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La propagande revisitée
Emmanuel Taïeb
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/quaderni/475
DOI : 10.4000/quaderni.475
ISSN : 2105-2956
Éditeur
Les éditions de la Maison des sciences de l’Homme
Édition imprimée
Date de publication : 5 avril 2010
Pagination : 5-18
Référence électronique
Emmanuel Taïeb, « La propagande revisitée », Quaderni [En ligne], 72 | Printemps 2010, mis en ligne le
05 avril 2012, consulté le 21 décembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/quaderni/475 ;
DOI : https://doi.org/10.4000/quaderni.475
la propagande
années ? S’appuie-t-il sur des transformations
particulières des structures de l’espace public,
ou de la communication politique ? Ou bien ne
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6 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010
déjà dans les années 1920 une communication désigne comme une forme de « nominalisme
dont la sincérité serait la règle d’or, et une action simpliste »13. Aujourd’hui, la communication
politique soucieuse de « présenter un programme gouvernementale est partie prenante de l’action
honnête »8. Il est intéressant de noter que pour son politique du gouvernement. Et l’on peut la com-
préfacier contemporain, Normand Baillargeon, prendre comme un « outil démocratiquement
la mention de cette sincérité est nécessairement légitime de régulation du social », une forme de
pur cynisme de la part de Bernays9, tant l’idée gestion de la « violence symbolique », et une
d’une propagande démocratique lui semble un forme de substitution de la coercition visant
oxymore. Plus près de nous, Guy Durandin, dans explicitement à modifier le comportement et les
son effort définitionnel, rappelle que si la propa- pratiques des récepteurs de messages14. La péjo-
gande recourt parfois au mensonge, il ne lui est ration qui a touché le mot propagande pourrait
pas constitutif ; contrairement à la désinformation dès lors toucher la communication politique15,
qui est par essence mensongère et vise à implanter tant c’est la chose plus que le mot qui reste objet
chez l’adversaire des informations fausses, dont il de critiques, s’il était besoin de le rappeler.
ne connaîtrait pas la source10. Et l’on notera que
le Code électoral français possède toujours une Pour autant, l’insistance sur une homologie
rubrique « Propagande », et une entrée d’index historique des formes entre propagande et com-
pour ce terme, pour désigner l’action persuasive munication interdit de mesurer l’épuisement de
des partis politiques11. la propagande en démocratie. Épuisement visible
d’une part dans la faible évolution définitionnelle
C’est donc surtout rétrospectivement que l’usage de la notion de propagande, et dans la reconduc-
de la propagande sera attribué exclusivement tion d’une définition passablement insatisfaisante
aux régimes totalitaires, et que l’existence d’une et peu opératoire. Visible d’autre part dans l’his-
propagande propre aux démocraties sera occultée toricisation même de la propagande, et sa critique
au profit d’une distinction promise à devenir clas- renouvelée, qui ont rendu délicat son emploi, y
sique : aux totalitarismes la « propagande », aux compris sous des formes modernisées, dans les
démocraties la « communication politique », sans démocraties pluralistes.
qu’il soit possible de savoir si les deux termes se
recouvrent absolument. Le même Guy Durandin La stabilité des définitions données à la propa-
réintroduit le flottement terminologique lorsqu’il gande est notable, tant elles ne paraissent pas
écrit qu’il « se développe actuellement ainsi, sous acter les évolutions formelles subies par l’ob-
le terme générique de “communication”, une né- jet16. De plus, il s’agit généralement de ce qu’on
buleuse formée par la communauté de méthodes pourrait appeler des « définitions par l’effet »,
entre la publicité, la propagande et les relations qui caractérisent l’acte de propagande par l’effet
publiques »12. Il ne faut alors pas en rester à qu’il est censé produire, sans toujours vérifier
une opposition absolue entre « propagande » et l’existence de cet effet, et surtout sans considérer
« communication gouvernementale », sauf à la contradiction interne d’une telle définition, qui
faire preuve de ce que Caroline Ollivier-Yaniv verrait son objet se dissoudre à partir du moment
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8 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010
et régime ouvert, parce que la diffusion de mes- optique, la conjonction d’un contenu jugé mani-
sages particuliers à destination de la population pulatoire et d’un canal jugé désireux de manipuler
n’a de sens que dans un système où le compor- témoignerait d’une action de propagande. C’est
tement des individus, électoral par exemple, classiquement la perspective propre au début du
produit des effets sur le pouvoir politique – ce XXe siècle, où la propagande des régimes totali-
qui n’interdit pas la propagande des régimes taires était d’abord comprise comme une action
totalitaires, qui ne fait que forcer l’adhésion des exclusivement étatique pour la domination des
masses à un système autrement illégitime. Ainsi, masses, puis l’idée fut étendue à l’action des
pour Breton, la propagande est une « méthode entreprises, ou encore aux relais implicites du
de présentation et de diffusion d’une opinion pouvoir (ou jugés tels), notamment les médias.
de telle manière que son récepteur croit être Mais cette perspective conduit ses tenants à voir
en accord avec elle et en même temps se trouve cette conjonction médium-message à peu près
dans l’incapacité de faire un autre choix à son partout, et à poser une multiplication des canaux
sujet »21. La propagande apparaît là comme un de propagande, dessinant un paysage politique
message possédant un caractère spécial, qui force et médiatique ontologiquement clos et manipu-
puis naturalise l’adhésion psychologique de son latoire où finalement tout est propagande22. Y
récepteur, éventuellement par la manipulation, compris au prix d’une confusion entre medium
le mensonge, ou plus prosaïquement par une et message, dans des perspectives qui posent
présentation favorable du contenu. Breton est qu’un support potentiel de propagande l’est en
moins explicite sur ce qui rend le destinataire du fait nécessairement23. C’est ce que fait Étienne
message incapable de s’affranchir du contenu de Augé, qui catalogue les supports qui ont pu
la propagande, mais l’on peut penser que cette être utilisés historiquement pour diffuser de la
faiblesse résulte à la fois de la force propre du propagande (journaux, cinéma, télévision, etc.),
message et de l’absence d’autres messages venant auxquels il ajoute des médias modernes (blogs,
le contredire, comme cela peut être le cas dans les magazines de communication institutionnelle),
régimes fermés où règne une propagande d’État. pour prouver qu’ils sont par essence des moyens
Si Breton n’exclut pas les effets attendus de la de propagande24.
propagande, il insiste aussi sur la mise en forme
propre aux contenus propagandistes qui incluent Il reste néanmoins possible de sortir de l’al-
des éléments de persuasion, de manipulation ou ternative définitionnelle entre une propagande
de mensonge pour arriver à leurs fins. déduite de ses effets supposés, et une propagande
permanente entretenue par un système médiatique
Les définitions par l’effet incorporent donc qui s’en ferait le relais. Par exemple, en rabattant
l’idée que c’est le contenu même du message l’identification du message propagandiste sur sa
qui cherche l’obtention d’une adhésion ou la source et sur l’intérêt – partisan, politique, idéolo-
fabrication d’un comportement. D’autres appro- gique – qu’elle a à diffuser un tel message. Il faut
ches affirment que le message propagandiste est donc comprendre la propagande en configuration
inséparable du médium qui le diffuse. Dans cette avec le champ de communication ou médiatique
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10 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010
der si ces écrits ne s’adressent pas tout autant à propagandiste lui-même. C’est par exemple bien
l’apprenti-propagandiste qu’au citoyen désireux un « traité » de propagande que propose Étienne
de résister à la propagande. C’était déjà visible Augé, qui liste dix-huit principes élémentaires ou
chez Tchakhotine qui, propagandiste lui-même, « commandements » tactiques de propagande32,
indiquait les méthodes qu’il avait utilisées contre qui à la limite pourraient aussi s’adresser au
le nazisme, mais ambitionnait également de don- propagandiste en herbe. Ceux-là ne sont pas ana-
ner aux citoyens les moyens psychologiques de lysés en tant que tels, mais présentés comme les
« barrer la route » à la « propagande néfaste »28. éléments classiques de l’arsenal propagandiste.
Et cette ambition est visible chez des auteurs Conscient d’ailleurs peut-être de l’ambiguïté
contemporains – jusque dans la quasi identité qui s’attache à ce catalogue de mesures, Augé
des termes. C’est ainsi qu’Étienne Augé indique se fait plus prudent deux chapitres plus bas :
que « savoir reconnaître la propagande devrait « Ces techniques, connues des spécialistes en
faire partie de l’arsenal du citoyen, qui saura propagande, sont présentées ici afin que le public
se prémunir des effets de la communication en puisse se prémunir de leurs effets, et non afin
général, et sera en position de mieux effectuer d’encourager les vocations de manipulateur »33.
ses choix en connaissance de cause »29. Élargis- Un dévoilement utile, en quelque sorte, mais que
sant sa déconstruction à l’ensemble des discours l’auteur persiste à conjuguer à nouveau avec des
informationnels circulant dans l’espace public, il propositions normatives en indiquant, à propos
affirme également que son ouvrage s’adresse « à de ces « commandements », qu’« il convient de
ceux qui souhaitent développer à l’égard de l’in- les combiner afin de développer une propagande
formation une attitude de vigilance citoyenne »30. efficace »34.
Christian Salmon ne conclut pas autrement à
propos de son travail sur le storytelling qui doit Ce dévoilement – et c’est une autre limite du
contribuer à « enrayer la machine à fabriquer genre – prend souvent des accents conspiration-
des histoires »31. Malgré le temps long qui sépare nistes. Une conspiration qui serait moins dans les
ces écrits, l’ambition d’intervention publique et messages visibles qui, après tout, sont décodables
critique est toujours présente, et conduit à ne via les manuels proposés, qu’à la fois dans les
plus savoir si l’on est absolument en présence de émetteurs des messages, toujours cachés, et dans
travaux analytiques ou de préconisations situées les effets des messages, enfermant leurs récep-
qui entendent alerter le bon citoyen plutôt que de teurs dans des comportements qui ne sont pas les
lui livrer des analyses de l’objet. leurs. On sait que le discours conspirationniste
postule que le cours de l’histoire, ou plus loca-
Non seulement le caractère normatif de certaines lement des décisions politiques particulières, est
de ces approches menace de les transformer en de déterminé par l’action secrète d’un petit groupe
véritables « manuels » de résistance citoyenne à d’hommes désireux de voir la réalisation de leur
la propagande, mais il est parfois doublé par une projet de domination. Leur action toute-puis-
présentation de l’objet propagande sous la forme sante déposséderait les individus formellement
d’un véritable « traité » que ne renierait pas le libres du cours de leur vie35. La dénonciation
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12 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010
profit de visions macroscopiques improuvables. qu’elle peut être tout aussi efficace sans moyens
Sur cette question centrale de l’effet de la pro- de masse et, qu’au contraire, son efficacité tien-
pagande, Tchakhotine était très prudent. De son drait dans son caractère diffus et insidieux, et non
ouvrage, on a essentiellement retenu l’idée d’un pas dans son caractère ostensible. La propagande
viol psychique généralisé opéré par les régimes possèderait ainsi une efficacité intrinsèque et
totalitaires, et on a conféré une force évidente à obtiendrait des résultats immédiats et certains.
toute propagande. Sauf que Tchakhotine insiste Pour Augé, la propagande « modèle nos vies en
à plusieurs reprises sur la nécessité de recours permanence et nous pousse parfois à agir dans
à des moyens massifs pour qu’une propagande la plus grande irrationalité apparente »40. Pour
soit efficace. Il ne s’agit pas simplement pour Christian Salmon, l’action cherchée n’est pas
lui qu’un État envoie un message habilement irrationnelle, mais vise l’adhésion aux décisions
rédigé pour que la population y souscrive, il faut politiques ou économiques des dominants. Il est
au contraire déployer un arsenal complexe, car il l’auteur qui pousse le plus loin les effets de cette
faut passer outre les résistances individuelles à la propagande moderne qu’est selon lui le storytel-
violence psychique. La propagande de masse est ling, puisque, passant outre toute la sociologie
bien celle que Tchakhotine a en tête, et sous les électorale et les analyses sur les déterminants
yeux, lorsqu’il publie son ouvrage sur le sujet. Et sociaux du vote qui ont pu être produits ces
il s’agit de la propagande nazie, qui s’invente en dernières décennies, il n’hésite pas à faire de la
marchant à l’époque, et qui utilise justement des propagande le seul moteur des choix politiques
moyens inédits et lourds, des moyens guerriers : individuels. Dans le chapitre qu’il consacre au
musique wagnérienne, roulements de tambours, storytelling en politique, il accrédite l’idée que
cérémonies de masses, ou « défilés à grands la propagande et la communication font ou dé-
fracas »39. Ce que décrit Tchakhotine ressemble, font les élections. À l’appui de cette thèse, il cite
on l’a dit, à une propagande totale, qui prend la simplement – sans proposer d’analyses conduites
forme non seulement d’une propagande continue, par lui sur le terrain – des spin doctors politiques,
mais de toute une politique visant à façonner qui pensent que John Kerry a perdu les élections
idéologiquement la société dans le sens même de de 2004 sur des erreurs de communication, en
la propagande, par la diffusion des thèmes nazis, demeurant notamment au plan de l’intellect,
par la place accordée au sport comme fabrique des contre un George W. Bush bon narrateur41. Il
guerriers, et par tout un appareil de production reconduit là surtout la croyance des acteurs de
d’images et de symboles au service du régime. la communication, qui en font le levier central
Pour Tchakhotine, la propagande hitlérienne n’a de l’élection, au mépris de ce que des analyses
pu fonctionner que dans ce contexte particulier, microsociologiques pourraient révéler. Tout son
et non pas par sa seule force de conviction. ouvrage d’ailleurs indique que Christian Salmon
a incorporé le discours de croyance des acteurs
Or, ces conditions historiques rappelées par quant à la puissance de l’objet, confondant alors
Tchakhotine ont été tenues pour négligeables, et leurs catégories pratiques avec des catégories
plusieurs travaux sur la propagande considèrent analytiques.
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14 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010
transformation démocratiquement correcte (France
N .
O .
T .
E .
S et Grande-Bretagne) », in Denis Rolland, Didier
Georgakakis, Yves Déloye (coord.), Les Républiques
1. L’auteur tient à remercier les relecteurs des articles en propagande. Pluralisme politique et propagande :
du dossier pour leur disponibilité et leurs remarques entre déni et institutionnalisation. XXe-XXIe siècles,
éclairantes. Paris, L’Harmattan, coll. « Inter-national », 2006,
2. Jean-Marie Domenach, La propagande politique, p. 393.
PUF, coll. « Que sais-je ? », 1973 [1950], pp. 9 & 14. Ibid., pp. 392-393.
97. 15. Table-ronde, avec Yves Déloye, Christian
3. Fabrice d’Almeida, « Propagande, histoire d’un Delporte, Robert Frank, Didier Georgakakis, Marc
mot disgracié », Mots, 69, juillet 2002. Lazar, Denis Rolland et Jean-François Sirinelli, in
4. Serge Tchakhotine, Le viol des foules par la Ibid., p. 28.
propagande politique, Paris, Gallimard, coll. « tel », 16. On trouve cependant des définitions s’attachant
1992 [1939], pp. 375, 395, 399 & 559. davantage aux volitions de l’émetteur, comme
5. Jacques Ellul, « Propagande et démocratie », aux rapports de force. Par exemple, une définition
Revue française de science politique, vol. 2, 3, 1952, donnée par F.-B. Huyghe : « Moyens de faire croire
p. 475. une communauté en un contenu idéologique dans
6. Fabrice d’Almeida, « L’américanisation de la le cadre d’un conflit avec une autre communauté et
propagande en Europe de l’Ouest (1945-2003) », d’autres croyances ». Mais cela reste vague tant sur la
Vingtième siècle, « Propagande et communication nature des moyens que sur celle du conflit. François-
politique dans les démocraties européennes (1945- Bernard Huyghe, Maîtres du faire croire. De la
2003) », 80, 2003. propagande à l’influence, Paris, Vuibert, CLEMI-INA,
7. Philippe Breton, La parole manipulée, Paris, coll. « Comprendre les médias », 2008, p. 159.
La Découverte, coll. « Essais », 2002 [2000], p. 25. 17. Étienne F. Augé, Petit traité de propagande à
8. Edward Bernays, Propaganda. Comment manipuler l’usage de ceux qui la subissent, Bruxelles, de Boeck,
l’opinion en démocratie, Paris, Zones, 2007 [1928], coll. « Culture & communication », 2007, p. 12.
pp. 59 & 95. 18. Edward Bernays, Propaganda, op. cit., p. 43.
9. Normand Baillargeon, « Edward Bernays et 19. Serge Tchakhotine, Le viol des foules, op. cit.,
l’invention du “gouvernement invisible” », in Ibid., p. 481.
p. 22. 20. Jacques Ellul, Propagandes, Paris, Economica,
10. Guy Durandin, L’information, la désinformation coll. « Classique des sciences sociales », 1990 [1962],
et la réalité, Paris, PUF, coll. « Le psychologue », p. 6.
1993, pp. 132, 141 & 147. 21. Philippe Breton, La parole manipulée, op. cit.,
11. Code électoral, Dalloz, 15e éd. 2009 (chapitre V, p. 73.
art. L.47). 22. La simple consultation de l’occurrence
12. Guy Durandin, L’information…, op. cit., p. 146. « propagande » sur un site autoproclamé d’observation
13. Caroline Ollivier-Yaniv, « “Propagande” et des médias comme Acrimed (Action-Critique-Médias)
“communication gouvernementale” : les enjeux d’une montre à quel point le mot est utilisé pour désigner
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16 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010
ou B. de Perthuis, dans D. Rolland, D. Georgakakis,
Y. Déloye (coord.), Les Républiques en propagande,
R .
É .
S .
U .
M .
É
op. cit.
43. Karine Berthelot-Guiet , Caroline Ollivier-Yaniv, Nombre de parutions récentes ont entrepris d’étudier la
« “Tu t’es vu quand t’écoutes l’État ?” Réception propagande en repartant de l’état de la question tel qu’il
des campagnes de communication gouvernementale. était dans la première moitié du XXe siècle, tout en
Appropriation et détournement linguistiques des reconduisant la péjoration du terme. La réactivation de
messages », Réseaux, vol. 19, 108, 2001 ; Stéphane la notion de propagande y est utilisée comme une voie
Calbo, « La réception comme activité collective », d’entrée vers une critique idéologique renouvelée des
in Michel de Fornel, Louis Quéré (dir.), La logique médias, de la communication, et au fond du libéralisme
des situations. Nouveaux regards sur l’écologie économique. Mais ce « retour de la propagande » paraît
des activités sociales, Paris, Éditions de l’EHESS, surtout construit par les études mêmes qui lui sont
coll. « Raisons pratiques », 1999 ; Pascal Froissart, consacrées. L’analyse de ce phénomène peut cepen-
« Penser les médias sans notion de masse », Actes du dant sortir de cette labellisation pour constater d’une
XIIe Congrès des sciences de l’information et de la part un épuisement de la propagande en démocratie,
communication. UNESCO, 10-13 janvier 2001, Paris, et d’autre part les limites de ces travaux normatifs et
SFSIC, 2001 ; Rodolphe Ghiglione, « La réception mécanicistes. À côté de la classique étude de contenu,
des messages. Approches psychosociologiques », l’article plaide pour une meilleure prise en compte
Hermès, 11-12, 1993 ; Caroline Ollivier-Yaniv (dir.), analytique des émetteurs de messages, des institutions
Quaderni, « Secret et pouvoir. Les faux-semblants de qui en sont chargées, des politiques qui les fondent, et
la transparence », 52, automne 2003. de la configuration entre formes de communication,
44. Patrick Charaudeau, Les médias et l’information. champ médiatique et destinataires de ces messages,
L’impossible transparence du discours, Bruxelles, dans les sociétés pluralistes.
De Boeck-INA, coll. « Médias recherches », 2005,
pp. 11, 218 & 220. Pour un éloge, à contre-courant, Abstract
de la manipulation, cf. Fabrice d’Almeida, La Most of the recent publications on propaganda go back
manipulation, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », to the level of knowledge of the first half of the XXth
2005. Comp. Philippe Breton, « Réfutation de century, and emphasise the pejorative nature of the
quelques objections concernant la pertinence du term. This reactivation of the notion of propaganda
concept de manipulation », in P. Troude-Chastenet is used as a path towards a renewed ideological criti-
(dir.), La propagande, op. cit. cism of the media, of communication, and of economic
liberalism. But this « return of propaganda » seems
above all constructed by these analyses themselves.
However, the study of this phenomenon can leave this
« labeling » behind to establish on the one hand the
exhaustion of propaganda in democracies, and on the
other hand the limits of these normative and mecha-
nistic studies. This paper argues in favour of analyses
.
18 LA PROPAGANDE REVISITEE QUADERNI N°72 - PRINTEMPS 2010