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VINGT ANS D'AUDIT : DE LA RÉVISION DES COMPTES AUX ACTIVITÉS

MULTISERVICES

Jean-François Casta, Alain Mikol

Association Francophone de Comptabilité | « Comptabilité Contrôle Audit »

1999/3 Tome 5 | pages 107 à 121


ISSN 1262-2788
ISBN 2711734110
DOI 10.3917/cca.053.0107
Article disponible en ligne à l'adresse :
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Jean-Fraoçois Ces-ra etAlain Mror
VINGT ANS DâUDIT: DE LA RÉVISION DES COMPTES AI.XAC'IVTTÉS MUTNSERVICES

Vingt ans d,aadit :


de la révision des comptes
aur( activités multiseryices
Jean-François Cesre etAlain MIror

Rê'rmê '/ihslnû ,,,,t:,,.,

I,es objeaifs'et le charq1r dinvestiption


des missions d'aedit onr co*$$ une exqqnsion
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nies. Linternationalisation imposé auK
grandes entrepriies le recoursr à dcs eg,. im
émanant de signatures internationdement
reconnues et est à l'origine d importants
mouvements de resuucnrration. læs grands
cabineæ, initialement focalis& sur utre
mission d'opinion, ont prçgres*itiâ#t ag"e;
loppé des, activit& de onseil, créant des
ensembles multiprofessionnels de services
associ& à I'audit. pans le même temps, fau-
dit est denrenu objet d'enseignement et de
rschffche

Conespondonce: Jean-François Casta


I-A,RGO, Université d'Angers
CEREG, Univenité Paris-Dauphine
casta@dauphine.fr

Alain Mikol
Ecole Supérieure de Commerce de Paris
mikol@escp.fr

CoMplABtrrrÉ - CoNrnôr.s - AIDrr / Les vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. 107 à l2l)
Jean-François Crsre et Alain Mxot
VINGTANS DâUDIT: DE LA ITÉVISION DES COMPTES AI.IXACITVTTÉS MUXTISERVICES
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Incoduction
Longtemps limitée à la seule vérification de l'information comptable, dotée d'une profession régle-
mentée et disposant d'une solide méthodologie, I'activité d'audit accède, depuis ces dernières décen-
nies, à une phase de maturité. À partir de leur métier de base, les cabinets d'audit ont activement
mené des stratégies de croissance externe, d'internationalisation, puis de diversification. Dépassant
la suicte acception compable et financière de I'audit, ils ont progressivement investi le champ de
l'évaluation d'efficacité de toutes les fonctions de I'entreprise, pour aborder l'activité de conseil t.
C'est de cette profonde mutation que nous proposons de rendre compte sous I'angle de l'évolution
des concepts (S l), de la réglementation (g 2), de la technologie (g 3), de la strucr.rarion du marché
(S 4) ainsi que de I'enseignement et la recherche (S 5).

W,,tffi Laudit : concept et domaines dinvestigation


i:,|,l"iVlW Chssification des missions d'audit : dans la < jungle des audits >
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Le mot u audir, qui renvoie à n contrôle, vérification, inspection )) est utilisé selon des accep-
-
tions diverses 2 que nous classerons à partir de trois critères. -
Selon la situation de I'auditeur par rapport à l'entité auditée, il est possible de distinguer I'audit
externe et l'audit interne : dans le premier cas, la mission est menée par un professionnel extérieur à
l'institution ; dans le second, elle est mise en æuvre par un service fonctionnel de l'entreprise, le plus
souvent rattaché à la direction générale.
Selon le statut de l'auditeur, il convient de différencier les missions d'audit conrracruel dont les
objectifs sont librement détermin6 p- le mandataire, des missions d'audit légal, dont le cadre et
l'étendue sont fixés par la loi et le règlement.
Selon la nanue dCI objectifs assignés à la mission, I
y a lieu d'opposer I'audit financier
conduisant à la certification des comptes à I'audit de la gestion visant à formuler un juge-
-
ment sur l'action des dirigeans et sur leurs résultats -, -
et à I'audit opérationnel, destiné à améliorer
-
les performances de I'entité. Les professionnels comptables libéraux font traditionnellement réfé-
rence à l'audit financier dont I'IFAC (International Federation of Accountanrs) donne la définition
suivante : u lJne mission d'audit des états financiers a pour objectif de permertre à I'auditeur d'expri-
mer une opinion selon laquelle les états financiers ont éré établis, dans tous leurs aspecrs significatifs,
conformément à un référentiel comptable identifié. , 3

ru,r,;,l,it#ir1i Le domaine élargi d'investigation


Les concepts de I'audit financier ont été essentiellement façonn& dans le cadre de missions externes
et, plus particulièrement, d'audit légal des comptes de sociétés, assurés dans tous les pays développés
par des professionnels libéraux. En France, iest au cornrnissaire aatc corn?tes (connôleur hgal dans le
langage de I'Union européenne) que la loi attribue la mission d'audit légal qui comprend la certifica-
tion de la régularité, de la sincériré et de l'image fidèle des compres annuels (et consolidés).

CoMpTABUxTÉ - CoNrRôLE - AIDrT / Les vingr ans de I'A_FC - mai 1999 (p. 107 à l2l)
Jean-François Qrsra er Alain Mrror
VINGT ANS DîUDIT : DE IÂ RÉr'ISION DES COMPTES AI.IX ACilVrrÉS MULIISEF5/ICES
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Contrairement à l'audit financier, I'audit opérationnel concerne a priori rout dépanemenr ou
toute fonction d'une entreprise (audit des services informatiques, audit de la production, audit du
service marketing etc.). il tend à apprécier I'efficience des systèmes, et non plus seulement leur
régularité. De façon indissociable, I'audit opérationnel propose des recommandations tendant à
I'amélioration des performances.
Par ailleurs, le champ dinvestigation peut s'étendre à l'évaluation des performances (Richard,
1989), à I'audit de management, qui se propose d'apprécier la pertinence des objectifs et leur degré
de cohérence avec les finalités de I'organisation (Becour et Bouquin,l996), ainsi quà I'examen de
l'opportunité des décisions de gestion.

ii'i.;gr,tr ', Le rôle économique de I'aud.iteur : réduire le risque de I'investisseur


Lopinion formulée par I'auditeur a fondamentalement pour objet de crédibiliser I'information
financière publiée par les sociétés, c'est-à-dire d'en accroltre l'utilité pour des urilisareurs placés en
situation d'asymétrie. lleffet de réduction du risque demeure cependant conditionné par le starut et
par la notoriété de l'auditeur (Casta, 1995). Ce rôle spécifique assumé par l'auditeur dans une
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économie de marché conduit les pouvoirs publics à organiser la profession et à réglementer le
contrôle des comptes de sociétés.

W Évolution du cadre réglementaire


Segmentant le marché de I'audit comptable et financier, le cadre réglementaire frangis a organisé la
profession comptable libérale autour de deux acteurs : l'expert-comptable, pour ce qui a trait à la
présentation des comptes annuels (tenue et surveillance des comptabilités) et le commissaire aux
comptes Pour ce qui concerne l'audit légal. Le cadre réglementaire de l'exercice de la profession
comptable a peu changé en trente ans alors que le champ d'intervention de I'auditeur légal s'est
considérablement développé. En I'organisant autour de ce double monopole d'exercice, les pouvoirs
publics ont ainsi déterminé les conditions du développemenr du marché de I'audit et du conseil.

?i*i+* Une grande stabilité des institutions


l,a loi du 3 avril 1942 acréé l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés (OECCA) et a
réglementé les professions d'expen-comptable et de comptable agréé. À la suite d'une réforme
conduisant à la suppression de l'accès au titre de comptable agréé, puis à leur inrégration au ableau
des expers-comptables, ÏOECCA s'est transformé, en 1994, en un Ordre des experts-comptables.

En ce qui concerne le contrôle légal, bien que l'obligation de nommer un commissaire figure
dans la législation française depuis la loi du 23 mù 1863, il. faudra attendre la loi du 24 jurllet 1966
sur les sociétés commerciales pour assister à une modernisation de la profession et à la création, en
1970' de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC). La montée en puissance
de la profession de commissaire aux comptes est illustrée par l'évolution des effectifs de la CNCC de
1970à 1998 (Tâbleau l).

CoN4me.sInrf - CoNrRôr-E - AuDrr / Les vingt ans de I,AIC - mai 1999 (p. 107 à 121)
Jean-François Casre et Alain Mxor
VINGT ANS DâUDIT : DE IÂ R-ÉVISION DES COMITTES AUXACTTVTTES MI.'LTISERVICES
lr0
Tableau 1. Évolution des effectifs de la CNCC de 1970 à 1998
ArHÉrs Ptmorururs PHYsrQuEs Prnsonu:s tuomus Tonl
1970 5 477 117 5 594
1975 6 688 217 6 90s
1 980 8 056 ztv 8 326
1 985 8Ml 444 8 885
1 990 9 800 1 210 11 0't0
1 995 12864 2 136 15 000
't998 13 237 2 665 15 902

Source; CNCC.

i."âtt.',.f De nouvelles perspectives pour l'auditeur légal


Lévolution du cadre réglementaire frangis est directement liée à l'harmonisation européenne en
matière comptable. Cependant, nila 4" directive (1978), en ce qui concerne les comptes sociaux, ni
la Z directive (1983), pour les comptes consolidés, riont fondamentalement modifié le rôle de fau-
diteur légal. De même, la 8" directive (1934), relative à l'agrément des contrôleurs légaux, â eu Peu
d'incidence sur l'accès aux fonctions de commissaire aux comptes, la quasi-totalité des membres de
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la profession étant issue d'un cursus l'expertise comptable plut exigeant que celui imposé par
la 8" directive.
- -
I-lextension du champ d'application du commissariat aux comptes consdnre la modification la
plus importante du cadre réglementaire : celle-ci résulte tant de la 4' directive que de considérations
nationales. Selon la législation française des sociétés commerciales, seules les sociétés par actions
étaient renues de désigner un (ou plusieurs) commissaires atD( comptes. Diverses lois récentes, dont
la loi du l"'mars 1984 relative à la prévention des difficultés des entreprises, ont considérablement
élargi le champ d'intervention du commissariat aux comptes : il intervient aujourd'hui également
dans les sociétés commerciales (autres que par actions) de taille importante et dans des entités
économiques ne relevant pas du droit des sociétés commerciales.

ffi Évolution de la technologie daudit


I-a technologie utilisée par l'auditeur financier afin d'émettre une opinion a considérablement
évolué. Jusqu aux années 30, les auditeurs tnanciers appréhendaient leur activité corlme une vériû-
cation, le plus souvent exhaustive, des enregistrements comptables. ks praticiens ont ensuite déve-
loppé, durant la période 1940-1960, une approche suucnrrée de faudit. Cette approche moderne a
intégré, dès les années 50, une perception du risque issue de la théorie statistique de la décision.

et approche Paf les risques : deux choix


',,'g,tr- .: Approche-système
technologiques majerus
Dès les années 1950-1960, la perception de l'entreprise comme un qrstème conduit I'auditeur à
privilégier les études de fonctionnement, c'est-à-dire à analyser davantage les flux d'information et le
qystème de contrôle interne que les enregistrements comptables. Parallèlement, la méthodologie est

CoMmABrr:rÉ - CoNrRôt.r - AUDII / ls vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. lo7 à l2L)
Jean-François C-e*çra et Alain Mrol
VINGT ANS D AUDIT : DE IA RÉVISION DES COMPTES AI.IX ACTIVTTÉS MULI]SERVICES
llL
profondément marquée par la décomposition du risque d'audit (risque qu'il subsiste une erreur
significadve dans les comptes annuels) en aléas élémentaires : risque qu il existe une erreur significa-
tive dans les opérations, risque de non-détection par le système de contrôle interne, risque Je non-
détection par I'auditeur. Dans la perspective d'une analyse du risque par exceptiorr, do irrrtrom.nt
spécifiques d'appréciation sont forgés tels que le seuil de signification (montant en dessous duquel
une erreur, commise de bonne foi, est réputée sans incidence) ou le concept de niveau de confiance
fut- * systime' qui permet I'identiûcation de zones critiques. Enfin, l'évolution des techniques de
sondage appliquées à I'audit modèle I'approche par les risques.
IJopérationnalisation de ces approches, réalisée pour l'essentiel sur la période 1950-70 par de
grands cabinets, et plus particulièrement par les huit premiers (les Big eighta), a nécessité des inves-
tissements importants, conduisant à l'élaboration d'outils (diagramme de circulation de l'informa-
tion, questionnaires d'appréciation du conrrôle interne, exarnen analytique, techniques de sondages
statistiques, puis outils spécifiques d'audit informatique) conçus comme autant de n technologies
propriétaires >. En France, c'est dans les années 70 que ce rype d'approche commence à se diffgse6
de f_aeon inégale, d'une profession comptable libérale très dispersée : tout d'abord, par I'inter-
luprès
médiaire d'accords techniques, en ce qui concerne les cabinets représentant en France ies réseaux
anglo-saxons ; Par osmose progressive avec ce marché, pour une vingtaine de grands cabtnets
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franco-
fau7ait. Ensuite, pour le plus grand nombre, la nouvelle démarche méthodologigue est lnghi.ulg.
par les recommandations des instances professionnelles (Ordre des experts-compables et CNCC).
Plus récemment, l'accroissement de [a concurrence sur un marché de I'audit parvenu à maturité
et la pression s'exerçant sur le monant des honoraires ont, dans un premier temps, favorisé la
recherche d'outils de productivité (progiciel d'aide à l'audit, intégration bureautique àes papiers de
systèmes exPerts, etc.). Au-delà, dans le cadre d'un arbitrage risque-cott, les cabinets recher-
chent un rééquilibrage de leur programme de travail conduisant à un allègement de la phase d'ap-
préciation du contrôle interne au profit de méthodes permeftant la localisation des zones de risques
de façon plus globale, mais moins cotreuse.

,rj Iiaudit et les norrnes professionnelles


Parallèlement à cette évolution de nature technologique, la méthodologie d'audit s'est développée à
partir de la construcdon d'un référentiel de normes professionnelles. Il convient de souligner que l"
loi du 24 iutllet 1966 et les autres textes instituant le commissariat aux comptes n en dZfinissaient
pas les règles et les modalit& de mise en æuwe : iest à la CNCC que rwiendra, pour I'essentiel, cene
responsabilité. Dès 1971, le Conseil national de la CNCC instaure un < Comité des diligences ,,
aujourd hui o Comité des normes professionnelles ,, gui élabore une première série de ( recomman-
dations relatives aux diligences o. C. Charron, président du Comité des normes professionnelles, en
rappelait récemment le contexte : < Dès le début, le comité dç5 diligences s'esi aaelé à une tâche
difficile : celle d'élaborer des recommandations en matière de diligences professionnelle alors que
nous étions en face d'obligations tout à fait nouvelles. En nous inspirant de la docrrine étrangère et
en l'adaptant au contexte frangis de l'époque, nous avons transformé I'essai. , 5
Par la suite, la refonte des recommandations conduit le Conseil national à distinguer :

- d'une part, la règle professionnelle âyant un caractère d'obligation et ses conditions de mise en
æuvre' qualitées respectivement de n norme o et de n commentaires o. Selon la CNCC, les normes

Corvrp'rastrrrÉ - Covrnôm - Auorr / læs vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. lO7 ù l2L)
Jean-François Casra et Alain Mxor
VrNGT ANS D AUDIT : DE tA RÉVISION DES COMPIES AUX ACTTVTTÉS MULflSERVICES
tt2
et commentaires expriment la position de la profession quant âu comPoftement, dans l'exercice de
sa mission, d'un professionnel raisonnablement diligent ;
- d'auue part, les considérations d'ordre pratique, laissant une place à la liberté d'appréciation
des professionnels, constitutives d'une information de cirractère technique ; à cette fin, la CNCC
édite une collection de publications à caractère technique.
Ce travail de refonte des recommandations de la CNCC se traduit, en 1987, par la première
édition des n Normes et commentaires des normes relatifs à I'exercice des missions , sous la forme
que nous connaissons aujourd'hui. Cet imponant travail de normalisation des pratiques profession-
n.llo, très largement inspiré des travaux de I'IAPC (International Auditing Practices Comrninee)6
conduisait récemment C. Charron à constater que n les normes d'audit frangises sont aujourd'hui à
un niveau comparable à celles suivies sur un plan international et à celles édictées par LIAPC [...] ".
Par ailleurs, dès 1993, la Commission des opérations de Bourse (COB) observait : u Il n'y a pas de
7
différence significative enue les normes internationales d'audit définies par I'IFAC et les normes
françaises publiées par la CNCC o '. Entérinant cette évolution, le Conseil national de la CNCC
s'est pronon cé en 1997 en faveur d'un rapprochement de structure de ses normes d'audit avec celles
de I'IFAC de manière à mieux pouvoir afficher l'unicité de la méthodologie d'audit et l'homogénéité
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des pratiques professionnelles.
Dans le domaine de I'audit interne, l'Institute of IntemalAuditors (IIA)'a publié dès 1947 ses
premières normes. Initialement fondées sur une problématique de recherche de fraudes, elles ont été
refondues en 1978 afin de les adapter à I'audit opérationnel.
Enfin, les normes d'audit applicables dans le seçteur public sont quactérisées par le développe-
ment, principalement aux États-Unis et au Canada, d'une concepdon étendue de l'approche d'audit
incluant les objectifs d'efficacité et d'efficience (Bethoux et a1.,1986).

r Lévolution de la technologie d'audit à travers les éditions


du Mémento comptable F. Lefebwe
Le chapitre 22 duMémento comptable, intinrlé < Notions générales de contrôle externe > en 1980
et n Audit et contrôles comptables et financiers u en 1999, porte sur le contrôle externe des comptes
annuels. Durant certe période, son volume est passé de26à.51 pages, chiffres qui sous-estiment
l'évolution, le nombre de caractères/page s'étant accru.
Plus précisément, les deux thèmes de comparaison sont :

la secdon 2 relative aux < Principes généraux de la démarche d'audit,, (1999). Elle se subdivise
-
en 1999 en detx sous-sections : u Schéma général dune révision " (S 3'3'l') et n læs outils d'une révi-
sion u (S 3.3.2.)'

- la section 3 relative aux n Normes d'audit , (S 3.3.3.).

i,. 'S:t.!, t', scHÉ,MA GÉ,NÉ,RAI D'LrNE nÉvtsloN


Aucune modification majeure rfapparait en dix-neuf ans dans le schéma général de révision :

. < Les trois approches du réviseur (S 5327) restent identiques :


"
- acquisition d'une connaissance générale de l'entreprise,

Cori,FTÂBILrÉ - Covrnôrr - Auprr / læs vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. lO7 à l2l)
Jean-François CcsrA etAlain Mtror
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- évaluation du contrôle interne,

- examen direct des comptes er des érats financiers.


. ( lÆs principales étapes de la démarche du réviseur, (S 5328) restenr les mêmes :
- prise de connaissance générale de I'entreprise (et analyse des risques, précise l'édition lggg),

- description des procédures,


- évaluation préliminaire du contrôle inrerne,

- tests de permanence,

- appréciation définitive du contrôle inrerne,


- examen des comptes,

- revue des états financiers,

- certification par le réviseur.


' Le schéma relatif à la phase d'acquisition d'une connaissance générale de l'entreprise (S 5330
en 1999) est quasiment inchangé, le u lancement des travaux,, (1980) dsvenant u orientation, plani-
fication et lancement des travaux ,.
'Les schémas relatifs à l'évaluation du contrôle interne (S 5332 en 1999) et à I'examen des
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comptes (S 5334 en 1999) sont inchangés.

3.3â, |, LES oUTLs D'LINE RÉvlsIoN


Cette sous-section d'une page (S 5n4O à 5344) de l'édition 1999 comprend une présentation du
seuil de signification et de < Sondages et informatique r. Cette sous-section nexistait pas en 1980,
mais figurait de manière rapide dans les S 369 et 5361.

i. r.33;t,,,i LEs NORMES D'AUDIT


Les changements sonr à la fois quantitatifs et qualitatifs.

' Les normes de la CNCC font I'objet en 1999 de 2 pages en section 1 et de toute la section 3
(21 pages), tandis qu elles comprenaient moins d'une page en 1980. Il convient néanmoins de préci-
ser que les 21 pages de la section 3 (1999) ne concernent pas seulement les normes d'audit condui-
sant à la certification mais toutes les normes de la CNCC relatives à la mission du commissaire aux
comPtes.

' On lit en 1980 (S 5365) : u En France les normes de contrôle émanent notamment des docu-
ments suivants : recommandations du Conseil national des commissaires aux comptes et en particu-
lier celles relatives au diliçnces ; encyclopédie des contrôles comptables du Conseil national des
commissaires arD( comptes ; recommandations à l'usage des membres de I'Ordre des experrs-comp-
tables [...] o. Léquivalent de ce paragraphe devient en t999 (S 5300 er 5301) : u l.a CNCC établit,
en application des dispositions légales et réglementaires, des normes, des commentaires et des infor-
mations techniques à l'usage des commissaires aux comptes. Les normes s'imposent à tous les
commissaires à la différence des commentaires qui n'ont ni caractère impératit ni valeur de recom-
mandation.,
Le changement de ton est net : le Mémento comptable ne se contente plus de faire référence à
il insiste neftement sur le fondement légal des normes et leur caracère obligaroire.
des textes,

C.oNû'rasnrrÉ - CoNTRôr"E - AuDrr / Les vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. 107 à l2l)
Jean-François C,rsre et Alain Mror
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COMMENTAIRE
Le u schéma général d'une révision , ria quasiment pas évolué en 19 ans. Seul un outil a changé (on
pourrait presque écrire: apparu), celui de l'ordinateur en tant quoutil d'aide à I'audit, mais le
mémento comptable délaisse volontairement cet asPect.
I.a place faite aux normes a très nertement changé. Lauditeur de 1980 retirait I'impression qu'il
existait des normes (appelées à l'époque des recommandations) peu coercitives et simplement desù
nées à le guider, tandis que fauditeur de 1999 ne peut ignorer qu'il existe des normes relatives à la
mission du commissaire arD( comPtes qui ont un câractère obligatoire.

W Évolution du marché de I'audit


Linternationalisation de l'économie : un élément moteur
Sur le plan international, les restructurations qui ont affecté le marché de l'audit au cours des
dernières décennies sont directement liées à la libéralisation du commerce international, conduisant
les grands cabinets à mettre en æuvre des suatégies de croissance externe, de différenciation et de
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diversification d'activités. la recherche d'économies d'échelles, d'une standardisation des méthodes
de travail et la volonté d'accompagner les firmes multinationales ont favorisé l'émergence de réseaux
internationaux fondés sur le principe de partnership. La constitution de ces réseaux a nécessité d'im-
poftants investissements humains et financiers, leur permeftant d'atteindre un niveau élwé d'homo-
généité en matière de méthodes de travail et de qualité des prestations. S'agissant de missions
d'opinion, dont la qualiÉ n est pas directement mesurable par le client, une telle démarche s'est
avérée un fadeur déterminant de leur stratégie. læ référencement auprès de la SEC ou des beilleurs
de fonds a permis à certains de ces réseaux - les Big eight - d'imposer progressivement leur signature
cornme une condition préalable à tout accès aux marchés financiers américains ou internationaux.
Dès les années 70, la concentration du marché de I'audit, déjà très élevée, est telle que les Big
r0.
eight auditent 98 o/o des sociétés cotées à la Bourse de New-Yor[< Elle s'accélère considérablement
vers la fin des années 80 avec les firsions successives de réseaux internationaux. En 1986' Peat
Marwick Mitchell (3") et Klynvetd Main (9") se rapprochent pour devenir le premier dæ Big eight
avec un effectif de 60 000 personnes réparti dans cent quinze pays. En 1989, c'est la firsion d'Amhur
Young (5) et d'Ernst Er \Thinney (61. Lannée 1990 marque un palier dans les restrucûrations
mondiales : Deloitte Hasking & Sells (7"), Touche Ross (8) et un cabinet japonais (Tohmatsu) s'al-
'W'ate-
lient, achevant de constituer le groupe des Big six. Il faudra aftendre 1998 pour que Price
rhouse et Coopers & Lybrand frrsionnent, ramenant le groupe de tête avx Bigfiae.
Llérude du classement des groupements internationaux de cabinets (y' tableaux 2 et 3 ci-contrQ
met en évidence une très forte croissance des chiftes d'affaires sur [a période 19851L997, ainsi
qu'une grande stabilité des principaux acteurs dont le classement relatif riest modifié qu à la suite de
restructurations. Par ailleurs, bien qu il existe plus de cinquante réseaux internationaux, leur taille est
très inégale : les résearx membres des Big six ont un chifte d'affaires comprls entre 9,1 et
5,2 milliards de dollars, alors que les réseaux suivants ne dépassent 1,4 milliard. À l'itsu. de ces
restructurations, en 1998, le groupe des Big five domine nettement, sur le plan international, le
marché des grandes entreprises.

CoMprABnrrtr - CoNTRôE - ArDIr / l,es vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. lO7 à' l2l)
Jean-Ftançois CAsrA et Alain MrKoL
VINGT ANS D'AUDIT : DE I.A,RÉVISION DES COMPTES AUX ACTTVTTES MUTITSERVICES
r15
Tableau 2. Classement des réseaux internationaux de cabinets d'audit en 1997
(la dénomination sociale ,|998 figure entre parenthèses)


Rme Erncnrs
laruom $)

I 9 120 79 750 Ernst & Young


2 9 000 8s 291 KPMG
3 7 541 82250 Coopers & Lybrand (PriceWaterhouse Coopers)
4 7 400 72200 Deloitte Touche Toh matsu
5 5 620 60 000 Price Waterhouse (PriceWaterhouse Coopers)
 s 200 n.c. Arthur Andersen (hors Andersen Consulting)
7 1 450 16 022 BDO
8 1 403 18562 Grant Thornton
9 1 063 15 911 Moores Rowland
10 1 060 14 101 R5M International

Source: La Profession comptable .

Tableau 3. Classement des réseaux internationaux de cabinets d'audit en l9B5


(la dénomination sociale 1998 figure entre parenthèses)
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CA
Rma Erncnrs
(mnuous $)

1 1 574 29 800 Arthur Andersen


2 1M5 29 900 Peat Manrvick (KPMG)
3 1 410 38 000 Coopers & Lybrand (PriceWaterhouse Coopers)
4 1 234 30 400 Price Waterhouse (PriceWaterhouse Coopers)
5 1 185 25 000 Ernst & Whinney (Ernst & Young)
1 060 26 800 Arthur Young (Ernst & Young)
7 973 26 000 Touche Ross (Deloitte Touche Tohmatsu)
8 953 24 000 Deloitte Haskins (Deloitte Touche Tohmatsu)
9 n. c. 29 800 Klynveld Main (KPMG)
10 479 14 100 Grant Thornton

Source : La Profæsion comohble

i:t$rï t, u struaruration du marché français


Lévolution du marché français de I'audit durant les mois dernières décennies se caracrérise à la fois
Par une expansion considérable et par un imponant mouvement de concentration, accompagnanr
lui-même l'ouverture internationale de l'économie frangise '. La croissance de la demande d;audit
a une double origine : I'une, concernant le plus gand nombre de sociétés, rient à la mise en æuvre
progressive de la législation sur le commissariat aux comptes, l'autre se réfère arx besoins spéci-
fiques, en matière d'audit et de conseil, des grandes entreprises françaises à vocation multinationale.
Dans-ce contexte de profonde mutation de l'économie française, les cabinea anglo-saxons ont joué
y rôle important dans les restructurations. Déjà présents sur le marché frangis afin d'accompagner
leur clientèle multinationale, ils effecruaient essentiellement des missions d'audit .t d. r.poùng
pour le comPte de sociétés mères américaines ou britanniques. À partir des années 60, une Jientele
de multinationales françaises, publiques ou prMes, commence à recourir à leur savoir-faire dans le
domaine du contrôle des entreprises faisant appel aux marchés financiers internationaux.

Cotrrrrr.rnrrÉ - CoNTRôr-E - AuDn / læs vingt ans de I'AFC - mai 1999 (p. t07 à l}l)
Jean-François Clsr,l et Alain Mtror
VINGT ANs D'AUDIT : DE LA ITÉVISION DES COMPTES AIIX ACTTVTTÉS MULTTSERVICES
r16
Cependant, le rôle de ces cabinets restera longtemps limité en ce qui concerne le commissariat atu(
comptes de sociétés cotées en France
12.
l,a place des réseaux internationaux en France ne se shbilisera
quàf issue d'un vaste mouvement de restructurations du marché de l'audit amorcé dans les années 80.
Ôeles-ci prendront la forme de regroupements de cabinets franco-français, suivis de rapprochements
entre cabinets franco-français et représentants des réseaux internationaux ou encore de fi.rsions entre
représentants nationaux faisant suite à des rapprochements de réseaux internationaux.

Tableau 4. Classement des cabinets de commissariat aux comptes en 1983/84


(la dénomination sociale 1998 figure entre parenthèses)

CA
Rme
lmruons D
1 197 Hélios Streco Durando (Ernst & Young)

2 141 Guy Barbier (Arthur Andersen)


3 121 De Bois Diéterlé (Deloitte Touche Tohmatsu)

4 110 Coopers & Lybrand (Price Waterhouse Coopers)


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100 Price Waterhouse (Price Waterhouse Coopers)

6 94 Befec réseau BDO (Price Waterhouse Coopers)

7 89 Frinault Fiduciaire (Arthur Andersen)


8 70 Audit continental (KPMG Fiduciaire de France)
9 68 Reydel Blanchot (Salustro Reydel)

10 65 Mazars (Mazars & Guérard)

Source: La Profæsion comptable.

Tabteau 5. Classement des cabinets de commissariat aux comptes en 1996197


(la dénomination sociale 1998 figure entre parenthèses)

(.A
Rana
(r,u.uons D

1 1 152 Arthur Andersen


2 1 017 Coopers & Lybrand (Price Waterhouse Coopers)
3 976 Ernst & Young

4 886 KPMG Fiduciaire de France

5 811 Deloitte Touche Tohmatsu


6 765 Befec Price Waterhouse (Price Waterhouse Coopers)
690 Mazars & Guérard
R 492 Salustro Reydel

9 227 Amyot Exco (réseau Grant Thornton)


10 224 Calan Ramolino (Deloitte Touche Tohmatsu)

Source; La Profession comptable

CoMsrlBrûrtr - CorvrRôLE - AuDrr / Les vingt ans de I'A.FC - mai 1999 (P. 107 à 121)
Jean-François Cesle et Alain Mrrot
VINGT ANS D AUDIT : DE LA RÉVISION DES COMPIES AUX ACTTVTTÉS MT]LIISERVICES
rr7
À I'issue de ces restrucrurarions, il ne subsiste, en 1998, que neuf cabinets d'audit sur les vingt-
cinq premiers cabinets en 1984. Il se dégage cependant de cette comparaison (cf tableavx 4
classés
et 5_ci-dessus) une grande stabilité des principau( acteurs du marché frangis de l'audit. l,a supréma-
tie des cabinets membres de^s Bigfiue s'impose. Par qilleurs, le degré de concentration du marché s'est
accru : les dix premiers cabinets (soit 0,4 o/o de feffectif) représentent 3T o/o du chifte d'affaires et
'3
dominent nememenr le marché des grandes entreprises et des sociétés cotées.

i-4* ..-.il Le redéploiemenr du portefeuille d'activités vers le conseil


Les gands cabinets ont progressivement développé, selon des modalités différentes, une activité de
conseil, cherchant à valoriser, auprès de leur clientèle, leur connaissance du fonctionnemenr interne
de I'entreprise. Sur le plan international, les grands réseaux ont ainsi enregistré une croissance très
rapide de ces activités de conseil (organisation, fiscdité, études de faisabilité, informatique, erc.),
constituant de véritables groupes multiprofessionnels de services associés à I'audit. Ainsi, le réseau
ArthurAndersen a été le premier à mettre en æuvre une telle stratégie : dès 1992, l'audit ne repré-
sentait que 35 %o des honoraires, contre 2L o/o pour la fiscalité et 44 o/o pour le conseil. En France,
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bien que freinés par l'existence de professions libérales réglementées et par les règles d'incompatibi-
lité, les grands cabinets pratiquent largement la diversification d'activités dans le ànseil.
Cette évolution majeure, qui met en cause les limites de la mission d'opinion et du conseil,
soulève des problèmes de responsabilité er d'éthique l'audit malade du consèil er renvoie à une
-
interrogation : ces pratiques affectent-elles I'indépendance -
des auditeurs ? Ce point a depuis de
nombreuses années fait I'objet de débats aux É,tats-Unis, plus récemment en France. En [g92,la
COB et la CNCC ont chargé Y. Le Portz d'animer un groupe de travail ayanr pour mission d'exa-
miner les n problèmes posés par le développement des activités de conseil par des personnes appane-
nant au même r&eau que les commissaires aux comptes er les solutions suscepdbles de Àieu*
garantir I'indépendance de jugement de ces derniers >. Le rapport du groupe de travail (Le Porv,
1993) conclut en mettant en évidence les dangers des activités multiservices er proposa un renforce-
ment des incompatibilités applicables au commissaire aux compres ainsi qu'aux mlmbres du réseau
lguel il appartient. Ces propositions fi.rent, dès 1993, intégrées dans les normes de comportement
de la CNCC.
Le marché de I'audit légal ayant, dans les pap développés, atteint sa phase de maturité, le
problème du développement de l'activité de conseil se pose acruellement avec encore plus d'acuité.
Faisant suite à une vive controverse sur le thème de I'indépendance de I'auditeur, une seconde
mission a été confiée en 1998 à Y. L€ Portz sur le même thème.

W L?audit, objet d'enseignement et de recherche

,"'l*1ilir,i Lémergence des formations à faudit


Bien que présent de longue date, sous la forme de cours de Révision des comptes, dans les
Programmes de I'option Comptabilité des grandes écoles de commerce ta, l'audit n a pénétré Ies

CoMprABuTÉ - Conrnôrn - Auolr / læs vingt ans de I'AIC - mai 1999 (p. tO7 à l2l)
Jean-François Cesr.r et Alain Mtror
VTNGT ANS DâT]DIT : DE LA RÉûSION DES COMPTES ÀI'XACTTITTES MTJLIISERVICES
118
programmes fr"trç"ir d'enseignement universitaire, puis suscité I'organisation de formations spéci-
fiques, qu à une date relativement récente.

Le premier exemple significatif concerne la crâtion, au milieu des années 70, de la maitrise de
sciences er techniques comptables et financières (MSTCF), dont le programme de référence' coor-
donné avec celui du diplôme d'expertise comptable, inclut un important volume denseignement
relatif à l'audit .t arD( comptes. Au début des années 80 seront créées, sous la forme
"., "oÀ-issariat
de diplômes d'études supérieures spécialisées (DESS), des formations spécifiques à I'audit interne ou
externe couvranr progressivement les champs de I'audit comptable, financier, juridique, ûscal et
social ou se positionnant à la frontière de l'audit et du conuôle de gestion. Ces créations seront
suivies, autour des années 90, par la crâtion de mastères d'audit par la Conférence des grandes
écoles. Enfin, nous norerons la crâtion plus récente du DEA Comptabilité, Décision, Contrôle,
qui permet à I'audit, reconnu comme discipline, d'accéder au statut d objet de recherche.
Parallèlement, le nombre de thèses soutenues " sut la période 1978-1998, a)'ant Pour thème faudit
au sens large, s'élève à24, dont l0 en droit et 11 en sciences de gestion. Les thèses de droit, relative-
ment anciennes, conespondent à la phase de mise en place des institutions relatives au commissariat
aux comptes. lÆs rhèses en gestion comprennent d'une part, des tr.vaux elçlorant des domaines d'ap-
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plication variés (audit social, sûatégique, des qrstème dinformation) et, dauue pan, des recherches,
moins nombreuses et plus récentes, se ratachant à la théorie positive de la compabilité.

i. .l${fllÏ Laudit, objet de recherche


PARADIGMES ET RECHERCHE EN AUDIT

La recherche en audit peut être subdivisée en deux tendances majeures. la première, recourant à une
problémarique normarive, s'intéresse principalement à la méthodologie et atu( outils. Ce courant
n technologique ,, qui a représenté une grande part de la recherche nord-américaine jusqtfaux
années 70, s'exprime toujours dans des revues telles Auditing : loumal of Practice and Theory. Par,la
suite, renouvelant la problématique par l'introduction d'approches empiriques ou expérimentales,
un autre courant, traitant de la modélisation du marché de I'audit, s'est donné pour but dexpliquer
les phénomènes observés (concentration, croissance externe, différentiation, effet de réseau, effet de
réputation, erc.) ou détudier le comportement de l'auditeur (indépendance' ,r€sPonsabilité, litiges,
fixation des honoraires, normrlisation, etc.). Il s'exprime dans des revues telles que le Journal of
Accounting and Econornics et emprunte aux développements les plus récents de la recherche en
finance ou en économie.
t6
Partant d'une situation oligopolistique observable sut [e marché de I'audit, de nombreuses
recherches empiriques mettent en évidence que, bien que s'agissant d'une activité réglementée,
fofte d'audit à'un cabinet ne peur être considérée comme un parfait substitut à celle d'un autre.
Dès lors, I'hétérogénéité de I'ofte justifierait, de la part des grands cabinets, des honoraires significa-
tivemenr plus élwés (Simunic, 19S0). Des travaux valident empiriquement l'hypothèse de différen-
ciation dei services d'audit (Shockley et Holt, 1983) : par exemple, en câs de changement d'auditeur
(non Big eighrversus Big eight), pour les grandes sociétés cotées. Cet avantage concurrentiel tiendrait
à l'existence d'une renre de spécialisation, à une avance technologique ou à une capacité présumée à

CoMrrABu.rrÉ - CoNIRôI^E - AIDrr / ls vingt ans de IAFC - mai 1999 (P. 107 à l2l)
Jean-François Cesra et Alain Mxor
VINGT ANS D AUDIT : DE IA RÉVISION DES COMPTES AI,IX ACIIVT'TÉS MUTNSERVICES
r19
résister aux Pressions, u1e pouvant être empiriquemenr observée entre la perception de
lelation l'in-
dépendance et la taille de l'auditeur (De Angelo, lgSl).

.'t; i::i,'; TAUDII AU ccEUR DE Il. RELATIoN D,AGENcE


Dès le milieu des années 70,|a théorie de I'agence (Jensen, Meckling, 1976), en proposant une
vision contracnrelle des organisations, a fourni le premier paradigme ,ob*t. pour l'él"bor"tion d'un
modèle de justification économique du rôle de l'auditeur. En effet, la firme est appréhend.ée comme
une u ficdon légde u, næud d'un ensemble de contrats passés entre différents i.rt *.nrrrt économi-
quement rationnels (actionnaires détenant le contrôle, actionnaires minoritaires, man€ers, autres
salariés, beilleurs de fonds, fournisseurs, clients). Dès lors que le mandataire risque d'ag;ir de façon
peu conforme aux intérêts du mandant, le rôle de I'auditeui exrerne peut dwenir déterÀinant : soit
au niveau de l'activité de surveillance soit, à l'inverse, lorsque le manàataire cherche à faire caution-
ner sa gesdon. ks relations actionnaires-rnanagers et actionnaires-créanciers, consituent deux
exemples paniculièrement érudiés.

Se situant dans le cadre méthodologique tracé par l'École dc Rochester (Vatts et Zimmerman,
1986) et reprenant les mêmes hypothèses quanr au compomement de I'auditeur, certaines recherches
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étudiant la décision de changer d'auditeur (ou le choix de celui-ci) ont montré I'influence d.e
variables exogènes comme : le capital détenu par les managers, les conuats de rémunération incita-
tifs, la diffi.rsion des titres, la valeur du ratio d'endemement (Francis et'Wilson, 1988). De même,
rePrenant l'hypothèse de lobhying (Vatts, Zimmerman,ISTS), certains ûavau)( se sonr attachés à
empiriquement meftre en évidence le lien entre la méthodologie développée par chacun des cabinets
et le comportement de vote dans les organismes professionnelr d. trot-ïi.ation (Kinney, 1986).

t_j,*J'. LAUDTI nÉpurarroN ET AsyMÉTRrE D'TNFoRMATîoN


Laudit est une activité cotteuse dont l'utilité économique n est justifiée que pil l'existence de situa-
tions antagonistes ou de conflits potentiels d'intérêts, en paniculier enrre propriétaires er managers
ou entre propriétaires et créanciers (|ensen et Meckling, 1976). [,a recherche d'un arbitrage exté-
rieur, mais aussi la minimisation les cotts d'agence, pourraient conduire à privilégier la signarure de
cabinets internationaux. La qualité de I'audit riétant pas directem.t. àbr.*Ibl. p"i le client,
certains travau( ont intégré le concept d'aqrmétrie d'information pour construire des modèles de
signalisation cherchant à expliquer la nature des institutions d'audit. La théorie de la réputation mer
l'accent sur la perception de la compétence de l'auditeur (capaciré à relever des irrégul'arités) ou de
son indépendance par (capacité à porter lesirrégularités dans l. ,alpon d'audit)
lappoft au client ;
glle luggère une modélisation du marché en termes de choix r,ùégiq,ro effecnréslar le client et
I'auditeur face aux investisseurs : les détenteurs du capital, de l'audireur, Àercheraient à
gagner la confiance d'investisseurs en divulguant une information "li.nafinancière certifiée,
les aud.iteurs
tirant un revenu de la réputation attachée à leur signature (Titman er Tï"u€man, 1986). Atn de
déterminer le niveau oPtimal d'information à divulguer dans le rapport d'audir, un modèle d'équi-
libre peut être construit, conduisant l'auditeur à arbitrer enffe : prér.*., sa réputation auprès àe,
investisseurs et risquer de perdre son client, la préservation de la réputation devant consdtuer une
barrière économiquement efficace conûe les tentations résulant du libr. jeu de la vie des afFaires 17.

coMrrABuxrÉ - corirnôr.e - AuDrr / Les vingt ans de I'AFC mai 1999 (p. ro7 à r2r)
-
Jean-François Cesra et Alain Mrcor
VINGT ANS DâUDIT : DE T.A R.ÉVISION DES COMI'TES ATIXACTTVTTÉS MULilSERVICES
L20

Conclusion
ks objeaifs et le champ d'investigation des missions d'audit ont connu une extension considérable
dur"ni les dernière, jéc.nnie". Par I'internationalisation de l'économie et l'essor des
"illeurr, imposé aux grandes entreprises, privées comme
marchés de capitatrx ont depuis longtemps
publiques, le r..our, à des audits émanant de signatures internationalement reconnues. Cette
iogiq". inéluctable est à I'origine d'importants mouvements de restructuradon, tant en France qu'au
nii."" international. Enfin, les grands cabinets, initialement focalisés sur une mission d'opinion
relevant de l'éthique du professionnel libéral, ont progressivement développé des activités de conseil,
créant do ,tructùr.s de nature conglomérale, véritables ensembles multiprofessionnels de services
associés à l'audit. Ceme remise en qluse du positionnement Par raPport au métier de base n'est
pas

sans engendrer de nombreux problèmes au plan de l'éthique, ni sans présenter de danger de perte
d'identiié. Une telle évolution qui a profondément renouvelé ant les concepts et la technologie que
l'économie du marché aur" p.rmii à l'audit d'accéder eu staflrt d'objet d'enseignement et de
recherche.
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9. En France, Cest en 1967 qiaété créêe la struc-
Notes
rure qui a donné nùsance à I'IFACI, aujourd'hui
1. Sur l'émergence de l'activité d'audit dans les Institut de lâudit Interne.
économies de marché (cf Ca'sra, 1995). 10. Conue 76 o/o dans les autres bourses américaines
2. Sur les différentes acceptions (f Mikol' 1991). (rappon US Sénat, 1976).
3. Normes intemationales d'audit, IFAC, 1996' ll.Pour une analyse de longue période (f Sauviat'
traduction française, p. 13. 1991).
Il s'agissait, par ordre alphabétique, de : Anhur l2.Pat exemple, au début des années 80, le Befec
Andersen, Anhur Young, Coopers & Lybrand' (rujourd hui Price W'aterhouse Coopers) détient
Deloitme Haskins & Sells, Ernst Ec ttrThinney, plus du double de mandats de commissariat aux
Peat Marwick Mitchell, Price S?'aterhouse, comptes de sociétés cotées que le premier
Touche Ross. membre des Big eight
Informations et Débaa, CNCC, n' 38, juin 13. En Grande-Bretagne, en 1997,les Big six contrô-
1997, p.31. luent 92 7o du marché des 500 premières enue-
prises cotées.
6. Comité de I'IFAC en charge de l'élaboration des
normes d audit. 14. Voire, dès les années 50, dans ceftains instituts de
faculté de droit.
7. LIFAC Qnternational Fedcration of Accountants),
organisation de normalisation internationale, a 15. Source : CD-Rom Doc-Thèses, 1998.

été créée en 1977 afin de regrouPer les insances l6.Aux É,tas-Unis, cene situation a souvent été
représentatives de la profession comptable de dénoncée par les commissions d'enguête sénato-
chacun des pays membres. À sa création, I'IFAC riales.
comprenait 63 instituts professionnels originaires 17. Les récentes mises en cause de la responsabilité
de 49 pays. En 1998, I'IFAC regroupait 140 professionnelle d'auditeurs tant aux Étaa-Unis et
institua professionnels originaires de 101 pays au Royaume-Uni, qu'en France, pour des
(source : site Web IFAC). monçmts de plus en plus importans, tendent à
Informations et Débats, CNCC' n" 38, iuin monûer les limites inhérentes à ce mode de régu-
1997, p.32. lation.

CoMprABIr.rÉ - CoNTRôI-E - AuDrr / l,es vingt ans de I'AFC - mai 1999 (P. 107 L l2l)
Jean-François Casra et Alain Mxor
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