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Institutions Judiciaires

(Mr Mané)

INTRODUCTION

La vie en société est nécessairement organisée par le Droit dont l’application est
parfois litigieuse, source de litiges c’est-à-dire objet de conflits importants. Le
règlement des litiges peut être recherché par le recours à la justice non-étatique,
privée ou « douce » comme l’arbitrage, la médiation, la conciliation, la transaction et
le recours administratif qui sont également appelés « les modes alternatifs ou extra-
judiciaires des règlements des conflits ».

L’arbitrage est le ‘jugement’, la résolution, le règlement d’un litige par une ou des
personnes privées, pas nécessairement des juristes, appelées des arbitres. Il nécessite
une convention des parties appelée « convention d’arbitrage » (accord par lequel les
parties acceptent de recourir à l’arbitrage) et passée par écrit.

La convention est dite un « compromis » si elle concerne un litige déjà né et actuel.


Elle est par contre appelée « clause compromissoire »si le litige est éventuel, n’est
pas encore né au moment de sa conclusion. Cette clause compromissoire consiste
donc pour les parties à accepter, à s’engager de soumettre à l’arbitrage tous les litiges
qui pourraient naître de leur contrat.

L’arbitrage éteint un litige par une décision réduit en droit ou équité (amiable
compositeur) appelée « sentence arbitrale » et dont l’exécution s’impose aux parties.

La médiation est le processus par lequel un tiers dit ‘médiateur’ (neutre, indépendant,
impartial, de bonne moralité, choisi par l’une ou les deux parties) aide les parties à
trouver elles-mêmes un ‘accord dit de médiation’, une résolution amiable de leur
différend en soumettant à leur acceptation un projet de solution. Elle constitue donc
une recherche commune, avec l’aide d’une personne, à la satisfaction de toutes les
parties d’une solution juste et équitable pour résoudre un litige. Elle est privilégiée
dans les litiges entre les citoyens et l’administration par ‘l’Institution du Médiateur de
la République’.

La conciliation est également le processus par lequel deux ou plusieurs parties


tentent, à l’appui de propositions et d’avis d’un tiers dit ‘conciliateur’ (neutre,
indépendant, impartial, de bonne moralité, généralement une autorité administrative
comme par exemple l’Inspecteur pour les Litiges Individuels de Travail, un juge,
parfois un chef ou un sage) ou de leur rapprochement par ce dernier de parvenir à un
‘accord dit de conciliation’ en vue de la résolution, de l’extinction amiable du litige,
du différend. Elle est obligatoirement et préalablement tentée en matière de divorce,
de litige individuel de travail et d’affaires commerciales par respectivement les
Présidents des Tribunaux d’Instance, du Travail et de Commerce.

La promotion de la médiation et de la conciliation ainsi que le rapprochement de la


justice du justiciable ont motivé la création des ‘Maisons de Justice’ qui, avec les
‘bureaux d’accueil et d’orientation’ et les ‘bureaux d’information du justiciable’
composent le modèle de Justice de Proximité.

Les Maisons de Justice sont créées dans les communes. Elles permettent d’obtenir
un règlement rapide, gratuit, simple, amiable et discret des litiges par un Médiateur-
Conciliateur (par la conciliation ou la médiation) et d’apporter une solution aux
contraintes économiques, géographiques et socio-culturelles qui rendent difficile
l’accès à la justice.

Le Médiateur-Conciliateur, généralement un ancien magistrat, a pour rôle de


faciliter le règlement par l’identification des questions qui font l’objet du litige, la
facilitation de la discussion entre les parties sur ces questions et l’aide aux parties à
trouver une solution au litige par leur accord mais sans possibilité d’en imposer.

Les bureaux d’accueil et d’orientation du justiciable sont mis en place au sein des
juridictions et les bureaux d’informations du justiciable au niveau des Universités. Ils
visent à rendre effectives, à permettre l’accessibilité à la justice.

La transaction est la convention par laquelle les parties se font des concessions, des
renonciations réciproques pour éteindre un litige actuel ou éventuel. Elle doit être
proposée par l’Assureur en matière d’indemnisation des dommages corporels
résultant d’accidents de circulation causés par un véhicule terrestre à moteur avant
tout recours au juge.

Le recours administratif (gracieux ou hiérarchique) est le mode de règlement


consistant à porter facultativement ou obligatoirement une contestation (acte
administratif litigieux) devant une autorité administrative (auteure de l’acte ou son
supérieur) en vue de provoquer une décision (recours administratif préalable) ou de
trouver une solution alors même qu’il existe une décision préalable.

Par exemple : du recours hiérarchique devant le ministre en charge du travail contre


la décision de l’Inspecteur du travail avant le recours au juge, la Chambre
Administrative de la Cour Suprême en matière d’autorisation de licenciement des
délégués du personnel.
Les modes alternatifs ou extra-judiciaires de règlements des conflits sont ouverts,
accessibles, possibles à toutes les personnes (physiques ou morales, publiques ou
privées) en principe. Ils ont pour fondement le célèbre adage « Un mauvais
arrangement vaut mieux qu’un bon procès ».

Mais ces modes alternatifs ou extra-judiciaires nécessitent soit l’accord des parties
pour y recourir ou pour éteindre le litige, soit certaines catégories de litiges comme
par exemple les litiges contre l’administration pour recourir au Médiateur de la
République, les litiges sur les droits d’ordre privé, les droits susceptibles de la libre
disposition des parties (non pas des droits d’ordre public, non susceptibles au libre
disposition des parties pour recourir à l’arbitrage).

Certains services administratifs sont investis en même temps de la mission de


trancher des litiges. Il en est ainsi des organes administratifs à caractère juridictionnel
comme par exemple les commissions (Commission de Surveillance des Banques et
des Établissements Financiers), des comités (Comité des droits de l’Homme, Comité
de la Liberté Syndicale) et les conseils ou chambres (Conseil de l’Ordre des Avocats,
Conseil de Discipline du Conseil Supérieur de la Magistrature).

Il en est de même des autorités administratives indépendantes comme par exemple


l’Autorité de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP), le Conseil
National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA), l’Autorité de Régulation des
Marchés Publics (ARMP), l’Office National de Lutte Contre la Fraude et la
Corruption (OFNAC).

Mais le règlement des litiges demeure principalement judiciaire, contentieux


conformément au vieil adage « Nul ne peut se faire justice soi-même », qui privilégie
la justice étatique ou justice « dure » sur la justice privée interdite en principe.

Le règlement judiciaire des litiges correspond à la réalisation, à l’application du droit


au juge consacré comme un droit de l’Homme, un droit fondamental à valeur
constitutionnel par des nombreuses dispositions internationales (Ex : l’article 8 de la
déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948) et nationales (préambule de
la Constitution).

Le droit au juge permet de recourir à une juridiction, d’être entendu sur sa cause par
une juridiction pour obtenir la résolution d’une contestation portant sur un droit ou
une liberté.

Un litige porté devant une juridiction devient un contentieux qui désigne aussi la
partie de la fonction de juger consistant à trancher une contestation en application du
droit ou l’ensemble des contestations soumises au juge pour règlement dans une
discipline juridique donnée.
Le contentieux donne lieu à la jurisprudence c’est-à-dire l’ensemble des décisions
rendues par les cours et tribunaux ou une série de décisions de justice suffisamment
concordantes rendues par les juridictions sur une même question de droit.

Le droit au juge oblige tout État de droit à mettre en place des organes, en principe
des juridictions indépendantes et impartiales.

Le terme juridiction, institution judiciaire ou institution juridictionnel désigne le


pouvoir de rendre la justice, de faire régner le droit pour l’organe investi de la
mission de dire le droit, d’appliquer le droit pour régler les litiges.

Au sens stricte ou classique, la juridiction est l’organe ou l’institution qui se


prononce traditionnellement, normalement sur les litiges (quel qu’en soient la nature
et la qualité du justiciable) et comprend nécessairement au minimum un magistrat
professionnel dans sa profession.

La fonction de juger ou la justice est également rendue au nom du peuple par l’État à
travers un pouvoir (autorité dans d’autres pays) judiciaire, indépendant en principe du
pouvoir législatif et du pouvoir exécutif et organisée par un ensemble de règles de
droit qui constitue le droit de l’organisation judiciaire ou le droit des institutions
judiciaires.

L’organisation judiciaire du Sénégal a principalement comme source actuelle la


Constitution du 22 janvier 2001 modifiée, la loi du 3 novembre 2014 fixant
l’organisation judiciaire du Sénégal modifiée, la loi 21 juillet 1965 portant code pénal
modifiée, la loi du 21 juillet 1965 portant code de procédure pénale modifiée et leurs
décrets d’application.

L’organisation judiciaire repose sur des principes comme le Principe de la


collégialité, le Principe d’un procès équitable dans un délai raisonnable et le
Principe de l’unité de juridiction.

Le Principe de la collégialité signifie que les juridictions, y compris les tribunaux


d’instance, rendent la justice, prennent les décisions normalement en formation
collégiale, en groupe ou à plusieurs et en nombre impaire, 3 juges au minimum.

Mais les tribunaux d’instance et les tribunaux de grande instance statuent


exceptionnellement à juge unique (rendent, prennent les décisions avec un seul juge,
deviennent des juridictions à juge unique) en matière civil (pas en matière pénale)
lorsque l’effectif qu’il aurait affecté est inférieur à 3 magistrats/juges, non compris les
juges d’instructions.

Le Principe d’un procès équitable dans un délai raisonnable impose, à peine


d’inconstitutionnalité (lois) ou d’illégalité (règlements, décisions de justice),
l’impartialité (neutralité, indépendance du juge), le droit de la défense des parties
(égalité des armes, contradictions), le double degré de juridictions (contestation
devant une juridiction supérieure) et la célérité (diligence, réduction des délais) des
décisions de justice.

Il fait partie, avec la réduction des coûts, de désengorgements des juridictions, le


rapprochement de la justice des justiciables, des objectifs que l’actuelle carte
judiciaire tente de réaliser par la création de juridictions (Tribunaux d’Instance,
Tribunaux de Grande Instance, Tribunaux de commerce, Chambre de commerce
d’appel, Chambre criminelle) à la place (Tribunaux départementaux, Tribunaux
régionaux, Cour d’assises) ou aux côtés (Tribunaux du travail) d’autres juridictions.

Le Principe de l’unité de juridiction signifie que les juridictions connaissent,


appliquent la loi, les règlements en vigueur et les usages qui ne sont pas contraires à
la loi en principe de toutes les affaires civiles, commerciales, sociales, pénales,
administratives, donc du droit coutumier, du droit privé et du droit public.

Les juridictions sont uniques, polyvalentes (suppression des juridictions coutumières


et des juridictions de l’ordre administratif) et forment un seul ordre juridictionnel
(suppression de l’ordre judiciaire et de l’ordre public ou administratif).

Mais le choix du législateur sénégalais pour le ‘jugement’ de toutes les affaires quel
qu’en soit leur nature par les mêmes juridictions est de plus en plus remis en cause
avec l’institution de juridictions spécialisées comme les tribunaux du travail, de
commerce.

Les juridictions sénégalaises obéissent aussi à des règles de compétences et sont


hiérarchisées avec l’existence des juridictions de première instance (Chapitre 1) et les
juridictions supérieures (Chapitre 2) qui, toutes, fonctionnent grâce à un personnel dit
judiciaire (Chapitre3).

Bibliographie :

- Papa Assane Touré, « La réforme de l’organisation judiciaire du Sénégal,


commentée et annotée », L’Harmattan, 2016.
- Papa Assane Touré, « La réforme de la composition et de la compétence des
juridictions du Sénégal », Abis éditions, 2017.
Chapitre 1 : Les institutions judiciaires de Première Instance

Les institutions judiciaires de première instance également appelées les tribunaux


occupent le premier degré, la « première marche » dans la hiérarchie judiciaire. Elles
se prononcent pour la première fois sur les affaires portées à leurs connaissances et
sont par conséquent les plus sollicités par les justiciables, les plus nombreuses, les
principaux instruments de la consolidation du rapprochement de la justice des
justiciables.

Leurs moyens humains et matériels sont variables selon leurs classements (moins
importants ou plus réduits pour les juridictions de troisième classe, moyens pour
celles de deuxième et première classe et plus importants pour celles hors classe
comme les tribunaux de Dakar).

Certaines institutions judiciaires sont exclusivement (Section 1) et les autres


principalement (Section2) de première instance.

Section 1 : Les institutions exclusivement de première instance

Les institutions exclusivement de première instance sont toujours saisies des affaires
portées pour la première fois à la connaissance d’une juridiction. Elles sont
constituées des Tribunaux d’Instance, des Tribunaux du Travail et des Tribunaux de
Commerce.

Les Tribunaux d’Instance

Les Tribunaux d’Instance sont créés avec la réforme de 2014 au niveau des
départements en remplacement des tribunaux départementaux. Ils sont dirigés par un
président et peuvent (par une décision de leur assemblée générale) comporter des
chambres (formations spécialisées en principe).

Les Tribunaux d’Instance sont compétents en matière civile, commerciale et pénale.

En matière civile et commerciale, ils connaissent en principe de toutes actions


personnelles (relatives aux droits personnelles, droits de créance obligations) ou
mobilières (relatives aux meubles) jusqu’au montant de 2 millions de FCFA.

Ils ont également une compétence de droit commun, de principe (sauf exceptions
comme par exemple les actions expressément attribuées à d’autres juridictions) en
matière de statut personnel c’est-à-dire les actions relevant du droit des personnes et
de la famille (notamment l’état civil, le mariage, le divorce, les successions, les
pensions alimentaires) quelque soit la valeur du litige.

Ils doivent consulter le CADI lorsque le litige est relatif aux successions de droit
musulman et peuvent le consulter dans les autres matières relavant du code de la
famille ou renvoyer les parties devant le CADI aux fins de tentatives de conciliation.

Le CADI (éventuellement le CADI suppléant) est nommé par décret parmi les imams
pour donner les conseils et mettre des avis consultatifs.

Les Tribunaux d’Instance sont exceptionnellement compétents pour connaître les


actions relatives aux contrats de locations d’immeubles à usage d’habitation (bail à
usage d’habitations) quelque que soit le montant du loyer et les actions relatives aux
contrats de location à usage professionnel (commercial, industriel, artisanal, etc.)
lorsque le montant du loyer mensuel est inférieur ou égal à 100.000 FCFA.

En matière pénale, les Tribunaux d’Instance connaissent en principe de tous les faits
qualifiés de contravention (infraction punie d’un emprisonnement allant d’un (1) jour
à un (1) mois ou d’une amende de 200 à 20.000 FCFA) et sont alors appelés des
tribunaux de simple police.

Mais ils connaissent exceptionnellement des délits (infraction punie d’une amende
supérieur à 20.000 FCFA ou d’un emprisonnent supérieur à un (1) mois) pour
lesquels la loi leur a expressément et limitativement donné compétence.

Il s’agit d’infractions contre la chose publique (Ex : violation d’une interdiction de


séjour, provocation à un attroupement non-armé), contre les particuliers (Ex : coups
et blessures volontaires n’entraînant pas plus de 20 jours d’incapacité) et contre la
propriété (Ex : le vol simple).

L’action civile engagée conjointement à l’action publique, mise en œuvre pour la


poursuite des contraventions et des délits relevants de leurs compétences, est
également de la compétence des Tribunaux d’Instance quelque soit le montant de la
demande.

Les Tribunaux d’Instance rendent des décisions appelées des jugements soit en
premier et dernier ressort sans possibilité d’appel ou susceptible seulement d’un
pourvoi en cassation, soit en premier ressort c’est-à-dire avec possibilité d’appel.

En matière civile et commerciale, les jugements des Tribunaux d’Instance sont en


premier et dernier ressort sur les actions personnelles ou mobilières dont le montant
n’excède pas 300.000 FCFA et en premier ressort sur celles dont le montant est
supérieur à 300.000 FCFA
Dans toutes les autres matières (statut personnel, location, contravention, délit), les
jugements des Tribunaux d’Instance sont toujours en premier ressort quelque soit le
montant.

Les Tribunaux du Travail

Les Tribunaux du Travail sont introduits au Sénégal par le Code du travail des
territoires d’Outre-mer de 1952 et organisés actuellement par la loi du 1er décembre
1997 portant Code du travail et la loi du 3 novembre 2014 portant l’Organisation
judiciaire du Sénégal.

Ils sont crées dans chaque région et dans certains départements (Ex : Dakar, Pikine,
Guediawaye, Rufisque).

Chaque tribunal de travail est dirigé par un président, comporte une formation de
référé et une chambre de conseil composé chacune du président et du secrétaire du
greffe. Il peut être subdivisé par décret en sections professionnels c’est-a-dire en
formations non spécialisées.

Les Tribunaux du Travail connaissent exclusivement des litiges, différends ou conflits


individuels de travail.

Un différend ou litige individuel est une lésion d’un droit, avantage ou intérêt
reconnu individuellement à la victime qui en réclame réparation à l’auteur.

Il est considéré survenir au travail par conséquent de la compétence des Tribunaux du


Travail lorsqu’il oppose un employeur à son travailleur à l’occasion de leurs contrats
de travail et des conditions de travail (principe), les salariés d’une même entreprise
ou leurs employeurs à l’occasion du travail, les institutions obligatoires et les
assujettis ou les bénéficiaires à l’occasion du régime de sécurité sociale, les
entreprises utilisatrices, les cautions, les maîtres d’ouvrage et les entreprises de travail
temporaire ou les tâcherons à l’occasion des actions récursoires (en remboursements).

Dans ces mêmes litiges individuels de travail, la formation de référé (référé sociale)
est compétente pour ordonner les mesures urgentes, non contestées sérieusement,
justifiées par l’existence du différend, conservatoire ou de remise en état nécessaire
pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement
illicite.

Les Tribunaux du Travail et leurs formations de référés sont saisis par une simple
déclaration écrite faite au Greffe par les parties (employeur ou travailleur).

En principe, le Président doit obligatoirement convoquer à une tentative de règlement


à l’amiable (phase de conciliation) en Chambre de conseil les parties qui peuvent se
faire représenter ou assister par un travailleur, un employeur, un représentant de
centrale syndicale, un représentant de syndicat professionnel justifiant d’un mandat
écrit (mandataire de justice) et d’un agrément du Président mais aussi par un avocat.

En cas de succès de cette tentative, le litige est définitivement éteint et l’accord qui
en résulte est constaté par un procès verbal rédigé séance tenante et exécuté comme
un jugement du Tribunal.

Par contre, en cas d’échec de la tentative de conciliation ou du non comparution du


défendeur (celle du demandeur entraînant la suppression de l’affaire du rôle), le
Tribunal statue avec le Président ou un autre juge-magistrat et deux assesseurs (un
employeur et un travailleur, titulaires ou suppléants, choisis par le Président pour
chaque litige), juge, tranche (phase contentieuse) l’affaire et rend un jugement soit en
premier, soit en dernier ressort.

Les assesseurs des Tribunaux du travail sont des employeurs et travailleurs nommés
par arrêté du Ministre chargé du travail sur des listes présentées par les organisations
syndicales les plus représentatives pour un mandat de trois (3) ans et prolongeable
jusqu’à la nomination de nouveaux assesseurs. Ils prêtent serment devant le Président
du tribunal de travail où ils sont appelés à siéger.

La composition des juridictions par des juges professionnels (magistrats du siège) et


les juges non professionnels (Exemple : les assesseures du tribunal du travail) est
appelée l’échevinage ou la composition échevinale.

Les jugements des Tribunaux du travail sont en premier et dernier ressort si le taux du
litige n’excède pas dix (10) fois le montant mensuel du Salaire Minimum
Interprofessionnel Garanti (SMIG, environ 580.000 FCFA).

Ils sont par contre en premier ressort si le taux du litige est supérieur à dix (10) fois le
montant mensuel du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG, environ
580.000 FCFA).

Les décisions des tribunaux du travail ou de leurs formations de référés peuvent en


principe faire l’objet d’une exécution immédiate par provision et sans caution.

Les Tribunaux de Commerce

Les Tribunaux de Commerce sont créés et organisés par la Loi du 28 juin 2017
portant création, organisation et fonctionnement des Tribunaux de Commerce et des
chambres commerciales d’appel modifiée par la Loi du 8 avril 2020.
Ils sont dirigés par un président et leurs sièges ainsi que leurs ressorts sont fixés par
décret en tenant compte de l’activité commerciale de la région. Ainsi, plusieurs
tribunaux peuvent être installés dans une même région en cas de besoin sans qu’il
existe dans une autre région.

Les tribunaux ont des compétences déterminées par la loi à l’exclusion de toute autre
attribution et prioritaire de préférence sur les autres juridictions (Tribunaux
d’Instance, Tribunaux de Grande Instance) et localités où ils sont installés comme
actuellement à Dakar.

Ils connaissent plus généralement des contestations relatives à l’activité commerciale,


aux actes de commerce accomplis par les commerçants à l’occasion de leur
commerce et de l’ensemble de leurs contestations commerciales même comportant un
objet civil.

Il en est ainsi notamment des contestations relatives aux engagements entre


commerçants, des contestations entre associés d’une société commerciale ou d’un
groupement d’intérêts économiques entre toute personne relative aux actes de
commerce (achat de marchandises pour les revendre, obtention de biens meubles,
lettre de change, opérations de banque, engagements nés à l’occasion du commerce),
des contestations et oppositions relatives aux décisions prises par les juridictions de
commerce.

Mais dans les actes mixtes (entre un commerçant et un non commerçant), la partie
non commerçante demanderesse peut saisir les juridictions de droit commun
(Tribunal d’Instance ou de Grande Instance).

Dans les mêmes matières, le Président du Tribunal de Commerce exerce les fonctions
de juges des référés et peut ordonner les mesures urgentes, non contestées
sérieusement ou de remise en état nécessaire pour faire cesser un trouble
manifestement illicite.

Les Tribunaux de Commerce sont saisis par assignation sauf comparution personnelle
ou requête conjointe des parties.

Ils procèdent obligatoirement et à huit clos (sans la présence du public) à une


tentative de conciliation. En cas d’accord des parties, il est établi un procès verbal
ayant force exécutoire.
En cas de non conciliation, les Tribunaux de Commerce siègent nécessairement en
nombre impair avec au moins un juge professionnel appelé Juge, le Président ou un
autre magistrat du siège, et d’un juge non professionnel appelé Juge consulaire (donc
échevinage ou composition échevinale avec des juges professionnels et non
professionnels) choisi par le Président pour chaque affaire.
Les Juges consulaires sont des commerçants nommés pour un mandat de trois (03)
ans renouvelable par arrêté du Ministre de la Justice sur proposition de la Chambre
Consulaire (de Commerce, d’Industrie et de Service) du siège du tribunal.

Ils prêtent serment devant le Tribunal de Commerce où ils sont appelés à siéger.

Les Tribunaux de Commerce rendent des décisions, des jugements en premier ressort
sur les demandes dont le taux du litige est supérieur à 10 millions de FCFA ou
indéterminé et en premier et dernier ressort sur les demandes dont le taux du litige
n’excède pas 10 millions de FCFA.

Section 2 : Les institutions principalement de Première Instance

Les institutions principalement de Première Instance sont les Tribunaux de Grande


Instance (TGI) crées en remplacement des tribunaux régionaux avec la reforme du
système judiciaire introduite par la loi du 3 novembre 2014 qui a réaménager leurs
organisations et leur compétences.

Paragraphe 1 : L’organisation des Tribunaux de Grande Instance

Les Tribunaux de Grande Instance sont installés dans les régions (au moins un par
région) ou dans les départements (Exemple : Dakar, Pikine, Guediawaye, Rufisque,
Thiès, Mbour… etc.).

Ils sont dirigés par un Président, comporte une formation de référés (composée du
Président et du Greffier), une formation des mineurs, une chambre criminelle (dirigée
par un président), un juge d’instruction parmi lesquels un doyen des juges (titre
attribué au plus ancien, plus âge juge d’instruction), un parquet dirigé par un
procureur de la république et peuvent comporter d’autres chambres spécialisées.

La Chambre Criminelle de Grande Instance remplace en principe la Cour d’assises


(exp. des chambres militaires). Elle doit tenir tous les quatre mois au moins une
session (possibilité de tenir plus d’une session) dont la suppression est envisagée pour
en faire des audiences ordinaires à tenir obligatoirement autant de fois que les besoins
du service l’exigent afin de favoriser la célérité de l’instance pénale.

Le Tribunal de Grande Instance hors-classe de Dakar comporte également une


formation spécialisée en matière militaire et abritait la Chambre Africaine
Extraordinaire d’Instruction crée par l’accord du 22 août 2012 entre la Commission
de l’Union Africaine et la république du Sénégal.
Les tribunaux de Dakar sont déclarés Hors-classes (Exemple : Tribunal d’Instance
hors-classe de Dakar, Tribunal de Grande Instance hors-classe de Dakar… etc.) en
raison de l’importance particulière du contentieux.

Ainsi, ils disposent de plus de moyens matériels et humains que les tribunaux de
même nature des autres localités. Mais leurs compétences restent les mêmes que
celles des tribunaux non déclarés hors-classes.

Paragraphe II - La compétence des Tribunaux de Grande Instance

Les Tribunaux de Grande Instance sont juges de droit commun en Première Instance
en toute matière. En d’autres termes, ils ont une compétence générale, connaissent en
matière civile et administrative de l’ensemble des matières à l’exception de celles qui
sont spécialement attribuées aux autres juridictions en premier et dernier ressort
(Exemple : recours pour excès de pouvoir pour la Cour Suprême, contentieux
électoral pour la Cour d’Appel) ou en premier ressort (Exemple : litige individuel de
travail pour les Tribunaux du travail, contestations commerciales pour les Tribunaux
du Commerce, actions civiles commerciales et mobilières personnelles pour les
Tribunaux d’Instance).

Ainsi, en matière administrative, leurs compétences portent sur l’ensemble du


contentieux administratif et fiscal à l’exception des recours en matière électoral et du
recours pour excès de pouvoir réservé à d’autres juridictions.

Ils connaissent notamment du contentieux de la responsabilité publique contractuelle


et extra-contractuelle, du contentieux fiscal (assiette, taux, recouvrement des
impositions de toute nature) et du contentieux individuel de la fonction publique
(litige sur les avantages pécuniaires ou statutaire reconnus au fonctionnaire).

En matière civile et commerciale, les Tribunaux de Grande Instance connaissent des


actions personnelles et mobilières dont la valeur excède 2 millions de FCFA, des
actions relatives aux baux d’immeubles à usage professionnel lorsque le montant du
loyer mensuel est supérieur à 100.000 FCFA et de toutes les actions immobilières
quelque soit leurs valeurs.

Ils ont également une compétence exclusive spéciale dans les matières déterminées
par la loi comme par exemple en matière de filiation et d’état des personnes. Ainsi, ils
ont une compétence exclusive pour connaître des demandes en matière d’absences et
de disparitions, des actions en contestation des filiations, des actions en adoption, des
actions en partage de successions litigieuses.

En matière pénale, les Tribunaux de Grande Instance connaissent tous les délits autres
que ceux qui sont spécialement attribués aux autres juridictions (Exemple : Tribunaux
d’Instance, Tribunaux de Commerce, Cour de Répression de l’enrichissement illicite,
Haute Cour de Justice). Ils sont alors alors des Tribunaux correctionnels.

Les Tribunaux de Grande Instance ou plus précisément leurs chambres criminelles


ont également en principe plénitude de juridictions, une pleine compétence pour juger
en premier ressort des infractions qualifiées ‘Crimes’ ou connexes à un crime.

Un crime est une infraction punie d’une peine criminelle comme la peine de mort, la
réclusion criminelle à perpétuité ou à temps (anciens travaux forcés), la détention
criminelle et la dégradation civique.

Mais les crimes, les délits et les contraventions commis par des mineurs (personnes
âgées de moins de 18 ans) relèvent de la compétence exclusive de la formation des
mineurs (Tribunal pour enfants) qui siège avec un seul juge-magistrat (mais recours
possible aux éducateurs spécialisés et aux assistants sociaux) et prononce en principe
des mesures de protection, d’assistance, d’éducation, de surveillance du mineur
même en dehors de toute infraction (cas du mineur en danger moral ou physique) et
exceptionnellement des sanctions, des peines exigées par les circonstances et la
personnalité du mineur délinquant mais âgé de 13 ans au moins.

Les crimes commis par les militaires et les paramilitaires échappent également à la
compétence des chambres criminelles des Tribunaux des Grande Instance tout
comme ceux commis par les membres du gouvernement.

La formation de référés peut, en cas d’urgence et dans les matières relevant de la


compétence des Tribunaux de Grande Instance, prendre par ordonnance des mesures
non contestées sérieusement ou nécessaires pour faire cesser un trouble
manifestement illicite.

Le Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar, plus précisément sa formation


spécialisée en matière militaire est la juridiction de droit commun en matière
militaire.

Il connaît en principe des infractions constitutives de contraventions et de délits


d’ordre militaire (concevables seulement dans la vie militaire comme l’insoumission,
la désertion, le complot militaire et de façon générale les infractions contre l’honneur
pour le devoir militaire) ou de droit commun commises par des militaires (personnel
de l’Armée National, de la Gendarmerie, du Groupement National des Sapeurs-
pompiers) et des paramilitaires (personnel de la Police, de la Douane, de
l’administration pénitencière, du Service National de l’Hygiène, du Service National
des Parcs Nationaux ou Agents des Eaux et Forêts) jusqu’au grade de Capitaine.

Il siège avec un Juge-magistrat et deux juges assesseurs militaires choisis par le


Président sur une liste dressée par le Ministre des Forces Armées, le Ministre de
l’intérieur ou l’autorité habilitée pour les autres personnels des corps paramilitaires.
Le Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar juge également et
exclusivement les actes de terrorisme (commis dans le but d’intimider une
population, de troubler gravement l’ordre public ou le fonctionnement des
institutions) soit dans sa Chambre Criminelle pour les actes sanctionnés de peine
criminelle (Exemple : atteinte à la vie, enlèvement, séquestration) soit en dehors de sa
Chambre Criminelle pour les actes sanctionnés de peines correctionnelles (Exemple :
l’apologie, le recel de terrorisme, la non-dénonciation d’actes terroristes).

La Chambre Africaine Extraordinaire d’Instruction était compétente pour enquêter,


instruire les affaires relevant de la compétence des autres chambres africaines
extraordinaires.

Les Tribunaux de Grande Instance sont exceptionnellement juges d’appel des


décisions rendues par les Tribunaux d’Instances en matière civile, commerciale et de
simple police ou contraventionnelle.

Ils sont en principe saisis par assignation en matière civile et commerciale, par le
Procureur de la république, son adjoint ou son substitut en matière contraventionnelle
et délictuelle, par une ordonnance (juge d’instruction) ou un arrêt (Chambre
d’Accusation de la Cour d’Appel), de renvoi en matière délictuelle, parfois, et
criminelle, toujours.

Ils rendent les jugements en premiers ressort dans les matières relevant de leurs
compétences de juge de première instance et en dernier ressort, confirmatif ou
infirmatif pour les appels exceptionnellement portés à leur connaissance.
Chapitre 2 : Les institutions judiciaires supérieures
Les institutions judiciaires supérieurs sont des juridictions d’appel, les juridictions de
premier et dernier ressort et les juridictions suprêmes.

Section 1 - Les juridictions d’Appel : les Cours d’appel

Certaines juridictions de première instance (Tribunaux de Grande Instance) ou


supérieures (Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite, Chambre Africaine
Extraordinaire, Cour Suprême) ont exceptionnellement, spécialement et
limitativement des compétences en matière d’appel.

Mais les principales juridictions d’appel sont les Cours d’appel dont il convient
d’examiner l’organisation et la compétence.

Paragraphe I – L’organisation de Cours d’appel

Le Sénégal compte actuellement 6 Cours d’appel (Dakar, Kaolak, St-Louis,


Ziguinchor, Thiès et Tambacounda).

Chaque Cour d’appel est dirigée par un premier Président, subdivisée en chambres
(Chambre Civile et Commerciale, Chambre Sociale, Chambre Correctionnelle,
Chambre Criminelle, Chambre Administrative, Chambre des mineurs, Chambre
d’accusation, Chambre Commercial d’appel en vad besoin) en cas de besoin, dirigées
par un Président et comportent un parquet général dirigé par un Procureur général.

La Cour d’appel de Dakar comporte une formation militaire et abritait la Chambre


Africaine Extraordinaire d’Accusation, la Chambre Africaine Extraordinaire d’Assise
et la Chambre Africaine Extraordinaire d’Assise d’Appel.

Paragraphe II – La compétence des Cours d’appel

Les Cours d’appel sont les juridictions d’appel ou juridictions du second degré de
droit commun, en principe.

Ainsi, par l’intermédiaire et selon la compétence des chambres, elle connaissent de


l’appel des jugements rendus en premier ressort par les Tribunaux de Grande Instance
et leurs chambres criminelles (en matière civile, commerciale, correctionnelle,
administrative, criminelle, de mineurs), les Tribunaux du Travail et les Tribunaux de
Commerce.

Elles connaissent également de l’appel des jugements rendus par les tribunaux
d’instance dans les affaires correctionnelles réservées à leur compétence, de l’action
civile engagée conjointement à l’action publique, des ordonnances et des décisions
des juges ou des commissions d’instruction.

Les Cours d’appel connaissent exceptionnellement des matières soumises à leur


compétence en premier ressort par les lois et règlements. Ainsi, elles connaissent des
litiges relatifs aux opérations électorales tels que le contentieux des inscriptions sur
les listes électorales et le contentieux des élections au conseils municipaux,
départementaux ou professionnels.

Elles veillent aussi au déroulement, à la régularité et procède à la proclamation des


résultats provisoires des élections nationales (présidentielles, législatives).

Enfin, elles reçoivent le serment des magistrats, des avocats, des notaires et des
huissiers de justice.

Les Cours d’appel, plus précisément leurs chambres, statuent avec des magistrats du
siège appelés des conseillers parmi lesquelles les présidents et les secrétaires
généraux. Elles rendent des décisions appelées des arrêts (décision de justice rendue
par une juridiction dénommée Cour) soit de non-lieu ou de renvoi (Chambre
d’Accusation) soit confirmatif ou infirmatif (les autres chambres).

Mais les Chambres Commerciales d’appel statuent aussi avec des conseillers
consulaires nommés et exerçant dans les mêmes conditions que les juges consulaires
(échevinage), contrairement aux chambres sociales qui sont exclusivement
composées de [ Conseil ], juges, magistrats sans conseillers assesseurs
(homogénéité).

Dans les matières relevant de la compétence de leurs Chambres, les présidents des
Chambres de Cour d’appel y compris celui de Chambre Commerciale d’appel
exercent les fonctions de Juge de référé et peuvent ordonner (ordonnance) des
mesures d’urgence non contestées, conservatoires ou nécessaires pour faire cesser des
troubles manifestement illicites.

[ Elle prend alors l’appellation de Juridiction Ordinaire à Formation Spéciale, tout


comme le Tribunal de Grande Instance de Dakar. Elle siège avec un Juge-magistrat
professionnel et deux juges assesseurs militaires choisis dans les mêmes conditions
que les assesseurs militaires du Tribunal de Grande Instance de Dakar.

Les Chambres Africaines Extraordinaires d’Accusation (juges exclusivement


sénégalais), d’assise et d’assise d’appel (juges africains sénégalais et non sénégalais)
étaient compétentes pour respectivement renvoyer, juger en première instance et en
appel les auteurs présumés de crimes internationaux (génocides, crimes contre
l’humanité, crimes de guerre et actes de torture ) comme au Tchad entre le 7 juin
1982 et le 1er décembre 1990 c’est-à-dire durant la présidence du feu Hissein Habre.

Les Cours d’appel et les juridictions de premières instances (Tribunaux d’Instance, du


Travail, de Commerce, de Grande Instance existent en plusieurs, en nombre. Elles
exercent par conséquent leurs compétences matériels dans un espace, une partie du
territoire appelée cmpétence territoriale.

La compétence territoriale également appelée compétence Rationae Loci ou Ressort


est donc l’aptitude d’une juridiction à connaître une affaire déterminée par des
critères géographiques en fonction du lieu, de l’espace (territoire d’au moins une
Commune, un Département ou une Région) quelque soit la matière du litige.

En Droit commun, elle est en principe déterminée par le domicile du défendeur. En


d’autres termes, la juridiction compétente est, sauf dispositions contraires, celle du
lieu de domicile du défendeur.

Mais la compétence territoriale est spécialement, exceptionnellement déterminée par


le lieu de situation du bien immobilier, le lieu d’exécution du contrat, le lieu du
domicile ou de la résidence de l’épouse ou le lieu choisi par les parties contractantes.

Le Tribunal de Travail territorialement compétent est en principe celui du lieu du


travail et exceptionnellement celui du lieu de résidence du travailleur, au choix de ce
dernier et pour les litiges nés de la résiliation du Contrat de travail.

La compétence matérielle des juridictions a en principe un caractère d’ordre public,


s’impose malgré une volonté contraire des parties (sauf le recours à l’arbitrage en
matière de litige portant sur des droits d’ordre privé autre que les litiges individuels
de travail) tandis que la compétence territoriale a un principe un caractère d’ordre
privé ou supplétif, peut être écarté par une volonté contraire des parties.

Mais la compétence territoriale des Tribunaux du Travail a exceptionnellement un


caractère d’ordre public, ne peut être écarté par une volonté contraire des parties.

Section 2 - Les juridictions de premier et dernier ressort


Les juridictions de premier et dernier ressort (à ne pas confondre avec les jugements
en premier et dernier ressort) sont celles qui rendent en principe des décisions
insusceptibles d’appel comme la Cour d’Assise Militaire, la Cour de Répression de
l’Enrichissement Illicite, la Cour des Comptes.
La Cour d’assise militaire est, selon le Code de la Justice Militaire, la Cour d’assise
de Dakar, exceptionnellement maintenue en matière militaire malgré son
remplacement avec la réforme de 2014 par la Chambre Criminelle du Tribunal de
Grande Instance de Dakar dans les autres affaires.

La Cour d’assise militaire connaît des crimes militaires et des crimes de droit
commun commis par des militaires et des paramilitaires.

Elle est saisie par un arrêt de renvoi de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel
de Dakar, siège avec une Cour proprement dite (un magistrat professionnel désigné
parmi ceux de la Cour d’appel du Tribunal de Grande Instance de Dakar et deux juges
assesseurs militaires) et un Jury (4 jurés titulaires et 2 jurés suppléants, tous miliaires
aussi).

Le ministère public y est représenté par le Procureur général de la Cour d’appel de


Dakar.

La Cour d’assise militaire rend des arrêts insusceptibles d’appel.

Les principales juridictions de premier et dernier ressort sont donc la Cour de


Répression de l’Enrichissement Illicite et la Cour des Comptes.

Paragraphe I - La Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite

La Cour de répression de l’enrichissement illicite est créée en 1980 a fonctionné


jusqu’en 1984 et fonctionne depuis 2012. Elle comprend la Cour proprement dite (le
Président, 4 juges titulaires et 4 juges suppléants tous appelés des assesseurs), une
commission d’instruction (un Président, 3 juges titulaires et 3 juges suppléants) et
un parquet spécial (un Procureur et substitut du procureur) dont les membres sont
nommés parmi les magistrats des cours et tribunaux.

La Cour de répression de l’enrichissement illicite a la compétence de réprimer le délit


d’enrichissement illicite et le délit de corruption ou de recel connexe.

L’enrichissement illicite est constitué lorsque sur une simple mise en demeure du
Procureur spécial, l’un des personnes désignées par la loi expressément et
limitativement (Ex : Les titulaires d’un mandat public électif, de fonction de
gouvernement, les agents publics notamment les magistrats, les agents civils et
militaires de l’État) ainsi que le complice se trouvent, à l’expiration du délais d’un
mois, dans l’impossibilité de justifier de l’origine licite des ressources qui leur
permettent d’être en possession d’un patrimoine ou de mener un train de vie sans
rapport avec ses revenus légaux.
La preuve de l’origine licite des ressources peut être apportée librement par tous les
moyens (écrits, témoignages, aveux, serment, présomption de fait) devant le
Procureur spécial, devant la commission d’instruction ou même devant la juridiction
de jugement (la Cour proprement dite). Mais la seule preuve d’une libéralité est
insuffisante.

En cas d’absence ou d’insuffisance de justifications de l’origine licite des ressources


ou de refus de la personne de se présenter à l’expiration de délais, le Procureur
spécial peut transmettre le dossier à l’autorité compétente (Parquet général de la Cour
Suprême, Parlement) pour exercer les poursuites contre la personne bénéficiant d’une
immunité ou d’un privilège de juridiction (magistrats, membres du gouvernement,
parlementaires) ou saisir la commission d’instruction contre la personne n’ayant pas
d’immunité.

Dans ce dernier cas, la commission d’instruction peut rendre un arrêt de renvoi


opérant, entraînant la saisine de la Cour proprement dite ou arrêt de non-lieu mettant
en principe fin aux poursuites contre la personne éventuellement relaxé.

L’arrêt de non-lieu est susceptible d’appel du Procureur spécial devant la Cour


proprement dite contrairement à l’arrêt de renvoi qui lui est insusceptible d’appel
de la personne poursuivie.

La Cour juge et peut éventuellement prononcer une peine d’emprisonnement de cinq


(5) à dix (10) ans et une amende égale au moins, au minimum au montant et au plus,
au maximum du double du montant.

Les arrêts de la Cour de répression de l’enrichissement illicite sont susceptibles


seulement d’un pourvoi en cassation à l’initiative de la personne condamnée ou du
Procureur spécial.

Paragraphe II – La Cour des comptes

La Cour des comptes est créé par la révision constitutionnelle de 1999 dirigée par un
1er Président (magistrat du siège nommé pour 5 ans renouvelables une fois),
subdivisé en 5 Chambres dirigées chacune par un président (Chambre des affaires
budgétaires et financières, Chambre des affaires administratives, Chambre des
collectivités territoriales, Chambre des entreprises publiques, Chambre de discipline
financière), comporte un Parquet général dirigé par un procureur général et peut être
subdivisé en sections.

La Cour des comptes est la juridiction financière de droit commun. Elle juge,
exerce par l’intermédiaire de ses Chambres, un contrôle juridictionnel sur les comptes
de gestion (opérations de recette, de dépenses, de détentions ou de maniement de
fonds) des comptables publics principaux de droit (habilitée par une autorité
compétente) ou de fait (non habilité par un personne compétente) des organismes
publics (État, établissements publics, collectivités territoriales) ou parapublics
(sociétés nationales, sociétés à participation publique) soumis à son contrôle.

La Cour des comptes, ou plus précisément chacune de ses Chambres, statue avec des
magistrats du siège appelés Conseillers ou Auditeurs et la participation ou l’assistance
des non magistrats, des fonctionnaires (assistants de justice, reporteurs experts). Elle
peut rendre un arrêt soit de décharge ou de quitus en l’absence d’irrégularités, soit
de débet en cas d’irrégularité.

La mise en débet consiste à faire payer de ses propres deniers (ressources) le


comptable public négligeant de recouvrir une recette ou payant une dépense
irrégulière.

La Cour des comptes réprime également les fautes de gestion c’est-à-dire des
manquements ou infractions à la réglementation financières des dépenses (Ex :
l’engagement des dépenses au profit des intérêts privés) ou des recettes (Ex : le
manque de diligence dans contrôle des actes de recette des subordonnés).

Elle peut prononcer contre les comptables publics commerciaux fautifs une amande
égale au minimum à 100 000 milles FCFA et au maximum au double du montant du
traitement du salaire brut annuel loué à la date de commission de la faute sans
préjudice de sanctions disciplinaires ou pénales.

Mais l’amende est prononcée par la Chambre de discipline financière saisie par le
Procureur général à la demande du Président de la république, du Président de
l’Assemblée nationale, du Premier ministre, du Ministre des finances ou du 1er
Président de la Cour des comptes.

Les arrêts de la Cour des comptes ne sont pas susceptibles d’appel mais ils peuvent
faire l’objet de recours en révision devant les Chambres réunies en cas d’erreur
ou d’omission soit d’office, soit à la demande du Ministre des finances, du
représentant des collectivités territoriales et établissements publics concernés, du
comptable public principal ou de ses héritiers en cas de découverte de pièces
justificatives.

Ils peuvent également faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

Section 3 : Les Juridictions Suprêmes


Les juridictions suprêmes sont celles qui occupent le sommet de la hiérarchie
suprême. Elles sont soit de forme soit de fond.
Paragraphe I - Les juridictions suprêmes de fond

Les juridictions suprêmes de fond également appelées juridictions suprêmes de fait


sont celles qui appliquent le droit aux faits et se composent de la Haute Cour de
Justice et Conseil Constitutionnel.

1 – La Haute Cour de Justice

La Haute Cour de Justice est instituée par la Constitution et organisée par la loi
organique du 22 février 2002 modifiée.

Elle comprend un Président de droit (1er Président de Cour Suprême), 8 membres


ou juges titulaires et 8 suppléants élus par l’Assemblée nationale, en son sein une
Commission d’Instruction composée d’un Président de droit (1er Président de la
Cour d’Appel de Dakar), de 4 membres titulaires et de 4 membres suppléants tous
désignés par la Cour d’Appel de Dakar parmi les magistrats du siège et un Parquet
représenté par le Procureur général de la Cour Suprême.

La Haute Cour de Justice est exclusivement compétente pour juger les présidents
de la république en cas de crimes de haute trahison (violations graves des devoirs et
obligations institutionnelles), les ministres, les autres membres du gouvernement et
leurs complices (en cas de complot contre la sûreté de l’État) pour des actes commis
dans l’exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont
été commis.

La mise en accusation de ces personnes est faite par l’Assemblée Nationale devant la
Commission d’Instruction qui peut décerner un mandat contre l’accusé, rechercher la
vérité et transmettre le dossier à la Haute Cour de Justice.

La Haute Cour de Justice statue, rend à la majorité absolue de ses membres des
arrêts qui, avec les actes de la Commission d’Instruction sont insusceptibles
d’appel et de pourvoi en cassation mais peuvent néanmoins faire l’objet de recours
en révision.

II – Le Conseil Constitutionnel

Le Conseil Constitutionnel est crée par la loi du 30 mai 1992 et organisé par la loi
organique de la même date plusieurs fois modifiée.

Il comprend sept (7) Juges, membres ou Sages, choisis par le Président de la


République (5 juges dont le Président et le Vice-Président), le Président de
l’Assemblée Nationale (les 2 autres) parmi notamment les Hauts magistrats
(notamment le Président), les professeurs titulaires de Droit, les inspecteurs généraux
d’État... et nommés pour un mandat de six (6) ans non renouvelable.

Le Conseil Constitutionnel est investi de la mission de rendre la justice


constitutionnelle c’est-à-dire de prévenir ou de régler les litiges relatifs à
l’application des dispositions constitutionnelles. Ainsi, il veille au respect des
dispositions constitutionnelles relatives aux domaines respectifs de la loi et du
règlement.

Il se prononce sur la recevabilité des propositions de loi et le caractère réglementaire


des dispositions de forme législative. Il connaît aussi des conflits de compétence entre
le Pouvoir exécutif et le Pouvoir législatif à travers le contrôle de constitutionnalité
des lois et engagements internationaux (accords, traités internationaux).

Il peut exercer par la voie de l’action (recours) en inconstitutionnalité à l’initiative


du Président de la République ou du dixième des députés avant la promulgation en
vue de l’annulation de la loi ou de l’exception d’inconstitutionnalité (soulevée
devant la Cour d’Appel ou la Cour Suprême après l’entrée en vigueur en vue de
inapplication de la loi ou litiges).

Le Conseil Constitutionnel est également juge de la régularité et du contentieux de


élections nationales ainsi que des consultations référendaires. Il reçoit les
candidatures, proclame les résultats provisoires, statue sur les contestations, proclame
les résultats définitifs des candidats à la candidature, arrête la liste des candidats,
reçoit les résultats provisoires proclamés par les Cours d’Appel, statue sur les
contestations et proclame les résultats définitifs des élections nationales (Président de
la République, Députés, Hauts Conseillers des collectivités territoriales) et des
consultations référendaires.

Il reçoit le serment du Président de République et constate sa démission, son


empêchement ou son décès. Il tient des séances en principe non-publiques, délibère
en présence et à la majorité de tous ses membres sauf empêchement temporaire de
deux (2) d’entre eux ou plus et rend des décisions insusceptibles de voies de
recours (pas d’appel, pas de pourvoi en cassation) obligatoires au pouvoir public et à
toutes les autorités administratives et juridictionnelles.

Le Conseil Constitutionnel a enfin une fonction consultative. Il peut être saisi par le
Président de la République pour rendre des avis sur notamment les projets de lois
qu’il souhaiterait soumettre au référendum.
Paragraphe II – Les juridictions suprêmes de forme : la Cour Suprême

Les juridictions suprêmes de forme, également appelées juridictions de droit, sont


actuellement constituées principalement de la Cour Suprême, créée en 2008 en
remplacement de la Cour de cassation et du Conseil d’État.

La Cour Suprême et dirigée par un 1er Président, comporte quatre Chambres


(Chambre Criminelle, Chambre Civile et Commerciale, Chambre Sociale, Chambre
Administrative) chacune dirigée par un président, un Parquet général dirigé par un
procureur général assisté d’avocats généraux et deux Commissions
Juridictionnelles.

Elle est en principe compétente pour juger, connaître des pourvois en cassation
dirigés contre les arrêts, les jugements ou les décisions rendues en dernier ressort par
toutes les juridictions sauf celles de la Haute Cour de Justice, du Conseil
Constitutionnel (insusceptibles de pourvoi), ou appliquant le droit communautaire de
l’OHADA (compétence exclusive de la CCJA).

Mais elle ne connaît pas en principe du fond des affaires, n’examine pas les
circonstances de faits ayant données lieu aux litiges. Sa fonction consiste uniquement
à vérifier si la règle de droit a été correctement interprétée et appliquée par la
juridiction dont la décision est contestée.

Ainsi, elle peut rendre soit un arrêt de rejet (par rapport au pourvoi), rendant
irrévocable la décision attaquée, soit un arrêt de cassation (total ou partiel avec
renvoi en principe et exceptionnellement sans renvoi) lorsque la décision n’est pas
conforme à la règle de droit et est par conséquent annulée.

[Quelles sont les catégories d’arrêts ? ]

La Cour Suprême est exceptionnellement juge de fond ou de faits dans les matières
spécialement réservées à sa compétence par les dispositions législatives. Ainsi, la
Chambre Administrative est juge en premier et dernier ressort de l’excès de pouvoir
des autorités exécutives et de la légalité des actes des collectivités territoriales. Elle
peut dans ce cas rejeter le recours pour excès de pouvoir (si le règlement est légal) ou
annuler le règlement illégal. (Contrôle de légalité)

Elle est également compétente en dernier ressort, en appel dans le contentieux de


l’élection des membres des assemblées autres que l’Assemblée Nationale
(contentieux des inscriptions sur les listes électorales et des élections au Conseil des
collectivités territoriales ou professionnelles).

Elle se prononce aussi sur l’irrecevabilité, la déchéance, le non-lieu de l’exception


d’inconstitutionnalité ou le désistement à celle-ci.
Les Commissions Juridictionnelles spécialisées connaissent notamment des
demandes d’indemnités présentées par les personnes bénéficiant d’une décision
définitive de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement après avoir fait l’objet d’une
détention provisoire ainsi que des recours formés par les officiers de polices
judiciaires ayant fait l’objet d’une décision de suspension ou de retrait d’habilitation.

La Cour Suprême, chacune de ses Chambres délibèrent en principe en présence de


cinq (5) magistrats ou Magistrat-juges appelés Conseillers (notamment le 1 er
Président, les présidents des Chambres). Elle bénéficie aussi de la collaboration de
non-magistrats (conseillers en service extraordinaire, assesseurs, commissaires du
gouvernement, assistants de justice).

Les décisions ou arrêts de la Cour Suprême sont insusceptibles d’appel et de pourvoi


en cassation mais peuvent faire l’objet de requête en rectification d’erreurs
purement matérielles et de requête en rabat d’arrêt.

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