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05/12/2008

Diagrammes d’équilibre
Alliages binaires
par Jean HERTZ
Professeur émérite à l’Université Henri-Poincaré - Nancy I

1. Présentation générale............................................................................. M 70 - 4
2. Principes thermodynamiques des équilibres entre phases ......... — 5
3. Règle des phases de Gibbs et règle des bras de levier ................. — 10
4. Phases présentes dans les alliages métalliques ............................. — 12
5. Simulation des diagrammes binaires par la solution régulière .. — 13
6. Divers types de diagrammes binaires en relation avec la nature
des interactions v ................................................................................... — 15
7. Solidification et coefficient de ségrégation..................................... — 25
8. Principales causes d’écart à l’équilibre............................................. — 26
9. Morphologie structurale des alliages................................................. — 27
10. Généralités sur les diagrammes présentés....................................... — 28
11. Principales causes d’incertitude des diagrammes d’équilibre ... — 28
12. Préparation des alliages......................................................................... — 29
13. Méthodes de détermination des diagrammes ................................. — 29
14. Renseignements généraux sur la présentation
des diagrammes ....................................................................................... — 30
Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. M 70

n alliage peut exister sous différents états : solide cristallisé, en agrégat de


U microcristaux appelés grains, souvent de variétés cristallines distinctes, ou
liquide ou gazeux.
Ces différents états représentent les diverses phases contenues dans l’alliage
et qui peuvent changer en fonction des conditions imposées à ce « système
thermodynamique », principalement la composition chimique et la tempéra-
ture, mais aussi la pression. Pour des conditions fixées, il faut un certain
temps de maintien à haute température pour stabiliser le système alliage dans
un état apparemment définitif, qui s’identifie à l’équilibre thermodynamique
stable du système. Mais il existe aussi des faux équilibres, appelés méta-
stables. Pour réaliser l’équilibre, il est nécessaire que tous les atomes des
constituants puissent se déplacer à l’intérieur de toutes les phases : c’est ce
que l’on appelle la diffusion chimique. Dans les liquides et les gaz, la diffusion
est généralement active et rapide mais, dans les phases cristallisées, il faut
dépasser une certaine « température de diffusion » pour obtenir le mouvement
interne des atomes, qui s’effectue par permutation avec les sites vacants sur le
réseau cristallin. Si l’on réussit par un subterfuge (trempe ultrarapide) à blo-
quer la diffusion des atomes dans un liquide et à le refroidir sans cristallisation
jusqu’à la température ambiante, on dit qu’on a réalisé un verre ou un solide
amorphe.

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C’est l’expérience qui permet d’observer les phases coexistantes dans un


alliage, en fonction de la composition chimique, de la température de réalisa-
tion de l’équilibre, voire de la pression appliquée. C’est également l’expérience
qui permet de déterminer les lignes des transitions de phases sur lesquelles
apparaissent ou disparaissent certaines d’entre elles. On constate en pratique
que la variable pression a très peu d’impact sur l’équilibre des phases conden-
sées liquide ou solide, que cet état soit monophasé ou polyphasé. Il n’en est
pas de même pour les métaux volatils engendrant une phase gazeuse. Pour
observer l’influence de la variable pression sur les phases condensées, il faut
exercer des pressions très élevées, de l’ordre de plusieurs kilobars. C’est pour-
quoi la description des équilibres de phases se fait souvent en supposant la
pression fixée et en utilisant comme variables les teneurs des constituants et
la température. Par exemple pour un alliage binaire, on porte en abscisse la
concentration moyenne d’un des deux constituants et en ordonnée la tempé-
rature. Une telle représentation est appelée diagramme binaire d’équilibre de
phases. Avec les métaux volatils, on utilise aussi une autre convention qui
consiste à maintenir la pression de vapeur naturelle dans un volume constant ;
dans ce cas le diagramme de phases n’est pas isobare.
L’existence même des diagrammes d’équilibre découle des lois générales de
la thermodynamique chimique. Depuis la mise en œuvre des moyens de calcul
automatique, la thermodynamique chimique permet la modélisation numé-
rique des diagrammes de phases à partir de ses lois générales et ainsi de pré-
voir ou de confirmer quelles phases coexistent à l’état d’équilibre. On peut
donc également rendre compte par le calcul des disparitions ou apparitions de
phases dans un système, en fonction des variations de composition, de tem-
pérature, voire de pression. Cependant la thermodynamique est encore incapa-
ble aujourd’hui de prévoir a priori les phases susceptibles d’apparaître au sein
du système si elles n’ont pas été préalablement identifiées expérimentalement,
modélisées numériquement, puis introduites dans le calcul. De la même façon,
la thermodynamique ne peut pas prévoir a priori les équilibres métastables qui
sont de véritables équilibres thermodynamiques stables qui s’établissent en
l’absence d’une phase cristallisée plus stable mais qui ne germe pas dans les
conditions expérimentales. Un tel équilibre peut cependant rester durable dans
le temps. Lorsque la phase qui ne germe pas est identifiée, le calcul thermody-
namique permet aussi de calculer ces équilibres métastables en « suspendant »
cette phase du calcul.
Les diagrammes d’équilibre de phases représentent donc, dans des condi-
tions prévisibles par la thermodynamique, les domaines d’existence à l’équi-
libre des diverses phases qui se forment dans le système en fonction de sa
composition chimique et des paramètres externes qui lui sont imposés. Ils per-
mettent une visualisation rapide de l’état du système. Puisque les propriétés
des alliages dépendent largement des phases qui le constituent, on comprend
l’intérêt d’une telle représentation qui permet de matérialiser les conditions
d’obtention des phases souhaitées ou, à l’inverse, d’éviter la formation des
phases indésirables. Les diagrammes d’équilibre constituent donc le document
de base des métallurgistes, outil indispensable que l’on consulte en priorité.
La thermodynamique de l’équilibre ne prend pas en compte la cinétique
nécessaire pour atteindre un équilibre, ni les mécanismes d’évolution vers cet
équilibre. En pratique, l’état d’équilibre est rarement complètement atteint ;
ainsi après la solidification d’un alliage, les phases solides qui le constituent ne
présentent pas une composition homogène ; c’est ce que l’on appelle la ségré-
gation mineure primaire, qui ne peut s’effacer que par un long recuit d’homo-
généisation. L’état de non-équilibre est beaucoup plus prononcé encore pour
les transformations qui se produisent entre phases solides et qui s’effectuent à
plus basse température que la solidification : les vitesses de diffusion des ato-
mes sont alors considérablement ralenties. Pour certaines applications particu-
lières, on sait d’ailleurs mettre à profit ce long laps de temps nécessaire à
l’installation de l’équilibre stable pour, selon les cas réels, établir certains équi-
libres métastables durables ou provoquer des transformations brutales sans
diffusion qui donnent à l’alliage des propriétés intéressantes et recherchées.

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Ces transformations sans diffusion se produisent lorsque l’écart à l’équilibre


est très important après un refroidissement rapide et que les atomes sont figés
sur un réseau cristallin non compact. Par un mouvement collectif très faible des
atomes, appelé cisaillement, le réseau cristallin peut alors augmenter brutale-
ment sa compacité : on désigne ces transformations de phases par le terme
générique de transformations martensitiques. Ces transformations sont parfois
renversables lors d’un réchauffement, c’est ainsi que les alliages à mémoire de
forme sont capables par leur transition martensitique renversable de modifier
leur forme géométrique dans les deux sens, selon le sens de variation de la
température et sont utilisables pour actionner mécaniquement divers systèmes
de régulation thermique.
Chaque phase solide possède une structure cristallographique bien définie
(un groupe d’espace) et toute transition de phase solide s’accompagne d’un
changement de groupe ou de sous-groupe. Pour les phases solides, c’est donc
la radiocristallographie par diffraction des rayons X ou des électrons, voire des
neutrons, qui permettra d’identifier avec certitude l’ensemble des phases
coexistantes dans un alliage.
Les phases non cristallisées, qui sont désignées sous le terme générique de
phases amorphes, ne sont pas distinguables entre elles par des critères struc-
turaux. Ainsi, la phase liquide et la phase gazeuse d’une même substance
représentent-elles deux états de densités distinctes d’une seule et même phase
au sens thermodynamique. Elles peuvent être séparées par un domaine d’ins-
tabilité thermodynamique, c’est ce qui se produit aux basses pressions à l’ébul-
lition d’un liquide. Cependant aux températures élevées, c’est-à-dire au-dessus
d’une certaine température critique, la phase amorphe ne présente plus d’ins-
tabilité thermodynamique et l’on passe de façon continue d’un fluide de forte
densité à un fluide de type gazeux. Vers les basses températures, une phase
amorphe peut atteindre un état gelé vis-à-vis de la diffusion des atomes, lors-
que les mouvements de migration sont figés. C’est ce que l’on appelle un verre
ou solide amorphe. La zone de vitrification est appelée improprement tempé-
rature de transition vitreuse (glass-transition) Tg . Dans les réseaux liquides à
forte liaison interatomique et grande polymérisation, tels les silicates ou les
macromolécules organiques, il est facile d’obtenir un verre par simple refroi-
dissement du liquide. Pour quelques alliages métalliques à forte liaison cova-
lentielle, tels les germanates, il est également possible d’obtenir des verres
métalliques par simple refroidissement du liquide. Mais dans le cas général des
métaux liquides, il faut atteindre des vitesses de trempe extrêmes pour obtenir
des phases métalliques amorphes. Un verre n’est jamais dans son état thermo-
dynamique stable et la température Tg est une caractéristique cinétique du
matériau.
Les diagrammes de phases ne donnent aucune indication sur la cinétique des
transformations. De la même façon, ils ne permettent pas de représenter les
transitions vitreuses ni les transformations sans diffusion (transitions marten-
sitiques), ni les transformations avec diffusion partielles (comprenant un
cisaillement martensitique dans un enchaînement de transformations), appe-
lées transformations bainitiques.
Ainsi les diagrammes de phases ne renseignent que sur la présence des pha-
ses à l’équilibre thermodynamique, en fonction de la composition de l’alliage
et des conditions extérieures qui lui sont imposées, sans information sur la
morphologie de ces phases : dimension et forme des microcristaux appelés
« grains » ou répartition spatiale des mélanges polyphasés. De même, les dia-
grammes de phases ne donnent aucune indication sur les défauts de structure
dans les solides tels que les joints de grains, les dislocations ou les défauts
ponctuels. Cependant par habitude et par un raisonnement analogique qui se
réfère à des cas déjà étudiés, le praticien métallurgiste peut déduire d’un dia-
gramme de phases des probabilités d’apparition de telle ou telle morphologie
du métal à l’échelle microscopique. C’est pourquoi l’usage des diagrammes de
phases, dans la pratique industrielle, dépasse souvent la stricte logique d’une
cartographie des phases en présence.

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1. Présentation générale tenant commercialisé et son utilisation est accessible à l’ingénieur


métallurgiste au moins pour l’exploitation des banques existantes.
Le présent article constitue une introduction à la diagrammatique
Les diagrammes d’équilibre qui sont représentés à la suite de cet moderne des alliages.
article, [M 70-101] à [M 70-198], constituent une collection originale Si l’ingénieur cherche à s’informer rapidement et concrètement
rassemblée par Philippe Poupeau en 1987. Elle comprend environ dans sa discipline cela ne signifie pas qu’il souhaite ignorer l’ori-
cent diagrammes de phases qu’il avait lui-même contribué à gine historique de la science qu’il met en pratique. C’est pourquoi
compléter. Elle couvre les domaines d’application les plus repré- il nous semble utile de rappeler ici brièvement quelques noms
sentatifs de la métallurgie, depuis les métaux précieux jusqu’aux illustres parmi les savants qui posèrent les bases de la science dia-
aciers et aux fontes en passant par les alliages légers d’aluminium, grammatique. L’américain Josiah Willard Gibbs en est le pionnier
de magnésium et de titane, les alliages de cuivre et de zinc ainsi qui inventa toute la thermodynamique chimique qu’il présenta
que les alliages fusibles à base d’étain ou de plomb, ou à l’inverse dans un mémoire de 300 pages publié en épisodes entre 1875 et
les alliages réfractaires et superalliages résistants au fluage. 1878, On the Equilibrium of Heterogeneous Substances. C’est lui
Cette collection reste d’un intérêt certain pour l’ingénieur qui qui a créé le mot phase qui désigne « un corps homogène, pouvant
veut s’informer de façon didactique et synthétique de la science contenir un nombre quelconque de substances composantes, qui
métallurgique sans se consacrer à l’étude approfondie d’atlas plus se réfère uniquement à la composition chimique et à l’état thermo-
complets, ou de monographies spécialisées dans un domaine par- dynamique de ce corps, sans considération ni de sa quantité ni de
ticulier des matériaux. sa forme. Ainsi dans un même système plusieurs corps de même
composition et de même état thermodynamique sont considérés
Mais depuis lors, la communauté internationale a fait un effort comme une phase unique. À l’inverse, des phases simultanément
exceptionnel pour analyser à nouveau une grande partie des quel- présentes à l’équilibre dans le système (avec des interfaces pla-
que dix mille diagrammes de phases binaires, en distribuant les nes), sans que des résistances passives d’origine cinétique s’oppo-
tâches par groupes de travail spécialisés, selon leur vocation ou sent aux échanges de matière dans le système, sont appelées
leur pays. Les atlas de diagrammes binaires ont été revisités (ce phases coexistantes ». Gibbs n’a donné aucune indication sur l’éty-
qui ne signifie pas toujours améliorés) et des monographies d’allia- mologie du mot phase ni sur la raison de son choix, mais on sait
ges de diverses familles ont été rassemblées et éditées principale- que ce mot vient du grec ϕασιζ qui signifie apparition. La pensée
ment par l’American Society of Metals (ASM) qui a servi de plaque originale de Gibbs fut d’abord diffusée en Allemagne par Wilhelm
tournante à ce travail collectif. La bibliographie mise à jour du pré- Ostwald, qui traduisit en langue allemande une partie de son
sent article fait le point à sa date de rédaction sur ces éditions mémoire en 1892, puis en France par Henry Le Chatelier qui fit de
internationales. même en français en 1899. Mais c’est Pierre Duhem qui a le plus
Cette profusion de publications ne donne que plus d’intérêt à la contribué a répandre en France la thermochimie de Gibbs en
collection de Philippe Poupeau qui permet de se familiariser rapi- publiant en 1886 un traité intitulé Le potentiel thermodynamique,
dement avec la diagrammatique métallurgique. ouvrage qui aurait dû constituer sa propre thèse sans l’intervention
Cependant depuis une quinzaine d’années, les méthodes d’opti- malencontreuse d’un ministre, Berthelot, dont les travaux scientifi-
misation thermodynamique et le calcul des diagrammes de phases ques étaient remis en cause dans la préface de Duhem. C’est Pierre
multiconstitués se sont largement développés sous l’impulsion de Duhem qui s’est particulièrement intéressé aux équilibres métasta-
plusieurs laboratoires et principalement l’équipe du Professeur bles qu’il appelait alors les « faux équilibres réels ».
Mats Hillert de l’Institut Royal de Technologie de Stockholm qui a
mis au point le logiciel de calcul et d’optimisation le plus utilisé
dans le monde entier : Thermo-Calc. Des groupes se sont consti- Exemple : dès 1910, Duhem invoquait l’existence des faux équili-
tués pour une coopération mondiale dans ce domaine comme bres dans la métallurgie des aciers, qui avait posé aux plus grands
SGTE (Scientific Group Thermodata Europ) et son réseau Thermo- chercheurs métallurgistes du début du siècle un casse-tête inextri-
data, qui établissent des banques de données thermodynamiques cable : la coexistence dans le même diagramme du graphite et d’un
accessibles à tous les utilisateurs potentiels. Cet article devait pren- carbure de fer appelé cémentite, de formule Fe3 C. À la suite de nom-
dre en considération l’évolution rapide dans ce domaine au cours breuses études, Bakhuys Roozboom avait proposé en 1900 un dia-
de la dernière décennie, sans perdre la lisibilité de l’approche ori- gramme fer-carbone dans lequel la cémentite prenait naissance à
ginale. Pour évoquer les méthodes de calcul thermodynamique 1 000 oC par une réaction péritectoïde entre le fer de haute tempéra-
des diagrammes, il était nécessaire de pousser un peu plus avant ture et le graphite. Dès 1901, Henry Le Chatelier émettait des réser-
les connaissances de thermochimie des matériaux. Des articles, ves sur cette interprétation. Puis Georges Charpy proposa de décrire
beaucoup plus approfondis en thermodynamique existent déjà deux diagrammes fer-carbone distincts : l’un contenant le graphite,
dans les Techniques de l’Ingénieur, volume des Sciences fonda- pour représenter les équilibres observés lors des refroidissements
mentales AF4, rubrique Thermodynamique ; citons plus particuliè- lents, et l’autre la cémentite pour les refroidissements rapides (voir
rement les articles ayant un rapport direct avec ce sujet où le les diagrammes [M 70-134] et [M 70-135]). Mais, c’est Pierre Duhem
lecteur pourra puiser une information plus complète et détaillée : qui a définitivement compris que la cémentite est un carbure métas-
table, toujours présent dans les aciers mais qui peut se décomposer
— S. Fabréga. – Thermodynamique macroscopique, A 223 (1978),
en graphite stable et solution solide riche en fer (appelée austénite),
1-19 ;
comme il est aujourd’hui couramment pratiqué dans le traitement de
— I. Ansara. – Thermodynamique chimique. Application aux graphitisation des fontes.
équilibres complexes A 226, (1978), 1-17 et A 226, 1 (1978), 1-10 ;
Dans le cas des aciers, la persistance de la cémentite est pratique-
— L. Schuffenecker, J.N. Jaubert et R. Solimando. – Formalisme
ment perpétuelle même à haute température, mais il existe des cas où
et principes de la Thermodynamique AF 4 040 (1999), 1-24 ;
l’équilibre métastable est seulement lié à la lenteur d’une transforma-
— C. Colinet. – Thermodynamique statistique : présentation
tion en phases solides. C’est le cas bien connu des bronzes (Cu-Sn),
générale AF 4 060 (1998), 1-14 ;
présenté sur les diagrammes [M 70-155] et [M 70-156]. Le premier dia-
— C. Colinet. – Thermodynamique statistique : thermodynami- gramme est le diagramme à l’équilibre stable, le second montre les
que des solutions AF 4 061 (1998), 1-24. phases réellement observables après un recuit de quelques heures ou
Le lecteur trouvera ici des connaissances de base suffisantes juste après la coulée en coquille ou en sable. La phase δ, qui est la
pour comprendre le principe du calcul des diagrammes d’équilibre phase sonore des cloches et qui devrait disparaître en dessous de
de phases. Nous souhaitons l’intéresser au logiciel suédois 350 oC par une réaction eutectoïde, reste présente en pratique à basse
« Thermo-Calc » en réalisant des simulations qui illustrent les température, pour le plus grand bonheur des fondeurs et des carillon-
divers types de diagrammes binaires. Le logiciel suédois est main- neurs (§ 8.2).

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2. Principes L’enthalpie de toute phase est décomposable en chaleur sensible


qui représente l’énergie cinétique globale d’agitation des atomes et
thermodynamiques chaleur latente qui est la somme de toutes les énergies de liaison
interatomiques ; ainsi dans une transition de phases, la variation
des équilibres entre phases de l’énergie globale de liaison des atomes représente la chaleur
latente de la transition.
De la même façon le désordre global d’une phase est la somme
de plusieurs contributions :
2.1 Définition thermodynamique
— l’entropie d’agitation thermique (distribution des phonons) ;
de l’équilibre entre phases — l’entropie de configuration (distribution des atomes sur les
sites) ;
On définit en thermodynamique un système fermé comme une — l’entropie électronique (distribution des électrons sur les états
certaine quantité de matière présentant un nombre constant de quantiques) ;
moles de chaque corps pur constituant. La définition des consti- — l’entropie magnétique (distribution des spins demi-impairs).
tuants chimiques est délicate pour certains systèmes qui sont le Chacun de ces termes s’exprime par une formule de type
siège de réactions chimiques, susceptibles de modifier la liste les Boltzmann :
corps purs réellement présents au sein du système. Mais dans le S = k ln (Ωeq) (4)
cas des alliages, la définition des constituants est sans ambiguïté,
chaque élément chimique du système représente un constituant. avec Ωeq le nombre de distributions microsco-
En effet dans beaucoup de phases métalliques, l’entité structurale piques à l’équilibre de la population
est l’atome, même si dans certains cas il existe des entités plus concernée (phonons, atomes, élec-
complexes avec des liaisons internes fortes. trons, spins), qui représentent le même
Le système fermé est bordé par un contour du système dont il état macroscopique,
est nécessaire de définir la perméabilité, vis-a-vis des échanges k = 1,38 10–23 J/K appelé la constante de Boltzmann, qui,
avec l’extérieur. Dans le cas général le système échange avec multipliée par le nombre d’Avogadro,
l’extérieur de la chaleur et du volume (il peut se dilater ou se donne la constante molaire des gaz
contracter). Nous verrons plus loin que c’est à travers ces deux parfaits, kNAv = R = 8,315 J/(mol · K).
types d’échange que se réalise l’égalité de température T et de
pression P dans l’ensemble du système, lorsque le milieu extérieur Pour un système totalement isolé, c’est-à-dire pour lequel toute
est lui-même isotherme et isobare. Mais, on peut concevoir aussi forme d’échange d’énergie avec l’extérieur a été supprimée, l’éner-
d’autres conditions de contour : système étanche à la chaleur ou gie, (du latin energia = force en action), contenue à l’intérieur du
adiabatique, système étanche au volume ou isochore. Un système système se conserve globalement. C’est là l’expression la plus
fermé, isotherme et isobare est à l’équilibre thermodynamique générale du premier principe de la thermodynamique, formulé
lorsque sa fonction enthalpie libre de Gibbs G (plus simplement pour la première fois par Léonard Sadi Carnot en 1824 mais attri-
fonction de Gibbs) est minimale. Cette fonction de Gibbs est la bué 25 ans plus tard à Julius Robert von Mayer, le médecin, ou à
somme de 2 contributions : James Prescott Joule, le physicien, cette grandeur indestructible
est appelée l’énergie interne du système. Le système isolé ne peut
G = H – TS (1) donc évoluer qu’à énergie constante. Dans ces conditions particu-
lières, Rudolph Clausius, s’inspirant des idées initiales de Carnot, a
avec H (en J) l’enthalpie qui représente la chaleur posé comme second principe de la thermodynamique que l’état
emmagasinée dans le système sous pression d’équilibre thermodynamique est atteint lorsque l’entropie du sys-
constante (du grec thalpein = chauffer), tème est maximale. Ludwig Boltzmann a montré ultérieurement
T (en K) la température thermodynamique, telle que : que ce maximum d’entropie représentait le nombre maximal de
distributions microscopiques possibles, pour un même état
T (K) = θ (oC) + 273,15 (2) macroscopique, ce qui équivaut à placer le système dans son état
statistiquement le plus probable.
θ oC étant l’échelle Celsius,
Un extremum se traduit toujours par une différentielle nulle :
S (en J/K) l’entropie du système qui représente la pour un système fermé-isotherme-isobare, c’est la fonction de
mesure quantitative du désordre global du Gibbs G qui présente cet extremum et l’égalité dG = 0 est appelée
système (du grec entropia = retour en arrière). condition d’équilibre. Mais un extremum peut être un maximum
La chaleur reçue par le système lors d’une évolution réversible ou un minimum. Le premier cas représente un équilibre instable
isobare est reliée tout à la fois à la variation de l’enthalpie et à celle qui ne peut se réaliser, le second un équilibre stable vers lequel le
de l’entropie, c’est la relation de Clausius : système tend à s’établir. Les conditions de stabilité concernent
donc les dérivées secondes de la fonction G et traduisent le fait
dQ = d H = T dS (3) que la forme quadratique d2G est positive lors des échanges inter-
nes locaux de chaleur, de volume et de matière. À ces échanges
Cependant l’évolution interne du système obéit à deux impéra-
internes locaux correspondent respectivement les fluctuations
tifs contradictoires la tendance énergétique voudrait que l’enthal-
locales de température, de densité et de potentiel chimique. Toutes
pie s’écoule au maximum vers l’extérieur (dH < 0), tandis que la
ces fluctuations doivent rester stables et réversibles. L’équilibre
tendance entropique voudrait que le désordre s’accroisse au maxi-
thermodynamique représente donc une moyenne statistique
mum (dS > 0). Selon la relation (3), les variations de H et S ne sont
d’états microscopiques en fluctuation et qui reste stable lorsqu’elle
pas indépendantes et c’est au minimum de la fonction G que la
est prise sur un intervalle fini de temps. Nous n’entrerons pas dans
balance s’équilibre. Toutefois en considérant l’équation (1), on
cet article dans le détail de la traduction mathématique des condi-
déduit que vers les basses températures l’influence entropique
tions de stabilité d’un système. Mais il est bon d’en connaître le
sera faible et que c’est la tendance enthalpique qui régira l’équili-
sens physique. Pour un système binaire les conditions de stabilité
bre, tandis qu’aux très hautes températures c’est la tendance au
(§ 2.3.1) s’expriment par trois inégalités qui doivent être simultané-
désordre qui l’emportera.
ment satisfaites :
Exemple : à l’équilibre à basse température, un alliage est tou-
jours cristallisé, système ordonné, tandis qu’à haute température il ∂T ∂P ∂µ
------- > 0 ------- < 0 --------i > 0
est liquide voire gazeux, système désordonné. ∂S ∂V ∂n i

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avec S, T (déjà définies) l’entropie et la température thermo-


dynamique,
P la pression,
V le volume,
µi le potentiel chimique,
dQ σ dni
Σ
ni le nombre de moles du constituant i
dans le système.
dV
La définition précise du potentiel chimique sera donnée plus loin
[relations (10) (18) et (32)]. Les variables qui peuvent être bloquées
dans ces dérivées partielles sont assez variées, par exemple la pre-
mière inégalité est valable en condition isochore ou en condition Les échanges sont comptés positivement de Σ vers σ
isobare, la seconde en condition isotherme ou en condition isen-
tropique, etc. Ces conditions de stabilité expriment trois réalités
physiques de l’équilibre d’un système : son désordre augmente Figure 1 – Représentation schématique des échanges locaux
avec la température, son volume diminue lorsque la pression des variables extensives énergétiques dQ = T dS, dV et dni
s’accroît, le potentiel chimique d’un de ses constituants augmente entre un petit sous-système s et le reste du système S
lorsque l’on ajoute des moles de ce constituant au système.
Un état métastable satisfait toutes ces conditions, c’est donc un
état d’équilibre thermodynamiquement stable, mais qui s’établit en
l’absence d’une phase dont la présence engendrerait un équilibre quantité d’énergie contenue dans σ (que l’on appelle son énergie
de plus basse enthalpie libre G ; la raison de l’absence de cette interne) va fluctuer autour d’une valeur moyenne constante. En
phase est qu’elle germe très difficilement dans le système. Le pas- effet Gibbs a montré que lorsque l’équilibre thermodynamique est
sage spontané de l’équilibre métastable à l’équilibre stable est pos- atteint, l’énergie E d’un système ne dépend que de ses grandeurs
sible à chaque instant et imprévisible, le passage inverse est extensives S, V et ni , c’est ce que l’on appelle l’équation fonda-
impossible. L’image mécanique de l’équilibre métastable est celui mentale de Gibbs dont toute la thermochimie découle :
d’une bille accrochée sur une pente dans une anfractuosité de la E = E (S, V, ni ...) (5)
surface. Si on extrait la bille de ce trou elle dévalera plus bas, mais
elle peut demeurer indéfiniment dans ce minimum relatif creusé à Bien que la relation (5) ne soit jamais explicite, elle peut être
flanc de coteau. différenciée :

∂E ∂E ∂E
d E =  ------- dS +  ------- d V + ∑  -------- dn i (6)
2.2 Conditions d’équilibre ∂S  V, ni ∂V  S, ni ∂n i  S, V, n
i j

thermodynamique entre deux phases


relation qui peut s’écrire encore :
2.2.1 Grandeurs thermodynamiques extensives d E = T d S – P d V + Σµ i d n i (7)
Nous avons défini un système fermé comme une certaine quan- en posant par définition de trois nouvelles grandeurs :
tité de matière, séparée de l’extérieur par un contour. Les gran-
deurs qui sont susceptibles de traverser ce contour sont appelées
∂E
les grandeurs thermodynamiques extensives, leur propriété carac- T =  ------- , température thermodynamique (8)
téristique est d’être « additives » sur l’ensemble du système. Ainsi ∂S V, ni
le volume total du système est la somme des volumes de tous ses
∂E
sous-systèmes adjacents ; il en est de même pour l’énergie, pour – P =  ------- , opposé de la pression (9)
∂V  S, ni
le nombre de moles de chaque constituant i, et pour l’entropie.
Toutes les grandeurs extensives sont positives mais leurs varia- et :
tions sont algébriques. La relation de Clausius (3) permet de
∂E
comprendre comment il est possible de faire pénétrer de l’entropie µ i =  -------- , potentiel chimique de l’élément i (10)
dans le système, il s’agit en fait d’un échange de chaleur avec ∂n i S, V, n
j

l’extérieur. On compte positivement les échanges de grandeurs


extensives lorsqu’ils se font de l’extérieur vers l’intérieur du sys- T, P et µi sont des variables locales appelées grandeurs intensives :
tème considéré, ainsi les échanges deviennent des différentielles par exemple si l’on considère le petit système σ précédemment
algébriques. La figure 1 représente un grand système thermo- défini, les variations à l’équilibre de son énergie interne e (σ ) en
dynamique dans lequel on a séparé par la pensée un petit sous- fonction des échanges de fluctuation dS = dQ/T, dV et dni dont il
système σ. Appelons Σ le reste du grand système. Le petit sous- est le siège obéiront à une relation de type (6) dans laquelle T, P
système σ échange en permanence avec Σ des quantités de cha- et µi sont les variables intensives locales. Les grandeurs intensives
leur, de volume et de matière. À l’équilibre thermodynamique, le T, P et µi du petit système σ vont elles-mêmes fluctuer autour de
bilan moyen de ces échanges est nul sur un intervalle de temps leur valeur moyenne d’équilibre.
fini, ce qui ne signifie pas que ces échanges n’existent pas, mais Dans les relations (6) ou (7), on peut reconnaître trois formes
que statistiquement il rentre autant de grandeur extensive de cha- possibles d’échange de l’énergie :
que espèce qu’il en ressort. Ces échanges sont la cause des fluc-
tuations locales. Chaleur, volume et moles de constituants sont les dQ = T dS est la chaleur transmise (11)
vecteurs de l’échange d’énergie et jouent un rôle primordial en
thermodynamique. dW = – P dV est le travail mécanique de compression (12)
dChim = µi dni est l’énergie chimique liée à l’échange
2.2.2 Grandeurs intensives ou variables de tension du constituant i (13)
À l’équilibre thermodynamique, et en raison précisément des Ainsi chaque variable extensive est couplée à sa variable inten-
perpétuels échanges locaux de grandeurs extensives Q, V et ni , la sive, S avec T, V avec (– P ) et ni avec µi .

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2.2.3 Conditions de l’équilibre thermodynamique équation dans laquelle la fonction de Gibbs G est définie par :
local G = E + PV – TS (17)
Ce sont les échanges permanents des grandeurs extensives S, V C’est cette fonction qui passe par un minimum à l’équilibre iso-
et ni qui vont aboutir à l’égalisation des grandeurs intensives de bare-isotherme. Si l’on calcule la différentielle de la fonction G en
tension T, P et µi sur l’ensemble du système. Chaque type tenant compte de la relation (7) on trouve :
d’échange S, V ou ni sera responsable de l’égalisation de sa varia-
ble intensive associée T, P ou µi , à condition toutefois que les d G = – S d T + V d P + Σµ i d n i (18)
conditions imposées aux limites (sur le contour du système) se Pour exprimer le passage à minimum de la fonction de Gibbs
prêtent à cette égalisation. Ainsi, si le système était placé dans un d’un système quelconque Σ, on doit d’une part exprimer que la dif-
gradient de température l’équilibre thermodynamique ne s’établi- férentielle première de G est nulle, d’autre part que sa différentielle
rait pas, le système pourrait seulement se stabiliser dans un état seconde est une forme quadratique positive :
d’écoulement permanent et stationnaire de la chaleur. Justifions
rapidement l’uniformité des variables intensives dans un système d G (Σ ) = 0 d 2 G (Σ ) ≥ 0 (19)
fermé, isobare et isotherme sur son contour : considérons les
échanges locaux entre σ et Σ (figure 1). L’équilibre thermodyna- L’égalité du premier ordre dans (19) s’appelle la condition d’équi-
mique exprime dans son second principe que les fluctuations loca- libre du système, tandis que l’inégalité du second ordre traduit la
les ne sont pas productrices de désordre ou encore que lorsque σ stabilité de l’équilibre. Pour un alliage binaire, cette inégalité
reçoit la quantité d’entropie dS le système Σ reçoit en échange la entraîne trois conditions de stabilité à satisfaire simultanément :
quantité (– dS ), de manière à conserver globalement le désordre
avec un bilan entropique nul. Pour des raisons plus évidentes les  ∂T
------- >0  ∂P
------- <0  ∂µ
--------i  >0 (20)
quantités de volume et de matière se conservent également. En ∂S  P, ni ∂V  T, ni  ∂n i  P, T, n
j
appliquant la relation (7) à chacun des sous-systèmes σ et Σ et en
sommant, le bilan en énergie de l’échange de fluctuation s’établit ces inégalités avaient déjà été évoquées au paragraphe 2.1. Quel
ainsi : que soit le nombre de constituants du système, ces conditions de
stabilité sont toujours des conditions nécessaires mais elles ne
de (σ ) + dE (Σ ) = (T – T ’)dS – (P – P ’)dV + ∑(µi – µi′ )dni = 0 (14) sont suffisantes que pour un système binaire. La dernière inégalité
semble recouvrir deux expressions distinctes selon que l’on
i
équation dans laquelle on a supposé que les grandeurs intensives utilise le constituant 1 ou le constituant 2 ; mais on démontre
dans σ et dans son voisinage immédiat de Σ étaient distinctes. [relation (25)] que l’une des conditions est redondante par rapport
à l’autre.
Le premier principe de la thermodynamique exprime que l’éner-
gie se conserve globalement, les fluctuations d’échange local ont
donc un bilan de variation d’énergie nulle. La relation (14) devant 2.3.2 Équations d’Euler et équations
être satisfaite pour une infinité de dS, dV et dni indépendants entre de Gibbs-Duhem. Fractions molaires
eux, on en déduit la seule solution :
Le développement de la thermochimie pour son application aux
T = T’ , P = P’ et µi = µ i′ (15) calculs des diagrammes de phases suppose connues certaines
relations qui concernent les potentiels thermodynamiques. Tous
Dans les relations (15), les deux premières égalités nous sont ces potentiels sont des grandeurs additives sur l’ensemble du sys-
très familières : on a conscience que la température s’uniformise, tème et nous allons montrer que ce sont des formes linéaires des
une casserole retirée du feu refroidit et prend progressivement la variables extensives. Considérons par exemple la relation fonda-
température du local ; de même une baudruche gonflée se dégon- mentale de Gibbs (5), qui exprime que les variables E, S, V, et ni ...
fle lorsqu’elle crève. Mais l’égalisation des potentiels chimiques sont liées, à l’équilibre thermodynamique. Considérons en outre
est un concept plus abstrait et c’est sur ce principe de base que un certain système dans un certain état d’équilibre bien défini. On
repose toute la théorie des diagrammes d’équilibre de phases. En peut par la pensée subdiviser ce système en ne considérant que sa
effet, l’uniformité des potentiels chimiques de tous les constituants fraction f, les grandeurs citées étant toutes additives elles seront
impose un ensemble de conditions qui traverse les frontières des toutes multipliées simultanément par f dans le nouveau système
phases distinctes à l’intérieur d’un même système. considéré. Cette observation démontre que l’équation fondamen-
tale de Gibbs est une forme linéaire à laquelle s’applique la rela-
tion d’Euler :
∂E ∂E ∂E
E = ------- S + ------- V + ∑ -------- n i

6
2.3 Les potentiels thermodynamiques ∂S ∂V i
∂n i

2.3.1 Fonction de Gibbs ou encore : E = TS – PV + ∑n i µ i (21)


i
La thermochimie utilise diverses fonctions potentiels dont la
caractéristique est de présenter un extremum à l’équilibre. Cha- Si l’on rapproche les équations (17) et (21), il vient tout
cune de ces fonctions s’applique à un ensemble défini de condi- simplement :
tions de contour du système. Ainsi, l’entropie d’un système isolé G = ∑n i µ i (22)
est maximale à l’équilibre. Parmi toutes les fonctions potentiels i
imaginables (Gibbs a donné la clef générale pour les obtenir), c’est Ainsi G est la fonction potentiel de la part chimique de l’énergie,
la fonction enthalpie libre de Gibbs (ou simplement fonction de tandis que TS est la part chaleur et (– PV ) la part énergie mécani-
Gibbs) déjà citée au paragraphe 2.1, qui joue le rôle primordial que. En différentiant l’équation (22) et en comparant le résultat
dans la théorie des diagrammes d’équilibre de phases. Elle s’appli- avec la différentielle (18), on établit une identité très importante
que aux systèmes fermés-isothermes-isobares. En effet, si l’on appelée identité de Gibbs-Duhem, le Français Duhem ayant préco-
considère les échanges de grandeurs extensives dS et dV entre ce cement reconnu le bien-fondé de la théorie de Gibbs et l’ayant lar-
système et son extérieur et si l’on se reporte à l’équation (7), la gement diffusée dans ses enseignements malgré les obstacles de
variation totale d’énergie qui accompagne cet échange s’écrit : Berthelot, ministre de l’Éducation :
dEtotal = dEintérieur + dEextérieur
= dEintérieur + T0dS – P0dV = dGintérieur (16)
– S dT + V dP = ∑n i d µ i (23)
i

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Cette relation exprime qu’à l’intérieur d’un système en équilibre Dans la pratique la variable pression n’a que très peu d’influence
chimique isobare isotherme, les potentiels chimiques sont liés sur les phases condensées et on ne dispose que d’informations
dans leur ensemble : très fragmentaires sur cette influence : on convient donc en
général de fixer la pression à une valeur constante choisie égale à
T0 , P0 → 0 = ∑n i d µ i J (24) 1 atmosphère standard (101 325 Pa ou 100 000 Pa selon les normes
standard adoptées, ce qui ne modifie pas de façon détectable les
i
potentiels chimiques des phases condensées). Finalement le sys-
En particulier pour un système binaire, les deux potentiels chi- tème d’équation (28) conduit à une solution unique pour chaque
miques des deux constituants sont liés et peuvent se déduire l’un température T fixée :
de l’autre par une intégration :
α α β β
n1 x1 x 2 = x 2 (T ) et x 2 = x 2 (T ) (29)
T0 , P0 → dµ2 = – ------ d µ 1 = – ------ d µ 1 (25)
n2 x2 Dans un plan représentant les fractions molaires x2 en abscisses
et la température T en ordonnées, les relations (29) décrivent deux
Dans cette dernière relation, les variables x1 et x2 sont les frac- courbes distinctes appelées courbes conjuguées de l’équilibre
tions molaires des constituants, dont la définition générale est : α ⇔ β. C’est le principe de la représentation graphique appelée
x i = ni / Σn i diagramme d’équilibre entre phases. À chaque température, tous
les mélanges biphasés (α + β) sont situés sur un segment de droite
et, pour un système binaire : horizontale dont les extrémités représentent les deux compositions
des phases en équilibre à cette température : ce bipoint est appelé
x1 = n1 /(n1 + n2 ) x2 = n2 /(n1 + n2 ) (26) segment de conjugaison ou conode.

2.4 Système d’équations d’équilibre 2.5 Échange de matière par diffusion


entre deux phases à travers une interface
Nous avons vu que l’équilibre entre deux phases s’exprime par Nous venons de voir que l’équilibre thermodynamique isobare-
l’égalité des potentiels chimiques de tous les constituants dans les isotherme est établi lorsque les potentiels chimiques de tous les
deux phases. Toute la théorie des diagrammes de phases et le cal- constituants sont égaux dans toutes les phases du système. En
cul pratique de ces diagrammes repose sur ce résultat. Dans la pra- conséquence, si l’on établit un contact entre deux métaux purs A
tique, la mise en équation de cette propriété nécessite de et B de part et d’autre d’une surface d’accolement, on établit un
subdiviser le système complet en autant de sous-systèmes que de couple de diffusion c’est-à-dire que les atomes A vont migrer à tra-
phases présentes ou susceptibles d’apparaître au sein du système. vers l’interface en direction de B et les atomes B vont migrer vers
Ainsi, chaque phase est traitée mathématiquement comme un A en sens inverse. Ce mouvement migratoire ne s’arrêtera que
système thermodynamique qui sera modélisé par un formalisme lorsque les potentiels chimiques seront égalisés de part et d’autre
approprié, dans une seconde étape on écrira toutes les conditions de l’interface. Les vitesses de déplacement des atomes A ou B
d’équilibre thermodynamique entre les divers sous-systèmes étant inégales, la surface géométrique d’accolement se déplacera
monophasés. également.
Exemple : pour un système binaire l’équilibre isotherme-isobare Au cours de l’expérience, on peut observer deux situations
entre une phase α (premier sous-système) et une phase β (deuxième distinctes :
sous-système) s’exprime par un système de deux équations à deux — A et B restent les phases présentes de part et d’autre de la
α β
inconnues fractions molaires x 2 et x 2 : surface d’accolement ;
— on observe la formation d’une ou de plusieurs phases nouvel-
 α β
 µ1 = µ1 les qui se succèdent dans la direction perpendiculaire à l’interface
 α (27) initiale, les phases extrêmes restant A et B.
 µ 2 = µ β2
 Il existe une grande variété de résultats selon la nature du dia-
gramme de phases binaire (A, B ) ; certains cas sont surprenants,
Les potentiels chimiques sont des grandeurs intensives locales, ainsi avec le sodium et le potassium solides à la température
pour cette raison ils ne dépendent que de variables locales : tem- ambiante, on forme à l’interface un liquide à bas point de fusion
pérature, pression et fractions molaires. Puisque la somme des appelé liquide eutectique.
fractions molaires est toujours égale à 1, il n’existe dans un sys-
tème contenant c constituants que (c – 1) variables de composition En dessous d’une certaine température appelée température de
chimique et chaque potentiel chimique, dans chaque phase, est diffusion, les vitesses de migration des atomes sont trop lentes
une fonction de (c + 1) variables au total en tenant compte de la pour être observées à l’échelle de temps d’une vie. Cette tempéra-
température et de la pression. ture n’est pas un repère fixe mais une zone qui se situe approxi-
mativement entre 0,4 Tf et 0,5 Tf , Tf désignant la température
Exemple : le système d’équations (27) fait apparaître au total qua- thermodynamique de fusion du métal. Le procédé le plus utilisé
α β pour former un alliage est la confusion de ses éléments, la diffu-
tre variables P, T, x 2 et x 2 et détermine les deux variables de
α β sion en phase liquide étant très rapide en comparaison de la diffu-
composition x2et x2
à l’équilibre thermodynamique, chacune sion en phase solide. Après solidification, il faut poursuivre le
comme fonction des deux variables P et T : traitement de mise en équilibre par un ou plusieurs recuits iso-
thermes.
 α α
 x 2 = x 2 (P , T ) Depuis quelques années, on a observé que la diffusion en phase
 β (28) solide était fortement accélérée par un malaxage mécanique inten-
 x 2 = x 2β(P ,T )
 sif, en général réalisé dans un broyeur à galets. Ce procédé est lar-
gement utilisé aujourd’hui même industriellement pour fabriquer
Ainsi deux phases en équilibre possèdent les mêmes potentiels certains alliages sans fondre les constituants. Dans certains cas, on
chimiques mais des compositions chimiques distinctes. peut obtenir ainsi directement des alliages à l’état vitreux.

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2.6 Grandeurs de mélange et d’excès. Chaque grandeur de mélange engendre son identité de Gibbs-
Duhem analogue à la relation (23) :
États de référence.
mix mix
Activités des constituants  ∂Y
----------------
∂Y
d T +  ---------------- ∑ni dY i
mix
dP = (34)
 ∂T  P,ni  ∂P  T,ni
i
Le calcul des équilibres entre phases nécessite la modélisation
L’entropie de mélange joue un rôle particulièrement important
algébrique des potentiels chimiques de chaque constituant dans
car elle contient l’accroissement du désordre global qui accompa-
chaque phase. Les fonctions additives énergie interne E, enthalpie
gne l’opération de mélange des constituants pour former une
H = E + PV, enthalpie libre de Gibbs G = H – TS, ne sont définies
phase unique ϕ. Indépendamment des interactions qui peuvent
qu’à une constante additive arbitraire près. Un troisième principe
s’exercer entre les espèces et par simple dénombrement du nom-
de la thermodynamique, posé par Nernst en 1906, attribue l’entro-
bre possible de configurations microscopiques, l’opération de
pie nulle S = 0 à toute phase en état d’équilibre stable ou métasta-
mélange des constituants est créatrice d’entropie (c’est une opéra-
ble, au zéro de l’échelle de température thermodynamique. Toutes
tion irréversible). La définition de l’entropie intégrale de mélange
ces fonctions sont modélisées pour chaque phase et, en général,
est la même que celle de n’importe quelle autre grandeur de
on considère leurs valeurs molaires c’est-à-dire pour une quantité
mélange, relation (30) :
de matière égale à une mole d’atomes Em , Hm , Gm , Sm .
Pour comparer entre elles les grandeurs molaires de plusieurs S mix = S ϕ(P, T, ni ...) – ∑ n i S *m,i (P,T ) (35)
phases (compte tenu des constantes additives arbitraires), il est i
nécessaire de les référer à une origine commune. C’est ce que l’on Cette grandeur contient donc le terme d’entropie de configura-
appelle l’état de référence : le plus souvent on choisit le système tion de mélange qui correspond aux permutations permises des
hors d’équilibre dans lequel chaque constituant est pris en quan- espèces lorsqu’elles sont dans la même phase ϕ, permutations qui
tité égale à celle du système considéré, mais à l’état pur et séparé, étaient impossibles dans l’état de référence. Un calcul statistique
dans un état structural convenu pour chacun, à la même tempéra- du nombre de permutations ainsi engendrées et l’application de la
ture et sous la même pression. L’état structural convenu pour cha- relation de Boltzmann (4) donne le résultat suivant pour le désor-
que corps pur est appelé état de référence du corps pur. Aucun dre idéal :
calcul thermochimique ne peut être effectué sans avoir défini au
préalable les états de référence de chaque constituant, tout comme
S mix(configuration) = – R ∑ ni ln (xi )
i
il serait impossible de définir une abscisse algébrique sur un axe et :
sans en avoir choisi l’origine. mix
Si (configuration) = – R ln (xi ) (36)
Considérons dans une phase ϕ une grandeur additive Y, on
appelle grandeur de mélange Y mix la différence entre la grandeur avec R la constante molaire des gaz parfaits définie plus
ϕ
Y dans la phase ϕ homogène et la quantité Y dans le système de haut au paragraphe 2.1,
référence, les deux états de la matière contenant la même quantité xi la fraction molaire, définie à la relation (26).
de chaque constituant :
On constate que lorsque la dilution de l’élément i devient infinie,
Y mix = Y ϕ(P, T, ni ...) – ∑ niY m* , i (P,T ) (30) c’est-à-dire xi → 0, l’entropie partielle molaire de configuration du
constituant i tend vers l’infini positif. Or si l’on explicite le potentiel
i
* ( P,T ) désigne la grandeur de même
Dans cette expression, Y m chimique de mélange, à partir de la relation (1) G = H – TS , on
,i obtient :
nature dans une mole de corps pur i pris dans l’état structural de
mix mix mix
référence convenu. µi = Hi – TS i (37)
mix Aux grandes dilutions de l’espèce i , le potentiel chimique de
On appelle grandeur molaire partielle de mélange Yi , la déri-
mélange de ce constituant tendra donc vers l’infini négatif, c’est ce
vée partielle de Y mix par rapport à la variable ni :
que l’on appelle un puits de potentiel chimique infiniment profond.
Le sens physique de ce résultat est que toute substance exempte
 ∂Y mix ∂Y
=  --------
mix * (T , P ) d’un constituant i exerce sur ce constituant une force motrice de
Yi =  ---------------- – Ym (31)
 ∂n i  T, P, nj ≠ i ∂n i  T, P, nj ≠ i
,i
diffusion attractive infiniment forte. Dans le cas des alliages métal-
liques, qui nous intéresse ici, l’opération de fusion dans un creuset
Exemple : en choisissant comme grandeur additive Y la fonction ou dans une poche risque donc d’apporter une contamination de
de Gibbs G dont la différentielle est donnée à la relation (18), on l’alliage par les constituants du creuset, seule la cinétique lente de
observe que le potentiel chimique de mélange s’identifie à l’enthalpie cette dissolution des parois dans le bain peut retarder cette conta-
libre molaire partielle de mélange : mination. Pour la recherche des puretés extrêmes, on a recours à
des méthodes de fusion sans creuset, telles que la fusion de zone
∂G
( T , P , x 1 , x 2 ,... x c – 1 ) =  -------
mix mix
µi = Gi
 ∂n i T , P , n
– G *m , i (T , P ) (32) sur barreau, la fusion en lévitation dans un champ électromagné-
j≠i tique haute fréquence ou la fusion en apesanteur.
Pour chaque constituant i , on définit l’activité ai et le coefficient
G *m , i (T , P ) = µ *i est aussi appelé le potentiel chimique du corps d’activité γi dans le système ou dans la phase considérés et par
pur dans son état de référence. référence à un état du corps pur i prédéfini, par les relations :
Puisque toutes les grandeurs additives sont des formes linéaires mix
des variables ni la formule d’Euler s’applique également aux gran- µi
= RT ln(ai ) = RT ln(γi ) + RT ln(xi ) (38)
deurs de mélange : On dit que la phase ϕ est idéale si le potentiel chimique de
∑n i Y i
mix mix mélange ne contient que la contribution d’entropie de configura-
Y =
i tion idéalement désordonnée de type (), dans ce cas γi = 1 et ai = xi
ou en divisant par ∑ ni : à toute température. Aucune solution n’est rigoureusement idéale,
i mais toutes s’en approchent vers les hautes températures
∑ xiY i
mix mix lorsqu’elles restent stables.
Ym = (33)
i L’écart à l’idéalité est engendré par trois causes principales.
La grandeur Y mix est encore appelée grandeur intégrale de Une cause extrinsèque constituée par le choix arbitraire d’un
mélange. état de référence de corps pur non isomorphe de la phase consi-

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dérée, l’écart à l’idéalité ne recouvre ici aucun sens physique, il


s’agit d’un décalage d’origine des potentiels chimiques. mix
Gm
Deux causes intrinsèques, l’une l’enthalpie de mélange traduit x2
les interactions énergétiques entre les constituants, attractives ou
répulsives. Elle est positive pour les solutions répulsives endother-
miques (à la formation du mélange) et négative pour les solutions
attractives exothermiques, la solution idéale étant athermique. La
seconde cause intrinsèque est l’entropie d’excès dans laquelle on
regroupe tous les termes d’entropie de mélange sauf le terme de
configuration idéale. L’existence d’une entropie d’excès est sou- µ1mix
vent constatée, elle peut être liée à un ordre de configuration des
atomes, qui engendre dans tous les cas une entropie d’excès néga- µm2ix
tive quel que soit le type d’ordre, ségrégation des constituants ou
distribution complexe ordonnée ; on peut observer également une
contribution entropique électronique, souvent négative, une entro- Figure 2 – Détermination géométrique des potentiels chimiques
pie d’excès magnétique ou un terme entropique de phonon. L’inté- de mélange d’une phase binaire à partir de la tangente au graphe
rêt de l’utilisation des grandeurs d’excès est de supprimer dans les de sa fonction de Gibbs intégrale de mélange, au point de fraction
calculs numériques les termes infinis aux grandes dilutions et de molaire x2
ne traiter que des termes toujours finis, ce qui permet d’éviter des
dysfonctionnements dans le calcul automatique. Les grandeurs
partielles molaires d’excès les plus utilisées sont : 2.7 Représentation des grandeurs
— l’enthalpie d’excès qui s’identifie à l’enthalpie de mélange : partielles d’un système binaire :
E
Hi = Hi
mix
(39) exemple des potentiels chimiques
— l’entropie d’excès :
Ce qui est décrit dans ce paragraphe s’applique à la représenta-
E mix tion géométrique de n’importe quelle grandeur partielle, de
Si = Si + R ln ( x i ) (40)
mélange ou d’excès d’un système binaire, quelle que soit la nature
— le potentiel chimique d’excès : de la grandeur. Pour être plus concret nous traiterons le cas des
E mix potentiels chimiques de mélange. La figure 2 représente la gran-
µi = µi – RT ln ( x i ) (41) deur intégrale liée aux potentiels chimiques par la relation d’Euler
Les grandeurs intégrales molaires d’excès, qui leur sont atta- (33) :
chées s’obtiennent par la relation générale d’Euler : mix mix mix
Gm = x1 µ1 + x2 µ2


E E
Ym = xiY i (42) c’est-à-dire l’enthalpie libre molaire de mélange d’un système
i binaire, en conditions isobare-isotherme. L’équation de Gibbs-
Duhem (25) associée à la relation d’Euler permet d’établir sans dif-
On remarque que les conditions d’équilibre thermodynami- ficulté les relations :
que dans un système expriment l’égalité des potentiels chimi- mix
mix mix d Gm
ques dans toutes les phases coexistantes. Il y a donc continuité µ1 = G m – x 1 -----------------
d x2
des potentiels chimiques de mélange et des activités des
constituants lorsque l’on traverse l’interface entre deux phases. et :
Mais cette continuité n’est assurée que par la compensation des d Gm
mix
mix mix
deux discontinuités, enthalpique et entropique ∆ α H i
β mix
et µ2 = G m + x 2 ----------------- (44)
d x2
β mix
∆ αS i , qui représentent la différence finie des deux grandeurs Dans les équations (44), la fonction de Gibbs isobare-isotherme
partielles de mélange en phase β ou en phase α : mix
n’est plus fonction que d’une seule variable G m ( x 2 ) . Elles expri-
β mix β mix ment que les potentiels chimiques de mélange sont les intersec-
∆ αH i – T ∆ αS i = 0.
tions avec les deux axes verticaux des corps purs de la tangente
Pour les compositions biphasées, c’est-à-dire sur le segment mix
de conjugaison, les enthalpies et les entropies partielles molai- à la courbe représentative de la fonction G m ( x 2 ) , prise à l’abs-
res de mélange sont encore distinctes des précédentes et sont cisse x2 , (figure 2). Des relations similaires s’appliquent aussi aux
mix mix grandeurs d’excès.
parfois écrites H i et S i pour les distinguer, la double barre
représentant la coexistence de deux phases. Finalement, la
continuité des potentiels chimiques s’établit par le jeu d’égalités
suivant :
3. Règle des phases de Gibbs
( αH mix α mix mix mix
– T S i ) limite α /α + β = (H i – TS i ) α + β
i
β mix β mix et règle des bras de levier
= ( H i – T S i ) limite β/α + β (43)
Ainsi le potentiel chimique est la seule grandeur partielle Nous regroupons dans ce paragraphe deux règles d’importances
molaire continue sur l’ensemble d’un système polyphasé et inégales. La règle des phases de Gibbs est de portée universelle et
c’est la raison pour laquelle on peut le définir sans ambiguïté permet le dénombrement des phases coexistantes dans un sys-
sur le système total ; mais toutes les autres grandeurs partielles tème de multiplicité quelconque, en relation avec le nombre de
ne sont continues que dans la même phase : c’est pourquoi degrés de liberté de ce système. La seconde règle dite des bras de
l’entité considérée comme système thermodynamique en cal- levier ou des segments inverses ne s’applique qu’aux systèmes
cul automatique de diagramme est toujours la phase pour ne binaires, c’est une image géométrique du bilan des masses des
pas avoir à modéliser des grandeurs discontinues. deux phases, dans un domaine biphasé.

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_____________________________________________________________________________________________________________ DIAGRAMMES D’ÉQUILIBRE

3.1 Règle des phases de Gibbs Les échelles de composition wi et xi sont reliées entre elles par
une relation homographique, qui fait intervenir les masses atomi-
ques des éléments, et qui a pour effet de dilater ou de comprimer
une des échelles par rapport à l’autre lorsque wi → 0 et inverse-
3.1.1 Variables de composition chimique ment lorsque wi → 1. Ces échelles se recoupent aux deux extrémi-
d’une phase tés 0 et 1. On se reportera au paragraphe 14.2.

Nous avons vu au paragraphe 2.4 que chaque phase appartenant


à un même système en équilibre thermodynamique possède sa 3.1.2 Dénombrement des variables de Gibbs
propre composition chimique et qu’en pratique il est plus simple
indépendantes
de décomposer le système complet en autant de sous-systèmes
adjacents que de phases coexistantes. Pour un alliage élaboré
avec c constituants indépendants, c’est-à-dire c éléments chimi- Un équilibre thermodynamique au sein d’un système élaboré
ques distincts, il faudra (c – 1) variables de composition pour avec c constituants indépendants peut s’établir avec ϕ phases en
décrire la composition chimique d’une seule phase, en considérant coexistence. L’équilibre est parfaitement défini si l’on connaît la
que la somme des compositions relatives fait toujours 1 ou 100 composition chimique dans toutes les phases, la pression et la
selon que l’on norme à 1 ou à 100 %. température, cela représente un total de ϕ (c – 1) variables de
composition chimique et 2 variables intensives P et T. Gibbs s’était
Au paragraphe 2.3.2, nous avons déjà rencontré une définition déjà rendu compte, en 1875, que ces variables n’étaient pas indé-
des compositions chimiques, les fractions molaires. Pour le sys- pendantes. C’est ce que l’on appelle la règle des phases de Gibbs
tème complet, on définit la fraction molaire moyenne x i par la qui dénombre parmi ces variables le nombre v (comme variance)
relation (26) appliquée à l’ensemble du système. La même défi- de variables indépendantes. En effet chaque équilibre individuel
nition s’applique également à chaque phase ϕ prise individuelle- entre deux phases impose entre ces variables c équations indépen-
ment : dantes, analogues aux deux relations (27) qui s’appliquaient à un
système binaire. Avec ϕ phases au total, on obtient ainsi c (ϕ – 1)
ϕ
ni ϕ ni équations d’équilibre. La variance du système est donc :
x i = -----------
- x i = ------------
- (45)
∑ ni ∑ ni
ϕ
v = ϕ(c – 1) + 2 – c (ϕ – 1) = c + 2 – ϕ (48)
équation dans laquelle 2 représente les variables intensives pres-
Si nϕ désigne le nombre de moles d’atomes dans chaque sion et température. Si l’on fixe la pression à une valeur constante
phase ϕ, le bilan matière s’exprime par l’équation barycentrique : la variance diminue de 1 unité :
ϕ → v=c+1–ϕ
xi ∑ nϕ = ∑ nϕ xi P = P0 (49)
ϕ
Un métal pur i, constitué d’une seule phase, est un système
monovariant en condition isobare : son potentiel chimique µ *i (T )
Les relations (45) peuvent se multiplier par 100 si l’on désire
est fonction de la température. Sur un diagramme d’équilibre
exprimer les fractions molaires en moles pour-cent :
binaire les deux corps purs représentent les deux axes verticaux
xi % = 100 xi qui bordent le diagramme à droite et à gauche ; sur chacun de ces
axes, le liquide et chaque variété cristalline occupent un certain
Les fractions molaires sont principalement utilisées par les phy- intervalle de la variable température. À l’inverse lorsque le corps
sico-chimistes, car elles représentent les proportions relatives des pur est biphasé en condition isobare le système est invariant,
espèces, mais en transaction commerciale les métaux sont vendus l’équilibre solide ⇔ liquide est représenté par un point fixe sur cha-
au « poids », c’est probablement la raison pour laquelle les indus- que axe, appelé point de fusion. Il en est de même pour la coexis-
triels utilisent plus volontiers les fractions massiques aussi nom- tence entre deux variétés cristallines du même corps pur.
mées concentrations pondérales. Les notations utilisées sont
différentes dans les pays francophones ou anglo-saxons, les pre-
miers privilégiant en général la notation ci (comme concentration), 3.1.3 Règle de Gibbs et diagrammes
les seconds la notation wi , (comme weight-fraction). Dans l’article de phases binaires
Diagrammes d’équilibre : alliages ternaires [M 76 a] des Techni-
ques de l’Ingénieur, Philippe Poupeau et Bernard Hocheid ont uti- Pour représenter graphiquement les diagrammes de phases, il
lisé la notation inusitée Xi pour désigner les concentrations convient de réduire le nombre de variables de façon à disposer de
pondérales, conservant la notation habituelle xi pour les fractions représentations à deux dimensions. La relation (49) montre qu’il
molaires. est possible d’écrire la règle des phases de Gibbs :
Si mi désigne la masse totale du constituant i (dans le système v=c+1–ϕ
ϕ
complet), et m i la masse de ce même constituant dans une en bloquant la pression à une valeur constante, valeur que l’on
phase ϕ, on écrira de manière analogue à la relation (45) : choisit généralement égale à la pression standard P o = 100 000 Pa
ϕ ou P o = 101 325 Pa, les deux normes étant encore en vigueur. Ainsi
mi ϕ ϕ mi pour un système binaire isobare, la relation v = 3 – ϕ conduit à une
c i = w i = -------------
- et c i = w i = --------------
- (46)
∑ mi ∑ mi
ϕ représentation plane.
Dans le plan à deux axes, x2 en abscisses et T en ordonnées, les
domaines monophasés (v = 2) occupent des portions de surface ;
où les notations c i ou w i désignent les concentrations pondérales
ϕ ϕ les domaines biphasés (v = 1) sont des fuseaux plans compris
moyennes prises sur l’ensemble du système et c i ou w i les entre leurs deux lignes conjuguées limitrophes (§ 2.4) et les domai-
concentrations pondérales dans la seule phase ϕ. nes à trois phases, qui correspondent à v = 0, sont des segments
Le bilan matière s’exprime en masse par l’équation bary- isothermes appelés paliers invariants, sur lesquels trois points
centrique : fixes représentent les compositions des trois phases invariantes en
équilibre et auxquels aboutissent les lignes conjuguées monova-
ϕ
w i ∑ mϕ = ∑ mϕ wi (47) riantes situées au-dessus et en dessous de ce palier. Il n’y a jamais
ϕ plus de trois phases coexistantes.

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DIAGRAMMES D’ÉQUILIBRE ______________________________________________________________________________________________________________

Si ce diagramme isobare (sous une atmosphère standard) ne


comporte pas de phase vapeur, la représentation plane est donc
parfaitement adaptée aux systèmes binaires métalliques. Dans la (axe cA )
pratique, si la tension de vapeur naturelle est faible, les expérien- cAa cA cAb
ces ont lieu en creuset ouvert sous la pression atmosphérique et A O B
on néglige la faible vaporisation ou sublimation dans l’atmos-
phère environnante, qui n’entraîne qu’une déperdition de matière
infime. Phase a Domaine biphasé a + b Phase b

Mais pour les métaux volatils, la formation d’une phase vapeur


vient compliquer la représentation car elle fait apparaître des ma mb
lignes d’équilibre avec le gaz qui n’ont en général que peu d’intérêt
pour le métallurgiste, et par ailleurs la représentation des équili-
bres entre phases condensées est interrompue dès que la vapeur
atteint 1 atmosphère : c’est le cas du binaire Fe-Zn [M 70-174]. On Figure 3 – Règle des bras de levier ou des segments inverses
peut adopter pour de tels systèmes une convention différente qui dans un domaine biphasé binaire
conservera la relation (49) mais avec une signification distincte.
Convenons de maintenir le système toujours en équilibre avec sa
vapeur naturelle dans un récipient scellé et étanche. Il se trouvera
sous la pression variable qu’il impose. Convenons aussi de ne Une relation semblable à la relation (50) lie les nombres d’ato-
représenter dans le diagramme que les ϕ phases condensées. Le mes contenus dans chaque phase aux deux bras de levier fractions
nombre total de phases en équilibre dans le système est réelle- molaires (les notations sont calquées sur les précédentes) :
ment (ϕ + 1) en tenant compte de la présence du gaz. La règle des
phases non isobare s’écrit alors : α β
nα ( x A – x A ) = n β ( x A – x A ) (51)
v = c + 2 – (ϕ + 1) = c + 1 – ϕ
La relation est formellement identique à la relation (49) et le
diagramme obéit aux mêmes règles de variance que dans la
représentation isobare. Les diagrammes Ag-Hg [M 70-105] et
Au-Hg [M 70-124] correspondent à cette convention. Cette nou-
velle convention supprime la représentation des équilibres avec 4. Phases présentes dans
la phase gazeuse, mais elle permet dans tous les cas de prolon-
ger les équilibres entre les phases condensées jusqu’au liquide
les alliages métalliques
monophasé, quelle que soit la pression de vapeur naturelle du
système.
Les phases condensées qui peuvent être présentes dans un
alliage métallique sont les suivantes.
3.2 Règle des segments inverses
■ La phase liquide
ou des bras de levier
Elle occupe toujours la partie supérieure des diagrammes de
La relation barycentrique (47) présente une signification géomé- phases, vers les hautes températures (sauf évidemment si la phase
trique simple lorsqu’on l’applique aux systèmes binaires biphasés, vapeur est aussi représentée). Dans la grande majorité des cas, la
c’est-à-dire sur un segment de conjugaison isobare-isotherme. Par phase liquide est unique ce qui signifie que, à l’état liquide et à
exemple, considérons le système formé des constituants A et B haute température, la plupart des métaux sont solubles entre eux
engagés dans un équilibre entre deux phases α et β. La relation en toutes proportions. Cependant en cas de répulsion forte entre
massique (47) s’écrit ici : les constituants métalliques, il peut apparaître dans les alliages
une démixtion liquide, comme dans une vinaigrette qui contient en
α β coexistence un liquide gras et un liquide aqueux non miscibles.
Mc A = mα c A + mβ c A

avec M = mα + mβ ■ Les solutions solides primaires


ou encore : Elles jouxtent les axes verticaux des corps purs. Ces phases sont
α β isomorphes des corps purs qu’elles bordent (elles sont de même
m α (c A – cA ) = m β ( cA – c A ) (50)
structure cristalline). Si les deux constituants sont eux-mêmes iso-
La relation (50) exprime que les masses des phases limitrophes morphes entre eux, il peut se faire que la solution solide traverse
du segment de conjugaison sont inversement proportionnelles à la toutes les compositions du diagramme. Les constituants sont alors
longueur du segment qui les sépare de la concentration moyenne miscibles en toutes proportions dans cette solution solide. Dans ce
du système. Cette relation est représentée sur la figure 3. Sur cette cas, après la solidification, il n’existe dans l’alliage qu’une seule
figure, les écarts de concentration sont les segments algébriques phase solide, quelle que soit sa composition. C’est le cas des allia-
ges cuivre-nickel représentés sur le diagramme [M 70-151]. Toute-
AO et OB et la relation (50) s’écrit : fois la réciproque est fausse ; des constituants isomorphes peuvent
se séparer en deux solutions solides primaires distinctes mais iso-
mα AO = mβOB morphes. C’est le cas lorsque les constituants se repoussent
fortement ou lorsque leurs rayons ioniques métalliques sont
Elle exprime aussi qu’une balance dont le fléau est le segment trop différents, par exemple les alliages binaires Au-Ni [M 70-125],
de conjugaison et qui repose sur un couteau placé à la concentra- Au-Pt [M 70-126] ou Ag-Cu [M 70-104].
tion moyenne est équilibrée lorsque les masses suspendues à ses
extrémités sont celles des phases limitrophes. En normant à 1 le Certains corps purs présentent plusieurs variétés cristallines sta-
segment AB le segment AO représente mβ et le segment OB repré- bles, selon la température, appelées variétés allotropiques. Chaque
sente mα . variété allotropique engendre sa propre solution solide primaire.

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Exemple : le fer α de basse température, de structure cubique


centrée (c.c.) engendre la solution solide primaire appelée ferrite, tan- 5. Simulation
dis que le fer γ stable à plus haute température et de structure cubi-
que à faces centrées (c.f.c.), engendre la solution solide primaire
des diagrammes binaires
austénite. Le fer δ de très haute température n’est pas différent du
fer α et sa solution solide primaire est également une ferrite ; on s’en
par la solution régulière
rendra compte en observant le diagramme Fe-Cr [M 70-146] sur
lequel la ferrite α de haute ou de basse température enclôt l’austé-
nite γ. À l’inverse, sur le diagramme Fe-Ni [M 70-163] les ferrites α 5.1 Objectif de la modélisation
et δ sont séparées par une solution continue d’austénite γ.
Nous avons vu au paragraphe 2.3.1 que l’état d’équilibre d’un
■ Les solutions solides intermédiaires et les composés définis alliage est celui qui minimise son enthalpie libre. Pour comprendre
Ces phases ne jouxtent jamais les axes verticaux des corps purs, le mécanisme pratique de cette minimisation, nous allons nous
mais surgissent dans le diagramme souvent autour de certaines servir d’un modèle simple dont le sens physique est facile à
compositions bien définies qui correspondent souvent à des struc- interpréter : le modèle de la solution régulière. Toutes les enthal-
tures ordonnées. Ainsi, la stœchiométrie AB2 désigne un composé pies libres des phases présentes dans nos simulations de diagram-
à deux types de sites α et β appelés sous-réseaux. Les sites β sont mes seront représentées mathématiquement par ce modèle. Le
ici deux fois plus nombreux que les sites α. Les atomes A occupent programme de calcul utilisé sera le logiciel Thermo-Calc, module
principalement les sites α tandis que les atomes B occupent Poly-3 de l’Institut Royal de Technologie de Stockholm. Il nous
préférentiellement les sites β. Un certain désordre permet cepen- sera possible de simuler pratiquement toutes les formes de dia-
dant à des atomes B de venir se placer sur α ou à des atomes A grammes observables dans la réalité rien qu’en faisant varier quel-
sur β, la composition atomique de la phase n’est donc pas exacte- ques constantes ajustables du modèle et, par cette approche, nous
ment 1/3, 2/3 mais s’écarte plus ou moins de cette composition de commencerons à nous familiariser avec le calcul des diagrammes
part et d’autre de la stœchiométrie exacte. Lorsque ces écarts sont de phases réels.
larges, on appelle ces phases des solutions solides intermédiaires,
au contraire lorsque ces écarts sont étroits on parle de composés
définis. En réalité, il n’existe pas de limite précise entre ces deux 5.2 Modèle statistique de Bragg-Williams
concepts, le composé étant une solution solide étroite en compo-
sition. Sur un diagramme de phases un composé défini apparaît
et solution régulière de Hildebrand
comme une ligne verticale qui représente la quasi-superposition de
deux lignes conjuguées, appartenant à deux domaines biphasés En 1935, Bragg et Williams ainsi que Bethe ont imaginé un
distincts, et séparées par un domaine monophasé qui occupe modèle atomique de solution solide qui a depuis lors été repris
seulement l’épaisseur du trait : entre les deux bords du même trait dans divers ouvrages pédagogiques tel le traité de Guggenheim.
les potentiels chimiques des constituants subissent une variation Ces auteurs ont imaginé que les énergies (assimilées aux enthal-
brusque. pies) des liaisons métalliques étaient localisées aux contacts des
premiers voisins. On distingue ainsi dans un alliage binaire AB, les
liaisons de type A-A, d’énergie HAA , de type B-B, d’énergie HBB et
En métallurgie les solutions solides se divisent en deux gran- de type A-B, d’énergie HAB .
des familles les solutions solides de substitution et les solu-
Si les corps purs A* et B* sont isomorphes entre eux leurs
tions solides d’insertion. Dans les premières, les atomes des
enthalpies molaires (latentes) de liaison sont données par les
constituants peuvent se permuter entre eux sur tous les sites,
relations :
d’où le nom de substitution. Dans les secondes, des petits ato-
mes viennent se blottir entre les gros atomes métalliques qui Hm (A*) = 1/2 ZNAv HAA et Hm (B*) = 1/2ZNAv HBB (52)
forment l’ossature du réseau. Ils s’insèrent dans des environne-
ments plus ou moins gros selon qu’ils sont entourés par quatre avec Z le nombre de premiers voisins (coordinence),
atomes (sites tétraédriques) ou six atomes (sites octaédriques), NAv le nombre d’Avogadro.
d’où le nom d’insertion. Les atomes insérables sont toujours de
petit diamètre : H, B, N, C. Dans les alliages multiconstitués les Dans une solution ϕ de substitution A1-x Bx également isomor-
solutions solides peuvent être mixtes. Par exemple, dans un phe des deux corps purs et statistiquement désordonnée, on éta-
acier à ressorts qui est un alliage contenant les éléments Fe, Cr, blit de même l’enthalpie molaire (latente) de liaison en
Si, Mn et C les quatre premiers atomes sont en substitution tan- dénombrant les liaisons des trois types :
dis que le carbone est en insertion. À basse température, la
structure stable est ferritique α c.c. et le carbone s’y distribue Hm (ϕ) = ZNAv x (1 – x )HAB + 1/2 ZNAv x 2HBB
statistiquement sur tous les sites octaédriques, par ailleurs un + 1/2 ZNAv (1 – x )2HAA (53)
carbure de fer appelé cémentite est en équilibre avec cette fer-
rite. À haute température, le réseau est austénitique γ c.f.c. et le Par référence aux corps purs isomorphes de ϕ, l’enthalpie
carbone s’y distribue également statistiquement sur tous les molaire de mélange [relation (30)] de la solution est :
sites octaédriques, la cémentite s’est totalement dissoute dans
mix
l’austénite. Mais lors d’un refroidissement brutal le passage H m (ϕ) = Hm (ϕ) – xHm (A*) – (1 – x )Hm(B*)
γ → α s’effectue par un mécanisme de « cisaillement martensi-
soit :
tique » dans une seule direction cristallographique c bloquant
tous les atomes C dans les seuls sites octaédriques situés au H m (ϕ) = ZNAv x (1 – x )[HAB – 1/2(HAA + HBB )] = ω ϕx (1 – x )
mix
(54)
centre des faces perpendiculaires à la direction c . La ferrite se
trouve alors sursaturée en carbone et distordue dans la direc- En partant du raisonnement purement phénoménologique qui
consiste à supposer que la fonction enthalpie de mélange peut être
tion c (déformation cubique → quadratique avec c /a > 1), ce qui modélisée par un développement polynomial de la variable x, Hil-
engendre des contraintes élastiques énormes qui durcissent debrand avait établi la même équation en cherchant le polynôme
considérablement cette ferrite : elle est alors appelée marten- de plus bas degré qui s’annule en x = 0 et en x = 1. Le coefficient
site. C’est le mécanisme de la trempe des aciers connu empiri- ω ϕ est le premier coefficient ajustable du modèle, on peut l’appeler
quement depuis l’antiquité. coefficient d’interaction énergétique entre les constituants.

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solides, ces états de corps purs sont en général purement spécula-


Ordres de grandeur des énergies de liaison : la sublimation tifs. Ainsi, le fer, le cuivre ou l’aluminium n’existent pas en struc-
ou la vaporisation d’un métal représentent la rupture des ture hexagonale compacte et, pour décrire une phase de cette
liaisons interatomiques et la mise en désordre gazeux des ato- structure, il faut introduire des termes de changement d’état de
mes, à laquelle correspond une certaine entropie latente de référence. Dans la pratique diagrammatique la communauté inter-
mise en désordre. Pour tous les métaux, cette entropie est de nationale a établi des banques de données thermodynamiques qui
l’ordre de 100 J/(mol · K). Pour les corps purs ces transitions représentent ces changements d’état de tous les corps purs. En
sont isothermes et s’effectuent à enthalpie libre constante, par particulier, la banque SGTE (Scientific Group Thermodata Europ).
exemple : ∆vapH = T∆vapS. Mais dans cette première approche nous préférons utiliser une
Si la vaporisation s’effectue à 2 000 K, l’enthalpie molaire de représentation plus simple et didactique. Nous prendrons comme
séparation des atomes est donc de l’ordre de 200 000 J/mol. exemple le changement d’état (solide α → liquide L du corps
Pour traduire cette énergie en unité électronvolt par liaison, il pur A* auquel correspond la température de fusion TA* et l’entro-
faut diviser la valeur précédente par le faraday qui vaut à peu pie de fusion ∆FusSA* . La fusion d’un métal est une mise en désor-
près 100 000 C/mol. Les énergies de Bragg-Williams HAA , HBB dre 10 fois moins importante que sa vaporisation et l’entropie de
ou HAB sont donc de l’ordre de grandeur de l’électronvolt par fusion de presque tous les métaux est voisine de 10 J/(mol · K). À
liaison. Mais les enthalpies de mélange sont beaucoup plus fai- la fusion, le corps pur présente la même enthalpie libre molaire
bles de l’ordre de quelques centièmes d’électronvolt par liaison dans ses deux états liquide et solide :
seulement. Les coefficients ω ϕ sont donc de l’ordre de grandeur L α
de quelques milliers de J/mol au maximum et souvent beau- µ A∗ = µ A∗ (57)
coup plus faibles, ils peuvent être positifs (solution répulsive
endothermique) ou négatifs (solution attractive exothermique). La relation (18) donne la signification de la dérivée partielle de G
La difficulté rencontrée par les physiciens du solide, qui souhai- par rapport à T :
 ∂G
tent établir les énergies de liaison dans les alliages par un calcul
-------- =–S (58)
ab initio, à partir des lois de la mécanique quantique, vient pré-  ∂T  P,ni
cisément de cette différence d’ordre de grandeur entre les éner-
gies des liaisons interatomiques qui sont les grandeurs En regroupant les relations (57) et (58) et en se souvenant que le
évaluées avec un certain degré d’approximation et les coeffi- potentiel chimique du corps pur s’identifie à son enthalpie libre
cients d’interaction 100 fois plus petits. Les erreurs d’évaluation molaire, il vient :
se trouvent exaltées dans la combinaison linéaire (54) :
α L L α
ωAB = HAB – 1/2(HAA + HBB ) d( µ A∗ – µ A∗) = dT (S A∗ – S A∗) = dT ∆FusSA* (59)

au point que même le signe des coefficients d’interaction est Sur un intervalle de température moyennement étendu, cette
souvent difficile à déterminer. Si la physique du solide a marqué relation peut être intégrée en considérant l’entropie de fusion
des succès certains en cette fin de siècle, en particulier pour ∆fusSA* comme une constante :
expliquer la forme de certains diagrammes de phases et la α L
nature des structures stables des corps purs, elle est encore très µ A∗ – µ A∗ = ∆FusSA*(T – TA*) (60)
loin de modéliser quantitativement un diagramme réel par ces
méthodes ab initio. Cette équation fait intervenir deux paramètres qui sont mesura-
bles pour un métal réel ∆FusSA* et TA* . Il existe une relation simi-
laire pour le corps pur B * et une relation de même type pour
Dans le dénombrement des liaisons de Bragg-Williams, la solu-
chaque variété allotropique (réelle ou spéculative, par exemple
tion a été supposée statistiquement désordonnée. En négligeant α
toutes les entropies d’excès, l’entropie de mélange s’identifie à pour µB ∗ ), de chacun des corps purs. Pour les variétés spéculati-
l’entropie idéale de configuration, au moins si la solution est de ves, les deux constantes seront toujours des coefficients ajustables
substitution. La forme générale de cette entropie a été donnée à la (pour un métal réel) puisque les entropie et température de fusion
relation () et s’écrit ici : de ces phases fictives ne peuvent pas être mesurées.
mix En désignant par x L et x α les fractions molaires du constituant B
S m (ϕ) = – R [x ln(x ) + (1 – x ) ln(1 – x )] (55) dans les phases L et α, l’enthalpie libre du solide α et du liquide L
s’écrivent par référence aux deux constituants purs liquides :
L’enthalpie libre de mélange d’une phase ϕ par référence à ses
deux corps purs isomorphes vaut donc : Gm
mix
(L) = ω Lx L(1 – x L) + RT [x L ln(x L) + (1 – x L) ln(1 – x L)] (61)
ω ϕx (1
mix
G m (ϕ) = – x ) + RT [x ln(x ) + (1 – x ) ln(1 – x )] (56) G m (α) = ω αx α(1 – x α) + RT [x α ln(x α) + (1 – x α) ln(1 – x α)]
mix

C’est cette expression que l’on appelle modèle de la solution + x α∆fusSB*(T – TB*) + (1 – x α)∆fusSA*(T – TA*) (62)
régulière. Dans l’approche phénoménologique de Hildebrand
comme dans l’approche statistique de Bragg-Williams et Bethe le
coefficient ω ϕ est strictement enthalpique, mais il est possible
aussi de le faire varier linéairement en T pour faire apparaître une
5.4 Récapitulation des paramètres
entropie d’excès parabolique. C’est ce que l’on appelle la solution variables du modèle
quasi régulière.
Dans nos modèles de diagrammes binaires, nous avons introduit
au maximum quatre phases distinctes, les deux solutions solides
primaires α et β, une seule solution solide intermédiaire γ et le
5.3 Changements d’états de référence liquide L. Chacune des phases α, β et L est décrite comme une
des corps purs solution régulière avec son propre coefficient d’interaction ω ϕ.
D’autre part, les solutions solides primaires α et β possèdent cha-
Dans un même calcul diagrammatique, l’état de référence de cune leur entropie et température de fusion de corps pur isomor-
chaque corps pur doit rester le même pour toutes les phases phe. En pratique, nous affecterons toujours la valeur 10 J/(mol · K)
coexistantes. Peu de phases seront donc représentées par réfé- aux entropies de fusion des corps purs stables ou métastables
rence aux deux corps purs isomorphes. D’ailleurs pour les phases dans le diagramme. Ces deux phases sont donc décrites par leurs

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deux paramètres ω ϕ et par leurs deux températures de fusion de


corps pur qui seront lues directement sur le diagramme calculé. La
phase γ est toujours choisie de stœchiométrie A2B, avec la possi- 900

Température (°C)
bilité d’introduire aussi des atomes A sur le second sous-réseau, a
décrivant ainsi une nouvelle interaction régulière entre les deux 870
types d’atomes distribués sur ce second sous-réseau. Pour décrire
l’attraction qui s’exerce entre les atomes A et B qui forment le Liquide
composé stœchiométrique A2B, une enthalpie de formation du 840
composé stœchiométrique à partir des corps purs solides A* et B *

Li
est introduite ainsi que l’enthalpie positive représentant la compo-

qu
810

id
sition extrême métastable A2A. Finalement nous disposons au total

us
So
de 11 paramètres ajustables pour créer tous nos diagrammes :

li d
— 4 coefficients d’interaction régulière dans les phases α, β, L et

us
780
second sous-réseau γ ;
— 3 températures de fusion de A* sous les variétés α, β et γ ;
— 2 températures de fusion de B * sous les variétés α et β ; 750
Solide a
— 1 enthalpie de formation de A2B et 1 enthalpie de corps pur
A2A*. 720

(kJ/mol)
6. Divers types b

de diagrammes binaires 0

mix
en relation avec la nature Gm –1

des interactions ω –2
L

L
–3
6.1 Systèmes à faible interaction 600 °C
avec miscibilité totale solide –4
a
785 °C
La figure 4 correspond à un système simple où les deux consti- –5 a
tuants sont miscibles en toutes proportions dans la phase liquide L
comme dans la solution solide α. Deux phases seulement occupent a
le diagramme d’équilibre. À haute température, la phase L et, à –6 a
L
basse température, la phase α. Les corps purs isomorphes A* et 600 °C
B * fondent respectivement à 900 et 700 oC. Entre ces deux tempé- –7
ratures, le diagramme présente deux lignes conjugées liquide et 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
solide appelées liquidus et solidus formant un fuseau de coexis- Fraction molaire xB
tence des phases qui se referme aux extrémités du diagramme sur
les deux points de fusion des corps purs. Les deux interactions Les courbes conjuguées liquidus et solidus forment un seul
régulières sont choisies ici faiblement répulsives, ω L = 750 J/mol et fuseau fermé aux deux points de fusion des corps purs. À 785 °C,
ω α = 2 000 J/mol, ce qui représente une enthalpie de mélange de les courbes d'enthalpie libre de mélange du solide et du liquide
se coupent, définissant une tangente commune qui engendre un
seulement quelques centaines de J/mol au centre du diagramme segment de conjugaison sur le diagramme.
(187 J/mol en phase liquide et 500 J/mol en phase solide). Le dia-
gramme de phases est représenté sur la figure 4a tandis que les
enthalpies libres de mélange calculées à 600 oC et à 785 oC sont Figure 4 – Système présentant une miscibilité totale en phase
tracées sur la figure 4b avec les deux liquides purs comme états liquide et en phase solide. Interactions faiblement répulsives
de référence. À 600 oC, les courbes L et α sont totalement disjoin-
tes et la phase α est stable à toute composition. Au contraire à
785 οC, les courbes L et α se coupent au voisinage de la composi-
tion xB = 0,45 et une tangente commune définit un segment de répulsive des interactions ; avec des interactions faiblement attrac-
conjugaison liquide ↔ solide. Le segment de tangente commune tives, le fuseau se situerait au-dessus de la ligne droite (système
αL de la figure 4b constitue la plus basse enthalpie libre réalisable Ag-Au [M 70-103]) et, pour deux phases presque idéales, il enca-
entre ces deux compositions ; le mélange biphasé (α + L) est donc, drerait cette droite (système Cu-Ni [M 70-151].
dans ce domaine, l’équilibre stable. À sa gauche, le domaine α
monophasé et à sa droite le domaine L monophasé. Dans le
domaine biphasé et pour une même température, les potentiels
chimiques sont indépendants de la composition (ils se lisent à 6.2 Systèmes à forte interaction
l’intersection de la double tangente avec les axes verticaux des répulsive : lacune de démixtion
deux corps purs, § 2.7), les compositions des deux phases sont en phase solide
donc invariantes avec la composition moyenne, seul le rapport de
leurs masses évolue pour satisfaire la règle des segments inverses
(§ 3.2). 6.2.1 Démixtion dans une phase
On observe sur la figure 4a que le fuseau liquidus ↔ solidus se
place ici en dessous de la ligne droite imaginaire reliant les deux Lorsque les conditions de stabilité chimique ne sont plus satis-
points de fusion. Cette propriété est liée à la nature faiblement faites dans une phase, celle-ci ne peut plus exister à la composition

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considérée. Pour une phase binaire, il n’existe qu’une seule condi-


tion de stabilité chimique mais elle peut se traduire sous des for-
400

(J/mol)
mes équivalentes variées : 527 °C

 ∂µ  ∂ 2G m   ∂ 2G m 
Mix Mix 0
--------i > 0 ↔  -----------------------  ↔  -

mix
- > 0 ----------------------- >0 (63)
 ∂x i P, T

Gm
 ∂x 12  P, T  ∂x 22  P, T 627 °C
– 400
condition spinodale :
– 800
 ∂ 2G m Mix
 727 °C
 -----------------------
- =0
 ∂x 22  P, T – 1 200

On désigne par condition spinodale, la condition limite de stabi- 827 °C


lité. Pour une phase binaire, elle exprime que l’enthalpie libre de – 1 600
mélange (isobare, isotherme) considérée comme une fonction TC = 930 °C
de x2 présente un point d’inflexion. Dans le domaine de stabilité, la – 2 000
concavité de cette fonction est tournée vers le haut (fonction
convexe), tandis que dans le domaine d’instabilité la concavité est – 2 400
tournée vers le bas. Pour des raisons entropiques, la phase est tou-
jours stable au voisinage des deux corps purs, les points spino- 1 027 °C
daux sont donc toujours en nombre pair. La plupart des phases à – 2 800
domaine instable ne présentent que deux points spinodaux entre 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
lesquels la monophase ne peut pas exister. Elle se sépare alors en Fraction molaire xB
deux phases isomorphes mais de compositions distinctes, chacune
située dans l’un des deux domaines de stabilité qui encadrent les On a choisi ω = 20 000 J/mol. À basse température, la fonction de
Gibbs présente deux points d'inflexion appelés points spinodaux entre
deux points spinodaux. C’est ce que l’on appelle une démixtion. lesquels la phase est instable. La tangente double (points binodaux)
C’est un phénomène très général qui peut se produire aussi bien définit les compositions des phases en équilibre dans la lacune de
en phase liquide qu’en phase solide. miscibilité. Entre ces points binodaux et les points spinodaux la
monophase peut exister en équilibre métastable. Les points binodaux
La figure 5 montre l’évolution avec la température de l’enthalpie et spinodaux se confondent à la température critique 930 °C.
libre intégrale de mélange d’une solution régulière présentant un
coefficient d’interaction positif ω = 20 000 J/mol. À chaque tempé-
rature les points spinodaux sont les points d’inflexion tandis que Figure 5 – Évolution avec la température de l’enthalpie libre
les compositions d’équilibre sont les points de contact avec la tan- de mélange dans une phase à forte interaction répulsive
gente commune qui représente la plus faible enthalpie libre
possible : les points binodaux. Entre les points binodaux et les
points spinodaux, il existe de part et d’autre du diagramme deux XIXe siècle. Un liquide congruent se solidifie comme un corps pur
domaines de concentration où la concavité de la fonction de Gibbs à température constante et sans changer de composition. Les allia-
est tournée vers le haut. La monophase ϕ y est donc thermodyna- ges Au-Ni [M 70-125] illustrent ce type de diagramme. La situation
miquement stable même si son état monophasé ne correspond congruente, que nous expliciterons au paragraphe 6.2.3, est assez
pas à la plus basse enthalpie libre possible, il s’agit donc de deux fréquente dans la nature, elle est désignée en thermodynamique
domaines monophasés métastables. Lorsque la température aug- par « théorème de Gibbs-Konovalov » (bien que ces deux savants
mente les points binodaux et les points spinodaux se ressèrent. À ne se soient jamais rencontrés) ;
une certaine température, appelée température critique de démix- — souvent aussi la fusion intervient en dessous de la tempéra-
tion TC , ils viennent se confondre en un seul point où la tangente ture critique de démixtion solide, on observe alors un équilibre
coupe quatre fois la courbe de Gibbs. Avec le modèle régulier la invariant à trois phases, deux solides et le liquide (sous pression
lacune de démixtion, qui représente l’ensemble des points d’équi- constante la variance de Gibbs est alors égale à zéro, ce qui signi-
libre binodaux, est toujours symétrique en concentration par rap- fie que la température et les compositions de toutes les phases
port à la fraction molaire médiane, pour retrouver une lacune sont des constantes physiques). Deux situations peuvent alors se
dissymétrique il faudrait compliquer le modèle mathématique pour présenter engendrant deux variantes de diagrammes. Soit le
le rendre dissymétrique. Au-dessus de la température critique, liquide invariant apparaît à une concentration intermédiaire par
T > TC , la phase considérée est stable à toute concentration. rapport à celles des deux phases solides, on obtient alors un équi-
Comme les interactions en phase solide sont généralement plus libre eutectique (figure 8), correspondant par exemple au système
fortes qu’en phase liquide la température critique du liquide est Ag-Cu [M 70-104]. Soit le liquide invariant apparaît à une concen-
plus basse que celle du solide. Vers les basses températures, la tration extérieure au segment des phases solides, on engendre
solidification du liquide se produit en général avant sa démixtion ainsi un équilibre péritectique (figure 9 et système Ag-Pt, non
et, dans la plupart des systèmes métalliques, le liquide est homo- représenté ici). Nous détaillons ces diverses situations dans les
gène. Nous rencontrerons cependant des cas de démixtion en trois paragraphes suivants.
phase liquide.
Dans ce paragraphe nous simulerons quatre situations dis- 6.2.2 Lacune de démixtion solide complète,
tinctes : un seul fuseau de solidification
— la lacune de démixtion solide est complète et la solidification
présente un seul fuseau (figure 6), c’est le cas par exemple des L a fi g u r e 6 i l l u s t r e c e t t e s i t u a t i o n , e l l e c o r r e s p o n d à
alliages Au-Pt du diagramme [M 70-126] ; ω α = 12 000 J/mol et ω L = 3 000 J/mol. Les températures de fusion
— mais souvent l’interaction répulsive engendre une solidifica- des corps purs sont très différentes. La figure 6b montre les équi-
tion en deux fuseaux avec un minimum commun au solidus et au libres réalisés à 437 oC, température où apparaissent deux seg-
liquidus (figure 7) : cette situation s’appelle une congruence, elle ments de conjugaison séparés, le segment de démixtion
avait été prévue théoriquement par Gibbs dès 1875 et observée solide ↔ solide, d’une part, et l’équilibre α ↔ L aux fortes concen-
dans beaucoup de systèmes par Konovalov, élève de Mendéléev trations en B. On retrouvera ce type de diagramme dans le sys-
qui prépara sa thèse à Leipzig et à Saint-Pétersbourg à la fin du tème Au-Pt [M 70-126].

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Température (°C)
900
900
Température (°C)

a
a Liquide
Liquide 800
800

700
700

600
600

500
500 a C
C
400
a a
400
a
300
300

m (J/mol)
2 000
(J/mol)

437 °C – 500

ix
1 500

Gm
– 1 000
mix

L
Gm

650 °C
1 000 – 1 500

500 – 2 000 L
a

0 – 2 500
L
– 3 000
– 500 L
a
– 3 500 a
– 1 000 a
a L
– 4 000
– 1 500 a L b
b – 4 500
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
– 2 000
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 Fraction molaire xB
Fraction molaire xB 0
m (kJ/mol)

Le liquidus à faible pente est caractéristique des liquides proches de la


démixtion
–1
ix
Gm

L
Figure 6 – Système à forte interaction répulsive présentant 611 °C
une lacune de miscibilité en phase solide complète jusqu’au point
–2
critique et un fuseau unique liquidus-solidus. Le liquidus à faible a
pente est caractéristique des liquides proches de la démixtion L

–3
6.2.3 Lacune de démixtion solide complète,
solidification congruente
–4
La figure 7 est une simulation de démixtion solide avec solidifi- a
cation congruente à minimum. Elle est engendrée avec les coeffi-
cients d’interaction suivants ω α = 12 000 J/mol et ω L = 5 000 J/mol. –5
Les températures de fusion des corps purs sont choisies plus voi- c
sines que dans le cas précédent. La figure 7b représente les fonc-
tions de Gibbs de mélange à 650 oC, température située au-dessus 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
du point critique de la phase solide et à laquelle les courbes solide Fraction molaire xB
et liquide se coupent en deux points engendrant deux équilibres Les courbes conjuguées liquidus et solidus forment deux fuseaux de
α ↔ L disjoints, donc deux fuseaux. Cette situation se retrouve part et d'autre d'un minimum commun situé à 611 °C, appelé point de
dans le diagramme du système Au-Ni [M 70-125]. congruence. À la température de congruence, les courbes de Gibbs
sont tangentes entre elles (figure 7c).
■ Justification du théorème de Gibbs-Konovalov
La figure 7c montre la situation des courbes d’enthalpie libre de Figure 7 – Système à forte interaction répulsive présentant
mélange du solide et du liquide à la température de fusion une lacune de miscibilité en phase solide complète
congruente 611 °C. La courbe du liquide est entièrement contenue jusqu’au point critique

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dans celle du solide sauf au point de congruence où ces deux cour-

Température (°C)
bes présentent une tangente commune. En ce point particulier, les 900
potentiels chimiques des deux constituants (qui se lisent à a
l’intersection de cette tangente avec les axes verticaux des corps
800
purs (§ 2.7) sont égaux dans les deux phases pour la même
concentration xB = 0,64. La phase solide et la phase liquide en Liquide
équilibre sont donc de même composition et la solidification se fait 700
à température constante qui est un minimum commun au solidus E
et au liquidus. En effet, si l’on s’écarte si peu soit-il vers les basses a a
températures, les deux courbes de la fonction de Gibbs ne se cou- 600
pent plus et, si l’on s’écarte vers les hautes températures, on
retrouve une situation analogue à celle de la figure 7b. Le point de 500
congruence peut donc être considéré comme un double segment
de conjugaison entre une phase liquide et une phase solide équi-
titres. Du point de vue de la règle des phases, la condition supplé- 400
L α
mentaire x 2 = x 2 ramène la variance du système isobare biphasé
à zéro. Ce point est donc un point isolé dont les coordonnées sont 300
des constantes physiques.
Au paragraphe 6.3, nous rencontrerons la même situation pour
les solutions attractives mais avec une inversion de sens dans 0

(J/mol)
l’échelle des températures : le point de congruence présentera 637 °C
alors une tangente horizontale commune au liquidus et au solidus
mais en un maximum de température (figure 12). –500

mix
Gm
Il est bien sûr possible de démontrer mathématiquement le théo-
rème de Gibbs-Konovalov : –1 000

« Toute rencontre entre deux courbes conjuguées du dia- –1 500


gramme de phases est une rencontre tangentielle autour d’un
extremum commun en température ».
– 2 000

La démonstration un peu longue repose sur la comparaison des L


ordres de grandeur des infiniment petits dx2 , dT et dP. Elle – 2 500 a
n’apporterait rien à cet exposé, sinon de démontrer aussi que la
variable pression se comporte, au point de congruence, exacte- L
– 3 000
ment comme la variable température. Un point de congruence est
également un extremum de la variable P dans une coupe iso- a b
therme du diagramme. – 3 500
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
Exemple : dans l’équilibre congruent de vaporisation d’une
solution liquide, les phases gazeuse et liquide ont la même composi- Fraction molaire xB
tion sur une coupe isotherme du diagramme, en un minimum ou en
Le palier invariant à trois phases fait totalement partie du solidus
un maximum de pression, et sur une coupe isobare, en un minimum
ou en un maximum de température. Ces points de vaporisation
congruente s’appellent également points azéotropes et les mélan- Figure 8 – Diagramme eutectique engendré par l’intersection d’une
ges correspondants les mélanges azéotropes. L’alcool à 90 % en lacune de miscibilité en phase solide avec un liquidus à deux fuseaux
volume, vendu en pharmacie, est un mélange azéotrope que l’on ne
peut plus séparer de son eau par distillation.
ter les lignes de solidification. Une disposition semblable à celle de
Du point de vue de la règle des phases de Gibbs, si l’on aug- la figure 7 mais avec une lacune de démixtion plus haute en tem-
mente d’une unité le nombre de constituants du système la condi- pérature, engendre alors un équilibre eutectique tel que celui
tion congruente d’équicomposition des deux phases introduit aussi représenté sur la figure 8, tandis qu’une disposition semblable à
une condition restrictive complémentaire, la variance reste donc celle de la figure 6 où les températures de fusion sont très éloi-
égale à zéro, en sorte que les points de congruence peuvent exister gnées engendre un équilibre péritectique tel que celui représenté
dans les systèmes de multiplicité quelconque. Dans sa thèse, sur la figure 9.
Konovalov a recherché de très nombreux exemples d’azéotropes
ternaires. ■ Équilibre invariant eutectique binaire
Il n’est pas rare de rencontrer plusieurs points de congruence Il est schématisé par la réaction :
dans un même diagramme de phases, par exemple le système liquide ↔ (solide 1 + solide 2)
Fe-Cr représenté sur la figure [M 70-146] présente 3 points de
congruence aux coordonnées suivantes T = 1 507 oC, xCr = 0,23 ; Dans le cas de la figure 8 les deux solides sont isomorphes et
T = 830 oC, xCr = 0,075 et T = 820 oC, xCr = 0,48. proviennent de l’équilibre de démixtion solide ↔ solide. Mais la
situation eutectique est plus générale et peut concerner deux soli-
des quelconques, comme sur la figure 10. Lors de la solidification
6.2.4 La lacune de démixtion solide intercepte du liquide eutectique (celui de l’équilibre invariant à trois phases),
la ligne de solidus : équilibres eutectique il se forme simultanément deux phases solides distinctes. La réac-
ou péritectique tion s’opère à température constante. Le liquide eutectique est
celui qui fond à plus basse température, c’est là l’origine du terme
Lorsque la lacune de démixtion remonte en température (parce eutectique (du grec eu = bien et teikein = fondre). Le palier eutec-
que les interactions répulsives sont plus fortes), elle vient intercep- tique appartient entièrement à la courbe de solidus.

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dans le cas de la figure 9, les deux solides sont isomorphes et pro-


viennent de l’équilibre de démixtion solide, mais la réaction péri-
Température (°C)

900
a tectique est plus générale et peut concerner deux phases solides
quelconques comme sur la figure 13, qui représente un système à
800 interaction attractive. Juste à la température invariante péritecti-
Liquide que, le liquide et le solide qui reste stable à haute température pré-
700 sentent l’un et l’autre un domaine monophasé plus ou moins
étendu de part et d’autre du palier invariant, tandis que le nouveau
solide qui apparaît à cette température, appelé solide péritectique,
600 présente une composition unique située sur ce palier. D’un côté de
a cette composition le palier marque la fin de la solidification et par-
ticipe à la ligne de solidus, de l’autre côté au contraire le liquide
500 reste en excédent après la réaction péritectique qui provoque la
redissolution de toute la phase solide primaire. Contrairement à la
400 situation eutectique, un équilibre péritectique ne marque donc pas
P la fin de la solidification et il est fréquent que plusieurs équilibres
de ce type s’enchaînent en cascade vers les températures décrois-
300 santes, par exemple sur le diagramme Cu-Zn [M 70-157], système
a
à interaction attractive. La figure 9b mise en correspondance avec
le diagramme de phases 9a montre les enthalpies libres de
1 mélange du liquide et du solide à la température invariante péri-
(kJ/mol)

tectique de 358 oC : les deux phases présentent des points spino-


358 °C
daux mais les courbes sont peu creusées parce que l’équilibre
0 péritectique intervient à une température proche des points criti-
mix

ques de démixtion, pour les deux phases. La tangente triple touche


Gm

L L deux fois la courbe du solide et une seule fois celle du liquide.


–1 Les paramètres de modélisation sont ici ω α = 11 500 J/mol et
ω L = 11 000 J/mol.
–2 a Le solide péritectique stable en dessous du palier fond en
s’entourant du solide stable au-dessus du palier, d’où le terme péri-
tectique (du grec peri = autour et teikein = fondre). La fusion péri-
–3
tectique est également appelée fusion incongruente.

–4
6.2.5 Équilibre eutectique sans isomorphisme
–5 a des solutions solides
b
La figure 10a représente un équilibre eutectique très semblable
–6 à celui de la figure 8a, mais ici les deux solutions solides ne sont
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 pas isomorphes. La figure 10b représente les enthalpies libres de
Fraction molaire xB mélange des trois phases α, β et L, à la température invariante
eutectique 670 oC. La tangente triple touche une seule fois chacune
Le palier invariant à trois phases ne fait partie du solidus qu'entre les des courbes, bien que la phase α présente deux spinodaux. Les
deux compositions solides
figures 10b et 10c montrent les courbes d’enthalpie libre de
mélange au-dessus et en dessous de la température eutectique TE .
Figure 9 – Diagramme péritectique engendré par l’intersection
Au-dessus de TE , il existe deux équilibres distincts du liquide soit
d’une lacune de miscibilité en phase solide avec un fuseau unique
avec α soit avec β, tandis qu’en dessous de TE le liquide n’est plus
liquidus-solidus
en concurrence pour l’équilibre. Les paramètres de modélisation
sont ici les suivants ω α = 20 000 J/mol, ω β = 12 000 J/mol,
ω L = 10 000 J/mol. La transition α ↔ β du corps pur A* requiert
1 000 J/mol d’enthalpie latente et la transition inverse β ↔ α du
Les conditions imposées au modèle pour engendrer ce dia- corps pur B *, 3 000 J/mol.
gramme sont ω α = 20 000 J/mol et ω L = 10 000 J/mol. Le dia-
gramme Ag-Cu [M 70-111] est de ce type. Les liquides eutectiques
sont utilisés en métallurgie pour obtenir des points de fusion à
basse température soit en fonderie du moulage, soit en soudage. 6.2.6 Équilibre monotectique
Exemple : le mélange eutectique Ag-Cu a longtemps servi Dans les systèmes fortement répulsifs à relativement bas points
d’alliage de métal d’apport pour réaliser des soudures appelées bra- de fusion, une lacune de démixtion peut apparaître dans le liquide,
sures à l’argent. en dessous de sa température critique. Lorsque le solide primaire
La figure 8a représente le diagramme de phases en correspon- apparaît au sein des deux liquides, il se forme un équilibre inva-
dance avec la figure 8b montrant les enthalpies libres de mélange riant à trois phases. Cet invariant est appelé équilibre monotec-
des deux phases liquide et α à la température eutectique 637 oC. La tique. La composition du solide est extérieure au segment de
tangente triple touche deux fois la courbe solide et une fois la conjugaison binodal des liquides. Le cas contraire est extrêmement
courbe liquide. rare et sera étudié au paragraphe 6.4.1 (équilibre syntectique).
La figure 11a représente cette situation diagrammatique et la
■ Équilibre invariant péritectique binaire figure 11b les courbes d’enthalpie libre du liquide et du solide
Il est schématisé par la réaction : à la température monotectique. Ici les coefficients d’interaction
choisis sont égaux en phase liquide et en phase solide
(liquide + solide 1) ↔ solide 2 ω α = ω L = 20 000 J/mol. À 750 o C, la phase solide β n’est pas

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Température (°C)
1 000 1 000

(J/mol)
a c
500

mix
900

Gm
0
Liquide 727 °C
– 500
800
– 1 000
a
700 E – 1 500
a
b – 2 000
600
– 2 500 a b b
– 3 000 L
500 L
L
– 3 500

1 000 1 000

(J/mol)

(J/mol)
670 °C b d
500 500

mix

mix
Gm

Gm
0 0
627 °C
– 500 – 500

– 1 000 – 1 000

– 1 500 – 1 500
a
– 2 000 a – 2 000
L
L
– 2 500 – 2 500
b b
– 3 000 a – 3 000
L b
– 3 500
a b
– 3 500

– 4 000 – 4 000
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
Fraction molaire xB Température (°C)

À la température eutectique 670 °C, les trois courbes d'enthalpie libre de mélange ont une tangente commune. Le palier invariant à trois phases fait
totalement partie du solidus. Au-dessus de cette température, il existe deux équilibres monovariant distincts solide-liquide.

Figure 10 – Diagramme eutectique engendré par l’intersection de la courbe de Gibbs de la phase liquide avec les courbes de Gibbs de deux phases
solides distinctes

encore solidifiée, elle apparaîtra à plus basse température et, 6.3.1 Miscibilité totale en solution solide primaire
selon les cas, en équilibre invariant eutectique ou péritectique avec et solution solide intermédiaire
α et L. sous le solidus
Cette situation s’observe lorsque les interactions attractives,
6.3 Systèmes à interaction attractive (ω < 0) sont moyennement fortes, de l’ordre du kilojoule par mole,
entre constituants et les points de fusion des corps purs suffisamment hauts en
température pour que la phase intermédiaire n’atteigne pas le soli-
Lorsque les constituants s’attirent fortement, il apparaît dans le dus. Elle engendre deux équilibres congruents à maximum. La
diagramme de phases une ou plusieurs solutions solides intermé- figure 12a illustre ce type de diagramme. Les courbes conjuguées
diaires (ou des composés définis). Nous limitons notre modélisa- de solidification forment deux fuseaux qui se referment en un
tions au cas où se forme un seul composé, situé au voisinage de point maximum congruent et dont la composition est souvent pro-
la composition A2B ; cette représentation permet de simuler tous che de celle de la phase intermédiaire. Celle-ci présente également
les types d’équilibre invariants individuels qui peuvent se présen- un équilibre congruent avec la solution solide primaire en un maxi-
ter dans les diagrammes binaires à interaction attractive. En exa- mum. En dessous de cet invariant, la phase intermédiaire présente
minant les diagrammes réels, le lecteur pourra ensuite interpréter deux équilibres disjoints avec la solution solide primaire, chacun
sans difficulté toutes les situations engendrées par la présence de situé d’un côté de la stœchiométrie structurale du composé. Les
plusieurs solutions solides intermédiaires, ce qui n’apporte pas de figures 12b et 12c montrent les situations des courbes d’enthalpie
situation nouvelle. libre de mélange des phases α, γ et L aux deux températures de

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Température (°C)
1 000
a
Température (°C)

950
C a 900 Liquide
925 a
800
900
Liquide Liquide 700
875
600
850
500
a
825 g
400
800
300
775
4

(kJ/mol)
b
1 000
(J/mol)

2
b

mix
Gm
0 a
mix

500
Gm

a L g
–2
0 a
989 °C L
–4

– 500
–6
828 °C
L
–1 000 –8

– 10
–1 500 a L L
– 12
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
– 2 000 Fraction molaire xB
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
Fraction molaire xB 2
(kJ/mol)

c
0
Le palier invariant met en équilibre deux phases liquides et une seule
713 °C
phase solide et n'appartient pas au solidus. La solidification se
mix

–2
Gm

poursuivra à plus basse température


–4
a g
–6
Figure 11 – Diagramme monotectique engendré par l’intersection L
d’une lacune de miscibilité en phase liquide avec un liquidus –8 g a
– 10

– 12

congruence 989 et 713 oC oC.


Sur chacune de ces représentations, – 14
on observe que deux courbes sont en situation de tangente L et α
pour la solidification congruente α et γ pour la transition de phase – 16
solide. La troisième courbe n’est pas en concurrence pour l’équili-
bre au voisinage de la composition congruente : on observe toute- – 18
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
fois à 713 oC que les courbes α et L se recoupent au voisinage de
xB = 0,97 ce qui engendre un petit segment de conjugaison solide- Fraction molaire xB
liquide très proche de B *. Cette modélisation est réalisée avec les Un composé intermédiaire g apparaît dans le diagramme qui
paramètres suivants ω α = – 12 000 J/mol, ω γ = – 10 000 J/mol (pour présente, à 713 °C, un équilibre congruent avec la solution
les interactions entre A et B sur le second sous-réseau du solide primaire a. La solidification est en deux fuseaux de part
composé γ ), ω L = – 5 000 J/mol. Le composé stœchiométrique A2B et d'autre d'une congruence à maximum à 989 °C.
a une enthalpie de formation de – 22 000 J/(formule) à partir des
corps purs solides. L’enthalpie de transition fictive α ↔ γ du corps Figure 12 – Système à forte interaction attractive en phase solide
pur A* est de 3 333 J/mol. et en phase liquide

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Température (°C)
1 000

Température (°C)
a 1 000
900 a
900
800
a Liquide
Liquide
800
700
a g
600 700

500 600
b
400 500
g b
300
400

(kJ/mol)
2

(kJ/mol)
4

mix
0

Gm
591 °C

mix
Gm
2
–2
g
a g
0
–4
681 °C a a b
–2 –6
b L
b L
L
–4 –8

a – 10
–6 g
g
L b
– 12
–8
g b
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
– 14
Fraction molaire xB
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
4
(kJ/mol)

Fraction molaire xB

Un composé intermédiaire g apparaît dans le diagramme qui fond de


2 façon congruente et qui engendre, de part et d'autre, deux équilibres
mix

eutectiques, avec le liquide et l'une des solutions solides primaires.


Gm

513 °C
0 Figure 14 – Système à forte interaction attractive en phase solide
a
et en phase liquide

–2
b L
g 6.3.2 Fusion péritectique du composé
–4 intermédiaire
a L
L Lorsque la stabilité du composé défini augmente ou lorsque les
–6 températures de fusion des corps purs décroissent, le composé
b
c défini apparaît au sein du mélange biphasé (liquide L + solide pri-
g maire α), par une réaction péritectique. La figure 13a illustre cette
–8 situation. Nous avons achevé la solidification par une seconde
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 réaction péritectique en cascade avec apparition de β dans la
Fraction molaire xB mélange biphasé (liquide L + solide γ ), suivi en température
décroissante par un équilibre monovariant entre L et β qui se ter-
Un composé intermédiaire g apparaît dans le diagramme qui
engendre, à 681 °C, un équilibre péritectique avec la solution mine au point de fusion du corps pur B *. Une autre situation serait
solide primaire a et le liquide. La seconde solution solide possible avec apparition de β dans un équilibre eutectique avec L
primaire b se décompose aussi sur un palier péritectique et γ. Il suffirait pour l’obtenir de remonter quelque peu la tempéra-
d'équilibre avec g et le liquide à 513 °C. ture de fusion du corps pur B *. La figure 13b montre la situation
des quatre courbes d’enthalpie libre de mélange α, β, γ et L à la
Figure 13 – Système à forte interaction attractive en phase solide température de fusion péritectique de γ, 681 oC. La tangente triple
et en phase liquide touche une seule fois les courbes α, γ et L. La phase β n’est pas en

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concurrence à cette température. Pour passer de la situation de la


figure 12 à celle de la figure 13, c’est essentiellement la b
température de fusion du corps pur B * qui a été fortement abais-
sée avec cependant une petite diminution de l’enthalpie de
formation du composé à partir des corps purs solides, qui est ici de a L
– 15 000 J/(formule), de manière à éviter la fusion congruente de γ, M
comme sur la figure 14.

6.3.3 Fusion congruente du composé intermédiaire Figure 16 – Disposition schématique du diagramme dans le cas d’un
équilibre métatectique à trois phases ( a , b et L)
Si l’enthalpie de formation du composé intermédiaire γ = A2B
devient plus négative, sa stabilité en température s’accroît et
dépasse la ligne droite imaginaire qui joint les deux points de Une situation symétrique dans l’échelle des températures, mais
fusion des corps purs. La fusion du composé devient alors tout aussi exceptionnelle que l’équilibre syntectique apparaît dans
congruente à maximum. C’est ce qui apparaît sur la figure 14a : le diagramme (Fe, Cr) [M 70-146] où la phase intermédiaire σ, qui
pour obtenir cette disposition nous avons porté l’enthalpie de for- se forme de façon congruente à partir de la solution primaire α,
mation du composé stœchiométrique à – 30 000 J/(formule). Deux engendre, à plus basse température, un équilibre eutectoïde avec
paliers invariants apparaissent alors à plus basse température, de une lacune de démixtion de cette même phase α.
part et d’autre du composé, avec la cristallisation des solutions
primaires α ou β au sein du mélange (γ + L). Chacun de ces équili-
bres est, selon les cas, de type eutectique ou de type péritectique, 6.4.2 Équilibre métatectique
ce qui donne quatre variantes possibles au diagramme. Nous
Il s’agit également d’un équilibre à trois phases, une phase
avons choisi les paramètres du modèle pour obtenir deux paliers
liquide et deux phases solides. Les règles de stabilité prévoient que
eutectiques, ce qui est fréquent. La figure 14b représente les
l’entropie d’un système s’accroît vers les températures croissantes
enthalpies libres de mélange des quatre phases α, β, γ et L, à la
(règle attribuée à Vant’Hoff, mais préalablement établie par Gibbs
température du plus bas eutectiques, 591 oC. On y observe, d’une
en 1876). En s’appuyant sur l’exemple du corps pur, on en déduit
part, une tangente triple aux trois phases γ, L et β et, d’autre part,
trop hâtivement que le liquide, qui possède davantage d’entropie
une tangente double aux phases α et γ. Les paramètres du modèle
que le solide, se place au-dessus du solide dans l’échelle des
sont ici ω α = – 6 000 J/mol, ω β = – 5 000 J/mol, ω γ = – 8 000 J/mol
températures. Dans un système à trois phases, cette habitude de
(pour les interactions entre A et B sur le second sous-réseau du
pensée peut être mise en défaut : c’est le bilan entropique des
composé γ ) et ω L = – 11 000 J/mol. Le composé stœchiométrique
trois phases qui doit être considéré et non l’entropie individuelle
A2B a une enthalpie de formation à partir des corps purs solides
des phases. Ainsi existe-t-il des situations diagrammatiques
de – 30 000 J/(formule). Les enthalpies des transitions fictives
(figure 16), d’ailleurs rares, où une solution solide intermédiaire β
α → β et α → γ du corps pur A* sont respectivement 3 000 J/mol et
engendre au refroidissement une phase liquide minoritaire L en
3 333 J/mol. L’enthalpie de transition fictive β → α du corps pur B *
coexistence avec une autre solution solide α. Le palier invariant est
vaut 3 000 J/mol.
analogue à un palier péritectique qui serait dessiné à l’envers dans
l’échelle des températures. La figure 16 illustre schématiquement
cette disposition : la solution solide β « fond » au refroidissement
6.4 Équilibres invariants syntectique engendrant simultanément le liquide et la phase α. On rencontre
et métatectique cette disposition dans les bronzes (Cu, Sn), diagramme [M 70-155],
où la phase γ contenant 27 atomes % d’étain fond à 640 oC au
refroidissement, engendrant beaucoup de phase solide ε et un peu
6.4.1 Équilibre syntectique de liquide. Évidemment en abaissant encore la température, ce
Dans certains systèmes très rares, on observe à la fois une liquide résiduel se solidifiera : dans le cas des bronzes cette
lacune de miscibilité liquide, caractéristique d’une interaction seconde solidification interviendra sur le palier péritectique à
répulsive entre les constituants de la phase liquide et la formation 415 oC. C’est cette fusion transitoire qui est évoquée dans l’éty-
d’une solution solide intermédiaire voire d’un composé défini, mologie du mot métatectique (du grec meta = transitoire et
caractéristique d’une interaction attractive en phase solide. La tekein = fondre).
phase intermédiaire est peu stable et forme, vers les températures
élevées, un équilibre invariant (sous pression imposée) avec les
deux phases liquides de la lacune de miscibilité. La figure 15 illus- 6.5 Règles des solubilités limites stable
tre schématiquement cette disposition diagrammatique exception- et métastable
nelle. On ne peut évidemment pas citer de nombreux exemples :
on rencontre l’équilibre syntectique dans le binaire (K, Pb) ; très
Dans ce paragraphe, nous évoquons, d’une part, les ruptures de
récemment, on vient de mettre en évidence la fusion syntectique
pente des lignes conjuguées aux extrémités des paliers à trois pha-
du composé CoSi2 . L’étymologie du mot syntectique vient du grec
ses et, d’autres part, le sens de variation de la solubilité limite d’un
sun = ensemble et tekein = fondre, elle exprime la fusion simulta-
élément d’alliage dans une solution primaire en équilibre métasta-
née en deux liquides.
ble ou en équilibre stable avec une seconde phase. Ces règles
découlent du même type de raisonnement graphique sur la posi-
tion de la tangente commune aux courbes d’enthalpie libre inté-
grale de deux phases (figure 17).
L1 + L2

S 6.5.1 Règle 1

a Une solution solide primaire en équilibre avec une seconde


phase métastable est plus riche en élément d’alliage que cette
même solution primaire en équilibre stable avec une autre
Figure 15 – Disposition du diagramme dans le cas d’un équilibre
phase.
syntectique à trois phases ( a , L1 , L2)

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6.5.2 Règle 2
mix
G
Aux extrémités d’un palier d’équilibre triphasé les extrapola-
tions métastables des lignes conjuguées externes sont toujours
Austénite Graphite situées dans les domaines biphasés stables.
g
Cémentite Fe3C

Les figures 17b et c illustrent cette règle générale sur l’exemple


particulier d’un équilibre invariant péritectique β ↔ (α + liquide). En
dessous de la température péritectique, il existe, sous le palier
invariant, deux équilibres biphasés monovariants stables (α + β) et
(β + liquide) : les compositions stables dans α et dans le liquide
sont alors extérieures aux compositions de ces mêmes phases
Fe xGraphite xCémentite xC C
dans leur équilibre métastable extrapolé (α + liquide). Cet équilibre
métastable sera observé si β ne germe pas. De façon semblable,
a l'austénite en équilibre métastable avec la cémentite est plus riche
en carbone que celle en équilibre stable avec le graphite au-dessus de la température péritectique l’équilibre stable est celui
de la tangente double (α + liquide) ; les deux équilibres (α + β) et
(β + liquide) sont alors spéculatifs car on n’observe pas de retard à
G mix la fusion et les compositions d’α et du liquide stables sont exté-
b T > TP rieures à celles des équilibres extrapolés.

a
6.6 Transformations à l’état solide
Liquide
b T = TP
Toutes les configurations de diagrammes que nous venons de
décrire en partant de la phase liquide se retrouvent à l’identique
b T < TP dans les transitions entre phases solides. Nous donnons ci-des-
sous les divers cas possibles avec leur terminologie.
xB
b ■ La démixtion en phase solide : α1 ↔ α2 est un équilibre mono-
variant entre deux phases isomorphes issues d’une même phase α
instable (voir § 6.2.1).
T
■ La transformation congruente α ↔ β est tout à fait semblable
à la fusion congruente que nous avons précédemment décrite
(§ 6.2.3) et (§ 6.3.3) on en trouvera de nombreux exemples
(a + Liquide) Liquide dans les diagrammes présentés : (Al, Mn) [M 70-115], 950 oC et
P 37,5 atome % Mn ; (Au,Cu) [M 70-123] compositions AuCu et
a
AuCu3 ; (Co, Fe) [M 70-143], quatre congruences entre phases soli-
(a + b) (b + Liquide) des sont présentes sur ce diagramme aux compositions Co3Fe,
b CoFe et CoFe3 .

■ La transformation ordre ↔ désordre de type α’ ↔ α concerne


xB l’équilibre entre une phase ordonnée à longue distance à basse tem-
c pérature et désordonnée à longue distance à haute température : on
dit qu’une phase est ordonnée à longue distance si on peut distin-
b et c aux extrémités d'un palier à trois phases les extrapolations guer sur son réseau cristallin deux ou plusieurs « sous-réseaux »
métastables des lignes conjuguées sont intérieures aux chacun préférentiellement occupé par un type d’atomes. C’est le cas
compositions de l'équilibre stable des composés définis. Il peut se produire que l’occupation des deux
c diagramme du palier péritectique avec prolongation des quatre sous-réseaux devienne identique en composition vers les hautes
lignes conjuguées externes dans les trois domaines biphasés températures, lors de l’accroissement du désordre atomique. On ne
peut plus alors distinguer les divers sous-réseaux et les deux phases
sont identiques. Si le désordre s’installe progressivement sur la
Figure 17 – Compositions des phases en équilibre métastable phase α’ jusqu’à l’obtention de la phase α la frontière de séparation
et en équilibre stable des deux phases sera constituée d’une ligne unique appelée ligne
critique. C’est le cas par exemple de la transition α’ ↔ α dans les
alliages (Al,Fe) [M 70-112] ou (Fe,Si) [M 70-169]. La transition sur la
ligne critique se fait alors sans enthalpie latente de transition ni
La figure 17a illustre et justifie cette assertion ; l’exemple choisi variation de volume, elle est appelée transition thermodynamique
est celui de l’austénite du binaire (Fe, C) en équilibre soit avec la du second ordre. L’étude détaillée de ces transitions critiques sort
cémentite métastable (fontes blanches), soit avec le graphite stable du cadre de cet exposé ; du point de vue diagrammatique, leur
(fontes grises). La tangente double de l’équilibre biphasé stable (ici particularité est l’existence de la ligne critique à la place du
γ + graphite) est toujours plus basse que celle de l’équilibre métas- fuseau de lignes conjuguées. La transition β’ ↔ β des laitons (Cu,Zn)
table (ici γ + cémentite). Cette baisse de la tangente réduit la solu- [M 70-157] est également de ce type, elle joue d’ailleurs un rôle tech-
bilité de l’élément d’alliage dans la solution primaire lors de la nologique très important dans la pratique : les tuyaux d’échangeurs
rupture de l’équilibre métastable : ici la graphitisation de la fonte de chaleur sont souvent réalisés en laiton β’, phase très fragile à
blanche entraînera une baisse de la teneur en carbone de l’austé- l’état ordonné ; pour laminer ce matériau il est indispensable de
nite depuis xCem jusqu’à xGr . désordonner cette phase, elle devient alors très malléable à haute

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température (600 oC). À l’inverse dans les laitons dits de décolle-


tage, qui peuvent s’usiner à très grande vitesse de coupe, c’est pré- Quelques règles utiles pour interpréter
cisément la fragilité de cette même phase ordonnée β’ qui permet la un diagramme de phase
rupture rapide du copeau sous l’outil de coupe.
1) La surface en haut du diagramme représente le liquide
■ Les transitions de Curie entre une phase ferromagnétique et monophasé, sauf si l’équilibre liquide ↔ gaz est représenté.
une phase paramagnétique représentent une mise en désordre des 2) Le franchissement d’une ligne oblique augmente ou
spins équivalente à une transition thermodynamique du second abaisse alternativement d’1 unité le nombre de phases présen-
ordre. Les lignes de Curie apparaissent sur les diagrammes de pha- tes dans un domaine : 1 → 2 → 1 → 2 → 1...
ses comme les lignes critiques : voir tous les alliages du fer sur les 3) Tout domaine bordé par une portion de contour horizontal
diagrammes qui suivent l’article. est biphasé.
4) Tout palier horizontal est triphasé.
■ Pour d’autres structures ordonnées, la transition 5) Une ligne verticale (sauf les axes des corps purs) est l’équi-
ordre ↔ désordre s’accompagne d’une enthalpie latente de valent de deux lignes obliques confondues, bordant le domaine
transformation ; elle est alors du premier ordre thermodynamique, monophasé d’un composé intermédiaire.
comme toutes les autres transitions de phases précédemment étu- 6) Deux lignes conjuguées ne se rencontrent qu’en un extre-
diées, telle la fusion. Les dispositions diagrammatiques de ces mum de température (Gibbs-Konovalov) sauf sur les axes verti-
transformations sont alors semblables à celles déjà rencontrées. Par caux des corps purs. Cette règle s’applique également à la
exemple, les congruences signalées dans les alliages AuCu et fusion congruente d’un composé défini, où le liquidus est hori-
AuCu3 [M 70-123] sont des transformations ordre ↔ désordre du zontal.
premier ordre. Les deux congruences observées sur la même
composition CoFe [M 70-143] sont de nature très différentes : à Réciproquement aucune ligne ne peut changer le signe de sa
730 oC il s’agit d’une transition ordre ↔ désordre congruente du pente sans rencontrer sa conjuguée.
premier ordre sur un réseau α non compact tandis qu’à 990 oC il
s’agit de la transition c.c. ↔ c.f.c.

■ On appelle point tricritique, un point situé sur une ligne critique


où la transformation du second ordre s’arrête pour engendrer une 7. Solidification et coefficient
transition du premier ordre avec deux lignes conjuguées, celle de la
phase désordonnée prolonge sans rupture de pente la ligne critique. de ségrégation
Un point tricritique existe sur la ligne α ↔ α’ du diagramme (Fe,Al)
[M 70-112].
Au cours du refroidissement, la solidification du liquide
commence à la température d’intersection de la verticale tracée sur
■ Les transitions allotropiques sont liées au polymorphisme des
le diagramme à la composition de l’alliage x0 avec la ligne de liqui-
corps purs constituants. Par exemple, le titane et le zirconium pos-
dus (figure 18). Quand il ne se forme qu’une seule phase solide la
sèdent l’un et l’autre deux variétés cristallines, la structure h.c. à
composition des premiers cristaux se lit sur le diagramme à l’inter-
basse température et la structure c.c. à haute température : ces deux
section de l’isotherme horizontale de début de solidification avec la
variétés engendrent deux solutions solides continues séparées par
ligne de solidus. Au fur et à mesure que la solidification se poursuit
un double fuseau de lignes conjuguées avec congruence à mini-
la température s’abaisse, la composition du liquide suit le liquidus
mum [M 70-198]. Tous les alliages de fer présentent des lignes
et celle du solide le solidus. Dans le cas de la figure 18 les deux
conjuguées de la transition allotropique c.c. ↔ c.f.c.
phases en équilibre s’enrichissent simultanément en élément B,
mais par le jeu des bras de levier (§ 3.2) la composition moyenne
■ Les paliers invariants (sous pression imposée) des équilibres reste invariante en x0 . La solidification se termine à la température
entre trois phases solides portent des noms calqués sur les équili- où la verticale x0 coupe le solidus. Nous verrons plus loin (§ 8.3)
bres similaires de fusion : que lors d’un refroidissement continu les conditions d’équilibre ne
— l’équilibre α ↔ β + γ avec les deux équilibres monovariants sont pas respectées et que les lignes de liquidus et de solidus
(α + β) et (β + γ) au-dessus du palier et un seul équilibre monova- observées lors d’une analyse thermique au refroidissement se
riant (β + γ) en dessous porte le nom d’équilibre eutectoïde ; trouvent décalées vers les basses températures. Selon les métho-
des expérimentales utilisées, les lignes de liquidus et de solidus
— l’équilibre α + β ↔ γ avec un seul équilibre monovariant sont établies avec plus ou moins de précision. Jamais la même
(α + β) au-dessus du palier, et deux équilibres (α + γ) et (γ + β) en méthode expérimentale ne donne une bonne précision sur la posi-
dessous, porte le nom d’équilibre péritectoïde. tion des deux lignes simultanément : certaines méthodes fournis-
Le lecteur trouvera facilement dans les diagrammes proposés sent un bon liquidus mais un mauvais solidus, d’autres l’inverse.
des illustrations de ces deux équilibres invariants entre trois pha- Nous allons montrer ci-dessous que ces deux lignes sont liées
ses solides. l’une à l’autre par une relation tirée de l’équilibre thermodynami-
que et qui permet de rectifier des erreurs expérimentales de tracé
Un équilibre eutectoïde dont deux phases en équilibre à haute particulièrement au voisinage des corps purs.
température appartiennent à une lacune de démixtion (voir (Al,Zn)
Appuyons-nous sur le modèle de la solution régulière [relation
[M 70-120]) porte aussi le nom d’équilibre monotectoïde.
(61)] et par la relation () calculons le potentiel chimique de mélange
du constituant L dans la phase liquide. Il vient :

mix
6.7 Quelques règles utiles pour µ1 (L) = ω L(x L)2 + RT ln(1 – x L) (64)
interpréter un diagramme de phases Au voisinage du corps pur 1*, le terme logarithmique dans (64)
est un infiniment petit du premier ordre en x L devant lequel on
Nous rassemblons dans l’encadré quelques règles faciles à com- peut négliger le terme du second ordre, il reste donc :
prendre et qui peuvent être utiles au lecteur non familiarisé avec
(L) ≈ RT ln(1 – x L)
mix
l’interprétation des lignes d’un diagramme de phases complexe. µ1 (65)

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DIAGRAMMES D’ÉQUILIBRE ______________________________________________________________________________________________________________

Puisque x L est positif, le liquidus part en dessous du point de


u (°C) fusion du corps pur (TA* > T ). Dans le cas général (figure 19), où
la solubilité du soluté dans le solide n’est pas nulle, les lignes
Tf conjuguées liquidus et solidus peuvent partir au-dessus ou en
dessous du point de fusion du solvant, selon que K est supérieur
à 1 (cas le plus rare) ou inférieur à 1.
Début de solidification
S L
T
8. Principales causes d’écart
à l’équilibre
Fin de solidification

8.1 Germination, surfusion, hystérésis


A xS x0 xL xB La solidification d’un alliage s’effectue par germination de cris-
taux de solide, puis par leur croissance. Cette germination ne peut
Figure 18 – Évolution des phases d’un alliage jamais avoir lieu à la température d’équilibre TE entre le liquide et
au cours de sa solidification le solide, car l’apparition d’un germe de solide dans le liquide crée
une interface liquide-solide possédant une certaine énergie super-
ficielle. Il faut donc être en surfusion à une température inférieure
à TE pour pouvoir bénéficier d’une force motrice suffisante pour
T T
compenser la création de cette énergie. En effet, cette force
motrice augmente quand la surfusion ∆T (∆T = TE – T ) augmente.
TA* K<1 K>1 Hormis les transformations martensitiques, les transformations à
Liquide
l’état solide s’effectuent aussi par germination et croissance.
Liquide L’apparition d’un germe solide d’une nouvelle phase dans un cris-
tal conduit également à la création d’une interface possédant une
a a certaine énergie, mais, en outre, à l’apparition d’une énergie de
TA* déformation élastique provenant du changement de volume mas-
sique à l’état solide et de la cohérence cristalline éventuelle des
xB xB deux phases.
Ces énergies nécessitent un écart par rapport à la température
Figure 19 – Les deux dispositions possibles des lignes solidus d’équilibre, c’est-à-dire une hystérésis, souvent très importante. Il
et liquidus au voisinage du point de fusion du corps pur A* peut en résulter la rétention à l’état métastable, à la température
ambiante, de phases normalement stables à haute température
(cas de l’austénite de certains aciers par exemple).
L’équation (65) est appelée loi de Raoult, elle exprime que dans Cependant, l’apparition d’un germe solide d’une nouvelle phase
une solution concentrée l’activité du solvant, par référence au dans un alliage solide est très souvent facilitée par la présence de
corps pur isomorphe (ici le liquide pur 1*L) est égale à sa fraction défauts structuraux (dislocations, joints de grains) dont la partici-
molaire : pation est très favorable dans le bilan énergétique de l’apparition
a 1 = x1 (66) d’un germe d’une nouvelle phase à l’état solide. C’est pourquoi les
transformations à l’état solide sont souvent plus faciles quand
De la même façon en appliquant la relation () à l’équation (62), l’alliage possède des grains fins ou qu’il est écroui. L’hystérésis de
on calcule le potentiel chimique de mélange du solvant dans la la transformation est alors moindre.
phase α, le résultat est similaire au précédent mais avec le terme
de changement d’état de référence du corps pur : Les transformations martensitiques sont des transformations
hors d’équilibre qui mettent souvent en jeu une énergie importante
mix
µ 1 (α) ≈ RT ln(1 – x α) + ∆FusSA* (T – TA*) (67) et nécessitent une forte hystérésis par rapport à la température
d’équilibre. En général, elles remplacent, dans certains alliages, les
L’équilibre de solidification entre les phases liquide et solide
transformations d’équilibre lors de refroidissements trop rapides
implique l’égalité des potentiels chimiques dans les deux phases.
qui ne laissent pas le temps aux transformations normales par ger-
On appelle coefficient de ségrégation K le rapport des fractions
mination et croissance de se produire (aciers par exemple).
molaires du soluté dans les phases solide et liquide, il se calcule
aisément en écrivant l’égalité entre (65) et (67) :
α α
x ln(1– x ) ∆ Fus S A* ( T – T A* ) 8.2 Diffusion à l’état solide lors
K = -----L- < ----------------------
- = 1 + --------------------------------------------
- (68)
x ln(1– x )
L
x RT
L des transformations à l’état solide
La relation (68) exprime que le coefficient de ségrégation ne
dépend que des caractéristiques de fusion (entropie et tempéra- Une autre cause de retard d’évolution et de difficulté de transfor-
ture) du solvant et qu’il est indépendant du soluté. Elle permet de mation provient de la lenteur de la diffusion à l’état solide, particu-
calculer, au voisinage du corps pur où la loi de Raoult s’applique, lièrement pour les éléments en solution solide de substitution (les
l’une des lignes solidus ou liquidus lorsque l’autre est bien connue, éléments en insertion, comme le carbone, l’azote ou l’hydrogène
c’est le cas en particulier lorsque la solubilité est très faible en dans le fer, diffusent considérablement plus vite). Souvent, ainsi,
phase solide, en posant x α = 0 on trouve alors : les transformations à l’état solide se produisant à basse tempéra-
ture, et impliquant des variations de composition, ne peuvent se
∆ Fus S A* (T A* –T ) produire qu’au cours de refroidissements infiniment lents ou de
x L = --------------------------------------------
- (69) maintiens isothermes extrêmement longs.
RT

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Exemples
u (°C)
C’est pour cette raison que les transformations α ↔ γ par germina-
tion et croissance sont facilement inhibées, dans les conditions prati-
ques de refroidissement ou de chauffage, dans les alliages Fe-Ni, et 1 083
sont remplacées par une transformation martensitique se produisant
dans des conditions hors d’équilibre sans diffusion. On est ainsi amené
à tracer un diagramme hors d’équilibre [M 70-164], plus proche de A
la réalité pratique des phénomènes que le diagramme d’équilibre Liquide
[M 70-163], où l’on distingue les transformations au refroidissement et
au chauffage.
On retrouve une autre illustration de ce phénomène dans le dia-
C
gramme Cu-Sn, tracé dans les conditions pratiques de refroidissement 798
[M 70-156]. L’apparition de la phase ε dans la phase α homogène ne B E
755
peut pratiquement pas avoir lieu au refroidissement, si bien que, pour D
les conditions pratiques d’emploi des bronzes, il convient de remplacer a b g
la limite de solubilité de l’étain dans le cuivre par une verticale (courbe
en trait plein du diagramme). La décomposition eutectoïde de la Cu x0 F % Sn
phase δ n’a pas lieu non plus dans les conditions pratiques de refroidis-
sement, et le domaine δ doit être prolongé jusqu’aux basses tempéra- Figure 20 – Solidus AB, CD, EF, dans le cas d’une diffusion
tures. imparfaite à l’état solide, au cours de la solidification
d’un alliage Cu-Sn de composition x0

8.3 Diffusion à l’état solide au cours Remarque : le diagramme hors d’équilibre Cu-Sn [M 70-156] représente, en tiretés, les
de la solidification solidus relatifs aux conditions de coulée en sable ou en coquille (refroidissement plus
rapide). Ces solidus ne sont que des courbes approximatives moyennes, intégrant pour
tous les alliages les courbes telles que AB de la figure 20. Dans les conditions pratiques de
Exemple : ce diagramme Cu-Sn, hors d’équilibre [M 70-156], illus- solidification, l’eutectoïde α-δ est présent dès lors que la composition du bronze dépasse
tre aussi l’effet des difficultés de diffusion à l’état solide lors de la une valeur de l’ordre de 8 % d’étain, comme le montre le diagramme [M 70-156].
solidification. En effet, au cours de la solidification, dans les condi- À la solidification, on ne peut espérer obtenir un alliage homo-
tions d’équilibre, la composition du solide qui se développe aux gène que si sa composition se situe, sur le diagramme d’équilibre
dépens du liquide suit le solidus, et la solidification se termine à la correspondant, à la position de celle d’un minimum du liquidus où
température où la verticale de l’alliage perce le solidus. Mais la diffu- se produit une solidification congruente, sans changement de
sion à l’état solide étant très lente, cette évolution ne se réalise composition. Dans le cas général, à la solidification d’un alliage, on
qu’avec un certain retard (courbe AB, figure 20, d’autant plus impor- obtient des phases hétérogènes, ainsi que des phases étrangères
tant que la vitesse de solidification est élevée, car alors, la diffusion non prévues dans les états d’équilibre, quand leur formation est
à l’état solide permettant l’évolution de la composition du solide a de possible au fur et à mesure que l’on descend sur le liquidus. Il
moins en moins le temps de se produire. Il en résulte en première convient donc, lors de l’utilisation des diagrammes d’équilibre,
conséquence que le solide déposé est hétérogène : il est plus riche d’être très prudent, et de prendre en compte ces phénomènes soit
en cuivre au cœur des grains. Par ailleurs, la solidification n’est pas pour prévoir les phases qui existeront dans un alliage, soit pour
encore terminée au point B, puisque le solide apparu n’a pas encore définir ses conditions de traitement, et en particulier pour éviter les
la composition d’équilibre, et la deuxième conséquence de cette dif- brûlures. Dans les alliages d’aluminium de la série 2 000 (Al-Cu),
ficulté de diffusion à l’état solide est l’abaissement de la tempéra- cette précaution conduit à observer des températures d’homogé-
ture de fin de solidification. néisation avant trempe extrêmement précises, souvent à ± 3 oC
Mais la conséquence la plus grave de ce phénomène, dans les allia- près dans les conditions industrielles.
ges où peuvent exister plusieurs phases solides, est essentiellement la Des difficultés du même ordre, pour atteindre l’état d’équilibre,
présence de phases étrangères qui ne devraient normalement pas se rencontrent à la solidification dans les alliages dont le dia-
exister dans l’alliage après solidification. En effet, dans le diagramme gramme présente un équilibre monotectique à trois phases.
Cu-Sn par exemple, quand la température atteint celle du palier péritec- L’alliage biphasé à l’état liquide se présente sous forme de deux
tique où apparaît la phase β à 798 oC (figure 20), le solide α hétérogène couches liquides superposées (en raison de leur différence de den-
possède une composition moyenne inférieure à celle de l’alliage initial sité), qui réagissent à leur interface commune pour former la phase
(point B ), il reste donc du liquide de composition péritectique. Quand le solide. Celle-ci isole alors les deux couches liquides qui se solidi-
refroidissement se poursuit, ce liquide réagit avec la phase α pour for- fient ensuite indépendamment l’une de l’autre, à moins que par
mer de la phase β qui l’isole du liquide ; celui-ci évolue ensuite en igno- gravité, elle ne flotte ou tombe au fond. Après solidification,
rant pratiquement la phase α par suite des difficultés de diffusion à l’alliage est constitué d’un empilement de trois couches solides de
l’état solide dans la phase β. C’est pour cette raison que, dans le cas compositions et de structures micrographiques différentes.
général, les transformations péritectiques ne sont pas complètes.
Il est donc parfois impossible de fabriquer par solidification un
Dans le diagramme Cu-Sn, à partir de 798 oC, le liquide dépose donc alliage de deux métaux présentant une lacune de solubilité à l’état
de la phase β dont l’évolution de la composition moyenne (courbe CD ) liquide à cause de la gravité. C’est pourquoi il est intéressant d’étu-
est aussi en retard sur celle du solidus correspondant, comme pour la dier la solidification de tels alliages en apesanteur. On ne peut les
phase α. On atteint ainsi le palier péritectique à 755 oC où apparaît la fabriquer que par la voie du frittage d’un mélange de poudres des
phase γ, dont la composition moyenne suit la courbe EF (figure 20). La métaux de base de l’alliage.
diffusion n’étant pas totalement nulle à l’état solide, la solidification
s’arrêtera avant le point le plus bas du liquidus [M 70-155]. Après leur
apparition, les phases β et γ se décomposent à l’état solide en eutec-
toïde α-δ. Après solidification, l’alliage contient donc de la phase δ fra-
gile qui diminue considérablement la ductilité du bronze, alors qu’il ne
9. Morphologie structurale
devrait pas en contenir pour la composition choisie. En outre, lors d’un des alliages
traitement thermique, il convient de ne pas dépasser la température de
fusion des phases qui se sont solidifiées en dernier, sous peine de les On constate, d’après ce qui précède, que les diagrammes de
refondre et de brûler l’alliage. phases permettent de déterminer, dans les conditions d’équilibre,

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ou dans des conditions hors d’équilibre, la nature des phases pré- métalliques. Ils permettront au lecteur intéressé de mieux
sentes dans un alliage, et dans une certaine mesure, la répartition comprendre les équilibres entre phases.
de ces phases. Cependant la morphologie structurale (forme, Les publications concernant les diagrammes d’équilibre sont très
dimension, répartition spatiale des phases) peut être souvent esti- nombreuses et souvent difficiles à concilier, voire contradictoires.
mée à l’aide des diagrammes de phases, compte tenu des remar- En effet, le problème expérimental essentiel est de réaliser l’équi-
ques supplémentaires suivantes concernant la solidification et les libre parfait entre les phases, à une certaine température, ce qui est
transformations à l’état solide. souvent pratiquement impossible, même en laboratoire, puis
À la solidification, les phases solides primaires se présentent d’analyser et de reconnaître ces phases stables à cette tempéra-
souvent sous forme de dendrites ramifiées, ou possèdent une ture.
forme liée à la nature cristalline des phases (graphite lamellaire, Un examen rapide des différentes conséquences de ces difficul-
silicium à grains angulaires par exemple). Les alliages de compo- tés sur les méthodes utilisées pour la détermination des diagram-
sition eutectique sont constitués, à l’état solide, d’un ensemble de mes d’équilibre, ou sur les procédés d’élaboration des alliages,
deux phases solides sous forme de grains extrêmement fins, imbri- permettra au lecteur de se faire une idée plus précise sur la validité
qués les uns dans les autres selon une disposition lamellaire, glo- des diagrammes qu’il rencontrera dans la littérature, et sur les
bulaire ou aciculaire, mais l’eutectique peut être divorcé. Les conditions et les limites de leur utilisation pour les alliages habi-
phases étrangères, apparues dans des conditions hors d’équilibre, tuellement utilisés dans l’industrie. Il ne devra jamais perdre de
quand elles existent, se retrouvent aux joints des grains ou dans vue que tous les diagrammes présentent, à des niveaux divers, un
les espacements interdendritiques. La forme des grains est large- certain degré d’incertitude, et que cela tient à la nature même des
ment influencée par les conditions de refroidissement (vitesse de phénomènes complexes mis en jeu. Il ne devra jamais oublier, que
refroidissement, direction et importance des gradients de tempéra- si l’équilibre est difficile à atteindre en laboratoire, il l’est encore
ture à la solidification). Les grains sont toujours d’autant plus fins plus pour les alliages industriels.
que la vitesse de refroidissement est plus élevée.
On trouve confirmation de ce fait capital dans le diagramme
Les transformations à l’état solide conduisent, pour les transfor- tracé dans les conditions industrielles proposé pour les alliages
mations allotropiques, à des structures d’autant plus fines que le cuivre-étain [M 70-156], et dans celui des alliages fer-nickel
refroidissement est, là aussi, plus rapide. Les transformations [M 70-164], pour les conditions pratiques de transformation, en
eutectoïdes fournissent des structures micrographiques où se ren- comparaison avec les diagrammes d’équilibre correspondants.
contrent deux phases finement imbriquées l’une dans l’autre, le
plus souvent de morphologie lamellaire, la structure étant égale- Les restrictions qui viennent d’être faites n’ôtent cependant pas
ment d’autant plus fine que le refroidissement est plus rapide, ou aux diagrammes leur intérêt primordial. Ils constituent un guide
que la transformation hors d’équilibre s’effectue à plus basse tem- indispensable qui, utilisé avec discernement, permet souvent d’évi-
pérature. Il en est de même pour les démixtions à l’état solide qui ter ou d’expliquer de nombreuses difficultés et de prévoir, avec
permettent d’obtenir, généralement après trempe et revenu, des une bonne chance de succès, la structure des alliages considérés,
précipités très fins de la nouvelle phase, répartis dans les grains de sous les réserves qui sont exprimées dans ce qui suit. Ils indiquent,
la phase initiale, d’autant plus fins et nombreux que la transforma- dans la mesure où ils sont connus avec précision, la limite vers
tion au cours du revenu a lieu à plus basse température. laquelle tendent à revenir plus ou moins vite les alliages, lors de
leur évolution naturelle vers l’état d’équilibre, c’est-à-dire vers
La répartition des phases et la finesse de la structure microgra- l’état le plus stable, comme le veut la thermodynamique.
phique sont également affectées, après transformation à l’état
solide, par les joints de grains qui facilitent l’apparition à l’état
solide d’une nouvelle phase : pour les transformations allotropi-
ques, leur action permet un affinement du grain. Enfin, les trans-
formations martensitiques, toujours hors d’équilibre, aboutissent à
11. Principales causes
des structures aiguilletées qui soulignent des directions cristallo-
graphiques particulières. Il ne faut pas confondre ces dernières
d’incertitude des
structures avec les structures de Widmanstätten où les phases se diagrammes d’équilibre
sont formées par germination et croissance le long de certaines
directions cirstallographiques.
11.1 Imprécision de certains domaines
Dans de nombreux diagrammes, les limites de certains domai-
10. Généralités sur les nes sont indiquées en pointillés, ce qui signifie qu’elles ne sont pas
connues avec suffisamment de précision. On rencontre principale-
diagrammes présentés ment cette situation pour les hautes ou les basses températures.
Pour les hautes températures, cette imprécision résulte surtout de
la pollution de l’alliage soit par l’atmosphère utilisée, soit par les
Les diagrammes d’équilibre des alliages métalliques proposés matériaux des creusets contenant les alliages, principalement pour
dans cet article ont été choisis principalement en fonction de l’inté- les alliages de métaux réfractaires très réactifs (Cr, Ti, etc.), mais
rêt pratique et industriel des alliages correspondants ; leur liste aussi des difficultés de mesure des températures élevées, et des
n’est donc pas exhaustive. Ces diagrammes ont été établis à partir conditions de solidification. Pour les basses températures, il s’agit
des recueils de diagrammes d’équilibre dont la liste est donnée surtout de la lenteur de certaines transformations à l’état solide et
dans « Pour en savoir plus » [Doc. M 70], notamment ceux de Han- plus encore de la diffusion à l’état solide. Pour quelques régions
sen, Elliott, Shunk, ASM et Moffatt, ainsi qu’à partir de publications difficiles à déterminer dans certains diagrammes, les limites des
originales. domaines ont pu être déterminées par des calculs thermodyna-
Les diagrammes qui ne figurent pas dans le présent article peu- miques.
vent être consultés dans les ouvrages plus spécialisés cités dans
« Pour en savoir plus ». Quelques références d’ouvrages concer-
nant les diagrammes d’équilibre des oxydes et des composés 11.2 Incertitude liée aux mécanismes
réfractaires (céramiques) sont également indiquées. Dans « Pour de la solidification
en savoir plus » figurent enfin une liste des ouvrages généraux qui
permettent d’interpréter les diagrammes d’équilibre, et certaines La surfusion peut affecter la solidification soit lors de la traversée
références d’ouvrages traitant de la thermodynamique des alliages du liquidus oblique du diagramme, soit aussi pour les transforma-

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tions isothermes, comme les transformations eutectiques. Il en phases métastables. C’est, par exemple, le cas des aciers (alliages
résulte une imprécision sur les limites du domaine liquide, c’est-à- fer-carbone). Ces phases peuvent elles-mêmes, à leur tour, donner
dire sur le liquidus. Par ailleurs, il y a souvent ségrégation dans les éventuellement naissance à d’autres phases métastables (cas de la
phases solidifiées, en raison d’une diffusion à l’état solide particu- martensite dans les aciers).
lièrement difficile dans les solutions solides de substitution : elles Certaines transformations sont tellement rapides, que la vitesse
sont alors hétérogènes, et la température de fin de solidification de transformation importe peu. Il s’agit notamment des transfor-
est abaissée. Pour ces deux raisons, les solidus sont souvent mations martensitiques qui se produisent à une température indé-
connus avec une faible précision, et c’est pourquoi ils sont souvent pendante de la vitesse de refroidissement, mais ne sont pas
dessinés en pointillés dans les diagrammes d’équilibre. La lenteur complètes et ont lieu à des températures différentes au chauffage
de la diffusion joue un rôle particulièrement néfaste dans le cas et au refroidissement, dans des conditions hors d’équilibre.
des transformations péritectiques qui ne sont jamais complètes.
Cela explique le doute qui règne souvent sur les résultats relatifs à Exemple : un cas intéressant est celui des alliages de cobalt
ce type de transformation et sur les alliages qui l’on subie. D’une [M 70-141], [M 70-142], [M 70-143], [M 70-144] où les diagrammes
manière générale, l’alliage est d’autant plus proche de l’état d’équi- affectent des formes différentes au chauffage et au refroidissement,
libre que la vitesse de refroidissement est plus faible. en raison de l’hystérésis importante de cette transformation.
Les impuretés, surtout pour les alliages à faible teneur, peuvent Bien souvent, d’ailleurs, ces transformations ne conduisent pas
modifier considérablement le comportement des alliages. Cette à un état d’équilibre thermodynamique.
action amène le métallurgiste à prendre des précautions particuliè-
res au cours de l’élaboration des alliages. Il résulte de ce qui précède, que dans certains alliages indus-
triels, et même dans des alliages élaborés en laboratoire, il existe
très fréquemment des phases métastables. Ces phases, bien que
ne correspondant pas à des états d’équilibre définitifs figurent
11.3 Incertitude due aux difficultés dans certains diagrammes d’équilibre en raison de leur présence
de transformation à l’état solide courante dans les alliages, et des conséquences pratiques de
celle-ci. Parfois sont représentées simultanément les phases
Seules sont évoquées dans ce paragraphe les transformations d’équilibre et les phases métastables : cas des diagrammes fer-
mettant en jeu des modifications de structure cristalline. Les trans- nickel [M 70-163] et [M 70-164] et fer-manganèse [M 70-159] ainsi
formations magnétiques qui sont indiquées sur les diagrammes que celui du diagramme métastable fer-carbone [M 70-134] et
n’entrent pas dans cette catégorie. [M 70-135].
On retrouve dans les transformations à l’état solide les mêmes
inconvénients que ceux évoqués précédemment :
— retards souvent importants ;
— diffusion paresseuse ;
12. Préparation des alliages
— influence des impuretés, etc.
Les données retenues sont, dans l’ensemble, celles obtenues à
Cela est particulièrement vrai pour les limites de solubilité à
partir des métaux les plus purs, ce qui est le cas des publications
l’état solide, qui sont toujours très difficiles à déterminer, surtout
les plus récentes, et celles dans lesquelles la contamination due à
pour les plus basses températures où les transformations à l’état
l’atmosphère ou au creuset dans lequel est élaboré l’alliage est la
solide sont très lentes, et où l’évolution de la concentration des
plus faible.
phases par diffusion est très ralentie. Il est donc très courant
d’obtenir des phases sursaturées, ce qui conduit à effectuer des Après élaboration, les alliages doivent subir des recuits d’homo-
maintiens isothermes, c’est-à-dire des recuits très longs, pour obte- généisation et, éventuellement, un corroyage important, pour
nir des phases homogènes et dans l’état le plus proche de l’équi- réduire les distances de diffusion et augmenter le taux de défauts,
libre. La détermination du diagramme fer-manganèse [M 70-159], ce qui accélère la diffusion, mais aussi pour provoquer la recristal-
pour les températures les plus basses, a, par exemple, nécessité lisation, ce qui active la mobilité des atomes, et peut aussi affiner
des recuits de plus de deux ans ; une durée de plusieurs semaines le grain, et ainsi faciliter certaines transformations ultérieures.
est très courante. La difficulté d’obtenir des états aussi proches que possible de
On retiendra donc, de préférence, les résultats obtenus pour les l’équilibre nécessite souvent l’utilisation de méthodes d’élabora-
temps de recuit les plus longs. Pour faire évoluer plus rapidement tion indirectes. Au lieu de faire appel à la solidification d’alliages
l’alliage aux basses températures, il est courant d’effectuer, quand liquides, il est souvent plus sûr et plus rapide, lorsque les risques
cet alliage s’y prête, des écrouissages importants qui favorisent de contamination ne sont pas trop grands, de procéder à des
certaines transformations et accélèrent la diffusion des atomes recuits d’alliages frittés à partir de poudres des composants de
grâce aux défauts cristallins qu’ils provoquent, et grâce à la dimi- l’alliage. On peut citer comme exemple les alliages présentant une
nution de la dimension des régions à homogénéiser (cf. article lacune de solubilité à l’état liquide qu’il est très difficile d’homogé-
Écrouissage. Recuit dans le présent traité). néiser quand ils sont élaborés par solidification.
Des difficultés d’autres origines se présentent également. Il se
trouve notamment que la solubilité d’un élément dans un alliage
peut varier avec la grosseur du grain (solubilité différente dans les
joints de grains). La dimension du grain pouvant varier dans de lar- 13. Méthodes
ges proportions selon les conditions expérimentales, il peut donc
arriver que des dispersions apparaissent dans les résultats. Quoi-
de détermination
que cette cause de perturbation soit, en ce qui concerne les allia-
ges industriels, très généralement négligeable, on en trouve
des diagrammes
cependant des exemples, notamment pour la solubilité du carbone
dans le fer α [M 70-134] et [M 70-135]. Les techniques utilisées pour la détermination des diagrammes
d’équilibre sont de plusieurs types.
La vitesse de refroidissement joue, comme pour la solidification,
un rôle important. Il faut généralement refroidir très lentement les ■ L’analyse thermique, avec enregistrement des courbes de refroi-
alliages pour que les transformations se produisent à l’équilibre. Si dissement et l’analyse thermique différentielle, plus précise, sont
le refroidissement est trop rapide, on peut en effet, comme cela a très souvent employées pour déterminer les températures des
été déjà dit (§ 8.1), conserver à des températures plus basses des points de transformation. Comme celles-ci sont très affectées par

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les impuretés, par la surfusion, et plus généralement, par le retard éléments constituant l’alliage : puis, pour un élément donné, dans
aux transformations que peuvent présenter les alliages, on retient l’ordre alphabétique du symbole du deuxième élément.
en général la température la plus élevée parmi les résultats propo-
sés par les différents auteurs, ou obtenus au cours de différents Exemple : on trouve le diagramme Fe-C à C-Fe.
essais pour un même alliage. C’est, en particulier, le cas pour les
températures de début de solidification (liquidus). Historiquement, Cependant, dans la représentation des diagrammes, c’est l’élé-
l’analyse thermique a été la première méthode utilisée pour déter- ment de base des alliages industriels le plus fréquemment rencon-
miner des équilibres entre phases ; c’est en 1829, en Suède, qu’ont trés qui a généralement été placé à gauche.
ainsi été étudiés, pour la première fois, des équilibres entre phases,
Les diagrammes proposés sont établis, pour la plupart, sous une
dans les alliages Pb-Sn, par Rudberg.
pression égale à la pression atmosphérique. Quand ils comportent
■ La dilatométrie et les mesures de résistivité peuvent souvent ren- un élément gazeux, la pression est parfois différente et a été indi-
dre les mêmes services que l’analyse thermique dont elles permet- quée dans le texte. Les effets d’une augmentation de pression sur
tent de compléter ou de confirmer les résultats. les diagrammes d’équilibre entre phases ont été mentionnés dans
les cas les plus remarquables.
■ L’analyse radiocristallographique, qui permet de déterminer,
avec une grande précision, les limites de solubilité à l’état solide, est
souvent mise en œuvre, à condition que les alliages soient très
homogènes. Elle s’applique généralement à des alliages trempés 14.2 Compositions massique et atomique
depuis une certaine température, dans le but de figer, hors d’équili-
bre, les phases existantes à cette température, mais tous les alliages Pour la commodité de la présentation et de la lecture, les dia-
ne se prêtent pas à ce type d’expérimentation. Il arrive également grammes sont représentés en atomes pour-cent [composition de 0
que les contraintes introduites par la trempe modifient suffisam- à 100 atomes pour cent, équivalente à la fraction molaire (de 0 à 1),
ment le paramètre cristallin pour rendre les mesures imprécises. Il plus couramment utilisée en thermodynamique]. En effet, les ato-
existe aujourd’hui des chambres de diffraction X chauffantes. mes s’associent souvent entre eux, dans des composés définis cor-
■ L’analyse micrographique au microscope est moins précise, mais respondant à des fractions atomiques simples (1/4, 1/3, 1/2, par
elle peut être utilisée soit à la température ambiante, soit, dans quel- exemple). Il s’ensuit que les dessins des diagrammes sont beau-
ques cas, à plus haute température. Dans ce dernier cas, les chauf- coup mieux équilibrés quand ils sont dessinés en atomes pour
fages, qui doivent être prolongés pour favoriser l’homogénéisation, cent, surtout quand les deux métaux ont des masses atomiques
risquent de s’accompagner de pollution par l’environnement. très différentes.

■ L’examen à la microsonde complète utilement les examens Exemple : le diagramme Cu-Be [M 70-130], dessiné en atomes
précédents qui renseignent sur la structure, la répartition et le pour- pour cent, est très lisible, mais si le diagramme était dessiné en
centage des différentes phases, en fournissant directement la masse pour cent, sa moitié gauche serait très écrasée et fort peu lisi-
composition de ces phases et, en particulier, les limites de solubilité ble car la composition CuBe (50 atomes %) ne correspond qu’à 12 %
du diagramme. en masse environ.
■ La mesure de certaines grandeurs thermodynamiques permet
également d’obtenir des renseignements très précis sur les dia- Une autre graduation en masse pour cent figure dans le haut du
grammes de phases. C’est le cas, en particulier, de la mesure de diagramme et les compositions remarquables sont indiquées en
l’activité d’un constituant dans l’alliage, au moyen d’une pile dont la atomes pour cent et, entre parenthèses, en masse pour cent. Mais,
f.e.m. (force électromotrice) est proportionnelle au potentiel chimi- par contre, compte tenu de son importance, le diagramme Fe-C est
que de cet élément. Pour cela, on forme un contact entre l’alliage et aussi proposé entièrement dessiné en masse pour cent [M 70-134].
un électrolyte à conduction ionique qui permet de réaliser à l’inter- La figure 21 est une construction géométrique issue du théo-
face l’équilibre d’ionisation de l’élément considéré : rème de Thalès et qui permet d’obtenir graphiquement la fraction
massique wB ou wB %, [définition (46)], du constituant B à partir de
M ↔ M n + + n e– sa fraction molaire xB ou xB % [définition (45)]. Si on appelle MA et
De telles mesures peuvent se poursuivre jusqu’à ce que l’équili- MB les deux masses atomiques des constituants la relation homo-
bre complet de l’alliage soit atteint et donnent la position des graphique qui lie les compositions massiques et atomiques s’écrit :
lignes conjuguées avec beaucoup de précision. Par ailleurs, les wB M xB wB % M xB %
valeurs de l’activité de l’élément sont des données extrêmement - = --------B- ---------------
-------------- - = --------B- --------------------------
- ou ---------------------------- - (70)
utiles pour la modélisation du diagramme de phases par le calcul. 1– w B M A 1 – x B 100 – w B % M A 100 – x B %
Les mesures calorimétriques de dissolution isotherme d’un consti-
tuant dans la phase liquide peuvent également fournir des coor- L’exemple utilisé sur la figure 21 est le binaire (Fe,Si) dont les
données précises de points du liquidus ; comme précédemment masses atomiques sont sensiblement dans le rapport 2/1 = 56/28.
les enthalpies mesurées sont également précieuses pour la modé- Pour trouver la fraction massique du silicium dans le binaire
lisation par calcul. (Fe,Si), on trace un axe des abscisses horizontal gradué de 0 à 1.
Par son extrémité 1, on trace un axe vertical des ordonnées tel que
OMSi et OMFe soient des segments de longueurs proportionnelles
aux 2 masses atomiques. À partir de O on joint la composition ato-
14. Renseignements généraux mique sur l’abscisse et on prolonge jusqu’en P sur AMFe . On pro-
jette ensuite ce point P sur l’abscisse parallèlement à l’ordonnée.
sur la présentation La construction inverse donne xSi lorsque l’on connaît wSi .

des diagrammes
14.3 Structures et dénominations
14.1 Classement des diagrammes des phases métalliques
Les diagrammes sont classés par ordre alphabétique du symbole ■ Les métallurgistes ont toujours utilisé des dénominations parti-
de l’élément venant en premier dans l’ordre alphabétique parmi les culières pour désigner les structures cristallines des phases solides,

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_____________________________________________________________________________________________________________ DIAGRAMMES D’ÉQUILIBRE

l’espoir d’une notation simplifiée propre à la métallurgie s’est éva-


noui. L’atlas Pearson (voir « Pour en savoir plus » [Doc. M 70]) ras-
MFe semble toutes les structures des solutions solides métalliques
P
établies : aujourd’hui environ 30 000 cas. Sa présente édition en
quatre volumes ou en deux disques CD a été dirigée par Pierre Vil-
lars. Les notations Pearson sont extrêmement simples et n’ont pas
A la prétention de se substituer aux notations internationales de
MSi cristallographie : une lettre minuscule désigne la première lettre du
0 wSi xSi 1 système cristallin de la phase considérée, suivie d’une lettre majus-
cule qui est le mode de Bravais, suivie enfin du nombre d’atomes
par maille. Ainsi les structures A1, A2 et A3 sont notées respective-
ment cF4, cI2, et hP2, (F comme Faces centrées, I comme Intérieur
centré, P comme Primitif).
O
Pour trouver la fraction massique du silicium dans le binaire (Fe, Si), on
trace un axe des abscisses horizontal gradué de 0 à 1.
Par son extrémité 1 on trace un axe vertical des ordonnées tel que OMSi Quelques clefs sur les notations du Strukturbericht
et OMFe soient des segments de longueurs proportionnelles aux deux encore utilisées par les métallurgistes
masses atomiques. À partir de O, on joint la composition atomique sur
l'abscisse et on prolonge jusqu'en P sur AMFe . On projette ensuite ce
point P sur l'abscisse parallèlement à l'ordonnée. La construction ● Les corps purs et les solutions solides primaires sont notés
inverse donne xSi lorsque l'on connait wSi . An, n représente le numéro dans la liste des structures des
métaux purs et comprend 1 ou 2 chiffres. Les deux principaux
empilements compacts sont ainsi A1, structure cubique à faces
Figure 21 – Relation entre les fractions massiques et molaires centrées et A3, structure hexagonale compacte. La structure non
compacte la plus souvent rencontrée est cubique, centrée et
s’appelle A2. Il est remarquable de constater que 90 % des
métaux purs cristallisent dans l’une des structures A1, A2, ou
indépendantes des notations très générales mais complexes des A3.
cristallographes. Cette originalité est liée à la structure souvent très
● Les solutions solides intermédiaires et les composés défi-
simple des solutions solides primaires des principaux métaux
d’usage : en effet la structure des métaux purs peut être décrite par nis sont notés Bn, Cn et DIn, selon que leur stœchiométrie est
un empilement de sphères dures au contact les unes des autres et respectivement 1/1 comme AlFe, 1/2 comme AuAl2 ou plus
qui représentent les atomes ionisés. La théorie quantique du nuage complexe. Le chiffre I dans DIn désigne la stœchiométrie parti-
d’électrons libres a permis de comprendre pourquoi les atomes culière, par exemple D0n désigne la stœchiométrie 1/3 comme
ionisés de l’empilement métallique se placent à des distances prati- AlFe3 ; dans tous les cas n est un numéro dans la série considé-
quement invariantes les uns des autres. Ces empilements de sphè- rée et qui comporte 1 ou 2 chiffres.
res se divisent en deux grandes familles, les empilements compacts ● Les phases ordonnées qui se rattachent à la structure
ou chaque sphère possède 12 premiers voisins et les empilements désordonnée An sont aussi appelées Lnm le numéro n est iden-
non compacts dont le principal représentant possède 8 premiers tique dans les deux structures ordonnée et désordonnée tandis
voisins autour d’une sphère centrale. Partant de cette observation que l’indice m est le numéro dans la série engendrée. Par
de répétition et de simplicité des structures métalliques, Ewald et exemple, la structure cubique à faces centrées A1 engendre fré-
Hermann (voir « Pour en savoir plus » [Doc. M 70]) avaient imaginé quemment deux variétés ordonnées : L10 comme AuCu ou AlTi
dès 1913 une classification appelée « Strukturbericht » qui eut un et L12 comme AuCu3 ou AlNi3 . C’est ce jeu de double entrée
grand succès et fut complétée jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, qui provoque l’incohérence de cette classification, par exemple
puis abandonnée parce qu’elle présentait des contradictions inter- les phases ordonnées non compactes CuZn ou AlFe se ratta-
nes et qu’elle n’était pas exhaustive. Dans une description moderne chent à la structure désordonnée A2 et à ce titre s’appellent L20
des structures des métaux, il semble donc désuet de parler du Struk- mais elles possèdent la stœchiométrie 1/1 et pour cela s’appel-
turbericht, dont la dernière édition complète remonte à 1931 et qu’il lent aussi B2.
est impossible aux bibliothèques de se procurer. Mais la pratique
est plus tenace, tous les métallurgistes de la planète continuent
encore aujourd’hui à utiliser ces notations, souvent sans en connaî-
tre la signification. C’est pourquoi nous donnons quelques clefs Dans les anciens recueils de diagrammes de phases le texte des-
pour en comprendre la logique (voir encadré). criptif des structures des phases solides se réfère essentiellement
aux notations du Strukturbericht et si nécessaire aux groupes
■ Depuis que les structures des alliages métalliques ont été large- d’espace des cristallographes : c’est le cas des monographies
ment étudiées, on s’est rendu compte qu’il était vain de vouloir de Hansen et Anderko, de Elliott ou de Shunk. Dans les atlas
construire une classification cristallographique simplifiée pour les récents tels que le recueil en trois tomes édité par Massalski, Oka-
seules solutions solides métalliques car les variétés cristallines des moto, Subramanian et Kacprzac (voir « Pour en savoir plus »
solutions intermédiaires aujourd’hui connues couvrent un très large [Doc. M 70]), on donne successivement, lorsque cela est possible,
éventail des groupes d’espace. On sait que la cristallographie distin- les trois désignations de structure : Pearson, groupe d’espace et
gue 7 groupes cristallins, selon la forme extérieure de la maille, Strukturbericht ainsi que la phase prototype.
14 modes de Bravais qui permettent par un jeu de maille multiple de Par ailleurs, ces phases sont souvent désignées sur le tracé du
ne pas masquer la plus haute symétrie d’une structure (par exemple diagramme par des lettres grecques : cette habitude avait été intro-
la maille simple du réseau cubique à faces centrées est un rhombo- duite par Hume-Rothery à propos des analogies structurales (pha-
èdre d’angle 60o et la maille cubique contient 4 mailles simples), ses appelées composés électroniques) observées dans les alliages
32 groupes d’espace appelés groupes finis, basés sur la combinai- de cuivre, d’argent et d’or pour une même valence moyenne, puis
son autour d’un point, les éléments de symétrie ne comportant pas elle s’est étendue à de très nombreux diagrammes ; toutefois ces
de translation et 230 groupes infinis en incluant la translation dans notations ne sont ni universelles ni normalisées. On prend souvent
les éléments de symétrie. On a trouvé des solutions solides intermé- les lettres grecques dans leur ordre alphabétique en composition
diaires appartenant pratiquement à tous ces groupes d’espace et croissante de l’élément B .

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Exemple : dans les laitons (Cu,Zn), on rencontre successivement


les solutions solides α (cF4, Fm 3 m, A1, Cu), β (cI2, Im 3 m, A2, W), Abréviations utilisées pour les structures cristallines
β’ (cP2, Pm 3 m, B2, CsCl), γ (cI52, I 4 3 m, D82 , Cu5Zn8) , δ = β, ε
(hP2, P63/mmc, A3, Mg) et η = ε.
c.c. : cubique centré
c.d. : cubique diamant
c.f.c. : cubique à faces centrées
Les phases β et β’ sont en relation ordre ↔ désordre : l’utilisation h.c. : hexagonal compact
de l’apostrophe pour désigner la variante ordonnée est fréquente. c. : cubique structures le
Parfois aussi l’apostrophe désigne une phase martensitique qui h. : hexagonal plus souvent
n’est pas une phase d’équilibre thermodynamique. m. : monoclinique complexes
orth. : orthorhombique
Dans le tableau 1 ont été rassemblées certaines caractéristiques rh. : rhomboédrique
physiques des constituants utilisés dans nos illustrations diagram- t. : tétragonal (ou q. : quadratique)
mes ainsi que leurs structures. Les abréviations concernant les tricl. : triclinique
structures cristallines sont données en encadré.

Tableau 1 – Données relatives aux différents éléments rencontrés dans les diagrammes proposés
Diamètre Température de
Masse Température
Numéro atomique Valence Structure cristalline transformation
Élément atomique de fusion
atomique (2) (3) (4) allotropique
(1)
(nm) (oC) (oC)
Ag 47 107,868 0,289 1 961,93 c.f.c.
Al 13 26,98154 0,286 3 660,37 c.f.c.
As 33 74,9216 0,236 3, 5 817 (2,8 MPa) rh.
Au 79 196,9665 0,288 1, 3 1 064,43 c.f.c.
B 5 10,81 0,176 3 2 300 α rh.
β rh.
γ q. simple + autres structures
Be 4 9,01218 0,222 2 1 278 ± 5 α h.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 1 254 ± 5
β c.c.
Bi 83 208,9804 0,307 3, 5 271,3 rh. + autres structures (sous haute
pression)
C 6 12,011 0,154 2, 4 ≈ 3 500 α h. 
graphite
β rh. 
c.d. diamant + autres structures (sous
haute pression)
Ca 20 40,08 0,395 2 840 ± 1 α c.f.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 443 ± 3
β c.c.
Cd 48 112,41 0,298 2 320,9 h.c.
Ce 58 140,12 0,365 3, 4 798 ± 3 α c.f.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ – 150
β h.c. double
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ – 10
γ c.f.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 730
δ c.c.(?)
Co 27 58,9332 0,250 2, 3 1 495 α h.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 417
β c.f.c.
(1) Les masses atomiques de certains éléments peuvent être différentes des valeurs indiquées, si les proportions des différents isotopes varient.
(2) Les diamètres atomiques indiqués correspondent en réalité aux distances entre plus proches voisins, pour la plupart des éléments, et sont approximatifs.
(3) Pour certains éléments, il existe d’autres valences, dans des cas particuliers, c’est pourquoi elles ne sont pas indiquées.
(4) Les différentes variétés cristallines sont indiquées α, β, γ, etc., dans l’ordre des températures croissantes.

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Tableau 1 – Données relatives aux différents éléments rencontrés dans les diagrammes proposés (suite)
Diamètre Température de
Masse Température
Numéro atomique Valence Structure cristalline transformation
Élément atomique de fusion
atomique (2) (3) (4) allotropique
(1)
(nm) (oC) (oC)

Cr 24 51,996 0,250 2, 3, 6 1 857 ± 20 c.c.


Cu 29 63,546 0,256 1, 2 1 083,4 ± 0,2 c.f.c.
Fe 26 55,847 0,248 2, 3 1 535 α c.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 912
γ c.f.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 1 394
δ c.c.
ε h.c. (sous haute pression)
Hg 80 200,59 0,301 1, 2 – 38,87 rh.
Li 3 6,941 0,3023 1 180,54 h.c.
c.c.
c.f.c. (par écrouissage à basse
température)
Mg 12 24,305 0,320 2 648,8 ± 0,5 h.c.
Mn 25 54,9380 0,224 2, 3, 4, 6, 7 1 244 ± 3 α c.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 707
β c. simple
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 1 088
γ q.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 1 139
δ c.f.c.
Mo 42 95,94 0,272 3, 4, 6 2 617 c.c.
N 7 14,0067 0,140 3, 5 – 209,86 α c. simple
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ – 237
β h.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ – 210
γ q.
Na 11 22,98977 0,3659 1 97,81 ± 0,03 c.c.
h.c.
Nb 41 92,9064 0,286 3, 5 2 468 ± 10 c.c.
Ni 28 58,70 0,249 2, 3 1 453 c.f.c.
O 8 15,9994 0,132 2 – 218,4 β rh.
γ c. simple
P 15 30,97376 0,220 3, 5 44,1 (blanc) c.
orth.
α c.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ – 4
β c.c.
c. et h.c. (sous pression)
Pb 82 207,2 0,350 2, 4 327,502 c.f.c.
Pt 78 195,09 0,277 2, 4 1 772 c.f.c.
(1) Les masses atomiques de certains éléments peuvent être différentes des valeurs indiquées, si les proportions des différents isotopes varient.
(2) Les diamètres atomiques indiqués correspondent en réalité aux distances entre plus proches voisins, pour la plupart des éléments, et sont approximatifs.
(3) Pour certains éléments, il existe d’autres valences, dans des cas particuliers, c’est pourquoi elles ne sont pas indiquées.
(4) Les différentes variétés cristallines sont indiquées α, β, γ, etc., dans l’ordre des températures croissantes.

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Tableau 1 – Données relatives aux différents éléments rencontrés dans les diagrammes proposés (suite)
Diamètre Température de
Masse Température
Numéro atomique Valence Structure cristalline transformation
Élément atomique de fusion
atomique (2) (3) (4) allotropique
(1)
(nm) (oC) (oC)
S 16 32,06 0,208 2, 4, 6 112,8 α orth. f.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 96
β m.
γ rh.
Sb 51 121,75 0,291 3, 5 630,74 rh.
Si 14 28,0855 0,235 4 1 410 c.d.
Sn 50 118,69 0,281 2, 4 231,968 1 α c.d.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 13,2
β q.c.
Ta 73 180,9479 0,286 5 2 996 c.c.
Th 90 232,0381 0,360 4 1 750 c.f.c.
Ti 22 47,90 0,289 3, 4 1 660 ± 10 α h.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 882
β c.c.
U 92 238,029 0,275 4, 6 1 132,3 ± 0,8 α orth. base c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 660
β q. simple
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 760
γ c.c.
V 23 50,9415 0,262 3, 5 1 890 ± 10 c.c.
W 74 183,85 0,274 6 3 410 ± 20 α c.c.
β c. simple, métastable (redevient α
au-dessus de 700 oC, irréversiblement)
Zn 30 65,38 0,266 2 419,58 h.c.
Zr 40 91,22 0,317 4 1 852 ± 2 α h.c.
—––––––––––––––––––––––––––––––––→ 870
β c.c.
(1) Les masses atomiques de certains éléments peuvent être différentes des valeurs indiquées, si les proportions des différents isotopes varient.
(2) Les diamètres atomiques indiqués correspondent en réalité aux distances entre plus proches voisins, pour la plupart des éléments, et sont approximatifs.
(3) Pour certains éléments, il existe d’autres valences, dans des cas particuliers, c’est pourquoi elles ne sont pas indiquées.
(4) Les différentes variétés cristallines sont indiquées α, β, γ, etc., dans l’ordre des températures croissantes.

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