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TSS2 UNIVERSITE JOSEPH KI-ZERBO

Traitements anticoagulants : surveillance biologique

Dr Jérôme KOULIDIATI

OBJECTIFS :

1. Décrire le mode d’action des héparines.


2. Décrire la surveillance biologique des héparines non fractionnées (=
HNF).
3. Surveillance biologique du traitement par HBPM.
4. Décrire le mécanisme d'action des A.V.K.
5. Décrire l'outil biologique de surveillance des AVK : l'INR.
6. Citer la cible des anticoagulants oraux directs (AOD).
7. Citer les indications des anticoagulants oraux directs (AOD).

PLAN :

A) Surveillance biologique d'un traitement par héparine standard

1. Structure et mode d'action


1.1. Structure
1.2. Mode d'action
2. Indications des HNF
2.1. Traitement préventif
2.2. Traitement curatif
2.3. La prescription
3. Conduite du traitement
3.1. Bilan pré thérapeutique
3.2. Voie d'administration et pharmacocinétique
3.3. Modalités thérapeutiques
3.3.1. Héparine et prévention des thromboses veineuses
3.3.2. Héparine et traitement des thromboses veineuses
4. Surveillance biologique des HNF
4.1. Prélèvement
4.2. Tests biologiques
4.2.1. TCA (Temps de céphaline activée)
4.2.2. Mesure de l'héparinémie : activité anti-Xa
4.2.3. Temps de thrombine
4.3. Prévention des thromboses veineuses
4.4. Traitement des thromboses veineuses
5. Complications des traitements par l'héparine
5.1. Accidents hémorragiques
5.2. Les thrombopénies induites par l'héparine

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5.2.1. Les TIH de type I
5.2.2. Les TIH de type II

B) Surveillance biologique d'un traitement par

Héparine de Bas Poids Moléculaire (HBPM)

1. Structure et mode d'action


1.1. Structure
1.2. Mode d'action
2. Indications des HBPM
3. Conduite du traitement
3.1. Bilan pré thérapeutique
3.2. Voie d'administration et pharmacocinétique
3.3. Modalités thérapeutiques
3.3.1. Prévention des thromboses veineuses
3.3.2. Traitement des thromboses veineuses
4. Surveillance biologique du traitement par HBPM
5. Complications des traitements par l'héparine

C). Surveillance biologique d'un traitement par anti-vitamines K

1. Mécanisme d'action
2. L'outil biologique de surveillance des AVK: l'INR
3. Indications
4. Mise en route du traitement
5. AVK et intervention chirurgicale
6. Effets secondaires

D) Les anticoagulants oraux directs (AOD)

1. Pharmacocinétique : Caractéristiques pharmacocinétiques des AOD.

2. Contre-indications aux AOD


3. Posologie d’administration
4 Surveillance biologique.

A). Surveillance biologique d'un traitement par héparine standard

1. Structure et mode d'action

1.1. Structure

Les héparines sont des mélanges hétérogènes de mucopolysaccharides


sulfatés.
Il existe 2 types d'héparines :

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- les héparines non fractionnées (HNF), extraites principalement de l'intestin
de porc, leur poids moléculaire varie de 4000 à 30 000 daltons avec un poids moyen
de 10 000 à 15 000 Da.
- les héparines de bas poids moléculaire (HBPM), obtenues à partir de l'HNF
par différents procédés chimiques ou enzymatiques, leur PM est de l'ordre de 5000
Da.

1.2. Mode d'action

Les héparines accélèrent la vitesse d'action de l'antithrombine.

Elles n'acquièrent leur activité anticoagulante qu'après fixation sur l'antithrombine III
(AT III) par l'intermédiaire d'une structure de 5 sucres appelée pentasaccharidique; il
faut donc 2 conditions à l'action des héparines : l'AT III doit être quantitativement et
qualitativement normale et le site pentasaccharidique de l'héparine, qui est le site de
fixation à l'AT III doit être présent sur 1/3 des chaînes.

Les chaînes de masse moléculaire < 5400 Da ont une activité essentiellement anti-
Xa tandis que les chaînes de masse moléculaire supérieure ont également une
activité anti–IIa.
Ceci est dû au fait que l'inhibition de la thrombine requiert la liaison de la chaîne de
l'héparine à la fois à l'AT III et à la thrombine (II), tandis que l'inhibition du facteur Xa
ne requiert que la liaison de la chaîne d'héparine à l'AT III.

Les HNF ont un rapport antiXa/antiIIa égal à 1.


Les HBPM ont une activité antiXa prédominante mais différente selon les spécialités;
l'activité anti-IIa nécessite un PM>5400 Da.

2. Indications des HNF

2.1. Traitement préventif :

- De la maladie thromboembolique veineuse

2.2. Traitement curatif :

-Thromboses veineuses
- Embolie pulmonaire

- Angor instable
- A la phase aigue de l'infarctus du myocarde
- Interventions chirurgicales vasculaires ou cardiaques
- Pendant et après une angioplastie coronaire
- Chez les patients porteurs d'un stent coronaire

2.3. La prescription :

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Par voie IV, les HNF sont utilisées uniquement en milieu hospitalier où la surveillance
biologique est facilement réalisable afin d’adapter la posologie.
Par contre par voie SC, elles peuvent être administrées à l'hôpital ou en ambulatoire.

3. Conduite du traitement

3.1. Bilan pré thérapeutique

Il doit comporter la recherche d'une contre-indication par l'interrogatoire et l'examen


clinique:
- ATCD de Thrombopénie Induite par l’Héparine (=TIH).
- Risque hémorragique : thrombopathie constitutionnelle ou acquise, lésion
organique susceptible de saigner
- Endocardite infectieuse

Un bilan biologique initial doit être effectué : plaquettes, TP, TCA, clairance de la
créatinine

3.2. Voie d'administration et pharmacocinétique

Les HNF sont administrées par voie IV ou SC, leur demi-vie dépend de la dose et est
environ de 90 mn.
L'élimination se fait par liaison aux récepteurs des cellules endothéliales et par le
système réticulo-endothélial.

3.3. Modalités thérapeutiques

3.3.1. Héparine et prévention des thromboses veineuses

Les HNF sont prescrites en prophylaxie de la maladie thrombo-embolique en


chirurgie ou en médecine.
Le risque de survenue de la thrombose dépend du patient (âge, antécédents
personnels, traitements ou pathologies associées, troubles de l'hémostase), du type
de chirurgie et de la durée d'immobilisation. Avec ces critères, on peut définir un
risque global faible où la prévention n'est pas nécessaire et un risque global modéré
ou élevé.

En prévention risque modéré, les doses sont de 5000 UI deux fois par jour d'HNF
(SC).
En prévention risque élevé les doses d'HNF sont de 100 à 150 UI/kg/24h en 3
injections (SC).

3.3.2. Héparine et traitement des thromboses veineuses

Après éventuellement un bolus initial de 50 à 80 UI/kg, la dose est de 500 UI/kg/24h


(SC ou IV).
Ultérieurement, en fonction des résultats biologiques, cette dose pourra varier entre
400 et 800 UI/kg/24h.

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4. Surveillance biologique des HNF

Dans tous les cas, il est indispensable de surveiller le taux de plaquettes avant le
traitement puis 2 fois par semaine 1mois, puis 1 fois par semaine.

4.1. Prélèvement

Tube citraté.
Prélèvement par ponction veineuse au bras opposé à la perfusion d'héparine.
Si prélèvement sur cathéter, un rinçage est nécessaire.
Pour un traitement en IV continue, l'heure de prélèvement n'a pas d'importance, pour
un traitement par voie SC, il faut prélever à mi-chemin entre deux injections.
Acheminement rapide au laboratoire.

4.2. Tests biologiques

4.2.1. TCA (Temps de céphaline activée)

C'est le test de choix pour la surveillance des traitements par HNF :

- Corrélation entre l'allongement du TCA et l'activité anti-thrombotique


- Mise en œuvre simple et facilement automatisable

L'inhibition de la thrombine par l'HNF entraîne un allongement du TCA, mais tous


les réactifs n'ont pas une sensibilité identique.

La silice a une bonne sensibilité (APTT) contrairement au kaolin (éviter le TCK).


Il est important de connaître la sensibilité du réactif utilisé : la zone d'anticoagulation
en curatif doit généralement viser un TCA entre 2 et 3 fois le témoin, cette zone
thérapeutique doit être déterminée par chaque laboratoire pour correspondre à une
concentration en héparine de 0,3 à 0,6 UI/mL.

Dans certains cas on ne peut suivre un traitement d'HNF par le TCA :

- Allongement du TCA avant le traitement (déficit en facteur, lupus anticoagulant)


- Résistance biologique à l'héparine (le TCA s'allonge peu malgré l'augmentation des
doses d'héparine).

Dans ces différents cas il faut suivre le traitement par la mesure de l'activité anti-Xa.

4.2.2. Mesure de l'héparinémie : activité anti-Xa

La méthode chronométrique basée sur le TCA est moins sensible que la méthode
chromogénique qui est la méthode de référence, elle mesure l'activité anti-Xa à
l'aide d'un substrat chromogène du facteur Xa : le complexe ATIII-héparine présent
dans le plasma provoquent une inactivation du F Xa et donc la diminution de
l'hydrolyse de son substrat.
A l'équilibre de la réaction, la DO obtenue est inversement proportionnelle à la
concentration d'héparine. La calibration du test doit être propre à l'HNF.

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4.2.3. Temps de thrombine

Quand il est supérieur à 120 secondes, il est témoin d'une héparinothérapie curative
(activité anti-Xa > 0,3 UI/mL).
Il est facultatif dans la surveillance des traitements par HNF.

4.3. Prévention des thromboses veineuses

En cas d'héparinothérapie préventive, il n'est pas nécessaire d'effectuer une


surveillance du TCA et de l'héparinémie pour la prévention à risque modéré,
contrairement au cas de prévention à risque élevé où l'on adapte les doses de façon
à générer un TCA entre 1,2 à 1,3 fois le temps du témoin (prélèvement à mi-chemin
entre deux injections).

4.4. Traitement des thromboses veineuses

Pour un traitement curatif, le suivi doit être quotidien :

- Par le TCA qui doit être entre 2 et 3 fois le témoin


- Par l'activité anti-Xa si le TCA ne permet pas de surveiller correctement le
traitement, qui doit être entre 0,3 et 0,6 UI/mL.

L'heure de prélèvement n'a pas d'importance pour un traitement par voie IV continue.
Pour un traitement par voie SC, le prélèvement doit être effectué à mi-distance entre
2 injections.

La posologie doit être adaptée en fonction des résultats, il faut faire un contrôle
4 à 6 heures après chaque modification de posologie.

5. Complications des traitements par l'héparine

5.1. Accidents hémorragiques

La survenue d'un accident hémorragique impose l'arrêt du traitement anticoagulant.


Les facteurs de risque hémorragique sont la dose d'héparine, la valeur du TCA, le
terrain (âge, Insuffisance Rénale, chirurgie ou trauma récent), les traitements
associés (aspirine, AINS, thrombolytiques), le traitement par HNF par rapport à celui
par HBPM.
L'antidote des héparines, essentiellement pour l'HNF, est le sulfate de protamine.

5.2. Les thrombopénies induites par l'héparine

5.2.1. Les TIH de type I

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Elles surviennent dans 10 à 20 % des cas .Ce sont des thrombopénies d'apparition
précoce (avant le 5ème jour de traitement), modérées (plaquettes>100G/l), transitoires
et réversibles malgré la poursuite du traitement, asymptomatiques (pas de
thromboses), absence d'Ac anti PF4-héparine.

5.2.2. Les TIH de type II

Complication rare mais sévère de tout traitement héparinique ; concernerait 1 à


5 % des patients traités par HNF et 0,1% à 0,2% de ceux traités par HBPM.
Ce sont des thrombopénies retardées, avec un taux de plaquettes<100G/l ou ayant
chuté de 40% par apport à la numération initiale.

Le délai d'apparition de la thrombopénie, typiquement de 5 à 8 jours, peut être plus


tardif (15 à 21 jours voir plus) surtout en cas de traitement par HBPM ou plus
précoce (1 à 2 jours) en cas d'exposition récente à l'héparine (dans les 3 mois
précédant).

La TIH de type II peut être asymptomatique, mais les manifestations cliniques les
plus fréquentes sont des thromboses veineuses (environ 50% des cas), dont
l'extension sous héparinothérapie efficace doit être évocatrice. Il a été observé des
thromboses artérielles, des lésions cutanées nécrotiques au point de ponction et
plus rarement des hémorragies (<10%).

Le diagnostic biologique comporte plusieurs étapes : la première est la


confirmation de la thrombopénie pour éliminer une pseudo thrombopénie à l'EDTA
(recherche d'amas plaquettaire sur lame, numération sur tube citraté ou prélèvement
capillaire).

2 variétés de tests sont disponibles :

- Les tests immunologiques qui sont la recherche d'Ac anti PF4-héparine par
ELISA.
Les tests ELISA permettent une détection des IgG, IgA et IgM, mais
seulement des Ac anti PF4-héparine, donc il y a des faux négatifs si les Ac sont
d'une autre spécificité (anti Il8 ou NAP 2). De plus, il peut y avoir des faux positifs
(circulation extra-corporelle, infections).

- Les tests fonctionnels qui détectent l'existence d'un facteur plasmatique


héparine-dépendant activant les plaquettes (technique agrégométrique ou test de
libération de la sérotonine marquée, considéré comme le test de référence).
L'avantage des tests fonctionnels est une plus grande spécificité que la méthode
ELISA, la détection d'une réactivité croisée à l'Orgaran® in vitro, mais ces tests ne
mettent en évidence que les IgG et leur détection est délicate en cas de
concentrations faibles.

Pour prévenir les TIH, il faut limiter les indications de l'HNF et privilégier les HBPM
éviter une prescription prolongée d'héparine, faire un relais précoce par AVK,

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surveiller les plaquettes 2 fois par semaine pendant 1 mois puis 1 fois par semaine et
avoir une numération initiale.

La prise en charge thérapeutique consiste en un arrêt de toute héparinothérapie et


la mise en place d'une thérapeutique de substitution sans attendre la confirmation
biologique.
Un contrôle quotidien des plaquettes reste le meilleur critère de bonne réponse au
traitement ; en effet la numération plaquettaire remonte à l'arrêt de l'héparine en cas
de TIH.
La thérapeutique de substitution pourra être de l'Orgaran® (danaparoïde) qui est un
héparinoïde de synthèse ou du Refludan® (lepirudine) qui est une hirudine
recombinante.
Il existe des réactions croisées entre les héparines et l'Orgaran®. Le traitement sera
surveillé par la mesure de l'activité anti Xa, à partir d'une gamme d'étalonnage propre
à l' Orgaran®.
L'hirudine est de surveillance difficile mais il n'existe pas de réaction croisée avec
l'héparine, compte tenu de la nature de la molécule. Ce traitement est surveillé à
l'aide du TCA.

Bibliographie :
- Hématologie biologique et clinique, G. Sébahoun, 2ème édition, 2005, Arnette.
- Hémorragies et thromboses, Du diagnostic au traitement, M.-M. Samama, abrégés
Masson. 2004

B) Surveillance biologique d'un traitement par


Héparine de Bas Poids Moléculaire (HBPM)

1. Structure et mode d'action

1.1. Structure : voir cours HNF ( ci-dessus)

1.2. Mode d'action

Les héparines accélèrent la vitesse d'action de l'antithrombine.

Elles n'acquièrent leur activité anticoagulante qu'après fixation sur l'antithrombine III
(AT III) par l'intermédiaire d'une structure de 5 sucres (pentasaccharidique).

Il faut donc 2 conditions à l'action des héparines : l'AT III doit être
quantitativement et qualitativement normale et le site pentasaccharidique de
l'héparine, qui est le site de fixation à l'AT III, doit être présent sur 1/3 des chaînes.

Les chaînes de masse moléculaire < 5400 Da ont une activité essentiellement anti-
Xa tandis que les chaînes de masse moléculaire supérieure ont également une
activité anti–IIa.
Ceci est dû au fait que l'inhibition de la thrombine requiert la liaison de la chaîne de
l'héparine à la fois à l'AT III et à la thrombine (II), tandis que l'inhibition du facteur Xa
ne requiert que la liaison de la chaîne d'héparine à l'AT III (voir enseignement sur la
« pharmacologie des héparines »)

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Les HNF ont un rapport anti-Xa / anti-IIa égal à 1.

Les HBPM ont une activité anti-Xa prédominante mais différente selon les spécialités
; l'activité anti-IIa nécessite un PM>5400 Da.

anti Xa / anti IIa

HNF 1

HBPM :

-Innohep® (tinzaparine) 1,5 à 2

-Fragmine® (daltéparine) 2à3

-Lovenox® (énoxaparine) 3à4

-Clivarine® (réviparine) 3,5

-Fraxiparine® (nadroparine) 3à4

HEPARINOIDE : Orgaran® 20

2. Indications des HBPM

Les HBPM sont indiquées en prophylaxie et en traitement curatif des thromboses


veineuses, et en cardiologie selon les spécialités. Du fait de leur confort d'utilisation,
elles remplacent les HNF dans de nombreuses indications.

3. Conduite du traitement

3.1. Bilan pré thérapeutique

Il doit comporter la recherche d'une contre-indication par l'interrogatoire et l'examen


clinique:

- ATCD de TIH
- Risque hémorragique : thrombopathie constitutionnelle ou acquise, lésion
organique susceptible de saigner
- Endocardite infectieuse

Un bilan biologique initial doit être effectué : plaquettes, TP, TCA, clairance de la
créatinine

L'utilisation des HBPM est contre indiquée à dose curative dans l'insuffisance
rénale sévère

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(Cl < 30ml/mn), déconseillée à dose préventive dans l'insuffisance rénale sévère et à
dose curative dans l'insuffisance rénale légère à modérée (30<Cl<60 ml/mn).

3.2. Voie d'administration et pharmacocinétique

Les HBPM ont une élimination rénale d’où le risque d’accumulation au cours de
l'insuffisance rénale, elles ont une demi-vie longue de l'ordre de 3 à 6 heure et leur
pharmacocinétique est indépendante de la dose ; elles sont administrées par voie
SC, leur biodisponibilité est proche de 100%. Leur effet pharmacologique est
prévisible et reproductible, ce qui explique le schéma simplifié de surveillance.

3.3. Modalités thérapeutiques

3.3.1. Prévention des thromboses veineuses

En prévention risque modéré, les doses sont de 1750 à 3000 UI selon les spécialités
d' HBPM en 1 injection.
En prévention risque élevé les doses d' HBPM sont de 1750 à 3000 UI en 1
injection.

3.3.2. Traitement des thromboses veineuses

Les HBPM sont administrées par voie SC à raison de 2 injections par jour de
100UI/kg
(Fragmine®, Fraxiparine®, Lovenox®) ou d'une injection par jour de 175UI/kg
(Innohep®) ou 171UI/kg (Fraxodi®).

4. Surveillance biologique du traitement par HBPM

Dans tous les cas, il est indispensable de surveiller le taux de plaquettes avant le
traitement puis 2 fois par semaine pendant 1mois, puis 1 fois par semaine.

En traitement préventif et curatif, le traitement par HBPM ne nécessite


habituellement pas de surveillance de l’hémostase (excepté le taux de
plaquettes) sauf chez le sujet âgé, les malades présentant un poids supérieur ou
inférieur à la normale, chez l'insuffisant rénal, en cas de manifestations
hémorragiques.

Le TCA ne sera allongé qu'en cas de traitement curatif : il est inutile car il ne prédit ni
le risque hémorragique ni l'efficacité antithrombotique.

Le seul test utilisable est le dosage de l'activité anti-Xa.


La méthode chronométrique basée sur le TCA est moins sensible que la
méthode chromogénique qui est la méthode de référence, elle mesure l'activité anti-
Xa à l'aide d'un substrat chromogène du facteur Xa : le complexe ATIII-héparine
présent dans le plasma provoque une inactivation du F Xa et donc la diminution de
l'hydrolyse de son substrat.

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A l'équilibre de la réaction, la DO obtenue est inversement proportionnelle à la
concentration d'héparine. La calibration du test doit être propre aux HBPM.
Le prélèvement doit être réalisé au pic d'activité, soit 3 à 4 heures après l'injection
pour la plupart des HBPM, sauf pour Innohep® et Fraxodi® pour lesquelles le
prélèvement doit être réalisé 4 à 6 h après l'injection.
Les valeurs attendues de l'activité anti-Xa varient en fonction des spécialités et des
indications, elles sont en général pour un traitement curatif entre 0,5 et 1 UI/mL,
pour un traitement préventif risque modéré autour de 0,2 UI/mL et pour un traitement
préventif risque élevé autour de 0,4 UI/mL.

Une activité anti-Xa > 1,8 UI/mL pourrait traduire un surdosage.

5. Complications des traitements par l'héparine

Voir cours "surveillance biologique d'un traitement par héparine non fractionnée".

Bibliographie :
- Hématologie biologique et clinique, G. Sébahoun, 2ème édition, Arnette, 2005.
- Hémorragies et thromboses, Du diagnostic au traitement, M.-M. Samama, abrégés
Masson, 2004.

C) SURVEILLANCE BIOLOGIQUE D'UN TRAITEMENT PAR ANTIVITAMINES K

Les antivitamines K (AVK) sont des anticoagulants oraux d'action retardée largement
utilisés en thérapeutique préventive et curative.

I- MECANISME D'ACTION

On distingue 2 structures de base :

-les dérivés de l'Indanedione : Fluidione (PREVISCANR)


-les dérivés coumariniques : Acénocoumarol (SINTRONR) et Warfarine
(COUMADINER)

La vitamine K est un cofacteur d'une carboxylase hépatique qui gamma-carboxyle


les facteurs II, VII, IX, X, et les protéines C et S.

Les AVK ont une analogie structurale avec la vitamine K, et ont ainsi une activité
antagoniste; on obtient alors des facteurs hypo ou agammacarboxylés inactifs, ne
pouvant se lier aux phospholipides anioniques membranaires.

Compte tenu des nombreux facteurs qui peuvent moduler l'effet des AVK, une
surveillance biologique rigoureuse du traitement est indispensable.

II- L'OUTIL BIOLOGIQUE DE SURVEILLANCE DES AVK: l'INR

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L’International Normalized Ratio (INR) doit remplacer tous les autres modes
d'expression du TP chez les patients sous anticoagulants oraux.

Le temps de Quick (TQ) utilise un réactif, la thromboplastine, constituée de facteur


tissulaire associé à des phospholipides. Il explore 3 des 4 facteurs vitamine K
dépendants
(II, VII, X).

De nombreux facteurs influencent le TQ : mode de prélèvement, technique


d'étalonnage, qualité du témoin utilisé, mode de réaction (automatique ou manuel),
mode de détection du caillot (optique ou mécanique), et surtout le type de
thromboplastine utilisée.

Plusieurs types de thromboplastine sont à disposition:


- Issue d'extraction d'organes (placenta, cerveaux) de bovin ou lapin.
- Recombinante

► Il existe des différences de sensibilité d'une thromboplastine à l'autre et d'un


lot à l'autre

L'ISI (Index de Sensibilité International) permet de comparer chaque


thromboplastine à la thromboplastine de référence (ISI=1).

Sur le graphe log TQ avec thromboplastine à tester en abscisse et log de TQ avec


thromboplastine de référence en ordonnée, l'ISI pour cette thromboplastine à tester
correspon à la pente de la droite obtenue à partir de 20 sujets normaux et de 60
sujets sous AVK.

Il est recommandé d'utiliser une thromboplastine avec un ISI proche de 1 (comme les
thromboplastine recombinante).

L'INR représente le ratio qui aurait été obtenu si la thromboplastine de référence


avait été utilisée pour la réalisation du test et permet ainsi de standardiser les
résultats entre différents laboratoires.

INR = (TQ patient / TQ témoin) ISI

III- INDICATIONS

- Traitement curatif des TVP et EP : 3 à 6 mois minimum (cible INR=2,5 entre 2-3)

- Traitement préventif des emboles systémiques (prothèse valvulaire tissulaire, FA,


IDM compliqué, cardiopathie valvulaire) : 3 mois en post-opératoire pour prothèse
sinon au long court (cible INR=2,5 entre 2-3).

- Prothèse valvulaires mécaniques : au long court (INR=2,5 à 4,5 en fonction du type)

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IV- MISE EN ROUTE DU TRAITEMENT

En raison du retard de l'effet anticoagulant des AVK, l'administration d'héparine est


nécessaire haut début de la prise en charge.
L'AVK est à débuter le plus tôt possible.
La surveillance clinique et biologique doit être renforcée lors du relais héparine/AVK
en raison du risque hémorragique accru.

*Choix de l'AVK:

-AVK à demi-vie courte : SINTROM (8-9h)


La concentration plasmatique est variable (inconvénient en cas d'oubli de prise, mais
avantage en cas de risque hémorragique.)

-AVK à demi-vie longue : PREVISCAN, COUMADINE


Ils ont une bonne stabilité biologique mais le délai d'élimination est plus long en cas
de surdosage.

*Introduction:

-pas de dose de charge


-dose de départ : PREVISCAN 20 mg ou COUMADINE 5 mg/j

*délai d'action de 2 à 7j

*surveillance : INR tous les jours à partir du troisième jour et adaptation


des doses d'AVK en fonction des résultats.

*arrêt de l'héparine après 5j minimum d'AVK lorsque l'INR est dans la


zone thérapeutique 2j consécutifs.

*l'INR est mesurée 2 à 3 fois par semaine pendant les 2 premières


semaines, puis une fois par mois au minimum. Un contrôle de l'INR est également
souhaitable en cas d'introduction d'un autre traitement ou d'un problème de santé
intercurrent (infection, diarrhée…)

*La mise en place d'un carnet de traitement répertoriant les INR successifs
est intéressante pour le suivi. L'éducation du patient est primordiale (signes
d'alarmes: épistaxis, gingivorragie, ecchymose, hématurie ; respects des interactions
médicamenteuses ; alimentation ; éviter certains sports violents ; contraception ;
injection intra-musculaire à proscrire)

V- AVK ET INTERVENTION CHIRURGICALE

*intervention programmée : arrêt des AVK 72h avant l'acte chirurgical et relais par
héparine.

*intervention non programmée:

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- vitamine K: délai d'action 6 à 8h
- en cas d'urgence majeure : PPSB + vit K pour obtenir un TP > 50%

VI- EFFETS SECONDAIRES

- Accidents hémorragiques et surdosage

Le risque hémorragique augmente considérablement quand l'INR >5


Lié à une posologie excessive ou une sensibilité accrue au traitement (diarrhée,
fièvre, interférence médicamenteuse, modification diététique, éthylisme…)

Objectif : rétablir rapidement l'INR dans la zone thérapeutique

Conduites pratiques:

-INR<5, pas de saignement : supprimer la prochaine prise et réduire les doses


ultérieures

-INR 5-9, pas de saignement ou minime : arrêt AVK, 1 à 2 mg de vit K1 per os, INR
quotidien, reprendre l'AVK à plus faible dose lorsque l'INR revient en zone
thérapeutique.

-INR>9, pas de saignement, bonne compréhension des consignes : 3 à 5 mg de


vit K1 per os,
INR 6h après et renouveler la vit K si besoin, reprendre l'AVK à plus faible dose
lorsque l'INR revient en zone thérapeutique

-INR>9, saignement même minime, ou mauvaise compréhension des


consignes : idem + hospitalisation.

-saignement majeur et/ou INR très élevé : Hospitalisation, vit K1 10 mg IV lent, à


renouveler si besoin toutes les 6h, et PPSB (KASKADIL) et/ou perfusions de plasma
frais congelé.
Après traitement par des fortes doses de vit K, les AVK ont une période d'inefficacité
pendant laquelle une héparinothérapie est nécessaire.

- Autres

Eruptions cutanées, réversibles à l'arrêt du traitement et contre-indiquant sa reprise

Accidents immunoallergiques sous indanediones (insuffisance rénale aigue,


hépatique, médullaire, réactions fébriles et arthralgies) réversibles à l'arrêt du
traitement et contre-indiquant sa reprise ; l'utilisation coumarinique est alors possible.

Nécroses cutanées au début de traitement : surtout chez les patients ayant un déficit
sévère en protéine C.

Foetopathies entre la 6e et 12e semaine de grossesse.

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D) Les anticoagulants oraux directs (AOD)

1. Pharmacocinétique : Caractéristiques pharmacocinétiques des AOD.

Dabigatran Rivaroxaban Apixaban


Cible IIa Xa Xa
Prodrogue Dabigatran étexilate Non Non
Biodisponibilité 7% >80 % 50 %
Concentration 2 heures 2-4 heures 3-4 heures
maximale
Demi-vie 12-17 heures 7-11 heures 12-15 heures
Métabolisme Substrat de PgP CYP3A4, CYP3A4,
Substrat de PgP Substrat de PgP
Elimination Rénale 80 % 70 % (35 % sous 25 %
forme active)
Interactions Inhibiteurs et Inhibiteurs et Inhibiteurs et
médicamenteuses inducteurs de PgP inducteurs du inducteurs du
Contre-indication : CYP3A4 et de PgP CYP3A4 et de PgP
kétoconazole,
Inhibiteurs protéase
du VIH
Dronédarone,
Cyclosporine
Potentialisation du Aspirine, Anticoagulants, AINS
risque hémorragique

2. Contre-indications aux AOD

-Saignements, troubles de la l’hémostase, lésion susceptible de saigner (ulcère, etc.)


-Atteinte hépatique (Child, Pugh B ou C)
-Grossesse, allaitement
-Interactions médicamenteuses
-Insuffisance rénale, clairance de la créatinine <30 ml/min, sauf pour l’apixaban : possible
avec prudence si clearance entre 15 ml et 30 ml/min et pour le rivaroxaban si clearance entre
20 ml et 30 ml/min en adaptant les doses (mais en pratique on déconseille l’ADO si clairance
de la créatinine <30 ml/min).

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3. Posologie d’administration

Dabigatran Rivaroxaban Apixaban


Dosage 110 mg 150 mg 10 mg 15 mg 20 mg 2,5 mg 5 mg

Prévention 150 mg 20 mg en 10 mg
AVC dans X 2/j 1 prise/j en 2
fibrilation prises/j
atriale non
valvulaire
Prévention 2 X 110 10 mg 5 mg en 2
des TVP mg en 1 en 1 prises/j
post prise/j prise/j
PTH/PTG
Traitement AMM mais pas de De J1 à J21 : 30 mg en 2 20 mg en 2 prises/j
curatif prix fixé en Mai prises/j pendant 7 j puis 10
desTVP 2017 A partir de J22 : 20 mg en 1 mg en 2 prises/j
prise/j

PTH : Prothèse totale de hanche ; PTG : Prothèse totale de genou.


AMM : Autorisation de mise sur le marché.

4 Surveillance biologique

Aucune surveillance biologique n’est nécessaire de façon systématique. En raison de leur


mécanisme d’action, les AOD peuvent interférer avec de nombreux tests de la coagulation, et
ce de façon très variable, les rendant ininterprétables.
En cas d’intervention chirurgicale urgente et/ou d’hémorragie, un dosage de la concentration
des AOD est possible par des tests spécifiques. Seul le dabigatran a un antidote
(l’idarucizumab) à utiliser si on ne peut pas retarder l’intervention ou si l’hémorragie présente
un risque vital. Dans ces situations, on utilisera pour les AOD anti-FXa (Apixaban,
Rivaroxaban) les CCP (Concentrés de Complexe Prothrombinique) : FII, FVII, FIX, FX ou le
FEIBA (concentrés de ces mêmes facteurs) qui sont activés.

Bibliographie :
- Hématologie biologique et clinique, G. Sébahoun, 2ème édition, 2005, Arnette.
- Hémorragies et thromboses, Du diagnostic au traitement, M.-M. Samama, abrégés Masson.
2004
- Hématologie biologique et clinique, G. Sébahoun, 2ème édition, Arnette.
- Hémorragies et thromboses, Du diagnostic au traitement, M.-M. Samama, abrégés
Masson.

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