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M E S U R E S - A N A LY S E S

Ti675 - Contrôle non destructif

CND : méthodes globales


et volumiques

Réf. Internet : 42585

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Contrôle non destructif
(Réf. Internet ti675)
composé de  :

CND : méthodes globales et volumiques Réf. Internet : 42585

CND : méthodes surfaciques Réf. Internet : 42586

CND : applications sectorielles Réf. Internet : 42587

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Contrôle non destructif
(Réf. Internet ti675)

dont les exper ts scientifiques sont  :

Jean-Luc BODNAR
Maître de Conférences, CATHERM/GRESPI, Université de Reims Champagne
Ardenne

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Franck AUGEREAU Gilles DESPAUX Didier LIPPENS


Pour l’article : R4043 Pour l’article : R4043 Pour l’article : RE73

José BARUCHEL Jean DOUCET Thomas MONNIER


Pour l’article : P2700 Pour l’article : P2700 Pour l’article : R1402

Farid BELAHCENE Jacques DUMONT- Patrick MOUNAIX


Pour les articles : IN8 – FILLON Pour les articles : RE172 –
R4040 Pour l’article : R1400 RE143 – RE144

Didier CARON Jacqueline ETAY Benoît RECUR


Pour l’article : R2057 Pour l’article : RE41 Pour l’article : RE172

Mohammed Yves FAUTRELLE Éric ROSENKRANTZ


CHERFAOUI Pour l’article : RE41 Pour l’article : R4043
Pour l’article : BM6450
Jean-Yves FERRANDIS Daniel ROYER
Loïc DE ROUMILLY Pour l’article : R4043 Pour l’article : E4415
Pour l’article : P3790
Didier LAUX Christian THIERY
Jean-Christophe Pour l’article : R4043 Pour l’article : P950
DELAGNES
Pour l’article : RE144 Emmanuel LE CLEZIO Jérôme WEISS
Pour l’article : R4043 Pour l’article : IN226
Stéphanie DESCHANEL
Pour l’article : IN226

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VI
CND : méthodes globales et volumiques
(Réf. Internet 42585)

SOMMAIRE

1– Aspects généraux Réf. Internet page

Contrôle non destructif (CND) R1400 11

Essais non destructifs BM6450 21

2– Radiographie Réf. Internet page

Rayonnement synchrotron et applications P2700 27

Tomographie à rayons X P950 35

Tomographie à l'aide de rayons Terahertz RE172 43

3– Techniques électromagnétiques Réf. Internet page

Spectro-imagerie térahertz. Voir autrement RE143 49

Spectroscopie térahertz RE144 53

Sources et détecteurs aux fréquences térahertz RE73 57

Contrôle électromagnétique des interfaces libres RE41 61

4– Techniques ultrasonores et acoustiques Réf. Internet page

Introduction à la technique ultrasonore multiéléments P3790 67

Génération et détection optiques d'ondes élastiques E4415 73

Détermination des contraintes résiduelles par méthode ultrasonore IN8 77

Contrôle de tension de serrage par ultrasons R4040 79

Détectabilité des fuites par émission acoustique R2057 83

Microscopie acoustique R1402 87

Contrôle de la fatigue des matériaux par émission acoustique IN226 91

Caractérisation de solides ou liquides par méthode de pulse-echo R4043 95

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VII
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CND : méthodes globales et volumiques
(Réf. Internet 42585)


1– Aspects généraux Réf. Internet page

Contrôle non destructif (CND) R1400 11

Essais non destructifs BM6450 21

2– Radiographie

3– Techniques électromagnétiques

4– Techniques ultrasonores et acoustiques

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Contrôle non destructif (CND)

par Jacques DUMONT-FILLON


Ingénieur de l’École Centrale de Paris
Ancien Directeur Technique de l’Institut de Recherches de la Sidérurgie (IRSID)

1. Contrôle non destructif : applications et tendances..................... R 1 400 - 2
1.1 Champ d’application actuel ........................................................................ — 2
1.2 Tendances et évolution ............................................................................... — 3
2. Principes de détection des défauts. Différentes techniques
du CND........................................................................................................ — 3
2.1 Hétérogénéités et défauts ........................................................................... — 3
2.2 Procédure de CND ....................................................................................... — 3
2.3 Principe de la détection d’un défaut .......................................................... — 3
2.4 Classement et performances des procédés de CND ................................ — 4
3. Procédés optiques ................................................................................... — 6
3.1 Examen visuel.............................................................................................. — 6
3.2 Contrôle optique automatique ................................................................... — 7
3.3 Techniques optiques particulières.............................................................. — 9
4. Ressuage..................................................................................................... — 10
4.1 Principe......................................................................................................... — 10
4.2 Bases physiques du ressuage .................................................................... — 10
4.3 Principaux procédés de ressuage .............................................................. — 10
4.4 Mise en œuvre du contrôle par ressuage.................................................. — 11
4.5 Applications pratiques du ressuage........................................................... — 13
5. Procédés à flux de fuite magnétique ................................................. — 13
5.1 Principe et bases physiques ....................................................................... — 13
5.2 Magnétisme : magnétisation et démagnétisation des pièces ................. — 13
5.3 Magnétoscopie ............................................................................................ — 15
5.4 Procédés à détection automatique de flux de fuite .................................. — 16
5.5 Champ d’application. Avantages et limites ............................................... — 17
6. Courants de Foucault.............................................................................. — 17
6.1 Principe et bases physiques ....................................................................... — 17
6.2 Mise en œuvre du sondage par courants de Foucault ............................. — 20
6.3 Applications. Performances et limitations................................................. — 23
7. Radiographie et techniques connexes ............................................... — 24
7.1 Bases physiques du contrôle radiographique........................................... — 24
7.2 Production et détection des rayons X et ␥ ................................................ — 25
7.3 Mise en œuvre ............................................................................................. — 29
7.4 Champ d’application de la radiographie. Techniques spéciales.............. — 30
7.5 Radioprotection ........................................................................................... — 32
8. Ultrasons .................................................................................................... — 33
8.1 Bases physiques du contrôle ultrasonore ................................................. — 33
8.2 Production et détection des ultrasons ....................................................... — 36
8.3 Méthodes de contrôle ultrasonore............................................................. — 37
8.4 Mise en œuvre. Appareillage de contrôle. Étalonnage ............................ — 38
8.5 Champ d’application et évolution du contrôle ultrasonore ..................... — 40
9. Utilisation des procédés de CND ........................................................ — 41
9.1 Le personnel de contrôle ............................................................................ — 42
9.2 Les procédures d’emploi............................................................................. — 42
9.3 Les études préalables.................................................................................. — 42
p。イオエゥッョ@Z@ェ。ョカゥ・イ@QYYV

10. Conclusion ................................................................................................. — 42


Pour en savoir plus........................................................................................... Doc. R 1 400

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Mesures et Contrôle R 1 400 − 1

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CONTRÔLE NON DESTRUCTIF (CND) _______________________________________________________________________________________________________

n regroupe sous le vocable essais non destructifs ou encore contrôles non


O destructifs (ce dernier évoquant mieux l’aspect qualité industrielle que le
premier qui évoque plutôt les examens en laboratoire) l’ensemble des techniques
et procédés aptes à fournir des informations sur la santé d’une pièce ou d’une
structure sans qu’il en résulte des altérations préjudiciables à leur utilisation ulté-
rieure. Le terme de santé, s’il souligne une certaine parenté avec le domaine
des examens d’aide au diagnostic médical, comme la radiologie ou l’écho-

Q graphie, délimite bien l’objectif des contrôles non destructifs qui est la mise en
évidence de toutes les défectuosités susceptibles d’altérer la disponibilité, la
sécurité d’emploi et/ou, plus généralement, la conformité d’un produit à l’usage
auquel il est destiné.
En ce sens, le contrôle non destructif (CND) apparaît comme un élément majeur
du contrôle de la qualité des produits. Il se différencie de l’instrumentation de
laboratoire et industrielle puisque l’objet est de détecter des hétérogénéités et
anomalies plutôt que de mesurer des paramètres physiques tels que le poids
ou les cotes d’une pièce.
Situé ainsi aux frontières de la métrologie, de l’instrumentation industrielle,
scientifique et médicale, le domaine des contrôles non destructifs constitue un
secteur spécifique d’activité scientifique et industrielle possédant ses propres
structures professionnelles qui regroupent des industriels fabricants ou dis-
tributeurs spécialisés, des organismes d’étude et de formation, des sociétés de
services, ainsi que les départements spécialisés d’un certain nombre de grosses
entreprises industrielles fortement utilisatrices de ces techniques. Tout cela repré-
sente en France l’activité de près de 5 000 personnes et un marché présentant
un bon taux de croissance sur le moyen terme.

1. Contrôle non destructif : malgré tout, une bonne fiabilité. Les défauts recherchés sont ici
généralement bien identifiés, le fonctionnement est automatique
applications et tendances aboutissant à un repérage ou un tri des produits défectueux. Quand
le détecteur de défauts ne peut pas être installé en ligne de fabrica-
tion, on utilise dans l’industrie des bancs de contrôle correspondant
1.1 Champ d’application actuel bien souvent à des équipements importants en taille et en coût
d’investissement.
À travers son objectif, on aura compris que le contrôle non
destructif est essentiel pour la bonne marche des industries qui
Bref historique
fabriquent, mettent en œuvre ou utilisent les matériaux, les produits,
les structures de toutes natures. À l’heure où la qualité est devenue
un impératif difficilement contournable, le champ d’application des Comme l’instrumentation scientifique, le contrôle non
CND ne cesse de s’étendre au-delà de son domaine d’emploi tra- destructif (CND) constitue un champ d’application privilégié des
ditionnel constitué par les industries métallurgiques et les activités découvertes de la physique. Aussi l’histoire des essais non
où la sécurité est primordiale, telles que le nucléaire et l’aéronau- destructifs (END) commence-t-elle avec celle de la physique
tique. Après le contrôle des biens d’équipements, vient celui des moderne à la fin du XIXe siècle : découverte des rayons X, des
biens de consommation. La nature des défauts que l’on cherche à courants de Foucault, de la piézoélectricité, etc. Ce n’est toutefois
détecter se diversifie du même coup ; on recherche les défauts tech- qu’à partir de la seconde guerre mondiale que les techniques du
nologiques ponctuels graves, comme ceux inhérents à la fabrication CND ont pris leur essor dans l’industrie, en particulier dans la
et à l’utilisation des métaux (fissure de fatigue), mais aussi désormais métallurgie : contrôle des aciers, radiographie des soudures.
des défauts d’aspect (taches sur une surface propre) et des corps Une vigoureuse accélération du progrès et du développement
étrangers nuisibles (éclats de verre dans un emballage alimentaire). des END s’est manifestée ensuite vers les années 60/70 avec le
développement rapide de secteurs très demandeurs tels que le
On peut, par ailleurs, considérer que le contrôle non destructif d’un génie des centrales électriques nucléaires, l’aéronautique civile,
produit ou d’un objet peut être effectué à trois stades différents de les gazoducs, oléoducs et les plates-formes offshore. La dernière
sa vie, conduisant à trois types d’application se différenciant à la fois décennie enfin voit l’émergence des techniques de CND qui ne
par le contexte industriel et par la nature du contrôle lui-même. pouvaient pas être mises en œuvre sans l’apport d’une électro-
■ Le contrôle en cours de fabrication procède de la philosophie de nique intégrée et d’une informatique puissante ; on assiste ainsi
l’instrumentation industrielle en tant qu’outil de contrôle d’un au développement rapide des contrôles entièrement automa-
procédé souvent automatisé et impliquant alors un appareillage tiques et à l’essor des techniques gourmandes en traitement
installé à demeure en ligne de fabrication présentant une grande informatique, comme les contrôles optiques.
robustesse, une réaction rapide, un coût d’exploitation faible et,

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_______________________________________________________________________________________________________ CONTRÔLE NON DESTRUCTIF (CND)

■ Le contrôle en recette d’un lot de pièces, d’une installation, d’un ■ Les défauts de surface, accessibles à l’observation directe mais
ouvrage au moment de la livraison procède d’une philosophie de par toujours visibles à l’œil nu, peuvent se classer en deux catégories
respect de conformité à des spécifications de qualité définies aupa- distinctes : les défauts ponctuels et les défauts d’aspect.
ravant. Si l’aspect coût et productivité peut avoir encore une certaine La première catégorie (défauts ponctuels) correspond aux défauts
importance à ce stade de contrôle, c’est surtout l’aspect procédure les plus nocifs sur le plan technologique, puisqu’il s’agit des criques,
de la démarche qui devient primordial, qu’il s’agisse du choix du piqûres, fissures, craquelures, généralement aptes à provoquer à
procédé, du choix des paramètres de réglage, de l’étalonnage, de la terme la rupture de la pièce, en initiant par exemple des fissures
présentation et de l’archivage des résultats obtenus. À ce stade, il


de fatigue. Dans les pièces métalliques, l’épaisseur de ces fissures
s’agit de détecter des défauts mais aussi bien souvent d’en définir est souvent infime (quelques µm) et elles peuvent être nocives dès
la nature et les dimensions. que leur profondeur dépasse quelques dixièmes de millimètre, ce
■ Le contrôle en service s’effectue sur pièces ou structures lors qui implique l’emploi pour leur détection de méthodes non destruc-
d’opérations de maintenance ou à la suite de détection d’anomalies tives sensibles, telles que le ressuage, la magnétoscopie, les cou-
de comportement du matériel. On en attend une très grande fiabilité, rants de Foucault, les ultrasons.
eu égard à l’importance des risques encourus par la non-détection La seconde catégorie correspond aux défauts d’aspect, c’est-à-dire
d’un défaut grave. Pour ce type de contrôle, il convient de pouvoir à des plages dans lesquelles une variation de paramètres géomé-
estimer le mieux possible la nature et les dimensions des défauts triques ou physiques (rugosité, surépaisseur, taches diverses) attire
pour pouvoir en apprécier la nocivité ; il faut disposer aussi d’une le regard et rend le produit inutilisable. Ici, le contrôle visuel est pos-
grande reproductibilité de l’examen non destructif, de façon à pou- sible, mais on cherche à le remplacer par des contrôles optiques
voir suivre l’évolution du dommage au cours du temps. automatiques.
■ Les défauts internes sont des hétérogénéités de natures, de
formes, de dimensions extrêmement variées, localisées dans le
1.2 Tendances et évolution volume du corps à contrôler. Leur nomenclature est très étoffée et
spécifique à chaque branche d’activité technologique et industrielle.
Dans les industries des métaux, il s’agira de criques internes, de
Globalement, en tant qu’outil majeur de la politique qualité d’une porosités, de soufflures, d’inclusions diverses susceptibles d’affecter
entreprise, les techniques de CND continueront à élargir leur champ la santé des pièces moulées, forgées, laminées, soudées. Dans
d’application vers de nouveaux secteurs d’activité économique. On d’autres cas, il s’agira simplement de la présence d’un corps étranger
constate aussi que l’objectif du contrôle non destructif évolue en rap- au sein d’une enceinte ou d’un produit emballé. Ici le contrôle visuel
prochant ce domaine de celui de l’instrumentation ; il ne suffit plus est généralement exclu d’office et l’on utilisera donc l’un ou l’autre
aujourd’hui de détecter un défaut, il faut aussi le caractériser et le des grands procédés du CND que sont la radiographie, le sondage
dimensionner ; il faut aussi imaginer des techniques et procédés non ultrasonore, ou encore des techniques mieux adaptées à certains cas
destructifs aptes à mettre en évidence des hétérogénéités physiques comme l’émission acoustique, l’holographie, l’imagerie infrarouge,
complexes ou des irrégularités de propriétés telles que, par exemple, la neutronographie.
des variations de microstructure dans un métal, des variations de
texture ou de rugosité sur une surface, des variations de propriétés
électromagnétiques sur une bande. Ces objectifs sont souvent dif-
ficiles à atteindre, car les lois de la physique sont ce qu’elles sont 2.2 Procédure de CND
et ainsi, dans ce domaine, les progrès sont lents.
Il n’en va pas de même pour l’automatisation des CND qui béné- L’opération de contrôle non destructif d’un objet ne se borne géné-
ficie pleinement des progrès de l’informatique ; il en résulte l’arrivée ralement pas à la détection d’éventuels défauts. En effet, même si
sur le marché, d’année en année, d’appareillages plus performants, le choix du procédé, de la méthode et du matériel a été effectué au
plus fiables et surtout plus faciles à utiliser dans le cadre du respect préalable, il faut envisager toute une procédure ayant les objectifs
de procédures de contrôles très strictes. L’évolution des CND doit suivants : fiabilité de l’examen, reproductibilité, localisation des
prendre toutefois en compte l’aspect coût, ce dernier pouvant freiner défauts, identification, caractérisation de ceux-ci, en particulier par
l’essor de nouvelles techniques très performantes, comme c’est le leur taille, classement, présentation visuelle, décision concernant
cas actuellement pour la tomographie X. l’affectation de l’objet, enfin archivage des résultats et des conditions
d’examen.
Ce sont des opérations d’étalonnage, de calibrage, de balayage
2. Principes de détection de la sonde, de traitement des données qui permettent d’atteindre
ces objectifs désormais dans de bonnes conditions, grâce à l’apport
des défauts. Différentes intensif de l’informatique en temps réel.

techniques du CND
2.3 Principe de la détection d’un défaut
2.1 Hétérogénéités et défauts
Le principe de la détection d’un défaut consiste à exciter celui-ci
Le terme défaut est ambigu, relatif et peu précis, mais sa conno- et à recueillir sa réponse. Schématiquement, on peut généralement
tation négative évoque bien le rôle que joue le contrôle non destructif distinguer les étapes suivantes, quelle que soit la méthode
dans la recherche de la qualité. En fait, détecter un défaut dans une employée :
pièce, c’est physiquement, mettre en évidence une hétérogénéité — mise en œuvre d’un processus physique énergétique ;
de matière, une variation locale de propriété physique ou chimique — modulation ou altération de ce processus par les défauts ;
préjudiciable au bon emploi de celle-ci. Cela dit, on a l’habitude de — détection de ces modifications par un capteur approprié ;
classer les défauts en deux grandes catégories liées à leur — traitement des signaux et interprétation de l’information
emplacement : les défauts de surface, les défauts internes. délivrée.

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CONTRÔLE NON DESTRUCTIF (CND) _______________________________________________________________________________________________________

Différents types d’énergie sont employés en pratique : énergie qu’ils favorisent la détection des défauts de surface ou des défauts
mécanique (ultrasons, ressuage), électromagnétique (radioscopie, internes. Le tableau 1 dresse la liste des procédés actuellement
observation dans le visible, flux magnétique...). On peut schéma- utilisés en contrôle industriel et résume leurs principes et leurs
tiquement distinguer deux groupes de méthodes de détection : champs d’application spécifiques.
■ les méthodes de flux, avec une excitation et une détection de Les performances des procédés de contrôle non destructif résul-
même nature et pour lesquelles le défaut introduit une perturbation tent à la fois de considérations théoriques et pratiques.
de flux qui peut être relevée soit directement dans le flux transmis


(radiographie) ou le flux rediffusé (ultrasons), soit par un effet de
proximité (bobine de sonde à courants de Foucault, flux de fuite
magnétique) : figure 1 ; la grande majorité des procédés du contrôle
non destructif se réfère à ce groupe de méthodes ;
■ les méthodes pour lesquelles l’excitation et la détection sont de
natures différentes, chacune mettant en jeu un processus original et
spécifique ; l’excitation la plus employée est la sollicitation mécani-
que ; elle conduit aux techniques d’analyse de vibrations mécaniques
ou de microdéformations (interférométrie holographique) ou encore
à une technique d’émission provoquée dont la plus connue est
l’émission acoustique.

2.4 Classement et performances


des procédés de CND
Les procédés de contrôle non destructif résultent de la mise en
œuvre des principes et techniques physiques précédents. Ils sont
assez nombreux. Certains sont anciens, d’autres récents ; certains
sont simples, d’autres complexes ; certains sont très employés,
d’autres peu. On les classe habituellement en deux familles selon Figure 1 – Principe du contrôle non destructif

(0)

Tableau 1 – Les procédés de contrôle non destructif : caractéristiques


Types Méthodes Types de défauts Domaines
Principes physiques Points forts Points faibles
de procédés de contrôle détectés d’application

Examen visuel Contrôle manuel


Productivité,
directe ou assisté de tous produits Souplesse fiabilité
Vision Défauts débou- à surface accessible
Perturbation d’une chants, fissures,
réflexion criques, trous Contrôles auto-
Taux de fausses
Contrôle laser matiques de bandes Productivité
et tôles alarmes

Formation Défauts d’aspect, Contrôle automatique


Optiques Contrôle TV en fabrication Productivité Défauts fins
d’une image taches
des produits divers

Interférométrie Détection de micro- Délaminations,


Contrôle en atelier
Contrôle Interprétation,
déformations de parois
holographique provoquées
décollements
non métalliques
des composites productivité

Cartographie Délaminations,
Thermographie de perturbations hétérogénéités idem Cartographie
Caractérisation
infrarouge thermiques diverses Contrôle sur site des défauts

Défauts fins Contrôle manuel Simplicité Productivité,


Ressuage Ressuage Effet de capillarité de tous produits
débouchants à surface accessible
Faible coût peu quantitatif

Défauts fins Réservé


Magnétoscopie Accumulation débouchants
de poudre Sensibilité aux aciers
Flux de fuite et sous-cutanés Produits ferro- Peu quantitatif
magnétique magnétiques (aciers)
Détection de flux Distorsion d’un flux Défauts fins Sensibilité Fragilité
de fuite magnétique débouchants Automatisation des sondes
Contrôle en ligne
Matériaux non
Courants de Foucault Perturbations Défauts fins et sur chantier Sensibilité conducteurs
d’un courant débouchants de tous produits Automatisation Interprétation
métalliques
Électro-
magnétiques Potentiel électrique Perturbations Mesure Tous produits Simplicité Contrôle
d’un courant de profondeur manuel
de défauts conducteurs Faible coût Lent
Transmission Hétérogénéités Matériaux Contrôle Interprétation
Hyperfréquences
ou réflexion radar diverses peu conducteurs sans contact du signal

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_______________________________________________________________________________________________________ CONTRÔLE NON DESTRUCTIF (CND)

Tableau 1 – Les procédés de contrôle non destructif : caractéristiques (suite)


Types Méthodes Types de défauts Domaines
Principes physiques Points forts Points faibles
de procédés de contrôle détectés d’application
Contrôle en atelier Cartographie Protection
Radiographie X et sur site de tous Souplesse Détection


matériaux de réglage des fissures

Radiographie γ Fortes épaisseurs Profondeur


des défauts
Atténuation d’un flux Défauts internes Contrôle en ligne
Rayonne- Radioscopie Résolution
ments en temps réel Productivité limitée
ionisants
Contrôle de structures Imagerie Coût
Tomographie X non métalliques en coupe Productivité
Neutronographie Corps hydrogénés Équipement
Complète
Contrôle la radiographie Condition
Diffusion Compton Rétrodiffusion Délaminations d’emploi
des composites
Contrôle manuel Grande sensi- Conditions
Perturbation Défauts internes ou automatique bilité d’essai
Ultrasons d’une onde Défauts de la majorité Nombreuses Interprétation
Échographie débouchants des matériaux méthodes des échos
d’auscultation Couplage
Vibrations
mécaniques Émission provoquée Parois de gros Contrôle global
Émission acoustique par sollicitation Criques Interprétation
Fissures récipients avec localisation
mécanique Structures diverses des défauts Bruits parasites

Perturbations
Essais dynamiques d’un amortissement Criques Contrôle de pièces
Fissures moulées Productivité Qualitatif
Mesure de vitesse
Essais hydrostatiques Détection de bulles
Défauts
Tests Tests avec gaz débouchants Grande étendue Contingences
traceurs (halogènes, Détection chimique Tubes et enceintes en
d’étanchéité dans joints de flux de fuite diverses selon
hélium) ou parois, tous matériaux selon la méthode la méthode
zone perméable
Détection sonore Bruit acoustique

2.4.1 Limite de détection 2.4.2 Étalonnage. Aptitude au dimensionnement


des défauts
La limite de détection est liée à deux facteurs de nature différente:
le rapport signal/bruit, le pouvoir séparateur. L’aptitude au dimensionnement des défauts peut s’établir en partie
sur la base de considérations théoriques, mais c’est pratiquement
■ Le rapport signal/bruit en sortie d’appareil doit être suffisamment toujours la procédure d’étalonnage qui permettra en fait de quantifier
supérieur à 1 pour qu’une conclusion claire soit prise quant à cet aspect très important du contrôle. La théorie permet de
l’absence ou la présence d’un défaut. Ce facteur dépend d’abord de comprendre les limites des méthodes empiriques de calibrage des
la façon dont le défaut lui-même « émerge » de son environnement défauts basées sur la seule prise en compte de l’amplitude du signal
que l’on doit chercher à améliorer (nettoyage et meulage des (calibrage AVG en contrôle ultrasonore, voir § 8.4.3).
surfaces très rugueuses, affinage des microstructures trop gros-
L’étalonnage permet de définir et de maintenir une relation
sières des métaux) à chaque fois que cela est possible (impératifs
quantitative entre signal et défaut, le problème étant bien entendu
techniques et de coût). Ensuite, les conditions d’examens (choix d’un
de connaître par ailleurs de façon précise les caractéristiques de ce
éclairage approprié, d’un angle de tir, d’une fréquence d’excitation,
défaut. L’utilisation pour l’étalonnage de défauts naturels oblige à
etc.), la qualité de l’appareillage (bruit électronique) et la nature du
détruire la pièce d’essai tandis que l’utilisation de défauts artificiels
traitement de l’information (imagerie, renforcement des contrastes)
éloigne des conditions réelles de contrôle. Un compromis consiste
devront concourir à accroître le rapport signal/bruit.
à utiliser des défauts naturels provoqués (fissures de fatigue).
■ Le pouvoir séparateur correspond à la limite physique de
détection ; son fondement théorique est bien établi dans le cas des
techniques utilisant une onde vibratoire telles que l’optique ou le 2.4.3 Théorie et pratique
contrôle ultrasonore. Les lois de la diffraction impliquent en effet que
cette limite soit proportionnelle au rapport λ/D, λ étant la longueur Les bases physiques sont rappelées à propos de chacun des
de l’onde dans le milieu considéré et D l’ouverture de l’appareil, en grands procédés décrits plus loin. Il convient d’emblée d’en mesurer
fait généralement le diamètre de la sonde. Le paramètre 1/λ étant pro- les limites, si l’on veut comprendre pourquoi le contrôle non destruc-
portionnel à la fréquence de la vibration, on comprend ainsi pour- tif fait appel à de nombreuses règles et données empiriques qu’il
quoi, en contrôle ultrasonore par exemple, l’utilisation de fréquences est indispensable de prendre en compte pour définir ou exécuter
élevées est favorable à la détection des défauts les plus fins (micro- un examen satisfaisant.
scopie ultrasonore). On comprend d’autre part l’intérêt théorique Ainsi, par exemple, l’aspect spectral est à considérer : les bases
d’accroître fortement le paramètre D (technique d’ouverture synthé- théoriques prennent le cas simple du rayonnement monochroma-
tique en hyperfréquence et ultrasons, holographie). tique alors qu’en pratique le rayonnement possède un spectre plus

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ou moins complexe (rayonnements ionisants) et de largeur de 3.1.2 L’œil et ses limitations


bande importante (ultrasons). L’aspect homogénéité et isotropie du
matériau engendre les mêmes difficultés de passage de la théorie L’œil est un capteur optique certes remarquable à bien des points
à la pratique, d’autant que l’on a de plus en plus souvent affaire à de vue mais possédant toutefois des limitations dont il faut tenir
des matériaux de structure complexe (composites, bétons). Toute- compte en contrôle non destructif. La lecture d’une image associe
fois, on assiste présentement à une forte activité de modélisation en fait l’œil et le cerveau de l’observateur, initiant ainsi à la fois des
des phénomènes physiques mis en œuvre dans les examens non problèmes objectifs et des problèmes subjectifs. Les premiers
destructifs, ce qui constitue un apport favorable à une meilleure


concernent l’aspect optique avec un paramètre principal qui est
maîtrise de ces techniques somme toute complexes. l’acuité, c’est-à-dire le pouvoir séparateur de l’œil ; on le situe
entre 0,5 et 1 minute d’angle soit environ 50 µm à une distance
d’observation de 25 cm. Mais il ne s’agit là que d’une valeur
moyenne, car l’acuité visuelle dépend de la nature de l’image
3. Procédés optiques (éclairement et contraste), ainsi que de l’individu à travers son pou-
voir d’accommodation à la distance et à la luminance, pouvoir dont
on connaît la décroissance avec l’âge de celui-ci (presbytie).
3.1 Examen visuel
Les performances et les limitations d’ordre subjectif sont plus
difficiles à analyser, à mesurer et à prendre en compte ; il s’agit de
L’examen visuel est le premier des procédés de contrôle, le plus
perception et de conscience de l’image observée. Ainsi par exemple,
simple et le plus général puisque c’est aussi le point final de la
la perception n’est pas indépendante de la nature de l’image
majorité des autres procédés non destructifs.
(perception des figures géométriques) ou de celle de « l’état
En examen préalable, l’inspection visuelle d’un objet, d’une struc- d’esprit » de l’observateur, qui verra mieux s’il sait déjà la nature
ture, d’un assemblage tel qu’une soudure permettra de guider un de ce qu’il recherche. Cela montre d’ailleurs l’importance d’une édu-
observateur expérimenté dans la définition d’une autre technique : cation préalable du contrôleur quant à la genèse et la nature des
choix de l’angle de tir en radiographie, direction de magnétisation, défauts recherchés pour une pièce donnée.
fréquence ultrasonore.
On doit enfin prendre en considération d’autres facteurs physio-
L’examen visuel direct des pièces peut constituer un contrôle logiques et psychiques susceptibles de dégrader la fiabilité du
suffisant pour la détection des défauts débouchant en surface et sur- contrôle visuel : la rémanence de l’œil rend problématique le
tout des hétérogénéités locales et superficielles (taches de diffé- contrôle des objets en mouvement, la fatigue oculaire dégrade les
rentes natures) constituant des défauts d’aspect rédhibitoires pour performances dans le temps, de même que la fatigue nerveuse ou
des produits plats du types tôles, tissus, verre, etc. Toutefois l’exa- la distraction de l’observation [1].
men purement visuel présente des limitations de différentes natures
que nous allons examiner et qui justifient l’éclosion de toute une
gamme de procédés de contrôle optique, dont les principaux sont 3.1.3 Aides optiques à la vision
décrits plus loin (§ 3.2 et 3.3).
Il s’agit des instruments d’optique permettant d’accroître les
performances de l’œil ou encore plus généralement de donner la
3.1.1 Éclairage possibilité de contrôler des surfaces inaccessibles à la vision directe
de l’observateur.
Dans tous les cas d’observation d’un objet, les conditions
d’éclairage sont essentielles pour la fiabilité du contrôle optique. Il 3.1.3.1 Appareils optiques classiques
s’agit d’abord de se placer dans les conditions énergétiques, lumi-
nosité et longueur d’onde permettant à l’œil de travailler avec la Les appareils optiques classiques permettent de repousser les
meilleure acuité ; ainsi un éclairement de plus de 300 lux en lumière limites de l’acuité visuelle ; il s’agit en premier lieu des loupes et
vert-jaune à 0,55 µm est optimal. Il s’agit ensuite d’adapter le type des verres grossissants, accessoires optiques simples et courants,
et l’orientation de l’éclairage à la nature des défauts en vue d’amé- constitués généralement d’une ou deux lentilles donnant un gros-
liorer le contraste. L’éclairage diffus, fourni par exemple par un sissement allant de 1,5 à 20 environ, correspondant à des focales
ensemble de sources lumineuses placées derrière un écran dépoli, allant de 1 à 20 cm. La loupe doit en principe être tenue près de l’œil ;
est utilisé dans la recherche de défauts variés, sans orientation défi- son champ et sa profondeur de champ diminuent fortement lorsque
nie. Par contre, pour détecter facilement les défauts du type rayures le grossissement s’accroît, ces conditions sont peu satisfaisantes
orientées sensiblement dans la même direction, on doit préférer pour l’examen d’images de surface notablement supérieure au déci-
l’utilisation d’un éclairage directif associé à une observation de la mètre carré, pour lesquelles on pourra préférer utiliser un verre gros-
surface sous un angle voisin de celui de la réflexion spéculaire sissant, dispositif optique assimilable à une grosse lentille à faible
(figure 2) ; enfin les défauts présentant un certain relief sont en grossissement conçu pour être utilisé par les deux yeux à la fois.
général bien mis en évidence grâce à un éclairage rasant. Pour un examen approfondi en laboratoire, en particulier lorsque
l’on cherche à mettre en évidence de très fines fissures ou rayures,
on utilisera de préférence du matériel d’observation métallogra-
phique : loupe binoculaire à grossissement variable et éclairage
incorporé, éventuellement microscope métallographique si l’on
ressent la nécessité d’utiliser des grossissements importants, de 100
ou 1 000 et plus.
Nous noterons enfin que l’emploi des microscopes électroniques
à balayage (MEB) n’est plus désormais réservé aux seuls spécialistes,
ce qui devrait élargir son soutien au contrôle non destructif en
laboratoire.
Il va sans dire enfin que l’appareil photographique est devenu
l’outil majeur de tout inspecteur en contrôle ; les performances
Figure 2 – Éclairage directif et observation remarquables de l’appareil de format 24 × 36 haut de gamme associé
dans une direction proche de la réflexion spéculaire à des objectifs « macro » permettent un emploi universel, du labo-

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ratoire au chantier, dès qu’il s’agit de garder la trace d’un examen entièrement automatiques, à l’instar des autres procédés automa-
optique ponctuel. tiques du contrôle non destructif. Remplacer le couple œil-cerveau
ne peut se concevoir que lorsqu’il s’agit de détecter des défauts bien
3.1.3.2 Appareils optiques spécifiques identifiés et bien visibles ; en fait, il apparaît que le développement
de telles techniques est beaucoup plus lié à celui de la micro-
Des appareils optiques spécifiques ont été développés pour le informatique qu’à celui des capteurs optiques. Des chaînes de
contrôle non destructif. contrôle automatique ou semi-automatique existent cependant dans
l’industrie depuis plusieurs décennies.


■ L’endoscope est un appareil conçu pour pouvoir observer les
surfaces non directement accessibles à l’œil telles que les parois
d’un tube ou d’une cavité, d’un alésage ou d’un trou borgne. Mis au
point à l’origine pour les examens liés au diagnostic médical, les 3.2.1 Procédés par formation d’image
endoscopes classiques à lentilles ont été remplacés par des trans-
metteurs d’image à fibres optiques. Il s’agit de la catégorie la plus courante des procédés de contrôle
mettant en œuvre une chaîne de télévision industrielle associée à
L’endoscope se présente sous forme d’un tube ou d’un flexible
des moyens de traitement en temps réel du signal vidéo ayant pour
comportant à une extrémité une optique de prise de vues et souvent
but d’améliorer suffisamment les contrastes de l’image d’un défaut
d’éclairage et, à l’autre extrémité, un oculaire d’observation ; les
détecté, de façon que sa présence puisse être automatiquement
appareillages utilisés en contrôle non destructif ont un diamètre de
signalée ou enregistrée [3]. Ce type d’installation est principalement
l’ordre du centimètre et une longueur souvent inférieure au mètre,
utilisé pour le contrôle optique des pièces fabriquées en grande série.
les grands endoscopes pour l’examen des tubes ayant été éliminés
par la miniaturisation des caméras TV.
■ Le stroboscope est un appareil d’éclairage délivrant des brefs 3.2.2 Procédés par balayage
flashs lumineux à une cadence soutenue et réglable dans une
gamme de plusieurs dizaines de coups par seconde. Il permet, en Les procédés par balayage ont surtout été développés pour le
contrôle non destructif, l’examen visuel de pièces ou de produits en contrôle en ligne des produits en défilement du type bandes de tôle,
mouvement ; c’est ainsi qu’il a longtemps été utilisé pour l’examen de papier, de tissu, etc. La détection de petits défauts sur ces
de tôles en défilement dans les aciéries. Son utilisation systématique immenses surfaces est un problème très difficile qui impose, en par-
provoque toutefois une rapide fatigue visuelle pour les observateurs, ticulier, un système optique à la fois très fin et très rapide. Deux tech-
aussi cherche-t-on à remplacer ce type de contrôle par des contrôles niques différentes ont été développées : les appareillages à balayage
automatiques mettant en œuvre les techniques mentionnées plus par laser et les appareillages à barrettes de photodiodes.
loin (§ 3.2).
■ Les appareillages à balayage par laser éclairent le produit en défi-
lement par un petit impact laser qui le balaye transversalement à
3.1.3.3 Télévision
très grande vitesse, cela grâce à un système de miroirs tournants ;
La télévision apporte une aide précieuse au contrôle visuel ; un concentrateur de lumière, associé à une ou plusieurs cellules
permettant une observation à distance, elle complète ou remplace photoélectriques rapides, permet de capter les variations de lumi-
les endoscopes ; couplée à des moyens de traitement et d’enregis- nance qui se produisent dans la lumière réfléchie lorsque le spot
trement des images vidéo, elle permet le contrôle optique auto- laser rencontre un défaut (figure 3).
matique. Les appareils de marque Sick fonctionnent selon ce principe et
Le matériel de télévision utilisé en contrôle non destructif est géné- s’appliquent au contrôle des tôles minces et autres produits, métal-
ralement spécifique, car les performances recherchées ne sont pas liques ou non. Avec une fréquence de balayage de 3 kHz et un spot
les mêmes que celles requises dans les applications plus banales laser de 0,5 mm de diamètre, on atteint une bande passante
de la télévision ; ainsi on se contentera d’une transmission par câble de 100 MHz, supérieure à celle des systèmes vidéo TV.
d’une image vidéo en noir et blanc, sans le son. Par contre, on recher-
chera une caméra robuste, miniaturisée, télécommandable à dis- ■ Les appareillages à barrettes de photodiodes évitent d’avoir
tance et surtout possédant des qualités optiques et une bande recours à un balayage mécanique puisque le balayage des diodes
passante vidéo bien supérieures à celle du matériel courant. C’est est essentiellement électronique. Ce type de matériel peut présenter
en effet la faible performance en qualité d’images des tubes de prise une bonne résolution, car il existe des barrettes de photodiodes
de vues qui a longtemps freiné les applications de la télévision en comportant 1 024 (et plus) éléments unitaires ; ce type de caméra
contrôle qualité. L’apparition progressive de tubes de prise de vues vidéo « linéaire » est robuste et facile à protéger ; il faut toutefois
plus petits, plus sensibles, moins rémanents, mieux résolus en disposer d’objectifs optiques et de systèmes d’éclairage associés
nombre de points image que les premiers vidicons, et surtout très performants si l’on veut bénéficier pleinement des avantages
l’apparition plus récente de récepteurs solides (CCD charge coupled de cette technique qui tend désormais à supplanter la précédente
devices ou constitués d’une mosaïque de microphotodiodes dans les mêmes domaines d’application.
512 × 512 ou plus) ont permis d’élargir le champ d’application des
matériels de télévision [2].
3.2.3 Traitement d’images

Le traitement d’images associé aux capteurs précédents est à la


3.2 Contrôle optique automatique fois indispensable et difficile à mettre au point. En effet, le signal
vidéo sortant de toute caméra de prise de vues est pratiquement
toujours trop bruité pour qu’un traitement analogique simple suffise
Nous avons vu que divers appareillages optiques permettent à délivrer un signal défaut fiable. Un simple seuillage en amplitude
d’améliorer les procédures de contrôle visuel ayant principalement par exemple est souvent inefficace, conduisant à un taux de fausses
pour objet de détecter des défauts de surface sur des structures ou alarmes prohibitif.
des composants industriels. Toutefois, bon nombre de contrôles
Ainsi, dans pratiquement tous les cas de contrôle optique, il faut,
industriels en grande série ne peuvent se satisfaire d’un examen
pour obtenir des images reconstituées de bonne qualité et envisager
visuel dont nous avons souligné les limites liées en particulier à la
une détection automatique des défauts sur celles-ci, mettre en œuvre
fatigue du contrôleur. Ainsi de très nombreux travaux ont été menés
un système élaboré de traitement d’images. Ce système a pour
dans le but de mettre au point des équipements de contrôle optique
premier but d’améliorer la qualité de l’image sur le plan du contraste

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Figure 3 – Schéma de principe d’un appareil d’inspection


par balayage laser

et du niveau de bruit ; il doit en second lieu très souvent prendre


en compte la morphologie des défauts recherchés afin de rendre
l’image reconstituée parfaitement exploitable.
Ces traitements, qui peuvent être relativement complexes, ne
peuvent être mis en œuvre que par voie numérique, ce qui
entraîne la nécessité de disposer derrière la caméra d’un système
de numérisation rapide, d’une ou plusieurs mémoires d’image
(vidéo-RAM), d’un mini-ordinateur adapté au traitement d’images
en temps réel. Les outils mathématiques utilisables sont nombreux
et variés ; nous nous contenterons de mentionner ici les opérateurs
matriciels linéaires (filtre cardinal, filtre de Laplace) et non linéaires
(filtres de Sobel, de Kirsch, de Prewitt) et statistiques (Markovien),
la convolution bidimensionnelle, l’analyse fréquentielle de Fourier,
les calculs statistiques sur l’image.
Après seuillage, les traitements s’effectuent sur une image binaire
et mettent en œuvre les outils de la morphologie mathématique tels
que, par exemple, les opérations de rétraction-dilatation, squelet-
tisation ou pontage-fermeture (figure 4). Des corrélations entre
images peuvent aussi être utilisées afin d’aboutir à la reconnaissance
et éventuellement à la classification des défauts recherchés. Pour
cette ultime étape, on commence à utiliser les techniques de trai-
tement basées sur un processus d’apprentissage préalable, comme
celles associées à l’utilisation des réseaux neuronaux câblés ou
simulés par programmation.

3.2.4 Applications du contrôle optique


Les applications du contrôle optique sont en pleine croissance
grâce à la mise sur le marché de nouveaux appareillages de prise
de vues et de traitement d’images qui bénéficient des progrès
rapides réalisés dans ces domaines depuis une décennie, en Figure 4 – Exemples de traitement d’images
particulier sous l’impulsion des industries de l’audiovisuel. en contrôle d’états de surface

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Le champ d’application concerné par cette rapide évolution est destructif dans la mesure où une répartition homogène de tempé-
celui du contrôle industriel en ligne, qu’il s’agisse du contrôle des rature à la surface d’une pièce peut être perturbée par la présence
produits fabriqués en continu tels que les bandes de tôle, de papier, de défauts sous-cutanés (figure 5). Cette technique est décrite en
de verre, de plastique ou du contrôle de pièces fabriquées en grande détail par ailleurs dans les Techniques de l’Ingénieur [4].
série, pour lesquelles on s’intéresse non seulement à l’absence de
défaut de surface mais aussi à celle de défauts d’aspect ou d’irré-
gularités dimensionnelles (contrôle de tuiles, de boîtes, de pièces 3.3.2 Imagerie radiofréquence
moulées, forgées, usinées).
Indépendamment du contrôle en fabrication, le contrôle optique
visuel, direct, par endoscope ou relayé par un équipement de télé-
vision est de pratique courante dans les opérations de maintenance
L’imagerie radiofréquence consiste à exploiter les propriétés des
ondes électromagnétiques dans les longueurs d’onde décimétri-
ques, centimétriques ou millimétriques, à l’instar des systèmes de

telles qu’on les effectue dans les domaines de l’aéronautique, du radar au sens large du terme. Ainsi, si l’auscultation radar d’un objet
génie nucléaire ou chimique, dans le génie civil. métallique conducteur ne présente pas d’intérêt pour le contrôle non
Le contrôle optique intervient enfin comme étape ultime des destructif, il n’en va pas de même pour celle d’objets isolants, légè-
procédés de contrôle décrits par ailleurs tels que le ressuage ou la rement conducteurs ou composites dont on pourra par ces inter-
magnétoscopie dont le rôle n’est d’ailleurs autre que d’améliorer la actions optiques à forte longueur d’onde mettre en évidence des
lisibilité optique des petits défauts. Il est utile aussi de rappeler que hétérogénéités dissimulées à l’œil de l’observateur.
les principales techniques de contrôle non destructif délivrent en L’application la plus connue de la technique radar au contrôle
fait des images qu’il faudra lire et éventuellement traiter : c’est non destructif des matériaux est celle de l’auscultation des parois
évident pour la radiographie ou la thermographie, mais la carto- de tunnels, routiers ou ferroviaires.
graphie des défauts devient petit à petit un élément important des
contrôles ultrasonores ou par courants de Foucault.
3.3.3 Holographie interférentielle

L’holographie interférentielle appartient à la seconde famille. Il


3.3 Techniques optiques particulières s’agit de détecter un défaut superficiel ou sous-cutané en mettant
en évidence de très légères irrégularités dans la déformation de la
surface de la pièce lorsque celle-ci est sollicitée de façon non destruc-
Nous regroupons sous ce vocable les procédés de contrôle optique
tive par une contrainte mécanique, pneumatique ou thermique.
qui, contrairement aux précédents, ne mettent pas en œuvre l’image
visible de la surface inspectée. Ces procédés sont généralement de Rappelons que l’holographie est un procédé optique qui consiste
développement récent mais ont, pour certains, largement franchi le à enregistrer sur un support photographique le champ d’inter-
seuil des laboratoires pour se répandre dans l’industrie. On peut clas- férences entre, d’une part, la lumière diffusée par l’objet éclairé par
ser ces procédés en deux familles : celle des techniques basées sur la lumière cohérente d’un laser et, d’autre part, une onde de réfé-
une imagerie hors du spectre du visible, celle basée sur les appli- rence provenant directement du même laser. L’hologramme ainsi
cations de l’optique ondulatoire. obtenu, placé à nouveau dans l’onde de référence, diffracte la
lumière selon une onde lumineuse identique à celle diffusée
préalablement par l’objet lors de la prise de vue ; ainsi, tout se
3.3.1 Imagerie infrarouge passe pour l’observateur comme si l’objet était toujours réellement
présent de façon tridimensionnelle. Partant de cette technique, on
conçoit qu’une double prise de vues holographiques va permettre
L’imagerie infrarouge appartient à la première famille de procédés;
de créer des franges d’interférences entre les images holo-
elle peut être considérée comme de la pyrométrie bidimensionnelle,
graphiques de l’objet relevées à des instants différents et des
d’où son nom générique courant de thermograhie infrarouge,
conditions de sollicitations différentes (figure 6).
méthode de mesure qui présente un grand intérêt en contrôle non

Figure 5 – Exemple de détection optique


d’un multidélaminage dans un composite
carbone-époxy (doc. ONERA)

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Essais non destructifs


par Mohammed CHERFAOUI
Docteur expert en CND (contrôles non destructifs)

1. Principales méthodes ............................................................................. BM 6 450 – 2


2. Mécanisme : analyse à partir d’un examen visuel.......................... — 2
3. Contrôle par ressuage ............................................................................ — 3
3.1 Analyse de la phase d’excitation ............................................................... — 3
3.2 Phase de perturbation ................................................................................. — 3
3.3 Phase de révélation ..................................................................................... — 4
3.4 Domaines d’application .............................................................................. — 4
3.5 Conclusions ................................................................................................. — 4
4. Contrôle par magnétoscopie ................................................................ — 4
4.1 Analyse de la phase d’excitation ............................................................... — 4
4.2 Analyse de la phase de perturbation ......................................................... — 5
4.3 Analyse de la phase de révélation ............................................................. — 5
4.4 Domaines d’application .............................................................................. — 5
4.5 Conclusions ................................................................................................. — 5
5. Contrôle par courants de Foucault ..................................................... — 6
5.1 Analyse de la phase d’excitation ............................................................... — 6
5.2 Analyse de la phase de perturbation ......................................................... — 6
5.3 Analyse de la phase de révélation ............................................................. — 6
5.4 Domaines d’application .............................................................................. — 6
5.5 Conclusions ................................................................................................. — 6
6. Contrôle par ultrasons ........................................................................... — 7
6.1 Contrôle par contact ................................................................................... — 7
6.2 Contrôle en immersion ............................................................................... — 7
6.3 Mise en œuvre ............................................................................................. — 7
6.4 Méthodes par transmission........................................................................ — 8
6.5 Utilisation des différents modes de propagation ..................................... — 8
6.6 Domaines d’application .............................................................................. — 9
6.7 Conclusions ................................................................................................. — 9
7. Contrôle par radiographie (radiologie industrielle) ....................... — 9
7.1 Excitation ..................................................................................................... — 9
7.2 Perturbation ................................................................................................. — 9
7.3 Révélation .................................................................................................... — 10
7.4 Conditions opératoires................................................................................ — 10
7.5 Sécurité ........................................................................................................ — 10
7.6 Domaines d’application .............................................................................. — 10
7.7 Conclusions ................................................................................................. — 11
8. Contrôle par émission acoustique ...................................................... — 11
8.1 Caractéristiques ........................................................................................... — 11
8.2 Facteurs d’influence .................................................................................... — 11
8.3 Domaines d’applications ............................................................................ — 12
8.4 Conclusions ................................................................................................. — 12
9. Thermographie ......................................................................................... — 12
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥャャ・エ@RPPV

Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. BM 6 450

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ESSAIS NON DESTRUCTIFS ______________________________________________________________________________________________________________

es termes « Essais non destructifs » END ou « contrôles non destructifs » CND


L évoquent le diagnostic que le médecin formule lors de l’examen de son patient.
Le même principe appliqué aux pièces industrielles consiste à mettre en œuvre des
méthodes d’investigation pour apprécier sans destruction leur état de santé et for-
muler un avis sur leur aptitude à remplir la fonction à laquelle elles sont destinées.
Considérée sous cet aspect d’aptitude au bon fonctionnement, la définition de


CND suppose une bonne connaissance de tous les phénomènes mis en jeu, en par-
ticulier de la nocivité des défauts, de leur évolution dans le temps, des lois générales
de la mécanique de la rupture et, dans la pratique, les spécialistes en contrôle non
destructif sont plutôt confrontés à des problèmes d’interprétation de résultats de
contrôle par rapport à des critères établis en liaison avec le concepteur de la pièce.
Une définition des contrôles non destructifs plus proche de la réalité indus-
trielle consiste donc à dire qu’il s’agit de « qualifier, sans nécessairement quan-
tifier, l’état d’un produit, sans altération de ses caractéristiques par rapport à des
normes de recette ».
L’exécution de cette tâche demande une bonne connaissance des méthodes
d’investigation mises en œuvre, de leurs limites et surtout une adéquation par-
faite entre le pouvoir de détection de chacune d’elles et les critères appliqués
pour la mise en œuvre. On comprend qu’une grande importance soit accordée à
la formation des opérateurs en contrôle non destructif.
La Confédération Française des Essais Non Destructifs (COFREND) est l’orga-
nisme national qui délivre des certifications permettant de démontrer l’aptitude
des opérateurs à remplir les tâches qui leur sont confiées. Elle applique désor-
mais des réglementations européennes. La normalisation est aussi un aspect
fondamental pour définir les méthodes et leur application et de nombreux tex-
tes, nationaux, européens et internationaux, existent. Quelques-uns des plus
importants sont cités en [Doc. BM 6 450].
Le but de ce dossier est de présenter, sans rentrer trop dans les détails, les
principes physiques mis en jeu dans les principales méthodes en faisant ressor-
tir leurs spécificités et les domaines d’application concernés. Une information
approfondie sur les méthodes serait fournie dans des documents plus spéciali-
sés ou à l’occasion de formations telles que celles dispensées par le CETIM (Cen-
tre Technique des Industries Mécaniques).

1. Principales méthodes Cette liste de méthodes est loin d’être exhaustive. On citerait
encore, entre autres, l’étanchéité, dont la complexité de mise en
œuvre peut varier beaucoup selon le type et l’importance des
anomalies recherchées ou encore les méthodes qui utilisent des
Les méthodes de contrôle non destructif les plus couramment effets particuliers pour caractériser des matériaux ou des pièces
employées peuvent être classées en deux familles principales en (effet Barkhausen, par exemple). Enfin, de nouvelles méthodes
fonction du type d’anomalie recherchée dans la pièce. sont émergentes : TOFD, Phased Array (multi-éléments), ondes
Les méthodes de surface, (anomalies en surface extérieure) sont guidées…
les suivantes :
— examen visuel ;


ressuage ;
magnétoscopie ;
2. Mécanisme : analyse
— courants de Foucault. à partir d’un examen visuel
Les méthodes volumétriques (anomalies au sein de la pièce) sont
les suivantes : L’examen visuel est une méthode de contrôle non destructif dont
— ultrasons ; la mise en œuvre est souvent simple mais qui est très riche
— rayonnements ionisants. d’enseignements car elle permet d’expliquer le mécanisme d’un
contrôle.
D’autres méthodes existent et ont l’avantage d’être globales et en
temps réel. Il s’agit en particulier de : Il s’agit d’observer la surface d’un objet pour y déceler d’éventuel-
les anomalies. Cette observation nécessite une source de lumière
— la thermographie ; d’intensité et de longueur d’onde compatibles avec l’aptitude natu-
— l’émission acoustique. relle de l’œil de l’opérateur exécutant l’examen.

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______________________________________________________________________________________________________________ ESSAIS NON DESTRUCTIFS

Le processus mis en jeu (figure 1) se décompose en trois phases


essentielles :
— l’excitation, qui consiste à produire le faisceau lumineux de Excitation Révélation
lumière blanche ou monochromatique ;
— la perturbation, qui consiste à placer la pièce dans le champ
optique du faisceau et à rechercher l’orientation la plus favorable à
la mise en évidence d’éventuels défauts de surface ;


— la révélation, qui consiste à placer l’œil dans le champ du fais- Défaut
ceau réfléchi par la surface de la pièce. Des aides optiques telles que
loupe, binoculaire, microscope, endoscope… sont possibles.
Ces trois phases sont étroitement liées et on remarque l’impor-
tance de plusieurs paramètres : Pièce

— le caractère directif des ondes incidentes et réfléchies ;


— la nature du rayonnement de la source ; Perturbation
— l’angle d’incidence par rapport à la surface de la pièce ;
— la propreté et la rugosité de la surface de la pièce ;
— la proportion des rayons réfléchis vers l’œil vis-à-vis de la Figure 1 – Processus mis en jeu lors d’un examen visuel
quantité de lumière émise par la source ;
— les distances entre la source et la pièce et entre l’œil et la
pièce ;
— les anomalies de perception de l’œil et sa sensibilité optimale
dans un domaine de longueur d’ondes bien particulier.
Une procédure de contrôle est nécessaire pour un tel examen. Elle Après nettoyage soigné, la pièce est
précise ces paramètres en fixant des valeurs limites acceptables soumise à l′action du pénétrant qui diffuse
dans le défaut.
pour chacun d’eux. Il est également important de noter que des évo-
lutions existent désormais pour traduire les résultats d’un contrôle
sous la forme d’une image numérisée et que les capteurs de mesure
font de plus en plus appel à des systèmes optoélectroniques met-
tant en jeu la conversion de photons en électrons. On procède au rinçage de l′excès du
pénétrant à la surface de la pièce.
Cette présentation du contrôle peut être généralisée pour la des-
cription des autres méthodes où on va retrouver :
— l’excitation, souvent caractérisée par un rayonnement de Œil
Source
nature électromagnétique ou une vibration mécanique et un champ
magnétique ;
— la perturbation, définie dans tous les cas de figure par la pièce Révélateur
et l’anomalie qu’elle contient, et qui traduit l’interaction avec
Le pénétrant contenu dans le défaut diffuse
l’excitation ;
sur le révélateur appliqué à la surface de la
— la révélation, assurée soit par l’œil, soit par des systèmes de
pièce. On observe la tache résultante sous
capteurs traduisant sous forme de signaux électriques la réaction l′éclairage adapté.
entre l’excitation et la perturbation.
Dans tous les cas, des procédures sont nécessaires pour la mise
en œuvre et des évolutions techniques sont apparues et se poursui- Figure 2 – Principe de contrôle par ressuage
vent depuis plusieurs années (par exemple, il faut noter l’impor-
tance de plus en plus grande prise par l’imagerie pour la restitution
des informations recueillies par les capteurs et le recours à des trai- — le choix du produit pénétrant ; on utilisera un produit d’autant
tements de l’information). plus sensible que la rugosité de surface est faible et que le matériau
Les principales méthodes de contrôle non destructif sont présen- n’est pas poreux ; le classement dans l’ordre croissant des sensibili-
tées ci-après. tés, généralement admis, est le suivant :
• produit coloré,
• produit fluorescent pré-émulsionné,
3. Contrôle par ressuage • produit fluorescent à post-émulsion ;
— la durée d’application ; il est nécessaire de respecter les temps
préconisés par le fabricant pour l’application considérée (générale-
Le contrôle non destructif par ressuage a pour objectif de détecter ment entre 15 et 30 min).
des défauts débouchant en surface sur des matériaux non absor-
bants (figure 2).

3.2 Phase de perturbation


3.1 Analyse de la phase d’excitation
Le modèle d’interaction entre produit pénétrant et défaut généra-
lement admis pour expliquer la remontée de produit (c’est-à-dire le
La pièce est soumise à l’action du liquide pénétrant, l’application ressuage) est l’effet capillaire. Il faut prendre en compte les phéno-
se faisant soit par immersion, soit par pulvérisation. mènes de diffusion et d’absorption. Les principaux paramètres
Parmi les paramètres qui influent sur cette première phase, on note : influençant le processus dans cette phase sont :
— l’état de surface de la pièce ; indépendamment de la rugosité — la géométrie du défaut et son état de surface. Pour un défaut
qui va jouer un rôle sur le choix des produits, il est indispensable qui débouche en surface extérieure, et qui n’est pas colmaté par des
d’appliquer le pénétrant sur une surface parfaitement dégraissée ; salissures, le processus de remontée s’engage d’autant mieux que

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RS

RT
CND : méthodes globales et volumiques
(Réf. Internet 42585)

1– Aspects généraux R
2– Radiographie Réf. Internet page

Rayonnement synchrotron et applications P2700 27

Tomographie à rayons X P950 35

Tomographie à l'aide de rayons Terahertz RE172 43

3– Techniques électromagnétiques

4– Techniques ultrasonores et acoustiques

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RU

RV
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pRWPP

Rayonnement synchrotron
et applications

par Jean DOUCET

et
Laboratoire de physique des solides, université Paris-Sud 11, Orsay
José BARUCHEL R
ESRF, Grenoble

1. Caractéristiques du rayonnement synchrotron .............................. P 2 700v2 - 2


2. Techniques de caractérisation et d’analyse .................................... — 9
3. Quelques exemples d’utilisation industrielle .................................. — 27
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. P 2 700v2

e rayonnement synchrotron, lumière émise par des électrons ou des posi-


L trons relativistes et soumis à une accélération centripète, fournit un très
large spectre de longueurs d’onde depuis l’infrarouge lointain jusqu’aux
rayons X. La nouvelle génération de machines, spécialement conçues pour
l’utilisation de cette lumière, a ouvert à une large communauté de scientifiques
de laboratoires publics et privés une grande variété de méthodes d’investiga-
tion de la matière condensée qui complètent et vont au-delà des méthodes
classiques. La continuité spectrale et l’utilisation en faisceau monochroma-
tique, la brillance de la source, sa structure temporelle, sa polarisation linéaire
ou circulaire, ses propriétés de cohérence ont donné une nouvelle dimension
aux études des propriétés structurales, chimiques, électronique, et magné-
tiques de la matière à un niveau de résolution extrême.
Les méthodes de caractérisation et d’analyse structurale basées sur les tech-
niques de diffraction-diffusion de rayons X, de caractérisation chimique basées
sur les techniques de spectroscopie dans toute la gamme des énergies, d’ana-
lyse du comportement électronique et magnétique par les techniques de
dichroïsme et de photoémission, enfin les nouveaux développements en radio-
graphie X à deux et trois dimensions sont décrites à l’aide de différents
exemples d’application choisis dans les secteurs de la chimie, de la pharmacie,
de la médecine, de la métallurgie, des plastiques, ou encore, des matériaux
pour l’électronique. Un accent particulier est porté sur les techniques d’ima-
gerie, qu’elles soient en plein champ ou à balayage : elles constituent en effet
la percée la plus remarquable dans le domaine de l’utilisation du rayonnement
synchrotron pour l’étude des matériaux, notamment pour les matériaux
industriels.
Les technologies et l’instrumentation associées au rayonnement synchro-
tron – machines, sources de lumière, optiques associées, stations d’analyse –,
sont également succinctement présentées non seulement à titre d’information
générale mais surtout pour bien souligner le lien étroit qui existe entre l’amé-
lioration des technologies synchrotron et les performances des techniques
d’analyse.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPQQ

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RW
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pRWPP

RAYONNEMENT SYNCHROTRON ET APPLICATIONS _______________________________________________________________________________________

1. Caractéristiques Donc, plus l’énergie des particules est élevée, plus λc est petit et
plus le rayonnement émis se déplace vers les grandes énergies.
du rayonnement Typiquement, l’anneau de l’ESRF (European Synchrotron
Radiation Facility) à Grenoble, l’un des plus puissants synchro-
synchrotron trons actuels, fonctionne avec une énergie de 6 GeV et une lon-
gueur d’onde critique de 0,06 nm, ce qui donne accès aux rayons
X durs. Le synchrotron SOLEIL fonctionne avec une énergie plus
faible (2,75 GeV) et une longueur d’onde critique de 0,144 nm, ce
1.1 Principe de l’émission qui ne permet pas de travailler pratiquement avec des rayons X de
plus de 70 keV mais est en revanche optimisé pour les rayons X
La lumière émise par des particules chargées, telles que des plus mous, l’ultraviolet et l’infrarouge.
électrons ou des positrons (« électrons » chargés positivement)
accélérés à une vitesse proche de celle de la lumière, est appelée

R rayonnement synchrotron. Le principe de base de cette émission


s’interprète bien dans la théorie des ondes électromagnétiques de
Maxwell [1]. Toute particule chargée soumise à une accélération
1.2 Principaux paramètres
Le rayonnement synchrotron présente des caractéristiques qui,
émet un rayonnement électromagnétique. Lorsque l’accélération
pour la plupart, lui confèrent des qualités très supérieures à celles
est faible (approximation de mécanique classique), le rayonne-
offertes par les sources classiques de lumière. Cela justifie
ment est émis dans tout l’espace de manière isotrope et il est pres-
amplement son utilisation et son développement actuel malgré sa
que monochromatique ; c’est le cas des antennes radio (figure 1a
lourdeur technique et le coût de revient élevé de telles machines.
et 1c ). Au contraire, lorsque l’accélération est forte (approximation
Passons en revue les principales caractéristiques du rayonnement
de mécanique relativiste), le rayonnement est émis exclusivement
synchrotron.
tangentiellement à la trajectoire des particules et sa distribution en
énergie s’étend continûment sur plusieurs puissances de 10 en fré- ■ La continuité spectrale, de l’infrarouge lointain jusqu’aux rayons
quence (figure 1b et 1d ). C’est le cas dans les accélérateurs de X, est exceptionnelle et n’est atteinte par aucune autre source sur
particules que sont les synchrotrons et les anneaux de stockage une aussi large plage de longueurs d’onde. Ainsi, il est possible
dans lesquels les particules, portées à des vitesses proches de d’avoir accès à des longueurs d’onde difficilement accessibles
celle de la lumière, se trouvent soumises à des accélérations autrement, comme les rayons X mous (énergie autour du keV) et
centripètes très élevées produites par des champs magnétiques l’ultraviolet proche (λ > 105 nm) et lointain (λ < 105 nm).
intenses qui incurvent leur trajectoire. L’émission est caractérisée,
entre autres, par la longueur d’onde critique λc , qui sépare en ■ La faible divergence d’émission dans le plan vertical (de l’ordre
deux parties égales la puissance émise, qui vaut : de 0,1 à 1 mrad) est le principal élément conduisant à une brillance
bien supérieure à celle des tubes de rayons X ou des lampes à
λc (nm) = 0, 599 R /E 3 = 1, 865 /BE 2 décharge. Cela permet également une excellente focalisation des
faisceaux. La focalisation horizontale est réalisée dans un onduleur
avec R (m) rayon de courbure, (voir § 1.3) où on obtient typiquement quelques milliradians. Dans
le cas d’un aimant de courbure ou d’un wiggler, on doit recourir à
B (T) induction magnétique, des optiques adaptées pour refocaliser (voir § 1.4.2).
E (GeV) énergie des particules.
■ L’intensité (flux ou puissance moyenne) du rayonnement syn-
chrotron est de plusieurs ordres de grandeur supérieure à celle
des générateurs de rayons X bien connus dans les laboratoires.
Dans le domaine de l’ultraviolet ou des rayons X mous, c’est la
Accélération même chose, mais la comparaison avec les lasers se limite à quel-
ques longueurs d’onde seulement. Dans le visible, les lasers sont
Accélération e– plus intenses que le rayonnement synchrotron. Notons que, si l’on
choisit la puissance crête des sources, les sources lasers sont
e– incomparablement plus puissantes que le rayonnement synchro-
tron. En revenant à la puissance moyenne, il est cependant ici pré-
Nappe férable de distinguer le flux total de photons émis, de la luminance
(ou brillance pour suivre le terme anglo-saxon) de la source qui
dépend de sa taille et de la divergence ; les deux ne sont pas tout
a vitesse non relativiste b vitesse relativiste à fait couplés et selon les besoins d’utilisation on peut privilégier
l’une ou l’autre de ces caractéristiques.
Pour fixer les idées, la figure 2 donne une comparaison des
I I luminances émises en fonction de la longueur d’onde par des
sources synchrotrons et un tube typique de rayons X. Pour
comparaison, la luminance des meilleures sources de laboratoire
atteint seulement 1012 photons. À noter que les gammes en éner-
gie ne sont pas les mêmes, celle de SOLEIL est beaucoup plus
large et s’étend plus vers les basses énergies que celle de l’ESRF
qui, en revanche, s’étend plus vers les hautes énergies. La lumi-
λ λ
nance et/ou le flux peuvent être considérablement amplifiés au
moyen de structures magnétiques qui créent des déviations secon-
daires à la trajectoire initiale des particules ; ces structures (wiggler
c spectre d'émission de l'électron d spectre d'émission et onduleur) seront décrites au paragraphe 1.3.
pour une vitesse non relativiste de l'électron pour
une vitesse relativiste Le lecteur souhaitant obtenir des données techniques précises
sur la machine et les sources de rayonnement pourra consulter
Figure 1 – Schéma de l’émission d’un électron accéléré des pages Internet de l’ESRF et de SOLEIL (adresses disponibles
sur une orbite circulaire en [Doc. P 7 200v2]).

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RX
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________________________________________________________________________________________ RAYONNEMENT SYNCHROTRON ET APPLICATIONS

Phot/s/0,1%/mm2/mrad2 1021
ID27
7 Courant : 200 mA
6 (4 m dans le vide)
Émittances : 4 et 0,03 nm
5
4
3

1020
7
6 ID16, ID18, ID28

5 (5 m dans l'air)
4
3

1019
3 4 5 6 7 8 9 2 3 4 5 6 7 8 9
10 keV 100 keV
Énergie
a ESRF
Phot/s/0,1%/mm2/mrad2

1020

Brillance ≈2,75 GeV

U20
1019
HU80
HU640
HU256
1018

1017

1016

1015
1 eV 10 eV 100 eV 1 keV 10 keV Énergie

b SOLEIL

Figure 2 – Luminance en fonction de l’énergie des faisceaux délivrés par différentes lignes de lumière des deux installations
de rayonnement synchrotron en France

« cylindriques » discrets (de 1 à plusieurs dizaines ou centaines


ESRF : European Synchrotron Radiation Facility selon les machines). Le diamètre du « cylindre » détermine la
SOLEIL : Source Optimisée de Lumière d’Énergie Intermé- taille de la source, sa longueur, la durée de l’impulsion, et la
diaire du LURE (Laboratoire d’utilisation du rayonnement élec- distance entre paquets donne la fréquence des impulsions.
tromagnétique) Typiquement, la durée de l’impulsion est de l’ordre de la nano-
seconde ou d’une dizaine de picosecondes et la fréquence de
l’ordre de quelques mégahertz à quelques dizaines de méga-
■ Le rayonnement synchrotron a une structure temporelle. En hertz. Certaines techniques d’analyse exploitent cette caracté-
effet, les particules circulent dans l’anneau par paquets ristique.

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RY
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RAYONNEMENT SYNCHROTRON ET APPLICATIONS _______________________________________________________________________________________

■ Le rayonnement synchrotron est fortement polarisé linéaire- impulsion à de multiples domaines et en particulier à la science
ment dans le plan de l’orbite des particules. De part et d’autre de des matériaux. Actuellement, il existe plus d’une cinquantaine de
ce plan, cette polarisation linéaire diminue fortement et laisse centres de rayonnement synchrotron dans le monde qui se répar-
place à une polarisation circulaire. Comme nous le verrons plus tissent en Asie du Sud-Est (Japon, Corée, Taïwan, Chine), en Amé-
loin, en utilisant des onduleurs ou wigglers spéciaux (hélicoïdal, rique du Nord (États-Unis, Canada), du Sud (Brésil) et en Europe
asymétrique), on peut obtenir de la lumière circulairement polari- (Grande-Bretagne, Allemagne, Italie, France, Suisse, Suède,
sée avec un flux élevé. Russie), ainsi qu’en Australie.
■ La lumière émise par un paquet de particules est normalement À l’inverse de la tendance vers le gigantisme des installations,
incohérente puisque la source n’est pas ponctuelle et que chaque se développe en parallèle la tendance vers la miniaturisation.
particule est en soi une source polychromatique sans relation de Certaines firmes commercialisent de petits synchrotrons dont la
phase avec les photons émis par les autres particules. Cette source gamme spectrale est limitée aux X-mous et à l’ultraviolet, avec
ne satisfait à aucune des conditions de cohérence spatiale et tem- une luminance très nettement inférieure à celle des grandes


porelle d’une source telle qu’un laser. Toutefois, on peut rendre le machines, mais supérieure à celle des sources classiques de
faisceau de lumière cohérent au niveau d’un détecteur (et réaliser lumière malgré leur faible taille (environ 10 m de diamètre). D’ici
un hologramme par exemple) en sélectionnant un intervalle spec- quelques années seront commercialisées de petites machines
tral et un angle solide suffisamment petits. Pratiquement, on utilise capables de délivrer du rayonnement synchrotron dans le domaine
la lumière émise sur l’axe d’un onduleur qui est très intense et très des rayons X. Ces machines, actuellement en phase de dévelop-
peu divergente et on réalise ensuite les conditions de cohérences pement sont basées sur la diffusion Thomson (effet Compton
spatiale et temporelle grâce donc à une fente de sortie très étroite inverse). Les photons X sont produits par l’interaction entre un
et à un monochromateur. faisceau d’électrons de quelques MeV et un faisceau laser dans le
domaine du TW. Il sera alors tout à fait concevable que certains
■ Enfin, le rayonnement synchrotron a une intensité moyenne qui, industriels, ou des centres hospitaliers, puissent s’équiper de telles
à long terme, est décroissante car les paquets se « désagrègent » installations pour des applications spécifiques pouvant aller
lentement au cours du temps. Les périodes de décroissance vont jusqu’au contrôle de procédés et au diagnostic médical.
de quelques heures à une centaine d’heures selon les machines,
ce qui oblige à réinjecter des particules dans ces machines généra-
lement de deux fois jusqu’à plusieurs fois par jour.
1.3.2 Description des machines
Les machines produisant du rayonnement synchrotron le plus
couramment utilisées sont des anneaux de stockage d’électrons et
1.3 Machines non pas directement des synchrotrons. Cela permet d’éviter
d’alourdir la structure des anneaux par les dispositifs d’accé-
1.3.1 Évolution lération et de les rendre plus efficaces pour la délivrance de rayon-
nement.
Jusqu’au début des années soixante-dix, le rayonnement syn- Généralement, les particules sont produites dans un canon à
chrotron était considéré comme un phénomène parasite et gênant électrons, accélérées, par une série de klystrons dans un accélé-
pour la réalisation des expériences de physique des collisions, rateur linéaire puis éventuellement, comme pour les machines de
phénomène que l’on cherchait à minimiser dans les accélérateurs la troisième génération, dans un petit anneau synchroton appelé
de particules. C’est à cette époque que certains chercheurs « booster », dont le but est de porter les particules à l’énergie
confrontés aux problèmes de l’étude de la matière condensée ont nominale avant d’être injectées dans l’anneau de stockage
perçu l’avantage qu’on pourrait tirer de telles sources de lumière si proprement dit.
l’on arrivait à les exploiter correctement. Les premiers centres de
recherche utilisant le rayonnement synchrotron pour l’étude des La figure 3a représente le principe d’un anneau de stockage
matériaux se sont alors développés autour des synchrotrons exis- avec ses principaux éléments. La figure 3b montre la machine
tants, en utilisant cette source en « parasite », en dehors des ESRF à Grenoble avec son système d’injection, ses lignes aimants
heures de fonctionnement propres à la physique des particules. Le notées D et ses lignes à éléments d’insertion notées ID.
succès aidant, les centres de rayonnement synchrotron ont fini par L’anneau de stockage est constitué par une succession de
utiliser majoritairement les installations, puis enfin exclusivement, sections droites et de sections courbes. La courbure de la trajec-
en profitant par ailleurs du déclin d’activité des installations de toire est produite par des aimants dipolaires (environ 1T). Dans les
physique des particules, dont l’énergie se révélait insuffisante. sections droites sont placés les éléments permettant l’injection, la
Vers la fin des années 1980 sont apparus les premiers anneaux cavité radiofréquence qui permet de redonner aux particules
construits spécifiquement pour délivrer du rayonnement synchro- l’énergie perdue par émission synchrotron et de les rassembler en
tron. Enfin, en 1994, le premier synchrotron dit de la 3e génération paquets, des éléments électrostatiques (quadrupôles, sextupôles,
pour les rayons X durs a été mis en service à Grenoble (ESRF). Par octupôles...) destinés à focaliser la trajectoire, et enfin des
rapport aux précédents, il délivrait, grâce à la haute énergie éléments d’insertion (ID) qui jouent le rôle d’amplificateur de
communiquée aux particules stockées dans l’anneau de près de rayonnement, les onduleurs et les wigglers. Leur principe est basé
900 m de circonférence à une énergie de 6 GeV, des faisceaux dont sur des déviations de faible amplitude des trajectoires par des
le flux et la brillance dépassaient, dans la gamme des rayons X structures magnétiques périodiques ; à chaque courbure supplé-
durs, de plusieurs ordres de grandeur ceux des synchrotrons pré- mentaire, il y a émission de lumière (figure 4a ).
cédents. Deux autres synchrotrons du même type, l’un aux Dans le cas de l’onduleur, l’induction magnétique est faible
États-Unis et l’autre au Japon, ont été mis en service quelques (quelques dixièmes de tesla), il existe un phénomène d’interfé-
années plus tard. Plus récemment, plusieurs machines de dimen- rence de l’émission à chacune des oscillations et le spectre d’émis-
sions et d’énergie plus modestes ont été mises en service, ou sont sion mesuré à travers une petite fente située sur l’axe d’émission
sur le point de l’être : SLS en Suisse, SOLEIL en France, DIAMOND est un spectre de raies d’harmoniques d’intensité proportionnelle à
au Royaume-Uni, ALBA en Espagne, BOOMERANG en Australie, N 2, N étant le nombre de structures magnétiques de l’onduleur
ainsi que plusieurs machines en Asie du Sud-Est. L’Allemagne (figure 4b ). Dans le cas du wiggler, l’induction magnétique est
possède maintenant plusieurs machines performantes grâce à la forte (supérieure au tesla), ces phénomènes d’interférences
transformation d’anciens synchrotons. Les performances des s’estompent (car repoussés vers les ordres supérieurs, au-delà de
installations expérimentales installées sur les quelques dizaines de la centième frange) et le spectre revient à la superposition de
lignes de lumière issues de ces anneaux permettent le dévelop- l’émission issue de chaque oscillation. On notera que le spectre
pement de nouvelles techniques et ainsi donnent une nouvelle d’émission est alors déplacé vers les grandes énergies.

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SP
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________________________________________________________________________________________ RAYONNEMENT SYNCHROTRON ET APPLICATIONS

Wiggler
Cavité radiofréquence
Aimant
de courbure

Injection
d'électrons


Onduleur

a schéma de principe d'un anneau de stockage avec émission


de lumière au niveau des aimants de courbure et
des éléments d'insertion (wigglers et onduleurs)

Central Building
)
RG
G)

)
RG
SC

EC
SH-SPLINE CR

)
BBLE CRG

M
MA

FA
P+
(FI
(X

29

0 M30 31 31
28

G)
BM

3 D
ID B I BM ID32 32 (IF CR
29
BM
ID
8

BM
BM26 (DU

27
ID2

ID 0 1
BM
BM25 (SPANI

BM01 (SW/NOR CRG)


ID27

32 1 ID02
31 2 BM02
ID26

30 3 (D2AM
ID03 CRG)
4
29
Op
tic

Booster
sl
28

ab

Synchrotron
.
ID24

27

6
BM

26

7
23

BM ID
ID2 M22 ID2

05 06
3

25
B

Public beamlines

Instrumentation test and


24

BM
2

development beamlines
20
BM ID08
10
23

(R ID CRG beamlines
OBL 21
07

CR
G) Free bending magnet
11
22

BM08

ID2 ports
0
ID09
12

ID19 BM 21
(GILDA

19 Storage Ring
13

20
B

14
BM18 19
ID10 A +

15
CRG)

18 16
ID18 17
1
ID1
12

ID17 16
G) BM
ID

ISH CR ID16
13

(SPAN + B M14 + B
ID

5A B
ID1 G) 14 A
K CR ID
(U

BL Beam lines pour ligne de lumière D lignes « aimants de courbure »


CRG Collaborating Research Group ID lignes « insertions »
GILDA acronyme pour 1 CRG particulier (Italie)

b disposition de la quarantaine de lignes de lumière autour


de l'anneau de stockage de l'ESRF à Grenoble

Figure 3 – Anneau de stockage

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SQ
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RAYONNEMENT SYNCHROTRON ET APPLICATIONS _______________________________________________________________________________________

lignes pour les rayons X durs qui sont peu absorbés est moins
Émission poussé et des fenêtres isolant le vide des lignes de celui de
de lumière Direction l’anneau (en général en béryllium) peuvent être traversées.
e– d'observation Aux extrémités des lignes de lumière, on trouve les dispositifs
α
expérimentaux que l’on peut diviser en trois parties : l’optique, le

B poste d’analyse et le détecteur.
T
1.4.2 Optique
a rayonnement synchrotron émis par un électron relativiste
Le rôle de l’optique est de transformer le rayonnement sortant
circulant sur une trajectoire sinusoïdale dans un champ
de la ligne de lumière en un rayonnement adapté à l’utilisation
magnétique périodique de période T
souhaitée. Les éléments principaux sont les monochromateurs, les


miroirs et les dispositifs de focalisation.
Brillance (photons/s/mm2/mrad2/0,1% BW)

■ Les monochromateurs pour les rayons X sont constitués par une


1020
lame cristalline qui sélectionne, par diffraction de Bragg sur une
famille de plans réticulaires, une longueur d’onde (et ses harmo-
Onduleur
1019
niques) parmi le continuum du faisceau blanc. Ce sont en général
des lames de silicium, de diamant ou de germanium choisies pour
leur grande réflectivité. La résolution en énergie (∆E/E allant de
1018 quelques 10–4 à 10–6, et même au-delà dans des cas très particu-
liers) peut être ajustée en choisissant le matériau et la réflexion, la
résolution étant de plus augmentée si l’on fait subir au faisceau
1017 plusieurs réflexions sur des cristaux successifs. En outre, les cris-
taux peuvent être très légèrement courbés de façon à focaliser le
Wiggler faisceau incident au niveau du poste d’expérience. Pour les rayons
1016 ultraviolets, on n’utilise plus des lames cristallines mais des
réseaux. Comme la réflectivité des métaux varie fortement avec
l’angle d’incidence et la longueur d’onde du rayonnement, on uti-
1015 lise des monochromateurs à incidence normale pour l’ultraviolet
Aimant proche, sous vide, et des monochromateurs à incidence rasante
pour le domaine des rayons X mous.
1014
2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 40 50 ■ Les miroirs sont des éléments comprenant, à l’extérieur, une
Énergie (keV) fine couche métallique, déposée sur un substrat de grande pla-
néité (verre, silicium), qui travaillent en incidence rasante et dont
b exemples de l'émission de différentes sources le double but est d’éliminer les harmoniques du rayonnement fon-
pour une machine d'énergie donnée damental choisi issu des monochromateurs et de préfocaliser,
moyennant une très faible courbure, le faisceau dans une direction
Figure 4 – Comparaison des spectres d’émission de lumière perpendiculaire à celle obtenue par le monochromateur (sur une
d’un anneau de stockage : exemple de spectre produit
par un onduleur avec ses différents harmoniques, spectre section de l’ordre de 200 × 200 µm2).
de wiggler et spectre produit par un aimant simple
avec une brillance beaucoup plus faible (exemples de spectres ■ Une meilleure focalisation est obtenue par des multicouches, où
de l’ESRF à Grenoble) quelques centaines de couches alternées, de compositions diffé-
rentes, déposées sur un substrat, miment un cristal avec des plans
réticulaires parallèles à la surface principale, et permettent d’obte-
Les électrons (ou positrons) à l’origine du rayonnement électro- nir un faisceau de moindre monochromaticité (∆E/E dans la
magnétique ont des vitesses proches de celle de la lumière. Ils font gamme 10–3 à 10–2), mais plus intense, ce qui correspond aux
donc des centaines de milliers de tours en une seconde, et la pro- besoins de nombreuses applications. Les multicouches courbées
babilité de perte par rencontre avec un ion résiduel est d’autant permettent, comme les miroirs, une focalisation des faisceaux.
plus forte que le vide est mauvais. Il est donc indispensable, pour Deux multicouches (ou miroirs) courbées, à 90o l’une de l’autre,
avoir une durée de vie du faisceau longue (plusieurs heures à plu- constituent un élément focalisant [de Kirkpatrick-Baez (KB)] dans
sieurs centaines d’heures) d’avoir un vide très poussé dans les deux directions. Les KB sont de plus en plus utilisés pour la
l’anneau de stockage (de l’ordre de 10–12 bar) pour réduire la focalisation de rayons X durs (E > 3 keV), avec des tailles de fais-
« désagrégation » des paquets d’électrons évoquée plus haut. ceau microniques, ou même submicroniques (80 × 80 nm2 est
obtenu en routine, pour des applications en imagerie ou nanofluo-
rescence, à l’ESRF).
1.4 Équipement associé au rayonnement
■ Les miroirs et multicouches ne sont pas les seuls éléments de
synchrotron focalisation pour les rayons X. Au cours des dernières années, de
nombreux dispositifs ont été proposés pour concentrer le faisceau
1.4.1 Lignes de lumière incident sur une petite surface de l’échantillon. Les plus simples
d’utilisation sont constitués par des ensembles de trous coaxiaux
Une fois issue de l’anneau, par une fenêtre dans l’axe de la alignés, sphériques au départ, aujourd’hui paraboliques, dans un
section droite pour un élément d’insertion ou sur la tangente à la matériau peu absorbant (aluminium, beryllium, polymères). Ces
trajectoire pour un aimant de courbure, la nappe de rayonnement « lentilles réfractives » permettent de descendre jusqu’à des dia-
circule dans un tube (ou ligne de lumière) et alimente une ou mètres de faisceau de l’ordre du micromètre. Des fibres capillaires
plusieurs stations d’expériences. Les anciens anneaux ne coniques, similaires à des fibres optiques, mais creuses, sont
comportaient que quelques lignes de lumière, ceux de la troisième également très souvent utilisés ; elles permettent d’obtenir des
génération en comptent plusieurs dizaines régulièrement réparties focalisations de même ordre. Pour aller au-delà, il faut utiliser des
autour de l’anneau. Il y règne le vide de l’anneau (sans fenêtre KB pour les rayons X durs, ou des lentilles à rayons X dérivées des
physique) pour les rayonnements X mous tandis que le vide des lentilles de Fresnel pour l’optique classique, pour des rayons X de

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________________________________________________________________________________________ RAYONNEMENT SYNCHROTRON ET APPLICATIONS

plus faibles énergies. D’autres dispositifs plus sophistiqués, tels ou basse température, sous atmosphère réactive, et plus généra-
des guides d’onde, ont également été proposés et utilisés. Tous lement in situ, par exemple sous chauffage laser, à l’état nébulisé,
ces dispositifs, dans leur ensemble, à la différence des collima- à l’interface d’un solide sous tension, etc. Cette flexibilité explique
teurs classiques, non seulement sélectionnent une partie du fais- la grande variété des applications (cf. § 2.2.3 et 2.3.3). On peut éga-
ceau mais focalisent le faisceau, ce qui permet d’obtenir un flux lement envisager d’étudier des produits radioactifs dans une
élevé concentré sur une surface, de l’ordre ou inférieure au micro- cellule adaptée [activité maximale de l’ordre de quelques millicu-
mètre carré. Ils sont à l’origine des divers types de microanalyse et ries (mCi), selon les centres] ou dans une boîte à gants à condition
d’imagerie par balayage. Ils sont décrits plus en détail dans le de respecter les règlements en vigueur.
paragraphe 2.5.2 consacré à ce type d’imagerie.
1.4.5 Détecteurs
1.4.3 Postes d’analyse
Les détecteurs de photons utilisés sur les diverses expériences


La plupart des postes d’analyse que l’on trouve dans les centres dépendent énormément du type de mesure souhaité [2]. On trouve
de rayonnement synchrotron sont spécialisés dans une technique ainsi des compteurs ponctuels, des détecteurs linéaires, bidimen-
donnée et pour une gamme d’énergie donnée. Ils ont en commun sionnels, avec ou sans sélection d’énergie, avec des sensibilités
leur taille imposante par rapport aux expériences analogues de plus ou moins grandes, des dynamiques plus ou moins élevées,
laboratoire, et leur automatisme et motorisation qui sont très élabo- des résolutions spatiales de diverses qualités... Il n’existe bien sûr
rés à cause de l’interdiction (ou des difficultés dans le cas de rayon- pas de détecteur universel idéal, et l’optimisation de certains des
nement peu énergétique) d’accès lorsque le faisceau est présent. paramètres précédents se fait au détriment des autres.
Pour les rayons X durs, toutes les expériences sont enfermées dans Ce n’est pas l’objet de cet article de décrire les principes et les
des enceintes dont les parois sont imperméables au rayonnement. fonctionnements de tous ces détecteurs d’autant plus que leur
Pour les rayons X mous ou l’ultraviolet, il est moins nécessaire de évolution actuelle est très rapide. Cette évolution est précisément
protéger les utilisateurs par des enceintes car le rayonnement est induite par le développement des sources de lumière de plus en
absorbé par des épaisseurs très fines de matière et l’enveloppe des plus brillantes qui créent des besoins toujours plus exigeants dans
lignes de lumière suffit à protéger l’environnement. la détection, notamment par le grand nombre de photons qu’ils
Une autre caractéristique des expériences avec rayonnement délivrent dans des temps très courts.
synchrotron est leur mode de fonctionnement continu jour et nuit. Plus généralement, le grand essor que connaît l’utilisation du
Les attributions d’expériences se font pour des périodes portant rayonnement synchrotron joue un rôle moteur dans l’amélioration
sur un jour à quelques semaines par des comités scientifiques qui des performances des optiques, des postes expérimentaux et des
examinent l’ensemble des projets déposés pour chaque poste détecteurs. Ces améliorations sont en retour bénéfiques aux
d’analyse, généralement deux fois par an. Le délai pour accéder au équipements traditionnels de laboratoire, voire à ceux d’autres
poste d’analyse, si le projet est sélectionné, varie donc entre six branches de la recherche (imagerie médicale par exemple).
mois et un an. Il existe d’autres modes d’accès plus rapides pour la
recherche industrielle à condition d’acheter le temps de faisceau.
1.5 Utilisation actuelle du rayonnement
1.4.4 Environnement d’échantillons synchrotron
■ Dans le domaine des rayons X durs (E > 3 keV), l’échantillon est Nous avons déjà dit que les centres de rayonnement synchrotron
placé dans le faisceau à l’air car la ligne de lumière est construite délivrent des faisceaux de lumière dont les qualités sont générale-
avec une fenêtre de beryllium en amont qui isole le vide de ment très supérieures à celles des sources conventionnelles.
l’anneau, tout en étant mécaniquement rigide et transparente au
rayonnement. Le tableau 1 montre une comparaison des performances du
rayonnement synchrotron avec quelques techniques concurrentes.
■ Dans le domaine des rayons X mous (E < 3 keV), il n’existe pas L’utilisation principale des sources synchrotron est la caractéri-
de matériaux convenables pour confectionner une fenêtre équiva- sation et l’analyse des matériaux, au-delà des techniques classi-
lente et l’échantillon est donc placé sous vide. ques, sous toutes leurs formes, essentiellement par des
Dans le premier cas, l’échantillon lui-même peut être étudié expériences d’absorption de diffraction et d’émission. Certaines
dans un environnement spécifique : cellule haute pression, haute techniques sont propres au rayonnement synchrotron, mais

Tableau 1 – Comparaison des performances de différentes techniques utilisant


le rayonnement synchrotron (RS) (en gras) avec quelques méthodes concurrentes
Dynamique
Durée
Taille au niveau
Environnement minimale Détérioration
Méthode Information d’échantillon atomique
d’échantillons d’une prise d’échantillons
minimale (temps
de donnée
caractéristique)

Diffusion/diffraction X Structure 3D pour tous les Oui pour les


Volume : 1 µm3 Grande
avec rayonnement éléments Z surtout les élé- Surface : µm3 flexibilité 50 ps Non échantillons
synchrotron (RS) ments lourds organiques

Diffusion/diffraction X avec Structure 3D pour tous les Volume : 106 µm3 Grande
Oui pour les
générateur X éléments Z surtout les élé- Surface : 104 µm2 flexibilité qq sec Non échantillons
ments lourds organiques

Non, mais
Diffusion/diffraction avec Structure 3D pour tous les Volume : qq mm3
Grande Oui activation très
neutrons éléments Z surtout H Surface : flexibilité
qq min
(10–7 à 10–13 s) pénalisante
fraction de cm2
possible

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Tomographie à rayons X

par Christian THIERY


Ingénieur traitement d’images et CND
Président du groupe « tomographie industrielle » (COFREND)
Expert tomographie (groupe CEN)
CEA


1. Principes physiques et mathématiques........................................... P 950v3 - 2
1.1 Atténuation des rayons X par la matière................................................. — 2
1.2 Production et détection du rayonnemen X ............................................. — 4
1.3 Principes mathématiques de la reconstruction....................................... — 5
2. Outil tomographique............................................................................. — 7
2.1 Architecture générale ................................................................................ — 8
2.2 Performances en matière de résolution .................................................. — 10
2.3 Extension aux domaines extrêmes : très haute énergie
et haute résolution..................................................................................... — 18
3. Évolution de la tomographie .............................................................. — 20
4. Applications ............................................................................................ — 21
4.1 Applications ............................................................................................... — 21
4.2 Applications aux sciences du vivant ........................................................ — 24
4.3 Perspectives d’avenir ................................................................................ — 25
5. Tomographie par autres rayonnements .......................................... — 28
5.1 Gamma tomographie ................................................................................ — 28
5.2 Tomographie à courants de Foucault ...................................................... — 28
5.3 Résonance magnétique nucléaire RMN .................................................. — 28
5.4 Tomographie par neutrons....................................................................... — 29
5.5 Tomographie Compton............................................................................. — 29
5.6 Tomographie à ultrasons : échographie.................................................. — 29
5.7 Tomographie à émission de positrons .................................................... — 29
5.8 Laminographie calculée à rayonnement rétrodiffusé ............................ — 29
5.9 Tomographie sismique et tomographie radar ........................................ — 29
5.10 Tomographies de procédés ...................................................................... — 30
6. Comparaison avec les autres méthodes de CND.......................... — 30
7. Conclusion ............................................................................................... — 30
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. P 950

a tomographie par absorption de rayons X est une technique non destruc-


L tive qui permet la reconstruction d’images « en coupe » d’un objet à trois
dimensions.
Son principe repose sur l’analyse multidirectionnelle de l’interaction d’un
faisceau de rayons X avec la matière, par enregistrement avec des détecteurs
du rayonnement transmis après traversée d’un objet.
Les données acquises lors de la prise de mesure (dont la durée varie d’une
fraction de seconde à quelques heures selon l’installation) sont collectées
suivant des orientations multiples dont le nombre et le pas sont fonction du
type d’appareil et de la finesse de résolution.
À l’aide de ces données, une image numérique est calculée et reconstruite
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mathématiquement en niveaux de gris ou de couleurs dont chacun traduit


point par point le coefficient d’atténuation local du faisceau incident. Celui-ci,
après calibration et étalonnage, peut être traduit en échelle de densité.

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TOMOGRAPHIE À RAYONS X __________________________________________________________________________________________________________

La tomographie à rayons X permet donc d’accéder au cœur de la matière


pour en apprécier les variations d’absorptions radiologiques et les différences
de composition.
Elle permet également de localiser très finement toute hétérogénéité, singu-
larité, vide ou inclusion présents dans un objet, ainsi que de vérifier
l’assemblage et le positionnement des ensembles mécaniques complexes.
Enfin, lorsque les temps d’acquisition sont compatibles avec les vitesses de
certains phénomènes physiques, la tomographie peut conduire à des mesures
dynamiques pour suivre, par exemple, l’évolution d’un matériau soumis à des
contraintes.

R Développée pour le domaine médical, cette technique prometteuse a adapté


ses paramètres au domaine industriel dont tous les secteurs peuvent bénéficier
des possibilités, que ce soit en aéronautique, dans le secteur automobile, en fon-
derie, dans l’industrie minière ou pétrolière ou le secteur agroalimentaire.
La tomographie à rayons X est utilisée aussi bien en production, en phase de
prototypage ou lors de la mise au point des procédés de fabrication.
Cet article présente les principes mathématiques et physiques qui participent à
la technique tomographique. L’auteur insiste sur les paramètres importants
pour l’acquisition d’une image de qualité et souligne les écueils à éviter, ainsi
que les solutions à mettre en œuvre pour éviter les artefacts nuisibles sur la
reconstruction, causes de diagnostics erronés en contrôle non destructif. Il pré-
sente aussi les raisons du développement indéniable de cette technique, qui,
pour des contingences économiques de moindre coût, analyse précisément les
défauts présents au sein de la matière et leur évolution possible pour les rendre
acceptables dans de nombreux cas, faisant passer la technique d’une stratégie
industrielle « zéro défaut » à une stratégie de « défaut admissible ». Enfin, grâce
aux progrès réalisés sur les détecteurs et les calculateurs, la tomographie a
trouvé un champ d’expérimentation nouveau dans les haute et très haute résolu-
tions, ainsi que dans le domaine de la reconstruction tridimensionnelle.

1. Principes physiques d’atomes par unité de volume du matériau), le coefficient linéaire


d’absorption µ peut s’écrire :
et mathématiques n
µ = ∑Ni σ i
i =1
1.1 Atténuation des rayons X
par la matière avec Ni densité atomique de l’élément i,
σi section efficace de l’élément i.
Quand un faisceau parallèle de rayons X monochromatiques La relation (1) peut faire intervenir explicitement la densité
d’intensité I traverse, à incidence normale, une quantité de matière volumique ρ du matériau concerné si elle est mise sous la forme :
d’épaisseur infinitésimale dx, le faisceau transmis est atténué de
l’intensité dI :
−µ
ρx
Ix = I0 e ρ (2)
dI = I µ dx
µ
avec µ coefficient linéaire d’absorption. avec coefficient massique d’absorption (souvent exprimé en
ρ cm2/g) :
Cela conduit à la loi de Beer donnant l’intensité transmise par
n
une épaisseur x de la matière : µ σ
= NA ∑w i i (3)
ρ i =1
Ai
Ix = I0 e− µ x (1)
avec NA constante d’Avogadro,
avec I0 intensité incidente. Ai masse atomique de l’élément i,
Dans le cas d’un matériau homogène constitué de n éléments wi concentration pondérale de l’élément i dans le matériau
avec les proportions exprimées en densité atomique (nombre (wi = Ni Ai /NA ρ).

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__________________________________________________________________________________________________________ TOMOGRAPHIE À RAYONS X

ou bien encore : champ électrostatique du noyau atomique, ce qui conduit à


l’absorption du photon incident et à la création d’une paire
µ nµ électron-positron (par un effet de matérialisation).
ρ ∑
=   wi
i =1
ρ i Les figures 1a, b et c [9] représentent l’évolution de la section
efficace, proportionnelle au coefficient linéaire d’absorption µ, en
fonction de l’énergie E des photons pour trois éléments purs en se
 µ σi limitant au domaine énergétique de la tomodensitométrie
avec  ρ  = N A A
i i conventionnelle (E < 1 MeV). Dans le domaine 1 keV < E < 100 keV,
dominé par l’absorption photoélectrique au moins pour les
La section efficace totale σi d’un élément i est elle-même la éléments moyens et lourds, de Z supérieur à 20 environ, la
somme de sections efficaces qui décrivent chacune la probabilité remarque essentielle concerne la décroissance rapide de µ (entre
d’un événement susceptible de survenir à un photon X pour l’empê- les seuils) quand l’énergie des photons croît et, pour une énergie
cher d’atteindre le détecteur, à savoir (pour un photon incident de photons donnée, la croissance très forte de µ en fonction du
d’énergie E < 1 MeV) :
– l’absorption du photon avec éjection d’un (photo)électron issu
d’une des couches électroniques de l’atome ;
numéro atomique de l’élément concerné. Ces
comportements peuvent se résumer par une formule empirique du
type :
deux

– la diffusion cohérente (sans changement de longueur d’onde) ; µ ≈C Z 4 λ 3
– la diffusion incohérente (effet Compton).
avec C constante,
L’amplitude de chacun de ces termes dépend de l’énergie du
photon incident et donc de la longueur d’onde du faisceau incident λ longueur d’onde des photons X incidents.
et du numéro atomique Z de l’atome avec lequel il interagit. Le tableau 1 donne les coefficients d’atténuation massique et la
Pour les photons X de faible énergie, le mécanisme dominant densité de quelques matériaux. Ces données permettent de déter-
est l’absorption du photon avec éjection d’un photoélectron, ce qui miner l’épaisseur x de matériau nécessaire pour introduire une
explique aussi les sauts d’absorption observés chaque fois que atténuation Ix /I0 = e–1 ≈ 0,368 (ordre de grandeur d’une atté-
l’énergie du photon X atteint une valeur suffisante pour arracher nuation significative sans être totale).
un électron d’un niveau atomique profond. Au-delà de quelques D’après [9], ces épaisseurs sont de l’ordre du millimètre pour le
dizaines de keV, la contribution de l’effet Compton devient carbone alors qu’elles ne sont que de quelques micromètres pour
progressivement prépondérante jusqu’à ce que (au-delà de 1 MeV) l’or à E = 10 keV et qu’elles progressent d’un ou deux ordres de
le phénomène dominant soit l’interaction du photon γ avec le grandeur pour E = 80 keV (figure 1).

106 10–1 107 10–2 107


Section efficace (barn/atome)

µ–1 (µm)

Section efficace (barn/atome)

µ–1 (µm)

Section efficace (barn/atome)

µ–1 (µm)
106 10–1 10–1
105 1 106
I I
105 1 1
104 10 105
I 10
104
10
103 102 104
103 102 II
II 102
102 103 103
102 103
II
103
10 104 102
I 10 104
I’ III III
III I’
I’ 104
1 105 1 105 10
10–1 1 10 102 103 10–1 1 10 102 103 10–1 1 10 102 103

Énergie (keV) Énergie (keV) Énergie (keV)

a carbone Z = 6 b cuivre Z = 29 c or Z = 79

I absorption totale (I’ absorption photoélectrique)


II diffusion cohérente
III diffusion incohérente

1 eV = 1,60218 . 10–19 J
1 barn = 10–24 cm2
Les trois contributions sont représentées avec la prépondérance de l’absorption photoélectrique aux basses énergies.
L’ordonnée donne l’épaisseur de l’élément pur, par le biais de µ–1, qui conduit à une atténuation de e–1 = 0,368

Figure 1 – Section efficace totale de différents éléments pour des photons X de 0,1 keV à 1 MeV [9]

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TOMOGRAPHIE À RAYONS X __________________________________________________________________________________________________________

Tableau 1 – Coefficient d’atténuation massique ␮ / ␳ (en 10–1 cm2/ g) pour divers matériaux
en fonction de l’énergie
Énergie des photons (keV) Densité
Matériau
50 100 150 200 300 400 500 1 000 (g/cm3)

Aluminium 3,34 1,62 1,34 1,2 1,03 0,922 0,841 0,624 2,7
Cuivre 25,0 4,27 2,08 1,48 1,08 0,919 0,822 0,586 8,93
Fer 18,4 3,42 1,84 1,39 1,07 0,921 0,829 0,596 7,86


Tungstène 54,0 42,9 15 7,38 3,02 1,8 1,29 0,639 19,3
Plomb 72,2 52,3 18,9 9,45 3,83 2,2 1,54 0,69 11,34
Béton 3,61 1,7 1,4 1,25 1,07 0,958 0,873 0,637 2,3
Polyéthylène 2,01 1,70 1,53 1,40 1,22 1,09 0,995 0,727 0,92
Bakélite 1,91 1,58 1,42 1,30 1,13 1,01 0,921 0,673 1,2 à 1,7
Os 3,27 1,74 1,47 1,32 1,14 1,01 0,925 0,675 1,7 à 2
Muscle 2,14 1,66 1,48 1,35 1,17 1,05 0,959 0,700 »1
Eau 2,14 1,68 1,49 1,36 1,18 1,06 0,967 0,707 1
Air 1,96 1,51 1,34 1,23 1,06 0,953 0,870 0,636 0,0012

La conséquence concrète est qu’un petit précipité de quelques ficient µ/ρ, quand il est explicité comme dans l’équation (3), est
micromètres de métal lourd comme l’or donne (à 80 keV et dans indépendant de ρ et donc de l’état (solide, liquide, ou gazeux) de
une matrice transparente) un contraste (significatif) équivalent à cet échantillon.
celui donné par une épaisseur cent fois plus grande de carbone.
Cela explique aussi la nécessaire ingestion de sels de bismuth
(Z = 83) pour l’examen de l’abdomen d’un patient en radiologie 1.2 Production et détection
médicale. du rayonnement X
Plus précisément, on peut calculer, à partir de la formule (1) la
sensibilité en radiographie X (c’est-à-dire son aptitude à discerner
une variation locale d’absorption µ ou d’épaisseur x d’un petit 1.2.1 Production du rayonnement X
détail) ; sachant que la variation correspondante du taux de La tomographie dite « classique » utilise comme sources de
comptage est au moins trois fois supérieure aux fluctuations statis- rayonnement X des tubes scellés analogues à ceux utilisés en
tiques du nombre de photons transmis par la matrice, soit Nx , on radiologie médicale ou en radiologie industrielle (cf. [R 1 400]
a approximativement : Contrôle non destructif (CND)).
En tomographie basse énergie, le générateur délivre des
3
∆ ( µ x) ⭓ photons d’énergie comprise entre 40 keV et 100 keV.
Nx En tomographie haute énergie utilisée en milieu industriel, la
source délivre un faisceau de rayons X d’énergie comprise entre
quand ∆ (µx) est plus petit que l’unité.
100 keV et 350 keV. Les flux délivrés sont intenses et la souplesse
Les mêmes phénomènes expliquent aussi l’impossibilité d’exploitation permet des réglages très précis par la haute tension
physique d’observer des fissures ou cavités : ou des filtrations. Pour des raisons physiques, le générateur doit
– dans des matériaux lourds et trop épais si l’atténuation expo- être utilisé dans le domaine Compton du matériau examiné.
nentielle dans de tels matériaux conduit à une absorption quasi Le spectre des rayons X émis par ces tubes est constitué d’un
totale du rayonnement incident et donc à la suppression quasi fond continu dû au freinage des électrons dans l’anticathode
complète du contraste correspondant ; auquel se superposent les raies caractéristiques de celle-ci
– dans un échantillon trop transparent qui introduit un bruit (figure 2) (cf. [P 2 695] Spectrométrie d’émission des rayons X.
Fluorescence X et [P 2 645] Spectrométrie de masse – Principe et
statistique (= Nx ) excessif. appareillage). La distribution spectrale g (E ) en fonction de l’éner-
En pratique, il est donc nécessaire d’ajuster l’énergie des pho- gie E du fond continu est donnée approximativement par la
tons incidents à l’épaisseur et à la nature de l’échantillon à radio- formule de Kramers [10] en négligeant l’absorption qui joue un
graphier. La sensibilité optimale est atteinte quand l’épaisseur d de rôle important aux faibles énergies :
l’échantillon est telle que : g (E ) = k Z [(eV /E ) − 1]

2 avec V tension appliquée au tube,


d= e valeur absolue de la charge de l’électron
µ
(1,60218 × 10–19 C),
Signalons enfin que la loi d’atténuation mise sous la forme (2) k coefficent de proportionnalité qui dépend des
explique le nom de densitométrie puisque l’exposant est propor- caractéristiques physiques de la cible de conversion
tionnel à l’épaisseur massique ρx de l’échantillon alors que le coef- (épaisseur, matériau, etc.)

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__________________________________________________________________________________________________________ TOMOGRAPHIE À RAYONS X


Distribution spectrale (unité arbitraire)

Source Source Source


x x x
16

14

12 Objet à
analyser
Raies caractéristiques
10

8
300 kV - 10 mA


6 Détecteur Réseau de Réseau de
250 kV - 10 mA détecteurs détecteurs
4 200 kV - 10 mA a 1re génération b 2e génération c 3e génération
2 150 kV - 10 mA

Source
0
0 100 200 x Source
Énergie (keV)

Figure 2 – Distribution spectrale des photons X émis


par une anticathode de métal lourd bombardée par des électrons
primaires de 150 à 300 keV

L’anticathode est presque toujours en tungstène, métal réfrac-


taire et de numéro atomique Z élevé. Une augmentation de la
tension appliquée V fait croître l’intensité des raies caractéristi- Réseau de
ques, sans les déplacer suivant la loi [11] : détecteurs
(eV /E x − 1)163
,
d 4e génération e 5e génération
avec Ex énergie de la série spectrale X correspondante (pour le
tungstène, elle est de 69,5 keV).
Le rayonnement X ainsi émis est polychromatique, ce qui Les quatre premières générations de tomodensitomètres ont été
développées pour des applications médicales. La cinquième génération
entraîne que : (tomographie tridimensionnelle avec détecteurs bidimensionnels) a été
– l’expression (1) de la loi de Beer doit être reformulée pour développée pour des applications industrielles en voludensimétrie.
prendre en compte la structure spectrale (multiénergétique) du
faisceau de rayons X émis ;
Figure 3 – Générations de tomographes [13]
– on observe un phénomène de « durcissement » du spectre. En
effet, comme le montre le tableau 1, le coefficient d’atténuation
(noté µ/ρ) pour une énergie considérée est moins sensible à la
nature des matériaux pour les gammes d’énergies plus élevées
1.3 Principes mathématiques
(supérieures à 200 keV). Ainsi, en raison de la polychromaticité, on de la reconstruction
observe une atténuation préférentielle des composantes spectrales
de basse énergie due à la modification de l’interaction entre le
rayonnement incident et le matériau constituant l’objet analysé.
Consulter l’article Transformations fonctionnelles [A 1 240].

1.2.2 Détection du rayonnement X transmis


Les détecteurs sont placés dans l’axe du faisceau, derrière l’objet 1.3.1 Principe général
à analyser (figure 3) [13]. Ils délivrent des signaux analogiques
issus de la création d’un courant proportionnel au nombre de ■ Théorie
photons reçus.
Le principe général de la reconstruction est illustré par la
Trois types de détecteurs sont utilisés en tomographie :
figure 4 sur laquelle le faisceau incident est supposé parallèle
– les détecteurs à gaz du type compteur proportionnel (xénon (pour simplifier).
sous pression, surtout dans les installations de basse énergie utili-
sées dans le domaine médical) ; L’image à reconstruire est composée de m × n points, appelés
– les détecteurs semi-conducteurs (installations de très hautes pixels (picture elements), affectés chacun d’un coefficient
énergies) ; d’absorption µij , (ou d’une densité locale ρij) qu’il convient de
– les sondes à scintillation (germanate de bismuth Bi4Ge3O12 déterminer.
(BGO) ou CdWO4) qui, associées à un photomultiplicateur, L’intensité mesurée par le détecteur k quand le réseau de
convertissent les photons X en photons visibles. détecteurs est en position 1, soit I1k , est telle que :
Les détecteurs doivent permettre des temps d’intégration extrê-
mement courts (fraction de seconde), ce qui impose des fronts de
montée et de descente du signal très brefs afin d’obtenir une I 
réponse quasi instantanée aux fluctuations de la fluence du rayon- ln  0  ∞
 I1k 
∑ ρij
nement X. ij

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SY
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TOMOGRAPHIE À RAYONS X __________________________________________________________________________________________________________

Transformée
Po
s iti de Fourier ky
on
1
p

Po
on

s iti
i

on
sit

s1
Po

u
u kx
I

R I11
Ipm

Ipq
a b
I12
I Ip2
I1k ky
Ip1

I1m ∆θ

n positions : p varie de 1 à n
m détecteurs pour chaque position
k varie de 1 à m kx
q varie de 1 à m
On a m × n données

Figure 4 – Principe général de la reconstruction : recueil


des données c d

Si, dans l'espace réel, on obtient un certain profil d’absorption


Dans cette expression, la sommation porte sur l’ensemble des correspondant à un éclairement pris avec l’angle u a , dans l’espace
pixels de la surface en forme de bande (hachurée sur la figure 4)
des vecteurs d'onde kx , ky , la transformée de Fourier de ce profil
délimitée par la taille de la source et le détecteur élémentaire
concerné. correspond au même angle u b . Les n profils discrets relatifs à un
même échantillon c obtenus avec n angles différents vont donner
Il en est de même pour toutes les positions successives (1 à n) l’étoile représentée en d dans l'espace réciproque.
prises au cours des rotations relatives du couple source-détecteur
par rapport à l’objet.
Figure 5 – Principe général de la reconstruction : espace
des fréquences [15]
En position p, le détecteur q mesure l’intensité Ipq donnée par
l’expression :
Dans la géométrie en éventail présentée sur la figure 7, les deux
 I  matrices (intensités et densités) sont corrélées entre elles par la
ln  0  ∞ ∑ ρi ′ j ′ transformation dite de Radon [14] [23] [A 1 240].
 Ipq  i′j′
Sur le plan théorique, les limites introduites par la rotation pas à
pas peuvent être déduites du théorème de la section centrale : un
Ici, la nouvelle sommation prend en compte les pixels de la
objet peut être représenté aussi bien dans l’espace réel (x, y) à
seconde bande hachurée de la figure 4.
deux dimensions que dans l’espace des fréquences (kx , ky).
On établit ainsi un système d’équations linéaires dans lequel le Or, la transformée de Fourier du profil correspondant à la
logarithme des intensités est déduit des mesures, et les ρij projection de cet objet à deux dimensions est une section centrale
représentent les inconnues à déterminer. Une inversion de matrice de la transformée bidimensionnelle de l’objet, c’est-à-dire une ligne
doit permettre, en principe, d’exprimer ces inconnues en fonction passant par l’origine de l’espace des fréquences. La rotation pas à
des intensités mesurées, à condition que le système admette une pas conduit donc à couvrir l’espace des fréquences (kx , ky) de droi-
solution, ce qui suppose au préalable que le nombre de grandeurs tes passant toutes par l’origine et décalées angulairement ∆θ
mesurées soit égal au nombre d’inconnues. Cela impose n (figure 5) [15]. Plus on s’écarte du centre, plus la couverture de
positions angulaires distinctes (pour obtenir une image de m × n l’espace des fréquences est faible et plus la perte d’information sur
pixels avec un réseau de m détecteurs), soit un pas de variation des petits détails est élevée quand on procède à l’opération inverse
angulaire ∆θ = 180o/n. (transformée de Fourier inverse) pour revenir à l’espace réel.
Ce raisonnement est généralisable à trois dimensions en substi-
Exemple tuant aux droites passant par l’origine dans l’espace des
fréquences des plans contenant l’axe kz (et donc l’axe de rotation
Le pas de rotation de la source et des détecteurs (pour les instal-
de l’échantillon) et ayant pour traces dans le plan kxky les droites
lations de première, deuxième et troisième générations (figure 3) est
évoquées ci-dessus.
de l’ordre d’une fraction de degré pour une image de 512 × 512 pixels
(et 512 acquisitions simultanées). Pour un échantillon de 10 cm de Mentionnons pour mémoire qu’il est théoriquement possible de
diamètre, cela conduit à une taille de pixel (et donc à une résolution) peupler uniformément l’espace des fréquences en déplaçant la
de l’ordre de 0,2 mm. source X de façon aléatoire par rapport à l’échantillon.

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TP
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__________________________________________________________________________________________________________ TOMOGRAPHIE À RAYONS X

■ En pratique, l’inversion de la matrice de Radon (512 × 512 à deux


dimensions et 512 × 512 × 512 à trois dimensions) introduit des
temps de calcul prohibitifs même avec des ordinateurs de grande
capacité. On préfère donc y substituer des algorithmes de mise en
œuvre plus rapide. Il s’agit principalement de méthodes de rétro-
projection filtrée (§ 1.3.2) et de méthodes itératives (§ 1.3.3).

1.3.2 Rétroprojection filtrée


La notion de rétroprojection (appliquée en général à la tomogra-
phie X) repose sur la démarche inverse de la précédente (et qui a
été illustrée sur la figure 3) : partant du profil obtenu sur le réseau
de détecteurs en position 1, on distribue uniformément l’intensité


collectée par un détecteur élémentaire à l’intérieur de la surface
limitée par la source et ce détecteur.
En procédant de même pour chaque détecteur et pour les n a le point de départ concerne les profils d'absorption obtenus
profils obtenus sous les n angles différents, la superposition des n avec différents angles d'éclairement
rétroprojections va délimiter l’objet et moduler les différentes
rangées introduisant des renforcements et des affaiblissements
qui restituent la structure interne de l’objet initial (figure 6).
En fait, la reconstruction n’est pas parfaite et on observe que la
rétroprojection d’un ensemble discret de n projections n’est pas
identique à l’objet initial (la rétroprojection d’un objet ponctuel
restitue une étoile à n branches). Pour améliorer la méthode, il faut
procéder à une déconvolution par la fonction de projection qui est
une fonction linéaire en k (vecteur d’onde). La méthode de rétro-
projection filtrée consiste donc à prendre la transformée de Fourier
de chaque profil, ensuite à amplifier proportionnellement les
hautes fréquences (à l’aide d’un filtre) puis à revenir par transfor-
mation de Fourier inverse dans l’espace réel avant d’effectuer les
opérations de rétroprojection.
b on suppose que le profil observé vers la gauche correspond à des
1.3.3 Méthodes itératives absorptions uniformément distribuées sur des bandes horizontales

Les méthodes itératives ont en commun une démarche par


approximations successives en supposant au départ une distri-
bution de densité ρ (x, y ) plus ou moins arbitraire. On calcule
ensuite les projections que cet objet devrait donner, et on compare
le résultat avec les projections expérimentales pour corriger le
modèle de départ. Après quelques itérations, la stabilité est en prin-
cipe atteinte si on incorpore dans le processus de reconstruction des
contraintes (c’est-à-dire des informations supplémentaires que l’on
connaît sur l’objet) comme l’évidence de positivité de ρ (x, y ).

1.3.4 Reconstruction en trois dimensions


Tous les développements précédents § 1.3.2 et § 1.3.3
concernent en fait la reconstruction d’une coupe perpendiculaire à
l’axe z de rotation. La juxtaposition des n coupes successives
résultant des translations pas à pas de l’objet par rapport au plan c le profil obtenu vers le bas est supposé correspondre à des
source-détecteur permet de mémoriser les données d’un objet à absorptions uniformément réparties sur des bandes verticales
trois dimensions µ (x, y, z). L’outil informatique permet de visuali-
ser ultérieurement l’image d’une section quelconque de l’objet. Le
plan choisi n’est pas nécessairement perpendiculaire à l’axe de
rotation puisqu’il peut en particulier le contenir.

2. Outil tomographique
Née officiellement en 1971 à des fins d’applications médi-
cales, la tomographie X a beaucoup évolué depuis, tant dans le
domaine médical que dans le domaine industriel. Voir l’intérieur
d’un objet pour en reconstruire la structure interne en trois
dimensions, domaine d’excellence de la tomographie, apparaît
d en procédant de même pour les profils obtenus avec les autres
être en effet un atout majeur dans la mise au point et la fabrica- projections, on obtient une image de l'objet par rétroprojection
tion des pièces industrielles pour lesquelles la bonne qualité des
matériaux (absence de défauts) demeure la plus sûre garantie
contre des faiblesses et fragilisations en fonctionnement. Figure 6 – Illustration du principe de rétroprojection

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TR
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RECHERCHE

Tomographie à l’aide de rayons


térahertz
par Patrick MOUNAIX

Directeur de recherches CNRS au Laboratoire Ondes et Matières d’Aquitaine
(LOMA, ex CPMOH – UMR 5798) à Talence,
et Benoit RECUR
Ingénieur de recherches CNRS au Laboratoire Bordelais de Recherches
en Informatique (LaBRI – UMR 5800) à Talence

Résumé : La tomographie par rayonnement térahertz est une technique de contrôle


non destructif (CND) permettant d’analyser et de visualiser la structure interne d’un
objet en 3D. Son principe consiste à enregistrer sur un détecteur adapté à ce rayon-
nement des images 2D obtenues pour différents angles, puis à reconstruire les coupes
transversales de l’objet à l’aide d’algorithmes. Grâce à ses propriétés, cette technique
offre de nouvelles perspectives dans le CND notamment pour l’analyse des matériaux
industriels de faible densité, les objets d’art et les matériaux du patrimoine culturel.

Abstract : In the application field of 3D imaging, X-Ray Computed Tomography (CT)


is an omnipresent technique which provides cross-sectional images of an object by ana-
lyzing the radiation transmitted by the sample through different incidence angles.
These remarkable properties make THz radiation very efficient for direct applications in
non-destructive inspection and the security field. Especially, a particular interest will
concern, the optimization of reconstruction associated with the preservation of the
image quality.

Mots-clés : Imagerie hyperspectrale, térahertz, tomographie 3D, spectroscopie,


infrarouge lointain

Keywords : Hyperspectral imaging, terahertz, 3D tomography, spectroscopy, far


infrared

Points clés
Domaine : Techniques d’analyse et spectroscopie
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : optique, électronique, optronique, traitement du
signal, reconstruction
Domaines d’application : biologie, environnement, sécurité, culture
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité : Route des Lasers™ (Aquitaine)
Centres de compétence : LOMA Laboratoire Ondes et Matière d’Aquitaine (CNRS),
Centre technologique Alphanov, ARMIR, Association pour le Rayonnement, les
Mesures et l’Imagerie Rapide, qui comprend un club « Teranaute » formé par une
dizaine de laboratoires universitaires, grands organismes et industriels travaillant
dans le domaine des ondes térahertz. GDR international TERAHERTZ « Détecteurs
et Émetteurs de Radiations Térahertz à Semi-conducteurs » (GDR CNRS 2897). Ce
GDR fédère les collaborations entre une vingtaine de laboratoires européens et
internationaux travaillant dans le domaine des composants à semi-conducteurs
pour la technologie des ondes THz.
Industriels : Nikon, Picometrix, Toptica Photonics, GigaOptics, Menlow, Synview
p。イオエゥッョ@Z@。ッエ@RPQR

Contact : p.mounaix@loma.u-bordeaux1.fr, brecur@labri.fr,


http://www.loma.cnrs.fr/SLAM/teraslam-terahertz-spectroscopy-and-imaging/

8 – 2012 © Editions T.I. RE 172 - 1

TS
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1. Contexte Un certain nombre d’autres systèmes d’acquisition basés sur


la tomographie ont été développés, comme la tomographie à
émission de positon (PET-scan) [13] [14], la tomographie
L’intérêt grandissant des communautés scientifiques pour le
d’émission monophotonique (TEMP) ou la microscopie électro-
domaine des ondes millimétriques (de 30 à 300 GHz) et submil-
nique de transmission. Plus récemment, la tomographie THz,
limétriques (de 300 GHz à 10 THz) présage un développement
basée sur les ondes millimétriques ou submillimétriques
d’applications novatrices de l’électronique rapide et de l’opti-
(bande de fréquences de 0,1 THz à 10 THz) a été
que. Dans ce contexte, la spectro-imagerie térahertz offre une
investiguée [15] [16]. Même si le support physique, le type de
potentialité de contraste optique novateur, sensible aux


radiation, et les données révélées par les images diffèrent,
niveaux vibrationnels et rotationnels des matériaux. L’aspect
tous ces procédés sont basés sur le principe d’atténuation
spectroscopique dans ce domaine de fréquence peut, dès lors,
d’un rayonnement électromagnétique à travers la
mener à une caractérisation très large bande et à une identi-
matière [P 950] [IN 20].
fication unique des matériaux ou d’échantillons. De plus, le très
fort pouvoir pénétrant de ces ondes permet d’envisager une
visualisation d’objets invisibles en surface, en volume ou opa- Mathématiquement, le processus de tomographie est
ques dans le visible. Nous nous proposons de faire un état des composé de deux étapes distinctes :
lieux des différentes approches d’imagerie tomographique en – le modèle direct, qui décrit la phase d’acquisition,
bande térahertz. Les limitations physiques et technologiques c’est-à-dire comment calculer les projections ;
seront abordées. Enfin, des illustrations en contrôle non des- – le modèle inverse, qui définit la manière de recons-
tructif seront montrées. Pour de plus amples informations sur truire le volume imageant l’objet acquis.
les sciences autour du « térahertz », le lecteur peut se référer à
de nombreuses publications accessibles pour présenter et ana-
lyser cette technologie récente ([1] à [9] [RE 143] [RE 144]). 2.1 Définitions et principes
Un rayonnement électromagnétique a une énergie et un pou-
2. Principes de la tomographie voir de pénétration qui lui permet de traverser la matière. Pen-
dant ce processus, le faisceau de rayons subit fatalement une
et applications actuelles atténuation. Avec les rayons X, cette atténuation est localement
proportionnelle à la densité et à la quantité de matière traver-
La tomographie consiste en une technique d’imagerie sée. Ainsi, en radiographie X, les rayons transmis au patient
utilisée pour reconstruire le volume d’un objet à partir subissent une perte d’intensité globale proportionnelle à la
d’une série de mesures (projections) acquises depuis nature physico-chimique et à l’épaisseur des tissus traversés.
l’extérieur de celui-ci. C’est cette mesure de perte d’intensité relative – traduite en
une image en niveaux de gris – qui permet ensuite d’établir un
diagnostic.
Ce concept est apparu au début du XXe siècle, avec les tra-
vaux de Johann Radon [10] [11]. Mais il n’a été mis en pra- Dans un scanner à rayons X médical ou industriel, une
tique que dans les années 1970 lorsque le premier scanner coupe 2D de l’objet est acquise en mesurant l’atténuation des
médical à rayons X a été développé par G.N. Hounsfield et A. rayons pour différents angles autour de l’objet. Pour chaque
Cormark [12]. Une barrette de détecteurs diamétralement angle, on obtient une projection 1D. Une méthode de rétro-
opposée à un émetteur mesure l’atténuation subie par les projection permet de reconstruire la coupe 2D modélisant
rayons X au travers du patient à différents angles de visuali- l’objet acquis à partir de l’ensemble des projections [17] [18].
sation. Cette atténuation est proportionnelle à la quantité et à Une acquisition coupe par coupe permet ensuite de recons-
la densité des tissus traversés. Le volume imagé à l’intérieur truire le volume 3D.
du corps du patient est ensuite obtenu par des algorithmes de Soit par exemple un domaine f (x, y), représentant une
reconstruction spécifiques. fonction d’atténuation (figure 1a). Chaque projection 1D est

y ᏾θ(ρ) ᏾θ y
᏾θ

ρ
f (x,y)
reconstruit
f (x,y)

θ θ

x x

a b

Figure 1 – (a) Une droite de projection est définie par un angle ␪ et une position radiale ␳ . Sa valeur correspond à la somme des
valeurs f (x, y) le long de la droite. Dans le cas où f (x, y) est la fonction d’atténuation, cette valeur correspond à l’atténuation globale
subie par le rayonnement, (b) Une seule projection ne suffit pas pour retrouver le domaine initial par « rétroprojection »

RE 172 - 2 © Editions T.I. 8 – 2012

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᏾θ2 ᏾θ2
᏾θ3 ᏾θ3
y y
᏾θ1
᏾θ1


᏾θ4 ᏾θ4
θ2
θ3 θ2

θ4 θ1 θ4

x x
f (x,y)
f (x,y) reconstruit

a b

Figure 2 – (a) Acquisition de plusieurs angles distincts ; (b) L’intersection des données disponibles sur les différentes projections
permet de reconstruire la fonction f de manière plus précise

définie selon un angle θ. Une droite de projection suivant θ est Le nombre d’échantillons par projection est noté Nρ . Il est
donnée par sa position radiale ρ et est notée (θ, ρ). La valeur commun à toutes les projections d’une acquisition donnée. Le
de projection ᏾θ (ρ) correspond à la somme des valeurs pas angulaire entre deux projections successives est noté
f (x, y) sur la droite, c’est-à-dire à l’atténuation globale subie π
par le rayonnement le long de cette droite. dθ = . De même, on note dρ le pas d’échantillonnage sur la

Pour un angle donné, l’ensemble des valeurs ᏾θ (ρi ) définit projection, c’est-à-dire la distance entre deux droites de pro-
la projection θ, notée ᏾θ . Communément, on note ᏿ et on jections successives.
appelle « sinogramme » l’ensemble des projections acquises
et utilisées dans les algorithmes de reconstruction. Comme le Une acquisition avec Nθ projections de Nρ échantillons four-
montre la figure 1b, une seule projection « rétroprojetée » nit le sinogramme ᏿*, qui est un sous-sinogramme du sino-
dans l’espace 2D ne permet de retrouver efficacement f (x, y). gramme idéal ᏿ . Il est représenté par une image 2D, de taille
En revanche, grâce à des acquisitions à angles distincts Nρ × Nθ , où chaque ligne correspond aux valeurs d’une projec-
(figure 2a), f (x, y) est reconstruit de manière plus significa- tion. Soient iθ et iρ les index de la projection et de l’échantillon
tive et plus précise (figure 2b).
tels que 0 ⭐ iθ < Nθ et 0 ⭐ iρ < Nρ . Le pixel (iθ , iρ) contient la
Ce processus d’acquisition/reconstruction correspond
mathématiquement à la transformée de Radon [10], définie valeur ᏾θ (ρ) . Par exemple, l’image de la figure 3b représente
par Johann Radon en 1919. La transformée directe décrit la l’acquisition avec 180 projections et 512 échantillons/projec-
valeur d’une droite de projection à un angle θ et une position tion du fantôme de Shepp-Logan [20] représenté figure 3a. La
ρ par la somme des atténuations locales sur la droite première ligne (512 pixels) contient les valeurs de la projec-
(θ, ρ) [10] [11] : tion d’angle θ = 0o, la seconde ligne contient les valeurs de la
projection d’angle θ = 1o, et ainsi de suite.
∞ ∞
᏾ θ (ρ) = ∫−∞ ∫−∞ f (x, y) δ (ρ − x cos θ − y sin θ)dx dyy (1) Un tel sinogramme est utilisé pour reconstruire une image I
modélisant l’espace acquis. Cette reconstruction s’effectue
où θ et ρ sont respectivement les coordonnées angulaire et avec une version discrète de la BFP, notée R–1 telle que :
radiale de la droite (θ, ρ), et δ (•) est l’impulsion de Dirac.
Nθ −1 Nρ −1
La transformée inverse retrouve le domaine à partir de ses
projections. Soit un sinogramme ᏿ contenant l’ensemble des R−1 (i , j) = I (i , j ) = ∑ ∑ ᏾BFP
θ
(ρ) pk (θ , ρ, i , j) (3)
acquisitions ᏾ θ (ρ) telles que θ ∈ [0, π[ et ρ ∈⺢ , alors : iθ = 0 iρ = 0

π ∞ où pk est un modèle de noyau de pixel qui détermine la


f ( x , y) = ∫0 ∫−∞ Ᏺ−1 ( ν ) ∗ ᏾ θ (ρ) δ (ρ − x cos θ − y sin θ)dρ dθ (2) manière avec laquelle une projection traverse un pixel et
᏾BFP
θ
(ρ) est la projection filtrée donnée par :
où Ᏺ est la transformée de Fourier. Dans un premier temps,
cette inversion emploie un filtre rampe sur chaque projection
pour augmenter les détails. Ensuite, f (x, y) est calculée à
᏾BFP
θ
(ρ) = ∑ ν (∑ ᏾ θ (ρs )e− i2πρ ν )ei2πρν s (4)
ρs ν
partir de la somme des projections filtrées ; d’où le nom usuel
de Backprojection of Filtered Projection (BFP) donné à cette
La valeur du noyau de pixel est comprise entre 0 (aucune
méthode.
interaction entre le pixel et la projection) et 1 (interaction
Contrairement à une acquisition idéale, une acquisition totale). Usuellement, sa valeur est proportionnelle à l’aire
réelle est composée d’un nombre fini de projections Nθ unifor- commune au pixel et à la droite épaisse centrée en ρ et
mément réparties entre 0 et π (les autres sont symétriques). d’épaisseur dρ.

8 – 2012 © Editions T.I. RE 172 - 3

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a b

Figure 3 – (a) Fantôme de Shepp-Logan analytique représenté dans une image 512 ⴛ 512 pixels ; (b) Sinogramme avec 180 projections
et 512 échantillons/projections

2.2 Méthodes de reconstruction itératives w −1 H −1


où Dθ (ρ) =
s
∑ i = 0 ∑ j = 0 pk (θ , ρ, i, j) est la norme du segment
La méthode directe BFP est rapide à mettre en œuvre et (θ, ρ) traversant l’image et λ est un paramètre de relaxation
disponible sur la majorité des plates-formes de reconstruction affectant la vitesse de convergence. Habituellement, λ = 1.
tomographique. En revanche, elle est sensible à la discrétisa- Cette méthode utilise une image initiale I0 uniforme [25].
tion (en particulier au nombre de projections) et est peu
robuste aux bruits d’acquisition. La conception de nouvelles
techniques répondant à ces problématiques fondamentales a 2.2.2 Méthodes stochastiques
donc fait partie des axes de recherches privilégiés en tomo- Les méthodes stochastiques sont basées sur l’interprétation
graphie depuis les années 1970. Des solutions mathématiques suivante du problème de reconstruction : quelle est l’image I
ont été apportées au travers des méthodes itératives, dont on la plus probable connaissant l’observation R [26]. Les algo-
distingue deux familles : les méthodes algébriques et les rithmes itératifs qui en résultent essayent donc de maximiser
méthodes stochastiques. la probabilité p (I|R), c’est-à-dire la probabilité d’avoir I
connaissant les projections R, en utilisant le théorème de
2.2.1 Méthodes algébriques Bayes :

Les méthodes algébriques ont été introduites par Gordon et p(I )


p(I R) = p(R I ) (6)
coll. [21] [22] dans les années 1970 avec l’ART (Algebraic p(R)
Reconstruction Technique). Cette méthode basée sur le
théorème de Karzmarz effectue une correction itérative de où p (I|R) est la valeur à optimiser, p (R|I) est la probabilité
l’image Ik à l’itération k en comparant ᏾θ (ρ) mesurée avec d’avoir les projections R connaissant l’image I (la vraisem-
blance des projections). p (I) est l’information a priori sur
Rθk (ρ) calculée depuis l’image Ik–1 (en utilisant la version l’image I et p (R) est l’acquisition a priori. p (R) = 1 car les
discrète de l’équation). Depuis, plusieurs variantes de ART ont projections sont connues. En revanche, il y a plusieurs
été proposées : la Multiplicative ART (MART), l’Adaptive ART manières de considérer p (I). Sans hypothèse sur l’image,
(AART) ou encore la Simultaneous Iterative Reconstruction p (I) = 1 et on obtient l’équation p (I|R) = p (R|I). Ainsi, pour
Technique (SIRT) [23]. Ces techniques diffèrent par leurs maximiser la probabilité d’avoir l’image I connaissant les pro-
sous-itérations en projections. Alors que ART effectue une mise jections R, il faut maximiser la vraisemblance des projections
à jour par droite de projection (c’est-à-dire Nθ × Nρ mises à jour connaissant I. Cette maximisation s’obtient par la minimi-
par k-itération), SIRT corrige l’image à partir de toutes les pro- sation de la distance entre les projections calculées et les pro-
jections (c’est-à-dire une seule fois par itération). La méthode jections observées. Ce processus est donc similaire aux
SART (Simultaneous ART) est un compromis entre ART et méthodes algébriques et s’effectue par une mise à jour
SIRT [24]. Elle utilise toutes les droites d’une seule projection itérative en k de I. La méthode MLEM (Maximum Likelihood
pour l’étape de mise à jour. SART est itérative en k ∈ [0...Niter[. Expectation Maximization) [26] modélise la vraisemblance
Chaque sous-itération s, 0 ⭐ s < Nθ met à jour chaque pixel de p (R|I) par une distribution de Poisson qui aboutit à l’équation
de mise à jour d’un pixel (i, j) suivante :
Ik,s en comparant la projection mesurée ᏾θ avec R k (calculée
s θs
depuis Ik,s–1). Une super-itération k est terminée quand toutes N −1 N −1 ᏾θ (ρ)
les projections ont été utilisées. La mise à jour d’un pixel par
∑ iθθ=0 ∑ iρρ=0 pk (θ , ρ, i , j)
Rθk (ρ)
SART est donnée par l’équation suivante : I (i , j)k +1 = I (i , j)k (7)
N −1 N −1
∑ iθθ=0 ∑ iρρ=0 pk (θ , ρ, i , j)
 ᏾ (ρ) − Rk (ρ) 
Nρ −1  θs θs
∑ iρ = 0 pk (θ s , ρ, i , j) 
D (ρ)
La convergence de MLEM est relativement lente car cette
 θs  méthode utilise globalement le sinogramme. Hudson et coll.
I k , s (i , j) = I k , s −1 (i , j) + λ (5) ont proposé en 1994 l’Ordered Subsets MLEM (notée
N ρ −1
∑ iρ = 0
pk (θ s , ρ, i , j) OSEM) [27]. Les projections sont séparées en sous-ensembles
de projection pour accélérer la vitesse de convergence.

RE 172 - 4 © Editions T.I. 8 – 2012

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CND : méthodes globales et volumiques
(Réf. Internet 42585)

1– Aspects généraux

2– Radiographie

3– Techniques électromagnétiques Réf. Internet page

Spectro-imagerie térahertz. Voir autrement RE143 49

Spectroscopie térahertz RE144 53

Sources et détecteurs aux fréquences térahertz RE73 57

Contrôle électromagnétique des interfaces libres RE41 61

4– Techniques ultrasonores et acoustiques

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Spectro-imagerie térahertz
Voir autrement

par Patrick MOUNAIX


Chargé de recherches CNRS au Centre de physique moléculaire optique et hertzienne
(CPMOH UMR 5798) à Talence (33) S
Résumé : Les ondes électromagnétiques térahertz suscitent à la fois la curiosité et
l’engouement des scientifiques et des industriels car elles permettent une analyse chi-
mique de matériaux en surface et en volume. Complémentaire des technologies
existantes, la spectro-imagerie térahertz offre un potentiel applicatif important pour les
domaines de la biologie, de la sécurité et de l’environnement par exemple. Cet article
rappelle les principes de base, les limites et les dernières évolutions de ce domaine en
pleine émergence.

Abstract : The terahertz electromagnetic waves arouse the curiosity and the craze of
the scientists and the manufacturers because they allow a chemical analysis of mate-
rials in surface and in volume. Additional of the existing technologies, the
spectro-imaging at terahertz wavelength offers an important potentiality for the
domains of the biology, the security and the environment for example. This paper
reminds the basic principles, the limits and the last evolutions of this domain in full
emergence.

Mots-clés : Imagerie hyperspectrale, Térahertz, Tomographie 3D, Spectroscopie,


Infrarouge lointain

Keywords : Hyperspectral imaging, terahertz, 3D tomography, spectroscopy, far


infrared

Points clés
Domaine : Techniques d’imagerie et d’analyse
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPQP@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPRP

Technologies impliquées : Optique, électronique, optronique, traitement


d’image
Domaines d’application : Biologie, environnement, sécurité
Principaux acteurs français :
Pôle de compétitivité : Route des Lasers (Aquitaine)
Centres de compétence :
– Centre de Physique Moléculaire Optique et Hertzienne CPMOH (CNRS) ;
– Centre technologique Alphanov ;
– ARMIR Association pour le Rayonnement, les Mesures et l’Imagerie Rapide, qui
comprend le club « Teranaute » ;
– GDR Européen TÉRAHERTZ « Détecteurs et Émetteurs de Radiations Térahertz
à Semi-conducteurs » (GDR CNRS 2897).
Industriels : la société I2S
Autres acteurs dans le monde : Nikon, Picometrix, Toptica Photonics,
GigaOptics...

5 – 2010 © Editions T.I. RE 143 - 1

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1. Contexte une condition nécessaire pour la mise en place et la validation


des expériences de spectroscopie térahertz résolue en temps.
L’intérêt grandissant des communautés scientifiques pour le Celles-ci permettent d’évaluer la réponse et le comportement
domaine des ondes millimétriques (30 à 300 GHz) et submilli- du matériau investigué lors de l’interaction avec le faisceau
métriques (300 GHz à 3 THz) présage un développement térahertz. Enfin, de nombreuses molécules d’intérêt
d’applications novatrices de l’électronique rapide et de présentent une signature spectrale spécifique qui souvent
l’optique. Toutefois, cette partie du spectre reste relativement n’existe pas dans d’autres parties du spectre électromagnéti-
inemployée en raison notamment d’une technologie très déli- que comme le proche ou moyen infrarouge. Cette réponse
cate et pas toujours maîtrisée. Ces développements et trans- unique, couplée à une caractérisation de la réponse diélec-
ferts vers l’industrie ne pourront s’accomplir sans être trique sur une très grande plage de fréquences (typiquement
accompagnés d’une étude du comportement électromagné- entre 100 GHz et 4 THz), permet de faire de la reconnaissance
tique des matériaux utilisés à ces fréquences extrêmes et de ou bien de la différenciation d’espèces chimiques sans contact.
la validité d’une imagerie active. Dans ce contexte, la Cette propriété intéresse particulièrement les domaines soit

S spectro-imagerie térahertz répond à cette problématique. Elle du contrôle qualité, soit de la défense et de la sécurité.
apporte une potentialité de contraste optique novateur, sensi-
ble aux niveaux vibrationnels et rotationnels des matériaux.
Il convient de rappeler quelques conversions d’unités
L’aspect spectroscopique dans ce domaine de fréquence peut
pour l’utilisateur. Un térahertz (THz) correspond à une lon-
dès lors mener à une caractérisation très large bande et à une
gueur d’onde de 300 µm dans le vide (figure 1), soit à un
identification unique des matériaux ou d´échantillons. De plus,
écart entre deux niveaux énergétiques de ∆E = 4,1 meV ou
le très fort pouvoir pénétrant de ces ondes permet d’envisager
encore une température équivalente de 48 K. Le rayon-
une visualisation d’objets invisibles en surface, en volume ou
nement térahertz présente l’avantage, comme les ondes
opaques dans le visible. Nous rappelons dans un premier
radio, de passer au travers de multiples obstacles mais
temps les caractéristiques de ce rayonnement ainsi que les
aussi, comme les ondes optiques, de pouvoir être focalisé
moyens de le générer et de le détecter. Ensuite nous présen-
pour fournir une image. En outre, la plupart des molécules
terons la mise en place d’une technique de spectro-imagerie
organiques ont une fréquence de résonance fondamentale
térahertz bidimensionnelle et son application à la visualisation
(de rotation ou de vibration) dans le domaine térahertz.
d’objets opaques.
Elles émettent donc naturellement dans ces fréquences, ce
qui permet d’utiliser des techniques d’imagerie totalement
passives et donc indétectables, avantage décisif pour les
2. Présentation du domaine applications militaires par rapport aux radars.
térahertz Jusqu’à l’horizon des années 1980, la production efficace et
la détection des ondes électromagnétiques (couplage d’un
2.1 Pourquoi le rayon T champ électrique et d’un champ magnétique qui oscillent et
s’induisent l’un l’autre en se propageant dans l’air à la vitesse
L’infrarouge lointain ou rayonnement térahertz est un de la lumière) dans cette plage du spectre électromagnétique,
domaine spectral complémentaire par rapport aux techniques restaient laborieuses. La plupart des sources THz étaient soit
employées actuellement (optique, RF, etc.). Son emploi se des émetteurs de faible brillance comme des sources ther-
démocratise depuis l’avènement simultané de lasers miques soit des lasers encombrants de type gaz moléculaires,
« femtoseconde », mais aussi grâce aux progrès constants dont la radiation en infrarouge lointain présente un choix de
dans la conception et la fabrication de nouveaux composants longueur d’onde sélectif dû à une largeur de bande étroite.
micro- voire nanoélectroniques. Pour les applications Conventionnellement, des détecteurs dits incohérents, comme
susceptibles d’être transférées, ces nouvelles techniques rem- des bolomètres et des détecteurs pyroélectriques, ont été
placent les moyens classiques de l’infrarouge lointain, qui uti- employés pour mesurer l’intensité de radiations THz, mais
lisent par exemple des corps noirs comme source de leurs inconvénients étaient un seuil de détectivité bas, des
rayonnement et des bolomètres comme détecteurs (avec de exigences cryogéniques et du bruit causé par la radiation ther-
longs temps de mesure). mique de fond. De plus, la perte de cohérence temporelle
L’intérêt d’employer ce rayonnement est multiple. En pre- réduisait fortement les possibilités d’application industrielle.
mier lieu par opposition aux rayons ionisants comme les Avec l’apparition de la spectroscopie temporelle térahertz au
rayons X bien connus, les radiations térahertz sont en effet milieu des années 1980, ces difficultés ont été surmontées
capables de pénétrer la matière organique ou inorganique rapidement. Le caractère multidisciplinaire du secteur de
sans causer de dommage. En second lieu, la radiation téra- recherche traitant les térahertz exige une connaissance pro-
hertz traverse certains milieux autrement opaques dans le fonde d’optique et photonique, d’ingénierie des micro-ondes et
domaine visible : vêtements, papier, bois, carton et plastiques de la physique des semi-conducteurs. Bien que la technologie
et la liste est non exhaustive. Cette transmission de l’onde progresse, peu de dispositifs sont disponibles dans le
térahertz sur plusieurs centimètres par divers matériaux est commerce.

Transistor world Laser world

THz gap
Radio Microwave IR Visible UV

300 MHz 3 GHz 30 GHz 300 GHz 3 THz 30 THz 300 THz
1m 10 cm 1 cm 1 mm 1 µm 10 µm 1 µm

Figure 1 – Spectre électromagnétique et positionnement du « gap » térahertz

RE 143 - 2 © Editions T.I. 5 – 2010

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2.2 Comment générer un tel rayonnement picoseconde. Dans les deux cas, les rendements de conversion
sont encore très faibles, et décroissent au fur et à mesure que
Les sources constituent actuellement la principale limitation la fréquence ciblée augmente.
de la technologie THz en termes de transfert industriel. Les Le laser à cascade quantique est probablement la source
moyens techniques dont on dispose aujourd’hui permettent de continue la plus prometteuse. Cette solution consiste à bénéfi-
réaliser des études en laboratoire, mais ne sont pas encore cier du comportement des électrons libres dans des structures
adaptés à des applications industrielles ou grand public. Leur quantiques. Les techniques de croissance cristalline, comme
encombrement, leur fiabilité et aussi leur coût ne sont pas l’épitaxie par jets moléculaires, permettent la fabrication d’un
encore compétitifs et attractifs pour des applications en empilement de couches semi-conductrices nanométriques de
PME-PMI. compositions différentes (multipuits quantique).
Les sources THz peuvent être réparties en différentes Dans un laser classique à semi-conducteur, la lumière est
familles, suivant qu’elles sont continues ou impulsionnelles, produite par la recombinaison de charges négatives et posi-
cohérentes ou incohérentes, basées sur des techniques élec- tives (les électrons et les trous) à travers la bande d’énergie
troniques ou optiques.

2.2.1 Sources continues


interdite existant entre les bandes de conduction et de valence
du cristal. La séparation énergétique entre les deux bandes
détermine la longueur d’onde du laser.

Historiquement, c’est le domaine de l’astronomie qui a Le laser à cascade quantique, ou laser QCL (Quantum Cas-
développé les sources millimétriques et submillimétriques. Le cade Laser ), est basé sur une approche diamétralement oppo-
moyen le plus simple reposait sur l’emploi de corps noirs. Ils sée. Dans un laser QCL, les électrons font des transitions
ne sont malheureusement pas adaptés à l’imagerie THz. Pour entre des états liés, créés par confinement quantique dans
pallier la faible puissance générée du corps noir, les tubes des couches alternées ultraminces de matériaux semi-
électroniques à ondes progressives (de type BWO – Back conducteurs. Comme ces couches ultraminces, appelées puits
Wave Oscillator – où les électrons sont accélérés dans un quantiques, ont une taille comparable à la longueur d’onde de
potentiel périodique) ont émergé avec des niveaux de puis- Broglie de l’électron, elles imposent son mouvement à l’élec-
sance disponibles importants, mais généralement limités à tron dans la direction perpendiculaire au plan des couches. À
moins de 200 GHz. Actuellement, on peut se procurer dans le cause de cet effet, appelé confinement quantique, l’électron
commerce des sources BWO térahertz de haute puissance (1 à ne peut passer d’un état d’énergie à l’autre que par pas dis-
100 mW), de largeur spectrale étroite (1 à 10 MHz) sur de lar- crets, en émettant des photons de lumière. L’espacement
ges domaines spectraux (0,035 à 1,25 THz). L’obtention de entre les états, donc la longueur d’onde ou bien, de manière
signaux THz nécessite toutefois une multiplication de la fré- équivalente, la fréquence, dépend de la largeur du puits.
quence de base par des dispositifs non linéaires. Pratiquement, par application d’une tension extérieure, la
Enfin, de par l’explosion technologique dans la microélectro- structure de potentiel obtenue forme « un escalier » comme
nique, des nouvelles sources issues des hétérostructures à illustré sur la figure 2 qui présente schématiquement le prin-
base de semi-conducteurs comme des diodes à effet de transit cipe de la cascade quantique. Les électrons descendent alors
(Gunn, RTD, IMPATT...), des transistors ultrarapides, sont en cascade, émettant un photon à chaque marche de poten-
capables de générer directement en bande millimétrique. Ces tiel. Par une ingénierie de bande très poussée, il est possible
composants sont moins puissants que les BWO mais plus de choisir les temps de vie et les probabilités de passage par
compacts et simples d’emploi. On les retrouve dans de nom- effet tunnel pour chaque niveau afin d’obtenir l’effet laser.
breux dispositifs commerciaux. Grâce à leur faible taille, leur haute fiabilité et leur facilité
Le positionnement charnière entre le domaine des d’usage, ces composants vont probablement bousculer les
micro-ondes et de l’optique permet de bénéficier des avancées champs applicatifs autour de l’emploi des ondes térahertz
du côté optique du spectre, pour générer un rayonnement en dans les prochaines années.
bande térahertz. On va donc retrouver de nombreux concepts
développés pour les applications optiques avec une adaptation 2.2.2 Sources impulsionnelles
aux longueurs d’onde térahertz. Pour la génération d’un rayonnement térahertz, dans les
En premier lieu, les oscillateurs laser, plus particulièrement laboratoires américains dès la fin des années 1980, des cher-
les lasers moléculaires (où l’on profite d’une inversion de cheurs avaient compris l’intérêt des impulsions laser ultra-
population entre deux niveaux rotationnels d’une molécule brèves pour générer des rayons en infrarouge lointain. Par
gazeuse, par exemple, le méthanol), peuvent délivrer plus de exemple, par des effets d’optique non linéaire, on convertit
100 mW avec une très grande accordabilité mais au détriment l’impulsion optique sub-picoseconde focalisée dans un cristal
d’un encombrement important. ou un composant non linéaire pour récupérer – avec un faible
rendement certes – un faisceau térahertz. Ce pulse électroma-
La seconde solution optique consiste à faire battre, dans un gnétique rayonne dans l’espace libre ou est guidé par des dis-
dispositif non linéaire, deux lasers continus asservis en lon- positifs optiques adaptés. Comme le spectre térahertz généré
gueurs d’onde légèrement différentes. La différence de fré- est inversement proportionnel à la largeur temporelle du
quences est égale à la fréquence THz désirée. Cette technique pulse, si on dispose d’une impulsion d’une durée à l’échelle de
est très attirante car le faisceau THz généré est quasi mono- la picoseconde (10–12 s) alors, en conséquence, le spectre
chromatique et accordable en fréquence en changeant la lon- atteint le domaine térahertz. Les mesures peuvent être
gueur d’onde des faisceaux de pompe. conduites à température ambiante. La combinaison des
Le mélange de fréquences peut s’effectuer par des cristaux méthodes optiques et microélectroniques a été très féconde
non linéaires, qui sont de la même famille que ceux employés depuis et les principes de base se sont enrichis par de très
pour le doublement de fréquence optique puisque les deux nombreuses techniques établissant ce que l’on surnomme
phénomènes sont complémentaires. aujourd’hui l’optoélectronique THz.
On emploie aussi des détecteurs en semi-conducteurs où Par exemple, un système efficace repose sur l’emploi
l’énergie est convertie par un dispositif couplé à une antenne conjugué de laser femtoseconde (10–15 s) de manière directe
à condition que sa réponse soit plus rapide que la période du pour initier des effets d’optique non linéaire dans des cristaux
signal THz à générer, c’est-à-dire de l’ordre ou inférieure à la qui seront la source du rayonnement. L’autre possibilité

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Spectroscopie térahertz

par Jean-Christophe DELAGNES


Maître de Conférences au Centre de Physique Moléculaire Optique et Hertzienne


(CPMOH UMR 5798) à Talence (33).
et Patrick MOUNAIX
Chargé de Recherche CNRS au Centre de Physique Moléculaire Optique et Hertzienne
(CPMOH UMR 5798) à Talence (33).

Résumé : La spectroscopie impulsionnelle apporte une quantité d’informations


considérable sur les sytèmes physico-chimiques : indice de réfraction, absorption,
temps de relaxation. S’agissant de la spectroscopie aux longueurs d’ondes térahertz
(1 THz = 1012 Hz), il est possible de mesurer directement le champ électrique de
l’impulsion et donc son spectre en amplitude et en phase. On peut extraire ainsi la
réponse diélectrique complète. À relativement court terme, en combinant imagerie et
spectroscopie large bande, les ondes térahertz pourraient ainsi trouver des applications
innovantes.
Abstract: Time domain and Time dependent spectroscopy are powerful tools for phy-
sical and chemical analysis. It gives access to numerous information such as refractive
index, absorption, relaxation time. In the terahertz range (1 THz = 1012 Hz), the spec-
troscopy has a key advantage since it is possible to directly measure the electric field
of the pulse, and thus the spectrum in amplitude and phase. In relatively short term,
by combining gimaging and broadband spectroscopy, the terahertz waves could find
innovative applications…
Mots-clés : Térahertz, Spectroscopie, Pompe-Sonde, Femtoseconde Picoseconde,
Réponse transitoire
Keywords: Terahertz, Spectroscopy, Pump-Probe, Femtosecond Picosecond, Transient
response

Fiche de synthèse
Domaine : Techniques d’analyse et spectroscopie
Degré de diffusion de la technologie : Émergence / Croissance / Maturité
Technologies impliquées : Optique, électronique, optronique, traitement du signal
Domaines d’application : Biologie, environnement, sécurité
p。イオエゥッョ@Z@ェオゥョ@RPQP@M@d・イョゥ│イ・@カ。ャゥ、。エゥッョ@Z@ヲ←カイゥ・イ@RPRP

Principaux acteurs français :


Pôles de compétitivité : Pôle de compétitivité Route des Lasers™ (Aquitaine)
Centres de compétence : Centre de Physique Moléculaire Optique et Hertzienne
CPMOH (CNRS), Centre technologique Alphanov, ARMIR (Association pour le
Rayonnement, les Mesures et l’Imagerie Rapide), qui comprend un club
« Téranaute » formé par une dizaine de laboratoires universitaires, grands organis-
mes et industriels travaillant dans le domaine des ondes térahertz. GDR Européen
TERAHERTZ « Détecteurs et Émetteurs de Radiations Térahertz à Semi-
conducteurs » (GDR CNRS 2897). Ce GDR fédère les collaborations entre une ving-
taine de laboratoires européens travaillant dans le domaine des composants à
semi-conducteurs pour la technologie des ondes THz.
Exemples d’acteurs dans le monde : Nikon, Picometrix, Toptica Photonics,
GigaOptics

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1. Contexte de leur faible accordabilité, ces composants ne sont pas adé-


quats pour effectuer des mesures en spectroscopie. En
Depuis de nombreuses années maintenant, la production et revanche, on peut les utiliser comme de bons étalons de fré-
la détection de rayonnement térahertz (THz) suscitent un quence, ou pour détecter des signatures spectrales d’espèces
engouement, tant au niveau de la recherche académique particulières dont une ou plusieurs raies si situent dans le
qu’au niveau du milieu industriel. L’imagerie, le contrôle non spectre étroit de la diode.
destructif (CND) et la détection d’explosifs sont des applica- Pour être complet, il ne faut bien entendu pas omettre la
tions particulières autour des ondes THz qui ont le plus mar- source la plus répandue de rayonnement, et de rayonnement
qué l’actualité scientifique. Outre les techniques de production THz en particulier : le corps noir. Dans un tel corps idéal,
et de détection de rayonnement THz cohérent, les méthodes chaque élément de surface en équilibre à la température T
d’extraction des spectres (statiques ou dynamiques) consti- émet par rayonnement électromagnétique une puissance
tuent un volet important du savoir-faire propre à ce domaine égale à celle qu’il reçoit provenant du reste de la surface des


de fréquence particulier. parois. La puissance rayonnée par unité de surface et de lon-
gueur d’onde (en W. m-2.m-1) est donnée à partir de la loi de
Planck par :
Le rayonnement THz cohérent fait référence soit à un
rayonnement monochromatique de grande pureté spectrale,
soit à une impulsion THz dont les différentes composantes (1)
spectrales ont une relation de phase bien déterminée qui
conditionne la forme temporelle de l’impulsion. C’est cette avec h constante de Planck,
dénomination que l’on utilise généralement, par opposition
au rayonnement incohérent d’une source telle que le corps λ longueur d’onde,
noir. kB constante de Boltzmann,
c célérité de la lumière dans le vide,
Nous nous proposons ici de faire un point sur l’état de T température.
l’art de différentes techniques qui interviennent dans la
spectroscopie THz. Nous abordons dans une première partie Ce rayonnement est très large bande. En particulier, une
les différentes sources et détecteurs THz ainsi que leurs quantité non négligeable couvre la partie THz du spectre élec-
paramètres et caractéristiques pertinents en spectroscopie. tromagnétique. C’est principalement le rayonnement de corps
Nous détaillons ensuite quelques spectromètres THz ainsi noir qui a imposé et impose encore de contraintes sur la détec-
que des méthodes ou des techniques de spectroscopie à tion du rayonnement THz par des méthodes bolométriques ; il
l’équilibre. Dans une dernière partie, nous présentons les faut notamment refroidir le capteur à des températures cryogé-
méthodes de spectroscopie hors équilibre du type pompe niques afin de ne détecter que l’énergie du rayonnement THz à
optique – sonde THz. étudier.

2.2 Sources térahertz optiques


2. Sources térahertz
L’avènement des lasers femtoseconde a véritablement révo-
Les performances des techniques de spectrométrie dans lutionné de nombreux domaines de la physique et de la chimie
l’infrarouge lointain (« spectromètres térahertz ») sont intime- (Prix Nobel en chimie pour A.H.Zewail, et en physique pour
ment liées aux méthodes de générations de ce rayonnement T.W.Hänsch), notamment avec la popularisation de la techno-
submillimétrique. Nous allons ici brièvement décrire ces logie titane-saphir (saphir dopé au titane Ti3+:Al2O3). Le téra-
méthodes et en souligner les paramètres et caractéristiques hertz a également bénéficié de cette nouvelle technologie, et
pertinents en spectroscopie. pour une raison assez simple : non seulement la durée des
impulsions femtoseconde est comparable à la période d’un
2.1 Sources térahertz non optiques cycle THz, mais en plus les impulsions délivrées sont relative-
ment intenses. Ces deux caractéristiques ont attiré l’attention
De par sa position dans le spectre électromagnétique, le très rapidement puisqu’elles sont nécessaires à la génération
rayonnement THz se situe, du point de vue technologique, à la de rayonnement THz impulsionnel. Ainsi Auston, Grischkowski
frontière ou plus justement à la confluence des domaines de et Mourou ont réalisé indépendamment les premières mises
compétences électronique et optique. en évidence de l’émission de rayonnement THz à l’aide de
En effet du côté « basses fréquences THz », se trouve à lasers courts. Ces dispositifs utilisent des semi-conducteurs à
notre disposition tout l’héritage et la poursuite d’innovation durée de vie courte. Par ailleurs, les cristaux non linéaires
des technologies hyperfréquences et submillimétriques. (non centrosymétriques) sont également capables de générer
Même si les premières sources de rayonnement cohérent un rayonnement THz soit par différence de fréquence soit par
sont les tubes hyperfréquences (micro-onde, carcinotron) et rectification optique. C’est l’autre méthode courante que nous
que certains sont encore utilisés efficacement (10 mW à allons également décrire.
0,5 THz pour un BWO – Backward Wave Oscillator), ils sont
aujourd’hui supplantés par des composants électroniques 2.2.1 Semi-conducteurs – Antennes térahertz –
dont l’exemple le plus important est sans nul doute la diode Photoconducteurs – Emission de surface
Gunn. La diode à effet Gunn ainsi que d’autres diodes Aux alentours de 1887, Heinrich R. Hertz a mené des tra-
(IMPATT – IMPact Avalanche Transit Time, RTD – Resonant vaux qui ont mis en évidence les ondes électromagnétiques
Tunneling Diode) sont des composants qui sont capables de permettant ainsi de valider les travaux de Maxwell. Ces expé-
délivrer d’assez fortes puissances (≈ mW) à des fréquences riences pionnières ont inspiré les techniques actuellement les
de fonctionnement inférieures à quelques centaines de giga- plus répandues de génération et de détection de rayonnement
hertz. Quelle que soit la technologie employée, compte tenu THz que nous allons examiner maintenant.

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2.2.1.1 Antennes à gap – Peignes interdigités


Le dipôle de Hertz : de l’expérience fondatrice Pour polariser le semi-conducteur, différentes architectures
aux émetteurs THz d’électrodes peuvent être employées. On trouve des lignes
coplanaires simples ; cependant ce dispositif est aujourd’hui
Dans l’expérience de Hertz, une bobine d’induction produit assez peu employé et on lui préfère les antennes à « gap »,
une haute tension qui cause périodiquement le claquage c’est-à-dire où l’espace interélectrode possède un rétrécissement
électrique de l’air entre les deux électrodes d’un éclateur (le gap). L’un des avantages de cette configuration est d’offrir un
haute tension. Ce courant transitoire associé à l’étincelle champ électrique local plus élevé en raison de la distance plus
provoque l’émission d’impulsions radiofréquences (RF). Le faible qui existe entre les électrodes. Suivant le matériau et la
champ électromagnétique de l’onde peut, après propagation durée des impulsions lasers employées ainsi qu’en fonction de
dans l’espace libre, induire un courant dans un circuit de l’implantation des éléments (lentilles, éclairement par la face
réception. avant/arrière, …), les photocommutateurs peuvent générer des


Les antennes THz fonctionnent sur un principe analo- fréquences considérables de plusieurs dizaines de THz avoisinant
gue. L’étincelle est remplacée par un transitoire de cou- même la centaine de THz. Néanmoins ce genre de performances
rant dans un semi-conducteur photoexcité ; le taux de restent exceptionnelles et de manière plus conventionnelle les
répétition est celui du laser tandis que la fréquence antennes THz opèrent entre 0,1 à 10 THz.
caractéristique de l’impulsion est donnée par la durée
de vie de cette « étincelle » de courant. Au niveau du Dans un montage typique, la source optique utilisée est
récepteur, l’impulsion THz induit également un courant. un laser femtoseconde titane-saphir. En sortie du laser, une
Néanmoins pour pouvoir mesurer la forme temporelle lame séparatrice divise le faisceau en deux parties, le faisceau
du signal, il faut réaliser un échantillonnage optique de génération et le faisceau d’échantillonnage (parfois très
(étapes a) à e) de la figure 1) car, contrairement aux improprement appelés « pompe » et « sonde » respective-
ondes RF, aucun détecteur n’est suffisamment rapide ment). Les deux faisceaux obtenus délivrent des impulsions
pour détecter un transitoire THz dont la durée est sub- lasers synchrones qui permettent la génération et la détection
picoseconde. résolue en temps du signal THz à l’échelle subpicoseconde. Un
substrat de GaAs épitaxié à basse température sur lequel sont
L’impulsion laser de sonde déclenche la mesure en déposées des lignes coplanaires munies d’un gap sont utilisées
créant des paires électron-trou. La résistivité de l’antenne
respectivement en émetteur et détecteur. Habituellement,
mesurable avec un ohmmètre voit sa valeur fortement
lorsqu’on fait croître des couches cristallines de GaAs, la tem-
diminuer. Le champ térahertz incident entraîne les por-
pérature du substrat est de l’ordre de 600 ° C. Les matériaux
teurs photocréés ; ceux-ci induisent un courant Jd que l’on
obtenus peuvent être semi-isolants et comportent des impure-
mesure.
tés résiduelles responsables de la création d’un niveau

Principe de détection c)

nAmp b) d)

Courant induit
dans le récepteur a) e)
RX d)
c) e)

a)
RX b)

IOpt J ETHz

BC ETHz ⬃ dJ/dt
n
TX J⬃n

TX Radio
p Thz
10 V DC BV
HT RF Mécanisme d’émission
Photocommutateur

TX transmission BC bande de conduction IOpt profil temporel de l’intensité optique


RX réception BV bande de valance J densité de courant dans le détecteur
ETHz champ térahertz rayonné

a expérience de Hertz b antenne térahertz

Figure 1 – Analogie entre l’expérience de Hertz et les premières expériences THz à base de photocommutateurs. Les principes d’émission
et de détection sont détaillés dans les inserts

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accepteur proche de la bande de valence. À cause de la rayonné. Comme nous le verrons ultérieurement, la généra-
recombinaison entre les électrons et les trous dans le niveau tion THz en continu avec un photomélangeur est particulière-
accepteur, le matériau est quasi isolant à température ment bien adaptée aux mesures de spectroscopie de très
ambiante. Pour des températures de croissance abaissée de haute résolution. En effet, la résolution spectrale est directe-
l’ordre de 200 à 300 ° C, le GaAs cristallisé est dit GaAs basse ment pilotée par la largeur spectrale des lasers utilisés pour le
température (GaAs-BT) en anglais Low-Temperature Grown battement.
GaAs. La stœchiométrie du GaAs-BT diffère de celle du GaAs
standard, néanmoins il est considéré comme un cristal de 2.2.1.2 Émission par effets de surface
haute qualité. Après sa croissance, il existe dans le matériau Comme nous l’avons observé précédemment, les photo-
un excès d’arsenic dont le pourcentage est proche de 1 %. Cet commutateurs (antennes) offrent des caractéristiques remar-
excès d’arsenic cause la formation de plusieurs types de quables et sont largement utilisés aussi bien en recherche que
défauts : arsenic en antisite (AsGa), arsenic en site interstitiel pour des applications industrielles. Ils souffrent néanmoins de
(Asi), lacunes de galium (VGa) ou de complexes arsenic-galium deux problèmes étroitement liés. D’une part, la géométrie de

S (Asi - AsGa). La durée de vie des porteurs photocréés peut


être subpicoseconde. Lors de l’absorption du faisceau optique,
des électrons photocréés passent de la bande de valence (BV)
l’espace interélectrode (gap) nécessite de focaliser le faisceau
optique sur des tailles de l’ordre de 5 µm. En conséquence, si
le pointé du faisceau laser fluctue, il peut engendrer une fluc-
dans la bande de conduction (BC). tuation importante du signal émis/détecté. D’autre part, le
L’antenne émettrice est polarisée par un champ statique de faisceau étant fortement focalisé, on ne peut pas augmenter
quelques volts qui accélère les électrons et les trous. Le cou- indéfiniment la puissance optique pour accroître le signal, sous
rant transitoire (durée inférieure à la picoseconde) associé à peine d’endommager voire de détruire le photocommutateur.
ce déplacement de porteurs est responsable de l’émission du Les semi-conducteurs offrent une autre possibilité de géné-
champ THz. L’impulsion THz ainsi émise se propage dans ration THz – l’émission de surface – qui ne nécessite ni aligne-
l’espace libre comme pour un rayonnement dipolaire. ment précis ni focalisation, contrairement aux antennes
Pour la détection, c’est le champ électrique (THz) qui sert à photoconductrices ultrarapides. L’émission de surface peut
son tour de champ accélérateur dans le récepteur. Ici, le fais- résulter de trois phénomènes physiques : l’émission par
ceau d’échantillonnage crée des charges libres avec un retard champ de surface, l’émission par effet photo-Dember et enfin
variable par rapport au signal THz à détecter. Un courant est par effet non linéaire d’ordre deux.
alors généré dans l’antenne réceptrice et peut ensuite être À la surface des semi-conducteurs, il existe un champ élec-
détecté par un amplificateur de courant. Ainsi, le champ élec- trique normal à l’interface. Ce champ de surface résulte de
trique ETHz(t) de l’impulsion THz générée par l’émetteur est défauts superficiels qui induisent une distribution spatiale de
reconstruit par échantillonnage temporel du courant induit charges à la surface du semi-conducteur. Cela se traduit par
dans le détecteur. On accède donc au spectre de l’impulsion une courbure des bandes en bord de la surface (voir figure 2).
THz par transformée de Fourier (TF) du signal temporel ; si un Lorsqu’ils sont excités par un faisceau laser, les porteurs de
échantillon est interposé dans le faisceau, on peut en consé- charge créés sont mis en mouvement par ce champ de sur-
quence remonter à sa transmittance complexe ou à son spec- face. Le courant de déplacement transitoire associé provoque
tre puisque le spectre de l’impulsion sans échantillon est une radiation THz. Les caractéristiques du champ THz dépen-
connu. Cette fonction de transfert permet notamment de dent de la densité de défauts à la surface du semi-conducteur
remonter à la réponse diélectrique ε( t) de l’échantillon. C’est et de la mobilité des photoporteurs. Un effet comparable est
le principe de base de la spectroscopie THz résolue en temps utilisé pour la génération d’onde THz dans les diodes p-i-n ou
(ou THz-TDS pour THz Time Domain Spectroscopy) que nous des structures à puits quantiques.
détaillerons plus loin (figure 8).
En plus du courant de déplacement, les électrons et les trous
Enfin, parmi les différentes architectures d’émetteur/
ayant des mobilités différentes, le courant de diffusion associé à
détecteur, les peignes interdigités submicroniques sont capa-
chacune des espèces crée une distribution de charges nette (en
bles d’augmenter fortement le champ rayonné ; il faut cepen-
dant masquer un espace interélectrode sur deux afin que
seuls les champs de même polarité s’ajoutent. Ces dispositifs
sont également largement utilisés pour la caractérisation à
l’équilibre. Courbure
de bande BC
Dans le cas de la génération d’un rayonnement THz continu
mais accordable, le matériau photoconducteur est couplé à
États de Niveau de Fermi
une antenne planaire métallique large bande c’est-à-dire que surface (A)
ses caractéristiques de rayonnement sont pratiquement indé- BV
pendantes de la fréquence sur une plage de fréquences de
plusieurs THz (typiquement une antenne type spirale logarith- Surface
Vers le massif
mique). L’ensemble constitue un photomélangeur. Le dispositif
est polarisé et la conductivité σ(t) du semi-conducteur est Distribution des électrons
modulée par le battement de deux faisceaux optiques continus Distribution des trous
dont la différence de fréquence Δν est ajustée très précisé-
ment pour se situer dans la gamme des fréquences THz : c’est
le principe du mélange photorésistif. La conductivité a pour Distribution
différentielle E
expression D

σ(t) = σm + Δσ cos(2πΔν t) Champ Dember


avec σm conductivité moyenne.
Un photocourant modulé à la différence de fréquence Δν est Figure 2 – Émission de surface : processus impliquant des
généré dans la structure et alimente l’antenne. Un champ déplacements de charges (redressement de surface non
électromagnétique continu de fréquence égale à Δν est ainsi représenté)

RE144 - 4 © Editions T.I. 5-2010

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Sources et détecteurs
aux fréquences térahertz
par Didier LIPPENS

Les applications aux fréquences térahertz connaissent actuellement un déve-


loppement sans précédent. Traditionnellement réservées à quelques applica-
tions très spécifiques notamment la radioastronomie millimétrique et S
submillimétrique, les technologies térahertz sont amenées à se développer
dans un champ plus large d’activités allant des techniques de l’environne-
ment aux biotechnologies. Les techniques térahertz ont fortement évolué ces
dernières années, grâce aux micro- et nanotechnologies les rendant plus
accessibles aux sens technique et économique.

des nanotechnologies dans de nombreux domaines


Didier LIPPENS, professeur à l’université des allant des hyperfréquences à l’optique. Un des exem-
Sciences et Technologies de Lille, dirige le groupe ples marquants est celui des lasers qui fonctionnent
Dispositifs Opto et Micro-Électronique quantique en régime impulsionnel. Ces lasers, dits femtose-
(DOME) à l’Institut d’Électronique de Micro- conde dans la mesure où les largeurs d’impulsion sont
électronique et de Nanotechnologie (IEMN). Il de la centaine, voire de quelques dizaines de femto-
préside également le comité de pilotage du secondes, permettent, par photodétection ultrara-
réseau d’excellence Européen MÉTAMORPHOSE pide, de couvrir un spectre très large des fréquences
sur les métamatériaux. allant typiquement de la centaine de gigahertz à quel-
ques térahertz. Un des ressorts essentiels de ce déve-
loppement est également l’ingénierie de bande
1. Introduction interdite dans les semi-conducteurs. Celle-ci a permis
de fabriquer des nanostuctures à puits quantiques
L’ouverture du spectre des applications trouve adaptant et optimisant les transitions optiques dans
avant tout son origine dans la prise de conscience les matériaux semi-conducteurs. Ces travaux ont
que les thématiques relatives à la santé, la sécurité conduit à la fabrication des lasers à cascade quanti-
et l’environnement sont au cœur de nos préoccupa- que dont la première démonstration vers 4 THz n’a
tions actuelles. été réussie qu’en 2004.
Nous nous proposons ici de faire le point sur l’évolu- Pour les deux approches, électronique et optique,
tion technique des dispositifs utilisés en spectroscopie nous essaierons de dégager les dénominateurs
et imagerie térahertz en introduisant deux approches. communs de ces deux disciplines qui traditionnelle-
La première est purement électronique. Elle bénéficie ment ont des langages relativement différents. La
de l’expérience des ingénieurs en instrumentation du bande de fréquence du spectre électromagnétique
spatial (astronomie et aéronomie) avec la perspective correspondant aux fréquences térahertz a été long-
d’intégrer de nouveaux composants à l’état solide. temps qualifiée de gap térahertz, en raison de la dif-
C’est en particulier le cas des nanocomposants dont le ficulté d’accès de cette bande correspondant à
principe de fonctionnement est basé sur les phénomè- l’infrarouge lointain. Nul doute que dans un proche
nes quantiques. Les composants mettant en jeu l’effet avenir, ce gap sera comblé grâce aux techniques et
tunnel résonant sont un des exemples les plus repré- aux technologies décrites ici.
sentatifs de cette évolution. Les nanotechnologies Pour la classification des composants, il faut distin-
permettent actuellement non seulement de considérer guer ceux utilisés pour la génération directe c’est-à-
des structures métalliques, semi-conductrices et dié- dire les oscillateurs, tant électroniques qu’optiques,
lectriques, aux très faibles dimensions, pour la fabri- des composants tirant parti des effets non linéaires,
cation des composants actifs, mais également pour essentiellement dans les semi-conducteurs. La
l’optimisation des circuits (guides d’ondes, anten- grande différence entre une approche optique ou
nes...) environnant ces mêmes éléments.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。ゥ@RPPW

plus exactement optoélectronique et une approche


La seconde approche est optique. Elle bénéficie purement électronique réside dans les mécanismes
également du développement des nanosciences et fondamentaux mis en jeu. Pour un composant

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électronique, il s’agit de contrôler les flux d’électrons l’amplification. Pour le moment cependant, même si
en amplitude et en phase afin d’obtenir notamment l’on fabrique des transistors « térahertziens » dans la
un effet d’opposition de phase entre tension et cou- mesure où leur fréquence de coupure atteint le téra-
rant alternatifs, synonyme de conductance différen- hertz, ils présentent des gains limités en infrarouge
tielle négative. Dans ce contrôle, le temps de transit lointain. Les valeurs de gain sont en particulier insuf-
des charges électriques est le facteur limitant. On fisantes pour assurer la régénération des signaux en
qualifie généralement ces composants limités par le amplitude compte tenu de l’absorption très forte des
temps de transit par le terme anglo-saxon : Transit ondes électromagnétiques au-dessus de 100 GHz.
Time Limited devices. Des études sont actuellement en cours pour
Pour un composant optoélectronique, l’ingénieur améliorer cette situation soit à partir d’une technolo-
joue sur les transitions optiques que ce soit par gie unipolaire, soit bipolaire en fabriquant des nano-
l’absorption utilisée pour la photodétection, mise en transistors térahertz. L’état de l’art se situe
œuvre dans le battement de sources optiques, ou cependant en bande millimétrique bornée par

S pour l’émission stimulée pour les lasers. Ces transi- 300 GHz. Ceci explique le choix des composants de
tions se font à des échelles de temps très courtes. type diode que ce soit pour la génération directe ou
Elles sont donc potentiellement mieux adaptées à la pour la conversion de fréquences.
partie haute du spectre.
La distinction entre composants électronique et opti- 2.1 Génération directe
que tend cependant à s’estomper dans la mesure où il Le composant dipôle le plus utilisé comme source à
y a une mixité des principes. Un photodétecteur ultra- l’état solide dans le bas de la bande térahertz, est la
rapide, au sens où il est capable de suivre la modula- diode Gunn. Ce composant présente un effet de con-
tion très hautes fréquences d’un signal optique, mettra ductance (résistance) différentielle négative. Mathé-
en jeu d’autres phénomènes que les seules transitions matiquement, cela correspond à écrire :
optiques. Le pompage électrique d’un laser à cascade
quantique, permettant d’obtenir l’inversion de popula- Gd = (dJ/dV) < 0 (1)
tion, est avant tout un problème de transport de char- avec J la densité de courant traversant le
ges dans les hétérostructures de semi-conducteurs. À composant,
ce titre, on peut le traiter comme un problème d’élec-
tronique. Nous allons à présent considérer plus en V la tension appliquée à ses bornes.
détails la filière électronique pure en gardant présente Lorsque l’effet de conductance différentielle existe
à l’esprit la remarque précédente. en régime de tension continue (régime dc), cela
Nous décrivons les principes, les technologies et les signifie simplement que, en augmentant la tension
performances des sources et détecteurs à l’état solide aux bornes du composant, on obtient moins de cou-
fonctionnant aux fréquences térahertz. Deux appro- rant le traversant. Cette situation peut paraître para-
ches complémentaires dans la couverture du spectre doxale en électronique classique où généralement la
électromagnétique sont considérées. La première caractéristique courant-tension croît quadratique-
vient de l’électronique utilisant la filière des semi- ment ou de façon exponentielle (cas des diodes
conducteurs III-V. Nous considérons les composants Schottky), ou bien sature (cas des transistors à effet
dipôles de l’électronique non linéaire ainsi que ceux de champ ou bipolaires). Le courant électronique, dit
permettant la génération directe d’une onde de fré- de conduction par opposition à un courant de dépla-
quence térahertz. La seconde approche est dérivée cement, est le reflet d’un flux d’électrons qui peut
des techniques de l’optique avec la description des s’exprimer sous la forme simple de la densité de cou-
enjeux spécifiques au fonctionnement des lasers à rant J donnée par l’équation suivante :
cascade quantique aux grandes longueurs d’onde J = qnv (2)
(≈ 100 µm), ainsi que des principes de la conversion
de fréquences par battement laser. Pour chacune de avec q la charge élémentaire,
ces approches, nous essayons également de considé- n la densité de charges, libres de se
rer les composants dans leur environnement électro- mouvoir au sein du semi-
magnétique pour lequel un certain nombre d’idées conducteur,
nouvelles ont émergé depuis quelques années. Dans
l’ensemble des thèmes présentés, les micro- et nano- v la vitesse moyenne de ces charges.
technologies sont le fil conducteur en permettant la L’idée de base, pour faire baisser les valeurs de
concrétisation de concepts théoriques énoncés pour courant, est de jouer sur la vitesse moyenne. C’est
certains dès les années 1970, notamment pour l’ingé- donc un effet de contrôle des flux électroniques par la
nierie de bande des semi-conducteurs. vitesse. Nous n’exposerons pas en détails les phéno-
mènes de transport dans les semi-conducteurs III-V
utilisés pour les sources Gunn. Ce sont des phéno-
2. Approche électronique mènes complexes dont la description fait appel à la
Traditionnellement, les composants électroniques physique du solide et à la physique statistique.
les plus utilisés aux fréquences térahertz sont les Nous retiendrons simplement que, en augmentant
composants dipôles. Rappelons que, en plus basses la valeur de la tension appliquée, donc du champ
fréquences, la situation est inverse. En effet, l’essen- interne, les électrons voient leur vitesse moyenne
tiel des fonctions électroniques est assuré, dans ce diminuer en passant d’une « vallée » de haute mobi-
cas, par les transistors que l’on peut considérer lité vers une « vallée » de faible mobilité. Par le
comme composants génériques. Cette première terme vallée, on désigne un minimum d’énergie dans
remarque n’est pas anodine dans la mesure où les relations de l’énergie des électrons en fonction du
l’application préférentielle d’un transistor est vecteur d’onde de probabilité. C’est l’équivalent du

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diagramme de dispersion pour les ondes électroma-

Intensité du courant (mA)


gnétiques défini dans l’espace des phases. Cet
espace est réciproque de l’espace réel défini par la 8
zone active du composant.
Par ce transfert, les électrons deviennent moins
mobiles et le courant diminue conformément à la 4
relation (2). A priori, il s’agit d’un effet de volume
limité par le seul temps de transfert intervallée. En
pratique cependant, la limitation vient du transit des
électrons au sein de la structure active (espace réel). 0

Les nouvelles technologies, notamment celles relati-


ves aux hétérostructures de semi-conducteurs, sont


actuellement employées pour pallier les différentes –4
limitations des composants faits de matériaux massifs.
C’est notamment le cas des super-réseaux de
semi-conducteur sur lesquels nous reviendrons pour –8
– 800 – 400 0 400 800
le laser à cascade quantique. Au niveau des perfor-
Tension (mV)
mances, un bon ordre de grandeur est 100 mW de
puissance délivrée à la fréquence de 100 GHz en
Figure 1 – Caractéristique courant-tension
technologie InP. Au-dessus de cette fréquence, les
d’une diode à effet tunnel résonant
performances décroissent très rapidement malgré la
possibilité de fonctionner en mode harmonique.
largeur de barrière, il est cependant possible de
L’autre composant dipôle qui présente une conduc- fabriquer des puits quantiques à très faibles temps
tance différentielle négative est la diode à effet tunnel de résidence. Ceci explique que, à l’heure actuelle, la
résonant. La figure 1 montre la caractéristique cou- diode à effet tunnel résonant présente une fréquence
rant-tension d’un tel composant mesurée à tempéra- record d’oscillation à plus de 700 GHz.
ture ambiante. Le fait que le courant décroisse
brutalement au-dessus d’une tension de l’ordre de Néanmoins, les niveaux de puissance délivrée sont
500 mV, pour l’exemple pris ici, n’est pas un artefact assez faibles : de l’ordre du microwatt. Sans expliquer
mais la conséquence de l’ingénierie de la fonction en détails le pourquoi de ces performances modestes
d’onde électronique. La structure de base d’une diode en puissance, mentionnons simplement que la mon-
à tunnel résonant est en effet constituée d’une tée en fréquence va généralement de paire avec une
hétérostructure double barrière de potentiel réduction des dimensions de la zone active semi-
encadrant un puits quantique. Le lecteur pourra se conductrice limitant la puissance disponible.
référer au dossier [RE 32] (page 5) des techniques de
La figure 2 permet de se faire une idée des techno-
l’ingénieur pour de plus amples détails sur les compo-
logies employées pour la fabrication d’une diode à
sants quantiques. En bref, nous retiendrons qu’il est
effet tunnel résonant. Elle représente une vue, au
nécessaire de décrire les propriétés de transport élec-
microscope électronique à balayage, du mesa qui
tronique par le formalisme de la fonction d’onde.
forme la zone active (le plateau ayant la forme d’un
Celle-ci peut être reliée à une probabilité de présence.
ruban au centre du cliché). Au-dessus a été déposée
Dans le puits quantique, les valeurs d’énergie des
une des électrodes du composant dipôle. Elle est réa-
électrons sont quantifiées avec des probabilités
lisée par dépôt d’or avec la forme de la lettre T par
d’occupation de ces niveaux qui dépendent de l’ordre
référence aux technologies transistor qui utilisent
des niveaux et de la position dans le puits. Ces
des contacts de grille également sous forme de T. On
niveaux quantiques sont autant de passages privilé-
note une autre métallisation qui forme le second con-
giés pour les électrons par effet tunnel. La condition
tact. Elle a la forme de la lettre U et permet de limiter
de résonance est que la valeur d’énergie à l’injection
les résistances parasites de contact.
soit égale à celle du niveau quantique.
Sur ce principe de la mécanique ondulatoire, on Si l’utilisation des transistors est encore marginale
conçoit qu’il est possible d’interrompre le passage aux fréquences térahertz, les technologies qui s’y rap-
des électrons en rendant inaccessible le niveau quan- portent connaissent actuellement un développement
tique. En pratique, cela se fait en appliquant une ten- inattendu avec l’appellation de composants plas-
sion qui désaligne les niveaux par rapport aux mon. Ce terme recouvre les phénomènes qui mettent
valeurs d’énergie des électrons incidents (cf. en jeu l’interaction d’une onde électromagnétique
figures 3 des dossiers [RE 47] et [RE 32]. avec les ondes plasma qui se développent à la surface
d’un métal. Pour les transistors à effet de champ, le
Ce principe n’est pas seulement utilisé pour la plasma n’est pas obtenu dans une couche métallique
génération par diode à effet tunnel résonant mais est mais dans un gaz d’électrons bidimensionnel. On
également à la base du pompage électrique dans les montre en effet que les transistors à effet de champ
lasers à cascade quantique, qui sera abordé ultérieu- fonctionnant aux très hautes fréquences sont réalisés
rement. à partir d’hétérostructures de semi-conducteurs. À
Les temps de passage par effet tunnel sont extrê- l’interface entre les deux semi-conducteurs, respecti-
mement courts. C’est pourquoi on a recours à cet vement de bandes interdites large et étroite, se forme
effet de la mécanique quantique pour les composants une couche d’accumulation qui se compare à un
térahertz. Les autres facteurs temporels limitants plasma d’électrons à deux dimensions. Les compo-
viennent du temps de résidence des électrons dans le sants tirant parti de ces effets ont un principe de fonc-
puits quantique. Par une ingénierie appropriée de la tionnement basé sur les oscillations de ce plasma.

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Contrôle électromagnétique
des interfaces libres
par Jacqueline ETAY
Directrice de recherche au Centre national de la recherche scientifique
Laboratoire SIMAP, CNRS Grenoble INP UGA, St.-Martin-d’Hères, France
et Yves FAUTRELLE
Professeur à l’institut national polytechnique de Grenoble
Laboratoire SIMAP, CNRS Grenoble INP UGA, St.-Martin-d’Hères, France

Résumé En métallurgie, il est souvent nécessaire de maîtriser la forme, la stabilité
d’une interface entre un métal liquide et un fluide de couverture ainsi que la cinétique des
éventuels transferts de masse à cette interface. L’utilisation de forces électromagnétiques
qui permettent d’agir sans contact matériel sur le métal est un moyen de contrôle souple
et efficace. Dans cet article, les mécanismes fondamentaux de l’induction sont introduits.
L’action de champs magnétiques sur le comportement des surfaces libres des métaux
liquides est illustrée par des exemples expérimentaux.
Abstract In metallurgy, controlling shape and stability of an interface between a liquid
metal and a covering fluid layers as well as possible mass transfers through this interface
is needed. The use of electromagnetic forces which allows to operate without physical
contact with the metal is a flexible and effective means of control. In this article, basic
mechanisms of induction are introduced. Actions of magnetic fields on the behavior of
liquid metals free surfaces are illustrated using experimental examples.
Mots-clés Interface libre, contrôle électromagnétique, force électromagnétique, lévita-
tion, dôme, transfert de masse aux interfaces, champ magnétique, induction.
Keywords : free interface, electromagnetic control, electromagnetic force, levitation,
dome, mass transfer, magnetic field, induction

1. Objectif
Après avoir présenté les mécanismes fondamentaux de l’induction, nous passons en
revue les effets d’un champ magnétique sur le comportement des surfaces libres de
métal liquide, selon l’intensité et la fréquence du champ. D’abord, les divers aspects liés
aux champs alternatifs monofréquence sont présentés : lévitation électromagnétique et
formage de dôme statique, oscillation de dôme, instabilité, émulsification... Puis, les effets
d’un champ magnétique présentant plusieurs fréquences sont exploités pour accélérer les
transferts de masse dans un procédé de dépollution. Le cas d’un champ magnétique
continu suit. Bien que ce dernier soit généralement stabilisant, son application en coulée
sidérurgique de brame peut favoriser des oscillations de forte amplitude et de basse
fréquence.

Tous ces cas sont illustrés par des photographies produites par le groupe EPM du
laboratoire SIMAP.

2. Forces électromagnétiques
Dans ce paragraphe, les bases théoriques relatives aux forces électromagnétiques sont
rappelées. Le lecteur soucieux de théorie peut approfondir ces bases en se rapportant à
Moreau [1] ou Davidson [2]. Celui qui s’intéresse aux applications lira directement le
paragraphe 3.

2.1 Principe
Sous l’influence d’un champ électrique E, les électrons ou les ions de certains matériaux
sont mis en mouvement, engendrant ainsi une densité de courant électrique j mesurée en
p。イオエゥッョ@Z@。カイゥャ@RPQV

A/m2. La facilité avec laquelle les particules chargées circulent dans un volume élémen-
taire est considérée comme une propriété physique du matériau : c’est la conductivité

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électrique s mesurée en (W · m)-1. Les valeurs des conductivi- 2.2 Équations


tés électriques de quelques métaux liquides sont portées dans
Nous cherchons maintenant à établir les équations d’évolution
le tableau 1. Un matériau de conductance électrique nulle ou de
du champ magnétique B et du champ des vitesses u dans le
résistance infinie est un parfait isolant électrique. La relation qui temps et dans l’espace.
lie, pour un matériau isotrope animé d’une vitesse u, dans un
champ magnétique B, la densité de courant électrique au Pour cela, nous utilisons la loi d’Ampère :
champ électrique est la loi d’Ohm qui, lorsque l’effet Hall est
∇ × B = µj
ignoré, s’écrit sous la forme :

j ( x , t ) = σ (E ( x , t ) + u ( x , t ) × B ( x , t )) dans laquelle m est la perméabilité magnétique du matériau


considéré. Pour les métaux liquides, cette perméabilité est celle
Voir tableau des notations et symboles en fin d’article.
du vide :

S Par convention, le champ électrique est la somme de deux µ = µ0 = 4 π × 107 (en unités SI)
champs :
En combinant les lois d’Ampère, d’Ohm et de Faraday, nous
 un champ électrostatique Es donné par la loi de obtenons l’équation de l’induction :
Coulomb :
∂B 1 2
E s = − ∇V = ∇ × (u × B ) + ∇ B
∂t µ0σ

 un champ électrique induit Ei par les variations tempo- C’est une équation classique de convection-diffusion, dont
relles du champ magnétique, donné par la loi de Faraday : nous allons voir qu’elle peut, dans les cas particuliers, dégénérer
sous des formes pratiques à manier.
∂B
∇ × Ei = − Le champ des vitesses est donné par l’équation de Navier-
∂t
Stokes dans laquelle la force électromagnétique j x B est
ajoutée :
Dans cette dernière, il est plus pratique d’introduire A, le vec-
teur potentiel du champ magnétique tel que ∇ × A = B . On peut ∂u ⎛ p⎞ j ×B
alors écrire l’équation précédente sous la forme : + (u ⋅ ∇ )u = − ∇ ⎜ ⎟ + ν∇2u +
∂t ⎝ ρ⎠ ρ
∂A
Ei = − avec r masse volumique du métal liquide (en kg · m-3) ;
∂t

L’énergie électromagnétique fournie au matériau par unité de n viscosité cinématique (cf. tableau 1) (en
temps et de volume est E · j ; elle est mesurée en W/m2 · s ou m2 · s-1) ;
bien en J/s. L’utilisation de la loi d’Ohm permet la décomposition p pression au point considéré (en Pa).
de cette énergie en deux parties :
À ces équations s’ajoutent les conditions initiales et aux
j2 limites.
 , qui est toujours positive, c’est la partie de l’énergie
σ
dissipée sous forme de chaleur dans le matériau. En France, 2.3 Approximations
on l’appelle l’effet Joule ; D’après les définitions qui précédent, la solution aux problè-
mes de contrôle électromagnétique consiste à résoudre les
 j · (u x B) = u · (j x B) qui peut être positive ou néga- équations différentielles régissant les évolutions temporelles et
tive, et qui représente le travail exercé par la force de spatiales des champs magnétiques (équation de l’induction) et
Laplace, j x B, sur le conducteur en mouvement. C’est de vitesse (équation de Navier-Stokes) avec les conditions initia-
l’énergie électromécanique. les et aux limites correspondant aux problèmes posés. En pra-
Le contrôle électromagnétique des métaux liquides utilise ces tique, résoudre de tels problèmes s’avère impossible. Des
deux types d’énergie. L’effet Joule sert à chauffer le métal, à le approximations sont donc introduites.
fondre et à en contrôler la température. La partie mécanique La première de ces approximations est celle qui consiste à
sert à en contrôler la pression interne et le mouvement. négliger l’effet de convection du champ magnétique par le

Tableau 1 – Quelques propriétés thermophysiques de métaux liquides

Température de Masse volumique r Tension superficielle Conductivité


g à Tf Viscosité n à Tf
Métal fusion Tf à Tf électrique s à Tf
(en N · m-1) (en m2 · s-1)
(en  C) (en kg · m-3) (en W · m)-1

Mercure (Hg) - 39 13 600 0,485 1,1 x 106 1,15 x 10-7

Gallium (Ga) 30 6 095 0,57 3,8 x 106 3,2 x 10-7

Aluminium (Al) 660 2 385 0,84 4,1 x 106 1,2 x 10-6

Fer (Fe) 1 536 7 870 1,754 0,9 x 106 9,35 x 10-7

RE 41v2 - 2 Copyright © - Techniques de l’Ingénieur - Tous droits réservés 4 - 2016

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RECHERCHE

champ des vitesses, phénomène déterminant par exemple en


MHD-astrophysique (MHD : magnéto-hydro-dynamique). Elle Toutes les combinaisons de ces champs sont possibles à
est connue sous le nom de « approximation du faible condition que l’on sache les créer. Toutefois, ces combinai-
nombre de Reynolds électromagnétique » et est valable sons de champ n’engendrent pas systématiquement la
pour les cas qui nous intéressent. L’équation de l’induction ainsi combinaison linéaire des effets mécaniques qu’ils induisent
simplifiée se réduit à une équation de diffusion instationnaire. séparément.
Ce sont les conditions aux limites – sources du champ, position
et dynamique des frontières séparant des domaines de
conductivités électriques différentes… – qui assurent le cou-
plage entre les parties électromagnétique et dynamique du pro-
3. Lévitation et formage
blème MHD. électromagnétique
Les forces électromagnétiques introduites dans l’équation de
Navier-Stokes sont dues à l’interaction entre un champ magné- 3.1 Lévitation électromagnétique
tique et une densité de courants électriques à l’intérieur du
domaine conducteur de l’électricité. Comme indiqué par la loi
d’Ohm, ces courants électriques ont principalement trois sour-
Le champ magnétique B est créé par un inducteur dans lequel
circule un courant alternatif d’intensité I (en A), d’amplitude
maximale I0, pulsé à la fréquence f (en Hz).

ces, qui peuvent exister simultanément :
 la 1re source est l’application d’une différence de poten- I = I0 cos (2πf ⋅ t )
tiel au moyen d’électrodes ( − ∇V ) ;
 la 2e source est la variation temporelle du champ d’in- Les forces électromagnétiques j x B induites dans le métal
duction magnétique (- ∂A/∂t) ; liquide comportent une partie moyenne indépendante du temps
et une partie pulsée à 2f. Dans la gamme de fréquences moyen-
 la 3e source est le déplacement du milieu conducteur nes et hautes, c’est-à-dire de quelques dizaines à quelques cen-
d’électricité dans un champ d’induction magnétique (u x B).
taines de kilohertz, et en raison de l’inertie du liquide, la partie
& D’un point de vue pratique, le premier cas intéresse peu le pulsée des forces électromagnétiques n’a pas d’effet significatif
contrôle de surfaces libres. En effet, les électrodes présentent sur la dynamique d’un bain de métal liquide. Cependant, la partie
des contacts matériels que nous cherchons à éviter. moyenne des forces électromagnétiques est responsable de
& Le deuxième cas est souvent appelé induction électro- divers phénomènes. D’une part, elle produit du brassage électro-
magnétique. Son application la plus connue est le chauffage et magnétique au cœur du bain. La vitesse caractéristique u de ce
le brassage électromagnétique mono ou polyphasé. brassage est proportionnelle à la vitesse d’Alfven :
Dans le cas où les sources de champ sont monophasées, les U A = B0 / µ0 ρ
effets sur un milieu conducteur de l’électricité varient avec l’in-
tensité et la fréquence du champ appliqué.
avec B0 intensité caractéristique du champ magné-
 Les hautes fréquences présentent la particularité de confiner tique.
les courants électriques à la frontière du domaine conducteur
d’électricité. Ce phénomène est appelé effet de peau électro- D’autre part, elle est capable de compenser partiellement ou
magnétique. Plus la fréquence est élevée, plus la partie irrota- totalement les effets de la gravité. On parle alors de lévitation
tionnelle (c’est-à-dire la pression) des forces électromagnétiques ou de formage électromagnétique.
est importante par rapport à la partie rotationnelle de ces forces. La photo de la figure 1b illustre la lévitation d’une sphère de
Cette pression électromagnétique permet de former ou défor- nickel par un inducteur constitué de 6 spires et 2 contre-spires
mer, de guider sans contact des domaines fluides conducteurs parcourues par un courant d’intensité 300 A efficaces et d’une
de l’électricité. Ces forces font l’objet du paragraphe 3. fréquence de 300 kHz. Ce type de procédé est utilisé pour fabri-
 Pour les fréquences intermédiaires, l’épaisseur de peau est quer des alliages métalliques ultrapurs et aussi pour mesurer les
suffisante pour que le cisaillement dû aux forces électromagnéti- propriétés thermophysiques d’alliages surfondus [3]. Les forces
ques puisse, par conservation de la masse, mettre tout le bain en électromagnétiques équilibrent alors les forces de gravité [4].
mouvement. Ainsi, on peut trouver l’ordre de grandeur du champ magnétique
nécessaire pour léviter une charge de dimension
 Pour les fréquences de champ basses (de 1 à 20 Hz), le caractéristique :
temps de variation du champ des vitesses est du même ordre
de grandeur que celui du champ magnétique avec, comme
a = (3 ᐂ / 4 π )
1/ 3
conséquence, une variation de la pression électromagnétique
suffisamment lente pour engendrer des instabilités de surface.
Ces instabilités sont décrites dans le paragraphe 4. avec ᐂ volume de métal mis en lévitation :

 Une combinaison de ces deux types d’effet est présentée au B02


paragraphe 5 avec une application à l’augmentation des cinéti- ≈O (1)
ques de transfert de masse intéressante, par exemple, pour les 2 µ0 ρga
procédés de dépollution.
avec g gravité.
& Le troisième cas est celui du champ de fréquence nulle appelé
aussi champ continu. Il a été bien exploré, au cours de ces Sur la photo de la figure 1, on remarque que la forme de la
vingt dernières années, surtout lorsque le temps de diffusion du goutte en lévitation n’est pas sphérique. Cela est dû au fait que
champ magnétique est faible par rapport aux temps de la la pression électromagnétique n’est pas identique en tout point
convection et de la diffusion visqueuse et où le champ magné- de la surface de la charge. Dans les régions les plus proches
tique est considéré comme uniforme. Ici il sera utilisé comme des inducteurs où cette pression est la plus grande, il y a répul-
un amortisseur de fluctuations d’interface avec, comme nous le sion. Le liquide s’étend dans les zones où le champ est plus
verrons, des artefacts pouvant aller à l’encontre des effets faible. Dans ces régions, c’est la tension superficielle du métal
recherchés. liquide qui gouverne la forme locale du domaine liquide.

4 - 2016 Copyright © - Techniques de l’Ingénieur - Tous droits réservés RE 41v2 - 3

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CND : méthodes globales et volumiques
(Réf. Internet 42585)

1– Aspects généraux

2– Radiographie

3– Techniques électromagnétiques

4– Techniques ultrasonores et acoustiques Réf. Internet page

Introduction à la technique ultrasonore multiéléments P3790 67

Génération et détection optiques d'ondes élastiques E4415 73

Détermination des contraintes résiduelles par méthode ultrasonore IN8 77

Contrôle de tension de serrage par ultrasons R4040 79

Détectabilité des fuites par émission acoustique R2057 83

Microscopie acoustique R1402 87

Contrôle de la fatigue des matériaux par émission acoustique IN226 91

Caractérisation de solides ou liquides par méthode de pulse-echo R4043 95

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Introduction à la technique
ultrasonore multiéléments

par Loïc DE ROUMILLY


EDF-CEIDRE, département études

1. Principes physiques ................................................................................. P 3 790 - 2


2. Méthodes ultrasonores conventionnelles ......................................... — 6
3. Techniques ultrasonores focalisées.................................................... — 8
4.
5.
Description des multiéléments ............................................................
Paramétrage des multiéléments ..........................................................


8
14 T
6. Exemple industriel ................................................................................... — 15
7. Applications avancées ............................................................................ — 17
8. Freins à la mise en œuvre des multiéléments .................................. — 19
9. Conclusion.................................................................................................. — 20
10. Annexes....................................................................................................... — 20
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. P 3 790

e contrôle non destructif couvre le domaine d’activité qui consiste, dans


L l’industrie, à examiner un objet dans son volume ou en surface, sans nuire
à son intégrité pour une utilisation ultérieure. Les techniques ultrasonores
figurent parmi celles les plus couramment utilisées, comme les courants de
Foucault, la radiographie, le ressuage... [R 1 400]. Elles s’appuient sur les prin-
cipes de propagation d’ondes mécaniques dans les solides et les fluides, de
fréquences situées dans le domaine ultrasonore. Plus précisément, il s’agit de
produire une vibration dans la pièce à examiner et de détecter les signaux
après interaction avec les éventuels défauts présents dans celle-ci. Dans cer-
taines configurations particulières, la technique consiste à tracer les échos
obtenus par réflexion : il s’agit littéralement d’« écho-graphie ».
La technique, utilisée depuis longtemps dans le domaine médical, mettant en
œuvre des capteurs multiéléments, se déploie dans le domaine industriel
depuis une dizaine d’années. S’il existe de nombreuses communications sur le
sujet, les possibilités, mais aussi les limites, de cette technique innovante ne
sont pas toujours précisées.
Cet article vise à fournir une meilleure compréhension des principes
physiques sur lesquels s’appuie la technique multiéléments, quelques
rudiments de calculs et un bref aperçu des applications avancées possibles.
Pour commencer, les principes généraux qui gouvernent les techniques
ultrasonores conventionnelles sont rappelés, en particulier le phénomène de
diffraction.
La technique multiéléments est introduite après une courte transition par les
ultrasons focalisés. Les principes physiques qui la régissent sont décrits, et les
différents paramètres caractéristiques des traducteurs sont présentés avec leur
impact sur le faisceau. Le principe de calcul des lois de retards est exposé,
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPQR

avec les « effets parasites » éventuels.

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est strictement interdite. – © Editions T.I. P 3 790 – 1

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INTRODUCTION À LA TECHNIQUE ULTRASONORE MULTIÉLÉMENTS __________________________________________________________________________

Les possibilités offertes par les multiéléments dans des configurations classi-
ques sont présentées. Revenant, à la fin de l’article, sur la question des
ultrasons focalisés, quelques applications plus évoluées sont brièvement
décrites.
Cet article est illustré par des résultats de simulations numériques ; les
calculs ont été réalisés sous le logiciel CIVA (version commerciale 9.2) déve-
loppé par le CEA (lien dans le « Pour en savoir plus »).

1. Principes physiques Toute discontinuité du milieu de propagation se traduit par un


changement d’impédance à l’origine de phénomènes de réflexion
et de transmission [R 1 400].

1.1 Rappels généraux


Ordres de grandeur typiques :
1.1.1 Propagation des ondes mécaniques Zacier = 45 × 106 kg · m–2 · s–1

T Dans les solides, deux types d’ondes mécaniques peuvent se pro-


pager, chacune associée à des polarisations différentes ([R 1 400]
[E 3 210]) : les ondes de compression – dites longitudinales (ou
Zeau = 1,5 × 106 kg · m–2 · s–1
Zair = 0,0004 × 106 kg · m–2 · s–1

ondes L), que l’on trouve également dans les fluides, et dont les
ondes sonores sont un cas particulier – et les ondes de cisaillement Du point de vue de la propagation des ondes mécaniques, une
– dites transverses (ou ondes T) spécifiques aux solides. En termes fissure dans un matériau peut être considérée comme une lame
mathématiques, les premières dérivent d’un potentiel scalaire, les d’air (ou de vide) et constitue une rupture brutale d’impédance
secondes d’un potentiel vecteur [AF 3 814] [1] ; dans la suite de dans le milieu de propagation. En première approche, la trans-
l’article, les illustrations obtenues par simulation sous le logiciel mission à travers cette lame d’air est quasi-nulle (ou nulle) et la
CIVA représentent l’amplitude du potentiel associé au mode réflexion de l’onde quasi-totale (ou totale) : ces deux phénomènes,
considéré. et le plus souvent le second, sont exploités pour la détection de
Ces ondes sont caractérisées par leurs célérités, qui s’expriment défauts (fissures, manques de matière...).
de la manière suivante :
En revanche, les impédances entre un solide et un liquide sont
E (1 − σ ) E dans les mêmes ordres de grandeur : les ondes mécaniques
cL = et cT = peuvent se transmettre d’un solide vers un fluide et récipro-
ρ (1 + σ ) (1 − 2σ ) 2 ρ (1 + σ ) quement.
où E et σ désignent respectivement les modules d’Young (en Pa) et Conséquence
le coefficient de Poisson, et ρ la masse volumique (en kg/m3).
ou encore : Pour pratiquer un examen par ultrasons, il est nécessaire d’assu-
rer la propagation aller-retour des ondes depuis le capteur, appelé
λ + 2µ µ aussi traducteur (figure 1a ), jusqu’aux éventuels défauts situés
cL = et cT =
ρ ρ dans la pièce, en assurant l’adaptation d’impédance qui convient :

où les notations λ et µ désignent classiquement les coefficients de – la première manière consiste à procéder à l’examen par
Lamé (en Pa ou N/m2). Dans la suite de l’article, λ désignera la lon- immersion, en plongeant dans un fluide (de l’eau par exemple) la
gueur d’onde du signal. pièce à examiner ainsi que le traducteur [BM 6 450] : les ondes
produites par le traducteur se propagent dans le fluide, se trans-
Dans les fluides : mettent dans le solide et, si un angle d’incidence est appliqué, se
réfractent en suivant la loi de Snell-Descartes connue en optique
1
c = cL = géométrique. Les indices de propagation qui apparaissent dans
ρχs cette loi sont définis comme les inverses des vitesses (d’après les
valeurs de célérité présentées ci-dessus, on note en particulier que
où χs désigne le coefficient de compressibilité isentropique. le rapport des indices entre l’eau et l’acier liant les sinus des
angles d’incidence et de réfraction des ondes longitudinales vaut
environ 4) ;
Ordres de grandeur [R 1 400] :
– dans l’acier ferritique : cL = 5 900 m/s et cT = 3 230 m/s – l’alternative consiste à mettre en œuvre, comme dans le
– dans l’acier inox : cL = 5 650 m/s et cT = 3 060 m/s domaine médical, les traducteurs au contact [BM 6 450]
– dans le plexiglas : cL = 2 750 m/s et cT = 1 100 m/s (figure 1d ). Il faut pour cela employer un couplant (du gel par
– dans l’eau : cL = 1 450 m/s exemple) entre le traducteur et le matériau à examiner pour éviter
la présence de toute lame d’air. De plus, on emploie généralement
une semelle en plexiglas, appelée sabot (figure 1b), destinée à
1.1.2 Interaction avec un défaut appliquer un angle d’incidence à la pastille ultrasonore et donc à
produire un faisceau réfracté dans la pièce à examiner [R 1 400]. Le
Le milieu de propagation des ondes mécaniques est caractérisé point d’émergence est le point théorique du sabot duquel sort le
par une grandeur appelée impédance Z = ρc, ρ étant la masse volu- faisceau ultrasonore ; il se situe à l’intersection de la semelle du
mique et c la célérité des ondes mécaniques dans le matériau. sabot et de l’axe orthogonal à la pastille (figure 1c).

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P 3 790 − 2 est strictement interdite. − © Editions T.I.

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___________________________________________________________________________ INTRODUCTION À LA TECHNIQUE ULTRASONORE MULTIÉLÉMENTS

Amplitude
Pastille
Tracé théorique du faisceau
piézoélectrique
dans le sabot

Longueur du signal

Temps

a traducteur ultrasonore b sabot amovible T 45o


(diamètre 6,35 mm)

Figure 2 – Illustration du signal en réception

Exemple :
– l’acier ferritique a un coefficient linéique de l’ordre de
0,01 dB/mm sur la plage de 1 à 3 MHz [2] : il peut être considéré en
pratique comme non atténuant pour les examens réalisés sur ce

Point d'émergence
domaine de fréquences ;
– dans certaines nuances d’acier, ce coefficient peut atteindre
0,025 dB/mm [3], voire plus.

c traducteur monté d mise en œuvre manuelle
sur le sabot d'un traducteur contact
In fine, les fréquences allant de 0,5 à 10 MHz couvrent la plus
Figure 1 – Examens par ultrasons
grande partie des applications de contrôle non destructif, car
elles permettent de satisfaire à la fois les conditions de préci-
sion de mesure (de l’ordre du millimètre), et d’atténuation
En immersion comme au contact, lorsque le faisceau est réfracté négligeable ou acceptable [R 1 400]. Ces ondes mécaniques, de
dans la pièce examinée en ondes transverses (respectivement lon- même nature que le son, se trouvent dans le domaine des
gitudinales) à 45o par exemple, on qualifie de « T45o » (respecti- aigus inaudibles et sont donc ultrasonores.
vement « L45o ») le traducteur, le sabot ou le mode de
propagation.

Il arrive de pratiquer des examens par ultrasons dits en air,


1.2 Rappel sur la diffraction
c’est-à-dire sans couplant aqueux, ni immersion, mais les appli- Si un faisceau ultrasonore peut être représenté en première
cations sont très spécifiques. approche par un pinceau qui se propage, se réfléchit et se réfracte
selon les lois de l’optique géométrique, il est nécessaire de passer
par une description en termes ondulatoires pour avoir une
1.1.3 Fréquence compréhension plus complète et plus fine des phénomènes.
L’hypothèse de l’optique géométrique considère que la longueur
Le choix de la fréquence f employée est déterminé par un
d’onde λ et la courbure des fronts d’onde sont négligeables devant
compromis entre la résolution temporelle attendue de l’examen,
les dimensions caractéristiques de la propagation (longueur du tra-
c’est-à-dire le pouvoir de séparation en temps de deux échos, et
jet optique, diamètre des lentilles...). En optique ondulatoire, la
les contraintes liées à l’atténuation des matériaux.
lumière est décrite comme une onde se propageant dans un milieu
En effet, la détection d’un écho, ou plus généralement d’une dont les caractéristiques ne sont plus considérées comme infinies.
interaction de l’onde avec d’éventuels défauts, va de paire avec sa L’interaction avec toute discontinuité du milieu impacte direc-
localisation en distance, par mesure du temps de parcours – tement la « forme » de l’onde elle-même : il s’agit du phénomène
appelé temps de vol – dans la pièce. Pour cela, le signal émis, et de diffraction. Dans cette description, la dimension finie de la
donc reçu, par le traducteur (tel que celui schématisé figure 2), doit source elle-même crée de la diffraction. Ce phénomène existe éga-
avoir une durée suffisamment courte pour permettre une mesure lement pour les ondes mécaniques : en contrôle non destructif, il
de temps de vol précise. Par exemple, si le temps de vol est détermine les caractéristiques principales des faisceaux ultrasono-
mesuré au niveau du maximum de l’enveloppe du signal (il ne res – formation, limite de champ proche et divergence – et son
s’agit que d’une convention ici), la précision de la mesure est de principe, présenté dans ce paragraphe, est exploité par la suite
l’ordre de la période de la sinusoïde amortie. En distance, la dans le cadre des multiéléments.
précision est donc de l’ordre de la longueur d’onde λ ; comme
c 1.2.1 Mise en évidence de la diffraction
λ = , elle est d’autant meilleure que la fréquence est élevée (et
f
que le signal est amorti). Historiquement, l’effet de diffraction a été pointé par Huyghens
(1629-1695). La mise en évidence de ce phénomène est l’expé-
L’atténuation des matériaux quant à elle est globalement une rience classique du passage d’un rayon laser (c’est-à-dire une onde
fonction croissante de la fréquence mais dépend également du électromagnétique plane sinusoïdale « monochromatique ») à tra-
rapport entre la taille moyenne des grains du matériau et la lon- vers une fente fine. Dans une description purement géométrique,
gueur d’onde [R 1 400] [3]. Elle s’évalue donc sur des plages de fré- le faisceau émergeant de la fente fine serait un faisceau en onde
quences. plane de section égale à celle de la fente. En passant à travers la

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INTRODUCTION À LA TECHNIQUE ULTRASONORE MULTIÉLÉMENTS __________________________________________________________________________

1.2.2 Principe d’Huyghens-Fresnel


Masque
Le principe fondamental qui permet d’interpréter et de formali-
ser ce phénomène de diffraction est celui d’Huyghens-Fresnel. Il
s’énonce ainsi :
Figure de diffraction Toute source monochromatique peut être décomposée en un
ensemble de sources secondaires sphériques, rayonnant des
ondes d’amplitude proportionnelle à leur surface, monochro-
matiques, de phase égale à celle de l’onde originelle en chacun
de ces points.
Source laser Rayon laser
x En appliquant ce principe à l’expérience de diffraction du rayon
laser, le front d’onde dans le plan de la fente peut se décomposer
en sources ponctuelles sphériques M, M′... ayant la même phase
que l’onde incidente. Sur la figure 6, les sources M et M’ sont donc
en phase.
Dans une direction d’observation θ, il existe une différence de mar-
che δ entre les fronts des sources sphériques. Pour obtenir l’ampli-
tude de la figure de diffraction, on somme l’ensemble des
Fente contributions des sources M, M′... en tenant compte de leurs
de largeur a déphasages respectifs dans chaque direction θ. Ce calcul classique de


sommation ([4] [5]) fournit l’allure de l’amplitude lumineuse (en sinus
cardinal) : le long de l’axe de propagation, on observe un maximum
d’amplitude et, de part et d’autre, des lobes secondaires (figure 7).
Figure 3 – Schéma de la diffraction d’un faisceau laser Dans le cas d’une ouverture circulaire de diamètre a, le calcul
par une fente fine montre que le premier anneau sombre est repéré par θ tel que :
λ
sin (θ ) = 1, 22 .
a
24 mm Le calcul mené ici pour une onde électromagnétique est
identique pour une onde mécanique.
Sabot

Conséquences
Lobes secondaires
En raison des dimensions finies de la surface émettrice du
traducteur, le faisceau ultrasonore n’est pas parallèle, mais
Faisceau λ
diverge, avec un angle (en radians) de l’ordre de θ ≃ ,
principal a
d’autant plus grand que l’ouverture est petite.
Ordre de grandeur typique en acoustique
La divergence d’un faisceau ultrasonore produit dans l’acier
ferritique par une pastille piézoélectrique de diamètre
 c 
a = 6,35 mm (quart de pouce) vibrant à 2 MHz  λ = = 2, 95 mm
 f 
Figure 4 – Illustration de la diffraction dans le plan d’incidence est de l’ordre de θ = 34o.
Ordres de grandeur typiques en optique
fente fine, du fait de son caractère ondulatoire, le faisceau s’élargit, Dans le cas d’un faisceau laser rouge de longueur d’onde
et cela d’autant plus que la largeur de la fente est fine, et présente λ = 600 nm passant à travers un trou de diamètre a = 0,1 mm, le
des lobes (figure 3). On obtient une figure de diffraction dont la premier anneau sombre est repéré par l’angle θ = 0,4o.
symétrie découle de celle de la fente [4] [5]. Concernant la source laser elle-même comportant une ouver-
En acoustique, la surface émettrice du traducteur qui constitue la ture de diamètre a = 2 mm, on obtient θ = 0,02o pour une longueur
source n’est pas ponctuelle mais de dimensions finies, ce qui d’onde λ = 600 nm. Contrairement au faisceau ultrasonore, le fais-
engendre de la diffraction : un traducteur conventionnel produit ceau laser n’est quasiment pas divergent, sa section est
donc un faisceau principal et des lobes secondaires d’amplitude quasi-constante à l’échelle du laboratoire : c’est un « rayon » laser.
moindre (figure 4), positionnés selon le rapport de la longueur
d’onde sur le diamètre de la pastille (cf. plus loin figure 8). Sur les simulations présentées figures 4 et 5a, l’effet de
Les résultats de simulation présentés sur les figures 4 et 5 ont diffraction n’est pas aussi net que sur la courbe de la figure 7. En
été obtenus sous le logiciel CIVA avec des traducteurs T45o à effet, la vibration d’un traducteur ultrasonore est amortie : l’onde
3 MHz, comportant des pastilles piézoélectriques rectangulaire acoustique engendrée possède un spectre fréquentiel de largeur
(figures 4 et 5a ; dimension 8 mm × 9 mm) et circulaire (figure 5b ; non nulle, elle n’est pas monochromatique et le calcul classique
diamètre 8 mm), en choisissant un signal accentuant le phéno- menant à la courbe en sinus cardinal n’est pas immédiatement
mène de diffraction. transposable ici. La figure de diffraction du traducteur est la
somme des figures de diffraction obtenues aux différentes fré-
Sur ces simulations, on retrouve la symétrie des lobes quences contenues dans la bande passante de celui-ci, c’est-à-dire
secondaires en fonction de l’ouverture du capteur (figure 5) ; on dans la largeur de son spectre (dans les simulations ci-dessus la
note que ces lobes sont d’amplitude faible. bande passante vaut 2 MHz).

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___________________________________________________________________________ INTRODUCTION À LA TECHNIQUE ULTRASONORE MULTIÉLÉMENTS

y
Faisceau
principal
z′

50 mm
Lobes secondaires

50 mm
a capteur rectangulaire
y
Faisceau
principal


z′

50 mm
Lobes secondaires

50 mm
b capteur circulaire

Figure 5 – Illustration de la diffraction dans le plan orthogonal du faisceau à 40 mm de profondeur

Amplitude lumineuse
sur la figure de diffraction
Masque

1
Onde plane

0,8

Direction
d’observation 0,6
M′

θ 0,4
M
δ

0,2

0
− 10 − 9 − 8 − 7 − 6 − 5 − 4 − 3 − 2 − 1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Figure 6 – Application du principe de Fresnel au cas Figure 7 – Amplitude de la figure de diffraction à travers
de la diffraction par une fente fine une fente fine

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Génération et détection optiques


d’ondes élastiques

par Daniel ROYER


Ingénieur de l’École Supérieure de Physique et de Chimie Industrielles (ESPCI)
Professeur à l’Université Denis Diderot (Paris 7)

1. Génération d’ondes élastiques par impact laser ............................ E 4 415 - 2


1.1 Régime thermoélastique............................................................................. — 3
1.1.1 Distribution de température .............................................................. — 3


1.1.2 Modèle unidimensionnel ................................................................... — 3
1.1.3 Modèle de la source ponctuelle ........................................................ — 5
1.2 Régime d’ablation........................................................................................ — 7
1.3 Accroissement de l’efficacité ...................................................................... — 8
1.3.1 Réseau de sources.............................................................................. — 8
1.3.2 Effet d’une couche mince................................................................... — 9
2. Détection optique de déplacements mécaniques .......................... — 9
2.1 Méthodes non interférométriques ............................................................. — 9
2.1.1 Déflexion ............................................................................................. — 9
2.1.2 Diffraction............................................................................................ — 10
2.2 Méthodes interférométriques..................................................................... — 10
2.2.1 Sonde homodyne ............................................................................... — 11
2.2.2 Sonde hétérodyne .............................................................................. — 11
2.2.3 Interférométrie différentielle dans le temps. Vélocimétrie Doppler — 12
3. Exemples d’application .......................................................................... — 14
4. Conclusion ................................................................................................. — 16
Références bibliographiques ......................................................................... — 16

epuis les premiers travaux de génération d’ondes élastiques sans contact


D mécanique dans un solide (par exemple par impact d’un faisceau d’électrons
ou d’ondes électromagnétiques), les études expérimentales ont progressé grâce
à l’emploi, d’une part, de sources optiques plus puissantes comme les lasers
et, d’autre part, de détecteurs plus sensibles. Des modèles théoriques ont été
développés pour expliquer les mécanismes de génération. Par rapport aux
méthodes traditionnelles (transducteurs piézoélectriques), la génération photo-
acoustique présente plusieurs avantages : outre qu’elle n’exige aucun contact
mécanique, la position et la forme de la source sont modifiables. Les ondes élas-
tiques peuvent être engendrées dans des matériaux portés à haute température.
Cette technique est actuellement orientée vers le contrôle non destructif, la
mesure des constantes élastiques, l’émission acoustique, la spectroscopie, et la
microscopie.
Dans la majorité des expériences, le solide est irradié à l’aide d’impulsions lumi-
neuses. Des ondes de volume et des ondes de surface ont été ainsi engendrées.
Ces ondes sont détectées soit par des transducteurs classiques (piézoélectriques,
capacitifs, électromagnétoacoustiques), soit par des méthodes optiques. Les
mesures optiques, qui font l’objet de la deuxième partie de cet article, ont l’avan-
tage de s’effectuer à distance avec une bande passante large, sans perturber le
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@QYYV

champ acoustique. La combinaison de la génération et de la détection optiques


est potentiellement très importante dans le domaine du contrôle non destructif.
Des exemples d’applications sont donnés en fin d’article.

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GÉNÉRATION ET DÉTECTION OPTIQUES D’ONDES ÉLASTIQUES __________________________________________________________________________________

1. Génération d’ondes
élastiques par impact laser
Les ondes élastiques, encore appelées ondes acoustiques ou
ondes ultrasonores, sont des ondes de matière qui nécessitent un
déplacement mécanique u . Dans un solide isotrope illimité deux
ondes peuvent se propager : une onde longitudinale dont la pola-
risation u L est parallèle à la direction de propagation et une onde
transversale dont la polarisation u T est perpendiculaire à la direction
de propagation. La vitesse de propagation c L de l’onde longitudinale
est toujours supérieure à celle c T de l’onde transversale (en fait
c L > c T 2 ). Ces vitesses, indépendantes de la direction de propa-
gation, sont de l’ordre de quelques milliers de mètres par
seconde [1] [2] [3]. Par exemple, dans l’aluminium c L = 6 300 m /s et
c T = 3 100 m/s.
Ces ondes sont solutions de la seule équation de propagation. En


pratique, les solides sont limités et les ondes élastiques sont
Figure 1 – Schéma général d’un système de génération
engendrées sur leur surface (figure 1). Les ondes doivent satisfaire
et de détection par laser d’ondes élastiques
à des conditions aux limites : par exemple, la tension mécanique doit
dans un solide fonctionnant en mode échographique
être nulle sur la surface libre. Les solutions satisfaisant aux équations
(détection D1) ou en mode transmission (détection D2)
de propagation et aux conditions aux limites conduisent à des ondes
dont le déplacement peut comprendre plusieurs composantes.
À la surface d’un solide isotrope semi-infini, une onde possédant
une composante longitudinale et une composante transversale,
déphasées de π/2, peut se propager. Sa polarisation est elliptique
et sa vitesse c R légèrement inférieure à c T . Le passage de cette onde
de surface, qui porte le nom de Rayleigh, provoque une ondulation
de la surface qui se fait sentir sur une profondeur de l’ordre de la
longueur d’onde [4].
Un faisceau laser pulsé, focalisé sur la surface d’un solide
semi-infini, selon un point ou une ligne, agit comme une source
ponctuelle ou linéique impulsionnelle qui engendre simultanément
ces différentes ondes. La figure 2 représente les fronts d’ondes à
l’instant t après l’impact de l’impulsion laser. Dans le cœur du maté-
riau, la perturbation mécanique est localisée sur deux arcs de cercles
de rayons c T t et c L t . Sur la surface libre, x 3 = 0, la perturbation due
à l’onde de Rayleigh apparaît aux points d’abscisses x 1 = ± c R t . Dans
la région |θ | > θc où θc est l’angle critique défini par rapport à la
normale à la surface libre par la relation :
cT
sin θ c = --------
c L- (1) Figure 2 – Fronts d’ondes engendrés par une source ponctuelle
ou linéique dans un solide isotrope semi-infini
il apparaît une perturbation supplémentaire, appelée onde de tête,
dont les fronts d’ondes sont parallèles à la ligne LT, qui a pour origine ■ du matériau :
le fait que l’onde longitudinale ne satisfait pas aux conditions aux
— coefficient d’absorption : η (%)
limites sur la surface libre. Sur cette surface, l’onde de tête se pro-
page à la même vitesse que l’onde longitudinale, mais comme elle — coefficient de dilatation linéique : α (K–1)
rayonne de l’énergie vers l’intérieur du matériau, son amplitude — masse volumique : ρ (kg/m3)
décroît beaucoup plus vite que celle de l’onde de Rayleigh avec la — capacité thermique massique : C (J/kg · K)
distance à la source. — conductivité thermique : K (W/m · K)
Les principaux paramètres qui interviennent dans la génération — constantes élastiques (de Lamé) : λ et µ (N/m2)
d’ondes élastiques par un faisceau laser sont ceux :
Les sources les plus utilisées sont le laser Nd:YAG constitué d’un
■ de l’impulsion laser : cristal Y3 Al5 O12 (Grenat d’Aluminium et d’Yttrium) dopé au néo-
— énergie incidente : E (mJ) dyme et le laser CO2 (dioxyde de carbone). Les longueurs d’onde
des rayonnements émis sont respectivement 1,064 µm et 10,6 µm
— énergie absorbée : Q (mJ)
pour des durées d’impulsion comprises entre 10 et 100 ns et des
— durée : ∆ (ns) cadences allant de 1 à 100 tirs par seconde.
— section de la zone irradiée : A (cm2) Suivant la densité de puissance, l’impact d’une impulsion lumi-
— densité de puissance absorbée : I (MW/cm2) neuse sur la surface libre d’un solide opaque engendre des ondes
— longueur d’onde : Λ 0 (µm) élastiques selon différents mécanismes qui relèvent de deux

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_________________________________________________________________________________ GÉNÉRATION ET DÉTECTION OPTIQUES D’ONDES ÉLASTIQUES

catégories : ceux qui entraînent une modification de l’état de la sur- Le coefficient d’absorption η est donné par [5] :
face (phénomène d’ablation) et ceux qui ne le modifient pas (pres-
sion de radiation, effet thermoélastique). Lorsque la densité de 4π γ
η = ------------
Λ0 - (2)
puissance lumineuse ne donne lieu à aucune vaporisation de
matière, l’effet de la dilatation locale résultant de l’échauffement
(régime thermoélastique) est prépondérant par rapport à celui de Dans les mêmes conditions, la fraction de l’énergie incidente
la pression de radiation. La dilatation thermique provoque des forces absorbée est de l’ordre de 6 à 7 %. La profondeur de la source
essentiellement parallèles à la surface libre (figure 3a). Si la densité thermoélastique est déterminée par le processus de diffusion ther-
de puissance lumineuse absorbée est suffisante (I > 15 MW/cm2 mique. L’élévation de la température T est régie par l’équation de
dans le cas de l’aluminium), l’impulsion incidente provoque une la chaleur [6] :
vaporisation de matière. Ce régime d’ablation, qui s’accompagne 1 ∂T Pa
d’un transfert de quantité de mouvement, crée des forces essen- ∇ 2 T – ------ ---------- = – --------- (3)
κ ∂t K
tiellement normales à la surface (figure 3b). Si un film est présent
à la surface du matériau, les forces normales sont alors augmentées. avec K (κ = K/ρC ) conductivité (diffusivité) thermique,
Étudions ces trois modes de génération d’ondes élastiques par Pa = ηP puissance absorbée par unité de volume.
impact d’une impulsion laser.
En désignant par q (t ) la variation temporelle de la puissance lumi-

neuse (normalisée à l’unité  ∞


q ( t )dt = 1 ) et en supposant une
1.1 Régime thermoélastique 0
distribution spatiale gaussienne de l’intensité du faisceau laser, de
rayon a, la puissance Pa absorbée par unité de volume est :
Lorsqu’un rayonnement d’intensité inférieure au seuil d’ablation
 -----Qγ- e   -------------  q(t ) T
tombe sur une surface métallique, le champ électromagnétique –z / γ 1 –r 2 ⁄ a 2
P a ( r, z , t ) = -e 2
induit un courant de conduction au voisinage de la surface. Une πa
partie de l’énergie incidente est absorbée par effet Joule et convertie
en chaleur, l’autre est réfléchie. En raison de l’effet d’écran des En négligeant la diffusion thermique dans l’air, Ready a établi
électrons de conduction, les phénomènes sont localisés très près de l’expression de la variation de température dans le métal [7] :


la surface du métal, dans l’épaisseur de peau. Un laser pulsé de faible t
Q κ z2 r2
 
intensité joue le rôle d’une source d’énergie thermique et engendre q(t – t ′)
∆T ( r, z , t ) = --------- ----
- -′ – ---------------------------2 d t ′(4)
- exp – ------------
une déformation mécanique. Cette source thermoélastique ne crée π K π 0 ---------------------------------------------
t ′ (4κt ′ + a ) 2 4 κ t 4κt ′ + a
que des ondes longitudinales si elle se situe à l’intérieur du solide.
La présence de la surface est à l’origine d’une conversion en ondes Si la diffusivité κ et la durée ∆ de l’impulsion laser sont suffisam-
transversales. La combinaison des déplacements longitudinaux et ment petites pour que κ∆  a 2 , la diffusion transversale est
transversaux engendre une onde de Rayleigh qui se propage à la négligeable : la distribution radiale de la température suit celle de
surface du solide. l’intensité lumineuse absorbée.
La distribution de température est représentée sur la figure 4, dans
le cas de l’aluminium, pour une impulsion laser de la forme
1.1.1 Distribution de température q (t ) = (t /τ 2) exp (– t /τ ) de durée ∆ = 2,4 τ = 24 ns (énergie absorbée
Q = 1 mJ) et un faisceau de diamètre 2 a = 1 mm. La pénétration de
L’onde électromagnétique pénètre sur une profondeur égale à l’onde thermique reste inférieure à 10 µm, même 100 ns après le
l’épaisseur de peau γ qui dépend de la longueur d’onde Λ0 , de la début de l’impulsion lumineuse. Pendant la durée de celle-ci, la pro-
conductivité électrique σ et de la perméabilité µ du métal [5] : fondeur de diffusion atteint environ 2 µm ce qui est très petit par
rapport à la largeur du faisceau lumineux et la longueur d’onde
Λ0
 -----------------
π σ c µ- 
1⁄2 acoustique. La source thermoélastique est localisée sous la surface
γ = dans un disque très mince d’épaisseur d de l’ordre du micromètre
et de surface A = πa 2 (figure 5a). L’échauffement local disparaît au
avec µ = µ0 µr produit de la perméabilité du vide (µ0 = 4 π · 10–7 H/m) bout d’un temps de l’ordre de 400 ns (figure 4). Des impulsions
par la perméabilité relative µr du matériau. arrivant avec une cadence inférieure à 1 MHz sont indépendantes.

Dans le cas de l’aluminium (σ = 4 × 107 Ω–1 · m–1 et µr = 1) et d’un


rayonnement provenant d’un laser YAG (Λ0 = 1,06 µm), la profon- 1.1.2 Modèle unidimensionnel
deur de pénétration est de l’ordre de 5 nm.
Dans ce modèle simple, nous négligeons la diffusion thermique
pendant la durée, supposée très brève (10 à 100 ns), de l’impulsion
laser. Dans le cas d’une impulsion d’énergie E, arrivant sur la surface
z = 0 à l’instant t = 0 (figure 2), la densité de puissance incidente par
unité de surface s’écrit :
I (t ) = (E/A) δ (t ) (5)
où δ (t ) est l’impulsion de Dirac et A la section du faisceau laser.
L’élévation de température ∆T du volume chauffé V = Ad due à
l’absorption de la fraction η de la puissance incidente varie comme
un échelon H (t ) :

∆T ( t ) =  ηρ
0
t I(t ′)
-------------------
Cd -
Q
dt ′ = -------------- H ( t )
ρ CV
(6)
Figure 3 – Génération photothermique

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GÉNÉRATION ET DÉTECTION OPTIQUES D’ONDES ÉLASTIQUES __________________________________________________________________________________

et provoque une dilatation ∆V du volume chauffé V = Ad :

∆V = 3 α V∆T ( t ) =
ρ C- 
 ---------

QH ( t ) (7)

proportionnelle à l’énergie absorbée Q et au paramètre thermo-


élastique (α /ρ C ) ; pour l’aluminium :
α
ρ C- = 0,84 × 10
--------- – 11 m 3 · J – 1 (8)

et l’expansion volumique est égale à :

∆V (µm3) = 2,5 × 10 4 Q (mJ) (9)


La figure 5b montre que la prise en compte de la diffusion ther-
mique modifie peu la forme temporelle de la dilatation : au temps
de montée près, celle-ci reste très proche d’un échelon.
La zone irradiée n’est pas libre de se dilater radialement en raison
de la rigidité du matériau qui l’entoure. Il apparaît des contraintes
mécaniques σij qui s’expriment en fonction des déformations εkl et
de l’élévation de température ∆T par la relation (la convention de
sommation sur les indices répétés est utilisée) :


(0)
σ ij = c ijkl ( ε kl – α kl ∆T ) = σ ij – ∆ σ ij (10)
Figure 4 – Distribution de température dans l’aluminium
où ∆σij = cijkl αkl ∆T représente les contraintes exercées par la source
en fonction de la profondeur, à différents instants
thermoélastique sur la matière qui l’entoure. Dans le cas d’un solide
isotrope, compte tenu des expressions du tenseur des rigidités
cijkl [1] en fonction des constantes de Lamé λ et µ et de celui des
dilatations αkl = α δkl , il vient :
σij = λεkk δij + 2µ εij – (3λ + 2µ )α ∆Tδij (11)
Si les dimensions latérales de la source sont grandes devant la
longueur d’onde acoustique, la déformation ε33 selon la normale à
la surface est prépondérante. Comme la contrainte normale à la sur-
face irradiée :
σ33 = (λ + 2µ ) ε33 – (3λ + 2µ )α ∆T (12)
s’annule sur la surface libre x3 = 0, la déformation est donnée par :
∂u 3
λ + 2µ -
 ------------------------
3λ + 2µ
ε 33 = α ∆T = ------------
∂x - (13)
3

Dans ce modèle unidimensionnel, la source, du type piston,


engendre uniquement des ondes longitudinales perpendiculaire-
ment à la surface, d’amplitude u3 = ε33d soit, compte tenu de la
relation (6) :

λ + 2µ -  ρC  A
 ------------------------
3λ + 2µ α Q
u3 = --------- ------ ( t ) (14)

Remarquons que ce déplacement ne dépend pas de la profondeur


de diffusion d, mais seulement :
— d’un coefficient sans dimension, fonction de la rigidité du maté-
riau, qui est égal à 2 dans le cas d’un matériau tel que l’aluminium
de coefficient de Poisson ν = 1/3 ⇒ λ = 2µ ;
— du groupement des constantes thermoélastiques du matériau
( α /ρ C ) ;
— de la densité d’énergie absorbée par unité de surface (Q /A ).
Exemple
Ordre de grandeur : pour l’aluminium, compte tenu de la valeur
Figure 5 – Source thermoélastique
donnée en (8) et pour une densité d’énergie absorbée
Q/A = 10 mJ/cm2, le déplacement de matière est : u = 1,68 nm.
Ce modèle est valable tant que les dimensions latérales de la
source sont grandes par rapport à la longueur d’onde acoustique.
En pratique, étant donné la durée des impulsions laser (30 à 50 ns),
celle-ci est de l’ordre du millimètre. Cette condition conduit à des
dimensions de faisceau (A ≈ 1 cm2) telles que la densité de puissance
devient trop faible pour que l’amplitude engendrée soit intéressante.

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INNOVATION

Détermination des contraintes


résiduelles par méthode
ultrasonore
par Farid BELAHCENE
Président et fondateur de la société ULTRA RS, France

Résumé : La détermination des contraintes résiduelles par ultrasons est basée sur la
dépendance de la vitesse de propagation des ondes ultrasonores avec l’état de contrainte
dans le matériau. Lorsqu’un matériau est soumis à une contrainte, on constate une varia-
tion de la vitesse de propagation de l’onde ultrasonore. On définit généralement les
contraintes résiduelles comme étant les efforts internes qui subsistent dans les pièces
mécaniques lorsque ces dernières ne sont soumises à aucun effort extérieur. Dans cet

articles, différentes étapes de la méthode ultrasonore sont présentées, à savoir le principe
de la mesure des contraintes, des exemples d’applications réalisés sur des pièces mécani-
ques et un aperçu sur les développements futurs de la méthode ultrasonore.
Abstract : Ultrasonic determination of residual stress is based on the dependence of
the propagation velocity of the ultrasonic wave with the stress state in the material.
When a material is subjected to stress, there is a variation of the propagation velocity of
the ultrasonic wave. Residual stress is generally defined as the internal forces that remain
in the mechanical parts when they are not subject to any external force. In this article, dif-
ferent steps of the ultrasonic method are presented namely the principal of the stress
measurement, application examples realized on the mechanical parts and an overview on
futures developments of the ultrasonic method
Mots-clés : Contraintes résiduelles, Méthode ultrasonore, Acoustoélastique, Déforma-
tion des pièces, Méthode non destructive.
Keywords : Residual Stresses, Ultrasonic Method, Acoustoelasticity, Deformation
parts, NDT method

Points clés
Domaine : Technique de caractérisation
Degré de diffusion de la technologie : Émergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : ultrason, logiciel, capteurs, électronique
Domaines d’application : Aéronautique, Automobile, Bâtiment, Énergie, Ferro-
viaire, Nucléaire, Pétrole et pétrochimie…
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence : SF2M – Groupe Français d’analyse de contraintes
Industriels :
Autres acteurs dans le monde : Don E. Bray, Inc. : http://www.brayengr.com/
Contact : – f.belahcene@ultrars.com – http://www.ultrars.com
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INNOVATION

1. Contexte Les limitations de la méthode UltraRS sont les suivantes :


La méthode d’analyse des contraintes résiduelles par ultrasons
est une technique quantitative, rapide et non destructive, basée
 ne permet pas d’avoir des contraintes en extrêmes
surfaces (profondeur supérieure ou égale à 0,3 mm) ;
sur la dépendance de la vitesse de propagation des ondes ultra-
sonores avec l’état de contraintes dans le matériau. Le caractère  plus difficile à mettre en œuvre sur une géométrie
non destructif et le coût des équipements sont les avantages complexe ;
principaux favorisant le développement de cette technique.  nécessite un étalonnage sur une pièce de référence.
Tout procédé de fabrication, on le sait, induit dans une pièce
mécanique des contraintes résiduelles qui influencent son com- Les approches théorique et pratique de la méthode de déter-
portement en fatigue, en rupture et même en corrosion. Le rôle mination des contraintes par ultrasons sont présentées, ainsi
de ces contraintes résiduelles est donc fondamental pour conce- que quelques exemples réalisés sur des pièces mécaniques et
voir une pièce mécanique. Depuis quelques années, les études un aperçu sur les applications industrielles prévisibles.
se sont multipliées pour comprendre leurs effets sur les perfor-
mances mécaniques.
2. Approche théorique
Définition :
Comme annoncé précédemment, la détermination des
Les contraintes résiduelles sont les efforts internes qui

T subsistent dans les pièces mécaniques lorsque ces derniè- contraintes résiduelles par ultrasons est basée sur la dépen-
res ne sont soumises à aucun effort extérieur. Dans une dance de la vitesse de propagation des ondes ultrasonores avec
section, la répartition des contraintes résiduelles résulte l’état de contrainte dans le matériau. Lorsqu’un matériau est
de l’équilibre mécanique entre la zone occupée par la soumis à une contrainte, on constate une variation de la vitesse
source des contraintes résiduelles, caractérisée par une de propagation de l’onde ultrasonore. Cette variation est due à
fonction de distribution bien définie, et le reste de la sec- des effets élastiques non linéaires formalisés par Murnaghan [1].
tion déformée élastiquement.
2.1 Résolution spatiale de la méthode
Ces contraintes internes proviennent des procédés de fabrica- ultrasonore
tion (usinage, forgeage, traitement thermique…). Elles influent Pour déterminer les contraintes résiduelles par ultrasons, trois
sur la durée de vie des composants mécaniques en accélérant ou configurations peuvent être utilisées comme indiqué sur la
en retardant l’apparition de fissures, elles n’ont donc pas toujours figure 1. Dans chaque cas, les ondes sont émises par un
un effet négatif sur le comportement mécanique des structures. transducteur émetteur, se propagent dans une zone du matériau
Elles peuvent aussi être bénéfiques, lorsque des contraintes de à analyser et sont ensuite détectées par le récepteur. La
compression en surface sont générées, pour augmenter leur contrainte moyenne est déterminée dans la région à travers
durée de vie en fatigue. Ainsi, le comportement mécanique et la laquelle l’onde se propage. Dans la configuration a, le même
durée de vie des structures mécaniques soumises à des charge-
transducteur est utilisé pour l’excitation et la réception (méthode
ments variés (mécanique, thermique ou chimique) dépendent de
par écho), et dans les configurations b et c, l’onde est reçue par
l’état des contraintes résiduelles induites dans le matériau.
un transducteur autre que celui utilisé pour l’émission (méthode
Les techniques de mesure des contraintes résiduelles par transmission).
existant actuellement sont destructives ou semi-destructives,
coûteuses et complexes à mettre en œuvre. La méthode par dif-
fraction des rayons X (RX) et la méthode du trou par perçage
incrémental sont les plus utilisées. La première limitée à quel-
ques micromètres reste non destructive ; la seconde est semi-
destructive et semble moins adaptée pour les mesures en sur-
face. La méthode de mesure des contraintes résiduelles du trou
par perçage incrémental est décrite dans l’article [M 1 180].
Une méthode originale dite « UltraRS », basée sur une simple
mesure de la vitesse de propagation des ondes longitudinales
subsurfaciques (LS), a été mise au point pour mesurer ces
contraintes résiduelles d’une façon non destructive et facile-
ment. En effet, il existe une relation de dépendance entre le
niveau des contraintes résiduelles et la vitesse de propa-
gation des ondes ultrasonores.

Les avantages concurrentiels de la méthode UltraRS


sont les suivants :
 non destructive ;
 moins coûteuse que les autres méthodes (ce qui
permet aux industriels de faire des économies sur leur
budget « contraintes résiduelles ») ;
 un dispositif de mesure portable ;
 rapide ;
 utilisable en laboratoire mais également en site
industriel ;
 idéale à appliquer pour le contrôle qualité de 100 % Figure 1 – Représentation schématique de diverses configurations
de la production. de mesures de contraintes résiduelles par méthode ultrasonore

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Contrôle de tension de serrage


par ultrasons
par Farid BELAHCENE
Docteur Ingénieur, fondateur de la société ULTRA RS (France)
Note de l’éditeur
Cet article est la version actualisée de l’article R 4 040 intitulé « Contrôle de tension de
serrage par ultrasons » rédigé par Farid BELAHCENE et paru en 2015.

1. Différentes méthodes de mesure ....................................................... R 4 040v2 - 2


2. Principe de la méthode de mesure..................................................... — 3
2.1 Théorie de l’acoustoélasticité .................................................................... — 3


2.2 Application de la théorie de l’acoustoélasticité à la mesure de tension
dans les vis .................................................................................................. — 4
2.3 Type d’onde utilisé pour la mesure de la tension de serrage ................. — 5
2.4 Approche pratique ...................................................................................... — 6
2.5 Paramètres d’influences sur la mesure de la tension de serrage ........... — 7
3. Applications et retours d’expériences .............................................. — 10
3.1 Exemples d’applications dans les secteurs nucléaire et hydraulique .... — 10
3.2 Quelques applications industrielles en cours de développement .......... — 11
4. Conclusions............................................................................................... — 13
5. Glossaire .................................................................................................... — 13
Pour en savoir plus .......................................................................................... Doc. R 4 040v2

es serrages insuffisants, excessifs ou hétérogènes représentent environ 30 %


L des défaillances statiques, et les mauvaises conditions de serrage 45 % des
défaillances en fatigue. Ils sont un problème récurrent dans l’ensemble des
industries : transport, raffinerie, nucléaire, construction navale, etc. avec un fort
impact financier et humain.
Les assemblages vissés ou boulonnés sont au cœur de la sécurité de nom-
breuses structures industrielles.
Pour obtenir un assemblage fiable, il est nécessaire d’utiliser des éléments
de fixation de qualité respectant des caractéristiques mécaniques normalisées,
de contrôler sa mise en place en s’assurant de sa reproductibilité et de
contrôler sa résistance dans le temps.
Pour optimiser la fiabilité d’un assemblage, deux phases sont nécessaires :
prototype et production.
En phase prototype, l’objectif est de vérifier et valider les conditions de
serrage minimales : essais de chute de l’assemblage, de chocs, de vibrations
répétées et d’augmentations de la température auxquels est soumis un assem-
blage. Une méthode de contrôle précise est nécessaire pour vérifier les valeurs
des tensions de serrage après ces essais.
En phase de production, l’objectif est de créer une spécification de l’assem-
blage incluant l’ensemble de ses caractéristiques et particulièrement les points
suivants : pièces de l’assemblage, consigne de serrage, classe de précision,
moyen de serrage, méthode de contrôle des tensions de serrage…
La validation de cette spécification doit être approuvée et validée par le
bureau d’études, les méthodes et la qualité.
D’où la nécessité de maîtriser l’opération de serrage avec un outillage précis
et fiable.
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CONTRÔLE DE TENSION DE SERRAGE PAR ULTRASONS ____________________________________________________________________________________

Feras Alkatan décrit les différentes étapes de ce type de serrage


1. Différentes méthodes Dans la figure 1 [11], on considère :
de mesure OA : accostage des pièces
AB : zone de proportionnalité effort/angle
Il y a eu un fort besoin d’évaluer la tension de serrage dans les BC : zone de déformation plastique
assemblages vissés de façon non destructive dans l’objectif de
La relation de proportionnalité entre l’effort Q et l’angle θ peut
mieux maîtriser les procédés d’assemblage et de garantir sa fiabi-
être calculée en utilisant la formule :
lité. En effet, même un assemblage optimisé vis-à-vis du dimen-
sionnement de ses éléments de fixation aura une tenue médiocre si
l’opération de contrôle de la tension de serrage a été mal réalisée.
Des instruments portables ou transportables ont été dévelop-
pés pour répondre à ces besoins, et sont désormais disponibles
(2)
dans le commerce. Ils fournissent des informations (couple, ten-
sion, allongement, angle) sur la qualité de serrage réalisée sur un avec
assemblage. Cs couple de serrage jusqu’à l’accostage,
Pour contrôler le serrage, il existe différentes méthodes. Q prétension installée,
■ Mesures du couple de serrage p pas de la fixation,
μt coefficient de frottement dans les filets,
Les méthodes les plus répandues sont celles basées sur la
mesure du couple de serrage. Même si la précision de mesure de d2 diamètre équivalent des filets,


couple est correcte, il reste une grande incertitude sur la tension de μh coefficient de frottement sous la tête de
serrage de la vis. Le résultat du serrage final dépendra des coeffi- l’élément mis en rotation (vis ou écrou),
cients de frottement au niveau des filets de la vis et au niveau de la
rm rayon moyen d'appui sous la tête de
surface de contact (sous la tête de la vis). Le problème du serrage
l'élément (vis ou écrou) mis en rotation,
avec contrôle de couple est dû à la fluctuation des coefficients de
friction. La dispersion liée aux coefficients de frottements entraîne Sb+Sp et St respectivement souplesses du boulon, des
une dispersion sur la valeur de prétension installée pouvant aller plaques et souplesse en torsion de la vis.
jusqu’à 30%.
■ Contrôle d’élongation ou mesure par comparateur
Malgré ces inconvénients, la procédure de serrage avec La relation mathématique entre l’élasticité de la vis et la ten-
contrôle de couple est de loin la procédure la plus couramment sion (précontrainte) de serrage est plus précise que la relation
utilisée. Cela est dû au fait qu’il s’agit d’une procédure technique entre le couple et la tension de serrage. Une mesure directe de
relativement simple. l’élasticité conduit ainsi à des valeurs de précontrainte plus pré-
La relation liant le couple de serrage à la prétension est linéaire cises. Cela peut être obtenu par la mesure mécanique du perçage
et la formule la plus couramment employée est la formule de Kel- dans une vis, qui doit être plus profond que la longueur de ten-
lermann et Klein. sion de la vis utilisée.
Cette méthode ne trouve pas beaucoup d’applications dans la
(1) pratique étant donné qu’elle ne concerne que des vis ou goujons
de grande taille. Cette méthode présente d’autres inconvénients
avec car elle génère un surcoût à cause du perçage de la vis ou de gou-
C couple de serrage, jon en son milieu ; et la vis et le goujon sont fragilisés (concentra-
tion de contraintes)
Pr prétension installée,
On peut également mesurer l’allongement de la vis par l’inter-
p pas de la fixation, médiaire de fibres optiques à réseaux de bragg placées au cœur
μt coefficient de frottement dans les filets, de la vis, laquelle nécessite donc également un perçage.
d2 diamètre équivalent des filets, Le principe de mesure consiste à graver des réseaux de bragg
sur une fibre qui va alors se comporter de la même façon qu’une
μh coefficient de frottement sous la tête de vis
(ou de l’écrou),
Dext et Dint diamètres externe et interne de la tête de vis
(ou de l’écrou)
Q
Le serrage au couple est généralement utilisé en contexte
industriel via des clés dynamométriques, visseuses hydrauliques, Q0
pneumatiques ou électriques C
B
■ Procédure d’acquisition d’angle
μ (S.μ)
Le serrage à l’angle. Il est possible d’associer la procédure de
serrage avec contrôle de couple avec une procédure d’acquisition
d’angle. C’est à la fois l’angle de rotation et le couple qui sont uti- QS
lisés comme critères de contrôle. A
C
Le serrage est réalisé en deux étapes. On applique d’abord à
l’écrou du boulon un couple légèrement inférieur au couple nomi- C0 CS O θ
nal théorique et on lui impose ensuite un angle de rotation précis. θ
La dispersion sur l’effort de tension est réduite mais l’incertitude
reste non négligeable et on risque d’augmenter sensiblement la
contrainte de torsion « parasites » ; Figure 1 – Courbe prétension/angle lors du serrage

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_____________________________________________________________________________________ CONTRÔLE DE TENSION DE SERRAGE PAR ULTRASONS

jauge de déformation : l’allongement axial de la fixation se tradui-


sant par une variation de la longueur d’onde réfléchie par le 2. Principe de la méthode
réseau. L’idée a été déposée par Hay (voir figure 2 [12]). de mesure
■ Méthodes extensométriques
Il existe également les méthodes extensométriques où un cap-
teur d’effort (rondelle avec des jauges de déformation) est utilisé L'application d'une tension électrique sur l'élément piézoélec-
comme rondelle. La précision est bonne et la mise en œuvre est trique dans un transducteur fait que le matériau piézoélectrique
aisée. L’inconvénient de cette technique est de munir chaque vis oscille en créant des ondes sonores qui se déplacent du transduc-
d’un capteur d’effort, ce qui rend le prix du contrôle important teur, à travers le liquide ou le milieu de couplage et dans la vis.
Ce type d'onde ultrasonore parcourt la longueur d'une vis. La
Rotabolt : les Rotabolt sont un autre type de fixations instrumen- vitesse acoustique d'un matériau représente la vitesse à laquelle
tées. L’idée n’est pas de mesurer l’allongement axial induit par la l’onde se déplace à travers lui. Tous les matériaux ont une vitesse
prétension, mais plutôt la contraction radiale. Ces vis sont équipées acoustique représentative, ou théorique, mais la vitesse acous-
d’un axe passant dans un alésage au cœur de vis. Lorsque la pré- tique réelle peut varier d'un échantillon à l'autre du même maté-
tension augmente, la contraction radiale augmente également riau et même dans tout le matériau d'un échantillon particulier.
jusqu’à ce que l’axe ne puisse plus tourner.
■ Méthode ultrasonore
Il est important de réaliser que la vitesse acoustique réelle
Sur laquelle repose l’innovation présentée dans cet article, permet
n'est pas vraiment une constante. Elle varie entre les élé-
de mesurer directement la tension dans la vis, aussi bien lors du ser-
ments de fixation (vis, goujon, boulon) d'un matériau simi-
rage que plus tard, pour vérifier qu’aucune dérive de montage n’ait
laire, même lorsque la composition du matériau de l'élément
eu lieu. Cette méthode repose sur le principe de mesure du temps de
de fixation est étroitement contrôlée. Cette variation résulte


vol d’une onde ultrasonore se propageant le long de la vis.
généralement de la contrainte résiduelle dans le matériau
Les atouts de la méthode ultrasonore résident dans le fait que c’est résultant des processus de fabrication et de traitement
une technique quantitative, précise et non destructive, facile à mettre thermique.
en œuvre, permettant des mesures en continu (suivre le serrage en
temps réel), et qui est indépendante des coefficients de frottement.
Il est intéressant de noter une grande diversité dans les moyens Une onde ultrasonore est transmise d'un transducteur à l'extré-
mis en œuvre pour arriver à contrôler la prétension de serrage mité d'un élément de fixation. Lorsque l'onde ultrasonore ren-
dans les fixations. Par ailleurs, toutes les technologies n’ont pas contre un changement brusque de densité, comme la fin de la vis
été présentées ici, en raison de leur trop grand nombre. Cela (fond), la majeure partie de l'onde se reflète. Cette réflexion
montre que ce sujet fait l’objet de nombreux travaux et qu’il remonte la longueur de la vis et dans le transducteur. Lorsque
constitue une vraie problématique industrielle. l'onde fait osciller l'élément piézo-électrique, un petit signal élec-
trique est produit. Ce signal est représenté sur l'écran de l’appareil
comme une onde sinusoïdale. C'est sur cette onde sinusoïdale
À retenir affichée que l'on peut voir l'événement de fin de parcours qui
déclenche une mesure. Cette onde parcourant la longueur de la
– Il existe différentes méthodes de contrôle qui fournissent vis est illustrée à la figure 3.
des informations (couple, tension, allongement, angle) sur la
qualité de serrage réalisée sur un assemblage
– Il existe des méthodes liées aux frottements au niveau des
éléments filetés de l’assemblage et d’autres non 2.1 Théorie de l’acoustoélasticité
– La dispersion induite par frottement sur la valeur de
couple de serrage appliqué pouvant aller jusqu’à 30 % La détermination des contraintes par ultrasons est basée sur
– La méthode ultrasonore permet de mesurer la prétension la dépendance entre la vitesse de propagation des ondes ultra-
de serrage indépendamment de frottements dans les assem- sonores et l’état de contrainte dans le matériau. Lorsqu’un
blages par éléments filetés matériau est soumis à une contrainte, on constate une variation
de la vitesse de propagation de l’onde ultrasonore. Cette varia-
tion est due à des effets élastiques non linéaires formalisés par
Murnaghan [2].
12 S’appuyant sur les travaux de Murnaghan concernant l’élasticité
EXTERNAL non linéaire en milieu isotrope, le premier travail en acoustoélasti-
30
CONNECTOR 28 cité a été effectué par Hughes et Kelly qui, en 1953, ont montré
EPOXY BRAGG GRATING 20 que, pour certains états de contraintes (compression uniaxiale et
24 de pression hydrostatique), les variations des vitesses des ondes
FIBER longitudinales et transversales peuvent être précisément prédites
25 18 en modélisant le matériau comme ayant la fonction d’énergie de
déformation proposée par Murnaghan . Cette dernière fait interve-
nir des termes d’ordre trois de la déformation qui conduisent à
13 16
une non-linéarité des relations constitutives [3].

Remarque
14
FT
En plus des deux constantes classiques de l’élasticité
linéaire, trois constantes élastiques, appelées constantes de
Murnaghan ou constantes de troisième ordre, sont néces-
Figure 2 – Principe d’application issu de Hay saires pour la description d’un matériau isotrope.

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CONTRÔLE DE TENSION DE SERRAGE PAR ULTRASONS ____________________________________________________________________________________

RÉFLEXION DE L’ONDE Couplant

ALLER RETOUR
DE L’ONDE ULTRASONORE ÉLÉMENT DE TRANSDUCTEUR
ENVOIE ET REÇOIT UNE ONDE ULTRASONIQUE

Figure 3 – Parcours de l’onde ultrasonore dans une vis.

Pour un milieu soumis à un chargement uniaxial dans la direc- Lors de son serrage, deux effets vont faire augmenter le temps
tion 1 (2 et 3 étant perpendiculaires), les vitesses des ondes élas- de parcours des ondes ultrasonores. L’effet acoustoélastique tout
tiques s’écrivent en fonction de la contrainte : d’abord, qui est l’effet direct provoqué par la contrainte de traction

T dans la vis. Celui-ci tend à diminuer la vitesse de propagation de


l’onde ultrasonore et, par conséquent, à augmenter son temps de
parcours. Ensuite, l’effet d’allongement de la vis, qui a un impact
(3) sur le chemin parcouru par l’onde et ainsi tend à faire augmenter
son temps de propagation.
En considérant un modèle à une dimension pour calculer la
réponse de l’onde plane en fonction du chargement uniaxial
avec (figure 5). La longueur totale du boulon libre est L0 et la vitesse de
l’onde longitudinale sans contrainte est V0 ; lN et lH sont respec-
ρ0 masse volumique à l’état non contraint, tivement les longueurs de l’écrou et de la tête du boulon.
Vij vitesse de propagation d’une onde se Quand une contrainte de traction σ est appliquée le long de la
propageant suivant la direction i et tige, un petit segment dx dans la tige du boulon est allongé d’une
polarisée suivant la direction j,
λ et μ constantes de second ordre de Lamé, valeur de , où E est le module de Young du matériau.
ℓ, m, n constantes de troisième ordre de Murnaghan, En admettant que la vitesse de l’onde V varie linéairement avec
θ = α1 + α+ α3 trace de tenseur de déformation. la contrainte axiale σ :
En linéarisant au premier ordre, le système d’équations (3) peut (5)
se réécrire sous la forme :
avec
(4) V0 vitesse de l’onde à l’état libre,
avec
Vij vitesse de l’onde se propageant dans la direction
i et ayant un déplacement particulaire dans la
direction j dans un milieu soumis à une US US
contrainte uniaxiale α11 dans la direction 1,
vitesse de l’onde se propageant dans la direction
i et ayant un déplacement particulaire dans la
direction j dans un milieu non contraint (σ11 = 0),
Aij constantes acoustoélastiques dépendant des
constantes de Lamé (λ, μ) et de celles de L0
L
Murnaghan (ℓ, m, n).

2.2 Application de la théorie


de l’acoustoélasticité à la mesure
de tension dans les vis
F = OKN
La figure 4 représente la configuration de mesure de la tension F1
de serrage dans une vis. Pour ce faire, un signal ultrason est
appliqué sur la tête de la vis. Le signal se propage à travers la vis Vis au repos, sans contrainte Vis à l’état contraint
jusqu’à parvenir à l’interface air/métal au bout de sa tige, puis
revient à sa tête. Le temps écoulé entre le 1er et le 2e écho du Figure 4 – Schéma d’une vis avant et après application d’une pré-
signal est utilisé pour mesurer la longueur de la vis. contrainte

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Détectabilité des fuites


par émission acoustique

par Didier CARON


Pôle d’activités « Ingénierie des contrôles et mesures », CETIM

1. Objet ............................................................................................................ R 2 057 - 2


2. État de l’art ................................................................................................ — 2


2.1 Caractéristiques de l’émission acoustique des fuites............................... — 2
2.1.1 Généralités .......................................................................................... — 2
2.1.2 Sources d’émission acoustique dans les fuites ............................... — 2
2.1.3 Cas des fuites à travers des fissures ................................................. — 3
2.1.4 Influence de divers paramètres ......................................................... — 4
2.2 Application de l’écoute acoustique à la détection de fuite sur robinet... — 5
2.2.1 Méthodes de détection de fuite spécifiques aux robinets .............. — 5
2.2.2 Systèmes commercialisés ................................................................. — 7
2.2.3 Discussion ........................................................................................... — 8
3. Expérimentations ..................................................................................... — 9
3.1 Expériences .................................................................................................. — 9
3.2 Résultats ....................................................................................................... — 9
3.2.1 Première expérience........................................................................... — 9
3.2.2 Deuxième expérience......................................................................... — 10
3.2.3 Troisième expérience ......................................................................... — 10
3.3 Conclusions des expérimentations ............................................................ — 10
4. Solutions acoustiques spécifiques...................................................... — 10
4.1 Détection d’émission fugitive par nez acoustique .................................... — 10
4.2 Détection d’émission fugitive par méthode photoacoustique ................ — 11
4.2.1 Spectrométrie photoacoustique avec cellule de collecte de gaz .... — 11
4.2.2 Spectrométrie photoacoustique sans collecte de gaz ..................... — 11
4.3 Comparaison des différentes méthodes acoustiques .............................. — 12
5. Conclusion ................................................................................................. — 12
Références bibliographiques ......................................................................... — 13

’émission acoustique est une technique très utilisée dans l’industrie pour la
L recherche de fuite. La méthode est plus sensible en gaz qu’en liquide et a
souvent été utilisée avec succès. Toutefois sa sensibilité est aléatoire et dépend
de nombreux facteurs (nature du fluide, géométrie du défaut, bruit environ-
nant, etc.). En règle générale sa sensibilité est plutôt de l’ordre du litre par
heure.
Ce résultat a été confirmé par les essais réalisés, sur le site du pôle d’activité
« Technologies de l’étanchéité » avec du matériel dont les spécifications étaient
similaires à celles des instrumentations du commerce.
Cela suggère que l’émission acoustique « classique » est difficilement trans-
férable au cas des faibles débits des émissions fugitives.
Par contre, des méthodes acoustiques alternatives, nez acoustique ou photo
acoustique, semblent être prometteuses.
p。イオエゥッョ@Z@ュ。イウ@RPPT

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DÉTECTABILITÉ DES FUITES PAR ÉMISSION ACOUSTIQUE ______________________________________________________________________________________

1. Objet —

turbulence de l’écoulement ;
jet gazeux ou liquide ;
— cavitation ;
Les législations concernant l’environnement imposent des limi- — pulsation des bulles ;
tes d’émission dans l’atmosphère des produits de l’industrie chimi- — explosion des bulles ;
que et pétrochimique. La profession de la robinetterie industrielle — choc des bulles sur les parois ;
est la première concernée, car on estime que 70 % des problèmes
— vaporisation de liquide (flashing ).
rencontrés sur site proviennent des robinets et plus particulière-
ment des étanchéités au niveau des presses-étoupes [1].
Lors de sa réunion du 7 novembre 2001, le groupe de travail 2.1.2.1 Turbulence de l’écoulement
« émission fugitive » issu de la commission Robinetterie du CETIM
a demandé que soit réalisé un dossier d’instruction sur la possibi- L’écoulement turbulent est un écoulement non permanent dont
lité d’utiliser l’émission acoustique pour la détection et la mesure le champ des vitesses possède un caractère aléatoire et non cor-
des émissions fugitives sur site de production ou sur site d’exploi- rélé dans l’espace et dans le temps.
tation au niveau des presses-étoupes des robinets. Le régime d’écoulement turbulent apparaît du fait de l’interac-
Les travaux réalisés en ce sens ont comporté trois phases : tion du fluide avec les parois de la conduite et de la présence éven-
tuelle d’obstacles. La vitesse du fluide dans une conduite est
— l’établissement de l’état de l’art de la détection de fuites par
maximale au centre et nulle sur la paroi. La structure d’écoulement
émission acoustique ;
est alors déterminée par le rapport des forces d’inertie et des
— l’étude des solutions acoustiques existantes (émissions acous- forces de viscosité dans le fluide. Ce rapport est défini par le
tique ou alternative) ; nombre de Reynolds :
— des essais de faisabilité.
UD


R = ----------
ν
avec D largeur de section,
µ
2. État de l’art ν viscosité cinématique du fluide égale à ------ ( µ étant la
ρ
viscosité dynamique et ρ la masse volumique),
L’étude de l’état de l’art d’une solution « émission acoustique » U vitesse de l’écoulement :
s’est articulée autour d’une analyse bibliographique des travaux de
Q
recherche menés sur la détection de fuite par émission acoustique U = ------
ainsi que d’une veille technologique du matériel commercialisé. A
Plusieurs bases d’informations ont été consultées : avec Q débit volumique et A section de l’orifice.
— Compendex ; Lorsque R est petit, les forces de viscosité sont prépondérantes
— Pascal ; partout et la vitesse du fluide nulle sur la surface de la paroi croît
— bases de données de brevets ; lentement de zéro à une valeur Umax lorsque l’on s’éloigne de
— Internet. celle-ci (figure 1a).
Lorsque R est grand, la variation de la vitesse croît rapidement
lorsque l’on dépasse une distance δ depuis la surface de la paroi,
2.1 Caractéristiques de l’émission la valeur de cette distance étant faible devant la dimension de la
acoustique des fuites conduite. L’écoulement n’est alors très lent que dans une épaisseur
de couche inférieure à δ (figure 1b).
Dans cette couche limite au voisinage de la paroi ou des obsta-
2.1.1 Généralités cles qui s’y trouvent, l’écoulement est laminaire, c’est-à-dire que le
fluide s’écoule en filets continus suivant régulièrement le contour
L’émission acoustique est créée par les fluctuations locales du des surfaces en présence.
champ de pression associées à divers phénomènes dans le fluide.
Si la vitesse d’écoulement augmente (ou si les dimensions de la
Chaque fluctuation est un phénomène transitoire, qui engendre conduite sont réduites), des instabilités se développent au niveau
une onde acoustique de forme impulsionnelle. Si un grand nombre de la couche limite. Celle-ci décolle et des tourbillons apparaissent,
de fluctuations se produit pendant la durée de mesure, et cela de fluctuent dans le temps, disparaissent pour réapparaître à d’autres
façon aléatoire et incohérente dans le temps et dans le volume de endroits. Le régime d’écoulement devient turbulent d’une façon
fluide, le signal résultant a l’allure d’un bruit, quasi stationnaire au d’autant plus marquée que le fluide rencontre des irrégularités sur
moins à l’échelle de la seconde. C’est ce que l’on appelle de les surfaces ou sur les bords d’attaque.
l’émission acoustique continue.
L’émission acoustique continue, dans le cas des fuites, se mani-
feste par une augmentation apparente du bruit de fond. Les
variations temporelles des fluctuations de pression étant très diffé-
rentes, le spectre en fréquence du bruit acoustique généré est alors
très étendu, proche de celui d’un bruit blanc. δ

Umax Umax
2.1.2 Sources d’émission acoustique
dans les fuites
Il existe a priori plusieurs phénomènes principaux dans l’écou- a R petit b R grand
lement d’un fluide à travers un orifice, tel qu’une fissure ou une
vanne, qui donnent naissance à de l’émission acoustique
détectable : Figure 1 – Écoulement du fluide suivant la valeur du nombre de Reynolds

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_____________________________________________________________________________________ DÉTECTABILITÉ DES FUITES PAR ÉMISSION ACOUSTIQUE

On considère que la transition entre l’écoulement laminaire vis- bulle. S’ensuivent alors des échos dus à l’onde de choc. L’allure du
queux et l’écoulement turbulent est située à une valeur d’environ spectre du bruit généré par un impact est comparable à celle de la
2 000 à 4 000 du nombre de Reynolds. Autrement dit, pour qu’un cavitation. Néanmoins, la différence tient à ce que le bruit créé par
écoulement soit turbulent, il faut au moins que la vitesse d’écou- un impact est directif et plus énergétique que le bruit de cavitation
4 000 ν pour les fluides en écoulements rapides [3] [4].
lement soit supérieure à -------------------- ou un débit Q > 4 000 ν D dans le
D
cas d’un orifice circulaire par exemple. 2.1.2.6 Jet gazeux ou liquide
Au travers de la valeur de ν, la température du fluide aura une
Un gaz ou un liquide s’écoulant à travers un orifice de fuite se
forte influence sur le phénomène de turbulence.
mélange en sortie de ce dernier avec le fluide ambiant sous forme
D’après la théorie de Lighthill, la puissance acoustique rayonnée d’un jet. Quel que soit le profil de vitesse du fluide, le jet est
par la turbulence varie en U8 ou l’intensité acoustique en U6. entouré d’une couche de cisaillement dès qu’il pénètre dans le
fluide ambiant.
2.1.2.2 Cavitation dans l’écoulement
Le développement de la zone de mélange dépend du nombre de
La cavitation dans un liquide se produit chaque fois que la Reynolds et de la géométrie de l’orifice. Pour un nombre de Rey-
pression chute localement à une valeur inférieure à la pression de nolds supérieur à 1 000, des instabilités se développent dans la
vaporisation du liquide ou à la pression partielle d’un gaz dissous couche de cisaillement et produisent des tourbillons plus ou moins
dans ce liquide. organisés.
Cette chute de pression provoque alors la formation de bulles de Ce phénomène de création de mouvements tourbillonnaires au
vapeur ou de gaz. Les bulles se déplacent et disparaissent très bru- sein du fluide s’accompagne en général de fluctuations de débit et
talement par implosion aussitôt que la pression remonte. de forces sur le bord de l’orifice de fuite. Plus la vitesse de sortie
Les variations locales de pression qui sont à l’origine de la cavi- est élevée, plus les tourbillons sont petits et la fréquence du bruit


tation peuvent être provoquées par la circulation du fluide sans émis est élevée.
qu’il y ait nécessairement des turbulences. Les variations de
dimensions de la conduite, les coudes, les changements de direc- 2.1.2.7 Vaporisation du liquide (flashing )
tion, les obstacles, les aspérités des parois... sont autant de causes
possibles pour modifier le profil de pression du liquide en écoule- La vaporisation rapide de l’eau surchauffée est très émissive.
ment. L’énergie acoustique engendrée peut être jusqu’à huit fois celle
que cause un phénomène de turbulence.
Le degré de cavitation dans une fuite à travers un orifice est
directement proportionnel aux pressions dans l’orifice de fuite et
inversement proportionnel à la différence entre la pression locale 2.1.2.8 Vibrations intrinsèques de la colonne de fluide
statique P et la somme PV des pressions partielles des vapeurs Ce mécanisme [5] se produit dans les tubes étroits selon la
saturantes et des gaz dissous. relation :
La durée d’un événement de cavitation dans l’eau est estimée 0,5 d < 0,61 λ
dans l’ordre de grandeur de 1 à 50 µs, ce qui implique l’émission
d’ondes dans un spectre de fréquence s’étendant largement de avec d diamètre de l’orifice,
quelques kHz à quelques MHz. λ longueur d’onde correspondant aux vibrations longi-
On retiendra que la cavitation se traduit par des événements tudinales de la colonne de fluide.
discrets, plus ou moins discernables dans le temps par les appa- Par exemple, ce phénomène pourrait exister dans le cas des
reils de mesure classiques, dont l’énergie acoustique est au moins fuites dans un réservoir d’épaisseur 3 mm et il correspondrait à
supérieure à un ordre de grandeur de celle engendrée par le phé- une fréquence élevée de l’ordre de :
nomène de turbulence.
C 1 500
2.1.2.3 Pulsation de bulles de vapeur ou de gaz f = ------ = -------------------------- = 0,5 MHz
λ 3 × 10 –30
(atomisation)
L Ce phénomène conduit donc à un spectre à bande étroite et
 
À l’entrée d’un orifice long ------ >>1 aux bords aigus, le courant
D pourrait en particulier apparaître lors d’un impact sur un obstacle.
de fluide est comprimé, puis se détend à la sortie. La chute de La fréquence serait alors fonction de la longueur réelle de l’écou-
pression entraîne la formation de bulles ou même de poches de lement ( ⭓ 3 mm pour l’épaisseur de paroi) augmentée, le cas
vapeur ou de gaz. Le calcul et l’expérience ont démontré que cette échéant, de la distance de l’obstacle.
chute de pression est insuffisante pour produire une cavitation,
mais l’évolution des bulles et la formation de poches s’accompa-
gnent d’oscillations qui peuvent entraîner des pulsations de pres- 2.1.3 Cas des fuites à travers des fissures
sion. Ces bulles peuvent être considérées comme des oscillateurs
dont la fréquence de résonance dépend de leur taille. Une appro- En première approximation, une fuite à travers une fissure peut
che théorique montre que des diamètres de 0,1 à 1 mm conduisent être assimilée à un écoulement d’un fluide dans une conduite. Les
à des bruits de fréquences de 5 à 40 kHz. mécanismes générant de l’émission acoustique dépendent gran-
dement de deux paramètres : le profil de la pression et la géomé-
2.1.2.4 Explosion des bulles trie du canal de fuite.
Le profil de la pression le long du canal est lié à la différence de
Les bulles provoquées par l’introduction de gaz dans un liquide
pression totale de part et d’autre de l’épaisseur de la paroi (carac-
migrent verticalement. Lorsqu’elles atteignent la surface libre du
térisée par la perte de charge totale) et au rapport longueur du
liquide, elles éclatent et produisent une onde mécanique facile-
canal sur diamètre hydraulique L/D. La géométrie de la fuite est
ment détectable.
définie principalement par la forme de la section, le rapport L/D,
l’existence de rétrécissements éventuels et la rugosité de la paroi.
2.1.2.5 Chocs des bulles
Dans un tel cas et s’il s’agit d’une fuite hydraulique, la cavitation
Le bruit d’impact d’une bulle sur une paroi est assez semblable est la source principale de l’émission acoustique [5] [6]. Le niveau
dans son principe à la cavitation. Le choc crée l’explosion de la du signal acoustique augmente brusquement à partir d’une

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XV
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Microscopie acoustique
par Thomas MONNIER
Maı̂tre de conférences à l’université de Lyon
Laboratoire acoustique et vibrations de l’Institut national des sciences appliquées de Lyon
(INSA de Lyon)
Note de l’éditeur :
cet article est la mise à jour de l’article « Microscopie acoustique » rédigé en 1998 par
Jacques ATTAL.

1. Avantages des ultrasons pour l’imagerie................................... R 1 402v2 – 2


2. Principe du microscope acoustique à balayage ....................... — 2
3. Imagerie et signature acoustique ................................................ — 3
3.1 Modes de volume et modes de surface ............................................ — 3
3.2 Microéchographie : une imagerie qualitative ................................... — 3
3.3 Micro-interférométrie : une caractérisation quantitative locale


des matériaux ..................................................................................... — 4
4. Systèmes de focalisation .............................................................. — 6
4.1 Lentille de focalisation ....................................................................... — 6
4.2 Calottes et membranes sphériques : microscopie acoustique
« basse fréquence » ........................................................................... — 7
4.3 Focalisation linéaire ........................................................................... — 8
4.4 Focalisation électronique : vers la microscopie tridimensionnelle .. — 8
4.5 Microscopie acoustique en champ proche ........................................ — 8
5. Applications ..................................................................................... — 9
5.1 Microélectronique .............................................................................. — 9
5.2 Métallurgie ......................................................................................... — 10
5.3 Polymères et composites ................................................................... — 11
5.4 Matériaux poreux ............................................................................... — 12
5.5 Biomédical .......................................................................................... — 13
5.6 Agroalimentaire .................................................................................. — 14
6. Perspectives d’avenir ..................................................................... — 14
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. R 1 402v2

boutissement d’une synthèse de plusieurs disciplines de la physique et de


A l’ingénierie, le microscope acoustique a maintenant plus d’une trentaine
d’années d’existence. Dans le domaine des essais non destructifs, il a prouvé
son efficacité pour l’inspection interne de matériaux opaques, intégrés dans des
structures de plus en plus complexes. Beaucoup d’instruments de ce type opè-
rent en routine sur sites industriels particulièrement pour le contrôle qualité
dans la production de circuits électroniques.
En parallèle, on continue dans les laboratoires universitaires à améliorer les
performances et à élargir le champ des applications. Les recherches concernant
la caractérisation par microscopie acoustique n’ont pas cessé de progresser,
motivées en premier lieu par la science des matériaux et par l’imagerie quanti-
tative en médecine.
Il existe énormément de produits ou de procédés industriels qui utilisent une
ou plusieurs couches minces déposées sur un substrat. La caractérisation de
ces revêtements : leur épaisseur, leur adhésion, leurs propriétés viscoélastiques
et leur évolution, est un challenge important.
Enfin, la progression des techniques de champ proche n’a pas épargné l’acous-
tique qui, paradoxalement, en était une au départ (acoustique aérienne, acoustique
musicale). En cela, l’essor des microtechniques a fortement aidé à développer de
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nouveaux concepts d’instruments, en permettant une approche acoustique diffé-


rente mais complémentaire des techniques de microscopie classique.

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MICROSCOPIE ACOUSTIQUE –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

1. Avantages des ultrasons piézoélectrique, qui convertit un signal électrique incident en signal
acoustique. Les fréquences f en acoustique correspondent à des
pour l’imagerie longueurs d’onde l de l’ordre du micromètre, compte tenu de la
vitesse v des ultrasons, qui est de l’ordre de plusieurs milliers de
mètres par seconde (l = v / f). Il s’ensuit que la résolution spatiale
maximale atteinte, du fait de la limitation par la diffraction, est de
Optique, électronique et maintenant acoustique sont les trois l’ordre d’une fraction de longueur d’onde. Cette résolution s’obtient
domaines exploités par la microscopie. L’utilisation des ultrasons en interposant entre la source d’ultrasons et l’objet un moyen de
en microscopie remonte aux années soixante-dix, suite notamment focalisation (lentille acoustique dans la grande majorité des dispo-
aux travaux des équipes de recherche de l’université de Stanford sitifs disponibles).
(Californie) où des transducteurs fonctionnant dans des gammes
de fréquences de plusieurs centaines de mégahertz ont vu le jour & En optique, une lentille est constituée d’un dioptre sphérique
dès le début des années soixante. La mise sur le marché des pre- séparant deux milieux d’indices de réfraction (c’est-à-dire de vites-
miers instruments s’est faite, elle, vers la fin des années quatre- ses de propagation d’ondes électromagnétiques) différents. En
vingt. Plusieurs constructeurs sont aujourd’hui présents de par le acoustique, un tel dioptre est réalisé en utilisant deux matériaux
monde (voir la fiche documentaire en fin d’article). Le microscope dont, cette fois, le rapport des vitesses acoustiques avoisine la
acoustique, par la nature des ondes utilisées, présente les avanta- dizaine. Ainsi, le barreau de saphir constitue le premier milieu (le
ges habituels des ultrasons : rayonnements non ionisants et de plus rapide) et comporte, sur la face plane opposée à celle du trans-
faible intensité (quelques milliwatts à quelques centaines de milli- ducteur, un petit dioptre sphérique creusé et poli d’un diamètre de
watts), donc sans danger pour les applications biomédicales, et l’ordre d’une centaine de mm. Les ultrasons ne se propageant pas
non destructif lorsqu’il s’agit d’observer les solides au voisinage dans l’air à ces fréquences (~ 1 GHz), le deuxième milieu sera
de leur surface ou en profondeur (observations ne nécessitant pas liquide, afin d’assurer le couplage acoustique avec l’objet.
d’attaque chimique). La résolution de cet instrument, qui condi- Le rôle de ce liquide de transmission est capital : le choix de ses
tionne le grandissement maximum, est comparable à celle des caractéristiques (vitesse et atténuation) est lié à la nature (céra-

T meilleurs appareils optiques. De nos jours, des prototypes de labo-


ratoire sont ainsi capables, en utilisant l’hélium superfluide comme
liquide de couplage, d’atteindre des résolutions de quelques dizai-
mique, métallique, polymère, biologique) des phases constituant
l’échantillon, et de ce choix dépendent la résolution et la profon-
deur de pénétration. Tout naturellement, les premières investiga-
nes de nanomètres par l’emploi de fréquences de quelques dizai- tions ont commencé avec l’eau, qui présente un grand nombre
nes de gigahertz. d’avantages : compatibilité avec la plupart des matériaux, innocuité
En outre, l’opacité acoustique diffère de celle de l’optique, ce qui pour l’opérateur, coût minime et possibilité d’usage à température
permet d’extraire des informations complémentaires par l’usage de ambiante. Son principal inconvénient est que, comme la plupart
ces deux types de modalités sur un même échantillon. Par exem- des liquides à température ambiante, elle absorbe les ondes acous-
ple, le contraste donné par le verre et le plexiglas, aussi transpa- tiques proportionnellement au carré de la fréquence. C’est d’ail-
rents l’un que l’autre aux ondes lumineuses, est très faible en leurs cette forte atténuation des ultrasons dans l’eau, avec typique-
optique mais plus important en acoustique car le verre est beau- ment 190 dB par millimètre d’épaisseur traversée à 1 GHz à 25  C,
coup plus réfléchissant aux ultrasons que le plexiglas. En revanche, qui limite la fréquence des meilleurs microscopes du commerce à
l’aluminium présente par rapport au verre des caractéristiques 2 GHz. Une solution simple pour diminuer l’atténuation de l’eau est
acoustiques similaires, et des caractéristiques optiques très nette- de la porter à plus haute température ; ainsi à 60  C l’atténuation
ment différenciées. sera pratiquement divisée par deux en chutant à 86 dB par mm à
1 GHz. Les seuls liquides purs à présenter une atténuation moindre
Enfin, si la microscopie acoustique apporte une image acous- sont le mercure (50 dB/mm mais avec les difficultés d’usage que
tique de la microstructure, elle permet aussi de mesurer de l’on imagine : compatibilité chimique, toxicité) et l’hélium super-
manière quantitative les propriétés locales d’élasticité et de visco- fluide (15 dB/mm à - 272,6  C et l’atténuation quasiment négli-
sité d’une vaste gamme de matériaux, et d’étudier la dynamique geable de 4 · 10-5 dB/mm à - 272,9  C liée cependant aux difficultés
des processus physico-chimiques qui s’y déroulent. La technique a d’obtention d’ultrabasses températures et de manipulation des flui-
gagné ses lettres de noblesse en permettant de résoudre de nom- des cryogéniques).
breux problèmes industriels ou de recherche, qui seront illustrés en
fin d’article. Le large spectre des applications s’étend du contrôle & Le faisceau d’ultrasons est donc focalisé en une très petite tache,
qualité des semi-conducteurs et des circuits microélectroniques, à située dans le plan de l’objet. Il est possible de prendre une image
l’étude des structures biologiques, en passant par la caractérisation de l’objet par réflexion ou par transmission en recueillant respecti-
des matériaux : cristaux, métaux et alliages, céramiques, polymè- vement les faisceaux réfléchi et transmis.
res et composites ; qu’ils soient massifs, en couches minces ou Dans le premier cas (figure 1a), le système émetteur joue aussi le
multicouches. rôle de récepteur en utilisant l’effet piézoélectrique inverse : les
signaux émis et réfléchi sont alors séparés dans le temps de la
même manière que pour un radar. En transmission, on dispose un
second capteur (TD) symétriquement (figure 1b) au premier (TG). À
2. Principe du microscope noter que si historiquement le premier microscope acoustique à
balayage en transmission développé par Lemons et Quate fut un
acoustique à balayage système confocal, pour lequel les points focaux des lentilles émet-
trice et réceptrice sont en coı̈ncidence (figure 1b), la tendance est
désormais à l’usage des microscopes en transmission en mode
Alors que nous disposons de détecteurs pour enregistrer un flux non confocal afin offrir plus de degrés de liberté à l’expérimenta-
lumineux provenant d’un objet, il n’existe pas de récepteurs acous- teur. Ainsi, dans la méthode dite « d’imagerie de flux ultrasonore »,
tiques analogues à l’œil ou à la plaque photographique pour fixer la focalisation est réalisée sur les deux faces opposées d’un échan-
l’image acoustique sur un support. tillon et seul un des deux capteurs effectue des déplacements afin
d’obtenir des informations sur les ondes de volume traversant
On a donc cherché différents artifices de transcription, ce qui a l’échantillon.
conduit au système actuel qui s’inspire en partie du microscope
électronique à balayage. L’image acoustique de l’objet dans un plan parallèle à sa surface
est obtenue par un balayage du faisceau d’ultrasons, obtenu le plus
& Dans son principe de base, le microscope acoustique comprend souvent par le balayage mécanique de l’échantillon par rapport au
un générateur d’ultrasons, constitué par un transducteur capteur (ou le contraire) suivant deux directions perpendiculaires

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S
Y TG B C
TD
B Liquide
X
D L
E S
+ C Balayages

A Al
T
ZnO Liquide
L Or
E
Y
a réflexion

Balayages
X
A Faisceau acoustique L Lentille
B Saphir S Signal de sortie (vers l’écran de télévision)
C Échantillon T Transducteur piézoélectrique
D Circulateur TD Transducteur détecteur b transmission
E Signal électrique d’entrée TG Transducteur générateur


L’objet dans le plan focal est animé de mouvements de translation perpendiculaires qui assurent la prise de l’image point par point
en une dizaine de secondes.

Figure 1 – Principe du microscope acoustique fonctionnant (a) en réflexion, (b) en transmission

X, Y dans le plan focal de la lentille. Les informations reçues à la de mode. Tout comme en optique, les plus classiques sont les
sortie des transducteurs sont numérisées à haute fréquence modes réfléchis et transmis, mais il en existe bien d’autres en
d’échantillonnage puis stockées dans une mémoire en correspon- acoustique, connus sous l’appellation modes de surface et d’inter-
dance avec les déplacements de l’objet, et l’image finale est visua- face. Les informations provenant du capteur sont enregistrées et
lisée sur un moniteur vidéo classique. Les développements techno- analysées de manière différente ; et l’on peut par ailleurs jouer sur
logiques récents en matière de balayage mécanique concernent la largeur de bande des signaux émis selon que l’on souhaite défi-
soit l’augmentation des vitesses de balayage afin d’augmenter nir précisément la fréquence ou que l’on recherche au contraire une
d’autant la cadence des images obtenues, en conjonction avec les bonne discrimination en temps.
progrès de l’électronique de numérisation, soit la mise au point de
robots permettant l’auscultation de surfaces courbes. Ces avancées
concernent plus particulièrement la microscopie acoustique 3.2 Microéchographie : une imagerie
« basse fréquence » utilisée dans le cadre du contrôle non destruc- qualitative
tif de pièces ou structures industrielles de formes variées.
Les grandissements atteints, comparables à ceux obtenus en & Le premier type de mode concerne la focalisation des ondes de
optique, vont d’une dizaine à 2 000 environ. Le champ maximal volume et n’appelle aucune remarque particulière excepté que les
observé varie suivant les possibilités mécaniques du système de modes qui y participent sont le plus souvent longitudinaux et quel-
balayage et de l’utilisation faite de l’instrument. Il varie d’une frac- quefois transversaux ; ils obéissent aux mêmes règles de réfraction
tion de centimètre carré à un décimètre carré pour un temps qu’en optique pour les matériaux transparents. La différence fonda-
d’acquisition d’image d’une dizaine de secondes à plusieurs mentale est que la vision acoustique de la profondeur peut se faire
minutes. sur des matériaux optiquement opaques et les informations qu’on
en retire sont bien souvent très difficiles, voire impossibles, à obte-
nir par d’autres techniques non destructives. Ce mode de fonction-
nement étant similaire à celui utilisé en échographie médicale ou
3. Imagerie et signature pour le contrôle non destructif des matériaux, on pourra se reporter
à la lecture la section « Ultrasons, échographie ultrasonore » de
acoustique l’article de Jacques Dumont-Fillon référencé [R 1 400].
Les images obtenues par balayage représentent les variations de
propriété d’origine structurelle (propriété mécanique) ou géomé-
trique (relief, microfissures…) de la surface du matériau étudié. Le
3.1 Modes de volume et modes volume de mesure est défini par l’aire de la tache focale et par la
de surface profondeur subsurface (dépendant de la longueur d’onde dans le
matériau). Les potentialités de la technique seront illustrées plus
Ces deux notions complémentaires sont apparues au fil du déve- loin au travers de différentes applications.
loppement de l’instrument, copiant un peu l’évolution des techni-
ques de microscopie électronique. L’emploi de modalités ayant En résumé, il s’agit donc d’un moyen d’imagerie
une interaction différente avec le matériau à observer offre en généralement :
effet des possibilités de recoupement afin de faciliter l’interpréta-
– utilisé en réflexion ;
tion des résultats. L’imagerie en mode C, c’est-à-dire par plans
– avec un fonctionnement en mode impulsionnel ;
parallèles à la surface, a été développée la première mais rapide-
– en utilisant des transducteurs d’angle d’ouverture faibles ;
ment la nature plutôt qualitative des observations a cédé le pas à
– et en travaillant sur l’amplitude du signal reçu (traitement
une analyse quantitative. Lorsqu’un faisceau acoustique fortement
du signal relativement simple).
convergent frappe la surface de l’objet, on assiste à une conversion

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& Les méthodes dites « résolues en temps » permettent, grâce à considérable et induit un temps d’acquisition beaucoup plus long
l’excitation d’impulsions courtes et au fenêtrage adéquat du signal (autour de la minute) que la simple prise d’image. Ce dernier
reçu, d’accéder à la topographie de surface des pièces (voir sur la point constituera une limitation à l’utilisation de ce genre de moda-
figure 2 un exemple d’imagerie en temps de vol d’un échantillon lité, notamment dans le cas de l’imagerie de cellules vivantes.
de composite de carbure de silicium tissé SiC/SiC) ou à des infor- Quant à la résolution, elle dépendra de la durée de l’impulsion
mations fines concernant la position de défauts internes (chevau- ultrasonore émise, de la fréquence propre du transducteur, du
chement de fibres dans les composites comme dans le cas du SiC/ degré de focalisation de la lentille acoustique et de la nature du
SiC sur la figure 3, défaut d’empilement dans les structures multi- liquide de couplage.
couches, décohésion, délaminage, etc.). La possibilité de multiples
post-traitements est conditionnée à l’enregistrement pour chaque & Avec une excitation en bande étroite, c’est-à-dire par l’émission
position du dispositif de l’intégralité du signal reçu, possibilité et la réception de trains d’ondes quasi monofréquentiels, la topo-
offerte par exemple par le système de Kibero GmBH (Saarbrücken) graphie de surface des échantillons peut aussi être obtenue, avec
mais qui requiert la capacité de stocker une quantité de données une résolution meilleure qu’un millième de la longueur d’onde, à
condition de conserver à la fois la phase et l’amplitude du signal
détecté. Le profil de hauteur h sera cette fois déduit de l’informa-
tion de phase f en utilisant la relation h = l · f/4p, à condition de
dérouler la phase (uniquement déterminée modulo 2p) de manière
continue à partir d’un signal de référence originaire du plan de
balayage. Dans de nombreuses applications, notamment en termes
de détection de défauts, le contraste de phase apporte des informa-
tions complémentaires à celles données par le contraste d’ampli-
tude. Enfin, la phase peut être exploitée à des fins de détermination
de l’épaisseur de films minces, ou encore pour le traitement numé-
rique des images afin d’éliminer l’effet de texture de la surface


z (mm)

dans le but d’améliorer la qualité de la détection de défauts


subsurfaciques.
z (mm)
mm)

3.3 Micro-interférométrie :
y (x10 -1

une caractérisation quantitative


x (x10-1mm) locale des matériaux
Le second type, évoqué au § 3.1, concerne l’utilisation de la pro-
pagation des modes de surface évanescents plus spécifiques à
l’acoustique, bien que les techniques de champ proche les utilisent
aujourd’hui sous une forme plus ou moins différente. Contraire-
Figure 2 – Imagerie d’un échantillon de composite SiC/SiC indenté, ment aux cas précédents, c’est en défocalisant l’objet vers la len-
topographie (échelle verticale et code couleur en mm) obtenue tille qu’apparaissent ces modes, qui sont le résultat de la reconver-
en travaillant sur l’écho de surface sion de l’énergie acoustique incidente arrivant sur l’objet à des
incidences dites « critiques » (comme celles qui correspondent en
optique à la réfraction limite). C’est ce que traduit la figure 4 en
Écho de fond montrant la génération et la détection de tels modes de surface
sous une incidence qR. Ces ondes de surface (qui sont

α
Transducteur

II Lentille I II
acoustique

θR
Fluide de Surface de
couplage l’échantillon

Ondes de surface
β ∆z
évanescentes

Plan focal (z = 0)

z
chevauchement de fibres

Figure 4 – Interférences entre les ondes acoustiques réfléchies en


Figure 3 – Mise en évidence d’un chevauchement de fibres incidence normale (trajet I) et les ondes de surface couplées aux modes
sous la surface en exploitant l’écho de fond de volume se propageant sous l’incidence critique qR (trajet II)

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INNOVATION

Contrôle de la fatigue
des matériaux par émission
acoustique
par Stéphanie DESCHANEL
Maître de conférence à l’INSA de Lyon
MATEIS, INSA de LYON/Université de Lyon, France
et Jérôme WEISS
Directeur de recherche au CNRS
ISTerre, CNRS/Université Grenoble-Alpes, France


Résumé La fatigue, c’est-à-dire la rupture de structures mécaniques sous l’effet de
chargements cycliques, demeure une gageure technologique considérable, car elle sur-
vient de façon inattendue lorsque la structure fonctionne apparemment dans un régime
stabilisé et sûr, sans signe extérieur de détérioration mécanique. Après avoir présenté ce
contexte et les méthodes classiques de contrôle de la fatigue par émission acoustique
(EA), une nouvelle méthode non destructive de détection spécifique de la propagation de
fissures de fatigue est exposée à partir de multiplets acoustiques : signaux d’EA répétitifs,
aux formes d’ondes quasi identiques. Des perspectives de contrôle en service sont ensuite
proposées.
Abstract Fatigue, i.e. the failure of mechanical structures under cycling loading,
remains a considerable technological challenge as it occurs unexpectedly when the struc-
ture is operating apparently in a safe and steady state regime, without external signs of
mechanical deterioration. After introducing this context as well as classical methods of
fatigue monitoring from acoustic emission (AE), we present a new, non-destructive
method to unambiguously detect fatigue crack propagation from specific, repeating AE
signals with quasi-identical waveforms. Perspectives in terms of fatigue control in service
are then given.
Mots-clés : fatigue ; rupture ; contrôle non destructif ; émission acoustique
Keywords : fatigue ; failure ; non-destructive monitoring ; acoustic emission
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INNOVATION

La fatigue est l’un des plus dangereux processus mécaniques menant à la


rupture de pièces ou structures, rencontré dans diverses situations indus-
trielles modernes allant des réacteurs nucléaires aux connexions micro-
électroniques. Cependant, nous ne disposons pas encore de méthodes
non destructives ni d’indicateurs capables de prédire la durée de vie en
fatigue, généralement encore estimée de nos jours à partir de relations
empiriques telles que la loi de Manson-Coffin, qui relie le nombre NR de
cycles à rupture en fatigue à l’amplitude de déformation plastique cyclique
imposée Dep : NR = c × Δεp−β. Le problème de ce type d’approche est que les
paramètres c et b dépendent du matériau, ainsi que du mode de charge-
ment (triaxialité par exemple), et doivent donc être déterminés par de
nombreux essais de calibration. Cet article présente, dans différents
matériaux métalliques, la détection de signaux d’émission acoustique
spécifiques de la propagation de fissures par fatigue. Ces signaux,
dénommés multiplets acoustiques, se caractérisent par des formes d’on-


des quasi identiques, signature d’une source unique, et sont déclenchés
de façon répétée sur de nombreux cycles de chargement successifs au
même niveau de contrainte. Ils marquent la propagation lente et incré-
mentale d’une fissure de fatigue à chaque cycle, ou le frottement le long
des surfaces de rupture. Étant spécifiques à la fissuration incrémentale
par fatigue, ils peuvent être utilisés comme des avertissements précur-
seurs de la propagation des fissures, qui mènera en définitive à une rup-
ture globale. Leur détection et leur caractérisation ouvrent ainsi la voie à
un nouveau suivi fiable de l’apparition des fissures de fatigue lors d’essais
mécaniques ou au sein de structures en service.

Points clés
Domaine : Contrôle non destructif
Degré de diffusion de la technologie : Émergence
Technologies impliquées : Émission acoustique
Domaines d’application : Contrôle non destructif de la fissuration par fatigue
Contact :
stephanie.deschanel@insa-lyon.fr
jerome.weiss@univ-grenoble-alpes.fr

1. Contexte mécanismes d’amorçage et de propagation des fissures de fatigue


-

sont désormais bien identifiés (par exemple [6]). Sous charge-


Les pièces et structures soumises à des sollicitations mécani- ment cyclique, la déformation plastique se localise le long de ban-
ques ou thermo-mécaniques cycliques peuvent rompre sous des des de glissement persistantes qui génèrent des irrégularités de
niveaux de contrainte bien plus faibles que les contraintes surface et des concentrations de contraintes pouvant entraîner
à rupture observées sous fluage ou chargement monotone. Cette l’amorçage de microfissures. Après un stade initial (stade I) de
rupture par fatigue est souvent insidieuse, consistant en l’aboutis- propagation limitée à quelques tailles de grain (soit quelques
sement d’un lent processus de propagation de fissures pouvant dizaines ou centaines de micromètres dans la plupart des maté-
s’étendre sur plusieurs centaines ou milliers de cycles de charge riaux métalliques classiques), un stade II débute, au cours duquel
sans pour autant modifier de façon détectable les propriétés phy- la propagation a lieu le long d’un plan perpendiculaire aux plus
sico-mécaniques du matériau à l’échelle de la pièce ou la structure grandes contraintes principales de traction. Au cours de ce stade,
en question. Elle constitue donc un problème à la fois scientifique, qui peut durer plusieurs milliers de cycles et qui représente sou-
technologique et industriel considérable, depuis le début de la vent une fraction importante de la durée de vie totale, le front de
révolution industrielle dans les industries navales et ferroviai- fissure avance lentement, par incréments successifs (de l’ordre de
res [1] [2], et non résolu, comme l’ont illustré des accidents dra- quelques micromètres au maximum) à chaque cycle, en laissant
matiques plus récents [3]. Cette problématique s’est ensuite éten- des striations nettement visibles par analyse post-mortem des
due à d’autres domaines comme l’aéronautique [4] puis, plus surfaces de rupture (exemple pour un aluminium pur) (figure 1).
récemment, aux industries micro-électroniques [5]. La détection Un tel type de propagation incrémentale a également été observé
précoce de la propagation de fissures de fatigue par un contrôle dans les verres métalliques et les polymères, même si les méca-
non destructif représente donc un objectif de premier ordre. nismes d’amorçage sont différents pour ces matériaux.
Dans le cas des métaux, aciers et alliages sollicités de telle sorte Ce stade II de fissuration se produisant lentement à l’intérieur
que le seuil de plasticité soit atteint de façon répétitive lors du du matériau, sur un très grand nombre de cycles, sa détection et
chargement cyclique (fatigue plastique ou oligocyclique), les l’estimation de l’avancement de la fissure est extrêmement

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INNOVATION


100 µm 10 µm

Figure 1 – Micrographie au MEB révélant des stries de fatigue, inégalité et rugosité des surfaces sur le faciès de rupture après 3 000 cycles
(essai de fatigue sur aluminium pur à De = 0,95 %)

difficile à effectuer par contrôle visuel [7]. Il débouche finale- d’avancement de la fissure [16], mais l’extension de cette
ment sur une rupture macroscopique brutale (stade III) [6], méthodologie à ces cas plus complexes demeure difficile
que l’on cherche bien entendu à prédire et à éviter. (§ 3). Ces difficultés sont renforcées par le fait que diverses
sources d’EA sont possibles dans les matériaux métalliques
Pour pallier ces problèmes, de nombreuses méthodes de
sollicités de manière cyclique, comme la plasticité [17], certai-
contrôle et de suivi non destructives ont été proposées, toutes
nes transformations de phase (par exemple, la transformation
basées sur une modification significative des propriétés
martensitique [18]), ou le maclage [18]. Ainsi, au cours des
globales comme la résistivité électrique [8], l’impédance élec-
premiers cycles de charge, lors de la phase initiale de durcisse-
tromagnétique [9], les propriétés électrochimiques [10], ou la
ment, une activité acoustique significative liée à la déformation
propagation des ultra-sons [11]. Toutefois, une limitation com-
plastique peut être observée [19], sans lien direct avec l’amor-
mune à toutes ces méthodes est qu’elles se basent sur la çage ou la propagation de fissures. Comme détaillé au para-
détection d’une modification des propriétés moyennées sur graphe 3 de cet article, le caractère non spécifique de ce type
toute la structure (ou du moins, en situation industrielle, sur d’analyse globale en limite donc fortement son utilisation pour
une fraction importante d’une pièce), et sont donc très peu détecter le degré d’avancement du processus de fissuration
sensibles à l’avancée d’une (ou de quelques) microfissure(s). par fatigue.
Si l’on ajoute à cela les contraintes habituelles de rapport
signal/bruit, ceci entraînera la plupart du temps une alarme Un travail récent [20], mené par les auteurs de cet article,
(trop) tardive, précédant de peu la rupture instable macrosco- a mis en évidence, pour la première fois, des signaux acousti-
pique. De plus, étant donné la durée des stades I et II de fati- ques très particuliers, caractérisés par des formes d’onde quasi
gue, il peut être envisagé de maintenir en service une pièce ou identiques, se déclenchant à chaque cycle au même niveau de
structure pendant un certain nombre de cycles, même si contrainte, parfois sur un nombre de cycles très important
l’amorçage de microfissures peut être détecté visuellement en (plusieurs centaines). Comme présenté dans ce qui suit, ces
surface (notion de tolérance au dommage [12]). Dans ce cas, multiplets acoustiques sont une signature spécifique de la
toute information sur l’avancée du processus de fissuration propagation incrémentale de fissure par fatigue lors du
obtenue par contrôle non destructif, en particulier la transition stade II. Cette spécificité vis-à-vis du mécanisme source per-
entre les stades I et II, serait capitale. met ainsi une détection précoce du processus, tout en s’affran-
chissant partiellement des problèmes de rapport signal/bruit.
Des signaux d’Émission Acoustique (EA) sont générés dans Leurs caractéristiques et la méthodologie utilisée pour les iden-
les matériaux lorsque des déformations irréversibles se produi- tifier sont décrites au paragraphe 4, alors que les perspectives
sent de manière suffisamment brutale [13]. L’EA a donc été en termes d’applications et de détection automatique en cours
proposée depuis longtemps [14] comme un outil de monitoring de chargement cyclique sont présentées au paragraphe 5.
de l’endommagement et de la fissuration par fatigue. Toute-
fois, à l’image des autres méthodes de contrôle non destructif
évoquées plus haut, ces travaux anciens, comme les plus 2. Émission acoustique : rappels
récents, ont été basés sur une mesure globale de l’activité
acoustique produite (par exemple, nombre de coups ou de
et définitions
signaux détectés, évolution du bruit acoustique (RMS Root L’émission acoustique (EA) correspond, selon la norme
Mean Square)). Il a ainsi été montré qu’une éventuelle corréla- AFNOR [21], à un « phénomène de libération d’énergie élastique
tion entre cette activité acoustique et le degré d’endommage- sous forme d’ondes élastiques transitoires au sein d’un matériau
ment ne devenait significative qu’à proximité de la rupture durant des processus dynamiques de déformation ». Un maté-
finale [15]. Dans le cas, très favorable, de la propagation riau soumis à déformation inélastique dissipe de l’énergie en
d’une fissure macroscopique unique sur éprouvette pré-entail- créant des microdéplacements de matière, dont une fraction
lée de type CTS (ASTM Compact Tension Specimen), un sous la forme d’ondes élastiques, si ces déformations s’effec-
certain degré de corrélation a été observé entre l’activité tuent de manière brutale [22] [23]. Ces ondes se propagent
acoustique globale (nombre de coups/cycle) et la vitesse dans le matériau et subissent d’éventuelles modifications liées

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INNOVATION

au milieu traversé avant d’atteindre la surface de l’échantillon Les principaux paramètres enregistrés en temps réel sont les
étudié. La vibration de surface est recueillie par un capteur suivants :
piézo-électrique qui produit en réponse un signal électrique : — amplitude maximale A du signal ;
le signal d’émission acoustique. Le domaine de fréquence de — énergie E du signal (intégration du signal au carré sur la
l’EA est compris entre 50 kHz et 1,5 MHz. durée de la salve) ;
Par abus de langage, le terme d’émission acoustique est — durée qui sépare le premier et le dernier dépassement de
employé pour désigner la technique de mesure. Cette technique seuil ;
est utilisée pour l’étude de phénomènes physiques comme — nombre de coups nc correspondant au nombre de franchis-
la déformation plastique, le maclage ou des mécanismes sements de seuil par le signal sur toute la durée de la salve ;
d’endommagement des matériaux et, par extension, — temps de montée correspondant au temps qui sépare le
comme méthode de Contrôle Non Destructif (CND). Elle permet premier dépassement de seuil et l’amplitude crête du signal ;
en effet de détecter en temps réel l’existence de défauts évolu- — fréquence moyenne donnée par la plupart des systèmes
tifs. En revanche, elle ne permet pas d’obtenir de cartographie d’acquisition non obtenue par la transformée de Fourier du
des défauts existants dans une structure donnée : il ne s’agit signal, mais correspondant au nombre de coups d’une salve
donc pas d’une technique d’imagerie. divisé par sa durée.
Généralement, on distingue l’émission acoustique continue La localisation vise à déterminer le point ou la zone, où le
de l’émission acoustique discrète ou par salves. Pour cette phénomène physique générateur d’EA a eu lieu. L’utilisation de

T dernière, le signal d’EA a la forme d’une sinusoïde amortie


(dénommée salve ou forme d’onde) (figure 2) se distinguant
nettement du bruit de fond. Ce type d’émission a pour origine
plusieurs capteurs est nécessaire pour cette localisation qui
peut être linéraire, bidimensionnelle ou tridimensionnelle.
Une localisation linéaire sur une éprouvette de traction ou de
des mécanismes très énergétiques comme les phénomènes fatigue ne nécessite l’emploi que de deux capteurs. Des géomé-
d’initiation et propagation de fissures conduisant à la rupture : tries plus complexes peuvent en nécessiter un plus grand nom-
des ruptures de fibres, la corrosion sous contrainte… Lorsque bre. La position de la source liée à un signal reçu est classique-
les salves sont moins énergétiques, mais si fréquentes qu’elles ment calculée en fonction des différences de temps d’arrivée des
se chevauchent, le signal d’EA se traduit par une augmentation signaux aux capteurs et de la vitesse de propagation des ondes
apparente du bruit de fond. Cette EA devient alors continue. dans le matériau considéré (méthodologie détaillée au § 4.2).
Elle peut être associée en particulier au mouvement des disloca- Une autre possibilité consiste à utiliser l’atténuation du signal.
tions lors de la déformation plastique des matériaux métalli- Une maille de localisation avec laquelle on mesure l’amplitude
ques [24]. En fatigue oligocyclique des matériaux métalliques, du signal à chaque capteur permet de déterminer la position de
cette EA continue est maximale lors du passage de la limite élas- la source à condition de connaître la loi d’atténuation dans le
tique, et symétrique en traction et compression. matériau étudié.
Dans le cas de l’EA par salves qui nous intéresse ici, les
paramètres classiques qui peuvent être extraits du signal d’EA
sont représentés sur la figure 2. Une salve est définie par rap-
3. Contrôle de la fatigue par émission
port à un seuil d’acquisition prédéfini par l’expérimentateur et acoustique : méthodes classiques
est bornée par la première et la dernière alternance dépassant L’idée d’un contrôle non destructif de l’endommagement et la
ce seuil. Le système d’acquisition détermine le temps d’arrivée fissuration par fatigue à partir de la détection des émissions
de la salve d’EA (par exemple t1 et t2, respectivement sur deux acoustiques induites est ancienne [25], mais basée quasi exclu-
capteurs 1 et 2), correspondant au premier dépassement de sivement sur l’analyse de l’évolution de variables globales,
seuil du signal. Ces temps d’arrivée sont connus, pour les systè- comme le niveau moyen de « bruit » ou d’énergie acoustique
mes d’acquisition haute fréquence classiques, avec une préci- enregistré, ou bien le nombre de coups dnc/dN ou de salves
sion de 0,1 ms, influençant de façon conséquente la précision (dns)/(dN) par cycle, détectés au-delà d’un seuil d’amplitude du
sur la localisation (§ 4.2). signal. N est le nombre de cycles de chargement. Ce type d’ana-
lyse classique, relativement aisé à mettre en œuvre dans le prin-
cipe, est confronté à divers problèmes :
— un problème classique de rapport signal/bruit, exa-
Tension (V)

Temps d’arrivée de la salve cerbé en situations réelles ou industrielles pour lesquelles les
Nombre de coups sources de bruit ambiant sont nombreuses et mal caractérisées.
Temps de montée Dans le cas d’essais de chargement cyclique d’une pièce de fuse-
lage, il a été estimé que le nombre de fausses détections était
0,2 environ un million de fois plus grand que le nombre de signaux
Amplitude

0,15 réellement associés à la propagation d’une fissure dans la struc-


0,1 ture [7]. Ceci rend la localisation des fissures sources à partir
0,05
Seuil des émissions acoustiques extrêmement difficile ;
0
— un manque de spécificité vis-à-vis des mécanismes
sources ; même en considérant un rapport signal/bruit très
–0,05
favorable, divers mécanismes physiques peuvent générer des
–0,1 émissions acoustiques lors de la fatigue des matériaux : initia-
–0,15 Durée tion et propagation de fissures, mais aussi mouvements collec-
–0,2 tifs de dislocations lors de la plasticité des matériaux métalli-
0 0,5 1,5 2 2,5 ques, en particulier lors de la phase initiale d’écrouissage
Temps (x 10–4 s) cyclique [17], du maclage [18], de la transformation martensi-
tique [18] de la rupture ou de la délamination des fibres dans
les matériaux composites [26], etc. De ce fait, un monitoring de
Figure 2 – Forme d’onde (FO) d’une salve d’EA et principaux la fatigue à partir de variables globales non spécifiques sera diffi-
paramètres mesurés en temps réel cile à interpréter.

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Caractérisation de solides ou liquides


par méthode de pulse-écho
par Didier LAUX
Docteur, maître de conférences habilité à diriger des recherches
IES (Institut d’Électronique et des Systèmes, UMR CNRS 5214), Université de Montpellier,
France
860, rue Saint Priest, bât 5, 34095 Montpellier, France
didier.laux@umontpellier.fr

et par ordre alphabétique

Franck AUGEREAU
Docteur, maître de conférences
IES, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France
Emmanuel LE CLEZIO
Docteur, professeur des universités
IES, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France

Gilles DESPAUX
Docteur, professeur des universités
IES, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France
Jean-Yves FERRANDIS
Docteur, ingénieur de recherche habilité à diriger des recherches
IES, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France
et Eric ROSENKRANTZ
Docteur, maître de conférences
IES, Université de Montpellier, CNRS, Montpellier, France

1. Transducteur monoélément ................................................................. R 4 043 - 2


1.1 Description générale................................................................................... — 2
1.2 Rayonnement et correction des effets dus à la diffraction ...................... — 4
2. Description du banc de mesure .......................................................... — 5
3. Mesures pour la caractérisation des solides ................................... — 6
3.1 Avec des ondes de volume ........................................................................ — 6
3.2 Avec des ondes guidées............................................................................. — 8
3.3 Cas particulier des mesures à haute température ................................... — 11
4. Mesures pour la caractérisation des liquides ................................. — 13
4.1 Grandeurs physiques.................................................................................. — 13
4.2 Méthodes utilisant des ondes longitudinales de volume ........................ — 14
4.3 Méthodes utilisant des ondes de cisaillement ......................................... — 16
5. Résultats divers dans le domaine biomédical, agroalimentaire
et nucléaire ............................................................................................... — 18
6. Conclusion................................................................................................. — 19
7. Glossaire .................................................................................................... — 20
Pour en savoir plus ......................................................................................... Doc. R 4 043

i les relations fondamentales régissant la propagation des vibrations


S mécaniques et par conséquent des ultrasons sont établies depuis plus de
200 ans grâce aux travaux de d’Alembert ou de Lord Rayleigh, [1] [AF3810]
[AF3812] [AF3814], les applications n’ont vu leur essor qu’à partir de la pre-
p。イオエゥッョ@Z@。ッエ@RPQX

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CARACTÉRISATION DE SOLIDES OU LIQUIDES PAR MÉTHODE DE PULSE-ÉCHO _________________________________________________________________

mière guerre mondiale, profitant de la découverte récente de la piézoélectricité


par Pierre et Jacques Curie. Dès lors, les méthodes échographiques n’ont
cessé de progresser et font aujourd’hui partie intégrante des méthodes de
contrôle non destructif, par exemple dans le domaine du génie civil pour
contrôler les édifices, mesurer des débits, contrôler le serrage, évaluer les
contraintes résiduelles…[R1410] [R2265] [R4040] [IN8].
Grâce aux performances croissantes des ordinateurs, des microtechnologies
et à l’avènement du numérique, il est maintenant possible de réaliser des
transducteurs ultrasonores multiéléments [P3790] qui permettent un balayage
spatial et une focalisation dynamique rapide. Profitant de ces avancées, les
échographes médicaux fournissent aujourd’hui une visualisation haute résolu-
tion ultrarapide et tridimensionnelle. Par ailleurs des résultats quantitatifs en
termes de modules élastiques peuvent être obtenus grâce aux élastographes
pour détecter en particulier des signes de fibrose [2].
D’un point de vue de la physique de la matière et de la mécanique du solide,
le lien existant entre les ondes ultrasonores et les modules élastiques permet
d’établir de façon non destructive les lois de comportement des matériaux vis-
coélastiques au sens large. Cette alternative aux méthodes classiques de
compression et de traction est indispensable dans de nombreux cas : petits


échantillons, échantillons microstructurés, radioactifs, biologiques…
Après une présentation du transducteur ultrasonore monoélément piézoélec-
trique, les approches expérimentales par méthode de pulse-écho dédiées à la
caractérisation fine des solides puis des liquides seront détaillées. L’accent
sera mis sur les différentes ondes pouvant être exploitées (de volume, de sur-
face, longitudinales, transverses…) ainsi que sur certains bancs de mesures
spécifiques : approche en réflexion, transmission, réflectométrie à angles cri-
tiques, bancs dédiés aux mesures en fonction de la température…
Même si le sujet est traité de façon plutôt académique, le lecteur trouvera en
fin de document divers résultats expérimentaux dans le domaine biomédical,
agroalimentaire et nucléaire.

À la description précédente, il faut ajouter des composants élec-


1. Transducteur triques (résistances, condensateurs, inductances) qui assurent
monoélément l’adaptation électrique entre la sonde et le générateur électrique
(figures 1 et 2). Par ailleurs, un barreau de silice (ligne à retard :
LAR ou delay line en anglais) est parfois intégré à la sonde pour
reporter l’émission des ondes ultrasonores dans la zone dite « de
1.1 Description générale champ lointain » où les ondes tendent vers des ondes planes (voir
paragraphe 1.2) ou pour permettre l’usinage d’un dioptre cylin-
drique ou sphérique visant à focaliser le faisceau ultrasonore (voir
La description présentée ici est restreinte aux transducteurs ultra- paragraphe 3.2). Les multiples allers-retours des signaux ultraso-
sonores monoéléments à base d’éléments actifs piézoélectriques. nores dans cette ligne à retard peuvent même être exploités pour
Ainsi donc, les transducteurs capacitifs ou électromagnétiques étudier les liquides visqueux (voir paragraphe 4.3.1).
(EMAT) qui, contrairement aux transducteurs piézoélectriques, ne
Les matériaux piézoélectriques les plus rencontrés sont des
nécessitent pas l’emploi de liquide de couplage [3] mais restent
céramiques PZT (titano-zirconate de plomb) qui peuvent être
encore difficiles à miniaturiser ne seront pas évoqués [4]. À noter
conditionnées sous forme massive ou sous forme de composites
que le mot « transducteur » est souvent remplacé dans la littérature
(résine/PZT) ; d’ailleurs, aujourd’hui, ces matériaux composites
par « capteur ultrasonore », « sonde ultrasonore »…
sont majoritairement employés car ils permettent d’obtenir des
coefficients de couplage électromécaniques supérieurs par rap-
De façon très générale, une sonde ultrasonore piézoélec- port à la céramique seule.
trique est classiquement constituée de trois éléments : un Sachant que le temps d’aller-retour d’une onde ultrasonore de
élément actif piézoélectrique (massif ou composite), une face vitesse Vp dans une lame de matériau piézoélectrique d’épaisseur
d’adaptation d’impédance placée à l’avant de la sonde et e vaut 2e/Vp, la fréquence de résonance f0 est donnée par la rela-
enfin un dos (Backing en anglais) placé à l’arrière de la tion suivante :
sonde. À partir d’une excitation électrique assurée par un
générateur, le matériau piézoélectrique vibre et génère (1)
l’onde ultrasonore. En effet, il convertit l’énergie électrique
en énergie mécanique et vice versa. La même sonde peut
Ce sera donc la fréquence principale émise par la sonde ultraso-
donc être utilisée pour émettre et recevoir les ultrasons lors
nore excitée en mode impulsionnel même si bien sûr la sonde
d’examens en mode réflexion.
émettra sur une certaine bande passante.

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__________________________________________________________________ CARACTÉRISATION DE SOLIDES OU LIQUIDES PAR MÉTHODE DE PULSE-ÉCHO

L’impédance acoustique des matériaux piézoélectriques étant très


élevée (typiquement 30 MRayl pour une céramique PZT massive),
injecter les ultrasons directement du piézoélectrique à l’air est
Composants Connecteur impossible : quasiment 100 % de l’énergie est réfléchie, l’impédance
électriques de l’air (~ 400 Rayl) pouvant être considérée comme nulle. C’est la
raison pour laquelle il est nécessaire d’intercaler systématiquement
Enveloppe Boîtier interne entre le piézoélectrique et le matériau étudié (s’il est solide) un
liquide de couplage : eau, gel… dans lequel les ondes ultrasonores
longitudinales se propagent à la vitesse Vc. Cependant, ce couplant
Dos
présente toujours une impédance acoustique différente de celle du
matériau piézoélectrique. Cette différence d’impédance, même si
elle est plus faible que dans le cas de l’interface (piézoélectrique/air),
Lame se traduit par une réflexion de l’onde à l’interface (piézoélectrique/
de protection liquide). Par exemple, si de l’eau est utilisée comme couplant, son
impédance vaut 1,5 MRayl et dans ces conditions environ 90 % de
l’énergie est réfléchie. Cette transmission imparfaite aux interfaces,
Électrodes qu’il faudra corriger pour les mesures d’atténuation, est désignée
Élément actif par la terminologie : perte d’insertion.
Pour pallier ce problème, on insère une couche d’adaptation
Figure 1 – Schéma constitutif d’une sonde ultrasonore monoélément d’impédance qui a pour rôle de ramener en face avant du piézoé-
lectrique une impédance acoustique égale à la sienne c’est-à-dire
valant Zp = ρpVp. Dans sa forme la plus simple, cette couche est


telle que son épaisseur est égale au quart de la longueur d’onde
(Vp /4fo) et son impédance à avec Zc = ρcVc l’impédance du
liquide de couplage. Cette couche permet, à la fréquence centrale
fo, d’avoir Zp = Zc (adaptation d’impédance) et ainsi d’injecter plus
d’énergie dans le couplant puis dans le matériau étudié.
Toutefois, avec une seule couche d’adaptation, la bande fréquen-
tielle d’adaptation est faible. L’utilisation de plusieurs couches dites
« antireflets » augmente la bande fréquentielle d’adaptation mais éga-
lement la bande passante de la sonde [5] [6] [7]. L’augmentation de
la bande passante de la sonde permet de réduire la réponse tempo-
relle de cette dernière. Ceci est un point très important car une
réponse temporelle courte apparaît souvent comme un impératif
dans bien des applications et ce, dès lors qu’il est question de discri-
miner dans le temps plusieurs signaux ultrasonores.
Même si les couches antireflets agissent sur la bande passante,
le contrôle de cette dernière est surtout assuré par le dos. C’est un
matériau très atténuant qui a pour but d’absorber l’énergie acous-
tique émise en face arrière de l’élément actif et d’amortir la réso-
Figure 2 – Photographie de transducteurs ultrasonores monoélé- nance de ce dernier. L’impédance du dos Zb permet de contrôler
ments classiquement utilisés en contrôle non destructif
la bande passante mais également la sensibilité de la sonde. On
distingue deux cas extrêmes :
La nature du matériau piézoélectrique permet de générer soit – le premier est tout simplement de ne pas mettre de dos,
une onde longitudinale soit une onde transverse auquel cas dans auquel cas Zb = 0. Dans cette configuration, toute l’énergie est
la relation ci-dessus Vp représentera la vitesse correspondant au transmise en face avant du piézoélectrique et la sensibilité de la
type d’onde. Notons que la fréquence centrale de la sonde dépend sonde est maximale ;
également de la face avant et du dos qui, par leur présence, – à l’inverse, Zb = Zp et le dos est adapté : la bande passante est
auront tendance à modifier légèrement la valeur de cette dernière. alors la plus élevée que l’on puisse obtenir. En pratique Zb est tou-
jours différent de Zp et les bandes passantes relatives des sondes
(Δf0/f0) sont comprises entre 50 % pour les sondes les plus sen-
Impédance acoustique et coefficient de réflexion sibles et 110 % pour les sondes larges bandes.

À l’interface entre deux milieux 1 et 2, le coefficient de Enfin, pour optimiser le rendement du transducteur, il est
réflexion en pression qui représente le rapport entre la pres- nécessaire d’adapter également le port électrique [5] par lequel le
sion ultrasonore réfléchie et la pression incidente prend la piézoélectrique va être excité par un générateur. Le transducteur
forme r = (Z2 – Z1)/(Z1 + Z2) [E2690]. Le coefficient de transmis- piézoélectrique peut être représenté par le circuit équivalent de la
sion en pression noté t vaut alors (1 + r). figure 3. Ainsi, l’impédance électrique complexe du piézoélec-
trique est constituée par la somme de trois termes où ω repré-
Dans ces expressions, Z est l’impédance acoustique et sente la pulsation :
s’exprime en Rayleigh. Elle représente le rapport entre la pres-
sion acoustique et la vitesse particulaire. C’est une grandeur
locale qui, dans le cas particulier d’une onde plane, s’écrit (2)
Z = ρV où V peut désigner la vitesse longitudinale ou trans-
verse et ρ représente la masse volumique. Ainsi donc si les
Le premier terme est la réactance due à la capacité statique du
impédances des milieux 1 et 2 sont très différentes, le coeffi-
matériau piézoélectrique. Les deux autres termes représentent
cient de réflexion tend en valeur absolue vers 1 : aucune éner-
l’impédance motionnelle dont la partie réelle, la résistance de
gie acoustique n’est injectée dans le milieu 2.
rayonnement Ra(ω) est la traduction du phénomène de conversion

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CARACTÉRISATION DE SOLIDES OU LIQUIDES PAR MÉTHODE DE PULSE-ÉCHO _________________________________________________________________

Pression normalisée sur l’axe


C0 Xa(ω) a2/λ
Ro

du piézoélectrique
Champ Champ
proche lointain
+
Transducteur Ra(ω)

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,45


Figure 3 – Schéma électrique équivalent d’un transducteur alimenté Y (m)
par un générateur
Figure 5 – Champ de pression suivant l’axe de la sonde (X = 0)
électromécanique. À la fréquence de résonance fo, la réactance
Xa(ω0) est nulle et la relation (2) devient (3) :
L’analyse détaillée du champ de pression (calculé par l’intégrale
(3) de Rayleigh [8]) sur l’axe de la sonde (c’est-à-dire en X = 0) fait
majoritairement apparaître deux zones : celle du champ proche et
celle du champ lointain (figure 5).


Dans sa version la plus simple, l’adaptation d’impédance du
port électrique est effectuée en compensant la capacité statique La zone de champ proche (ou zone de Fresnel) est caractérisée
C0. Pour ce faire, on rajoute en série avec l’impédance du généra- par une variation rapide du module et de la phase du champ de
teur (généralement égale à Ro = 50 Ω) une inductance Ls de réac- pression jusqu’à la distance N de la sonde égale à a2/λ où a est le
rayon actif de la sonde, λ la longueur d’onde pour la fréquence
tance telle que Lsω0 = 1/C0ω0 [8]. Cependant, cette adaptation se d’émission ultrasonore f. La distance N correspond à la tache focale
fait au détriment de la bande passante. Pour pallier ce problème, naturelle d’une sonde plane. Ainsi donc, aussi surprenant que cela
plutôt que d’adjoindre une inductance il est préférable de choisir puisse paraître, une sonde plane focalise légèrement les ondes
dans (3) 1/C0ω0 proche de Ro en modifiant la surface A de l’élé- ultrasonores. Cette distance correspond au dernier maximum de
pression. Au-delà, la pression décroît de manière monotone. La
ment piézoélectrique car où ε est la permittivité de l’élé- tache focale fait approximativement 0,27 fois le diamètre actif de la
ment piézoélectrique et e son épaisseur [8]. Enfin, si l’impédance sonde. L’adjonction d’une lentille permet d’obtenir des sondes forte-
du générateur Ro est très différente de Ra, alors il est nécessaire ment focalisées, ce qui permet de réduire encore cette tache focale.
d’utiliser des circuits spécifiques d’adaptation d’impédance. Elles ont par exemple tout leur intérêt en microscopie acoustique
[R1402], ou dans la détection de défauts de petite taille.
La zone de champ lointain (ou zone de Fraunhofer), au-delà de N,
1.2 Rayonnement et correction des effets est caractérisée par une variation d’amplitude et de phase lente de
dus à la diffraction la pression et une divergence du faisceau. Le faisceau est globale-
ment contenu dans un cône d’angle au sommet α tel que [8]
Les dimensions finies du transducteur font que le champ émis
[P3790] : sin , où VL est la vitesse ultrasonore des
par la sonde n’est pas celui d’une onde plane [P3790]. Ainsi donc
le champ de pression est beaucoup plus complexe que l’on peut ondes longitudinales dans le liquide de couplage. Cette expression
l’imaginer. Une des conséquences majeures est l’apparition de
phénomènes de diffraction conduisant en particulier à une non- est souvent approximée par où a est le rayon du piézoélé-
directivité du faisceau (figure 4). ment et λ la longueur d’onde dans le milieu d’émission [E2690].
Pour la plupart des applications, ces grandeurs approchées suf-
fisent à guider l’expérimentateur dans le choix des sondes à utiliser.
Y (m) Axe central Mais pour réaliser une mesure précise de la vitesse et de l’atténua-
tion il est impératif de prendre en compte correctement les effets
dus à la diffraction. La diffraction a pour conséquence de déphaser
0,4
le signal reçu, un excès de phase conduisant à surestimer la vitesse
réelle. Par rapport à une onde plane, la divergence du faisceau
acoustique tend à diminuer l’amplitude des échos reçus. Sans cor-
rection, cela conduit donc à surestimer l’atténuation.
Lorsque le diamètre de l’émetteur et du récepteur sont égaux,
0,2 et que a > 7λ ou que Y > 7a où Y est la distance parcourue par
l’onde, les effets de la diffraction sont facilement pris en compte
en multipliant la solution en onde plane par un facteur correctif
complexe [9] :

Piézoélectrique (4)
–0,02 –0,01 0,01 0,02 X (m)
–0,005 0 0,005
avec Jn fonction de Bessel d’ordre n de première espèce,
Figure 4 – Représentation dans le plan X-Y du champ de pression théo-
rique d’une sonde de 10 mm de diamètre émettant dans de l’eau s paramètre de Fresnel donné par : .

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__________________________________________________________________ CARACTÉRISATION DE SOLIDES OU LIQUIDES PAR MÉTHODE DE PULSE-ÉCHO

Le calcul de la phase de permettra alors de corriger la vitesse


ultrasonore obtenue en première approximation par l’application Δt
de la relation simple (distance = vitesse x temps de parcours) Oscilloscope
valable en ondes planes. De même, le calcul du module de per- Échos
mettra de corriger la valeur de l’atténuation obtenue en première ultrasonores
approximation en supposant par exemple pour un liquide vis-
queux que la décroissance suit une tendance exponentielle. Il Sonde Liquide
apparaît que les effets de la diffraction sont pilotés principalement de couplage
par le paramètre s. Ils sont d’autant plus importants que s est E1 E2
élevé, et notamment que la fréquence et le rayon de la sonde Générateur
sont faibles. Enfin, si l’onde parcourt n matériaux d’épaisseur ei à la d’impulsions
e
vitesse Vi alors le paramètre de Fresnel vaut . électriques

À noter que la correction peut être également effectuée avec


des sondes émettrices et réceptrices de diamètres différents [9]. Figure 6 – Banc de mesure classiquement utilisé en contrôle non
destructif pour des mesures échographiques quantitatives

2. Description du banc À partir de ce banc expérimental, il est possible de travailler en


mode réflexion avec une seule sonde qui pourra générer plusieurs
de mesure allers-retours dans l’échantillon supposé être une lame, à faces
parallèles, d’épaisseur e. De même, en utilisant deux sondes en
mode transmission, de multiples allers-retours seront générés
Un banc de mesure typique se compose d’un générateur
d’impulsions électriques, d’un oscilloscope de visualisation et/
ou d’une carte d’acquisition permettant de transférer les
dans la lame. Les échogrammes classiquement obtenus sont pré-
sentés sur la figure 7. T
Même si l’absorption est faible dans le milieu étudié, les ampli-
signaux ultrasonores vers un ordinateur pour traitement du tudes des échos décroissent du fait des réflexions multiples aux
signal. Il est bien sûr indispensable d’utiliser une fréquence interfaces : à chaque réflexion l’amplitude est multipliée par un coef-
d’échantillonnage au moins égale à deux fois la fréquence du ficient de réflexion inférieur à 1. Que ce soit en mode réflexion ou
signal pour respecter le critère de Shannon. Une ou deux transmission, deux échos successifs sont séparés d’un temps de vol
sondes ultrasonores sont connectées au générateur électrique noté Δt et qui s’exprime de façon triviale de la façon suivante :
en fonction du mode de travail choisi : réflexion ou transmis-
sion (figure 6). À cette description peuvent s’ajouter des pla-
tines de déplacement, des systèmes de réglage d’assiette… (5)

Amplitude (V)
Sonde
(Émission / Réception) Δt = 2e/V
Mode réflexion
Fine couche t = 2e/V
de couplant

Lame

Temps

Amplitude (V)

Δt = 2e/V

Mode transmission

t = e/V

Sonde Sonde
(Émission) (Réception)

Temps

Figure 7 – Représentation schématique d’échogrammes typiques en mode réflexion ou transmission pour des solides peu atténuants et non
dispersifs

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