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PARTIE 2.
LE COMMERCANT
L’application du droit commercial nécessite au préalable de déterminer quels sont les actes
juridiques qui peuvent recevoir la qualification d’actes de commerce (voir Partie 1). Elle
nécessite également de pouvoir identifier les personnes qui peuvent être considérées comme
commerçantes. Cette identification revient à traiter de la qualité de commerçant (Chapitre 1).
L’acquisition de cette qualité par une personne, que celle-ci soit physique ou morale, produit
d’importants effets sur son statut. En effet, la qualité de commerçant impacte tout ce qui
concerne la personne, elle est générale et entraîne l’assujettissement à toutes les conditions que
les lois imposent aux commerçants, par le fait de leur qualité (Chapitre 2).
CHAPITRE 1.
La qualité de commerçant
A titre liminaire, il convient de souligner que la qualité de commerçant peut résulter de l’effet
de la loi, on parle alors de « commerçant de droit ». La qualification naît de l’effet de la loi. Tel
est le cas pour les associés de la société en nom collectif (article 3 de la loi 5-96) et pour les
commandités dans la société en commandite par actions (article 31 de la loi 5-96). De façon
plus générale, l’immatriculation au registre du commerce fait présumer la qualité de
commerçant. En dehors de ces cas, on parle alors du « commerçant de fait » et l’acquisition de
la qualité de commerce par ce dernier nécessite la réunion de certaines conditions (§1). De façon
générale, l’exercice du commerce est soumis à certaines restrictions (§2).
C’est la pratique du commerce qui fait le commerçant. Le Code de commerce ne fait pas de
distinction entre le commerçant « personne physique » et le commerçant « personne morale ».
Par conséquent, les critères d’attribution de la qualité de commerçant prévus à l’article 6 sont,
en principe, les mêmes pour la personne physique et la personne morale.
L’article 6 du Code de commerce dispose que « sous réserve des dispositions du chapitre II
du titre IV ci-après, relatif à la publicité au registre du commerce, la qualité de commerçant
s’acquiert par l’exercice habituel ou professionnel des activités suivantes : (…) ».
S’il est vrai que la recherche du profit est un critère important de définition des actes de
commerce et du commerçant, cela ne suffit pas à l’acquisition de la qualité de commerçant.
Comme l’article ci-dessus énoncé l’indique, d’autres conditions doivent être réunies. En effet,
il faut d’abord que la personne exerce des actes de commerce par nature (A) de manière
habituelle ou professionnelle (B). La jurisprudence française rajoute le critère personnel c’est à
dire que l’activité commerciale doit être exercée au nom et pour le compte du commerçant (C).
Les actes de commerce dont il est question ici sont ceux visés à l’article 6, 7 et 8 du Code de
commerce. Il s’agit des actes de commerce par nature dans la mesure où es actes de commerce
par la forme ne permettent pas à une personne d’être qualifiée de commerçant. En effet, la
signature de lettres de change ou la création d’une société commerciale ne confèrent pas cette
qualité. De même, les actes de commerce par accessoire ne peuvent pas remplir cette condition
puisque ces actes supposent, au préalable, que cette qualité soit établie chez l’auteur de l’acte.
Cette première condition permet de distinguer le commerçant de celui qui exerce une profession
libérale (à l’exception du pharmacien) ou l’agriculteur.
Il ne suffit pas d’accomplir les actes de commerce visés précédemment de manière isolée ou
occasionnelle pour acquérir la qualité de commerçant. Le législateur fait référence aux notions
d’habitude et de profession.
1. Le critère de l’habitude
- Un élément intentionnel : les actes de commerce ne doivent pas être réalisés de manière
accidentelle puisque dans ce cas, le critère de l’habitude n’est pas rempli. Ainsi, par
exemple, lorsqu’une personne achète un tableau de peinture pour sa maison mais qu’il
le revend par la suite pour réaliser un profit, cet acte (achat pour revendre) est réalisé de
manière isolée et non habituelle.
2. Le critère professionnel
Ce critère suppose de mettre en œuvre une certaine organisation et une compétence (c’est
l’exercice professionnel du commerce). En effet, la profession suppose que la personne mette
en œuvre une certaine organisation et qu’il agisse dans un but intéressé c’est-à-dire contre
rémunération. Ce critère permet de distinguer le commerçant professionnel du simple amateur
qui ne dispose pas d’une véritable compétence ou du bénévole qui agit sans percevoir de
rémunération.
En somme, pour acquérir la qualité de commerçant, il faut exercer des actes de commerce par
nature en continu, de manière répétée et dans un but intéressé, c’est-à-dire à titre onéreux.
Cette troisième condition n’est pas prévue par le Code de commerce marocain. Elle a été
rajoutée par la jurisprudence française. Ce critère suppose que l’activité commercial soit
exercée de manière indépendante et pour le compte personnel de l’intéressé. Cela implique que
les actes de commerce soient accomplis au nom propre de leur auteur et pour son profit.
Ainsi, par exemple, le conjoint du commerçant qui assiste ce dernier dans l’exercice de son
activité ou les salariés ne sont pas commerçants et ce, bien qu’il participe à la réalisation
habituelle d’actes de commerce. Le conjoint n’agit pas pour son compte personnel et le salarié
est en situation de subordination vis-à-vis de son employeur, il agit par conséquent pour le
compte de ce dernier. Il en est de même pour les mandataires sociaux tels que les gérants de
société.
Toute personne a la liberté d’entreprendre et donc à devenir commerçante. Cette liberté a une
valeur constitutionnelle. Cependant, l’exercice du commerce est considéré comme une activité
à risque qui nécessite de prendre des engagements vis-à-vis des tiers, lesquels doivent être
protégés. De ce fait, l’accès au statut de commerçant est limité et interdit à certaines personnes.
Il s’agit des restrictions légales (A). Mais la liberté contractuelle permet également de
restreindre cette liberté par le biais des clauses de non concurrence (B).
A. Restrictions légales
1. Les restrictions liées à la personne
a. Les incapacités
La capacité juridique d’un individu est une composante de sa personnalité juridique. Pour
rappel, la personnalité juridique est l’aptitude d’une personne à être titulaire de droits subjectifs
et à être soumise à des obligations. On distingue entre la capacité de jouissance c’est-à-dire
l’aptitude à être titulaire de droits et la capacité d’exercice qui est l’aptitude d’une personne à
exercer elle-même les droits dont elle est titulaire. La capacité d’une personne peut être atteinte
dans l’une ou l’autre de ses deux composantes.
Il y a incapacité d’exercice lorsqu’un individu, titulaire des mêmes droits que tout autre
individu, ne peut pas exercer ceux-ci sans l’intervention d’une autre personne qui agit
en son nom et à sa placer pour le représenter ou, à ses côtés, pour l’assister ;
Pour exercer le commerce, il faut avoir la capacité juridique exigée à cet effet. La capacité
commerciale est déterminée par les règles du statut personnel (article 12 du Code de
commerce). Certains individus sont, en raison de leur âge ou de l’altération de leurs facultés,
frappés d’une incapacité qui les prive d’exercer le commerce ou de le faire seuls.
On distingue ici deux catégories d’individus dont la capacité d’exercice est affectée : le mineur
et le majeur incapable.
Le mineur
Le premier cas est celui des mineurs de moins de dix-huit ans non émancipés.
- Le mineur marocain
Le mineur marocain de confession musulmane est soumis aux règles du code de la famille
( )مدونة األسرة. En principe, en droit marocain, le mineur n’est pas autorisé à exercer le commerce
et à disposer de ses biens avant l’âge de la majorité. Selon le code de la famille, l’âge de la
majorité légale est fixé à dix-huit années grégoriennes révolues (Code de la famille, article 209).
Avant cet âge, l’on distingue entre le mineur doué de discernement âgé de plus de 12 ans et le
mineur dépourvu de discernement qui est celui n’ayant pas atteint l’âge de 12 ans (Code de la
famille, article 214).
Ainsi, les mineurs ne peuvent, en principe, exercer le commerce si ce n’est par l’intermédiaire
de leur représentant, administrateur légal ou tuteur. Néanmoins, la portée de cette incapacité est
doublement limitée.
.Le mineur autorisé à administrer une partie de ses biens. L’article 226 du code de la famille
dispose que « le mineur doué de discernement peut être autorisé à prendre possession d’une
partie de ses biens pour en assurer la gestion à titre d’essai. Une autorisation est accordée, à
cet effet, par le tuteur légal ou par décision du juge chargé des tutelles, sur demande du tuteur
testamentaire ou datif ou du mineur intéressé. Le juge chargé des tutelles peut annuler
l’autorisation de remise des biens, sur demande du tuteur testamentaire ou datif, du ministère
public ou d’office, en cas de mauvaise gestion, dûment établie, des biens autorisés. L’interdit,
autorisé à gérer une partie de ses biens, est considéré comme ayant pleine capacité pour agir
dans la limite de l’autorisation qu’il a reçue et pour ester en justice ».
Ainsi, le mineur doué de discernement (âgé de plus de 12 ans) peut disposer d’une partie de ses
biens afin de l’administrer à titre d’essai après autorisation de son tuteur légal ou du juge. Le
mineur demeure incapable mais acquiert pour une durée limitée la capacité juridique.
L’autorisation donnée au mineur par son tuteur légal ou par le juge peut être révoquée à tout
moment si le mineur fait une mauvaise gestion de ses biens.
A l’âge de 16 ans, le mineur ou son représentant légal a la possibilité de faire une demande au
tribunal afin d’obtenir une déclaration anticipée de majorité. Le mineur acquiert, par l’effet de
cette déclaration anticipée de majorité, la capacité juridique.
En effet, l’émancipation du mineur lui permet de gérer et de disposer de son patrimoine comme
le ferait une personne majeure puisqu’il n’est plus sous tutelle.
L’autorisation spéciale d’administrer une partie de ses biens ainsi que la déclaration anticipée
de majorité permettent au mineur d’exercer une activité commerciale. C’est en ce sens que
l’article 13 du Code de commerce dispose que ces autorisations doivent obligatoirement être
inscrite au registre du commerce (article 13 du Code de commerce) afin d’avertir les tiers qu’ils
traitent un mineur émancipé ou autorisé.
- Le mineur étranger
Le mineur étranger peut exercer le commerce sur le territoire marocain lorsqu’il atteint l’âge de
dix-huit ans révolus même si sa loi nationale prévoit un âge de majorité supérieur à celui édicté
par la loi marocaine (article 15 du Code de commerce). En revanche, dans le cas où le mineur
étranger n’a pas atteint l’âge de la majorité requis par la loi marocaine (18 ans) mais qu’il est
réputé majeur par sa loi nationale, il est en droit de déposer une demande adressée au Président
du tribunal où il entend exercer une activité commerciale.
Dans le cas où l’autorisation lui est octroyée par le tribunal, elle est inscrite au registre du
commerce.
Le majeur incapable
Par ailleurs, certaines personnes majeures peuvent être privées de leur capacité d’exercice. C’est
le cas des personnes visées notamment à l’article 217 du code de la famille qui dispose que
« Ne jouit pas de la capacité d’exercice : 1) l’enfant qui n’a pas atteint l’âge de discernement ;
2) le dément et celui qui a perdu la raison. La personne qui perd la raison de manière
discontinue a pleine capacité durant ses moments de lucidité […] ».
Ainsi, certaines personnes âgées de dix-huit ans et plus peuvent être incapables d’exercer le
commerce en raison de maladies mentales, de faiblesses d’esprit ou de prodigalité. C’est ainsi
que l’aliéné mental (le dément et celui qui a perdu la raison) perd sa capacité juridique (Code
de la famille, article 217).
Le cas du prodigue et du faible d’esprit se rapproche de celui du mineur doué de discernement :
les actes réalisés par le prodigue et le faible d’esprit sont valables s’ils lui sont profitables et
sont nuls s’ils lui sont préjudiciables.
Le prodigue est celui dilapide ses biens par des dépenses sans utilité ou considérées
comme futiles par les personnes raisonnables, qui porte préjudice à lui-même ou à sa
famille ;
Le faible d’esprit est touché d’un handicap mental qui l’empêche de maîtriser ses actes.
b. Les incompatibilités
La déchéance est l’interdiction faite à une personne d’exercer une profession commerciale.
L’article 745 prévoit une liste de faits pouvant donner lieu au prononcé de la déchéance
commerciale contre une personne :
- Le fait pour un le dirigeant de détourner ou de dissimuler tout ou partie de l’actif d’une
société ou de gonfler frauduleusement le passif ;
- Le fait pour le dirigeant de continuer l’exercice de l’activité sachant que la poursuite de
celle-ci devait conduire de manière certaine à une cessation de paiement ;
- L’omission de tenir une comptabilité régulière ou le fait de faire disparaître les
documents comptables.
La déchéance peut frapper également toute personne condamnée pour crimes ou délits liés à
l’exercice d’une activité commerciale. Dans ce cas, la déchéance est prononcée de manière
accessoire à une sanction pénale.
Enfin, la déchéance peut également être prononcée contre certaines personnes sur le fondement
du défaut d’honorabilité comme par exemple les personnes condamnées pour des infractions en
relation avec les affaires (abus de confiance, escroquerie etc.)
Cette interdiction est prononcée par le tribunal pour une durée limitée et emporte interdiction
de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise
commerciale ou artisanale, et toute société commerciale ayant une activité économique.
Il faut noter que l’inobservation d’une déchéance, d’une interdiction ou d’une incompatibilité
entraîne l’application de sanctions pénales et disciplinaires à l’égard de leur auteur mais les
actes de commerce accomplis n’en demeurent pas moins valables si leur auteur avait la capacité
commerciale. De même, lorsqu’il est démontré que ces personnes exercent de manière
habituelle une activité commerce, ils seront réputés commerçants (article 11 du Code de
commerce).
D’autres activités sont interdites pour des raisons politiques, notamment celles pour lesquelles
l’Etat jouit d’un monopole. Cette interdiction s’applique, sans distinction, aux nationaux et aux
étrangers
Certaines professions commerciales nécessitent l’obtention d’un diplôme. Tel est le cas par
exemple des pharmaciens.
Dans d’autres cas, une autorisation administrative (licence/agrément) est nécessaire avant
l’exercice de l’activité commerciale envisagée ou l’ouverture du commerce en question. A titre
d’exemple :
- Le transport public des personnes est soumis à l’obtention d’un agrément du Ministère
des transports ;
- L’ouverture d’une agence de voyages est soumise à l’autorisation du Ministère du
tourisme.
Enfin, certaines activités nécessitent d’être exercées sous une forme particulière. C’est le cas
notamment de l’activité bancaire qui doit être exercée sous la forme d’une personne morale et
qui ne peut être exercée par une personne physique compte tenu des risques induits par de telles
activités.
Ces conditions restreignent l’accès à la qualité de commerçant aux personnes répondant à ces
conditions.
On retrouve cette clause dans les contrats de travail et dans la plupart des contrats commerciaux.
2. Conditions de validité
La validité d’une telle clause est soumise à deux conditions principales : (i) elles doivent être
limitées dans leur objet et (ii) limiter dans le temps et dans l’espace. Ainsi, par exemple, un
salarié travaillant dans une société dont l’activité est l’imprimerie et l’édition, en signant un
contrat de travail qui contient une telle clause, s’oblige à ne pas entreprendre une activité
similaire (limitation de l’objet) que cette société à l’expiration de son contrat de travail et ce,
pour une durée limitée et sur une région déterminée (limitation dans le temps et l’espace).
Chaque personne physique ou morale dispose d’un patrimoine qui est unique et universel. Par
l’exercice d’une activité commerciale, le commerçant est amené à prendre des risques
financiers, juridiques qui peuvent mettre en péril sa situation personnelle (ses biens familiaux,
son logement, son argent etc.). Ainsi, le commerçant engage son patrimoine. Cependant, les
risques le commerçant prend diffère selon qu’il exerce son activité en tant que personne
physique (§1) ou personne morale (§2) et ce choix a une influence directe sur son patrimoine.
Une entreprise est une unité économique, juridiquement autonome, organisée pour produire des
biens ou des services pour le marché. Le commerçant peut décider d’exploiter son entreprise
en tant que personne physique et développer l’activité en son propre nom comme, par exemple,
le commerçant épicier. Dans ce cas, il va engager le seul patrimoine dont il dispose. Ce
patrimoine va regrouper des éléments d’actif et de passif concernant sa vie personnelle mais
également des éléments de sa vie professionnelle.
Par conséquent, le patrimoine du commerçant sera engagé à titre de garantie pour les créanciers
si le commerçant ne paye pas ses dettes. Ainsi, par exemple, s’il ne parvient à payer ses
fournisseurs ou à rembourser le crédit contracté pour démarrer son activité, les créanciers
pourront saisir les éléments d’actif de son patrimoine, lesquels peuvent être des éléments
personnels (maison familiale, voiture etc.).
Pour limiter le risque lié à l’exploitation de son activité commerciale et protéger son patrimoine
personnel, le commerçant peut opter pour la création d’une personne morale, sous forme de
société. Dans ce cas, ce sera la société elle-même qui aura le statut de commerçante et qui
développera l’activité sous sa dénomination sociale. Cette société disposera d’un patrimoine
qui lui sera propre et distinct de celui de l’entrepreneur personne physique qui pourra en être le
gérant/dirigeant. Ainsi, les risques de l’activité commerciale seront supportés par la personne
morale puisque c’est elle qui s’engage et c’est elle qui sera redevable des dettes contractées
auprès des tiers. En cas de faillite, les créanciers pourront saisir les éléments d’actif du
patrimoine de la société pour être désintéressés et payés.
Nota Bene :
Il existe différentes formes de sociétés (sociétés à responsabilité limitée -SARL/SA- et sociétés
à responsabilité illimitée -SNC/SCA-).
Dans certaines sociétés, comme la société en nom collectif (SNC) ou la société en commandite
par actions (SCA), la responsabilité des associés est illimitée. Les associés sont alors
indéfiniment et solidairement responsables des dettes sociales. Cela signifie que si le
patrimoine de la société ne suffit pas à payer les dettes contractées par la société, les
créanciers pourront se faire payer sur les patrimoines personnels des associés.
Néanmoins, cette responsabilité illimitée ne change rien au fait que les deux patrimoines ne
se confondent pas : celui de l’entrepreneur qui a créé la société et le patrimoine de la société
restent séparés et distincts l’un de l’autre.
I. Le registre du commerce
A. Définition
Le registre du commerce est un support de publicité qui a pour but de faire à toute personne qui
y a intérêt l’existence, les caractéristiques et le devenir des entreprises et sociétés commerciales.
Le registre de commerce est ainsi un répertoire officiel des personnes physiques et morales
exerçant le commerce. Il fournit aux tiers les renseignements essentiels sur le statut des
commerçants, leur activité et l’identité de leurs exploitants (gérants, dirigeants, propriétaire de
fonds de commerce, gérant libre etc). Cette fonction essentielle que remplit le registre du
commerce explique que ce dernier soit un document public, consultable par toute personne qui
y a intérêt. Le registre du commerce est également consultable par voie électronique.
Ainsi, toute personne peut se faire délivrer une copie ou un extrait certifié des inscriptions qui
sont portées au registre du commerce ou un certificat attestant de l’inexistence d’une inscription
ou de la radiation d’une inscription spécifique ou d’une immatriculation.
Le registre du commerce est composé d’un registre central (2) et de plusieurs registres locaux
(1) (article 27 du Code de commerce).
1) Le registre local
Le registre local est tenu par le secrétariat-greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel
se situe le siège de la société ou l’établissement principal du commerçant. Lorsqu’il n’y a pas
de tribunal de commerce dans ce ressort géographique, le registre local est tenu par le secrétariat
greffe du tribunal compétent.
L’article 30 du Code de commerce dispose que toute inscription au registre du commerce d’un
nom de commerçant ou d’une dénomination commerciale doit être demandée par voie
électronique à travers la fenêtre dédiée dans la plateforme électronique de création et
d’accompagnement d’entreprises au secrétariat-greffe du tribunal du lieu de situation de
l’établissement principal du commerçant ou du siège de la société créée.
Ce registre est placé sous la surveillance du président du tribunal ou d’un juge désigné par le
président du tribunal chaque année à cet effet.
Toute personne peut se faire délivrer une copie ou un extrait certifié conforme des inscriptions
qui sont portées au registre du commerce ou un certificat de radiation d’une société du registre
du commerce.
2) Le registre central
Le registre central est tenu par le ministère chargé de l’industrie et du commerce à l’Office
Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC). Le registre central est public
et ouvert à la consultation à travers la plateforme électronique de création et d’accompagnement
d’entreprises par voie électronique.
Il est subdivisé en deux sous registres : l’un pour les personnes physiques, l’autre pour les
personnes morales. De même, chaque registre est divisé en autant de volumes qu’il y a de
tribunaux.
Centraliser, pour l’ensemble du Royaume, les renseignements portés dans les registres
locaux avec une référence au registre local sous lequel le commerçant ou la société est
immatriculé ;
Pour ce faire, chaque secrétaire-greffier des tribunaux compétents transmet au registre central
un exemplaire des déclarations qu’il a enregistrées au cours du mois précédent, aux fins
d’immatriculation, de modification ou de radiation.
Délivrer les certificats et copies relatifs aux inscriptions qui y sont portées (noms des
commerçants, les dénominations commerciales et les enseignes);
Le registre central du commerce peut être consulté par le public à travers la plateforme
électronique de création et d’accompagnement d’entreprises par voie électronique (article 32
du Code de commerce).
Ce registre électronique est créé à travers le plateforme électronique créée par la loi n°88-17.
D’après les dispositions de l’article 37 du Code de commerce, toutes les personnes physiques
et morales, marocaines ou étrangères, qui exercent une activité commerciale sur le territoire du
Royaume doivent observer l’obligation d’immatriculation au registre du commerce (article 37
du Code de commerce) ;
Le commerçant dispose d’un délai de trois mois pour se faire immatriculation au registre du
commerce. Ce délai commence à courir :
-Pour les personnes physiques, à partir de l’ouverture de son établissement
commercial ou de l’acquisition d’un fonds de commerce ;
-Pour les personnes morales, à partir de leur constitution, c’est-à-dire à partir de la
signature du contrat de société.
- Déclaration d’immatriculation
Cette déclaration doit être remplie par le commerçant lui-même (personne physique) ou par le
gérant/dirigeant de la société (personne morale). C’est ce que précise l’article 38 du Code de
commerce qui dispose que l’immatriculation du commerçant au registre électronique du
commerce ne peut être requise que sur la demande du commerçant ou à la demande de son
mandataire muni d’une procuration écrite qui doit être obligatoirement jointe à la demande.
Ainsi, le Modèle 1 comporte tous les éléments permettant d’identifier la personne physique :
-nom, prénom, date de naissance, nationalité ;
-l’activité exercée, le siège de son entreprise, l’origine du fonds de commerce et l’enseigne s’il
en possède ;
-la date du certificat négatif pour l’inscription du nom commercial.
La déclaration doit être remplie, signée et légalisée en trois exemplaires originaux. Elle doit
être déposée auprès du secrétariat-greffe du tribunal dans le ressort duquel est situé le siège de
la société. S’il s’agit d’un commerçant personne physique, la demande d’immatriculation doit
être déposée au secrétariat-greffe du tribunal dans le ressort duquel est situé le principal
établissement du commerçant ou le siège de son entreprise s’il est distinct de son établissement
principal.
Par l’effet de l’immatriculation au RC, les sociétés acquiert la personnalité juridique qui lui
permet d’avoir un patrimoine propre et une autonomie juridique par rapport à ses membres.
Par ailleurs, les mentions -faits et actes- devant faire l’objet d’une publicité au registre du
commerce ne sont opposables aux tiers que s’ils sont publiés. C’est-à-dire que seuls les faits et
actes régulièrement inscrits au registre du commerce sont opposables aux tiers. Dans le même
esprit, le commerçant ne peut se prévaloir des faits et actes qui n’ont pas fait l’objet d’une
inscription (inscription modificative ou radiation) au registre du commerce conformément aux
prescriptions légales. A cet égard, l’article 61 dispose dans son alinéa second ce qui suit : « Les
personnes assujetties à l’immatriculation au registre du commerce ne peuvent, dans l’exercice
de leur activité commerciale, opposer aux tiers qui peuvent toutefois s'en prévaloir, les faits et
actes sujets à mention modificative que si ces derniers ont été inscrits au registre du
commerce ». En revanche, les tiers peuvent se prévaloir de faits et actes qui n’auraient pas fait
l’objet d’une formalité de publicité, c’est-à-dire qui n’auraient pas été inscrits au registre du
commerce.
Tout changement ou modification se rapportant aux faits devant faire l’objet d’une inscription
sur le registre du commerce doit faire l’objet d’une demande d’inscription modificative dans un
délai d’un mois suivant la modification décidée (article 50 du Code).
La déclaration modificative (le « Modèle 4 ») doit être remplie avec la mention des
modifications devant être enregistrées et elle doit être accompagnée des pièces justificatives.
Exemple. Une société décide de changer sa dénomination sociale deux ans après le
début de son activité. Pour que cette modification soit opposable aux tiers, le gérant ou le
dirigeant de la société doit déposer une déclaration modificative (appelée le « modèle 4 »)
auprès du registre du commerce avec tous les renseignements nécessaires et les pièces
justificatives relatives au changement de dénomination sociale (notamment le procès-verbal de
l’assemblée générale extraordinaire de la société ayant décidé le changement de dénomination).
Cette demande de radiation peut être faite par le commerçant lui-même, ou par ses héritiers (en
cas de décès) ou par le liquidateur d’une société (en cas de dissolution de société) ou par les
gérant/dirigeants de société.
Dans certains cas, la radiation du registre du commerce ne s’opère pas sur demande, elle
s’opère d’office. En effet, la radiation du commerçant du registre du commerçant peut avoir
lieu en vertu d’une ordonnance rendue par le Président du Tribunal de commerce. Sur la
base de cette décision, le secrétaire-greffier du registre du commerce procédera à la
radiation du commerçant. La radiation d’office a lieu dans les cas suivants :
- Le constat du décès du commerçant depuis plus d’une année ;
- La clôture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire prononcée
à l’égard du commerçant ;
- La cessation effective de l’activité commerciale exercée par le commerçant et ce,
depuis plus de trois années ;
- Le prononcé de la déchéance commerciale à l’égard du commerçant par le tribunal.
L'article 60 du code de commerce dispose à ce propos qu’en cas de cession ou de location d'un
fonds de commerce, la personne immatriculée reste solidairement responsable des dettes de son
successeur ou de son locataire tant qu'elle ne se fait pas radier du registre du commerce ou
qu'elle n'a pas modifié son inscription avec la mention expresse de la vente ou la location.
La qualité de commerçant est donc maintenue tant que la personne immatriculée au RC n'a pas
procédé à la radiation. C'est une mesure qui vise en premier à protéger les tiers en rendant le
commerçant solidairement responsable à cause de son indifférence par rapport à la nouvelle
situation juridique du fonds.
D’une part, le commerçant qui ne se fait pas immatriculer au registre de commerce encourt une
amende de 1000 à 5000 DH s’il n’y remédie pas dans un délai d’un mois à compter de la mise
en demeure adressée par l’administration1.
Cette sanction est encourue par tout commerçant, tout gérant ou membre des organes
d’administration, de direction ou de gestion d’une société commercial ainsi que tout directeur
d'une succursale ou d'une agence d'un établissement ou d'une société commerciale, tenus de se
faire immatriculer au registre du commerce ou d’immatriculer leur structure et qui ne requièrent
pas dans les délais prescrits les inscriptions obligatoires.
En outre, cette amende peut être prononcée contre toute personne qui ne respectent pas
l’interdiction posée à l’article 39 du Code de commerce selon laquelle une même personne ne
peut pas être immatriculée à titre principal dans plusieurs registres locaux ou dans un même
registre local sous plusieurs numéros.
Enfin, cette sanction est également applicable en cas de manquement à l’obligation d’indiquer
certaines mentions sur les papiers de commerce des commerçants.
D’autre part, toute indication donnée de mauvaise foi lors de l’immatriculation ou d’une
inscription modificative est puni d’un emprisonnement d’un mois à un an et / ou d’une amende
de 1000 à 50.000 DH.
Ces sanctions n’excluent pas l’application s’il y a lieu des dispositions du code pénal.
1
Le Décret n° 2-96-906 (article 6) pris pour l’application du chapitre 2 du Code de commerce relatif au
registre de commerce donne des précisions sur la mise en demeure dont il s’agit et les modalités selon
lesquelles elle est transmise au commerçant défaillant :
« La mise en demeure prévue à l'article 62 de la loi n° 15-95 susvisée en cas de non immatriculation
dans les délais légalement prescrits, est adressée au contrevenant, par lettre recommandée avec accusé
de réception, par le ministre chargé du commerce ou la personne déléguée par lui à cet effet. Le Ministre
chargé du commerce ou la personne déléguée par lui à cet effet peut être saisi de l'infraction par les
agents de toute administration concernée. »
L’article 19, alinéa premier du Code de commerce dispose ce qui suit : « Le commerçant tient
une comptabilité conformément aux dispositions de la loi n° 9-88 relative aux obligations
comptables des commerçants promulguée par le dahir du 25 décembre 1992 ».
Les obligations comptables des commerçants sont imposées par les articles 19 et suivants du
Code de commerce. Elles sont régies par la loi n°9-88 du 25 décembre 1992 modifiée par la loi
44-03 du 14 février 2006. Pour le commerçant, l’objectif de la comptabilité commerciale est de
pouvoir enregistrer l’ensemble des mouvements qui affectent constamment le patrimoine de
l’entreprise. Elle permet également de déterminer les résultats globaux de l’exploitation au
cours d’une période définie. Ainsi, elle permet au commerçant de contrôler et de maîtriser le
fonctionnement de son entreprise, son évolution financière et le rapport entretenu avec ses
partenaires commerciaux et ses clients.
En outre, la comptabilité permet à l’administration fiscale de pouvoir exercer un contrôle sur
les déclarations d’impôts fournis par le commerçant et en cas d’irrégularités de procéder à des
vérifications fiscales. Enfin, elle permet aux créanciers de pouvoir être informés de la
solvabilité de l’entreprise.
Les documents comptables constituent l’objet de l’obligation mise à la charge du commerçant
(I). Régulièrement tenus, les documents comptables peuvent constituer un moyen de preuve en
cas de litige soumis au tribunal (III). Le non-respect de cette obligation par le commerçant
entraîne l’application de sanctions (II).
I. L’objet de l’obligation
Ainsi, la comptabilité suppose de tenir plusieurs livres comptables (I) et lorsqu’elle est
régulière, la comptabilité a une valeur probante (II).
Ces documents constituent le support des obligations comptables du commerçant.
A) Le support de l’obligation : les documents comptables
Les commerçants doivent procéder à l’enregistrement des mouvements qui affectent l’actif et
passif de l’entreprise (article 1er de la loi n°9-88). La comptabilité du commerçant a pour objet
les livres comptables (1) et les comptes annuels (2).
-Le grand livre : ce livre reprend les écritures du livre-journal avec une ventilation entre les
différents comptes tenus par le commerçant (comptes de stocks, de fournisseurs,
d’immobilisations etc).
-Le livre d’inventaire : ce livre constitue un relevé de tous les éléments d’actif et de passif du
patrimoine de l’entreprise et mentionne la quantité et la valeur de chacun d’eux à la date de
l’inventaire. Ce document permet de contrôler l’existence et la valeur de ces éléments au moins
une fois par exercice (12 mois).
Pour compléter les livres comptables, le commerçant doit également tenir états de synthèse
annuels sur la base du contenu des livres comptables. Les états de synthèse doivent donner une
image fidèle de l’actif et du passif de l’entreprise ainsi que de la situation financière et des
résultats de l’entreprise.
Ces états de synthèse comportent :
Le livre journal et livre d’inventaire sont cotés c’est-à-dire que les numéros des pages vont de
la première à la dernière feuille et ils sont paraphés (un signe y est apposé) par le greffier du
tribunal de commerce du siège où se situe l’entreprise.
Chaque livre reçoit un numéro répertorié par le greffier sur un registre spécial.
Le commerçant doit enregistrer les opérations de manière chronologique et continue sur les
livres, sans altération ni blanc. En cas d’erreur, il doit corriger par des écritures nouvelles, il ne
peut raturer ou gratter l’erreur.
Les documents comptables, les pièces justificatives (factures, bons de commande etc) doivent
être conservés pendant dix ans. Les originaux des correspondances reçues et les copies des
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correspondances envoyées doivent également être conservés pendant dix ans à compter de leur
date (article 26 du code de commerce).
L’absence de comptabilité, une comptabilité fictive ou incomplète sont des faits sanctionnés
par la loi. Il s’agit par exemple de faire disparaître des documents comptables de l’entreprise
ou de manipuler la comptabilité de sorte à augmenter frauduleusement le passif.
Lorsque les documents comptables ne respectent pas les normes prescrites par la loi 9-88,
l’article 23 de cette dernière laisse la faculté à l’administration fiscale de les rejeter. Elle
procédera alors à une évaluation arbitraire et forfaitaire de l’impôt qui devra être payé par le
commerçant tout en ayant la possibilité d’appliquer, le cas échéant, des sanctions pécuniaires
telles que des majorations ou des indemnités de retard.
Dans le cas où un commerçant falsifie les livres et documents comptable, il peut être
poursuivi pour banqueroute, fraude fiscale ou pour faux en écriture commerciale. En effet,
tout dirigeant d’une entreprise individuelle ou à forme sociale qui aurait tenu une comptabilité
fictive ou fait disparaître des documents comptables de l’entreprise ou de la société ou qui
n’aurait pas tenu de comptabilité alors que la loi en fait l’obligation est coupable de
banqueroute. Cette dernière est une infraction pénale punie par une peine d’emprisonnement
allant d’un an à cinq ans et / ou d’une amende de 10.000 à 100.000 dirhams
La fraude fiscale quant à elle suppose par exemple la production d’une comptabilité fausse
ou fictive ou encore la soustraction ou la destruction des documents comptables. La sanction
pénale dans ce cas-là est une amende de 5000 à 50.000 dirhams qu’il s’agisse de l’IS, l’impôt
sur le revenu ou taxe sur la valeur ajoutée. En cas de récidive, le contrevenant est passible en
plus de cette amende, d’un emprisonnement pouvant aller de 1 à 3 mois.
Les documents comptables remplissent une fonction probatoire c’est-à-dire que les
documents comptables sont admis à constituer une preuve en cas de litige porté devant le
tribunal.
L’article 19, alinéa 2 du code de commerce entérine le principe de la force probante des
documents comptables puisqu’il dispose que la comptabilité est admise par le juge pour faire
preuve entre commerçants à raison des faits de commerce à condition qu’elle soit
régulièrement tenue. L’utilisation des documents comptables en justice peut se faire selon
deux modalités prévues à l’article 22, lequel dispose qu’« au cours d’une instance judiciaire,
La force probante des documents comptables varie en fonction de la qualité des parties
au litige.
En cas de litige, la comptabilité régulièrement tenue fait preuve entre commerçants à raison
des faits et actes de commerce qu’elle retrace. Elle constitue une preuve également en faveur
du commerçant qui tient cette comptabilité (article 232 du Code de commerce).
1. Dans les rapports entre commerçants
En cas de litige, la comptabilité régulièrement tenue fait preuve entre commerçants à raison des
faits et actes de commerce qu’elle retrace. Elle constitue une preuve également en faveur du
commerçant qui tient cette comptabilité (article 232 du Code de commerce).
A l’égard des non commerçants, la comptabilité ne fait pas preuve contre eux. Un tiers non
commerçant peut faire valoir contre le commerçant le contenu de sa comptabilité même si celle-
ci est irrégulièrement tenue. A l’inverse, le commerçant ne peut invoquer les documents
comptables contre un non-commerçant.
Cela étant dit, les juges conservent leur pouvoir d’appréciation en la matière et rien n’empêche
que ces derniers dégagent des présomptions de fait dans des écritures même si elles sont
irrégulièrement tenues. En outre, la preuve demeure libre en matière commerciale et peut, par
conséquent, être apportée par tous les moyens.
Le régime juridique des actes de commerce diffère de celui des actes civil.
En effet, il est appliqué aux actes de commerce les règles prévues par le droit commercial
(Paragraphe 1). Parfois, ces actes sont passés entre commerçants et particuliers non-
commerçants et, dans ce cas, le régime juridique applicable est spécifique (Paragraphe 2).
Les actes de commerce bénéficient de règles spécifiques dans la mesure où certaines règles du
droit commun des actes civils apparaissent inadaptées aux besoins du commerce. Ces règles
concernent aussi bien l’exécution des actes de commerce (II) que le contentieux commercial (I
et III).
La preuve est une composante essentielle des relations contractuelles puisque les obligations
doivent être prouvées pour pouvoir bénéficier d’une reconnaissance judiciaire. En effet, les
litiges sont résolus à la lumière des éléments preuves apportées par les parties. La preuve est
considérée différemment en droit civil et en droit commercial.
En droit civil, le régime de la preuve est réglementé. Ainsi, par exemple, la preuve par
témoins n’est pas admise pour les obligations qui ont pour objet une somme d’argent dont la
valeur dépasse 10.000 dirhams. En effet, un écrit est exigé dans ces cas là. De même, la preuve
par écrit doit revêtir des formes particulières pouvant aller jusqu’à l’exigence d’un acte
authentique.
En droit commercial, ce formalisme est écarté puisqu’il peut être handicapant pour le
commerçant qui est appelé à passer de nombreux contrats pour exercer son activité. Par
conséquent, en matière commerciale, la preuve est libre. Tous les moyens sont admis pour
prouver les obligations commerciales : témoignages, livres de commerce, correspondances,
factures, l’écrit électronique etc.
En droit civil, l’on distingue plusieurs types d’obligations volontaires au nombre desquels :
les obligations conjointes et les obligations solidaires.
Les obligations conjointes sont celles dans lesquelles sont impliquées plusieurs
personnes. Ces personnes peuvent être créancières ou débitrices pour la même
obligation. Dans ce cas, il y a autant de créances et de dettes qui sont indépendantes les
unes des autres. En exécution d’une obligation conjointe impliquant plusieurs
créanciers, chaque créancier ne pourra réclamer que ce qui lui est dû personnellement.
Dans le même esprit, en exécution d’une obligation conjointe impliquant plusieurs
débiteurs, chaque débiteur ne peut être poursuivi que pour ce qu’il doit personnellement.
Les obligations solidaires quant à elles sont de deux sortes. On distingue en effet la
solidarité passive de la solidarité active. Il y a solidarité active lorsque l’un des
créanciers peut réclamer au débiteur la totalité de la créance. Ainsi, le paiement fait pas
le débiteur à l’un des créanciers libère le débiteur à l’égard de tous les autres. Il y a
solidarité passive ou entre co-débiteurs lorsque plusieurs débiteurs sont obligés à la
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même chose, de manière à ce que chacun d’eux puisse être contraint pour la totalité de
la créance. Dans la solidarité passive, le paiement fait pas un seul débiteur libère les
autres débiteurs envers le créancier.
Dans un rapport contractuel de nature civile, la solidarité ne se présume pas entre plusieurs
personnes qui concourent à la formation et à l’exécution d’un même contrat. Si plusieurs
personnes, dans un rapport civil, sont tenues conjointement d’une obligation, cette obligation
se divisera entre elles. Chaque créance et chaque dette sont indépendantes les unes des autres.
Par voie de conséquence, le créancier devra exercer plusieurs recours distincts contre chaque
débiteur. Dans ce cas, il devra supporter l’insolvabilité de l’un de ses débiteurs. En conclusion,
la solidarité est une option en droit civil qui devra, pour produire ses effets entre les parties, être
prévue expressément par une clause insérée dans le contrat.
Dans un rapport contractuel de nature commerciale, la solidarité entre codébiteurs est présumée
par l’effet de la loi. Cela constitue une forme de protection pour le créancier puisque la solidarité
est une garantie qui va sécuriser les échanges commerciaux. C’est à cet effet que l’article 335
du Code de commerce dispose que la solidarité n’a pas besoin d’être prévue dans le contrat
commercial pour être appliquée (article 335 du Code de commerce).
De façon plus concrète, la solidarité signifie que lorsque plusieurs commerçants ont contribué
au même acte de commerce, l’un d’eux peut être appelé au paiement pour tous les autres.
Chaque débiteur est tenu d’exécuter la totalité de l’obligation et il devra se retourner contre les
autres contractants.
Il devra payer le montant total de la somme due au créancier et il pourra ensuite, réclamer aux
autres débiteurs la part qu’il a payé à leur place.
Exemple. Messieurs A, B et C sont commerçants, ils vendent des fruits et légumes. Ils
ont chacun un commerce différent situé dans des endroits différents à Casablanca. Pour obtenir
des prix intéressants, ils décident de passer une commande groupée chez un fournisseur de
tomates. La commande est d’un montant de 1000 dhs. Mais il s’avère que le fournisseur de
tomates n’est pas payé dans les délais.
Le principe de la solidarité permet au fournisseur de choisir parmi les commerçants A,
B et C celui qui est le plus solvable et lui demander le paiement de la totalité du montant (1000
dhs).
Celui qui a payé pourra, après avoir versé la somme au fournisseur de tomates, demander
aux autres commerçants de lui rembourser ce qu’il a payé à leur place.
Il est à noter que cette présomption a un caractère simple et non irréfragable. Cela signifie que
la solidarité est présumée, par l’effet de la loi, mais il est toujours possible pour les parties
d’écarter le jeu de la solidarité par une clause insérée au contrat. Néanmoins, cette faculté n’est
pas accordée aux sociétés de personnes dans lesquelles la loi impose aux associés une
responsabilité personnelle et solidaire des dettes sociales (associés de la SNC ainsi que les
commandités dans les sociétés en commandite simple ou les sociétés en commandites par
actions.
Les tribunaux de commerce, créés par la loi n°53-95, sont compétents pour connaître :
- Des actions relatives aux contras commerciaux ;
- Des actions entre commerçants à l’occasion de leurs activités commerciales ;
- Des actions relativs aux effets de commerce ;
- Des différents entre associés d’une société commerciale ;
- Des différends à raison du fonds de commerce.
Ainsi, tous les litiges relatifs aux commerçants passés à l’occasion du développement de leur
activité professionnelle sont portés devant les tribunaux de commerce. Le tribunal de commerce
a vocation à traiter des litiges entre commerçants de façon rapide et simple, toujours dans le
souci de répondre aux besoins spécifiques du commerce : le besoin de rapidité et de sécurité.
Cependant, les tribunaux de commerce sont compétents uniquement pour les demandes dont
la valeur excède 20.000 dirhams. Par conséquent, si l’objet du litige est le paiement d’une
créance dont la valeur est inférieure ou égale à 20.000 dirhams, la demande doit être portée
devant le tribunal civil.
Ainsi, une fois que le délai fixé par la loi pour agir en justice expire, l’action est éteinte. C’est
la prescription extinctive.
En droit civil, cette prescription est de quinze ans, sauf cas particuliers (article 387 du
Dahir des obligations et des contrats).
En droit commercial, il y a un besoin de rapidité car les choses évoluent rapidement,
il ne faut donc pas handicaper les relations commerciales en faisant peser sur les parties un
risque judiciaire pendant une durée aussi longue que celle prévue par le droit civil. Ces
impératifs expliquent qu’en droit commercial, la prescription extinctive est de cinq années
seulement. Cela permet aux parties d’avoir un délai suffisant pour agir en justice, après
réflexion et tentative de règlement amiable sans pour autant handicaper les relations
commerciales.
Les actes juridiques qui mettent en jeu un commerçant et un particulier sont appelés « actes
mixtes ». La notion d’acte mixte (I) implique une application distributive des règles civiles et
des règles commerciales (II).
Les actes conclus entre un commerçant et un non-commerçant constituent des actes mixtes.
L’acte mixte présente un caractère civil à l’égard de l’une des parties et un caractère commercial
à l’égard de l’autre. En effet, bon nombre d’actes de commerce, par nature ou par accessoire,
sont conclus entre commerçants et particuliers non-commerçants. Cette situation est
particulièrement courante et rassemble la plupart des échanges quotidien dits de consommation.
Par conséquent, l’acte mixte présente une double nature juridique.
- Le principe de la distributivité
Le régime d’un acte mixte repose sur l’application distributive des règles applicables. Il en
résulte que chaque partie se voit appliquer les règles imposées par la nature, civile ou
commerciale, que revêt l’acte à son encontre (article 4 du Code de commerce) : les règles du
droit commercial s’appliquent aux commerçants et les règles du droit civil s’applique au
particulier.
En cas de litige entre les parties, l’application du principe de distributivité a des conséquences
sur les règles applicables.
Ainsi, en matière de preuve, le non-commerçant peut invoquer le principe de la liberté de la
preuve et il peut donc prouver l’acte juridique qui a été accompli ou le fait juridique qui a eu
lieu par tous moyens. Tandis que le commerçant est obligé de respecter les règles du droit civil.