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L’Amour médecin
Molière
Livret pédagogique
correspondant au livre de l’élève n° 76
SOMMAIRE
R É P O N S E S A U X Q U E S T I O N S ................................................................................. 3
Le Médecin volant, scènes I à III (pp. 11 à 15) ......................................................................................................................................... 3
Le Médecin volant, scènes IV à VIII (pp. 20 à 26) .................................................................................................................................... 6
Le Médecin volant, scènes IX à XVI (pp. 30 à 41)..................................................................................................................................... 9
L’Amour médecin, acte I (pp. 51 à 61) .................................................................................................................................................. 12
L’Amour médecin, actes II et III (pp. 65 à 91)........................................................................................................................................ 15
Retour sur les œuvres (pp. 95 à 98) ..................................................................................................................................................... 19
Réponses aux questions du groupement de textes (pp. 112 à 122) ..................................................................................................... 20
P R O P O S I T I O N D E S É Q U E N C E S D I D A C T I Q U E S ............................................................... 22
E X P L O I T A T I O N D U G R O U P E M E N T D E T E X T E S .............................................................. 23
P I S T E S D E R E C H E R C H E S D O C U M E N T A I R E S ................................................................. 24
B I B L I O G R A P H I E C O M P L É M E N T A I R E ....................................................................... 25
– Les liens peuvent aussi être professionnels : Sganarelle est le valet de Valère.
– Ajoutons ce qui concerne les sentiments : Valère et Lucile s’aiment. Quant à Villebrequin, il n’est
pas question de sentiment et on peut supposer que son mariage avec la fille de Gorgibus est une
question d’intérêt plus que d’amour.
À propos de l’intrigue : inspirée de la comédie latine autant que de la farce, l’intrigue est centrée sur la
question du mariage de Lucile. La jeune fille aime Valère d’un amour réciproque et pourtant son père
a décidé de la marier au plus vite avec Villebrequin. Désir et sentiments d’un côté, autorité paternelle
de l’autre. C’est le ressort de nombreuses comédies, et il faudra attendre le XVIIIe siècle et Marivaux
pour que la question du mariage soit posée différemment. Le conflit des générations et des points de
vue sur le mariage (amour contre intérêt, liberté contre autorité) dynamise la pièce et, comme plus
tard dans Le Médecin malgré lui, sert de canevas aux scènes comiques. L’urgence de la situation, comme
dans L’Amour médecin, oblige la jeune fille à recourir à un stratagème destiné à retarder le mariage fixé,
dans l’espoir d’un revirement du père. Lucile (comme Lucinde) est presque séquestrée et il s’agit,
pour son amant, de détourner l’attention du père pour l’approcher malgré l’interdiction. D’où la ruse
du médecin, destinée à occuper Gorgibus et à l’amener à placer sa fille dans un lieu (« ce pavillon qui est
au bout de notre jardin ») où la rencontre (voire davantage : « vous pourriez l’entretenir à l’insu de notre
vieillard, l’épouser ») avec Valère sera possible.
W L’exposition consiste également à présenter les personnages au fur et à mesure de leur entrée en
scène. Ainsi, lorsque Sganarelle fait son entrée (scène II), il a été présenté à la fin de la scène première
comme le valet de Valère que Sabine songe à faire passer pour un médecin. Les derniers mots de la
scène commentent son entrée : « Mais le voici tout à propos ». Aucun doute pour le spectateur : le
comédien qui entre en scène vêtu d’un costume de valet est au service de Valère et va devoir jouer le
rôle d’un médecin.
Dans sa tirade de la scène première, Sabine a présenté la feinte maladie de Lucile et le projet de
mariage de son père. Elle a aussi expliqué que son oncle l’avait envoyée « quérir un médecin ». Ainsi,
lorsque le personnage qui fait son entrée dans la scène III s’exclame : « Allez vitement chercher un
médecin ; car ma fille est bien malade, et dépêchez-vous », le public comprend qu’il s’agit de Gorgibus, dont
le nom a été prononcé dans la scène II ; il en déduit également que le personnage qui l’accompagne,
habillé en valet, est à son service.
X Le mot « médecin », au cœur des trois scènes d’exposition (cf. question précédente), est le premier
mot du titre. Le spectateur comprend que l’intrigue va être centrée sur le stratagème du faux médecin
destiné à tromper Gorgibus et à faciliter les amours de Valère et de Lucile.
at Le titre et son adjectif verbal fantaisiste « volant » continuent de susciter la curiosité des spectateurs
car, si l’on a compris que la médecine serait au cœur du stratagème, on ne voit ni comment ni
pourquoi Molière va faire voler son faux médecin.
– le valet est intéressé. Il suffit, en effet, à Valère de parler de donner dix pistoles à son valet pour que
ce dernier se sente à la hauteur de la mission qu’il avait tout d’abord refusée. Le ressort de l’argent
fonctionne de la même manière dans le premier acte du Médecin malgré lui ;
– le valet aime profiter de l’existence (valet épicurien) : « je croyais refaire mon ventre d’une bonne
carrelure, et m’en voilà sevré », se plaint Gros-René dont le nom même suggère l’appétit ;
– le valet peut s’opposer à son maître : « vous vous moquez de moi ! » dit Sganarelle à Valère, qui lui
demande d’endosser l’habit de médecin ; « Que diable aussi ! » répond Gros-René à son maître. Et il
n’hésite pas à lui montrer ses torts : « Pourquoi vouloir donner votre fille à un vieillard ? » ;
– le valet peut faire preuve d’autorité (inversion carnavalesque des rôles caractéristique de la culture
populaire) : « Laissez-moi faire », « Venez seulement me faire avoir un habit de médecin » (Sganarelle) ;
– le valet incarne le bon sens populaire ; pour preuve, les remontrances adressées à Gorgibus par
Gros-René et les références de Sganarelle aux proverbes : « On dit un proverbe d’ordinaire ».
am Sabine, personnage qui ne réapparaîtra pas dans la suite de la pièce, fait preuve d’ingéniosité car
c’est à elle que Valère doit le stratagème du faux médecin. Elle a aussi conseillé à sa cousine de feindre
d’être malade pour retarder son mariage avec Villebrequin. Elle est à la fois la confidente de Valère et
celle de Lucile – un rôle souvent attribué à la servante dans la comédie. Ici, Sabine fait figure
d’entremetteuse – ce qui est aussi un emploi au théâtre.
an Dans la scène première, on apprend que Gorgibus est l’oncle de Sabine, un « vilain oncle » – ce qui
désigne à la fois son origine sociale populaire et son comportement négatif. Il est âgé conformément à
l’emploi du barbon : « bon vieillard », l’adjectif « bon » étant ironique ici. Le nom « bonhomme » est
dévalorisant car familier. Gorgibus est présenté comme avare (« l’avarice ») et « crédule » (la crédulité).
ao On relèvera « vitement » et « vite ». La première réplique de Gorgibus porte toutes les marques de
l’insistance : « vitement », « bien », « dépêchez-vous », si bien que l’on pourrait croire le père inquiet de
la maladie de sa fille. La seconde réplique de Gorgibus nous montre qu’il n’en est rien. L’inquiétude
du « vieillard » ne porte pas sur la santé de Lucile, mais sur l’éventuel retard du mariage fixé. Le père
apparaît comme insensible et égoïste, seulement préoccupé de son propre intérêt.
ap Le rapprochement des deux répliques contribue à révéler le caractère du barbon de comédie tout
en produisant un effet comique dû à la surprise.
◆ À vos plumes !
as
On attend des élèves les connaissances et les compétences suivantes :
– connaissances : la scène première de la pièce et le stratagème initié par Sabine, la mise en forme
(répliques, didascalies) d’une scène de théâtre ;
– compétences : insérer un récit dans un dialogue, utiliser à bon escient les didascalies.
Réponses aux questions – 6
◆ Lire l’image
bt Plusieurs éléments nous permettent de voir que les personnages représentés sont des comédiens :
leurs costumes sont différents alors qu’ils occupent le même espace, certains portent un masque, leur
attitude est exagérée et artificielle ; par exemple, les personnages au premier plan ne semblent pas se
préoccuper les uns des autres et on dirait qu’ils jouent des scènes distinctes.
bk Certains costumes évoquent une époque bien réelle et les gestes sont supposés exprimer un
sentiment. Grâce au jeu des comédiens, les personnages de papier semblent vrais.
Le décor joue un rôle déterminant. La femme au balcon et le trompe-l’œil, qui crée un effet de
profondeur (les lustres en enfilade), donnent au spectateur l’illusion d’être sur la place d’une ville.
L e M é d e c i n v o l a n t , s c è n e s I V à V I I I
( p p . 2 0 à 2 6 )
◆ Avez-vous bien lu ?
u a) C’est Sabine, l’entremetteuse, qui introduit Sganarelle auprès de Gorgibus.
b) C’est également Sabine qui introduit Lucile. On remarquera que, lorsque Lucile entre en scène,
Sabine n’intervient plus. Le stratagème qu’elle a initié est en marche et elle n’a plus sa place dans le
mécanisme enclenché.
c) Suivant le plan de Sabine, Sganarelle propose que Lucile prenne « un peu l’air » et qu’elle se
divertisse « à la campagne » (scène V).
V Les questions précédentes ont permis de mettre en avant la dimension spectaculaire du théâtre. Le
texte est destiné à être dit à voix haute, comme le montrent la diversité des types de phrases et la
dimension orale des paroles. Il est aussi écrit pour être vu et non lu. On a, en effet, observé
l’importance des déplacements, des costumes et des accessoires. Le comique ne prend sa vraie force
que lorsque la pièce est jouée.
La part accordée à l’improvisation, dans la tradition de la commedia dell’arte, montre également que le
texte n’est pas achevé, mais qu’il trouve son aboutissement dans la représentation, au moment où les
comédiens prennent la relève et contribuent à la création de l’œuvre.
On pourra montrer aux élèves que, à la différence du roman dont l’auteur est unique, le spectacle de
théâtre est le produit d’une création collective : auteur, metteur en scène, comédiens et techniciens.
On pourra aussi inviter les élèves à lire la préface de L’Amour médecin.
al Sganarelle fait rire les spectateurs en se faisant passer pour un médecin, car l’on devine bien qu’il a
du mal à combler le fossé qui sépare sa condition de valet de celle d’un médecin. Il énonce des
évidences : « une personne ne se porte pas bien quand elle est malade » et donne ainsi l’impression de
combler le vide de son ignorance par des paroles qui n’ont pas de signification, soit parce que celles-ci
disent ce que tout le monde sait, soit parce qu’elles ne veulent rien dire. Il fait appel, par exemple, au
Cid de Corneille ou au latin d’église. Profitant de la naïveté de Gorgibus, il va même, dans un jeu de
double énonciation (deux sens selon que l’on considère que le père ou le public est le destinataire),
jusqu’à révéler la supercherie : « Ne vous imaginez pas que je sois un médecin ordinaire, un médecin du
commun » ; « J’ai des talents particuliers ».
◆ Étudier la satire
am En incarnant un médecin, Sganarelle donne une image négative de la médecine. On retrouvera les
caractéristiques suivantes dans Le Médecin malgré lui, puis dans Le Malade imaginaire :
– l’ignorance : les références culturelles de Sganarelle sont incohérentes ; il ne sait pas écrire ;
– la prétention : Sganarelle cherche à impressionner son auditoire, quitte à aligner des mots latins qui
n’ont rien à voir avec la médecine (le latin d’église) ou qui n’existent pas (« Ficile tantina pota baril
cambustibus ») ;
– l’incapacité à identifier une quelconque maladie (« Tant pis ! », « C’est fort bien fait ! ») ; les seules
vérités qu’il profère sont des évidences d’autant plus amusantes que Lucile n’est pas malade : « votre
fille est fort malade » ;
– le goût pour l’argent : « Je n’en prendrai pas, je ne suis pas un homme mercenaire. (Il prend l’argent.) »
an L’Avocat admire les médecins (« cette belle science », « grande louange ») et donne une image positive
de la médecine : « tant à cause de son utilité que parce qu’elle contient en elle plusieurs sciences, ce qui rend sa
parfaite connaissance fort difficile ».
ao Les répliques de l’Avocat sont longues – ce qui témoigne de sa bonne maîtrise de la langue,
caractéristique attendue de sa profession. Le vocabulaire qu’il utilise est soutenu, voire technique
(« rationale ou dogmatique ») ; il maîtrise le latin et se montre capable de citer Hippocrate.
ap L’Avocat maîtrise le langage et se montre capable de tenir de longs discours cultivés et argumentés.
Cependant, il n’a pas su déceler l’ignorance de son interlocuteur et tout se passe comme s’il n’écoutait
pas ce qu’on lui disait, trop centré sur son propre propos. En effet, lorsque Sganarelle lui répond :
« Ficile tantina pota baril cambustinus », il ne s’aperçoit pas que cela ne veut rien dire.
Molière fait donc des avocats des hommes savants mais prétentieux et peu soucieux de
communiquer, voire peu intéressés par leur entourage et peut-être par les clients qu’ils sont supposés
défendre. En rendant le personnage ridicule, Molière dénonce les hommes cultivés mais prétentieux
autant que les ignorants qui s’affirment savants.
aq Les quatre répliques qui suivent le départ de l’Avocat ferment la parenthèse de son intervention
savante et déconnectée (de la réalité comme de l’intrigue). Elles ont un effet comique car elles
soulignent la naïveté de Gorgibus qui, au lieu de demander à l’Avocat ce qu’il pense du médecin,
s’adresse à Sganarelle : « Que vous semble de cet homme-là ? » On retrouve ici le procédé de l’inversion
caractéristique de la farce ; c’est en effet Sganarelle qui devient ici le savant : « Il sait quelque petite
chose. S’il fût demeuré tant soit peu davantage, je l’allais mettre sur une matière sublime et relevée. »
◆ Lire l’image
ar Dans le texte de Molière, rien n’indique que Sganarelle donne à boire à l’Avocat l’urine de Lucile,
qu’il a goûtée dans la scène IV. Dario Fo s’autorise cette liberté car Molière envisage le théâtre
comme les Comédiens-Italiens et accorde une place à l’improvisation. De plus, le fait de donner à
boire de l’urine à l’Avocat relève bien du comique de la farce : répétition de ce qui s’est passé dans la
scène III et exagération des contrastes entre le grotesque (l’urine que l’on boit) et le sérieux de
l’Avocat.
as L’Avocat est placé au centre de la scène, car c’est son attitude qui est source de comique. Il tient
son verre avec délicatesse – ce qui est en opposition avec le contenu. En homme du monde habitué à
tenir élégamment un verre, il semble se désintéresser de ce qu’il va boire – ce qui réjouit le spectateur
qui guette la réaction du personnage.
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 9
De chaque côté, les deux personnages, Sganarelle et Gorgibus, adoptent une attitude opposée :
Sganarelle semble inviter l’Avocat à boire, tandis que le maître de maison exprime un dégoût mêlé de
curiosité. Le geste de ce dernier aurait dû alerter l’Avocat, mais, trop occupé à parler, il ne jette pas un
regard à sa gauche.
◆ À vos plumes !
bt
Les élèves devront à la fois montrer leur connaissance du dialogue théâtral (forme du texte, oralité,
didascalies) et imiter la farce de Molière en transposant le déroulement d’une situation ordinaire
(consultation ou leçon) de façon à souligner l’ignorance du spécialiste. On valorisera les copies qui
auront su recourir à différents procédés comiques et on pourra proposer aux élèves de mettre en scène
ensuite les dialogues qu’ils jugent les plus réussis.
L e M é d e c i n v o l a n t , s c è n e s I X à X V I
( p p . 3 0 à 4 1 )
◆ Avez-vous bien lu ?
u Narcisse est le prétendu jumeau de Sganarelle médecin. Il tente de se réconcilier avec son frère.
On expliquera aux élèves (voir note) le choix du prénom Narcisse. Sganarelle, valet de Valère, est un
ignorant qui ne sait pas écrire (cf. scène V) ; pourtant le prénom qu’il choisit pour son jumeau
témoigne d’une certaine culture. On y verra bien sûr un clin d’œil de l’auteur et on pourra montrer
que le théâtre n’accorde pas priorité à la vraisemblance.
v Gros-René découvre la supercherie de Sganarelle en ramassant la robe de médecin qu’il a laissée
tomber à la fin de la scène XV.
w Gorgibus, quand il apprend que Sganarelle l’a trompé pour favoriser une rencontre entre Valère et
Lucile, menace de pendre Sganarelle : « mais tu seras pendu, fourbe, coquin ! ».
x Valère et Lucile viennent demander grâce à Gorgibus, qui leur pardonne la supercherie utilisée
pour faciliter leur rencontre et accepte le mariage.
y La réplique a est prononcée par Gorgibus, la b par Gros-René et la c par Valère.
heureusement trompé par Sganarelle, ayant un si brave gendre. » La pendaison annoncée est heureusement
remplacée par un festin : « Allons tous faire noces et boire à la santé de toute la compagnie. »
pièce suppose que ce passage, typique de la farce et de la commedia dell’arte, soit malgré tout justifié par
l’intrigue. Telle est la fonction des scènes X et XIII, deux scènes faisant intervenir Valère, le
personnage au cœur du stratagème. Dans la scène X, Sganarelle, après avoir fait un compte-rendu de
la première ruse, aperçoit Gorgibus. Il ne porte pas sa robe de médecin et, n’étant pas connu comme
valet de Valère, il doit justifier sa présence dans la maison de Gorgibus. Il s’agit aussi d’occuper le père
de Lucile, tandis que Valère parle à la jeune fille. C’est ce qui est repris dans la scène XIII : « Sans une
invention que j’ai trouvée, toute la mèche était découverte. »
◆ Étudier le dénouement
ar L’événement qui déclenche le dénouement est la découverte de la supercherie de Sganarelle par
Gros-René : « Voilà le coquin qui faisait le médecin et qui vous trompe. » Cet événement est préparé par
les doutes que le valet de Gorgibus exprime, avant même que Sganarelle ne devienne le « médecin
volant ». Sceptique quant à l’histoire des jumeaux, il se pose en observateur et en critique : « comment
diable on saute ici par les fenêtres ! Il faut que je demeure ici, et que je voie à quoi tout cela aboutira ». Par la
suite, il pousse Gorgibus à demander au faux médecin de se montrer en compagnie de son frère – ce
qui alimente le comique et prépare le moment où il ramassera la robe de médecin.
as Le coup de théâtre final est le retour de Valère et de Lucile qui demandent pardon à Gorgibus.
Cet événement, qui n’était pas prévu dans le stratagème de Sabine, marque un revirement. Le
mensonge et la tromperie font place à la transparence et à l’honnêteté. Cet aveu (demander pardon
suppose que l’on a commis une faute) entraîne le revirement de Gorgibus : il n’est plus question de
marier de force Lucile au vieux Villebrequin ni de pendre Sganarelle le fourbe : « Je vous pardonne, et
suis heureusement trompé par Sganarelle, ayant un si brave gendre ».
bt Gorgibus change d’avis car il semble convaincu par les arguments de Sganarelle :
– « C’est un parti sortable pour elle, tant pour la naissance que pour les biens » ;
– « Ne faites pas un vacarme qui tournerait à votre confusion ».
Il se montre également sensible au revirement de Valère et de Lucile, qui viennent demander pardon.
En réalité, il s’agit, pour Molière, de terminer la farce rapidement car l’intérêt des spectateurs ne porte
pas sur une intrigue, qui n’est que l’armature nécessaire aux scènes comiques : celles de la consultation
fantaisiste et du « médecin volant ». Sganarelle ayant été démasqué, le comique n’a plus sa place et la
morale reprend ses droits, comme pour sauver les apparences après un temps où primaient fourberie
et mensonge.
On pourra s’étonner de ce revirement soudain de Gorgibus que l’on a vu au tout début de la pièce
peu soucieux du bonheur de sa fille. Après ne s’être inquiété de la santé de sa fille qu’en pensant à son
mariage avec Villebrequin, le voilà qui pardonne aux jeunes gens. Crainte de la « confusion » dont
parle Sganarelle, c’est-à-dire du qu’en-dira-t-on ? Peut-être. Mais ne cherchons pas trop la
vraisemblance dans une pièce qui met en scène des personnages-types et ne vise, au fond, qu’à
distraire le spectateur.
bk Dans la première phrase, les 1re et 2e personnes sont distinguées : un pronom personnel sujet « je »
et « vous », un COS du verbe « pardonner ». Dans la deuxième phrase, les deux personnes sont réunies
dans l’impératif « allons », qui marque la réconciliation des personnages. On voit ainsi que Gorgibus
(sujet « je ») a le pouvoir de décision qui correspond à son rôle de chef de famille et que les deux
jeunes gens (complément d’objet) sont soumis à son autorité. La 1re personne du pluriel qui clôt la
pièce, marque la fin du conflit : l’intrigue est dénouée.
◆ Lire l’image
bl Les personnages sont nombreux sur scène et ils sont tous en mouvement. Tout l’espace est
occupé : à gauche et à droite, au premier et au second plan, au-dessus de la scène (au bout de la
corde). Les positions des personnages sont variées et tous bougent. On pourra opposer le personnage
replié, à genoux à droite, et celui qui vole. Un personnage apparaît de dos – ce qui manifeste le grand
désordre de la scène, tout étant ordinairement fait pour que les spectateurs puissent voir l’expression
des visages.
Cette désorganisation de l’espace et des mouvements exprime le vent de folie qui souffle sur la pièce à
la fin. On retrouve bien là les lazzi de la commedia dell’arte.
Réponses aux questions – 12
◆ À vos plumes !
bm On attend des élèves :
– une maîtrise de la forme théâtrale du dialogue, et on valorisera les devoirs qui auront accordé une
place importante aux didascalies ;
– la mise en place du décor nécessaire au double rôle ;
– un jeu de scène ;
– la construction d’une intrigue (avec prise en compte de la « bêtise »).
L ’ A m o u r m é d e c i n , a c t e I
( p p . 5 1 à 6 1 )
◆ Avez-vous bien lu ?
u Les propositions justes sont : a, d, e, f.
v Sganarelle ne veut pas que Lucinde épouse le jeune homme qu’elle aime, car il ne veut pas qu’elle
se marie avec qui que ce soit. Il tient à garder sa fille pour lui. On apprend, dans la scène première, de
la bouche d’Aminte, que Lucinde a déjà été demandée en mariage et l’on devine que Sganarelle a
refusé cette demande.
cherche à hériter de sa fortune et que sa voisine est amoureuse d’un jeune homme qui a « quelque
inclination » pour sa fille.
Le spectateur ne peut trouver le personnage entièrement positif ou digne de pitié. Faisant mention
d’un jeune homme qui a « quelque inclination » pour sa fille, il n’établit pas de lien avec la tristesse de sa
fille, lui qui se montre capable de comprendre les sentiments secrets de sa voisine. De plus, lorsqu’il
évoque sa femme, il en parle comme s’il s’agissait d’un bien : « Je n’avais qu’une seule femme qui est
morte. » Il rappelle également ce qui se passait avant ce décès : « Je n’étais pas fort satisfait de sa
conduite » ; « Si elle était en vie, nous nous querellerions ».
X La scène 2 vient compléter et nuancer les informations données dans la première scène :
– On apprend la cause de la mélancolie de Lucinde par le signe d’acquiescement qu’elle fait à la fin de
la tirade de Sganarelle, quand celui-ci lui demande : « Aimerais-tu quelqu’un et souhaiterais-tu être
mariée ? »
– On voit Sganarelle afficher son inquiétude pour sa fille et sa sollicitude : « je te promets que je ferai
toutes choses pour toi ». Cependant, on devine qu’il ne veut pas comprendre le signe de Lucinde
(« Lucinde lui fait signe que c’est cela ») – ce qui est confirmé dans la scène suivante lorsqu’il s’emporte et
tente de clore la discussion : « c’est une coquine qui me fait enrager ».
La scène 2 est brève et allusive. Le théâtre ne peut se contenter d’esquisser les informations, car il faut
s’assurer que les spectateurs aient tous bien compris les tenants et aboutissants de l’intrigue. La scène 3
a donc pour fonction d’expliciter ce qui était rapidement brossé dans la scène 2. Lisette intervient
pour formuler clairement la cause de la mélancolie de Lucinde : « C’est un mari qu’elle veut. » À des
fins comiques, mais aussi informatives, le mot « mari » est martelé – ce qui fait davantage ressortir
l’obstination d’un Sganarelle enfermé dans son égoïsme : en réponse au mot « mari », Sganarelle ne
peut que répéter : « Ne m’en parlez point. »
servante : « voilà un vilain homme, et je vous avoue que j’aurais un plaisir extrême à lui jouer quelque tour ».
Elle devient là pleinement servante de comédie. Elle affirme son autorité (principe de l’inversion de la
comédie : « laissez-moi faire » ; « je prends, dès à présent, sur moi tout le soin de ses intérêts ») et elle joue
auprès de la jeune fille le rôle de la mère absente (« Allez, allez, il ne faut pas se laisser mener comme un
oison » ; « on peut se libérer de la tyrannie d’un père »). Mais, si elle va servir les intérêts de sa maîtresse,
c’est aussi pour le plaisir de la fourberie, autant dire pour les nécessités théâtrales du comique.
am Scène 6, Lisette met en place la première étape d’un stratagème pour tromper Sganarelle et rendre
possible le mariage de Lucinde avec le jeune « inconnu ». Cette fourberie sera dévoilée au fur et à
mesure. Dans l’acte I, le stratagème est simplement annoncé, mais le spectateur n’en connaît pas le
déroulement et il ne sait pas encore comment Lisette va s’appuyer sur la fausse nouvelle de la maladie
de Lucinde. L’effet d’attente maintient l’attention du public.
Avec l’accord implicite de Lucinde (la jeune fille n’a pas exprimé d’opposition au projet de Lisette),
Lisette joue sur les sentiments que Sganarelle éprouve pour sa fille et lui fait comprendre qu’il pourrait
la perdre. Désespérée d’être reniée par son père (il n’est pas question ici de son amour interdit), la
jeune fille serait sur le point de mourir. Elle insiste sur l’urgence de la situation : « je crois qu’elle ne
passera pas la journée ». La dernière réplique de l’acte I marque l’aboutissement de cette première
étape : Sganarelle demande qu’on « aille quérir des médecins, et en quantité ».
◆ Étudier le comique
an Plusieurs passages peuvent être évoqués :
– Scène 1 : quatre personnages interviennent successivement pour donner des conseils variés à
Sganarelle, qui ensuite démasque les avis intéressés. Le comique repose ici sur l’accumulation, la
répétition et le revirement. Il contribue à dédramatiser la situation tragique que présente Sganarelle
quand il évoque la mort de sa femme et la mélancolie de sa fille.
– Scène 3 : dans le prolongement de la scène 2, le refus de Sganarelle d’entendre la volonté de sa fille
est comique tant il est exagéré. Les stichomythies à la fin de la scène ainsi que les répétitions (« Un
mari », « Ne m’en parlez point ») participent à ce comique.
– Scène 5 : le spectateur rit au récit de Lisette et à l’inquiétude de Sganarelle car, d’une part, il sait
que le premier est faux et, d’autre part, que le père de Lucinde, homme égoïste, ne mérite pas sa pitié.
Les nombreux rebondissements du récit qui orientent le public sur de fausses pistes (la fenêtre et la
rivière) participent également au comique.
ao Dans le prolongement de la question précédente, cette question permet d’insister sur le fait que le
théâtre est destiné à être représenté. Le travail demandé suppose analyse et imagination.
Les élèves pourront s’appuyer sur l’une des trois scènes (1, 3 ou 5) présentées dans la réponse
précédente.
– Scène 1 : on peut imaginer une sorte de ballet des quatre personnages s’avançant successivement
pour parler à Sganarelle ou l’encerclant. On pourra imaginer des didascalies comme « s’avançant à son
tour ».
– Scène 3 : Lucinde étant incapable d’affronter son père, on pourra préciser qu’elle se bouche les
oreilles pour ne pas entendre les propos de son père en colère. Quant à Lisette, qui répète « un mari »
et qui aura le dernier mot, sans doute parle-t-elle de plus en plus fort et tourne-t-elle autour de son
maître pour le faire enrager. On peut imaginer même à la fin qu’elle finit par le frapper. L’inversion
des statuts sociaux est un des ressorts traditionnels de la farce et de la comédie. Autres suggestions :
Lisette peut se placer devant Lucinde pour la défendre et parler en son nom ; Sganarelle, entre les
deux femmes, tourne la tête à droite et à gauche, selon qu’il parle à l’une ou à l’autre. Les
mouvements et les gestes, exagérés ou répétés, sont source de comique.
– Scène 5 : on insistera sur le ton des répliques et sur les gestes de désespoir qui peuvent accompagner
les paroles de Sganarelle, quand il presse Lisette de lui dire ce qui se passe.
Lisette correspond à Sabine : toutes deux interviennent pour mettre en place un stratagème destiné à
rendre possible le mariage de la jeune fille avec le garçon qu’elle aime. Lisette n’est pas non plus sans
rappeler Sganarelle, le valet débrouillard de Valère, qui va gagner en autonomie tout au long du
Médecin volant, Sabine s’étant effacée, une fois le stratagème lancé.
aq Les deux intrigues sont centrées sur la question du mariage d’une jeune fille avec le jeune homme
qu’elle aime. L’amour est réciproque et seul le père, égoïste, constitue un obstacle qu’il va falloir
surmonter ou contourner. Ce thème du mariage contrarié par l’autorité d’un père (le barbon) est au
cœur de la comédie latine dont Molière hérite.
Dans les deux pièces, ce sont les valets, Sganarelle et Lisette, qui interviennent pour résoudre le
problème. Dans Le Médecin volant, Sganarelle, guidé au départ par Sabine, feint d’être médecin pour
permettre à Valère de rencontrer Lucile au bout du jardin. Dans L’Amour médecin, Lucinde doit aussi
feindre d’être malade (cf. acte III) et c’est le jeune homme lui-même qui se fera passer pour un
médecin.
◆ À vos plumes !
ar Il s’agit là de composer un récit en jouant sur les registres. L’hyperbole, qui peut être un des
moteurs du dramatique comme du pathétique, sera ici poussée à l’extrême de façon à créer un effet
comique. On valorisera les récits qui auront su créer, à l’instar de la scène 6, de fausses pistes.
as Ce sujet est un travail de réécriture qui demande de passer du récit à une scène de théâtre dont la
fonction sera informative (le récit inséré) et comique. On valorisera les devoirs qui auront su utiliser
les didascalies pour imaginer un jeu de scène ou simplement préciser déplacements et ton des
personnages.
L ’ A m o u r m é d e c i n , a c t e s I I e t I I I
( p p . 6 5 à 9 1 )
◆ Avez-vous bien lu ?
u Dans l’acte II, Sganarelle apparaît dans 6 scènes et, dans l’acte III, il est présent dans 5 scènes – ce
qui fait 11 scènes au total.
v La scène 6 de l’acte II est un court monologue de Sganarelle.
On veillera à ce que les élèves fassent bien la différence entre une tirade (dans la scène 1 de l’acte III
notamment) et un monologue.
w a) Sganarelle ; b) Tomès ; c) Maroton ; d) Clitandre en médecin ; e) M. Filerin.
x Clitandre est le jeune homme dont Lucinde est amoureuse. Il se fait passer pour un médecin sur les
conseils de Lisette.
y Clitandre est accompagné d’un notaire qui se fait passer pour un apothicaire.
U C’est Lisette qui apprend à Sganarelle qu’il a été trompé.
Ensuite, c’est Lisette qui vante à Sganarelle les qualités du médecin qu’elle lui amène. Après les avis
contradictoires des quatre médecins qui sont intervenus dans l’acte II, Sganarelle est disposé à écouter
un avis éclairé : « Je vous amène un médecin : mais un médecin d’importance, qui fait des cures merveilleuses, et
qui se moque des autres médecins. »
Dans la scène 6, lorsque Sganarelle s’interroge sur l’attitude de Clitandre, elle s’empresse de le
rassurer : « Il faut s’éloigner : un médecin a cent choses à demander, qu’il n’est pas honnête qu’un homme
entende » ; « C’est qu’il observe sa physionomie et tous les traits de son visage ».
Enfin, à la toute fin de la pièce, c’est Lisette qui révèle à Sganarelle la fourberie dont il a été dupe :
« Ma foi, Monsieur, la bécasse est bridée, et vous avez cru faire un jeu, qui demeure une vérité. »
X Lisette, comme on l’a vu, est débrouillarde et fourbe : c’est elle qui est à l’origine du stratagème
joué par Clitandre et c’est elle qui en guide le déroulement jusqu’au dévoilement final. Toinette ne
sera pas différente dans Le Malade imaginaire.
Lisette a aussi toute l’effronterie de la servante de comédie et elle n’hésite pas à se montrer insolente
avec les médecins qui appartiennent pourtant à une couche plus élevée de la société. C’est la fonction
de la scène 2 : « Un insolent, qui a eu l’effronterie d’entreprendre sur votre métier et qui, sans votre ordonnance,
vient de tuer un homme d’un grand coup d’épée au travers du corps. »
Enfin, elle a l’allant de son rôle, comme en témoigne la scène IV, où elle prépare l’arrivée de
Clitandre déguisé en médecin.
at Sganarelle se montrait perspicace dans la première scène de la pièce, lorsqu’il mettait au jour les
intentions cachées de ceux qui lui donnaient des conseils. Cependant, dans la suite de la pièce, dès
lors que Lisette lui raconte la soudaine maladie de sa fille, il redevient le barbon crédule que tous
s’appliquent à duper et que Molière a si souvent mis en scène dans ses comédies. Dans l’acte II, il ne
remet pas en cause les quatre médecins venus donner leur avis, mais finit par prendre ses distances vis-
à-vis d’eux en choisissant un remède populaire : l’orviétan. C’est dans l’acte III que sa naïveté se
manifeste avec le plus d’évidence, lorsqu’il prend Clitandre pour un médecin et ne s’interroge pas sur
la comédie du mariage destinée à guérir Lucinde. Sa naïveté est soulignée par le fait qu’il participe lui-
même à cette comédie destinée – croit-il – à lui garder sa fille. Il insiste même pour que tout soit fait
dans les formes et c’est lui qui demande le contrat : « il faut faire un contrat pour ces deux personnes-là.
Écrivez. » Ainsi, dans la tradition de la comédie et de la farce, Sganarelle est dupé afin que le mariage
des jeunes gens amoureux se fasse.
ak Sganarelle, qui tient à garder sa fille pour lui, est prêt à la tromper pour parvenir à ses fins. On le
voit même se réjouir de cette folie soudaine qui la maintient en vie à ses côtés, comme un de ses
biens. En effet, on l’entend s’écrier : « Oh la folle ! Oh la folle ! » Pensant lui jouer une comédie qui
sert ses intérêts, il est en réalité le dupe de la pièce que lui ont montée Clitandre et Lisette.
an Le nombre de médecins et le jeu des symétries rendent les personnages des médecins artificiels et
ridicules. Si M. Filerin se démarque (voir question précédente), les quatre autres personnages
s’organisent en deux paires : deux médecins dominants, Tomès et Des Fonandrès, dont les opinions
(scène 4 de l’acte II, scène première de l’acte III) dominent et se répondent : « je conclus à lui donner de
l’émétique », dit l’un ; « Je soutiens que l’émétique la tuera », dit l’autre. Macroton et Bahys sont placés au
second plan et ils ne parviennent pas à donner leur avis dans la scène 4 ; cependant, le principe de
l’opposition les régit également, cette fois-ci sur le plan de l’élocution : « l’un va en tortue, et l’autre en
poste », souligne Sganarelle dans un aparté.
On pourra demander aux élèves de trouver d’autres paires célèbres au cinéma ou dans la littérature
(Laurel et Hardy, Dupont et Dupond…).
L’organisation en paires, l’exagération des propos (les positions catégoriques ; la scène où, censés se
mettre d’accord, les quatre médecins parlent de tout sauf de la malade), et l’inefficacité de la
consultation contribuent à ridiculiser la profession.
ao Le mode verbal dominant est l’impératif (« conservons-nous », « soyons », « n’allons point »). Placé
ainsi à la fin de la réplique et de la scène, l’impératif souligne l’autorité de Filerin sur les autres
médecins et donne du poids à la satire.
ap La pièce réunit différents reproches concernant les médecins :
– La forme prime sur le contenu : la cérémonie de leur arrivée, le « pompeux galimatias » mentionné
par Filerin.
– Ils sont incompétents et incapables de soigner leur malade : leurs avis diffèrent radicalement et la
mort du cocher, que Lisette évoque, prouve que Tomès n’a pas su guérir son malade (« — Comment se
porte son cocher ? — Fort bien, il est mort »).
– Trahissant le serment d’Hippocrate et ne se souciant que de leurs propres intérêts, ils ne se soucient
pas de la santé de leurs malades et même profitent de la faiblesse des hommes, comme le dit avec
beaucoup de cynisme M. Filerin dans la première scène de l’acte III : « le plus grand faible des hommes,
c’est l’amour qu’ils ont pour la vie, et nous en profitons nous autres, par notre pompeux galimatias ».
– Ce sont des escrocs intéressés par l’argent : les quatre médecins réunis ne discutent pas du cas qui
leur est soumis (acte II, scène 3), alors que Sganarelle imagine qu’ils comparent leurs diagnostics
respectifs afin d’apporter une solution.
bt Les deux entractes font rire les spectateurs en mettant en scène, dans le premier entracte, les
médecins réputés, attachés à la forme de leur art plus qu’au contenu et, dans le second, un
médicament populaire, dont l’universalité garantit l’inefficacité. Les deux entractes se répondent : la
science puis le savoir populaire – ce qui contribue au comique en ridiculisant ces deux types de
médecines.
bk Les questions précédentes visent à dégager le caractère artificiel et avant tout spectaculaire du
théâtre. Même si Molière propose un certain point de vue sur le réel en dénonçant l’égoïsme des
médecins, qui ne pensent qu’à assurer leur fortune, et celui des pères, qui ne pensent pas au bonheur
de leurs enfants, il cherche avant tout à divertir les spectateurs en leur proposant un spectacle dont le
but n’est pas d’imiter la réalité. Les personnages se réduisent à des types ; ils ne sont pas plus crédibles
que l’intrigue.
Pour Molière, acteur et metteur en scène, le théâtre est destiné à être représenté et vu et non à être
lu ; les jeux de scène et les ballets ont autant d’importance que les répliques des personnages. La
préface présentait d’ailleurs clairement cette conception de la comédie : « on sait bien que les comédies ne
sont faites que pour être jouées ».
femme), n’est pas sans ressembler à celle des médecins qui ne se soucient pas de guérir, mais d’assurer
leur notoriété et leurs revenus. Un an après l’interdiction du Tartuffe et la même année que Dom Juan,
c’est une fois encore l’hypocrisie qui est dénoncée.
◆ Lire l’image
bo Le médecin se tient debout, alors que l’homme à qui il s’adresse est assis, soumis à son autorité.
Les visages expriment la force, voire la menace (les yeux fixés), chez le médecin, et la crainte mêlée
d’incompréhension (la bouche entrouverte) chez l’autre. L’attitude du médecin, un poing sur la
hanche et un doigt tendu, est d’autant plus menaçante qu’il va presque jusqu’à toucher le front de son
interlocuteur. C’est ce dernier aspect de l’attitude du personnage qui exprime l’abus de pouvoir.
◆ À vos plumes !
bp Il s’agit d’imaginer un triangle comique soulignant l’opposition entre deux personnages, le
troisième étant là comme spectateur et comme faire-valoir du comique.
On valorisera les devoirs qui sauront jouer sur différents ressorts du comique : mots, gestes… Bien
entendu, les didascalies, si elles sont judicieuses, seront appréciées.
R e t o u r s u r l e s œ u v r e s ( p p . 9 5 à 9 8 )
◆ Le Médecin volant
u Les événements apparaissent dans l’ordre suivant : c, d, a, g, e, f, b.
v a) Le valet. b) Un ami. c) Le maître. d) La cousine. e) L’oncle. f) L’amant/l’amoureux.
w
◆ L’Amour médecin
x a) Sganarelle (I, 2). b) Lisette (I, 4). c) Des Fonandrès (II, 3). d) Tomès (II, 3). e) Sganarelle (II, 6).
f) Lucinde (III, 6). g) Clitandre (III, 6). h) Sganarelle (III, 7).
y a) Exposition. b) Monologue. c) Didascalie. d) Tirade. e) Caractère.
U
1
D
E
2 B A H Y S
3 F I L E R I N
O
4 C L I T A N D R E
A
N
D
5 M A C R O T O N
E
6 T O M E S
Réponses aux questions – 20
V Le Médecin volant
Lucile Valère
Le père ne veut pas que sa fille se marie avec celui qu’elle aime. X X
Le père veut garder sa fille pour lui. X
Le père pense que sa fille est malade. X X
Le père craint que la maladie de sa fille ne retarde le mariage. X
Un faux médecin intervient. X X
Les jeunes gens qui s’aiment finissent par se marier. X X
Le père finit par accepter le mariage de sa fille. X
Le stratagème mis en place permet un jeu de théâtre dans le théâtre. X X
R é p o n s e s a u x q u e s t i o n s d u g r o u p e m e n t d e t e x t e s
( p p . 1 1 2 à 1 2 2 )
◆ Document 1 : Le Vilain Mire
A. On relève : « Que vous dire de plus ? » et « Tout se passa comme je vous le raconte », deux expressions
dans lesquelles apparaissent des indices du destinataire et/ou du locuteur. Le présent de narration va
dans ce sens également.
B. Le « vilain mire » rentre chez lui « tout joyeux » pour deux raisons. D’une part, il a échappé aux
coups de bâton des deux valets promis au début du texte et, d’autre part, son succès lui ouvre de
nouvelles perspectives : « riche », « ne travailla plus avec sa charrue », « ne battit plus jamais », « aima »,
« chérit ».
– Comique de mots : l’importance accordée à des détails, tels que « gratouille » ou « chatouille », « tête
de veau vinaigrette », « cinquante-deux » ou « cinquante et un » ans.
PROPOSITION
D E S É Q U E N C E S D I D A C T I Q U E S
ÉTUDE DE
QUESTIONNAIRES TECHNIQUES LITTÉRAIRES EXPRESSION ÉCRITE
LA LANGUE
Séance n° 1 • Les types de phrases • Spécificité du texte de théâtre : découpage, • Écrire un dialogue théâtral en
Le Médecin volant • Adjectifs et adverbes didascalies… prenant en compte les informations
Scènes I à III • L’exposition données dans l’exposition
• La comédie : personnages et intrigue
Séance n° 2 • Les types de phrases • Le comique grossier de la farce • Écrire un dialogue théâtral en
Le Médecin volant • Le langage oral • Une pièce destinée à être représentée transposant la scène de la fausse
Scènes IV à VIII • Les hyperboles • La satire de la médecine consultation
Séance n° 3 • Les marques des personnes et • Les personnages de la comédie • Écrire une scène de théâtre dans
Le Médecin volant les fonctions des pronoms • Les jeux de scène le théâtre
Scènes IX à XVI • Le théâtre dans le théâtre
• Le dénouement de la comédie
Séance n° 4 • Champ lexical de l’amour • Étudier une préface : la conception de • Écrire un récit en racontant de
L’Amour médecin Molière du théâtre manière comique un événement
Acte I • L’exposition dramatique (imitation du récit de
• La comédie : les personnages, l’intrigue, le Lisette)
comique • Écrire un dialogue théâtral dans
• Comparaison des deux pièces : intrigue et lequel se trouve inséré un récit
personnages
Séance n° 5 • L’impératif • Les personnages de comédie • Écrire un dialogue théâtral comique
L’Amour médecin • La satire des médecins en mettant en scène des personnages
Actes II et III • La comédie-ballet contrastés
• Comparaison des deux pièces : stratagème,
dénouement, portée de la satire
Le Médecin volant – L’Amour médecin – 23
EXPLOITATION
D U G R O U P E M E N T D E T E X T E S
Avec Le Vilain mire et Knock, le groupement inscrit le texte de Molière dans une tradition qui fait des
médecins des cibles de la satire. Les deux autres passages proposent une image différente des médecins.
On pourra étudier :
– La tradition de la satire : quelle image du médecin nous donne-t-on ? Quelles sont les ruses mises
en place ? Pourquoi fonctionnent-elles ? Comment s’exprime l’autorité du médecin ? Comment et
pourquoi les malades se laissent-ils impressionner et tromper par le médecin ?
– Les autres images de la médecine : dans les deux autres textes, le médecin est dévoué. On pourra en
relever les marques. Mais on opposera deux visions : Bardamu est impuissant et la misère du monde
(la maladie, le milieu défavorisé) pèse trop lourd ; Henry Perowne, lui, réussit. On pourra également
comparer l’attitude des patients (ou de leur entourage dans le passage de Céline).
Pistes de recherches documentaires – 24
PISTES DE RECHERCHES
D O C U M E N T A I R E S
◆ La médecine
• Hippocrate
• Les connaissances médicales à l’époque de Molière
• Les grandes avancées de la médecine au fil des siècles
◆ La commedia dell’arte
• Les personnages
• Les canevas
• Les lazzi
• L’histoire : comment ce théâtre italien a-t-il été introduit en France ?
• Les représentations picturales du personnage d’Arlequin
◆ Le théâtre
• Les métiers du théâtre
• La gestion d’un théâtre
• L’architecture des théâtres (des tréteaux à la salle prestigieuse)
◆ Chez Molière
• La satire des médecins : repérer les vrais et les faux médecins dans les pièces de Molière et réfléchir à
la mise en scène de ces passages
• Le schéma traditionnel de l’intrigue et les personnages types (en s’appuyant sur Le Médecin malgré lui
et Le Malade imaginaire)
BIBLIOGRAPHIE
C O M P L É M E N T A I R E
◆ Sur Molière et son œuvre
– Jean-Pierre Collinet, Lectures de Molière, coll. « U2 », Armand Colin, 1974.
– Patrick Dandrey, Molière ou l’Esthétique du ridicule, Klincksieck, 1992 (rééd. 2002).
– Patrick Dandrey, « L’Amour médecin » de Molière ou le Mentir-vrai de Lucinde, coll. « Jalons critiques »,
Klincksieck, 2006.
– Georges Forestier, Molière, coll. « En toutes lettres », Bordas, 1990.
– René Jasinski, Molière et « Le Misanthrope », Nizet, 1983.
– Alfred Simon, Molière par lui-même, coll. « Écrivains de toujours », Le Seuil, 1957.
– Site Internet : www.toutmoliere.net.
◆ Sur le théâtre
– Michèle Clavilier et Danielle Duchefdelaville, Commedia dell’arte : le jeu masqué, Presses
Universitaires de Grenoble, 1999 (rééd. 2013).
– Bernard Jolibert, La Commedia dell’arte et son influence en France du XVIe au XVIIIe siècle, coll. « Univers
théâtral », L’Harmattan, 2000.
– Jacques Scherer, La Dramaturgie classique en France, Nizet, 1950 (rééd. Armand Colin, 2014).