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ISTANBUL

2021 / 1442 H
© Éditions Erkam - Istanbul: 1442 / 2021

Osman Nûri TOPBAŞ

Titre original: Hz. Muhammed Mustafa r


1. Cilt Mekke Devri
2. Cilt Medine Devri
Auteur: Osman Nûri Topbaş
Traducteur: Musa Belfort, Adem Dereli
Éditeur: Mohamed Roussel
Mise en page: Rasim Şakiroğlu
ISBN: 978-9944-83-425-4
Adresse: Ikitelli Organize Sanayi Bölgesi Mah.
Atatürk Bulvarı, Haseyad
1. Kısım No: 60/3-C
Başakşehir / Istanbul - Turquie
Tel: (+90-212) 671-0700 pbx
Fax: (+90-212) 671-0748
E-mail: info@islamicpublishing.org
Web: www.islamicpublishing.org
Imprimé par: Éditions Erkam
Language: French

ÉDITIONS
ERKAM
À LA LUMIÈRE DU SAINT CORAN LA CHAÎNE DES PROPHÈTES

Osman Nûri TOPBAŞ

ÉDITIONS
ERKAM
Dieu dit dans le Coran à propos du Saint Prophète r :

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« Et tu es certes d’une moralité éminente. » (al-Qalam, 68 :4)
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Ɔ ïŽ ĝƆ ĤƆ
« En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle
[à suivre], pour quiconque espère en Allah et au Jour dernier et
invoque Allah fréquemment. » (al-Azhab, 33 : 21)

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Ɔ Ɔ ĥāƆ ƇĺįƇ ÝƆ ġƆ ÐŻĨƆ IJ Ɔ Ʃ Īƈƪ Ì
« Certes, Allah est Ses Anges prient sur le Prophète ; ô vous qui
croyez priez sur lui et adresses [lui] vos salutations. » (al-Azhab, 33 : 56)

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« (…) Prenez ce que le Messager vous donne ; et ce qu’il vous
interdit, absentez-vous en ; et craignez Allah car Allah est dur en puni-
tion. » (al-Hashr, 59 : 7)

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Ƈ ĈÈÒijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
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Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ž Ž Ɔ Ɔ Ƈ ƪ
« Ô vous qui avez cru ! Obéissez à Allah, obéissez au Messager, et
ne rendez pas vaines vos œuvres. » (Muhammad, 47 : 33)

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Ɔ Ļƈž ×ĭĤÒ
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Ɔ ğƆ ÑÃĤIJÉĘƆ Ģij Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ʃ  ďƈ ĉƇĺīŽ ĨƆ IJƆ
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Ɔ ğƆ ÑÃĤIJƇÈīƆ ùƇ èƆ IJ Ɔ īĻƆ éĤÓāĤÒ ƪ IJ Ɔ ÅÒïƆ ıƆ ýĤÒ Ɔ Ɔ ž IJƆ
« Quiconque obéit à Allah et au Messager... ceux-là seront avec
ceux qu’Allah a comblés de Ses bienfaits: les prophètes, les véridiques,
les martyrs, et les vertueux. Et quels compagnons que ceux-là ! » (an-
Nisa, 4 : 69)

ħĻčƈ đƆ ĤŽ ÒĸƇ õŽ íƈ ĤŽ ÒğƆ ĤðÓ


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Ƈ ƆƪƆ Ɔ Ɔ Ƈ
« Ne savent-ils pas qu’en vérité quiconque s’oppose à Allah et à
Son messager, aura le feu de l’Enfer pour y demeurer éternellement ?
Et voilà l’immense opprobre. » (at-Tawba, 9 : 63)
īĻ ƈ ƈ Ɔ
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĥŽ žĤÙƃ ĩƆ èŽ ò
Ɔ źƈƪ ÌĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ÈÓĨƆ IJƆ
« Et Nous ne t’avons envoyé qu’en miséricorde pour l’univers. »
(Al-Anbiya, 21 : 107).

ħĻèƈ ò ĖIJÊòīĻĭƈ Ĩƈ ËĩĤÓƈÖħġĻĥĐÿĺ ƈóèħÝĭƈ ĐÓĨįƈ ĻĥĐõĺ ƈõĐħġùƈ ęĬƆÈīĨ


ƈ ĢijøòħĠÅÓäïĝĤ
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ž Ƈ ŽƆ Ɔ Ƅ Ɔ Ž ƫ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ƅ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ž ž Ƅ Ƈ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
« Certes, un Messager pris parmi vous, est venu à vous, auquel
pèsent lourd les difficultés que vous subissez, qui est plein de solli-
citude pour vous, qui est compatissant et miséricordieux envers les
croyants. » (At-Tawba, 9 : 128).

ħĻèƈ ò òijęĔųÒIJħġÖijĬðħġĤóęƈ ĕĺIJųÒħġ×ƈ×éĺĹĬij ƈ đƈ×ÜÓƪ ĘƆ ųÒ Ɔ ×ƫ éƈ ƇÜħŽ ÝĭƇ ĠĪƈ


Ɔ Ʃ Īij Ƈ ÌģŽ ĜƇ 
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƇƩ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƇƇ Ž Ƈ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ ƇƩ Ƈ Ƈ Ž Ž Ƈ Ƈ
Dis : ‹ Si vous aimez vraiment Allah, suivez-moi, Allah vous aime-
ra alors et vous pardonnera vos péchés. Allah est Pardonneur et Misé-
ricordieux. » (Al-Imran, 3 : 31).

ƈ ƈ ųÒÒijđĻĈƈ ƆÈģŽ ĜƇ
Ɔ Ʃ Īƪ Íƈ ĘƆ ÒŽ ijŽ Ĥƪ ijƆ ÜĪƈ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒÕƫ éƇĺƆźųÒ
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Ɔ øƇ óĤÒIJ
ƪ Ɔ ƆƩ Ž Ƈ
Dis : ‹ Obéissez à Allah et au Messager. Et si vous tournez le dos...
alors Allah n’aime pas les infidèles ! » (Al-Imran, 3 : 32).

ƃÓĩĻĥƈ Đ ƅ Ɔ ģƈ ž ġƈ ƈ Ʃ Ģij ƈ ħġƇ ĤÓƈ äòī ƈ ƅ Ɔ Ɔ


Ɔ ÅĹŽ ü Ƈ ÖƇųÒ
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ƪ ġĤƆ IJ ž ïèƆ ÈÓÖƆ ÈïƄ ĩƪ éƆ Ĩ
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Ɔ Ĩƪ
« Muhammad n’a jamais été le père de l’un de vos hommes, mais
le messager d’Allah et le dernier des prophètes. Allah est Omniscient. »
(Al-Azhab, 33 : 40).

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Ɔ ĢƆ õžƈ ƇĬÓĩƈƆ ÖÒijƇĭĨÆ
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Ɔ ÚÓéƆ ĤÓāĤÒÒij
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Ɔ ħŽ ıƇ ĭŽ Đ Ɔ ħŽ ƈıƈÖž òī
ƪ Ĩěƫ éƆ ĤŽ ÒijƆ İƇ IJƆ
« Et ceux qui ont cru et accompli de bonnes œuvres et ont cru en
ce qui a été descendu sur Muhammad - et c’est la vérité venant de leur
Seigneur - Il leur efface leurs méfaits et améliore leur condition. » (Mu-
hammad, 47 : 2).
Le Messager de Dieu r a dit :

« J’ai été envoyé pour parfaire la moralité. » (Muwatta’, Husn’ul-Khuluq, 8)


« Tout ce qui est sur terre et dans les cieux savent que je suis le Messager
de Dieu excepté les humains et les djinns désobéissants. » (Ahmad ibn Hanbal,
Musnad, III, 310)

« Je vous laisse deux choses si vous vous y tenez vous ne vous égarerez
jamais, le Livre de Dieu (le Saint Coran) et la Sunna (la Tradition) de Son
Prophète. » (Muttawa’, Qadar, 3)
« Je serai le premier d’entre vous à atteindre le Bassin d’al Kawthar et
c’est là que je vous rencontrerai ! Notre lieu de rencontre sera le Bassin. Je le
vois en ce moment même ! Je témoignerai en votre faveur ! On m’a donné à
cet instant les trésors de la terre ainsi que leurs clés. Par Allah, je ne crains
point que vous retourniez après moi à l’idolâtrie, mais je crains que vous
vous laissiez emporter par la cupidité de ce monde et que vous deveniez
jaloux les uns des autres, vous entretuant et périssant tout comme ceux qui
ont péri avant vous ! » (Al Boukhari, Janaiz, 73 ; Muslim, Fadail, 31).
« Soyez assurés que je vous précéderai et que je vous attendrai ! Soyez
conscients que (dans l’Au-delà) notre lieu de rencontre sera le haut du Bas-
sin d’al-Kawthar. Celui qui demain veut me rencontrer doit tenir ses mains
et sa langue éloignées du péché. » (Al Boukhari, Salât, 80 ; Ibn Sa’d, II, 227).

Et de Mawlânâ Rumî ç :

“Tant que je porte la vie dans ce corps, je suis l’esclave du Coran et la


poussière sur le chemin de Muhammad l’élu…
Mes plaintes demeureront contre quiconque ira à l’encontre de ceci.”
7

AVANT-PROPOS

Le Premier et le Dernier Lien dans la Chaîne des Prophètes,


Le plus Noble dans les Deux Mondes,
Le Prophète des Hommes et des Djinns,
L’Imam de la Sainte Cité,
La Lumière de tout Être et Miséricorde pour l’Univers,

Le Prophète Muhammad Mustafâ


-Que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui- 1

Considérant le fait que toute chose venue à l’existence, sur le plan de la raison,
provient de la Lumière de Muhammad, il est impossible de rendre justice par ces
mots humbles, à la vie, si unique et sans tache, d’un homme honoré comme étant
le « Bien-aimé » par le Créateur. Pourtant, d’innombrables avantages attendent
chaque personne, selon l’aptitude de chacune, quand on tente de raconter la vie du
Saint Prophète r et de transmettre ses caractéristiques aux générations nouvelles.
Ainsi, nous nous considérerons honorés si par ce travail nous pouvons recevoir un
tant soit peu un aperçu du caractère exceptionnel du Saint Prophète r et imiter sa
grande moralité. Que l’on sache que nous sommes loin d’avoir tout compris et tout
expliqué sur la personnalité du Saint Prophète r comme il fut. En respect pour la
magnificence du Messager de Dieu r, nos paroles devraient plutôt être considérées
comme un mince rayon de lumière qui perce à travers le feutre d’une lampe. Dieu
déclare en effet :

īĩƆ žĤƈ ÙƄ ĭƆ ùƆ è ƈ Ʃ Ģijƈ øòĹĘ ƈ ħġƇ ĤƆ ĪÓ


Ɔ ØƄ ijƆ øŽ ƇÈųÒ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž ƆƆ
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Ɔ óƆ ìŴÒ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ʃ äƇ óŽ ĺƆ ĪÓ
Ɔ ĠƆ
« En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle [à suivre],
pour quiconque espère en Allah et au Jour dernier et invoque Allah fréquem-
ment. » (al-Azhab, 33 : 21)
1. Formule de révérence abrégée en arabe dans le livre par r (Sal Allahou aleihi wa sallem).
8 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Puisque le Tout-Puissant jure par la vie du Saint Prophète r pour démontrer


l’importance de son existence : ĞƆ óĩŽ đƆ ĤƆ « Par ta vie !.. » (al-Hijr, 15 : 72). Il est impossible
Ƈ
de bien comprendre par de simple mots une telle existence si exaltée et imposante.
Sheikh Ghalib, une des plus grandes figures de la poésie classique ottomane,
exprime par les vers suivants son amour et à son respect envers le Saint Prophète r :
Maître… Le Sultan de tous les prophètes, un illustre roi,
Tu es l’éternel remède, Maître, pour les désespérés et les souffrants,
Maître, tu es l’âme la plus précieuse dans la demeure du Seigneur,
Qui a juré sur ta vie, Maître, par des paroles divines appuyées,
Ahmad, Mahmud et Muhammad, tu es, louangé de toutes les façons,
Une miséricorde pour nous de la part du Seigneur, intensifiée par le Divin…
Si élevée que puisse être la valeur du Saint Prophète r auprès de Dieu, Lui-
même considère l’obéissance due au Saint Prophète r semblable à celle qui Lui est
due.
Même une petite désobéissance à l’égard du Saint Prophète r est suffisante
pour annuler des actes religieux et les rendre dénués de sens. Le respecter est consi-
déré comme un critère de piété ; même s’adresser à lui improprement est considéré
comme un résidu de l’ignorance. Dieu le Glorieux a ainsi affirmé la nécessité de
respecter le souvenir du Saint Prophète r dans nos cœurs et sur nos langues, nous
prescrivant également de le citer au cours de chacune de nos prières quotidiennes :

įƇ ÜÓƇ ĠƆ óÖƆ IJ ƈ ÙĩèòIJĹƈ×ĭĤÒÓıĺƆÈğĻĥĐĦŻùĤÒ


ųÒ
Ɔ Ɔ Ʃ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ƫ ƪ Ɔ ƫ Ɔ ŽƆ Ɔ Ƈ Ɔ ƪ Ɔ
« Que la paix soit sur toi ô Prophète, ainsi que la miséricorde et les bénédictions
de Dieu ! »
Alors que saluer une personne lors de l’accomplissement de la prière prescrite
l’annule en temps normal, Dieu a non seulement exempté le salut de Son Prophète
de ce principe légal, mais il l’a rendu obligatoire.
L’imam al-Ghazali g a déclaré à ce propos :
« De même que vous envoyez vos salutations au Prophète durant la prière (salât),
considérez-le comme étant présent en personne, dans votre cœur. Soyez assurés que
vos vœux sauront l’atteindre et il vous répondra même de meilleure façon. » (İhyâu
Ulûmi’d-Dîn, I, 224)

Dans la quatrième lettre de son Maktûbât Khalid al-Baghdadi g, le fameux


Sheikh Naqshbandi, cite le fameux érudit Shihâb ibn-i Hajar al-Makki comme ayant
affirmé :
Avant-propos 9

« Quand nous récitons « as-salâmu ‘alayka » en position assise pendant la prière,


ce salut est adressé au Saint Prophète r, comme si le Tout-Puissant informait Son
Messager r de la prière de ses disciples.
Ainsi le Saint Prophète r étant témoin de la prière de ses disciples dans ce
monde, témoignera en leur faveur dans l’au-delà.
En outre, notre prière, se souvenant que sa présence spirituelle nous accom-
pagne, permettra d’accroître la conscience du cœur et la concentration. »2
Il est difficile de vraiment comprendre et d’expliquer l’immense et précieuse vie
du Saint Prophète r, un homme dont l’univers peut se vanter.
En mentionnant son nom béni, nous avons seulement l’intention d’honorer nos
mots, et peut-être prendre part à cet honneur nous-mêmes. Par conséquent, nous
implorons nos lecteurs d’excuser la faiblesse de nos mots dans cet effort de vouloir
démontrer la grande valeur du Saint Prophète r.
Les langues, elles aussi, souffrent sans aucun doute de la même incapacité cau-
sée par l’inaptitude à voir et à méditer sur le Gracieux Messager r de comprendre
ce fait.
Le Saint Prophète r est un royaume éternel de mystère dont l’accès est déterminé
en fonction de la force et de la sincérité de l’amour dû à son égard. Nous demandons
l’aide de Dieu pour qu’Il nous accorde l’accès à la vie bénie du Noble Prophète r et la
capacité de puiser dans sa conduite exemplaire et qu’Il nous pardonne pour les erreurs
que nous avons faites en tentant de traduire en paroles sa vie illustre.
Dans l’esprit de nos pieux prédécesseurs, nous vous prions de répéter :
Ô Dieu ! Où donc les pécheurs peuvent-ils trouver refuge si Tu ne pardonnes
qu’aux serviteurs pieux et obéissants ? Où peuvent-ils mendier si Tu ne fais montre
de miséricorde qu’aux pieux et aux craignant-Dieu ?3
Et nous aussi, nous trouvons refuge dans le vaste océan de la miséricorde divine
et implorons Son pardon pour les lapsus involontaires occasionnés par notre langue,
forgés par nos défauts et l’audace avec laquelle nous avons établi d’élaborer la vie
du Noble Prophète r, conscients de la portée limitée des mots que nous avons pu
fournir.
Ô Dieu ! Pour l’amour du Prophète Muhammad Mustafâ, de grâce, pardonne-
nous.
Amin !

2. Maktûbât-ı Mawlânâ Khâlid, p. 118; Risâlatu’r-Râbıta, (Mawlânâ Safiyyuddîn, dans le commentaire


de Rashahat) p. 225-226.
3. Bayhaqî, Shuabu’l-Îman, II, 26 ; Ghazalî, Ihyâ, I, 338.
10 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Chers lecteurs !
Le travail que nous présentons ici est la version enrichie du quatrième volume
de Nebiler Silsilesi (la Chaîne des Prophètes), d’abord publiée en langue turque.
Les trois premiers volumes ont porté sur la vie des prophètes antérieurs.
Le quatrième volume, un aperçu de la vie et de l’époque du Prophète Muham-
mad r, a été dans cette nouvelle édition regroupée dans un seul volume, composé
de trois parties : la première traitant de l’existence de la Lumière des Mondes avant
l’apostolat prohétique, la deuxième traitant de la période mecquoise.
Je remercie sincèrement Murat Kaya pour son aide à trouver les sources des
hadiths relatifs à la vie du Saint Prophète r.
Mes remerciements vont également aux traducteurs, MM Adem Dereli et Musa
Belfort, qui ont accompli un excellent travail en proposant ce texte en langue fran-
çaise.
Je veux mentionner aussi avec respect les noms des auteurs précédents ayant un
rapport avec la vie du Saint Prophète r et son époque.
Je demande le pardon et la miséricorde de Dieu en leur nom.
Le succès vient de Dieu Seul !

Osman Nuri Topbaş


Avril 2012
Üsküdar / Istanbul
11

INTRODUCTION

La primauté de la vie du Saint Prophète r pour apprendre et vivre l’islam


Beaucoup de facteurs influencent l’éducation et l’enseignement de l’être humain
qui a tout d’abord besoin d’une personnalité qui lui serve de modèle et de guide dans
tous les domaines. Car l’homme forme toutes les pensées, les croyances et les activi-
tés religieuses comme la langue les caractéristiques morales en les habituant par les
exemples qui lui sont exposés et les impressions qu’il reçoit. Même s’il y a quelques
petites exceptions, en général, la situation est telle.
Par exemple, un enfant apprend, en tout premier lieu, la langue de ses parents,
puis il peut en apprendre une seconde, une troisième et même une quatrième par
rapport aux modèles et aux exemples qu’il prendra en compte.
La tendance naturelle de l’homme pour l’imitation est un facteur important
dans la formation de sa personnalité. Pour cette raison, l’éducation de l’homme n’est
qu’une imitation de modèles positifs et négatifs et demeure influencée par sa mère,
son père, la famille dans laquelle il grandit, le quartier dans lequel il vit, selon les
capacités d’imitation qui sont les siennes et en qualité d’individu bon ou mauvais qui
se joint à la communauté.
En revanche, chez l’homme, l’apprentissage de la langue et des éléments simi-
laires ne constituent pas, en général, une grande difficulté ; mais pour la formation
de son univers religieux, moral et spirituel, des obstacles importants et sévères appa-
raissent. Car en effet la volonté divine est donnée à l’être humain pour son propre
examen et les deux grands obstacles que sont l’ego (nafs ou âme instigatrice du mal)
et « Satan », qui ne le quittent jamais, dans l’imitation et la pratique de ce type de
vertus, l’amènent un grand nombre de fois à montrer un penchant dans le sens
contraire.
De ce point de vue, l’univers moral de l’homme doit être formé par le Saint Pro-
phète r et les amis de Dieu qui sont des personnes supérieures et parfaites.
Dans le cas contraire, l’homme sera incapable de montrer facilement sa volonté
de se protéger contre son inclination à l’inadvertance, l’erreur et la révolte. De cette
façon, il ne pourra pas éviter qu’un bonheur éternel ne devienne un désastre.
12 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

De là, l’homme a besoin de guides qui possèdent une finesse d’âme, de la grâce
et un cœur rempli de délicatesse. C’est aussi pour cette raison que l’homme suit les
traces de ceux qui les captivent –bons ou mauvais- et sur lesquelles il se modèle.
Il est tragique de constater qu’aujourd’hui des personnes se mettent, eux-
mêmes et leur bonheur éternel, en danger pour tenter de ressembler à ces individus
qu’elles prennent en exemple, alors que ces individus sont sous l’emprise constante
d’un désir de libertinage et soumis à une pauvreté morale. Cette tromperie atroce
est due, en fait au vide laissé dans les cœurs. Au final, ces personnes finissent par
s’abuser elles-mêmes.

Mawlana Jalal Eddine Rumî ç 4 a ainsi exprimé l’étrange attitude de l’homme :


« On ne peut pas s’étonner de la fuite de l’agneau devant le loup. Car le loup est
l’ennemi de l’agneau. Mais il est ahurissant que l’agneau s’éprenne du loup ! »
C’est pour cela qu’il nous appartient, dans ce monde d’examen temporel, pour
que nous ne nous éprennions pas du loup et finissions condamné à la punition éter-
nelle, de nous soumettre avec amour et affection à l’Aimé de l’univers, le Prophète
Muhammad Mustafâ r que Dieu nous a envoyé, nous Ses sujets, comme le modèle
suprême de personnalité : «Uswa al-Hassana ».
Nous devons en faire l’unique sultan de nos cœurs et le guide de notre vie. Car
l’aimer est pour nous une obligation. (Voir Coran, at-Tawba, 9 : 24).

Dieu le Tout-Puissant a dit :

ƈ īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÓƈÖĵĤƆ IJƆÈĹƈ×ĭĤÒ


ħƈ ƈıùƈ ęƇ ĬƆÈīŽ Ĩ
Ž Ɔ Ƈ Ž ƫ ƪ
« Le Prophète a plus de droit sur les croyants qu’ils n’en ont sur eux- mêmes
(…) » (al-Azhab, 33 :6).
Selon un fameux hadith, rapporté par Abû Hurayra t,5 le Saint Prophète r
indique que l’amour à son égard est une des conditions de la vraie foi.
Il r a en effet déclaré ce qui suit :
« Par celui qui a ma vie entre Ses mains, aucun de vous n’a la vraie foi s’il ne
m’aime pas plus que son père, sa mère, ses enfants et tous les hommes. » (Al Boukhari,
Iman, 8).

4. Quddis Allah sirruhu formule en langue Arabe de révérence pour les Saints maîtres soufis. Cela
signifie Qu’Allah sanctifie son secret.
5. Formule de révérence pour tous les Compagnons du Noble Prophète r qui en Arabe signifie Radhi
Allah Anh (Que Dieu soit satisfait de lui).
Introduction 13

Selon un autre hadith rapporté par Anas t, la douceur de la foi ne se déguste


que lorsque Dieu et Son Prophète r deviennent plus chers au croyant que toute
autre chose.6
Un récit raconté par Abdullah ibn Hishâm t est significatif et montre jusqu’à
quel niveau doit être porté l’amour envers le Saint Prophète r :
« Un jour, le Prophète de Dieu r prit la main d’Omar t qui se promenait avec
lui pour l’inciter à s’écrier :
- Par Dieu, je t’aime tant.
- Encore plus que tes enfants ? lui demanda le Saint Prophète r.
- Oui !
- Plus que ta famille aussi ?
- Oui, Prophète de Dieu.
- Plus que ta richesse ?
- Oui, Prophète de Dieu, plus que ma richesse !
- Et même plus que toi-même ? demanda ensuite le Messager de Dieu.
- Non, Messager de Dieu, répondit Omar t en hésitant.
- Tant que tu ne m’aimeras pas plus que toi-même ta foi ne sera pas complète.
Alors Omar t partit resta un moment seul et revint quelques temps plus tard.
Debout au milieu de la mosquée, il cria à plein poumons :
- Messager de Dieu, à présent je t’aime plus que moi-même !
- C’est cela Omar, c’est cela ! répondit le Noble Messager r, ce qui signifiait
entre autres que la foi d’Omar t était désormais complète. » (Al Boukhari, Aymân, 3)
La première condition et le premier fruit de l’amour, c’est de ne pas oublier
l’objet aimé ; c’est de l’approuver dans ses paroles, ses actions, ses attitudes et ses
pensées.
Pour acquérir un cœur rempli d’amour à l’égard du Saint Prophète r, il faut
tout d’abord apprendre la totalité de sa Sunna et la transposer dans nos attitudes et
comportements, en toute obéissance et sentiment profonds. Car sans connaître sa
vie, sans que les cœurs ne puissent s’orner de son amour, l’islam ne peut être vécu
convenablement.
6. Deux autres caractéristiques, c’est d’aimer ce qu’aime Dieu et de ne pas retourner au monde de la
parjure quand Dieu sauve de la parjure, car c’est un chemin méprisable et dangereux, autant que
vouloir se jeter dans le feu. (Voir Al Boukhari, Iman, 9, 14 ; Muslim, Iman, 67)
14 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le chemin pour obtenir l’amour de Dieu passe nécessairement par l’amour du


Saint Prophète r ; et sans aimer à l’extrême le Saint Prophète r, on ne peut parfaire
sa foi. Il n’est pas possible de vivre une réelle affection sans le connaître et d’avoir
une foi réelle sans développer dûment cette affection. C’est pour de telles raisons que
l’obtention de l’amour de Dieu est liée à son obéissance. C’est également la raison
pour laquelle le Messager de Dieu r fut aussi pointilleux quant à ce sujet et ressentit
le besoin de le souligner avec insistance.
Le caractère de Muhammad Mustafâ r, le chef des prophètes, est un océan de
valeurs. Lui, selon les récits, a obtenu l’ensemble des caractéristiques des 124 000
prophètes connus ou méconnus venus avant lui ; il fut au sommet de la bonne mora-
lité et des nobles attitudes. En complément des améliorations qu’il a apportées au
vécu et à la pratique des hommes de son époque, il fut envoyé comme un modèle
de personnalité pouvant répondre aux besoins des hommes jusqu’au Jour Dernier,
comme le « Prophète du Jour Dernier ». Il est « Khatamu’n Nabiyyîn ».
Dans l’Histoire, le seule être et le seul prophète dont la vie est intégralement
connue jusqu’au moindre détail est Muhammad Mustafâ r.
Dans la chaîne des prophètes, des merveilles de comportement qui peuvent être
chacune des exemples permettant à l’homme d’atteindre ce qui est bien et juste ne
furent amenées jusqu’à nos jours que dans des proportions limitées.
En revanche les actes, les paroles et le monde du cœur exprimés par le Prophète
du Dernier Jour sont toujours considérés comme un tableau d’honneur. De plus,
tel un présent de Dieu, ils ont obtenu la spécificité d’atteindre tous les hommes, des
siècles passés jusqu’au Jour du Jugement dernier.
En conséquence, ce qui rend la morale de l’islam supérieure en la faisant passer
de la théorie à la pratique et qui la place au-dessus des autres systèmes de morale,
c’est la stricte identification des critères de la vie sacrée de notre Saint Prophète r,
c’est-à-dire ses états et ses comportements, et le fait de les avoir amenés jusqu’à nos
jours, les ayant ainsi solidement protégés tout au long des siècles.
Nous, êtres humains, ne devons pas perdre notre équilibre devant les catas-
trophes, les accoutumances et les surprises de la vie, afin de nous protéger des
conspirations, à côté de caractéristiques telles que le remerciement, la croyance, l’ac-
ceptation du destin, la patience devant l’adversité, la foi, le sacrifice, la conviction,
la richesse de cœur, le courage, la générosité et la modestie, en face des orages et des
raz-de-marée liés aux évènements.
Dieu a offert le Saint Prophète r aux hommes afin qu’il soit un sublime modèle
de grâce, de pureté et de chasteté. Dieu, qui l’a fait naître orphelin au sein de la
communauté des hommes, au plus bas en matière d’impuissance et en l’ayant fait
passer par toutes les étapes de la vie, l’amena au point le plus élevé dans le domaine
Introduction 15

du pouvoir et de l’autorité, c’est-à-dire au niveau de prophète et de chef d’État. Le


Saint Prophète r, au travers des étapes qu’il a vécues tout au long de sa vie, dévoila
beaucoup de comportements idéaux pouvant être un réconfort pour tous les types
d’évènements bouleversants que peuvent subir les hommes dans leur vie. C’est pour
cela que sa vie est unique et sublime pour tous les hommes qui peuvent imiter ses
actions en proportion de leur pouvoir et leurs aptitudes.
En d’autres termes, pour que l’islam puisse être compris par toutes les per-
sonnes issues des différentes classes, la vie sacrée du Messager de Dieu r fut un lieu
de pratique active.
En face de cette grandeur de Dieu, la tâche qui nous incombe est de faire les
efforts nécessaires pour apprendre et expérimenter avec un cœur rempli de foi la vie
sacrée et chaste du « Seigneur des mondes ».
Nous devons affirmer qu’il est autant important de connaître les critères indis-
pensables pour le prendre en exemple que de savoir que le Saint Prophète r est pour
nous un guide et un modèle exceptionnels.
En effet, ses actes et attitudes sont formés de deux catégories :
1. Ceux qui lui sont propres.
Par exemple, le fait qu’il ait passé ses nuits en prière jusqu’à avoir les pieds gon-
flés, qu’il ait jeûné sans manger, qu’il ait donné tout ce qu’il possédait en charité,
autant que la montagne d’Ohoud, à l’exception de ses dettes, qu’il n’ait rien laissé en
héritage, qu’il ait interdit d’accepter la charité et l’aumône pour lui et ses descendants
jusqu’à la fin des temps. Il a dit à ce propos :
« Je suis aussi un être humain, tout comme vous… » (Al Boukhari, Salât 31, Ahkâm 20)
« Je ne suis qu’un homme comme vous ; je suis nourri et abreuvé par Dieu… » (Al
Boukhari, Sawm 49 ; I’tisam 5 ; Muslim, Siyam 57-61)

Les croyants, de les toutes façons qui ne peuvent pas avoir la force nécessaire
pour le suivre dans ce domaine, ni faire ce qu’il a fait tant sur le plan matériel que
moral, ne pouvent rien résoudre de par leur état. Ces actes ne sont donc applicables
que par lui, les disciples n’étant pas autorisés à le suivre de la même manière.
2. Ceux qui concernent tout le monde
Ces actes qui doivent être universellement imités, sont la Sunna du Saint Pro-
phète r qui est, pour tous les êtres humains de toute classe, applicable en fonction de
leurs capacités. Nous ne sommes donc pas obligés d’imiter les vertus du Saint Pro-
phète r décrites dans la première section car elles sont aussi élevées que les cieux et
nous sommes incapables de suivre. Mais quant aux comportements, agissements et
paroles rentrant dans la seconde catégorie, nous en sommes responsables et devons
16 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

nous les appliquer selon la mesure de notre pouvoir tout au long de notre vie, en
les imitant et en les appliquant en marchant selon la trace lumineuse qu’il a laissée.
Cela signifie que le Saint Prophète r est en tous points un modèle même celui de
l’organisation militaire. Mais il faut attirer l’attention sur le fait que certains actes
de la Sunna et d’autres, ne sont que des permissions. Notre peuple Turc, qui montre
une grande volonté dans l’application de cet esprit en appelant ses membres « Meh-
metçik » (petit Muhammad) a ainsi voulu les orienter vers ce modèle. Il est égale-
ment très important d’assimiler la vie du Saint Prophète r pour saisir la sagesse et la
philosophie du Coran qui enseigne :

ƅ ƈ ƈ ƈ Ɔ ġƇ ÝĤƈ ğƈ ƈ ƈ
īĻƈ
ƅ ×Ĩ
Ƈ ĵƈž ƅ ÖóƆ Đ Ɔ ƈòñĭŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨĪij
Ɔ ĪÓùƆ ĥƈÖīĺ Ɔ Ɔ ×ĥŽ ĜƆ ĵĥƆ Đ
Ɔ īĻ
Ƈ ĨƆźÒŽ æIJ
Ƈ óĤÒ
ƫ įƈÖĢƆ õƆ ĬƆ
« Et l’Esprit fidèle est descendu avec cela sur ton cœur, pour que tu sois du
nombre des avertisseurs, en une langue arabe très claire. » (ash-Shuarâ, 26 : 193-195)
Et notre Saint Prophète r durant les vingt-trois années de sa mission prophé-
tique, l’a pratiqué de la plus belle des façons. au point que notre mère Aïcha c a dit
de lui : « Sa moralité était le Coran. » (Muslim, Musafirîn, 139). C’est pour cela qu’un
musulman ne peut bien comprendre le Coran sans connaître les hadiths sacrés de
notre Saint Prophète r et sa vie emprunte de vertu.7
En fait pour comprendre la culture islamique et la réaliser spirituellement
requiert inévitablement une grande source d’inspiration venant de ses vingt-trois
années de vie prophétique.
La vie spirituelle ne peut être parfaite que par l’énergie positive que dégage le
Messager de Dieu r.
Sa vie chaste est comme une peinture dans laquelle les beautés de l’islam sont
pleinement exposées.
Ni ceux qui appellent les gens à l’islam, ni ceux qui l’enseignent ne peuvent ac-
complir leur tâche sans connaître la vie bénie de leur Saint Prophète r, car il donne
les exemples les plus concrets autant en matière d’enseignement que d’appel à l’islam.
7. Si les paroles ne sont pas illustrées par des actes, on tombe dans l’erreur de pratique on a toujours
tendance à comprendre les choses abstraites par rapport à nos expériences et en fonction de notre
niveau de compréhension. Des exemples concrets portent sur la forme selon laquelle une vérité
abstraite donnée est censée se réaliser, ne laissant aucune place pour d’autres arguments. Ainsi donc
toutes les opinions proposées pour le bien de l’humanité conduisent à des différences variées dans
la pratique, du fait de leur manque de critères physiques et concrets. La pensée islamique, dans ce
sens, contient une richesse et une perfection incomparables et cela n’est possible que par le fait du
Saint Prophète r qui a solidifié l’ensemble du corps des vérités abstraites par son comportement
tout au long de sa vie et de son application immédiate, dans sa totalité, par les Compagnons y qui
providentiellement nous l’ont transmis.
Introduction 17

Une telle connaissance s’unira avec la connaissance du cœur, établissant un


équilibre entre les deux.
Un jeune homme voulant être digne de confiance dans sa société, un chef d’État
qui souhaite être juste avec ses concitoyens, un homme qui cherche à être un mari
et un père compatissant envers sa femme et ses enfants, un chef militaire qui s’ef-
force de réussir, en un mot, tous les musulmans provenant de tous les horizons de
la vie ont peuvet trouver leur meilleur exemple dans la vie du Saint Prophète (Sirah’an
Nabawiyyah).8

Le choix de la Péninsule Arabique comme berceau de l’islam


Pour mieux apprécier le choix de l’Arabie comme berceau de l’islam, il nous
faut connaître la nature, les traditions et les caractéristiques des Arabes ainsi que les
conditions sociales et géographiques de la région où ils vivaient.
Les deux superpuissances de l’époque, les Empires Byzantin et Perse étaient
tous deux voisins des terres arabes.
Les Byzantins avaient de nombreux vassaux et des problèmes avec leurs sujets
en matière de religion. Leurs dirigeants corrompirent le christianisme en le modi-
fiant en fonction de leurs caprices. Durant les conciles d’Église qu’ils tinrent, ils
proclamèrent saints certains passages scripturaires et d’autres comme hérétiques,
manipulant les règles de la foi chrétienne comme ils le souhaitaient. Ils utilisèrent
l’excommunication comme raison politique et il n’était pas rare que le nouveau sou-
verain excommunie le précédent. Les lourdes taxes appliquées sur les gens et la cor-
ruption rampante altérèrent la base de la société.
La Perse était aussi sous l’emprise du chaos moral et politique. Permettant à l’un
de se marier avec sa mère et même avec sa fille, le zoroastrisme fit effectivement des
ravages sur la dignité humaine. Le mazdéisme prétendait que tout comme l’air, l’eau
et le feu appartenaient à tous, des êtres humains exerçaient un droit similaire sur des
femmes qu’ils abusaient couramment, tout comme le reste de leurs propriétés.
La civilisation grecque était, quant à elle, dans le cercle vicieux et sans fin des
disputes philosophiques et des superstitions, alors que la civilisation indienne était
restée dans une phase primitive, à la fois moralement et socialement.
8. Johann Wolfgang Von Goethe a écrit : « Personne ne peut faire un pas au-delà des principes de
Muhammad. En dépit de tout les succès de l'Europe, tous les décrets et principes qui y ont été
décrétés sont insuffisants au regard de la culture islamique. Nous, nations d’Europe, en dépit de
toutes les possibilités dont notre civilisation est imprégnée, ne sommes que sur la première marche
de l’échelle là où Muhammad est à la dernière. Sans aucun doute, personne ne le battra dans cette
course. Et le Coran étant exceptionnellement pratique, ne cessera pa d’exercer une influence pour
l’éternité et recueillera d’autres nations autour de lui. »
18 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les Arabes, d’autre part, vivaient dans des sociétés très soudées, entourés par de
vastes déserts, et étaient éloignés de la menace des invasions militaires et culturelles.
Comme ils n’avaient jamais été colonisés ils étaient comme des matières premières
non corrompues par une culture étrangère. Des vertus comme l’honneur, la parole
donnée, la générosité, la reconnaissance, le courage et la patience, entre autres,
étaient encore très vivaces. Cependant ces caractéristiques qui tantôt régressaient,
tantôt évoluaient avaient malgré tout glissé de leur base naturelle. En l’absence d’un
guide apte à leur montrer le vrai chemin, ils vivaient dans les ténèbres de l’ignorance.
Leur ignorance et leur ego soumis à l’esclavage avaient voilé leurs bonnes parti-
cularités cachées sous leur nature humaine. Par peur d’être contraints à la prostitu-
tion dans le cas où ils seraient capturés comme esclaves lors des batailles, les Arabes
païens tuaient leurs filles en les enterrant vivantes, à la grande consternation de leurs
mères ; ou bien gaspillaient leurs plus élémentaires besoins pour protéger leur répu-
tation de générosité. Leur bravoure et leur intrépidité les incitaient à s’engager dans
des batailles incessantes. Le lendemain était toujours synonyme d’effusion de sang.
Avec l’avènement de l’islam et l’émergence du Noble Prophète r, l’ignorance
subit des modifications patentes et à la place des caractéristiques morales prirent
forme et trouvèrent un état de perfection, une direction positive, ce qui avait pour
résultat d’éliminer les mauvais penchants qu’ils avaient à l’intérieur.
Une autre raison pour expliquer pourquoi l’Arabie a été choisie comme le ber-
ceau du dernier Prophète r était de dissiper tout doute qui aurait découlé quant
à l’authenticité du Prophétat (ou Apostolat prophétique) du Messager de Dieu r.
Les Arabes, puisqu’ils étaient un peuple analphabètes, ne furent pas affectés par les
cultures et les philosophies des nations qui les entouraient. Si le Saint Prophète r
avait été un lettré bien au fait de la culture, de la connaissance des civilisations voi-
sines et du contenu de leurs textes sacrés, il aurait été évident que le doute se serait
installé quant à sa mission divine en l’ayant appris des autres. De la même façon, si
l’islam était apparu dans une culture ou civilisation ayant atteint un niveau détermi-
né comme la civilisation perse ou byzantine, il est évident que les hommes auraient
eu beaucoup de mal à accepter les obligations et principes de l’islam. En outre, cela
aurait conduit d’autres à penser que l’islam ne fût que le produit d’un environne-
ment donné et non le fruit d’une révélation du Tout-Puissant. Pour éviter ces doutes,
l’islam a donc été envoyé à une société analphabète par le biais d’un prophète illettré,
ne laissant aucune place pour valider l’affirmation selon laquelle l’islam a été le pro-
duit d’un prophète lettré et de gens cultivés.
L’Arabie avait aussi l’avantage d’occuper une place centrale dans la carte du
monde entre l’Europe, l’Asie et l’Afrique, facilitant par conséquent la propagation et
l’accessibilité de l’islam.9
9. Voir Muhammad Ilyas Abdulghanî, Târihu Makka, p. 12-13.
Introduction 19

Le Saint Coran décrit La Mecque comme un lieu impropre à l’agriculture10, né-


cessitant que la population locale se déplace dans le but de s’en sortir. Les sociétés
agricoles sont en principe très attachées à leur sol et n’aiment pas les longs dépla-
cements. Pareillement, les artisans sont attachés à leurs ateliers et donc ne sont pas
friands de déplacement non plus. Comme les commerçants, les Mecquois étaient
habitués à voyager sur de longues distances ceci s’est avéré être une bénédiction pour
la propagation de l’islam. L’avantage qu’ils avaient d’être en mesure d’aller dans des
pays lointains et leur expérience dans l’interagir avec d’autres personnes est une
autre raison pour laquelle l’islam a été envoyé au peuple de La Mecque.
La Volonté divine honora la langue arabe comme le véhicule de transmission en
raison des excellentes qualités qu’elle recèle. Par rapport à d’autres langues, la langue
arabe bénéficie de qualités supérieures en matière d’harmonie et de syntaxe, de pro-
duction de dérivations et de conjugaisons, et ainsi de suite.
La langue arabe a le pouvoir de transmettre des expressions profondes et
concises sans en perdre un seul détail.
Sa richesse permet au langage de transmettre les idées les plus abstraites dans la
plus admirable éloquence.
La langue arabe a très tôt complété son développement, ce qui en fait la seule
langue capable de transmettre la Volonté Divine dans l’expression la plus parfaite.
La Péninsule Arabique est également un environnement béni. Le grand-père du
Prophète Muhammad r y vécut et construisit la Ka’ba dont les fondations avaient
été aussi là, aussi vieilles que l’histoire de l’humanité. Avec une prise de conscience
de ce fait historique, les Mecquois se considéraient comme héritiers de l’héritage
spirituel d’Abraham et d’Ismaël L11. C’est un autre facteur qui a contribué à l’accep-
tation et à la compréhension de l’islam.
Bien que l’on puisse certainement énumérer beaucoup d’autres causes quant au
choix de cette terre particulière pour la révélation de l’islam, il se trouve finalement
derrière cela une sagesse dont nous sommes ignorants et qui est connue de Dieu
seul. Nous pensons donc être obligés de conclure cette étude par les mots suivants :
Įƈ îÒƈ óĩƈƇ ÖħĥƆ ĐŽ ƆÈƇųƩ ÒƆ « Dieu sait mieux ce qu’Il veut. »
Ɔ Ƈ

La Mecque : Mère des Cités


Connue sous le nom de Mère des Cités, La Mecque est aussi appelée « Becca »
ou « la cité sûre ». En babylonien La Mecque et Becca signifient « foyer ou maison ».
10. Voir la sourate Ibrahim du Saint Coran (14) verset 37.
11. Formule de révérence en Arabe qui signifie Que la paix soit sur eux (Alheyhim Salam) et qui est
employée pour révérer tous les Prophètes et les Anges.
20 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La grande région de La Mecque est entourée par le Yémen au sud, la Mer Méditer-
ranée au nord, le Golfe Persique à l’est et la Mer Rouge à l’ouest. Elle est à la croi-
sée des chemins de toutes les liaisons intercontinentales, en particulier l’Afrique, où
Djeddah, a joué un rôle important en reliant la Mecque aux routes maritimes. À La
Mecque, la zone où la Ka’ba est située était appelée al-Batha, et le centre de la cité
était appelé Batn’u Mecca.
La Mecque fut établie par Abraham u,12 le père des prophètes.
Abraham u avait une épouse nommée Sarah qui n’avait eu aucun enfant de
lui. Sarah donna à Abraham u sa servante Hajjar et tous deux se marièrent après
l’émancipation de cette dernière. De cette union naquit Ismaël u, à qui la Lumière
muhammadienne fut transmise, à la grande déception de Sarah qui eut espéré que la
lumière passât par elle. Réaliser que la lumière avait été transmise à Ismaël u plutôt
qu’à son ancienne servante Hajjar la rendit très triste. Elle demanda à Abraham u
de prendre Hajjar et Ismaël u et de les emmener ailleurs.
Ce fut bien sûr la raison apparente de celle qui est cachée et se trouve la plus
grande, à savoir la Volonté Divine. Par conséquent, en vertu de l’ordre de Dieu,
Abraham u les emmena à La Mecque, guidé sur le chemin par l’Ange Jibril u13 .
Parvenus à La Mecque, l’Ange u dit à Abraham u d’y établir sa famille.
Mais Abraham u dit en désaccord :
« Ce lieu n’est ni bon pour l’agriculture, ni pour l’élevage des bêtes. »
Gabriel u cependant le calma :
« En effet… mais de la descendance de tes fils, le Prophète illettré apparaîtra. Et
avec lui s’achèvera la Parole Divine, les mots de l’unicité (tawhid). » (Ibn Sa’d, I, 164)
Abdullah ibn Abbâs14 t raconte :

12 Formule de révérence en Arabe qui signifie Que la Paix soit sur lui (Aleyhi Salam) et qui est em-
ployée pour un prophète ou un ange.
13 Jibril u est le nom arabe de l’Ange Gabriel. Pour plus d’homogénéité nous avons choisi de ne faire
figurer dans le texte que le nom en Français tel que les savants interprètes du Saint Coran l’ont fait.
14. Abdullah ibn Abbâs t est le fils d’Abbâs t et le cousin du Saint Prophète r. Sa mère, Ummu’l Fadl
Lubaba, fut la femme qui accepta l’islam tout de suite après Khadîdja c. Quelques instants après sa
naissance, trois ans avant l’Hégire, on le remit au Saint Prophète r qui prit le bambin dans ses bras
et mit sur son palais une datte qu’il avait mâchée. En raison de cet incident, connu sous le nom de
tahnik, Ibn Abbâs t se distingua plus tard parmi les Compagnons y. Puis le Messager de Dieu r
pria personnellement pour lui à deux reprises, disant notamment : « Dieu, accorde-lui de profondes
connaissances en matière de religion et enseigne-lui le Coran ! » Ainsi il devint le Compagnon qui savait
le mieux le Coran, ce qui lui valut le surnom de « at-Tarjuman », l’interprète, le traducteur. Il était
aussi connu sous l’appellation de Hibr’ul-Umma, signifiant le plus connaissant parmi les croyants.
Incluant les répétitions, il rapporta au total 1600 hadiths. Devenu aveugle à la fin de sa vie, il décéda à
Ta’if en 687 (68H) à l’âge de 71 ans.
Introduction 21

« Le prophète Abraham u emmena à La Mecque notre mère Hajjar et son fils,


encore enfant. Il les laissa derrière un arbre situé près de la source de Zamzam en
attente d’être creusé. Il leur laissa également un panier de dattes et une outre d’eau.
Alors qu’il s’en retournait, Hajjar demanda :
« Est-ce Dieu qui t’a commandé de nous laisser ici dans cette terre aride ? »
« Oui » répondit Abraham u.
Puis Hajjar, faisant montre de grande soumission et de confiance en Dieu, dit :
« Dans ce cas, notre Seigneur nous protégera. Nous ne serons pas abandonnés. »
Puis elle retourna près de son fils Ismaël.
Puis Abraham u commença à s’éloigner et dès qu’il fut loin du regard de Haj-
jar et d’Ismaël, il leva ses mains vers le ciel et supplia :

ƈ Ďƅ òôĸ ƈ ƅ ƈ ƈ ĭŽ ġƆ øƆÈĹžĬƈ Ìƈ ÓĭƆ Öò


ïƆ ĭŽ Đ Ž Ɔ ð ƈóĻŽ ĔƆ îÒijƈƆ ÖĹÝĺƪ òžƈ ðƇ īŽ ĨÛ Ƈ Ž ƪƆ
ƈ ĭĤÒīĨ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
ħ ƈıĻĤƆ Ìƈ ĸ ƈijıŽ ÜƆ öÓ
Ž Ž ƪ Ɔ Øƃ ïƆ ÑĘŽ ƆÈģŽ đƆ äÓ Ž ĘƆ ØƆ ijĥſ āĤÒÒij
ƪ ĩĻ Ɔ Ħóƪ éƆ ĩƇ ĤŽ ÒğƆ ÝĻŽ ÖƆ
Ƈ ĝĻƇ ĤÓĭƆ Öƪ ò
ĪIJ ƈ óĩáĤÒ
Ɔ óƇ ġƇ ýŽ ĺƆ ħŽ ıƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ÚÒ ƈ ħıĜôòÒIJ
īĨ
ƆƆƪ Ɔ ŽƇ ŽƇ Ž Ɔ
« Ô notre Seigneur, j’ai établi une partie de ma descendance dans une vallée
sans agriculture, près de Ta Maison sacrée [la Ka’ba], - ô notre Seigneur - afin
qu’ils accomplissent la Salât. Fais donc que se penchent vers eux les cœurs d’une
partie des gens. Et nourris-les de fruits. Peut-être seront-ils reconnaissants ? »
(Ibrahim, 14 : 37) (Al Boukhari, Anbiyâ, 9)

Laissant son fils unique et son épouse au sein de cette terre aride Abraham u
invoqua Dieu de la manière suivante :

ƈ óĩáĤÒ
ÚÒ īĨƈ įĥİƆÈĚôòÒIJÓĭĨÆÒƈ ïĥÖÒñİģđäÒÔƈ ò
Ɔ Ɔƪ Ɔ ƇƆ Ž Ž Ƈ Ž Ɔ ƃ ƃƆƆ Ɔ ŽƆ Ž ž Ɔ
ƈóìŴ ƈ
ƈ ÒŽ Ħƈ ijĻĤŽ ÒIJųÓƈ ƈ
Ž Ɔ Ɔ Ʃ ÖħŽ ıƇ ĭŽ ĨīƆ ĨÆ
Ɔ īŽ ĨƆ
« Ô mon Seigneur, fais de cette cité un lieu de sécurité, et fais attribution des
fruits à ceux qui parmi ses habitants auront cru en Allah et au Jour dernier (…) »
(al-Baqara, 2 : 126)

Le Tout-Puissant accepta ses invocations, excluant les incroyants de Sa miséri-


corde et les menaçant dans les termes suivants :
22 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

óĻāƈ ĩƆ ĤŽ Ò÷Ɔ ÑƈŽ ÖIJ


Ɔ ƈòÓĭĤÒ
ƪ ÔÒ ƈ ñƆ Đĵ ƈ ƈ
Ɔ ĤƆ Ìƈ ĮƇ óƫ ĉƆ ĄŽ ƆÈħƪ ƇàƃŻĻĥĜƆ įƇ đƇ Ýž ĨƆ ƇÉĘƆ óƆ ęƆ Ġ
Ɔ īŽ ĨƆ IJ
Ɔ ĢÓƆ ĜƆ
Ƈ
« Et quiconque n’y aura pas cru, alors Je lui concéderai une courte jouissance
[ici-bas], puis Je le contraindrai au châtiment du Feu [dans l’au-delà]. Et quelle
mauvaise destination ! » (al-Baqara, 2 : 126).
Même de nos jours, en raison de l’invocation d’Abraham u, le Tout-Puissant
comble le cœur des pèlerins d’amour et de respect envers la Sainte Ka’ba. Les âmes
trouvent dans ces terres saintes une paix et une tranquillité inégalées.
Comme le peu d’eau laissée par Abraham u à Hajjar fut consommée en un
rien de temps elle courut sept fois entre les collines de Safa et de Marwa avec l’espoir
de trouver un peu d’eau. Ces deux collines sont distantes d’environ quatre cents
mètres. Elle surveillait son bébé du coin de l’œil en courant entre ces collines mais
il n’y avait aux alentours ni trace de vie, ni présence humaine, ni même d’oiseaux.
Hajjar atteignant une nouvelle fois la colline de Marwa entendit une voix lui
commander : « Garde le silence et écoute ! ».
Elle répondit : « Oui, je peux t’entendre. De grâce, secours-nous si tu le peux ! ».
Puis elle vit un ange u creuser avec ses ailes ou ses talons la source de Zamzam.
L’eau jaillit. Jubilant, Hajjar remplit d’abord sa cruche. Pourtant, plus elle prenait de
l’eau dans ses mains, plus elle jaillissait.
Elle commença immédiatement à creuser un petit puits à l’aide de ses mains
pour recueillir l’eau qui jaillissait, tout en répétant « zam zam » (« stop, stop »).
Le Messager de Dieu r a dit :
« Puisse Dieu accorder Sa miséricorde à la mère d’Ismaël ! Si elle ne s’était pas
ainsi hâté pour remplir son outre d’eau avec l’eau du puits de Zamzam, Zamzam
aurait été un fleuve qui coulerait sur toute la surface de la terre. »
Ibn Abbâs t ajouta :
« Le prophète Abraham u emmena Ismaël u et sa mère à La Mecque alors
qu’elle allaitait Ismaël u et transportait une outre. » (Al Boukhari, Anbiyâ, 9).
La mère et son fils continuèrent à vivre uniquement grâce à l’eau de Zamzam.
Quelques temps plus tard, passant près de la source de Zamzam, la tribu de Jurhum
aperçut un oiseau qui survolait un endroit précis. Devinant qu’il y avait une trace de
vie, ils envoyèrent deux personnes aux fins de vérification. Après avoir découvert la
source, ils demandèrent à Hajjar l’autorisation de s’installer près d’elle. Hajjar le leur
permit à condition qu’ils ne revendiquent pas la propriété de la source. Les Jurhu-
mites acceptèrent ce qui fit d’eux la première tribu à s’installer à La Mecque.
Introduction 23

Avec le temps, La Mecque se développa jusqu’à devenir une cité-État. La tribu


de Huza’a prit La Mecque de force en 207 alors que les Jurhumites lui eurent inter-
dit d’y séjourner. Les fils d’Ismaël u restèrent neutres dans cette bataille et donc
ne furent pas touchés par la nouvelle force d’occupation. Ils gouvernèrent la ville
pendant de longues années au cours desquelles ils dévièrent du droit chemin d’Abra-
ham. Ils appuyèrent le culte des idoles, promotionnant la foi déviante. Ils créèrent
une idole nommée Hubal. Lorsque les descendants d’Ismaël u devinrent plus puis-
sants en vertu de l’autorité de Qusayy, ils chassèrent Huza’a de La Mecque en 440.
Qusayy établit le Dar’un-Nadwa qui fut comme le Parlement de la cité-État de
la Mecque avec les autres institutions qu’il instaura pour organiser la vie sociale et
religieuse. Des devoirs tels que le commandement des batailles et la protection de
l’étendard (qiyâda), le service de la Ka’ba (sidâna, hijâba), le rafraîchissement par
arrosage des pèlerins (sikâya) et leur alimentation sur les impôts collectés (ridâna)
étaient tous sous la responsabilité de Qusayy.
Peu de temps avant sa mort, Qusayy demanda dans son testament que ces droits
soient répercutés sur ses fils Abd’ud-Dâr et Abd Menaf, initiant le début du passage
de ces devoirs de père en fils. (Voir Ibn Hicham, I, 135-142).
Tous les habitants de La Mecque eurent la possibilité de se joindre aux sessions
du Parlement dès qu’ils avaient atteint l’âge de quarante ans. Mais la règle était que
seuls les chefs de famille ou de clan pouvaient participer à ces réunions. Fait inté-
ressant cette assemblée fut utilisée pour s’opposer à la mission du Saint Prophète r.
D’autres assemblées locales, ou nadi, comme les précédentes, furent également uti-
lisées pour des rassemblements sociaux et d’autres activités en plus de leur principal
objectif qui étaient de prendre des décisions politiques et militaires.
Comme le sol de La Mecque était impropre à agriculture, les habitants gagnaient
leur vie principalement par le commerce. La Mecque occupait donc une place char-
nière dans la vie économique de la Péninsule Arabique. Le commerce dans la cité
était en permanence animé de l’été à l’hiver. Les destinations à but commercial
étaient la Syrie l’été ainsi que le Yémen. Les chameaux étaient principalement utili-
sés pour transporter les marchandises commerciales et parfois leur nombre pouvait
atteindre deux mille cinq cents dans une seule caravane.
L’existence prospère des Mecquois reçurent une si grande amplitude que le
Tout-Puissant leur rappela cette faveur exclusive lorsqu’Il les invita à l’islam :

Ôƪ òÒIJ ƈ ƈ ž ƈ ÙƆ ĥƆ è ƈòħ ƈıĘƈ ŻĺƆ Òƀ ûƅ ĺóĜƇ Ėƈ ŻĺƆ źƀ ƈ


Ɔ ïƇ ×Ƈ đŽ ĻƆ ĥŽ ĘƆ ėĻŽ āĤÒ
ƪ IJ Ɔ ÅÓƁÝƆ ýĤÒ Ž Ž ŽƆ
Ėƅ ijŽ ì
Ɔ īŽ Ĩ ƈ ħıĭƆ ĨÒſ IJĎƅ ijäīĨ ƈ ƀ ƈ
Ƈ Ž ħŽ ıƇ ĩƆ đƆ ĈŽ ƆÒĸñƁ ÃĤƪ ƆÒÛĻŽ ×Ɔ ĤŽ ÒÒñƆ İſ
ŽƇ Ɔ Ɔ
24 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« A cause du pacte des Quraysh,


De leur pacte [concernant]
les voyages d’hiver et d’été.
Qu’ils adorent donc le Sei-
gneur de cette Maison (la Kaaba).
Qui les a nourris contre la
faim et rassurés de la crainte ! »
(Quraysh, 106 : 1-4)

Le commerce caravanier
n’était pas aisé dans la Péninsule
Arabique en raison des turbu-
lences tribales et de l’absence d’un
pouvoir politique central.
Un commerçant ne se sentait
en sécurité que pendant les mois
sacrés, qui interdisent l’engage-
ment dans tout type de conflit ou
de banditisme.
Même à cet égard, La Mecque
avait la supériorité sur d’autres
endroits.
Alors que l’interdiction générale de la violence et la transgression ne couvraient
que le mois de Rajab, La Mecque connut une longue période de non-violence qui
s’étendit sur quatre mois appelée al-Ashuru’l-Hurum.
Les huit autres mois l’institution Basl protégeait les biens des nombreuses fa-
milles susceptibles d’être la proie de pilleurs. (Voir Hamidullâh, I, 24-25).
La Mecque tenait trois foires commerciales dans son voisinage : Ukâz, Majanna
et Dhu’l-Majâz. Tenues en temps de pèlerinage selon le calendrier Jalihiyya, les foires
attiraient une foule importante, faisant faire d’énormes bénéfices aux commerçants
mecquois. Étant la plus importance enceinte pour la Maison de Dieu, La Mecque a
toujours attiré l’attention des puissances voisines. En dépit de nombreuses tentatives
d’invasion à travers l’histoire, La Mecque a toujours été en mesure de conserver son
indépendance. Même les Byzantins, en dépit de leur désir d’étendre leur influence
sur la Péninsule, ont finalement échoué.
Introduction 25

L’histoire de la Ka’ba et de son caractère sacré


La Ka’ba, mentionnée à deux reprises dans le Coran, signifie littéralement « ob-
jet de forme cubique ».
Malgré ses autres synonymes célèbres signifiés dans le Coran comme al-Bayt,
Baytullâh, al-Baytu’l-Atîq, al-Baytu’l Harâm, al-Baytu’l-Muharram, al-Masjidu’l-
Harâm, elle est souvent appelée la Ka’ba al-Muazzama, la très respectée Ka’ba.15
L’histoire de la Ka’ba commence avec le prophète Adam u, le premier être hu-
main. Après être descendu dans le monde, on lui donna l’obligation de construire un
lieu de culte sur le terrain où se trouve la Ka’ba aujourd’hui. (Voir Tabarî, Târih, I, 124).
Le Noble Coran le spécifie parfaitement dans le verset suivant :

īĻ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ Ûƅ ĻÖĢƆ IJƆÒĪƪ Òƈ
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĥŽ ĤĴïƃ İƇ IJÓ
Ɔ Ġƃ òÓ
Ɔ ×Ɔ Ĩ
Ƈ ÙƆ ġƪ ×ƈƆ ÖĴñĥƪ ĤƆ öÓĭĥƪ ĤďƆ ĄIJ
Ƈ ŽƆ ƪ
« La première Maison qui a été édifiée pour les gens, c’est bien celle de Bakka
(La Mecque) bénie et une bonne direction pour l’univers. » (al-Imrân, 3 : 96)
15. La Ka’ba a été érigée sur des colonnes d’environ 1,5 m de large. Ses murs contiennent un total de 1614
pierres de basalte de différentes dimensions apportées des environs de La Mecque.
Du côté Est se trouve la Pierre Noire, Hajar’ul-Aswad qui est conservée dans une enveloppe argentée.
Elle marque le début et la fin de la circumambulation
Le coin Est de la Ka’ba se nomme Rukn’ul-Hajar’ul-Aswad ou Rukn’us-Sharqi, son coin Nord
Ruknu’l-Iraqi, son coin Ouest Ruknu’l-Shami, et son coin Sud Rukn’ul-Yamani.
La gouttière qui canalise l’eau de pluie sur le toit de la Ka’ba (Mizab’ul Ka’ba) est appelée la Gouttière
d’Or.
Partant de la Ka’ba, les trois premiers mètres de la zone délimitée par un mur semi-circulaire, se
dressant à une hauteur de 1,32 m et à une largeur de 1,55 m, s’élevant en face de l’angle nord-ouest de
la Maison Sacrée entre Rukn’ul-Iraqi et Rukn’ul-Shami, se nomme Hatim. Cette section a été incluse
dans le bâtiment principal de la Ka’ba érigé par Abraham u.
Restreint par le manque de matériaux, toutefois, Quraysh, au cours des restaurations qu’il entreprit,
n’avait pas d’autre choix que de laisser cette partie en dehors. Le reste des 5,46 m de la zone appelée
Hijru’l-Ka’ba, Hijru Ismaël ou Hatira, est l’endroit où Abraham u avait fait de l’ombre pour Hajjar
et son fils Ismaël u à partir d’un arbre nommé Arak. Selon la tradition, Hajjar et Ismaël L seraient
enterrés dans la région de Hijr. Il a donc été décrété obligatoire d’effectuer la circumambulation à
l’extérieur de Hijr. La porte de la Ka’ba, au nord-est de la Maison, est à 2,25 m du sol. La section de la
paroi située entre la porte et le Hajar’ul-Aswad est nommée Multazam.
La hauteur exacte de la Ka’ba est de 14 m. la longueur de Multazam est de 12,84 m tandis que celle de
Hatim est de 11,28 m.
Hatim et Rukn’ul-Yamani sont séparés par une distance de 12,11 m et la distance entre Ruknu’l-
Yamani et Hajar’ul-Aswad est de (la Pierre Noire) est de 11,52 m.
À l’intérieur de la Maison Sacrée se trouvent trois piliers qui soutiennent le plafond, du mur sud
jusqu’à Hatim. En rentrant de la porte, il y a un escalier à droite. À l’entrée de l’escalier il y a une porte
dont le nom est Bab’ut Tawba, la Porte de la Repentance. Les murs intérieurs de la Ka’ba et son
toit sont recouverts d’un tissu de soie verte. (Muhammad Ilyâs Abdulghanî, p. 33-66 ; Kâmil Mîrâs,
Traduction de Tajrid, VI, 17-20)
26 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Messager de Dieu r répondit à une question d’Abû Dhart16 en révélant que


le premier édifice construit sur la surface de la terre fut la Ka’ba et le second Mas-
djid’ul-Aqsa, la sainte Mosquée de Jérusalem. (Voir Al Boukhari, Anbiyâ, 10). La vallée de
La Mecque fut choisie comme lieu sacré depuis le début de l’histoire humaine. Après
le déluge au temps de Noé u la Ka’ba resta longtemps enfouie sous le sable. Elle fut
reconstruite par Abraham u de nombreuses années plus tard après qu’il eût quitté
sa femme et son fils. Il revisita sa famille des années plus tard et vit que son fils était
devenu un jeune homme, Abraham u lui dit :
« Notre Seigneur nous ordonne de lui construire une maison et tu m’aideras ! »
Le jeune Ismaël u porta les pierres et Abraham u érigea les murs de la Ka’ba.
La pièce de marbre portant les empreintes d’Abraham u fut utilisée comme ascen-
seur pour l’aider à atteindre les endroits du mur les plus élevés.17
Le Coran raconte ainsi ce fait :

ģĻ ƈ øƈÌIJÛƈ Ļ×ĤŽ ÒīĨ


Ƈ ĐÓĩ ƈ ƈ ƈ ÖƈÌďĘóĺðÌƈ IJ
Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ ïƆ ĐÒijƆ ĝƆ ĤŽ ÒħĻ İó
Ƈ Ž Ƈ Ɔ ŽƆ Ž Ɔ
ħĻĥƈ đƆ ĤŽ ÒďĻ ƈ
Ƈ ĩùĤÒ
ƪ Û
ƈ ģŽ ×ĝƆ ÜÓ
Ɔ ĬŽ ƆÈğƆ Ĭƈƪ ÌÓĭƪ Ĩ ĭÖò
Ƈ ƪ Ɔ Ɔƪ Ɔ
« Et quand Abraham et Ismaël élevaient les assises de la Maison: ‹Ô notre
Seigneur, accepte ceci de notre part ! Car c’est Toi l’Audient, l’Omniscient. » (al-
Baqara, 2 : 127; Pour les détails concernant cet évènement, voir Al Boukhari, Anbiyâ, 9).

La Ka’ba n’est que symboliquement la Maison du Tout-Puissant car Dieu ne


l’habite pas. Les musulmans prient Dieu en faisant le tour sept fois (tawaf) en par-
tant de la Pierre Noire placée par Abraham u près d’un des coins. La Pierre Noire
est comme l’a rapporté le Saint Prophète r descendue du Paradis. Elle était plus
16. Abû Dharr t, dont le vrai nom est Ibn Jundab ibn Junada., était un Ghifari (membre de la tribu de
Ghifar). Cinquième musulman, c’était un homme de piété, de contentement et d’abstinence, ce qui
conduit le Saint Prophète r à l’appeler le Masih’ul-Islam, c’est-à-dire le Jésus de l’islam. Constamment
aux côtés du Saint Prophète r, il tirait le meilleur parti de sa présence, lui demandait ce qu’il ignorait
pour plus de clarification. Il accumula de si grandes connaissances qu’à la fin Ali t finit par le
nommer « le répertoire de la connaissance ». Il rapporta en tout 281 hadiths. Il décéda la 31e année de
l'Hégire à Rabaza près de La Mecque.Ses funérailles furent suivies par un petit groupe qui l’emmena à
son dernier repos.
17. Said Bektash, Fadlu’l-Hajari’l-Aswad wa Maqâmi Ibrâhîm, p.108 ; Muhammad Ilyâs Abdulghanî, p.
71-73. Selon une source, Abraham, se tenant debout sur le marbre, le Maqam d’Abraham, invitait les
gens à accomplir le Hajj. Dieu dit :

ĵĥƬ āƆ Ĩ
Ƈ ħĻ İƀ óÖÒƈ ĦÓƈ ĝĨīĨÒIJ
ƈ ñƇ íƈ ÜÒƪ IJÓĭƃ ĨƆÒIJöÓ
ƈ ĭĥĤƈ Ùƃ ÖÓáƆ ĨÛƆ Ļ×ĤŽ ÒÓĭƆ ĥŽ đäðŽ Òƈ IJ
Ɔ ſŽ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ
« Et rappelle-toi], quand nous fîmes de la Maison un lieu de visite et un asile pour les gens -
Adoptez donc pour lieu de prière, ce lieu où Abraham se tint debout. » (al-Baqara, 2 : 125)
Introduction 27

blanche que le lait et la neige quand elle descendit et devint noire à cause des péchés
humains. (At Tirmidhi Hajj 49/877 ; Ahmad, I, 307)18
Il est aussi rapporté que les feux qui eurent lieu avant et après l’islam ont à voir
en partie avec l’obscurcissement de la Pierre. Mais il reste néanmoins des endroits
de la Pierre qui sont restés très blancs ; ce sont ceux qui font face au mur de la Ka’ba.
Mujahid raconte qu’Abdullah ibn Zubayr t vit en démolissant le mur de la
Ka’ba pour le rénover que le côté intérieur de la Pierre Noire était blanc. Qarmatîs,
Muhammad ibn Nafî al-Khuzâî qui, après avoir été emmenée par les schismatiques
assista à la réintégration de la Pierre la 339ème année de l’Hégire témoigna plus tard :
« J’étais là pour inspecter la Pierre Noire quand elle a été remise à sa place et j’ai
vu que d’un seul côté la face visible de la Pierre était noire, tandis que les trois autres
côtés étaient blancs. »
Durant l’année 1039 de l’Hégire, la Ka’ba fut détruite par une forte inondation
qui avaient balayé La Mecque. Pendant la reconstruction, l’Imam Allân al-Makkî
inspecta la Pierre Noire, ajoutant que « les parties de la Pierre Noire installées face
aux murs de la Ka’ba étaient aussi blanches que la pièce du marbre où Abraham avait
prié (Maqâmu Ibrahîm) » (Voir Said Bektash, p. 36-38; Dr Muhammad Ilyâs Abdulghanî, p. 43).
Le Coran raconte qu’une fois la construction de la Ka’ba achevée, le prophète
Abraham u et son fils invoquèrent Dieu ainsi :

ƈ Ɔ ğƆ ĤƆ Ùƃ ĩĥƈ ùĨÙƃ ĨƇÈÓĭƆ Ýƈ ĺòƈ ðƇ īŽ Ĩƈ IJğƆ ĤƆ īƈ Ļĩĥƈ ùĨÓĭƆ ĥŽ đäÒ
ÕŽ ÜƇ IJÓ Ɔ ĬƆ ƈòÈIJ
Ɔ ĭƆ ġƆ øÓĭƆ ĨÓ Ɔ Ɔ ŽƇ ƪ ƪž Ɔ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔƪ Ɔ
IJÓĭÖò
ħ ƈıĻĥƆ ĐÒij ĥÝĺħıĭĨ ƈ źijøòħ ƈıĻĘ ƈ ߎ đÖÒIJÓĭƆ ÖòħĻèƈ óĤÒÔÒijÝĤÒÛƆ ĬŽ ƆÈğƆ Ĭƈƪ ÌÓĭƆ ĻĥƆ Đ
Ž Ž Ɔ Ƈ ŽƆ Ž Ƈ Ž ƃ Ƈ Ɔ Ž ƆŽ Ɔ ƪƆ Ƈ ƪ Ƈ ƪƪ Ž Ɔ
ħĻġƈ éĤÒ õĺ ƈõđĤÒÛĬƆÈğĬƈÌħ ƈıĻĠƈ õĺIJÙĩġéƈ ĤÒIJÔÓÝġƈ ĤÒħıĩĥƈ đĺIJğÜÓƈ ĺÆ
Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ž ž ƆƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ƈ ž ƆƇ Ɔ Ɔ Ɔ
« Notre Seigneur ! Fais de nous Tes Soumis, et de notre descendance une
communauté soumise à Toi. Et montre-nous nos rites et accepte de nous le
repentir. Car c’est Toi certes l’Accueillant au repentir, le Miséricordieux. Notre
Seigneur ! Envoie l’un des leurs comme messager parmi eux, pour leur réciter Tes
versets, leur enseigner le Livre et la Sagesse, et les purifier. Car c’est Toi certes le
Puissant, le Sage ! » (al-Baqara, 2 : 128-129)
La Ka’ba achevée, le Tout-Puissant ordonna à Abraham u d’inviter les gens
au Pèlerinage (Hajj):
18. Les savants commentent que si les péchés peuvent avoir sur une pierre un tel effet jusqu’à la rendre
noire, quelle pourrait être l’intensité de la ternissure sur les cœurs. S’abstenir au maximum des péchés
est par conséquent un devoir.
28 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ƈ ĪŽ ðž ƈ ÒƆ IJ
ƈ ĭĤÒĵĘ
ƃźÓäƆ ƈòĞƆ ijÜƇ ÉŽ ĺƆ ãƈž éƆ ĤŽ ÓƈÖöÓ ƪ Ɔ
ěĻƅ ĩƈ Đ ƈ īĻÜƈ ÉŽ ĺ ƅóĨÓƈ Ą
Ɔ ãƅž ĘƆ ģƈ ž Ġ
Ƈ īŽ Ĩ Ɔ Ɔ Ɔ ģƈ ž Ġĵ
Ƈ ĥƆ ĐƆ IJƆ
« Et fais aux gens une annonce pour le Hajj. Ils viendront vers toi, à pied, et
aussi sur toute monture, venant de tout chemin éloigné (…). » (al-Hajj, 22 : 27)
N’écoutant que cet ordre divin, Abraham u gravit la Montagne d’Abû Qubays
qui était à proximité et appela dans les quatre directions avec une voix audible,
informant les gens de leur obligation à se rendre à la Ka’ba. (Voir Kâmil Mîrâs, Traduction
de Tajrid, VI, 20-21; Said Bektash, p. 111).

Après cette déclaration, l’Ange Gabriel u vint, montra à Abraham u les


frontières de la Sainte Mosquée, la distance entre Safâ et Marwâ, et lui demanda
de placer des pierres pour marquer ces frontières. Puis l’Ange lui enseigna tous les
rituels et les agissements relatifs au Pèlerinage.
Par la suite, des gens venus de pays lointains commencèrent à se rendre à la
Ka’ba pour effectuer le Pèlerinage, faisant de La Mecque le centre principal dédié
à la religion du Tout-Puissant et accordant à la cité une place importante dans le
cœur des gens.
Mais jaloux de son caractère sacré et de sa haute estime parmi les gens, de nom-
breuses tribus idolâtres commencèrent à attaquer La Mecque. Avant Abraha, trois
idolâtres rois du Yémen avaient lancé des attaques sur la Ka’ba pourde la démolir.
Curieusement, la tribu de Huzayl avait une façon de se débarrasser de leurs
ennemis en les encourageant à attaquer la Ka’ba, sachant que toute armée qui
tenterait de l’attaquer serait condamnée par Dieu. On dit même à l’un de ces rois
du Yémen, le Tubba19, que s’il envisageait d’envahir la Ka’ba il pouvait prétendre
s’emparer du supposé trésor qui se trouvait caché à l’intérieur. Encouragé, le roi
attaqua la Ka’ba, mais sa tentative fut déjouée au moment où les pieds de ses soldats
commencèrent à s’enfoncer dans le sable. Le roi fut averti par ses conseillers compé-
tents qui lui demandèrent de battre en retraite.
Sur le chemin du retour, le roi s’engagea dorénavant à mieux traiter les Mec-
quois, promettant également de respecter la Ka’ba. Ainsi donc, les assaillants purent
se sauver eux-mêmes de la destruction. (Voir Ibn Hicham, I, 19-20; Abdurrazzaq, V, 153.).
Les nouvelles de tels évènements se répandirent très vite parmi les habitants de
la Péninsule Arabique et la Ka’ba, atteint ainsi une impressionnante réputation et
une place estimée aux yeux des gens.
19. Tubba est le nom donné autrefois aux rois du Yémen.
Introduction 29

L’idée que La Mecque, la Ka’ba et la tribu de Quraysh furent sous protection


divine devint une norme acceptée parmi les Arabes.
Adorer dans la Maison de Dieu, poursuivre la voie du prophète Abraham u
avait été enseigné jusqu’à la propagation de l’idolâtrie.
Quand l’adoration des idoles se répandit à La Mecque, les idolâtres mirent des
idoles à l’intérieur et autour de la Ka’ba.
Pourtant, malgré l’abondance des idoles, la Ka’ba ne fut jamais renommée,
continuant d’être appelée Baytullah, la Maison de Dieu.20
Lorsque le Noble Prophète r conquit La Mecque et l’ouvrit à l’islam, toutes les
idoles furent démolies, et sous son inspection la Ka’ba fut nettoyée avec de l’eau de
zamzam à la fois à l’intérieur et à l’extérieur.
Ce fut le début d’une coutume consistant à laver chaque année la Ka’ba avec de
l’eau de zamzam et de l’eau de rose et à la parfumer de musc et d’ambre et à renou-
veler le tissu qui la couvre.
La pratique idolâtre de suspendre sur les murs de la Ka’ba les sept poèmes les
plus éloquents, al-Muallaqât al-Sab’a (littéralement les « sept pendus »), acclamés
pendant leurs concours littéraires, sans parler de l’accrochage aux mêmes murs de la
déclaration appelant à boycotter les musulmans, témoigne de l’immense valeur que
la Maison Sacrée revêtait à leurs yeux.
Tout service rendu à la Ka’ba et à ses visiteurs a ainsi été jugé en grande estime.
Premièrement remplis par Ismaël u, ces nobles obligations passèrent à ses fils, puis
aux Jurhumites et enfin à la tribu de
Quraysh. Simultanément à l’établissement de la cité-État de La Mecque, nous
trouvons l’établissement des obligations suivantes :
1. Sidânah ou Hijâbah : l’obligation de couvrir la Ka’ba et préserver ses clés.21
20. Coincés dans le marais de l’ignorance, les idolâtres, étonnamment, n’ont jamais adoré les trois choses
qu’ils appréciaient le plus : la Ka’ba, al Hajar’ul-Aswad et Maqam’u Ibrahim, en dépit d’adorer divers
types d’arbres et de pierres. Cela ne peut être dû qu’à la protection exclusive du Tout-Puissant.
21. Ismaël u est connu pour être le premier qui a drapé la Ka’ba. (Abdurrazzaq, V, 154). Tout au long de
l’histoire de l’islam, la préparation de la couverture de la Ka’ba était supervisée par le calife, le sultan
ou le gouverneur de La Mecque en exercice. Après le passage du califat aux mains des Ottomans en
1517, la couverture de la Maison Sacrée continua à être tissée en Egypte pendant quelques temps.
Pendant le règne de Soliman le Magnifique, Istanbul devint le centre de tissage de la couverture
intérieure qui avait été ajoutée à l’enveloppe externe, puis vint le temps du Sultan Ahmet III. La
dernière couverture tissée par les Ottomans date de 1916. La rébellion de Sharif Hussain, empêcha
d’autres tentatives. Confectionnée de nouveau en Egypte pendant quelques temps, la couverture est
aujourd’hui fabriquée dans une usine à La Mecque mise en place spécifiquement à cet effet.
30 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

2. Siqâyah : Abreuver le pèlerins en eau et boissons et entretenir le puits de


Zamzam.
3. Ridânah : Fournır alimentation et hébergement des pèlerins pauvres.
Les Arabes considéraient qu’être chargé de ces tâches était un grand honneur
et un privilège.
Au temps du Noble Prophète r, ces tâches furent partagées entre les grandes
familles de La Mecque. Omar u le deuxième calife, alloua un budget à cet effet, et
Muawiya améliora ce budget.
Les Ottomans considéraient comme très important l’entretien de la Ka’ba et
versaient des indemnités importantes pour cela.

L’Evènement de l’Eléphant témoigne de la protection divine


La Ka’ba, construite sur l’ordre de Dieu, se trouve toujours sous la protection
divine. Cette affirmation repose sur le célèbre évènement connu dans l’histoire et
nommé « l’Evénement de l’Eléphant », riche d’enseignements à tirer.
Abraha, un vassal romain et gouverneur du Yémen avait bâti une église particu-
lièrement grande et ornementée dans l’espoir qu’elle attirerait tous les regards. Mais
à la grande déception du gouverneur les Arabes ne montrèrent que très peu d’intérêt
pour l’église. Pour mettre en œuvre son programme, Abraha décida de démolir la
Ka’ba, le centre d’attraction, la Maison Sacrée qui avait toujours attiré des visiteurs.
Après avoir préparé une armée qui comprenait de nombreux éléphants, compa-
rables aux tanks d’aujourd’hui, Abraha se dirigea vers La Mecque pour mener à bien
son plan et rendre l’église inégalée dans sa recherche à attirer l’attention des gens.
Près de la Ka’ba Abraha saisit quelques chameaux appartenant aux Mecquois,
dont certains appartenaient à Abd al-Muttalib.
Lorsque le grand-père du Prophète Béni r vint lui demander de les lui restituer,
Irrité par la requête d’Abd al-Muttalib qui concernait quelques chameaux, Abraha
se mit à le fustiger :
« Je suis venu pour démolir la Ka’ba et tu ne me parles que de tes chameaux ! »
Abd al-Muttalib répondit calmement :
« La Ka’ba a un propriétaire qui la protège ».
Et Abraha lui rétorqua avec arrogance :
« Nul aujourd’hui ne pourrait la protéger de moi ».
Quand Abraha ordonna à son armée de marcher vers la Ka’ba, les éléphants
paralysés furent incapables d’avancer. Soudain, le ciel se remplit d’oiseaux en vol
Introduction 31

qui commencèrent à bombarder l’armée avec de petites pierres d’argile cuite qu’ils
tenaient dans leurs griffes.
Les pierres tombèrent sur l’armée comme de la grêle, détruisant tout ce qu’elles
touchaient.
Les petits oiseaux étaient en train de pulvériser les éléphants apparemment
invincibles et qui pesaient des tonnes. L’année où cet évènement miraculeux a eu
lieu a été nommée ensuite par les Arabes « l’Année de l’Eléphant ».
Le Tout-Puissant raconte ainsi cette histoire dans le Coran :

ģƆ øƆ òŽ ƆÈIJ
Ɔ ģĻ ƅ ĥƈ ąŽ ÜĹ
Ɔ Ęƈ ħİïƆ ĻĠ ģđåĺħĤƆÈģĻęƈ ĤÒÔÓ
Ž Ƈ ŽƆ Ž Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ƈ Ž
ƈ éƆ ĀŽ ƆÉÖƈ ğƆ Öƫ ò Ɔ óƆ ÜƆ ħŽ ĤƆ ƆÈ
Ɔ ģƆ đƆ ĘƆ ėƆ ĻŽ Ġ
ƅ ĠƇ ÉŽ Ĩėƅ āđĠ
Ģij ƅ åž ƈ ø ƈ ƅ åéƈƈ Öħ ƈıĻĨƈ óÜ
ƈ īĨ ģĻƈÖÓÖƆÈÒóĻĈħ ƈıĻĥĐ
Ɔ Ž Ɔ Ɔ ħŽ ıƇ ĥƆ đƆ åƆ ĘƆ ģĻ Ž ØòÓ
Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƃ ŽƆ Ž ŽƆ Ɔ
« N’as-tu pas vu comment ton Seigneur a agi envers les gens de l’Eléphant.
N’a-t-Il pas rendu leur ruse complètement vaine ? Et envoyé sur eux des oiseaux
par volées qui leur lançaient des pierres d’argile ? Et Il les a rendus semblables à
une paille mâchée. » (al-Fil, 105 : 1-5)
La Ka’ba, la Maison de la Bienveillance servant de lieu de culte au Dieu unique,
a été de tout temps bénie par Dieu et maintenue sous Sa protection. Le châtiment
exigé d’Abraha pour son manque de respect envers la Ka’ba demeure en termes non
équivoque un avertissement jusqu’à l’Heure finale pour tous ceux qui abritent de
telles malveillances à l’encontre de la Maison Sacrée. Le Coran étend similairement
cette dimension à toutes les mosquées de Dieu :

ƈ ƈ Ʃ ïƆ äÓ ƈ
įƇ ĩƇ øÒÓ Ɔ ĘóƆ ĠƆ ñŽ ƇĺĪŽ ƆÈųÒ
Ž ıĻ
ƈ ùĨ
Ɔ Ɔ ďƆ ĭƆ Ĩ
Ɔ
Ɔ īŽ ĩƪ ĨħƇ ĥƆ ČŽ ÈīŽ ĨƆ IJƆ
ħıƇ ĤƆ īĻ ęƈ ÐÓƈ ì Ɔ ĥƇ ìƇ ïŽ ĺƆ ĪŽ ƆÈħŽ ıƇ ĤƆ ĪÓ
Ɔ ƪ źÌƈ Óİij Ɔ ĠÓƆ Ĩ ƈ
Ɔ ğƆ ÑĤſ IJƇÈÓıƈƆ ÖÒóƆ ìĹ
Ɔ Ęĵ ƈ đøIJ
Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
ħĻčƈ Đ ÔÒñĐØƈ óìŴ ƈ ÒĹĘ ƈ ħıĤƆ IJĸõìÓ ƈ ĻĬïĤÒĹĘƈ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ Ɔ Ƅ Ž ƆŽ ƫ
« Qui est plus injuste que celui qui empêche que dans les mosquées d’Allah,
on mentionne Son Nom, et qui s’efforce à les détruire ? De tels gens ne devraient
y entrer qu’apeurés. Pour eux, ignominie ici-bas, et dans l’au-delà un énorme
châtiment. » (al-Baqara, 2 : 114)
Aveuglé par son arrogance sans bornes, Abraha était convaincu de détenir un
grand pouvoir et le châtiment qui lui a été imposé fut à la mesure de cette arrogance.
32 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il n’a pas été frappé par des bêtes connues pour leur force comme des lions ou
des tigres, ou même des serpents venimeux, mais par de faibles oiseaux transportant
des pierres plus petites que des pois chiches.
Le Tout-Puissant avait déjà anéanti dans le passé de tels impies arrogants
comme Pharaon, Nemrod ou bien Goliath en utilisant des créatures apparemment
impuissantes, dans le but de montrer combien en réalité ils sont faibles.
Abraha retourna au Yémen, la terre d’où il était sorti plein d’honneur et de
majesté, emprunt d’une allure méprisable.
Avec son corps parsemé de plaies et ses vêtements en lambeaux, il retourna
dans sa ville en rampant.
Son état est une leçon saisissante sur la manière dont la disgrâce fait suite à
l’arrogance, même ici-bas.
Nommée par les Qurayshites « l’Année de l’Eléphant », cette année marqua le
point de départ de leur calendrier.
Qubash ibn Ushaym t, un des peiux Compagnon du Saint Prophète r avait
coutume de citer l’Année de l’Eléphant pour raconter aux autres comment lui et le
Saint Prophète r étaient nés la même année :
« Le Prophète et moi, dit-il, sommes nés au cours de l’Année de l’Eléphant. »
Othman ibn Affân u lui demanda :
« Etais-tu le plus âgé ou bien était-ce le Prophète le plus âgé ? ».
Qubash ibn Ushaym t lui répondit de la plus respectueuse et délicate façon :
« Le Prophète était beaucoup plus grand que moi. Mais ceci dit, j’étais plus âgé
que lui22, je me souviens que les excréments appartenant aux éléphants d’Abraha
étaient encore verts et peu altérés. » (At Tirmidhi, Manâqîb, 2).

Le prophète Abraham u, la Hanîfiyyah ou foi en un Seul Dieu


Bien que la plupart des gens de La Mecque fussent devenus idolâtres, des traces
de croyance en un seul Dieu subsistaient.
22. Comme on le remarque dans ce récit, les Compagnons ont toujours été conscients du fait que
le Saint Prophète r possédait le rang le plus élevé et le plus sublime à l’égard duquel ils étaient
extrêmement sensibles.
Rien que l’effleurement de leur peau avec celle du Saint Prophète r était, pour eux, une cause de
satisfaction, à l’instar de ces Compagnons chanceux qui ont été touchés par ces mains bénies et qui
ont pu dire en référence à leurs propres mains : «C’était avec ces deux mains que j’ai fait allégeance
au Messager de Dieu ! » (Ibn Sa’d, IV, 306 ; Haythamî, VIII, 42)
Introduction 33

Quelques-uns pratiquaient la religion du tawhid (croyance en l’unicité de


Dieu), tel que l’avait enseigné Abraham u.
Abraham u est considéré en islam comme l’Ami de Dieu (Khalîlullâh) et l’un
des cinq plus grands prophètes L que l’on nomme Ulu’l-Azm.
Il est l’ancêtre de plusieurs prophètes, et plus particulièrement du Messager de
Dieu r et est également connu pour avoir reçu dix feuilles (suhuf) provenant de la
Révélation du Tout-Puissant.
Le nom d’Abraham u est mentionné dans vingt-cinq sourates du Coran, soit
un total de soixante-neuf fois.
Certains des attributs mentionnés dans des versets en rapport avec l’éloge qui
lui est faite incluent les notions d’al-awwâh (celui qui est plein de sollicitude), al-
halîm (l’indulgent), al-munîb (le repentant), al-qânit (celui qui se soumet pleine-
ment à Dieu), al-shâkir (celui qui remercie Dieu) et al-hanîf. La religion d’Abraham
est donc la hanîfiyyah (c.-à-d. la religion qui est vouée exclusivement à Dieu) et
Abraham un hanîf : un voué à Dieu. Cela signifie en d’autres termes délaisser les
voies tortueuses pour marcher dans le droit chemin, renoncer aux croyances impies
afin de croire en un seul Dieu et devenir un muwahhid, celui qui reconnaît l’unicité
du Tout-Puissant qui déclare dans le Coran :

ħĻİƈ óÖŽ Òƈ ÙƆ ĥƪ Ĩ


ƈ ģŽ ÖģŽ ĜƇ ÒIJïƇ ÝıÜĴ
Ɔ Ɔ Ž Ɔ òÓƆ āƆ ĬƆ IJŽ ƆÒÒîij
ƃ İÒij
Ƈ ƇĬijĠÒij
Ƈ ƇĤÓĜƆ IJƆ
Ɔ Ɔ
īĻ ƈ ƈ Ɔ ĠÓ ƈ
Ɔ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨĪÓ Ɔ ĨƆ IJÓ Ɔ ęƃ ĻĭèƆ
« Ils ont dit : ‹Soyez Juifs ou Chrétiens, vous serez donc sur la bonne voie›. -
Dis: ‹Non, mais suivons la religion d’Abraham, le modèle même de la droiture et
qui ne fut point parmi les Associateurs›. » (al-Baqara, 2 : 135)

ĪÓ Ɔ īŽ ġƈ ĤƆ IJÓ
Ɔ Ġ ƈ
Ɔ ĻƬ ĬÒóƆ āŽ ĬƆ ƆźIJÓ
ƈ
Ɔ ĺƬ îijıƇ ĺƆ ħĻ İƈ óÖÒƈ ĪÓĠÓĨ
Ƈ ƆŽ Ɔ Ɔ Ɔ
īĻ ƈ ƈ Ɔ ĠÓ ƈ ƈ
Ɔ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨĪÓ Ɔ ĨƆ IJÓƆ ĩƃ ĥùŽ ĨÓ
Ƈ ęƃ ĻĭèƆ
« Abraham n’était ni Juif ni Chrétien. Il était entièrement soumis à Allah
(Musulman). Et il n’était point du nombre des Associateurs. » (al-Imrân, 3 : 67)
Durant l’Ère de l’Ignorance (Jahiliyyâh), le terme hanîf fut utilisé pour désigner
celui qui rejetait le culte des idoles, épousait la croyance en un seul Dieu et suivait la
religion d’Abraham u. On trouvait parmi les hanîf des personnes comme Waraqa
ibn Nawfal, Abdullâh ibn Jasht, Othman ibn Huwayrith, Zayd ibn Amr et Quss ibn
34 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Sâida y restèrent pendant toute leur vie inflexibles en refusant d’invoquer les idoles
ou de se prosterner devant elles.
Ibn Omar t23 raconte :
Le Saint Prophète r, avant que la révélation divine lui parvienne fut invité à un
repas près de la vallée de Baldah. (vallée près de La Mecque).
Zayd ibn Amr ibn Nufayl t assistait lui aussi à ce repas. Comme le Saint Pro-
phète r refusa de manger la viande qui lui était offerte Zayd t agit de même et dit :
- Je ne mangerai rien de ce qui provient de l’abattage accompli au nom de vos
idoles de pierre. Je ne mange que ce qui est abattu au nom de Dieu.
Zayd ibn Amr t était connu pour critiquer la façon dont les Qurayshites abat-
taient leurs animaux, ce qu’il considérait comme une chose abominable en disant :
- Dieu a créé la brebis, a envoyé pour elle de l’eau du ciel et l’a parfait en lui
octroyant de l’herbe pour se nourrir, et pourtant vous l’abattez au nom d’un autre
que Dieu. » (Al Boukhari, Manâqibu’l-Ansâr, 24 ; Dhabâih, 16)
Selon un autre récit d’Ibn Omar t :
« Zayd ibn Amr ibn Nufayl t s’était rendu à Damas afin d’en savoir davantage
sur la vraie religion à suivre. Il y rencontra un savant religieux juif à qui il demanda :
- Je pense embrasser votre religion, alors dites-moi quelque chose à son sujet.
23. Abdullah ibn Omar t est né l'an trois de l’Apostolat prophétique. Il fit l’hégire avec son père Omar t
et fut avec Abû Ayyûb al-Ansarî t membre de l’armée qui devait mettre le siège sur Istanbul. Comme
sa sœur ainée Hafsa c était l’épouse du Noble Messager r, il eut le privilège de vivre en sa proche
compagnie. Il rapporta 2.630 hadiths et fut ainsi un des 7 compagnons y mukthirun (rapporteur de
plus de 1.000 hadiths) et un de ceux qui qui apporta le plus grand nombre de fatwas (Sentences de
jurisprudence). Il était sans égal, cependant, suivait à la lettre le mode de vie du Messager de Dieu r et
appliquait scrupuleusement ses recommandations. Après le décès du Saint Prophète r, en raison de
son extrême affection pour lui, Ibn Omar t n’offrait sa prière que dans les endroits précis où le Saint
Prophète r les offrait ; il marchait sur les chemins qu’il avait coutume d’emprunter, s’asseyait à l’ombre
des arbres sous lesquels le Messager de Dieu r avait l’habitude de s’asseoir, à dessein de les arroser
afin qu’ils ne se desséchassent point. (Al Boukhari, Salât, 89 ; Hajar ibn al-Isaba, II, 349). Alors qu’il
souffrait d’une crampe majeure au pied, Abdurrahman ibn Sa’d t, qui était à ses côtés, lui conseilla de
prononcer le nom de la personne qu’il aimait le plus. Ibn Omar t s’écriant « Muhammad » vit alors
son pied immédiatement soulagé de la douleur. (Ibn Sa’d, IV, 154). Bien qu’il fut aussi un des plus
riches Compagnons, il ne permit pas que sa fortune s’accumule et la distribua aux pauvres nécessiteux
dès qu’il en eut l’occasion. Il avait l’habitude d’épargner ses biens les plus précieux pour en faire don
ensuite, œuvrant ainsi en toute charité dans la voie du Tout-Puissant. Il commença aussi à affranchir
un par un tous ses esclaves, développant ainsi un comportement digne d’éloges, en particulier envers
ceux qui avaient commencé à effectuer la prière. À ce sujet Ibn Omar t fut une fois averti par l’un
de ses amis qu’un de ses esclaves ne fréquentait la mosquée que pour être affranchi. La réponse d’Ibn
Omar t, montre la splendide profondeur de l’amour divin dans son cœur : « Nous sommes prêts à
être trompés par ceux qui souhaitent nous tromper avec Dieu ! » Il a affranchi plus de mille esclaves.
Il décéda à La Mecque en l’an 692 (73 de l’Hégire) à l’âge de 85 ans.
Introduction 35

- Tu ne peux pas embrasser notre religion, à moins que tu ne reçoives ta part de


la colère de Dieu, répondit le juif.
- Je ne suis venu ici que mû par la crainte de Sa colère, aussi je ne me vois pas
la porter quelque peu, étant donné que j’ai le pouvoir de l’éviter. Peux-tu m’informer
au sujet d’une autre religion ?
- Je ne connais pas d’autre religion excepté la Hanîfiyah.
- Qu’est-ce que la Hanîfiyah ? demanda alors Zayd t.
- La Hanîfiyah est la religion du prophète Abraham u, qui n’était ni juif ni
chrétien, et qui n’adorait que Dieu seul, expliqua le savant juif.
Alors Zayd t alors partit et vit un savant chrétien qui lui répondit en tenant le
même propos :
- Tu ne peux pas embrasser notre religion, à moins que tu n’obtiennes une part
de la malédiction de Dieu.
- Je ne peux m’enfuir de toute façon de Sa malédiction, et je n’en porterai jamais
aucun tant que j’ai le pouvoir de l’éviter. Peux-tu m’informer au sujet d’une autre
religion ? demanda Zayd t.
- Je ne connais pas d’autre religion que la Hanîfiyah.
- Qu’est-ce que c’est ?
- C’est la religion du prophète Abraham u, qui n’était ni juif ni chrétien, et qui
n’adorait que Dieu seul.
Ayant ouï des paroles semblables en ce qui concerne la religion d’Abraham u,
Zayd t quitta les lieux, leva les mains au ciel une fois éloigné et dit :
- Ô Dieu ! Sois témoin que j’appartiens à la religion d’Abraham. » (Al Boukhari,
Manâqıbu’l-Ansâr, 24)

Asma bint Abû Bakr c24 rapporte avoir entendu Zayd ibn Amr ibn Nufayl t,
déclarer en étant debout le dos contre la Ka’ba :
« Gens de Quraysh ! Par Dieu ! Nul parmi vous n’appartient à la religion
d’Abraham, excepté moi. »
Elle ajouta que Zayd t prit grand soin de préserver la vie des petites filles, les
sauvant ainsi d’une mort atroce.
Voyant un homme voulait tuer sa fille, il intervint et dit :
24. Radhi Allah anha expression qui signifie qu’Allah soit satisfait d’elle formule de révérence employée
pour les saintes femmes, filles et les femmes compagnons féminin du Prophète r.
36 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ne la tue pas ! Je la nourrirai à ta place ! ».


Puis il l’emmena et s’occupa d’elle.
Une fois qu’elle fut devenue grande, Zayd t dit un jour à son père :
« Si tu la veux maintenant, je te la donnerai, et si tu le souhaites, je continuerai
à m’occuper d’elle à ta place. » (Al Boukhari, Manâqibu’l Ansâr, 24)
À propos de Waraqa t, un autre éminent Hanîf, le Messager de Dieu r dit :
« Je le vois se promener dans le Paradis portant une robe de soie. »
Et à propos de Zayd t :
« Il sera ressuscité dans l’Au-delà en tant que communauté distincte entre moi et
‘Issa (Jésus). » (Haythamî, IX, 416)
Grâce à leur connaissance des livres sacrés antérieurs, les Hanîf avaient le sen-
timent que l’avènement du Dernier Prophète r était proche et ils l’attendaient tous
avec impatience.
La plupart des savants musulmans sont d’avis que les parents du Messager de
Dieu r ont été parmi les Hanîf, adeptes d’une religion qui n’est rien d’autre que la
croyance en un seul vrai Dieu (tawhîd).
C’est la raison pour laquelle le Tout-Puissant ordonne dans le verset coranique
suivant le respect de la religion d’Abraham t, le Hanîf archétypal :

ħĻİƈ óÖŽ Òƈ ÙƆ ĥƪ Ĩ


ƈ ďƈ×ÜÒ ƈ ƈ
Ž ƪ ĪƆÒğƆ ĻŽ ĤƆ ÒÓĭƆ ĻŽ èƆ IJŽ ƆÒħƪ Ƈà
Ɔ Ɔ
īĻ ƈ ƈ Ɔ ĠÓ ƈ
Ɔ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨĪÓ Ɔ ĨƆ IJÓ Ɔ ęƃ ĻĭèƆ
« Puis Nous t’avons révélé: ‹Suis la religion d’Abraham qui était voué exclu-
sivement à Dieu et n’était point du nombre des associateurs›. » (an-Nahl, 16 : 123)
Le terme Hanîf est aussi utilisé pour signifier l’islam, et tout musulman sincère
est également appelé Hanîf.
Le Saint Prophète r déclara, confirmant cela :
« J’ai été envoyé avec la Hanîfiyah, la religion tolérante. » (Ahmad, V, 266; Voir aussi
Al Boukhari, Iman, 29).
Le Saint Prophète r
Avant Le Message

PREMIÈRE PARTIE
39

LA NAISSANCE ET L’ENFANCE
DU SAINT PROPHÈTE r

La Lumière Muhammadienne
Lorsqu’on pense à Dieu, nous ne pouvons le faire sous le rapport du temps et
de l’espace parce qu’Il est Celui qui transcende toutes les dimensions.25 Existant de
toute éternité, Son existence provient de Lui-même sans besoin de tout autre. Cela
étant, le Tout-Puissant a voulu être connu et a donc créé l’existence, le monde de la
pluralité (âlam’ul-kastrat), qui est également appelé mâ siwallâh, désignant toute
chose autre que Dieu.26
Dans le processus de la création, Il créa d’abord la lumière qui est l’essence de
Haqîqa’tul-Muhammadiya, la Réalité muhammadienne.
Une pierre précieuse se conserve dans une boîte ornementale et non dans une
boîte rudimentaire. En parallèle la Lumière muhammadienne est le bijou précieux
caché dans le reste de la création, la boîte ornementale servant à le préserver. Les
créatures n’ont été créées que pour l’amour de Sa grandeur. On pourrait donc dire
que Dieu a créé l’existence dans le but d’orner la Lumière muhammadienne. Dans le
langage divin, le Tout-Puissant, origine de la création, est libre de faire tout ce qu’Il
veut, tandis que la cause est la Lumière muhammadienne, la première création.
Contrairement aux affirmations des philosophes, l’univers n’est ni éternel ni
incréé ; au contraire, il a été façonné par Dieu. Seul le Tout-Puissant est incréé et
intemporel. La Lumière muhammadienne fut créée en premier, comme le met en
lumière ce hadith :
« J’étais déjà un Prophète alors qu’Adam n’était qu’entre âme et corps (quand la
création d’Adam u était dans sa phase proême). » (Tabaranî Al-Mu’jam al-Kabir; Al Kha-
sa’is al-Kubra, v.1, p.4; Tirmidhi, Manâqib, 1)

25. L’esprit humain est d’une nature qui ne peut penser que dans les limites de l’espace et du temps. Avec
les impressions qu’il reçoit du monde physique, il peut, dans une certaine mesure, atteindre la Vérité.
Lié par les impressions reçues du monde de l’observation de se référer à des vérités qui transcendent
le domaine observationnel, tant en termes de désignation que d’insinuation du contenu des vérités
métaphysiques, l’homme est donc pratiquement obligé d’avoir recours à la métaphore.
26. Mâ siwallâh désigne tout ce qui est en dehors de Dieu et qui maintient une distance vis-à-vis de Lui.
40 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En d’autres termes, le Saint Prophète r fut créé et se vit confier son Aposto-
lat prophétique bien avant la création d’Adam u. Sa manifestation corporelle sur
Terre, cependant, marque la dernière page du livre de l’histoire prophétique, ce qui
signifie en d’autres termes que c’est la Lumière muhammadienne qui tourna la pre-
mière page de ce livre dont la dernière prit fin avec l’avènement de Muhammad r en
tant que prophète venu physiquement.
Le Prophète Muhammad r est donc la Lumière de la Création auprès de qui
tous les êtres empruntent leur valeur, un fait élaboré dans le hadith suivant :
« Quand Adam fut expulsé du Paradis à cause de son péché, il demanda par-
don à Dieu en prononçant ces mots : « Pardonne-moi, mon Seigneur, pour l’amour de
Muhammad ! »
« Comment connais-tu le nom de Muhammad alors que Je ne l’ai pas encore
créé ? demanda le Tout-Puissant. »
Adam u répondit :
« Lorsque Tu m’as créé, mon Seigneur, et insufflé en moi Ton esprit, j’ai levé la
tête et vu inscrit les mots Lâ ilâha ilallâh, Muhammad Rasûlullâh au-dessus des piliers
du Trône. J’ai donc pensé que Tu voulais mentionner Ton nom à côté de celui du Plus
Aimé de la Création. »
« Je te pardonne, déclara le Tout-Puissant. Certes Il m’est le plus aimé de la créa-
ture. Implore-moi par son intermédiaire. (Puis chose faite) Je te pardonne. Mais sache
que si Muhammad n’avait point existé, je ne t’aurai guère créé. » (Hâkim, II, 672)
Selon le rapport d’Ibn Abbâs t, Dieu inspira à Jésus (Issa u) de « croire en
Muhammad r et d’ordonner aux gens de son époque de croire en lui. Car si ce n’était
pas à cause de Muhammad r Je n’aurais créé ni Adam u ni le Paradis ni l’Enfer.
Quand J’ai créé le Trône (Arsh) sur l’eau, il a commencé à remuer, en s’arrêtant seu-
lement après que J’eus écrit Lâ ilâha ilallâh, Muhammad Rasûlullâh. » (Hâkim, II, 672)
Jabir t aurait un jour demandé au Saint Prophète r :
« Que mon père et ma mère te servent de rançon ô Messager de Dieu ! Peux-tu
me dire quelle est la première chose que Dieu créa ?
Le Prophète r répondit :
« La première chose créée par Dieu fut la Lumière de Son Messager (issue) de Sa
Propre Lumière. » (Voir Ajlunî, I, 265).
Ibn ‘Arabî g, quant à lui, avance le commentaire suivant :
« Quand Dieu annonça à Muhammad r sa mission prophétique, Adam u qui
n’avait pas été entièrement créé était dans un état intermédiaire entre l’eau et la boue.
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 41

Dès lors le Messager de Dieu r devint effectivement le cœur principal de toutes les
lois divines (charia) pour apparaître ensuite à travers les prophètes L. Même si,
comme le Saint Prophète r l’a indiqué selon le hadith qui explique qu’il était un
Messager r lorsqu’Adam u était toujours dans un état intermédiaire entre l’esprit
et le corps, il avait une charia. Il ne dit pas qu’il était un « homme » ou qu’il existait
car l’Apostolat prophétique ne peut se faire que par une loi, une charia, donnée par
le Tout-Puissant. » (Ibn ‘Arabî, al-Futuhat, II, 171 ; IV, 66-67)
Dans un autre ouvrage célèbre Ibn ‘Arabî g dit :
« Étant la plus parfaite de toutes les particularités humaines, l’Apostolat pro-
phétique a ainsi débuté et s’est achevé avec le Messager de Dieu r. » (Ibn ‘Arabî, Fusûs
al-Hikam, IV, 319)

Dans son Mathnawî, Rumî ç déclare :


« Viens, ô cœur ! La véritable fête, c’est l’union avec Muhammad, sa Majesté ; car
la luminosité de l’univers provient de la lumière de son être sacré. »
Suleyman Chelebi g fait également mention de la Lumière muhammadienne
dans son Mawlid :
Mustafâ nûrunu evvel kıldı vâr
Sevdi ânı ol Kerîm ü Girdigâr 27
La Lumière de Mustafâ, Il la fit d’abord,
Celui qu’Il aimait, le Généreux, le Grand.
Ainsi donc, la Lumière muhammadienne marquée par la Vérité muhamma-
dienne est une essence qui représente l’identité spirituelle du Noble Prophète r.
C’est lui qui, au regard du Créateur, est le plus aimé et le plus précieux. C’est pour
cela que la raison pour laquelle il y a eu création réside dans l’amour du Tout-Puis-
sant envers la Lumière muhammadienne, la première entité créée.
L’univers entier est donc venu à l’existence en l’honneur de la Lumière muham-
madienne, le cœur qui l’enveloppe.
L’existence consiste seulement à exposer et à expliquer sa réalité.
Cela dit, de même qu’il est impossible de verser un océan dans une simple tasse,
il n’est pas concevable d’appréhender la Lumière muhammadienne comme il sied à
sa nature.

27. Les autres distiques présents dans le Mawlid de Sulayman Chelebi g apportent en outre un hommage
lyrique au Noble Prophète r en tant que Lumière de l’Existence et raison pour laquelle l’univers a été
créé en l’honneur de la Lumière muhammadienne.
42 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La lignée pure du Saint Prophète r


Abdallah, le père du Noble Prophète r et sa mère Amina étaient une lignée
bénie issue d’Abraham et d’Ismaël à travers Adnan28, le plus honorable membre de la
lignée Kayzar. (Voir Ibn Hishâm, I, 1, 5).
Il est même dit que Meadd, le fils d’Adnan, fut contemporain de Jésus u.
Aussi bien du côté paternel que du côté maternel, le Messager de Dieu r appar-
tient à la plus pure famille de Quraysh.
Selon ce récit le Prophète r confirma la pureté de sa lignée :
« Je suis né de ma mère et de mon père sans avoir été entaché par l’un des maux
caractéristiques de la Période de l’Ignorance. Depuis Adam jusqu’à ma mère et mon
père, tous les membres précédents qui appartiennent à la lignée ont été conçus dans le
cadre du mariage religieux légal, jamais sous le rapport de la fornication. » (Ibn Kathir,
al-Bidâya, II, 260)

Mustafâ, qui est un autre noble nom du Saint Prophète r, signifie « celui qui a
été délicatement élu ».
Chaque fois qu’il y eut scission dans la lignée, les ancêtres du Noble Prophète r
réussirent à maintenir le lien le plus pur.
En conséquence, depuis Adam u et Eve(Hawwa), la Lumière Prophétique fut
transmise de génération en génération par l’entremise des plus purs des mères et des
pères. (voir Ahmad, I, 210).
Le Coran décrète:
« Et place ta confiance dans le Tout-Puissant, le Très- Miséricordieux, qui
te voit quand tu te lèves, et (voit) tes gestes parmi ceux qui se prosternent » (al-
Shu’ara, 26 : 217-219)

Un certain nombre de commentateurs, dont Ibn Abbâs t, comprennent ce


verset comme étant une référence à l’origine du Noble Prophète r par le biais de
ses ancêtres.
En effet tous étaient des hommes de grande piété et jusqu’à l’atteindre ; la
lumière du Saint Prophète r ne fut transmise que par l’intermédiaire de ceux qui se
sont prosternés devant Dieu. (Qurtubî, XIII, 144 ; Haythamî, VIII, 214).
Le Noble Prophète r confirma lui aussi la pureté de sa lignée :
28. Telle est la lignée du Noble Prophète r: Muhammad ibn Abdullah ibn Abd al-Muttalib ibn Hâshim
ibn Abdi Menaf ibn Qusayy ibn Kilâb ibn Murra ibn Kaab ibn Luay ibn Ghalib ibn Fihr ibn Malik ibn
Nadr ibn Kinâna ibn Huzayma ibn Mudrika ibn Ilyas ibn Mudar ibn Nizar ibn Ma’add ibn Adnan. (Al
Boukhari, Manaqibu’l-Ansar, 28 ; Ibn Hishâm, I, 1-3; Ibn Saad, I, 55-56)
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 43

« Dieu a choisi Ismaël parmi les fis d’Abraham ; le clan de Kinana parmi les
descendants d’Ismaël, Quraysh parmi les fils de Kinana, les fils de Hashim parmi
Quraysh, et les fils d’Abd al-Muttalib parmi Hashim ; et moi parmi les fils d’Abd al-
Muttalib. » (Muslim, Fadâil, 1 ; At Tirmidhi, Manâqib, 1)
En ce qui concerne la pureté bien connue relative à la généalogie du Noble
Prophète r et de ses éminents ancêtres, le grand érudit musulman Ibn Khaldun
apporte ces remarques :
« Nul autre que le Prophète Muhammad r peut se targuer d’avoir une lignée
attestée et bénie par une pureté et une noblesse ininterrompues depuis Adam u.
C’est un cadeau spécial que le Tout-Puissant a offert à Son Bien-aimé. » (Ibn Khaldun,
I, 115).

Mariage des parents du Saint Prophète r Abdallah et Amina


Avant l’avènement du Prophète Muhammad r, la croyance en un Dieu unique
avait presque disparu et la Ka’ba était remplie d’idoles appartenant à différentes tri-
bus. Le puits de Zamzam était aussi perdu. Un jour, alors qu’il s’était endormi près
de la Ka’ba, Abd al-Muttalib, le grand-père du Noble Prophète r, fit un rêve dans
lequel on lui montra l’emplacement du puits de Zamzam et l’ordre de creuser à cet
endroit. Mais alors qu’il tentait de creuser dans l’espoir d’amener le rêve à la réalité,
il en fut empêché par le peuple de Quraysh, au motif qu’il serait affreux de creuser
n’importe où près du Temple Sacré. Comme il n’avait qu’un seul fils pour l’aider
Abd al-Muttalib, appréhendant de ne pas pouvoir leur résister, invoqua Dieu et fit
le vœu (nadhr) de sacrifier un fils si le Tout-Puissant lui en donnait dix pour l’aider
dans cette cause contre ses ennemis.
En voyant des signes miraculeux devenir apparents chez Abd al-Muttalib,
les Mecquois commencèrent à s’adoucir un peu et lui donnèrent la permission de
creuser le puits. Abd al-Muttalib alla donc de l’avant, creusa et mit au jour le puits
de Zamzam. Des années plus tard, son invocation fut exaucée : le Tout-Puissant lui
donna douze fils qui grandirent tous pour être forts, des hommes de protection.
Abd al-Muttalib se souvint ensuite du vœu qu’il avait formulé il y a longtemps
dans son rêve. Inquiet, Il sacrifia d’abord un bélier, puis une vache, étant de tout
temps sollicité pour accomplir un plus grand sacrifice avant qu’on lui rappelle fina-
lement :
« Tu m’avais promis de sacrifier l’un de tes fils ! »
Là-dessus, Abd al-Muttalib rassembla tous ses fils autour de lui et, tout en leur
expliquant le rêve qu’il avait fait, les invita à se soumettre à ce que le rêve l’avait
contraint à faire.
44 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En pleine soumission, ils dirent :


« Fais ce que tu as à faire pour réaliser ton vœu ! »
Pour s’acquitter de son vœu, Abd al-Muttalib décida de tirer au sort pour dési-
gner celui qui allait être sacrifié, plaidant ainsi devant le Tout-Puissant :
« Ô Seigneur ! Me voici, tirant au sort pour montrer que je ne manque pas à
ma parole. Maintenant, s’il te plaît, permets-moi de tirer le nom que Tu voudrais
voir tiré ! »
Le sort en était jeté et ce fut le nom d’Abdallah qui sortit.
Bien que ce dernier fût le plus cher de ses fils, Abd al-Muttalib n’hésita pas à se
plier à ce que le destin lui avait octroyé.
Cependant, craignant qu’il puisse initier une mauvaise coutume, les Mecquois
s’opposèrent vivement à Abd al-Muttalib, le convainquant de consulter un homme
compétent. Alors ils allèrent tous chez un homme sage et lui racontèrent l’histoire.
« Quel est le prix du sang pour une personne tuée ? » demanda l’homme avisé.
« Dix chameaux », répondirent-ils.
L’homme avisé conseilla alors aux Mecquois de tirer au sort entre Abdallah et
les dix chameaux, et s’il s’avérait que le nom d’Abdallah était tiré une fois de plus,
il leur faudrait rajouter à chaque fois dix chameaux supplémentaires par rapport au
prix du sang jusqu’à ce qu’un seul chameau soit tiré au sort.
Ainsi tirèrent-ils au sort, comme on le leur avait conseillé, entre dix chameaux
et Abdallah. Le nom d’Abdallah fut tiré à plusieurs reprises jusqu’à ce que le nombre
de chameaux atteigne une centaine, puis enfin un chameau fut finalement tiré au
sort. La famille était en liesse, mais Abd al-Muttalib n’était toujours pas satisfait,
pensant qu’il aurait été injuste d’ignorer le fait d’avoir tiré le nom d’Abdallah dix
fois par opposition à un simple contingent de chameaux. Il réitéra donc trois fois le
tirage au sort entre Abdallah et la centaine de chameaux et, à la grande satisfaction
d’Abd al-Muttalib, le sort tomba à chaque fois sur les chameaux. Tous ceux qui
étaient présents glorifièrent le Tout-Puissant pour cette échéance. Abd al-Muttalib
sacrifia la totalité des chameaux et distribua leur viande en charité. (Voir Ibn Hishâm; I,
163-168; Ibn Saad, I, 83-85; Hakim, II, 604/4036).

Dans la Loi islamique aujourd’hui, le prix du sang pour une personne tuée
s’élève à une centaine de chameaux ou bien l’équivalence, une juridiction qui est
issue de cet épisode cité précédemment.
À la mémoire du sacrifice de son père et de son aïeul Ismaël u le Noble Pro-
phète r a déclaré :
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 45

« Je suis le fils des deux sacrifices. » (Hâkim, II, 609/4048)


On a donc surnommé le Messager de Dieu r « fils des deux sacrifices ».(Hakim,
II, 604/4036).

Abdallah était le plus bel homme de sa tribu, surpassant également tout le


monde en intelligence et en perfection morale. (Voir Halabî, I, 51-62).
Toutes les femmes de Quraysh souhaitaient l’épouser. L’une d’entre elles était
la sœur de Waraqa ibn Nawfal qui, voyant la lumière sur le front d’Abdallah, réalisa
qu’elle appartenait à la lumière du Prophète imminent.
Elle désira par conséquent être la mère du Prophète attendu avec impatience,
offrant même au jeune Abdallah cent chameaux en guise de dot. (Voir Ibn Hishâm, I,
168-169.V).

Un an avant « l’Année de l’Eléphant », Abd al-Muttalib demanda pour son fils


Abdallah la main d’Amina, fille d’Abdimenaf, l’éminence de Quraysh en termes
d’honneur et d’ascendance.
La proposition fut accueillie favorablement et le mariage eut lieu rapidement.
L’ascendance d’Amina, à travers son père Wahb ibn Abdimenaf, atteignit
Zuhrah, le fils de Kilab, le fils de Murrah, par laquelle elle s’unit avec l’ascendance
d’Abdallah et du clan Hashim, avec Kilab, dont le fils Zuhrah fut le fils de Qusay.
(Voir Ibn Saad 59,60).

Lorsque le Noble Prophète r fut conçu, la lumière sur le front d’Abdallah passa
à Amina. (Voir Ibn Hishâm, I, 170).

Décès d’Abdallah
Peu de temps après le mariage, Abdallah fit un voyage commercial à Damas.
Sur le chemin du retour, il tomba malade. Parvenu à Médine, il dit à ses amis qu’il
serait mieux pour lui de rester quelques temps en ville auprès de ses oncles maternels
jusqu’à ce qu’il récupère. Bien qu’il restât un mois à Médine il ne put récupérer et
rendit finalement le dernier soupir dans la ville où il devait être enterré à l’âge de
vingt-cinq ans. (Voir Ibn Saad, I, 99). Amina versa des larmes de douleur pendant des
jours pour son défunt mari, prononça des oraisons, fit des éloges sur celui qui fut
aimé de tous, et célébra sa générosité et sa miséricorde inégalables. (Cf. Ibn Saad, I, 100).

Evènements annonçant la naissance du Saint Prophète r


Les signes divins de la grande naissance commencèrent à se manifester bien
avant la venue au monde du Saint Prophète r. Chaque pouce de l’Univers se lan-
guissait après l’incarnation de la cause originelle qui se trouve derrière leur création.
46 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les engagements du Tout-Puissant pris par le biais des prophètes L antérieurs qui
ont reconnu Muhammad r comme Prophète et l’ont aidé à le manifester pendant
leur mission prophétique peuvent être considérés comme le plus grand signe attes-
tant son avènement.
Le verset coranique suivant confirme que :

ƅ ƈ ÔÓ ƈ ƈ ƈ ųÒ Ɔ
ĢijƄ øƇ ò
Ɔ ħŽ ĠƇ ÅÓƆ ä
Ɔ ħƪ ƇàÙĩƆ ġŽ èIJ Ɔ ƅ ÝƆ ĠīŽ ĨħŽ ġƇ ÝƇ ĻŽ ÜÆÓ
Ɔ ĩƆ ĤƆ īĻƈ
Ɔ Ļƈž ×ĭĤÒ
ƪ ĚÓ Ɔ áƆ ĻĨ Ƈ Ʃ ñƆ ìƆ ÈðŽ Ìƈ IJƆ
ƈ ĥƆ ĐħÜƇ ñŽ ìƆ ƆÈIJħÜƇ òóĜŽ ƆÈƆÈĢÓƆ ĜƆ įĬƪ óāĭŽ ÝĤƆ IJįƈƈ ÖīƇĭĨƈ ËŽ ÝĤƆ ħġƇ đĨÓĩĤƈ ĚƄ ïžƈ āĨ
ĸ ƈóĀƈŽ ÌħġƇ Ĥðĵ
Ž Ɔ Ž Ɔ Ž ŽƆ Ƈ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ
īĺ ƈ ƈ ƪ īĨ ƈ Ɔ Ž ĘƆ ĢÓƆ ĜƆ ÓĬƆ òŽ óƆ ĜŽ ƆÈÒijƇĤÓĜƆ
Ɔ ïİÓýĤÒ Ɔ ħŽ ġƇ đƆ ĨÓ
Ɔ ĬƆ ÈIJÒIJ
Ɔ ïƇ ıƆ üÓ
« Et lorsqu’Allah prit cet engagement des prophètes : ‹Chaque fois que Je
vous accorderai un Livre et de la Sagesse, et qu’ensuite un messager vous viendra
confirmer ce qui est avec vous, vous devez croire en lui, et vous devrez lui porter
secours.› Il leur dit : ‹Consentez-vous et acceptez-vous Mon pacte à cette condi-
tion ? › - ‹Nous consentons›, dirent-ils. ‹Soyez-en donc témoins, dit Allah. Et Me
voici, avec vous, parmi les témoins. » (al-Imrân, 3 : 81)
Après avoir fini la construction de la Ka’ba les prophètes Abraham et Ismaël L
prièrent en levant leurs mains vers les cieux pour l’avènement du Saint Prophète r :

ÔÓ ƈ ƈ ƈ ħ ƈıĻĥƆ ĐijĥƇ ÝĺħıĭŽ Ĩƈ ƃźijøòħ ƈıĻĘ


ƈ
Ɔ ÝƆ ġĤŽ ÒħƇ ıƇ ĩƇ ĥž đƆ ƇĺIJ
Ɔ ğƆ ÜÓĺÆ
Ɔ Ž Ž Ɔ ŽƆ Ž Ƈ Ƈ Ɔ Ž ߎ đƆ ÖÒŽ IJÓ
Ɔ ĭƆ Öƪ òƆ
ħĻġƈ éĤÒ õĺ ƈõđĤÒÛĬƆÈğĬƈÌħ ƈıĻĠƈ õĺIJÙĩġéƈ ĤÒIJ
Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ƪ Ž ž ƆƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ
« Notre Seigneur ! Envoie l’un des leurs comme messager parmi eux, pour
leur réciter Tes versets, leur enseigner le Livre et la Sagesse, et les purifier. Car
c’est Toi certes le Puissant, le Sage ! » (al-Baqara, 2 : 129)
Le Prophète Jésus u informa les Juifs sur sa prophétie et donna l’heureuse
nouvelle de l’avènement du dernier prophète :

ƈ Ĝïƈ āĨħġĻĤÌƈ ųÒ ƈ ĢijøòĹĬƈ Ìƈ ģĻÐÒƈ óøƈÌĹĭƈ ÖÓĺħĺóĨīÖÒĵùĻĐ ƈ


īƆ ĻÖÓĩĤÓ
ŽƆ Ɔ ƃ ž Ɔ Ƈ Ž Ƈ ŽƆ Ʃ Ƈ Ƈ Ɔ ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ž Ɔ ĢÓƆ ĜƆ ðŽ Ìƈ IJƆ
ïƇ ĩƆ èŽ ƆÈįƇ ĩƇ øÒĸ ƈ ƈ ƈŽ ƅ ƈ ƈ ƈ
Ž ïđŽ ÖƆ īŽ ĨĹÜÉĺƆ ĢijøƇ óƈƆ ÖÒóƃ ýž ×Ɔ ĨƇ IJ
Ɔ ØÒòƆ ijŽ ÝĤÒ
ƪ īƆ Ĩĸƪ ïƆ ĺƆ
« Et quand Jésus fils de Marie dit : ‹Ô Enfants d’Israël, je suis vraiment le
Messager d’Allah envoyé à vous, confirmateur de ce qui, dans la Thora, est anté-
rieur à moi, et annonciateur d’un Messager à venir après moi, dont le nom sera
‹Ahmad›...» (as-Saff, 61 : 6)
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 47

Alors qu’elle était toujours enceinte, Amina fit ce rêve :


« Tu es enceinte, Amina, du maître de l’Oumma. Quand tu lui donneras nais-
sance, prie Dieu et dit : « Je cherche refuge auprès de Dieu, l’Unique, contre le mal
de l’envieux quand il envie et donne-lui le nom de « Muhammad ». » (Voir Ibn Hishâm,
I, 170).

En mémoire de cela, le Messager de Dieu r déclara :


« Je suis la réponse à la prière de mon grand-père Abraham, à la bonne nouvelle
donnée à Jésus et au rêve de la mère. » (Hâkim, II, 453 ; Ahmad, IV, 127-128)
Le nom et attributs du Saint Prophète r ont été aussi clairement cités tant dans
la Torah que dans l’Evangile.
Ces mentions que les savants des deux textes ont eu connaissance à l’époque
sont loués dans le Coran :

įƇ ĬƆ IJïƇ åƈ ĺĸ ƈ ƈ đƈ×Ýĺīĺñƈ ĤÒ


Ɔ ñĤƪ ÒĹƪ Ĩž ƇŶÒŽ Ĺƈƪ ×ĭĤÒ
ƪ ĢijƆ øƇ óĤÒĪij
ƪ Ɔ Ƈ ƪƆ Ɔ ƪ
ƈ åƈ ĬŽ Ÿƈ ÒIJ
ģĻ ƈ ƈ ƈ ÝġŽ Ĩ
Ɔ ØÒòƆ ijŽ ÝĤÒĹ
ƪ ĘħŽ İƇ ïƆ ĭŽ ĐÓÖij
ƃ Ƈ Ɔ
« Ceux qui suivent le Messager, le Prophète illettré qu’ils trouvent écrit
(mentionné) chez eux dans la Thora et l’Evangile. » (al-Arâf, 7 :157)
Ils reconnurent le Saint Prophète r avec la même facilité qu’un père reconnaît
son fils parce qu’ils connaissaient ses caractéristiques .
C’est ce que confirme le verset coranique suivant :

ħİƇ ÅÓƆ ĭƆ ÖŽ ƆÈĪij


Ɔ ĘƇ ƈóđŽ ĺÓ ƈ ƈ
Ž Ɔ ĩƆ Ġ
Ɔ įƇ ĬƆ ijĘƇ ƈóđŽ ĺƆ ÔÓ
Ɔ ÝƆ ġĤŽ ÒħƇ İÓ Ƈ ĭƆ ĻŽ ÜÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ Ò
Īij
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ħŽ İƇ IJ ƈ Óƃ ĝĺ ƈóĘƆ Īƈƪ ÌIJ
Ɔ ĩƇ ÝƇ ġŽ ĻƆ ĤƆ ħŽ ıƇ ĭŽ Ĩ
Ɔ ěƪ éƆ ĤŽ ÒĪij Ɔ
« Ceux à qui nous avons donné le Livre, le reconnaissent comme ils recon-
naissent leurs enfants. Or, une partie d’entre eux cache la vérité, alors qu’ils la
savent ! » (al-Baqara, 2 : 146)
Abdallah ibn Salâm29, savant spécialiste de la Torah, dit en devenant Musulman:
29. Abdallâh ibn Salâm, aussi connu sous le nom d’Abû Yûsûf, est un descendant de Yûsûf (Joseph : sur
lui la paix). Nommé Husayn à sa naissance, son nom fut changé plus tard en Abdallâh par le Saint
Prophète r. C’était un érudit juif des Banu Qaynuqa. Quand le Messager de Dieu arriva à Quba, près
de Médine, au moment de l’Hégire, Abdallâh s’y rendit et lui posa quelques questions. Il pends que les
réponses du Saint Prophète ne pouvaient qu’être données que par un prophète, et de ce fait il embrassa
sine die l’islam. Plus tard, il contribua à faire accepter l’islam à sa famille et à de nombreux proches.
Compte tenu de la bonne nouvelle du Paradis que le Saint Prophète r lui avait fait part de son vivant,
48 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Je reconnais le Messager de Dieu mieux que je ne reconnaitrais mon fils. »


Omar t lui demanda, la voix curieuse : « Comment cela ? »
Il répondit : « Je peux sans aucun doute témoigner que Muhammad est le Mes-
sager de Dieu car ses caractéristiques sont clairement décrites dans la Torah ».
En entendant cela, Omar t lui fit cette remarque :
« Le Tout-Puissant t’a en effet donné la Vérité. » (Wâhidî, s 47; Râzî, Tafsîr, IV, 116)
Le Saint Coran témoigne que la Torah et l’Evangile décrivent les caractéris-
tiques du Saint Prophète r ainsi que (celles) de ses Compagnons :

ƈ ƈ ųÒ ƈ Ƈ øòïƄ ĩéĨ


Óđƃ Ġƪ ò Ƈ ħŽ İÒƇ óƆ ÜƆ ħŽ ıƇ ĭƆ ĻŽ ÖƆ ÅÓ Ƈ ĩƆ èƆ ò Ɔ ÅÒƇ ïƪ üƆÈįƇ đƆ Ĩ
Ƈ ƈòÓęƪ ġƇ ĤŽ ÒĵĥƆ Đ Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒIJƆ Ʃ Ģij Ƈ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ
ƈ åùĤÒ ƈóàƆ ƆÈīĨħ
îij ƈ ƈıİij ƈ äIJĹĘ ƈ ħİÓĩĻøÓ ƈ Ĭƃ ÒijĄŽ ƈòIJųÒ ƈ ƈ
Ƈ ƫ Ž Ƈ Ƈ ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ʃ īƆ ĨƃŻąŽ ĘƆ Īij Ɔ ĕƇ ÝƆ ׎ ĺÒ
Ɔ ïƃ åƪ øƇ

Ɔ ĥƆ ĕŽ ÝƆ øÓ Ɔ ĘƆ ĮƇ ƆÉĉŽ ü Ɔ âƆ óƆ ìŽ ƆÈĎƅ òŽ õƆ Ġ ƈŽ Ÿƈ ÒŽ ĹĘƈ ħıĥƇ áƆ ĨIJØÒƈ òijÝĤÒĹĘ ƈ ħıĥƇ áƆ ĨğƆ Ĥð ƈ
Ž ĘƆ ĮƇ òƆ ôÇ Ɔ ģĻ
ƈ åĬ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Žƪ ŽƇ Ɔ
ÒijƇĭĨÆƆ īĺ
ƈ Ʃ ïƆ ĐIJòÓęƪ ġƇ ĤŽ Òħ ƈıƈÖċĻ
Ɔ ñĤƪ ÒƇųÒ ĕƈ ĻĤƈ ĎÒòõĤÒÕåƈ đĺįƈ Ĝij ƈ øĵĥƆ ĐĴijÝøÓĘƆ
Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ ƫ Ƈ ŽƇ Ƈ Ɔ ƆƆ Ž
ÓĩĻ ƈ óäƆÈIJØƃ óęƈ ĕŽ ĨħıĭŽ Ĩ ƈ ƈ ƈ ĥƇ ĩƈ ĐƆ IJƆ
ƃ čĐÒ Ɔ ƃ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ÚÓéƆ ĤÓāĤÒÒij ƪ
« Muhammad est le Messager d’Allah. Et ceux qui sont avec lui sont durs
envers les mécréants, miséricordieux entre eux. Tu les vois inclinés, prosternés,
recherchant d’Allah grâce et agrément. Leurs visages sont marqués par la trace
laissée par la prosternation. Telle est leur image dans la Torah. Et l’image que
l’on donne d’eux dans l’Evangile est celle d’une semence qui sort sa pousse, puis
se raffermit, s’épaissit, et ensuite se dresse sur sa tige, à l’émerveillement des
semeurs. [Allah] par eux [les croyants] remplit de dépit les mécréants. Allah pro-
met à ceux d’entre eux qui croient et font de bonnes œuvres, un pardon et une
énorme récompense. » (al-Fath, 48 : 29)
Abdallah ibn ‘Abbâs demanda un jour à Ka’b al-Ahbâr30 de lui décrire les carac-
téristiques du Saint Prophète r mentionnées dans la Torah. Il lui répondit :
« Y sont mentionnées les caractéristiques suivantes :
Muhammad ibn Abdallah naîtra à La Mecque et émigrera à Médine.
Abdallâh ibn Salâm fut un compagnon très respecté. On dit que le verset 10 de la sourate al-Ahqaf
et le verset 43 de la sourate ar-Rad ont été révélés à son intention. Après avoir rapporté vingt-cinq
hadiths, il rendit le dernier soupir à Médine en 663 (43 de l’Hégire) au cours du califat de Mu’awiyya.
30. Ka’b ibn Ahbâr g, issu de la génération des Tabi’un (la génération postérieure à celle des Compagnons),
est célèbre pour ses narrations tirées des différents livres des Israélites.
Il devint musulman sous le califat d’Abû Bakr t et décéda au cours de la 32ème année de l’Hégire.
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 49

Il finira par s’emparer de Damas, ne s’exprimera pas grossièrement et n’élèvera


pas la voix en public.
Il ne fera pas de représailles contre le mal en employant le mal et pardonnera
aux coupables.
Son peuple offrira des remerciements à Dieu et le glorifiera dans les bons
moments comme dans les mauvais.
Ils se laveront les bras (feront l’ablution) et s’aligneront en rang pour la prière
comme dans une bataille.
On entendra constamment dans leurs lieux d’adoration des bourdonnements
(la récitation du Coran et des chants sur les noms de Dieu).
Leur appel à la prière remplira le ciel. » (Dârimî, Muqaddima, 2)
Atâ ibn Yasâr g raconte :
Un jour que je rencontrai Abdallah ibn Amr31, je lui demandai de me détailler
la description que faisait la Torah sur le Messager de Dieu r.
Il me répondit :
« Par Dieu il y est décrit avec certaines des qualités qui lui sont attribuées dans
le Coran. Il est dit dans la Torah ce qui suit :
« Ô Prophète ! Nous t’avons envoyé comme témoin pour attester de la Vraie
religion de Dieu, un porteur de bonnes nouvelles aux croyants fidèles, un avertisseur
à l’égard des incroyants et un gardien pour les analphabètes.
Tu es Mon serviteur (ou Mon esclave) et Mon Messager. Je t’ai nommé al-
Mutawakkil (qui dépend de Dieu). Tu n’es ni discourtois, ni enclin a faire du bruit
en public.
Tu ne rends pas le mal à ceux qui te font du mal, mais tu es pardonneur et
bienveillant envers eux.
Dieu ne te laissera pas mourir tant qu’à travers toi Il ne puisse redresser les voies
tortueuses, faisant admettre que nul n’a le droit d’être adoré en dehors de Dieu qui,
31. Abdallâh ibn Amr t émigra à Médine la 7ème année de l’Hégire avec son père Amr t qui avait embrassé
l’islam avant lui. C’était un Compagnon lettré, connaissant bien les cultures du passé. Il rapporta
plusieurs hadiths qu’il avait entendus de la bouche du Saint Prophète r avec sa permission spéciale.
Sa vaste connaissance du Hadith et de la jurisprudence fait de lui l’un des quatre « Abdallâh », ou
Abadila, reconnus pour leur profondeur à cet égard. Membre de l’armée qui conquit Damas, Abdallâh
t combattit également à Yarmuk où il fut le porte-étendard de l’armée des croyants commandée par
son père Amr t. Après leur conquêtes il s’installa en Egypte avec son père. Il y décéda à l’âge de 72
ans. Il est enterré près de la mosquée Amr ibn al-As au Caire.
50 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

à travers cela, permettra aux yeux des aveugles, aux oreilles des sourds et aux cœurs
de pierre de s’ouvrir à la vérité.» » (Al Boukhari, Buyû, 50 ; Tafsîr, 48 :3)
Conscients des caractéristiques du Saint Prophète r, les juifs attendaient
anxieusement son avènement. Si bien qu’à chaque fois qu’ils se querellaient avec les
tribus médinoises des Aws et des Khazraj, ils ne cessaient de les menacer, disant que
leurs jours étaient comptés depuis la promesse du Prophète attendu, dont l’arrivée
était imminente et que tous les juifs devraient suivre, ce qui signifierait l’éradication
de ces deux tribus, comme le furent les Ad et de Iram. (Ibn Asîr, al-Kâmil, II, 95-96).
Mais comme le Saint Prophète r n’avait pas de sang juif, ils ne l’acceptèrent
jamais en tant que tel.
L’histoire suivante racontée par Safiya bint Huyay c, l’épouse du Saint Pro-
phète r et juive avant son entrée en islam est vraiment frappante:
« Quand le Messager de Dieu r atteignit le village de Quba lors de la migration
à Médine, mon père et mon oncle se précipitèrent pour le voir. Ils revinrent tristes et
abattus vers le coucher du soleil.
J’entendis mon père demander à mon oncle :
« Donc tu penses qu’il est le Prophète attendu ? »
Mon oncle Abû Yâsir répondit :
« Par Dieu il l’est ! »
Mon père demanda une fois de plus :
« Mais en es-tu sûr ? Confirmes-tu ceci par d’autres preuves ?»
La réponse fut : «Oui ! »
Après une courte pause Abû Yasir demanda :
« Alors comment te sens-tu maintenant vis-à-vis de lui ? »
Mon père répondit :
« Par Dieu aussi longtemps que je serai vivant, je développerai dans mon cœur
de l’hostilité à son égard. » (Abû Nu’aym, Dalâil, I, 77-78)
Les juifs étaient jaloux des Arabes car le dernier Prophète r avait émergé de
ces derniers, et non d’une souche juive. Ils avaient attendu impatiemment depuis le
début à ce qu’il fut ressuscité d’entre eux. C’est pour cela qu’ils rejetèrent son Apos-
tolat prophétique. (Voir Ibn Saad, I, 155).
Ibn ‘Abbâs t fit ce récit concernant l’attitude hostile des juifs :
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 51

« Combattant sans cesse la tribu de Ghatafan, les juifs de Khaybar avaient


presque toujours l’habitude de finir battus.
En conséquence, ils prièrent ainsi le Tout-Puissant :
« Notre Seigneur ! Nous Te demandons la victoire au nom du Prophète que Tu
as promis d’envoyer vers la fin des temps. »
En implorant l’aide divine au nom du Prophète (tawassul), les juifs purent
vaincre la tribu de Ghatafan.
Pourtant, même s’ils reçurent de l’aide en utilisant son nom, ils n’acceptèrent
pas le Dernier Prophète r envoyé par le Tout-Puissant.
En conséquence afin de les châtier, ce verset coranique fut révélé :

Ó ĩƪ ĥƆ ĘƆ ÒIJóęƆ Ġ īĺñƈ ĤÒĵĥĐĪijéÝƈ ęÝùĺģ×ĜīĨƈ ÒijƇĬÓĠƆ IJƆ


Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ž Ɔ Ƈ ŽƆ Ž
īĺ ƈ ƈ Ʃ ÙƇ ĭđĥƆ ĘƆ įƈƈ ÖÒIJóęƆ ĠÒij
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒĵĥƆ ĐƆ ųÒ ƆŽ ĘóĐÓĨħİÅÓä
Ƈ Ɔ ƇƆƆ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ
« Et quant leur vint d’Allah un Livre confirmant celui qu’ils avaient déjà, -
alors qu’auparavant ils cherchaient la suprématie sur les mécréants, - quand donc
leur vint cela même qu’ils reconnaissaient, ils refusèrent d’y croire. Que la malé-
diction32 d’Allah soit sur les mécréants ! » (al-Baqara, 2 : 89) ; (Qurtubî, II, 27; Wâhidî, p. 31)
L’évènement suivant est également remarquable parce qu’il fait part de l’avène-
ment du Saint Prophète r dans le monde :
Sayf ibn Zî-Yazan avait été nommé roi du Yémen par le Perse Khosrau. Les re-
présentants des tribus arabes vinrent ensemble pour le féliciter. La mission envoyée
par les Mecquois se composait de dix personnes et était dirigée par Abd al-Muttalib,
le grand-père du Saint Prophète r.
En présence du roi, Abd al-Muttalib dit :
« Nous sommes le peuple ainsi que les serviteurs de la Maison protégée de Dieu.
Nous sommes venus te féliciter pour ton accession au trône. »
Ils furent chaleureusement accueillis par le roi du Yémen et séjournèrent
quelques temps auprès de lui en tant qu’invités.
32. Tant dans le Saint Coran que dans les hadiths du Noble Prophète r, dont quelques-uns que nous
verrons en temps utile, il y est fait mention de la malédiction de certains pécheurs invétérés, sans
référence particulière à une personne en particulier ou à des personnes en général. Les différentes
malédictions, ici, visent les notions, les comportements et les pratiques moralement déviantes. Que
le Saint Prophète ait choisi de maudire malgré avoir affirmé «… Je n’ai pas été envoyé pour maudire
(les gens), mais comme une miséricorde… » (Muslim, Birr, 87) indique seulement la gravité du
comportement et de ses graves conséquences sur la vie islamique et la structure sociale.
52 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un jour, le roi convoqua Abd al-Muttalib et lui dit :


« Je vais te dire un secret, Abd al-Muttalib. S’il s’agissait d’un autre que toi, je ne
l’aurais pas dit, mais c’est seulement parce qu’il y a quelque chose en toi que je sens.
Garde ceci entre nous jusqu’à ce que le Tout-Puissant veuille bien l’exposer. Que Sa
volonté se réalise. Nous avons un livre dont le contenu, à ce que nous avons compris,
renferme des nouvelles importantes vous concernant ainsi que vos amis. »
Abd al-Muttalib insista :
« Même si cela signifie que ces nomades vont mourir sur ton chemin dis-moi
que sont donc ces importantes nouvelles ? »
Le roi répondit :
« Un garçon qui naîtra dans la région de Tihâma sera le leader de l’humanité
jusqu’à la Dernière Heure. Son peuple glanera l’honneur. Comme signe il aura un
grain de beauté entre ses omoplates. »
Le roi Sayf ibn Zi-Yazan continua :
« Le moment de sa naissance est venu. Qui sait ? Peut-être est-il déjà né. Son
nom est Muhammad. Ses parents vont décéder et son grand-père puis son oncle
prendront soin de lui. Le Tout-Puissant l’a envoyé comme un interlocuteur clair
sur Son chemin et fera de quelques-uns ses assistants (les Ansârs). Par eux, le Tout-
Puissant abaissera les ennemis de ce Prophète et donnera de la dignité à ses amis.
Il conquerra les meilleures parties du monde. Le feu des Zoroastriens s’éteindra
lorsqu’il naîtra. Les gens à son époque adoreront ar-Rahman, le Seul Vrai Dieu. L’in-
crédulité et toutes les extrémités seront bannies, les idoles seront détruites et le Satan
sera lapidé. Ses paroles différencieront le vrai du faux. Ses jugements seront toujours
justes. Il commandera toujours le bien et le pratiquera lui-même le premier. Le mal
sera prohibé et le mensonge sera détruit. »
Abd al-Muttalib demanda :
« Puisse Dieu prolonger ta vie et ton honneur ! Que ta règle soit éternelle ! Ce
que tu décris est ma lignée. Le roi peut-il rendre cet homme plus heureux en donnant
plus de détails sur cet enfant ? »
Sayf répondit :
« Par le voile qui enveloppe la Maison de Dieu, par tous les miracles et les cé-
lestes Écritures, il n’est guère mensonger d’affirmer que tu es l’ancêtre de ce bébé. »
Abd al-Mutallib tomba par terre en jubilant et le roi lui demanda :
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 53

« Lève la tête. Que ton cœur soit en paix, que ta vie soit longue et ton nom
exalté ! Dis-moi… Y a-t-il quelque chose, parmi les signes que je t’ai révélés, dont tu
es conscient ? ».

« Oui… j’ai eu un fils que j’aimais tendrement, tel un trésor. Je l’ai marié à Ami-
na, fille de l’une des personnes les plus honorables de mon peuple. Elle donna nais-
sance à un enfant. Je l’ai appelé Muhammad. Il a un grain de beauté situé entre ses
omoplates. Il porte en outre tous les signes que tu as mentionnés. Ses deux parents
sont décédés. Son oncle et moi avons pris soin de lui », expliqua Abd al-Muttalib.

« Protège bien l’enfant, informa le roi. Méfie-toi des juifs parce qu’ils ont de
l’inimitié à son encontre. Mais le Tout-Puissant ne leur donnera pas l’occasion. Ne
mentionne pas à tes amis ce que je t’ai dit, car je crains qu’ils ne soient jaloux de la
précellence qui t’a été accordée en infligeant des ennuis à ton petit-fils. Si seulement
je savais que je survivrais pour voir le jour où il deviendra prophète, je marcherais
sur Yathrib (Médine) avec ma cavalerie et mon infanterie et en ferais la capitale de
mon royaume, préparant ainsi la voie pour son émigration. Si seulement je pouvais
être celui qui le protège des troubles et des adversaires ! Donne-moi de ses nouvelles
dans un an ! »

Malheureusement, Sayf ibn Zi-Yazan fut tué pendant l’année en cours.33 (Ibn
Kathir, al-Bidaya, III, 26-28; Diyarbakri, I, 239-241)

Concernant son petit-fils Abd al-Muttalib reçut cette autre bonne nouvelle:
33. Le fait que l’avènement du Noble Prophète r et de certains de ses attributs aient été exprimés tant
dans la Torah que dans l’Evangile indique que ces livres étaient bien à l’origine d’inspiration divine et
qu’en dépit de leur distorsion ils conservent toujours une nuance d’authenticité. Par conséquent les
musulmans, même s’ils considèrent ces livres comme caducs, ne montrent en aucun cas d’irrespect à
leur égard. Comme dans la Torah et l’Evangile, la venue du Saint Prophète r a également été annoncée
dans les Écritures considérées comme sacrées par les religions de l’Orient, comme le Zoroastrisme,
l’Hindouisme et le Bouddhisme. Dans l’Avesta, le livre sacré du Zoroastrisme, où il y est mentionné
comme étant le Prophète de toute l’humanité, en plus du grand nombre de ses attributs, le Noble
Messager r est appelé Saoshyant, un terme qui signifie « miséricorde pour les mondes ». Les Védas,
Upanishads et Puranas de la tradition hindoue, entre autres, parlent de la façon dont le Sceau des
Prophètes proclamera le port de la barbe comme sunna et prohibera la consommation de viande de
porc. Des textes bouddhiques contiennent aussi beaucoup de sections s’arrêtant sur les attributs du
Saint Prophète r, célébrant sa venue future. (Voir Remzi Kaya, İlâhî Kitaplarda Hazret-i Muhammed,
p. 221-239; A. H. Viyarthi - U. Ali, Doğu Kutsal Metinlerinde Hazret-i Muhammed, İstanbul, 1997;
İbrâhim Cânan, XIV, 79-81). Considérant que la première religion de la Terre ait été la vraie religion
et que des milliers de prophètes aient été envoyés pour guider l’humanité, par intermittence, à chaque
fois qu’elle s’est écartée du vrai chemin, il n’est pas vraiment surprenant de tomber sur des vérités,
comme l’annonce du Prophète Ultime, qui existent encore dans les croyances erronées telles que le
Zoroastrisme, l’Hindouisme, le Bouddhisme et bien d’autres.
54 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un jour, alors qu’il jouait avec d’autres enfants, le jeune Muhammad r s’éloigna
jusqu’au quartier de Radm. Là, des gens appartenant au clan des Mudlij le hélèrent et
inspectèrent les pieds et les empreintes de l’enfant.
Sur ces entrefaites, Abd al-Muttalib arriva. Ils l’étreignirent et lui demandèrent :
« Est-ce là ton enfant ?»
Il leur répondit : « C’est mon fils ! ».
Ils lui conseillèrent :
«Protège-le étroitement car nous n’avons jamais vu auparavant d’empreintes,
près de la Ka’ba, qui ressemblent autant à celles d’Abraham que celles-ci! »
Abd al-Muttalib exhorta son fils Abû Talib qui était à côté de lui à prêter l’oreille
à leurs paroles. C’est grâce à de telles préoccupations qu’Abû Talib devint si protec-
teur à l’égard de son neveu. (Voir Nuaym, Dalâil, I, 165; Ibn Saad, I, 11).
Avant même que le Noble Messager r n’ait honoré le monde par sa présence,
le monde entier était plongé dans les ténèbres spirituelles. Les gens se noyaient dans
les marécages de l’ignorance crasse. Mêmes les bêtes en avaient assez des atrocités
humaines. L’humanité avait presque perdu sa dignité.
La vie était devenue insupportable, les êtres humains étaient dans la misère et les
cœurs étaient endoloris. Le faible avait oublié depuis longtemps comment sourire.
Seul le fort exerçait le droit de vivre.
Avec ces vers Mehmet Akif relate la situation :
L’humanité a dépassé en férocité les hyènes,
Faible, dévoré par ses frères chacun demeurait.
Le Coran en fait ainsi la description :

ƈ ĭĤÒĸïƈ ĺƆÈÛŽ ×ùĠÓ


öÓ ƈ îÓùęƆ ĤŽ ÒóıČ
ĩƈÖ ƈóé×ĤÒIJóƈ ×ĤÒĹĘ
ƪ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆŽ Ɔ ž ƆŽ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ 
« La corruption est apparue sur terre et dans la mer à cause de ce que les gens
ont accompli de leurs propres mains... » (ar-Rum, 30 :41).
Au fur et à mesure que la sublime naissance approchait, toutes choses, vivantes
ou inanimées, montaient en excitation et en désir, attendant la venue de cette Grande
Lumière qui allait les sauver de l’obscurité, assoiffées de recevoir de lui l’élixir de la
vie. Toute l’humanité était dans l’attente, ayant déjà reçu les signes providentiels de
son avènement.
En apportant une expression poétique à l’état d’Amina au moment du sublime
événement, Suleyman Chelebi g évoque dans son Mawlid que même le soleil, par
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 55

pur amour, tourne autour du Saint Prophète r, à l’instar du papillon de nuit autour
d’une flamme :
J’ai vu, dit la mère du Bien-aimé,
Une lumière si singulière, le soleil son papillon de nuit,
Les anges descendant du ciel en ligne,
Et comme la Ka’ba, en orbite autour de chez moi,
Nul autre que ton fils, dirent-ils,
N’est venu depuis que le monde a été formé,
Il est le Roi de la connaissance divine,
Arborant les secrets de la sagesse et de l’unité distinguée…

La Sublime Naissance et les Evénements Extraordinaires


Á l’aube du lundi 12 de Rabi’ul-Awwal, soit le 20 avril 571 du calendrier solaire,
la Lumière Attendue honora enfin le monde par sa présence bienveillante, enfant
d’Amina et d’Abdallah. Ce fut comme si toutes les choses créées étaient revenues à la
vie pour proclamer dans l’allégresse : « Bienvenue Messager de Dieu ! »
Les vers suivants de Suleyman Chelebi g expriment les sentiments joyeux par-
tagés par tous les corpuscules de l’univers, célébrant cette naissance emplie de grâce :
Bienvenue… Ô grand sultan,
Orné de sagesse… Bienvenue !
Bienvenue, ô secret de tout Discernement,
Remède pour tous les souffrants… Bienvenue !
Bienvenue, ô miséricorde des mondes,
Secours pour tous les pécheurs, bienvenue !
Son apparition marqua le surplus de compassion divine d’un côté à l’autre de
l’univers. Le jour et la nuit changèrent de couleurs. Les sentiments devinrent plus
profonds. Les paroles et les saveurs s’ouvrirent à l’infini. Tout gagna un sens diffé-
rent, une grâce unique. Les idoles tremblèrent et s’effondrèrent. Les piliers et les
tours du palais de Madayin, résidence de Khosrô, furent détruits. Le lac de Sawa,
ou Tabariya34, alors considéré comme sacré, s’assécha tel un marécage d’oppression.
(Voir Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 273).

Cette manifestation spatio-temporelle était la première grâce liée à l’avènement


de cet Être Noble, une grâce qui a englobé tout l’univers. Cette année-là était désor-
mais connue comme l’Année de l’Abondance. Il est d’ailleurs étonnant que les justes
34. Sawa était un lac qui se situait à 12 km au sud-ouest de Téhéran, entre Hamadan et Qom. La ville de
Sawa fut fondée sur le lac une fois devenu asséché.
56 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

considèrent la nuit la plus précieuse après la nuit d’al-Qadr, celle durant laquelle le
Saint Prophète r honora la terre.
Un poète a dit :
Ne laissez pas le jardinier se fatiguer à arroser le jardin de roses,
car même arroser un millier de jardins ne ferait fleurir un visage comme le tien !
L’avènement sublime de la Rose des roses changea le cours de toutes choses.
Comme les perles des perles, les manifestations de la Miséricorde Divine furent dis-
persées tout l’univers, plongeant dans les cœurs heureux qui aspiraient à la Lumière.
Ibn Abbâs relate : « Le Messager de Dieu r, est né un lundi, s’est vu confier
sa mission prophétique un lundi, a quitté La Mecque pour Médine un lundi, y est
parvenu un lundi et a rendu son dernier soupir un lundi. Il arbitra près de la Ka’ba,
un différend quant au remplacement de la Pierre Noire un lundi. Il triompha à Badr
ƈ ħġƇ ĤƆ Û
un lundi ; et ce verset : ħġƇ ĭĺƆ î Ƈ ĥŽ ĩƆ ĠŽ ƆÒĦƆ ijŽ ĻƆ ĤŽ Ò « Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous
Ž Ž
votre religion » (al-Maida, 5 : 3) été révélé un un lundi. » (Ahmad, I, 277 ; Haythamî, I, 196).
Sa naissance, son Apostolat prophétique, son hégire et sa mort le jour du lundi,
tout coïncidant dans le cadre de la manifestation divine, sont des signes attestant de
l’importance de ce jour où l’excitation joyeuse et la tristesse douloureuse, la jubila-
tion et la peine ont été vécues simultanément.
Certains évènements extraordinaires survinrent durant la nuit sacrée où le Saint
Prophète r honora l’univers. En voici quelques-uns :
Selon ses propres dires, Amina n’eut aucune difficulté ni pendant sa grossesse,
ni pendant le travail. Alors que le Messager Béni r pénétrait dans ce monde, elle vit
une lumière sortit d’elle qui illumina l’Est et l’Ouest. Le Noble Enfant est né aussi pur
qu’on peut l’être, les mains posées sur le sol et la tête tournée vers le ciel.(Ibn Saad, I,
102, 150).

Iblis poussa un cri plus fort qu’il ne l’avait jamais fait. (Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 271).
Mubazan, le grand-prêtre de la Perse, rêva qu’un troupeau de chameaux sau-
vages, conduisant un groupe de chevaux dans leur sillage, en train de traverser le
Tigre et de se répandre dans toute la contrée.
La vallée de Samawa fut inondée.35
Quatorze piliers du palais de Khosrô de Perse s’effondrèrent. Le feu qui brûlait
sans cesse depuis mille ans dans le Temple persan s’éteignit.(Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 273).
35. Samawa est un désert de sable situé à 235 km au sud-est de Bagdad, près de Kalb, qui est à peu près
entre Koufa et Damas.
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 57

Selon les propos d’Aïcha c au cours de la nuit de la Sublime Naissance, un com-


merçant juif de La Mecque vit l’apparition d’une étoile dont il reconnut aussitôt le
signe d’un avènement attendu. Après celà il se rendit à l’un des endroits où les gens
de Quraysh avaient l’habitude de se rencontrer et demanda :
« Est-ce que parmi vous une femme a donné naissance à un enfant ce soir ? »
« Pas à notre connaissance », répondirent-ils.
« Ecoutez-moi bien maintenant, gens de Quraysh, fit remarquer le juif, le pro-
phète de la Période finale est censé être né ce soir. Entre ses omoplates se trouve le
sceau de la prophétie, un mélange fait de noir et de jaune, couvert de poils.
Étonnés par les paroles du juif, ceux qui étaient présents se séparèrent et retour-
nèrent chez eux. Dès leur arrivée, ils racontèrent tout aux membres de leur famille,
dont certains firent remarquer :
« Les fils d’Abdallah du nom de Muhammad vient de naître ce soir. »
Sur ce, ils allèrent chez le juif et lui demandèrent :
« Un enfant est né à La Mecque. As-tu entendu cela ? ».
Le juif leur demanda :
« Est-il né avant ou après que vous m’ayez informé ? ».
Ils lui répondirent :
« Avant et son nom est Ahmad ! ».
Le juif demanda à ce qu’on l’emmène chez Amina. Cette dernière leur montra
le Bébé Sacré. En voyant de ses propres yeux le sceau de la prophétie entre les omo-
plates du bébé, le juif s’évanouit. Lorsqu’il reprit ses sens, on lui demanda ce qui
s’était passé. Il dit:
« Par Dieu la Prophétie a maintenant quitté les enfants d’Israël. Ainsi est l’Ecri-
ture ! Il y est écrit que le Dernier Prophète vaincra les Juifs et détruira la réputation
de leurs savants. Grâce à la Prophétie, les Arabes auront grand honneur et dignité.
Réjouis-toi Quraysh, car, par Dieu, vous êtes maintenant prêts à accueillir celui dont
la légende résonnera d’Est en Ouest. » (Ibn Saad, I, 162-163; Hakim, II, 657/4177)
Tous les Mecquois furent heureux de la naissance de cet Enfant Béni. Même
Abû Lahab récompensa sa jeune esclave Suwayba en l’affranchissant car elle lui avait
apporté la bonne nouvelle de la naissance de son neveu. (Halabî, I, 138).
Ibn Abbâs relate en parallèle :
« Je vis Abû Lahab en songe un an après sa mort. Sa condition était terrible. »
58 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Je lui demandai :
« Quelle est ta condition ? »
Il me répondit :
« Ma peine est allégée chaque lundi parce que j’ai affranchi Suwayba en raison
de la joie qui fut mienne lorsque j’appris la naissance de Muhammad. Ce jour-là,
on me rafraîchit avec de l’eau qui coule du petit trou situé entre mon pouce et mon
index. » (Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 277; Ibn Saad, I, 108, 125)

Les différents noms attribués au Saint prophète r


Le Messager de Dieu r a un certain nombre de noms sacrés. D’abord, et avant
les autres, il y a ceux de Muhammad et d’Ahmad, mentionnés également dans le
Saint Coran.
Muhammad signifie celui qui a été abondamment loué, tandis qu’Ahmad signi-
fie celui qui remercie en abondance. Le nom Muhammad est mentionné dans le
Coran à quatre reprises, et celui d’Ahmad une seule fois.
Les Evangiles se réfèrent à ces noms en utilisant le terme « Faraqlitos », portant
respectivement leur signification exacte.
Selon un hadith, le Messager de Dieu r déclare :
« Je suis Muhammad et Ahmad ; l’Effaceur36, avec qui Dieu efface l’incroyance ;
le Rénovateur qui sera le premier à être ressuscité ; le Dernier, le Sceau des Prophètes,
il n’y aura pas de Prophète après moi. » (Al Boukhari, Manaqib, 17; Muslim, Fadail, 125)
Les noms et attributs sacrés du Saint Prophète r ont été mentionnés dans de
nombreux ouvrages. Dalail’ul-Khayrat, par exemple, cite environ deux cents d’entre
eux. Certains de ces noms et attributs qui aujourd’hui ornent magnifiquement le
mur du côté Qibla du Rawda de la Mosquée du Prophète aux lignes calligraphiques
exceptionnelles sont les suivants :
Ahmad, Mahmûd, Muhammad, Hâmid, Hamîd, Bashîr, Nadhîr, Burhân, Amîn,
Awwal, Âkhir, Duhâ, Habîbullâh, Hâdî, Khâtam, Mukhtâr, Mustafâ, Mutahhar,
Mujtabâ, Nabî, Nûr, Raûf, Rahîm, Rasûlullâh, Rasûlü’s-Thaqalayn, Rahmatan li’l-
Âlamîn, Sayyidu’l- Mursalîn, Sayyidu’l-Kawnayn, Imâmu’l-Haramayn, Imâmu’l-
Muttakin, Shafîu’l-Mudhnibîn, Shams, Tâ-hâ, Ummî, Yâ-sîn...

36. Al-Mâhî (ĹèÓĩĤÒ): Celui qui efface, qui élimine.


La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 59

Aux bons soins d’une nourrice


L’Être de Lumière naquit ici-bas orphelin de père tel que l’exprime le Coran :

ĴIJÇƆ ĘƆ ÓĩĻ ƈ ƈ Ɔ
ƃ ÝĺƆ ĞƆ ïŽ åĺƆ ħŽ ĤƆ È
« Ne t’a-t-Il pas trouvé orphelin? Alors Il t’a accueilli ! » (ad-Duha, 93 : 6)
Les premiers jours, L’Enfant Béni fut allaité par sa mère Amina.
Puis, brièvement, ce fut le tour de Suwaybah de l’allaiter en même temps que
son propre enfant Masruh.37
Pilier en matière de fidélité, le Messager de Dieu r a toujours pris soin des
besoins de Suwayba, sa mère nourricière, tout au long de sa vie. Lui et Khadîdja c
traitèrent Suwayba avec gentillesse et honneur au cours des années qu’ils passèrent
à La Mecque. Même après leur migration à Médine, la Lumière de l’Existence r
assura ses besoins en lui envoyant régulièrement des provisions. Après avoir appris
la nouvelle de sa mort alors qu’il revenait de l’expédition de Khaybar au cours de la
septième année de l’Hégire, le Messager de Dieu r s’enquit du bien-être de son fils
Masruh et lui envoya son soutien, non seulement pour se renseigner au sujet de sa
mort, mais aussi concernant la perte de tous les proches de Suwayba bien avant la
sienne. (Ibn Saad, I, 108,109).
Le respect et l’honneur qu’a mis en évidence le Noble Prophète r à l’égard de
Suwayba fournit un exemple parfait de fidélité reconnaissante.
Halima reçut après Suwayba l’honneur de devenir la nourrice de l’Enfant Béni.
Les Arabes avaient pour coutume d’envoyer temporairement leurs nouveau-
nés aux soins des tribus du désert afin d’être allaités. Non seulement le climat du
désert rendait les enfants plus sains et courageux, mais aussi les divers dialectes
parlés par les Arabes nomades étaient plus clairs et plus éloquents, ce qui permettait
aux enfants de mieux s’exprimer.
Dans le cadre de ladite mesure, l’Enfant Béni fut confié aux bons soins de la
très chanceuse Halima de la tribu des Bani Saad, réputée pour être la plus éloquente
parmi les tribus arabes. Le plus éloquent et le plus expressif de tous les hommes, le
Messager de Dieu r fut ainsi préparé, depuis un âge précoce, au devoir de trans-
mettre les paroles divines qui, elles-mêmes, marquèrent le summum de l’éloquence.
37. Suwayba était aussi la nourrice de Hamza et d’Abû Salama, ce qui leur permit de devenir les frères de
lait du Saint Prophète r. (Ibn Saad, I, 108-110)
60 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ce qui repose sur cette affirmation, c’est la réponse que fit le Saint Prophète r
à Abû Bakr t lorsque celui-ci lui fit remarquer qu’il n’avait jamais vu et entendu
d’orateur plus éloquent que lui :
« Ce n’est pas étonnant ! Je suis un homme de Quraysh qui a été allaité par une
nourrice appartenant aux Bani Saad. » (Ali al-Muttaqî, VI, 174 /15247)
Halima bint Haritha raconte comment elle a fini par devenir la nourrice de
l’Enfant Béni :
« C’était une année dévastée par la famine. À califourchon sur un âne blanc et
en compagnie d’autres femmes de Bani Saad, nous allions vers La Mecque avec l’es-
poir d’y trouver des nourrissons à allaiter. Nous n’avions plus rien à manger. Nous
avions une vieille chamelle incapable de nous donner la moindre goutte de lait.
Nous avions aussi avec nous un petit enfant. Étant donné que ni moi ni la chamelle
ne pouvait lui fournir suffisamment de lait pour le nourrir, nous ne pûmes dormir
à cause de ses pleurs incessants. Finalement nous atteignîmes La Mecque. Pas une
femme de libre ne voulait s’occuper du petit Muhammad. Toutes refusèrent de le
prendre car elles étaient plutôt à la recherche d’un enfant dont le père était encore
vivant. Mais celui-ci était orphelin. Ensuite, chaque femme, sauf moi, finit par trou-
ver un enfant et repartit. Je ne voulais pas revenir les mains vides, aussi je dis à mon
mari : - Je vais quand même accepter de prendre cet orphelin.
Alors je fis comme j’avais dit et je revins à la tente avec l’enfant dans mes bras.
« Tu as fait un bon choix, me dit mon mari. Qui sait, le Tout-Puissant pourrait
nous bénir grâce à lui. »
Et chose étonnante, dès le moment où je l’ai eu dans mes bras, j’ai commencé
à avoir du lait en abondance et je pus le nourrir copieusement lui et mon propre
enfant. La nuit venue, mon mari alla inspecter notre vieille chamelle et, à notre
grand étonnement, elle commença aussi à avoir du lait en abondance. Après l’avoir
trait, nous bûmes de son lait le cœur content, supprimant ainsi toute trace de soif et
de faim. Les enfants dormirent paisiblement.
« Par Dieu, il semble que tu aies entre tes mains un enfant vraiment béni, ne put
s’empêcher de dire mon mari. »
Mais notre sort ne s’arrêta pas là. Notre âne, toujours connu pour demeurer à
la traîne lors de voyages en groupe, commença à dépasser tout le monde. Je pouvais
à peine le contenir. Des gens demandèrent :
« N’est-ce pas l’âne que tu montais pour aller à La Mecque ? »
- Oui, répondis-je.
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 61

De retour à la maison, et bien que la zone où nous habitions fût aride, nos bre-
bis revinrent le soir pleines de lait du lieu où elles paissaient. Les autres brebis, entre-
temps, revinrent fatiguées et usées, assoiffées et affamées. Nous étions en mesure de
traire nos brebis en totalité à un moment où les autres brebis ne pouvaient offrir une
seule goutte de lait. Les propriétaires des brebis blâmèrent ainsi les bergers :
« Honte à vous ! Ne faites-vous pas paître nos brebis alors que le berger de
Halima fait paître les siennes ? »
En effet, les bergers faisaient paître les brebis dans le même secteur. Certaines
rentraient saturées de lait tandis que d’autres rentraient sans une goutte.
Alors que d’autres enfants mettaient un mois à grandir, le petit Muhammad r
se développait en une seule journée et en un mois, il avait fleuri comme un enfant
d’un an. Quand il eut un an, c’était déjà un bambin tout à fait frappant. Après être
resté avec nous quelques années, nous le renvoyâmes finalement chez sa mère.
Mais mon mari ne supportant pas son départ (litt. cette perte) insista :
« Gardons-le encore au moins jusqu’à ce que la peste s’éloigne de La Mecque! »
Séparés de lui, effectivement, nous serions privés de ses bénédictions. Nous
insistâmes tellement auprès d’Amina que celle-ci finit par céder à notre requête,
permettant ainsi que la bénédiction de l’enfant demeurât avec nous un peu plus
longtemps. » (Haythamî, VIII, 221; Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 278-279)
Un jour, l’Enfant Béni était parti du côté des agneaux en compagnie de Shayma,
sa sœur de lait, sous la chaleur torride de midi. Quand ils revinrent, Halima répri-
manda sa fille pour s’être aventuré à l’extérieur sous une telle chaleur, ce à quoi la
petite Shayma répondit :
« Nous n’avons jamais senti la chaleur du soleil, même pas un seul instant.
Il y avait toujours un nuage qui planait au-dessus de mon frère, nous faisant de
l’ombre. » (Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 279; Ibn Saad, I, 112).
Halima poursuit en expliquant :
« Alors il demeura avec nous quelques temps encore. Mais ayant été témoin de
beaucoup de choses extraordinaires le concernant, nous fûmes tous saisis par une
peur soudaine que quelque chose de fâcheux puisse lui arriver. Nous nous rendîmes
donc à La Mecque pour le ramener. Nous parvînmes dans les hauts de La Mecque
lorsque soudain nous le perdîmes. » (Ibn Hishâm, I, 179; Ibn Saad, I, 112).
On raconte que les Mecquois commencèrent à rechercher frénétiquement
l’enfant perdu, mais en vain. Abd al-Muttalib était près de la Ka’ba, priant pour son
bien-être, quand on entendit une voix dire d’en haut :
62 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« N’aies aucune crainte Muhammad a un Seigneur qui ne le laissera pas sans


protection ! »
Abd al-Muttalib supplia en désespoir de cause :
« Qui que tu sois… Dis-nous où se trouve l’enfant ! »
« Près de l’arbre vers le côté droit de la vallée Tihama, répondit la voix. »
Sans tarder plus longtemps, Abd al-Muttalib se rendit près de l’arbre décrit et y
trouva son petit-fils à proximité. (Diyarbakrî, I, 228).
Il est également rapporté que le verset suivant de la sourate ad-Duha est une
référence directe à l’évènement décrit ci-dessus (Zamakhsharî, VI, 240) :

ĴïƆ ıƆ ĘƆ ƬźÓĄ
Ɔ ĞƆ ïƆ äƆ IJƆ IJƆ
« Ne t’a-t-Il pas trouvé orphelin ? Alors Il t’a guidé ! » (ad-Duha, 93, 7).
Halima continue de raconter le déroulement des évènements :
« Amina visiblement surprise lorsque nous arrivâmes près d’elle nous demanda:
- Pourquoi le ramenez-vous alors que vous avez tellement insisté pour l’emme-
ner en premier lieu ?
- Le Tout-Puissant est témoin que nous avons pris soin de lui, répondis-je.
- De grâce, dites ce que vous avez vu et qui vous a fait si peur, demanda-t-elle.
Bien que nous ne voulions pas lui dire au premier abord, elle insista tellement
que nous avons finalement dû céder. Mais elle fut peu surprise des explications que
nous lui apportâmes.
- Mon fils a déjà manifesté beaucoup de choses assez extraordinaires pour lais-
ser plus d’un dans la crainte. Maintenant, laissez-moi vous expliquer ce dont j’ai été
témoin auparavant, dit-elle, avant d’expliquer les expériences étonnantes qui ont eu
lieu au cours de son accouchement.
- Vous pouvez maintenant me le laisser et rentrer chez vous en paix, furent les
dernières paroles que nous entendîmes d’elle. » (Haythamî, VIII, Ibn Kathir, al-Bidayah, II,
278-279)

Halima rajouta :
« Abd al-Muttalib nous renvoya avec des dons généreux. Je retournai donc à la
maison avec une quantité inénarrable de biens précieux. Je lui dis également ce que
j’avais déjà dit à la mère de l’enfant. Abd al-Muttalib embrassa celui-ci alors qu’il
commençait à pleurer.
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 63

- Nul doute, Halima, que mon fils portera un grand nom. Comme je désirerais
voir déjà ces jours-là quand cela arrivera. » (Bayhaqî, Dalail, I, 145)
Le Noble Prophète r montra une loyauté absolue envers ses proches tout au
long de sa vie. Il continua d’appeler Halima « ma chère mère » et montra à son
égard un fort sentiment d’affection et de respect, jusqu’à même lui étendre son
manteau afin qu’elle puisse s’asseoir. Quel que soit le besoin qui lui était nécessaire,
le Prophète Béni r s’en occupait. (Ibn Saad, I, 113, 114).
Halima se rendit un jour à La Mecque pour y rencontrer le Saint Prophète r,
qui à l’époque était marié à Khadîdja c. Tous deux l’invitèrent à rester chez eux
quelques temps et l’accueillirent gentiment.
Halima déplora la famine et la sécheresse qui sévissaient dans sa région, dévas-
tant le bétail. Quand elle retourna chez elle Halima avait avec elle quarante moutons
et un chameau apprêté à porter sa charge.(Ibn Saad, I, 114).
Lors de la conquête de La Mecque, la sœur de Halima était venue rendre visite
au Noble Prophète r qui était stationné en ce temps-là près d’Abtah. Elle avait
apporté avec elle comme cadeau un peu de fromage et de beurre qu’elle avait placé
dans un étui en cuir.
D’emblée le Messager de Dieu r lui demanda des nouvelles de sa mère adop-
tive. Quand elle lui apprit qu’elle venait de décéder, ses yeux se remplirent de larmes.
Puis il ordonna qu’on lui remette des vêtements, un chameau et deux cents dirhams
en argent.
Avant de retourner contente dans son village, elle lui fit cette remarque : « Tu
es loyal aujourd’hui comme tu l’as été à l’époque. » (Waqidi, II, 869; Balazuri, I, 95).

Le premier Sharh’us-Sadr : L’ouverture du coeur


Afin que le cœur du Saint Prophète r soit apte à accueillir les mystères divins,
le Tout-Puissant ouvrit sa poitrine et purifia son cœur à de nombreuses reprises, le
remplissant de traits uniques tels que la sérénité, la compassion, la miséricorde, la
foi et la sagesse. La première de ces manifestations s’est produite alors que l’Enfant
Béni était toujours avec sa mère adoptive, fait raconté plus tard par le Messager de
Dieu lui-même r.
Après quelques années plus tard, un homme demanda au Saint Prophète r
quels furent les premiers signes de son Apostolat prophétique et il r les lui détailla :
« Ma mère adoptive faisait partie du clan des Banu Saad. Un jour, ma sœur
de lait et moi, avions entrepris de sortir avec notre bétail. Nous n’avions rien pris à
manger avec nous. Je conseillai donc à ma sœur de se rendre auprès de notre mère et
de ramener un peu de nourriture.
64 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ainsi elle partit et moi je restai seul avec les animaux. Peu de temps après, deux
anges apparurent, vêtus de blanc.
- Est-ce lui ? dit le premier à l’autre.
- Oui ? répondit ce dernier.
Puis ils vinrent rapidement près de moi. M’ayant couché sur le dos, ils fendirent
ma poitrine. Ils prirent ensuite mon cœur et en ôtèrent une tache noire.
-Va et apporte-moi de l’eau en forme de neige, entendis-je l’un dire à l’autre.
De l’eau fut apportée et avec elle ils lavèrent mon intérieur.
- Maintenant, apporte-moi un peu d’eau en forme de grêle, dit une nouvelle fois
l’un des anges à l’autre. Et avec elle ils lavèrent mon cœur.
- Maintenant apporte-moi la paix et la sérénité, commanda encore l’un d’entre
eux. Et ils les déposèrent tous deux dans mon cœur.
- Maintenant, ferme-le et apposes-y le sceau de la prophétie, dit un des anges.
Ils fermèrent et scellèrent mon cœur et par la suite ma poitrine. Puis ils cousirent
immédiatement ma poitrine. Je fus vraiment effrayé. M’étant précipité à la maison,
j’informai ma mère adoptive de l’incident… » (Ahmad, IV, 184-185; Ibn Kathir, al-Bidayah,
II, 280; Haythamî, VIII, 222)

De nombreuses sources attestent de la survenance de l’incident décrit ci-dessus


alors que la Lumière de l’Être n’était âgé que de quatre ans. (Voir Ibn Saad, I, 112).
Anas t confirma à plusieurs reprises avoir vu la cicatrice du Saint Prophète r
effectuée sur sa poitrine à partir de cette ouverture. (Muslim, Iman, 261)
Certaines des sagesses qui sous-tendent l’ouverture de la poitrine du Noble
Prophète r pourraient être ainsi exprimées :
À travers cet évènement, Dieu U informa les gens quant à la réputation de Son
Prophète r en le préparant à la Révélation dès son plus jeune âge. Car la sagesse
du Sharh’us-Sadr, qui un acte de purification spirituelle laissé en témoignage en
tant que marque et signe particuliers, était de faciliter le chemin pour d’autres dans
l’affirmation de la foi en sa mission prophétique. Des évènements extraordinaires
comme ceux-ci ont en fait permis aux gens de croire en lui plus facilement.

Voyage à Médine et disparition d’Amina


Alors que la Lumière de l’Être r n’était âgé que de six ans, Amina, accompa-
gnée d’Umm Ayman, l’emmena à Médine pour visiter la tombe de son père. Ils res-
tèrent un mois à Médine auprès des frères d’Amina. Grâce à cette visite l’Enfant Béni
joua avec ses cousins et eut même l’occasion d’apprendre à nager. (Voir Ibn Saad, I, 116).
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 65

Rappelant ces jours particuliers, le Messager de Dieu r se souvint de ces juifs


qui vinrent près de lui et qui après l’avoir observé longtemps lui dirent (Ibn Saad I 116) :
« Après m’avoir inspecté pendant un certain temps, un juif quitta la scène pour
revenir quelques instants plus tard.
- Quel est ton nom, mon enfant ? me demanda-t-il.
- Ahmed, répondis-je.
Puis il me regarda de dos et murmura : - Sûr que c’est lui.
J’ai raconté l’incident à mes oncles qui ont alors informé ma mère. Elle com-
mença à se sentir mal à l’aise, et sans plus tarder, nous nous apprêtâmes à retourner
à La Mecque. » (Abû Nuaym, Dalail, I, 163-164)
Mais sur la route du retour, Amina tomba malade et rendit son dernier soupir
près d’Abwa, à l’âge de trente ans.
Quelques instants avant sa mort, elle regarda son fils béni les yeux remplis
d’amour, le cœur plein d’affection, l’embrassa et lui dit :
« Que Dieu te bénisse ! Si ce que j’ai vu dans mes rêves est vrai, tu seras désigné
par le Glorieux et Généreux Dieu pour informer l’humanité sur le bien et le mal.
Dieu te protégera des idoles et de l’idolâtrie. Tout ce qui est vivant mourra, tout ce
qui est nouveau est appelé à devenir vieux et tout ce qui est ancien est destiné à périr.
Je vais maintenant partir, mais il y a une chose que je saurai éternellement, c’est que
je laisse derrière moi un enfant pur et une mémoire d’amour… » (Diyarbakri, I, 229-230;
Kamil Miras, Tecrid Tercümesi, IV, 549)

Le poète Arif Nihat Asya décrit Amina comme suit :


Ô toi la femme, qui à Abwa est étendue,
De ton jardin s’est ouvert au monde
La plus belle des roses !
Affligé maintenant par la perte de sa mère, la Lumière de l’Être s’en retourna à
La Mecque avec sa protectrice Umm Ayman.
Umm Ayman, la protectrice de l’Enfant Béni, était également celle que le Saint
Prophète r appelait « mère » et rendait fréquemment visite.
Dans l’expression de son respect affectueux envers elle, le Noble Prophète r
est connu pour l’avoir considérée comme une « seconde mère » et un membre de sa
famille immédiate. (Voir Ibn Asîr, Usdu’l-Ghâba, VII, 303-304; Ibn Saad, VIII, 223).
66 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Sous la protection d’Abd al-Muttalib


Dieu ne permit pas que l’Enfant Béni fût sans protection, bien qu’il ait perdu
son père et sa mère en quelques années successives. C’est ainsi qu’il fut pris sous
les ailes bienveillantes de son grand-père Abd al-Muttalib, qui exprima envers son
petit-fils bien-aimé un amour et telle miséricorde telles que ses propres enfants n’en
reçurent jamais. Nul autre que Muhammad r, qui jouissait d’une liberté illimitée de
voir son grand-père, n’était autorisé à pénétrer dans la chambre d’Abd al-Muttalib
quand il était seul ou endormi. (Ibn Saad, I, 118).
Même, par respect, aucun de ses propres fils n’osait s’asseoir à l’endroit où se
tenait habituellement Abd al-Muttalib près de la Ka’ba. Seul Muhammad r en avait
reçu l’autorisation. Quand l’Enfant bien-aimé était averti par ses oncles de ne pas
s’asseoir à cet endroit, son grand-père intervenait en sa faveur :
« Laissez-le s’asseoir à ma place. Je jure par Dieu qu’il est destiné à de plus
grandes choses. »
Abd al-Muttalib asseyait toujours son petit-fils à ses côtés et profitait et approu-
vant tout ce que faisait l’Enfant. (Ibn Hishâm, I, 180).
Il ne commençait jamais à manger sans son petit-fils et quand il n’était pas près
de lui, il lui envoyait son repas. (Ibn Saad, I, 118).
Quand le repas était servi il veillait à ce qu’on lui donne la plus succulente part.
(Balazurî, I, 81).

La Mecque fut une fois frappée par une grave sécheresse qui laissa ses habitants
dans la détresse. Impuissants, les Mecquois escaladèrent la montagne Abû Qubays
pour prier le Tout-Puissant de faire tomber la pluie.
Abd al-Muttalib portant Muhammad r sur ses épaules était de ceux qui
escaladèrent la montagne. Après avoir atteint le sommet il commença avec des
gens alignés près de lui à supplier le Tout-Puissant en faveur de la pluie, en levant
les mains au ciel dans l’espoir qu’une averse survienne, avec l’Enfant Béni sur ses
épaules. Il ne fallut pas longtemps pour que les portes de ciel s’ouvrent. Des nuages
jaillirent immédiatement après qu’ils eurent commencé à descendre de la montagne
et arrosèrent généreusement le sol aride de La Mecque. (Voir Ibn Saad, I, 90; Ibn Asîr,
Usdu’l-Ghaba, VII, 112; Diyarbakrî, I, 239).

Ces beaux jours passèrent comme un éclair, et quand le Saint Prophète r eut
atteint l’âge de huit ans, son grand-père Abd al-Muttalib décéda. Tous ses appuis
sur terre semblaient avoir pris fin. Son seul protecteur, ami et éducateur était à
présent son Seigneur Dieu. Le fait que le Saint Prophète r vécut sa prime enfance
sans parents et grands-parents relève d’une immense sagesse. Ainsi les incroyants
étaient sans excuse pour refuser sa future mission prophétique. Ils ne pouvaient plus
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 67

prétendre qu’il put avoir été formé par ses parents ou son grand-père. Être orphelin,
en outre, signifiait être protégé des habitudes corrompues de sa société, transmises
le plus souvent de père en fils ; cela signifie qu’il fut éduqué et formé exclusivement
par le Tout-Puissant.
C’est ce que confirme le hadith suivant :
« Mon Seigneur m’a formé, et m’a parfaitement formé en effet. » (Suyûtî, I, 12).
Le fait qu’il ait atteint, au cours de son développement, le plus haut niveau de
moralité, en dépit d’avoir grandi sans avoir eu le privilège de recevoir une éducation
et un soutien venant de parents, est une autre preuve significative de la véracité de
l’Apostolat prophétique du Noble Messager r.
Le Messager de Dieu r qui grandit comme un orphelin soutenu put développer
un cœur raffiné et miséricordieux, apprenant à faire pleinement confiance au Tout-
Puissant. Endurer une variété de difficultés provenant de son statut d’orphelin et du
manque de soutien familial a permis au Saint Prophète r de devenir le protecteur
des orphelins et des autres groupes vulnérables issus de tous les niveaux de la société.
Ainsi il déclara :
« Quiconque protège un orphelin de ses proches ou de qui que ce soit d’autre
sera avec moi au Paradis aussi proches que ces deux là. (Et il montra ses deux doigts :
l’index et le majeur). » (Muslim, Zuhd, 42 ; Al Boukhari, Adab, 24 ; Talâq, 14).
Une autre raison subtile liée au statut d’orphelin de l’Enfant Béni r est que
pour l’humanité il fallait qu’il représentât dans sa vie toutes sortes d’exemples de
statuts sociaux, du plus bas, le statut d’orphelin, au plus élevé celui de chef d’État.

Sous la protection d’Abû Talib


Juste avant sa mort, Abd al-Muttalib rassembla ses fils autour de lui pour leur
faire part de ses dernières volontés. Il leur conseilla avant tout de s’occuper après
son décès de son petit-fils bien-aimé de la meilleure façon possible. Directement liés
à Muhammad r en tant qu’oncles, les principaux candidats furent naturellement
Zubayr et Abû Talib. Après un tirage au sort, Abû Talib, qui était le plus miséricor-
dieux des fils qui restaient à Abd al-Muttalib fut finalement choisi pour prendre soin
de l’enfant. (Ibn Asîr, Usdu’l-Ghaba, I, 22).
Abû Talib avait une grande famille et ne possédait que quelques chameaux.
Mais en dépit de sa pauvreté il était considéré comme le maître de Quraysh. Tout le
monde l’écoutait et obéissait à ses ordres. Comme son père qui fut un homme ver-
tueux, toute sa vie durant il s’abstint des boissons alcoolisées. (Halabî, I, 184).
68 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’amour et les soins qu’Abû Talib prodigua à Muhammad r son neveu bien-
aimé furent comme ceux d’un père pour son fils. Ils étaient à bien des égards supé-
rieurs à ceux qu’il avait pour ses propres enfants, il ne s’endormait pas sans avoir
Muhammad r à ses côtés et il l’emmenait avec lui quand il allait quelque part. Il n’y
eut pas un seul morceau de nourriture sur la table sans que le jeune Muhammad ne
fût pas le premier à être assuré de sa part.
Abû Talib remarqua rapidement que quand Muhammad mangeait avec eux la
nourriture abondait sur la table et que tout le monde mangeait à satiété.
Il nota aussi que quand l’enfant béni était absent la nourriture était insuffisante.
Par exemple s’il ne restait qu’une quantité suffisante de lait pour une seule per-
sonne, c’était d’abord l’orphelin qui en bénéficiait et s’il en restait encore les autres
le buvaient.
Avant chaque repas, Abû Talib disait à ses enfants :
« Attendez jusqu’à ce que mon fils arrive. » (Ibn Saad, I, 119-120, 168).
Fatima bint Assad, l’épouse d’Abû Talib, qui était une femme très vertueuse et
au cœur doux, approchait le jeune orphelin avec une grande affection à son égard.
Elle fut de ceux qui émigrèrent des années plus tard à Médine avec lui r.
Durant toute sa vie, le Noble Messager r la visitait souvent et faisait même la
sieste chez elle les après-midis. (Ibn Saad, VIII, 222).
Son décès provoqua chez le Messager de Dieu r des larmes semblables à des
perles coulant de ses yeux, le jour où il déclara que ce jour était celui où « sa mère
était morte ».
Sous son linceul, le Saint Prophète r commanda qu’on la vêtisse de sa chemise,
et avant de diriger la salât janaza, il s’étendit quelques instants sur sa tombe en fai-
sant des invocations. En réponse à ceux qui lui en demandaient la raison il répondit :
« Après Abû Talib, personne ne m’a offert son aide comme elle l’a fait. Je lui ai
donné ma chemise pour que Dieu lui donne la robe du Paradis dans la vie future. »
Certains Compagnons furent étonnés du degré de tristesse et de chagrin que
ressentait le Saint Prophète r. Il s’en expliqua comme suit :
« Elle était une seconde mère pour moi. Elle était la première qui me nourrissait
quand bien même ses propres enfants étaient affamés et revêches. Elle me peignait les
cheveux et me parfumait ; elle était en effet une mère. »
Puis il fit cette invocation :
La Naissance et l’enfance du Saint Prophète 69

« Que Dieu te pardonne, ma mère, et t’accorde la meilleure récompense. Que


Dieu ait pitié de toi ! Tu as été une mère pour moi après ma propre mère. Tu m’as
nourri alors que tu avais faim. Tu m’as vêtu alors que tu avais toi-même besoin de
vêtements. Tu m’as offert les plus savoureux aliments alors que toi tu te privais. Et tu
as fait tout cela uniquement pour gagner l’agrément du Tout-Puissant et dans l’at-
tente de la demeure de l’au-delà ! » (Hâkim, III, 116-117; Haythamî, IX, 256-257; Ya’kûbî, II, 14)

Le second Sharh’us–Sadr: la clémence et la compassion dans le cœur


Abû Hurayra,38 qui est connu pour avoir eu l’audace de questionner le Messager
de Dieu r sur ce que nul n’osait demander, lui demanda un jour:
« Ô Messager de Dieu quel est le premier signe que tu as vu concernant ton
Apostolat prophétique ? »
Le Saint Prophète r, le guide vers le bonheur dans les deux mondes, répondit
ceci afin d’apaiser la curiosité du Compagnon :
« Puisque tu me le demandes, Abû Hurayra, je vais te l’expliquer. J’étais une fois
dans le désert ; je devais avoir une dizaine d’années. Je fus soudain alarmé par une
voix venant de dessus ma tête.
Un homme demandait à un autre : «Est-ce lui ?»
L’Autre lui répondit : « Oui… C’est sûr que c’est lui ».
Ils apparurent ensuite en face de moi. Leurs visages ne ressemblaient à nul autre.
S’approchant de moi, chacun d’eux me tenait par le bras, mais il m’était impossible
de sentir leur contact.
- Etendons-le sur le sol, dit l’un à l’autre.
Et tous deux m’étendirent sur le sol. Je ne ressentis aucune pression et il n’y eut
de malaise d’aucune sorte.
- Allons… ouvrons-lui la poitrine, dit l’un à l’autre.
Mais une fois de plus je ne m’aperçus de rien et ne ressentis aucune douleur.

38. Abû Hurayra t, que l’on nomma Abd’us-Shams à sa naissance, prit le nom d’Abdurrahman après son
entrée en islam. Un jour alors qu’il portait un chat dans sa chemise, il rencontra le Saint Prophète r
qui lui demanda ce qu’il portait. Lui répondant : « Un chat » le Messager de Dieu r le surnomma en
plaisantant Abû Hurayra, ce qui signifie le « père des chats ». Ce nom lui colla si bien que son véritable
nom ne fut plus jamais utilisé. Abû Hurayra t arriva à Médine pendant la 7ème année de l’Hégire. Il
fut parmi les musulmans y défavorisés de la Suffa, appelée le foyer de la Masdjid al-Nabawi. Restant
jour et nuit auprès du Saint Prophète r il avait une passion insatiable pour l’apprentissage des propos
(hadiths) directement sortis de la bouche du Noble Messager r. Ainsi, outre les répétitions entendues
de la part des Compagnons y de la première heure il recensa un total de 5374 hadiths du Prophète r,
plus que tout les autres Compagnons y. Il t décéda à Médine en l’an 58 de l’Hégire, à l’âge de 78 ans.
70 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

- Enlevons-y toute malice et jalousie, dit-il.


Puis ils ôtèrent quelque chose qui ressemblait à un caillot de sang qu’ls jetèrent.
- Maintenant, plaçons-y la miséricorde et la compassion, dit l’un.
Je les vis placer quelque chose qui ressemblait à de l’argent, de la même taille de
ce qu’ils avaient préalablement ôté.
Puis l’un deux saisit mon gros orteil, le secoua et dit :
-Nous pouvons maintenant le laisser en paix !
Comme je me levai pour partir, je pus sentir la miséricorde et la compassion tout
au fond (de moi). Par la suite, je ne pus ressentir que du respect envers mes aînés et de
l’amour envers les plus petits. » (Ahmad, V, 139; Haythamî, VII, 223).
71

LES ANNÉES DE JEUNESSE

Une croissance sous la protection divine


Le jeune Muhammad r fut préservé par le Tout-Puissant de toutes les mau-
vaises habitudes inhérentes à son temps et à sa société. Il passa sa jeunesse immergé
dans la pureté morale de façon à ce qu’il soit digne de soutenir le poids de l’Apostolat
prophétique, ce qui eut représenté pour lui un brillant avenir en réserve.
Parmi son peuple, l’homme à la noble lignée incarna sans aucun doute les plus
hautes valeurs morales bien avant d’inaugurer sa mission de prophète. Sa générosité
sans pareil s’étendait à tous ses voisins et il montrait généralement une magnanimité
et un sens du pardon qui l’empêchaient de nuire à quiconque de quelque façon que
ce soit. Pour lui, les querelles et les combats étaient des choses totalement inouïes.
En plus de ces traits particuliers, il était d’une fiabilité inégalée, ce qui amena
ses pairs à le surnommer al-Amîn, le digne de confiance, et al-Sâdiq, l’honnête. (Ibn
Hishâm, I, 191; Ibn Saad, I, 121).

On demanda une fois au Messager de Dieu r s’il n’avait jamais adoré d’idoles
ou bu du vin avant d’être investi de sa mission prophétique.
Le Saint Prophète r répondit à ces deux questions par la négative puis affirma :
« Même si je ne savais rien du Livre et de la Foi, je savais d’une manière ou d’une
autre que les Mecquois désobéissaient à Dieu. » (Diyarbakrî, I, 254-255)
Le Saint Prophète r raconte un autre moment de son enfance où il expérimenta
la protection du Tout-Puissant :
« Encore jeune garçon, je jouais avec les autres garçons de Quraysh à transporter
des pierres d’un endroit à l’autre. Afin de porter les pierres plus facilement, les autres
garçons enlevaient leurs vêtements et les plaçaient sur leurs épaules de façon à ce qu’ils
aient la possibilité d’y installer les pierres. Un jour, tout comme je me proposais de faire
la même chose, je ressentis un violent coup de poing venant je ne sais d’où.
« Garde ton vêtement » est tout ce que j’ai entendu.
Je laissai donc mon vêtement et continuai à transporter des pierres. Je fus le seul
parmi mes amis à être dans ce cas. » (Ibn Hishâm, I, 197)
Avant le début de l’Apostolat prophétique un autre évènement similaire se pro-
duisit lors de la reconstruction de la Ka’ba.
72 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le jeune Muhammad r transportait des pierres sur ses épaules en compagnie


de son oncle Abbâs, qui lui avait conseillé de poser son vêtement sur ses épaules
pour ne pas se blesser. Mais quand il essaya de s’y conformer le jeune Muhammad r
s’effondra par terre, et les yeux fixés en direction du ciel, ne fit que demander à son
oncle de lui donner ses vêtements pour qu’il couvre son corps. (Al Boukhari, Hajj, 42)
Bien qu’en ce temps il eût été acceptable de se promener nu dans certaines cir-
constances, le Saint Prophète r ne se promena jamais d’une manière totalement
inacceptable par l’islam.
On peut aussi rappeler la conversation qui eut lieu entre le Saint Prophète r,
alors âgé de douze ans à l’époque, et Bahira, pour avoir une idée suffisante quant
à son attitude à l’égard des actes répréhensibles que commettaient les Mecquois.
Quand Bahira lui demanda de dire la vérité au nom des idoles Lât et Uzza il lui fit
cette réponse :
« Par Dieu, je ne déteste rien de plus que Lât et Luzza, donc ne me demande rien
en leur nom. » (Ibn Ishâq, p. 54 ; Ibn Saad, I, 154 ; Voir aussi Ahmed, V, 362).
Umm Ayman, la protectrice de l’Enfant Béni, rapporte que Quraysh avait
coutume de rendre hommage à une idole nommée Buwaabah en organisant chaque
année une fête spéciale en son honneur, laquelle consistait à rester à côté de l’idole
toute la journée et à se raser la tête en signe de révérence.
Comme d’autres Mecquois, Abû Talib se préparait aussi avec impatience pour
cette fête annuelle et demanda à son neveu orphelin d’y participer avec lui. À la
grande fureur de son oncle et de ses tantes, Muhammad r déclina l’offre.
« Nous avons peur qu’une calamité s’abatte sur toi à cause de ton manque de
respect envers nos idoles » dirent ses tantes, enjoignant l’Enfant à être présent à la
fête. L’Enfant accepta finalement leur plaidoyer et se rendit à la fête avec son peuple.
Mais une fois en présence de l’idole, Muhammad r disparut tout à coup pour reve-
nir quelques moments plus tard pétrifié, le visage pâle.
Questionné par ses tantes anxieuses de connaître ce qui s’était passé, il déclara :
« Je crains d’être possédé par quelque esprit mauvais ! »
Ses tantes lui assurèrent :
« Le Tout-Puissant ne te laisserait jamais souffrir de tels tourments, car tu es
un enfant exsudant toutes sortes de vertus. Dis-nous seulement ce que tu as vu ! »
Il dit : « Chaque fois que je m’approchais de l’idole, un grand homme, un homme
(en) blanc, apparaissait en me disant de reculer et de m’abstenir de le toucher ! ».
Les Années de Jeunesse 73

Ce fut la dernière fois que Muhammad r fut contraint d’assister à des festivités
idolâtres. (Ibn Saad, I, 158).
Le récit suivant, fourni par le Saint Prophète r, est rapporté par son cousin Ali
ibn Abû Taleb t :
« Jamais je n’ai pensé prendre part aux festivités organisées durant l’Âge de
l’Ignorance, sauf à deux reprises. Mais lors de ces deux occasions, je fus protégé par
Dieu contre ces maux. Alors qu’un soir je gardais des moutons, je me souviens avoir
demandé à l’un de mes camarades bergers :
- Pourrais-tu s’il te plaît prendre soin de mes moutons de sorte que je puisse avoir
une chance de descendre à La Mecque et d’assister à ces réjouissances comme les autres
garçons ?
- Bien sûr, répondit-il, fais ce que tu veux.
Je me rendis donc à La Mecque. Au moment où j’entrai dans la ville, j’entendis de
la musique et des chants provenant de la première maison. Me renseignant à ce sujet,
on me fit part qu’untel était sur le point de se marier. Je décidai donc de m’asseoir et
d’observer. Mais presque immédiatement une immense torpeur prit possession de moi
et me conduisit dans un sommeil profond. Je ne fus réveillé que le lendemain matin
par la chaleur du soleil. Je retournai vite auprès de mon ami. Dès qu’il me vit, il me
demanda de lui dire ce que j’avais fait.
- Je n’ai rien fait, lui répondis-je.
Il m’est arrivé la même chose une autre nuit lorsque je suis allé à La Mecque
pour participer à un événement dans l’unique but de surmonter la fatigue. Je n’ai plus
jamais pensé ou fait quelque chose de ce genre jusqu’au moment où Dieu m’a honoré
de l’Apostolat prophétique. » (Ibn Ishâq, p. 58-59 ; Ibn Kathir, al-Bidâyah, II, 292)

Muhammad comme berger


La Lumière de l’Être r travailla comme berger avant de rejoindre son oncle
Abû Talib dans le commerce. Les Arabes tenaient en haute estime le métier de ber-
ger. il n’était pas rare de voir des enfants de riches faire paître des moutons.
Transmettant les compétences précieuses de la décision et de l’administration,
le métier de berger, comme le confirme le hadith suivant, fut d’ailleurs celui de tous
les prophètes L, bien avant que ne soient venues leurs responsabilités liées à leur
statut de prophète :
« Tous les messagers envoyés par Dieu ont été des bergers. »
Il est rapporté que certains Compagnons y demandèrent au Messager Béni r
s’il avait oui ou non effectué ce travail.
74 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il répondit ce qui suit :


« Oui, en effet, j’ai gardé les moutons des Mecquois en échange d’un salaire. »39 (Al
Boukhari, Ijârah, 2, Anbiyâ, 29 ; Ibn Majah, Tijârat, 5).

Un autre hadith similaire déclare :


« Moïse u fut envoyé comme prophète alors qu’il gardait des moutons tout
comme David u qui fut investi prophète alors qu’il faisait paître des moutons. Je
faisais paître les moutons appartenant à ma famille à Ajyad lorsque j’ai été investi de
l’Apostolat prophétique. » (Ibn-i Saad, I, 126).
Le jeune Muhammad était âgé de vingt-cinq ans quand il faisait paître les mou-
tons des Mecquois.
Exercer le métier de berger en période d’affliction est clairement loué dans le
hadith suivant, qu’il décrit comme étant une occupation vertueuse :
« Celui qui se trouve dans l’une des lignes de travail les plus propices est celui
qui fait paître ses moutons sur une colline ou dans une vallée, qui effectue en outre sa
prière (salât), qui verse l’aumône, qui adore son Seigneur jusqu’au jour de son décès et
ne cesse de faire du bien aux autres. » (Muslim, Imarat, 125 ; Ibn Majah, Fitan, 13).
Le chemin de la solennité, de la compassion et de la capacité de réflexion est
pavé pour les bergers, comme l’indique le hadith suivant :
« La sérénité et la solennité suivent les bergers. » (Al Boukhari, Manaqib, 1; Muslim,
Iman, 84/52).

Surveiller les moutons et les protéger des animaux sauvages apportent au ber-
ger des sentiments de miséricorde et d’assistance, favorables à l’épanouissement des
vertus qu’un prophète doit posséder, comme la patience face au possible irrespect et
ignorance de son peuple et la compassion à l’égard de toutes les créatures de Dieu.

Voyages commerciaux avec ses oncles


À l’âge de douze ans, le jeune Muhammad r accomplit son premier voyage
avec son oncle Abû Talib jusqu’en Syrie. Il effectua un autre voyage au Yémen à
l’âge de seize ans.
39. Les rapports varient sur la signification du mot qararit, utilisé dans ce hadith pour désigner le salaire
perçu. Un rapport suggère qu’il s’agit plutôt du nom d’un endroit précis de La Mecque, tandis qu’un
autre implique qu’il serait le pluriel du mot qirat, une sorte de monnaie, que le Messager de Dieu r
perçut en guise de salaire pour faire paître les moutons des Mecquois à hauteur d’un qirat, soit le
vingtième d’un dinar, par mouton et par jour.
Les Années de Jeunesse 75

À la première occasion, Abû Talib avait décidé de rejoindre la caravane de La


Mecque qui était en route vers la Syrie. Profitant que toute sa famille était présente
pour lui dire au revoir, Abû Talib demanda à son neveu bien-aimé :
« Désires-tu venir en Syrie avec moi ? »
Bien qu’ils furent enthousiastes à l’idée les autres oncles et tantes de l’Enfant
Béni par peur qu’il n’attrapât quelque maladie en route alors qu’il était encore si
jeune ils dissuadèrent Abû Talib d’emmener Muhammad r et se rallia à cette idée.
Mais ce fut sans compter sur la déception de son neveu bien-aimé qu’il laissa en
larmes. Abû Talib lui demanda alors la raison de ces larmes :
« Pourquoi pleures-tu, mon cher ? Est-ce parce que je te laisse en arrière ? »
Tenant ferme les rênes du chameau sur lequel son oncle était à califourchon,
Muhammad r plaida ainsi sa cause :
« Avec qui me laisses-tu ? Je n’ai ni père ni mère ! »
Soudainement débordant de compassion, Abû Talib répondit alors :
« Par Dieu ! Je vais te prendre avec moi… Et ce sera la dernière fois que l’idée
de me séparer de toi m’atteindra. » (Ibn Ishâq, s. 53 ; Abû Nuaym, Dalâil, I, 168)
Il entreprit son second voyage à l’âge de seize ans avec son oncle Zubayr
qui l’emmena jusqu’au Yémen. Voulant profiter de la bénédiction de son neveu
dans son projet d’entreprise, Zubayr obtint d’Abû Talib la permission de prendre
Muhammad r avec lui. (Diyarbakrî, I, 260).
Sur le chemin, ils croisèrent un chameau sauvage qui bloquait un passage qu’ils
devaient traverser. La caravane décida de changer d’itinéraire, mais Muhammad r
demanda aux membres de la caravane de lui laisser le soin d’arranger la situation.
Le chameau sauvage se calma au moment où il aperçut Muhammad r.Le futur
Prophète r grimpa sur l’animal, le conduisit jusqu’à ce qu’ils atteignent la vallée,
après quoi il le laissa libre.
De même, sur le chemin du retour, la caravane traversa une vallée inondée de
manière inattendue. Le Prophète à venir garda son calme et demanda aux autres de
le suivre, conduisant la caravane à travers la vallée, saine et sauve, comme si le Tout-
Puissant avait asséché le chemin pour eux. (Ibn Kathir, al-Bidâyah, II, 282).

La rencontre avec le moine Bahira


Pendant le voyage qu’il accomplit vers la Syrie en compagnie de son oncle Abû
Talib, la caravane campa près du monastère de Bahira, un moine chrétien.
76 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Bahira fut étonné de voir qu’un nuage planait autour de la caravane et faisait de
l’ombre à quelqu’un en particulier. C’était comme si les branches des arbres s’incli-
naient vers cette même personne pour la protéger du soleil là où la caravane était
implantée. Piqué par la curiosité Bahira décida d’élucider cette question intrigante
en invitant les Mecquois à dîner à l’intérieur du monastère :
« J’ai préparé un repas à votre intention. J’invite chaque membre de la caravane
à s’y joindre, jeunes et vieux, libres et esclaves. »
Les Mecquois furent surpris par l’invitation de Bahira, car il n’avait jamais
montré beaucoup d’intérêt à les inviter alors qu’ils empruntaient régulièrement cette
route menant vers la Syrie. Mais tous répondirent à l’invitation. Observant curieuse-
ment les différents visages de ses invités qui entraient, Bahira sentit qu’il n’avait pas
trouvé ce qu’il cherchait, un certain signe qu’il désirait apercevoir.
Aussi il leur demanda : « Avez-vous laissé quelqu’un en retrait ? »
Ils répondirent : « Personne sauf un enfant qu’on a laissé pour garder un œil
sur la caravane et la marchandise. Nous l’avons assigné à ce poste car il est le plus
jeune d’entre nous. »
Mais Bahira insista pour qu’il vienne lui aussi manger avec eux. Une fois à table,
Bahira reconnut tout de suite Muhammad. Le prenant par la main, il murmura :
« Voici le Maître des Deux Mondes… Le Messager du Tout-Puissant, la
Miséricorde des Mondes ! »
Les anciens parmi les Mecquois lui demandèrent la provenance d’une telle idée.
Bahira répondit : « J’ai découvert ses signes dans nos Saintes Écritures. Alors
que vous approchiez, j’ai remarqué que tous les arbres et les rochers s’inclinaient
devant lui par respect. Certes les objets inanimés ne se prosternent que devant
les prophètes. Je suis ensuite devenu d’autant plus convaincu une fois que j’eusse
regardé plus loin et remarqué le Sceau de la Prophétie placé entre ses omoplates. »
Puis Bahira continua à interroger Abû Talib au sujet de son jeune neveu et
chaque réponse qu’il reçut permit à son cœur de corroborer avec la plus grande
facilité la prémonition qui était sienne à ce sujet. Bahira était désormais certain de
l’Apostolat prophétique de l’enfant. Aussi il dit à Abû Talib en l’exortant :
« Ramène ton neveu chez toi, parmi ton peuple ! Méfie-toi des méfaits pouvant
provenir des juifs, car s’ils reconnaissent ton neveu, ils tenteront très certainement
de le tuer. Les juifs désirent que le prochain prophète émerge de leur peuple, les
enfants d’Israël, et pourtant cet enfant est un Arabe. Ramène-le… L’attendre est
synonyme de grand avenir. »
Les Années de Jeunesse 77

Abû Talib écouta les conseils de Bahira et retourna immédiatement à La


Mecque, au détriment d’une affaire commerciale à laquelle il coupa court. (Ibn Ishâq,
p. 54-55; Ibn Saad, I, 153-155 ; At Tirmidhi, Manâqib, 3)

Certains orientalistes ont exploité cet évènement en alléguant que le Saint


Prophète r a reçu toutes les informations vitales de Bahira pour établir sa propre
religion, ce qui est une accusation non fondée.
Bahira, après tout, n’était qu’un moine chrétien et les croyances communi-
quées textuellement dans les Écritures bibliques erronées sont contraires à la base
des croyances islamiques. Par conséquent, comment pourrait-on concevoir que le
Saint Prophète r ait pu imiter les idées des chrétiens alors qu’il avait entrepris de les
corriger en premier lieu ?
Le Dieu du christianisme, foi professée par Bahira, est attribué aux qualités
anthropomorphiques qui se traduisent par une conception matérialiste du Divin. Le
concept de Dieu en islam, d’autre part, la foi transmise par le dernier Messager r, est
profondément ancrée dans la notion d’unicité divine et de transcendance et se situe
donc sur un plan complètement différent. Dieu y est transcendant, au-delà de toute
compréhension et surtout de faiblesses et d’imperfections semblables.
Le Saint Coran permet donc d’éclaircir en termes non équivoques, que les Gens
du Livre, la Torah et les Evangiles qui sont apparus avant l’avènement du dernier
Prophète r méritaient la considération tant qu’elles respectaient la forme originelle
de leur message religieux respectif. Voilà ce qui est écrit dans le Saint Coran :

īĻ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ÑƈÖÓāĤÒ
ƪ IJĴ
Ɔ òÓ
Ɔ āƆ ĭĤÒ
ƪ IJÒIJ
Ɔ îÓ
Ƈ İ
Ɔ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒIJÒij
Ɔ ƇĭĨƆ ÒƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒĪƪ Ò
ħ ƈıƈÖž ò ƈ ħİóäÒħıĥĘÓéĤÓƈ Āģĩƈ ĐIJ ƈóìƈ źÒĦƈ ijĻĤÒIJųÓƈ
ïĭĐ ƈ ÖīĨÒīĨ
Ž Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ Ƈ Ž Ɔ Ž Ƈ ƆƆ ƃ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ŽƆŽ Ɔ Ʃ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
Īij
Ɔ ƇĬõƆ éŽ ĺƆ ħŽ İ
Ƈ ƆźIJ
Ɔ ħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ĖƄ ijŽ ì
Ɔ ƆźIJƆ
« Certes, ceux qui ont cru, ceux qui se sont judaïsés, les Nazaréens, et les
Sabéens, quiconque d’entre eux a cru en Allah, au Jour dernier et accompli de
bonnes œuvres, sera récompensé par son Seigneur; il n’éprouvera aucune crainte
et il ne sera jamais affligé. » (al-Baqara, 2 : 62).
L’Apostolat prophétique de Muhammad r, qui est le dernier Prophète r,
englobe toutes les époques et tous les lieux et abroge par voie de conséquence toutes
les religions antérieures et leur validité. Refuser de professer la foi en Dieu et en Son
Prophète Muhammad r équivaut à de la mécréance.
78 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Même les adeptes fervents qui appartiennent aujourd’hui aux Gens du Livre
sont en conséquence exclus de la catégorie des personnes citées dans le verset cora-
nique susmentionné.
Consécutivement à la profession de foi viennent la vie d’adoration et les règles
de conduites qui lui sont inhérentes. L’islam a mis en place une vie d’adoration en
alignant la vie sociale avec la justice, la moralité avec la droiture, desquelles il décrète
des sanctions pour ceux qui violent la loi.
D’autre part, les aspects liés aux actes cultuels d’adoration dans la religion que
pratiquait Bahira à cette époque avaient déjà été falsifiés et dépourvus de lois qui
réglementent la conduite sociale à adopter.
Par ailleurs, le Prophète Muhammad r était aussi illettré. Comme cela est clai-
rement mentionné dans le Saint Coran, il ne savait ni lire ni écrire :

ģŽ Ö Ɔ ĥƇ ĉƈ ׎ ĩƇ ĤŽ ÒÔÓ


Ɔ Īij Ɔ ÜƆ òŽ źÒ Ɔ ðƃ Òƈ ğƆ ĭĻƈ ĩƀ ĻƈƆ ÖįƫƇ ĉíƇ ÜƆ źƆ IJ
Ɔ ÔÓ
ƈ īĨ
ƅ ÝƆ Ġ ƈ ƀƈ ƈ
Ž įĥ׎ ĜƆ īŽ ĨÒijĥƇ ÝŽ ÜƆ ÛƆ ĭŽ ĠÓ
Ƈ ĨƆ IJƆ
Ɔ ĩƇ ĤÓƈ čƪ ĤÒźƪ Òƈ ƂÓĭƆ ÜÓƈ ĺƆ Óſ Öƈ ïƇ éƆ åŽ ĺÓ ƈ ƀ ƀ Ƅ ĭƈƆ ĻÖÚÓ
Īij Ɔ ĨƆ IJƆ ħƆ ĥŽ đĤŽ ÒÒijÜƇ IJƘ ƇÒīĺ
Ɔ ñĤƪ Ò ƈòIJïƇ ĀĹ
Ƈ ĘÚÓ žƆ Ƅ Ɔſ Ɔ Ƈ
ĺÒijİ
« Et avant cela, tu ne récitais aucun livre et tu n’en écrivais aucun de ta main
droite. Sinon, ceux qui nient la vérité auraient eu des doutes. Il consiste plutôt
en des versets évidents, (préservés) dans les poitrines de ceux à qui le savoir a été
donné. Et seuls les injustes renient Nos versets. » (al-Ankabut, 29 : 48-49).
Le Saint Prophète r n’était âgé que de douze ans quand il rencontra Bahira et
leur entrevue avait même été extrêmement courte. Il serait en conséquence inconce-
vable d’accepter l’idée qu’un garçon de douze ans et de surcroit illettré pût mémori-
ser six mille versets d’un livre en un temps si éphémère et, en outre, les garder intacts
dans sa mémoire pendant encore vingt-huit longues années, puis tout d’un coup
sortir et commencer progressivement à les communiquer à l’âge de quarante ans.
Personne ne peut contester le fait que l’islam, en tant que religion universelle-
ment acceptée, a apporté une façon de vivre compréhensive qui ne peut simplement
pas être évoquée à l’improviste, même par un savant particulièrement compétent en
la matière, et encore moins par un enfant.
Qui plus est, Bahira avait-il vraiment connu tout cela comme prétendu ?
Alors pourquoi n’a-t-il pas proclamé lui-même la religion au lieu de laisser les
honneurs à un garçon qu’il n’avait jamais rencontré auparavant ?
Un autre aspect qui doit également être notifié est que Bahira lisait et écrivait
l’hébreu et non la langue arabe claire et éloquente qui est si caractéristique du Saint
Coran. C’est d’ailleurs ce qui est notifié dans le Saint Coran de la façon suivante :
Les Années de Jeunesse 79

 ñƈ Ĥƪ ÒĪƇ ÓùƆ Ĥƈ óýƆ ÖƆ įƇ ĩƇ ĥžƈ đƆ ƇĺÓĩƆ Ĭƪ Òƈ Īij


Ĵ Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ ħŽ ıƇ Ĭƪ ÒƆ ħƇ ĥƆ đŽ ĬƆ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
Ƅ
īĻƈ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ïƇ éƈ ĥŽ ĺ
Ƅ ×ĨƇ ĵƈƭ ÖóƆ ĐƆ ĪƄ ÓùƆ ĤÒñƆ İƆ IJ Ɔ ĵƭ ĩåƆ ĐŽ ÒƆ įĻŽ ĤƆ ÒĪIJ Ƈ
« Et Nous savons parfaitement qu’ils disent : ‹Ce n’est qu’un être humain qui
lui enseigne (le Coran) ›. Or, la langue de celui auquel ils font allusion est étran-
gère [non arabe], et celle-ci est une langue arabe bien claire. » (an-Nahl, 16 : 103)
Le Coran, par ailleurs, utilise la langue arabe si puissamment qu’il illustre ce qui
est un défi insurmontable pour tous les poètes arabes et leurs aptitudes littéraires.
L’origine divine du Coran et l’échec certain de ceux qui tentent d’imiter sa
majestueuse puissance littéraire est nettement exprimée dans le verset subséquent :

ģƈ Ꭰĩƈƈ ÖÒijÜƇ ÉŽ ĺƆ ĪŽ ÒƆ ĵĥƆ Đ ƈ ƈ ƈ


Ɔ īƫ åƈ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ÷Ƈ ĬŽ źÒŽ ÛđƆ ĩƆ ÝƆ äÒ
Ž īƈ ÑĤƆ ģŽ ĜƇ
ÒóĻ ƈıČ ăƅ đŽ ×Ĥƈ ħıƇ ąƇ đŽ ÖƆ ĪÓ
Ɔ Ġ
Ɔ ijŽ ĤƆ IJ ƈ ƈ ƈ Ɔ ÜƇ ÉŽ ĺƆźĪƈ ÒƆ óĝƇ ĤŽ ÒÒñİ
Ɔ įĥᎠĩƈÖĪij Ɔ
ƃ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž
« Dis: ‹Même si les hommes et les djinns s’unissaient pour produire quelque
chose de semblable à ce Coran, ils ne sauraient produire rien de semblable, même
s’ils se soutenaient les un les autres›. » (Al Isra, 17 : 88).
En considérant que de nombreux polythéistes Qurayshites avaient assisté à la
rencontre du Prophète r avec Bahira, si les affirmations des orientalistes conte-
naient un semblant de vérité, les polythéistes qui ont passé leur vie à renier le Mes-
sager d’Allah r depuis les premiers jours de la prophétie, auraient utilisé ce prétexte
pour contester la véracité de cet incident.
Mais comme il n’existe aucune référence affirmant que les polythéistes Qurays-
hites aient polémiqué sur ce sujet ce qui laisse à penser qu’ils ont dû prendre une
telle affirmation comme étant totalement absurde.

La société de Hilfu’l-Fudûl
Les affrontements qui eurent lieu à plusieurs reprises entre les tribus arabes au
cours des mois sacrés étaient appelées « batailles de Fijar ».
Quatre batailles connues comme telles eurent lieu durant l’Âge de l’Ignorance,
la dernière d’entre elle fut se déroula entre les tribus Quraysh des Kinanah et la
tribu Hawazin au sein de laquelle le futur Prophète r, alors âgé de vingt ans, avait
pris part, mais sans qu’il ne fasse couler de sang, il recueillit les flèches lancées par
l’ennemi et les remit à ses oncles. (Ibn Hishâm, I, 198; Ibn Saad, I, 126-128).
80 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La bataille prit fin au mois de Zilqadah, l’un des mois jugé sacré par les
Arabes.
Peu de temps après, un commerçant yéménite de la tribu Zubayd vint à La
Mecque pour vendre ses marchandises. Le Mecquois Âs ibn Wâil, un des plus riches
commerçants de la ville, acheta les marchandises de l’homme, mais il ne lui offrit
pas le prix escompté.
Impuissant, le pauvre homme sollicita l’aide des fortes tribus de Mahzûm,
Abd’ud-Dâr, Jumâh, Sahm et Adiyy ibn Kâ’b, mais en vain. Ils le réprimandèrent
même pour avoir sollicité ses droits !
Incapable de trouver l’aide et particulièrement aigri, le commerçant yéménite
gravit la colline d’Abû Qubays situé près de la Ka’ba et récita un poème qui com-
mença avec les mots « O Fils de Fihr », se référant au célèbre ancêtre des Mecquois,
faisant mention de l’injustice qu’il venait de subir de la part d’Âs ibn Wâil et solli-
citant le soutien des Mecquois qui s’étaient rassemblés à cette époque autour de la
Ka’ba. Ce qui eut comme conséquence que le premier homme qui fit un geste en
sa faveur fut Zubayr, l’oncle du Saint Prophète r, qui organisa une réunion dans la
maison d’Abdullah ibn Jud’an, en présence de nombreux notables de La Mecque.
En ce lieu, ils firent la promesse solennelle de défendre et de restaurer les droits
d’autrui, en commençant par le Yéménite, qui était victime d’injustice au sein des
frontières de La Mecque et de lutter contre les tyrans au nom des faibles, « tant que
les Monts Hira et Sabir se maintiennent à leur place et qu’il reste assez d’eau dans
les mers pour humidifier une seule mèche de cheveux ».
La société nouvellement créée demeura forte même après qu’ils eurent rendu
les droits du Yéménite et resta d’aplomb pour aider les victimes des injustices com-
mises, faisant de son mieux pour rétablir la justice entre les gens. (Ibn Kathir, al-Bidâya,
II, 295-296; Ibn Saad, I, 128-129).

Enracinée dans la justice et basée sur l’aide aux faibles, la société de Hilfu’l-
Fudûl a été la seule que le Saint Prophète r ait soutenue durant l’Âge de l’Ignorance,
se souvenant d’elle avec sympathie longtemps après son Apostolat prophétique :
« J’étais présent avec mes oncles dans la maison d’Abdullah ibn Jud’ân lorsque
la société de Hilfu’l-Fudûl fut créée. Ma satisfaction fut telle qu’offrir des chamelles
rouges (ce qui était le bien le plus prisé dans la société arabe de l’époque) à sa place ne
m’aurait pas autant satisfait. Si j’étais invité à participer à une telle société aujourd’hui
encore, je serais à même d’accepter l’offre sans hésitation.» (Ibn Kathir, al-Bidâya, II, 295)
Les Années de Jeunesse 81

La vie du Saint Prophète r dans le monde des affaires


On doit toujours garder à l’esprit qu’abritant en son sein la Ka’ba, la Maison
de Dieu, La Mecque a toujours été un lieu vénéré pour les croyants, depuis l’époque
d’Abraham u, mais aussi depuis celle Adam u.
Les Mecquois continuaient leur vie en s’occupant du commerce. Pendant les
foires qui avaient lieu durant la saison du pélerinage ils formaient des caravanes
commerciales pour vendre les marchandises qu’ils apportaient des pays voisins. Ils
achemineraient aussi vers les pays voisins les marchandises produites à La Mecque.
Le Saint Prophète r avait déjà voyagé avec ses oncles dans des caravanes de
commerce vers la Syrie et le Yémen alors qu’il était adolescent. Des années plus
tard, il voyagea encore à deux reprises au Yémen, précisément jusqu’au marché de
Juraish, pour le compte de Khadîdja c, recevant en retour un jeune chameau mâle
pour chaque voyage effectué. (Hâkim, III, 200/4834).
Il prit également une caravane chargée de biens appartenant à Khadîdja c et
se rendit au marché de Hubasha au Tihamah. Il était accompagné dans ce voyage
de Maysara, serviteur de Khadîdja c. Ils rapportèrent à La Mecque des étoffes pré-
cieuses qu’ils avaient achetées dans ce marché et les revendirent à Hakim ibn Hizam
avec un profit élevé. Le Noble Messager r a toujours été heureux de la conduite de
Khadîdja c quand il travaillait pour son compte, confessant n’avoir jamais travaillé
avec un meilleur partenaire d’affaires que Khadîdja qui le plus souvent rétribuait
davantage les services de Muhammad que le prix convenu. (Halabî, I, 221, Aynî, X, 104).
Tout cela commença avec les conseils qu’Abû Talib prodigua à Muhammad r :
« Je suis un homme pauvre, mon cher neveu. La sécheresse ne nous a pas per-
mis de vendre quoi que ce soit. Elle a tari notre capital. Mais j’ai entendu qu’une
caravane s’apprêtait à quitter Damas et que Khadîdja c, la fille de Khuwaylid, est à la
recherche d’un agent de confiance pour vendre certains de ses produits là-bas en son
nom ; une personne fiable et loyale comme toi. Je pense qu’on devrait la convaincre
de t’accepter comme partenaire dans le commerce. Je crois même qu’elle va te pré-
férer à cause de ta fidélité. La vérité est que je ne veux pas que tu ailles à Damas car,
à cause des juifs, je crains pour ton bien-être, mais je ne vois pas d’autre issue. »
Khadîdja c, ravie par l’offre finit par offrir à Muhammad r plus d’argent que
prévu. Elle fit même cette remarque :
« Je n’ais jamais pensé que Muhammad r soit disposé à travailler pour moi ! »
Khadîdja c savait très bien que Muhammad r était un homme fiable et hon-
nête, possédant une moralité exceptionnelle. (Hâkim, III, 200/4834).
82 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Lorsque Muhammad r se prépara à partir pour la Syrie, Khadîdja c lui conseil-


la de prendre avec lui son serviteur Maysara qui lui obéirait en toutes circonstances.
Une fois les deux chameaux chargés, ils prirent la route. Dès le départ, les deux
chameaux restèrent à la traîne par rapport au reste de la caravane. Maysara, soucieux
de ce problème, se précipita vers Muhammad r pour l’informer de la situation. Il
fallut que Muhammad plaçât ses mains sur les sabots des chameaux pour qu’ils
soient immédiatement revivifiés, beuglant et marchant à un rythme frénétique
jusqu’à aller se placer à la tête de la caravane. Témoins d’un tel évènement, les
autres membres de la caravane prirent par la suite des précautions supplémentaires
à l’égard de Muhammad r et de son serviteur. (Diyarbakrî, I, 262).
Le jeune Muhammad r fut toujours honnête dans ses transactions et réalisa les
promesses qu’ils faisaient à n’importe quel prix.
Ibn Abbâs t qui connaissait à fond les détails de la vie de Muhammad r, a
déclaré :
« Chaque fois que le Messager de Dieu promettait quelque chose, certainement
il le faisait. » (Al Boukhari, Shahâdât, 28)
Une affirmation semblable a été émise par Sâib ibn Abi’s-Sâib qui raconte le
moment où il a visité le Saint Prophète r alors qu’il était entouré des Compagnons.
« Les Compagnons commencèrent à me louer auprès du Messager de Dieu r,
pensant qu’il savait peu de choses sur moi. Mais il leur affirma qu’il me connaissait
plus intimement que quiconque. Sur ce je déclarai :
- Que ma mère et mon père te soient donnés en rançon, Messager de Dieu, qu’il
en soit ainsi. Tu as été mon partenaire d’affaires ; et quel excellent partenaire tu as
été ! Je ne me souviens pas m’être disputé ou querellé avec toi, non jamais ! » (Abû
Dâwûd, Adab, 17/4836 ; Ibn Majah, Ticârât, 63).

D’innombrables exemples tirés de sa vie illustrent la raison pour laquelle le


Saint Prophète r fut surnommé al-Amîn (le Digne de confiance) et as-Sâdiq (l’Hon-
nête). Une telle circonstance est ainsi narrée par Abdallah ibn Abi’l-Hamsâ :
« J’ai eu l’occasion de faire quelques échanges commerciaux avec le Messager
de Dieu r avant son Apostolat prophétique. Lui devant de l’argent, je lui avais
demandé de patienter, lui promettant de le rembourser un peu plus tard.
Mais quelques temps après mon départ, j’oubliai ma promesse et ne m’en sou-
vins que trois jours après. Impulsivement, je me précipitai vers l’endroit où j’avais
fait la promesse et je le trouvai toujours en train de m’attendre.
M’attendant à ce qu’il me blâme, cet homme noble, qui manifesta les vertus les
plus remarquables, me fit simplement la remarque suivante :
Les Années de Jeunesse 83

- Tu m’as placé dans une situation très fâcheuse, jeune homme, me forçant à
attendre ici depuis trois jours. » (Abû Dâwûd, Adab, 82/4996).
Un tel comportement splendide est évocateur d’une grande sagesse qui n’aurait
pu seulement être incarnée par un futur prophète r.
Si le Tout-Puissant l’avait voulu, Il aurait pu permettre à Son Bien-aimé
Prophète r de mener dès l’enfance une vie confortable mais la Divine Sagesse a
voulu qu’il gagne sa vie de ses mains pour donner aux autres un exemple à imiter.
L’action du Noble Prophète r est corroborée par ses propres paroles :
« Nul ne mange de meilleure subsistance que celle qu’il a gagné de ses propres
mains. » (Al Boukhari, Buyû’, 15 ; Anbiyâ, 37).
Toute origine attribuée diminuera nécessairement aux yeux des gens en termes
de valeur dans la mesure où son chef de file conforme sa vie qu’à travers les dons de
ses suiveurs. Un tel chef ne sera pas pris au sérieux par les autres. C’est l’essentiel qui
sous-tend le commandement du Tout-Puissant à Ses prophètes :

ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ħġƇ ĥƇ ÑƆ øƆÒÓĨIJ
īĻ
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĤŽ ÒÔžƈ òĵ Ɔ ƪ źÒĴƆ ƈóäŽ ƆÒĪŽ Ò ƅóäŽ ƆÒīŽ ĨįĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ĥƆ Đ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ
« Je ne vous demande aucun salaire, ma rétribution n’incombant qu’au
Seigneur des mondes. » (al-Shuarâ, 109, 127, 145, 164, 180 ; Yûnus, 72 ; Hûd, 29)
Le couplet suivant fait aussi écho à cette vérité :
Ne convoite pas l’avantage d’un autre,
Car son prix est le joyau de la liberté.
En s’appuyant sur ses propres revenus, le Saint Prophète r était dans ce sens la
plus indépendante des personnes.

Les observations du moine Nestor


Après un long voyage, la caravane fit une halte à Busra qui faisait partie de la
Syrie. Muhammad r se retira sous un olivier dans le voisinage du monastère du
moine Nestor.
Remarquant l’homme qui prenait quelque répit à l’ombre, et ayant déjà rencon-
tré Maysara auparavant, le moine demanda à ce dernier:
- Maysara ! Qui est cet homme tapi là à l’ombre ?
- Il est originaire de la tribu de Quraysh, répondit Maysara.
- A-t-il des rougeurs dans les yeux ? demanda alors le moine.
84 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

- Oui, en effet.
- Alors c’est lui le dernier prophète ! s’exclama Nestor. Si seulement je pouvais
suffisamment vivre pour voir l’avènement de son Apostolat prophétique et l’assister.
(Ibn Saad, I, 130-156 ; Ibn Kathir, al-Bidâya, II, 297-298).

Peu après, la caravane quitta Busra pour La Mecque. Sur le chemin du retour,
Maysara fut témoin d’une scène incroyable : deux anges faisaient de l’ombre à
Muhammad alors que la chaleur du désert grimpait à des pics insupportables. Le
voyage s’avéra être un investissement profitable pour toute la caravane. (Ibn Saad, I,
130, 156-157).

Mariage avec Khadîdja c


Immédiatement après le retour à La Mecque, Maysara commença à transmettre
avec force de détails la conduite suprême de l’Homme Béni dont il fut témoin tout
au long du voyage ainsi que les diverses expériences attenantes.
Après avoir entendu cela, Khadîdja c commença à nourrir le souhait d’épouser
Muhammad r.
Nafisa bint Umayya, une amie proche de Khadîdja c, raconte la manière dont
tout cela se développa par la suite :
« Khadîdja c était une femme intelligente, travailleuse et d’une moralité admi-
rable. Il n’y eut pratiquement aucun homme de sa tribu qui ne n’ait pas eu un fort
désir de l’épouser. Mais Khadîdja c admirait profondément Muhammad r. Après
le retour de la caravane commerciale de Damas, Khadîdja c m’envoya pour le son-
der sur ses intentions concernant la question du mariage.
- Pourquoi ne pas te marier Muhammad ? lui demandai-je.
- Comment le puis-je alors que je suis sans moyens matériels ?
- Admettons que les moyens ne te fassent pas défaut, serais-tu d’accord pour
épouser une belle et honorable dame, et des plus riches qui plus est ?
- Qui est cette dame ? demanda t-il ensuite.
- Il s’agit de Khadîdja c, répondis-je.
- Penses-tu que ce soit possible ?
- Laisse-moi faire, lui assurai-je.
Puis il fit la remarque suivante :
- Si tu peux t’arranger, je l’épouserai.
Les Années de Jeunesse 85

Sans plus tarder je me rendis auprès de Khadîdja c pour l’informer de notre


conversation. » (Ibn Saad, I, 131).
Khadîdja c, après avoir entendu les bonnes nouvelles apportées par sa confi-
dente, fit une proposition (de mariage) à Muhammad r.
La Lumière de l’Être r informa alors son oncle Abû Talib de la proposition,
lequel, conformément à la coutume de l’époque, se rendit auprès de Khadîdja c
pour lui demander sa main au nom de son neveu bien-aimé.
L’oncle de Khadîdja c donna sa bénédiction et la cérémonie de mariage se
déroula en présence de tous les parents et amis.
De courtes allocutions furent données à l’occasion par Abû Talib et Waraqa ibn
Nawfal, le cousin de Khadîdja c.
Une fois les discours terminés, Amr, l’oncle de Khadidja c, se leva et dit :
« Soyez témoins, gens de Quraysh, que j’atteste présentement que Khadîdja est
désormais l’épouse de Muhammad ibn Abdallah. (Diyarbakrî, I, 264; Yakûbî, II, 20).
Comme mahr, la dot obligatoire que l’on offre à la mariée, Muhammad r offrit
à Khadîdja vingt jeunes chameaux. ( Ibn Hishâm, I, 206; Ibn Asîr, Usdu’l-Ghaba, I, 23).
Au moment de leur mariage, Muhammad r était âgé de 25 ans environ, alors
que Khadîdja c, qui était veuve, avait des enfants de son mariage précédent, était
âgée d’environ 40 ans.
Tout au long de leur mariage, Khadîdja c, la mère des croyants, s’est révélée
être un support brillant pour Muhammad r en déposant pratiquement à ses pieds
sa vie et ses richesses.
Provenant de son caractère noble, elle était connue comme al-Afifah (la
Chaste), al-Tâhirah (la Pure), et, surtout, avant et après l’avènement de l’islam,
comme Khadîdjat’ul Kubra (Khadîdja la Grande). (Ibn Saad, VIII, 14-15).
Les paroles suivantes, formulées par le Messager de Dieu r, témoignent de son
statut exceptionnel :
« La meilleure femme de l’au-delà est Maryam bint Imran, la mère de ‘Issa,
tandis que la meilleure de ce monde est Khadîdja bint Khuwaylid. » (Al Boukhari,
Manâqibu’l-Ansâr, 20 ; Muslim, Fadâil’us-Sahâbah, 69).

Le choix du futur Prophète en matière de mariage montre qu’il n’a jamais été
un homme motivé par des désirs égoïstes. Il aurait pu très certainement épouser une
dame jeune et plus belle et non pas une veuve possédant déjà des enfants.
86 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Mais le Noble Muhammad r n’était pas à la recherche des beautés passagères


ou de la jeunesse d’une future épouse, mais des vertus précieuses telles que l’hon-
neur, la chasteté et la moralité.

La sagesse des multiples mariages du Saint Prophète r


Le Saint Prophète r contracta de multiples mariages après qu’il eut atteint l’âge
de 55 ans, une démarche derrière laquelle se trouvent de nombreuses sagesses.
Dieu indique dans le verset ci-dessous qu’Il a fait de Son Messager r un modèle
à imiter dans tous les aspects de la vie et Il défie toute mauvaise pensée à propos de
ses différents mariages, mauvaises pensée qui peut aller jusqu’à la calomnie qui met
au jour une ignorance des faits religieux et une intention malveillante allant au-delà
de l’ignorance. :

īŽ ĩƆ Ĥƈ ÙƄ ĭƆ ùƆ è ƈ Ʃ Ģij
ƈ øòĵĘ ƈ ħġƇ ĤƆ ĪÓ
Ɔ ƄØijƆ øŽ ƇÒųÒ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž ƆƆ
ĠïĝĤ
ÒóĻáƈ Ġ ųÒóĠðIJóìŴ ƈ ÒĦijĻĤÒIJųÒijäóĺĪÓĠ
ƃ Ɔ ƆƩ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž ƆŽ Ɔ ƆƩ Ƈ ŽƆ Ɔ
« En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle (à suivre)
pour quiconque espère en Allah et au Jour dernier et invoque Allah fréquem-
ment. » (al-Ahzab, 33 : 21).
Le Saint Prophète r est un modèle au-delà même de toute comparaison dans
toutes les affaires, en particulier dans les relations familiales.
Même si nous ne pouvons pas donner ici tous les détails concernant les épouses
vertueuses du Prophète Muhammad r et de ses mariages, une tâche qui surpasse-
rait le cadre de cet ouvrage, nous pouvons néanmoins toucher à certaines de leurs
caractéristiques.
Il va sans dire que c’est pendant le temps de la jeunesse que l’on ressent la plus
forte attirance pour le sexe opposé. Sur cet aspect, un regard sur la prime jeunesse
du Saint Prophète r présente de toute évidence un impeccable, chaste et honnête
jeune homme. Cela corrobore facilement le surnom que lui ont donné les Mecquois,
à savoir al-Amîn, le Digne de confiance, sans exiger que l’on regarde ailleurs. Son
intégrité est également établie par le fait qu’aucun Mecquois n’a jamais fait d’alléga-
tion au sujet de sa vie conjugale.
Le Saint Prophète r ne se maria qu’une seule fois pendant la période mec-
quoise, quand il avait 25 ans, à Khadîdja c, une veuve âgée de 40 ans.
Tout au long de leur union qui dura 25 ans et qui se termina par le décès de
Khadîdja c, le Prophète Muhammad r n’épousa aucune autre femme.
Les Années de Jeunesse 87

La coutume arabe de l’époque favorisant la polygamie si le Saint Prophète r


avait pris les devants pour se marier avec une autre femme, cela aurait été jugé tout
à fait acceptable et il n’aurait encouru blâme.
Le Saint Prophète r épousa une autre veuve Sawda c après le décès de notre
mère Khadîdja c. Ayant émigré en Abyssinie avec son ancien mari, elle souffrit de
la mort de ce dernier lors de son retour à La Mecque, la laissant vulnérable et sans
protection, notamment de ses proches, majoritairement des idolâtres, qui lui firent
subir une pression insupportable pour qu’elle rejette l’islam. Par conséquent, afin de
l’aider et de la protéger, le Noble Messager r l’épousa au cours de la dixième année
de son Apostolat prophétique.
En dehors des mariages avec Khadîdja c et Sawda c, les mariages suivants
eurent lieu à Médine.
L’Hégire marqua le début d’une période entièrement nouvelle dans la vie du
Saint Prophète r. Il n’était pas seulement un prophète, mais aussi un chef d’État et
un commandant d’une armée de croyants. Surtout, il fut un enseignant chargé de
la responsabilité de transmettre le message d’une façon qui devait atteindre toutes
sortes de personnes dans des lieux différents, comme il convenait à leurs besoins
particuliers. Répondre à ces divers besoins a été le principal motif dissimulé derrière
les différents mariages du Saint Prophète r, intervenant avec une sagesse remar-
quable dans toutes les perspectives, qu’elles soient religieuses, sociales ou morales.
Aïcha c fut la seule jeune fille qu’il épousa.
Malgré son jeune âge, elle était très intelligente et avait un discernement aigu et
une compréhension profonde.
C’est par son intermédiaire que les femmes musulmanes de l’époque (Sahabiyya)
apprirent avec facilité les règlements et principes islamiques, notamment ceux qui
sont propres aux femmes.
Même cinq à six décennies après la disparition du Noble Messager r, les
Compagnons y restants ainsi que le reste de la communauté musulmane, y com-
pris les enfants et les petits-enfants de cette première génération qui n’a jamais eu le
privilège d’être physiquement en la présence du Saint Prophète r, ont pu apprendre
directement l’islam d’elle.
Avec le recul vient préfigurer ce hadith de confirmation énoncée par le Saint
Prophète r :
« Apprenez un tiers de votre religion de la maison d’Aïcha. » (Daylamî, II, 165/2828).
Aïcha c figure parmi les sept Compagnons y connus sous le nom de mukthirun
pour le fait d’avoir transmis un nombre considérable de hadiths concernant les
88 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

paroles et les actions du Saint Prophète r, 2210 pour être exact. 194 d’entre eux sont
des narrations agréées (muttafaqun alayh) à la fois par Al Boukhari et Muslim, les
savants spécialistes du Hadith.
Aïcha c, la mère des croyants, était une femme ancrée dans la connaissance,
douée d’une perspicacité relative au Saint Coran et notamment dans les domaines
liés aux obligations et aux interdits, sans mentionner ses connaissances de la méde-
cine, de la poésie, de l’histoire arabe et de la lignée des familles arabes. Chaque fois
que les Compagnons y avaient des difficultés à résoudre leurs désaccords sur une
question donnée, ils venaient toujours auprès d’Aïcha c pour trouver une solu-
tion. Comme l’a confirmé Abû Mûsâ t cela s’appliquait même aux plus éminents
Compagnons du Prophète r.(Voir Ibn Hajar, al-Isâba, IV, 360).
« Chaque fois que nous rencontrions une difficulté à comprendre une parole du
Messager de Dieu r, nous demandions l’aide d’Aïcha c qui éclaircissait toute nos
incompréhensions. » (At Tirmidhi, Manâqib, 62).
En épousant sa fille et en établissant un lien de parenté, le Messager de Dieu r
renforça également son amitié déjà solide avec Abû Bakr t, son plus proche ami et
son plus fidèle partisan.
Le Messager de Dieu r eut dans son esprit une idée similaire, c’est-à-dire éta-
blir un lien de parenté avec l’exceptionnel Omar t par le biais de son mariage avec
Hafsa c. Hafsa t était en deuil car son mari avait été tué à la bataille de Badr.
Omar t souhaita d’abord qu’Abû Bakr t épouse sa fille, mais après que ce der-
nier ait décliné l’offre, Othman t, à qui la demande fut faite, la déclina également.
Omar t fut extrêmement attristé par leur refus.
Ainsi donc, en épousant Hafsa, le Saint Prophète r apaisa Omar t efficace-
ment et dans le même temps reconsolida les relations altérées qui existaient entre
Abû Bakr, Omar et Othman y.
Le très débattu mariage du Saint Prophète r avec Zaynab c, de nature hési-
tante, est en fait chargé d’une profonde sagesse. En premier lieu, le Messager de
Dieu r, en arrangeant le mariage entre Zaynab c, la fille de sa tante, et Zayd t son
esclave émancipé, aida à éradiquer certaines notions erronées et répandues parmi les
Arabes et quelques personnes proches de lui en montrant d’une part la manière de
mettre un terme à la discrimination entre le riche et le pauvre, le noble et l’esclave
et d’autre part en envoyant un message stipulant que tous sont égaux aux yeux de
Dieu, comme les dents d’un peigne.
Pourtant la réticence de Zaynab t et la pression persistante de ses proches
signifiait que le mariage était devenu insupportable pour les deux parties.
Les Années de Jeunesse 89

Le Saint Prophète r, bien que Zayd t l’ai consulté et requis sa permission pour
divorcer de Zaynab c, lui conseilla plutôt de rester patient. Une fois que le mariage
atteignit un niveau insupportable, Zayd t n’eut pas d’autre choix que de divorcer.
Révélé peu de temps après le divorce, un verset coranique commanda au Saint
Prophète r d’épouser Zaynab. (Voir al-Ahzâb, 37).
Par ce verset Dieu a voulu abolir la notion arabe quant au mariage avec l’ex-
épouse d’un fils adoptif comme étant quelque chose d’illicite.
Ce genre de mariage a donc été destiné à attirer l’attention, une fois pour toutes,
sur la différence existant entre un enfant adopté et le sien propre, soulignant la dis-
tinction entre les deux.
Ainsi l’affirmation que le Saint Prophète r épousa Zaynab c pour sa beauté
provient d’une ignorance des faits suivants :
1. Zaynab c, étant la cousine du Saint Prophète r, la fille de sa tante, il la
connaissait donc depuis l’enfance et l’avait vue à plusieurs occasions.
2. Si le Saint Prophète r avait voulu faire une proposition préalable, elle
l’aurait acceptée sans réserve et il n’y avait aucun obstacle pour entraver la perspec-
tive de ce mariage. Mais non seulement le Noble Prophète r lui demanda d’épouser
Zayd c, mais en plus il rejeta à de nombreuses reprises leur intention de divorcer.
En bref, de tels évènements devaient avoir lieu pour faciliter la mise en place
de nombreux principes de la Loi islamique à travers eux, s’incarnant dans la vie du
Saint Prophète r et fournit des outils de jurisprudence pour les pratiques futures.
Le mariage du Saint Prophète avec Safiyya c, la fille du leader juif de Khaybar,
avait été motivé par le désir de renforcer les relations avec les juifs, propice donc à
un objectif politique.
Le mariage avec Juwariyya c avait aussi des buts similaires. Se marier avec
Juwariyy c, la fille d’un chef, signifiait la libération de centaines de prisonniers de
guerre séduits par l’idée de recouvrer la liberté et d’entrer totalement dans l’islam.
L’union entre le Saint Prophète r et Juwariyyah c provoqua cette bonne destinée.
Le mariage du Noble Prophète r était motivé par l’intention de la protéger. En
effet, parmi les premiers musulmans qui émigrèrent avec son mari en Abyssinie,
Umm Habîba c fut laissée seule et sans protection quand son mari abjura l’islam.
Mais, elle conserva courageusement sa foi dans des circonstances extrêmement dif-
ficiles. Bien que son père Abû Sufyan fût à l’époque le chef de La Mecque, la foi et
l’honneur d’Umm Habîba c l’empêcha de lui demander son appui. Par conséquent,
en l’épousant, le Noble Prophète r la prit sous sa protection. Ce mariage ne pouvait
qu’aider à réduire l’hostilité existant entre les idolâtres mecquois et les musulmans.
90 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

S’il avait été motivé par un désir sexuel quand il voulut se marier le Saint
Prophète r n’aurait eu que l’embarras du choix parmi les nombreuses et belles
jeunes filles des Ansars, les musulmanes médinoises. Sans doute ces dernières
auraient été plus que disposées à épouser le Saint Prophète r et donc à atteindre
l’honneur de devenir l’épouse du dernier Messager et, par conséquent, de porter le
titre de « Mère des Croyants ». Le Saint Prophète r, néanmoins, n’a jamais choisi de
se diriger vers cette voie.
On doit donc réaliser que le Saint Prophète r n’a contracté de multiples
mariages que par la permission et l’ordre de Dieu, pour des raisons sociales, morales
et religieuses, et surtout pour avoir un certain nombre de femmes formées dans le
but de transmettre à d’autres femmes des avis juridiques qui leur sont spécifiques.
Considérant que l’islam est une religion universelle qui vise à couvrir toutes les
époques et les lieux, il serait difficile de penser que le devoir d’enseigner le vaste
corpus de la connaissance islamique puisse se reposer sur une seule femme, et si
tel eut été le cas, la religion n’aurait pas pu être transmise correctement aux géné-
rations futures. D’ailleurs, cette « seule »femme aurait bien pu décéder avant le
Saint Prophète r, ce qui aurait interrompu pour toujours l’établissement de la Loi
islamique.
IBeaucoup de questions privées relatives à la Loi islamique mettraient mal à
l’aise les femmes si elles étaient amenées à questionner les hommes à ce sujet. Mais
étant donné qu’elles ont des instructrices spécialisées dans ce domaine, elles sont
par conséquent capables d’apprendre avec aisance et à l’abri de tout malaise toutes
sortes de choses qui y sont liées. Les sociétés musulmanes ont donc toujours besoin
de femmes instruites et bien informées pour assurer la pratique pure et simple de
l’islam. Qui de mieux, en conséquence, auraient pu s’acquitter de ce devoir si ce
n’est ces « femmes bénies » qui ont respiré le même air que le Saint Prophète r et
tout appris directement de lui ? Au-delà de tout, la voie qu’elles ont menée ainsi que
leur vie empreinte de piété ont permis de les considérer toutes comme des brillants
exemples pour les futures générations de croyants.
Si on se demande dans quelle mesure les multiples mariages du Messager de
Dieu r ont pu constituer un exemple pour les gens de cette époque, les considéra-
tions suivantes pourraient être prises en compte :
Tout d’abord, nous devons nous rappeler que toutes les pratiques du Messager
de Dieu r ne sont pas destinées à être imitées. Étant le premier représentant d’une
religion, son fondateur aussi bien que son exécuteur, sa position était unique. Le
Saint Prophète r fut par conséquent obligé de mener à bien certaines pratiques
propres à lui seul comme la prière de tahajjud, le jeûne continu sans rupture (sawm
al-wisâl) et l’interdiction pour lui et sa famille de recevoir la charité même si leurs
besoins étaient grands. Les mariages qu’il a contractés pour diverses raisons, reli-
Les Années de Jeunesse 91

gieuses, sociales ou politiques, ne constituent en aucun cas des exemples à suivre


pour le reste de la communauté musulmane (Oumma), comme cela a été décrété par
le consensus des savants musulmans.
Il faut aussi se rappeler que l’islam n’a pas initié la polygamie mais a plutôt
réformé et réglementé sa pratique déjà existante. Avant l’islam, il n’y avait aucune
restriction quant au nombre de femmes qu’un homme pouvait épouser. Limitant
ce nombre à quatre, l’islam, dans le même temps, recommande avec insistance la
monogamie si on craint de ne pas pouvoir traiter équitablement toutes les épouses.
(Voir Coran, an-Nisâ, 3).

Deuxièmement, contracter plus d’un seul mariage n’est pas un ordre, mais une
autorisation spéciale donnée dans des circonstances particulières et motivée par
l’objectif de maintenir et de préserver l’institution matrimoniale.40
En temps de guerre et d’épidémie, par exemple, le nombre d’hommes peut
avoir tendance à diminuer, ce qui laisserait de nombreuses femmes sans époux.
Par ailleurs, si on est marié à une femme amoindrie et de mauvaise santé, vic-
time d’un trouble d’ordre physique ou d’une incapacité de procréer, cela peut sus-
citer l’occasion d’un autre mariage sans recourir au divorce dont les conséquences
nuiraient fortement à la cellule familiale déjà protégée. Indépendamment de la
circonstance, la limite maximum autorisée est de quatre épouses, quel que soit le
motif qu’il y a derrière.
En effet, lorsque la guerre frappe, le nombre de victimes peut atténuer la popu-
lation, et, dans ce cas, encourager les mariages multiples peut être le seul remède
pour augmenter la population et anticiper la prostitution. De nombreux exemples
de ce genre de circonstances ont traversé l’histoire de l’humanité.
Dans le but de surmonter ces grands défis, l’islam propose toujours des solu-
tions grâce à une marge d’une telle nature qu’elle sert à rendre la vie plus facile à
tous et à la préserver permanemment dans son cours naturel. Cela montre aussi la
vitalité de l’islam puisqu’il présente une capacité à résoudre toutes sortes de pro-
blèmes potentiels qui peuvent faire surface à différents moments et endroits, sous
diverses conditions.
40. Elmalılı Muhammed Hamdi Yazır élucide ainsi la question : « … Quant à la question des mariages
multiples : on ne peut contester qu’il ne s’agit que d’une permission rendant admissible (mubah)
quelque chose qui peut aussi devenir inadmissible (makruh) s’il y a une crainte de commettre une
injustice envers un de ses conjoints. Cela dit, on peut voir dans la construction du verset en question (
An-Nisâ, 3) la suggestion que contracter des mariages multiples peut être recommandable (mandub)
et même nécessaire (wajib) dans certaines cas, définis par une augmentation du risque, tant pour les
hommes que pour les femmes, de tomber dans l’iniquité. » (Hak Dîni Kur’ân Dili, II, 1290).
92 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les versets coraniques qui suivent montrent clairement que celui qui a l’inten-
tion de contracter plus d’un mariage doit être conscient de ses responsabilités et
chercher à établir la justice entre ses épouses, de peur que l’injustice qu’il est suscep-
tible de commettre ne l’entraîne à appeler sur lui le châtiment de Dieu :

ħġƇ ĤƆ ÔÓ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ž Ɔ ĈƆ ÓĨÒij
Ɔ éƇ ġĬŽ ÓĘƆ ĵĨÓƆ ÝƆ ĻƆ ĤŽ ÒĵĘÒijĉƇ ùĝŽ ÜƇ ƪ źÒƆ ħŽ ÝƇ ęŽ ìĪŽ ÒIJƆ
Øƃ ïƆ èÒ ƈ ĪŽ Óƈ ĘƆ ĎÓÖòIJÞ
ƈ ijĘƆ ÒijƇĤïƈ đÜƆ ƪ źÒƆ ħÝęŽ ì ƈ ƈ ƈ
Ɔ Ž ŽƇ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƆŻƇàIJĵ
Ɔ ĭƆ ᎠĨ Ɔ ÅÓùƆ žĭĤÒīƆ Ĩ
ÒijƇĤijđƇ ÜƆ ƪ źÒƆ ĵĬƆ îŽ ÒƆ ğƆ Ĥƈ ðƆ ħġƇ ƇĬÓĩƆ ĺŽ ÒƆ ÛŽ ġƆ ĥƆ ĨÓ
Ɔ ĨƆ IJŽ ÒƆ
Ž
« Et si vous craignez de ne pas être justes envers les orphelins,...Il est permis
d’épouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais, si vous
craignez de ne pas être juste avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que
vous possédez. Cela afin de ne pas faire d’injustice (ou afin de ne pas aggraver
votre charge de famille). » (an-Nisâ, 4 : 3).

ħÝƇ ĀŽ óè ijĤIJÅÓ ƈ ùĭĤÒ ƈ īĻÖÒijĤïƈ đÜĪÒÒijđĻĉƈ ÝùÜīĤIJ


Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ž Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ
ÒijéƇ ĥƈ āŽ ÜƇ ĪŽ Òƈ IJ ƈ
Ɔ ÙĝƆ ĥƪ đƆ ĩƇ ĤŽ ÓĠÓ
Ɔ İIJ Ƈ ĥƇ Ļĩƈ ÜƆ ƆŻĘƆ
Ɔ òƇ ñƆ ÝƆ ĘƆ ģƈ ĻŽ ĩƆ ĤŽ Òģƪ ĠÒij
ÓĩĻ ƈ òijęƇ ĔƆ ĪÓ ƈ
ƃ èòÒ
Ɔ ƃ Ɔ Ġ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƪ ÓĘƆ ÒijĝƇ Ýƪ ÜƆ IJƆ
« Vous ne pourrez jamais être équitables entre vos femmes, même si vous en
êtes soucieux. Ne vous penchez pas tout à fait vers l’une d’elles, au point de laisser
l’autre comme en suspens. Mais si vous vous réconciliez et vous êtes pieux... donc
Allah est, certes, Pardonneur et Miséricordieux. » (an-Nisâ, 4 : 129).
Le Saint Prophète r a dit :
« Un homme marié à deux femmes, et qui n’a pas établi de justice entre elles, sera
ressuscité dans l’au-delà à moitié paralysé. » (Ibn Maja, Nikâh, 47)
L’islam permet aussi à la femme d’imposer, au moment du contrat de mariage,
la condition que son mari observe la monogamie tout au long de leur union.
C’est un droit légal qui lui est accordé et qui lui permet de faire opposition à
tout projet de second mariage, à condition qu’elle l’ait prévu au moment de la mise
en place du contrat. (Hayreddin Karaman, Mukâyeseli İslâm Hukûku, v. I, p. 290, İstanbul, 1996).
Une logique rudimentaire serait susceptible de justifier le mariage multiple
d’une femme avec plusieurs hommes. Une telle notion est totalement erronnée, car
Les Années de Jeunesse 93

un enfant né d’une telle union ne pourrait appartenir à une lignée appropriée et


serait dans la controverse quant à savoir qui est son père.
L’islam rejette ce type de mariage en le nommant fujur (péché ouvert).
Mais de plus aucun autre système juridique, religieux ou séculier est à même
d’accueillir ce genre de pratique.
L’islam met l’accent sur la descendance des êtres humains au point d’exiger que
la femme divorcée est obligée d’attendre au moins trois mois avant de se remarier,
de peur qu’elle ne enceinte de son précédent mariage, auquel cas la période d’attente
efface toute confusion qui pourrait survenir au père de l’enfant.
La période d’attente décrite ci-dessus est ignorée aujourd’hui par presque tous
les systèmes juridiques séculiers. Cette différence illustre le niveau de soins prôné
par l’islam envers l’honneur humain à travers des lois qu’il établit pour assurer sa
protection.
Réfléchir sur toutes ces conditions uniques permet de comprendre les raisons
cachées derrière l’autorisation donnée par l’islam de contracter des mariages mul-
tiples et qui découle de l’examen des diverses circonstances.
L’islam n’est pas seulement une religion pour les forts et les puissants, mais
aussi pour les plus âgés et les faibles.
L’islam offre non seulement des règles qui régissent des conditions communes,
mais il fournit également des solutions adaptées aux dilemmes difficiles.
L’Islam est non seulement la religion de tous les hommes, mais aussi celle qui
protège les droits des femmes.
C’est une religion inimitable qui se soucie tellement de l’honneur et de la digni-
té des êtres humains qu’elle ne permet pas que des femmes et des enfants tombent
dans la misère et le désastre et que la famille soit détruite.

Le Saint Prophète r affranchit et adopte Zayd ibn Harith t


Le jeune Zayd ibn Hâtitha t, qui avait été enlevé par la tribu des Banî Qayn,
fut amené à la foire d’Ukaz afin d’y être vendu.
Finalement, il fut acheté par un certain Hakîm ibn Hizâm pour la somme de
quatre cents dirhams. Ce dernier l’offrit ensuite à sa tante Khadîdja c.
En voyant le jeune garçon pour la première fois, le Saint Prophète r dit :
« Si j’étais le propriétaire de cet esclave, je l’aurais certainement affranchi ! »
Khadîdja c entendant les paroles de son mari lui dit :
94 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Dans ce cas, il est à toi ».


Le Noble Messager r, la miséricorde des mondes, l’affranchit immédiatement.
(Ibn Hishâm, I, 266 ; Ibn Saad, III, 40)

Angoissé par la disparition de son fils, le père de Zayd le cherchait partout.


Après une longue recherche et par le biais d’informations recueillies auprès de pèle-
rins qui étaient sur le chemin du retour, il trouva les traces de son fils à La Mecque,
lieu vers lequel il partit immédiatement, accompagné de son frère. Ayant trouvé le
Saint Prophète r peu de temps après, il l’informa de son intention de reprendre son
fils et de payer la rançon nécessaire s’il le fallait, l’appelant à user de miséricorde et
lui proposer un prix raisonnable.
Mais le Saint Prophète r qui avait autre chose en tête leur demanda :
« Ne pouvons-nous pas trouver une autre solution à ce sujet ? ».
Pensant que la seule façon pour eux de reprendre la garde de Zayd t était de
payer une rançon qui lui permettrait de recouvrer la liberté ils lui répondirent :
« Quelle autre solution y aurait-il ? »
Le Messager de Dieu r leur dit :
« Appelons Zayd et laissons-le libre de décider entre moi et vous. S’il vous choisit,
vous pourrez l’emmener sans rien payer. Mais s’il me préfère vous devrez comprendre
que, par Dieu, je ne peux pas dire à quelqu’un qui désire rester avec moi de partir ! »
Le père et l’oncle de Zayd, confiants que Zayd t allait porter sur eux son choix,
et qu’ils pourraient quitter La Mecque avec lui sans avoir à payer de rançon, et ravis
de la suggestion du Saint Prophète r, le félicitèrent pour sa gentillesse et sa généro-
sité. L’idée qu’il choisirait de rester ne traversa jamais leur esprit.
Mais les paroles de Zayd t prouvèrent qu’ils avaient tort :
« Je jure par Dieu que je ne préfère personne d’autre que vous ! Vous êtes
comme un père et une mère pour moi. Ma préférence serait de rester avec vous. »
Lorsque son père et son oncle commencèrent à afficher leur déception quant à
son choix, Zayd t leur dit :
« J’ai tellement vu de lui des choses extraordinaires qu’il n’est pas possible que
je lui préfère quiconque. Je ne pourrais certes jamais le quitter. »
Motivé par la loyauté de Zayd t, le Saint Prophète r le prit par la main et
l’emmena à la Ka’ba d’où il proclama ceci :
Les Années de Jeunesse 95

« Ô mon peuple ! Soyez témoins que Zayd est maintenant mon fils, qu’il héritera
de moi et que j’hériterai de lui. »41
Zayd t fut donc officiellement adopté par le Saint Prophète r.
L’honneur conféré au jeune Zayd t fut un motif de soulagement et de bonheur
pour son père et son oncle qui retournèrent chez eux le cœur soulagé. (Ibn Hishâm, I,
267; Ibn-i Sa’d, III, 42)

Jabala ibn Hâritha, le frère de Zayd t, raconte une autre version de l’histoire :
« Je me rendis auprès du Messager de Dieu pour lui demander que Zayd t
puisse m’accompagner.
- Il est ici, me répondit-il, s’il veut venir avec toi, je ne l’empêcherai pas.
Mais Zayd t n’accepta pas ma demande, disant :
- Je ne préfèrerai personne d’autre que toi.
Beaucoup plus tard, je compris que mon frère Zayd t avait une plus grande
sagesse que moi. » (At Tirmidhi, Manâqib, 39/3815)
Abû Talib avait des difficultés financières, étant à la tête d’une importante
maisonnée. C’est à cause de cela que le Saint Prophète r vint auprès de son oncle
Abbâs et lui suggéra :
« Comme tu le sais mon oncle, ton frère Abû Talib gère une grande famille et la
sécheresse ainsi que la famine l’ont laissé dans le besoin comme la plupart des gens.
Pourquoi ne pas nous rendre auprès de lui et lui demander de confier à notre garde
deux de ses petits pour le décharger de quelques-unes de ses responsabilités ? »
Abbâs accepta la bienveillante suggestion et ensemble ils se rendirent auprès
d’Abû Talib qui, avoir entendu la proposition, déclara :
« Hormis Aqîl, vous pouvez prendre l’enfant que vous désirez. »
Muhammad r prit finalement Ali t tandis qu’Abbâs t prit son frère Jafar t.
Ali t fut élevé par son généreux gardien jusqu’au début de l’Apostolat prophétique.
(Ibn Hishâm, I, 264)

Les enfants du Saint Prophète r


Le Saint Prophète r a eu en tout six enfants avec Khadîdja c : deux fils, Qasim
et Abdallah, et quatre filles, Zaynab, Ruqayya, Ummu Khultum et Fatima.
41. Après ce jour, Zayd t commença à être nommé « Zayd ibn Muhammad » jusqu’à l’abolition de
l’adoption consécutivement à la révélation des versets 5 et 40 de la sourate al-Ahzab.
96 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Comme la coutume arabe désignait le nom en rapport avec le nom d’un enfant
premier-né de sexe masculin, le Saint Prophète r se vit appeler Abu’l Qasim, du
nom de son fils premier-né.
Qasim ne vécut pas longtemps néanmoins, décédant à l’âge de deux ans. Abdal-
lah, son second fils, naquit au cours de son Apostolat prophétique.
Mais Abdallah, comme son frère avant lui, ne survécut pas et rendit son dernier
souffle très tôt. (Ibn Saad, I, 133).
Âs ibn Wâ’i, un idolâtre notoire de Quraysh, exploitant la richesse du moment,
commença à insulter le Saint Prophète r et à colporter les paroles suivantes :
« C’est un homme stérile incapable d’assurer à un fils une lignée qui porte son
nom. Nous n’avons donc besoin que d’attendre sa mort. Vous serez alors préservés
de lui à tout jamais. »
Cela provoqua la révélation de la sourate al-Kawthar :

óÝƆ ÖŽ ƆźÒŽ ijƆ İ ƈ óéĬŽ ÒIJğƈƆ ÖóĤƈ ģƈ ž āĘƆ óàƆ ijġƆ ĤŽ ÒĞƆ ÓĭƆ ĻĉƆ ĐƆÒÓĬƪ Òƈ
ƈ Ɔ Īƪ Ò
Ƈ Ƈ ğƆ ÑƆ ĬÓü ŽƆ Ɔ žƆ Ɔ Ɔ Ž Ž Ž
« Nous t’avons certes accordé l’Abondance (Kawthar).42 Accomplis la Salât
pour ton Seigneur et sacrifie. Celui qui te hait sera certes sans postérité. » (Coran,
al-Kawthar, 108, 1-3) ; (Ibn Saad, III, 7; Wâhidî, p. 494)

Après le décès précoce de leur fils, Khadîdja c se lamenta ainsi :


« Il me reste du lait en abondance pour mon cher fils. (Je suis débordante de
lait). Si seulement Dieu lui avait donné le temps de pour compléter sa nourriture ! »
« Il la complètera au paradis », répondit le Messager de Dieu r.
« Si j’en étais vraiment sûre, cela soulagerait certainement la douleur liée à sa
perte », dit Khadîdja c.
« Je vais prier Dieu, si tu le souhaites, afin que tu puisses entendre sa voix », dit
le Saint Prophète r.
Mais lui manifestant une fois de plus sa soumission et sa dépendance exem-
plaires, Khadîdja c répondit :
« Pas besoin. J’ai confiance en Dieu et en Son Messager. » (Ibn Majah, Janaiz, 27)
42. Kawthar signifie abondance, quantité conséquente en chaque chose accordée. Son interprétation
inclut la Prophétie, le Coran, l’Islam, la bonté, la béatitude, l’intercession, la prière et les miracles
accordés au Saint prophète r. Les narrations authentiques indiquent qu’il s’agit du nom de la piscine
dont bénéficiera le Messager de Dieu au Paradis, autour de laquelle la communauté musulmane
(l’Oumma) se réunira. (Al Boukhari, Tafsir, 108).
Les Années de Jeunesse 97

Zaynab c l’aînée des filles du Noble Messager r est née alors qu’il était âgé
d’environ trente ans. Ruqayya c naquit après elle. (Diyarbakrî, I, 273-274).
Après la naissance de Ruqayya c vint au monde Umm Khultum c, suivie de
Fatima c, née l’année de la reconstruction de la Ka’ba, au moment où le Messager
de Dieu r atteignit l’âge de trente-cinq ans. ( Ibn Saad, VIII, 19-26).
Le dernier enfant du Noble Prophète r fut Ibrahim, né à Médine, durant la
huitième année de l’hégire. Sa mère se nommait Mâriya.
L’enfant fut soigné par Umm Rafi dont le mari, Abû Rafi, est celui qui délivra la
bonne nouvelle de la naissance d’Ibrahim au Messager de Dieu r qui, tout heureux,
dit à ceux qui était autour de lui :
« Ce soir j’ai eu un petit garçon que je prénommerai Ibrahim, comme mon
ancêtre. » (Muslim, Fadâil, 62)
Ibrahim tomba lui aussi malade à l’âge de dix-sept mois et décéda peu après.
(Voir Asri Çubukçu, DİA, « Ibrahîm », Introduction, XXI, 273-274).

L’arbitrage à la Ka’ba
Une inondation frappa La Mecque et provoqua une destruction partielle de la
Sainte Ka’ba et les clans de La Mecque décidèrent de la reconstruire en commen-
çant par la démolir depuis ses fondations. Par inadvertance, dans le même temps,
on apporta la nouvelle qu’un navire chargé de fer, de planches, de bois et d’autres
matériaux de construction s’était échoué à Shuaiba, à proximité de La Mecque. Sans
perdre de temps, les Mecquois s’y rendirent et achetèrent le matériel nécessaire à la
réparation de la Maison Sacrée.
Bientôt, la reconstruction débuta. Les Mecquois tirèrent au sort pour détermi-
ner les travaux auxquels chaque clan devait s’engager. Ils partagèrent le travail de
démolition et de reconstruction en tirant également au sort. Avant le lancement des
travaux, un homme avisé parmi eux dit :
« Gens de Quraysh ! Ne mélangez pas l’argent dans la reconstruction de la
Maison Sacrée. Ne laissez pas l’argent acquis par des intérêts ou usurpé à d’autres
contre leur volonté être utilisé pour financer la réparation. » (Ibn Hishâm, II, 210 ; Ibn
Kathir, al-Bidâyah, II, 305).

Mais craignant la colère qui pouvait survenir s’ils se précipitaient trop vite et
détruisaient la Ka’ba, les Mecquois restèrent indécis. Parmi les Arabes le respect
pour la Ka’ba était un devoir sacré confirmé depuis la Loi d’Abraham u.
Walid ibn Mughira, un notable de Quraysh, coupa le nœud et demanda :
« Que visez-vous en voulant détruire la Ka’ba : le bien ou le mal ? »
98 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il lui fut répondu : « Le bien, naturellement ».


Walid leur assura : « Mes amis ! Voulez-vous détruire la Ka’ba uniquement
pour le bien de son amélioration ? Car, certes, le Tout-Puissant ne détruira jamais
ceux qui cherchent une quelconque amélioration ». Puis il donna le premier coup de
chantier pour démolir la Maison et tous lui emboîtèrent le pas. (Abdurrazzaq, V, 319).
Ils soulevèrent les murs de la Ka’ba, renforçant chaque rangée de pierres avec
des poutres en bois, suivant l’ordre vers le sommet. La Lumière de l’Être r travailla
également à la reconstruction avec son oncle Abbâs. Quand le moment fut venu de
remettre la Pierre Noire à sa place, tous les clans rivalisèrent entre eux pour avoir
l’honneur exclusif de s’en occuper.
Ce débat se transforma en un différend amer qui à un moment aurait pu même
se transformer en conflit sanglant si bien que le clan d’Abduddâr fît un pacte avec le
clan des Adiyy ibn Kaab pour se battre jusqu’à la mort.
Les deux clans trempèrent leurs mains dans un bol rempli de sang apporté par
le clan Abduddâr comme symbole de leur résolution. Quraysh fut laissé dans le
doute quant au sort de la Pierre Noire pour les trois ou quatre jours qui suivirent.
Abû Umayya, le plus âgé des Mecquois présents, prit finalement la parole en
désignant la porte de Banu Shayba de l’Enceinte Sacrée:
« Mes amis ! Nous voulons ce qui est préférable, pas ce qui est mal. Cessez toute
jalousie ! Cessez toute querelle ! Nous semblons incapables de régler la question
entre nous, désignons comme arbitre la première personne qui passera devant les
portes de l’Enceinte Sacrée et conformons-nous à son verdict quel qu’il soit ! ».
À cet instant, Muhammad r traversa la porte en question. Tous les visages
devinrent radieux, car après tout c’était le Digne de confiance qui approchait.
L’amour et le respect des Mecquois pour Muhammad r avaient grandi de jour
en jour, au point même que pour sacrifier un chameau, ils faisaient appel à lui pour
les bénédictions d’usage. (Abdurrazzaq, V, 319; Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 304).
Dès qu’ils le virent, les hommes de Quraysh s’écrièrent :
« C’est le Digne de confiance. Soyons heureux car il va régler notre différend ! »
Après lui avoir expliqué l’affaire, Muhammad r élut une personne de chaque
clan, puis enleva son manteau, le posa sur le sol et y plaça la Pierre Noire. Puis il dit à
chacun des membres de maintenir un bout du manteau, ce qui leur permit d’emme-
ner conjointement la Pierre Sacrée jusqu’à son emplacement. Puis Muhammad r
plaça la Pierre de ses mains. Ainsi donc, il empêcha qu’une bataille n’éclatât entre
les différents clans. (Ibn Hishâm, I, 209-214; Abdurrazzaq, V, 319).
Les Années de Jeunesse 99

Ces manifestations de sagesse et d’exceptionnelles vertus furent les signes pré-


curseurs d’un Apostolat prophétique qui consista à élever dans un avenir proche
l’Homme Noble au-dessus de tout autre prophète avant lui.
Les gens étaient peu conscients que le jeune Muhammad r, né et élevé à La
Mecque, ait pu devenir un prophète. Beaucoup d’âmes pieuses persévérantes dans
le chemin du tawhid étaient conscientes de la venue du Prophète de l’Heure Ultime,
pressentant que le temps était proche.
Une de ces âmes pieuses fut Quss ibn Saida.

Le discours de Quss ibn Saida


Leader de son clan, Quss ibn Saida était un poète adepte de la religion de
Jésus u.
Son discours pendant la Foire d’Ukaz devant une foule où se trouvait aussi le
Futur Prophète r, évoquant son avènement attendu, est connu pour sa sagesse :
« Ô gens !
Venez, écoutez, instruisez-vous et apprenez !
Quiconque vit est voué à la mort, celui qui meurt périt et tout ce qui doit arriver
arrive. La pluie tombe, l’herbe pousse et les enfants sont appelés à prendre la place de
leurs parents. Puis ils partent ensemble. Les évènements sont incessants ; ils se suivent
les uns les autres.
Méfiez-vous et prêtez l’oreille à mes paroles ! Le ciel est rempli de nouvelles, la
terre de leçons à prendre. La terre est un matelas étiré et le ciel un plafond élevé. Les
étoiles expireront et les mers viendront à se reposer. Quiconque vient ne reste pas et
quiconque part ne revient jamais. Qui sait ? Est-ce qu’ils sont si à l’aise là où ils sont
qu’ils y demeurent ou bien sont-ils retenus ou endormis ?
Je jure qu’il existe une religion plus aimée de Dieu que celle que vous suivez
actuellement.
Et un Prophète de Dieu viendra ; et sa venue est proche. Son ombre plane sur
vos têtes. Bénédiction sur celui qui croit au Prophète et baigne dans la lumière de la
guidance. Malheur à celui qui se rebelle et s’oppose à lui !
Malheur à ceux qui dissipent leur vie dans l’ignorance !
Ô gens !
Méfie-toi de l’insouciance ! Tout est périssable. L’immortalité n’appartient qu’au
Tout-Puissant, qui est Un, sans associés, sans quelqu’un qui Lui ressemble. Il est le
Seul digne d’être adoré. Il n’engendre pas, Il n’est pas non plus engendré.
100 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

De nombreuses leçons attendent d’être prises de ceux qui sont venus pour passer.
Ô Gens d’Iyad ! Où sont vos pères et vos aïeux ! Où sont les gens de ‘Ad et de
Thamud qui bâtirent des châteaux exquis et des demeures en pierre ? Où sont Nemrod
et Pharaon qui, se vautrant dans les richesses mondaines, dirent à leur peuple : « Ne
suis-je pas votre plus grand seigneur ? »
La terre a fini par les moudre tous dans son moulin ! Même leurs os sont main-
tenant pourris là, dispersés. Leurs demeures restent désertées, habitées maintenant
par des chiens. Ne devenez jamais insouciants comme eux ! N’empruntez pas leur
chemin ! Tout est périssable, hormis le Tout-Puissant qui ne l’est pas.
Il y a de nombreux moyens d’emprunter le fleuve de la mort, mais hélas, pas de
moyens d’en sortir ! Toute chose, grande ou petite, émigre. Tout ce qui arrive vous
arrivera aussi. » (Bayhaqî, Kitabu’z-Zuhd, II, 264 ; Ibn Kathir, al-Bidaya, II, 234-241; Haythamî,
IX, 418)

Peu de temps après avoir fait ce beau discours, il rendit l’âme.


Quss ibn Saida ne savait bien sûr que l’avenir qu’il annonçait, le Prophète
Muhammad r, était présent dans la foule et l’avait écouté. Mais toute la tribu de
Quss crut au Messager de Dieu r une fois qu’elle prit conscience de lui.
Il est rapporté que le noble Prophète Muhammad r déclara aux membres de
leur délégation :
« Jamais je ne pourrais oublier le discours prononcé par Quss ibn Saida lors de
la Foire d’Ukaz, lorsque, monté sur un chameau, il a dit : ‘Quiconque vit est voué à la
mort, celui qui meurt périt et tout ce qui doit arriver arrive᾿. »
Le Messager Béni r leur demanda si quelqu’un parmi eux serait capable de
répéter son discours. Ils répondirent que presque tout le monde le serait ce qui ren-
dit la Lumière de l’Être r particulièrement heureux.
Abû Bakr t déclara alors qu’il pouvait répéter de mémoire le fameux discours
auquel il avait assisté et confirma son aveu en déclamant le discours de Quss ibn
Saida dans son intégralité.
Un homme de la tribu se leva et après Abû Bakr t récita un poème de Quss
ibn Saida, informant clairement qu’un grand prophète émergera des Hachémites.
(Ibn Kathir, al-Bidâyah, II, 234-241)

À propos de Quss ibn Saida, le Saint Prophète r a dit :


« Puisse Dieu avoir pitié de Quss ibn Saida. Il sera, dans l’au-delà, ressuscité
comme une nation distincte. » (Ibn Kathir, al-Bidâyah, II, 239)
Les Années de Jeunesse 101

La retraite du Prophète r dans la grotte de Hira


L’avènement de l’Apostolat prophétique approchait et le Messager de Dieu r se
plongeait souvent dans les profondeurs de la contemplation, dans l’isolement, loin
du regard des gens.
Il quittait parfois son domicile et laissait La Mecque loin derrière lui pour cher-
cher un havre de paix et de silence.
Plus d’une fois sur le chemin il entendit les pierres et les arbres le saluer de la
façon suivante : « Que la paix soit sur toi, ô Messager de Dieu. »
Avec l’espoir de manifester la provenance de ces voix, il regardait autour de lui,
mais n’apercevait que des arbres et des pierres. (Ibn Saad, I, 157).
Plus tard, il r dit à ce sujet :
« Je me souviens qu’à La Mecque une certaine pierre avait coutume de me saluer
avant l’avènement de mon Apostolat. Jusqu’à aujourd’hui, je suis capable d’identifier
l’endroit où cela s’est produit. » (Muslim, Fadâil, 2).
Ces paroles d’Ali t vinrent confirmer les précédentes :
« Le Messager de Dieu r et moi sommes allés une fois en un certain lieu situé à
La Mecque durant les années où nous y étions. Chaque fois que nous passions près
d’un arbre ou d’un rocher, je pouvais les entendre le saluer ainsi : As-salamu alayka
ya Rasûlullah. » (At Tirmidhi, Manâqib, 6/3626).
Muhammad r avait coutume de se retirer dans la grotte de Hira43 pendant le
mois de Ramadan, en prenant encore plus de soin à nourrir les pauvres et les défa-
vorisés, et faire des circumambulations autour de la Ka’ba avant de rentrer chez lui
était également devenu une routine. (Ibn Hishâm, I, 253-254).
Le Prophète à venir r avait toujours méprisé le fait que sa tribu adore des idoles
et se démarqua perpétuellement de leur pratique. Son adoration dans l’isolement

43. Hira, une grotte située sur la montagne appelée Jabal al-Nur, ou Montagne de Lumière, où le Saint
Prophète r reçut sa première révélation. Située au nord de La Mecque à une distance d’environ cinq
kilomètres, la grotte de Hira tient une place importante dans la vie du Noble Prophète r. Cette grotte,
située à quelques mètres en dessous du sommet de la montagne, est en fait constituée d’un tunnel-
passage coincé au milieu de dalles de pierre naturelle empilées les unes sur les autres, la Ka’ba se
trouve en plein champ de vision depuis l’entrée de la grotte. Aussi grande que puisse être la personne,
la largeur de la grotte permet à peine la position couchée. Surplombant les régions environnantes, y
compris la Ka’ba, elle est un refuge idéal et propice à la contemplation. Avant le Saint Prophète r,
les Hanifs de La Mecque saisirent l’opportunité qu’offrit la grotte en matière de contemplation. L’un
d’entre eux était Abd al-Muttalib, le grand-père du Saint Prophète r qui, ayant une foi ferme en Dieu
et en l’au-delà en tant que demeure de la récompense et du châtiment, se réfugiait à l’intérieur de la
grotte et s’abîmait dans des actes d’adoration. (Fuat Günel, DİA, “Hira”, Introd., XVIII, 121-122)
102 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

consistait pour lui à contempler la création des cieux et de la terre, comme son
ancêtre Abraham u et la Ka’ba depuis la grotte surplombante. (Ibid, I, 61; XXIV, 128).
Muhammad r avait l’habitude de prendre avec lui un peu de provisions,
retournant auprès de Khadîdja c quand il en manquait, et retournait aussitôt à la
grotte. (Muslim, Iman, 252).
À l’occasion, il prenait aussi Khadîdja c avec lui. (Ibn Hishâm, I, 254).
Méditant reclus dans la grotte de Hira, la Lumière de l’Être r voyait fréquem-
ment des lumières et entendait des voix, ce qui l’avait conduit à craindre que ces
expériences pouvaient être liées à des prémonitions divinatoires ou à de la sorcelle-
rie. Inquiet, il partagea son anxiété à Khadîdja c:
« J’ai peur, Khadîdja, d’être un devin, alors que, par le Tout-Puissant, il n’y a
rien que je déteste de plus que la divination et les idoles ! »
Mais Khadîdja c n’avait pour lui que des paroles consolatrices :
« Ne dis pas çà, cousin.44 Dieu ne fera jamais de toi un devin. » (Ibn Saad, I, 195)
Cette période d’isolement vécue avant la mission est considérée comme un
stage préparatoire pour le Saint Prophète r, à l’instar d’une graine qui pousse et
qui germe du sol. La nature exacte de cette période préliminaire de préparation
restera cependant et à jamais un secret pour nous. Mais ce fut là précisément que les
graines de la foi furent déposées, que le feu de la béatitude éternelle s’enflamma et
que débuta la révélation du Coran, guidance pour toute l’humanité.
En cela, la retraite du Saint Prophète r dans la grotte a été incitée par l’égare-
ment général de son peuple et par sa tristesse indicible devant les injustices com-
mises par les Mecquois corrompus.
Pourtant, en réalité, la retraite signifiait tout simplement l’acte de préparer le
cœur du Noble Messager r à la purification immaculée, après quoi le Saint Coran
pouvait être parfaitement communiqué à la perception de l’humanité tout entière.
C’était comme une étincelle spirituelle agitée par la base d’une haute tension
électrique, un secret intime entre le Tout-Puissant et Son Bien-aimé, à l’intérieur
d’une grotte isolée et à distance des regards indiscrets.
Tout comme le fer brut devient de l’acier grâce à une propension intérieure, le
temps à Hira était l’antichambre nécessaire pour que le Saint Prophète r devienne
le destinataire de la Révélation divine et assume un fardeau trop lourd à transporter
pour un être humain ordinaire.
44. Des termes familiers, tels que cousin ou neveu, sont couramment utilisés par les Arabes quand ils
s’adressent entre eux. Ils n’impliquent pas nécessairement une relation de sang.
Les Années de Jeunesse 103

Il est même inconcevable d’imaginer une conscience qui n’éclaterait pas en


morceaux si elle tentait de saisir ce secret ou un langage humain qui pourrait expri-
mer parfaitement ses grandes lignes.
Puisque la retraite et la solitude du Saint Prophète r à la grotte de Hira et
d’autres itikaf qu’il fit pendant les dernières années de son existence signifia le fait
qu’indépendamment de la grandeur d’une œuvre effectuée, la perfection spirituelle
sera à jamais hors de portée, hormis la retraite solitaire dans le but d’appeler le moi
en considération et de contempler le flux de la Puissance divine au sein de l’univers.
Ceci est une exigence minimale pour tous les musulmans.
Quant à ceux qui s’apprêtent à devenir des guides pour le reste, ils doivent
consacrer même plus de temps à la contemplation et à la réflexion sur l’ego (ou le
moi profond).
Le Saint Coran initie du premier au dernier verset à l’art de la contemplation et
instille la soumission au Seigneur au centre de toute pensée.
Alors seulement la foi devient une identité intrinsèque, incitant à rechercher la
satisfaction du Tout-Puissant en tout temps et en tous lieux.
Et grâce aux manifestations de la Puissance et de la Splendeur divines dans le
cœur, le serviteur gagne progressivement et avec sagesse une plus grande proximité
avec le Seigneur, atteignant ainsi le but suprême.
Parmi les plus essentiels aspects pour un croyant on trouve l’amour de Dieu (la
muhabettullah).45
Après la foi, le plus important catalyseur pour gagner l’Amour divin consiste à
contempler constamment Ses Bénédictions, Sa grâce, à évoquer Sa majesté, Sa puis-
sance et sans cesse à se rappeler de Lui en L’invoquant avec son cœur et sa langue.46
45. Durant ses prières le Saint Prophète r implorait ainsi l’amour du Tout-Puissant :
ğƆ ×èĵ ĭƈ ĕĥƈ ×ĺĴñƈ Ĥƪ ÒģƆ ĩƆ đƆ ĤŽ ÒIJƆ ğƆ ×ƫ éƈ ƇĺīŽ ĨƆ Õƪ èƇ IJƆ ğƆ ×èğĤƆÉøÒĵĬƈ Òƈ ħıĥĤÒ
ƪ Ƈ Ƈ ž ƆƇ ƪƇ Ɔ Ƈ ŽƆ ž ƪƇž Ɔ
îƈ ƈòÓ×ĤŽ ÒÅÓƈ ĩƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩƈ IJĵ ƈ
Ɔ ĥİŽ ƆÒIJĵ
ƈ ƈ ƈ
Ɔ ùęŽ ĬƆ īŽ Ĩĵƪ ĤƆ ÒÕƪ èƆ ƆÒğƆ ×ƪ è
Ƈ ģŽ đƆ äÒ
Ž ħƪ ıƇ ĥƪ ĤƆÒ
Ɔ
« Ô Dieu ! Je Te demande Ton amour, l’amour de ceux que Tu aimes et les œuvres qui mènent à Ton
amour ! Ô Dieu ! Fais que Ton amour me soit plus cher que moi-même, ma famille, mes biens et même
l’eau froide ! » (Tirmidhi Daawat, 72)
46. Interprétant le verset coranique :
ÒóĻáƈ ĠÒóĠðƈ ųÒÒIJóĠðÒÒijĭĨÆīĺñƈ ĤÒÓıĺƆÈÓĺ
ƃ Ɔ ƃ Ž ƆƩ Ƈ Ƈ Ž Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ ƫ Ɔ
« Ô vous qui croyez ! Evoquez Allah d’une façon abondante » (al-Azhâb, 33 : 41)
Ibn Abbâs t a déclaré : « Pour chaque acte obligatoire que Dieu a décrété à l’intention de Ses
serviteurs, Il a imposé une limite, exemptant en même temps ceux qui ont des excuses légitimes.
De cela, cependant, Son évocation (dhikr) est exclue et pour laquelle Dieu n’a pas désigné de limite
spécifiée. Il n’accepte pas non plus les excuses de ceux qui abandonnent sciemment Son évocation,
en dehors de ceux qui ont perdu leur santé mentale. Il a ordonné à tout un chacun d’être dans un état
constant de souvenir. » (Tabarî, XXII, 22; Qurtubî, XIV, 197)
104 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Pour se rendre compte de ces états, au sens propre du terme, il faut savoir que
ces aspects ne peuvent être réalisés qu’en protégeant le cœur des fastes et des préoc-
cupations de ce monde et en se retirant dans l’isolement.
On doit préciser ici que la khalwat, ou le fait de s’isoler, n’est pas synonyme
de fuite et de prise de refuge permanente dans des grottes, des montagnes ou des
habitations isolées.
Un tel mouvement irait à l’encontre de la pratique du Saint Prophète r et de
ses Compagnons y.
Il suffit de se rappeler de ces paroles du Saint Prophète r :
« Un musulman qui vit dans la communauté et supporte les tourments qui
l’accompagnent est de plus grande vertu que celui qui s’éloigne d’elle et de sa détresse. »
(At Tirmidhi, Qiyamat, 55).

Les nombreuses activités du Noble Prophète r, de sa fonction de berger à sa


part active dans les batailles de Fijar et le cercle de Hilf’ul-Fudul, ses efforts dans le
monde des affaires et son assistance dans la reconstruction de la Ka’ba témoignent
de sa présence vivante dans la société avant son avènement en tant que prophète.
En partie présent aux activités vertueuses de sa société, le Saint Prophète r
faisait en sorte de rester loin de ses vices, sans jamais croiser les chemins qu’elle
empruntait.
L’essence du refuge dans l’isolement, c’est d’améliorer sa condition.
Pour être guéri, le remède doit être pris à temps et en quantité juste. Pris de
manière excessive, il est sûr de procurer plus de mal que de bien. (Bûtî, p. 79-82).

Aperçu de l’enfance et de la jeunesse du Saint Prophète r


Dieu a mené Son bien-aimé à la réalité de l’être en le filtrant à travers la plus
noble et la plus pure des lignées et en commençant par la première page du livre de
l’humanité. Conférant à cette lignée une prééminence au-dessus des autres à bien
des égards, le Tout-Puissant a fait de chaque ancêtre du Saint Prophète r une per-
sonne honorée et respectée en son temps, comme l’indique l’exquis couplet suivant :
Une rose est une rose dès sa base,
Seule une lignée de roses pouvait porter en avant un prophète …
Chaque Prophète depuis Adam u, le premier homme et prophète u, a fait
le serment de croire au dernier Messager r et de divulguer les nouvelles concernant
sa venue, nouvelle renforcée par de nombreux évènements faisant allusion à l’avè-
nement attendu.
Les Années de Jeunesse 105

Dieu a ainsi présenté à l’humanité Son Prophète Bien-aimé r, avec tous ses
signes, facilitant de la sorte le chemin pour Ses serviteurs bien-pensants qui eux-
mêmes verront leur foi s’affirmer une fois le Prophète r apparu.
En le laissant orphelin sans parents, le Tout-Puissant prit en charge la formation
exclusive de l’âme gracieuse, Il lui inculqua le meilleur comportement, lui donna le
goût amer de la plus grande vulnérabilité et impuissance que l’on peut supporter.
Il lui permit d’atteindre le sommet de la miséricorde, de la compassion et de
l’altruisme à l’égard de toutes les personnes qui lui feraient désormais confiance dans
un avenir proche.
Protégeant Son bien-aimé de la répugnance causée par l’Âge de l’Ignorance, Il
n’autorisa pas que la moindre tache de vice abimât la feuille blanche que fut sa vie,
assurant ainsi la manifestation de l’apogée de la vertu dans sa conduite.
Les gens le connaissaient pour ses vertus d’honnêteté, de fiabilité, de sincérité,
de générosité, de noblesse et de loyauté, ainsi que pour ses caractéristiques prédo-
minantes telles que l’intelligence et la prudence, plaçant leur confiance en lui dans
toutes leurs affaires.
Le Tout-Puissant combina en lui toutes les belles choses et les plus exemplaires
attributs, réalités admises même par ses ennemis, eux qui le surnommèrent al-Amin,
le Digne de confiance, bien avant le temps de l’Apostolat prophétique.
L’arbitrage à la Ka’ba du Saint Prophète r témoigne de sa position inimitable
aux yeux des notables mecquois dont l’esprit n’avait même pas été traversé par le fait
qu’il aurait pu y avoir une quelconque contre-vérité dans ses paroles ou bien que sa
fibre morale puisse nourrir le doute.
Ils ne doutèrent jamais du niveau sublime de sa sincérité quand son aide était
sollicitée et que des choses dépendaient de lui.
Sage de caractère, le Tout-Puissant a formé le Saint Prophète r de la plus ex-
cellente manière et a assuré qu’il allait vivre en conséquence, puisqu’il allait devoir
constituer le meilleur modèle pour le reste de l’humanité, dans le but de l’orienter sur
le chemin de la guidance.
En substance, l’homme est attiré par les figures de caractère exceptionnel et non
par des individus qui possèdent des biens terrestres.
Cependant, aussi dignes d’éloges que puissent être ces génies, les gens ne suivent
que ceux qui montrent une disposition exemplaire.
Les Années de Jeunesse 107

La Période Mecquoise De
La Prophétie

DEUXIÈME PARTIE
109

LA PÉRIODE MECQUOISE DE LA PROPHÉTIE

Le début de la Révélation divine : Les rêves véridiques


Après une jeunesse intègre et une perfection morale qui se manifestèrent à
travers une vie de famille irréprochable, le Noble Prophète r, la cause de toute la
création, devint officiellement prophète r à l’âge de quarante ans.
Six mois avant sa quarantième année, la Divine Majesté inaugura à La Mecque
une école sacrée à son intention, à la grotte de Hira. Ces séances édifiantes et instruc-
tives, conduites d’une manière qui demeure éternellement un secret entre lui et son
Seigneur, virent le Saint Prophète r recevoir une formation divine, sans aucun livre
ni stylo, à la fin de laquelle il devint prêt à recevoir la Révélation divine.
Le futur Prophète r subit pendant la première partie des six premiers mois de
préparation des expériences dans une forme qui sera plus tard connue sous le nom
de « rêves véridiques » (ar-Ruyâ-us’sâdiqah), où les choses viendraient à se dévelop-
per de la manière dont le Saint Prophète les avaient déjà vues dans ses rêves.
En relation avec ceci, Aïcha c raconte :
« La révélation transmise au Messager de Dieu r commença sous forme de
rêves véridiques durant son sommeil ; des rêves lucides qui s’avérèrent vrais aussi
clairement que la lumière du matin. » (Al Boukhari, Bad’ul-Wahy, 3).
Étant donné que tout Apostolat prophétique est une responsabilité d’une
immense ampleur l’Ange Gabriel u lui apparut d’abord seul dans ses rêves afin de
faciliter le processus de préparation aux difficultés qu’il devra nécessairement ren-
contrer et d’intégrer l’amour de la mission dans son cœur.
Selon un récit d’Alqama ibn Qays g, tout ce qui est transmis aux prophètes,
en conseils, commandements ou interdictions, est toujours au préalable révélé dans
des rêves et divulgués plus tard sous forme de révélation. (Ibn Kathir, al-Bidâya, III, 55).
Les rêves sont donc un des moyens par lesquels la révélation est transmise aux
prophètes L comme l’illustre le verset coranique suivant :

ªĴóÜÒðÓĨóčĬÓĘğéÖðƆÈĹĬƈ ƆÈĦÓƈ ĭĩĤÒĹĘĴ


ƈ òƆÈĹžĬƈ Ìƈ ĹĭƆ ÖÓĺ
ƆƆ Ɔ Ɔ ŽƇ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ƆŽ ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ƈ Ɔ
« …Ô mon fils, je me vois en songe en train de t’immoler. Vois donc ce que
tu en penses ?» (as-Saffat, 37 : 102).
110 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il convient de garder à l’esprit que même si les yeux des prophètes peuvent
sommeiller (littéralement dormir), leur cœur, en revanche, ne dort pas. (Al Boukhari,
Manâqib, 24).

Par conséquent, nulle barrière ne peut les empêcher de recevoir des révélations,
même dans leurs rêves.
À propos du rêve véridique le Saint Prophète r a dit à la fin de sa vie :
« Le rêve véridique est un quarante-sixième de la prophétie. » (Al Boukhari, Tâbir,
26; Muslim, Ru’yâ, 6).

Il est intéressant de noter que cette période de six mois correspond exactement
à un quarante-sixième de ses vingt-trois années de mission prophétique.
111

LES TROIS PREMIÈRES ANNÉES DE LA


PROPHÉTIE : L’APPEL EN SECRET

La première révélation et l’intervalle

Après avoir achevé sa préparation de six mois nécessaire pour le perfectionne-


ment de son développement spirituel, de sorte qu’il était maintenant prêt à recevoir
la Révélation divine, Muhammad r était alors âgé de quarante ans.

C’était le septième jour du mois sacré de Ramadan. (Ibn Saad, I, 194).

Le Noble Prophète r était dans la grotte de Hira, comme d’habitude, lorsque


Gabriel u lui apparut soudainement et lui dit :

- Lis !

- Je ne sais pas lire, répondit notre bien-aimé Prophète r.

Alors l’Ange u le saisit et le serra contre lui de sorte que le Saint Prophète r
ne pouvait presque plus respirer.

- Lis ! Gabriel u lui ordonna une fois de plus.

Mais la Lumière de l’Être r réagit de la même manière :

- Je ne sais pas lire !

L’Ange u le saisit pour la deuxième fois, comprimant le Saint Prophète r


jusqu’à ce qu’il n’ait plus la force de tenir sur ses pieds et répétant le même ordre
une fois de plus :

- Lis !

- Je ne sais pas lire ! répondit le Saint Prophète r.

C’était comme s’il exhortait l’Ange u à lui révéler ce qu’il voulait exactement
qu’il lise.

Gabriel u pressa alors énergiquement la Lumière de l’Être pour la troisième


fois, le relâcha, puis commença peu après à lui énoncer la toute première révélation :
112 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ÈŽ óĜŽ Òƈ ěƅ ĥƆ Đ ƈ Ɔ ùĬŽ ŸÒ Ɔ ñƈ Ĥƪ ÒğƈƆ Öž ò ƈ ÖÈŽ óĜŽ Òƈ


Ɔ Ɔ īŽ ĨĪÓ Ɔ ƈ Ž ěƆ ĥƆ ì
Ɔ ěƆ ĥƆ ìĸ Ɔ ħøÓƈ
Ž Ɔ
ħĥƆ đŽ ĺƆ ħĤƆ ÓĨ ƈ ħĥĐħƈ ĥĝĤÓƈÖħĥĐĸñƈ Ĥƪ ÒĦƇ óĠŽ ƆŶÒ
ĪÓùĬŸÒ Ž ğƆ Öƫ òƆ IJƆ
Ž Ž Ɔ Ɔ ƆŽ Ž ƆƪƆ ƆƆŽ ƆƪƆ Ɔ
« Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé, qui a créé l’homme d’une adhé-
rence. Lis ! Ton Seigneur est le Très Noble, qui a enseigné par la plume [le
calame], a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. » (al-Alaq, 96 : 1-5).
Avec ce commandement divin, la révélation du Saint Coran, la plus grande
bienveillance du Seigneur I à l’adresse de l’ensemble de l’humanité, commença
son long parcours révélationnel à travers la personne de Muhammad, le Messager
de Dieu r.
Ce fut donc ces versets du Coran Lumineux que le bien-aimé Prophète r reçut
en premier par les portes du ciel, comme une source de grâce et de vigueur.
Gabriel u quitta le Saint Prophète r peu après et ce dernier retourna chez lui
auprès de Khadîdja c, tout tremblant en raison de la peur insoutenable du moment :
- Couvre-moi, Khadîdja, couvre-moi ! disait-il.
Après quelques instants, le bien-aimé Messager r raconta l’expérience qu’il
avait vécue à son épouse, notre mère Khadîdja c, la noble femme avec qui il vivait
une vie de famille intègre, modèle à imiter pour le reste de l’humanité.
Inquiet, il r lui demanda :
- Qui va me croire maintenant, Khadîdja ?
Mais la noble femme c rassura son compagnon de vie :
- N’aies pas peur ! Dieu ne te mettra jamais à mal. Dieu ne te fera que du bien
car tu aides tes proches, tu soutiens ta famille, tu gagnes honnêtement ta vie, tu
maintiens les autres dans la droiture, tu donnes asile aux orphelins, tu dis la vérité,
tu ne t’appropries pas frauduleusement les dépôts, tu secours ceux qui n’ont rien,
tu fais du bien aux pauvres et tu traites tout le monde avec courtoisie. Je te crois et
suis la première à faire ainsi, même si personne d’autre ne le fait. Laisse-moi être la
première personne que tu invites sur le chemin que tu appelles !
Ces paroles gracieuses firent de Khadîdja c la première personne qui témoigna
de la véracité de son noble époux et qui l’aida dans sa mission ardue. En d’autres
termes, Khadîdja c voulait dire à son époux que du bien ne peut sortir que le bien
et que la bienveillance ne peut susciter que la bienveillance. À juste titre, elle c
s’attendait au déploiement d’un brillant avenir inauguré depuis un passé immaculé
plein de droiture morale, répondant en écho aux paroles du Coran qui seront bien-
tôt révélées :
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 113

ƈ ÒŽ ƪźÒƈ ĪÓ
ĪƇ ÓùƆ èŽ ź ƈ ùèź ƈ
Ɔ Ž ÒŽ ÅÒƇ õƆ ä
Ɔ ģŽ İƆ
« Y a-t-il d’autre récompense pour le bien, que le bien ? » (ar-Rahmân, 55 : 60).
Khadîdja c emmena ensuite le Saint Prophète r auprès de son cousin (pater-
nel) Waraqa ibn Nawfal, qui était l’une des personnes exceptionnellement rares qui
n’avaient jamais adoré d’idoles durant l’Âge de l’Ignorance.
Grâce à sa maîtrise de l’hébreu, Waraqa connaissait bien la Bible.
Maintenant, qu’il était devenu âgé, il n’était plus capable de voir.
Khadîdja c dit en arrivant :
- Écoute, cousin, ce que va te dire ton neveu.
Alors Waraqa curieux demanda :
- De quoi s’agit-il mon neveu ?
Et le Saint Prophète r commença à raconter ce qu’il avait vu et vécu.
Reconnaissant la grande réalité de toutes les explications rapportées, le visage
de Waraqa s’illumina d’un sourire radieux avant d’être absorbé dans une brève mais
profonde méditation.
- Ce que tu as vu n’était rien d’autre que le Grand Namus (Gabriel u), que le
Tout-Puissant a envoyé autrefois à Moïse u. Plût à Dieu que je fusse jeune en ce
moment ! Comme je voudrais être encore vivant à l’époque où tes concitoyens te
banniront !
- Ils m’exileront donc ? s’écria le Saint Prophète r.
- Oui, reprit Waraqa, jamais homme n’a apporté ce que tu apportes sans être
persécuté ! Si je vis encore en ce jour-là, je t’aiderai de toutes mes forces. »
Mais après quelques jours, Waraqa mourut, et la Révélation Divine s’arrêta
également pendant un certain temps (fatrah). (Al Boukhari, Bad’ul-Wahy, 1; Anbiya, 21;
Tafsir, 96 ; Muslim, Iman, 252).

Dans les versets révélés par la suite, Dieu s’adressera ainsi à Son Prophète r :

ƈ Ɔ ƈ èIJ Ɔ ƈ
ÔÓ Ɔ ƈòïŽ ÜƆ ÛƆ ĭŽ ĠÓ
Ƈ ÝƆ ġĤŽ ÒÓĨĸ Ƈ ĨÓ
Ɔ ĬƆ ƈóĨŽ ÈīŽ ĨÓ
ž ƃ ò Ƈ ğƆ ĻŽ ĤƆ Ìƈ ÇĭƆ ĻŽ èƆ IJŽ ÈğƆ Ĥñſ ĠƆ IJƆ
Ó ĬƆ îÓƈ ×Đƈ īĨ
ƈ ÅÓýĬīĨįƈƈ Öĸïƈ ıĬÒ ƈ ĪƇ ÓĩĺŸÒ
Ɔ Ž Ƈ Ɔƪ Ž Ɔ Ž ƪ òijƃ ƇĬĮÓƇ ĭƆ ĥŽ đƆ ä
Ɔ īŽ ġĤƆ IJ Ɔ Ɔ ƈ Ž źƆ IJƆ
ƅ ĝƈ ÝƆ ùĨĆÒ ƅ ƈ ƈ
ħĻ Ž Ƈ óƆ ĀĵĤƆ Ìƈ ĸïıŽ ÝƆ ĤƆ ğƆ Ĭƈƪ ÌIJƆ
114 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Et c’est ainsi que Nous t’avons révélé un esprit [le Coran] provenant de
Notre ordre. Tu n’avais aucune connaissance du Livre ni de la foi ; mais Nous en
avons fait une lumière par laquelle Nous guidons qui Nous voulons parmi Nos
serviteurs. Et en vérité tu guides vers un chemin droit. » (Achoura, 42 : 52).

Įƈ ïƈ đŽ Öī ƈ Ļƈ×ĭĤÒIJæij
Ɔ ž ƪ Ɔ ƅ ƇĬĵĤƆ Ìƈ ÓĭƆ ĻŽ èƆ IJŽ ƆÈÓĩƆ Ġ
Ɔ ĨīĻƈ Ɔ ğƆ ĻŽ ĤƆ Ìƈ ÓĭƆ ĻŽ èƆ IJŽ ƆÈÓĬƈƪ Ì
« Nous t’avons fait une révélation comme Nous fîmes à Noé et aux prophètes
après lui… » (an-Nisa, 4 : 163).
Concernant le fait que le tout premier mot révélé au Messager de Dieu r ait été
« Lis », les hommes sages de cœur ont fait l’interprétation suivante :
« Lis ! Lis tout ! Lis le Livre de Dieu ! Lis Ses signes ! Lis le Livre qui est l’uni-
vers ! Lis en vue d’atteindre la guidance et de t’éloigner de la déviance ! Lis pour
compléter ta foi ! Lis au nom de Dieu ! Lis au nom de ton Seigneur qui t’a créé ! Lis
au nom de Celui qui, même s’Il a créé l’homme d’un caillot de sang, Il lui donne
encore l’occasion de lire, de comprendre afin de devenir éclairé et mettre en pratique
ce qui a été compris ! Lis au nom de Dieu qui a béni l’homme en lui donnant la capa-
cité de lire, ce qui est la grande grâce accordée parmi toutes ! Lis afin d’apprendre !
Lis au nom de Dieu qui a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas… »
S’étant lui-même classifié au cours des étapes spirituelles qui le firent progres-
ser, Mawlana Rumî ç utilisa le terme cru pour désigner le temps qu’il passa à lire des
ouvrages à contenu exotérique, cuit pour désigner la phase de lecture des mystères
de l’univers et brûlé pour désigner la phase de lecture des mystères divins, ce qui
l’avait quasiment réduit en cendres.
Le commandement « Lis », véhiculé par le verset (ayat), est d’une grande
importance qui va de pair avec la condition que cette lecture soit entreprise au nom
de Dieu.
Elle montre en outre la manière dont cette lecture doit être entreprise.
La « lecture » n’est pas tant une activité extérieure qu’un processus de raffinage
et de purification spirituelle du cœur au point de devenir réceptif au Livre et à la
Sagesse.
La capacité de lire avec le cœur, qui est le point focal des manifestations, est par
conséquent suggérée par le commandement. Plus clairement, cela exige que l’uni-
vers soit perçu comme un livre, les pages vers lesquelles le cœur se tourne pour lire
les sagesses et les mystères divins ; l’essentiel de tout cela étant que les êtres humains
soient appelés à lire, à comprendre et à vivre le Saint Coran.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 115

On peut aussi conclure de la première révélation qu’on doit commencer toute


activité noble au nom du Tout-Puissant.
Les êtres humains, créés à partir d’un caillot de sang et rendus sous la plus belle
forme, ne doivent jamais oublier leur vulnérabilité et leur insignifiance devant la
Puissance divine :

ħĥƆ đŽ ĺƆ ħĤƆ ÓĨ ƈ ħĥĐħƈ ĥĝĤÓƈÖħĥĐĸñƈ Ĥƪ Ò


ĪÓùĬŸÒ
Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆƪƆ ƆƆŽ ƆƪƆ
« … qui a enseigné par la plume [le calame], a enseigné à l’homme ce qu’il ne
savait pas… » (al-Alaq, 96 : 4-5).
Ces versets informent les humains de l’importance de la connaissance et qui,
dans le même temps, leur rappellent le fait que ce qui est appris l’est à partir de ce
qu’a enseigné le Tout-Puissant, ce qui est en soi une extraordinaire bénédiction.
L’homme doit toujours être conscient de la grandeur de son Seigneur et résister
à l’envie de devenir ingrat.
La Révélation glissa peu à peu vers un profond silence. Ce fut, dans un sens,
pour préparer le Saint Prophète r à recevoir les révélations à venir. Recevoir la
Révélation divine fut une telle entreprise que même la concevoir ne fut certainement
pas chose facile, les paroles de Tout-Puissant soulignant fortement ce fait :

ƃŻĻĝƀ àƆ ƃźijŽ ĜƆ ğƆ ĻŽ ĥƆ ĐĹ ƀ ƈ


Ɔ ĝĥŽ ƇĭøÓ
Ɔ Ĭƪ Ò
« Nous allons te révéler des paroles lourdes (très importantes). » (al-Muzzamil,
73 : 5).

Le Saint Prophète r, après la première phase des rêves véridiques, fut accablé
d’anxiété lorsque l’Ange de la Révélation u lui fit soudainement face. Il faut dire
que les paroles réconfortantes de Khadîdja c et la confirmation de Waraqa firent
que son cœur restât à l’aise. À présent, enthousiaste, il désirait ardemment que la
Révélation reprenne, faisant même preuve d’impatience à cet égard.
Maintes et maintes fois, il se rendit au Mont Hira où il reçut la Révélation pour
la première fois, et attendait dans l’espoir qu’elle vienne encore une fois.
Son plus grand soutien durant cette interruption fut sans conteste l’honorable
Khadîdja c, dotée d’une profondeur d’esprit, d’une élégance et d’une grâce que le
Noble Prophète r n’était pas prêt d’oublier.
Après la mort de Khadîdja c, à chaque fois qu’il sacrifiait des animaux pro-
venant de son cheptel, il rendait hommage à sa défunte épouse en envoyant à ses
proches une part de la viande obtenue.
116 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Aux yeux du Messager de Dieu r, Khadîdja c demeura un souvenir cher et


inoubliable.
La vie du Saint Prophète r fut remplie de manifestations incroyablement admi-
rables, jamais vues par les prophètes qui l’ont précédé. Dieu le présenta comme Son
« Bien-aimé ».
Encore une fois, parmi la totalité des prophètes, lui seul bénéficia du don de
l’Ascension, le Miraj.
À cette occasion, la prééminence du Noble Messager r fut confirmée par le fait
qu’il ait dirigea la prière devant tous les prophètes à la Mosquée d’al-Aqsa.
Quant au secret de Moïse u ĵĭĺó ƈ Ü
Ɔ īŽ ĤƆ (len terâni) : Tu ne me verras pas ! al-Araf,
47

7 : 143). Il lui apparut sous la forme de ĵĬîŽ ƆÒIJƆÒīƈ ĻøijĜƆ ÔÓĜƆ « Qaba qawsayni aw adna ».48
Ž ŽƆ Ž Ɔ
La prière (as-salât), moment d’union avec la Réalité, est présentée à tous les
croyants à venir comme une reconstitution de l’Ascension.
Ordonné, au départ, pour être effectué cinquante fois par jour par l’Oumma, le
nombre de prières fut finalement réduit à cinq après des appels répétés du Messager
de Dieu r.
47. Le secret de « len terâni » se résume ainsi : Moïse u avait été préparé pour s’entretenir avec Dieu. Il
lui fut commandé de jeûner trente jours, période qui plus tard fut prolongée à quarante jours. Cette
période fut une phase préparatoire de l’entretien avec Dieu et de nettoyage de ces désirs charnels.
Moïse u parla avec Dieu non par l’intermédiaire de moyens matériels, comme la langue, mais à
travers l’éternel attribut divin qu’est le «Kalam», la Parole. Personne n’entendit ou ne ressentit ce
dialogue pour ne pas égaliser l’Ange Gabriel u ou les soixante-dix témoins qui étaient venus avec
Moïse u. Mais Moïse u s’évanouit sous l’influence de cette manifestation divine. Il devint ainsi
ignorant comme s’il était en ce monde ou dans la Vie future, se sentant hors de l’espace et du temps.
Noyé dans l’amour et dans l’extase, une passion forte s’éveilla en lui afin de percevoir la Vérité finale :
al-Haqq.
La réponse divine vint : « len terâni » («Tu ne me verras pas!»).
Pendant que Moïse u dans cet état semi-conscient, persévéra inconsciemment dans ses exigences,
Dieu lui indiqua la direction de la montagne et déclara que si la montagne pouvait supporter la
manifestation divine, alors lui aussi pourrait la supporter.
Le récit dit ensuite qu’une petite lumière divine venant des voiles infinis brilla sur la montagne qui
se brisa en morceaux.
Moïse u s’évanouit en raison de ce terrifiant évènement.
Il loua Dieu en se réveillant et se repentit d’avoir voulu essayer de franchir ses limites.
48. Sourate An Najm (53) verset 9. Le verset dit :
ĵĬƆ îŽ ƆÈIJŽ ƆÈīƈ ĻøƆ ijŽ ĜƆ ÔÓ
Ɔ ĜƆ ĪÓ
Ɔ ġƆ ĘƆ ð ĵĤƪ ïƆ ÝƆ ĘƆ ÓĬƆ î
Ɔ ħƪ Ƈà
Ž
Thuma dana fatadalla - Fakaa qaba qawsayni aw adna
... et fut à deux portées d’arc, ou plus près encore...
Ce verset, explique qu’une union intime, inimaginable pour la pensée humaine, eut lieu entre le
serviteur et Son Seigneur. Ces exemples des deux grandes manifestations qui eurent lieu face aux
Prophètes Moïse et Muhammed L sont subordonnées à notre niveau de compréhension.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 117

Bien qu’orphelin illettré, le Saint Prophète r devint avec l’instruction et la for-


mation divines un guide pour l’humanité, un traducteur de la réalité du royaume de
l’inconnu, l’enseignant de l’école de la vérité.
Ziya Pasha a décrit ceci :
D’une telle école était-il l’enseigné,
Que le Tout-Puissant ait été son enseignant particulier.
Moïse u transmit certaines lois. David u excella dans les prières et les
psaumes inspirés par Dieu. Jésus u fut envoyé comme modèle de vertu et de piété.
Muhammad Mustafâ r vint avec tous ces aspects. Il enseigna les lois en proposant
d’affiner l’ego et pria le Tout-Puissant avec un cœur pur. Il enseigna les vertus pri-
mordiales en les incarnant tout au long de sa vie. Il conseilla de ne pas être séduit
par l’éclat de ce monde trompeur. Pour parler plus simplement il a incarné tous les
droits et devoirs de la totalité des prophètes L qui sont venus avant lui. La noblesse
du comportement et de l’ascendance, de la beauté et de la perfection ont été person-
nifiées en lui.
La quarantième année de sa vie s’est avérée, sans aucun doute, être le grand
tournant dans le cours de l’histoire de l’humanité. Il avait passé quarante ans dans
une société ignorante dans laquelle la plupart des perfections qu’il promut par la
suite restèrent un mystère pour la majorité. Il n’était pas encore connu comme chef
d’État. Peu connaissaient son éloquence. Parler de son potentiel en tant qu’illustre
commandant était une chose; il n’était même pas réputé comme soldat ordinaire.
Avant cela, personne ne l’avait entendu parler des histoires relatives aux peuples
et aux prophètes d’antan, ou bien du paradis et de l’enfer. Réputé seulement pour
mener une vie de grande vertu et de solitude, ce retour mémorable à la grotte de
Hira, d’où la tâche divine lui avait été confiée, marqua un changement important.

La réalité de la Révélation et les moyens de sa divulgation


Le terme Wahy, ou Révélation, contient une variété de significations : signe ra-
pide, écriture, correspondance, inspiration et parole secrète, juste pour en nommer
quelques-uns.
En principe, cela signifie que Dieu informe Ses prophètes L de tout ce qu’Il
veut, de n’importe quelle façon que ce soit, selon Son désir. C’est ce que stipule ce
verset coranique :

ƈ òIJīĨ ƈ IJƆÈÓĻèIJźƈƪ ÌųÒ ƈ Ɔ ƈ Ɔ ĠÓ


ÔÓ
ƅ åƆ èÅÒ Ɔ Ɔ Ž ƃŽ Ɔ Ƈ Ʃ įƇ ĩƆ ĥž ġƆ ƇĺĪÈ ƅóýƆ ×Ɔ ĤĪÓ Ɔ ĨƆ IJƆ
ħĻġƈ è Ĺĥƈ ĐįĬƈÌÅÓýĺÓĨįƈ Ĭƈ ðÍƈ Öƈ Ĺèij ƈ ĻĘźijøòģøƈ óĺIJƆÈ
Ƅ Ɔ ƭ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ƇƆ ƃ Ƈ Ɔ Ɔ ŽƇ Ž
118 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Il n’a pas été donné à un mortel qu’Allah lui parle autrement que par révé-
lation, ou de derrière un voile, ou qu’Il [lui] envoie un messager (Ange) qui révèle,
par Sa permission, ce qu’Il [Allah] veut. Il est Sublime et Sage. » (Achoura, 42 : 51).
Selon un récit rapporté par Aïcha c on interrogea une fois le Saint Prophète r à
propos de la manière dont il a reçu la Révélation divine et il r répondit :
« Parfois il s’agit d’un son retentissant, ce qui est pour moi la manière la plus
contraignante quand je la reçois. Une fois que je comprends et mémorise ce que Dieu
a déclaré, l’Ange me quitte ensuite. Et parfois l’Ange apparaît sous forme humaine.
Il me parle et je le comprends instantanément. » (Al Boukhari, Bad’ul-Wahy, 1-2 ; Muslim,
Fadail, 87).

Les savants Musulmans considérant les nombreux récits sur ce sujet ont
conclu ce qui suit :
1) La Révélation venait parfois sous forme de rêves véridiques pendant le som-
meil et qui plus tard se manifestaient de la façon exacte qu’ils ont été vus.
2) Des paroles étaient parfois révélées dans le cœur du Noble Prophète r sans
l’apparition physique de l’Ange.
3) Comme ce fut le cas dans le hadith de Gabriel49, l’Ange de la Révélation pren-
drait la forme d’un être humain et transmettrait la Révélation.
Rapporté par Ibn Abbâs t , l’incident relaté ci-dessous fournit un splendide
exemple de révélation dans son sens dernier :
« J’étais avec mon père Abbâs à côté du Messager de Dieu r à côté de lui r se
trouvait également un homme et tous deux parlaient à voix basse. C’est pour cela que
le Messager de Dieu r ne fit pas beaucoup attention à mon père.
Lorsque nous partîmes, mon père me demanda :
« As-tu vu que le Messager de Dieu n’a pas fait beaucoup attention à moi ? »
Je lui répondis :
« Oui père. Mais il parlait avec un autre homme à ses côtés. »
Là-dessus nous retournâmes immédiatement auprès du Messager de Dieu r et
mon père lui expliqua :
49. Un jour, alors que le Saint Prophète r était à la mosquée, Gabriel u vint à lui sous la forme d’un
homme et le questionna sur l’islâm, l’îman et l’ihsân ainsi que sur les signes du Jour du Jugement, ceci
dans le but d’aider les Compagnons y à s’instruire en matière de religion.
Le hadith qui évoque cet incident a été nommé ultérieurement « Hadith de Gabriel ». (Voir Al
Boukhari, Iman, 37 ; Muslim, Iman, 1, 5).
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 119

« Ô Messager de Dieu ! Abdallah m’a dit que tu t’entretenais à voix basse avec
un homme qui était à tes côtés. Y avait-il vraiment quelqu’un à tes côtés ? »
Alors le Messager de Dieu r me demanda :
« L’as-tu vu en réalité, Abdallah ? »
-Je répondis :
« Oui »
-Il dit alors :
« Eh bien, c’était Gabriel u. »
Puis il dit : « C’est pour cela que je n’ai pas fait attention à vous. » (Ahmad I 293;
Haythamî IX 276)

La Révélation venait parfois sous la forme d’un terrifiant bruit retentissant. À


la fin du processus, le Saint Prophète r avait compris toutes les paroles véhiculées
par l’Ange.
À deux reprises, Gabriel u fit parvenir la Révélation dans sa réelle forme
d’ange.
La première fut subséquente à la période d’intervalle, au moment où le Noble
Prophète r était descendu de la grotte de Hira, tandis que la seconde eut lieu pen-
dant la nuit du Miraj, près du Jujubier de la limite supérieure, Sidrat al-Muntaha.
La Révélation, à l’occasion, était divulguée directement au Saint Prophète r
dans le cadre de la grâce et de l’acceptation divines, sans l’intermédiaire de l’Ange de
la Révélation, comme ce fut le cas lors du Miraj.
On a également noté le cas où Gabriel u transmettait la Révélation au Messa-
ger de Dieu r durant son sommeil. Certains commentateurs sont d’avis que c’est de
cette manière que la sourate al-Kawthar a été révélée.
Certains Compagnons y ont fourni un compte rendu de la façon dont le Saint
Prophète r, pendant le déroulement de la Révélation, devenait bouleversé, agité,
fermait les yeux et inclinait sa tête vers le bas. Les Compagnons y, eux aussi bais-
saient la tête, n’osant pas lever leurs yeux ni jeter un coup d’œil furtif vers le Noble
Messager r jusqu’à ce que la transmission se termine enfin.
Parfois un bruit ressemblant à un bourdonnement d’abeilles pouvait être enten-
du près de son visage quand une révélation se manifestait. Au cours de ces moments,
le Saint Prophète r respirait rapidement, des gouttes de sueur perlaient sur son front
béni, même au cours des journées les plus froides. (Al Boukhari Bad’ul-Wahy 1/2, Umra 10;
Muslim, Fadâil 87, Houdûd 13 ; At Tirmidhi, Tafsir 23/3173 ; Ahmed, V, 327).
120 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Zayd ibn Thâbit50, scribe chargé de recueillir par écrit la Révélation, a déclaré
que l’intensité d’une révélation donnée correspondait au poids de son contenu.
Si la révélation concernait une promesse ou une assurance divine, Gabriel u
apparaissait alors sous forme humaine, ce qui ne causait pas trop de difficultés pour
le Noble Messager r.
En revanche, si des avertissements divins et des menaces de punition descen-
daient, la révélation arrivait au milieu d’un bruit assourdissant des plus terrifiants.
Si le Messager de Dieu r était monté sur un chameau quand la révélation arri-
vait, incapables de résister à son poids, les pattes de l’animal se dérobaient et se met-
taient à fléchir.
En effet, selon le troisième verset de la sourate al-Maida, c’était comme si les
pattes de sa chamelle ‘Adba étaient sur le point de se rompre, forçant le Messager de
Dieu r à descendre. (Ahmed, II, 176; VI, 445; Ibn Saad, I, 197; Tabarî, Tafsîr, VI, 106.).
Zayd ibn Thâbitt raconte :
« J’étais assis à même le sol à côté du Messager de Dieu r, son genou posé sur
le mien. Juste à cet instant il commença à recevoir une révélation. Et soudainement
c’était comme s’il n’y avait rien d’autre sur terre plus lourd que son genou. Ce n’était
qu’une question de temps, pensai-je, avant que le mien ne soit écrasé. » (Ahmad, V,
190-191).

Dans leur refus de croire que le Saint Coran soit la Parole du Tout-Puissant,
certains orientalistes ont prétendu que la Révélation n’était rien de plus que des ins-
pirations intérieures ressenties par le Saint Prophète r relativement à sa capacité de
profonde méditation. De telles allégations trahissent la profonde ignorance qui est
dans leur cœur, leur faiblesse en matière de jugement et leur zèle emprunt d’inimitié.
La crainte ressentie par le Messager de Dieu r en voyant l’Ange pour la pre-
mière fois lors de la première Révélation réfute clairement la possibilité que cela
eusse pu être un cas intérieur et personnel d’hallucination.51
50. Zayd ibn Thâbit u était un des scribes du Saint Prophète r. Quand le Messager r émigra à Médine,
Zayd t, qui était un orphelin âgé de onze ans et alors qu’il n’était qu’un enfant, s’engagea à mémoriser
dix-sept chapitres du Coran. Le Messager de Dieu r lui conseilla d’apprendre l’hébreu et l’assyrien,
langues auxquelles il devint familier en l’espace de quarante jours, supervisant par la suite les relations
du Saint Prophète r avec des personnes parlant ces langues. Mais l’une de ses plus admirables œuvres
fut l’assemblage du Coran qu’il accomplit avec l’aide de deux autres Compagnons y. Il t décéda à
Médine au cours de la 45ème année de l’Hégire après avoir rapporté 92 hadiths.
51. Hallucination : mot d’origine française. En psychologie, le terme désigne des sensations plus
couramment observées dans les cas de schizophrénie ou de paranoïa où la personne subit des
expériences sans la stimulation de ses sens et imagine des choses qui n’ont aucune réalité propre.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 121

En ce qui concerne le Saint Prophète r, la réception de la Révélation consistait


en une conception de la réalité extérieure et indépendante de l’état de son être inté-
rieur. Le fait que Gabriel u ait étreint le Messager de Dieu r à trois reprises en lui
demandant à chaque occasion de « lire » avant de le laisser partir confirme le fait que
la source de la Révélation n’est pas intérieure, mais extérieure, venant de Dieu.
En outre, l’intervalle temporaire de la Révélation invalide, de façon inéquivoque,
ses revendications d’être un phénomène intérieur apparaissant dans l’esprit du Saint
Prophète r comme une conséquence de sa profonde méditation.
La rupture brutale de la Révélation et le désir pressant nourri par le Messager de
Dieu r qu’elle reprenne apportent visiblement la preuve qu’il s’agit d’un évènement
de nature extérieure et indépendante de la volonté du Noble Prophète r.
De plus, comme le rappelle le verset ci-dessous, le Messager de Dieu r ignorait
totalement qu’il recevrait la Révélation préalablement :

ƈ Ɔ
Ƈ ÝƆ ġĤŽ ÒğƆ ĻŽ ĤƆ Ìƈ ĵĝƆ ĥŽ ƇĺĪÈijäƇ óŽ ÜƆ Ûĭ
źƈƪ ÌÔÓ Ɔ ĠÓ
Ƈ ĨƆ IJƆ
īĺ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĥŽ žĤÒóĻƃ ƈıČ
Ɔ īƪ ĬƆ ijġƇ ÜƆ ŻƆ ĘƆ ğƈƆ Öž ò
ƪ īŽ Ĩ
ž Ùƃ ĩƆ èŽ òƆ
« Tu n’espérais nullement que le Livre te serait révélé. Ceci n’a été que par
une miséricorde de ton Seigneur. Ne sois donc jamais un soutien pour les infi-
dèles. » (al-Qassas, 28 : 86)
Il suffit d’observer la différence de style entre le Coran et les hadiths pour être
convaincu de la source révélatrice du premier. De tels incidents se produisirent de
temps en temps : quand le Saint Prophète r avait besoin d’une réponse urgente,
la révélation était retardée, comme pour l’affaire dite du « ifk » (la calomnie), ou
les nombreuses questions récurrentes posées par les Israélites. Si le Coran avait été,
comme on l’a soutenu, un fruit de la méditation du Saint Prophète r, il eut été pré-
férable qu’une réponse immédiate lui soit fournie au lieu de le placer dans une fâ-
cheuse position en attente d’une autre révélation.
De plus la Révélation informait parfois le Saint Prophète r de son attitude erro-
née sur certaines questions ou ordres selon sa tendance préférée. Même le fait d’avoir
tardé à communiquer certaines choses le plaçait ouvertement sous le feu de la cri-
tique divine. Tout cela expose l’illogisme des accusations tenant le Coran pour n’être
qu’un produit des méditations personnelles du Noble Prophète r.
Pour relater un fait s’y référant, lorsque le Saint Prophète r communiquait
l’islam à des notables Quraysh, Abdullah ibn Umm Maktum t, un Compagnon
aveugle qui avait embrassé l’islam à la première heure, s’approcha de lui r et insista
pour qu’il lui apprenne quelques vérités révélées par le Tout-Puissant. Préoccupé de
122 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

vouloir convaincre ces notables, le Messager de Dieu r fit peu cas de lui et fronça
même les sourcils en face de l’attitude insistante d’Ibn Maktum t. Pour cela il fut
ainsi réprimandé par Dieu :

ğƆ ĻĥƆ ĐÓ ĨIJĴïāÜįĤÛĬƆÉĘĵĭĕÝøÒīĨÓĨƆÈ


Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ƇƆ Ɔ Ɔ ƆŽ Ɔ Ž ƈ Ɔ ƪ
ĵýƆ íŽ ĺƆ ijƆ İƇ IJĵ Ɔ Ġƪ õƪ ĺźƪ ƆÈ
Ɔ đƆ ùŽ ĺƆ ĞƆ ÅÓäī
Ɔ ĨÓ
Ɔ Ĩƪ ÈIJĵ
Ɔ Ɔ
Ɔ Ɔ ĩƆ ĘƆ ØƄ óƆ Ġƈ ñŽ ÜÓ
ĮƇ óĠƆ ðƆ ÅÓüī Ɔ ıƆ Ĭƈƪ ÌŻƪ ġķ
Ɔ ıƪ ĥƆ ÜƆ įƇ ĭŽ Đ Ɔ ƆÉĘƆ
Ɔ ÛĬ
« Quant à celui qui se complaît dans sa suffisance (pour sa richesse) tu vas
avec empressement à sa rencontre. Or, que t’importe qu’il ne se purifie pas. Et
quant à celui qui vient à toi avec empressement tout en ayant la crainte, tu ne t’en
soucies pas. N’agis plus ainsi ! Vraiment ceci est un rappel, quiconque veut, donc,
s’en rappelle. » (Abasa, 80 : 5-12).
Après la révélation de ce verset le Messager de Dieu r cherchait toutes les
opportunités pour complimenter Ibn Maktum t par des mots gentils. En le voyant,
il lui arrivait de dire :
« Salutations, Ibn Maktum, au nom de mon Seigneur qui m’a réprimandé. »
(Wahidi, p.471).

Le Saint Prophète r, à l’occasion, recevait des commandements divins succincts


(mujmal)52 pour lesquels il ne fournissait pas d’interprétation subjective tant qu’ils
restaient non élaborés par le Tout-Puissant. Ce verset coranique en est l’exemple :

ÒŽ IJïƇ ×ÜĪƈ ÌIJĂƈ òŽ ƆŶÒĹĘÓ ƈ ĨIJÚÒIJÓ ƈ ĩùĤÒĹĘÓĨ ƈ ų ƈƩƈ


ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ
Ʃ įƈƈ ÖħġƇ ׎ øÓ
ƇųÒ
ƈ éĺĮijęƇ íŽ ÜƇ IJƆÈħġƇ ùƈ ęƇ ĬƆÈĹĘÓ
Ɔ Ƈ Ƈ Ž Ž
ƈ Ĩ
Ɔ
« C’est à Allah qu’appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Que
vous manifestiez ce qui est en vous ou que vous le cachiez, Allah vous en deman-
dera compte… » (al-Baqara, 2 : 284).
Ayant entendu la révélation de ce verset et craignant d’être tenus responsables
des pensées fugitives qui agitent leurs cœurs, les Compagnons y, inquiets, lui
demandèrent :
« Ô Messager de Dieu, sommes-nous censés y faire face ? »

52. Mujmal sont des expressions qui contiennent des significations succinctes et qui, jusqu’à nouvel ordre
de clarification, demeurent obscures.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 123

En réponse, le Saint Prophète r déclara :


« Que faire maintenant ? Essayez-vous de dire « nous avons entendu et nous nous
rebellons », comme les Gens du Livre avant vous ? Mieux vaut pour vous dire plutôt
« nous avons entendu et nous obéissons. Nous Te supplions Seigneur de nous pardon-
ner, car c’est vers Toi qu’est le retour ! » (Muslim Iman 200; Ahmad I 233; Wahidi p.97).
En raison de la signification concise de la pertinente Révélation, le Messager de
Dieu r ne fournissait pas de précisions supplémentaires, mais insistait sur le fait que
les Compagnons y devaient maintenir leur foi en Dieu. Il ne fallut pas longtemps
pour qu’un nouveau verset révélé fasse la lumière sur le précédent :

ÛŽ ×ùƆ ÝƆ ĠÒÓ ĨÓıĻĥĐIJÛ×ùĠÓĨÓıĤÓıđøIJźÌƈ Óùƃ ęŽ ĬƆ ƇųÒ


Ɔ Ž Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƪ Ʃ ėƇ ĥžƈ ġƆ ƇĺƆź
įƇ ÝƆ ĥŽ ĩƆ èÓ ƈ Ž Ɔ Ɔ ƈ ƪ ÌÓĬƆ ñŽ ìÒ ƈ ËƆ ÜƇ ƆźÓĭƆ Öò
Ɔ ĩƆ ĠÒ
Ɔ óƃ ĀƈŽ ÌÓĭƆ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ģŽ ĩéŽ ÜƆ ƆźIJÓ
Ɔ ĭƆ Öƪ òÓ
Ɔ ĬƆ ÉĉƆ ìŽ ÈIJŽ ÈÓĭĻƆ ùĬĪƈ ƪƆ
ÓĭƆ ĤƆ óęƈ ĔŽ ÒIJÓ ĭĐėĐÒIJįƈƈ ÖÓĭƆ ĤƆ ÙƆ ĜƆ ÓĈ Ɔ ƆźÓĨÓ ƈ
Ɔ ĭƆ ĥŽ ĩž éƆ ƇÜƆźIJÓ
Ɔ ĭƆ Öƪ òÓ
ƈ ƈ ñƈ Ĥƪ ÒĵĥƆ Đ
Ɔ ĭƆ ĥ׎ ĜƆ īĨīĺ
Ž Ɔ ƪƆ ƇŽ Ɔ Ɔ Ɔ
īĺ ƈ ƈ Ɔ ƆÈÓĭƆ ĩŽ èƆ òÒŽ IJƆ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒĦijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĵĥƆ ĐÓ
Ɔ ĬƆ óŽ āĬÓ
Ƈ ĘƆ ÓĬƆ ƆźijŽ ĨƆ ÛĬ
« Allah n’impose à aucune âme une charge supérieure à sa capacité. Elle
sera récompensée du bien qu’elle aura fait, punie du mal qu’elle aura fait. Sei-
gneur, ne nous châtie pas s’il nous arrive d’oublier ou de commettre une erreur.
Seigneur ! Ne nous charge pas d’un fardeau lourd comme Tu as chargé ceux qui
vécurent avant nous. Seigneur! Ne nous impose pas ce que nous ne pouvons sup-
porter, efface nos fautes, pardonne-nous et fais nous miséricorde. Tu es Notre
Maître, accorde-nous donc la victoire sur les peuples infidèles. » (al-Baqara, 2 : 286).
Réjouis par la révélation de ce verset les Compagnons y devinrent conscients
qu’ils n’étaient pas tenus responsables des pensées qu’ils ne pouvaient pas gérer.
Le fait que le Noble Messager r ait reculé à l’idée de clarifier une révélation
muijmal, ajouté au fait qu’elle soit une réalité prophétique, fournit dans le même
temps une preuve incontestable qui corrobore la source divine du Coran. Si cela
n’avait pas été le cas, une révélation explicative aurait été redondante, et une expli-
cation subjective aurait suffi pour que la clarification soit satisfaisante. L’absence de
survenance d’un tel scénario prend donc en compte le cas de la nature miraculeuse
du Saint Coran.
Un autre fait irréfutable qui prouve la source divine du Coran réside dans ses
nouvelles révélant l’invisible, qui est le ghayb.
De la même manière, le Coran fournit également un compte rendu factuel de
l’histoire. Ni institution savante, ni culture individuelle n’existait au 7ème siècle à La
124 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Mecque, dévoilant un aperçu des connaissances historiques qui y étaient présentées.


En guise de connaissance historique, il n’y avait rien au-delà de quelques légendes
persanes locales qui pullulaient de contradictions et qui étaient portées en ville par
des commerçants saisonniers. Non seulement le Coran offre un ensemble cohérent
et une image globale de l’histoire, mais de plus il ne peut en aucune façon être arti-
culé par qui que ce soit, peu importe son niveau d’intelligence et d’inventivité.
Par ailleurs, une personne intelligente devrait s’arrêter et réfléchir : Est-ce qu’un
homme illettré, élevé au sein d’une société ignorante, peut être la source de la si-
gnification exceptionnelle du Coran autrement qu’en l’ayant obtenue d’une source
divine ? Bien sûr que non !
Et cela montre que tout ce qui a été véhiculé par le Messager de Dieu r a jailli
de la source même de la Révélation divine.
Le Saint Coran a également prédit les évènements futurs et qui surviendront
de la manière exacte prédite, quand le temps de leur accomplissement sera venu. Le
Coran mène perpétuellement la voie, et seule la science suit son sillage.
Indéniablement, l’incident suivant, relaté dans le Coran, ne fournit qu’un seul
exemple parmi beaucoup d’autres.
Au Pharaon, sur le point de sombrer dans le tourbillon de la Mer Rouge qui vou-
lut saisir la corde de la foi comme une dernière station, le Tout-Puissant déclara pour
rejeter sa tentative désespérée d’affirmer la foi au milieu des affres de la mort :

īĺ ƈ ƈ ƈ Ɔ ĠƇ IJģƇ ×ĜƆ ÛƆ ĻāĐïŽ ĜƆ IJĪŴÆ


Ɔ ïùęŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨÛĭ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« Maintenant ? Alors qu’auparavant tu as désobéi et que tu as été du nombre
des corrupteurs ! » (Yunus, 10 : 91).
Puis Il U poursuivit :

Ùƃ ĺÆ
Ɔ ğƆ ęƆ ĥŽ ìƆ īŽ ĩƆ Ĥƈ Īij Ɔ ġƇ ÝƆ Ĥƈ ğƆ Ĭƈ ïƆ ×ƈƆ ÖğĻ
Ɔ åž ƈ ĭƆ ƇĬĦƆ ijŽ ĻƆ ĤŽ ÓĘƆ
Ɔ ĥƇ ĘÓƈ ĕƆ ĤƆ ÓĭƆ ÜÓƈ ĺÆ
Īij Ɔ īŽ Đ
Ɔ öÓĭĤÒ
ƈ īĨ
ƪ Ɔ ž ƃÒóĻáĠ
ƈ ƈ Ɔ Īƈƪ ÌIJ
Ɔ
« Nous allons aujourd’hui épargner ton corps, afin que tu deviennes un signe
à tes successeurs. Cependant beaucoup de gens ne prêtent aucune attention à Nos
signes (d’avertissement). » (Yunus, 10 : 92).
Zamakhshari interprète ainsi ce verset :
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 125

« Nous allons jeter ton corps nu dans un coin près du rivage et le protéger, dans
sa globalité, l’empêchant de se décomposer, en guise de leçon pour ceux qui vien-
dront après toi dans les siècles à venir. » (Zamakhshari, III, 24).
Des découvertes récentes ont permis de retrouver le cadavre de Pharaon échoué
sur le rivage, prostré. Il s’agissait de son état final avant son trépas. Redoutant les
scènes horribles dont il a été finalement témoin lors de ses derniers instants, il a vou-
lu se joindre à la foi, mais sa prise de position l’a été en désespoir de cause puisqu’elle
n’a pas été acceptée.
Ainsi donc, trois mille ans environ après ces faits et ayant survécu à la décom-
position, son cadavre a émergé, et, comme cela l’a été proclamé par le Coran, exhibé
à l’humanité tel un avertissement. À l’heure où nous parlons, son cadavre est exposé
au British Museum ; un seul parmi les nombreux cas de miracles du Coran appelés
à subsister jusqu’à la Dernière Heure. Mais comme l’objectif principal du Coran est
de communiquer l’unicité divine (tawhid) et appeler l’humanité à la guidée, de tels
miracles de nature scientifique ou historique ne sont que secondaires. On ne doit pas
oublier que dans le Coran tout y est consigné et que toutes les vérités appartenant à
une simple chose y sont cachées :

īĻƈ
ƅ ×Ĩ ƈ Ęƈ ƪ źÌƈ ÷ƈƅ ÖÓĺƆźIJÕƅ ĈŽ òƆźIJ
ƫ ÔÓ
ƅ ÝƆ ĠĹ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« … qui ne soit consigné dans un livre explicite. » (al-An’am, 6 : 59).
En conséquence, le Coran est un récit parfait de toutes les réalités gravées à
travers l’univers, comprenant le noyau de toutes les vérités qui s’y trouvent. Cette
caractéristique du Coran, nécessitée par son statut de miracle, est mieux à même
d’être appréciée à travers le déroulement des évènements et en proportion avec les
progrès de la connaissance humaine.
Toutes les bibliothèques du monde entier ne seraient pas assez spacieuses pour
accueillir une telle connaissance, cachée dans les profondeurs de l’univers et mani-
festée dans le Coran, en raison de sa taille volumineuse. En outre puisque les hu-
mains sont enclins à rejeter toute réclamation injustifiée par l’expertise du temps la
foi dans la véracité du Coran n’aurait pas été préservée jusqu’à la Dernière Heure.
Donnons un simple exemple :
Si la réalité de la télévision avait été exposée jadis comme nous la connaissons
maintenant, les gens de l’époque auraient hésité à croire jusqu’à ce qu’ils la voient
de leurs propres yeux, ce qui leur aurait donné une raison de rejeter le Coran et par
conséquent le motif pour lequel le Coran, tout en incarnant toute vérité unique,
exprime la plupart d’entre elles d’une manière non détaillée.
126 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Toutes les questions traitées par le Coran ont pour but de mener à la connais-
sance du tawhid, l’impulsion derrière tout ce qui touche les faits scientifiques. Le
miracle distinctif du Coran, c’est qu’il survit en tout temps et en tous lieux jusqu’à
l’Heure Ultime.
Ceci étant un autre témoignage d’une splendeur révélée d’autant plus à chaque
moment et lors de chaque découverte.53
Certains orientalistes, incapables qu’ils étaient de digérer la splendeur du Saint
Coran et du Saint Prophète r, établirent une description absurde et illogique du
statut du Saint Prophète r.
Ils affirmèrent qu’il était sous l’emprise d’une « crise d’épilepsie » au moment où
il recevait une révélation.54
Pour toute réponse il nous suffit de mentionner les éléments suivants:
La personne qui a subi une crise d’épilepsie, est vaincu après la crise par l’épui-
sement et la douleur, laissant en arrière une grande affliction et un état d’esprit per-
turbé.
Pourtant, le Messager de Dieu r ne subit aucune de ces souffrances et au
contraire, il considéra les pauses dans le processus de révélation comme faisant par-
tie de la « procédure », attendant avec nostalgie sa manifestation et devenant profon-
dément heureux lorsque cela survenait.
Au cours d’une crise d’épilepsie, fait connu par la médecine, on perd toute capa-
cité de penser et toute conscience, demeurant inconscient de ce qui se passe autour.
Pourtant la Révélation que le Noble Prophète r a reçue a permis de transmettre
à l’humanité les magnifiques versets du Coran, vantant les plans les plus parfaits de
la loi, de la morale, de la piété et des plus splendides récits de l’Histoire.
Le violent tremblement connu qui s’empare d’un épileptique lors d’une crise n’a
jamais fait l’objet de témoins durant la venue de la Révélation. Les épileptiques, au
cours d’une crise, ont tendance à prononcer des paroles insensées, voire absurdes.
53. Pour des exemples appropriés, voir Osman Nûri Topbaş, Rahmet Esintileri, Istanbul 2001, p. 184-239
(Version en langue turque).
54. Les changements observables subis par le Saint Prophète r durant le temps que dura la Révélation, ,
ont conduit des orientalistes à concevoir toute expérience de révélation comme une crise d’épilepsie,
centre sur lequel ils évoquèrent d’autres arguments (ou polémiques), allant très loin dans leurs
allégations ineffables jusqu’à considérer le Saint Prophète r comme un aliéné mental. Ils ont même
été capables de convaincre l’Académie Nationale Française de Médecine à, au minimum, considérer
la valeur scientifique de l’affaire, espérant la confirmation éventuelle de leurs revendications. En 1842,
un comité composé de médecins parmi les plus remarquables évalua ces revendications, puis soumit
un long et complexe rapport dans lequel elles furent jugées médicalement inacceptables.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 127

Le Saint Prophète r n’eut jamais de tels comportements ; les mots qui sortaient
de sa bouche furent les plus éloquents et significatifs que l’humanité puisse imaginer.
Ces allégations qui n’ont aucun sens sont donc le résultat d’une incapacité à
parvenir à un accord avec la vérité du Saint Prophète r.

La Prophétie : Nubuwwah et Risalah


Dieu a voulu répondre à Ses serviteurs par d’exceptionnelles figures apparues
au milieu d’eux et investies de l’Apostolat prophétique ; une formalité divine révélée
dans le Coran :

ģƇ ×ĜƆ īĨƈ ğƆ ĻĥƆ ĐħİÓĭƆ āāĜƆ ïŽ ĜƆ ƃŻøòIJ


Ž Ž Ɔ ŽƇ Ž Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ
ğƆ ĻĥƆ Đ ħıāāĝĬħĤŻøòIJ
Ž Ɔ Ž Ƈ Ž Ƈ ŽƆ Žƪ ƃ Ƈ Ƈ Ɔ
« Et il y a des messagers dont Nous t’avons raconté l’histoire précédemment,
et des messagers dont Nous ne t’avons point raconté l’histoire… » (an-Nisa, 164).

ƈ ĭƈƆ Ļ×ĤŽ ÓƈÖħİIJ


ÚÓ
žƆ Ƈ åƆ ĘƆ ħŽ ƈıĨƈ ijŽ ĜƆ ĵĤƆ Ìƈ Żƃ øƇ ò
Ƈ ÊÓ
ƈ ƈ Ɔ
Ƈ ğƆ ĥ׎ ĜƆ īĨÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ÈïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
« Nous avons effectivement envoyé avant toi des Messagers vers leurs peuples
et ils leur apportèrent les preuves. » (ar-Rum, 30 : 47).
Commençant par le premier homme, et à travers toutes les époques de l’his-
toire, le Tout-Puissant a continué d’envoyer Ses prophètes, comme nabi et rasoul,
comme une miséricorde pour les êtres humains. Nubuwwah, ou Prophétie dans un
sens large général, désigne la relation à connotation ambassadrice entre le Tout-
Puissant et Ses serviteurs dans la régulation de leurs affaires, à la fois ici-bas et dans
l’au-delà. Un rasoul est un homme qui, ayant reçu la Révélation, est dans l’obligation
de transmettre à d’autres ce qui lui a été révélé. Un nabi, en revanche, est un homme
qui reçoit la Révélation et l’obligation de la transmettre est plus ou moins relative.
Généralement un nabi est envoyé vers les autres pour communiquer et renfor-
cer la charia, la loi canonique d’un rasoul envoyé avant lui. Par conséquent, chaque
rasoul est aussi un nabi, mais tout nabi n’est pas un rasoul.
De nombreux hadiths indiquent que les termes nabi et rasoul impliquent une
relation universelle : le Coran, notamment, utilise les deux termes indifféremment.
À la question qui peut se poser de savoir pourquoi le Tout-Puissant ne répond pas
directement à Ses serviteurs, mais plutôt par le biais des prophètes, la réponse sui-
vante pourrait être apportée :
128 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il est contraire au mystère de la grande épreuve qui comprend la raison pro-


fonde de l’existence de l’univers que le Tout-Puissant puisse divulguer Sa Révélation
à travers un message direct adressé à l’humanité. La foi aurait alors perdu l’honneur
et la valeur qu’elle possède dans son rapport avec l’inconnu. Recevant des comman-
dements et des interdictions directement du Tout-Puissant, l’humanité n’aurait pas
eu d’autre choix que de croire et d’être directement consciente de la réalité de Dieu.
En empêchant les êtres humains de faire un choix délibéré du bien et du mal, cela
aurait rendu la récompense attendue ou la punition absurde.
D’autre part, les êtres humains possèdent différents niveaux de compréhension,
de pouvoir et de capacité, pour aucune autre raison pour laquelle chacun a diffé-
rentes fonctions à effectuer dans la vie. Si tous les êtres humains avaient été talen-
tueux, il y serait resté certaines choses que personne n’aurait aimé faire.
L’accomplissement de toutes les activités de ce monde, de la plus basse à la plus
élevée, aurait nécessité que les êtres humains fussent créés selon différents niveaux
de capacité.
Dans toute l’histoire de l’humanité, les plus grands leaders, enseignants et
guides ont été des prophètes.
Il est impératif que ceux qui sont appelés à guider la société, à lui montrer le droit
chemin et à endurer les tourments et les difficultés qui peuvent en découler soient
dotés d’aptitudes élevées et d’une réserve inépuisable de patience. À moins qu’ils ne
soient bénis par des qualités et des caractéristiques élevées de caractère que les gens
vont admirer, incliner les masses et les guider demeureront pour eux quelque chose
d’impossible. Même s’il bénéficie d’un leadership ordinaire, un individu ne peut pas
devenir un leader sans posséder des qualités supérieures à celles de ses subordonnés.
Même s’il se considère comme un leader, il ne rencontrera pas le succès pour la seule
raison que les inaptes ne sont vraiment jamais reconnus comme leaders. C’est pour
cela que les prophètes L sont reconnus comme étant naturellement dotés des plus
grandes qualités. Pourtant, ce n’est pas que grâce à leur volonté personnelle qu’ils
ont pu devenir des prophètes, mais en utilisant simplement les talents qu’ils possé-
daient. Parmi eux, la prophétie est une exclusivité donnée à ceux qui, ayant été triés
sur le volet, ont été nommés par le Tout-Puissant. Ni la nubuwwah ni la risalah ne
rapportent. On ne les acquièrent pas grâce à l’effort. En lieu et place, Dieu choisit qui
Il veut parmi Ses serviteurs. Ainsi le verset coranique en rapport stipule :

įƇ ÝƆ ĤƆ ÓøƆ ƈòģƇ đƆ åŽ ĺƆ ß Ɔ ħƇ ĥƆ ĐŽ ƆÈƇųÒ


Ƈ ĻŽ è Ʃ
« Allah sait mieux où placer Son message. » (al-An’am, 6 : 126).
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 129

En revanche, sélectionner une personne ordinaire pour porter la Révélation est


incompatible avec la Volonté divine puisque personne n’est assez compétent pour
concevoir et transmettre la Parole du Tout-Puissant. Les prophètes L ont donc été
spécialement choisis pour porter le lourd fardeau de la Prophétie en vertu de l’endu-
rance innée dont ils ont été gratifiés.

Les attributs des prophètes L


Tous les prophètes ont des propriétés communes qui sont : sidq, amanah, fata-
nah, tabligh, et ismah. La croyance aux prophètes est complètée dans le cadre de ces
caractéristiques.
Sidq marque l’honnêteté et la véracité des prophètes L dans leur façon de
communiquer les verdicts, ordres et interdits divins et dans tous les mots qu’ils
prononcent. Ils font toujours preuve d’honnêteté dans leurs paroles et actes qui sont
comme un miroir se réfléchissant mutuellement. Il est inconcevable pour eux de
mentir. Dans le Coran le Tout Puissant salue leur fiabilité dans ces termes :

ƪ ĝƃ ĺïžƈ Ā
ÓĻƈƬ ×ĬÓ ƈ ĪÓ
Ɔ Ġ
Ɔ įƇ Ĭƈƪ ÌħĻ ƈ óÖƈÌÔÓ
İÒ
Ɔ ƆŽ
ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ ÒĹĘ
ƈ óĠƇ ðŽ ÒIJ
Ž Ɔ
« Et mentionne dans le Livre, Abraham C’était un très véridique et un
Prophète. » (Maryam, 41; voir aussi Maryam, 54, 56; Yûsuf, 46).
Dieu, en mettant l’accent sur l’impossibilité qu’ont les prophètes L de s’écar-
ter du sidq, ne serait-ce que d’une fraction de seconde dit :

ÓĬƆ ñŽ ìƆ ƆŶƆ ģĺ ƈ IJÓƈ ĜƆ ƆŶÒŽ ăƆ đŽ ÖÓ Ɔ ĭƆ ĻŽ ĥƆ Đ


Ɔ ĢƆ ijƪ ĝƆ ÜƆ ijŽ ĤƆ IJƆ
īĻ ƈ ƈ ƈ ĩƈ ĻƆ ĤŽ ÓƈÖįƇ ĭŽ Ĩƈ
Ɔ ÜijƆ ĤŽ ÒįƇ ĭŽ ĨÓĭƆ đŽ ĉƆ ĝƆ ĤƆ ħƪ ƇàīĻ
« Et s’il avait forgé quelques paroles qu’ils Nous avait attribuées, Nous
l’aurions saisi de la main droite, ensuite, Nous lui aurions tranché l’aorte… »
(al-Haqqa, 69 : 44-46)

Leur fiabilité est d’une splendeur même attestée par leurs ennemis. Voici
quelques exemples parmi d’autres :
Pendant les premiers jours durant lesquels le Messager de Dieu r annonça
publiquement l’Appel, debout sur un rocher situé sur la colline de Safa, il déclara
aux gens de Quraysh qui étaient présents :
130 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ô gens de Quraysh ! Si je vous disais que des cavaliers ennemis sont en ce


moment en train de jalonner la périphérie de cette montagne ou de cette vallée, prêts
à bondir sur vous et à saisir vos biens, me croiriez-vous ? »
Sans aucune arrière-pensée, ils répondirent :
« Certainement ! Car jusqu’à maintenant, nous savons que tu es un homme de
parole et nous n’avons jamais entendu dire que tu profères des mensonges… » (Al
Boukhari, Tafsir, 26)

Une des questions posées par Héraclius, empereur des Byzantins, à Abû Sufyan,
encore incroyant pour avoir plus d’informations sur le Saint Prophète r, fut :
« Y a-t-il eu un seul instant où il n’a guère réussi à garder sa parole ? »
En dépit de son mépris envers le Noble Messager r à l’époque, Abû Sufyan
répondit fermement :
« Non… Quelle que soit la promesse qu’il fait, il la garde toujours. » (Al Boukhari,
Bad’ul-Wahy, 1, 5-6 ; Muslim, Jihad, 74)

Ubayy ibn Khalaf, un Mecquois idolâtre, fut parmi les plus farouches ennemis
de l’islam. Avant l’Hégire, il dit au Saint Prophète r :
« Je suis présentement en train d’élever un cheval et je le nourris en lui offrant le
meilleur fourrage. Viendra un jour où je le monterai et te tuerai ! »
Une fois, pourtant, le Messager de Dieu r brisa le silence et lui dit :
« Si Dieu le veut, je serai celui qui finira par te tuer. »
Au cours de la bataille d’Ohoud, ce stupide idolâtre chercha partout le Noble
Messager r en hurlant :
« S’il survit aujourd’hui, cela signifiera que je suis définitivement parti ! »
Avec cette pensée dans son esprit, il réussit à se rapprocher à une courte distance
du Saint Prophète r et fut prêt à fondre sur lui. L’ayant aperçu quelques instants
auparavant, les Compagnons y voulurent en finir avec lui, mais ils furent empêchés
par le Messager de Dieu r qui leur dit : « Qu’il vienne ! »
Comme Ibn Khalaf se rapprochait, le Saint Prophète r prit une lance des mains
d’un Compagnon. Quand Ibn Khalaf chargea, monté sur son cheval, le Messager de
Dieu r dirigea sa lance qui effleura légèrement le cou d’Ibn Khalaf. Mais même avec
ce petit choc, il tomba de son cheval et roula par terre un certain temps avant de se
redresser sur ses pieds, horrifié, et de s’enfuir dans ses rangs, hurlant, les yeux sur le
point de sortir de ses orbites à cause de l’effroi : « Je jure que Muhammad m’a tué ! »
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 131

Les idolâtres se précipitèrent à côté de lui pour inspecter sa blessure puis le ras-
surèrent en disant : « Ce n’est qu’une légère blessure… »
Mais, insatisfait, il continua d’objecter :
« À La Mecque, Muhammad m’a dit qu’il allait me tuer. Alors je vous le jure,
même s’il crachait sur moi, ce serait suffisant pour prendre ma vie ! »
Il continua à brailler et alors Abû Sufyan finit par lui dire:
« Comment peux-tu autant te lamenter pour une aussi petite éraflure ? »
Alors il répondit : « Savez-vous qui m’a fait çà ? Cette blessure m’a été provo-
quée par Muhammad. Je jure par Lat et Uzza que si elle avait été infligée à tous les
gens du Hedjaz, toute la douleur que je ressens à cause de cette blessure serait suffi-
sante pour les faire périr tous. De retour à La Mecque, Muhammad m’a dit qu’il allait
finir par me tuer. Je savais qu’il allait être la cause de la mort… Je savais que je n’avais
aucun moyen de me sauver. »
Ubayy, ardent ennemi du Saint Prophète r, mourut sur le chemin du retour,
peu de jours avant d’atteindre La Mecque. (Ibn Ishâq, p. 89 ; Ibn Saad, II, 46 ; Hakim, II, 357).
Même un idolâtre qui avait une connaissance proche du Saint Prophète r
croyait fermement dans la véracité de ses paroles.
Abû Maysara explique :
« Le Messager de Dieu se trouva une fois à côté d’Abû Jahl et compagnie. En le
voyant, ceux-ci déclarèrent :
- Nous jurons, Muhammad, que nous te dénions pas car nous savons que tu es
homme honnête et véridique. Ce n’est que ce que tu as apporté que nous réfutons !
Puis le verset suivant fut révélé :

ğƆ ĬƆ ijÖƇ ñž ƈ ġƆ ƇĺƆźħıƇ Ĭƈƪ ÍĘƆ ĪijƆ ƇĤijĝƇ ĺĸ ƈ


Ɔ ñĤƪ ÒğƆ ƇĬõƇ éŽ ĻƆ ĤƆ įƇ Ĭƈƪ ÌħƇ ĥƆ đŽ ĬƆ ïŽ ĜƆ
Ž
ĪIJ ƈ Ʃ ÚÓ
Ɔ ïƇ éƆ åŽ ĺƆ ųÒ ƈ ĺÇƈÖīĻĩƈ ĤÓƈ čƪ ĤÒīġƈ ĤƆ IJ
Ɔ Ɔ ƪ Ɔ
« Nous savons qu’en vérité ce qu’ils disent te chagrine. Or, vraiment ils ne
croient pas que tu es menteur, mais ce sont les versets (le Coran) d’Allah, que les
injustes renient. » (Coran, al-An’am, 6 : 33) ; Wahidi, p. 219)
La seule expression du Saint Prophète r sans parole ni discours supplémentaire
était l’ultime incarnation de l’honnêteté au point que la simple vue de son visage
contraignit Abdullah ibn Salam r un éminent érudit juif à déclarer alors qu’il était
sur le point d’embrasser l’islam :
132 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Un tel visage ne peut jamais mentir ». (At Tirmidhi, Qiyamah, 43 ; Ahmad, V, 451).
Proférer un mensonge au nom du Tout-Puissant est impossible pour un homme
qui n’a jamais menti, même en plaisantant, durant toute son existence précédant
son Apostolat prophétique. En effet, le Noble Messager r considérait le mensonge
comme un signe d’hypocrisie et interdit catégoriquement à sa communauté (Oum-
ma) de proférer le moindre mensonge. (Al Boukhari, Iman, 24; Muslim, Iman, 107).
Il déclare en effet dans un hadith :
« Tant que l’on continue à mentir et à nourrir l’intention d’agir toujours ainsi,
le cœur est marqué d’un point noir. Puis le point grandit et rend le cœur tout noir,
jusqu’au point où l’on est inscrit parmi les menteurs au regard de Dieu. » (Muwatta’,
Kalam, 18).

Nufay ibn Haritha t raconte :


« Un jour, le Messager de Dieu r demanda à trois reprises :
- Dois-je vous informer du plus grave des grands péchés ?
- S’il te plaît, Messager de Dieu r, répondîmes-nous.
- Attribuer des associés à Dieu et se rebeller contre ses parents, dit-il.
Puis il se redressa, prit une position assise et ajouta :
- Et aussi – et écoutez attentivement – le mensonge et le parjure. Il le répéta tel-
lement qu’il finit par se fatiguer et nous espérions pour lui qu’il arrête. » (Al Boukhari,
Adab, 6 ; Muslim, Iman, 143).

Le Coran souligne l’importance de la sincérité comme suit :

ƈ īĻĜƈ îÓƈ āĤÒďęƆ ĭĺĦijĺÒñƆ İ


ħıƇ ĤƆ ħıƇ ĜƇ ïŽ Ā
Ž Ž Ɔ ƪ Ƈ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ ƇųÒ Ʃ ĢÓƆ ĜƆ 
ĹĄƈ òÒïÖƆÈÓıĻĘ ƈ īĺïƈ ĤÓƈ ì ƈ Ɔ Ĩĸ ƈ ƈóåÜƆ ÚÓ
Ɔ ƪ ƃƆ Ɔ Ɔ Ɔ òÓ Ƈ ıƆ ĬŽ ƆŶÒÓıƆ ÝéŽ Üī Ž Ƅ ĭƪ ä
Ɔ
Ĺčƈ đƆ ĤŽ ÒôƇ ijŽ ęƆ ĤŽ ÒğƆ Ĥƈ ðƆ įƇ ĭŽ Đ
Ɔ ÒŽ ijĄƇ òƆ IJ
Ɔ ħŽ ıƇ ĭŽ Đ
Ɔ ƇųÒ
Ʃ
« Allah dira : ‹Voilà le jour où leur véracité va profiter aux véridiques : ils
auront des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux pour y demeurer éternel-
lement.› Allah les a agréés et eux L’ont agréé. Voilà l’énorme succès. » (al-Maida, 5 :
119).

Amanah représente l’extrême loyauté, la fiabilité et l’honnêteté dont les figures


marquantes demeurent les prophètes L. Même les non-croyants les regardaient
avec confiance. Signifiant la loyauté et la fiabilité en matière de questions générales,
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 133

l’attribut d’amanah implique notamment la fidélité à l’égard de la Révélation, com-


muniquant sans faille les commandements divins et les interdictions à l’attention des
gens, sans y ajouter ou soustraire un seul mot.
Dieu ne confie l’Apostolat prophétique qu’à Ses plus honnêtes et plus fiables
serviteurs, et non pas aux traîtres.
Les versets ci-dessous indiquent que les prophètes ont toujours été véridiques
en ce qui concerne le rappel à leur peuple respectif :

ƈ ƈ ƈ ƈ
Ƅ ĨƆÈçƄ ĀÓĬƆ ħŽ ġƇ ĤƆ ÓŽ ĬƆ ƆÈIJĹƈ
īĻ Ɔ ÚƆźÓøƆ ƈòħŽ ġƇ ĕƇ ĥž ÖƆ ƇÈ
Ɔ Öž ò
« Je vous communique les messages de mon Seigneur, et je suis pour vous un
conseiller digne de confiance. » (al-Araf, 6 : 68).

ƈ Ƅ øòħġƇ ĤƆ ĹžĬƈ Ìƈ
Ƅ ĨƆÈĢij
īĻ Ƈ Ɔ Ž
« Je suis pour vous un messager digne de confiance. » (as-Shuara, 26 : 107;voir aussi,
as-Shuara, 125, 143, 162, 178; ad-Dukhân, 18).

En fait, le titre d’al-Amin, ou le Digne de confiance, du Saint Prophète r ré-


sonne aussi fort parmi les rangs des idolâtres.
Toujours suspects envers leurs propres amis, et quand ils pouvaient le faire, ils
confiaient régulièrement leurs biens au Messager de Dieu r. En effet, juste avant
l’Hégire, les idolâtres avaient confié beaucoup de leurs biens au Saint Prophète r
qui, en affichant une loyauté inimitable, avait laissé Ali t à La Mecque dans le but de
restituer ces biens à leurs propriétaires par crainte de décès. Al-Amin devint quasi-
ment le second nom du Noble Prophète r et le nom que les Mecquois avait coutume
d’utiliser quand il fut âgé d’environ vingt-cinq ans. (Ibn Saad, I, 121, 156).
Ceux qui se posaient la question au sujet de la Pierre Noire au cours du fameux
épisode de l’arbitrage du Saint Prophète r jubilaient en le voyant s’approcher d’eux,
criant avec enthousiasme : « Al-Amin est en train de s’approcher», et plaçant le rè-
glement de leur désaccord au creux de sa main fiable.
Jamais il n’y eut le moindre point d’interrogation concernant son honnêteté, ni
par un seul Compagnon qui d’ailleurs aurait préféré plutôt tout sacrifier pour lui, ni
par un seul ennemi qui avait pourtant l’intention de le tuer.
Tout autant égal à la fiabilité des prophètes se situe Gabriel u, le porteur de la
Révélation, attestant que le Tout-Puissant dit :
134 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ïĭ ƈ Øƅ ijĜƇ ĸð


Ɔ Đ ƈ ħĺ
ƅ ƈóĠ ƅ øòĢƇ ijĝƆ ĤƆ įĬƈƪ Ì
Ɔ Ģij
ƪ Ƈ Ɔ Ž Ƈ
ƅ Ĩƈ ƆÈħƪ àƆ Ďƅ ÓĉƆ Ĩ
īĻ ƅ ġƈ Ĩ ƈ ƈ
Ƈ īĻ Ɔ úóŽ đƆ ĤŽ Òĸð
« Ceci [le Coran] est la parole d’un noble Messager, doué d’une grande force,
et ayant un rang élevé auprès du Maître du Trône, obéi, là-haut, et digne de
confiance. » (at-Takwir, 81 : 19-21).
La Révélation a donc été portée à l’Amin de la Terre par l’intermédiaire de
l’Amin des Cieux.
Fatanah implique que les prophètes L soient ceux qui parmi les humains ont
le plus haut niveau d’intelligence, de raison et de perspicacité. Ils eurent une vive
mémoire, une connaissance pénétrante et un solide pouvoir de jugement et de per-
suasion. Fatanah n’est pas un exercice fastidieux de raison et de logique, il est plutôt
un niveau de compréhension au-delà du génie, de l’expression de la raison, de la
prudence et de la perspicacité qui demeure avec le cœur. Pour parfaitement com-
pléter leurs devoirs, les prophètes L doivent être en possession d’une intelligence
hors pair. Ils seraient autrement incapables de s’exprimer devant leur peuple au cas
où ils seraient amenés à le convaincre de vérité.
Les prophètes L résolvent même avec facilité les problèmes les plus obscurs
et les plus complexes. Enveloppant même les problèmes les plus complexes dans le
linceul de la facilité, cela permet que leurs paroles soient comprises avec clarté par
des gens qui possèdent différents niveaux de compréhension.
En tant que qualité apparue dans des styles différents chez chaque prophète on
pourrait dire que la vie du Saint Prophète r est une quintessence de fatanah ou de
circonspection. Comme mentionné antérieurement, en vertu d’un écran incompa-
rable de prudence et de perspicacité, le Noble Messager r, qui passait à ce moment
par la porte de la Ka’ba, fut capable de régler le différend qui avait surgi à propos
du placement de la Pierre Noire et d’éviter ainsi un probable conflit entre les clans
rivaux qui se serait terminé par un bain de sang.
Sa compétence en termes de lutte dans la voie de l’islam, sa prudence en termes
de paix notamment pendant l’armistice d’Houdaybiyya, la sagesse liée à sa capture à
La Mecque et les conseils qui s’ensuivirent sans que la moindre goutte de sang coule,
sa discrétion et sa justice extraordinaires lors de l’épisode de Tâ’if, sont d’exem-
plaires manifestations de fatanah situées au-delà de la portée du simple mortel.
Tout musulman devrait être également en droit de saisir une part de fatanah
que possédaient les prophètes L et mettre à profit le don de la raison de la manière
la plus efficace possible.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 135

Savoir dire ce qui doit être dit, où et quand le dire, et quel que soit le compor-
tement à adopter en le disant, est quelque chose d’absolument essentiel.
L’approche adoptée par Jafar Tayyar t, par exemple, en informant le Négus
d’Abyssinie au sujet de l’islam, est d’une énorme importance en termes d’exposition
de prudence idéale que doit revêtir un croyant. Quand le Négus, de confession chré-
tienne, insista pour qu’il t lui récite quelques versets du Coran, au lieu de réciter,
par exemple, la sourate al-Kafiroun qui défie en pleine force les infidèles, Jafar t
choisit de réciter la sourate Maryam qui évoque maintes fois Jésus u et sa mère.
Captivé par ces versets récités à voix haute par Jafar t, le Négus en larmes, s’écria :
« Il ne fait aucun doute que ce que je viens d’entendre provient de la même
source de lumière que celle apportée par Jésus. » Et il embrassa l’islam peu de temps
après. (Ibn Hishâm, I, 358-360).
Le Tabligh se réfère à la manière dont les prophètes L informent sincèrement
les gens quant à la Parole Divine, comme cela leur fut commandé. Leur invitation ne
contient ni addition ni soustraction. Parmi les attributs communs des prophètes, le
tabligh est un des plus importants devoirs, tel que stipulé dans ce verset coranique :

ğƆ ĻĤƆ Ìƈ ĢƆ ƈõĬƇÈÇĨ ƈ Ƈ øóĤÒÓıĺƆÈÇĺ


Ž Ɔ ēŽ ĥž ÖƆ Ģij Ƈ ƪ Ɔƫ Ɔ
įƇ ÝƆ ĤƆ ÓøƆ ƈòÛƆ ĕŽ ĥƪ ÖÓ ƈ
Ɔ ĩƆ ĘƆ ģŽ đƆ ęŽ ÜƆ ħŽ Ĥƪ ĪƈÌIJ
Ɔ ğƈƆ Öž òī
ƪ Ĩ
« Ô Messager, transmets ce qui t’a été descendu de la part de ton Seigneur.
Si tu ne le faisais pas, alors tu n’aurais pas communiqué Son message. » (al-Maida,
5 : 67).

Dans l’exercice de leur responsabilité liée au tabligh, les prophètes L ont


rencontré de nombreux obstacles en face desquels cependant ils n’ont jamais fait de
compromis. Toute leur existence abonde d’exemples de telles expériences.
Le Noble Messager r débuta son invitation à l’islam en l’offrant à ses plus
proches parents, statuant conformément au temps et au lieu donnés, veillant à res-
pecter l’état d’esprit et le niveau de compréhension de ses sujets ; en conformité avec
les principes de gradualité, il profitait de chaque occasion, remplaçant la difficulté
avec aisance et la promotion de bonnes nouvelles au lieu d’attirer la haine.
Ayant consacré sa vie entière à l’appel de l’islam, le Saint Prophète r demanda
aux Compagnons y qui étaient présents lors de son Sermon d’Adieu :
« Ai-je accompli mon devoir de transmission ? »
Après avoir une réponse affirmative, il annonça :
« Sois témoin, ô Seigneur ! » avec la satisfaction de la mission accomplie.
136 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ainsi, tous les croyants se doivent de respecter aussi les méthodes de tabligh
illustrées par le Messager de Dieu r, au mieux de leur capacité, car l’appel à l’islam
est une obligation pour tout musulman. (Voir al- Imrân, 3 : 104, 110).
Le Saint Prophète r a dit :
« Celui d’entre vous qui voit une chose répréhensible doit l’empêcher avec sa
main ; s’il ne le peut, avec sa langue, et, si cela ne lui est toujours pas possible, que ce
soit en son for intérieur. C’est là le minimum exigé par la foi. » (Muslim, Iman, 78).
L’absence, dans la société, de gens qui ordonnent le bien et interdisent le blâ-
mable conduira tôt ou tard à ce que les mauvaises habitudes deviennent quelque
chose de normal et acceptées comme telle. Un mal non éradiqué à temps devient
indéracinable. Le bien et le mal se confondent, et comme la vérité s’est envolée, les
gens oublient leur Seigneur. Après cela survient la destruction totale de cette société.
Éviter une telle dévastation nécessite qu’une importance particulière soit accordée
au tabligh.
Ismah indique que les prophètes L sont à l’abri de tomber dans le péché,
qu’il soit grand ou petit. Grâce à cette qualité, ils ont été préservés de l’enlisement
dans le bourbier de l’associationnisme (shirk), à la fois avant et après leur mission
prophétique.
De la même manière, il est impossible pour eux d’avoir un trou de mémoire ou
de faire une erreur dans l’action de transmettre aux individus la Révélation qu’ils
reçoivent du Tout-Puissant.
Si les prophètes L n’avaient pas été dotés de l’attribut d’ismah, alors la véracité
de que ce qu’ils avaient communiqué serait restée douteuse, une lacune qui aurait
mis en doute qu’ils étaient la preuve et le témoignage du Tout-Puissant sur terre.
D’après les Ahl as-Sunna les prophètes L n’ont jamais commis de péchés
majeurs. Bien qu’il se peut qu’ils eussent commis certaines bévues, sans le vouloir
et en conformité avec de nombreuses raisons sous-jacentes, ils ne sont jamais restés
dans cet état, mais se sont amendés et ont été avertis par le biais de la Révélation.
La commission de ces erreurs involontaires, nommée Zalla, est motivée par
la sagesse sous-jacente de donner aux prophètes un petit goût d’insuffisance en
comparaison avec le Tout-Puissant et le fait de prévenir les individus de l’idolâtrie à
travers le rappel qu’ils sont, après tout, humains.
Le comportement des prophètes L doit être d’une nature propice à l’exempla-
rité. Autrement les individus seraient enclins à rejeter les commandements divins
avec l’excuse que ce que les prophètes enjoignent est au-delà de la capacité humaine.
Dans un mépris total de ce fait, il y eut même des gens assez ignorants pour croire
que les prophètes avaient été ressuscités au milieu des anges.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 137

Le Coran leur apporte la réponse suivante :

īĻ ƈƈ ƈ ĨĂƈ òƆŶÒĹ ƈ Ɔ Ġ
Ɔ žĭÑĩƆ ĉŽ Ĩ
Ƈ Īij
Ɔ ýƇ ĩŽ ĺƆ ÙƄ ġƆ Ðŵ Ɔ Ž Ž ĘĪÓ Ɔ ijŽ ĤƆ ģŽ ĜƇ
ƃźijøƇ òÓ ƈ
ƪ ġƃ ĥƆ ĨÅÇ
Ɔ ĩƆ ùĤÒ
ƪ īƆ ĨħŽ ƈıĻŽ ĥƆ ĐÓ
Ɔ ĭƆ ĤŽ õƪ ĭƆ ĤƆ
« Dis : ‹S’il y avait sur terre des Anges marchant tranquillement, Nous
aurions certes fait descendre sur eux du ciel un Ange-Messager›. » (al-Isra, 17 : 95)

īĺ ƈ ƈ Ɔ ƇĬÓĠÓ Ɔ ĥƇ ĠƇ ÉŽ ĺƆ źÒ


Ɔ ïĤÓìÒij Ɔ ĨƆ IJ
Ɔ ĦÓ
Ɔ đƆ ĉƪ ĤÒĪij ƪ ïƃ ùƆ ä
Ɔ ħŽ İÓ
Ƈ ĭƆ ĥŽ đƆ äÓ
Ɔ ĨƆ IJƆ
« Et Nous n’en avons pas fait des corps qui ne consommaient pas de nourri-
ture. Et ils n’étaient pas éternels. » (al-Anbiya, 21 : 8).
De même, préserver leurs suiveurs de faire le même type d’erreur et leur mon-
trer la bonne manière d’agir demeurent l’apanage des prophètes en matière d’exem-
plarité. Par exemple, après que son peuple soit resté indifférent à ses 950 années
d’appel à la Vérité, Noé u plaida ainsi :

óāƈ ÝĬÓ ĘÔijĥĕĨĹĬƈ ƆÈįÖòÓĐïĘ


Ž Ɔ Ɔ Ƅ ƇŽ Ɔ ž ƇƪƆ Ɔ ƆƆ
« Il invoqua donc son Seigneur : ‹Moi, je suis vaincu. Fais triompher (Ta
cause). » (al-Qamar, 54 : 10).
Son peuple ayant causé sa propre ruine en se noyant au milieu du Déluge
consécutivement à la prière de Noé u, ce dernier rempli de compassion paternelle,
plaida de nouveau :

ƈ ĭƈ ÖÒĪƈƪ ÌÔƈ ò
Ĺĥƈ İŽ ƆÈīŽ ĨĹ Ƈ ž Ɔ
« Ô mon Seigneur, certes mon fils est de ma famille ! » (Houd, 11 : 45).
Pourtant, pour avoir désiré que son fils soit sauvé alors que la destruction de
son peuple était effective, Dieu lui envoya l’avertissement suivant :

īĻ ƈƈ Ɔ ƆÈğƆ ƇčĐƈ ƆÈĹžĬƈ Ìƈ


ƈ Ɔ ġƇ ÜĪ
Ɔ ĥİÓåƆ ĤŽ ÒīƆ ĨĪij
« Ne me demande pas ce dont tu n’as aucune connaissance. » (Houd, 11 : 46).
Cette réprimande adressée à Noé u fournit un précédent pour tous les
croyants à venir jusqu’à la Dernière Heure.
L’attribut la yukhti’, ou l’infaillibilité, n’est particulier qu’au Tout-Puissant.
138 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il est impossible pour les mortels d’éviter les erreurs. Quoi qu’il en soit, un
musulman doit s’efforcer de minimiser ses erreurs, d’assurer ce que le Coran, à
plusieurs reprises, conseille, en d’autres termes le dhikr, c’est-à-dire la convivialité
du cœur avec Dieu, car il est impossible de faire une injustice ou de commettre une
erreur quand le cœur dit « Allah ».
Ainsi parle le Tout-Puissant :

Īij ƈ ęƆ ĤŽ ÒħİğƆ Ñƈ ĤƆ IJƇÈħıùęƇ ĬƆÈħİÓùĬƆÉĘƆ ųÒÒij


Ɔ ĝƇ øÓ ùƇ ĬƆ īĺ ƈ Ɔ ƇĬijġƇ ÜƆ źƆ IJ
ƇƇ Ž ŽƇ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƆƩ Ɔ ñĤƪ ÓĠÒij Ɔ
« Et ne soyez pas comme ceux qui ont oublié Allah ; [Allah] leur a fait alors
oublier leurs propres personnes ; ceux-là sont les pervers. » (al-Hashr, 59 : 19).
Puis en référence à ceux qui ignorent cet aspect :

īĻƈ
ƅ ×Ĩ ƅ Ɔ Ę ƈ
ƈ ğƆ Ñƈ ĤƆ IJƇÈųÒ ƈ ƈ ıÖijĥƇ ĜƇ Ùƈ ĻøÓ
ƈ ĝĥĤƈ ģĺijĘ
Ƈ ĢŻƆ ĄĹ Ž Ʃ ƈóĠŽ ðīĨħ
ž ƇƇ Ɔ Ɔ Žž Ƅ Ž Ɔ Ɔ
« … Malheur donc à ceux dont les cœurs sont endurcis contre le rappel
d’Allah. Ceux-là sont dans un égarement évident. » (az-Zumar, 39 : 22).
Outre les cinq attributs prophétiques mentionnés, à savoir sidq, amanah,
fatanah, tabligh et ismah, il en existe trois autres réservés exclusivement au Noble
Messager r qui sont :
1. Le Prophète Choisi r est le Bien-aimé de Dieu, le plus grand de tous les
prophètes L, le plus noble des hommes.
Le poète Necip Fazil le dépeint de façon concise comme suit :
L’éternité a épuré ton parfum,
Tu es le miel, l’Être est ton peigne !
2. En tant que rasoul’us-thaqalayn, le Saint Prophète r a été envoyé à tous les
hommes et les djinns. La religion qu’il a apportée est valable jusqu’à la fin des temps.
D’autres prophètes L furent envoyés pour une période temporaire, quelques-uns
d’entre eux ayant été envoyés pour un certain groupe de personnes en particulier.
À cet égard alors que les miracles accomplis par les autres prophètes L sont res-
tés exclusifs à leur époque, les miracles du Prophète de Dieu r s’étendent en tout
temps. Le Saint Coran, en particulier, en tant que plus grand miracle lui ayant été
attribué, est déterminé à demeurer intact jusqu’à l’Heure Ultime, imperméable à
toute falsification.
3. Il est Khatam’ul-Anbiya, le Sceau des Prophètes. Qui plus est, le Jour du
Jugement, Le Messager de Dieu r aura le privilège de mener la Grande Intercession,
shafaat’ul-uzma et d’atteindre la Station de la Louange, maqam’ul-mahmud.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 139

C’est lui r qui intercèdera donc en faveur des pécheurs de sa Communauté


(Oumma), une intercession qui sera acceptée. (Voir Al Boukhari, Tawhid, 36).
C’est un fait incontestable que l’amour que l’on ressent envers quelqu’un dont
on admire le caractère et que l’on essaie d’imiter est une tendance naturellement
enracinée. Identifier des figures parmi les plus exemplaires et suivre leur voie est
donc d’une importance capitale pour les êtres humains. Être de la grâce éternelle
et de la générosité, le Tout-Puissant n’a donc pas seulement envoyé la Révélation
à l’humanité, mais aussi des prophètes ornés des qualités les plus parfaites, figures
quintessentielles qui sont l’incarnation vivante de la Révélation divine. De tels
personnages accomplis respirent la perfection dans tous les aspects, qu’ils soient
religieux, scientifiques ou moraux. En fait, en ayant perfectionné certains modes
de comportement, chaque prophète a rendu un service exceptionnel à l’humanité.
Par exemple, et ce parmi les prophètes L, un regard sur la vie de Noé u nous
frappe immédiatement dans la teneur de son appel patient et persévérant à la Vérité,
et son aversion ultime et passionnée à l’égard de l’incrédulité et de ses représentants.
L’existence première d’Ibrahim u fut une lutte implacable contre l’idolâtrie
en tentant de l’éradiquer définitivement et par laquelle il fournit un exemple unique
de confiance dans le Tout-Puissant qui, en retour, transforma en sa faveur le feu de
Nemrod en jardin de roses.
Musa u passa la majeure partie de sa vie à combattre l’oppresseur Pharaon et
les siens et institua pour les croyants un système social, à l’ombre de la Loi Sacrée.
La particularité de l’appel de Jésus u fut une tendresse de cœur emplie de
miséricorde et de compassion à l’égard des êtres humains. Non moins importante
dans son appel fut la promotion des vertus sublimes comme l’humilité et la clé-
mence envers autrui.
En dépit de son règne éblouissant et légendaire, le maintien de l’état spirituel
de Suleyman u le fit croître toujours davantage dans son assujettissement au Réel,
fort de son esprit de gratitude et d’humilité, et force l’admiration.
La vie d’Ayyoub u révèle des exemples de courage et de force morale contre
les difficultés, de gratitude envers Dieu, en tout temps, peu importe la gravité de la
situation.
La vie de Yunûs u offre un parfait exemple de la manière de se tourner et de
s’attacher au Tout-Puissant à travers la repentance, à cause de remords provoqués
par une erreur commise.
Même pendant son temps de captivité, Yusûf u personnifia le zénith de la
loyauté envers le Tout-Puissant, ayant été appelé sur Son chemin et ayant repoussé
avec pureté la tentative de séduction perpétrée par une belle femme riche et réputée.
140 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Son cœur, embelli de piété, fut comme un puits de science en matière de perfection
comportementale.
La vie de Dawûd u fut remplie d’une excellence de sentiments à l’égard de la
Majesté Divine. Plein de crainte et de respect envers Lui, ses invocations et glorifica-
tions plaintives à Son adresse, sa façon de se tourner vers Lui, sérieuse et suppliante,
fournissent de grandes leçons.
La vie de Yaqûb u demeure l’essence même de la nécessité d’éviter tout déses-
poir, même dans les heures les plus sombres, liant avec une patience constante tous
ses espoirs vers le Tout-Puissant et ne désespérant jamais de Sa miséricorde.
Muhammad Mustafâ r, le Sceau des Prophètes, quant à lui, incarne tous les
attributs distingués, connus et inconnus, de la totalité des prophètes L venus avant
lui - soit 124000 - et représente le sommet de la vertu et du bon comportement. Sa
vie est un vaste océan duquel la vie de tous les autres prophètes n’est qu’un ensemble
de rivières tributaires qui se déversent en lui.

Afin que la religion puisse prospérer dans un environnement de paix et de bon-


heur, la famille humaine, qui a commencé avec Adam et Eve, opta pour un certain
emplacement à La Mecque, sur lequel est aujourd’hui la Ka’ba, en tant que premier
lieu de culte.
Répartis sur de vastes territoires en raison des vicissitudes de l’existence, les
descendances d’Adam u poursuivirent leur vie religieuse, guidés par les prophètes
L, et restèrent fidèles à des vérités divines qui, depuis des temps immémoriaux,
furent exposées à la distorsion des ignorants et de tous ceux qui s’acharnent à
détruire la religion.
Par le biais de l’envoi successif de prophètes, le Tout-Puissant répara les dégâts
infligés et revivifia à chaque fois la religion grâce à un nouveau souffle de vie.
L’humanité fut ainsi sauvée à chaque fois du désarroi universel, individuel et social.
Puis celui qui entra dans ce monde fut le grand Muhammad Mustafâ r duquel la
durabilité de la religion rencontra son exposition définitive et la plus grandiose à
l’endroit même où elle fut inaugurée.
Il est aujourd’hui inconcevable d’imaginer une plus grande perfection au-delà
de ce qu’elle dispense dans la mesure où la reviviscence régulière de la religion par le
biais de l’envoi de prophètes est parvenue à son terme, faisant de l’islam la religion
agréée par Dieu.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 141

Sur l’humanité du Saint Prophète r


Allah renforça l’humanité en envoyant des prophètes L issus de leur propre
peuple, qui vivaient parmi eux, et dont les détails de leur vie étaient connus par tous.
En réponse au souhait des idolâtres de voir un miracle, le Tout-Puissant conseilla au
Noble Messager r :

öÓ Ɔ ĭĤÒ
ƪ ďƆ ĭƆ ĨÓ
Ɔ ĨƆ IJ
Ɔ ƃźijøƇ òÒ ƪ óƃ ýƆ ÖƆ ƪ źƆÌÛĭ Ƈ ĠƇ ģŽ İĹƈ
Ɔ Öž ò
Ɔ ĪÓƆ éƆ ׎ øƇ ģŽ ĜƇ
ƈ ĪÓ Ɔ đƆ ÖƆ ƆÈÒŽ ijƇĤÓĜƆ ĪƆÈƪźÌƈ ĴïƆ ıƇ ĤŽ ÒħƇ İÅÓ ƈ
ĹĘ Ɔ Ġ
Ɔ ijŽ Ĥƪ ģĜƇ ƃźijøƇ òÒ
ƪ óƃ ýƆ ÖƆ ƇųÒ
Ʃ ß Ƈ ä Ɔ ðŽ Ìƈ ÒŽ ijƇĭĨËŽ ƇĺĪƆÈ
ƃźijøƇ òÓ ƈ ƈƈ ƈ ĨĂƈ òƆŶÒ
ƪ ġƃ ĥƆ ĨÅÓ
Ɔ ĩƆ ùĤÒƪ īƆ ĨħŽ ƈıĻŽ ĥƆ ĐÓ
Ɔ ĭƆ ĤŽ õƪ ĭƆ ĤƆ īĻ
Ɔ žĭÑĩƆ ĉŽ Ĩ
Ƈ Īij
Ɔ ýƇ ĩŽ ĺƆ ÙƄ ġƆ Ðŵ Ɔ Ž
« …ou que tu aies une maison [garnie] d’ornements ; ou que tu sois monté
au ciel. Encore ne croirons-nous pas à ta montée au ciel, jusqu’à ce que tu fasses
descendre sur nous un Livre que nous puissions lire›. Dis-[leur]: ‹Gloire à mon
Seigneur ! Ne suis-je qu’un être humain-Messager ? Et rien n’empêcha les gens de
croire, quand le guide leur est parvenu, si ce n’est qu’ils disaient : ‹Allah envoie-
t-Il un être humain-Messager ? Dis : ‹S’il y avait sur terre des Anges marchant
tranquillement, Nous aurions certes fait descendre sur eux du ciel un Ange-Mes-
sager›. » (al-Isra, 17 : 93-95).
Le Messager de Dieu r rappelle son incapacité à produire le moindre miracle,
sauf par le biais et la permission du Tout-Puissant, et la réalité qu’il n’est, après tout,
qu’un être humain. Le Coran réitère ce fait à de nombreuses reprises, comme par
exemple :

ƈ IJįĤƆ Ìƈ ħġƇ ıĤƆ Ìƈ ÓĩĬƪ ƆÈĹĤƆ Ìƈ ĵèijĺħġƇ ĥƇ ᎠĨ


ƈ
ïƄ èÒ Ɔ Ƅ Ž Ƈ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ Ž ž óƄ ýƆ ÖÓƆ ĬƆ ƆÈÓĩƆ Ĭƈƪ ÌģŽ ĜƇ
« Dis : Je suis en fait un être humain comme vous. Il m’a été révélé que votre
Dieu est un Dieu unique ! » (al-Kahf, 18 : 110).55
Les paroles ci-dessous, énoncées par le Saint Prophète r, ne laissent aucun
doute sur le fait qu’il soit un être humain comme les autres :
« Moi aussi, je suis un être humain, comme le reste d’entre vous. Vous venez à
moi pour régler vos protestations. Certains peuvent avoir plus de preuves ou être plus
persuasifs, et en raison de cela j’émets un jugement en fonction de ce que j’entends.
Celui que j’ai favorisé dans mon jugement au détriment du droit de son frère, qu’il
sache que je lui ai remis une partie des flammes infernales. » (Al Boukhari, Shahadah, 27 ;
Mazalim, 16 ; Muslim, Aqdiyya, 5).

55. Pour d’autres versets coraniques voir Fussilat, 6 ; al-Muminûn, 33, 24 ; al-Anbiyâ, 2-3 ; Ibrâhîm, 11.
142 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les prophètes L ont été envoyés non seulement pour communiquer la Révéla-
tion, mais aussi pour concevoir un style de vie conforme à la voie divine, manifester
un caractère exemplaire en toutes circonstances et fournir un exemple concret qui
soit au point. Puisque cela ne pouvait être réalisé que dans une société composée
d’humains, seul un être humain pouvait accomplir cette tâche. Si des anges avaient
été envoyés à leur place, la communication orale de la Révélation divine aurait été la
seule chose qu’ils auraient été pu faire. Étant incapables de mener une vie en société
et par conséquent incapables de se rattacher aux problèmes humains, ils auraient
échoué dans leur tentative de traiter la condition humaine. Les êtres humains
auraient inventé l’excuse de ne pas être des anges, il est naturellement au-delà de leur
pouvoir d’obéir aux commandements et aux interdictions qu’ils communiquent.
À cet égard, étant dans l’obligation de fournit un exemple pour sa commu-
nauté, le Messager de Dieu r n’a pas mené la vie extraordinaire, l’autorité d’être
un prophète au-delà de ce qui lui avait été accordé. Ses exploits merveilleux sont en
effet très rares et seulement effectifs à l’échelle individuelle. La majorité des activités
qui ont rempli sa vie évoluèrent autour des nécessités de la société, conformément à
leurs capacités. C’est pour cela qur quiconque a l’intention de devenir un commer-
çant idéal, un chef de famille parfait, un commandant superbe, un administrateur…
peut très bien tirer des principes de la vie du Saint Prophète r qui lui permettront
d’être ce qu’il désire être.
La société, à travers l’histoire, s’est tenue dans l’illusion que l’être humain ne
peut pas être un Messager du Tout-Puissant. Le fait que ces prophètes aient été
comme eux des êtres humains, qu’ils aient eu des femmes et des enfants, et subi-
viennent à leurs besoins, cela fut considéré comme étant un défaut et par extension,
cela fini attribuer une erreur sur le décret divin. Plus d’un prophète a été confronté
à une telle objection par les mêmes gens vers qui il a été envoyé.
À l’inverse de cette objection l’amour et la dévotion excessive des disciples de
certains prophètes L aboutit, au fil du temps, à une croyance selon laquelle ils
devaient être surhumains. Les glorifiant avec une intensité extrême, beaucoup ont
jugé bon d’attribuer à leur prophète L un statut divin, tombant ainsi dans l’idolâ-
trie. Certains confondirent leur prophète avec Dieu, d’autres choisirent de l’appeler
Fils de Dieu, voire Dieu incarné, aboutissant à une corruption du monothéisme et
à une promotion de l’anthropomorphisme comme c’est le cas avec le christianisme.
Le but de l’accent mis sur l’humanité du Saint Prophète r dans le Coran et le
Hadith est de dissuader les croyants de tomber dans l’erreur qui a tourmenté les
gens avant eux.
Omar t rapporte que le Noble Messager r a dit :
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 143

« Ne me louez pas de manière excessive, de la même façon dont les chrétiens


louaient Jésus, le fils de Marie. Je suis sans aucun doute un serviteur de Dieu. Alors
appelez-moi dûment « serviteur et messager de Dieu ». » (Al Boukhari, Anbiya, 48).
Selon le récit d’un autre hadith nous le Messager de Dieu r lance un avertisse-
ment à un groupe prompt à le louer à l’excès :
« Ne m’élevez pas au-dessus de ce que je mérite… Dieu a fait de moi un serviteur
avant qu’il ne fasse de moi un prophète. » (Hakim, III, 197/4825 ; Haythamî, IX, 21).
Un autre motif du rappel fréquent de la condition humaine et de servitude au
Tout-Puissant du Prophète r est son insondable humilité. Sans doute, bien des fois,
après avoir cité en reconnaissance les bénédictions que lui avait accordées le Tout-
Puissant, il était toujours prêt à leur adjoindre l’expression : « Ce ne doit pas être un
objet de glorification. » (At Tirmidhi, Manâqib, 1/3615). Abdullah ibn Jubayr t apporte
l’explication suivante :
« Le Messager de Dieu r se promenait un jour en compagnie de quelques
Compagnons lorsque l’un d’eux fit un mouvement pour le préserver du soleil, tel
un voile. Le Messager de Dieu r, intervenant immédiatement, ramena le voile au
sol avant de dire :
- Je suis un être humain, tout comme toi. » (Haythamî, IX, 21)
Il faut rappeler, que le Saint Prophète r bien qu’il soit de nature humaine, ne
ressemble pas à un autre humain. Le poète a écrit:
Il n’y en a pas deux pareils dans toute l’histoire,
Sur chaque langue vit sa mémoire,
Les Cieux représentent la perfection de son Ascension,
Les anges se lèvent admirant sa beauté,
L’essence des mots réside dans sa personnalité,
Un homme, qui préside encore sur les anges en toute suprématie.

Le sens caché de l’illettrisme (ummi) du Saint Prophète r


Le terme ummi abrite une variété de significations, dénotant notamment celui
qui reste pur et sans tache tel un nouveau-né, ou bien un illettré qui n’a jamais reçu
d’éducation formelle, ou bien les Mecquois, ou, en général, les Arabes, à l’exception
des Gens du Livre résidant en Arabie.
Selon le Saint Coran, le Noble Messager r fut un ummi, c’est-à-dire un illettré,
sachant ni lire ni écrire. comme le stipule ce verset :
144 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

įƇ ĬƆ IJïƇ åƈ ĺĸ ƈ ƈ đƈ×Ýĺīĺñƈ ĤÒ


Ɔ ñĤƪ ÒĹƪ Ĩž ƇŶÒĹƈƪ ×ĭĤÒƪ ĢijƆ øƇ óĤÒĪij
ƪ Ɔ Ƈ ƪƆ Ɔ ƪ
ƈ åƈ ĬŽ Ÿƈ ÒIJ
ģĻ ƈ ƈ ƈ ÖijÝġŽ Ĩ
Ɔ ØÒòƆ ijŽ ÝĤÒĹ
ƪ ĘħŽ İƇ ïĭ Ɔ ĐÓ ƃ Ƈ Ɔ
« Ceux qui suivent le Messager, le Prophète illettré qu’ils trouvent écrit
(mentionné) chez eux dans la Thora et l’Evangile. » (al-Araf, 7 : 157).
L’illettrisme du Messager de Dieu r était une chose connue des idolâtres de
l’époque qui, selon le témoignage coranique, firent l’allégation suivante :

ŻĻƃ Āƈ ƆÈIJ ƈ
Ɔ Øƃ óƆ ġŽ ÖƇ įĻŽ ĥƆ Đĵ
Ɔ ĥƆ ĩŽ ÜƇ ĹƆ ƈıĘƆ ÓıƆ ×Ɔ ÝƆ ÝƆ ĠÒ
Ž īĻ ƈ Ž óĻĈÓ
Ɔ ĤIJƪ ƆŶÒ
ƈ øƆÈÒijĤÓĜIJ
Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
« Et ils disent : ‹Ce sont des contes d’anciens qu’il se fait écrire ! On les lui
dicte matin et soir !› » (al-Furqan, 25 : 5).
Les raisons pour lesquelles le Saint Prophète r a été appelé ummi ou illettré
peuvent être énumérées comme suit :
1. Il est resté aussi pur que le jour où il est né, une pureté prédispositionnelle
à travers laquelle il a été préservé de toute salissure provenant de connaissances
externes, formé et éduqué personnellement par le Tout-puissant en lieu et place.
Le Coran stipule dignement :

ŻĻƃ Āƈ ƆÈIJ ƈ
Ɔ Øƃ óƆ ġŽ ÖƇ įĻŽ ĥƆ Đĵ
Ɔ ĥƆ ĩŽ ÜƇ ĹƆ ƈıĘƆ ÓıƆ ×Ɔ ÝƆ ÝƆ ĠÒ
Ž īĻ ƈ Ž óĻĈÓ
Ɔ ĤIJƪ ƆŶÒ
ƈ øƆÈÒijĤÓĜIJ
Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
« Nous te ferons réciter (le Coran) de sorte que tu n’oublieras. » (Al A’la 87: 6).
Comme l’a également professé le Saint Prophète r :
« Mon Seigneur m’a formé et m’a donné une belle éducation. » (Suyutî, I, 12).
Fendant sa poitrine à trois reprises (sharh’us-sadr), le Tout-Puissant nettoya
toutes les négativités présentes dans le cœur du Saint Prophète r et les remplaça par
des sentiments sublimes de paix, de sérénité, de miséricorde, de compassion, de foi
et de sagesse.
2. Son illettrisme rappelle que le Saint Prophète r était un Arabe et n’appar-
tenait pas aux Gens du Livre.
3. L’accent est mis sur le fait que le Saint Prophète r est né à La Mecque,
connue aussi sous le nom d’Ummu’l Qura. Qaryah, dont le pluriel est Qura, est un
mot arabe qui désigne des villages ou des petites cités. Ummu’l Qura signifie donc
la mère des cités, c’est-à-dire le tout premier milieu où les hommes se sont installés.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 145

Les Arabes étaient la plupart illettrés ; c’était un peuple éloigné de toute culture,
qui ne savait ni lire ni écrire. Dieu leur envoya un prophète issu de leur peuple ; un
prophète typique dont le mélange de pureté intérieure est resté intacte.
Un verset coranique nous apporte la description suivante :

ij ƈ źijøòīĻƈĻĨƈ ƇŶÒĹĘ
 ĥƇ ÝŽ ĺƆ ħıƇ ĭŽ Ĩ ƈ ß Ɔ đƆ Öĸ ƈ
Ž ž ƃ Ƈ Ɔ Ɔ žž Ž Ɔ ñĤƪ ÒijƆ İƇ
ÙƆ ĩƆ ġŽ éƈ ĤŽ ÒIJƆ ÔÓ
ƈ ƈ
Ɔ ÝƆ ġĤŽ ÒħƇ ıƇ ĩƇ ĥž đƆ ƇĺIJ
ƈ
Ɔ ħŽ ƈıĻĠž õƆ ƇĺIJ
ƈ ƈ ħ ƈıĻĥƆ Đ
Ɔ įÜÓĺÆ
Ɔ Ž Ž Ɔ
īĻƈ
ƅ ×Ĩ ƅ Ɔ ęƈ ĤƆ ģƇ ×ĜƆ īĨÒij ƈ ƇĬÓĠĪƈ
ƫ ĢŻƆ ĄĹ Ž Ɔ ÌIJƆ
« C’est Lui qui a envoyé à des gens sans Livre (les Arabes) un Messager des
leurs qui leur récite Ses versets, les purifie et leur enseigne le Livre et la Sagesse,
bien qu’ils étaient auparavant dans un égarement évident… » (al-Jumu’a, 62 : 2).
Le Saint Prophète r jette plus de lumière sur la question :
« Nous sommes un peuple d’illettrés. Nous ne savons ni écrire, ni calculer. »
(Muslim, Siyam, 15).

Le terme « illettré » dénote un manque de connaissances quand il est utilisé


pour les gens ordinaires ; en revanche, s’agissant du Messager de Dieu r, il porte
une connotation de perfection et de supériorité.
Qu’un prophète, dont la perfection de la connaissance et l’action puissent lais-
ser les soi-disant cultivés dans la crainte, ne pouvait être qu’une preuve fabuleuse
qu’il était bien envoyé directement par le Tout-Puissant.
Dieu déclare :

įƫƇ ĉí
Ƈ ÜƆ źƆ IJ ƈ Ĩ ƈ įƈ ĥƈ ×ĜƆ īĨij ƈ ĥƇ ÝÜƆ Ûĭ
Ɔ ÔÓ ƅ ÝƆ Ġī
Ž Ž Ɔ ĠÓ Ƈ ĨƆ IJƆ
Ɔ ĥƇ ĉƈ ׎ ĩƇ ĤŽ ÒÔÓ
Īij Ɔ ÜƆ òŽ źÒ ƪ ðƃ Ìƈ ğƆ ĭĻƈ ĩƈ ĻƈƆ Ö
« Et avant cela, tu ne récitais aucun livre et tu n’en écrivais aucun de ta main
droite. Sinon, ceux qui nient la vérité auraient eu des doutes. » (al-Ankabut, 29 : 48).
Hormis par la Révélation divine, il n’y a aucun moyen connu pour qu’un
ummi, grâce à son inspiration intérieure, puisse reconstituer le Saint Coran, un
miracle qui laisse impuissants tous les hommes et les djinns, et donner un aperçu
de faits historiques tels que les récits relatifs à Pharaon, la mère de Moïse u et
Joseph u.
146 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Coran présente à l’humanité et de la façon la plus évocatrice les expériences


vécues par les gens du passé, en conformité avec les exigences de la science contem-
poraine et les normes de la philosophie de l’histoire.56
Être illettré, d’un autre point de vue, est le minimum obligatoire pour que les
mots du Coran aient une universalité complète et totale. Faisant penser à l’apho-
risme « le leader de la caravane est toujours le plus faible », et pour s’assurer de
délivrer son message à l’humanité entière et rendre son application réalisable par
tous les êtres humains, le Coran a, dans un sens, ciblé, avant tout, le niveau d’anal-
phabétisme. De telle sorte que comprendre et vivre l’islam exige aussi peu que de
rester un être humain ordinaire.
D’entrée de jeu, encore une fois, il s’agit pour ces mêmes humains de détermi-
ner les actes cultuels quotidiens conformément au mouvement du soleil et les actes
cultuels mensuels et annuels conformément au mouvement de la lune.

Hilyat’us-Saadah
Le mot hilyah signifie ornements, bijoux, ainsi que la beauté de l’esprit et de
l’expression. Par convention, le terme désigne aussi une description verbale de
l’apparence du Saint Prophète r dans la mesure où le permet la capacité des mots
prononcés par les mortels.
Nahifi admet :
« Quiconque rédige la hilyah du Messager de Dieu r et prend un certain temps
pour la contempler, sera assurément protégé par Dieu contre toute maladie, trouble
et mort subite.
Celui qui prend la hilyah avec lui en voyage sera tout au long de ce voyage sous
la protection divine. »
Beaucoup de savants musulmans ont mis en avant leurs points de vue en ce qui
concerne les nombreuses bénédictions de la hilyah du Noble Messager r. La tradi-
tion liée à sa mémorisation, elle-même motivée par l’espoir de voir en rêve le Saint
Prophète r, survit à ce jour dans de nombreux pays musulmans.
Ceci dit, comparable à l’inadéquation de toute description orale de l’apparence
du Saint Prophète r, une beauté décrite comme « lumière sur lumière », il est aussi
nécessaire de considérer l’absolue inadéquation de tout visage humain quand on
le regarde fixement en essayant de comprendre sa réalité. Une articulation parfaite
56. De plus certains des récits historiques fournis par la Bible s’opposent aux résultats de l’historiographie
moderne et de la science. La création de l’univers et de ses étapes, la date de l’arrivée de l’homme sur
terre et le Déluge sont quelques-uns de ses récits contradictoires. (Voir Maurice Bucaille, la Bible, le
Coran et la Science, p.53-82, 157-175).
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 147

des beautés de cet être exceptionnel, en qui le Tout-Puissant a rassemblé toutes les
finesses qu’Il n’a jamais accordées à l’humanité, reste impossible.
Comme l’a dit Haqqanî :
Aucun de ceux qui savent cela n’a démenti,
Parmi la création, qu’il n’a pas son pareil.
Ces descriptions tentées du Saint Prophète r, Beauté de toutes les Beautés, ne
servent simplement qu’à consoler et apaiser les cœurs qui n’ont pas eu l’opportu-
nité de vivre pendant l’Âge du Bonheur, toujours brûlants de son désir. Ceux qui
véhiculent les descriptions précieuses du Saint Prophète r risquent de ne nous
présenter qu’une simple goutte tirée d’un vaste océan. Les croyants, qui ont tenté de
voir l’océan à travers les cristaux de cette goutte, se sont efforcés de profiter de son
exemple quintessentiel, et en raison de l’intensification de leur amour pour lui, pour
essayer d’être conforme à sa conduite et à sa moralité.
Sans aucun doute, puisque contraints par leur prédisposition, les cœurs s’in-
clinent toujours vers le beau, avec le désir de faire un avec lui. L’attraction s’empare
de l’esprit puisqu’il devient exclusivement préoccupé par elle. Le désir de devenir
comme le bien-aimé est greffé dans le cœur, en termes d’esprit et de moralité.
Consécutivement au désir de prendre le bien-aimé comme exemple, on finit par
devenir un avec lui. Et en raison d’une tendance à la prédisposition, il ne fait aucun
doute que ces descriptions du Saint Prophète r ont la capacité d’augmenter l’amour
et l’enthousiasme à son encontre.
À vrai dire, Hasan utilisa les mots suivants pour décrire son état émotionnel
tandis qu’il demandait à son oncle d’accueil Hind ibn Abi Hala de lui faire une des-
cription du Saint Prophète r :
« Mon oncle Hind ibn Abi Hala avait coutume de décrire le Messager de Dieu
dans le plus beau style. J’aimais quand mon oncle le décrivait, car mon cœur conti-
nuait à lui être attaché et à rester ferme sur son chemin. » (At Tirmidhi, Shamail, p.10)
Hasan et Husayn y qui ne se lassaient jamais d’entendre les autres décrire le
Saint Prophète r ont entendu à maintes reprises leur père Ali t décrire en détail son
apparence gracieuse, une description qu’ils ont transmise aux générations futures.
Pourtant, cela donne le droit de s’interroger sur la portion de la réalité du Saint
Prophète r qui est vraiment véhiculée par ces représentations. De même, on ne peut
comprendre la hilyah conformément à l’intensité de l’amour qu’il y a en son sein et
en rapport avec les mots malgré tout limités qui peuvent être transmis.
Ainsi, malgré notre insuffisance flagrante à cet égard, ce que nous confessons
humblement, nous souhaitons néanmoins présenter ici une simple goutte des récits
qui dépeignent l’aspect gracieux du Saint Prophète r et qui ont coulé jusqu’à nous.
148 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un bref aperçu de ces récits révèle que :


Le Saint Prophète r était de taille moyenne, plus proche de la grande taille.
Il avait une stature parfaitement équilibrée et un corps bien proportionné.
Doté d’une large poitrine et d’épaules larges, il possédait le sceau de la prophétie
qui ornait l’endroit spécifique situé entre ses deux omoplates.
Ses os et ses articulations étaient assez développés.
Il avait le teint blanc rosé, comme une rose. Brillante comme la lumière, sa
peau était plus douce que la soie. Son corps était toujours gracieux, propre, émettant
un parfum rafraîchissant. Peu importe qu’il se parfume ou pas, sa peau et sa sueur
avaient le plus élégant et le plus exquis des parfums. Si quelqu’un devait lui serrer
la main, ses mains restaient plongées chaque jour dans le parfum élégant du Saint
Prophète r. Quand il caressait la tête d’un enfant, on pouvait le reconnaître immé-
diatement parmi les autres à cause de son doux parfum.
Côté transpiration, sa peau ressemblait à une rose parsemée de rosée.
Il avait une barbe dense qu’il ne laissa pas pousser au-delà d’une poignée. Après
son décès, il arborait environ une vingtaine de mèches de cheveux gris sur ses che-
veux et sa barbe.
Ses sourcils avaient la forme d’un croissant et une bonne distance les séparait.
Une veine, située entre ses sourcils, gonflait visiblement toutes les fois où il était
gêné à cause d’une chose ayant trait à la Vérité.
Il se brossait les dents avec un miswak, une pratique fréquente qu’il recomman-
dait aux autres.
Ses cils noirs étaient très longs. Ses yeux étaient étonnamment grands ; entière-
ment foncés quand tout était foncé, entièrement pâles quand tout était pâle, comme
si les mains de la Divinité les avaient garnis de khôl dans un passé d’éternité.
La beauté de son aspect était tout aussi exceptionnelle que la perfection de sa
disposition spirituelle. (Voir Hâkim, III, 10 ; Ahmed, I, 89, 96, 117, 127; IV, 309 ; Ibn Saad, I, 376,
412, 420-423; II, 272; Ibn Kathir, al-Bidaya, VI, 31-33; At Tirmidhi, Shamâil, p. 15).

Son visage brillait comme la pleine lune. Aïcha c a dit :


« Le visage du Messager de Dieu r était si rayonnant que même dans l’obscurité
de la nuit je profitais de sa lumière pour passer un fil à travers le chas d’une aiguille. »
Entre ses omoplates se trouvait une marque divine qui attestait de la mission
prophétique. Plus d’un Compagnon recherchaient à poser leurs lèvres sur cette
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 149

marque. La disparition du sceau, après le décès du Saint Prophète r, fut acceptée


comme la confirmation de sa mort. (At Tirmidhi, Shamâil, p. 15; Ibn Saad, II, 272).
Son corps béni n’a subi aucun changement après sa mort. Abû Bakr t, regar-
dant fixement la Lumière de l’Être les yeux remplis de larmes quelques instants après
qu’il eût rendu le dernier soupir, fit tristement remarquer :
« De même que ta vie, ta mort a été belle, ô Messager de Dieu. »
Et il plaça ses lèvres sur le front du Saint Prophète r.
Il est impossible de décrire justement la profondeur de l’élégance de son cœur.
Ne prononçant jamais un mot en vain, chacune de ses paroles véhiculait sagesse
et conseil.
Il n’y avait aucune place pour la médisance et la discussion inutile dans son
vocabulaire. Il parlait aux gens en fonction de leurs capacités.
Il était gentil et humble. Bien qu’il n’ait jamais exprimé sa joie en riant excessi-
vement, son visage affichait toujours un sourire chaleureux.
Si quelqu’un venait le voir, la crainte le terrassait ; même une brève conver-
sation suffisait à implanter des sentiments profonds d’amour et d’affection à son
égard.
Il traitait le juste avec respect, en fonction de son niveau de piété. Ses proches
recevaient de lui une part massive de gentillesse et de respect.
C’était habituel pour lui de prolonger la tendresse qu’il nourrissait envers ses
proches afin de la prolonger au reste de la société.
Lui-même nous rappelle explicitement ces qualités comme suit :
« Aucun de vous ne peut être un vrai croyant s’il ne désire pour autrui ce qu’il
désire pour lui-même. » (Al Boukhari, Iman, 7; Muslim, Iman, 71-72).
Il traitait ses serviteurs au-delà de toute expression, les nourrissant de ce qu’il
avait et les vêtant avec les habits que lui-même portait. Généreux et compatissant, le
Saint Prophète r avait trouvé un équilibre parfait entre courage et bonté.
Le Messager de Dieu r était un homme de parole et tenait toujours ses pro-
messes. Supérieur en tout en matière de vertu, d’intelligence et d’acuité, il mérite
vraiment toutes les louanges qui lui sont dues. Avec la beauté de l’apparence associée
à la perfection de la vie, il demeure une créature sacrée sans comparaison dans toute
la création.
Son regard était perpétuellement triste. Enfermé dans un état méditatif continu,
il ne parlait que lorsque c’était nécessaire. Bien qu’il s’exprimât lentement, il complé-
150 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

tait toutes les phrases qu’il commençait, véhiculant leur sens profond en utilisant le
moins de mots possible. Ses paroles sortaient distinctement, comme les perles d’un
collier. Bien qu’il soit né avec une prédisposition à la douceur, sa stature fut néan-
moins somptueusement imposante.
Il ne se levait jamais de son siège quand il se mettait en colère. En outre, il n’était
pas colérique sauf lorsqu’il y avait une violation de droit et ne punissait personne
sans qu’il ne l’avertisse préalablement, sa colère ne diminuait pas tant que le droit
n’était pas rétabli. Il ne se fâchait jamais, ne développait aucune sorte de vendetta ou
querelle à des fins personnelles.
Il n’entrait jamais chez quelqu’un sans autorisation. Une fois revenu chez lui, il
divisait son temps en trois parties : la première était consacrée à Dieu, la seconde à
sa famille et la troisième à lui-même, désireux par là d’aménager ces moments pour
toutes sortes de gens, tant communs qu’éminents, ne privant jamais personne de son
temps précieux, ne laissant jamais un seul cœur perdu.
Chacun de ses états, chacune de ses actions était une expression du Rappel
Divin.
À la mosquée, il considérait différents endroits avant de s’asseoir, empêchait les
autres de prendre l’habitude de s’asseoir à un endroit particulier et se méfiait de la
consécration de certains endroits et sites. Il n’aimait pas que l’on adopte un compor-
tement vaniteux en public. En entrant dans une assemblée, il s’asseyait là où c’était
disponible, insistant pour que l’on fasse de même.
Chaque fois qu’on le sollicitait pour gérer un problème particulier, quelle que
soit l’importance de la faveur, le Saint Prophète r ne se sentait jamais à l’aise jusqu’à
ce que ce besoin ait été pris en charge.
Quand le problème était impossible à gérer, le Prophète r ne répugnait pas
à consoler les gens avec quelques paroles réconfortantes et encourageantes. Peu
importe la classe sociale à laquelle ils appartenaient, qu’ils fussent riches ou pauvres,
sages ou ignorants, les gens recevaient auprès de lui le même traitement, simplement
pour le fait qu’ils sont des êtres humains. Tous ses rassemblements étaient remplis
de bonté, de sagesse, de bonnes manières, de patience et de confiance, d’abord et
avant tout en Dieu, puis les uns envers les autres. Jamais il ne condamnait explicite-
ment quelqu’un pour ses lacunes. Quand il devait avertir quelqu’un en particulier,
le Noble Messager r faisait subtilement et délicatement allusion à lui, sans lui briser
le cœur et disait :
« Ne vous réjouissez pas quand une catastrophe s’abat sur votre frère musulman
car par Sa miséricorde, Dieu peut l’en délivrer et vous tester » (At Tirmidhi, Qiyamat, 54).
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 151

Non seulement il était toujours préoccupé sur le fait que l’on puisse enquêter
sur les défauts cachés des autres, mais il usait également de sévérité envers ceux qui
étaient occupés à de telles ignominies, car le décret divin a interdit de soupçonner
les autres et de s’interroger sur leurs défauts cachés.
Il ne parlait que rarement, sauf avec le but de récolter le plaisir divin. L’extase
saisissait les assemblées où il parlait. Et quand il parlait, les auditeurs, les oreilles
attentivement tendues, devenaient si passionnés que, selon les mots d’Omar t, s’il y
avait un oiseau perché sur leur tête, il aurait pu y rester des heures sans être perturbé.
Toute sa personne, reflétant sur ses Compagnons y, avait une telle force que,
le plus souvent, le simple fait de lui poser des questions était jugé comme quelque
chose d’inopportun. Ainsi ils attendaient un Arabe du désert qui, peut-être, arrive-
rait et qui, par inadvertance, poserait des questions au Noble prophète r dans le but
de susciter une conversation à partir de laquelle ils pourraient bénéficier de certaines
grâces et bénédictions. (Ibn Saad, I, 121, 365, 422-425; Haythamî, IX, 13).
Timides en sa présence, d’autres avaient attendu pendant deux ans avant
d’avoir trouvé le courage de poser leurs questions.
En raison de sa présence imposante, ils ne pouvaient pas le regarder en face.
Amr ibn Âs t confessa :
Bien que j’aie passé beaucoup de temps auprès du Messager de Dieu r, la
timidité que je montrais en sa présence et l’immense sentiment de respect dû à son
égard m’ont toujours empêché de soulever la tête pour que mon cœur trouve son
plaisir dans la contemplation de son visage sacré et admirable. Si on me demandait
maintenant de décrire l’apparence du Messager de Dieu r, croyez-moi bien que je
ne le pourrais pas. » (Muslim, Iman, 192; Ahmad, IV, 199).
Celui qui souhaite décrire ses traits singuliers ne peut qu’affirmer « ne jamais
avoir vu quelqu’un comme lui avant ou après. » (Ahmed, I, 96).
Alors qu’il visitait une certaine tribu arabe, Khalid ibn Walid t fut sommé par
le chef de décrire le Saint Prophète r :
- C’est impossible, répondit Khalid t, les mots ne peuvent suffire !
- Décris-nous au moins la meilleure de ses qualités, dit le chef, incitant Khalid
à lui fournir cette magnifique réponse :
- Laisse-moi te dire ceci : l’Envoyé reflète l’honneur de l’Envoyeur. L’Envoyeur
étant le Seigneur de l’univers, le Créateur de l’univers, alors imagine ce que peut être
l’honneur de l’Envoyé ! (Munawi, V, 92; Qastallani, Mevâhib-i Ledünniyye Tercü- mesi, p. 417).
152 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Doté d’une immense beauté, d’une majesté à couper le souffle et d’une élégance
éblouissante, nul besoin d’extra-preuve ou de miracle pour prouver qu’il était le
Prophète du Tout-Puissant.
Sa moralité était le Coran, quelque chose gracieusement décrite en détail par
Muallim Naji :
Incarnée en toi est la beauté du Coran, l’éloge de toutes les choses existantes,
Le Coran est ta hilyah écrite de la Main de la Force.
Un ton similaire émane des mots de Mawlana Khalid Baghdadî g, expriman
comment les vertus suprêmes du Noble Messager r vivifient la création tout entière:
« Combien magnifiquement salutaire est le fait que grâce à son existence bien-
veillante, les perles émergent des mers, les émeraudes des pierres dures et les roses des
épines. Vous ne voudriez pas voir le bourgeon ne pas sourire de joie, ainsi que la fleur,
dans un jardin où son comportement admirable est mentionné. » (Diwan, p. 65-66).
Toutes les beautés se sont unies dans le Messager de Dieu r, rayonnant prati-
quement tout son corps. Pourtant, personne n’a été capable de percevoir les beautés
du Saint Prophète r dans leur intégralité.
En témoigne les mots de l’Imam Qurtubi g :
« La beauté de l’apparence du Messager de Dieu n’est jamais complètement
apparue. Si la totalité de ses beautés avait été manifestée dans toute leur réa-
lité, les Compagnons n’auraient pas pu poser leurs regards sur lui. » (Ali Yardım,
Peygamberimiz’in Şemâili p. 49).

Hassan ibn Thabit t, le poète attitré du Noble Messager r, exprime clairement


la singularité de sa nature comme suit :

īƅ ĻĐ ƫćĜóÜħĤğĭĨ ƈ īùèÒIJ


ŽƆ Ɔ ƆƆ ŽƆ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
ÅÓ ƈ ƈƈ ƈ
Ƈ ùƆ žĭĤÒïĥÜƆ ħŽ ĤƆ ğƆ ĭŽ ĨģƆ ĩƆ äŽ ƆÒIJƆ
Õƅ ĻĐ ģĠīĨÒƈ ƜÅó×ĨÛĝĥƈ ä
Ž Ɔ ƈž Ƈ Ž ƃ ƪ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ƈ
ÅÓƇ ýƆ ÜÓ Ɔ ÛƆ ĝŽ ĥƈ ì
Ɔ ĩƆ Ġ Ƈ ïŽ ĜƆ ğƆ Ĭƪ ƆÓĠƆ
« Ô Messager de Dieu ! Nul œil n’a vu créature plus belle que toi.
Nulle femme n’a donné naissance à créature plus belle.
Tu as été créé loin de toute honte et d’insuffisance,
c’est comme si tu as été créé selon ton propre penchant ! »
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 153

Reprise de la Révélation
La Révélation cessa six mois. Sa reprise est ainsi relatée par le Saint Prophète r :
« Alors que je me promenais un jour, j’entendis une voix venant du ciel. Je levai
la tête et je le vis, l’ange qui était venu à moi à Hira, assis sur un trône suspendu à
l’horizon. J’étais terrifié. Je retournai alors chez moi, appelant : - Couvrez-moi… cou-
vrez-moi !
(Et comme on me couvrait, Gabriel u revint et à travers lui Dieu révéla :

óƈ×ġƆ ĘƆ ğƆ Öƪ òƆ IJ ƈ Ɔ ƈ Ɔ
Žž Ɔ òŽ ñĬÉĘƆ ħŽ ĜƇ óƇ žàïƪ ĩƇ ĤŽ ÒÓıƆ ĺƫ ÈÇĺƆ
óåƇ İÓ ĘõäóĤÒIJóıƈ ĉĘğÖÓĻàƈ IJ
Ž Ž Ɔ Ɔ Ž ƫ Ɔ Žž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« Ô, toi (Muhammad) ! Le revêtu d’un manteau ! Lève-toi et avertis. Et de
ton Seigneur, célèbre la grandeur. Et tes vêtements, purifie-les. Et de tout péché,
écarte-toi. » (al-Muddattir, 74 : 1-5).
Et, par la suite, la Révélation se poursuivit sans interruption. » (Al Boukhari, Tafsir,
74/4, 5; Muslim, Iman, 255-258).

Le Tout-Puissant déclare :

ĪIJ
Ɔ óƇ Ġƪ ñƆ ÝƆ ĺƆ ħŽ ıƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ĢƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒħƇ ıƇ ĤƆ ÓĭƆ ĥŽ Āƪ IJ
Ɔ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
« Nous leur avons déjà exposé la Parole (le Coran) afin qu’ils se sou-
viennent. » (al-Qasas, 28 : 51).
La poursuite ininterrompue de la Révélation doit aussi être comptée parmi les
miracles du Coran.
La révélation successive au Messager de Dieu r de versets d’une telle magnifi-
cence, défiant toute imitation, même s’il y eut tentative humaine en la matière, ne
peut que confirmer sans l’ombre d’un doute la source divine du Coran, offrant ainsi
une des plus évidentes preuves de l’imperméabilité à toute intervention humaine.
Par ailleurs on admet aisément que même un simple exemplaire de poèmes
nécessite un grand labeur pour le compiler.
Toutefois indépendamment du niveau de soin apporté, il est impossible de
prétendre que n’importe laquelle de ces œuvres humaines soit exempte d’erreur.
Ces préoccupations sont inapplicables à la Révélation divine, éternellement
survivante dans sa forme originelle, riche de nombreux miracles. Cela seul suffit à
manifester la splendeur du Saint Coran.
154 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Dès que survint la révélation de la sourate al-Muddattir, le Messager de Dieu r


se leva de l’endroit où il était étendu.
Ne sachant pas ce qui s’était produit Khadîdja c fut surprise et lui demanda :
- Pourquoi ne continues-tu pas à te reposer ?
Le Messager de Dieu r lui répondit :
« Le temps du repos est terminé.»
Il l’informa de ce fait que la Révélation était revenue.
Durant les premiers jours de la Révélation, Gabriel u enseigna au Saint
Prophète r la façon de procéder aux ablutions rituelles et d’accomplir la prière.
L’ordre d’effectuer un acte d’adoration qu’il aimait provoqua chez lui un sou-
rire marquant sur son visage.
Jubilant, le Messager de Dieu r retourna chez lui et racontant à Khadîdja c la
grande bénédiction que Dieu lui avait octroyée, il l’instruisit quant aux ablutions et
à la prière. (Ibn Ishâq, p. 117; Ibn Hishâm, I, 262-263).

Les premiers Musulmans


La première personne à croire au Message divin fut le Messager de Dieu r,
réalité exprimée comme suit dans le Coran :

Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJ
Īij ƈ
Ɔ įƈÖž òī
ƈ ƈ Ƈ
ƪ ĨįĻŽ ĤƆ Ìƈ ĢƆ ƈõĬÈÓĩƈƆ ÖĢij
Ƈ øƇ óĤÒīƆ ĨÆ
ƪ Ɔ
« Le Messager a cru en ce qu’on a fait descendre vers lui venant de son
Seigneur… » (al-Baqara, 2 : 285).

īĺ žƈ įƇ Ĥƪ Óāƃ ĥƈ íŽ Ĩ
Ɔ ïĤÒ Ƈ ųÒ
Ɔ Ɔ Ƈ óĨƈ ƇÈĹžĬƈ Ìƈ ģŽ ĜƇ
Ɔ Ʃ ïƆ ×Ƈ ĐŽ ÈĪŽ ÈÚ Ž
ƈƈ ƈ ÚóĨƈ ƇÈIJ
Ɔ ĩĥùŽ ĩƇ ĤŽ ÒĢƆ IJƪ ƆÈĪij
īĻ Ɔ ĠƇ ƆÈĪŽ ƆŶ Ƈ Ž Ɔ
« Dis : ‹Il m’a été ordonné d’adorer Allah en Lui vouant exclusivement le
culte, et il m’a été ordonné d’être le premier des Musulmans. » (az-Zumar, 39 : 11-12).
La personne qui accepta l’islam tout de suite après le Saint Prophète r fut son
honorable épouse Khadîdja c.
Chaque fois que le Noble Prophète r retournait chez lui abattu et déprimé
après avoir essuyé toutes sortes d’insultes, de moqueries et de mauvais traitements
de sa tribu, le Tout-Puissant apaisait sa douleur par la nature et les paroles réconfor-
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 155

tantes de Khadîdja c ; paroles qui lui servirent de soulagement en vue de la mission


divine qui l’attendait. (Ibn Hishâm, I, 259).
Une fois que Khadîdja c devint musulmane, ses filles Ruqayya, Umm Kulthum
et Fatima V suivirent ses pas. (Ibn Saad, VIII, 36).
Ayant vu le Saint Prophète r et Khadîdja c offrir ensemble la prière, Ali t
leur demanda :
- Que faites-vous ?
- C’est la religion que Dieu a choisie pour Lui-même. Je vous invite à croire en
Dieu seul et à L’adorer, et de rejeter Lat et Uzza qui n’offrent ni bénéfice ni mal, lui
répondit le Saint Prophète r.
- Je n’ai jamais entendu parler d’une religion de ce genre jusqu’à maintenant,
répondit Ali t. En tout cas, je ne peux pas accepter n’importe quoi sans d’abord
consulter mon père Abû Talib.
Comme le Saint Prophète r n’appelait à l’islam que secrètement à l’époque, il
lui dit :
- Si tu ne choisis pas de devenir musulman, Ali t, garde ceci entre nous, ne
l’expose pas.
Cette nuit-là, le Tout-Puissant réchauffa le cœur d’Ali t à la lumière de l’islam.
Le matin même, il alla auprès du Saint Prophète r pour lui poser davantage de
questions. Ayant reçu les réponses désirées, il succomba à la volonté du Saint Pro-
phète r et devint musulman. Étant âgé seulement de dix ans à l’époque et craignant
la réaction de son père, il conserva son acceptation de l’islam secrète pendant un
certain temps. (Ibn Ishâq, p. 118; Ibn Saad, III, 21).
Chaque fois que le Saint prophète r souhaitait effectuer la salât, avec Ali t à
ses côtés, il se rendait dans les vallées de La Mecque, adorait en secret et revenait au
coucher du soleil. Cela continua pendant un moment.
Ce n’était qu’une question de temps avant qu’Abû Talib ne découvrît les prières
secrètes de son fils et de son neveu, sur quoi le Saint Prophète r invita officiellement
son oncle bien-aimé à l’islam.
Abû Talib fit la réponse suivante :
« Abandonner la religion de mes ancêtres, mon cher neveu, n’est pas quelque
chose de mon ressort. Mais n’oublie pas de tenir bon dans ce que pour quoi tu as
été envoyé. Par Dieu, aussi longtemps que je serai vivant, aucun mal ne te sera fait. »
Et il déclara à Ali t:
156 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Il ne t’invite qu’à la bonté et à l’intégrité. Reste ferme sur son chemin, mon
fils ; ne le quitte jamais ! » (Ibn Hishâm, I, 265).
Au cours d’une visite commerciale à La Mecque, Abdullah ibn Mas’ud t57 vit
le Saint Prophète r, Khadîdja c et Ali t effectuer des circumambulations autour de
la Ka’ba. En outre, il remarqua que Khadîdja c avait mis une attention particulière
à se couvrir d’un voile (hijab). (Zahabi, Siyer, I, 463)
Ufayf al-Kindi t, qui était également en visite d’affaires à La Mecque, remar-
qua que le Saint prophète r, Khadîdja c et Ali t faisaient la salât près de la Ka’ba.
Intéressé il se renseigna auprès dAbbâs qui après les avoir décrits en détail ajouta :
« Par Dieu, je ne connais pas d’autres personnes qui croient en cette religion en
dehors de ces trois ! »
Longtemps après avoir embrassé l’islam, Ufayf t exprima comme suit le regret
qu’il eût de cette journée :
« Si seulement j’avais accepté l’islam ce jour-là et ainsi être devenu le second
homme musulman ! Comme je souhaiterais maintenant avoir été le quatrième
d’entre eux ! » (Ibn Saad, VIII, 18; Ibn Hajar, al-Isaba, II, 487).
Juste après Ali t, Zayd ibn Haritha t, l’esclave affranchi du Saint Prophète r,
accepta aussi l’islam et effectua la salât, ne quittant plus par la suite la compagnie
et le service du Saint Prophète r. Sa dévotion envers le Saint Prophète r était si
sincère que lorsque les vagabonds de Ta’if commencèrent à le lapider, il le protégea
tel un blindage à l’aide de son propre corps jusqu’à ce qu’il soit laissé sanglant et
meurtri, acte pour lequel il reçut l’affection personnelle et les compliments du Saint
Prophète r.
À cet égard, le compte rendu d’Omar t témoigne de la profonde affection que
le Saint Prophète r avait pour Zayd t.
57. Abdullah Ibn Mas’ud t, appelé aussi Abû Abdurrahman, fit partie des premiers musulmans.
Après avoir accepté l’islam, il ne quitta jamais la proximité du Saint Prophète r et prenait plaisir à
le servir. Ibn Mas’ud t était un homme mince, délicat, doté d’une voix douce et d’une apparence
aimable. Les musulmans étaient encore très peu nombreux quand il embrassa l’islam.
Les idolâtres de la Mecque ne cessèrent pas de le harceler et le forcèrent à émigrer à Médine, où Muadh
ibn Jabal t le recueillit. Après l’hégire du Noble Messager r, il résida en permanence à Médine et prit
activement part à toutes les batailles qui devaient avoir lieu par la suite.
Le Messager de Dieu r avait beaucoup de plaisir à l’entendre réciter le Coran.
En raison de sa connaissance profonde, Ibn Mas’ud t finit par former de nombreux savants
spécialistes en tafsir, hadith et jurisprudence islamique.
Les savants de Kufa, en particulier, sont connus pour avoir apporté des verdicts en matière de
jurisprudence en conformité avec ses narrations et opinions.
Il est réputé pour avoir transmis un total de 848 hadiths.
Après avoir servi en tant que juge à Kufa, Abdullah Ibn Mas’ud t retourna à Médine durant le califat
d’Othman t, et décéda peu de temps après, à l’âge de soixante ans passés.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 157

En sa qualité de calife Omar t avait réservé un salaire de 3500 dirhams à


l’attention de Zayd t, 500 dirhams de plus que le salaire d’Abdullah, le propre fils
d’Omar t.
Abdullah t protesta :
« Pourquoi donnes-tu plus de valeur à Oussama qu’à moi alors que j’ai été
impliqué dans un plus grand nombre de batailles que lui ? »
La réponse d’Omar t manifeste la richesse de son cœur et la grandeur de son
humilité, en sus de son extraordinaire estime pour la justice :
« Eh bien, mon fils, le Saint Prophète r a aimé son père plus qu’il n’a aimé le
tien. Il a aimé aussi Oussama plus qu’il ne t’a aimé. C’est pour cela que j’ai choisi de
préférer celui que le Prophète r aimait plutôt que mon fils. » (At Tirmidhi, Manaqib, 39)
Comme c’est évident dans cet exemple, qui n’est qu’un spécimen pris parmi de
nombreux autres, les Compagnons y ont toujours volontairement choisi ceux que
le Saint Prophète r aimait particulièrement le plus. (Haythami, VI, 174; Ibn Saad, IV, 30).
Abû Bakr t était déjà un ami du Saint Prophète r avant même le début de la
Prophétie. Depuis son enfance, il avait été témoin de la moralité, de la loyauté et de
la fidélité exemplaires du Messager de Dieu r. Il était convaincu qu’une personne,
dont les normes irréprochables l’empêchaient de proférer le moindre mensonge, ne
pouvait jamais mentir au sujet du Tout-Puissant. Ainsi lorsque le Saint Prophète r
l’invita à accepter l’islam, Abû Bakr le fit sans hésitation. (Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 78).
Dans un hadith pertinent, le Saint prophète r déclare :
« Quand Dieu m’a envoyé à vous en tant que prophète, ô gens, vous aviez d’abord
dit : « C’est un menteur ». Mais Abû Bakr a dit : « Il dit la vérité », puis m’a soutenu
par sa vie et ses biens. » (Al Boukhari, Ashab’u-Nabi, 5)
Rien ne rendit plus heureux le Saint Prophète r que la conversion à l’islam
d’Abû Bakr t.
Une fois devenu musulman, il proclama ouvertement sa foi et commença à
inviter d’autres à croire en Dieu et en Son Messager. (Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 80-81).
Abû Bakr t tient une place extrêmement importante dans la vie du Noble
Prophète r.
À cet égard, la réussite de toute cause donnée dépend de ces trois facteurs :
1. Une idée directrice.
2. Des gens se ralliant à cette idée.
3. Des ressources financières.
158 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’idée directrice était la teneur de l’islam, confirmée par la Révélation.


Concernant les deux autres facteurs, Abû Bakr t assuma un rôle crucial.
C’est avec lui que le ralliement débuta et sa grande richesse fut mise à profit
pour financer différentes causes, y compris, entre autres, l’affranchissement des
esclaves musulmans.
Pour détailler plus ces deux points, on peut dire que l’amitié entre le Saint
Prophète r et Abû Bakr t, qui traversèrent ensemble la période adolescente, se
transforma en un sublime compagnonnage une fois la mission prophétique débuta.
Déjà honoré d’avoir été parmi les premiers à accepter l’islam, Abû Bakr t
gagna encore le titre d’as-Siddiq, en ne permettant pas même qu’une graine de doute
puisse salir sa foi. Fidèle à cet esprit, les années à venir allaient être témoins de son
engagement relatif à la propagation de l’islam, tant sur le plan matériel que spirituel,
jusqu’à consacrer toute sa fortune dans la voie de Dieu.
Aimer, c’est déborder d’affection pour l’être aimé, c’est être capable d’aimer tout
ce qu’aime le bien-aimé, préférer ses désirs aux siens et être capable de tout sacrifier
dans la voie du bien-aimé. La vie d’Abû Bakr t est remplie d’exemples sublimes de
cet amour dévoué et de complète auto-annihilation dans le Saint Prophète r.
Lors d’une occasion particulière, Abû Bakr t est devenu grabataire tout sim-
plement après avoir entendu dire que le Saint Prophète r était tombé malade. Un tel
amour entraîna consécutivement une attache complète entre les deux amis, ce qui
fit dire au Saint Prophète r :
« Abû Bakr fait partie de moi et je fais partie de lui. Il est mon frère dans ce
monde et dans l’au-delà. » (Daylami, I, 437)
Il s’agit là d’une confirmation de leur compagnonnage dans le monde spirituel
et d’une réflexion commune sur l’état de leur cœur.
Sur son lit de mort, le Saint Prophète r ajouta au sujet des portes menant à sa
mosquée :
« Fermez toutes les portes, sauf celle d’Abû Bakr ! » (Al Boukhari, Ashabu’n-Nabi, 3).
Ce compliment est l’une des plus belles expressions de leur connexion spiri-
tuelle et de leur proximité exceptionnelle.
Parmi ceux qui embrassèrent l’islam au cours des premiers jours de l’appel de
Dieu figurent Bilal l’Abyssin t et sa mère.
Bilal t fut un des sept premiers à annoncer leur adhésion à l’islam. Pour
lui faire abjurer sa foi, il subit les pires tortures, qu’il endura, en disant : « Ahad !
Ahad ! Dieu est Un ! Dieu est Un ! », chaque fois qu’on le forçait à renier sa foi.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 159

Ayant payé le prix de leur rançon, Abû Bakr t libéra Bilal et sa mère. (Ibn Saad, III,
232; Hâkim, III, 319).

Il reçut les louanges du Saint Prophète r non seulement pour cet acte mais
aussi pour être devenu un parfait modèle de compassion et de générosité.
Utilisant le langage du cœur, Mawlana Rumî ç raconte ainsi cet exemple :
Ayant entendu parler des tortures horribles qu’avait subies Bilal al-Habashi t,
le Siddiq t parut en présence du Noble Prophète r et l’informa des problèmes qu’il
rencontrait :
« Cette âme sacrée, qui étreint les cieux, est tombé amoureux de toi. Il est captivé
par ton amour. C’est pour cette seule raison que les oppresseurs harcèlent cet homme
angélique. En dépit de son innocence, ils arrachent ses ailes. Ils veulent enterrer ce
trésor dans la saleté de l’idolâtrie et de la rébellion…
Ils l’ont placé sur le sable brûlant sous un soleil torride, raclé son corps nu avec
des branches épineuses…
Mais bien que le sang eût jailli de sa chair telle une fontaine, il dit encore : « Dieu
est Un, Dieu est Un » ; il ne renonce pas à se prosterner devant son Seigneur…
La compassion et la miséricorde avaient transformé chaque partie du corps
d’Abû Bakr t en une langue endolorie de tristesse et de souffrance qui expliqua lon-
guement au Noble Prophète r les tourments endurés par Bilal t.
Enfin, il dévoila l’intention de son cœur et dit : « Je désire le racheter, ô Messager
de Dieu, je suis prêt à y laisser toute ma fortune. Je ne serai jamais à l’aise dans ce
monde tant que je ne sauverai pas cette âme sacrée qui a encouru la colère des ennemis
de Dieu et leurs tortures simplement pour avoir aimé Dieu et être devenu son esclave,
ainsi qu’en croyant en Son Messager. »
Le Noble Prophète r devint immensément heureux et répondit : « Je suis ton
partenaire dans cette aventure… tu es un ami compatissant de Dieu et de Son
Messager ! »
Abû Bakr se dirigea immédiatement chez le maître de Bilal t. Ce dernier avait
entre-temps perdu connaissance à cause de la douleur occasionnée par la torture.
Abû Bakr t n’avait que des mots amers à dire à son maître, l’homme privé de
la moindre miséricorde.
Toi, âme mauvaise et impitoyable ! Comment peux-tu torturer un ami de Dieu ?
Toi, homme sans cœur ! De quelle sorte de haine et de méchanceté es-tu rempli ?
Tu es une bête sans pitié ! Penses-tu être un homme ? Tu n’es qu’un méchant
privé de miséricorde, une âme répugnante vêtue comme un être humain !
160 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Par ces paroles, Abû Bakr t assouvit l’avidité du maître de Bilal t avec autant
de biens de ce monde que cela laissa l’homme dans la crainte quand il le vit verser la
rançon.
Réalisant l’étonnement de l’homme désormais dépouillé, Abû Bakr t dit : Tu
es fou ! Petit sois-tu, toi comme un enfant, tu m’as offert une perle en échange d’une
noix. Mais tu ne sais pas que Bilal vaut deux mondes. La différence est que tu regardes
la couleur de sa peau alors que moi je regarde son âme. Si tu avais insisté pour que
je paie plus lors de la transaction, j’aurais certainement offert plus pour le sécuriser.
Aurais-tu insisté plus, je t’aurais abandonné tout ce que je possède, et je me serais
même endetté si nécessaire. Tu n’es qu’un simple fou ! Souviens-toi que seul le bijou-
tier connaît la valeur d’un joyau. »
Donnant voix à une compassion et miséricorde parfaites, la représentation
de Rumî ç frappe également nos cœurs sur le fait authentique que la valeur d’un
être humain mature est au-delà de toute estimation et que toutes les richesses de
ce monde ne valent rien en comparaison avec la fibre spirituelle d’un être humain.
Par le biais de cet acte somme toute profondément humain, Abû Bakr t appor-
ta une nouvelle fois la preuve du grand amour qu’il avait pour le Saint Prophète r.
D’autres signes de son amour infini envers le Saint Prophète r pourraient se résu-
mer comme suit :
- Agir en conformité avec le Coran et les principes de l’islam apportés par le
Saint Prophète r, les aimer de tout son cœur.
- Manifester de la compassion envers tous les autres musulmans et persévérer
dans tout ce qui peut les avantager.
- Ne pas valoriser le monde et se préparer volontairement à la pauvreté si
besoin est.
- Désirer s’unir à Lui.
- Se souvenir fréquemment de Lui.
Sous un autre angle, ce fut à travers un rêve troublant que l’orientation de
Khalid ibn Said t lui est venue. Une nuit, il se vit au bord d’une gigantesque fosse
enflammée en compagnie de son père qui tentait de le pousser à l’intérieur, juste au
moment où le Saint Prophète r le saisit par la taille, l’épargnant ainsi d’être plongé
dans les flammes.
Quand il se réveilla, rempli de crainte, il se dit à lui-même : « Cela doit sûre-
ment être un message ! »
Puis, suite aux conseils d’Abû Bakr t, il se rendit auprès du Saint Prophète r
et embrassa l’islam.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 161

Après avoir entendu dire que son fils avait changé de croyance, le père de Khalid
commença à le persécuter, lui disant : « Va t-en ! Plus jamais je te nourrirai ! »
« Refuse autant que tu le peux… certainement c’est Dieu qui me nourrira »,
répondit Khalid t de manière résolue.
Khalid t demeura auprès du Saint Prophète r jusqu’à l’émigration en
Abyssinie. (Hakim, III, 277-280).
D’autres embrassèrent l’islam par la suite dont notamment Umayna c, l’épouse
de Khalid t, son frère Amr et son épouse Fatima c.
Grâce aux encouragements et aux conseils d’Abû Bakr t, les jours de l’appel
secret virent également l’arrivée d’Abû Fuqayha, Othman, Zubayr ibn Awwam,
Abdurrahman ibn Awf, Sa’d ibn Abi Waqqas et Talha ibn Ubaydullah y qui goû-
tèrent tous les délices de l’islam. (Ibn Hishâm, I, 268).
Othman t dit une fois au Saint Prophète r :
« Alors que Damas était à moitié endormie, ô Messager de Dieu r, nous enten-
dîmes soudainement une voix, disant : « Dormeurs, réveillez-vous ! Ahmed est
apparu à La Mecque ! » Une fois revenus à La Mecque, nous nous renseignâmes au
sujet de ta mission prophétique. » (Ibn Saad, III, 255).
Talha ibn Ubaydullah t raconte ce qui suit :
« J’étais à la foire de Busra quand j’entendis un prêtre qui cherchait des gens
originaires de La Mecque. Je m’approchai de lui et lui dit que j’en étais originaire.
- Ahmed est-il apparu ? demanda le prêtre.
- Quel Ahmed ? répondis-je.
Le prêtre dit :
- Ahmed ibn Abdallah ibn Abd al-Muttalib!
Le dernier Prophète r qui doit apparaître à La Mecque ! Il est censé quitter La
Mecque et émigrer vers un lieu pierreux et aride qui dispose de palmeraies-dattiers.
Je vous conseille de le poursuivre !
Les paroles du prêtre trouvèrent un chemin dans mon cœur.
Quittant aussitôt la foire, je rentrai à La Mecque et demandais :
- Y a-t-il des nouvelles tardives ?
- Oui, me répondit-on, Muhammad r, le Digne de confiance, fils d’Abdallah,
prétend être un prophète. Abû Bakr t l’a suivi aussi. » (Ibn Saad, III, 215).
162 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

D’autres encore connurent l’honneur d’embrasser l’islam très tôt dont Abû
Ubayda ibn Jarrah, Abû Salama, Al-Arqam ibn Abi Arqam, Othman ibn Mazun,
Asma bint Abû Bakr, Khabbab ibn Arat, Abdullah ibn Ma’sud, Abdullah ibn Jahsh,
Abu Huzayfa, Amir ibn Fuhayrai, Jafar ibn Abû Talib y et son épouse Asma bint
Umays c.

Dar Al Arqam : Centre Éducatif pour Nouveaux Musulmans


Pendant les trois premières années, le Saint Prophète r appela secrètement les
gens à l’islam et demanda à ceux qui déclinaient l’offre de ne pas divulguer la ques-
tion à n’importe qui. La maison d’al-Arqam ibn Abi Arqam r, qui devint musulman
la première année de l’Apostolat prophétique servait de lieu secret de rencontres
pour les Compagnons y.
Dar Al Arqam, aussi appelée la Maison de l’Islam, était située près du Mont Safâ
à La Mecque. Là, dans cette maison sacrée, le Saint Prophète r allait se réfugier pour
rendre intelligible l’islam, réciter et enseigner le Coran à ceux qui voulaient venir,
loin des idolâtres mecquois. Là, il accomplissait la prière en commun. C’est là que
de nombreuses personnes furent instruites en matière d’islam. Jusqu’à la conversion
d’Omar t qui eut lieu pendant la sixième année de l’Apostolat prophétique, la mai-
son prêtait d’immenses services sur la façon d’enseigner et d’appeler à l’islam. Plus
tard Al-Arqam t légua en fondation la maison. L’acte lié à la fondation se compose
comme suit :
« Au Nom de Dieu, le Très-Miséricordieux, le Très-Compatissant… Telle est
la volonté d’al-Arqam concernant sa maison à Safâ qui se trouve dans le périmètre
de la Maison Sacrée, et par conséquent considérée comme sacrée et inviolable. Elle
ne peut en aucun cas être vendue ou léguée. À cela, Hishâm ibn As et son esclave
portent témoignage. » (Ibn Saad, III, 242-244 ; Hakim, III, 574-575/6129).
La Maison d’al-Arqam fut démolie sur ordre des autorités du Royaume d’Ara-
bie Saoudite et incorporée désormais dans le périmètre de la Maison Sacrée, la
Ka’ba, ayant été par conséquent renvoyée à son origine.
Le Saint Prophète r passa les trois premières années de son Apostolat à appeler
secrètement à l’islam. Il agit ainsi, non pas par peur de subir toutes sortes de tour-
ments et de difficultés, mais plutôt en raison des bénéfices que l’islam pouvait tirer.
Outre le fait qu’il n’y eût pas encore d’injonction divine qui révélât l’ouverture
vers un appel public, l’islam avait néanmoins été proclamé ouvertement pendant
cette période et les nombreux nouveaux musulmans, dont la plupart étaient pauvres
et faibles, auraient été en danger et leur situation aurait pu mettre un terme à la
religion, même avant qu’elle ne débute.
Les Trois Premières Années de la Prophétie : L’appel en Secret 163

De l’expérience de la Maison d’al-Arqam, nous pouvons tirer les leçons sui-


vantes en matière de méthode proprement islamique :
1. En cas de besoin la dissimulation doit être essentielle à une mission.
2. L’éducation est la première étape nécessaire à la réalisation d’un objectif
donné, qu’il soit d’ordre social, politique et religieux. Afin d’acquérir la qualité
nécessaire, les individus doivent être familiarisés avec la logique et la moralité de la
mission.
La marche et la méthode à suivre pour toute activité islamique accomplie
jusqu’au Jour du Jugement doit être observée selon la lumière du modèle muham-
madien.
Tout effort accompli en vue de la revitalisation de l’islam et de son implanta-
tion dans des endroits où il n’a pas encore pris racine doit prendre en considération
essentielle ces plans d’éducation.
164

LA QUATRIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE

Révèle ce qui t’es ordonné et avertis tes proches


Après trois années de prêche effectuées en toute discrétion, la quatrième année
de l’Apostolat prophétique, Dieu le Tout-Puissant fit la révélation suivante :

ƈ ƈ
īĻ
Ɔ Ð ƈõıŽ ÝƆ ùŽ ĩƇ ĤŽ ÒĞƆ ÓĭƆ ĻŽ ęƆ ĠÓ
Ɔ Ĭƈƪ ÌīĻ Ɔ ĂŽ ƈóĐŽ ƆÈIJ
Ɔ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ Òīƈ Đ Ɔ óƇ ĨƆ ËŽ ÜÓ
Ƈ ĩƈƆ ÖĎŽ ïƆ ĀÓ
Ž ĘƆ
« Expose donc clairement ce qu’on t’a commandé et détourne-toi des asso-
ciateurs. Nous t’avons effectivement défendu vis-à-vis des railleurs ! » (al-Hijr, 15 :
94-95)

Ce glorieux verset ordonna que dorénavant l’appel à l’islam doive se faire ouver-
tement et en public. Un autre verset coranique exprime cela d’une façon plus claire :

ÛƆ ĕŽ ĥƪ ÖÓ ƈ ğƈƆ ÖòīĨƈ ƈ ƈ Ƈ øóĤÒÓıĺÒƆ Óĺ


Ɔ ĩƆ ĘƆ ģŽ đƆ ęŽ ÜƆ ħŽ ĤƆ ĪŽ ÒIJ
Ɔ ž Ɔ Ž ğƆ ĻŽ ĤƆ ÒĢƆ ƈõĬŽ ƇÒÓĨ
Ɔ ēŽ ĥž ÖƆ Ģij Ƈ ƪ Ɔƫ Ɔ
īĺ ƈ ƈ ƈ ƈ īĨ ƈ ƈ Ʃ IJįÝĤƆ Óø ƈò
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĴïıŽ ĺƆ ƆźųÒ Ɔ Ʃ Īƪ ÒöÓĭĤÒ
ƪ Ɔ ğƆ ĩƇ āđŽ ĺƆ ƇųÒ Ɔ ƇƆ Ɔ
« Ô Messager, transmets ce qui t’a été descendu de la part de ton Seigneur.
Si tu ne le faisais pas, alors tu n’aurais pas communiqué Son message. Et Allah te
protégera des gens. Certes, Allah ne guide pas les gens mécréants. » (al-Maida, 5 : 67).
A présent, le Messager de Dieu r allait commencer à inviter ouvertement les
hommes à l’islam, comme mentionné dans le verset coranique suivant :

ÚÒ ƈ ijĩùĤÒğƇ ĥŽ ĨįĤƆ Ĵñƈ Ĥƪ ÒÓđĻĩƈ äħġƇ ĻĤƆ Òƈ ųÒ ƈ Ƈ øòĵžĬƈ Òƈ öÓĭĤÒÓıĺƆÒÇĺģŽ ĜƇ
ƆƆ ƪ Ƈ Ƈ ƃ Ɔ Ž Ž Ʃ Ģij Ƈ Ɔ Ƈ ƪ Ɔƫ
Ĵñƈ Ĥƪ Òĵƈ Ĩžƈ Ƈ źÒŽ ĵƈƈ ×ĭĤÒ įƈ Ĥij
ƈ øòIJųÓƈ ƈ ƈ ƈ ĵĻƈ éĺijİƪźÒƈ įĤſ ÒƆƈ ŴĂƈ òƆźÒŽ IJ
ž ž ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ ÖÒijƇĭĨÓſ ĘƆ ÛĻ Ƈ ĩƇĺIJƆ Ž Ƈ ƆƇ Ɔ Ž Ɔ
ĪIJ
Ɔ ïƇ ÝƆ ıŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ Įij ƈ ƈ ƈ ųÓƈ ƈ ƈ
Ƈ đƈƇ ×ÜÒƪ IJ Ɔ Ʃ ÖīƇ ĨËŽ Ƈĺ
Ɔ įÜÓĩƆ ĥĠƆ IJ
« Dis : «Ô hommes ! Je suis pour vous tous le Messager d’Allah, à Qui appar-
tient la royauté des cieux et de la terre. Pas de divinité à part Lui. Il donne la vie
et Il donne la mort. Croyez donc en Allah, en Son Messager, le Prophète illettré
qui croit en Allah et en Ses paroles. Et suivez-le afin que vous soyez bien guidés! »
(al-Araf, 7 : 158).
La Quatrième Année de la Prophétie 165

Alors que le Saint Prophète r se demandait par où et comment commencer,


une autre révélation lui parvint en ces termes :

ğƆ đƆ ×ÜÒ īĩĤƈ ğèÓĭäăęƈ ìÒIJīĻƈÖóĜƆŶÒğÜóĻýƈ ĐòñĬ ƈ ƆÈIJ


Ɔƪ ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
ƈ ƈ ƈƈ ƈ
Īij
Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ÜÓ
Ɔ ĩƪ Ĩ
ž Åĸ Ɔ žĬÌƈ ģŽ ĝƇ ĘƆ ĞƆ ijŽ āƆ Đ
Ƅ ƈóÖĹ Ɔ ĪƈŽ ÍĘƆ īĻ
Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ Ĩ
Ħij ƈ ƈ ƈ ƈ
Ƈ ĝƇ ÜƆ īĻ
Ɔ èĞƆ ÒóƆ ĺĸ
Ɔ ñĤƪ ÒħĻèóĤÒ
ƪ
ƈõĺ ƈõđƆ ĤŽ ÒĵĥƆ Đ
Ɔ ģŽ Ġƪ ijƆ ÜƆ IJƆ
« Et avertis les gens qui te sont les plus proches. Et abaisse ton aile [sois
bienveillant] pour les croyants qui te suivent. Mais s’ils te désobéissent, dis-leur :
«Moi, je désavoue ce que vous faites». Et place ta confiance dans le Tout-Puissant,
le Très-Miséricordieux, qui te voit quand tu te lèves ! » (ash-Shu’ara, 26 : 214-218).
Le Saint Prophète r, dès qu’il commença sa mission, invita, conformément à la
volonté divine, tout d’abord ses proches. Il leur fit même des offrandes et s’exclama :
« Ô fils d’Abd al-Muttalib ! J’ai été précisément envoyé comme Prophète à ma
Communauté et de manière générale à tous les hommes. Vous avez vu de ma part un
certain nombre de miracles. Lequel d’entre vous accepterait de devenir mon frère et
faire serment d’allégeance ? »
Personne ne donna d’importance à ces paroles. Tout le monde resta muet.
Ali t, qui à cette époque était encore un enfant, et qui eut plus tard l’honneur
d’être parmi l’un des premiers imams, se leva promptement et dit :
« Ô Messager de Dieu ! Moi je t’aiderai ! »
Devant les yeux sournois et railleurs des personnes présentes, le Messager de
Dieu r tourna son visage éclairant l’univers vers Ali t et, avec ses mains que tous
les amoureux voudraient embrasser, caressa sa tête. (Ahmed, I, 111, 159; Haythami, VIII,
302-303).

Même si dans un premier temps ses proches ne crurent pas en lui, la détermina-
tion du Messager de Dieu r n’en fut pas pour autant brisée car Dieu le Tout-Puissant
lui commanda :

ƅ ĝƈ ÝƆ ùĨĆÒ
ħĻ ƅ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ġƈ éĤŽ ÒĪƈ ÒƆ óĝƇ ĤŽ ÒIJ÷ĺ
Ž Ƈ óƆ ĀĵĥƆ Đ
Ɔ īĻ
Ɔ ĥøƆ óŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĩĤƆ ğƆ Ĭƪ ÒħĻ Ɔ Ž Ɔ ſ
« Ya-Sin. Par le Coran plein de sagesse. Tu (Muhammad) es certes du nombre
des Messagers. Sur un chemin droit ! » (Ya-Sin, 36 : 1-4).
166 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ÒïĻ
ƃ ƈıü ƈ Ʃ ÖĵęƆ ĠƆ IJƃźijøòöÓ
Ɔ ųÓƈ ƈ ĭĥĤƈ ĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øòƆÈIJ
Ɔ Ƈ Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ
« … Et Nous t’avons envoyé aux gens comme Messager. Et Allah suffit
comme témoin ! » (an-Nisa, 4 : 79).

Īij ƈ ĭĤÒóáƆ ĠŽ ƆÈīġƈ ĤƆ IJÒóĺñƈ ĬƆ IJÒóĻýƈ ÖöÓ


Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ źƆ öÓ ƈ ĭĥžĤƈ Ùƃ Ęƪ ÓĠ
Ɔ źƈƪ ÌĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ƆÈÓĨƆ IJƆ
ƪ Ɔ ƪ Ɔ ƃ Ɔ ƃ Ɔ ƪ
« Et Nous ne t’avons envoyé qu’en tant qu’annonciateur et avertisseur pour
toute l’humanité. Mais la plupart des gens ne savent pas. » (Saba, 34 : 28).

Ăƈ òŽ ƆŶÒIJƆ ÚÒ ƈ Ƈ øòĹžĬƈ Ìƈ öÓĭĤÒÓıĺƆÈÓĺģŽ ĜƇ


ƈ IJÓĩùĤÒğƇ ĥŽ ĨįĤƆ ĸñƈ Ĥƪ ÒÓđĻĩƈ äħġƇ ĻĤƆ Ìƈ ųÒ
Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ƈ ƃ Ɔ Ž Ž Ʃ Ģij Ƈ Ɔ Ƈ ƪ Ɔƫ Ɔ
« Dis : «Ô hommes ! Je suis pour vous tous le Messager d’Allah, à Qui appar-
tient la royauté des cieux et de la terre... » (al-Araf, 7 : 158).
Les versets ci-dessus indiquent que le Messager de Dieu r, contrairement aux
autres prophètes L, fut envoyé à toute l’humanité.
C’est d’ailleurs ce qu’il l’exprima ainsi :
« Je me distingue des prophètes antérieurs en ces cinq particularités :
1. On me fit grâce de mettre la crainte dans le cœur de l’ennemi à une distance
d’un mois.
2. La Terre m’a été donnée comme lieu de culte. Ainsi, lorsque vient le moment
de la prière, le croyant qui appartient à ma communauté peut l’accomplir aisément.
3. Le butin qui n’était pas permis aux autres prophètes qui m’ont précédé l’a été
pour moi.
4. On ne donna qu’à moi l’autorisation d’intercéder.
5. Avant moi, les prophètes étaient envoyés à leur peuple. Alors que moi j’ai été
envoyé à toute l’humanité. » (Al Boukhari, Tayammum, 1)58
En dehors d’Ali t qui était encore un enfant à cette époque, la première invita-
tion publique à l’islam que le Messager de Dieu r entreprit n’atteignit personne de
sa famille. Quelques temps après, il invita chez lui sa famille proche.
Après les avoir accueillis avec hospitalité, il leur dit :
58. Dans un autre récit, le Messager de Dieu r a souligné trois autres sujets :
1. On me donna la capacité de dire beaucoup avec peu de mots.
2. Le cycle de la Prophétie prendra fin avec moi et aucun autre prophète ne viendra après moi.
3. Lorsque je dormais, les clés des trésors du monde m’ont été apportées et placées devant moi.
(Muslim, Masajid, 5, 6).
La Quatrième Année de la Prophétie 167

« … Ô fils d’Abd al-Muttalib ! Par Dieu ! Aucun homme n’apportera au peuple


arabe quelque chose de plus bénéfique pour ce monde et l’au-delà que ce à quoi je vous
invite.
Ô fils d’Abd al-Muttalib ! J’ai été envoyé comme prophète à vous et à tous les
hommes. Vous avez vu de ma part un certain nombre de miracles. Dans cette fonction,
qui accepterait de m’aider, de devenir mon frère en islam, et gagner ainsi le paradis ?
Lequel d’entre vous ferait serment d’allégeance pour être mon frère et mon ami ? »
Relativement à cette invitation proposée par le Messager de Dieu r, aucun
membre de sa famille n’accepta son message, outre le fait qu’ils se moquèrent de lui
en riant. Puis tous partirent quelques instants plus tard. (Ahmed, I, 159; Ibn Saad, I, 187;
Haythami, VIII, 302; Ibn Asir, al-Kâmil, II, 63; Balazurî, I, 119; Halabbi, I, 283).

En général, les membres d’une même famille acceptent plus facilement les pa-
roles transmises par un proche que par une personne étrangère. Il est évident que
s’ils avaient accepté en premier le message de l’islam, les gens auraient embrassé la
religion véridique plus rapidement. Effectivement, l’obstination de la famille proche
à croire en un membre de sa propre famille rend plus difficile la crédibilité de celui-
ci vis-à-vis des personnes étrangères. Ainsi, le Saint Prophète r, en se soumettant à
l’ordre divin, a commencé par inviter ses proches.
En outre, au plan de la mission religieuse des prophètes, le soutien et l’aide des
proches sont deux réalités certes importantes.
Ainsi donc, avec les exemples des prophètes du passé, cette vérité est rapportée
comme suit dans le Coran :

ĞƆ ÒóĭƆ ĤƆ ÓĬƈƪ ÌIJ ƈ ƈ Ɔ įĝƆ ęŽ ĬƆ ÓĨÕĻđüÓ


Ɔ Ɔ Ģij
Ƈ ĝƇ ÜÓ
Ɔ ĩƪ Ĩ
ž Òƃ óĻáĠ Ƈ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ƈ ĺÒij Ɔ ƇĤÓĜƆ
ƅõĺ ƈõđƈƆ ÖÓĭƆ ĻĥƆ Đ ÛĬƆÈÓĨƆ IJ ƈ Ɔ ĭĻƆ Ęƈ
Ž Ɔ Ɔ Ɔ ĞƆ ÓĭƆ ĩŽ äƆ óƆ ĤƆ ğƆ ƇĉİŽ ò
Ɔ ƆźijŽ ĤƆ IJÓ
Ɔ ęƃ ĻđĄÓ
« Ils dirent : ‹Ô Chouyaib, nous ne comprenons pas grand-chose à ce que tu
dis ; et vraiment nous te considérons comme faible parmi nous. Si ce n’était ton
clan, nous t’aurions certainement lapidé› ! ... » (Houd, 11 : 91).
Lorsque Lot u désespéra devant les pervers, et comme il n’avait guère de fa-
mille proche pour lui apporter son soutien, dit en face de son impuissance :

ïĺƅ ïƈ ü ƈ IJŽ ƆÈØƃ ijĜƇ ħġƈ


Ƈ ĤƆ Ìƈ ĸIJÆ
Ɔ īƅ ĠŽ òĵ ƈ Ɔ
ƪ Ž Ƈ ÖĹĤĪƪ ÈijŽ ĤƆ
« [Ah !] Si j’avais de la force pour vous résister ! Ou bien si je trouvais un
appui solide ! » (Houd, 11 : 80).
168 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’islam donne une importance à la protection de la famille proche. C’est pour


cela qu’une personne qui désire que d’autres soient honorées des bienfaits de la
croyance, doit penser avant tout à sa famille proche.
Ainsi donc, Dieu le Très-Haut dit à ce sujet :

ƈƈ ƈ ƈ Ʃ ÔÓ ƈ Ęƈ ăƅ đ×ƈÖĵĤƆ IJƆÈħıąƇ đÖĦÓƈ èòƆŶÒij


īĺ ƈ ıƆ ĩĤŽ ÒIJƆ īĻ
Ɔ ƈóäÓ Ƈ Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨųÒ ƈ ÝƆ ĠĹ ŽƆ Ž Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ž Ž ƇĤIJŽ ƇÈIJ
Ɔ
« … Les liens de consanguinité ont [dans les successions] la priorité [sur les
liens]… » (al-Ahzab, 33 : 6).

Le Prophète r invite les Qurayshes à l’Islam sur le Mont Safa


L’être de lumière r, à qui il fut demandé de commencer l’invitation à l’islam à
ses proches, se rendit un jour sur le Mont Safâ et s’adressa au peuple qurayshite. Ce
dernier répondit à l’invitation et se rendit sur le Mont.
Du haut d’un rocher, le Messager de Dieu r s’adressa à lui en ces termes :
« Ô peuple de Quraysh ! Si je vous dis que derrière cette montagne ou dans cette
vallée il y a des cavaliers ennemis, qu’ils sont sur le point de vous attaquer et de voler
vos biens, le croiriez-vous ? »
Sans hésiter les gens de Quraysh répondirent :
« Oui nous te croirons ! Car jusqu’à maintenant tu as toujours été correct. Nous
ne t’avons jamais entendu proférer des mensonges ! »59
Le Messager de Dieu r, qui avait obtenu la confirmation des personnes pré-
sentes, leur fit la prédication divinement inspirée suivante :
« Dans ce cas, sachez que j’annonce une journée de supplices devant vous et ceux
qui ne croient pas en Dieu vont écoper de ce rude châtiment. J’ai été envoyé pour vous
avertir et vous éloigner de ce châtiment. Ô Quraysh ! Ma situation est telle une per-
sonne qui voit l’ennemi et court vers sa famille pour les avertir du danger qui vient…
59. Ici le Messager de Dieu r, avant même sa prédication, reçut une confirmation de la reconnaissance
de sa personnalité. En effet, les personnes présentes admiraient la personnalité de Muhammad r et
le respectaient énormément.
De nos jours, les personnes qui appellent à la religion doivent être dignes de confiance et honnêtes.
Il faut en outre que leurs vertus morales soient confirmées.
Dans la sourate Ya-Sin, et en référence à Habib an-Najjar, sa personnalité est ainsi confirmée : ÒijđƈƇ ×Üƪ Òƈ
ĪIJ
Ɔ ïƇ ÝƆ ıŽ Ĩ
Ƈ ħŽ İƇ IJÒ Ɔ źƆ īŽ ĨƆ « Suivez ceux qui ne vous demandent aucun salaire et qui sont sur la
Ɔ óƃ äŽ ƆÒ ħŽ ġƇ ĥƇ ùƆƉŽ ĺ
bonne voie. » (Ya-Sin, 36 : 21).
Ce verset accorde un poids égal sur la nécessité que l’invitation soit mise en œuvre pour le plaisir
du Tout-Puissant et, en premier lieu, que ceux qui invitent se trouvent eux-mêmes sur le chemin
de la guidance.
La Quatrième Année de la Prophétie 169

Ô peuple de Quraysh ! Vous allez mourir comme quand vous vous endormez.
Vous allez être ressuscités comme quand vous vous réveillez. Certes vous allez sortir de
votre tombe pour rendre compte à Dieu de tous vos comportements. Enfin, vous allez
recevoir le bénéfice de vos bonnes actions et de votre foi et être punis sévèrement pour
vos mauvaises actions ! La récompense est le paradis éternel : la sanction est l’enfer. »
(Al Boukhari, Tafsir, 26 ; Muslim, Iman, 348-355 ; Ahmed, I, 281-307 ; Ibn Saad, I, 74, 200 ; Balazuri, I,
119 ; Samira az-Zayid, I, 357-359).

La déclaration du Messager de Dieu r ne suscita aucune opposition des per-


sonnes présentes. Seul son oncle Abû Lahab déclara :
« Que tes mains périssent ! Ne nous-as-tu appelés que pour cela ? Et il commen-
ça à proférer des injures à son encontre, ce qui brisa le cœur du Saint Prophète r.
La sourate « al-Masad » fut révélée suite au comportement d’Abû Lahab :

ÒòÓ
ƃ ĬƆ ĵĥƆ āŽ ĻƆ ø Ɔ ÕƆ ùƆ ĠÓ
Ɔ ĨƆ IJ
Ɔ įƇ ƇĤÓĨ Ɔ ĭƆ ĔŽ ƆÈÓĨ
Ɔ įƇ ĭŽ Đĵ Ɔ Õƪ ÜƆ IJ
Ɔ
Ɔ Õƅ ıƆ ĤƆ ĹƈÖÈÒïƆ ĺƆ ÛŽ ×ƪ ÜƆ
ïƅ ùƆ Ĩī
ƪ Ĩ
ƈ
ž ģƄ ׎ èÓ
ƈ ƈ Ę
Ɔ İƆ ïĻäĹ
ƈ Õƈ ĉƆ éĤŽ ÒÙƆ ĤƆ ÓĩèįÜƇ ƆÈóĨÒIJÕƅ ıĤƆ ÚÒ
Ɔ ƪ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ðƆ
« Que périssent les deux mains d’Abû Lahab et que lui-même périsse. Sa
fortune ne lui sert à rien, ni ce qu’il a acquis. Il sera brûlé dans un Feu plein
de flammes. De même sa femme, la porteuse de bois, à son cou, une corde de
fibres. » (al-Masad, 111 : 1-5; voir aussi Al Boukhari, Tafsir 26/2, 34/2, 111/1-2 ; Muslim, Iman 355).
Dans ces versets, la femme d’Abû Lahab est évoquée, car comme son mari,
elle causait beaucoup de peine au Messager de Dieu r en jetant des épines sur les
chemins qu’il empruntait. Cette sourate exprime aussi en termes de signification
absolue que le lien de sang et de filiation n’a guère d’importance. Les liens spirituels
et fraternels priment sur le reste. L’esprit n’a pas de filiation. Le corps, quant à lui, se
dissoudra dans la terre. L’homme gagne de l’estime selon la splendeur de son esprit.
Le corps est chez l’homme un moule ou un vêtement dans lequel il est enveloppé.
Certes l’homme ne gagne pas plus de valeurs en changeant le tissu de son vêtement !

Consécutivement à l’appel du Messager de Dieu r, ses tantes Safiyya et Atika,


ainsi que les esclaves affranchis de son oncle Abbâs, Abû Rafi, Abû Dharr et Amr
ibn Abasa, embrassèrent l’islam.
Pendant la Période de l’Ignorance, Abû Dharr t ne croyait pas aux idoles. Il
raconte ainsi son entrée dans le droit chemin :
170 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« J’appartenais à la tribu al-Ghifar. Lorsque j’entendis qu’à La Mecque quelqu’un


se prétendait prophète, à ce moment même Dieu mit dans mon cœur l’envie d’adhé-
rer à l’islam. Je dis à mon frère Unays :
- Va à La Mecque et converse avec celui qui affirme avoir des révélations venues
du ciel. Apporte-moi des informations et des nouvelles à son sujet !
Mon frère Unays se rendit donc à La Mecque, rencontra le Messager de Dieu r
et revint me voir pour me rapporter ce qui lui avait dit. Je lui demandai :
- Qu’as-tu fait ? M’as-tu apporté des nouvelles ?
- À La Mecque j’ai rencontré une personne de ta religion qui se dit être l’Envoyé
de Dieu, me dit-il.
- Et que dit la population à son sujet ? lui demandai-je.
- Elle dit de lui qu’il est poète, devin, magicien, répondit-il.
Mon frère, qui était poète et connaissait très bien la parole belle et éloquente,
dit à propos du Saint Prophète r :
- Je connais les paroles proférées par les devins. Ses paroles à lui ne ressemblent
pas à celles des devins. J’ai comparé ces paroles avec tous les genres poétiques. Par
Dieu, personne ne pourrait dire que ses paroles soient des vers poétiques. Il dit sans
aucun doute la vérité ! Certes il ordonne d’accomplir le bien et la bonne morale, il
demande l’éloignement du mal et des choses réprimandables.
Je ne fus pourtant pas satisfait des propos rapportés par mon frère aussi je pris
mes affaires, mon outre d’eau et me rendis à La Mecque. Ne connaissant nullement
le Messager de Dieu r, j’appréhendai de questionner un inconnu. J’attendis à la
Mosquée Sacrée et, en buvant de l’eau de zamzam, je compensais ma faim et ma soif.
À ce moment Ali t arriva et me dit :
- Je crois bien que tu es étranger à La Mecque ?
- Oui, répondis-je.
- Dans ce cas sois notre invité, me dit-il.
J’allai donc avec Ali t. En raison du vent de terreur provoqué par les Mec-
quois et la crainte engendrée, il ne me demanda même pas la raison de ma venue.
Le matin, je me rendis de nouveau à la Maison Sacrée dans le but de rencontrer le
Messager de Dieu r. Bien que j’eusse attendu jusqu’au soir, aucune nouvelle ne me
parvint.
Ali t apparut de nouveau et me dit :
- Tu ne sais toujours pas où aller ?
La Quatrième Année de la Prophétie 171

- Non, lui répondis-je.


Ali t me dit alors : « Eh bien sois une nouvelle fois notre invité !»
Quand nous arrivâmes chez lui, il me demanda :
- Quelle est la raison de ta présence ?
Après qu’il m’ait promis de garder le secret et de m’aider, je lui dis :
- Selon les informations que nous avons reçues, il y a une personne ici qui se
proclame prophète ! Je suis venu pour le rencontrer et lui parler.
- Tu as bien fait de venir ici, me répondit-il, cette personne est le Messager de
Dieu r, le Prophète véridique ; au matin, tu me suivras et tu entreras dans la mai-
son où j’entrerais ! Si je vois un danger qui pourrait t’atteindre, je ferais comme si
j’arrangeais ma chaussure en m’appuyant contre un mur, et toi tu partiras.
Enfin nous arrivâmes auprès du Saint Prophète r.
- Que la paix soit sur toi ô Messager de Dieu ! lui dis-je. Ainsi je fus le premier
à le saluer avec le salut de l’islam.
- Ô Muhammad ! À quoi invites-tu les hommes ? lui demandai-je.
Le Messager de Dieu r m’indiqua la chose suivante :
- J’invite à la foi en Dieu, l’Unique et qui n’a aucun associé, à abandonner les
idoles et à témoigner que je suis le Messager de Dieu.
Après m’avoir expliqué les fondements de l’islam, j’embrassai aussitôt l’islam.
Le Messager de Dieu r fut si satisfait de mon entrée en islam que son visage en
rayonnait de joie.
- Ô Abû Dharr, me dit-il, garde pour l’instant cette affaire secrète des Mecquois
et retourne dans ton pays.
- Ô Messager de Dieu ! Je veux maintenant proclamer ma (nouvelle) religion,
lui dis-je alors.
Le Messager de Dieu r répondit :
- Je crains que les Mecquois ne te fassent quelque tort !
- Ô Messager de Dieu, lui répondis-je, même si je devais être assassiné, je le
ferais.
À ces paroles, le Saint Prophète r se tut.
Alors que les Qurayshites étaient réunis à la Ka’ba, je m’approchai et élevai la
voix haut et fort, disant :
172 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

- Ô peuple de Quraysh ! Achhadou an lâ ilâha illa-llâh, wa ashadou ana mu-


hammadun abdouhou ve rasûluhu ! » (Je témoigne qu’il n’y a de vraie divinité que
Dieu et que Muhammad est son Serviteur et Messager.)
Les idolâtres, stupéfaits, s’exclamèrent :
- Il a perdu la raison ! Il a perdu la raison ! Levons-nous et piétinons ce sabiîte 60 !
Ils se levèrent et me frappèrent à mort. À ce moment-là, Abbas t, l’oncle du
Messager de Dieu r, arriva et s’interposa en disant :
- Malheur à vous ! Ô peuple de Quraysh ! Vous êtes des commerçants et votre
route commerciale passe par le clan d’al-Ghifar. Voulez-vous que l’on vous coupe
votre route commerciale ? En entendant ceci, ils se dispersèrent.
Le lendemain matin, en arrivant près de la Maison Sacrée (la Ka’ba), le même
évènement se répéta. Je fus tellement battu qu’ils finirent par me laisser, me croyant
mort. Je me levai enfin et me rendis auprès du Messager de Dieu r. Quand le Saint
Prophète r vit mon état, il me dit :
- Ne t’avais-je pas défendu d’agir ainsi ?
Je lui répondis :
« Ô Messager de Dieu ! Je sais, mais c’était plus fort que moi, je devais accomplir
ce désir venant de mon cœur.
Je restai quelques temps avec le Messager de Dieu r et finis par lui demander :
- Ô Messager de Dieu ! Que m’ordonnes-tu de faire ?
Le Messager de Dieu r répondit :
- Quand mon appel te parviendra, tu transmettras l’islam à ton clan ! Et quand
tu auras appris que nous nous sommes montrés publiquement, tu viendras alors me
voir ! » (Al Boukhari, Manaqibu’l-Ansar 33, Manaqib 10 ; Ahmad, V, 174 ; Hakim, III, 382-385 ; Ibn
Saad, IV, 220-225).

Le Saint Prophète r invita tous les hommes à rejoindre l’islam. Pendant les
mois de pèlerinage effectués pendant les foires d’Ukaz, de Majanna, de Dhul-Majaz
ainsi que d’autres, là où il y avait un attroupement d’hommes, il diffusait le message
de l’islam à tous ceux qu’il rencontrait, qu’ils soient libres ou esclaves, faibles ou
puissants, riches ou pauvres ; il les invitait à la croyance en l’unicité de Dieu. (Voir Ibn
Saad, I, 216-217).

60. Les Mecquois appelaient les musulmans « sabiîtes », ce qui signifie « ceux qui sortent de la religion ».
La Quatrième Année de la Prophétie 173

Les versets révélés à ce moment de la mission prophétique donnaient surtout


des nouvelles du Jour du Jugement dernier :

Ò òƃ ijŽ Ĩ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ÅÓƇ ĩƆ ùĤÒ
ƪ òij Ƈ ĩƇ ÜƆ ĦƆ ijŽ ĺƆ ďƅ ĘÒîī
Ɔ ĨįƇ ĤƆ ÓĨ
Ɔ ďƄ ĜÒijƆ ĤƆ ğƈƆ Öž ò
Ɔ ÔÒ
Ɔ ñƆ Đ
Ɔ Īƈƪ Ì
Ɔ ×Ƈ đƆ ĥŽ ĺƆ Ăƅ ijŽ ìĹ
ĦƆ ijŽ ĺƆ Īij Ɔ Ę ƈ ħİīĺñƈ Ĥƪ ÒīĻƈÖñž ƈ ġƆ ĩĥŽ Ĥƈ ñƅ Ñƈ ĨijĺģƄ ĺijĘƆ ÒóĻøĢÓ
ŽƇ Ɔ Ɔ Ƈ
ƈ
Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ƃ Ž Ɔ Ƈ ×Ɔ åƈ ĤŽ ÒóĻƇ ùÜƆ IJƆ
Ɔ ÖƇ ñž ƈ ġƆ ÜÓ
Īij Ƈ Ýƈ Ĥƪ ÒòÓ
Ƈ ıƈƆ ÖħÝĭƇ ĠĹ ƈ ƈ Ɔ Đîħĭıä ƈòÓĬƆ ĵĤƆ Ìƈ Īij
Ƈ ĭĤÒ
ƪ ĮñİÓ Ƭ Ɔ ƆƪƆ Ɔ Ɔ Đƫ ïƆ Ƈĺ
« Le châtiment de ton Seigneur aura lieu inévitablement. Nul ne pourra le
repousser. Le jour où le ciel sera agité d’un tourbillonnement, et les montagnes
se mettront en marche. Ce jour-là, malheur à ceux qui traitent (les signes d’Allah)
de mensonges, ceux qui s’ébattent dans des discours frivoles le jour où ils seront
brutalement poussés au feu de l’Enfer : Voilà le feu que vous traitiez de men-
songe. » (at-Tur, 52 : 7-14).
Alors que le Messager du Dieu r déclara ouvertement son Apostolat prophé-
tique et commença à inviter publiquement à la religion véridique, des versets allant à
l’encontre des idolâtres et de leurs idoles commencèrent à être révélés :

Ɔ îƇ ƈòÒIJÓ
ĪIJ Ɔ ƈ Ʃ ĪIJ
ƈ îī ƈ Ɔ ïƇ ×đÜÓ
Ɔ ıƆ ĤƆ ħŽ ÝĬƇ ÈħƆ ĭƪ ıƆ ä
Ɔ ÕƇ āƆ è
Ɔ ųÒ Ƈ ĨĪIJ ĨIJħġĬƈÌ
ƇŽƆ Ɔ Ɔ ŽƇ ƪ
« Vous serez, vous et ce que vous adoriez en dehors d’Allah, le combustible de
l’Enfer, vous vous y rendrez tous. » (al-Anbiya, 21 : 98).

įĤ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ƅ ÒħŽ ġƇ ıƇ ĤƆ ÒÓĩƆ Ĭƪ ÒƆ ĵƪ ĤƆ Òĵèij Ɔ ƇĺħŽ ġƇ ĥƇ ᎠĨóƄ ýƆ ÖÓ
Ɔ ĬƆ ÒƆ ÓĩƆ Ĭƪ ÒģŽ ĜƇ
īĻ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ĘƆ ïƄ èÒ ƈ IJ
Ɔ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĥŽ ĤģƄ ĺŽ IJƆ IJ Ɔ ĮIJ Ƈ óƇ ęĕŽ ÝƆ øÒ
Ž IJ
Ɔ įĻŽ ĤƆ ÒÒijĩĻ Ƈ ĝÝƆ øÓ Ž Ɔ
« Dis : ‹Je ne suis qu’un homme comme vous. Il m’a été révélé que votre Dieu
est un Dieu unique. Cherchez le droit chemin vers Lui et implorez Son pardon›.
Et malheur aux associateurs… » (Fussilat, 41 : 6).
Quand le Messager de Dieu r commença à dénigrer les idoles qu’adoraient les
mécréants, les idolâtres de Quraysh démentirent immédiatement et renièrent notre
Saint Prophète r. Ils se réunirent pour lui manifester leur haine et animosité. Mais
Abû Talib l’ayant pris sous sa protection, ils ne purent aller plus loin. (Ibn Saad, I, 199).
Des mécréants comme Abû Jahl, Abû Lahab, Walid ibn Mughira, Ummaya ibn
Halef, Uqba ibn Abi Muayt et Utba ibn Rabia étaient parmi les malchanceux qui
furent condamnés à la souffrance éternelle en raison de leur animosité excessive à
l’égard de la Fierté de l’humanité r.
174 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’importance de la prédication et sa méthode


La prédication est le travail consistant à transmettre le message de l’islam et
ses principes tout en contribuant à ce que les gens vivent selon ses préceptes. La
prédication est citée comme « Amr bi’l ma’rûf, nahy ani’l-munqer » : ordonner le
convenable et le bon comportement et interdire le blâmable et le mal (sous toutes
ses formes).
Dans les versets coraniques suivants, Dieu le Tout-Puissant ordonne à tous les
croyants de pratiquer le prêche islamique :

ƈ óđĩĤŽ ÓƈÖĪIJ
ĖIJ óĨÉŽ ĺIJ ƈóĻíĤÒĵĤÌƈ ĪijĐïĺÙĨƇÈħġĭĨī ƈ ġÝĤIJ
Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ ŽƆ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ŽƆ Ƅ ƪ Ž Ƈ ž Ƈ ƆŽ Ɔ
Ɔ éƇ ĥƈ ęŽ ĩƇ ĤŽ ÒħƇ İ
Īij Ƈ ğƆ ÑÃƈ ĤƆ IJŽ ƇÈIJ Ɔ ĩƇ ĤŽ Òīƈ Đ
Ɔ ƈóġĭ Ɔ ĪƆ ijŽ ıƆ ĭŽ ĺƆ IJƆ
« Que soit issue de vous une communauté qui appelle au bien, ordonne le
convenable, et interdit le blâmable. Car ce seront eux qui réussiront. » (al-Imran,
3 : 104).

ƈóġĭ
Ɔ ĩƇ ĤŽ Òīƈ Đ ƈ ƈ ĭĥĤƈ ÛŽ ä ƈóìŽ ƇÈÙƅ ĨƇÈóĻì
Ɔ óƇ ĨƇ ÉŽ ÜƆ öÓ
Ɔ ĪƆ ijŽ ıƆ ĭŽ ÜƆ IJ
Ɔ ĖIJóƇ đŽ ĩƆ ĤŽ ÓƈÖĪIJ ƪ Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ ħŽ ÝƇ ĭŽ ĠƇ
« Vous êtes la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes,
vous ordonnez le convenable, interdisez le blâmable… » (al-Imran, 3 : 110).
Dans quelques fameux hadiths, notre Saint Prophète r évoque l’importance
que revêt la prédication :
« Que Dieu rende le visage illuminé de celui qui entend notre parole et la commu-
nique telle quelle ! Il existe tellement de personnes qui comprennent et pratiquent la
prédication alors qu’ils ne l’ont pas entendue d’eux-mêmes. » (At Tirmidhi, Ilm, 7).
« Je le jure par Dieu ! Qu’une seule personne adopte l’islam grâce à toi, cela sera
meilleur pour toi que d’être en possession de chamelles rousses (les plus précieuses). »
(Al Boukhari, Ashabu’n-Nabi, 9).

« À celui qui invite les gens à l’islam, il lui sera attribué autant de récompenses
que les invités auront eux-mêmes reçues. Si bien que de leur bienfait rien ne sera perdu
ni soustrait. » (Muslim, Ilm, 16).
Anas t rapporte dans le hadith suivant le niveau éminent qu’atteindront dans
l’au-delà les personnes qui ont pratiqué l’appel à l’islam :
« Un jour, le Messager de Dieu r déclara :
La Quatrième Année de la Prophétie 175

- Voulez-vous que je vous donne des nouvelles concernant certaines personnes ?


Elles n’étaient ni prophètes ni martyrs. Mais le Jour du Jugement, les prophètes et les
martyrs eux-mêmes désireront leur niveau.61 Ils seront assis sur des coussins de lumière
et tout le monde les reconnaîtra.
Les Compagnons y demandèrent :
- Qui sont-ils, ô Messager de Dieu ?
Le Messager de Dieu r répondit :
- Ce sont des personnes qui font aimer Dieu aux gens et les gens à Dieu. Elles sil-
lonnent la terre pour communiquer le message divin.
Je demandais :
- Ô Messager de Dieu ! Nous avons bien compris ce que signifie faire aimer
Dieu. Mais comment fait-on aimer Dieu ?
Le Messager de Dieu r rétorqua :
- Elles ordonnent aux hommes de se comporter de la façon dont Dieu aime et les
empêchent d’accomplir ce qu’Il déteste. Lorsque les hommes suivront ces paroles, Dieu
le Tout-Puissant les aimera. » (Ali al-Muttaqi, III, 685-686; Bayhaqî, Shuabu’l-Iman, I, 367).
Un poète décrit ainsi l’état d’âme des personnes engagées dans la mission de
transmettre l’islam :
J’aimerais que tous les êtres de l’univers aiment mon Amour,
Qu’il ne reste personne loin de mon Seigneur.
Un autre poète traduit ainsi ses sentiments :
Que toutes les créatures aiment celui que j’aime,
Qu’elles soient sur Lui toutes nos paroles nuit et jour…
Le profit de celui qui assure le rôle de la prédication à juste titre est plus précieux
que tous les trésors du monde, mais la négligence de cette fonction peut conduire à
des conséquences plus désastreuses, jusqu’à exterminer spirituellement toute une
communauté.
L’avertissement du Messager de Dieu r à ce sujet est très clair :
« Par Dieu qui m’a donné la vie, soit vous ordonnez le bien et interdisez le mal,
soit Dieu de sa station vous enverra un tourment par le biais duquel vous prierez, mais
votre prière ne sera pas acceptée. » (At Tirmidhi, Fitan, 9).

61. Il est important de ne pas conclure que ces gens sont supérieurs aux prophètes et aux martyrs car ces
derniers ont sacrifié leur vie pour cette cause.
176 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abzâ al-Huzâi t, Compagnon du Saint Prophète r, raconte :


« Un jour, le Messager de Dieu monta sur le minbar et après avoir dit beaucoup
de bien de certains musulmans, il ajouta :
« Comment se fait-il que certains d’entre vous n’enseignent pas à leurs voisins ce
qu’ils savent et n’essaient pas de les rendre plus aptes à comprendre ? Ils ne leur or-
donnent pas le bien et ne les éloignent pas des interdictions. Qu’arrive-t-il à d’autres ?
Ils ne s’efforcent pas d’apprendre de leurs voisins ce qu’ils ne savent pas afin d’augmen-
ter leur compréhension. Je le jure par Dieu ! Soit ceux qui savent doivent enseigner à
leurs voisins qui ne savent pas et tenter de leur faire acquérir davantage de compré-
hension, soit ceux qui ne savent pas doivent demander que leurs voisins les enseignent
et les mettent au fait quant aux questions de religion, ou bien je les punirai tous, ici,
dans ce monde.»
Après son discours, le Messager de Dieu r descendit du minbar et retourna
chez lui.
Certaines personnes présentes dans l’assistance dirent :
- Nous supposons qu’il a voulu faire référence aux Yéménites, car ce sont des
gens compréhensifs alors que leurs voisins sont des gens rustres, au visage dur, des
nomades vivant autour des points d’eau.
Lorsque les Yéménites prirent connaissance de la situation, ils se rendirent au-
près du Messager de Dieu r et lui dirent :
- Ô Messager de Dieu ! Tu as parlé d’une tribu en bien et de nous en mal. Quelles
fautes avons-nous commises pour mériter cela ?
Le Seigneur des mondes se tut puis répéta les mêmes paroles.
Les Acharites (Yéménites) ne purent comprendre s’ils étaient oui ou non visés.
Pour plus de certitude, ils réitérèrent plusieurs fois leur question.
À chaque fois, le Messager de Dieu r répéta les mêmes paroles.
Sur ce, les Acharites dirent :
- Dans ce cas, accorde-nous au moins une année, ô Messager de Dieu !
Le Messager de Dieu r leur accorda un délai d’un an pour former leurs voisins
et leur enseigner tout ce qui a trait à la religion.
Le Saint Prophète r récita alors les versets coraniques suivants :
La Quatrième Année de la Prophétie 177

îIJ ƈ ùĤĵƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ IJÒƇ î
Ɔ ĪÓ Ɔ ĥƆ ĐƆ ģĻƆ ÐÒóƆ øƈŽ ÌĹĭÖƆ īŽ ĨÒIJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒīƆ đƇĤ
ĪIJ
Ɔ ïƇ ÝƆ đŽ ĺÒij ƈ ƈ
Ɔ ƇĬÓĠƆ IJÒ Ɔ ĩƈƆ ÖğƆ ĤðħƆ ĺƆ óŽ Ĩ
Ɔ ijŽ āƆ ĐÓ Ɔ īƈ ÖÒĵ
Ž ùĻ Ɔ ĐIJƆ
Īij
Ɔ ĥƇ đƆ ęŽ ĺÒij
Ɔ ƇĬÓĠÓ
Ɔ Ĩ Ƈ ĥƇ đƆ ĘƆ  ƅóġƆ ĭŽ Ĩ
Ɔ ÷Ɔ ÑƈŽ ×ĤƆ Įij Ƈ īŽ Đ
Ɔ ĪƆ ijŽ İÓ
Ɔ ĭƆ ÝƆ ĺƆ ƆźÒijƇĬÓĠƆ
« Ceux des Enfants d’Israël qui n’avaient pas cru ont été maudits par la
bouche de David et de Jésus fils de Marie, parce qu’ils désobéissaient et transgres-
saient. Ils ne s’interdisaient pas les uns aux autres ce qu’ils faisaient de blâmable.
Comme est mauvais, certes, ce qu’ils faisaient ! » (al-Maida, 5 : 78-79) ; (Voir aussi Hay-
thami, I, 164 ; Ali al-Muttaqi, III, 684/8457).

L’Être de lumière r gagna un tel enthousiasme en matière de servitude qu’il


continua avec amour le travail de guidance de l’humanité. Il accomplit sa mission de
diffusion du message avec responsabilité et conviction, atteignant en conséquence
le sommet des sommets. Toutes les propositions flatteuses qui lui furent faites pour
l’écarter de sa mission n’aboutirent pas car rien ne valait plus que servir Dieu.
Notre Saint Prophète r expliquait l’islam selon le niveau intellectuel de chaque
personne et dans la mesure de la compréhension de son auditeur ce qui avait comme
conséquence le fait que chaque personne finissait par accepter l’islam et cela lui pro-
curait une joie immense.
Ainsi donc, lors d’un évènement important, comme l’expédition de Khaybar,
il ressentit beaucoup de plaisir à raconter de façon très détaillée les fondements de
l’islam à un esclave, ce qui permit à ce dernier de rejoindre la voie de la vérité. (Ibn
Hishâm, III, 398).

De même, lors du voyage pénible qui dura une dizaine de jours jusqu’à Tâ’if, il
invita un esclave chrétien, nommé Addâs, à la religion. Enchanté des réponses qu’il
reçut, il embrassa l’islam. Cet évènement fit oublier toutes les peines qu’il avait subies
à Tâ’if.
Le Messager de Dieu r dépensait toutes ses forces pour illuminer les hommes
de la lumière de l’islam et il ne s’en lassait pas. Son extrême conviction dans la prédi-
cation est rapportée comme suit par Abû Rifâa :
« Alors que le Messager de Dieu r était en train de délivrer un sermon, je m’ap-
prochai de lui pour lui dire :
- Ô Messager de Dieu ! Il y a un homme pauvre qui ne sait rien à propos de la
religion et qui est venu te questionner à son sujet.
Le Messager de Dieu r se retourna vers moi et me regarda. Il arrêta son sermon
et vint à moi. Afin qu’il puisse s’asseoir, on lui ramena une chaise dont les pieds
178 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

étaient en fer. Il s’assit et commença à me raconter un certain nombre de choses


que Dieu le Tout-Puissant lui avait apprises. Ensuite il continua son sermon là où il
s’était arrêté pour enfin le terminer. » (Muslim, Juma, 60).
Les Compagnons du Saint Prophète r étaient très engagés quant à la prédica-
tion des vérités et à la correction des erreurs qu’ils remarquaient. Le travail consis-
tant à avertir les gens qui agissaient en contradiction avec les indications du Mes-
sager de Dieu r n’appartenait pas à un groupe limité de personnes. Chacun d’eux
accomplissait cette fonction quand le moment et le lieu l’exigeaient, peu importe le
prix à payer. Ils disaient toujours la vérité, personne ne pouvait supporter qu’une
personne agisse contre les ordres du Saint Prophète r. À ceux qui contestaient les
prédications, ils leur disaient qu’ils ne resteraient désormais plus sous le même toit
qu’eux. (Voir Shafiî, Risâla, p. 193, Istanbul, 1985 ; Suyutî, Miftâh, p. 48, Beyrouth 1987).
Quant à ceux qui revendiquaient leur avis personnel par rapport à un hadith
béni, ils leur faisaient comprendre qu’ils ne pouvaient plus vivre dans le même pays
qu’eux et qu’ils pouvaient même quitter cet endroit. (Voir Muwatta’, Buyu’, 33 ; Ibn Mâjah,
Muqaddima, 2).

Sufyan al-Thawrî g a dit ceci concernant l’importance de la prédication :


« Il est plus bénéfique pour toi de prêcher l’islam au Khorasan que d’habiter à
La Mecque. »
Étant donné que la prédication est aussi importante, la formation des personnes
pouvant accomplir cette fonction avec justesse devient également essentielle.
L’évènement suivant montre la valeur d’un prédicateur bien guidé accomplis-
sant son devoir avec responsabilité :
« Un jour Omar t, étant assis en compagnie de ses amis, leur demanda d’im-
plorer Dieu pour divers souhaits.
Certains d’entre eux demandèrent donc à Dieu le Très-Haut :
- Que la maison où nous nous trouvons soit remplie d’argent et que nous dé-
pensions tout sur le sentier de Dieu !
D’autres dirent :
- Que la maison où nous nous trouvons soit remplie d’or et que nous dépen-
sions tout sur le sentier de Dieu !
Et d’autres :
- Que la maison où nous nous trouvons soit remplie de pierres précieuses et que
nous dépensions tout sur le sentier de Dieu !
Mais Omar t dit :
La Quatrième Année de la Prophétie 179

- Demandez davantage !
- Que pouvons-nous demander de plus à Dieu le Tout-Puissant ? lui deman-
dèrent-ils.
Omar t leur répondit :
- Moi je demanderai à Dieu que la maison dans laquelle nous sommes soit rem-
plie de gens comme Abû Ubayda ibn Jarrâh, Muadh ibn Jabal, Houdhayfa’tul-Ya-
manî (tous des gens exceptionnels et distingués, et sublimes dans tous les sens) et je
voudrais les désigner dans le travail d’appel à la foi en Dieu et à la prédication aux
gens… » (Al Boukhari, Tarikh’us-Saghir, I, 54).

Dans le Coran, Dieu le Très-Haut, Source même de la miséricorde et de la com-


passion, prescrit la méthode nécessaire à suivre en ce qui concerne l’invitation au
droit chemin :

ƈ Ýƈ Ĥƪ ÓƈÖħıĤŽ îÓƈ äIJÙƈ ĭƆ ùéĤŽ ÒÙƈ čƆ Đƈ ijĩĤŽ ÒIJÙƈ ĩġŽ éƈ ĤŽ ÓƈÖğƈƆ ÖòģĻƈ
īƇ ùƆ èŽ ƆÒĵİĵ ƈ
Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ ž Ɔ ƈ ×øĵ
Ɔ ĤƆ ÒĎƇ îŽ ƇÒ
« Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton
Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui
connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux
ceux qui sont bien guidés. » (an-Nahl, 16 : 125).

īƇ ùƆ èŽ ƆÒĵİĵ ƈ Ýƈ Ĥƪ ÓƈÖƪźÒƈ ÔÓ ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ ÒģƆ İŽ ƆÒÒijƇĤîÓƈ åƆ ÜƇ ƆźIJƆ


Ɔ
ĢƆ ƈõĬŽ ƇÒIJÓ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ĭƆ ĻŽ ĤƆ ÒĢƆ ƈõĬŽ ƇÒĴñĤƪ ÓƈÖÓĭƪ ĨƆ ƆÒÒijƇĤijĜƇ IJ Ɔ ħŽ ıƇ ĭŽ ĨÒijĩƇ ĥƆ Č
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒƪźÒ
Ɔ ĩƇ ĥƈ ùŽ Ĩ
Īij ƈ ħġƇ ıĤƆ Òƈ IJÓĭƆ ıĤƆ Òƈ IJħġƇ ĻĤƆ Òƈ
Ƈ įƇ ĤƆ īƇ éŽ ĬƆ IJ
Ɔ ïƄ èÒIJ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ž
« Et ne discutez que de la meilleure façon avec les gens du Livre, sauf ceux
d’entre eux qui sont injustes. Et dites : ‹Nous croyons en ce qu’on a fait descendre
vers nous et descendre vers vous, tandis que notre Dieu et votre Dieu est le même,
et c’est à Lui que nous nous soumettons›. » (al-Ankabut, 29 : 46).

Óéƃ ĤÓƈ Ā ƈ ųÒĵ ƈ ƈ ƈ


Ɔ ģƆ ĩĐƆ IJ
Ɔ Ʃ ĤƆ ÒÓĐƆ î
Ɔ īŽ ĩƪ ĨƃźijŽ ĜƆ īƇ ùƆ èŽ ÒƆ īŽ ĨƆ IJƆ
ƈ Ýƈ Ĥƪ ÓƈÖďĘƆ îÒƈ ÙƇ ÑƈƆ ĻùĤÒƆźIJÙƇ ĭƆ ùéĤŽ ÒĴ ƈijÝùÜƆ ƆźIJīĻĩƈ ĥƈ ùĩĤŽ ÒīĨĵ
ĵİĵ ƈ ĭƈ Ĭƪ Òƈ ĢÓƆ ĜƆ IJ
Ɔ Ž Ž ž ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ
ħĻĩƈ è ĵĤƈ IJįĬÓĠØIJÒïĐįĭĻÖIJğĭĻÖĴñƈ Ĥƪ ÒÒðƆ Óƈ ĘƆ īƇ ùƆ èŽ ƆÒ
Ƅ Ɔ ƭ Ɔ Ƈ ƪƆ Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ
180 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Et qui profère plus belles paroles que celui qui appelle à Allah, fait bonne
œuvre et dit : ‹Je suis du nombre des Musulmans›? La bonne action et la mauvaise
ne sont pas pareilles. Repousse (le mal) par ce qui est meilleur62 ; et voilà que celui
avec qui tu avais une animosité devient tel un ami chaleureux. » (Fussilat, 41 : 33-34).

 ĭƈ đƆ ×ÜÒ
Ĺ īĨIJÓĬƆÈØƅ óĻāƈ ÖĵĥĐųÒĵ ƈ ĤÌƈ ijĐîƆÈĹĥĻƈ ƈ ×øĮƈ ñÃƈ İ
Ɔƪ ƈ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ʃ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ ģŽ ĜƇ
ƈ ƈ ƈ Ʃ ĪÓ
Ɔ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨÓŽ ĬƆ ƆÈÓĨƆ IJ
īĻ Ɔ ųÒ Ɔ éƆ ׎ øƇ IJƆ
« Dis: ‹Voici ma voie, j’appelle les gens [à la religion] d’Allah, moi et ceux qui
me suivent, nous basant sur une preuve évidente. Gloire à Allah ! Et je ne suis
point du nombre des associateurs. » (Yûsuf, 12 : 108).
Ainsi, dans l’histoire, ceux qui ont suivi cette méthode conseillée par Dieu le
Très-Haut ne furent jamais déçus et transformèrent les cœurs noircis en cœurs
épanouis.
Dieu le Tout-Puissant conseilla aux prophètes Moïse u et Aaron u d’em-
ployer un langage doux lorsqu’Il les envoya les auprès du Pharaon égaré :

ĵýƆ íŽ ĺƆ IJŽ ƆÈóĠƪ ñƆ ÝƆ ĺƆ įƇ ĥƪ đƆ Ĥƪ Óĭƈƃ ĻĤƪ źƃ ijŽ ĜƆ įƇ ĤƆ źij


Ɔ ĝƇ ĘƆ
Ƈ ž
« Puis, parlez-lui gentiment. Peut-être se rappellera-t-il ou [Me] craindra-t-
il? » (Ta-Ha, 20 : 44).
Dans ce verset glorieux, on retrouve deux principes systématiques en matière
de prédication :
1. Celui qui prêche la vérité à son interlocuteur doit utiliser une méthode qui
ne provoque pas son ego.
Même si devant les miracles manifestes de Moïse u, Pharaon s’approcha à
plusieurs reprises de la croyance, le vizir Hâmân et son cercle furent à chaque fois
un obstacle.
Lui aussi doté de vanité et d’arrogance choisit de ne pas croire.
Dieu le Très-Haut, en conseillant à Moïse u d’adopter un langage doux (kawli
layyin) prescrit une méthode à appliquer lors d’une prédication.

62. L’attitude de Yûsuf u est un exemple caractérisant au mieux ce verset. Il ne rappela pas à ses frères
leur faute mais il continua à les servir avec hospitalité tout en dissimulant sa véritable identité. Pour
finir, ses frères le reconnurent et dirent : ÓĭƆ ĻĥƆ Đ ƈ Ü « Par Allah ! Vraiment Allah t’a préféré à
ųÒĞóàÒïĝĤųÓ
Ž Ɔ ƇƩ Ɔ ƆƆſ Ž ƆƆ Ʃ Ɔ
nous … » (Yûsuf, 12 : 91) En reconnaissant sa supériorité et en l’acceptant ils demandèrent pardon.
Cette situation montre à quel point l’attitude et la prédication sont une méthode active. (Osman Nûri
Topbaş, la chaîne des prophètes 2, p.129-130, Istanbul 2004).
La Quatrième Année de la Prophétie 181

Ainsi il est recommandé d’abord d’adoucir les cœurs et ensuite de transmettre


le Message divin.63
Dans la vie des prophètes et des rapprochés de Dieu, il n’y a jamais eu de que-
relles en matière d’invitation. La prédication liée au comportement est un principe
fondamental.
Les prophètes L chargés par Dieu le Tout-Puissant de guider les hommes
considéraient ceux-ci avec un regard compassionnel et miséricordieux. Par consé-
quent, en dégageant un amour perpétuel, les hommes étaient prompts à adhérer
d’eux-mêmes à la religion de Dieu. En revanche, s’ils avaient eu un comportement
non-compréhensif et aveugle, le fossé entre les hommes se serait ouvert et le contact
se serait brisé, personne alors n’aurait rejoint la voie de la raison. Et ceci aurait été
contraire à la volonté divine. En effet, Dieu le Très-Haut voulait que Ses serviteurs
soient sauvés du marécage dans lequel ils s’étaient enfoncés.
C’est pour cela que Dieu, tout au long de l’histoire de l’humanité, envoya des
milliers de prophètes et leur commanda de conquérir les cœurs armés de la plus
belle des méthodes. Ainsi donc, les rapprochés de Dieu s’impliquèrent dans cette
mission de la même manière.
Aucun profit ne peut être attendu d’un service rendu avec un comportement
déplaisant, grossier et rude.
Cela est d’autant plus important dans les activités liées à l’âme de la personne,
telles que l’éducation, l’invitation et la prédication.
En la personne du Saint Prophète r, le verset ci-dessous s’adresse à tous les
musulmans :

ÛƆ ĭŽ Ġ
Ƈ ijŽ ĤƆ IJ ƈ ƈ Ʃ īĨ
ƈ ƅ
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ÛƆ ĭŽ ĤųÒ Ɔ ÙĩƆ èŽ òÓ Ɔ ĩƈƆ ×ĘƆ
ğƆ Ĥƈ ijŽ è ƈ Ɔ ĥƈ ĔƆ ÓƬčĘƆ
Ɔ īŽ ĨÒijąƫ ęƆ ĬŽ ƆźÕƈ ĥŽ ĝƆ ĤŽ ÒċĻ
« C’est par quelque miséricorde de la part d’Allah que tu (Muhammad) as
été si doux envers eux ! Mais si tu étais rude, au cœur dur, ils se seraient enfuis de
ton entourage. Pardonne-leur donc, et implore pour eux le pardon (d’Allah)… »
(al-Imran, 3 : 159).

63. Lors de la 7ème année de l’Hégire, après la prise de Khaybar, le Messager de Dieu r envoya à la
population de La Mecque, victime de la sécheresse et de la famine, de l’or, de l’argent et des graines
de dattes. Abû Sufyan prit toutes ces offrandes afin de les distribuer aux nécessiteux de Quraysh et
s’exclama : « Que Dieu récompense les bienfaits de mon neveu, car il a respecté le droit de la famille ! »
En affirmant cela, il montra sa satisfaction. (Yaqûbî, II, 56). Le comportement digne du Messager de
Dieu r avait adouci le cœur des Mecquois et après la conquête de La Mecque, les idolâtres acceptèrent
sans réserve la religion véridique.
182 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

2. En dépit de leur statut, la prédication doit s’étendre à toute l’humanité :


Pharaon était un homme brutal, misérable, et plus encore, indisposé à croire ;
de plus, un assassin impitoyable qui tua des milliers de bébés innocents juste dans
le but d’atteindre Moïse u. Malgré cela, la volonté divine réitéra son invitation.
Similairement, le Prophète Muhammad r invita maintes fois Abû Jahl à l’islam.
Tout en acceptant dans sa conscience les paroles de vérité énoncées par le Saint Pro-
phète r, Abû Jahl ne pouvait pas l’admettre, il fut vaincu par son ego et son orgueil.
Quoi qu’il en soit, la manière noble du Messager de Dieu r conduisit à la
vérité de nombreuses personnes qui étaient auparavant hostiles à l’islam, comme par
exemple Omar ibn al-Khattab, Abû Sufyan, Hind et Wahshi y.
Aussi bien dans les activités islamiques que dans tous les rapports sociaux en
général, cette approche engendre l’élégance, la gentillesse et la sensibilité vis-à-vis
de la population indépendamment des circonstances particulières et des conditions
physiques. Ainsi, ces valeurs fondamentales et les plus inspirantes furent les bases
du comportement des soufis.
Lorsqu’on analyse les vingt-trois années de prédication qu’assuma l’Être de
lumière r, nous rencontrons les six facteurs suivants qui éclaircissent la voie du
prédicateur :
1. Le Messager de Dieu r commença l’invitation par ses plus proches parents
comme Dieu le Tout-Puissant le prescrit :

Ž ğƆ ÜƆ óĻýƈ Đ
Ɔ ÖóƆ ĜŽ ƆŶÒ
īĻƈ òñƈ ĬƆÈIJ
Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ
« Et avertis les gens qui te sont les plus proches. » (Ash-Shuara, 26 : 214).

ÓıƆ ĻĥƆ ĐØòÓåéƈ ĤÒIJöÓĭĤÒÓİîijĜIJÒòÓĬħġĻĥƈ İÒIJħġùęĬÒÒijĜÒŧĭĨÒīĺñƈ ĤÒÓıĺÒÇĺ


Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ ƃ Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ ŽƆ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ ƫƆ Ɔ
ĪIJ
Ɔ óƇ ĨƆ ËŽ ƇĺÓĨ ƈ Ƅ ƆŻĔ
ƈ ÙƄ ġƆ Ñƈ ĥƆ Ĩ
Ɔ Īij
Ɔ ĥƇ đƆ ęŽ ĺƆ IJ
Ɔ ħŽ İƇ óƆ ĨƆ ƆÒÇĨ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īij
Ɔ āƇ đŽ ĺƆ ƆźîÒ
Ƅ ïƆ üĊ Ɔ
« Ô vous qui avez cru! Préservez vos personnes et vos familles, d’un Feu dont
le combustible sera les gens et les pierres, surveillé par des Anges rudes, durs, ne
désobéissant jamais à Allah en ce qu’Il leur commande, et faisant strictement ce
qu’on leur ordonne. » (at-Tahrîm, 66 : 6).
2. Dans l’invitation à l’islam, notre Prophète r se conforma à l’instruction et
agit graduellement dans la difficulté.
Le premier ordre divin fut : ÈŽ óĜŽ Òƈ « Lis » (al-Alaq, 96 : 1).
Ɔ
La Quatrième Année de la Prophétie 183

ƈ ƆÉĘƆ ħĜƇ
Puis Il octroya à notre Saint Prophète r l’Apostolat prophétique : òŽ ñĬ
Ž
« Lève-toi et avertis ». (al-Muddathir, 74 : 2).
Puis vint l’injonction :

Ž ğƆ ÜƆ óĻýƈ Đ
Ɔ ÖóƆ ĜŽ ƆŶÒ
īĻƈ ƈ ƆÈIJ
òñĬ
Ɔ Ɔ Ž Ɔ
« Et avertis les gens qui te sont les plus proches. » (ash-Shuara, 26 : 214).
Puis les limites de cette fonction s’élargirent à toute la ville :

ƈ ƈ Ɔ đ×ĺĵÝèĴóĝƇ ĤŽ ÒğƆ ĥƈ ıĨğƆ ÖòĪÓ


ijĥƇ ÝŽ ĺƆ źij Ɔ ıƆ Ĩž ƇÈĹĘß
ƃ øƇ òÓ Ɔ ŽƆ ƪ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƫ Ɔ Ɔ ĠÓƆ ĨƆ IJƆ
Ɔ ĩƇ ĤÓƈ Č
Īij Ɔ ÓıƆ ĥƇ İŽ ƆÈIJ ƈ ƈ ĭĠÓ ƈ ħ ƈıĻĥƆ Đ
Ɔ źƈƪ ÌĴóƆ ĝƇ ĤŽ ÒĹġĥıŽ ĨÓ
Ƈ ƪ Ƈ ĨƆ IJÓ
Ɔ ĭƆ ÜÓĺÆ
Ɔ Ž Ž Ɔ
« Ton Seigneur ne fait pas périr des cités avant d’avoir envoyé dans leur
métropole un Messager pour leur réciter Nos versets. Et Nous ne faisons périr les
cités que lorsque leurs habitants sont injustes. » (al-Qasas, 28 : 59).
Après cette étape l’invitation fut étendue aux pays voisins :

īƆ ĻÖĸ ñƈ Ĥƪ ÒĚƇ ïžƈ āƆ Ĩ


ƫ ĞƄ òÓ
Ɔ ×Ɔ Ĩ
Ɔ
Ƈ ĮÓƇ ĭƆ ĤŽ õĬƆ ÈÔÓ
ƈ
Ƅ ÝƆ ĠÒñÃƆ İƆ IJƆ
ŽƆ
ƈ ƈ įƈ ĺïƆ ĺ
ÓıƆ ĤƆ ijŽ è
Ɔ īŽ ĨƆ IJĴƆ óƆ ĝƇ ĤŽ ÒĦƪ ƇÈòƆ ñĭÝƇ ĤIJƆ Ž Ɔ
« Voici un Livre (le Coran) béni que Nous avons fait descendre, confirmant
ce qui existait déjà avant lui, afin que tu avertisses la Mère des Cités (La Mecque)
et les gens tout autour. Ceux qui croient au Jour dernier, y croient et demeurent
assidus dans leur Salât. » (al-An’am, 6 : 92).
Enfin, il fut proclamé que les limites de l’invitation étaient aussi vastes que
celles de l’humanité :

īĻ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĥŽ ĤÙƃ ĩƆ èŽ ò
Ɔ ƪ źÒĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ƆÒÓĨƆ IJƆ
« Et Nous ne t’avons envoyé qu’en miséricorde pour l’univers. » (al-Anbiya, 21 :
107).

Òóĺñƈ ĬƆ IJÒóĻýƈ ÖöÓ ƈ ĭĥžĤƈ Ùƃ Ęƪ ÓĠ


ƪ Ɔ źƈƪ ÌĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ƆÈÓĨƆ IJƆ
ƃ Ɔ ƃ Ɔ
Īij
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ źƆ öÓ ƈ ĭĤÒóáƆ ĠŽ ƆÈīġƈ ĤƆ IJ
ƪ Ɔ ƪ Ɔ
184 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Et Nous ne t’avons envoyé qu’en tant qu’annonciateur et avertisseur pour


toute l’humanité. Mais la plupart des gens ne savent pas. » (Saba, 34 : 28).
Nous pouvons remarquer que le Saint Prophète r a également suivi ce même
principe de progression dans la transmission de certains commandements. De nom-
breux exemples tels que le commandement de la prière rituelle et du jeûne, ainsi que
la prohibition de l’alcool et de l’usure (intérêts).
La Lumière de l’Existence r a élevé ses Compagnons y à un niveau parfait en
matière d’obéissance. Pour parvenir à ce résultat, il n’instaura pas un changement
soudain, mais plutôt une évolution lente, progressive et subtile. Ceci peut être clai-
rement apprécié lorsque le Saint Prophète r donna quelques conseils à Muadh ibn
Jabal t avant de le déléguer au Yémen :
« Certes tu es sur le point de te rendre auprès d’une communauté de gens du
Livre. Appelle les gens de ce pays à attester qu’il n’y a pas d’autre divinité que Dieu et
que je suis l’Envoyé de Dieu. S’ils témoignent de cela, instruis-les quant à l’obligation
d’effectuer cinq prières pour chaque jour et chaque nuit. S’ils s’y conforment, enseigne-
leur que Dieu a prescrit de faire l’aumône en prélevant une partie des biens aux riches
pour les distribuer aux gens nécessiteux. S’ils se soumettent également à ceci, tâche de
ne pas prendre ce qu’ils ont de plus précieux ! Prends garde à ne pas t’attirer la malé-
diction d’un opprimé, car entre sa malédiction et Dieu, il n’y a point de rideau ! » (Al
Boukhari, Zakat 41-63 ; Muslim, Iman 29-31).

3. Dans son éducation et dans sa prédication, le Messager de Dieu r attendait le


moment propice en termes de lieu, moment et état spirituel de la personne.
Ibn Mas’ud t avait l’habitude de prêcher le jeudi. Une fois quelqu’un lui dit :
« - Ô Abû Abdurrahman ! Si seulement tu nous prêchais chaque jour !
- Je ne prêche pas tous les jours de crainte de vous ennuyer, répondit-il en
ajoutant ceci :
- Le Messager de Dieu r avait l’habitude d’observer notre attention lorsqu’il
prêchait, craignant que nous nous ennuyions. » (Al Boukhari, Ilm, 11, 12)
Lors de la conquête de La Mecque, Abbâs t amena avec lui Abû Sufyan qui
voulait devenir musulman, et dit au Messager de Dieu r :
- Ô Messager de Dieu ! Abû Sufyan est une personne qui aime être complimen-
tée. Que penserais-tu de lui dire des choses afin qu’il se sente honoré ?
Le Messager de Dieu r lui répondit :
- Tu as raison ! Dès que tu pénétreras dans la ville, annonce que « quiconque
entrera dans la demeure d’Abû Sufyan, y restera et fermera sa porte, sera en sécurité. »
(Abû Dawûd, Kharaj, 24-25/3021).
La Quatrième Année de la Prophétie 185

Le Messager de Dieu r répondit aux questions que lui posèrent ses invités selon
la situation de chacun et suivait une méthode appropriée à chaque personne.
À ceux qui lui demandaient :
« Quel est l’acte le plus vertueux ? »
L’Envoyé de Dieu r répondait différemment selon leur état :
« L’activité la plus vertueuse, c’est la croyance en Dieu, c’est combattre sur Son
sentier et c’est le pèlerinage agréé ! » (Al Boukhari, Hajj, 4).
« La prière accomplie à son heure ! » (Al Boukhari, Mawaqit, 5).
« Le rappel de Dieu ! » (Muwatta’, Quran, 24).
« Aimer pour l’amour de Dieu ! » (Abû Dawûd, Sunnah, 2).
« L’émigration ! » (Nasa’i, Bay’ah, 14).
« Servir ses parents ! » (Ibn Athir, Usdu’l-Ghaba, IV, 330).
4. Notre Saint Prophète r prenait comme devise la facilité dans chaque chose
et annonçait la bonne nouvelle. Il respectait strictement ces principes en matière de
prédication.
L’Envoyé de Dieu r dit dans un hadith :
« Facilitez la voie, ne la rendez pas difficile. Annoncez ce qui est agréable et ne
jetez pas l’épouvante dans votre auditoire. » (Al Boukhari, Ilm 11, Adab, 80).
Dieu le Tout-Puissant dit aussi :

óùŽ đƇ ĤŽ ÒħġƈÖïĺ ƈóĺźIJóùĻĤÒħġƈÖųÒïĺ ƈóĺ


Ɔ Ƈ Ƈ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƇŽ Ƈ Ƈ ƇƩ Ƈ Ƈ
« … Allah veut pour vous la facilité, Il ne veut pas la difficulté pour vous… »
(al-Baqara, 2 : 185).

Åƅ Ĺü ģĠÛđøƈ IJĹÝƈ ĩèòIJ


Ž Ɔ ƪƇ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
«… Et Ma miséricorde embrasse toute chose… » (al-Araf, 7 : 156).
Dans ce qui pourrait être considéré comme un commentaire du verset susmen-
tionné, le Saint Prophète r dit :
« Quand Dieu le Tout-Puissant créa toutes les créatures, il écrivit dans le Livre,
suspendu au-dessus de Son Trône : « Ma miséricorde a vaincu Ma colère ». » (Al Bou-
khari, Tawhid, 15, 22, 28, 55; Muslim, Tawba, 14-16).
186 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abû Hurayra t raconte l’incident suivant :


« Un Arabe du désert avait uriné dans la mosquée de Médine.
Furieux, les Compagnons y commencèrent à l’insulter.
Mais le Saint Prophète r rétorqua :
- Laissez-le tranquille et renversez un seau d’eau à cet endroit. Vous avez été
envoyés pour faciliter et non pour rendre les choses plus difficiles. (Al Boukhari, Wudu,
58 ; Adab, 80).

5. Lors de ses prédications, le Messager de Dieu r avertissait les hommes du


châtiment divin et encourageait la préparation à la vie dans l’au-delà.
Lorsque le Saint Prophète r commença son appel, il s’adressa à sa famille, aux
enfants de Hashim, dans les termes suivants :
« Je vous invite à témoigner qu’il n’y a point de divinité si ce n’est Dieu, Il est
unique et n’a point d’associé ! Je suis Son serviteur et Messager. Si vous acceptez ceci
comme tel et le pratiquez, je garantis que vous entrerez au paradis. »
Le Jour du Jugement, si vous venez en vous chargeant du monde sur vos épaules et
non avec vos bonnes actions, je me détournerai de vous ! Ensuite, vous m’appellerez :
« Ô Muhammad ! » Et moi je ferais comme cela. »
Le Messager de Dieu r dit « et moi je ferais comme cela » en détournant d’eux
son visage et répéta ces paroles deux fois. (Ibn Ishâq, p. 128 ; Yaqubî, II, 27).
6. Non seulement le Saint prophète r invitait les gens verbalement, mais
montrait aussi l’exemple en pratiquant lui-même ces commandements dans sa vie
quotidienne.
La forme la plus efficace pour inviter à l’islam est certes de vivre l’islam. Les
Compagnons du Saint Prophète r s’étaient dévoués à l’islam pour porter la voix de
la vérité dans les coins les plus reculés du monde et ainsi guider l’humanité vers le
droit chemin. Aujourd’hui encore, la plus belle façon d’inviter à l’islam est d’exposer
sa beauté et ses bienfaits au monde entier.
Notifier l’islam en le vivant et en l’exprimant dans la mesure du possible est
une responsabilité qui incombe à chaque croyant. Aujourd’hui, en raison de l’évo-
lution des moyens de communication dans le monde, l’importance de cette mission
a d’autant plus augmenté. Hormis les personnes qui vivent dans des endroits parmi
les plus isolés du monde, ceux qui vécurent à nos côtés et que l’on a négligé de
transmettre le message nous attraperont le Jour du Jugement afin nous demander
des comptes.
À ce sujet, Abû Hurayra t indique :
La Quatrième Année de la Prophétie 187

« Nous entendîmes dire que le Jour dernier un homme viendra saisir le col de
la chemise d’un autre en se plaignant.
Ce dernier lui dira :
- Que veux-tu de moi ? Nous ne nous connaissons même pas !
Et l’autre lui répondra :
- Tu me voyais dans la vie ici-bas commettre des mauvaises actions sans jamais
m’avertir. » (Rudanî, Jam’ul-Fawaid, V, 384).

L’invitation à l’islam et l’œuvre des missionnaires


Le but de l’invitation à l’Islam est de communiquer la religion de Dieu et de la
faire parvenir aux hommes. (Voir al-Maida, 5 : 67).
En aucun cas on ne doit islamiser les gens par le recours à la force et selon tout
type de méthode. (Voir al-Baqara: 256 ; Yâ-sîn, 36 : 17).
À l’inverse les missionnaires chrétiens cherchent à christianiser et baptiser ses
adeptes à tout prix. (Voir Evangile selon Matthieu, 28 :19-20).
Paul de Tarse, prit comme modèle par les missionnaires, explique ainsi sa
démarche dans une de ces lettres :
« Car, bien que je sois libre à l’égard de tous, je me suis rendu le serviteur de
tous, afin de gagner le plus grand nombre. Avec les Juifs, j’ai été comme Juif, afin
de gagner les Juifs ; avec ceux qui sont sous la loi, comme sous la loi (quoique je
ne sois pas moi-même sous la loi), afin de gagner ceux qui sont sous la loi ; avec
ceux qui sont sans loi, comme sans loi (quoique je ne sois point sans la loi de Dieu,
étant sous la loi de Christ), afin de gagner ceux qui sont sans loi. J’ai été faible avec
les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver de
toute manière quelques-uns. » (Lettre de Paul aux Corinthiens, I, 9 : 19-22).
Comme on le voit Paul légitimise tous les moyens pour parvenir à la fin désirée.
Alors que l’islam prohibe l’utilisation des moyens illicites à des fins licites. Cette
méthode erronée que le christianisme adopta dès le début, c’est-à-dire christianiser
les masses par tous les moyens au lieu de leur transmettre simplement conduit à la
perte de l’essence du christianisme et à l’altération du message véridique là où il est
allé. Par conséquent, tous les partisans de cette religion se sont divisés.
Dans les activités liées au missionnariat, il est rare de ne pas voir lors d’un fléau
politique ou social l’exploitation de la fragilité physique/mentale des réfugiés, des
victimes de guerre et de catastrophes naturelles où l’on tente de se saisir de leur
croyance initiale.
188 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

D’autre part, c’est un fait bien connu que les activités des missionnaires sont
étroitement liées à l’impérialisme, et leur motivation est bien plus religieuse que
politique. Dans l’objectif de s’installer dans ces pays ciblés et christianiser les habi-
tants, ils construisent des écoles et proposent des cours de langues étrangères pour
attirer une plus grande masse de gens.
Aujourd’hui, les missionnaires qui suivent toujours la méthode de Paul
prennent soin de cacher leur identité et leur vrai but ; ainsi ils apparaissent sous un
aspect respectable dans et pour le milieu où ils se trouvent. Pour sympathiser avec
les musulmans qu’ils ont pris comme cible, ils apprennent des versets coraniques,
s’habillent comme les musulmans, utilisent des termes comme « Hodja » et « mas-
djid » au lieu de « prêtre » et « église ». Encore une fois, pour détourner les gens de
leur religion et les amadouer, ils renoncent à beaucoup de principes du christia-
nisme. (Voir Şinâsi Gündüz, p. 5-28).
Face à ce travail intense des missionnaires, les musulmans doivent accorder de
l’importance à leur éducation et à celle de leurs enfants. Ils doivent pratiquer l’islam
de la meilleure manière et la communiquer aux autres. Les musulmans doivent
prendre leçon des efforts déployés par les missionnaires pour propager une reli-
gion altérée ; les musulmans, héritiers de la dernière religion véridique, se doivent
d’accomplir les efforts en conséquence. En effet, il ne faut pas oublier la responsabi-
lité que nous avons de prêcher l’islam, car cette religion est une grâce dont nous ne
pourrons jamais remercier notre Seigneur.
Le poète Mehmet Akif exprime dans ces vers la carence des musulmans sur ce
sujet :
Alors que les missionnaires sillonnent la terre, nuit et jour ;
Qu’attendent nos savants ? Une nouvelle Révélation peut-être ?!

L’attitude d’Abû Lahab et de sa femme face au Prophète r


La maison de l’Envoyé de Dieu r se situait entre celles de deux figures misé-
rables : Abû Lahab et Uqba Abi Muayt qui avaient coutume de déverser toutes sortes
d’ordures devant la porte du Messager de Dieu r. Son cœur pur et sensible était
blessé mais le Messager de Dieu r disait :
« Quel genre de voisins êtes-vous, ô fils d’Abd Manaf ? »
Et il éloignait les déchets de devant sa porte avec son arc. (Ibn Saad, I, 201).
Un jour, alors qu’Abû Lahab était sur le point d’accomplir le même acte ignoble,
Hamza t l’aperçut et prit alors les ordures qu’il déversa sur sa tête. Tout en essayant
de se nettoyer, Abû Lahab pelin de colère insultait Hamza t. (Cf. Ibn Asîr, al-Kâmil, II,
70).
La Quatrième Année de la Prophétie 189

Oumm Jamil, la femme d’Abû Lahab, elle non plus ne se privait pas de tour-
menter le Messager de Dieu r. Chaque soir, elle préparait et accrochait à son cou
des branches épineuses ; la nuit tombée, elle jetait les épines sur la route que le Saint
Prophète r empruntait pour qu’il se blessât. Mais le Messager de Dieu r marchait
par miracle sur elles comme s’il marchait sur de la soie. (Voir Ibn Hishâm, I, 376; Qurtubî,
XX, 240).

Leurs actes répréhensibles provoquèrent la révélation de la sourate al-Masad.


Quand Oumm Jamil entendit cela, elle saisit une grosse pierre et sortit pour
aller à la recherche du Saint Prophète r.
Pendant ce temps, le Messager de Dieu r était assis près de la Ka’ba avec Abû
Bakr t qui la voyant venir, dit à l’Être de lumière r :
« Ô Messager de Dieu ! C’est Oumm Jamil. C’est une femme mauvaise. Je crains
qu’elle veuille te faire du mal. Si nous partions avant que cette femme ne te cause
quelque préjudice ! »
Le Prophète de Miséricorde r répondit :
« Elle ne pourra pas me voir ! »
En effet, bien qu’Oumm Jamil se trouvât à côté d’eux, elle fut incapable de voir
le Messager de Dieu r. Après quelques rodomontades auprès d’Abû Bakr t, elle
s’éloigna. (Voir Ibn Hishâm, I, 378-379; Qurtubî, XX, 234).

Avant l’Apostolat prophétique la fille de notre Prophète r Oumm Kalthoum c,


était fiancée au fils d’Abou Lahab Utayba et Ruqqaya c, son autre fille, était fiancée
à Utba, l’autre fils d’Abû Lahab. Toutes les deux n’étaient donc pas mariées.
Quand la sourate al-Masad fut révélée Oumm Jamil dit à ses fils :
- Ruqqaya et Oumm Kalthoum ont abandonné notre religion, séparez-vous
d’elles !
Abû Lahab, quant à lui, jura en disant :
- Si vous ne quittez pas les filles de Muhammad, je ne veux plus vous voir !
Sur ces entrefaites, Utayba se rendit auprès du Messager de Dieu r et lui dit :
- Je n’accepte pas ta religion et me sépare de ta fille. À partir de maintenant,
ne viens plus me voir et moi je ne viendrais plus te voir non plus ! Et il déchira la
chemise du Saint Prophète r !
Alors le Messager de Dieu r maudit Utayba en disant :
190 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

- Veuille Dieu lui envoyer un de ses chiens pour le persécuter ! »


Quelques temps après Utayba joignit une caravane en partance pour un voyage
à caractère commercial. En chemin, la caravane s’arrêta à un endroit nommé Zarqa.
Au cours de cette nuit, un lion commença à rôder autour du campement. Utayba
dit avec stupeur :
- Par Dieu, cela m’arrive comme l’avait dit Muhammad ! Il peut être à La
Mecque et moi à Damas, le responsable de ma mort sera Ibn Abi Kabsha ! 64
Après avoir rôdé autour du campement, le lion repartit ce soir-là. Les amis
d’Utayba le prirent au milieu d’eux puis ils s’endormirent. Soudain, le lion réapparut
et se mit lentement à renifler chaque homme jusqu’à ce qu’il finisse par se trouver à
proximité d’Utayba. Le lion saisit l’ennemi de Dieu et le dévora.
Avant de mourir, Utayba s’écria :
- Ne vous ai-je pas dit que Muhammad était un homme de parole !
Quand Abû Lahab apprit la mort atroce de son fils, il dit :
- Je savais qu’un jour ou l’autre la colère de Muhammad allait atteindre mon
fils… (Voir Ibn Saad, VIII, 36-37; Bayhaqî, Dalâil, II, 338-339; Haythami, VI, 19).
Pendant cette période, personne ne fit autant de tort à l’Être de lumière r
qu’Abû Lahab mais, il continua avec patience et endurance sa mission prophétique.

Les tentatives de réconciliation des Mecquois


Le fait que le Messager de Dieu r poursuive son invitation à l’islam, sans se
préoccuper de ses ennemis, mit les idolâtres hors d’eux. Ils commencèrent à expri-
mer leur colère à l’encontre des musulmans, car la nouvelle religion toouchait leurs
intérêts. Ils coururent vers Abû Talib pour lui exprimer leurs préoccupations en le
priant de mettre en garde son neveu. Abû Talib les repoussa gentiment et refusa de
lui parler de ce sujet.
Ne voyant aucun changement, les idolâtres allèrent une fois de plus chez Abû
Talib et lui dirent :
« Ô Abû Talib ! Nous sommes à court de patience ! Tu sais que le fils de ton
frère dénigre notre religion et nos idoles. Il nous traite de stupides et d’ignorants. S’il
ne renonce pas à ce qu’il fait, vous serez tous deux confrontés à nous. Soit tu lui dis
64. Avant Abû Kabsha, un homme du clan de Houdzâa s’était opposé à sa tribu à propos d’idolâtrie. Les
mécréants, comparant notre Prophète r à cet homme, l’appelaient Ibn (fils de) Abi Kabsha. Selon une
autre source, Abû Kabsha était aussi un des deux grands-pères maternels ou paternels du Messager de
Dieu r, ou l’appellation du père nourricier du Messager de Dieu r, le mari de Halima.
La Quatrième Année de la Prophétie 191

de renoncer à ce qu’il fait, soit tu lèves ta protection à son égard afin que l’on puisse
préparer le sort qu’il mérite… »
Face à ces menaces, Abû Talib expliqua poliment au Saint Prophète r l’attitude
des idolâtres. Bien qu’il ait refusé de lever sa protection à son encontre, il lui fit com-
prendre sa réticence à défier les idolâtres, disant : « Protège-nous toi et moi ! »
Le Messager de Dieu r était profondément bouleversé, car les paroles de son
oncle signifiaient qu’en cas de nécessité, il pourrait renoncer à sa protection. Ses yeux
gracieux se remplirent de larmes.
Après tout, les musulmans étaient encore faibles. Ils n’avaient pas la force de
lutter contre les idolâtres de La Mecque qui possédaient force et richesse.
C’est à ce moment-là que Dieu le Tout-Puissant lui fit la révélation suivante afin
de surmonter sa difficulté :

ŻĻƃ Ýƈ ×ÜƆ įƈ ĻĤƆ Ìƈ ģŽ Ýƪ ×ÜƆ IJ ğƈÖòħøÒ ƈóĠðÒIJ


Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ žƆ Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ
ŻĻƃ Ġƈ IJ ƈ ƈ
Ɔ ĮƇ ñŽ íÜÓƪ ĘƆ ijƆ İ Ƈ źƈƪ ÌįƆ ĤƆ Ìƈ źƆ Ôƈ ƈóĕŽ ĩƆ ĤŽ ÒIJ
Ɔ Ě ƈóýŽ ĩƆ ĤŽ ÒÔƫ òƆ
« Et rappelle-toi le nom de ton Seigneur et consacre-toi totalement à Lui, le
Seigneur du Levant et du Couchant. Il n’y a point de divinité à part Lui. Prends-
Le donc comme Protecteur. » (al-Muzzamil, 73 : 8-9).
Grâce à cette injonction, la douleur et la tristesse du Messager de Dieu r se
dissipèrent.
Avec une foi et un courage inébranlables, il prononça ces paroles, désormais
célèbres, à son oncle :
« Ô mon oncle ! Par Dieu ! Si ces hommes posaient dans une de mes mains le soleil
et dans l’autre la lune, je ne renoncerais jamais à l’appel ! »
Puis il partit les larmes aux yeux.
Abû Talib, qui ne s’attendait pas à cette réponse fut ébranlé. Bien qu’il n’eût pas
embrassé l’islam, il aimait le Saint Prophète r comme son fils. D’ailleurs, quand son
père, Abd al-Muttalib rassembla tous ses fils autour de lui juste avant sa mort, Abû
Talib avait promis à son père de prendre soin de lui :
« Père ! Tu sais que je ne suis pas riche, mais je suis un homme de compassion
et j’ai bon cœur. Je te le promets, je tâcherai de prendre soin de mon neveu. Confie-
le-moi ! »
Le cœur tendre d’Abû Talib ne pouvait pas supporter voir le seigneur des
mondes r le quitter le cœur brisé. Il cria derrière lui :
192 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ô fils de mon frère ! Viens dire ce que tu veux ! Je te le jure, jamais je ne te


livrerais à eux ! » (Ibn Hishâm, I, 276-278; Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 96-97).
Les idolâtres, n’ayant pu obtenir ce qu’ils désiraient, se rendirent auprès d’Abû
Talib, en compagnie d’Umara, le fils de Walid ibn Mughira, et lui firent une offre
stupide :
« Umara est le plus beau et le plus fort des jeunes gens de Quraysh. Prends-le
et tire profit de son intelligence et de sa force ! Il sera ton fils. En contrepartie, livre-
nous ton neveu qui se révolte contre la religion de ses ancêtres. Ainsi nous nous
débarrasserons de lui ! »
Abû Talib leur répondit :
« Mon Dieu ! Quelle abominable proposition ! Vous voulez me donner votre
fils pour l’élever, et vous voulez que je vous donne en échange mon fils pour que vous
le tuiez ? Ceci est impensable ! » (Ibn Hishâm, I, 279; Ibn Saad, I, 202).
Par la suite, les idolâtres dirent à Abû Talib :
« Envoie un message à Muhammad, qu’il vienne ici afin que nous puissions
faire des propositions raisonnables. »
Aussitôt, le Messager de Dieu r, mis au courant de l’affaire, se précipita pour les
rejoindre. Ahnas ibn Shariq lui dit :
« Arrête donc de nous dénigrer, ainsi que nos idoles, et nous te laisserons tran-
quille avec ton Dieu ! »
Le Messager de Dieu r leva la tête au ciel et demanda :
« Voyez-vous ce soleil ? »
« Oui nous le voyons, répondirent-ils. »
L’Envoyé de Dieu r donna alors cette réponse significative indiquant la gran-
deur de l’islam et son avenir prometteur :
« Est-ce dans mes capacités d’empêcher les rayons du soleil de vous atteindre ? »
Abû Talib dit :
« Par Dieu, le fils de mon frère ne nous a jamais menti ! »
Les idolâtres, en colère, se levèrent et quittèrent les lieux. (Ibn Ishâq, p. 136; Ibn
Kathir, al-Bidayah, III, 92; Ibn Saad, I, 202-203).

Selon le récit d’Ibn Abbâs t après cet évènement, les notables de Quraysh se
recueillirent sur le site de Hijr près de la Ka’ba et jurèrent sur les idoles nommées Lat,
Menât, Uzza, Nâila et Isâf que dès qu’ils verraient le Saint Prophète r, ils le tueraient.
Et tous s’engagèrent à payer le prix du sang lui revenant.
La Quatrième Année de la Prophétie 193

En entendant ces paroles Fatima c la fille du Prophète r, se précipita vers son


père en larmes et l’informa de ce terrible complot.
Le Messager de Dieu r demanda de l’eau pour procéder aux ablutions puis se
rendit de suite à la Ka’ba.
Quand les idolâtres le virent, ils s’écrièrent avec enthousiasme :
« Le voici ! Il est là ! »
Mais voyant en face d’eux l’aspect majestueux du Prophète de miséricorde r, ils
baissèrent la tête et leurs regards devant lui.
Malgré leur engagement sous serment, aucun d’eux n’eut le courage de le regar-
der dans les yeux.
Le Saint Prophète r se rendit auprès d’eux et y demeura quelques instants. Puis,
prenant une poignée de terre qu’il leur lança au visage il dit :
« Puissiez-vous perdre la face ! »
Les idolâtre atteints d’une poussière du sol furent tués en athées à la bataille de
Badr et jetés dans une fosse de l’enfer. (Ahmad, I, 303).
Après cet évènement, Abû Talib rassembla tous les fils de Hashim et de Muttalib
et leur demanda de jurer sur l’honneur de leur famille de protéger le Prophète r des
Qurayshites. En dehors d’Abû Lahab, tous acceptèrent. (Voir Ibn Hishâm, I, 281; Ibn Asîr,
al-Kamil, II, 65).

Réalisant que les sollicitations faites auprès d’Abû Talib n’aboutissaient à rien,
les idolâtres allèrent voir directement le Messager de Dieu r et lui dirent :
« Tu appartiens à une lignée noble et très respectée ! Mais tu fais et tu dis ce
qu’aucun Arabe n’a dit jusqu’à maintenant. Tu as mis une scission entre nous. Tu as
fait de nous des ennemis. Quel est ton but en agissant ainsi ? Si c’est pour être riche
nous ne te donnerons tout ce que tu souhaiteras. Il n’y aura pas de plus riche que toi
dans aucune tribu. Si tu veux devenir chef, nous te mettrons à notre tête et tu seras
le chef de La Mecque ! Si ton désir est de te marier avec une femme noble, nous te
donnerons la plus belle femme de Quraysh que tu choisiras ! Si tu es sous l’influence
de djinns et de démons, nous t’amènerons voir des sorciers. Nous ferons tout pour
te guérir. Quoi que tu demandes nous sommes prêts à le réaliser. Renonce juste à
cette action. »
Les pauvres idolâtres pensaient faire renoncer au Saint Prophète r sa mission
en le soudoyant par la richesse, le rang social et les femmes, pensant qu’il ne pourrait
jamais dire non aux trois appâts toujours efficaces pour tromper les hommes. Ils
pensaient que le Saint Prophète r ne pouvait pas dire non à ces trois instruments
de chasse. La richesse, la célébrité et la sensualité sont les trois pièges qui usent la
194 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

volonté de l’homme. Comment se fait-il que les idolâtres n’ont guère compris que
ces choses n’ont jamais pris place dans la vie pure de l’Être de lumière r ?
En guise de réponse claire et nette le Messager de Dieu r leur cria cette vérité :
« Je ne veux rien de vous. Ni biens, ni richesse, ni leadership ! La seule chose
que je veuille est que vous cessiez d’adorer des idoles et que vous n’adoriez que Dieu
l’Unique ! » (Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 99-100).
Mais les idolâtres, étant sous l’emprise de leur ego, furent incapables de saisir
le sens de la mission du Saint Prophète r. Ils allèrent même jusqu’à lui demander
d’adorer leurs propres idoles !
La réaction du Saint Prophète r devant un tel cas fut en conséquence conforme
à l’avis du Coran :

ƈ Ʃ ĪIJ
Ó ĩƪ ĤƆ ųÒ ƈ î ƈ Ɔ ĐïŽ ÜƆ īĺñƈ Ĥƪ ÒïƆ ×ĐƆÒĪŽ ƆÒÛĻ ƈıƇĬĵžĬƈ Òƈ ģŽ ĜƇ
Ƈ īŽ ĨĪij Ƈ Ɔ ƇŽ Ƈ
īĻ ƈ ƈ ƈ Ƈ óŽ Ĩƈ ƇÒIJĵƈ ƈ Ƈ ĭƈƆ Ļ×ĤŽ ÒĵĬƈ ÅÓä
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĤŽ ÒÔžƈ óƆ ĤħƆ ĥøŽ ƇÒĪŽ ƆÒÚ Ɔ Öž ò
Ɔ īŽ ĨÚÓ žƆ Ɔ Ɔ Ɔ
« Dis : ‹Il m’a été interdit, une fois que les preuves me sont venues de mon
Seigneur, d’adorer ceux que vous invoquez en dehors d’Allah, et il m’a été ordon-
né de me soumettre au Seigneur de l’univers›. » (Gafir, 40 : 66).

ƈ Ɔ ƈ ƈ Ɔ Ɔ Ƈ óĨƈ ƇÈÓĩĬƈƪ ÌģŽ ĜƇ


Ɔ ĐƇ îŽ ÈįĻŽ ĤƆ Ìƈ įƈÖĞƆ ƈóüŽ ƇÈźIJ
Ɔ įĻŽ ĤƆ Ìƈ IJij
ÔÇĨ Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ïƆ ×Ƈ ĐŽ ÈĪŽ ÈÚ Ž Ɔ
« … Dis : ‹Il m’a seulement été commandé d’adorer Allah et de ne rien Lui as-
socier. C’est à Lui que j’appelle [les gens], Et c’est vers Lui que sera mon retour›. »
(ar-Rad, 13 : 36).

ģƫ Ġ
Ƈ įƇ ĤƆ IJÓ ƈ ƈ ƈƈ ƈ
Ƈ óŽ Ĩƈ ƇÒÓĩƆ Ĭƪ Ò
Ɔ ıƆ ĨƆ óƪ èĴ Ɔ ñĤƪ ÒØïƆ ĥŽ ×Ɔ ĤŽ ÒĮñİÔƪ ò Ɔ ïƆ ×Ƈ ĐŽ ÒƆ ĪŽ ÒƆ Ú
ƈƈ ƈ Ɔ ĠƇ ÒƆ ĪŽ ÒƆ Ú ƅ Ɔ
Ž īƈ ĩƆ ĘƆ ĪƆ ÒƆ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒijƆ ĥƇ ÜŽ ÒƆ ĪŽ ÒƆ IJ
ĴïƆ ÝƆ İÒ Ɔ īĻ
Ɔ ĩĥùŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨĪij Ƈ óŽ Ĩƈ ƇÒIJ Ɔ ÅĵŽ ü
ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ƈòñĭŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨÓĬƆ ÒƆ ÓĩƆ Ĭƪ ÒģŽ ĝƇ ĘƆ ģƪ Ą
īĺ Ɔ īŽ ĨƆ IJ Ɔ įùęŽ ĭƆ ĤĴïÝƆ ıŽ ĺÓ Ɔ ĩƆ Ĭƪ ÓĘƆ
« ‹Il m’a été seulement commandé d’adorer le Seigneur de cette Ville (la
Mecque) qu’Il a sanctifiée, - et à Lui toute chose - et il m’a été commandé d’être
du nombre des Musulmans, et de réciter le Coran›. Quiconque se guide, c’est
pour Lui- même en effet qu’il se guide. Et quiconque s’égare..., alors dis : ‹Je ne
suis que l’un des avertisseurs›. » (an-Naml, 27 : 91-92).
La Quatrième Année de la Prophétie 195

ħĻİƈ óÖŽ Òƈ ÙƆ ĥƪ ĨÓ


ƈ ĩĻĜÓ ƈ ƈ ƅ ƈ ƅ ƈ ƈ ƈ Ɔ ĭƈ Ĭƪ Òƈ ģŽ ĜƇ
Ɔ Ɔ ƃ Ɔ ĭĺƃ îħĻĝÝƆ ùŽ Ĩ Ƈ ĆÒóƆ ĀĵĤƆ ÒĵƈÖž òĵ Ɔ ĭĺïİĵ
ĴÓ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ĠÓ ƈ
Ɔ ĻƆ éŽ ĨƆ IJĵƆ ġùƇ ƇĬIJĵ Ɔ ÜƆŻĀ Ɔ Īƪ ÒģŽ ĜƇ īĻƆ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨĪÓ Ɔ ĨƆ IJÓ
Ɔ ęƃ ĻĭèƆ
ƈ Ʃ ƈ ÜÓƈ ĩĨIJ
Ó ĬƆ ƆÒIJ
Ɔ ÚƇ óŽ Ĩƈ ƇÒğƆ Ĥƈ ñƈƆ ÖIJƆ įƇ ĤƆ ğĺ
Ɔ ƈóü Ɔ ƆźīĻ ƈ
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĤŽ ÒÔžƈ ò Ɔ ųĵ Ɔ Ɔ Ɔ
Åƅ ĵü ģĠÔòijİIJÓÖòĵĕƈ ÖŽ ƆÒųÒ ƈ Ʃ óĻĔƆ ƆÒģŽ ĜƇ īĻĩƈ ĥƈ ùĩĤŽ ÒĢƇ IJƆÒ
Ž Ɔ ƈž Ƈ ƫ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ƭ Ɔ ƆŽ Ɔ ŽƇ ƪ
« Dis : ‹Moi, mon Seigneur m’a guidé vers un chemin droit, une religion
droite, la religion d’Abraham, le soumis exclusivement à Allah et qui n’était
point parmi les associateurs. Dis : ‹En vérité, ma Salât, mes actes de dévotion,
ma vie et ma mort appartiennent à Allah, Seigneur de l’Univers. A Lui nul asso-
cié ! Et voilà ce qu’il m’a été ordonné, et je suis le premier à me soumettre.› Dis
: ‹Chercherais-je un autre Seigneur qu’Allah, alors qu’Il est le Seigneur de toute
chose ?›… » (al-An’am, 6 : 161-164).

Øƅ óĻāƈ Öĵ ĥƆ Đ ƈ Ʃ ĤƆ Ìƈ ŧĐîƆÈĹĥĻƈ


ųÒĵ ƈ ×øĮƈ ñÃƈ İ
Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ ģŽ ĜƇ
« Dis : Voici ma voie, j’appelle les gens [à la religion] d’Allah, moi et ceux qui
me suivent, nous basant sur une preuve évidente. » (Yûsuf, 12 : 108).

ƈƈ ƈ Ɔ ƈ ƈ Ɔ ħġƇ ƇĤƆÉøƆÈÇĨģŽ ĜƇ
Ɔ ęĥž ġƆ ÝƆ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨÓĬƆ ƆÈÇĨƆ IJ
īĻ Ɔ ƅóäŽ ÈīŽ ĨįĻŽ ĥƆ Đ Ž Ž Ɔ
« Dis : Pour cela, je ne vous demande aucun salaire; et je ne suis pas
un imposteur. » (Sad, 38 : 86).

Les idolâtres, faisant face à cette attitude décidée du Messager de Dieu r, lui
demandèrent, au minimum, de ne pas dénigrer les idoles. Suite à cela, Dieu dit :

Ɔ Ƈĭİƈ ïŽ ĻƇ ĘƆ īƇ İƈ ïŽ ÜƇ ijŽ ĤƆ ÒIJîƫ IJ


Īij ƈ ƈ
Ɔ īĻƈ
Ɔ Öñž ġƆ ĩƇ ĤŽ Òďƈ ĉÜƇ ŻƆ ĘƆ
« N’obéis pas à ceux qui crient en mensonge, ils aimeraient bien que tu tran-
siges avec eux afin qu’ils transigent avec toi. » (al-Qalam, 68 : 8-9).
Autrement dit, les idolâtres, qui n’acceptaient pas la vérité, affirmèrent qu’ils
pouvaient se réconcilier à la condition que le Saint Prophète r renonçât aux versets
contraires à leurs intérêts.
Mais dans lesdits versets, l’ordre de Dieu était très clair :
196 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ƈ ĩĩĤŽ ÒėƆ đĄƈ IJØij


ÚÓ ƈ ƈ ƈ
Ɔ Ɔ Ž Ɔ ĻƆ éƆ ĤŽ ÒėƆ 𮠡ĞƆ ÓĭƆ ĜŽ ðƆ ƆźÒðƃ Ò
ÒóĻāƈ ĬƆ ÓĭƆ ĻĥƆ Đ ğĤïåƈ Üźħà
ƃ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƪƇ
« Alors, Nous t’aurions certes fait goûter le double [supplice] de la vie et
le double [supplice] de la mort ; et ensuite tu n’aurais pas trouvé de secoureur
contre Nous. » (al-Isra, 17 : 75).
En effet, même en temps de difficultés, faire des concessions au détriment des
principes monothéistes est interdit car cela signifie la destruction de la religion,
ce qui était bien le désir premier des idolâtres. Cela aurait aussi signifié la dénatu-
ration de la religion avant même qu’elle n’eût été complètement parachevée, une
évidence faisant partie des mauvaises intentions concoctées par les idolâtres. Plus
ceux-ci revenaient les mains vides, plus ils insistaient en proférant leurs propositions
incultes. Tout cela dans le but de sauver la popularité de leurs idoles. Qui plus est,
ils allèrent jusqu’à suggérer :
« Adore nos idoles et nous croirons en ton Dieu. Ainsi, notre différend cessera.»
Parce que cette proposition était en total conflit avec l’esprit et la logique de
l’islam, le Tout-Puissant déclara dans le Coran :

Ó ĬƆ ƆÒƆźIJ
Ɔ ïƇ ×Ƈ ĐŽ ƆÒÓĨ
Ɔ ĪIJ
Ɔ ïƈƇ ÖÓĐ
Ɔ ħŽ ÝƇ ĬŽ ƆÒƆźIJ
Ɔ ĪIJ
Ɔ ïƇ ×Ƈ đŽ ÜÓ
Ɔ Ĩ Ɔ óƇ ĘÓƈ ġƆ ĤŽ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÒÓĺƆ ģŽ ĜƇ
Ɔ ïƇ ×Ƈ ĐŽ ƆÒƆźĪIJ
īĺ
ƈ îƈ ĵĤƈ IJħġƇ Ƈĭĺî ƈ ħġƇ ĤƆ ïƇ ×ĐƆÒÓĨĪIJ ïƈÖÓĐħÝĬÒźIJħÜï×ĐÓĨïƈÖÓĐ
Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ƈ ŽƆ Ɔ Ɔ Ž ƫ Ɔ Ɔ Ɔ Ƅ Ɔ
« Dis : ‹Ô vous les infidèles ! Je n’adore pas ce que vous adorez. Et vous n’êtes
pas adorateurs de ce que j’adore. Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez.
Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. A vous votre religion, et à moi ma
religion›. » (Al Kafiroun, 109 : 1-6; Voir Ibn Hishâm, I, 386).
Au début, les pauvres, les faibles et les esclaves furent les premiers à adhérer à
la religion de l’Envoyé de Dieu r. Bien que des riches, tel Abû Bakr t qui accepta
l’islam, les notables furent rares.
Que le Messager de Dieu r ait refusé d’un revers de main toutes sortes de
propositions faites par les idolâtres, telles la richesse et le statut, prouve clairement
qu’il n’avait pas l’intention d’obtenir la richesse ou le pouvoir, contrairement aux
allégations de certains. Par ailleurs, même en période d’aisance, la vie du Prophète
de compassion r n’était pas différente de celle d’un pauvre. Ce comportement
d’abstinence, d’humilité et de contentement n’était rien d’autre que la manifestation
de la morale prophétique.
La Quatrième Année de la Prophétie 197

Si le Messager de Dieu r avait accepté d’être le chef de La Mecque, il aurait pu


user de ses pouvoirs pour glorifier l’islam. Mais l’Être de lumière r n’a pas voulu
abuser du pouvoir pour sa cause tout simplement parce que l’islam reste toujours
fidèle au principe de loyauté et d’honneur en matière de religion. Ainsi, dans de
nombreux cas, les musulmans peuvent être contraints à faire des sacrifices et à se
battre s’il le faut, mais le chemin qu’ils doivent suivre est toujours le chemin de la
droiture (sirat’ul-mustaqim).

L’inimitabilité (i’jaz) du Coran et son effet sur les auditeurs


Le mot i’jaz signifie littéralement neutraliser quelqu’un ou le pousser au-delà
de ses limites. Cependant, dans le sens propre présenté ici, il signifie l’incapacité
de l’ensemble des hommes à reproduire quelque chose de semblable au Coran,
en termes d’éloquence, de valeur législative et de nouvelles concernant l’invisible ;
certes ce Livre est la source la plus éminente.
Selon la volonté divine, le dernier des Livres saints a été révélé à l’humanité
dans la forme la plus parfaite et en langue arabe. Des siècles avant l’avènement du
Coran, Dieu le Très-Haut avait donné au peuple arabophone l’éloquence et la finesse
dans le domaine de la littérature et de la poésie. En prenant part à de nombreuses
activités littéraires et des concours, les Arabes développèrent leur langue. En consé-
quence, ils apportèrent une richesse et une perfection à cette langue afin qu’elle
puisse au mieux exprimer les mots issus de la Plume divine.
Au fil du temps, ces activités ont vu l’éloquence devenir chez les Arabes une
profession valorisante. Le nombre de poètes et d’orateurs augmenta et ceux-ci
devinrent des personnages très enviés. C’est pour cela que le miracle le plus mani-
feste émanant du Saint Prophète r fut la parole la plus élégante, en l’occurrence le
Coran.
Parce que les qualités les plus importantes qui séparent l’homme des autres
créatures sont la raison, la compréhension et l’expression, le miracle du Saint Coran,
le dernier Livre divin et le plus parfait, se distingue dans ces qualités.
Le Tout-Puissant dit :

ĪÓ
Ɔ ĻƆ ×Ɔ ĤŽ ÒįƇ ĩƆ ĥƪ Đ ƈ ÒŽ ěƆ ĥƆ ì
Ɔ ĪÓƆ ùƆ ĬŽ ź Ɔ ĪÆƆ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒħƆ ĥƪ Đ
Ɔ īĩƇ èŽ óĤƪ ÒƆ
« Le Tout-Miséricordieux. Il a enseigné le Coran. Il a créé l’homme. Il lui a
appris à s’exprimer clairement. » (ar-Rahman, 55 : 1-4).
Beaucoup de livres ont été écrits par des intellectuels qui y ont notifié de nom-
breuses observations précises concernant l’i’jaz insondable du Coran.
198 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Voici présentement un petit résumé de ces observations :


Lorsque le Messager de Dieu r annonça son Apostolat prophétique, les ido-
lâtres le contestèrent, disant :

įƈƈ Öž òī
ƪ Ĩ
ƈ Ƅ ĺÆįƈ ĻĥƆ ĐĢƆ ƈõĬƇÈźƆ ijĤƆ ÒijƇĤÓĜƆ IJ
ž ÚÓ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ
« Pourquoi n’a-t-on pas fait descendre sur lui des prodiges de la part de son
Seigneur ? »
Ce à quoi le Tout-Puissant répondit :

ğƆ ĻĥƆ ĐÓĭĤõĬÒÓĬÒħ ƈıęƈ ġĺħĤIJÒīĻƈ×Ĩóĺñƈ ĬÓĬÒÓĩĬÒƈ IJųÒ ƈ ïĭĐ ƈ ÚÓĺźÒÓĩĬÒƈ ģĜ


Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ ŽƆ ƪƆ Ž Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƅ Ƈ Ƅ Ɔ ƆƆ Ɔ ƪ Ɔ Ʃ Ɔ Ž Ƈ ƆƆ Ž Ɔ ƪ Ž Ƈ
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ƇĺĦƅ ijŽ ĝƆ ĤĴ
Īij ƈ óĠŽ ðƈ IJÙƃ ĩèóĤƆ ğƆ Ĥƈ ðƆ ĵĘ
Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
ƈ Īƪ Òƈ ħ ƈıĻĥƆ ĐĵĥƆ ÝĺÔÓÝġƈ ĤŽ Ò
Ž Ž Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ
« Dis : ‹Les prodiges sont auprès d’Allah. Moi, je ne suis qu’un avertisseur
bien clair›. Ne leur suffit-il donc point que Nous ayons fait descendre sur toi le
Livre et qu’il leur soit récité ? Il y a assurément là une miséricorde et un rappel
pour des gens qui croient. » (al-Ankabut, 29 : 50-51).
L’i’jaz du Coran est explicite dans de nombreux aspects, comme son éloquence
et son style, la richesse de son contenu, le pouvoir convaincant de ses principes, les
nouvelles au sujet de la vie d’outre-tombe, sa capacité à toujours conserver sa vali-
dité et sa suprématie législative.
L’éloquence et le style constituent le miracle le plus important du Coran. L’élo-
quence est la plus belle parole et la plus appropriée en termes de contenu, de but ou
d’objet, conformément à ce qu’exige la situation donnée. Dans les questions qu’il
traite, le Saint Coran met l’éloquence en pratique de la meilleure des façons.
Le Coran est aussi un chef-d’œuvre du point de vue de la clarté de la parole.
Il est impossible de trouver le moindre défaut dans les mots choisis, les phrases
construites et le sens exprimé.
Comme son sens, la rédaction65 du Coran appartient aussi à Dieu le Tout-
Puissant. C’est la différence fondamentale qui distingue un verset coranique d’un
hadith. Pour cette raison, changer un mot du Texte sacré conduit à l’hérésie si cela
est fait intentionnellement, dans le cas contraire, en raison de la modification de la
signification, très souvent cela annule l’acte d’adoration.
65. On dénote ici l’idée du choix du mot dans la langue parlée, son expression et la compréhension de la
pensée.
La Quatrième Année de la Prophétie 199

Ces erreurs ont été prises en main dans les recueils nommés zhallat’ul-qari
(erreurs de récitation) pour décider de la validité ou non de la prière lors d’erreurs
involontaires de prononciation ou de changement de mot. En considérant tout cela,
à quel point il serait absurde de réciter le Coran à partir d’une traduction durant
l’accomplissement de la prière ce qui l’invaliderait immédiatement.
Le style du Coran observe un équilibre parfait entre le sens et les termes
employés. Lorsqu’un sens doit être exprimé, les mots les plus justes et les plus forts
sont alors employés. Ainsi, l’équilibre entre le mot et la signification est entretenu
par le style du Possesseur de la Parole Absolue (al-Qalam). À ce sujet, même les
littéraires les plus illustres n’ont jamais pu cacher leur stupéfaction.
Le célèbre exégète andalou Ibn Atiyya déclara : « Le Coran est un livre tel que
si l’on devait remplacer un mot, il serait impossible de trouver une solution de
rechange et cela même en dépouillant toute la langue arabe. » (Zarqânî, Manâhilü’l-İrfân,
II, 325; Muhammad Abdullâh Dırâz, an-Nabau’l-Azîm, s. 112; Atâ, Azamatu’l-Kur’ân, p. 85).

Le Coran, fruit de la Parole divine, traite de différentes paraboles, de conseils, de


débats, de récits historiques, de questions juridiques et d’informations concernant
l’au-delà, de sujets relatifs au paradis et à l’enfer, aussi bien des versets annonçant
les récompenses que les châtiments ; tout cela en les exprimant avec force tout en
restant fidèle en termes de clarté et d’éloquence. Le Coran s’adresse à toutes sortes
de personnes aux niveaux intellectuels contrastés et dont la chronologie et la géo-
graphie sont diverses. Lorsque des versets du Coran sont récités dans une assemblée
de gens de différents niveaux (de compréhension), chacun est à même de percevoir
et de comprendre selon sa capacité de discernement. Encore une fois, ceci est une
qualité dépassant les aptitudes humaines.
En somme, le miracle de chaque prophète appartient à son temps. Par contre,
puisque le Saint Prophète r a été envoyé pour l’ensemble de l’humanité, son plus
grand miracle, le Coran, se poursuivra en englobant l’espace et le temps jusqu’au
Jour du Jugement.
Pour illustrer l’existence et la puissance du Tout-Puissant, le Coran fait aussi
de nombreuses références à des vérités scientifiques. Le développement rapide et les
découvertes étourdissantes dans le domaine scientifique au cours des mille quatre
cents dernières années ont été incapables de réfuter ne serait-ce qu’une seule infor-
mation livrée par le Saint Coran. Au contraire, ces vérités n’ont fait que renforcer
la Parole divine.
De nos jours, les plus éminents savants des nations se réunissent entre eux pour
préparer des encyclopédies et se mesurent les uns aux autres. À l’instar de ces tra-
vaux, nous pouvons citer l’encyclopédie britannique « Britannica » et l’encyclopédie
200 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

française « Larousse ». Mais chaque année, ces gens doivent faire des modifications
ou des rajouts et publier en conséquence de nouvelles éditions.
Les nouvelles découvertes obligent à y insérer des ajouts et à corriger de précé-
dentes informations. Même à notre époque marquée par une incroyable vigueur de
la découverte scientifique, les encyclopédies produites par des commissions compo-
sées de savants exceptionnels sont dépassées et nécessitent des corrections.
Or, durant des siècles, le Saint Coran n’a jamais nécessité la moindre correction
des affirmations scientifiques qu’il contient. Cet exemple ne fait que réaffirmer la
preuve de son origine divine et qu’il est la Parole du Tout-Puissant.
Un hadith mettant l’accent sur le fait que le miracle du Saint Coran durera
éternellement rapporte que le Saint Prophète r a dit :
« Le Coran est une Parole divine qui apporte à l’homme la sérénité contre toutes
les tribulations à venir, qui informe au sujet des peuples du passé, des signes précur-
seurs des peuples à venir et des pensées de toutes les controverses qui auront lieu entre
eux. Il distingue le bien du mal. Dieu détruira le contrevenant qui s’en détourne, et
quiconque cherche une recommandation en dehors d’elle s’égare manifestement. Cette
Parole est la corde solide de Dieu, elle est invocation et guidance. Nul ne sera égaré
tant qu’il se cramponne à ses ordres, les langues qui la prononceront ne se tromperont
jamais, les savants n’en seront jamais rassasiés, sa fraîcheur ne perdra en rien à cause
de sa répétition continuelle, ses miracles continueront d’étonner les hommes à jamais.
Quand ils entendirent la Parole divine du Coran, les djinns ne purent s’empêcher
de dire : Ó×å ĐÓĬÆóĜ Óĭđĩƈ øÓĬƈÌ « … Nous avons certes entendu une Lecture [le Coran]
ƃ Ɔ Ɔ ƃ ŽƇ Ɔ Ž Ɔ ƪ
merveilleuse. » (al-Djinn, 72 : 1).
Ceux qui parlent avec elle disent la vérité, ceux qui rendent leur décision avec
elle jugent avec équité, ceux qui la pratiquent sont récompensés, ceux qui font appel à
elle certes sont les bien-guidés. » (At Tirmidhi, Fadail’ul-Quran, 14 ; Darimi, Fadail’ul-Quran, 1).
Le Coran est un grand miracle dans tous ces aspects.
À cet égard, le Saint Coran demande depuis des siècles à ceux qui, à l’époque
de la révélation avaient atteint les sommets en matière d’éloquence et de rhétorique,
les arabes, mais aussi aux génies et aux humains qui viendraient jusqu’à la fin du
monde, de produire des paroles similaires mais il leur fut impossible de répondre à
ce défi. Cela nous rappelle le verset 34 de la sourate al-Tur :

īĻ ƈƈ ƈ ƅ ƈ
Ɔ Ìįƈ ĥƈ ᎠĨ Ž
Ɔ ĜîÓĀÒij
Ɔ ƇĬÓĠĪƈ ž ßĺïéƈƆ ÖÒijÜƇ ÉĻƆ ĥŽ ĘƆ
« Eh bien, qu’ils produisent un récit pareil à lui (le Coran), s’ils sont véri-
diques ! »
La Quatrième Année de la Prophétie 201

Dieu le Très-Haut dit dans le verset 88 de la sourate al-Isrâ :

Ɔ ģƈ Ꭰĩƈƈ ÖÒijƇÜÉŽ ĺƆ ĪŽ ƆÒĵĥƆ Đ


Īƈ ƆÒóĝƇ ĤŽ ÒÒñİ ƈ ƈ ƈ
Ž Ɔ īƫ åƈ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ÷Ƈ ĬŽ źÒŽ ÛđƆ ĩƆ ÝƆ äÒ
Ž īƈ ÑĤƆ ģŽ ĜƇ
ÒóĻ ƈıČ ăƅ đŽ ×Ĥƈ ħıƇ ąƇ đŽ ÖƆ ĪÓ Ɔ ijŽ ĤƆ IJ
Ɔ Ġ ƈ ƈ ƈ Ɔ ÜƇ ÉŽ ĺƆź
Ɔ įĥᎠĩƈÖĪij
ƃ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
« Dis : ‹Même si les hommes et les djinns s’unissaient pour produire quelque
chose de semblable à ce Coran, ils ne sauraient produire rien de semblable, même
s’ils se soutenaient les uns les autres›. »
Et Il exprime ainsi leur impuissance :

ƅ ƈ ƈ ƈ ƅòijø ƈóýŽ đƈÖÒŽ ijƇÜÉŽ ĘƆ ģŽ ĜƇ ĮÒóÝĘŽ ÒĪij


ÒŽ ijĐƇ îÒŽ IJ
Ɔ ÚÓĺƆ óƆ ÝƆ ęŽ Ĩ
Ƈ įĥᎠĨ
ž Ɔ Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ ĦŽ ƆÈ
īĻ ƈ ƈ ħÝĭĠĪƈ ƈ Ʃ ĪIJ
ƈ îī ƈ
Ɔ ĜîÓĀ Ɔ Ž Ƈ Ƈ ÌųÒ Ƈ Ĩħ ž ÝƇ đŽ ĉƆ ÝƆ øÒ
Ž īƈ ĨƆ
« Ou bien ils disent : ‹Il l’a forgé [le Coran] › - Dis : ‹Apportez donc dix
Sourates semblables à ceci, forgées (par vous). Et appelez qui vous pourrez (pour
vous aider), hormis Allah, si vous êtes véridiques›. » (Houd, 11 : 13).

ƈ ƈ Øƅ òijùƈÖÒŽ ijÜƇ ÉŽ ĘƆ ÓĬƆ ïƈ ×ĐĵĥƆ ĐÓĭƆ ĤŽ õĬƆ ÓĩĨ


įƈ ĥƈ ᎠĨī ƈ ƈ Ƈ ÌIJ
ž Ĩž Ɔ Ƈ ŽƆ Ɔ ƪ ƪ ž Õƅ ĺŽ òĹ Ɔ ĘħŽ ÝĭƇ ĠĪƈ Ɔ
īĻ ƈ ƈ ħÝĭŽ Ġ ƈ Ʃ ĪIJ
ƈ îī ƈ Ƈ ïƆ ıü
Ɔ ĜîÓĀƆ Ž Ƈ Ƈ ĪƈŽ ÌųÒ Ƈ Ĩħ ž ĠÅÒ Ɔ Ƈ ÒŽ ijĐƇ îÒŽ IJƆ
« Si vous avez un doute sur ce que Nous avons révélé à Notre Serviteur,
tâchez donc de produire une sourate semblable et appelez vos témoins, (les
idoles) que vous adorez en dehors d’Allah, si vous êtes véridiques. » (al-Baqara, 2 :
23; Voir également al-Qasas, 28 : 49-50).

Ces versets ont peu à peu accentué l’impuissance des idolâtres, garanti leur
faiblesse et scellé leur langue. Comme ils ne pouvaient guère répondre à ces défis
divins, ils prirent une attitude déplacée, mensongère, rebelle et violente :

ƈ źƈƪ ÌÒñƆ İ
óàƆ ËŽ ƇĺóéŽ ø Ɔ ĪƈŽ Ì
Ƈ Ƅ
«… Puis il a dit : ‹ (le Coran) n’est que magie apprise›. » (al-Muddattir, 74 : 24).

óƭ ĩƈ ÝƆ ùŽ Ĩ
ƫ óƄ éŽ ø
ƈ
« …Une magie persistante. » (al-Qamar, 54 : 2).
202 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ĮÒƇ óÝƆ ĘŽ ÒğƄ ĘŽ Ìƈ źƈƪ ÌÒñƆ İ


Ɔ ĪƈŽ Ì
Ɔ
« … Tout ceci n’est qu’un mensonge qu’il (Muhammad) a inventé, et où
d’autres gens l’ont aidé›… » (al-Furqan, 25 : 4).
Des affirmations mensongeuses dévoilaient leur irrationalisme et leur stupidité
telles que :

īĻ ƈ ƈ ƈ Ɔ ĪŽ Ò
ƈ
Ɔ ĤIJƪ ƆźÒŽ óĻƇ ĈÓøƆ ÒƆ ƪźÒÒñİ
« … Ce ne sont que des légendes des anciens. » (al-An’am, 6 : 25) .
Jusqu’à présent, le défi lancé par le Coran à ses détracteurs quant au fait de for-
muler un chapitre similaire les conduisit à une défaite et à une impuissance totales.
Et ceci continuera jusqu’au Jour du Jugement dernier.
Au fil des années, les chrétiens ont été capables de former des prêtres suffi-
samment compétents pour enseigner la langue arabe aux Arabes eux-mêmes. Mais
aucun d’entre eux n’a jamais pu répondre au défi lancé par le Coran. N’aurait-il pas
été judicieux pour ces non-musulmans qui ont enduré ces depuis des siècles toutes
sortes de difficultés pour éteindre la lumière de l’islam, de relever ce défi ? Ce simple
fait historique, ne suffit-il pas pour prouver la grandeur du défi coranique, l’impuis-
sance de ses détracteurs et l’impossibilité de réfuter la Parole divine ?
Beaucoup de figures célèbres ont travaillé leur éloquence pendant des mois
à huit-clos sans pouvoir produire à la fin un seul verset. Musaylama et beaucoup
d’autres qui ont essayé d’écrire des versets similaires à ceux du Coran se sont ridi-
culisés. Leurs écrits n’ont servi qu’à mettre en valeur leur propre ineptie. C’est parce
que le Coran n’est pas seulement un miracle d’éloquence, mais il est aussi un livre
qui regroupe en son sein tous les siècles avec toutes leurs vérités. En effet, il est
impossible pour un être humain vulnérable, qui ne sait même pas quand il mourra,
de produire des versets dont la substance relève du miracle et des réalités divines.
Le sort actuel du contenu de la Torah et des Évangiles qui ont connu des altérations
est un fait avéré. Après avoir été soumis à l’intervention humaine, ces livres sont
aujourd’hui loins de leur essence et sont une sorte de compilation de contradictions.
Le fait que le Coran soit maintenu jusqu’à aujourd’hui sans perdre de son
influence est la preuve incontestable de sa majestueuse éloquence. Depuis la pre-
mière révélation jusqu’à aujourd’hui, et depuis près de quinze siècles, pas un indi-
vidu n’a pu défier et contester l’essence divine de ce Livre sacré. Et ceux qui ont tenté
de s’y mesurer se firent humilier à jamais. (Bûtî, Min Rawâii’l-Kur’ân, p. 126, 129, 130).
La Quatrième Année de la Prophétie 203

Le Coran n’est ni une poésie ni une prose.


En fait, son style combine les caractéristiques de la poésie et de la prose avec
une harmonie spirituelle et une mélodie intrinsèque.
Pour preuve, chaque fois que nous récitons le Coran, nous pouvons ressentir les
effets de cette harmonie intérieure au plus profond de notre âme.
Le changement de place d’un seul mot dans le texte coranique ou la moindre
modification romprait l’harmonie et le sens de celui-ci.
En vertu de cette caractéristique, le Coran a une influence énorme dans le cœur
des gens.
En écoutant ces versets divins de la bouche du Messager de Dieu r, les Arabes
se hâtèrent d’embrasser l’islam les uns après les autres. Comme ils étaient incapable
de reproduire quelques versets semblables, tous les idolâtres acceptèrent dans leur
cœur l’éloquence et la supériorité du Coran.
Leur seule raison qu’ils avaient pour refuser le Coran était qu’il entravait la voie
de leurs propres intérêts.
Et de plus il leur était insupportable de suivre un prophète orphelin.
Ibn Abbâs t dit qu’un jour Walid ibn Mughira vint voir le Saint Prophète r et
lui demanda de réciter le Coran.
Le Messager de Dieu r lui récita alors le verset suivant :

ƈ ƈ ƈ Ž Ʃ Īƈƪ Ì

 ıƆ ĭŽ ĺƆ IJĵ
Ɔ ÖƆ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒĸðÅÓÝĺƈƆ ÌIJ Ɔ ĪÓùƆ èŽ Ÿƈ ÒIJ Ɔ ĢïŽ đƆ ĤŽ ÓƈÖóƇ ĨƇ ÉĺƆ ųÒ
Ɔ
Ɔ óƇ Ġƪ ñƆ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ħŽ ġƇ Ƈčđƈ ĺƆ Ĺƈ ĕŽ ×Ɔ ĤŽ ÒIJ
ĪIJ Ɔ ƈóġĭ
Ɔ ĩƇ ĤŽ ÒIJÅÓ
Ɔ ýƆ éŽ ęƆ ĤŽ Òīƈ ĐƆ
« Certes, Allah commande l’équité, la bienfaisance et l’assistance aux
proches. Et Il interdit la turpitude, l’acte répréhensible et la rébellion. Il vous
exhorte afin que vous vous souveniez. » (an-Nahl, 16 : 90).
Walid demanda au Saint Prophète r de réciter ce verset à nouveau, après quoi
il ne put s’empêcher de s’exclamer :
« Par Dieu, il y a dans ces paroles une telle douceur, une telle beauté et une telle
luminosité qu’elles ressemblent à un arbre verdoyant rempli de figues et enraciné
dans l’eau. Ces paroles ne peuvent être celles d’un homme. Rien ne pourra s’opposer
à cette Parole et cette religion dominera toujours ses opposants. »
Stupéfait, Walid se leva et alla poser Abû Bakr t quelques questions sur le Livre
saint.
204 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Puis il se rendit auprès des chefs des Qurayshites et leur dit :


« Les choses dites par le fils d’Abû Kabshah sont vraiment étonnantes ! Par
Dieu, ses paroles ne sont ni de la poésie, ni de la magie, encore moins les paroles
d’un fou ! Ce qu’il dit est sans aucun doute la Parole de Dieu ! »
Abû Jahl entendant ces propos grommela :
« Je jure que si Walid se détourne de sa religion, alors sachez que tous les
Qurayshites se convertiront aussi. »
Et il se plaça immédiatement à côté de Walid et lui dit :
« Ô oncle ! Ta tribu collecte des biens afin de les donner parce qu’il semble que
tu serais allé voir Muhammad pour mendier. »
Walid répondit :
« Les Qurayshites devraient savoir que je suis le plus riche d’entre eux ! »
Alors Abû Jahl suggéra :
« Dans ce cas, affirme telle chose à propos de Muhammad, que le clan sache que
tu le rejettes et que tu le détestes. »
Walid répliqua :
« Que puis-je dire ?
Par Dieu, personne parmi vous ne connait mieux que moi la poésie, la qasida
(l’ode classique) et le rajaz.66
Ce qu’il a dit ne ressemble pas du tout à cela. Je vous assure que ce que j’ai
entendu de Muhammad ne ressemblait ni à la parole d’un homme ni à la parole
d’un djinn.
Il y avait une douceur et une élégance magnifiques. »
Abû Jahl insista :
« Ta tribu ne sera guère satisfaite de toi tant que tu ne proféreras pas quelque
chose contre lui. »
Walif répondit :
« Donne-moi le temps de réfléchir ! »
Et dans la détresse, il déclara :
66. Le rajaz est une sorte de poésie dans la prosodie arabe. La séance est rythmée et accentuée d’un
tempo lent et rapide qui lui permet d’être faite par plusieur instruments différents. Cela évoque ainsi
le ralliement d’une variété de sentiments, rendant possible l’expression de la joie et de la tristesse. Le
rajaz a environ une quinzaine de sous-branches. (Tahir’ul-Mevlevi Edebiyat Lügati p.120, “recez”.).
La Quatrième Année de la Prophétie 205

« Ceci n’est que de la magie. »


Son état, dans le Coran, a été transcrit comme suit :

ħƇàóùƆ ÖƆ IJ ÷×ĐħàóčĬħàòïĜėĻĠģÝƈ ĜħàòïĜėĻĠģÝƈ ĝĘòïĜIJóġĘįĬƈÌ


ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ ƆƆ Ɔ ƪ Ƈ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ƈ ƪ Ƈ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ ƪ
ƈóýƆ ×ĤŽ ÒĢƇ ijŽ ĜƆ źƈƪ ÌÒñƆ İ ƈ źƈƪ ÌÒñƆ İ
Ɔ ĪƈŽ ÌóƇ àƆ ËŽ ƇĺóƄ éŽ ø Ɔ ĪƈŽ ÌĢÓƆ ĝƆ ĘƆ óƆ ×Ɔ ġŽ ÝƆ øÒ Ɔ
Ɔ Ž IJ
Ɔ óƆ ÖƆ îŽ È
« Il a réfléchi. Et il a décidé. Qu’il périsse ! Comme il a décidé ! Encore une
fois, qu’il périsse ; comme il a décidé ! Ensuite, il a regardé. Et il s’est renfrogné et
a durci son visage. Ensuite il a tourné le dos et s’est enflé d’orgueil. Puis il a dit:
‹Ceci (le Coran) n’est que magie apprise, ce n’est là que la parole d’un humain›. »
(al-Muddattir, 74 : 18-25).

Des idolâtres comme Abû Sufyan, Abû Jahl et Ahnath ibn Shariq, qui empê-
chaient le public d’écouter le Coran, vinrent discrètement trois nuits de suite à la
Ka’ba pour écouter avec grand plaisir le Messager de Dieu r réciter le Coran.
Comme ils étaient venus en cachette, ils furent surpris et devinrent rouge de
honte en se voyant les uns les autres, si bien qu’ils se réprimandèrent mutuellement,
disant :
« Quoi qu’il arrive, personne ne doit savoir cela ! Nous serions déshonorés si les
gens apprenaient notre comportement, et nos paroles n’auraient aucun effet sur eux
lorsqu’on leur défendra d’écouter le Coran ! » Et ils se séparèrent en s’engageant à ne
pas réitérer ce genre de comportement. » (Ibn Hishâm, I, 337-338).
Beaucoup de gens acceptèrent l’islam en raison de cette beauté substantielle.
À l’instar d’Omar t qui se rendit chez son beau-frère dans le but de les assas-
siner.
Quand il arriva devant la porte et entendit la lecture des versets, aussitôt son
cœur fondit, ainsi que sa colère, au son agréable du Coran.
Une autre figure accepta l’islam après avoir été séduit par le Coran ce fut Jubayr
ibn Mutim t, dont le coeur tressaillit quand il entendit le Saint Prophète r réciter la
sourate at-Tur, et qui déclara après cela :
« Je pensais que mon cœur allait craquer ! » (Ahmad, IV, 83, 85).
Jubayr t rapporte lui-même cet évènement :
« J’ai été tellement ému que ce fut comme si mon cœur s’arrachait et allait sortir
de sa cage lorsque j’entendis le Messager de Dieu r réciter pendant la prière du soir
ces versets de la sourate At Tur :
206 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ƈ Ɔ ĝƇ ĤÓƈ íƆ ĤŽ ÒħƇ İ
Ɔ ĦŽ ƆÈĪij ƅ Ɔ ƈóĻĔƆ īĨÒij
ƈ ĝƇ ĥƈ ì
ĂƆ òŽ ƆŶÒŽ IJ
Ɔ ÚÒIJÓƆ ĩƆ ùĤÒÒij
ƪ ĝƇ ĥƆ ì Ƈ ĦŽ ƆÈÅĹŽ ü Ž Ž Ƈ ĦŽ ƆÈ
Ɔ óƇ ĉƈ ĻŽ āƆ ĩƇ ĤŽ ÒħƇ İ
ĪIJ Ƈ ĦŽ ƆÈğƈƆ Öž ò
ƈ Ɔ ħİïĭ
Ɔ īƇ ÐÒõƆ ì Đƈ ĦƆÈĪijĭĜij
ŽƇ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ƈ ƪ Ɔ
ƈ ĺźģÖ
« Ont-ils été créés à partir de rien ou sont-ils eux les créateurs ? Ou ont-ils
créé les cieux et la terre ? Mais ils n’ont plutôt aucune conviction. Possèdent-ils
les trésors de ton Seigneur ? Ou sont-ils eux les maîtres souverains ? » (at-Tur, 52 :
35-37; Al Boukhari, Tafsir, 52).

Durant les premières années de l’Apostolat prophétique, la sœur d’Imru’al-


Qays, le célèbre poète dont les poèmes étaient accrochés sur les murs de la Ka’ba
en guise de victoire dans les concours de poésie, était encore en vie. Quand on lui
lut quelques versets du Coran, la femme, experte en éloquence et clarté de la parole,
s’écria : « Ces paroles ne peuvent être le fruit d’un être humain ! Si de telles paroles
existent sur terre, les poèmes de mon frère ne méritent plus d’être affichés sur les
murs de la Ka’ba. » Puis elle enleva d’elle-même les œuvres de son frère accrochées
sur les murs de l’Enceinte. Et naturellement, toutes les autres écritures inférieures à
celles-ci furent ôtées une à une. (Voir Ahmed Cevdet Paşa, I, 83).
Il suffit que celui qui est doté d’intelligence écoute le Coran pour qu’il réaliser
que ce n’est rien d’autre que la Parole divine. D’ailleurs, c’est pour cela que le Saint
Prophète r fut missionné pour le faire entendre aux gens. Dieu le Tout-Puissant dit
en effet dans le Coran :

įƇ ĭƆ ĨƆ ÉŽ Ĩ ƈ Ɔ ƈ Ʃ ĦƆŻĠ ƈ ƈ
Ɔ įƇ ĕŽ ĥÖŽ Èħƪ ƇàųÒ Ɔ Ɔ ďƆ ĩƆ ùŽ ĺĵ Ɔ ĮƇ óŽ äƈ ƆÉĘƆ ĞƆ òÓ
Ɔ Ýƪ è Ɔ åƆ ÝƆ øÒ
Ž īĻƆ Ġ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ Ĩ Ɔ
ž ïƄ èƆ ÈĪƈŽ ÌIJƆ
« Et si l’un des associateurs te demande asile, accorde-le lui, afin qu’il
entende la parole d’Allah, puis fais-le parvenir à son lieu de sécurité… » (at-Tawba,
9 : 6).

Ainsi, faire entendre la Parole divine aux gens permet à la lumière de la foi de
s’enraciner dans leurs cœurs.
La mélodie du Coran qui captive l’âme naît de l’harmonie du son, de l’agence-
ment impeccable des mots, syllabes longues et courtes et voyelles brèves ou allon-
gées. Les cœurs frémissent lors d’un passage d’un son à un autre avec une harmonie
exceptionnelle. Même ceux qui ne comprennent pas son sens peuvent prendre beau-
coup de plaisir à condition que les règles de récitation soient respectées.67
67. La récitation du Coran constitue elle-même une branche distincte de la science islamique. Celle-
ci se compose de dix styles différents de récitation (ou qiraat) connus sous le nom des dix lectures
canoniques appelées « qiraat-ul-ashara ». Tout comme les imams des différentes écoles de
jurisprudence, chaque style de récitation a son propre initiateur, connu sous le nom d’imam de qiraat.
En Turquie, celle la plus répandue est la qiraat d’Asim.
La Quatrième Année de la Prophétie 207

L’attitude des idolâtres envers le Coran


L’islam met fin aux désirs des idolâtres, il instaure la justice, la vérité, la
croyance en la résurrection, en l’au-delà, et promet qu’aucune faute commise ne
sera laissée impunie.
De plus, l’islam discrédite formellement les croyances des idolâtres. Qui plus
est, la « grande nouvelle » apportée par le Messager de Dieu r avait ébranlé la cité
entière de La Mecque.
Le début de la sourate an-Naba décrit ainsi cette scène terrifiante :

Ɔ ęƇ ĥƈ ÝƆ íŽ Ĩ
Īij ƈ ƈ
Ƈ ñƈ Ĥƪ ÒƆ ħĻ
Ƈ įĻĘħŽ İĸ
ƈ čƈ đĤŽ ÒƈÍ×ĭĤÒ
Ɔ Ɔ ƪ īƈ Đ Ɔ Īij
Ɔ ƇĤÅÓùƆ ÝƆ ĺƆ ħƪ ĐƆ
« Sur quoi s’interrogent-ils mutuellement ? Sur la grande nouvelle, à propos
de laquelle ils divergent. » (an-Naba, 78 : 1-3).
Vu que les êtres humains sont naturellement prédisposés à la vérité, les cœurs
ne se satisfont jamais de l’inconnu. C’est pour cela qu’ils courent toujours vers le
connu, car leur angoisse majeure a toujours été ce à quoi ils n’ont jamais eu connais-
sance. Depuis longtemps, et bien que des prophètes apportent maintes informations
à ce sujet, la mort est la principale préoccupation de l’homme. Le mystère de la mort
terrifie l’esprit de l’homme, semblable à l’angoisse causée par un serpent venimeux.
C’est pour cela que l’homme tente vainement de rejeter et d’emprisonner cette
fatalité dans son subconscient. Puisque la mort finira un jour ou un autre par nous
surprendre par sa force prodigieuse, il devient prioritaire à l’humanité de se poser
les bonnes questions au sujet de cette vérité.
Cette énigme éternelle, hors de portée de la pensée humaine, ne peut être
résolue que par la force de la Révélation. Alors que toutes ces nouvelles concer-
nant l’avenir apportées par le Prophète Muhammad r et tous les autres prophètes
auraient dû être accueillies avec reconnaissance, elles firent pourtant l’objet de rail-
leries, d’injures, d’insultes et d’indifférence de la part de gens indignes. Les idolâtres
et mécréants de toutes sortes qui menaient une vie contraire à la volonté divine
accueillirent avec perplexité les nouvelles qu’avait apportées l’Envoyé de Dieu r
concernant la vie d’outre-tombe. Entêtés et égoïstes, ils tournèrent le dos à l’invita-
tion au salut éternel.
Le Coran parle de l’au-delà comme une « grande nouvelle ». La raison en est
claire. Peu importe leurs conditions de vie, les êtres humains éprouvent une souf-
france face à la mort. Que tous les chemins de la vie finiront par converger vers la
mort fait frémir les cœurs et surtout ceux des non-croyants.
208 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Pour les vivants, il n’y a pas d’évènement qui ne soit plus important que la
mort ; c’est pour cela qu’il faut bien considérer la grandeur des nouvelles qui lui sont
relatives. Par conséquent, les personnes qui ont compris cette réalité abandonnent
les richesses éphémères pour se tourner vers celles de la vérité et de l’éternel. Une
existence vécue sans prendre de leçon de la mort est semblable à une existence
plongée dans les ténèbres. L’étoile du bonheur ne naît qu’avec la mort précédée
d’une existence exemplaire. C’est la raison pour laquelle l’islam conseille le souvenir
constant de la mort et de sa préparation.
Les idolâtres, dérangés par les diverses déclarations du Coran relatives à la vie
éternelle et à la mort, demandèrent au Saint Prophète r de changer de discours :
« Apporte-nous un Coran qui ne nous demande pas de quitter Lat et Uzza. Si
Dieu ne révèle pas un tel Coran, conçois-en un nouveau ou bien altère ce que Dieu
t’a révélé, place le mot »miséricorde » au lieu de « châtiment » et « licite » au lieu de
« illicite » et vice-versa ! »
Concernant ce genre de personnages, le Coran stipule :

Īƅ ƆÒóĝƇ Öƈ Ûƈ ÐŽ ÒƆÓĬÅÓƆ ĝƆ Ĥƈ ĪijƆ äƇ óŽ ĺƆ Ɔźīĺ ƈ ƅ Ƈ ðƆ Òƈ IJƆ


Ž Ɔ ñĤƪ ÒĢÓƆ ĜƆ ÚÓĭƈƆ Ļž ÖÓ
Ɔ ĭƆ ÜÓƇ ĺƆ ƆÒħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đĵ
Ɔ ĥƆ ÝŽ ÜÒ
ƪ źÒƈ ďƈƇ ×Üƪ ÒƆ ĪŽ Òĵ
ƈ ùƈ ęŽ ĬƆ ÅÓƈ ĝƆ ĥŽ Üƈ īĨ
ƈ ƈ ƈ ƈ
Ž įƇ ĤƆ ïž ÖƆ ƇÒĪŽ ÒƆ ĵĤĪƇ ijġƇ ĺÓ
Ɔ ĨƆ ģŽ ĜƇ įƇ ĤŽ ïž ÖƆ IJŽ ÒƆ Òñİ
Ɔ ƈóĻŽ ĔƆ
ħĻƅ čƈ Đ ƅ ƈ Ƈ ìƆ ÒƆ ĵžĬƈ Òƈ ĵĤƆ Òĵƈ èijĺÓĨ
Ɔ ĦijŽ ĺƆ ÔÒƆ ñƆ Đĵƈ
Ɔ Öž ò Ɔ Û Ƈ ĻŽ āƆ Đ Ɔ ĪŽ ÒĖÓ ƪ Ɔ Ƈ Ɔ
« Et quand leur sont récités Nos versets en toute clarté, ceux qui n’espèrent
pas notre rencontre disent : ‹Apporte un Coran autre que celui-ci› ou bien
‹Change-le›. Dis : ‹Il ne m’appartient pas de le changer de mon propre chef. Je
ne fais que suivre ce qui m’est révélé. Je crains, si je désobéis à mon Seigneur, le
châtiment d’un jour terrible›. » (Yunus, 10 : 15) ; Wahidi, p.270 ; Alusi, XI, 85).
Les idolâtres, ne sachant pas quoi faire, retournèrent opprimer, persécuter et
torturer les musulmans. De jour en jour, ces supplices augmentèrent et la vie à La
Mecque devint insupportable.
Abû Bakr t, comme beaucoup d’autres musulmans, demanda également la
permission au Saint Prophète r d’émigrer. Une fois l’autorisation accordée, il partit
pour l’Abyssinie et après un ou deux jours de route, il rencontra Ibn Daghinah, le
chef de la tribu de Qara, qui lui dit :
« Ô Abû Bakr ! Quelqu’un comme toi ne peut ni quitter sa maison ni être
chassé. Par Dieu, tu es la richesse de ta tribu ! Tu accomplis le bien et t’occupes de
tes proches. Tu prends la charge de ceux qui sont impuissants ! Reviens ! Tu es à
présent sous ma protection. »
La Quatrième Année de la Prophétie 209

Avec Ibn Daghinah près de lui, Abû Bakr t rentra à La Mecque. Quand ils
entrèrent dans la ville, Ibn Daghinah déclara ouvertement sa tutelle aux Qurayshites.
Ceux-ci posèrent certaines conditions :
« Dis à Abû Bakr d’adorer son Seigneur uniquement dans l’enceinte de sa
demeure ! Et qu’il accomplisse la prière et récite le Coran autant qu’il le désire
là-bas ; qu’il ne nous dérange pas en faisant tout cela, car nous craindrions qu’il
enchante nos femmes et nos enfants. »
Ibn Daghinah rapporta à Abû Bakr t les sollicitations des Mecquois. Ce der-
nier les accepta, puis aménagea une petite place pour prier devant sa maison. Là, il
continua à prier et à réciter le Coran. Possédant un cœur tendre et sensible, il ne
pouvait retenir ses larmes lorsqu’il lisait la Parole de Dieu. Ainsi, les femmes et les
enfants des idolâtres se rassemblaient autour de lui et le regardaient avec admira-
tion. Cette situation inquiéta les idolâtres. Sur ces entrefaites, ils firent appel à Ibn
Daghinah pour que celui-ci empêche Abû Bakr t de se comporter ainsi ou bien
qu’il enlève sa protection. En conséquence, il se rendit chez lui et déclara :
« Ô Abû Bakr ! Sois tu restes chez toi et gardes le silence, sois tu déclares quitter
la protection. »
Complètlement soumis à la volonté du Tout-Puissant, Abû Bakr t répondit :
« Je te rends ta protection. La protection de Dieu me suffit. » (Al Boukhari, Mana-
qib’ul-Ansar, 45 ; Ibn Hishâm, I, 395-396).

Comme les populations arabes avaient un grand intérêt pour la littérature, elles
admiraient et étaient fortement touchées par les paroles éloquentes. Si bien que
parfois le moindre vers pouvait les élever aux cieux ou rabaisser d’autres au plus
bas. Conscients de l’énorme influence suscitée par le Coran, les idolâtres prirent cer-
taines dispositions pour le contrecarrer. En effet, eux-mêmes tombaient parfois sous
son emprise. Outre le fait que les idolâtres avaient interdit la lecture et l’audition du
Coran, et, d’une manière ou d’une autre, lorsqu’ils entendaient une récitation, ils
faisaient du bruit pour que la spiritualité du Coran ne puisse pas atteindre les cœurs
et les rapprocher de l’islam. Le Tout-Puissant les mentionne ainsi :

Ɔ ×Ƈ ĥƈ ĕŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ įĻƈ ĘÒ


Īij ƈ ijĕƆ ĤŽ ÒIJĪÆ
ƈ ƈ
Ž Ɔ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒÒñƆ ıƆ ĤÒijđƇ ĩƆ ùŽ ÜƆ źÒIJ
Ɔ óƇ ęƆ Ġ
Ɔ īĺ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒĢÓƆ ĜƆ IJƆ
« Et ceux qui avaient mécru dirent : ‹Ne prêtez pas l’oreille à ce Coran, et
faites du chahut (pendant sa récitation) afin d’avoir le dessus›. » (Fussillat, 41 : 26).
210 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Malgré l’oppression et le harcèlement incessant de sa tribu, le Seigneur des


mondes r continua à transmettre le message de l’islam et à inviter son peuple au
salut éternel. Les idolâtres allaient aux frontières de La Mecque à la rencontre des
Arabes qui venaient en pèlerinage ou pour d’autres raisons. Ils les avertissaient et
même les menaçaient en leur interdisant de s’approcher et d’écouter les paroles du
Messager de Dieu r. En affirmant que le Saint Prophète r était un fou, un magicien
ou un voyant, ils cherchaient à tenir les gens éloignés de lui en alléguant des men-
songes qu’eux-mêmes ne croyaient pas.
Lorsque Tufayl ibn Amr68 se rendit à La Mecque, des notables de Quraysh
allèrent à sa rencontre et lui dirent ceci en guise d’avertissement :
« Ô Tufayl ! Tu es un poète très respecté au sein de ta tribu. Étant donné que tu
es venu dans notre ville, nous te mettons en garde contre un homme qui se trouve
parmi nous ! Son état nous inquiète, il a complètement perturbé notre communauté.
Ses paroles ont l’effet de la magie et ont séparé l’homme de son père, de son épouse
et de ses frères et sœurs. Nous craignons que ce qui nous est arrivé t’arrive aussi.
Alors tâche de ne jamais lui parler ou l’écouter. »
Sous l’influence de ces paroles, Tufayl t décida de ne pas parler au Messager
de Dieu r ni de l’écouter. Si bien que lorsqu’il se rendit à la Ka’ba, il se boucha les
oreilles avec du coton pour ne pas entendre ce que le Messager de Dieu r pouvait
dire. Plus tard, en reconsidérant sa situation, il eut honte de son action, s’étant dit
à lui-même :
« Honte à moi ! Je suis une personne intelligente et un poète doté d’une raison
saine. Je sais différencier les belles paroles des mauvaises. Dans ce cas, quel mal peut-
il y avoir à écouter ce que dit cet homme ? Si ses paroles sont de bonnes paroles, je
les accepterais, sinon je les rejetterais. »
Puis il se mit à attendre le Messager de Dieu r. Quand il le vit sortir de chez
lui, il le rattrapa et lui dit :
« Ô Muhammad ! Ta tribu en disant ceci et cela à ton sujet, me fit tellement
peur que pour ne pas t’entendre, j’ai même bouché mes oreilles avec du coton.
Après, avec l’aide de Dieu, j’ai eu le privilège d’écouter tes paroles. À présent, peux-
tu m’expliquer ta cause ? »
Tufayl t raconte ainsi la suite :
68. At-Tufayl ibn Amr ad-Dawsi t était un homme honorable, sage, hospitalier et doué pour la poésie.
Il nourrissait ceux qui avaient faim, protégeait ceux qui se réfugiaient vers lui et aidaient ceux qui
lui demandaient de l’aide. Suite à sa conversion à l’islam au cours de la 10ème année de l’Apostolat
prophétique, il continua d’inviter les Daws à l’islam jusqu’à l’Hégire du Saint Prophète r à Médine. Il
mourut finalement martyr lors de la bataille de Yamana après avoir fait montre d’un grand courage.
La Quatrième Année de la Prophétie 211

« Le Messager de Dieu r m’a explicité l’islam et a récité le Coran. Par Dieu, je


n’avais jamais entendu de paroles plus belles que celles du Coran, ni une religion
plus belle que l’islam ! Aussitôt j’embrassai l’islam et témoignai qu’il n’y avait pas
d’autre divinité si ce n’est Dieu le Tout-Puissant. »
Après être resté quelques jours en compagnie du Saint Prophète r, Tufayl t
lui demanda la permission de retourner dans sa tribu pour y propager l’islam. Il lui
demanda de prier Dieu pour que se produise un signe apparent par lequel il puisse
appeler à la religion véridique.
Par la bénédiction attachée à la prière de l’Envoyé de Dieu r, il lui fut accordé
une lumière entre ses deux yeux. Puis, conformément à sa demande, cette lumière
se déplaça de son front vers la pointe de son bâton. Tufayl t rejoignit donc sa tribu
et travailla pour cette cause jusqu’au martyr. (Ibn Hishâm, I, 407-408; Ibn Saad, IV, 237-238).
Le premier qui répondit à l’invitation de Tufayl t fut Abû Hurayra t, l’éminent
Compagnon qui rapporta le plus grand nombre de hadiths. (Ibn Hajar, al-Isaba, II, 226).

Bien qu’ayant adopté une attitude négative envers le Coran, les idolâtres,
lorsqu’ils étaient seuls avec leur conscience, acceptaient la vérité et ne pouvaient
s’empêcher d’écouter discrètement le Coran. Cependant ils finirent par trouver une
autre excuse :

ƅ čƈ Đ
ħĻ ƈ
Ɔ īƈ ĻŽ ÝƆ ĺƆ óŽ ĝƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩ
ž ģƅ äƇ òĵ
Ɔ ĥƆ Đ
Ɔ ĪƇ ÆóŽ ĝƇ ĤŽ ÒÒñƆ İ
Ɔ ĢƆ õžƈ ƇĬźƆ ijŽ ĤƆ ÒijƇĤÓĜƆ IJƆ
« Et ils dirent : ‹Pourquoi n’a-t-on pas fait descendre ce Coran sur un haut
personnage de l’une des deux cités ?› (La Mecque et Ta’if) » (az-Zukhruf, 43 : 31).
Même s’ils reconnaissaient dans leur conscience l’authenticité du Saint Pro-
phète r, leur ego les empêchait d’affirmer cette croyance. Ils savaient que le Coran
était révélé par Dieu, mais ils attribuaient l’erreur à Sa volonté. Selon leur réflexion
voilée par leur propre égoïsme, le Coran ne pas être envoyé à un orphelin mais à l’un
des riches personnages originaire de Ta’if comme Amr ibn Umayr ou de La Mecque
comme Walid ibn Mughirah qui déclara :
« Pourquoi le Coran devrait-il être révélé à Muhammad alors qu’il y a moi,
l’aîné et le seigneur de Quraysh, ou Amr ibn Umayr, le notable de Ta’if ? » (Ibn
Hishâm, I, 385).

La valeur des hommes au regard du Tout-Puissant ne vient ni de la richesse ni


de la noblesse, mais de la piété. Cela dit, la lignée sacrée du Messager de Dieu r était
la plus noble parmi toutes celles existantes.
212 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les allégations contre le Messager de Dieu r et le Coran


Tout en sachant qu’il était illettré, les idolâtres impuissants face à la grandeur
du Messager de Dieu r redoublèrent d’imbécilité jusqu’à affirmer qu’il avait appris
le Coran d’un esclave chrétien. Ils ne se demandèrent même pas pourquoi un esclave
capable d’établir une religion aussi suprême laisserait cet honneur et ce privilège à
quelqu’un d’autre ? En outre, celui-ci peut-il demeurer encore chrétien ?
À cette allégation infondée, le Coran répondit :

ĸñƈ Ĥƪ ÒĪƇ ÓùƆ žĤƈ óýƆ ÖƆ įƇ ĩƇ ĥžƈ đƆ ƇĺÓĩƆ Ĭƈƪ ÌĪij
Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ ħŽ ıƇ Ĭƪ ƆÈħƇ ĥƆ đŽ ĬƆ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
Ƅ
ƈ ƈ Ɔ ƈ Ɔ ïƇ éƈ ĥŽ ĺ
īĻƈ
Ƅ ×Ĩ ƫ Ĺƈƭ ÖóƆ ĐƆ ĪƄ ÓùƆ ĤÒñÃƆ İƆ IJ Ɔ Ĺƭ ĩåƆ ĐŽ ÈįĻŽ ĤƆ Ìƈ ĪIJ Ƈ
« Et Nous savons parfaitement qu’ils disent : ‹Ce n’est qu’un être humain qui
lui enseigne (le Coran) ›. Or, la langue de celui auquel ils font allusion est étran-
gère [non arabe], et celle-ci est une langue arabe bien claire. » (an-Nahl, 16 : 103).

Ɔ ĥƇ ĉƈ ׎ ĩƇ ĤŽ ÒÔÓ
Īij ƪ ðƃ Ìƈ ğƆ ĭĻƈ ĩƈ ĻƈƆ ÖįƫƇ ĉí
Ɔ ÜƆ òŽ źÒ Ƈ ÜƆ źƆ IJ
Ɔ ÔÓ
ƈ Ĩ
ƅ ÝƆ Ġī ƈ įƈ ĥƈ ×ĜƆ īĨij
Ž
ƈ ĥƇ ÝÜƆ Ûĭ
Ž Ɔ ĠÓ Ƈ ĨƆ IJƆ
« Et avant cela, tu ne récitais aucun livre et tu n’en écrivais aucun de ta main
droite. Sinon, ceux qui nient la vérité auraient eu des doutes. » (al-Ankabut, 29 : 48).
Par ailleurs, le Tout-Puissant avisa Son Messager r pour qu’il ne soit pas atteint
par les accusations des idolâtres :

ƈ üĪijĤijĝĺĦÒĪij
ÿƇ Öƪ óÝƆ ĬƆ óĐÓ ƅ ĭåĨźIJīƅ İÓ ƈ ġƈƆ ÖğƈƆ ÖòÙƈ ĩđĭƈƈ ÖÛƆ ĬŽ ƆÒÓĩĘƆ óĠžƈ ñƆ ĘƆ
Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ Ƈ ƇƆ ŽƆ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ žƆ Ɔ Ž Ɔ Ž
īĻ ƈ ƈ ƈƈ ƈ ƈ
Ɔ āƈÖž óƆ ÝƆ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨħŽ ġƇ đƆ Ĩĵ
Ɔ žĬÓĘƆ ÒijāƇ Öƪ óƆ ÜƆ ģŽ ĜƇ ĪijƇĭĩƆ ĤŽ ÒÕƆ ĺŽ ò
Ɔ įƈÖ
« Rappelle donc et par la grâce de ton Seigneur tu n’es ni un devin ni un pos-
sédé ; ou bien ils disent : ‹C’est un poète ! Attendons pour lui le coup de la mort›.
Dis : ‹Attendez ! Je suis avec vous parmi ceux qui attendent ›. » (at-Tur, 52 : 29- 31).

ĦŽ ÒƆ īĻƈ ƈ Ɔ ħİÅÓäÓĩĤƆ ěžƈ éĥŽ ĤÒIJ ƈ óęƆ Ġ īĺñƈ ĤÒĢÓĜ


Ƅ ×Ĩ
Ƈ óƄ éŽ øÒñİ ŽƇ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ
ÓĩƈƆ ÖħĥƆ ĐŽ ÒƆ ijƆ İÓ ƈ Ʃ īĨĵ Ɔ ġƇ ĥƈ ĩŽ ÜƆ ƆŻĘƆ įƇ ÝƇ ĺŽ óƆ ÝƆ ĘŽ ÒĪƈ Òƈ ģŽ ĜƇ įĺ
ƈ Ĥƈ Īij
Ƈ Ƈ Ñƃ ĻŽ ü
Ɔ ųÒ Ɔ Ƈ óƆ ÝƆ ĘŽ ÒĪij
Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ
ħĻèƀ óĤÒòij ęĕĤÒijİIJħġĭĻÖIJĵĭƈ ĻÖÒïĻ ƈıüįƈƈ ÖĵęƆ Ġ Ɔ įĻƈ Ę ƈ Īij
Ɔ ąĻ Ƈ ęƈ ÜƇ
Ƈ ƪ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ŽƆ Ɔ ŽƆ ƃ Ɔ
Et quand on leur récite Nos versets bien clairs, ceux qui ont mécru disent à
propos de la vérité, une fois venue à eux : ‹C’est de la magie manifeste›. Ou bien
La Quatrième Année de la Prophétie 213

ils disent : ‹Il l’a inventé !› Dis : ‹Si je l’ai inventé, alors vous ne pourrez rien pour
moi contre [la punition] d’Allah. Il sait parfaitement ce que vous propagez (en
calomnies contre le Coran): Allah est suffisant comme témoin entre moi et vous.
Et c’est Lui le Pardonneur, le Très-Miséricordieux›. » (al-Ahqaf, 46 : 7-8).
Les idolâtres ne souhaitant pas prendre la voie du droit chemin ne se privèrent
pas de porter toutes sortes d’allégations et d’accusations à l’encontre du Messager
de Dieu r et du Coran. Mais, au fond d’eux, ils connaissaient la vérité. Craignant
la propagation de l’islam en dehors des frontières de La Mecque, les notables de
Quraysh se rassemblèrent autour de Walid ibn Mugharah afin de se concerter. Ils
se demandèrent :
« Que devrions-nous dire aux gens venant à La Mecque pour rencontrer
Muhammad ? »
Walid, qui s’était déjà entretenu avec le Saint Prophète r et avait écouté le
Coran personnellement de sa propre bouche, fit la suggestion suivante :
« Je connais tous les genres de poésie. Ce que j’ai pu écouter de lui n’était ni
de la poésie ni de la prose ; c’était bien supérieur à tout ceci. Je n’ai jamais entendu
venant de qui que ce soit d’autre une telle harmonie ornée d’une éloquence excep-
tionnelle. Cela ne ressemblait pas aux paroles d’un sorcier, ni à celles d’un fou. Je
n’ai vu d’ailleurs aucune trace de folie chez lui. Nous ne pouvons guère le traiter de
sorcier, car il ne pratique aucune de ses activités ! »
Après avoir prononcé ces paroles, Walid s’obligea à apporter une solution pour
appuyer les mauvaises intentions des idolâtres, disant :
« Mais ils séparent les frères entre eux. Il sème les graines du conflit entre les
parents. Par conséquent, sa parole ne peut être que magie et sorcellerie ! » (Ibn Jawzi,
VII, 403-404 ; Hakim, II, 550 ; Wahidi, p. 468).

Insatisfaits du résultat de leurs allégations apportées au Coran, les idolâtres


s’attaquèrent cette fois-ci à la personnalité du Saint Prophète r. Profitant de la dis-
parition de Qasim, le fils du Messager de Dieu r, à l’âge de deux ans, ils répandirent
par la bouche d’As ibn Wail que le Messager était devenu « abtar », c’est-à-dire qu’il
n’avait plus désormais de descendance et que sa lignée s’était éteinte.
En agissant de la sorte, ils désiraient que le Messager de Dieu r tombât en dis-
grâce aux yeux du peuple en éteignant son influence dans le cœur des gens.
Mais ils échouèrent car la sourate al-Kawthar vint comme une gifle sur leurs
visages :
214 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

óÝƆ ÖŽ ƆŶÒ
Ž ijƆ İ ƈ Ɔ Īƪ Ìƈ óéĬŽ ÒIJğƈƆ ÖóĤƈ ģƈ ž āĘƆ óàƆ ijġƆ ĤŽ ÒĞƆ ÓĭƆ ĻĉƆ ĐƆÈÓĬƈƪ Ì
Ƈ Ƈ ğƆ ÑƆ ĬÓü ŽƆ Ɔ žƆ Ɔ Ɔ Ž Ž Ž
« Nous t’avons certes, accordé l’Abondance. Accomplis la Salât pour ton Sei-
gneur et sacrifie. Celui qui te hait sera certes, sans postérité. » (al-Kawthar, 108, 1-3)
Ces versets montrent que quiconque se porte à haïr le Messager de Dieu r,
quel que soit le moment ou le lieu, a pour point commun l’absence de descendance.
Cela vaut aussi pour les vulgaires qui ont l’audace de traiter le Messager de Dieu r
d’arriéré, pour les idiots qui tentent de projeter leur indignité sur la meilleure créa-
ture qui soit et pour les imbéciles qui voient la religion de vérité comme une « loi du
désert ». De tels individus sont perdus à tout jamais.
Comme l’a si magnifiquement exprimé le poète :
Du soleil de ton visage,
Les deux mondes sont faits de lumière,
Qui ne porte pas d’affection à ton enfant,
Verra le Jour du Jugement sa descendance rompue comme Satan !

Tous comme ceux qui avaient renié les prophètes antérieurs, ceux qui ne pou-
vaient pas supporter le Messager de Dieu r étaient dominés par l’arrogance, l’orgueil
et l’argent.
Dieu le Tout-Puissant dit :

įƈƈ ÖħÝƇ ĥŽ øƈ òŽ ƇÈÓĩƈƆ ÖÓĬƈƪ ÌÓİij ƈ ƪ Ĩƈ ƅ ƈ Ɔ


Ƈ ĢÓƆ ĜƆ źƈƪ Ì ƅóĺñĬī
Ɔ ĘƇ óƆ ÝŽ Ĩ ž ÙĺƆ óŽ ĜƆ ĹĘÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ÈÓĨƆ IJƆ
īĻƈ Ɔ źÒƃ ijĨƆÈóáƆ ĠŽ ƆÈīƇ éŽ ĬƆ ÒijƇĤÓĜƆ IJĪIJ ƈ
Ɔ Öñƪ đƆ ĩƈƇ ÖīƇ éŽ ĬƆ ÓĨƆ IJÒƆ îƃ źƆ IJŽ ÈIJ
Ɔ ƆŽ Ƈ Ɔ Ɔ óƇ ĘÓĠƆ
« Et Nous n’avons envoyé aucun avertisseur dans une cité sans que ses gens
aisés n’aient dit : ‹Nous ne croyons pas au message avec lequel vous êtes envoyés›.
Et ils dirent : ‹Nous avons d’avantage de richesses et d’enfants et nous ne serons
pas châtiés›. » (Saba, 34 : 34-35).

ƅ ýƪ Ĩ ƅôÓĩİīĻ
ƅ ĩƈ ĭƈƆ ÖÅÓ
ħĻ ƅ Ƈ ďŽ ĉƈ ÜƇ ƆźIJƆ
Ɔ ƪ Ɔ ƅ ƈıĨƆ ĖƪŻè
Ɔ ģƪ Ġ
ƅ ĨÒðƆ ĪÓ
ĢÓ ƅ Ĭƈ ô
Ɔ ğƆ Ĥƈ ðƆ ïƆ đŽ ÖƆ ģƅ ž ÝƇ Đ ƅ àƈ ƆÒïƅ ÝƆ đĨ ƈóĻíƆ ĥŽ Ĥƈ Ďƅ Óĭƪ Ĩ
Ƈ ħĻ
Ɔ Ɔ Ġ Ɔ ĪŽ ƆÒħĻ ŽƇ Ž Ɔ
īĻ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ĤIJƪ ƆźÒŽ óĻƇ ĈÓøƆ ƆÒĢÓƆ ĜƆ ÓĭƆ ÜÓƇ ĺƆ ƆÒįĻŽ ĥƆ Đĵ Ƈ ðƆ Òƈ īĻ
Ɔ ĥƆ ÝŽ ÜÒ
ƈ
Ɔ ĭÖƆ IJƆ
La Quatrième Année de la Prophétie 215

« Et n’obéis à aucun grand jureur, méprisable, grand diffamateur, grand col-


porteur de médisance, grand empêcheur du bien, transgresseur, grand pécheur,
au cœur dur, et en plus de cela bâtard. Même s’il est doté de richesses et (de nom-
breux) enfants. Quand Nos versets lui sont récités, il dit : ‹Des contes d’anciens›. »
(al-Qalam, 68 : 10-15).

Ainsi le plus féroce ennemi du Messager de Dieu r et de l’islam Abû Lahab dit :
« Nous savons que Muhammad dit vrai ! Jusqu’à présent nous avons toujours
fait ce que sa tribu a fait et avons toujours été à sa hauteur. Et maintenant tous se
réjouissent d’avoir un prophète parmi eux. Comment pouvons-nous faire sortir de
notre sein un prophète comme lui ? C’est impossible ! Cest pour cela que je n’accep-
terais jamais l’Apostolat prophétique de Muhammad ! » (Ibn Kathir al-Bidayah III, 113).
Aigri par sa haine, sa jalousie et son animosité, Abû Jahl disait à chaque fois :
« Si jamais je l’aperçois en train de prier, je lui poserai mon pied sur la tête ! »
Plus tard, il se trouva dans la Ka’ba alors que le Messager de Dieu r était en
train d’y prier.
C’était donc pour lui le moment propice pour qu’il mette en œuvre ce qu’il avait
prémédité.
Mais soudain il devint pâle et fut submergé par la peur, si bien qu’il ne pouvait
même plus tenir la pierre qu’il avait saisie. Il tourna le dos et s’enfuit rapidement.
Ceux qui l’observaient lui demandèrent ce qui s’était passé.
Apeuré, Abû Jahl commença à raconter :
« Quand je me suis approché de lui, un chameau en furie sortit devant moi. Je
jure que je n’ai jamais vu de bête aussi terrifiante ! Encore un peu, il allait me dévo-
rer ! » (Ibn Hishâm, I, 318; Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 92-93)
Assurément, Dieu le Tout-Puissant protégeait et glorifiait Son serviteur et
Messager, Muhammad Mustafâ r, ainsi que la religion qu’il avait envoyée avec lui.
Ainsi donc, les idolâtres n’avaient toujours pas pu digérer la présence du
Messager de Dieu r et s’obstinaient à réfuter les vérités du Coran.
Ils fuyaient tout simplement la réalité divine.
Dieu le Très-Haut dit :

Øƅ òƆ ijƆ ùŽ ĜƆ īŽ Ĩ
ƈ ÚŽ óĘƆ ØƄ óęƈ ĭŽ ÝùĨóĩèħıĬƪ ÓƆ Ġ īĻĄƈ ƈóđŽ Ĩ ƈ ƈ
Ƈ ØóƆ ĠñŽ ÝĤÒ
ƪ īƈ Đ
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ÓƆ ĩĘƆ
ƪ Ɔ Ɔ ŽƇ ƄƇ Ƈ ŽƇ Ɔ Ɔ
« Qu’ont-ils à se détourner du Rappel ? Ils sont comme des onagres épou-
vantés, s’enfuyant devant un lion. » (al-Muddattir, 74 : 49-51).
216 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un poète exprime si bien le refus de l’islam par les idolâtres alors qu’ils connais-
saient la vérité et que la guidance vers le droit chemin est de l’ordre de Dieu :
Que faire de l’intelligence si elle est absente de la guidance, ô Seigneur !
Que peut faire le verset même si Abû Jahl connaît l’arabe, ô Seigneur !
Par moment, dans le cadre de l’épreuve divine, l’obstination et la dénégation des
idolâtres se transformaient en tortures et oppressions insupportables à l’encontre du
Messager de Dieu r et de l’ensemble des croyants.

Le temps des tortures


Déçus de n’avoir pu obtenir gain de cause auprès d’Abû Talib ni aucune conces-
sion de la part du Messager de Dieu r, les idolâtres trouvèrent la solution dans la
terreur. Dans un premier temps, ils s’abstinrent de nuire aux grandes familles tri-
bales car l’oppression des musulmans ne s’était pas encore généralisée.
À ce moment, les croyants soumis à la torture des idolâtres étaient principale-
ment des pauvres, des gens sans famille, des esclaves hommes ou femmes. Il n’y avait
pratiquement plus aucune forme de torture à laquelle ils ne furent pas soumis…
Khabbab t69 fut couché sur des braises et on le força à rester étendu sur le feu
jusqu’au moment où celui s’éteigne par la graisse coulant de son corps. Khabbab t
était forgeron et certains idolâtres avaient des dettes à lui payer.
Chaque fois qu’il leur réclamait son argent, ils lui répondaient :
« Renonce à Muhammad et nous rembourserons nos dettes ! »
Et lui, renonçant à l’intérêt de ce monde passager et faisant le choix du bonheur
éternel, il t répondait :
« Jamais je le renierai ! Je suis de son côté, avec lui ! »
Il raconta comme suit l’un des tourments qu’il subit :
« Un jour je suis parti chez As ibn Wail pour qu’il paie sa dette.
Celui-ci me dit :
- Tant que tu ne renonceras pas à Muhammad, je ne te rembourserai pas ce
que je te dois.
69. Khabbab ibn Arat t fut le sixième homme à avoir embrassé l’islam. Les idolâtres lui firent subir de
lourdes tortures qu’il porta sur son dos jusqu’à sa mort.
Après l’Hégire à Médine, il participa à toutes les batailles depuis celle de Badr.
Il rapporta 32 hadiths du Messager de Dieu r. Il avait plus de soixante-dix ans au moment de sa
disparition à Kufa, en 657. (37AH)
La Quatrième Année de la Prophétie 217

Et je lui répondis :
- Je ne renierai jamais Muhammad, ni jusqu’au jour où tu mourras ni jusqu’au
jour où tu seras ressuscité.
Il me dit alors :
- Je vais mourir et être ressuscité, c’est çà ?
Je lui répondis : - Oui !
As ibn Wail dit alors :
- Dans ce cas, lorsque je serai ressuscité, je posséderai des biens, et à ce
moment-là je te rembourserai ma dette. »
Cette réplique, provoqua la révélation des versets subséquents :

Ò ïƃ ĤƆ IJƆ IJ ƈ Ɔ ñƈ Ĥƪ ÒÛƆ ĺŽ ƆÒóƆ ĘƆ ƆÒ


Ɔ ƃźÓĨ
Ɔ īƪ ĻƆ ÜIJ
Ɔ Ƈ źĢÓƆ ĜƆ IJÓ
Ɔ ĭƆ ÜÓĺƆ ƆÓÖƈ óƆ ęƆ ĠĴ
Ģij
Ƈ ĝƇ ĺÓ ƈ ñƆ íƆ ÜÒ
ƪ Ħƈ ÒƆ ÕƆ ĻŽ ĕƆ ĤŽ ÒďƆ ĥƆ Ĉ
Ɔ ĨƆ ÕƇ ÝƇ ġŽ ĭƆ øƆ ƪ ŻĠÒ
Ɔ ïƃ ıŽ Đ
Ɔ īĩƈ èŽ óĤÒïƆ ĭŽ Đ
ƪ ƪ ÒƆ
Òîƃ óĘƆ ÓĭĻƆ Üƈ ÉŽ ĺƆ IJ
Ɔ Ģij
Ƈ ĝƇ ĺÓ
Ɔ ĨƆ įƇ Ƈà ƈóĬƆ IJÒ
Ɔ ïƬ Ĩ
Ɔ ÔÒ
ƈ įĤƆ ïƫ ĩĬƆ IJ
ƈ ñƆ đƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩ Ƈ Ƈ Ɔ
Ž
« As-tu vu celui qui ne croit pas à Nos versets et dit : ‹On me donnera certes
des biens et des enfants› ? Est-il au courant de l’Inconnaissable ou a-t-il pris un
engagement avec le Tout Miséricordieux ? Bien au contraire ! Nous enregistre-
rons ce qu’il dit et accroîtrons son châtiment. C’est Nous qui hériterons ce dont
il parle, tandis qu’il viendra à Nous, tout seul. » (Maryam 19 : 77-80; Al Boukhari Tafsir
19/3; Muslim Munafiqin 35-36; At Tirmidhi Tafsir 19/3162).

Oumm Ammar, la maîtresse de Khabbab, lui infligeait aussi des tortures. Elle
laissait le fer rougir sur le feu et le posait sur la tête de Khabbab t.
Un jour, ce dernier, n’en pouvant plus, se rendit auprès du Saint Prophète r
pour se plaindre d’elle.
Le Messager de Dieu r leva ses mains au ciel et fit ce doua :
« Ô Dieu ! Prête secours à Khabbab ! »
Sur ce, Dieu le Tout-Puissant fit tomber une sanction exemplaire sur Oumm
Ammar :
Elle fut prise d’une démence subite qui la poussa à aboyer comme les chiens
et son traitement consista à ce que Khabbab t, son serviteur, lui cautérisât la tête
matin et soir avec du fer. (Voir Ibn Asîr, Usdu’l-Ghaba, II, 115).
218 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Bilal t70 avait, quant à lui, été soumis à des formes de tortures les plus impi-
toyables. Son maître, Umayya ibn Khalef lui infligeait des souffrances inimaginables.
Il l’allongeait sur le sable brûlant et lui attachait d’énormes rochers sur la poi-
trine ; et parfois il le traînait dans les rues de La Mecque.
Après avoir laissé Bilal t sans eau durant une journée, il lui faisait porter une
armure en fer et le maintenait sur le sable brûlant jusqu’à ce que les graisses de son
corps commencent à fondre.
Malgré tous ces sévices, les idolâtres ne purent obtenir ce qu’ils voulaient de lui.
En effet, il répétait sans cesse :
« Dieu est Un, Dieu est Un, Dieu est Un ! » (Voir Ahmed, I, 404; Ibn Saad, III, 233;
Balâzurî, I, 186).

Les supplices infligés aux musulmans n’étaient pas seulement que de la torture.
Yassir71, le père d’Ammar t mourut martyr sous les tortures des idolâtres car il
refusait de répondre à ce qu’ils lui demandaient.
Pareillement, Sumaya c, la mère d’Ammar, fut cruellement torturée. Elle rendit
l’âme en ayant eu les deux jambes écartelées.
De ce fait, les membres de la famille de Yassir devinrent les premiers martyrs
de l’islam. (Voir Ibn Hajar, al-Isâba, III, 648; Zamakhsharî, III, 164).
70. Bilal ibn Rabah t, plus connu sous le nom de Bilal al-Habashi en référence à ses origines (Habashi :
Abyssinie), fut parmi les sept premiers à déclarer sa foi à La Mecque. Sa mère Hamama c était aussi
musulmane. Tous deux souffrirent d’énormes tourments que leur infligeaient les idolâtres durant les
premières années de la révélation islamique. Il fut le premier muezzin à faire l’appel à la prière la
première année de l’Hégire, en temps de guerre comme en temps de paix. Il participa à toutes les
batailles à côté du Messager de Dieu r. Le jour de la conquête de La Mecque, il monta sur le toit de
la Ka’ba pour l’appel de la victoire. Il préparait l’eau pour les ablutions de l’Envoyé de Dieu r, l’aidait
dans ses tâches, veillait sur lui la nuit en temps de guerre et l’assistait dans ses affaires administratives.
Après le décès du Messager de Dieu r, il ne put plus appeler à la prière à cause de son immense
chagrin. Quand Omar t devint calife, il prit part à certaines batailles en Syrie. Là-bas, les gens
insistèrent auprès d’Omar t pour que Bilal recommence à appeler à la prière. Ainsi donc, suite à la
demande d’Omar t il ne fit qu’une seule fois l’appel à la prière. (Dhahabi, Siyar, I, 357). À cet instant,
les personnes se rappelant l’époque du Messager de Dieu r fondirent en larmes. Bilal al-Habashi t
rapporta 44 hadiths de l’Envoyé de Dieu r.
Cet amoureux de l’Envoyé de Dieu r s’éteignit à Damas, âgé d’une soixantaine d’années. Au moment
de rendre l’âme, il dit joyeusement : « Mes chers amis, j’espère rejoindre demain mes chers amis :
l’Envoyé de Dieu r et ses Compagnons ! ». Alors que sa femme pleurait sa mort imminente, Bilal t
exprimait sa joie de pouvoir enfin retrouver le Saint Prophète r, disant : « Ah que c’est beau, combien
cela est merveilleux ! » (Dhahabi, Siyar, I, 359).
71. Originaire du Yémen, Yassir ibn Amir t s’était installé à La Mecque et avait épousé la servante d’Abû
Houdayfa. Ensemble, ils eurent deux fils : Ammar et Abdullah. (Ibn Saad, IV, 136, VIII, 264) La famille
de Yassir accepta collectivement l’islam et fut pour cela soumis à toutes sortes de tortures.
La Quatrième Année de la Prophétie 219

Un jour, le Messager de Dieu r rencontra cette famille bénie au moment même


où ils subissaient une nouvelle fois des tortures. Il r leur dit :
« Patience, ô famille de Yassir ! Réjouis-toi, ô famille de Yassir ! Le paradis vous
attend ! » (Hakim, III, 432, 438).
Ammar t72 fut lui aussi, l’objet de vices et de tortures innombrables. Un jour
les idolâtres l’attrapèrent lui mirent la tête sous l’eau et le maintinrent sous l’eau en
lui disant :
« Nous ne te lâcherons pas tant que tu n’auras pas injurié Muhammad et glo-
rifié Lat et Uzza ! »
On rapporta la nouvelle au Messager de Dieu r :
« Ô Messager de Dieu ! Ammar a renié l’islam ! »
Le Saint Prophète r répondit :
« Non ! Ammar est rempli de foi de la tête aux pieds ! L’islam s’est mélangé à sa
chair et à son sang ! »
C’est alors qu’Ammar t vint au Saint Prophète r en pleurant.Tout en essuyant
ses larmes, le Seigneur des mondes r lui demanda ce qui s’était passé. Ammar lui
répondit :
« Ô Messager de Dieu ! Ils ne m’ont pas lâché tant que je ne t’injurie pas et que
je n’affirme pas que la religion des idoles étaitt meilleure que la tienne ! »
Le Messager de Dieu r demanda alors :
« Dans quel état était ton cœur lorsque tu leur as répondu ? »
Ammar répondit avec conviction :
« Mon cœur était forgé de sérénité et de quiétude grâce à ma foi ferme en Dieu,
et l’attachement à ma religion était plus solide que le fer ! »
Puis toujours en essuyant les larmes d’Ammar, il lui conseilla :
« Ô Ammar ! Si l’on t’oblige une nouvelle fois à répéter ces paroles, répète-les ! »
Après cet incident, le verset suivant fut révélé :

īŽ ġƈ ĤƆ IJ ƈ ź ƈ ƈ ƈ ƈ Ʃ ÖóęƆ Ġ
ƈ ƈ ƈ Òƈ ïƈ đÖīĨ
Ɔ ĪÓĩĺ
Ɔ ÓŽ Öƈ īƭ ÑĩƆ ĉŽ Ĩ
Ƈ įƇ ×Ƈ ĥŽ ĜƆ IJ
Ɔ ĮƆ ƈóĠŽ ƇÒīŽ Ĩ
Ɔ ƪ źÒįĬÓĩĺ
Ɔ Ž Ɔ Ž ųÓƈ īĨ
Ɔ Ɔ Ž Ɔ
ħĻčƈ Đ ÔÒñĐħıĤIJųÒ ƈ īĨ ƈ ÕąĔħ ƈıĻĥđĘÒòïĀ ƈóęġĤÓƈÖæóüīĨ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ Ž ŽƆ Ɔ Ɔ ƃ Ž Ɔ ŽƇ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
72. Les vertus d’Ammar t ont été mises en évidence par le Messager de Dieu r dans les hadiths : « Le
paradis désire rencontrer trois personnes : Ali, Ammar et Salman. » - « Ammar fait toujours le meilleur
choix dans ce qui lui est soumis. » (At Tirmidhi, Manâqib, 32, 34; Ibn Mâja, Muqaddima, 11).
220 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Quiconque a renié Allah après avoir cru... - sauf celui qui y a été contraint
alors que son cœur demeure plein de la sérénité de la foi - mais ceux qui ouvrent
délibérément leur cœur à la mécréance, ceux-là ont sur eux une colère d’Allah et
ils ont un châtiment terrible. » (an-Nahl, 16: 106); (Ibn Saad, III, 249; Ibn Athir, al-Kamil, II,
67; Haythami, IX, 295; Wahidi, p. 288-289).

Cet incident donne une preuve légale que formuler une expression contraire
à la foi islamique n’est permise qu’en cas de danger de mort, autrement cela est
interdit.
Les ennemis de l’islam avaient l’habitude de frapper Suhayb t73 jusqu’à ce qu’il
perde connaissance.
Zinnîra c était une esclave qui subit toutes sortes de tourments de la part des
idolâtres. Elle avait même perdu la vue en raison des tortures infligées par Abû Jahl.
Les idolâtres lui dirent en se moquant d’elle :
« Lat et Uzza t’ont rendu aveugle ! »
Zinnîra lui répondit :
« Non ! Par Dieu, ce n’est pas eux qui m’ont aveuglé. Lat et Uzza ne peuvent
me causer ni tort ni dommage. Certes, mon Seigneur a la capacité de me rendre la
vue ! »
Au matin, tous s’aperçurent qu’effectivement Dieu lui avait rendu la vue. (Ibn
Hishâm, I, 340-341; Ibn Athir, al-Kamil, II, 69; Usdu’l-Ghabah, VII, 123).

Beaucoup d’autres croyants furent victimes de telles difficultés et souffrances.


Parmi les Compagnons y exceptionnels du Saint Prophète r, Amir ibn
Fuhayra, Abu Fuqayha, Miqdad ibn Amr, Ummu Ubays, Lubayna, Nahdiya et sa
fille, subirent des tortures inimaginables. Les idolâtres les déshabillaient et enchaî-
naient leurs pieds, et pendant les heures les plus ardentes de la journée, les emme-
73. Suhayb ibn Sinan t , plus connu sous le nom de Suhayb ar-Rumî, fut fait prisonnier, alors qu’il
était encore enfant, par les Romains, puis par les Arabes. Lorsqu’il fut l’allié d’Ibn Jadan, il fit la
connaissance d’Ammar t et accepta lui aussi l’islam. Il ne put quitter La Mecque pour Médine qu’en
ayant livré toute sa fortune aux idolâtres. Le verset coranique suivant fut révélé à son sujet :
îÓƈ ×đƈ ĤŽ ÓƈÖĖƄ ÊƇ òƆ ƇųÒ ƈ Ʃ ÚÓ
Ʃ IJƆ ųÒ ƈ ĭĤÒīĨƈ IJ
ƈ ĄƆ óĨÅƂÓĕƆ Ýƈ ÖÒįùęŽ ĬƆ ĸ ƀóýŽ ĺīĨöÓ
Ɔ ŽƆ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ɔ Ɔ
« Et il y a parmi les gens celui qui se sacrifie pour la recherche de l’agrément d’Allah. Et Allah est
Compatissant envers Ses serviteurs. » (al-Baqara, 2 : 207)
Lorsqu’il arriva à Médine, le Messager de Dieu r lui dit :
« Ô Abû Yahya ! Quelle transaction rentable et bénéfique ! » (Hâkim, III, 450-452)
Habile archer, Suhayb t participa à toutes les batailles aux côtés du Saint Prophète r. De taille
moyenne, il avait la peau claire. Homme très généreux, il sacrifia sa vie entière au service de l’islam. Il
décéda la 38ème année de l’Hégire, à l’âge de 73 ans. Il fut enterré à Médine, au cimetière al-Baqî.
La Quatrième Année de la Prophétie 221

naient dans le désert, posaient sur eux des rochers et leur infligeaient toutes sortes
de tortures jusqu’à ce qu’ils perdent connaissance et agonisent. Ils les étranglaient et
ne les lâchaient que lorsqu’ils pensaient qu’ils étaient morts. (Voir Ibn Maja, Muqaddima,
11; Ahmed, I, 404).

Tous les croyants, et particulièrement le Prophète de Dieu r, étaient très attris-


tés par cette situation, mais malheureusement ils ne pouvaient rien faire.74
Mais Abû Bakr t, ce pilier de la foi qui était un des rares Compagnons y for-
tunés, dépensa de sa fortune pour racheter et affranchir sept esclaves, dont Bilal t,
et les sauver ainsi des griffes des idolâtres.
Mais les tortures infligées par les idolâtres mécréants augmentaient de jour
en jour. Après les croyants faibles et pauvres, les plus puissants et plus riches qui
s’étaient rangés aux côtés du Messager de Dieu r comme Abû Bakr, Othman,
Zubayr ibn Awwâm, Musa’b ibn Umayr y n’échappèrent pas aux tourments
Qurayshites. En provoquant les rustres de La Mecque, les idolâtres les remontaient
contre le Saint Prophète r. Ils le méprisaient en le traitant de poète, de magicien, de
sorcier et de fou, ce à quoi eux-mêmes ne croyaient guère. (Voir Ibn Hishâm, I, 309-310).
Selon Abdallah ibn Amr t, le Saint Prophète r effectuait la prière au site de
Hijr, près de la Ka’ba, lorsqu’Uqba ibn Abi Muayt se plaça derrière lui et tenta de
l’étrangler avec son propre vêtement. Abû Bakr t accourut, le dégagea et s’écria :
« Veux-tu assassiner un homme venu avec des preuves évidentes de ton
Seigneur rien que parce qu’il dit “ Mon Seigneur est Allah ? ” » (Al Boukhari, Tafsir, 40).
Ibn Mas’ud t rapporte un autre fait similaire :
« Alors qu’un jour le Messager de Dieu r accomplissait la prière à la Ka’ba, Abû
Jahl, qui avait égorgé un chameau la veille, demanda à ses amis :
- Lequel d’entre vous oserait prendre les entrailles de ce chameau et les poser
sur les épaules de Muhammad quand il se prosternera ?
Le plus malheureux d’entre eux prit les entrailles les posa sur les épaules du
Messager de Dieu r quand il se prosterna. Tous commencèrent à se moquer en
riant et à se ruer de joie les uns sur les autres. De loin, je ne pouvais que les observer.
74. Le poète Mehmet Âkif exprime la peine du Saint Prophète r face aux tortures infligées aux croyants :
N’éprouvez-vous aucune honte vis-à-vis du Prophète ?
Car aussi lointain soit-il, tout croyant marchant sur une épine
Fait que son cœur ressent la souffrance de cette douleur,
Le Jour du Jugement, le Prophète certes vous accusera.
Ainsi donc on doit toujours éviter de faire de la peine à un croyant, car cela attriste le Messager
de Dieu r. C'est pour celai qu'il faut s’abstenir de porter atteinte aux droits d’autrui, de médire et
s’éloigner de tout comportement offensant.
222 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Si j’avais eu quelqu’un pour me protéger, j’aurais retiré les entrailles de dessus ses
épaules et les aurais jetées au loin. Le Messager de Dieu r ne leva pas la tête.
Quelqu’un prévint alors Fatima c qui n’était alors qu’une enfant. Elle prit les
entrailles et les ôta des épaules de son père. Puis elle se tourna vers eux et fit des
imprécations à leur encontre. Ce qui eut comme conséquence que les idolâtres
furent incapables de répondre à Fatima c.
Quand l’Être de lumière r termina sa prière, il éleva la voix, disant :
« Ô Dieu ! Je m’en remets à Toi au sujet de ces Qurayshites ! »
Et il répéta cette invocation à trois reprises. Quand les idolâtres entendirent
cette invocation du Saint Prophète r, leurs moqueries se transformèrent en inquié-
tude, puis en peur. Par expérience, ils savaient que ses invocations étaient toujours
exaucées. Puis le Messager de Dieu r mentionna un à un les ennemis de l’islam :
« Ô Dieu ! Je m’en remets à toi à propos d’Abû Jahl, Utba, Shayba, Walid,
Umayya ibn Khalef et Uqba ibn Abi Muayt ! »
Par celui qui a envoyé Son Messager avec la Vérité, chacun des hommes cités
par l’Envoyé de Dieu r fut tué ultérieurement et étendu sur-le-champ de bataille de
Badr. Tous furent ensuite traînés et jetés dans la fosse de Badr. (Al Boukhari, Salât 109,
Jihad 98, Jizya 21; Muslim, Jihad 107).

En dépit de toutes ces cruautés que le Messager de Dieu r subit, il n’abandonna


jamais ses convictions face aux idolâtres. Une fois, il demanda à ses Compagnons y :
« Qui d’entre vous ira à la Ka’ba réciter le Coran aux idolâtres ? »
Acceptant sans réserve, Abdullah ibn Mas’ud t alla leur réciter les versets de
Dieu, mais ils le frappèrent sauvagement.
Ses amis lui dirent alors : « C’est ce que nous avions craint pour toi ! »
Abdullah ibn Mas’ud t répondit : « À mes yeux, actuellement, nul n’est plus
faible qu’eux ! Si vous le voulez, j’irai encore demain leur réciter le Coran ! »
Ses amis répliquèrent : « Non ! Tu leur as déjà fait écouter quelque chose qu’ils
n’apprécient guère. Ce qu’ils t’ont infligé est suffisant ! » (Ibn Hishâm, I, 336-337).

Quand Abû Jahl entendait qu’une personne de renommée, riche et puissante


avait accepté l’islam, il allait l’injurier et l’intimider :
« Alors tu as quitté la religion de ton père alors qu’il a été plus sage que toi ?
Mais regarde-toi… Tout ce que tu as fait, c’est d’avoir déshonoré son nom ! Je jure
La Quatrième Année de la Prophétie 223

que nous n’allons accepterons jamais ta pensée et ferons tout pour l’anéantir et nuire
ainsi à ta respectabilité. »
Si la personne en question était commerçante, il la menaçait ainsi :
« Nous allons ruiner ton commerce et te contraindre à la faillite. »
Si le néophyte musulman était pauvre et faible, il le battait et essayait de le trom-
per avec de faux espoirs dans le but de le détourner de l’islam.
Un jour, on questionna Ibn Abbâs t à propos des tortures :
« Est-ce que le Messager de Dieu r et Ses Compagnons y ont été soumis à de
tels traitements au point de renier leur religion ? »
« Oui ! répondit-il, par Dieu, les idolâtres se saisissaient de l’un d’eux, le bat-
taient, le laissaient sans vivres ni eau au point qu’il ne pouvait même plus s’asseoir.
De la sorte ils pouvaient lui faire dire ce qu’ils voulaient, comme par exemple :
« A part Allah, Lat et Uzza sont-ils des dieux ? »
Et lui répondait : «Oui ! »
Ensuite, en lui montrant un insecte qui rampait à proximité, ils lui demandaient
aussi si celui-ci était un dieu. Et juste pour échapper aux tortures insupportables qui
s’annonçaient, il s’obligeait à confirmer ces propos. Quand il reprenait conscience, il
regagnait sa foi. (Ibn Hishâm, I, 339-343; Ibn Saad, III, 233; Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 108).
En considérant tous ces supplices cités ici, nous devons bien comprendre la
valeur et la richesse de notre religion ainsi que tous les efforts déployés par nos
pieux prédécesseurs qui n’ont jamais abandonné les fondements de l’islam. Ainsi, la
religion véridique nous est parvenue dans toute son authenticité et sa clarté la plus
lumineuse.

Si Dieu le Tout-Puissant l’avait voulu, le développement et la propagation de


l’islam auraient pu être beaucoup plus faciles, sans qu’il y ait eu la moindre peine
ou souffrance d’un musulman ; la sincérité des croyants n’aurait jamais été vérifiée,
leur conviction et leurs sacrifices jamais révélés. Alors il aurait été impossible de
distinguer le croyant de l’hypocrite, le véridique du menteur.
Dieu le Tout-Puissant déclare dans le Coran :

ïŽ ĝƆ ĤƆ IJ ƈ
Ɔ Īij
Ɔ ƇĭÝƆ ęŽ ƇĺƆźħŽ İƇ IJÓ
Ɔ ĭƪ ĨƆ ÒƆ ÒijƇĤijĝƇ ĺƆ ĪŽ ÒƆ ÒijĠƇ óƆ ÝŽ ƇĺĪŽ ÒƆ öÓ
Ƈ ĭĤÒ
ƪ ÕƆ ùèƆ ÒƆ ħĤÒ
īĻƈ ƈ ƈ Ʃ īĩĥƆ đĻĥƆ ĘƆ ħ ƈıĥƈ ×ĜƆ īĨ ƈ ñƈ Ĥƪ ÒÓĭÝĘƆ
Ɔ ÖðÓġƆ ĤŽ Òīƪ ĩƆ ĥƆ đŽ ĻƆ ĤƆ IJÒij
Ɔ ĜƇ ïƆ Ā Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒƇųÒ ƪ Ɔ Ž Ɔ Ž Ž Ž īĺ Ɔ ƪƆ
224 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Alif, Lam, Mim. Est-ce que les gens pensent qu’on les laissera dire : ‹Nous
croyons !› sans les éprouver ? Certes, Nous avons éprouvé ceux qui ont vécu
avant eux ; [Ainsi] Allah connaît ceux qui disent la vérité et ceux qui mentent. »
(al-Ankabut, 29 : 1-3).

īĺ
Ɔ ƈóƈÖÓāĤÒ
ƪ ħƆ ĥƆ đŽ ĺƆ IJ Ƈ Ĩƈ ÒŽ IJïƇ İÓ
Ɔ ħŽ ġĭ Ɔ ä
Ɔ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒƇųÒ ŽƆ ƪ Ɔ ƪƆ Ɔ ƆÈħŽ ÝƇ ׎ ùƈ è
ƈ Ʃ ħƈ ĥƆ đĺÓĩĤƆ IJÙƆ ĭåĤŽ ÒÒŽ ijĥƇ ìƇ ïŽ ÜĪ
Ɔ ĦŽ ƆÈ
« Comptez-vous entrer au Paradis sans qu’Allah ne distingue parmi vous
ceux qui luttent et qui sont endurants ? » (al-Imran, 3 : 142).

ÒijŽ ĥƆ ì
Ɔ īĺ ƈ ƈ Ž ĩĤƆ IJÙƆ ĭåĤŽ ÒÒijĥƇ ìƇ ïŽ ÜƆ ĪŽ ƆÒħÝ×ùƈ èĦƆÒ
Ɔ ñĤƪ ÒģƇ áƆ Ĩ
Ɔ ħŽ ġƇ ÜÉĺÓ
Ɔ ƪ Ɔ ƪƆ ŽƇŽ Ɔ Ž
Ƈ øƇ óĤÒ Ģij
Ģij Ɔ ĝƇ ĺĵ Ž ƈ ƈ
ƪ Ɔ Ýƪ èÒij Ɔ ÅÒƇ óƪ ąĤÒ
Ɔ ƇĤ ƈõĤŽ ôƇ IJ ƪ IJ
Ɔ ÅÓƇ øƆ É×Ɔ ĤŽ ÒħƇ ıƇ ÝŽ ùƪ Ĩ
Ɔ ħŽ ġƇ ĥ׎ ĜƆ īŽ Ĩ
Õĺ ƈ Ʃ óāĬƆ Īƪ Òƈ ƆźƆÒųÒ
ƈ Ʃ óāĬƆ ĵÝĨįđĨÒijĭĨƆÒīĺñƈ Ĥƪ ÒIJ
Ƅ ƈóĜƆ ųÒ Ɔ Ž Ƈ Ž ƆƆ ƇƆ Ɔ ƇƆ Ɔ Ɔ
« Pensez-vous entrer au Paradis alors que vous n’avez pas encore subi des
épreuves semblables à celles que subirent ceux qui vécurent avant vous ? Misère
et maladie les avaient touchés ; et ils furent secoués jusqu’à ce que le Messager,
et avec lui, ceux qui avaient cru, se fussent écriés : ‹Quand viendra le secours
d’Allah?› - Quoi ! Le secours d’Allah est sûrement proche. » (al-Baqara, 2 : 214).
La voie de la vérité est semée d’embuches selon la volonté du Tout-Puissant.
Tous les prophètes L et leurs sujets vertueux subirent la souffrance, certains
d’entre eux y sont même morts martyrs. C’est pour cela qu’au lieu de tomber dans le
désespoir faces aux embuches le croyant doit savoir que sa récompense et l’agrément
qu’il aura le Jour du Jugement seront relatives aux difficultés et peines qu’il aura
éprouvées pour accomplir les commandements de Dieu.

La Patience et l’endurance recommandées aux croyants


Le Messager de Dieu r n’était qu’un humain et la mauvaise attitude des gens
qu’il voulait guider vers la vérité l’attristait. Il subissait parfois des peines telles qu’il
avait besoin du réconfort de son Seigneur qui ne voulait pas que Son Messager soit
chagriné :

ƃÒóĻ ƀ×Ġ
Ɔ ğƆ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ĪÓ Ɔ įƇ ĥƆ ąŽ ĘƆ Īƪ Òƈ ğƈƆ Öž ò
Ɔ Ġ ƈ
Ɔ īŽ ĨÙƃ ĩƆ èŽ ò
ƈ
Ɔ źƪ Ò
« Si ce n’est par une miséricorde de ton Seigneur, car en vérité Sa grâce sur
toi est grande. » (al-Isra, 17 : 87).
La Quatrième Année de la Prophétie 225

ħĻĥƈ Đ ųÒĪÒÒijƈ ĥĩƈ ĐÓĩƈÖħıÑƈ×ĭĭĘħıđäƈ óĨÓĭĻĤÒƈ ĮóęĠğĬõéĺŻĘóęĠīĨIJ


Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ƈ žƆƇ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ž Ɔ Ɔ ŽƆ Ƈ Ƈ Ž Ƈ Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
ƅ ĥƈ ĔƆ ÔÒ ƈ ƈ ƈ ƈ
ċĻ Ɔ ĤƆ ÒħŽ İƇ óƫ ĉƆ ąŽ ĬƆ ħƪ ƇàƃŻĻĥĜƆ ħŽ ıƇ đƇ Ýž ĩƆ ƇĬ ƈòIJïƇ āĤÒ
ƅ ñƆ Đĵ ƫ ÚÒñƈƆ Ö
« Celui qui a mécru, que sa mécréance ne t’afflige pas : vers Nous sera leur
retour et Nous les informerons de ce qu’ils faisaient. Allah connaît bien le conte-
nu des poitrines. Nous leur donnons de la jouissance pour peu de temps ; ensuite
Nous les forcerons vers un dur châtiment. » (Luqman, 31 : 23-24).

ƈ ƈ ġƇ ÜƆ źƆ IJħ ƈıĻĥƆ ĐĪŽ õéÜƆ źƆ IJ


ĪIJ
Ɔ óƇ ġƇ ĩŽ ĺÓ ž ěƅ ĻŽ ĄĹ
Ɔ ĩƪ Ĩ Ɔ Ęī Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ
« Et ne t’afflige pas sur eux et ne sois pas angoissé à cause de leur complot. »
(an-Naml, 27 : 70).

Dieu le Tout-Puissant le rassura et lui conseilla d’être patient :

ÔIJ
ƈ óĕƇ ĤŽ ÒģƆ ׎ ĜƆ IJ ƈ ƪ Ďƈ ijĥƇ ƇĈģƆ ×ĜƆ ğƈƆ Öòïƈ ĩéƈÖçƈ×øIJĪij
Ƈ Ɔ ÷ĩŽ ýĤÒ ĤijĝĺÓĨĵĥĐóƈ×ĀÓĘ
Ž žƆ Ž Ɔ Ž ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ ƇƆ Ɔ ƆƆ Ž Ž Ɔ
« Endure donc ce qu’ils disent : et célèbre la louange de ton Seigneur avant
le lever du soleil et avant [son] coucher ! » (Qaf, 50 : 39).
Ainsi donc, ces versets sacrés renforcèrent la détermination du Messager de
Dieu r et de ses Compagnons ; leurs cœurs brisés purent se réjouir de nouveau.
Khabbab t explique :
« Un jour, alors que le Messager de Dieu r se trouvait à l’ombre de la Ka’ba,
nous nous rendîmes auprès de lui pour nous plaindre des tourments causés par les
idolâtres. Ce à quoi il répondit :
« Parmi vos prédécesseurs, commença t-il à expliquer, il y eut des croyants qui
furent capturés et placés dans des fosses et qui ensuite furent sciés en deux de la
tête aux pieds, d’autres eurent la chair écorchée par des râteaux en acier ; malgré
tout cela, ils ne renièrent pas leur foi. Par Dieu, le Tout-Puissant va parfaire cette
religion et lui accorder la suprématie. Tant et si bien qu’une personne voyageant
de Sana jusqu’à Hadramout sera en sécurité en dehors du fait de craindre les loups
pour ses moutons. Mais malheureusement, vous êtes impatients ! » (Al Boukhari, Mana-
qib’ul-Ansar, 29).

Ensuite, le Messager de Dieu r récita ces glorieux versets :


226 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ħĭƪ ıƆ ä ħıĺIJÉŽ ĨħàģĻĥƈ ĜĎÓÝĨîƈ Ż×ƈ ĤÒĵĘÒIJ ƈ óęƆ Ġ īĺñƈ ĤÒÕĥƫ ĝÜğĬóĕĺź
Ƈ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ ƪƇ Ƅ Ɔ Ƅ ƆƆ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ ƆƆ Ɔ ƪƪƇ Ɔ Ɔ
ƈ ƈóåÜƆ ÚÓ
Ó ıƆ Ýƈ éŽ ÜƆ īŽ ĨĴ ƈ ƈ ƈ
Ž Ƅ ĭƪ ä
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ħŽ ıƇ Öƪ òÒ
Ɔ ijŽ ĝƆ ÜÒ
ƪ īĺƆ ñĤƪ Òīƈ ġĤƆ îÓ
Ƈ ıƆ ĩĤŽ Ò÷Ɔ ÑƈŽ ÖIJƆ
ƈòÒóÖŽ ƆŻĤƈ óĻì ƈ ïĭĐÓ
ųÒ ƈ ĨIJųÒ ƈ ïƈ ĭĐ ƈ īĨ ƈ źõĬÓıĻĘ ƈ īĺïƈ ĤÓƈ ì
Ɔ òÓ
Ɔ Ƅ ŽƆ Ʃ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ʃ Ž Ž ƃ ƇƇ Ɔ Ɔ Ƈ ıƆ ĬŽ ƆźÒŽ
« Que ne t’abuse point la versatilité [pour la prospérité] dans le pays, de
ceux qui sont infidèles. Piètre jouissance ! Puis leur refuge sera l’Enfer. Et quelle
détestable couche ! Mais quant à ceux qui craignent leur Seigneur, ils auront des
Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, pour y demeurer éternellement, un
lieu d’accueil de la part d’Allah. Et ce qu’il y a auprès d’Allah est meilleur, pour
les pieux. » (al-Imran, 3 : 196-198).
Ces versets consolidèrent le cœur des croyants qui étaient persécutés de plus en
plus par les idolâtres.
En ce sens, les peines et les souffrances étaient des épreuves qui rapprochaient
les serviteurs de Dieu, aussi mesuraient-elles leur foi et leur soumission à Dieu.
La plus convenable attitude que doivent adopter les musulmans dans de tels
moments est mentionnée comme suit dans le Coran :

ħøÒ ƈóĠðÒIJÒòijęĠIJƆÈÓĩàÆ ƈ ħıĭĨ ƈ ďĉƈ ÜźIJğƈÖòħƈ ġéĤƈ óƈ×ĀÓĘ


Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ ƃ ƇƆ Ž ƃ ŽƇŽ Ž Ƈ ƆƆ Ɔ žƆ Ž Ƈ Ž Ž Ɔ
Żĺƃ ƈijĈ
Ɔ Żƃ ĻŽ ĤƆ įƇ éƈŽ מ øƆ IJ ƈ ŻĻƃ Āƈ ƆÈIJØƃ óġŽ ÖğƈƆ Öò
Ɔ įƇ ĤƆ ïŽ åƇ øÓ
Ž ĘƆ ģƈ ĻŽ ĥƪ ĤÒīƆ ĨIJ
Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ žƆ
« Endure donc ce que ton Seigneur a décrété, et n’obéis ni au pécheur, parmi
eux, ni au grand mécréant. Et invoque le nom de ton Seigneur, matin et après-
midi ; et prosterne-toi devant Lui une partie de la nuit ; et glorifie-Le de longues
[heures] pendant la nuit. » (al-Insan, 76 : 24-26).
Il est certain que pour le croyant qui se voit renforcé en se soumettant à ces
ordres, il pourra être en mesure d’acquérir la force nécessaire pour endurer toutes
sortes de peines et d’afflictions. En particulier, les prières nocturnes permettent au
croyant de se rapprocher de son Créateur et, comme résultat, une telle force lui sera
accordée. Le Tout-Puissant dit en effet :

ƈ ĦijĜŽ ƆÈIJÒÅĆŽ IJïƫ üƆ ƆÈĹİ


ŻĻƃ Ĝ ƈ ģĻĥĤÒÙÑüÓ
ƈ ĬĪƈÌ
Ƈ Ɔ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ ƈ Žƪ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ
« La prière pendant la nuit est plus efficace et plus propice pour la récita-
tion. » (al-Muzzamil, 73 : 6).
La Quatrième Année de la Prophétie 227

Bien que la prière nocturne (tahajjud) eût été exclusive au Saint Prophète r,
elle demeure néanmoins méritoire dans la mesure où sa communauté la pratique
selon sa disposition. Il en va de même pour le reste des autres formes surérogatoires
d’adoration qui ont été conseillées à l’intention des pieux, dans la mesure où elles
augmentent la force spirituelle.

Dieu le Très-Haut, qui a béni les croyants en leur octroyant la voie du bonheur,
déclare en outre :

ÓĜƃ ijİƇ ô
Ɔ ĪÓ
Ɔ Ġ ƈ ×ĤŽ ÒĪƪ Ìƈ ģƇ ĈÓ
Ɔ ģƆ ĈÓ ƈ ×ĤŽ ÒěƆ İƆ ôƆ IJěƫ éĤŽ ÒÅÓäģŽ ĜƇ IJ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« Et dis : ‹La Vérité (l’Islam) est venue et l’Erreur a disparu. Car l’Erreur est
destinée à disparaître›. » (al-Isra, 17 : 81).
Toutefois, ceux qui ont mission d’assurer la justice sont tenus de faire le néces-
saire. L’homme étant éprouvé dans ce bas monde, il est sans cesse confronté à de
multiples épreuves et ne pourra jamais atteindre la fin désirée sans lutter.
Dieu le Très-Haut indique dans le verset suivant que cette réalité reste égale-
ment valable pour les prophètes :

ƈ Ƈ ïŽ ĜƆ ħıĬƪ ƆÒÒijĭƫ Č ƈ
ÅÓ Ɔ ĵƆ åž ƈ ƇĭĘƆ ÓĬƆ óƇ āŽ ĬƆ ħŽ İ
Ƈ ýƆ ĬƆ īŽ Ĩ Ƈ ÅÓƆ äÒij
Ɔ ÖƇ ñĠ ŽƇ Ɔ IJ Ɔ ģƇ øƇ óĤÒ
ƫ ÷Ɔ ÑƆ ĻŽ ÝƆ øÒÒ
Ž ðƆ ÒĵÝƪ èƆ
ƈ ƈ
īĻ Ɔ ĭƆ øƇ ÉŽ ÖƆ îƫ óƆ ƇĺƆźIJƆ
Ɔ Ĩ ƈóåŽ ĩƇ ĤŽ ÒĦijŽ ĝƆ ĤŽ Òīƈ ĐÓ
« Quand les messagers faillirent perdre espoir (et que leurs adeptes) eurent
pensé qu’ils étaient dupés voilà que vint à eux Notre secours. Et furent sauvés
ceux que Nous voulûmes. Mais Notre rigueur ne saurait être détournée des gens
criminels. » (Yusûf, 12 : 110).
Tandis que le cœur des croyants se soulageait et que les efforts déployés aug-
mentaient, la haine et l’animosité s’amplifiaient. Loin de s’arrêter d’infliger des
peines au Noble Messager de Dieu r, ils inventaient chaque jour de nouvelles
méthodes de tortures. De jour en jour, les difficultés et les peines infligées aux
croyants devenaient incessantes et insupportables.
On en vint à un tel niveau d’hostilité que les idolâtres songèrent même à anéan-
tir la source de la Révélation. Le Saint Prophète r, quant à lui, se réfugiait en Dieu
le Tout-Puissant.
228 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ne désirant pas que Son Messager soit affligé par la douleur et la souffrance, le
Seigneur le mit en garde :

ĦÓƅ ĝƆ Ýƈ ĬŽ ÒIJðƇ õĺƄ ƈõĐ


Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌįƇ ĥƆ øƇ ò
ƈ ƈ ėƆ ĥƈ íŽ ĨųÒ
Ƈ ĮïĐŽ IJ
Ɔ Ƈ Ɔ Ʃ īƪ ×Ɔ ùƆ éŽ ÜƆ ƆŻĘƆ
« Ne pense point qu’Allah manque à Sa Promesse envers Ses messagers.
Certes Allah est Tout Puissant et Détenteur du pouvoir de punir. » (Ibrahim, 14 : 47).

ÓĨ Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ģŽ åƈ đŽ ÝƆ ùŽ ÜƆ ƆźIJ ƈ ƈ


Ɔ ĪƆ IJŽ óƆ ĺƆ ĦƆ ijŽ ĺƆ ħŽ ıƇ Ĭƪ ÓƆ Ġ Ɔ ģƈ øƇ óĤÒ
ƫ īƆ ĨĦõŽ đƆ ĤŽ ÒÒijƇĤIJƇÒóƆ ×Ɔ ĀÓ
Ɔ ĩƆ Ġ
Ɔ óƈŽ ×ĀÓ
Ž ĘƆ
ƈ Ùƃ ĐÓøƪźÒÒij
ƅòÓıƆ ĬƆ īŽ Ĩ ƈ Ƈá×ĥŽ ĺħĤƆ ĪIJ ïĐijĺ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ƈ
« Endure (Muhammad) donc, comme ont enduré les messagers doués de fer-
meté ; et ne te montre pas trop pressé de les voir subir [leur châtiment]. Le jour
où ils verront ce qui leur est promis, il leur semblera qu’ils n’étaient restés [sur
terre] qu’une heure d’un jour. Voilà une communication. Qui sera donc anéanti
sinon les gens pervers ? » (al-Ahqaf, 46 : 35).
229

LA CINQUIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE

L’émigration en Abyssinie
En raison de la persécution impitoyable des idolâtres, le Messager de Dieu r
conseilla aux croyants d’émigrer. En effet, ils ne pouvaient ni librement exercer leurs
fonctions religieuses, ni s’acquitter de leur obligation de transmettre le messager
divin.
Lorsque les Compagnons y demandèrent où ils pouvaient éventuellement émi-
grer, le Saint Prophète r leur répondit :
« En Abyssinie ! Car là-bas se trouve un roi qui n’opprime pas son peuple. De
plus, c’est une terre d’hommes intègres. Demeurez-y jusqu’à ce que Dieu le Tout-
Puissant vous ouvre une voie qui mettra fin à vos souffrances ! » (Ibn Hishâm, I, 343; Ibn
Saad, I, 203-204).

Cette première émigration eut lieu au mois de Rajab, la cinquième année de la


période mecquoise.
Le premier groupe d’émigrants était composé de dix-sept personnes : douze
hommes et cinq femmes. Parmi elles, on comptait des notables tels que Othman ibn
Affan et sa femme Ruqayya, Zubayr ibn Awwam, Musa’b ibn Umayr, Abdurrahman
ibn Awf, Abû Salama, Othman ibn Ma’zun et Ibn Mas’ud y.
Lorsque les émigrants quittèrent discrètement La Mecque et atteignirent le port
de Shuayba, par la grâce du Tout-Puissant, deux navires de commerce les atten-
daient. Contre une demi-pièce d’or, ils embarquèrent pour l’Abyssinie. Bien que des
Mecquois les poursuivirent, ils ne purent les rattraper, les deux navires ayant déjà
pris le large. (Ibn Saad, I, 204).
Pendant longtemps, le Messager de Dieu r n’eut aucune nouvelle d’Othman
ibn Affan t et de sa fille Ruqqaya c.
De temps à autre, il r allait à l’encontre de voyageurs venant de cette direction
afin d’obtenir des nouvelles d’eux. Un jour, une femme de Quraysh arriva d’Abyssi-
nie avec quelques nouvelles.
Le Saint Prophète r lui demanda si elle savait quelque chose à propos de son
gendre et de sa fille. Ce à quoi la femme répondit :
« Ô Abu’l-Kasem, je les ai vus. »
230 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Messager de Dieu r lui


demanda :
« Comment vont-ils ? Sont-
ils en bonne santé ? »
La femme lui répondit :
« Othman avait fait mon-
ter Ruqayya sur un âne et lui
marchait derrière. »
Alors le Prophète r dit :
« Que Dieu soit de leur côté
et leur apporte amour et assis-
tance ! Othman est certainement
la première personne qui depuis
le prophète Lot a émigré avec sa
famille pour l’amour de Dieu ! »
(Ali al-Muttaqi, XIII, 63/36259).

Après que la rumeur dise


que les idolâtres avaient em-
brassé l’islam, les premiers émi-
grés partirent d’Abyssinie où
ils étaient réfugiés depuis trois
mois.

Ainsi, pendant le mois de Shawwal, un groupe de trente-neuf émigrés composé


de trente-trois hommes et de six femmes partirent de leur terre de refuge. Cepen-
dant, en s’approchant de La Mecque, ils comprirent que la rumeur répandue était
fausse. Un retour en Abyssinie eut été par conséquent trop difficile à supporter pour
eux. En outre, ils craignaient d’entrer à La Mecque sans aucune protection. Enfin,
certains s’infiltrèrent dans la ville avec leur famille demeurée dans l’idolâtrie tandis
que d’autres y pénétrèrent discrètement. (Ibn Hishâm 3-8 ; Ibn Saad, I, 206 ; Haythami, VI, 33).

L’affaire dite des Gharânîq


Quand la sourate « an-Najm » fut révélée le Messager de Dieu r commença à
la réciter à haute voix près de la Ka’ba. Parvenu à la fin de la sourate, au verset de
la prosternation, il se prosterna devant Dieu le Tout-Puissant. Avec lui, croyants,
non-croyants, hommes et djinns, tout le monde se prosterna. (Al Boukhari, Tafsir, 53/4).
La Cinquième Année de la Prophétie 231

Mais, les idolâtres ne s’étaient pas en fait prosternés devant le Dieu unique,
mais devant leurs idoles Lat, Uzza et Manat qui furent mentionnés péjorativement
dans le chapitre en question.
À la suite de cet évènement, l’affaire dite des Gharânîq (Déesses) fut créée et
montée de toutes pièces. La rumeur disant que les Mecquois avaient adhéré à l’islam
étaient due à cette double prosternation qui avait eu lieu en même temps, mais dont
une seule appartenait aux musulmans. La réalité de l’affaire se limitant seulement
à ce fait susmentionné, l’allégation dite « l’affaire des Garânîq » fut échafaudée par
la suite. On assura en effet que Satan aurait insufflé un passage exprimant l’inter-
cession des idoles alors que le Saint Prophète r récitait le Coran ; réjouis par ces
paroles, les idolâtres se seraient prosternés, mais seulement plus tard, l’erreur aurait
été réalisée.
Cette thèse ne fut affirmée que par quelques associateurs dont l’hostilité envers
l’islam était connue. De grands savants spécialistes du tafsir, des hadiths et de
l’histoire islamique examinèrent les deux chaînes narratives et le contenu de cette
rumeur sur le plan de la chaîne de transmission de hadiths et du dogme et affir-
mèrent unanimement que le récit cité ne possède aucune preuve d’authenticité.
Certes la mission du Messager de Dieu r consistant à transmettre la Révélation
divine à l’humanité a été assurée de toute erreur ou absence. En aucun cas Satan n’a
pu interférer dans la mission prophétique du Saint Prophète r. Considérant que
le Tout-Puissant affirme que Satan ne peut exercer un contrôle sur les croyants, il
est inconcevable de supposer qu’il pût interférer dans la mission d’appel du Saint
Prophète r. (Voir al-Hijr, 42).
En plus d’avoir été protégé contre toutes sortes d’erreurs et de péchés dans sa
mission prophétique, le Coran transmis par le Messager de Dieu r demeura (et
demeure) toujours sous protection divine.

įƈ ęƈ ĥŽ ì ƈ ƆźIJįƈ ĺïƆ ĺīƈ ĻÖīĨ


Ɔ īŽ Ĩ ƈ ƈ ƈ ƈŽ
Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ž ģƇ ĈÓ×Ɔ ĤŽ ÒįĻÜÉĺƆ Ɔź
ïĻƅ ĩƈ è ƅ ƈ īĨ
Ɔ ħĻġè
ƈ Ƅ ƈõĭŽ ÜƆ
Ɔ Ž ģĺ
« Le faux ne l’atteint [d’aucune part], ni par devant ni par derrière: c’est une
révélation émanant d’un Sage, Digne de louange. » (Fussilat, 41 : 42).

Ɔ ƇčĘÓƈ éƆ ĤƆ įƇ ĤƆ ÓĬƈƪ ÌIJ


Īij ž ƈ ĭƆ ĤŽ õƪ ĬƆ īƇ éŽ ĬƆ ÓĬƈƪ Ì
Ɔ óƆ ĠŽ ñĤÒÓ
« En vérité c’est Nous qui avons fait descendre le Coran, et c’est Nous qui en
sommes gardien. » (al-Hijr, 15 : 9).
232 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La chaîne de transmission relative à l’allégation de Gharânîq est par conséquent


irrecevable.
Concernant ce fait, Ibn Khuzayma g a dit :
« L’évènement de Gharânîq n’est rien d’autre qu’un mensonge d’hérétiques. »
(Ismâîl Cerrahoğlu, Diyanet İslam Ansiklopedisi, “Garanîk” md. XIII, 363).

Le fait que cet évènement n’ait pas été relatée par une chaîne ininterrompue et
qu’une personne ait authentifiée cette histoire suffit pour affirmer que cette affaire
fut inventée. (Qâdî Iyâd, II, 132).
Aucune personne raisonnable ne peut revendiquer l’exactitude de Gharânîq.
En effet cette allégation relève il de l’associationnisme, alors que l’islam, dès le début,
a affirmé avec force et conviction l’unicité divine. Encore une fois, dès le début de la
prédication islamique, la croyance en l’unicité divine fut prééminente. En référence
à la sourate an-Najm, Dieu le Très-Haut condamne l’idolâtrie et souligne que les
idoles ne sont que de simples étiquettes et que les idolâtres ne font que suivre les
désirs de leur ego. Il est tout à fait inimaginable que les idolâtres aient pu se proster-
ner à la lecture d’une telle sourate, même si ledit énoncé ait pu s’avérer véridique. De
même, considérant tous les versets qui répugnaient les idolâtres, il est impensable
qu’ils aient pu se prosterner juste pour une paire de phrases prétendument mélan-
gées par Satan. Le début de la sourate fut la meilleure réponse à ces allégations :

ĵèij ƈ ƈ ƈ ĨIJĴijĔƆ ÓĨIJħġƇ ×èÓ


ƈ
Ɔ ƇĺĵƄ èŽ IJ
Ɔ ƪ źÒijƆ İ
Ƈ ĪŽ ÒĴijƆ ıƆ ĤŽ Òīƈ Đ
Ɔ ěƇ ĉĭŽ ĺÓ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ā Ɔ ģƪ ĄÓ
Ɔ ĨƆ
« Votre compagnon ne s’est pas égaré et n’a pas été induit en erreur et il ne
prononce rien sous l’effet de la passion ; ce n’est rien d’autre qu’une révélation
inspirée. » (an-Najm, 53 : 2-4).
Les savants musulmans prouvèrent que cette œuvre n’est qu’un simple men-
songe né de l’hostilité anti-islamique. En outre, durant les treize années à La
Mecque, les croyants luttèrent pour se débarrasser de l’idolâtrie et renforcèrent dans
leurs cœurs l’unicité de Dieu qui ne peut en aucun cas accepter l’associationnisme.

La seconde émigration en Abyssinie


Une fois que les Qurayshites découvrirent que les premiers émigrés avaient été
très bien reçus et traités en Abyssinie, leur inquiétude redoubla ainsi que les tortures
infligées aux croyants.
Othman ibn Ma’zun t vivait jusque là très confortablement sous la protection
de Walid ibn Mughirah.
La Cinquième Année de la Prophétie 233

Mais en voyant le Messager de Dieu r et ses Compagnons subir toutes sortes


d’oppressions et de tortures, certains marqués au fer, d’autres fouettés, il se dit :
« Par Dieu, ce n’est pas juste que je sois sain et sauf, sous la protection d’un ido-
lâtre, loin de la tourmente, alors que les frères subissent autant de souffrances dans
la voie de Dieu. La protection du Tout-Puissant est plus grande et plus honorable ! »
Fort de cette pensée, il partit dire à Walid ibn Mughirah, son protecteur :
« Ô Fils de mon oncle ! Tu m’as pris sous ta protection ! Jusqu’à présent tu m’as
protégé et tu as tenu ton engagement ! Maintenant, je veux renoncer à ta protection
et me rendre auprès du Messager de Dieu r. Pour moi, lui et ses Compagnons y
sont les meilleurs exemples. Maintenant amène-moi auprès de Quraysh et dis-leurs
que tu as levé ta protection sur moi ! (Ibn Ishâq, p. 158; Haythami, VI, 34).
Après l’amplification de l’oppression et de la persécution causées par les ido-
lâtres, les croyants durent émigrer en Abyssinie pour la deuxième fois.
Cette fois-ci, ils étaient quatre-vingt-douze, dont soixante-dix hommes et treize
femmes.
Ils étaient dirigés part Jafar at-Tayyar t 75, le frère ainé d’Ali t.
Layla raconte :
« Omar t était très en colère contre nous, car nous avions accepté l’islam. Alors
que nous nous préparions à faire route vers l’Abyssinie, il vint me demander :
- Où allez-vous, ô Umm Abdallah ?
- Vous nous opprimez à cause de notre croyance, lui répondis-je, et c’est pour
cela que nous partons vers un lieu où nous serons moins tyrannisés.
- Que Dieu soit avec vous ! me dit-il.
75. Jafar ibn Abi Talib t, le cousin du Noble Messager r avait embrassé l’islam bien avant que le
Messager de Dieu r ne prenne la maison d’al-Arqam comme lieu d’apprentissage de la religion, il
participa avec son épouse Asma bint Umays qui avait aussi participé à la seconde émigration en
Abyssinie. (Ibn Saad, IV, 34). Jafar ibn Abi Talib t et ses amis retournèrent à Médine la 7ème année de
l’Hégire. À ce moment-là, le Messager de Dieu r était en pleine bataille à Khaybar. Après celle-ci, les
émigrés d’Abyssinie reçurent également une part du butin de guerre. (Al Boukhari, Maghazi, 38).
En l’an 8 de l’Hégire, Jafar t participa à la bataille de Muta où il mourut martyr. Ibn Omar t raconte :
« Nous avons trouvé le corps de Jafar entre les martyrs. Nous pouvions apercevoir sur son corps
plus de quatre-vingt-dix blessures infligées par des épées, des lances et des flèches. » (Al Boukhari,
Maghazi, 38). Jafar t avait perdu ses deux bras lors de la bataille. Se référant à cet épisode, le Messager
de Dieu r révéla qu’on les lui remplaça par deux ailes et rajouta ces désormais fameuses paroles :
« J’ai vu Jafar voler avec les anges. » (At Tirmidhi, Manaqib, 29/3763). C’est ainsi que par la suite Jafar
fut appelé « Jafar at-Tayyar », Tayyar signifiant « celui qui s’élève en volant ».
234 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Lorsque vint mon mari, je lui fis part de l’attitude aimable qu’avait eue Omar
ibn al-Khattab t. Il me répondit :
- Je crois que tu as de l’espoir que Khattab reçoive la guidée. Par Dieu ! Il y a
plus d’espoir que son âne devienne musulman qu’il ne le devienne !
Telle était la dureté du cœur d’Omar t jusque-là et personne ne pouvait pré-
voir qu’un jour il croirait. » (Haythami, VI, 23-24).
Umm Salama c, la future épouse du Saint Prophète r raconte :
« Dès que nous mîmes pied en Abyssinie, le Négus nous traita avec honneur et
respect. Ainsi nous pûmes accomplir nos devoirs envers le Tout-Puissant en paix et
en sécurité. » (Ahmad, I, 201-202).
Notre mère, Umm Habiba c, relate l’affection intense qui unissait les nouveaux
croyants au Messager de Dieu r alors qu’ils ne l’avaient pas encore rencontré :
« Le Négus avait une esclave nommée Abrahah. Étant fiancée au Messager de
Dieu r je me préparais à rentrer de l’Abyssinie à Médine. Abrahah s’approcha de
moi et me dit :
- Je voudrais te demander une chose : transmets mes salutations au Messager de
Dieu r et dis-lui que j’ai adhéré à sa religion.
Abrahah c fut tout au long du temps très gentille envers moi. Elle prépara
même tout pour le voyage et me disait à chaque fois qu’elle me voyait :
- N’oublie surtout pas ma demande ! Transmets mes salutations au Messager
de Dieu r !
Parvenue à Médine, je fis part à l’Envoyé de Dieu r de la foi d’Abrahah durant
mes noces et lui transmis ses sincères salutations.
Le Messager de Dieu r sourit et répondit à son salut :
- Wa alayhassalam wa rahmatullahi wa barakatu. » (Ibn Saad, VIII, 98).
235

LA SIXIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE

Les Mecquois demandent au Négus d’extrader les musulmans


Les idolâtres Qurayshites n’avaient pas pris au sérieux la première émigration
des croyants en Abyssinie, mais ils furent alarmés en entendant parler de l’accueil
qui leur avait été donné. En effet, ils pensaient que si l’islam commençait à se pro-
pager hors d’Arabie, les choses pourraient échapper à leur contrôle. C’est pour cela
qu’ils décidèrent d’un commun accord de presser le Négus d’extrader les musul-
mans et Abdullah ibn Rabai fut avec Amr ibn As chargé de se rendre en Abyssinie
pour amadouer le souverain et ses commandants. Abû Talib, dès qu’il entendit la
nouvelle que les Qurayshites avaient envoyée des émissaires en Abyssinie, composa
rapidement un poème à l’attention du Négus, le glorifiant et le sommant de se
méfier des intrigues des Mecquois. (Ibn Hishâm, I, 356)
Avant de s’entretenir avec le Négus, Amr et ses amis convainquirent les com-
mandants en leur offrant des présents. Puis ils exposèrent au Négus leurs présents
et présentèrent leurs doléances :
- Votre Majesté ! Certains de nos jeunes égarés sont venus se réfugier dans ton
pays. Bien qu’ils aient abandonné la religion de leurs ancêtres, ils n’ont pas accepté
la tienne et ont inventé une nouvelle. Aussi leurs proches nous ont envoyés pour les
ramener. Après tout, leur tribu les connaît et est mieux à même de les comprendre.
Les Qurayshites craignant que le Négus écoute Jafar t et ses amis et qu’il se
fasse influencer, voulurent que le roi les leur livre sans écouter leur version des faits.
Les commandants du Négus dirent :
- Votre majesté, ces hommes disent la vérité. Nous ne pouvons guère connaître
leur tribu mieux qu’eux. Nous devrions leur livrer ces émigrés et laissez régler cette
affaire entre eux !
Le Négus se mit en colère :
- Jamais je ne les livrerai avant de les avoir entendus ! Je ne peux faire du mal à
un groupe qui m’a préféré et s’est réfugié dans mon pays. »
Et ainsi il fit appeler les émigrants auprès de lui.
Le Négus, ainsi que ses prêtres, s’assirent, leurs livres ouverts, et attendirent
l’arrivée des réfugiés.
236 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Lorsque ceux-ci arrivèrent, le Négus mit face à face les deux parties. On assistait
à un moment historique.
Le porte-parole des musulmans étant Jafar t, le roi se tourna vers lui et lui dit :
- Les Qurayshites ont envoyé des émissaires et veulent que vous retourniez à
La Mecque.
Jafar répondit :
- Demandez-leur, ô Majesté. Sommes-nous des esclaves pour qu’ils veuillent
nous ramener ?
Le Négus regarda Amr ibn As qui répondit :
- En effet, ils sont tous libres !
La discussion se poursuivit ainsi :
- Demandez-leur ! Avons-nous des dettes à rembourser pour qu’ils nous
veuillent ? »
- Non, aucun d’entre eux n’a de dette envers qui que ce soit !
- Demandez-leur ! Somme-nous des criminels en vue d’être jugés ?
- Non, ce n’est pas le cas !
- Alors pourquoi désirent-ils notre extradition ?
Amr répondit :
- … Car ils ont abandonné la religion de leurs ancêtres ! Ils insultent nos
idoles ! Ils ont corrompu la foi de notre jeunesse ! Ils ont semé la discorde dans notre
population ! Toute la communauté de La Mecque est divisée en deux à présent !
Le Négus l’interrompit pour questionner Jafar t à ce sujet :
- Étant donné que vous n’acceptez ni la religion de vos ancêtres ni la mienne,
dites-moi quels sont les principes de votre religion !
Jafar at-Tayyar t prit la parole et dit :
- Ô Roi, nous étions un peuple vivant dans l’ignorance et l’immoralité, adorant
des idoles et mangeant la chair des cadavres d’animaux, commettant toutes sortes
d’atrocités et de pratiques honteuses, brisant les liens de parenté, manquant aux
règles de l’hospitalité, le plus fort d’entre nous exploitait le plus faible. Nous demeu-
râmes ainsi jusqu’a ce que Dieu le Très-Haut nous envoie un Prophète r de notre
peuple dont la lignée, la sincérité, le respect du dépôt et l’intégrité étaient connues
de nous tous.
La Sixième Année de la Prophétie 237

Il nous appela à adorer Dieu, l’Unique et à abjurer les pierres et les idoles que
nos ancêtres et nous-mêmes adorions, en dehors de Dieu.
Il nous a enjoignit de dire la vérité, d’honorer notre parole, d’être aimables
envers nos proches, d’aider nos voisins, de cesser tout acte illicite, de s’abstenir de
verser le sang, d’éviter l’indécence et le faux témoignage, de ne pas s’approprier les
biens des orphelins ni de calomnier les femmes honnêtes.
Il nous ordonna d’adorer Dieu seul, sans rien lui associer, d’accomplir la Salât
(prière), de s’acquitter de la Zakât (aumône légale) et de jeûner le mois de Ramadan.
Nous avons cru en lui et au message de Dieu qu’il nous a apporté, nous observons
tout ce qu’il nous demande de faire, et rejetons ce qu’il nous a interdit de commettre.
Suite à cela, ô Roi, notre peuple nous a attaqué et infligé le plus sévère des châtiments
pour nous faire renoncer à notre religion et nous ramener aux anciennes pratiques
immorales et à l’adoration des idoles. Ils nous ont opprimés, rendu notre vie impos-
sible, et nous ont empêchés d’appliquer notre religion. C’est alors que nous sommes
venus dans ton pays, et que nous t’avons choisi parmi tant d’autres, avec le désir de
gagner ta protection et dans l’espoir de vivre dans la justice et la paix, parmi vous.
Le Négus écouta attentivement les paroles de Jafar t et lui demanda :
- As-tu en mémoire quelques révélations que Dieu aurait envoyées à votre
Prophète ?
- Oui, répondit Jafar t, et il commença à réciter les premiers versets de la
sourate Maryam (Marie). Parvenu dans sa récitation au passage concernant Yahya
(Jean-Baptiste) et ‘Issa (Jésus), le Négus et les hommes de sa cour commencèrent à
pleurer d’émotion.
Se tournant du côté des émissaires, le Négus leur dit :
- Je jure au nom de Dieu que ces paroles sont issues de la même source que ce
qui a été révélé à Moïse u et à Jésus-Christ u.
Puis il rajouta :
- Pour rien au monde je ne vous livrerai ces réfugiés ! Rejetant ainsi leur
demande.
Lorsque les émissaires s’éloignèrent, Amr dit alors :
- Je vais dire au Négus qu’ils croient que Jésus, le fils de Maryam, n’est seule-
ment qu’un homme. Je serai certain alors qu’ils seront bannis !
Le lendemain, Amr se rendit de nouveau à la cour du Négus et lui déclara :
- Ô Majesté ! Ceux-là ont des pensées très singulières sur Jésus ! Appelle-les si
tu le souhaites et entends de tes propres oreilles !
238 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Négus les fit appeler et leur demanda ce qu’ils pensaient de Jésus fils de
Marie.
Jafar t répondit au roi :
- Nous le connaissons tel que nous l’a appris notre Prophète r.
Le Messager de Dieu r a dit à son sujet :
« Jésus est le serviteur de Dieu, Son Messager, Son esprit, Sa parole, né de Marie
qui a voué toute son existence à Dieu. »
C’est alors que le Négus ramassa une brindille à terre et dit :
- Par Dieu ! Ce que tu viens de dire ne dépasse pas la vérité sur Jésus d’une
longueur plus grande que cette brindille !
Voyant ses commandants grommeler, il leur dit :
- Ne vous en déplaise !
Il dit ensuite aux musulmans :
- Allez ! Vous êtes en sécurité dans mon pays, quiconque vous insulte paiera
une amende. Je n’aimerais pas avoir une montagne d’or si je devais l’obtenir en
portant préjudice à l’un d’entre vous.
Puis se tournant vers ses hommes :
- Restituez à ces deux hommes les présents qu’ils ont amenés ! Je n’en ai nul
besoin ! Si j’étais en ce moment à côté du Messager de Dieu r, je lui laverais les pieds
et le servirais ! (Ibn Hishâm, I, 356-361; Ahmad, I, 202-203, V, 290-291; Haythami, VI, 25-27).
Selon une autre version, le Négus aurait déclaré :
« Je témoigne que Muhammad est le Messager de Dieu r. Il est l’homme indi-
qué par Jésus-Christ u. Si je n’avais pas été sur le trône de ce royaume et respon-
sable de mon peuple, je lui aurais porté ses sandales. » (Abû Dawûd, Janaiz, 55-57/3205).

Les réponses apportées par Jafar r au Négus demeurent un parfait exemple


pour ceux qui sont chargés de transmettre le message de l’islam car en effet, quand
on lui demanda de réciter le Coran, au lieu de lire un passage au hasard, Jafar r psal-
modia avec perspicacité les versets coraniques appropriés à la situation, en l’occur-
rence le passage de la sourate Maryam concernant Jésus u. Par conséquent, grâce
aux réponses intelligentes et logiques apportées aux idolâtres mecquois qui vou-
laient le retour des croyants réfugiés, il leur exprima néanmoins les fondements de la
religion tels que les aspects du droit, de la justice et de la moralité.
La Sixième Année de la Prophétie 239

Le choix qu’eut notre Saint Prophète r de nommer Jafar t à la tête du groupe


de réfugiés n’est pas anodin et renferme une grande sagesse. Ainsi, grâce à cette atti-
tude, l’Envoyé de Dieu r indiqua les caractères essentiels que doivent posséder les
leaders de toutes sortes.
Une partie des réfugiés du second groupe retourna à Médine après l’Hégire du
Saint Prophète r et une autre partie revint après le pacte de Houdaybiya.
Enfin, le dernier groupe revint à Médine sous la direction de Jafar t au moment
de la conquête de Khaybar. Il va sans dire que leur arrivée enchanta naturellement le
Messager de Dieu r.

Adhésion de Hamza t à l’islam


Le Messager de Dieu r n’envoyait pas que ses Compagnons y à la Ka’ba pour
réciter le Coran aux idolâtres, par moment il accomplissait lui-même cette mission.
Une fois que le Messager de Dieu r s’y rendit, Abû Jahl l’insulta d’une manière
démesurée et alla très loin dans ses insultes à son égard. Voulant montrer sa férocité
devant les idolâtres, il était particulièrement effréné.
Alors une femme accourut vers Hamza t qui rentrait de la chasse et lui dit :
« Ô Hamza ! Brave Hamza ! On insulte et on s’acharne sur ton neveu à la Ka’ba !
Je crains que quelque mal lui soit fait ! »
Hamza t courut à la Ka’ba et s’interposa devant Abû Jahl.
Hamza t le frappa si fort à la tête que du sang se mit à couler. Surpris de cette
forte opposition, l’ennemi de l’islam s’enfuit stupéfait. Les autres idolâtres, témoins
de cette scène, se dispersèrent aussi un par un. En effet, tous les Mecquois connais-
saient la force de Hamza t. Pas un seul lutteur de Quraysh ne pouvait se mesurer à
lui. Après cela, Hamza t se rangea du côté de son neveu, le Seigneur des mondes,
Muhammad Mustafâ r, et lui dit :
« Je t’ai vangé de lui, ô Muhammad… sois à l’aise à présent ! »
Le Saint Prophète r lui répondit :
« Ô Oncle ! Je ne serais vraiment à l’aise que lorsque tu embrasseras l’islam ! »
Soudain le rideau de l’ignorance se leva du cœur de Hamza t. Réalisant la vérité
à cet instant, le brave Hamza t regarda en souriant la lueur magnifique qui émanait
du visage de son cher neveu puis témoigna de son adhésion à l’islam. Hamza t,
l’oncle du Messager de Dieu r n’avait que deux ans de plus que son neveu. Tous
deux avaient été allaités par la même nourrice (ou mère de lait). (Voir Ibn Hishâm, I,
312-313; Hâkim, III, 213; Ibn Kathir, al-Bidaya , III, 84.).
240 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En disant à son oncle qu’il ne pouvait être à l’aise tant qu’il n’accepterait pas
l’islam, le Messager de Dieu r exprima l’importance de la foi et non de la vengeance
vis-à-vis de la vie éternelle.
Cet évènement nous apprend que le croyant doit toujours privilégier le bénéfice
de l’islam et non ses intérêts personnels. En effet, il doit chercher le bonheur dans la
réussite de la religion et non dans les réalisations individuelles. C’est seulement ainsi
que les efforts employés seront gratifiés.

Le jour où Hamza t devint musulman, Abû Bakr t insista auprès du Messager


de Dieu r pour que tous les croyants aillent à la Ka’ba et invitent tout le monde à
l’islam.
Le Messager de Dieu r répondit :
« Ô Abû Bakr ! Nous sommes encore très peu nombreux. »
Mais comme Abû Bakr t insistait, notre Saint Prophète r sortit de la maison
d’al-Arqam avec un groupe de Compagnons y et tous se rendirent à la Ka’ba. Dès
qu’ils arrivèrent Abû Bakr t commença à inviter les gens à croire en Dieu et en Son
Messager r. Mais les idolâtre se ruèrent à sur eux et commencèrent à battre inten-
sément Abû Bakr t et les autres y. Le misérable Utba monta sur Abû Bakr t avec
ses bottes en acier et commença à le piétiner, le laissant ensanglanté et meurtri. Il
fallut ensuite un grand effort de la part de sa tribu, les fils de Taym, pour le sauver
des mains des idolâtres.
Les fils de Taym l’amenèrent chez lui inconscient. Considérant son état particu-
lièrement grave, ils se rendirent à la Ka’ba et dirent :
« Nous jurons que si Abû Bakr t meurt, nous tuerons Utba. »
Quand Abû Bakr t ouvrit les yeux dans la nuit, la première chose qu’il deman-
da fut :
« Est-ce que le Messager de Dieu r va bien ? »
Sa mère, Umm’l-Khayr, ne cessait de dire qu’il ferait mieux de boire et de man-
ger quelque chose. Mais Abû Bakr t, comme s’il n’entendait rien, ne cessait de poser
des questions sur l’état de santé du Saint Prophète r.
Umm’l-Khayr dit :
« Mon fils ! Je n’ai aucune nouvelle de ton ami ! »
La Sixième Année de la Prophétie 241

Abû Bakr t envoya sa mère à Umm Jamil c76, une femme croyante pour avoir
des informations sur le Saint Prophète r. Quand Umm Jamil c arriva et vit l’état
d’Abû Bakr t, elle ne peut s’empêcher de s’écrier :
« Par Dieu ! Ceux qui ont agi de la sorte ne peuvent être que des idolâtres et des
égarés ! Puisse Dieu les punir de leur geste ! »
Aux interrogations d’Abû Bakr t, elle répondit que le Messager de Dieu r était
en sécurité dans la maison d’al-Arqam.
Abû Bakr t s’exclama alors :
« Par Dieu ! Je ne mangerais ni ne boirais quoi que ce soit tant que je ne l’aurais
pas vu de mes propres yeux ! »
Une fois la situation devenue calme et que tout le monde était rentré chez soi, la
mère d’Abû Bakr et Umm Jamil c le prirent par le bras et l’emmenèrent auprès de
l’Être de lumière r. Quand il vit le Saint Prophète r, il se jeta à ses pieds. L’état de
son cher ami affecta le cœur tendre du Messager de Dieu r. Abû Bakr t dit :
« Que mon père et ma mère te soient sacrifiés, ô Messager de Dieu ! Je vais bien.
Cet homme sordide m’a un peu secoué, c’est tout ! » Et il demanda au Messager de
Dieu r de prier pour sa mère afin qu’elle rejoigne la Religion de Vérité.
Avec la bénédiction du Noble Prophète r, l’honorable mère d’Abû Bakr t
rejoignit également le cercle des croyants. (Cf. Ibn Asîr, Usdu’l-Ghâba, VII, 326; Ibn Kathir,
al-Bidaya, III, 81).

Alarmés par l’augmentation du nombre des musulmans, et parmi eux de


grandes figures comme Hamza t, les idolâtres se réunirent pour trouver des solu-
tions afin de stopper ce courant.
Ils dirent :
« La question de Muhammad devient vraiment préoccupante, il a embrouillé
nos affaires. Envoyons-lui notre plus éminent expert en magie, voyance et poésie afin
qu’il puisse lui parler ! »
Pour accomplir cette tâche, ils choisirent Utba ibn Rabia.
Celui-ci répéta à la longue les offres faites précédemment par les idolâtres.
L’Envoyé de Dieu r l’écouta jusqu’à ce qu’il termine ses doléances, puis il r lui
demanda :
76. Ne confondez pas Umm Jamil c, croyante musulmane, avec son homonyme, la femme d’Abû Lahab.
242 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« As-tu terminé, ô Abû Walid ? »


Utba répondit en hochant la tête : « Oui »
Le Messager de Dieu r lui dit : « Écoute-moi bien alors ! »
Le Messager de Dieu r commença à réciter la sourate Fussilat jusqu’au verset 37
de la sourate de la Prosternation et se prosterna. En se relevant, il lui dit :
« Ô Abû Walid ! Tu as entendu ce que j’avais à dire ! Voici cela et te voilà !
Utba se leva et partit rejoindre ses amis. Ces derniers, le voyant arriver, virent
qu’il arborait un visage différent et lui demandèrent avec impatience :
« Alors, que s’est-il passé ? Raconte donc ! »
Utba leur répondit :
« Je jure que je ne n’ai jamais entendu de telles paroles ! Ce n’était ni de la poésie,
ni de la magie, ni de la voyance !
Quand Muhammad a dit :

îij ƅ Ùƈ ĝƆ ĐÓ
ƈ ĀģƆ ᎠĨ
ƈ ƈ Ɔ ƆÈģŽ ĝƇ ĘƆ ÒijĄƇ óƆ ĐŽ ƆÈĪƈŽ ÍĘƆ
Ɔ îÓĐ
Ɔ ĩƇ àƆ IJ Ɔ Ɔ ž Ùƃ ĝƆ ĐÓĀ
Ɔ ħŽ ġƇ ÜƇ òŽ ñĬ
« S’ils s’en détournent, alors dis-leur ; ‹Je vous ai averti d’une foudre sem-
blable à celle qui frappa les Aad et les Tamud›… » (Fusillat, 41 : 13)
J’ai alors mis mes mains devant sa bouche pour l’empêcher de continuer, car je
savais que tout ce que Muhammad dit se réalise et j’ai craint que la colère divine ne
tombât sur nous !
Maintenant, écoutez-moi ô Quraysh !
Laissez-le seul avec ses affaires et ne vous mettez pas en travers.
Si les Arabes parviennent à le tuer, vous seriez sauvés de lui par d’autres.
Mais s’il devient le souverain des Arabes, sa souveraineté deviendra la vôtre,
son avenir et son honneur seront votre avenir et votre honneur. De la sorte, grâce à
Muhammad, vous deviendrez les plus heureux des hommes ! »
Les Qurayshites rétorquèrent :
« Ô Abû Walid ! Nous croyons qu’il a ensorcelé ta langue ! »
Utba leur répondit alors :
« Je dis simplement ce que je pense ! Vous êtes libres de faire ce que bon vous
semble ! » (Ibn Hishâm, I, 313-314; Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 111-112).
La Sixième Année de la Prophétie 243

Adhésion d’Omar t à l’islam


Les idolâtres rassemblèrent le conseil consultatif dans la Maison de Nadwa et
décidèrent d’assassiner le Saint Prophète r. Pour accomplir cette tâche, ils choisirent
le plus courageux, le plus dur et le plus vaillant de leurs hommes, Omar ibn al-Khat-
tab t. Ce dernier avait treize ans de moins que le Messager de Dieu r avec lequel il
partage une lignée commune au neuvième niveau.
Omar t s’était engagé à assassiner le seigneur des mondes r. En chemin il
croisa Nuaym ibn Abdullah t qui fut intrigué par le comportement d’Omar t.
Alors il lui demanda :
« Ô Omar t ! Où vas-tu donc ainsi ? »
Omar t lui répondit :
« Je m’en vais tuer Muhammad… celui qui a apporté une nouvelle religion au
détriment de celle de nos ancêtres ! »
Nuaym t, pour gagner un peu de temps et distraire Omar t lui dit :
« Ô Omar ! Je jure que tu te trompes ! Penses-tu vraiment que les fils d’Abd
Manaf te laisseront vivre ! De plus, tu devrais te préoccuper de ta propre famille ! »
Omar t se mit alors en colère :
« De qui parles-tu ? »
Nuaym t répondit :
« De ta sœur Fatima c et de son mari Sa’id ibn Zayd t ! Crois-moi, ils sont tous
deux devenus musulmans ! »
Ayant découvert la sinistre intention d’Omar t, Nuaym t avait gagné un
temps précieux en détournant le chemin qu’il voulait emprunter vers celui menant à
la maison de sa sœur. Ainsi, Nuaym t eut le temps de prévenir le Saint Prophète r
des intentions d’Omar t. Les paroles de Nuaym t rendirent Omar t furieux qui se
dirigea alors vers la maison de sa sœur.
À ce moment précis, Khabbab t se trouvait chez Fatima ibn Khattab c, occupé
à enseigner le Coran au couple. Quand ils virent Omar t arriver en furie, le couple
cacha Khabbab t dans une pièce de la maison, et Fatima c cacha de suite la page du
Coran en question. Omar t, lorsqu’il pénétra dans la maison, demanda :
« Quelles sont ces paroles que je viens d’entendre à l’instant ? »
Son beau-frère et sa sœur lui répondirent :
« Tu as dû mal entendre. Nous n’avons rien de cela ici ! »
Omar t s’approcha de son beau-frère et dit :
244 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Vraiment ! Alors pourquoi ai-je entendu que vous avez adhéré tous deux à la
religion de Muhammad ? »
Et il t commença à le bousculer. En essayant de s’interposer Fatima c reçut
une gifle en plein visage. Elle c dit à son frère : « Ô Omar t ! Fais ce que tu veux !
Tue-nous si tu le désires, mais sache que nous ne renoncerons jamais à l’islam ! »
Alors qu’elle manifestait avec force sa conviction, un filet de sang coulait le long
de son visage. Ne s’attendant pas à une telle réaction venue de sa sœur Omar t fut
abasourdi. À la vue du sang qui coulait de son visage, il fut pris de remords et regretta
ce qu’il venait de faire et avec compassion, comme pour s’excuser il les pria :
« Faites-moi voir ce que vous lisiez ! ».
Sa sœur c déclara : « Promets-nous de ne rien attenter contre la page. »
Omar t jura sur ses idoles qu’il la rendrait une fois lue.
Alors, espérant qu’il fût guidé vers la lumière, Fatima c lui dit :
« Ô mon frère ! Les adorateurs d’idoles sont impurs et ne peuvent pas toucher
les pages du Coran ! »
Omar t se fit remettre les pages en question qu’après avoir accompli la grande
ablution. Puis il commença à lire le verset glorieux. (On rapporte que les versets lus
par Omar t furent les premiers de la sourate al-Hadid). (Bayhaqî, Dalail, II, 217).

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La Sixième Année de la Prophétie 245

« Ta-Ha. Nous n’avons point fait descendre sur toi le Coran pour que tu sois
malheureux, si ce n’est qu’un Rappel pour celui qui redoute (Allah), (et comme)
une révélation émanant de Celui qui a créé la terre et les cieux sublimes. Le Tout-
Miséricordieux S’est établi « Istawa » sur le Trône. A Lui appartient ce qui est
dans les cieux, sur la terre, ce qui est entre eux et ce qui est sous le sol humide.
Et si tu élèves la voix, Il connaît certes les secrets, mêmes les plus cachés. Allah !
Point de divinité que Lui ! Il possède les noms les plus beaux. Le récit de Moïse
t’est-il parvenu ? Lorsqu’il vit du feu, il dit à sa famille : ‹Restez ici ! Je vois du feu
de loin ; peut-être vous en apporterai-je un tison, ou trouverai-je auprès du feu
de quoi me guider›. Puis, lorsqu’il y arriva, il fut interpellé : ‹Moïse ! Je suis ton
Seigneur. Enlève tes sandales : car tu es dans la vallée sacrée Tuwa. Moi, Je t’ai
choisi. Ecoute donc ce qui va être révélé. Certes, c’est Moi Allah : point de divinité
que Moi. Adore-Moi donc et accomplis la Salât pour le souvenir de Moi. L’Heure
va certes arriver. Je la cache à peine, pour que chaque âme soit rétribuée selon ses
efforts. Que celui qui n’y croit pas et qui suit sa propre passion ne t’en détourne
pas. Sinon tu périras. » (Ta-Ha, 20 : 1-16).
Omar t lut ces versets, et demeurant pétrifié et ne put s’empêcher de clamer :
« Que ces paroles sont belles et précieuses ! »
Il fut séduit par l’éloquence du Coran, par les mots chargés de sens et de sagesse.
Il était évident que ces paroles ne pouvaient être celles d’un homme. Alors qu’il
méditait profondément à tout ceci, Khabbab t sortit de là où il se cachait et déclara :
« Ô Omar t ! Par Dieu, j’ai le sentiment que la prière du Prophète r est sur le
point de se réaliser. En effet, hier encore il pria :
“ Ô Seigneur ! Puisses-Tu renforcer l’islam par le bais d’Abû’l-Hakem ibn Hishâm
ou d’Omar ibn al-Khattab ! Ô Omar ! Le moment est venu de craindre Dieu ! ”»
Omar t dit à Khabbab t:
« Ô Khabbab t ! Mène-moi à Muhammad, car je désire embrasser l’islam ! »
Ils se mirent immédiatement en chemin. Les pas d’Omar t, cette fois-ci, se
situaient sur le chemin de l’amour et de la foi en Dieu. À présent, son cœur était
rempli d’enthousiasme à la pensée de rencontrer le Messager de Dieu r.
Lorsqu’ils atteignirent la maison d’al-Arqam, Hamza t les attendait épée en
main car Nuaym t les avait prévenus de l’intention d’ibn al-Khattab t. Mais per-
sonne ne pouvait être au courant du changement de situation.
Le Messager de Dieu r se leva pour accueillir Omar t dans la cour et lui
demanda la raison de sa venue.
Les mots suivants sortirent des lèvres d’Omar t :
246 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Je suis venu pour embrasser l’islam, ô Messager de Dieu ! »


En remerciement de ce que Dieu le Tout-Puissant leur accorda, le Saint Pro-
phète r s’écria :
« Allahu Akbar ! (Dieu est grand !) »
Les croyants répétèrent avec enthousiasme la même formule.
C’est ainsi qu’une prière, comme tant d’autres, formulée par le Messager de
Dieu r, fut accomplie.
La première formule qu’Omar t prononça fut :
« Je témoigne qu’il n’y a de dieu que Dieu et que Muhammad est Son serviteur
et Messager. »
La prière du Saint Prophète r avait atteint Omar ibn al-Khattab t.
Abû’l-Hakem ibn Hishâm, connu sous le nom d’Abû Jahl, quant à lui, s’enfonça
de plus en plus dans les profondeurs de l’ignorance. (Voir Ibn Hishâm, I, 365-368).
Suite à la déclaration de foi d’Omar t qui eut lieu en présence du Noble Mes-
sager r, et avec sa proposition, tous les musulmans quittèrent la maison d’al-Arqam
tout en glorifiant le nom de Dieu le Très-Haut et en se dirigeant vers la Ka’ba.
Ce fut un coup dur pour les idolâtres.
C’est à ce moment-là que le Messager de Dieu r décida d’octroyer à Omar t
l’attribut d’« al-Farouq », celui qui distingue le bien du mal. (Voir Diyarbakri, I, 296).
Omar t raconte ainsi ces jours-là :
« Pas un seul musulman n’échappait au harcèlement des idolâtres, tous lut-
taient tant qu’ils pouvaient contre l’oppression. Mais moi, personne ne pouvait
m’atteindre. Je ne pouvais pas vivre dans la sérénité alors que mes frères en religion
subissaient toutes sortes de cruautés.
Alors le soir où j’embrassai l’islam, j’eus la pensée de retrouver, parmi les ido-
lâtres, le plus grand ennemi du Messager de Dieu r pour lui faire part de ma foi.
Au matin, je me présentai devant la porte d’Abû Jahl. Il ouvrit la porte et me
demanda :
- Bienvenue, ô Omar t ! De quelle nouvelle es-tu porteur ?
Je lui répondis :
- Je suis venu te déclarer ma foi en Dieu, en Son Messager r et en tout ce qu’il
a apporté.
La Sixième Année de la Prophétie 247

En entendant cela, Abû Jahl me ferma la porte au nez en me maudissant. » (Ibn


Hishâm, I, 371).

Puis Omar t partit annoncer la nouvelle à l’un des plus éminents idolâtres de
Quraysh, son oncle Walid ibn Mughira, ainsi qu’à deux autres idolâtres qui, man-
quant de courage en face d’Omar t, ne purent que refermer leur porte devant lui
et se replier chez eux.
Abdullah ibn Mas’ud t disait :
« L’entrée d’Omar t en islam fut un triomphe, son émigration vers Médine
une aide et son califat une miséricorde. Jusqu’à ce qu’Omar t embrassât l’islam,
nous ne pouvions ouvertement accomplir la salât à la Ka’ba. Quand il devint musul-
man, il lutta contre les idolâtres ; en conséquence, ceux-ci nous laissèrent en paix et
nous pûmes prier librement. » (Haythami, IX, 62-63).
248

DE LA SEPTIÈME À LA NEUVIÈME ANNÉE DE LA


PROPHÉTIE

Les idolâtres adoptent un embargo de trois ans


Malgré toutes les mesures préventives, l’islam fleurissait de jour en jour et cela
ne faisait qu’alimenter la haine des associateurs. Ne supportant plus cette situation,
ces derniers firent un pacte infernal visant la personne sacrée de l’Envoyé de Dieu r
en se disant les uns aux autres :
« Quoiqu’il arrive, en privé ou en public, nous le tuerons ! »
Voyant leur détermination à commettre un acte monstrueux, Abû Talib était
inquiet. Il rassembla les membres de la tribu Hashim et Muttalib et les exhorta à
protéger le Saint Prophète r à tout moment et à tout prix.
C’était une nuit où le croissant de lune du mois de Muharram apparut dans
le ciel, et où, hormis Abû Lahab qui avait choisi le camp des païens, les tribus de
Hashim et de Muttalib, y compris le Saint Prophète r, se rassemblèrent dans le
quartier où demeurait Abû Talib.
Les idolâtres recoururent à un autre plan vicieux dans le but de mettre fin à la
fleuraison de l’islam en leur imposant un boycottage économique et social.
À cette fin, un groupe d’idolâtres aux âmes sombres, dirigé par Abû Jahl, se
rassembla au quartier de Bani Kinana d’où ils avaient annoncé la rupture de tout
lien avec les musulmans et les protecteurs de la tribu Hashim, allant du commerce
en tout genre jusqu’au mariage.
Consécutivement à cela, ils rédigèrent le pacte et l’affichèrent sur l’un des murs
de la Ka’ba. Suite à une invocation du Saint Prophète r, la main de Mansur ibn
Ikrima, qui avait retranscrit le pacte, se paralysa. Les idolâtres se dirent entre eux que
ce malheur avait été causé par l’oppression des Bani Hashim. (Ibn Hishâm, I, 372-373; Ibn
Saad, I, 208-209; Al Boukhari, Hajj, 45).

L’embargo contraignit les musulmans, qui jusque-là habitaient différents quar-


tiers de La Mecque, à déménager dans le quartier d’Abû Talib, l’oncle du Saint
Prophète r, et à s’aider mutuellement.
L’Envoyé de Dieu r quitta aussi Dal-Arqam pour déménager.
De la Septième à la Neuvième Année de la Prophétie 249

Préparé au pire, Abû Talib prit les mesures nécessaires pour éviter un éventuel
assassinat. Par exemple, chaque nuit quand tout le monde allait se coucher, il envoya
un de ses fils dormir à la place du Saint Prophète r. (Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 132).
Pour les musulmans, une période d’énormes difficultés commençait. Abû
Jahl et ses hommes se relayaient jour et nuit pour empêcher le transit de nourri-
ture même fait en toute discrétion. Toutes les routes qui pouvaient conduire les
musulmans vers les marchés furent bloquées, et les marchandises qui arrivaient à La
Mecque étaient achetées par les idolâtres avant qu’elles ne parvinssent aux musul-
mans. Les croyants ne pouvaient sortir du quartier d’Abû Talib que durant la saison
du pèlerinage.
Chaque fois qu’un musulman s’approchait d’un vendeur pour acheter de la
nourriture pour sa famille, Abû Lahab venait et criait :
« Ô commerçants ! Augmentez vos prix quand vous avez affaire à Muhammad
et ses compagnons pour qu’ils soient incapables d’acheter quoi que ce soit ! Ne vous
inquiétez pas ! Je suis un homme de parole. Je compenserai vos pertes ! »
Les croyants revenaient la plupart du temps les mains vides, incapables de cal-
mer les pleurs de leurs enfants affamés. Et le lendemain, Abû Lahab allait chez les
commerçants pour acheter le restant de leurs marchandises à un prix élevé. (Suhaylî,
II, 127-128).

Pendant cette crise le Messager de Dieu r et son épouse Khadîdja c finirent


par dépenser tout ce qu’ils avaient pour soulager la souffrance des croyants. (Yaqûbî,
II, 31).

Malgré toutes les mesures prises par les idolâtres de bloquer les routes menant
aux quartiers musulmans, certains Mecquois apportaient de l’aide à leurs parents.
Hakim ibn Hizâm amena un jour une caravane de blé en provenance de Damas. Le
blé fut chargé sur un chameau et amené secrètement dans le quartier des musul-
mans. Une autre nuit ainsi il envoya un chameau chargé de farine.
Une autre figure ayant apporté son aide aux croyants est Hishâm ibn Amr.
Quand les idolâtres apprirent que Hishâm avait envoyé aux musulmans des mar-
chandises à dos de chameau, ils le menacèrent sévèrement. Malgré leurs avertis-
sements, Hishâm continua à aider ses proches parents ; les idolâtres finirent par
employer la force et le frappèrent.
Il fut sauvé de la mort grâce à l’intervention d’Abû Sufyan qui avait pris sa
défense :
« Laissez cet homme tranquille ! Il ne fait qu’aider ses proches ! Si seulement
nous étions capables de faire de même ! »
250 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Pendant cette période, les musulmans endurèrent de grandes souffrances,


contraints parfois même à manger les feuilles des arbres. Les enfants mouraient de
faim et leurs pleurs pouvaient facilement être entendus à l’extérieur du quartier.
Avec cet embargo, les idolâtres envisageaient d’affamer les croyants jusqu’à ce
que le Saint Prophète r se rende à eux, de manière à pouvoir l’assassiner. Mais les
musulmans, unis avec la tribu Hashim autour d’Abû Talib, étaient déterminés à
protéger l’Être de lumière r jusqu’à leur dernière goutte de sang.
Quand l’intensité de l’embargo devint insupportable, le Messager de Dieu r
leva au ciel ses mains bénie et fit l’invocation suivante :
« Ô mon Seigneur ! Aide-nous en infligeant à ces gens impitoyables une famine
de sept années, semblable à celle qu’a connue la communauté du prophète Joseph ! »
Peu de temps après, effectivement, les pluies cessèrent en laissant place à une
sécheresse destructrice qui frappa durement les idolâtres. Beaucoup d’entre eux
moururent de faim. N’ayant rien trouvé de quoi se mettre sous la dent, ils commen-
cèrent à manger de la viande et la peau d’animaux morts. Quand l’un d’entre eux
regardait le ciel, il le voyait recouvert de fumée tellement la faim l’affectait.
Selon Ibn Mas’ud t, le Tout-Puissant y fait allusion dans le Coran :

ħĻĤƈ ƆÈÔÒ
Ƅ ñƆ ĐÒ
Ɔ ñƆ İ
Ɔ öÓ
Ɔ ĭĤÒĵ
ƪ ýƆ ĕŽ ĺ
Ɔ īĻƈ
ƅ ×Ĩ ƅ
ƫ ĪÓìƆ ïƈƇ ÖÅÓĩƆ ùĤÒĹ
ƪ Üƈ ÉŽ ÜƆ ĦƆ ijŽ ĺƆ ÕŽ ĝƈ ÜƆ òÓŽ ĘƆ
Ƅ
« Et bien, attends le jour où le ciel apportera une fumée visible qui couvrira
les gens. Ce sera un châtiment douloureux. » (ad-Dukhan, 44 : 10-11).
Quand la sécheresse devint insoutenable, Abû Sufyan vint demander au sei-
gneur des mondes r :
« Ô Muhammad ! Tu dis être envoyé comme miséricorde pour les mondes ! Tu
nous ordonnes d’obéir à Dieu et d’aider les proches parents. Ton peuple est sur le
point de périr à cause de la famine ! Demande donc à Dieu de les soulager de ce sup-
plice ! Si ta prière éloigne ceci de nous, je te jure que nous croirons en ton Dieu ! »
Le Noble Messager r se mit alors à prier et la pluie commença à tomber. Mais
bien que la famine prît fin, les associateurs demeurèrent dans leur idolâtrie. (Al
Boukhari, Tafsir, 30, 44; Muslim, Munâfiqîn, 40; Ahmed, I, 431, 441).

Dans le Coran, Dieu le Tout-Puissant mentionne la mentalité des idolâtres :

óĨ ĮóĄįĭĐÓĭęýĠÓĩĥĘÓĩÐÇƈ ĜIJƆÈÒïĐÓ ƈ ĜIJƆÈįƈƈ ×ĭåĤÓ


ƈ
Ɔ ĬƆ ÓĐƆ î
Ɔ óƫ ąĤÒ
ƫ ĪÓ Ɔ ùĬƆ Ÿƈ Ò÷ƪ ĨÒ Ɔ ðƆ Ìƈ IJƆ
ƪƆ Ƈ ƪ Ƈ ƇŽƆ ƆŽ Ɔ Ɔ ƪƆƆ ƃ Ɔ Ž ƃ Ɔ Ž
ƈ ƈ Ƈ ğƆ Ĥƈ ñƆ Ġ Ƈ ĤƆ Ìƈ ÓĭƆ ĐƇ ïŽ ĺƆ ħŽ Ĥƪ ĪƆÉĠƆ
Īij Ɔ Ĩ
Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ĺƆ ÒŽ ijƇĬÓĠÓ Ɔ īĻ
Ɔ Ę ƈóùŽ ĩƇ ĥŽ ĤīƈƆ žĺô ƪ óžƅ Ąĵ
Ɔ įƇ ùƪ Ĩ
De la Septième à la Neuvième Année de la Prophétie 251

« Et quand le malheur touche l’homme, il fait appel à Nous, couché sur le


côté, assis, ou debout. Puis quand Nous le délivrons de son malheur, il s’en va
comme s’il ne Nous avait point imploré pour un mal qui l’a touché. C’est ainsi
que furent embellies aux outranciers leurs actions. » (Yunus, 10 : 12).

La fin de l’embargo
Après ces trois années de souffrance, Dieu le Tout-Puissant suscita un asti-
cot qui rongea le pacte affiché sur le mur de la Ka’ba. Excepté la formule Bismik
Allahumma (en Ton nom ô Allah), tous les décrets qui exprimaient la cruauté et
l’oppression furent supprimés. Prévenu par le biais de la Révélation, le Messager
de Dieu r informa à son tour Abû Talib de la situation qui, à son tour, informa ses
frères en leur disant : « Parez-vous de vos plus beaux vêtements et allez auprès de
Quraysh ! Parlez-leur du sort du pacte avant qu’ils s’en aperçoivent eux-mêmes ! »
Tout de suite après avoir été informés par Abû Talib et ses frères, les idolâtres
envoyèrent une personne pour quérir le pacte. Tous furent frustrés quand ils virent
que l’état du pacte était tel que l’avait décrit le Saint Prophète r.
Encouragé, Abû Talib déclara :
« Avez-vous compris maintenant que vous avez fait du tort à votre peuple et
que vous les avez opprimés ? »
Aucun des idolâtres ne put répondre à Abû Talib.
Certains commencèrent à marmonner :
« Ceci n’est que de la magie ! »
Une fois de plus ils tournèrent le dos à la vérité et continuèrent leur oppression.
Certains notables de Quraysh éprouvèrent néanmoins des remords et se blâ-
mèrent pour ce qu’ils avaient fait endurer aux Bani Hashim.
Alors que la dixième année de l’Apostolat prophétique survint, certains Qurays-
hites entamèrent des actions pour lever l’embargo.
Hishâm ibn Amr dit à Zuhayr ibn Abi Umayya :
« Ô Zuhayr ! Comment peux-tu être à l’aise alors que tes oncles luttent contre la
pauvreté et sont privés de tout droit d’échange et de mariage ? Je jure que si tu avais
appelé Abû Jahl à établir un pacte contre ses oncles, il ne l’aurait jamais accepté ! »
Alors que Hishâm avait convaincu Zuhayr, il gagna aussi un par un Mu’tim
ibn Adiyy, Abû’l-Bakhtarî et Zam’a ibn Aswad. Durant la nuit, cinq personnes se
réunirent au Mont Hajun, sur les hauteurs de La Mecque, pour discuter des mesures
nécessaires et jurèrent de lutter jusqu’à ce que l’embargo soit levé.
252 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le lendemain matin, ils se rendirent à la Ka’ba. Vêtus d’habits couteux, Zuhayr


circumambula autour de la Grande Maison et dit :
« Ô Mecquois ! Comment pouvons-nous vivre si aisément alors que les fils de
Hashim et de Muttalib sont en train d’être décimés ! Par Dieu ! Je ne m’assiérais pas
avec celui qui a rompu ses liens de parenté tant que ce pacte d’oppression ne sera
pas déchiré ! »
Bien qu’Abû Jahl contestât ces propos, les quatre amis qui exprimèrent ainsi
leur soutien virent un climat encourageant se former. C’est alors que Mu’tim se
leva et déchira la feuille accrochée sur l’un des murs de la Ka’ba. Puis Adiyy ibn
Qays, Zam’a, Abû’l-Bakhtarî et Zuhayr s’armèrent et allèrent à l’encontre des fils
de Hashim et de Muttalib. Ainsi, ils purent sortir du quartier d’Abû Talib pour
retourner chez eux. Par un effet de la grâce divine, les croyants furent libérés de
trois années de siège. À cette occasion, Abû Talib lut un poème à la gloire de ceux
qui avaient levé l’embargo. Pendant ce temps, les idolâtres irréductibles comprirent
qu’ils ne pourraient plus jamais bénéficier de l’invitation du Saint Prophète r à
l’islam. (Voir Ibn Hishâm, I, 397-406; Ibn Saad, I, 210-211).
Ces difficultés et tourments subis par les croyants leur permirent de forger et
renforcer leur foi et le nombre de défaites des idolâtres ne firent qu’accroître.
Durant la huitième année de l’Apostolat prophétique, les Perses avaient défait
les Byzantins au cours de plusieurs batailles successives et défait leurs villes, les
contraignant à reculer jusqu’aux portes de Constantinople et à payer de lourdes
indemnités.
Comme les Perses étaient aussi des idolâtres, leur victoire ravit les Mecquois.
Cependant, le Saint Prophète r fut attristé par la défaite byzantine, le peuple
des Gens du Livre.
Sur cet évènement, Dieu le Très-Haut révéla ces versets :

Ɔ ×Ƈ ĥƈ ĕŽ ĻƆ ø
Īij ƈ ƈ ƈ ƈ óĤÒÛƈ ×ĥƈ ĔƇ ħĤÒ
Ɔ ħŽ ƈıƈ×ĥƆ ĔƆ ïđŽ ÖƆ īŽ ĨħŽ İƇ IJ Ɔ ĂòŽ ƆźÒŽ ĵĬƆ îŽ ƆÒĵĘĦIJ Ƈ ƫ Ɔ
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒæƇ óƆ ęŽ ĺƆ ñƅ Ñƈ ĨƆ ijŽ ĺƆ IJ
Īij ƈ ģƇ ×ĜƆ īĨ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ïƇ đŽ ÖƆ īŽ ĨIJ Ɔ Ž Ž óƇ ĨŽ ƆźÒŽ ų Ʃ īĻƆ ĭøďƈ ąƈŽ ÖĵĘ
ħĻèƈ óĤÒõĺƇ ƈõđƆ ĤŽ ÒijƆ İƇ IJ ƈ Ʃ ƈóāĭƈÖ
Ƈ ƪ Ɔ ÅÓƇ ýƆ ĺƆ īŽ Ĩ
Ɔ óƇ āƇ ĭŽ ĺƆ ųÒ Ž Ɔ
« Alif, Lam, Mim. Les Byzantins ont été vaincus, dans le pays voisin, et après
leur défaite ils seront les vainqueurs, dans quelques années. À Allah appartient
le commandement, au début et à la fin, et ce jour-là les Croyants se réjouiront du
secours d’Allah. Il secourt qui Il veut et Il est le Tout-Puissant, le Tout- Miséri-
cordieux. » (ar-Rum, 30 : 1-5).
De la Septième à la Neuvième Année de la Prophétie 253

Le Messager de Dieu r ajouta :


« Certes la défaite est proche pour les Perses ! » (Ahmed, I, 276).
Apprenant ces divines nouvelles, Abû Bakr t paria avec l’idolâtre Ubayy ibn
Khalef dix chameaux que les Byzantins vaincraient les Perses dans les trois ans.77
Le Messager de Dieu r déclara à Abû Bakr t quand il l’informa du pari :
« Le mot « bid’ » dans le verset signifie les nombres entre trois et neuf. Va et aug-
mente le nombre de chameaux ainsi que la durée ! »
Abû Bakr t s’en retourna et augmenta la durée à neuf ans et le nombre de
chameaux à cent.
Les Byzantins recouvrèrent rapidement de la force pour remporter une victoire
écrasante sur les Perses.
Dès que la nouvelle lui fut annoncée, Abû Bakr t se rendit chez Ubayy pour se
saisir les cent chameaux et les amener au Saint Prophète r.
Le Messager de Dieu r lui conseilla alors de les distribuer aux nécessiteux et
c’est ce qu’il fit.
De nombreux idolâtres, témoins de ce miracle du Coran, embrassèrent l’islam.
(Voir At Tirmidhi, Tafsir, 30/3194; Qurtubî, XIV, 3).

Shaqqu’l-Qamar : le miracle de la scission de la lune


Afin d’aider les gens à vaincre leur obstination, Dieu le Tout-Puissant a accordé
à Ses prophètes L un don exceptionnel pour accomplir pleinement leur devoir
d’inviter à la vraie religion.
Chaque prophète se vit accorder une bénédiction extraordinaire appelée
« miracle » afin de convaincre la population.
Chaque miracle manifesté était en ligne avec les plus admirables compétences
de leur époque.
Par exemple, durant l’époque de Moïse u la magie était à son apogée.
C’est ainsi que les miracles de Moïse u furent associés à ce domaine.
Ce fut par exemple le miracle du bâton ou sa main lumineuse.78
77. Cet évènement eut lieu avant que ne soit interdit les paris de tous genres.
78. La Main Lumineuse ou Yad’ul-Bayda (littéralement « Main Blanche ») est l’un des neuf miracles
accordés à Moïse u (voir Coran al-Araf, 7 : 108 ; al-Isra, 17 :101; Taha, 20 : 22 ; as-Shuara, 26 : 33 ;
an-Naml, 27 :12; al-Qasas, 28 : 32). Chaque fois qu’il sortait sa main de sa poitrine, tous les alentours
s’illuminaient tel le soleil quand il apparaît.
254 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

À l’époque de Jésus u, les médicaments gagnèrent en popularité et les méde-


cins devinrent des gens très respectés dans la société.
Aussi il lui fut accordé le plus éminent miracle dans le domaine de la médecine,
à savoir la résurrection des morts.
Étant donné que l’Apostolat prophétique du Prophète Muhammad r englobe
toutes les époques et l’éternité, son autorité et son influence en termes de miracles
divins dépassèrent tous les autres prophètes L avant lui.
Ses miracles ne furent pas restreints au domaine de l’éloquence et de la simple
expression, mais englobèrent beaucoup d’autres domaines.
Parmi ces miracles, il faut noter celui de la scission de la lune : un miracle qui
souleva le doute des cœurs affaiblis par l’embargo, qui renforça la foi en Dieu et qui
mit une fois de plus en garde les idolâtres.
Ce grand miracle eut lieu en plein cœur de l’embargo, au pendant la neuvième
année de la période mecquoise.
Une nuit de pleine lune, le Messager de Dieu r pria son Seigneur et la lune se
fendit en deux, une partie allant du côté du Mont Abû Qubays et l’autre du côté du
Mont Quayqian.
Malgré cet impressionnant miracle les idolâtres s’obstinèrent à refuser de croire.
Et comme toujours, Abû Jahl dénonça l’évènement comme étant de la pure
magie. Les idolâtres, voyant ce miracle, dirent à propos du Saint Prophète r :
« Même s’il nous a ensorcelé, il n’a quand même pas pu ensorceler tous les
Mecquois ?! »
Ils demandèrent alors aux caravanes éloignées de La Mecque si elles avaient vu
cet évènement. Toutes témoignèrent de la scission spectaculaire de la lune.
Les versets ci-dessous furent révélés après cet évènement :

óƭ ĩƈ ÝƆ ùŽ Ĩ ƈ ƈ óĩĝƆ ĤŽ Òěƪ ýƆ ĬŽ ÒIJÙƇ ĐÓùĤÒÛƈ ÖóÝĜŽ Òƈ


Ƈ óƄ éŽ øÒijƇĤijĝƇ ĺƆ IJÒij
Ɔ ĄƇ ƈóđŽ ƇĺÙƃ ĺƆ ÒƆ ÒIJŽ óƆ ĺƆ ĪŽ ÒIJ
Ɔ ƇƆ Ɔ Ɔ ƪ ƆƆƆ
« L’Heure approche et la lune s’est fendue. S’ils voient un prodige, ils s’en
détournent et disent : ‹Une magie persistante›. » (al-Qamar, 54 : 1-2 ; Wahidi, p. 418; At
Tirmidhi, Tafsir, 54/3286).

Tous les Mecquois virent la scission de la lune .


Ainsi ceux qui avaient dans leur cœur la lumière de l’islam eurent la confirma-
tion de leur foi.
De la Septième à la Neuvième Année de la Prophétie 255

Ceux dont les cœurs étaient scellés, quant à eux, s’exclamèrent :


« Quel grand magicien ! »
Alors qu’il enquêtait sur les cycles précédents du mouvement de la lune, le
célèbre astronome français François De Lalande (1732-1807) admit la vérité relative
au miracle du Shaqq’ul-Qamar (la scission de la lune). (Voir Zekâî Konrapa, p. 110).

Si on doit énumérer les pourquoi les prophètes L bénéficièrent de miracles on


pourrait dire qu’ils furent nécessaires pour :
1. Influencer les peuples et les guider vers la croyance.
2. Renforcer la foi des croyants et consolider leurs cœurs.
3. Prouver la véracité de la mission prophétique.
4. Ébahir les croyants et montrer l’impuissance des idolâtres devant la Puis-
sance divine.
Chaque verset du Coran est à même d’une part d’accroître la force des croyants
et d’autre part d’amplifier l’incrédulité de ceux à qui le Coran s’adresse en affirmant
« la yahdi », c’est-à-dire ceux qui ne pourront jamais être guidés.79
L’événement de la scission de la lune est considéré comme un grand miracle de
notre Saint Prophète r.
Étant aussi appelé le « Prophète de l’Heure dernière », son avènement dans ce
monde fait partie des signes du Jour du Jugement cités ainsi dans le Coran :

óĩƆ ĝƆ ĤŽ Òěƪ ýƆ ĬŽ ÒIJ ƈ ƈ


Ƈ Ɔ ÙƇ ĐÓ
Ɔ ùĤÒ
ƪ ÛÖƆ óƆ ÝƆ ĜŽ Ò
« L’Heure approche et la lune s’est fendue. » (al-Qamar, 54 : 1).

79. Cette expression apparaît exactement dans vingt-six versets coraniques, comme par exemple :

īĻ ƈƈ ƈ
Ɔ ĩĤÓčƪ ĤÒĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĸïıŽ ĺƆ ƆźƇųÒ
Ʃ IJƆ
- « Allah ne guide pas les gens injustes. » (al-Baqara, 2 : 258).

īĺ ƈ ƈ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĸïıŽ ĺƆ ƆźƇųÒ
Ʃ IJƆ
- « Allah ne guide pas les gens infidèles. » (al-Baqara, 2 : 264).

īĻ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ĝøÓęƆ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĸïıŽ ĺƆ ƆźƇųÒ
Ʃ IJƆ
- « Allah ne guide pas les gens pervers. » (al-Maida, 5 : 108).
256 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La poursuite de la prédication en dépit des circonstances


En Dépit de la terreur qu’employèrent par les hommes de sa tribu, le Messager
de Dieu r ne ralentit jamais la prédication.
Il fit usage de la moindre occasion pour inviter à l’islam et utilisait pour cela le
procédé la plus convenant qui soit.
Rukana, qui fut certainement l’homme le plus fort de Quraysh, croisa un jour
le Saint Prophète r dans une vallée voisine de La Mecque.
Le Saint Prophète r lui dit :
« Ô Rukana ! Combien de temps encore vas-tu t’obstiner à t’opposer à l’islam et
à ne pas l’accepter ? Viens… Accepte donc l’islam ! »
Rukana répondit :
« Ô Muhammad ! Si tu parviens à me battre à la lutte, je l’accepterai ! »
Le Saint Prophète r lui demanda :
« Accepteras-tu vraiment l’islam si je gagne ? »
Rukana répondit :
« Oui, si tu me bats, soit j’accepte l’islam, soit mes moutons t’appartiendront !
Mais si je te bats, tu renonceras à ta mission prophétique ! »
Ils commencèrent à lutter et dès la première prise, le Saint Prophète r mit à
terre le lutteur mecquois qui ne put faire le moindre geste. Il lui demanda :
« Ô Muhammad ! Luttons encore une fois ! ».
Le Messager de Dieu r le vainquit à nouveau.
Rukana dit :
« Ô Fils de mon oncle ! Luttons encore une fois ! »
Rukana vit pour la troisième fois son dos essuyer le sol, mais refusa toujours
d’embrasser l’islam.
Le comportement et les paroles de Rukana attristèrent profondément l’Être de
lumière r.
Aussi il r lui dit :
« Va t-en, et je ne veux pas de tes moutons non plus ! »
Rukana lui répondit :
« Je jure que tu es bien meilleur et bien plus noble que moi ! »
De la Septième à la Neuvième Année de la Prophétie 257

Même s’il ne resta pas fidèle à sa promesse, Rukana t embrassa finalement


l’islam après la conquête de La Mecque, puis il partit s’établir à Médine. (Ibn Hishâm,
I, 418; Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, II, 236).

Dimad ibn Thalaba, de la tribu Azd Shanua, vint à La Mecque pour cause de
pèlerinage.
Ayant un grand intérêt pour la médecine et étant connu pour ses traitements
sur les malades mentaux, il avait entendu le bruit que les idolâtres traitaient de
« fou » le Messager de Dieu r.
Il se dit à lui-même :
« Je dois rendre visite à cet homme ! Peut-être trouverai-je un moyen de le
guérir ! »
En conséquence, il se leva et se rendit auprès du Messager de Dieu r et lui dit :
« Ô Muhammad ! Sais-tu que je peux guérir de la folie. Si tu le veux, je peux
tenter de te soigner, peut-être même que Dieu t’octroiera un remède ! »
Le Messager de Dieu r, en guise de réponse, lui dit alors :
« Louange à Dieu ! À Lui seul reviennent nos remerciements et à Lui seul sont
adressées nos demandes de secours et de miséricorde. C’est à Lui que nous demandons
refuge des maux de nos âmes. Nul ne peut guider ceux que Dieu a égarés. Et nul ne
peut égarer ceux que Dieu a guidés. Je témoigne qu’il n’y a pas de divinité si ce n’est
Dieu. Il est unique. Il n’a ni égal ni associé. Et je témoigne que Muhammad est Son
serviteur et Messager. »
Les paroles prononcées par le Saint Prophète r enchantèrent Damad t qui
finit par déclarer :
« De toute ma vie je n’ai jamais entendu de plus belles paroles que celles-ci.
Peux-tu me les répéter ? »
Le Saint Prophète r s’empressa de les lui répéter.
Suite à cela, Dimad t lui fit encore répéter deux fois, puis il dit :
« Par Dieu, j’ai déjà entendu des paroles de voyants, de magiciens, de poètes
et de toutes sortes de gens, mais je n’ai rien jamais entendu de tel. Ces paroles sont
comme les perles les plus précieuses de l’océan de l’éloquence. Donne-moi ta main
afin que je puisse prêter serment d’allégeance. »
C’est ainsi que Dimad t devint musulman.
Le Messager de Dieu r lui demanda ensuite :
« Peux-tu également prêter serment d’allégeance au nom de ta tribu ? »
258 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Dimad t répondit :
« Certes je jure fidélité en leur nom également ! » (Muslim, Juma, 46; Ahmed, I, 302;
Ibn Saad, IV, 241).

En faisant allégeance, Dimad t s’engagea au nom de sa tribu.


Devenu musulman, le Messager de Dieu r le chargea par la suite d’enseigner à
sa tribu les fondements de l’islam.
259

LA DIXIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE

L’année de la tristesse : décès de Khadîdja c et d’Abû Talib


La joie du Messager de Dieu r et des croyants d’avoir été libérés de l’embargo
fut de courte durée. En effet, l’oncle du Saint Prophète r, le protecteur des musul-
mans, celui qui prit grand soin de leur sauvegarde, décéda peu après. À de nom-
breuses occasions, le Saint Prophète r insistait pour que son oncle adhérât à l’islam.
Face à ce souhait, Abû Talib répondait à son neveu :
« Je sais que tu dis la vérité, mais si je l’accepte maintenant, les femmes de
Quraysh me blâmeront ! »
Ayant néanmoins accepté la vérité du Saint Prophète r, il était cependant, dans
sa conscience, freiné par son ego.
Même sur son lit de mort, le Messager de Dieu r voulut qu’il rendît l’âme en
croyant au Tout-Puissant :
« Ô mon oncle ! Témoigne de ta foi et Dieu t’accordera le bonheur éternel ! »
Abû Jahl, qui était présent à ce moment-là, s’interposa. Le fait est que lorsque
le Saint Prophète r faisait répéter les paroles de la chahada à son oncle, Abû Jahl le
coupait en disant : « N’oublie pas la religion de tes ancêtres ! »
Par conséquent, les dernières paroles d’Abû Talib furent :
« Je livre mon dernier souffle, fidèle à la religion des anciens. Si je savais que les
Qurayshites ne diraient pas que j’ai changé de religion par crainte de la mort, j’aurais
accepté tes paroles ! » (Al Boukhari, Janaiz 81, Manaqibu’l- Ansar 40; Ibn Saad, I, 122-123).
Le Saint Prophète r lui répondit :
« Je vais toujours prier pour ton pardon ! »
Puis il quitta plein de chagrin la maison de son oncle. La dernière promesse du
Saint Prophète r à son oncle amena cette révélation :

ÅÓ ƈ Ʃ īġƈ ĤƆ IJÛƆ ××èƆÒīĨĴïƈ ıÜƆ ƆźğƆ Ĭƪ Òƈ


Ƈ ýƆ ĺƆ īŽ ĨĴ
Ɔ ïıŽ ĺƆ ųÒ
Ɔ ƪ Ɔ ŽƆ Ž Ž Ɔ Ž
« Tu (Muhammad) ne diriges pas celui que tu aimes : mais c’est Allah qui
guide qui Il veut. Il connaît mieux cependant les bien-guidés. » (al-Qasas, 28 : 56) ;
(Muslim, Iman, 41-42).
260 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La guidée est une lumière divine qui mène l’homme au Créateur et qui n’atteint
que ceux dont les cœurs sont enclins à la Vérité :

ÔÓ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ĬƆ ƆÒīŽ Ĩ
Ɔ įĻŽ ĤƆ ÒĴïıŽ ĺƆ
«… En vérité, Allah égare qui Il veut et Il guide vers Lui celui qui se repent. »
(ar-Rad, 13 : 27).

Le Déploiement d’effort n’est qu’un moyen et la guidance n’est pas le résultat des
efforts de la personne, fut-elle prophète. Malgré tous les efforts du Saint Prophète r,
Abû Talib, qui savait la vérité mais succomba à son ego, ne fut pas guidé.

La mort d’Abû Talib plongea le Saint Prophète r dans une tristesse profonde.
Trois jours après cet évènement tragique, la mère des croyants, Khadîdjat’ul-
Qubra c, rendit elle aussi l’âme. Ainsi une nouvelle tristesse s’ajouta dans le cœur
du Saint Prophète r et des croyants.
Triste et en larmes, le Messager de Dieu r déposa sa chère épouse tant aimée
dans sa demeure éternelle.
Tout au long de sa vie, Khadîdja c avait été une conseillère fiable et une source
de réconfort pour le Messager de Dieu r dans la voie de l’islam.
Son décès le toucha tellement qu’il s’écria :
« Je ne sais pas sur laquelle de ces deux catastrophes touchant l’Oumma (la mort
de son oncle ou de son épouse) je dois m’apitoyer le plus. » (Yakubi, II, 35; Tabari, Tarih,
II, 229).

En raison de ces deux pertes ô combien douloureuses pour lui, la dixième année
de l’Apostolat prophétique fut nommée « l’année de la tristesse ».
Avec la mort de son oncle et de sa bien aimée épouse, le Saint Prophète r n’eut
plus aucun soutien ni refuge.
Son monde spirituel n’était désormais réservé qu’à son Seigneur.
Après tout, dans l’absolu, ce n’est que sur Dieu le Très-Haut que l’on peut
compter et faire confiance.
Par ailleurs, en perdant son père, sa mère et son grand-père à un âge précoce, le
Saint Prophète r avait déjà été en quelque sorte nourri par le Tout-Puissant.
La Dixième Année de la Prophétie 261

Khadîdja c fut une femme particulièrement vertueuse. L’Ange Gabriel u vint


une fois dire au Messager de Dieu r :
« Ô Messager de Dieu ! Khadîdja c vient vers toi avec une assiette de nourriture
dans sa main. Dès qu’elle arrivera, transmets-lui les bénédictions de son Seigneur
et de moi. Et annonce-lui un palais fait de perles qui l’attend au paradis, là où il n’y
aura ni bruit ni fatigue. » (Al Boukhari, Manaqibu’l-Ansar, 20)
Khadîdja c répondit ainsi à ce salut divin :
« Dieu Lui-même est la Paix ; c’est de Lui que vient la paix, et paix à Gabriel
aussi ! Et que la paix, la miséricorde et la bénédiction de Dieu soient sur toi, ô
Messager de Dieu ! »
Tout au long de sa vie, le Messager de Dieu r n’oublia pas son épouse bénie, lui
montrant à chaque fois sa reconnaissance et son respect.
Aïcha c raconte :
« Je n’ai jamais été plus jalouse des épouse du Prophète r que je l’étais de
Khadîdja c, alors que je ne l’ai jamais vue. Seulement, le Prophète r l’évoquait à
tel point qu’il sacrifiait un mouton, le coupait en morceaux, partageait les morceaux
entre nous et en envoyait aux amies de Khadîdja c, jusqu’à ce qu’une fois je lui
dise : « Comme s’il n’y avait dans cette vie que Khadîdja ! ». »
En guise de réponse, le Sceau des prophètes r commença à mentionner cha-
cune de ses vertus, disant :
« Elle était ainsi… et ainsi… et elle me donna des enfants. »
C’est ainsi que je me suis dit que plus jamais je ne parlerai d’elle en mal. » (Al
Boukhari, Manaqib’ul-Ansar 20; Adab 73; Muslim, Fadailu’s-Sahabah 74-76)

Un jour, Hala ibn Khuwaylid c, la sœur de Khadîdja c, demanda la permission


pour se rendre auprès du Messager de Dieu r.
À cet instant, celui-ci se souvint de Khadîdja c et s’exclama :
« Ô mon Dieu ! C’est la sœur de Khadîdja, c’est Hala bint Khuwaylid ! »
Aïcha c, jalouse une fois de plus, ne put s’empêcher de dire :
« Pourquoi mentionnes-tu encore le nom d’une vieille Qurayshite qui est
morte depuis longtemps ? Dieu ne t’a-t-Il pas donné mieux à sa place ? » (Al Boukhari,
Manaqib’ul-Ansar, 20)

En disant « mieux », Aïcha c parlait d’elle.


Estimant ses paroles inappropriées, le Messager de Dieu r lui répondit :
262 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Non, Dieu ne m’a pas donné mieux. Elle m’a cru quand les autres ont mécru,
elle m’a fait confiance quand tout le monde m’appelait menteur, elle m’a accordé ses
biens quand les gens m’en ont privé. De plus, Dieu m’a accordé une descendance par
son intermédiaire. »

Voyage à Ta’if
Après la mort de son oncle et de son épouse, les mauvais traitements envers le
Saint Prophète r augmentèrent. Les attaques perpétrées contre le Sultan des pro-
phètes r atteignirent un degré extrême de sauvagerie.
Cherchant quelque répit, le Messager de Dieu r décida de partir à Ta’if, une
ville située à environ 120km de La Mecque, accompagné de Zayd, et y demeurèrent
dix jours.
L’Envoyé de Dieu r y expliqua l’islam aux gens du pays et les invita à l’Unicité.
En rencontrant les dirigeants, il leur demanda d’abandonner les idoles et leur rap-
pela qu’ils étaient tous les serviteurs de Dieu. Nul, à ce moment, ne fut ignorant de
son message. Mais cet appel provoqua un violent orage au sein du peuple de Ta’if
qui était aussi idolâtre que les Qurayshites. Enfoncés dans leur train de vie égoïste,
pas même une personne ne répondit à son invitation.
Les harcèlements commencèrent d’abord par des moqueries et continuèrent
par de multiples insultes. Puis, un jour, ils alignèrent leurs esclaves des deux côtés
de la voie où le Messager de Dieu r était en train de marcher et commencèrent à
lui lancer des pierres. Cette lapidation continua jusqu’à la sortie de la ville. Et même
en dehors de la ville, certains esclaves continuèrent à le lapider. Les pieds de la
meilleure créature du monde baignèrent dans une mare de sang. Et Zayd c, bien
que grièvement blessé, tenta de le protéger avec son propre corps tout en s’écriant :
« Ô peuple de Ta’if ! Savez-vous que l’homme que vous êtes en train de lapider
est un Prophète ?! »
Avec beaucoup de difficultés, ils parvinrent à se réfugier dans un jardin qui
appartenait à un habitant de La Mecque. La terre et les cieux étaient tristes, les anges
étaient tristes, Gabriel, Michael et Israfil aussi.
Gabriel et les autres anges demandèrent au Tout-Puissant la permission de se
rendre auprès du Messager de Dieu r et lui dirent :
« Ô Messager de Dieu ! Ordonne et nous exterminerons ce peuple ! »
Mais au lieu de maudire ces gens, le Prophète de compassion et source de misé-
ricorde ouvrit ses mains et implora ainsi le Seigneur :
La Dixième Année de la Prophétie 263

« Ô Seigneur Dieu, je me plains à Toi de ma faiblesse, de mon peu de pouvoir et


du peu de considération que les gens ont pour moi, ô Toi Le Plus Miséricordieux des
miséricordieux, tu es mon Seigneur et celui des faibles. A qui m’abandonnes-tu ? A un
étranger qui m’attaque ou un ennemi de qui Tu m’as fait dépendre ? Si Tu n’es pas
en colère contre moi cela m’est égal. Ta clémence est plus généreuse envers moi. Je me
réfugie en Ton visage pour lequel les ombres se sont dissipées et qui a ajusté tout ce
qui concerne ce monde ici-bas et celui de l’au-delà, de faire tomber sur moi Ta colère
ou de me faire parvenir Ton désagrément. Je supporterai tout reproche jusqu’à ce que
Tu sois satisfait et il n’y a de pouvoir ni de puissance qu’en Toi. » (Ibn Hishâm, II, 29-30;
Haythami, VI, 35; Al Boukhari, Bad’ul-Khalq, 7).

Les propriétaires du jardin, membres de la tribu de Rabia, envoyèrent leur


esclave Addâs offrir un plat de raisins au Messager de Dieu r qui se reposait sous
un palmier.
Addâs offrit le plat à l’Être de lumière r et lui dit : « Je t’en prie, mange ! »
ƈ Ʃ ħƈ ùƈÖ « Bismillah ! » (Au Nom de Dieu !) et commença
Le Saint Prophète r dit ųÒ Ž
à manger.
Cette parole attira l’attention d’Addâs car il n’avait jamais entendu une telle
parole sortir de la bouche de quelqu’un.
« Ce mot n’est ni connu ni prononcé par les gens d’ici », marmonna t-il, puis il
ne put s’empêcher de lui demander :
« Tu es un homme différend ! Tu ne ressembles pas aux gens d’ici ! Qui es-tu
donc ? »
Le Messager de Dieu r lui répondit en le questionnant de même :
« Et toi, d’où est-ce que tu viens et quelle est ta religion ? »
Addâs répondit :
« Je suis de Ninive et je suis chrétien. »
Le Saint Prophète r dit :
« Alors tu es de la cité de Yunus ibn Matta ! »
Étonné, Addâs rétorqua :
« D’où connais-tu Yunus ? »
L’Être de lumière lui déclara alors :
« Yunus est mon frère. C’était un prophète u tout comme moi ! »
264 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

À l’écoute de ces paroles, le cœur d’Addâs s’enflamma de foi et de bonheur,


puis saisissant les mains du Saint Prophète r, il embrassa l’islam. » (Ibn Hishâm, II, 30;
Yaqubi, II, 36).

Quand ses maîtres commencèrent à le blâmer pour son choix, Addâs défendit
sa décision : « De toute ma vie je n’ai jamais rencontré un homme comme lui. Il
m’a dit des paroles que seul un prophète pouvait communiquer. » (Ibn Hishâm, II, 31).
Quel bonheur pour Addâs d’avoir entendu l’appel du Saint Prophète r au
moment où celui-ci traversait les moments les plus difficiles de sa vie et d’avoir saisi
l’occasion d’embrasser l’islam pour le réconforter. Le Messager de Dieu r devint si
heureux qu’il en oublia toutes les peines et souffrances subies. Là où Addâs embras-
sa l’islam, s’élève une mosquée qui porte son nom, et le jardin où il offrit du raisin
au Messager de Dieu r a été laissé tel quel.

Une miséricorde et une consolation uniques venues du Très-Compatissant


Aïcha c raconte :
« Je demandai un jour au Saint Prophète r s’il y avait un autre jour à part celui
d’Ohoud où il s’était senti dépourvu.
Il me répondit :
- Oui, j’ai eu de nombreuses tribulations de la part de ta tribu. Le pire de ces jours
fut le mal qui m’a été fait le jour d’Aqaba.80 De plus, lorsque j’étais à Ta’if, je voulus
me réfugier chez Abdiya’lil ibn Abduqulal, mais celui-ci refusa de m’accueillir (au
contraire, il utilisa ses esclaves pour me lapider jusqu’à ce que je baigne dans une mare
de sang). Puis je m’en retournai et marchai profondément chagriné. Je recouvrai mes
esprits lorsque j’atteignis un lieu nommé Kam’us-Saalib. En levant la tête, je vis un
nuage qui me faisait de l’ombre, et en regardant de plus près, j’aperçus l’Ange Gabriel
qui me dit :
- Dieu le Tout-Puissant sait ce que les gens de cette tribu t’ont fait et comment
ils ont refusé de te protéger. Pour cela, Il t’a envoyé l’Ange des Montagnes pour qu’il
agisse selon bon te semblera.
Sur ce, l’Ange des Montagnes me salua et me dit :
- Ô Muhammad ! Certes Dieu a entendu ce que t’ont dit ces gens. Je suis l’Ange
des Montagnes. Dieu le Tout-Puissant m’a envoyé pour que j’accomplisse ce que tu
m’ordonneras. Que veux-tu que je fasse ? Veux-tu que je les extermine en les écrasant
entre ces deux montagnes ?
80. Le jour d’Aqaba est le jour où le Messager de Dieu r s’arrêta à Mina, en un lieu nommé Aqaba, et
appela les gens à l’islam. Alors que certains entendirent son appel, d’autres, fort nombreux, répondirent
par des injures. Ce jour fut appelé par la suite « jour d’Aqaba » en référence à cet événement.
La Dixième Année de la Prophétie 265

Alors je lui répondis :


- Non, je veux seulement que Dieu fasse sortir de leur descendance des gens qui
L’adorent et ne Lui associent rien d’autre. » (Al Boukhari, Bad’ul-Khalq, 7; Muslim, Jihad, 111)
Le poète exprime l’affection du Tout-Puissant pour Son Envoyé :
Tu es un être si aimé de Dieu
Qu’Il sacrifierait le monde et tout ce qu’il contient.

Le voyage de Ta’if contient de nombreuses leçons :


1. L’importance de la prédication. Bien que cette année-là fût l’année de la
tristesse, le Saint Prophète r ne suspendit pas sa mission. Au contraire il continua
l’appel avec patience et conviction.
2. Malgré que les gens l’aient lapidé, le Messager de Dieu r ne les a pas mau-
dits. Ce fait démontre la compassion qui était la sienne mais aussi le comportement
que doit avoir tout prédicateur.
3. Celui qui invite à l’islam doit savoir s’autocritiquer, prier pour que les gens
trouvent le salut et ne jamais perdre espoir.
Quand le Messager de Dieu r voyait une faute, il s’en tenait responsable et
disait : « Que m’arrive t-il pour que je vous vois faire ceci et cela ! » (Voir Muslim, Salât
119; Abû Dâwud, Khatem 4, Adab 14).

Ainsi Salomon u quand il ne vit pas la huppe présente à l’assemblée dit :

ƈ Ĩ
ïƆ İƇ ïŽ ıƇ ĤŽ ÒĴòƆ ƆÈźƆ ĹĤÓ
Ɔ Ɔ
«…Puis il passa en revue les oiseaux et dit : ‹Pourquoi ne vois-je pas la
huppe? Est-elle parmi les absents ? » (an-Naml, 27 : 20).
4. Lors du voyage à Ta’if, l’adhésion d’Addâs à l’islam est très importante.
En effet, il fut un très grand réconfort pour le Messager de Dieu r. Cet évènement
nous apprend que quel que soit l’ampleur des tourments dans lesquels nous nous
trouvons, la guidance de tout individu doit nous réconforter.
5. Le prédicateur doit être un exemple par son comportement.
6. Celui qui prêche l’islam doit connaître les moyens d’interpeller les gens et
être cultivé. Comme ce fut le cas dans le cas de la conversation entre le Saint Pro-
phète r et Addâs, il doit savoir que dire au bon moment.
266 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un groupe de djinns acceptent l’islam après l’audition du Coran


Sur le chemin du retour, partant de Ta’if où, personne sauf Addâs n’avait accep-
té le message de l’islam, le Messager de Dieu r récitait quelques versets du Coran.
Un groupe de djinns qui passait par là l’avait écouté. Tous comprirent que ces
paroles ne pouvaient pas être autre chose que la Vérité et aussitôt ils témoignèrent
de leur foi en Dieu et en Son Messager r. Ensuite ils retournèrent auprès des leurs
en tant qu’émissaires de l’islam. (Ibn Saad, I, 212).
Ibn Abbâs raconte :
« Le Messager de Dieu r était avec quelques compagnons t en route pour la
Foire d’Ukaz. C’était au moment où il avait été interdit aux démons (de la popula-
tion des djinns) de prendre des nouvelles du ciel.81
C’est ainsi que des météorites furent projetées sur les esprits qui parce qu’ils
tentaient de récolter des nouvelles du ciel82, rentrèrent les mains vides auprès des
leurs. Ceux-ci leur demandèrent :
- Pourquoi êtes-vous revenus sans nouvelles ?
- Parce que nous avons noté qu’il y a à présent une barrière placée entre nous et
les cieux. Non seulement nous avons été incapables de récolter des nouvelles, mais
de plus nous avons été bombardés par des étoiles enflammées ; en conséquence nous
avons dû fuir, répondirent-ils.
- Un nouvel évènement a dû apparaître ! Allez parcourir la terre d’Est en Ouest
et revenez-nous avec des nouvelles à ce sujet, leur a-t-on dit.
Alors les divers groupes de djinns partirent dans différentes directions. Le
groupe qui se rendit à Tihama tomba sur le Messager de Dieu r qui à ce moment
dirigeait la prière de l’aube près de Nakhlah, sur le chemin de la Foire d’Ukaz.
Prêtant l’oreille aux versets récités, ils dirent :
- Ce doit être la chose qui nous empêche de collecter des nouvelles du ciel ! »
Puis, retournant auprès des leurs, ils firent ce compte rendu :
- Nous avons entendu un Coran merveilleux qui guide vers le droit chemin.
Jamais nous ne mettrons autre chose au même niveau et n’attribuerons d’associés à
notre Seigneur. Alors le Tout-Puissant révéla la sourate al-Djinn et informa le Saint
Prophète r de l’audition et de l’acceptation des versets par les djinns :
81. Les djinns avaient coutume de monter aux cieux pour écouter la Révélation. Quand ils entendaient un
mot, ils en rajoutaient quatre-vingt-dix-neuf. Un mot était correct et le reste ne l’était pas. Une fois le
Messager de Dieu r investi de son Apostolat prophétique, il leur fut désormais interdit d’y accéder.
82. Le terme shihab, en langue arabe, qui signifie signal flamboyant, est surtout utilisé pour décrire
la flamme qui apparaît dans le ciel simultanément avec une étoile filante. Des commentateurs
contemporains ont dit que le terme shihab-s (au pluriel) pourrait signifier météorites.
La Dixième Année de la Prophétie 267

Ó
 ×åƆ ĐÓĬÒóĜÓĭđĩƈ øÓĬÒÒij ƈ ĤÓĝĘīåƈ ĤÒīĨ ƈ óęĬďĩÝøÒįĬÒĵĤÒƈ ĵèIJ ƈ ÒģĜ
ƃ Ɔ ƃ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ žƈ Ž Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƪ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ƈ
Òïƃ èƆ ÒƆ ÓĭƈƆ Öž óƈÖĞƆ ƈóýŽ ƇĬīŽ ĤƆ IJ ƈ ƈ ƈ ïƈ ıĺ
Ɔ Ɔ įƈÖÓĭƪ ĨƆ ÓƆ ĘƆ ïüŽ óĤÒĵ
ƫ ĤƆ ÒĴ ŽƆ
« Dis : ‹Il m’a été révélé qu’un groupe de djinns prêtèrent l’oreille, puis
dirent : ‹Nous avons certes entendu une Lecture [le Coran] merveilleuse, qui
guide vers la droiture. Nous y avons cru, et nous n’associerons jamais personne
à notre Seigneur. » (al-Djinn, 72 : 1-2) ; (Al Boukhari, Tafsir, 72; Adhan, 105; Muslim, Salât, 149;
At Tirmidhi, Tafsir, 72/3324).

Dieu le Tout-Puissant exprime dans la sourate al-Ahqaf :

ÒijÝƇ āƈ ĬŽ ƆÒÒijƇĤÓĜƆ ĮIJ Ɔ đƇ ĩƈ ÝƆ ùŽ ĺƆ īžƈ åƈ ĤŽ ÒīƆ ĨÒ ƈ ĭĘóĀðÒƈ IJ


ƈ óęƆ ĬƆ ğƆ ĻĤƆ ÒÓ
Ƈ óƇ ąƆ èÓ
Ɔ ĩƪ ĥƆ ĘƆ ĪƆ ƆÒóŽ ĝƇ ĤŽ ÒĪij ƃ Ž ƆŽƆ Ɔ Ž Ɔ
ƈ ĢƆ ƈõĬŽ ƇÒÓÖÓÝĠÓ
īŽ Ĩ ƈ ƈ ĭƆ ĨijĜƆ ÓĺÒijƇĤÓĜƆ īĺ ƈòñƈ ĭŽ Ĩħ ƈıĨƈ ijĜƆ ĵĤƆ ÒÒ
ƈ Ĭƪ ÒÓ ƈ ijĤƪ IJĵąƈ ĜƇ ÓĩĥƆ ĘƆ
ƃ Ɔ ĭƆ đŽ ĩøÓ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ž Ž Ɔ Ɔ ƪ
ÓĭƆ ĨƆ ijŽ ĜƆ Óĺ ƅ ƈ
Ɔ ħĻĝÝƆ ùŽ Ĩ Ƈ ěĺƅ ƈóĈ Ɔ ĵĤƆ Òƈ IJ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ěžƈ éƆ ĤŽ ÒĵĤƆ ÒĴïıŽ ĺƆ įĺŽ ïƆ ĺƆ īƆ ĻŽ ÖÓ
ƈ ƈ
Ɔ ĩƆ ĤÓĜƃ ïž āƆ Ĩĵ
Ƈ øij Ɔ Ĩ
ƈ
Ƈ ïđŽ ÖƆ
ƅ Ĥƈ ƆÒÔÒ ƈ ƈ
ƈ ħġƇ ĤƆ óęƈ ĕŽ ĺįƈƈ ÖÒijƇĭĨƈ ƆÒIJųÒ ƈ
 ħĻ
 ƅ ñƆ ĐƆ īŽ ĨħŽ ĠƇ óŽ åƈ ƇĺIJ Ƈ ÖijƇĬðƇ īŽ Ĩ
Ɔ ħŽ ġƈ Ž Ž Ɔ Ɔ Ʃ ĵƆ ĐÒîÒij Ɔ ×ĻƇ äƈ ƆÒ
īŽ Ĩƈ įĤƆ ÷ĻĤƆ IJĂƈ òƆźÒŽ ĵĘ ƈ ƅõåƈ đĩƈÖ÷ĻĥƆ ĘƆ ųÒ ƈ ƈ Õåƈ ĺƆźīĨIJ
Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ž Ƈ Ɔ Ž Ʃ ĵƆ ĐÒî Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ
īĻƈ
ƅ ×Ĩ ƅ Ɔ Ę ƈ ğƆ Ñƈ ĤƆ IJƇÒÅÓĻĤƈ IJÒƆ įƈ ĬIJ
ƈ î
Ƈ ĢƆŻĄĵ Ƈ Ɔ Ž Ƈ
« (Rappelle-toi) lorsque Nous dirigeâmes vers toi une troupe de djinns pour
qu’ils écoutent le Coran. Quand ils assistèrent [à sa lecture] ils dirent : ‹Ecoutez
attentivement›... Puis, quand ce fut terminé, ils retournèrent à leur peuple en
avertisseurs. Ils dirent : ‹Ô notre peuple ! Nous venons d’entendre un Livre qui a
été descendu après Moïse, confirmant ce qui l’a précédé. Il guide vers la vérité et
vers un chemin droit. Ô notre peuple ! Répondez au prédicateur d’Allah et croyez
en lui. Il [Allah] vous pardonnera une partie de vos péchés et vous protégera
contre un châtiment douloureux. Et quiconque ne répond pas au prédicateur
d’Allah ne saura échapper au pouvoir [d’Allah] sur terre. Et il n’aura pas de pro-
tecteurs en dehors de Lui. Ceux- là sont dans un égarement évident. » (al-Ahqaf,
46 : 29-32).

Le Saint Coran mentionne aussi l’interdiction faite aux djinns d’écouter ce qui
se dit dans les cieux :
268 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ó×ıƇ üƇ IJÒ ïĺïƈ üÓøóèÛÑĥƈ ĨÓİÓĬïäijĘÅÓĩùĤÒÓĭùĩĤÓĬÒIJ


ƃ Ɔ ƃ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ƪƆ Ɔ
ƈ Ɔ ÒŽ ďƈ ĩƈ ÝƆ ùŽ ĺƆ īŽ ĩƆ ĘƆ ďƈ ĩŽ ùĥ ƈ ƈ ƈ
ÓĬƪ ÒƆ IJÒ Ɔ ÖÓƃ ıƆ üįƇ ĤƆ ïŽ åƈ ĺƆ Īź
Ɔ ïƃ ĀƆ òÓ ƪ ĤïƆ ĐÓĝƆ ĨÓ
Ɔ ıƆ ĭŽ ĨïƇ đƇ ĝŽ ĬƆ Óĭƪ ĠÓ
Ƈ Ĭƪ ÒƆ IJƆ
Òïƃ üƆ ò ƈ ƈ Ɔ ƈòƇÒóƭ üƆ ÒƆ Ĵ ƈòïŽ ĬƆ Ɔź
Ɔ ħŽ ıƇ Öƫ ò
Ɔ ħŽ ƈıƈÖîÒƆ òƆ ÒƆ ĦŽ ÒƆ ĂòŽ ƆźÒŽ ĵĘīŽ ĩƈƆ Öïĺ
« Nous avions frôlé le ciel et Nous l’avions trouvé plein d’une forte garde et
de bolides. Nous y prenions place pour écouter. Mais quiconque prête l’oreille
maintenant, trouve contre lui un bolide aux aguets. Nous ne savons pas si on veut
du mal aux habitants de la terre ou si leur Seigneur veut les mettre sur le droit
chemin. » (al-Djinn, 72 : 8-10).83
En apparence, le seul bénéfice du Messager de Dieu r consécutif à son voyage
à Ta’if fut sa rencontre avec Addâs. Mais en réalité, Dieu le Tout-Puissant offrit de
nombreuses bénédictions. Parmi celles-ci nous pouvons citer le sultanat des deux
mondes qui lui fut octroyé.
Avant même qu’il ne retourne à La Mecque, les djinns entendirent le Messager
de Dieu r réciter le Coran, ce qui inspira leur propre prédication dans leur com-
munauté respective. Un peu plus tard, le Tout-Puissant accorda à Son Bien-aimé
l’Ascension ou Mira’j, faisant de lui le sultan des cieux.

83. Mawlana Rumî ç décrit cet évènement de façon métaphorique :


« Les démons avaient coutume de monter aux cieux pour écouter ses secrets. Au moment de prendre la
fuite détenteurs d’un petit nombre de secrets, ils étaient chassés par des étoiles flamboyantes.
« Un Prophète a été envoyé, s’entendaient-ils dire, allez là où il se trouve et acquerrez de lui ce vous voulez.
« Si c’est une perle précieuse que vous recherchez, entrez dans les maisons par leurs portes.
« Frappez à l’anneau de la porte et attendez à son seuil… car pour vous et vos semblables il n’y a plus de
chemin menant aux cieux.
« De plus, en ce qui vous concerne, plus besoin de parcourir les cieux… car en effet tous les secrets ont été
transmis à Notre serviteur créé de terre.
« Si vous êtes sincères, allez en sa présence, après du Calife du Divin. Même si vous êtes une canne vide,
en sa présence et avec son aide, vous deviendrez une canne pleine de sucre. »
« Entrez donc dans les maisons par leurs portes. » (al-Baqara, 2 : 189) : À l’Époque de l’Ignorance,
et pendant les premières années consécutives à l’avènement de l’islam, quand quelqu’un était en état
de sacralisation (ihram), il ne pouvait pas pénétrer à l’intérieur d’une maison ou d’un jardin par sa
porte principale. Si c’était un citadin, il ouvrait une fenêtre sur le toit et entrait et sortait par là. Si
c’était un bédouin, il déchirait la partie arrière de sa tente et entrait et sortait par là. Ils agissaient ainsi
jusqu’à la fin de la sacralisation et considéraient cet acte comme une grande vertu et adoration. En
révélant le verset 189 de la sourate al-Baqara, le Tout-Puissant indiqua que pénétrer dans les maisons
en dehors de sa porte principale ne serait plus désormais un acte admissible. Plus tard ce verset fut
interprété par allégorie avec l’expression «Faire son travail comme il se doit». Mawlana Rumî ç en fait
ce commentaire soufi : « Pour trouver Allah référez vous aux gens qui lui sont proches.»
La Dixième Année de la Prophétie 269

Le Messager de Dieu r, puisqu’il avait quitté La Mecque de son propre chef,


avait besoin selon la coutume arabe de la protection d’un Mecquois. Ainsi, au retour
de Ta’if, sur le chemin qu’il avait emprunté entre Nahl et La Mecque, il rencontra
une personne près du Mont Hira qu’il envoya d’abord à Ahnas ibn Skarik, puis à
Suhayl ibn Amr et à Mutim ibn Adiyy, avec le message suivant :
« Peux-tu me prendre sous ta protection jusqu’à ce que j’accomplisse la mission
prophétique que le Seigneur m’a confiée ? »
Alors qu les deux premiers ne répondirent pas Mutim accepta et l’Être de
lumière r passa la nuit chez lui. Le matin suivant, Mutim appela ses fils et les
membres de sa tribu et ordonna :
« Armez-vous et restez près des piliers de la Ka’ba ! »
Lorsqu’ils arrivèrent à la Ka’ba, Mutim annonça aux Mecquois :
« Écoutez, ô Quraysh ! J’ai pris Muhammad sous ma protection ! Que personne
ne s’avise à le toucher ! »
Le Messager de Dieu r circumambula autour de la Ka’ba, accomplit deux uni-
tés de prière sous la protection de Mutim et de ses fils et retourna chez lui. (Ibn Saad,
I, 212; Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 182).

Des années plus tard, Mutim fut tué lors de la bataille de Badr, sans avoir pu
embrasser l’islam. Après la bataille, au milieu des discussions concernant le sort des
prisonniers mecquois, le Saint Prophète r exprima sa gratitude envers Jubayr, le fils
de Mutim :
« Si ton père était encore en vie et qu’il aurait demandé que les prisonniers
fussent libérés, je les aurais tous libérés sans demander la moindre rançon. » (Al
Boukhari, Khumus, 16, Ibn Hishâm, I, 404-406).

Ce sentiment de reconnaissance s’étendant même à un non-croyant, n’est-elle


pas le fruit d’une expression de la morale suprême !

Rencontre avec différentes tribus et leur invitation à l’islam


Après son retour de Ta’if, le Messager de Dieu r s’éloigna quelque peu du
peuple. Peu après, il reprit la prédication et retrouva des idolâtres plus brutaux que
jamais. Dieu le Tout-Puissant ordonna alors au Saint prophète r de rencontrer
d’autres tribus arabes et de les inviter à l’islam.
C’est ainsi que le Messager de Dieu r saisit l’occasion fournie par le mois du
pèlerinage à La Mecque pour visiter les foires d’Uzaz, de Majanma et de Zhu’l-
Majaz. Avant d’adresser une invitation à l’islam, il leur faisait toujours une lecture
du Saint Coran.
270 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Messager de Dieu r se rendait dans les camps de Banu Amir, Muharib,


Fazara, Ghassan, Murrah, Hanifa, Sulaym, Abs, Banu Nasr, Banu Baqqa, Kind, Kalb,
Haritha, Uzra et Houdarima, et les invitait à l’islam. Il leur demandait de l’aide pour
accomplir le devoir que lui a confié le Tout-Puissant. (Voir Ibn Saad, I, 216-217; Ahmed,
III, 322, 492; Ibn Kathir, III, 183-190).

Jabir84 rapporte :

« Pendant le mois du pèlerinage, le Messager de Dieu se présentait aux pèlerins


à Arafat et leur disait :

« Y a-t-il quelqu’un qui veuille m’emmener auprès de sa tribu ? Quraysh m’a


empêché de transmettre la parole de mon Seigneur. » (Abû Dâwud, Sunnah, 19-20/4734).

Malheureusement, personne ne s’avançait, ni pour accepter son invitation ni


pour l’aider. Au contraire, beaucoup lui tournaient le dos et avaient envers lui un
comportement froid et grossier.

Certains même se disputaient avec lui en lui disant :

« Ta tribu te connaît mieux que quiconque ! Pourquoi n’adhèrent-ils pas alors


à tes idées ? »

Le Messager de Dieu r leur répondait toujours avec justesse et persévérait dans


son appel à la Religion divine. (Ahmed, III, 322; Ibn Saad, I, 216).
84. Jabir ibn Abdallâh t est né à Médine seize années avant l’Hégire. Son père, Abdallâh ibn Amr t,
fut le premier Compagnon mort martyr lors de la bataille d’Ohoud. Forcé de rester en retrait pour
s’occuper de ses neuf sœurs, Jabir t ne fut pas en mesure de participer à des batailles tant que son
père était en vie. Après la mort de ce dernier à Ohoud, Jabir t prit une part active dans dix-neuf
batailles décisives avec le Messager de Dieu r. Il fut aussi le plus jeune participant lors du deuxième
serment d’Aqaba. Le Prophète de Dieu r avait une grande affection pour lui. Maintes et maintes
fois, le Saint Prophète r le fit monter derrière lui à dos de chameau et lui rendit visite quand il était
malade. Jabir t avait beaucoup de mal à payer les dettes que son père avait laissées derrière lui. Les
créanciers, dont la plupart étaient juifs, exigeaient sans cesse de lui un remboursement immédiat. Pire
encore, les récoltes cette année-là avaient été peu nombreuses. C’est alors que le Messager de Dieu r,
devant toutes les dates récoltées et empilées en tas, et avec la balance de ses mains bénies, commença
à rembourser les créanciers un par un. Non seulement Jabir t vit la totalité des dettes payées, mais tel
un miracle divin, la quantité de dattes ne diminua pas. Jabir faisait partie des « mukthirun », c’est-à-
dire ceux qui ont rapporté le plus de hadiths. Pour sa part, il en rapporta exactement 1540. Une fois,
il entendit qu’Abdallâh ibn Unays t avait rapporté un hadith du Messager de Dieu r mentionnant
que quiconque dérobait le droit d’un oppressé ne pourra entrer au paradis. Jabir t voulut écouter ce
hadith de la bouche du rapporteur, mais il avait déménagé à Damas. Promptement, Jabir t acheta
un chameau et prit, de Médine, la route de Damas afin de le rencontrer. Après un mois de voyage,
il atteignit enfin Damas, se rendit auprès d’Abdallâh t et écouta le hadith prononcé de sa propre
bouche. Jabir t perdit la vue à l’approche de sa mort et s’éteignit finalement à Médine, en l’an 78 de
l’Hégire, à l’âge de 94 ans.
La Dixième Année de la Prophétie 271

Quand une personne originaire de Mudar ou du Yémen se rendait à La Mecque


à l’occasion d’un pèlerinage ou d’une foire, les gens de sa tribu le mettaient en garde
de ne pas croire au Saint Prophète r :
« Attention ! Que surtout le jeune Qurayshite ne te détourne pas de ta reli-
gion ! » (Hakim, II, 681/4251.).
Un jour, à Mina, le Messager de Dieu r se rendit auprès des membres de la
tribu Thalaba. Quand il leur indiqua qu’il était le Messager de Dieu r, Mafruq ibn
Amr, un des plus influents de cette tribu, lui dit :
« Ô frère de Quraysh ! À quoi invites-tu les gens ? »
Le Messager de Dieu r alla s’asseoir près d’eux et dans le même temps Abû
Bakr t se leva pour faire de l’ombre à l’Être de lumière r qui déclara :
« Je vous invite à croire en l’unicité de Dieu qui n’a nul semblable, que je suis
l’Envoyé de Dieu, à me protéger et à m’aider jusqu’à ce que ma mission se termine.
En effet, les gens de Quraysh se sont opposés aux ordres de Dieu, ils ont démenti le
Messager de Dieu et ont préféré l’erreur à la vérité. Mais Dieu est au-dessus de tout et
mérite toutes les louanges ! »
Mafruq demanda :
« Ô frère de Quraysh ! À quoi d’autre nous invites-tu ? »
En réponse le Messager de Dieu r lut quelques versets de la sourate al-An’am :

ÓĬƃ ÓùƆ èŽ Òƈ īƈ ĺŽ ïƆ ĤÒƈ ijƆ ĤŽ ÓƈÖIJÓ Ɔ įƈƈ ÖÒijĠƇ ƈóýŽ ƇÜƪźƆÒħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ


Ɔ Ñƃ ĻŽ ü Ɔ ħŽ ġƇ Öƫ ò Ɔ ĦƆ óƪ èÓ
Ɔ Ĩ Ɔ ģƇ ÜŽ ƆÒÒijŽ ĤƆ ÓđƆ ÜƆ ģŽ ĜƇ
ÓĨ ƈ ƈ ħġƇ ĜƇ ôƇ óĬƆ īéĬƆ Ěƅ ƆŻĨÒƈ īĨ ƈ
Ɔ ûƆ èÒijƆ ęƆ ĤŽ ÒÒijÖƇ óƆ ĝŽ ÜƆ ƆźIJ Ɔ ħŽ İÓƇ ĺƪ ÒIJ
Ɔ Ž Ž Ƈ Ž Ž Ž ħŽ ĠƇ îƆ ƆźIJŽ ƆÒÒijĥƇ ÝƇ ĝŽ ÜƆ ƆźIJƆ
ħġĻ ĀIJħġĤƈ ðěƈ éĤÓƈÖźÒƈ ųÒĦóèĵÝƈ Ĥƪ Ò÷Ɔ ęŽ ĭĤÒÒij ĥƇ ÝƇ ĝŽ ÜƆ ƆźIJ Ɔ īƆ ĉƆ ÖÓ
Ɔ ĨƆ IJÓ
ƈ Ɔ
Ɔ ıƆ ĭŽ ĨóƆ ıƆ Č
Ž Ƈ ƪ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ž Ɔ Ž ƪ ƇƩ Ɔ ƪ Ɔ ƪ
ĮƇ ïƪ üƇ ƆÒēƆ ĥƇ ×ĺĵ ÝèīùèÒĵİĵ ƈ Ýƈ Ĥƪ ÓƈÖƪźÒƈ ħĻ ƈ Ýƈ ĻĤŽ ÒĢÓƆ ĨÒijÖóĝŽ ÜƆ ƆźIJĪij ƈ ƈ
ŽƆ ƪ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƇƆ Ɔ Ɔ ĥƇ ĝđŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ įƈÖ
ÒijƇĤïƈ ĐÓ ƈ ıđøIJƪźÒÓ
Ž ĘƆ ħŽ ÝƇ ĥŽ ĜƇ ÒðƆ ÒIJÓ
Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ
ƈ ùęŽ ĬƆ ėƇ ĥžƈ ġƆ ƇĬƆźćƈ ùĝƈ ĤŽ ÓƈÖĪÒ
ƃ Ž Ɔ õĻƆ ĩƈ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ģƆ ĻŽ ġƆ ĤŽ ÒÒijĘƇ IJŽ ƆÒIJƆ
 Ɔ óƇ Ġƪ ñƆ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ įƈƈ ÖħŽ ġĻ
 ĪIJ Ƈ Āƪ IJ ƈ ƈ Ʃ ïƈ ıđƈÖIJĵÖóĜƇ ÒðƆ ĪÓ
Ɔ ħŽ ġƇ ĤðƆ ÒijĘƇ IJŽ ƆÒųÒ ŽƆ Ɔ ƆŽ Ɔ ĠƆ ijŽ ĤƆ IJƆ
ħġƈ ÖĚóęÝĘģ×ùĤÒÒijđƈƇ ×Ýƪ ÜƆ ƆźIJ ƈ ƈ ƈ Ɔ Īƪ ƆÒIJ
Ž Ƈ Ɔ ƪ ƆƆƆ Ɔ Ƈ ƫ Ɔ Įij Ƈ đƈƇ ×ÜÓƪ ĘƆ ÓĩĻƃ ĝÝƆ ùŽ Ĩĵ
Ƈ ĈÒóƆ ĀÒñİ Ɔ
Ɔ ĝƇ Ýƪ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ įƈƈ ÖħŽ ġĻ
Īij Ƈ Āƪ IJ ƈ ƈƈ
Ɔ ħŽ ġƇ ĤðƆ įĥĻƈ×ø
Ɔ īŽ ĐƆ
272 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Dis : ‹Venez, je vais réciter ce que votre Seigneur vous a interdit: ne Lui
associez rien ; et soyez bienfaisants envers vos père et mère. Ne tuez pas vos
enfants pour cause de pauvreté. Nous vous nourrissons tout comme eux. N’ap-
prochez pas des turpitudes ouvertement, ou en cachette. Ne tuez qu’en toute jus-
tice la vie qu’Allah a faite sacrée. Voilà ce qu’ [Allah] vous a recommandé de faire
; peut-être comprendrez-vous. Et ne vous approchez des biens de l’orphelin que
de la plus belle manière, jusqu’à ce qu’il ait atteint sa majorité. Et donnez la juste
mesure et le bon poids, en toute justice. Nous n’imposons à une âme que selon
sa capacité. Et quand vous parlez, soyez équitables même s’il s’agit d’un proche
parent. Et remplissez votre engagement envers Allah. Voilà ce qu’Il vous enjoint.
Peut-être vous rappellerez-vous. ‹Et voilà Mon chemin dans toute sa rectitude,
suivez-le donc ; et ne suivez pas les sentiers qui vous écartent de Sa voie.› Voilà ce
qu’Il vous enjoint. Ainsi atteindrez-vous la piété. » (al-An’am, 6 : 151-153).
Mafruq demanda encore :
« Ô frère de Quraysh ! À quoi d’autre invites-tu ? Je jure que ces paroles ne sont
pas issues de la plume d’un homme ! Si c’était le cas, certes nous l’aurions reconnu. »
Le Saint Prophète r récita alors les versets suivants :

ƈ ƈ ÝĺÒƈ IJĪÓ ƈ Ģƈ ïŽ đĤŽ ÓƈÖóĨÉŽ ĺųÒ ƈ


ĵıƆ ĭŽ ĺƆ IJĵ
Ɔ ÖƆ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒĴðÎÓ Ɔ Ɔ ƈ ùƆ èŽ źÒŽ IJ Ɔ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ Īƪ Ò
Ɔ óƇ Ġƪ ñƆ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ħŽ ġƇ Ƈčđƈ ĺƆ ĵƈ ĕŽ ×Ɔ ĤŽ ÒIJ
ĪIJ ƈ
Ɔ ƈóġƆ ĭŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ÅÓýƆ éŽ ęƆ ĤŽ Òīƈ ĐƆ
« Certes, Allah commande l’équité, la bienfaisance et l’assistance aux
proches. Et Il interdit la turpitude, l’acte répréhensible et la rébellion. Il vous
exhorte afin que vous vous souveniez. » (an-Nahl, 16 : 90).
Mafruq dit encore :
« Ô frère de Quraysh ! Par Dieu, tu viens de m’inviter à la plus belle des
morales ! Ceux qui te traitent de menteur sont certes des calomniateurs. »
Hani et Musanna, d’autres hommes éminents de la tribu, livrèrent les mêmes
réponses, mais affirmèrent qu’ils ne pouvaient accepter l’offre tant qu’ils n’avaient
pas consulté les autres membres de la tribu. Ils déclarèrent en plus qu’ils avaient
passé une alliance avec les Perses et que ces derniers n’accepteraient sûrement pas
leur décision d’accepter l’islam.
Bien qu’au fond d’eux ils aient accepté l’islam, ils rejetèrent la proposition du
Messager de Dieu à cause de leurs intérêts personnels et par crainte de représailles.
(Ibn Asir, Usdu’l-Ghâba, V, 250-251; Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 187-189).
La Dixième Année de la Prophétie 273

Tariq ibn Abdallâh t raconte :


« Je vis une fois le Messager de Dieu r à la Foire de Zul’l-Majaz vêtu d’un habit
rouge et dire aux gens à voix haute :
« Ô hommes ! Dites « La ilaha illallah » (Point de divinité si ce n’est Allah) et
soyez sauvés ! »
Derrière lui se tenait un homme qui lui lançait des pierres tout en hurlant :
- Ne le croyez surtout pas, c’est un menteur !
Les pieds du Saint Prophète r étaient ensanglantés à cause des pierres qu’on
lui avait lancées.
Je demandai aux personnes présentes :
- Qui est celui-ci ?
On me répondit :
- C’est un jeune homme parmi les fils d’Abd al-Muttalib.
Alors je demandais :
- Et qui est celui qui le suit en lui jetant des pierres ?
Et la réponse fut :
- C’est son oncle Abû Lahab ! » (Hakim, II, 668; Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, III, 71).
Mudrik al-Azdi raconte un autre fait montrant les oppressions subies par le
Messager de Dieu r :
« Alors que j’accomplissais le pèlerinage avec mon père, nous rencontrâmes un
groupe de gens à la station de Mina. Je demandai à mon père :
- Quelle est la raison de ce rassemblement ?
Mon père me répondit :
- À cause d’un homme qui a abandonné la religion de sa tribu !
En m’approchant de plus près, je vis le Messager de Dieu r qui disait aux gens :
- Ô hommes ! Dites « La ilaha illallah » et soyez sauvés ! »
En réponse, certains lui crachaient au visage ou lui jetaient de la terre sur la tête,
d’autres l’insultaient. Cette situation continua jusqu’à midi.
À ce moment-là, une fille dont le cou était largement dénudé arriva, elle portait
un récipient d’eau et tenait un mouchoir à la main. Elle était en train de pleurer.
Le Messager de Dieu r prit le récipient, but l’eau et lava son visage et ses mains.
274 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ensuite il leva la tête et dit :


- Mon enfant ! Que ton foulard couvre ton cou ! N’aie aucune crainte au sujet de
ton père car on ne pourra ni le tuer ni le déshonorer !
J’appris par la suite que cette fille n’était autre que sa propre fille Zaynab c. »
(Ibn Athir, Usd’ul- Ghabah, V, 130; Haythami, VI, 21).

Les filles du Messager de Dieu r, qu’il s’agisse de Zaynab, de Fatima ou des


autres V, vécurent leur enfance et leur jeunesse pendant la plus difficile période de
l’islam. Elles furent aussi associées aux souffrances vécues par leur père et tous les
musulmans. Lorsque leur père allait prêcher l’islam, deux opportunités s’offraient à
elles : soit elles l’attendaient anxieusement devant la porte de leur demeure, soit elles
le suivaient pour tenter de le protéger.
Les honorables filles du Saint Prophète r continuèrent à l’assister même après
la mort de leur mère Khadîdja c et partagèrent toutes sa douleur et sa peine. Elles
étaient attristées par les oppressions que l’on faisait subir à leur père et versaient
beaucoup de larmes à cause de cela. Elles vécurent dans la crainte.
Fatima c essuyait le sang de son père et Zaynab c lui apportait de l’eau pour
qu’il se lave les mains et le visage.
Parmi les tribus que le Messager de Dieu r appela à l’islam lors de la Foire
d’Ukaz il y avait celle des fils d’Amir ibn Sa’saa.
« Je suis l’Envoyé de Dieu, dit-il aux membres de la tribu. Êtes-vous disposés à
m’offrir refuge et protection jusqu’à ce que ma mission prophétique s’achève ? Certes
je ne contraindrais aucun d’entre vous ! »
Ils lui répondirent :
« Sois sur que nous ne te chasserons pas et nous ne croirons pas en toi mais
nous te protégerons jusqu’à l’accomplissement de ta tâche ! »
À ce moment, un membre de la tribu, nommé Bayhara, arriva.
Ayant découvert l’identité du Messager de Dieu r, il envisageait déjà de gou-
verner sur tous les Arabes en s’appropriant cet homme de Quraysh.
Il demanda impudemment au Messager de Dieu r :
« Si nous te faisons allégeance et que Dieu t’accorde la victoire sur tes ennemis,
la royauté nous appartiendra-t-elle ? ».
L’Être de lumière r lui répondit :
« Toutes les affaires appartiennent à Dieu ! Et à Lui seul revient la décision ! »
Bayhara lui fit cette remarque :
La Dixième Année de la Prophétie 275

« Alors tu nous demandes de mettre notre vie en jeu pour toi contre tous les
Arabes et nous ne devrions pas recevoir la royauté pour cela ?! C’est une affaire
inconcevable ! »
Puis Bayhara s’adressa à sa tribu en vociférant :
« De toute cette foire, je n’ai jamais connu une affaire pire que la vôtre. Allez-y
donc et attirez-vous l’hostilité de tous les Arabes ! Mais sachez que c’est sa tribu qui
est mieux à même de le connaître, et si elle avait aperçu quelque bénéfice en lui,
certes elle l’aurait tiré avant tout le monde. ».
Puis il dit à l’Envoyé de Dieu r :
« Va-t-en immédiatement d’ici ! »
Au moment où le Messager de Dieu r s’apprêtait à monter sur son chameau,
le malheureux Bayhara frappa la poitrine de l’animal, ce qui provoqua la chute du
Saint Prophète r.
Témoin de cet horrible traitement qu’on lui faisait subir, Dubaa bint Amir c,
une femme musulmane, cria remplie d’amertume :
« Pour l’amour du ciel, ô fils d’Amir ! Comment pouvez-vous supporter de voir
le Messager de Dieu r ainsi abusé devant vos yeux sans bouger le petit doigt. »
Trois des fils de son oncle finirent par se lever et corriger Bayhara.
Suite à cet évènement, le Messager de Dieu r fit une invocation en leur faveur :
« Seigneur Dieu ! Accorde-leur Tes bénédictions ! »
Les bénédictions consécutives à cette invocation furent si grandes que non seu-
lement ces trois hommes embrassèrent l’islam, mais ils moururent martyrs.
La tribu avait un chef de file, empêché par la vieillesse de se rendre à La Mecque
à l’occasion du pèlerinage.
Quand il apprit ce qui s’était passé, il mit ses mains sur la tête et dit avec déses-
poir aux membres de sa tribu :
« Ô fils d’Amir ! Comment avez-vous laissé passer une telle occasion ? Par les
fils d’Ismaël, je jure qu’un homme qui se prétend prophète ne peut avoir tort ! Où
aviez-vous la tête à ce moment ? » (Ibn Hishâm, II, 33-34; Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 184; Ibn
Hajar, al-Isâba, IV, 353).

En dépit de tous les abus auxquels il devait faire face, le Messager de Dieu r
continua à inviter à la voie de la Vérité le restant des tribus présentes à la foire.
276 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Mariage avec Sawda


Notre mère Sawda c avait été l’épouse de Sakrân ibn Amr.
Tous deux firent partie des musulmans qui avaient émigré en Abyssinie.
Peu de temps après, Sakrân décéda là-bas.
Dévouée et engagée, Sawda avait reçu les compliments du Messager de Dieu r.
Il se maria ensuite avec elle dans le but de la sauver de la situation dans laquelle
elle se trouvait.
Hawla, l’épouse d’Othman ibn Mazun, joua un rôle important dans ce mariage.
En effet, c’est elle qui demanda au père de Sawda son accord pour ce mariage.
Celui-ci répondit :
« Certes, Muhammad serait un mari très honorable ! »
Mais comme Sawda c avait eu cinq ou six enfants (en bas âge) nés de son pre-
mier mariage, elle n’eut guère le courage de se marier avec notre Saint Prophète r.
Devant son hésitation, l’Être de lumière r lui en demanda la raison, ce à quoi
elle répondit :
« Comment pourrais-je hésiter alors qu’il n’y a personne de plus aimable que
toi ? Mais je crains que mes enfants ne te dérangent à longueur de journée par leurs
cris et leurs pleurs. Autrement, je serais plus qu’heureuse de me marier avec toi. »
(Ibn Saad, VIII, 53-57; Ahmad, I, 318-319; VI, 211; Haythami, IV, 270).

C’est ainsi que leur mariage fut célébré la dixième année de l’Apostolat prophé-
tique, pendant le mois de Ramadan.
Sawda c fit preuve d’un infini respect envers l’Être de lumière r et le servit
avec soin.
Elle devint son autre moitié, toujours présente à ses côtés dans les moments où
il en avait le plus besoin, et prit tendrement soin de ses filles qui avaient elles aussi
besoin d’affection maternelle.
277

LA QUATORZIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE

La réunion d’Aqaba
Il faisait nuit. Six hommes venus de Médine pour visiter la Ka’ba rencontrèrent
le Messager de Dieu r à Aqaba. Ils furent tout de suite frappés par l’éclat céleste qui
se dégageait de son visage et ne purent s’empêcher de s’exclamer : « Quel homme
admirable ! » Leurs cœurs se remplirent d’amour à son égard et leur joie prit une
dimension indescriptible. À ce moment, l’Être de lumière r se rapprocha d’eux afin
de les inviter à l’islam, conformément à sa mission prophétique. Il leur dit :
« Pouvez-vous vous asseoir un instant pour discuter ? »
Ces six chanceux Médinois affichèrent leur profond désir de converser avec un
homme aussi impressionnant. Ils formèrent un cercle autour du Noble Prophète r
comme des papillons attirés par une quelconque lumière. Le Messager de Dieu r
les appela à l’islam, leur récita quelques versets du Coran et les exhorta à accepter
le bonheur des deux mondes. Les Médinois avaient entendu de leurs ancêtres et de
leurs voisins juifs la venue d’un nouveau prophète. De ce fait, considérant l’invita-
tion du Saint Prophète r, ils se dirent entre eux :
« Camarades ! Par Dieu, Muhammad est le prophète dont les juifs nous mena-
çaient de sa venue ! Nous ne pouvons pas les laisser croire en lui avant nous ! »
Un seul regard sur le visage rayonnant du Saint Prophète r avait suffit aux
Médinois pour embrasser l’islam sans réserve et c’est ainsi que tous entrèrent dans
son cercle en prononçant la chahada.
Puis le Saint Prophète r leur demanda s’ils étaient en mesure de l’aider dans
le cas où la nécessité d’émigrer à Médine avec les croyants devait s’imposer. Les
premiers musulmans de Médine demandèrent un délai d’un an car l’hostilité entre
les tribus d’Aws et de Hazraj était au paroxysme. De ce fait, ils ne pouvaient pas
être d’un grand secours si les musulmans étaient amenés à émigrer cette année. En
promettant d’inviter les Médinois et de revenir en pèlerinage l’année d’après, ils
rentrèrent chez eux remplis de joie.
Nettoyés de la saleté de l’ignorance, ils étaient maintenant soulagés d’un far-
deau qui pesait sur leurs épaules et se sentaient aussi légers que des oiseaux. Dès leur
arrivée à Médine, ils commencèrent à inviter à l’islam et à expliquer à la population
locale la cause bénie du Saint Prophète r, si bien qu’il ne restait plus une habitation
dans laquelle il ne fut pas évoqué. (Voir Ibn Hishâm, II, 38; Ibn Saad, I, 219; Haythamî, VI, 40).
278 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le troisième Sharh’us Sadr : une préparation à l’Ascension (al-Mi’raj)


Durant la nuit d’al-Isra et d’al-Mi’raj, le Voyage Nocturne et l’Ascension, avant
que le Saint Prophète r ne rencontrât Dieu le Très-Haut, son cœur pur avait été
préparé pour accueillir une troisième fois les manifestations divines ; c’est ainsi que
sa poitrine fut remplie de foi et de sagesse. (Voir Al Boukhari, Salât, 1; Muslim, Iman, 263).
Le Messager de Dieu r raconte ainsi cet évènement :
« J’étais allongé près de la Ka’ba, en un lieu nommé Khatîm. Alors que j’étais
entre le sommeil et le réveil, quelqu’un vint, me fendit la poitrine de haut en bas, et
sortit mon cœur. Puis il prit une tasse en or remplie de foi et de sagesse, lava mon cœur
(avec de l’eau de zamzam), le remplit de foi et de sagesse puis le remit à sa place… »
(Al Boukhari, Bad’ul-Khalq 6; Anbiya 22, 43; Muslim, Iman 264).

L’Ascension : un cadeau spécial de Dieu à Son Bien-aimé


L’évènement dit « Le Voyage Nocturne » (al-Isra) eut lieu dix-huit mois avant
l’hégire.
Le cadeau divin constitué du Voyage Nocturne (al-Isra) et de l’Ascension (al-
Mi’raj) est un présent hors du commun qui dépasse la compréhension humaine. En
effet, des notions comme le temps et le lieu ont été supprimées ; un voyage dont la
vie de millions d’hommes ne suffirait pas se déroula dans un laps de temps défini.
Dieu le Très-Haut dit :

ĵāƆ ĜŽ ƆźÒŽ ïƈ åƈ ùŽ ĩƆ ĤŽ ÒĵĤƆ Òƈ ĦÒƈ óéƆ ĤŽ Òïƈ åƈ ùŽ ĩƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩ


ƈ ƃŻĻĤƆ Įƈ ïƈ ×đƈÖĴóøƆÒĴñƈ Ĥƪ ÒĪÓ
Ɔ éƆ ׎ øƇ
Ɔ Ž ŽƆ Ɔ Ž
óĻāƈ ×ĤŽ ÒďĻ ĩƈ ùĤÒijİįĬÒÓ ƈ ĭÜÓƈ ĺÒīĨ ƈ įĺ ƈóĭĤƈ įĤijèÓĭĠòÓÖĴñƈ Ĥƪ Ò
Ƈ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ ƆƆ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
« Gloire et Pureté à Celui qui de nuit, fit voyager Son serviteur [Muhammad],
de la Mosquée Al-Haram à la Mosquée Al-Aqsa dont Nous avons béni l’alentour,
afin de lui faire voir certaines de Nos merveilles. C’est Lui, vraiment, qui est
l’Audient, le Clairvoyant. » (al-Isra, 17 : 1).
Pour appuyer l’importance de cet évènement surprenant, le verset coranique
susmentionné débute par la glorification du Tout-Puissant.
Selon les exégètes, le mot « subhana » signifie que Dieu est exempt de toute
imperfection.
Par ailleurs, cette expression est aussi utilisée pour désigner l’ébahissement
devant la splendeur de la création de Dieu.
De manière succincte, ce mot signifie :
La Quatorzième Année de la Prophétie 279

1. L’éminence et la réalité de cet évènement miraculeux qu’est al-Isra, c’est-


à- dire une préparation des cœurs à pouvoir l’accepter en tant que tel. C’est aussi
protéger les hommes de vouloir assimiler Dieu à toute créature.
2. Pour ceux qui jugeraient L’Ascension comme quelque chose d’impossible,
il exprime le fait que Dieu le Tout-Puissant est exempt de tout attribut déficient.
Dans la suite du verset, l’attention est attirée par la nuit. En effet, al-Isra fut un
voyage nocturne. La plupart des révélations vinrent pendant la nuit.
Encore une fois, ce fut pendant la nuit que des évènements révolutionnaires
eurent lieu, qu’ils aient été bons ou mauvais.
De même, l’heure qui se situe avant l’aube, et que l’on nomme tahajjud, est
connue pour être un temps d’adoration spécifique.
La Mosquée Al-Aqsa et ses environs sont bénis et glorifiés dans le Coran. Nous
pouvons citer quelques-unes de ces bénédictions :
1. À la fois embellie par les bénédictions de ce monde et de l’au-delà, la Mos-
quée est entourée de verdure et de rivières.
2. Cet endroit a été le berceau de nombreux prophètes L et, par conséquent,
béni davantage par la Révélation divine.
3. L’évènement du Voyage Nocturne (al-Isra) a orné différemment ces lieux.
Enfin, au cours de ce voyage, le Messager de Dieu r fut témoin de nombreux
évènements extraordinaires.

Cette nuit-là, le Saint Prophète r dirigea la prière en compagnie de tous les


prophètes jusque-là envoyés à la Mosquée Al-Aqsa. (Ibn Saad, I, 214).
Abû Hurayra t raconte que le soir du Voyage on apporta deux récipients à
l’Envoyé de Dieu r. Le premier était rempli de vin et l’autre de lait. Après un coup
d’œil fugitif, le Saint Prophète r choisit de boire le lait.
Alors l’Ange Gabriel u s’écria : « Louange à Dieu, tu as été guidé vers la nature
primordiale (fitra) et ta communauté a été guidée, ô Muhammad. Si tu avais pris
le vin, ta communauté aurait été égarée. » (Muslim, Iman 272, Ashribah, 92; Voir aussi Al
Boukhari, Tafsir 17/3, Ashriba 1, 12; An Nasaï, Ashriba, 41).85

85. Le fait que l’islam soit une religion liée à la prédisposition naturelle a été confirmé par ces événements
que sont al-Isra et al-Mi’raj, témoignant ainsi que les livres célestes ne sont jamais divulgués aux gens
spirituellement corrompus et atteints de diverses maladies du cœur.
280 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Par conséquent, le Messager de Dieu r représente l’ensemble de sa commu-


nauté et sa source d’inspiration. Le lait ici symbolise la prédisposition naturelle (al-
fitra) tandis que le vin symbolise l’amour du monde d’ici-bas.
Le Coran déclare :

ĴijƆ ıƆ ĤŽ Òīƈ Đ ƈ ĨIJ
Ɔ ěƇ ĉĭŽ ĺÓ
Ɔ Ɔ Ɔ
« …. et il ne prononce rien sous l’effet de la passion… » (an-Najm, 53 : 3).
Par ce verset le Tout-Puissant nous informe qu’en matière de révélation, le
Saint Prophète r n’a jamais prononcé un seul mot de son propre chef.
Dieu gloire et louanges à Lui, est le Créateur absolu. C’est pour cela que le Saint
Prophète r se soumit entièrement à Lui. Ici, en lui faisant préférer le lait, Dieu le
Tout-Puissant veut guider Son Messager sur la voie de la vertu. Aussi, cet évènement
montre à quel point le Prophète Muhammad r est une grande bénédiction pour sa
communauté.
Lors de l’évènement d’al-Isra, le Saint Prophète r fut amené du Masdjid’ul-
Haram au Masdjid’ul-Aqsa, ayant eu ainsi l’honneur de survoler les cieux et d’ac-
complir l’Ascension (al-Mi’raj).
Guidé par l’Ange Gabriel u le Messager de Dieu r se rendit jusqu’au Sidrat’ul-
Muntaha, le Lotus de la Limite.
La plus noble des créatures r raconte cet évènement comme suit :
« Alors que j’étais près de la Ka’ba, en un lieu nommé Khatîm, me trouvant entre
le sommeil et l’éveil, je vis Buraq à mes côtés. C’était un animal de couleur blanche,
plus grand qu’un âne, mais plus petit qu’un mulet. Il était capable de poser ses sabots
à l’extrême limite où se portait le regard. Porté par lui et accompagné par Gabriel,
je m’élevai jusqu’aux portes des régions célestes. Gabriel demanda l’ouverture des
portes :
- Qui est-ce ? demanda-t-on.
- C’est Gabriel.
- Et qui t’accompagne ?
- Muhammad.
- A-t-il reçu l’invitation divine ?
- Oui.
- Dans ce cas, bienvenue ! Quelle merveilleuse visite !
La Quatorzième Année de la Prophétie 281

Les portes s’ouvrirent alors et je vis Adam u qui me souhaita la bienvenue et


invoqua Dieu en ma faveur.
Ensuite je fus porté au second ciel. Gabriel u demanda à ce que l’on nous ouvre.
On nous ouvrit et je vis tout de suite les deux cousins maternels : Jésus le fils de
Marie u et Jean-Baptiste u, le fils de Zacharie u qui me souhaitèrent la bienve-
nue ainsi que le bien.
Puis je fus porté au troisième ciel et Gabriel u demanda aussi la permission d’y
pénétrer. On nous ouvrit et je trouvai aussitôt Joseph u auquel on avait assigné la
moitié de la beauté humaine.
Au quatrième ciel nous rencontrâmes Enoch u, au cinquième Aaron u et au
sixième ciel Moïse u nous attendait.
- Frère vertueux, bienvenue ! Ô Prophète vertueux, bienvenue ! dit-il.
Mais dès que nous continuâmes notre chemin, il se mit à pleurer.
- Pourquoi pleures-tu ? lui demanda-t-on.
- Je pleure parce que le jeune homme qui est devenu prophète après moi aura une
plus grande communauté qui ira au paradis, répondit-il. 86
Puis Gabriel u m’emmena au septième ciel où nous rencontrâmes un autre
homme.
-Salue donc ton père Abraham u! me demanda Gabriel u.
Je le saluai et Abraham u me dit :
- Ô fils vertueux, ô Prophète vertueux, bienvenue !
Puis il poursuivit :
- Ô Muhammad ! Transmets mes salutations à ta communauté et dis-lui que la
terre du paradis est très belle, que ses eaux sont très douces et que sa surface est très
large. Demande-leur d’y planter beaucoup d’arbres. Les arbres du paradis sont plantés
en disant simplement : « Subhanallah wa’l-hamdu lillah wa la ilaha illallahu wallahu
Akbar » : (Gloire et Louange à Allah, il n’y a pas de divinité si ce n’est Allah et Allah
est le plus grand).
Puis je fus porté jusqu’à un Arbre dont les fruits étaient aussi gros que les réci-
pients originaires de la région du Hejr au Yémen et les feuilles aussi grandes que des
oreilles d’éléphants. Gabriel me dit :
- Et voici le Sidrat’ul-Muntaha (le Lotus de la Limite extrême) !
86 Les pleurs de Moïse u ne sont pas liés à la jalousie, mais plutôt à la tristesse de n’avoir pas pu at-
teindre cet état de perfection.
282 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il y avait aussi quatre fleuves : deux cachés et deux visibles.


- Qu’est-ce que cela, ô Gabriel u ? ai-je demandé.
- Les deux rivières cachées sont des fleuves qui appartiennent au paradis ; quant
aux deux autres visibles, ce sont le Nil et l’Euphrate. »87 (Al Boukhari, Bad’ul- Khalq, 6 ;
Anbiya, 22, 43 ; Manaqib’ul-Ansar, 42; Muslim, Iman, 264 ; At Tirmidhi, Tafsir, 94 ; Da’wat, 58 ; An
Nasaï, Salât, 1 ; Ahmad, V, 418).

Après avoir atteint le Sidrat’ul-Muntaha, Gabriel u s’écria :


- Ô Messager de Dieu ! Notre compagnie s’arrête là, car à partir d’ici tu iras seul !
Le Messager de Dieu r demanda :
- Pourquoi ô Gabriel u?
Gabriel u répondit :
- Le Tout-Puissant m’a demandé de t’accompagner jusqu’ici, parce que si
j’avançe encore d’un pas, je serais réduit en cendres ! (Razi, XXVIII, 251).
À partir de cet endroit, le Noble Prophète r poursuivit seul le reste du voyage.
Il fut témoin de manifestations extraordinaires et surtout honoré par la vision du
Tout-Puissant.
Décrire cette expérience unique et extraordinaire est aussi impossible que de
décrire une vérité qui dépasse l’imagination et la compréhension humaines. Les
manifestations dont la véritable nature reste un secret éternel entre le Tout-Puissant
et Son Bien-aimé eurent lieu en dehors de nos perceptions visuelles dans l’alam’ul-
ghayb, le monde suprasensible.
Cela dit, ces secrets magnifiques manifestés entre Dieu le Tout-Puissant et son
Noble Prophète r expriment à ceux qui reçoivent la Révélation toute la puissance,
la beauté et la majesté du Créateur.
De plus, l’Ascension (al-Mi’raj) fut un moyen divin et efficace pour que le cœur
du Saint Prophète r ne connût plus le chagrin consécutivement aux cruautés qu’il
endura à Ta’if, en faisant place au bonheur.
Le Mi’raj est un évènement tel, au-delà de l’espace et du temps, qu’il est impos-
sible à la compréhension humaine d’appréhender son contenu. Forcer l’imagination
dans le but d’appréhender ces questions délicates est d’ailleurs fortement déconseillé.
87. Selon un point de vue, le témoignage du Saint Prophète r concernant le Nil et l’Euphrate signifie
que l’islam allait fleurir sur terre et qu’il deviendra souverain sur les terres fertiles où coulent les
deux fleuves. Ces régions seront donc sauvées de l’idolâtrie des Perses et du dogme de la Trinité que
confessent les Byzantins. Et pour les générations à venir, les habitants de ces zones deviendront les
porte-drapeaux du tawhid et prêteront un service inestimable à l’islam.
La Quatorzième Année de la Prophétie 283

En résumé, au cours de l’Ascension, une fois présent dans le royaume sans


dimension du Tout-Puissant, le Messager de Dieu r reçut un cadeau divin et telle-
ment exceptionnel qu’il surpassa tous ceux qui avaient été octroyés aux prophètes
antérieurs.
C’est ainsi qu’il connut la manifestation ainsi décrite dans le Saint Coran :

ĵĬƆ îŽ ƆÈIJŽ ƆÈīƈ ĻøƆ ijŽ ĜƆ ÔÓ


Ɔ ĜƆ ĪÓ
Ɔ ġƆ ĘƆ
Ž
« Et fut à deux portées d’arc, ou plus près encore. » (an-Najm, 53 : 9).
En dépit d’appartenir aux grands prophètes élus, Moïse u s’était tout bon-
nement évanoui à la vue d’une infime lumière divine qui s’était manifestée sur la
montagne Tur.
Par conséquent, nous sommes à même de réaliser quel aurait pu être le rang
sublime accordé au dernier des prophètes r lorsqu’il rencontra le Tout-Puissant.
Certes il fut demandé à Moïse u d’ôter ses chaussures en se déplaçant dans
la vallée sacrée afin d’être honoré et de profiter pleinement des bénédictions qui s’y
trouvaient. Alors que durant la nuit de l’Ascension il fut dit au Messager de Dieu r :
« Ô Mon Bien-aimé ! Garde tes chaussures en te déplaçant dans les plus Hauts
Cieux afin qu’ils soient honorés par leur poussière et que la lumière des cieux soient
bénie par ta présence ! » (Bursawî, V, 370).
Le poète Kemal Edib Kürkçüoğlu exprime comme suit la joie et l’excitation des
cieux quant à l’Ascension du Saint Prophète r :
La nuit du Mi’raj, en contemplant son visage,
Et en signe de gratitude, les cieux se prosternèrent…

Le Tout-Puissant fait ainsi la description de l’Ascension dans le Coran :

Ɔ ðƆ Òƈ ħƈ åŽ ĭĤÒ
ĴijƆ İÒ ƪ IJƆ
« Par l’étoile à son déclin ! » (an-Najm, 53 : 1).88
88. Les commentateurs ont fourni des explications différentes en ce qui concerne l’étoile (an-najm) par
laquelle jure le Tout-Puissant. Parmi les plus importantes d’entre elles se trouve l’explication selon
laquelle « l’étoile » en question serait le Messager de Dieu r lui-même ou bien les versets coraniques
révélés progressivement. À la lumière de cette constatation, le serment peut signifier :
1. Soit Muhammad Mustafâ r qui a accompli l’Ascension (al-Mi’raj).
2. Soit le moment de la divulgation de chaque oracle divin pendant la révélation du Saint Coran.
284 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La sourate commence par un serment afin de souligner la vérité de l’Ascension


contre les éventuelles dénégations des non-croyants.
Après ledit serment est soutenu comme suit :

ĵèij ƈ ƈ ƈ ĨIJĴijĔƆ ÓĨIJħġƇ ×èÓ ƈ


Ɔ ƇĺĵƄ èŽ IJ
Ɔ ƪ źÒijƆ İƇ ĪŽ ÒĴijƆ ıƆ ĤŽ Òīƈ Đ Ɔ ěƇ ĉĭŽ ĺÓ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ā Ɔ ģƪ ĄÓ
Ɔ ĨƆ
ĵĥƆ ĐŽ ƆźÒŽ ěƈ ĘƇ Ƈ źÓŽ Öƈ ijƆ İƇ IJĴ ƅ ƈ Ƈ ïƈ ü
Ž ĘƆ Øóƪ ĨIJðƇ ĴijƆ ĝƇ ĤŽ Òïĺ
Ɔ ijƆ ÝƆ øÓ Ɔ įƇ ĩƆ ĥƪ ĐƆ
« Votre compagnon ne s’est pas égaré et n’a pas été induit en erreur et il ne
prononce rien sous l’effet de la passion ; ce n’est rien d’autre qu’une révélation
inspirée que lui a enseigné [L’Ange Gabriel] : à la force prodigieuse, doué de
sagacité ; c’est alors qu’il se montra sous sa forme réelle [angélique], alors qu’il
se trouvait à l’horizon supérieur. » (an-Najm, 53 : 2-7).
Dans ce verset, le mot « istiwa » signifie englober, encercler et confirmer.
La plupart des exégètes affirment que l’Ange Gabriel u est le sujet du verbe
et ont tendance à l’attribuer au Saint Prophète r. Dans ce cas « istiwa » exprime la
valeur, la gloire, le rang et le niveau de Messager de Dieu r.
C’est-à-dire qu’il s’est d’abord élevé au plus haut des horizons :

ĵĤƪ ïƆ ÝƆ ĘƆ ÓĬƆ î
Ɔ ħƪ Ƈà
« Puis il se rapprocha et descendit encore plus bas… » (an-Najm, 53 : 8).
C’est-à-dire que l’Être de lumière r fut élevé par attraction divine et davantage
par rapport au lieu et au rang où il se trouvait.
Ainsi donc, durant l’Ascension, le Saint Prophète r s’était non seulement élevé
aux cieux, mais aussi rapproché de son Seigneur.
Ensuite l’attraction divine s’amplifia de plus en plus jusqu’à ce qu’il passe subi-
tement de l’autre côté des horizons :

ĵĬƆ îŽ ÒƆ IJŽ ÒƆ īƈ ĻøƆ ijŽ ĜƆ ÔÓ


Ɔ ĜƆ ĪÓ
Ɔ ġƆ ĘƆ
Ž
« Et fut à deux portées d’arc, ou plus près encore. » (an-Najm, 53 : 9)
Dans le verset, l’expression ĵĬſ îŽ ƆÒ IJŽ ƆÒ īƈ ĻøƆ ijŽ ĜƆ ÔÓ
Ɔ ĜƆ « deux portées d’arc, ou plus près
Ž
encore » est une comparaison utilisée pour exprimer une réalité suprasensible en
termes sensoriels.
La Quatorzième Année de la Prophétie 285

Pour montrer la conclusion d’un accord avant l’avènement de l’islam les Arabes
avaient coutume de placer conjointement l’un à côté de l’autre deux arcs et tiraient
une flèche unique avec les deux. Ainsi donc, cette entente exprimait l’unité et la com-
plémentarité ; si l’une des parties était en accord ou en colère, l’autre partie s’enga-
geait à suivre l’autre sans conditions.
Par conséquent, cette proximité, aussi bien physique que spirituelle, décrit
comme étant « qaba qawsayn », ou la mesure de deux portées d’arc, est une réalité
sublime transcendant la condition humaine.
À cet instant, le Prophète Muhammad Mustafâ r devint si proche de son Sei-
gneur que tous les moyens cessèrent d’être et cela d’une manière directe :

ƈƈ
ĵèſ IJŽ ƆÈÇĨ Ɔ Ĥſ Ìƈ ĵƁ èſ IJŽ ƆÉĘƆ
Ɔ Įï׎ Đĵ
« Il révéla à Son serviteur ce qu’Il révéla. » (an-Najm, 53 : 10).
Cette révélation peut être explicitée de la façon suivante :
1. La salât. En effet, l’un des plus importants aspects de l’Ascension fut l’établis-
sement des cinq prières quotidiennes et obligatoires. Sur les conseils du prophète
Moïse u le Saint Prophète r obtint du Tout-Puissant que les cinquante prières
quotidiennes fussent ramenées à cinq. C’est ainsi que Dieu le Très-Haut offrit à la
communauté de Muhammad r la récompense de cinquante prières pour cinq ac-
complies. Puis Dieu, Exalté soit-Il, donna cet ordre :
« Chaque fois que Mon serviteur a l’intention d’accomplir une bonne action mais
ne met pas sa pensée à exécution, elle lui est inscrite comme une bonne action, mais s’il
la met à exécution, il lui est inscrit dix bonnes actions.
Quiconque veut commettre une mauvaise action mais finalement ne la met pas
à exécution, aucun péché ne lui sera inscrit. S’il commet la mauvaise action, un seul
péché sera alors inscrit ! » (Muslim, Iman, 259).
Grâce aux plaidoyers répétés du Saint Prophète r, le Tout-Puissant réduisit de
cinquante à cinq le nombre de prières quotidiennes, comme l’explicite un fameux
hadith. Cela signifie qu’initialement l’homme devait prier et adorer son Créateur
cinquante fois par jour, ceci faisant partie du hukukullah, c’est-à-dire des droits du
Créateur. Mais par la grâce de Dieu le Tout-Puissant, cela fut, avec le même bénéfice,
diminué d’un dixième nononbstant le fait que le verset coranique suivant déclare:

ƈ ïƇ ×đĻĤƈ źƈƪ Ì÷ĬŸÒ


ĪIJ
ƇŽƆ Ɔ īƪ åƈ ĤŽ ÒÛ
Ɔ ƈ Ž IJ Ƈ ĝŽ ĥƆ ìÓ
Ɔ ĨƆ IJƆ
286 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Je n’ai créé les djinns et les hommes que pour qu’ils M’adorent. » (ad-Dariyat,
51 : 56)

Ce verset signifie qu’adorer le Créateur doit être l’activité essentielle de l’homme.


Dieu le Tout-Miséricordieux a réduit cette responsabilité à hauteur de la capacité
du plus faible homme. Cela ne signifie pas qu’il faille ne se restreindre qu’aux cinq
prières quotidiennes puisque ceux qui le souhaitent peuvent en exécuter davantage.
C’est pour cela qu’en plus des cinq prières obligatoires, les croyants fervents accom-
plissent des prières surérogatoires telles que la prière d’ad-duha, al-ishraq, al-awaw-
bin et particulièrement la prière de la nuit nommée at-tahajjud.
Ainsi donc, consécutivement aux demandes répétitives de l’Envoyé de Dieu r
et afin que les hommes puissent accomplir avec plaisir et aisance l’ordre de Dieu, ces
prières furent ramenées à cinq par jour.
2. Cette promesse a été donnée au Messager de Dieu r :
« Aucun prophète ni aucune communauté antérieure n’entrera au paradis avant
toi ! » (Razi, XXVIII, 248)
3. Les deux derniers versets de la sourate al-Baqara furent révélés.
Un hadith rapporté par Muslim stipule :
« Au cours du Mi’raj, le Messager de Dieu reçut trois bénédictions divines : les
cinq prières quotidiennes, la fin de la sourate al-Baqara et la bonne nouvelle du par-
don des péchés majeurs commis par les croyants à l’exception de l’associationnisme… »
(Muslim, Iman, 279)

Ceci dit, il n’y a que Dieu et Son Messager r qui connaissent le mieux la nature
de ladite « révélation » de l’Ascension. Il est évident ici que le Saint Prophète r a bel
et bien vécu l’expérience de l’Ascension, non pas comme un rêve, mais comme une
vérité soutenue par sa conviction la plus profonde.
En d’autres termes Dieu le Tout Haut affirme :

ĴóĺÓ ĨĵĥĐįĬIJòÓĩÝĘÒĴÒòÓĨîÒËęĤÒÔñĠÓĨ
ƆƆ Ɔ Ɔ Ɔ ƇƆ Ƈ Ɔ ƇƆƆ ƆƆ Ɔ Ƈ Ɔ ƇŽ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« Le cœur n’a pas menti en ce qu’il a vu. Lui contestez-vous donc ce qu’il
voit? » (an-Najm, 53 : 11-12).
Après avoir observé d’innombrables manifestations et événements exemplaires,
rencontré son Seigneur la nuit du Mi’raj, Le Prophète d’Allah r revint de cette
position spéciale qu’aucun serviteur ne pouvait atteindre et revit l’Ange Gabriel u
dans sa forme originale à l’endroit même où ils s’étaient séparés lors de l’ascension le
Sidrat’ul-Muntaha.
La Quatorzième Année de la Prophétie 287

Le Saint Coran rapporte ainsi cet évènement :

ƈ óìŽ ƇÒÙƃ ĤƆ õĬƆ ĮƆÒòïŽ ĝƆ ĤƆ IJ


ƈ ïƆ ĭŽ ĐĴ
ĵıƆ ÝƆ ĭŽ ĩƇ ĤŽ ÒØƈ òƆ ïŽ ø
Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ
« Il l’a pourtant vu, lors d’une autre descente, près de la Sidrat’ul-Muntaha. »
(an-Najm, 53 : 13-14).

Dans ce verset il est indiqué que le degré du Messager de Dieu r est supérieur
à celui de Gabriel u. En effet, celui-ci ne devait pas dépasser la limite où il fit
remarquer « si j’avançais encore d’un pas, je serais réduit en cendres », alors que le
Saint Prophète r était allé beaucoup plus loin. Ceci est rendu d’autant plus évident
par la nouvelle rencontre du Saint Prophète r avec Gabriel sur le chemin du retour.

ĵýƆ ĕŽ ĺÓ ƈ ƈ IJÉŽ ĩĤŽ ÒÙƇ ĭäÓİƆ ïƆ ĭŽ Đƈ


Ɔ ĨƆ ØƆ òƆ ïŽ ùĤÒĵ
ž ýƆ ĕŽ ĺƆ ðŽ ÒĴ Ɔ Ɔ ƪƆ
« Près d’elle se trouve le jardin de Maawa : au moment où le lotus était cou-
vert de ce qui le couvrait. » (an-Najm, 53 : 15-16).
On avait demandé au Messager de Dieu r :
« Ô Messager de Dieu ! Qu’est-ce qui enveloppait le Sidrat’ul-Munataha ? »
Et lui de répondre :
« Des hélices en or le couvrait et sur chacune de ses feuilles un ange invoquait
Dieu, Exalté soit-Il. » (Tabari, XXVII, 75; Muslim, Iman, 279).
Selon Ibn Abbâs t Dieu le Tout-Puissant récompensa Moïse u par la Parole,
Abraham u par l’Amitié et Muhammad Mustafâ r par l’honneur de la Vision
Divine dont la nature nous restera à jamais inconnue à jamais. (Tabari, XXVII, 64).
En présence du Bien-aimé, il est du principe de la courtoisie (adab) que les yeux
soient fixes. En effet, lors de ce voyage extraordinaire :

Ĵó×ġƇ ĤŽ Òįƈƈ Öž ò ƈ ƈ
Ɔ ÚÓĺƆ ÒƆ īŽ ĨĴÒƆ ò
Ɔ ïŽ ĝƆ ĤƆ ĵĕƆ Ĉ
Ɔ ÓĨƆ IJ
Ɔ óƇ āƆ ×Ɔ ĤŽ ÒĒƆ ÒôÓ
Ɔ ĨƆ
ƆŽ
« La vue n’a nullement dévié ni outrepassé la mesure. Il a bien vu certaines
des grandes merveilles de son Seigneur. » (an-Najm, 53 : 17-18).
Comme mentionné dans ces versets du Coran, le Noble Prophète r a été auto-
risé à passer au-delà du Sidrat’ul-Muntaha, au-delà duquel personne, y compris
Gabriel u, n’avait franchi cette limite. Cette union divine fut simplement décrite
comme « deux portées d’arc, ou plus près encore » dont la véritable nature est un
secret pour l’entendement humain.
288 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Durant cette union, le Sultan des prophètes r fut témoin de vérités tellement
grandes et absolues de la divinité du Tout-Puissant que la moindre parole serait inu-
tile, car tous ces signes divins ont été contemplés par le biais de la haute spiritualité
de l’Envoyé de Dieu r.
Ici, la plupart des exégètes ont déclaré que c’est avec l’œil du cœur que le Saint
Prophète r vit le Tout-Puissant. (Tabari, XXVII, 63)
Ibn Abbâs t rapporte que le Saint Prophète r a dit :
« J’ai vu Dieu le Tout-Puissant ! » (Ahmad, I, 285; Haythami, I, 78).
Dans un autre récit alors qu’on lui avait demandé :
« As-tu vu le Seigneur ? »
Le Messager de Dieu r répondit :
« J’ai vu une lumière ! » (Muslim, Iman, 292).
Seul Dieu, gloire à Lui, connaît la vérité à cette question…89

Parmi les quelques récits rapportés par l’Envoyé de Dieu r concernant le


Voyage Nocturne et l’Ascension, nous pouvons en citer quelques-uns :
Au cours du Mi’raj, le Messager de Dieu r vit un groupe de gens qui avaient
les lèvres gonflées, comme celles des chameaux. Deux anges avaient pour mission de
couper leurs lèvres et de remplir leurs bouches de pierres.
Le Saint Prophète r demanda :
« Qui sont-ils, ô Gabriel ? ».
Gabriel u répondit :
« Ces gens ont usé à tort des biens des orphelins. » (Tabari, XV, 18-19).
Puis le Messager de Dieu r croisa un autre groupe qui se griffait le visage et la
poitrine avec leurs ongles en cuivre.
Le Saint Prophète r demanda une nouvelle fois :
« Qui sont-ils, ô Gabriel ? ».
Gabriel u répondit :
89. L’explication des versets coraniques relatifs à l’Ascension (Mi’raj) est tirée de l’ouvrage de Elmalılı
Hamdi Yazır : « Hak Dîni Kur’ân Dili ».
La Quatorzième Année de la Prophétie 289

« Ces gens qui ont joué avec l’honneur et la dignité d’autres gens en colportant
sur eux toutes sortes de commérages et de médisances. » (Abû Dâwud, Adab, 35/4878)
Le Saint Prophète r vit aussi des fornicateurs manger des cadavres, des usu-
riers affligés et leurs ventres gonflés, des femmes qui avaient tué les enfants qu’elles
avaient conçus par voie de fornication, misérablement pendues par leurs seins ou à
l’envers par leurs pieds. (Voir Tabari, XV, 18-19).
C’est pour ces raisons que l’Être de lumière r fit une fois cet avertissement :
« Si vous saviez ce que je sais, vous ririez moins et pleureriez davantage ! » (Al
Boukhari Tafsir, 5/12).

En outre, relatant l’une de ses visions, le Messager de Dieu r affirma :


La nuit du Mi’raj, je vis ces mots inscrits sur la porte du paradis :
« La charité sera récompensée par dix, mais le prêt par dix-huit. »
Je demandai à Gabriel u : « Pourquoi le prêt est plus méritoire que la charité ? »
« Parce que souvent le mendiant demande de l’argent alors qu’il en possède sur
lui, répondit-il, tandis que celui qui demande un prêt le demande par nécessité. » (Ibn
Majah, Sadaqat, 19).

Selon un autre rapport, l’Être de lumière r raconte :


« (Pendant l’Ascension) je me suis posté à la porte du paradis et j’ai vu que la
majorité de ceux qui y entraient étaient des pauvres. Quant aux personnes opulentes,
elles furent empêchées d’entre [et devaient attendre que tous les pauvres s’y intro-
duisent]. Lorsque les gens de l’enfer furent jetés dans le feu, je vis que la majorité
d’entre eux étaient des femmes. » (Al Boukhari, Riqaq, 51; Muslim, Zuhd, 93).
Par ce récit, le Saint Prophète r veut surtout prévenir les femmes de se pré-
server de tout comportement susceptible de leur faire encourir la punition divine.

Il faut souligner qu’à l’occasion de cet exraordinaıre événement du Mi’raj, alors


que les êtres humains rapportent des évènements de leur passé, les prophètes L,
dans la mesure où le Tout-Puissant le permet, sont doués de la connaissance du
présent et du futur, en plus du passé.
Le fait que le Messager de Dieu r ait pu donner des nouvelles de l’au-delà au
« passé » n’est qu’une affirmation de cette vérité.
En fait, durant la nuit miraculeuse du Mi’raj, les notions temporelles (comme le
passé, le présent et le futur) furent dépassées et le Messager de Dieu r relata des évé-
nements futurs comme faisant partie du « passé », comme s’ils avaient déjà eu lieu.
290 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En ce qui concerne cette réalité, nous pouvons citer Abdurrahman ibn Awf t
qui fit partie des dix à qui on avait promis le paradis.
Le Messager de Dieu r raconte à son sujet :
« Au cours de cette fameuse nuit (la nuit de l’Ascension), je vis Abdurrahman ibn
Awf entrer au paradis en rampant. Je lui demandai :
- Pourquoi te déplaces-tu aussi lentement ?
- Ô Messager de Dieu, me répondit-il, en raison de l’opulence de mes biens, j’ai dû
rendre compte de chacun de mes biens. J’ai eu très peur de ne plus jamais te revoir… »
(Muhammad Parsa, Faslu’l-Khitab, p. 403).

Abdurrahman ibn Awf t était devenu effectivement riche après l’émigration


à Médine.
Un jour, il entendit le récit susmentionné et partit demander à notre mère
Aïcha c si ses propos étaient vrais.
Après que notre mère c ait confirmé leur authenticité, il devint si extatique
qu’il se mit à distribuer aux pauvres toutes les marchandises que contenait sa cara-
vane à peine revenue de Damas.
Le Messager de Dieu r fut témoin de nombreux signes divins lors du Mi’raj.
Selon un autre hadith, il a déclaré :
« J’atteignis une telle éminence que je fus même capable d’entendre le bruisse-
ment des plumes (de la Destinée). » (Al Boukhari, Salât, 1).
En effet, l’Envoyé de Dieu r atteignit une position si haute qu’il pouvait
entendre le bruit des crayons qui écrivaient le Destin de l’univers et assister aux
réalités demeurant au-delà de toute compréhension.
À en juger par ces quelques hadiths, il est évident que pendant le Mi’raj le Saint
Prophète r a quasiment vécu le passé, le présent et l’avenir de manière entrelacée.

Quelques subtilités relatives à l’Ascension


1. Avant d’entreprendre le Voyage, il y eut cet évènement nommé le Sharh’us-
Sadr (l’ouverture de la poitrine). Cela montre qu’une ascension spirituelle exige un
cœur pur dans lequel rien d’autre hormis la lumière divine ne doit y résider. Ce
n’est qu’après s’être débarrassé de toutes les lourdeurs que les secrets divins sont en
mesure de pénétrer dans le cœur.
2. L’évènement nommé al-Isra (Voyage Nocturne) expose la Puissance éternelle
et la majesté du Tout-Puissant à travers le voyage de Son serviteur r.
La Quatorzième Année de la Prophétie 291

3. En outre, le Mi’raj (l’Ascension) est l’indication de jours meilleurs à venir


consécutivement au voyage douloureux et pénible de Ta’if.
4. Tous les actes obligatoires mentionnés dans le Coran furent transmis par
l’entremise de l’Ange Gabriel u. À l’exception de la prière rituelle (salât) qui fut
directement ordonnée par le Tout-Puissant durant le Mi’raj. En conséquence, nous
pouvons dire que la prière revêt une tout autre importance aux yeux du Seigneur.
La prière est en effet le pilier de la religion. Aucune autre forme d’adoration ne
peut atteindre la sagesse qu’elle véhicule. Ceci peut être comparé à la vision du Tout-
Puissant par rapport aux bénédictions appartenant à l’au-delà. Dans la mesure où la
salât est le Mi’raj du croyant, la proximité avec Dieu le Très-Haut sera d’autant plus
intense lors de son accomplissement que la concentration sera parfaite. La salât étant
l’union du serviteur avec son Créateur dans ce bas-monde c’est pour cette raison que
le Saint Prophète r a affirmé que « la salât est la lumière de mes yeux ». (An Nasaï,
Ishratu’n-Nisa, 1).

Pour le même motif il exhorta ses Compagnons t lors de ses derniers instants
« de ne surtout pas négliger la salât ». (Voir Abû Dâwud, Adab, 123-124).
5. Le fait que les portes du ciel aient été largement ouvertes au Messager de
Dieu r montre que son Apostolat prophétique n’était pas limité qu’à La Mecque et
Ta’if, mais qu’il était vraiment le Prophète de l’univers dont la mission s’étendait au
monde entier et même au-delà des cieux.
6. Le Mi’raj marque le point final de la maturité de l’homme, la frontière finale
de la perfection spirituelle qui ne pourra jamais être atteint par un autre humain.
7. Le voyage entre la Masdjid’ul-Haram (le Sanctuaire de La Mecque) à la Mas-
djid’ul Aqsa (le Sanctuaire de Jérusalem) montre les liens déjà forts entre ces deux
grands centres spirituels qui ont été bénis par l’avènement de nombreux prophètes
de Dieu. De plus, à travers cet évènement, il est démontré que l’islam englobe toutes
les religions célestes antérieures et c’est la raison pour laquelle le Noble Prophète
Muhammad r conduisit la prière devant tous les prophètes L jusque-là envoyés.

Les répercussions de l’Ascension


Quand le temps fut venu de raconter cet évènement extraordinaire à sa commu-
nauté, l’Être de lumière r exprima son inquiétude à l’Ange Gabriel u :
« Ô Gabriel ! Ma tribu ne me croira jamais ! »
L’Ange u répondit :
« Abû Bakr t lui te croira. Il est al-siddiq (le véridique). » (Ibn Saad, I, 215).
292 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Lorsque les idolâtres entendirent parler de l’Ascension, ils démentirent aussitôt


le fait. Profitant de l’occasion, un vent de rumeurs se répandit autour de la ville. En
mettant en cause la crédibilité du Saint Prophète r, leur but était de faire apostasier
les croyants.
Ils étaient tellement sûrs d’eux qu’ils se rendirent même chez Abû Bakr t qui, à
leur grande consternation, afficha une fois de plus une fidélité inébranlable en affir-
mant :
« S’il a affirmé avoir fait ce voyage, c’est que cela est vrai ! Jamais il ne mentirait
et je crois sans hésitation tout ce qu’il peut dire ! »
Les idolâtres lui demandèrent d’un ton moqueur :
« Alors tu crois vraiment qu’il est parti à Jérusalem en une nuit et qu’il en est
revenu ? »
Abû Bakr t leur répondit :
« Oui ! Qu’y a-t-il d’étonnant à cela ? Certes je le crois déjà pour bien plus que
cela ; je le crois quand il me dit qu’il reçoit des nouvelles du haut des sept cieux ! »
Puis Abû Bakr t s’en alla retrouver le Saint Prophète r qui se trouvait à ce
moment à la Ka’ba et se mit à écouter lui aussi de sa bouche le récit de ce voyage béni.
Confirmant ses dires, il dit au Messager de Dieu r :
« Tu dis la vérité, ô Messager de Dieu ! »
Ravi de la réaction d’Abû Bakr t, le Messager de Dieu r dit avec un sourire
dont la lueur aurait été suffisante pour éclairer l’univers tout entier :
« Ô Abû Bakr, tu es (véritablement) al-siddiq – le véridique ! » (Ibn Hishâm, II, 5).
À partir de ce jour, Abû Bakr t fut appelé Abû Bakr as-Siddiq.
Les autres croyants comme Abû Bakr t confirmèrent le Messager de Dieu r
dans ce qu’il disait.
Les idolâtres, incapables de convaincre les Compagnons du Saint Prophète r,
décidèrent de questionner ce dernier en lui demandant d’emblée qu’il leur donnât
une description précise du Bayt’al-Maqdis (le Temple de Jérusalem).
Fortifiant Son Messager, Dieu le Tout-Puissant présenta devant ses yeux une
vision du Temple Sacré et, tout en l’observant, le Saint Prophète r répondit une par
une aux questions posées. (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 41; Tafsir, 17/3; Muslim, Iman, 276).
Toujours pas convaincus, les idolâtres posèrent ensuite une question relative à
une caravane qui était actuellement en chemin :
La Quatorzième Année de la Prophétie 293

« Ô Muhammad, parle--nous de notre caravane qui est en chemin, car ceci est
plus important que le Temple de Jérusalem ! »
Le Messager de Dieu r leur répondit :
« Dans cette vallée, je suis tombé sur la caravane du clan untel. Effrayé par le
grognement d’un animal sauvage, un des chameaux appartenant à la caravane s’est
échappé. Je leur ai montré ensuite où il se trouvait ! »
Il poursuivit ainsi :
« Et près de Dajnan, je vis la caravane des fils d’untel. Les hommes étaient en
train de dormir. Il y avait une cruche remplie d’eau recouverte. J’ai enlevé le couvercle
et j’en ai bu. Puis je l’ai remise comme elle était. Leur caravane doit être maintenant en
train de descendre la pente de Tanim. Au devant de la caravane se trouve un chameau
mâle de couleur grise portant deux sacs, l’un est de couleur noire et l’autre est multico-
lore. »
Stupéfaits par ces réponses, les idolâtres s’écrièrent :
« Voici la caravane qui arrive et le chameau gris est devant ! »
Dès que la caravane fut arrivée, ils se rendirent compte que le chameau était
exactement comme il avait été décrit.
Puis ils questionnèrent les gens de la caravane au sujet de la cruche d’eau. La
description collait parfaitement à ce qu’ils avaient entendu et ils affirmèrent bel et
bien qu’ils avaient retrouvé leur cruche d’eau vide alors qu’elle était préalablement
remplie.
D’autre part, cette indication montre bien que al-Isra et al-Mi’raj ont été à la fois
un voyage physique et spirituel.
Les idolâtres de Quraysh questionnèrent d’autres membres de la caravane.
Ceux-ci leur répondirent :
« En effet nous avons été secoués par un grognement provenant de cette vallée
et un de nos chameaux s’est enfuit. Nous entendîmes quelqu’un nous héler du lieu
où se trouvait l’animal et nous l’avons retrouvé là où il nous avait hélés ! »
Par ailleurs, certains d’entre eux reconnurent la voix comme étant « celle de
Muhammad r ».
Il n’y eut pas une seule question que les idolâtres ne posèrent pas au Noble Pro-
phète r, allant du nombre de chameaux composant la caravane jusqu’aux nombre
de bergers sans que l ’Envoyé de Dieu r réponde correctement à chacune d’elles.
Cela car à l’instar de la description du Temple Sacré, la caravane avait été également
emmenée devant ses yeux afin qu’il leur donnât une description précise.
294 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Malheureusement ceux qui avaient le cœur verrouillé s’entêtèrent à dire :


« Ceci est clairement de la magie ! » (Ibn Hishâm, II, 10; Ibn Sayyid, I, 243; Haythami, I,
75; Bayhaqî; Dalail, II, 356)

Dieu le Tout-Puissant dit dans le Coran:

ïĺƅ ïƈ ä
Ɔ ěƅ ĥŽ ì
ƈ ƅ
Ɔ īŽ Ĩ ƈ
Ƈ ģŽ ÖƆ Ģƈ IJƪ ƆŶÒ
ž ÷׎ ĤƆ ĹĘħŽ İ Ž ěƈ ĥŽ íƆ ĤŽ ÓƈÖÓĭĻƈƆ ĻđƆ ĘƆ ƆÈ
« Quoi ? Avons-Nous été fatigués par la première création ? Mais ils sont
dans la confusion [au sujet] d’une création nouvelle. » (Qaf, 50 : 15).
Qui a t-il de plus simple pour Dieu le Glorieux, qui a créé tout de rien, d’élever
Son serviteur à l’Isra et au Mi’raj !
Seul le manque de bon sens pourrait expliquer que l’on dédaigne cette réalité.
De nouveau, les pitoyables idolâtres de La Mecque rechignèrent à croire que
l’évènement du Mi’raj avait eu lieu et ils se moquèrent ouvertement de l’Envoyé de
Dieu r.
Mais leur comportement inapproprié leur coûta à jamais la possibilité d’avoir
à leur côté le Noble Prophète r. À présent, le temps était venu de le soustraire du
milieu d’eux et de lui accorder un autre peuple qui allait être en mesure d’apprécier
une telle bénédiction.
En effet, peu de temps après le voyage fatidique de Ta’if, le Tout-Puissant avait
déjà envoyé à Son Bien-aimé Messager r les précurseurs d’un peuple exceptionnel
désireux de lui prêter allégeance…
295

LES DOUZIÈME ET TREIZIÈME ANNÉES DE LA


PROPHÉTIE

Le premier sermon d’allégeance d’Aqaba


Les six Médinois qui avaient embrassé l’islam au cours de leur voyage à La
Mecque revinrent un an plus tard cette fois-ci accompagnés de six personnes. Une
nouvelle fois, leur lieu de rencontre fut Aqaba.
Le Messager de Dieu r invita les six nouveaux venus au tawhid (unicité divine).
Ayant déjà entendu de leurs amis la beauté et la grandeur de l’islam ainsi que
la noblesse du Saint Prophète r, eux les six nouveaux venus embrassèrent eux aussi
la foi.
Contrairement à leur première réunion, cette fois-ci les visiteurs firent formel-
lement allégeance à l’Envoyé de Dieu r.
En serrant la main du Messager de Dieu r, les Médinois donnèrent leur parole,
et à cette occasion on nomma cet évènement « le premier serment d’Aqaba ».
En conséquence, les Médinois s’engagèrent à :
1. Ne jamais associer quoi que ce soit à Dieu.
2. Ne pas voler.
3. Ne pas s’approcher de la fornication.
4. Ne pas enterrer les filles vivantes.
5. Ne pas calomnier.
6. Obéir à Dieu et à Son Messager r. (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 43)
Ce premier engagement contracté par les Médinois fut un tournant dans l’his-
toire de l’islam. Grâce à lui, la Péninsule arabique fut débarrassée de l’idolâtrie, de
l’oppression et des mauvaises coutumes.

Médine est conquise par le biais du Coran enseigné par Mus’ab ibn Umayr t
La douzième année de l’apostolt prophétique les nouveaux musulmans de Mé-
dine écrivirent une lettre au Saint Prophète r.
296 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ils lui demandaient dans cette lettre de leur envoyer un enseignant pour leur
expliquer l’islam, leur apprendre le Coran et les diriger dans la prière. Répondant à
leur requête, le Saint Prophète r leur envoya Mus’ab ibn Umayr t. (Ibn Saad, I, 220).
En plus de Mus’ab t, l’Envoyé de Dieu r leur envoya aussi Abdullah ibn Umm-
Maktum t , l’un des premiers croyants, dans le but de leur enseigner spécifiquement
le Coran. (Al Boukhari, Manaqibu’l-Ansâr, 46).
Mus’ab ibn Umayr t, qui embrassa l’islam très tôt, tint ferme sa foi en dépit de
la tyrannie de sa famille et des menaces de le priver de son héritage. Même si son ap-
parence pouvait laisser penser qu’il était pauvre et faible, en fait il avait un cœur riche
rempli d’amour et de foi. Il fut une figure monumentale pour l’expansion de l’islam.90
En effet sa venue à Médine marqua la floraison de l’islam dans la cité. Envoyé
par le Messager de Dieu r, le jeune Compagnon t commença à travailler jour et
nuit pour expliquer aux gens la Parole du Tout-Puissant. Ses efforts en la matière
portèrent leurs fruits : Asad ibn Zurara t fut l’un des premiers privilégiés que Dieu
guida et ce dernier devint une aide précieuse pour Mus’ab t. Un jour, ils partirent
tous deux s’asseoir au bord du puits situé dans le jardin de la tribu Zafar. Saad ibn
Muadh, un notable de la famille des Abdul’Ashal exprima à Usayd ibn Houdayr son
mécontentement :
« Tu es intelligent, tu connaîs bien ton travail et tu n’as besoin de l’aide de qui
ce soit à ce sujet. Va dire à ces deux hommes qui sont venus dans notre quartier pour
corrompre la foi des plus faibles d’entre nous de quitter ces lieux et de ne plus jamais
revenir ! Je l’aurais fait moi-même si Asad n’était pas de notre tribu. »
Usayd saisit sa lance et courrut sur les deux hommes en criant :
« Que fais-tu ici, ô Asad ? Aurais-tu amené cet étranger pour corrompre la
croyance des plus faibles d’entre nous ? Si tu veux rester en vie, pars d’ici et ne re-
viens jamais ! »
Intelligent et clairvoyant, Mus’ab t lui demanda :
90. Ali t raconte : « Alors que nous étions assis avec le Messager de Dieu r dans la mosquée, Musa’b
t fit son entrée. Voyant ce dernier porter des vêtements rapiécés et se souvenant qu’auparavant ce
Compagnon bénéficiait de tant d’aisance, il fut profondément ému. Puis il dit : « Que deviendrez-vous
lorsque le matin vous porterez un beau vêtement et dans l’après-midi un autre, lorsqu’un plat sera placé
devant vous et un autre retiré et que vous habillerez vos maisons comme on habille la Ka’ba ? »Les
compagnons y répondirent : « Ô Messager de Dieu, nous serons alors meilleurs qu’aujourd’hui,
nous nous consacrerons à l’adoration et ne serons guère inquiets quant à notre bien-être. » Le Saint
Prophète r leur déclara alors : « Bien au contraire, c’est aujourd’hui que vous êtes bien meilleurs. »(At
Tirmidhi, Qiyamat, 35/2476).
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 297

« Ne veux-tu pas t’asseoir et écouter ce que j’ai à dire ? Comme tu me sembles


être quelqu’un d’intelligent, si mes paroles te conviennent tu les accepteras, sinon tu
les refuseras. »
Usayd répondit : « Dis rapidement ce que tu as à dire ! »
Puis il planta sa lance et s’assit à côté d’eux.
Mus’ab t commença donc à lui expliquer l’islam et à lui réciter quelques versets
du Coran. Dès qu’il écouta le Coran, avant même qu’il ne commence à parler, son
visage se mit à s’éclaircir par la lumière de l’islam et son cœur s’adoucit immédia-
tement.
Il s’exclama à propos du Coran :
« Quelles paroles merveilleuses ! »91
Puis il demanda :
« Que doit-on faire pour adhérer à cette religion ? »
Sur les instructions de Mus’ab et d’Asad, Usayd t se lava, lui et ses vêtements
puis prononça la chahada (la profession de foi musulmane).
Ensuite, après avoir effectué deux unités de prière, il déclara :
« Il y a un homme que j’ai laissé derrière moi. Si celui-ci accepte l’islam, aucun
membre de sa tribu ne refusera d’y entrer aussi. Cet homme se nomme Saad ibn
Muadh t et je vais tâcher de vous l’envoyer ! »
Saad t arriva auprès d’eux particulièrement en colère. Mais, chose étonnante,
lui aussi, comme Usayd t, finit par embrasser l’islam après avoir écouté Mus’ab t.
91. Usayd t ne cessa jamais de réciter les Paroles Divines avec autant d’amour et d’enthousiasme tout au
long de sa vie. Il s’en justifie lui-même : « Une nuit, j’étais en train de réciter la sourate al-Baqara. Mon
cheval qui était attaché près de moi, se mit soudain à hennir. Je stoppai ma récitation et le cheval se
calma immédiatement. Dès que je recommençai à réciter, le cheval s’excita à nouveau. Je pris mon fils
Yahya dans mes bras de peur que mon cheval ne le piétine. À ce moment je regardai le ciel et vis au-
dessus de moi des objets ressemblant à des lampes qui ensuite montèrent au ciel puis disparurent. Le
matin je me rendis chez le Messager de Dieu r pour lui raconter tout cela. Alors il me dit : - Récite ô
Usayd, récite !
Puis il r me demanda : - Sais-tu ce que tu as vu, ô Usayd ?
- Non. Répondis-je. Le Messager de Dieu r me dit alors : - Ce sont les anges qui venaient t’écouter ô
Usayd. Si tu n’avais pas mis un terme à ta récitation, ils seraient restés avec toi sans se cacher des gens. »
(Al Boukhari, Fadail’ul-Quran, 15)
Aïcha c raconte : « Usayd ibn Houdayr t fut un des plus vertueux Compagnons. Il disait tout le
temps : - Si je pouvais rester dans l’un des trois états suivants, je serais certes parmi les gens annoncés
au paradis : quand je récite et écoute le Coran, quand j’écoute les sermons du Saint Prophète r et
quand j’aperçois des funérailles. En effet, en ce qui concerne ce dernier état, je me mets à la place du
défunt et je me mets à m’imaginer tout ce qui l’attend. » (Hakim, III, 326/5260).
298 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Puis il se rendit auprès des hommes de sa tribu et leur demanda tout d’abord :
« Ô Fils d’Abdul’-Ashal ! Comment m’avez-vous connu jusqu’à présent ?
« Tu es le plus avisé et le plus éminent d’entre nous. » répondirent-ils.
Saad t poursuivit :
« Alors sachez que je ne parlerai à aucun d’entre vous tant que vous ne croirez
pas en Dieu et en Son Messager ! »
Ce jour-là, il ne resta pas une seule personne dans la tribu qui n’ait pas accepté
l’islam. (Ibn Hishâm, II, 43-46; Ibn Saad, III, 604-605; Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, I, 112-113).
Mus’ab t invita aussi à l’islam Amr ibn Jamuh t, un notable de la tribu Salima,
en lui récitant les huit premiers versets de la sourate Yusûf.
Amr t hésitait à prendre une décision aussi il demanda du temps pour réflé-
chir.
C’est alors que son fils Muadh t, qui avait déjà embrassé l’islam, se saisit de
l’idole de son père avec l’aide de quelques jeunes de la tribu et la jeta dans une fosse
boueuse. Horrifié, Amr t sortit son idole le lendemain, la nettoya et la remit à sa
place.
Quand le même incident se répéta à plusieurs reprises, Amr t décida d’accro-
cher son épée au cou de son idole afin qu’elle puisse se protéger !
Mais le lendemain, revoyant son idole replongée dans la saleté, il eut la convic-
tion que cet objet ne pouvait même pas se défendre alors comment pourrait-elle le
protéger ?
Et ainsi il ferma ses yeux à l’obscurité de l’ignorance et les ouvrit au soleil de
l’islam. Il remercia Dieu le Tout-Puissant de l’avoir guidé par l’intermédiaire de Son
Messager r et invita toute sa tribu à rejoindre l’islam. (Ibn Hishâm, II, 61-63; Dhahabî,
Siyar, I, 182).

Les nouvelles de l’acceptation de l’islam par les Médinois parvinrent au Messa-


ger de Dieu r et aux Mecquois. Ces informations remplirent de joie les croyants et
l’on surnomma cette année « l’année de la joie », car, en effet, Médine était prête à
devenir le berceau de l’islam.
Le Saint Prophète r a dit dans un hadith :
« Les terres sont conquises par les épées mais Médine l’a été par le Coran. » (Bazzar,
Musnad, 1180; Rudani, 3774).
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 299

Le second serment d’allégeance (L’an 13 de la prophétie)


Un an après la première rencontre d’Aqaba, les Médinois rencontrèrent une
nouvelle fois le Saint Prophète r durant les mois de pèlerinage. Cette fois-ci il y eut
soixante-quinze personnes dont deux femmes. Tous prêtèrent serment d’allégeance
au Messager de Dieu r. Ce fut ce qu’on nomma« le second sermon d’allégeance ».
Dirigeant la caravane venue de Médine, Mus’ab t se rendit chez l’Envoyé de
Dieu r avant d’aller chez lui pour annoncer les nombreuses adhésions à l’islam
opérées parmi les Médinois. Le seigneur des mondes r fut particulièrement réjoui
d’entendre une telle nouvelle.
La mère de Mus’ab, qui était idolâtre, rentra dans une colere nore quand elle
apprit qu’il s’était rendu préalablement auprès du Messager de Dieu r. Mais Mus’ab
t se justifia auprès d’elle :
« Je n’irai chez personne tant que le Messager de Dieu r est parmi nous, et tant
qu’il est parmi nous, il aura toujours la priorité. »
Après que le Saint Prophète r l’y ait autorisé il se rendit auprès de sa mère et
l’invita une nouvelle fois à l’islam. (Ibn Saad, III, 119)
Tel était l’amour des Compagnons envers l’Envoyé de Dieu r
Jabir t raconte : « Alors que le Saint Prophète r cherchait pour lui et les musul-
mans une tribu pour les protéger et qu’aucune ne leur ouvrait les bras, Dieu le Tout-
Puissant nous envoya de Yathrib jusqu’à lui, nous crûmes en lui et le protégeâmes.
Quand un de nous acceptait le message de l’islam, le Saint Prophète r lui récitait
quelques versets du Coran. Une fois rentré chez lui, tous les membres de sa famille
adhéraient à l’islam. Pas une maison à Médine dans laquelle le message de l’islam
n’ait pas pénétré. Puis nous nous rassemblâmes pour nous concerter.
- Jusqu’à quand allons-nous laisser le Messager de Dieu souffrir dans les mon-
tagnes de La Mecque ? Ainsi nous lui prêtâmes allégeance lors du pèlerinage. » (Ah-
mad, III, 322; Hakim, II, 681-682)

Ces gens bénis se mirent d’accord avec le Saint Prophète r pour se retrouver à
Aqaba. Le Messager de Dieu r dit aux Médinois :
« Ne réveillez pas celui qui dort, n’attendez pas celui qui sera en retard au lieu du
rendez-vous ! »
Quand le tiers de la nuit passa, ils arrivèrent comme convenu à Aqaba et com-
mencèrent à attendre le Saint Prophète r qui arriva un peu plus tard accompagné
de son oncle Abbâs. Même si ce dernier n’avait pas encore accepté l’islam, il s’était
chargé de la protection de son neveu après la mort d’Abû Talib. Abbâs dit aux Médi-
nois qui avaient invité le Messager de Dieu dans leur contrée :
300 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ô Médinois ! Nous l’avons protégé de ses ennemis jusqu’à maintenant et nous


continuerons à le faire. Sachez qu’il est hautement respecté parmi nous. Mais en rai-
son de votre amour et de votre respect à son égard vous voulez qu’il soit plus en sécu-
rité à Médine. C’est ce qu’il désire aussi. Emmenez-le si vous avez la capacité de le
protéger de ses ennemis. Je veux que vous promettiez que vous ne le laisserez jamais
sans assistance et que vous ne le trahirez jamais. Sachez que vos voisins juifs sont
les ennemis de mon neveu et je crains qu’ils ne lui tendent un piège. Ne tentez ceci
que si vous pensez avoir assez de force pour combattre l’animosité des tribus arabes.
Concertez-vous d’abord et ne tombez pas en désaccord par la suite ! Renoncez à cette
invitation si par la suite vous ne vous sentez plus capables de le secourir et que vous
deviez le laisser aux mains de ses opposants ! Si l’un d’entre vous veut dire quelque
chose, qu’il le fasse, mais que ce ne soit pas trop long, car il y a partout des espions et
des idolâtres qui sont aux aguets ! Gardez tout ceci secret dès que vous serez partis ! »
Alors Asad ibn Zurara t se leva et répondit aux inquiétudes d’Abbâs, l’oncle
du Saint Prophète r :
« Ô Messager de Dieu ! Tu nous as invités à abandonner nos vieilles croyances
et à nous conformer à ta religion. Cela a été difficile et pénible, mais nous avons
accepté ta proposition. Tu nous as invités à couper nos liens avec nos parents et
nos voisins idolâtres ! Cela a été difficile et pénible, mais nous avons accédé à ta
demande. Nous sommes conscients de prendre sous notre protection quelqu’un que
non seulement sa tribu maisaussi ses oncles veulent assassiner. Malgré cela, nous
avons quand même accepté ta proposition à ce sujet. Ô Messager de Dieu ! Nous te
protégerons comme nous protégeons actuellement nos fils et nos femmes. Si d’aven-
ture nous rompons notre promesse, que Dieu nous punisse pour cela. Ô Messager
de Dieu ! Voilà notre promesse de fidélité ! Nous nous réfugions qu’en Dieu le Tout-
Puissant ! »
Abdallah ibn Rawaha t se leva après Asad et dit au Messager de Dieu :
« Ô Messager de Dieu ! Tu peux nous poser toutes les conditions qui te
concernent et au nom de Dieu le Tout-Puissant ! »
Le Bien-aimé de Dieu r répondit :
« Ma condition à l’égard de mon Seigneur est de L’adorer et de ne rien Lui asso-
cier ! La condition me concernant est de me défendre comme vous défendez vos vies et
vos biens. ».
Le groupe de croyants privilégiés et bénis venu de Médine demanda :
« Qu’aurons-nous en échange, ô Messager de Dieu ? »
« Le paradis ! » répondit-il.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 301

« Quel commerce profitable ! Nous ne l’abandonnerons jamais et ne voulons


pas qu’il soit abandonné ! » (Ibn Kathir,Tafsir, II, 406).
Abdallah ibn Rawaha t accomplit effectivement ce commerce profitable lors
de la bataille de Muta en offrant avec grand enthousiasme sa vie et sa fortune au
service de Dieu le Très-Haut et en volant en direction du paradis. Car, comme l’avait
annoncé le Messager de Dieu r, il mourut martyr. De la même façon les autres Com-
pagnons y demeurèrent aussi fidèles à leur engagement et servirent l’islam durant
toute leur vie. Ainsi donc, tous bénéficièrent des bénédictions spirituelles attachées
à leur allégeance.
Le verset coranique suivant fut révélé pour notifier l’engagement des Médinois :

ģĻƈ
ƈ ×øĵ ƈ Ɔ ĥƇ ÜÓƈ ĝƆ ĺÙƆ ĭåĤŽ ÒħıĤƆ Īƪ ÓƆ Öƈ ħıĤƆ ÒijĨÒƆ IJħıùęƇ ĬŽ ÒƆ īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÒīĨĴ
ƈ óÝüÒ ųÒĪÒƈ
Ɔ ĘĪij Ƈ ƪƆ ƇƇ ŽƇ ƆŽ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆƩ ƪ
ĵĘƆ IJŽ ÒƆ īŽ ĨƆ IJ ƈ ƈ ÒŽ IJÙĺƈ òijÝĤÒĵĘÓ
ƈ åƈ ĬŽ ź ƈ ĝƬ èįƈ ĻĥƆ ĐÒïƃ ĐIJĪij ƈƩ
Ɔ ĪÒƆ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ģĻ Ɔ Ɔ Žƪ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ ĥƇ ÝƆ ĝŽ ƇĺIJ Ɔ Īij
Ɔ ĥƇ ÝƇ ĝŽ ĻƆ ĘƆ ųÒ
ħĻčƈ đƆ ĤŽ ÒôƇ ijŽ ęƆ ĤŽ ÒijƆ İ ƈ įƈƈ ÖħÝđĺÓÖĴñƈ Ĥƪ ÒħġƇ đƈ Ļ×ƈÖÒIJóýƈ ×ÝøÓĘƆ ųÒ ƈ īĨ ƈ Įƈ ïƈ ıđƈÖ
Ƈ Ƈ ğƆ ĤðƆ IJƆ ŽƇŽƆ Ɔ Ƈ ŽƆ Ƈ ŽƆ Ž Ʃ Ɔ ŽƆ
« En vérité, Allah a acheté aux croyants leurs personnes et leurs biens en
échange du Paradis, en vue de défendre Sa Cause : tuer et se faire tuer. C’est une
promesse authentique qu’Il a prise sur Lui-même dans la Thora, l’Évangile et le
Coran. Et qui est plus fidèle à sa promesse que le Seigneur ? Réjouissez-vous donc
de l’échange que vous avez effectué ! N’est-ce pas que c’est là le comble de la féli-
cité ? » (at-Tawba, 9 : 111).
Après ceci, d’autres personnes prirent aussi la parole et s’exprimèrent tour à
tour.
Ensuite le Saint Prophète r commença son discours devant les Médinois en
récitant des versets du Coran pour expliciter les termes de leur engagement. En plus
de celles déjà convenues, les conditions suivantes furent également ajoutées :
1. Peut importe qui il soit aucun croyant ne doit s’opposer au chef des musul-
mans.
2. Ne jamais craindre les blâmes qui peuvent provenir des idolâtres en marchant
dans le sentier de Dieu.
3.À travers vents et marées, toujours obéir au Messager de Dieu r, le préférer à
quiconque et en aucun cas lui désobéir.
Le Noble Messager de Dieu r demanda douze naqibs92, ou délégués, chacun
représentant sa tribu respective. Les Médinois nommèrent douze personnes, neuf de
Hazraj et trois de Aws.
92. Naqib : chef ou représentant d’une tribu ou d’une ethnie.
302 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Vous serez garants de vos tribus tout comme les Apôtres le furent pour Jésus fils
de Marie (‘Issa ibn Maryam), leur dit l’Envoyé de Dieu. Et moi je serai le garant de la
communauté musulmane. »
Les représentants approuvèrent la requête du Messager de Dieu r.
Sous un arbre, Abbâs, l’oncle du Saint Prophète r, prit la main de chaque Médi-
nois et la posa sur celle de son neveu, symbolisant par ce geste l’acte d’allégeance.
Ce serment ouvrit la porte à l’immigration à Yathrib (Médine) et marqua l’Hé-
gire, l’impulsion originelle de l’islam.
Comme cette réunion eut lieu de nuit, aucun des idolâtres ne fut mis au courant.
Après la conclusion de ce pacte, Iblis lança un cri perçant :
« Ô Gens de Mina ! Ô Quraysh ! Savez-vous que Muhammad et ceux qui ont
tourné le dos à leur croyance se sont réunis et ont convenu de vous faire la guerre ? »
Le Saint Prophète r ne tarda pas à les rassurer :
« N’ayez pas peur ! Ce n’est que la voix d’Iblis, l’ennemi de Dieu. Il ne peut rien
faire ! »
Puis il conseilla aux croyants de rejoindre de suite leurs campements.
Abbâs ibn Ubada dit alors :
« Je jure par Celui qui t’a envoyé avec la Vérité que si tu le souhaites nous les
passerons tous au fil de notre épée ! »
« Non, lui répondit le Saint Prophète r, on ne nous a pas ordonné d’agir ainsi.
Maintenant, retournez à vos campements ! »
Les musulmans retournèrent dans leurs campements et dormirent jusqu’à
l’aube. Tôt le matin, quelques idolâtres vinrent au campement des Mecquois au
sein duquel se trouvait aussi des musulmans pour leur demander si un accord avait
eu lieu avec le Saint Prophète r. Au courant de rien, les idolâtres du campement
jurèrent que rien de tel n’avait eu lieu. Nullement convaincus, les idolâtres conti-
nuèrent à enquêter à propos du serment d’Aqaba. Bientôt, leurs pires craintes furent
confirmées en ils découvrirent la véracité du pacte. C’est alors que des cavaliers cou-
pèrent les routes qui menaient à Médine.
Ces derniers appréhendèrent Saad ibn Ubada t et lui demandèrent :
« Es-tu entré dans la religion de Muhammad ? »
Quand Saad t leur répondit par l’affirmative, ils attachèrent fermement ses
deux mains à son cou et le tirèrent par ses longs cheveux jusqu’à La Mecque où ils
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 303

commencèrent à le torturer encore plus sauvagement. Jubayr ibn Mut’im93 et Harith


ibn Harb, qui avaient été auparavant aidés et protégés par Saad t le sauvèrent des
griffes des idolâtres. Juste au moment où les croyants de Médine s’apprêtaient à aller
le sauver, Saad t fit son apparition. (Ibn Hishâm, II, 47-57; Ibn Saad, I, 221-223; III, 602- 603;
Ahmed, III, 322, 461, 462; Haythami, VI, 42-44).

Ibn Abbâs t dit:


« Comme le Messager de Dieu r, Abû Bakr et Omar y font partie des Muha-
djirs (les Émigrés), car ils ont fui l’idolâtrie et émigré à Médine. De même, il y a
des émigrés parmi les Ansars (les Compagnons Médinois) ; ceux-là, pendant la nuit
d’Aqaba, ont fui Yathrib, alors ville païenne, pour se rendre auprès du Messager de
Dieu. » (An Nasaï, Bayat, 13).

Le serment d’Aqaba signifie non seulement l’engagement de douze ou soixante-


quinze personnes, mais aussi l’engagement que tous les musulmans doivent contrac-
ter avec Dieu le Très-Haut.
Le monde est un marché dans lequel l’au-delà s’achète. Chaque croyant se doit
de demeurer en parfaite conviction avec cet engagement susmentionné. À l’instar
des Compagnons, ils doivent se réjouir d’un « tel commerce profitable ».
À l’image de Mus’ab t, le Compagnon qui bâtit les fondations de l’islam à
Médine, nous devons nous-mêmes les bâtir dans nos cœurs et dans ceux des autres.
S’il le faut, même de porte en porte, nous devons témoigner de notre foi en
arborant un bon comportement.
Une fois que le cœur du croyant est rempli de l’amour de Dieu et de Son Mes-
sager r, le sacrifice des plaisirs mondains devient un plaisir, à l’exemple de Mus’ab.

L’analyse de la Période mecquoise


Les cinq points ci-dessous résument l’attitude des idolâtres à l’encontre des mu-
sulmans à travers une période qui a duré treize années :
1. La moquerie.
2. L’insulte.
93. Jubayr ibn Mut’im t, qui était parent avec le Messager de Dieu r résista longtemps à l’islam et fut
même dans le groupe qui décida d’assassiner l’Être de lumière r. Pendant la campagne de Badr, il
était avec les idolâtres. À Ohoud il permit à Washi, son esclave, d’assassiner Hamza t. Après le traité
de paix d’Houdaybiya (628 de notre ère), il embrassa l’islam et devint un musulman sincère. Homme
clairvoyant et de tempérament doux, il rapporta 60 hadiths jusqu’à sa mort à Médine en 678 (58 A.H).
304 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

3. La torture.
4. l’isolement ou la rupture de tout type de relation sociale ou commerciale.
5. les pressions violentes et les meurtres, forçant ainsi les musulmans à émigrer.
Dans le Coran, Dieu le Très-Haut décrit de la sorte la situation des musulmans :

Īij
Ɔ ġƇ éƆ ąŽ ĺÒij ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ƇĭĨƆ ÒƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒīƆ ĨÒijƇĬÓĠÒij
Ɔ ĨƇ óƆ äŽ ÒƆ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒĪƪ Ò
ƈ ×ĥƆ ĝƆ ĬŽ ÒÒðƆ Òƈ IJĪIJ
Òij×ĥƆ ĝƆ ĬŽ Òħ ƈıĥƈ İŽ ƆÒĵĤƆ ÒÒij ƈ
Ƈ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ õƇ ĨÓƆ ĕƆ ÝƆ ĺƆ ħŽ ƈıƈÖÒIJóƫ ĨÒ
Ɔ ðƆ ÒIJƆ
Ɔ ĤÓąƆ ĤƆ Åƈ ƆźËƇ İ
Īijƫ ƈ ƇĤÓĜƆ ħİIJƆÒòƆÒðÒƈ IJīĻ ƈıġƈ ĘƆ
Ɔ Īƪ ÒÒij ŽƇ Ž Ɔ Ɔ Ɔ
« Les criminels riaient de ceux qui croyaient, et, passant près d’eux, ils se
faisaient des œillades, et, retournant dans leurs familles, ils retournaient en
plaisantant, et les voyant, ils disaient: ‹Ce sont vraiment ceux-là les égarés›. »
(al-Mutaffiffin, 83 : 29-32).

Conformément à cela, la méthode du Messager de Dieu r renforcée par la


Révélation continue qui lui conseilla la meilleure manière, peut ainsi se résumer :
1. Cultiver la spiritualité dans le cœur des croyants.
2. Être patient face aux difficultés.
3. Conseiller et guider les gens de la meilleure des manières.
4. Continuer à persévérer sans la moindre concession.
5. Se confier et s’en remettre à Dieu le Tout-Puissant.
Le Messager de Dieu r réussit grâce à cette méthode et malgré les conditions
défavorables, à surmonter toutes sortes de difficultés. Comme fruit de cette longue
et éprouvante étape il fut honoré par la cité bénie de Médine, cité stratégique qui
vit, alors qu’il n’y était jamais allé pour inviter à l’islam, nombre de ses habitants
embrasser l’islam, la religion de Dieu s’y propager comme une trainée de poudre.
Inspiré par le triomphe de sa cause, un éminent historien fit cette observation
quant au génie du Messager de Dieu r :
« Si la grandeur du dessein, la petitesse des moyens, l’immensité de la réussite
sont les trois mesures du génie de l’homme, qui osera comparer humainement un
grand homme de l’histoire moderne à Muhammad ? » (A. de Lamartine, Histoire de la
Turquie).
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 305

Dieu le Tout-Puissant n’autorisa aux croyants d’émigrer qu’après une période


de treize années vécue dans la souffrance et la peine. Après cette période d’oppression
intense, le cœur des croyants atteignit un haut degré de contentement et se remplit
de spiritualité. C’est ainsi que les croyants s’acquittèrent du prix de leur foi. À cette
époque furent jetés à Médine les fondements d’une civilisation et d’un État islamique
qui allaient devenir un exemple pour tous les hommes, formés de personnes possé-
dant un fort caractère, et qui, enthousiasmées par l’extase de leur foi, accueillirent
toutes sortes de difficultés sans tomber dans le désespoir. Ces personnes devinrent
des étoiles qui allaient guider tous les croyants, et ce jusqu’à la fin des mondes.

Particularités des versets coraniques mecquois


Les premiers versets du Coran sont connus pour exprimer les fondements de
l’aqida, ou du dogme, l’invitation au tawhid (ou unicité de Dieu), la croyance à la
Résurrection, au paradis pour les croyants et à l’enfer pour les mécréants. Ce n’est
qu’après avoir exposé les preuves irréfutables et renforcé la foi des croyants que des
versets relatifs aux questions sociales furent révélés. En effet, il était très difficile pour
les gens de renoncer à leurs fausses croyances et vieilles habitudes. À défaut d’ap-
pliquer une procédure progressive pour tenter d’enlever aux gens leurs mauvaises
manières, on risquerait de les pousser à l’éloignement et à la haine.
Aïcha c a dit :
« La première sourate révélée fait partie des mufassals94 et évoque le paradis et
l’enfer. Les dispositions concernant le licite et l’illicite ne furent révélées qu’après la
fortification de la foi des croyants. Au tout début, si on leur avait interdit de boire de
l’alcool, ils auraient répondu :« On ne cessera jamais de boire ! »
Relativement à l’interdiction de la fornication, ils auraient répondu :
« On ne cessera jamais de forniquer ! »
Lorsque j’étais enfant et jouais à La Mecque, des versets concernant la foi et le
Jour de la Résurrection furent révélés à l’Envoyé de Dieu r tels que :

óƫ ĨƆ ƆÒIJĵ ƈ ÙƇ ĐÓùĤÒģƈ Ö
Ɔ İƆ îŽ ƆÒÙƇ ĐÓ
Ɔ ùĤÒ
ƪ IJ
Ɔ ħŽ İƇ ïƇ ĐijŽ Ĩ
Ɔ Ɔ ƪ Ɔ
« L’Heure, plutôt, sera leur rendez-vous, et l’Heure sera plus terrible et plus
amère. » (al-Qamar, 54 : 46).
94. Le suwar’ul-mufassal comprend la dernière section du Saint Coran, débutant, en conformité avec le
point de vue privilégié, par la sourate 50, Qaf, et se terminant par la dernière sourate, an-Nas. Ces
sourates ont été nommées mufassals pour le fait qu’elles sont souvent divisées par une basmala due à
leur brièveté.
306 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Et les sourates al-Baqara et an-Nisa, qui traitent des relations sociales, ne lui
furent révélées que lorsque j’étais avec lui à Médine. » (Al Boukhari, Fadail’ul-Quran, 6)
Marquées par un style élégant et concis, les sourates coraniques mecquoises
adoptent une position certaine et sans compromis contre l’idolâtrie. En effet, les Qu-
rayshites étaient des hommes éloquents qui aimaient se mesurer les uns aux autres
en organisant des joutes poétiques. Par conséquent, la parole qui devait les atteindre
se devait d’être éloquente et parfaite.
Ainsi donc, afin de réduire à néant la maîtrise de la littérature des idolâtres et
mieux la confondre, Dieu le Très-Haut fit usage de lettres alphabétiques disjointes
(huruf’al-muqatta’a) au début des sourates d’une manière jusqu’alors inédite.
Excepté pour les sourates al-Baqara et al-Imran, toutes les sourates qui dé-
butent par les huruf’al-muqatta’a appartiennent à la période mecquoise.
C’est la raison pour laquelle les premiers versets révélés furent si éloquents, si
sensés et en même temps si fluides qu’ils atteignirent le cœur de leurs auditeurs.
Une autre caractéristique de ces révélations mecquoises est que leur façon de
s’adresser aux gens, sauf quelques rares exceptions, est « Ô les hommes ! ».
Afin de persuader les idolâtres d’accepter une série de questions qui allaient
à l’encontre de leurs opinions et de leurs pratiques, les révélations mecquoises in-
cluaient des serments sur le soleil, la lune, les étoiles, la nuit, le jour et ainsi de suite.
En effet, toutes manifestaient la puissance du Très-Haut à travers l’univers.
Par ailleurs, une grande partie des récits historiques du Coran (Qasas) fut révé-
lé pendant la période mecquoise. Prendre les leçons de l’histoire est un des points
essentiels du Coran.
Les sourates traitant du passé des prophètes, en particulier d’Adam u et de son
affaire avec Iblis (Satan), sont d’origine mecquoise, sauf la sourate al-Baqara qui fut
révélée à Médine.
Le récit des expériences des peuples anciens, donnant des leçons à prendre, joua
un rôle prédominant dans la prédication de la Vérité aux idolâtres et dans leur cor-
rection progressive.
Au premier plan, la notion dominante dans ces récits demeure certes celle du
tawhid, le strict monothéisme.
Les versets mecquois montrent le chemin à suivre en matière de prédication. Ils
soulignent que l’invitation à la Religion divine ne doit se faire que pour l’agrément
de Dieu le Tout-Puissant.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 307

Ainsi, dans la sourate as-Shuara, le Très-Haut cite les prophètes Noé, Houd,
Sâlih, Lot et Shuayb L qui ordonnèrent à leur peuple la soumission et la piété et
affirmèrent qu’ils n’étaient que des messagers véridiques envoyés par Dieu :

ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ħġƇ ĥƇ ÑƆ øƆÒÓĨIJ
īĻ
Ɔ ĩĤƆ ÓđƆ ĤŽ ÒÔžƈ òĵ Ɔ ƪ źÒĴƆ ƈóäŽ ƆÒĪŽ Ò ƅóäŽ ƆÒīŽ ĨįĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ĥƆ Đ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ
« Et je ne vous demande pas de salaire pour cela ; mon salaire n’incombe
qu’au Seigneur de l’univers. » (Coran, as-Shuara, 26 : 109, 127, 145, 164, 180).
La seconde partie du Coran a été révélée majoritairement à La Mecque. Comme
les Mecquois étaient généralement des gens orgueilleux, le mot « ŻĠ» (kallâ : signi-
fiant « que non ») peut être facilement remarqué tout au long de ces sourates, reje-
tant et menaçant les idolâtres à cause de leur attitude.
Ainsi donc, les sourates dont le mot « kallâ » est mentionné sont toutes d’ori-
gine mecquoise et se trouvent dans la seconde moitié du Coran.
Par ailleurs, les versets qui contiennent des versets relatifs à la prosternation
(sadja) furent également révélés à La Mecque.
Les gens habitués à se prosterner devant d’autres choses furent encouragés à le
faire devant le Tout-Puissant et à réfléchir sur le sens profond de ces versets.
Ces premiers versets révélés à La Mecque instaurèrent les fondations solides
d’une société saine du point de vue de la croyance, de la pensée et de la morale.
Contenant des principes moraux, ces versets visent à purifier les musulmans des
fausses croyances et coutumes, à leur inculquer une foi inébranlable en la Vérité et à
leur enseigner la patience, la volonté et la persévérance.
Enfin, il demeure remarquable que les versets mecquois ne contiennent aucun
sujet d’ordre juridique et ne concernent que les actes d’adoration, à l’exception de la
prière (salât).
Par exemple, les sourates Yunus, ar-Rad, al-Furqan, Ya-Sin et al-Hadîd ne
traitent jamais de sujets juridiques, mais plutôt de manière générale des principes de
la foi, des attributs de Dieu le Très-Haut, des histoires des prophètes antérieurs et des
scènes relatives à l’au-delà.

L’ultime solution du Saint Prophète : l’Hégire


L’autorisation d’émigrer et le voyage à Médine
Après le second serment d’allégeance d’Aqaba, quand les idolâtres apprirent que
les musulmans avaient l’intention d’émigrer, ils amplifièrent leurs oppressions. En
raison des tortures insupportables qui leur rendirent la vie impossible à La Mecque,
308 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

les croyants demandèrent au Saint Prophète r la permission d’émigrer. Par la volon-


té du Tout-Puissant, le Messager de Dieu r indiqua le chemin de Médine et déclara :
« Il m’a été montré que votre destination est un lieu de plantations de dattiers
entouré de deux montagnes rocheuses. » (Al Boukhari, Kafalah, 4).
Les avisant d’embrasser les Ansars, leurs frères de Médine, il ajouta :
« Dieu le Glorieux vous a fait grâce en vous donnant des frères et une terre où vous
trouverez la paix ! »
Sans que les idolâtres s’en aperçoivent, les musulmans s’aidant mutuellement
commencèrent les préparatifs et émigrèrent en secret. (Ibn Hishâm II 76; Ibn Saad, I, 226).
Même si les croyants avaient été accueillis généreusement en Abyssinie, cette
première destination d’émigration ne répondait pas aux conditions requises pour
être le centre d’une religion universelle alors que Médine, d’un point de vue politique
et commercial, était une cité idéale pour devenir un centre islamique. C’est donc là
qu’eut lieu l’Hégire et, Médine devint un refuge pour les croyants. Les pires craintes
des idolâtres se réalisèrent : l’islam sortait des territoires de La Mecque pour gagner
une réputation de plus en plus grande et conséquente à Médine. Les idolâtres ne
pouvaient pas comprendre à quel point le départ forcé du Saint Prophète r était une
grande perte pour eux, étant incapables même de la sentir.
Dieu le Tout-Puissant révéla à Son Messager r le verset suivant :

ƃŻĻĥƈ ĜƆ ƪźÒƈ ğƆ ĘƆ ƆŻì Ɔ Ƈá×Ɔ ĥŽ ĺƆ ƆźÒðƃ Òƈ IJ


ƈ Īij
Ɔ
« … ils n’y seraient pas restés longtemps après toi. » (al-Isra, 17 : 76).
Trompés par leur puissance apparente et leur ego, les misérables idolâtres pen-
saient qu’avec leurs moqueries, leurs menaces, leurs tortures et leur embargo, ils
allaient détourner les croyants de la Vérité afin qu’ils y renoncent. En revanche, nul
parmi eux n’était conscient de ce qui les guettait : une défaite absolue et sans retour !
En effet, les croyants mecquois n’avaient pas quitté La Mecque par crainte, mais par
prise de conscience de la nécessité de fonder les bases d’un État islamique.

L’Hégire ne doit pas être vue comme une fuite face à l’indigence et à la misère.
Pour les Muhadjirs (les Émigrants) Médine fut une terre de refuge dans laquelle en
joignant leurs forces avec les Ansars ils firent asseoir la souveraineté de l’islam.
Le poète Necip Fazil donne la voix à cette réalité dans ces quelques vers :
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 309

L’Hégire… le soutien que l’on cherche de loin,


Pour un homme de mission, le foyer est une entrave,
L’espoir… de l’extérieur pour envelopper le noyau,
La volonté de conquérir le centre depuis l’étranger…
L’Hégire…. le soutien que l’on cherche de loin !
Les Muhadjirs laissèrent derrière eux tous leurs biens, richesses et parents. Cer-
tains secrètement et d’autres ouvertement prirent la route de Médine.
Ali t a dit :
« Personne d’autre qu’ Omar ibn al-Khattab t émigra ouvertement à Médine.
Omar t, avant de se mettre en route, se rendit à la Ka’ba muni de son épée, arc sur
l’épaule, lance et flèches dans ses mains. Tous les notables de La Mecque étaient pré-
sents il t circumambula sept fois autour de la Ka’ba et alla auprès d’eux dans le but
de les narguer. À présent rien n’allait être comme autrefois, ce geste fut le premier
signe annonçant les victoires à venir.
Omar t leur dit :
« Comme vous le voyez je m’en vais à Médine ! Que celui qui veut laisser der-
rière lui une mère en pleurs, une veuve, des orphelins, qu’il me suive et m’affronte
derrière cette vallée ! »Personne n’osa relever le défi. » (Ibn Asir Usd’ul-Ghabah IV 152-153)
Les Médinois accueillirent à bras ouverts leurs frères mecquois et les aidèrent
du fond du cœur. Les musulmans Mecquois furent appelés « Muhadjirs » (« les Émi-
grés »), et les musulmans médinois « Ansars », ce qui signifie « Auxiliaires ».
Dieu le Tout-Puissant dit dans le Saint Coran :

ħİij đ×ÜÒīĺñƈ ĤÒIJ ƈòÓāĬźÒIJīĺ ƈóäÓ ƈ Īij


ƈ ıƆ ĩĤŽ ÒīƆ Ĩ Ɔ ƇĤIJƪ ƆźÒŽ Īij
Ɔ ĝƇ Öƈ ÓùĤÒ
Ž Ƈ Ƈ Ɔƪ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ŽƆ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ƪ IJƆ
ƅ ĭäħıĤƆ ïƪ ĐÒƆ IJįĭŽ ĐÒijĄƇ òIJħıĭŽ ĐųÒ
Ĵ ƈóåŽ ÜƆ ÚÓ ƈ ĪÓ ƅ ƈ
ƪƆ ŽƇ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ʃ ĵƆ Ąò Ɔ ùƆ èŽ ÓƈÖ
ħĻčƈ đƆ ĤŽ ÒôƇ ijŽ ęƆ ĤŽ ÒğƆ Ĥƈ ðƆ Òïƃ ÖƆ ÒƆ ÓıĻ ƈ ïƈ ĤÓƈ ì
Ƈ Ɔ Ęīĺ
Ɔ Ɔ òÓ
Ƈ ıƆ ĬŽ ƆźÒŽ ÓıƆ ÝƆ éŽ ÜƆ
« Les tout premiers [croyants] parmi les Émigrés et les Auxiliaires et ceux qui
les ont suivis dans un beau comportement, Allah les agrée, et ils l’agréent. Il a pré-
paré pour eux des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, et ils y demeureront
éternellement. Voilà l’énorme succès ! » (at-Tawba, 9 : 100).
310 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les savants de l’islam ont tiré les conclusions suivantes relativement à l’autori-
sation accordée aux musulmans d’émigrer :
L’Hégire rendue obligatoire au temps du Saint Prophète r garde sa validité
jusqu’au Jour du Jugement. Cependant l’Hégire qui prit fin avec la conquête de La
Mecque est contextuelle à l’époque du Messager de Dieu r.
Il est donc interdit à tout musulman de rester dans un endroit où il ne peut
remplir ses fonctions telles que l’appel à la prière (adhan), la prière (salât) en congré-
gation et le jeûne.
Le verset ci-dessous en est la preuve :

Ó ĭƪ ĠÒij
Ƈ ƇĤÓĜƆ ħŽ ÝƇ ĭŽ Ġ
Ƈ ħĻ ƈ ƇĤÓĜƆ ħ ƈıùƈ ęƇ ĬŽ ƆÒĵĩƈ ĤÓƈ Č
ĘÒij Ɔ ÙƇ ġƆ Ñƈ ĥƆ ĩƆ ĤŽ ÒħƇ ıĻ ƈ ƈ
Ɔ Ž Ƈ Ęƪ ijƆ ÜƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒĪƪ Ò
Ó ıĻ ƈ ƈ ıƆ ÝƇ ĘƆ Ùƃ đƆ øÒƈ IJ ƈ Ʃ ĂƇ òƆÒīġƇ ÜƆ ħĤƆ ƆÒÒijƇĤÓĜƆ Ăƈ òƆźÒŽ ĵĘ ƈ īĻęƈ 𹎠ÝùĨ
Ɔ ĘÒIJóƇ äÓ Ɔ ųÒ Ž Ž Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ ŽƇ
ƈ äóĤÒ
ĢÓ ƈ ęƈ 𹎠ÝùĩĤŽ ÒƪźÒÒ ƈ óĻāƈ ĨÚ ÅÓøIJħĭıäħıĺIJÉŽ ĨğÑƈ ĤIJÓĘ
Ɔ žƈ īƆ ĨīĻ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƇ ƃ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƇƪƆ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƇƆ
ƃŻĻƈ×ø ƈ Ɔ đĻĉƈ ÝùĺƆźĪÒ ƈ ïƆ ĤŽ ƈijĤŽ ÒIJÅÓ ƈ ƈ
Ɔ ĪIJ Ɔ ïƇ ÝƆ ıŽ ĺƆ ƆźIJ Ɔ Ùƃ ĥƆ ĻèĪij Ƈ Ɔ ŽƆ Ɔ ùƆ žĭĤÒIJƆ
« Ceux qui ont fait du tort à eux mêmes, les Anges enlèveront leurs âmes en
disant : ‹Où en étiez-vous ? ›(À propos de votre religion) - ‹Nous étions impuis-
sants sur terre›, dirent-ils. Alors les Anges diront : ‹La terre d’Allah n’était-elle
pas assez vaste pour vous permettre d’émigrer ? › Voilà bien ceux dont le refuge et
l’Enfer. Et quelle mauvaise destination ! A l’exception des impuissants : hommes,
femmes et enfants, incapables de se débrouiller, et qui ne trouvent aucune voie. »
(An Nisa, 4:97).

Ce verset indique que ceux qui ont refusé d’émigrer et sont restés au sein de
cette société idolâtre s’infligent des tortures à eux-mêmes, préférant leur confort,
leurs habitudes, leur famille, leurs richesses et leurs intérêts à la Religion. Le prétexte
de dire « nous étions parmi les faibles sur la terre » ne sera ni valable ni accepté lors
du Jugement divin. L’excuse n’est valable que pour les personnes âgées, les invalides,
les femmes et les enfants qui n’ont vraiment pas pu trouver le moyen d’émigrer.
Ce que nous enseigne aussi l’Hégire, c’est qu’il nous est obligatoire de venir en
aide aux personnes oppressées, quelles que soient leurs origines.
L’opinion consensuelle (ijma) des savants musulmans (oulémas) est d’avis sur
le fait que tout musulman soumis à l’oppression, voire à la persécution ouverte, se
doit d’être secouru par les autres musulmans. Dans le cas contraire, il y aura négli-
gence en la matière et ces derniers auront commis un grand péché.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 311

L’Être de lumière r accorda une grande importance à l’Hégire et exhorta tous


les musulmans à émigrer jusqu’à la conquête de La Mecque. En effet, toutes les terres
en dehors de Médine étaient étrangères à l’islam, ce qui avait rendu pratiquement
irréalisable pour le croyant l’apprentissage et la pratique de sa religion.

Le plan d’assassinat ourdi par les idolâtres


En voyant La Mecque de plus en plus désertée la journée, les idolâtres sentirent
l’urgence de la situation. À la hâte, ils se réunirent dans la maison de Nadwa, le foyer
du mal. Parmi les participants se trouvait un homme âgé se disant être originaire de
Nadj et qui n’était rien d’autre qu’Iblis ayant pris forme humaine.
Ils discutèrent longuement de ce qu’ils allaient faire. Des propositions comme
emprisonner ou exiler le Saint Prophète r en dehors de La Mecque furent avancées,
mais l’homme âgé de Nadj s’y opposa. Finalement ils arrivèrent à prendre une déci-
sion impitoyable : assassiner le Messager de Dieu !
Ce fut Abû Jahl, le Pharaon de son temps, qui manigança le plan à exécuter :
« Nous allons tout d’abord armer un jeune homme appartenant à chaque tribu,
ensuite nous leur demanderons de l’attaquer tous au même moment pour que son
sang soit réparti entre tous les clans et que les fils d’Abd Manaf ne puissent plus avoir
assez de force pour combattre toutes les tribus de La Mecque. Ainsi donc ils seront
obligés de se contenter du prix du sang et nous paierons les fils d’Abd Manaf ! »
L’homme âgé de Nadj, qui n’était autre qu’Iblis le maudit, fut le premier à se
réjouir :
« Voilà une parole bien appropriée ! Il ne peut y avoir de proposition plus rai-
sonnable ! » (Ibn Hishâm, II, 93-95).
Alors que les idolâtres étaient occupés à préparer leur plan sinistre, le Bien-
aimé de Dieu r était bien seul à La Mecque. Rempli de compassion pour son peuple,
il y demeura jusqu’à ce que les émigrants ne fussent pas attaqués par derrière. Par
ailleurs, la volonté divine allait aussi dans ce sens.
Quand Abû Bakr t qui allait avoir le privilège d’accompagner le Messager de
Dieu r jusqu’à Médine, lui demanda l’autorisation d’émigrer, il r lui répondit :
« Sois patient ! Qui sait ? Peut-être Dieu t’accordera t-Il un bon compagnon pour
le voyage ? » (Ibn Hishâm, II, 92).
Pressentant les futures bénédictions, et comme marque de joie, Abû Bakr t alla
acheter deux chameaux pour huit cents dirhams et les nourrit soigneusement durant
quatre mois en préparation du voyage. (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 45).
312 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Au moment où les idolâtres s’apprêtèrent à commettre le plan maléfique, le


Noble Prophète r reçut l’ordre divin d’émigrer :

âƆ óíŽ Ĩĵ ĭƈ äŽ ƈóìŽ ƆÒIJ ƅ ƈ


Ɔ ĚïŽ ĀģƆ ìƆ ïŽ Ĩĵ
ƈ ƈ
Ƈ ĭĥŽ ìîŽ ƆÒÔžƈ ò
Ɔ ģŽ ĜƇ IJƆ
Ɔ Ƈ
ÒóĻāƈ ĬƆ ÓĬƃ ÓĉƆ ĥŽ ø ƈ ƈ
Ƈ ğƆ ĬŽ ïƇ ĤƆ īŽ ĨĵĤģŽ đƆ äÒ
Ž IJ
ƅ ƈ
Ɔ ĚïŽ Ā
ƃ
« Et dis : ‹Ô mon Seigneur ; fais que j’entre par une entrée de vérité et que je
sorte par une sortie de vérité ; et accorde-moi de Ta part, un pouvoir bénéficiant
de Ton secours›. » (al-Isra, 17 : 80).
Outre cette révélation, Gabriel u avait communiqué au Messager de Dieu r
ce que les idolâtres étaient en train d’ourdir :
« Ne te couche pas dans ton lit cette nuit ! » lui dit-il. (Ibn Hishâm, II, 95)
Alors, dans la chaleur de midi quand tout le monde se reposait chez soi, l’En-
voyé de Dieu r vint à Abû Bakr t et lui fit part de l’ordre reçu d’émigrer.
Abû Bakr t lui demanda :
« Suis-je aussi du voyage, ô Messager de Dieu r ? »
« Oui », répondit-il.
Des larmes de joie jaillirent des yeux d’Abû Bakr t tellement cette réponse
l’avait enchanté et réjoui profondément. En fait, ces larmes reflétaient la beauté et
l’amour intense qu’il avait envers son cher ami. (Voir Ibn Hishâm, II, 97-98).
Puis le Saint prophète r appela Ali t et lui apporta aussi la nouvelle et le char-
gea de rendre les dépôts à leurs propriétaires qui lui avaient été confiés.
Connaissant la loyauté et la droiture du Saint Prophète r, il n’y avait pas un
seul homme à La Mecque qui ne lui avait pas un jour ou l’autre confié ses objets de
valeur.
Préventif face au complot des Mecquois, le Saint Prophète r demanda à Ali t:
« Ô Ali ! Cette nuit, couche-toi dans mon lit… et couvre-toi de mon manteau !
Tu n’as rien à craindre, il ne te sera fait aucun mal ! » (Ibn Hishâm, II, 95, 98)
Le fait que le Messager de Dieu r couvrit Ali t de son manteau fournit égale-
ment un exemple de tabarruk, c’est-à-dire une recherche de bénédictions liées aux
effets personnels du Saint Prophète r.
Des exemples similaires peuvent être cités en grand nombre.
Le Saint Prophète r envoya plus tard son manteau à Uways al-Qarani t en lui
demandant :
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 313

« Portes le manteau et prie pour la communauté ! » (Fariduddin Attar, Tadhkirat’ul-


Awliya’a, p. 21; Voir aussi, Muslim, Fadailu’s-Sahâba, 223-225).

Un autre fait est ici digne d’attention c’est la totale soumission d’Ali t au Mes-
sager de Dieu r.
En effet, les Compagnons t n’avaient pas l’habitude de montrer le moindre
signe d’hésitation quant à l’accomplissement des ordres prophétiques, que ce soit sur
le plan de la parole ou de l’action. Jamais ils ne sentirent le besoin de demander pour-
quoi ni comment. Si c’était d’un ordre, ils l’exécutaient promptement sans jamais
négliger une seule sunna dans son application.
Ils connaissaient parfaitement les conséquences qu’entrainaient le fait de tom-
ber dans la déviance et craignaient cette réalité. L’attachement de ces croyants au
Coran et à la Sunna était comparable à l’union entre l’ombre et son propriétaire. (Voir
Al Boukhari, Humus, 1; Muslim, Jihad, 52; Abu Dâwud, Haraj, 18; Ahmed, I, 10).

Ali t raconte :
« Au moment où le Messager de Dieu était sur le point de quitter La Mecque,
nous nous rendîmes ensemble à la Ka’ba. Le Messager de Dieu t me dit alors :
« Assieds-toi, ô Ali ! »
Je me suis assis. Puis voulant grimper sur le toit de la Ka’ba, il monta sur mes
épaules. Mais soudainement je perdis toute mon énergie. Me voyant en état de fai-
blesse, il descendit de mes épaules, s’accroupit, puis me dit :
« Monte sur mes épaules ! »
M’exécutant promptement, il se leva et me hissa. Je fus pris alors d’une telle
puissance que si je l’avais voulu, j’aurais pu atteindre les extrémités du ciel. Je me
retrouvai sur le toit de la Ka’ba où y était placé une idole faite de bronze et de cuivre.
« Jette-la en bas, ô Ali ! » me dit l’Envoyé de Dieu.
À l’instant où l’idole toucha terre, elle se brisa comme un bol en verre. Je
descendis ensuite du toit de la Ka’ba et nous nous éloignâmes du lieu sans croiser
personne. » (Ahmed, I, 84; Hakim, III, 6/4265).

La nuit même de l’Hégire, avant même qu’il ne sorte de chez lui, la maison du
Messager de Dieu r fut encerclée.
314 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Mais doté d’une confiance et d’une soumission inébranlables en Dieu le Tout-


Puissant, il n’afficha aucun signe d’anxiété ou de crainte. Le Saint Prophète r sortit
de chez lui et, prenant du sol une poignée de sable, la jeta sur les idolâtres tout en
récitant ces versets de la sourate Ya-Sin :

Ó ĭƆ ĥŽ đƆ äƆ IJ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ Īij Ɔ éƇ ĩƆ ĝŽ Ĩ
Ƈ ħŽ ıƇ ĘƆ ĪÓĜƆ ðŽ ƆźÒŽ ĵĤƆ ÒĵƆ ƈıĘƆ ƃźƆŻĔŽ ƆÒħŽ ƈıĜÓĭƆ ĐŽ ƆÒĵĘÓĭƆ ĥŽ đƆ äÓ
Ɔ Ĭƪ Ò
ĪIJ Ɔ óƇ āƈ ׎ ƇĺƆźħŽ ıƇ ĘƆ ħŽ İÓ ƈ Ɔ īĨƈ IJÒïƬ øħ ƈıĺïƈ ĺÒƆ īƈ ĻÖīĨƈ
Ƈ ĭƆ ĻŽ ýƆ ĔŽ ÓƆ ĘƆ ÒïƬ ø
Ɔ ħŽ ƈıęĥŽ ì Ž Ɔ Ɔ Ž Ž ŽƆ Ž
« Nous mettrons des carcans à leurs cous, et il y en aura jusqu’aux mentons:
et voilà qu’ils iront têtes dressées. Et Nous mettrons une barrière devant eux et
une barrière derrière eux ; Nous les recouvrirons d’un voile : et voilà qu’ils ne
pourront rien voir. » (Ya-Sin, 36 : 8-9).
Aveuglés par le voile qui enveloppait leurs cœurs, ils ne purent en effet rien
voir. En effet, l’aveuglement des cœurs rend aussi les yeux aveugles, tant et si bien
que le Saint Prophète r passa devant eux, ils ne purent rien voir. Car, certes, les yeux
et les cœurs de ceux qui sont aveugles ne peuvent percevoir la lumière.
Ce n’est que quelques temps après que les idolâtres s’en aperçurent.
Quelqu’un qui passait par là leur demanda :
« Qui attendez-vous ici ? »
« Nous attendons Muhammad ! » répondirent-ils.
« Que Dieu vous détourne d’accéder à vos désirs, objecta l’homme. Muhammad
est parti en vous jetant de la terre au visage ! »
Quand les idolâtres posèrent leurs mains sur leur tête, ils les trouvèrent
recouvertes de sable. Furieux, ils prirent d’assaut la maison et y découvrirent que
quelqu’un était couché dans le lit du Saint Prophète r.
Ils s’écrièrent :
« C’est Muhammad ! Il est couché sous sa couverture ! »
Les idolâtres se précipitèrent vers le lit, mais quand l’homme couché dans le lit
leva la tête, ils demeurèrent stupéfaits.
En effet, celui qui était devant eux n’était autre qu’Ali t !
« L’homme disait donc vrai.» se dirent-ils, déconfits.
Ils se tournèrent vers Ali t et lui demandèrent sur un ton empli de colère :
« Où est le fils de ton oncle, ô Ali ? »
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 315

« Je n’en ai aucune idée, leur répondit Ali t, croyez-vous que je suis toujours là
où il se rend ? Vous lui avez dit sans arrêt de quitter La Mecque. Voilà, il a fini par le
faire, il vous a quittés ! »
Les idolâtres commencèrent à s’acharner sur Ali t en le réprimandant et en
l’insultant. Qui plus est, ils le tinrent prisonnier pendant quelques temps à la Ka’ba
puis finirent par le relâcher. (Ibn Hishâm, II, 96; Ahmed, I, 348; Yakubi, II, 39).
Pendant que ces misérables aux cœurs verrouillés et aux yeux fermés à la vérité
rôdaient autour de sa maison l’Envoyé de Dieu r avait paisiblement rallié depuis
longtemps la maison d’Abû Bakr t.
Bien que les idolâtres eussent ourdi le complot, Allah le Tout-Puissant le contre-
carra de la plus belle des façons.
Le Très-Haut décrit cette situation comme suit :

ƈ óęĠīĺñƈ ĤÒğƈÖóġĩĺðÒƈ IJ
ĞƆ ijĥƇ ÝƇ ĝŽ ĺƆ IJŽ ÒƆ ĞƆ ijÝƈƇ ×ᎠĻĤÒIJ
Ƈ ƇƆƆ Ɔ ƪ Ɔ ƇƇ ŽƆ Ž Ɔ
īĺ ƈ
Ɔ ƈóĠÓĩƆ ĤŽ ÒóƇ ĻŽ ìƆ ƇųÒ Ʃ IJ
Ɔ ƇųÒ Ʃ óƇ ġƇ ĩŽ ĺƆ IJ Ɔ óƇ ġƇ ĩŽ ĺƆ IJ
Ɔ ĪIJ Ɔ ĞƆ ijäƇ ƈóíŽ ƇĺIJŽ ÒƆ
« (Et rappelle-toi) le moment où les mécréants complotaient contre toi pour
t’emprisonner ou t’assassiner ou te bannir. Ils complotèrent, mais Allah a fait
échouer leur complot, et Allah est le meilleur en stratagèmes.» (al-Anfal, 8 : 30).

Le long voyage
Le Messager de Dieu r quitta sa maison et une fois arrivé chez Abû Bakr t
remit à son ami, malgré son refus, la somme convenue pour l’achat du chameau qui
lui était prédestiné.
Le Messager de Dieu r, qui venait de passer miraculeusement devant les yeux
des idolâtres, devait cette fois-ci agir avec plus beaucoup plus de circonspection. En
effet, selon la volonté divine, le Messager de Dieu r est le meilleur exemple pour les
hommes.
C’est pour cela qu’ils sortirent par l’arrière de la maison d’Abû Bakr t, et qu’ils
y laissèrent quelques jours de plus leur chameaux.
De même qu’en termes de précaution, ils prirent la direction inverse de la route
menant à Médine.
Abû Bakr t marchait tantôt devant tantôt derrière le Messager de Dieu r.
Quand celui-ci remarqua cette attitude, il lui demanda :
« Pourquoi marches-tu de cette façon, ô Abû Bakr ? »
316 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abû Bakr t répondit :


« C’est parce que je crains qu’il ne t’arrive quelque mal, ô Messager de Dieu ! »
C’est alors qu’ils atteignirent la grotte de Thawr.
Abû Bakr t dit au Messager de Dieu r :
« Il est préférable que tu attendes ici jusqu’à ce que je prépare l’intérieur de la
grotte, ô Messager de Dieu. »
Il se mit donc à nettoyer la grotte et à boucher les différents trous. Puis il le fit
pénétrer à l’intérieur. (Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 222-223).
Pendant ce temps, les idolâtres, menés par Abû Jahl, se précipitèrent chez Abû
Bakr t. Ne trouvant pas Abû Bakr t et le Saint Prophète r ils interrogèrent sa fille
Asma c. Cette dernière leur répondant qu’elle n’était au courant de rien alors les
idolâtres se mirent à la gifler.
L’Être de lumière r et son « Compagnon de la Grotte » (Yar-i Ghar95) restèrent
dans la grotte pendant un certain temps pour se protéger des idolâtres qui les recher-
chaient partout sur les routes de Médine. Quand leurs moyens s’épuisaient ils trou-
vaient la protection et l’aide du Tout-Puissant.
Certains suivirent leurs traces et parvinrent jusqu’au seuil de la grotte, mais
voyant son entrée fermée par une toile d’araignée et un nid de pigeon, ils poursui-
virent leur route.
Et par la grâce de Dieu, un arbre prit racine pour cacher le visage du Saint Pro-
phète r. (Ibn Saad, I, 229; Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 223-224).
Sans soupçonner la moindre possibilité de les trouver dans la grotte, ils se reti-
rèrent de là.Sans aucun doute, le Défenseur, le Protecteur et le Refuge commun à ces
deux voyageurs bénis n’était nul autre que Dieu le Tout-Puissant.
C’est pour cela que les hommes qui se présentèrent devant la grotte ne purent
rien voir en dehors du nid de pigeon et de la toile d’araignée.
Comme l’a écrit le poète Arif Nihat Asya :
L’araignée n’était ni dans le ciel,
Ni dans l’eau, ni sur la terre,
Elle était dans les yeux
Aveugles à la Vérité !
95. Yar-i Ghar signifie « Compagnon de la Grotte ». Cette expression décrit le compagnonnage du Saint
Prophète r et d’Abû Bakr t dans la grotte de Thawr. Par extension, cette expression est aussi utilisée
pour signifier la véritable amitié.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 317

Face à tous ces évènements, Abû Bakr t commençait à devenir de plus en plus
anxieux et agité. Il s’inquiétait non pas pour sa personne mais pour le Messager de
Dieu r.
En effet, si les idolâtres s’étaient légèrement penchés, ils les auraient certaine-
ment vus.
Ils se dirent même en faisant le tour de la grotte :
« S’ils étaient entré dans cette grotte, la toile d’araignée et les œufs de pigeon
auraient été détruits. »
Certains proposèrent de regarder à l’intérieur de la grotte.
Umayya ibn Khalef énervé dit :
« Avez-vous perdu la tête ? Que voulez-vous faire dans une grotte pleine de
toiles d’araignée ?! Croyez-moi, ces toiles d’araignée existent avant même que Mu-
hammad ne vint au monde ! »
Abû Jahl, quant à lui, ajouta :
« Pourtant Muhammad est près d’ici ! Mais avec à sa magie, il nous a bandés les
yeux et c’est pour cela que nous ne pouvons pas le voir ! » (Ibn Saad, I, 228; Halabî, II, 209).
Abû Bakr t le véridique s’inquiéta et dit au Messager de Dieu r :
« Si je suis tué, une seule personne serait tuée, mais s’il t’arrivait quelque chose,
toute une communauté serait anéantie. »
Le Saint Prophète r accomplissait la prière debout tandis qu’Abû Bakr t gar-
dait un œil ouvert.
Il t exprimait son inquiétude :
« Ces gens te recherchent partout, dit il au Saint Prophète. Par Dieu, je n’ai
aucune crainte pour moi, mais j’ai tellement peur qu’il te soit fait du mal ! »
Le Saint Prophète r répondit à son Yar-i Gar :
« Ô Abû Bakr ! N’aie aucune crainte, car Dieu est avec nous ! » (Ibn Kathir, al-Bi-
dayah, III, 223-224; Diyarbakri, I, 328-329).

Le Saint Coran raconte cet évènement comme suit :

ƈ ĩİðŽ Òƈ īƈ ĻĭƆ àŽ ÒĵĬÓƈ àƆ ÒIJóęƆ Ġ


 ƈòÓĕƆ ĤŽ ÒĵĘÓ īĺñƈ ĤÒįäóìÒðÒƈ ųÒĮóāĬïĝĘĮIJóāĭÜźÒƈ
ƆƇ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž ƇƩ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ƈ Ƈ ŽƆ ƪ
ħĤƆ îij ƅ ĭåƈÖĮïƆ ĺÒƆ IJįƈ ĻĥƆ ĐįÝĭĻƆ ġƈ øųÒ ƈ ƈ ƈ ƈ Ƈ ĝƇ ĺðŽ Òƈ
Ž Ƈ Ƈ Ƈ ƪ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ĢƆ õƆ ĬŽ ÓƆ ĘƆ ÓĭƆ đƆ Ĩ Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƪ ÒĪŽ õƆ éŽ ÜƆ Ɔźįƈ×èÓāƆ ĤĢij Ɔ
ħĻġƈ è õĺ ƈõĐųÒIJÓĻĥđĤÒĵİ ƈ ųÒ ƈ Ùĩĥƈ ĠIJĵĥęùĤÒÒIJóęƆ Ġ īĺñƈ ĤÒÙĩĥƈ ĠģđäIJÓİIJóÜ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ ƆŽ Ƈ Ž Ɔ Ʃ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƫ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆƆ
318 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Si vous ne lui portez pas secours... Allah l’a déjà secouru, lorsque ceux qui
avaient mécru l’avaient banni, deuxième de deux. Quand ils étaient dans la grotte
et qu’il disait à son compagnon : ‹Ne t’afflige pas, car Allah est avec nous.› Allah
fit alors descendre sur lui Sa sérénité ‹Sa sakina› et le soutint de soldats (Anges)
que vous ne voyiez pas, et Il abaissa ainsi la parole des mécréants, tandis que la
parole d’Allah eut le dessus. Et Allah est Puissant et Sage. » (at-Tawba, 9 : 40).
Plus tard, Abû Bakr t relatant cet évènement, dit :
« Lorsque nous étions retranchés dans la grotte, j’aperçus les pieds des associa-
teurs et je dis au Messager de Dieu r:
- Ô Messager de Dieu, si un d’eux regardait sous ses pieds, il nous verrait !
Le Messager de Dieu r me répondit ceci :
- Ô Abû Bakr ! Que penses-tu de deux compagnons dont le troisième est Dieu le
Très-Haut ! » (Al Boukhari, Fadail’ul-Ashab 2, Manaqib 45; Muslim, Fadailu’s-Sahabah, 1).
Après seize années de prédication à La Mecque, et conséquemment à cette pé-
riode, une seconde grotte fut donc indiquée au Saint Prophète r.
À l’instar de celle qui se trouvait sur le Mont Hira, cette seconde grotte fut un
lieu de formation spirituelle.96
Là, dans ce lieu, le Messager de Dieu r observa tout un cortège de mystères
divins ; son cœur béni se développa et s’immergea dans les réalités du livre de la
création.
Le séjour dans la grotte de Thawr dura trois jours et trois nuits.
Durant ce moment exceptionnel, le Saint Prophète r n’était pas seul, il était
accompagné d’Abû Bakr t le plus noble des hommes après les prophètes. Honoré
de se trouver aux côtés de l’Envoyé de Dieu r durant ces trois jours et ces trois nuits,
il gagna la mention coranique de « Second des Deux ».

Le Saint Prophète r avait ainsi conseillé son ami :

ÓĭƆ đƆ Ĩ ƈ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƪ ÒĪŽ õƆ éŽ ÜƆ Ɔź
«…‹Ne t’afflige pas, car Allah est avec nous›… » (at-Tawba, 9 : 40).
96. Par rapport à Hira, Thawr était un autre lieu d’éducation. Alors qu’à Hira les graines de la foi avaient
été cultivées, à Thawr, les graines de l’ihsan (l’excellence) et du tasawwsuf (soufisme) furent plantées
après que les graines de l’iman (la foi) eussent déjà fleuri. Cela signifie que le cœur doit d’abord vivre
la charia, en vertu de laquelle il acquerra une aptitude pour le tasawwuf.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 319

Ce faisant le Saint Prophète r, lui avait transmis dans le même temps le secret
de demeurer avec Dieu (ma’iyya).
Ce fut le début de l’enseignement du dhikr ou du rappel silencieux (dhikr khafi)
et de l’ouverture du cœur à la spiritualité et à son apaisement.
Ainsi donc, la grotte de Thawr servit de lieu de départ à la formation du cœur en
vue d’atteindre le Tout-Puissant depuis l’horizon des mystères sans fin, la première
étape de ce voyage divin.
La transmission des secrets intérieurs du cœur béni du Saint Prophète r à sa
Communauté (Oumma) commença d’abord dans cette grotte avec Abû Bakr t qui
devint ainsi le premier maillon de la « chaîne d’or » (silsila) qui subsistera jusqu’à la
fin des temps.
La foi puise sa force dans l’amour développé à l’égard du Messager de Dieu r.
Le principal moteur de ce voyage, c’est l’amour que l’on ressent pour le Noble
Messager r et la seule façon d’atteindre le Tout-Puissant est liée à ce sentiment
d’amour. En effet, le véritable amour, ce n’est pas seulement le fait d’aimer quelqu’un,
mais c’est aimer aussi tout ce qu’il aime. Ce genre d’amour qui doit être constam-
ment vivifié n’est possible qu’à travers le lien spirituel (rabita). ( cf. Osman Nûri TOPBAŞ,
Îmandan Ihsâna Tasavvuf, p. 249-257, Istanbul 2002).

La compréhension de la nature de l’amour divin est inconcevable par un cœur


non doué de profondeur.
Le fait suivant reflète l’intensité du lien spirituel existant entre Abû Bakr t et
le Saint Prophète r et qui n’est perceptible que par les personnes dotées d’un fort
discernement :
Lorsqu’Abû Bakr t conversait avec l’Envoyé de Dieu r, il obtenait une tout
autre satisfaction. En effet, il était le plus au fait des secrets prophétiques et même à
ses côtés, il désirait davantage sa proximité.
Quand l’Envoyé de Dieu r disait en guise de reconnaissance :
« Il n’y a pas de fortune qui m’ait été autant utile que celle d’Abû Bakr »
Abû Bakr t répondait en pleurant :
« Moi et mes biens, ne sommes-nous pas seulement pour toi, ô Messager de
Dieu ! » (Ibn Majah, Muqaddimah, 11) ; une expression de dévotion totale et d’anéantisse-
ment de soi en la personne du Saint Prophète r. (Dans le soufisme, cet état spirituel
est appelé fana fi’r-Rasoul.
320 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Fatigué à cause des évènements, le Messager de Dieu r avait placé sa tête sur les
genoux d’Abû Bakr t et s’était assoupi. À un moment, ce dernier remarqua un trou
qu’il avait oublié de boucher, et de peur qu’un reptile ne causât quelque tort au Saint
Prophète r, il avança son pied sans vouloir le déranger.
Bientôt confronté à une épreuve divine Abû Bakr t avait toutes les raisons de
s’inquiéter. En effet, un serpent se manifesta et mordit violemment son pied en y
déversant son venin.
Abû Bakr t entra subitement dans une telle agonie que même s’il fut incapable
de remuer un seul membre de son corps pour ne pas réveiller le Messager de Dieu r,
il n’eut guère la force de contenir ses larmes. C’est ainsi qu’une de ses larmes tomba
sur le visage béni du Saint Prophète r, ce qui le réveilla.
Celui-ci lui demanda alors :
« Que se passe t-il, ô Abû Bakr ? »
Abû Bakr t répondit qu’il n’y avait rien de mal, mais finit néanmoins par ra-
conter ce qui venait de se produire. (Bayhaqî, Dalail, II, 477; Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 223)
Sans tarder une seule seconde, le Saint prophète r appliqua sa salive sur la plaie
à l’aide de son doigt, et par un effet de la grâce de Dieu, la souffrance s’apaisa et sa
blessure guérit.
Une source non confirmée rapporte que le Messager de Dieu r demanda au
serpent la raison de sa morsure, ce à quoi il répondit :
« Ô Messager de Dieu ! J’attendais ta venue ici depuis tant d’années afin de te
voir. Juste au moment où mon désir le plus fort allait se réaliser, je m’aperçus que
mon chemin était bloqué. Incapable de retenir ce désir intense de te voir, je n’eus pas
d’autre choix que de mordre ! »
Inspiré par cet évènement, le poète Fuzuli exprima dans un distique la force spi-
rituelle qu’avait le Saint Prophète r de guérir tant physiquement que moralement :
Pour l’ami intime, même le venin devient vie,
Alors que l’eau pure est poison pour l’ennemi...
Au cours de son califat, quand certaines personnes firent l’éloge d’Omar t en
le plaçant au-dessus d’Abû Bakr t, Omar t déclara :
« Par Dieu, Abû Bakr t est meilleur que toute la famille d’Omar t réunie. Bien
plus encore, même un seul jour de sa vie est plus méritoire que toute ma famille.
Quand le Messager de Dieu r quitta sa maison pour se réfugier dans la grotte, c’est
lui qui était en sa compagnie. » (Hakim, III, 7/4268).
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 321

Tout au long du séjour qui eut lieu dans la grotte de Thawr, Asma c, la fille
d’Abû Bakr t, apporta de la nourriture et son fils Abdullah t passa chaque nuit
dans la grotte avec eux. Pour faire croire aux idolâtres qu’il passait la nuit en ville, il
rejoignait La Mecque dès l’aube et la journée, il se mélangeait parmi eux et écoutait
leurs complots qu’ils voulaient ourdir contre le Saint Prophète r. La nuit tombée, il
racontait à l’Être de lumière ce qui se disait.
Amir ibn Fuhayra t, l’affranchi d’Abû Bakr t, faisait paître les brebis de ce
dernier en compagnie des autres bergers. Partant tôt le matin en leur compagnie,
il ralentissait volontairement le pas de ses animaux au retour pour rester en retrait,
derrière les autres bergers. Ainsi la nuit venue, il allait à la grotte avec les brebis pour
que le Saint Prophète r et son honorable ami puissent bénéficier du lait de ses bêtes.
(Ibn Hishâm, II, 99; Al Boukhari, Manaqibu’l-Ansâr, 45; Haythami, VI, 53).

Après trois jours de recherche intensive, les idolâtres perdirent tout espoir. Le
quatrième jour, ayant appris d’Abdullah ibn Abû Bakr t que les idolâtres avaient
abandonné les recherches, le Saint Prophète r et Abû Bakr t enfourchèrent les
chameaux apportés par le guide et quittèrent la grotte. Cela signifiait que c’était le
moment pour le Saint Prophète r de faire ses adieux à sa ville natale où il avait passé
toute son existence jusqu’à ce jour.
Le Messager de Dieu r était très attaché à La Mecque et l’aimait particulière-
ment. Si bien qu’il s’arrêta sur la colline de Hazwara et s’écria à l’adresse de la cité :
« Par Dieu ! Mekka tu es la plus aimée de toutes les cités. Si les événements ne m’y
avaient pas poussé jamais je ne t’aurais quitté. » (Ahmed IV, At Tirmidhi, Manaqib, 68/3925).
Puis de nouveau :
« Quelle belle cité es-tu et comme je t’aime ! Jamais je ne t’aurais quitté si ma
tribu ne m’avait pas contraint à changer de contrée. » (At Tirmidhi, Manaqib, 68/3926).
À cette tristesse qui était sienne vint le réconfort divin :

îÓƅ đƆ Ĩĵ ƈ
Ɔ ĤƆ ÒĞƆ îÒƫ óƆ ĤƆ ĪƆ ÒƆ óŽ ĝƇ ĤŽ ÒğƆ ĻŽ ĥƆ Đ
ƈ ƈ
Ɔ ĂƆ óƆ ĘƆ ĴñĤƪ ÒĪƪ Ò
« Celui qui t’a prescrit le Coran te ramènera certainement là où tu (sou-
haites) retourner. Dis : ‹Mon Seigneur connaît mieux celui qui a apporté la guidée
et celui qui est dans un égarement évident. » (al-Qasas, 28 : 85).
Ces versets coraniques indiquent explicitement les premiers signes de la
conquête de La Mecque et ont chassé la tristesse du cœur du Saint Prophète r en y
laissant place à la joie.
322 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La Mecque et Médine sont distants l’une de l’autre d’environ 400 kilomètres. À


cette époque, à dos de chameau, cette distance se parcourait en huit jours. Pourtant,
en dépit du long chemin à parcourir, du climat torride et du sable brûlant, les voya-
geurs bénis continuèrent leur marche sans s’arrêter et ce dès le premier jour.
Comme Abû Bakr t était un commerçant renommé qui avait l’habitude de
beaucoup voyager, des gens le croisèrent durant le trajet et lui demandèrent l’identité
de l’homme qui le précédait.
« C’est mon guide… leur répondit-il à chaque fois, il me montre la voie à
suivre ! »
Bien entendu, dans son cœur, il voulait dire « il me guide vers de meilleures
voies ». » (Ibn Saad, I, 233-235; Ahmed, III, 211).
Emmenés par Abdullah ibn Urayqit97, le Messager de Dieu r, Abû Bakr as-Sid-
diq t et son esclave affranchi Amir ibn Fuhayra t s’arrêtèrent devant une tente aux
environs de Qudayd et qui appartenait à une certaine Ummu Ma’bad. Cette dernière
avait coutume de combler les besoins des voyageurs en leur fournissant des vivres.
C’est dans ce contexte que les nobles voyageurs qui se dirigeaient vers Médine la
sollicitèrent pour qu’elle leur offrît un peu de lait.
À l’intérieur de la tente se trouvait une brebis si faible et amaigrie que l’expec-
tative qu’elle fournît du lait semblait quasi nulle ; elle n’avait même pas la force de
rejoindre le troupeau qui paissait dans les pâturages. Quand le Messager de Dieu r
demanda à Ummu Ma’bad la permission de traire l’animal, celle-ci s’exclama :
« Que ma mère et mon père te soient sacrifiés, ô Messager de Dieu ! Si tu peux
trouver en elle du lait, fais-le ! »
Après avoir invoqué les bénédictions de Dieu, comme par miracle, le Noble
Prophète r commença à traire la brebis, et de ses mamelles sortirent une quantité
abondante de lait.
Ummu Ma’bad raconta par la suite que cette brebis vécut jusqu’à la sécheresse
survenue durant le califat d’Omar t.
Elle détailla aussi les joies et bénédictions que cette brebis lui avait apportées :
« Quand les animaux ne trouvaient rien à brouter, nous tirions son lait nuit et
jour ! »
Après que le Messager de Dieu r eut quitté la tente d’Ummu Ma’bad, son mari
arriva et fut tout étonné de voir autant de lait :
97. Abdullah ibn Urayqit, quoique non croyant à ce moment précis, était un homme tenu en haute
estime. Même si plus tard sa conversion à l’islam fut contestée, il n’en demeure pas moins qu’il existe
de nombreux récits qui témoignent de son adhésion à l’islam.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 323

« Ô Ummu Ma’bad ! D’où vient toute cette abondance de lait ! s’exclama t-il.
Nos brebis sont toutes loin d’ici et toutes stériles, et il n’y a ici aucune bête qui ne
peut être soumise à la traite. Que s’est-il donc passé ? »
« Aujourd’hui, un saint homme est venu dans notre tente ! » répondit-elle, puis
elle se mit à lui raconter tout depuis le début.
Tout excité, son mari lui demanda :
« Allez, raconte-moi plus de choses à son sujet. »
Alors son épouse commença à lui faire la description de l’Être de lumière r
selon la perception qu’elle en avait eue :
« Celui que j’ai vu était un bel homme, doté d’un visage lumineux et d’une
personnalité exceptionnelle. Je ne pourrais lui attribuer de défaut. Ses yeux étaient
noirs et pétillants, ses cils épais et sa voix délicate. Le blanc et le noir de ses yeux
étaient remarquables, le contour de ses yeux était naturellement souligné de noir.
L’extrémité de ses sourcils était fine et ses cheveux étaient noirs foncés. Assez grand
de taille, sa barbe était dense et modérément longue.
Son calme reflétait la sérénité et la dignité. Lorsqu’il conversait coulaient de sa
parole la beauté et la délicatesse. Ses mots étaient formulés comme des perles par-
faitement alignées et coulaient tous distinctement. Sa parole était claire et précise, ni
elle ne montrait d’incapacité ni elle devenait fastidieuse. Il distinguait parfaitement
le bien du mal.
Le voyant arriver de loin, on pouvait remarquer son imposante stature et son
extrême beauté, mais de près, c’était l’homme le plus aimable et le plus charmant.
De taille moyenne, il n’était ni excessivement grand ni trop petit. Sa beauté
dépassait celle de tous ses semblables. Ceux qui l’entouraient écoutaient paisible-
ment ses paroles et accouraient à chacun de ses désirs. Sa personnalité exception-
nelle faisait que tous le respectaient et lui obéissaient. Arborant un visage souriant,
il ne blâmait ni ne rabaissait qui que ce soit. »
En entendant cette description vivante, Abû Ma’bad t s’écria :
« Cet homme est le Prophète sorti de Quraysh ! J’aurais tellement souhaité le
rencontrer et devenir son ami ! Je le ferai à la première occasion ! »
Pendant ces jours particuliers, on entendit une voix inconnue à La Mecque qui
faisait l’éloge des invités de la tente d’Ummu Ma’bad.
Poussé par cette voix inconnue, Hassan ibn Thabit t lui répondit en improvi-
sant un poème dans lequel il évoquait le désespoir de Quraysh, l’Hégire du Messager
de Dieu r à Médine et la diffusion de la lumière de l’islam. (Ibn Saad, I, 230-231;VIII,
289; Hakim, III, 10-11).
324 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Toute la bienheureuse famille d’Abû Ma’bad t finit par embrasser l’islam,


recevant ainsi l’insigne honneur de devenir Compagnons du Prophète r.

En dépit de leurs efforts, incapables de retrouver la trace des voyageurs, les


idolâtres décidèrent d’offrir une grande récompense à quiconque les capturerait.
Parmi les candidats potentiels se présenta le chasseur Suraqa ibn Malik, aveuglé par
l’étendue de la récompense offerte.
À la fin de longues recherches menées à cheval, Suraqa finit par tomber sur les
traces du Messager de Dieu r. Mais alors qu’il galopa au plus vite pour le rattraper,
tout à coup les sabots de son cheval commencèrent à s’enfoncer dans le sable et il
chuta.
Malgré tous les efforts qu’il déploya, il fut incapable de sortir de ce bourbier
et de reprendre sa quête. Après plusieurs tentatives s’étant soldées par un échec, la
raison lui revint et il commença à avoir des remords. Il sollicita la miséricorde du
Noble Prophète r qui, après avoir prié Dieu en sa faveur, parvint peu de temps après
à le sortir du sable.
Considérant ce miracle évident, le cœur de Suraqa t se transforma et lui-même
devint un ami sincère du Saint Prophète r. Il retourna ensuite à La Mecque et fit en
sorte que les gens susceptibles de retrouver la trace des voyageurs ne puissent pas le
faire. (Muslim, Zuhd, 75).
La bonne nouvelle du Messager de Dieu r résonna dans les oreilles de Suraqa :
« Ô Suraqa ! Comment est-ce que tu te sentiras le jour où tu porteras les bracelets,
la ceinture et la couronne de Khosro ? »
En effet, après la conquête de la Perse, les bracelets, la ceinture et la couronne de
Khosro furent apportés à Médine. Omar t, alors en charge du califat, appela Suraqa
et lui fit porter les ornements. Ensuite il lui demanda de lever les mains et de dire :
« Allahu Akbar ! (Dieu est Grand !) Louange à celui qui a pris de Khosro fils
d’Ormuz, qui se prétendait « dieu des hommes », ces parures et les a placées dans
les mains de Suraqa ibn Malik, des fils de Mudlij ! » (Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, II, 332; Ibn
Hajar, al-Isaba, II, 19).

Parvenu à l’endroit nommé Ghamim, le Messager de Dieu r rencontra Burayda


ibn Hassib t et les membres de sa tribu et en profita pour les inviter à l’islam.
Ces derniers acceptèrent avec joie le Message. Cette nuit-là, l’Être de lumière
enseigna à Burayda t le début de la sourate Maryam (Marie). (Ibn Saad, IV, 242).
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 325

Burayda t, défaisant son turban de couleur blanche, dit : « Ô Messager de


Dieu ! Permets-moi d’être ton porte-étendard ! »
Le Saint Prophète r accepta et Burayda t porta l’étendard jusqu’à ce qu’ils
atteignent le village de Quba.
Puis toujours en route, ils croisèrent une caravane commerciale qui venait de
Damas et dans laquelle se trouvait Zubayr ibn Awwam t qui recouvrit d’un man-
teau blanc l’Envoyé de Dieu r et Abû Bakr t. (Al Boukhari, Manâqibu’l-Ansâr, 45).
Les voyageurs approchaient de Médine.
Bien que les idolâtres mirent tout mis en œuvre pour l’assassiner, le Messager
de Dieu r continua sans relâche sa mission prophétique et ne manqua pas d’inviter
à l’islam tous ceux qu’ils rencontrait sur la route.
Saad ad-Dalil t98,
raconte :
« Pendant l’Hégire, le
Messager de Dieu r et Abû
Bakr t vinrent chez nous.
Une fille d’Abû Bakr t était
présente à ce moment-là et sa
nourrice était en train de l’al-
laiter.
Le Messager de Dieu r
avait l’intention de rejoindre
Médine par le chemin le plus
court. Nous leur proposâmes
de prendre les devants car le
chemin de Ghair passait par le
passage de Raquba, particuliè-
rement célèbre à cause de deux
bandits connus sous le nom de
Mukhanan.
Le Messager d’Allah r dit:
«Amène-nous auprès d’eux !»
98. Pour avoir montré le plus court chemin pour aller à Médine et guider le Saint Prophète r à travers le
passage de Raquba, on surnomma ce grand Compagnon ad-Dalil, le Guide.
326 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Nous prîmes donc la route et, parvenus à la pente de Raquba, nous aperçûmes
les bandits.
Le premier d’entre eux dit à l’autre :
- Cet homme semble venir du Yémen.99
L’Être de lumière r les appela ensuite à lui et les invita à l’islam. Ceux-ci accep-
tèrent le Message et devinrent musulmans.
Quand le Messager de Dieu r leur demanda comment ils s’appelaient, ils
répondirent :
- On nous appelle Mukhanan (c.-à-d. les deux méprisés).
Le Messager de Dieu r leur dit alors :
- Désormais, vous vous nommerez Mukraman (c.-à-d. les deux honorables) ! »
Et il leur ordonna d’aller à Médine pour annoncer leur arrivée. » (Ahmed, IV, 74).

L’invité tant attendu


L’excitation des Médinois était à son comble depuis qu’ils avaient reçu la nou-
velle de l’arrivée imminente du Messager de Dieu r.
En effet, tous s’étaient rassemblés à la périphérie de la ville et étaient impatients
d’accueillir leur invité béni.
Après une longue attente, le lundi 12 de Rabi’ul-awwal100, les exclamations de
joie « ils arrivent ! » résonnèrent dans toute la ville.
Animées par la bonne nouvelle, les rues de Médine retentirent au son du takbir.
Les musulmans prirent leurs armes et accourirent à la rencontre de leur invité
béni sur des montures ou à pied.
Ayant bénéficié de la protection et de l’assistance divines, les Émigrés bénis
arrivèrent à Quba, un petit village près de Médine, où un climat d’euphorie et
d’effervescence régnait. On entendit pour la première fois la chanson traditionnelle
et improvisée appelée « Tala ‘al-Badru ‘Alayna ». (La lune nous a montré sa lumière).
À partir de ce moment, un nouveau calendrier, le « calendrier hégirien », allait
être instauré pour archiver tous les évènements futurs jusqu’à l’Heure ultime.
99. Par cette parole, l’homme voulait dire que le Saint Prophète r était originaire de La Mecque. La
Mecque était considérée comme faisant partie intégrante de Tihama, une région située aux confins
du Yémen. La Ka’ba, pour cette raison même, était nommée al-Kaaba’ul-Yemeniyya. (Ibn Athir, an-
Nihaya, V, 300).
100. Cette date coïncide avec le mois de septembre de l’an 622, selon le calendrier grégorien.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 327

Comme la majorité des musulmans n’avaient jamais vu l’Être de lumière r,


ils confondirent Abû Bakr avec le Saint Prophète r qui était resté en retrait et avait
gardé le silence.
Ce n’est que quand Abû Bakr t fit de l’ombre au Messager de Dieu r pour le
protéger du soleil que son identité leur fut manifeste.(Al Boukhari, Manaqibu’l-Ansâr, 45).
Depuis ce jour, Médine devint le centre et le miroir de l’évolution de l’islam et
du progrès. La face obscure de l’ignorance avait flétri.
Les mosquées de Médine et de Quba gagnèrent un sens profond et restèrent à
jamais un souvenir de l’Hégire béni.
Soumettant tous leurs biens aux Muhadjirs t, les Ansars t dirent :
« Voici tous mes biens… La moitié vous appartient ! »
L’abnégation et la dévotion incommensurables représentées par la fraternité
musulmane furent ainsi exprimées et formées à Médine.
Médine cimenta sa place et sa réputation inébranlable dans l’histoire islamique.
Toutes les œuvres propres à l’islam, qu’elles soient religieuses, sociales ou per-
sonnelles, devinrent manifestement uniques à Médine, fixant un exemple pour le
reste de l’Oumma musulmane.
À Quba, Le Saint Prophète r fut l’invité d’Ibn Khidm t de la tribu d’Amr ibn
Awf t.
De là, il sortit et joignit la maison de Saad ibn Haythama t où il s’assit et
conversa avec les croyants.
Comme Saad était encore célibataire et que les Emigrés célibataires logeaient
chez lui sa maison fut dénommée « Manzil’ul-Uzzab », la Maison des Célibataires.
(Ibn Hishâm, II, 110; Ibn Saad, I, 233).

Lors de son séjour à Quba, le Messager de Dieu r assistait à des funérailles, ren-
dait visite aux malades et acceptait les invitations. Abû Sa’id al-Khoudri t raconte
quelques-uns de ses souvenirs exposant la sensibilité des croyants :
« Dès les premiers jours de sa présence à Médine, nous informions le Messager
de Dieu r dès qu’une personne était proche de la mort. Il restait alors au chevet de
l’agonisant et priait pour son pardon. Quand la personne décédait, il rentrait avec
les autres et attendait parfois jusqu’à l’enterrement. Soucieux du désagrément que
nous pouvions lui causer, nous nous entendîmes sur un point et décidâmes de ne
rien dire au Messager de Dieu r jusqu’à ce que le mourant décède pour qu’il ne soit
pas fatigué et ne perde pas de temps. Pendant quelques temps nous continuâmes
ainsi. Mais nous nous rendîmes compte que cela aussi prenait davantage de temps à
328 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

l’Envoyé de Dieu r. Nous décidâmes alors de ramener le défunt devant la porte du


Prophète r pour qu’il fasse la prière mortuaire. »
Muhammad ibn Omar t, le narrateur du récit, ajoute :
« C’est pour cela que cet endroit est maintenant nommé « musalla », terme qui
désigne l’endroit où la prière (sur le défunt) est effectuée. Même après la disparition
du Saint Prophète, cette pratique se poursuivit. » (Ibn Saad, I, 257, Hakim, I, 519/1349).
Le Messager de Dieu r n’avait pas encore quitté Quba qu’Ali t apparut, après
avoir comme convenu rendu les biens aux propriétaires concernés. Nombreux sont
les récits qui mentionnent l’immensité de l’amour des Compagnons y pour le Saint
Prophète r et son souvenir intense.
Parmi eux, Bara ibn Azib t101 relate le désir profond qu’avait son père de com-
mémorer le souvenir du Messager de Dieu r :
Abû Bakr t acheta à mon père une selle pour un montant de treize dirhams.
Une fois l’affaire conclue il lui demanda :
« Demande à Bara de la déposer chez nous. »
Mon père lui répondit :
« Pas avant que tu me dises comment le Messager de Dieu r a émigré de La
Mecque à Médine ! »
Alors Abû Bakr t se mit à narrer longuement leur Hégire jusqu’à Médine. » (Al
Boukhari, Ashabu’n-Nabi, 2; Ahmad, I, 2).

La Mosquée de Quba : une mosquée fondée sur la piété


À Quba, premier arrêt sur la route de Médine, le Saint Prophète r fut l’invité
de la tribu d’Ibn Awf pendant quatorze jours. C’est alors que l’illustre Mosquée de
Quba fut érigée avec le Messager de Dieu r qui prit une part active dans sa construc-
tion. Quba, première mosquée de l’islam, a plus d’importance car elle fut construite
pendant l’Hégire. Elle est ainsi décrite dans le Coran :

Ħƅ ijŽ ĺƆ Ģƈ IJƪ ƆÒīŽ ĨĴ


ƈ ijĝŽ ÝĤÒĵĥƆ Đ÷øƈ ƇÒïƄ åƈ ùĩĤƆ 
Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ž Ž Ɔ
« … une Mosquée fondée dès le premier jour, sur la piété… »102 (Tawba, 9 : 108).
101. Bara ibn Azib t aussi connu sous le nom d’Abû Ammara, faisait partie des Ansars. Il embrassa l’islam
avant l’Hégire et prit une part active à toutes les batailles après celle d’Ohoud. Il rendit son dernier
soupir à Koufa, en l’an 73 de l’Hégire, après avoir rapporté plus de 300 hadiths.
102. Omar t ajouta par la suite l’expression coranique « dès le premier jour » comme preuve quand il fit
de l’Hégire la date de départ du calendrier islamique.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 329

Abû Hurayra t rapporte (At Tirmidhi Tafsir 9/3099; Abû Dâwûd, Taharah, 23/44; Ibn
Majah, Taharah, 357) que la fin du verset susmentionné se réfère à la population de
Quba :

īĺ ƈ Ʃ IJÒIJóıĉƆ ÝĺĪŽ ÒƆ Īij


Ɔ ×ƫ éƈ ƇĺĢÓ
Ƅ äƆ ƈòįĻƈ Ę
ƈ
Ɔ ƈóıž ƈ ĉƪ ĩƇ ĤŽ ÒÕƫ éƇĺƇųÒ Ɔ Ƈ ƪ ƆƆ
« ...On y trouve des gens qui aiment bien se purifier, et Allah aime ceux qui
se purifient »
Les premiers migrants, quand ils atteignirent Quba, utilisèrent la zone ancien-
nement utilisée par les fils d’Ibn Awf pour faire sécher leurs dattes et y effectuer la
prière rituelle (salât).
Salim t, l’affranchi d’Abû Houdhayfa fut chargé de diriger la prière au
Muhadjirs parce qu’il était celui qui connaissait le mieux et récitait le mieux le Saint
Coran. (Ibn Saad, III, 87; IV, 311).
L’Être de lumière r étendit cette zone où se tenait la prière pour y construire la
fameuse Mosquée de Quba.
De forme carrée, chaque côté avait à l’origine une longueur de 32 mètres.
Le Saint Prophète r avait demandé à la population de Quba d’apporter des
pierres dont la première fut placée par ses propres mains du côté de la Ka’ba.
Puis il demanda à Abû Bakr et à Omar y de placer les pierres dans le même
ordre.
Ammar ibn Yassir t fut de loin celui qui contribua le plus à la construction
de la mosquée. Pour cette raison, il a été surnommé « le constructeur de la première
mosquée » dans l’islam. (Ibn Hishâm, II, 114).
Les poèmes d’Abdullah ibn Rawaha déclamés tout en travaillant aidèrent les
croyants à se détendre et à se reposer pendant la construction. Kâmil Mîras, Traduction
de Tajrid, X, 106).

L’appel à la prière était effectué par le Compagnon nommé Saad al-Kurazi t.


Tout comme dans la Mosquée du Prophète (Masdjid al-Nabawi) et les neuf
autres mosquées, les activités d’enseignement et d’éducation se déroulaient aussi
dans la Mosquée de Quba.
Le Messager de Dieu r avait l’habitude de superviser ces activités chaque fois
qu’il s’y rendait. (Hamîdullâh, İslâm Peygamberi, II, 771).
330 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

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Le samedi, le Saint Prophète r avait l’habitude de se rendre, à pied ou sur sa


monture, à la Mosquée de Quba pour y accomplir deux unités de prière. (Al Boukhari,
Fadlu’s-Salat 3, 4; Muslim, Hajj, 516).

Un hadith Cherif rapporte qu’il r donne aux croyants le conseil suivant :


« Quiconque se purifie chez lui en s’appliquant dans ses ablutions pour se rendre
ensuite à la Mosquée de Quba, uniquement pour y effectuer une prière, aura la récom-
pense d’une omra (petit pèlerinage). » (Ibn Majah, Iqamah, 197; An Nasaï, Masajid, 9).
Pendant son califat, Omar t avait coutume de visiter la Mosquée de Quba les
lundis et jeudis.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 331

Il t dit même que s’il se trouvait à une très longue distance de Quba, il n’hési-
terait pas à s’y rendre à dos de chameau. (Ibn Saad, I, 245).
La Mosquée de Quba subit des extensions pendant le califat d’Othman t et
d’Omar ibn Abdulaziz g.
Par la suite de nombreuses rénovations eurent lieu.
En l’an 1242 de l’Hégire (1829 après J.C), le sultan ottoman Mahmud II entre-
prit des travaux de rénovation en y plaçant un plafond droit et un minaret.
Par la suite, le gouvernement saoudien la détruisit pour pouvoir l’agrandir et
y construire une mosquée possédant un dôme central entouré de quatre minarets.

La première prière du Vendredi dans la vallée de Ranûnâ


Après quatorze jours passés à Quba, le Messager de Dieu r et ses Compagnons
prirent enfin le chemin de Médine. C’était un vendredi.
À midi, ils atteignirent la vallée de « Ranûnâ ». L’heure de la prière était arrivée.
Le Messager de Dieu r descendit de son chameau.
Là, et pour la première fois, il dirigea la Salât al-Djoumoua (Prière du
Vendredi), le signe le plus apparent de la souveraineté de l’islam.
Voici les deux sermons qu’il délivra à cette occasion :
1. Premier sermon
« Ô les hommes !
Repentez-vous avant la mort ! Accomplissez de bonnes actions pendant qu’il est
encore temps !
Donnez l’aumône discrètement ou ouvertement et tâchez de gagner la satisfac-
tion en invoquant Dieu le Tout-Puissant en abondance ! Ainsi, vous trouverez votre
subsistance, vous serez assistés et vous retrouverez tout ce que vous aurez perdu.
Sachez que Dieu, à partir de ce moment et ce lieu, vous a rendu obligatoire la
prière du Vendredi. Maintenant ou après ma mort, qu’il soit maudit celui qui, juste ou
injuste, trouvera un imam pour diriger la prière et prendrait cette prière à la légère !
Et que Dieu ne le conduise pas vers le succès ! Alors toutes ses autres prières ne lui
seront d’aucune utilité ; à moins qu’il ne se repente, car Dieu accepte le repentir. » (Ibn
Majah, Iqamah, 78).

Ô les hommes !
Préparez-vous dès à présent au monde de l’Au-delà. Certes chaque personne
mourra et laissera son troupeau sans berger. Ensuite, sans intermédiaire et ni tra-
332 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ducteur, Dieu vous demandera : « Ne vous ai-Je pas envoyé un Messager pour vous
informer de Mes commandements ? Pour toutes les bénédictions et faveurs que je vous
ai octroyées, qu’avez-vous apporté pour vous ?
Face à cette question ; chaque personne regardera à gauche et à droite, mais sans
succès. Il ne verra que les Flammes infernales devant lui.
Alors réveillez-vous !
Que celui qui peut se protéger du Feu même en offrant la moitié d’une datte, qu’il
le fasse. S’il est aussi pauvre qu’il n’a même pas ceci, qu’il fasse du bien en exprimant
de belles paroles ! Car une bonté est multipliée par dix à sept cents fois.
Que le Salut et la miséricorde de Dieu soient sur vous ! » (Ibn Hishâm, I, 118-119,
Bayhaqî, Dalâil, II, 524).

2. Second sermon
« Louange à Dieu et à Lui seul je demande assistance. Nous nous réfugions auprès
de Dieu des vices de l’ego et de l’accomplissement de mauvaises actions. Nul ne peut
guider celui que Dieu égare et nul ne peut égarer celui que Dieu guide.
Je témoigne qu’il n’y a de dieu que Dieu, Il est unique et sans associé. Les plus
belles paroles sont celles du Livre de Dieu. Celui dont Dieu le Très-Haut orne le cœur
par le Coran, le guide vers l’islam après la mécréance et que celui-ci préfère la Parole
d’Allah à toutes les autres, aura incontestablement atteint la réussite.
Certes le Livre de Dieu est la plus admirable et la plus éloquente des paroles.
Aimez ce que Dieu aime ! N’ayez point de lassitude à réciter le Coran et invoquer
Dieu.
Que vos cœurs ne soient guère contrariés en raison de la plume de Dieu car ces
Paroles sont choisies parmi les meilleures. Le Livre Saint traite des meilleures actions,
mentionne les plus beaux récits des prophètes les plus éminents et dans lequel le licite
et l’illicite sont évoqués.
N’adorez que Dieu et ne Lui associez personne ! Craignez le Tout-Puissant
comme il se doit ! Que vos langues témoignent de vos bonnes actions ! Aimez-vous
en Dieu et en Son Livre ! Sachez que Dieu n’aime pas celui qui ne tient pas Sa parole
quand il fait une promesse !
Que la Paix de Dieu soit sur vous ! » (Bayhaqî, Dalâil, II, 524-525).
Le contenu de ces deux sermons résume bien divers aspects de l’islam, à savoir
la croyance, le culte, les principes moraux et sociaux de la religion.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 333

Que la prière du Vendredi ait été rendue obligatoire avant même l’achèvement
de l’Hégire souligne l’importance et l’urgence pour les musulmans de se rassembler
en communauté.

L’attente émue et enthousiaste à Médine


Avant de quitter Quba pour Médine, le Messager de Dieu r convoqua ses oncles
maternels. Armés, ils arrivèrent rapidement et le saluèrent.
« Montez sur vos chameaux en vue du voyage, leur dit-il, votre protection est
assurée. » (Al Boukhari, Manaqibu’l-Ansâr, 46).
La prière du Vendredi accomplie, l’Envoyé de Dieu r enfourcha sa chamelle
nommée Qaswa, accompagné d’Abû Bakr t, des notables de Najjar et des autres
croyants y.
Le départ de la lumière de l’Être r plongea les habitants de Quba dans la tris-
tesse. En effet, ils allaient être dorénavant privés de cet honneur qui leur avait été fait.
Aussi ils demandèrent au Saint Prophète r :
Ô Messager de Dieu ! Est-ce que tu t’en vas-tu parce que tu es lassé de nous ou
bien est-ce juste pour rejoindre un meilleur endroit ? »
Le Messager de Dieu r leur répondit :
« Je m’en vais que parce que mon Seigneur m’a demandé de partir pour Médine ! »
(Diyarbakri, I, 339).

Tous les musulmans de Médine sans exception brûlaient de désir d’accueillir le


Messager de Dieu r dans leur propre demeure.
Sachant que ce désir profond menaçait de se transformer en conflit, le Noble
Messager r demanda à se référer à Qaswa, sa chamelle bénie :
« Libérez le chemin de la chamelle, dit-il, car l’endroit où elle doit s’arrêter lui a
été révélé. » (Ibn Hishâm, II, 112-113).
Ainsi donc, le problème du lieu de résidence du Messager de Dieu r était en
passe d’être réglé, sans concurrence entre les croyants fervents.
Après quelques arrêts temporaires, la chamelle bénie s’accroupit devant la mai-
son de Khalid ibn Zayd t, plus connu sous le nom d’Abû Ayyub al-Ansari. Le cœur
de ce Compagnon ressentit alors une exaltation inexprimable qui se traduisit par ces
paroles:
« Entre ô Messager de Dieu ! Tu as honoré notre demeure ! »
334 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Au moment où le Messager de Dieu r se dirigeait vers la maison d’Abû Ayyub,


les petites filles de la tribu Najjar commencèrent à chanter joyeusement en s’accom-
pagnant de tambourins :

ƈ ƈ
ƪ ĭÖƆ īŽ Ĩ ƅòÒijƆ ä
ƈòÓåƪ ĭĤÒĵ Ɔ īƇ éŽ ĬƆ
ƈ ïƄ ĩéĨÒñƆ ×èÓĺ
ƈòƆÓäīŽ Ĩ
ƪ ƪ Ƈ ƪƆ Ɔ
Nous sommes les filles de Najjar !
Quel bonheur d’être proches et voisines de Muhammad !
Quel grand honneur ! »
Le Sultan des cœurs r leur demanda :
« Répondez-moi, m’aimez-vous ? »
« Oui, ô Messager de Dieu, nous t’aimons beaucoup ! »
Ravi par tant de joie, le Saint Prophète r leur dit alors :
« Seul Dieu sait combien je vous aime ! Par Dieu, je vous aime toutes aussi ! Par
Dieu, je vous aime toutes aussi ! Par Dieu, je vous aime toutes aussi ! » (Ibn Majah, Nikah,
21; Diyarbakri, I, 341).

Bara ibn Azib t raconte :


« Je n’ai jamais vu les Médinois aussi heureux que le jour où le Messager de Dieu
est arrivé à Médine ! Tous les Médinois, jeunes ou vieux, hommes et femmes, avaient
afflué dans les rues aux cris de : ‘Le Messager de Dieu est arrivé ! Ô Muhammad ! Ô
Prophète de Dieu !’ » (Al Boukhari, Manaqib’ul-ansar, 45; Muslim, Zuhd, 75).
De même, Anas ibn Malik t raconte dans ses souvenirs :
« Je n’ai jamais connu un jour aussi beau, aussi joyeux et aussi lumineux que le
jour où le Messager de Dieu a honoré Médine. C’était comme si toute la ville était
baignée de lumière. » (Ahmed, III, 122; At Tirmidhi, Manaqib, 1/3618).
En signe de gratitude envers le Tout-Puissant, les musulmans de Médine immo-
lèrent un chameau en l’honneur de l’Envoyé de Dieu r et de sa venue.103
Le poète exprime de la plus belle façon l’affection inexprimable des croyants à
l’égard du Messager de Dieu r :
Aman est synonyme de ton nom,
Car pour l’amant, ô Prophète, ton souvenir est aman…
103. Ahmed, III, 301.
Les Douzième et Treizième Années de la Prophétie 335

Dans ce couplet, le poète exprime ses sentiments avec subtilité et élégance. Ici,
le mot « aman » qui signifie en arabe « demande d’aide », et le mot « Muhammad »
ont la même valeur abjad104 soit 92.
Poétiquement parlant, le cri de l’amant : « aman ! » fait allusion au fait de ne
désirer que le Saint Prophète r et nul autre.
Ainsi donc l’Hégire mit fin à la Période mecquoise et inaugura la Période Médi-
noise.

104. L’alphabet consonantique.


La Période Médinoise De
L’apostolat Prophétique

TROISIÈME PARTIE
339

PREMIÈRE ANNÉE DE L’HÉGIRE

Les jours du Noble Prophète r à Médine


L’émigration du Noble Prophète r à Médine marqua une nouvelle ère, tour-
nant une nouvelle page dans l’histoire de l’Islam et des Musulmans.
Le Noble Prophète r ne s’installa pas à Médine en tant que réfugié, mais en tant
que principal architecte d’un monde futur, son guide, le leader de la nation islamique
émergeante ; en un mot, sa vie et son âme. Par sa venue à Médine, le mouvement de
l’Islam et sa communication au monde reçurent une impulsion considérable.
Jusqu’à l’achèvement de la Mosquée de Médine, al Masdjid’un-Nabî, le Messa-
ger d’Allah r demeura sept mois dans la demeure d’Abû Ayoub al Ansarî t. Mais
l’hébergement chez Abû Ayoub t, le porte-étendard du Prophète, bénéficiait en fait
d’une histoire vieille de plusieurs siècles.
Sept siècles auparavant, Tubba’ Abû Karib, un des rois du Yémen, était venu à
Médine (connu alors sous le nom de Yathrib). Apprenant de savants juifs la future
émergence d’un prophète mecquois qui émigrerait à Médine, il fit construire une
maison dans la ville. Il confia ensuite aux plus grands savants de Médine une lettre
scellée d’or, demandant à ce qu’on la transmette dans le cas où il ne vivrait pas assez
longtemps pour voir l’avènement de ce futur prophète. (Ibn Asakir, III, 334-335; Samhûdî,
I, 188-189).

Et alors Tubba, déclara sa foi au Prophète r et devint musulman.(Ahmad, V, 340).


D’année en année, de génération en génération, la maison, située à l’est de la
Mosquée, fut finalement rendue à Abû Ayoub Khalid ibn Zayd t réputé pour être
l’un des descendants dudit savant.
Ceux qui ont préservé la lettre de Tubba envoyèrent Abû Layla, un homme de
confiance appartenant à la tribu de Sulaym, avec cette lettre à la rencontre du Mes-
sager d’Allah r alors qu’il approchait de Médine. Abû Layla suivit la trace du Noble
Prophète r sur la route de La Mecque ; et celui-ci l’interpella en premier :
« Es-tu Abû Layla ? »
Abou Layla lui répondit «Oui»
Alors le Noble Prophète lui ordonna:
« Tu as avec toi la lettre de Tubba’. Donnes-la moi ! »
Abû Layla était stupéfait car auparavant il n’avait jamais vu le Noble Prophète r.
340 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il lui demanda avec étonnement :


« Et toi qui es-tu ? Tu ne ressembles absolument pas à un sorcier… Et comment
sais-tu que je possède cette lettre avec moi ? »
Alors le Noble Prophète r lui ordonna :
« Sois à l’aise, car je suis Muhammad. De grâce, donne-moi cette lettre ! »
Ayant sorti la lettre, Abû Layla la remit au Noble prophète r.
Une fois qu’Abû Bakr t l’eût lue à haute voix, le Messager d’Allah r dit à trois
reprises :
« Salutations à Tubba’, notre frère vertueux ! »
Il conseilla ensuite à Abû Layla de retourner à Médine, ce qu’il fit promptement,
apportant la bonne nouvelle de l’arrivée imminente du Noble Prophète r, ce qui lui
avait valu une certaine considération de la part de chaque Médinois, telle une mani-
festation de reconnaissance. (Ibn Asakir, III, 335; Ayni, IV, 176).

Abû Ayoub al-Ansarî t: le porte-étendard du Noble Prophète r


Honoré d’accueillir le plus grand des prophètes pendant sept mois dans sa de-
meure doublement chaleureuse, Abû Ayoub t lui avait tout d’abord demandé de
séjourner à l’étage supérieur, ce à quoi il se voyait répondre à chaque fois :
« Rassure-toi Abû Ayoub… le rez-de–chaussée est mieux pour nous et plus utile. »
Par conséquent le Noble Prophète r s’istalla au rez-de-chaussée.
Abû Ayoub t et sa famille, qui étaient au service de leur invité d’honneur, le
Messager d’Allah r, avec un amour et un respect exceptionnels, se positionnaient
contre les parois de leurs murs pour dormir, mal à l’aise à l’idée de dormir sur le
même plan vertical que le Noble Prophète r.
Une fois, une cruche se brisa et de l’eau se répandit au sol. Inquiet que l’eau
puisse atteindre leur hôte sacré, Abû Ayoub t saisit son unique couverture, une
couverture en velours, et anxieusement se mit à sécher le sol.
Au matin, il insista pour que le Messager d’Allah r monte à l’étage. Plus le
Noble Prophète r lui assurait qu’il était confortablement installé au rez-de-chaussée,
plus Abû Ayoub t poliment persistait :
« Nous ne montrerons pas à l’étage tant que toi tu ne le fais pas ! »
C’est seulement après (avoir longuement négocié) qu’ils finirent par changer de
place. » (Muslim, Ashriba, 171; Ibn Hishâm, II, 116).
Ayant pour hôte le Noble Prophète r, Abû Ayoub al-Ansarî t et sa famille lui
offraient des repas qu’ils avaient eux-même préparés.
Première Année de L’hégire 341

Quans il restait de la nourriture, Abû Ayoub t recherchait les parties que le


Messager de Allah r avait touchées, spécialement dans la pratique que l’on nomme
tabarruk (ou le fait de rechercher la bénédiction par des choses touchées ou portées
par des hommes pieux).
Une fois il fit parvenir au Noble Prophète r un plat contenant des oignons et
de l’ail. Le plat lui fut restitué intact. Incapable de discerner les empreintes du Noble
Prophète r sur la nourriture, Abû Ayoub t s’approcha de lui avec inquiétude et lui
demanda :
« Cette nourriture t’est-elle interdite, ô Messager d’Allah ? »
Le Prophète r lui répondit de toute grâce :
« Non, elle ne l’est pas, seulement je n’apprécie pas son odeur, car je suis un
homme qui parle avec les anges! »
Alors Abû Ayoub t lui dit :
« Si tu ne l’apprécie pas, que puis-je donc faire ? »
Toutefois le Messager d’Allah r lui conseilla :
« Mais toi tu devrais en manger. »
Alors ce fut la dernière fois qu’on lui prépara ce plat. (Muslim, Ashriba, 170-171; Ibn
Hishâm, II, 116).

Combien ce splendide exemple peut-il servir, indiquant par là le degré de sensi-


bilité et de délicatesse que le Noble Prophète r a manifesté pour causer le moins de
gêne possible autant aux êtres humains qu’aux anges.
Le respect, l’honneur d’Abû Ayoub t pour le Noble Prophète r se poursuivit de
manière sincère, même après le séjour temporaire qu’il fit dans sa demeure.
Juste pour être parmi ceux qui récoltent les bénédictions inhérentes à ces pa-
roles du Noble Prophète r :
« Constantinople (Istanbul) sera certainement conquise ; et son commandant,
quel merveilleux commandant, et ses combattants, quels merveilleux combattants ! »
(Ahmad, IV, 335 ; Hakim, IV, 468/8300).

Bien qu’âgé de plus de quatre-vingt ans, Abû Ayoub t prit part à deux sièges de
la ville très convoitée, et comme une avant-garde de la conquête suprême qui allait
avoir lieu bien des siècles plus tard, il offrit sa vie pour la cause.
Quelques instants avant qu’il ne décède, et pour éviter que son corps ne soit
un objet d’ambition pour les combattants musulmans qui revendiqueraient la ville
après lui, il dit à ceux qui l’entouraient :
« Enterrez-moi au plus éloigné point que vous foulerez…»( Cf.Ibn Sa’d, III, 484-485).
342 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Anas ibn Malik t au service du Noble Prophète r


Anas t raconte :
« Alors que le Messager d’Allah r venait d’arriver à Médine, mon beau-père
Abû Talha t me prenant par la main me conduisit auprès de lui et lui dit: “Ô Messa-
ger d’Allah, Anas est un enfant intelligent laisse-le donc te servir !”
Et c’est ainsi que je devins le serviteur du Messager d’Allah r. Partout, en temps
de guerre comme en temps de paix, je fus à son service pendant dix ans. Par Allah, ja-
mais je ne l’ai entendu me réprimander pour une chose que je n’étais pas censé faire
ou pour quelque chose que je n’avais pas réussi à mener à bien. » (Muslim, Fadail, 52).
Selon une autre version, l’entrée d’Anas r dans le service du Noble Prophète r
se passa de la façon suivante :
Lorsque le Noble Messager r honora Médine de sa présence, tous les Ansar,
hommes et femmes, lui offrirent des cadeaux de bienvenue. Oum Soulaym c était
en revanche, particulièrement abattue et déprimée, car elle n’avait rien à présenter.
Plus tard, elle prit son fils Anas t par la main et ils se rendirent ensemble auprès du
Messager d’Allah r à qui elle demanda :
« Jugerais-tu bon de laisser Anas t te servir, ô Messager d’Allah r ? »
Le Noble Prophète r lui donna son consentement. (Samhudi I 271).
Anas t raconte encore :
« Une fois, le Messager d’Allah r voulut m’envoyer quelque part. Quoique
j’eusse apparemment refusé, je me suis dit néanmoins : « Hors de question d’y aller,
pourtant à l’intérieur de moi, j’avais décidé de m’y rendre ; après tout, nul autre que
le Prophète d’Allah r en a donné l’ordre. Aussi me suis-je mis en route. Sur le che-
min je vis des enfants qui jouaient et me joignis à eux quelques temps. Puis je sentis
quelqu’un venir derrière moi et me tenir doucement la nuque. En me retournant je
vis le Messager d’Allah, souriant.
Il r me demanda :
« As-tu fini par te rendre là où je t’ai dit de te rendre, petit Anas ? ».
Je lui répondis promptement :
« J’y vais tout de suite Messager d’Allah ! ». (Muslim, Fadail, 54).
Anas t se rappelle d’une autre époque :
« Une fois, après avoir effectué mon service auprès du Messager d’Allah r, je me
rendis à l’extérieur, du côté des enfants, pensant qu’il allait faire une sieste. Comme
je me laissai emporter en regardant les enfants jouer, le Messager d’Allah r apparut
et salua les enfants. Il m’appela ensuite et m’envoya quelque part. Alors je me mis en
chemin. Il s’est ensuite assis et a attendu mon retour à l’ombre.
Première Année de L’hégire 343

Mon devoir achevé, je retournai en retard auprès de ma mère qui me demanda :


«Pourquoi es-tu en retard ?»
Je lui répondis :
« Le Messager d’Allah r m’a envoyé quelque part pour quelque chose ».
Elle me demanda :
« Qu’est-ce que c’était ? ».
Je lui répondis :
« C’est le secret du Messager d’Allah ».
Alors elle me conseilla :
«Alors garde bien le secret du Messager d’Allah ».
Thabit t qui rapporta ce récit d’Anas t ajouta plus tard qu’Anas t lui avait dit:
« Si je devais révéler ce secret à quelqu’un ce serait à toi ! » (Ahmad, III, 195).
Comme on peut le constater, le Noble Prophète r traitait les enfants comme
ses pairs et leur confiait même certains secrets. Entretenant à leur égard un profond
amour doublé d’une même compassion tout au long de chaque phase de son exis-
tence, le Prophète de miséricorde r eut une attitude affectueuse pour les enfants,
communiquant avec eux tout en se mettant à leur niveau pour trouver une voie qui
pénètre leur esprit.
Le schéma idéal relatif au traitement des enfants est stipulé, parmi d’autres, par
ces deux hadiths :
« Si vous avez des enfants, soyez un enfant parmi eux… » (Daylami, III, 513).
« Traitez convenablement vos enfants et éduquez-les bien. » (Ibn Maja, Adab, 3).
La vie exemplaire du Prophète de Grâce r nous guide aussi en ce qui concerne
l’éducation des enfants.
Quelle superbe éducation a-t-il su donner à Anas t pour que de toute sa vie
durant il n’ait jamais ressenti le besoin de se mettre en colère contre l’enfant, même
une seule fois !
Par quelle magnifique méthode le Prophète r a-t-il pu trouver la maturité dans
le coeur d’Anas t l’enfant de dix ans, pour qu’il se sente comme avec un copain
quand il plaisantait avec lui et qu’il lui confie un secret et qu’il soit sûr qu’il emporte-
rait le secret du Messager d’Allah r dans sa tombe.
Élever Anas t à un tel niveau de maturité fut sans aucun doute la plus impo-
sante méthode d’éducation mise en œuvre par le Noble Prophète r.
344 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Pacte Fraternel entre Muhajirun et Ansar : Le Muakhat


Dès qu’il commença l’Appel, sans distinction de race ou de tribu à laquelle
chacun appartenait, le Messager d’Allah r considéra tous ceux qui entraient en
Islam comme égaux et établit entre eux la fraternité de l’Islam. Il mit par deux fois en
place un muakhat, un pacte de fraternité, le premier avant l’Hégire et l’autre après.
Le Pacte de La Mecque consista à mettre en place une fraternité entre les Musulmans
de Quraysh et les esclaves affranchis.
Zayd ibn Haritha t et Hamza t, par exemple, furent déclarés « frères » tout
comme Salim t, esclave affranchi d’Abû Hudayfa t et Abû Ubayda ibn Jarra t,
ainsi que Bilal al-Habashi et Ubayda ibn Haritha y. (Ibn Seyyidinnâs, I, 321; Ibn Habîb, p.70;
Ibn Abdilbar, ad-Durar, p. 90).

Attachés les uns aux autres dès les premiers temps de l’Islam, les Musulmans
exposèrent au regard de tous un deuxième écran de fraternité à la suite de l’Hégire.
Dès que les Muhajirun posèrent le pied à Médine, les Ansar se concurrencèrent
à propos de l’accueil de leurs frères nouvellement venus. La savoureuse dispute prit
un tour inquiétant au point qu’ils durent finalement effectuer un tirage au sort pour
décider qui accueillerait qui. (Al Boukhari, Janaiz, 3; Manaqıbu’l-Ansar, 46).
Cinq mois après l’arrivée à Médine, le Messager d’Allah r désigna pour chaque
Muhajir un frère Ansar. La déclaration du pacte eut lieu dans la maison d’Anas ibn
Malik t. (Al Boukhari, Adab, 67).
Citons même quelques paires célèbres : Abû Bakr et Kharija ibn Zayd, et Utban
ibn Malik, Abû Ubayda et Saad ibn Muadh, Othman et Aws ibn Thabit,105 Bilal al-
Habashi et Abdullah ibn Abdurrahman,106 Salman et Abû Darda,107 Salim et Muadh
ibn Maiz,108 Ammar et Hudhayfa. y109
La constitution de ces paires prit en considération les similitudes de tempé-
rament des deux personnes. Chaque famille d’émigrés était pensionnaire chez un
Médinois. Les Compagnons qui furent déclarés frères devaient travailler ensemble
et partager ce qu’ils avaient acquis. Les Ansar donnaient leurs biens excédentaires au
Noble Prophète r qui les partageait ensuite entre les Muhajirun. Toujours insatis-
faits, les Ansar insistèrent auprès du Messager d’Allah :
« Ô Messager d’Allah ! Partage aussi nos champs de dattes entre nos frères émi-
grés ! »
« Non ce n’est pas possible ! », répondit le Messager d’Allah r.
105 Ibn Hishâm, II, 124-125.
106 Ibn Sa’d, III, 233, 234.
107 Al Boukhari, Adab, 67.
108 Ibn Abdilbar, II, 567.
109 Hakim, III, 435/5657.
Première Année de L’hégire 345

Les Ansar firent alors aux Muhajirun la proposition suivante :


« Vous entreprendrez les travaux d’arrosage et prendrez soin des arbres et en-
suite nous partagerons la récolte ! »
Avec l’approbation du Noble Prophète r, les deux parties convinrent de la tran-
saction. (Al Boukhari, Harth, 5).
Cette fraternité était axée sur l’assistance physique et spirituelle des Musulmans
qui avaient laissé derrière eux tout ce qu’ils avaient à La Mecque et qui avaient émi-
gré à Médine pour tout recommencer, grâce aux Ansar de Médine qui les avaient
accueillis les bras ouverts, motivés qu’ils étaient par le but de faire oublier aux Muha-
jirun le chagrin qu’ils avaient éprouvé en quittant leur ville natale à cause de leur
croyance et que désormais, à Médine, leur nouveau foyer, la fusion de l’ensemble des
Musulmans fut rendue possible en vertu de l’émergence d’une solidarité mutuelle.
Le pacte, découlant uniquement de l’amour de la foi et mis en place loin de toute
prétention, avait une teneur de grande envergure, car s’étendant à couvrir les droits
mutuels, l’équité et l’assistance, y compris les questions d’héritage. (Al Boukhari, Kafala,
2; Adab, 67).

Les « Frères » étaient les tuteurs légaux et les héritiers des uns des autres. Bien
que le pacte de fraternité demeurât en principe, la clause relative à l’héritage fut mo-
difiée par une révélation subséquente à la Bataille de Badr, ce qui amena à restreindre
l’héritage uniquement à la naissance. (Voir, al-Anfal, 72-75; Al Boukhari, Faraid, 16).
Ibn Abbâs t donne cette explication en lien avec la question :
« En vertu de la fraternité fondée par le Messager d’Allah, un Muhajir a le droit
d’hériter d’un frère Ansar, au-delà même de ses liens de sang.
Mais lorsque verset coranique suivant fut révélé:

ĪijÖƇ óĜŽ ƆŶÒIJĪÒ ƈ ĹĤÒƈ ijĨÓĭĥđäģġĤƈ IJ


ƈ ïĤÒƈ ijĤÒĞóÜÓĩĨ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ƅž Ƈ Ɔ
« À chacun Nous avons désigné des héritiers de ce que laissent les père et mère,
les proches … » (an-Nisa, 4/33)
Cette pratique fut annulée par la partie suivante du verset :

ħıƇ ×Ļāƈ ĬƆ ħİij ÜÇĘħġĬÓĩĺƆÈÚïĝĐīĺñƈ ĤÒIJ


Ž Ɔ ŽƇ Ƈ Ɔ ŽƇ Ƈ ƆŽ Ž ƆƆƆ Ɔ ƪ Ɔ
« Et ceux envers qui, de vos propres mains, vous vous êtes engagés, donnez-leur
donc leur part… »
Les droits de fraternité entre les Muhajirun et les Ansar furent donc limités à
l’entraide, le soutien et la bonne volonté. Mais celui qui le voulait pouvait encore faire
346 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

un leg volontaire, à condition de ne pas dépasser un tiers de sa fortune. »(Al Boukhari,


Tafsir, 4/7 ; Abou Daoud, Faraid, 16/2922).

Le muakhat servit à mettre un terme à la bataille qui s’ensuivit entre les Aws et
les Khazraj, les tribus locales de Médine, et à établir une fraternité plus profonde que
les liens de sang. Ils pouvaient difficilement attendre jusqu’au matin dans l’expecta-
tive de se voir et lorsqu’enfin ils se voyaient ils se demandaient avec enthousiasme
des nouvelles des uns des autres comme s’ils ne s’étaient pas vus depuis des années.
Rarement trois jours passaient sans que l’un aille visiter l’autre. Cette fraternité atti-
rant la Faveur Divine fut approuvée par le Noble Coran. (Voir, al-Hashr, 9).
Le Noble Prophète r jeta les bases d’un État et d’une société islamiques à Mé-
dine. En premier lieu, il fallut mettre en place une unité et une solidarité sociales, à
condition d’y placer l’amour et l’assistance mutuelles. C’est pour cela que le pacte
de fraternité instituée par le Prophète d’Allah r entre les Muhajirun et les Ansar
s’avéra être le facteur le plus important quant à la construction d’une société qui n’a
pas connu son pareil dans l’histoire de l’humanité. Le Noble Prophète r ne fonda
la société Islamique naissante que sur la base de la fraternité de l’Islam, et non pas
sur une base tribale ou raciale, ou bien d’une catégorisation sociale entre libres ou
esclaves, riches ou pauvres, etc. Toute société islamique est bâtie par des personnes
issues de tous les horizons et appartenant à n’importe quelle catégorie sociale.

Les vertus inhérentes aux Muhajirun et aux Ansar


Le terme Muhajir désigne une personne qui émigre d’un lieu à un autre. En
l’occurrence c’est le nom donné au musulman mecquois qui a été contraint de partir
à Médine à cause de l’augmentation insupportable des tourments qu’il subissait (à La
Mecque). Les Muhajirun en quittant La Mecque pour Médine avaient laissé derrière
eux tout leurs biens, n’emportant que quelques maigres affaires. Les idolâtres en pro-
fitèrent et se saisirent de tout ce que les Muhajirun avaient abandonné à La Mecque.
La perte financière subie par les Musulmans fut en effet énorme, mais ces derniers
ne se focalisèrent point sur les biens matériels ; détachés de tout gain mondain, ils
avaient goûté à la joie procurée par la foi. Par conséquent, ils furent plus que prêts à
sacrifier tout ce qu’ils avaient sur le sentier d’Allah – Gloire à Lui.
Ils considéraient comme impératif le moindre souhait du Noble Prophète r,
étant toujours à sa disposition, sans réserve pour prononcer ces paroles « que mes
parents soient sacrifiés pour toi, ô Messager d’Allah », ce qui était en fait un écho de
leurs sentiments de profonde dévotion intérieure.
Un des exemples les plus frappants de cet état d’esprit est fourni par Suhayb ibn
Sinan t, plus connu sous le nom de Suhayb ar-Rumî, qui avait révélé où il gardait
ses richesses à La Mecque pour que les idolâtres qui tentaient de l’empêcher de faire
l’hégire soient retenus.
Première Année de L’hégire 347

Comme les idolâtres lui avaient infligés les pires tourments, Suhayb t prit le
chemin de l’hégire vers Médine tout de suite après ‘Alî t. Il fut contrecarré dans son
projet par un groupe de Mecquois qui l’appréhendèrent et lui dirent :
« Il n’est pas question que nous te laissions partir vivant en emportant tous tes
biens ! Tu es venu à La Mecque pauvre et c’est dans notre ville que tu t’es enrichi et
que tu es devenu ce que tu es. »
Alors Suhayb t descendit immédiatement de cheval et, prenant quelques
flèches de son carquois, se mit à protester :
« Vous savez très bien que je suis d’entre vous un des plus talentueux archers.
Par Allah, même si je devais utiliser toutes les flèches en ma possession et mon épée,
je ne reculerai pas… et tant que je tiendrais un de ces objets dans ma main, vous ne
serez pas en mesure d’obtenir un seul pouce de moi. Mais si vous êtes capables de
vous emparer de moi alors que je suis complètement dépossédé d’eux, faites de moi
ce que vous désirez. Maintenant si je vous dis où se trouve ma fortune et que vous en
disposiez comme bon vous semble, me laisseriez-vous le chemin libre ? »
Les idolâtres acceptèrent l’offre. Sur ces entrefaites, Suhayb t fit porter à leur
connaissance l’endroit exact où se trouvait sa fortune et puis reprit tranquillement sa
route, le cœur léger. Vers la moitié du mois de Rabi’ al-Awwal, il rejoignit le Noble
Prophète r à Quba, accompagné à l’époque d’Abû Bakr et d’Omar y. Les yeux en-
doloris et extrêmement affamé à cause du voyage, Suhayb t commença à manger
les dattes, ce qui fit dire à Omar t d’un ton railleur :
« Ô Messager d’Allah ! Regarde Suhayb ! Le fait qu’il ait les yeux endoloris ne l’a
pas empêché de cueillir des dattes fraiches ! »
La Lumière de l’Être r participa (à cette plaisanterie) :
« Ainsi donc, on mange des dattes alors qu’on a mal aux yeux ? »
« J’ai aperçu ces dattes avec la partie de mes yeux qui n’était pas douloureuse ! »
répondit Suhayb.
Le Noble Prophète r arbora un sourire chaleureux et insinuant la manière dont
Suhayb racheta sa fortune aux idolâtres contre sa vie, déclara :
« Suhayb est triomphant… Suhayb est triomphant. Sois assuré Suhayb, ton com-
merce s’est avéré rentable ! » (Ibn S’ad, III, 226-230 ; Hakim, III, 450, 452).

Tandis que les Musulmans de La Mecque faisaient un grand sacrifice dans


la plus dure des conditions en essayant de se rendre à Médine, les Musulmans de
Médine les étreignaient avec l’amour de la foi, comme s’ils voulaient s’approprier
l’intensité de leur lutte.
348 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Certains Muhajirun, désireux de ne pas être un fardeau pour les Ansar qui
n’étaient pas gênés pour partager ce qu’ils avaient avec leurs frères émigrés, n’accep-
tèrent pas ce qu’on leur donnait gratuitement et d’autres l’acceptait à condition de
travailler de leurs propres mains dans les champs de dattiers appartenant aux Ansar.
D’autres émigrés préférèrent s’engager dans ce qu’ils connaissaient le mieux, à
savoir le commerce. L’un d’entre eux, Abdurrahman ibn Awf t qui, bien que Sa’d
ibn Rabi t, son pair, lui offrît la moitié de sa fortune, refusa net en lui disant :
« Veuille Allah faire prospérer ta richesse et accorder le bien-être à ta famille, il
me suffit que tu me montres où se situe le marché de Médine. »
Ainsi il débuta son affaire commerciale et devint riche en peu de temps. (Al
Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 3).

Les Muhajirun, premiers bénéficiaires de la Révélation, qui défièrent tous les


risques liés à la croyance au Messager d’Allah r et qui en conséquence subirent
toutes les formes de tortures les plus impensables au point d’avoir été contraints de
quitter leurs foyers, furent ainsi honorés par Allah – Gloire à Lui.
Même si aucun bien terrestre ne les attendait, ils avaient néanmoins tout aban-
donné pour avoir l’opportunité de vivre conformément à la religion qu’ils avaient
embrassée. Par conséquent, non seulement les Muhajirun montrèrent un parfait
exemple d’altruisme, mais ils s’acquittèrent aussi d’une obligation religieuse, car le
Coran condamnait tous ceux qui refusaient d’effectuer l’expatriation en dépit de
leurs moyens. (Voir, an-Nisa, 97).
8

Allah – Gloire à Lui – promet de pardonner les péchés des Muhajirun et de les
récompenser au paradis :

ƈ ×øĹĘ ƈ ÒŽ IJðƇ IJƇÈIJħİƈ ƈòÓĺîī


ƈ ƈ ƈ

 ĥĻƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ĨÒŽ ijäƇ ƈóìŽ ƇÈIJ Ɔ ÒŽ IJóƇ äÓ
Ɔ İƆ īĺ Ɔ ñĤƪ ÓĘƆ
ÓıƆ Ýƈ éŽ Üī ƈ ƈóåÜƆ ÚÓ
Ɔ Ĩĸ ƅ ĭäħıĭĥƆ ìƈ îƇŶIJħ ƈıÜÓƈ ÑƈƆ ĻøħıĭŽ ĐĪƪ óęžƈ ĠƆ ƇŶÒŽ ijĥƇ Ýƈ ĜƇ IJÒŽ ijĥƇ ÜÓƆ ĜƆ IJ
Ž ƪƆ ŽƇƪ Ž Ɔ Ž žƆ ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
ƈ ųÒ ƈ Ʃ ïĭƈ Đī
ƈ ĨÓƈ
ÔÒ
ƈ ijƆ áĤÒ
ƪ īƇ ùŽ è Ƈ ĮƇ ïĭ
Ɔ Đ Ƈ Ʃ IJ
Ɔ ųÒ Ƈ ıƆ ĬŽ ƆŶÒ
ž ÖÒƃ ijƆ àƆ òÓ
« ... Ceux qui se seront expatriés, qui auront été chassés de leurs foyers, qui
auront souffert pour Ma Cause, qui auront combattu ou auront été tués à Mon
service, à ceux-là Je pardonnerai toutes leurs fautes et Je les recevrai dans des Jar-
dins baignés de ruisseaux, à titre de récompense de la part de leur Seigneur, car
c’est Allah qui distribue les meilleures récompenses. » (Al-Imran, 3 /195).
Première Année de L’hégire 349

ÒŽ IJïƇ İÓ
Ɔ ä ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ħƪ ƇàÒŽ ijƇĭÝĘƇ ÓĨ
Ɔ ïđŽ Öī
Ɔ ĨÒŽ IJóƇ äÓ
Ɔ İ Ɔ īĺ
Ɔ ñĥƪ ĤğƆ Öƪ òƆ Īƈƪ Ìħƪ Ƈà
ħĻèƈ ò òijęĕĤÓİïƈ đÖīĨ ƈ ğƆ ÖòĪƈƪ ÌÒŽ IJó×ĀIJ
Ƅ ƪ Ƅ ƇƆ Ɔ Ɔ ŽƆ ƪƆ ƇƆ Ɔ Ɔ
« Quant à ceux qui ont émigré après avoir été persécutés, et qui ont ensuite
combattu et enduré, ton Seigneur sera à leur égard Plein de sollicitude et de bien-
veillance. » (An-Nahl, 16/110).
Dans la même veine le Noble Prophète r a déclaré :
« Les Muhajirun entreront au paradis soixante-dix années avant les autres et
profiteront de ses bénédictions tandis que les gens attendront le moment où ils seront
appelés à rendre des comptes. » (Haythamî, X, 15).
Destiné aux grandes récompenses dans l’Au-delà, le Muhajir déjà bénéficié des
nombreuses bénédictions divines tout au long de sa vie, suite à ses sacrifices :

Ó ĻĬŽ ïĤÒĹ ƈ ħıĭƆÐijƈ ×ƇĭĤƆ ÒŽ ijĩĥƈ ƇČÓĨïƈ đÖīĨ


Ę ƈ Ʃ Ę
ƈ ųÒĹ ƈ ÒŽ IJóäÓİ īĺñƈ ĤÒIJ
Ɔ ƫ ŽƇƪ žƆ Ƈ Ɔ ŽƆ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ
Ɔ ijŽ ĤƆ óƇ ×Ɔ ĠŽ ƆÈØƈ óƆ ìŴÒ
ĪijĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ÒŽ ijƇĬÓĠ ƈ óäƆŶƆ IJÙƃ ĭƆ ùè
Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ
« Ceux qui ont émigré pour la Cause d’Allah, après avoir subi des injustices,
Nous leur affecterons un séjour agréable en ce monde, et leur rétribution dans la
vie future sera encore plus belle. Mais le savent-ils ? » (An-Nahl, 16/41).
Derechef, suite aux troubles qu’ils subirent, le Tout-Puissant leur réserva une
plus grande partie du butin par rapport aux autres. Le Coran déclare en substance :

Ɔ ĕƇ ÝƆ ׎ ĺƆ ħŽ ƈıĤÒƈ ijƆ ĨŽ ƆÈIJ


Żƃ ąŽ ĘƆ Īij ƈ ƈ ƈ
Ɔ ħŽ İ ƈòÓĺîīĨÒijäƇ ƈóìŽ ƇÈīĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ Òīĺ
Ɔ ƈóäÓ ƈ ıƆ ĩĤŽ ÒÅÒóĝƆ ęƇ ĥŽ Ĥƈ
Ƈ Ɔ
Ɔ ĜƇ îÓƈ āĤÒ ƈ Ʃ īĨƈ
Īij ƪ ħƇ İ Ƈ ğƆ Ñƈ ĤƆ IJŽ ƇÈįƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ĪIJ
Ɔ óƇ āĭ Ɔ Ĭƃ ÒijƆ ĄŽ ƈòIJ
Ƈ ĺƆ IJÓ Ɔ ųÒ Ɔ ž
« Il appartient aussi] aux émigrés besogneux qui ont été expulsés de leurs
demeures et de leurs biens, tandis qu’ils recherchaient une grâce et un agrément
d’Allah, et qu’ils portaient secours à (la cause d’) Allah et à Son Messager. Ceux-là
sont les véridiques. » (Al-Hashr, 59/8).
Les Muhajirun, en plus de la nostalgie qui les prit dès leur arrivée, furent ter-
rassés par la fièvre et autres maladies semblables ce qui fit qu’ils ne purent pendant
longtemps supporter le climat de Médine. Aïcha c, voyant le mauvais état de santé
de son père Abû Bakr et de Bilal al-Habashi y, état aggravé par leur nostalgie de La
Mecque, rapporta la situation à la Lumière de l’Existence r qui fit cette invocation :
350 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ô Allah… Rends Médine chère à nos yeux de même que La Mecque est chère
à Tes yeux ; et même davantage ! Accorde la prospérité à sa moisson ! Ô Allah …
Améliore le climat de Médine et envoie sa fièvre et sa peste à Juhfah ! »110 (Al Boukhari,
Fadail’ul-Madina, 12 ; Muslim, Hajj, 480).

Les vaillants Musulmans de Médine qui accueillirent les Muhajirun à l’esprit


troublé venus de La Mecque partagèrent généreusement toutes leurs ressources et
par ailleurs apportèrent leur soutien affectueux à la cause du Noble Prophète r, ce
qui leur valut d’être appelés Ansar, ce qui signifie Auxiliaires.
Ghaylan ibn Jarir t donne l’explication suivante :
« Une fois, j’ai demandé à Anas t : “ Est-ce que le terme Ansar a été utilisé pour
vous décrire avant, ou est-ce qu’il vous a été donné par Allah ?” Sur quoi il répondit:
“ Ce terme nous a été donné par Allah.” » (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 1).
Les Ansar étaient constitués de deux tribus médinoises rivales de même parenté,
les Aws et les Khazraj.
Au cours de la onzième année de l’Apostolat prophétique, une délégation de
six personnes appartenant aux Khazraj vint à Médine pour assurer le soutien de
Quraysh face aux Aws avec lesquels ils avaient croisé le fer. Ils y avaient rencontré le
Noble Prophète r et son invitation à l’Islam, à la suite de quoi ils devinrent Musul-
mans. À leur retour à Médine, dans l’espoir de mettre un terme aux hostilités entre
eux et réunir tout le monde comme des frères qu’ils étaient autrefois, Khazraj invita
avec succès Aws à l’Islam. Ainsi donc, la lassitude qui régnait dans leurs cœurs à
force de conflits et d’hostilités menés pendant de longues années tourna soudaine-
ment à l’unité et à la force, grâce au silm, c’est-à-dire la paix et la tranquillité de
l’Islam. Unissant de nouveau leur force, les deux tribus apparentées envoyèrent leurs
représentants à La Mecque au cours de la douzième et treizième année de l’Apostolat
prophétique, occasionnant le Premier et le Second Serment d’Aqaba.
Lors du second serment, ils firent le vœu de protéger et de soutenir le Messager
d’Allah r et les Musulmans de La Mecque à condition qu’ils émigrent à Médine,
jouant ainsi un rôle majeur dans l’Hégire et par conséquent dans le commencement
d’une nouvelle ère pour l’Islam.
Alors que le Noble Prophète r eut désigné un frère pour chaque Muhajir,
chaque Ansar fit de son pair un partenaire lui offrant tout ce qu’il possédait en ma-
tière de logement, de travail et de biens, révélant par là un exemple incomparable de
110. Juhfah était alors habitée par des Juifs et des idolâtres qui aidaient les ennemis de l’Islam dans leurs
transgressions contre les Musulmans en semant les graines d’hostilité. En priant ainsi, le Noble
Prophète r voulut que les idolâtres s’occupent de la peste plutôt que de causer du mal. (Ayni, X, 251).
Première Année de L’hégire 351

solidarité et au-delà même de tout ce qu’on pouvait rêver d’attendre de son propre
frère de naissance. La sincérité des Ansar est ainsi acclamée dans le Coran :

ĪIJ Ɔ ïƇ åƈ ĺƆ źƆ IJ
Ɔ ħŽ ƈıĻŽ ĤƆ Ìƈ óƆ äÓ
Ɔ İ
Ɔ īŽ Ĩ Ɔ ×ƫ éƈ ƇĺħŽ ƈıĥƈ ׎ ĜƆ īĨ
Ɔ Īij
ƈ ĪÓ
Ɔ ĩĺ ƈ Ɔ òÒƆ ïĤÒÒIJ
Ɔ ŸÒŽ IJ ƪ ÊƇ ijƪ ×ÜƆ īĺ
Ɔ Ɔ ƪ Ɔ
ñƈ ĤÒIJ
ƈ Ɔ Ɔ óƇ àƈ ËŽ ƇĺIJÒij ƈ
Ƈ ƇÈÓĩƪ Ĩ ƈ ƈ
ÙƄ ĀÓƆ āƆ ì Ɔ ħŽ ƈıƈÖĪÓ
Ɔ Ġ Ɔ ijŽ ĤƆ IJ
Ɔ ħŽ ƈıùęƇ ĬÈĵĥƆ Đ
Ɔ ĪIJ Ɔ ÜIJ ž Ùƃ äÓ Ɔ ħŽ İ ƈòIJïƇ ĀĹ
Ɔ è Ƈ Ę
« Il [appartient également] à ceux qui, avant eux, se sont installés dans le pays
et dans la foi, qui aiment ceux qui émigrent vers eux, et ne ressentent dans leurs
cœurs aucune envie pour ce que [ces immigrés] ont reçu, et qui [les] préfèrent
à eux-mêmes, même s’il y a pénurie chez eux. Quiconque se prémunit contre sa
propre avarice, ceux-là sont ceux qui réussissent. » (Al-Hashr, 59 /9).
L’évènement suivant, rapporté comme ayant occasionné la révélation susmen-
tionnée, représente vraiment la profondeur de l’esprit de sacrifice des Ansar :
Un homme mourant de faim vint demander de l’aide au Messager d’Allah r :
« Qui veut inviter son frère ? » demanda le Noble Prophète r.
« Moi », répondit Abû Talha t l’Ansar, et il emmena l’homme chez lui.
Une fois arrivé, il dit à sa femme en particulier : « Prépare quelque chose en
l’honneur de l’invité du Messager d’Allah »
Puis il demanda : « Y a-t-il quelque chose à manger ? »
« Non, répondit sa femme, il y a juste suffisamment pour nourrir les enfants. »
« Alors distrais-les. S’ils viennent demander à manger, envoie-les se coucher.
Une fois notre invité à l’intérieur, éteins doucement la lumière pour qu’il y ait l’obs-
curité et nous nous rassemblerons comme si nous nous joignons à lui pour le repas. »
C’est ainsi que peu après ils s’assirent pour le repas. L’invité mangea ce qu’on
lui présenta alors qu’Abû Talha t et son épouse allèrent se coucher le ventre vide.
Le lendemain matin, il se rendit auprès du Noble Prophète r qui, en le voyant, dit :
« Allah a apprécié la manière dont tu as agi avec ton invité la nuit dernière. » (Al
Boukhari, Tafsir, 59/6 ; Muslim, Ashribah, 172-173).

Quand le Noble Prophète r arriva à Médine, les Muhajirun lui dirent :


« Jamais, ô Messager d’Allah, nous avons vu un peuple aussi généreux et chari-
table que cette tribu vers laquelle nous avons émigré. Leurs riches donnent beaucoup
et leurs pauvres fournissent de l’aide, accourant à chacun de nos besoins. Ils prennent
entièrement en charge nos soucis financiers et ont fait de nous des partenaires quant
à leurs propriétés. Nous craignons qu’ils raflent toutes les récompenses d’Allah. »
352 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ne vous inquiétez pas, assura le Noble Prophète, tant que vous priez Allah en
leur nom et que vous les remerciez en retour de ce qu’ils font, vous serez aussi récom-
pensés. » (At Tirmidhi Qiyamah, 44/2487).
Jâbir t, quant à lui, rappelle l’évènement suivant :
« Après avoir collecté les dattes, les Ansar les divisaient en deux tas empilés l’un
à côté de l’autre. Puis, plaçant quelques feuilles de dattier sur le plus petit des tas
pour le faire paraître plus important que l’autre, ils demandaient aux Muhajirun de
choisir le tas qu’ils préféraient. Et eux, souhaitant que leurs frères Ansar choisissent
le plus grand tas, choisissaient le tas apparemment plus petit de façon à ce qu’ils se
retrouvassent avec la plus grande quantité de dattes. Les Ansar voyaient tous leurs
vœux exaucés en s’accordant le plus petit tas. Cet acte généreux continua jusqu’à la
prise de Khaybar. » (Haythamî, X, 40).
Voici un autre exemple d’altruisme que les Ansar manifestaient à l’égard de
leurs frères immigrés :
Le Noble Prophète r avait préalablement appelé les Ansar à répartir entre eux,
en lots, la terre de Bahreïn. Mais les Ansar renoncèrent à leurs droits :
« De grâce, ô Messager d’Allah, dirent-ils, ne nous donne rien avant de donner
deux fois plus à nos frères Muhajirun ! »
« Ainsi, ô Ansar, vous préférez les autres à vous-même, répondit le Messager
d’Allah, soyez donc patients jusqu’à ce que vous soyez unis à moi au Bassin d’al-Kaw-
thar… car après moi viendra un temps où d’autres vont être préférés à vous ! » (Al
Boukhari, Manaqib’ul-Ansar).

L’esprit des Ansar reçut les éloges personnels du Noble Messager r :


« Aussi loin que je puisse voir, vous augmentez en nombre quand survient l’appel
à combattre ou à secourir le nécessiteux, et vous accourez même ; pourtant, quand on
vous appelle à donner des choses de ce monde, vous en réduisez le nombre et renon-
cez. » (Ali al-Muttaqi, XIV, 66).
En contrepartie à l’abnégation avec laquelle ils adoptèrent le Noble Prophète r
et les Muhajirun qui avaient émigré, les Ansar ont été récompensés du Paradis, et
plus important encore, par la grâce d’Allah.
Le verset coranique en rapport énonce :

ƈ ƈ Īij
ƈ ıƆ ĩĤŽ ÒīƆ Ĩ
ħİij
Ƈ đƇ ×Ɔ ÜÒƪ īĺ Ɔ ƈòÓāĬ
Ɔ ñĤƪ ÒIJ Ɔ ƆŶÒIJ Ɔ īĺ Ɔ ƈóäÓ Ƈ Ɔ ƇĤIJƪ ƆŶÒĪij Ɔ ĝƇ Öƈ ÓùĤÒ
ƪ IJƆ
ĸ ƈóåŽ ÜƆ ÚÓ ƅ ĭäħıĤƆ ïƪ ĐƆÈIJįĭŽ ĐÒŽ ijĄƇ òIJħıĭŽ ĐųÒ ƈ ĪÓ ƅ
ƪƆ ŽƇ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ʃ ĹƆ Ąò ƪ ùƆ èƈŽ ÍÖƈ
ħĻčƈ đƆ ĤŽ ÒôƇ ijŽ ęƆ ĤŽ ÒğƆ Ĥƈ ðƆ Òïƃ ÖƆ ƆÈÓıĻ ƈ ïƈ ĤÓƈ ì
Ƈ Ɔ Ęīĺ Ɔ Ɔ òÓƇ ıƆ ĬŽ ƆŶÒÓıƆ ÝƆ éŽ ÜƆ
Première Année de L’hégire 353

« Les tout premiers [croyants] parmi les Emigrés et les Auxiliaires et ceux qui
les ont suivis dans un beau comportement, Allah les agrée, et ils l’agréent. Il a pré-
paré pour eux des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, et ils y demeureront
éternellement. Voilà l’énorme succès ! » (At-Tawba, 9/100).
Les Ansar n’ont pas hésité à mettre leur vie en jeu pour la défense de l’Islam et la
protection du Noble Prophète r. Ils furent vaillants lors de la Bataille de Badr.
À Ouhoud, lors du moment désastreux où les Croyants furent assaillis par der-
rière et que la marche de la victoire se retournait contre eux, la plupart des Com-
pagnons qui formèrent un bouclier humain autour du Noble Prophète n’étaient
autres que les Ansar eux-mêmes. Ces derniers lui firent montre d’un attachement
sans réserve, doublé d’un amour et d’une loyauté légendaires. L’intensité de l’épisode
émotionnel suivant, relaté par Anas t, est tout à fait significative de cet état de fait :
« J’étais en voyage en compagnie de Jarir ibn Abdullah111 qui, bien que plus âgé
que moi, était à mon service. Quand je lui ai demandé de cesser il me répondait : “J’ai
été témoin du grand service accompli par les Ansar au profit du Messager d’Allah,
et depuis je me suis promis que si jamais je devenais l’ami intime d’un Ansar, je le
servirais.” » (Al Boukhari. Jihad, 71 ; Muslim, Fadail’us-Sahaba, 181).
Un jour le Noble Messager d’Allah r dit pour exprimer l’immenser valeur qu’ils
revêtaient à ses yeux:« S’il n’y avait jamais eu d’hégire, j’aurais voulu moi aussi être un
Ansar ».(Al Boukhari Manaqib’ul-Ansar, 2).
Parmi les autres termes énoncés du Noble Prophète r en relation avec la vertu
des Ansar, nous pouvons citer ceux-ci :
« Que celui qui croit en Allah et en l’Au-delà ne soit pas méprisant envers les
Ansar. » (At Tirmidhi Manaqib, 25/3906).
« Seuls les croyants les aiment et seuls les hypocrites les détestent. Allah aime ceux
qui aiment les Ansar et qui sont méprisants envers ceux qui les détestent. » (At Tirmidhi
Manaqib, 25/3900).

« Les êtres humains s’accroissent tandis que les Ansar diminuent ; ainsi sont-ils,
comme du sel lors d’un repas. » (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 11).
« Je vous conseille de traiter correctement les Ansar. Ils sont (à la fois) mon peuple,
mes fidèles et mes confidents. Ils ont bien rempli leurs devoirs. Les récompenses inhé-
rentes à tous leurs services rendus n’ont pas encore été accordées (mais elles sont immi-
nentes, et plus que suffisantes, dans l’Au-delà). Par conséquent, traitez-les bien, soyez
en accord avec leur cause et pardonnez leurs erreurs. » (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 11).
111. Jarir ibn Abdallah t était le chef de la tribu Bajila du Yémen. Accompagné de 150 hommes, il vint à
Médine et embrassa l’Islam pendant le mois de Ramadan de l'an Dix de l’Hégire trois mois avant le
décès du Noble Messager r. Il aimait beaucoup le Messager d’Allah r. L’affection était réciproque, car
le Noble Prophète r souriait toutes les fois qu’il le voyait.
354 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’amour profond du Noble Prophète r pour les Ansars et les Muhajirun s’éten-
dit jusqu’à tous les Compagnons au point que chaque Compagnon croyait qu’il n’y
avait personne de plus cher aux yeux du Messager d’Allah r que lui-même.
Ka’b ibn Ujra r raconte l’évènement évocateur ci-dessous :
« Nous étions assis à la mosquée, à Médine, en compagnie du Messager d’Allah.
Il y avait des petits groupes comprenant chacun des Ansar, des Muhajirun et des
membres du clan de Hashim. Parmi ces groupes nous nous demandions quel était
celui que le Messager d’Allah r aimait le plus. Nous, les Ansar, avons déclaré :
“Nous avons cru au Messager d’Allah, nous lui avons obéi et nous nous sommes
battus à ses côtés contre ses ennemis. C’est pour cela qu’il nous aime davantage !”
Nos frères Muhajirun répondirent :
“ Nous avons émigré pour l’amour d’Allah et de Son Messager, tourné le dos à
nos familles et aux biens matériels. Nous avons participé à toutes les batailles aux-
quelles vous-mêmes avez participé. Le Messager d’Allah r, en conséquence, nous
aime encore davantage !”
Les membres du clan de Hashim dirent quant à eux :
“ Nous sommes les proches du Prophète r qui avons pris part à toutes les ba-
tailles que vous avez évoquées. Ainsi donc, le Messager d’Allah nous aime certaine-
ment bien plus que quiconque ! ”
Le Messager d’Allah r se rapprocha alors de nous et demanda:
“ De quoi parliez-vous entre vous ? ”
Chacun d’entre nous répéta ce que qui avait été dit précédemment, sur quoi le
Messager d’Allah fit le commentaire suivant :
“Vous tous avez dit vrai. Qui pourrait prétendre le contraire?”
Puis, après une courte pause, il demanda :
“ Voulez-vous faire en sorte de régler la question ? ”
“ Bien sûr, nous le voulons ”, répondîmes-nous.
Le Messager d’Allah r déclara ensuite : “ Vous, les Ansar , je suis votre frère !”
“Allahou Akbar ! s’écriérent les Ansar avec jubilation. Par le Seigneur de la
Ka’ba, nous l’avons conquis ! ”
“Vous les Muhajirun ! continua le Messager d’Allah, je suis de vous !”
Les Muhajirun, également, s’écrient : “Allahou Akbar ! Par le Seigneur de la
Ka’ba, nous l’avons conquis !”
“Quant à vous fils de Hashim dit le Messager d’Allah r vous êtes de moi et vous
êtes venus à moi !”
Première Année de L’hégire 355

Ces derniers s’exclamèrent : “Allahou Akbar ! Par le Seigneur de la Ka’ba, nous


l’avons conquis !”
“C’est ainsi que nous partîmes tous satisfaits. Chaque groupe fut ravi des com-
pliments du Messager d’Allah r.” (Haythamî, X, 14).
Les frontières de la petite Cité-État musulmane fondée à Médine, comprenant
approximativement quatre cents familles, atteignit l’Irak et la Palestine en dix ans.
Les Compagnons r, bien que leur niveau de vie ait peu changé comparative-
ment aux dix années antérieures, étaient en guerre contre les Byzantins et les Perses
au moment de la disparition du Noble Messager r. Ils continuaient à persister dans
leur vie d’abstinence. La consommation excessive, l’avidité, le luxe et la splendeur
leur étaient des choses inconnues car leur conscience était sans cesse sous l’emprise
de la constance et, « quant à la chair, demain, ce sera l’affaire de la tombe ». Ils s’éloi-
gnèrent toujours de toute tendance à se réserver les plaisirs du monde et de toute
indulgence à leur égard. À la faveur de leur enthousiasme et de leur « zeste de foi »,
ils mirent en exergue tous leurs moyens pour guider l’humanité à son salut, mode-
lant ainsi leur vie dans le but d’obtenir l’agrément divin. Sans aucun doute, l’une des
plus importantes raisons à l’expansion rapide de l’Islam parmi les oppressés et les
exploités, tel un flash évident de lumière matinale, était le fait que les Compagnons
aient affiché un parfait exemple (archétype) de « l’être musulman » partout où ils
posèrent les pieds. Les étudiants d’élite du Noble prophète r, à savoir les Compa-
gnons y, étaient des Croyants par excellence, justes et honnêtes, portant des trésors
de bienveillance dans leurs cœurs éclairés par la lumière prophétique et cherchant à
demeurer des serviteurs du Tout-Puissant à travers les yeux de la compassion.

Madinat an Nabi ou la Constitution de Médine


Entourée de montagnes sur trois côtés et d’une plaine au sud, Médine est une
belle cité agrémentée d’une verdure luxuriante fournie par d’abondantes plantations
de palmiers-dattiers, des terres arables et un climat agréable.
Au temps de l’Hégire deux tribus arabes, les Aws et les Khazraj, et trois tribus
juives, les Banû Qaynuqa, les Banû Nadir et les Banû Qurayza vivaient dans la cité.
Les Arabes étaient venus à Médine depuis le Yémen suite à la grande inondation
d’Arim (Sayl’ul-Arim), tandis que les Juifs étaient des réfugiés originaires de Jérusa-
lem qui avaient fui l’oppression romaine après leur incursion dans la ville.
Au fil du temps, la tension prévalut entre les Arabes et les Juifs. En fin de compte
les Juifs furent battus par les Arabes qui prirent le dessus à Médine. Mais les Juifs
semant les graines de l’hostilité entre les Arabes, les Aws et les Khazraj se trouvèrent
bientôt en conflit les uns contre les autres, dont le dernier fut celui de Buath. Les
pertes humaines enregistrées sur les deux fronts, dans une guerre qui sporadique-
ment dura plus de cent vingt ans et ne prit fin que cinq années précédant l’Hégire,
356 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

eurent pour résultat la décimation des deux tribus. Et notamment au moment de


l’Hégire, les Juifs détinrent le pouvoir financier dans la ville.
L’arrivée du Prophète Béni r à Médine signifia donc, par le truchement des
bénédictions du Tout-Puissant, la fin de l’inimitié entre les deux tribus sœurs.
Allah, Gloire à Lui, déclare :

ħÝĭƇ Ġ ðÌƈ ħġĻĥĐųÒ ƈ ÛĩđĬƈ ÒIJóĠðÒIJÒijĜóęÜźIJÓđĻĩƈ äųÒ ƈ ģ×éƈÖÒijĩāƈ ÝĐÒIJ


Ž Ƈ Ž Ž Ƈ ŽƆ Ɔ Ʃ Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ Ƈ Ž Ɔ Ž Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƃ Ɔ Ʃ ƈ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ
īƆ Ĩƈ ƅ ƈƈ ƈ Ɔ Ƈ ÖijĥƇ ĜƇ īƆ ĻÖƆ ėƆ Ĥƪ ƆÉĘƆ ÅÒïƆ ĐŽ ƆÈ
Ƈ ęƆ ü
ž ØóƆ ęŽ èÓ Ɔ ĵƆ ĥƆ Đ Ɔ ħŽ ÝĭƇ ĠƇ IJÓ Ɔ Ĭƃ ÒijƆ ìƈŽ ÌįÝĩƆ đŽ ĭƈÖħÝƇ éŽ ×Ɔ ĀŽ ÉĘƆ ħŽ ġƈ Ž
Ɔ ïƇ ÝƆ ıŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ įƈ ÜÓƈ ĺÆ
ĪIJ Ʃ īƈƇ Ļž ×Ɔ ƇĺğƆ Ĥƈ ñƆ ĠÓ
Ɔ ħŽ ġƇ ĤƆ ƇųÒ
ƈ Ɔ ƪ
ž ĠƇ ñƆ ĝƆ ĬÉĘƆ  ƈòÓĭĤÒ
Ɔ ıƆ ĭŽ Ĩħ
« Et cramponnez-vous tous ensemble au ‹ Habl › (câble) d’Allah et ne soyez
pas divisés ; et rappelez-vous le bienfait d’Allah sur vous : lorsque vous étiez enne-
mis, c’est Lui qui réconcilia vos cœurs. Puis, pas Son bienfait, vous êtes devenus
frères. Et alors que vous étiez au bord d’un abîme de Feu, c’est Lui qui vous en
a sauvés. Ainsi, Allah vous montre Ses signes afin que vous soyez bien guidés. »
(Al-‘Imrân, 3 : 103).

Peu de temps après l’Hégire, les Mecquois idolâtres écrivirent des lettres inti-
midantes et provoquantes aux idolâtres et aux Juifs de Médine dans l’espoir d’empê-
cher les Musulmans de s’installer et d’asseoir leur pouvoir dans la ville. Les menaces
contenues dans une des lettres adressées à Abdullah Ibn Ubbay et aux idolâtres par-
mi les Aws et les Khazraj sont absolument claires et explicites :
« Un de nos hommes se trouve parmi vous. Ou bien vous le tuez ou le chassez
de votre ville, soit nous marcherons vers vous en compagnie de toutes les tribus
d’Arabie, nous passerons tous vos hommes au fil de nos épées et nous prendrons vos
femmes en vue de notre amusement ! »
Abdullah Ibn Ubbay, soutenu par les idolâtres médinois fit un geste pour af-
fronter le Noble Messager r. Le Messager d’Allah r, informé à l’avance de la situa-
tion, prit les devants en allant vers eux avant qu’ils ne le fassent.
« Il semblerait que les menaces proférées par les Qurayshites vous sont parvenues.
Sachez que le mal qu’ils peuvent vous infliger n’est pas plus grand que le mal que vous
pouvez encourir en vous battant avec nous ! Ou bien êtes-vous absorbés par l’expecta-
tive de combattre vos propres fils et vos propres frères et de les tuer ? » Finalement ils
se dispersèrent. (Abou Daoud, Kharaj, 22-23/3004 ; Abdurrazzaq, V, 358-359).
Les intimidations et les provocations venant de La Mecque avaient prouvé la
futilité de la chose. Mais là encore, il fut entendu que Quraysh frapperait Médine au
moment voulu et massacrerait indistinctement les Musulmans, les Juifs et les ido-
Première Année de L’hégire 357

lâtres. Cette menace commune aboutit in fine au rassemblement de la communauté


non musulmane de Médine autour du leadership du Prophète r.
Depuis les temps anciens, les Aws, les Khazraj et les Juifs se contestaient mutuel-
lement l’autorité de la cité. Les Khazraj, par exemple, déclarèrent vouloir placer leur
chef Abdullah ibn Ubbay à la tête de Médine en sachant fort bien que les Aws ne sup-
porteraient jamais l’autorité d’un chef issu d’une tribu rivale. À cet égard, le Prophète
d’Allah r s’avéra être une figure unificatrice pour tous les habitants de Médine.
Dans ces circonstances, le Messager d’Allah r assura la direction de la ville.
Ayant déjà établi la fraternité entre Aws et Khazraj et par conséquent l’ordre social
parmi les Croyants par le biais de l’awakhat (fraternité entre un croyant muhajirun et
un croyant ansar), le Noble Prophète r, sans plus tarder, accueillit aussi les Juifs lo-
caux en tant que citoyens de Médine par le truchement d’un document écrit, établis-
sant certains principes pratiquement susceptibles d’être considérés comme la consti-
tution de la Cité-État de Médine. Certains des principes contenus dans le document
connu sous le nom de « Constitution de Médine » — un enregistrement officiel de la
fondation de la Cité Idéale (Islamique) — étaient comme suit :
« Bismillahi ar Rahmani ar Rahim (au Nom d’Allah le Clément et le Miséri-
cordieux),
1. Les Musulmans qurayshites et de Yathrib (Médine) et ceux qui les suivirent et
luttèrent avec eux forment une seule communauté.
2. Tous les Croyants monothéistes devront s’unir contre celui qui est rebelle ou
qui cherche à promouvoir l’hostilité ou la sédition, et cela quels que puissent être
leurs liens familiaux ou tribaux.
3. Tous les Musulmans, quels que soient leurs clans ou tribus partagent entre
eux le prix du sang, payent la rançon des captifs selon le bon usage et l’équité.
4. Les Croyants monothéistes ne délaissent jamais un endetté qui a la charge
d’une famille ; ils lui accordent des fonds destinés à payer le prix du sang ou le rachat
d’un captif.
5. Médine doit rester un lieu sacré et inviolé pour tous ceux qui joignent la
charte, à l’exception de ceux qui ont commis une injustice ou un crime.
6. Les Juifs peuvent continuer de professer leur religion et la liberté de pratiquer
leur religion est garantie. Tout Juif qui adhère à cette charte doit avoir l’aide et l’assis-
tance des croyants et tous les droits des croyants doivent lui être donnés.
7. Tous les participants à cette charte doivent boycotter les Qurayshites non-
Musulmans (de La Mecque).
8. Tous les participants à cette charte doivent défendre Médine contre toute
attaque étrangère. Les Juifs et les Croyants monothéistes de Médine ont un pacte de
358 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

défense mutuelle entre deux groupes. Pour honorer ce pacte, ils doivent en payer le
coût nécessaire. Aucun des Juifs ou des Croyants monothéistes ne doit commettre de
péchés portant préjudice à l’autre groupe.
9. Chaque fois qu’un désaccord s’élève entre deux participants à cette charte, le
désaccord doit être soumis à Allah et à Son Messager pour arbitrage.
10. La protection d’Allah est sur tous les croyants monothéistes, indépendam-
ment de leur classe ou de leur origine tribale.
11. Aucun participant à cette charte ne peut déclarer une guerre sans la permis-
sion du Prophète de l’Islam.
Il ne fait aucun doute qu’Allah, le Tout-Puissant, agréera ceux qui s’abstien-
dront de violer les clauses spécifiées dans cette constitution et qui incarnent ce qui
est bon et droit. Ces clauses n’empêcheront certainement pas l’exigence de toute
punition envers l’oppresseur ou le coupable.
Allah, Gloire à Lui, fournira la protection à tous ceux qui prospèrent dans la
bonté et qui renoncent au mal. Muhammad est le Messager d’Allah. » (Ibn Hishâm, II,
119-123 ; Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 263-264 ; Hamidullah, al-Wasaiq, p. 57-64).

Il est évident que ces clauses avaient pour but d’implanter les règles islamiques
au sein de la société.
La Constitution de Médine, véritable pacte de citoyenneté, est la plus décisive
réponse aux fausses allégations disant que l’Islam serait une religion manquant de
fonctions législatives et de conduite sociale, n’étant instituée que pour la pratique
d’actes cultuels.
Avec cet accord aux multiples facettes en matière de politique, d’économie,
d’enjeux sociaux et religieux, la Constitution de Médine situe l’Islam comme l’unique
élément qui forge l’unité parmi les Musulmans, qui en retour doivent impérative-
ment se porter mutuellement assistance, soutenir la justice et l’impartialité dans
toutes leurs transactions et avoir recour à l’arbitrage d’Allah le Très-Haut et de Son
Messager r en cas de désaccord.
Ladite Constitution, en vertu du principe de justice, limite et règle la solidarité
purement tribale répandue parmi les Arabes, enjoint la punition du coupable même
si ce dernier appartient à la même famille. Qui plus est, en vertu du droit des Juifs
à posséder des biens et de pratiquer leur religion, cette Constitution met aussi en
évidence l’extraordinaire profondeur de la justice soutenue par le Noble Prophète r.
Si les Juifs ne l’avaient pas violé de leur propre chef, la Constitution eut été appliquée
pendant longtemps.
Première Année de L’hégire 359

Médine : Cité proclamée Territoire sacré


La Constitution fut suivie par la détermination d’apposer les frontières sacrées
du Haram, ou de Médine, selon les termes voulus par le Noble Prophète r lui-même :
« Ibrahim u avait déclaré La Mecque sacrée (haram) ; pareillement, je déclare
sacré (haram) l’espace situé entre les deux sommets de Médine. » (Ahmad, IV, 141).
En érigeant des pierres sur les monts prescrits, les frontières du sanctuaire de
Médine furent ainsi établies. Médine, telle que déterminée entre ces frontières, fut
ensuite appelée al-Haram’ur-Rasul, le Sanctuaire du Prophète r.
Chaque recoin relatif aux trois zones farsah, elles-mêmes situées entre les monts
‘Ayr et Thawr112, fut établi dans un bosquet. (Al Boukhari, Fadail’ul-Medina, 1; Muslim, Hajj,
471-472).

Après avoir proclamé Médine sanctuaire (sacré), le Messager d’Allah r ajouta :


« Aucun arbre ne sera abattu, aucun péché ne sera commis au sein de ces fron-
tières. Quiconque commet un acte contraire au Livre et à la Sunna encourra la malé-
diction d’Allah, des anges et de l’humanité tout entière. » (Al Boukhari, Fadail’ul-Medina, 1).
Levant les mains au ciel, le Messager d’Allah r pria ensuite pour le bien-être de
la ville, en raison de la grâce dont Médine serait en mesure de bénéficier, c’est-à-dire
un havre de paix, de sérénité et de miséricorde pour tous les croyants ; une ville où le
bonheur serait manifeste et le pouls du monde musulman palpable.
Les Compagnons considéraient avec égards le statut distinct de Médine, comme
l’a démontré la sensibilité d’un Abou Hourayra t qui dit :
« Quand bien même je verrais un troupeau de cerfs passer près des pâturages de
Médine, je ne le dérangerais pas car j’ai entendu le Messager d’Allah déclarer que la
zone se situant entre les endroits pierreux de Médine était sacrée. » (Muslim, Hajj, 471).
Bien plus, les Compagnons ne toléraient pas l’idée que leurs enfants aient un
comportement contraire à « l’essence de Médine », comme le raconte Abdullah ibn
‘Ubada t :
« Alors qu’un jour j’étais parti chasser des oiseaux près du puits d’Abû Ihâb,
mon père m’aperçut et relâcha tout de suite l’oiseau que j’avais capturé en disant :
“Le Messager d’Allah a déclaré sanctuaire sacré la zone située à Médine entre les
deux endroits pierreux, tout comme Ibrahim l’avait fait pour La Mecque”. » (Ibn Asir,
Usdu’l-Ghaba, III, 159).

112. Il s’agit de la zone qui se situe entre le Mont ‘Ayr près de Dhu Hulayfa et Thawr, un petit mont au nord
d’Ouhoud. Ce petit mont, Thawr, ne doit pas être confondu avec le Mont Thawr près de La Mecque.
360 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le marché de Médine et la régulation du commerce


En arrivant à Médine, le Noble Prophète r souligna le fait que les Musulmans
devaient tenir leur marché dans un espace différent de celui des Juifs et insista pour
que les Musulmans eux-mêmes y fissent leurs affaires. C’est un fait avéré, après tout,
que les espaces de marché séparés sont essentiels pour que chaque partie acquière
son indépendance commerciale.
Le Noble Messager r eut un vif intérêt pour le marché de Médine et le com-
merce qui s’y déroulait notamment pour tout ce qui était relatif aux marchands et
aux produits. Un jour, alors qu’il se rendit au marché, il plongea sa main dans un tas
de blé qui se trouvait sur un comptoir marchand. Y ayant décelé de l’humidité, il en
demanda la raison. Le marchand lui expliqua :
« Cela est dû à la pluie ô Messager d’Allah ».
« Ne pouvais-tu pas mettre en évidence la partie humide de façon à ce que tout le
monde puisse voir ? » conseilla le Noble Prophète r, en ajoutant : « Le tricheur n’est
pas des nôtres ! » (Muslim, îman, 164).
Qays Ibn Abî Garaza t raconte :
« À l’époque du Messager d’Allah r, on nous appelait « courtiers » jusqu’au
moment où il se joignit à nous et, alors qu’il nous nomma « marchands », un nom
bien meilleur, il nous donna ensuite ce conseil :
“Ô marchands ! sachez que puisque le mensonge et les serments apposent leurs
marques sur tout ce qui a trait aux affaires, mélangez-y donc quelques oeuvres de
bienfaisance !” » (Ahmad, IV, 6 ; Abou Daoud, Buyu’’, 1/3326).
Malgré les attentions que l’on peut porter, une injustice peut se produire par
erreur, oubli ou négligence. C’est pour cela qu’il faut prendre des précautions pour
prévenir toute éventualité en donnant abondamment en charité (à partir des gains
obtenus).
C’est en particulier ce que le Noble Prophète r a voulu mettre en évidence dans
le récit ci-dessous. Rifaa Ibn Rafi t raconte :
« Nous étions en route vers Musalla113 avec le Messager d’Allah r lorsqu’il vit
un groupe de marchands et les Héla ainsi: “Ô marchands”. Cela attira leur attention
vers nous, “des commerçants (tajir) ressusciteront certainement comme traîtres (fajir)
sauf ceux qui craignent Allah, agissent en bien et font l’aumône (de leurs gains).” » (At
Tirmidhi Buyu’, 4/1210).

113. Musalla est le nom d’une large zone donnée au peuple et réservée aux usages du Vendredi, de l’Aïd ou
des prières funéraires. Initialement elle était située à la périphérie des villes pour honorer les prières
communes, telle que la prière du vendredi, ou celle de l’Aïd, en lieu et place d’autres mosquées. Cela
avait l’avantage de réunir au moins une fois par semaine l’ensemble des habitants d’une ville.
Première Année de L’hégire 361

Le Prophète de Grâce r cita cette histoire ancienne qui eut lieu entre deux
hommes des enfants d’Israël pour détailler la morale à adopter dans le commerce :
« Un homme acheta un terrain et y trouva ensuite de l’or. Portant un récipient
rempli d’or, il retourna vers celui qui lui avait vendu le terrain et lui dit :“Prends donc
cet or, car je ne t’ai acheté que le terrain, pas l’or qui s’y trouve !”
“Jamais, répondit-il, car je t’ai vendu ce terrain avec tout ce qui s’y trouve !”
Incapables de régler leur différend, ils firent appel à un autre homme qu’ils prirent
comme arbitre qui, après les avoir entendu, leur demanda : “Avez-vous des enfants ?”
Il s’avérait qu’un des protagonistes avait un fils, tandis que l’autre avait une fille.
L’arbitre leur suggéra : “ Mariez-les donc, utilisez l’or pour leurs dépenses et distri-
buez le reste en aumône.” » (Al Boukhari, Anbiya, 54 ; Muslim, Aqdiyya, 21 ; Ibn Maja, Luqata, 4).
Le Noble Prophète r,qui était un commerçant expert du fait qu’il entreprit dans
sa jeunesse de longs voyages commerciaux, proclama certains principes liés à ce do-
maine dès son arrivée à Médine. Voici la teneur de ces propos quant à ce sujet :
« Les neuf-dixièmes des revenus se trouvent dans le commerce. » (Suyutî, I, 113).
« Le plus admissible et le meilleur de ce qu’une personne mange vient de ce qu’elle
a gagné de ses propres mains.»(Ibn Maja Tidjarat 1).
Certes, au-delà de son influence physique (matérielle), la nourriture exerce une
influence spirituelle. Chaque morceau consommé, indépendamment de sa prove-
nance licite, illicite ou douteuse, exerce un contrôle sur nos esprits. La nature de
ce que nous mangeons affecte notre sensibilité. Faisant allusion à l’importance de
l’argent licitement acquis dans toute œuvre d’adoration, le hadith ci-dessus, citant
en exemple le pèlerinage (hajj), stipule :
« Celui quiconque rend visite à la Maison d’Allah avec de l’argent obtenu de
manière illicite se démarque de toute obéissance envers Allah. Un tel individu qui,
après être entré en état d’ihram, pose le pied sur l’étrier de son chameau, s’exclame
“labbayk Allahumma labbayk” dans l’unique but de recevoir une réponse du Ciel se
voit répondre: nul labbayk pour toi, nul Sa’dayk, car tes revenus, tes dispositions (four-
nitures), même ton chameau, sont illicites. En conséquence, reviens repentant, tel un
pécheur que tu es, sans attendre la moindre récompense, et sois peiné pour ce qui t’at-
tends en termes de calamités auxquelles tu devras faire face.”
Mais celui qui se rend au hajj avec des ressources licites puis pose le pied sur l’étrier
de son chameau et s’exclame “labbayk Allahumma labbayk” recevra une réponse du
Ciel, “labbayk et Sa’dayk”… Je te réponds car ton chameau, tes vêtements et tes fourni-
tures sont licites. Alors retourne-t’en après avoir obtenu nombre de récompenses, loin
de la salissure du péché, et sois joyeux à cause de ce qui t’attend en termes de bonheur
et de félicité !” » (Haythamî, III, 209-210).
362 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Étant une réalité importante et souvent violée, la porte des interdits en matière
de gains a été fermée en vertu des proclamations divines spécifiées dans la sourate
Al-Baqara, et ceci immédiatement après la mention de l’associationnisme (shirk),
c’est-à-dire le fait d’attribuer des partenaires à Allah, Gloire à Lui. Même dans des
sourates Mecquoises telles que Al-An’âm, Al-A’râf, Yûnus et An-Nahl, qui recèlent
des versets concernant la nature d’une foi saine dans le Tout-Puissant et ne com-
prennent pas beaucoup de jugements d’ordre moral, des clarifications quant à ce qui
est permis et interdit en matière de nourriture et de gains sont fournies. (Al-An’âm, 136-
152; Al-A’râf, 32-33, 169; Yûnus, 59-60; An-Nahl, 95, 115-116. cf, Draz, an-Nabau’l-Azîm, p. 193).

Pour souligner la nécessité du courage et de l’honnêteté dans le commerce, le


Noble Prophète r a dit :
« Le commerçant courageux met ses marchandises en vente subvient à ses besoins,
alors que le commerçant qui s’adonne au marché noir est maudit. » (Ibn Maja, Tijarat, 6).
« Le commerçant lâche est défavorisé, tandis que le commerçant courageux est
pourvu. » (Daylamî, II, 79).
Certains autres principes commerciaux instaurés par le Messager d’Allah r
sont explicités dans les deux hadiths suivants :
« L’acheteur et le vendeur ont la possibilité de revenir sur leur parole tant qu’ils
ne se sont pas séparés. S’ils sont sincères et montrent les défauts de la marchandise, ils
obtiendront la bénédiction dans leur vente. Et s’ils mentent et cachent les défauts, la
bénédiction sera anéantie dans leur vente. » (Al Boukhari, Buyu’, 19 ; Muslim, Buyu’).
« Le serment augmente la relation avec le bien (matériel), mais en apaisant seule-
ment la bénédiction. » (Al Boukhari, Buyu’, 26 ; Muslim, Musaqat, 13).
Le Noble Prophète r a interdit l’interception des marchandises avant qu’elles
n’arrivent au marché, la complète conclusion de l’accord avant que les marchandises
soient remises à leur propriétaire, la vente préalable des marchandises avant d’en
prendre possession, les enchères en dépit d’un accord déjà conclu et l’incitation à
opposer les acheteurs entre eux. (Voir Al Boukhari, Buyu’, 70-72; Muslim, Buyu’, 29).
Soulignant la nécessité d’adopter une attitude décontractée dans le commerce,
le Prophète de miséricorde r déclare :
« Veuille Allah le Très-Haut accorder Sa miséricorde en abondance à la personne
généreuse et clémente dans l’achat, la vente et dans l’acceptation d’une créance à re-
couvrer. » (Al Boukhari, Buyu’, 16).
« Allah le Très-Haut a pardonné à une personne qui était avant vous car il faisait
montre de clémence en matière d’achat, de vente et de sollicitation d’argent qu’on lui
devait. » (At Tirmidhi Buyu’, 75/1320).
Première Année de L’hégire 363

Ceux qui, séduits par la cupidité et l’éblouissement du monde d’ici-bas et dans


l’expectative qu’il y a plus à gagner en désobéissant aux orientations fixées par le
Noble Prophète r, encourent le danger d’être en état d’indigence dans l’Au-delà. À
l’inverse les commerçants (marchands et négociants) honnêtes qui s’efforcent d’ob-
tenir l’agrément du Tout-Puissant et des dispositions inhérentes à l’Au-delà sont
quant à eux concernés par la merveilleuse promesse du Noble Prophète r :« Tout
commerçant musulman, honnête et digne de confiance, prendra place dans l’Au-delà
parmi les martyrs. » (Ibn Maja, Tijarat, 1).

Constructıon de la Mosqué et de la maison du Prophète r


Comme il n’y avait pas de mosquée à Médine le Noble Prophète r avait coutume
d’accomplir la prière (salât) partout où il le jugeait bon. Peu de temps s’écoula avant
qu’une seconde mosquée après celle de Quba soit bâtie. Cette mosquée c’est l’actuelle
Mosquée du prophète - la Masjid’un Nabi (aussi appelée Mesdjid an Nawawi).
En pénétrant dans Médine, Qawsa, la chamelle du Noble Messager r, s’accrou-
pit sur un terrain adjacent aux quartiers détenus par la tribu Najjar, laissé vacant
pour le séchage des dattes, et appartenant à deux orphelins du clan, Sahl et Suhayl.
Descendant de sa chamelle, le Noble Prophète r déclara alors :
« Par la volonté d’Allah, ce sera notre place ! »
S’enquérant de l’identité des propriétaires du terrain en question, Mu’adh ibn
Afra t l’en informa. Les ayant ensuite fait mander, il leur proposa de fixer eux-
mêmes le prix du terrain en vue de son acquisition.
« C’est hors de question », ô Messager d’Allah », répondirent les jeunes gens,
nous ne pouvons que t’accorder cette terre comme présent et en attendre les récom-
penses que d’Allah seul ! »
Mais le Noble Prophète r refusa leur offre généreuse et acquit le terrain après le
paiement de son prix. (Al Boukhari, Manaqib’ul- Ansar, 45, Salât 48; Muslim, Masajid, 9).
Il y avait sur ce terrain quelques tombes d’idolâtres, des fossés, des monticules et
des palmiers-dattiers. Les tombes furent déterrées et les os furent transférés ailleurs ;
les monticules furent nivelés et les arbres furent coupés. (Muslim, Masajid, 9).
Puis le Noble Prophète r donna l’ordre que quelques briques de boue soient
moulées en vue de la construction. (Ibn Sa’d, I, 239).
Pendant la construction de la Mosquée (Masjid), le Noble Prophète r apporta
sa contribution en portant avec ses Compagnons y les briques nécessaires à l’édifi-
cation du bâtiment, déclarant, dans le même temps :
« Cette charge (lit. ce fardeau) n’est pas la charge de Khaybar, mais l’œuvre la
meilleure et la plus pure que l’on peut offrir à Allah. » (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 45).
364 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r voulait ainsi dire que les travaux qu’ils menaient à bien
n’avaient aucune ambition liée à ce monde d’ici-bas, mais que ceux-ci étaient inhérents
à un avantage beaucoup plus conséquent que des marchandises telles que des dattes ou
des raisins que des gens importeraient de Khaybar à des fins commerciales.
Un Compagnon qui tenait une brique dans ses mains s’approcha du Noble Pro-
phète r et l’avait exhorté à lui laisser l’honneur de porter la brique à sa place reçut
cette réponse :
« Mieux vaut que tu te saisisses d’une autre brique, car tu n’as pas de plus grand
besoin d’Allah que je n’en ai ! » (Samhudî, I, 333).
La responsabilité spirituelle et l’incitation à encourager les Musulmans-Com-
pagnons d’œuvre à travailler ont fait que le Noble Prophète r s’engagea dans la
construction.114
Cela inspira aux Compagnons y cette : « … (Comment) se relaxer alors que
l’œuvre du Prophète ne peut nous détourner du droit chemin. » (Ibn Hishâm, II, 114).
Un homme originaire d’Hadramawt qui participait aux travaux de construc-
tion, étant habile en ce qui concerne le mélange et la coulée des briques, reçut ces
éloges du Noble Prophète r :
« Veuille Allah être miséricordieux envers celui qui exécute son art avec perfection.
(Puis s’adressant à l’homme :) Continue donc d’exercer ton activité, car je m’aperçois
que tu le fais bien ! »
Allah le Très-Haut, Gloire à Lui, désire aussi que les Croyants accomplissent
toutes leurs actions avec perfection tel que décrit dans le verset coranique suivant :
« …. Et faites le bien, immédiatement suivi par … car Allah aime les bienfaisants. »
(Al-Baqara, 2/195).

114. L’attitude du Noble Prophète r est hautement significative quant à la conduite idéale de tous ceux qui
occupent des postes administratifs, à savoir : être précurseur, en tout temps, dans l’exercice de toutes
les responsabilités qui leur incombent et éviter l’arrogance de prendre une responsabilité à la légère,
aussi insignifiante soit-elle.
Prenant exemple sur l’excellent exemple du Noble prophète r en la matière, le Sultan Ahmed 1er ,
lors de la construction de la magnifique mosquée qui porte son nom (Sultanahmet), travailla tel un
ouvrier en maniant la pelle et la pioche.
Après sa mort, sa fille Gevher Nesibe Hatun fit un rêve dans lequel elle vit son père dans un endroit
magnifique au Paradis.
“ Père, lui demanda-t-elle curieusement, par quelle action as-tu atteint un si haut rang ?”
Il lui répondit : “J’ai porté des pierres sur mon dos pendant la construction de la mosquée c’est pour
cela qu’on m’a accordé un si haut rang.”
Il est à noter que lorsque le Sultan Ahmet 1er porta ces pierres sur son dos, ce qui est du reste une belle
démonstration de ce que sont les valeurs morales Islamiques, l’Empire ottoman était à son apogée et
enregistrait à son compte les plus vastes territoires. Les souverains se prosternaient devant sa majesté
et n’étaient ordonnés que par les mains de ses grands vizirs.
Première Année de L’hégire 365

Tandis qu’il portait les briques épaule contre épaule parmi ses Compagnons y,
le Noble Prophète r ne cessait de répéter les paroles suivantes, originellement expri-
mées par un autre compagnon :
« Allah… La vraie récompense est celle de l’Au-delà. Aie pitié de l’Ansar et du
Muhajirun ! » (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar, 45).
Alors que les autres étaient en train de porter les briques une par une, Ammar
ibn Yasir t lui en portait deux à la fois, une en son nom et l’autre au nom du Noble
Prophète r.
Remarquant ses efforts diligents, le Messager d’Allah r, enlevant la poussière de
dessus lui, lui demanda :
« Ces briques, pourquoi ne les portes-tu pas une par une comme le font tes amis ? »
« J’agis de la sorte en prévision de la récompense que me donnera d’Allah »,
répondit-il.
Le Noble Prophète r, lui tapotant alors le dos, lui dit :
« Les autres ne seront accrédités que d’une seule récompense, tandis que toi Am-
mar, tu en auras deux. » (Ahmad, III, 91 ; Ibn Kathir, al-Bidaya, III, 256).
Le rapport ci-dessus témoigne du fait que les hommes et les femmes, dans leur
totalité, ont travaillé avec enthousiasme à la construction de la Masjid’un Nabi :
« Au décès de sa femme, Abdullah ibn Awfa t exhorta les gens à « porter son
cercueil…. Avec enthousiasme. Car dit-il, elle-même et ses esclaves (servantes) por-
taient la nuit les briques nécessaires (à la construction) de la Mosquée du Prophète,
bâtie sur les fondations de la piété. Et nous, les hommes, les portions par paire durant
la journée. » (Haythamî, II, 10).
En forme de quadrilatère, la Masjid’un Nabi possédait à l’origine une longueur
et une largeur d’environ une centaine de zira, (Unité de mesure qui vaut 54 cm) et une
hauteur de cinq à sept zira, les trois premiers (zira) composés de roche et le restant
composé de briques de boue. (Ibn Sa’d, I, 239).
La boue fut aussi utilisée dans le mortier de la construction. (Diyarbakrî, I, 344).
En guise de colonnes, des rondins provenant de palmiers-dattiers furent liés
ensemble en direction de la qibla et les branches et les feuilles du même arbre furent
utilisées en vue de l’édification de son toit et de ses piliers. (Al Boukhari, Salât, 62).
S’y trouvait également un mihrab orienté en direction de la Masjid’ul Aqsa
(Mosquée d’al-Aqsa) à Jérusalem ainsi que trois portes. Une fois la qibla orientée en
direction de la Ka’ba, le Noble Prophète r fit fermer la première porte et en fit ouvrir
une autre orientée en direction du mur de Damas. (Diyarbakrî, I, 346).
366 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Deux pièces supplémentaires furent établies à côté de la Mosquée pour le loge-


ment du Noble Prophète r et des membres de sa famille dont le nombre avait aug-
menté progressivement. (Ibn Sa’d, I, 240).
Hasan al-Basri, qui durant son enfance respira l’air de la maison du Noble Pro-
phète r parce que sa mère avait assisté l’honorable Oumm Salama, raconte qu’une
personne pouvait toucher aisément le toit de ces pièces. (Ibn Sa’d, VII, 161; Suhayli, I, 248).
À partir de cela on peut supposer que les chambres n’étaient pas si élevées. Les
portes des chambres étaient composées de feutre de toison noire. (Ibn Sa’d, I, 49).
Sa’id ibn Musayyab g, un des plus grands imams de la génération des Tabi’un,
exprime ainsi son chagrin concernant la démolition de ces pièces (chambres) qui eut
lieu durant le règne de la dynastie omeyyade et de leur incorporation à la mosquée :
« Par Allah, comme j’aurais aimé que ces pièces soient gardées tel quel pour que
la nouvelle génération et les gens qui visitent les lieux celles réalisent compte de la
façon précise ce à quoi le Messager d’Allah r s’est conformé dans sa vie et de la ma-
nière dont il se détournait de toute idée d’accumulation et de vantardise en matière
de richesse ! » (Ibn Sa’d, I, 499-500).
La Mosquée étant recouverte de branches et de feuilles de palmiers-dattiers, sa
surface au sol se transformait en boue quand il pleuvait. Une fois, alors que le Noble
Prophète r pratiquait une retraite spirituelle (i’tikaf) pendant le Ramadan, une pluie
salissante inonda la Mosquée et l’on pouvait voir des traces de boue collées sur son
visage béni alors qu’il dirigeait la prière de l’aube (fajr). (Al Boukhari, I’tikaf, 1).
Lors d’une autre occasion, il plut de nouveau ce qui provoqua un refroidisse-
ment de la surface au sol. Un homme apporta alors un peu de sable qu’il avait mis
dans ses vêtements puis le dispersa sur toute la surface à sécher. Impressionné, après
qu’il eut achevé la prière, le Messager d’Allah r exprima sa satisfaction par la re-
marque suivante : « Comme c’est bien ! » (Abou Daoud, Salât, 15/458).
Alors qu’il revenait de Damas, Tamîm’ud-Darî t avait rapporté avec lui une
quantité considérable de lampions, d’huile et de cordes qui leur étaient destinées.
Il arriva à Médine. Il demanda alors à son serviteur Abû’l-Barrâd de verser dans
les lampions un peu d’huile et de l’eau, de les accrocher dans la Mosquée et de les
allumer après le coucher du soleil. Apercevant la Mosquée éclatante en raison des
lampions posés à l’entrée, le Noble prophète r demanda l’identité qui l’avait fait.
On lui répondit : « C’est Tamîm, ô Messager d’Allah ».
Visiblement heureux, le Noble Prophète r dit alors à Tamîm :
« Tu viens d’illuminer l’Islam et d’orner sa Mosquée, aussi veuille Allah t’illumi-
ner ici-bas et dans l’Au-delà ! » (Samhudî, II, 596-597 ; Ibn Hajar, al-Isaba, II, 18).
Première Année de L’hégire 367

Selon les paroles du Noble Prophète r, la Mesjid an Nabawî est une des trois
mosquées dignes de s’y rendre à des fins de visite et d’adoration. (Al Boukhari, Fadl’us-
Salât, 1 ; Muslim, Hajj, 505-510).

Il a d’ailleurs dit selon le récit qui en est fait dans un hadith :


« La zone située entre ma maison et mon minbar (chaire) est un jardin parmi
les jardins du Paradis. Mon minbar est au-dessus de mon Bassin (de Kawthar). » (Al
Boukhari, Fadl’us-Salât, 5; Fadail’ul-Medina 11; Muslim, Hajj, 502).

Selon les paroles du Noble Prophète r, une salât dans sa Mosquée est mille fois
plus gratifiante, en termes de récompense, qu’une salât accomplie partout ailleurs,
hormis à la Ka’ba, la Maison Sacrée. » (Al Boukhari Fadl’us-Salât 1; Muslim Hajj 505-510).
D’après le témoignage d’Anas t le Noble Prophète r avait coutume dans la
mosquée de s’adresser à l’assemblée (le dos) appuyé contre le tronc d’un palmier.
La nécessité d’un minbar étant flagrante, il fut bientôt fait de sorte que le Messager
d’Allah r pût livrer par la suite son sermon (khutba). Mais au moment où, pour la
première fois, le Noble Prophète r monta sur le minbar, un gémissement semblable
à celui d’un chameau se fit entendre du tronc, comme si celui-ci donnait libre cours
à une agonie d’abandon. Le Messager d’Allah r descendit aussitôt du minbar puis
tapota le tronc pendant un certain temps. Celui-ci cessa de gémir et finit par s’apai-
ser. (Al Boukhari, Juma, 26 ; At Tirmidhi Manaqib, 6/3627).
« C’est parce qu’il était éloigné du rappel (dhikr) d’Allah qu’il a ainsi gémi (de
douleur), dit le Noble Prophète r, car il en était auparavant très proche ». (Al Boukhari,
Manaqib, 25 ; Ahmad, III, 300).

Les sources sur l’endroit où le tronc du palmier fut placé après l’incident va-
rient. Une tradition dit qu’il a été enterré dans un fossé creusé sous le minbar, tandis
qu’une autre affirme qu’il est fixé au plafond. Indépendamment de l’endroit où il fut
placé, une chose néanmoins est sure : au cours de la reconstruction de la Mosquée
qui eut lieu durant le califat d’Othmân t, le tronc de palmier partit chez Ubbay ibn
Ka’b t jusqu’à ce qu’il soit entièrement dévoré par les insectes. (Ibn Sa’d, I, 251-252).
Dans son Mathnawî, le fameux Mawlânâ Jelal Ed Dine Rûmî ç fait parler le
tronc de palmier (en le nommant pilier) dans un langage spirituel :
« Le pilier qui gémissait se plaignait d’être séparé du Prophète comme pourraient
le faire des êtres doués de raison.
Le Prophète dit : “ Ô pilier, que veux-tu ?” Le pilier répondit : “ Mon âme saigne
d’être séparé de toi. Tu t’appuyais sur moi ; à présent, tu t’es enfui loin de moi ; tu as
préparé un endroit pour t’appuyer contre la chaire.”
368 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

“Désires-tu, dit-il, être transformé en dattier afin que les gens d’Orient et d’Occi-
dent cueillent tes fruits? Ou bien que Dieu fasse de toi un cyprès dans l’autre monde,
afin que tu restes éternellement frais et florissant?”
Il répondit : “Je désire ce par quoi la vie demeure à jamais.” Écoute, ô insouciant
! Ne sois pas moins qu’un morceau de bois !
Le Prophète enterra ce pilier dans la terre, afin qu’il ressuscite d’entre les morts,
comme l’humanité, le jour de la Résurrection. » (Mathnawî, Livre premier, v. 2013-2019, trad.
E. de Vitray-Meyerovitch).

Après avoir honoré Médine une des premières initiatives prise par le Noble
prophète r pour constituer une communauté Islamique soudée fut la construction
de la Masjid (Mosquée).
Rejetant les différences de richesse et de statut et se recueillant cinq fois par jour
dans la Maison d’Allah, nul doute à ce sujet que de telles inclinaisons ont joué un rôle
déterminant en matière de fraternité entre les croyants.
C’est pour cela que les villes
musulmanes sont généralement
bâties autour des mosquées, comme
plaques tournantes pour leurs quar-
tiers avoisinants, de manière à favo-
riser une expansion extérieure à la
faveur d’un ancrage (durable).
En plus d’être un lieu de culte
proprement dit, la Masjid, était aussi,
à l’Ère du Bonheur (Asr as-Saada),
une école, une congrégation déci-
sionnelle, un centre pour discuter
des questions administratives et mili-
taires, un hôpital et un lieu de loisirs.
La Masjid servait également de
pension aux célibataires et aux sans-
abris qui assistaient aux leçons, aux
causeries et aux assemblées de dhikr
qui s’y tenaient, faisant d’elle, en
même temps, une maison d’hôtes.
Première Année de L’hégire 369

L’Exhortation à la prière en commun


La formation sociale est un des plus vitaux fondements de l’Islam. La phase
d’ouverture de la formation sociale que reçoit tout musulman est fondée sur la prière
en commun, (en jama’a), qui le plus robuste pilier en termes d’œuvre capable de
maintenir la société musulmane sous son influence directe. Partout où elle peut être
offerte, la prière en commun concoure à actualiser l’esprit social de l’Islam.
Désireux d’établir l’unité et la solidarité entre ses membres, l’Islam a donc insti-
tué la salât (prière rituelle) comme marque caractéristique du Musulman et la mos-
quée comme témoignage (visuel) de la condition de Croyant.
Le Noble Prophète r a dit :
« Si vous voyez un homme fréquenter régulièrement la mosquée, attestez qu’il est
croyant car Allah le Très-Haut déclare :

ƈ Ʃ ÖīĨÆīĨųÒ
ųÓƈ ƈ ƈ ùĨ
Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ʃ ïƆ äÓ Ɔ Ɔ óƇ ĩƇ đŽ ĺÓ
Ɔ ĩƆ Ĭƈƪ Ì
“Ne peupleront les mosquées d’Allah que ceux qui croient en Allah et au Jour
dernier...” (At-Tawba, 9/18. (Ibn Maja, Masajid, 19). »
L’importance de maintenir une présence physique à la mosquée équivaut à la
maintenir spirituellement par le biais des prières en commun, celles-ci étant consti-
tutives de toute résignation (à la volonté d’Allah).
Comme les paroles suivantes, rapportées par Abou Hourayra t, attestent :
« Quatre choses sur terre sont vraiment étranges : le Noble Coran (enfoui) dans la
mémoire d’un tyran, une mosquée à l’intérieur de laquelle nulle salât n’y est pratiquée
en dépit du fait qu’elle se trouve en terre musulmane, un Coran non lu bien qu’il soit
mis en évidence à l’intérieur de la maison (dans une bibliothèque), et une vie juste (et
convenable) au milieu de gens corrompus. » (Daylami, III, 108/4301).
Allah le Très-Haut, Gloire à Lui, accorde une si grande importance à la prière en
commun qu’Il l’ordonne même en plein cœur de la bataille et enseigne dans le Noble
Coran la façon précise de l’effectuer.
Abou Hourayra t raconte :
« Alors que le Messager d’Allah était en voyage, il fit une pause quelque part
entre Dajnan et Usfan. (À ce moment) les idolâtres conspiraient en disant :à propos
des Musulmans: “ Ils ont une prière qui a plus de valeur pour eux que les parents et
leurs enfants. C’est la prière de la Asr. Faites vos préparatifs et tombez sur eux en
groupe. !”
370 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

C’est alors que Gabriel u vint auprès du Messager d’Allah, porteur du 102ème
verset de la sourate An-Nisâ qui explique la façon dont la prière doit être accomplie
sur le champ de bataille. » (At Tirmidhi Tafsir, 4/21).
Aussi défavorable que puisse être sa condition, le Musulman doit s’acquitter de
la prière en commun et ne jamais l’abandonner.
Quelques hadiths du Noble prophète r mettent en évidence cette réalité :
« La prière en commun dépasse en mérite la prière individuelle de vingt-sept de-
grés. » (Al Boukhari, Adhan, 30).
« Celui qui va à la mosquée le matin ou l’après-midi, Dieu lui prépare le Paradis
comme lieu de séjour pour chacun de ses parcours. » (Al Boukhari, Adhan, 37).
« Lorsque l’un d’entre vous accomplit scrupuleusement son woudou (ablution
rituelle) puis sort de chez lui pour joindre la salât, chaque fois qu’il lève son pied droit,
Allah inscrit une bonne action et efface un péché chaque fois qu’il pose son pied gauche
à terre. Il peut choisir entre faire des petits ou des grands pas. Puis lorsqu’il arrive à la
Masdjid et fait la salât en congrégation, il est pardonné. Et si en arrivant à la Masdjid,
il constate qu’il a manqué une partie de la salât, qu’il la termine avec les autres puis
complète le reste seul et il obtiendra une récompense analogue. Et si lorsqu’ il arrive à
la Masdjid, il constate que la salât est terminée, qu’il l’accomplisse individuellement et
sa récompense sera identique. » (Abou Daoud, Salât, 50/563).
« Tout Musulman qui attend l’heure exacte de la prière à la mosquée est considéré
comme étant en état de prière. » (Ibn Maja, Masajid, 14).
Abou Hourayra t relate :
« Le Messager d’Allah r demanda une fois :
“Ne voulez-vous pas que je vous informe comment Allah efface les fautes et élève
les degrés ?”
Oui, certes ô Messager d’Allah “ ont répondu les Compagnons y.
“Et bien, reprit-il, par les ablutions intègres malgré les circonstances difficiles,
aller souvent aux mosquées et l’attente de la deuxième prière (après avoir exécuté la
première). Voilà la fermeté115, voilà la fermeté, voilà la fermeté”. » (Muslim, Taharat, 41).
Yazid Ibn Amir t relate à une autre occasion :
« Je suis venu alors que le Prophète r disait la prière. Je me suis assis mais n’ai
pas prié avec eux. Le Messager d’Allah r se tourna ensuite vers nous et vis que j’étais
assis là. Il me demanda :
115. Ar-Ribat : la fermeté. Ce terme signifie « soumettre l’ego à l’obéissance », « monter la garde près d’une
frontière » ou bien « lutter dans la voie d’Allah ». Principe à l’effet de grandes récompenses, ar-ribat
est emphatiquement louée tant dans le Noble Coran que dans la Tradition prophétique (Sunna).
Première Année de L’hégire 371

— N’as-tu donc pas embrassé l’Islam, ô Yazid ?


— Bien sûr que si, ô Messager d’Allah, répondis-je.
— Qu’est-ce qui t’a donc empêché de prier en congrégation ? me demanda-t-il.
— J’ai déjà prié à la maison pensant que vous aviez déjà prié en congrégation,
répondis-je.
— Quand tu viens à la mosquée, dit-il, et que tu trouves des gens en train de
prier, alors joins toi à eux, même si tu as déjà prié auparavant. Cette prière obligatoire
prendra la place de celle que tu auras priée chez toi. » (Abou Daoud, Salât, 56/577).
Intransigeant quant aux compromissions relatives à la prière en commun, le
Noble Prophète r a voulu que les Musulmans réglassent leurs habitudes en fonction
des cinq adhan quotidiens.
Relativement à cette attitude, le cas d’Abdallah Ibn Umm Maktûb t est tout à
fait significatif.
Ce dernier vint dire au Prophète de Miséricorde r :
— Ô Messager d’Allah ! Je suis un homme aveugle et je n’ai personne pour me
guider à la mosquée. M’autorises-tu donc à accomplir la prière chez moi ?
— Est-ce que tu entends l’appel à la prière de chez toi ? lui demanda le Noble
Prophète r, ce à quoi Ibn Maqtûm répondit positivement.
— Dans ce cas, dit alors le Noble Messager, il vaut mieux alors répondre à cet
appel. (Abou Daoud, Salât, 46/552).
En ce qui concerne les mosquées qui sont (géographiquement) éloignées, le
Noble Prophète r rajouta :
« Ceux des fidèles qui, pour la prière, recevront la plus grande récompense, seront
ceux qui seront les plus éloignés, c’est-à-dire ceux qui auront la marche la plus longue
à faire (pour aller à la mosquée). Celui qui attend, pour sa prière, le moment de la faire
en même temps que l’imam, aura une récompense plus belle que celui qui prie (seul) et
se couche ensuite. » (Al Boukhari, Adhan, 31).
« Plus la demeure est éloignée de la mosquée, plus la récompense sera grande. »
(Abou Daoud, Salât, 48/556).

Le Noble Prophète r a laissé toutes sortes d’avertissements à l’adresse de ceux


qui n’assistent pas à la prière en communauté. Ubbay ibn Ka’b t en donne l’expli-
cation suivante :
« Un jour que le Messager d’Allah r s’apprêtait à nous conduire dans la prière
de l’aube (fajr), il s’était auparavant retourné et avait demandé si telle personne était
présente. Il s’avéra que non. Le Messager d’Allah r demanda alors si telle autre per-
sonne était présente. Il s’avéra que ladite personne était aussi absente.
372 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Là-dessus, le Messager d’Allah r déclara :


“Ces deux prières (fajr et ‘icha) sont les plus lourdes à accomplir pour les hypo-
crites. Si vous saviez ce qu’elles contiennent (en termes de bénédictions), vous viendriez
à elles même si vous deviez ramper sur les genoux. La première rangée est comme celle
des anges, et si vous saviez la nature de son excellence, vous vous hâteriez pour la re-
joindre. La prière qu’un homme accomplit en compagnie d’un autre homme est plus à
propos et offre de plus grandes récompenses qu’une prière accomplie seul. (De même),
la prière accomplie en compagnie de deux hommes est plus à propos et supérieure à
une prière accomplie en compagnie d’un seul homme. Plus le nombre de personnes est
important, plus la satisfaction d’Allah est grande”. » (Abou Daoud, Salât, 47/554).
Un autre hadith nous rapporte que le Noble Prophète r a dit :
« La prière de celui dont la demeure est voisine d’une mosquée n’est (réellement)
parfaite que lorsqu’il l’accomplit à la mosquée. » (Ibn Abi Shayba, I, 303).
Interrogé sur la signification l’expression « voisine d’une mosquée », ‘Alî t dit :
« Quiconque entend l’appel à la prière. » (Bayhaqî, as-Sunanu’l- Kubra, III, 57).
Les paroles suivantes prononcées par le Noble Prophète r contiennent d’alar-
mantes menaces à l’encontre de tous ceux qui abandonnent la prière en commun :
« Quand dans une ville ou à la campagne se trouvent trois hommes qui ne font
pas la prière en commun, c’est que certainement le Diable les a mis sous sa férule.
Astreignez-vous donc à la prière en commun, car le loup ne mange du troupeau que la
bête isolée. » (Abou Daoud, Salât, 46/547).
« Ou bien les gens cesseront d’abandonner la jama’a (congrégation), ou bien Al-
lah scellera leurs cœurs et les comptera parmi les insouciants. » (Ibn Maja, Masajid, 17).

Le Premier Appel à la prière (Adhan)


Seuls les mots « à la salât, à la salât » étaient alors utilisés au commencement
pour informer les Croyants que l’heure de la prière rituelle était venue. Le bienfait de
l’adhan devait survenir après un certain temps.
Dans le même temps, le Noble Messager r consulta ses Compagnons pour défi-
nir la manière idéale d’appeler les Croyants à la prière. Le Noble Prophète r n’adhé-
ra pas à la suggestion de certains qui dirent « Arborons un étendard lorsque survient
l’heure de la prière ainsi les Croyants qui le voient pourront s’en informer mutuel-
lement ». Il rejeta aussi celle de souffler dans une corne qui demeure l’instrument
spécifique des Juifs. Bien plus, le Noble Prophète r n’était nullement enthousiaste à
l’idée de faire sonner des cloches, suggestion qui avait été également évoquée dans la
discussion, car c’était là « une pratique typiquement chrétienne ».
Première Année de L’hégire 373

Abdullah ibn Zayd116 t assista à toute la discussion et, très réceptif aux senti-
ments du Noble Messager r, il prit congé de l’assemblée et retourna chez lui. C’est
alors qu’il était couché et à moitié endormi qu’il fit un rêve relatif à l’appel à la prière.
Il retourna aussitôt auprès du Messager d’Allah r et lui fit part de son rêve et de
la manière tel qu’on « lui enseigna l’adhan alors qu’il était couché ». Comme Omar t
avait fait le même rêve le Prophète de miséricorde r ordonna à Bilal tde répéter à
haute voix les mots qu‘Abdullah ibn Zayd t avait entendus. Ainsi on entendit pour
la première fois l’écho de l’adhan. (Abou Daoud, Salât, 27/498).
L’Adhan est une sunna, suffisamment forte pour qu’elle ait un caractère obli-
gatoire (wajib) car il est attesté par un rêve décisif. Cette pratique est confirmé par
l’injonction divine :
ØƆŻāĤÒĵ ĤƆ Ìƈ ħÝƇ ĺŽ îÓ ĬÒðÌƈ IJ
ƪ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
“Et lorsque vous faites l’appel à la Salât (...).” (Al-Mâ’ida, 5/58).
Bien qu’Abdullah ibn Zayd t qui reçut la révélation de l’adhan, il faut garder à
l’esprit que le Noble Prophète r fut le seul bénéficiaire de la Révélation divine et réci-
piendaire de toute inspiration céleste. Ce n’est qu’après son approbation que l’adhan
fut établi comme moyen pour appeler depuis les mosquées les Croyants à la prière.
Une fois que Bilal al-Habashî t eut lancé le premier adhan, l’invitation divine attei-
gnit chaque coin de Médine et les Croyants se rendirent en masse à la Mosquée, sous
des cieux couverts par les echos de l’adhan.
La lumière de l’Être r désapprouva les diverses propositions invitant les Croyants
à la prière qui lui furent faites et instaura avec beaucoup d’enthousiasme l’adhan qui
est un résumé précis de la conception islamique d’Allah U, du Prophète r, et de la
notion de l’adoration et de la vie en général. On peut donc dire que le Messager d’Al-
lah r a opté pour la meilleure solution possible en vue d’inviter les gens à la prière.
Confirmé à la fois par le Coran et la Sunna, l’adhan continue depuis quatorze siècles
à lancer son appel depuis les cieux à l’adresse des Musulmans.
Cet appel à la prière est à la fois universel et international et de ce fait il ne peut
pas être communiqué sous aucune autre forme que son original.
Il est comme le chant merveilleux des cieux.
116. ‘Abdullah ibn Zayd ibn Asim al Ansari t reçut les louanges du Noble Prophète r pour l’avoir défendu
durant la Bataille d’Ouhoud. Abdullah t ne fut pas le seul à faire preuve d’héroïsme au cours de cette
bataille. Toute sa famille fit preuve d’un immense courage et c’est pour cela que le Noble Messager r
pria pour qu’Abdullah et sa famille fussent ses voisins au Paradis. Maintes fois, le Noble Prophète r
rendit visite à ‘Abdullah ibn Zayd t chez lui et il y faisait ses ablutions et priait. Ibn Zayd al-Ansari t
était un des Compagnons les plus aimés du Messager d’Allah r. Très choqué à l’annonce de sa mort,
Abdullah t pria en invoquant le Tout-Puissant: « Rends-moi aveugle pour que je ne voie personne
d’autre après Muhammad r» ! Sa demande fut alors acceptée et ‘Abdullah devint aveugle et le resta
jusqu’à la fin de ses jours. (Qurtubi, V, 271). Il fut plus tard martyrisé à Harra avec ses deux fils.
374 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Comme le poète Yahya Kemal image magnifiquement l’adhan dans ses vers :
Quel commandement suprême tu es Ô adhan Muhammedî
Les pays Musulmans ne suffisent pas à ta voix Muhammedî
Si le Sultan Selim I n’avait pas courbé l’échine devant la mort
La gloire Muhammedî aurait conquis le monde entier
Les cieux baigneraient dans la Lumière spirituelle de cent mille minarets
Comme une plume rafraîchissante de cette âme Muhammedî
Toutes les âmes verraient la grandeur d’Allah
Quand l’écho de la parole Muhammedî résonnera dans les cieux
Le Noble Prophète r a dit :
« Quand vous entendez l’appel du Muezzin, dites après lui la même chose que
lui puis invoquez pour la bénédiction d’Allah, car toutes les fois que qu’une personne
me bénit une fois, Allah lui donne en contrepartie dix bénédictions. Puis demandez
à Allah de me donner le pouvoir d’intercession, car cela représente une position au
Paradis (wasila) qui ne convient qu’à l’un des esclaves d’Allah et j’ai bon espoir d’être
ce quelqu’un. Celui qui demande pour moi ce pouvoir d’intercession aura plein droit à
mon intercession en sa faveur. » (Muslim, Salât ; Abou Daoud, Salât, 26/523).
Le Prophète Béni r assura clairement selon un autre hadith le Paradis à ceux
qui répètent les paroles que le Muezzin prononce pendant l’adhan: (Muslim, Salât, 12).
« Celui qui dit en entendant l’appel du Muezzin : «Seigneur Dieu ! Maître de cet
appel parfait et de cette prière inaltérable, donne à Muhammad le pouvoir d’inter-
cession et la place d’honneur. Ressuscite-le dans la position louable que Tu lui as pro-
mise», celui-là obtient de plein droit mon intercession le Jour de la Résurrection. » (Al
Boukhari, Adhan, 8 ; Abou Daoud, Salât, 37/529).

Les vertus de l’adhan ont donné lieu à de nombreux hadiths dont voici certains :
« Deux invocations ne sont pas ou très rarement refusées. La première est celle qui
a lieu après l’adhan et la seconde est celle qui a lieu au cours d’une bataille, juste au
moment où les deux parties se lancent l’une contre l’autre. » (Abou Daoud, Jihad, 39/2540).
« Si les gens savaient quelle récompense se trouve dans l’appel à la prière et dans
le premier rang des orants et s’ils ne trouvaient que le tirage au sort pour se départager,
ils le feraient. » (Al Boukhari, Adhan, 9, 32 ; Muslim, Salât, 129).
« Quand on lance l’appel à la prière, Satan se sauve à toute vitesse en pétant pour ne
pas entendre l’appel. Dès que l’appel est terminé, il revient. Quand on lance le deuxième
appel à la prière (iqama), il se sauve de nouveau pour revenir à la fin de cet appel pour
distraire le prieur par des pensées étrangères à la prière. Il lui dit : «Pense à telle chose ou
Première Année de L’hégire 375

à telle autre», en lui désignant des choses auxquelles il n’a pas encore pensé. Si bien que
l’homme ne sait plus où il en est de sa prière. » (Al Boukhari, Adhan, 4 ; Muslim, Salât, 19).

Al-Suffa : l’École de la Science et de la Sagesse


Une partie de la Masjid an-Nabawi fut aménagée en porche couvert de feuilles
de dattiers. Cette partie, qui fut appelée la Suffa,117 hébergeait les Musulmans défa-
vorisés ou qui n’avaient aucune famille et qui sont connus sous le nom de Gens (ou
Compagnons) du Banc (« Ahl as-Suffa ». (Ibn Sa’d, I, 255).
Leur nombre pouvait varier en fonction de la mort, du mariage ou du départ de
ses membres pour des raisons telles que la relocalisation ou une expédition militaire;
on rapporte que leur nombre avait atteint soixante-dix individus. Dans certaines
sources les noms de plus d’une centaine de compagnons y qui avaient élu résidence
à la Suffa sont mentionnés Le Noble Prophète r couvrait personnellement leurs be-
soins vitaux et encourageait de même ses autres Compagnons à faire de même.
Abou Hourayra t lui-même membre de la Suffa, raconte :
« J’ai vu soixante-dix personnes parmi celles de Suffa, pas une d’elles ne portait
un vêtement complet : soit ces gens portaient un izâr, soit une pièce d’étoffe qu’ils atta-
chaient autour du cou, qui les couvrait jusqu’à mi-mollet pour certains ou aux che-
villes pour d’autres. Ils en rassemblaient les deux bouts de la main, de peur de laisser
apparaitre leur nudité. » (Al Boukhari, Riqaq, 17).
Fadala ibn Ubayd t raconte à son tour :
« Lorsque le Prophète dirigeait la Salât, certains qui n’étaient autres que les gens
de la Suffa - tombaient à terre tellement ils avaient faim ; si bien que des bédouins
disaient : « Ces gens sont fous ! » Quand le Prophète clôturait la Salât, il venait à eux
et leur disait : « Si vous saviez la récompense que Dieu vous réserve, vous souhaiteriez
être encore plus pauvres et plus nécessiteux. » (At Tirmidhi Zuhd, 39/2368).
Abdurrahman ibn Abi Bakr As-Siddiq t raconte l’évènement suivant :
« Les gens de la Suffa étaient des gens pauvres.
Le Prophète r dit un jour :
« Que celui qui a de la nourriture pour deux invite une troisième personne ; s’il en
a pour quatre, qu’il invite une cinquième ou sixième personne. »
Abû Bakr t emmena chez lui trois personnes, et le Prophète r emmena dix
d’entre eux dans sa maison bénie et les servit.
117 Suffa désigne le porche (auvent) d’une partie des vieilles maisons dans lequel sont ajoutées des ban-
quettes en guise de sièges. Sofa en langue turque est dérivé de ce terme.
376 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abû Bakr t partit dîner chez le Prophète r et y resta jusqu’à la salât du soir et
rentrant chez lui à une heure tardive et sa femme lui demanda :
« Qu’est-ce qui t’a retenu loin de tes hôtes ? »
Il lui demanda : « Ne leur as-tu donc pas servi le dîner ? »
« Ils ont refusé de toucher au dîner sans toi ! On leur a pourtant présenté la
nourriture, mais ils ont refusé. »
Abdurrahman Ibn Abi Bakr As-Siddiq t, ajoute :
« Je partis me cacher tandis que mon père pestait contre moi : Qu’il est stupide !
Puisse-t-il se casser un membre ! »
Puis il t dit à ses hôtes : « Mangez de bonne grâce ! Quant à moi, par Dieu, je
fais le serment de ne pas toucher à ce repas ! »
Abdurrahman t poursuivit : « Par Dieu chaque fois que les hôtes prenaient une
bouchée dans le plat la nourriture ne cessait d’augmenter là où elle avait été prise.
Quand tous furent rassasiés, la nourriture fut plus abondante qu’au début du repas.»
S’apercevant de cela, Abû Bakr t dit à son épouse :
« Ô fille des Banû Firas, qu’est-ce que cela signifie ? »
Elle s’exclama : « Rien si ce n’est que ce plat est trois fois plus abondant qu’il ne
l’était au début du repas. »
Abû Bakr t goûta au plat et dit : « Le Diable était la cause de mon serment. »
Il en mangea encore une bouchée puis il porta le plat chez le Prophète r. » (Al
Boukhari, Mawaqit, 41 ; Manaqib, 25 ; Adab, 87-88 ; Muslim, Ashriba, 176-177).

Voilà l’exemple concret de l’abondance qui découle d’un cœur sincère et généreux.
Les gens de la Suffa travaillaient quand ils trouvaient du travail et le reste du temps
ils s’occupaient dans la mosquée sur la voie de la connaissance et du culte de l’adoration.
En effet, tous ceux qui parmi eux avaient assez de force et de vigueur faisaient toute
sorte de travaux qu’ils pouvaient tel que transporter sur leur dos des seaux d’eau ou du
bois, et avec ce qu’ils gagnaient ils subvenaient aux besoins de leurs amis. (Al Boukhari,
Maghazi 28, Jihad 9; Ibn Sa’d, III, 514).

Circonspects quant à la préservation de leur dignité, ils s’abstenaient de tout com-


portement susceptible de jeter une ombre sur leur caractère et ainsi ils s’abstenaient de
demander quoi que ce soit à autrui.
Les gens de la Suffa étaient les plus proches compagnons de la source de la Reli-
gion car ils étaient les plus assidus aux assemblées du Noble Prophète r. Ils furent de
ce fait les mieux instruits et formés en matière religieuse.
Première Année de L’hégire 377

Sous l’égide du Noble Prophète r, leurs enseignants ne furent pas d’autre que
de fameux Compagnons comme Ubayy ibn Ka’b, Abdullah ibn Mas’ud, Muadh ibn
Jabal et ‘Ubada ibn Samit y.
Les Compagnons de la Suffa furent soumis à une formation avancée et accé-
lérée, comme en témoigne le fait que l’ensemble des mukthirun, Compagnons qui
connaissaient le plus grand nombre de ahadith, était originaire de la Suffa. Abou
Hourayra t le plus connu d’entre eux a relaté ces paroles :
« Les gens sont étonnés par le fait qu’Abou Hourayra t relate beaucoup de aha-
dith. Mais tandis que nos frères muhajirun étaient occupés à faire du commerce dans
le bazar et que nos frères ansar étaient occupés à labourer leurs terres, Abou Hou-
rayra t était quant à lui auprès du Messager d’Allah, témoin de beaucoup de choses
auxquelles ils ne pouvaient pas assister et qu’ils ne pouvaient pas apprendre. » (Al
Boukhari, Ilm, 42).

Les délégations tribales qui visitaient temporairement Médine pour apprendre


l’Islam rencontraient le Prophète de Miséricorde r et apprenaient des Compagnons
de la Suffa t ce qu’elles ignoraient. Chaque fois que les tribus qui avaient embrassé
l’Islam avaient besoin d’un enseignant, celui-ci était presque toujours choisi parmi
ceux de la Suffa. Sages et vertueux, les Ashab al-Suffa viennent juste après les Khu-
lafa’ur-Rashidin, (Califes Pieux), les Asharat’ul-Mubashshara, (les dix Compagnons
promis au Paradis de leur vivant), et les Ashab’ul-Badr, les Compagnons y qui
prirent les armes lors de la Bataille de Badr.
Le Tout-Puissant déclare :

Ó Öƃ óĄ ĪijđĻĉƈ ÝùĺźųÒ ƈ ģĻƈ×øĹĘ ƈ ÒŽ IJóāèƈ ƇÈīĺñƈ Ĥƪ ÒÅÒóĝƆ ęƇ ĥŽ Ĥƈ


Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ ŽƆ Ɔ Ʃ ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
ĩĻùƈƈ ÖħıƇ ĘƇ ƈóđŽ ÜƆ ėƈ ęƫ đƆ ÝĤÒ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
ħİÓ
ŽƇ Ɔ ƪ īƆ ĨÅÓĻƆ ĭĔŽ ƆÈģƇ İÓåƆ ĤŽ ÒħƇ ıƇ ×Ƈ ùƆ éŽ ĺƆ ĂòŽ ƆŶÒĹĘ
ħĻĥƈ Đ įƈƈ ÖųÒĪƈÍĘ ƅóĻìīĨ ƈ Òijĝęĭƈ ÜÓĨIJÓĘÓéĤÌƈ öÓĭĤÒĪijĤƆÉùĺź
Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ Ɔ Ž Ɔ Ž Ž Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ ƃ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ
« Aux nécessiteux qui se sont confinés dans le sentier d’Allah, ne pouvant
parcourir le monde, et que l’ignorant croit riches parce qu’ils ont honte de men-
dier - tu les reconnaîtras à leur aspects - Ils n’importunent personne en mendiant.
Et tout ce que vous dépensez de vos biens, Allah le sait parfaitement. » (Al-Baqara,
2/273).

Khabbab t relate :
« Aqra ibn Habis et Uyayna ibn Hisn, deux idolâtres tristement célèbres pour
leur vanité, vinrent une fois auprès du Messager d’Allah r alors qu’il était assis avec
des Musulmans pauvres et solitaires tels que Bilal, Suhayb, Ammar et moi-même. »
378 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Nous regardant avec dédain, ils dirent d’un ton méprisant au Messager d’Al-
lah r :
« Nous voulons que tu nous réserves un endroit pour que les autres Arabes com-
prennent que nous leur sommes supérieurs. Tu sais bien que nombre de délégations
tribales viennent partout d’Arabie pour nous rendre visite. Nous serions gênés si elles
nous voyaient en compagnie de ces esclaves. Renvoie-les donc quand nous sommes
là mais tu peux, si tu le veux, t’asseoir avec eux quand nous ne sommes pas là. »
Alors le Messager d’Allah r dit :
« Très bien ».
Ils lui rétorquèrent :
« Nous ne pouvons pas prendre cela comme réponse retranscrit pour nous cet
accord par écrit. »
Alors le Messager d’Allah r pria ‘Alî t d’aller chercher une feuille pour enre-
gistrer l’accord. Nous étions toujours assis dans un coin. C’est alors que Gabriel u
apparut, porteur de cette révélation (coranique) :

ĪIJƆ ïĺƇ ƈóƇĺĹžƈ ýƈ đƆ ĤŽ ÒIJ ƈ


Ɔ ØÒïƆ ĕƆ ĤŽ ÓƈÖħıƇ Öƪ ò
Ɔ ĪijƆ ĐƇ ïŽ ĺƆ īĺ ƈ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒîóƇ ĉŽ ÜƆ ƆźIJƆ
ħ ƈıĻĥƆ Đ ğƈÖÓùè ƈ īĨÓ ƈ ĨÅƅ ĹüīĨħ ƈ ƈıƈÖÓùè ƈ ƈ
Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ž Ɔ īŽ ĨğƆ ĻŽ ĥƆ ĐÓ Ɔ Ĩ Ɔ įƇ ıƆ äŽ IJƆ
ijƆ ĭĻƆ ĩƈ ĤÓƈ ƪčĤÒīƆ Ĩ
ƈ Īij Ɔ ġƇ ÝƆ ĘƆ ħŽ İƇ îƆ óƇ ĉŽ ÝƆ ĘƆ Åƅ ĹŽ üī
Ɔ Ĩžƈ
« Et ne repousse pas ceux qui, matin et soir, implorent leur Seigneur, cher-
chant Sa Face «Wajh». Leur demander compte ne t’incombe en rien, et te deman-
der compte ne leur incombe en rien. En les repoussant donc, tu serais du nombre
des injustes. » » (Al-An’âm, 6/52).

ƇųÒ
Ʃ īƪ ĨÅź Ɔ ƈ ƅ ƈ
Ɔ ËÃƇ İƆ ÈÒŽ ijĤijĝƇ ĻƆ žĤăđŽ ×ƈƆ ÖħıƇ ąƆ đŽ ÖÓ
Ɔ ĭƪ ÝƆ ĘƆ ğƆ ĤñƆ ĠƆ IJƆ
īĺ ƈ ƪ ÖħĥƆ ĐƆÉÖƈ ųÒ
Ɔ ƈóĠÓýĤÓƈ ÷ĻĤƆÈÓĭĭƈ ĻÖīĨħ ƈ ƈıĻĥĐ
Ɔ Ž ƇƩ Ɔ ŽƆ Ɔ ŽƆ ž ŽƆ Ɔ
Ainsi, éprouvons-Nous (les gens) les uns par les autres, pour qu’ils disent :
«Est-ce là ceux qu’Allah a favorisés parmi nous ?» N’est-ce pas Allah qui sait le
mieux lesquels sont reconnaissants ? » (Al-An’âm, 6/53).

ħġƇ ĻĥƆ Đ ĦŻøģĝĘÓĭÜÓƈ ĺÇƈÖĪijĭĨƈ Ëĺīĺñƈ ĤÒĞÅÓäÒðÌƈ IJ


Ž Ž Ɔ ƄƆ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ ŽƇ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
ÙƆ ĩƆ èŽ óĤÒįƈ ùƈ ęŽ ĬƆ ĵĥƆ Đ
Ɔ ħŽ ġƇ Öƫ ò
Ɔ ÕƆ ÝƆ ĠƆ
ƪ
Première Année de L’hégire 379

« Et lorsque viennent vers toi ceux qui croient à nos versets (le Coran), dis:
«Que la paix soit sur vous ! Votre Seigneur S’est prescrit à Lui-même la misé-
ricorde. Et quiconque d’entre vous a fait un mal par ignorance, et ensuite s’est
repenti et s’est réformé... Il est, alors, Pardonneur et Miséricordieux». » (Al-An’âm,
6/54).

Sur ce, le Messager d’Allah r apposa donc l’accord puis nous appela à venir le
rejoindre près de lui. Une fois à ses côtés, nous l’entendîmes dire :
« Que la paix soit sur vous ; votre Seigneur S’est prescrit à Lui-même la miséri-
corde… »
Nous étions assis si près de lui que nos genoux reposaient sur les siens. Après la
révélation, nous continuâmes à demeurer assis près du Messager d’Allah r comme
avant et cela toutes les fois qu’il le souhaitait.
Mais il cessa d’agir ainsi après que la révélation (coranique) suivante vienne:

ĪIJ Ƈ ƈóƇĺĹžƈ ýƈ đƆ ĤŽ ÒIJ


Ɔ ïĺ ƈ
Ɔ ØÒïƆ ĕƆ ĤŽ ÓƈÖħıƇ Öƪ ò
Ɔ Īij Ɔ ĐƇ ïŽ ĺƆ īĺ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒďƆ ĨƆ ğƆ ùƆ ęŽ ĬƆ óƈŽ ×ĀÒ
Ž IJƆ
ÓĻĬŽ ïĤÒ ØÓƈ ĻéƆ ĤŽ ÒÙƆ ĭĺƆ ƈôïĺ
Ƈ ƈóÜƇ ħŽ ıƇ ĭŽ Đ
Ɔ ĞƆ ÓĭƆ ĻŽ Đ
Ɔ ïƇ đŽ ÜƆ źƆ IJ
Ɔ įƇ ıƆ äŽ IJƆ
Ɔ ƫ Ɔ
« Fais preuve de patience [en restant] avec ceux qui invoquent leur Seigneur
matin et soir, désirant Sa Face… » (Al-Kahf, 18/28).
Nous aussi agîmes ainsi. Après avoir passé beaucoup de temps en sa présence
et nous être assis près de lui nous fîmes preuve de discrétion à son égard pour qu’en
nous séparant de lui il r soit à l’aise. » (Ibn Maja, Zuhd, 7; Tabarî, Tafsir, VII, 262-263).
Après avoir reçu cette révélation coranique, le Noble Prophète r se leva et partit
à la recherche de ces croyants défavorisés. Il les trouva bientôt au fond de la Masjid
en train de s’adonner aux actes d’adoration. Les regardant intensément, il déclara :
« Louange à Allah qui m’a ordonné de demeurer au milieu de ces gens de ma
oumma ! Dorénavant ma vie et ma mort seront aussi vôtres. » (Wahidi, p. 306).
Abû Sa’id raconte :
« J’étais assis avec des Muhajirun défavorisés et indigents. Certains étaient dé-
pourvus de tout vêtement approprié pour se couvrir le corps, et s’étaient réfugiés
à l’ombre des autres pour se protéger. Quelqu’un nous récitait le Coran lorsque le
Messager d’Allah r apparut soudainement et se tint là, debout. L’homme qui récitait
le Coran interrompit sa récitation. Le Noble Prophète r nous salua et demanda :
— Que faites-vous ?
— Celui-ci est notre maître-enseigneur, répondîmes-nous, il nous lit le Coran
et nous prêtons l’oreille au Livre d’Allah.
380 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

— Merci à Allah qui a suscité, parmi ma oumma, des gens avec lesquels je puisse
faire preuve de patience118! s’exclama alors le Prophète d’Allah r.
Puis avec une suprême modestie le Messager d’Allah r s’assit avec nous et d’un
geste du doigt dit : « Formez un cercle comme ça.»
Nous formâmes alors un cercle autour du Messager d’Allah r.
Et il nous fit part de cette bonne nouvelle :
«Bonne nouvelle qui vous est destinée, ô gens infortunés parmi les Muhajirun…
Je vous apporte la bonne nouvelle d’une pleine lumière dans la Vie future. Vous entre-
rez au Paradis avant le riche… une demi-journée équivalente à la somme de cinq cents
années sur Terre ! « » (Abou Daoud, Ilm, 13/3666).

Le mariage du Saint Prophète r avec Aïcha c


Le mariage entre le Noble Prophète r et Aïcha c fut formellement contracté
avant l’Hégire à La Mecque et fut finalisé à Médine. Aïcha c raconte cet évènement :
« Quand le Messager d’Allah, émigra à Médine, il me laissa avec ses filles à La
Mecque. Plus tard, il envoya Zayd ibn Haritha et Abû Rafî y à La Mecque en leur
donnant deux chameaux et 500 dirhams pour couvrir leurs frais de voyage. Mon
père Abû Bakr t envoya ‘avec eux Abdullah ibn Urayqît t, deux ou trois chameaux
complémentaires et un message disant à mon frère ‘Abdullah t de faire en sorte que
ces chameaux soient apprêtés pour que ma mère Oumm Ruman, ma sœur Asma
et moi pussions nous rendre à Médine. Abû Rafî t apprêta donc les chameaux
pour Fâtima, Oumm Kulthum et Sawda bint Zama V, Zayd t agit de même pour
Oumm Ayman c et son fils Oussama. Puis nous nous mîmes en route119. Quand
nous atteignîmes Bayz près de Mina, notre chameau s’échappa avec ma mère et moi
qui étions à califourchon sur notre hawdaj120. Ma mère terrifiée s’exclamait: « pitié
pour ma fille ». Mais quelques instants plus tard, grâce à une intervention divine,
notre chameau se calma et nous pûmes rejoindre sains et saufs le reste du groupe à
Médine. Bien que mariée je restai avec ma famille. À cette date, la Masjid an-Nabî et
les différentes pièces attenantes avaient déjà été bâties et le Messager d’Allah r avait
emménagé dans son propre logis, comme l’avait fait sa famille.
Après un certain temps, mon père demanda au Messager d’Allah r :
— Qu’est-ce qui empêche la pleine concrétisation du mariage ?
118. Ces paroles du Noble Prophète r font allusion au 28ème verset de la sourate Al-kahf. Le Tout-Puissant
commande au Prophète r de faire preuve de patience en restant auprès des pauvres défavorisés et
d’être sensible aux difficultés qu’ils pouvaient rencontrer.
119. Zaynab c dut rester à La Mecque un peu plus de temps car son mari ‘Abdu’l As ibn Rabî ne l’avait
pas autorisé à partir.
120. hawdaj: petite selle conçue pour les dames à des fins protectrices.
Première Année de L’hégire 381

— La dot (al-mahr), lui répondit-il.


Mon père lui donna 12,5 uqiyya121 et le Messager d’Allah r finalisa notre union
au mois de shawwal. (Ibn Sa’d, VIII, 58, 62-63).
Pour les noces Aucun chameau ou mouton ne fut sacrifié. Seul Sa’d ibn ‘Ubada122
fit parvenir de la nourriture au moyen d’un grand plat.(Ahmad, VI, 211).

La situation à Médine
L’Ère médinoise, lorsque l’Islam et les Musulmans régnaient en souverains, fut
une époque animée et vigoureuse, regorgeant d’activités propices au sein desquelles
les principes universels de l’Islam trouvèrent un extraordinaire point d’appui et le
sang versé tout au long des batailles ne servit qu’à en renforcer d’autres. La situation
à Médine n’était pas simple en dépit du bon accueil que la ville avait prodigué aux
nouveaux arrivants. En effet, quelques dangers subsistaient, aggravés principalement
par les hypocrites et les Juifs qui, en raisonde leur attitude dissidente envers la mon-
tée de l’Islam, cherchèrent sans relâche à semer les graines de l’inimitié.
La caractéristique dominante des hypocrites était leur persistance à demeurer
dans leurs vieilles croyances idolâtres, en dépit du fait d’avoir accepté l’Islam en sur-
face. Allah, Gloire à Lui, qui verra briller Sa lumière (à travers l’Islam), lança dans
l’intervalle contre ces derniers l’avertissement suivant :

ƈ ĥƆ ĐÒŽ IJîóĨÙƈ ĭĺƆ ïƈ ĩĤŽ Òģƈ İŽ ƆÈīĨƈ IJĪij


ƈ ęƆ žĭĤÒĵ ƈ ÔÒ ƈ ƈ
ƆźĚÓ Ɔ Ƈ ƆƆ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ĝƇ ĘÓĭƆ Ĩ Ƈ ƈ óƆ ĐŽ ƆŶÒīƆ Ĩħ ž ġƇ ĤƆ ijŽ è Ɔ īŽ ĩƪ ĨIJƆ
ƅ čƈ Đ
ħĻ Ɔ ÔÒ Ɔ ĤƆ Ìƈ ĪIJ
ƅ ñƆ Đĵ Ɔ îƫ óƆ Ƈĺħƪ Ƈàīƈ ĻŽ ÜƆ óƪ Ĩħ ƈ
ƪ ıƇ ÖƇ ñž đƆ Ƈĭø
Ɔ ħŽ ıƇ ĩƇ ĥƆ đŽ ĬƆ īƇ éŽ ĬƆ ħŽ ıƇ ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ
« Et parmi les Bédouins qui vous entourent, il y a des hypocrites, tout comme
une partie des habitants de Médine. Ils s’obstinent dans l’hypocrisie. Tu ne les
connais pas mais Nous les connaissons. Nous les châtierons deux fois puis ils se-
ront ramenés vers un énorme châtiment. » (At-Tawba 9/101).
121. L’uqiyya, monnaie autrefois utilisée est constituée en pièces en argent. Aussi utilisée comme unité de
poids, une uqiyya pèse à peu près à 128 grammes.
122. Sa’d ibn ‘Ubada t devint musulman lors du Second Serment d’Aqaba. Il fut un des douze
représentants élus. Prodiguant sa fortune avec une étonnante générosité, il envoyait quotidiennement
des repas au Noble prophète r qui séjournait chez Khalid ibn Zayd t depuis sept mois. Bien plus, il
nourrissait chaque jour la Suffa et porta l’étendard de Khazraj durant maintes batailles. Durant la celle
de Dhu Qarad, il fit don à l’armée musulmane de dix chameaux chargés de dattes. Satisfait, le Noble
Prophète r invoqua ainsi Allah en sa faveur : « Ô Allah, fais miséricorde à Sa’d et à toute sa famille ! ».
Il nourrit l’armée musulmane durant la campagne de Banû Qurayza. Sa vie et sa fortune furent sans
nul doute des moyens extraordinaires pour mener la lutte dans la voie d’Allah, et ce jusqu’à son décès.
Comme sa demeure était située à l’extérieur de Médine et donc éloignée de la Masjid, Sa’d se fit bâtir
une petite mosquée qu’il utilisait à des fins personnelles. Après l’élection d’Abû Bakr t comme Calife,
il partit vivre à Hawran près de Damas où il mourut en 635. Il est enterré dans la petite ville de Ghuta.
382 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les hypocrites étaient si habiles dans leur tromperie que même le Noble pro-
phète r ne s’en était pas aperçu ; seule la Révélation divine pouvait mettre en lumière
leurs artifices. Les hypocrites craignaient de se livrer à tout comportement suscep-
tible d’attirer la moindre désapprobation, aussi agissaient-ils toujours discrètement.
Les idolâtres mecquois qui avaient forcé les Musulmans à émigrer continuèrent
d’attirer les flammes de la malveillance qui avaient été déclenchées par les hypocrites
de Médine. Correspondant régulièrement avec ces derniers et effrayés par l’idée que
l’Islam puisse prospérer, les Mecquois, dans le but de les extirper de la surface de Mé-
dine, incitèrent leurs camarades d’armes à lever leurs épées contre les Musulmans.
Ces provocations se firent sur un ton menaçant : S’il s’avérait que les Médinois
répugnaient à s’occuper des Musulmans, les idolâtres mecquois leurs assureraient
leur venue, soutenus pour cela par toutes les tribus de la péninsule, et feraient le
travail eux-mêmes, avec le détail près qu’ils étaient prêts à passer au fil de l’épée,
sans discernement préalable, l’ensemble de la population de Médine, Musulmans ou
non. Pour montrer qu’ils étaient à la hauteur, les idolâtres missionnèrent une bande
de malfaiteurs qui se mirent à piller tout leur stock (provenant des cultures) dans la
périphérie de Médine.
La situation était devenue délicate et le danger était visible à l’horizon. Les
Croyants commencèrent à surveiller les rues de Médine la nuit, prenant toute me-
sure préventive contre un possible raid. Même le Noble Prophète r était parvenu
au bout de ses nuits blanches. De petites forces armées furent envoyées à l’extérieur
de Médine pour garder un œil sur la ville en ne devant en aucun cas faire preuve de
cécité en cas d’attaque. D’autre part des tribus juives ennemies jurées des Croyants
étaient constamment à l’affût pour frapper. À cause de leur héritage religieux, ces
tribus étaient les plus acharnées en matière de lutte et causaient beaucoup de diffi-
cultés. La première sourate révélée à Médine, al-Baqara, est une invite explicite faite
aux Juifs à embrasser l’Islam. Suite à l’invitation adressée à l’ensemble de l’humanité,
cette sourate mentionne les « Enfants d’Israël » entre les versets 40 et 162, intensifiant
sa référence, particulièrement au verset 129, mais en réalité presque la moitié de la
sourate leur est réservée. Les expressions divines qui y sont mentionnées s’adressent
directement aux Juifs à la troisième personne ; et en vue de réfuter leurs revendica-
tions en leur rappelant les bénédictions dont ils avaient fait l’objet, elles cherchent à
raviver la lumière de la foi dans leurs cœurs.(Voir, Draz, an-Nabau’l-Azîm, p. 178).

Le poète juif Ka’b ibn Ashraf, qui avait pris l’habitude de persifler le Noble Pro-
phète r, pour stimuler les Mecquois contre lui et influencer les poètes de Quraysh
qui n’allaient pas tarder à le suivre dans leurs satires.
Première Année de L’hégire 383

Hassan ibn Thabit t, qui était le plus grand poète ansar, demanda alors au
Noble Prophète r la permission d’exercer des représailles. Sa permission lui fut ac-
cordée. (Al Boukhari, Manâqib, 16 ; Muslim, Fadailu’s-Sahaba, 156-157).
La poésie, en ce temps-là, avait la même importance que les médias ont au-
jourd’hui. Le Noble Messager r avait placé une chaire à l’intérieur de la Masjid,
spécialement conçue pour Hassan ibn Thabit t, afin qu’il y exprime ses satires poé-
tiques en réaction aux vers malveillants clamés à l’encontre du Messager d’Allah r.
Le Noble Prophète r disait de lui : « Tant qu’il défend le Messager d’Allah, le
Noble-Esprit sera avec Hassan. » (Abou Daoud, Adab, 87/5015).
Devant la persistance des Juifs et des idolâtres à vouloir infliger des tourments
au Noble Prophète r et aux Croyants, le Tout-Puissant exhortait Son Bien-Aimé à
la patience et au pardon. La veille de la Bataille de Badr, le Noble Prophète r, à dos
d’âne avec Oussama ibn Zayd t derrière lui, avait décidé d’aller rendre visite à Sa’d
ibn ‘Ubâda t qui était malade. En chemin, il croisa un groupe d’hommes assis en as-
semblée et parmi lequel se trouvait ‘Abdullah ibn Ubbay ibn Salûl t qui n’avait pas
encore (certainement par peur) manifesté « publiquement » son adhésion à l’Islam,
et s’était contenté de proclamer ouvertement son incrédulité. Quelques Croyants
comme ‘Abdullah Ibn Rawâha t, et quelques Juifs et idolâtres (hypocrites) étaient
assis là. L’âne sur lequel était monté le Prophète de Miséricorde r remua un peu de
poussière en passant devant le groupe. Ayant couvert son nez avec la pointe de sa
chemise ‘Abdullah ibn Ubbay rétorqua : « Cesse de nous envoyer de la poussière ! »
Le Noble Prophète r descendit de monture, salua l’assemblée et, récitant
quelques versets du Coran, les invita à croire en Allah, Gloire à Lui. Abdullah ibn
Ubbay rétorqua une nouvelle fois :
« Pourquoi nous dis-tu cela ? Si ce que tu dis est vrai laisse-nous tranquilles…
rentre chez toi et raconte-les à ceux qui prennent la peine de venir t’écouter ! »
« Bien au contraire, intervint ‘Abdullah ibn Rawâha t, visite nos assemblées,
ô Messager d’Allah, car nous prenons beaucoup de plaisir à entendre tes paroles ! »
Cet évènement fut suivi d’une âpre discussion entre Musulmans, idolâtres et
même Juifs qui furent prêts de s’empoigner la gorge lorsque le Noble Prophète r
réussit à calmer tout le monde. Une fois les choses redevenues normales, le Noble
Prophète r remonta en selle et continua son chemin jusqu’à la demeure de Sa’d ibn
‘Ubada t à qui il raconta l’aventure qu’il venait de vivre. Ibn ‘Ubada en guise de
consolation dit :
« Pardonne-leur, ô Messager d’Allah, ne fais pas cas de leur rudesse je t’assure
par Celui qui t’a envoyé avec le Livre que peu de temps avant que tu ne reçoives
le don de prophétie, ces gens étaient prêts à proclamer chef cet Ibn ‘Ubayy et à le
couronner comme on couronne les rois. Mais quand Allah t’a envoyé à nous avec
384 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

la Vraie Religion, son rêve de devenir roi a été brisé et cette réalité l’avait laissé dans
une grande détresse… on aurait dit qu’il ne pouvait plus respirer. Sa rancune doit
probablement provenir de là. »
Après ces explications le Noble prophète r pardonna à ‘Abdullah ibn Ubba les
énormités dont il se targuait.
Le verset coranique suivant (ayah) fut révélé en relation avec cet évènement :

ħġƇ ĥƈ ×ĜƆ īĨ


ƈ ÔÓÝġƈ ĤŽ ÒÒŽ ijÜIJ
Ɔ Ɔ Ƈ ƇÈīĺ ƈ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒīƆ Ĩīƪ đƇ ĩƆ ùŽ ÝƆ ĤƆ IJ
ƈ Ɔ ħġƇ ĤÒƈ ijĨƆÈĹĘ
Ɔ ħŽ ġƇ ùęƇ ĬÈIJ
Ɔ Ž ƆŽ
ƈ Īƪ ijĥƆ ×ÝĤƆ
Ƈ ŽƇ
Ž Ž
òijĨƇ ƇŶÒĦƈ õŽ Đ ƈ ƈ
Ɔ īŽ ĨğƆ ĤðƆ Īƈƪ ÍĘƆ ÒŽ ijĝƇ Ýƪ ÜƆ IJ
Ɔ ÒŽ IJóƈƇ ×āŽ ÜĪƈ
Ɔ ÌIJ ƈ Ɔ ðƃ ƆÈÒŽ ijĠƇ óüŽ ƆÈīĺñƈ Ĥƪ ÒīĨƈ IJ
Ɔ ƃÒóĻáĠĴ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« Comment Allah guiderait-Il des gens qui n’ont plus la foi après avoir cru et
témoigné que le Messager est véridique, et après que les preuves leur sont venues ?
Allah ne guide pas les gens injustes. » (Al-Imrân, 3/186).
Antérieurement à la révélation du verset relatif à la permission de prendre les
armes, le Noble Prophète r et les Compagnons étaient amenés à pardonner, comme
cela leur avait été commandé, les comportements véhéments et malveillants dont se
rendaient coupables les idolâtres et les Juifs. (Al Boukhari, Tafsîr, 3/15).

L’ordre divin : « Combattez ceux qui vous combattent ! »


Le Messager d’Allah r n’avait pas encore été autorisé à combattre les poly-
théistes. Il avait le devoir de les inviter à croire en l’unicité d’Allah, d’endurer les
tortures auxquelles il serait confronté, à être patient et à faire fi de leur comportement
inapproprié. Les polythéistes Quraysh encouragés par la situation allaient de torture
en torture à l’encontre de ceux qui suivaient le Prophète r pour les faire revenir à
leur religion. Certains Musulmans revinrent sur leur conversion à la suite de tortures
intolérables, d’autres quittèrent la patrie où ils étaient nés et avaient grandi pour émi-
grer en Abyssinie, et certains autres à Médine pour préserver leur foi.
Les évènements commençaient à prendre un tournant si dramatique qu’il était
quasi devenu impossible de maintenir la paix avec la politique « d’endurance et de
patience » qu’avait observé jusqu’à présent le Noble prophète r. Même l’autodéfense
ne pouvait pas arrêter les marées d’agonie, forçant davantage le Noble prophète r à
chercher refuge dans le Tout-Puissant en attendant la révélation divine libératrice.
Finalement, comme les idolâtres niaient toutes les bénédictions que le Tout-Puissant
leur avait conférées et rejetaient le Noble Messager d’Allah r, en un temps où ils
étaient une cause d’anxiété pour les Croyants même après que ceux-ci eussent émi-
gré, le donné coranique accordant aux Musulmans la permission de combattre fut
enfin révélé.
Première Année de L’hégire 385

Ce verset souligna fortement la nécessité de la légitime défense qui était à pré-


sent devenue une question urgente :

īĺ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ Ɔ ĥƇ ÜÓƆ ĝƆ ĺīĺ ƈ ƈ ƈƇ


Ɔ ñĤƪ ÒóĺƄ ïĝƆ ĤƆ ħŽ İ ƈóāŽ ĬƆ ĵĥƆ Đ Ɔ ųÒƆ Ʃ Īƈƪ ÌIJÒij
Ɔ ĩƇ ĥƇČħŽ ıƇ Ĭƪ ÉÖƈ Īij Ƈ Ɔ ñĥƪ ĤĪƆ ðÈ
öÓ ƈ Ʃ ďĘŽ îźƆ ijĤƆ IJųÒÓ Ɔ ƅ Ɔ ƈóĻĕƈƆ Öħİƈ ƈòÓĺîī ƈ ä ƈóìŽ ƇÈ
ƈ ĨÒij
Ɔ ĭĤÒ
ƪ ųÒ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ʃ ĭƆ Öƫ òÒij Ɔ ƇĤijĝƇ ĺĪ Ɔ Èźƈƪ Ìěž è Ž Ž Ɔ Ƈ
óĠƆ ñŽ ƇĺïƇ äÓƈ ùĨƆ IJ ƈ ƈ ƅ
Ƈ Ɔ Ɔ ÚÒ Ƅ ijƆ ĥƆ ĀƆ IJ Ɔ ďƄ ĻƈƆ ÖIJ
Ɔ ďƇ ĨÒijƆ ĀƆ ÛŽ ĨƆ ïž ıƇ Ĥƪ ăđŽ ×ƈƆ ÖħıƇ ąƆ đŽ ÖƆ
õĺƄ ƈõĐ ƈ Ʃ ħøÒÓıĻĘƈ
ƈ Ɔ ųÒ
Ɔ ĸƭ ƈijĝƆ ĤƆ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌĮƇ óƇ āĭƇ ĺīƆ Ĩ Ɔ ƇųÒ
Ʃ Īƪ óƆ āĭƇ ĻƆ ĤƆ IJ
Ɔ ƃÒóĻáĠ Ƈ Ž Ɔ
« Autorisation est donnée à ceux qui sont attaqués (de se défendre) - parce
que vraiment ils sont lésés ; et Allah est certes Capable de les secourir - ceux qui
ont été expulsés de leurs demeures, - contre toute justice, simplement parce qu’ils
disaient : «Allah est notre Seigneur». - Si Allah ne repoussait pas les gens les uns
par les autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les églises, les synagogues
et les mosquées où le nom d’Allah est beaucoup invoqué. Allah soutient, certes,
ceux qui soutiennent (Sa Religion). Allah est assurément Fort et Puissant. » (Al-
Hajj, 39-40).

īĺ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ ƈ
Ɔ ïÝƆ đŽ ĩƇ ĤŽ ÒÕžƈ éƇĺƆźųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌÒŽ IJïƇ ÝƆ đŽ ÜƆ ƆźIJ
Ɔ ħŽ ġƇ ĬƆ ijĥƇ ÜÓĝƆ Ƈĺīĺ
Ɔ ñĤƪ ÒųÒ ƈ ×øĹ
Ɔ ĘÒŽ ijĥƇ ÜÓĜƆ IJƆ
« Combattez dans le sentier d’Allah ceux qui vous combattent, et ne trans-
gressez pas. Certes. Allah n’aime pas les transgresseurs ! » (Al-Baqara 2/190).
Et pour appuyer les raisons légitimes ainsi que la finalité du combat, le Tout-
Puissant proclame :

ƈ Ʃ ƈ įĥƫ Ġ žƈ Īij ƈ Ɔ ġƇ ÜƆ ƆźĵÝèħİijĥƇ ÜÓƈ ĜƆ IJ


ųÒ Ɔ Īƈƈ ÍĘƆ ų
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÍĘƆ ÒŽ ijŽ ıƆ ÝĬÒ Ƈ Ƈ īĺ Ƈ ïĤÒ Ɔ ġƇ ĺƆ IJ
Ɔ ÙƄ ĭƆ ÝŽ ĘĪij ƪƆ ŽƇ Ɔ
« Et combattez-les jusqu’à ce qu’il ne subsiste plus d’association, et que la re-
ligion soit entièrement à Allah. Puis, s’ils cessent (ils seront pardonnés car) Allah
observe bien ce qu’ils œuvrent. » (Al-Anfal, 39).
La permission de combattre est consécutive à l’hostilité contre l’Islam et les
Musulmans.
Le Jihad est obligatoire pour sauvegarder et défendre contre les agressions les
darurat’ul-khamsa (les cinq impératifs) qui sont les valeurs vitales pour la survie
d’une société. Ces impératifs sont la protection de la propriété, de la vie humaine, de
la descendance humaine, de la raison et de la religion.
386 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le commandement divin manifeste le but de punir quiconque éloigne autrui de


la Vérité et fait entrave aux moyens d’assurer sa communication.
Ainsi Muhammad al Mustafa r, le pinacle de tous les prophètes L envoyé
comme miséricorde à toute l’humanité, prit part à toutes les grandes batailles bien
qu’il eût assez de compassion pour prendre l’humanité entière sous son ombre. Cela
pour établir la paix sociale et la stabilité et consolider la lutte en faveur du Tawhîd
(Unicité divine).
Le hadith stipulant : « Je suis un prophète de miséricorde et de combat », (Ahmad,
IV, 396), doit être compris dans le contexte qui vient d’être évoqué tout au long de ces
lignes.
D’autres versets coraniques exhortent le Noble Prophète r et les Croyants à agir
conformément à l’injonction divine suivante :

ƈƈ ƈ
īĻ
Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĨğƆ đƆ ×Ɔ ÜÒ
ƪ īƈ ĨƆ IJ
Ɔ ƇųÒ
Ʃ ğƆ ×Ƈ ùŽ è ƪ ıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ɔ Ĺƈƫ ×ĭĤÒÓ
ƈ ÝƆ ĝƈ ĤŽ ÒĵĥƆ Đ ƈƈ ƈ
ĢÓ Ɔ īĻ
Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĂóžƈ è ƪ ıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ɔ Ĺƈƫ ×ĭĤÒÓ
« Ô Prophète, Allah et ceux des croyants qui te suivent te suffisent. Ô Pro-
phète, incite les croyants au combat. S’il se trouve parmi vous vingt endurants, ils
vaincront deux cents ; et s’il s’en trouve cent, ils vaincront mille mécréants, car ce
sont vraiment des gens qui ne comprennent pas. » (Al-Anfal, 64-65).

Øƅ óĨ ĢƆ IJƆÈħĠIJÊïÖħİIJĢij ƈ øóĤÒâÒ


Ƈ ƪ ƈ óƆ ìƈŽ ÍÖƈ ÒŽ ijĩƫ İƆ IJ
Ɔ
Ɔ ħŽ ıƇ ĬƆ ÓĩƆ ĺŽ ÈÒŽ ijƇáġƆ ĬÓ Ɔ ĥƇ ÜÓƈ ĝƆ ÜƇ ƆźƆÈ
ƪ Ĩƃ ijŽ ĜƆ Īij
ƪƆ ƪ ŽƇ Ƈ ƆƆ Ƈ Ɔ
ħġĺ ïƈ ĺƆÉÖƈ ųÒħıÖñƈ đĺħİijĥÜÓƈ ĜīĻĭƈ Ĩƈ ËĨħÝĭĠĪƈÌĮƇ ijŽ ýƆ íŽ ÜĪ Ɔ ƆÈěƫ èƆ ƆÈƇųÓ Ʃ ĘƆ ħŽ ıƇ ĬƆ ijŽ ýƆ íŽ ÜƆ ƆÈ
Ž Ƈ Ž ƇƩ Ƈ Ƈ Žž Ɔ Ƈ Ž Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ ƫ Ƈ Ƈ
ħ ƈıƈÖijĥƇ ĜƇ ċƆ ĻŽ ĔƆ ÕŽ İƈ ñŽ ƇĺIJ ƈ ƈ Ħƅ ijĜƆ òIJïƇ Āėƈ ýŽ ĺIJħ ƈıĻĥƆ ĐħĠƇ óāĭĺIJħİƈ ƈõíŽ ĺIJ
Ž Ɔ īĻ
Ɔ ĭĨËŽ Ĩƫ Ž Ɔ Ƈ ƆƆ Ž Ž Ɔ Ž Ž Ƈ ƆƆ Ž ƇƆ
« Ne combattrez-vous pas des gens qui ont violé leurs serments, qui ont
voulu bannir le Messager et alors que ce sont eux qui vous ont attaqués les pre-
miers ? Les redoutiez-vous ? C’est Allah qui est plus digne de votre crainte si vous
êtes croyants ! Combattez-les. Allah, par vos mains, les châtiera, les couvrira
d’ignominie, vous donnera la victoire sur eux et guérira les poitrines d’un peuple
croyant. Et il fera partir la colère de leurs cœurs. Allah accueille le repentir de qui
Il veut. Allah est Omniscient et Sage. » (At-Tawba, 13-15).
En complément furent révélés divers versets mettant en garde toute réticence
en matière de jihad :
Première Année de L’hégire 387

ħġƇ Ĥƪ óĻì ijİIJÓÑĻüÒijİóġÜĪƆÈĵùƆ ĐƆ IJ


Ž ƄŽƆ ƆƇ Ɔ ƃŽ Ɔ Ž Ƈ ƆŽ Ɔ Ɔ ħŽ ġƇ Ĥƪ ĮƄ óŽ Ġ
Ƈ ijƆ İƇ IJ
Ɔ ĢÓ Ƈ ÝƆ ĝƈ ĤŽ ÒħƇ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ ƈ
Ɔ ÕƆ ÝĠƇ
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ ƆźħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ
Īij Ɔ ħƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ƇųÒ
Ʃ IJ
Ɔ ħŽ ġƇ Ĥƪ óƭ ü
Ɔ ijƆ İƇ IJÓ Ɔ ÒŽ ij×ƫ éƈ ÜĪ
Ɔ Ñƃ ĻŽ ü Ƈ ƆÈĵùƆ ĐƆ IJƆ
« Le combat vous a été prescrit alors qu’il vous est désagréable. Or, il se peut
que vous ayez de l’aversion pour une chose alors qu’elle vous est un bien. Et il se
peut que vous aimiez une chose alors qu’elle vous est mauvaise. C’est Allah qui
sait, alors que vous ne savez pas. » (Al-Baqara, 2/216).

Ɔ ƈ óĐŽ ƆŶÒīƆ Ĩħ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ĠÓ


ÒŽ ijęƇ ĥƪ íƆ ÝƆ ĺĪ
Ɔ ÈÔÒ Ɔ ž ıƇ ĤƆ ijŽ è Ɔ īŽ ĨƆ IJƆ ÙĭĺƆ ïĩƆ ĤŽ Òģƈ İŽ ƆŶĪÓ Ɔ ĨƆ
įƈ ùƈ ęŽ Ĭī ƈ ƈ Ʃ Ģij ƈ øòīĐƆ
ƪ ĐƆ ħŽ ƈıùęƇ ĬƆÉÖƈ ÒŽ ij×Ƈ ĔƆ óŽ ĺƆ ƆźIJ
Ɔ ųÒ Ƈ ƪ
« Il n’appartient pas aux habitants de Médine, ni aux Bédouins qui sont au-
tour d’eux, de traîner loin derrière le Messager d’Allah, ni de préférer leur propre
vie à la sienne. Car ils n’éprouveront ni soif, ni fatigue, ni faim dans le sentier
d’Allah, ils ne fouleront aucune terre en provoquant la colère des infidèles, et
n’obtiendront aucun avantage sur un ennemi, sans qu’il ne leur soit écrit pour
cela une bonne action. En vérité Allah ne laisse pas perdre la récompense des
bienfaiteurs. » (At-Tawba, 9/120).

ħġƇ ÜƇ óĻýƈ ĐƆ IJ Ɔ ħŽ ġƇ äÒ Ƈ IJƆ ôŽ ƆÈIJ


Ɔ ħŽ ġƇ ƇĬÒijƆ ìƈŽ ÌIJ
Ɔ ħŽ ĠƇ ÊÇ Ƈ ĭƆ ÖŽ ƆÈIJƆ ħŽ ĠƇ ÊÓ
Ƈ ÖÆ
Ɔ ĪÓ Ɔ ĠĪƈ Ɔ ÌģŽ ĜƇ
Ž Ɔ
ƈ ùĨIJÓİƆ îÓùĠ
Ó ıƆ ĬƆ ijŽ ĄƆ óÜƆ īƇ ĠÓ ƈ İij Ɔ
Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ĪƆ ijŽ ýƆ íŽ ÜƆ ØƄ òÓ Ɔ åƆ ÜIJÓ Ɔ Ɔ ĩƇ ÝƇ ĘŽ óƆ ÝƆ ĜŽ ÒĢÒƄ ijƆ ĨŽ ÈIJƆ
ƈƈ ƈ ƅ ƈ įƈ Ĥij ƈ øòIJųÒ ƈ ƈ Ɔ
ĵÝƪ è Ɔ ÒŽ ijāƇ Öƪ óƆ ÝƆ ĘƆ įĥĻƈ×øĹ
Ɔ ĘîÓıƆ äIJ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ īƆ Ĩħ ž ġƇ ĻŽ ĤƆ Ìƈ Õƪ èƆ È
īĻ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ Ʃ ĹÜƈ ÉŽ ĺ
Ɔ ĝøÓęƆ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĸïıŽ ĺƆ ƆźƇųÒ Ʃ IJ Ɔ Į ƈóĨŽ ÉÖƈ ƇųÒ Ɔ Ɔ
« Dis : «Si vos pères, vos enfants, vos frères, vos épouses, vos clans, les biens
que vous gagnez, le négoce dont vous craignez le déclin et les demeures qui vous
sont agréables, vous sont plus chers qu’Allah, Son messager et la lutte dans le sen-
tier d’Allah, alors attendez qu’Allah fasse venir Son ordre. Et Allah ne guide pas
les gens pervers». » (At-Tawba, 9/24).
Conformément à ces injonctions divines et suivant l’exemple du Noble Pro-
phète r, les Croyants commencèrent alors à se préparer sérieusement en vue de
lutter contre les idolâtres.
388 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le jihad dans le sentier d’Allah U


Le jihad, au sens général du terme c’est s’engager dans une lutte pour affiner
et purifier son ego, accomplir les commandements du Tout-Puissant avec la plus
grande sincérité et s’abstenir de tout interdit. (An Nasaï, Hajj, 4).
C’est aussi pour enjoindre ses frères musulmans à pratiquer le bien et à espérer
le mieux, d’expliquer les principes de l’Islam aux non-musulmans dans l’expectative
de leur guidance et de leur salut. (Ahmad, III, 456).
C’est enfin utiliser tous les moyens à sa disposition, même sa propre vie, pour
protéger la religion et tout ce qu’elle contient de sacré, et éliminer toutes les barrières
qui empêchent la communication de la Vérité, à travers une lutte de toute nature,
incluant, mais pas seulement, la lutte armée. (Voir les versets associés dans An-Nisa, 95 ; Al-
Anfal, 72 ; At-Tawba, 20, 41, 44, 81, 88 et les ahadih associés : Al Boukharî, Mazalim, 33 ; Muslim, Iman,
226 ; Abou Daoud, Sunnah, 28-29).

Le terme jihad est par conséquent très extensible parce qu’il comprend toutes
les luttes et actions individuelles et sociales qui visent à purifier chaque « ego » et à
instituer un mode de vie islamique qui ambitionne la seule satisfaction d’Allah à tra-
vers la façon de glorifier Sa religion. À cet égard ce ne serait pas n’exagéré d’affirmer
que les vingt-trois années de l’Apostolat prophétique de Muhammad r furent un
engagement exclusivement orienté vers cet objectif.
Le Tout-Puissant a fait en sorte que la vie et les biens d’ici-bas soient autant
d’épreuves impliquant à cet effet la responsabilité de les utiliser à bon escient, c’est-
à-dire dans le sentier d’Allah, comme cela est stipulé dans les versets coraniques
suivants :

ħ ƈıùƈ ęƇ ĬƆÈIJ ƈ Ɔ
Ɔ ħŽ ƈıĤÒijƆ ĨŽ ÉÖƈ ÒŽ IJïƇ İÓ
Ɔ ä Ɔ įƇ đƆ Ĩ
Ɔ ÒŽ ijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
ƈ Ģij
Ɔ ñĤƪ ÒIJ Ɔ Ƈ øƇ óĤÒ
ƈ ĤƆ
īƈ ġÃ
Ž ƪ
Ɔ éƇ ĥƈ ęŽ ĩƇ ĤŽ ÒħƇ İ
Īij Ƈ ğƆ ÑÃƈ ĤƆ IJŽ ƇÈIJ
Ɔ ÚÒƇ óƆ ĻŽ íƆ ĤŽ ÒħƇ ıƇ ĤƆ ğƆ ÑÃƈ ĤƆ IJŽ ƇÈIJƆ
« Mais le Messager et ceux qui ont cru avec lui ont lutté avec leurs biens et
leurs personnes. Ceux-là auront les bonnes choses et ce sont eux qui réussiront. »
(At-Tawba, 9/88).

ÔÒ
ƅ ñƆ Đ Ɔ īŽ Ĩħ
ƈ Ƈ åĭ
ž ġĻ ƈ ÜƇ Øƅ òÓ ƈ
Ɔ ħŽ ġƫƇ ĤîƇ ƆÈģŽ İÒij
Ɔ åƆ ÜĵĥƆ Đ Ɔ ƇĭĨƆƆ Æīĺ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ƈ Ʃ ģĻƈ
ħġƇ ĤÒƈ ijƆ ĨŽ ƆÉÖƈ ųÒ ƈ Ɔ ïƇ İÓ
ƈ åÜƇ IJįƈ Ĥij ƈ øòIJųÓƈ ƈ Ɔ ĭĨƈ ËÜƇ ħĻ
Ž ƈ ×øĹ Ɔ ĘĪIJ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ ÖĪij Ƈ Ž ƅ Ĥƈ ƆÈ
Īij
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ ħŽ ÝĭƇ ĠĪƈ Ɔ ħŽ ġƇ Ĥƈ ðƆ ħŽ ġƇ ùƈ ęƇ ĬƆÈIJƆ
Ƈ ÌħŽ ġƇ Ĥƪ óƄ ĻŽ ì
Première Année de L’hégire 389

« Ô vous qui avez cru ! Vous indiquerai-je un commerce qui vous sauvera
d’un châtiment douloureux ? Vous croyez en Allah et en Son messager et vous
combattez avec vos biens et vos personnes dans le chemin d’Allah, et cela vous est
bien meilleur, si vous saviez ! » (As-Saff, 10-11).
Les Compagnons demandèrent au Noble Prophète r quel était le meilleur des
humains.
« Le meilleur des humains, répondit-il, est un croyant combattant pour la Cause
d’Allah, y allant de sa personne et de ses biens. » (Al Boukhari, Jihad, Muslim, Imarat, 122).
Mais en fait accomplir ou effectuer le jihad dans le sentier d’Allah, tel que le
Coran et la Sunna le préconise n’implique pas, bien au contraire, d’entreprendre la
lutte armée, car prendre les armes est le dernier recours quand surgit une menace
urgente ou immédiate, comme par exemple lutter contre l’oppression afin d’établir
la justice. Le jihad suprême est ce qui vise à conquérir les cœurs en utilisant toutes
sortes de moyens, notamment l’écrit et la parole, pour faire connaître la Vérité.
Durant la période mecquoise pendant laquelle furent révélés de nombreux ver-
sets relatifs au jihad, les Musulmans n’avaient pas encore acquis assez de puissance
pour entreprendre une lutte armée. Afin de se conformer à l’ordre d’Allah face au
visage de la terreur incarné par le « peuple de l’ignorance », les Musulmans revêtirent
simplement les caractéristiques du vrai croyant, au nom du progrès de l’Islam et de
toutes les notions qu’il exprime, y compris celles de vérité et de justice.
Cette approche est qualifiée dans le Coran de « grand effort / jihad » :

ÒóĻƈ×ĠÒîÓıä ƈ äIJīĺ ƈóĘÓƈ ġƆ ĤŽ Òďƈ ĉƈ ÜƇ ŻƆ ĘƆ


ƈ įƈƈ ÖħİƇ ïŽ İÓ
ƃ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« N’obéis donc pas aux infidèles et mène contre eux grâce à lui (le Coran) un
grand combat. » (Al-Furqan, 52).
L’expression « un grand combat » ci-dessus mentionnée, se rapporte à la trans-
mission de la Parole du Tout-Puissant par le biais du discours, du comportement
adéquat et par la mobilisation de tous les moyens possibles en vue de la glorification
de la Vérité, et ce pour le bien de l’humanité guidée et unie dans la paix et le bonheur.
Entreprendre le jihad au nom de la transmission de la Vérité (tabligh) est indu-
bitablement plus important et efficace que prendre les armes.
En effet, le Noble Prophète r, au cours des toutes premières années de sa mis-
sion prophétique, avait lui-même entrepris son jihad avec pour seule arme le Coran.
Ayant pour but de guider l’humanité et en vertu des nombreux exemples qu’il
contient, le Coran exhorte chaque individu à entreprendre « le jihad dans le sentier
d’Allah ». Seule une petite partie se rapporte au qital, ou guerre totale (armée), une
option uniquement admissible lorsque la situation la considère nécessaire.
390 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La majorité des combats auxquels le Noble Prophète r participa furent en fait


défensifs, comme ce fut le cas à Badr, Ouhoud et Khandaq.
Des campagnes militaires telles que Muta et Tabuk furent à la fois préventives et
offensives, pour pouvoir maîtriser les éventuelles attaques de l’ennemi.
Enfin la prise de La Mecque ne se déroula qu’à cause de la violation du traité
récemment conclu et dans l’intention de rétablir les droits bafoués des Musulmans.
Ainsi donc, une notion profonde de compassion et de justice était à même d’ap-
puyer toutes les batailles dans lesquelles le Prophète de Miséricorde r était lui-même
impliqué, amenant par leur truchement un vent de clémence, de bonté et de charité.
En Islam, la lutte armée n’a pas pour but de tuer123, saisir des butins, semer la
destruction sur terre, avoir des gains personnels ou donner libre cours à des senti-
ments de vengeance ; au contraire, l’Islam soutient le projet d’éradiquer toute forme
d’oppression, mais aussi d’assurer la liberté de croyance, de mener l’humanité à la
véritable guidance et de bannir l’injustice dans tous ses aspects.
Une vue d’ensemble sur toutes les batailles auxquelles le Messager d’Allah r a
participé démontre sans équivoque qu’une guerre légitime ne peut être menée que
si le but affiché est la légitime défense et la préservation du Verbe du Tout-Puissant
(ila’yi kalimatullah). Les guerres simplement menées dans le but d’annexer des terri-
toires sont une honte pour l’humanité.
123. Le Prophète r, envoyé en qualité de Miséricorde pour les mondes, suivit une telle politique de
compassion à travers la totalité de ses 120 campagnes militaires (29 batailles majeures (ghawza) et 91
batailles mineures (sarriya)). Bien que toute l’Arabie eût été sous sa domination il ne permit jamais
à l’armée musulmane de verser une goutte de sang de plus qu’exigé. Selon d’authentiques rapports,
le nombre de Musulmans morts martyrs lors des 120 campagnes militaires menées pour des raisons
diverses pendant 11 ans se chiffre à 340, par contraste avec 800 pertes humaines du côté ennemi.
Cela fait en tout un nombre de victimes inférieur à 1200. En prenant simplement en compte les 29
campagnes personnellement menées par le Noble Prophète r, force est de constater qu’aucune épée
ne fut brandie au cours de seize d’entre elles, amenant ainsi à bien l’objectif désiré. Les 13 campagnes
restantes virent des heurts réels, causant la mort de 140 martyrs et de 335 combattants ennemis.
Ayant adopté une approche diplomatique prudente et prévoyante, le Messager d’Allah r put obtenir
l’allégeance de nombreuses régions sans avoir eu besoin de livrer bataille. Beaucoup d’autres lieux
succombèrent après leur acceptation préalable de son message. Considérant ce dernier point
supérieur à la lutte armée, le Noble Prophète r s’abstenait de recourir à l’épée, sauf si c'était nécessaire.
En d’autres occasions, une diplomatie prudente et alliée à une intelligence pratique lui permit de
dissuader l’ennemi d’entrer dans la bataille, veillant ainsi à ce qu'une quantité minimum de sang soit
versé. Pour qu’une campagne militaire puisse aboutir à des résultats probants, le Noble Prophète r
préféra élire un commandant originaire de la région ou mieux encore, de la tribu rivale. Le Noble
Prophète r était extrêmement exigent à ce que l’armée tienne sa parole, se maintienne loin de tout
excès comme tuer sans raison, ne touche pas aux esclaves, enfants, femmes, personnes âgées, moines,
ermites vivant en retrait dans des monastères et autres lieux propices (à leur vie spirituelle), enfin à ne
pas laisser de déchets à côté des arbres et des bâtisses. (ElSa’d Mahmudov, Sebep ve Sonuçları İtibâriyle
Hazret-i Peygamber’in Savaşları, 2005, Université Marmara, Institut des Sciences Sociales, thèse de
doctorat non publiée).
Première Année de L’hégire 391

Aussi loin que l’Islam est concerné, une guerre doit être fondée selon l’objectif
suprême d’étendre la justice, de fournir les moyens adéquats en vue de la guidance à
l’Islam, d’éradiquer toute forme d’oppression.
Le Coran dit clairement :

ÓđĻ ƈ îÓƅ ùĘƆ IJƆÈ÷ƅ ęŽ ĬƆ  ƈóĻĕƈƆ ÖÓùęŽ ĬƆ ģƆ ÝĜƆ īĨ


ƈ öÓĭĤÒģƆ ÝĜƆ ÓĩĬƪ ƆÉġƆ ĘƆ Ăƈ òƆŶÒĹĘ
ƃ ĩä
Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ž ƃ Ɔ Ɔ
« … quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une
corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. Et quiconque
lui fait don de la vie, c’est comme s’il faisait don de la vie à tous les hommes. En
effet Nos messagers sont venus à eux avec les preuves. Et puis voilà, qu’en dépit
de cela, beaucoup d’entre eux se mettent à commettre des excès sur la terre. » (Al-
Ma’ida, 5/32).

Toutes les luttes qu’entreprennent les Musulmans, que ce soient avec leurs vies
ou leurs richesses, strictement motivées par des préoccupations islamiques elles-
mêmes appuyées par les lignes directrices précitées, doivent donc nécessairement
aboutir par voie de retour à une grâce divine aussi considérable que le Paradis lui-
même.
Toutefois la sincérité est ici essentielle, pas inférieure à d’autres domaines.
‘Abdullah ibn Amr t demanda une fois au Noble Prophète r quelque éclaircis-
sement concernant le jihad et la lutte armée.
Il reçut la réponse suivante :
« Admettons, ‘Abdullah, que tu combattes uniquement pour recevoir l’assenti-
ment d’Allah, alors sache qu’Il te ressuscitera dans l’Au-delà tel que tu es présentement.
Mais si, en revanche, tu combattais uniquement pour te glorifier et te faire remarquer,
sache que tu ressusciteras tel que tu es présentement. » (Abou Daoud, Jihad, 24/2519).
Selon Abû Mûsâ t un Bédouin dit au Noble Prophète r :
« Ô Messager d’Allah ! L’homme combat pour le butin, ou pour la renommée,
ou pour avoir de la considération124. Lequel de ces combats est au service d’Allah ? »
Le Messager d’Allah lui répondit :
« Celui qui combat pour que la parole d’Allah soit la plus haute, c’est ce combat
qui est au service d’Allah. »
Une autre personne demanda :
124. Une autre version : « L’homme combat par courage ou par esprit de clan. » Et dans une autre version :
« L’homme combat sous l’effet de la colère. »
392 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Et si un homme désire prendre part au jihad dans le sentier d’Allah et dans le


même temps désirer quelque avantage mondain»
« Point de récompense pour lui », répondit le Messager d’Allah r.
Cette réponse s’était avérée insoutenable aux Compagnons y, tout simplement
en raison de la difficulté même de vivre à ce niveau de sincérité.
Ainsi ces derniers exhortèrent-ils le Compagnon t qui avait posé la dernière
question à la réitérer en lui disant :
« Tu as peut-être mal compris la réponse ».
Les Compagnons espéraient seulement recevoir une réponse qui eût pu les sou-
lager. Mais en vain, car même après trois tentatives, la réponse fournie par le Noble
Prophète r demeura inchangée. (Abou Daoud, Jihad, 24/2516).
On attribue au Noble Messager r nombre de ahadith mentionnant les mérites
du jihad, dont voici quelques-uns :
« Quand on monte la garde au service d’Allah un jour et une nuit, cela vaut mieux
que de jeûner un mois et d’en veiller toutes les nuits à adorer Allah. Si on meurt durant
sa garde, on reçoit le salaire de ce qu’on faisait, on obtient la subsistance promise aux
martyrs et on est à l’abri du « Tentateur » (l’Ange de la tombe qui pose au mort des
questions-pièges pour l’envoyer en Enfer).» (Muslim, Imara, 163).
« Quand on monte la garde un seul jour au service d’Allah, cela vaut mieux que le
monde et tout ce qu’il porte. La place du fouet de l’un de vous au Paradis vaut mieux
que le monde et tout ce qu’il porte. La marche au service d’Allah au début du jour ou
à sa fin vaut mieux que le monde et tout ce qu’il porte. » (Al Boukhari, Jihad, 6, 73 ; Riqaq,
2 ; Muslim, Imara, 113-114).

« Allah S’est engagé vis-à-vis de celui qui sort à Son service, ne sortant que pour
combattre à Son service et poussé uniquement par sa foi en Allah et en Son Messager.
Allah S’est engagé à l’introduire au Paradis ou à la demeure d’où il est sorti avec le
salaire qu’il a ainsi acquis, ou avec un butin. Par Celui qui tient l’âme de Muhammad
dans Sa Main, toute blessure reçue au service d’Allah viendra le jour de la résurrection
telle qu’elle a été reçue : sa couleur est celle du sang et son odeur est celle du musc. »
(Muslim, Imara, 103 ; An Nasaï, Iman, 24).

« Aucun de ceux qui sont entrés au Paradis n’accepterait de retourner à la terre


pas même pour avoir tout ce qu’elle porte sauf le martyr. Il souhaite retourner à la terre
dix fois de suite et être à chaque fois tué ; et ce à cause des honneurs avec lesquels le
martyr est accueilli au ciel125. » (Al Boukhari, Jihad, 21 ; Muslim, Imara, 108-109).
Le Noble Prophète r énonce dans les termes suivants l’objectif central des luttes
et des batailles auxquelles il a participé :
125. Autre version : « Et ce à cause du mérite du martyr qu’il constate de ses yeux. »
Première Année de L’hégire 393

« Il m’a été ordonné de combattre les gens jusqu’à ce qu’ils affirment qu’il n’y a
nulle autre divinité qu’Allah et que Muhammad est Son Prophète, offrent la salât et
donnent la zakat. Une fois qu’ils auront adopté cela, ils préserveront leurs vies et leurs
biens, hormis les sanctions décrétées par l’Islam.» (Al Boukhari Iman 17).
C’est pour cela que le Messager d’Allah r ne combattit jamais de nuit et attendit
l’aube, au cas où l’Adhan retentirait dans la ville. (Al Boukhari Adhan 6; Muslim Salât,9).
Avant d’envoyer des combattants au front il leur défendait d’attaquer s’ils
voyaient une mosquée ou entendaient l’Adhan ». (Abou Daoud, Jihad, 91/2635 ; Ahmad,
III, 448-449).

Muslim ibn Harith t rapporte à ce propos :


« Le Messager d’Allah r m’envoya avec une unité de combat. Lorsque nous par-
vînmes à l’endroit où nous étions supposés combattre, je lançai mon cheval à toute
vitesse et devançai mes Compagnons. Soudain je croisai des femmes et des enfants
en pleurs et je leur demandais: «Voudriez-vous avoir la vie sauve ?»
Elles répondirent: «Oui !»
Je leur dis : «Alors dites La ihaha ill’Allah Muhammadun Rasulullah et vous
aurez la vie sauve!».
C’est ce qu’elles firent. Certains compagnons y me critiquèrent car je les avais
empêché de mettre la main sur le butin.
De retour près du Messager d’Allah r ils l’informèrent de cela.
Le Noble Prophète r me demanda de venir près de lui et me dit :
« Allah t’a sans aucun doute récompensé en abondance pour chacune de ces
femmes (et de ces enfants). » (Abou Daoud, Adab, 100-101/5080).
Burayda t rapporte également :
« Avant d’envoyer une troupe au jihad le Messager d’Allah r recommandait
à son commandant d’être pieux sur la voie d’Allah, d’être profitable pour les musul-
mans, et de bien agir puis il disait :
« Combats dans le sentier d’Allah, en Son Nom, et lutte contre ceux qui ne le
reconnaissent pas. Ne trahis pas le butin. Ne recours pas à la brutalité. Ne coupe pas
le nez ou les oreilles. Ne tue pas les enfants. Quand tu seras en face de ton ennemi
polythéiste, convie-le à accepter une des conditions suivantes et admets celles à laquelle
il se rend : embrasser l’Islam. S’il refuse, invite-le à payer un tribut. S’il persiste alors
implore Allah et charge. « » (Muslim, Jihad, 3 ; At Tirmidhi Siyar, 48/1617 ; Ahmad, V, 353, 358).
394 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Quelques campagnes militaires mineures


Les Mecquois provoquaient les hypocrites pour empêcher les croyants de
Médine d’accomplir la Omra car ils voulaient les empêcher de devenir plus forts avec
ce voyage empreint de spiritualité.
Le Noble Prophète r décida alors de couper la route commerciales des hypo-
crites vers la Syrie.126
Ainsi il éprouverait économiquement les hypocrites et renforçait les Musulmans.
(Al Boukhari, Maghazî, 2 ; Abou Daoud, Kharaj, 22-23/3004).

Ainsi sept mois après l’Hégire le 8 Rajab (Novembre /Décembre 623), le Noble Pro-
phète r envoya sous le commandement de Hamza t trente hommes des Muhajirun
à Sif’ul-Bahr127 .
Revenant de Damas, la caravane commerciale qui se dirigeait vers La Mecque
était à présent à Sif’ul-Bahr, sous la protection de trois cents cavaliers dont Abû Jahl.
Au moment où les deux parties adverses se mirent en ligne en vue du choc apparem-
ment inévitable Madji ibn Amr, un allié appartenant aux deux parties, intervint et
finit par les dissuader de combattre.
Le Noble Prophète r heureux que Majdi ait pu intervenir à cet égard pour
empêcher la collision apprécia son succès et fit en guise de reconnaissance cadeau
d’habits aux émissaires qu’il lui envoya. (Waqidî, I, 9-10; Ibn Sa’d, II, 6).
Pendant le mois de Chawwal, le huitième mois de l’Hégire, le Noble Prophète r
envoya à Rabigh, toujours avec le même objectif Ubayda ibn Harith t, avec sous sa
responsabilité entre 60 et 80 Muhajir.128.
Conduit par Abû Sufyân, Quraysh comptait deux cents hommes. Hormis une
légère escarmouche et quelques jets de flèches, les deux camps adverses ne s’ali-
126. Le Messager d’Allah r imposa aux polythéistes Qurayches un embargo économique et politique pour
mettre fin à leur hostilité. À cette fin, il r établit des relations diplomatiques avec les tribus voisines,
signa des traités et organisa des expéditions et campagnes militaires pour suivre les caravanes des
idolâtres Qurayches, moteur du commerce et de l'économie de La Mecque.
Muhammad Hamidullah g a déclaré: « Les raids contre les caravanes de Qurayches ne peuvent en
aucun cas être assimilés à du pillage car les Qurayches étaient innocents et les auteurs des raids
n’étaient pas membres d’une bande conçue pour piller des caravanes. En fait l’état de guerre qui avait
émergé entre les deux cités. donnait le droit aux belligérants de nuire à l’autre dans sa vie, ses biens
ou autres intérêts. La loi de la guerre était ainsi entrée en vigueur entre les deux parties adverses. Ces
expéditions militaires ne sont donc pas comparables au simple pillage de caravanes ». Un autre aspect
à relever est qu’en matière d’expédition militaire, les Musulmans n'attaquèrent que les caravanes
mecquoises.Les autres tribus de la péninsule bien qu’elles fussent non-croyantes restèrent à l’abri de
ces raids. (M. Hamidullah İslâm Peygamberi, I, 219 ; Hz. Peygamberin Savaşları, p.56).
127. Sif’ul-Bahr, dans la région d’Iys, où le clan de Juhayna avait coutume de résider, est un terme qui est en
relation avec sa localisation près d’un rivage (bahr = mer).
128. Voie empruntée par les pèlerins en chemin vers La Mecque, Rabigh est une vallée sise entre Anwa et
Juhfa,à environ 5km de cette dernière.
Première Année de L’hégire 395

gnèrent pas et ne tirèrent pas leurs épées en vue du combat. Sa’d ibn Waqqâs t tira
la première flèche et devint de ce fait le premier archer de l’Islam. Craignant que
les Musulmans ne reçoivent des renforts, les idolâtres reculèrent, ce qui permit aux
deux parties de se séparer.
Bien qu’ils aient embrassé l’Islam depuis peu de temps, deux Compagnons,
Miqdâd ibn Amr et ‘Utba ibn Ghazwan y, qui jusque-là n’avaient pas pu rejoindre
le Noble Prophète r à Médine, rallièrent un temps les idolâtres, utilisant ce moyen
pour gagner les rangs musulmans et ainsi réaliser leur souhait. À la vue des cavaliers
musulmans et après s’être soustraits aux idolâtres, ils trouvèrent aussitôt refuge dans
les rangs de l’armée musulmane. (Ibn Hishâm, II, 224-225; Waqidî, I, 10; Ibn Sa’d, II, 7).
Le Messager d’Allah r neuf mois après l’Hégire à Médine envoya Sa’d ibn abi
Waqqas t 8 (ou 20) personnes à Harrar 129 (Dhul Qada 1/ Mai 623).
Sa’d ibn Abi Waqqâs t ra-
conte lui-même :
« Le Messager d’Allah m’or-
donna d’atteindre Harrar au mo-
ment du passage de la caravane
de Quraysh. Nous atteignimes
Harrar le matin du 5e jour en nous
cachant le jour et nous déplaçant
la nuit. Cependant la caravane
était apparemment passée la veille.
N’eût-ce été l’ordre du Messager
d’Allah de ne pas aller au-delà de
Harrar, peut-être aurais-je eu l’op-
portunité de la rattraper. »
Les Compagnons rentrèrent
à direction Médine sans avoir eu à
combattre les idolâtres. (Ibn Hishâm,
II, 238; Waqidî, I, 10; Ibn Sa’d, II, 7).

Au début du 11e mois de l’Hé-


gire, au mois de Safar, le Noble
Prophète r dirigea la Campagne
d’Abwa (Waddan)130 (Safar 2/Août
129. Harrar est le nom d’une source qui se trouve au Hedjaz, près de Juhfa. Sur la route partant de Juhfa
et ralliant La Mecque, elle coule à gauche de Mahajja près de Ghadir’ul-Hum.
130. Abwa, village entre Furu et Juhfa, est situé à environ 37 km de Médine. La tombe d’Amina la mère
du Noble Prophète r, se trouve à cet endroit. Waddan, située entre La Mecque et Médine est à 13km
d’Abwa, est une partie de la contrée proche de Juhfa qui appartenait aux Damra, Ghifar et Kinana.
396 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

623). Ce fut la première Campagne à laquelle il prit part. L’Ansar Sa’d ibn ‘Ubada t
eut à cette période la responsabilité de Médine.
Cette Campagne (militaire) ne provoqua aucun heurt avec les idolâtres, car un
accord de paix avait été conclu avec le clan de Damra, de la tribu Kinana. Ce traité
stipulait notamment le fait qu’aucune des deux parties adverses ne s’affronterait ni
ne se livrerait à quelque agression ou exaction envers les Musulmans. En outre, cha-
cune des parties s’était engagée à ne pas prêter main forte à leurs ennemis. Le Messa-
ger d’Allah r fit confirmer le pacte par écrit et celui-ci fut finalisé le quinzième jour
de la Campagne d’Abwa. (Ibn Hishâm, II, 223-224; Waqidî, I, 12; Ibn Sa’d, II, 8).
Cet épisode est représentatif des nombreux autres cas de témoignage dans les-
quels on voit le Noble Prophète r apporter la paix et user de compassion envers
chaque être humain.
397

LA DEUXIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

Quelques batailles et la campagne de Bat’nu Nakhla


Au début du treizième mois de l’Hégire, le mois de Rabia al awwal l’expédition
de Buwat131 fut organisée pour faire face à une caravane Qureychite forte de cent
personnes et de deux mille cinq cents chameaux (Rabia al Awwal/ Septembre 623).
Le Messager d’Allah r nomma Sa’d bin Muaz t pour le remplacer et partit avec
deux cents Musulmans. Il revint à Médine sans combattre. (Waqidî, I, 12 ; Ibn Sa’d, II, 8-9).
La Campagne de Safwân (vallée proche de Badr), aussi appelée Badr’ul-Ula (la Pre-
mière Badr), eut lieu à peu près vers la même période. Son objectif était d’appréhen-
der et traduire en justice un certain Quarz ibn Jâbir qui avait dérobé à leurs proprié-
taires des chameaux et des bœufs qui paissaient près du Mont Jamma, dans la petite
ville d’Aqiq, à environ trois kilomètres de Médine (Rabi al Awwal 2/Septembre 623).
Zayd ibn Haritha t fut alors temporairement assigné suppléant de Médine.
Bien qu’il eût atteint Safawan, le Prophète r rentra à Médine car Quarz, qui devint
plus tard un éminent Musulman, avait fui depuis longtemps.
La Campagne de Dhu’l-Ushayra, (Joumada al akhir 2/Novembre 623), mena à la
conclusion d’un traité de paix avec le clan de Mudlij et leurs alliés. (Ibn Sa’d, II, 9-10).
C’est alors qu’à ce moment une unité menée par ‘Abdullah ibn Jahsh t le cousin
du Noble Prophète r, qui avait été envoyé en éclaireur, attaqua une caravane mec-
quoise près de Batn’u Nakhlah.
Les idolâtres qui cherchaient depuis un certain temps le plus petit prétexte pour
lancer un raid sur Médine trouvèrent dans cet incident un motif assez explicite pour
causer une vague d’émotion parmi eux.
En galvanisant des sentiments antimusulmans à La Mecque, les idolâtres souli-
gnèrent avec force le fait que l’attaque de leur caravane ait coïncidé avec le mois de
Rajab, saison sacrée et de trêve (haram), criant (à qui veut l’entendre) :
“Muhammad a violé la trêve, il a versé le sang, pris des otages et saisi nos biens !”
Le Prophète Béni r n’avait en fait jamais ordonné d’attaquer la caravane et
lorsqu’il entendit les faits il exhorta Abdullah t à ne rien prendre du butin et dit :
« Je ne vous ai pas ordonné de combattre durant les mois sacrés de trêve ! »

131. Buwât est une montagne à environ 58 km de Médine dans la région habitée par la tribu de Juwayna.
398 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Cela mit les Compagnons y dans un état d’abattement par crainte que le châti-
ment divin ne fût imminent. (Ibn Hishâm, II, 241).
Mais alors que les idolâtres oeuvraient pour accentuer leurs entreprises de pro-
pagande antimusulmane le verset suivant fut révélé:

ƈ Ʃ ģĻƈ ×ĠįĻƈ Ę
ƈ ĢÓ ƈ ģŽ ĜƇ įĻƈ Ę
ƈ ĢÓ ƈ ĦÒƈ óéĤŽ Ò ƈóıýĤÒ
ƅ ÝƆ Ĝ
ųÒ ƈ ×øīƆ Đ Ɔ ïƭ ĀƆ IJ
Ɔ óĻƈ
Ƅ Ɔ Ƅ ÝƆ Ĝ ƆƆ Ž ƪ īƈ ĐƆ ğƆ ĬƆ ijƇĤƆÉùŽ ĺƆ
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ƈ ó×ĠŽ ƆÈÙƇ ĭƆ Ýęƈ ĤŽ ÒIJųÒ
īƆ Ĩ ƈ ó×ĠŽ ƆÈįĭŽ Ĩ
ƈ įƈ ĥƈ İŽ ƆÈâÒóìƈŽ ÌIJĦÒƈ óéĤŽ Òïƈ åƈ ùĩĤŽ ÒIJįƈƈ ÖóęŽ ĠƇ IJ
ƇƆ Ž Ɔ Ʃ ïĭ ƇƆ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ ƆƆ Ž Ɔ Ɔ Ƅ Ɔ
ÒijĐÓ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ƇĤÒõĺƆźIJģƈ ÝĝƆ ĤŽ Ò
Ƈ ĉƆ ÝƆ øÒŽ ĪƈÌħŽ ġƇ ĭĺîīĐ Ƈ îƫ óƇ ĺƆ ĵƆ Ýƪ è
Ɔ ħŽ ĠIJ Ɔ ħŽ ġƇ ĬƆ ijĥƇ ÜÓĝƆ ƇĺĪij ƆƆ Ɔ Ž
« Ils t’interrogent sur le fait de faire la guerre pendant les mois sacrés. - Dis:
«Y combattre est un péché grave, mais plus grave encore auprès d’Allah est de
faire obstacle au sentier d’Allah, d’être impie envers Celui-ci et la Mosquée sa-
crée, et d’expulser de là ses habitants. L’association est plus grave que le meurtre.»
Or, ils ne cesseront de vous combattre jusqu’à, s’ils peuvent, vous détourner de
votre religion… » (Al-Baqara, 2 : 217).
Ce verset soulagea Abdullah ibn Jahsh t et ses amis qui demandèrent :
« Ö Messager d’Allah recevront-nous les mêmes récompenses que celles réser-
vées aux combattants dans la voie de l’Islam ? » Cela provoqua la révélation suivante :

ƈ Ʃ ģĻƈ
ųÒ ƈ ×øĹ ƈ ƈ ÒŽ ijƇĭĨÆīĺñƈ Ĥƪ ÒĪƈƪ Ì
Ɔ ĘÒŽ IJïƇ İÓ
Ɔ äƆ IJ
Ɔ ÒŽ IJóƇ äÓ
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Ɔ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒIJ
Ɔ Ɔ Ɔ
ħĻèƈ ò òijęĔųÒIJųÒƈ ÛĩèòĪijäóĺğÑÃƈ ĤIJƇÈ
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƇƩ Ɔ Ʃ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ŽƆ Ɔ Ɔ Ž
« Certes, ceux qui ont cru, émigré et lutté dans le sentier d’Allah, ceux-là
espèrent la miséricorde d’Allah. Et Allah est Pardonneur et Miséricordieux. » (Al-
Baqara, 2 : 218).

Ces déclarations divines tout en renforçant les croyants fit accroitre l’animo-
sité des polythéistes à leur encontre. Mais même si ce verset n’avait pas été révélé
les idolâtres auraient été courroucés contre les croyants car le nombre de Musul-
man augmentait de jour en jour et donc l’état islamique se renforçait. À cette époque
lors d’un recensement ordonné par le Messager d’Allah r à Médine cinq cent milles
croyants furent recensés.Étant donné que le nombre de Musulmans augmentait les
polythéistes ne sous-estimèrent pas le chiffre qui commençait à représenter un dan-
ger pour eux. De plus Médine se situait sur la voie du commerce qui était la pierre
angulaire des polythéistes mecquois. Aussi il leur fallut réfléchir à la manière d’élimi-
ner ce danger avant qu’il ne se propage aussi ils décidèrent d’attaquer Médine.
Deuxième Année de L’hégire 399

Le Prophète de Miséricorde r invita à l’Islam Hakam ibn Kaysan t, qui était


parmi les prisonniers qui avaient été capturés à Batn’u Nakhlah. Il lui expliqua plu-
sieurs fois et en détail le chemin de la vérité pour étouffer tous les doutes possibles
pouvant surgir dans son esprit.
Contrarié par la ténacité de Hakam t dans son refus d’embrasser l’Islam, et par
tous les problèmes que le Prophète r avait vécus, Omar t ne put se retenir de dire :
« Pourquoi te donnes-tu autant de peine avec lui, ô Messager d’Allah ? Par Al-
lah, celui-ci ne deviendra jamais musulman. Tu ferais mieux de me le laisser afin que
je lui brise le cou et que je l’envoie en enfer ! »
Mais le Noble Messager r persista à lui expliquer l’Islam jusqu’au moment où
il fut tout oreilles.
Hakam demanda: «Qu’est-ce qu’Islam ?»
Le Messager d’Allah r lui répondit:
« C’est que tu sois un serviteur d’Allah, sans Lui attribuer de partenaires, et de
témoigner que Muhammad est Son serviteur et Messager.»
Hakam t déclara alors bruquement: «Alors j’accepte l’Islam !»
Le Messager d’Allah r s’adressa alors à ses compagnons y:
« Si je vous avais écouté Hakam serait maintenant en enfer ! »
Omar t déclara plus tard :
« Pour moi le fait de voir Hakam t devenir musulman c’était comme si j’avais
été submergé par tout le passé et l’avenir. Je me disait : “Qu’est-ce qui t’a pris de vou-
loir suggérer quelque chose au Messager d’Allah alors que lui savait mieux que toi ?”
Je m’étais alors consolé en pensant que ma seule intention était d’obtenir l’agrément
d’Allah et de Son messager. Hakam t devint musulman et quel parfait musulman il
fut. Il t combattit dans le sentier d’Allah et mourut martyr près du puits de Maoû-
na. » (Ibn Sa’d, IV, 137-138 ; Waqidî, I, 15-16).
La leçon à retenir de cet évènement est qu’il faut transmettre l’Islam patiem-
ment, de manière douce, l’ornant de toutes sortes de sagesses et de bons conseils.

Changement de direction de la Qibla


Au début, et durant durant seize ou dix-sept mois après l’Hégire les Musulmans
continuèrent d’accomplir leur prière rituelle (salat) en faisant face à la Mesjid al Aqsa
de Jérusalem.
Les Juifs employaient ce fait comme prétexte pour affirmer oralement leur su-
prématie sur les Musulmans, ce qui chagrinait beaucoup le Prophète béni r.
400 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

C’est sur la Ka’ba que tout au long son cœur était placé et il la considérait comme
qibla, ce qui peut être considéré comme la première étape menant à l’ouverture de la
Mecque à l’Islam. Il était désireux de recevoir une révélation à ce sujet. Et puisque la
permission divine n’était pas encore venue, la pensée du Prophète béni r était restée
un ardent désir dont la réalisation n’était qu’une question d’attente patiente.
Finalement, un lundi du milieu de mois de rajab, alors que le Noble Messager r
était en train d’accomplir la prière de midi (dhor) dans une petite mosquée dans les
quartiers du clan Salima, le Tout-Puissant révéla la bonne nouvelle suivante :

ğıäIJĢƈ ijĘÓİÓĄóÜÙĥ×Ĝ ƈ ğĭĻĤƈ ijĭĥĘÅÓĩùĤÒĹĘ ƈ ğƆ ƈıäIJÕĥƫ ĝƆ ÜĴ


óĉŽ ü
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ ƃ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ɔž Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ž Ɔ Ɔ Ɔ óƆ ĬƆ ïŽ ĜƆ
ÒŽ ijÜƇ IJŽ ƇÈīĺ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒĪƈƪ ÌIJ
Ɔ ĮƇ óƆ ĉŽ ü
Ɔ ħŽ ġƇ İƆ ƈijäƇ IJ
Ƈ ÒŽ ijƫĤijƆ ĘƆ ħŽ ÝĭƇ ĠÓ
Ƈ ĨƆ ß Ɔ ĦÒóƆ éƆ ĤŽ Òïåƈ ùŽ ĩƆ ĤŽ Ò
Ƈ ĻŽ èƆ IJ
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Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ĺÓ ƈ ƈ Ɔ Ɔ ĩĥƆ đĻĤƆ ÔÓ ƈ
Ɔ ĩƪ Đ
Ɔ ģƅ ĘÓĕƈƆ ÖƇųÒÓ Ɔ ħŽ ƈıƈÖž òī
Ʃ ĨƆ IJ ƪ Ĩěƫ éƆ ĤŽ ÒįƇ Ĭƪ ÈĪij Ƈ Ž Ɔ Ɔ ÝƆ ġĤŽ Ò
« Certes nous te voyons tourner le visage en tous sens dans le ciel. Nous te
faisons donc orienter vers une direction qui te plaît. Tourne donc ton visage vers
la Mosquée sacrée. Où que vous soyez, tournez-y vos visages. Certes, ceux à qui le
Livre a été donné savent bien que c’est la vérité venue de leur Seigneur. Et Allah
n’est pas inattentif à ce qu’ils font. » (Al-Baqara, 2 : 144).
Et pendant ce temps, à la fin de la seconde unité de prière (ra’kat), le Prophète
de miséricorde r se tourna aussitôt en direction de la Ka’ba et ses Compagnons y
suivirent son exemple. Tous commencèrent à faire face à leur nouvelle qibla devant
laquelle les deux autres unités de prière furent achevées. Dès lors la mosquée fut
appelée Masjid’ul-Qiblatayn, la Mosquée des deux Qibla. (Ibn Sa’d, I, 241-242).
Un compagnon qui était derrière le Prophète béni r quitta la mosquée pour se
diriger vers une autre où il aperçut un groupe de gens qui accomplissait leur prière
ensemble. Ils étaient en position inclinée (ru’ku) lorsqu’il s’exclama à leur endroit :
« Par Allah U, avec le Messager d’Allah r, nous venons à l’instant d’accomplir
notre prière en direction de la Ka’ba ! »
Aussitôt le groupe changea de direction pour s’orienter vers la Ka’ba.
Les croyants accueillirent ceci avec enthousiasme, mais ce changement de qibla
en direction de la Ka’ba incita les idolâtres, les Juifs et les hypocrites à produire cer-
taines rumeurs et à entretenir des revendications non fondées auxquelles la Révéla-
tion répondit ainsi :
Deuxième Année de L’hégire 401

ÓıƆ ĻĥƆ Đ ƈ ĐħİźIJÓĨöÓ


ÒijĬÓĠĹÝƈ ĤÒħ ƈıÝƈ ĥ×Ĝī ƈ ĭĤÒīĨÅÓ ƈ ıęƆ ùĤÒĢij
Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƪ Ƈ ƆŽ Ɔ ŽƇƪ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ƫ Ƈ ĝƇ ĻƆ øƆ
ƅ ĝƈ ÝƆ ùĨ ƅ ƈ ƈ ƈ Ʃ ƈž ĜƇ
ħĻ Ž ƫ ĆÒóƆ ĀĵĤƆ Ìƈ ÅÓýƆ ĺī Ɔ ïıŽ ĺƆ ÔƇ ƈóĕŽ ĩƆ ĤŽ ÒIJ
Ɔ Ĩĸ Ɔ ĚƇ ƈóýŽ ĩƆ ĤŽ Òųģ
« Les faibles d’esprit parmi les gens vont dire : ‹ Qui les a détournés de la
direction (Qibla) vers laquelle ils s’orientaient auparavant ?› - Dis : ‹ C’est à Allah
qu’appartiennent le Levant et le Couchant. Il guide qui Il veut vers un droit che-
min ›. » (Al-Baqara, 2 : 142; Al Boukhari, Iman 30, Salât 31; Muslim, Masajid 11).
Ibn ‘Abbâs t rapporte même la chose suivante :
« Après le changement de qibla en direction de la Ka’ba, conformément à l’in-
jonction du Coran, certains Musulmans demandèrent au Messager d’Allah : “ Ô
Messager d’Allah ! Qu’en est-il des prières de nos frères décédés qui s’étaient dirigés
en direction de la Masjid’ul-Aqsa ?”
Sur ce, le Tout-Puissant révéla le verset suivant :

ƈ ĭĤÒĵĥƆ ĐÅÒïƆ ıü ƈ ƈ


öÓ ƪ Ɔ Ɔ Ƈ ÒŽ ijƇĬijġƇ ÝƆ žĤÓĉƃ øƆ IJ Ɔ Ùƃ Ĩƪ ƇÈħŽ ĠÓ
Ƈ ĭƆ ĥŽ đƆ ä
Ɔ ğƆ ĤñƆ ĠƆ IJƆ
ƈ Ƈ Ýƈ Ĥƪ ÒÙƆ ĥƆ ׎ ĝƈ ĤŽ ÒÓĭƆ ĥŽ đƆ äÓ
Ɔ ħƆ ĥƆ đŽ ĭƆ ĤƪźÌƈ ÓıƆ ĻŽ ĥƆ Đ
īĨ Ɔ Ûĭ Ɔ ĠĹ Ɔ ĨƆ IJÒ
Ɔ ïĻ ƃ ƈıüƆ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ Ģij Ƈ øƇ óĤÒĪij ġĺIJ
ƪ Ɔ Ƈ ƆƆ
ĴïƆ İ
Ɔ īĺ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒĵĥƆ Đ Ɔ ƪ źÌƈ Øƃ óĻƈ×ġĤÛĬÓĠĪƈÌIJįƈ Ļ×ĝƈ ĐĵĥĐÕĥƈ ĝĭĺīĩĨ ƈ ĢijøóĤÒďƈ×Ýĺ
Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ ƪ Ƈ ƪƆ
ħĻèƈ ò ĖIJÊóĤöÓ ƈ ĭĤÓƈÖųÒ
ƪ Ɔ Ʃ Īƪ Ìƈ ħŽ ġƇ ĬƆ Óĩĺƈ Ɔ ÌďĻ
ƈ ƈ Ʃ ĪÓ
Ɔ ąĻƇ ĤƇųÒ Ɔ ĠÓ
Ɔ ĨƆ IJ Ɔ ƇųÒ
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ ƆƆ Ʃ
« Et aussi Nous avons fait de vous une communauté de justes pour que vous
soyez témoins aux gens, comme le Messager sera témoin à vous. Et Nous n’avions
établi la direction (Qibla) vers laquelle tu te tournais que pour savoir qui suit le
Messager (Muhammad) et qui s’en retourne sur ses talons. C’était un change-
ment difficile, mais pas pour ceux qu’Allah guide. Et ce n’est pas Allah qui vous
fera perdre [la récompense de] votre foi, car Allah, certes est Compatissant et
Miséricordieux pour les hommes. » (Al-Baqara, 2 : 143; At Tirmidhi Tafsir, 2/2964).
Le changement de qibla fut en effet un évènement significatif. L’invalidation de
la qibla précédente, que le commandement divin impliquait, devint matière à attiser
des rumeurs susceptibles d’éloigner de la Vérité beaucoup de gens. Ce comman-
dement divin relatif à la nouvelle qibla avait donc été auparavant répété plusieurs
fois au Prophète béni r en personne, puis aux croyants et finalement à l’ensemble,
confirmant sans aucun doute que tous étaient dorénavant soumis à l’obligation de
s’accrocher à leur nouvelle qibla, tant à domicile qu’en voyage. (Voir Al-Baqara 148-149).
402 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Dans l’expectative de clarifier (dans une certaine mesure) la sagesse sous-ja-


cente au changement opéré, la confirmation (attendue) parvint avec la descente du
verset coranique suivant :

ħÝĭƇ ĠÓ ĨßĻèIJĦÒƈ óéĤÒïƈ åƈ ùŽ ĩƆ ĤŽ ÒóĉŽ ü ğıäIJĢƈ ijĘÛäóìßĻèīĨƈ IJ


Ž Ƈ Ɔ Ƈ ŽƆ Ɔ ƆƆ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ž ƆƆ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ŽƆ Ž Ɔ
ƈ ƈ ƈ Ɔ ġƇ ĺƪŻÑƆ Ĥƈ ĮóĉŽ ü
ÒŽ ijĩƇ ĥƆ Č
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒƪźÌƈ ÙƄ åƪ è Ƈ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ öÓĭĥƪ ĤĪij Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ħŽ ġƇ İij
Ɔ äƇ IJ
Ƈ ÒŽ ijƫĤijƆ ĘƆ
ƈ ƈ ƈ ƈ Ž IJħİijýƆ íŽ ÜƆ ƆŻĘƆ ħıĭŽ Ĩƈ
ĪIJ
Ɔ ïƇ ÝƆ ıŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ IJ Ɔ ÝĩƆ đŽ Ĭħƪ ÜƇŶIJĹ
Ɔ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ ĐĹ Ɔ ĬijŽ ýƆ ìÒ Ɔ ŽƇ Ž ŽƇ
« Et d’où que tu sortes, tourne ton visage vers la Mosquée sacrée. Et où que
vous soyez, tournez-y vos visages, afin que les gens n’aient pas d’argument contre
vous, sauf ceux d’entre eux qui sont de vrais injustes. Ne les craignez donc pas;
mais craignez-Moi pour que Je parachève Mon bienfait à votre égard, et que vous
soyez bien guidés ! » (Al-Baqara, 2 : 150).
Ce verset met en valeur un certain nombre de sagesses :
1. La première sagesse sous-jacente au changement d’orientation de la qibla
était de déposséder les Gens du Livre et les idolâtres de tout témoignage allant à
l’encontre des Musulmans ; étant donné que le changement d’orientation de la qibla
en direction de la Ka’ba était un fait inclus parmi les exploits du Dernier Prophète r
tels que cités dans les Écritures antérieures.
En effet, certains passages du Livre d’Isaïe dans l’Ancien Testament prédisent
l’avenir de La Mecque en indications explicites et notamment que le Dernier Pro-
phète r accomplirait continuellement la prière en direction d’al-Aqsa. Et lorsqu’il
reçut l’ordre (divin) de se diriger vers la Ka’ba, cela jeta le doute dans l’esprit des
Gens du Livre (Juifs et Chrétiens).
En outre, défier la qibla du prophète Ibrâhîm u aurait contredit la prétention
du Messager d’Allah r à représenter la nation d’Ibrâhîm u un argument qui aurait
alors pu être utilisé comme saine objection par les idolâtres. Mais après le change-
ment réel, aucune objection ne fut faite, excepté par l’obstiné qui avait comme habi-
tude d’obscurcir la vérité.(Voir, Elmalılı, I, 537).
2. La réalisation des bénédictions divines sur les Musulmans est une autre sa-
gesse inhérente au changement de qibla. Les croyants furent gratifiés de la nouvelle
qibla en tant que contribution menant vers leur but ultime de perfection sur le sen-
tier de Vérité, l’actuelle bénédiction dont la qibla constitue une part.
3. Une des sagesses sous-jacentes au fait que le Prophète béni r effectua ses
prières au cours des mois débutant et en direction de la Bayt’ul Maqdis est de faire
allusion à la source commune qui lie toutes les religions célestes et réchauffer le cœur
des Juifs et des Chrétiens quant à l’Islam. Cette approche peut être néanmoins consi-
Deuxième Année de L’hégire 403

dérée comme ayant pour le moins diminué les désaccords entre Juifs et Chrétiens
durant le processus d’épanouissement de la société (idéale) Iislamique.
Dans le même temps, cet évènement prouve (avec d’autres preuves) que le
Noble Prophète r n’a jamais exercé d’autorité sur le Noble Coran.
Nonobstant son désir profond de voir la Ka’ba devenir la nouvelle direction du
culte dû, le Prophète béni r dut encore patienter seize mois après l’Hégire pour que
parvienne la révélation pertinente.

Jeûne, aumône de Fitr et autres aumônes


Tout en renforçant son existence politique à travers des campagnes mineures,
l’Islam dans le même temps continuait à parfaire sa vie spirituelle unique. Une part
importante en fut l’obligation faite aux Musulmans de jeûner durant le mois de Ra-
madan, déclaration qui fut faite juste après le changement de qibla, dix-huit mois
après l’Hégire, au mois de Cha’bân. (Ibn Sa’d, I, 248).
C’est par le truchement du verset coranique suivant que le Très-Haut déclara le
jeûne ou siyam de Ramadan obligatoire.

Ó ĩƆ Ġ
Ɔ ĦÓ ƈ ƈ Ƈ ÒŽ ijƇĭĨÆīĺñƈ Ĥƪ ÒÓıĺƆÈÓĺ
Ƈ ĻƆ āĤÒž ħƇ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ Ɔ ÕƆ ÝĠ Ɔ Ɔ Ɔƫ Ɔ
Ɔ ĝƇ Ýƪ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ħŽ ġƇ ĥƈ ׎ ĜƆ īĨ
Īij ƈ īĺñƈ Ĥƪ ÒĵĥƆ ĐÕÝƈ ĠƇ
Ɔ Ɔ Ɔ
« Ô les croyants ! On vous a prescrit as-Siyam comme on l’a prescrit à ceux
d’avant vous, ainsi atteindrez-vous la piété (et contre le mal). » (Al-Baqara, 2 : 183).
Dans la même veine sont les paroles du Prophète de Miséricorde r :
« L’Islam est bâti sur ces cinq principes : Le témoignage qu’il n’y a pas d’autre dieu
qu’Allah et que Muhammad est Son Messager, l’accomplissement de la prière, l’acquit-
tement de l’aumône légale, le pèlerinage, le jeûne du mois de Ramadan. » (Al Boukhari,
Iman, 1, 2 ; Tafsir, 2/30 ; Muslim, Iman, 19-22).

Les vertus du jeûne sont magnifiquement exprimées dans les hadiths suivants
du Noble Messager r :
Allah U a dit :
« Toute œuvre du fils d’Adam lui appartient, sauf le jeûne, il M’appartient, et
c’est Moi seul qui le récompense à sa juste valeur. Le jeûne est tel un bouclier, et celui
qui jeûne a deux joies : une joie quand il casse le jeûne, et une joie quand il rencontre
son Seigneur. L’haleine de celui qui jeûne est plus agréable pour Dieu que l’odeur du
musc.»(Al Boukhari, Sawm 9; Muslim Siyam 163).
404 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Toute action du fils d’Adam sera multipliée de dix à sept cents fois. Allah, Puis-
sant et Sublime, a dit : “Sauf le jeûne, car il est pour Moi et Je le récompenserai. Il
abandonne ses désirs et sa nourriture pour Moi”. » (Muslim, Siyam, 164).
« Celui qui réunit deux bonnes actions au service d’Allah s’entend appeler à partir
des portes du Paradis : “Ô bien-aimé serviteur d’Allah ! Voilà une bonne chose que tu
viens de faire». Celui qui fait partie des pratiquants fervents de la prière est appelé à
partir de la porte de la prière. Celui qui fait partie des volontaires fervents au jihad est
appelé à partir de la porte du jihad. Celui qui fait partie des pratiquants fervents du
jeûne est appelé à partir de la porte dite «Rayyan» et celui qui fait partie des dispensa-
teurs fervents d’aumônes est appelé à partir de la porte de l’aumône. »
Abû Bakr t demanda :
“Ô Messager d’Allah ! Que mon père et ma mère te servent de rançon ! Il suffit
d’être appelé à partir d’une de ces portes pour être sûr du succès d’entrer au Paradis ?
Est-il possible que quelqu’un soit appelé à partir de toutes ces portes à la fois ?”
Le Messager d’Allah r répondit :
« Oui, et j’ai bon espoir que tu sois un d’eux. » (Al Boukhari, Sawm, 4 Jihad, 37 ; Muslim,
Zakat, 85, 86).

Avisés que nous sommes de la valeur des incommensurables bienfaits dont nous
avons été gratifiés, le jeûne est un acte d’adoration qui éveille des sentiments de gra-
titude envers le Tout-Puissant car il débarrasse l’âme des désirs et des tendances
égoïstes, il libère le cœur des entraves de la matière et en conséquence engendre la
patience qui est la plus haute qualité morale accessible.
Conférant une conscience du pauvre et du défavorisé, le jeûne emplit également
le cœur de sentiments de compassion. Bien qu’il eût été bénéficiaire de nombreux
trésors le prophète Yûsuf u n’a jamais rempli son estomac parce qu’il ne voulait pas
ignorer, ne serait-ce qu’un seul instant, la condition des pauvres.
Par le truchement de toutes ces sagesses sous-jacentes, le jeûne demeure une
injonction divine qui exerce la plus grande influence en matière de nettoyage des
mauvais sentiments, comme la malice et la jalousie qui étouffent la société dans leur
tumulte.
Le jeûne est la clé du mystère de l’abandon de la vie temporaire en faveur de
l’éternité. Il est un bouclier qui protège l’honneur et la dignité humaine contre les
désirs insatiables du soi qui empruntent la voie de la consommation (excessive) et
de la convoitise.
Ses journées sont ravivées par le jeûne, ce qui permet aux nuits de Ramadan
d’être davantage propices à la prière de Tarawih, une tradition (sunna) que l’on doit
à la Lumière de l’Être r.
Deuxième Année de L’hégire 405

« C’est un mois où Allah vous a prescrit de jeûner et dans lequel j’ai décrété sunna
les prières de nuit (qiyam). » (Ibn Maja Salât 173).
Afin de profiter davantage du Ramadan, il est donc nécessaire de le compléter
par des actes adoratifs nocturnes, de s’abstenir de toutes sortes de comportements
vains et de purifier la langue par la prière et le rappel (dhikr) qu’accompagnent des
larmes de repentir. Entrer en i’tikaf (retraite spirituelle) durant les dix derniers jours
de ce mois est également un élément important et constitutif de la Tradition prophé-
tique (Sunna).
« Quiconque encore, porte la foi dans son cœur et ravive ses nuits de Ramadan en
espérant la récompense d’Allah seulement, verra ses péchés antérieurs pardonnés. » (Al
Boukhari, Tarawih, 46).

Aïcha c raconte :
« Le Prophète d’Allah r sortit une fois à la mosquée au milieu de la nuit pour
effectuer des prières surérogatoires. Quelques fidèles prièrent derrière lui. Le matin
les gens diffusèrent la nouvelle. Le soir suivant, un nombre plus important de fidèles
se réunit et pria derrière le Prophète r Au matin les gens en parlèrent encore. Le
troisième et la quatrième nuit le Prophète r sortit pour prier et les gens firent la
prière avec lui. La mosquée fut comble ! Le lendemain le Messager d’Allah r ne sortit
pas et le matin, après avoir fait la prière du sobh, faisant face aux gens il attesta qu’il
n’y de Dieu qu’Allah et dit :
“Sachez que ce que vous avez fait ne m’a pas échappé. Ce qui m’a empêché de sortir
vers vous est que j’ai craint que cette prière ne vous soit imposée et que vous soyez inca-
pables de l’assumer !” » (Al Boukhari, Tarawih, 1 ; Muslim, Musafirin, 177).
Dès lors le Noble Messager r, considérant que la prière de Tarawih devait être
appropriée à la capacité de chaque personne ne l’accomplit plus en congrégation.
Ces prières furent encore accomplies individuellement durant le califat d’Abû
Bakr t et ce n’est que sous le califat d’Omar t qu’elle commencèrent à être effectuées
en congrégation.
Durant le mois de Ramadan le Prophète de miséricorde r renforçait sa pratique
dévotionnelle, et ce dans une atmosphère inextinguible et marquée par une connexion
intime avec le Tout-Puissant comme en témoignent ces paroles d’Ibn ‘Abbâs t :
« Le Messager d’Allah était le plus généreux des hommes, et particulièrement
durant le mois de Ramadan lorsque l ’Ange Gabriel u lui enseignait le Coran. Sa
générosité était ininterrompue comme le souffle continu du vent bénéfique. » (Al
Boukhari, Bad’ul-Wahy, 5, 6 ; Sawm, 7 ; Muslim, Fadail, 48, 50).

Après le jeûne proprement dit se déroule la prière de l’Aïd (marquant la fin du


Ramadan) et la remise de l’aumône dite de “fitr”.
406 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Prophète béni r a (Selon le rite malikite N.D.T) prescrit cette aumône obligatoire
pour tout musulman jeune ou vieux, libre ou esclave à hauteur d’un sa’132 de dattes
ou d’une mesure égale d’orge. (Al Boukhari, Zakat, 70-78; Muslim, Zakat, 13).
Et concernant les défavorisés, il a déclaré : “Ne pensez pas (littéralement sauvez-
les) en ce jour qu’ils puissent marcher l’estomac vide.” (Ibn Sa’d, I, 248).
Si la Zakat al-Fitr est acquittée avant la prière de l’Aïd, elle réalise alors son but
et est une aumône (zakat) acceptée.
Si en revanche elle est versée après cette prière, elle est alors considérée comme
une simple aumône et non comme relevant statutairement du fitr. (Ibn Maja, Zakât, 21).
Anas t rapporte:
«Lorsque le Messager d’Allah r est arrivé à Médine, les habitants avaient deux
jours durant lesquels ils se divertissaient.
Le Messager d’Allah r demanda : “Quels sont ces deux jours ?”
Ils répondirent : “Nous avions l’habitude de nous divertir durant ces deux jours
dans la Jahiliya (la période avant l’Islam).”
Alors le Noble Messager r dit : “Certes Allah vous a remplacé ces deux jours par
deux jours meilleurs : le jour du sacrifice et le jour de la rupture du jeûne”. » (Abou
Daoud, Salât, 239/1134 ; Nasa’i, Iydayn, 1).

Après avoir dirigé la prière de l’Aïd pour la première fois le 10 du mois de Dhul-
Hijja, le Prophète béni r ordonna aux Musulmans de procéder au sacrifice (abattage
rituel) proprement dit.
Durant les dix années qu’il passa à Médine, le Noble Messager r observait le
sacrifice de l’Aïd chaque année. (Ibn Sa’d, I, 248-249).
Il offrait même deux sacrifices par an : l’un au nom des membres de sa commu-
nauté (oumma) qui n’avaient pas les moyens de sacrifier et l’autre en son nom propre
et sa famille. (Abou Daoud, Adahi, 3-4/2792 ; Ibn Sa’d, I, 249).
Hanash t raconte :
« J’ai vu ‘Ali sacrifier deux béliers ; alors je lui ai demandé :
“Qu’est-ce que c’est ?”
Il a répondu : “Le Messager d’Allah m’a ordonné de sacrifier en son nom, c’est
ce que je fais”. » (Abou Daoud, Adahi, 1-2/2790 ; Ahmad, I, 107).
De la prière du fajr, juste avant l’Aïd al-Adha, jusqu’à la prière de l’asr au qua-
trième jour de l’Aïd, il y a un total de vingt-trois prières.
132. Le sa’ est une échelle volumétrique qui peut contenir environ 1040 dirhams de blé ou d’orge. Selon le
dirham shari, un sa’ pèse 2,917kg et 3,333 kg selon le dirham coutumier.
Deuxième Année de L’hégire 407

Tous les Musulmans, hommes et femmes, autochtones ou voyageurs, qu’ils l’ac-


complissent individuellement ou collectivement, sont appelés de manière exigeante
(wajib) à formuler le takbir’ut-tashriq. (Muwatta, Hajj, 205).

ƈ Ʃ IJ Ʃ ƪ źÒƈ įĤƆ Òƈ ƆźóƇ ×Ɔ ĠŽ ƆÒƇųƩ ƆÒóƇ ×Ɔ ĠŽ ƆÒƇųƩ ƆÒ


ïƇ ĩŽ éƆ ĤŽ Òų Ɔƈ óƇ ×Ɔ ĠŽ ƆÒƇųƆÒóƇ ×Ɔ ĠŽ ƆÒƇųÒ
Ʃ IJ
Ɔ ƇųÒ
Peu de temps après l’institution de la zakat al-fitr survint l’injonction concer-
nant l’aumône légale ou zakat al-mal.
Le Coran stipule en effet :

ƈ óéĩĤŽ ÒIJģƈ ÐÓƈ ùĥžĤƈ ěƭ èħ ƈıĤÒƈ ijĨƆÈĹĘƈ IJ


ĦIJ
Ƈ Ž Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ž ƆŽ Ɔ
« … et dans leurs biens, il y avait un droit au mendiant et au déshérité. » (Ad-
Dhariyât, 51 : 19).

Īij ƈ ĘƆ ØÓƈ ĠƆ õĥĤƈ ħİīĺñƈ Ĥƪ ÒIJ


Ɔ ĥƇ ĐÓ ƪ ŽƇ Ɔ Ɔ
« … qui s’acquittent de la Zakat. » (Al-Mu’minun, 23 : 4).

Ó ıƈƆ Öħ ƈıĻĠžƈ õƆ ÜƇ IJ


Ɔ ħŽ İƇ óƇ ıž ƈ ĉƆ ÜƇ Ùƃ ĜƆ ïƆ Ā
ƈ Ɔ ƈ
Ɔ ħŽ ƈıĤÒijƆ ĨŽ ÈīŽ ĨñŽ ìƇ
ħıƇ Ĥƪ īƄ ġƆ ø Ɔ ğƆ ÜƆ ƆŻĀ Ɔ Īƈƪ ÌħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ģƈ ž ĀƆ IJƆ
« (Ô prophète) Prélève de leurs biens une Sa’daqa (Zakat) par laquelle tu les
purifies et les bénis, et prie pour eux (…). » (At-Tawba, 9 : 103).
La zakat al-mal est mentionnée vingt-six fois dans le Coran en même temps que
la prière rituelle et quatre fois sans mention de la prière rituelle.
Parmi ces références, nonobstant le fait que la prière soit citée de façon indé-
pendante, le verset cité dans la sourate Al-Mu’minun constitue une prière exclusive
et perpétuelle qu’adressent les croyants soucieux de la préserver.
La raison de cette référence commune est que parmi tous les actes cultuels
d’ordre physique et financier, ce sont ces deux éléments qui demeurent les plus es-
sentiels et d’égale importance.
Un hadith précise en effet :
« Il n’y a pas de bien dans la prière de celui qui ne donne pas la zakat. » (Al-
Haythami, III, 62).
408 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En dehors des huit groupes de gens déterminés par le Tout-Puissant133 les ins-
titutions comme les écoles ou les hôpitaux ne peuvent pas accepter les diverses au-
mônes pour répondre à leurs propres besoins. Ces institutions, lorsqu’elles reçoivent
la zakat, ne peuvent l’utiliser en dehors des besoins essentiels des nécessiteux.
La Zakat peut donc être utilisée par exemple en faveur d’étudiants nécessiteux
ou de personnes qui recherchent la connaissance dans le seul but d’obtenir l’agré-
ment d’Allah, Gloire à Lui. Parmi les prérequis en matière de versement de la zakat,
on trouve l’injonction de couvrir au mieux les besoins fondamentaux (hawaij-i as-
liyya) des défavorisés que les donateurs n’ont pas l’opportunité de rencontrer ; ces
derniers n’ayant même pas la possibilité d’entreprendre des recherches pour déter-
miner les personnes qui demeurent dans de telles conditions.
Les institutions qui, dans l’acte même de verser la zakat, ont le devoir d’agir
en tant que supports doivent donc aborder cette problématique avec une extrême
sensibilité de peur qu’elles ne soient tenues responsables devant le Tout-Puissant.
Le Coran classifie de la manière suivante les destinataires légitimes de la zakat :

ĵĘƈ IJ ƈ ƈƈ ƈ ùĩĤŽ ÒIJÅÒƈ óĝƆ ęƇ ĥŽ Ĥƈ ÚÓ ƈ


Ɔ ħŽ ıƇ Öij
Ƈ ĥƇ ĜƇ ÙęƆ Ĥƪ ËƆ ĩƇ ĤŽ ÒIJÓ
Ɔ ıƆ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ īĻ
Ɔ ĥĨÓđƆ ĤŽ ÒIJ
Ɔ īĻ
ƈ ĠÓ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ ĜƆ ïƆ āĤÒÓ
ƪ ĩƆ Ĭƪ Ò
ħĻġƈ è ħĻĥƈ ĐųÒIJųÒ ƈ īĨ ƈ Ùąĺ ƈóĘģĻƈ×ùĤÒīÖÒIJųÒ ƈ ģĻƈ×øĵĘƈ IJīĻĨƈ ƈòÓĕƆ ĤŽ ÒIJÔÓ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ʃ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ ƈ ƪ ƈ Ž Ɔ Ʃ ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƈ ĜƆ óĤÒ
ž
ƈ
« Les Sa’daqa ne sont destinés que pour les pauvres, les indigents, ceux qui y
travaillent, ceux dont les cœurs sont à gagner (à l’Islam), l’affranchissement des
jougs, ceux qui sont lourdement endettés, dans le sentier d’Allah, et pour le voya-
geur (en détresse). C’est un décret d’Allah ! Et Allah est Omniscient et Sage. »
(Coran, At-Tawba, 9 : 60).

De même, des structures telles que les fondations ou les associations peuvent
recevoir la zakat à condition de la distribuer à l’un ou à plusieurs groupes parmi
les huit précédemment cités. Cette pratique est sans aucun doute un élément d’une
extrême importance.
Après qu’il eut reçu la révélation divine concernant la zakat, le Prophète béni r
fit rédiger un écrit explicitant clairement les modalités avec lesquelles la zakat devait
s’accompagner, notamment le montant minimum de la richesse tombant dans le
domaine de l’obligation, et ce jusqu’au péril de l’épée (s’il le fallait).
Le Messager d’Allah r garda cet écrit près de lui jusqu’à la fin de sa vie et s’em-
ploya à agir en stricte conformité avec son contenu.
Abû Bakr et Omar y suivirent scrupuleusement le Messager d’Allah r en ce
sens. (Al Boukhari, Zakat, 38; Ahmad, II, 14 ).
133. Cf. Coran, At-Tawba, 9 : 60.
Deuxième Année de L’hégire 409

La zakat s’entrecroise avec de nombreuses autres raisons individuelles et so-


ciales qui sont empruntes de sagesse. Ériger une barrière contre de possibles trans-
gressions des riches qui risquent de tomber sous le sortilège de leur richesse et des
nécessiteux susceptibles de jalouser les riches pour sauvegarder l’harmonie sociale
en rapprochant avec amour ses composantes est un de ses avantages. Dans l’ordre
social tel que l’Islam le préconise, des actes comme le versement de la zakat ou de la
charité sont à la fois la pierre angulaire et l’équilibre entre le riche et le pauvre.
Une autre sagesse inhérente à la zakat et à l’infaq est l’endiguement de la crois-
sance excédentaire, l’empêchement de tout abus et l’éradication de tout accroisse-
ment de haine et de dissentiment. Considérée comme moyen suscitant la fierté et la
vanité, la richesse n’est alors que l’avant-coureur d’une fin pitoyable qui attend ceux
qui la possèdent. Le fait est que tous les membres d’une société – ceux qui aident et
ceux qui sont aidés – se tiennent mutuellement dans un besoin physique et spirituel.
Il convient de rappeler qu’au sens absolu la richesse n’appartient qu’à Allah,
Gloire à Lui. Le pouvoir des êtres humains sur l’exercice de la richesse est analogue
au temps-partage qui est devenu à la mode aujourd’hui. Plus simple encore, la ri-
chesse est une confiance que le Tout-Puissant accorde temporairement et la manière
dont elle est utilisée se trouve liée par certaines mesures divines. Elle devrait en outre
être utilisée selon la voie ordonnée par son Vrai Propriétaire. Employée par défi
contre les injonctions divines en la matière, la richesse devient à travers la vanité
l’ultime moyen qui mène à la distorsion et aussi à l’indulgence vis-à-vis de l’injustice.
L’amour de la richesse s’insère dans le cœur de l’homme et le conduit vers un sentier
tragique. Parmi toutes les bénédictions répandues sur terre, le fait qu’Allah, Gloire à
Lui, ne mentionne que la richesse et les enfants comme (les deux principales) causes
de division (fitna) est dû à la facilité avec laquelle celles-ci pénètrent dans le cœur et
sont idolâtrées. À ceux qui sont tombés dans les profondeurs de cette infortune, le
Tout-Puissant lance cet avertissement :

ħ ƈ ģĻƈ×øĹĘÓ
 İƇ óýž ƈ ×ĘƆ ųÒ ƈ ıĬƆ ijĝƇ ęĭƈ ĺƆźIJÙƆ ąƪ ęƈ ĤŽ ÒIJÕİƆ ñĤÒ Ɔ õƇ ĭƈ ġŽ ĺƆ īĺ ƈ
Ž Ɔ Ʃ ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ ĪIJ Ɔ ñĤƪ ÒIJƆ
ƈ ıĻĥƆ ĐĵĩéĺĦijĺħĻ ƈ ƅ ñƆ đƈÖ
ħıƇ Öijĭ äIJħıİÓ×äÓ
Ž Ƈ Ƈ Ɔ ŽƇƇ Ɔ Ɔ
ƈ ıƈÖĴijġŽ ÝƇ ĘƆ ħĭƪ ıƆ ä
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
ƈòÓĬĹĘÓ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ ƅ ĤƆÈÔÒ Ɔ
Ɔ õƇ ĭƈ ġŽ ÜƆ ħŽ ÝĭƇ ĠÓ
ĪIJ Ƈ Ĩ ƈ
Ɔ ÒŽ ijĜƇ IJñƇ ĘƆ ħŽ ġƇ ùęƇ ĬƆŶħŽ ÜƇ õŽ ĭƆ ĠÓ Ɔ ñÃƆ İ
Ɔ ĨÒ Ɔ ħŽ İƇ òij
Ƈ ıƇ ƇČIJƆ
« … à ceux qui thésaurisent l’or et l’argent et ne les dépensent pas dans le
sentier d’Allah, annonce un châtiment douloureux, le jour où (ces trésors) seront
portés à l’incandescence dans le feu de l’Enfer et qu’ils en seront cautérisés, front,
flancs et dos : voici ce que vous avez thésaurisé pour vous-mêmes. Goûtez de ce
que vous thésaurisiez. » (At-Tawba, 9 : 34-35).
Le Prophète r décrit ainsi la fin douloureuse de ceux qui négligent la zakat :
410 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Celui qui a de l’or ou de l’argent et ne verse pas l’aumône légale (zakat) les
concernant, des plaques de feu lui seront chauffées au Feu de l’Enfer et on lui cautérise-
ra avec les flancs, le front et le dos. Et dès qu’elles se refroidissent, on les chauffe de nou-
veau pour lui remettre, le jour étant équivalent à cinquante mille ans ; jusqu’à ce que
les hommes soient jugés, et là, sa destination, le paradis ou l’enfer se fera connaitre. »
On dit : « Mais, ô Messager d’Allah r, qu’en est-il des chameaux ? »
Il dit : « De même celui qui possède des chameaux et qui ne s’acquitte pas de la
Zakat les concernant. Parmi ce que l’on doit à leur égard est le fait de les traire en pu-
blic, là où on les abreuve ; celui-là, on lui ramènera des chameaux qui seront présentés
dans leur totalité, pas un ne manquera, et seront encore plus corpulents qu’ils n’étaient
[dans ce bas-monde], lui étant jeté dans un endroit profond au sol uni, lequel on a cou-
vert de cailloux, et où les chameaux viendront le fouler sous leurs pattes et le mordre.
Dès que le dernier chameau lui passe dessus le corps, le premier reprend de nouveau,
un jour équivalent alors cinquante mille ans, jusqu’à ce que les hommes soient jugés,
alors il sera décidé s’il ira au paradis ou bien en enfer. »
Les Compagnons y lui posèrent une autre question relative aux propriétaires
de bétail (bovins et ovins) et le Noble Messager r leur apporta semblables réponses.
(Muslim, Zakat, 24 ; Al Boukhari, Jihad, 48).

Offrir la zakat ou une aumône avec courtoisie est un élément qui revêt la même
importance. On doit à cet effet s’abstenir de toute attitude telle que l’insulte ou le
don de marchandises de piètre qualité susceptible d’invalider cet acte. Le donateur,
en particulier, doit montrer un esprit de reconnaissance envers le bénéficiaire parce
que ce dernier lui fournit l’occasion d’accomplir une obligation qu’il n’aurait pas été
en mesure de remplir en temps normal. Les diverses actions à vocation charitable
agissent en même temps comme des boucliers impénétrables qui protègent le dona-
teur des maladies et du malheur. De fait, les pauvres sont une grande bénédiction
pour les riches, car ce sont leurs prières qui ouvrent les portes du Paradis.
Le verset coranique suivant énonce les façons d’offrir l’aumône charitable :

ÓĭƬ Ĩ Ɔ Īij ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ Ɔ Ɔ ĝƇ ęĭƈ ĺīĺ ƈ


Ɔ ƇÒijĝƇ ęƆ ĬÈÓĨ
Ɔ Ɔ đƈƇ ×ÝŽ ƇĺƆźħƪ ƇàųÒ ƈ ×øĹ
Ɔ ĘħŽ ıƇ ĤƆ ÒijƆ ĨŽ ÈĪij Ƈ Ɔ ñĤƪ Ò
Īij
 ƇĬõƆ éŽ ĺƆ ħİ źIJħ ƈıĻĥĐĖijìźIJħ ƈıƈÖòïĭĐ ƈ ħİóäƆÈħıĤĴðƆÈźIJ
Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ž ŽƆ Ɔ Ƅ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ž Ž Ƈ ƪ ƃ Ɔ Ɔ
ÓĺƆ ħĻĥƈ è Ĺĭƈ ĔųÒIJĴðƆÈÓıđ×ÝĺÙƅ ĜïĀīĨ ƈ óĻìØóęƈ ĕĨIJĖIJóđĨĢijĜ
Ƅ Ɔ ƭ Ɔ ƇƩ Ɔ ƃ Ɔ Ƈ ƆŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ ž Ƅ Ž Ɔ Ƅ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƅ Ƈ Ž ƪ Ƅ Ž Ɔ
ĸñƈ Ĥƪ ÓĠĴ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ðƆ ŶÒIJ Ɔ īžƈ ĩƆ ĤŽ ÓƈÖħġƇ ÜÓĜƆ ïƆ ĀƆ ÒŽ ijĥƇ ĉ׎ ÜƇ ƆźÒŽ ijƇĭĨÆƆ īĺƆ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈ
ƈ Ħƈ ijĻĤŽ ÒIJųÓƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
óìŴÒ Ž Ɔ Ɔ Ʃ ÖīƇ ĨËŽ ƇĺƆźIJ Ɔ öÓĭĤÒÅÓ ƪ ƆÐ ƈòįƇ ĤƆ ÓĨ
Ɔ ěƇ ęĭƇĺ
Deuxième Année de L’hégire 411

« Ceux qui dépensent leurs biens dans le sentier d’Allah sans faire suivre leurs
largesses ni d’un rappel ni d’un tort, auront leur récompense auprès de leur Sei-
gneur. Nulle crainte pour eux, et ils ne seront point affligés. Une parole agréable
et un pardon valent mieux qu’une aumône suivie d’un tort. Allah n’a besoin de
rien, et Il est indulgent. Ô les croyants ! N’annulez pas vos aumônes par un rappel
ou un tort, comme celui qui dépense son bien par ostentation devant les gens sans
croire en Allah et au Jour dernier… » (Al-Baqara, 2 : 262-264).

L’I’tikaf
I’tikaf (ou retraite pieuse) signifie littéralement “se retenir”, “attendre dans un
certain lieu” et “se tenir ou s’en tenir à une certaine chose”. Mais techniquement
i’tikaf signifie “rester dans une mosquée à un moment déterminé avec l’intention de
gagner la proximité d’Allah”. Du fait qu’aucun délai n’est spécifiquement fixé, une
seule heure compte comme i’tikaf, quoique étant surérogatoire.
Ainsi, le verset coranique « … mais ne cohabitez pas avec elles pendant que
vous êtes en retraite rituelle dans les mosquées… » (Al-Baqara, 2 ,187) constitue un
trait nécessaire de l’i’tikaf, ce qui suggère que sa période de validité ne peut être infé-
rieure à un jour – il s’agit de l’i’tikaf shari.
L’i’tikaf est généralement pratiquée pendant le mois de Ramadan en raison du
séjour (à la mosquée) qui y est effectué. L’i’tikaf est donc une immersion dans la
pratique du jeûne durant le jour et d’actes d’adoration durant la nuit à la mosquée.
L’i’tikaf pratiquée pendant les dix derniers jours de Ramadan est une sunna
dite muakkada (acte très recommandé que le Prophète béni r a rarement négligé)
et dans le même temps une sunna dite fard ul’kifaya (acte qui, bien qu’il ne soit
pas obligatoire, exige qu’au moins une personne dans la communauté l’accomplisse
pour que les autres en soient exemptés). Le vœu d’entrer en i’tikaf nécessite qu’il faille
l’accomplir. La pratique de l’i’tikaf en dehors du mois de Ramadan est également
recommandée (mustahab). L’i’tikaf incite à ne pas quitter la mosquée sauf en cas de
nécessité, comme par exemple renouveler ses ablutions (wudu).
Les épouses du Prophète r avaient quant à elles coutume de pratiquer l’i’tikaf
dans leurs chambres. Des tentes furent préalablement installées à l’intérieur de la
Mosquée (du Prophète) pour assurer leur confort puis elles furent démantelées sur
ordre du Noble Prophète r. Ainsi donc les épouses des Musulmans pratiquaient
l’i’tikaf, non pas dans les mosquées, mais chez elles, dans l’intimité de leurs chambres.
Aïcha c rapporte :
« Lorsque les dix derniers jours de Ramadan étaient entamés, le Messager
d’Allah s’abstenait de tout rapport sexuel, passait ses nuits en prière et réveillait ses
épouses. » (Al Boukhari, Fadlu Laylat’il-Qadr, 5 ; Muslim, I’tiqaf, 7).
412 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Toujours selon Aïcha le Messager d’Allah r redoublait de ferveur dans l’i’tikaf


au cours des dix derniers jours du Ramadan plus qu’aux autres jours. Après sa mort,
l’i’tikaf continua d’être pratiqué par ses épouses. (Al Boukhari I’tikaf 1, 17; Muslim I’tikaf 5).
L’évènement suivant est une superbe indication de l’importance et de la valeur
qui revêt l’entrée en i’tikaf et souligne conjointement le besoin d’être soucieux des
devoirs individuels et sociétaux :
« Un jour Ibn ‘Abbâs t faisait une retraite spirituelle dans la Mosquée du Pro-
phète. Un homme entra, le salua et s’assit à côté de lui.
Ibn ‘Abbâs lui dit alors : “Je vois que tu as l’air triste”.
L’homme répondit : “Oui, ô cousin du Prophète, j’ai une dette envers quelqu’un,
mais je ne peux pas la rembourser.”
Ibn Abbâs lui dit : “Veux-tu que j’aille voir avec toi cette personne ?”
L’homme répondit : “Si tu le veux”.
Ibn ‘Abbâs mit alors ces chaussures et sortit de la Mosquée.
L’homme dit : “Mais n’es-tu pas en retraite spirituelle (i’tikaf)!”.
Ibn ‘Abbâs t répondit :
« Si mais j’ai entendu celui qui repose dans ce tombeau et qui vient juste de nous
quitter (les larmes coulèrent des yeux d’Ibn Abbas en disant cela) dire : “ Celui qui
se déplace pour aider un frère dans le besoin et pour résoudre son problème, la récom-
pense sera meilleure qu’une retraite spirituelle de dix années. Et quiconque fait une
retraite spirituelle d’un jour pour Allah, sera éloigné de l’Enfer de trois fossés, dont la
largeur de chaque fossé est semblable à la distance entre l’Est et l’Ouest.” » (Al-Bayhaqî,
Shuab’ul-Iman, III, 424-425).

Une bataille majeure : Badr (17 Ramadan 2/ 13 Mars 624)


La 2e année de l’Hégire une grande caravane commerciale Quraychite de 1.000
chameaux au capital d’environ 50.000 dinars financé par tous, (hommes et femmes)
fut envoyée de Damas vers le marché de Gaza. La caravane comptait des figures de
proue mecquoises telles que Abou Sofyan, Muhammed bin Nawfal et Amr ibn al As
et trente ou quarante autres polythéistes.
Les idolâtres savaient que les Musulmans étaient en guise de représaille parce
qu’ils leur avaient interdit d’effectuer le pélerinage, et qu’ils voulaient leur couper la
voie commerciale menant vers Damas. De ce fait ils partirent de Damas avec la peur.
Abou Sofyan loua Damdam ibn Amr pour vingt pièces d’or miskal et l’envoya
avec la caravane à la Mecque plutôt qu’à Tabouk. (Ibn Hishâm, II, 244; Waqidi, I, 27-28).
Deuxième Année de L’hégire 413

Trois jours avant que Damdam ne vienne à la Mecque Atik, la tante du Messa-
ger d’Allah r fit un rêve qui l’effreya beaucoup.
Elle dit à Abbas :
«Le rêve que j’ai fait m’a fait trembler. J’ai peur qu’une catastrophe ne touche ton
peuple. Ne raconte à personne le rêve que je vais te raconter!»
Abbas t lui dit : «Alors vaz-y recontes moi ce que tu vas vu !»
Elle dit: «J’ai vu en rêve un homme monté sur un chameau venir à al-Abtah
(lieu entre la Mecque et Mahassa) et s’écrier debout : “Levez-vous, ô gens, et allez à
votre mort dans trois jours.” Les gens s’étaient rassemblés autour de lui et l’avaient
suivi jusqu’à la Ka’ba où il avait répété son avertissement. Puis il est parti à la hâte
vers une montagne voisine nommée Abû Qubays, où il a répété son avertissement
pour la troisième fois. Puis l’homme a ramassé une grosse pierre et l’a jetée en bas de
la montagne : la pierre s’est divisée en petits morceaux qui s’étaient dispersés dans
toutes les maisons de La Mecque, sans exception.
Abbas t lui dit : « Par Allah c’est un rêve très important! Fais attention ne le
révèle à personne !»
Plus tard, après avoir quitté ‘Atika, ‘Abbâs t croisa son ami Walid ibn Utbah
et lui raconta le rêve en question tout en insistant pour que ce dernier ne le révélât à
quiconque. Mais, inquiet, celui-ci le révéla à son père et bientôt le rêve fut sur toutes
les lèvres des habitants de La Mecque.
Voici comment ‘Abbâs t évoque les évènements qui s’en suivirent :
« Abû Jahl furieux me demanda :
“Depuis quand une prophétesse est-elle apparue parmi vous ? Qu’il y ait un pro-
phète homme ne suffisait-il pas ? Vos femmes se sont-elles adaptées au rôle ? Soit
disant qu’Atika a entendu dans son rêve quelqu’un lui dire Allez jusqu’au lieu où vous
serez abattu et tomberez dans trois jours. Eh bien, nous attendrons trois jours et si
rien ne se passe pour confirmer son rêve, nous ferons proclamer officiellement que
vos femmes sont les plus grandes menteuses parmi les femmes d’Arabie !”»
Je ne répondis pas grand-chose et me contentait de nier qu‘Atika eut fait le
moindre rêve. Par Allah rien ne fut plus grave pour moi que de nier cela. Au troi-
sième matin, furieux, je me rendis à la maison Sacrée (la Ka’ba) en espérant y trouver
Abû Jahl et donner libre cours à ma frustration de n’avoir pas su lui répondre comme
il le fallait trois jours auparavant.
Après que je sois entré dans l’enceinte, je le vis approcher de la porte des Banû
Sahm et en même temps je vis Damdam qui était debout sur son chameau. Il avait
entaillé le nez de son chameau, déchiré sa chemise pour indiquer la gravité de la
situation.
414 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il criait de toutes ses forces :


“La caravane Ô Quraysh, la caravane ! Vos biens avec Abû Sufyan comme res-
ponsable sont attaqués par Muhammad et ses compagnons ! Je ne crois pas que vous
puissiez sauver la caravane. À l’aide ! À l’aide !” Les cris de Damdam m’avait fait
oublier tout le reste. » (Ibn Hishâm, II, 244-247 ; Waqidi, I, 29-31).
Les Quraysh ne perdirent pas de temps pour se préparer. Cela ne leur prit que
deux à trois jours, le temps de lever une armée et d’être prêts. Des armes furent four-
nies à ceux qui n’en possédaient pas ; les riches notables s’investirent à fond pour
aider les plus faibles à se préparer. Des notables tels que Suhayb ibn Amr et Zama ibn
Aswad proclamèrent avec ardeur dans les rues de La Mecque :
“Les chameaux ainsi que la nourriture sont notre propriété, plus que vous ne
pouvez l’imaginer ! Vous êtes à présent tous exposés (c.-à-d. en chemin) ! Que per-
sonne en conséquence ne reste en retrait ! Si Muhammad saisit la caravane, il va
certainement l’utiliser pour parader dans La Mecque !”
La plupart des hommes de La Mecque rejoignirent les rangs ; ceux qui en étaient
incapables envoyèrent d’autres à leur place. Vint ensuite le jour où Abû Jahl ordonna
aux troupes de se mettre en marche. Umayya ibn Khalaf, quant à lui, se montra indé-
cis parce qu’il s’était rappelé le sort que le Noble Prophète, le Digne de confiance, lui
avait prédit s’il quittait La Mecque.
“Je le jure, se disait-il intérieurement et saisi d’une crainte terrible, Muhammad
ne ment jamais lorsqu’il parle.” Finalement, la persistance d’Abû Jahl finit par le
persuader de se joindre à l’armée.

Alors qu‘Utbah ibn Rabia et son frère Shayba commençaient à préparer leurs
armes, Addâs, leur esclave, leur en demanda la raison. Ils lui répondirent :
— Te souviens-tu de celui à qui tu as offert des dattes dans notre verger de Ta’if ?
— Oui je m’en souviens.
— Et bien, c’est lui que nous allons combattre !
Addâs se jeta alors à leurs pieds et les supplia :
“N’y allez pas ! C’est un prophète ! Certainement vous serez perdants !”
Des larmes coulaient le long de ses joues.
Pour autant ; ‘Utbah et Shayba demeurèrent indifférents à son plaidoyer et le
délaissèrent sans égard.
Deuxième Année de L’hégire 415

Les polythéistes mecquois étaient au nombre de neuf cent cinquante à mille.


Cent à deux cents d’entre eux étaient à cheval et les sept cents autres montaient à
dos de chameau. La plupart étaient cuirassés. Tous les notables de Quraysh étaient
présents et accompagnés de leurs esclaves féminines qui jouaient du tambour au
rythme de poèmes antimusulmans déclamés avec ferveur alors qu’ils sortaient de La
Mecque. (Waqidi I 31-39; Al Boukhari Manaqib 25; Ibn Kathir al-Bidayah, III, 294-295).
C’était la deuxième année de l’Hégire, le 12 du mois de Ramadan. Le Messa-
ger d’Allah r avait laissé ‘Abdullah ibn Ummi Maqtum t pour diriger les prières
rituelles et quitté Médine accompagné d’une armée composée de trois cent treize
Croyants, soixante-quatre d’entre eux étaient des Muhajirun et le restant des Ansar.
Trois montaient à cheval, soixante-dix à dos de chameau et le reste de la troupe
étaient à pied. (Vâkıdî, I, 23-24; İbn-i Hişâm, II, 250-251; İbn-i Sa’d, II, 12).
Le Noble Prophète r stoppa l’armée des Croyants en un lieu nommé Buyut’us-
Suqya, situé à un kilomètre environ de Médine, et donna l’ordre de rapatrier à Mé-
dine les plus jeunes et les personnes âgées. Sa’d ibn abi Waqqâs t raconte :
« Quand le Messager d’Allah r donna l’ordre aux plus jeunes de rentrer, je
vis mon frère Umayr t tenter de se cacher et je lui demandais: “ Qu’essaies-tu de
faire ?” ».
Il me répondit: « Mon souci est que le Messager d’Allah r puisse me voir et me
dire de m’en retourner, mais je veux combattre dans l’espoir de mourir martyr ! »
Effectivement, l’ayant vu, le Messager d’Allah r constata qu’il était trop jeune
pour combattre et lui conseilla de repartir. Umayr t commença à pleurer si fort que
le Messager d’Allah r finit par céder et lui permit de rester. Ceint d’une épée il com-
battit et mourut martyr à Badr. Il n’avait que 16 ans. (Waqidi, I, 21 ; Ibn Sa’d, III, 149-150).
La pénurie de chameaux faisait que trois personnes les montaient à tour de rôle.
Le Messager d’Allah r, ‘Alî et Abû Lubaba y se partageaient un chameau. Lorsque
le tour du Messager d’Allah r était terminé, ses deux Compagnons y tentaient de
le persuader de rester sur le chameau tandis qu’ils continueraient à pied. Mais il r
insistait pour marcher en disant : “Vous n’êtes pas plus capables de marcher que
moi, et je n’ai pas moins besoin que vous d’une plus grande récompense divine !”
(Ibn Sa’d, II, 21 ; Ahmad, I, 422).

Cette attitude dénote avec force l’amour profond que le Noble Prophète r
nourrissait à l’égard du Tout-Puissant ainsi que le désir ardent de gagner Sa proxi-
mité dans chaque acte ou chaque instant. Plus encore, elle enseigne la nécessité de
respecter la justice, peu importe qui est la personne ou bien ce que les circonstances
sont susceptibles d’entraîner.
Le Noble Messager r mandata par la suite Abû Lubaba t pour se charger des
affaires de Médine jusqu’à son retour. (Ibn Hishâm, II, 251).
416 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r , ne reconnaissant pas d’autre refuge qu’Allah le Très-Haut


et se référant à Lui pour tout besoin et incapable de supporter de voir les membres de
sa communauté (oumma) en état de faiblesse et défavorisés alors qu’ils se trouvaient
sur le chemin de Badr, fit alors l’invocation suivante :
“Ô Allah ! Accorde-leur des montures car ils n’en ont pas ! Habille-les car ils sont
nus ! Nourris-les car ils ont faim !”
Ansi, une fois la victoire obtenue à Badr, chaque Croyant retourna chez lui avec
un ou deux chameaux, des vêtements et le ventre plein. (Abou Daoud, Jihad, 145/2747).
Dans ces jours ardus qui coïncidèrent avec le mois de Ramadan, le Noble Pro-
phète r ordonna aux Croyants de rompre leur jeûne, car ils avaient besoin de toute
leur force physique pour gagner la bataille. Tous les Musulmans prêts à combattre
ajournèrent donc leur jeûne jusqu’à leur retour.
La toute première Armée de l’Islam se mit en chemin en direction de Badr et
parvint à la vallée d’Aqiq.
C’est alors que deux hommes, Hubayb ibn Yasaf et Qays ibn Muharris, désireux
de rejoindre l’armée dans l’unique but de prendre une part du butin, se présentèrent.
Le Noble prophète r demanda à Hubayb :
« As-tu débuté cette campagne avec nous ? »
Hubayb lui répondit :
« Non, mais nous vous avons rejoints pour aider notre peuple et revendiquer les
dépouilles. »
Cette fois le Noble Messager r demanda :
« Croyez-vous en Allah et en Son Messager ? »
Ayant répondu par la négative, il reçut l’injonction suivante :
« Alors, repars-donc, car nous ne désirons aucune aide venant d’un idolâtre! »
Hubayb refusant ce refus pour toute réponse affirma:
« Tout le monde sait combien je suis courageux sur le champ de bataille et
connaît les nombreux dégâts que j’occasionne à l’ennemi. Puis-je simplement com-
battre de ton côté en contrepartie d’un butin ? »
Le Messager d’Allah r lui répondit :
« Non, la condition est que tu embrasses l’Islam et ensuite tu pourras te battre à
nos côtés ! »
Peu de temps après, Hubayb revint auprès du Noble Prophète r et réitéra sa
demande. Mais la réponse demeura inchangée.
Deuxième Année de L’hégire 417

Hubayb était confus. Il bénéficiait en effet d’une réputation illustre parmi les
Arabes en raison de ses immenses exploits sur les divers champs de bataille. Malgré
cela, le Noble Prophète r ne lui avait pas donné la permission de combattre parce
qu’il n’était pas musulman.
L’attitude digne du Messager d’Allah r, en dépit de la différence flagrante entre
les deux forces opposées dont toutes les chances avaient été mobilisées, avait pro-
fondément secoué Hubayb t. Il se laissa pendant un moment entraîner dans les
profondeurs de son monde intérieur et put percevoir les lumières d’un royaume de
vérité qu’il n’avait jamais perçu auparavant.
Puis il se leva et courut vers le Messager d’Allah r avec dans son esprit une autre
approche et s’écria avec passion: « Oui je crois en Allah et en Son Messager ! »
Le Noble Prophète r, visiblement heureux lui dit:
«Maintenant, dit-il, tu peux te joindre (à l’armée) comme tu le souhaites!»(Muslim,
Jihad, 150; At Tirmidhi Siyar 10/1558; Waqidi, I, 47; Ibn Sa’d, III, 535).

Cet évènement est tout à fait normatif en matière de foi.


C’est-à-dire qu’indépendamment du degré d’exigence d’une circonstance don-
née, un mauvais procédé ou tout autre moyen ne doit jamais être utilisé pour at-
teindre un but noble. Ce qu’il faut plutôt faire, c’est prendre toutes les précautions
nécessaires et ne garder confiance que dans le Tout-Puissant.
En refusant à Hubayb t la possibilité de joindre l’armée musulmane en raison
de sa non-déclaration de foi musulmane, le Noble Prophète r offre à sa commu-
nauté en devenir un comportement exemplaire et motivé, en termes de foi (iman),
par une profonde sensibilité.
Le Noble Prophète r savait très bien que toutes les formes d’aide et de grâce
viennent seulement d’Allah auprès de Qui il se réfugiait sans cesse et vers Qui il se
tournait en maintes occasions.
Cette approche des choses est sans aucun doute un exemple quintessentiel ainsi
qu’un cas de figure vivant de tawakkul (confiance en Allah seul).
C’est ce que mentionne le verset coranique suivant :

Ƈ Ġƈ ijƆ ĤŽ ÒħƆ đŽ Ĭƈ IJ
ģĻ Ɔ ƇųÒÓ
Ʃ ĭƆ ×Ƈ ùŽ èƆ
« … Allah nous suffit ; Il est notre meilleur garant. » (Al-‘Imrân, 3 : 173).
418 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Hudayfa t raconte :
« Je me rendis à Médine accompagné de mon père Husayl lorsque nous fûmes
arrêtés par des polythéistes qurayshites. Ces derniers nous demandèrent si nous
avions l’intention de rencontrer Muhammad r. Nous répondîmes que nous sou-
haitions seulement nous rendre à Médine. Les Qurayshites ne nous laissèrent partir
qu’après avoir obtenu de nous la promesse de ne pas combattre aux côtés du Pro-
phète r. Quand survint la bataille de Badr, nous informâmes le Prophète r de notre
engagement avec les polythéistes. Le Prophète r nous dit : “N’y prenez pas donc part.
Nous respecterons le pacte conclu avec eux et nous solliciterons l’aide d’Allah contre
eux”. » (Muslim, Jihad, 98).
Cet événement est encore une fois un brillant témoignage de l’admirable véridi-
cité du Noble Prophète r qui s’étendait même à ses ennemis.

Des femmes voulaient également participer à la Bataille de Badr. L’une d’entre


elles se nommait Umm Waraqa c.
Elle s’était précipitée vers le Messager d’Allah r, disant à grand renfort de sup-
plications :
— Ô Messager d’Allah, autorise-moi à t’accompagner pour secourir les blessés
jusqu’à ce qu’Allah m’accorde le martyre.
Le Messager d’Allah r lui répondit
— Reste chez toi et Allah t’accordera le martyre !
Suite à cette conversation, on surnomma Umm Waraqa “shahida” (martyre)
parmi les Compagnons c. Elle qui était remplie d’une insatiable soif du martyre
le devint bien plus tard quand Omar t devint calife car ses esclaves l’étranglèrent
avec une serviette en velours. Informé de sa mort, Omar t proclama : “Allah et Son
Messager ont dit vrai”. Les responsables furent tout de suite capturés et punis. (Abou
Daoud, Salât, 61/591 ; Ibn Hajar, al-Isaba, IV, 505).

Après avoir été informé que les Croyants se dirigeaient vers Badr, Abû Sufyan
modifia sans tarder la trajectoire de la caravane en direction de la côte, laissant Badr
à sa gauche. (Ibn Hishâm, II, 57).
Réalisant ensuite qu’il avait sauvé la caravane, il missionna un envoyé à Quraysh
avec le message suivant :
« Vous vous êtes engagés à protéger votre caravane, vos hommes et vos biens.
Mais à présent que le danger a été repoussé, vous pouvez revenir ! »
Deuxième Année de L’hégire 419

Suite au message d’Abû Sufyan et à l’avis d’Ahnas ibn Sharik, les clans d’Ibn
Zuhra et d’Ibn Ka’b s’en retournèrent. Mais Abû Jahl demeura inflexible :
« Nous ne ferons pas demi-tour, nous irons jusqu’à Badr et y festoierons pen-
dant trois jours. Nous tuerons des chameaux pour manger. Les femmes chanteront
et danseront. Toute l’Arabie entendra parler de nous et nous craindra à jamais ! »
Quand Abû Sufyan eut pris connaissance de la décision des Mecquois de se
mettre en marche indépendamment, il fit cette réflexion : « Ma pauvre tribu… Ceci
doit être l’idée d’Ibn Hishâm (Abû Jahl) ! Sa réticence à faire demi-tour est liée à
son empressement à devenir le leader de son peuple… c’est une transgression ! Et la
transgression est de mauvais augure ! » (Waqidi, I, 43-45 ; Ibn Hishâm, II, 258).
Suivant étroitement la tournure des évènements, le Noble Prophète r se rendit
compte de l’inévitabilité de la bataille, et ce à la vie et à la mort.
Ayant rassemblé ses Compagnons y il leur demanda :
« Que croyez-vous qu’il soit plus approprié : suivre la caravane ou rencontrer
(directement) l’armée de Quraysh ? »
S’exprimant au nom des Muhajirun, Abû Bakr et Omar y assurèrent que tous
étaient prêts à affronter l’armée des idolâtres.
Le Noble Messager r souhaita entendre aussi l’opinion des Ansar.
S’étant dressé droit sur ses pieds, Miqdad Ibn Aswad t déclara :
« Ô Envoyé d’’Allah ! Fais donc ce qui te paraîtra le mieux. Nous ne te dirons
jamais ce qu’ont dit les Israélites à Moïse u : “Va avec ton Seigneur combattre
l’ennemi tandis que nous restons en arrière !” (Al-Mâ’ida, 24).
Aussi vraie que la parole que nous avons prononcée à Aqaba, nous te dirons
plutôt : « Va avec ton Seigneur combattre l’ennemi, et nous combattrons à tes cô-
tés134. » (Al Boukhari, Maghazi, 4 ; Tafsir, 5/4).
C’est alors qu’après Miqdad, Sa’d ibn Mu’adh t prit la parole :
« Nous avons déclaré notre foi en toi et accepté ton message comme étant la
Vérité. Nous nous sommes fermement engagés à toujours faire ce que tu nous de-
manderas. Va donc, ô Messager d’Allah ; fais ce que tu veux, et nous irons avec toi.
Par Celui qui t’a envoyé apporter la Vérité, si tu nous conduis jusqu’à la mer, nous
irons avec toi. Personne ne restera en arrière. Nous ne craignons pas de rencontrer
l’ennemi demain. Nous combattrons avec acharnement et détermination quand la
guerre éclatera. Nous implorons Allah de te montrer ce qui te satisfera. Avance donc,
avec la bénédiction d’Allah. »
134. Ibn Mas’ud t dit : « Je témoigne avoir entendu Miqdad prononcer des paroles d’une telle conviction
que si je les avais prononcées moi-même, j’aurais été prêt à renoncer à toute autre parole.» (Al
Boukhari Maghazi 4; Tafsir, 5/4).
420 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ces paroles de loyauté et d’obéissance provoquèrent un sourire réconfortant et


expressif sur le beau visage du Noble Prophète r.
Après avoir fait une courte invocation en leur faveur, il r déclara :
« Je vous annonce la bonne nouvelle que Dieu m’a promise : l’une des deux troupes
ennemies nous reviendra135. Je vois maintenant leurs chefs mourir sous nos coups. »
(Muslim, Jihad, 83 ; Al-Waqidi, I, 48-49 ; Ibn Hishâm, II, 253-254).

Au moment où l’armée musulmane parvint à Badr, Quraysh était déjà sur place,
campant dans la vallée de Yalyal, derrière une colline de sable, en un point reculé de
Médine. D’autre part, les puits de Badr étaient situés à la lisière de la vallée la plus
proche de Médine. (Ibn Hishâm, II, 259).
Le Noble prophète r, après qu’il eut atteint le puits le plus proche de Badr, dis-
cuta avec les Ansar sur la plus favorable façon d’installer le campement.
Hubab ibn Munzir t prit alors la parole :
« Ce n’est pas le bon endroit pour établir le campement. Il vaudrait mieux avan-
cer davantage, jusqu’au puits le plus proche de l’ennemi, où nous pourrons camper
et creuser un bassin rempli d’eau. Puis nous fermerons les autres puits, de sorte que
nous aurons notre réserve d’eau et qu’ils n’en auront pas. »
Le Prophète de Miséricorde r se rangea de son avis.136 » (Ibn Hishâm, II, 259-260;
Ibn Sa’d, II, 15).

Un groupe d’idolâtres dont Hakim ibn Hizam t apparut dans le but d’obtenir un
peu d’eau du bassin que les Croyants avaient creusé dans le camp. Alors que ces der-
niers voulurent l’en empêcher, le Noble Prophète r intervint et dit : « Laissez-les tran-
quilles ; laissez-les boire de cette eau. » Tous ceux qui y burent furent tués dans la bataille,
sauf Hakim ibn Hizam t qui devait plus tard adhérer à l’Islam. Celui-ci, chaque fois
qu’il voulait prêter serment pour renforcer la force de sa parole, disait : « Par Allah Qui
m’a sauvé de la mort à Badr et qui m’a fait don de la foi (iman)… » (Ibn Hishâm, II, 261).
En permettant à l’ennemi de boire l’eau du bassin, nonobstant le fait que ce
même ennemi chercherait à les abattre quelques instants plus tard, le Noble Pro-
phète r établit ainsi une norme universelle et une façon de répandre la guidance
(islamique). Un comportement bienveillant tel que celui-ci a fini par adoucir maints
cœurs de pierre, ouvrant ensuite une porte vers la lumière de la vérité.

135. Une promessses au verset 7 de la sourate Al-Anfal est la tribu Quraysh, c’est-à-dire la défaite qu’elle
allait subir ainsi et sa mise hors d’état de nuire, tandis que l’autre concerne la grande caravane de
Quraysh provenant de Damas.
136. Selon les dires des autochtones même si les autres collines de sable se déplaçaient tous les cinq ou dix
ans en raison des vents persistants, la colline sur laquelle fut basé le camp du Noble Prophète r resta
stable jusqu’à ce jour.
Deuxième Année de L’hégire 421

Une fois l’armée musulmane bien en place Qa’d ibn Mu’adh t dit : « Ô Messa-
ger d’Allah ta monture sera prête. Si nous gagnons, c’est ce que nous voulons. Dans
le cas contraire tu partiras sur ta monture rejoindre le reste des nôtres. Ceux que tu
as laissés derrière toi t’aiment tout autant que nous. S’ils avaient su que tu partais
en guerre, ils ne seraient pas restés en arrière. Ils te protégeront, te conseilleront et
combattront tes ennemis à tes côtés. »
Le Noble Prophète r remercia Sa’d et implora Allah pour lui. Sa’d t dégaina
ensuite son épée et entreprit de monter la garde. (Ibn Hishâm, II, 260 ; Al-Waqidi, I, 49).
Et pour la dernière fois, le Noble Messager r envoya Omar t auprès des Mec-
quois pour les inciter à faire demi-tour, car il préférait se battre avec d’autres qu’eux.
Hakim ibn Hizâm t agit pour tenter d’éviter le conflit: “Voilà une proposition
honnête, vous feriez bien de l’accepter. Après cela nulle rigueur ne vous sera tenue.”
Mais les paroles bien intentionnées qu’il prononça furent étouffées par l’obsti-
nation d’Abû Jahl qui dit: « Je jure que nous ne ferons pas demi-tour tant que nous
ne serons pas vengés surtout après qu’Allah137 nous y ait mis ! Nous leur donnerons
une telle leçon qu’ils ne pourront plus harceler nos caravanes et les retenir !»
Ces mots galvanisèrent les Qurayshes dans leur intention de se battre. (Al-Waqidi,
I, 61-65).

Les polythéistes mecquois envoyèrent ‘Umayr ibn Wahb et l’éminent cavalier


Abû Usama afin d’estimer l’importance des troupes musulmanes. Après en avoir fait
le tour, ils retournèrent vers les leurs et dirent : “Nous n’avons observé ni chameaux
ou chevaux stériles et corpulents,le nombre d’hommes n’est pas très élevé et ceux-ci
n’ont fait aucune grande préparation. Mais en revanche nous avons constaté qu’ils
étaient unis et qu’ils préféreraient être tués plutôt que de retourner auprès de leurs
familles ! Ils n’ont ni abri pour se protéger ni de quoi se défendre hormis avec leurs
épées !” (AlWaqidi, I, 62).
Omar t raconte :
« La veille de la bataille, le Messager d’Allah r montra, un par un, les lieux où les
notables polythéistes allaient tomber. Par Allah qui l’a envoyé comme prophète de
vérité le jour de la bataille aucun d’eux ne put s’échapper des endroits indiqués. Lors,
ils furent jetés dans un puits, entassés les uns sur les autres. (Muslim, Jannat, 76, Jihad, 83).
137. Les Arabes, au temps de l’ignorance, avaient admis l’existence d’Allah ; en revanche, adorant d’autres
divinités à côté de Lui, ils s’étaient écartés du sentier du Tawhîd (Unicité divine) pour rallier celui du
shirk (associationnisme). Il était donc habituel pour eux, comme on le voit, de mentionner le Nom
d’Allah et d’exprimer ainsi Sa divinité. Cependant ils adoraient les idoles, motivés par le désir de se
rapprocher d’Allah en les utilisant comme supposés intercesseurs et par la croyance selon laquelle
l’honneur devait être gagné par ce biais. (Voir aussi : Al-Ankabût, 61 ; Az-Zumar, 3).
422 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le terrain sur lequel les Croyants avaient campé était particulièrement sableux,
ce qui rendait toute marche difficile. Comme l’eau se faisait de plus en plus rare aussi
ils étaient confrontés à une pénurie. Il devenait même difficile de trouver de l’eau
pour procéder aux ablutions. Ces contraintes, ajoutées à la supériorité flagrante des
polythéistes du point de vue du nombre et de la force, donna à Satan des excuses
suffisantes pour essayer de susciter l’effroi dans le cœur des Musulmans.
Mais il avait assez plu à verse cette nuit-là pour inonder la vallée. Les Croyants
stockèrent aussitôt de l’eau et l’utilisèrent abondamment pour prendre soin tant de
leurs propres besoins que ceux de leurs animaux. Dans le même temps, la pluie avait
emporté la poussière sableuse et arrangé par conséquent le terrain, ce qui l’avait ren-
du plus ferme. D’autre part, cela avait forcé les Mecquois à s’arrêter, car ces derniers
ne pouvaient pas se déplacer hors de leur campement. Allah U accorda en outre aux
Croyants un état de sommeil apaisant comme le dit ce verset coranique :

įƈƈ ÖħĠƇ óıž ƈ ĉƆ ĻžĤƈ ÅÓĨÅÓ ĩùĤÒīĨħ ƈ


ž ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ĢƇ õžƈ ĭƆ ƇĺIJ
ƈ Ɔ
Ɔ įƇ ĭŽ Ĩ
ž Ùƃ ĭƆ ĨƆ ÈöÓ
Ɔ đƆ ĭĤÒ
ƫ ħƇ ġĻƇ ýž ƈ ĕƆ ƇĺðŽ Ìƈ
Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ
ĦÒïƆ ĜŽ ƆŶÒįƈƈ ÖÛƈ Ɔ מ áƆ ƇĺIJ
Ɔ ħŽ ġƈ
Ƈ ÖijĥƇ ĜƇ ĵĥƆ Đ
Ɔ ćƈ Ɔ ÖóŽ ĻƆ Ĥƈ IJ ƈ ƪ õƆ äŽ ƈòħŽ ġĭ
Ɔ ĪÓĉƆ ĻŽ ýĤÒ Ƈ Đ ƈ
Ɔ ÕƆ İñŽ ƇĺIJƆ
« Et quand Il vous enveloppa de sommeil comme d’une sécurité de Sa part, et
du ciel Il fit descendre de l’eau sur vous afin de vous en purifier, d’écarter de vous
la souillure du Diable, de renforcer les cœurs et d’en raffermir les pas ! [vos pas]. »
(Al-Anfâl, 8 : 11; Tabari, Tafsir, IX, 256-261).

Le Noble Prophète r pria tout au long de la nuit comme l’a confirmé ‘Alî t :
« Je me souviens très clairement que dans la nuit précédant la bataille, nous
nous étions tous endormis excepté le Messager d’Allah. Il avait prié et supplié Allah
jusqu’au matin. » (Ibn Huzayma, II, 52).
À l’aube le Messager d’Allah r appela à la prière : “À la prière (salât), ô serviteurs
d’Allah !” Puis après la prière il exhorta les Croyants au Jihad. (Ahmad, I, 117).
Avant que l’ennemi eût assuré ses positions face aux Croyants, le Noble Pro-
phète r, une flèche à la main, passa en revue les rangs musulmans. Il fit aligner
chaque Croyant afin de les compter tous. Lorsqu’il vit Sawad ibn Ghaziya t quelque
peu avancé, il lui toucha légèrement le ventre du bout de sa flèche. Ce dernier lui dit:
«Ô Messager d’Allah tu m’as fait mal. Allah t’a envoyé avec la Vérité. J‘exige
réparation de ta part !»
Le Messager d’Allah r, sans agitation souleva sa chemise et découvrit son ventre.
Les compagnons tentèrent de le dissuader : « Sawad, c’est le Messager d’Allah ! ».
Mais Sawad t rétorqua: « Nul n’est supérieur à un autre en matière de justice. »
Deuxième Année de L’hégire 423

Le Messager d’Allah lui dit alors : « Fais-moi ce que je t’ai fait! »


Sawad se jeta alors sur le Prophète r et embrassa son ventre.
Le Prophète r lui demanda: « Qu’est ce qui t’a poussé à le faire? »
Il t répondit: « Ô Messager d’Allah ce que tu vois (l’imminence de la bataille)
va bientôt se produire et j’ai voulu que ma dernière action soit que ma peau touche
la tienne ! » Le Noble Prophète r fit alors une invocation en sa faveur. (Ibn Hishâm, II,
266-267; Ibn Sa’d, II, 15-16).

Les forces en présence s’alignèrent dans la plaine de Badr le 17e jour du mois
de Ramadan. C’était une journée très chaude. Les Arabes jusque-là motivés par la
protection de leur parenté se battaient pour des raisons tribales. La religion rem-
plaça ensuite le tribalisme, l’esprit religieux exacerba davantage l’esprit de corps qui
existait depuis toujours au sein d’une même parenté, et ce à tel point que des pères
levèrent leurs épées à l’encontre de leurs propres fils, des oncles à l’encontre de leurs
neveux et des frères les uns contre les autres.
Ce jour Abû Bakr t croisa l’épée avec son propre fils, Abû Ubayda ibn Jarra t
avec son père et Hamza t avec son frère.
Ce fut une scène incroyable. Allah le Très-Haut proclame en effet :

ħıƇ ĬƆ IJŽ óĺƆ ØƄ óĘÓƈ ĠĴ óìƇÈIJųÒ ƈ ģĻƈ×øĹĘ ƈ ģƇ ÜÓƈ ĝƆ ÜƇ ÙƄ ÑƆ ĘÓ


ƈ ÝĝƆ ÝĤŽ Òīƈ ĻÝÑƆ ĘĹ
ƈ Ęƈ ÙƄ ĺÆħġƇ ĤƆ ĪÓ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ʃ ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ž Ɔ Ġ Ɔ ïŽ ĜƆ
òÓāƆ ÖŽ ƆŶÒĹĤƈ IJŽ Ƈ Ŷƪ Øƃ ó×đƈ ĤƆ ğƆ Ĥƈ ðƆ ĹĘ
ƈ Īƈƪ ÌÅÓýƆ ĺīĨĮƈ ƈóāĭƈƆ ÖïƈƇ ĺËƆ ĺųÒ
Ɔ Ɔ Ž ž Ƈ Ƈ Ʃ IJ
Ž ħ ƈıĻĥƆ ᎠĨƈ
Ɔ īƈ ĻŽ đƆ ĤŽ ÒĸƆ Èò
Ɔ Ž Ž ž
ƆŽ
« Il y eut déjà pour vous un signe dans ces deux troupes qui s’affrontèrent :
l’une combattait dans le sentier d’Allah ; et l’autre, était mécréante. Ces derniers
voyaient (les croyants) de leurs propres yeux, deux fois plus nombreux qu’eux-
mêmes. Or Allah secourt qui Il veut de Son aide. Voilà bien là un exemple pour
les doués de clairvoyance ! » (Al-‘Imrân, 3 : 13).
Parvenus sur le champ de bataille, remplis d’arrogance, les idolâtres se perdirent
dans leur propre prétention parce qu’ils se considéraient invincibles.
Le Coran décrit ainsi leur condition :

ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ÒŽ ijƇĬijġƇ ÜƆ ƆźIJ


ģĻƈ
ƈ ×øī Ɔ Đ Ɔ ĪIJ
Ɔ ïƫ āƇ ĺƆ IJ
Ɔ öÓĭĤÒÅÓ ƪ ƆÐ ƈòIJÒ Ɔ óƃ ĉƆ Öħ Ɔ İ ƈòÓĺƆ îīĨÒŽ ijäƇ óƆ ì Ɔ īĺƆ ñĤƪ ÓĠ Ɔ
ÕƆ ĤÓƈ ĔƆ ƆźĢÓƆ ĜƆ IJ Ɔ Ɔ ðŽ Ìƈ IJ Ƅ éƈ Ĩ ƈƩ
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ÓĩƆ ĐŽ ÈĪƇ ÓĉƆ ĻŽ ýĤÒ
ƪ ħƇ ıƇ ĤƆ īƆ ĺƪ ô Ɔ ćĻ Ƈ Īij
Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ĺÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖƇųÒ
Ʃ IJƆ ųÒ
įƈ Ļ×ĝƈ Đĵ ĥĐÿġĬĪÓ ƈ ÝÑęƈ ĤÒÚÅÒ ƈ óÜÓ ĩĥĘħġĤòÓäĹĬƈ Ìƈ IJöÓ ƈ ĭĤÒīĨ ƈ
ƪ Ɔ ĦƆ ijŽ ĻƆ ĤŽ ÒħƇ ġƇ ĤƆ
ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƆƆ Ž ƆƆ ƪ ƆƆ ŽƇ ƪ Ƅ Ɔ ž Ɔ
ÔÓƈ ĝƆ đƈ ĤŽ Òïĺ
Ƈ ïƈ ü
Ɔ ƇųÒ
Ʃ IJƆ ųÒ
Ɔ Ʃ ĖÓ Ƈ ìƆ ƆÈĹƆ žĬƈ Ìƈ ĪƆ IJŽ óƆ ÜƆ ƆźÓĨĴ Ɔ ƈ Ƈ Ĩ
Ɔ òƆ ÈĹžĬÌƈ ħŽ ġĭ
ƈ
ž Åĸ Ƅ ƈóÖĹ
ƈ
Ɔ žĬÌƈ ĢÓƆ ĜƆ IJƆ
424 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Et ne soyez pas comme ceux qui sortirent de leurs demeures pour repousser
la vérité et avec ostentation publique, obstruant le chemin d’Allah. Et Allah cerne
ce qu’ils font. Et quand le Diable leur eut embelli leurs actions et dit : «Nul parmi
les humains ne peut vous dominer aujourd’hui, et je suis votre soutien.» Mais,
lorsque les deux groupes furent en vue l’un de l’autre, il tourna les deux talons et
dit : «Je vous désavoue. Je vois ce que vous ne voyez pas ; je crains Allah, et Allah
est dur en punition». » (Al-Anfâl, 8 : 47-48).
Leur vanité fut anéantie par le rocher de la Fierté divine :

ƈ Ʃ ģĻƈ
ĪƇ ijġƇ ÜƆ ħƇàÓıƆ ĬƆ ijĝƇ ęĭƈ ĻùƆ ĘƆ ųÒ ƈ Ɔ ĝƇ ęĭƈ ƇĺÒŽ IJóƇ ęƆ Ġ ƈ
ƪ Ƈ ƈ ×øī Ɔ Đ Ɔ ÒŽ IJïƫ āƇ ĻƆ ĤħŽ ıƇ ĤƆ ÒijƆ ĨŽ ƆÈĪij Ɔ īĺƆ ñĤƪ ÒĪƈƪ Ì
ƈ Īij
Ɔ óƇ ýƆ éŽ ƇĺħƆ ĭƪ ıƆ äĵ
ĪIJ Ɔ ĤƆ Ìƈ ÒŽ IJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ īĺƆ ñĤƪ ÒIJƆ Ɔ ×Ƈ ĥƆ ĕŽ Ƈĺħƪ ƇàØƃ óƆ ùŽ èƆ ħŽ ƈıĻŽ ĥƆ ĐƆ
« Ceux qui ne croient pas dépensent leurs biens pour éloigner (les gens) du
sentier d’Allah. Or, après les avoir dépensés, ils seront pour un sujet de regret.
Puis ils seront vaincus, et tous ceux qui ne croient pas seront rassemblés vers
l’Enfer. » (Al-Anfâl, 8 : 36).

Le soutien des anges


Le Noble Prophète r considéra d’un regard les idolâtres : ces derniers étaient
environ un millier. Ses Compagnons y quant à eux étaient au nombre de trois cent
treize138. Il r se tourna en direction de la Ka’ba, leva ses mains au ciel et fit cette
invocation :
138. Bara t dira plus tard : « Nous avions l’habitude de nous dire que le nombre de Croyants à Badr était
exactement le même que le nombre de ceux de l’armée de Talut qui passèrent la rivière ; soit trois cent
treize. » (Al Boukhari, Maghazi, 6 ; At Tirmidhi Siyar, 38/1598).
Deuxième Année de L’hégire 425

« Seigneur, je T’implore d’accomplir la promesse que Tu m’as faite. Si ce groupe


de croyants était anéanti, Tu ne serais plus jamais adoré ici-bas ! »
Sa supplication était si fervente, ses mains si élancées vers le ciel que son man-
teau commença à glisser de son épaule.
Le fidèle Abû Bakr t, qui était près de lui à cet instant-là, retint le vêtement du
Messager d’Allah r et le replaça sur son épaule, en disant :
« Ô Messager d’Allah ! N’implore pas ton Seigneur si fort, Il t’accordera certai-
nement ce qu’il t’a promis. »
Dans le cœur des Croyants y l’enthousiasme était aussi présent.
Bien plus, peu de temps après, la grâce du Très-Miséricordieux (Ar Rahman)
fondit sur eux :

ħĠƇ ïƫ ĩƈ ĨĹ ƈƆ
Ƈ žĬÈħŽ ġƇ ĤƆ ÔÓ Ɔ åƆ ÝƆ øÓ
Ž ĘƆ ħŽ ġƇ Öƪ ò
Ɔ ĪijƆ ƇáĻĕƈ ÝƆ ùŽ ÜƆ ðŽ Ìƈ
īƪ Ñƈ ĩƆ ĉŽ ÝƆ Ĥƈ IJĴ ƈ ƈ Ùƈ ġƆ Ðŵ ƈ ĩĤŽ ÒīĨ ƈ ƅ Ɔ
Ɔ óƆ ýŽ ÖƇ ƪ źÌƈ ƇųÒ
Ʃ įƇ ĥƆ đƆ äÓ
Ɔ ĨƆ IJ Ɔ īĻ
Ɔ ĘîóŽ Ĩ Ƈ Ɔ Ɔ ž ėĤŽ ÉÖƈ
ħĻġƈ è ƈ ïĭƈ Đ ƈ īĨ ƈ ƈ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ Ʃ
õĺ ƈõĐųÒĪƈÌųÒ Ž ƪ źÌƈ óƇ āŽ ĭĤÒÓ
ƪ ĨƆ IJ Ɔ ħŽ ġƇ Öij Ƈ ĥƇ ĜƇ įƈÖ
« (Et rappelez-vous) le moment où vous imploriez le secours de votre Sei-
gneur et qu’Il vous exauça aussitôt : › Je vais vous aider d’un millier d’Anges dé-
ferlant les uns à la suite des autres. Allah ne fit cela que pour (vous) apporter une
bonne nouvelle et pour qu’avec cela vos cœurs se tranquillisent. Il n’y a de victoire
que de la part d’Allah. Allah est Puissant est Sage. » (Al-Anfâl, 8 : 9-10).

ĪIJ
Ɔ óƇ ġƇ ýŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ųÒ ƈ Ɔ Ɔ ƅòïŽ ×ƈÖųÒ
Ɔ Ʃ ÒŽ ijĝƇ ÜÓƪ ĘƆ ÙƄ Ĥƪ ðÈħŽ ÝĬƇ ÈIJ
Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ħƇ ĠƇ óƆ āƆ ĬƆ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
Ėƅ ƆźÆÙƈ àƆ ƆŻáƆ Öƈ ħġƇ Öƫ ò ƈ Ɔ Ƈ ęƈ ġŽ ĺīĤƆ ƆÈīĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĥŽ Ĥƈ Ģij
Ɔ ħŽ ĠƇ ïƪ ĩƇĺĪÈħŽ ġĻ Ɔ Ɔ Ƈ Ƈ ĝƇ ÜƆ ðŽ Ì
ƈ
ħİƈ ƈòijŽ ĘƆ īĨħƈ Ƈ ÜƇ ÉŽ ĺIJÒŽ ijĝƇ ÝÜƆ IJÒŽ IJóƈ×āÜĪƈ ƈ Ùƈ ġƆ Ðŵ ƈ ĩĤŽ ÒīĨƈ
Ž ž Ġij Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ Ž Ɔ ÌĵĥƆ ÖīĻ Ɔ ĤõĭƆ Ĩ
Ƈ Ɔ Ɔ ž
ĹĨƈ ijžƈ ùƆ Ĩ ƈ ƈ ƈ ƅ ƈ Ɔ ÖħġƇ ÖòħĠƇ îïƈ ĩĺÒñÃƆ İƆ
Ƈ ÙġƆ ÐŵĩƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩ ž ĖźÆÙùƆ ĩŽ íƈ ƫƆ Ž Ž ŽƇ
« Allah vous a donné la victoire, à Badr, alors que vous étiez humiliés. Crai-
gnez Allah donc. Afin que vous soyez reconnaissants ! (Allah vous a bien donné
la victoire) lorsque tu disais aux croyants ; «Ne vous suffit-il pas que votre Sei-
gneur vous fasse descendre en aide trois milliers d’Anges» ? Mais oui ! Si vous êtes
endurants et pieux, et qu’ils [les ennemis] vous assaillent immédiatement, votre
Seigneur vous enverra en renfort cinq mille Anges marqués distinctement. » (Al-
‘Imrân, 123-125).
426 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ce jour-là, AllahU soutint les Croyants avec mille anges.(Al Boukhari, Maghazi, 4, 6
; Muslim, Jihad, 58).

Puis comme récompense de leur sincérité Il U accrut leur nombre à trois mille
puis jusqu’à cinq mille.
Même si le Noble Messager r avait prédit les endroits précis où les idolâtres
finiraient par être tués et qu’il obtiendrait par la grâce divine la victoire, il ne cessa
de supplier le Tout-Puissant jusqu’à la pointe de l’aube, priant ardemment au point
de s’oublier lui-même.
Cet état est une des manifestations les plus essentielles de la véritable soumis-
sion. Allah le Très-Haut n’attend rien de nous, si ce n’est de Lui être en tous points
soumis. Et il n’y a pas de façon plus ferme de gagner la proximité d’Allah que de Lui
soumettre nos supplications, en toute humilité et déférence.
Ce fameux jour de Badr, on entendit le Noble Prophète r s’exclamer :
« Voici l’Ange Jibrîl tenant la bride de son cheval au-dessus de la poussière de la
bataille (et qui vient à votre secours) ! » (Al Boukhari, Maghazi, 11).
Huwaytib ibn Abduluzza fit plus tard la confession suivante :
« J’étais parmi les idolâtres le jour de Badr et j’y ai vu d’incroyables scènes et,
au-dessus de tout, les anges. Ils tuaient les hommes de Quraysh, entre ciel et terre,
et les emmenaient prisonniers. Je me suis dit aussitôt : “Cet homme doit être sous la
protection d’Allah” ! Pendant longtemps je n’ai rien dit à propos de ce que j’ai vu. »
(Al-Hakim, III, 562/6084).

Abou Daoud al-Mazini t donne également ce témoignage :


« Le jour de Badr, j’ai poursuivi un idolâtre pour le frapper et le tuer. Avant
que mon épée ne l’atteigne, je vis sa tête tomber sur le sol. Je me rendis compte que
quelqu’un d’autre, un ange, l’avait frappé. » (Ahmad, V, 450).
Selon Anas t dès que les idolâtres commencèrent à s’approcher, le Noble Pro-
phète r dit :
— Accourez vers un Paradis dont la largeur est équivalente à la distance qui sé-
pare les Cieux et la Terre.
Umayr ibn Humam al-Ansari t demanda alors :
— Ô Messager d’Allah, un Paradis dont la largeur est équivalente à la distance
qui sépare les Cieux et la Terre ?
— Oui, répondit le Prophète de Miséricorde r.
— Que c’est grandiose ! remarqua Umayr t.
— Qu’est-ce qui te fait dire cela ? demanda le Messager d’Allah r.
Deuxième Année de L’hégire 427

— Par Allah, dit Umayr t, seulement l’espoir de faire partie de ces gens-là.
— Tu en fais partie, affirma le Noble Prophète r.
Umayr t sortit alors quelques dattes de son carquois et se mit à les manger.
Puis il t se dit :
— Demeurer en vie jusqu’à terminer de manger mes dattes serait une chose bien
longue ! Il jeta alors les dattes qu’il avait en sa possession puis combattit jusqu’à la
mort. (Muslim, Imara, 145 ; Ahmad, III, 137).
La Bataille de Badr débuta par un mubaraza, c’est-à-dire une épreuve de force,
un duel entre deux personnes. Les trois combattants qui furent choisis parmi les
Musulmans, Hamza, ‘Alî et Ubayda y triomphèrent de leurs adversaires directs.
Ubayda t, cependant, reçut une blessure fatale qui s’avéra mortelle.
Il mourut en martyr non sans avoir entendu les mots apaisants du Noble Pro-
phète r en sa faveur : « Tu l’as fait ! » (Waqidi, I, 69-70).
Suite à cela, les forces opposées se rapprochèrent les unes des autres.
Le Noble Prophète r ne donna pas la permission de lancer immédiatement
l’offensive parce que beaucoup de Qurayshites hésitaient à se battre, sachant que la
caravane n’était plus menacée et comme les Musulmans tardaient aussi à attaquer,
l’hésitation des Mecquois augmenta d’autant plus que leur détermination globale
était à présent sapée. De plus, l’élimination des trois combattants qu’ils avaient en-
voyés pour rencontrer (et combattre) les trois challengers musulmans leur avaient
donné des frissons.
Ces moments silencieux où un malaise certain s’était installé furent brisés par le
cri vil et perçant d’Abû Bakr t :
« Ne vous laissez pas berner parce que deux ou trois personnes ont été tuées…
Allez de l’avant ! » (Waqidi, I, 71).
Stimulés, les idolâtres lancèrent alors une offensive totale. Mais les supplica-
tions sincères et authentiques issues des rangs musulmans et les cris incessants et
tonitruants “Allah’u Akbar” emplirent d’effroi les idolâtres ; les Musulmans dont les
cœurs étaient emplis de foi, se tenaient tous en état d’extase.
Le moment fatidique de l’offensive vint finalement et le Noble Prophète r don-
na l’ordre à ses combattants de la lancer. Les deux parties croisèrent le fer. La bataille
commença de manière acharnée ; et cet acharnement crût de plus en plus.
Le Noble Prophète r, quant à lui, allait et venait dans les rangs musulmans,
cherchant l’aide du Tout-Puissant et, récitait pour encourager les Compagnons y :
« Leur rassemblement sera bientôt mis en déroute, et ils fuiront. » (Al-Qamar,
54 : 45).
428 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Proclamant dans le même temps :


« Celui qui garde patiemment son terrain face à l’ennemi et tombe martyr, le
Tout-Puissant le placera sûrement dans le Paradis. Le Paradis Firdaws attend ceux
qui tomberont aujourd’hui martyrs. Elancez-vous et attaquez ! » (Ibn Hishâm II, 267-268).
Puis il dit à Abû Bakr t qui était à ses côtés :
« Bonne nouvelle ! Jibrîl et les anges sont venus à notre aide ! »
Il r se saisit ensuite de quelques cailloux et les jeta en direction des idolâtres en
disant :
« Que leurs visages se noircissent ! » (Ibn Hishâm, II, 267).
À ce moment précis, un vent féroce se mit à souffler vers l’ennemi et déplaça
tant de poussière qu’ils purent à peine se distinguer les uns des autres.

Les lions de Badr


‘Alî t témoigne :
« Le jour de la bataille de Badr, nous cherchions refuge derrière le Messager
d’Allah r alors qu’il était celui d’entre nous qui était le plus proche de l’ennemi, et il
fut le plus vaillant de tous ce jour-là. » (Ahmad, I, 86).
À propos du courage du Noble Messager r Bara t apporte une vue similaire :
« Par Allah, quand la bataille devenait de plus en plus féroce, nous cherchions
refuge dans le Messager d’Allah r. La personne la plus courageuse à nos yeux était
celle qui assez brave pour se maintenir sur la même ligne que lui. » (Muslim, Jihad, 79).
Les Compagnons y firent montre d’un grand héroïsme et d’un esprit de sacri-
fice tout au long de la bataille.
Hamza t particulièrement, “le Lion d’Allah” fut en tous points un exemple
brillant de courage. Umayya ibn Khalaf interrogea plus tard le Compagnon Abdur-
rahman ibn Awf t sur l’identité de “l’homme qui pendant la bataille avait comme
marque une touffe de plumes d’autruche placée sur sa poitrine”.
Abdurrahman t lui répondit :
« C’était Hamza ibn Abdulmuttalib, répondit Abdurrahman.»
Umayya lui dit alors :
« Il fut la cause de tout ce qui nous est arrivé en ce jour. « (Ibn Hishâm, II, 272).
Sur les traces de son oncle Hamza t, ‘Alî t fit montre d’un grand courage,
éliminant ses adversaires les uns après les autres. ( Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, IV, 97).
Deuxième Année de L’hégire 429

En récitant à cheval des vers relatifs au rajaz139, Abû Jahl se disait imperméable
à n’importe quelle tentative visant à se venger de lui, et ce quelle que soit la bataille
engagée. Il disait avec arrogance : “Je suis né pour des jours comme ceux-ci !” (Ibn
Hishâm, II, 275).

Abdurrahman ibn Awf t rapporte cette anecdote :


« Alors que j’étais debout dans les rangs le jour de la bataille de Badr, j’ai regardé
à droite et à gauche et j’ai aperçu deux très jeunes adolescents médinois (ansari) alors
que j’eusse préféré me trouver parmi des hommes plus forts. L’un d’eux me fit signe
sans que l’autre s’en aperçoive et me demanda si je connaissais Abû Jahl.
— Oui, répondis-je, pourquoi m’interroges-tu à son sujet ?
— J’ai appris qu’il insultait le Prophète r, je jure que si je l’aperçois, je ne le
quitterai pas tant que l’un de nous n’aura pas achevé l’autre.
Je fus très surpris de ses propos et voilà que l’autre me fit signe et me dit la même
chose. Je sentis brusquement une énorme satisfaction d’être aux côtés de ces deux
jeunes.
Soudain, j’aperçus Abû Jahl qui tournait à cheval sur le champ de bataille et leur
lançai : “voilà l’homme que vous cherchez”. Ils se jetèrent alors sur lui et le frappèrent
jusqu’à la mort avec leurs épées. J’appris plus tard que ces deux jeunes, s’appelaient
Mu’adh ibn Afra et Mu’adh ibn Amr y. » (Al Boukhari, Maghazi, 10 ; Muslim, Jihad, 42).
Mu’adh ibn Amr t a relaté également l’évènement :
« Je me lançai dans la direction d’Abû Jahl, et quand il fut à ma portée, je le
frappai de mon sabre dans le but de lui porter le coup fatal. Mais son fils, ‘Ikrima, me
frappa à son tour et me coupa la main qui resta attachée par un lambeau de chair. Je
continuai néanmoins à me battre le reste de la journée, traînant ma main derrière
moi. Quand elle m’eut trop gêné, je me penchai et posai le pied sur ma main, puis je
me redressai pour l’arracher » (Ibn Hishâm, II, 275-276).
La bataille terminée, le Noble Prophète r demanda où se trouvait Abû Jahl et à
cet effet envoya Abdullah ibn Mas’ud t pour le chercher.
Abdullah ibn Mas’ud t, qui finit par le trouver couché par terre, relate la
conversation qui s’en suivit :
139. Rajaz est le nom donné à un bahir dans la prosodie arabe. Littéralement il signifie ”frémir“ et son
rythme ressemble à une rajza, ou une chamelle – d’où son nom – qui, du fait de sa trop grande
délicatesse, frémit au lever. Rajaz signifie également “rugir”, auquel cas le nom aurait pu dériver du
chant rugissant lié aux hymnes de guerre pour lesquelles le rajaz a été préféré (Cehande, A.-Çetin
N. Milli Eğitim Bakanlığı İslam Ansiklopedisi “recez” entry, IX, 657). La réunion rythmique et
accentuée d’un tempo lent et rapide permet son exécution par le biais d’une multitude d’instruments
différents, évoquant ainsi la mobilisation d’une variété de sentiments. Rendant possible l’expression à
la fois de la joie et de la tristesse, le rajaz aurait d’ailleurs une quinzaine de sous-branches. (Tahir’ul-
Mevlevi Edebiyat Lügati p. 120 “recez” article en relation).
430 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Je le trouvais et le reconnus alors qu’il vivait ses dernières minutes. Je pressais


son cou avec mon pied et lui dis:
« Ennemi d’Allah, n’as-tu pas été humilié ? »
Abû Jahl qui n’avait rien perdu de son arrogance répondit :
« Comment cela ? Je ne suis qu’un homme tué par les siens. Dis-moi, qui a gagné
la bataille ? Montre-moi seulement un homme qui fût supérieur à moi parmi tous les
hommes de votre peuple qui ont été tués aujourd’hui. »
Puis, faisant référence au fait que j’avais posé mon pied sur sa poitrine, il me fit
la remarque suivante :
« Tu as atteint un sommet difficile à escalader, berger ! »
Après une courte pause, il demanda :
« Quoi qu’il en soit, dis-moi… Qui est le vainqueur aujourd’hui ?»
— Allah et Son Messager, dis-je.
Puis, sans plus tarder, je le mis hors d’état de nuire avec sa propre épée. Je revins
ensuite auprès du Prophète d’Allah r et lui annonçai que j’avais tué Abû Jahl.
Il r remercia et loua Allah Y puis déclara :
« Il était le Pharaon de sa communauté ! » (Al Boukhari, Maghazi, 12; Ahmad, I, 444; Ibn
Hishâm, II, 277; Waqidi, I, 89-90).

Le fils d’Ummu Haritha c mourut martyr à Badr à cause d’une flèche perdue
provenant des rangs ennemis. Elle vint auprès du Prophète d’Allah r et dit :
« Si mon fils Haritha t est au Paradis, ô Messager d’Allah, je serai patiente et
attendrai sa récompense ; dans le cas contraire, je pleurerai toutes les larmes de mon
corps pour lui ! »
Elle fut cependant consolée par les merveilleuses paroles du Noble Messager r :
« Il y a plusieurs niveaux au Paradis, Ummu Haritha, et ton fils a atteint le plus
haut d’entre eux, le Firdaws’ul-A’la. » (Al Boukhari, Jihad, 14 ; Ahmad, III, 272).
Alors qu’elle s’en retournait, Ummu Haritha c afficha sur son visage un sourire
radieux, tout en se disant à elle-même:
« Regarde ! Regarde Haritha ta haute destinée. » (Ibn Athir, Usd’ul- Ghaba, I, 426).
Bien que ce fût une bataille acharnée liée à la survie de l’Islam, les bienheureux
Compagnons y qui y participèrent furent en même temps considérés comme les
plus vertueux de tous les Musulmans. Pareillement, des anges mobilisés par le Tout-
Puissant pour cette bataille, en une vague incomparable de foi inspirant l’enthou-
siasme, obtinrent une Gloire supérieure aux autres anges, comme corroboré par la
conversation entre Gabriel u et le Noble Prophète r.
Deuxième Année de L’hégire 431

Quand Gabriel u lui demanda comment il considérait ceux qui avaient parti-
cipé à Badr, le Noble prophète r répondit :
« Nous les considérons comme les plus vertueux des Musulmans ! »
À cela Gabriel u rétorqua par des paroles similaires : « Nous considérons aussi
que les anges qui ont pris part à la Bataille de Badr sont parmi les meilleurs anges ! »
(Al Boukhari, Maghazi, 11).

La bataille s’acheva vers midi par une victoire musulmane décisive. En tout qua-
torze Musulmans moururent martyrs, à la différence des soixante-dix idolâtres, en
incluant Abû Jahl, qui firent face à leur destin sur le champ de bataille. Aussi coura-
geux qu’ils fussent, les infortunés idolâtres ne burent pas le vin de la victoire comme
ils l’avaient terriblement espéré, mais le venin d’une mort malheureuse. Au lieu de
chanter, leurs femmes pleurèrent leur mort. Loin de remplir leurs appétits du butin
qu’ils rêvaient de saisir au terme d’une victoire qui ne devait jamais être, les idolâtres
finirent par disparaitre dans les fosses de l’Enfer.
Revêtu de son armure, le Noble Prophète r s’avança sur le champ où eut lieu la
bataille et se mit à déclamer le verset coranique suivant :

óÖƇ ïĤÒ ĪijƫĤijĺIJďĩåĤÒĦõıĻø


Ɔ ƫ Ɔ ƆƇ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ ŽƇ Ɔ
« Leur rassemblement sera bientôt mis en déroute, et ils fuiront. » (Al-Qamar,
54 : 45).

Un verset à propos duquel Omar t a déclaré :


« Lorsque ce verset fut révélé à La Mecque je me suis demandé qui allait être
mis en déroute et défait. Et quand vint le jour de Badr et que j’entendis le Messager
d’Allah r le déclamer, je réalisai alors que Quraysh était le groupe en question. Pour
moi, la signification de ce verset prit son sens ce jour-là. » (Ibn Sa’d, II, 25 ; Ibn Kathir,
al-Bidaya, III, 312).

Et Ibn ‘Abbâs t fournissant d’autres commentaires sur le verset suivant dit :

ƈòÒijƆ ×ĤŽ ÒòÒƆ î ƈ ÙĩđĬƈ ÒijĤïÖīĺñƈ ĤÒĵĤÌƈ óÜħĤƆÈ


ħıĨijĜÒijĥèƆÈIJÒóęĠųÒ
Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ŽƆ Ž ƫ Ɔ Ɔ ƃ ŽƇ Ʃ Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ ƪ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ ƆƆ ŽƆ
« Ne vois-tu point ceux qui troquent les bienfaits d’Allah contre l’ingratitude
et établissent leur peuple dans la demeure de la perdition ? (Ibrâhîm, 14 : 28).
« Par Allah, l’allusion vise les idolâtres de Quraysh tandis que la grâce d’Allah
repoussée n’est autre que le Messager d’Allah r. La demeure de la perdition vers
laquelle ils ont dirigé leur peuple n’est autre que le feu vers lequel ils l’ont entraîné à
Badr. » (Al Boukhari, Maghazi, 8 ; Tafsir, 14/3).
432 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La bataille de Badr, qui aboutit au triomphe de l’Islam et de la Foi, est pleine


d’exemples significatifs portant sur la manière dont Allah, Y aide Ses serviteurs
pieux et sincères.
Après cette victoire massive, et dans le but d’avertir les Croyants au danger de
l’orgueil (ujub), Allah, Gloire à Lui, révéla le verset coranique suivant :


 ĨƆ ò ƈ ÛƆ ĻĨòðŽ Ìƈ ÛƆ ĻĨòÓĨIJħıĥƆ ÝĜƆ ųÒ ƈ ĤIJħİijĥÝĝÜħĥĘ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ īƪ ġÃĤƆ IJ
Ɔ ŽƆ Ɔ īġÃ
Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƆƩ ƪ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ƈ ŽƆ Ž Ɔ Ɔ
ħĻĥƈ Đ ƈ īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÒĹĥƈ ×ĻĤƈ IJ
ďĻĩƈ øųÒĪƈÌÓĭùèÅŻÖƆ įƇ ĭŽ Ĩ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ ƃ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ ŽƇ Ɔ
« Ce n’est pas vous qui les avez tués : mais c’est Allah qui les a tués. Et lorsque
tu lançais (une poignée de terre), ce n’est pas toi qui lançais : mais c’est Allah qui
lançait, et ce pour éprouver les croyants d’une belle épreuve de Sa part ! Allah est
Audient et Omniscient. » (Al-Anfâl, 8 : 17).
Le pouvoir exercé par l’homme n’est liée qu’à l’appréciation divine (taqdir). C’est
pour cela qu’il est déclaré 140:

ƈ čƈ đĤŽ Òĵƈ ĥƈ đĤŽ ÒģƩƈ ĤÓƈÖĢƪ Òƈ ØƆ ijĜƇ ĢƆ IJĢƆ ijéƆ ĤƆ
ħĻ Ɔ ž Ɔ ƪ Ɔ Ž
«Il n’est de force ni de puissance qu’en Allah le Très Haut le Sublime».
Tous les êtres non existants dans la prééternité ne sont venus à l’existence que
par le biais de la grâce et de la bienveillance d’Allah, Gloire à Lui, le Très-Haut, le
Tout-Puissant. Par conséquent, la volonté universelle d’Allah I englobe et com-
prend toute la création et ses occurrences. Cela signifie que l’origine de la volonté et
de la puissance se trouve dans le Tout-Puissant Lui-même. Pourtant, parce que les
êtres humains sont venus en ce monde dans le cadre d’un test, ils ont été dotés d’une
volonté particulière et d’une aptitude au bien et au mal. Réaliser cette aptitude par la
pratique a été laissé à leur gré.

Le Retour de Badr
Demeurer à proximité immédiate d’un champ de bataille pendant trois jours
supplémentaires, et ce après une victoire, était une pratique coutumière du Noble
Prophète r. Une fois les trois jours écoulés à Badr, il ordonna qu’on lui apporte son
chameau. On l’apprêta donc.
Le Noble Prophète r se déplaça à pied et ses Compagnons y le suivirent en se
demandant : “Le Messager d’Allah doit certainement se souvenir de quelque chose”.
140. Un des récits de la parole prophétique enseigne que cette formule est un des trésors du Paradis : «Ô
‘Abdallah Ibn Qays ! Vais-je pas t’apprendre une parole qui fait partie des trésors du paradis: Il n’y a de
force et de puissance que par Allah.» Al Boukhari Hadith 6610. (Note de l’Éditeur).
Deuxième Année de L’hégire 433

Finalement il s’arrêta près d’un puits asséché dans lequel des idolâtres avaient
été jetés et il se mit à les appeler chacun par leur nom :
« Eh Abû Jahl ! Eh Umayya ibn Khalaf ! Eh Utbah ibn Rabia! Eh Shaybah ibn
Rabia! »
Puis il poursuivit :
« N’aurait-il pas été mieux pour vous d’obéir à Allah et à Son Messager ? Nous
avons trouvé que la promesse de notre Seigneur s’est réalisée ! Et vous, avez-vous trouvé
que la promesse de votre Seigneur s’est réalisée ? »
« Es-tu en train de t’adresser à des cadavres, ô Messager d’Allah ? demanda
Omar t. Comment peuvent-ils t’entendre et répondre alors qu’ils sont réduits à
l’état de carcasse ? »
« Par Celui Qui tient la vie de Muhammad dans Sa Main Puissante, ils peuvent
m’entendre mieux que vous! Mais ils n’ont pas la force de répondre ! » (Al Boukhari,
Maghazi, 8 ; Muslim, Jannat, 77).

À la fin de la bataille, Gabriel u vint dire au Prophète d’Allah r :


« Muhammad ! Allah le Tout-Haut m’a envoyé vers toi et m’a ordonné de ne te
quitter que lorsque tu seras totalement satisfait de notre aide. Es-tu satisfait ? »
— Oui je le suis ! assura le Noble Prophète r.
Sur ce, Gabriel u le quitta. (Al-Waqidi, I, 113 ; Ibn Sa’d, II, 26-27).
Une brise de joie emplit Médine tandis que l’énorme victoire à Badr jeta coup
sur coup La Mecque dans le deuil à un tel point qu’Abû Lahab en mourut de chagrin.
(Ibn Hishâm, II, 289). La promesse divine fut ainsi accomplie.

Mais, la joie des Croyants fut de courte durée lorsqu’ils apprirent le décès de
Ruqayya c l’honorable fille du Noble Prophète r peu de temps après la bataille.
Le traitement des captifs
Dès son retour de Médine le Noble Messager r se mit à discuter avec ses Com-
pagnons, notamment avec Abû Bakr, Omar et ‘Alî y, sur la façon la plus appropriée
de traiter les captifs.
Abû Bakr t fut le premier à donner son avis:
«Ce sont nos parents, nos proches, ô Messager d’Allah. Je suggère donc que
nous définissions leur rançon puis que nous les libérions. Ce que nous recevrons
d’eux sera un moyen d’accroître notre force dans notre lutte contre les non-croyants.
Et, si tel est le désir d’Allah, ils finiront aussi par être guidés et nous assister. »
Ensuite le Noble Prophète r demanda à Omar t:
« Quel est ton avis, fils de Khattab ? »
434 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Omar t répondit:
« C’est hors de question, ô Messager d’Allah ! Je ne suis pas du même avis qu’Abû
Bakr t. Permets-moi de leur couper la tête et j’agirai de même personnellement avec
mes proches. Permets à ‘Ali t d’agir de même envers son frère Aqil et à Hamza t
d’agir de même envers son frère ‘Abbâs… jusqu’à ce qu’Allah U apporte cet avis en
pleine lumière et de façon à ce qu’il n’y ait plus aucune trace de faiblesse et de vulné-
rabilité dans nos cœurs quant aux idolâtres ! Ces captifs sont les leaders de l’idolâtrie
et de l’oppression ! »
Le Noble Prophète r adopta l’avis d’Abû Bakr t avec l’espoir que la captifs
soient finalement guidés et que par leur intermédiaire des générations futures en
viennent à adorer Allah seul. (Muslim Jihad, 58; At Tirmidhi Siyar 18/1567; Ahmad I 30-31, 383-
384; Al-Waqidi I 107; Ibn Sa’d II, 22).

Suite à ces discussions, les captifs furent remis en liberté en contrepartie d’une
rançon. Ceux qui ne purent pas payer furent libérés sans contrepartie financière.
Ceux qui savaient lire et écrire furent, quant à eux, formés afin de transmettre
leurs connaissances à dix enfants de Médine. C’était à ce prix qu’on considérait qu’ils
avaient payés leurs rançons.
Zayd ibn Thabit t, le futur scribe du Coran qui plus tard aura la lourde tâche
de le compiler, faisait partie des enfants qui apprirent à lire et à écrire par ce biais.
(Ahmad, I, 247 ; Al-Waqidi, I, 129 ; Ibn Sa’d, II, 22).

Allah, Gloire à Lui, a déclaré à propos des captifs et de la rançon exigée d’eux :

Ăƈ òŽ ƆŶÒĹĘ ƈ īíƈ ᎠĺĵÝèĴóøƆÈįĤƆ Īij Ɔ ƈ Ɔ ĠÓ


Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ġƇ ĺĪ Ɔ ÈĹƈžƅ ×ĭƆ ĤĪÓ Ɔ ĨƆ
ƆźijŽ Ĥƪ ħĻġƈ è õĺ ƈõĐųÒIJØóìŴÒƈ ïĺ Ƈ ƈóƇĺƇųÒ Ɔ ĻƆ ĬŽ ïĤÒ
Ʃ IJÓ ƫ ĂƆ óƆ Đ Ɔ ĪIJ
Ɔ ïĺƇ ƈóÜƇ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ɔ Ɔ
ƈ ÒŽ ijĥƇ ġƇ ĘƆ ħĻčƈ ĐÔÒñƆ ĐħƇÜñŽ ìƆ ƆÈÓĩĻĘ
Óĩƪ Ĩ ƈ ƈ Ʃ īĨ ƈ ƈ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ž Ɔ ħŽ ġƇ ùƪ ĩƆ ĤƆ ěƆ ×Ɔ ø
Ɔ ųÒ Ɔ ž ÔÓƄ ÝƆ Ġ
ħĻèƈ ò òijęĔųÒĪƈÌųÒÒijĝÜÒIJÓ×ƈĻĈźŻèħÝĩĭƈ Ĕ
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƆƩ ƪ ƆƩ Ž Ƈ ƪ Ɔ ƃžƆ ƃ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ
« Un prophète ne devrait pas faire de prisonniers avant d’avoir prévalu [mis
les mécréants hors de combat] sur la terre. Vous voulez les biens d’ici- bas, tan-
dis qu’Allah veut l’au-delà. Allah est Puissant et Sage. N’eût-été une prescription
préalable d’Allah, un énorme châtiment vous aurait touché pour ce que vous avez
pris [de la rançon]. Mangez donc de ce qui vous est échu en butin, tant qu’il est
licite et pur. Et craignez Allah, car Allah est Pardonneur et Miséricordieux. » (Al-
Anfâl, 6 : 67-69).
Deuxième Année de L’hégire 435

Omar t raconte :
« Au matin je me rendis auprès du Messager d’Allah r, je le trouvai assis en
compagnie d’Abû Bakr t. Tous deux étaient en train de pleurer.
Je dis alors : « Ô Messager d’Allah ! Dis-moi, qu’est-ce qui te fait pleurer, toi et
ton compagnon ? Si les larmes me montent aux yeux, je pleurerais avec vous sinon,
je m’efforcerais de pleurer d’attendrissement à cause de vos pleurs. »
Le Messager d’Allah r répondit :
« Ce qui me fait pleurer est ce à quoi tes Compagnons y auraient été exposés à
cause de leur avis d’accepter la rançon. Leur torture se manifesta devant moi si claire-
ment qu’elle me fut plus proche que cet arbre. » (Ahmad, I, 31 ; Muslim, Jihad, 58).
Allah, Gloire à Lui, n’était pas satisfait de la proposition de libérer les captifs
sous couvert de rançon car l’ennemi n’avait pas encore été traité de manière décisive
et l’Islam n’avait pas encore atteint la force à laquelle il était destiné et aussi avant que
la division (fitna) n’ait été entièrement éradiquée. Il émit par conséquent un avertis-
sement à l’endroit des croyants. L’acceptation de la rançon portait sur les effets liés
aux désirs mondains alors que le Tout-Puissant désirait que les Musulmans prennent
en considération l’Au-delà. La prise de captifs ennemis de la Vérité avant qu’ils ne
soient écrasés était alors susceptible de mettre en danger le bonheur des Musulmans.
Comme on ne peut pas les tenir responsables du risque d’erreur dans un avis
juridique (ijtihâd), et garantit que les participants à la bataille de Badr ne goutèrent
pas au châtiment divin d’autant plus qu’il n’existe aucune punition pour un acte qui
n’a pas été explicitement interdit à l’avance le Tout-Puissant pardonna aux Croyants
et déclara licite la rançon qu’ils avaient saisie.

Allah, Gloire à Lui, ordonna que les captifs et les esclaves soient traités avec
honneur et gentillesse. (Voir, An-Nisâ, 36).
De nombreux hadiths rapportent les paroles du Prophète de Miséricorde r à ce
sujet et ainsi ses dernières paroles avant son décès furent :
« La prière (salât), soyez particulièrement attentifs à la prière (salât)… Et crai-
gnez Allah pour ceux qui sont sous votre garde. » (Abou Daoud, Adab, 123-124/5156 ; Ibn
Maja, Wasaya, 1).

Marur ibn Suwayd t rapporte :


« J’ai vu Abû Dharr t vêtu d’un habit semblable à celui de son esclave. Je lui
en demandai la raison. Il me rappela qu’il avait insulté un homme au temps du Pro-
phète en déshonorant sa mère et que le Prophète r lui avait alors dit :
436 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

“Il subsiste encore en toi un reste de la jahiliyya. Ce sont vos frères et vos serviteurs
qu’Allah a mis sous votre autorité. Que celui donc qui a son frère sous son autorité le
nourrisse de la même nourriture que la sienne et qu’il l’habille des mêmes vêtements
que les siens. Qu’il ne lui impose pas ce qu’il ne peut supporter et s’il le charge de
quelque chose, qu’il l’aide”. » (Al Boukhari, Itq, 15 ; Muslim, Ayman, 40).
Abou Aziz, le frère de Mus’ab ibn Umayr t fit ce témoignage :
Pendant la bataille de Badr, j’ai été fait prisonnier et livré à un groupe d’Ansar et
le Messager d’Allah r fit cette recommandation : «Traitez bien les prisonniers!»
Pour respecter cet ordre les Ansars avec qui j’étais me donnaient le matin et le
soir du pain et se contentaient alors de dattes. Chaque fois que l’un d’eux possédait
un morceau de pain, il nous l’offrait. Parfois, embarrassé par leur hospitalité, je don-
nais le pain au premier d’entre eux qui passait : il me le rendait sans en prendre une
seule bouchée.» (Al-Haythami, VI, 86 ; Ibn Hishâm, II, 288).
Une telle bienveillance du Noble Prophète r et de ses Compagnons y, à un
moment où l’oppression et l’injustice étaient de mise, est propre à fournir un modèle
exemplaire pour toute l’humanité, et ce jusqu’à L’Heure Finale. Abordant les gens
avec une bonté suprême et authentique, le Prophète d’Allah r laissait simplement
agir sa conduite globale (hal) lorsqu’il les appelait au chemin de la Vérité et c’est
seulement après avoir adouci leurs cœurs qu’il commençait à expliquer verbalement
l’Islam. Touchés par cette approche compatissante (des choses), beaucoup de captifs
de Badr finirent par accepter l’Islam.
Non seulement l’Islam ne donne aucun crédit à l’esclavage141, mais de plus il ne
le favorise pas. Cela dit, l’Islam a vu cette pratique comme étant une réalité sociale
enracinée et son abolition soudaine aurait généré un chaos dans l’équilibre social.
C’est pour cela qu’il ne fut pas dans l’immédiat entièrement rejeté. Mais afin de pré-
venir d’éventuels abus et systèmes de traite, l’Islam l’a réglementé en vertu de son
attachement à certains principes et l’a perfectionné en matière de loi, et ce autant
que possible.
Etant donné que la guerre est une réalité existante parmi les nations et qui,
apparemment, ne diminuera pas jusqu’à l’Heure finale, le besoin de lois qui pro-
tègent ceux qui ont perdu leur liberté est un principe qui lui durera toujours. Par
conséquent, au lieu de l’abolir, ce qui aurait totalement négligé le fait susmentionné,
l’Islam considère qu’il est davantage bénéfique d’instaurer des principes de protec-
tion et de régler les lois relatives à l’esclavage.
En vertu des principes qu’il met en œuvre, l’Islam permet le rapprochement de
l’esclave et du maître, cherchant par là une voie ouvrant à la libération (du passé).
141. La captivité et l’esclavage sont ici évalués ensemble, pour la seule raison que la source de l’esclavage
est la captivité ; les esclaves sont ceux qui ont été faits prisonniers de guerre.
Deuxième Année de L’hégire 437

Dans le cas où par exemple une personne tue accidentellement une autre, l’Is-
lam exige préalablement à titre de compensation l’affranchissement d’un esclave,
puis le paiement du prix du sang estimé en argent ou en chameaux, d’un montant
négocié avec la famille de la victime.
Similairement, une faute commise durant le hajj exige la même réparation, à
savoir l’affranchissement d’un esclave et il en va de même pour le fait d’avoir renié
un serment, commettant ainsi un zihar142, jusqu’à rompre le jeûne de Ramadan.
En matière de grandeur liée à certains actes, il n’est pas rare de voir ceci com-
paré à “ l’affranchissement de maints et maints esclaves”, un élément qui met l’accent
sur la vertu en ouvrant la voie à la liberté d’autrui. Le revers de la médaille est que
l’asservissement illégal est considéré comme faisant partie des plus grands péchés.
L’Islam exige catégoriquement le meilleur traitement à l’égard de ceux qui
étaient auparavant asservis pour une raison ou une autre.
L’Islam exhorte toujours le maître à nourrir convenablement son esclave,
comme il jugerait bon de le faire pour lui-même, à le vêtir de la même manière, à ne
pas le charger d’un travail excédentaire alors qu’il jeûne et s’occupe de ses propres
besoins.
Affranchir un esclave est toujours un acte considéré comme un parmi les meil-
leurs moyens de salut pour le croyant. L’Islam a introduit en faveur de l’esclave des
droits tels qu’une observation stricte de leur contenu suggère qu’il n’est pas aisé
d’acquérir des esclaves, car le fait même d’en acquérir n’est guère différent que de
devenir esclave (soi-même).
L’Islam a par conséquent fermé les portes de l’esclavage autant que le permet-
taient les circonstances ; pleinement ouvertes sont en revanche ses portes de sorties
qui promeuvent à chaque occasion l’affranchissement d’esclaves.

Ce récit pourrait illustrer notre propos: Le Noble Prophète r suggéra à son


oncle ‘Abbâs, relativement aux captifs de Badr :
«Eh Abbas mon oncle! Tu es de tous les prisonniers le plus riche et le plus consi-
dérable. Rachète-toi toi-même, ainsi que tes neveux ‘Aqîl, et Nawfal ibn Hârith, et ton
allié ‘Otba, qui tous les trois sont trop pauvres pour pouvoir se racheter.»
Abbas répliqua: «Ô Muhammad, répliqua ‘Abbâs, j’étais croyant (musulman)
et les Quraishes m’ont forcé à aller avec l’armée.»
142. La zihar ou assimilation incestueuse était la pratique alors répandue parmi les hommes arabes
d’apparenter leurs épouses et leurs mères et de considérer qu’il n’est plus approprié pour eux de
poursuivre toute relation conjugale avec elles. L’Islam a interdit cette pratique et a exigé des comptes
à ceux qui l’ont exercée en échange d’une indemnisation (kaffara).
438 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le prophète r lui répondit: «Allah sait si tu as été croyant ou non. Si ce que tu af-
firmes est vrai, Allah te récompensera sûrement pour cela. Mais en ce qui concerne les
apparences, tu as pris les armes contre nous et par conséquent tu dois payer ta rançon.»
Puis il prit les 800 dirhams d’or d’Abbâs comme butin.
Abbâs plaida: «Prends les comme rançon ô Messager d’Allah !»
Le Prophète dit: «Non c’est un présent d’Allah aux Musulmans.»
Abbâs se plaignit: « Ça veut dire que je vais mendier jusqu’à la fin de mes jours!»
Le Prophète de Miséricorde dit: «Qu’en est-il de l’or que tu as remis à ton épouse
Ummu’l Fadl en quittant La Mecque ?»
Abbas demanda : «De quel or parles-tu ?»
Le Prophète dit : «Je parle de l’or que tu as remis à ton épouse en lui disant que
s’il t’arrivait malheur, elle devrait distribuer cet argent entre tes quatre fils, à savoir
‘Ubaydullah, Fadl, Qusam et ‘Abdullah.»
Étonné par ces paroles, ‘Abbâs t s’exclama :
«Par Allah qui t’a envoyé comme Prophète, aucune autre personne en dehors
d’Ummul’ Fadl avait connaissance de ce fait. Sans aucun doute, tu es le Messager
d’Allah.»(Ahmad I 353 ; Ibn Sad IV 13-15).
Parmi les captifs de Badr se trouvait également Abû’l-As Ibn Rabî, mari de
Zaynab c et gendre du Noble Prophète r. Abû’l-As était un marchand hautement
considéré à La Mecque. Sa mère, Hala bint Khuwaylid était la sœur de l’honorable
Khadîdja c l’épouse du Noble Prophète r pour qui Abû’l-As était plus un fils qu’un
neveu.
Au plus fort de leur inimitié, les idolâtres de Quraysh avaient incité les gendres
du Noble Messager r à “divorcer des filles de Muhammad et de les lui renvoyer pour
éviter qu’il ne s’inquiète davantage !”
Abû’l-As t fut quant à lui l’objet de provocations similaires de la part des ido-
lâtres qui lui promirent le libre choix de se remarier ultérieurement du moment qu’il
acceptât de divorcer. Mais Abû’l-As t rejeta rigoureusement leur offre en insistant
sur le fait qu’il préférait demeurer auprès de sa femme, peu importe ce qui pourrait
advenir en ce qui le concerne.
Dès que les Mecquois envoyèrent la rançon exigée pour libérer leurs compa-
triotes qui avaient été faits prisonniers à Badr, Zaynab c, pour payer la rançon de son
mari envoya à Médine le collier que sa mère Khadîdja c lui avait offert à l’occasion
de son mariage. Le Prophète r, très ému à la vue du collier et dit à ses Compagnons :
« Zaynab a envoyé ce montant pour la rançon d’Abû’l-As, si vous trouvez bon de
libérer ce prisonnier et de rendre son bien à Zaynab, alors faites-le. »
Deuxième Année de L’hégire 439

Les Compagnons y acceptèrent, libérèrent Abû’l-As t et firent en sorte que le


collier revienne chez sa propriétaire légitime. Le Noble Messager r promit à Abû’l-
As t, avant de le liberer, d’envoyer Zaynab c à Médine à condition que sa libération
reste secrete entre eux. (Ibn Hishâm, II, 296-297 ; Abou Daoud, Jihad, 121/2692 ; Ahmad, VI, 276).

Wahb ibn ‘Umayr se trouvait également parmi les captifs de Badr. ‘Umayr, son
père, était parmi les idolâtres de Quraysh non seulement l’homme le plus vif d’esprit
mais aussi le plus véhément. Depuis toujours, c’était l’homme qui se trouvait der-
rière chaque assaut lancé contre les Musulmans. Un jour, à Hijr, se remémorant avec
tristesse et regret le sort qui avait touché ses pairs jetés dans les puits de Badr, il dit à
Safwân ibn Umayya qui était assis à ses côtés :
— Il est inutile de continuer à vivre après avoir appris ce qui leur est arrivé !
— Tu as raison, remarque Safwân, si je n’avais pas de dettes et une famille dont
je crains la perte, j’irais chez Muhammad et je le tuerais, mettant ainsi un terme à sa
mission, et maîtriserais le mal. Je dirais simplement que je suis venu pour mon fils
captif. D’ailleurs, d’après ce que je sais, il parcourt même les rues sans crainte !
Safwân se réjouit d’entendre de telles paroles.
— Écoute, dit ce dernier, abandonne-moi tes dettes et je m’acquitterai de leur
montant quel qu’il soit. Pour ta famille, je les considérerai comme ma propre famille
et je leur donnerai tout ce dont ils auront besoin tant que je serai vivant.
Homme de parole, ‘Umayr fit aiguiser son épée et l’enduisit de poison. Safwân
contribua à sa cause en lui fournissant un chameau et de la nourriture pour le voyage.
Peu de temps après, ‘Umayr arriva à Médine et se rendit directement à la mos-
quée à la recherche du Prophète r. Il mit pied à terre près de la porte de la mosquée,
attacha son chameau et ceignit son épée.
Omar t, le voyant se diriger vers la mosquée en brandissant son épée, se dit :
« C’est ‘Umayr, l’ennemi d’Allah. Il n’est venu ici que pour commettre quelque
mauvaise action, avant qu’il ne se rende dans la mosquée auprès du Noble Prophète. »
Puis il dit au Noble Prophète r :
«Ô Messager d’Allah ! ‘Umayr est venu en brandissant son épée !»
Le Noble Prophète r répondit calmement:
«Envoie-le moi, Omar !»
L’ayant saisi par la sangle de son épée, Omar t traîna ‘Umayr à l’intérieur de
la mosquée et exhorta les Ansar à “ être sur leur garde pour protéger le Messager
d’Allah r de cet homme mauvais et indigne de confiance.”
440 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r, lorsqu’il le vit traité de la sorte, dit à Omar t :


«Relâche-le ! Et toi, ‘Umayr, approche !»
Et il lui demanda la raison de sa venue.
Umayr répondit: « Je suis venu pour mon fils qui est captif. Et je m’attends à ta
générosité concernant sa libération.»
Le Noble Prophète r s’enquit:
«Dans ce cas, pourquoi cette épée accrochée à ton cou ?»
Umayr répondit habilement:
«Au diable les épées, quel avantage nous ont-elles apporté jusqu’à présent ?»
Le Noble Prophète r déclara :
«Dis-moi la vérité, Pourquoi es-tu venu ici ? Ne serait-ce pas pour raison autre
que le fait que ton fils soit entre nos mains ? Qu’as-tu donc dit à Safwân à Al-Hijr ?»
Umayr marmonna :» Qu’aurais-je bien pu lui dire ?»
Le Noble Messager r lui rappela alors mot pour mot la conversation qu’il avait
eue avec Safwân et ajouta :
“Allah s’est interposé entre vous et vos plans et vous a empêché de commettre ce
que vous aviez à l’esprit !”.
‘Umayr t demeura un temps stupéfait, puis finit par dire :
« Je suis témoin que tu es le Messager d’Allah ! Nous avons l’habitude de rejeter
tous les bienfaits que tu nous as apportés et toute révélation venant de toi. Mais ma
conversation avec Safwân ibn Umayya n’a été entendue de personne. Par Allah, je
suis certain que seul Allah a pu te la faire connaître. Louange à Allah qui m’a amené
à toi et que Lui-même me guide (vers l’Islam).»
Il attesta alors qu’il n’y a de Dieu qu’Allah et que Muhammad est le Messager
d’Allah et devint ainsi musulman.
Puis le Noble Prophète r dit à ses Compagnons :
«Apprenez la religion et le Coran à votre frère et libérez son prisonnier.»
L’ordre du Noble Prophète r fut promptement exécuté.
Après un certain temps, ‘Umayr t dit au Noble Prophète r :
«Ô Messager d’Allah ! J’étais un homme qui tentait d’éteindre la lumière d’Allah
et torturait tous ceux qui embrassaient l’Islam. Aujourd’hui, je voudrais que tu me
donnes la permission de me rendre à La Mecque pour inviter les idolâtres qurays-
hites à rejoindre les rangs d’Allah et de Son Messager. Si Allah le veut, ils seront bien
guidés.»
Deuxième Année de L’hégire 441

Le Noble Prophète r lui donna la permission de partir.


Ignorant la façon dont les évènements se déroulaient, Safwân ibn Umayya disait
entre temps aux idolâtres de La Mecque :
« Vous allez bientôt recevoir des nouvelles qui vous feront oublier la douleur de
Badr !” Mais, en fait, il était anxieux, car il demandait à chaque caravane qui arrivait
en ville s’il y avait quelque nouvelle de ‘Umayr. Quelqu’un finalement lui annonça
qu’il avait embrassé l’Islam.
Quant à ce dernier, dès son retour à La Mecque, il ne perdit pas de temps et
commença à prêcher et à inviter les idolâtres à l’Islam. Ceux-ci tentèrent de le réfré-
ner, mais sans succès. Cependant, bon nombre adhérèrent à l’Islam à la suite de ses
interventions, hormis Safwân.
Un jour, ‘Umayr t le croisa près de la Ka’ba et lui dit : « Tu es l’un des plus
éminents notables de la tribu de Quraysh. Penses-tu réellement que ces pierres que
tu adores et auxquelles tu offres des sacrifices méritent d’être le fondement d’une
religion ? »
Safwân fut incapable de dire un mot, réduit à un infrangible silence. (Ibn Hishâm,
II, 306-309 ; Al-Waqidî, 125-128 ; Ibn Sa’d, IV, 199-201).

Cet évènement a depuis été célébré selon le sens de cette sentence : « Vivez la vie
de celui qui est venu pour vous tuer. »
La nouvelle selon laquelle tous les notables de Quraysh avaient été tués et le
spectacle montrant soixante-dix captifs emmenés à Médine les mains liées à leurs
cous avaient tôt fait de plonger dans le désespoir les autochtones : idolâtres, hypo-
crites et Juifs.
Abdullah ibn Ubbay et ses acolytes, déplorant que « le vent de la victoire ait
tourné en faveur du Prophète », n’eurent pas d’autre solution que de prêter allé-
geance au Noble Prophète r et de signifier leur accordance avec l’Islam. (Al Boukhari,
Tafsir, 3/15; Waqidi, I, 121).

Quelques prescriptions relatives au butin


Comme aucune règle concernant le butin n’avait pas été révélée, des désaccords
émergèrent quant à sa distribution après la bataille de Badr.
Parmi les protagonistes, Sa’b ibn Abî Waqqâs t, dont le frère tomba martyr à
Badr, se rendit auprès du Noble Prophète r en tenant dans sa main une épée ravie
à Sa’id ibn As qu’il avait tué au cours de la bataille. Il suggéra au Messager d’Allah r
que cette épée lui revienne de droit.
442 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Dans ce contexte, où nombre d’incidents et requêtes survinrent le premier ver-


set de la sourate Al-Anfal fut révélé avant même que les croyants aient quitté Badr et
distribué le butin :

ÒŽ ijéƇ ĥƈ ĀŽ ƆÈIJ ƈ ƈ ƈ ĢÓ ƈ ęƆ ĬƆŶÒīƈ Đ


Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ÒŽ ijĝƇ ÜÓƪ ĘƆ ĢijøƇ óĤÒ IJų
ƪ Ɔ Ʃ Ɔ
Ƈ ęĬƆŶÒģƈ ĜƇ ĢÓ Ɔ ğƆ ĬƆ ijƇĤƆÉùŽ ĺƆ
īĻ ƈƈ ƈ Ɔ ħġƇ ĭƈ ĻƈÖÚÒ
Ɔ ĭĨËŽ Ĩħ
ƫ ÝĭƇ ĠĪƈ Ƈ ÌįƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ÒŽ ijđĻ
Ƈ ĈÈIJ Ɔ Ž Ž Ɔ ðƆ
« Ils t’interrogent au sujet du butin. Dis : «Le butin est à Allah et à Son mes-
sager.» Craignez Allah, maintenez la concorde entre vous et obéissez à Allah et à
Son messager, si vous êtes croyants. » (Al-Anfal, 8 : 1).
Ainsi que, le Noble Prophète r put répartir équitablement le butin entre les
Croyants près de Médine. (Ahmad, I, 178; V, 323-324; Abou Daoud, Jihad, 144-145/2737-2744).
Un autre verset, le quarante et unième de la même sourate fut révélé ultérieure-
ment. Ce verset relate avec force de détails la répartition du butin :

 ÖƆ óĝƇ ĤŽ Òĸñƈ Ĥƈ IJ
ĵ ƈ ƈ ƈ ĪƆÉĘÅƅ ĹüīĨħ
Ĥƈ IJįùĩìų ƈ Ýĩĭƈ ĔÓĩĬƆÈÒijĩĥĐÒIJ
Ž Ɔ ĢijøƇ óĥ ƪ Ɔ Ƈ Ɔ Ƈ Ƈ ž ƪ Ɔ Ž Ɔ ž ƇŽ Ɔ Ɔƪ Ž ƇƆŽ Ɔ
ƈ ƪ ÖħÝĭĨÆħÝĭĠĪƈ ƈ ùĩĤŽ ÒIJĵĨÓÝĻĤŽ ÒIJ
 ĥƆ ĐÓ
ĵ Ɔ ĭƆ ĤŽ õĬƆ ƆÈÓĨƆ IJ
Ɔ ųÓƈ ŽƇ Ɔ ŽƇ Ƈ
ÌģĻƈ
ƈ ×ùĤÒ
ƪ īƈ ÖÒŽ IJ
Ɔ īĻƈ ĠÓ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƆƆ Ɔ
ƅ
óĺïƈ ĜƆ ÅĹü ģĠĵĥĐųÒIJĪÓ ƈ đĩåĤÒĵĝÝĤÒĦijĺĪÓ ƈ ĜóęĤÒĦijĺÓĬïƈ ×Đ
Ƅ Ž Ɔ ƈž Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ
« Et sachez que, de tout butin que vous avez ramassé, le cinquième appar-
tient à Allah, au messager, à ses proches parents, aux orphelins, aux pauvres,
et aux voyageurs (en détresse), si vous croyez en Allah et en ce que Nous avons
fait descendre sur Notre serviteur, le jour du Discernement: le jour où les deux
groupes s’étaient rencontrés, et Allah est Omnipotent). » (Al-Anfal, 8 : 41).
Conformément à ce verset, 1/5ème du butin de guerre revient à Allah, Son Mes-
sager, ses proches, aux orphelins, nécessiteux et voyageurs. Après avoir examiné les
besoins des membres de sa famille, le Noble Prophète r déposa le reste au trésor avec
la part du butin qui lui échut pour qu’il soit consacré à couvrir les besoins des Musul-
mans et les dépenses de l’armée.(Al Boukhari, Fara’id, 3, Khumus, 1, Nafaqat, 3; Muslim, Jihad 49).
Amr ibn Abasa raconte :
« Le Messager d’Allah nous conduisit dans la prière faisant face à un chameau,
au cœur du butin de guerre, tel un sutrah143. Après les salutations finales, il arracha
une touffe de poils d’un flanc de l’animal et dit : “ Mon droit à votre butin n’excède
pas ceci, et un cinquième vous revient”. » (Abou Daoud, Jihad, 149/2755).
143. Un sutrah est un rideau ou un objet pouvant servir de couverture. Plus précisément c’est un objet
placé devant celui qui prie dans le but d’empêcher d’autres personnes de passer devant lui.
Deuxième Année de L’hégire 443

Le Messager d’Allah r, alors qu’il n’avait souvent rien à faire cuire chez lui et
que l’âtre restait éteinte pendant plusieurs mois d’affilée, distribuait tout ce qu’il pos-
sédait aux nécessiteux. Nombre de récits similaires notifient ce fait. Son attitude à cet
égard est manifestée de façon éclatante dans le récit suivant rapporté par Anas t:
« On apporta au Messager d’Allah r des biens d’Al-Bahrayn d’une importance
sans précédent.
Le Messager d’Allah r dit : “Portez-les à la mosquée !”
Puis il sortit pour faire la prière sans s’y intéresser davantage. Mais après la fin
de la prière, il s’assit près de ces richesses et commença à les partager à chaque per-
sonne qu’il voyait » (Al Boukhari, Salât, 42 ; Jizya, 4, Jihad, 172).

La sourate Al-Anfal fut révélée au cours de la deuxième année de l’Hégire. Et


dans la mesure où une grande partie fournit des détails sur la bataille de Badr, sa
révélation eut cours pendant les quelques jours précédant et suivant la bataille. Elle
est également surnommée “la sourate de Badr”.

Le degré de martyr
Le degré de martyr est dans ce monde l’ultime et plus sublime des degrés que le
croyant puisse atteindre. Quand bien même le plus bas degré du Paradis est meilleur
que le monde entier, le martyr, en vertu de la sublimité de son rang et de l’ampleur de
sa récompense préfèrerait revenir en ce bas-monde et mourir incessamment martyr.
Allah, Gloire à Lui, déclare :

ƈ Ʃ īĨ
ųÒ ƈ ƈ Ɔ ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ž ƄØóƆ ęĕŽ ĩƆ ĤƆ ħŽ Ýƫ Ĩ
Ƈ IJŽ ÈųÒ ƈ ×øĹ
Ɔ ĘħŽ ÝƇ ĥŽ ÝĜƇ īÑĤƆ IJƆ
Īij
Ɔ đƇ ĩƆ åŽ ĺÓ ƈ Ɔ ÙƄ ĩèòIJ
Ɔ ĩƪ Ĩ
ž óƄ ĻŽ ì Ɔ Ž Ɔ Ɔ
« Et si vous êtes tués dans le sentier d’Allah ou si vous mourez, un pardon de
la part d’Allah et une miséricorde valent mieux que ce qu’ils amassent. » (Al-‘Imrân,
3 : 157).

Sa’d ibn Abî Waqqâs t raconte l’évènement suivant :


« Un homme fit son entrée alors que le Messager d’Allah r dirigeait la prière.
Ayant pris sa place dans la rangée, il fit l’invocation suivante : “Ô Allah ! Accorde-
moi le meilleur de ce que tu accordes à Tes serviteurs justes !”
La prière achevée, le Messager r d’Allah demanda :
“Qui est celui qui fit ce doua ?”
444 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’homme répondit: “C’est moi”.


Le Messager d’Allah r lui dit: “Et bien ton cheval s’affaissera et tu tomberas mar-
tyr dans la voie d’Allah”. » (Al-Hakim, I, 325/748).
Nombre de Compagnons y dont les noms furent cités par le Noble Prophète r
et pour lesquels il pria pour leur pardon et leur bien-être finirent également martyrs.
Tel est le cas de Amr ibn Aqwa t qui, peu de temps après avoir reçu le privilège
d’être nommé par le Noble Prophète r, mourut martyr à Khaybar.(Muslim, Jihad, 123,
132; Al Boukhari, Maghazi, 138).

L’annonce du martyr futur de nombre de ses Compagnons y pour lesquels


il pria est une autre preuve de l’excellence du rang de martyr. Habitués à écouter
ces révélations (de sa propre bouche), les Compagnons y finirent par les concevoir
comme autant de “nouvelles chanceuses” de leur prochain martyr.
Selon une narration d’Abû Qatada t, le Noble Prophète r se leva et nous rap-
pela que “le combat au service d’Allah et la foi en Allah constituent les meilleurs actes.»
Un homme se leva alors : “Ô Prophète d’Allah, si j’étais tué au service d’Allah,
penses-tu que mes péchés seraient effacés ?”
Le Prophète r répondit : “Oui, si tu fais montre de constance, d’abnégation et
si tu fais face à l’ennemi sans jamais lui tourner le dos. C’est ce que m’a annoncé
Gabriel”. (Muslim, Imarah, 117 ; At Tirmidhi Jihad, 33/1712).
Un autre hadith stipule :
« Allah pardonne tous les péchés du martyr, excepté la violation des droits d’au-
trui. » (Muslim, Imarah, 119).
À un autre moment, le Prophète de Miséricorde r dit à ses Compagnons y :
« Cette nuit, j’ai vu en rêve deux hommes qui sont venus à moi, m’ont fait grimper
à un arbre et m’ont introduit dans une demeure. C’était la meilleure demeure qu’il m’a
été de voir. Ils m’ont dit : “ Concernant cette demeure-ci, il s’agit de la demeure des
martyrs”.» (Al Boukhari, Jihad, 4 ; Janaiz, 93).
Le Noble Prophète r donnait ses conseils avec compassion et soutenait les fa-
milles des martyrs et, dans le même temps, encourageait les Compagnons à désirer
le degré de martyr.
Jâbir t raconte :
« On apporta au Prophète r le corps de mon père qui avait été mutilé144. On
le plaça devant lui. Je voulus alors lui découvrir le visage, mais certains m’en empê-
chèrent.
144. La mutilation (muslah) consistait à couper les oreilles, le nez, d’autres parties du corps et les yeux du
cadavre du défunt tué au combat. Le Noble Prophète r insista fortement pour interdire cette pratique
et l’interdit même sur les animaux. (Al Boukhari Mazalim, 30, Dhabaih, 25 ; Abou Daoud, Jihad, 110).
Deuxième Année de L’hégire 445

Le Prophète r dit alors : “Les anges le recouvrent encore de leurs ailes”. » (Al
Boukhari, Janaiz, 3, 35, Jihad, 20 ; Muslim, Fadail’us-Sahabah, 129-130).

Être martyr dans la voie d’Allah ne signifie pas mourir, mais plutôt la marque de
la réception des bénédictions éternelles dans une existence dont on ignore (ici-bas)
les finalités. Allah, Gloire à Lui, a en conséquence interdit l’emploi du mot “mort”
pour désigner les martyrs.
Le Noble Coran stipule en effet :

ĪIJóđƇ ýŽ ÜƆ ƪ źīġƈ ĤƆ IJÅÓ Ɔ ƈ Ʃ ģĻ× ƈ ƈ


Ƈ Ƅ ijƆ ĨŽ ƆÈųÒ
Ɔ ĻƆ èŽ ÈģŽ ÖƆ ÚÒ ƈ øĹ
Ɔ ĘģƇ ÝƆ ĝŽ ƇĺīŽ ĩƆ ĤÒŽ ijƇĤijĝƇ ÜƆ ƆźIJƆ
« Et ne dites pas de ceux qui sont tués dans le sentier d’Allah qu’ils sont morts.
Au contraire ils sont vivants, mais vous en êtes inconscients. » (Al-Baqara, 2 : 154).

ïĭ ƈ ĻèƆÈģŽ ÖÓÜÒƃ ijĨƆÈųÒ


Ɔ ĐÅÓ ƈ ģĻƈ×øĹĘ ƈ ÒŽ ijĥƇ Ýƈ ĜƇ īĺñƈ Ĥƪ Òī×ùéÜƆ ƆźIJ
ƆŽ Ɔ ƆŽ Ʃ ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
īĺ ƈ Ɔ óýƈ ×ÝùĺIJįƈ ĥƈ ąŽ ĘƆ īĨ ƈ ųÒ ƈ Ɔ ĜƇ ôƆ óĺħ ƈıƈÖò
Ɔ ñĤƪ ÓƈÖĪIJ Ƈ ŽƆ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ħƇ İÓ
Ƈ ÜÆÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖīĻ Ɔ è ƈóĘƆ Īij ŽƇ Ž ž Ɔ
Ɔ óƇ ýƈ ׎ ÝƆ ùŽ ĻƆ ĬƆ ijƇĬõƆ éŽ ĺƆ ħŽ İ
ĪIJ Ƈ ƆźIJ
Ɔ ħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đ Ɔ ƪ źƆÈħŽ ƈıęƈ ĥŽ ì
Ɔ ĖƄ ijŽ ì Ɔ īŽ Ĩħƈ
ž ƈıƈÖÒŽ ijĝƇ éƆ ĥŽ ĺƆ ħŽ ĤƆ
īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒóäŽ ƆÈďĻ ąƈ ĺźųÒĪƆÈIJģąĘIJųÒ ƈ īĨ ƈ Ùƅ ĩđĭƈƈ Ö
Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ ƆƩ ƪ Ɔ ƅ Ž Ɔ Ɔ Ʃ Ɔ ž Ɔ Ž
« Ne pense pas que ceux qui ont été tués dans le sentier d’Allah, soient morts.
Au contraire, ils sont vivants, auprès de leur Seigneur, bien pourvus et joyeux de
la faveur qu’Allah leur a accordée, et ravis que ceux qui sont restés derrière eux
et ne les ont pas encore rejoints, ne connaîtront aucune crainte et ne seront point
affligés. Ils sont ravis d’un bienfait d’Allah et d’une faveur, et du fait qu’Allah ne
laisse pas perdre la récompense des croyants. » (Al-‘Imrân, 3 : 169-171).
Quelle belle description que celle faite pas Ziyâ Pacha à propos des Martyrs qui
sont exaltés par le Seigneur des Mondes et honorés par les humains:
Nev-i insân Haşr’a dek tâzîm ederler âdına,
Kim fedâ-yı nefs ederse cinsinin imdâdına…
Toute l’humanité respectera jusqu’au Jour de la Résurrection
La personne qui va au secours des gens et se sacrifie pour eux.
Le Jour du Jugement Dernier, on reconnaîtra les martyrs par le sang coulant
librement de leurs plaies, ce qui donnera l’impression qu’elles sont ouvertes, alors
qu’en réalité un musc agréable s’en dégagera. (En ce Jour), les êtres humains devront
témoigner de leur honneur et de leur vertu.
446 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Et c’est pour cette raison que contrairement à d’autres, le cadavre du martyr


n’est pas lavé avant les funérailles et les plaies sont laissées en l’état.
Le Noble Prophète r montrait toujours la compassion quand les bienheureux
martyrs rendaient leur dernier soupir. Il disait :
« Le martyr ne ressent son exécution que comme vous ressentez la piqûre d’une
fourmi. » (At Tirmidhi Fadail’ul-Jihad, 26/1668 ; Nasa’i, Jihad, 35 ; Ibn Maja, Jihad, 16).
Pour encourager les croyants au martyre, Allah déclare :

ģŽ ÜÓƈ ĝƆ ƇĺīĨƆ IJ ƈ ƈ ƈ ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ ƈ


Ɔ ØóƆ ìŴÓƈÖÓĻƆ ĬŽ ïĤÒ
ƫ ØƆ ÓĻƆ éƆ ĤŽ ÒĪIJ
Ɔ óƇ ýŽ ĺƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒųÒ ƈ ×øĹ
Ɔ ĘģŽ ÜÓĝƆ ĻƇ ĥŽ ĘƆ
ÓĩĻ ƈ ƈ ×øĹĘƈ
ƈ óäƆÈįĻƈ Üƈ ËŽ ƇĬĖƆ ijùĘƆ Õĥƈ ĕŽ ĺIJƆÈģŽ ÝĝŽ ĻĘƆ ųÒ
ƃ čĐÒƆ ƃ Ž Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ģĻƈ Ɔ
« Qu’ils combattent donc dans le sentier d’Allah, ceux qui troquent la vie
présente contre la vie future. Et quiconque combat dans le sentier d’Allah, tué ou
vainqueur, Nous lui donnerons bientôt une énorme récompense. » (An-Nisâ’, 4 : 74).
Le Noble Prophète r a aussi exprimé ce désir :
« Si je ne craignais d’être dur envers ma communauté (Oumma), je ne serais
jamais resté derrière une troupe, au contraire, j’aurais voulu être tué pour la cause
d’Allah puis ressuscité, puis tué de nouveau, ensuite ressuscité, pour être tué encore
une fois. » (Al Boukhari, Iman, 26 ; Muslim, Imarah, 103, 107).
Un jour, le Noble Messager r voyant Omar t porter une chemise s’enquit :
«Cette chemise, est-elle neuve ou simplement lavée.»
Omar t répondit: «Elle n’est pas neuve, Ô Messager d’Allah, mais simplement
lavée !»
Et le Noble Messager r de dire :
«Puisses-tu toujours la porter ainsi, vivre en toute gratitude et mourir en martyr.»
(Ahmad, II, 89).

Le Prophète r annonça ainsi à Omar t son futur martyre.


Une fois, le Prophète de Miséricorde r se tenait sur le Mont Ouhoud en com-
pagnie d’Abû Bakr et ‘Uthmân y quand soudain la montagne commença à trembler.
Le Noble Prophète r se mit à taper des pieds sur le sol et dit : « Sois calme
Ouhoud il n’y a sur toi qu’un prophète, un siddiq et deux martyrs.»(Al Boukhari Ashab’un-
Nabi 6; At Tirmidhi Manaqib 18/3703; An Nasaï Ahbas 4).

Omar t avait coutume de faire cette invocation :


« Ô Allah ! Accorde-moi le martyr dans Ton sentier et la joie de mourir dans la
terre de Ton messager ! » (Al Boukhari, Fadail’ul-Medina, 12).
Deuxième Année de L’hégire 447

Par la suite Allah, Gloire à Lui, répondit favorablement à son vif désir.
Sa fille Hafsa c raconte :
« En entendant mon père invoquer de la sorte, je fus surprise et lui fit remar-
quer : “ Tu veux devenir martyr ? Et à Médine ?” Mais tout ce qu’il trouva à dire
était : “Si Allah le veut, cela se produira ainsi”. »
Finalement, la stupeur et la curiosité (ou l’intérêt) des gens à ce sujet finirent par
causer ce que Omar t souhaitait : le martyr. (Ibn’ul-Hajar, Fath’ul-Bari, IV, 101).
Soulignant la nécessité pour chaque musulman de désirer vivement le martyre,
le Noble Prophète r a dit :
« Celui qui demande sincèrement à Allah de faire de lui un martyr, Allah lui fait
atteindre le degré des martyrs même s’il meurt dans son lit. » (Muslim, Imarah, 157 ; Nasa’i,
Jihad, 36).

« Celui qui demande sincèrement le martyre, Allah le lui accorde même s’il ne
meurt pas martyr. » (Muslim, Imarah, 156).
En outre, le Noble Prophète r a considéré d’autres types de décès directement
liés au martyre. Et à ce propos il demanda une fois à ses Compagnons :
« Lesquels d’entre vous tenez-vous pour martyrs ? »
Ils répondirent : « Ô Envoyé d’Allah, celui qui est tué au service d’Allah est
considéré comme martyr. »
Le Noble Prophète r reprit alors : « Les martyrs de ma communauté seraient
bien peu nombreux ! »
Ils demandèrent : « Qui d’autre, ô Envoyé d’Allah ? »
Le Noble Prophète r conclut: « Quiconque est tué pour la cause d’Allah est mar-
tyr. Celui qui meurt au service d’Allah est martyr, de même que celui qui meurt de la
peste, d’une maladie du ventre ou de la noyade ». (Muslim, Imarah, 165 ; Ibn Maja, Jihad, 17).
Dans d’autres récits, le Noble Prophète r désigne aussi comme martyrs ceux
qui meurent en légitime défense ou défendent leur famille et leurs biens. (Voir, Al
Boukhari, Mazalim, 33 ; Muslim, Iman, 226 ; Abou Daoud, Sunnah, 28-29 ; At Tirmidhi Diyat, 21).

L’arrivée de Zaynab à Médine


À présent libre la première chose qu’Abû’l-As t, le gendre du Noble Prophète r
fit dès qu’il retourna à La Mecque, ce fut de permettre à Zaynab c de quitter Médine.
Ainsi un mois environ après l’évènement de Badr, le Noble Prophète r envoya à La
Mecque Zayd ibn Haritha t avec un autre compagnon Ansar et leur recommanda :
« Attendez dans la vallée de Yajij jusqu’à ce que vous aperceviez Zaynab puis
escortez-la jusqu’à Médine. »
448 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abû’l-As t avait dit à Zaynab c qu’elle pouvait rejoindre son père à Médine.
Elle ne tarda donc pas à faire ses préparatifs. Kinana, frère d’Abû’l-As fit lui fournit
un chameau paré d’un hawdaj (palanquin) dans lequel elle voyagerait. Ayant jeté
son carquois sur l’épaule, Kinana saisit les rênes de l’animal et le groupe commença
à quitter la ville. C’était en journée. Mais la nouvelle de la sortie de Zaynab c pour
rejoindre son père commença à se propager parmi les idolâtres. Quelques hommes
furent alors missionnés pour les intercepter près de Zituwa. L’un de ces hommes,
Habbar ibn Aswad, piqua de sa lance le chameau sur lequel était montée Zaynab c.
Le chameau se rua et fit tomber Zaynab c qui heurta un rocher. Enceinte à ce mo-
ment, elle se blessa et se mit à saigner abondamment. Ce choc lui fit perdre son bébé.
Pour assurer sa défense, Kinana saisit son arc, ajusta une flèche et la pointant en
direction des idolâtres, hurla :
« N’avancez pas sinon je vous arroserai de flèches !
Après un instant d’hésitation, les poursuivants se ravisèrent.
Mais quelques temps plus tard, Abû Sufyan, accompagné d’un autre groupe
d’idolâtres, demanda à Kinana de baisser son arc parce qu’il désirait s’exprimer.
Après que Kinana eut déposé son arc et ses flèches, Abû Sufyan déclara :
« Ô Kinana, je ne m’oppose pas au départ de Zaynab. Mais vous partez en plein
jour, au vu et au su de tous alors que tu connais le malheur qui vient de nous frapper
à Badr. En te laissant partir, les gens verront cela comme une nouvelle humiliation
et une faiblesse de notre part. Retourne-donc sur tes pas et attends que le calme
revienne. Les gens sauront que nous sommes opposés à ce départ. Puis tu reprendras
Zaynab et tu la conduiras chez son père discrètement. »
Kinana agit ainsi. Après avoir passé plusieurs nuits supplémentaires à La
Mecque en attendant que les choses se renversent, il repartit avec Zaynab cette fois-
ci de nuit. Puis il la remit à Zayd ibn Harith t et à son compagnon qui attendaient
dans la vallée de Yajij. Ces derniers l’escortèrent jusqu’à Médine où elle rejoignit son
père. (Ibn Hishâm, II, 297-299; Ibn Abdilbar, IV, 1854; Ibn Kathir, al-Bidayah, III 362-363).
La sixième année de l’Hégire, alors qu’il se trouvait en tête d’une caravane de
Quraysh, Abû’l-As fut intercepté par un groupe d’une centaine d’hommes conduit
par Zayd ibn Haritha. Ayant réussi à s’échapper, il se rendit aussitôt à Médine auprès
de Zaynab c pour solliciter le pardon du Noble Prophète r à son égard.
Au moment même où celui-ci venait de conduire la prière d’al-fajr, Zaynab c
sortit la tête hors de sa chambre et dit :
— Ô Gens… Je suis Zaynab c la fille du Messager d’Allah r et sachez que j’ai
pris Abû’l-As sous ma protection ! »
Deuxième Année de L’hégire 449

— Nous prenons aussi sous notre protection toute personne que tu as prise sous
ta protection, répondit le Noble Prophète r.
« Ô Envoyé d’Allah, dit-elle un peu plus tard à son père, si Abû’l-As est un
proche il est le fils d’un oncle. Et s’il ne l’est pas, il reste le père de mes enfants. »
Puis, s’adressant aux Compagnons, le Noble Prophète r dit :
« Si vous voulez rendre à Abû’l-As son bien, faites-le ; mais si vous ne le voulez
pas, gardez-le sinon car c’est votre droit de le garder. »
Les Compagnons y acceptèrent unanimement de rendre à Abû’l-As son bien.
Celui-ci, après avoir récupéré ses marchandises, retourna à La Mecque puis
après avoir rendu à chacun son dû il déclara :
— Y a-t-il quelqu’un à qui je n’ai pas restitué son dû ?
— Non, répondirent les autres.
— Ai-je accompli mon devoir vis-à-vis de vous ?
— Pour sûr, dirent-ils. Sois récompensé car tu es un homme honorable et loyal.
— Par Allah dit Abû’l-As, si je n’ai pas donné mon adhésion à l’Islam alors que
je me trouvais à Médine, c’est pour que vous ne disiez pas que je voulais m’accaparer
vos biens maintenant que je vous ai restitué votre dû, je me déclare musulman.
Abû’l-As t retourna ensuite à Médine où le Noble Prophète r lui permit de
reprendre la vie commune avec Zaynab c après avoir organisé un second mariage.

Les Juifs et la Bataille de Banû Qaynuqa (Shawwal 2 /Avril 624)


Les Juifs, qui formaient une communauté importante dans et autour de Médine,
évoquaient sans cesse à leurs voisins Arabes l’avènement prochain d’un prophète.
Leur croyance selon laquelle ce prophète émergerait de leur communauté fit qu’ils
étaient prompts à répandre cette nouvelle avec enthousiasme.
Mais dès que le prophète attendu apparut enfin, comme il était issu du peuple
Arabe, le sentiment d’enthousiasme qui les animait céda la voie à la jalousie. Ayant
changé immédiatement d’avis, ils rejetèrent massivement son Apostolat prophé-
tique. Allah, Gloire à Lui, énonce à ce sujet :

īƈ ĺŽ ïƆ ĤÒƈ ijƆ ĤŽ ÓƈÖIJ Ɔ ïƇ ×Ƈ đŽ ÜƆ ƆźģĻƆ ÐÒƈ óƆ øƈŽ ÌĹĭƈ ÖƆ ĚÓ


Ɔ Ʃ ƪ źÌƈ ĪIJ
Ɔ ųÒ
ƈ ĬƆ ñŽ ìƆ ƆÈðŽ Ìƈ IJ
Ɔ áƆ ĻĨÓ Ɔ
ƃÓĭùŽ è ƈ ƈ ƈ ùĩĤŽ ÒIJĵĨÓÝĻĤŽ ÒIJĵÖóĝƇ ĤŽ Òĸðƈ IJƃÓĬÓùèƈÌ
Ƈ öÓĭĥƪ ĤÒŽ ijƇĤijĜƇ IJ Ɔ īĻ
ƈ ĠÓ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƆƆ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž
ƈ Ɔ ħġĭ ƈ ƈ ƈƆ
Īij
Ɔ ĄƇ ƈóđŽ Ĩħ ž ÝĬƇ ÈIJ Ɔ Ž Ƈ Ĩ ž ƃŻĻĥĜƆ ƪźÌƈ ħŽ ÝƇ ĻŽ Ĥƪ ijƆ ÜƆ ħƪ ƇàØƆ ÓĠƆ õĤÒ
ƪ ÒŽ ijÜÆ
Ƈ IJƆ ØƆ ƆŻāĤÒƪ ÒŽ ijĩĻ Ƈ ĜÈIJƆ
450 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Et [rappelle-toi], lorsque Nous avons pris l’engagement des enfants d’Is-


raël de n’adorer qu’Allah, de faire le bien envers les pères, les mères, les proches
parents, les orphelins et les nécessiteux, d’avoir de bonnes paroles avec les gens
; d’accomplir régulièrement la Salât et d’acquitter le Zakat ! - Mais à l’exception
d’un petit nombre de vous, vous manquiez à vos engagements en vous détournant
de Nos commandements. » (Al-Baqara, 2 : 83).

Ī ƆÈÓƃ ĻĕŽ ÖƆ ƇųÒ


Ʃ ĢƆ õƆ ĬƆ ÈÓĩƈƆ ÖÒŽ IJóƇ ęƇ ġŽ ĺĪ Ɔ Ɔ ƈ
Ɔ ÈħŽ ıƇ ùƆ ęƇ ĬÈįƈÖÒŽ IJŽ óƆ ÝƆ üÒÓ
Ž ĩƆ ùƆ ÑƈŽ Ö
ÒŽ IJÊÇ ƈ īĨÅÓ
Ƈ ×Ɔ ĘƆ Įƈ îÓƈ ×Ɔ Đ ƈ ýƆ ĺīĨĵĥƆ Đįƈ ĥƈ ąŽ ĘƆ īĨ ƈ ųÒ
Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ĢƇ õžƈ ĭƆ Ƈĺ
īĻ ƈ ƈ Õƅ ąƆ ĔƆ ĵĥƆ ĐÕƅ ąƆ ĕƈƆ Ö
Ƅ ƈıĨ ƫ ÔÒ Ƅ ñƆ ĐƆ īĺ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĥŽ ĤIJ Ɔ Ɔ
« Comme est vil ce contre quoi ils ont troqué leurs âmes ! Ils ne croient pas en
ce qu’Allah a fait descendre, révoltés à l’idée qu’Allah, de par Sa grâce, fasse des-
cendre la révélation sur ceux de Ses serviteurs qu’Il veut. Ils ont donc acquis colère
sur colère, car un châtiment avilissant attend les infidèles ! » (Al-Baqara, 2 : 90).
Une autre raison de l’amertume juive était leur amour du monde.
C’est ce qui est signifié dans le Noble Coran :

īĺ ƈ ƈ ØÓƅ ĻèĵĥƆ ĐöÓ ƈ ĭĤÒþóèƆÈħıĬƪ ïƆ åƈ ÝĤƆ IJ


Ɔ ñĤƪ ÒīƆ ĨIJ Ɔ ƆƆ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ž ŽƇ Ɔ Ɔ
Ùƅ ĭƆ ø Ɔ Ɔ Ɔ
Ɔ ėƆ ĤŽ ÈóƇ ĩƪ đƆ ƇĺijŽ ĤƆ ħŽ İƇ ïƇ èƆ Èîƫ ijƆ ĺƆ ÒŽ ijĠƇ óƆ üŽ È
« Et certes tu les trouveras les plus attachés à la vie [d’ici-bas], pire en cela
que les Associateurs. Tel d’entre eux aimerait vivre mille ans. Mais une pareille
longévité ne le sauvera pas du châtiment ! Et Allah voit bien leurs actions. » (Al-
Baqara, 2 : 96).

Le monopole que les Juifs exerçaient sur le commerce leur donnait un air de
supériorité, aggravé en cela par leur puissance apparente.
Cela les conduit à croire et à affirmer :

Ƈ ×ƪ èƈ ƆÈIJ
ĮƇ ÊÓ ƈ Ʃ ÅÓĭÖƆÈīéĬƆ
Ɔ ųÒ Ƈ ƆŽ Ƈ Ž
« ...Nous sommes les fils d’Allah et Ses préférés... » (Al-Ma’ida, 5 : 18).

Ɔ
Øƃ îIJ ƪ ƃÓĨÓĺƪ ÈƪźÌƈ òÓ
Ɔ ïƇ đŽ Ĩ Ƈ ĭĤÒÓ
ƪ ĭƆ ùƪ ĩƆ Üī
Ɔ ĤƆ
« Le Feu ne nous touchera que pour quelques jours comptés ! » (Al-Baqara 2: 80).
Deuxième Année de L’hégire 451

Mais Allah, Gloire à Lui, dit à l’opposé :

Ɔ ĉƈ ì
įƇ ÝƇ ÑÃĻ Ɔ įƈƈ ÖÛŽ ĈƆ ÓèƆ ƆÈIJ
Ɔ Ùƃ ÑƈƆ Ļž ø
Ɔ ÕƆ ùƆ Ġī
Ɔ Ĩĵ
Ɔ ĥƆ ÖƆ
Ɔ ïƇ ĤÓƈ ìÓ
ĪIJ Ɔ ıĻ ƈ
Ƈ ƈòÓĭĤÒ
Ɔ ĘħŽ İ ƪ ÔÓ Ɔ ƈ Ƈ
Ƈ éƆ ĀŽ ÈğƆ ÑÃĤƆ IJŽ ÉĘƆ
« Bien au contraire ! Ceux qui font le mal et qui se font cerner par leurs pé-
chés, ceux-là sont les gens du Feu où ils demeureront éternellement. » (Al-Baqara,
2 : 81).

Malgré le pacte qu’ils avaient conclu avec Prophète r, les Juifs eurent des senti-
ments d’hostilité à son égard, ce qui relança les vielles rivalités entre les clans et attisa
les flammes de la méchanceté. Allah, les dénonça à Son Messager et aux croyants :

ƃźÓ×ì ħġĬijĤÉŽ ĺźħġĬIJ ƈ ÙĬÓĉÖƈ ÒIJñíƈ ÝÜźÒijĭĨÆīĺñƈ ĤÒÓıĺƆÈÓĺ


ƈ îīĨ
Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ƈ ž ƃ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƪƆ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ ƫ Ɔ
ó×ĠŽ ƆÈħİƇ òIJ ïĀĹęƈ íŽ ƇÜÓĨƆ IJ ƈ Ɔ ƈ ƈ ƈ ĨÒŽ IJîƫ IJ
ƇƆ Ž Ƈ Ƈ Ƈ Ɔ ħŽ ƈıİÒijƆ ĘŽ ÈīŽ ĨÅÓąƆ ĕŽ ×Ɔ ĤŽ ÒÚïƆ ÖƆ ïŽ ĜƆ ħŽ Ýƫ ĭĐÓ Ɔ Ɔ Ɔ
ħġƇ ĬƆ ij×ƫ éƈ ƇĺƆźIJ ƈ Ɔ Ɔ
Ɔ ħŽ ıƇ ĬƆ ij×ƫ éƇÜÅźIJŽ ƇÈħŽ ÝĬƇ ÈÓİĪij ĥƇ ĝƈ đŽ ÜƆ ħÝĭƇ ĠĪƈ ÌÚÓ ƈ ĺŴÒħġƇ ĤƆ ÓĭĻÖïŽ ĜƆ
Ž Ž Ƈ Ɔ Ƈ ƪƪƆ
ģƆ ĨÓƈ ĬƆ ƆŶÒħġƇ ĻĥƆ Đ ÒijąĐÒijĥìÒðÌƈ IJÓĭĨÆÒijĤÓĜħĠijĝĤÒðÌƈ IJįƈ ĥƈ ĠÔÓ ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ ÓƈÖĪij
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ÜƇ IJƆ
Ƈ Ž Ɔ Ž ƫ Ɔ Ž ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ ƪƆ Ž Ƈ Ɔ ŽƇ ƇƆ Ɔ Ɔ žƇ
ħġƇ ùŽ ùƆ ĩŽ ÜĪƈ Ɔ Ì ƈòIJïƇ āĤÒ ƈ
ƫ ÚÒñƈƆ ÖħĻ ĥƈ ĐųÒĪƈÌħġčƈ ĻĕƈÖÒijÜijĨģĜċƈ ĻĕĤÒīĨƈ
Ž Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ Ž Ƈ ŽƆ Ž Ƈ Ƈ Ž Ƈ ŽƆ Ž Ɔ
ƆźÒŽ ijĝƇ Ýƪ ÜƆ IJ ƈ Ƈ ÌIJħİËŽ ùÜƆ ÙƄ ĭƆ ùè
Ɔ ÒŽ IJóƈƇ ×āŽ ÜĪƈ
Ɔ ÌIJÓ Ɔ ıƈƆ ÖÒŽ ijèƇ óƆ ęŽ ĺƆ ÙƄ ÑƈƆ Ļž øƆ ħŽ ġƇ ׎ āÜĪƈ Ɔ ŽƇ Ƈ Ɔ Ɔ
Ƅ éƈ Ĩ
ćĻ Ƈ Īij Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ĺÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌÓÑƃ ĻŽ ü Ɔ ħŽ İƇ ïƇ ĻŽ Ġ
Ɔ ħŽ ĠƇ óƫ ąƇ ĺƆ
« Ô les croyants, ne prenez pas de confidents en dehors de vous- mêmes : ils
ne failliront pas à vous bouleverser. Ils souhaiteraient que vous soyez en diffi-
culté. La haine certes s’est manifestée dans leurs bouches, mais ce que leurs poi-
trines cachent est encore plus énorme. Voilà que Nous vous exposons les signes.
Si vous pouviez raisonner ! Vous, (Musulmans) vous les aimez, alors qu’ils ne
vous aiment pas ; et vous avez foi dans le Livre tout entier. Et lorsqu’ils vous ren-
contrent, ils disent «Nous croyons » ; et une fois seuls, de rage contre vous, ils
se mordent les bouts des doigts. Dis : «mourrez de votre rage » ; en vérité, Allah
connaît fort bien le contenu des cœurs. Qu’un bien vous touche, ils s’en affligent.
Qu’un mal vous atteigne, ils s’en réjouissent. Mais si vous êtes endurants et pieux,
leur manigance ne vous causera aucun mal. Allah connaît parfaitement tout ce
qu’ils font. » (Al-‘Imrân, 3 : 118-120).
452 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Comme le stipule le verset susmentionné, les Juifs, qui nourrissaient une forme
cachée et irréversible de rancune envers les Musulmans, étaient visiblement décon-
certés suite à la victoire de Badr et les Juifs de Banû Qaynuqa entre autres, déci-
dèrent de mener plus loin les sentiments d’inconfort qui les habitaient en déclarant
la guerre aux croyants
Ce fut le prélude de la violation du pacte qu’ils avaient conclu avec le Prophète
d’Allah r. Les Juifs, aidés par leur allié proche et hypocrite en chef ‘Abdullah ibn
Ubbay, avaient presque transformé le marché de Médine en chaudière de sorcières
pour concevoir des complots à l’encontre des croyants et ils allèrent même jusqu’a
ourdir le projet d’assassiner le Noble Prophète r.
Leurs méfaits étaient sans limite et leur impudence atteignait des extrêmes. Un
jour, un Juif insulta vilement et molesta une femme musulmane qui commerçait sur
leur marché. Ses appels furent entendus par un Musulman qui passait alors par là
et fut témoin de la scène. Il intervint et s’en prit alors au Juif. Après une brève mais
violente bagarre, le Juif perdit la vie. D’autres Juifs cernèrent le Musulman et finirent
par le tuer. Cette scène chaotique signifia que les Juifs avaient violé leur pacte conclu
avec des Croyants. Alors le Noble Prophète r réunit leurs dirigeants et leur dit :
« Ô Juifs ! Craignez Allah ! Craignez-le de sorte que vous ne soyez pas submergés
par le châtiment qui a submergé Quraysh ! Après tout, vous savez très bien que je suis
un vrai prophète… ceci est d’ailleurs stipulé dans vos Écritures et connu à travers la
promesse qu’Allah vous a faite ! »
Le Noble Messager r signifia donc aux Juifs qu’ils devaient payer la pénalité liée
à leur transgression, mais comme il ne voulait pas que le pacte fût brisé. Il leur offrit
donc de le renouveler. Comme réponse, les arrogants Juifs dirent:
« Eh Muhammad ! Crois-tu que comme Quraysh on connaît si peu la guerre ?
Dès que tu tireras l’épée contre nous, tu verras ce que la guerre signifie vraiment ! »
Alors ce verset fut révélé :

ħĭƪ ıƆ äĵ ĤÌƈ ĪIJóýéÜIJĪij×ĥĕÝøÒIJóęĠīĺñƈ ĥĤƈ ģĜ


Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ ƇƆŽ Ƈ Ɔ Ž Ƈ ƆƆ Ɔ ƪž Ƈ
ƈ Ę
ÓÝƆ ĝƆ ÝƆ ĤŽ Òīƈ ĻÝƆ ÑƆ ĘĹ ƈ ÙƄ ĺÆħġƇ ĤƆ ĪÓ ƈ
Ž Ɔ Ž Ɔ Ġ Ɔ ïŽ ĜƆ îÓ
Ƈ ıƆ ĩĤŽ Ò÷Ɔ ÑƈŽ ÖIJƆ
« Dis à ceux qui ne croient pas : ‹ Vous serez vaincus bientôt ; et vous serez
rassemblés vers l’Enfer. Et quel mauvais endroit pour se reposer ! › Il y eut déjà
pour vous un signe dans ces deux troupes qui s’affrontèrent : l’une combattait
dans le sentier d’Allah ; et l’autre était mécréante... » (Al-‘Imrân, 3 : 12-13; Ibn Hishâm,
II, 422-423; Waqidi, I, 181-182; Ibn S’ad, II, 30).
Deuxième Année de L’hégire 453

Ce n’était autre que ces mêmes Juifs qui, dans le passé, s’insurgèrent contre le
prophète Mûsâ u en lui disant :
« Va donc, toi et ton Seigneur, et combattez tous deux. Nous restons là où
nous sommes... » (Al-Ma’ida, 5 : 24).
Ayant précédemment refusé de livrer une bataille approuvée par le Tout-Puis-
sant et dont les fruits récoltés en termes de récompenses auraient été considérables,
ils adoptèrent une position inverse tout en se cachant derrière une fausse bravade,
et ce dans le but affiché de prendre les armes au milieu d’une bataille qui s’avérait
clairement à leur désavantage.
Ayant par conséquent déclaré la guerre aux Musulmans, les Juifs avaient effec-
tivement violé leur pacte et frayé la voie à la mise en pratique de leurs intentions
malveillantes.
Le Noble Prophète r assigna Alî t comme porte-étendard et se mit en marche
en direction des Juifs de Banû Qaynuqa qui, se retranchèrent à l’intérieur de leurs
fortins.
Malgré les nombreux complots ourdis avec les hypocrites pour repousser les
Croyants, les Juifs ne purent pas tirer une seule flèche, et encore moins sortir de leurs
fortins. Tout en maintenant le siège, le Noble Prophète r prit toutes les mesures de
sécurité possibles afin d’empêcher les hypocrites du camp ennemi de se révolter.
‘Adullah ibn Ubbay, l’hypocrite en chef, leur conseilla de se cantonner dans
leurs fortins et les assura de son aide mais il ne tint jamais sa parole parce que la peur
l’avait saisi.
Le siège dura quinze jours. La crainte ressentie dans les cœurs juifs devint insup-
portable. Lorsqu’ils ne reçurent pas l’aide qu’ils attendaient, ils n’eurent pas d’autre
solition que de demander grâce et s’incliner devant la sentence que le Messager d’Al-
lah r allait émettre à leur encontre.
Les Banû Qaynuqa avaient conclu un pacte d’allégeance avec les Khazraj avant
l’Hégire. Ainsi donc, ‘Abdullah ibn Ubbay, le chef des Kharaj converti en hypocrite,
plaida pour qu’on leur accordât le pardon parce que, selon la coutume, ils devaient
être condamnés à mort.
Conséquemment à une série de plaidoyers implacables en faveur du pardon, le
Noble Prophète r ne prononça pas sur eux de condamnation à mort, mais il les exila
en Syrie.
Les Juifs de Banû Qaynuqa s’arrêtèrent en chemin à Wadi’l-Qura où ils reçurent
le soutien des Juifs locaux. Bien que leur existence se poursuivît quelques temps, les
Banû Qaynuqa finirent peu à peu à péricliter. (Voir, Abou Daoud, Kharaj, 21-22/3001).
454 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’expédition de Sawiq (Dhul-hijjah, 2 / Mai 624)


À la mort d’Abû Jahl, Abû Sufyan fut chargé d’assumer la direction de Quraysh.
Désireux se venger après la défaite de Badr il quitta discrètement La Mecque avec
deux cents cavaliers à cheval. Finalement à une heure de distance de Médine, profi-
tant pleinement de l’obscurité, Abû Sufyan atteignit les quartiers où vivaient les Juifs
de Banû Nadir. Là, il se rendit chez Sallam ibn Mishkam, leur chef et trésorier, qui
accueillit son hôte de la meilleure façon possible et lui fournit toutes sortes d’infor-
mations sur les Musulmans.
Ayant ensuite quitté les quartiers des Banû Nadir, Abû Sufyan retourna vers
ses amis, martyrisant dans le même temps Sa’d ibn Amr et mettant en chemin le feu
à quelques plantations de palmiers-dattiers. S’estimant vengé par ces actions, Abû
Sufyan retourna sans délai à La Mecque de peur d’être suivi.
Ayant été informé de la situation, le Noble Prophète r se mit à la poursuite des
idolâtres et découvrit que dans leur hâte ces derniers avaient laissé choir des sacs de
farine ou sawiq d’où est tiré le nom donné au conflit. (Ibn Hishâm, II, 426-429; Waqidi, I,
176-180; Ibn Sa’d, II, 28-30).

Le mariage d’Alî t et de Fâtima c


La deuxième année de l’Hégire vit aussi le mariage de Fâtima, la fille du Noble
Prophète r avec Alî y.
Beaucoup de notables, dont Abû Bakr et Omar y, avaient auparavant demandé
sa main, mais le Noble Prophète r la leur avait refusé car il était dans l’attente d’une
injonction divine la concernant. Pour cette raison, et malgré l’encouragement assuré
de ses proches, même ‘Alî t n’eut pas l’occasion propice de faire sa demande.
Mais quelques temps plus tard, devant la forte insistance de ses proches, ‘Alî t
se rendit auprès du Noble Prophète r. (Ibn Sa’d, VIII, 19).
Ce qui se déroula ensuite est rapporté par ‘Alî t lui-même :
« Je me rendis enfin auprès du Messager d’Allah r. Sa présence, comme de cou-
tume, était rayonnante. Je m’assis en face de lui et gardais le silence, incapable de
dire un mot.
Le Messager d’Allah r me demanda:
“Alors ‘Alî pourquoi es-tu venu ? As-tu besoin de quelque chose ? peut-être es-tu
venu pour demander Fâtima en mariage ?”
Ma seule réponse fut : “oui”» (Ibn Kathir, al-Bidayah, III, 379).
À la faveur des bénédictions du Noble Prophète r, ‘Alî vendit quelques biens
qui lui appartenaient et proposa une dot (mahr) d’un montant de 480 dirhams.
Deuxième Année de L’hégire 455

Le Noble Prophète r lui conseilla d’utiliser les deux tiers pour acheter du bon
parfum et le tiers restant pour acquérir des vêtements. (Ibn Saad, VIII, 19).
Le Noble Prophète r présenta Fâtima c avec, comme trousseau, un couvre-lit,
une cruche d’eau et un tapis garni d’une herbe appelée idhir. (Nasa’i, Nikah, 81).
Il dit ensuite à Bilal t qu’il l’avait chargé des préparatifs :
« Je veux que le fait de servir à manger à l’occasion de leur mariage devienne une
tradition (sunna) pour ma communauté. »
Alî t, quant à lui, mit en gage son bouclier chez un Juif et acheta une demi-
mesure d’orge dont le hays145 un plat sucré préparé en guise de walima, ou fête des
noces. Les Ansar et les Muhajirun vinrent en groupe pour participer au repas. (Ibn
Sa’d VIII 23; Abdurrazzaq V 487; Diyarbakri, I, 411).

Par la suite, le Noble Prophète r utilisa une cruche d’eau pour faire ses ablu-
tions, appela ensuite ‘Alî t près de lui et lui aspergea de l’eau sur la poitrine et entre
ses épaules.
Puis il appela Fâtima c et agit de même avec elle. Conscient qu’il était de la
marier avec le meilleur homme de sa famille proche, il fit l’invocation suivante :
Ô Allah… je cherche refuge en Toi contre Satan le banni, pour eux et pour leur
progéniture ! » (Ibn Sa’d, VIII, 24 ; Diyarbakri, I, 411).
Puis il conseilla à Fâtima c de bien s’occuper des tâches ménagères et à ‘Alî t
de subvenir aux besoins de sa famille. ( Kasani, IV, 24).
Zayd ibn Haritha t raconte :
« J’étais assis avec le Messager d’Allah r lorsqu’Alî et ‘Abbâs y firent leur appa-
rition et demandèrent la permission d’entrer. Le Messager d’Allah r me demanda :
— Sais-tu pourquoi ils sont venus ?
— Non, répondis-je.
— Moi je le sais, qu’ils entrent ! dit le Messager d’Allah r.
Je les laissai donc entrer.
— Messager d’Allah, dirent-ils, nous sommes venus pour savoir qui à tes yeux
est le plus cher parent.
— Fâtima bint Muhammad ! répondit le Messager d’Allah.
— Nous ne faisions pas allusion à ta toute proche parenté, ô Messager d’Allah !
— Dans ce cas mon plus cher parent est Zayd qu’Allah a favorisé par la guidance
et j’ai pris soin de lui.
145. Le hays est un mets composé de dattes, d’huile pure et de yaourt tamisé. On y ajoute parfois de la
farine frite ou sawiq.
456 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

— Ensuite ?
— ‘Alî, répondit le Messager d’Allah r.
— Tu as relégué ton oncle en dernier, se plaignit alors ‘Abbâs.
— Alî s’est employé avant toi pendant l’Hégire ! dit le Messager d’Allah r. » (At
Tirmidhi Manaqib, 40/3819).

Ibn ‘Abbâs t rapporte :


Le Prophète d’Allah r traça quatre traits sur le sol puis dit : «Savez-vous ce que
cela signifie ? »
Ils répondirent : « Allah et son Messager sont plus savants. »
Alors le Prophète d’Allah r dit :
« Les meilleures femmes du paradis sont : Khadîdja Bint Khuwailid, Fâtima Bint
Muhammad, Maryam Bint Imran et Assiya Bint Muzahim la femme de Pharaon».
(Ahmad, I, 293).

Le Noble prophète r était sensible à l’éducation des membres de sa famille. Il les


nourrissait spirituellement et les préparait en vue de la Vie éternelle. Appliquant, par
exemple, la révélation du verset coranique subséquent et tiré de la sourate Al-Azhab :

ďƆ ĩƆ ĉŽ ĻĘƆ Ģƈ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÓƈÖīƆ 𮠱Ɔ íŽ ÜƆ ŻƆ ĘƆ īƪ ÝƇ ĻĝƆ ÜÒ ƈ īĨ


Īƈƈ ÌÅÓùƆ žĭĤÒ ƈ ƅ Ɔ īÝùĤƆ Ĺƈƈ ×ĭĤÒÅÓùĬÓ
ƈ
Ɔ Ž ƪ Ɔ ž ïèƆ ƆÉĠ ƪ Ƈ Ž ž ƪ Ɔ ĺƆ
âƆ óƫ ×ÜƆ īƆ äŽ ó×ÜƆ źƆ IJ īġÜij ƈ ĻÖĹĘ ƈ ĪƆ óĜƆ IJÓĘƃ IJóđĨźƃ ijĜƆ īĥŽ ĜƇ IJĂƄ óĨįƈƈ ×ĥŽ ĜƆ ĹĘĸ
ƈ ñƈ Ĥƪ Ò
Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ ƇƇ Ž Ɔ ƇŽƪ Ž Ɔ Ɔ ƆƆ
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Ƈ ƈóƇĺÓĩƆ Ĭƈƪ ÌįƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ ƈ Ɔ ØƆ ÓĠƆ õĤÒīĻÜÆƈ IJØƆ ŻƆ āĤÒīĩĜƈ ƆÈIJĵĤƆ IJƇŶÒ Ž Ùƈ Ļĥƈ İÓ
ƈ åĤÒ
Ɔ Ʃ īƆ đŽ ĈÈIJ
Ɔ ųÒ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ɔ Ž
źƆ IJ ƈ ƈ ƈ Ɔ ƈ ħġĭĐÕİƈ ñĻĤƈ ųÒ
Ɔ īƪ ġƇ ÜijĻƇ ÖĹ Ɔ ÛĻŽ ×Ɔ ĤŽ ÒģƆ İŽ È÷Ɔ äŽ óĤÒ
Ƈ ĘĪƆ óŽ ĜƆ IJÒƆ óĻƃ ƈıĉŽ ÜƆ ħŽ ĠƇ óƆ ıž ƈ ĉƆ ƇĺIJ ž Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƇƩ
įƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ ƈ Ɔ ØƆ ÓĠƆ õĤÒīĻÜÆƈ IJØƆ ŻƆ āĤÒīĩĜƈ ƆÈIJĵĤƆ IJƇŶÒŽ Ùƈ Ļĥƈ İÓ
ƈ åĤÒâó×Üīäó×Ü
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ īƆ đŽ ĈÈIJ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ ƫ ƆƆ Ɔ Ž ƪ ƆƆ
ÒóĻ ƈıĉŽ ÜƆ ħĠƇ óıž ƈ ĉƆ ƇĺIJ ƈ Ɔ ƈ ħġĭĐÕİƈ ñĻĤƈ ųÒïĺ ƈóĺÓĩĬƈÌ
Ɔ ÛĻŽ ×Ɔ ĤŽ ÒģƆ İŽ È÷Ɔ äŽ óĤÒ
ƃ Ž Ɔ ž Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƇƩ Ƈ Ƈ Ɔ ƪ
« Ô femmes du Prophète ! Vous n’êtes comparables à aucune autre femme. Si
vous êtes pieuses, ne soyez pas trop complaisantes dans votre langage, afin que celui
dont le cœur est malade [l’hypocrite] ne vous convoite pas. Et tenez un langage dé-
cent. Restez dans vos foyers ; et ne vous exhibez pas à la manière des femmes avant
l’Islam (Jahiliyah). Accomplissez-le Salât, acquittez la Zakat et obéissez à Allah et
à Son messager. Allah ne veut que vous débarrasser de toute souillure, ô gens de la
maison [du prophète], et vous purifier pleinement… (Al-Azhâb, 33 : 32-33) »
Deuxième Année de L’hégire 457

Le Noble Prophète r se tenait chaque matin devant la porte de Fâtima, et ce


pendant six mois, et appelait comme suit :
« Réveillez-vous pour la salât, ô Gens de la Maison, car Allah veut seulement
éviter l’impureté et vous purifier par une purification complète. » (At Tirmidhi Tafsir,
33/3206).

Similairement, dans le but de leur rappeler as-salât at-tahajjud, l’une des plus
importantes garanties relatives à une vie éternelle bienheureuse, le Noble Prophète r
frappait parfois à la porte de ‘Alî et Fâtima et disait d’une voix douce :
« Allez-vous accomplir la salât ? » (Al Boukhari, Tahajjud, 5).
‘Alî t rapporte à ce sujet cet évènement frappant :
« Fâtima c était de tous les membres de la famille, l’être le plus proche de son
père. Des cicatrices étaient apparues sur ses mains et sur son cou à force de tourner
le moulin et de porter l’eau. Balayer autour de la maison la rendait sensible à la pous-
sière. Entre-temps on avait amené quelques esclaves au Messager d’Allah r aussi je
lui ai suggéré : “Tu devrais demander à ton père de t’offrir une esclave”.
Fâtima se rendit auprès de son père, mais voyant qu’il était occupé à s’entretenir
avec d’autres personnes, elle repartit.
Le lendemain, le Messager d’Allah r nous rendit visite et nous demanda :
“De quoi avez-vous besoin ?”
Fâtima garda le silence et ne répondit point.
Je lui dis alors :“Permets-moi de t’expliquer, ô Messager d’Allah…”
Puis je commençai à lui expliquer l’affaire. Une fois l’explication terminée, le
Messager d’Allah r dit :
“Crains Allah, Fâtima, et accomplis ce qu’Il a ordonné ! Implique-toi dans ta
famille et avant d’aller te coucher, dis Subhanallah trente-trois fois, Alhamdulillah
trente-trois fois et Allahu Akbar trente-quatre fois ; tous multipliés par cent et ceci est
meilleur pour toi qu’un serviteur.”
Fâtima déclara alors: “Je suis satisfaite d’Allah et de Son Messager”.
Ainsi le Messager d’Allah r ne lui accorda aucun serviteur. » (Abou Daoud, Kharaj,
19-20/2988).

On rapporte dans un autre récit que le Noble Prophète r a dit :


« Par Allah, je ne peux te donner un serviteur alors que les gens de Suffa lient
des pierres autour de leurs ventres pour apaiser leur faim et que moi je ne peux rien
dépenser en leur faveur. J’ai par ailleurs l’intention d’obtenir en retour une rançon de
ces captifs et d’affecter à la Suffa ce que je recevrai. » (Ahmad, I, 106).
458 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Sawban, un ancien esclave que le Noble Prophète r avait affranchi, raconte :


« Fâtima était la dernière personne que le Messager d’Allah r voulait voir em-
barquer pour un voyage. Elle était de même la première personne que le Messa-
ger d’Allah r venait visiter quand il était de retour. À l’occasion donc d’un retour
de voyage, Fâtima c avait suspendu un drap sur sa porte et fait porter à Hasan et
Husayn y deux bracelets d’argent. Bien qu’il soit parvenu sur le seuil, le Messager
d’Allah r ne pénétra pas à l’intérieur de la maison. Fâtima c sentit immédiatement
que quelque chose le faisait hésiter à entrer. Aussitôt elle déchira le drap et ôta les
bracelets des poignets de ses enfants. Hasan et Husayn y se précipitèrent en pleurant
sur le Messager d’Allah r avec les bracelets dans leurs mains.
Les ayant saisis, le Messager d’Allah r dit alors :
“Sawban Prends ces bracelets et apportes les à la famille d’untel. Hasan et Husayn
font partie des miens (Ahl’ul-Bayt) et je ne désire pas qu’ils consomment en cette vie
la bonté dont Allah les comblera dans la vie de l’au-delà. Eh Sawban ! Achètes ensuite
un collier fait en os pour Fâtima et des bracelets faits en os pour Hasan et Husayn”. »
(Abou Daoud, Tarajjul, 21/4213).

Ahl’ul-Bayt et l’amour d’Ahl’ul-Bayt


Ahl’ul-Bayt désigne les membres d’une famille qui vivent sous le même toit.
Au sens conjoncturel, ce terme englobe tous les membres de la famille du Noble
Prophète r ainsi que sa famille élargie. En ce sens, Ahl’ul-Bayt sont donc le Messager
d’Allah r et sa famille et ‘Ali, Jafar, Aqil et ‘Abbâs et leurs familles.
Tout comme prier sur le Noble prophète r et lui envoyer des salutations (sa-
lât’u salam) est un devoir pour tout musulman, de même ceci est vrai en matière de
respect et d’amour vis-à-vis des Ahl’ul bayt. (Ahmad, VI, 323).
Il est par exemple interdit aux Ahl’ul-Bayt de recevoir l’aumône (zakat).
Un jour, le Noble Prophète r fit recracher à son petit-fils Hasan t, alors enfant,
une datte qu’il venait de mettre dans la bouche, en disant :
« Ne sais-tu pas que la famille de Muhammad ne reçoit aucune zakat ? » (Al
Boukhari, Zakat, 57 ; Ahmad, I, 200).

Zayd ibn Arqam t raconte :


« Le Messager d’Allah r se leva un jour et nous fit un sermon près du puids
d’eau de Khumm situé entre la Mecque et Médine.
Après avoir loué et Glorifié Allah il nous donna quelques conseils.
Puis il nous dit :
Deuxième Année de L’hégire 459

«O gens ! Je ne suis qu’un être humain, l’appel de l’envoyé d’Allah (l’ange de la


mort) est imminent et j’y répondrai. Je vous laisse deux dépôts de taille : le premier est
le Livre d’Allah contenant la guidée et la lumière. Attachez-vous à ce Livre et mettez-le
en pratique. «
Il nous encouragea à appliquer les préceptes contenus dans le Livre jusqu’à sus-
citer en nous l’envie [de les appliquer]. Puis il reprit :
«Et les membres de ma famille (Ahl’ul-Bayt), je vous rappelle au respect d’Allah à
travers les membres de ma famille. «
On demanda alors à Zayd t:
«Et qui sont les membres de sa famille Zayd ? Ses épouses ne sont-elles pas des
membres de sa famille? »
Il répondit :
«Ses épouses en font partie ainsi que tous les membres qui n’ont pas le droit de
recevoir l’aumône. »
On lui demanda alors :
« Et qui sont ceux pour qui le fait de percevoir la Zakat est haram (illicite) ?»
Zayd t répondit :
« Alî, ‘Aqil, Ja’far et ‘Abbâs et leurs familles. » (Muslim, Fadail’us-Sahabah, 36).
Le Messager d’Allah r a dit :
« Aimez Allah pour ce qu’Il vous accorde comme bienfaits ; aimez-moi pour
l’amour d’Allah et aimez les membres de ma famille (Ahl’ul-Bayt) pour mon amour. »
(At Tirmidhi Manaqib, 31/3789).

Le Noble Prophète r prit une fois la main de Hasan et de Husayn y, puis dit :
« Celui qui m’aime et aime ces deux-là, ainsi que leur père et leur mère, sera au
même degré que moi le Jour du Jugement. » (At Tirmidhi Manaqib, 20/3733).
Les Compagnons avaient beaucoup de respect et de déférence envers la famille
et les proches du Noble Messager r.
C’est naturel d’avoir de l’affection non seulement envers l’être aimé, selon l’am-
pleur de cet amour porté, mais aussi envers ses amis et qui plus est, vis-à-vis de la
moindre petite chose qui aide à se rappeler de lui, tel que des habits qu’il a portés,
des aliments qu’il a consommés. Plus l’amour grandit, plus il en imprègne tout ce qui
entoure l’être aimé. Les Compagnons y laissaient leur amour jaillir du plus profond
de leurs cœurs devant les gestes et actes du Noble Prophète r comme lorsqu’il tenait
l’étrier d’un cheval ou d’un chameau quand un de ses proches y mettait le pied. (Hay-
thami, IX, 348).
460 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Conscients qu’ils étaient du fait qu’au Jour du Jugement Dernier tous les liens
de sang, sauf celui qui les liaient avec le Noble Prophète r seront rompus, ils étaient
impatients d’épouser une de ses proches pour renforcer leur amour par un lien de
parenté.(Haythami, IX, 173).
Les descendants du Noble Prophète r vivent de nos jours dans différentes par-
ties du monde musulman. Le terme Sayyid est employé employé pour ceux qui des-
cendent de la lignée de Husayn t et les Sharif sont les descendants de Hasan t. Les
Ottomans se référaient aux sayyid-s en tant qu’amîr et aux turbans qu’ils portaient
sur leurs têtes comme étant les “turbans des amirs”. Les femmes issues de la lignée du
Noble Prophète r portaient également une marque verte sur leurs hijabs.
Servir les Ahl’ul-Bayt était chez les Ottomans un fait si considéré qu’ils fon-
dèrent une institution dédiée à ce but ! Les fonctionnaires exclusivement chargés
pour ce service étaient appelés naqib’ul-ashraf et choisis parmi les Ahl’ul-Bayt.
Parmi les divers aspects de ce qui constituait leurs divers besoins, le traité relatif
aux naqib’ul-ashraf incluait l’enregistrement de leur lignée, les naissances, les décès,
l’empêchement d’entrer dans n’importe quelle vieille profession, mais aussi le fait
de partager entre eux leurs parts d’impôts et de butin et d’interdire aux femmes (de
leur communauté) d’épouser des hommes qui ne seraient pas leurs égaux. (Haythami,
IX, 173).

Successeurs des enfants du Noble Prophète r en raison du devoir qu’ils ont


accompli, les naqib’ul-ashraf furent honorés de recevoir l’un des plus hauts grades
officiels, en fait second derrière le Calife selon le protocole. Les naqib’ul-ashraf
étaient les premiers à prêter allégeance au sultan lors de son accession au trône et
qui priaient pour son bien-être, seulement après quoi le protocole suivait. Les félici-
tations durant les fêtes de l’Aïd étaient en priorité formulées par les naqib’ul-ashraf.
Le sultan en personne se levait pour les saluer durant les solennités.
Un sayyid ou un sharif reconnu coupable de meurtre ou ayant agi de façon inac-
ceptable était conduit à l’administration des naqib’ul-ashraf, et ce à Istanbul ou bien
ailleurs, vers le chef officiel d’un district. Avant la punition réelle, le fonctionnaire
ôtait son turban vert, l’embrassait, puis le reposait sur sa tête une fois la punition
terminée.
461

LA TROISIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

Ouhoud : une bataille étayée par la sagesse


À l’instar de Badr, la bataille d’Ouhoud,146 qui eut lieu la troisième année de
l’Hégire, pendant le mois de Shawwal, fut un conflit féroce engagé contre les ido-
lâtres mecquois.
Les idolâtres de La Mecque étaient très chagrinés d’avoir été vaincus à Badr.
Tous avaient perdu un proche durant la bataille, ce qui avait aggravé leur désir insa-
tiable de vengeance. La personne qui brûlait le plus d’impatience de se venger n’était
autre que Hind, la femme d’Abû Sufyan, le dirigeant récemment nommé de Quraysh.
Rapidement, les idolâtres furent capables de monter une armée forte de trois mille
combattants, lesquels ne pensaient qu’à la rétribution. Des marchandises provenant
d’une caravane qu’Abû Sufyan avait réussi à préserver furent utilisées pour financer
l’armée. Les tribus arabes voisines furent également sollicitées pour financer l’effort
de guerre. (Waqidi, I, 199-203).
Pendant ce temps, ‘Abbâs, l’oncle du Noble Prophète r informa Médine de la
procédure. (Ibn Sa’d, II, 37).
Le Prophète d’Allah r réunit immédiatement les Compagnons y pour décider
s’ils devaient rester à Médine et adopter une stratégie défensive, ou quitter la ville
pour adopter une ligne d’attaque offensive.
Le Messager d’Allah lui-même r désira adopter la première option, c’est-à-dire
la défensive.147
Finalement conciliant le désir de la jeunesse trop jeune et inexpérimentée pour
participer à la bataille à Badr avec le fait que cette jeunesse avait attendu ce moment
depuis le début, simultanément à l’opinion des autres combattants conduits par
Hamza t, il fut décidé que la rencontre avec les idolâtres se aurait lieu à l’extérieur
de Médine, dans une action offensive. (Ibn Hishâm, III, 6-7).
146. Ouhoud se situe à environ 1,5km au nord de Médine.
147 Il prit cette décision à cause d’un rêve qu’il avait fait et qu’ıl r expliqua plus tard : « Dans mon rêve
j’agitai mon épée dont le pommeau était brisé. Cela signifiait les troubles infligés aux Musulmans à
Ouhoud. J’agitai de nouveau mon épée et elle était à présent en meilleur état qu’auparavant. Cela fai-
sait référence à la bénédiction d’Allah le Tout-Puissant sous la forme de conquêtes et de rassemblement
des Musulmans. Dans le même rêve, je vis également du bétail et une autre bénédiction donnée par
Allah. Le bétail est devenu manifeste au sein d’un groupe de Musulmans le jour d’Ouhoud en devenant
martyrs. La bénédiction que j’ai vue s’est manifestée à travers les conquêtes qu’Allah nous a accordées
après Badr et les récompenses qu’Allah nous a dispensées sont dues à notre persévérance à Badr. » (Al
Boukhari Tabir 39, 44 ; Manaqib, 25 ; Muslim, Ruya, 20).
462 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r entra alors dans sa chambre et revêtit son armure. Les
combattants qui avaient opté pour une action défensive (à Médine) sous les ordres
de Sa’d ibn Mu’adh et Usayd ibn Khudayr y tentèrent de persuader les autres qu’ils
avaient “tort d’insister de quitter Médine quand le Noble Prophète r en avait décidé
autrement. Ce qui est ordonné provient des cieux ; alors, laisse-lui cette affaire et fais
ce qu’il te dit !” (Waqidi, I, 213-214).
Sans perdre de temps ils courrèrent pour dire au Prophète r : “Nous ne nous
soustrairons jamais à ton avis, ô Messager d’Allah. Fais ce qui te semble juste !”
Mais la réponse vint, parfaitement limpide :
“Un prophète n’enlève l’armure qu’il a revêtue qu’une fois la bataille terminée !
Vous préoccupez-vous présentement de faire ce que je vous dis ! Allez au nom d’Allah !
Si vous êtes patients et faites votre devoir, Allah le Tout-Puissant vous accordera la
victoire ! ” (Waqidi, I, 214 ; Ibn Sa’d, II, 38).
Après la Prière du Vendredi, le Noble Prophète r laissa la gérance de Médine
à ‘Abdullah ibn Maqtum t et quitta Médine en compagnie d’un millier d’hommes.
Mais avec la marche arrière d’Abdullah ibn Ubayy, le chef hypocrite, en même temps
que ses trois cents hommes, le nombre fut finalement réduit à sept cents, suite à quoi
Allah Y révéla ce qui suit :

ƈƈ ƈ ƈ
ƈ ųÒ ƈ Ɔ
 īĻ
 Ɔ Ʃ ĪðŽ Íƈ ×ƈ ĘƆ ĪÓđƆ ĩŽ åƆ ĤŽ ÒĵĝƆ ÝƆ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĺƆ ħŽ ġƇ ÖÓƆ ĀƆ ÈÓĨƆ IJƆ
Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒħƆ ĥƆ đŽ ĻƆ ĤIJ
ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ ƈ ƈ ÒŽ ijĝƇ ĘƆ ÓĬƆ īĺñƈ Ĥƪ ÒħĥƆ đĻĤŽ IJ
Ž IJƈ ƆÈųÒ
ÒŽ ijđƇ ĘƆ îÒ ƈ ×øĹ Ɔ ĘÒŽ ijĥƇ ÜÓĜƆ ÒŽ ijŽ ĤƆ ÓđƆ ÜƆ ħŽ ıƇ ĤƆ ģĻƆ ĜIJ
Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ
ĪÓ ƈ ĩĺƈŹĤƈ ħıĭŽ Ĩ ƈ ÔóĜƆÈñƅ Ñƈ Ĩijĺ ƈóęġĥĤƈ ħİħĠÓĭđ×ÜźźÓÝĜ ƈ ħĥđĬijĤÒijĤÓĜ
Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ž Ƈ Ž Ž Ƈ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔƪƪ ƃ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ
Ɔ ĩƇ ÝƇ ġŽ ĺÓ
Īij Ɔ Ʃ IJħ ƈıƈÖijĥƇ ĜƇ ĹĘ ƈ ÷ĻĤƆ ÓĨħ ƈıİÒ ƈ ijĘŽ ƆÉÖƈ Īij
Ɔ ĩƈƆ ÖħƇ ĥƆ ĐŽ ÈƇųÒ Ɔ Ž Ɔ Ž ƪ Ɔ Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ
« Et tout ce que vous avez subi, le jour où les deux troupes se rencontrèrent,
c’est par permission d’Allah, et afin qu’Il distingue les croyants. Et qu’Il distingue
les hypocrites. On avait dit à ceux-ci : «Venez combattre dans le sentier d’Allah,
ou repoussez [l’ennemi]», ils dirent : «Bien sûr que nous vous suivrions si nous
étions sûrs qu’il y aurait une guerre». Ils étaient, ce jour-là, plus près de la mé-
créance que de la foi. Ils disaient de leurs bouches ce qui n’était pas dans leurs
cœurs. Et Allah sait fort bien ce qu’ils cachaient. » (Al-‘Imrân, 3 : 166-167).

ðŽ Ìƈ ħĻĥƈ Đ ďĻĩƈ øųÒIJĢÓ ƈ ĝĨīĻĭƈ Ĩƈ ËĩĤÒÎijƈ ×Üğĥƈ İƆÈīĨ


ƈ Ýĝƈ ĥĤƈ ïĐÓ ƈ ÚIJïĔðÌƈ IJ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ž Ƈ ž ƆƇ Ɔ Ž Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ
Īij ƈ Ʃ ĥƆ ĐIJÓĩıĻĤƈ IJųÒ
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ Òģƈ Ġƪ ijƆ ÝƆ ĻƆ ĥŽ ĘƆ ųÒĵ Ɔ ƆÈħŽ ġĭ ƈ ÝƆ ęƆ ÐÇƈ ƪĈÛĩİƆ
ƈ ĪÓ
Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ ƫ Ɔ Ƈ Ʃ IJƆ ƆŻýƆ ęŽ ÜĪ Ƈ Ĩ ƪ
La Troisième Année de L’hégire 463

« Lorsqu’un matin, tu (Muhammad) quittas ta famille, pour assigner aux


croyants les postes de combat et Allah est Audient et Omniscient. Quand deux
de vos groupes songèrent à fléchir ! Alors qu’Allah est leur allié à tous deux ! Car,
c’est en Allah que les croyants doivent placer leur confiance. » (Al-‘Imrân, 3 : 121-122).
La défection des hypocrites du sein de l’armée musulmane fut en réalité une
bénédiction déguisée car au lieu de l’affaiblir, cette défection servit à la renforcer et
la revigorer spirituellement, et ce en l’ayant nettoyé des hommes lâches et au double
jeu. Une trahison au cœur de la bataille aurait pu avec le recul avoir des conséquences
désastreuses et secouer toute la confiance des musulmans.

La passion du martyre chez les Compagnons y


Amr ibn al-Jamuh le chef du clan Salimah des Ansar était un homme boiteux
dont les quatre fils participèrent régulièrement aux batailles du Noble Prophète r.
Alors que les Croyants étaient sur le point de quitter Médine pour Ouhoud Amr t
exprima son désir de se joindre lui aussi à l’armée.
Ses fils y lui dirent :
« Tu n’es pas obligé de combattre, lui dirent alors ses fils, Allah considère que tu
as une excuse légitime. De toute façon nous y allons à ta place. »
Il t leur répondit :
« Vous m’avez déjà empêché d’entrer au Paradis le jour de Badr et même si je
survis aujourd’hui, je deviendrai définitivement un martyr et entrerai au Paradis. »
Puis Amr t se tourna vers sa femme et lui dit :
« Espères-tu que je reste assis en ta compagnie alors que tout le monde se tient
prêt au martyre et à entrer au Paradis ? »
Puis, ayant saisi son bouclier, il t sortit de chez lui et se dirigea chez le Prophète
de Miséricorde r tout en priant (intérieurement) :
« Ô Allah… ne permets pas que je retourne dans ma famille ! »
Il t dit au Noble Prophète r :
«Mes fils veulent m’empêcher de partir avec toi pour cette bataille. Par Allah, je
souhaite marcher au Paradis avec mon boitement»
Le Noble Prophète r lui répondit:
« Allah t’a excusé, tu n’es pas tenu de participer au jihad»
Mais ‘Amr t rétorqua:
«Ô Messager d’Allah ! Ne voudrais-tu pas me voir aussi combattre jusqu’à la fin
dans la voie d’Allah et me voir marcher au Paradis avec ma jambe boiteuse ?»
464 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

le Noble Prophète r répondit: «Oui, certes»


Puis il r dit à ses fils :
«Ne l’en empêchez pas, peut-être Allah lui octroiera-t-Il le martyre.»
Amr t se tourna en direction de la Qibla et fit l’invocation suivante : « Ô Allah !
Accorde-moi le martyre et ne permets pas que je retourne parmi les miens déchu et
affligé ! «
Ayant pris une part active durant la bataille d’Ouhoud, on l’a entendu dire : “Le
Paradis, par Allah, est ce qui me manque.”
Il tomba alors martyr avec un de ses fils qui avait tenté de le protéger.
Plus tard, le Noble Prophète r déclara à son sujet :
« Par Celui qui tient mon âme en Son pouvoir ! Il est des gens parmi vous à qui
Allah donnerait raison s’ils juraient devant Lui. L’un de ceux-là est ‘Amr ibn al-Ja-
mûh. Je l’ai vu marcher au paradis avec son boitement. » (Waqidi, I, 264-265 ; Ibn Athir,
Usd’ul-Ghabah, IV, 208).

Ayant inspecté l’armée peu avant sa marche sur Ouhoud, le Noble prophète r
refusa d’y admettre ceux qui étaient trop jeunes.
Parmi ces derniers se trouvaient Samura ibn Jundab et Rafi ibn Khadij y.
Zubayr ibn Rafi t intervint auprès du Messager d’Allah r et lui dit :
« Rafi est un habile archer, ô Messager d’Allah ! »
Le reste du récit est narré par Rafi t lui-même :
« Je me tenais droit sur mes orteils pour paraître plus grand. Le Messager d’Al-
lah r me permit finalement de rester.
En entendant cela, Samoura t dit à Muray ibn Sinan, son père adoptif :
“Le Messager d’Allah a donné à Rafi la permission de rester et m’a dit de revenir,
mais je suis meilleur lutteur que Rafi !”
Muray t rapporta ces propos au Messager d’Allah r qui ensuite me regarda
ainsi que Samoura. Puis il nous commanda de lutter l’un contre l’autre. Nous avons
donc lutté et Samoura me battit. En conséquence, il fut aussi autorisé à rester. »
(Tabari, Tarih, II, 505-506, Waqidi, I, 216).

En atteignant Ouhoud, le Noble Prophète r prit position près du Mont Ou-


houd derrière son armée de Croyants y et plaça cinquante archers sur la colline de
‘Aynayn au cas où l’ennemi tenterait une incursion dans la vallée. Il nomma ‘Abdul-
lah ibn Jubayr t commandant et exhorta (l’armée) à “… couvrir leurs arrières indé-
La Troisième Année de L’hégire 465

pendamment d’une victoire ou d’une défaite de l’ennemi et à ne pas quitter leur place
avant qu’il ne l’ordonne.” (Ibn Hishâm, III, 10, Ahmad, I, 288).
Comme d’accoutumée, la bataille s’engagea par un défi, un mubaraza. Il ne fal-
lut qu’un court instant à ‘Alî t pour vaincre Talha, le porte-étendard des idolâtres.
Othman, le frère de Talha qui s’était saisi de l’étendard après lui, ne posa aucun
trouble à Hamza t et le troisième porte-étendard ne causa aucune inquiétude à Sa’d
ibn Abi Waqqâs t.
La bataille s’engagea ensuite avec une grande intensité. Et avant qu’elle n’at-
teigne son plus haut niveau de férocité, le Messager d’Allah r, tendit son épée sur
laquelle étaient inscrits les mots “honte et disgrâce dans la lâcheté, honneur et dignité
dans le courage, et demanda :
«Qui prendra cette épée à sa juste valeur ?»
Les Compagnons y levèrent tous la main, en compétition pour l’épée convoitée.
Le Messager d’Allah r réitéra:
« Qui prendra cette épée à sa juste valeur ?»
Abû Dujana t demanda:
«Quelle est sa juste valeur, ô Messager d’Allah ?»
Le Messager d’Allah r répondit:
« Que tu en frappes l’ennemi jusqu’à ce qu’elle soit tordue! »
Abû Dujana t s’exclama:
« C’est moi qui vais la prendre et lui donner sa juste valeur ! »
Il prit l’épée et commença à marcher entre les rangs avec orgueil en adoptant
une démarche particulière. Devant ce comportement, le Noble Prophète r déclara :
« C’est une démarche qu’Allah n’aime pas, sauf dans de telles situations. » (Ibn Hishâm,
III, 11-12 ; Waqidi, I, 259 ; Muslim, Fadail’us-Sahabah, 128).

Muhayriq, un érudit juif, qui avait embrassé l’Islam juste avant les hostilités,
savait très bien que le Noble Prophète r correspondait avec les attributs divulgués
dans la Torah pourtant un certain doute continuait à l’habiter jusqu’à ce jour d’Ou-
houd. Lorsque le Noble Prophète r commença, et derrière lui ses Compagnons y, à
se diriger vers Ouhoud derrière lui, Muhayriq se mit à rabrouer ses pairs juifs :
« Je suis certain que vous savez très bien que Muhammad est un prophète et que
vous êtes obligés de l’aider !»
Ils répondirent d’un ton sarcastique:
«C’est samedi aujourd’hui alors nous ne pouvons rien faire !»
Alors Muhayriq dit avec colère, en saisissant son épée:
466 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Il n’y a rien de tel pour vous que le samedi !»


Avant de partir, il laissa ce message à l’un de ses proches :
« Si je suis tué aujourd’hui, Muhammad est en droit de prendre tout mon héri-
tage. Il l’utilisera de la meilleure façon comme Allah l’a montré. »
Cela s’avéra être sa volonté puisqu’il devint martyr à Ouhoud. Le jardin qu’il
laissa derrière lui fut recueilli par le Noble Prophète qui en fit un waqf (donation
faite à perpétuité).
Le Noble Prophète r dit de lui :
« Muhayriq était le meilleur des Juifs ! » (Ibn Hishâm, III, 38; Waqidi, I, 263; Ibn Sa’d, I,
501-503).

Ouhoud vit des scènes étonnantes se succéder.


Bien qu’il ait tué sept idolâtres un Médinois du nom de Quzman décéda suite à
une blessure mortelle le Prophète r dit:
« Quzman est en enfer. »
La raison en est que lorsqu’il fut félicité par Qatada ibn Numan qui recueillit son
dernier souffle Quzman déclara :
« J’ai combattu pour ma tribu, pas pour le martyre. »
Après cela il se jeta sur son épée et se suicida. (Waqidi, I, 263).
En revanche, un certain Usayram t, qui plus avait ressenti quelques remords
quant l’opposition sévère qu’il fit à ce que son peuple entrât en Islam, vint auprès du
Noble Prophète r armé de la tête aux pieds et lui demanda :
« Dois-je me joindre à la bataille ou accepter d’abord l’Islam ?»
Le Noble Messager d’Allah r lui répondit:
«Accepte l’Islam puis rejoins-nous!»
Usayram t devint donc musulman avant une bataille qui devait le voir tomber
martyr. Le Noble Prophète r dit de lui par la suite :
« Il a travaillé peu mais a gagné beaucoup ! » (Al Boukhari Jihad 13 ; Muslim Imara 144).
Alors qu’il se trouvait parmi les blessés ses dernières paroles furent :
« Ce n’est que pour l’Islam que je suis venu et que j’ai combattu dans la voie
d’Allah et de Son Messager. Et c’est pour cela que j’ai été blessé. »
Abou Hourayra t soumit plus tard à d’autres Compagnons y cette énigme :
« Qui selon vous est entré au Paradis sans avoir offert une seule fois la prière ? »
Ils répondirent :
La Troisième Année de L’hégire 467

« C’est bien entendu ‘Amr ibn Thabit t connu sous le nom de Usayram. » (Ibn
Hishâm, III, 39-40 ; Waqidi, I, 262).

Pendant le combat l’épée d’Abdullah ibn Jahsh t se brisa. Le Prophète r lui


donna à la place une branche de dattier qui dans les mains d’Abdullah t se transfor-
ma en épée. Il en fit usage jusqu’à ce qu’il connût le martyre. l’épée, nommée Urjun
par les héritiers d’Abdullah t fut achetée plus tard par un chef turc pour 200 dinars.
(Ibn Athir, Usd’ul-Ghaba, III, 195 ; Diyarbakri, I, 433).

L’assaut des Musulmans en vue d’une victoire rapide n’avait jamais suscité au-
tant d’enthousiasme dans les rangs. Les idolâtres, malgré leur supériorité en combat-
tants et en armes, commencèrent à fuir. Poursuivant ces derniers un certain temps et
pensant la bataille remportée, les Musulmans y renoncèrent pour se rabattre sur les
effets que les idolâtres avaient abandonnés dans leur fuite. Bien pire encore malgré
l’ordre que le Noble Prophète r avait donné aux archers de ne pas quitter leur posi-
tion, une grande partie d’entre eux le firent pour se saisir du butin. Seul Abdullah t,
le chef des archers et sept autres restèrent postés sur la colline de ‘Aynayn.
Cet épisode s’avéra être un tournant. Khalid ibn Walid, l’habile commandant
de l’armée adverse, trouva là une occasion d’agir avec ses cavaliers. Après une rapide
et violente attaque à l’arrière de la colline, ceux-ci tuèrent huit archers qui étaient
positionnés à son sommet. La férocité des hostilités s’étendit ensuite à l’ensemble du
champ de bataille. Les Croyants y occupés à dépouiller les cadavres furent soudaine-
ment réveillés par une attaque brutale surgie derrière eux, ce qui permit bientôt aux
idolâtres de s’emparer de l’ensemble du terrain des opérations, telle une embuscade.
L’armée musulmane se trouvait maintenant coincée dans un feu croisé et soumise à
une frénésie chaotique.

Hamza t, prince des martyrs


Cet évènement marquant vit aussi le martyre de Hamza t le vaillant com-
battant de l’Islam qui allait et venait entre les rangs, tué par la lance de Wahshi.
Esclave de condition, ce dernier avait exécuté cette tâche afin de gagner la liberté que
Hind lui avait promise. Celle-ci en effet nourrissait des sentiments de vengeance et le
moment venu, sa cruauté fut telle qu’elle arracha le foie de Hamza et le mordit. On
l’a surnomma par la suite akilat’ul-akbad, la mangeuse de foie. L’effondrement de
Hamza t projeta l’armée musulmane dans une vague de deuil.
Déjà dans la tourmente, les Musulmans étaient maintenant entièrement désa-
grégés, une scène décrite ainsi par le Tout-Puissant :

ħÝƇ ĥŽ ýƈ ĘƆ ÒðƆ Ìƈ ĵÝƪ è ƈƈ


Ɔ įĬðŽ Íƈ Öƈ ħıƇ ĬƆ ijùƫ éƇ ÜƆ ðŽ Ìƈ ĮƇ ïƆ ĐŽ IJ
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Ɔ ƈóĨŽ ƆŶÒĹĘħŽ ÝƇ ĐŽ ôÓ Ɔ ĭƆ ÜƆ IJƆ
468 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ħġƇ Ļĥƈ ÝƆ ×ĻĤƈ ħıƇ ĭŽ ĐħġĘóĀħàØóìŴÒ ƈ ïĺ Ƈ ƈóƇĺīĨħ


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Ɔ ĻƆ ĬŽ ïĤÒ
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Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĵĥƆ Đ
Ɔ ģƅ ąŽ ĘƆ IJðƇ ƇųÒ Ɔ ħŽ ġĭ
Ʃ IJ Ƈ ĐÓ
Ɔ ęƆ Đ
Ɔ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
« Et certes, Allah a tenu Sa promesse envers vous, quand par Sa permission
vous les tuiez sans relâche, jusqu’au moment où vous avez fléchi, où vous vous
êtes disputés à propos de l’ordre donné, et vous avez désobéi après qu’Il vous eut
montré (la victoire) que vous aimez ! Il en était parmi vous qui désiraient la vie
d’ici-bas et il en était parmi vous qui désiraient l’au-delà. Puis Il vous a fait recu-
ler devant eux, afin de vous éprouver. Et certes Il vous a pardonné. Et Allah est
Détenteur de la grâce envers les croyants. » (Al-‘Imrân, 3 : 152).
Allah, Gloire à Lui, considère les archers qui avaient laissé leurs positions comme
“désirant ce bas monde” et ceux qui les avaient tenues comme “désirant l’Au-delà”.

Ce jour-là, les idolâtres firent de nombreux martyrs parmi les Musulmans y.


Un groupe d’entre eux tenta même un assaut en voyant le Noble Messager r prendre
la tête de l’armée musulmane, ce qui leur permit plus tard de multiplier des offen-
sives ciblant le Noble Messager r.
Talha ibn ‘Ubaydullah t raconte:
« Dès que les Compagnons y commencèrent à se disperser les idolâtres lancèrent
une attaque et cernèrent le Messager d’Allah r de toutes parts au point que je ne sus
plus s’il fallait le défendre devant, derrière, à gauche ou à droite. Alors j’agitais sans
relâche mon épée à l’avant et à l’arrière jusqu’à ce qu’ils soient partis. » (Waqidi, I, 254).
Malik ibn Zuhayr, le tireur d’élite des idolâtres, décocha une flèche visant le
Noble Prophète r. Réalisant que cette flèche allait l’atteindre directement, Talha ibn
‘Ubaydullah t la saisit de sa main. Ayant percé son doigt, la flèche finit par le rendre
paralysé. (Ibn Sa’d, III, 217).
Quelques Compagnons Ansar et Muhajirun formèrent un cercle autour du
Noble Prophète r pour le défendre jusqu’à la mort, en étant des boucliers humains
présents constamment à ses côtés pour protéger sa vie. (Ibn Sa’d, II, 45 ; Waqidi, I, 240).
Abû Talha t était un puissant archer qui outre ses flèches avait une grande
force physique. Ce jour-là, deux ou trois arcs furent brisés par la seule force de ses
bras avec un carquois de flèches, le Noble Prophète r disait à ceux qui le voyait
de « remplir un nouveau carquois (de flèches) à l’intention d’Abû Talha ! ».
Chaque fois que le Noble Prophète r levait la tête pour apercevoir les idolâtres
qui les avaient cernés par derrière, Abû Talha t disait : « Que mes parents soient
sacrifiés sur ton chemin, ô Messager d’Allah, ne lève point la tête car une seule flèche
La Troisième Année de L’hégire 469

lancée par les idolâtres pourrait t’atteindre. Permets à mon corps d’agir comme un
bouclier et que ce qui t’est destiné m’atteigne à ta place ! » (Al Boukhari, Maghazi, 18).
Dans le but de protéger le Noble Prophète r, Qatada ibn Numan t se tenait
devant lui et lançait ses flèches en direction des idolâtres jusqu’à devenir par la suite
hors d’usage. Plus encore dans le processus, il fut directement frappé d’une flèche
dans l’œil ; son globe oculaire glissant sur sa joue. Le Noble Messager r prit alors le
globe oculaire de Qatada et l’inséra à sa place. Cet œil, alors eut une vision plus claire
et distincte que son autre œil.(Hakim, III, 334/5281 ; Haythami, VI, 113 ; Ibn Sa’d, III, 453).
Umm Umarah c est parmi les femmes, celle qui repoussait courageusement
l’ennemi avec son arc et ses flèches. Au retour à Médine après la bataille, le Noble
Messager r dit à son sujet : « Chaque fois que je regardais à gauche et à droite pendant
la bataille, je voyais Umm Umarah se battre à mes côtés. » (Ibn Hajar, al-Isabah, IV, 479).
Encouragée par les nombreux éloges et prières du Noble Prophète à son égard,
Umm Umarah c insista en outre auprès de lui pour “prier Allah afin que nous
soyons tes voisins au Paradis !”
Alors le Noble Prophète r fit cette invocation :
« Ô Allah ! Fais qu’ils soient mes voisins et amis au Paradis ! »
Toute excitée, Umm Umarah c dit alors avec verve :
« Que m’importe les ennuis qui m’arriveraient dans cette vie ! » (Waqidi, I, 273 ;
Ibn Sa’d, VIII, 415).

Au plus fort de la bataille, et d’une des plus violentes séquences visant le Pro-
phète d’Allah r Utah le frère idolâtre de Sa’d ibn Abi Waqqâs, saisit une pierre et la
jeta sur le Noble Prophète r. L’impact fut tel que deux boucles du casque du Noble
Prophète r éclatèrent, perçant ainsi sa joue et lui brisant les dents ; un incident qui
ne manqua pas de secouer la terre et les cieux148.
Qui plus est, pour aggraver les choses, le Noble Prophète r trébucha dans un
fossé creusé par le sordide Abû Amir pour piéger les Croyants.
Alî t saisit le Noble Prophète r d’une main et Talha ibn ‘Ubaydullah t le sai-
sit de l’autre et ensemble ils le tirèrent hors du fossé. Abû ‘Ubaydullah ibn Jarrah t
sortit à l’aide de ses dents une des boucles qui avaient perforé la joue du Noble Pro-
phète r, ce qui dans l’action eut causé la perte de ses dents de devant. Et en voulant
arracher l’autre boucle, il en cassa encore une autre. Cette vision était suffisante pour
que tous les Compagnons y, et même les anges, fussent complètement démoralisés.
Ces derniers furent profondément blessés par une chose aussi difficile à suppor-
ter et exhortèrent le Noble Prophète r : “maudit les idolâtres de Quraysh ! ”

148. Les dents de devant de tous les descendants du traitre ‘Utbah ibn Abi Waqqas, comme un signe divin,
sont naturellement brisées. (Ramazanoğlu Mahmûd Sâmî, Uhud Gazvesi, p. 26).
470 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Mais le Noble Prophète r répondit :


« Je n’ai pas été envoyé pour maudire, mais comme une miséricorde et un invité sur
le chemin de la vérité.
Et en levant les mains il r dit :
Ô Allah… guide mon peuple car il ne sait pas ! » (Al Boukhari, Maghazi, 24; Haythami, VI,
117; Waqidi, I, 244-247; Qadi Iyad, I, 95).

Au moment où il fut blessé, le Prophète d’Allah r dit :


« La colère d’Allah s’est intensifiée contre ceux qui ont fait couler le sang du visage
de Son messager. »
Sa’d ibn Abi Waqqâs t a dit à ce propos :
« Par Allah ! dès que j’entendis le Messager d’Allah r dire ces paroles, je n’avais
jamais ressenti ni avant ni après une aussi grande colère et le désir de tuer mon frère
‘Utbah pour ce qu’il avait fait. »
Sa’d t avait en guise de représailles percé à plusieurs reprises les rangs ennemis
mais il en fut empêché par le Noble Prophète r. (Waqidi, I, 245).
Sa’d ibn Abi Waqqâs t lançait sans cesse ses flèches en direction des idolâtres,
encouragé par le Noble Prophète r qui lui disait :
« Lance tes flèches, ô Sa’d, que mes parents soient sacrifiés pour toi ! »
‘Alî t qui fut témoin de la scène, dira plus tard :
« Je n’ai jamais entendu le Messager d’Allah dire à qui que ce soit: “que mes
parents soient sacrifiés pour toi”, excepté à Sa’d. » (At Tirmidhi Adab, 61, Manaqib, 26 ; Ah-
mad, I, 92).

Même au cœur de ce tourbillon de bouleversements, s’appuyant sur le Tout-


Puissant, animé d’une foi irrépressible, le Noble Prophète r continuait à prier en
ces termes :
« Ô Allah ! guide mon peuple est ignorant ; ils ne savent pas ce qu’ils font ! »
Sahl ibn Sa’d t relate :
« L’Envoyé d’Allah r était blessé au visage, il avait une incisive brisée et le
casque fracassé sur sa tête. Pendant que sa fille Fâtima c lavait le sang de sa blessure,
Alî ibn ‘Abî Tâlib t versait l’eau contenue dans le creux de son bouclier. Fâtima c,
voyant que l’eau ne faisait qu’augmenter le flot de sang, prit une natte, la brûla et,
lorsque celle-ci fut calcinée, l’appliqua sur la blessure et le sang s’arrêta de couler. »
(Al Boukhari, Jihad, 80 ; Maghazi, 24 ; Muslim, Jihad, 101).
La Troisième Année de L’hégire 471

La Bataille d’Ouhoud était devenue une scène emplie d’une grande tristesse.
L’avantage que les Croyants possédaient au départ avait tourné en faveur des ido-
lâtres, et ce pour avoir défié les instructions qui leur avaient été données. Il ne res-
tait que quatorze personnes autour du Noble Prophète r. Quant aux autres, elles
s’étaient à présent retrouvées dans un état de panique profonde.
Le Prophète de Miséricorde r finit en conséquence par leur lancer cet appel :
« Ô Serviteurs d’Allah ! Venez à moi ; je suis le Messager d’Allah ! » (Waqidi, I, 237).
Le Coran expose une image de la scène en ces termes :

Óƃ ĩƪ ĔƇ ħġƇ ÖÓƆ àƆ ƆÉĘƆ ħĠÒ ƈ ħĠij


óìƇÈĹĘ ĐïĺĢijøóĤÒIJïƅ èÈĵĥƆ Đ
Ɔ ĪIJ
Ɔ ijƇ ĥŽ ÜƆ ƆźIJ Ɔ ïƇ đƈ āŽ ÜƇ ðŽ Ìƈ
Ɔ ĪIJ
Ž ŽƇ Ɔ Ž ŽƇ Ƈ ŽƆ Ƈ Ƈ ƪ Ɔ Ɔ
Īij
Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ÜÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖóĻƈ×ìųÒIJħġÖÓĀƆÈÓĨźIJħġÜÓĘÓĨĵĥĐÒijĬõéÜŻĻġĤƈ ħƅ ĕƈÖ
Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ŽƆ ž ž Ɔ
« (Rappelez-vous) quand vous fuyiez sans vous retourner vers personne,
cependant que, derrière vous, le Messager vous appelait. Alors Il vous infligea an-
goisse sur angoisse, afin que vous n’ayez pas de chagrin pour ce qui vous a échap-
pé ni pour les revers que vous avez subis. Et Allah est Parfaitement Connaisseur
de ce que vous faites. » (Al-‘Imrân, 3 : 153).
Un autre groupe de Musulmans qui avait entendu la rumeur selon laquelle le
Noble Prophète r avait été tué fut complètement ébranlé de telle sorte que certains
se disaient entre eux “… il n’y a maintenant aucune raison de rester ici si le Prophète
d’Allah est mort en martyr”. Et ils commencèrent à quitter les lieux avec pour seule
pensée la protection que Médine pouvait leur assurer. Mais les femmes de Médine
finirent par les dissuader d’agir ainsi.
Un autre groupe se dit “même si le Messager d’Allah est mort, Allah, Lui, est
immortel. Et ce groupe ne perdit rien de son calme et continua à se battre.
Un compagnon, Anas ibn Nadr t, l’oncle du fameux Anas ibn Malik, faisait
partie ce dernier groupe.
Dès qu’il entendit la terrible rumeur colportée par certains Musulmans qui
avaient abandonné tout espoir disant que le Noble Prophète r avait été tué, il s’écria,
personnifiant l’immense courage et confiance en Allah qu’il avait au fond de lui : “Eh
bien, que comptez-vous faire maintenant que le Messager d’Allah est mort ? Levez-
vous quelle que soit la cause pour laquelle il est mort, vous aussi mourrez pour cette
cause.” Et il se lança dans le combat et tomba martyr atteint par plus de quatre-vingt
blessures de sabre. (Ahmad III 253; Ibn Hishâm III 31).
Anas t raconte :
« Mon oncle Anas ibn Nadr t n’avait pas pu participer à la bataille de Badr.
C’est pour cela qu’il dit un jour au Messager d’Allah r : “Ô Messager d’Allah ! J’ai
472 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

manqué la première bataille que tu as livrée contre les idolâtres. Si Allah me donne
l’occasion de participer au combat contre eux, Il verra ce dont je suis capable.”
C’est ainsi qu’il prit part à Ouhoud. En plein cœur de la bataille, Ibn Nadr, ayant
remarqué que les Musulmans s’étaient dispersés, s’avança en direction des idolâtres
tout en s’écriant : “Ô Allah ! Je te présente mes excuses pour ce qu’on fait ceux-ci (ses
compagnons) et je me déclare innocent pour ce qu’on fait ceux-là (les idolâtres).”
Puis s’avançant encore il vit devant lui Sa’d ibn Mu’adh et lui dit : “Ô Sa’d ! Par le
Seigneur de la Ka’ba, le Paradis, je sens déjà son odeur en deçà du Mont Ouhoud ! ”
Sa’d t dira plus tard : « Je fus incapable de faire ce qu’il a fait ! Nous trouvâmes
finalement notre oncle mort martyrisé. Il présentait sur son corps plus de quatre-
vingt blessures causées par le sabre, la lance et les flèches. Les idolâtres avaient mutilé
son cadavre après l’avoir tué, et ce à tel point que personne ne le reconnut si ce n’est
sa sœur grâce aux extrémités de ses doigts.
C’est en son honneur que verset fut révélé le verset suivant :
« Il est, parmi les croyants, des hommes qui ont été sincères dans leur engage-
ment envers Allah. Certains d’entre eux ont atteint leur fin, et d’autres attendent
encore ; et ils n’ont varié aucunement (dans leur engagement). » (Al-Azhâb, 33 : 23) ;
cf. (Al Boukhari, Jihad, 12 ; Muslim, Imarah, 148).

L’écrasante majorité de ceux qui avaient fui le champ de bataille une fois le vent
de la victoire réorienté voulurent continuer le combat loin du théâtre des opérations.
Allah, Gloire à Lui, adressa à ces derniers les propos suivants :

Ɔ óƇ ƇčĭÜƆ ħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ ƈ ÚƆ ijĩĤŽ ÒĪƆ ijĭĩÜƆ ħÝĭĠ


ĪIJ Ƈ ĩƇ ÝƇ ĺŽ ƆÈò
Ɔ Įij Ɔ ƆÈģƈ ׎ ĜƆ īĨ
Ɔ ïŽ ĝƆ ĘƆ ĮƇ ijŽ ĝƆ ĥŽ ÜĪ ŽƆ Ž ƪ Ɔ Ž Ƈ Ƈ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJƆ
« Bien sûr, vous souhaitiez la mort avant de la rencontrer. Or vous l’avez vue,
certes, tandis que vous regardiez ! » (Al-‘Imrân, 3 : 143).
Et même ceux qui étaient prêts à mourir et qui n’avaient pas fait cas de la ru-
meur relative à la mort du Noble Prophète r furent davantage réprimandés par le
Tout-Puissant en ces termes :

ƈ ƈƈ ƈ
Ɔ ħŽ ÝƇ ׎ ĥƆ ĝƆ ĬÒģƆ ÝĜƇ IJŽ ƆÈÚÓ
ĵĥƆ Đ Ɔ ĨĪƈ Ɔ
ƪ ÍĘƆ ÈģƇ øƇ óĤÒ
ƫ įĥ׎ ĜƆ īĨÛŽ ĥƆ ì
Ɔ ïŽ ĜƆ Ģij Ɔ ƪ źÌƈ ïƄ ĩƪ éƆ ĨÓ
Ƅ øƇ ò Ƈ ĨƆ IJƆ
īĺ ƈ ƪ ųÒĸ ÑĻüųÒóąĺīĥĘįƈ Ļ×ĝƈ ĐĵĥĐÕĥƈ ĝĭĺīĨIJħġƈÖÓĝĐƆÈ
Ɔ ƈóĠÓýĤÒ ƇƩ ƈõåŽ ĻøƆ IJÓ
Ɔ Ɔ ƃ Ž Ɔ ƆƩ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž
« Muhammad n’est qu’un messager - des messagers avant lui sont passés -
S’il mourait, donc, ou s’il était tué, retourneriez-vous sur vos talons ? Quiconque
retourne sur ses talons ne nuira en rien à Allah ; et Allah récompensera bientôt les
reconnaissants. » (Al-‘Imrân, 3 : 144).
La Troisième Année de L’hégire 473

Au mépris de toute l’adversité rencontrée, le Noble Prophète r tint ferme ses


positions comme l’Étoile du Nord et résista à l’assaut avec une résolution prophé-
tique ; un courage héroïque qui fournit un modèle exemplaire pour ses Compa-
gnons, en écho virtuel aux paroles du Tout-Puissant :

ħġƇ ùŽ ùƆ ĩŽ ĺĪƈ ƈƈ Ƈ ÌĪƆ ijŽ ĥƆ ĐŽ ƆŶÒħƇ ÝĬƇ ƆÈIJÒij


Ž Ɔ ÌīĻĭĨËŽ Ĩħ ƫ ÝĭƇ ĠĪƈ Ɔ ƇĬõƆ éŽ ÜƆ ƆźIJÒij
Ɔ Ƈĭ ƈıÜƆ ƆźIJƆ
öÓ ƈ ĭĤÒīĻÖÓıƇĤIJÒƈ ïƆ ƇĬĦÓĺŶÒğƆ ĥŽ Üƈ IJįĥƇ ᎠĨ
ƈ
ƪ Ɔ ŽƆ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ƈ ž æƄ óŽ ĜƆ ĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ Ò÷ƪ Ĩ
Ɔ ïŽ ĝƆ ĘƆ æƄ óŽ ĜƆ
īĻ ƈƈ ƈ ƈ ñƆ íƈ ÝĺIJÒŽ ijƇĭĨÆīĺñƈ Ĥƪ ÒųÒ ƈ
Ɔ ĩĤÓƪčĤÒÕƫ éƇĺƆźƇųÒ
Ʃ IJÅÒ
Ɔ ïƆ ıƆ ü
Ƈ ħŽ ġĭ
Ƈ Ĩ ƪƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ħƆ ĥƆ đŽ ĻƆ ĤIJƆ
« Ne vous laissez pas battre, ne vous affligez pas alors que vous êtes les supé-
rieurs, si vous êtes de vrais croyants. Si une blessure vous atteint, pareille blessure
atteint aussi l’ennemi. Ainsi faisons-Nous alterner les jours (bons et mauvais)
parmi les gens, afin qu’Allah reconnaisse ceux qui ont cru, et qu’Il choisisse par-
mi vous des martyrs - et Allah n’aime pas les injustes. » (Al-‘Imrân, 3 : 139-140).
À la faveur de la grâce et de la miséricorde d’Allah pour Son Messager r et les
Croyants y, et ce malgré toute la tourmente imposée à Ouhoud, les idolâtres furent
incapables d’atteindre leur but. En attendant, les Compagnons y commencèrent à
se regrouper autour du Noble Prophète r et repoussèrent les assauts menés par les
idolâtres, protégeant le Messager d’Allah r par une défense héroïque, et finirent par
leur infliger de grandes pertes comme auparavant. Profitant de la stabilité recouvrée,
le Messager d’Allah r se retira sur le Mont Ouhoud. Abû Sufyan tenta de lancer une
offensive à l’extrémité supérieure de la montagne, mais son effort s’avéra stérile. À
ce moment particulièrement effrayant, Allah le Très-Haut plongea les Croyants dans
une sensation de calme qui les fit sombrer dans un sommeil paisible. À peine réus-
sirent-ils à garder une emprise sur leurs épées, les ayant fait choir au sol à plusieurs
reprises.
Seuls les Musulmans dormaient profondément ; les hypocrites étaient terrifiés
à l’idée que les idolâtres fondent sur eux et les passent au fil de l’épée. (Al Boukhari,
Maghazi, 18, 20 ; Waqidi, I, 295-296).

Il y eut ensuite un vif échange de paroles entre Omar t et Abû Sufyan, qui
mécontent de ne pas avoir eu le résultat escompté, s’écria : « Rendez-vous l’année
prochaine à Badr ! » (Ibn Hishâm, III, 45).
Omar t attendit de voir quelle réponse allait donner le Noble Prophète r.
Et il r dit à Omar t d’annoncer : « Si Allah le veut, ici sera notre prochain lieu
de rencontre l’année prochaine ! » (Ibn Hishâm, III, 45 ; Ibn Sa’d, II, 59).
474 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les idolâtres s’en retournèrent avec pour seule raison les graines de la peur qui,
une fois de plus, avaient sensiblement augmenté.
Un des miracles du Noble Prophète r fut de jeter l’effroi dans le cœur de ses
ennemis, indépendamment de la distance qui le séparait de lui.
Allah, Gloire à Lui, déclare :

ħĤƆ ÓĨ ƈ ÖÒijĠóüƆÈÓĩƈÖÕĐóĤÒÒIJóęĠīĺñƈ ĤÒÔij


ųÓƈ ƈ ĝƈ ĥŽ Ƈĭø
ƈ ĥƇ ĜƇ ĹĘĹ
Ž Ɔ Ʃ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž ƫ Ž ƇƆƆ Ɔ ƪ Ɔ
ƈƈ ƈ
īĻ
Ɔ ĩĤÓčƪ ĤÒĴijƆ ᎠĨ
Ɔ ÷Ɔ ÑƈŽ ÖIJ
Ɔ òÓ
Ƈ ĭĤÒ Ƈ IJƆ ÉŽ ĨƆ IJÓ
ƪ ħƇ İÒ Ɔ Ĭƃ ÓĉƆ ĥŽ ø
Ƈ įƈÖĢŽ õžƈ ĭƆ Ƈĺ
« Nous allons jeter l’effroi dans les cœurs des mécréants. Car ils ont associé
à Allah (des idoles) sans aucune preuve descendue de Sa part. Le Feu sera leur
refuge. Quel mauvais séjour que celui des injustes ! » (Al-‘Imrân, 3 : 151).
Ainsi les idolâtres, affectés par l’effroi jetés dans leurs cœurs, furent incapables
d’envahir Médine pourtant sans défense, en dépit de l’avantage provisoire dont ils
jouissaient face aux Croyants. En outre, ils retournèrent sans prisonnier musulman.
Voilà sans conteste une grâce d’Allah accordée à Son Messager r et aux Croyants.
Alors que les idolâtres se retiraient d’Ouhoud, le Noble Prophète r ordonna aux
Musulmans de se mettre en rang pour être en mesure de “louer et d’invoquer Allah”.
Donc les Compagnons y s’alignèrent derrière le Prophète d’Allah r qui fit ce Doua :
« Ô Allah… À toi vont toutes nos louanges ! Allah… Nul ne peut retenir ce que
Tu décrètes, ni décréter ce que Tu retiens. Nul ne peut guider celui que Tu égares, ni
égarer celui que Tu guides. Nul ne peut donner ce que Tu retiens, ni faire obstacle à ce
que Tu donnes. Nul ne peut rapprocher ce que Tu veux être lointain ni éloigner ce que
Tu décrètes comme devant être proche ! »
« Ô mon Seigneur ! Étends sur nous Tes bénédictions, Ta miséricorde, Ta grâce et
Tes bienfaits ! Ô mon Seigneur ! Je t’implore pour que Tu m’accordes une bénédiction
continuelle qui jamais ne disparaît.
Ô mon Seigneur ! Je ne recherche que Ton secours dans les épreuves. Je me réfugie
en Toi seul lors des moments de frayeur.
Ô mon Seigneur ! C’est Toi seul que j’invoque pour que Tu nous protèges des maux
qui pourraient provenir des biens que Tu nous accordes comme des maux pouvant
provenir de ce que Tu ne nous as pas donné ! »
« Ô mon Seigneur ! Fais-nous aimer la foi (iman) et rends-nous la agréable et
désirée ! Rends-nous détestable la mécréance, la perversion et la désobéissance. Place-
nous parmi les bien-guidés ! »
La Troisième Année de L’hégire 475

« Ô mon Seigneur ! Fais-nous vivre en musulmans et mourir en musulmans ; fais-


nous rejoindre les rangs des vertueux sans nous couvrir d’ignominie et sans nous sou-
mettre à la tentation (fitna) ! »
« Ô mon Seigneur ! Maudis les incroyants qui traitent de menteurs Tes Messagers
et qui dévient les gens de Ta Noble Voie. Que ta colère, Ton châtiment et Ton hostilité
les frappent ! Ô mon Seigneur ! Maudis les négateurs à qui Tu as donné le Livre. Allah !
Tu es source de toute Vérité… Amin ! » (Ahmad III 424 ; Hakim I 686-687/1868; III, 26/4308).

Sa’d ibn Rabî t: le Compagnon qui rejeta toute excuse


Le Noble Prophète r envoya un de ses Compagnons sur le champ de bataille
dans l’espoir de trouver Sa’d ibn Rabi’, mais sans succès. Tous ses appels demeu-
rèrent vains. Perdant espoir, le Compagnon en question cria une dernière fois :
« Sa’d ! J’ai été envoyé par le Messager d’Allah pour constater si tu étais parmi
les vivants ou les martyrs ! »
Bien que conscient de vivre ses derniers instants, ayant entendu que le Noble
Prophète r se souciait de lui, Sa’d rassembla ses dernières forces et dit en gémissant :
« Je suis à présent parmi les morts ! »
Bien entendu il pensait à ce moment-là à l’Au-delà. Le Compagnon t courut
alors vers Sa’d t. Le corps de ce dernier était marqué par de nombreuses blessures
d’épée.
Malgré cela, Sa’d eut encore la force de murmurer ces incroyables paroles :
« Par Allah ! Tant que vos yeux sont en mouvement, si vous ne protégez pas le
Messager d’Allah r de ses ennemis et permettez que quelque chose de mal lui arrive,
476 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

vous n’aurez aucune excuse au regard d’Allah ! » (Muwatta Jihad 41 ; Hakim III 221/4906 ;
Ibn Hishâm III 47).

Sa’d t fit ensuite ses adieux à ce monde après qu’il eut prononcé ces paroles qui
restèrent un héritage pour toute la communauté (musulmane).

Les martyrs d’Ouhoud


Une fois que les idolâtres eurent quitté le champ de bataille d’Ouhoud, le Noble
Prophète r et les Croyants y s’y rendirent pour enterrer leurs martyrs. Ils étaient
exactement soixante-dix, y compris les intrépides Hamza et Musa’b ibn ‘Umayr y.
Musa’b ibn ‘Umayr t, le porte-étendard de l’armée musulmane, connut le mar-
tyr en tentant de défendre le Noble Prophète r. Un ange prit ensuite l’apparence de
Musa’b t et se saisit de l’étendard. Pas encore conscient que Musa’b t était mort, le
Noble Prophète r lui ordonna : « Avance, Musa’b, avance ! »
Le porte-étendard se retourna alors et regarda dans sa direction. Le Noble Pro-
phète r, ayant reconnu l’ange, réalisa que Musa’b t avait été tué. Bien que son corps
ait été retrouvé plus tard, les Croyants ne purent obtenir un assez grand linceul pour
couvrir son cadavre. (Ibn Sa’d, III, 121-122).
Le fait de couvrir le haut de son corps avec les vêtements qu’il portait aurait
signifié que le bas de son corps fût exposé ; et le fait de couvrir le bas de son corps
aurait exposé à l’air libre le haut de son corps. Face à ce dilemme, les Compagnons
eurent recours au Noble Prophète r pour déterminer la manière de prendre soin
du cadavre. Le Prophète de Miséricorde r leur conseilla alors de couvrir la partie
supérieure du corps de Musa’b avec ses vêtements et d’utiliser de bonnes herbes
odorantes pour en couvrir la partie inférieure.
Un regard rétrospectif sur sa vie nous apprend que Musa‘b t naquit au sein
des plus nobles et riches familles de La Mecque. Et presque toute la jeunesse de La
Mecque l’enviait énormément. On rapportait même que des filles jetaient des roses
sur son chemin. Mais lui, en dépit de toutes les pressions familiales, désirait plus que
tout être aux côtés du Noble Prophète r, et ce en rejetant formellement toute leur
richesse mondaine.
Ce fut à cause de son immense amour pour le Noble Prophète r qu’un ange
avait pris son apparence alors qu’en réalité il était tombé martyr sur le champ de
bataille d’Ouhoud. Ce fut un hommage du Tout-Puissant pour tous les sacrifices
qu’il avait accomplis.
Cette scène émouvante eut un impact durable et profond sur les cœurs musul-
mans. Des années plus tard, quand les Musulmans eurent acquis une souveraineté
forte et puissante, différents mets furent présentés à ‘Abdurrahman ibn Awf t par-
La Troisième Année de L’hégire 477

mi les plus fortunés compagnons y, par son fils, afin de rompre son jeûne. Très ému,
celui-ci déclara :
« Mus’ab t a été tué. Il était meilleur que moi. Nous avons trouvé à peine de
quoi couvrir sa tête, ses jambes sont restées découvertes. Allah nous a donné tout
ce qu’il y a dans ce monde, je crains vraiment que notre récompense nous ait été
accordée trop tôt. » Il commença à sangloter et ne mangea pas. (Al Boukhari, Janaiz, 27).
Parmi tous les martyrs d’Ouhoud Hamza t, l’exceptionnel héros de l’armée
musulmane, fut celui qui suscita dans le cœur du Noble Prophète r et des Croyants
le chagrin le plus indescriptible.
Safiyya c se précipita auprès des martyrs pour identifier son frère Hamza t et
fut accueillie par son fils Zubayr ibn Awwam t qui lui dit :
« Le Messager d’Allah r t’ordonne de rebrousser chemin ».
Elle s’exclama :
« Pourquoi ? Ne puis-je donc pas me rendre auprès de mon frère ? J’ai ouï dire
qu’il avait été massacré. Mais c’est pour la Gloire d’Allah qu’il l’a été. De toute façon,
rien ne pourrait nous consoler. Si Allah le veut, je ferai montre de patience et es-
compterai les récompenses divines qui sont siennes.
Zubayr t partit alors transmettre les paroles de sa mère au Noble Prophète r
qui lui dit :
« Dans ce cas, permettez-lui de le voir ! »
Safiyya c se leva donc et pria près du cadavre de Hamza t. (Ibn Hishâm, III, 48; Ibn
Hajar, al-Isabah, IV, 349).

Zubayr ibn Awwam t raconte dans une scène émotionnelle digne de la frater-
nité musulmane ce qui s’est déroulé ensuite :
« Ma mère sortit les deux manteaux qu’elle avait apportés et dit : “ Je les ai apr-
portés pour que vous les utilisiez comme linceul pour Hamza t”. »
Nous primes les manteaux et retournâmes près du cadavre de Hamza t. À
côté de lui reposait un autre martyr, un Ansar, sans linceul. Alors nous eûmes honte
d’envelopper le corps de Hamza t avec ces deux manteaux et de laisser l’Ansar t
sans linceul alors nous dîmes: «Qu’un manteau soit le linceul d’Hamza t et l’autre
pour l’Ansar.» Un de ces manteaux étant plus grand que l’autre, nous tirâmes au sort
pour l’attribuer à un des deux martyrs. (Ahmad, I, 165).
Ce compte rendu émotionnellement chargé confirme que les liens de parenté
avaient bel et bien cédé la place aux liens de fraternité dans la foi.
Neuf martyrs furent ensuite amenés près du corps de Hamza t pour y être
enterrés après l’oraison funèbre. Et toujours en présence du corps de Hamza t, neuf
478 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

autres martyrs furent amenés. C’est ainsi que le Noble Prophète r fit deux oraisons
funèbres à l’intention de son oncle bien-aimé, le roi des martyrs.(Ibn Maja, Janaiz, 28).
Selon le récit fait par Jâbir t le Noble Messager r emmena les martyrs d’Ou-
houd par paires et les plaça côte à côte et demanda :
«Lequel d’entre eux connaissait le mieux le Coran ?» (Al Boukhari, Janaiz, 73, 75).
Et on plaça en direction de la Qibla celui qui fut désigné comme connaissant le
mieux le Saint Coran. (Al Boukhari, Jenaza, 73, 75).
‘Aïcha c partit de Médine avec un groupe de femmes pour recueillir des nou-
velles d’Ouhoud. Près de Harra, elle croisa Hind bint Amr c qui, ayant chargé à
dos de chameau les cadavres de son mari Amr ibn Jamuh, de son fils Khallad et de
son frère ‘Abdullah y, rentrait à Médine. Une conversation s’engagea entre les deux
femmes. Aïcha, anxieuse demanda: «Quelles sont les nouvelles d’Ouhoud ?»
Hind répondit : «Tout va bien le Messager d’Allah est vivant et se porte bien.
Rien d’autre n’est important.»
Aïcha c désignant les cadavres questionna : «Qui sont ceux-là ?»
«Mon mari Amr t, mon frère ‘Abdullah t et mon fils Khallad t.»
«Où les emmènes-tu ?»
« À Médine où je vais les enterrer.»
Hind tenta ensuite de stimuler le chameau qui commençait à perdre du rythme,
avançait, puis s’arrêtait, puis ensuite s’accroupit.
‘Aïcha c demanda : « Est-ce parce qu’il est trop chargé ?»
Hind répondit: « Je l’ignore, c’est étrange parce que normalement il est capable
de porter deux fois plus qu’un autre chameau. C’est comme si quelque chose d’in-
croyable venait d’arriver ! »
Forcé de se relever, l’animal se redressa, pour s’accroupir une fois qu’on l’eût
tourné vers Médine. Mais quand il s’orienta en direction d’Ouhoud, le chameau se
mit à galoper. Sur ce Hind expliqua au Noble Prophète r la situation, cherchant par
là quelques conseils.
Le Messager d’Allah r dit:
«Ce chameau est de service. Amr a-t-il laissé un testament ?»
Elle répondit : «Peu avant de partir pour Ouhoud il s’était tourné en direction de
la Qibla et fit cette invocation : “Ô Allah ! Accorde-moi le martyre ! Et fais en sorte
que je ne retourne pas auprès des miens honteux et affligé !”
Le Noble Prophète r lui fournit alors l’explication suivante :
La Troisième Année de L’hégire 479

« Voilà pourquoi le chameau a eu ce comportement. Quiconque parmi vous, les


Ansar, fait un vœu à Allah, doit rester fidèle à sa parole. Amr, ton mari, est parmi les
justes. Dès l’instant où il est tombé martyr, les anges lui ont fait de l’ombre avec leurs
ailes et ont cherché le meilleur endroit pour l’enterrer. Amr ton mari, Khallad ton fils
et ‘Abdullah ton frère seront réunis comme amis au Paradis.»
En entendant ces mots et désireuse de rejoindre son mari dans l’au-delà, Hind
dit au Messager d’Allah r :
« De grâce, ô Messager d’Allah, prie Allah pour que je puisse aussi être réunie
avec eux. » (Waqidi, I, 264-265; Ibn Hajar, Fath’ul-Bari, III, 216; Ibn Abdilbarr, III, 1168).
Une autre scène eut lieu : « Le jour d’Ouhoud, Médine se mit à trembler après
avoir entendu la rumeur selon laquelle le Noble Prophète r serait tombé martyr. Un
vent de panique se leva au point que les cris finirent par atteindre les cieux. Sumayra
une femme ansar c à qui on avait annoncé que son mari, ses deux fils et son frère
avaient été tués lors de la bataille resta pourtant indifférente à cette nouvelle car elle
était davantage préoccupée par le sort du Noble Prophète r et demandait incessam-
ment : “Comment va-t-il ?” »
Les Compagnons y qui revinrent lui apportèrent finalement la réponse qu’elle
espérait :
« Louanges à Allah il est vivant et se porte bien.»
Mais Sumayra c, peu satisfaite de cette réponse, les implora :
« Montrez-le moi afin que mon cœur soit apaisé !»
Aussitôt dit, elle se précipita auprès du Prophète d’Allah r et, l’ayant saisi par le
bord de sa chemise, s’exclama :
« Que mes parents te soient sacrifiés, ô Messager d’Allah, je ne crains rien tant
que tu es en vie ! »(Waqidi, I, 292 ; Al-Haythami, VI,115).
Bashir ibn Aqrabah t raconte ce qui suit :
« J’étais alors enfant. Ayant appris que mon père Aqrabah t avait connu le
martyre à Ouhoud, je me rendis les yeux remplis de larmes auprès du Messager d’Al-
lah r qui me dit :
«Pourquoi pleures-tu, mon petit ? Ne serais-tu pas heureux de m’avoir comme
père et ‘Aïcha comme mère ?»
Je répondis: « Que mes parents te soient sacrifiés, ô Messager d’Allah ! Bien sûr
que je le voudrais !»
Là-dessus, le Messager d’Allah r me caressa la tête. Depuis ce jour, quand bien
même mes cheveux sont devenus gris, la partie qu’il avait touchée est restée noire. »
(Al Boukhari, at-Tarikh’ul-Kabir, II, 78; Ali al-Muttaqi, XIII, 298/36862).
480 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Jâbir t raconte aussi ce qui suit :


« La nuit avant Ouhoud, mon père me fit appeler et me dit :
« J’ai le sentiment que demain je serai le premier Compagnong t du Messager
d’Allah r à tomber en martyr. Hormis le Messager d’Allah r, tu es l’être le plus cher
que je laisserai ici-bas. J’ai des dettes ; règle-les et traite avec soin tes frères et sœurs. »
Comme il l’avait annoncé, mon père fut effectivement le premier homme à su-
bir le martyre à Ouhoud. À l’issue de la bataille je plaçai son corps dans un tombeau
en compagnie d’un autre martyr. Six mois plus tard, désireux de l’enterrer seul et
j’entrepris d’enlever son corps et, à ma grande surprise, celui-ci était dans le même
état que quand je l’avais placé. Je procédai donc à un nouvel enterrement, cette fois-
ci dans un tombeau distinct. (Al Boukhari, Janaiz, 78).
Une fois les martyrs d’Ouhoud identifiés et désireux de souligner la vaillance
qu’ils montrèrent, le Noble Prophète r s’exclama :
« Par Allah, comme j’aurais aimé moi aussi tomber martyr et passer chaque nuit
sous le mont Ouhoud ! » (Ahmad, III, 375).
Plus tard le Noble Prophète r qui rendait visite aux martyrs d’Ouhoud, ajouta :
« Je suis témoin de leur foi et de leur intégrité.»
Abou Bakr t demanda: «Ne sommes-nous pas leurs frères, ô Messager d’Al-
lah ? Nous avons embrassé l’Islam, comme eux, et nous avons entrepris le jihad, de
la même manière qu’eux.»
Le Noble Prophète r répondit:
«C’est vrai, mais j’ignore présentement ce qu’en matière d’innovation vous allez
susciter après moi !»
Abû Bakr t se mit à pleurer longuement puis déclara :
«Si c’est ainsi, nous demeurerons toujours auprès de toi ! » (Muwatta, Jihad, 32).
La préoccupation d’Abû Bakr t témoigne de son amour intense pour le Pro-
phète d’Allah r et montre pourquoi le Saint Coran le nomme “le second des deux,
le troisième étant Allah”.
Les Compagnons y aimaient le Noble Prophète r plus que n’importe qui, y
compris même leurs propres personnes. Quand ils étaient à la maison et que le Mes-
sager d’Allah r leur venait à l’esprit ils trouvaient leur maison étroite, se levaient
et partaient à ses côtés pour se soulager en regardant son visage béni et illuminé et
trouver la paix en conversant avec lui. (Kastallani, II, 104).
La crainte de se trouver éloigné de lui au Paradis était suffisante pour que leurs
visages pâlissent et que leur conscience fût davantage affinée. (Qurtubi, V, 271).
La Troisième Année de L’hégire 481

Tout ce que Rabia t désirait avec insistance auprès du Noble Prophète r, c’était
d’être auprès de lui au Paradis. (Muslim, Salât, 226; Ahmad, III, 500).
Les Compagnons prenaient constamment du plaisir à se réunir autour du Noble
Prophète r. (Ahmad, I, 8; Ibn Maja, Janaiz,4).
La plus grande joie qu’ils purent exprimer après l’Islam, c’est cette parole pro-
phétique : “L’homme sera avec celui qu’il a aimé”. (Al Boukhari, Adab, 96).

Pas moins de soixante versets de la sourate Al-‘Imrân évoquent la bataille d’Ou-


houd. Lorsque Miswar ibn Mahramah t demanda à ‘Abdurrahman ibn Awf t de
récapituler la fameuse bataille, ce dernier répondit :
“Récite le cent vingtième verset de la sourate Al-‘Imrân et ce sera comme si tu
étais avec nous à Ouhoud !” (Ibn Hishâm, III, 58 ; Waqidi, I, 319).

« Nous aimons Ouhoud et Ouhoud nous aime »


Ouhoud occupe une place particulière dans le cœur du Noble Prophète r. Tout
au long des années qui lui restaient à vivre, il visita Ouhoud et les martyrs qui y
étaient enterrés, déclarant de temps à autre :
« Nous aimons Ouhoud et Ouhoud nous aime ! » (Al Boukhari, Jihad, 71; Muslim, Hajj,
504).

Consacré par le Noble Prophète r à travers les compliments qu’il fit, absorbé
par son amour, Ouhoud, paradis des martyrs, eut tôt fait de proposer une vitrine
généreuse et vivante des souvenirs de la bataille, et ce à l’adresse de l’oumma à ve-
nir, jusqu’à la Dernière Heure. C’est plutôt la méfiance qui incitait les Musulmans
à penser qu’Ouhoud serait un lieu de malchance après l’issue de la bataille et pour
contrecarrer tout sentiment d’hostilité envers Ouhoud que le Noble Prophète r prit
l’initiative de lui exprimer ainsi son amour : « Nous aimons Ouhoud et Ouhoud nous
aime ! »
Dès lors, Ouhoud ne fut plus considéré comme un lieu de défaite, mais comme
un sanctuaire vantant dans ses profondeurs les cadavres vivants de ses célèbres héros.
D’autre part, le fait qu’Ouhoud reconnaisse et aime le Noble Prophète r met en
évidence de façon claire que la création tout entière confirme son Apostolat prophé-
tique. Lui-même a d’ailleurs affirmé :
« Excepté les rebelles parmi les djinns et les humains, tout entre ciel et terre sait
que je suis le Messager d’Allah. » (Ahmad, III, 310).
482 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Quelques leçons à tirer de la Bataille d’Ouhoud


Durant le paysage effroyable et attristant de ls Bataille d’Ouhoud de nombreuses
pages de vie amères et douces furent vécues avec une immense maturité. Après avoir
tout d’abord affiché une pleine confiance en Allah, l’engagement et la confiance des
Croyants commencèrent peu à peu à s’étioler pour finalement subir des expériences
amères et douloureuses.
La négligence dans l’accomplissement des ordres du Noble Prophète r pro-
voqua le changement brusque du destin de la bataille. Le chemin de la victoire fut
suspendu et fit place aux avertissements divins. Tous les Croyants payèrent le prix
de l’erreur de quelques-uns et se retrouvèrent au milieu d’un itinéraire quasi irréver-
sible parce c’était la sunnatullah, ou la Loi d’Allah. Même la présence parmi eux de
Son Bien-aimé Messager r ne put rien changer à la situation.
Et pourtant à Badr les compagnons y furent inconditionnellement obéissants
au Messager d’Allah r comme en témoignent les paroles qu’ils lui dirent alors qu’ils
étaient au comble de l’excitation divine :
« Nous avons cru en toi, ô Messager d’Allah… Nous avons une foi sincère dans
la vérité du Coran que tu as apportée ; et nous jurons de te suivre et de t’obéir. Fais
comme bon te semble ; ordonne-nous simplement et nous serons à tes côtés. Pour
l’amour de Celui qui t’a envoyé, même si tu devais plonger dans la mer, nous te sui-
vrons et pas un seul d’entre nous ne sera à la traîne ! » (Ibn Hishâm, II, 253-254).
La situation tourmentée impulsa alors l’envoi d’avertissements divins à l’adresse
des Croyants y à cause d’un moment d’insouciance qu’ils eurent à propos de leur
responsabilités sensibles et importantes.
Une des plus grandes sagesses sous-jacentes à l’épreuve d’Ouhoud fut l’épreuve
décisive d’isoler les hypocrites qui s’étaient mêlés aux Croyants.
Une autre sagesse fut le fait qu’Ouhoud instilla parmi les idolâtres de Quraysh
un faux sentiment de victoire sans implication pratique, ce qui les réduisit à l’immo-
bilisme. La victoire en trompe-l’œil avait fini par atténuer la haine et la colère qui
s’étaient accumulées dans le cœur des idolâtres depuis leur défaite à Badr, ce qui
avait réduit progressivement, au fil du temps, leur froideur envers l’Islam.
Il est frappant de noter que les Compagnons y, du plus jeune au plus âgé, se
concurrencèrent pour participer à la bataille et y mourir en martyrs.
Des adolescents de quinze ans recoururent à tous les moyens possibles pour
s’enrôler dans l’armée du Prophète d’Allah r. Le secret lié à la poursuite de la mort
n’est autre que la résultante de leur foi profonde et de leur amour inconditionnel
pour le Noble Prophète r, la raison même de l’existence de l’univers. Chaque fois
que la foi (iman) s’unit à l’amour, on y trouve toutes sortes d’exploits impensables et
emprunts de bravoure ; et partout où cette unité fait défaut, la paresse, l’indécision et
La Troisième Année de L’hégire 483

la peur sont présentes. Le seul moyen de renforcer cet amour, est de pratiquer le rap-
pel d’Allah (dhikr) et les prières (salawat) sur le Bien-aimé Prophète r avec l’objectif
de contempler les bénédictions d’Allah, Gloire à Lui, et de s’engager (lutter) en vue
d’adopter de tout cœur les voies du Prophète d’Allah r.

Hamra’ul-ASa’d (9 Shawwal, 3 / 24 mars 625)


Les idolâtres reprirent tout de suite le chemin de La Mecque, avec une peur qui
ne leur permettait même pas de réfléchir à deux fois avant de rentrer chez eux. Tou-
jours est-il qu’ils commencèrent à regretter de n’en avoir pas fini avec les Croyants.
Aussi ils décidèrent de retourner sur leurs pas pour lancer un second assaut.
Parvenu entre-temps à Médine, le Noble Prophète r ressentit le même besoin
d’intimider les idolâtres au moment même où le Tout-Puissant révéla le verset dé-
conseillant tout laxisme en matière de relation :

Ɔ ĤƆ ÉŽ ÜÓ
Īijĩ Ɔ ĩƆ Ġ
Ɔ ĪijƆ ĩƇ ĤƆ ÉŽ ĺƆ ħŽ ıƇ Ĭƈƪ ÍĘƆ Īij Ɔ ÌĦƈ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒÅÓĕƆ Ýƈ ÖÒĹ
Ɔ ĩƇ ĤƆ ÉŽ ÜƆ ÒŽ ijƇĬijġƇ ÜĪƈ ƈ
Ž ĘÒŽ ijƇĭ ƈıÜƆ ƆźIJƆ
ÓĩĻ ƈ ƈ ųÒ ƈ Ʃ īĨ ƈ Ɔ äóÜƆ IJ
ƃ ġèÓƆ ĩĻ ƃ ĥĐ Ɔ Ƈ Ʃ ĪÓ Ɔ ĠƆ IJ
Ɔ Īij Ɔ äƇ óŽ ĺƆ ƆźÓĨ Ɔ ųÒ Ɔ Īij Ƈ Ž Ɔ
« Ne faiblissez pas dans la poursuite du peuple [ennemi]. Si vous souffrez,
lui aussi souffre comme vous souffrez, tandis que vous espérez d’Allah ce qu’il
n’espère pas. Allah est Omniscient et Sage. » (An-Nisa, 4 : 104).
Le Noble Prophète r demanda alors parmi ses Compagnons y des volontaires
prêts à relever la tâche de poursuivre l’ennemi. Sans aller plus loin, Abû Bakr et
Zubayr y prirent place dans les rangs. Bien que la plupart des combattants avaient
été blessés à Ouhoud, cela ne les empêcha pas de s’équiper et de rejoindre les troupes
près du puits d’Abû Inabah. (Waqidi, I, 334-335).
Même Usayd ibn Khudayr t pourtant occupé à soigner les blessés, délaissa sa
tâche, prit ses armes et rejoignit le Noble Prophète r.
Sa’d Ibn Sahl t ordonna lui aussi à son clan d’agir immédiatement de même.
(Waqidi, I, 334-335).

Conduite par le Noble Prophète r en personne, l’unité combattante se mit à


poursuivre la trace de l’ennemi.
À Ouhoud, ‘Abdullah ibn Sahl et son frère Rafi y se battirent aux côtés du Pro-
phète d’Allah r et rentrèrent à Médine blessés. Ayant entendu l’appel du Noble Mes-
sager r qui invitait à poursuivre l’ennemi, ils s’exclamèrent :
« Par Allah ! Nous n’avons pas de monture et nous sommes blessés. Pour autant,
comment manquerions-nous une seule campagne menée par le Messager d’Allah ? »
Ainsi, ne supportant pas l’idée de laisser seul le Noble Prophète r, ils partirent en
484 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

se soutenant mutuellement tout au long du chemin, et finalement parvinrent à le


rejoindre. (Ibn Hishâm, III, 53).
Les Croyants prêts à un tel sacrifice reçurent d’Allah la promesse suivante :

ħıƇ ÖÓƆ ĀƆ ƆÈÓĨ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ÒijÖÓåÝøÒīĺñƈ Ĥ


Ƈ Ɔ ïđŽ Öī
Ɔ ĨĢijøƇ óĤÒ IJų
ƪ Ɔ Ʃ Ž Ƈ Ɔ ƆŽ Ɔ ƪ
ħĻčƈ Đ ƈ ÒijĭùèƆÈīĺñƈ ĥĤƈ æóĝĤÒ
óäƆÈÒijĝÜÒIJħıĭĨ
Ƅ Ɔ Ƅ Ž Ž Ɔƪ Ɔ Ž Ƈ Ž Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ ƪ Ƈ ŽƆŽ
« Ceux qui, quoiqu’atteints de blessure, répondirent à l’appel d’Allah et du
Messager, il y aura une énorme récompense pour ceux d’entre eux qui ont agi en
bien et pratiqué la piété. » (Al-‘Imrân, 3 : 172).
L’unité combattante progressa jusqu’à atteindre l’endroit appelé Hamra’ul-
ASa’d, à environ huit kilomètres de Médine. L’étendard était porté par ‘Alî t.
La nuit venue, le Noble Prophète r donna l’ordre d’allumer des feux de camp en
cinq cents endroits distincts. La vue était spectaculaire. Aux yeux des témoins de la
scène, cela apparaissait comme si une colossale armée campait dans la zone.
En fait un homme du nom de Mabad, non musulman au moment des faits, avait
aperçu les feux alors qu’il se rendait à La Mecque vint dire aux armées polythéistes
que les Musulmans les avaient suivi.
Pour leur expliquer qu’ils étaient nombreux, il leur dit:
“De ma vie je n’ai jamais croisé une armée aussi importante”.
En apprenant la situation une grande peur tomba dans le coeur des idolâtres qui
se dirent en se regardant mutuellement :
« Il ne restait plus un Musulman qui puisse bouger le plus petit doigt ! Comment
cela a-t-il pu se produire ? »
Puis devant le fait qu’ils ne comprenaient pas la situation ils se dirent:
«Allez ! Sortons d’ici avant qu’une catastrophe ne vienne s’abattre sur nous!»
Comme ils ne purent pas revenir en arrière et risquer l’affrontement ils conti-
nuèrent finalement le chemin vers la Mecque.
Alors le Messager d’Allah r et ses compagnons y, voyant les polythéistes se
retirer, rentrèrent ensemble à Médine. (Ibn Hishâm, III, 52-56; Waqidi, I, 334-340).

La question de l’héritage
Entre-temps certains versets du Coran portant sur l’héritage avaient été révélés
car une certaine confusion était apparue après Ouhoud. Après le martyr de Sa’d ibn
Rabi t et conformément à la coutume pratiquée durant la période préislamique
La Troisième Année de L’hégire 485

(Jalihiyya), le frère de ce dernier s’était emparé de tout ce qui restait de sa fortune


sans rien laisser aux deux filles de Sa’d. Considérées à cette époque comme ayant peu
de valeur, les femmes n’avaient aucun droit en matière d’héritage ce qui était une
coutume injuste que l’Islam a aboli :

 ùƆ Ĭƈ īƪ ĠĪƈ
ÅÓ Ƈ ÍĘƆ īƈ ĻŽ ĻƆ áƆ ĬƇŶÒċ ž ƈ è ƈ ƪ Ĥƈ ħĠƇ îƈ ƆźIJƆÈĹĘ
Ɔ ģƇ ᎠĨ ƈóĠƆ ñĥ Ž
ƈ ųÒ
Ƈ Ʃ ħƇ ġĻ Ƈ Āij ƈ ĺ
Ƈ
Ž
įƈ ĺŽ ijƆ ÖƆ ƆŶIJ ƈ ƈ ÛŽ ĬƆ ÓĠĪƈ
Ɔ ėƇ āŽ žĭĤÒÓıƆ ĥƆ ĘƆ Øƃ ïƆ èÒIJ Ɔ Ɔ ÌIJ Ɔ ĞƆ óƆ ÜÓ
Ɔ ĨÓ
Ɔ áƆ ĥƇ Ƈàīƪ ıƇ ĥƆ ĘƆ īƈ ĻŽ ÝƆ ĭƆ àŽ ÒĚƆ ijŽ ĘƆ
įƇ Ĥƪ īġƇ ĺƆ ħĤƪ ĪƈÍĘƆ ïƄ ĤƆ IJ ƈ öïƇ ùĤÒÓĩıĭŽ Ĩ ƈ ƅ ƈ ģƈ ž ġƇ Ĥƈ
Ž Ɔ įƇ ĤƆ ĪÓ
Ɔ ĠĪƈ
Ɔ ÌĞƆ óƆ ÜÓ Ɔ ĩƪ Ĩ Ƈ ƫ Ɔ Ƈ ž ïèÒIJ Ɔ

 Ĩ ƈ öïƇ ùĤÒįƈ ĨƇƈ ŷĘƆ ØƄ ijìƈŽ ÌįĤƆ ĪÓ Ƈ ĥƇ ƫáĤÒįƈ ĨƇžƈ ŷĘƆ ĮÒƇ ijƆ ÖƆ ƆÈįƇ àƆ ƈòIJƆ IJ
Ƈ ƫ ž Ɔ Ƈ Ɔ ĠĪƈ Ɔ ÍĘƆ ß Ɔ ïƄ ĤƆ IJƆ
ħıƇ ĺƫ ƆÈĪIJ òïÜźħĠÊÓĭÖƆÈIJħĠÊÇÖÆīĺîIJƆÈÓıƈÖĹĀij ƈ ĺÙƅ ĻĀƈ IJïƈ đÖ
Ž Ɔ Ƈ ŽƆ Ɔ ŽƇ Ƈ Ɔ ŽƇ Ƈ Ɔ ƅ ŽƆ Ž Ɔ Ƈ ƪ Ɔ ŽƆ
ÓĩĻ ƈ ĥƈ Đ ƈ Ʃ īĨƈ Ɔ ƈóĘƆ Óƃ đęŽ ĬƆ ħġƇ ĤƆ ÔóĜŽ ƆÈ
ƃ ġèÓĩĻ
Ɔ Ɔ ĪÓ
Ɔ Ġ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌųÒ Ɔ ž Ùƃ ąĺ Ž Ƈ Ɔ
« Voici ce qu’Allah vous enjoint au sujet de vos enfants : au fils, une part
équivalente à celle de deux filles. S’il n’y a que des filles, même plus de deux, à
elles alors deux tiers de ce que le défunt laisse. Et s’il n’y en a qu’une, à elle alors
la moitié. Quant aux père et mère du défunt, à chacun d’eux le sixième de ce qu’il
laisse, s’il a un enfant. S’il n’a pas d’enfant et que ses père et mère héritent de lui,
à sa mère alors le tiers. Mais s’il a des frères, à la mère alors le sixième, après exé-
cution du testament qu’il aurait fait ou paiement d’une dette. De vos ascendants
ou descendants, vous ne savez pas qui est plus près de vous en utilité. Ceci est un
ordre obligatoire de la part d’Allah, car Allah est, certes, Omniscient et Sage. »
(An-Nisa, 4 : 11).

Ainsi donc, la première répartition de l’héritage en Islam fut initiée par les héri-
tiers de Sa’d ibn Rabi. (Ahmad, III, 352, 375).
La Loi islamique en matière d’héritage cherche un juste équilibre entre le droit
au partage et les devoirs des héritiers.
Les hommes qui ont des responsabilités financières plus lourdes, allant des frais
de mariage jusqu’au paiement de la dot (mahr) qui permet ensuite de soutenir éco-
nomiquement la famille, reçoivent une part plus importante que les femmes.
Autrement dit, la différence entre les hommes et les femmes dans la Loi isla-
mique sur l’héritage est strictement conséquente à la différence des devoirs et des
responsabilités. Un équilibre a été trouvé entre ces deux éléments.
Du fait de leur rôle de “veilleuses” inlassablement reliées aux soins et autres
besoins des enfants et de la famille, les femmes sont par conséquent exemptées de
486 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

soutenir financièrement la famille. De ce fait leur part d’héritage représente la moitié


de celle des hommes. Derrière cette part d’héritage qui leur est donnée pour tenir
compte des besoins personnels des femmes célibataires, veuves ou divorcées.
Les femmes sont en outre dotées de vertus telles qu’une sentimentalité exacer-
bée, une sensibilité, une miséricorde et une abnégation, vertus idéales pour élever
les enfants et prendre la famille sous leurs ailes de compassion. De nature délicate,
dotée d’une sensibilité raffinée et d’une profondeur de miséricorde très élevée, la
femme peut donc avoir tendance à céder la place à la faiblesse physique et mentale
lorsqu’elle est confrontée aux surprises à différents stades de la vie. Ce n’est que pour
cette raison qu’une femme, dans l’Islam, a le statut de « demi témoin «. Ceux qui y
voient un mobile pour attaquer l’islam sont tout simplement incapables de voir, par
leur épais voile de malice, et par ignorance grossière, la perfection de ce principe
qui trouve son origine dans quelques considérations très importantes et inaltérables
concernant la disposition humaine.
La vérité est qu’Allah, Gloire à Lui, a créé chaque être – y compris chaque parti-
cule de cet être – dans un but. En cela, Il l’a doté d’une constitution physique appro-
priée ainsi que d’une structure spirituelle. En plaçant l’homme dans l’obligation d’as-
surer les besoins de la famille – et ce dans l’objectif de réaliser vraiment l’importance
de cette tâche – le Tout-Puissant l’a doté d’une grande force physique et spirituelle.
Les femmes, d’autre part, ont le devoir de protéger la génération, d’élever les
enfants et de s’occuper d’eux au moment où ils sont le plus faible et le plus impuissant.
C’est pour cela que ce devoir spécifique exige que leurs âmes, et non leurs corps,
soient dotées de sentiments et d’une sensibilité accrue. C’est pour cette raison que
durant la première période de faiblesse de l’enfant les femmes sont par le cadeau divin
dotées d’émotivité et de sensibilité de telle sorte qu’elles embrassent et nourrissent
les enfants avec un grand amour et une profonde compassion. Si la mère, qui est un
fleuve de compassion avec sa nature sentimentale, assume à un devoir au-delà de ses
capacités et autre que le but de la création cela aura des conséquences négatives.
Relativement aux considérations précitées, on pourrait préciser qu’en matière
de justice la femme a davantage de possibilités de se tromper comme par exemple en
affichant une empathie excessive pour la personne fautive. Voilà pourquoi la sagesse
divine prend en compte cela pour rendre le témoignage de deux femmes équivalent
à celui d’un seul homme.
D’autre part, l’Islam régule le processus de témoignage avant la loi, en étroite
conformité avec les mécanismes psychologiques des êtres humains. Par exemple, le
témoignage des femmes est considéré comme suffisant lorsque se produisent des
évènements auxquels les hommes ne peuvent pas être témoins. (Majallah, article. 1685).
Ceux qui accusent l’Islam de rabaisser la valeur de la femme en prétextant la
question du témoignage de la femme, ne comprennent pas ou ne veulent pas com-
La Troisième Année de L’hégire 487

prendre qu’en établissant un juste équilibre entre les droits et les obligations, les êtres
humains amènent toute la société à la sagesse avec leurs caractéristiques inhérentes
immuables.
La féminité est exaltée par la préservation et l’élévation des merveilleuses capa-
cités que le Tout-Puissant a accordées aux femmes. Quand une femme oriente ses
capacités naturelles à l’opposé de la résolution divine à son égard et renonce à sa
propre réalité, elle finit par gaspiller tout ce qui fait sa valeur et en vient à perdre sa
paix intérieure et à plonger dans le découragement et la misère. Pire encore, le sanc-
tuaire que représente la famille est abandonné, puis la société – dont la famille est la
base – finit par se décomposer.
Notre ère voit le début d’une course injuste et artificielle vers l’égalité entre les
hommes et les femmes.
Au mépris total des caractéristiques inhérentes aux femmes, cette course frappe
directement au cœur des qualités féminines, notamment en ce qui concerne la ma-
ternité, et par conséquent s’avère être préjudiciable pour l’institution familiale.
La pratique malheureusement courante de l’avortement – qui est une des consé-
quences de cette course – est la version moderne de la pratique consistant à enterrer
vivantes les petites filles et si répandue à l’époque préislamique.
Une simple différence de vêtements est la seule chose qui sépare les femmes fati-
guées et léthargiques d’aujourd’hui de celles qui ont vécu avant l’avènement de l’Islam.
Sans aucun doute, il s’agit là d’une catastrophe sociale provoquée par une édu-
cation matérialiste et sans véritable esprit.
488

LA QUATRIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

L’Embuscade de Raji (Safar 4 / juillet 625)


Le Noble Prophète r avait coutume d’envoyer des enseignants au sein des tri-
bus pour leur faire connaître l’Islam. Mais certains enseignants qu’il avait envoyés
furent victimes de trahison dont une des plus grandes est la «Trahison de Raji».
Les tribus voisines d’Adal et de Qara avaient demandé au Noble Messager r de
leur envoyer quelques Compagnons bien informés afin de leur enseigner l’Islam. Le
Prophète d’Allah r délégua donc dix Compagnons dirigés par Asim ibn Thabit t.
Lorsqu’ils parvinrent à Huda, une localité située entre Usfan et La Mecque, ils
firent une halte au puits de Raji qui, à l’époque, était sous la domination de la tribu
des Banû Hudhayl. Leur présence fut signalée aux Banû Lihyan, une branche la tribu
de Hudhayl, qui envoya à leurs trousses une centaine d’archers. Lorsqu’Asim t et
ses Compagnons y s’aperçurent qu’ils étaient suivis, ils se retranchèrent dans un
refuge où ils furent cernés par les Banû Lihyan qui leur dirent:
« Si vous descendez vers nous, dirent les Banû Lihyan, nous tiendrons l’engage-
ment formel de ne tuer aucun d’entre vous. »
Asim t répondit : « En ce qui me concerne jamais je ne descendrai pour me
mettre sous la protection d’un infidèle. Ô Seigneur, informe Ton Prophète de notre
situation. »
Le combat s’engagea aussitôt. Asim t et six Compagnons y qui se trouvaient à
ses côtés furent tués à coup de flèches.
Mortellement blessé, Asim t fit cette invocation :
« Ô Allah ! Protège mon cadavre au coucher du soleil, tout comme j’ai protégé
ta religion au lever du soleil ! »
En apprenant la mort d’Asim ibn Thabit t, les Qurayshites dépêchèrent
quelques individus pour récupérer une partie de son corps permettant de s’assurer
de son identité, parce qu’Asim avait tué un de leurs notables à Badr. Mais Allah en-
voya sur le cadavre une nuée de guêpes qui le protégea des émissaires qui ne purent
le mutiler à leur guise. (Al Boukhari, Jihad, 170 ; Maghazi, 10, 28 ; Waqidi, I, 354-363).
En attendant néanmoins le coucher de soleil pour que les guêpes se dispersent,
les idolâtres tombèrent sur une chose à laquelle ils ne s’attendaient pas : une forte
averse de pluie.
La Quatrième Année de L’hégire 489

L’inondation qui s’en suivit balaya la vallée et emporta hors de vue le corps
d’Asim t. Les idolâtres ne le retrouvèrent pas et ne purent mettre à dessein leur pro-
jet. Asim fut plus tard appelé “le martyr protégé par les guêpes”. (Ibn Hishâm, III, 163).
Les trois Compagnons y rescapés se rendirent et s’aperçurent vite que l’ennemi
n’avait nulle intention de respecter sa parole. Bien au contraire. Et alors que les ido-
lâtres les ligotèrent à l’aide des cordes de leurs arcs, un des trois Compagnons s’écria :
“C’est là une première trahison ! Par Allah ! je ne vous accompagnerai pas ! Ceux-là
(les victimes) sont pour moi un bel exemple.” On le traîna d’abord, puis on essaya de
le faire monter et, comme il refusait, on le tua. Sur dix Compagnons y seuls restaient
Khubayb et Zayd y qui furent emmenés et vendus à La Mecque.
Les Banû Harith ibn Amir achetèrent Khubayb t qui avait tué Harith le jour de
Badr et le gardèrent prisonnier avant de décider de le tuer. Une des filles de Harith
dira plus tard :
“Je n’ai jamais rencontré un aussi bon prisonnier que Khubayb. Je l’ai trouvé
un jour en train de manger une grappe de raisin alors qu’il n’y avait plus de fruits à
La Mecque et qu’il était solidement enchaîné. C’est un don qu’Allah lu avait fait. Il
récitait le Coran et se réveillait la nuit pour accomplir la prière de tahajjud. Ceux qui
l’entendaient réciter le Coran pleuraient d’émotion. Je lui ai demandé une fois s’il
avait besoin de quelque chose. “Rien, me répondit-il, hormis un peu d’eau fraîche et
le fait de vous abstenir de me donner de la viande sacrifiée au nom de vos idoles et
aussi de m’informer de l’heure où je serai exécuté.”
“Après les mois de trêve, continua-t-elle, je me rendis auprès de Khubayb et lui
annonça qu’on avait décidé de l’exécuter. À cette annonce, je ne vis chez lui aucune
trace d’anxiété.
Comme les fils de Harith l’emmenaient pour le tuer hors du territoire sacré de
La Mecque, khubayb dit : “Laissez-moi accomplir deux unités de prière (ra’kat)”. On
l’y autorisa. Après avoir prié il revint vers ses bourreaux et leur dit : “Si je ne craignais
que vous pensiez que j’eusse peur de la mort, j’aurais prié davantage !”
C’est donc Khubayb qui institua la coutume d’accomplir deux unités de prière
pour le condamné à mort. Puis il fit l’invocation suivante : “Ô Seigneur, réduis leur
nombre, élimine-les un par un et n’en laisse aucun en vie !149”
149. Quand Khubayb pria tous ceux qui étaient présents eurent peur et, pour se protéger de l’effet de la
prière, se mirent à courir à la recherche d’un endroit où se cacher, pensant qu’elles ne survivraient au
« fléau » de la prière. Plus d’un mois après son exécution, la prière de Khubayb demeura le principal
sujet de discussion des Quraysh. Selon certaines sources Qa’id ibn Amir s’évanouissait chaque fois
qu’on lui rappelait cette prière. Lorsqu’il fut calife, Omar t entendit parler de l’était de santé de Sa’id
et lui demanda s’il souffrait d’une quelconque maladie. « Je ne souffre d’aucune maladie, répondit-il,
si ce n’est que j’ai assisté à l’exécution de Khubayb et que j’ai entendu sa prière. Et, par Allah chaque
fois que j’y reviens, je commence soudain à perdre conscience ! » (Waqidi, I, 359-360).
490 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Puis il récita ce distique : “Peu m’importe comment je dois être tué, du moment
que je suis musulman, puisque c’est pour Allah que je vais succomber. C’est Lui
qui en a décidé ainsi et, s’Il le veut, Sa bénédiction fera rassembler de nouveau mes
membres dispersés.”
Plus tard Hubayb t lança cet appel à Allah le Tout Haut:
«Seigneur ! Ici je ne peux voir aucun autre visage que celui des ennemis ! Je n’ai
aucun messager à envoyer au Prophète d’Allah ! Alors transmets lui mes salutations.»
Assis au même moment avec ses Compagnons, le Noble Prophète r s’exclama
d’un ton fort : “et que la paix soit aussi sur toi”.
Les Compagnons demandèrent : « À qui as-tu adressé ces salutations, ô Messa-
ger d’Allah? ».
Le Noble Prophète r répondit: «À votre frère Khubayb, c’est Gabriel qui vient de
m’apporter ses salutations !»
Et le Noble Messager r informa ses Compagnons du martyr de Khubayb t. (Al
Boukhari Jihad, 170 ; Maghazi, 10, 28 ; Waqidi, I, 354-363).

Peu de temps avant son exécution, on demanda à Khubayb t :


« Ne souhaiterais-tu pas que Muhammad soit ici à ta place et que nous te lais-
sions la vie sauve ? »
Sans un seul moment d’hésitation, avec une voix faisant immensément écho à
son courage et à sa dignité, Khubayb t répondit :
« Par Allah, je n’aimerais pas être parmi les miens si pour cela Muhammad de-
vait être piqué par une simple épine ! »
Étonné de la réponse, Abû Sufyan confessa plus tard : « Je jure que jamais je n’ai
vu quelqu’un qui parmi ses amis aimât autant Muhammad ! » (Waqidi, I, 360 ; Ibn Sa’d,
II, 56).

Alors qu’il allait être exécuté les idolâtres tentèrent de tourner son visage vers
Médine, mais Khubayb t fit l’invocation suivante :
« Ô mon Seigneur ! Si ce que je suis en train de traverser a de la valeur à Tes
yeux, tourne donc mon visage vers la Qibla ! »
Allah, Gloire à Lui, l’entendit et fit en sorte que son visage se tournât vers la
direction désirée. Les idolâtres tentèrent de l’en empêcher, mais sans succès.
Le verset coranique suivant fut révélé en référence à cet illustre Compagnon t :

ƈ òğƈƈ ÖòĵĤÌƈ Ĺđƈ äƈ òÒÙƇ ĭÑƈ ĩĉŽ ĩĤŽ Ò÷ęŽ ĭĤÒÓıÝĺƆÈÓĺ


Ùƃ ĻĄÒ
Ɔ Ɔ žƆ Ɔ Ž ƪ Ɔ Ƈ Ƈ ƪ Ɔ Ƈƪ Ɔ
ĹÝƈ ĭƪ äĹ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ĥìƇ îÒŽ IJĸ
Ɔ îÓ×Ɔ ĐĹĘĹĥìƇ îÓŽ ĘƆ Ùƃ Ļƪ ĄóŽ Ĩƪ
La Quatrième Année de L’hégire 491

« Ô toi, âme apaisée, retourne vers ton Seigneur, satisfaite et agréée ; entre
donc parmi Mes serviteurs, et entre dans Mon Paradis. » (Al-Fajr, 89 : 27-30). (Al-Qur-
tubi, XX, 58 ; Alusi, XXX, 133).

Martyr comme Khubayb t Zayd t avait lui aussi foi forte (imân). Pendant ses
jours de captivité, il faisait tout pour se réveiller pour prier les tahajjud et jeûner les
journées. Il ne mangeait pas la nourriture composée de viande qu’on lui offrait car
elle avait été sacrifiée au nom des idoles. À cela il préférait le lait qu’il buvait avant
de jeûner et pour rompre le jeûne. Il aperçut Khubayb t sur le chemin de Tan’im, le
lieu de son exécution, là où tous deux s’étaient mutuellement exhortés. Zayd t fit lui
aussi deux unités de prière avant d’être exécuté. Il lui fut posé la même question qu’à
Khubayb t et il donna la même réponse. (Waqidi I 361-362).
“Mourir en musulman est préférable à mille vies vécues dans l’idolâtrie” furent
les dernières paroles qu’il prononça alors que les idolâtres lui avaient promis la vie
sauve s’il renonçait à sa foi. Et dans une dignité appropriée au croyant, il but avec
plaisir le calice du martyr t.
Yunus Emre, un des amoureux du Prophète r qui nous fait goûter aux délices
de la foi, a exprimé avec ce merveilleux poëme son désir de mourir pour Allah et Son
Messager r afin de bénéficier de son intercession dans l’au-delà :
Que mon âme te soit sacrifiée sur Ton chemin
Toi le bel homme au joli nom Muhammed
Viens intercéder pour ton serviteur impuissant
Toi le bel homme au joli nom Muhammed...

L’Embuscade de Maouna (Safar, 4 / Juillet 625)


Au même moment que la trahison de Raji, Abû Bara, un notable originaire de la
région du Najd, demanda au Noble Prophète r si quelques Compagnons eussent été
en mesure de leur enseigner l’Islam.
Pour toute réponse, le Noble Prophète r émit un refus, disant :
« Je crains que mes amis soient sous l’emprise de la trahison du peuple de Najd ! »
Abû Bara fit alors la promesse qu’au nom de sa tribu nul mal ne leur sera fait.
Le Noble prophète r fit alors rédiger une missive qui fut envoyée à Amir, le
neveu d’Abû Bara, qui gouvernait l’ensemble du Najd en l’absence de son oncle.
Puis le Noble Messager r désigna un groupe de soixante-dix Compagnons y
issus de la Suffa.
Le groupe prit la route avec Abû Bara t mais ils furent soudainement trahis
alors qu’ils atteignirent le puits de Maouna, quatre étapes après Médine.
492 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Amir, le neveu d’Abû Bara, lança un raid appuyé par une armée considérable,
sans même avoir lu la missive du Noble Prophète r.
Nonobstant le fait que sa tribu hésitait à attaquer les Compagnons en vertu de
la protection qu’Abû Bara leur avait signifiée, Amir attira à lui les tribus d’Usayya,
de Ri’l, de Dhakwân et de Banû Lihyan dans le but de passer les Compagnons au fil
de l’épée. À l’issue de l’attaque qui fut un véritable massacre seul Amr ibn Umayya
survécut. (Ibn Hishâm, III, 184; Haythami, VI, 125-130).
Jabbar ibn Sulma, un des assaillants qui participa à cet évènement tragique,
raconte :
« J’enfonçai ma lance dans le corps d’Amir ibn Fuhayra qui, quelques instants
auparavant, m’avait invité à embrasser l’Islam. Je pouvais voir la lame de la lance
sortir de l’autre côté de sa poitrine. Mais Amir, en était de jubilation, s’exclama : “
Par Allah, j’ai triomphé !”
Je me suis alors demandé :
« De quoi a-t-il triomphé ? C’est moi, après tout, qui l’ai tué. Dans le même
temps, son cadavre s’éleva au ciel et disparut de ma vue. Ce que j’aperçus à ce mo-
ment précis contribua à ma conversion à l’Islam. » (Ibn Hishâm, III, 187 ; Waqidi, I, 349).
Gabriel u fut le premier à informer le Messager d’Allah r que ses envoyés se
trouvaient désormais auprès de leur Seigneur en tant que martyrs et que leur Sei-
gneur était satisfait d’eux et qu’eux aussi étaient satisfaits. (Al Boukhari, Jihad, 9).
Le Prophète de Miséricorde r fut cependant affligé par cet évènement dévasta-
teur. Élevant ses mains en direction des portes du Divin, il fit durant un mois après
chaque prière de l’aube cette invocation :
« Ô mon Seigneur, maudis les tribus de Ri’l, de Dhakwân et d’Ussaya qui se sont
révoltées contre Allah et Son Messager ! » (Al Boukhari, Jihad, 9, 19 ; Maghazi, 28 ; Muslim,
Masajid, 297).

Les larmes de chagrin des Croyants y furent opposées à la joyeuse frénésie des
hypocrites et des Juifs qui semblaient davantage réjouis par rapport aux évènements
d’Ouhoud. D’ailleurs, frustrés de n’avoir pas pu prendre un ascendant certain sur
les Musulmans durant les évènements d’Ouhoud, les adversaires n’hésitèrent plus à
manifester ouvertement leur haine envers l’Islam.
À Ouhoud déjà, les hypocrites avaient commencé à présenter leur trahison sous
des couleurs séduisantes, semblable à une fine manœuvre visant à réprimander les
Musulmans qui avaient subi de nombreuses pertes humaines durant la bataille.
Bien plus, ils ne se génèrent pas pour faire des réflexions déplaisantes telles que :
“Si ceux qui ont été tués nous avaient écouté, ils n’auraient pas rencontré la mort.”
La sévère réponse formulée par le Coran demeure sans appel :
La Quatrième Année de L’hégire 493

 ÊƇ òƆ îÓŽ ĘƆ ģŽ ĜƇ ÒijĥƇ Ýƈ ĜƇ ÓĨÓ Ɔ ƆÈijŽ ĤƆ ÒŽ IJïƇ đƆ ĜƆ IJ ƈ ƈ


ÒIJ Ɔ ĬƆ ijĐÓ
Ƈ Ĉ Ɔ ħŽ ƈıĬÒijƆ ìŽ Ÿƈ ÒŽ ijƇĤÓĜƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ Ò
īĻ ƈ ƈ ħÝĭĠĪƈ ƈ Ɔ
Ɔ ĜîÓĀ Ɔ Ž Ƈ Ƈ ÌÚƆ ijŽ ĩƆ ĤŽ ÒħƇ ġƇ ùęƇ ĬÈīŽ ĐƆ
« Ceux qui sont restés dans leurs foyers dirent à leurs frères : “S’ils nous
avaient obéi, ils n’auraient pas été tués.» Dis : «Ecartez donc de vous la mort, si
vous êtes véridiques”. » (Al-‘Imrân, 3 : 168).

Żäƪ ËƆ ĨÓ ƈ ƈ Ʃ Īƈ ðŽ Íƈ Öƈ ƪźÌƈ Úij ƅ Ɔ ĠÓ


Ɔ ĩƇ ÜƆ ĪŽ ƆÈ÷ęŽ ĭƆ Ĥƈ ĪÓ
ƫ ÖÓƃ ÝƆ ĠųÒ Ɔ ĨƆ IJƆ
« Personne ne peut mourir que par la permission d’Allah, et au moment pré-
déterminé… » (Al-‘Imrân, 3 : 145).
Anas t déclarera plus tard :
« Je n’ai jamais vu le Messager d’Allah r éprouver autant de chagrin qu’au sou-
venir des martyrs de Ma’ûna ». (Muslim, Masajid, 302).
Ces derniers étaient tous des gens de la Suffa, des enseignants dévoués au Coran
et à la Sunna, éduqués selon l’enseignement spirituel du Noble Prophète r.
Les évènements de Raji et du puits de Maouna montrent l’importance pour les
Musulmans de communiquer l’Islam et favoriser la guidance.
Le Noble Prophète r avait choisi comme enseignants l’élite de ses Compagnons
en dépit des dangers inhérents qui menaçaient de poindre. Allah I a loué les émi-
nents Compagnons qui subirent le martyre durant cette cause, exprimant Sa satisfac-
tion à leur égard et eux-mêmes exprimant leur satisfaction à l’égard de leur Seigneur.
(Al Boukhari, Maghazi 28, Jihad 9; Muslim, Masajid, 297).

Le complot perfide des Banû Nadir


Amir ibn Umayya t, qui survécu au massacre perpétré au puits de Ma’ûna, tua
pendant leur sommeil deux hommes de la tribu ennemie qui les avaient attaqués.
Mais comme ils étaient sous la protection du Prophète d’Allah r une compensation
financière (Diya) devait être versée selon le pacte préalablement établi avec les Banû
Nadir. Pour ce faire le Noble Prophète r, se rendit dans leur territoire avec un groupe
de Compagnons y. Le fait que le Messager r leur rende visite, avec une poignée de
Compagnons y fut pour les Juifs des Banû Nadir l’occasion en or pour l’assassiner.
En disant qu’ils donneraient avec satisfaction la part de la compensation qui
leur incombe ils invitèrent le Messager d’Allah r à s’asseoir à l’ombre d’une maison
en attendant qu’ils préparent l’argent et lui offrirent quelques friandises. En même
temps, ils réfléchirent à la manière d’intenter à la vie du Noble Prophète r.
494 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Parmi les idées qui circulaient pour le tuer, celle qui consistait à lui jeter du haut
du fortin un bloc de pierre semblait faire l’unanimité.
Mais dans le même temps, le Noble Prophète r quitta aussitôt l’endroit où il se
tenait assis et s’en éloigna rapidement. Allah I l’avait en effet informé du complot
ourdi et l’avait protégé.
En fait, cette grâce apportée aux Musulmans est mentionnée dans ce verset :

ħġƇ ĻĤƆ Ìƈ ÒŽ ijĉƇ ùƇ ×ĺĪ ƆÈĦijĜƆ ħİ ƈ Ʃ ÛĩđĬƈ ÒŽ IJóĠƇ ðŽ ÒÒŽ ijĭĨÆīĺñƈ Ĥƪ ÒÓıĺƆÈÓĺ
Ž Ž ŽƆ Ƅ Ž ƪ Ɔ ðŽ Ìƈ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ųÒ Ɔ Ɔ Ž Ƈ ƇƆ Ɔ Ɔƫ Ɔ
ƈ Ʃ ĥƆ ĐIJųÒ
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ Òģƈ Ġƪ ijƆ ÝƆ ĻƆ ĥŽ ĘƆ ųÒĵ ƈ ƈ
Īij Ɔ Ɔ Ɔ Ʃ ÒŽ ijĝƇ ÜÒƪ IJ
Ɔ ħŽ ġĭ Ɔ ħŽ ıƇ ĺƆ ïĺŽ ƆÈėƪ ġƆ ĘƆ ħŽ ıƇ ĺƆ ïĺŽ ƆÈ
Ƈ Đ
« Ô les croyants ! Rappelez-vous le bienfait d’Allah à votre égard, le jour où
un groupe d’ennemis s’apprêtait à porter la main sur vous (en vue de vous atta-
quer) et qu’Il repoussa leur tentative. Et craignez Allah. C’est en Allah que les
croyants doivent mettre leur confiance. » (Al-Ma’ida, 5 : 11).
Ce verset s’adresse à l’ensemble des Croyants. Et même si le projet d’assassiner
le Noble Prophète r était dans les esprits, ceci démontre que Muhammad r incarne
la vie et l’âme des Musulmans et que sa vie doit être plus précieuse que la leur.
En rapport avec cette tentative d’assassinat, le Très-Haut fit cette révélation :

ƈ Ħƅ ijĜƆ īĨ
ħ ƈıĻĤƆ Ìƈ ñƈŽ ×ĬÓĘƆ Ùƃ ĬƆ ÓĻì ƈ īĘƆ ÓíƆ ÜÓ
Ɔ Ĩƈƪ ÌIJƆ
Ž Ž Ɔ Ž ƪ
īĻ ƈ ƈ Ɔ Õéƈ ĺƆźųÒ
Ɔ ĭÐÓíĤÒ ƫ Ƈ Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌÅÒijƆ øĵ Ɔ ĥƆ ĐƆ
« Et si jamais tu crains vraiment une trahison de la part d’un peuple, dé-
nonce alors le pacte (que tu as conclu avec), d’une façon franche et loyale car
Allah n’aime pas les traîtres. » (Al-Anfal, 8 : 58).

ƈ Ʃ ĥƆ ĐģŽ Ġƪ ijÜƆ IJÓıĤƆ çĭäÓĘƆ ħƈ ĥŽ ùĥĤƈ ÒŽ ijéĭäĪƈÌIJ


įƇ Ĭƈƪ ÌųÒĵ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆŽ ƪ Ƈ ƆƆ Ɔ
Īƈƪ ÍĘƆ ĞƆ ijĐƇ ïƆ íŽ ĺĪ Ɔ Ƈ ƈóĺĪƈÌIJħĻĥƈ đĤŽ ÒďĻĩƈ ùĤÒijİƇ
Ɔ ÈÒŽ IJïĺ Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ
īĻ ƈƈ ƈ Ɔ ƈ Ƈ ųÒ
Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÓƈÖIJ
Ɔ Į ƈóāŽ ĭƈƆ ÖĞƆ ïƆ ĺƪ ÈĸƆ ñĤƪ ÒijƆ İƇ Ʃ ğƆ ×Ɔ ùŽ èƆ
« Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta confiance
en Allah, car c’est Lui l’Audient, l’Omniscient. Et s’ils veulent te tromper, alors
Allah te suffira. C’est Lui qui t’a soutenu par Son secours, ainsi que par (l’assis-
tance) des croyants. » (Al-Anfal, 8 : 61-62).
La Quatrième Année de L’hégire 495

Le Noble Prophète r envoya alors un émissaire auprès des Banû Nadir pour
renouveler leur pacte les liant faute de quoi ils devraient s’exiler et quitter Médine
dans les dix jours.
Mais les hypocrites ne restèrent pas inactifs et envoyèrent un autre messager
aux Bani Nadir qui s’apprêtaient à quitter Médine. Ils les incitèrent à ne pas quitter
Médine et leur dirent qu’ils les aideraient en masse.
Le secret de cette relation entre Juifs et hypocrites est relaté dans le Coran :

ƈ óęƆ Ġ
īŽ ĨÒIJ īĺñƈ ĤÒħ ƈıĬÒƈ ijìŸ
ƈ ƈ ĪijĤijĝĺÒijĝĘÓĬīĺñƈ ĤÒĵĤÌƈ óÜħĤƆÈ
Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ƈ ƇƆ ƇƆ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ŽƆ
Òïƃ èƆ ƆÈħġĻ ƈ ďĻĉƈ ĬźIJħġđĨīäóíĭĤħÝä ƈóìƇÈīÑƈ ĤÔÓ
Ę ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ Òģƈ İŽ ƆÈ
Ž Ƈ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ Ž ƆƆ Ž Ƈ Ž Ž Ž Ɔ
Ɔ ÖƇ ðÓƈ ġƆ ĤƆ ħŽ ıƇ Ĭƈƪ ÌïƇ ıƆ ýŽ ĺƆ ƇųÒ
Īij Ʃ IJ
Ɔ ħŽ ġƇ Ĭƪ óƆ āĭ
ƈ
Ƈ ĭƆ ĤƆ ħŽ ÝƇ ĥŽ ÜijĜƇ ĪƈÌIJÒ
Ɔ
Ɔ ïƃ ÖƆ È
« N’as-tu pas vu les hypocrites disant à leurs confrères qui ont mécru parmi
les gens du Livre : «Si vous êtes chassés, nous partirons certes avec vous et nous
n’obéirons jamais à personne contre vous ; et si vous êtes attaqués, nous vous
secourrons certes». Et Allah atteste qu’en vérité ils sont des menteurs. » (Al-Hashr,
59 : 11).

Nonobstant tous les pièges que les ennemis tentèrent secrètement d’ourdir à
l’encontre des Musulmans, ceux-ci demeurèrent en réalité terrifiés par les Croyants.
Le Coran mentionne cet état d’esprit :

ƈ Ʃ īĨħ
Ɔ ıƇ ĝƆ ęŽ ĺƆ źƪ ĦƄ ijŽ ĜƆ ħŽ ıƇ Ĭƪ ƆÉÖƈ ğƆ Ĥƈ ðƆ ųÒ ƈ ƈ ƈ Ɔ
Īij Ɔ ž İ ƈòIJïƇ ĀĹ Ɔ ïƫ üƆ ÈħŽ ÝĬƇ ƆŶƆ
Ƈ ĘÙƃ ×Ɔ İŽ ò
« Vous jetez dans leurs cœurs plus de terreur qu’Allah. C’est qu’ils sont des
gens qui ne comprennent pas. » (Al-Hashr, 59 : 13).
Après un siège d’environ vingt jours, suite à la parfaite stratégie du Noble Pro-
phète r, les Banû Nadir finirent par capituler et furent alors expulsés de leur terri-
toire. Les Banû Qurayza, quant à eux, ayant accepté un nouveau pacte, furent autori-
sés à rester. (Al Boukhari, Maghazi, 14; Muslim, Jihad, 62).
Avant d’être exilés, les Banû Nadir avaient procédé au rasage complet de leurs
demeures afin que les Musulmans n’en prennent pas possession. Puis ils se diri-
gèrent vers Khaybar où ils s’établirent, tandis que d’autres se dirigèrent en direction
de la Syrie. (Ibn Hishâm, III, 191-194; Waqidi, I, 363-380).
Allah U rapporte ainsi Son soutien aux Croyants qui ont combattu Banû Nadir :
496 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ħİƈ ƈòÓĺƆ îī


ƈ Ĩ ƈ ÔÓ ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ Òģƈ İŽ ƆÈīŽ ĨÒIJ
ƈ óęƆ Ġ īĺñƈ ĤÒâóìƆÈĸñƈ Ĥƪ ÒijƆ İƇ
Ž Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ž
ħıƇ ƇĬijāƇ è ƈ
Ƈ ħŽ ıƇ ÝƇ đƆ ĬÓĨħ Ɔ Ɔ IJÒijäƇ óíŽ ĺĪƆÈħÝĭƇ ĭƆ Č
ƪ ıƇ Ĭƪ ÈÒijĭƫ Č ÓĨ ƈóýéĤÒĢƈ IJƆŶƈ
Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž ƪ
ÕƆ ĐŽ óĤÒ ƈ ƈ ƈ Ʃ īĨƈ
ƈ Ʃ ħİÓÜƆ ƆÉĘƆ ųÒ
ƫ ħƇ ƈıƈÖijĥƇ ĜƇ ĹĘĖƆ ñƆ ĜƆ IJÒij Ɔ ×Ƈ ùÝƆ éŽ ĺƆ ħŽ ĤƆ ßƇ ĻŽ è
Ɔ īŽ ĨƇųÒ ƇƇ Ɔ ž
ƈòÓāƆ ÖŽ ƆŶÒĹ
Ž ĤIJ ƈ ƇÈÓĺÒIJóƈ×ÝĐÓĘƆ īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ Òĸïƈ ĺƆÈIJħ ƈıĺïƈ ĺƆÉÖƈ ħıÜij
Ɔ Ƈ ƆŽ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ž Ž Ž Ƈ Ɔ ĻƇ ÖƇ Īij Ɔ ÖƇ ƈóíŽ Ƈĺ
« C’est Lui qui a expulsé de leurs maisons, ceux parmi les gens du Livre qui
ne croyaient pas, lors du premier exode. Vous ne pensiez pas qu’ils partiraient,
et ils pensaient qu’en vérité leurs forteresses les défendraient contre Allah. Mais
Allah est venu à eux par où ils ne s’attendaient point, et a lancé la terreur dans
leurs cœurs. Ils démolissaient leurs maisons de leurs propres mains, autant que
des mains des croyants. Tirez-en une leçon, ô vous êtes doués de clairvoyance. »
(Al-Hashr, 59 : 2).

Et la prise de possession sans violence des biens abandonnés par les Banû Nadir
occasionna la révélation de ce verset coranique :

 ÖƆ óĝƇ ĤŽ Òĸñƈ Ĥƈ IJ
ĵ ƈ
Ɔ ĢijøƇ óĥ Ĥƈ IJįƩƈ ĥĥƈ ĘĴóĝĤÒģİƆÈīĨ ƈ įƈ Ĥij
ƈ øòĵĥƆ ĐųÒÅÓ
Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ĘƆ ÈÓĨƪ
Ɔ
Ž ƪ Ɔ Ɔ ƆƇŽ ƈ Ž Ž
ÓĨƆ IJ ƈ Ļĭƈ ĔŽ ƆŶÒ ƈ ùĩĤÒIJĵĨÓÝĻĤÒIJ
Ɔ ħŽ ġĭ
Ƈ ĨÅÓ īĻÖÙĤIJîĪijġĺźĹĠģĻƈ×ùĤÒīÖÒIJīĻĠÓ
Ɔ Ž Ɔ ŽƆ ƃ Ɔ Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ƈ ƪ ƈ Ž Ɔ ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ
ƈ ĝƆ đƈ ĤŽ Òïĺ
ÔÓ Ƈ ïƈ ü Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌųÒÒijƆ Ʃ ĝƇ ÜÒƪ IJÒij Ɔ ıƇ ÝĬÓƆ ĘƆ įƇ ĭŽ Đ Ƈ ıƆ ĬƆ ÓĨƆ IJ
Ɔ ħŽ ĠÓ Ɔ ĮIJƇ ñƇ í Ƈ ĘƆ Ģij Ƈ øƇ óĤÒħƇ ĠÓ ÜÆ
ƪ Ƈ Ɔ
Żƃ ąŽ ĘƆ Īij Ɔ ĕƇ ÝƆ ׎ ĺƆ ħŽ ƈıĤÒƈ ijƆ ĨŽ ƆÈIJ ƈ ƈ ƈ
Ɔ ħŽ İ ƈòÓĺîīĨÒijäƇ ƈóìŽ ƇÈīĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ Òīĺ Ɔ ƈóäÓ ƈ ıƆ ĩĤŽ ÒÅÒóĝƆ ęƇ ĥŽ Ĥƈ
Ƈ Ɔ
Ɔ ĜƇ îÓƈ āĤÒ ƈ Ʃ īĨƈ
Īij ƪ ħƇ İ Ƈ ğƆ Ñƈ ĤƆ IJŽ ƇÈįƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ĪIJ Ɔ óƇ āĭ
Ƈ ĺƆ IJÓƆ Ĭƃ ÒijƆ ĄŽ ƈòIJ Ɔ ųÒ Ɔ ž
« Le butin provenant [des biens] des habitants des cités, qu’Allah a accordé
sans combat à Son Messager, appartient à Allah, au Messager, aux proches pa-
rents, aux orphelins, aux pauvres et au voyageur en détresse, afin que cela ne cir-
cule pas parmi les seuls riches d’entre vous. Prenez ce que le Messager vous donne
; et ce qu’il vous interdit, absentez-vous en ; et craignez Allah car Allah est dur
en punition. [Il appartient aussi] aux émigrés besogneux qui ont été expulsés de
leurs demeures et de leurs biens, tandis qu’ils recherchaient une grâce et un agré-
ment d’Allah, et qu’ils portaient secours à (la cause d’) Allah et à Son Messager.
Ceux-là sont les véridiques. » (Al-Hashr, 59 : 7-8).
Le butin obtenu sans combattre (fay), réservé à Allah et à Son Messager r,
comme l’indique ce verset coranique, était destiné à la réfection de la Ka’ba et
d’autres mosquées.
La Quatrième Année de L’hégire 497

Le Prophète r, quant à lui, répartissait sa part du fay parmi les nécessiteux de


ses compagnons y.
La sagesse véhiculée par la répartition du fay est, comme l’explique le verset ci-
dessus, qu’elle empêche l’accumulation et la circulation de la richesse entre les seules
mains des nantis.
L’Islam, en matière financière, exige que les membres de la société s’aident pour
s’assurer que les riches et les pauvres bénéficient de leurs droits et avantages et ap-
porter un juste équilibre social qui unisse les différentes franges de la société et qu’il
n’existe plus de groupe qui en exploite d’autre.
C’est pour cela que le Prophète d’Allah r donna le butin des Banû Nadir aux
Muhajirun, le retint des Ansar et leur dit:
« Si vous le souhaitez ce que vous avez précédemment fourni aux Muhajirun res-
tera parmi eux et vous pourrez recevoir une part du butin. Mais si vous le voulez, vous
pouvez leur demander de vous rendre ce que vous leur avez donné et leur céder la
totalité du butin. »
Les Ansar firent alors cette magnifique et déchirante réponse :
« Nous ne leur demandons pas de nous rendre ce que nous avons donné de nos
biens et nous ne voulons rien de ce qui provient de ce butin ! »
L’inégalable exemple de fraternité qu’exprimèrent les Ansar fut la raison de la
révélation du verset coranique suivant :

ĪIJ Ɔ ïƇ åƈ ĺƆ źƆ IJ
Ɔ ħŽ ƈıĻŽ ĤƆ Ìƈ óƆ äÓ
Ɔ İ
Ɔ īŽ Ĩ Ɔ ×ƫ éƈ ƇĺħŽ ƈıĥƈ ׎ ĜƆ īĨ
Ɔ Īij
ƈ ĪÓ
Ɔ ĩĺ ƈ Ɔ òÒƆ ïĤÒÒIJ
Ɔ ŸÒŽ IJ ƪ ÊƇ ijƪ ×ÜƆ īĺ
Ɔ Ɔ ƪ Ɔ
ñƈ ĤÒIJ
ƈ Ɔ Ɔ óƇ àƈ ËŽ ƇĺIJÒij ƈ
Ƈ ƇÈÓĩƪ Ĩ ƈ ƈ
ÙƄ ĀÓƆ āƆ ì Ɔ ħŽ ƈıƈÖĪÓ
Ɔ Ġ Ɔ ijŽ ĤƆ IJ
Ɔ ħŽ ƈıùęƇ ĬÈĵĥƆ Đ
Ɔ ĪIJ Ɔ ÜIJ ž Ùƃ äÓ Ɔ ħŽ İ ƈòIJïƇ ĀĹ
Ɔ è Ƈ Ę
« Il [appartient également] à ceux qui, avant eux, se sont installés dans le pays
et dans la foi, qui aiment ceux qui émigrent vers eux, et ne ressentent dans leurs
cœurs aucune envie pour ce que [ces immigrés] ont reçu, et qui [les] préfèrent
à eux-mêmes, même s’il y a pénurie chez eux. Quiconque se prémunit contre sa
propre avarice, ceux-là sont ceux qui réussissent. » (Al-Hashr, 59 : 9). (Voir aussi : Ar-
Razi, XXIX, 250 ; Al-Qurtubi, XVIII, 2).

La prohibition de l’alcool et des jeux de hasard


Les sentences divines en matière de boissons alcooliques et des jeux de hasard
ne furent pas comme on le sait révélées durant les premières années consécutives
à l’avènement de l’Islam, mais motivées par des problèmes spécifiques seulement
retardées.
498 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La prohibition de l’alcool se réalisa au travers des étapes suivantes :


1. À La Mecque, selon le verset coranique suivant :

ÒóġƆ ø įĭĨ ƈ ĪIJñíƈ ÝÜÔÓ ƈ ĭƆ ĐŽ ƆŶÒIJ ƈ íƈ ĭĤÒ ƈ ƈ


ƃ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ƈ ƪƆ Ɔ ģĻ ƪ ÚÒóƆ ĩƆ àƆ īĨIJƆ
ĪijĥƇ ĝƈ đŽ ĺƆ Ħƅ ijŽ ĝƆ žĤƈ Ùƃ ĺŴ ƈ ƈ
Ɔ Ĝƃ ôŽ ƈòIJƆ
Ɔ ğƆ ĤðƆ ĹĘĪƈƪ ÌÓĭƃ ùƆ èÓ
« Des fruits des palmiers et des vignes, vous retirez une boisson enivrante et
un aliment excellent. Il y a vraiment là un signe pour des gens qui raisonnent. »
(An-Nahl, 16 : 67).

Ce verset explique que les raisins et les dattes, bien qu’ils soient de bons aliments,
peuvent aussi se transformer en boissons enivrantes. Cela signifie que les substances
intoxicantes ne sont pas considérées comme admises parmi les bonnes sources de
nourriture et font donc allusion à leur future interdiction. Il s’agit là du seul verset
révélé concernant ces substances durant la période mecquoise.
2. Le Noble Prophète r était après l’Hégire très réceptif à tout ce que le Tout-
Puissant révélait relativement à toutes ces questions, tel le verset coranique suivant :

óĻƈ×Ġ ƈ ģŽ ĜƇ  ƈóùƈ ĻĩĤŽ ÒIJ ƈóĩíƆ ĤŽ Òīƈ ĐğƆ ĬƆ ijƇĤƆÉùĺ


ħàÌƈ Óĩ ƈıĻĘ
Ƅ Ɔ ƄŽ Ɔ ŽƆ Ɔ Ž Ɔ ŽƆ
ÓĩƆ ƈıđƈ ęŽ Ĭī
ƪ Ĩ ƈ ó×ĠŽ ƆÈÓĩıĩàŽ Ìƈ IJöÓ ƈ ĭĥĤƈ ďĘÓƈ ĭƆ ĨIJ
ƪ Ƈ Ɔ Ɔ
ƇƆ ƆƇ Ƈ Ɔ
« Ils t’interrogent sur le vin et les jeux de hasard. Dis : «Dans les deux il y a un
grand péché et quelques avantages pour les gens; mais dans les deux, le péché est
plus grand que l’utilité… » (Al-Baqara, 2 : 219).
Une majorité de croyants cessèrent de consommer des substances intoxicantes,
tandis que d’autres continuèrent indépendamment à en consommer.
3. Alors qu’il dirigeait la prière du soir (maghrib), un Compagnon en état
d’ébriété se mit à confondre les mots d’un verset coranique au point d’en déformer
le sens, ce qui occasionna la déclaration divine suivante :

Īij
Ɔ ƇĤijĝƇ ÜÓ
Ɔ Ĩ Ɔ ØƆ ƆŻāĤÒÒŽ ijÖƇ óĝŽ ÜƆ ƆźÒŽ ijƇĭĨÆīĺ ƈ Ɔ
Ɔ ÒŽ ijĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ ĵƆ Ýƪ èĴ
Ɔ òÓƆ ġƆ ø
Ƈ ħŽ ÝĬƇ ÈIJ
Ɔ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ÈÓĺƆ
« Ô les croyants ! N’approchez pas de la Salât alors que vous êtes ivres, jusqu’à
ce que vous compreniez ce que vous dites… » (An-Nisâ’, 4 : 43).
Il s’en suivit que le nombre de buveurs musulmans diminua drastiquement
après la révélation de ce verset.
La Quatrième Année de L’hégire 499

Bien plus, un Compagnon indiqua que « quiconque se était en état d’ébriété ne


devait pas s’approcher de la prière ». Les Musulmans commencèrent alors à réaliser
qu’il n’était question que de temps avant que l’interdiction totale n’intervienne ; eux-
mêmes étaient préparés à cet égard.
4. Une écrasante majorité de Musulmans cessèrent donc de boire. Quelques-
uns en revanche furent bouleversés à la vue de scènes désagréables le plus souvent
liées à l’ivrognerie. Omar ibn Al-Khattâb t par exemple implora Allah le Très-Haut
de faire une déclaration claire et indéniable sur la consommation d’alcool !
Finalement le désordre Le souvenir survenu lors d’un festin très arrosé fut la
raison de la révélation de l’interdiction définitive :

ƈ ƈ
ĦƇ ƆźôŽ ƆŶÒIJƆ ÔÓ
Ƈ āĬ Ɔ ƆŶÒIJ Ɔ óƇ ùĻŽ ĩƆ ĤŽ ÒIJƆ óƇ ĩŽ íƆ ĤŽ ÒÓĩƆ Ĭƈƪ ÌÒŽ ijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ĪƇ ÓĉƆ ĻýĤÒ ïĺ ƈóĺÓĩĬƈÌĪijéĥƈ ęÜħġĥđĤĮij×ĭƈ ÝäÓĘĪÓ ƈ ĉĻýĤÒģĩĐīĨ ƈ ÷ä ƈò
Ž ƪ Ƈ Ƈ Ɔ ƪ Ɔ Ƈ ŽƇ Ž Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž ƪ ƈ Ɔ Ɔ Ž ž Ƅ Ž
ħĠƇ ïƪ āƇ ĺƆ IJ ƈ ƈ ƈ Ɔ
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Ɔ ƈóĩŽ íƆ ĤŽ ÒĹĘÅÓąƆ ĕŽ ×Ɔ ĤŽ ÒIJ Ɔ ØƆ IJÒƆ ïƆ đƆ ĤŽ ÒħƇ ġƇ ĭƆ ĻŽ ÖƆ ďƆ ĜijƇĺĪÈ
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ƫ ÝĬƇ ƆÈģŽ ıƆ ĘƆ ØƆŻāĤÒ
ĪijıƇ ÝĭƆ Ĩħ ƪ īƈ ĐƆ IJ Ɔ ųÒ Ɔ
« Ô les croyants ! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de
divination ne sont qu’une abomination, œuvre du Diable. Ecartez-vous en, afin
que vous réussissiez. Le Diable ne veut que jeter parmi vous, à travers le vin et le
jeu de hasard, l’inimité et la haine, et vous détourner d’invoquer Allah et de la
Salât. Allez-vous donc y mettre fin ? » (Al-Mâ’ida, 5 : 90-91).
Le Noble Prophète r fit mander Omar t puis lui récita les versets divins juste
révélés.
Parvenu aux mots “Écartez-vous-en”, Omar t s’écria : « Oui, par Allah, nous
nous en écarterons, nous nous en écarterons ! »
Ces paroles précises résonnèrent très fort sur l’ensemble des Compagnons.
Suite à cette révélation divine, et sur ordre du Prophète r, un compagnon t fut
désigné pourparcourir les rues de La Mecque annonçant que “les boissons alcooli-
sées étaient désormais interdites”.
Ceci eut pour conséquence que des rivières de vin commencèrent à couler dans
les rues de La Mecque ; toutes sortes de récipients remplis de ce liquide ayant été
préalablement mis en pièces.
Les Musulmans qui s’adonnaient au vin détruisirent tout ce qui constituait leur
stock. À la suite de cette déclaration indiscutable, plus jamais ces derniers n’ont tou-
ché à une goutte d’alcool.
500 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ayant mis d’avantage l’accent sur l’interdiction formelle le Prophète r dit:


« Certes Allah maudit les boissons alcoolisées, celui qui les boit, celui qui les pré-
pare, celui qui les vend, celui qui les achète, celui qui les transporte, celui pour qui on
les transporte. » (Ahmad, I, 53 ; II, 351 ; Nasa’i, Ashribah, 1-2 ; Al-Hakim, II, 305/3101).
Anas t raconte :
« L’alcool venait d’être interdit au moment où je servais des gens dans la de-
meure d’Abû Talha. Conformément aux ordres du Messager d’Allah r, un com-
pagnon désigné annonça partout la nouvelle. Nous pouvions entendre sa voix de
l’intérieur. Abû Talha me demanda de “sortir pour voir de quoi il s’agissait”. Je sortis
donc et entendis le héraut annoncer que l’alcool était désormais interdit. J’en infor-
mai ensuite Abû Talha qui me dit aussitôt de “déverser tout cela !”. Bientôt le vin se
répandit dans les rues de Médine. » (Al Boukhari, Tafsir, 5/11).
Cet évènement met ici en évidence la rigueur avec laquelle les Compagnons y
ont immédiatement adhéré au commandement d’Allah le Très-Haut. Sans émettre la
moindre excuse ou attendre une seule minute, ils épandirent ce qu’ils détenaient en
matière d’alcool, cherchant avec enthousiasme l’agrément divin. Bien plus, ceux-ci
cherchaient dès ce moment à Lui obéir sincèrement, et ce du tréfonds de leurs cœurs.
Le Prophète de miséricorde r déclara concernant les boissons alcoolisées :
« Toutes les boissons alcoolisées sont illicites. Ce qui enivre en grande quantité est
interdit même en petite quantité. » (Ibn Maja, Ashriba, 10 ; Nasa’i, Ashribah, 24, 48).
« L’alcool est la mère de tous les maux. » (Ahmad, V, 238).
« Que celui qui croit en Allah et au Jour Dernier ne s’asseoie pas à une table où il
y a de l’alcool. » (At Tirmidhi Adab, 43/2801).
« Un temps viendra où une partie de gens de ma communauté consommeront de
l’alcool en lui donnant des noms différents.» (Ahmad, IV, 237).
Le processus graduel, issu d’une préoccupation attachée au maslahah (bien
commun) que nous voyons mis en œuvre dans l’interdiction du jeu de hasard et de
la consommation de produits alcoolisés, fournit un indice pratique de la méthode
islamique qui vise à lutter contre les différentes formes de vices.
Allah I, même s’Il connaît d’une manière absolue, éternelle et universelle la
façon de déterminer les règles de l’Islam, considère néanmoins les capacités des
ceux auxquelles s’adressent ces règles ainsi que leurs niveaux de compétence pour
s’y conformer.
Peut-être que la plus importante manifestation de cette réalité réside dans le fait
que le verset se rapportant au crédo de l’Islam eut la préséance d’avoir été révélé lors
de la période mecquoise, et ce contrairement à la manière générale dont la séquence
coranique s’oriente aujourd’hui.
La Quatrième Année de L’hégire 501

Dès lors que le Coran existait déjà dans le Lawh’ul-Mahfuz avant sa descente sur
terre, il n’est pas difficile de constater que la préoccupation spécifique sous-jacente
à la préséance donnée à certaines sections du Coran sur les autres demeure quelque
chose de strictement maslahah, c’est-à-dire à l’avantage des Croyants.
Ce bien commun consiste à observer l’aptitude et le pouvoir des êtres humains
à suivre le Coran et son développement, juste comme la façon dont les obligations
augmentent en tandem avec l’âge d’un enfant.
Le principe de gradualité – davantage mis en œuvre au temps béni du Noble
Prophète r – est une part de la sunnatullah, la Voie ou Chemin d’Allah, soutenue en
cela par la grande sagesse du Tout-Puissant et par un effet de Sa miséricorde. Appli-
cable à tout moment dans la transmission de l’Islam, elle est dans le même temps la
plus agréable à la nature humaine. En effet, la chose initiale que l’on doit faire après
avoir embrassé l’Islam est de rectifier sa foi ; une fois cela acquis, l’on peut passer aux
actes proprement dits.
La gradualité entre une fois de plus en jeu lors de la réalisation des actes, mais
cette fois en la réglant selon la capacité humaine. Ceci est non seulement applicable
pour inviter des personnes à l’Islam, mais aussi pour toutes les autres formes d’ensei-
gnement.
Par conséquent, depuis l’Appel divin initié avec Adam u, il y eut un déve-
loppement notable dans le Message – les articles fondamentaux de la foi étant bien
entendu restés les mêmes –, parallèlement au développement social de l’humanité ;
un développement qui a abouti à la religion de l’Islam.

Dhât ar-Riqâ’150
Les clans de Muharib et de Salahah, issus de la tribu Ghatafan, unirent leurs
forces pour mener une attaque contre les Musulmans, et ce en réponse à l’offensive
du Noble Prophète r qui marchait à leur rencontre, appuyé par quatre cents Com-
pagnons. Alors que les Croyants se tenaient en face de lui, l’ennemi perdit son sang-
froid et finit par se retirer. Peu après, les Croyants accomplirent ensemble la prière
de dhor dont le moment était venu. Observant de loin les Croyants accomplirent la
prière jusqu’à son achèvement, l’ennemi s’en voulut ensuite de ne pas avoir tendu
d’embuscade alors qu’ils étaient en prière.
Un des membres du clan se mit alors à consulter ses camarades. Puis il leur dit:
“Ne vous inquiétez pas, leur prochaine prière (Salât al-‘asr) leur est plus chère
que leurs pères et leurs fils.”
150. D’après certaines sources, cette campagne aurait eu lieu après celles de Khandâq (des tranchées) ou
de Khaybar. Nous avons cependant préféré suivre cette séquence l’opinions de la majorité des savants
spécialistes de la vie et de l’époque du Noble Prophète r.
502 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ainsi ils décidèrent d’un commun accord d’attendre ce moment.


Et sur ces entrefaites le Tout-Puissant U envoya Gabriel u, porteur de la Révé-
lation qui allait ruiner leur plan d’attaque :

ÒŽ IJñƇ ìƇ ÉŽ ĻĤŽ IJ ğđĨħıĭĨ ƈ ÙęÐÇƈ ĈħĝÝĥĘØŻāĤÒħıĤÛĩĜƆÉĘħ ƈıĻĘ ƈ Ûĭ Ɔ ĠÒƇ ðƆ Ìƈ IJƆ


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ÒŽ ijĥƫ āƆ ƇĺħĤƆ ĴóìŽ ƇÈÙƄ ęƆ ÐÇƈ Ĉ Ɔ Úƈ ÉŽ ÝƆ ĤŽ IJ ƈ
Ɔ ħŽ ġƇ ÐÆòƆ IJī
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Ɔ ðƆ Íƈ ĘƆ ħŽ ıƇ ÝƆ éƆ ĥøŽ È
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Ɔ Īij Ɔ ĥƇ ęƇ ĕŽ ÜƆ ijŽ ĤƆ ÒŽ IJóƇ ęƆ Ġ
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Ɔ ñĤƪ Òîƪ IJ Ɔ ħŽ ıƇ ÝƆ éƆ ĥøŽ ÈIJ
Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ
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Ɔ Žƪ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ƆƆ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž
« Et lorsque tu (Muhammad) te trouves parmi eux, et que tu les diriges dans
la Salât, qu’un groupe d’entre eux se mette debout en ta compagnie, en gardant
leurs armes. Puis lorsqu’ils ont terminé la prosternation, qu’ils passent derrière
vous et que vienne l’autre groupe, ceux qui n’ont pas encore célébré la Salât. A
ceux-ci alors d’accomplir la Salât avec toi, prenant leurs précautions et leurs
armes. Les mécréants aimeraient vous voir négliger vos armes et vos bagages,
afin de tomber sur vous en une seule masse. Vous ne commettez aucun péché si,
incommodés par la pluie ou malades, vous déposez vos armes ; cependant prenez
garde. Certes, Allah a préparé pour les mécréants un châtiment avilissant. » (An-
Nisâ’ 4 : 102 ; voir aussi At Tirmidhi Tafsir, 4/3035).

Ce type spécifique de prière est connu sous le nom de salât al-khawf, c’est-à-dire
la prière de la peur ou du danger151.
Gabriel u avait lui-même enseigné au Noble Prophète r comment l’accomplir.
Ce jour-là, la prière de la ‘asr fut, dans l’attente de l’ennemi dont les seuls espoirs
reposaient sur ces moments d’adoration qu’ils jugeaient futiles, faite de cette façon.
151. La salât’ul khawf ou prière de la crainte advient lorsqu’un groupe effectue à tour de rôle une salât
(prière rituelle) derrière un seul imam, et ce lorsqu’un grave danger menace telle une attaque
ennemie imminente. Le premier groupe qui exécute la première ra’kat (unité de prière) d’une salât de
deux ra’kat, ou les deux premières ra’kat d’une prière de quatre ra’kat quitte la salât pour surveiller le
groupe, après la seconde sajda (prosternation) – dans une salât de deux ra’kat – ou la première qaadah
– dans une salât de quatre ra’kat. Le deuxième groupe en rang vient ensuite compléter le restant des
ra’kat derrière l’imam, après quoi ils partent pour prendre la relève de la garde. L’imam donne le
salam qui met fin à la salât, lui seul le fait. C’est alors que les membres du premier groupe reviennent
encore une fois pour compléter leur salât, sans qira, c’est-à-dire sans récitation du Coran, car ils sont
considérés comme lahiq, c’est-à-dire comme ayant quitté la salât pour une excuse, bien qu’ils aient
rejoint l’imam dès le départ. Après l’achèvement de la salât, les membres du second groupe suivent
et la complètent avec qiraah, car ils sont considérés comme masbuk, c’est-à-dire comme ayant rejoint
l’imam après l’exécution de la première ra’kat. Ainsi donc la salât et le devoir ne sont pas négligés.
(Komisyon, Diyânet İlmihâli, I, 334 ; Hamdi Döndüren, Delilleriyle İslâm İlmihâli, p.377-378).
La Quatrième Année de L’hégire 503

La campagne qui dura quinze jours se solda par la retraite totale des membres terri-
fiés des clans. (Ibn Hishâm, III, 214-221; Ibn Sa’d, II, 61).
Le récit d’Abû Mûsâ al-Asharî t se réfère à ce sujet :
« Nous partîmes en expédition en compagnie du Messager d’Allah r, nous
étions six hommes et ne possédions qu’un chameau que nous montions à tour de
rôle de sorte que la marche eut tôt fait nos pieds. Les miens furent blessés et j’en per-
dis les ongles du pied. Nous enveloppâmes nos pieds de morceaux de chiffon pour
les protéger d’où le nom de l’expédition, Dhât ar-Riqâ’. »
Abû Burdah t, qui recueillit de récit de la bouche d’Abû Mûsâ t, ajouta :
« Après avoir dit cela, Abû Mûsâ sembla regretter amèrement en disant : “Je ne
pense pas avoir bien fait en te racontant cela”. Ce qui le troublait sans doute était le
fait qu’il ait révélé un exploit empreint de bravoure et qu’il n’avait accompli que pour
Allah.» (Al Boukhari, Maghazi, 31).
Ni la pauvreté, ni le manque d’opportunités n’empêchèrent les Compagnons y
de s’acquitter de leurs fonctions et d’aller combattre dans le Sentier d’Allah U. Qui
plus est, ils furent sensibles au fait de ne pas dévoiler les difficultés auxquelles firent
face au nom de leur obéissance au Tout-Puissant, sauf si cela devenait nécessaire
pour réaliser un but positif tel qu’enseigner une leçon ou réconforter les opprimés.
Durant cette campagne, le Messager d’Allah r ordonna qu’on lui apporte de
l’eau pour procéder à l’ablution rituelle. Un peu d’eau dans un récipient lui fut donc
apportée (alors qu’il en manquait cruellement dans les environs). Le Messager d’Al-
lah r mit sa main dans le récipient, écarta ses doigts et de l’eau en abondance se
mit à jaillir. Tous les Compagnons y purent même étancher leur soif. Après cela, le
récipient était toujours rempli d’eau. (Al Boukhari, Wudu, 32; Manakib, 25; Muslim, Fadail, 5).
Vers midi, l’armée musulmane atteignit une vallée boisée alors qu’elle revenait
de la campagne de Dhar ar-Riqah où le Noble Prophète r avait décidé de faire une
pause. Les Compagnons y, chacun à leur manière, prirent un peu de repos sous
l’ombre fraîche des arbres.
Le Prophète d’Allah r se retira sous un samurah, un arbre densément feuillu,
ayant accroché son épée à une branche de l’arbre. Les Compagnons y venaient juste
de s’assoupir lorsqu’ils entendirent le Prophète d’Allah r les appeler.
Ces derniers coururent aussitôt et virent un Bédouin qui se tenait devant lui r.
Le Messager d’Allah r leur dit: « Cet homme s’est saisi de mon épée pendant
que je dormais. En me réveillant je l’ai trouvé debout devant moi, tenant l’arme et me
disant: “Qui peut te préserver de moi?” J’ai dit : “Allah trois fois”. » (Al Boukhari, Jihad,
84, 87 ; Muslim, Fada’il, 13).
504 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r ne punit pas le Bédouin qui avait attenté à sa vie mais
l’invita plutôt à l’Islam. Profondément touché par ce remarquable comportement, le
Bédouin s’en retourna auprès des membres de sa tribu et leur déclara ceci : “Je suis
revenu à vous de chez le meilleur des gens !” (Hakim, III, 31/4322).
Le soir, sur le chemin du retour en direction de Médine, le Noble Prophète r
décida de faire une autre halte et demanda à cette occasion des volontaires pour
monter la garde pendant que les autres se reposeraient. Sans la moindre hésitation,
‘Ammar ibn Yasir t des Muhajirun et ‘Abbâd ibn Bishr t des Ansar se propo-
sèrent. ‘Abbâd t demanda alors à ‘Ammar t durant quelle partie de la nuit il pré-
férait assurer la garde. ‘Ammar t, qui s’allongea puis s’endormit presque aussitôt,
dit préférer la dernière moitié de la nuit. Abbâd t, se mit à faire la prière lorsqu’un
idolâtre s’approcha de lui clandestinement à une certaine distance. Ayant vu l’ombre
d’Abbâd t qui se tenait débout, l’idolâtre lança une flèche qui transperça ‘Abbâd t.
Ce dernier rassembla ses forces, ôta la flèche et poursuivit sa prière. Ceci ne dissuada
pas l’archer ennemi qui tira une seconde flèche puis une troisième qui frappèrent
Abbâd t, lequel, à chaque fois, se tenait toujours en prière et retirait les flèches qui le
frappaient. ‘Abbâd t s’inclina finalement (ru’ku) puis se prosterna (sujud) et acheva
sa prière par les salutations d’usage (salam). C’est alors qu’il informa son camarade :
“Réveille-toi ‘Ammar, j’ai été blessé” dit-il d’une voix faible. ‘Ammar se réveilla
aussitôt. L’assaillant, sentant qu’il avait été vu par les deux camarades, se sauva dans
l’obscurité. Ammar t se pencha vers ‘Abbâd t couché à terre, le sang affluait de
ses blessures. Il s’exclama : “Subhanallah ! Pourquoi ne m’as-tu pas réveillé quand la
première flèche t’a atteint ?”
S’étant positionné, ‘Abbâd t fit cette réponse expliquant de façon éclatante son
amour enthousiaste pour la prière (Salât):
“J’étais en pleine récitation des versets du Coran qui emplit mon âme de crainte
et je ne voulais pas couper court à cette récitation. Le Messager d’Allah r m’a or-
donné de retenir cette sourate. Plutôt mourir que d’interrompre sa récitation.” (Abou
Daoud, Taharat, 78/198; Ahmad, III, 344; Ibn Hishâm, III, 219; Waqidi, I, 397).

Jâbir t prit part à cette expédition en montant un chameau particulièrement


frêle de ce fait il se trouvait sans cesse en retrait. Quand le Noble Prophète r le
remarqua et apprit que le chameau était faible, il demanda à Jâbir t quelle en était
la raison. Ce dernier lui ayant expliqué la situation, le Noble Prophète r piqua à
plusieurs reprises le flanc du chameau avec un bâton. L’animal se mit alors en mou-
vement si rapidement qu’il était devenu aussi rapide que les autres.
Le Noble Prophète r lui demanda ensuite s’il était marié et celui-ci répondit par
l’affirmative. Jâbir t révéla également qu’il était endetté. Alors le Noble Prophète r
lui demanda ce qu’il possédait en propre.
La Quatrième Année de L’hégire 505

Jabir t lui répondit : “Je ne possède qu’un seul chameau”.


Le Prophète de Miséricorde r lui demanda alors de le lui vendre, ceci dans le
but de le décharger de sa dette. Jâbir t accepta à la condition de l’utiliser jusqu’à leur
arrivée à Médine. Après qu’ils eurent posé le pied sur le sol médinois, Jâbir t, tenant
le chameau par le licou, se rendit chez le Noble Prophète r. Là, une agréable surprise
l’attendait ! Non seulement le Noble Prophète r lui acheta le chameau, mais il le lui
offrit en cadeau ! (Al Boukhari, Jihad, 49 ; Buyu’, 34 ; Muslim, Musaqat, 109).
Jâbir lui-même t raconte :
« Alors que je rentrai avec le chameau que le Messager d’Allah r m’avait offert,
je croisai un Juif de ma connaissance et lui racontai ce qui m’était arrivé. Étonné
celui-ci ne cessait de répéter: “Alors il a acheté le chameau et te l’a retourné ?”À
chaque fois je lui répondis :“Oui” » (Ahmad, III, 303).
Les Musulmans furent si touchés par la délicatesse, la générosité et l’incompa-
rable élégance du Prophète, qu’ils se remémorèrent de la nuit où l’incident a eu lieu
comme étant «Leylat ül-Bair» c’est à dire la Nuit du Chameau.

La deuxième expédition de Badr (Dhul Qadah 4 / Avril 626)


Conformément à leur accord verbal établi à Ouhoud avant de se séparer, les
Musulmans et les idolâtres devaient se rencontrer et s’affronter une nouvelle fois à
Badr un an plus tard.
Obligé de tenir sa parole, Abû Sufyan prit la tête d’une armée qu’il conduisit
jusqu’à Marr’uz-Zahran. Il va sans dire que ce dernier, rongé par la peur, se sentit
obligé de s’en retourner à La Mecque. Désireux cependant de ne point ravaler sa
fierté, il envoya un émissaire à Médine pour informer les Croyants qu’une puissante
armée s’était constituée à La Mecque. En voulant ainsi les effrayer, Abû Sufyan vou-
lait en fait s’assurer que les Croyants resteraient encore à Médine et ainsi retourner
également avec un prétendu avantage.
Au désespoir d’Abû Sufyan cependant, au moment où son émissaire atteignait
Médine, le Noble Prophète r avait depuis longtemps organisé les préparatifs en vue
de la bataille et avait même ordonné aux Compagnons y de partir.
L’émissaire savait qu’Abû Sufyan, terrifié, aurait bien reconduit les idolâtres à
La Mecque ; en fait, il faisait tout ce qu’il pouvait pour effrayer et ainsi décourager les
Croyants à partir. Inventant des mensonges impensables, il prétendait que rencon-
trer les idolâtres à Badr n’éveillerait qu’une fin tragique pour les Croyants.
Ses efforts appuyés d’une forte propagande ne tombèrent cependant pas dans
de sourdes oreilles étant donné que certains commencèrent à sentir quelques doutes
s’installer en eux concernant la vraie finalité de la chose en question.
506 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Cette situation fit dire au Noble Prophète :


« Par Celui qui tient mon âme dans Sa main même si personne ne me suit, c’est
seul que je le rendrai à Badr ! »
Allah, Gloire à Lui, soutint ensuite les Croyants en renforçant leurs cœurs. (Ibn
Sa’d, II, 59 ; Waqidi, I, 386-387).

L’armée musulmane atteignit finalement le champ de Badr. Là précisément,


nulle trace de l’ennemi mais une petite foire commerciale qui s’y tenait. En consé-
quence, les Musulmans n’eurent rien à faire sinon y commercer. Néanmoins, le
Noble Prophète r et ses Compagnons s’attardèrent là pendant huit jours au cas
où l’ennemi se manifesterait bien que la situation demeurât inchangée et que les
Croyants retournassent à Médine avec le profit obtenu grâce à leur commerce du-
rant la foire. (Ibn Hishâm, III, 221; Ibn Saad, II, 59; Waqidi, I, 384-389).
Le courage et la force d’âme manifestés à cette occasion par les Croyants ont été
loués dans le Coran de la façon suivante :

ħİƇ ijŽ ýƆ ìÓŽ ĘƆ ħŽ ġƇ ĤƆ ÒŽ ijđƇ ĩƆ ä ƈ


Ž Ɔ ïŽ ĜƆ öÓ Ɔ ĭĤÒ
ƪ Īƈƪ ÌöÓ Ƈ ĭĤÒ
ƪ ħƇ ıƇ ĤƆ ĢÓƆ ĜƆ īĺƆ ñĤƪ Ò
ƈ Ʃ īĨ
ųÒ ƈ ƅ ƈ Ƈ Ġƈ ijƆ ĤŽ ÒħƆ đŽ Ĭƈ IJ
Ɔ ž ÙĩƆ đŽ ĭƈÖÒŽ ij×Ƈ ĥƆ ĝƆ ĬÓĘƆ ģĻ Ɔ ƇųÒÓ
Ʃ ĭƆ ×Ƈ ùŽ è
Ɔ ÒŽ ijƇĤÓĜƆ IJ
Ɔ ƃÓĬÓĩĺƈ
Ɔ ÌħŽ İƇ îÒƆ õƆ ĘƆ
ƅ čƈ Đ
ħĻ ƈ Ʃ ĪÒƆ ijƆ ĄŽ ƈòÒŽ ijđƇ ×Ɔ ÜÒƪ IJ
Ɔ ģƅ ąŽ ĘƆ IJðƇ ƇųÒ Ʃ IJ Ɔ ųÒ Ɔ Åij
Ƅ ø Ƈ ħŽ ıƇ ùŽ ùƆ ĩŽ ĺƆ ħŽ Ĥƪ ģƅ ąŽ ĘƆ IJƆ
« Certes ceux auxquels l’on disait : «Les gens se sont rassemblés contre vous
; craignez-les» - cela accrut leur foi - et ils dirent: «Allah nous suffit ; Il est notre
meilleur garant». Ils revinrent donc avec un bienfait de la part d’Allah et une
grâce. Nul mal ne les toucha et ils suivirent ce qui satisfait Allah. Et Allah est
Détenteur d’une grâce immense. » (Al-‘Imrân, 3 : 173-174).
Selon l’énoncé d’Abdullah ibn ‘Abbâs t Ibrâhîm u fut le premier à dire “Allah
nous suffit, Il est notre meilleur garant” avant d’être jeté dans le feu.
Le Noble Prophète r en fait répéta cette déclaration quand on lui dit que les
idolâtres s’étaient rassemblés en grand nombre. La foi de tous les Compagnons y
avait alors augmenté alors qu’ils répétaient les paroles du Prophète d’Allah r, mon-
trant de la sorte un parfait exemple de confiance à l’égard du Tout-Puissant. (Voir, Al
Boukhari, Tafsir, 3/13).
507

LA CINQUIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

La conversion et l’affranchissement de Salman al Farisi t


Salman al Farisi t, ou Salman le Perse, autrefois esclave d’un juif médinois, ra-
conta un jour à Ibn ‘Abbâs t le chemin qui le mena jusqu’au havre béni de l’Islam :
« Je vivais à Jayyan, un village près d’Ispahan. J’étais celui que mon père, qui
faisait partie des notables de notre village, chérissait le plus. Il me chérissait même
excessivement et ne me perdait jamais de vue. Il faisait en sorte que je reste enfermé
à la maison, comme une fille, et m’accordait rarement la possibilité de sortir. La
religion mazdéenne avait une telle empreinte sur moi que je nourrissais en personne
le feu sacré du temple. Et je ne permettais pas que le feu ne couve ne serait-ce qu’un
seul instant. Mon père possédait également une grande ferme. Un jour, alors qu’il
travaillait sur un chantier de construction, il me dit : “Mon fils, puisque ce travail va
m’occuper toute la journée je ne pourrai pas me rendre aujourd’hui à la ferme.” Il
m’informa ensuite de ce que je devais porter à la ferme en ajoutant : “Mais restes-y
que le temps nécessaire afin que je ne m’inquiète pas au sujet de tes allées et venues
et que je puisse me concentrer sur ce que je dois accomplir ici.” C’est ainsi que je me
rendis à la ferme. Sur le chemin, je remarquai la présence d’une église chrétienne.
Je m’approchai et entendis des voix à l’intérieur. Je ne savais pas exactement ce qui
s’y déroulait parce que mon père m’avait enfermé une grande partie de ma vie. Par
conséquent, je ne pouvais pas savoir ce que ces gens faisaient à l’intérieur de l’église.
Après un temps d’observation, je conclus que leur religion semblait meilleure que
la mienne. Je demeurai dans l’église jusqu’au coucher du soleil. Quant à la ferme, je
l’avais oubliée ! Désireux d’en savoir plus, je demandai aux fidèles de l’église où je
pouvais découvrir (cette religion) sous une forme plus authentique et on me répon-
dit : “À Damas.”»
Le soleil s’était déjà couché lorsque je retournai à la maison de mon père qui
avait auparavant délaissé ses occupations et envoyé des gens pour me rechercher.
En me voyant il me dit :
« Où étais-tu ? Ne t’avais-je pas informé de ce que tu devais faire ?»
Je lui répondis :
« J’ai fait la connaissance de quelques personnes dans une église qui se livraient
à des actes d’adoration et j’ai été très impressionné par cela à un tel point que je ne
m’étais pas aperçu que le soleil s’était couché lorsque je les ai laissés.»
508 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Alors mon père me dit sur un ton empreint de réprimande :


« Il n’y a rien de bénéfique pour toi dans cette religion. Ce que tu possèdes déjà,
ce qui provient de tes ancêtres, cela est beaucoup mieux ! »
Puis, inquiet que je ne m’enfuisse vers eux, mon père m’enchaîna les pieds et
m’enferma dans la maison. Mais avec la complicité d’une relation, je pus envoyer un
message aux hommes de l’église, insistant auprès d’eux pour qu’ils “m’informent dès
qu’une caravane se rendait à Damas”. Quelques temps plus tard, je reçus la nouvelle
annonçant que la caravane chrétienne qui se rendait à Damas était arrivée. Saisissant
l’opportunité de me délier de mes chaînes, je rejoignis cette caravane qui atteignit
Damas peu de temps après. Là, je me mis à la recherche du savant le plus compétent
de la ville. Les gens du pays me conseillèrent alors de rencontrer un évêque qui était
à la tête de l’église.
J’allai le trouver et je lui dis :
« Je désire embrasser le christianisme et je voudrais rester près de vous, à votre
service pour que vous m’instruisiez dans la religion et que je fasse les prières en rela-
tion, étant guidé par vous. »
Il me répondit : « Venez ! »
C’est ainsi que je me mis à son service. Mais je ne tardai pas à découvrir que
l’évêque n’était pas l’homme aussi bon qu’on le décrivait. Il exhortait ses adeptes à la
charité, mais s’accaparait les aumônes sans rien donner aux indigents, et ce jusqu’à
ce qu’il eût amassé de l’or à emplir sept jarres. Ma colère grandissait de jour en jour.
Bientôt l’évêque mourut et quand les adeptes se furent réunis pour procéder à son
enterrement, je leur déclarai :
« C’était un homme mauvais. Il vous ordonnait de faire l’aumône et vous inci-
tait à la charité et quand vous la lui faisiez, il la thésaurisait sans rien donner aux
pauvres!»
Ils me demandèrent : «Comment le sais-tu ?»
Je leur dis : «Je vais vous montrer où il a enfoui son trésor!»
Ils me répliquèrent : «Oui, montre-le-nous !»
Ils sortirent sept jarres pleines d’or et d’argent du lieu que je leur avais montré.
Ils s’écrièrent alors: «Nous ne l’enterrerons pas !»
Fidèles à leur promesse, ils le pendirent, lapidèrent son cadavre, puis désignèrent
à son poste un évêque qui lui était complètement différent. Jamais à ce jour, hormis
ceux qui accomplissent leurs cinq prières quotidiennes, je n’ai vu un homme qui eût
aussi peu d’égard pour ce bas monde, qui désirât autant l’au-delà et qui s’adonnât
aux dévotions jour et nuit.
La Cinquième Année de L’hégire 509

Plus tard, sur son lit de mort, je lui dis :


« Dites moi ! J’ai toujours été avec vous et avant vous je n’ai jamais autant aimé
une personne que je vous ai aimé ! Voilà que l’ordre de Dieu vous touche. Que dois-je
faire et qui me conseillez-vous de contacter après votre décès ? »
« O mon fils ! Tous les justes sont morts à présent. Ceux qui sont vivants ont
déformé les vérités éternelles de la religion et abandonné la plupart des leurs. ! Il
n’y a qu’un homme qui vit à Mossoul et qui suit la même voie que moi. Va donc le
rejoindre ! »
Après le décès de mon vénérable maître, je me rendis à Mossoul pour rencon-
trer l’homme qu’il m’avait conseillé. Celui-ci décéda peu de temps après sans m’avoir
préalablement conseillé de me rendre à Nusaybin (pour y rencontrer un autre) et, au
décès de celui-ci, de prendre la direction de ‘Amuriyya pour rencontrer un homme
de la discipline. En ce lieu je fis fortune et j’acquis du bétail. Un certain laps de temps
s’écoula et vint le moment de sa mort.
Quand je lui demandaire : “À qui me recommandez-vous ?” Il me répondit :
“Ô mon fils, honnêtement je ne connais absolument personne qui soit rigou-
reux quant à notre discipline mais à présent c’est le temps de l’avènement du Pro-
phète de l’Heure Ultime r. Je peux déjà sentir son ombre planer au-dessus de nos
têtes. Il professera la religion d’Ibrâhîm et apparaîtra en territoire arabe. Il migrera
ensuite dans un endroit peuplé de palmiers et situé entre deux terres arides. Il accep-
tera les présents mais ne touchera pas à ce qui est destiné à l’aumône. Il portera le
sceau de la prophétie entre ses omoplates. Si tu as les moyens de te rendre là-bas, pars
et n’attends pas !”
Puis il rendit le dernier soupir. La volonté d’Allah fit que je reste là un peu plus
longtemps. Puis je fis la connaissance de marchands arabes de la tribu des Kalb. Je
leur proposai alors de m’emmener avec eux en échange de mon bétail. Ils consen-
tirent et me prirent avec eux. Une fois parvenus à la vallée de Qura, ils me trahirent et
me vendirent à un Juif qui m’employa à son service. Cette vallée correspondait exac-
tement à la description qu’en avait fait mon précédent maître ; l’exacte description
du lieu de la migration du Prophète de l’Heure Ultime r. Pourtant, bien que j’eusse
entretenu en moi une lueur d’espoir, mon cœur n’était pas complètement convaincu.
Alors que j’étais à présent au service de mon nouveau maître (juif), le cousin
de ce dernier m’acheta puis m’emmena avec lui à Médine. Par Allah, à l’instant où
j’aperçus Médine, je sus qu’il s’agissait de la ville décrite par mon maître à ‘Amuriyya.
Mon cœur apaisé, je me mis à attendre la venue du Prophète de l’Heure Ultime r.
J’étais à cette époque peu conscient du fait que le Messager d’Allah avait déjà fait
son apparition à La Mecque (et qu’il y prêchait l’Islam).
510 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Absorbé par les tâches qui m’incombaient en ma qualité d’esclave, je ne savais


rien à ce sujet, ni même le fait qu’il avait migré à Médine. Mais un jour, alors que
je me trouvais au sommet d’un palmier au pied duquel mon maître était assis, son
cousin vint lui dire :
“Que les Aws et les Khazraj soient maudits ! Ils se sont rassemblés au village de
Quba, entourant un homme qu’ils appellent prophète !”
Aussitôt que ces paroles parvinrent à mes oreilles, je commençai à trembler
violemment au point de perdre l’équilibre et de choir sur mon maître et alors que je
descendais rapidement de l’arbre je lui demandais à plusieurs reprises :
« Qu’as-tu dit ? Qu’as-tu dit ? »
Furieux, mon maître m’asséna un violent coup de poing et hurla :
« En quoi cela te regarde-t-il ? Occupe-toi de ce que tu as à faire ! »
Je lui rétorquais :
« Pas de souci, je voulais juste m’assurer d’avoir bien entendu ! »
Le soir venu, je me rendis à Quba pour y rencontrer le Messager d’Allah r,
ayant apporté avec moi quelques dattes que j’avais collectées auparavant.
Mes premiers mots furent ceux-ci :
« J’ai entendu dire que tu étais un homme juste et que tu avais des Compagnons
dans le besoin. Voici quelque chose que j’avais mis de côté pour faire l’aumône.
Quand j’ai eu vent de votre situation, j’ai pensé que vous en auriez plus besoin que
moi. Et j’offris ce que j’avais au Messager d’Allah r. »
Il r dit à ses compagnons en s’abstenant de goûter: « Tenez, mangez ! »
Je me suis dit alors : “C’est un des signes (de la prophétie).”
Je pris congé de lui, retournai à Médine et pris soin de mettre de côté plus de
choses.
Pendant ce temps, le Messager d’Allah r était arrivé à Médine. Je vins lui dire :
« J’ai remarqué que vous ne goûtez pas à l’aumône. Voici un présent que je vous
ai préparé.»
Il r en mangea et invita ses Compagnons à faire de même. Alors je me suis dit :
«Voici le second (des signes de la prophétie). »
Après cela, je revins auprès du Messager d’Allah r qui se trouvait à ce moment-
là au cimetière al-Baqi al-Gharqad où il enterrait un de ses Compagnons.
Je le vis assis, vêtu d’une pèlerine (habit) qui le couvrait entièrement. Je le saluai
puis me positionnai derrière lui afin d’observer son dos, tentant par ce biais d’aper-
cevoir le sceau décrit par mon maître à ‘Ammuriya.
La Cinquième Année de L’hégire 511

Quand le Messager d’Allah r comprit mon intention, il ôta sa pèlerine et me


montra son dos. Je reconnus alors le sceau (de la prophétie). Je me jetai sur lui et
l’étreignit tout en pleurant.
“Viens ici !” dit le Messager d’Allah r. Alors, je me plaçai devant lui.
Salmân fit une pause et poursuivit son récit :
“Ensuite je me mis à lui raconter mon histoire de la même façon que je te la
raconte présentement, Ibn ‘Abbâs. Admiratif, le Messager d’Allah r m’invita à la
raconter à ses Compagnons y qui s’en réjouirent.” »
L’esclavage, qui avait maintenu ce Salmân, ne lui avait pas donné l’occasion de
participer aux batailles de Badr et d’Ouhoud aux côtés du Messager d’Allah r. (Ah-
mad V 441-444 ; Ibn Hishâm I 233-242; Ibn Sa’d IV 75-80).

Salmân t était maintenant uni au Noble Prophète r qu’il avait cherché toute sa
vie. Son seul désir désormais était la recherche de sa proximité et le service envers le
Sceau des Prophètes r. En fait devant le zèle de Salmân t, le Noble Messager r lui
suggéra de négocier un arrangement avec son propriétaire pour qu’il l’affranchisse
du joug de l’esclavage. Le Juif finit par accepter la proposition à condition que Sal-
mân t procède à la plantation de trois cents palmiers-dattiers, y compris le creu-
sement de leurs sillons, et lui octroie quarante uqiyyah152 d’or. Sur ces entrefaites, le
Noble Prophète r ordonna aux Compagnons d’aider Salmân à répondre à ces exi-
gences. Chacun contribua selon sa capacité et dans un temps très court les trois cents
pousses dont Salmân avait besoin furent récoltées. Le Prophète r lui dit
« Salman creuse à présent pour procéder à la plantation et dès que tu auras ter-
miné, appelle-moi pour que je puisse planter les jeunes pousses de mes propres mains. »
Salmân t raconte ce qui se déroula ensuite :
“Avec l’aide de mes camarades, je commençai à creuser des sillons afin d’y dé-
poser les jeunes pousses de dattes. Une fois le creusement achevé, j’en informai le
Messager d’Allah r et retournai avec lui là où j’avais creusé. Nous lui remîmes les
pousses et il les planta. Par Allah, Celui qui tient ma vie entre Ses mains, il n’y eut pas
une seule pousse plantée par le Messager d’Allah r qui n’eût pas réussi à s’épanouir.
J’ai pu par ce biais remplir une des conditions de l’accord. Une seule année s’écoula
quand les dattes commencèrent à s’accrocher en grappes sur les branches.
Peu de temps après, le Messager d’Allah r revint d’une expédition durant la-
quelle figurait dans le butin une pépite d’or de la taille d’un œuf (de poule). Il me la
fit parvenir. Lorsque je me rendis auprès de lui, il me dit :
« Prends ceci, Salmân, et rembourse ta dette ! »
Je lui demandais :
152. Un uqiyya correspond à environ 128 grammes.
512 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Comment une si petite pépite suffirait-elle à rembourser la dette qui pèse sur
mes épaules, ô Messager d’Allah ! »
Il r prit la pépite, la frotta légèrement sur sa langue et me dit :
« Prends-là à présent ! Allah le Tout-Puissant couvrira ta dette avec ! »
Sur ces entrefaites, j’apportai la pépite à mon maître juif, comme on me l’avait
signifié. Par Allah, Celui qui tient ma vie entre Ses mains, la pépite pesait exactement
quarante uqiyyah. Aussi incroyable que cela puisse paraître, même le Mont Ouhoud
aurait pesé moins lourd sur la balance s’il devait être placé sur l’autre plateau ! »
Ainsi donc, après avoir été libéré de l’esclavage, Salmân t prit librement une
part active à la bataille de tranchées (Khandâq) et resta sans reculer près du Noble
Prophète r au cours des batailles qui eurent lieu ultérieurement. (Voir, Ahmad, V, 443-
444 ; Ibn Asir, Usd’ul-Ghabah, II, 419 ; Ibn Abdilber, II, 634-638).

Salmân t était hautement apprécié par les autres Compagnons t, au point


qu’il exerçait un profond magnétisme. À la fois les Ansar et les Muhajirun se reven-
diquaient de lui.
Mais le plus beau compliment à son égard fut celui qui sortit de la bouche du
Noble Prophète r en déclarant : « Salmân fait partie de nous, les Ahl’ul Bayt.» (Ibn
Hishâm, III, 241).

Tout au long de sa vie, Salmân al-Farîsî t refléta les beautés de la morale isla-
mique et laissa un splendide exemple à suivre pour les générations suivantes.
Juste un seul regard sur l’une de ces occurrences :
Le monde musulman s’étend aujourd’hui sur de vastes terres. Salmân al-Farîsî,
cet ancien esclave d’un Juif, fut nommé gouverneur de Madâin là où les Sassanides
régnèrent plus tard.
Un homme du clan de Taym venu de Damas, fit son entrée à Madâin avec un
sac de figues et jeta son dévolu sur le modeste Salmân t qu’il fut bien incapable de
reconnaître en raison certainement du modeste manteau de laine qu’il portait sur lui.
L’homme dit à Salman t: « Eh toi ! Viens ici et porte moi ce sac! »
Salman t se saisit du sac et sans dire un mot le plaça sur son épaule. Mais
contrairement au Damascène, les gens du peuple reconnurent rapidement le gouver-
neur et lui dirent : “Cet homme qui porte ton sac, c’est le gouverneur !”.
Bien embarrassé, l’homme s’excusa et le supplia de lui pardonner cette mala-
dresse et Salman t lui répondit calmement :
“Il n’y a pas de mal je porterai quand même ce sac là où tu le désires.” (Ibn Sa’d,
IV, 88).
La Cinquième Année de L’hégire 513

L’abolition de toute adoption d’enfant


Zayd qui fut présenté, alors qu’il était encore enfant, au Noble Prophète r par
l’entremise de son honorable épouse Khadîdja c fut affranchi par le Messager d’Al-
lah r avant le début de son Apostolat prophétique.
Zayd t préférait être auprès du Noble Prophète r plutôt que de rester chez son
propre père. Le Noble Prophète r en conséquence finit par l’adopter comme son
propre enfant.
Parce qu’il aimait beaucoup Zayd t, le Noble Prophète r le maria d’abord à
Umm Ayman, une ancienne esclave qu’il r avait affranchie, puis à sa cousine Zay-
nab ibn Jahsh c. Bien que Zaynab eut hésité au début à se marier avec Zayd t, le
souhait du Noble Prophète r, appuyé par les versets coraniques subséquents, finit
par l’emporter :

ħĠÓ ƈ ïĭĐ
ĝÜƆÈųÒ ƈ ħġĨóĠƆÈĪƈÌ
ŽƇ ƆŽ Ʃ Ɔ ŽƇ ƆƆŽ ƪ
« Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux» (al-Hujurat, 49 :
13).

Īij Ɔ ġƇ ĺĪ Ɔ Ɔ
Ɔ ÈÒóƃ ĨŽ ÈįƇ ƇĤijøƇ òƆ IJ Ʃ ąƆ ĜƆ ÒðƆ Ìƈ Ùƅ ĭƆ Ĩƈ ËŽ Ĩ
Ɔ ƇųÒĵ Ƈ źƆ IJ
ƈ ƈ Ɔ ĠÓ
Ɔ īƅ ĨËŽ ĩƇ ĤĪÓ Ɔ ĨƆ IJƆ
ÓĭĻƈƃ ×Ĩ ƈ ƈ Ɔ ƈ ƈ
ƫ źƃ ŻƆ Ą
Ɔ ģƪ Ą Ɔ ïŽ ĝƆ ĘƆ įƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ÿđŽ ĺīƆ ĨƆ IJ Ɔ ħŽ İ ƈóĨŽ ÈīŽ ĨØƇ óƆ ĻƆ íĤŽ ÒħƇ ıƇ ĤƆ
« Il n’appartient pas à un croyant ou à une croyante, une fois qu’Allah et Son
messager ont décidé d’une chose d’avoir encore le choix dans leur façon d’agir. Et
quiconque désobéit à Allah et à Son messager, s’est égaré certes, d’un égarement
évident. » (Al-Azhâb, 33 : 36).
Le cœur de Zaynab cependant ne parvenait pas à se réchauffer de Zayd t. En
conséquence, le couple envisagea de divorcer peu de temps après le début de leur
mariage. Zayd t, pour sa part, se plaignait aussi d’elle. Lorsqu’il s’en ouvrit au Pro-
phète de Miséricorde r, celui-ci lui donna le conseil suivant : « Garde pour toi ton
épouse et crains Allah ! »
En fait, le Noble Prophète r, apprit par la Révélation Divine, que Zaynab c
allait finalement l’épouser. Mais hésitant à cause des éventuelles protestations et
autres tempêtes de malice des hypocrites qui verraient d’un mauvais œil le fait que
Muhammad r épouse l’ex-femme de son fils adoptif, il garda cela secret. La coutume
de l’époque accordait aux enfants adoptés le même statut que les enfants nés par
filiation parentale établie. Ils portaient également le nom de leur père et bénéficiaient
de leur part d’héritage.
514 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Zayd et Zaynab finirent donc par divorcer peu de temps après suite à une autre
révélation. Le Tout-Puissant en effet avait décrété que son Messager r épouserait
Zaynab. Cela signifiait que le Noble Prophète r deviendrait le premier à mettre en
œuvre un ordre ayant pour objectif ultime d’abolir la pratique de l’adoption telle
qu’elle était en vigueur durant l’Âge de l’Ignorance :

ƈ ƈ ÛƆ ĩđĬŽ ƆÈIJįƈ ĻĥƆ ĐųÒ Ɔ ƈ ƈ Ƈ ĝƇ ÜƆ ðŽ Ìƈ IJ


ğƆ äƆ IJŽ ô Ɔ ğŽ ùĨŽ ƆÈįĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ğƆ ĻŽ ĥƆ Đ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ʃ ħƆ đƆ ĬŽ Èĸñĥƪ ĤĢij Ɔ
Ɔ ƆÈěƫ èƆ ƆÈƇųÒ ƈ ƈ ųÒÓ ƈ ƈ ƈ
ĮÓƇ ýƆ íŽ ÜĪ Ʃ IJ Ɔ öÓ
Ɔ ĭĤÒĵ
ƪ ýƆ íŽ ÜƆ IJ Ɔ įĺï׎ Ĩ
Ƈ Ƈ Ʃ Ĩ
Ɔ ğƆ ùęŽ ĬƆ ĹĘĹęíŽ ƇÜIJ
Ɔ ųÒƆ Ʃ ěƈ ÜÒƪ IJƆ
ƈ âóèīĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÒĵĥƆ ĐĪij
ĹĘ ƈ Ɔ ĭƆ äIJôÒ ƈ Ɔ ąƆ ĜƆ ÓĩĥƆ ĘƆ
Ƅ ƆƆ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ġƇ ĺƆ źƆ ĹŽ ġƆ ĤÓıƆ ĠÓ Ž ƪ Ɔ óƃ Ĉ
Ɔ IJÓ
Ɔ ıƆ ĭŽ Ĩ
ž ïƄ ĺŽ ôĵ ƪ
źij
ƃ đƇ ęŽ Ĩ ƈ Ʃ óĨƆÈĪÓ ƈ ijąĜÒðÌƈ ħ ƈıÐÓƈ ĻĐƈ îƆÈâÒIJôƆÈ
Ɔ ųÒ ĠIJÒóĈIJīıĭĨÒ
Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƃƆ Ɔ ƪ Ƈ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž ƈ Ɔ Ž
« Quand tu disais à celui qu’Allah avait comblé de bienfaits, tout comme toi-
même l’avais comblé : «Garde pour toi ton épouse et crains Allah», et tu cachais
en ton âme ce qu’Allah allait rendre public. Tu craignais les gens, et c’est Allah
qui est plus digne de ta crainte. Puis quand Zayd eût cessé toute relation avec elle,
Nous te la fîmes épouser, afin qu’il n’y ait aucun empêchement pour les croyants
d’épouser les femmes de leurs fils adoptifs, quand ceux-ci cessent toute relation
avec elles. Le commandement d’Allah doit être exécuté. » (Al-Azhâb, 33 : 37).
Zaynab c, par qui le commandement divin avait entrainé le mariage avec le
Noble Prophète r, exprimait toujours sa reconnaissance en ces termes : “ C’est mon
Seigneur qui m’a mariée !” (At Tirmidhi Tafsir, 33/3213).
Pourtant, l’évènement eut tôt fait de déclencher parmi les hypocrites toutes
sortes de rumeurs malicieuses et infondées. Ces derniers d’ailleurs exprimèrent leur
mécontentement par le biais de vives critiques adressées au Sceau des Prophètes r
sur ce qu’ils qualifiaient de “mariage avec l’ex-femme de son fils”.
Mais la réponse vint directement du Coran :

ƈ Ʃ Ģij ƈ ħġƇ ĤÓƈ äòī ƈ ƅ Ɔ Ɔ


ųÒ Ɔ øƇ òī Ɔ Ž Ɔ žƈ Ĩ
ƪ ġĤƆ IJ ž ïèƆ ÈÓÖƆ ÈïƄ ĩƪ éƆ Ĩ
Ƈ ĪÓ
Ɔ ĠÓ
Ɔ Ĩƪ
ÓĩĻ ƈ Åƅ Ĺü
ƃ ĥĐƆ Ž Ɔ ģƈ ž ġƈ
Ƈ ÖƇųÒ
Ʃ ĪÓƆ ĠƆ IJ
Ɔ īĻƈ
Ɔ Ļƈž ×ĭĤÒ
ƪ ħƆ ÜÓƆ ìƆ IJƆ
« Muhammad n’a jamais été le père de l’un de vos hommes, mais le messager
d’Allah et le dernier des prophètes. Allah est Omniscient. » (Al-Azhâb, 33 : 40).
Cet évènement marqua ainsi la fin de la pratique de l’adoption d’enfants, comme
cela avait été observé tout au long de l’Âge de l’Ignorance.
La Cinquième Année de L’hégire 515

Les allégations faites aujourd’hui par un certain nombre de négateurs qui pré-
tendent que le Noble Prophète r aurait été attiré par la beauté de Zaynab et que ce
serait la raison de ce mariage sont en réalité des arguments complètement infondés.
En effet puisque Zaynab c était la cousine du Noble Prophète r, la fille de sa tante
pour être précis, ce qui signifie qui l’avait déjà rencontrée à plusieurs reprises. S’il
avait nourri une telle intention le Noble Prophète r aurait pu épouser Zaynab c
bien avant Zayd t un mariage pour lequel elle dernière n’aurait eu aucun scrupule.
Les esprits simples et superficiels si coutumiers à évaluer le mariage du point
de vue de la luxure sont toujours incapables de comprendre la réalité des différents
mariages que le Noble Prophète r a contractés. Les jugements stupides ainsi que les
jugements inférés par ceux dont les cœurs et les esprits font montre d’inclinaison
égoïste ne peuvent être que le reflet de leur univers référentiel sombre et sinistre.
Le Noble Messager r a passé les vingt-quatre premières années de sa vie conjugale,
années période où on porte naturellement le plus de vigueur, avec l’honorable Kha-
dîdja t. Les différents mariages qu’il contracta par la suite furent totalement moti-
vés par certaines considérations , politiques ou sociales, mais toujours d’importance
islamique. Une grande majorité de ces femmes étaient veuves et plus âgées que le
Prophète d’Allah r. Seule parmi elles Aïcha c était la plus jeune et n’avait jamais
mariée auparavant. Même ce mariage devait maintenir à long terme le transfert de la
science islamique authentique, en particulier les questions relatives aux femmes, aux
générations suivantes. Rétrospectivement, force est de constater qu’Aïcha t avait
une intelligence et une prudence qui lui permettaient de saisir parfaitement tous
les détails complexes des questions juridiques liées à la gent féminine. De longues
années après le décès du Prophète d’Allah r, elle continua à éclairer les Croyants y
par ses connaissances sur cet aspect important du Droit islamique, devenant ainsi à
terme un pilier majeur en la matière. Femme parmi les sept fuqaha qui ont excellé
parmi les autres Compagnons y, c’est par l’intermédiaire de ses connaissances que
la Loi islamique est devenue prévalente chez les femmes musulmanes.
Si la luxure avait été la motivation première de ces mariages, comme le prétend
le contradicteur, le Noble Prophète r n’aurait sûrement pas passé ses plus vigou-
reuses années en compagnie d’une femme de quinze ans son aînée et qui avait d’ail-
leurs eu plusieurs enfants d’un précédent mariage.
Seules les personnes empreintes de sagesse et de conscience qui comprennent
la logique incomparable de la foi (iman) sont en mesure d’apprécier la subtile sa-
gesse intentionnelle de ces mariages ainsi que les finalités sublimes vers lesquelles ils
étaient destinés.
516 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La question du hijab ou l’injonction divine de se couvrir


Avant l’avènement de l’Islam, les Arabes n’avaient aucune notion a propos du
hijab (ou voile islamique) et cette situation a naturellement perduré jusqu’aux pre-
mières années consécutives à son avènement. Mais à ne juger que par la gradualité
mentionnée plus haut — relativement à l’interdiction de l’alcool et du jeu — il était
évident que cela ne durerait pas longtemps. Le verset coranique afférent à l’instau-
ration du hijab fut finalement révélé, ce qui en conséquence produisit l’élévation du
statut de la femme et l’intensification de sa réputation en vertu de la protection de
son honneur et de sa dignité. Les femmes furent alors érigées en “statues de chasteté”
et dotées d’une identité significativement digne.
Par ailleurs, la décision prise concernant le hijab ne concerne pas seulement les
femmes, mais également les hommes. Autrement dit, l’injonction concernée intègre
à la fois les femmes et les hommes, ce qui les engage à la responsabilité commune.
Allah U déclare en effet :

Ɔ ƈ ƈ Ɔ ƈ ƈƈ ƈ
ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌħŽ ıƇ ĤƆ ĵĠƆ ôŽ ÈğƆ ĤðƆ ħŽ ıƇ äIJ Ɔ ħŽ İ ƈòÓāƆ ÖŽ ÈīŽ ĨÒijąƫ ĕƇ ĺƆ īĻ
Ɔ óƇ ĘƇ ÒijƇčęƆ éŽ ĺƆ IJ Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĥŽ žĤģĜƇ
ƈ Ɔ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ɔ óƇ ĘƇ īƆ čŽ ęƆ éŽ ĺƆ IJ
īƪ ıƇ äIJ Ɔ īƪ İ ƈòÓāƆ ÖŽ ÈīŽ ĨīƆ ąŽ ąƇ ĕŽ ĺƆ ÚÓĭƆ ĨËŽ ĩƇ ĥŽ žĤģĜƇ IJ
Ɔ ĪijƆ đƇ ĭƆ āŽ ĺÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖóĻƈ ×ì
Ƅ Ɔ
īƪ ƈıƈÖijĻäĵ ĥĐīİƈ ƈóĩíƈÖīÖ ƈóąĻĤIJÓıĭĨ ƈ óıČÓĨźƈÌīıÝĭĺ ƈôīĺïƈ ×ĺźIJ
Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ
« Dis aux croyants de baisser leurs regards et de garder leur chasteté. C’est
plus pur pour eux. Allah est, certes, Parfaitement Connaisseur de ce qu’ils font.
Et dis aux croyantes de baisser leurs regards, de garder leur chasteté, et de ne
montrer de leurs atours que ce qui en paraît et qu’elles rabattent leur voile sur
leurs poitrines… » (An-Nûr, 24 : 30-31).
L’acte de se couvrir est à même de protéger les caractéristiques physiques des
femmes. À travers son hijab, la femme exhale une aura d’élégance et de grâce. Non
couverte elle devient un objet de convoitise qui suscite les désirs de l’ego et cela ne
fait qu’augmenter le dénigrement de son caractère et de sa dignité jusqu’à porter
atteinte à l’honneur que procure la maternité.
Une chose à souligner ici est qu’il existe une différence naturelle entre l’âme
masculine et l’âme féminine. Cette différence, qui est consécutive à la création, aux
rôles distincts déterminés par le Tout-Puissant qui ont donné lieu à une différence
de nature.
La manière spécifique de se couvrir varie donc entre les hommes et les femmes.
Comparée à l’homme, la femme est dotée d’un plus grand charme et d’un plus grand
effet d’attraction.
La Cinquième Année de L’hégire 517

La femme qui ne porte pas de hijab ruine en quelque sorte sa grâce et son élé-
gance. Son attribut particulier qui la porte vers la maternité subit également un coup
destructeur aux proportions similaires. En vertu de ce que nous venons de mention-
ner plus haut, et notamment ce qui a trait à la question du hijab, les charmes de la
femme sont donc exclusivement réservés à son mari. Il existe entre les hommes et les
femmes une tendance naturelle s’avérant nécessaire pour perpétuer la succession des
prochaines générations.
Dans le cas contraire, c’est-à-dire en n’obéissant pas à l’injonction divine rela-
tive au port obligatoire du hijab, la conséquence serait la transgression des limites
divines et l’incitation à la corruption morale à l’échelle désastreuse.
En fait un des commandements essentiels d’Allah le Tout-Puissant est :
« Et n’approchez point la fornication (…) », (al-Isrâ, 17 : 32)
Cela peut aussi très bien se lire : « N’ouvrez pas les portes de la fornication en
défiant le hijab ! Ne jetez pas inconsciemment les bases de cette action ! »
Ceci est une décision absolue ! Il est à noter que l’Islam commande aux femmes
qui sont moins attirantes de se couvrir de la même façon. En d’autres termes, on ne
peut affirmer : “Il n’y a certes aucun mal au fait qu’elle ne se couvre pas parce que
de toute façon elle n’est pas attirante”, puisque le hijab vise justement à préserver la
dignité féminine en général.
L’Islam, qui établit des règles conformes à la disposition humaine naturelle,
tient compte des exigences de la masculinité et de la féminité. C’est ainsi que le Noble
Prophète r a toujours de son vivant condamné les hommes qui agissent comme des
femmes et les femmes qui agissent comme des hommes. (Voir Al Boukhari, Libas, 61).
Afin de se protéger de ce péril, les femmes doivent impérativement nouer des
relations avec d’autres femmes qui sont droites et vertueuses ; car quiconque se lie
d’amitié avec n’importe qui va tôt ou tard lui ressembler. C’est en réalité une loi de
la psychologie. Une fois que les femmes sont incitées à partager le même environne-
ment que les hommes, elles perdent leurs sentiments féminins et toutes leurs carac-
téristiques irremplaçables.
Porter la tenue vestimentaire attribuée au sexe opposé est donc un acte réso-
lument interdit. Les hommes qui s’habillent comme des femmes et les femmes qui
s’habillent comme des hommes, avoue le Noble Prophète r seront éloignés de la
Compassion divine. (Voir, Abou Daoud, Libas, 28/4098).
Il est donc impératif que les deux sexes préservent respectivement leur dignité
de genre. Imiter la tendance vestimentaire du sexe opposé provoque également une
déficience dans la personnalité. La déviance en matière d’habillement se répercutera
avec le temps sur la personne elle-même et pèsera sur son comportement, ce qui
entraînera inexhorablement l’effondrement de sa prédisposition naturelle.
518 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La Bataille de Muraysi (Shaban-Ramadhan, 5 / Janvier-Février 627)


Cette bataille, aussi nommée “Banû Mustalîq”, du nom de la tribu qui, séduite
par les provocations mecquoises, avait commencé à préparer une grande armée en
vue d’attaquer Médine.
Ayant eu connaissance du projet, le Noble Messager r leva une armée de sept
hommes pour aller à la rencontre de la tribu ennemie.
Le Noble Prophète r mandata Omar t avec le message suivant : “Dites Lâ ilâha
ill Allâh et protégez vos vies et vos biens !”
Et bien non seulement les Banû Mustalîq rejetèrent l’offre, mais pire ils pas-
sèrent les premiers à l’offensive en décochant la première flèche. (Voir, Waqidi, I, 407).
Les Musulmans conduisirent les Banî Musralîq près d’un point d’eau nommé
al-Muraysi, consécutivement à une attaque menée rapidement. Dix combattants
ennemis furent tués, tandis qu’un seul Compagnon mourut martyr. Un important
butin fut saisi et de nombreux captifs furent faits prisonniers et emmenés à l’issue de
la bataille, dont Juwayriya, fille de Harith, le chef de la tribu.
Les captifs furent ensuite libérés un par un en échange d’une rançon. Juwayriya
échut dans la part de Thabît ibn Qays. Elle avait formellement sollicité le Messager
d’Allah r à propos de sa rançon. Son père était également intervenu en évoquant
avec véhémence le fait qu’elle était fille d’un chef, donc d’ascendance noble et qu’elle
ne pouvait en aucun cas être asservie. Il se mit en conséquence à plaider en faveur de
sa fille. Montrant les chameaux qu’il avait apportés avec lui, il dit : “Voici la rançon
pour ma fille. S’il te plaît, laisse-la aller !”
Soudain le Noble Prophète r lui demanda où il avait caché “les autres cha-
meaux qu’il n’avait pas apportés”. Abasourdi, Harith savait qu’il cachait deux autres
chameaux dans une vallée voisine. Face à cette évidence, lui et le reste de son entou-
rage embrassa l’Islam. (Voir, Ibn Hishâm, III, 340).
Plus tard, le Noble Messager r demanda l’avis de Juwayriya c. Cette dernière
laissa entendre qu’elle préférait rester à ses côtés, ce qui amena le Noble Prophète r
à rembourser personnellement le montant de sa rançon et à la libérer. (Ibn Sa’d, VIII,
118).

À présent libre, Juwayriya c embrassa l’Islam et, qui plus est, eut l’honneur
d’épouser le Sceau des Prophètes r après un rêve qu’elle avait fait à ce sujet. C’est
précisément la raison pour laquelle elle choisit de rester auprès du Prophète r même
si elle aurait pu recouvrer sa liberté par l’intermédiaire de son père qui lui aurait
payé la rançon. Ayant appris que le Prophète d’Allah r allait épouser Juwayriya les
Compagnons y pensèrent qu’il n’était pas juste que les désormais proches du Noble
Prophète r restent encore captifs. Aussi tous furent libérés.
La Cinquième Année de L’hégire 519

On apprit plus tard qu‘Aïcha c aurait déclaré :


“Nous n’avons jamais connu une femme aussi vertueuse que Juwayra parmi sa
tribu. Par son intermédiaire, cent familles ont été délivrées des Banû Mustalîq.” (Abou
Daoud, Itq, 2/3931).

Comme une évidence, le mariage du Noble Prophète r avec Juwayra c ne fut


certainement pas animé par un quelconque désir (charnel), mais par un élan stricte-
ment politique et surtout par le plan divin qui l’avait inspiré, et ce conformément à
la parole du Tout-Puissant :

ĵèij ƈ ĨIJ
Ɔ ƇĺĹƄ èŽ IJ
Ɔ źƈƪ ÌijƆ İ
Ƈ ĪƈŽ ÌĴijƆ ıƆ ĤŽ Òīƈ Đ
Ɔ ěƇ ĉĭĺÓ
Ɔ Ɔ Ɔ
« Et il ne prononce rien sous l’effet de la passion ; ce n’est rien d’autre qu’une
révélation inspirée. » (An-Najm, 53 : 3,4).
Les captifs de Banû Mustalîq furent après coup libérés, et, plus important en-
core, ils entrèrent en totalité dans les rangs de l’Islam.
520 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Prescription du tayammum (ablutions sèches)


‘Aïcha c relate :
« Une fois, nous sortîmes avec le Messager d’Allah r pour l’une de ses expé-
ditions (Muraysi). Arrivés à al-Baydâ’ ou à Dhât al-Jaych, je perdis mon collier. Le
Messager d’Allah r resta alors pour le chercher et des fidèles restèrent avec lui. Il
n’avaient pas d’eau et il n’y en avait pas non plus dans les environs.
Une partie d’entre eux se dirigea vers Abû Bakr t et lui dirent: “As-tu vu ce que
‘Aïcha r a fait ? Elle distrait les gens et le Messager d’Allah r et les gens alors que
personne n’avait d’eau.”
Mon père Abû Bakr t vint me dire alors le Messager d’Allah r était endormi
posant la tête sur ma cuisse : “Tu as retenu et le Messager d’Allah r et les gens qui
n’ont d’ailleurs pas d’eau ; et en plus, ils ne sont pas près d’une source !”
Puis, il commença à me gronder, me fit maints reproches et, ne pouvant réfrei-
ner sa colère, il t me blessa avec sa main alors que je ne pouvais pas faire un geste
car le Messager d’Allah r avait sa tête sur mes genoux.
À l’aube, le Messager d’Allah r se réveilla et comme on n’avait pas trouvé d’eau,
Allah le Tout-Puissant lui révéla le verset relatif aux ablutions sèches (tayammum) :

IJŽ ƆÈćƈ ÐÓƈ ĕƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩħ


ƈ Ƈ ĨïƄ èƆÈÅÓäIJƆÈ ƅóęƆ øĵĥƆ ĐIJƆÈĵĄƆ óĨħÝĭĠĪƈ
ž ġĭ ÌIJ
ƪ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Žƪ Ƈ Ƈ Ɔ
ÒŽ ijéƇ ùƆ ĨÓŽ ĘƆ Ó×ƈĻĈ ÒïĻđƈ ĀÒijĩĩĻÝĘÅÓĨÒIJïåƈ ÜħĥĘÅÓùĭĤÒ ƈ ħÝùĨź
ƃžƆ ƃ Ɔ Ž Ƈ ƪ ƆƆƆ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ž Ƈ Ƈ Ž ƆƆ
âƅ óè īĨħ ƈ ġĻĥĐģđåĻĤƈ ųÒïĺ ƈóĺÓĨįĭĨħ ƈ ġĺïƈ ĺƆÈIJħġİij
ƈ äijƈÖ
Ɔ Ɔ Ž ž Ƈ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ƇƩ Ƈ Ƈ Ɔ Ƈ Ž ž Ƈ Ž Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ƈ
ĪIJ
Ɔ óƇ ġƇ ýŽ ÜƆ ħŽ ġƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ ƈ ƈ ƈ ħĠƇ óıĉƆ ĻĤƈ ïĺ ƈ
Ɔ įƇ ÝƆ ĩƆ đŽ Ĭħƪ ÝĻƇ ĤIJ
Ɔ Ž Ɔ ƪ Ƈ Ƈ ƈóƇĺīġÃĤƆ IJƆ
« (…) Et si vous êtes pollués, alors purifiez-vous ; mais si vous êtes malades,
ou en voyage, ou si l’un de vous revient du lieu ou’ il a fait ses besoins ou si vous
avez touché aux femmes et que vous ne trouviez pas d’eau, alors recourez à la
terre pure, passez-en sur vos visages et vos mains. Allah ne veut pas vous imposer
quelque gêne, mais Il veut vous purifier et parfaire sur vous Son bienfait. Peut-
être serez-vous reconnaissants. » (Al-Ma’ida, 5 : 6).
Dans ces circonstances Usayd ibn al-Hudayr t dit :
“Ô famille d’Abû Bakr ! Ce n’est là qu’une de vos innombrables bénédictions”
Et on retrouva le collier sous le chameau sur lequel j’étais montée. » (Al Boukhari,
Tayammum, 1 ; Ashab’un-Nabi, 5, 30).

Al-Hudayr t dit encore à Aïcha c:


La Cinquième Année de L’hégire 521

“Qu’Allah te récompense en bien ! Par Allah ! à chaque fois que te parvient ce


que tu détestes, Allah le transforme en une bonne chose, pour toi et pour les Musul-
mans.” (Al Boukhari, Tayammum, 1).

L’incident du ifk ou le récit d’une calomnie


Ce fut aussi en revenant de la bataille de Muraysi qu’Aïcha153c la pure et inno-
cente épouse du Prophète r s’écarta de l’armée (en repos) pour répondre à un besoin
urgent. Lorsqu’elle revint sur ses pas, l’armée était partie depuis longtemps. Comme
le commandement relatif au hijab venait juste d’être révélé, la mère des Croyants
‘Aïcha c voyageait dans un palanquin (hawdaj) à dos de chameau. L’armée s’étant
mise en mouvement, les Croyants supposèrent naturellement qu’elle se trouvait tou-
jours à l’intérieur du palanquin.
Au lieu de poursuivre l’armée au risque de se perdre, ‘Aïcha c préféra patienter
là où elle se trouvait et s’assoupit en attendant.
Safwân ibn Muattal t qui devait rassembler ceux qui étaient restés à l’arrière de
l’armée, aperçut ‘Aïcha c et dit en s’approchant d’elle :

ƈ ò ƈ ƈ Ʃ ƈ Ĭƈƪ Ì
Īijđ
Ɔ äÒ Ɔ įĻŽ ĤƆ Ìƈ ÓÃĬƈƪ ÌIJ
Ɔ ųÓ
« Certes nous sommes à Allah, et c’est à Lui que nous retournerons. » (Al-
Baqara, 2 : 156).

La mère des Croyants Aïcha c fut réveillée par le son de la voix et sans même
prononcer un seul mot, Safwân t fit accroupir le chameau et fit monter Aïcha c.
Tous deux rattrapèrent le convoi aux alentours de midi. Mais les hypocrites voyant la
situation saisirent l’opportunité pour donner libre cours à leur méchanceté et monter
une affreuse calomnie en disant:
“Jamais pourtant ‘Aïcha ne s’est laissée porter vers un autre homme, ni un
autre homme vers ‘Aïcha”. ‘Abdullah ibn ‘Ubayy alla même plus loin en disant aux
Croyants : “Voici l’épouse de votre Prophète…. Elle a passé la nuit avec un autre
homme !”
La fitna commença à envahir toute l’armée et Abû Bakr t gémit dans une
grande douleur inexprimable :
“Par Allah, même lors de l’Époque de l’Ignorance, nous n’avons jamais connu
une telle diffamation !”
153. Avant chaque bataille, le Noble prophète r tirait au sort entre ses épouses puis emmenait l’une d’elles.
Cette fois-là, ce fut ‘Aïcha c.
522 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Safwan t qui était dans une profonde tristesse dit au Messager d’Allah r à son
propos : « Je ne connais à son propos que du bien!». C’était un compagnon courtois.
Le coeur béni du Noble Prophète r, quant à lui, tomba dans le plus grand cha-
grin. Il r s’isola pour un temps, ne rencontra que peu de gens et mena une enquête.
Il n’y avait aucune preuve, aussi infime soit-elle, pour suggérer qu‘Aïcha c puisse être
coupable. Mais la bouche des hypocrites ne se taisait pas.
Aïcha c, qui fut la dernière à entendre parler de la rumeur, fut prise d’une peur
terrible dès qu’elle entendit cette lourde diffamation. Elle partit avec la permission de
notre prophète r chez son père pour en apprendre plus sur la question. Une fois tous
les détails exposés, elle se mit à se désagréger telle une feuille d’automne qui se fane.
Le Noble Prophète r, voulant alors s’entretenir avec ‘Aïcha c, se rendit chez
Abû Bakr t et dit à sa femme bénie:
« Ô Aïcha ! Quelques propos à ton sujet me sont parvenus ! Si tu es innocente,
Allah t’absoudra ! »
Ayant perçu quelque doute dans l’intonation de sa voix, la délicate et sensible
‘Aïcha c jeta un regard implorant à ses parents, mais ceux-ci préférèrent demeurer
silencieux.
Puis, les yeux pleins de larmes, elle dit au Noble Prophète r ces paroles sincères:
« Par Allah, je sais que tu as entendu ce que les gens disent. Si je te dis que je suis
innocente, tu ne me croiras pas. Mais si je t’avoues que j’ai commis ce dont Allah sait
que je suis innocent, tu me croiras. J’attendrai donc Son aide concernant tout ce qui
a été dit… »
Alors que les rumeurs allaient bon train, une conversation eut lieu entre Abû
Ayyüb al-Ansarî t et sa femme Umm Ayoub c qui demanda à son mari :
« As-tu entendu ce que les gens disent à propos de ‘Aïcha ? »
Il répondit :
« Oui ce ne sont que des mensonges fabriqués. Toi, ferais-tu une telle chose ? »
Umm Ayoub répondit : « Jamais je ne ferais une chose pareille !»
Alors Abû Ayyüb al-Ansarî t dit à sa femme :
« Alors si tu es comme ça saches qu’Aïcha c est meilleure que toi ! »(Ibn Hishâm,
III, 347 ; Waqidi, II, 434).

Seule une révélation divine pouvait dorénavant régler le problème. Et il ne fallut


pas longtemps pour que le Tout-Puissant mette fin aux rumeurs. Il devenait évident
que les mots prononcés n’étaient que calomnies d’hypocrites. En plus d’absoudre
‘Aïcha c de toute culpabilité, le Propos divin mit en lumière tous ces mensonges
infondés, informa les hypocrites d’une punition imminente et les mit en garde les :
La Cinquième Année de L’hégire 523

ƈ Ù×āĐğƈ ĘŸÓƈ
ƈ ÖÒIJÊÓ
Ƈ ä ƈ
ħġƇ Ĥƪ óĻì ijİģÖħġĤÒóüĮij×ùéÜźħġĭĨ
Ž ƄŽƆ ƆƇ ŽƆ Ƈ ƪ Ƭ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ŽƇ ž Ƅ Ɔ Ž Ƈ Ž Ž Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒĪƈƪ Ì
ħĻčƈ Đ ƈ Įó×Ġĵ
ƈ ĤijÜĸñƈ Ĥƪ ÒIJħƈ àŽ ŸÒ ƈ ƈ ƈ
ÔÒñĐįĤħıĭĨ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ ƇƆ ŽƇ Ž Ƈ ƆŽ ƪ ƆƆ Ɔ ƈ Ž īƆ ĨÕƆ ùƆ ÝƆ ĠÒÓ
Ž Ĩħ ž Îƅ ƈóĨÒ
ƪ ıƇ ĭŽ Ĩ Ž ģƈ ž ġƇ Ĥ
« Ceux qui sont venus avec la calomnie sont un groupe d’entre vous. Ne pen-
sez pas que c’est un mal pour vous, mais plutôt, c’est un bien pour vous. À chacun
d’eux ce qu’il s’est acquis comme péché. Celui d’entre eux qui s’est chargé de la
plus grande part aura un énorme châtiment.

Ƈ ĭƆ Ĩƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJ
ÚÓ Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ Òīƪ Č
Ɔ Īij Ɔ Įij ƈ ðŽ Ìƈ źƆ ijĤƆ 
Ƈ ĩƇ ÝƇ đŽ ĩø
Ɔ Ž
īĻƈ ƫ ğƄ ĘŽ Ìƈ ÒñƆ İÒij
Ƅ ×Ĩ Ɔ ƇĤÓĜƆ IJÒ Ɔ ħŽ ƈıùƈ ęƇ ĬƆÉÖƈ
Ɔ óƃ ĻŽ ì
Pourquoi, lorsque vous avez entendue cette calomnie, les croyants et les
croyantes n’ont-ils pas, en eux-mêmes, conjecturé favorablement et dit : «C’est
une calomnie évidente?»

ƫ ÖÒijÜƇ ÉŽ ĺƆ ħŽ ĤƆ ðŽ Íƈ ĘƆ ÅÒïƆ ıƆ ü


ÅÒïƆ ıƆ ýĤÓƈ Ƈ Ùƈ đƆ ÖƆ òŽ ƆÉÖƈ įƈ ĻŽ ĥƆ ĐÒIJ
Ɔ ÊÓƇ ä
Ɔ źƆ ijŽ ĤƆ
Ɔ ÖƇ ðÓƈ ġƆ ĤŽ ÒħƇ İ
Īij ƈ Ʃ ïĭ ƈ ğƆ Ñƈ ĤƆ IJƇÉĘƆ
Ƈ ųÒ Ɔ Đ Ž
« Pourquoi n’ont-ils pas produit [à l’appui de leurs accusations] quatre té-
moins ? S’ils ne produisent pas de témoins, alors ce sont eux, auprès d’Allah, les
menteurs.

Øƈ óìƈ ŴÒŽ IJÓ ƈ įÝĩèòIJħġƇ ĻĥƆ ĐųÒ ƈ


Ɔ Ɔ ĻƆ ĬŽ ïĤÒĹ
ƫ Ę Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ʃ ģƇ ąŽ ĘƆ źƆ ijŽ ĤƆ IJƆ
ħĻčƈ Đ ÔÒñĐįĻƈ Ęƈ ħÝąŽ ĘƆ ƆÈÓĨĹĘƈ ħġƇ ùĩĤƆ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ɔ ŽƇ Ɔ Ž ƪ Ɔ
N’eussent-été la grâce d’Allah sur vous et Sa miséricorde ici-bas comme dans
l’au-delà, un énorme châtiment vous aurait touchés pour cette (calomnie) dans
laquelle vous vous êtes lancés,

įƈƈ ÖħġƇ ĤƆ ÷Ɔ ĻĤƆ ÓĨħ ƈ ijĘƆÉÖƈ ĪijĤijĝÜIJħġÝƈ ĭùƈ ĤƆÉÖƈ įĬijĝĥÜðÌƈ
ġİÒ
Ž ƪ Ƈ ƆŽ Ɔ Ƈ ƇƆ Ɔ ŽƇ Ɔ Ž ƇƆ ŽƪƆƆ Ž
ħĻčƈ Đ ƈ ïĭĐ
ųÒ ƈ ijİIJÓĭƈĻİįĬij×ùéÜIJħĥĐƈ
Ƅ Ɔ Ʃ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ ƃžƆ ƇƆ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƅ Ž
quand vous colportiez la nouvelle avec vos langues et disiez de vos bouches
ce dont vous n’aviez aucun savoir ; et vous le comptiez comme insignifiant alors
qu’auprès d’Allah cela est énorme.
524 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ħĻčƈ Đ ĪÓÝıÖÒñİğĬÓé×øÒñıƈÖħĥġÝĬĪƆÈÓĭƆ ĤƆ ĪƇ ijġƇ ĺÓ ƈ ðŽ Ìƈ źƆ ijĤƆ IJ


Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ɔ Ɔƪ Ɔ Ĩħ
ƪ ÝƇ ĥŽ ĜƇ Įij
Ƈ ĩƇ ÝƇ đŽ ĩø
Ɔ Ž Ɔ
« Et pourquoi, lorsque vous l’entendiez, ne disiez-vous pas : ‹ Nous ne devons
pas en parler. Gloire à Toi (ô Allah) ! C’est une énorme calomnie › ?

īĻ ƈƈ
Ɔ ĭĨËŽ Ĩħ Ƈ ÌÒïƃ ÖƆ ƆÈįƈ ĥƈ Ꭰĩƈ ĤÒIJ
ƫ ÝĭƇ ĠĪƈ
ƈ îijđÜĪ ƪ ħƇ ġƇ Ƈčđƈ ĺƆ
Ƈ Ƈ Ɔ ƆÈƇųÒ
« Allah vous exhorte à ne plus jamais revenir à une chose pareille si vous êtes
croyants.

ħĻġƈ è ħĻĥƈ ĐųÒIJÚÓ


ƈ ĺŴÒ
Ɔ Ž ħƇ ġƇ ĤƆ ƇųÒ
ƪ īƈƇ Ļž ×Ɔ ƇĺIJƆ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ Ƈƪ Ɔ
Allah vous expose clairement les versets et Allah est Omniscient et Sage.

ÔÒ ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ƆÈĪij Ɔ ×ƫ éƈ Ƈĺīĺ ƈ


Ƅ ñƆ Đ
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ÒijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒĹĘÙƇ ýƆ èÓęƆ ĤŽ ÒďĻ Ɔ ýÜĪ Ɔ ñĤƪ ÒĪƈƪ Ì
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ źƆ ħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ
Īij ƈ ƈ ƈ ħĻĤƈ ƆÈ
Ɔ ħƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ƇųÒ
Ʃ IJƆ ØóƆ ìŴÒŽ IJÓ
Ɔ ĻƆ ĬŽ ïĤÒĹ
ƫ Ę
Ƅ
Ceux qui aiment que la turpitude se propage parmi les croyants auront un
châtiment douloureux, ici-bas comme dans l’au-delà. Allah sait, et vous, vous ne
savez pas.

ħĻèƈ ò ĖIJÊòųÒĪƆÈIJįÝĩèòIJħġĻĥĐųÒƈ ģąĘźijĤIJ


Ƅ Ɔ Ƅ Ƈ Ɔ Ʃ ƪ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ ŽƆ Ɔ Ʃ Ƈ Ž Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ
Et n’eussent été la grâce d’Allah sur vous et Sa miséricorde et (n’eût été)
qu’Allah est Compatissant et Miséricordieux...

ƈ ijĉƇ ì ƈ ƈ ijĉƇ ìÒij ƈ


ÚÒ Ɔ Ƈ ďƈŽ ×Ýƪ ĺīƆ ĨƆ IJ Ɔ ĪÓĉƆ ĻŽ ýĤÒ
ƪ ÚÒ Ɔ Ƈ đƈƇ ×Ýƪ ÜƆ źÒij
Ɔ ƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ÓĠƆ ôÓ
Ɔ Ĩ ƈ Ʃ ģƇ ąŽ ĘƆ źƆ ijĤƆ IJ ƈóġĭ Ž ƈ
Ɔ įƇ ÝƇ ĩƆ èŽ òƆ IJ
Ɔ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ųÒ Ž Ɔ Ɔ ĩƇ ĤŽ ÒIJÅÓ
Ɔ ýƆ éŽ ęƆ ĤŽ ÓƈÖóƇ ĨƇ ÉĺƆ įƇ Ĭƈƪ ÍĘƆ ĪÓĉƆ ĻŽ ýĤÒ
ƪ
ħĻĥƈ Đ ďĻĩƈ øųÒIJÅÓýĺīĨĹĠƈ õĺųÒīġƈ ĤIJÒïÖƆÈïƅ èƆÈīĨħ ƈ ġĭĨƈ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ž ƆƇ ƆƩ ƪ Ɔ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ž ž Ƈ
« Ô vous qui avez cru ! Ne suivez pas les pas du Diable. Quiconque suit les pas
du Diable, [sachez que] celui-ci ordonne la turpitude et le blâmable. Et n’eussent
été la grâce d’Allah envers vous et Sa miséricorde, nul d’entre vous n’aurait ja-
mais été pur. Mais Allah purifie qui Il veut. Et Allah est Audient et Omniscient.»
(Coran, An-Nûr, 24 : 11-21).

Aïcha c fut la première informée par le Noble Prophète r de l’admirable nou-


velle qui lui dit gaiement : « Bonne nouvelle, ‘Aïcha, Allah t’a acquittée ! »
La Cinquième Année de L’hégire 525

Après avoir loué et remercié Allah le Tout-Puissant, Aïcha c répondit :


« Je n’aurais jamais pensé qu’une révélation divine prendrait en considération une
servante sans défense telle que moi. Tout ce que je pouvais attendre de cela, c’était une
inspiration dans le cœur du Prophète r qui lui aurait prouvé mon innocence. »
À son père qui l’embrassa sur le front et lui conseilla de retourner chez son mari,
blessée elle fit cette remarque : « Je ne remercierai nul autre qu’Allah, car Lui seul a
fait connaître mon innocence. »
Le Noble Messager r sourit à son tour. Une détresse qui a duré un mois tout en-
tier venait de prendre fin, grâce au bienfait et à la compassion d’Allah, Gloire à Lui.
(Al Boukhari, Shahadat, 15, 30 ; Jihad, 64; Maghazi, 11, 34 ; Muslim, Tawba, 56 ; Ahmad, VI, 60, 195).

La victime de cette atroce diffamation n’était autre que l’épouse du Prophète


d’Allah r, la mère des Croyants, la fille du meilleur ami du Prophète r, qui était
d’ailleurs une des plus chastes femmes de l’Oumma (la Communauté Musulmane).
D’autre part, cette épreuve suffit pour signifier le pouvoir indulgent des pro-
phètes face aux tribulations. Elle apporte dans le même temps, telle une preuve, une
consolation réconfortante à toutes les victimes de dénonciation calomnieuse, et ce
jusqu’à l’Heure Dernière.
Or, en dépit du fait incontestable que le Saint Coran ait exempté l’honorable ‘Aï-
cha c de toute culpabilité en décrivant l’accusation comme “un mensonge évident”
et “une grande calomnie”, que dire d’autre si des ignorants continuèrent malgré tout
à lui lancer des accusations, comme plus tard lors de l’incident de Jamal ?
Les individus reconnus coupables furent en conséquence punis pour avoir ac-
cusé d’adultère une femme honorable. Pour cela, les calomniateurs reçurent chacun
quatre-vingt coups de bâton. (Ahmad, VI, 35).
Selon Ibn ‘Abbâs t Allah I n’a donné, dans toute l’histoire, l’absolution qu’à
quatre personnes:
1. Yûsuf u à travers la parole d’un témoin parmi les amis de la femme qui
l’avaient accusé(Voir, Yûsuf, 26-29).
2. Mûsâ u des rumeurs fomentés par les Juifs (Voir, Al Ahzab, 69).
3. Maryam u en facilitant la parole à son nouveau-né alors qu’il était dans ses
bras (Voir, Maryam, 29-33).
4. Jamais le Tout-Puissant n’avait auparavant révélé, comme Il le fit par ces
glorieux versets du Saint Coran qui seront lus jusqu’à l’Heure Dernière. un
acquittement comme celui d’Aïcha c avec une telle éloquence. Cela indique
le rang sublime qu’occupe Son Messager r. (Zamakhshari, IV, 121).
526 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’apparent retard de la révélation divine à propos de cette affaire, et ce à un mo-


ment où il était si nécessaire, sert de souligner le fait que le Noble Prophète r n’était
après tout qu’un être humain qui n’exerçait aucun pouvoir en matière de révélation
divine à venir. Cet épisode a servi par conséquent à tester la sincérité des Croyants.

Abû Bakr t avait pour coutume de soutenir un pauvre homme nommé Mis-
tah. Ayant réalisé que lors de l’incident ce dernier figurait parmi les calomniateurs,
il se jura de ne plus jamais l’aider, ni lui ni ses proches. Dès qu’il eut cessé son aide,
Mistah et les siens tombèrent dans une totale indigence, sur laquelle le Tout-Puissant
révéla les versets coraniques suivants :

ĵÖƆ óĝƇ ĤŽ ÒĹĤƈ IJŽ ƇÈÒijÜƇ ËŽ ƇĺĪƆÈÙƈ đƆ ùĤÒ


ƪ IJƆ ħŽ ġĭ
ƈ ģƈ ąŽ ęƆ ĤŽ ÒÒijƇĤIJƇÈģƈ ÜƆ ÉŽ ĺźƆ IJ
Ƈ Ĩ Ž Ɔ Ɔ
Ž
źƆ ƆÈÒijéƇ ęƆ āŽ ĻĤŽ IJÒij ƈ ģĻƈ×øĹĘ ƈ īĺ ƈóäÓ ƈ
ęđĻĤIJųÒ
Ɔ Ɔ Ƈ Ž ƆŽ Ɔ Ʃ ƈ Ɔ Ɔ ƈ ıƆ ĩƇ ĤŽ ÒIJ Ɔ īĻ Ɔ ĠÓùƆ ĩƆ ĤŽ ÒIJƆ
ħĻèƈ ò òijęĔųÒIJħġĤųÒóęƈ ĕĺĪƆÈĪij Ɔ ×ƫ éƈ ÜƇ
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƇƩ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƇƩ Ɔ Ž Ɔ
« Et que les détenteurs de richesse et d’aisance parmi vous, ne jurent pas de
ne plus faire des dons aux proches, aux pauvres, et à ceux qui émigrent dans le
sentier d’Allah. Qu’ils pardonnent et absolvent. N’aimez-vous pas qu’Allah vous
pardonne ? et Allah est Pardonneur et Miséricordieux ! » (An-Nûr, 24 : 22).

ÒŽ ijĝƇ Ýƪ ÜƆ IJ ƈ ž Ùƃ ĄƆ óĐųÒ


Ɔ ƆÈħŽ ġƇ ĬÓƈ ĩƆ ĺŽ ƆŶ
Ɔ ÒŽ IJóƫ ×Ɔ ÜĪ ÒijĥđåÜźIJ
Ž Ƈ ƆƩ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ
ħĻĥƈ Đ ďĻĩƈ øųÒIJöÓ ƈ ĭĤÒīĻÖÒŽ ijéĥƈ āÜƇ IJ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ ƪ Ɔ ŽƆ Ƈ Ž Ɔ
« Et n’usez pas du nom d’Allah, dans vos serments, pour vous dispenser de
faire le bien, d’être pieux et de réconcilier les gens. Et Allah est Audient et Omnis-
cient. » (Al-Baqara, 2 : 224).
Les versets susmentionnés fournissent des preuves concrètes attestant de la mi-
séricorde qu’Allah U manifeste à l’égard de Ses serviteurs. De façon alternative, ils
sont à même de fournir un objectif pour améliorer les qualités du vertueux.
« Bien entendu, je voudrais qu’Allah me pardonne », commenta Abû Bakr t
après avoir eu connaissance de la révélation (relative à cette affaire). Puis, offrant la
compensation (kaffara) de son serment, il continua à faire œuvre de bienfaisance
comme auparavant. (Al Boukhari, Maghazi, 34 ; Muslim, Tawba, 56 ; Tabari, Tafsir, II, 546).
Abû Bakr t ne refusa pas d’offrir l’aumône, même à une personne qui avait ca-
lomnié sa fille, ce qui prouve à quel point cet illustre Compagnon t était un homme
de vertu.
La Cinquième Année de L’hégire 527

Ceux-ci sont les ennemis…. Méfiez-vous !


Ce ne fut pourtant pas la fin des ennuis initiés par les hypocrites au retour de la
Bataille de Muraysi. Après une dispute qui éclata entre un Ansar et un Muhajir ‘Ab-
dullah ibn Ubayy, le chef des hypocrites, vit une occasion de laisser échapper sa frus-
tration. Faisant allusion au Muhajir, il dit avec méchanceté : “Voyez donc la manière
dont ils agissent maintement ! Ils commencent par nous dominer dans notre propre
ville puis ils ne nous reconnaissent même pas ! Mais ils verront bien lorsque nous
reviendrons à Médine. Les plus honorables chasseront alors les plus pitoyables !”
Le juste et loyal Zayd ibn Arqam t qui entendit ces propos s’exclama : “ Tu es
l’homme le plus pitoyable de ta tribu ! Allah le Tout-Puissant a fait de Muhammad
un homme honorable ! ”
Apprenant que leurs paroles arrogantes étaient parvenues aux oreilles du Noble
Prophète r, les hypocrites changèrent rapidement de ton, faisant le vœu de n’avoir
jamais rien dit de tel et ce à un tel point qu’ils firent passer Zayd ibn Arqam t pour
un menteur, causant de la sorte au courageux Compagnon une détresse beaucoup
plus grande. Omar t eut cependant une autre idée en tête : il demanda au Noble Pro-
phète la permission de tuer les hypocrites, à commencer par ‘Abdullah ibn Ubbay.
Mais faisant preuve de clairvoyance et de prudence le Prophète d’Allah r ré-
pondit : « Omar ! Les gens qui ne comprennent pas ce qui se passe diront alors : “Mu-
hammad tue son peuple !”. Non, je n’agirai pas de la sorte ! Dis aux Croyants de se
préparer à reprendre le voyage ! »
Les Croyants reprirent alors leur marche vers Médine. Le Noble Prophète r
poursuivit sa marche jusqu’au soir, puis sans interruption jusqu’au matin. Une fois
que le soleil eut commencé à darder ses rayons, il r décida de faire une halte. Érein-
tés par cette longue marche, les Croyants ne tardèrent pas à s’endormir. La décision
du Noble Prophète r d’agir ainsi était destinée à empêcher les Musulmans de se
préoccuper des propos de ‘Abdullah ibn Ubbay. (Voir, Ibn Hishâm, III, 335-336).
La stratégie hautement délicate du Noble Prophète r montre à cet égard sa
connaissance intime de la nature humaine. Bientôt survinrent successivement
quelques versets mettant à nu la sinistre condition des hypocrites :

ƈ Ʃ Ģij Ɔ ĝƇ ĘÓƈ ĭƆ ĩƇ ĤŽ ÒĞƆ ÅÓäÒ


ğƆ Ĭƈƪ ÌħĥƆ đŽ ĺƆ ƇųÒ
Ƈ Ʃ IJ Ɔ ųÒ Ƈ øƇ óƆ ĤƆ ğƆ Ĭƈƪ ÌïƇ ıƆ ýŽ ĬƆ ÒijƇĤÓĜƆ Īij Ɔ ðƆ Ìƈ
Ùƃ ĭƪ äƇ ħŽ ıƇ ĬƆ ÓĩƆ ĺŽ ƆÈÒIJñƇ íƆ ÜÒ
ƪ Īij Ɔ ÖƇ ðÓƈ ġƆ ĤƆ īĻ ƈƈ
Ɔ ĝĘÓĭƆ ĩƇ ĤŽ ÒĪƈƪ ÌïƇ ıƆ ýŽ ĺƆ ƇųÒ
Ʃ IJ Ɔ įƇ ƇĤijøƇ óƆ ĤƆ
ħıƇ Ĭƪ ƆÉÖƈ ğƆ Ĥƈ ðƆ Īij Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ĺÒij ƈ Ʃ ģĻƈ
Ž Ɔ ƇĬÓĠÓ Ɔ ĨÅÓ Ɔ ø Ɔ ħŽ ıƇ Ĭƈƪ ÌųÒ ƈ ×øīƆ ĐÒIJ Ɔ ïƫ āƆ ĘƆ
Īij
Ɔ ıƇ ĝƆ ęŽ ĺƆ źƆ ħŽ ıƇ ĘƆ ħŽ ƈıƈÖijĥƇ ĜƇ ĵĥƆ ĐƆ ďƈƆ ×ƇĉĘƆ ÒIJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ ħƪ ƇàÒijƇĭĨÆ Ɔ
528 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Quand les hypocrites viennent à toi, ils disent : «Nous attestons que tu es
certes le Messager d’Allah»; Allah sait que tu es vraiment Son messager; et Allah
atteste que les hypocrites sont assurément des menteurs. Ils prennent leurs ser-
ments pour bouclier et obstruent le chemin d’Allah. Quelles mauvaises choses
que ce qu’ils faisaient ! C’est parce qu’en vérité ils ont cru, puis rejeté la foi. Leurs
cœurs donc, ont été scellés, de sorte qu’ils ne comprennent rien.

ƄØïƆ ĭƪ ùƆ Ĩ
ƫ Õ Ƅ ýƇ ì Ɔ ħŽ ƈıĤƈ ijŽ ĝƆ Ĥƈ ďŽ ĩƆ ùŽ ÜÒij
Ƈ ħŽ ıƇ Ĭƪ ƆÉĠ Ɔ ƇĤijĝƇ ĺĪƈ Ɔ ÌIJ
Ɔ Ɔ ðƆ Ìƈ IJ
Ɔ ħŽ ıƇ ĨÓƇ ùƆ äŽ ÈğƆ ×Ƈ åƈ đŽ ƇÜħŽ ıƇ ÝƆ ĺŽ ÈòÒ
Ɔ Ɔ
Ɔ ġƇ ĘƆ ËŽ ƇĺĵĬƪ ƆÈƇųÒ
Īij Ʃ ħƇ ıƇ ĥƆ ÜÓƆ ĜƆ ħŽ İƇ òŽ ñƆ èÓ ƅ
Ž ĘƆ IJƫ ïƇ đƆ ĤŽ ÒħƇ İ
Ƈ ħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ÙéƆ ĻŽ Ā
Ɔ ģƪ Ġ Ƈ ĪijƆ ×Ƈ ùƆ éŽ ĺƆ
« Et quand tu les vois, leurs corps t’émerveillent ; et s’ils parlent, tu écoutes
leur parole. Ils sont comme des bûches appuyées (contre des murs) et ils pensent
que chaque cri est dirigé contre eux. L’ennemi c’est eux. Prends-y garde. Qu’Allah
les extermine ! Comme les voilà détournés (du droit chemin).

ħıƇ ÝƆ ĺŽ ƆÈòƆ IJ ƈ Ʃ Ģij ƈ ƈ ðƆ Ìƈ IJ
Ž Ɔ ħŽ ıƇ øIJ
Ɔ ÊƇ òÒƇ IJŽ ijƪ ĤƆ ųÒ Ƈ øƇ òƆ ħŽ ġƇ ĤƆ óŽ ęĕŽ ÝƆ ùŽ ĺÒ
Ɔ ijŽ ĤƆ ÓđƆ ÜƆ ħŽ ıƇ ĤƆ ģĻ
Ɔ ĜÒ Ɔ
óęƈ ĕŽ ÝƆ ùŽ ÜƆ ħĤƆ ĦŽ ƆÈħıƇ ĤƆ ÚƆ óęƆ ĕŽ ÝƆ øŽ ƆÈħ ƈıĻĥƆ ĐÅÒ ijøĪIJóƈ×ġÝùĨħİIJĪIJïāĺ
Ž Ž Ž Ž Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Žƫ Ƈ Ɔ Ɔ ƫ Ƈ Ɔ
īĻ ƈ ƈ ƈ Ʃ óƆ ęƈ ĕŽ ĺī
Ɔ ĝøÓęƆ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÒĸïıŽ ĺƆ źƆ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌħŽ ıƇ ĤƆ ƇųÒ Ɔ ĤƆ ħŽ ıƇ ĤƆ
« Et quand on leur dit : «Venez que le Messager d’Allah implore le pardon
pour vous», ils détournent leurs têtes, et tu les vois se détourner tandis qu’ils
s’enflent d’orgueil. C’est égal, pour eux, que tu implores le pardon pour eux ou
que tu ne le fasses pas : Allah ne leur pardonnera jamais, car Allah ne guide pas
les gens pervers.

Òijąƫ ęƆ ĭĺĵ ƈ Ʃ Ģij ƈ øòïĭ ƈ ƈ ƈ


Ɔ Ýƪ è Ɔ ųÒ Ƈ Ɔ Ɔ ĐīŽ Ĩĵ Ɔ ĥƆ ĐÒij
Ɔ ĝƇ ęĭÜƇ źƆ Īij Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒħƇ İƇ
Īij
Ɔ ƇĤijĝƇ ĺ ƈƈ ƈ Ăƈ òƆŶÒŽ IJÚÒ ƈ IJÓĩùĤÒīÐÒƈ õì ƈƈ
Ɔ Īij Ɔ ıƇ ĝƆ ęŽ ĺƆ źƆ īĻƆ ĝĘÓĭƆ ĩƇ ĤŽ Òīƪ ġĤƆ IJ
Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ ųƩ IJƆ
ƈ Ʃ ƈ IJĢƪ ðƆ ƆŶÒÓ
ØƇ õƪ đƈ ĤŽ Òų ƈ õƫ ĐƆŶÒ ƈ ƈ ƈ
Ɔ Ž ıƆ ĭŽ Ĩ Ɔ Ž īƪ äƆ ƈóíŽ ĻƇ ĤƆ ÙĭĺƆ ïĩƆ ĤŽ ÒĵĤƆ Ìƈ ÓĭƆ đŽ äƆ òī
ƪ ÑĤƆ
Īij
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ źƆ īĻ ƈƈ ƈ īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĥŽ Ĥƈ IJįƈ Ĥij ƈ øóĤƈ IJ
Ɔ ĝĘÓĭƆ ĩƇ ĤŽ Òīƪ ġĤƆ IJ
Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
« Ce sont eux qui disent : «Ne dépensez point pour ceux qui sont auprès du
Messager d’Allah, afin qu’ils se dispersent». Et c’est à Allah qu’appartiennent
les trésors des cieux et de la terre, mais les hypocrites ne comprennent pas. Ils
disent : «Si nous retournons à Médine, le plus puissant en fera assurément sortir
La Cinquième Année de L’hégire 529

le plus humble». Or c’est à Allah qu’est la puissance ainsi qu’à Son messager et
aux croyants. Mais les hypocrites ne le savent pas. » (Al-Munafiqûn, 63 :1-8).
Après la révélation de ces versets le Noble Prophète r convoqua Zayd ibn Ar-
qam et dit après les lui avoir récités : « Allah vient de confirmer ta déclaration, Zayd !
» (Al Boukhari, Tafsir, 63/1-2 ; Muslim, Sifat’ul-Munafiqin, 1).
Puis il r saisit doucement l’oreille de Zayd et dit: “Jeune homme qui a fait bon
usage de son oreille pour la cause d’Allah. » (Ibn Hishâm, III, 336).
Y
Ironiquement, ‘Abdullah ibn ‘Ubay, le chef de file notoire des hypocrites, avait
un fils nommé ‘Abdullah, un musulman sincère inséparablement attaché au Noble
Messager r. Fortement attristé par les méfaits de son père pendant un certain temps,
les récents développements eurent tôt fait de faire bouillir son sang. Il ressentit alors
le besoin d’approcher le Noble Prophète r.
“Si tu le souhaites, ô Messager d’Allah, dit-il, permets-moi de tuer mon père !”
Comme on pouvait s’y attendre, le Noble Prophète r ne lui permit pas de pour-
suivre ses objectifs, mais lui donna ce conseil :
« Au lieu de cela, sois bon envers lui et traite-le bien aussi longtemps qu’il demeure
parmi nous. »
Malgré cela, ‘Abdullah courut vers son père et, se promenant dans les rangs
musulmans et saisissant son chameau par le licou, hurla : “Vous ne bougerez pas tant
que vous ne direz pas “l’honneur et la puissance sont à Allah et à Son Messager !”
Le chef des hypocrites demeura abasourdi. Il ne pouvait en effet supporter que
son propre fils agisse de la sorte en présence d’une foule de spectateurs.
— Ne me laisserais-tu pas entrer dans Médine devant tous ces gens ?
— Pas avant que je t’enseigne une fois pour toutes que le plus honorable et le
plus pitoyable se trouve en face devant tous ces gens, répondit ‘Abdullah d’un ton
courageux et résolu. Et si tu n’admets pas cela, ajouta-t-il, je te couperai la tête !
L’hypocrite n’avait nulle part où fuir, pétrifié à la pensée que son fils allait mettre
en œuvre les propos qu’il avait énoncés. Il n’avait par conséquent pas d’autre choix
que de renier ce qu’il avait affirmé auparavant, et il murmura, même si c’était bien à
contre-cœur:
“J’admets que l’honneur et la puissance sont à Allah et à Son Messager.
Le Noble Prophète r fit alors cette invocation :
« Qu’Allah te récompense du bien de Son Messager et des Croyants»
Puis il lui dit de faciliter le chemin de son père. (Ibn Hishâm, III, 334-337 ; Ibn Sa’d, II,
65 ; Haythami, IX, 317-318 ; Zamakhshari, VI, 117).
530 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les Compagnons avaient tant d’amour pour le Noble Prophète r qu’ils ne sup-
portaient pas de le voir offensé. Tout manque de respect envers lui les exaspérait au
point de donner l’impression qu’ils voulaient tuer le coupable fut-il leur propre père.

Une épreuve difficile : la Bataille de Khandâq (Shawwâl-, Dhul-Qa`dah, 5 /


Mars 627)
Motivée par l’unique but d’effacer de l’histoire l’émergence de l’État islamique
de Médine, la Bataille de Khandâq fut sans doute la plus horrible menée contre les
Musulmans. Quelques notables des juifs exilés de Benî Nadîr s’étaient réfugiés à
Khaybar. Brûlant de vengeance contre les musulmans ils offrirent leur collaboration
aux Qurayshites et allèrent même plus loin en affirmant devant les idolâtres que leur
idolâtrie était supérieure à l’Islam. Sur ce sujet propos Allah le Très-Haut a déclaré :

Ûƈ ×åƈ ĤŽ ÓƈÖĪij


Ž Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ƇĺÔÓ
ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ ÒīƆ ĨÓ
ƈ ƈ Ƈ ƇÈīĺñƈ Ĥƪ ÒĵĤƆ Ìƈ óÜƆ ħĤƆ ƆÈ
ž ×Ļƃ āĬƆ ÒŽ ijÜIJ Ɔ Ɔ Ž
ƈ ƈ ƈ ƈ Ɔ ƇĤijĝƇ ĺIJÚij ƈ ĔƇ Óĉƪ ĤÒIJ
ŻĻƈ×ø
Ɔ ÒŽ ijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒīƆ ĨĴïƆ İŽ ƆÈÅźËƇ İ Ɔ ÒŽ IJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ īĺ
Ɔ ñĥƪ ĤĪij ƆƆ Ɔ
ÒóĻāƈ ĬƆ įƇ ĤƆ ïƆ åƈ Üī
Ɔ ĥƆ ĘƆ ƇųÒ
Ʃ īƈ đƆ ĥŽ ĺī
Ɔ ĨƆ IJ Ɔ ƇųÒƩ ħƇ ıƇ ĭƆ đƆ ĤƆ īĺ ƈ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒğƆ ÑÃĤƆ IJŽ ƇÈ
ƃ
« N’as-tu pas vu ceux-là, à qui une partie du Livre a été donnée, ajouter foi à
la magie (gibt) et au taghout, et dire en faveur de ceux qui ne croient pas : «Ceux-
là sont mieux guidés (sur le chemin) que ceux qui ont cru»? Voilà ceux qu’Allah
a maudit ; et quiconque Allah maudit, jamais tu ne trouveras pour lui de secou-
reur.» (An-Nisâ’, 4 : 51-52; Voir, Wahidi, p. 160).
Anticipant la moindre opportunité, les idolâtres réagirent aussitôt à l’offre faite
par les Juifs. De nombreuses tribus idolâtres en Arabie avaient déjà été encouragées
par le revers musulman à Ouhoud, à la grande joie de Quraysh qui avait profité de
cet enthousiasme généralisé pour rassembler une armée composée de plus de dix
mille combattants. (Voir, Waqidi, II, 444 ; Ibn Sa’d, II, 66).
Conscient que l’armée ennemie se préparait à marcher sur Médine, le Noble
Prophète r se mit à discuter de l’urgente question avec ses Compagnons y, tout en
leur garantissant la victoire tant qu’ils s’abstiendraient de toute rébellion contre les
ordres d’Allah et qu’ils se tiendraient prêts à supporter les épreuves susceptibles de
se présenter. En outre, le Noble Prophète r leur ordonna d’obéir à Allah et à Son
Messager en toutes circonstances.
Le Tout-Puissant inspira ensuite au Noble Prophète r de creuser des tranchées
autour de Médine. Il demanda par conséquent aux Compagnons y s’il leur semblait
préférable d’affronter l’ennemi à l’extérieur de Médine ou bien de creuser des tran-
chées autour de la ville pour la défendre de l’intérieur.
La Cinquième Année de L’hégire 531

Salman t dit alors : “ En Perse, ô Messager d’Allah quand nous nous attendions
à un raid ennemi, nous creusions des tranchées autour de notre ville.”
Les paroles de Salmân t qui soutenaient le conseil du Noble Prophète r furent
aimées par les Musulmans (Ibn Hishâm, III, 231; Waqidi, II, 445).
Les compagnons y se souvinrent du désir que nourrissait le Noble Prophète r
lors de la Bataille d’Ouhoud de rester dans la ville et de mener une guerre défensive.
Ils se mirent conséquemment d’accord pour creuser des tranchées autour de Médine.
Médine n’était accessible et sujette à être attaquée que d’un seul côté. Les autres
côtés étaient couverts de maisons reliées les unes aux autres, un peu comme un
château. Les espaces étaient peu nombreux et très densément couverts de dattiers,
rendant tout effort d’intrusion impossible. Le Noble Prophète r prit donc la déci-
sion de creuser la tranchée du côté ouvert. Pour cela, il constitua des groupes de dix
hommes, chaque groupe devait creuser une partie du fossé dans l’exacte mesure qu’il
avait assignée. (Tabari, Târîh, II, 568; Diyarbakri, I, 482).
Le Noble Prophète r travailla personnellement dans le creusement des tran-
chées. De surcroit des pénurie alimentaires sévirent à l’époque, et il fut contraint
d’attacher une pierre autour de son abdomen béni pour réduire sa sensation de faim.
(Al Boukhari, Maghazi, 29).

Mais même dans ces circonstances le Prophète de Miséricorde et Sultan des Pro-
phètes ne cessa jamais d’exprimer sa gratitude envers son Seigneur Allah U.
Bara ibn Azib t raconte : « Le jour d’Ahzab 154j’ai vu le Messager d’Allah porter
de la terre. .
Il r clamait ce poème d’Abdulah ibn Rawaha t:

ÓĭƆ ĻĥƆ Đ ÙĭĻġƈ øīĤ ƈõĬƆÉĘƆÓĭĻĥĀźIJÓĭĜïāÜźIJÓĭĺïÝİÒÓĨÛĬÈźijĤħıĥĤÒ


Ž Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ Žƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ƪ Ƈ ƪ Ɔ
ƈ îÒòƆÈĪƈŽ ÌIJÓĭƆ ĻĥƆ ĐÒijĕƆ ÖïŽ ĜƆ ĵĤſ ƇŶÒ
ÓĭƆ ĻÖƆ ƆÒÙƃ ĭƆ ÝŽ ĘÒIJ Ž Īƈƪ ÌÓĭƆ ĻŽ ĜƆ ƆźĪƈŽ ÌĦÒƆ ïƆ ĜŽ ƇŶÒ ƈ ×àƆ IJ
Ž Ûƈ
Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ž Ɔ
“Ô Allah, si Ta guidance nous faisait défaut, nous serions incapables de faire l’au-
mône ou d’offrir la prière. Ô Allah, submerge-nous de sérénité au moment de rencon-
trer l’ennemi ; ne laisse pas nos pieds glisser. Ce sont eux qui nous assaillent… Quand
ils veulent nous pousser au sein de la tribulation, nous allons avancer et ne pas fuir !”
Et il élevait la voix en disant « “abayna” (Mes proches ne fuyez pas). » (Al
Boukhari, Maghazi, 29).

154 Comme diverses tribus s’unirent leurs forces pour attaquer les Croyants, la Bataille de Khandâq fut
aussi appelée Ahzab (les coalisés))
532 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les Compagnons y vivaient tous dans un état de stress tel qu’ils ne parvenaient
même pas à se nourrir. Anas t rapporte ainsi la description de leur calvaire :
« On apporta aux Compagnons une poignée d’orge qui, après avoir été cuite
avec du beurre périmé. En dépit de la faim ardente, il était impossible de ne pas
goûter à l’âpreté ainsi qu’au goût fétide du beurre. La nourriture dégageait une odeur
lourde et désagréable. » (Al Boukhari, Maghazi, 29).
Tous les Musulmans y, les jeunes comme les vieux, creusaient des tranchées.
Zayd ibn Thabit t, âgé de quinze ans à l’époque, s’était momentanément endormi
lors de l’exercice de ses fonctions. Pendant ce temps, les Compagnons y qui étaient
près de lui l’avaient laissé endormi au bord des tranchées. Voulant plaisanter, Umar
ibn Hazm t se saisit de ses armes et les dissimula. Plus tard, constatant que ses
armes avaient disparu, Zayd t se mit à paniquer.
Là-dessus, le Noble Prophète r le fit appeler et lui dit :
« Tu t’es endormi, ô dormeur, et tes armes ont disparu ! »
Puis il demanda :
« Qui sait où se trouvent les armes de ce gamin ? »
Umar ibn Hazm t répondit
« Moi je le sais, ô Messager d’Allah elles sont en ma possession. »
Le Noble Prophète r lui demanda alors de restituer à Zayd t ses armes et for-
mula l’injonction d’interdire à tous de cacher tout bien, même à titre de plaisanterie.
(Waqidi, II, 448).

De bonnes nouvelles amenées à Khandâq


Les Compagnons se plaignirent auprès du Noble Prophète r à propos d’une
grosse pierre sur laquelle ils étaient tombés en creusant et qu’ils ne pouvaient pas
casser.
Le Messager d’Allah r s’était alors saisi d’une massue pointue et, prononçant
le Nom d’Allah, frappa la pierre à trois reprises, l’écrasant pour en faire du sable fin.
(Al Boukhari, Maghazi, 29).

À chaque découverte de ce genre, le Noble Prophète r libérait les Croyants avec


de bonnes nouvelles. Selon la vision qu’il en eut et qu’il partagea avec les Compa-
gnons t, les clés de Damas (Empire byzantin) furent cédées au premier coup, les
clés de la Perse au second et les clés du Yémen au troisième. Il leur déclara également
qu’il pouvait apercevoir les palais qui se situaient à ces endroits précis et de là où il se
tenait. Le Noble Prophète r leur assura qu’ils allaient être honorés sous la guidée de
l’Islam et de la Parole d’Allah, et ce dans un avenir proche.
La Cinquième Année de L’hégire 533

Il r leur insuffla l’espoir des victoires à venir, mais aussi le fait que très bientôt
la vérité allait triompher du faux et que les victoires auparavant inconcevables étaient
désormais des réalités imminentes. (Voir, Ahmad, IV, 303 ; Ibn Sa’d, IV, 83, 84).
Quand le Noble Prophète r eut commencé à décrire le palais blanc de Khosrau
situé dans la forteresse sassanide de Mada’in, Salmân t qui par expérience connais-
sait ce lieu approuva fortement déclara :
« Par Allah qui t’a envoyé avec la Religion de vérité et le vrai Livre, ce palais est
exactement comme tu le décris ! Je témoigne une fois de plus que tu es le Messager
d’Allah ! »
Le Noble Messager d’Allah r dit:
« Eh Salmân ! Allah vous accordera ces victoires après moi. Damas tombera sûre-
ment ! Héraclius s’enfuira et se réfugiera dans le coin le plus éloigné de son royaume !
Vous régnerez sur toute la région de Damas et personne ne pourra se placer sur votre
chemin ! Le Yémen tombeau sûrement! Et Khosrau trouvera la mort après cela ! »
Salmân t déclarera plus tard “J’ai vu tout cela se produire.” (Waqidi, II, 450).
Au moment où ces régions s’effondrèrent les unes après les autres, Abou Hou-
rayra t déclara également :
« Ce n’est pour vous que le début ! Par Allah qui tient ma vie entre Ses mains, le
Tout-Puissant a cédé à Muhammad les clés de tous les lieux que vous avez conquis et
que vous occuperez jusqu’à l’Heure ultime. » (Ibn Hishâm, III, 235).
Le Noble Prophète r avait en effet annoncé aux Croyants un immense récon-
fort spirituel pour les aider à supporter les épreuves à venir.
Cette victoire appartiendrait en définitive aux Croyants et la consternation à
leurs ennemis, ce qui n’avait fait que renforcer leur patience et endurance propre à la
foi qui remplissait leurs cœurs.
Effectivement, une patience et une endurance extraordinaires allaient être plus
que nécessaires ; une lutte acharnée contre la fatigue et la faim d’un côté et un froid
glacial de l’autre, Khandâq s’avérerait de fait une épreuve quasi insupportable.
Mais surtout, une prière-invocation que le Noble Prophète r avait énoncée
dans les tranchées s’avérait tel un rappel émotionnel que toutes les douleurs et souf-
frances subies ici-bas, aussi intenses fussent-elles, ne signifiaient rien en comparai-
son avec la félicité à venir :
« Ô Allah ! Il n’est de vie que celle de l’au-delà! Donne la victoire aux Ansar et aux
Muhajirun ! » (Al Boukhari, Maghazi, 29).
534 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Jâbir t fournit un repas abondant


Jâbir t raconte :
« Le jour de la bataille du Fossé (khandâq), nous étions en train de creuser des
tranchées lorsque nous fûmes confrontés à un rocher très dur. Les Compagnons y
allèrent trouver le Messager d’Allah r et lui dirent : « Un rocher très dur s’est inter-
posé. »
Le Messager d’Allah r répondit :
« Je vais descendre moi-même !»
Il se leva, alors qu’il maintenait son ventre par une pierre. Cela faisait trois jours
que nous n’avions rien mangé. Le Messager d’Allah r prit alors la pioche et en frap-
pa le rocher qui devint malléable, telle une dune de sable.
Je lui demandai alors :
« Ô Messager d’Allah, permets-moi d’aller chez moi. »
Une fois parvenu, je dis à ma femme : « J’ai vu le Prophète r dans un état que
je ne peux pas supporter. As-tu quelque chose à manger ? »
Elle répondit: « Je n’ai qu’une petite quantité d’orge et une petite chèvre.
Je coupai la chèvre et moulut l’orge. Nous mîmes la viande dans la marmite.
Quand le repas fut presque prêt, je retournai auprès du Messager d’Allah r et lui dit :
« Ô Messager d’Allah, j’ai à manger chez moi. Veux-tu être mon hôte avec un
ou deux de tes compagnons ? »
Le Messager d’Allah r me demanda alors combien de nourriture j’avais.
En entendant ma réponse, il dit :
« C’est beaucoup. Dis à ta femme de ne pas ôter sa marmite du feu ni de sortir son
pain du four avant que j’arrive.»
Puis il appela ses Compagnons et les invita au repas.
Tous les hommes qui creusaient le fossé, les Muhajirun et les Ansar y, l’accom-
pagnèrent. Je dis à ma femme :
« Le Messager d’Allah vient avec es Muhajirun et les Ansar ! »
Elle me demanda : « A-t-il demandé combien de nourriture nous avions ? »
Comme je répondis par l’affirmative, elle me dit :
« Allah et Son Messager sont mieux informés. »
Sa réponse suffit à dissiper mon embarras.
En arrivant le Messager d’Allah r dit à ses Compagnons :
La Cinquième Année de L’hégire 535

« Entrez, mais ne vous bousculez pas. »


Le Messager d’Allah r commença à couper le pain, le disposa sur des plats et y
posa la viande. Pendant ce temps, il laissa la marmite sur le feu et la couvrit ainsi que
le four, à chaque fois qu’il en prélevait de la nourriture. Il servit ainsi plat après plat
ses Compagnons, jusqu’à ce que chacun ait mangé à sa faim. La marmite et le four
étaient encore pleins de viande et de pain quand tout le monde eut fini de manger.
Le Messager d’Allah r dit alors à ma femme :
« Mangez et donez le reste à vos voisins, car la famine a rendu les gens misérables.»
Elle obéit et envoya en grande quantité du pain et des nourritures pendant le
reste de la journée. » (Al Boukhari, Maghazi, 29 ; Muslim, Ashribah, 141 ; Waqidi, II, 452).
Avec ce miracle évident du Noble prophète r un millier de personnes, y com-
pris le voisinage environnant, se rassasia d’une nourriture prévue pour quelques-
unes seulement.
La raison en est que le Noble Messager r dépensait tout ce qu’il avait dans le
chemin d’Allah, Gloire à Lui.
Quand il r avait un besoin réel, il le gardait secret pour ses Compagnons y,
ne voulant pas être un fardeau pour quiconque. Mais comme les Compagnons y
étaient attentifs à sa condition, ils faisaient tout ce qui était en leur pouvoir pour
l’aider chaque fois qu’ils le sentaient dans le besoin.
Parfois, la voix du Noble Prophète r laissait transparaître le degré démesuré
de sa faim, alors les Compagnons y l’emmenaient immédiatement chez eux et lui
offraient leur nourriture. (Voir, Al Boukhari, Atimah, 6; Muslim, Ashribah, 142).
Quand ils voyaient la pâleur du teint du Noble Prophète r ils ne négligeaient
rien pour lui trouver quelque chose à manger, même en effectuant quelques tâches
ménagères, comme par exemple arroser des dromadaires, pour lui offrir ne serait-ce
que quelques dattes.
Le Prophète d’Allah r croisa un jour un Compagnon Ansari qui lui demanda :
« Que mes parents te soient sacrifiés, ô Messager d’Allah, dis-moi s’il te plaît la
raison pour laquelle ton visage est si pâle. Cela m’inquiète ! »
Après avoir regardé quelques instants le visage de ce Compagnon t, le Noble
Prophète r répondit simplement :
« La faim ! »
Le Compagnon t s’empressa d’aller chez lui pour aller chercher quelque chose
à manger, mais en vain. Il se rendit ensuite à toute vitesse dans le quartier des Banû
Qurayza et conclua avec un homme un marché qui stipulait qu’il gagnerait une datte
pour chaque seau d’eau qu’il préleverait d’un puits.
536 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Une fois qu’il eût amassé une poignée de dattes, il se rendit auprès du Noble
Prophète r et lui dit : « De grâce, ô Messager d’Allah, accepte ceci ! »
Le Messager d’Allah r lui demanda la provenance de ces dattes. L’homme ex-
pliqua l’histoire. Le Noble Prophète r lui dit alors :
« Certes tu aimes Allah et Son Messager ! »
« Oui, répondit le Compagnon t, par Allah I qui t’a envoyé porteur de la vé-
rité, tu m’es plus cher que moi-même, mon épouse, mes enfants et tous mes biens ! »
Le Noble Prophète r répondit :
« Alors si c’est le cas, patiente face à la pauvreté, prépare-toi un bouclier contre
les troubles ! Par Allah qui m’a envoyé porteur de la Vérité, ces deux atteignent plus
vite que l’eau qui coule d’une montagne une personne qui m’aime ! (Al-Haythami, X, 313;
Dhahabi, Siyar, III, 54; Ibn Hajar, al-Isabah, III, 298).

Les difficultés endurées à Khandâq


C’était l’hiver. Les idolâtres, qui avaient à présent assiégé Médine de toutes
parts, furent surpris par les tranchées infranchissables qui se étaient devant eux. et ne
purent pas entrer dans Médine.
Une fois que les idolâtres eurent installé leur quartier général aux abords de la
ville, le Noble Prophète r, après avoir désigné comme fondé de pouvoir à Médine
Abdullah ibn Umm Maqtum t, se rendit rapidement dans les tranchées, accompa-
gné par trois mille Compagnons y. Laissant le Mont Sal derrière lui, le Noble Pro-
phète r installa son camp à la périphérie du mont en question, après avoir ordonné
au préalable aux femmes et aux enfants de demeurer dans la partie inférieure de la
ville et de se placer dans des lieux fortifiés. (Ibn Hishâm, III, 235).
Les enfants âgés de moins de quinze ans se rendirent dans des fortins proches
de leurs familles, tandis qu’Ibn Omar, Zayd ibn Thâbit et Bara ibn Azib y, âgés de
quinze ans à l’époque, furent autorisés à rester. (Waqidi, II, 453).
Les Juifs de Banû Qurayza, quant à eux, se révoltèrent officiellement dans la
ville, violant pour la seconde fois le pacte qu’ils avaient conclu avec le Noble Pro-
phète r. Ce fut là leur seconde trahison qui contraignit les Musulmans à subire un
terrible feu croisé. Les Juifs firent parvenir ce message à Abou Soufyan : « Tenez bon,
nous allons frapper les Musulmans par derrière et les anéantir!» (Abdurrazzaq, V, 368).
Le Prophète d’Allah r fut profondément offensé par la trahison des Juifs mais
malgré cela, il fit montre d’une confiance inébranlable dans le Tout-Puissant mur-
murant, même en ces temps difficiles :
“Hasbonallah wa ni’mal wakil” – Allah me suffit, Il est le Meilleur Garant” (Waq-
idi, II, 457 ; Ibn Sa’d, II, 67).
La Cinquième Année de L’hégire 537

Le Noble Prophète r demanda ensuite à un volontaire de se rendre auprès des


Banû Qurayza pour vérifier si ce qu’il avait entendu était fondé.
« Moi j’irai » dit alors Zubayr ibn Awwam t. Et il se mit en chemin.
Une fois la situation devenue vraiment précaire, le Prophète d’Allah r envoya
plusieurs fois Zubayr ibn Awwam t pour observer si les Juifs s’étaient rassemblés en
vue d’agir collectivement.
Il r exprima ainsi sa satisfaction de Zubayr pour les précieux services rendus :
“Chaque prophète a un messager et mon messager est Zubayr.” (Ahmad, III, 314).
Puis le Noble Prophète r conseilla l’émissaire qu’il dépêcha aux Banû Qurayza:
« Vérifie si les rumeurs qui circulent sont fondées. Si c’est le cas, informe-moi de façon
indirecte. Ne me le dis pas directement pour ne pas jeter l’effroi dans le cœur des gens
et leur ôter tout espoir. Mais s’ils se conforment toujours à notre pacte, alors tu peux
l’annoncer ouvertement !”
L’émissaire finit par trouver les Banû Qurayza en état de mutinerie bien plus
tumultueux que les Musulmans ne l’avaient entendu dire. (Ibn Hishâm, III, 237).
Le Noble Prophète r entreprit en conséquence de déployer deux cents Com-
pagnons y placés sous le commandement de Salamah ibn Aslam t et trois cents
autres sous celui de Zayd t à Médine, et ce à titre de mesure préventive contre une
éventuelle attaque des Juifs contre la ville. Leur fonction fut de monter la garde dans
la ville et de patrouiller dans les rues au cri de “Allah’u Akbar”. (Ibn Sa’d, II, 67).
Chaque le matin qui venait sans un raid des Juifs des Bani Kurayza aidait les
Croyants à reprendre leur souffle. Abou Bakr t déclarera plus tard :
« Notre crainte pour nos femmes et nos enfants, fut la perspective d’un raid des
Banû Qurayza sur Médine. Cette crainte était supérieure à celle de Quraysh et de
Ghafatan. J’étais monté à maintes reprises au sommet du Mont Sal pour observer les
demeures de Médine et en les voyant dans la paix et la tranquillité, je ne pus m’empê-
cher de remercier et de louer Allah. »
Umm Salamah c eut des mots similaires :
« J’étais présente aux côtés du Messager d’Allah r lors de nombreuses batailles
ardentes et redoutables telles que Muraysi, Khaybar, la Conquête de La Mecque et
Hunayn. Aucune de ces batailles ne fut plus gênante et alarmante pour le Messager
d’Allah r que celle de Khandâq. Jamais nous ne nous sentîmes rassurés quand les
Banû Qurayza se mirent à attaquer les femmes et les enfants. » (Waqidi, II, 467).
Pendant ce temps, les idolâtres qui se trouvaient de l’autre côté des tranchées
tentaient fréquemment de les traverser, ce qui avait entraîné des affrontements
jusqu’à tard dans la nuit. La tente où demeurait le Noble Prophète r était même
devenue la cible d’une bonne partie des flèches ennemies.
538 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un jour, les idolâtres menèrent une attaque acharnée contre le campement du


Noble Prophète r. À cause des assauts qui s’ensuivirent, le Prophète d’Allah r et
les Compagnons se trouvèrent dans l’incapacité d’accomplir leurs prières rituelles
du dhor et de l’asr. À la tombée de la nuit, quand les idolâtres se furent enfin retirés,
le Noble Messager r demanda à Bilal de procéder à l’adhan. Avec un seul iqama
récité pour chaque prière, le Noble Prophète r conduisit lui-même les prières qu’ils
n’avaient pas pu réaliser à temps.155
Profondément bouleversé par cette situation, le Noble Prophète r déclara à
l’attention des idolâtres – ceux-là même qui l’avaient empêché d’accomplir la prière
qu’il nommait lui-même “lumière de mes yeux” :
« Qu’Allah remplisse de feu leurs maisons, leurs ventres, et leurs tombeaux en
punition pour nous avoir détournés des devoirs de notre culte !»(Al Boukhari Maghazi 29;
Ibn Sa’d II 68-69; Ibn Kathir al-Bidayah IV 112).

Exploits courageux à Khandâq


Tous les Croyants présents, jeunes et moins jeunes, firent tout ce qui était en
leur pouvoir pendant la bataille, notamment le fait de surveiller les parties les plus
étroites des tranchées. (Waqidi, II, 463-464).
Umm Salamah c raconte :
« J’étais à Khandâq près du Messager d’Allah r et toujours présente là où il se
trouvait. Il se tenait en personne près des tranchées où il y régnait un froid glacial. Je
l’observais. Il venait de commencer sa prière. Puis nous partîmes.

155 Cet évènement met en valeur la salât qada et en apporte la preuve, c’est-à-dire qu’on peut accomplir
ultérieurement les prières non effectuées à temps.
La Cinquième Année de L’hégire 539

Ayant un certain temps observé les tranchées, il déclara :


« Il me semble que les cavaliers idolâtres tentent de se frayer un chemin dans les
tranchées. Qui va les stopper ? »
Puis il appela : «‘Abbâd ibn Bishr !»
Abbâd ibn Bishr t répondit : « Oui, ô Messager d’Allah !»
Le Messager d’Allah r lui demanda : « Y a-t-il quelqu’un avec toi ? »
Abbâd ibn Bishr t répondit :
« Oui j’ai quelques Compagnons avec moi et nous attendons près de ta tente. »
Alors le Messager d’Allah r lui dit:
« Avancez donc en direction des tranchées. Les cavaliers que l’on aperçoit de loin
sont sans doute nos ennemis. Ils viennent pour vous et souhaitent vous prendre au
dépourvu par un raid soudain avec le désir d’en tuer un maximum parmi vous ! »
Le Noble Prophète r fit alors l’invocation suivante :
« Ô mon Seigneur ! Éloigne de nous leur mal ! Préserve-nous d’eux et permets-
nous de les vaincre ! Toi Seul est capable de nous accorder la victoire ! »
‘Abbâd ibn Bishr t et ses camarades se mirent donc à arpenter les tranchées
dont la partie la plus étroite était à ce moment précis occupée par Abû Sufyan qui
tentait justement de la traverser accompagné d’une unité de cavalerie. Le petit groupe
de Compagnons arriva juste à temps pour tirer suffisamment de flèches et jeter assez
de pierres pour forcer les idolâtres à se retirer. (Waqidi, II, 464).
Safiyya c la tante du Noble Prophète r se tenait dans la grande maison de Has-
san ibn Thâbit t, connue sous le nom de Fari, avec d’autres femmes et enfants. À
un moment donné, un groupe de dix Juifs fit son apparition et submergea de flèches
la maison. Ces Juifs voulaient y pénétrer de force. L’un d’entre eux en particulier
rôda discrètement autour de la maison dans l’espoir de trouver un passage. Le Noble
Prophète r pendant ce temps luttait farouchement contre les idolâtres à l’intérieur
même des tranchées.
Sans possibilité de secours, donc sans autre choix que de faire face à la situation,
Saffiya c eut l’idée de serrer étroitement un linge autour de sa tête et, un bâton à la
main, descendit l’escalier de la maison. Ouvrant doucement la porte d’entrée, elle se
glissa furtivement derrière le Juif qui rôdait et le frappa très fort sur la tête, ce qui eut
pour conséquence de le tuer net.
Quelques instants plus tard, voyant leur ami étendu à terre dans l’obscurité, les
autres Juifs s’alarmèrent et se dispersèrent en disant :
« Est-ce qu’on ne nous avait pas affirmé que les femmes n’étaient pas protégées
par des gardes? ». (Haythami, VI, 133-134 ; Waqidi, II, 462).
540 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

‘Aïcha c décrit ainsi ses propres observations relatives à l’enthousiasme des


Compagnons t pour le jihad :
« J’observai les combattants pendant la Bataille de Khandâq et j’entendis der-
rière moi une voix. Je me retournai et j’aperçus Sa’d ibn Mu’adh et son neveu Haritha
ibn Aws y. Je m’assis sur place. Sa’d portait une armure autour de sa poitrine et ses
bras sortaient des flancs. Il récitait un poème qui encourageait le jihad et disait à quel
point la mort était belle quand elle survenait. Sa mère lui criait: “Cours mon cher !
rattrape le Messager d’Allah, car tu es en retard!”
“J’aurais aimé voir l’armure de Sa’d recouvrir tout son corps jusqu’au bout des
doigts”, dis-je à la mère de Sa’d. Ma crainte serait que des flèches atteignent ainsi ses
bras exposés.”
“Allah réalisera Sa volonté”, répondit-elle.
Et Sa’d fut blessé à mort ce jour.(Ahmad VI 141 ; Ibn Hishâm III 244)
Réalisant que sa blessure était fatale, Sa’d t fit cette invocation:
“ Ô mon Seigneur ! si Ton intention est de faire prolonger un peu la guerre contre
Quraysh, garde-moi encore en vie pour elle, car il n’y a pas de peuple que j’aime com-
battre plus que celui qui a fait du tort à Ton Messager, l’a démenti et chassé. Mais si
Ton intention est de mettre un terme à cette guerre entre eux et nous, alors fais de ce
qui m’a atteint aujourd’hui un chemin au martyre, et ne me recouvre pas jusqu’à ce
que j’aie voie de mes yeux la punition des Banû Qurayza.” (Waqidi, II, 525 ; Ibn Sa’d, III, 423).
Dès que Sa’d acheva son doua ses saignements cessèrent. (At Tirmidhi Siyar, 29/1582;
Ahmad, III, 350).

Le Noble Prophète r lui fit ensuite ériger une tente dans la mosquée afin de ve-
nir lui rendre fréquemment visite et pour qu’il puisse bénéficier de soins plus étroits.
(Al Boukhari, Maghazi, 30).

Une seule poignée d’idolâtres put traverser les larges tranchées. L’un d’entre
eux se nommait Amr ibn Abd, un guerrier réputé dans toute l’Arabie.
L’arrogant défi qu’il avait lancé ne fut relevé que par ‘Alî t qui donna le meil-
leur de lui-même.
Les Croyants étaient quant à eux dans une situation si délicate et difficile qu’ils
désespéraient de drecevoir une aide divine.
Le Coran décrit ainsi leur état :
La Cinquième Année de L’hégire 541

ƈ ƈ ģƆ ęƆ øƆÈīĨƈ IJħġƇ Ĝƈ ijĘƆ īĨħ ƈ Ƈ ÊÓ


Ôij Ƈ ĥƇ ĝƇ ĤŽ ÒÛĕƆ ĥƆ ÖƆ IJ
Ɔ òÓ Ƈ āƆ ÖŽ ƆŶÒ Ž ÛŽ ĔƆ Òô Ɔ ðŽ Ìƈ IJ
Ɔ ħŽ ġĭ Ƈ Ĩ Ž Ž Ɔ Ž Ž ž ĠIJ Ƈ äƆ ðŽ Ìƈ
Òïĺƃ ïƈ üƆ źÒƃ õƆ ĤŽ ƈôÒijƇĤ ƈõĤŽ ôƇ IJ Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĹƆ ĥƈ ÝƇ ÖÒ ƈ ƈ Ʃ ÖĪij ƈ ĭƆ éƆ ĤŽ Ò
Ɔ Īij Ž ğƆ ĤÓĭƆ İÓ Ƈ ĬƆ ijƇĭƫčĤÒųÓƈ Ɔ ĭƫ ƇčÜƆ IJƆ óƆ äÓ
ÒòIJ ƈ ñƈ Ĥƪ ÒIJĪij ƈ Ƈ ĝƇ ĺƆ ðŽ Ìƈ IJƆ
ƃ óƇ ĔƇ źƈƪ ÌįƇ ƇĤijøƇ òƆ IJ Ɔ ƇųÒÓ
Ʃ ĬƆ ïƆ ĐƆ IJÓ Ɔ Ĩ ƪ ĂƄ óƆ Ĩħ ƪ ƈıƈÖijĥƇ ĜƇ ĹĘīĺ Ɔ Ɔ Ɔ ĝƇ ĘÓĭƆ ĩƇ ĤŽ ÒĢij
ħıƇ ĭŽ Ĩƈ ěĺ ƈóĘĪðƈ ÉŽ ÝùĺIJÒijđäƈ òÓĘħġĤĦÓĝĨźÔ ƈóáĺģİƆÈÓĺħıĭĨ ƈ ÙęÐÓƈ ĈÛĤƆ ÓĜƆ ðŽ Ìƈ IJ
Ƈ ž Ƅ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ž Ɔ Ž Ƈ Ž ž Ƅ Ɔ ƪ Ɔ
ÛŽ ĥƆ ìƈ îƇ ijŽ ĤƆ IJÒ
ƈ
Ɔ òÒƃ óƆ Ęźƈƪ ÌĪIJ Ɔ ïĺ Ƈ ƈóƇĺĪƈÌØƅ òƆ ijŽ đƈƆ ÖĹƆ İÓ ƈ ĨIJƄØòijĐÓĭƆ Üij
Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ĻƇ ÖƇ Īƈƪ ÌĪij Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ Ĺƈƪ ×ĭĤÒ ƪ
ÒijƇĬÓĠ Ɔ ïŽ ĝƆ ĤƆ IJÒ ƈ ƈ ƈ ħƇàÓİƆ ƈòÓĉƆ ĜŽ ƆÈīĨħ ƈ
Ɔ óĻƃ ùĺƆ źƈƪ ÌÓıƈƆ ÖÒijƇá×ƪ ĥƆ ÜÓ Ɔ ĨƆ IJÓ Ɔ İƆ ijŽ ÜƆ ŴƆ ÙƆ ĭƆ ÝŽ ęĤŽ ÒÒijĥƇ Ñø Ƈ ƪ Ž ž ƈıĻŽ ĥƆ ĐƆ
ƈ ƪ ïƇ ıĐĪÓ ƈ ųÒÒIJ
ħġƇ đƆ ęƆ ĭĺī
Ƈ Ɔ Ĥƪ ģĜƇ źIJ ƃ ËƇ ùŽ Ĩ Ɔ ųÒ Ž Ɔ Ɔ ĠƆ IJ Ɔ òÓƆ ÖƆ îŽ ƆŶÒ
Ž Īijƫ Ɔ ĤijƆ ƇĺźƆ ģƇ ׎ ĜƆ īĨ Ɔ ƪ ïƇ İÓ Ɔ ĐƆ
ŻĻƃ ĥƈ ĜƆ źƈƪ ÌĪij Ɔ đƇ Ýƪ ĩƆ ÜƇ źÒƪ ðƃ Ìƈ IJ Ɔ ƈ
Ɔ ģƈ ÝŽ ĝƆ ĤŽ ÒIJƈ ÈÚijŽ ĩƆ ĤŽ ÒīƆ Ĩħ
ƈ ƈ
ž ÜƇ òŽ óƆ ĘƆ ĪƈÌòÒƇ óƆ ęĤŽ Ò
« Quand ils vous vinrent d’en haut et d’en bas [de toutes parts], et que les
regards étaient troublés, et les cœurs remontaient aux gorges, et vous faisiez sur
Allah toutes sortes de suppositions... Les croyants furent alors éprouvés et se-
coués d’une dure secousse. Et quand les hypocrites et ceux qui ont la maladie [le
doute] au cœur disaient : «Allah et Son messager ne nous ont promis que trom-
perie». De même, un groupe d’entre eux dit : «Gens de Yathrib ! Ne demeurez pas
ici. Retournez [chez vous]». Un groupe d’entre eux demande au Prophète la per-
mission de partir en disant : «Nos demeures sont sans protection», alors qu’elles
ne l’étaient pas : ils ne voulaient que s’enfuir. Et si une percée avait été faite sur
eux par les flancs de la ville et qu’ensuite on leur avait demandé de renier leur
foi, ils auraient accepté certes, et n’auraient guère tardé, tandis qu’auparavant ils
avaient pris l’engagement envers Allah qu’ils ne tourneraient pas le dos. Et il sera
demandé compte de tout engagement vis-à-vis d’Allah. Dis : «Jamais la fuite ne
vous sera utile si c’est la mort (sans combat) ou le meurtre (dans le combat) que
vous fuyez ; dans ce cas, vous ne jouirez (de la vie) que peu (de temps)». » (Al-Azhâb,
33 : 10-16).

įƇ ƇĤijøƇ òƆ IJ
Ɔ ƇųÒÓ
ƪ ĬƆ ïƆ ĐƆ IJÓ
Ɔ ĨÒ
Ɔ ñƆ İÒij Ɔ õƆ èŽ ƆŶÒ
Ɔ ƇĤÓĜƆ ÔÒ Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĴƆÈòÓ
Ž Īij Ɔ ĩƪ ĤƆ IJƆ
ÓĩĻ ƈ
ƃ ĥùŽ ÜƆ IJÓ
Ɔ Ĭƃ Óĩĺƈ
Ɔ Ìźƈƪ ÌħŽ İƇ îÒƆ ôÓ
Ɔ ĨƆ IJ
Ɔ įƇ ƇĤijøƇ òƆ IJ
Ɔ ƇųÒ
ƪ ĚƆ ïƆ ĀƆ IJƆ
« Et quand les croyants virent les coalisés, ils dirent : «Voilà ce qu’Allah et
Son messager nous avaient promis ; et Allah et Son messager disaient la vérité».
Et cela ne fit que croître leur foi et leur soumission. » (Al-Azhâb, 33 : 22).
542 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La guerre est une duperie


Le Noble Prophète r avait donné ce conseil : “la guerre est une duperie”. (Al
Boukhari, Jihad, 157 ; Muslim, Jihad, 17). Aussi pendant que les Croyants tenaient bon de
toutes leurs forces, Nuaym, un notable de la tribu Ghafatan prit au mot le conseil et,
cachant aux idolâtres sa conversion à l’Islam, réussit à mettre ces derniers les tribus
Ghafatan et Banû Qurayza mutuellement en mauvais termes. Une vague d’hésitation
s’empara alors de la coalition formée par les idolâtres après qu’ils eurent assiégé
Médine. Chaque tribu se méfiait soudainement de l’autre. Finalement, les Juifs
cédèrent aux tactiques persuasives de Nuaym t et se retirèrent dans leurs fortins.
À présent, seuls les idolâtres demeuraient sur le terrain et attendaient de l’autre côté
des tranchées. Dans le même temps, les Croyants étaient en proie à une situation
désastreuse. C’est alors qu’au moment où le Noble Prophète r et les Compagnons
subissaient le siège des idolâtres et quand, pour ainsi dire, “leurs cœurs montaient
aux gorges”, ce verset fut révélé :

ƈ ÒŽ ijĥƆ ì ƈ ƈ Ž ĩĤƆ IJÙƆ ĭåĤŽ ÒÒŽ ijĥƇ ìƇ ïŽ ÜĪ


Ɔ ƆÈħŽ ÝƇ ׎ ùƈ è

 Ĩ Ž Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒģƇ áƆ Ĩħ
ƪ ġƇ ÜÉĺÓ Ɔ ƪ Ɔ ƪƆ Ɔ ĦŽ ƆÈ
Ģij
Ƈ øƇ óĤÒĢij Ɔ ĝƇ ĺĵ Ž ƈ
ƪ Ɔ Ýƪ è Ɔ óƪ ąĤÒ
Ɔ ÒŽ ijƇĤ ƈõĤŽ ôƇ IJÅÒ ƪ IJÅÓ
Ɔ øƆ É×Ɔ ĤŽ ÒħƇ ıƇ ÝŽ ùƪ Ĩħ
ƪ ġƇ ĥ׎ ĜƆ
Õĺ ƈ Ʃ óāĬƆ Īƈƪ ÌźƆÈųÒ ƈ Ʃ óāĬƆ ĵÝĨįđĨÒŽ ijĭĨÆīĺñƈ Ĥƪ ÒIJ
Ƅ ƈóĜƆ ųÒ Ɔ Ž Ƈ Ž ƆƆ ƇƆ Ɔ ƇƆ Ɔ Ɔ
« Pensez-vous entrer au Paradis alors que vous n’avez pas encore subi des
épreuves semblables à celles que subirent ceux qui vécurent avant vous ? Misère
et maladie les avaient touchés ; et ils furent secoués jusqu’à ce que le Messager,
et avec lui, ceux qui avaient cru, se fussent écriés : «Quand viendra le secours
d’Allah?» – Quoi ! Le secours d’Allah est sûrement proche. » (Al-Baqara, 2 : 214; Voir,
Tabari, Tafsir, II, 464).

Puis, les mains levées au ciel le Noble Prophète r fit cette invocation (doua):
« Ô Allah ! Toi qui a envoyé le Glorieux Coran ! Toi qui se hâte de considérer
l’ennemi ! Disperse ces tribus arabes qui se sont rassemblées avant Médine ! Ô mon
Seigneur! Brise leur unité et ébranle leur résolution (pour qu’ils n’aient aucune possi-
bilité de se maintenir) ! »
Le doua du Noble Messager r à peine terminé le secours divin se manifesta et
un sourire de joie brilla sur son visage. Une tempête rude et brûlante traversa les
rangs ennemis, la tempête fut si déchaînée qu’elle laissa des traces sur son passage et
fit mordre aux idolâtres la poussière de la vallée de Médine, souffla violemment leurs
tentes, retournant les pots de nourriture et estompant leurs feux. Assaillis, leurs cha-
meaux et leurs chevaux se heurtèrent férocement et mutuellement. (Voir, Ibn Sa’d, II, 71).
La Cinquième Année de L’hégire 543

Complètement submergés par la force du vent, les idolâtres n’eurent pas d’autre
choix que de subir la désolation.
Même Abû Sufyan qui était sans doute le plus impatient d’entre eux n’eut pas
d’autre alternative que de dire à ses combattants : “Je rentre à la vue de tout ceci, et
vous devriez faire de même !”
Puis il grimpa sur son chameau et rentra à La Mecque sans jeter un seul coup
d’œil en arrière. (Voir, Ibn Hishâm, III, 251).
Allah I fit donc parvenir Son secours aux Croyants, comme cela est stipulé
dans le Coran :

ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ƆÉĘƆ îij ƈ Ʃ ÙƆ ĩđĬÒIJ


ƈ ƈ
Ƅ Ƈĭä
Ƈ ħŽ ġƇ ÜÅÓ
Ž äƆ ðŽ Ìƈ ħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ ųÒ Ɔ Ž óƇ ĠƇ ðŽ ÒÒijƇĭĨÆ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ɔ īĺ
ÒóĻāƈ ÖƆ ĪijƆ ĥƇ ĩƆ đŽ ÜÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖƇųÒ
Ʃ ĪÓ Ɔ ĠƆ IJÓ Ɔ İƆ IJŽ óƆ Ü
Ɔ ħŽ Ĥƪ Òîij
ƃ ƇĭäƇ IJÓ
Ɔ éĺƃ ƈòħŽ ƈıĻŽ ĥƆ ĐƆ
ƃ
« Ô vous qui croyez ! Rappelez-vous le bienfait d’Allah sur vous, quand des
troupes vous sont venues et que Nous avons envoyé contre elles un vent et des
troupes que vous n’avez pas vues. Allah demeure Clairvoyant sur ce que vous
faites. » (Al-Azhâb, 33 : 9).


 ęƆ ĠƆ IJÒ Ɔ ƇĤÓĭƆ ĺƆ ħŽ ĤƆ ħŽ ƈıčƈ ĻŽ ĕƈƆ ÖÒIJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ óƃ ĻŽ ìÒij Ɔ īĺ ƈ Ʃ îòIJ
Ɔ ñĤƪ ÒƇųÒ ƪ Ɔ Ɔ
Òõĺƃ ƈõĐÓ ƈ ƈƈ
Ɔ ĺƬ ƈijĜƆ ƇųÒ
Ʃ ĪÓ Ɔ ĠƆ IJƆ ĢÓƆ ÝƆ ĝĤŽ ÒīĻƆ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒƇųÒ
Ʃ
« Et Allah a renvoyé, avec leur rage, les infidèles sans qu’ils n’aient obtenu
aucun bien, et Allah a épargné aux croyants le combat. Allah est Fort et Puissant.»
(Al-Azhâb, 33 : 25).

Ayant pris lamentablement la fuite dans un état de confusion totale, les idolâtres
abandonnèrent de nombreux chevaux, chameaux, équipements militaires, denrées
alimentaires et effets personnels, ce qui eut tôt fait de représenter pour les Croyants
une réelle bénédiction tant ils souffraient de la faim.
Après cette formidable victoire, le Noble Prophète r dit à ses Compagnons :
« C’est maintenant à votre tour ! Quraysh n’est plus désormais en mesure de vous
assaillir ! » (Al Boukhari, Maghazi, 29).
À partir de ce jour, les Croyants y ne furent plus sur la défensive, car la fierté et
le pouvoir des idolâtres avaient subi un dommage irréparable. Le cœur des Musul-
mans résonnait maintenant aux paroles prometteuses du Noble Prophète r :
« Désormais ce sera nous qui marcherons sur eux ! »
544 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La marche sur Banû Qurayza (23 Dhul Qadah 5 – 15 Avril 627)


La Bataille de Khandâq avait été gagnée. Forcés de ravaler leur fierté, les ido-
lâtres repartirent discrètement à La Mecque. Le Noble Prophète r rentra satisfait
chez lui. à peine avait-il enlevé, comme d’habitude après un combat, son armure et
avoir pris un bain que l’Ange Gabriel u lui apparut ensuite et lui demanda :
« Aurais-tu déposé tes armes ? Nous, nous ne les avons pas encore déposées ! »
Le Noble Prophète r lui répondit:
« Ça veut dire qu’un autre combat se prépare ? Où est-il ?
Gabriel u pointa alors les Banû Qurayza qui avaient trahi les Croyants à Khan-
dâq et dit : «Là-bas !» (Al Boukhari, Maghazi, 30).
Comme les autres tribus juives avant elles, les Banû Qurayza n’avaient pas res-
pecté le pacte qu’ils avaient conclu avec le Messager d’Allah r et ils avaient trahi les
Musulmans dans les plus délicats moments.
En effet, le pacte conclu avec les Croyants obligeait la tribu juive à fournir son
assistance pour défendre Médine contre tout assaillant. Non seulement les Banû
Qurayza avaient reculé devant l’ennemi mais en plus ils n’avaient pas ménagé leurs
efforts pour ourdir à chaque occasion qui se présentait des complots perfides, no-
nobstant leur perte, à l’encontre des Croyants.
Dès qu’il obtint l’assentiment divin, le Prophète r rassembla les Musulmans
pour leur annonçer qu’ils devaient marcher sur les Banû Qurayza. Il leur ordonna :
« Que personne ne fasse la prière de la asr avant d’atteindre les fortins des Banû
Qurayza ! » (Al Boukhari, Maghazi, 30).
Les Musulmans se mirent ainsi en route avant que les Juifs puissent avoir la
mainmise sur la situation.
Lorsque les Juifs virent le petit contingent d’hommes envoyés en éclaireur sous
le commandement d’Ali t, au lieu de regretter violemment ce qu’ils avaient fait,
aggravèrent leur cas en se mettant à médire du Messager d’Allah r. (Voir, Waqidi, II, 499).
Mais ils devienrent désemparés lorsqu’ils aperçurent l’armée musulmane com-
posée de trois mille hommes qui se présentait devant eux. La présence majestueuse
du Noble Prophète r les amena à renoncer à leurs précédentes offenses à son égard.
Usayd Ibn Khudayr t tonna :
“Ennemis d’Allah ! Nous ne lèverons pas le siège de vos fortifications avant que
vous ne mouriez de faim. Vous êtes comme des renards piégés dans leurs tanières !”
Terrifiés, les Juifs crièrent avec insistance depuis leurs fortins :
“Nous sommes vos alliés, Ibn Khudayr…. Les alliés des Aws, pas des Khazraj !”
La Cinquième Année de L’hégire 545

Ibn Khudayr t annonça d’un ton ferme :


« Le pacte que nous avons conclu avec vous est rompu. » (Waqidi, II, 499).
Mais avant de commencer les hostilités, le Noble Prophète r s’approcha des
murs de leurs fortins et les invita à l’Islam, ce qu’ils refusèrent. (Abdurrazzaq, V, 216, 370).
Le siège continua et le chef des Juifs Ka’b ibn Asad très affligé dit:
« Eh communauté des Juifs ! vous voyez le désastre qui s’abat sur nos têtes !
Alors je vais vous faire trois propositions ! Faites celle que vous accepterez !»
Ils lui demandèrent : «Quelles sont elles ?»
Il répondit: « Premièrement prêtons allégeance à cet homme et acceptons son
Apostolat prophétique. Par Allah il a été révélé avec certitude que c’est un prophète
qui vous a été envoyé et que cet homme a toutes les caractéristiques de la prophétie
telles qu’elles sont écrites dans notre livre. Déclarons croire en lui et nous serons
amnistiés! »
Les Juifs protestèrent :
«Nous ne nous écarterons jamais de la Torah et nous n’adopterons aucune autre
Écriture à sa place !»
Sa première proposition étant tombée dans de sourdes oreilles, Ka’b proposa
alors de tuer leurs propres femmes et enfants pour ensuite combattre les Musul-
mans ou bien de les attaquer à un moment inattendu, le samedi soir, en espérant les
prendre par surprise.
Indécis face à cette proposition car Allah I avait distillé la peur dans leurs
cœurs, les Banû Qurayza n’acceptèrent aucune des propositions. (Ibn Hishâm, III, 254).
Trois jeunes hommes, Salabah, Usayd et Asa’d y reconnurent que le Noble
Prophète r comme ayant les attributs que les érudits juifs avaient décrits depuis
longtemps et portait les caractéristiques inhérentes au Prophète de l’Heure Ultime.
Ils s’échappèrent de leurs fortins dans l’obscurité de la nuit et rejoignirent le Noble
Prophète r. (Ibn Hishâm, III, 256).
Les Juifs durent finalement se rendre sans conditions. Comme ils étaient sous la
tutelle des Aws, et conformément à la demande des Juifs, le Noble Prophète r dési-
gna Sa’d comme arbitre qui, bien qu’il eût été grièvement blessé à Khandâq, écouta
avec empressement l’appel du Noble Prophète r.
Après tout, n’avait-il pas invoqué le Tout-Puissant suite à ses blessures en Lui-
demandant de “ne pas rendre le dernier soupir avant que les comptes ne soient défi-
nitivement réglés avec Banû Qurayza ?”
546 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Encore une fois, conformément aux demandes juives, Sa’d parvint à prendre
une décision en accord avec la Loi de Mûsâ u.156
Le Noble Prophète r confirma sa décision en disant :
« Par Allah Sa’d tu as prononcé à leur encontre le jugement qu’Allah a arrêté par-
dessus les sept cieux ! » (Al Boukhari Maghazi 30 ; Ibn Sa’d, III, 426).
La sincère invocation de Sa’d t fut acceptée et après qu’il eut rendu son juge-
ment concernant les Juifs des Banû Qurayza qui avaient poignardé les Croyants dans
le dos pendant la bataille, sa blessure se rouvrit.
Peu de temps après, l’admirable Compagnon, véritable dévot livré à la cause du
Messager d’Allah r, rendit son dernier soupir de martyr et atteignit la miséricorde
éternelle. (Voir, Ibn Hishâm, III, 271).
Le Noble Prophète r fit ainsi son éloge : « Le Trône d’Ar-Rahmân a frémi à la
mort de Sa’d ibn Mu’adh. » (Al Boukhari, Manaqib’ul-Ansar 12; Muslim, Fadail’us-Sahabah, 125).
Bien que Sa’d t fut un homme corpulent les hommes qui portèrent son corps
lors des funérailles eurent l’impression qu’il était léger.
Le Saint Prophète r expliqua la sagesse de cet évènement en s’exclamant:
« Les anges le portent ! Par Allah dans la Main Duquel ma vie réside, les anges se
réjouissent concernant l’âme de Sa’d ! » (Ibn Hishâm, III, 271 ; At-Tirmidhi, Manaqib, 50/3848).
Après avoir dirigé la prière mortuaire et enterré Sa’d t, le Noble Prophète r
continuait à réciter le tasbihat lorsque les Compagnons le rejoignirent.
Puis le Prophète d’Allah r prononça un takbir. Les compagnons prononcèrent
eux aussi un takbir puis interrogèrent le Messager d’Allah r:
« Pourquoi as-tu prononcé des tasbih puis ensuite un seul takbir? »
Le Noble Prophète r répondit:
— Parce que la tombe s’est rétrécie sur votre compagnon. Il a été étreint puis
relâché. (Ahmad III 360).
Puis il continua:
« S’il n’y avait qu’une seule personne ait pu être immunisée contre l’épreuve de la
tombe ça aurait sûrement été Sa’d, mais la tombe l’a d’abord pressé jusqu’à ce qu’Allah
lui donne de l’ampleur. »(Tabarani, Mujam’ul-Kabir, X, 334).
156 Selon l’Ancien Testament, un tel crime est puni par l’exécution de tous les hommes adultes,
l’appropriation de leurs biens et la capture de toutes les femmes et de tous les enfants. (Voir, Ancien
Testament, Deutéronome, 20 /10-15).
La Cinquième Année de L’hégire 547

D’après Anas t le Noble Prophète r s’était vu offrir en cadeau un manteau or-


nementé dont la beauté et la texture délicieusement douce avaient plu au plus grand
nombre mais il dit:
« Par Celui qui détient mon âme dans Sa main puissante, s’exclama le Prophète
de Miséricorde, les mouchoirs de Sa’d au Paradis sont bien plus beaux et dignes que
ceci ! » (Al Boukhari, Bad’ul-Khalq, 8 ; Muslim, Fadail, 126).
Le Saint Coran décrit ainsi le triomphe obtenu à la bataille de Khandâq, et ce
grâce au secours d’Allah, Gloire à Lui :

ƈ ĖƆ ñƆ ĜƆ IJħ ƈıĻĀÓ ƈ ĻĀīĨ ƈ ÔÓ


ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ Òģƈ İŽ ƆÈīŽ Ĩħ
ƈ ƈ
ħ ƈıƈÖijĥƇ ĜƇ ĹĘ
Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ž İIJ Ƈ óƇ İÓ
Ɔ Č Ɔ īĺƆ ñĤƪ ÒĢƆ õĬƆ ƆÈIJƆ
ħıƇ ĤƆ ÒijƆ ĨŽ ƆÈIJ
Ž Ɔ ħŽ İƇ òÓ
ƈ ħıĄƆ òƆÈħġƇ àƆ òIJƆÈIJÓĝƃ ĺ ƈóĘƆ ĪIJ
Ɔ ĺƆ îIJ
Ɔ ŽƇ Ž Ž Ɔ Ž Ɔ Ɔ óƇ øƈ ÉŽ ÜƆ IJ
Ɔ Īij
Ɔ ĥƇ ÝƇ ĝŽ ÜÓ
Ɔ ĝƃ ĺ ƈóĘƆ ÕƆ ĐŽ óĤÒ
ƫ
Òóĺïƈ ĜƆ Åƅ Ĺü ģĠĵĥĐųÒĪÓĠIJÓİIJËĉÜħĤÓĄòƆÈIJ
ƃ Ž Ɔ ƈž Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ž ƪ ƃ Ž Ɔ
« Et Il a fait descendre de leurs forteresses ceux des gens du Livre qui les
avaient soutenus [les coalisés], et Il a jeté l’effroi dans leurs cœurs ; un groupe
d’entre eux vous tuiez, et un groupe vous faisiez prisonniers. Et Il vous a fait hé-
riter leur terre, leurs demeures, leurs biens, et aussi une terre que vous n’aviez
point foulée. Et Allah est Omnipotent. » (Al-Azhâb, 33: 26-27).
548

LA SIXIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

La clé de la victoire : Le traité d’Al-Hudaybiya et l’émouvant chemin du


retour à la Ka’ba
Après un rêve qu’il avait fait, le Noble Prophète r invita les Croyants à effectuer
un pèlerinage à la Ka’ba. (Waqidi, II, 572).
Le premier lundi du mois de Dhul Qadah de l’an six de l’Hégire le Noble
Messager r partit donc en direction de La Mecque avec les Compagnons qui répon-
dirent à l’invitation et qui étaient au nombre de mille quatre cents .(Ibn Sa’d, II, 95).157
N’étant pas en situation de guerre, ils ne prirent pour armes que des épées pour
se protéger. Ils avaient également en leur possession environ soixante-dix chameaux
à sacrifier. (Ibn Sa’d, II, 95).
Omar t demanda au Prophète d’Allah r s’il n’était pas préoccupé par une
possible attaque d’Abû Sufyan et de ses sbires, suggérant ainsi qu’il pouvait être
préférable pour eux de porter plus d’armes que ce qu’ils avaient prévu.
« Je n’en suis pas si sûr, répondit le Noble Prophète r, je ne désire porter aucune
arme parce que mon intention est d’accomplir l’omra. » (Waqidi, II, 573).
Parvenu au miqat ( point à partir duquel le pèlerin doit revêtir l’ihram) de Dhu’l
Hulayfa le Noble Prophète revêtit l’ihram et émit l’intention d’accomplir l’omra.
Les Compagnons y le suivirent en clamant la talbiya à haute voix, reflétant ainsi
l’ardent désir de s’unir à la Ka’ba aussitôt que possible. Pas à pas, le ravissement spi-
rituel et l’excitation rapprochaient les Croyants plus près encore de leur destination.
Mais parce qu’une angoisse indicible s’était emparée d’eux les idolâtres de
Quraysh dès qu’ils furent informés de l’approche des Musulmans décidèrent lors
d’une réunion d’urgence de ne pas laisser passer les Musulmans, quel qu’en soit le
prix. Une unité de deux cents hommes vite mobilisés fut placée sous les ordres de
Khâlid ibn Wâlid et Iqrima quitta La Mecque pour aller à la rencontre des Croyants.
Le Noble Prophète r et les Croyants étaient maintenant parvenus à Sariyya
d’où il était assez facile d’atteindre La Mecque. Mais Qaswa, la chamelle sur laquelle
le Noble Prophète r était monté, s’accroupit là, sur place. Tous les efforts déployés
par les Compagnons pour la faire bouger s’avérèrent infructueux. Ils en conclurent
que la chamelle s’était (durablement) immobilisée.
157. Selon un autre source leur nombre aurait grimpé à avec l’arrivée des Bédouins arabes mille cinq cents,
voire même mille sept cents selon une autre source.
La Sixième Année de L’hégire 549

Le Messager d’Allah r dit alors:


« Non, elle ne s’est pas immobilisée et elle n’a pas pour habitude d’agir de la sorte.
Elle n’a été stoppée que par Celui qui l’a empêchée d’entrer à La Mecque ! »
Puis il r ajouta :
« Par Celui dans la main de Qui réside ma vie, si exigeantes que soient les
conditions que Quraysh pose, au nom de l’estime de ce qu’Allah a interdit dans Son
Sanctuaire, je les accepterai certainement ! »
Puis, faisant signe à la chamelle de se déplacer, celle-ci s’envola littéralement.
Après cela le Noble Prophète r changea de direction en s’éloignant de
Quraysh et descendit près d’un puits presque à sec. C’était au point le plus éloigné
de Hudaybiya depuis La Mecque. Le puits en question souffrant résolument du
manque d’eau, les Compagnons s’en plaignirent au Noble Prophète r. Celui-ci sor-
tit une flèche de son carquois et leur demanda d’aller la jeter dans le puits. Bientôt,
par la volonté du Tout-Puissant, de l’eau commença à surgir puis à couler généreu-
sement jusqu’à ce que les Compagnons eussent décidé de quitter les lieux.
Pendant ce temps, Budayl, le chef de la tribu Khuzâ’a, qui vint avec quelques
hommes, évoqua l’inquiétude des Mecquois et leur éventuelle préparation à une
confrontation armée. Nonobstant l’apparente appréhension de Quraysh, le Noble
Prophète r expliqua à Budayr la raison de leur visite, en disant :
« Nous ne sommes pas venus pour nous battre avec qui que ce soit. Notre but
est de visiter la Maison d’Allah et d’accomplir l’omra. Les Quraysh sont maintenant
dans un état d’esprit tel qu’ils ne pensent qu’à la guerre. Je suis prêt à convenir d’une
trêve avec eux, s’ils le souhaitent. Je leur demande seulement de me laisser parler aux
gens. Si je réussis et que des gens me suivent, ils auront le choix d’en faire autant.
S’ils refusent, ils auront préservé leur force. S’ils sont déterminés à m’arrêter, je jure
par Allah que je les combattrai pour ma cause jusqu’à ma mort, et même alors ils ne
pourront pas s’opposer à la volonté d’Allah. »
Budayl retourna à La Mecque et transmit les paroles du Prophète d’Allah r aux
notables de Quraysh.
L’un d’eux, Urwa ibn Mas’ud, se leva et dit :
“L’homme vous montre le chemin du bien. Acceptez son offre et envoyez-moi
à lui afin de conclure un traité !”
Les notables de Quraysh finirent par accepter sa proposition.
En retour, le Noble Prophète r fit la même proposition à Urwa.
Pendant ce temps, ce dernier inspectait les Compagnons du coin de l’œil en
même temps que le Prophète d’Allah r s’exprimait.
550 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

À son retour, il raconta avec entrain à ses pairs tout ce qu’il avait vu :
« Gens de Quraysh, j’ai vu Chosroes, l’Empereur de Perse, le César de l’Empire
byzantin et le Négus d’Abyssinie, chacun dans son royaume. Je jure que je n’ai jamais
vu un souverain jouir parmi les siens d’une position telle que celle de Muhammad
parmi ses Compagnons. Ils ne fixent pas leur regard sur lui, ils n’élèvent pas la voix
quand ils lui parlent. Un simple signal à l’un d’entre eux suffit pour que cet homme
fasse ce qu’il attend de lui. J’ai regardé ces gens et j’ai vu qu’ils ne se soucient pas de
ce qui peut leur arriver tant qu’ils parviennent à protéger leur maître. Décidez-vous.
Il vous a fait une proposition et je vous conseille de conclure un accord de paix avec
lui et d’accepter son offre. Je vous conseille en toute sincérité, et je crains assurément
que vous ne parveniez pas à le vaincre.»
À ce propos on peut ajouter que plus tard Thomas Carlyle confessera cette
vérité : « Nul Empereur portant une couronne sur la tête n’a reçu autant de respect que
Muhammad, un homme qui se vêtait d’un manteau qu’il rapiéçait lui-même. ».
Après qu’Urwa eut terminé ce qu’il avait à dire, un autre homme de la tribu
Kinana demanda aussi la permission d’aller rencontrer le Noble Prophète r.
Permission lui fut donnée.
Le Noble Prophète r s’écria en le voyant :
« Voici un homme appartenant à
une tribu qui apprécie les chameaux
voués au sacrifice pour le Hajj et l’omra.
Libérez vos chameaux sacrificiels afin
qu’il puisse voir (de lui-même) ! »
L’homme ne put alors s’empêcher
de dire : « Il ne me semble pas juste de
les empêcher de visiter la Ka’ba ! » (Al
Boukhari Shurut 15; Ahmad, IV, 323-324).

Mais en dépit de ce qu’on leur a


dit à ce propos, Quraysh déploya une
unité de cavalerie afin de lancer un raid
contre les Musulmans.
Le Noble Messager r libéra les
assaillants idolâtres qui enfin furent
faits prisonniers car il r voulait faire
savoir haut et fort son intention de ne
venir que pour accomplir l’omra et ne
pas verser de sang. (Muslim, Jihad, 132, 133).
La Sixième Année de L’hégire 551

La tente du Noble Prophète r était dressée à Hudaybiya, à l’extérieur des fron-


tières du Haram mais tout au long de son séjour là-bas, il se rendait à l’intérieur de
ses frontières afin d’accomplir ses prières. (Waqidi, II, 614; Ahmad, IV, 326).
Après tout, une sâlat offerte dans les environs de la Ka’ba n’équivaut-elle pas
plus que cent mille autres offertes ailleurs ! (Voir, Ibn Maja, Iqama, 195).

Le Serment de Ridwân : un serment agréé par le Tout-Haut


Entre temps, quelques autres émissaires de Quraysh rendirent visite aux
Croyants. Mais comme un accord de paix n’avait pu être signé le Noble Prophète r
envoya ‘Uthmân t à La Mecque en lui disant :
« Vas aux Qurayshites et dis leur nous ne sommes pas venus pour combattre qui
que ce soit et que nous ne sommes venus pour visiter la Maison d’Allah en respectant
Ses interdits et en exprimant Sa grandeur, que nous abattrons les chameaux en guise
de sacrifice et que nous rentrerons. Et invites-les à l’Islam!».
Il lui ordonna en même temps de rencontrer les hommes et femmes Musulmans
et de leur apporter la bonne nouvelle que la Mecque serait bientôt conquise et qu’Al-
lah allait faire triompher Sa religion à la Mecque. (Ibn S’ad, II, 97 ; Ibn, Qayyim, III, 290).
‘Uthmân t partit à la Mecque et agit conformément aux instructions du Noble
Prophète r. Il indiqua aux polythéistes qu’ils n’avaient que l’intention d’accomplir
une Omra et de repartir.
Mais ces derniers ne donnèrent pas l’autorisation et retinrent ‘Uthmân t en lui
permirent toutefois de faire le tour de la Maison Sacrée s’il le voulait. Comme il sied
à un tel adepte du Noble Prophète r, celui-ci répondit :
« Je n’en ferai pas le tour tant que le Messager d’Allah ne l’aura pas fait ! C’est
uniquement à sa suite que je visiterai la Maison Sacrée ! » (Ahmad, IV, 324).
‘Uthmân t fut détenu plus longtemps que prévu au point que des rumeurs
affirmèrent : “’Uthman avait été assassiné.”
Cela provoqua un grand tumulte entre les deux camps aussi, pesant la pro-
babilité que son émissaire avait été assassiné, le Noble Prophète r rassembla les
Compagnons y au grand complet puis leur dit :
« Il semble que nous ne pourrons pas partir sans combattre les idolâtres ! » (Ibn
Hishâm, III, 364).

Puis il r exigea que tous les Compagnons s’engagent de de mourir, si nécessaire,


sur le sentier du Tout-Puissant. Chacun d’entre eux fit alors un serment d’allégeance
sans réserve. (Waqidi, II, 603).
552 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les Croyants promirent de se battre jusqu’à la mort sur le sentier d’Allah I en


plaçant leurs mains au-dessus de celles du Noble Prophète r. À la fin du serment,
se tenant les mains il r déclara : « … et ceci est la promesse d’Uthmân ! » (Al Boukhari,
Ashab’un-Nabi, 7).

La promesse établie sous un arbre fut connue plus tard comme “la Promesse
de Ridwân” ou “Al-Hudaybiya”. Tous les Compagnons y, sauf un seul hypocrite,
prêtèrent ce jour là un serment que le Tout-Puissant approuva :

Øƈ óåƆ ýĤÒ ÛéÜğĬijđƈĺÓ×ĺðÌƈ īĻĭƈ Ĩƈ ËĩĤÒīĐųÒĹĄƈ òïĝĤ


Ɔ ƪ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ ƆƇ Ž Ɔ Ž Ƈ Ž ƈ Ɔ ƇƩ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
ħ ƈıĻĥƆ Đ ÙĭĻġƈ ùĤÒĢõĬƆÉĘħ ƈıƈÖijĥĜĹĘÓ
ƈ Ĩħĥƈ đĘƆ
Ž Ž Ɔ ƆƆ ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƇƇ Ɔ Ɔ Ɔ
« Allah a très certainement agréé les croyants quand ils t’ont prêté le ser-
ment d’allégeance sous l’arbre. Il a su ce qu’il y avait dans leurs cœurs, et a fait
descendre sur eux la quiétude, et Il les a récompensés par une victoire proche. »
(Al-Fath, 48 : 18).

Plus tard alors qu’il était en compagnie de l’honorable Hafsa c le Noble


Prophète r déclara :
« N’entrera en Enfer, si Dieu le veut, aucun des Compagnons qui ont fait serment
sous l’arbre. »
Curieuse, Hafsa c ressentit le besoin de lui demander :
« Mais, comment sera-t-il, ô Messager d’Allah, quand Allah énonce :

ÓİƆ îƇ ƈòÒIJ ƈ
Ɔ źƈƪ ÌħŽ ġĭ
Ƈ ĨĪƈ
ž ÌIJƆ
« Il n’y a personne parmi vous qui ne passera pas par [L’Enfer] : Car [il s’agit
là] pour ton Seigneur d’une sentence irrévocable. » (Maryam, 19 : 71).
À cela le Noble Prophète r répondit :
« Allah, le Tout-Puissant, a également énoncé :

ÓĻƬ áƈ äÓ ƈ ĩƈ ĤÓƈ ƪčĤÒòñƆ ĬƆ IJÒijĝƆ ÜÒ ƈ


ƈ ıĻƆ ĘīĻ
Ɔ Ƈ ƪ ƪ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒĹåž ƈ ĭƆ ƇĬħƪ Ƈà
« Ensuite, Nous délivrerons ceux qui étaient pieux et Nous y laisserons les
injustes agenouillés. » (Maryam, 19 : 72).
Ainsi donc il devint évident que le verset impliquait, non pas une entrée directe
dans le feu de l’Enfer, mais le passage sur le pont (Sirât). (Muslim, Fadail’us-Sahabah, 163).
La Sixième Année de L’hégire 553

Jabir t raconte :
« Le jour d’Al-Hudaybiya, nous étions épuisés à cause de la soif. Nous déci-
dâmes alors de nous rendre auprès du Messager d’Allah r qui, à l’époque, avait en
sa possession un récipient en cuir. Il venait juste de procéder à l’ablution rituelle
lorsque nous nous approchâmes de lui. Il nous demanda alors :
« Qu’est-ce qui vous tracasse ? »
Nous lui répondîmes :
« Nous n’avons plus d’eau pour boire et pour procéder à l’ablution, excepté le
peu qui nous reste. »
Le Prophète d’Allah r plaça alors ses mains à l’intérieur du récipient et à l’ins-
tant même, l’eau commença à jaillir entre ses doigts. C’était exactement comme une
source d’eau sous pression. Grâce à elle, Nous pûmes tous nous désaltérer et prendre
l’ablution.
On me demanda :
« Combien de personnes étiez-vous ? ».
Et je répondis :
« Si nous avions été cent mille, l’eau aurait suffi, mais à l’époque, nous étions
mille cinq cents » répondis-je. (Al Boukhari, Manaqib, 25).

Le Traité d’Al-Hudaybiya : une nouvelle phase dans l’Appel


Les idolâtres furent ébranlés en apprenant que les Croyants s’étaient engagés à
les combattre jusqu’à la mort si nécessaire. Terrifiés à l’idée que les choses commen-
çaient à devenir sérieuses, ils décidèrent immédiatement de conclure un accord de
paix et envoyèrent à cet effet Suhayl ibn Amr pour négocier en leur nom.
Voyant que Suhayl avait été choisi pour procéder aux pourparlers de paix, le
Noble Prophète r, faisant allusion au fait que Suhayl signifiait “aisance” en arabe,
indiqua aux Croyants :
« Les choses sont désormais plus aisées pour vous ; c’est Suhayl ! »
Le Prophète de Miséricorde r prôna en conséquence une stratégie de paix,
conformément au commandement divin :

ƈ
Ž ĘƆ ħƈ ĥŽ ùĥ
ÓıƆ ĤƆ çŽ ĭƆ äÓ ƪ ĤÒŽ ijéƇ ĭƆ äĪƈ
Ɔ ÌIJƆ
« Et s’ils inclinent à la paix, incline vers celle-ci (toi aussi) et place ta
confiance en Allah, car c’est Lui l’Audient, l’Omniscient. » (Al-Anfâl, 8 : 61).
554 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les idolâtres avaient pour objectif premier d’empêcher les Croyants d’accom-
plir l’omra, au moins pour cette année-là. En outre, ils étaient venus pour établir
ce qui, à l’extérieur, semblait être des termes lourds. Après une discussion, parfois
âpre, leurs conditions furent acceptées.
Le Noble Prophète r confia à ‘Alî t le devoir de mettre par écrit les conditions
convenues. Ce dernier devait commencer à rédiger le document par la Basmallah
(Bismillahi Ar Rahman Ar Rahim)mais Suhayl souleva une objection. Alors, au lieu
de cela, il écrivit ħıĥĤÒğĩøÓÖ Bismikallahumma).
Ce ne fut pas la dernière objection de Suhayl car il se plaignit aussi du fait que
le nom du Prophète r soit appelé “Messager d’Allah”. Il argumenta ainsi :
« Si nous t’avions accepté comme le Messager d’Allah, serions-nous en train de
te combattre et de t’empêcher de te rendre à la Ka’ba ?».
Vexés par la lourdeur des termes du traité, les Compagnons y furieux avaient
à présent atteint le point d’ébullition.
‘Alî t tira sa plume et s’écria : « Par Allah, jamais je ne pourrai effacer le terme
“Messager d’Allah” ! »
« À présent, peu importe ce que vous niez, je suis le Messager d’Allah », signala le
Noble Prophète r à Suhayl.
Il demanda ensuite qu’on lui montre l’endroit exact où le terme “Messager
d’Allah” avait été écrit, après quoi il l’effaça lui-même du doigt et demanda que son
nom soit écrit à la place : Muhammad ibn ‘Abdallah.
En raison de nombreuses sagesses sous-jacentes, le Noble Prophète r finit par
accepter les conditions fixées par Quraysh, dont certaines furent les suivantes :
1. Le traité sera valable dix ans.
2. Les Musulmans ne se rendront pas à la Ka’ba pour le moment et la visite sera
reportée à l’année suivante. Les pèlerins qui arriveront à La Mecque l’année suivante
n’y resteront pas plus de trois jours durant lesquels les habitants, qui ne doivent pas
entrer en contact avec les Musulmans, auront évacuer la ville (La Mecque).
3. Tout Mecquois demandeur d’asile à Médine sera être renvoyé, même s’il est
Musulman mais tout Médinois demandant asile à La Mecque ne sera pas renvoyé.
4. Tout autre tribu arabe sera libre de se ranger du côté des Musulmans ou de
celui des Qurayshes.
Alors que les termes venaient d’être rédigés Abû Jandal t, le fils de l’émissaire
qurayshite Suhayl ibn Amr, s’approcha du Noble Prophète r en trainant ses pieds
enchaînés. Ouvertement musulman, Abû Jandal t avait subi les tourments vicieux
des mains des idolâtres. Profitant d’une occasion momentanée, il avait pu s’éloigner
des idolâtres et se rendre auprès des Croyants. Mais Suhayl, frappant son fils au
La Sixième Année de L’hégire 555

visage avec un bâton, s’interposa et dit aux Musulmans qu’Abû Jandal t devait
être le premier demandeur d’asile à être renvoyé aux idolâtres, de crainte que ces
derniers ne souhaitassent déjà violer les termes du traité.
Observant que les évènements se déroulaient dans la douleur, le Prophète de
Miséricorde r insista pour qu’Abû Jandal t soit exempté des termes du traité et
qu’il demeure avec les Musulmans. Mais Suhayl au cœur de pierre resta inflexible.
Alors qu’il était remis aux idolâtres, Abû Jandal t implora avec émotion l’aide des
Croyants en demandant : « Vais-je être jeté à nouveau dans le même feu ? ».
Ce fut plus que suffisant pour attiser les émotions des Croyants déjà affligés,
réduisant la plupart d’entre eux en larmes.
C’est alors que le Noble Prophète r conseilla affectueusement Abû Jandal t :
« Sois patient et compte sur la récompense d’Allah le Tout-Puissant ! Sois certain
qu’Allah t’aménagera, ainsi qu’aux Musulmans faibles et impuissants qui sont dans le
même était que toi, une issue ! Nous avons conclu avec ces gens (Quraysh) un traité de
paix, et nous sommes engagés à le respecter au nom d’Allah. Nous ne pouvons donc en
aucun cas rompre cet engagement ! » (Ahmad, IV, 325 ; Ibn Hishâm, III, 367).
Malgré tout, le Prophète de la compassion illimitée r lui laissa une seconde
opportunité en redemandant à Suhayl: « Laisse-le moi ! »
Mais celui-ci resta indifférent alors le Prophète d’Allah r lui fit cette requête:
« Alors au moins, prends-le sous ta protection ».
Suhayl refusa même cela mais deux autres représentants de Quraysh, Huwaytib
et Miqraz, réagissant à l’acharnement de Suhayl promirent au Messager d’Allah r
qu’ils prendraient Abû Jandal t sous leur protection et le protégeraient de tout
châtiment qui, autrement, lui parviendrait. (Waqidi, II, 608 ; Balazuri, I, 220).
Le Noble Prophète r se sentit alors quelque peu soulagé.
Le cœur débordant de foi, Omar t qui ne supportait plus l’attitude obstinée et
vaniteuse des idolâtres, fut incapable de se contenir davantage. En vérité, les autres
Compagnons, à l’exception probablement d’Abû Bakr tn’étaient pas différents de
cette approche des choses. Omar t en vint même jusqu’à s’élever contre l’approche
du Prophète d’Allah r avec l’espoir d’échapper à un traité qui, en apparence, sem-
blait constituer une défaite certaine pour les Croyants. Le Noble Prophète r lui
rappela cependant qu’il agissait uniquement et conformément à l’ordre divin :
« Je suis le Messager d’Allah je ne puis me rebeller contre Lui. Il est mon
Secours ! » (Al Boukhari, Maghazi, 35 ; Muslim, Jihad, 90-97).
Alors que Suhayl retournait à La Mecque avec exultation après la signature
du traité avec son fils à ses côtés, le Noble Messager r dit à ses Compagnons :
« Acquittez-vous de vos sacrifices et rasez-vous la tête (ou coupez-vous les cheveux) ! »
556 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ceci dit, aucun d’entre eux ne fit le moindre geste pour exécuter l’ordre donné.
En fait, ils étaient affligés et désabusés à cause d’évènements dont ils ne pouvaient
résoudre le mystère. Le Noble Prophète r réitéra sans succès son ordre à trois
reprises sans pour autant que cela ait constitué une rébellion. C’était simplement une
pause momentanée, d’une anticipation optimiste que le traité, dont l’encre n’avait
pas encore séché, eût pu être annulé. C’était une attente stimulée par un désir ardent
pour la Ka’ba. Ce sont ces mêmes Compagnons qui, il y a un jour à peine, avaient
juré de mourir en présence de leur Prophète bien-aimé r, dans le sentier d’Allah,
Gloire à Lui !
L’indifférence manifestée par les Compagnons t avait fortement dérangé le
Noble Prophète r qui, démoralisé, se résigna alors qu’il se trouvait sous la tente de
son honorable épouse Umm Salama c.
Après l’avoir informée de la situation, la prudente Umm Salama c dit au Noble
Prophète r : « Prends-donc l’initiative, ô Messager d’Allah, sacrifie un animal en
premier et rase-toi la tête. Une fois que tu auras fait cela, quel que soit le poids de
leur chagrin, ils te suivront… de grâce, excuse-les ! »
Étant sorti de la tente après cette brève conversation, le Noble Prophète r prit
les devants et agit selon le conseil avisé. C’est alors que les Compagnons y réali-
sèrent qu’il n’y avait aucune possibilité de retour en arrière par rapport au traité et
que chacun était invité à suivre le Noble Prophète r dans ses actions. C’est ainsi
qu’ils offrirent leurs sacrifices et se firent raser la tête.
Umm Salama c qui fut témoin de la situation, déclarera plus tard : « Les
Musulmans se ruèrent sur les chameaux sacrificiels avec un tel enthousiasme que
j’avais craint qu’il y eût une débandade ! » (Al Boukhari, Shurout, 15 ; Ahmad, IV, 326, 331 ;
Waqidi, II, 613).

Une fois que les Croyants eurent fini de sacrifier leurs chameaux et qu’ils eurent
leurs cheveux coupés, Allah I envoya un coup de vent qui souffla tous leurs poils
vers le Haram. Les Compagnons prirent cela comme un signe que leur omra avait
été accepté. (Ibn Sa’d, II, 104 ; Halabi, II, 713).
S’en retournant ensuite à Médine les Compagnons commencèrent à craindre
la colère divine à cause de leur mécontentement initial et de leur indifférence à la
sagesse sous-jacente du traité.
C’est dans ces circonstances que la sourate al-Fath fut révélée :

ħÝƈ ƇĺIJ óìƆÉÜÓĨIJğƈ×ĬðīĨ ƈ Ħïƪ ĝƆ ÜÓ Ʃ ğƆ ĤƆ óƆ ęƈ ĕŽ ĻƆ ĤÓ


ƈ ĭĻƈƃ ×ĨÓéÝĘƆ ğƆ ĤƆ ÓĭƆ éÝĘƆ ÓĬƈƪ Ì
ƪ Ɔ Ɔƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ĩ Ɔ ƇųÒ ƫ ƃ Ž Ž Ɔ
Òõĺƃ ƈõĐÒ ƈ ƈ ğƆ ĺïƈ ıĺIJğƆ ĻĥƆ ĐįÝĩđĬƈ
Ɔ óƃ āŽ ĬƆ ƇųÒ
Ʃ ĞƆ óƆ āĭ
Ƈ ĺƆ IJÓ
Ɔ ĩĻƃ ĝÝƆ ùŽ ĨÓ
ƫ Ĉ ƃ ÒóƆ Ā Ɔ ŽƆƆ Ž Ɔ ƇƆƆ Ž
La Sixième Année de L’hégire 557

« En vérité Nous t’avons accordé une victoire éclatante, afin qu’Allah te par-
donne tes péchés, passés et futurs, qu’Il parachève sur toi Son bienfait et te guide
sur une voie droite ; et qu’Allah te donne un puissant secours… » (Al-Fath, 48 : 1-3).
Mujammi ibn Jariya t évoque la crainte que les Compagnons y avaient éprou-
vée lors de la révélation de cette sourate :
« Tous, effrayés, s’étaient dispersés vers leurs chameaux. Ils se demandaient ce qui
se passait exactement. “Le Messager d’Allah vient de recevoir une révélation” dirent
certains.
Nous nous rendîmes auprès du Messager d’Allah r, avec crainte. Quand tout le
monde fut rassemblé le Messager d’Allah r récita la sourate Al Fath. » (Ibn S’ad, II, 105).
Omar t dira similairement :
« Par crainte des conséquences de ce que j’avais dit ce jour-là au Messager
d’Allah r, à titre de bonne fin, j’ai jeûné continuellement, offert beaucoup d’au-
mônes, accompli des prières surérogatoires et affranchi beaucoup d’esclaves. » (Ibn
Sayyidinnas, II, 167).

La révélation de la sourate Al-Fath était en quelque sorte un prélude aux portes


de la victoire qui pour les Croyants commençaient à s’ouvrir. Il ne fallut pas long-
temps pour que les fruits mentionnés par la sourate fussent peu à peu récoltés.
Les tribus voisines avaient surnommé le voyage des Croyants “un voyage sans
retour”.
Voyant le Noble Prophète r et ses Compagnons revenir indemnes, elles se
précipitèrent vers lui r pour s’excuser.
Leur condition est ainsi décrite par Allah, Gloire à Lui :

Òïƃ ÖƆ ƆÈħ ƈıĻĥƈ İŽ ƆÈĵĤƆ Ìƈ Īij


Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJ
Ɔ Ģij Ƈ øƇ óĤÒÕƆ ĥƈ ĝƆ ĭĺī Ɔ
Ɔ Ĥƪ ĪÈħŽ ÝĭƇ ĭƆ Č Ɔ ģŽ ÖƆ
Ž ƪ
Òòij ƈ ƈ ğƆ Ĥƈ ðƆ īƈĺôƇ IJ
ƃ ÖÓ Ƈ Ĩƃ ijŽ ĜƆ ħŽ ÝĭƇ ĠƇ IJ
Ɔ ÅijŽ ùĤÒ
ƪ īƪ Č Ɔ ħŽ ÝĭƇ ĭƆ Č
Ɔ IJ Ɔ ħŽ ġƈ
Ƈ ÖijĥƇ ĜƇ ĹĘ Ɔž Ɔ
ÒóĻđƈ ø īĺ ƈóĘÓƈ ġƆ ĥŽ ĤÓ
ƈ ĬƆ ïŽ ÝĐƆÈÓĬƈƪ ÍĘƆ įƈ Ĥij
ƈ øòIJųÓƈ ƈ ƈ
ƃ Ɔ Ɔ ƆŽ Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ ÖīĨËŽ ƇĺħŽ Ĥƪ īĨƆ IJƆ
« Vous pensiez plutôt que le Messager et les croyants ne retourneraient
jamais plus à leur famille. Et cela vous a été embelli dans vos cœurs ; et vous avez
eu de mauvaises pensées. Et vous fûtes des gens perdus ›. Et quiconque ne croit
pas en Allah et en Son messager... alors, pour les mécréants, Nous avons préparé
une fournaise ardente. » (Al-Fath, 48 : 12-13).
558 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En apparence, les termes du Traité d’Al-Hudaybiya étaient en défaveur des


Musulmans. Ce n’est qu’après la révélation d’Al-Fath qu’il devint évident que ce qui
semblait au départ être une défaite et un échec s’avèrerait avec le recul constituer un
triomphe évident et durable, comme cela est énoncé dans le verset suivant :

ÒŽ ij×ƫ éƈ ÜĪ


Ƈ ƆÈĵùƆ ĐƆ IJ Ɔ ħŽ ġƇ Ĥƪ óƄ ĻŽ ì
Ɔ ijƆ İƇ IJÓ
Ɔ Ñƃ ĻŽ ü Ɔ ƆÈĵùƆ ĐƆ IJƆ
Ɔ ÒŽ ijİƇ óƆ ġŽ ÜĪ
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ ƆźħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ
Īij Ɔ ħƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ƇųÒ
ƪ IJƆ ħŽ ġƇ Ĥƪ óƭ ü
Ɔ ijƆ İƇ IJÓ
Ɔ Ñƃ ĻŽ üƆ
« … Or, il se peut que vous ayez de l’aversion pour une chose alors qu’elle
vous est un bien. Et il se peut que vous aimiez une chose alors qu’elle vous est
mauvaise. C’est Allah qui sait, alors que vous ne savez pas. » (Al-Baqara, 2 : 216).
Les diverses raisons sous-jacentes à cet évènement particulièrement trouble,
que le Noble Prophète r eut beaucoup de mal à expliquer au préalable, ne se mani-
festèrent complètement qu’au bout de deux années.
Le climat de paix insufflé par le Traité permit à de nombreuses personnes d’en-
trer dans le giron de l’Islam et ils furent si nombreux qu’en l’espace de deux années,
le nombre total de Musulmans dépassa celui d’avant Hudaybiya.
C’est un fait que cette année-là, les Musulmans ne purent effectuer l’omra, parce
qu’ils en furent empêchés, et qu’ils durent endurer des conditions pouvant être
considérées comme lourdes pendant un certain temps.
Mais les gains qui devaient en découler allaient être bien plus importants,
attendu que le Traité signifiait que l’Islam était officiellement reconnu. Il leur suf-
fisait maintenant d’attendre une année avant d’entreprendre la visite de la Ka’ba.
Quiconque, parmi les tribus arabes environnantes, souhaitait rejoindre les
Musulmans, le pouvait. Cela avait en outre permis la diminution de l’influence de
La Mecque ainsi qu’un répit à la prédication islamique.
Une autre raison pour laquelle le Noble Prophète r opta pour la paix est le
nombre important de personnes à La Mecque qui, pour des raisons évidentes, pra-
tiquaient l’Islam en secret.
Si une guerre avait éclaté avec les idolâtres à ce moment-là, selon toute vrai-
semblance, ils auraient été exposés et par conséquent massacrés. En foi de quoi
le Messager d’Allah r, Prophète de Miséricorde, envoyait des signes cachés aux
futurs musulmans de La Mecque et aux tribus arabes voisines pour les “réchauffer à
l’islam”. Les bienfaits ne tardèrent pas à s’en faire sentir.
La Sixième Année de L’hégire 559

Une victoire évidente : une orientation sans cesse croissante


Les idolâtres ravis d’avoir accepté les termes du Traité d’Al-Hudaybiya, avaient
en fait supprimé sans le savoir les obstacles empêchant les Croyants de prolonger
l’appel à l’Islam et les avaient placés dans une position supérieure.
Le fait qu’aucun Compagnon t n’ait été disposé à reconnaître les termes du
Traité, se croyant ouvertement à leur désavantage, avait jeté un voile supplémen-
taire aux yeux de Quraysh. Ils considéraient alors qu’avec le traité qu’ils l’avaient
signé avec grand enthousiasme, ils avaient remporté une énorme victoire.
Cependant, la véritable nature du Traité, jusque-là cachée aux Croyants au
départ, ne s’est manifestée qu’avec le temps, à mesure que les clauses étaient mises
en pratique.
Le Noble Prophète r, qui pourtant savait dès le début les bénédictions que le
Traité avait en réserve, était malaisé à respecter les clauses du Traité d’Al-Huday-
biya et à tirer le meilleur parti des opportunités qui s’offraient à lui. Par exemple,
lorsque quelques femmes de La Mecque arrivèrent à Médine pour y trouver refuge,
le Messager d’Allah r refusa les demandes de Quraysh de les remettre au motif que
les termes du Traité s’appliquaient uniquement aux hommes. Allah I avait en effet
ordonné de ne pas les extrader :

ħĥƆ ĐŽ ƆÈƇųÒ ƈ ƅ ƈ ıĨÚÓĭƆ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÒħĠÅÓ ƈ


Ƈ Ʃ īƪ İij Ƈ ƇĭéÝƆ ĨÓŽ ĘƆ ÚÒóƆ äÓ Ɔ Ƈ Ƈ Ƈ Ƈ Ƈ äÒ Ɔ ðƆ Ìƈ ÒijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ħıƇ Ĥƪ ģƭ è ƈ īİźƆ ƈòÓęƪ ġƇ ĤŽ ÒĵĤƆ Ìƈ īİijđäƈ óÜƆ ŻƆ ĘƆ ÚÓ ƅ ĭƆ Ĩƈ ËŽ ĨīİijĩÝĩĥƈ ĐĪƈŽ ÍĘƆ ī ƈıĬÓƈ ĩĺƈÍÖƈ
Ž ƪ Ƈ ƪ Ƈ Ƈ Ž Ƈ ƪ Ƈ ƇƇŽ Ɔ ƪ Ɔ
ÒðƆ Ìƈ īƪ İij ƈ Ɔ ƆÈħġƇ ĻĥƆ ĐæÓĭƆ äźƆ IJÒijĝƇ ęƆ ĬƆÈÓĨħİijÜÆ
Ƈ éƇ ġĭÜĪ Ž Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ ƪ Ƈ Ƈ IJ Ɔ ĥƫ éƈ ĺƆ ħŽ İ
Ɔ īƪ ıƇ ĤƆ Īij Ƈ źƆ IJƆ
ÓĨÒij Ɔ Ɔ Ɔ IJ ƈóĘÒƈ ijġƆ ĤŽ Òħƈ āđƈƈ ÖÒijġƇ ùƈ ĩÜƇ źƆ IJīƪ İƇ òijäƇ ƇÈīƪ İij
Ɔ ƇĤÉùŽ ĻƆ ĤŽ IJ Ɔ ħŽ ÝƇ ĝŽ ęƆ ĬÈÓĨÒij
Ɔ ƇĤÉøÒ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ƈ ĩƇ ÝƇ ĻŽ ÜÆƆ
ħĻġƈ è ħĻĥƈ ĐųÒIJħġĭĻÖħġéĺųÒ ƈ ħġèħġĤƈ ðÒijĝęĬƆÈ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ŽƆ Ƈ Ƈ Ž Ɔ Ʃ Ƈ Ž Ƈ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ
« Ô vous qui avez cru ! Quand les croyantes viennent à vous en émigrées,
éprouvez-les ; Allah connaît mieux leur foi ; si vous constatez qu’elles sont
croyantes, ne les renvoyez pas aux mécréants. Elles ne sont pas licites [en tant
qu’épouses] pour eux, et eux non plus ne sont pas licites [en tant qu’époux] pour
elles. Et rendez-leur ce qu’ils ont dépensé (comme mahr). Il ne vous sera fait
aucun grief en vous mariant avec elles quand vous leur aurez donné leur mahr. Et
ne gardez pas de liens conjugaux avec les mécréantes. Réclamez ce que vous avez
dépensé et que (les mécréants) aussi réclament ce qu’ils ont dépensé. Tel est le
jugement d’Allah par lequel Il juge entre vous, et Allah est Omniscient et Sage. »
(Al- Mumtahana, 60 : 10; Voir, Al Boukhari, Shurut, 15 ; Waqidi, II, 631-632).
560 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Pendant ce temps, Abû Basir t, un Mecquois qui avait accepté l’Islam, était
venu à Médine en quête de protection. Lié par les termes du Traité, le Noble
Prophète r n’eut pas d’autre choix que de le livrer aux idolâtres.
Comme les autres, Abû Basir t eut d’abord du mal à trouver un sens à ce
déplacement et exprima ainsi son étonnement au Noble Prophète r :
« Veux-tu que je retourne à l’adoration des idoles ?»
Mais plus calme que jamais, le Noble Prophète r le réconforta calmement :
« Eh Abu Basir ! Nous ne pouvons pas rompre notre alliance ! Mais sois patient.
Allah te montrera ainsi qu’à ceux qui sont dans ton cas une voie de salut.»
Alors Abû Basir t se plia sans dire un mot à la volonté du Prophète r et mettant
le bien-être des Musulmans avant le sien, il se rendit donc aux idolâtres.
Pourtant, il se ressentait à présent comme “un mort qui marche”, car il savait que
les idolâtres ne l’emmenaient pas à La Mecque, mais vers la mort.
Sachant cela, il opposa une résistance farouche lorsque la première opportunité
se présenta. Il t tua Hunays un des deux hommes qui l’emmenaient, et poursuivit le
second.
Abû Basir t prit alors les vêtements, les effets personnels et l’épée de l’idolâtre
mort et retourna auprès du Prophète d’Allah r et lui dit :
« Prends un cinquième de tout ceci, ô Messager d’Allah. »
Le Noble Prophète r lui répondit :
« Si je le fais je n’aurais pas respecté les termes du Traité. Tout ce que tu as
accompli vis-à-vis de cet homme ne regarde que toi. (Waqidi, II, 626-627).
L’idolâtre qui s’était enfui se rendit aussi à Médine pour réclamer Abû Basir t.
Celui-ci dit au Noble Prophète r :
« Tu étais fidèle à ta parole quand tu m’as livré à eux, ô Messager d’Allah, mais
je devais sauver ma vie. »
À présent qu’il commençait à comprendre la sagesse sous-jacente aux conseils
du Noble Prophète r, Abû Basir t quitta Médine et s’installa à Is un lieu situé entre
La Mecque et Damas.
En peu de temps, l’endroit devint une zone neutre qui servit de centre d’asile
pour tout Musulman fugitif.
Très vite, le nombre de Musulmans, y compris Abû Jandal t qui avait éga-
lement réussi à s’évader, atteignit trois cents individus mettant en péril la route
commerciale vitale de La Mecque vers la Syrie et causant de nombreux dommages
au commerce qurayshite.
La Sixième Année de L’hégire 561

Les idolâtres n’eurent alors pas d’autre choix que d’insister auprès du Noble
Prophète r pour qu’il annule les clauses pertinentes du Traité. À présent, ils deman-
dèrent au Noble Prophète d’accueillir les réfugiés musulmans à Médine. Ainsi donc
une clause qui semblait initialement préjudiciable aux Musulmans s’avéra être pour
eux un bénéfice. (Voir, Al Boukhari, Shurut, 15; Ibn Hishâm, III, 372).
Le Noble Prophète r envoya alors une lettre à l’endroit de la communauté
musulmane d’Is, dirigée par Abû Basir.
Ce dernier, à ce moment-là, se trouvait sur son lit de mort. Il rendit son dernier
souffle juste après avoir lu la lettre en question.
Abû Jandal t le fit porter en terre là où il mourut et fit construire une mos-
quée juste à côté de sa tombe, après quoi il conduisit ses coreligionnaires à Médine,
auprès du Prophète d’Allah r. (Voir Vakidi, II, 629).

La paix instaurée lors d’Al-Hudaybiya, traité que le Tout Haut décrit comme
une « victoire claire » (fathan mubinan) marqua un tournant dans l’accélération de
la prédication islamique.(Voir, al-Fath, 1).
Quand le Noble Prophète r eut proclamé Al-Hudaybiya comme étant un
triomphe majeur, un Compagnon t fit ce commentaire :
« On nous a empêchés de tourner autour de la Ka’ba et d’offrir nos sacrifices
à l’intérieur du Haram (ou Sanctuaire sacré). Qui plus est, nous avons livré deux
personnes qui cherchaient notre protection… quelle victoire cela pourrait être ? »
Le Noble Prophète r ayant eu vent de ces propos il décrivit en réponse la nature
de la victoire remportée à Hudaybiya :
« Ce traité est bien sûr la plus grande victoire. Les idolâtres ont accepté vos va-et
-vient sur leurs terres, que vous vous occupiez de vos obligations et que vous vous trou-
viez en sécurité dans vos allées et venues. Ainsi ils verront et apprendront de vous l’Is-
lam qu’ils ont détesté jusqu’à présent. Allah vous rendra victorieux et vous reviendrez
sains et saufs de votre entrée. Et c’est la plus grande victoire de tous ! » (Halabi, II, 715).
Abû Bakr t livra aussi son opinion quant à ce traité :
« l’Islam n’a jamais connu une victoire plus grande que celle d’Al- Hudaybiya.
Mais étant myopes et étroits d’esprit, beaucoup s’y sont opposés. Les gens se pressent
dans les affaires qui concernent Allah et Son Messager r. Mais contrairement à eux,
Allah n’est pas pressé et n’exécute rien avant que le bon moment ne soit arrivé. »
(Waqidi, II, 610 ; Halabi, II, 721).

Le premier résultat positif du traité fut la propagation rapide de l’Islam.


Beaucoup de voies auparavant bloquées étaient maintenant grandes ouvertes pour
la prédication.
562 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les Musulmans étaient à présent en mesure de se réunir avec les idolâtres,


parler ouvertement et les inviter à l’Islam. Même ceux qui avaient gardé leur foi
musulmane cachée jusqu’alors pouvaient désormais sortir sans crainte. (Voir, Ibn
Qayyim, III, 309-310.).

Pourtant, au préalable, les deux parties ne pouvaient pas interagir librement


l’une avec l’autre, et encore moins voyager librement à La Mecque ou à Médine
comme elles l’avaient fait après le traité.
Les Croyants et les idolâtres exerçaient à présent la liberté de rendre visite à
leur famille et à leurs amis des deux côtés. La moralité et la conduite exemplaires
du Noble Prophète r, ainsi que ses miracles, étaient maintenant clairement apparus
devant les yeux des Qurayshites ; et avec les conseils adéquats délivrés avec empres-
sement par les Croyants, les idolâtres se trouvaient désormais et irrémédiablement
tournés vers l’Islam.
En outre, les Arabes du désert attendaient pratiquement que les Mecquois
deviennent musulmans pour leur emboîter le pas.
C’est à cette époque que des notables de La Mecque tels que Amr ibn ‘As,
Khâlid ibn Walîd et ‘Uthmân ibn Talha y entrèrent dans le giron de l’Islam. (Voir,
Waqidi, II, 624).

Les émissaires musulmans jouissaient de la liberté de visiter la région de leur


choix et d’expliquer l’Islam à chaque occasion. Le nombre de Musulmans augmenta
considérablement pendant cette période de paix.
S’inspirant des ahadith pertinents du Noble Messager r, l’Imam al-Zuhrî éva-
lue conséquences du Traité d’Al-Hudaybiya dans les termes suivants :
« Auparavant, les Musulmans et les idolâtres s’affrontaient à chaque fois
qu’ils se rencontraient. Avec le Traité d’Al-Hudaybiya, la guerre prit fin. Un lien
de confiance s’établit entre les deux parties. Ils purent se rencontrer et fusionner
les uns avec les autres, et même s’entraider dans divers domaines. En attendant,
chaque fois que l’Islam était évoqué par quelqu’un, après une brève réflexion, il
saisissait la vérité et devenait musulman ; de sorte que les deux années comprises
entre Al-Hudaybiya et la conquête de La Mecque ont vu un plus grand nombre de
personnes embrasser l’Islam que les dix-neuf années consécutives à la prédication
(islamique) post-traité. »
À cela, Ibn Hishâm ajoute :
« Le Messager d’Allah r est venu à Al-Hudaybiya avec mille quatre cents
Croyants. Deux ans plus tard, il partit pour La Mecque avec dix mille, et, selon un
autre récit, avec deux mille autres qui le rejoignirent en chemin, portant le nombre
à douze mille. Ces statistiques attestent du degré d’exactitude des remarques d’al-
Zuhrî. » (Haythami, VI, 170 ; Ibn Hishâm, III, 372).
563

LA SEPTIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

L’invitation des souverains à l’Islam


À la suite du Traité d’Al-Hudaybiya, le Noble Prophète r, Messager envoyé à
l’humanité tout entière, commença à inviter toutes les terres à sa portée, proches et
lointaines, à l’Islam. Tel était, après tout, l’injonction divine :

ÓđĻ ƈ Ƈ øòĹžĬƈ Ìƈ öÓĭĤÒÓıĺƆÈÓĺģŽ ĜƇ


ƈ ħġƇ ĻĤƆ Ìƈ ųÒ
ƃ ĩä
Ɔ Ž Ž Ʃ Ģij Ƈ Ɔ Ƈ ƪ Ɔƫ Ɔ
ĂòŽ ƆŶÒIJ ƈ ƈ
Ɔ ÚÒIJÓƆ ĩƆ ùĤÒ
ƪ ğƇ ĥŽ Ĩ
Ƈ įƇ ĤƆ ĸñĤƪ Ò
« Dis : «Ô hommes ! Je suis pour vous tous le Messager d’Allah, à Qui appar-
tient la royauté des cieux et de la terre… » (Al-A’râf, 7 : 158).

ƈ Ƈ Ɔ ēŽ ĥžƈ ÖƆ Ģij
Ƈ øƇ óĤÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ħĤƪ ĪƈÌIJ
Ž ƪ ĨğƆ ĻŽ ĤƆ Ìƈ ĢƆ ƈõĬÈÓĨ
Ɔ ğƈƆ Öž òī ƪ
öÓ ƈ ĭĤÒīĨ ƈ ƈ Ʃ IJįÝĤƆ Óø ƈòÛƆ ĕŽ ĥƪ ÖÓĩĘƆ ģŽ đęŽ ÜƆ
ƪ Ɔ ğƆ ĩƇ āđŽ ĺƆ ƇųÒ Ɔ ƇƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
« Ô Messager, transmets ce qui t’a été descendu de la part de ton Seigneur.
Si tu ne le faisais pas, alors tu n’aurais pas communiqué Son message. Et Allah
te protégera des gens. Certes, Allah ne guide pas les gens mécréants. » (Al-Mâ’ida,
5 : 67).

Īij ƈ ĭĤÒóáƆ ĠŽ ƆÈīġƈ ĤƆ IJÒóĺñƈ ĬƆ IJÒóĻýƈ ÖöÓ


Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ źƆ öÓ ƈ ĭĥžĤƈ Ùƃ Ęƪ ÓĠ
Ɔ źƈƪ ÌĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ƆÈÓĨƆ IJƆ
ƪ Ɔ ƪ Ɔ ƃ Ɔ ƃ Ɔ ƪ
« Et Nous ne t’avons envoyé qu’en tant qu’annonciateur et avertisseur pour
toute l’humanité. Mais la plupart des gens ne savent pas. » (Saba, 34 : 28).
Le Noble Prophète r invita ces personnes à l’Islam par le biais de lettres écrites
dont les plus célèbres sont au nombre de six ou huit.
Chaque lettre d’invitation était portée par un Compagnon digne de confiance.
Quand le Noble Messager r eut exprimé le désir que des lettres soient écrites
aux souverains, les Compagnons y déclarèrent :
« Ils ne les liront pas, ô Messager d’Allah, à moins qu’elles ne soient scellées. »
564 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

C’est ainsi que le Noble Prophète r fit graver sur une bague en argent qu’il
possédait l’inscription “Allah Rasul Muhammad” sur trois lignes verticales. Il utilisa
ensuite cet anneau comme sceau officiel. (Voir, Al Boukhari, Ilm, 7; Muslim, Libâs, 57, 58; Ibn
Sa’d, I, 258).

La mention “Muhammad Rasulullah” était gravée sur la bague, bien que par
respect le Nom d’Allah ait été inscrit ci-dessus à la première ligne, suivi au milieu
par Rasul et ensuite sur la ligne inférieure Muhammad.

C’est Dihyat’ul Kalbi t qui fut chargé d’apporter la lettre du Prophète r à


Héraclius, l’Empereur byzantin qui, étant de retour d’une victoire éclatante contre
les Perses, se trouvait en Syrie lorsque la lettre lui fut finalement remise.
Dès la réception de la lettre en question, l’Empereur ne fut pas comme le sont
les souverains vaniteux, irrité. Au contraire, la lettre suscita en lui un vif intérêt, et,
désireux d’enquêter plus avant sur la nature de cette invitation, ce dernier ordonna
que le compatriote du Prophète r fût amené en sa présence afin de pouvoir l’inter-
roger personnellement.
À la tête d’un groupe de marchands de La Mecque, Abû Sufyan, qui était à
l’époque un des ennemis jurés du Noble Prophète r, se trouvait à Damas à ce
moment-là. Le Traité d’Al-Hudaybiya était toujours en vigueur. Ces marchands
furent escortés par les hommes du souverain jusqu’à la présence royale. Héraclius,
accompagné de sa cour, était à Ilia, dans les environs d’al-Aqsa, lorsque les Mecquois
lui furent livrés. Entouré de notables grecs, l’Empereur accepta les hommes en
sa présence et fit appel à un traducteur pour servir de médiateur entre lui et les
hommes de Quraysh. L’Empereur demanda par l’intermédiaire du traducteur :
« Qui d’entre vous est le plus proche parent de l’homme qui se dit prophète ? »
Abû Sufyan dit : « Je le suis ».
Héraclius ordonna :
« Amenez-le et ses amis plus près de moi ; mais lorsque je le questionnerai, que
ses amis restent à un pas derrière lui. »
Puis se tournant de nouveau vers son traducteur, il ajouta : « Dites à ses amis
que je vais poser certaines questions concernant cet homme. S’il commence à men-
tir, qu’ils le dénoncent alors ! »
En effet, Abû Sufyan confessera plus tard :
« Si ce n’était la crainte d’acquérir une réputation de menteur, j’aurais déjà
menti à son sujet ! »
Septième Année de L’hégire 565

Ce qui se déroula par la suite est narré par Abû Sufyan lui-même : La première
question que l’Empereur posa alors fut :
— Quelle est sa lignée ?
— Sa lignée est hautement respectée parmi nous, répondis-je.
— Quelqu’un parmi vous, vous a-t-il déjà prétendu la même chose ?
— Non !
— Y a-t-il eu un roi parmi ses ancêtres ?
— Non !
— Sont-ce les notables ou les gens issus des classes inférieures qui le suivent ?
— Les gens issus des classes inférieures !
— Le nombre de ses partisans augmente ou diminue ?
— Leur nombre s’accroît !
— Y a-t-il des gens qui, après avoir accepté sa religion, reviennent par aversion ?
— Non !
— L’accuseriez-vous de mentir avant d’affirmer ce qu’il dit ?
— Non !
— Y a-t-il eu un moment où il n’a pas tenu sa promesse ?
— Non, répondis-je, chaque promesse faite est tenue. Mais pour l’instant nous
avons conclu un accord de paix avec lui. Nous ne savons pas comment il agira pen-
dant cette période. Et ceci est la seule chose que je puis inclure dans mes diverses
réponses pour le discréditer potentiellement.
— Avez-vous combattu contre lui ? demanda Héraclius.
— Oui !
— Quel fut l’aboutissement de ces batailles ?
— Parfois il nous battit, parfois c’est nous qui le vainquions.
— Que vous commande-t-il ?
— Il nous commande d’adorer un seul Dieu, de ne rien Lui associer et
d’abandonner les idoles que nos ancêtres avaient coutume d’adorer. Il nous enjoint
d’accomplir la prière, d’être équitable, honnête, intègre et de nous occuper de nos
parents.
Puis Héraclius parla à l’interprète qui traduisit ses paroles :
566 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Dis-lui : «Je t’ai interrogé sur sa lignée et tu m’as répondu qu’elle était parmi
la plus noble d’entre vous. Tels sont les prophètes. Ils sont envoyés parmi les plus
nobles de leur peuple.
Je t’ai interrogé pour savoir si antérieurement quelqu’un d’autre avait fait une
telle déclaration (ou avait prétendu la même chose), et tu m’as répondu que non. Si
c’était le cas, j’aurais peut-être affirmé qu’il l’imitait.
J’ai demandé ensuite s’il y avait eu un roi parmi ses pères et tu m’as répondu
qu’il n’y en avait jamais eu. S’il y avait eu un roi, j’aurais dit qu’il essayait de récupé-
rer la domination de son aïeul.
J’ai demandé si tu l’avais déjà vu mentir avant qu’il n’exprime cette affirmation
et tu m’as répondu que non. Je sais moi-même qu’une personne qui ne ment pas aux
humains ne peut jamais mentir au sujet de Dieu !
J’ai demandé si ses partisans étaient principalement des notables ou bien des
gens issus des classes inférieures. Tu m’as répondu qu’ils appartenaient aux classes
inférieures. Après tout, ce sont eux qui suivent les prophètes dès le début.
Le nombre de ses partisans est-il en hausse ou en baisse, ai-je demandé, et tu
m’as répondu que ce nombre augmente. C’est une caractéristique des religions véri-
diques que le nombre de leurs adeptes augmente continuellement.
J’ai demandé s’il des gens qui se détournaient de sa religion (par aversion) après
l’avoir acceptée et tu m’as répondu que non. C’est ce qui se produit lorsque la foi
pénètre dans le cœur et s’enracine.
J’ai demandé s’il lui était arrivé de manquer à sa parole ; tu as répondu non. Tels
sont les prophètes. Ils ne reviennent jamais sur leurs paroles.
J’ai demandé si tu l’as déjà combattu. Tu as dit que tu l’avais fait et que par-
fois tu perdais et parfois tu gagnais. En tout cas, les prophètes sont comme ça. Ils
subissent des épreuves, mais la victoire leur appartient au final.
Je t’ai interrogé ce qu’il vous a commandé. Tu n’as rien dit d’autre que d’adorer
Dieu sans Lui attribuer d’associés, d’abandonner le culte des idoles, d’accomplir la
prière et de faire montre d’honnêteté et d’intégrité.
Si ce que tu affirmes est vrai, alors cet homme régnera très bientôt sur ces terres
sur lesquelles je me tiens présentement. D’ailleurs, j’étais au courant de la venue de
ce prophète, mais je n’aurais jamais imaginé qu’il serait suscité parmi vous. Si je
pouvais me rendre auprès de lui, je subirais des ennuis de toutes sortes simplement
pour le voir. Si j’étais à ses côtés, je lui laverais certainement les pieds.» »
Héraclius demanda ensuite qu’on lui remette la lettre du Prophète d’Allah r,
remise par Dihya au gouverneur de Basra qui la fit ensuite parvenir à l’Empereur.
Voici qui était écrit :
Septième Année de L’hégire 567

« De la part de Muhammad, Serviteur et Messager d’Allah, à Héraclius, Empereur


des Byzantins.
« Paix à tous ceux qui suivent la bonne direction ! Je t’appelle à la religion de
l’Islam. Embrasse l’Islam, tu parviendras ainsi à la paix et Allah te récompensera
doublement. Mais si tu refuses, tu porteras aussi les péchés de tes sujets. »

ƪźƆÈħġƇ ĭƆ ĻÖƆ IJÓĭĭĻÖÅÒijøÙƅ ĩĥĠĵĤÌƈ ÒijĤÓđÜÔÓ


ƈ ÝƆ ġƈ ĤŽ ÒģƆ İŽ ƆÈÓĺƆ ģŽ ĜƇ
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Ƈ Ĭƪ ÉÖƈ ÒŽ IJïƇ ıƆ üÒ
Ž ÒŽ ijƇĤijĝƇ ĘƆ ÒŽ ijŽ Ĥƪ ijƆ ÜĪƈ
Ɔ ÍĘƆ ųÒ
« Dis : «Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous:
que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions
point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah». Puis, s’ils tournent le
dos, dites : «Soyez témoins que nous, nous sommes soumis».» (Al-Imrân 3: 64).
Abû Sufyan raconte lui-même la suite des évènements :
« Après qu’Héraclius eut terminé ce qu’il avait à dire et que la lettre fut lue,
on entendit une clameur et des voix s’élevèrent de toutes parts. Là-dessus, on nous
chassa dehors.
Je confiai alors à mes compagnons : “La réputation du fils d’Abû Kabcha158 a
pris de l’ampleur ! Même le roi des Beni al-Asfar159 (Héraclius) a peur de lui !
C’est à ce moment que j’eus la certitude qu’il triompherait prochainement et
finalement Allah favorisa ma conversion à l’Islam. »
Héraclius invita alors tous ses notables à la cour royale.
Tous se rassemblèrent dans l’un des palais appartenant à l’Empereur. Celui-ci
leur dit :
“Ô Byzantins…. Qu’aimeriez-vous si vous receviez le salut et la souveraineté
éternels ?”
Il les invitait implicitement à l’Islam.
Puis, tels des ânes sauvages qui sortent d’une frayeur, ils se précipitèrent tous
en direction des portes de sortie, seulement pour constater qu’elles avaient toutes
été fermées.
158. L’un des surnoms attribués au Noble Prophète r.
159. Beni al-Asfar, littéralement “les Enfants du Blond”, était le terme qu’employaient les Arabes pour
désigner les Byzantins.
568 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Réalisant que ses hommes d’État résistaient à l’appel de l’Islam, Héraclius les
rappela calmement et revint sur ce qu’il avait dit auparavant :
« J’ai seulement mis seulement votre résistance à l’épreuve et votre loyauté
envers le christianisme… et j’apprécie ce que je viens de voir ! » Rassurés, les
hommes d’État s’inclinèrent alors devant lui avec reconnaissance. (Al Boukhari, Bad’ul-
Wahy 1, 5-6, Iman, 37, Shahadat, 28, Jihad, 102; Muslim, Jihad, 74; Ahmad, I, 262).

L’Empereur Héraclius, laissant les considérations du monde prendre le dessus,


nia ainsi pour lui-même la bénédiction de l’Islam, bien qu’il eût examiné et compris
sa vérité. Après s’être approché si près du seuil d’une félicité et d’une domination
éternelles, il se détourna.
C’est ‘Abdallah ibn Huzayfa t qui remit une lettre similaire au Perse Chosroès,
dont la réaction fut bien différente de celle d’Héraclius. Furieux de voir son nom
écrit en dessous de celui du Noble Prophète r, il déchira violemment la lettre et
lança des insultes abusives à l’émissaire.
‘Abdallah garda son calme et prononça ces paroles devant Chosroès et ses
hommes d’État :
« Vous, peuple perse, passez vos journées comptées sans prophète, sans
Écritures et avec le contrôle d’une simple partie du monde… vous vivez la vie d’une
rêverie fugitive ! La partie du monde sur laquelle vous n’exercez aucune influence
est en effet beaucoup plus grande. »
« De nombreux souverains sont venus avant toi, ô Chosroès, et ont régné
pour que leur désir soit porté vers ce monde d’ici-bas, soit vers l’au-delà. Ceux qui
désiraient l’au-delà ont reçu également leur part du monde. Quant à ceux qui dési-
raient le monde d’ici-bas, ils ont gaspillé leur part de l’au-delà. Dénigre ce que nous
t’offrons autant que tu veux, mais, par Allah, où que tu sois, quand ce que tu dépré-
cies viendra te chercher, tu seras enveloppé de frayeur et incapable de te protéger ! »
Chosroès resta indifférent et se vanta avec arrogance de sa part de souveraineté
et de la manière dont la défaite ou l’émergence d’un rival ne saurait lui faire peur.
(Suhayli, VI, 589-590).

Il ordonna ensuite à ses gardes de faire sortir ‘Abdallah du palais.


‘Abdallah ibn Huzayfa t s’empressa de retourner à Médine en se disant : « Par
Allah, loin de moi la pensée de m’inquiéter de ce qui pourrait m’arriver sur les
deux chemins (retour à Médine ou la mort), car j’ai fait mon devoir en remettant
la lettre du Prophète. » (Ahmad, I, 305; Ibn Sa’d, I, 260, IV, 189; Ibn Kathir, al-Bidaya, IV, 263-6;
Hamidullah, al-Wasaiq, p. 140).
Septième Année de L’hégire 569

Nous pensons ici à un autre récit de ‘Abdallah ibn Huzayfa t qui illustre bien
son immense courage et sa vertu :
« Durant le califat de Omar t, ‘Abdallah ibn Huzayfa t appartenait à un
bataillon musulman qui fut envoyé en Syrie, plus précisément dans la région de
Kaysariyya, afin de combattre les Byzantins où il fut fait prisonnier. Les autorités
byzantines, le considérant comme un prisonnier estimé, l’emmenèrent devant
l’Empereur, disant qu’il était …“un compagnon du Prophète”.
L’Empereur fit Enfermer ‘Abdallah dans une maison où il fut privé d’eau et
de nourriture. Par la suite, il envoya au Compagnon du vin et de la viande de porc.
On observa ‘Abdallah pendant trois jours, mais ce dernier ne toucha ni au vin et à
la viande de porc. “C’est vraiment maintenant qu’il commence à lutter, dirent les
hommes à l’Empereur, si vous ne le sortez pas (de là), il mourra certainement !”
On amena ‘Abdallah devant l’Empereur qui lui demanda :
— Qu’est ce qui t’empêche de manger et de boire ce que je t’ai fait parvenir ?
— Bien que la nécessité me permette de manger et de boire ce que tu m’as fait
parvenir, répondit le Compagnon, je ne veux pas faire de moi ou de l’Islam une risée
pour vous !
Ému par sa dignité, l’Empereur offrit à ‘Abdallah la main de sa fille et, qui plus
est, la fonction de gouverneur à la condition qu’il devienne chrétien.
— Même si vous deviez me donner tout votre royaume ainsi que les pays
arabes en échange de m’être détourné de la religion de Muhammad, ne serait-ce que
le temps d’un clin d’œil, je ne le ferais pas toujours pas ! dit ‘Abdallah.
— Alors je te ferai taire ! menaça l’Empereur.
— C’est à vous de décider ! répondit ‘Abdallah.
Le digne Compagnon fut ensuite suspendu à une croix. Les archers lui tirèrent
dessus mais le manquèrent délibérément – conformément à l’ordre qui leur avait été
donné – afin de lui faire un peu peur. Lors, il reçut, une fois de plus, l’ultimatum de
renoncer à l’Islam, mais ce noble Compagnon garda la tête haute.
— Ou tu deviens chrétien, cria l’Empereur de loin, ou je te fais jeter dans un
chaudron bouillant !
‘Abdallah ayant refusé, on apporta un chaudron en cuivre rempli d’huile d’olive
et d’eau que l’on fit bouillir. L’Empereur fit amener un autre prisonnier musulman
auquel il donna le même ultimatum qu’à ‘Abdallah. Quand lui aussi eut refusé,
il fut brutalement jeté dans le chaudron sous les yeux de ‘Abdallah. Son corps se
désintégra instantanément dans l’eau brûlante alors qu’il mourait de la plus noble
des morts.
570 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’Empereur répéta son ultimatum à ‘Abdallah. Rejeté une fois de plus, l’Empe-
reur ordonna alors qu’il soit jeté dans le chaudron. Juste avant d’y être jeté, ‘Abdallah
se mit à verser des larmes. Pensant qu’il avait changé d’avis, l’Empereur se fit amener
le Compagnon. Là, il répéta son ultimatum qui fut rejeté avec forte conviction.
— Alors pourquoi pleurais-tu alors ? cria l’empereur.
— Je pleurais, dit ‘Abdallah, parce que je me disais : «Tu vas être jeté dans
ce chaudron et ton âme s’en ira.» Que n’aurais-je donné pour avoir autant d’âmes
que j’ai de poils sur le corps pour que toutes soient jetées dans ce chaudron pour la
Cause d’Allah ?
La formidable attitude d’Abdallah pour la valeur et l’honneur de la foi affecta
beaucoup l’Empereur qui, voulant le libérer, lui dit:
— Baises mon front et tu seras libre !
Abdallah lui demanda :
— Et avec moi tous les prisonniers musulmans ?
— Oui ! dit alors l’Empereur.
‘Abdallah dira plus tard : « Je me suis alors demandé quel mal il y avait à baiser
le front d’un des ennemis d’Allah, en échange de mon salut et de celui des autres
prisonniers musulmans ! »
Ce jour-là, quatre-vingts prisonniers musulmans furent libérés. Ces derniers
racontèrent leur calvaire au Calife Omar t lors de leur retour à Médine.
« Baiser le front d’Abdallah est un devoir pour tous les Musulmans et je serai la
première personne à remplir ce devoir », s’exclama Omar t. Puis il se leva et baisa
le front de ‘Abdallah t. (Ibn Athir, Usd’ulGhabah, III, 212-213 ; Dhahabi, Siyar, II, 14-15).
Ce compagnon béni eut aussi l’honneur de remettre à Chosroès de Perse la lettre
d’invitation à l’Islam du Messager d’Allah r. Il fit preuve d’une grande foi devant le
souverain en l’invitant à l’Islam alors qu’il était pourtant entouré d’hommes de main
qui n’attendaient de leur Empereur qu’un simple geste pour l’exécuter.
Le Messager d’Allah r apprenant que Choroès avait déchiré la lettre et adopté
une attitude négative face à l’invitation à l’Islam fit cette invocation : « Ô mon
Seigneur ! Toi aussi détruit en morceau son royaume ! » (Al Boukhari, Ilim, 7 ; Ibn Athir,
Usd’ul-Ghabah, III, 212).

Le miracle fatidique du Prophète r se réalisa très peu de temps après, pendant


la période dite Khulafa-i Rashidun, (Califes Vertueux), lorsque tout l’Empire perse
fut passé sous contrôle musulman.
Chosroès, toujours vexé, fit parvenir un édit à Badhân, gouverneur du Yémen,
lui demandant de lui amener le Prophète r.
Septième Année de L’hégire 571

Les émissaires de Bazan se rendirent donc auprès du Messager d’Allah r et lui


remirent la lettre de Chosroès. Après lui avoir lu la lettre, le Seigneur des Mondes r
esquissa un sourire et invita les émissaires à l’Islam. Ces derniers lui demandèrent
d’écrire au moins une réponse à Chosroès s’il ne souhaitait pas les accompagner. Le
Noble Prophète r, par inspiration divine, leur dit alors :
« Allah a renversé Chosroès et l’a remplaçé par son fils Shirawayh. Shirawayh l’a
assassiné ce mois-ci, telle nuit et à telle heure ! »
Les émissaires frappés de stupeur lui demandèrent:
“Devons-nous écrire et informer le gouverneur de ce que vous avez présente-
ment déclaré ?”
Le Noble Prophète r leur répondit:
« Oui informez le gouverneur de ce que vous avez entendu et dites-lui également
que ma religion et ma souveraineté iront au-delà de la domination et du royaume de
Chosroès et s’étendront jusqu’aux points les plus reculés, là où s’aventurent les che-
vaux et les chameaux. Dites-lui aussi que s’il embrasse l’Islam, je lui concèderai des
terres sous sa gouverne et je le ferai roi de sa tribu d’Abna (Perses vivant au Yémen). »
Lorsque les paroles du Noble Prophète r furent finalement transmises à
Badhân, ce dernier réagit ainsi : “Je jure que cela ne sonne pas comme les paroles
d’un souverain. Je crois que cet homme est un prophète comme il le dit. Quoi qu’il
en soit, attendons le résultat ce qu’il a déclaré concernant Chosroès. S’il s’avère
que c’est vrai, alors il est véritablement un prophète envoyé au peuple par le Tout-
Puissant. Si cela s’avère faux, nous déciderons alors de la mesure à prendre !”
Puis il demanda aux émissaires :
— Comment l’avez-vous trouvé ?
— Ils déclarèrent en continuant à décrire ce qu’ils avaient vu:
— Nous n’avions jamais rencontré auparavant un dirigeant aussi majestueux
et humble, qui n’a peur de rien, malgré l’absence de gardes à ses côtés, qui marche
d’ailleurs à pied comme des hommes ordinaires ! Ses compagnons n’élèvent pas la
voix quand ils sont à ses côtés et ils parlent d’un ton doux.
Ils n’attendirent pas longtemps l’arrivée de la lettre impériale stipulant que
Shirawayh avait assassiné son père. De plus, l’heure de la mort correspondait exac-
tement à celle qu’avait donnée le Noble Prophète r. Badhân dit alors simplement :
“Cet homme est assurément un prophète envoyé par Allah !” Les Abna, peuple
d’origine persane vivant au Yémen, suivirent leur gouverneur en acceptant l’Islam.
(Ibn Sa’d, I, 260 ; Abu Nuaym, Dalail, II, 349-350; Diyarbakri, II, 35-37).
572 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Négus d’Abyssinie fut de loin le plus hospitalier en recevant la lettre du


Noble Prophète r et de son porteur ‘Amr ibn Umayya t.
Outre une invitation ouverte à l’Islam, la lettre envoyée au Négus comprenait
également des informations concises sur Maryam (Marie) et ‘Isâ (Jésus) L.
Ayant plus ou moins déjà appris l’Islam auprès des Musulmans qui avaient
précédemment immigré en Abyssinie et ayant adopté une approche encourageante à
son égard dès le début, le Négus prit son envol vers les horizons de la foi après avoir
reçu la lettre officielle d’invitation à la Vérité.
Il déclara sa foi en présence de Jafar t fils aîné d’Abû Tâlib, qui était avec lui à
cette époque. Puis, conformément aux souhaits du Noble Prophète r, il embarqua
à bord de deux navires d’immigrants musulmans pour les conduire de l’autre côté
de la Mer Rouge, déclarant qu’il avait lui-même embrassé l’Islam. Voici ses propos :
« Au Nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux. Du Négus
à Muhammad, le Messager d’Allah ! Que la paix, la miséricorde et les bénédictions
d’Allah soient sur toi, ô Prophète d’Allah ! Par Allah en dehors de Qui il n’existe pas
de divinité digne d’adoration !
« J’ai reçu ta lettre, dans laquelle tu parles de Jésus et je jure par le Seigneur des
cieux et de la Terre que Jésus n’est en effet ni plus ni moins que ce que tu as dit qu’il
était ! Nous avons compris ton message et avons bien traité tes envoyés.
« J’atteste que tu es véritablement le Messager d’Allah et je te prête serment
d’allégeance par l’intermédiaire de ton cousin (Jafar) devant lequel j’ai embrassé
l’Islam au nom d’Allah le Maître des mondes.
« Je t’envoie par la présente mon fils Arha. Sache que je n’exerce mon pouvoir
que sur ma propre âme ; et si tu veux que je vienne à toi, ô Messager d’Allah, je le
ferai tout de suite. Je témoigne que ce que tu dis est vrai. Que la paix soit sur toi,
ô Messager d’Allah… » (Ibn Sa’d, I, 259 ; Ibn Qayyim, III, 689 ; Hamidullah, al-Wasaiq, p. 100,
104-105).

Un autre jour de cette période le Noble Prophète r demanda: “… Oh vous les


gens ! Lequel d’entre vous, en n’attendant le salaire et la récompense que d’Allah, por-
tera cette lettre à Al Muqawqis160 d’Alexandrie.
Hatib bin Abi Beltaa t se levant d’un seul trait vint dire à notre Seigneur:«Moi
Messager d’Allah ! Je vais la lui porter !»
160. On appelait César un empereur byzantin, Khosrau (ou Chosroès) un souverain perse, Négus un roi
d’Abyssinie, Pharaon un souverain d’Égypte, Muqawqis un gouverneur d’Alexandrie, Baltimus un
roi d’Inde et Tubba un roi du Yémen. Il s’agit ici d’appellations générales à ne pas confondre avec des
noms particuliers. (Ibn Kathir, al-Bidayah, XI, 228).
Septième Année de L’hégire 573

Le Messager d’Allah r lui dit alors:


« Veuille Allah sanctifier cette mission pour toi ! »
Khâtib ibn Abi Balta’a t prit la lettre et se rendit auprès d’Al-Muqawqis.
Voici le contenu de la lettre :
« Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux,
De Muhammad, Serviteur et Messager d’Allah à Al-Muqawqis, Grand-chef des
Coptes,
Que la paix soit sur ceux qui suivent le droit chemin ! Je t’appelle à embrasser
l’Islam. Soumets-toi et tu seras sauvé et obtiendras de la part d’Allah une double
récompense. Si tu refuses et que tu te détournes, tu porteras la responsabilité du péché
des Coptes.

ƪźƆÈħġƇ ĭƆ ĻÖƆ IJÓĭĭĻÖÅÒijøÙƅ ĩĥĠĵĤÌƈ ÒijĤÓđÜÔÓ


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Ž Ž Ɔ ƆƆ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ
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Ž ÒŽ ijƇĤijĝƇ ĘƆ ÒŽ ijŽ Ĥƪ ijƆ ÜĪƈ
Ɔ ÍĘƆ ųÒ
« Dis : «Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous
: que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions
point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah». Puis, s’ils tournent
le dos, dites : «Soyez témoins que nous, nous sommes soumis».» (Al Imrân,3 : 64).»
Après avoir lu la lettre du Noble Prophète r Al Muqawqis ordonna à Khâtib de
s’approcher de lui, rassemblant en même temps ses éminents grand-prêtres.
C’est Khâtib lui-même qui raconte les évènements suivants :
« Al-Muqawqis me dit qu’il voulait s’entretenir avec moi de certaines choses.
— Certainement, lui répondis-je, vous n’avez qu’à demander.
— Ton maître, n’est-il pas un prophète ?
— Certainement… il est le Messager d’Allah.
— S’il est vraiment le Messager d’Allah, alors pourquoi n’a-t-il pas maudit son
peuple qui l’a forcé à émigrer de sa ville natale et à chercher refuge ailleurs ?
Je répondis à cela par une question personnelle :
— Tu ne contestes pas le fait qu’ Isâ (Jésus) u fils de Maryam, fût un prophète
d’Allah, n’est-ce pas ? Puisqu’il l’était, n’aurait-il pas pu demander à son Seigneur
d’anéantir son peuple quand il voulait l’exécuter, au lieu d’être élevé aux cieux ?
574 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Al-Muqawqis ne savait plus quoi dire. Après un bref silence, il me demanda de


répéter ce que je venais de dire. Je réitérai mes propos. Lui se tut ensuite de nouveau.
— Tu as bien parlé, dit-il après coup, tu es un homme sage qui mesure ce qu’il
dit ; et proche d’un homme sage qui t’a envoyé (vers moi).
Encouragé par ses paroles, je lui dis ensuite :
Avant toi un homme qui vivait dans ces contrées prétendait être le plus grand
seigneur. Alors Allah le Tout-Puissant s’en empara et le punit en faisant de lui un
exemple dans cette vie et dans l’au-delà. Tires-en donc une leçon et ne suis pas son
exemple !161
— Nous avons déjà une religion et nous ne l’abandonnerons pas à moins que
l’on nous offre quelque chose de mieux, dit-il.
— L’Islam est définitivement supérieur à la religion que vous suivez actuelle-
ment ! nous vous appelons à l’Islam qu’Allah le Tout-Puissant a choisi comme reli-
gion pour l’humanité. Muhammad Mustafâ r vous invite non seulement vous, mais
aussi l’humanité entière. Les plus vulgaires et les plus brutaux envers lui sont les gens
de Quraysh. Les plus méchants envers lui sont les Juifs. Les plus proches de lui, en
revanche, sont les chrétiens. Tout comme Moïse u a annoncé Jésus u, Jésus u a
annoncé Muhammad r. Nous vous invitons à accepter le Coran tout comme vous
appeliez les gens de la Torah à l’Évangile. Chacun est obligé de suivre le prophète
de son temps et vous l’avez fait jusqu’au temps de Muhammad Mustafâ r. Nous ne
voulons pas vous éloigner de la religion de Jésus u lorsque nous vous invitons à
l’Islam ; bien au contraire, nous vous appelons à agir conformément à sa prophétie.
À cela, Al-Muqawqis répondit :
— Pour autant que je puisse constater, la religion de ce prophète ne commande
pas d’abandonner le monde d’ici-bas et n’interdit pas l’acquisition de ces choses qui
sont acceptées et désirées. Il ne semble pas être un magicien égaré ni un menteur qui
prétend recevoir des nouvelles de l’inconnu. Il porte plutôt les signes caractérisant
un prophète, comme se faire révéler l’inconnu et dispenser les choses avant qu’elles
n’arrivent. Mais j’aimerais quand même avoir un peu plus de temps pour réfléchir.
En réponse à la lettre que j’avais apportée il fit écrire :
“Au Nom d’Allah, le Très-Miséricordieux, le Tout-Miséricordieux,
À Muhammad ibn ‘Abdallah, de la part d’Al-Muqawqis,
Que la paix soit sur toi !
161. Comme le poète exprime magnifiquementsi bien cet esprit :
Quiconque ne retire pas de leçons de l’histoire
Son travail sera d’être un exemple pour l’avenir.
Septième Année de L’hégire 575

j’ai lu ta lettre et j’ai bien compris ce que tu mentionnes et m’invites à faire. Je


savais qu’un autre prophète viendrait, mais je pensais qu’il apparaîtrait aux alen-
tours de Damas. J’ai rendu hommage à ton émissaire et t’envoie deux jeunes filles
esclaves très appréciées des Coptes et quelques vêtements, ainsi qu’une mule comme
monture. Que la paix soit sur toi ! »
Al-Muqawqis n’a rien fait de plus, pas plus qu’il n’a accepté l’Islam. “Quoi
qu’il arrive, que les Coptes n’entendent pas un mot de toi !” me dit-il alors que je
m’apprêtais à repartir.” (Ibn Kathir, al-Bidaya, IV, 266-267; Ibn Sa’d, I, 260-261; Ibn Hajar, al-
Isaba, III, 530-531).

De toute évidence, Al-Muqawqis reçut l’appel du Prophète r de façon aimable.


Il avait anticipé l’arrivée du dernier prophète, mais attendait sa manifestation dans
les environs de Damas. Cette supposition avait fini par l’empêcher d’accepter la véri-
té et, par extension, d’embrasser pleinement l’Islam. Mais avec Khâtib t il envoya
une mule (chargée)ainsi que deux filles esclaves, l’honorable Mâria et sa sœur Sirin.
Pendant le voyage de retour, Khâtib s’assura d’initier à l’Islam les deux sœurs,
les encourageant à devenir musulmanes, ce qu’elles firent. ( Ibn Sa’d, VIII, 212).
Ces dernières comprirent la vérité éternelle avant même de parvenir à Médine.
Une fois que Khâtib lui eut transmis les paroles d’Al-Muqawqis, le Noble pro-
phète r déclara :
« l’homme égaré ne pouvait pas renoncer au pouvoir…mais ce qu’il ne pouvait
pas perdre ne restera pas avec lui. » (Ibn Sa’d, I, 260-261 ; Diyarbakri, II, 38).
Le Prophète d’Allah r maria Sirin à Hasan ibn Thâbit, tandis que lui-même
épousa Mâria qui donna ensuite naissance à son fils Ibrahim. Ce mariage, contracté
par la Volonté divine, récolta un certain nombre d’avantages politiques. Cela laissa
une empreinte durable sur les Égyptiens ainsi que sur les Byzantins – relativement
à leur désertion durant les guerres postérieures menées contre les Musulmans – et
permit aux Croyants de marcher vers la victoire avec plus de confiance.
Le Noble Prophète r avait donné ce conseil à ses Compagnons, illustrant par
ce biais la conduite idéale à l’égard des proches :
« Vous allez conquérir l’Égypte, terre où les habitants utilisent une échelle appelée
qirat. Je vous conseille donc de traiter ses gens avec gentillesse. Gardez ma volonté, car
nous sommes leurs parents, d’ascendance et de mariage.» (Muslim Fadail Sahabah 226).
Comme on le sait, la lignée du Prophète d’Allah r atteint Ismâ’îl u et comme
Hajar, la mère d’Ismâ’îl était originaire d’Égypte, le Noble Prophète r considérait
les Égyptiens comme ses parents. Quant à la parenté conjugale, elle provient de
l’honorable Mâria. (Ibn Hishâm, I, 4).
576 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Harith, le chef des Arabes Ghassanides de Syrie agit avec arrogance à l’égard de
la lettre du Noble Prophète r remise par Shuja ibn Wahb. Il demanda même une
autorisation officielle de l’empereur de Byzance pour marcher sur les Musulmans.
Mais sa demande fut rejetée. (Ibn Sa’d, I, 261).
Hawza, le chef de Yamamah, rejeta lui aussi l’invitation remise par Salit ibn
Umayr. Il mourut peu de temps après dans les affres de son ignorance. (Ibn Sa’d, I, 262).

Le Noble Prophète r donna d’importants conseils à chacun de ses ambassa-


deurs avant de les envoyer. Par exemple, avant de faire parvenir une lettre aux habi-
tants de Khimyar conseilla à Iyash t: « Si tu arrives de nuit, attends le matin pour
entrer. Ensuite, procède à l’ablution rituelle et offre deux unités de prière. Invoque
Allah pour le succès et pour être agréablement reçu. Alors prépare-toi, prends ma
lettre de la main droite et présentes-la avec ta main droite dans leur main droite. Si
tu agis ainsi, ils t’accepteront… »
Iyash t raconte : “J’ai fait exactement ce que le Messager d’Allah avait conseil-
lé. Les évènements ultérieurs, aussi, se sont déroulés exactement comme il l’avait
prédit.” (Ibn Sa’d, I, 282-283).
Ces invitations furent les premiers pas que l’Islam prit pour embrasser le
monde entier depuis Médine. Ayant pris vie dans la Péninsule arabique, l’Islam a
continué de croître de jour en jour. Après tout, les fondements solides de la marche
triomphante avaient été posés par le Bienheureux Prophète lui-même r.
Septième Année de L’hégire 577

Le sort jeté par les Juifs sur le Noble Prophète r


À cette époque les dirigeants juifs firent cette proposition à l’habile magicien
Asam ibn Lâbid, qui était en apparence musulman, mais gardait secrète sa croyance
juive. “Tu es notre plus habile magicien.Muhammad a encorcelé nos hommes et
nous ne pouvons rien faire. Tu as vu comment il a défié notre religion, tué et exilé
beaucoup des nôtres. Pour tous les dommages qu’il nous a causés, nous te confions
le devoir de le punir en lui jetant un sort !”
Il reçut trois dinars d’or pour la mission. Ibn Lâbid se mit immédiatement à la
tâche et commença à chercher des moyens d’obtenir quelques mèches de cheveux
du Noble Prophète r. Tant bien que mal, il réussit à se procurer ce qu’il cherchait.
Nouant certains types de nœuds sur les cheveux et soufflant dessus, il les plaça dans
une coquille séchée de fleur de datte. Il la plaça ensuite sous un tremplin à l’intérieur
du puits de Zarwan.
Juste après le sortilège, le Noble Prophète r tomba malade et la lumière de ses
yeux s’estompa. La maladie qui s’ensuivit pendant des jours réduisit son appétit et
il ne put ni manger ni boire.
Allah I montra à Son Messager r qui et comment cette magie avait été réalisée
et où elle avait été cachée.
Le Prophète r envoya alors ‘Alî et ‘Ammar y au puits de Zarwan. Ils y pui-
sèrent l’eau qui était devenue rouge, comme du henné, et le vidèrent. En soulevant
le marchepied, ils y trouvèrent les nœuds cachés.
Entre temps Jîbril u révéla les sourates Al-Falaq et An-Nâs et au fur et à
mesure que le Noble Prophète r récitait un verset, un nœud du sortilège se défit et
lors de la récitation du dernier verset, le Noble Messager r ressentit un soulagement,
comme s’il avait été libéré d’une corde.
Il fit ensuite fermer le puits de Zarwan, ne convoqua pas Ibn Labid, n’évoqua
pas son crime et ne le condamna pas. Non seulement il ne le punit pas, bien qu’il fut
coupable d’avoir attenté à sa vie, mais il n’en a même pas voulu aux membres de sa
tribu, les Juifs de Banû Zurayq. ( Voir Ibn Sad II 197; Al Boukhari Tıbb 47, 49; Muslim Salâm 43;
An Nasaï Tahrîm 20; Ahmad IV 367, VI 57; Aynî, XXI, 282).

Le Noble Prophète r déclara un jour :


“Évitez les sept péchés destructeurs. »
On lui demanda : “Et quels sont-ils Ô messager d’Allah !”
Il r dit : « Associer quelque chose à Allah, la sorcellerie, tuer la vie qu’Allah a
rendue sacrée sans raison légale, manger l’intérêt, manger l’argent de l’orphelin, fuir le
champ de bataille et accuser d’adultère les femmes chastes, croyantes et éloignées des
actes immoraux. » (Al Boukhari, Wasaya, 23 ; Muslim, Iman, 145).
578 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un autre hadith rapporte que le Noble Prophète r a dit :


« Quiconque fait un nœud puis souffle dessus a pratiqué la sorcellerie. Et qui-
conque pratique la sorcellerie a commis un acte d’association. » (Nasa’i, Tahrim, 19).
« La prière d’un arraf162 qui donne des nouvelles de l’endroit où se trouve un objet
volé ou perdu, et qui lui demande quelque chose et confirme ce qu’il dit, ne sera pas
acceptée avant quarante jours. » (Muslim, Salam, 125).

La prıse de Khaybar: Le coup fatal aux juifs (Safar-Rabi I / Juin-Juillet 628)


Les Juifs de Khaybar étaient d’accord avec les hypocrites pour considérer que le
Traité d’Al Hudaybiya reflétait la supposée faiblesse des Musulmans. Incité par les
nombreux Juifs exilés qui s’étaient réfugiés dans leurs fortins, un grand feu d’anta-
gonisme prit bientôt Khaybar dans ses flammes. Les Juifs promirent de donner la
moitié de leurs récoltes annuelles aux Banû Ghatafan à condition qu’ils se joignent
à eux contre les Croyants.
Les Banû Ghatafan étant plus que disposés à collaborer se mirent rapidement à
penser aux moyens de mettre leur force à exécution. L’envoi d’une armée à Médine
fut (après concertation) le plan proposé. (Voir, Waqidi, II, 530-531, 566, 640 ; Ibn Sa’d, II, 92).
Pour enrayer l’hostilité juive et assurer la paix, le Noble Prophète r envoya
Abdallah Ibn Rawahah t à Khaybar. Le Compagnon revint bientôt avec un refus
peu accueillant. La bataille était devenue inévitable et une marche sur Khaybar pra-
tiquement imminente. Le Noble Prophète r déclara en ces circonstances :
« Que seuls ceux qui veulent le jihad se joignent à nous ! » (Ibn Sa’d, II, 92, 106).
Médine, par ailleurs, était située juste entre La Mecque et Khaybar et ainsi
chaque fois qu’il y avait un conflit avec La Mecque, Khaybar représentait toujours
de l’arrière une menace potentielle.
Les Compagnons t entendirent avec enthousiasme et répondirent à l’appel
du Noble Prophète r. Mais tout en appelant ses compagnons y au combat, le Noble
Prophète n‘accepta pas dans l’armée ceux qui n’étaient pas présents à Al-Hudaybiya.
L’armée musulmane, dans les plus délicats moments avait souffert plus d’une
fois de la trahison des hypocrites qui, avaient réussi à se faufiler au sein des cam-
pagnes précédentes dans le seul but d’acquérir du butin. Ces mêmes personnes vou-
laient désespérément s’y joindre dans l’espoir de mettre la main sur l’éblouissante
richesse des Juifs de Khaybar. Elles furent donc toutes rejetées.
162. Un kahin, ou devin, est une personne qui prétend connaître les évènements futurs. Bien que d’un
certain point de vue, un arraf est aussi un kahin, le terme étant réservé à une personne qui donne des
informations sur un bien volé ou perdu. Le munajjim, ou astrologue, est aussi un kahin, à la différence
que celui-ci prétend connaitre les évènements futurs en observant les étoiles.
Septième Année de L’hégire 579

C’était d’ailleurs la volonté d’Allah, Gloire à Lui :

ÓĬƆ ijđƈƇ ×Ýƪ Üī


Ɔ Ĥƪ ģĜƇ
« … Dis : “Jamais vous ne nous suivrez”… » (Al-Fath, 48 : 15).
La préparation musulmane pour aller à Khaybar inquiéta et mobilisa les Juifs
de Médine qui étaient liés à un traité avec le Noble Prophète r. Ils craignaient que
les juifs de Khaybar ne subissent une perte similaire à celle qui avait déjà frappé
Qaynuqa, Nadir et Qurayza.
Afin d’affaiblir potentiellement les Croyants, chaque Juif de Médine dont un
Musulman lui était redevable demanda un remboursement immédiat.
L’évènement mentionné ci-dessous, ainsi que l’attestation de ce changement de
circonstances, illustre également la sensibilité du Noble Prophète r relativement au
respect des droits d’autrui :
‘Abdallah ibn Hadrad devait cinq dirhams à Abû Shahm, un Juif, pour de l’orge
que celui-ci lui avait vendue. Quand Abû Shahm lui demanda brusquement de
mettre un terme à sa dette, Ibn Hadrad le supplia de lui accorder un peu de temps
et lui dit:
“Si Allah le veut, dit-il, je m’acquitterai de ma dette, car le Tout-Puissant a pro-
mis à Son Messager le butin de Khaybar. Nous sommes sur le point de nous rendre
dans la ville la plus riche de tout le Hedjaz !”
Cela ne fit qu’alimenter la colère et du Juif qui s’écria:
« Pensez-vous que les Juifs de Khaybar sont comme les Arabes que vous avez
combattus jusqu’à présent ? Je jure sur la Torah qu’il y a au moins dix mille com-
battants sur place ! »
— Toi, tu es l’ennemi d’Allah ! répondit Ibn Hadrad t, tu oublies que tu vis
sous notre protection. Par Allah, je te conduirai auprès du Messager d’Allah !
Il le prit par le bras, l’emmena au Noble Prophète r et lui dit en lui exposant
les paroles d’Abû Shahm:
« Écoute ce que dit ce Juif, ô Messager d’Allah ! »
Le Noble Prophète r ne prononça pas une parole audible et ils ne purent
qu’observer un léger mouvement de ses lèvres, sans pouvoir discerner ce qu’il disait.
— Il a commis une injustice envers moi, Abû’l-Kasim, se plaignit le Juif. Il ne
s’est pas acquitté de sa dette !
— Rends-lui ce que tu lui dois ! dit le Messager d’Allah r à Ibn Hadrad.
580 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Celui-ci évoqua sa pauvreté et assura qu’il s’acquitterait de sa dette grâce au


butin de Khaybar. Mais le Noble Prophète r réitéra son ordre à deux reprises.
Là-dessus Ibn Hadad t se rendit au bazar et y acquit des vêtements.
— Je te vends ces vêtements, dit-il au Juif qui accepta de les acheter pour quatre
dirhams, ce qui lui permit de rembourser sa dette. (Ahmad, III, 423 ; Waqidi, II, 634-635).
Le Noble Prophète r en conduisant l’armée musulmane vers Khaybar chercha
refuge dans le Tout-Puissant en disant :

Ɔ ƈ Ɔ ƈ
Ôƪ òƆ IJ
Ɔ īƆ ĥŽ ĥƆ ĜŽ ÈÓĨIJ
Ɔ ďƈ ׎ ùĤÒ
ƪ īĻ Ɔ ĄòƆ ƆŶÒŽ Ôƪ òƆ IJ Ɔ īƆ ĥŽ ĥƆ ČŽ ÈÓĨƆ IJ
Ɔ ďƈ ׎ ùĤÒ
ƪ ÚÒijƆ ĩƆ ùĤÒ
ƪ Ôƪ òƆ ħƪ ıƇ ĥž ĤƆÒ
óĻìƆ IJ Ùƈ ĺóĝĤÒĮƈ ñƈ İ Ɔ ğƆ ƇĤƆÉøŽ ƆȱīƆ ĺŽ òƆ ðƆ ÓĨƆ IJ
Ɔ óƆ ĻŽ ì Ɔ æÓ ƈ ÔòIJīĥĥĄƆÈÓĨIJīĻĈÓĻýĤÒ
ƈ ĺƆ óĤÒ
ƆŽ Ɔ ƆŽƆ ž ƪ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ž Ɔ Ɔ ƈ ƪ
ÓıĻ ƈ óƈ üƆ IJÓıĥƈ İŽ ƆÈóƈ üƆ IJÓİƆ óƈ ü ƈ ğƈÖðijđĬIJÓıĻĘÓ ƈ ĨóĻìIJÓıĥƈ İÈ
Ɔ ĘÓĨ Ɔ ž Ɔ Ɔ īĨ
ž Ɔ ž Ɔ Ž Ɔ Ƈ ƇƆƆ Ɔ Ɔ ƆŽƆ Ɔ Ž
« Ô Allah, Seigneur des sept cieux et de ce qui est en dessous, des sept terres et de
ce qui est à l’intérieur, des démons et de ceux qu’ils égarent, des vents et de ce qu’ils
projettent ! nous Te demandons le bien de cette cité, de ses habitants et de ce qu’elle
contient ! Et nous nous réfugions en Toi contre les maux de cette cité, de ses habitants
et de ce qu’elle renferme163 ! » (Ibn Hishâm, III, 379 ; Waqidi, II, 642).
En chemin, les Compagnons commencèrent tous ensemble à dire à voix haute
le takbir “Allahu Akbar, Allahu Akbar ; La ilaha ill-Allahu wa Allahu Akbar !”.
Le Noble Prophète r leur dit alors : « Ayez pitié de vous-mêmes ; car vous ne
vous adressez pas à un sourd et votre Collocuteur n’est pas absent non plus ! Vous
vous adressez à Celui qui vous voit et vous entend, et qui est avec vous où que vous
soyez. Celui que vous invoquez est plus proche de vous que le cou de sa monture ! » (Al
Boukhari, Daawat, 50, 67 ; Muslim, Dhikr, 44).

Notre Prophète r arriva à Khaybar la nuit et y attendit. Parce que Muhammed


la Lumière des Existences avait coutûme de ne jamais lancer d’assaut la nuit et
d’attendre le matin pour attaquer.
Le matin les juifs sortirent avec leurs pioches, leurs pelles et leurs paniers. Mais
aperçevant l’armée musulmane campée juste devants leurs fortins, ils coururent
pour s’y réfugier tout en criant : “C’est Muhammad… Muhammad et son armée !”
Le Noble Prophète r s’écria alors : “Allahu Akbar… Khaybar tombera ! Lorsque
nous descendrons sur le seuil de leurs demeures, quel mauvais matin, alors, pour ceux
qui avaient été avertis !” (Al Boukhari, Maghazi, 38 ; Ibn Hishâm, III, 380).
163. Le Noble Prophète r faisait toujours cette invocation avant d’entrer dans une localité et notamment
quand il l’apercevait de loin. (Hakim, I, 614/1634).
Septième Année de L’hégire 581

Le Prophète d’Allah r installa son camp à Raji, entre Ghafatan et Khaybar,


coupant ainsi l’accès des deux alliés et empêchant leur plan d’aide mutuelle. En fait,
lorsque Ghafatan avait tenté d’aider les Juifs à se conformer à leurs demandes, ils
n’eurent d’autres choix que de revenir, effrayés, réalisant que leur chemin avait été
coupé par les Croyants. Forcés de se battre seuls contre les Musulmans, les Juifs de
Khaybar se replièrent dans leurs fortins. Pendant le siège, des rumeurs circulèrent
parmi les Juifs pour les inciter à prendre les armes contre les Musulmans, comme l’a
dit le Noble Prophète r :
« Un diable s’est approché des Juifs et a dit : “Muhammad vous combat seule-
ment pour prendre possession de vos biens : Dis-leur : Dites “La ilaha ill Allah” et
protégez ainsi vos biens et votre sang… quant à votre épreuve dans l’au-delà, c’est à
Allah qu’il appartient de la juger ! ” »
Mais la réponse des Juifs ne se fit pas attendre : “Par la Torah de Mûsâ que nous
avons, nous ne t’obéirons pas et ne quitterons pas notre religion !” (Waqidi, II, 653).
Le siège durait depuis plusieurs jours. Les Croyants étaient presque à court de
provisions. Les conditions de la bataille étaient très difficiles. Les Musulmans qui
avaient beaucoup de martyrs et de blessés graves étaient exposés à de nombreux
problèmes. Quoi qu’il en fût Messager d’Allah r n’hésitait pas à saisir chaque occa-
sion pour appeler les gens à Allah, Louanges à Lui. En effet le Messager d’Allah r
ne considérait personne indigne ou trop petit pour recevoir l’invitation à l’Islam.
En fait un évènement qui se produit lors de la conquête de Khaybar en est un
merveilleux exemple.
Le Messager d’Allah r expliqua longtemps l’Islam à un esclave qui gardait les
moutons d’un juifs et il s’en suivit que l’esclave reçut la guidance. (Ibn Hishâm, III, 398).
Voilà comment tout cela se déroula :
Yasar t, qui gagnait sa vie en gardant un troupeau de moutons appartenant à
un Juif, croisa un matin le Noble Prophète r alors qu’il menait les bêtes à l’extérieur
des murs du fortin. Après qu’ils eurent discuté, Yasar t décida de devenir musul-
man et sur la recommandation du Prophète r changea son nom d’origine en Aslam.
Il demanda ensuite au Messager d’Allah r ce qu’il devait faire des moutons dont il
avait la charge.
« Fais demi-tour et refoule-les ! conseilla le Noble Messager r. N’aie aucun
doute… ils retourneront tous à leur propriétaire. »
Aslam t prit alors une poignée de cailloux qu’il jeta vers les bêtes en criant :
“Retournez près de votre maître ! Par Allah, nous nous séparons pour toujours !”
Les moutons rebroussèrent chemin à l’unisson et pénétrèrent dans le fortin
comme si quelqu’un les avait guidés.
582 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Aslam t rejoignit ensuite les


autres Musulmans dans la bataille
sous les murs du fortin. (Ibn Hishâm,
III, 397-398; Ibn Hajar, al-Isabah, I, 38-39).

Participant activement à la
bataille dès qu’il avait embrassé
l’Islam, Aslam t tomba martyr
peu de temps après.
Son cadavre fut alors amené
au Messager d’Allah r qui, avec
un groupe des compagnons y qui
l’entouraient, fixa le défunt pen-
dant un certain temps et finit par
tourner son visage dans une autre
direction. Quand on lui demanda
pourquoi, il répondit : « Il est à pré-
sent en compagnie de ses épouses :
deux houris aux beaux yeux ! » (Ibn
Hishâm, III, 398 ; Ibn Hajar, al-Isaba, I,
38-39).

Alors que la bataille commen-


çait à mettre à l’épreuve la patience
des Croyants qui étaient épuisés de
voir leurs assauts repoussés, le Noble Prophète r annonça : « Demain, j’offrirai mon
étendard à celui par qui Allah accordera la chute de Khaybar. Il aime Allah et Son
Messager et Son Messager l’aime… »
Les Compagnons présents à la bataille passèrent la nuit à spéculer sur celui qui
allait hériter de l’étendard du Prophète r.
À l’aube ils se précipitèrent vers le Prophète r avec l’espoir d’être de ceux qui
auront atteint l’amour d’Allah et de Son Messager. Leur enthousiasme était si vif
qu’Omar t confessera plus tard : “Je n’ai jamais voulu plus que ce jour être com-
mandant. J’essayais de me faire remarquer en espérant que le Messager d’Allah
m’appellerait !”
Finalement, le Noble Prophète r choisit ‘Alî t qui, bien que porteur d’une
maladie de l’œil à l’époque, lui fut amené. ‘Alî t était incapable de distinguer quoi
que ce soit devant lui. Réalisant qu’il luttait pour voir le Prophète r souffla dans ses
yeux et par la grâce du Tout-Puissant, “le lion de Dieu” guérit.
Le Messager d’Allah r le revêtit d’une armure et lui tendit l’étendard en lui
disant:
Septième Année de L’hégire 583

« Avance maintenant et ne regarde ni à gauche ni à droite jusqu’à ce qu’Allah


t’accorde la victoire (al-fath) ! »
Alî t s’élança, s’arrêta pour demander sans regarder derrière :
« Pourquoi dois-je les combattre, ô Messager d’Allah ? »
— Combats-les jusqu’à ce qu’ils témoignent qu’il n’y a pas d’autre divinité
qu’Allah et que Muhammad est Son Messager. S’ils acceptent – à moins qu’ils ne
commettent ce que la religion leur interdit – ils auront protégé leurs biens et leur
sang ; et leurs comptes véritables resteront à Allah. Approche-toi d’eux lentement et
calmement. Tout d’abord, invite-les à l’Islam. Il serait préférable (pour toi) de mettre
un seul homme dans la la bonne voie que de posséder des chameaux roux ! (Al Boukhari,
Ashab’un-Nabi, 9 ; Muslim, Fadail’usSahabah, 32-34 ; Haythami, VI, 151).
Les plus fameux guerriers juifs furent tous tués ce jour-là. Khaybar tomba, avec
ses huit fortins, dont deux se rendirent sans combattre.
Ce que le Noble Prophète r avait prédit était devenu réalité. Les Juifs déplo-
rèrent au total quatre-vingt-treize victimes, contre quinze martyrs musulmans164.
Abou Hourayra t raconte :
« Nous étions avec le Messager d’Allah r à la campagne de Khaybar.
Il dit à propos d’un homme qui disait qu’il était devenu Musulman:
« Il est de ceux du feu de l’enfer ! »
Lorsque finalement les hostilités débutèrent, cet homme se battit vaillamment
et fut grièvement blessé. Des Compagnons informèrent le Messager d’Allah r en
disant : “L’homme que tu viens de déclarer être en Enfer a combattu courageuse-
ment et vient de mourir !”
Le Messager d’Allah r réitéra son propos : “Il est de ceux de l’Enfer !”
Quelques musulmans se mirent alors à douter après cette réponse. Et puis, un
peu plus tard, on lui annonça que l’homme n’était pas encore mort, mais que sa
blessure était mortelle. La nuit, l’homme, ne pouvant plus supporter la douleur, se
suicida d’un coup d’épée. On informa alors le Messager d’Allah r de la situation qui
déclara : “Allah-u Akbar ! Je témoigne que je suis le Serviteur et le Messager d’Allah”.
Puis il ordonna à Bilal d’annoncer que “Seuls les Musulmans entreront au
Paradis. Il est certain qu’Allah fortifie aussi cette religion par l’entremise d’un
pécheur”. » (Al Boukhari, Jihad, 182, Maghazi, 38 ; Qadar, 5 ; Muslim, Iman, 178).

164. Sayyid Sayfullah g a dit à propos de cet évènement: "Ne faites pas l'éloge des méchants et des ignorants
pour une bouchée de pain parce que c'est en fait de l'ignorance. Battez votre ego aussi fort que la forteresse
de Khaybar pour être un héros comme le fut Ali."
584 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Puisque les Juifs voulurent, après la victoire à Khaybar, continuer à travailler


sur leurs terres en échange de la moitié des produit le Prophète d’Allah r ne les exila
pas tous à la condition qu’il puisse les expulser quand il le jugerait bon. Le Noble
Prophète r accepta donc la requête des Juifs de travailler sur ces terres fertiles avec
en contrepartie le partage de la moitié de toute la récolte. Ces juifs sont restèrent sur
ces terres jusqu’au califat de Omar t. (Muslim, Musaqat, 5 ; Abou Daoud, Kharaj, 23-24/3007).
Abdallah Ibn Rawahah t fut chargé d’aller tous les ans à Khaybar pour estimer
et recueillir comme convenu la moitié de la récolte des Juifs. Mais les Juifs, dérangés
par la méticulosité qu’Abdullah Ibn Rawahah t apportait dans l’estimation qu’il
faisait, allèrent jusqu’à tenter de le soudoyer pour qu’il traite en leur faveur.
Il t s’exclama alors :
“En dépit de tout ce que vous avez fait et que vous soyez, par Allah, les êtres
les plus méprisables parmi toute la création d’Allah, cela ne m’empêche pourtant
pas d’être juste envers vous. Ce que vous m’offrez est un pot-de-vin et se livrer à la
corruption est inadmissible. On ne touche pas à ça ! ”.
Les Juifs admiratifs répondirent :
“C’est justice telle que le ciel et la terre restent en ordre !” (Muwatta, Musaqat, 2).

Délicatesse envers les droits d’autrui


Le butin de Khaybar fut réparti entre les personnes présentes à Hudaybiya,
qu’elles l’aient été ou non, car Allah I avait promis les richesses de Khaybar aux
Musulmans présents à Hudaybiya comme stipulé au 20ème verset de la sourate
Al-Fath. (Waqidi, II, 684).
Omar ibn al-Khattâb t explique ce qui suit :
« Le jour de la bataille de Khaybar un groupe de Compagnons du Prophète r
citant le nom des morts dirent :
«Untel est mort en martyr! Untel est mort en martyr!».
Puis ils s’approchèrent d’un autre mort et dirent:
«Celui là aussi est mort en martyr!»
Le Messager d’Allah r intervint :
“Non je l’ai vu en Enfer recouvert d’un manteau qu’il avait injustement saisi du
butin !” » (Muslim, Iman, 182).
Le statut de martyr, bien qu’il soit un des plus hauts degrés qu’on puisse
atteindre car il compense la majorité des péchés d’une personne, ne peut tolérer la
violation des droits d’autrui telle que l’usurpation d’une propriété commune.
Septième Année de L’hégire 585

Le Noble Prophète r, en annonçant que le compagnon qui avait été annoncé


comme étant mort en martyr serait puni de l’Enfer pour un manteau qu’il s’était
approprié sans doit, a enseigné à sa Communauté que l’usurpation de la propriété
commune et l’intrusion dans les droits d’autrui constituent une offense impardon-
nable.
Le Noble Prophète r avait un esclave noir du nom de Midam qui lui avait été
offert en cadeau par Rifa’a ibn Zayd. Lors du déchargement du fardeau du Messager
d’Allah r une flèche dont on ne sait pas d’où elle venait frappa à mort Midam.
Les Musulmans dirent avec détermination leur joie en disant:
«Ô Midam ! Sois béni au Paradis !»
Le Messager d’Allah r leur dit:
«Ce n’est pas comme vous avez dit ! Je jure par Allah qui tiens dans Son pouvoir
mon âme qu’il brûle maitenant en Enfer sur le tapis qu’il a pris avant le partage du
butin de Khaybar!»
Les Croyants furent terrifiés.
Un homme s’approcha du Noble Messager r et lui tendit un ou deux lacets de
chaussure, puis dit avec un certain embarras :
« Je les avais pris pour mes chaussures, ô Messager d’Allah, avant que le butin
ne soit distribué… »
« Alors ce sera un ou deux lacets du feu de l’Enfer pour toi », répondit le Messager
d’Allah r. (Al Boukhari Iman 33; Muslim, Iman, 183).

Le jour de la chute de Khaybar, un homme s’adressa au Noble Messager r en


prétendant avoir fait “…un profit supérieur à ce que les habitants de cette vallée ne
pouvaient imaginer.”
Le Noble Prophète r demanda
« Vraiment ? Qu’as-tu donc fait ? »
L’homme répondit :
« Je n’ai pas cessé de vendre ce que j’avais acheté jusqu’à ce que je puisse faire
un profit de trois cents uqiyya ! »
Le Noble Messager r demanda:
« Dois-je te dire ce qui procure le meilleur bénéfice ? »
L’homme dit: « Oui, ô Messager d’Allah dis le moi! »
Le Messager d’Allah r lui répondit:
586 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« C’est de faire deux unités de prière juste après la prière obligatoire ! » (Abou
Daoud, Jihad, 168/2785).

Les finances des Muhajirun s’améliora grandement après qu’ils aient reçu leur
part du butin de Khaybar en marchandises et en dattes. Le Messager d’Allah r rendit
alors aux Ansars les palmeraies et les palmiers qu’ils leur avaient prêtés pour qu’ils
en tirent profit. (Ibn Qayyim, III, 359).

L’arrivée des Daws à Médine


Pendant ce temps, des membres de la tribu des Daws se rendaient à Médine.
Leur chef, Tufayl ibn Amr t, qui était déjà venu à La Mecque durant les premières
années suivant l’avènement de l’Islam, avait accepté l’Islam après avoir discuté avec
le Prophète r. Puis, ayant reçu la permission du Prophète r de retourner auprès de
son peuple, il avait commencé à les inviter à l’Islam. Abou Hourayra t avait été le
premier à répondre à son appel. (Ibn Hajar, al-Isabah, II, 226).
Le nombre de Musulmans, qui augmenta progressivement, atteignit soixante-
dix à quatre-vingt foyers qui tous migrèrent à Médine pendant la bataille de
Khaybar. S’étant rendus directement à Khaybar de là, ils rejoignirent le Noble
Prophète r dans la bataille. Abou Hourayra t devint très impatient pendant le
trajet, anxieux et empressé de rencontrer le Noble Prophète r le plus tôt possible.
En chemin, il récita le vers poétique suivant :
“Ô nuit du voyage ! Mais c’est toi qui me sauves du pays de l’incrédulité et du
déni !” (Al Boukhari, Maghazi, 75 ; Waqidi, II, 636).
Quand Abou Hourayra t parvint enfin à Khaybar avec le reste de sa tribu de
Daws, Khaybar était déjà tombé.(Ibn Sa’d, IV, 328).
Le Noble Prophète r l’ayant aperçu lui demanda d’où il venait alors Abou
Hourayra t lui répondit : “De Daws”. Le Noble Prophète déclara : “Je n’ai vu que
de la bonté chez ceux que j’ai rencontrés depuis Daws !” (At Tirmidhi Manaqib, 46/3838).
Et il r ordonna d’allouer une part du butin de Khaybar aux Daws. (Ibn, Sa’d, I 353).

Le retour des immigrants d’Abyssinie


Alors que Khaybar était en train de tomber un groupe de seize Compagnons y
menés par Jafar t rentrait d’Abyssinie à Médine.
Lorsqu’ils apprirent que le Noble Prophète r se trouvait à Khaybar, les immi-
grants s’y rendirent immédiatement et s’unirent rapidement à lui.
Le noble Prophète r s’exclama en voyant Jafar t :
« Tu me ressembles tant en apparence qu’en comportement ».
Septième Année de L’hégire 587

Puis il ajouta : « Je ne sais pas ce qui me rend le plus heureux : la chute de


Khaybar ou le retour de Jafar ! » (Ibn Hishâm, III, 414).
Jafar t était infiniment ravi de recevoir les précieux compliments du Noble
Prophète r. Tel un enfant innocent, il se mit à tourner avec extase autour du
Messager d’Allah r jusqu’à perdre le contrôle. (Ahmad, I, 108; Ibn Sa’d, IV, 35).
Le Noble Prophète r n’interdit pas à Jafar t d’agir de la sorte. Certains
ordres soufis prirent plus tard cela comme une confirmation (sunnat’ut-taqriri) du
Messager d’Allah r et comme un précédent pour le wajd ou l’état d’extase165.
La tribu Ashari du Yémen était également aux côtés des immigrants.
Parmi eux se trouvait Abû Mûsâ al-Asharî t qui raconte :
« Pendant notre séjour au Yémen, nous, les Asharis, fûmes informés que le
Messager d’Allah r était apparu. Là-dessus, avec cinquante-deux ou cinquante-
trois membres de notre tribu, nous décidâmes de nous rendre auprès du Messager
d’Allah r. Les conditions météorologiques se détériorant et devenant défavorables
sur le chemin, notre navire nous déposa au pays du Négus abyssinien. Là, avec ses
amis, nous rencontrâmes Jafar t qui nous dit : “Le Messager d’Allah r nous a
envoyé ici et nous a ordonné d’y demeurer un certain temps. Alors je vous suggère
de rester avec nous !”
Plus tard, nous montâmes à bord d’un navire et retournâmes ensemble à
Médine. Nous étions unis au Messager d’Allah r tout comme Khaybar était tombé.
Le Messager d’Allah r nous offrit également une part du butin de Khaybar. » (Al
Boukhari, Maghazi, 38 ; Muslim, Fadail’us-Sahabah, 169).

Le complot Juif pour empoisonner le Noble Prophète r


Les Juifs n’avaient toujours pas renoncé à leur traîtrise malgré le traitement
humain qu’ils recevaient des Musulmans. Bien au contraire, ils complotèrent en
secret pour assassiner le Noble Prophète r. Aussi vives que fussent encore les
conséquences de leurs crimes récents, ils essayaient maintenant de trahir à nouveau
un Prophète r qui, au lieu de les envoyer en exil comme il l’avait fait avec d’autres
tribus juives, leur avait déjà pardonné une fois pour avoir tenté d’exécuter un projet
d’assassinat similaire. De façon incroyable, ils violaient encore une fois leur pacte.
Pour exécuter ce sinistre complot, Zaynab, fille d’un notable juif nommé
Harith, invita le Noble prophète r, et certains Compagnons y à un festin d’agneau
rôti qu’elle avait préalablement enduit de poison.
165. Le sama, ou tourbillon, qui commence après l’atteinte d’un état extatique pendant le dhikr mevlevi,
s’inspire de cet évènement même.
588 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Sachant que le Noble Prophète r aimait particulièrement l’épaule d’agneau,


elle y ajouta du poison. Mais au moment où le Prophète d’Allah r prit un morceau
de viande, il avertit ses Compagnons : « Quelque chose me dit que cette viande est
empoisonnée… N’en mangez pas ! »
Mais Bishr ibn Bara en avait déjà consommé immédiatement après avoir vu
le Messager d’Allah r porter la main à la viande. L’avertissement vint alors que les
autres n’avaient pas encore touché au plat. La femme malveillante fut vite arrêtée et
amenée au Noble Prophète r qui lui demanda :
« Est-ce toi qui as empoisonné cet agneau ? »
Elle lui demanda :
« Comment as-tu su qu’il avait été empoisonné ? »
Le Noble Messager r lui répondit:
« Les épaules de l’agneau m’en ont informé. »
Zeyneb reconnut son crime:
« Oui, c’est moi qui ai empoisonné la viande ! »
Interrogée par le Noble Prophète r sur les raisons qui l’ont poussée à faire cela,
elle répondit :
« Tu as tué mon père, mon oncle et mon mari. Il n’y a plus rien que tu n’aies fait
à mon peuple. Alors je me suis dit : “S’il est vraiment un prophète, mon complot sera
porté à sa connaissance par l’action du Tout-Puissant et le poison ne lui fera aucun
mal ; mais si c’est un menteur et simplement un chef, il mourra empoisonné et nous
aurons vengé ces morts et serons débarrassés de lui ! »
Le Noble Prophète r déclara:
« Allah ne t’a pas donné le pouvoir d’agir de la sorte. »
Zeyneb avoua son crime puis influencée par le miracle dont elle avait été témoin
fut touchée par la foi, exprima son regret et demanda pardon.
Le Noble Prophète r, envoyé comme miséricorde aux mondes, lui pardonna sa
tentative d’assassinat. Mais comme Bishr ibn Bara mourut peu de temps après avoir
absorbé la viande empoisonnée, ses proches demandèrent une rétribution ou qisas.
La fille de Harith fut donc amenée à consommer le même poison.
Pour débarasser son corps des effets du poison, du sang fut prélevé entre les
omoplates du Noble Prophète r. (Al Boukhari Jizya 7 ; Muslim Salam 45 ; Ibn Hishâm III 390;
Waqidi II 678-679 ; Haythami, VI, 153).

Trois ans plus tard, avant de rendre son dernier soupir, le Noble Prophète r dit
que sa maladie était dûe à ce poison.
Septième Année de L’hégire 589

La question du mariage dit mut’a


Également interdite à la même époque que la bataille de Khaybar, la pratique
du mariage temporaire ou mut’a n’avait jamais jusqu’alors subi une quelconque
interdiction.
Alî t raconte que “lors de la bataille de Khaybar, le Messager d’Allah r a
interdit d’épouser des femmes sous engagement mut’a et de consommer la chair de
l’âne domestique”. (Al Boukhari, Maghazi, 38 ; Nikah, 31 ; Dhabaih, 28 ; Hiyal, 3 ; Muslim, Nikah,
29-32 ; Muwatta, Nikah, 41 ; Nasa’i, Nikah, 71).

Pendant le mariage dit mut’a, qui est une pratique qui trouve ses racines durant
l’ère de l’ignorance, la femme est engagée pour une période temporaire en échange
d’une rémunération. Un mariage mut’a prend fin une fois que le terme désigné
expire. Le droit de succession, l’allocation et le délai d’attente après le divorce, com-
muns aux mariages normaux, n’existent pas dans un mariage mut’a.
Les hadiths sont nombreux à cet égard et l’un d’eux stipule :
« Allah, le Glorieux, l’a interdit jusqu’au Jour de la Résurrection. Quiconque
épouse une femme sous le régime du muta doit la libérer et ne rien reprendre de ce
qui lui a été donné en guise de paiement. » (Muslim, Nikah, 21 ; Ibn Maja, Nikah, 44 ; Darimi,
Nikah; Ahmad, III, 406).

Au retour de l’expédition de Tabûk, le Noble Prophète r avait décidé de faire


une pause près de Saniyyat’ul-Wada où il r vit quelques femmes en pleurs et leur
demanda pourquoi elles versaient ces larmes. Quelqu’un expliqua en leur faveur
qu’elles étaient “des femmes mariées sous le régime du mut’a ”.
Le Messager d’Allah r dit :
« Le mariage mut’a a été annulé par les jugements de l’Islam concernant le
mariage, le divorce, l’attente (après le divorce) et l’héritage ! » (Ibn Balban, VI, 178 ;
Darakutni, III, 259).

Ainsi, une femme mariée sous le régime mut’a n’est pas considérée comme
épouse et, selon le consensus des savants musulmans, cela équivaut à la fornication.
Ibn ‘Abbâs t donne l’explication suivante :
« Avant l’Islam, on pratiquait le mariage mut’a. Celui qui arrivait dans une
contrée étrangère pouvait épouser dans la localité une femme autochtone sous le
régime mut’a pendant le temps présumé de son séjour. La femme gardait ainsi un
œil sur ses affaires et s’occupait de ses diverses tâches. Cela continua jusqu’à cette
révélation coranique : “… et qui préservent leurs sexes [de tout rapport], si ce
n’est qu’avec leurs épouses ou les esclaves qu’ils possèdent, car là vraiment, on ne
590 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

peut les blâmer…” (Al-Mu’minun, 23 : 5-6). Toutes les autres relations, à l’exception
des deux mentionnées dans ce verset sont interdites.” (At Tirmidhi Nikah, 29/1122).
Les conséquences sociales dévastatrices du mariage mut’a sont notamment :
a) Les dommages causés aux enfants nés de tels mariages temporaires, qui,
tout comme les enfants nés d’actes hors mariage, sont amenés à grandir sans père,
et donc sans soins et éducation adéquats.
b) Comme les frontières généalogiques deviennent floues et les enfants incon-
nus, il est probable qu’une femme puisse éventuellement entrer dans une relation
avec son propre fils, né d’un homme avec lequel elle avait contracté un mariage
mut’a. Il en va de même pour l’homme ; il pourrait finir par être avec sa fille, sa
petite-fille ou bien sa nièce ; ou, plus simple encore, avec quelqu’un qui lui est for-
mellement interdit. C’est sans aucun doute l’un des plus grands dangers du mariage
mut’a, comme en témoignent de nombreuses tragédies similaires à travers l’histoire.
c) Dans la plupart des cas, il est impossible de répartir l’héritage d’une per-
sonne qui a contracté le mariage mut’a, tout simplement parce que le nombre et
l’identité des héritiers de ces personnes restent inconnus.
Les dangers inhérents au mariage mut’a sont en effet très graves. Ce n’est rien
d’autre que de gaspiller sa progéniture. Une femme, d’autre part, contrainte de
contracter un mariage mut’a s’engage dans une chute spirituelle car le sentiment
d’être louée est quelque chose d’extrêmement démoralisant. Le mariage mut’a est
donc un coup majeur porté au cœur de la vertu de la femme. Qui supporterait de
voir sa fille ou sa mère contracter un mariage mut’a malgré tout le dégoût qu’elle
éprouve ? cela suffirait à lui seul à exposer la dépravation de ce type de mariage166.

Le retour de Khaybar
Après la chute de Khaybar, le Noble Prophète r envoya un émissaire dans la
région de Fadak, à deux jours de distance de Médine, et la fit incorporer au domi-
nion musulman sans effusion de sang.
Enfin, Wadi’il-Qura, une petite colonie juive située sur la route de Médine, fut
également prise après un siège d’une journée. Ils furent, comme les habitants de
Khaybar, contraints de travailler leurs terres en échange de la moitié de leur récolte.
Les Juifs de Tayma, quant à eux, acceptèrent de verser la jizya au Noble
Prophète r en échange de quoi ils furent autorisés à demeurer dans leur village.
Ces deux tribus juives avaient déjà conclu un pacte avec Khaybar pour marcher sur
Médine. (Voir, Ibn Hishâm, III, 391 ; Waqidi, II, 707, 711).
166. Pour une présentation détaillée du mariage mut’a, voir İbrâhim Cânan, Nâmus Fitnesi Mut’a (Le
Mut'a la conspiration contre l'honneur), İstanbul, 1993.
Septième Année de L’hégire 591

La conquête de Khaybar et de ses environs ouvrit aux Musulmans la voie de


l’imminente conquête de La Mecque. Les diverses défaites subies par les Banû
Qunayqa, les Banu Nadir, les Banû Qurayza et enfin par les Juifs de Khaybar avaient
intimidé les tribus de la Péninsule, ne laissant aucun doute dans leur esprit sur le
triomphe ultime du Noble Prophète r. C’était alarmant, car ces tribus étaient les
plus riches et les plus puissantes des Juifs de l’Arabie toute entière et leur partici-
pation aux guerres était légendaire. Ces tribus aux forts imprenables et aux abon-
dantes plantations de dattiers et exerçaient un pouvoir assez puissant pour protéger
l’ensemble des Arabes, si ceux-ci eussent choisi d’y chercher refuge. Mais à présent,
il était devenu évident que leur prétendu courage et puissance potentielle s’étaient
affaiblis lorsqu’ils avaient été assiégés par le Prophète d’Allah r et qu’ils avaient
été amenés à accepter humblement des fardeaux insupportables. La brise soufflait
maintenant sur le chemin des Croyants. (Cf. Waqidi II, 729-731; Ibn Kathir, al-Bidayah, IV,
234).

Au lendemain de Khaybar, le Noble Prophète r épousa l’honorable veuve


Safiyya c, après que son défunt mari, un notable parmi les Juifs de Khaybar qu’elle
avait épousé quelques jours avant la prise de Khaybar, eut été tué au combat. (Ibn Sa’d,
VIII, 121-126).

Lors de sa nuit de noces, elle fit un rêve dans lequel une lune, se levant de
Médine, se rapprochait pour choir ensuite sur ses genoux. Elle expliqua son rêve à
son mari qui, furieux, s’exclama : “Tu veux devenir la femme de Muhammad, le roi
du Hedjaz, n’est-ce pas ?” avant de gifler Safiyya avec force, lui laissant un œil poché,
un bleu qu’elle avait quand elle rencontra le Noble Prophète r quelques jours après.
Elle expliqua au Prophète d’Allah r son calvaire lorsqu’il lui demanda comment elle
avait eu ce bleu. Il lui donna alors une explication de l’Islam et lui dit :
“Nous te forçons pas si tu décides de suivre ta religion. Mais sache que si tu
acceptes Allah et Son Messager, je te prendrai comme épouse. Mais si tu choisis de
rester juive je te libérerai et tu pourras retourner dans ta tribu.” Safiyya choisit l’Islam
et devint “Mère des Croyants”. (Waqidi, II, 674, 707 ; Ibn Sa’d, VIII, 123 ; Ahmad, III, 138).
Le mariage du Noble Prophète r avec Safiyya, fille de Huyay, engendra une
proximité avec les Juifs de Khaybar et, en réduisant l’hostilité, permit le développe-
ment de relations plus amicales. À cet égard, Safiyya resta proche des Juifs, au point
même de pouvoir porter plainte pour eux, devint pratiquement leur représentant
dans la maison du Prophète r.
Une fois, une des servantes de Safiyya c se rendit auprès d’ Omart durant son
califat et se plaignit que “Safiyya aimait encore beaucoup le samedi et qu’elle gardait
ses contacts avec les Juifs”.
592 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le calife Omar t dépêcha alors quelqu’un pour enquêter sur la situation.


Safiyya fournit alors cette explication:
“En ce qui concerne le samedi, je n’aime pas ce jour depuis qu’Allah m’a offert
le Vendredi à sa place. Quant à ta question sur les Juifs, j’ai parmi eux des parents
que je vois et que je visite.” (Ibn Hajar, al-Isabah, IV, 347).
Safiyya demanda alors à sa servante pourquoi elle avait porté une telle accu-
sation. “J’ai suivi le shaytan” fut sa réponse. Mais la réaction de Safiyya à cela fut
brillante ; d’une brillance qui reflétait son degré d’adhésion aux mœurs de l’Islam :
“Tu peux t’en aller”, dit-elle, libérant ainsi sa servante qui avait tenté de la calomnier
par une fausse accusation. (Ibn Hajar, al-Isabah, IV, 347).

Umrat’ul-Qada (Dhul-Qa’dah, 7 / Mars, 629)


Réalisée pour compenser la tentative d’accomplir l’omra, contrecarrée nous
l’avons vu par les idolâtres une année auparavant, cet omra est ainsi devenue
connue sous le nom d’umrat’ul-qada, ce qui signifie “omra de compensation”.
Une année s’était maintenant écoulée depuis Hudaybiya et le temps était venu
d’effectuer l’omra comme convenu dans le Traité d’Al-Hudaybiya. Au début du
mois de Dhul-Qa’dah, la septième année de l’Hégire, le Noble Prophète r ordonna
à chaque personne présente à Hudaybiya de se préparer pour l’omra. Il étendit éga-
lement le commandement à d’autres Musulmans. Les Arabes des régions voisines
qui se trouvaient à Médine à l’époque avaient déclaré qu’ils “ne possédaient ni
nourriture pour le voyage ni personne pour les nourrir !”
Le Prophète de Miséricorde r demanda ensuite aux Musulmans de Médine de
donner la charité, pour l’amour d’Allah, en faveur de ceux qui sont dans le besoin
et de constater (par eux-mêmes) ce dont ils pourraient avoir besoin. Il r les avertit
que retirer leur aide amènerait leur destruction ultime. Les Croyants qui vivaient des
problèmes similaires demandèrent :
« Que pouvons-nous donner en charité, ô Messager d’Allah ? ».
Le Noble Prophète r répondit :
« Quoi que vous ayez ne serait-ce que la moitié d’une datte… (Waqidi, II, 731-732).
Le Noble Prophète r quitta finalement Médine avec deux mille compagnons,
une centaine de chevaux, et, au cas où ils en auraient besoin des équipements mili-
taires tels que des casques, armures et lances.
Certains Compagnons y rappelèrent au Noble Messager r la condition posée
par Quraysh qui les empêchait de s’armer, à l’exception du strict minimum jugé
acceptable pour un voyageur.
Septième Année de L’hégire 593

Le Noble Prophète r leur expliqua :


« Nous n’entrerons pas dans le Haram avec ces armes mais il vaut mieux les avoir
à proximité en cas d’attaque ».
Avec deux cents compagnons, il fit ensuite envoyer les armes à Batn-i-Yajaj, à
une distance de trois milles de La Mecque. (Waqidi, II, 733-734).
En chemin, les pèlerins firent escale à Abwa. Le Prophète r avait reçu l’autori-
sation d’Allah I de visiter la tombe de sa mère. Pendant la visite, il répara la tombe
de ses mains en versant quelques larmes de chagrin. Les Croyants eurent également
beaucoup de mal à retenir leurs larmes. Interrogé quelques instants plus tard sur la
raison de ces larmes, le Noble Prophète répondit : « Parce que je me suis souvenu
de la miséricorde et de la compassion de ma mère à mon égard. » (Ibn Sa’d, I, 116-117).
Conformément aux termes d’Al-Hudaybiya, les idolâtres avaient évacué La
Mecque pendant trois jours pour se retirer dans les montagnes voisines, laissant la
ville à la disposition des Musulmans. Incapables de voir la Ka’ba pour la première
fois en sept ans, les Croyants se mirent à chanter avec enthousiasme la talbiya.


 ğƆ Ļ×ĤƆ ğƆ ĤƆ ğĺ
Ɔ ƈóü
Ɔ źƆ ğƆ ĻŽ ×ƪ ĤƆ ±ğƆ ĻŽ ×ƪ ĤƆ ħƪ ıƇ ĥƪ ſ ĤļğƆ ĻŽ ×ƪ ĤƆ
Žƪ
ƈ ïƆ ĩéĤŽ ļĪƈƪ Ì
ğƆ ĤƆ ğĺ Ɔ ƈóü Ɔ ğƆ ĤƆ ÙƆ ĩƆ 𮠾ĭĤļIJ
Ɔ źƆ ğƆ ĥŽ ĩƇ ĤŽ ļIJ Ɔ Ž Ɔ
« Me voilà, ô Seigneur, me voilà. Me voilà, Tu n’as pas d’associé, me voilà. En véri-
té, la louange et la grâce T’appartiennent ainsi que la royauté. Tu n’as pas d’associé. »
Selon Ibn ‘Abbâs t le Noble Prophète r aété accueilli et salué par de jeunes
enfants du clan Muttalib à son arrivée à La Mecque. Il aurait ensuite placé l’un des
enfants à l’avant de sa selle et pénétré dans la ville. (Al Boukhari, Umrah, 13; Libâs, 99).
Pour montrer aux idolâtres qu’il n’y avait aucune vérité dissimulée derrière
leurs rumeurs affirmant que les Musulmans étaient affaiblis par la fièvre de Médine,
le Noble Prophète r ordonna de marcher d’un pas rapide avec une touche de flam-
boyance. (Al Boukhari, Hajj, 55; Muslim, Hajj, 240; Ahmad, I, 305-306).
Puis il r dit: « Qu’Allah ait pitié de celui qui se montre aujourd’hui fort et puis-
sant face aux idolâtres ! » (Ibn Hishâm, III, 424-425).
Les Musulmans, après avoir parcouru dans ces conditions plus de quatre cents
kilomètres depuis Médine, ressentirent une fois arrivés à la Mecque la tension du
voyage mais se conformèrent aux ordres du Noble Prophète r et effectuèrent l’omra
avec dignité en dégageant une puissance intimidante. Ils coururent même de façon
flamboyante durant les trois premières ashwat ou circumambulations, entre les
deux pôles verts qui existent encore aujourd’hui.
594 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les idolâtres, entre-temps, inspectaient curieusement les Musulmans. S’ils


avaient pu observer un semblant de leur fatigue et du relâchement, ils auraient pu
avoir d’autres pensées. Voyant de leurs propres yeux la vivacité et l’enthousiasme
des Musulmans, ils ne pouvaient rien faire pour dissimuler leur étonnement :
“S’agit-il des personnes que vous dites affaiblies à cause de la fièvre ? s’exclamèrent-
ils, elles sont plus vivantes et plus éveillées que nous !” (Muslim, Hajj, 240).
Ce jour-là, le touchant et harmonieux adhan lancé par Bilal al-Habashî t
depuis le toit de la Ka’ba, tout en émouvant les cœurs musulmans, ajouta à l’éton-
nement des idolâtres. Alors que le Noble Prophète r circumambulait autour de la
Ka’ba avec ses Compagnons y, ‘Abdallah ibn Rawahah t se mit à réciter un poème.
“Combien de temps vas-tu encore réciter ce poème en présence du Prophète et,
qui plus est, dans le Haram d’Allah ? ” s’exclama Omar t sur un ton de reproche.
Mais le Noble Prophète r intervint en personne :
« Ne l’en empêchez pas ! Par Allah dans la main de Qui réside ma vie, ses paroles
sont plus dommageables pour les Quraysh que des flèches volantes ! Continue, Ibn
Rawahah ! »
Puis il dit à ‘Abdallah t de dire à son tour :
« Dis, ni divinité ni personne d’autre hormis Allah ne doit être adoré. Il est
l’Unique. C’est Lui qui réalisera sa promesse. C’est Lui qui donne la force à Ses soldats.
C’est Lui seul qui met en déroute les tribus unies ! »
Les autres Compagnons y répétèrent les paroles de ‘Abdallah ibn Rawahah t
(Waqidi, II, 736 ; Ibn Sa’d, II, 122-123).

Une expression gracieuse et calme était visible sur le visage des Musulmans
lorsqu’ils rentrèrent finalement à Médine après leur visite de trois jours à la Ka’ba.
La première visite de la Ka’ba avait maintenant eu lieu et le rêve que le Noble
Prophète r avait fait il y un an s’était réalisé avec exactitude ; une réalité à laquelle
Allah, dans Sa gloire, fait allusion dans le Coran, relativement à la récente victoire à
Khaybar et l’annonce de la prochaine victoire à La Mecque :

ƇųÒÅÓ
Ʃ üĪƈƆ ÌĦÒƆ óƆ éƆ ĤŽ ÒïƆ åƈ ùŽ ĩƆ ĤŽ Òīƪ ĥƇ ìƇ ïŽ ÝƆ ĤƆ ěžƈ éƆ ĤŽ ÓƈÖÓĺƆ ÊŽ óĤÒ
ƫ įƇ ĤƆ ijøƇ ò
Ɔ ƇųÒ
Ʃ ĚƆ ïƆ Ā
Ɔ ïŽ ĝƆ ĤƆ
Òij
 ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ ħĤƆ ÓĨ ħĥƈ đĘĪijĘÓíÜźīĺ ƈóāƈ ĝĨIJħġøIJÊòīĻĝƈ ĥƈ éĨīĻĭƈ ĨÆ ƈ
Ž Ɔ Ɔ ƆƆ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ž ƆƇ Ɔ ŽƇ Ɔ ƇƇ Ɔ ž Ɔ Ƈ Ɔ

 ïƆ ıƇ ĤŽ ÓƈÖįƇ ĤƆ ijøƇ ò Ɔ ƈ Ƈ ×ĺ ƈóĜƆ Óéƃ ÝŽ ĘƆ ğƆ Ĥƈ ðƆ ĪIJ ƈ îī ƈ
Ɔ ģƆ øƆ òŽ ÈĸñĤƪ ÒijƆ İÓ ƃ Ƈ ĨģƆ đƆ åƆ ĘƆ
ƈ Ʃ ÖĵęƆ ĠƆ IJįƈ ĥžƈ Ġ žƈ ƈ ƈ îƈ IJƆ
ÒïĻ
ƃ ƈıü Ɔ ųÓƈ Ɔ Ƈ īĺ ƈ ïĤÒĵ Ɔ ĮƇ óƆ ƈıčŽ ĻƇ Ĥěžƈ éƆ ĤŽ Òīĺ
ĥƆ Đ
Septième Année de L’hégire 595

« Allah a été véridique en la vision par laquelle Il annonça à Son messager en


toute vérité : vous entrerez dans la Mosquée Sacrée si Allah veut, en toute sécu-
rité, ayant rasé vos têtes ou coupé vos cheveux, sans aucune crainte. Il savait donc
ce que vous ne saviez pas. Il a placé en deçà de cela (la trêve de Hudaybiya) une
victoire proche. C’est Lui qui a envoyé Son messager avec la guidée et la religion
de vérité [l’Islam] pour la faire triompher sur toute autre religion. Allah suffit
comme témoin. » (Al-Fath, 48 : 27-28).
L’umrat’ul-qada laissa une profonde impression sur les Mecquois et son
impact permit rapidement à des hommes tels que Khâlid ibn Walid t, le futur
conquérant de la Syrie, Amr ibn As t, le futur conquérant de l’Égypte et ‘Uthmân
ibn Talha y de rejoindre les rangs de l’Islam.
Alors que le Noble Prophète r s’éloignait de La Mecque, Umamah, la fille de
Hamza t courut après lui et pour être emmenée à Médine avec lui l’implora: «Eh
Mon Oncle ! Eh Mon Oncle!»
Ali t la prit alors par la main et la conduisit auprès de son épouse Fâtima c et
lui dit: «Emmenez la fille de votre oncle avec vous !»
Lors de l’arrivée à Médine un petit désaccord surgit entre ‘Alî, Zayd et Jafar y
pour savoir qui devait prendre soin d’Umamah.
Ali t dit:
— C’est ma cousine !
Jaffar t répliqua :
— C’est aussi ma cousine et je aussi suis le mari de sa tante.
Zeyd t, quant à lui, dit:
— Elle est la fille de mon frère ! (Le Noble Prophète r avait fait de Hamza t
son frère).
Le Noble Prophète r décidant qu’il valait mieux qu’Umamah restât avec sa
tante maternelle, dit :
— Une tante maternelle est comme une mère !
Puis, se tournant vers ‘Alî, il lui dit :
— Tu es de moi, je suis de toi !
À Jafar :
— Tu me ressembles tellement en apparence et en conduite !
Et à Zayd :
596 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

— Toi, tu es à la fois notre frère et notre ami ! (Al Boukhari, Maghazi, 43, Umrah, 3 ;
Muslim, Jihad, 90).

‘Alî t indique :
« Zayd en entendant les compliments du Messager d’Allah r devint si heureux
qu’il se mit à tourner autour du Prophète, sur un pied. Puis Jafar suivit Zayd, der-
rière lui et de la même manière ; et par allégresse, moi aussi, je me mis à sauter sur
un pied derrière Jafar. » (Ahmad, I, 108 ; Waqidi, II, 739).
597

LA HUITIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

Le décès de Zaynab c, la fille du Noble Prophète r


Zaynab c ne s’était jamais bien remise de sa blessure quand elle fut poussée
hors du chameau qu’elle montait lors de son voyage vers Médine. Elle rendit son
dernier soupir au tournant de la huitième année de l’Hégire. Son corps fut lavé par
Umm Ayman c, Umm Atiyya c une femme Ansari, et les honorables épouses du
Noble Prophète r Sawda c et Umm Salama c. Juste avant qu’elles ne commencent,
le Noble Prophète r s’approcha d’elles et leur dit :
«Commencez à la laver “du côté droit et ses membres en état d’ablution (wudu) !
Procédez à la toilette (mortuaire) en nombres impairs avec de l’eau et du sidr167, une
fois, trois fois, sept fois et plus, si nécessaire. Mettez un peu de camphre dans l’eau
avant la dernière opération. Informez-moi lorsque vous aurez fini !”
En peignant les cheveux de Zaynab c, les femmes firent trois mèches ; une
pour les côtés et une pour le dessus de la tête. Quand elles eurent fini de la laver, le
Prophète r leur tendit le linceul168 qu’il avait autour de la taille et leur dit “Mettez le
comme linceul intérieur pour Zaynab”. (Al Boukhari, Janaiz, 9; Muslim, Janaiz, 36; Ibn Sa’d
VIII 34).

Après avoir conduit la prière funéraire, le Noble Messager r descendit dans la


tombe de Zaynab, triste et abattu. Il y resta un moment, avant de remonter, cette
fois affichant un sourire sur son visage en disant : « Tout en pensant à la faiblesse
de Zaynab, j’ai prié Allah de lui éviter les peines et la chaleur de la tombe et Allah a
accepté ma prière. » (Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, VII, 131).

La Bataille de Mu’tah : Une légende écrite par une poignée de Compagnons


(Jumaza al Awwal 8 /Août-Septembre 629)
Les ambassadeurs envoyés par le Noble Prophète r auprès de divers souve-
rains et gouverneurs, nonobstant les mauvais traitements et autres abus dont ils
furent victimes et conformément au principe séculaire interdisant de “tirer sur le
messager”, rentrèrent à Médine sains et saufs.
167. Le sidr, cerisier d’Arabie, est connu pour son ombrage dense et agréable. Ses feuilles sont utilisées pour
laver le corps du défunt. (Âsım Efendi Kâmus II 385).
168. Le linceul de l’homme a trois parties : un izar pour couvrir tout le corps, une chemise et une écharpe.
Celui de la femme a cinq parties : un izar, un hidjab couvrant la tête, un tissu autour de la poitrine et
de l’abdomen et une chemise.
598 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Seul Harith ibn ‘Umayr t, qui avait mandaté auprès du chef de guerre de
Busra, ne rentra pas. Parvenu à Mu’tah, Harith t fut intercepté par Shurahbil ibn
Amr, un chef Ghassani, qui lui avait demandé où il allait. Harith t lui disant qu’il
était l’ambassadeur du Noble Prophète, le maléfique Shurabbil, violant l’immunité
de l’envoyé du Messager, tua de façon barbare le compagnon t. (Waqidi, II, 755 ; Ibn
Qayyim, III, 381).

Le Noble Prophète r fut profondément indigné de la manière dont Harith t


avait été martyrisé. Il considérait que cette manoeuvre, qui était une violation de
l’Islam, signifiait le mépris des Musulman et mobilisa immédiatement une armée de
trois mille Croyants. Sinon, la réputation de l’État islamique de Médine serait com-
promise et que des conséquences dramatiques en découleraient.
Se basant sur la volonté universelle de l’Islam qui a détruit les différences de
classe appartenant à l’âge de l’ignorance, le Noble Prophète r désigna Zayd t, son
esclave affranchi, comme commandant de l’armée musulmane.
Il donna ensuite à ce dernier les instructions suivantes :
« Si tu tombes en martyr, laisse Jafar prendre le commandement ! Et si Jafar aussi
tombe martyr, que ‘Abdallah ibn Rawahah prenne le commandement ! Et si lui aussi
tombe martyr, que les Musulmans choisissent un commandant parmi eux ! »
Un Juif, dans l’intervalle, entendit ces instructions et les considéra comme
des annonces de mort des personnes concernées. Il s’approcha de Zayd t, et avec
l’intention de semer la peur dans son cœur, lui dit : “Prépare ton testament ! Car
si Muhammad est vraiment un prophète, tu ne reviendras plus jamais auprès de
lui. Les noms que les prophètes d’Israël donnaient avant une bataille ne revenaient
jamais !”
Cette déclaration ne fit qu’augmenter la joie de Zayd (Ibn Kathir, al-Bidaya, IV, 23).
Le Juif ignorait en fait que Zayd t, comme tous les autres Compagnons y,
brûlait du désir du martyre. Abdallah ibn Rawahah t ayant fini ses préparatifs pour
la campagne, vint dire adieu au Messager d’Allah r, qui lui manquerait beaucoup :
« Donne-moi un conseil, ô Messager d’Allah, que je puisse livrer à mon cœur !»
— Vous atteindrez bientôt une terre où l’on se prosterne peu devant Allah.
Augmentez en ce lieu votre prière et vos prosternations, recommanda le Noble
Prophète.
— Conseille-moi encore, ô Messager d’Allah, insista Ibn Rawahah.
— Souviens-toi toujours d’Allah, car le souvenir d’Allah t’aidera à atteindre ce
que tu souhaites. (Waqidi, II, 758).
Le Prophète d’Allah r accompagna l’armée musulmane jusqu’à Saniyyat’ul-
Wada et la vit partir en campagne au milieu de prières abondantes.
La Huitième Année de L’hégire 599

Il lui ordonna de se rendre à l’endroit où Harith t avait été martyrisé, d’y


inviter l’ennemi à l’Islam et s’il refusait de le combattre en attendant l’aide d’Allah.
(Ibn Sa’d, II, 128).

Informé de la marche musulmane, soutenu par les Byzantins, le sinistre


Shurahbil avait préparé une force de cent mille hommes, renforcée par cent mille
autres Arabes chrétiens. (Ibn Hishâm, III, 429).
L’armée musulmane ne découvrit l’imposante force ennemie qu’après son
entrée en Syrie. Face à cette situation à laquelle il ne s’y attendaient pas, les soldats
musulmans se concertèrent.
Comme le rapport de force était très disproportionné et représentait un
déséquilibre sans doute jamais vu auparavant dans l’histoire, la majorité fut d’avis
d’informer le Noble Prophète r de la situation et d’attendre ses instructions.
Ils étaient sur le point de prendre la décision unanime d’envoyer la nouvelle au
Noble Prophète r quand ‘Abdallah ibn Rawahah t prit la parole :
« Ce que vous craignez est cela même pourquoi vous vous êtes mis en cam-
pagne, à savoir le martyre. Est-ce que nous combattons l’ennemi grâce au nombre
ou par une quelconque puissance ? Non, nous nous battons par le pouvoir de la
religion qu’Allah nous a accordé. Alors qu’attendons-nous ? Ce qui nous attend,
c’est l’une de ces deux plus belles fins : la victoire ou le martyre ! »
Les combattants décidèrent d’aller de l’avant avec fermeté.
Zayd ibn Arqam t raconte :
« J’étais un orphelin placé sous la tutelle d’Abdallah ibn Rawahah t qui me fit
asseoir à l’arrière de sa selle en partant pour la campagne de Mu’tah. Après avoir
voyagé quelques temps de nuit, je l’entendis murmurer un poème qui signifiait à
peu près :
“Ô mon chameau ! Il suffit que tu m’emmènes, moi et ma charge, dans quatre
stations devant le puits près du sable, et je ne t’emmènerai plus jamais dans une autre
campagne. Tu seras en suite libre, sans propriétaire ! Pour ma famille, il semble que
je ne pourrai pas revenir ! Être martyrisé, c’est ce que j’espère ! Les Musulmans sont
venus et m’ont laissé sur les terres de Damas, où je suis impatient d’y être pour tou-
jours ! Je ne me soucie plus des dattiers mûrs, arrosés par la pluie et par en dessous !”
Après l’avoir entendu, j’ai commencé à pleurer. ‘Abdallah ibn Rawahah t me
poussa ensuite doucement avec son fouet et dit : “Petit quel mal y aurait-il qu’Allah
m’accorde le martyre et que tu reviennes en chameau avec ton chargement ? Je serai
alors soulagé de tous les ennuis et de la douleur du monde !”
600 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Au plus profond de la nuit, il t descendit de son chameau, fit deux unités de


prière, prononça une longue invocation, puis il déclara : “Cette fois-ci, si Allah le
veut, le martyre me sera accordé !” » (bn Hishâm, III, 431-432; Waqidi, II, 759).
Une fois parvenu à la périphérie du village de Mu’tah où l’adversaire était sta-
tionné, sans le moindre clignement de l’œil, la poignée de Croyants que dirigeait
Zayd t lança une attaque courageuse dans les rangs ennemis. Ceux qui avaient
donné leurs cœurs au Tawhid étaient sur le point de donner leur vie dans la voie
d’Allah.
Dans un moment violent et ardent de la bataille, Zayd t, le bien-aimé du
Noble Prophète r fut victime des lances ennemies et tomba en martyr.
Conformément aux instructions que leur avait données le Noble Prophète r,
Jafar t s’empara immédiatement de l’étendard musulman et prit la direction de
l’armée. Il réussit courageusement à se frayer un chemin à travers les rangs ennemis
et dans un combat légendaire au cours duquel il t fut frappé à plusieurs reprises par
l’épée, il perdit ses deux bras et mourut peu après.
Le moment était venu pour ‘Abdallah ibn Rawahah t d’assumer la direction
des forces en action. Avec le même zèle, il t s’empara de l’étendard musulman et fit
signe de la main au milieu des rangs ennemis.
Puis il déclara à ceux qui l’entouraient :
« Témoignez que je laisse au Trésor tout ce que je possède à Médine ! »
Après cela il t mena un combat héroïque jusqu’à ce que son corps ne puisse
plus supporter les blessures causées par l’épée et la lance.
Après le martyre d’Abdallah ibn Rawahah t Khalid ibn Walid t prit l’éten-
dard musulman et continua à diriger l’assaut épique des Croyants. Une poignée de
Compagnons y opposèrent une résistance colossale face à l’adversaire aussi nom-
breux qu’un essaim de sauterelles.
Pendant ce tempsle Noble Prophète r racontait, depuis la chaire de la mosquée
de Médine, à ses Compagnons y le déroulement de la bataille.
C’était comme si le champ de bataille se situait juste devant leurs yeux. Le Noble
Prophète r dépeignait les martyrs qui se succédaient à Mu’tah, sur un ton triste :
« Zayd ibn Haritha a pris l’étendard. Shaytan s’est rapidement approché de lui
pour que la vie et le monde d’ici-bas lui paraissent chers et la mort, laide et méprisable.
Mais Zayd t déclara : “Tu tentes de me faire aimer ce monde d’ici-bas à un moment
qui devrait renforcer la foi dans les cœurs musulmans !” Et il s’en est allé jusqu’au
cœur du martyre. Invoquez Allah pour Son pardon et Sa miséricorde ! »
La Huitième Année de L’hégire 601

Le Noble Prophète r continua :


« Il court à présent dans le Paradis. Jafar vient de se saisir de l’étendard. Shaytan
s’est rapidement approché de lui, voulant que la vie et le monde d’ici-bas lui paraissent
chers ; et la mort laide et méprisable. Mais Jafar répond : “C’est maintenant le temps
où la foi doit être renforcée dans les cœurs musulmans” et avance jusqu’au cœur du
martyre. Je témoigne qu’il est un martyr. »169
Puis il r ajouta:
« Demandez le pardon et la miséricorde d’Allah de la part de votre frère. Il est
maintenant entré au Paradis, en qualité de martyr, volant avec deux ailes de rubis
pour aller où son cœur le souhaite. »
Le noble Prophète r expliqua :
« Abdallah ibn Rawahah s’empara de l’étendard après Jafar avant de tomber
dans un silence abrupt.»
Puis il se tût. Les visages Ansari devinrent pâles. Ils pensaient qu’Ibn Rawahah
avait fait quelque chose qui avait déplu au Messager d’Allah r.
Pendant ce temps Abdullah ibn Rawahah t avait pris la bannière et avançait
sur son cheval vers l’ennemi tout en essayant aussi de mettre à genoux son égo insu-
bordonné en le blâmant ainsi: :
« Je me suis juré de te soumettre à moi-même. Ou bien tu te conformes de ton
plein gré, ou je t’oblige à t’y conformer ! Je constate que tu n’aimes pas tant que ça le
Paradis ! Mais qu’est-tu es sinon une goutte d’eau dans ce récipient qu’est le corps !
Ô mon ego ! Serais-tu capable d’échapper à la mort si tu survis aujourd’hui ? Si tu
choisis de suivre les deux qui te précèdent et d’opter pour le martyre, tu auras fait
un bon choix ! Mais si tu es en retard, tu vivras pour te lamenter ! »
Ibn Rawahah t qui avait reçu une vilaine blessure au doigt, descendit de sa
monture et plaçant son doigt qui pendait sous son pied puis d’un ton poétique, avant
de retirer rapidement sa main de son pied il ôta son doigt qui pendait et dit :
« N’es-tu pas qu’un simple doigt saignant sur la voie du Tout-Puissant ? »
Il repartit ensuite de plus belle au combat. S’engageant dans un jihad mineur
contre l’ennemi, il était en même temps pris dans un jihad majeur contre lui-même :
“Si ton inquiétude vient du fait que tu es séparé de ta femme, sache que je
divorce présentement ! Si c’est le fait d’être privé de l’aide de tes esclaves qui te
169 Ibn Omar t a dit : “Nous avons cherché Jafar et l’avons trouvé parmi les martyrs. Nous avons compté
environ quatre-vingt-dix blessures d’épée et de flèche sur le bas de son corps et son dos n’avait aucune
blessure. (Al Boukhari, Maghazi, 44). Jafar avait trente-trois ans quand il fut martyrisé (Ibn Hishâm,
III, 434). Cela signifie qu’il n’était qu’un adolescent de dix-sept ans lorsqu’il émigra en Abyssinie et
s’adressa au Négus avec avec sagesse et courage et une telle connaissance.
602 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

retient, sache alors que je les ai affranchis ! Ou si ton jardin représente ce que tu ne
peux délaisser derrière toi, prends note que je les laisse présentement à la disposition
d’Allah et de Son Messager !”
Le Prophète d’Allah r continua à informer les Compagnons sur la bataille :
« Abdallah ibn Rawahah a rassemblé son courage, a combattu l’ennemi l’éten-
dard à la main et est mort martyr. C’est avec crainte qu’il est entré au Paradis.
Demandez aussi pardon et miséricorde à Allah en sa faveur ! »
Un Ansar qui avait pris à cœur la manière dont ‘Abdallah était entré au Paradis
demanda : « Quelle était sa crainte, ô Messager d’Allah ? ».
Le Messager d’Allah r lui fit cette réponse :
« Il a hésité à combattre l’ennemi après avoir été blessé. Il s’est alors condamné
lui-même, a rassemblé son courage et a été martyrisé. Il est entré au Paradis. On me
les a montrés (les martyrs), assis sur des trônes d’or. Celui de ‘Abdallah était subor-
donné à celui de ses camarades et tortueux. Lorsque j’ai demandé la raison de ceci, on
m’a répondu : “ ‘Abdallah avait eu des doutes avant le combat !” »
Le fait qu’Abdallah ait été martyrisé et qu’il soit maintenant un habitant du
Paradis donna à l’Ansar une occasion de se réjouir.
La tristesse du Messager d’Allah r augmentait au fur et à mesure qu’il leur
racontait cela et alors des larmes fines comme des perles commencèrent à couler de
ses yeux bénis. Il dit alors :
« On s’est saisi à présent de l’étendard par l’épée parmi les épées d’Allah et ainsi
Allah accorda la victoire aux mudjahidun. » (Al Boukhari, Maghazi, 44; Ahmad, V, 299 ; III,
113; Ibn Hishâm III, 433-436; Waqidi, II, 762 ; Ibn Sa’d, III, 46, 530 ; Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, III, 237).
La Huitième Année de L’hégire 603

Puis, toujours les larmes aux yeux, le Noble Prophète r leva les mains vers les
portes de la Miséricorde divine et fit ce Doua:
« Ô Allah Khâlid est une épée parmi Tes épées. Accorde-lui Ton secours ! »
(Ahmad, V, 299).

La prouesse de Khâlid ibn Walid t comme Commandant


Khâlid ibn Walid t géra la bataille avec une exceptionnelle habileté jusqu’au
coucher du soleil, lorsque les deux forces en place se furent retirées chacune dans
son camp respectif à la nuit tombée. Dans l’obscurité de la nuit, il changea tota-
lement la configuration de l’armée musulmane. Il inversa les flancs à droite et à
gauche, plaça les combattants de l’avant-garde à l’arrière-garde et déplaça ceux de
l’arrière vers la ligne de front. Le matin l’ennemi, stupéfait, vit des visages complète-
ment renouvelés. Ils hésitèrent, pensant que l’armée musulmane avait été renforcée
pendant la nuit. Khâlid ibn Walid t était sûr qu’il avait en face de lui un ennemi
indécis. Il lança par conséquent un assaut massif sur l’ennemi qui, ne s’attendant
pas à une offensive aussi violente, n’endura pas longtemps le déluge de foi qui mon-
trait des signes inquiétants de son élimination. L’ennemi commença à montrer des
signes de désarroi et, fut par mesure de sécurité forcé de battre en retraite.
Khâlid ibn Walid t, qui ce jour-là tenait dans sa main neuf épées brisées170,
profita de cette occasion et ordonna, sans que l’ennemi s’en rende compte, le retrait
des forces musulmanes.
Cette manœuvre, deuxième témoignage de son génie militaire, signifiait que
les deux forces s’étaient retirées sans pouvoir prétendre à la victoire. Khâlid réussit
à ramener l’armée musulmane chez elle à Médine sans avoir beaucoup de victimes.
Le nombre de martyrs dans cette bataille qui dura sept jours se portait à quatorze,
tandis que les pertes ennemies, en revanche, s’avéraient plus nombreuses. L’armée
musulmane réussit même à rapporter du butin. (Waqidi, II, 764, 768 ; Ibn Sa’d, III, 407).
Le Noble Prophète r ordonna ensuite aux Croyants de Médine
« Réunissez-vous et accueillez vos frères qui sont de retour chez eux. »
C’est ainsi que tous les Musulmans de Médine, rejoints par le Noble Prophète
sur sa monture, bravèrent la chaleur et se rassemblèrent afin d’accueillir les mudja-
hidun. Suivait ensuite une foule d’enfants escortant le Noble Prophète r. Les aper-
cevant enfin, il r ordonna aux Croyants de prendre les enfants sur le devant de leur
selle et de lui confier ‘Abdallah, le fils de Jafar pour qu’il le prenne lui-même en
selle. (Ahmad, V, 299 ; Ibn Kathir, al-Bidayah, IV, 244).
170. Khâlid ibn Walid avouera plus tard : “Par Allah, neuf épées me sont tombées entre les mains à Mu’tah.
Seule une épée d’origine yéménite à large tranchant a résisté.” (Al Boukhari, Maghazi, 44).
604 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r fit l’éloge du succès de Khâlid t et déclara à ceux de


Médine qui, n’ayant aucune idée de l’affaire, accusaient les soldats d’être revenus
après avoir fui le champ de bataille :
« Ils ne sont pas de ceux qui fuient les combats dans le sentier d’Allah. Mais ils
sont plutôt de ceux qui battent en retraite et attaquent encore et encore ! » (Ibn Hishâm,
III, 438 ; Waqidi, II, 765).

En effet, la bataille de Mu’tah vit une petite unité intimider une gigantesque
force majeure, comme pour actualiser la vérité suivante révélée par le Tout-Puissant :

īĺ ƈ Ʃ Īƈ ðŽ Íƈ Öƈ Øƃ óĻáƈ Ġ ƈ Û×ĥĔÙƅ ĥĻĥƈ ĜÙƅ ÑĘī


ƈ Ĩħ
ƈ Ġ
Ɔ ƈóƈÖÓāĤÒ
ƪ ďƆ Ĩ
Ɔ ƇųÒ
Ʃ IJ
Ɔ ųÒ ÙÑĘ
Ɔ Ɔ ƃ Ɔ Ž ƆƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ž Ɔ
« … Combien de fois une troupe peu nombreuse a, par la grâce d’Allah,
vaincu une troupe très nombreuse ! Et Allah est avec les endurants. » (Al-Baqara,
2 : 249).

La bataille de Mu’tah, où trois mille Croyants réussirent à éviter une force de


deux cent mille hommes, marqua le premier conflit violent contre les Chrétiens, le
Peuple du Livre.

Asma bint Umays c la femme de Jafar raconte :


«Le Messager d’Allah r est venu à nous quand Jafar t et ses camarades furent
martyrisés. Ce jour-là, j’avais tanné quarante morceaux de peau. Après avoir préparé
ma pâte à pain, j’ai lavé le visage de mes enfants, puis peigné et huilé leurs cheveux.»
Le Messager d’Allah r me demanda :
« Où sont tes enfants, Asma ? »
Une fois qu’ils furent en sa présence, le Messager d’Allah r les prit dans ses bras
et les embrassa affectueusement.
Comme entre-temps, il avait commencé à verser des larmes je lui demandais :
« Que mes parents te soient sacrifiés, ô Messager d’Allah, pourquoi pleures-tu ?
Pourquoi traites-tu mes enfants comme des orphelins ? Est-ce parce que tu as reçu
de mauvaises nouvelles de Jafar et de ses camarades ?
Il r me répondit:
« Oui ils sont tombés martyrs aujourd’hui! »
— Oh mon…mon Jafar, m’écriai-je en gémissant.
Le Messager d’Allah r dit alors à Fâtima, sa fille, de préparer à manger pour la
famille de Jafar, car ils étaient perturbés par ce qui s’était produit aujourd’hui.
La Huitième Année de L’hégire 605

On apporta de la nourriture chez nous pendant trois jours pendant lesquels


le Messager d’Allah r ne nous visita pas pour nous accorder du temps pour nous-
mêmes. Puis il revint et nous a dit :
« Ne pleurez plus mon frère à présent ! À partir d’aujourd’hui, je m’occuperai de
ses enfants. »
‘Abdallah t le fils de Jafar t raconte à son tour :
« Le Messager d’Allah nous a gentiment emmenés comme des oisillons chez lui
puis a fait venir un coiffeur. Ce dernier est venu nous couper les cheveux. »
Le Messager d’Allah a alors levé ses mains et a prié ainsi :
“Ô mon Seigneur ! Sois avec bonté le successeur de la famille de Jafar ! Accorde à
‘Abdallah la prospérité dans le commerce !” »
Et il répéta à trois reprises cette invocation.
« J’expliquai la situation à ma mère dès son retour. Elle fut trop heureuse.
Le Messager d’Allah r lui dit (plus tard) : “Ne te soucie de rien au sujet de la
subsistance de ces enfants ! Je suis leur bienfaiteur ici-bas et dans l’au-delà !”» (Ahmad,
I, 204-205 ; Abou Daoud, Tarajjul, 13/4192 ; Ibn Hishâm, III, 436 ; Waqidi, II, 766 ; Ibn Sa’d, IV, 37).

‘Abdallah ibn Jafar n’oublia jamais à quel point le Noble Prophète r fut affec-
tueux envers eux :
“Je me souviens bien. À l’instar de Qusam, ‘Ubaydullah, fils de ‘Abbâs, et moi,
jouions dans la rue lorsque le Messager d’Allah s’approcha de nous et dit en me
montrant du doigt:
« Portez-le vers moi » .
Puis il dit sur le même ton en montrant Qusam du doigt:
« Et lui aussi ! »
Même si ‘Abbâs, l’oncle du Noble Prophète r avait un attachement plus grand
pour ‘Ubaydullah que pour Qusam, le Messager d’Allah r n’eut aucun scrupule de
prendre Qusam en selle.
Puis il caressa la tête de Qusam à trois reprises, priant à chaque fois :
« Seigneur ! prends soin des enfants de Jafar ! »”171 (Ahmad I 205 ; Hakim, III, 655/6411).

171. Un des narrateurs du hadith ajoute : « J’ai demandé à ‘Abdallah ibn Jafar : “ Qu’est-il arrivé à Qusam
plus tard ?” – ”Il a été martyrisé“, me répondit-il. J’ai alors dit : “Allah et Son Messager savent mieux
que quiconque. “ – “En effet“, répondit-il. » ((Hakim, III, 655/6411).
606 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La conquête de La Mecque : La Vérité a surgi et le mensonge a disparu


(20 Ramadan 8 / 10 Janvier 630)
La période de paix, selon le Traité d’Al-Hudaybiya signé entre les Musulmans
de Médine et les idolâtres de La Mecque, devait durer dix ans mais un malaise
envahissait de plus en plus les idolâtres, car ils voyaient jour après jour que l’Islam
prenait toute l’Arabie dans ses bras. Aussi ils commencèrent à ressentir le besoin
urgent de violer les termes du Traité et, au fil du temps, à afficher un certain courage
en indiquant ouvertement qu’ils ne le respecteraient pas plus longtemps.
Dix-sept ou dix-huit mois seulement s’étaient écoulés depuis la signature du
Traité lorsque les Mecquois incitèrent la tribu Banû Bakr, son alliée, à attaquer
les Huza musulmans et par conséquent intouchables relativement aux termes du
Traité. Certains Qurayshites prirent part à cette attaque sans relâche. (Ibn Hishâm, IV,
4 ; Bayhaqi, Delâil, V, 6).

Les Huza, qui avait prêté allégeance au Noble Prophète r, étaient en train
d’offrir leurs prières rituelles au moment de l’attaque ; certains se trouvaient en posi-
tion de prosternation, d’autres en position d’inclinaison, d’autres encore en qiyam,
lorsqu’un massacre brutal et sans appel était sur le point de pourfendre leurs vies.
Quelques-uns purent atteindre l’Espace sacré (al-Haram), le Sanctuaire inviolable
où ils espéraient rester en vie. Mais, furieux, les Banû Bakr et quelques hommes de
Quraysh poursuivirent leur impitoyable massacre. Le Noble Prophète r fut rapide-
ment mis au courant de cet incident. (Ibn Hishâm, IV, 11; Waqidi, II, 783).
En écoutant Amr ibn Salim t livrer les nouvelles de la déchirante tragédie les
larmes coulaient des yeux du Noble Prophète r. Profondément contrarié, il r dit au
Compagnon t pour le consoler :
« Vous allez recevoir de l’aide, ô Amr ! » (Ibn Hishâm, IV, 12 ; Waqidi, II, 784-785).
En dépit de tous ces évènements, et conscient que les Musulmans étaient encore
liés au Traité conclu avec les idolâtres, le Noble Prophète r envoya un émissaire à
La Mecque à propos du raid sur Huza. Parce qu’ils avaient gravement violé le traité
d’Al Hudaybia les Quraysh reçurent l’injonction de payer le prix du sang des victimes
tombés martyrs ou d’exclure les Banû Bakr de la protection dont ils étaient bénéfi-
ciaires. Le rejet de ces options annihilerait totalement le Traité d’Al-Hudaybiya.
Les idolâtres, aveuglés par la haine et le désir du sang, s’accordèrent sur la der-
nière option : mettre fin au Traité. (Waqidi, II, 787).
Ils n’étaient pas être conscients que cela revenait en fait à inviter les Musulmans
à conquérir La Mecque. Bien que les polythéistes revinrent à la raison peu de temps
après, c’était trop tard et le Traité fut bilatéralement résilié. Dans l’espoir de redresser
la situation, Abû Sufyan, désespéré et plein de remords, prit le chemin de Médine.
La Huitième Année de L’hégire 607

Le Messager d’Allah r, indiqua à ses Compagnons y qu’il avait été informé


par la révélation divine qu’Abû Sufyan était sortı de La Mecque avec l’intention de
renouveler l’acte de paix. (Ibn Hishâm, IV, 12).
Comme l’atmosphère de deuil et de tristesse lié au récent massacre de Huza pré-
dominait à Médine, personne ne regarda Abou Sufyan. C’en fut même à un tel point
qu’Umm Habiba c, une des épouses du Prophète r, bien qu’elle fut sa fille, retira
le coussin sur lequel Abou Sufyan voulait s’asseoir. Abu Sufyân étonné demanda :
« Est-ce que je suis indigne du coussin ou ce coussin est-il indigne de moi ? »
La sainte Umm Habiba c qui s’était fondue dans l’amour du Prophète r dit :
« Ce coussin appartient au Messager d’Allah et toi, en tant qu’idolâtre impur,
tu n’es pas digne de t’asseoir dessus ! »
Abû Sufyan, pétrifié, dit en bégayant:
«Tu as bien changé depuis que tu nous as quittés! »
Elle répondit :
« Non mais Allah m’a honorée avec l’Islam. »(Ibn Hishâm, IV, 12-13).
La position du Noble Prophète r et de l’ensemble des Compagnons signifiait
qu’Abû Sufyan n’eut d’autre choix que de retourner à La Mecque les mains vides.
En tentant d’expliquer que la paix n’était désormais plus possible pour les idolâtres
anxieux rassemblés autour de lui et désireux de connaître l’issue de sa visite, Abû
Sufyan ne pouvait plus dissimuler son étonnement et dit :
« Je reviens d’un peuple dont les cœurs ne font qu’un. Croyez-moi quand je
vous dis que j’ai parlé à des hommes et à des femmes, jeunes et vieux, et à tous ceux
que je pensais pouvoir aider… mais en vain ! » (Abdurrazzaq, V, 375).
Entre temps le Noble Prophète r avait ordonné aux Croyants de se préparer à
une expédition militaire à La Mecque. Il convoqua à cet effet les tribus musulmanes
voisines de Médine, et demanda aux tribus plus éloignées de rester à sur place et de
rejoindre l’armée musulmane en chemin. L’intense préparation se déroula dans le
plus grand secret. Qui plus est, afin d’empêcher les Mecquois de devenir méfiants, le
Noble Messager r envoya une petite unité en direction de la Syrie. Toutes les parties
étaient étroitement contrôlées. Avec l’aide d’Allah, le Noble Prophète r demeura
inflexible dans son désir de prendre La Mecque sans verser la moindre goutte de
sang. C’est pour cela qu’il prit de nombreuses mesures stratégiques dont celles-ci :
Tout d’abord le Noble Prophète r, bien qu’il ordonna aux Compagnons y de se
préparer à une expédition, garda secret son intention et ne précisa pas la destination,
et. (Ibn Sa’d, II, 134).
608 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Même son plus proche ami et confident Abû Bakr t ne se rendit pas compte
que l’expédition ciblait La Mecque. Aussi il demanda à ‘Aicha c, sa fille et l’épouse
du Prophète r des informations à ce sujet. Mais elle n’en savait pas plus que lui :
« Je ne sais pas, dit-elle, peut-être a-t-il l’intention d’aller du côté des Banû
Sulaym ou des Thaqif, ou peut-être même des Hawazin ! » (Ibn Hishâm, IV, 14).
Pour s’assurer de la prise pacifique de La Mecque, le Noble Prophète r, par
crainte que les idolâtres ne découvrent les préparatifs et qu’ils s’y préparent, ordonna
de surveiller de près toutes les routes menant à Médine. Il prit aussi des mesures à
l’encontre des espions portant des nouvelles concernant la préparation à La Mecque
et pria ainsi :
« Ô mon Seigneur ! Stoppe les espions de Quraysh, rends-les aveugles et sourds
jusqu’à ce que nous fondions soudainement sur leur terre ! Obture leurs yeux pour
qu’ils m’aperçoivent soudainement devant eux ! » (Ibn Hishâm, IV, 14).
Lorsque l’armée musulmane eut enfin quitté Médine, et avec le but affiché
de confondre une nouvelle fois les idolâtres, le Noble Prophète r la mena dans la
direction opposée de celle où elle fit escale chez ses alliés. Une excursion sur un sen-
tier circulaire ne ferait qu’accroître l’incertitude quant à la destination que le Noble
Prophète r avait prévue. Une fois en place à une distance visible de La Mecque,
le Noble Prophète r ordonna à chaque soldat musulman d’allumer une flamme
dissemblable afin de donner l’impression d’être plus nombreux que ne le pensait
Quraysh. (Hamîdullah, I, 264-265).
De la même manière, l’armée musulmane ne pénétra pas par Dhul-Hulayfa,
le miqat situé sur le chemin de La Mecque d’où le Prophète d’Allah r continua à
garder secret la destination du voyage. (Nebî Bozkurt, DİA, “Mekke” entrée. XXVIII, 557)
Le Noble Prophète r une fois qu’il eut repris le pouvoir ne fit pas d’abus comme
le fait de massacrer des êtres humains ou de conquérir leurs terres par la force. Bien
au contraire, il l’utilisa pour incliner leurs cœurs vers le Tout-Puissant et les diriger
vers la guidance et le vrai bonheur. Après tout, il était le Prophète de la Compassion
envoyé comme une miséricorde et une direction pour les mondes.
Dans ce verset du coran Allah I édifie la notion islamique de guerre et de paix :

ØƆ ÓĠƆ õĤÒÒ


ƪ ijƇ ÜÆƆ IJ Ɔ ØƆ ŻƆ āĤÒÒij ĨÓƇ ĜƆ ƆÈĂƈ òŽ ƆŶÒĹ
Ž Ę ƈ ħİÓĭġƪ ĨĪƈÌīĺñƈ Ĥƪ Ò
ƪ ŽƇ ƪ ƪ Ɔ
Ž ÙƇ ×Ɔ ĜÓƈ Đ
ƈòijĨƇ ƇŶÒ ƈ ƈ ƈóġĭ ƈ Ɔ
Ɔ ųƩ IJ Ɔ Ɔ ĩƇ ĤŽ Òīƈ ĐÒ Ɔ ĖIJóƇ đŽ ĩƆ ĤŽ ÓƈÖÒIJóƇ ĨƆ ÈIJƆ
Ɔ ijŽ ıƆ ĬƆ IJ
« Ceux qui, si Nous leur donnons la puissance sur terre, accomplissent la
Sâlat, acquittent la Zakat, ordonnent le convenable et interdisent le blâmable.
Cependant, l’issue finale de toute chose appartient à Allah. » (Al-Hajj, 22 : 41).
La Huitième Année de L’hégire 609

Alors que tous les Compagnons y avaient gardé le secret sur la destination de
la campagne, Khâtib ibn Balta, un ancien combattant de Badr, envoya une lettre à La
Mecque, par l’intermédiaire d’une certaine femme, pour les informer de la situation.
L’inspiration divine prévint le Noble Prophète r de ce fait par aussi il r ordon-
na illico à ‘Alî, Zubayr et Miqdâd y de s’emparer de la femme et de la lui amener. Il
leur indiquant le lieu exact où elle se trouvait et elle fut surprise à l’endroit précisé
par le Prophète d’Allah r.
La lettre disait :
“Quraysh ! Le Messager d’Allah vient à vous avec une force immense, une
armée aussi terrifiante que l’obscurité de la nuit qui coulera comme le déluge. Par
Allah ! même si le Messager d’Allah r venait à vous de son propre chef, Allah le
rendrait victorieux et accomplirait Sa promesse. Prenez soin de vous dès à présent!”
(Ibn Kathir, al-Bidayah, IV, 278).

En fait ce n’était pas contraire aux faits et n’étaient pas une trahison. Mais cela
signifiait quand même qu’un mouvement censé rester caché était révélé à l’ennemi.
En conséquence, le Noble Prophète r convoqua Khâtib et lui demanda :
« Pourquoi as-tu agi de la sorte, Khâtib? »
Khâtib répondit plein de remords :
« Ô Messager d’Allah ! Tous les Muhajirun ont quelqu’un pour s’occuper de
leurs familles et de leurs biens à La Mecque. Moi je n’ai personne. En écrivant cette
lettre, j’ai pensé pouvoir obtenir leur appréciation et ainsi protéger ma femme et
mes enfants. Par Allah, je ne suis pas un espion qui travaille pour eux. Jamais je ne
pourrais accepter le kufr après l’Islam. Par Allah ! ma foi (iman) en Allah et en Son
Messager est sans limites. Je n’ai pas changé de religion… pas question !
Le Noble Prophète r, tel un océan de compassion, lui accorda le pardon et dit :
« Khâtib s’est défendu avec raison !».
Puis il rappela ensuite à Omar t qui voulait exécuter Khâtib pour trahison,
l’amnistie générale accordée par le Tout-Puissant aux participants de la bataille de
Badr, déclarant au sujet de Khâtib t :
« Mais il était présent lors de la bataille de Badr. Qu’en sais-tu ? Il se peut
qu’Allah le Tout-Puissant, conscient de leur situation a déclaré : “Faites ce que vous
voulez, Je vous ai pardonné !” » (Al Boukhari, Maghazi, 9 ; Muslim, Fadail’us-Sahabah, 161).
Cela dit le Messager d’Allah r fit savoir à tous les Compagnons, et notamment
à Khâtib t, que s’associer avec les ennemis d’Allah était un mal.
C’est ce que le verset coranique suivant qui avait été révélé entre-temps stipule :
610 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ƈ ĻƆ Ĥƈ IJŽ ƆÈħŽ ĠƇ IJƪ ïƇ ĐƆ IJĸ ƈ ƈ
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Ɔ ĝƇ ĥŽ ÜÅÓ Ɔ IJžƈ ïƇ ĐÒIJ
Ɔ ñƇ íÝƪ ÜƆ źÒij Ɔ ƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
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Ɔ øƇ óĤÒĪij ä ƈóíĺěƈ éĤÒīĨħ ƈ ĠÅÓäÓĩƈÖÒIJóęƆ Ġ ïĜIJØƈ îijĩĤÓƈÖħ ƈıĻĤƆ Ìƈ
ƪ Ɔ Ƈ Ž Ƈ ž Ɔ Ž Ɔ ž Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ ŽƆ Ɔ ƪ Ɔ ƆŽ Ž
ƈ ×øĹĘÒ ƈ îÓıä ƈ Ʃ ÖÒijĭĨƈ ËÜĪ
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Ĺ Ɔ ƃ Ɔ ƈ ħŽ ÝƇ äŽ óƆ ì Ɔ ħŽ ÝĭƇ ĠĪƈ
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Ɔ ųÓƈ Ƈ Ž Ƈ ƆÈħŽ ĠÓ Ƈ ĺƈƪ ÌIJƆ
ħÝƇ ĻęƆ ìŽ ƆÈÓĩƈƆ ÖħĥƆ ĐŽ ƆÈÓĬƆ ƆÈIJ
Ž Ž Ƈ
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Ɔ Øîƪ ijƆ ĩƆ ĤŽ ÓƈÖħ ƈıĻŽ ĤƆ Ìƈ ĪIJ Ƈ ÜÓƈ ĄƆ óŽ ĨÅÓ
Ɔ óƫ ùƈ ÜĹ ƈ
Ɔ ĕƆ ÝÖÒŽ IJƆ
ģĻƈ
ƈ ×ùĤÒÅÒ ijƆ ø ƈ įĥŽ đęŽ ĺīĨIJħÝĭĥƆ ĐƆÈÓĨIJ
ƪ Ɔ ģƪ Ą Ɔ ïŽ ĝƆ ĘƆ ħŽ ġĭ
Ƈ Ĩ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƇ Ž Ɔ Ɔ
« Ô vous qui avez cru ! Ne prenez pas pour alliés Mon ennemi et le vôtre,
leur offrant l’amitié, alors qu’ils ont nié ce qui vous est parvenu de la vérité.
Ils expulsent le Messager et vous-mêmes parce que vous croyez en Allah, votre
Seigneur. Si vous êtes sortis pour lutter dans Mon chemin et pour rechercher
Mon agrément, leur témoignerez-vous secrètement de l’amitié, alors que Je
connais parfaitement ce que vous cachez et ce que vous divulguez ? Et quiconque
d’entre vous le fait s’égare de la droiture du sentier.

ħıƇ ĺƆ ïƈ ĺŽ ƆÈħġƇ ĻĤƆ Ìƈ ÒijĉƇ ùƇ ×ĺƆ IJÅÒ ïĐƆÈħġĤÒijĬijġĺħĠijęĝáĺĪƈÌ


Ž Ž Ž Ž Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ɔ ŽƆ
ħġƇ ĨÓƇ èƆ òŽ ƆÈħġƇ đƆ ęƆ ĭÜī ƈ ƈ
Ž Ž Ɔ ĤƆ ĪIJ Ɔ óƇ ęƇ ġŽ ÜƆ ijŽ ĤƆ ÒIJîƫ IJƆ IJ ƫ ÖħıƇ ÝƆ ĭƆ ùĤŽ ƆÈIJƆ
Ɔ ÅijùĤÓƈ
óĻāƈ ÖƆ Īij
Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ÜÓ
Ɔ ĩƈƆ ÖƇųÒ
Ʃ IJ ƈ ƈ ƈ Ɔ
Ƅ Ɔ ħŽ ġƇ ĭƆ ĻŽ ÖƆ ģƇ āęŽ ĺƆ ÙĨÓƆ ĻƆ ĝĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĺƆ ħŽ ĠƇ îƇ źƆ IJŽ ÈźƆ IJƆ
« S’ils vous dominent, ils seront des ennemis pour vous et étendront en
mal leurs mains et leurs langues vers vous ; et ils aimeraient que vous deveniez
mécréants.Ni vos proches parents ni vos enfants ne vous seront d’aucune utilité
le Jour de la Résurrection, Il [Allah] décidera entre vous, et Allah est Clairvoyant
sur ce que vous faites. » (Al-Mumtahana, 60 : 1-3; Al Boukhari, Tafsir, 60).
Ces versets interdisent aux Musulmans de se lier d’amitié avec des non-croyants
en raison de craintes liées à la famille et aux biens.
En fait, Kenan, le fils de Noé u périt pour être resté parmi les non-croyants,
tout comme la femme de Lot qui a appelé la méchanceté sur elle-même pour s’être
mise du côté des injustes.
Cela eut pour conséquence de favoriser le courroux divin. En fin de compte,
être physiquement proche d’un prophète ne leur profita pas.
Le dixième jour de Ramadan l’an huit de l’Hégire le Noble Prophète r conduisit
sa magnifique armée de dix mille Croyants en dehors de Médine.
La Huitième Année de L’hégire 611

Sur le chemin d’Allah, il rompit son jeûne et ordonna aux Croyants de faire de
même. (Al Boukhari, Maghazi, 47).
Près de Juhfah, l’armée rencontra ‘Abbâs t, qui avait caché à Quraysh son
acceptation de l’Islam.
‘Abbâs t était resté à La Mecque et avait fourni au Noble Prophète r à Médine
des mises à jour continues sur la situation à La Mecque.
Une autre raison pour laquelle il resta à La Mecque était la corvée d’eau en
faveur des pèlerins, une tâche qui lui avait été confiée.
Pensant que le temps était enfin venu, il était parti de La Mecque avec sa famille
pour accomplir son hégire tant attendu. (Ibn Hishâm, IV, 18).
Le Messager d’Allah r, très heureux de le voir lui dit: « Tout comme je suis le
dernier des prophètes tu es le dernier des Muhajirun. » (Ali al-Muttaqi, XI, 699/33387).
Le spectaculaire voyage en route vers la victoire (al fath) éclatante de La
Mecque exposa une fresque constituant un modèle de compassion à suivre pour
l’humanité tout entière et un témoignage de l’oeuvre de la création à travers la vision
du Créateur.
L’armée du Noble Prophète r avançait tel un déluge, des tribus affluant des
quatre coins de l’Arabie et joignaient en masse l’armée musulmane, augmentant la
taille d’une foule rarement vue auparavant.
Le Noble Prophète r, alors qu’il menait la charge de sa splendide armée d’Arj
à Talub, vit une chienne allongée qui allaitait ses chiots.
Il appela aussitôt Juayl ibn Suraqa, lui ordonna de surveiller l’animal et ses
petits et de veiller à ce que personne ne fasse la moindre chose susceptible de les
effrayer. (Waqidi, II, 804).
Quelle scène incroyable !
On ne peut s’empêcher de se demander si l’histoire de l’humanité a déjà été
témoin d’une scène semblable si pleine de compassion ?172
Même au bord d’un évènement historiquement révolutionnaire comme la
Victoire éclatante de La Mecque, le Noble Prophète r s’enquit de ce que beaucoup
considérent comme des détails et s’estima responsable du bien-être d’une chienne
et de ses chiots.
172. Pourtant certains ennemis de l’Islam, lors de catastrophes humanitaires, font référence à la terreur en
parlant d'Islam. Là où la terreur et l’anarchie se fondent sur l’insensibilité, sans le moindre scrupule
moral, l’Islam a dès son émergence pris position contre la terreur et l’anarchie et s’est fixé comme
priorité la défense des droits des êtres vivants ou inanimés. Les vingt-trois ans de la prophétique de
Muhammad furent pratiquement tous une lutte contre la terreur.
612 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ceux qui occupent des postes à responsabilités devraient tirer profit de cet fait,
qui est une leçon d’accomplissement consciencieux de chaque détail lié de ses tâches
tout en étant prêt à faire face à tout imprévu susceptible de survenir 173.
Les Mecquois, quant à eux, n’avaient aucune idée de ce qui se passait. Ils
devinrent ainsi bouche-bée lorsqu’ils apprirent que le Noble Prophète r avait fait
camper son armée dans la vallée de Marr’uz-Zahran, donc proche de La Mecque,
d’autant plus qu’ils devenaient finalement témoins de la vue spectaculaire offerte par
les feux allumés par chaque unité musulmane, conformément à l’ordre reçu. Il va
sans dire que l’esprit de chacun était embrouillé à ce moment-là !
Emmenant Hakim ibn Hizan et Budayl avec lui, Abû Sufyan quitta La Mecque
pour constater de visu ce qui se passait. Peu de temps après ils se heurtèrent à un
barrage de flammes séparées et allumées par les soldats musulmans. Ils tentèrent
d’abord de deviner qui étaient les soldats campés, n’ayant pas la moindre idée qu’il
put s’agir du Noble Prophète r et de ses Compagnons.
La Mecque étant pratiquement encerclée de tous côtés Abû Sufyan et ses deux
camarades furent arrêtés peu après et amenés au Prophète r. (Al Boukhari, Maghazi, 48).
Tandis qu’Omar t exhortait le Noble Prophète r à exécuter Abû Sufyan,
‘Abbâs, l’oncle du Prophète, insistait pour qu’il soit pardonné.
En fait le Noble Messager r, employant son inégalable génie politique en lien
avec une tactique psychologique, dit à son oncle ‘Abbâs :
“Emmène Abû Sufyan dans un lieu où il pourrait voir défiler l’armée musulmane
et contempler sa splendeur !”.
Cette mesure visait à s’assurer que le chef Quraysh soit dans un état d’esprit qui
le convaincrait que toute préparation contre les Musulmans, après ce moment pré-
cis, serait inutile. Un manque d’intérêt de la part des idolâtres à faire preuve de résis-
tance empêcherait ainsi presque certainement l’effusion de sang. Se conformant aux
173. Mehmet Akif Ersoy g exprime avec élégance le sens légendaire de la responsabilité du Calife Omar t:
Si un loup devait capturer un mouton au bord du Tigre,
C’est Omar qui serait appelé à rendre des comptes par la Justice divine,
Si une vieille femme est délaissée... C'est Omar qu'il faut blâmer !
Quand les orphelins sont emportés par le malheur… Omar est à blâmer !
Pour un nid est négligé jusqu’à s’écrouler,
C’est Omar et personne d’autre, qui devra être laissé sous ses décombres.
Quand, avec la trahison, on verse une goutte de sang,
Qu’une goutte monte pour noyer Omar t dans son déluge,
Omar est entendu en chaque peine de cœur,
Et en chaque deuil, il est chassé.
Quand Omar est le calife, qui d’autre est à blâmer ?
Que peut faire Omar, ô Seigneur, quand l’homme est tyrannique et tortueux.
Peut-on exiger de Omar ce qu’on attendait de Muhammad ?
Omar, Omar, comment as-tu pris cette charge qui repose sur tes épaules ?
La Huitième Année de L’hégire 613

conseils du Noble Prophète r Abbas t amena Abû Sufyan là où il pourrait voir de


ses propres yeux l’armée musulmane. Celle-ci venait juste de commencer à bouger et
avançait par unités. Les échos des T “Allah’u Akbar” jaillissant des cœurs faisaient
trembler le ciel. Abû Sufyan était ébloui. Juste quand le Noble Prophète r se mit à
l’avant de son unité, il ne put s’empêcher d’exprimer son étonnement, s’exclamant :
« Abbas ! Quel grand royaume ton neveu s’est bâti ! »
Abbas t répondit:
« Ce n’est pas un royaume c’est la prophétie ! »
Abû Sufyan ne put dire que: “C’est vrai, c’est vrai”. (Al Boukhari, Maghazi, 48 ;
Haythami, VI, 164 ; Ibn Sa’d, II, 135 ; Ibn Athir, al-Kamil, II, 242).

Puis les deux hommes revinrent près du Noble Messager r, qui fixa du regard
Abû Sufyan et lui demanda :
« Le moment n’est-il pas venu pour toi de dire ųÒźÒƈ įÃƆ ĤƆ ÌŴ (La ilaha ill-Allah - Il
n’est de Dieu qu’Allah ?) »
Après un moment de réflexion, Abû Sufyan répéta les paroles du Tawhid
mais sans ajouter la partie qui confirme l’acceptation de la prophétie du Messager
d’Allah. Alors le Messager d’Allah r lui demanda de nouveau :
« Le moment n’est-il pas venu que tu affirmes que je suis le Messager d’Allah ? »174
Abû Sufyan, bien qu’il eût demandé un certain délai pour réfléchir, prononça
intégralement, et sous la pression de ‘Abbâs t, la chahada.
Pour conquérir pleinement son cœur et l’aviver à l’Islam, le Noble Prophète r
déclara que la maison d’Abû Sufyan était un des refuges sûrs pour les habitants de
La Mecque, une fois que l’armée musulmane aura pénétré dans la ville.
« Quiconque entrera dans la Masjid’ul-Haram sera en sécurité. Quiconque reste
chez lui sera en sécurité. Et quiconque cherchera refuge dans la maison d’Abû Sufyan
sera en sécurité ! » (Abou Daoud, Kharaj, 24-25/3021-3022 ; Haythami, VI, 164-166 ; Ibn Hishâm,
IV, 22).

174. Comme le stipule clairement Allah le Très-Haut dans le Coran : « Dis : «Obéissez à Allah et au
Messager. Et si vous tournez le dos... alors Allah n’aime pas les infidèles ! » (Al-‘imrân, 3 : 32), le
seul fait de croire en Allah U et en Son Messager r ne suffit pas.
Ceux qui ont la foi (iman) et n’obéissent qu’à Allah, à l’exclusion de Son Messager, ou vice-versa, sont
considérés selon le verset précité comme des infidèles qu’Allah Lui-même déteste.
L’important est de réguler la foi conformément à la Volonté et au Commandement divins, et non selon
une compréhension inadéquate ou insuffisante.
À cet égard, le Tout-Puissant a accordé ce statut à Son Messager et spécifié la reconnaissance et
l’obéissance à Son Messager comme pilier fondamental de la foi ; combien il est inhabile et même
traître de prétendre, comme beaucoup d’ignorants aujourd’hui, que le Saint Coran est suffisant, et sur
un tel prétexte basé sur une compréhension superficielle, de rejeter la Sunna prophétique du Noble
Prophète r.
614 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Alors qu’Abû Sufyan retournait à La Mecque après avoir été libéré, le Messager
d’Allah r donna son ordre final :
« Ne tirez pas vos épées si vous n’êtes pas attaqués ! » (Ibn Hishâm, IV, 28).
Peu de temps après, le Noble Prophète r ordonna à l’armée musulmane, qu’il
avait scindée en quatre corps, d’avancer. La Mecque fut alors remplie des sons des
takbir (T “Allah’u Akbar”) qui résonnaient des quatre côtés.
Ainsi donc le Noble et Saint Prophète r, lui qui avait été contraint huit ans
auparavant de quitter La Mecque en compagnie de deux personnes et d’un couple
de chameaux, revenait par la grâce d’Allah le Très-Haut sur la terre sacrée en com-
pagnie d’une magnifique armée de dix mille musulmans.
Ainsi cet homme qui fut autrefois injustement persécuté triomphait aujourd’hui
dans son pays d’origine. Mais il ne laissa jamais l’orgueil prendre le dessus et entra
dans La Mecque prosterné à dos de chameau, immergé dans les remerciements
envers le Tout-Puissant qui lui avait accordé cette immense bénédiction.
Sa tête était si abaissée en signe d’humilité que sa barbe touchait la selle de sa
monture et il ne cessait de clamer cette invocation:

ƈ ûƇ ĻĐƪźÌƈ ûƆ ĻĐƆźħıĥƪ ĤÒ


ØóìŴÒ
Ɔ ŽƆ ŽƆ ƪƇ
« O Allah! Il n’y a de vrai vie que celle de l’au-delà175 ! » (Waqidi, II, 824 ; Al Boukhari
Riqaq, 1).

L’armée Musulmane ne rencontra presque pas de résistance. A cet égard la


tactique appliquée à Abou Sufyan eut la bénéfique issue d’empêcher les Mecquois de
mettre en difficulté les Musulmans et de ce fait personne n’eut le courage de défier
la magnifique armée Musulmane.
Seul un petit conflit, vite résorbé, eut lieu lorsque Khalid ibn al Walid t entra
dans la Mecque.
Le Messager d’Allah r prit la direction avec ses compagnons y de la Majestueuse
Kaaba en lisant la sourate Al Fath du Saint Coran.
175. Tout au long de son existence, le Noble Prophète r avait coutume de répéter cette invocation qui
attire notre attention sur le poids de l’au-delà par rapport à la vie dans le monde d’ici-bas. Parmi les
occasions où il faisait cette prière, mentionnons la construction de la Masjid’un-Nabawî (Mosquée
du Prophète), le creusement des tranchées avant Khandâq, l’entrée à La Mecque le jour de la Victoire
éclatante (al-Fath) et le Pèlerinage d’Adieu après avoir contemplé devant lui le nombre impressionnant
de Croyants. (Voir Al Boukhari, Jihad, 33, 110, Manaqib’ul-Ansar 9, Maghazi 29 ; Muslim, Jihad, 126,
129 ; At Tirmidhi Manaqib, 55 ; Ibn Maja, Masajid, 3).
La Huitième Année de L’hégire 615

Après avoir fait la circunambulation autour de la Kaaba et sans descendre de


son chameau le bâton en main il r, commença à renverser les idoles de la Kaaba. (Al
Boukhari, Al Maghazî, 48; Muslim, Jihâd, 87; Vâkıdî, II, 831-832).

Ce faisant il lisait le verset du Noble Coran qui décrète:

ÓĜƃ ijİƇ ô
Ɔ ĪÓ
Ɔ Ġ ƈ ×ĤŽ ÒĪƪ Ìƈ ģƇ ĈÓ
Ɔ ģƆ ĈÓ ƈ ×ĤŽ ÒěƆ İƆ ôƆ IJěƫ éĤŽ ÒÅÓäģŽ ĜƇ IJ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
«Et dis: ‘La Vérité est venue et l’Erreur a disparu. Car l’Erreur est destinée à
disparaître.» (Saint Coran sourate Al Isra (17) verset 81).
En voyant les images sur les murs intérieurs de la Kaaba, le Saint Prophète r
n’y entra pas et ordonna qu’elles soient effacées.
Les compagnons y exécutèrent l’ordre immédiatement. Il y avait des dessins
représentant Ibrahim et Ismael L portant des flèches de bonne fortune dans leurs
mains.
En les voyant le Béni Prophète r dit :
« Qu’Allah anéantisse les polythéistes qui les ont déssinées. Par Allah ces prophètes
n’ont jamais cherché fortune avec des flèches.» (Al Boukhari Al Anbiya 8; Al Haj 54 Al Maghazi 48).
Le grand ami d’Allah Mawlana Rumî ç indique le degré de gratitude que nous
devrions avoir pour le Noble Prophète r qui pendant toute sa vie a enduré la plus
impensable des épreuves pour briser les idoles et renverser l’oppression :
« Toi qui jouis aujourd’hui d’être musulman! Sache que l’effort suprême de Notre
Seul et Unique Ahmad était sa détermination à briser les idoles, car, toi aussi, tu
aurais été un idolâtre comme tes ancêtres! »
Le jour où les Croyants s’emparèrent de La Mecque, ils circumambulèrent
autour de la Ka’ba jusqu’au matin ; au milieu des acclamations “Allah’u Akbar”.
En les voyant de loin Abû Sufyan murmura à sa femme Hind :
« Crois-tu que cela provient d’Allah ? »
Hind répondit:
« Oui, cela ne peut être que l’œuvre d’Allah ! »
Le lendemain matin, aux premières lueurs de l’aube, Abû Sufyan rendit visite
au Noble Prophète r qui lui raconta la conversation qu’il eut avec Hind.
Abû Sufyan r s’exclama alors :
“Je témoigne que tu es le Messager d’Allah ! Par Allah, dans la main de Qui
réside ma vie, personne n’a entendu ce que j’ai dit, si ce n’est Allah et Hind !” (Ibn
Kathir, al-Bidayah, IV, 296).
616 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les Mecquois emmenèrent alors leurs enfants chez le Prophète d’Allah r qui
les caressa et pria pour leur bien-être. (Ahmad, IV 32).

La Fête du Pardon
Les Mecquois s’étaient entassés dans la Mosquée Sacrée en attendant nerveuse-
ment leur verdict. Le Noble Prophète r prononça un bref discours, applicable non
seulement à Quraysh mais également à toute l’humanité :
« Il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah. Il n’y a que Lui. Rien ne Lui ressemble et Il n’a
aucun partenaire. Allah a accompli Sa promesse, aidé Son serviteur et dispersé tous
nos ennemis. À l’exception du service de la Ka’ba et de l’approvisionnement en eau
des pèlerins, toutes les coutumes et pratiques d’autrefois, querelles de sang et de biens,
reposent aujourd’hui sous mes pieds.»
«Ô Quraysh ! Allah vous a débarrassés de l’orgueil de l’ignorance, de l’orgueil des
pères et du lignage. Tous les humains sont descendants d’Adam, et Adam a été créé
d’argile. »
La Huitième Année de L’hégire 617

Puis le Prophète d’Allah r récita le verset coranique suivant :

ƈ Ƈ ĭƆ ĝŽ ĥƆ ìÓ
ÓÖij
ƃ đƇ üƇ ħŽ ĠÓ Ɔ áƆ ĬƇÈIJ
Ƈ ĭƆ ĥŽ đƆ äƆ IJĵ Ɔ ƅóĠƆ ðƆ īĨħ
ž ĠÓ Ɔ Ĭƈƪ ÌöÓ ƪ ıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ƈ ĭĤÒÓ
óĻƈ×ì Ɔ ħĻĥƈ Đ ųÒ
Ʃ Īƈƪ ÌħĠÓ
Ƈ ƈ Ʃ ïĭ
ĝƆ ÜŽ ƆÈųÒ ƈ ħġƇ ĨóĠŽ ƆÈĪƈƪ ÌÒijĘƇ òÓđÝĤƈ ģƆ ÐÓƈ ×ĜƆ IJ
Ɔ Đ
Ƅ Ƅ Ɔ Ɔ Ž Ž ƆƆ Ɔ ƆƆ Ɔ Ɔ
« Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle et Nous
avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entreconnais-
siez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah est le plus pieux. Allah est certes
Omniscient et Grand- Connaisseur. » (Al-Hujurât 49 13 – Ibn Maja Diyat 5; Ahmad II 11;
At Tirmidhi Tafsir 49/3270).

En vertu d’une victoire spirituelle éclatante, mêlée de pardon, de paix, de sécu-


rité et d’orientation, comme promis à Hudaybiya, La Mecque avait maintenant
ouvert son cœur à ses authentiques habitants, à sa communauté bien-aimée.
La douleur et l’agonie de la séparation de La Mecque étaient maintenant finies.
Des années de chagrin avaient fait place à la joie.
En signe de gratitude pour ce revirement spectaculaire et quelques instants
avant de proclamer la plus grande amnistie de l’histoire de l’humanité le Noble
Prophète r demanda aux Qurayshes :
« Que croyez-vous que je vais faire de vous, ô Quraysh ? »
Ils lui répondirent:
« Nous nous attendons à ce que tu fasses ce qui est bon et favorable. Nous disons
que tu feras ce qui est bon. Tu es un frère et fils d’un frère généreux et noble ! »
Le Noble Messager r leur fit la réponse suivante :
« Je vous dirais ce que Yûsuf u a dit à ses frères :

īĻ ƈ ƈ ħèòƆÈijİIJħġĤųÒóęƈ ĕĺĦijĻĤÒħġĻĥĐÕĺóáÜź
Ɔ ĩèÒóĤÒ
ƪ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƇƩ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ž ƆŽ Ƈ Ƈ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ
« Pas de récrimination contre vous aujourd’hui ! Qu’Allah vous pardonne.
C’est Lui Le plus Miséricordieux des miséricordieux. » (Yûsuf, 12 : 92)
« Allez partez ! vous êtes libres ! »
Et selon une autre version, il aurait dit :
« Aujourd’hui est le jour de la miséricorde. Aujourd’hui est le jour où Allah for-
tifiera et élèvera Quraysh par le biais de l’Islam. »
618 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Par conséquent, même ceux qui avaient le sang des Musulmans sur les mains
avant la Victoire éclatante finirent par accepter l’Islam.
Allah I avait placé Quraysh au bénéfice de la miséricorde de Son Messager et
les avait fait succomber à lui.
À son tour, le Noble Messager r leur avait pardonné et même autorisé leur
libération. Après cela les Mecquois furent aussi connus sous le nom de Tulaqas,
c’est-à-dire ceux qui ont été libérés. (Cf. Ibn Hishâm IV 32 ; Waqidi, II, 835 ; Ibn Sa’d, II, 142-143).
Le plus grand désir du Noble Prophète r était que l’humanité tout entière
accepte l’Islam, exclusivement, et qu’aucune personne n’en soit exclu. À une époque
où il était au sommet de son pouvoir, alors qu’il était en droit de se venger de ceux
qui l’avaient soumis, lui et ses compagnons y aux plus terribles traitements, le
Noble Prophète r proclama une amnistie officielle, une manifestation extraordi-
naire de la vision du créé par le regard miséricordieux du Créateur.
La Mecque, qui avait subi pendant des années l’oppression, la moquerie et
l’inimitié, profitait à présent de la brise douce de la compassion et de la miséricorde,
assurée par la grande rafale de pardon qui s’était abattue sur elle.
Pourtant, un Mecquois nommé Fadala, voulant jeter une ombre sinistre sur
cette agréable journée, s’approcha du Noble Prophète r avec l’intention de le tuer.
Le Noble Prophète r, conscient de ses intentions malveillantes, ne montra aucun
signe de panique ou de colère et déploya ses ailes de miséricorde à l’endroit de
Fadala. Plaçant ses mains gracieuses sur la poitrine de ce dernier il r déclara :
« Fadala, repens-toi du complot que ton esprit a inventé ! »
L’intention malveillante disparut immédiatement de l’esprit de Fadala; son
cœur fondit et fut rempli par la lumière de la foi. À ses yeux, le Messager d’Allah r
était soudain devenu l’être le plus aimé. (Ibn Hishâm, IV, 37 ; Ibn Kathir, as-Sirah, III, 583).
Abû Sufyan qui était assis près de la Ka’ba, méditait et pesait ses options.
L’idée de rassembler des hommes pour s’opposer au Noble Prophète r et
reprendre son combat contre lui lui traversa l’esprit, surtout après avoir vu les
Croyants marcher derrière le Prophète d’Allah r. Il était emporté par l’évaluation
de l’option quand le Noble Prophète r s’approcha de lui et dit en lui frappant le dos :
« Allah te rendra alors méprisable et tu seras déshonoré ! »
Levant la tête, Abû Sufyan vit le Noble Prophète r et dit : “Jusqu’alors je ne
pouvais pas accepter le fait que tu sois un prophète mais je me repens à Allah pour
ces pensées et je Lui demande de me pardonner !” (Ibn Kathir, al-Bidayah, IV, 296).
La Huitième Année de L’hégire 619

Hind c, qui avait plongé ses dents dans le foie sectionné de Hamza t au len-
demain de la bataille d’Ouhoud, devint aussi musulmane le jour de la Victoire écla-
tante et bénéficia donc de sa part lors de l’amnistie générale. Le Noble Prophète r lui
pardonna pour l’honneur de ce que représente la notion de Tawhid. (Waqidi, II, 850).
Iqrima, le fils d’Abû Jahl, un des plus invétérés ennemis de l’Islam, s’était enfui
au Yémen immédiatement après l’arrivée de l’armée musulmane à La Mecque.
Finalement, il fut attrapé et amené en présence du Noble Prophète r, par sa femme,
en tant que Musulman. Le Prophète de la Miséricorde le reçut amicalement :
« Bienvenue, cavalier errant », dit-il avec légèreté, sans lui reprocher les crimes qu’il
avait commis contre les Musulmans. (Hakim, III, 271/5059 ; Waqidi, II, 851-852).
Comme Iqrima, Habbar ibn Aswad était l’un des ennemis les plus en vue de
l’Islam. Avec sa lance il avait avec malice piqué le chameau sur lequel Zaynab c était
montée pour émigrer de la Mecque vers Médine. Il fit ainsi choir la fille du Noble
Prophète r et la laissa au sol meurtrie et en sang après une fausse couche dont elle
fut alors victime. Le plus regrettable est que la blessure grave finit par causer sa
mort un peu plus tard. Habbar était coupable de nombreux crimes vicieux. Il s’était
notamment enfui le jour de la Victoire éclatante de La Mecque, échappant ainsi à
toute tentative de capture. Un peu plus tard, il apparut provisoirement à Médine
en présence du Prophète de Miséricorde r qui était alors assis en compagnie de ses
Compagnons y. Tout ce qu’il entreprit à cet instant de la rencontre fut d’annoncer
qu’il avait embrassé l’Islam.
Le Noble Prophète r non seulement lui pardonna mais il interdit également à
tous les autres d’abuser de lui et de l’injurier. (Waqidi, II, 857,858).
Après tout, le Saint Coran stipule bien :

ƈƈ ƈ Ž ijęŽ đĤŽ Òñƈ ìƇ


īĻ Ɔ ĂŽ ƈóĐŽ ƆÈIJ
Ɔ ĥİÓåƆ ĤŽ Òīƈ Đ Ɔ ĖóŽ đƇ ĤŽ ÓƈÖóŽ ĨƇ ÈIJ
Ɔ Ɔ Ɔ
« Accepte ce qu’on t’offre de raisonnable, commande ce qui est convenable
et éloigne-toi des ignorants. » (Al-A’râf, 7 : 199).
Le Saint Prophète r était lui-même un Coran vivant176. Il r affichait en lui de
la plus belle façon les valeurs morales du coran. Il pardonnait sans hésiter toutes les
atteintes portées contre sa personne. Quant aux atteintes commises envers autrui,
personne ne pouvait l’apaiser tant qu’il n’avait pas élevé la justice à sa place méritée
et rétabli le droit de la victime. C’est ainsi qu’en même temps qu’il proclama une
amnistie générale sans précédent au profit de la oumma il r ordonna l’exécution
sur place d’un très petit nombre d’idolâtres incurables dont les conditions étaient
irrémédiables. (Abou Daoud Jihad, 117/2683 ; Nasa ’i, Tahrîm’ud-Dam, 14).
176. La mère des croyants Aïcha c disait à propos du Saint Prophète r : « Il était un Coran qui marchait
sur terre… » (Ahmad (6/91,163) et Al-Bayhaqî (2/499).Note de l'Éditeur).
620 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Aucun butin ne fut saisi à La Mecque. (Abou Daoud, Kharaj, 24-25/3023).


Le Messager r opta plutôt pour un prêt obtenu auprès de riches figures de La
Mecque pour couvrir les lourdes mais nécessaires dépenses de l’armée musulmane.
Il remboursa ensuite ce prêt par le biais du butin de Hawazin, déclarant à ce
propos : « Tout prêt mérite remboursement et remerciements. » (Waqidi II 863; Abou
Daoud Buyu, 88/3562 ; Nikah, 44).

Les Mecquois se réjouissaient encore de la fête occasionnée par l’amnistie que


le Noble Prophète r avait faite comme étant un exemple pour toute l’humanité alors
qu’il était maintenant midi.
Comme d’habitude le Noble Prophète r fit un signe à Bilal al-Habashît pour
qu’il procède à l’appel à la prière (adhan).
Ce dernier n’avait pas oublié ses jours d’esclavage lorsqu’il gémissait ces mots
“Ahad, Ahad” sous une torture atroce.
L’oppression avait maintenant atteint son crépuscule et c’est en homme libre
qu’il était venu à La Mecque comme membre d’une armée triomphante et animée
par la foi.
Remerciant Allah I il monta sur le toit de la Ka’ba et lança l’appel à la prière
d’un ton passionné.
Ce jour-là, l’adhan fut si émouvant et touchant que le ciel et les montagnes
environnantes se réverbèrent virtuellement par l’écho de sa voix. Le ciel s’illumina
et la terre se réjouit.
Ce jour-là, l’appel à la prière lancé par Bilal t laissa un souvenir impérissable
à tous les Croyants.
On entendit quelques idolâtres ayant assisté à la scène dire :
“Honte à nous! Notre condition ne peut même pas s’approcher de celle d’es-
clave ! Regardez à quel degré ils se situent alors que nous somme placés si bas !”
En fait, ils regrettaient leurs actions passées et le fait qu’ils étaient restés jusque-
là inconscients de la Vérité.

Le serment d’allégeance de La Mecque


Après la prière de dohr le Prophète r monta sur la colline de Safa pour accep-
ter l’allégeance des Mecquois. Ce furent d’abord les hommes qui prêtèrent serment
“sur l’Islam et le Jihad ”. Puis les femmes leur emboîtèrent le pas. (Ahmad, III, 415 ; Al
Boukhari, Maghazi, 53).
La Huitième Année de L’hégire 621

À propos du serment d’allégeance des femmes, Allah U a statué :

ƪ ƆÈĵĥƆ Đ
īƆ ĠŽ ƈóýŽ ƇĺźĪ Ɔ ğƆ ĭƆ đƈŽ ĺÓ×Ɔ ƇĺÚÓƇ ĭƆ Ĩƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĞƆ ÅÓäÒ ƪ ıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ɔ ðƆ Ìƈ Ĺƈƫ ×ĭĤÒÓ
ƈ ƈ ƈƩ Ö
Ɔ ÜÉŽ ĺƆ źƆ IJ
īĻ Ɔ
Ɔ īƪ İƇ îƆ źƆ IJŽ ÈīƆ ĥŽ ÝƇ ĝŽ ĺƆ źƆ IJ
Ɔ īĻ
Ɔ ĬõŽ ĺƆ źƆ IJ Ɔ īƆ ĜŽ ƈóùŽ ĺƆ źƆ IJÓ
Ɔ Ñƃ ĻŽ ü
Ɔ ųÓƈ
ĖIJ ƅ óđĨĹĘ ƈ ğƆ ĭĻƆ āƈ đĺźƆ IJī ƈıĥƈ äòƆÈIJī ƈıĺïƈ ĺƆÈīĻÖįĭĺƆ ƈóÝęŽ ĺĪÓ ƅ
ƇŽƆ Ž Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ž Ɔ ƪ Ž Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ ÝƆ ıŽ ×ƈƇ Ö
ħĻèƈ ò òijęĔųÒĪƈÌųÒīıĤóęƈ ĕÝøÒIJīıđƈĺÓ×Ę
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƆƩ ƪ ƆƩ ƪ Ƈ Ɔ Ž Ž Ɔ Ž Ɔ ƪ Ƈ Ž ƆƆ
« Ô Prophète ! Quand les croyantes viennent te prêter serment d’allégeance,
[et en jurent] qu’elles n’associeront rien à Allah, qu’elles ne voleront pas, qu’elles
ne se livreront pas à l’adultère, qu’elles ne tueront pas leurs propres enfants,
qu’elles ne commettront aucune infamie ni avec leurs mains ni avec leurs pieds
et qu’elles ne désobéiront pas en ce qui est convenable, alors reçois leur serment
d’allégeance, et implore d’Allah le pardon pour elles. Allah est certes, Pardonneur
et Très Miséricordieux. » (Al-Mumtahana, 60 : 12).
Les femmes prêtèrent serment en plongeant leurs mains dans un petit récipient
d’eau dans lequel le Noble Prophète r avait plongé ses propres mains. Jamais il n’y
eut de cas où il accepta l’engagement des femmes en leur serrant la main.
Umayma bint Ruqayqa c raconte :
« Je suis parti avec un groupe de femmes Ansari près du Messager d’Allah r et
nous proclamâmes :
“Nous te promettons de ne rien associer à Allah, de ne pas voler ; de ne pas
commettre l’adultère, de ne pas tuer nos enfants, de ne pas forger de mensonges et
de t’obéir dans le cadre de tes injonctions légitimes”.
Il r répondit : “Seulement dans vos domaines et selon de vos capacités…”
En entendant ces paroles prévenantes, nous nous mîmes à penser “Allah et Son
Messager sont plus compatissants envers nous que nous le sommes nous-mêmes…
alors offrons notre engagement !”
Les femmes voulurent lui serrer la main, mais le Messager d’Allah r dit :
“Je ne serre pas la main des femmes. Une parole que j’adresse à cent femmes compte
comme si j’avais parlé à chacune d’elles séparément.” » (Muwatta’, Bayat, 2 ; At Tirmidhi Siyar,
37/1597).
622 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Rendez les dépôts à leurs ayants-droit


Le Noble Prophète r se rendit à la Ka’ba et s’assit dans un coin en face de la
Maison Sacrée tandis que les Compagnons y prenaient place autour de lui.
Le Messager d’Allah r chargea Bilal t de se rendre auprès de ‘Uthmân ibn
Talha t pour qu’il lui rapporte les clés de la Kaaba.
Bilal t dit à Othman ibn Talha t :
“Le Messager d’Allah r te demande de lui apporter les clés de la Ka’ba”.
Othman t accepta et partit chez sa mère qui à l’époque détenait les clés.
Il lui dit: « Je suis venu pour te demander les clés de la Ka’ba car le Messager
d’Allah r m’a ordonné de les lui apporter.»
Sa mère lui dit: « Je me réfugie auprès d’Allah pour que tu ne rendes pas de tes
propres mains quelque chose dont ta tribu est fière. Une fois en possession des clés,
il ne te les rendra jamais. »
Ce n’est qu’après un certain temps qu’Othmân t réussit à convaincre sa mère
et à obtenir les clés.
En les apportant au Noble Prophète, il déclara :
“Je te remets ceci en tant qu’un dépôt au nom d’Allah !”
En fait, il craignait de ne pas les récupérer. (Waqidi, II, 833 ; Haythami, VI, 177).
Le Prophète d’Allah r ouvrit la porte de la Ka’ba. À l’intérieur, il demanda que
l’on fermât la porte derrière lui. Il y demeura un certain temps durant lequel il offrit
deux unités de prière. (Waqidi, II, 835 ; Ibn Sa’d, II, 137).
Le Noble Prophète r sortit enfin de la Ka’ba et, après avoir livré un discours
portant sur la Victoire éclatante (al-Fath), il demanda où était Othmân t.
Celui-ci, qui était présent depuis le début, se leva.
Le Noble Prophète r se mit alors à réciter le verset coranique suivant :

ĪƆÈöÓƈ ĭĤÒīĻÖħÝĩġƆ èÒðƆ Ìƈ IJÓıĥƈ İŽ ƆÈĵĤƆ Ìƈ ÚÓ


ƈ ĬƆ ÓĨƆŶÒÒŽ IJîË Ƈ ƆÈħŽ ĠƇ óƇ ĨƇ ÉŽ ĺƆ ųÒ
ƫ ÜĪ
ƪ Ɔ ŽƆ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ʃ Īƈƪ Ì
ÒóĻāƈ ÖÓđĻĩƈ øĪÓĠųÒĪƈÌįƈƈ ÖħġƇ Ƈčđƈ ĺÓ ƈ ƈ Ʃ Īƈƪ ÌĢƈ ïŽ đĤŽ ÓƈÖÒŽ ijĩġƇ éÜƆ
Ɔ ĩƪ đĬųÒ
ƃ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ɔ ƆƩ ƪ Ɔ Ɔ Ƈ Ž
« Certes, Allah vous commande de rendre les dépôts à leurs ayants-droit,
et quand vous jugez entre des gens, de juger avec équité. Quelle bonne exhorta-
tion qu’Allah vous fait ! Allah est, en vérité, Celui qui entend et qui voit tout. »
(An-Nisâ’,4 : 58).

Puis il r dit :
La Huitième Année de L’hégire 623

« Ô Fils d’Abû Talha ! Prends le dépôt d’Allah et gardes-le en permanence!


Préserves-le avec intégrité ! Que personne ne puisse te l’enlever à moins d’être cruel !
Aujourd’hui est le jour de la bonté et de la loyauté ! »(Ibn Hisham IV 31-32; Waqidi II 837-838;
Ibn Sad II 137).

L’évènement souligne l’importance de rétablir les dépôts à ceux à qui ils sont
dus.
Rendre aux personnes ce qui leur revient garantit la paix et la stabilité pour
l’individu, la famille et la communauté en général. Il n’est pas rare que de grands
empires s’effondrent lorsque les gens se voient refuser ce qu’ils méritent. L’histoire
témoigne de nombreux exemples de cette nature.
Ce hadith montre que le Noble Prophète r reflète l’importance de la question :
« Attendez-vous au Jour Dernier quand les dépôts ne seront pas rendus à leurs
atant droits. » (Al Boukhari Ilim 2; Ahmad II 361).
En bref, la trahison du dépôt au détriment de ses ayant droits est un des signes
majeurs de la Dernière Heure.
Abbâs t qui depuis longtemps fournissait de l’eau aux pèlerins, avait aussi-
demandé au Noble Prophète r de le charger d’al hijabah (charge du gardien de la Ka’ba).
Ce dernier dit à son oncle :
« Je ne puis te confier une tâche dans laquelle tu tirerais profit de ce que les gens
t’enverront comme couverture pour la Ka’ba, mais plutôt une tâche plus pénible où
tu payerais de ta propre poche pour prendre soin du besoin d’eau des pèlerins et ainsi
obtenir des récompenses. »
Puis il conseilla à son oncle de continuer à fournir de l’eau aux pèlerins. Abbâs,
qui avait un vignoble à Ta’if. Avant et après l’avènement de l’Islam, il en tirait des
raisins secs qu’il ajoutait à l’eau de zamzam et les offrait ensuite aux pèlerins. Ses fils
et petits-enfants continuèrent après lui. (Ibn Hishâm IV, 32 ; Ibn Sa’d II, 137 ; Waqidi, II, 838).

Le second jour de la conquête de La Mecque le Prophète r se tint au milieu


de la foule et déclara après avoir adressé ses louanges et remercié le Tout-Puissant :
« Ô gens ! Nul doute qu’Allah a déclaré La Mecque sacrée et inviolable le jour
où Il a créé les cieux et la terre, le soleil et la lune ! Elle restera sacrée jusqu’à la der-
nière heure ! Sans aucun doute, Allah a empêché l’armée des éléphants d’entrer à La
Mecque, mais Il a maintenant fait triompher Son Messager ainsi que les Croyants. La
Mecque n’est autorisée à personne après moi. Son gibier ne doit pas être effarouché,
ses arbres ne doivent pas être taillés, les objets qui y sont perdus ne doivent pas être
récupérés, sauf pour se mettre en quête de leur propriétaire. Si un parent est tué, il
pourra exiger le meilleur des deux choses : le prix du sang ou la rétribution (qisas). »
624 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abbâs t insista toutefois pour que l’idhir, une mauvaise herbe ne soit pas
comptée comme plante et broussaille prohibée en disant: “car nous en faisons usage
dans nos tombes et nos maisons”.
Alors le Noble Prophète r rétorqua : « Hormis l’idhir ! »177 (Al Boukhari, Luqata, 7;
Maghazi, 53 ; Ahmad, IV, 31-32; II, 238).

Un autre évènement survenu le même jour montre la profondeur émotionnelle


du cœur des Compagnons y. Alors que le Noble Prophète r était assis près de la
Ka’ba. Abû Bakr r vint avec son père Abû Quhafah. Le Saint Prophète r lui dit:
« Tu n’aurais pas dû déranger ton père (en l’amenant jusqu’ici), j’aurais pu me
déplacer à sa place. »
— Il serait plus approprié qu’il vienne à toi plutôt que tu ailles vers lui, ô
Messager d’Allah, répondit Abû Bakr.
Le Noble Prophète r fit alors asseoir Abû Quhafah en face de lui et, plaçant sa
main sur son cœur, dit :
— Embrasse l’Islam, ô Abû Quhafah, et trouve la paix !
C’est ce qu’Abû Quhafah fit et répétant les paroles de la chahada, il devint
musulman. (Ibn Sa’d, V, 451).

Une loyauté exceptionnelle


Le Noble Prophète r demeura à La Mecque pendant quinze jours consécutive-
ment à la Victoire éclatante (al-Fath).
Durant ce séjour prolongé, beaucoup d’Ansar étaient agités parce qu’ils crai-
gnaient que le Prophète d’Allah r ne revienne plus jamais à Médine. Allah U lui
avait après tout accordé la victoire en s’emparant d’une ville (résolument) sacrée et
vénérable où il était né et avait vécu une grande partie de sa vie.
En prière à l’époque sur la colline de Safa, le Noble Prophète r sentit l’inquié-
tude des Ansar. Après avoir achevé sa prière, il s’approcha d’eux et leur demanda :

177. Plante à grandes feuilles et au parfum doux, l’idhir est originaire de La Mecque. Elle est utilisée pour
nourrir les animaux et aussi dans les maisons et les tombes. Les plantes dont la coupe est interdite
à proximité du Haram sont appelées “celles qui poussent toutes seules”. Outre la controverse sur la
coupe des plantes semées par l’homme, une grande majorité de savants est d’accord sur la licéité de
cette pratique. Couper le miswak, arracher une feuille ou le fruit d’un arbre, à condition de ne pas nuire
à l’arbre sont aussi permis.(İbrâhim Cânan, Hadîs Ansiklopedisi, XII, 525-526). La coupe d’arbres verts
et de mauvaises herbes à l’intérieur de l’Espace sacré de Médine, en revanche, est autorisée. Comme
Médine est une région qui vit de l’agriculture, on avait demandé au Noble Prophète r l’autorisation de
la pratiquer, ce qui permit à la cité de faire une concession supérieure à celle de La Mecque à propos
de l’utilisation des plantes. La chasse en dehors de Médine reçut une concession similaire. (Cf. Hamdi
Döndüren, Şâmil İslâm Ansiklopedisi, entrée «Harem»).
La Huitième Année de L’hégire 625

« De quoi parlez-vous ? »
Les Ansar exprimèrent alors leurs préoccupations à propos desquelles le Noble
Prophète, montrant une loyauté exemplaire, déclara :
« Je cherche refuge en Allah afin d’éviter de commettre une telle chose. J’ai émigré
pour me rendre sur votre terre. Ma vie est votre vie ; comme j’ai vécu parmi vous, je
mourrai parmi vous ! »
Les Ansar poussèrent un grand soupir de soulagement. (Muslim, Jihad, 84, 86 ;
Ahmad, II, 538).

Le Noble Prophète r accrut ses remerciements et sa gratitude envers le Tout-


Puissant suite à la Victoire éclatante remportée à La Mecque.
L’invocation ci-dessous était en particulier manifeste pendant ses inclinations
(ruku’) et ses prosternations (sujud) au cours de la prière rituelle (sâlat) :
« Je glorifie Allah et m’élève contre toutes les insuffisances susceptibles de nuire
à Son essence, à Ses attributs, à Ses actions et à Ses Noms. Je Le vénère et Le remercie
par toutes les louanges qu’Il mérite. Je demande à Allah de me pardonner et je me
repens de tous les péchés. »
Quand Aïcha c lui demanda pourquoi il avait prononcé ces paroles il répondit :
« Mon Seigneur m’a révélé que je verrai un signe au sein de ma communauté
(oumma), et quand je l’aurai vu, de réciter souvent cette invocation. Ce signe, je le vois
à présent. » (Muslim, Sâlat, 220).
En effet, par le biais de révélation de la sourate An Nasr, le Noble Prophète r
avait reçu l’ordre d’augmenter sa repentance et sa glorification du Tout-Puissant
lorsqu’il avait finalement reçu l’aide et le triomphe divins et qu’il eût vu des gens
entrer en masse dans l’Islam. Le mot nasr, éponyme du nom de la sourate particu-
lière, a été interprété en tant que suprématie sur tous les Arabes et, dans le cadre de
la victoire dite d’al-Fath, avec la conquête de La Mecque.
S’appuyant sur le sens du mot fath qui signifie “ouvrir”, Ibn ‘Abbâs t a qualifié
le triomphe de La Mecque de “ fath parmi toutes les fath-s” (c-à-d : victoire parmi les
victoires), car il signifiait “l’ouverture” à l’Islam d’une cité où se trouvait la Maison
Sacrée, la Ka’ba.
Al-Fath n’est pas la simple conquête d’une terre auparavant contrôlée par
l’ennemi. Il s’agit plutôt de “l’ouverture” du cœur des gens qui y vivent à la religion
d’Allah I et, en retour, “l’ouverture” pour eux des portes de l’Islam par extension
à l’ensemble de l’humanité.
Ce jour-là, le Noble Prophète r n’a pas plus conquis une ville qu’il n’a “ouvert”
le cœur de ses habitants à l’Islam. La Victoire éclatante de La Mecque est donc
626 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

considérée comme le début de la marche de l’Islam vers l’ouverture du monde à


l’Islam.
La voie de “l’ouverture” de toute l’Arabie et, de là, du monde entier à l’Islam, a
d’abord commencé par “l’ouverture” de la porte de la Ka’ba.
Certes, c’était un évènement que les autres tribus d’Arabie attendaient, un
épisode sur lequel reposait leur acceptation ultime de l’Islam. Celles-ci se disaient :
“Laissez l’homme traiter d’abord avec sa propre tribu. S’il est capable de triompher
d’elle, cela veut dire qu’il est un véritable prophète !” (Al Boukhari, Maghazi, 53).
Selon un récit de Hasan al-Basrî, quand le Noble Prophète r eut triomphé à La
Mecque, les Arabes déclarèrent : “Si Muhammad a réussi à remporter la victoire sur
les Mecquois, alors que le Tout-Puissant les avait protégés de l’Armée de l’Éléphant,
il est par conséquent impossible que nous puissions lui nuire !” C’est à ce moment-là
qu’ils entreprirent d’entrer en masse dans la religion d’Allah I. (Elmalılı, IX, 6236-6238).

La bataille de Hunayn (11 Chawwal, 8 / 1 Février, 630)


Le Noble Prophète r n’avait pas fait que détruire les idoles dans et autour de
la Ka’ba, il avait aussi envoyé des unités pour débarrasser les villes environnantes
de ces pierres sans vie et liées à l’idolâtrie. Une purification par le biais du Tawhid
avait commencé178. La tribu Hawazin de Hunayn ainsi que la tribu des Banû Thâqif
de Ta’if, incapables de supporter cela, décidèrent de lancer une attaque contre les
Croyants. Ayant préparé une immense armée, ils partirent en emportant avec eux
tous leurs biens comme s’ils s’étaient lancés dans une bataille engageant la vie ou la
mort. (Ibn Hishâm, IV, 65; Ibn Sa’d, II, 150).
Apprenant qu’ils se préparaient à l’attaquer, le Prophète r réagit en préparant
l’armée des Croyants et enrôlant par la même occasion deux mille autre Mecquois
178. Waqidi,III,873. Le Saint Prophète r envoya Khâlid ibn Walid t, après qu’il eut détruit l’idole ‘Uzza
avec une unité de trois cent cinquante Croyants et regagné la Mecque, auprès de la tribu des Banû
Jazimah pour les inviter à croire en Allah. Suite à un malentendu dont il fut victime Khâlid tua une
trentaine de personnes de la tribu. Le Saint Prophète r, apprenant la nouvelle, leva les mains au
ciel et pria ainsi à deux reprises : « Ô Allah ! Je me désolidarise (devant Toi) de ce qu’a fait Khalid ! »
Et il chercha refuge auprès du Tout-Puissant. Il envoya ensuite ‘Alî t auprès des Banû Jazimah avec
la mission de compenser l’incident par le versement du prix du sang aux familles des victimes. ‘Alî
compensa donc tous ceux qui furent lésés dans leurs biens, y compris les abreuvoirs endommagés
destinés aux chiens. Il laissa ensuite l’argent qui restait aux Banû Jazimah afin qu’ils puissent couvrir
les dommages supplémentaires dont ils auraient probablement connaissance plus tard. De retour à La
Mecque, ‘Alî expliqua au Prophète de Miséricorde r la ligne de conduite qu’il avait prise. Ce à quoi il
lui dit : « Tu as bien fait ; juste ce qu’il faut ! » (Al Boukhari Maghazi 58, Ahkâm 35; Nasa’i, Âdâbu’l-
Kudât, 16 ; Ibn Hishâm, IV, 53-57 ; Waqidi, III, 875-884). Cet incident montre l’immense compassion
du Noble Prophète r et la manière dont il avait observé le droit de la créature du point de vue du
Créateur. L’indemnisation des abreuvoirs, même endommagés, constitue à partir de là une norme
exemplaire pour le respect des droits des animaux.
La Huitième Année de L’hégire 627

qui venaient d’embrasser l’Islam. Quelle ironie de voir qu’Abû Sufyan, qui avait
combattu les Croyants pendant des années au nom des idoles tout en leur infligeant
beaucoup de chagrin et de tourments, marchait à présent comme un Croyant au sein
de l’armée musulmane, prêt à combattre cette fois pour l’Islam.
L’armée comprenait même dans ses rangs environ quatre-vingt idolâtres mec-
quois. (Ibn Hishâm, IV, 68; Waqidi, III, 890).
À tous égards, l’armée musulmane semblait invincible et se dirigeait vers
Hunayn avec une splendeur éblouissante. Jamais auparavant l’Arabie n’avait vu
une armée aussi bien équipée et organisée, pensait-on. Et pendant un moment, la
magnifique scène laissa un souffle de fierté s’infiltrer dans le cœur des Compagnons.
Supposant qu’une telle armée ne serait jamais vaincue, ils commencèrent à rabais-
ser l’ennemi et pensèrent à une victoire assurée par leur seule puissance physique.
C’est ce moment de fierté et de vanité qui finit par soumettre les Croyants à une
sévère épreuve divine : Dans l’obscurité de la nuit, peu avant l’aube les forces
d’avant-garde musulmane avançaient avec confiance dans l’étroit détroit menant à
Hunayn, lorsqu’elles furent soudainement prises en embuscade par l’ennemi qui se
trouvait à l’affût. La panique et le désarroi prirent le relais par la suite. Les Croyants,
contrariés par un barrage de flèches tirées d’on ne sait où, se trouvèrent dans un état
d’hésitation qui les conduisit peu de temps après à une confusion quasi irrévocable
qui facilita la prise des forces situées à l’arrière. Les Musulmans furent par consé-
quent forcés à se retirer, mais les Hawazin et les Banû Thâqif les poursuivirent avec
empressement, sans intention de mettre fin à la poursuite.
Seul le Noble Prophète r, qui tenait courageusement bon au milieu du désarroi
désastreux, faisait constamment avancer sa monture plus profondément à l’intérieur
des rangs ennemis, puis se jeta pratiquement au milieu de ceux-ci.
Le Prophète d’Allah r fit preuve ce jour-là d’un courage et d’une bravoure
incomparables, en dépit des efforts désespérés de ses oncles Abbâs et Abû Sufyan y
qui, par peur que quelque chose lui arrive, serraient les rênes de sa monture pour
l’empêcher d’avancer davantage. (Muslim, Jihad, 76).
La confusion de l’armée musulmane se poursuivit entre-temps et ne mnifesta
aucun signe de rétablissement.
Certains dirent :“La magie est sûrement restée sans effet aujourd’hui”.
D’autres crièrent de désespoir : “Ce n’est qu’en atteignant la mer que tout cela
pourra cesser !”
On entendit même dire dans les rangs mecquois que “le Prophète avait été tué
et que les Arabes allaient bientôt retourner à leur religion d’antan !”
Pourtant, le Noble Prophète r était vivant et en bonne santé, debout sur sa
monture, résistant fermement à l’ennemi.
628 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Comme toujours avec sa confiance placée dans le Tout-Puissant, il appela ses


Compagnons y :
« Ô Ansar…Ô Muhajirun ! Ô serviteurs d’Allah ! Venez-ci ! Je suis le Serviteur
et le Messager d’Allah ! »
Il fit ensuite signe à ‘Abbâs t, qui était réputé pour sa voix forte, de continuer
à appeler les combattants musulmans et alors Abbâs t se mit à crier à haute voix :
“Ceux qui se sont engagés à Aqaba… Ceux qui se sont engagés sous l’arbre de
Ridvan ! Courez ! Le Messager d’Allah est ici !”
Les Compagnons y répondant aux échos de l’appel, se précipitèrent auprès
du Noble Prophète r. Tels des papillons momentanément balancés par un violent
coup de vent, ils s’étaient rassemblés autour d’une lumière attirante. Les cœurs des
Croyants, réunis une fois de plus autour du Prophète d’Allah r, furent purifiés de
leurs peurs antécédentes et rétablis au sein de leur paix antérieure. À la faveur de la
grâce d’Allah I tous les rangs de l’armée musulmane retrouvèrent leur élan.
Le Noble Prophète r leva alors les mains au ciel et fit cette invocation :
« Ô mon Seigneur ! Accorde-moi la victoire que tu as promise ! »
Comme il le fit lors de la bataille de Badr, le Prophète d’Allah r saisit alors une
poignée de terre et la jeta en direction de l’ennemi puis dit à ses Compagnons y :
« Avancez maintenant avec honnêteté et loyauté ! » (Muslim, Jihad, 76-31; Ahmad, III,
157, V, 286; Ibn Hishâm, IV, 72; Waqidi, III, 897-899).

L’armée musulmane lança alors une nouvelle offensive contre l’ennemi, comme
si la bataille ne faisait que commencer. Confrontés à la vague d’un assaut vigoureux,
les Hawazin et les Banû Thâqif ne purent pas résister longtemps et encaissèrent
une défaite rapide. Les Croyants n’eurent à déplorer que quatre martyrs, alors que
l’ennemi eut environ soixante-dix victimes. La défaite de cette dernière fut si décisive
qu’elle dut abandonner tout ce qu’elle avait apporté sur le champ de bataille. On ne
comptait plus le nombre de dépouilles qu’elle y laissa. (Ibn Hishâm, IV, 79).
Il va sans dire que c’était là une bénédiction qu’Allah avait accordée aux
Croyants. Bien qu’ils eussent été au plus bas dès le début des hostilités, grâce au
courage et à la persévérance du Noble Prophète r ainsi qu’à ses prières sincères à
l’adresse du Tout-Puissant, ils purent finalement revendiquer la victoire.
Allah I la décrit ainsi dans le Saint Coran :

ħġƇ ÝŽ ×åƆ ĐŽ ƆÈðŽ Ìƈ īƅ ĻĭƆ è ĦijĺIJØƅ óĻáƈ ĠīĈÒ ƈ ųÒ


ƈ ijĨĹĘ
Ƈ Ʃ ħƇ ĠƇ óƆ āƆ ĬƆ ïŽ ĝƆ ĤƆ
Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
ħƇàÛŽ ×èƇ òÓ ĩƈÖĂòƆŶÒħġĻĥĐÛĜÓĄIJÓÑĻüħġĭĐīĕÜħĥĘħġÜóáĠ
ƪ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ƈ Ƈ ŽƆ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƃ Ž Ɔ Ž Ƈ Ɔ ƈ Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ɔ ŽƆ
La Huitième Année de L’hégire 629

īĻ ƈƈ ƈƈ ƈ ųÒ Ɔ ĬƆ ƆÈħƪ Ƈàīĺ


Ɔ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĵĥƆ ĐƆ IJ
Ɔ įĤijøƇ òĵ
Ɔ ĥƆ Đ
Ɔ įƇ ÝƆ ĭĻƆ ġø
Ɔ Ƈ Ʃ Ģõ Ɔ ƈóƈÖïŽ Ĩħ
ƫ ÝƇ ĻŽ Ĥƪ IJƆ
ƈ ƈ ÒŽ IJóęƆ Ġ ƈ
īĺ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒÅÒõƆ ä
Ɔ ğƆ ĤðƆ IJ
Ɔ Ƈ Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÔƆ ñĐ ƪ IJÓ
Ɔ İƆ IJŽ óƆ ÜƆ ħŽ Ĥƪ Òîij
ƃ Ƈĭä Ƈ ĢƆ õĬƆ ƆÈIJƆ
« Allah vous a déjà secourus en maints endroits. Et [rappelez- vous] le jour
de Hunayn, quand vous étiez fiers de votre grand nombre et que cela ne vous a
servi à rien. La terre, malgré son étendue vous devint bien étroite ; puis vous avez
tourné le dos en fuyards. Puis, Allah fit descendre Sa quiétude sur Son messager
et sur les croyants. Il fit descendre des troupes (Anges) que vous ne voyiez pas,
et châtia ceux qui ont mécru. Telle est la rétribution des mécréants. » (At-Tawba,
9 : 25-26).

En fait, ceux qui avaient accepté l’Islam après avoir combattu à Hunayn aux
côtés de l’ennemi témoignèrent plus tard avoir vu des combattants qu’ils “n’avaient
jamais vus auparavant” les attaquer, ce qui témoigne de l’aide divine apportée aux
Croyants ce jour-là. (Ahmad, V, 286; Haythami, VI, 182-183; Ibn Hishâm, IV, 79).
Une partie de l’armée vaincue des Hawazin finit par fuir à Ta’if, d’autres à
Nakhlah, et encore d’autres à Awtâs. (Ibn Hishâm, IV, 84.)
Vainqueur à Hunayn, le Noble Prophète r ordonna de poursuivre l’ennemi
en fuite et fit transférer les prisonniers et le butin à Jiranah puis, pour mener à bien
la campagne (militaire), il envoya une unité commandée par Abû Amir t, l’oncle
d’Abû Mûsâ al-Achari t, à Awtas et orienta l’armée musulmane vers Ta’if.
630 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

La bataille d’Awtâs (Chawwal, 8 / Février, 630)


Le Noble Prophète r ne participa pas, en raison de sa marche sur Ta’if, à la
bataille dite d’Awtas. Durant cette bataille Abû Amir t, le commandant des forces
musulmanes, trouva la mort juste après qu’il ait tué le commandant ennemi. Blessé
à mort et ayant perdu tout espoir de survie Abu Amir t se tourna vers son neveu
Abû Musa t et lui dit:
“Envoie mes salutations au Messager d’Allah et demande-lui de prier pour mon
pardon.”
Abû Mûsâ t, après le décès de son oncle, prit la direction des opération et
empêcha les forces musulmanes de se disperser. Une ligne d’attaque parfaite lui
permit de dérouter l’ennemi et de brandir victorieusement l’étendard de l’Islam à
Awtâs. À son retour il informa le Noble Prophète r des dernières volontés de son
oncle. Le Noble Prophète r demanda alors qu’on lui apporte un peu d’eau pour
prendre les ablutions, après quoi il leva les mains au ciel et dit :
« Ô mon Seigneur ! Pardonne à Ton serviteur Abû Amir ! Au Jour de la
Résurrection, élève-le à un rang plus élevé que la majorité de ceux que Tu as créés ! »
(Al Boukhari, Maghazi, 55).

Le siège de Ta’if (Chawwal, 8 /Février, 630)


Ta’if, une cité importante du Hedjaz qui mérite d’être qualifiée de paradis ter-
restre, possède un château fortifié situé au sommet d’une colline. Le siège imposé
par l’armée musulmane à Ta’if s’était donc révélé être une lutte exigeante et sévère.
Le siège de Ta’if ne constituait pas une vengeance pour les mauvais traitements
autrefois infligés par ses habitants au Noble Prophète r, mais plutôt la continuité
de la bataille de Hunayn.
Plusieurs combattants ennemis dont leur chef Malik ibn Awf, étaient venus à
Ta’if pour se réfugier dans le château. En ce lieu, s’alliant une fois de plus avec les
Banû Thâqif, ils se préparèrent à une toute nouvelle guerre défensive. Bien que les
Musulmans mirent en œuvre durant ce siège plusieurs stratégies et nouveaux équi-
pements les murs du château résistaient aux tentatives de franchissement. Qui plus
est, les Croyants étaient incapables d’attirer l’ennemi hors du château.
Lorsque Khâlid ibn Walid t leur demanda de leur envoyer un guerrier en vue
d’un combat singulier on lui répondit : « Nous n’avons personne qui soit capable de
te tenir tête ! »
Le Noble Prophète r fit alors cette remarque :
« L’ennemi s’est maintenant retiré dans sa tanière comme un renard. Même
laissé à lui-même, il ne pourra plus faire de mal ! »
La Huitième Année de L’hégire 631

Les adversaires étant à présent affaiblis, le Noble Prophète r de Miséricorde


ne vit plus l’intérêt de prolonger le siège et souhaita au contraire que les habitants
de Ta’if fussent guidés et non annihilés. Très vite, il ordonna que le siège soit levé.
Alors que le siège touchait à sa fin, les Compagnons y demandèrent au Noble
Prophète r de maudire les Banû Thâqif qui infligeaient de nombreux dommages
aux Musulmans.
Mais avant son départ de Ta’if le Prophète de la Miséricorde choisit de prier afin
que ceux-ci fussent bien guidés:
« Mon Seigneur octroie aux Banû Thâqif de bons conseils ! »
Peu de temps après, les Banû Thâqif se rendirent spontanément au Noble
Prophète r et embrassèrent l’Islam. (Ibn Hishâm, IV, 134 ; At Tirmidhi Manaqib, 73/3942).
Le Noble Prophète r, au lieu de maudire une tribu qui lui avait jeté des pierres
il y a de cela quelques années, le laissant ensanglanté et meurtri, nourit un véritable
désir de les voir guider. et c’est ainsi que leur venue un an plus tard pour exprimer
leur désir d’embrasser l’Islam rendit le Noble Prophète r si heureux qu’il ménagea
quelques jours pour s’occuper d’eux.
Le plus important gain du siège de Ta’if, fut alors, l’acceptation de l’Islam par
les nombreux esclaves de l’autre bord qui, suite à la promesse du Noble Prophète r
de leur accorder la liberté s’ils devenaient musulmans, quittèrent l’armée ennemie
et rejoignirent les Croyants. (Al Boukharî, Maghazi, 56).
Abû Zura’a t raconte :
« Quand le Messager d’Allah r demanda qu’on lui apporte sa monture alors
qu’il était sur le point de quitter Qarn’u Manazil, je fus chargé de lui apprêter sa
chamelle Qaswa. Je tenais les rênes jusqu’à ce qu’il monte ; puis, lui ayant passé les
rênes, je montai à mon tour et m’assis derrière lui.
Le Messager d’Allah fouetta légèrement la chamelle pour la faire avancer et,
étant derrière lui, je sentis à chaque fois le fouet me frapper.
Il se retourna et me demanda :
« Est-ce que le fouet t’a touché ? »
Je lui répondis :
« Oui Messager d’Allah que mes parents te soient sacrifiés ! »
Puis nous parvîmes à Jiranah, où des moutons se tenaient près d’un coin. Le
Messager d’Allah r posa une question à leur sujet à l’homme chargé du butin.
L’homme lui donna l’information demandée.
Juste après leur conversation, le Messager d’Allah rm’appela.
Je lui répondis: « Me voici, ô Messager d’Allah. »
632 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Alors il r me dit: « Prends ces moutons en échange des coups de fouet que tu as
reçus dans la soirée !
Je comptai les moutons ; il y en avait exactement cent vingt. Et ce sont les biens
dont j’ai tiré le plus de profit. » (Waqidi, III, 939).
La sensibilité manifestée ici par le Noble Prophète r pour les droits d’autrui
suffirait à éclairer l’ensemble des temps et des lieux.

La distribution du butin
Après avoir levé le siège de Ta’if, le Noble Prophète r conduisit l’armée musul-
mane jusqu’à Jiranah, où les captifs et le butin étaient retenus.
Abû Mûsâ al-Acharî t vint presque au même moment avec ses forces victo-
rieuses à la bataille d’Awtâs.
Les Croyants avaient dispersé tous leurs ennemis et c’était le temps de distri-
buer le butin. Le butin saisi au cours de toutes les batailles récentes s’élevait à vingt-
quatre mille chameaux, quarante mille moutons et quatre mille uqiyyah en argent
sans parler des six mille captifs. (Ibn Sa’d, II, 152).
Le Prophète r déclara avant de distribuer le butin :
« Que ceux qui ont quelque chose du butin, même une aiguille ou un peu de
ficelle, la rendent ! Sachez que la trahison à l’égard du butin apporte au coupable
honte et feu dans l’au-delà ! » (Muwatta, Jihad, 22’ Ahmad, V, 316).
Le Messager d’Allah r fut entre-temps informé que Shayma, sa sœur de lait,
faisait également partie des captifs. Le Noble Prophète la fit immédiatement amener
auprès de lui. Il prit son cardigan (rida’), le posa par terre pour qu’elle puisse s’as-
seoir, l’accueillit avec gentillesse et compassion. En considérant Shayma c le Noble
Prophète se souvint de son enfance. Il leva ses yeux puis il lui posa des questions
concernant ses parents qui, en fait, étaient décédés depuis quelques années. Après
l’avoir interrogée sur ses proches, le Noble Prophète r dit :
« Si tu le souhaites, tu peux rester avec moi et tu seras traitée avec beaucoup
d’amour et de respect. Mais si tu le souhaites, je peux aussi t’accorder quelques biens
et te raccompagner dans ta tribu ! »
Shayma c choisit de retourner dans sa tribu et devint ensuite musulmane. Le
Noble Prophète r lui donna, ainsi qu’aux autres membres vivants de sa famille, un
grand nombre de chameaux et de moutons. Il lui présenta également deux esclaves,
un homme et une femme, que Shayma unit ensuite par le mariage. (Ibn Hishâm, IV,
91-92 ; Waqidi, III, 913).

Le Noble Messager r remit alors à plus tard la distribution du butin. Ceux


dont le cœur présentait des faiblesses, incapables d’en percevoir la sagesse, furent
La Huitième Année de L’hégire 633

mécontents. Les Arabes bédouins exigèrent une distribution immédiate et tentèrent


même d’acculer le Noble Prophète r sous un samoura (Espèce d’arbre épineux) alors qu’il
était à dos de chameau, au point que son manteau se prit dans l’une de ses branches.
Le Prophète r stoppa l’animal et déclara :
« Rendez-moi mon manteau ! Si j’avais eu autant de butin que ces arbres, je
l’aurais encore distribué parmi vous dans leur totalité ; et alors vous auriez vu que je
ne suis ni avare, ni menteur, ni lâche ! » (Al Boukhari, Jihad, 24).
Plus tard, alors même que le Noble Prophète r commençait à distribuer le
butin, la foule qui s’entassait autour de lui le mit mal à l’aise.
Abdullah ibn Masoud t nous rapporte ainsi sa réaction :
« Il me semble encore voir l’Envoyé de Dieu r, parlant de l’un des Prophètes
ayant été frappé par son peuple et qui dit en essuyant le sang coulant sur son visage :
“Seigneur, pardonne à mon peuple car ils ne savent pas! » (Ahmad I 456; Muslim Jihad 105).
La sagesse contenue dans la lenteur opérée par le Messager d’Allah r dans le
partage du butin ne fut connue que lors du 10e jour de son arrivée à Jiranah.
Ce jour-là, une délégation des vaincus d’Hawazin se rendit auprès du Noble
Prophète r pour annoncer leur adhésion à l’Islam et demander le retour de leurs
captifs et de leurs biens saisis.
Un homme du clan Saad se leva et s’exprima en leur nom :
“Ô Messager de Dieu ! Ces femmes qui t’attendent dans les pénombres sont
vos tantes parternelles et paternelles et les femmes qui vous ont allaité et pris soin
de vous pendant votre enfance. Si elles avaient allaité le roi de Damas ou d’Irak et
que, se trouvant dans l’état actuel où elles sont actuellement, elles qu’elles auraient
sollicité de lui sa compassion et sa bienfaisance il leur aurait donné sans réserve.
Mais vous êtes le meilleur de ceux qui ont été allaités et soignés !”
Le Noble Prophète r répondit:
« J’ai retardé la distribution du butin jusqu’à aujourd’hui, mais vous êtes arrivés
tardivement alors choisissez maintenant entre vos captifs et vos biens ! »
Ils optèrent pour les captifs et le Messager d’Allah r leur dit :
« Je vous rends les captifs qui m’ont été échus ainsi qu’aux fils de ‘Abdulmuttalib.
Venez me voir demain après la prière de dhor pour les autres. »
Le lendemain, le Noble Prophète r rassembla ses Compagnons, leur expliqua
qu’il avait restitué les captifs en sa possession et dit :
« Que celui qui désire libérer volontairement ses captifs et rendre ainsi heureux
ses frères, qu’il le fasse. Et quiconque ne veut pas donner gratuitement ce qu’il a reçu
634 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

comme part (du butin), nous le dédommagerons avec le prochain butin qu’Allah nous
accordera. Ceux qui le souhaitent peuvent opter pour cela ! »
Le fait que le Noble Prophète r ait consulté les Compagnons y à ce sujet tient
à la circonstance qu’ils avaient un droit de libre exercice sur les captifs.
Les Compagnons y, voyant le Prophète d’Allah r libérer ses captifs, libérèrent
sans plus attendre les leurs, enthousiastes à l’idée de récolter leur part de récompense
qui les attendaient en retour. “Et nous aussi, s’exclamèrent-ils, remettons nos captifs
au Messager d’Allah !” (Al Boukhari, Maghazi, 54 ; Ibn Hishâm, IV, 134-135).
Ainsi, des milliers de captifs furent remis aux Hawazin ce jour-là, sans rançon.
Une telle scène ne s’était jamais produite auparavant dans l’Histoire. Mais à
présent, l’Histoire est faite pour voir le spectacle de milliers de captifs libérés sans
retour matériel, tout cela grâce au Noble et Bienheureux Prophète qui avait dyna-
misé sa communauté (oumma) par le biais de la morale islamique.
Le Noble Messager r fit en cette occasion une incontestable preuve de loyauté
envers un peuple, pour le simple motif qu’une de ses femmes l’avait allaité quand
il était petit. C’est une exceptionnelle leçon de vertu à l’adresse d’une communauté
cruelle. Tandis que les êtres humains dans l’ensemble, ont tendance à effacer com-
plètement les souvenirs des bienfaits plutôt que de les remémorer. La loyauté se
trouve ainsi mue en un mot que l’on ne trouve que dans les dictionnaires.
Émue par cet immense acte de loyauté, toute la tribu Hawazin accepta l’Islam.
Même leur chef, Malik ibn Awf, qui à l’époque était à Ta’if, fut si étonné
d’apprendre la nouvelle qu’il n’a fallu qu’une petite invitation du Prophète d’Allah
r pour entrer dans la maison de l’Islam.
Le Noble Prophète r lui offrit cent chameaux et le rétablit à la tête de sa tribu.
(Ibn Hishâm, IV, 137-138).

Le plus grand enseignement de tout cela est que les bonnes mœurs sont le meil-
leur mode de prédication (tabligh). Cette leçon souligne également le fait qu’une
approche diplomatique prudente est un moyen d’obtenir plus de bonté, tandis
qu’une approche insensée engendrera des dommages de plus grande ampleur.
Le Noble Prophète r répartit équitablement le butin en cinq parts dont quatre
furent réparties entre les combattants et la cinquième fut attribuée au Bayt’ul-Mal,
c’est-à-dire au Trésor.
Bien que le Bayt’ul-Mal demeurât à la disposition du Noble Prophète r il n’en
fit pas usage à des fins personnelles il l’avait indiqué à ses Compagnons y avant de
commencer la distribution :
La Huitième Année de L’hégire 635

« Je n’ai rien à voir avec votre butin, pas même avec ses poils179, encore moins avec
un chameau. Pourquoi êtes-vous si impatients ? Même si le butin fut aussi abondant
que les pierres et les arbres de cette vallée, je vous l’aurais distribué. Si j’en épargne un
cinquième, il sera dépensé pour vos pauvres. » (Muwatta Jihad 22 ; Ahmad V 316).
Le Noble Prophète r, remit conformément à l’injonction divine qui lui avait été
adressée une part supplémentaire aux muallafat’ul-qulub, c’est-à-dire à ceux dont
le cœur devait être attaché à l’Islam. Hakim ibn Hizam t, qui était un d’eux a dit:
« J’ai demandé au Messager d’Allah r une partie du butin et il m’a donné cent
chameaux. Je lui en ai redemandé et il m’en a redonné cent. Puis je reformulai ma
demande une troisième fois, il m’en donna encore cent et me dit : « Ô Hakim, cet
argent est comparable à un fruit tendre et délicieux. Celui donc qui le prend sans cupi-
dité, cet argent lui sera béni. Mais celui qui le prend avec avidité, cet argent ne lui sera
pas béni, et il sera à l’image de celui qui mange sans pourtant se rassasier. La main qui
donne (litt. la main haute) est meilleure que la main qui reçoit (litt. la main basse).”
Je lui dis alors : «Ô Envoyé d’Allah, par Celui qui t’a envoyé par la Vérité, je ne
prendrai plus rien de qui que ce soit jusqu’à ce que je quitte ce monde. »
Et, effectivement, Abû Bakr t fit appeler Hakim t pour lui donner une part
des dons, mais celui-ci refusa de prendre quoi que ce soit.
Puis Omar t fit comme Abû Bakr t, mais comme Hakim t refusa encore
catégoriquement. Omar t déclara alors : “Ô musulmans, je vous prends à témoin
que j’ai proposé à Hakim la part de butin qu’Allah lui a impartie et qu’il l’a refusée.”
Ainsi Hakim t refusa jusqu’à sa mort de prendre quoi que ce soit de quiconque
après le Prophète r. » (Al Boukhari, Wasaya, 9 ; Waqidi, III, 945).
N’ayant toujours pas embrassé l’Islam, le notable qurayshite Sâfwan ibn
Umayya t n’avait pas quitté le camp du Noble Prophète r de Hunayn ainsi qu’à
Ta’if. Sâfwan t était aussi présent aux côtés du Messager d’Allah r alors qu’il se
promenait au milieu du butin à Jiranah, et ce dans le but affiché de l’inspecter.
Sâfwan, étonné, observait avec admiration la vallée peuplée de chameaux, de mou-
tons et de bergers qui les surveillaient.
Le Noble Prophète r observa Sâfwan t du coin de l’œil et lui demanda :
« Aimes-tu ce que tu vois dans la vallée ? »
Sâfwan t répondit par l’affirmative.
Le Messager d’Allah r lui dit alors :
« Tu peux prendre possession des deux… la vallée et ce qu’elle contient ! »
Incapable de se contenir, Sâfwan t déclara :
179. Des poils qu’il avait tirés d’un chameau qui se trouvait devant lui.
636 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Seul le cœur d’un prophète peut être aussi généreux ! »


Puis il prononça alors la chahada et devint musulman.(Waqidi II 854-855).
Plus tard, Sâfwan t retourna parmi les Qurayshites et dit :
« Embrassez l’Islam, ô mon peuple ! Par Allah, Muhammad donne en abon-
dance, sans craindre la pauvreté ! » (Muslim, Fadail, 57-58).
Une quarantaine de muallafa’tul-qulub, dont Abû Sufyan, Aqra ibn Habis,
Unaynah ibn Hisn, ‘Abbâs ibn Mirdas et Malik ibn Awfy se virent attribuer des
biens en quantité impressionnante. (Waqidi, III, 944-947).
‘Abbâs ibn Mirdas, un poète, insatisfait de ce qui lui avait été octroyé, récita un
poème amer sur le Noble Prophète r qui, lorsqu’il l’apprit, le fit appeler et lui dit :
« Je vais te couper la langue ! »
Mais avant cela, le Prophète d’Allah r avait dit à Bilal al-Habashî t :
« Quand je t’ordonnerai de lui couper la langue donne lui un vêtement. »
Le moment venu le Noble Prophète r fit signe à Bilal t d’aller lui couper la
langue et quand Bilal le saisit par le bras, ‘Abbâs s’écria :
« Le Messager d’Allah va-t-il me couper la langue ? Muhajirun ! On va me cou-
per la langue ! Ansar ! On va me couper la langue ! »
Bilal t continua à l’escorter, les mains fermement agrippées à ses bras. Mais
quand ‘Abbâs se mit à pousser des cris de plus en plus forts Bilal t lui dit :
« Tais-toi donc ! Le Messager d’Allah m’a ordonné de te faire taire en t’offrant
une paire de vêtements ! »
Bilal t offrit ensuite à ‘Abbâs qui s’était calmé une paire supplémentaire. En
fin de compte, le Prophète de Miséricorde lui octroya cent autres chameaux. (Ibn
Sa’d, IV, 273 ; Muslim, Zakat, 137).

Pendant la distribution du butin Sa’d ibn Abi Waqqas t fit cette remarque :
« Ô Messager d’Allah ! tu as délaissé un homme pauvre comme Juayl ibn
Suraqa et accordé cent chameaux chacun à des notables tels que Uyaynah et Aqra. »
Le Noble Prophète r lui répondit :
« Par Celui qui détient ma vie entre Ses mains, même si la terre regorgeait de gens
comme Uyaynah et Aqra, Juayl serait bien meilleur que tous ceux-là réunis ! Mais je
m’occupe de ces gens pour les éveiller à l’Islam quant à Juayl, il est si fermement attaché
à l’Islam et aux hautes récompenses divines que je le renvoie à ses récompenses prépa-
rées pour lui dans l’au-delà ! » (Ibn Hishâm, IV, 143; Ibn Sa’d, IV, 246).
Le fait que les muallafat’ul-qulub aient reçu beaucoup de biens provenant du
butin provoqua un certain malaise parmi les Compagnons y.
La Huitième Année de L’hégire 637

Quelqu’un du nom de Dhu’l-Huwaysirah, du clan Tamim, franchit même la


ligne et se montra fort irrespectueux, s’écriant : “Sois juste, ô Messager d’Allah !”
Très attristé par cette réaction, le Noble Prophète r dit :
« Vraiment ? Et qui va être juste si je ne le suis pas moi-même ? »
Il ne fallut pas beaucoup de temps avant qu’une révélation ne descende :

ƈ ƈ ƈ ĞƆ õĩƈ ĥŽ ĺīĨħıĭŽ Ĩƈ IJ
ħĤƪ ĪƈÌIJ
Ž Ɔ ıƆ ĭŽ ĨÒŽ ijƇĉĐŽ ƇÈĪƈŽ ÍĘƆ ÚÓĜƆ ïƆ āĤÒĹ
Ɔ ÒŽ ijĄƇ òÓ ƪ Ę Ƈ Ɔ ƪ Ƈ Ɔ
Ɔ ƈ
ÒŽ ijƇĤÓĜƆ IJ
Ɔ įƇ ƇĤijøƇ òƆ IJ
Ɔ ƇųÒ
Ʃ ħƇ İÓ
Ƈ ÜÆÓ
Ɔ Ĩ Ɔ ÒŽ ijŽ ĄƇ ò
Ɔ ħŽ ıƇ Ĭƪ ÈijŽ ĤƆ IJ
Ɔ Īij Ƈ ðƆ Ìƈ Óıĭ
Ɔ ƇĉíƆ ùŽ ĺƆ ħŽ İÒ Ɔ ĨÒŽ ijŽ ĉƆ đŽ Ƈĺ
Ɔ ×Ƈ ĔÒƈ ò
Īij ƈ Ʃ ĤƆ Ìƈ ÓĬƈƪ ÌįƇĤijøòIJįƈ ĥƈ ąŽ ĘƆ īĨ ƈ ųÒÓ ƈ
Ɔ ųÒĵ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ ĭĻƆ ÜËŽ ĻƇ ø
Ɔ ƇųÒÓ
Ʃ ĭƆ ×Ƈ ùŽ èƆ
« Il en est parmi eux qui te critiquent au sujet des Sadaqats: s’il leur en est
donné, les voilà contents ; mais s’il ne leur en est pas donné, les voilà pleins de
rancœur. S’ils s’étaient contentés de ce qu’Allah leur avait donné ainsi que Son
messager et avaient dit : ‹ Allah nous suffit. Bientôt Allah nous accordera Sa
faveur de même que Son messager !... C’est vers Allah que va tout notre désir ›. »
(At-Tawba, 9 : 58-59).

Ce verset met en lumière que la distribution du butin – nonobstant le fait qu’il


ait été distribué par le Noble Prophète r lui-même – était en réalité un acte divin. Il
souligne également la différence entre le coeur insouciant et le cœur sain.
En fait, la majorité des plaintes qui émanaient d’Ansar ne concernaient pas la
part publique – c’est-à-dire les quatre cinquièmes du butin – que le Noble Prophète
avait distribuée mais ce que l’on nommait fay, c’est à dire le cinquième du butin sur
lequel le Noble Prophète exerçait un contrôle exclusif. Pourtant cela provoqua une
réaction de la part de certains jeunes hommes Ansar. (Kâmil Mîras Tecrîd Tercemesi, X, 341).
Pour régler les objections qui leur venaient à l’esprit, le Noble Messager r
convoqua les Ansar avant que la situation ne dégénère. Lors d’un rassemblement
auquel personne en dehors d’eux ne fut admis le Noble Prophète r s’adressa à eux
pour leur faire comprendre l’essentiel et leur rappeler les faveurs dont ils avaient
bénéficiées.
« Ô Ansar ! J’entends que des plaintes à mon sujet vous traversent le cœur. Mais
dites-moi… Ne vous a-t-on pas montré le droit chemin par Allah, à travers moi,
quand vous étiez égarés ? N’êtes-vous pas devenus riches après que je sois venu à vous,
alors que vous étiez pauvres auparavant ? vos cœurs n’étaient-ils pas unis par Allah
lors de mon avènement alors que la méchanceté et l’inimitié vous rongeaient ?
À toutes ces questions, les Ansar répondirent :
« Tout notre gratitude et les bénédictions sont pour Allah et Son Messager ! »
638 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r poursuivit son émouvant discours :


« Ô Ansar ! Si vous m’aviez dit: «tu es venu à nous quand ton peuple t’a renié et
nous t’avons soutenu ! Nous t’avons soutenu quand ton peuple t’a abandonné ! Ton
peuple t’a chassé et nous t’avons accueilli ! Tu étais pauvre et nous avons fait de toi un
partenaire de notre richesse” je vous aurais alors affirmé : “C’est vrai”
Ô Ansar ! Est-ce vrai que vous avez proférées certaines paroles parce que j’ai
attribué des biens matériels à certaines personnes ? Êtes-vous contrariés par le fait que
j’ai donné a certains quelques biens, uniquement pour réveiller leurs cœurs à l’Islam et
que confiant dans la force et la maturité de votre foi je vous en ai privés… Est-ce cela
le sujet de vos tourments ?
Ô Ansar… Ne voudriez-vous pas rentrer chez vous avec votre prophète pendant
que tous les autres repartent avec leurs biens ? »
Les larmes qui déjà avaient inondé les yeux des Ansar se mirent à couler libre-
ment à l’écoute des paroles touchantes du Noble Prophète r. Ils pleuraient tout en
disant : “Nous voulons retourner chez nous avec toi, ô Messager d’Allah !”
Leur amour infini à son égard trouva à cette occasion une source de rajeunis-
sement. Le Noble Prophète r pleura aussi avec eux et dit pour les réconforter et en
reconnaissance de leur dévotion :
« Ô Ansar… s’il n’y avait eu l’honneur et la vertu de l’Hégire, j’aurais sûrement
voulu être un Ansar… Si chaque personne devait prendre un chemin, je serais toujours
certain de suivre celui des Ansar. »
Après ce triste rassemblement on n’entendit plus dans les rangs Ansar que
cette expression : « Allah et Son Messager nous suffisent!». Une blessure causée par
un malentendu fut guérie définitivement grâce à l’action bienveillante du Noble
Prophète r. (Al Boukhari Maghazi 56 ; Muslim, Zakat, 135; Haythami, X, 31).
Il y a beaucoup de leçons à tirer dans ce comportement exemplaire du Messager
d’Allah r. L’être humain de part sa nature est vaincu par la bienfaisance et la bonté.
Celui qui a bénéficié de la bienfaisance, s’il est un ennemi anihilera son inimitié et
si c’est un proche ami, son amitié sera renforcée. En bref, il est loisible de constater
que la distribution du butin est la plus probante démonstration de la personnalité
exemplaire (Uswah hasana) du Messager d’Allah r.
Le Noble Prophète r entra en état d’ihram en vue d’accomplir l’omra et quitta
Jiranah après un séjour de treize jours. (Al-Boukhari, Umrah, 3 ; At Tirmidhi Hajj, 92/935).
Il est donc considéré qu’il est plus méritoire pour ceux qui séjournent dans la
Mecque ou dans ses environs d’entrer en état d’ihram à Jiranah.
La Huitième Année de L’hégire 639

La punition pour avoir tué un Musulman


Avant de quitter Médine, le Noble Messager r envoya un petit détachement
dirigé par Abû Qatada t vers Najd, et ce dans le but de dissimuler la destination
finale de l’armée musulmane.
Le détachement, lorsqu’il atteignit Izam, fut accueilli par un homme nommé
Amir ibn Adbat qui le salua et prononça la chahada. Mais en raison d’un vieux
différend qu’il avait eu avec Amir, Muhallim ibn Jassamah, qui était avec l’unité de
cavalerie musulmane, prétendit que celui-ci était un imposteur et le tua, saisissant
au passage tous ses biens comme butin.
Le Noble Prophète r, qui venait d’achever sa prière de dhor dans la vallée de
Hunayn, était assis sous un arbre au milieu de ses Compagnons lorsqu’Abû Qatada
et son détachement revinrent de Najd.
L’incident, qui fut porté à sa connaissance, provoqua à l’instant même la révé-
lation du verset suivant :

ħġƇ ĻĤƆ Ìƈ ĵĝƆ ĤŽ ƆÈīŽ ĩƆ Ĥƈ ÒŽ ijƇĤijĝƇ ÜƆ ƆźIJ ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ ƈ


Ƈ Ž Ɔ ÒŽ ijƇĭĻƪ ×Ɔ ÝƆ ĘƆ ųÒ ƈ ×øĹ Ɔ ðƆ Ìƈ ÒŽ ijƇĭĨÆ
Ɔ ĘħŽ ÝƇ ÖŽ óƆ ĄÒ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ɔ īĺ
ğƆ Ĥƈ ñƆ Ġ Ɔ ħƇ ĬÓƈ ĕƆ Ĩ
Ɔ ØƄ óĻƆ áƈ Ġ ƈ Ʃ ïĭ Ɔ đƈ ĘƆ ÓĻƆ ĬŽ ïĤÒ
ƫ ØÓƈ ĻƆ éƆ ĤŽ ÒĂƆ óƆ Đ Ɔ ĭƃ Ĩƈ ËŽ Ĩ
Ɔ ųÒ Ɔ Īij
Ɔ ĕƇ ÝƆ ׎ ÜÓ Ƈ ÛƆ ùŽ ĤƆ ĦƆ ƆŻùĤÒ
ƪ
ÒóĻƈ×ì ĪijĥĩđÜÓĩƈÖĪÓĠųÒĪƈÌÒijĭĻ×ÝĘħġĻĥĐųÒīĩĘģ×ĜīĨħ ƈ ÝĭĠ
ƃ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ƆƩ ƪ Ž Ƈ ƪ ƆƆƆ Ž Ƈ ŽƆ Ɔ ƇƩ ƪ Ɔ Ɔ Ƈ ŽƆ ž Ƈ Ƈ
« Ô les croyants ! Lorsque vous sortez pour lutter dans le sentier d’Allah,
voyez bien clair (ne vous hâtez pas) et ne dites pas à quiconque vous adresse le
salut (de l’Islam) : «Tu n’es pas croyant», convoitant les biens de la vie d’ici-bas.
Or c’est auprès d’Allah qu’il y a beaucoup de butin. C’est ainsi que vous étiez
auparavant ; puis Allah vous a accordé Sa grâce. Voyez donc bien clair. Allah est
certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites. » (An-Nisâ’,4 : 94).
Peu de temps après, la famille d’Amir se présenta pour accuser Muhallim de
meurtre. Après un long procès, avec l’approbation de la famille d’Amir, le Noble
Prophète r condamna Muhallim à verser le prix du sang à la famille de la victime
tout en lui ayant dit avec force de reproches :
« Ainsi donc tu as tué Amir en dépit du fait qu’il t’ait dit qu’il était Musulman ! »
Cette fois Muhallim se trouva dans l’obligation de dire :
« Prie pour mon pardon, ô Messager d’Allah ! »
C’était pratiquement l’aveu qu’il avait commis le meurtre en connaissance de
cause.
640 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ayant pris la vie d’un innocent alors qu’il était musulman, le crime de Muhallim
n’était pas du genre à pouvoir être pardonné facilement.
Le moindre signe de tolérance à cet égard aurait rendu impossible l’endigue-
ment de futurs crimes de ce type.
Le Prophète de la Miséricorde r refusa en conséquence la demande de pardon
de Muhallim et déclara en outre :
« Veuille Allah ne point te pardonner180 ! »
Quelle belle parole que celle du poète Kemal Edip Kürkçüoğlü qui tire la leçon
du désaveu du Messager d’Allah r:
Quelle déchéance que de s’éloigner de la Satisfaction
Dans les deux mondes pour cela la mécréance suffit.
Muhallim, affligé par la colère du Noble Prophète r, rentra chez lui où il se
cacha et décéda finalement une semaine plus tard à cause d’un trop grand chagrin.
Quand des membres de sa famille voulurent l’enterrer, la terre repoussa sans
cesse son cadavre, et ce malgré les nombreuses tentatives.
Impuissants et désemparés, les membres de sa famille vinrent expliquer leur
dilemne au Prophète d’Allah r.
Le Messager d’Allah alors leur dit:
« La terre a accepté en son sein bien d’autres individus pires que lui mais Allah
veut vous enseigner une leçon et la valeur de “La ilaha ill Allah !”
Puis il leur conseilla de porter une nouvelle fois Muhallim en terre tout en
plaçant des pierres sur sa tombe. (Ahmad, V, 112; Ibn Maja, Fitan, 1; Ibn Hishâm, IV, 302;
Waqidi, III, 919).

Le Noble Prophète r agit ainsi pour souligner la gravité de la violation du droit


et de l’honneur de “La ilaha ill-Allah” et montrer à quel point il est terrible de tuer
un Musulman pour le seul bien du monde pour ainsi dissuader énergiquement
quiconque de commettre des crimes similaires.
Cet incident prouve que toute personne qui professe la parole du Tawhid (La
Illaha Ill Allah) doit être considérée comme musulmane et que dans ce cas il est
interdit de suspecter de mécréance une telle personne à moins qu’un blasphème ne
vienne contredire son attestation de foi.
Cela montre une fois de plus à quel point il est impératif que les Musulmans
examinent les apparences lorsqu’ils portent un jugement sur une affaire. Puisqu’il
180. Le rapporteur du hadith ajoute : « Nous avions coutume de dire entre nous que le Messager d’Allah r
pria pour son pardon mais que dans ce cas il avait agi pour exprimer la gravité de l’acte commis par
Muhallim et pour empêcher que les gens ne s’entretuent. » (Ahmad, V, 112 ; Ibn Hishâm, IV 304).
La Huitième Année de L’hégire 641

existe toujours un élément de tromperie, même lorsque les jugements se basent sur
des apparences et en admettant que les humains aient le privilège de fonder leurs
verdicts sur des bases psychiques dont la détermination exacte est une impossibilité
absolue, ils ne seraient pas en mesure d’éviter de commettre de nombreuses injus-
tices à cause de leurs interprétations subjectives.
Un autre motif de cette obligation de fonder un jugement sur des apparences
est d’empêcher certaines personnes de s’accrocher à des excuses telles que “regardez
mon cœur, pas mes actes” pour justifier leurs actes et leurs défauts.
Cette tactique souvent utilisée de nos jours est instantanément annulée par
le principe susmentionné qui a été instauré par l’Islam et la pratique du Prophète
d’Allah r.
Porter un jugement en fonction des apparences peut sembler constituer une
faille temporaire aux hypocrites qui trouvent là l’occasion de dissimiler leur hypo-
crisie cachée avec des actes extérieurs.
Ladite hypocrisie est une barrière contre toute tentative de mettre la justice en
application en se fondant sur des preuves basées sur des conjectures plutôt que sur
des convictions.

Affectation du gouverneur et d’enseignants à La Mecque


Avant de quitter La Mecque, le Noble Prophète r confia à Attâb ibn Asid t
la fonction de gouverneur pour gérer la cité et régler les affaires relatives au pèle-
rinage.
Le Noble Prophète r l’avait déjà nommé à la fonction d’adjoint à La Mecque
lors du départ pour la bataille de Hunayn. (Ibn Hishâm, IV, 69, 148).
Bien qu’il y ait eu des Compagnons y âgés et vertueux, Attâb t fut nommé
alors qu’il avait vingt ans. (Ibn Asîr, Usdu’l-Gaba, III, 556).
Cela montre que la position, l’autorité doivent être confiées à des personnes
qui en ont le mérité et la compétentes, c’est-à dire en d’autres termes qui ont la
science et la vertu et qui sont connues pour leur piété et leur intégrité.
En effet, les Compagnons t qui ont prêté le plus grand service dans la trans-
mission de l’Islam aux générations futures étaient, le plus souvent, des jeunes
comme Attâb ibn Asid t.
Par exemple ‘Abdallah ibn Omar et Ibn ‘Abbâs y, qui furent parmi ceux qui
rapportèrent le plus de ahadith, n’avaient que treize ans au moment du décès du
Noble Prophète r.
Anas, Ibn Mas’ud y et ‘Aïcha c, quant à eux, n’avaient que de 18 ans. De la
même façon la majorité des Compagnons y présents lors du Serment d’Aqaba
642 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

étaient jeunes, de même qu’une majorité des enseignants du Coran martyrisés au


puits de Ma’una.
Cela montre à quel point il est vital de veiller à l’éducation des jeunes qui vien-
dront à assumer potentiellement des tâches importantes susceptibles de façonner
l’avenir de l’Islam.
Le Noble Prophète r, parce qu’il a toujours voulu qu’ils apprennent le Coran et
la Sunna sans perdre de temps, soumettait les nouveaux musulmans à une formation
intense même pour quelques jours auprès de ses Compagnons y.
Durant la prière de l’aube, il contrôlait leurs connaissances et si elle étaient
encore insuffisantes, il les envoyait vers d’autres Compagnons et s’assurait qu’ils
avaient bien retenu leurs instructions.
À la suite de cette sensibilité attachée à l’enseignement de l’Islam, le Noble
Prophète laissa à La Mecque Mu’ad ibn Jabal (Ibn Hishâm, IV, 148-149; Hakim, III, 303/5181)
et Abû Mûsâ al-Asharî (Waqidi, III, 959) pour y enseigner le Coran et la jurisprudence
islamique (fiqh).
Voilà donc une preuve catégorique de l’importance que nous devons accorder
à l’enseignement de l’Islam.
643

LA NEUVIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

L’épée du langage
Le Noble Prophète r envoya, sous la direction de ‘Uyaynah, une petite unité de
cavalerie vers la tribu des Banû Tamim qui avait refusé de payer l’aumône. Au cours
d’un raid rapide, les Croyants vainquirent les rebelles puis retournèrent à Médine
avec une quantité non négligeable de butin et de captifs. (Ibn Sa’d, II, 160).
Un certain nombre de notables issus de cette tribu, vinrent avec leurs grands
poètes vers le Noble Messager r pour sauver leurs captifs.
En attendant que le Noble Prophète r apparaisse à l’intérieur de la Mosquée,
ils s’impatientèrent et se mirent à crier irrespectueusement :
« Allez viens maintenant près de nous ! »
Le Noble Prophète r se sentit mal à l’aise à cause de tous leurs cris
Cela eut pour conséquemment, la révélation du verset coranique suivant :

Ɔ ĥƇ ĝƈ đŽ ĺƆ źƆ ħŽ İƇ óƇ áƆ ĠŽ ƆÈÚÒ


Īij
ƆƇ Ƈ Ɔ Ɔ
ƈ ğƆ ĬƆ IJîÓĭƆ ĺīĺñƈ Ĥƪ ÒĪƈƪ Ì
ƈ óåéĤŽ ÒÅÒòIJīĨ
Ƈ Ƈ Ɔ
« Ceux qui t’appellent à haute voix de derrière les appartements, la plupart
d’entre eux ne raisonnent pas. » (Al-Hujurât, 49 : 4; cf. Ibn Hishâm, IV, 223, 233).
Après avoir accompli la prière de dhor, le Noble Prophète r s’assit dans la cour
de la Mosquée. Le porte parole de la tribu déclara:
« Nous sommes venus avec nos poètes et nos orateurs pour réciter des poèmes. »
Le Noble Prophète r répondit:
« Je n’ai pas été envoyé pour réciter des poèmes et il ne m’a pas été ordonné de lire
des verset en mon honneur. Mais voyons ce que vous avez à lire. »(Ibn Athir Usd’ul-Ghabah
fil marifat as Sahaba I 128).

Un homme des Banû Tamim se leva alors et prononça un discours éloquent


puis le Noble Prophète r fit signe à Thâbit ibn Qays t qui se leva à son tour et
déclama une exceptionnelle allocution concernant la splendeur d’Allah et le don de
prophétie accordé au Noble Messager r : un discours bien supérieur à celui pro-
noncé par le porte-parole des Banû Tamim.
644 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un poème récité par Zibriqan ibn Badr des Banû Tamim fut ensuite contré
par une ode éloquente et affective, prononcée par l’illustre Hasan ibn Thâbit t qui
rendit hommage à l’honneur lié à la religion musulmane.
Le triomphe des Compagnons y était dû à leur immersion dans le Saint Coran,
un sommet extraordinaire en matière de langage, et à leur formation auprès du
Messager d’Allah r, le plus bel orateur jamais apparu, connu sous le nom de jawa-
mi’ul-kalim en raison de sa capacité divine à exprimer en quelques mots simple des
significations profondes.
D’une voix magnifique, cette inspiration exsudée par le Noble Prophète r lui-
même apporte un témoignage éclairant :
Celui qui le voit un seul instant se transforme en rose
Et le témoin de sa parole se mue en rossignol
Conscient du résultat, le poète Aqra ibn Habis des Banû Tamim s’exclama :
« Ses orateurs sont meilleurs que nos orateurs et ses poètes sont bien supérieurs
aux nôtres. Leurs paroles sont simplement au-dessus des nôtres ! »
Après s’être exprimé de la sorte, il accepta l’Islam et après lui ses amis le sui-
virent. Le Noble Prophète r offrit ensuite de nombreux cadeaux aux membres de
la délégation. (Ibn Hishâm, IV, 232).
À ce moment-là, une petite dispute qui éclata entre Abû Bakr et Omar y en
présence du Noble Prophète r occasionna la révélation du verset coranique suivant :

ƈ ųÒ ƈƈ ƈ Ʃ ĸƈ ïƆ ĺīĻÖÒijĨïžƈ ĝƆ ÜƇ źÒij ƈ


ďĻ
Ƅ ĩø Ɔ Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌųÒÒij
Ɔ Ʃ ĝƇ ÜÒƪ IJ
Ɔ įĤijøƇ òƆ IJ Ɔ ųÒ Ɔ Ɔ ŽƆ Ƈ Ɔ ƇĭĨÆ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ÒIJóıƆ åŽ ÜƆ źƆ IJ ƈ
ƪ ÚijŽ Ā
Ɔ Ĺƈžƈ ×ĭĤÒ
Ɔ
Ɔ ĚƆ ijŽ ĘƆ ħŽ ġƇ ÜÒƆ ijƆ ĀŽ ÈÒijđƇ ĘƆ óŽ ÜƆ źÒij
Ɔ ƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺ
Ɔ ħĻ ĥƈ Đ
Ƈ Ƅ Ɔ
Ɔ óƇ đƇ ýŽ ÜƆ źƆ ħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ
ĪIJ Ɔ Ɔ ×éŽ ÜĪƆÈăƅ đ×Ĥ
ƈ ƈ Ɔ Ģƈ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÓƈÖįƇ ĤƆ
Ɔ ħŽ ġƇ ƇĤÓĩƆ ĐŽ Èć Ɔ Ɔ Ž Ɔ ħŽ ġƇ ąđŽ ÖƆ ƈóıŽ åƆ Ġ
« Ô vous qui avez cru ! Ne devancez pas Allah et Son messager. Et craignez
Allah. Allah est Audient et Omniscient. Ô vous qui avez cru ! N’élevez pas vos
voix au-dessus de la voix du Prophète, et ne haussez pas le ton en lui parlant,
comme vous le haussez les uns avec les autres, sinon vos œuvres deviendraient
vaines sans que vous vous en rendiez compte. » (Al-Hujurât 49 : 1-2).
Après cela Omar t baissa tant le ton de sa voix que le Messager d’Allah r,
ayant du mal à comprendre ce qu’il disait, ressentit le besoin de lui demander de
répéter ses paroles. (Al Boukhari, Maghazi, 68).
D’autres Compagnons y, imprégnés du respect dû au Noble Prophète r firent
tout pour qu’il se sente à l’aise.
La Neuvième Année de L’hégire 645

En fait après la révélation de ce verset un Compagnon t réputé pour sa voix


naturellement forte décida, par crainte que le ton de sa voix ne cause une gêne au
Noble Prophète r, de ne pas sortir pendant des jours.
Le Messager d’Allah r lui offrit alors une consolation personnelle et ce n’est
qu’après cela qu’il se sentit en confiance pour sortir. (Al Boukhari, Tafsir, 49/1).
Quand les Compagnons y s’asseyaient autour du repas avec le Prophète r, ils
ne tendaient jamais la main vers la nourriture devant lui. (Abou Daoud, Atimah, 15/3766).
Ils frappaient à la porte de sa chambre avec le bout de leurs ongles et s’abs-
tenaient de tout comportement susceptible de lui causer le moindre embarras. (Al
Boukhari, Adabu’l-Mufrad, s.316; haythami, VIII, 40).

Ils le décrivaient avec finesse, comme le soleil ou la lune, par amour et par res-
pect. (Muslim, Fada’il, 109).
Leur sensibilité consistait à la narration des ahadith du Noble Prophète. Lors de
la narration de l’un de ces ahadith, leur expression changeait visiblement, la sueur
coulait librement de leur front, les larmes jaillissaient de leurs yeux et les veines de
leur cou enflaient à cause de l’anxiété. (Ibn Sa’d, III, 156; Ibn Maja h, Muqaddimah, 38; Dârimî,
Muqaddimah, 28).

Quand ils entendaient un bruit fort, tel que par exemple celui d’un marteau
frappant un clou ou un pieu venant de demeures situées autour de la Mosquée, ils
envoyaient alors un message invitant la personne à cesser de déranger le Prophète
d’Allah r. Certains faisaient même fabriquer leurs portes en dehors de Médine,
juste pour éviter de tomber dans une situation compromettante (Kastallani, II, 386).

Ka’b ibn Zuhayr était ın des poètes qui avaient déclaré la guerre à l’Islam. Une
condamnation à mort avait été prononcée contre lui en raison des poèmes satiriques
malveillants qu’il récitait.Son frère Bujayr t, un Musulman, lui envoya, pour le
raisonner, un poème l’avertissant qu’il se dirigeait vers une fin amère, à moins qu’il
n’arrange son acte. Terriblement affligé, Ka’b se rendit auprès du Noble Prophète r
accompagné d’un Compagnon et jura allégeance, sans toutefois révéler son identité.
Il s’assit sur ses genoux et déclara :
« Ô Messager d’Allah… Ka’b ibn Zuhayr désire également s’approcher de toi
et demander l’amnistie en acceptant l’Islam. L’acceptes-tu ?” Une fois que le Noble
Prophète r l’eut accepté, Ka’b s’exclama joyeusement : “Je suis Ka’b, ô Messager
d’Allah !” (Ibn Hishâm, IV, 152 ; Hakim, III, 675/6480 ; Haythami, IX, 393).
En signe de gratitude envers le Noble Prophète r pour la bienveillance dont il
avait preuve en lui pardonnant, Ka’b se mit alors à réciter la qasida de Banat Su῾ād
qu’il avait préparée à l’avance.
646 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

En remerciement, le Noble Prophète r retira son manteau et le plaça person-


nellement sur le dos de Ka’b. La qasida est ainsi connue sous le nom de Qasida al-
Burda (burda signifiant manteau en arabe).
Après sa mort, le manteau présenté à Ka’b fut acheté par Muawiya.
Ce même manteau, qui est actuellement conservé au Palais Topkapı (à Istanbul),
dans la chambre Hırka-i Saâdet qui porte le même nom (hırka (prononcer Khirka)
signifie manteau en turc) fut, transmis d’une dynastie et d’une génération à l’autre.
Il y a une autre qasida sous le nom de Qasida al-Burda qui est attribuée à
l’Imam Bûsirî.181 Mais le vrai nom de cette deuxième qasida est Qasida al-Bur’a.
Bur’a, en arabe signifie la guérison d’une maladie. L’Imam Busirî a donné ce titre à
sa qasida en commémoration de sa guérison de la paralysie qui eut lieu comme suit :
L’Imam Bûsirî, qui était devenu hémiplégique, c’est-à-dire que la moitié de son
corps était devenu paralysé, se mit à composer la Qasida al-Bur’a et demanda la
guérison au Tout-Puissant.
La nuit où il acheva la qasida, il fit un rêve dans lequel il lisait au Noble
Prophète r ce qu’il avait écrit. Heureux d’entendre le poème, le Noble Prophète r
caressa la partie de son corps qui était paralysé. Constatant qu’il ne restait plus rien
de sa paralysie après son réveil, l’Imam Bûsirî rendit grâce à Allah. Puis, se rendant à
la Mosquée ce matin-là pour accomplir la prière de l’aube (al-fajr), il croisa le grand
homme de la perspicacité, le Cheikh Abû’r-Raja qui lui demanda de réciter la qasida
dans laquelle il loue Le Meilleur de toute la Création. L’Imam Bûsiri lui s’enquit:
«J’ai plusieurs poèmes de ce genre Lequel veux-tu écouter?»
Le Cheikh Abû ’r-Raja lui dit: «Celui que tu as lu hier soir au Messager d’Allah.
Je l’ai vu très heureux quand tu le lisais!»
Étonné il lui demanda: «Comment peux-tu connaître ce rêve alors que je n’en
ai parlé à personne ?»
Le Cheikh lui répondit: «J’étais aussi présent!»
Après cela il lit le premier couplet :
Est-ce le peuple de Salam182 dont tu te souviens, ô mon cœur,
Que tu mêles le sang aux larmes qui coulent de tes yeux ?
On rapporte que le Noble Prophète r souriait et balançait son corps comme un
élégant frémissement de feuilles en entendant la lecture de la qasida.
181. Originaire d’Égypte, Muhammad ibn Saîd al-Bûsirî vécut au 13ème siècle durant l’époque mamelouke
(608/1211-694/1296). (Cf. H. Ibrâhim Şener, Kasîde-i Bürde Kasîde-i Bür’e ve Su Kasîdesi, p. 32, 60).
182. Salam: Nom du bosquet près duquel le Noble Prophète r tenait parfois des discours à ses Compagnons.
La Neuvième Année de L’hégire 647

Selon une pratique, la qasida continue à être lue aux malades, avec l’espoir de
voir se manifester la spiritualité du Noble Prophète r et d’être utilisée comme une
recherche de guérison auprès d’Allah. (Ilhan Armutçuoğlu, Kasîde-i Bürde, Konya 1983, p.8-11).

Investiguez sur les nouvelles apportées par les pervers !


Walîd ibn ‘Uqba envoyé par le Noble Prophète r auprès des Banû Mustaliq
pour recueillir les aumônes se détourna en voyant des membres de sa tribu venir
vers lui pour l’accueillir, pensant qu’ils voulaient le tuer à cause d’une dispute
remontant à l’époque de l’ignorance. De retour à Médine pour s’absoudre, il fit un
faux rapport au Noble Prophète r, allant jusqu’à calomnier les Banû Mustaliq :
« Ils se sont détournés de l’Islam, ô Messager d’Allah ! Non seulement ils ont
refusé de verser l’aumône, mais ils ont voulu me tuer ! »
Suite à cette déclaration, le Messager d’Allah r prépara une unité militaire en
vue de l’envoyer vers ce qui semblait être une tribu rebelle.
Prenant conscience de la situation avant cela, les Banû Mustaliq dépêchèrent de
toute urgence à Médine l’émissaire qui était allé accueillir Wâlid. Là, ils croisèrent
l’unité de cavalerie musulmane qui leur avait été assignée.
Allah I apporta une révélation avertissant les Croyants de ne pas porter de
jugement avant d’avoir tout compris de l’affaire :

Ùƅ ĤƆ ÓıƆ åƈƆ ÖÓĨƃ ijŽ ĜƆ Òij×Ļāƈ ÜĪ ƆÈÒijƇĭĻ×ÝƆ ĘƆ Éƅ ×ĭƈƆ ÖěƄ øÓ
ƈ ĘƆ ħĠÅÓ äĪƈÌÒijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ƈ Ƈ ƪƆ Ɔ ŽƇ Ɔ
ĹĘ ƈ ħġƇ đĻĉƈ ĺijĤƆ ųÒ ƈ ĢijøòħġĻĘ ƈ ĪƆÈÒijĩĥƆ ĐÒIJīĻĨƈ îÓƈ ĬƆ ħÝĥŽ đĘƆ ÓĨĵĥƆ ĐÒijéƈ×āÝĘƆ
Ž Ƈ Ƈ Ž Ʃ Ɔ Ƈ Ɔ ŽƇ ƪ Ƈ Ž Ɔ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ž Ƈ
ĮƆ óĠƆ IJ ħġƈÖijĥĜĹĘ ƈ įĭƆ ĺôƆ IJĪÓ
Ƈ ƪ Ɔ Ɔ ĩĺ ƈ Ž ħġƇ ĻĤƆ Ìƈ ÕƆ ×è
Ɔ ŸÒ ųÒīġƈ ĤIJħÝĭƈ đĤ ƈóĨƆŶÒ
Ž īĨ ƈ ƅóĻáƈ Ġ
ƪ Ɔ ŽƇ ƇƇ Ƈ Ž ƪ Ɔ ƆƩ ƪ Ɔ Ɔ Ž ƫ Ɔ Ɔ Ž Ɔ ž Ɔ
Ɔ ïƇ üÒƈ óĤÒ
ĪIJ ħİğÑƈ ĤIJƇÈĪÓĻāđƈ ĤÒIJĚijùęĤÒIJóęġĤÒħġĻĤÌƈ
ƪ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ž Ɔ Ɔ Ƈ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ž Ƈ Ƈ ŽƆ
« Ô vous qui avez cru ! Si un pervers vous apporte une nouvelle, voyez bien
clair [de crainte] que par inadvertance vous ne portiez atteinte à des gens et que
vous ne regrettiez par la suite ce que vous avez fait. Et sachez que le Messager
d’Allah est parmi vous. S’il vous obéissait dans maintes affaires, vous seriez en
difficultés. Mais Allah vous a fait aimer la foi et l’a embellie dans vos cœurs et
vous a fait détester la mécréance, la perversité et la désobéissance. Ceux-là sont
les bien dirigés. » (Al-Hujurât, 49 : 6-7).
Le Noble Prophète r donna alors l’ordre à ‘Abbâd ibn Bishr de “revenir avec
eux et de recueillir leurs aumônes, mais d’éviter de prendre le meilleur de leurs
biens.”
648 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Abbâd t demeura parmi les Banû Mustaliq pendant dix jours durant lesquels
il leur enseigna tout ce qu’il savait du Coran et de l’Islam. (Ahmad, IV, 279 ; Ibn Hishâm,
III, 340-341 ; Ibn Sa’d, II, 161).

Beaucoup d’informations venant d’un individu mal intentionné se répandirent


de bouche à oreille et finirent par atteindre celui qui agit avec droiture, mais avec
naïveté. Cet individu mal intentionné procèda à la propagation de la rumeur.
Il faut affirmer haut et fort que le fait de recueillir des informations dont
l’authenticité et la véracité ne sont pas vérifiées et les diffuser entraine la responsa-
bilité de celui qui les diffuse, indépendamment du fait qu’il soit ou ne soit pas mal
intentionné.
Peut-être n’y aurait-il aucun mal s’il s’avérait que la vérité se dissimulât derrière
l’information, mais, d’un autre côté, s’il s’avérait que l’information eut été fabriquée,
alors la diffuser porterait directement atteinte à la vérité comme étant de la calomnie
et de la médisance. Par conséquent, il faut toujours se méfier des informations, en
particulier les déplaisantes qui proviennent de sources douteuses.

La Campagne de Tabûk : un extraordinaire test de foi (Rajab 9 / septembre –


octobre 630)
La campagne de Tabûk, une ville située entre Médine et Damas, fut la dernière
entreprise par le Noble Prophète r. Cette campagne peut être considérée comme
une suite de la Bataille de Mu’tah.
L’empereur de Byzance, encore ébranlé par Mu’tah, avait l’intention d’envahir
toute l’Arabie avant que le pouvoir Musulman n’atteignît des hauteurs menaçantes.
Afin de réprimer ce qu’il considérait comme une attaque musulmane, il voulut
utiliser les Ghassanides, des Arabes chrétiens qu’il considérait comme des candi-
dats naturels à cet effet qui étaient plus que prêts pour remplir une telle mission.
La nouvelle de l’attaque potentielle fut rapidement portée à Médine par le biais des
caravanes commerciales qui arrivaient.
Le Noble Prophète r eut tôt fait de rassembler tout ses Compagnons y, jeunes
et vieux. Jusque-là, les préparatifs en vue d’une campagne militaire étaient toujours
menés en secret afin que l’ennemi n’eût aucune connaissance de la destination.
Mais à présent la situation était différente. C’était les plus chauds jours de l’été et
les Musulmans faisaient face à un ennemi puissant et situé à une grande distance.
En outre, les Musulmans se trouvaient dans une situation financière difficile à cause
de la famine dévastatrice qui avait frappé Médine cette année-là.(Ibn Sa’d, II, 165; Al
Boukhari, Tafsir, 66/2).

Les hypocrites, profitant comme à l’accoutumée des troubles, ravivèrent leurs


flammes immortelles de malice et tentèrent de démoraliser les Croyants.
La Neuvième Année de L’hégire 649

Leur arrogant chef Abdallah ibn Ubay se mit, comme d’habitude, à divaguer :
« Muhammad pense-t-il que les Byzantins sont un jeu d’enfant ? Je peux dès à
présent l’apercevoir en captivité ainsi que ses Compagnons. »
Après cela, d’autres hypocrites firent des remarques du genre : « Comment
pouvez-vous vous lancer dans une campagne par un temps aussi chaud ? »
La réponse à cela fut cette révélation divine :

 ƆÈÒŽ ijİƇ ƈóĠƆ IJ


Ī ƈ Ʃ Ģij ƈ øòĖƆ ƆŻì ƈ ħİƈ ïƈ đĝŽ ĩƈÖĪij
Ɔ ųÒ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƇƪƆ ƇŽ Ɔ Ɔ
ęĥíĩĤÒæ ƈóĘ
ÒŽ IJóęĭƈ ÜƆ ƆźÒŽ ijƇĤÓĜƆ IJ ƈ Ʃ ģĻƈ ƈ ƈ Ɔ ħ ƈıĤÒƈ ijĨƆÉÖƈ ÒŽ IJïƇ İÓ ƈ åĺ
Ƈ Ɔ ųÒ ƈ ×øĹ
Ɔ ĘħŽ ƈıùęƇ ĬÈIJ Ɔ Ž ƆŽ Ɔ Ƈ
ƈ
Īij
Ɔ ıƇ ĝƆ ęŽ ĺÒij
Ɔ ƇĬÓĠ Ɔ ïƫ üƆ ƆÈħƆ ĭƪ ıƆ ä
Ɔ ijŽ Ĥƪ ÒóƬ è Ɔ òÓ
Ƈ ĬƆ ģŽ ĜƇ óžƈ éƆ ĤŽ ÒĹĘ
« Ceux qui ont été laissés à l’arrière se sont réjouis de pouvoir rester chez eux
à l’arrière du Messager d’Allah, ils ont répugné à lutter par leurs biens et leurs
personnes dans le sentier d’Allah, et ont dit : «Ne partez pas au combat pendant
cette chaleur !» Dis : «Le feu de l’Enfer est plus intense en chaleur.» - S’ils com-
prenaient ! » (At-Tawba, 9 : 81).
Quelques Arabes du désert se rendirent auprès du Noble Prophète r et , lui
ayant soumis des excuses inventées, demandèrent à être exemptés de participer à
l’expédition militaire.
C’est ce que souligne le verset coranique suivant :

ųÒ ƈ ƈ ƈ óĐƆŶÒīĨ ƈ Ɔ òñž ƈ đĩĤŽ ÒÅÓäIJ


Ɔ Ʃ ÒŽ ijÖƇ ñƆ Ġ
Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒïƆ đƆ ĜƆ IJ
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ ĪƆ ðƆ ËŽ ĻƇ ĤÔÒ ƆŽ Ɔ ĪIJ Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
ħĻĤƈ ƆÈÔÒƄ ñƆ Đ
ƈ
Ɔ ħŽ ıƇ ĭŽ ĨÒŽ IJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ īĺ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÕĻ
ƈ įĤƆ ijøòIJ
Ƈ āĻƇ ø
Ɔ Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ
Ƅ
« Et parmi les Bédouins, certains sont venus demander d’être dispensés (du
combat). Et ceux qui ont menti à Allah et à Son messager sont restés chez eux. Un
châtiment douloureux affligera les mécréants d’entre eux. » (At-Tawba, 9 : 90; Waqidi,
III, 993-996; Ibn Sa’d, II, 165).

Puis e Coran établit des critères pour distinguer les Croyants des hypocrites :

ī ƈ ĤƆ IJĞƆ ijđ×Üƪ ƪ źÒïƃ ĀÓ


 ġà ƈ ĜƆ ÒóęƆ øIJÓ×ĺ ƈóĜƆ ÓĄƃ óĐĪÓ ĠijĤ
Ɔ ƇƆ ƃ Ɔ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ
ħġƇ đƆ ĨÓĭäóíĤÓĭđĉÝøÒ ƈijĤųÓƈ ƈ ÖĪijęĥƈ éĻøIJÙĝýĤÒħ ƈıĻĥĐÚïđÖ
Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ʃ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ ƪ ƫ Ƈ ŽƆ Ɔ Ž Ɔ Ƈ Ɔ
Ɔ ÖƇ ðÓƈ ġƆ ĤƆ ħŽ ıƇ Ĭƈƪ ÌħƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ƇųÒ
Īij Ʃ IJ Ɔ Ɔ ġƇ ĥƈ ıŽ ĺ
Ɔ ħŽ ıƇ ùƆ ęƇ ĬÈĪij Ƈ
650 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« S’il s’était agi d’un profit facile ou d’un court voyage, ils t’auraient suivi ;
mais la distance leur parut longue. Et ils jureront par Allah : «Si nous avions pu,
nous serions sortis en votre compagnie.» Ils se perdent eux-mêmes. Et Allah sait
bien qu’ils mentent. » (At-Tawba, 9 : 42).

ƈ åĺĪƆÈ ƈóìŴÒ
ÒŽ IJïƇ İÓ ƈ Ħƈ ijĻĤŽ ÒIJųÓƈ ƈ Ɔ ĭĨƈ Ëĺīĺñƈ Ĥƪ ÒğƆ ƇĬðƈ ÉŽ ÝùĺƆź
Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ʃ ÖĪij Ƈ ŽƇ Ɔ Ɔ ŽƆ
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ƇĺƆźīĺ ƈ ƈ ƈ ĥƈ ĐųÒIJħ ƈıùƈ ęĬƆÈIJħ ƈıĤÒƈ ijĨƆÉÖƈ
Īij Ɔ ñĤƪ ÒğƆ ƇĬðÉŽ ÝƆ ùŽ ĺÓƆ ĩƆ Ĭƈƪ ÌīĻƆ ĝÝƪ ĩƇ ĤŽ ÓƈÖħĻ
Ƅ Ɔ ƇƩ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž
ĪIJ
Ɔ îƇ îƪ óƆ ÝƆ ĺƆ ħŽ ƈıƈ×ĺŽ òĹ ƈ ƈ ƈ ƈƩ Ö
Ƈ ĥƇ ĜƇ ÛŽ ÖÓƆ ÜƆ òÒŽ IJ
Ɔ ĘħŽ ıƇ ĘƆ ħŽ ıƇ Öij Ɔ ƈóìŴÒĦijŽ ĻƆ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ųÓƈ
« Ceux qui croient en Allah et au Jour dernier ne te demandent pas permis-
sion quand il s’agit de mener combat avec leurs biens et leurs personnes. Et Allah
connaît bien les pieux. Ne te demandent permission que ceux qui ne croient pas
en Allah et au Jour dernier, et dont les cœurs sont emplis de doute. Ils ne font
qu’hésiter dans leur incertitude. » (At-Tawba, 9 : 44-45).
Les hypocrites n’avaient fait aucune préparation en vue de la campagne. Cela
montrait clairement qu’ils n’avaient aucune intention de se joindre aux Croyants en
marche vers Tabûk.
Ainsi le Tout-Puissant déclara :

Ƈ įƇ ĤƆ ÒŽ IJïƫ ĐƆ ƆŶâIJ


Øƃ ïƪ Đ Ƈ ĤŽ ÒÒŽ IJîÒƇ òƆ ƆÈijŽ ĤƆ IJƆ
Ɔ óƇ í
« Et s’ils avaient voulu partir (au combat), ils lui auraient fait des prépara-
tifs… » (At-Tawba, 9 : 46).
Pourtant, il s’agissait là d’une bénédiction divine que les hypocrites fussent
intentionnellement à la traîne et gardassent un profil bas pour ne pas rejoindre l’ar-
mée musulmane. Même s’ils l’avaient fait, ‘Abdallah ibn Ubayy aurait en fait répété
une attitude semblable à celle qu’il avait manifestée lors de la bataille d’Ouhoud en
abandonnant les Croyants.
Allah – Gloire à Lui – déclare en effet :

īĺ ƈ ƈ ƈ ħıĉƆ ×áƆ ĘƆ ħıàƆ Óđƈ×ĬÒųÒ ƈ ĤƆ IJ


Ɔ ïĐÓĝƆ ĤŽ ÒďƆ Ĩ
Ɔ ÒŽ IJïƇ đƇ ĜŽ ÒģĻƆ ĜIJƆ Ž Ƈ ƪ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ʃ ĮƆ ƈóĠī Ɔ ġÃ Ɔ
ħġƇ ĤƆ ƆŻìƈ ÒŽ ijđĄƆ IJƆŶIJƃźÓ×ì źÌƈ ħĠIJîÒôÓĨħġĻĘ ƈ ÒijäóìijĤ
Ž Ƈ Ž Ɔ Ɔ ƪ ŽƇ Ƈ Ɔ ƪ Ƈ Ž Ƈ Ɔ Ɔ ŽƆ
īĻ ƈƈ ĥƈ ĐųÒIJħıĤĪijĐÓĩøħġĻĘƈ IJÙĭÝęƈ ĤÒħġĬijĕ×ĺ
Ɔ ĩĤÓƪčĤÓƈÖħĻ
Ƅ Ɔ Ƈ Ʃ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ ƪ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ž Ƈ Ƈ Ɔ Ƈ ŽƆ
La Neuvième Année de L’hégire 651

« Et s’ils avaient voulu partir (au combat), ils lui auraient fait des prépara-
tifs. Mais leur départ répugna à Allah ; Il les a rendus paresseux. Et il leur fut dit:
«Restez avec ceux qui restent ». S’ils étaient sortis avec vous, ils n’auraient fait
qu’accroître votre trouble et jeter la dissension dans vos rangs, cherchant à créer
la discorde entre vous. Et il y en a parmi vous qui les écoutent. Et Allah connaît
bien les injustes. » (At-Tawba, 9 : 46-47).
Bien que les hypocrites fussent malicieux et désobéissants, ce n’était rien com-
paré aux dommages qu’ils avaient causés lors des campagnes auxquelles ils avaient
en quelque sorte participé, perturbant l’ensemble de l’armée musulmane à cause de
leurs rumeurs, leurs mensonges et leurs crises interminables de peur et d’anxiété.
Chaque hypocrite n’était en fait qu’un fauteur de troubles susceptible de favoriser la
défaite musulmane. Le Tout-Puissant intervint cependant et empêcha les hypocrites
de se joindre à la campagne de Tabûk, une campagne dont les nombreuses difficul-
tés semblaient tout simplement trop ardues pour eux.
Les Compagnons y furent finalement soulagés de leurs ennuis habituels.
Inventant toutes sortes d’excuses, les hypocrites demandèrent à être exemptés
de la campagne. Certains allèrent même jusqu’à prétendre qu’ils s’abstenaient de
se joindre à l’armée de peur d’être tentés par les femmes byzantines. En fait, ils
essayaient de cacher leur sinistre hypocrisie en simulant avoir d’autres préoccupa-
tions plus profondes.
Mais Allah I révéla une fois de plus leur situation :

Ùƈ ĭƆ ÝŽ ęƈ ĤŽ ÒĹĘ
ƈ ƆźƆÈĹžĭƈ Ýƈ ęŽ ÜƆ ƆźIJĹžĤƈ ĪñƆ ÐŽ ÒĢij
Ɔ Ƈ ĝƇ ĺī
Ɔ Ĩħ
ƈ
ƪ ıƇ ĭŽ ĨIJƆ
īĺ ƈ ƈ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÓƈÖÙƄ ĉƆ ĻéĩƇ ĤƆ ħƆ ĭƪ ıƆ ä
Ɔ Īƈƪ ÌIJ
Ɔ ÒŽ ijƇĉĝƆ øƆ
« Parmi eux il en est qui dit : «Donne-moi la permission (de rester) et ne
me mets pas en tentation.» Or, c’est bien dans la tentation qu’ils sont tombés ;
l’Enfer est tout autour des mécréants. » (At-Tawba, 9 : 49).
En menaçant les hypocrites d’un châtiment, le Tout-Puissant avertit aussi
quelques Croyants qui, sous leur influence, montraient des signes de relâchement :

ƈ Ʃ ģĻƈ
ųÒ ƈ ×øĹ ƈ ƈ ƈ ðƆ Ìƈ ħġƇ ĤƆ ÓĨÒŽ ijƇĭĨÆīĺñƈ Ĥƪ ÒÓıĺƆÈÓĺ
Ɔ ĘÒŽ IJóƇ ęĬÒħƇ ġƇ ĤƆ ģĻ
Ɔ ĜÒ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔƫ Ɔ
Ó ĻĬŽ ïĤÒØÓƈ ĻéƆ ĤŽ ÒĎÓ ƈ ƈ ƈ ƫ ØÓƈ ĻéĤŽ ÓƈÖħÝĻĄƈ òƆÈĂƈ òƆŶÒĵĤƆ Ìƈ ħÝĥŽ ĜƆ Óàƪ Ò
Ɔ ƫ Ɔ Ƈ ÝƆ ĨÓ
Ɔ ĩƆ ĘƆ ØóƆ ìŴÒīƆ ĨÓĻƆ ĬŽ ïĤÒ ƆƆ Ƈ Ɔ Ž ŽƇ
ÓĨƃ ijŽ ĜƆ ĢŽ ïƈ ×ÝƆ ùŽ ĺƆ IJÓ ĩĻĤƈ ƆÈÓÖÒñĐħġÖñƈ đĺÒIJóęĭƈ ÜźÌƈ Ĺĥƈ ĜƆ ƪźÌƈ Øƈ óìŴÒĹ
ƈ Ęƈ
Ž Ɔ ƃ ƃ Ɔ Ɔ ŽƇ Žž ƆƇ Ž Ƈ Ɔ ƪ Ɔ
óĺïƈ ĜƆ Åƅ Ĺü ģĠĵĥĐųÒIJÓÑĻüĮIJóąÜźIJħĠóĻĔ
Ƅ Ž Ɔ ƈž Ƈ Ɔ Ɔ Ƈ Ʃ Ɔ ƃ Ž Ɔ Ƈ ƫ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž Ɔ
652 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ô vous qui croyez ! Qu’avez-vous ? Lorsque l’on vous a dit : «Elancez-vous


dans le sentier d’Allah » ; vous vous êtes appesantis sur la terre. La vie présente
vous agrée-t-elle plus que l’au-delà? - Or, la jouissance de la vie présente ne sera
que peu de chose, comparée à l’au-delà ! Si vous ne vous lancez pas au combat,
Il vous châtiera d’un châtiment douloureux et vous remplacera par un autre
peuple. Vous ne Lui nuirez en rien. Et Allah est Omnipotent. » (At-Tawba, 9 : 38-39).

ħġƇ ùƈ ęƇ ĬƆÈIJ ƈ Ɔ ƈ
Ɔ ħŽ ġƇ ĤÒijƆ ĨŽ ÉÖƈ ÒŽ IJïƇ İÓäƆ IJ
Ɔ ƃźÓĝƆ àIJÓ
ƈ ÒŽ IJóęƈ ĬŽ Ò
ƈ Ęƃ ÓęƆ ì
Ɔ
Ž Ƈ
Īij
Ɔ ĩƇ ĥƆ đŽ ÜƆ ħŽ ÝĭƇ ĠĪƈ
Ƈ ÌħŽ ġƇ Ĥƪ óƄ ĻŽ ì ƈ Ʃ ģĻƈ
Ɔ ħŽ ġƇ Ĥƈ ðƆ ųÒ ƈ ×øĹ ƈ
Ɔ Ę
« Légers ou lourds, lancez-vous au combat, et luttez avec vos biens et vos
personnes dans le sentier d’Allah. Cela est meilleur pour vous, si vous saviez. »
(At-Tawba, 9 : 41).

Les avertissements eurent un effet instantané sur les Musulmans, en les revi-
talisant en un clin d’œil. Le relâchement qui s’était abattu sur les cœurs firent à
présent place au remords, qui se transforma en initiative vivante et enthousiaste.
Une mobilisation de foi, pleine de vigueur, s’était alors mise en marche. Après tout,
c’était une obligation fard’ul-ayn (obligation catégorique) pour tous les Musulmans
que de répondre à l’appel du jihad où l’ennemi s’apprêtait à attaquer les terres
musulmanes.
Mais ceux qui pouvaient à juste titre être considérés comme exemptés de
l’appel au jihad furent à nouveau distingués par la Révélation divine :

Ɔ ĝƇ ęĭƈ ƇĺÓĨ
Īij Ɔ ïƇ åƈ ĺƆ Ɔźīĺ
Ɔ ĪIJ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒĵĥƆ Đ
Ɔ ƆźIJĵƆ ĄƆ óŽ ĩƆ ĤŽ ÒĵĥƆ Đ
Ɔ ƆźIJÅÓ
Ɔ ęƆ đƆ ąĤÒĵ
ƫ ĥƆ Đ
Ɔ ÷Ɔ ĻŽ Ĥƪ
ħĻèƈ ò òijęĔųÒIJģĻƈ×øīĨ ƈ īĻĭƈ ùƈ éĩĤŽ ÒĵĥƆ ĐÓĨįƈ Ĥijƈ ƈ Ʃ ƈ ÒŽ ijéāĬƆ ÒðƆ Ìƈ âóè
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƇƩ Ɔ ƅ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ øƇ òƆ IJ Ɔ ų Ƈ Ɔ Ƅ ƆƆ
« Nul grief sur les faibles, ni sur les malades, ni sur ceux qui ne trouvent
pas de quoi dépenser (pour la cause d’Allah), s’ils sont sincères envers Allah et
Son messager. Pas de reproche contre les bienfaiteurs. Allah est Pardonneur et
Miséricordieux. » (At-Tawba, 9 : 91).
Conformément au verset précité, ceux qui sont exemptés de se joindre à la
bataille, en restant en retrait, ne doivent pas causer de méfaits dans leur ville ou
répandre des rumeurs fausses et démoralisantes, mais sont tenus en revanche de
porter secours aux familles qui participent à la bataille et comme ils sont des “fai-
seurs de bien”, on ne peut les accuser de péché.
La Neuvième Année de L’hégire 653

Dans le même temps, en l’absence de déclaration leur interdisant de se joindre


à la cause, s’ils le souhaitent ou en ont les moyens, ils sont libres de s’engager dans
l’armée à condition qu’ils ne soient pas un fardeau pour les autres.
Les Compagnons y étaient à présent pris dans un tourbillon d’excitation et
prévoyaient même de sacrifier leur vie dans le sentier d’Allah.
Sept Compagnons y défavorisés ne purent toutefois pas trouver de monture
pour participer au voyage. En tout état de cause, les Compagnons y furent globale-
ment contraints de partager un chameau et parfois même trois entre eux. Mais ces
sept furent incapables de trouver une monture susceptible de partager entre deux
ou trois autres combattants, malgré le désespoir lié à leur volonté de s’y joindre. Ils
vinrent donc auprès du Noble Prophète r pour lui signifier leur dilemme. Mais
quand le Noble Prophète r leur répondit qu’il n’avait pas de chameaux à leur offrir,
ils fondirent en larmes et revinrent en sanglotant.
La divine appréciation des larmes versées de la manière la plus noble est énon-
cée ainsi dans le Coran :

ħġƇ ĥƇ ĩƈ èŽ ƆÈÓĨ Ɔ ƈ ƈ Ɔ
Ɔ ïƇ äƈ ÈƆźÛƆ ĥŽ ĜƇ ħŽ ıƇ ĥƆ ĩéŽ ÝƆ ĤĞƆ ijŽ ÜƆ ÈÓĨÒ
Ɔ ðƆ Ìƈ īĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒĵĥƆ Đ
Ɔ ƆźIJƆ
Ž
ĪijĝƇ ęĭƈ ƇĺÓĨ Ɔ Ɔ ďƈ ĨïĤÒ
Ɔ ÒŽ IJïƇ åƈ ĺƆ ƪ źÈÓĬƃ õƆ è Ž ƪ īƆ ĨăĻ
ƈ Ƈ ęƈ ÜƆ ħıƇĭĻĐƆÈIJÒŽ ijĤƪ ijÜƆ įƈ ĻĥƆ Đ
ŽƇ ƇŽ ƪ Ɔ Ž Ɔ
« Pas de reproche) non plus à ceux qui vinrent te trouver pour que tu leur
fournisses une monture et à qui tu dis : «Je ne trouve pas de monture pour vous.»
Ils retournèrent les yeux débordant de larmes, tristes de ne pas trouver de quoi
dépenser. » (At-Tawba, 9 : 92).
Tandis qu’Abdurrahman ibn Ka’b et ‘Abdallah ibn Mughaffal y, parmi ceux
loués dans le verset susmentionné, revenaient auprès du Noble Prophète r les yeux
emplis de larmes, Ibn Yamin t s’approcha d’eux et leur demanda la raison de ces
larmes. “Nous sommes allés voir le Messager d’Allah en dernier recours pour qu’il
nous arrange une monture, déclarèrent-ils, mais il n’a pu nous en offrir une… et
nous n’avons pas de monture pour rejoindre le Messager d’Allah dans sa cause.”
Ibn Yamin t fournit aussitôt une monture pour deux à partager et quelques
dattes à titre de provision. Ibn ‘Abbâs t, fournit lui aussi des montures pour les
deux autres et ‘Uthmân t pour les trois autres. (Ibn Hishâm, IV, 172; Waqidi, III, 994).
Le Noble Prophète r eut plus tard la possibilité de fournir des montures pour
d’autres Compagnons nécessiteux. (Al Boukhari, Maghazi, 78).
Ces Compagnons – qui malgré leur exemption de participer à la campagne – ne
pouvaient pas supporter l’idée d’être éloignés un seul instant du Noble Prophète r.
654 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Ces Compagnons y dont le cœur était rempli de l’amour d’Allah I se virent


ainsi accorder l’honneur de partir pour Tabûk en retour de leur enthousiasme fer-
vent et de leur désir de participer à cette campagne.
Ceci n’est qu’un exemple parmi tant d’autres qui montre à quel point le sacri-
fice physique et spirituel que les Compagnons y ont consenti sur le sentier du Tout-
Puissant est grand et indique l’excellence de leur composition intérieure.
Un autre souvenir émouvant en relation avec Tabûk est ici mis en lumière par
Wassila ibn Asqa t :
« Quelques jours avant de partir pour Tabûk, je publiais une annonce à Médine
pour rechercher quelqu’un susceptible de me faire monter sur sa monture en
échange de ma part de butin.
Un vieil homme Ansari me répondit qu’il pouvait m’emmener à la bataille en
se relayant avec moi sur sa monture.
Je lui dis aussitot:
— C’est d’accord.
Il me répondit:
— Alors nous avancerons au nom de la prodigalité d’Allah !
Je quittai donc Médine en compagnie d’un ami idéal. À la fin, Allah m’accorda
une part du butin sous forme de quelques chameaux que je conduisis à mon ami
Ansari pour qu’il en prenne possession mais il me dit:
— Prends tes chameaux et pars !
J’insistais alors et lui dit:
— Mais ils t’appartiennent conformément à notre accord.
Il me répondit alors:
— Frère, prends ton butin, car je ne voulais pas ta part matérielle. Je voulais
avoir une part de tes récompenses dans l’au-delà. » (Abou Daoud, Jihad, 113/2676).
L’enthousiasme de transformer des vies et des richesses en ressources pour
l’au-delà et d’acheter par conséquent le Paradis a été vécu à son apogée pendant les
préparatifs de la campagne, préparatifs qui offrirent des scènes qui allait devenir une
norme pour toute l’oumma à venir, et ce jusqu’à l’Heure ultime.
En se précipitant pour servir le Noble Prophète r, les Compagnons y, qui
étaient comme des papillons autour d’une flamme, répétaient ces mots :
« Puisse nos parents et nos vies être sacrifiés pour toi, ô Messager d’Allah! »
Il disaient cela lors de chaque extraordinaire exploit accompli, indiquant ainsi
que ce n’était rien pour eux comparé à leur amour envers le Noble Prophète r.
La Neuvième Année de L’hégire 655

L’excitation se prolongea avec les Compagnons y pendant les années à venir.


Préférant la crainte révérencielle (taqwa) à la subvention donnée aux personnes
citées comme étant à juste titre exemptées dans le verset coranique susmentionné,
l’aveugle Ibn Umm Maktûm t prit une part active à la bataille de Qadisiyya t, et
agit même en tant que porte-étendard de l’armée musulmane, en dépit de sa cécité.
Les avertissements signifiés par le Tout-Puissant eurent pour effet de mobiliser
en peu de temps une superbe armée musulmane composée de plus de trente mille
hommes. (Waqidi, III, 1002; Ibn Sa’d, II, 166).
Le Noble Prophète r confia d’abord l’étendard de Najjar à Omar ibn Hazm t
mais ayant vu Zayd ibn Thâbit t, il décida de l’enlever des mains d’Omar ibn
Hazm t et de le confier à Zayd.
Alors Omar ibn Hazm t dit :
« Es-tu fâché contre moi, ô Messager d’Allah ? »
Le Noble Prophète r lui répondit:
« Non, par Allah, je ne suis pas du tout fâché contre toi mais tâche d’accorder ta
préférence au Coran. Il a plus mémorisé le Coran que toi. Quiconque garde le plus de
Coran dans sa mémoire doit toujours être préféré, même s’il s’agit d’un esclave noir
au nez coupé ! »
Le Prophète d’Allah r conseilla ensuite aux Aws et aux Khazraj de céder leurs
étendards aux personnes qui avaient mémorisé plus de Coran que les autres.
Abû Zayd t reçut ainsi l’étendard de Awf t tandis que Mu’adh t reçut l’éten-
dard de Banû Salima t. (Waqidi, III, 1003).

Appel à verser des aumônes


Le Noble Messager r invita les Compagnons y à faire des dons avant de se
lancer dans la campagne pour couvrir les nombreux besoins de l’armée. À l’époque,
Médine était sous l’emprise d’une grave famine. Quoi qu’il en soit, laissant de côté
toutes les pensées et motivations personnelles au cœur d’un effort suprême de foi
(iman), les Compagnons y se lancèrent avec ardeur dans une course à l’altruisme.
Abû Bakr t présenta toute sa fortune.
Le Noble Prophète r déclara :
« Je n’ai bénéficié de la fortune de personne autant que j’ai bénéficié de celle
d’Abû Bakr »
Alors ce dernier, déjà réduit en larmes à ce moment-là, répondit :
« Ma fortune et moi, ne sommes-nous pas pour toi seul, ô Messager d’Allah ? »
(Ibn Maja, Muqaddima, 11).
656 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

C’était la confirmation qu’il avait dédié son existence au Noble Prophète r et


qu’il s’était annihilé en lui. Le Noble Prophète r s’enquit :
« Que reste-t-il à ton épouse et à tes enfants, Abû Bakr ? ».
Ce à quoi le Compagnon t répondit derechef, animé d’une foi radieuse :
« Allah et Son Messager ! » (At Tirmidhi Manaqib, 16/3675).
Omar t apporta la moitié de sa fortune, pensant au moins cette fois-ci qu’il
serait en mesure de surpasser Abû Bakr t en matière de donation. Mais encore une
fois, il ne fut pas à la hauteur.
‘Uthmân t fit apprêter trois cents chameaux entièrement équipés et en fit don
à l’armée, ainsi que mille dinars.
Le Noble Prophète r le complimenta affectueusement en disant :
« Plus rien ne pourra lui faire du mal ! » (At Tirmidhi Manaqib, 18/3700; Ahmad, V, 63).
Qui plus est, ‘Uthmân t et sa famille firent don de tous les bijoux qu’ils possé-
daient sur le sentier d’Allah.
De même, toutes les femmes compagnons (les Sahabiyat) apportèrent leurs
bijoux et leurs ornements à la vue du Noble Messager r. (Waqidi, III, 992).
Une petite fille âgée de onze ans, incapable de détacher ses boucles d’oreilles,
les arracha par pur enthousiasme et plaça les boucles ensanglantées devant le Noble
Prophète r.
Même les Compagnons y défavorisés qui avaient à peine quelque chose à don-
ner étaient pris dans l’excitation de vouloir faire un don.
Un d’entre eux, Abû ‘Aqil t travailla toute la nuit et prépara deux charges de
dattes dont une qu’il amena chez lui et la seconde qu’il offrit à l’armée musulmane.
Le Noble Prophèter déclara à son propos :
« Qu’Allah fasse prospérer ce que tu as apporté et ce que tu as conservé. »
Puis il ordonna que les dattes soient ajoutées au reste des piles des aumônes.
(Tabari, Tafsir, X, 251).

Les hypocrites, de leur côté, commencèrent à se moquer de ce qu’ils percevaient


comme de petites aumônes, accusant notamment Abû ‘Aqil t d’insincérité.
Uqba ibn Amir relate ce qui suit :
« Une fois que le verset relatif à la charité183 eut été révélé, nous commençâmes
à porter du bois sur notre dos et à faire don de ce que nous avions obtenu.
183. Il s’agit ici du 103ème verset de la sourate At-Tawba dont la plus grande partie fut révélée à propos de la
campagne de Tabûk : « Prélève de leurs biens une Sadaqa par laquelle tu les purifies et les bénis, et
prie pour eux. Ta prière est une quiétude pour eux. Et Allah est Audient et Omniscient. »
La Neuvième Année de L’hégire 657

Puis vint un homme qui versa une grosse somme d’argent au sujet de laquelle
les hypocrites firent remarquer : “C’est juste pour se vanter”.
Il en vint un autre qui offrit une charge de dattes à propos de laquelle les hypo-
crites objectèrent : ”Allah n’a nul besoin de sa charge de dattes”.
C’est alors que vint de la part d’Allah le Très-Haut la révélation suivante :

Ɔ ïƇ åƈ ĺƆ Ɔźīĺ
ƪźÌƈ ĪIJ ƈ ƈ ƈ īĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÒīĨ
ƈ Đƈ ijƈ ĉƪ ĩĤŽ ÒĪIJ ƈ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒIJ
Ɔ ÚÓĜƆ ïƆ āĤÒĹ
ƪ Ę Ɔ Ƈ Ɔ īĻ Ɔ ž Ƈ Ɔ õƇ ĩĥŽ ĺƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ Ò
ħĻĤƈ ƆÈÔÒ ƈ Ʃ óíƈ øħıĭŽ Ĩ
ƈ ĪIJóíùĻĘħİïıä
Ƅ Ƅ ñƆ Đ
Ɔ ħŽ ıƇ ĤƆ IJ
Ɔ ħŽ ıƇ ĭŽ ĨƇųÒ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ž ƆƆ Ž Ƈ Ɔ Ž Ƈ
« Ceux-là qui dirigent leurs calomnies contre les croyants qui font des
aumônes volontaires et contre ceux qui ne trouvent que leurs faibles moyens (à
offrir), et ils se moquent alors d’eux. Qu’Allah les raille. Et ils auront un châti-
ment douloureux. » (At-Tawba 9 : 79; cf. Al Boukhari, Zakat, 10 ; Muslim, Zakat, 72).
D’après ce que l’on comprend des versions alternatives de la narration susmen-
tionnée, l’homme qui fit un don considérable n’était autre qu’Abdurrahman ibn
Awf, tandis que ce fut Abû ‘Aqil qui apporta l’unique charge de dattes.
Ulba ibn Zayd t un autre Compagnon parmi les plus pauvres, se réveilla une
fois en pleine nuit, accomplit la prière et fit l’invocation suivante :
« Ô Allah ! Tu ordonnes et encourage le jihad. Pourtant, Tu ne m’as pas donné
le pouvoir sur une seule montagne sur laquelle je puisse m’engager dans Ton che-
min en compagnie du Messager d’Allah. Tu n’as même pas mis entre les mains de
Ton Messager une monture sur laquelle je puisse m’installer ! J’ai toujours offert
nombre d’aumônes qui m’ont été autant d’obligations à honorer à partir de mes
quelques biens et de mon corps. Ô Allah ! À présent, il n’y a qu’un seul objet que tu
m’as accordé… et que je vais offrir ! »
Au matin, il s’approcha du Noble Prophète r et dit :
« Je n’ai rien en ma possession, ô Messager d’Allah, que je puisse donner en
aumône à part ce seul objet. Laisse-moi te dire que je ne porte désormais aucune
rancune à ceux qui pourraient dire du mal de moi ou bien se moquer de moi ! »
À ces mots chargés d’autant de compassion que d’amour le Noble Prophète r
ne répondit simplement que :
« Qu’Allah accepte ton aumône »
Le lendemain, il r dit à Ulba t :
« Je t’ai rapporté ton aumône ainsi qu’une bonne nouvelle ! Par Allah, en Qui
réside la vie de Muhammad, tu a été inscrit dans le livre de ceux dont les œuvres ont
été acceptées ! » (Ibn Hajar, al-Isabah, II, 500; Ibn Kathir, as-Sirah, IV, 9; Waqidi, III, 994).
658 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Quelques hypocrites s’efforcèrent encore d’influencer les Musulmans dont la


foi était faible pour les empêcher de participer à la campagne. Ils avaient pris comme
base la demeure d’un Juif nommé Suhaylim.
Dès qu’il eut été informé, le Prophète d’Allah r envoya Talha t et quelques
autres Compagnons incendier la maison.
Les hypocrites furent donc contraints de se disperser car ils ne pouvaient plus
risquer de voire une telle tentative se dissoudre. (Ibn Hishâm, IV, 171).
D’autre part, suite aux versets descendus après le mouvement des hypocrites, les
croyants avaient le coeur envahi par la peur de la punition divine participèrent tous
à la guerre à un tel point que Medine devint une ville fantôme.
Cependant la guerre pouvait prendre beaucoup plus de temps que prévu aussi il
serait difficile à l’État de se mettre tenir debout si des incidents survenaient.
Des conséquences graves pourraient en découler telle que le fait que la religion
soit affaiblie, l’approvisionnement de l’armée ne pourrait pas être fourni et enfin la
disparition d’un groupe de cerveaux nécessaire pour former le moteur du renseigne-
ment à l’arrière des Musulmans pourrait entraîner l’effondrement de l’État.
Pour prévenir cela Allah I énonça dès le début par la voie révélationnelle une
norme concernant la participation au combat :

ÙƄ ęƆ ÐÇƈ Ĉ ƈ ƅ ƈ Ƈ Ĩ
Ɔ ħŽ ıƇ ĭŽ Ĩ ƈ óęƆ ĬƆ ƆźijĥƆ ĘƆ Ùƃ Ęƪ ÇĠ Ɔ ÒŽ IJóƇ ęĭƈ ĻƆ Ĥƈ Īij
Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒĪÓ
ž ÙĜƆ óŽ Ęģƈ ž Ġī Ɔ Ž Ɔ ĠÓ
Ɔ ĨƆ IJƆ
Ɔ òƇ ñƆ éŽ ĺƆ ħŽ ıƇ ĥƪ đƆ ĤƆ ħŽ ƈıĻŽ ĤƆ Ìƈ ÒŽ ijđƇ äƆ òÒ
ĪIJ ƈ ƈ īĺ
Ɔ ðƆ Ìƈ ħŽ ıƇ ĨƆ ijŽ ĜƆ ÒŽ IJòƇ ñĭĻƇ ĤIJ žƈ
Ɔ ƈ ïĤÒĹ
ƈ ÒŽ ijıĝƪ ęƆ ÝĻžĤƈ
Ę Ƈ ƆƆ
« Les croyants n’ont pas à quitter tous leurs foyers. Pourquoi de chaque clan
quelques hommes ne viendraient-il pas s’instruire dans la religion, pour pouvoir
à leur retour, avertir leur peuple afin qu’ils soient sur leur garde. » (At-Tawba, 9 :
122).

Obéissant à cette injonction, le Noble Prophète r laissa ‘Alî et Maslama y à


Médine pour assurer la sécurité en arrière du front.

As-Saat’ul-Usra : Le Temps des Troubles


Enfin, nonobstant les conditions difficiles et les épreuves, l’armée musulmane
put se mettre en mouvement, dans une grande splendeur.
Pourtant, les Croyants durent continuer à endurer les troubles qui s’ensui-
virent et à garder leur patience.
La difficulté des conditions ne s’était pas encore atténuée.
Parmi les circonstances aggravantes il y eut :
La Neuvième Année de L’hégire 659

1) Une sécheresse sans compromis.


2) Une grande distance à parcourir dans un chemin qui traverse un désert
impropre à la marche.
3) L es fruits attendaient d’être récoltés car la saison de la récolte coïncida avec
la campagne militaire.
4) La chaleur brûlante.
5) La croyance de longue date en la puissance des Byzantins, basée sur le
nombre de combattants qu’ils seraient capables d’aligner le jour même.
En raison des aléas en jeu, la campagne fut surnommée “al-Ghazwat’ul-Usra”,
littéralement la Bataille des Troubles et les jours correspondant “Saat’ul-Usra”, le
Temps des Troubles.
Peu de temps après que l’armée musulmane ait pris sa décision, ‘Alî t vint
demander au Noble Prophète r la permission de se joindre à la cause en disant:
“Les hypocrites répandent des rumeurs selon lesquelles tu m’as abandonné
parce que tu ne m’aimes pas. Ô Messager d’Allah ! De grâce, permets-moi de par-
ticiper !”
Le Messager d’Allah r lui répondit:
« Ils mentent, Ô Alî, je t’ai assigné comme adjoint sur ceux que j’ai laissés derrière
moi. Reviens immédiatement ! sois l’œil et l’oreille de ta famille et de la mienne, sois
mon adjoint ! Ne te contenterais-tu pas d’être comme Harun envers Mûsâ (en chemin
vers le Mont Sinaï) ? À cette différence près qu’aucun prophète ne viendra après moi ! »
(Ibn Hishâm IV,174; Al Boukhari Maghazi,78; Muslim Fadail’us-Sahabah,3).

Après ces éloges, ‘Ali t revint joyeux pour assumer à nouveau son devoir.
L’armée avait maintenant parcouru une distance considérable. Abû Dharr t
rejoignit l’armée après un certain temps. Sa faible et frêle monture n’était pas en
mesure du supporter la fatigue du voyage, c’était la raison pour laquelle il s’était
laissé distancier par le groupe principal. Il dut finalement abandonner sa monture
et, malgré les terribles difficultés, rattrapa l’armée à pied.
En le voyant, le Noble Prophète r déclara :
« Qu’Allah ait pitié d’Abû Dharr ! Il vit seul, mourra seul et ressuscitera seul ! »
Les prophéties et paroles miraculeuses du Noble Messager r finirent par se
réaliser dans la vie d’Abû Dharr qui vécut jusqu’à son dernier souffle, seul, comme
il avait vécu. (Waqidi, III, 1000).
Le voyage expéditionnaire s’avérait extrêmement difficile.
La chaleur était étouffante. Une autre difficulté résidait dans le fait que trois
Compagnons y devaient monter un chameau à tour de rôle.
660 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Deux hommes se partageaient une simple datte. Trouver de l’eau était quasi
impossible. Lors de la prise des ablutions, chaque partie du corps n’était donc puri-
fiée qu’une seule fois. Les voyageurs (safarî) reçurent l’ordre de faire la madéfaction
(mas’h) avec la paume de leur main pendant trois jours et les résidents (muqim) un
jour. ( Ibn Maja, Taharat, 45; Ahmad, VI, 27).
À un moment donné le Noble Prophète r fit une prière qui provoqua une
pluie diluvienne tombant exactement là où l’armée musulmane était stationnée.(Ibn
Hishâm, IV, 177).

Alors que l’armée traversait l’antique cité d’Al-Hijr, où le peuple de Thamūd


encourant la colère divine fut détruit, le Noble Prophète r dit à ses Compagnons :
« Il nous faut fuir cette vallée ! » (Waqidi, III, 1008).
Puis il ajouta :
« N’entrez pas chez ceux qui ont été injustes envers eux-mêmes, de peur que ne
s’abatte sur vous ce qui s’est abattu sur eux ! »
Puis il se couvrit la tête et traversa rapidement la région. Il ordonna aussi que
l’eau puisée à cet endroit fût rejetée, en dépit de son aversion pour le gaspillage. (Al
Boukhari, Anbiya, 17 ; Tafsir, 15/2 ; Muslim, Zuhd, 39).

Les lieux frappés par la colère d’Allah I portent leur perte jusqu’à la Dernière
Heure. Pour éviter d’être soumis à la réflexion spirituelle négative reflétée par les
zones qui ont subi la colère divine, les lieux immergés dans la rébellion et le péché,
il faut traverser rapidement ces zones, comme le fit savoir le Noble Prophète r184.
Un soir, alors qu’ils se trouvaient tous à proximité d’Al-Hijr, le Noble Prophète
dit : « Une violente tempête va éclater ce soir ! Attachez rapidement vos chameaux,
restez assis où vous êtes et surtout ne vous levez pas ! »
184. Voici un exemple de la façon dont les circonstances se répercutent sur la matière et l’affectent :
Travaillant sur les cristaux d’eau gelée, Masaru Emoto, un scientifique japonais, découvrit que les
cristaux des étangs naturels éloignés de toute intervention humaine étaient faits d’hexagones à
l’élégance parfaite et aux formes impeccables et envoûtantes. Ayant pris une partie de cette eau dans
deux bocaux séparés, il réalisa une expérience. Les cristaux contenus dans le premier bocal auquel on
murmurait des expressions positives d’amour, de miséricorde, de gratitude et de prière, conservaient
leur forme naturelle et gracieuse, tandis que les cristaux contenus dans le second bocal auquel
étaient associées des expressions négatives comme des insultes et le mot “diable” se désintégraient
rapidement et perdaient toutes leurs caractéristiques esthétiques. Au cours de la même expérience, on
a constaté que les deux bocaux réagissaient différemment à l’audition d’une musique agréable ou bien
épouvantable. Afin de renforcer le résultat obtenu, Emoto mena une autre expérience, cette fois sur
deux bocaux distincts de riz bouilli. À l’intérieur du premier bocal, il plaça un petit morceau de papier
portant l’inscription ”merci“ et, dans le second, un autre morceau de papier portant l’inscription
“stupide”. Répétant en outre chaque mot dans leur bocal respectif, Emoto constata qu’après un mois,
le riz contenu dans le premier bocal avait conservé sa fraicheur et sa couleur, tandis que le riz contenu
dans le second bocal avait noirci et dégageait une odeur nauséabonde. (Safvet Senih, “Su Kristallerinin
Sırrı”, Sızıntı, Aralık 2002, n° 287 ; M. Akif Deniz, İlk Adım, Şubat, 2003).
La Neuvième Année de L’hégire 661

Effectivement, une tempête fit des ravages cette nuit-là. Un homme qui s’était
levé pour faire ses ablutions fut frappé au sol, tandis qu’un autre qui était parti à la
recherche de son chameau fut soufflé en direction du mont Tay situé à proximité.
(Al Boukhari, Zakat, 54 ; Muslim, Fadail, 11).

Quelques jours avant d’atteindre Tabûk, l’armée musulmane fut à nouveau en


proie au manque d’eau.
Mu’adh ibn Jabal narre :
« Le Messager d’Allah r nous dit :
“Si Allah le veut, vous arriverez demain à la source de Tabûk.”
Un jour plus tard, nous atteignîmes la source. Nous recueillîmes le peu d’eau
qu’il y avait avec la paume de nos mains et la versâmes dans une outre en cuir. Le
Messager d’Allah r se lava les mains et le visage avant de reverser l’eau dans la
source. Il y introduisit ensuite trois bâtons, munis d’une pointe en fer. Trois sources
d’eau se mirent alors à jaillir. Tous les combattants purent étancher leur soif.
Le Messager d’Allah r me dit alors :
« Si tu vis assez longtemps, ô Mu’adh, tu verras ici nombre de jardins et de
vignes !” » (Muslim, Fadail, 10 ; Ahmad, V, 238).
L’importante disette des Compagnons y pendant la campagne les amena à
demander au Noble Prophète r la permission d’abattre leurs chameaux pour se
nourrir. L’Autorisation leur fut donnée. Omar t fit ce commentaire :
« Ô Messager d’Allah ! Si tu leur accordes la permission d’abattre leurs cha-
meaux, il y aura alors une pénurie de montures. Si tu le souhaites, tu peux également
leur demander d’apporter leurs provisions puis prier Allah de leur donner l’abon-
dance. Nous espérons qu’Allah l’accordera. »
Le Noble Prophète r dit:
« Très bien, nous agirons ainsi »
Peu de temps après, il fit apporter un tissu de cuir, le fit étendre au sol puis il
ordonna aux combattants d’apporter toutes leurs provisions. Certains apportèrent
une poignée de maïs, d’autres des morceaux de pain. Il y avait très peu de nourriture
empilée sur le tissu.
Le Noble Prophète r invoqua ensuite Allah U pour que la nourriture devienne
abondante, et dit après cela aux Compagnons y :
« Apportez vos récipients et prenez votre nourriture ! »
Les combattants apportèrent leurs récipients et les remplirent copieusement.
Pas un seul récipient ne fut pas rempli. Tous mangèrent à leur guise.
Réalisant qu’il y avait un excédent de nourriture le Noble Prophète r s’exclama :
662 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Je témoigne qu’il n’y a d’autre divinité qu’Allah et que je suis Son Messager.
Celui qui n’est pas uni à Allah par une foi inébranlable en Son unité et en la prophétie
de Muhammad sera certainement empêché d’entrer au Paradis ! » (Muslim, Iman, 45).
L’armée musulmane avait à présent établi son campement à Tabûk ; pourtant il
n’y eut aucun signe de l’ennemi à l’horizon.
Devant cette prodigieuse armée, la confiance des Arabes chrétiens était complè-
tement ébranlée et se souvenant de l’héroïsme des trois mille combattants emplis de
foi à Mu’tah, ceux-ci décidèrent de ne pas participer au combat.
En outre, les Byzantins avaient depuis longtemps changé d’avis quant à l’inva-
sion de l’Arabie et l’empereur était trop occupé à essayer de réprimer les troubles
internes à Humus.
Il s’avéra par la suite que la nouvelle de l’imminente invasion byzantine était
une rumeur exagérée émanant des Arabes Ghassanides.
Les Musulmans, et bien sûr l’Islam, acquirent un immense prestige pour avoir
courageusement marché vers Tabûk. Les frontières nord de l’Arabie furent sécu-
risées. Le souverain d’Ayla, les habitants de Jarba et d’Azruh ainsi que les Juifs de
Makna furent placés sous la protection des Musulmans en acceptant de verser le
tribut “jizya” au Noble Prophète r.
Avec ses quatre cent vingt cavaliers, Khâlid ibn Wâlid t effectua un raid sur
Dumat’ul-Jandal, fit prisonnier le souverain chrétien Uqaydir ibn ‘Abdulmalik et
emmena ce dernier au Noble Messager r.
La condition de sa libération fut qu’il s’acquitte lui aussi du tribut “jizya”. (Ibn
Hishâm, IV, 180-182 ; Ibn Sa’d, I, 276-277 ; Ahmad, V, 4).

L’armée musulmane resta vingt jours à Tabûk. Le Noble Prophète r ne voulut


pas aller plus loin, car il ne voulait pas communiquer l’Islam aux gens par la force de
l’épée. De plus les Byzantins étaient déjà intimidés et aucun ennemi n’avait osé les
affronter.
Enfin une peste mortelle et très contagieuse dévastait la Syrie et sur le Noble
Prophète r avait déclaré :
« Lorsque vous entendrez parler d’une peste sévissant en un certain lieu, n’y allez
pas ! Si vous y êtes, n’en sortez pas ! » (Al Boukhari, Tibb, 30).
Après avoir consulté ses Compagnons y le Messager d’Allah r ramena les
Croyants à Médine. Un autre Compagnon, Abû Haythama t, avait rattrapé l’armée
musulmane à Tabûk.
La difficulté de la campagne l’avait d’abord forcé à rester à Médine. Un jour, sa
femme l’appela à un festin qu’elle avait préparé sous une pergola dans son jardin.
La Neuvième Année de L’hégire 663

Au moment où Abû Haythama t aperçut l’exquis festin, il ressentit immé-


diatement un frisson le long de sa colonne vertébrale en imaginant les difficultés
qu’enduraient le Noble Prophète r et ses Compagnons.
Étant rentré il se dit en lui-même :
« Comment pourrais-je faire cela alors qu’ils sont en train d’endurer tous ces
tourments dans le sentier d’Allah ? »
Pris de remords, Abû Haythama t, sans toucher au festin préparé pour lui,
quitta Médine pour rejoindre l’armée musulmane à Tabûk.
Heureux de le voir, le Noble Prophète lui dit :
« Abû Haythama… tu as failli être brisé ! »
Puis il pria pour son pardon. (Ibn Hishâm, IV, 174 ; Waqidi, III, 998).
Allah I ne contraint pas Ses serviteurs à des devoirs allant au-delà de leurs
capacités. Il ne les tient responsables que de ce qui est en leur pouvoir.
Ce qu’Abû Haythama t a accompli, c’est, à cet égard, payer le prix de la capa-
cité d’endurance dont il était doté.
De tels évènements sont pour nous comme des conseils vivants, des moyens de
réfléchir et de mesurer à quel point nous sommes capables de mettre nos aptitudes
physiques et spirituelles au service du Tout-Puissant et de méditer sur les responsa-
bilités qui nous incombent en tant que musulmans.
Un matin, à Tabûk, appuyé contre un tronc de dattier, le Noble Prophète r fit
ce discours :
« Le meilleur des hommes est celui qui, à cheval, à dos de chameau ou à pied se
lance dans le jihad dans le chemin d’Allah jusqu’à la mort. Le pire des hommes est le
malfaiteur ou l’impudent qui récite le Livre d’Allah mais n’en profite pas.»
« Sachez que le Livre d’Allah contient les mots les plus véridiques qui soient. Le
manche le plus solide à saisir est la crainte révérencielle d’Allah (Takwa). La meil-
leure des religions est celle d’Ibrahim (Islam). La meilleure des lois est la Sunna de
Muhammad. Le plus honorable des mots est dhikr (ou souvenir d’Allah). Les plus
beaux récits sont ceux du Coran185.
185. Plus du tiers du Coran est constitué de récits.
En soulignant leur importance ; Allah le Très-Haut prescrit de contempler les vérités qu’elles
communiquent, d’en tirer des leçons et d’évaluer ces dernières avec notre propre condition.
Le Coran énonce :
« Nous te racontons le meilleur récit, grâce à la révélation que Nous te faisons dans le Coran
même si tu étais auparavant du nombre des inattentifs (à ces récits). » (Yûsuf, 12 : 3).
« […] Eh bien, raconte le récit. Peut-être réfléchiront-ils ! » (Al-‘A’râf, 7 : 176).
« Nous avons, dans ce Coran, cité pour les gens des exemples de toutes sortes afin qu’ils se
souviennent. » (Az-Zumarat, 39 : 27).
664 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les meilleures actions sont celles exigées d’Allah. Les pires actions sont les inno-
vations. La meilleure voie est celle du Prophète. La plus honorable des morts est le
martyre.»
« La pire forme de cécité est de s’éloigner du droit chemin après l’avoir trouvé. Ce
qui est moindre, mais suffisant, vaut mieux que ce qui semble plus avantageux, mais
qui empêche l’homme d’adorer Allah.
La pire des excuses est celle qui a été faite une fois que la mort a montré son
visage. Le pire remords est celui ressenti dans l’au-delà. Le pire des hommes est celui
qui arrive le dernier à la Prière du Vendredi et parle mal d’Allah. L’homme qui a le
plus de défauts est celui dont la langue profère le plus de mensonges. »
« La meilleure richesse est la richesse du cœur. Les meilleures dispositions sont
celles liées à la crainte révérencielle (at-taqwa). Les poèmes dénués de sagesse sont les
œuvres d’Iblis. L’alcool est l’unificateur des péchés de toutes sortes. Les femmes péche-
resses sont les pièges du diable. La jeunesse est une division de la folie. L’usure est le
pire des revenus. La pire chose
dont il faut se nourrir, c’est
la propriété de l’orphelin. La
personne heureuse est celle qui
tire une leçon de la condition
des autres. »
« Chacun d’entre vous se
retrouvera sous quatre arshin
(neuf pieds) ; et le compte de
vos actions sera reporté dans
l’au-delà. Ce qui importe dans
les actions, ce sont leurs consé-
quences. Les pires pensées sont
celles qui sont trompeuses.
Jurer sur un croyant est un
péché, le tuer est de l’incrédu-
lité. Médire d’un Croyant, c’est
se rebeller contre les comman-
dements d’Allah.
« Quiconque commet un
parjure sera dénié. Quiconque
demande pardon sera par-
donné par Allah. Quiconque
réprime sa colère,
La Neuvième Année de L’hégire 665

Allah le récompensera. Quiconque subit un préjudice sera indemnisé par Allah.


Allah augmentera encore plus la récompense de celui qui supporte les épreuves.
Quiconque se rebelle contre Allah sera tourmenté.
Ô mon Seigneur ! Pardonne-moi ainsi qu’à ma communauté !
Ô mon Seigneur ! Pardonne-moi ainsi qu’à ma communauté !
Ô mon Seigneur ! Pardonne-moi ainsi qu’à ma communauté !
Je demande pardon à Allah, en votre nom et en mon nom ! » (Waqidi, III, 1016-1017;
Ahmad, III, 37; Ibn Kathir, al-Bidayah, V, 13-14).

Le Martyr de Tabûk
Abdallah al-Muzani t, qui se vit honoré de l’Islam en dépit de son apparte-
nance à une tribu d’idolâtres, fut le seul compagnon qui tomba en martyr à Tabûk.
Son père n’ayant laissé aucune fortune derrière lui à son décès, Abdallah t fut
élevé par son oncle fortuné qui en fit un homme riche comme lui.
Abdallah t en dépit de son ardent désir de devenir musulman dès que le
Noble Prophète r accomplit l’Hégire à Médine, ne put le suivre à cause de son
oncle, un idolâtre pratiquant. Une fois que le Prophète d’Allah r revint à Médine
après la Victoire éclatante (al-Fath) de la Mecque, Abdallah t dit à son oncle :
« J’ai attendu tout ce temps pour que tu deviennes Musulman, mais je ne vois
pas chez toi le moindre intérêt pour Muhammad. Alors le moins que tu puisses faire
est de me permettre d’embrasser l’Islam ! »
Son oncle lui répondit : « Si tu commences à suivre Muhammad d’une façon
ou d’une autre je reprendrai tout ce que je t’ai donné, même les habits que tu as sur
le dos ! »
Abdallah t s’exclama :
« Par Allah, j’ai commencé à suivre Muhammad ! J’ai déjà cessé de vénérer les
pierres et le bois. Alors tu peux y aller et prendre ce que tu veux de mes mains. »
C’est ainsi que son oncle lui prit tout, jusqu’aux vêtements qu’il portait, comme
il l’avait menacé. Abdallah t retourna presque nu chez sa mère qui coupa un épais
tapis en deux morceaux. Abdallah utilisa la moitié pour couvrir le haut de son corps,
l’autre moitié pour le bas. Il était résolu à aller à Médine le plus vite possible et s’allier
au Prophète d’Allah r. Tous les obstacles qui se dressaient devant lui ne comptaient
pas. Il ne pouvait pas attendre un instant de plus. Il s’éloigna des membres de sa tribu
qui le surveillaient de près et partit secrètement dans l’obscurité de la nuit. Après un
long et fatiguant voyage, il arriva finalement à une distance visible de Médine, bien
que ses mains et ses pieds – marqués par la fatigue de la longue marche – fussent
ensanglantés et qu’il eût perdu son souffle à cause de la soif et de la faim.
666 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Son enthousiasme était malgré tout débordant ; il voulait juste parvenir à des-
tination. Puis, tout à coup, il s’arrêta et se dit qu’il n’était pas possible qu’il appa-
raisse en présence du Prophète d’Allah r avec les gros morceaux de tapis qu’il avait
enroulés autour de lui pour se vêtir. Pourtant, sans autre choix possible, il continua
à marcher, et le jeune homme, Compagnon en devenir, se dirigea vers la mosquée,
au milieu de regards fascinés qui apercevaient l’étranger enveloppé dans un tapis.
À ce moment le Noble Prophète r allait diriger la prière de l’aube (al-fajr).
Après l’accomplissement de la prière, alors qu’il inspectait les personnes présentes
avant de se retirer dans ses appartements, il r remarqua ‘Abdallah.
Le Prophète de la Miséricorde r, refuge des solitaires et des faibles, embrassa
alors ‘Abdallah de toute sa compassion.
Apprenant qu’il s’appelait ‘Abduluzza t, le Noble Prophète r dit alors :
« Tu es (à présent) ‘Abdallah Dhul-Bildayn (celui qui a deux tapis) ! Demeure
quelque part près de moi et visite-moi fréquemment ! »
Abdallah t rejoignit ensuite les Gens de la Suffa où il se mit aussitôt à
apprendre à réciter le Coran. Bientôt, il fut capable de réciter et mémoriser de
nombreuses sourates.
Ce fameux Compagnon t, qui s’était lié au Prophète r par amour, courut
bientôt en sa compagnie d’une bataille à une autre, brûlant du désir de donner sa
vie dans le chemin d’Allah.
Il avait fermement insisté pour que le Noble Prophète r priât pour son martyr
avant de se lancer dans la campagne de Tabûk.
Le Noble Messager r fit l’invocation suivante :
« Ô mon Seigneur, rend son sang inviolable aux non-croyants ! »
Abdallah t s’écria :
“Ce n’est pas ce que je voulais dire, ô Messager d’Allah”,
Le Noble Prophète r lui répondit :
« Si tu sors combattre dans le sentier d’Allah, contractes une fièvre et meurs, tu
es un martyr ! Si ta monture te jette à terre et tu te casses le cou, tu es un martyr ! Ne
t’inquiète pas ! quoi qu’il en soit, il te suffira d’être un martyr ! »
Miraculeusement, ‘Abdallah t tomba martyr de la manière exacte annoncée
par le Noble Prophète r.
Une nuit, alors que l’armée se préparait à rentrer, trois hommes, le Noble
Prophète r accompagné de deux de ses plus proches Compagnons Abû Bakr et
Omar y portaient sous la faible lumière d’une flamme le corps d’un Compagnon
décédé, celui de Abdallah ibn Dhul-Bijadayn t.
La Neuvième Année de L’hégire 667

Abdallah ibn Mas’ud t raconte avec admiration la scène à laquelle il a assisté :


« Dans l’obscurité de la nuit, j’aperçus une sorte de flamme en mouvement dans
un coin du champ où les combattants avaient dressé leurs tentes.
Je me levai et la suivit. C’était le Messager d’Allah r, Abû Bakr et Omar y qui
transportaient le corps d’Abdallah ibn Dhul-Bijadayn. Ils atteignirent un endroit où
ils s’arrêtèrent puis creusèrent une tombe. Le Messager d’Allah r descendit ensuite
dans la tombe alors qu’Abû Bakr et Omar y se préparaient à lui remettre le corps.
Le Messager d’Allah r leur dit: “Amenez votre frère près de moi”.
Ils l’amenèrent et le Messager d’Allah r prit lecorps et le plaça dans la tombe.
Puis il se leva et fit cette invocation :
« Ô mon Seigneur ! Sois satisfait de lui aussi. Je l’ai toujours été... sois satisfait
de lui aussi !”
Ému par cette scène j’enviai Dhul-Bijadayn t et me dis alors :
“Si seulement j’étais l’occupant de cette tombe pour être ainsi complimenté par
le Prophète !” » (Ibn Hishâm, IV, 183 ; Waqidi, III, 1013-1014 ; Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, III, 227).

La trahison des hypocrites et la Mosquée de l’Opposition (Masjid al-Dirar)


Un groupe d’hypocrites se préparait à assassiner le Noble Prophète r quand
l’armée traverserait un étroit défilé, la nuit, au retour de Tabûk.
Le Noble Prophète r, informé de leur sinistre plan, envoya Hudhayfa ibn al-
Yaman t. Les hypocrites s’enfuirent en entendant le Compagnon t les appeler.
(Ahmad, V, 453).

Mais un autre piège des hypocrites attendait le Noble Prophète r. Abû Amir
Fasik, un Chrétien de Khazraj qui avait quitté Médine en raison de l’établissement
de l’Islam et avait fait défection aux Byzantins, incitait incessamment les hypocrites
à agir. Tel un chaudron de sorcière parvenu au point d’ébullition, ces derniers se
mirent à bâtir une mosquée située un peu en contrebas de la Mosquée de Quba. Il
s’agit de la fameuse Mosquée de l’Opposition (Masjid al-Dirar).
Dans l’objectif d’exécuter leur plan d’assassinat, les hypocrites invitèrent le
Noble Prophète r à se rendre dans leur mosquée avant de partir pour la campagne
de Tabûk. « Au retour, incha Allah », répondit le Noble Prophète r. Ils étaient à
présent à l’affût du retour de l’armée musulmane.
Les Croyants étaient maintenant à une courte distance de Médine. Jîbril u
vint auprès du Noble Prophète r et lui donna un aperçu de ce lieu de malice pré-
senté comme une mosquée de piété. Le piège tendu par les hypocrites, sous la forme
d’une mosquée rivale pour piéger le Prophète d’Allah r et tous les Croyants, fut
ainsi déjoué avant même qu’elle ne puisse être active.
668 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Tout-Puissant expose ainsi et sans équivoque leur malice :

īŽ ĩƆ žĤƈ ÒîÓ ƈƈ ƈ ƈ


ƃ ĀƆ òƈŽ ÌIJ Ɔ īĻƆ ĭĨËŽ ĩƇ ĤŽ ÒīƆ ĻŽ ÖÓ
Ɔ ĝƃ ĺ ƈóęŽ ÜƆ IJÒ Ɔ òÒƃ óƆ ĄÒïƃ åƈ ùŽ Ĩ
Ɔ óƃ ęŽ ĠƇ IJÒ Ɔ ÒŽ IJñƇ íƆ ÜÒ
ƪ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒIJƆ
Ɔ ƈ ƈ
ħıƇ Ĭƈƪ ÌïƇ ıƆ ýŽ ĺƆ ƇųÒ
Ž Ɔ ĭƆ ùŽ éƇ ĤŽ ÒƪźÌƈ ÓĬƆ îŽ òƆ ÈĪƈŽ Ìīƪ ęƆ ĥéŽ ĻƆ ĤƆ IJ
Ʃ IJĵ Ɔ ģƇ ׎ ĜƆ īĨįƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ÔƆ òÓ Ɔ èƆ
ĪƆÈěƫ èƆ ƆÈĦƅ ijŽ ĺƆ Ģƈ IJƪ ƆÈīŽ ĨĴ ƈ ijĝŽ ÝĤÒĵĥƆ Đ÷øƈ ƇÈïƄ åƈ ùĩĤƪ Òïƃ ÖƆÈįĻƈ Ę
Ɔ ƪ Ɔ Ɔ ž Ž Ɔ Ɔ
ƈ ħĝƇ ÜƆ ƆźĪij Ɔ ÖƇ ðÓƈ ġƆ ĤƆ
Ž
īĺ ƈ Ʃ IJÒŽ IJóıĉƆ ÝĺĪƆÈĪij Ɔ ×ƫ éƈ ƇĺĢÓƄ äƆ ƈòįĻƈ Ęƈ įĻƈ Ę
ƈ ĦijĝƇ ÜƆ
Ɔ ƈóıž ƈ ĉƪ ĩƇ ĤŽ ÒÕƫ éƇĺƇųÒ Ɔ Ƈ ƪ ƆƆ Ɔ
« Ceux qui ont édifié une mosquée pour en faire [un mobile] de rivalité,
d’impiété et de division entre les croyants, qui la préparent pour celui qui aupa-
ravant avait combattu Allah et Son Envoyé et jurent en disant : «Nous ne vou-
lions que le bien !» [Ceux-là], Allah atteste qu’ils mentent. Ne te tient jamais
dans (cette mosquée). Car une Mosquée fondée dès le premier jour, sur la piété,
est plus digne que tu t’y tiennes debout [pour y prier] On y trouve des gens qui
aiment bien se purifier, et Allah aime ceux qui se purifient. » (At-Tawba, 9 : 107-108).
Cette fois c’était plus qu’un cas habituel de duplicité hypocrite : ils avaient
préparé un complot manifeste contre le Noble Prophète r et les Croyants y. Ils
devaient donc être démasqués et leur mosquée être démolie. Le Noble Prophète r
agit selon l’ordre divin et fit brûler la Masjid al-Dirar dès son retour à Médine.

Du petit jihad au grand jihad


La dernière campagne militaire que le Noble Prophète r conduisit personnel-
lement fut celle de Tabûk, une ville située au milieu de la distance entre Damas et
Médine. Ce fut une campagne marquée par la privation.
L’armée musulmane avait parcouru une distance de mille kilomètres juste pour
atteindre Tabûk et la même distance pour revenir. Avec la poussière qui recouvrait
leurs poils et barbes négligés, les Compagnons y furent pratiquement été réduits en
peau et en os.
Pour autant, le Noble prophète r leur signifia : « Nous revenons saints et saufs,
nous rentrons du Jihad Asghar (petit jihad) vers le Jihad Akbar (grand Jihad). »
Les Compagnons y furent stupéfaits et demandèrent :
«Ô Prophète, quel Jihad peut être plus grand que celui que l’ont vient de faire ?»
Le Noble Prophète r leur répéta:
« Nous retournons maintenant au grand jihad, le jihad contre l’ego (nafs). »
(Suyuti, II, 73).
La Neuvième Année de L’hégire 669

Le jihad contre l’ego est l’entrainement spirituel du cœur à dessein de le puri-


fier en vertu de l’élévation de sa conduite morale et de transformer l’individu en être
humain parfait (insan kamil). Le chemin qui y mène consiste dans l’enchevêtrement
de la raison dans le sein des vérités divines, l’ornement du coeur par la foi (iman)
et les belles moeurs dans un état général couronné par le biais de la spiritualité du
Coran et de la Sunna et, enfin, dans une perfection permettant d’atteindre l’émi-
nence du Tawhid en vertu du comportement juste et droit.

Tous les Musulmans de Médine, les jeunes comme les vieux, se rendirent en
masse à Saniyya al-Wada’ pour accueillir le Noble Prophète r et les Compagnons
alors qu’ils faisaient un retour triomphal à Médine. (Al Boukhari, Jihad, 196).

Les trois Compagnons y qui furent mis en quarantaine jusqu’à leur repentir
Trois catégories d’hommes ne participèrent pas à la campagne de Tabûk :
1) Ceux qui avaient des excuses légitimes et qui, comme l’a stipulé le verset
coranique, ne pouvaient pas participer faute de moyens, malgré leur désir désespéré.
Le Noble Prophète r dit à ses Compagnons à leur propos: « Il y a certainement à
Médine des hommes qui, dans toute marche que vous faites et dans toute la vallée que
vous traversez, sont avec vous : ce sont ceux qui y ont été retenus par la maladie. » (Al
Boukhari, Maghazi, 81 ; Muslim, Imarah, 159).

Un autre hadith, rapporte que le Prophète d’Allah r a déclaré : «La valeur des
actes réside dans les intentions» (Al Boukhari Al wahy 1).
2) Les hypocrites. Outre de nombreuses autres excuses, leur principale raison
de rester en retrait était leur conviction que le Noble Prophète r ne reviendrait pas
de Tabûk. Mais devant le retour sain et sauf du Noble Prophète r et des autres suc-
cès obtenus pendant la campagne, ils se précipitèrent aussitôt vers lui, inventèrent
des mensonges en guise d’excuse et s’excusèrent auprès de lui. Ceux-là au nombre
d’environ quatre-vingts, furent soumis au verdict de la Révélation divine :

Ɔ ïƇ åƈ ĺƆ ijŽ ĤƆ Īij
ĪIJ ƈ ĤƆ IJħġĭ
Ɔ ĜƇ óƆ ęŽ ĺƆ ĦƄ ijŽ ĜƆ ħŽ ıƇ ĭƪ ġà ƈ ƈ Ʃ ÖĪij
Ƈ ĩƈ ĤƆ ħŽ ıƇ Ĭƈƪ ÌųÓƈ Ɔ ęƇ ĥƈ éŽ ĺƆ IJƆ
Ɔ Ž Ƈ Ĩħ
ž İÓ
Ƈ ĨƆ IJ
Ɔ ħŽ ġĭ
ĪijéƇ ĩƆ åŽ ĺƆ ħİƇ IJ įƈ ĻĤÌƈ ÒijĤijĤŻìïĨIJƆÈÚÒ ƅ òÓĕƆ ĨIJƆÈƃÉåĥŽ Ĩ
Ž Ɔ ŽƆ Ž Ž ƪ Ɔ ƪ ƃ Ɔ ƪ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
« Et ils (les hypocrites) jurent par Allah qu’ils sont vraiment des vôtres ; alors
qu’ils ne le sont pas. Mais ce sont des gens peureux. S’ils trouvaient un refuge,
des cavernes ou un souterrain, ils s’y tourneraient donc et s’y précipiteraient à
bride abattue. » (At-Tawba, 9 : 56-57).
670 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ƈ ųÒÓ Ɔ ƈ ƈ Ɔ òƇ ñƈ ÝƆ đŽ ĺƆ
īŽ Ĩ Ƈ Ʃ ĬƆ É×ƪ ĬƆ ïŽ ĜƆ ħŽ ġƇ ĤƆ īƆ ĨËŽ Ĭƫ īĤƆ ÒŽ IJòƇ ñÝƆ đŽ ÜƆ ƪ źģĜƇ ħŽ ƈıĻŽ ĤƆ Ìƈ ħŽ ÝƇ đŽ äƆ òÒ
Ɔ ðƆ Ìƈ ħŽ ġƇ ĻŽ ĤƆ Ìƈ ĪIJ
Øƈ îÓ ƈ ƈ Ɔ ĤƆ Ìƈ ĪIJ Ɔ
Ɔ ıƆ ýĤÒ
ƪ IJ Ɔ Õƈ ĻŽ ĕƆ ĤŽ ÒħĤÓĐĵ Ɔ îƫ óƆ ÜƇ ħƪ ƇàįƇ ƇĤijøƇ òƆ IJ Ɔ ħŽ ġƇ ĥƆ ĩƆ Đ Ɔ ƇųÒĴ
Ʃ óƆ ĻƆ øƆ IJ Ɔ ħŽ ĠƇ ƈòÓ×Ɔ ìŽ È
ħıƇ ĭŽ Đ ÒijĄ ƈóđÝĤƈ ħ ƈıĻĤÌƈ ħÝ×ĥĝĬÒÒðÌƈ ħġĤųÓƈ ƈ ÖĪijęĥƈ éĻøĪijĥĩđÜħÝĭĠÓĩƈÖħġÑƈ×ĭĻĘ
Ž Ɔ Ž Ƈ Ž Ƈ Ž ŽƆ Ž Ƈ ŽƆ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ʃ Ɔ Ƈ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ž Ƈ Ƈ Ɔ Ƈ Ƈ žƆ Ƈ Ɔ
Ɔ ×Ƈ ùƈ ġŽ ĺƆ ÒŽ ijƇĬÓĠÓ
Īij Ɔ ĩƈƆ ÖÅÒõƆ ä Ɔ ħƇ ĭƪ ıƆ ä
Ɔ ħŽ İÒ Ƈ IJƆ ÉŽ ĨƆ IJ
Ɔ ÷Ƅ äŽ ƈòħŽ ıƇ Ĭƈƪ ÌħŽ ıƇ ĭŽ Đ Ɔ ÒŽ ijĄƇ ƈóĐŽ ƆÉĘƆ
« Il vous présentent des excuses quand vous revenez à eux. Dis : «Ne pré-
sentez pas d’excuses : nous ne vous croyons pas. Allah nous a déjà informés de
vos nouvelles. Et Allah verra votre œuvre, ainsi que Son messager. Puis vous
serez ramenés vers Celui qui connaît bien l’invisible et le visible, et alors, Il vous
informera de ce que vous faisiez. Ils vous feront des serments par Allah, quand
vous êtes de retour vers eux, afin que vous passiez (sur leur tort). Détournez-vous
d’eux. Ils sont une souillure et leur refuge est l’Enfer, en rétribution de ce qu’ils
acquéraient. » (At-Tawba, 9 : 94-95).
Après ces révélations, les hypocrites furent bannis de la société musulmane.
Qualifiés d’impurs, ils n’étaient plus considérés comme des musulmans. Ils reçurent
également l’interdiction de prendre part à toutes les causes au nom de l’Islam.
3) Ceux qui n’avaient pas d’excuses et qui étaient répartis en deux groupes :
a) Ceux qui ne participèrent pas à la campagne, même s’ils n’étaient pas
hypocrites et n’avaient pas d’excuse légitime et qui, avant que le Prophète d’Allah r
ne revienne de la campagne, réalisèrent leur erreur et se repentirent profondément.
En guise d’autopunition, ils s’attachèrent aux poteaux de la mosquée et jurèrent de
rester dans cet état jusqu’à ce que le Noble Prophète r les délivrât personnellement
à son retour. Informé de leur situation, le Noble Prophète r déclara à leur sujet :
« Et je promets de ne pas les détacher jusqu’à ce que j’aie reçu un ordre conforme. »
Le verset ci-dessous fut révélé à cette occasion :

óìÆ IJÓéĤÓƈ ĀŻĩĐÒijĉĥìħ ƈıƈÖijĬñƈÖÒijĘóÝĐÒĪIJóìÆIJ


Ɔ Ɔ Ɔ ƃ Ɔ ƃ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ɔ Ž ƇƇ Ž Ƈ ƆƆŽ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
ħĻèƈ ò òijęĔųÒĪÌƈ ħ ƈıĻĥĐÔijÝĺĪƆÈųÒĵùƆ ĐÓ
Ɔ Ñƈƃ Ļž øƆ
Ƅ ƪ Ƅ Ƈ Ɔ ƆƩ ƪ Ž ŽƆ Ɔ Ɔ ƇƆ ƇƩ
« D’autres ont reconnu leurs péchés, ils ont mêlé de bonnes actions à d’autres
mauvaises. Il se peut qu’Allah accueille leur repentir. Car Allah est Pardonneur
et Miséricordieux. » (At-Tawba, 9 ; 102).
Suite à cette révélation, le Noble Prophète détacha les Compagnons qui
s’étaient attachés à des poteaux par remords.
La Neuvième Année de L’hégire 671

b) Ceux qui n’avaient pas participé à la campagne alors qu’ils n’étaient pas
hypocrites et qu’ils n’avaient aucune excuse légitime pour se justifier mais qui
étaient restés séparés des autres qui s’étaient liés aux poteaux de la Mosquée. Ils
étaient trois : le poète Ka’b ibn Malik, Murara ibn Rabi et Hilal ibn Umayya y.
Contrairement aux hypocrites, ils n’avaient pas menti et ils avaient avoué au Noble
Prophète r qu’ils n’avaient aucune excuse justifiée pour ne pas s’être associés à
la cause. C’est avec un grand et inexprimable remords qu’ils supplièrent le Noble
Prophète r de pardonner leur refus de se joindre à eux. Le Noble Prophète r sen-
sible à respecter toute injonction divine, ne leur accorda pas immédiatement son
pardon. De plus, alors qu’il attendait une révélation qui dévoilerait leur sort, il ne
leur adressa même pas la parole. Les Compagnons y qui avaient modifié leur com-
portement conformément à la loi du Noble Prophète r agirent de même.
Ces trois Compagnons y avaient pris part à toutes les batailles précédentes,
à l’exception de Ka’b qui ne fut absent qu’à Badr. Le monde s’était soudainement
rétréci devant leurs yeux et leurs coeurs étaient resserrés maintenant qu’ils étaient
ignorés par l’ensemble de la société musulmane à cause de leur jugement erroné
relativement à leur retrait de Tabûk. Et pire le Noble Prophète r les évita au point
de ne pas répondre à leurs salutations. La terre entière s’était éloignée ; même leurs
épouses étaient comme des étrangères. Ils ne pouvaient rien faire d’autre que de
pleurer jour et nuit. Ils ressemblaient à des bougies qui avaient fondu en raison de
leurs pleurs incessants. Certes ils avaient commis une erreur, mais cela ne les avait
pas empêchés d’être sincères et droits ; cela n’avait ni ébranlé leur confiance en Allah
le Très-Haut ni détourné leurs remords et leur désir de repentance.
Cinquante jours s’écoulèrent avant que leur honnêteté et leur repentir sincère
fut récompensés par la révélation coranique suivante :

ƈ Ƈ īĺñƈ Ĥƪ ÒÙƈ àƆ ƆŻáĤÒĵ


ÛŽ ĜƆ ÓĄƆ IJƆ ÛŽ ×Ɔ èƇ òÓ Ɔ ĩƈƆ ÖĂƇ òŽ ƆŶÒħƇ ƈıĻŽ ĥƆ Đ Ɔ ðƆ Ìƈ ĵÝƪ è
Ɔ ÛŽ ĜƆ ÓĄÒ Ɔ ÒŽ ijęƇ ĥž ì Ɔ ƪ ĥƆ ĐƆ IJƆ
ƈ ƈ ƈ Ʃ īĨ ƈ
ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌÒŽ ijÖijƇ ÝƇ ĻƆ ĤħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đ Ɔ ÜƆ ħƪ ƇàįĻŽ ĤƆ Ìƈ ƪźÌƈ ųÒ
Ɔ ÔÓ Ɔ ƆÉåƆ ĥŽ Ĩ Ɔ Ɔ IJħıƇ ùęƇ ĬƆÈħ ƈıĻĥƆ ĐƆ
Ɔ ƪ źĪÈÒŽ ijĭƫ Č Ɔ Ž Ƈ Ž Ž
īĻ ƈƈ
Ɔ ĜîÓāĤÒ ƪ ďƆ Ĩ Ɔ ÒŽ ijƇĬijĠƇ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ÒŽ ijĝƇ ÜÒ ƪ ÒŽ ijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ ħĻ èƈ óĤÒÔÒijÝĤÒijİ
Ƈ ƪ Ƈ ƪƪ ƆƇ
« Et [Il accueillit le repentir] des trois qui étaient restés à l’arrière si bien
que, toute vaste qu’elle fût, la terre leur paraissait exiguë ; ils se sentaient à
l’étroit, dans leur propre personne et ils pensaient qu’il n’y avait d’autre refuge
d’Allah qu’auprès de Lui. Puis Il agréa leur repentir pour qu’ils reviennent [à
Lui], car Allah est L’accueillant au repentir, le Miséricordieux. Ô vous qui croyez!
Craignez Allah et soyez avec les véridiques. » (At-Tawba, 9 : 118-119).
Le Noble Prophète r s’empressa d’annoncer en ces termes la bonne nouvelle à
Ka’b ibn Malik t :
672 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Réjouis-toi du plus beau jour que tu aies jamais connu depuis que ta mère t’a
mis au monde ! ».186
Ka’b ibn Malik t pour exprimer sa gratitude déclara:
« Dans ce cas, ô Messager d’Allah je voudrais faire l’aumône de toute ma for-
tune pour l’amour d’Allah et de Son Messager ! »
Le Noble Prophète r lui conseilla:
« Il est préférable pour toi que tu gardes une partie de tes biens pour toi-même» .
Alors Ka’b t dit : « Alors je garde ma part du butin de Khaybar »
Puis il t ajouta : « Ô Messager d’Allah ! Allah le Très Haut ne m’a sauvé qu’à
cause de ma sincérité et, comme autre preuve de mon repentir, je ne dirai plus que
la vérité tant que je vivrai ».
Et enfin il t dit : «Je jure devant Allah que le plus grand bienfait qu’Allah Tout-
Puissant m’a donné est d’être sincère avec le Prophète r et de me préserver d’être
détruit avec ceux qui mentent. Parce qu’Allah le Tout Haut a révélé les mots les plus
lourds qu’Il n’ait jamais proféré à l’intention de ceux qui n’ont pas participé à l’expé-
dition de Tabut et ont inventé des excuses pour se justifier. Il a en affet ordonné :
« (…) Détournez-vous d’eux. Ils sont une souillure et leur refuge est l’Enfer (…) »
(At-Tawba 9 : 95 –Al Boukhari Maghazi 79 Wasaya 16 Jihad 103 ; Muslim Tawba 53 ; Musafirin 74).

Ces trois Compagnons y, pour s’être tenus à l’écart d’une seule expédition
militaire, alors qu’ils avaient été présents aux côtés du Noble Prophète r pendant
presque toutes les batailles précédentes, subirent une punition d’une envergure telle
que ceux qui s’abstiennent sans excuse légitime de participer à la lutte pour l’unité
divine dans le sentier d’Allah U doivent méditer sur les conséquences de leurs actes.
Quelle énorme leçon en effet pour un homme qui est appelé “Compagnon” de
se retrouver face à face avec la mort lors de nombreuses batailles, en premier lieu
à Badr, pour ensuite faire l’objet de la plus lourde censure pour avoir été absent
lors d’une campagne (militaire) aussi ardue et sans qu’il n’y eût d’effusion de sang
comme à Tabûk !
Non seulement il y a une incroyable leçon à tirer pour ceux qui détiennent un
fil de compréhension, mais cet incident a aussi une signification et des conséquences
terrifiantes. Considérant que la lutte pour le triomphe de l’Islam reste une nécessité
contemporaine, comme elle l’a toujours été, combien il est triste de voir les nom-
breuses personnes négligentes, lentes et laxistes, agir à cet égard.
186. Ka’b t, alors qu’ıl se précipitait vers le Noble Prophète r après avoir reçu cette merveilleuse nouvelle,
fut intercepté par Talha ibn Ubaydullah t qui l’embrassa avec joie et le félicita ; une expression
authentique d’un sentiment dont Ka’b t se souvint avec tendresse le restant de sa vie.
La Neuvième Année de L’hégire 673

Si un ancien combattant de Badr a dû payer un tel prix à cause de sa négligence,


combien devrions-nous nous modérer et penser aux conséquences liées à notre
propre négligence et, conformément à l’injonction du Tout-Puissant, nous efforcer
d’être en compagnie des justes.
Dans le but de les rendre réceptifs aux influences positives et réfractaires aux
influences négatives, Allah U ordonne aux Croyants de rechercher la compagnie des
justes, de demeurer avec eux, de désirer leur proximité, de les soutenir et de ne pas
se tenir éloignés d’eux, eu égard à tous les aspects de leur vie. Ceci est impératif pour
éviter que “la terre ne se rétrécisse”, pour permettre la guérison de tout cœur endolo-
ri, pour échapper en conséquence au châtiment du Tout-Puissant et pour supprimer
toutes les barrières qui empêcheraient d’atteindre Sa satisfaction. L’importance de
se lier d’amitié avec les justes est magnifiquement exprimée dans les vers suivants :
L’épine est anéantie quand elle est seule,
Et arrosée quand elle est avec la rose…
Il est très important de signifier que la campagne de Tabûk a été surnommée
la “Campagne Pénible”. Il est nécessaire d’être en compagnie des justes, non seule-
ment dans les moments de réconfort, mais aussi lorsqu’ils endurent des épreuves,
lorsqu’ils s’engagent dans un jihad sur le sentier d’Allah. Il est absolument essentiel
de porter les peines dont souffrent les justes et de les imiter dans leurs efforts sans
rester en retrait.
La grande partie de la sourate At-Tawba concerne la campagne de Tabûk et
met l’accent sur l’importance du jihad physique et spirituel dans le chemin d’Allah
le Très-Haut. Après tout, le jihad tant physique que spirituel est la plus flagrante
preuve de la loyauté d’un Musulman pour la religion, car il établit la différence entre
un Croyant et un hypocrite. Le Tout-Puissant déclare en effet :

ģĻƈ
ƈ ×øĹ ƈ Ɔ ĥƇ ÜÓƈ ĝƆ ĺÙƆ ĭåĤÒħıĤƆ Īƪ ƆÉÖƈ ħıĤƆ ÒijĨƆÈIJħıùęƇ ĬƆÈīĻĭƈ Ĩƈ ËŽ ĩĤŽ ÒīĨĴ ƈ óÝüÒ
Ɔ ĘĪij Ƈ ƪƆ ƇƇ Ƈ ƆŽ Ɔ ŽƇ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆƩ ƪ
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ĵĘƆ IJŽ ƆÈīŽ ĨƆ IJ ƈ ƈ Ÿƈ ÒIJ ƈ ƈ ƈ ƈƩ
Ɔ ĪÆóŽ ĝƇ ĤŽ ÒIJ Ɔ ģĻ
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Ɔ įĻŽ ĥƆ ĐÒ
Ɔ ïƃ ĐŽ IJ
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Ɔ ĥƇ ÝƇ ĝŽ ĻƆ ĘƆ ųÒ
ħĻčƈ đƆ ĤŽ ÒôƇ ijŽ ęƆ ĤŽ ÒijƆ İ ƈ īĨ
ƈ įƈƈ ÖħÝđĺÓÖĸñƈ Ĥƪ ÒħġƇ đƈ Ļ×ƈÖÒŽ IJóýƈ ×ÝøÓĘƆ ųÒ ƈ Įƈ ïƈ ıđƈÖ
Ƈ Ƈ ğƆ ĤðƆ IJ
Ɔ ƇŽƆ Ɔ Ƈ ŽƆ Ƈ ŽƆ Ž Ʃ Ɔ ŽƆ
« Certes, Allah a acheté des croyants, leurs personnes et leurs biens en
échange du Paradis. Ils combattent dans le sentier d’Allah : ils tuent, et ils se
font tuer. C’est une promesse authentique qu’Il a prise sur Lui-même dans la
Thora, l’Evangile et le Coran. Et qui est plus fidèle qu’Allah à son engagement?
Réjouissez-vous donc de l’échange que vous avez fait : Et c’est là le très grand
succès. » (At-Tawba, 9 : 111).
674 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Une autre conséquence de cette situation est qu’à tous les âges les hypocrites
représentent la plus grande menace pour les Musulmans, ce que la sourate At-Tawba
et les expériences vécues à Tabûk mettent en lumière.

À Allah appartient les trésors des Cieux et de la Terre


Malgré toutes les tentatives orchestrées par les non-croyants, Allah le Très-
Haut régnait à présent sur Sa religion et la victoire appartenait aux Croyants.
C’était, depuis le début, une promesse divine faite au Noble Prophète r et à ceux
qui l’ont suivi avec sincérité. Cette vérité devait donc toujours se réaliser, quels que
fussent les désirs de ses ennemis comme le stipule le Coran :

Òijąƫ ęƆ ĭĺĵ ƈ Ʃ Ģijƈ øòïĭ ƈ ƈ ƈ


Ɔ Ýƪ è Ɔ ųÒ Ƈ Ɔ Ɔ ĐīŽ Ĩĵ Ɔ ĥƆ ĐÒij
Ɔ ĝƇ ęĭÜƇ źƆ Īij
Ɔ ƇĤijĝƇ ĺƆ īĺ
Ɔ ñĤƪ ÒħƇ İƇ
Īij
Ɔ ıƇ ĝƆ ęŽ ĺƆ źƆ īĻ ƈƈ ƈ Ăƈ òƆŶÒŽ IJÚÒ ƈ IJÓĩùĤÒīÐÒƈ õì ƈƈ
Ɔ ĝĘÓĭƆ ĩƇ ĤŽ Òīƪ ġĤƆ IJ
Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ ųƩ IJƆ
« Ce sont eux qui disent : «Ne dépensez point pour ceux qui sont auprès du
Messager d’Allah, afin qu’ils se dispersent». Et c’est à Allah qu’appartiennent
les trésors des cieux et de la terre, mais les hypocrites ne comprennent pas. »
(Al-Munâfiqûn, 63 : 7).

Certes, les siècles d’efforts persistants déployés par des non-croyants pour affai-
blir la puissance économique Musulmane furent toujours contrecarrés par Allah I
qui combattit cet état en dotant Ses Croyants de nombreuses bénédictions issues des
trésors du ciel et de la terre dont Il est le Digne Possesseur. Mobilisant ses armées
physiques et spirituelles, le Tout-Puissant a toujours accordé aux Croyants des
victoires rapides aux dépens des non-croyants qui ont subi des défaites écrasantes.
L’Histoire fournit de nombreux exemples de Musulmans remportant des vic-
toires suprêmes en petit nombre avec l’aide d’Allah le Très-Haut. Badr, Mu’tah, les
batailles d’Andalousie et de Manzikert en sont des exemples parmi tant d’autres.
Quatre cents cavaliers seulement furent à l’origine du magnifique Empire
Ottoman qui a apposé la signature «i’lâyı kelimetullâh”187 en luttant pour faire régner
la Parole d’Allah dans le monde entier.
Cela prouve que le succès des Musulmans va toujours en parallèle et est induit
de leur sincérité (ikhlas) envers Allah le Très-Haut.
En corolaire la perte de sincérité constitue une perte de force et s’accrocher à
al-ikhlas apporte l’invincibilité.
187. En référence au verset 40 de la sourate At Tawbah. ųÒƇƪ IJÓ ƈ ƪ ƈ ÙƇ ĩĥƈ ĠƆ ("La Parole d'Allah est la plus
Ɔ ĻƆ ĥŽ đƇ ĤŽ ÒĹƆ İųÒ Ɔ
haute"). (Note du Rédacteur).
La Neuvième Année de L’hégire 675

Quand c’est le cas, les ennemis de l’Islam sont toujours frustrés, peu importe
l’ampleur de leurs tentatives de nuire aux Musulmans.
Allah le Très-Haut parle de cette protection dans le Coran :

Ƅ éƈ Ĩ
ćĻ Ƈ Īij
Ɔ ĥƇ ĩƆ đŽ ĺÓ Ɔ Ʃ Īƪ Ìƈ ÓÑƃ ĻŽ ü
Ɔ ĩƈƆ ÖųÒ Ɔ ħŽ İƇ ïƇ ĻŽ Ġ
Ɔ ħŽ ĠƇ óƫ ąƇ ĺƆ ƆźÒŽ ijĝƇ Ýƪ ÜƆ IJ
Ɔ ÒŽ IJóƈƇ ×āŽ ÜĪƈ
Ɔ ÌIJƆ
« (…) Mais si vous êtes endurants et pieux, leur manigance ne vous causera
aucun mal. Allah connaît parfaitement tout ce qu’ils font. » (Al-‘Imrân, 3 : 120). *
L’Histoire islamique témoigne des innombrables manifestations de ce verset.

Il n’y a pas de bien dans une religion sans acte d’adoration


Alors que le Noble Prophète r rentrait à Médine après avoir atteint ses objec-
tifs Urwa ibn Ma’sud t, le dirigeant de Ta’if, arriva précipitamment en ville pour
embrasser l’Islam. Sans plus attendre, il retourna à Taïf, sa ville natale, et commença
à y inviter les gens à l’Islam. Mais les autochtones, qui, il y a des années, avaient
tenté de lapider le Prophète d’Allah r alors qu’il n’avait rien fait d’autre que de les
inviter à la Vérité, réagirent encore plus durement envers Urwa qui reçut une salve
de flèches qui le mena au martyr. (Ibn Hishâm, IV, 194; Hâkim, III, 713/6579).
Le Noble Prophète r ordonna à Malik – le chef des Hawazin qui avait été réta-
bli dans ses fonctions après qu’il ait embrassé l’Islam – de soumettre Ta’if. Les raids
persistants menés par Malik finirent par épuiser les Thâqif, les obligeant à rester
coincés dans leurs fortins. Grandement perturbés, ils envoyèrent leurs notables à
Médine. (Ibn Hishâm, IV, 138, 195).
Afin que leurs cœurs soient réchauffés (à l’Islam), le Noble Prophète r accueil-
lit en personne les délégués Thâqif à l’intérieur même de la Mosquée. (Ahmad, IV, 218).
Ainsi, ces derniers eurent l’opportunité d’entendre le Coran que les Compagnons
récitent usuellement la nuit et durant la prière de tahajjud, et voir les Musulmans
alignés, côte à côte, accomplir les cinq prières rituelles quotidiennes. (Waqidi, III, 965).
Finalement, les membres de la délégation Thâqif déclarèrent être prêts à deve-
nir musulmans à condition d’être exemptés d’accomplir la prière rituelle (sâlat).
Le Noble Prophète r leur répondit : « Il n’y a pas de bien dans une religion sans
ruku’188 ». (Abou Daoud, Kharaj Hadith 3026).
Les Thâqif furent alors assez stupides pour exiger du Noble Prophète r que Lât,
leur idole vénérée, demeurât à sa place encore trois années.
Devant le refus inévitable, ils négocièrent pour seulement un mois ce qui leur
fut bien évidemment refusé.
188. Ruku: Inclinaison du corps pendant l’accomplissement de la prière. (NdT)
676 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Alors, impuissants, ils embrassèrent l’Islam et demandèrent à être exemptés


de détruire l’idole. Le Noble Prophète r n’insista pas et envoya Abû Sufyan et
Mughirah y pour exécuter la tâche à leur place. (Ibn Hishâm, IV, 197 ; Waqidi, III, 967-968).
Curieusement, lorsque l’idole tomba au sol, les femmes de Thâqif se mirent à
courir en pleurant dans les rues de Ta’if. Mais il ne leur fallut pas longtemps pour
oublier leurs anciennes idoles et devenir des musulmanes sincères en reconnaissant
l’excellence de l’Islam.
La prière bienveillante que le Noble Prophète r avait faite au cours de la neu-
vième année de l’ère mecquoise pour guider les habitants de Ta’if, nonobstant le
traitement cruel qu’il avait subi, s’était maintenant vraiment réalisée.
Les délégués Thâqif apprirent les obligations inhérentes à l’Islam et les règles
à respecter concernant les actes d’adoration quotidiens. Le Noble Prophète r leur
enjoignit également de jeûner durant les derniers jours du mois de Ramadan au
cours desquels ils se trouvaient à l’époque.
Bilal al-Habashî t se vit chargé de leur apporter les deux repas sahur et iftar
afin de pouvoir commencer et terminer leur jeûne tout au long de leur séjour à
Médine. (Waqidi, III, 968).
Le Prophète d’Allah r rencontrait des délégués qui venaient le voir chaque fois
qu’il était disponible, jour et nuit, et leur donnait de longs conseils concernant leurs
problèmes189.
Il rencontrait aussi souvent la délégation de Thâqif après la prière de l‘icha190.
Une fois, alors qu’ils parlaient plus que d’habitude, le Noble Prophète r qui
était resté longtemps debout ressentit le besoin de faire raposer le poids de son corps
sur une jambe puis après sur l’autre. (Abou Daoud, Shahr-u Ramadan, 9/1393).
Aws Ibn Hudayfah, t membre de la délégation Thâqif, raconte :
« Une fois, le Messager d’Allah r arriva plus tard que d’habitude, à un moment
donné, après la prière de l‘icha. Nous lui demandâmes à son arrivée:
« Qu’est-ce qui t’a retenu, ô Messager d’Allah ? »
Il r nous répondit:
«Je me suis fait un devoir personnel de lire un hizb du Coran par jour et je ne
voulais pas venir avant de l’avoir terminé! » (un hizb est une section du Coran).
Le matin venu, nous demandâmes aux Compagnons y comment ils divisaient
le Coran en hizb.
189. Omar t raconte : « Le Messager d’Allah r parlait avec Abou Bakr t sur les sujets concernant les
Musulmans et j'étais avec eux. » (At Tirmidhi Sâlat, 12/169).
190. L'Icha est la dernière prière canonique quotidienne.(NdT).
La Neuvième Année de L’hégire 677

Ils nous répondirent :


« Un troisième, un cinquième, un septième, un neuvième, un onzième, un
treizième, puis le hizb du Moufassal de Qâf à la fin du Coran. » (Ahmad, IV, 9 ; Ibn
Maja, Sâlat, 1406).

Le Coran étant la Parole d’Allah le Très-Haut et un dépôt légué par le Noble


Prophète r, les Compagnons y y accordaient une grande importance. Non seule-
ment ils le récitaient longuement durant les prières rituelles, mais ils s’assuraient
aussi de le réciter longuement durant les voyages, les batailles et au cours de la nuit.
Jamais ils ne se lassaient de le réciter, avec joie ; pas un seul jour ne passait sans qu’ils
n’eussent récité le Livre saint. (Ibn Sa’d, III, 75-76).
Ils commençaient leurs journées avec le Coran et conseillaient à quiconque
souffrait d’une maladie de l’œil de considérer ses pages. Othman t aurait même usé
ses deux copies du Coran à cause de récitations excessives.(Kattânî, II, 197).
Parmi les représentants de Thâqif, le plus enthousiaste au sujet du Coran était
‘Uthmân ibn Abi’l-As. Il avait prêté allégeance au Prophète d’Allah r et était devenu
musulman bien avant les autres membres délégués et à leur insu. Comme il était
le plus jeune d’entre eux, il avait été laissé en arrière pour surveiller les montures.
Pendant que les autres étaient revenus vers lui dans la chaleur de midi pour se repo-
ser un peu, ‘Uthman ibn Abi’l-As se tenait à côté du Noble Prophète r, lui posait
toutes sortes de questions, l’écoutait et apprenait le Coran. Il pouvait ainsi entendre
et mémoriser une sourate directement enseignée par le Noble Prophète r. S’il se
trouvait que le Noble Prophète r était très occupé, il allait voir Abû Bakr t ou Ubay
ibn Ka’b t et leur demandait ce qu’il avait en tête ou bien il leur récitait ce qu’il avait
mémorisé. Le Noble Prophète r apprécia beaucoup l’enthousiasme de ‘Uthmân
ibn Abi’l-As et se prit d’une certaine affection pour lui. Lorsque les délégués Thâqif
exprimèrent le désir de retourner à Ta’if, ils demandèrent au Noble Prophète r de
leur désigner un chef. Le Noble Prophète r désigna ‘Uthmân ibn Abi’l-As, même
s’il était le plus jeune d’entre eux. (Ibn Hishâm, IV, 185 ; Ibn Sa’d, V, 508 ; Ahmad, IV, 218).

Autres évènements survenus à la suite de Tâbuk


Le Noble Prophète r eut alors un fils nommé Ibrahim, né de Maria l’Égyp-
tienne. Le petit Ibrahim tomba malade après le retour du Noble Prophète r de
Tâbuk et décéda peu de temps après. Le Noble Prophète r en fut extrêmement
affligé au point qu’il r dit alors que des larmes silencieuses mais compatissantes
coulaient de ses yeux :
« L’œil pleure, le cœur est affligé, mais nous ne disons rien d’autre que ce qui plaît
à notre Seigneur ! Par Allah, Ibrahim, le fait d’être séparé de toi nous cause beaucoup
de peine ! » (Al Boukhari, Janaiz, 44 ; Ibn Sa’d, I, 138).
678 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Noble Prophète r demanda alors qu’on lui apporte une pierre qu’il plaça
ensuite sur le faîte de la tombe. La tombe était à présent délimitée. Ce fut aussi la
première fois qu’une tombe était arrosée d’eau. (Ibn Sa’d, I, 144; Ibn Abdilbarr, I, 59).
Une éclipse solaire eut lieu le même jour. Certains Compagnons se référant
à une coutume datant de l’époque de la Jahiliyya firent le rapprochement de cette
éclipse solaire avec le décès d’Ibrahim. Alors le Prophète d’Allah r accomplit deux
unités de prière au moment où se produisit l’éclipse et dit pour indiquer qu’il
n’acceptait pas les propos tenus par certains Compagnons y :
« Le soleil et la lune sont deux signes parmi les signes d’Allah. Ils ne sont éclipsés ni
par la mort ni par la vie de quiconque. Lorsque vous apercevez leur éclipse, employez-
vous au souvenir d’Allah et accomplissez la prière de circonstance191. » (Nasa’i, Kusuf, 14).
Le Négus d’Abyssinie décéda pendant le mois de Rajab. Le Noble Prophète r
annonça aussitôt aux Compagnons la nouvelle de sa mort malgré la distance qui
sépare les deux pays.
Il dit: «Effectuez la prière funéraire sur votre frère qui est mort dans un pays
lointain.»
Les Compagnons demandèrent: «Qui était-il ?»
Il dit: « Le Négus Ashama. Aujourd’hui, Ashama, le juste serviteur d’Allah, est
mort. Demandez pardon à Allah pour votre frère !»
Puis il r dirigea la prière funéraire en présence des Compagnons. (Muslim, Janaiz,
62-68 ; Ahmad, III, 319 ; IV, 7).

La nouvelle, confirmant que le Négus s’était éteint le jour même où le Noble


Prophète r l’annonça, à Médine. Umm Kulthum, l’honorable fille du Noble
Prophète r et épouse de ‘Uthmân c mourut également à Chaban, le mois d’après.
(Ibn Sa’d, VIII, 38).

Deux mois après la campagne de Tabûk, le mois de Dhul-Qa’dah Abdallah ibn


Ubay, le chef des hypocrites décéda.
Sa mort eut pour effet d’ébranler les fondements du mouvement hypocrite à
Médine. Une majorité de ces hypocrites se repentirent par la suite et finirent par
devenir de véritables Musulmans.

191. Les festivités observées dans certaines régions au cours d’éclipses solaires et lunaires sont des
superstitions qui n’ont rien à voir avec l’Islam qui enjoint plutôt l’offrande de la prière simultanément
aux deux évènements. Considérer le cri du hibou comme un signe de malchance et verser des larmes
dans cette circonstance provient, encore une fois, de croyances superstitieuses similaires.
La Neuvième Année de L’hégire 679

Lorsqu’Abdallah ibn Ubay décéda son fils ‘Abdallah partit dire Messager
d’Allah r : “Abdallah est mort, ô Messager d’Allah, je demande à présent que tu
me remettes ta tunique afin qu’elle serve de linceul à mon père, puis de conduire la
prière funéraire et de prier pour qu’il soit pardonné !” Le Noble Prophète r ôta sa
tunique, la tendit à ‘Abdallah et conduisit la prière funéraire. Cet événement cepen-
dant provoqua la révélation suivante :

Įƈ ƈó×ĜƆ ĵĥƆ Đ ħĝÜźIJÒïÖƆÈÚÓĨħıĭĨ ƈ ïƅ èƆÈĵĥƆ Đģƈ ž āƇÜƆźIJ


Ž Ɔ Ɔ Ž ƇƆ Ɔ Ɔ ƃƆ Ɔ ƪ Ƈ Žž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ
Īij ƈ ĘƆ ħİIJÒŽ ijÜÓƇ ĨIJįƈ Ĥij
Ɔ ĝƇ øÓ ƈ øòIJųÓƈ ƈ
ŽƇ Ɔ Ɔ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ Ʃ ÖÒŽ IJóƇ ęƆ Ġ
Ɔ ħŽ ıƇ Ĭƈƪ Ì
« Et ne fais jamais la Sâlat sur l’un d’entre eux qui meurt et ne te tiens pas
debout auprès de sa tombe parce qu’ils n’ont pas cru en Allah et en Son messager
et ils sont morts en étant pervers. » (At-Tawba, 9 : 84; Al Boukhari, Janaiz, 23 ; Ibn Maja,
Janaiz, 31).

Quand on lui demanda pourquoi il avait accepté de remettre sa tunique pour


envelopper le cadavre d’un hypocrite notoire et effectué la prière funéraire sur lui, le
Prophète d’Allah r s’expliqua ainsi :
« Ni ma tunique ni la prière que j’ai effectuée à son intention ne le protégeront
du châtiment qui provient du sentier d’Allah. Pourtant, ce faisant, je prévois la guidée
de mille personnes issues de son peuple ! »
En effet un millier d’anciens hypocrites de Khazraj, qui furent témoins de la
scène, délaissèrent l’idolâtrie et embrassèrent l’Islam. (Aynî, VIII, 54 ; Diyarbakrî, II, 140-14).

L’Année des Émissaires


La Mecque avait été prise, la bataille d’Hunayn avait été gagnée, le peuple de
Ta’if avait embrassé l’Islam un an après le siège et la dure campagne de Tabûk
s’était terminée triomphalement. Dans toute la Péninsule arabique, il n’y eut alors
plus d’obstacle s’opposant à l’Islam. Les tribus d’Arabie ayant ainsi l’occasion
d’acquérir une connaissance plus intime de l’Islam, commencèrent à dépêcher des
envoyés auprès du Noble Prophète r afin de lui prêter allégeance.
Ces envoyés, venant du Yémen, d’Hadramawt, de Bahreïn, d’Amman, des
frontières de la Syrie et de la Perse, se présentèrent pour adhérer à l’Islam en pré-
sence du Noble Prophète r ou pour l’informer qu’ils avaient déjà franchi le pas, et
pour lui réclamer des enseignants capables de leur enseigner l’Islam.
Banû Tujib est un brillant exemple de tribu susceptible de retourner immé-
diatement auprès des leurs pour transmettre tout ce qu’elle avait personnellement
appris du Noble Prophète r.
680 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Treize émissaires de cette tribu vinrent à lui en avec des aumônes qu’ils vou-
laient verser. Le Prophète d’Allah r apprécia leur attitude et, après leur avoir sou-
haité la bienvenue, dit à Bilal al-Habashî de les accueillir de la meilleure façon.
Lorsqu’ils dirent au Messager d’Allah r :
« Ô Messager d’Allah nous t’apportons ce qui pris de nos biens est dû à Allah ! »
Le Noble Prophète r leur répondit :
« Rapportez tout ceci et faites-en la distribution aux pauvres! »
Ils objectèrent : « Mais nous n’avons apporté avec nous que ce qui reste après la
distribution faite à nos pauvres. »
Abû Bakr t les félicita alors et dit :
« Il n’y a sûrement pas d’autres émissaires parmi les Arabes qui soient sem-
blables à ces gens de Tujib, ô Messager d’Allah ! »
Alors le Noble Prophète r déclara :
« La guidée est entre les mains d’Allah. Allah ouvre à la foi le cœur de qui Il
souhaite le meilleur. »
Les émissaires de Banû Tujib posèrent au Noble Prophète r certaines ques-
tions relatives au Coran et à la Sunna. Leurs réponses furent consignées par écrit et
transmises. Leur enthousiasme eut tôt fait d’augmenter l’intérêt qu’avait pour eux le
Noble Prophète r.
Après avoir séjourné quelques jours, les émissaires exprimèrent leur désir de
rentrer chez eux. Quand on leur demanda pourquoi ils étaient pressés, ils répon-
dirent :
“Nous désirons retourner auprès de notre peuple le plus vite possible pour leur
enseigner ce que nous avons observé et appris du Messager d’Allah.”
Puis ils virent le Prophète d’Allah r une dernière fois et lui firent leurs adieux.
Le Noble Prophète r demanda alors Bilal al-Habashî t de les accompagner et leur
accorda plus de cadeaux qu’aux autres délégations. (Ibn Sa’d I 323; Ibn Qayyim III, 650-651).
En exhortant les membres des diverses délégations à rester quelques temps à
Médine, le Noble Prophète r s’était ainsi assuré qu’ils apprennent le Coran et les
bases de l’Islam pour qu’ils acquièrent une connaissance pratique de la religion et
appliquent eux-mêmes les principes.
Par exemple quand des émissaires de la tribu de ‘Abd’ul-Qays vinrent se pré-
senter le Noble Prophète r demanda aux Ansar de les accueillir et de répondre à
leurs besoins durant leur séjour à Médine tout en leur enseignant les rudiments de
l’Islam et en les incitant à mémoriser assez de sourates du Coran pour qu’ils accom-
plissent correctement la prière rituelle.
La Neuvième Année de L’hégire 681

Le lendemain matin, lors de la prière de fajr, le Prophète d’Allah r leur


demandait comment ils s’en sortaient et s’ils étaient satisfaits de la façon dont leurs
hôtes s’étaient occupés d’eux. Voyant qu’ils étaient plus que ravis, il les répartit par
deux parmi les Compagnons y pour leur donner l’occasion d’apprendre l’Islam de
manière plus adéquate et plus confortable. Satisfait des efforts de ses Compagnons
et du zèle montré par les émissaires d‘Abd’ul-Qays, le Noble Prophète r s’occupa
ensuite de ces nouveaux Musulmans et, un par un, les écouta personnellement
réciter ce qu’ils avaient mémorisé du Coran et corrigea leurs éventuelles erreurs.
(Ahmad, III, 402).

Ainsi l’islam se répandit dans toute l’Arabie et se développa jour après jour. Les
gens venaient embrasser en masse l’Islam et Médine se remplissait de jour en jour
de nouveaux arrivants. Le Prophète d’Allah r les accueillait avec compassion, les
traitait avec honneur et gentillesse, discutait avec eux selon leurs conditions et leurs
dispositions, recueillait des informations concernant leurs régions d’origine, prêtait
attention à leurs besoins et résolvait leurs problèmes. Bref, il inscrivit dans leurs
cœurs le fondement de la paix et de la joie attaché à l’Islam. (Voir, An Nasaï, Umrah, 5).
Les troubles liés à l’époque ouvrirent la voie à une abondante bénédiction.
Allah le Très-Haut exhorta Son Messager r et tous les Croyants à mettre en
lumière leur dette envers la généreuse bénédiction qu’Il leur avait octroyée :

ƈ Ʃ īĺ ƈ Ę ƈ Īij ƈ Ʃ óāĬƆ ÅÓäÒðƆ Ìƈ
ƃ ijƆ ĘŽ ƆÈųÒ
ÓäÒ ƈ îĹ Ɔ ĥƇ ìƇ ïŽ ĺƆ öÓ ƪ ÛƆ ĺŽ ƆÈòƆ IJ
Ɔ ĭĤÒ Ɔ çƇ ÝŽ ęƆ ĤŽ ÒIJ
Ɔ ųÒ Ƈ Ž Ɔ
ÓÖÒƃ ijƪ ÜƆ ĪÓ Ɔ įƇ Ĭƈƪ ÌĮƇ óŽ ęƈ ĕŽ ÝƆ øÒ
Ɔ Ġ ƈ
Ž IJ
Ɔ ğƈƆ Öž ò
Ɔ ïĩŽ éƈƆ ÖçƈŽ מ ùƆ ĘƆ
« Lorsque vient le secours d’Allah ainsi que la victoire, et que tu vois les gens
entrer en foule dans la religion d’Allah, alors, par la louange, célèbre la gloire de
ton Seigneur et implore Son pardon. Car c’est Lui le grand Accueillant au repen-
tir. » (An-Nasr, 110 : 1-3).
Consécutivement à la propagation rapide de l’Islam en Arabie et à la venue à
Médine d’émissaires de différentes tribus pour apprendre la Religion de Vérité, la
neuvième année de l’Hégire fut nommée l’Année des Émissaires.

Le Pèlerinage obligatoire (Al Hajj)


La pratique annuelle du Hajj, qui était accomplie suivant la religion hanifiyya
d’Ibrahim u était mêlée à de nombreux rituels idolâtres.
L’an neuf de l’Hégire, après avoir désigné Abû Bakr t comme guide (amir) des
pèlerins, le Noble Prophète r envoya trois cents Compagnons y à La Mecque pour
enseigner aux Musulmans habitant sur place la bonne manière d’exécuter le Hajj.
682 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il déclara dans le même temps vouloir assister personnellement au pèlerinage


de l’année suivante et demanda aux membres du groupe d’emmener avec eux un
cheptel de vingt chameaux marqués en vue d’être sacrifiés dans le cadre du Hajj.
Lorsqu’Abû Bakr r partit de Médine avec le groupe, les premiers versets de
la sourate At-Tawba furent révélés. Ces versets ordonnaient que, tout comme la
Maison Sacrée avait été purifiée des idoles, les environs de la Maison Sacrée devaient
être expurgés des idolâtres. Jusqu’à présent les idolâtres avaient été laissés libres de
pratiquer leur culte à la Ka’ba. Mais à présent comme la Ka’ba avait étét restaurée
dans son identité originelle, la forme immorale du culte idolâtre de à circumambuler
nu et taper frénétiquement des mains, ne seyait plus au dogme du Tawhid et semait
de surcroit la confusion parmi les gens. Ces versets mirent fin aux honteux actes
pratiqués dans la Maison Sacrée :

Ăƈ òŽ ƆŶÒĹĘ ƈ ÒŽ ijéĻùƈ ĘƆ īĻĠƈ ƈóýŽ ĩĤŽ ÒīĨħ ƈ ƈ ƈƈ ƈ Ʃ īĨ ƈ


Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ ž Üƫ ïİÓ Ɔ Đ Ɔ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒĵĤƆ Ìƈ įĤijøƇ òƆ IJ Ɔ ųÒ Ɔ ž ØƄ ÅÒóƆ ÖƆ
ƈ Ɔ īĺ ƈ Ɔ ųÒĸ ƈ ƈõåƈ đŽ Ĩ Ɔ Ɔ Ɔ
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Ɔ ĝÝƪ ĩƇ ĤŽ Ò Õƫ éƇĺ ųÒ Ɔ Ž Ƈ ŽƇ ŽƆ Ž Ž ƫ Ɔ Ž Ž Ɔ Ƈ čƆ Ƈĺ
« Désaveu de la part d’Allah et de Son messager à l’égard des associateurs
avec qui vous avez conclu un pacte : Parcourez la terre durant quatre mois ; et
sachez que vous ne réduirez pas Allah à l’impuissance et qu’Allah couvre d’igno-
minie les mécréants.» Et proclamation aux gens, de la part d’Allah et de Son
messager, au jour du Grand Pèlerinage, qu’Allah et Son messager, désavouent les
associateurs. Si vous vous repentez, ce sera mieux pour vous. Mais si vous vous
détournez, sachez que vous ne réduirez pas Allah à l’impuissance. Et annonce un
châtiment douloureux à ceux qui ne croient pas. A l’exception des associateurs
avec lesquels vous avez conclu un pacte, puis ils ne vous ont manqué en rien, et
n’ont soutenu personne [à lutter] contre vous : respectez pleinement le pacte
conclu avec eux jusqu’au terme convenu. Allah aime les pieux. » (At-Tawba, 9 : 1-4).
La Neuvième Année de L’hégire 683

ƈ
ƆŻĘƆ ÷Ƅ åƆ ĬƆ Īij
Ɔ ĠƇ ƈóýŽ ĩƇ ĤŽ ÒÓĩƆ Ĭƈƪ ÌÒŽ ijƇĭĨÆ
Ɔ īĺƆ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ĖƆ ijŽ ùƆ ĘƆ Ùƃ ĥƆ ĻĐ ħÝęìƈ ĪƈÌIJÒñÃİħ ƈıĨÓƈ ĐïđÖĦÒóéĤÒïåƈ ùĩĤÒÒijÖóĝĺ
ŽƆ Ž Ƈ Ž Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ Ž Ž Ƈ Ɔ ŽƆ
ħĻġƈ è ħĻĥƈ ĐųÒĪƈÌÅÓüĪƈ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ Ɔ Ìįƈ ĥƈ ąŽ ĘƆ īĨ ƈ ųÒ
Ƈ Ʃ ħƇ ġĻƇ ĭƈ ĕŽ Ƈĺ
« Ô vous qui croyez ! Les associateurs ne sont qu’impureté: qu’ils ne s’ap-
prochent plus de la Mosquée sacrée, après cette année-ci. Et si vous redoutez une
pénurie, Allah vous enrichira, s’Il veut, de par Sa grâce. Car Allah est Omniscient
et Sage. » (At-Tawba, 9 : 28).
À la suite d’Abû Bakr t le Noble Prophète r chargea Alî t de faire l’annonce
des versets susmentionnés à La Mecque.
Le premier jour de l’Aïd, ‘Alî t se tint près d’Aqaba et s’acquitta de la tâche
qui lui avait été confiée à travers un sermon. dans lequel, après avoir lu les versets
concernés, il annonça les quatre conditions définies par le Prophète d’Allah r pour
que chacun puisse les entendre :
1) Que tout le monde sache que seuls les Croyants entreront au Paradis.
2) La pratique idolâtre de circumambuler nu autour de la Ka’ba est abolie.
3) À partir de cette année aucun mushrik ne sera autorisé à approcher la Ka’ba.
4) Quant aux idolâtres qui avaient un pacte avec le Prophète d’Allah r auquel
ils demeuraient fidèles, tous les pactes établis resteront en vigueur jusqu’à la fin des
termes désignés.
Aucun idolâtre ne put cette année-là participer au Hajj et ce fut la dernière fois
que la Ka’ba connût la circumambulation de l’ancien rituel.
En outre, les quelques idolâtres qui restaient comprirent à quel point leurs
croyances les avaient mis dans une position dégradante, après quoi ils “succom-
bèrent” à l’Islam. Tout comme elle avait été débarrassée auparavant des idoles, la
Ka’ba était maintenant aussi purgée de ses idolâtres et était devenue prête pour le
Grand Hajj que le Noble Prophète r allait effectuer l’année suivante. (Ibn Hishâm, IV,
201 ; At Tirmidhi Hajj, 44/871 ; Waqidi, III, 1077).
684

LA DIXIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

L’adhésion d’Adiyy ibn Hâtim t à l’Islam


Le père de ‘Adiyy était l’illustre Hâtim Tâ’î, un homme de la tribu Tayy dont la
générosité était devenue légendaire. ‘Adiyy, tout comme son père, était un homme
généreux et vertueux particulièrement honoré dans sa tribu. Il avait fui à Damas au
cours de la neuvième année de l’Hégire lorsque le Noble Prophète r avait envoyé
‘Alî à Tayy pour démolir leur idole nommée Fuls. D’autre part, sa sœur Saffanah
avait été emmenée à Médine avec les autres captives.
Le Prophète de Miséricorde r libéra Saffanah, lui remit ses vêtements, une
monture et des provisions pour le voyage et l’envoya à Damas en compagnie de
personnes dignes de confiance.
Adiyy ibn Hâtim t raconte : « Je demandais à Saffanah qui était une femme
intelligente: “Que penses-tu de cet homme.”»
— Je le jure, répondit-elle, il vaut mieux que tu le rejoignes immédiatement.
S’il est vraiment un prophète et si tu es en mesure de battre les autres dans la course
pour le rejoindre, cela t’apportera que plus d’honneur et de vertu. S’il est un roi, tu
ne perdras pas ton statut au Yémen et seras déprécié jusqu’à occuper une position
ignoble. À présent, c’est à toi de choisir !
— C’est tout à fait exact, dis-je. J’irai voir cet homme. Si c’est un menteur, son
mensonge ne le fera aucun mal. Si ce qu’il dit est vrai, je l’écouterai et le respecterai.
Dès que je suis arrivé à Médine et que je vis le Prophète d’Allah r au milieu de
ses proches, femmes et enfants, je sus qu’il n’était ni un César ni un Khosrau !
Le Messager d’Allah r me prit par la main et m’emmena chez lui. En chemin,
une vieille femme l’arrêta et lui parla d’un certain besoin. Il l’écouta longuement
debout et résolut son problème. Lorsque nous arrivâmes chez lui, il me tendit un
coussin bourré de feuilles de dattes et me dit :
— Tiens, assieds-toi là-dessus.
Je lui répondit: «Non plutôt assieds-toi plutôt !»
Le Messager d’Allah r me dit: « Non ! Toi assieds-toi dessus!»
Je finis par m’asseoir sur le coussin et le Messager d’Allah r s’assis à même le
sol. “Cela ne peut être l’acte d’un roi” pensai-je.
Il me dit ensuite: « Adiyy embrasse l’Islam et trouve la paix ! «
La Dixième Année de L’hégire 685

Je lui répondis: «J’ai déjà une religion!»


Ce à quoi il me répliqua: «Je connais ta religion mieux que toi!»
Je l’interrogeais: «Tu connais ma religion mieux que moi ?»
Alors il me demanda: «Bien sûr ! N’as-tu pas extorqué un quart du butin saisi
par ta tribu alors que tu es un Rukusiqui ?»192
Je lui répondis : « En effet!»
Alors le Messager d’Allah r affirma sans rien ajouter de plus :
« Mais cela, selon ta religion n’est pas permis!»
Je me sentis très embarrassé par ce qu’il venait de dire. Quant à moi, tout ce que
je pouvais dire était : “C’est tout à fait vrai”.
Mais comme apparemment il ne désirait pas s’attarder sur cette question sus-
ceptible de m’embarrasser davantage, j’ai pensé à cet instant qu’il devait être un
prophète envoyé par le Tout-Puissant.
Il poursuivit: «Je sais que la seule chose qui t’empêche d’adhérer à l’Islam c’est
que tu penses que seuls s’y joignent les faibles et ceux qui ont peu de valeur aux yeux
des Arabes. Connais-tu Hirah ?»
Je lui répondis: «Je n’y suis jamais allé, mais j’en ai entendu parler.»
Il affirma alors: « Par Celui dans le pouvoir Duquel réside mon esprit, Allah
mènera à bien cette cause : une femme partira de Hirah et circumambulera autour
de la Maison d’Allah. Puis les trésors de Khosrau fils de Hormuz seront conquis ! «
Étonné je lui demandai: « Khosrau fils de Hormuz ?»
Il continua: « Oui, Khosrau fils de Hormuz. D’ici peu les trésors seront si abon-
dants que personne ne daignera y mettre la main et qu’il n’y aura plus personne
habilité à recevoir son aumône ! «
Le Messager d’Allah r fut très heureux de me voir accepter l’Islam ; son visage
brillait de satisfaction. Je fus ensuite hébergé chez un Ansar. Puis je commençai à
lui rendre visite jour et nuit. Pas un seul épisode de prière n’arrivait sans que je
soupirasse après lui ! »
‘Adiyy t ajouta des années plus tard :
« Par Allah, je vis une femme quitter Hirah à dos de chameau sans crainte,
atteindre la Ka’ba et faire son pèlerinage ! Je fus aussi de ceux qui se saisirent des tré-
sors de Khosrau. Par Celui dans la Main Duquel se trouve son esprit, le troisième évè-
nement surviendra sans aucun doute, car le Messager d’Allah l’a prédit ! » (Al Boukhari,
Manaqib, 25 ; Ahmad, IV, 257, 377-379 ; Ibn Hishâm, IV, 246 ; Ibn Kathir, al-Bidayah, V, 62).

192 Foi composée d’éléments empruntés à la fois au christianisme et à la foi sabéenne.


686 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le troisième évènement annoncé par le Prophète d’Allah r se réalisa rapide-


ment. Le calife Omar ibn ‘Abdulaziz t envoya son distributeur officiel d’aumônes
dans des régions d’Afrique après avoir constaté qu’il ne s’y trouvait aucune personne
dans le besoin dans les autres parties du royaume musulman. Mais le distributeur
est revint sans trouver un seul individu susceptible à recevoir la zakat. L’argent fut
ensuite utilisé pour acheter et affranchir un grand nombre d’esclaves. (Voir Bûtî, p.43).

Le premier et dernier Hajj du Noble Prophète r : le Pèlerinage d’Adieu


Le premier et le dernier Hajj auquel le Noble Prophète r assista après qu’il eut
été décrété obligatoire fut connu sous le nom de Hajj al-Wada’ (Pèlerinage d’Adieu).
Le Prophète d’Allah r fit ses adieux aux Musulmans y au cours de ce
pèlerinage, conduisit les Compagnons y à la conviction générale qu’il annonçait
son départ imminent, d’où le nom donné à ce pèlerinage. (Al Boukhari, Hajj, 132).
Au reste, le Noble prophète r l’appela Al Hajj al-Islam. (Haythami, III, 237).
À cette occasion la dixième année de l’Hégire tous les Musulmans furent invités
au pèlerinage à une époque où l’Arabie, cédant à la lumière de la guidée, jouissait de
son zénith en matière de souveraineté et de splendeur.
Les cœurs débordant d’amour pour Allah I et pour Son Messager r répon-
dirent à cette invitation. Les gens affluaient de tous les coins de la Péninsule une fois
la nouvelle transmise à l’extérieur de Médine. On ne comptait plus le nombre de
personnes qui se joignaient à la masse des gens déjà présents en chemin.
On dénombra environ cent vingt mille Croyants qui se précipitèrent pour
profiter au maximum de l’occasion d’accomplir le Hajj en compagnie du Prophète
d’Allah r
Tous les cœurs battaient comme un seul, formant une scène sublime au-delà
de toute imagination. Après avoir fourni quelques informations sur les modalités du
Hajj et de l’ihram, le Noble Messager r se mit en route en emmenant avec lui une
centaine de chameaux destinés au sacrifice.
En chemin il r s’entretint avec les Croyants y sur ces modalités en dévelop-
pant ce qui est essentiel et surérogatoire dans l’exécution. Parvenu à Dhul-Hulayfah,
dans la vallée d’Al-‘Aqiq, il r s’adressa ainsi aux Compagnons y:
« Jîbril envoyé par mon Seigneur, est venu me voir de nuit et m’a dit : “Offre une
sâlat dans cette vallée sacrée et forme l’intention d’accomplir l’omra en association
avec le Hajj”. » (Al Boukhari, Hajj, 16).
Là, le Noble Prophète r effectua deux unités de prière avant d’entrer en état
d’ihram.193
193. Ihram : état de sacralisation. (NdT).
La Dixième Année de L’hégire 687

Glorifiant et remerciant Allah en prononçant le takbir, il fit cette invocation :

ƈ ƈ
ÙƆ đƆ ĩŽ ø
Ƈ ƆźIJÓ
Ɔ ıĻƆ ĘÅÓƆ ĺƆ ƈòƆźÙƄ åƪ èħƪ ıƇ ĥƪ ĤÒ
« Ô mon Seigneur ! Fais que ce pèlerinage soit bon et accepté, libre de toute insin-
cérité et de toute vanité. » (Ibn Maja, Manasiq, 4).
Il se mit état d’ihram à Dhoul Khulayfa et dit la talbiya194:

ïƆ ĩŽ éƆ ĤŽ ÒĪƈƪ ̱ğƆ Ļ×ĤƆ ğƆ ĤƆ ğĺ


Ɔ ƈóü
Ɔ ƆźğƆ ĻŽ ×ƪ ĤƆ ±ğƆ ĻŽ ×ƪ ĤƆ ħƪ ıƇ ĥƪ ĤÒğƆ ĻŽ ×ƪ ĤƆ
Žƪ
ğƆ ĤƆ ğĺ Ɔ ƈóü
Ɔ Ɔź±ğƆ ĥŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJ ƈ
Ɔ ğƆ ĤƆ ÙƆ ĩƆ 𮠾ĭĤÒIJƆ
«Me voici ô mon Dieu me voici ! Tu n’as point d’associé, me voici ! A Toi la louange,
la grâce et le royaume ! Tu n’as point d’associé ! (Boukhari Hajj 23).
Après cela, il r dit :
« Quiconque veut effectuer (simultanément) le Hajj et l’omra le fasse. »
Le Noble Prophète r annonça après avoir réitéré la talbiya que Jîbril u était
venu lui dire :
« Ordonne à tes Compagnons d’élever la voix en prononçant la talbiya, car c’est
un des signes du Hajj. » (Ibn Maja, Manasiq, 16).
Le ciel et la terre bourdonnaient des sons de la talbiya. La conscience spirituelle
tissait tout autour sa paix, comme une toile.
Le Noble Prophète r conduisit les Croyants dans la prière. Plus tard, en signe
d’amour et de loyauté, des mosquées furent édifiées dans chaque endroit exact où il
avait conduit les Musulmans dans la prière. (Ibn Sa’d, II,173).
Voyant la Maison sacrée, le Prophète d’Allah r leva les mains et fit ce doua :
« Ô mon Seigneur ! Fait accroître l’honneur, la majesté et la grandeur de Ta
Maison ! et l’honneur, la majesté, la bienveillance, la grandeur et la bonté de ceux qui
par le Hajj et l’omra la vénèrent ! »(Ibn Sad II 173).
Le rida (drap blanc) jeté autour de son épaule gauche par-dessous l’épaule
droite – laissant ainsi l’épaule droite nue – le Noble Prophète r pénétra dans la
Masjid Al-Haram.
Il r s’approcha ensuite de la Pierre Noire (Hajar al-Aswad) et la toucha. Ses
yeux étaient remplis de larmes.
194. Invocation que doit prononcer à haute voix par le pèlerin musulman.(NdT).
688 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il r embrassa ensuite la Pierre Noire et dit après avoir posé ses mains dessus,
se frotta le visage:

ğƆ Ļƈ ×ƈ ĬƆ ÙƆ ĭƪ øÓ ƈ ğƈƆ ÖÓÝġƈƈ ÖÓĝƃ ĺïƈ āÜƆ IJğƈƆ ÖÓĬƃ ÓĩĺÒƈ ħıĥž ĤƆÒ
ž Ƈ ĐÓƃ ×Ɔ ÜÒž IJ
Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ƪƇ
« Ô mon Seigneur, dit-il, j’ai foi en Toi et confirme Ton Livre et respecte les lois
de Tes prophètes. »
Puis il commença la circumambulation depuis le coin de la Pierre Noire.
(Haythami, III, 240).

Lors des trois premiers tours le Prophète r raccourcit ses pas et marcha rapi-
dement en balançant ses épaules.
Il r dit ce verset en arrivant au Ruknu’l-Yamani (Coin Yéménite) et à Hajar al-
Aswad :

ƈòÓĭĤÒ ƈ Ùƃ ĭƆ ùèØƈ óìŴÒĹ


ƈ Ęƈ IJ ƈ ĭƆ ÖòĢij
ƈ ĭƆ ÜÆÓ ƈ ƈ
ƪ ÔÒ Ɔ ñƆ ĐÓ
Ɔ ĭƆ ĜIJ
Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ùƃ ĭƆ ùƆ èÓ
Ɔ ĻƆ ĬŽ ïĤÒĹ
ƫ ĘÓ ƪ Ɔ Ƈ ĝƇ ĺī
Ɔ Ĩħ
ƪ ıƇ ĭŽ ĨIJ
« Et il est des gens qui disent : «Seigneur ! Accorde nous belle part ici-bas,
et belle part aussi dans l’au-delà ; et protège-nous du châtiment du Feu !». »
(Al-Baqara, 2 : 201).

Après avoir achevé cette étape de la circumambulation, le Noble Prophète r


embrassa de nouveau la Pierre Noire, plaça ses mains sur la Pierre puis se frotta le
visage.
Après avec un peu de difficulté, il r se fraya un chemin à travers la foule nom-
breuse de Croyants jusqu’au Maqam Ibrahim et en se plaçant entre le maqam et la
Ka’ba, il r accomplit deux unités de prière.
Puis il se retourna toucha la Pierre Noire et conseilla à Omar :
« Omar tu es vigoureux. Dans ton désir d’atteindre la Pierre Noire, abstiens-toi
de pousser ou de bousculer les gens. Ne cause ni gêne ni inconfort ! Si tu vois qu’il y a
de la place, touche la Pierre Noire et embrasse-là. Sinon, fais un geste de loin et passe
à côté en disant La ilaha ill-Allah et Allah’u Akbar195. » (Haythami, III, 241 ; Ahmad, I, 28).
195. Omar t, par crainte de blesser d'autres pèlerins lorsqu'il se rapprochait, faisait de loin un geste en
direction de la Pierre Noire. Les Musulmans qui vont au Hajj doivent y faire très attention. Un pèlerin
ne doit pas anéantir les hassantes de l’accomplissement du Hajj en blessant les autres Croyants. Suivant
les conseils du Prophète d’Allah r, il faut s’abstenir de pousser ou bousculer ses compagnons pour se
rapprocher de la Ka’ba ou de la Pierre Noire. Il est dit qu’Omar t embrassa la Pierre Noire en disant :
« Je sais que tu es une pierre et que tu ne peux ni apporter profit ni porter préjudice. Si je n’avais pas
vu le Messager d’Allah r l’embrasser, je ne l’aurais pas fait ! » (Al Boukhari Hajj 50 ; Muslim Hajj 251).
La Dixième Année de L’hégire 689

Puis quittant la Masjid al-Haram par la porte de Banû Mahzum, le Prophète


d’Allah r se rendit à la colline de Safa et alors qu’il s’en approchait, il récita :

ƈ ƪ ƈóÐÇƈ đüī
ųÒ ƈ
Ɔ Ɔ ĨØƆ IJƆ óŽ ĩƆ ĤŽ ÒIJÓ
Ɔ ęƆ āĤÒ
ƪ Īƈƪ Ì
« As Safa et Al Marwah sont vraiment parmi les lieux sacrés d’Allah … »
(Al-Baqara, 2 : 158).

Puis il dit :
« J’ai commencé par ce qu’Allah mentionne en premier dans le verset et me suis
rapproché de Safa pour initier la sa’y.»
En vue de la Ka’ba, il la fixa, dit le tahlil et le takbir196 et délara trois ou sept fois :

ïƇ ĩŽ éƆ ĤŽ ÒįƇ ĤƆ IJ
Ɔ ğƇ ĥŽ ĩƇ ĤŽ ÒįƇ ĤƆ įƇ ĤƆ ğĺ
Ɔ ƈóü
Ɔ ƆźĮƇ ïƆ èŽ IJ ƪ ƪ źÌƈ įƆ ĤƆ Ìƈ Ɔź
Ɔ ƇųÒ
ƅ Ɔ ģƈ ž Ġĵ
ƆźĮƇ ïƆ èŽ IJ ƪ ƪ źÌƈ įƆ ĤƆ Ìƈ ƆźóĺƄ ïƈ ĜƆ ÅĵŽ ü
Ɔ ƇųÒ Ƈ ĥƆ Đ
Ɔ ijƆ İƇ IJ
Ɔ ÛĻ
ƈ
Ƈ ĩƇĺIJĹƈ
Ɔ ĻéŽ Ƈĺ
ĮƇ ïƆ èŽ IJ Ɔ õƆ èŽ ƆŶÒĦƆ õƆ İƆ IJ Ɔ
Ɔ ÔÒ Ɔ ĮƇ ïƆ ׎ Đ
Ɔ óƆ āƆ ĬƆ IJ
Ɔ ĮƇ ïƆ ĐŽ IJ
Ɔ õƆ åƆ ĬŽ ÈįƇ ĤƆ ğĺ
Ɔ ƈóüƆ
“Il n’y a d’autre divinité qu’Allah, qui est Un. Il n’a ni associé ni partenaire. La
souveraineté Lui appartient et à Lui Seul appartient la gratitude. Il ressuscite et fait
mourir. Il a le pouvoir sur toutes choses. Il n’y a pas d’autre divinité qu’Allah. Allah a
accompli Sa promesse. Il a aidé Son serviteur et a Lui-Même mis en déroute toutes les
armées qui s’étaient rassemblées aux fins d’hostilité. » (Ibn Maja, Manasiq, 84).
Le Prophète d’Allah r se rendit ensuite à pied de Safa à la colline de Marwa. À
mi-parcours environ de sa marche, il se mit à accélérer le pas pour revenir ensuite à
un rythme de marche modéré tout en invoquant entre-temps :

ĦƇ óĠŽ ƆźÒõƫ ĐƆ ƆźÒŽ ÛƆ ĬŽ ÒƆ IJ ƈ


Ɔ Ɔ ħŽ èƆ òÒŽ IJ
Ɔ óŽ ęĔŽ ÒÔžƈ òƆ
« Ô mon Seigneur ! pardonne-moi et aie pitié de moi ! Tu es le plus Glorieux, le
plus Bienveillant ! » (Haythami, III, 248).
Parvenu sur la colline de Marwa, le Noble Messager r réédita ce qu’il avait
accompli à Safa.
Faisant sept allers-retours entre les collines de Safa et de Marwa, il finit ainsi sa
marche (sa’y).
Le Noble Prophète r resta quatre jours à La Mecque.
196. Tahlil : ųÒƇƪ ƪ źÌƈ įƆ ĤƆ Ìƈ ź(La
Ɔ ilaha ill Allah). Takbir: ó×ĠŽ ƆÈųļ(Allah’u Akbar).
Ƈ Ɔ ƪ Ƈſ
690 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le cinquième jour (jour d’al-tawriya) après avoir effectué une autre


circumambulation autour de la Ka’ba, il r monta à dos de chameau et se rendit à
Mina où il demeura jusqu’au lever du soleil en offrant les prières rituelles de dhor,
de la asr, du maghrib et de l’icha en temps voulu.
Le matin, neuvième jour de Dhul-Hijja, il r se dirigea vers ‘Arafat récitant la
talbiya à voix haute et tout au long de la journée.
Après cette démonstration personnelle de la façon dont le Hajj doit être
mené par sa oumma et après avoir accompli tous les rites qui y étaient attachés, le
Noble Prophète r prononça son Sermon d’Adieu, à ‘Arafat, où se trouve l’actuelle
Mosquée de Namira :
« Ô peuple !
Écoutez-moi attentivement, car je ne sais pas si, après cette année-ci, je serai
encore parmi vous !
Ô Peuple !
Tout comme vous considérez ce Mois, ce Jour, cette Cité comme Sacrés, consi-
dérez aussi la vie et les biens de chaque Musulman comme Sacrés. Toute forme de
violation est interdite.
Ô Compagnons !
Souvenez-vous qu’en vérité vous rencontrerez votre Seigneur et qu’effectivement,
il vous demandera compte de vos actes. Ne retournez pas dans vos vieilles habitudes et
ne vous déchirez pas après moi ! Sachez que je vous précèderai et que je vous attendrai
près du Bassin (d’al-Kawthar). J’exulterai votre nombre auprès des autres nations !
Prenez garde de ne pas me rabaisser (en tombant dans le péché) !
Ô Compagnons !
Retournez à leurs légitimes propriétaires les biens qui vous ont été confiés. Ne
blessez personne afin que personne ne vous blesse. Souvenez-vous qu’en vérité, vous
rencontrerez votre Seigneur et qu’effectivement, Il vous demandera compte de vos
actes. Allah vous a défendu de pratiquer l’usure, donc tout intérêt non-payé sera
maintenant annulé. Votre capital, cependant, vous revient. Vous n’infligerez ni d’en-
durerez aucune injustice. Dieu a décidé de rendre l’intérêt illicite, et tout intérêt qui
était dû à (mon oncle) ‘Abbâs ibn ‘Abd al-Muttalib sera maintenant annulé.
Ô Compagnons !
Les vengeances de sang des temps de l’Ignorance sont, elles aussi, désormais abo-
lies. La première vengeance (que j’interdis) est celle du sang d’Ibn Rabi’a, petit-fils de
‘Abd al-Muttalib.
Ô Gens !
La Dixième Année de L’hégire 691

Aujourd’hui, Satan a perdu pour toujours son pouvoir de rétablir son influence
et sa souveraineté sur ces terres qui sont les vôtres. Mais il sera quand même satisfait
si vous le suivez dans les choses que vous considérez triviales, en dehors de ce que j’ai
moi-même aboli. Abstenez-vous d’en faire autant afin de protéger votre religion !
O Gens !
Respectez les droits des femmes ! Traitez-les avec amour et compassion ! Je vous
conseille de craindre Allah à leur égard ! Vous les avez prises comme épouses au nom
d’Allah ; leur chasteté est leur honneur au nom d’Allah ! Vous avez des droits sur les
femmes et les femmes ont des droits sur vous ! Le droit que vous avez sur les femmes,
c’est qu’elles ne doivent laisser quiconque porter atteinte à l’honneur de votre famille !
Le droit que les femmes ont sur vous, c’est que vous devez leur fournir, légitimement,
leur nourriture et leurs vêtements. Il n’est pas permis à une femme de donner quoi que
ce soit des biens de son mari à qui que ce soit, sans sa permission.
Quant à vos esclaves, prenez soin de les nourrir de la même manière que vous
vous nourrissez et habillez-les de la même manière que vous vous habillez. S’ils
commettent une action que vous réprouvez, laissez-les tranquilles ! Ne les persécutez
jamais, car eux aussi sont des serviteurs d’Allah.
O Croyants !
Écoutez-moi bien et apprenez ! Le Musulman est le frère du Musulman ; par
conséquent, tous les Musulmans sont frères. Il n’est (donc) pas permis de violer tout
droit appartenant à votre frère en religion, à moins qu’il ne le donne d’un cœur
satisfait...
Ô Compagnons !
Ne vous accablez pas ! Vous aussi avez des droits sur vous-mêmes !
Ô Gens !
Tout coupable est personnellement condamnable pour le crime commis. Aucun
enfant ne doit supporter la punition liée au crime de son père. Aucun père ne peut être
tenu responsable du crime de son enfant.
Ô Gens !
À chacun ses ayant-droits. Le Tout-Puissant a fourni son dû (dans le Coran).
L’héritier n’a nul besoin de testament197. Quel que soit le lit où l’enfant nait, il est là
où il doit être. Tout fornicateur doit être déshérité. Que le socle qui revendique un
autre lignage que celui de ses pères ou un esclave ingrat qui prétend appartenir à un
197. Avant la révélation du verset qui établit définitivement les droits en matière d’héritage, notamment
après un décès, tout Musulman devait obligatoirement rédiger un testament. Après la révélation du
verset qui détermine tous les droits le testament ne devint plus obligatoire. Mais, tout Musulman qui
le souhaite est autorisé à faire un testament sur la partie de sa propriété qui n’en excède pas le tiers.
692 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

autre maître que le sien soit soumis à la colère d’Allah et à la malédiction des Anges
et des Musulmans ! Il n’accepte ni la repentance de ces personnes, ni leur intégrité et
leur témoignage.
Ô Gens !
Votre Seigneur est Un ! Ainsi est-il de votre père ; vous êtes tous les fils d’Adam ;
et Adam a été créé de terre. Un Arabe n’est pas supérieur à un non-Arabe et un non-
Arabe n’est pas supérieur à un Arabe – seulement par la piété et la bonne action.
Ô Gens !
Le temps s’est écoulé de façon uniforme depuis l’époque où Allah a créé les cieux et
la Terre. Par conséquent une année équivaut toujours à douze mois, dont quatre sont
inviolables (en tant que mois sacrés). Ce sont dans l’ordre Dhul-Qa’dah, Dhul-Hijja
et Al-Muharram, tandis que le dernier est Rajab qui s’intercale entre Jamazi’al-Akhir
et Cha’ban. Cette année, les mois inviolables sont revenus à leur époque d’antan. La
saison du Hajj correspond au dixième jour de Dhul-Hijja.
Ô Croyants !
Je vous laisse une chose digne de confiance à laquelle tant que vous vous y agrip-
perez, vous ne vous égarerez jamais. Cette chose digne de confiance est le Coran, le
Livre d’Allah.
Ô Gens !
Adorez Allah ! Acquittez-vous des cinq prières quotidiennes. Jeûnez le mois de
Ramadan et suivez mon exemple (Sunna). Vous entrerez alors au Paradis.
Ô Gens !
Prenez garde aux excès ! La raison pour laquelle vos prédécesseurs ont péri est
due à leurs excès en matière de religion. Apprenez de moi les rites du pèlerinage. Je ne
serais peut-être pas en mesure de vous revoir d’ici l’année prochaine. Que les présents
transmettent mes paroles à ceux qui sont absents ! Il se pourrait que celui qui reçoit
comprenne et protège mieux mes paroles que celui qui transmet.»
Alors le Noble Prophète r demanda au plus de cent mille Compagnons :
« Demain, on vous demandera de mes nouvelles, que répondrez-vous ? »
« Nous attesterons que tu as rempli ton devoir en tant que Messager d’Allah, et
que tu nous as bien avertis et conseillés, bourdonna la masse des Croyants. »
Après ce témoignage unanime le Noble Prophète demanda trois fois :
« Ai-je bien transmis, ô mes Compagnons ? »
Il reçut autant de confirmations, après quoi il leva les mains au ciel et demanda
à Allah le Très-Haut d’être le Témoin de ceci :
La Dixième Année de L’hégire 693

« Sois témoin, ô Seigneur ! Sois témoin, ô Seigneur ! Sois témoin, ô Seigneur ! »


(Muslim Hajj, 147 ; Abou Daoud, Manasiq, 56 ; Ibn Maja, Manasiq, 76, 84 ; Ahmad, V, 30 ; Ibn Hishâm,
IV, 275 ; Hamidullah, al-Wasaiq, p. 360).

Le Sermon d’Adieu est un édit qui régit les relations sociales, un compte rendu
abrégé de l’Islam et une norme pour la conduite et les droits humains.
Bien avant la proclamation de la célèbre Déclaration des Droits de l’Homme,
le philosophe français La Fayette, un des génies de la Révolution Française de 1789
découvrit, après avoir mené une recherche minutieuse sur la quasi totalité des sys-
tèmes juridiques du monde, le Sermon d’Adieu du Prophète Muhammad r qu’il
jugea comme renfermant les principes de justice pour l’humanité toute entière.
Il déclara même à ce propos : « Muhammad le Magnifique ! Nul n’a pu égaler
jusqu’à présent le niveau de justice que tu as exercé et nul ne le surpassera! »(Voir,
Kâmil Mîras, Tecrîd-i Sarîh Tercemesi, IX, 289).

Dans ce fameux Sermon, le Prophète d’Allah r énonce les règles que les êtres
humains doivent connaître et dont l’ignorance ne peut servir d’excuse. La foule
immense qui était présente a permis la propagation du Sermon à toute l’humanité.
Après le Sermon, Bilal al-Habashî t lança l’appel à la prière (adhan).
Le Noble Prophète dirigea alors successivement les prières de midi (ad-dohr)
et de l’après-midi (al-‘asr) sans effectuer aucune prière surérogatoire entre les deux.
Après cela il remonta sur sa chamelle Qaswa et se rendit sous le Djebel Raতma198.
Puis il orienta Qaswa vers les rochers, en direction de la Ka’ba. Il demeura là
jusqu’à ce que le soleil se couche complètement et perde sa luminosité.

Durant l’arrêt (waqfa), tenant les rênes de la chamelle avec une seule main tout
en élevant l’autre, le Prophète d’Allah r commença une longue invocation, expres-
sion de sa sensibilité de cœur et de son affectuosité pour le service :
« Ô mon Seigneur !
Merci à Toi de la manière dont Tu l’as déclaré et d’une manière supérieure à la
manière dont nous l’exprimons. Ô Allah… Ma prière, mon culte, ma vie et ma mort
sont pour Toi seul ! Vers Toi est mon retour !
« Ô mon Seigneur !
Je cherche refuge en Toi contre les tourments de la tombe, les murmures du cœur
et l’éparpillement des soucis ! ô Allah… Je cherche en Toi un refuge contre les désastres
causés par les vents !
198. Djebel Ra‫ۊ‬ma : Mont de la Miséricorde, autre nom du Mont ‘Arafat. (NdT).
694 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Ô mon Seigneur !
Mets une lumière dans mon regard, une lumière dans mes oreilles, une lumière
dans mon cœur !
ô Allah… Élargis ma poitrine ! Facilite mes affaires !
Ô Allah… Je cherche en Toi un refuge contre la conversion de la santé en maladie,
contre Ton châtiment qui survient sans préavis et contre toute Ta colère…
Ô Allah… Guide-moi sur Ton droit chemin ! Pardonne à mon passé et à mon
futur !
« Ô Allah, Qui augmente les rangs, Qui fait descendre l’abondance… Allah Qui
a créé les cieux et la terre ! Des voix multiples et passionnées s’élèvent vers Toi et
T’adressent leurs appels ! Et mon appel est pour que Tu te souviennes de moi au pays
de l’épreuve, où je suis délaissé par les peuples du monde !
« Ô mon Seigneur !
Tu entends mes paroles, Tu vois où je suis et Tu sais tout de ce que j’ai, que ce
soit caché ou apparent ! Rien de ce que je fais n’est secret pour Toi. Je suis pauvre et
impuissant ; je demande Ton aide et Ta miséricorde ! J’ai peur ; j’avoue mes défauts !
Je te supplie à la manière d’un homme sans défense qui te supplie ! Je te supplie à la
manière d’un infâme pécheur qui te supplie ! Je T’implore comme un de Tes serviteurs
qui, humilié en Ta sublime présence, prie les larmes aux yeux et, frottant son visage
dans la boue, abandonne son existence pour Ton amour ! Mon Seigneur ! Ne refuse
pas ma prière ! Sois compatissant et miséricordieux envers moi… Toi Qui es le meil-
leur de ceux sollicités et Le plus généreux des donateurs ! » (Ibn Kathir, al-Bidayah, V, 166-
168; Haythami, III, 252; Ibn Qayyim, II, 237).

Les pieux prédécesseurs (al-salaf al-salihin) avaient coutume de faire à Arafat des
invocations dont voici un extrait :
« Ô Seigneur ! Qui peut se louer devant Toi ? Mon Seigneur ! Ma langue est
liée par les péchés. Je n’ai ni acte digne que je puisse user devant Toi et ni autre
intercesseur en dehors de mon propre désir ! Ô mon Seigneur ! Je sais que je n’ai ni
pas de position favorable devant Toi à cause de mes péchés, ni un visage avec lequel
je puisse implorer Ton pardon !
Ô Seigneur ! Même si je suis digne de Ton pardon, Ta miséricorde est suffisante
pour m’atteindre, car Ta Miséricorde est suffisamment vaste pour tout englober !
Ô Seigneur ! Quel que soit leur poids mes fautes, sont minimes comparées à
Ton pardon ! C’est pourquoi, ô mon Seigneur Bienveillant, pardonne-les-moi !
« Ô Seigneur ! Si Tu ne pardonnes qu’à Tes serviteurs dévoués en qui les
injustes chercheront-ils refuge ?
La Dixième Année de L’hégire 695

Ô Allah ! Si tu n’as pitié que de Tes serviteurs justes à qui les pécheurs deman-
deront-ils de l’aide ?
« J’ai besoin de Toi en tout temps mais Toi Tu n’as pas besoin de moi ! Tu ne
peux me pardonner qu’en tant que mon Créateur ! Puissé-je par Toi retourner d’où
je viens avec tous mes besoins comblés, toutes mes demandes satisfaites et tous mes
souhaits réalisés !
« Ô Seigneur ! Toi qui détient le pouvoir sur tous les besoins de ceux qui
demandent ! Mon Dieu Toi qui sait ce qui se passe dans l’esprit de ceux qui se
taisent ! Mon Dieu en dehors de Toi il n’y a point de secours ! Mon Dieu Toi qui n’a
pas de créateur au-dessus de Lui et qui doit être craint ! Mon Dieu toi qui n’a pas
de subalterne auquel nous dussions faire appel, pas de portier que nous fussions en
mesure de soudoyer ! Mon Dieu Dont la générosité ne fait que croître au fur et à
mesure que les supplications croissent et Dont la bienveillance ne fait qu’accroître
les besoins. Ô mon Seigneur ! Certes, Tu divertis Tes hôtes ! Nous sommes nous
aussi Tes hôtes ! Divertis-nous dans Ton Paradis !
« Ô Seigneur ! Tout visiteur reçoit des présents ; Quiconque insiste reçoit sa
récompense, tandis que tout invité est honoré. Quiconque attend des récompenses
est dûment récompensé ! Ensemble nous sommes venus dans Ta Maison Sacrée !
Nous nous tenons tous par-devant ce grand édifice ! Nous sommes présents sur
cette terre sacrée ! Notre espoir est de saisir les récompenses qui patientent en Ta
sublime présence ! Ne laisse pas, ô Allah, nos espoirs demeurer vains ! » (Al-Ghazalî,
Ihya, I, 337-338 ; Bayhaqi, Shuab’ul-Iman, II, 25-26).

Alors que le Noble Prophète r se trouvait toujours à ‘Arafat, des gens de Najd
vinrent le voir et lui demandèrent :
«Qu’est -ce que le Hajj, ô Messager d’Allah, et comment s’accomplit-il ?»
Le Noble Messager r répondit :
« Le Hajj, c’est ‘Arafat, quiconque parvient à ‘Arafat avant la prière d’al-fajr
dans la nuit de Muzdalifah a accompli le Hajj. Les jours de Mina sont trois. Point
de reproche à faire à celui qui se précipite et qui n’y reste que deux jours. Point de
reproche à faire aussi à celui qui arrive en retard.» (Ibn Maja, Manasiq, 57).

Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion


Le verset révélé lors du coucher de soleil alors que le Noble Prophète r se tenait
debout lors de la Waqfa annonça que l’Islam était maintenant achevé et parfait :

ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ
Ƈ ĥŽ ĩƆ ĠŽ ƆÈĦƆ ijŽ ĻƆ ĤŽ ÒĪƈ ijŽ ýƆ ìÒ
Û Ž IJ
Ɔ ħŽ İƇ ijŽ ýƆ íŽ ÜƆ ƆŻĘƆ ħŽ ġƇ ĭĺîīĨÒŽ IJóƇ ęƆ ĠƆ īĺƆ ñĤƪ Ò÷Ɔ ÑĺƆ ĦƆ ijŽ ĻƆ ĤŽ ÒƆ
ƈ ĦƆŻøŸƈ ÒħġƇ ĤƆ ÛĻ ƈ ƈ ƈ ƈ
īĺî Ɔ Ž Ƈ Ƈ ĄòƆ IJĹ Ɔ ÝĩƆ đŽ ĬħŽ ġƇ ĻŽ ĥƆ Đ
Ɔ Û Ƈ ĩŽ ĩƆ ÜŽ ƆÈIJ
Ɔ ħŽ ġƇ ĭĺƆ îħŽ ġƇ ĤƆ
696 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« … Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur


vous Mon bienfait. Et J’agrée l’Islam comme religion pour vous … »(Al-Mâ’ida 5: 3;
voir At Tirmidhi Tafsir, 5/3043).

Abû Bakr t, avec sa vivacité d’esprit et d’analyse, avait tout saisi dès qu’il enten-
dit la révélation. Il comprit profondément la signification du “Bienfait accompli” et
l’évènement imminent à suivre après le “parachèvement de la religion”.
Pour les gens perspicaces le verset signifiait en quelque sorte l’annonce de la
mort prochaine du Noble et Saint Prophète r.
Allah le Très-Haut allait bientôt inviter Sa Lumière de l’Être, Son Bien-Aimé
dans le royaume éternel.
Les yeux d’Abû Bakr t, alors que personne autour de lui ne pouvait voir à quoi
faisait allusion le verset, s’emplirent de larmes à cause de la douleur de la séparation.
(Elmalılı, III, 1569).

Après tout, la Foi sacrée, dont la révélation avait duré vingt-trois années, allait
maintenant devenir une grâce divine pour chaque membre de l’oumma à venir, et
ce jusqu’à l’heure Ultime.

Après le coucher du soleil, le Noble Prophète r, accompagné d’Oussama ibn


Zayd t qu’il avait pris en croupe, se rendit d’Arafat à Muzdalifah où il dirigea suc-
cessivement les prières du maghrib et de l‘icha avec un seul adhan et deux second
appel (qiyama).
Il demeura à Muzdalifah jusqu’à l’aube et y stationna jusqu’au lever de l’aurore,
faisant la talbiya ainsi que toutes sortes d’invocations.
Le Noble Prophète r ramassa ensuite les pierres devant être lancées à Mina
et ordonna à ses Compagnons y de collecter les pierres devant être lancées à la
jamrah.199
Le Prophète d’Allah r leur enseigna la bonne manière de lancer les pierres,
c’est-à-dire en choisissant de petits cailloux qu’on lance à l’aide de deux doigts.

Quand la colère devient manifeste


Pendant le Pèlerinage d’Adieu, le Noble Prophète r traversa en vitesse la vallée
de Batn al-Muhassir, située entre Mina et Muzdalifah.
Les compagnons y étonnés lui demandèrent:
« Pourquoi accélères-tu si soudainement le pas ? »
199. Cela signifie braise, charbon ardent ou petits cailloux. Ici ce sont les endroits précis (les grandes,
moyennes et petites jamrah) où une certaine quantité de cailloux doit être jetée pendant le hajj.
La Dixième Année de L’hégire 697

Le Prophète d’Allah r répondit:


« C’est à cet endroit que par le truchement de nuées d’oiseaux Allah le Très-Haut
détruisit l’armée d’Abraha composée d’éléphants. J’accélère le pas pour m’assurer
que personne ne reçoive une part de cette colère.» (Nawawi Sharh-u Muslim XVIII 111 ; Ibn
Qayyim II 255-256).

En fait, il n’existe pas de station (waqfa) dans cette région durant le Hajj.
Les manifestations de miséricorde ou de colère peuvent parfois même se
répercuter sur la congrégation. C’est pour cela qu’il faut profiter au maximum des
lieux où la miséricorde divine se manifeste, tels que la Ka’ba, les mosquées ou bien
les endroits où résident les justes, et s’abstenir au contraire de fréquenter des lieux
infectés par le péché et la rébellion, soumis au courroux divin.
Les être inanimés sont aussi soumis à la loi de l’attraction. C’est ainsi que le
palmier sur lequel le Noble Prophète r s’adressait aux Croyants était rempli de cette
lumineuse sentimentalité spirituelle et quand Noble Prophète r commença à dire
ses sermons dans d’autres endroits il se mit à pleurer. (Al Boukhari, Manaqib, 25 ; Buyû, 32).
Les ahadith qui fournissent le récit de l’évènement sont appelés mutawatir,
c’est-à-dire que leur authenticité narrative est garantie.
Mawlana Rumî ç dit à ce propos :
« L’air, la terre, l’eau et le feu sont les serviteurs d’Allah. Pour nous ils semblent
sans vie, mais devant Allah ils sont êtres vivants. »

Après avoir vite traversé la vallée d’al-Muhassir, le Noble Messager r parvint à


la grande jamarat c’est-à-dire la jamarat al Aqaba.
Le jour du sacrifice, après le lever du soleil, il r lança ses pierres sur la jamarat
al Aqaba. Pendant qu’il prenait les petites pierres entre le pouce et l’index et les jetait
une à une, les gens commencèrent à jeter leur pierre. Mais en raison de leur grande
alluence ils commencèrent à s’entasser les uns contre les autres.
Le Noble Prophète r les interpella :
« Ô gens! Ne vous entretuez pas ! En lançant vos pierres sur la jamarat, utilisez
les plus petites qui se situent entre vos doigts !200 » (Ahmad VI, 379).
Qudama ibn ‘‘Abdallah t décrit ainsi l’état à ce moment du Noble Prophète r :
« Je vis le Messager d’Allah lancer des pierres à dos de chameau. Il ne poussait
pas, ne bousculait pas et n’écartait pas les autres de son chemin. » (Ibn Maja Manasiq 66).
200. Malheureusement la pratique de la “lapidation de Satan” est aujourd’hui loin d’être faite avec
profondeur de sentiment et la conscience qu’il s’agit d’un acte d’adoration accompli dans un état
d’esprit similaire à celui d’Ibrahim u quand il procéda lui-même à la lapidation de Satan.
698 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Après avoir sacrifié de ses propres mains soixante-trois chameaux, un pour


chaque année de sa vie, le Noble Prophète r remit un couteau à ‘Alî t qui abattit
les autres bêtes.201
Le Prophète d’Allah r ordonna ensuite qu’un morceau de viande fût prélevé
sur chaque chameau sacrifié.
Tous les morceaux prélevés furent ensuite placés dans une seule marmite et
cuits.
Le Prophète d’Allah r et ‘Alî mangèrent puis il r lui demanda de distribuer aux
nécessiteux la viande restante, et la peau et les sacs des chameaux sacrifiés.
Après avoir fait son sacrifice le Messager d’Allah r appela son coiffeur et se rasa.
Puis il r interdit aux femmes de couper leurs cheveux très courts voire de les
raser. Il r dit :
« Les femmes n’ont pas à se couper les cheveux très courts, dit-il, ce qui leur est
nécessaire, c’est de couper l’extrémité de leurs cheveux. » (Darimi, Manasiq, 63).
Anas ibn Malik t rapporte :
« Le Messager d’Allah r offrit son sacrifice et se fit raser la tête, après avoir
accompli la lapidation de Satan. Le coiffeur saisit une mèche de cheveux du côté
droit et la coupa. Le Messager d’Allah r appela Abû Talha t et lui offrit cette
mèche. Le coiffeur prit alors une mèche côté gauche et le Messager d’Allah r lui
dit “Coupe !” Ce que fit le coiffeur. Il offrit cette seconde mèche de cheveux à Abû
Talha t en lui ordonnant de la distribuer aux gens. » (Muslim, Hajj, 323-326 ; Al Boukhari,
Wudu, 33).

Alors que les cheveux du Noble Prophète furent coupés en franges, Khâlid ibn
Wâlid t insista pour qu’une frange lui soit donnée:
« S’il te plaît, ô Messager d’Allah offre-la-moi ! Donne-moi la préférence sur
d’autres. Que mes parents te servent de rançon !202 »
Alors après avoir reçu la frange en question qu’il désirait désespérément, il la
frotta contre ses yeux et la plaça ensuite sous son turban (imamah).
Puis il ne rencontra plus jamais de force ennemie qu’il n’eut finalement pas
vaincue.
Il dira ensuite:

201 Soit trente-sept chameaux. Au total cent chameaux furent donc sacrifiés ce jour-là.
202 Abû Bakr t observa ceci avec étonnement, et compara les actes de Khâlid à Ouhoud, Khandâq et
Hudaybiya avec ce qu’il était devenu (Ibn Sa’d, II, 174).
La Dixième Année de L’hégire 699

« Je n’ai pas participé à une bataille en l’ayant sur moi sans que la victoire ne me
soit accordée ! »203 (Waqidi III 1108; Ibn Athir, Usd’ul-Ghabah, II, 111).
Avant d’accomplir la prière de dhor, le premier jour de l’Aïd al-Adha, le Noble
Messager r enfourcha sa monture se dirigea vers la Ka’ba pour effectuer la circu-
mambulation dit “du déferlement” (tawâf al-ifâda).
Après qu’il l’eût achevé, il accomplit la prière de dhor puis se rendit au puits
de zamzam.
La tombée de la nuit approchait quand, ce jour-là, il retourna finalement à
Mina où devaient s’écouler les journées et les nuits du tachriq204.
En soirée il continua ses visites régulières à la Ka’ba.
Après la journée du sacrifice, au cours de l’après-midi du premier et du deu-
xième jour du tachriq, le Prophète d’Allah r se rendit à la première stèle (jamrah)
près de la Mosquée de Mina.
Le dernier jour du tachriq, il lança ses dernières pierres après quoi dans l’après-
midi il passa de Mina à Muhassab.205
Le Noble Prophète r, voyant que les Croyants y étaient plus enclins à se sépa-
rer et à quitter Muhassab à leur manière leur dit :
« Ne partez que si votre destination finale est la Ka’ba ! » (Darimi, Manasiq, 85).
203. Hikmet Atan cite cet exemple de bénédictions fournies par les cheveux et la barbe du Prophète r :
«En 1983,Ali Yücel Efendi vint me dire : « Lorsque j’étais imam à la Mosquée Centrale de Suluova
l’imam d’un village voisin vint me dire : "Quelque chose que je ne saurais expliquer s’est passé.
Récemment, des gens d’un village proche de celui où je suis imam sont venus me voir avec un bon
nombre de livres. Ils me dirent : ”Notre père vient de mourir et nous a laissé ceci. Mais nous sommes
incapables de les lire. Vous êtes ici le seul érudit à pouvoir tirer profit de ces livres. Nous avons donc
pensé vous les offrir” Je pris les livres et suis rentré chez moi. Je m’assis près du poêle qui brûlait
à plein feu et commençais à les examiner. À l’intérieur se trouvaient des lettres et des enveloppes
appartenant à l’imam décédé et je me dis: “Elles sont certainement d’ordre personnel ” aussi je les ai
rassemblé et les ai jeté dans le poêle qui brûlait furieusement. Le poêle, une fois que j’y ai tout mis
soudainement se mit à chauffer davantage puis à s’éteindre. Horrifié, je sortis (de chez moi) et me mis
à courir. Ce n’est que plus tard que je recouvrai assez de courage pour revenir chez moi.”
“ J’avouai à l'imam qu’un poil de la barbe du Prophète d’Allah r se trouvait dans l’une de ces enveloppes.
Après un certain temps, je revis l'imam qui me demanda aussitôt :
“Comment sais-tu qu’un poil de la barbe du Prophète d’Allah r se trouvait dans une de ces
enveloppes ?"
Je lui répondis: "Les gens qui m'avaient offert les livres revinrent me dire plus tard : ”Nous ne le
savions pas à l’époque, mais une des enveloppes contenait un poil de la barbe du Prophète d’Allah r.
Pouvons-nous la récupérer ?”»
204. Les jours du tachriq sont des jours de nourriture, de boisson et de rappel d’Allah. Ordinairement, ce
sont les trois jours qui suivent le jour de l’Aïd al-Adha. (NdT).
205. Muhassab se situe entre Mina et La Mecque, plus près de Mina cependant. C’est là que les dirigeants
de Quraysh avaient décidé d’imposer un embargo aux Musulmans. Le Noble Prophète r s’en était
souvenu dès son arrivée à Muhassab. (Al Boukhari, Hajj, 45).
700 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le Prophète d’Allah r dit ensuite qu’il y restait une ultime circumambulation


autour de la Ka’ba avant la prière d’al-fajr, le quatorzième jour de Dhul-Hijja.
Dans le même temps, quelqu’un se présenta et posa une question sur le fait de
rester à La Mecque.
Le Prophète d’Allah r répondit :
« La Mecque n’est pas un lieu de séjour. Pour ceux qui sortent de La Mecque pour
effectuer leur pèlerinage, la durée du séjour n’excède pas trois jours. » (Ahmad, IV, 339).
Le Noble Prophète r avait un énorme respect envers la Maison Sacrée et toute
sa conduite y contribuait. S’il voulait manger ou effectuer un besoin, il sortait de
l’enceinte et se rendait en un lieu éloigné. Craignant qu’un sentiment de fatigue ne
surgisse ou qu’il fasse un faux pas à l’égard de la Ka’ba, il n’y séjournait pas long-
temps.
Après tout, il est préférable de se trouver dans un autre endroit avec le cœur
attaché à la Ka’ba que de s’y trouver à proximité, mais de la percevoir comme n’im-
porte quel endroit et en agissant de manière irrespectueuse., préoccupé par le désir
de rentrer chez soi ou n’importe où.
Après avoir effectué la circumambulation d’adieu le Noble Prophète r et les
Compagnons y firent leur retour à Médine. (Al Boukhari, Hajj, 21, 70, 128 ; Muslim, Hajj,
147 ; Ibn Maja, Manasiq, 84).

Allah le Très-Haut ayant accompli Sa faveur et perfectionné la religion, le temps


était maintenant proche pour la plus grande des séparations et assemblées.
701

LA ONZIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE

L’Ultime Adieu ou le Sublime Voyage vers Al Rafiq Al A’lâ


Le premier et le dernier maillon de la chaîne des prophètes, le Seigneur des
deux Mondes (Sayyid al Kawnayn) , le Messager des Génies et des Humains (Rasoul
as Sakalayn) I‘Imam des Deux Lieux Saints (Imam al Haramayn), la Lumière des
Mondes (Nur al Aalamine) le Prophète Muhammed al Mustapha r fut pris d’une
fièvre après le Pèlerinage de l’adieu. Cette fièvre allait s’avérer être la maladie qui
le séparerait de sa communauté (oumma) et l’unirait au Compagnon le plus élevé
(al Rafiq al A’lâ), cette réunion qu’il avait attendue toute sa vie. Ayant réalisé que
son heure était désormais proche, en particulier par le truchement de la sourate
An-Nasr, le Prophète d’Allah r se préparait maintenant pour le dernier voyage,
faisant ses adieux à tous, vivants et défunts, d’une manière implicite.
Il s’était rendu au cimetière de Jannat al-Baqi un jour avant de tomber malade
et, regardant les tombes, avait prié en ces termes :
« Ô mon Seigneur, le Suprême… Ne prive pas de Ta miséricorde ceux qui
reposent ici ! » (Ahmad, III, 489).
De retour du cimetière il monta sur le minbar de la Mosquée et adressa aux
Compagnons présents ces paroles d’adieu :
« Je serai le premier d’entre vous à atteindre le Bassin d’al-Kawthar et je vous
y retrouverai. Ce sera là notre lieu de rencontre. Ce Bassin, je le vois en ce moment-
même ! Je témoignerai en votre faveur ! Les clés des trésors de la Terre m’ont été don-
nées. Par Allah ! Je ne crains pas que vous redeveniez idolâtres après moi, mais que
vous vous laissiez emporter par l’avidité, que vous deveniez jaloux les uns des autres,
que vous vous entretuiez et que vous périssiez comme ceux qui ont péri avant vous ! »
(Al Boukhari Janaiz 73 ; Muslim Fadail,31).

Après avoir prononcé ces paroles, le Noble Messager r se retira dans sa


chambre, épuisé. La maladie s’aggravant de jour en jour et devenue rapidement
insupportable, tout courtois qu’il fût comme de coutume, il r demanda à ses hono-
rables épouses la permission de passer ses derniers jours dans la chambre d’Aïcha c.
(Al Boukhari, Tibb, 22 ; Ahmad, VI, 34, 38 ; Balazuri, I, 545).

Jamais le Noble Prophète r n’eut à souffrir d’une maladie d’une telle inten-
sité. La vie pure qu’il avait menée était même du genre à éloigner complètement la
maladie.
702 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Mais le don de la prophétie, ce lourd devoir qui est au-dessus des capacités
humaines ordinaires206 qu’il accomplissait depuis vingt-trois ans, sans parler des
nombreux actes malveillants que ses ennemis lui avaient infligés dès le début,
avaient à la fin épuisé son corps ce qui permit à la maladie de s’ ancrer dans son
corps.
D’un autre point de vue, la maladie eut pour tâche de l’élever à un rang supé-
rieur. Les effets du poison qu’il avait absorbé à Khaybar avaient joué un rôle impor-
tant dans la maladie.
En effet, à un moment où l’intensité de la maladie faisait des ravages, le Noble
Messager r dit à ‘A’icha c :
« Je ressens constamment la piqûre de la viande empoisonnée que j’ai goûtée
à Khaybar, ô ‘A’icha, et à présent je puis entendre la veine qui s’entaille dans mon
cœur. » (Al Boukhari, Maghazi, 83).
Similairement, Anas ibn Malik t aurait affirmé :
« J’ai vu la marque et les effets du poison sur sa luette. » (Muslim, Salam, 45).
À cause de ce poison, la Lumière de l’Être r disparut ainsi en martyr et Allah
le Très-Haut, qui l’avait déjà honoré du don de prophétie, lui accorda également la
bénédiction du martyr. (Ibn Hishâm, III, 390 ; Waqidi, II, 678-679 ; Haythami, VI, 153).

La fièvre qui s’était emparée du Noble Prophète r devenait si forte qu’elle le fai-
sait transpirer continuellement. C’était comme de l’eau qui coulait sans cesse d’une
bouteille d’eau suspendue. Abû Saïd al-Khodrî t qui était venu lui rendre visite ne
put s’empêcher de remarquer : « “ Quelle forte fièvre tu as, ô Messager d’Allah ! ”
avant de poursuivre : « Je posai ma main sur lui et sentis la chaleur émanant du
dessus de sa couverture. et je lui dis : Tu as une telle fièvre, ô Messager d’Allah !»
Il r me répondit : « Nous (les prophètes) sommes comme cela, les problèmes
viennent à nous, mais les récompenses (attenantes) aussi. »
Je lui demandais : « Qui parmi les êtres humains rencontrent le plus de pro-
blèmes? »
Il r me répondit : « Les prophètes.»
206. Durant la réception de la Révélation, le corps du Prophète r s’alourdissait considérablement. S’il
était à dos de chameau, par exemple, les pattes de l’animal se tordaient tellement que les témoins
commençaient à craindre qu’elles ne se brisent, ce qui l’obligeait à s’accroupir sur place. (Ahmad, II,
176 ; VI, 445 ; Ibn Sa’d, I, 197). Zayd ibn Thâbit t donne ce témoignage : « Un jour que j’étais assis aux
côtés du Messager d’Allah, il reçut une Révélation au moment où son genou était appuyé sur le mien (à
cause de la foule présente). Il devint si lourd que je craignis qu’il ne contusionnât le mien. » (Ahmad,
V, 190-191).
La Onzième Année de L’hégire 703

Je m’enquis : « Et ensuite ? »
— Les justes.
Après cela il ajouta :
« Et parmi eux figurent des personnes affligées par tant de tribulations qu’elles ne
peuvent trouver autre chose qu’un tissu de laine pour se couvrir. Elles se réjouissent
des tribulations, comme vous vous réjouissez de l’abondance. » (Ibn Maja, Fitan, 23).
La rigueur de la maladie ne lui permit pas de rejoindre l’assemblée des fidèles
(jama’a) dans ses derniers jours.
De ce fait il nomma Abû Bakr t pour diriger les fidèles dans la prière.
Peu après, s’étant senti légèrement rajeuni, il fit une apparition à la Mosquée et
adressa les paroles suivantes à l’attention des Musulmans rassemblés :
« Allah, le Glorieux, a laissé un de Ses serviteurs libre de choisir entre ce monde
d’ici-bas et ses ornements et les bénédictions attachées à Sa présence. »
Le sensible Abû Bakr t perçut sans plus tarder que les paroles que le Noble
Prophète r avait prononcées étaient des paroles d’adieu. Il fut alors submergé par
un chagrin incommensurable. Il se sentit soudainement découragé et se mit à pleu-
rer, parvenant quand même à dire : « Que mon père et ma mère soient sacrifiés pour
toi ô Messager d’Allah, nous pourrions sacrifier, nos vies, nos parents, nos enfants et
tout ce que nous avons pour toi ! » (Ahmad, III, 91).
Aucun autre Compagnon qu’Abou Bakr t, “le deuxième des deux” dans la
grotte de Thawr comme le désigne le Coran, ne fut capable de comprendre l’essen-
tiel des paroles prononcées par le Noble Prophète r.
On rapporte que le Noble Messager a dit r :
« J’ai imprégné Abû Bakr de tout ce qu’il y a dans mon cœur. » (Voir, Ajlunî, Kashfu’l-
Khafâ, v. 2, p. 419).

En voyant l’ami loyal du Noble Prophète r ainsi réduit en larmes Abou Saïd al
Khoudri t stupéfait se dit :
« C’est étrange qu’Abû Bakr t pleure quand le Messager d’Allah r évoque
une personne juste dont le souhait est de retourner auprès de son Seigneur ! » (Al
Boukhari, Sâlat, 80, 466).

En fait le cœur délicat d’Abû Bakr t avait perçu la grande séparation qui s’an-
nonçait et il se mit à pleurer comme la flûte de roseau se lamente de la séparation.
Quand la maladie du Noble Prophète r s’aggrava les autres Compagnons y
commencèrent à sentir eux-aussi un avant-goût de la plus grande des séparations,
ce qui n’était à présent qu’une question de temps. Une douleur solennelle s’empara
alors des Ansar et des Muhajirun.
704 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Quelques compagnons y lui demandèrent :


« Ne serait-il pas à propos que tu pries pour ta santé, ô Messager d’Allah ? »
Mais le Noble Prophète r, qui jusque-là avait toujours prié pour avoir une
bonne santé, refusa cette fois-ci.
‘Aïcha c raconte :
« Alors qu’il était tombé malade le Messager d’Allah r se mit à réciter les sou-
rates Al-Falaq et An-Nâs puis il souffla dans ses mains et se frotta tout le corps avec.
Au fur et à mesure que la maladie s’aggravait, je commençai à faire de même : réciter
les deux sourates, souffler dans mes mains puis me frotter tout le corps.
Je récitai également cette invocation que Jîbril u avait déjà prononcée lorsque
le Messager d’Allah r était tombé malade : “Ô Seigneur de l’humanité ! Guéris-moi
de cette maladie ! Le remède ne repose que dans Tes mains ! Nul autre à part Toi
ne peux me guérir ! Accorde-moi un remède qui ne laisse plus trace de la maladie !”
Le Messager d’Allah r se tourna alors vers moi et me dit :
« Mieux vaut me prendre la main, car ta prière (invocation) ne servira plus à
rien… j’attends mon heure ! » (Ahmad VI 260-261 ; Ibn Sa’d, II, 210).
‘Aïcha c continue :
« Le Messager d’Allah r appela alors sa précieuse fille, la délicate Fâtima c et
lui dit en la voyant venir: « Bienvenue, ma fille. »
Il la fit asseoir près de lui après quoi il lui murmura quelques mots d’un ton
calme et Fâtima c se mit alors à pleurer puis il r lui dit alors doucement quelques
autres paroles qui la rendirent aussitôt heureuse, à la vue du sourire qu’elle arborait.
« Je n’avais jamais su, jusqu’à ce jour, qu’un sourire pouvait être si proche des
larmes et des larmes pouvaient être si proches d’un sourire. J’en demandai la rai-
son à Fâtima c qui répondit : “Il vient en fait de m’informer qu’il allait mourir des
suites de sa maladie. Ce fut la raison de mes pleurs. Il m’a alors indiqué que je serai
la première à le rejoindre. Et cela m’a rendue heureuse”. » (Al Boukhari, Maghazi, 83).
Quand la maladie le rendit un peu moins faible, le Messager d’Allah r présida
à la prière rituelle. Lors d’une occasion, il s’adressa ainsi à ses Compagnons t bou-
leversés par la perspective de la séparation :
« Ô Gens…
J’entends dire que vous craignez pour la mort de votre Prophète ! Mais y a-t-il
eu un prophète, envoyé avant moi, qui est resté indéfiniment avec son peuple, pour
que moi je reste avec vous pour toujours ? Sachez bien que je m’en vais m’unir à mon
Seigneur ; et vous aussi le serez. Nul doute à ce sujet, tout se passe avec la permission
d’Allah.
La Onzième Année de L’hégire 705

Ayez bien conscience que je vous précède et que je vous attendrai ! Prenez garde !
Notre point de rencontre dans l’au-delà est la tête du Bassin d’Al-Kawthar. Quiconque
veut me rencontrer demain, qu’il ôte sa langue et ses mains du péché.
Ô Gens…
Les péchés sont la cause d’un changement de destin. Quand les gens sont bons,
leurs dirigeants le sont aussi… quand les gens sont mauvais, leurs dirigeants le sont
aussi. Par Allah dans la Main Duquel ma vie réside, en cette heure même, je me tiens
au-dessus de mon Bassin et je la regarde d’où je me tiens… »
À ce moment précis, le Noble Messager r tourna son regard vers Abû Bakr t
qui pleurait et l’exhorta:
« Ne pleure pas, Abû Bakr »tout en continuant à s’adresser à l’auditoire.
« Ô gens…
Aucun homme n’est plus altruiste et plus généreux qu’Abû Bakr. Si j’eusse adopté
un ami parmi les humains autre que mon Seigneur, c’eût été sûrement Abû Bakr…
Fermez toutes les portes qui s’ouvrent sur la Mosquée. Gardez seulement ouverte
la porte d’Abû Bakr… J’aperçois une lumière qui plane au-dessus de sa porte. » (Al
Boukhari, Sâlat, 80 ; Ibn Sa’d, II, 227).

Mes Compagnons…
Je ne suis après tout qu’un être humain. J’ai donc sans doute enfreint les droits de
certains d’entre vous. Quelle que soit la peau que j’aie pu meurtrir, voici la mienne.
Que celui qui veut obtenir justice vienne ! Quel que soit le dos que j’aie pu frapper,
voici le mien ? Que celui qui veut obtenir justice, qu’il vienne (et qu’il prenne mon
dos) !
Ô Mon Seigneur ! Je ne suis qu’un être humain. Quel que soit le Musulman à qui
j’aurais fait maints reproches, ou que j’aurais frappé ou maudit, que ceci soit une voie
de pureté, de récompense et de miséricorde ! » (Ahmad, III, 400).
Ô mon Seigneur ! Quel que soit le Musulman à qui j’aurais fait maints reproches,
que cela soit un moyen de proximité d’avec Toi le Jour de la Rétribution ! » (Al Boukhari,
Daawat, 34 ; Darimi, Muqaddimah, 14 ; Ibn Sa’d, II, 255 ; Tabari, Tarih, III, 191 ; Halabi, 463-464).

Après avoir prononcé ces paroles, le Prophète d’Allah r se retira dans sa


chambre, épuisé.
Ce fut la dernière fois qu’il dirigea la prière. Plus tard, ayant repris quelques
forces, il se positionnera juste derrière Abû Bakr qui conduira la prière.
Un lundi matin, le 12 Rabi al-Awwal, le Noble Prophète r ressentit une
dernière brise de soulagement, mais il n’eut pas assez force pour se joindre aux
Compagnons y qui l’espéraient pour effectuer la prière.
706 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Il ne fit que soulever le rideau qui était suspendu au-dessus de la porte de sa


chambre et regarda, pour la toute dernière fois, la masse des Croyants qui se tenait
côte à côte, offrant la prière d’al-fajr, derrière Abû Bakr t. Ravi par ce qu’il voyait,
il sourit avec une totale satisfaction. Pour lui, c’était comme si l’empreinte de la
maladie intransigeante avait pendant un moment disparu pour laisser place à la
satisfaction de laisser derrière soi une foule de Croyants justes et soulagés d’avoir
correctement exécuté ce devoir confié par Allah le Très-Haut. (Al Boukhari, Maghazi,
83; Adhan, 46, 94 ; Muslim, Sâlat, 98 ; Nasa’i , Janaiz, 7).

Comme l’avait observé ‘Aïcha c :


« Le Messager d’Allah r souriait en regardant ses Compagnons effectuer la
sâlat. Je ne l’avais jamais vu aussi heureux auparavant. » (Ibn Hishâm, IV, 331).
Allah le Très-Haut avait accordé au Noble Prophète r une bénédiction plus
grande que celle de tout autre prophète avant lui. Il a vécu pour voir le triomphe de
l’Appel. La Péninsule arabique avait maintenant été débarrassée de ses idoles, bri-
sées et démolies par le peuple qui se tenait jadis devant elles avec respect pour leur
rendre un culte. Des gens, qui dans un passé pas si lointain enterraient vivantes leurs
propres filles, étaient devenus des piliers de compassion, façonnés par les mains
mêmes du Noble Prophète r, le meilleur de tous les éducateurs qui en avaient fait à
présent des merveilles de la création.
Le matin même, il appela une armée de Compagnons y qu’il avait préparée
auparavant, mais dont le départ avait été retardé en raison de sa maladie.
Il suggéra au jeune commandant Oussama ibn Zayd t : « Partez vers le milieu
de la matinée avec la bénédiction d’Allah ! » (Waqidi, III, 1120).
Plus tard dans la même journée, le Noble Prophète r demanda à ‘A’icha c de
distribuer aux nécessiteux les six ou sept dinars qu’il possédait en commun. Peu de
temps après, il lui demanda si cela avait été fait. Constatant que cela lui était sorti de
l’esprit à cause de l’inquiétude liée à la maladie, il lui réclama les dinars en question.
Il les prit dans ses mains et dit :
« Muhammad, le Prophète d’Allah, n’est pas du genre à juger bon de retrouver
son Seigneur avec ceux-ci dans les mains, sans les avoir livrés aux nécessiteux. »
Il répartit ensuite les dinars entre cinq familles Ansar, après quoi il déclara :
« Maintenant, je me sens soulagé. »
Puis il fit une petite sieste207. (Ahmad, VI, 104 ; Ibn Sa’d, II, 237-238).
Voilà une charité qui demeure sans fin !
207. L’Imam Kastallâni commente à ce propos : « Si le Messager d’Allah r, le Bien-Aimé du Seigneur des
Mondes, le plus grand de tous les prophètes qui a vu ses péchés passés et futurs pardonnés réagit
ainsi alors pensez à la situation de ceux qui retournent à Allah en ayant enfreint les droits des autres
Musulmans et en s’étant appropriés ce qui leur était interdit de leurs biens. » (Kastallânî, II, 480-481).
La Onzième Année de L’hégire 707

Il eut les mots suivant à l’intention des Ahl-ul-Bayt :


« Prenez garde, ô gens, car le feu fait rage ! les tribulations se profilent comme des
hordes dans la nuit ! Je n’ai permis que ce qui est permis par le Coran, le Livre d’Allah,
et interdit ce qui y est interdit !
« Fâtima, la fille de Muhammad, le Messager d’Allah ! Safiyya ! Offrez des
actions dignes aux yeux d’Allah ! Car je ne pourrai pas vous sauver de Son châtiment
(à moins que vous ne fassiez votre part dans le service [ou dans votre condition de
servantes]) ! » (Ibn Sa’d, II, 256 ; Al Boukhari, Manaqib, 13-14 ; Muslim, Iman, 348-353).
« Prenez garde… prenez garde que l’on s’empare de votre sâlat, déclara le Noble
Prophète r le même jour. Traitez avec bienveillance ceux qui vous sont confiés.
Craignez Allah en leur nom. Ne négligez pas de les vêtir et de les nourrir. Parlez-leur
avec sollicitude ! » (Abou Daoud, Adab, 123-124/5156 ; Ibn Maja, Wasaya, 1).
Le Noble Prophète r utilisa son bâton de siwak pour se brosser les dents ce
jour-là avec un enthousiasme accru. « C’était comme si je n’avais jamais vu le
Messager d’Allah r utiliser son bâton de siwak avec autant d’éclat » commenta
‘Aïcha c. (Al Boukhari, Maghazi, 83 ; Ibn Sa’d, II, 261).
Le Prophète d’Allah r avait un petit récipient d’eau à ses côtés. À maintes
reprises, il y mettait la main, se mouillait le visage et disait : « La ilaha ill-Allah… la
mort a sûrement ses accès d’ivresse. » (Al Boukhari, Maghazi, 83).
Le Noble Prophète r fit ce jour-là l’invocation suivante :
« Ô mon Seigneur… Enveloppe-moi de Ta compassion ! Fais-moi rejoindre le
compagnon suprême (Al-Rafiq al-A’lâ) ! Ô Allah ! Enveloppe-moi de Ta compassion !
Accorde-moi Ta miséricorde ! Fais-moi rejoindre le compagnon suprême (Al-Rafiq
al-A’lâ) ! » (Al Boukhari, Maghazi, 83 ; Ahmad, VI, 126).
À un moment de la journée, le Prophète de Miséricorde r se mit à consoler sa
fille déprimée, Fâtima c, en lui disant ces quelques mots :
« Ne pleure pas, ma chérie, quand je mourrai, dis : “À Allah nous appartenons et
à Lui nous retournons”. » (Ibn Sa’d, II, 312).
Le Noble Prophète r exerça la même mise en garde à ses Compagnons y
en leur rappelant le verset révélé à l’heure la plus sombre d’Ouhoud, lorsque les
Croyants furent au bord de l’annihilation à cause d’une rumeur selon laquelle
“Muhammad avait été tué” :

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708 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Muhammad n’est qu’un messager - des messagers avant lui sont passés -
S’il mourait, donc, ou s’il était tué, retourneriez-vous sur vos talons ? Quiconque
retourne sur ses talons ne nuira en rien à Allah ; et Allah récompensera bientôt
les reconnaissants. » (Al-‘Imrân, 3 : 144).
Jîbril u l’Ange de la Révélation, vint annoncer le même jour au Noble
Prophète r : « Paix et bénédictions à toi, ô Messager d’Allah. C’est ici la dernière fois
que je pose le pied sur Terre pour toi ! » (Ibn Sa’d, II, 259).
Les paroles que le Noble Prophète r avait prononcées plus tôt dans la journée
s’animèrent peu à peu : « L’esprit d’un prophète n’est jamais saisi avant qu’on lui ait
montré sa place au Paradis ! Alors c’est à lui de s’en charger ! » (Al Boukhari, Maghazi,
83, 84 ; Ahmad, VI, 89).

Arrivant ensuite dans le sillage de Jîbril u, l’Ange de la mort se présenta et


demanda la permission d’entrer en présence du Noble Prophète r. La permission
accordée, il entra, se tint bien droit et dit : « Ô Messager d’Allah ! Ahmad ! Allah le
Tout-Puissant m’a envoyé vers toi et m’a ordonné de me plier à tes ordres. Si tu le
souhaites, je puis me saisir de ton esprit ; le cas échéant, je puis te le laisser. »
Gabriel u qui était toujours présent fit la remarque suivante : « Tu manques à
Allah le Tout-Puissant, ô Messager d’Allah ! »
À l’Ange de la mort, dans l’attente d’une réponse, le Prophète d’Allah r dit :
« Ce qui est auprès d’Allah est meilleur et plus durable. Alors, ô Ange de la mort, fais
ce qui t’a été ordonné : prends mon esprit ! » (Ibn Sa’d, II, 259 ; Haythami, IX, 34-35 ; Balazuri,
I, 565).

Puis, une dernière fois, il r plongea sa main dans le récipient d’eau qui se trou-
vait à côté de lui et humidifia son visage. Il avait à présent commencé à se frayer un
chemin conduisant vers le seuil de la “compagnie suprême, aux derniers instants
d’une vie dominée par le désir ardent du Divin.
Prononçant les mots relatifs au Tawhid, il dit : « Ô mon Seigneur ! Al-Rafiq al-
A’lâ ! Al-Rafiq al-A’lâ ! » et rendit son esprit pur.
La main avec laquelle il avait humidifié son visage glissa lentement et élégam-
ment à l’intérieur du récipient d’eau (Al Boukhari, Maghazi, 83).
Le verset suivant révélé antérieurement : « En vérité tu mourras et ils mour-
ront eux aussi 208» était maintenant une réalité.
Ô Allah… que tes bénédictions soient sur notre Prophète Muhammad Mustafâ,
sa descendance et ses Compagnons. Bénis-les tous et accorde-leur Ton salut… et fais
que ceci soit une requête éternelle !
208. Az-Zumar, 39 : 30.
La Onzième Année de L’hégire 709

Les membres de la famille du Noble Prophète r se retrouvèrent plongés dans


un déluge de larmes et déchirés par le chagrin au moment de son décès.
Entre-temps, bien que personne ne l’eût aperçu, ils entendirent une voix apai-
sante qui les réconforta en disant :
« Que la paix et les bénédictions d’Allah soient sur vous ».
Après que les Ahl’ul-Bayt eurent répondu de la même manière, la même voix
se fit à nouveau entendre, cette fois en écho avec une parole divine :

Ƈ ĩƆ ĘƆ Ùƈ ĨÓƆ ĻƆ ĝƈ ĤŽ ÒĦƆ ijŽ ĺƆ ħŽ ĠƇ òij ƈ ƈ ƅ


īƈ Đ
Ɔ æƆ ƈõèŽ ôī Ɔ äƇ ƇÈĪƆ ijŽ Ęƪ ijƆ ÜÓ
Ƈ ĩƆ Ĭƈƪ ÌIJ
Ɔ ÚijŽ ĩƆ ĤŽ ÒÙƇ ĝƆ ÐÆðƆ ÷ęŽ ĬƆ ģƫ ĠƇ
ƈòIJóĕƇ ĤŽ ÒĎÓÝĨźÌƈ ÓĻĬïĤÒØÓĻéĤÒÓĨIJôÓĘïĝĘÙĭåĤÒģìƈ îƇÈIJ ƈòÓĭĤÒ
Ƈ Ƈ Ɔ Ɔ ƪ ƆŽ ƫ Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ž ƆƆ Ɔƪ Ɔ Ž Ɔ Ž Ɔ ƪ
« Toute âme goûtera la mort. Mais c’est seulement au Jour de la Résurrection
que vous recevrez votre entière rétribution. Quiconque donc est écarté du Feu et
introduit au Paradis, a certes réussi. Et la vie présente n’est qu’un objet de jouis-
sance trompeuse. » (Al-‘Imrân, 3 : 185).
Ceci suivi d’un ton de consolation similaire :
« Sachez qu’il est, aux yeux d’Allah, une consolation pour tout désastre, un
successeur pour tout défunt et un quelque chose en retour pour quiconque décède.
Accrochez-vous à Allah et attendez ce que vous attendez de Lui. L’affligé, c’est celui
qui est privé de récompenses dans l’au-delà. Que la paix et les bénédictions d’Allah
soient sur vous ! » (Ibn Sa’d, II, 259).
Ibn Omar t atteste : « L’ensemble des Ahl’ul-Bayt, les gens présents dans la
Mosquée et à l’extérieur entendirent cette voix. » (Balazuri, I, 564).
‘Alî t déclare quant à lui que la voix appartenait à Al-Khidr u. (Ibn Sa’d, II, 260).
Fâtima c fut si bouleversée à la pensée d’être séparée de son père qu’elle
déclara : « Ce malheur est tel que s’il devait être répandu en plein jour sa lueur se
noircirait indubitablement ! » (Diyarbakri II 173).
On ne vit plus jamais sourire Fâtima c pendant les six mois suivant la mort du
Noble Prophète r. (Kâmil Mîras, Tecrîd Tercemesi, XI, 25-26).
Ainsi donc, après une grave maladie qui dura treize jours consécutivement à
son retour à Médine, la onzième année de l’Hégire (8 juin 632) les portes des hori-
zons sublimes s’ouvrirent au Noble Prophète r pour aller à la rencontre d’Allah, le
plus Grand de tous les amis, et Lui rendre grâce.
Même s’ils ne parvenaient pas à maîtriser entièrement leurs émotions, les
Compagnons y eurent à présent l’impression que l’essentiel de la vie elle-même
était parti.
710 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Bilal al-Habashî t le muezzin du Noble Prophète r fut incapable, ce jour-là,


d’appeler à la prière avec sa belle voix qui remplissait le ciel tout entier. Chaque fois
que les Compagnons y insistaient pour qu’il le fasse, Bilal t faisait un geste mais
n’apercevant pas le Noble Prophète r prendre sa place habituelle pour l’accomplis-
sement de la prière, il se sentait soudainement mal, comme asphyxié, perdait sa voix
et finissait par s’effondrer sans pouvoir aller jusqu’au bout de son appel. Ensuite,
dans l’espoir d’éteindre la flamme d’amour qui ravageait son cœur, il s’éloigna de
Médine et se rendit à Damas.
Quelques temps plus tard, il vit le Messager d’Allah r en songe qui lui dit :
« Combien de temps doit durer cette séparation, Bilal ? N’est-il pas temps pour
toi de me rejoindre ? »
Désemparé, Bilal t se réveilla soudainement et, sans plus tarder, se rendit
jusqu’à la tombe sacrée du Noble Prophète r à Médine.
Là, alors qu’il levait les yeux au ciel en présence de son bien-aimé et versait des
larmes sur sa tombe, Hasan et Husayn y firent leur apparition. Ravi de voir les chers
petits-fils du Noble Prophète r, Bilal se mit à les éteindre chaleureusement.
« Nous aimerions d’entendre appeler à la prière, ô Bilal » lui dirent-ils alors.
Celui-ci succomba pour lors à leur souhait. Son adhan se mit alors à secouer
tout Médine. Au passage “Ashadu anna Muhammadan Rasulullah”, tous les
hommes et toutes les femmes de la ville descendirent dans la rue et commencèrent à
affluer à la Mosquée, pensant que le Noble Prophète r était revenu à la vie. En effet,
depuis son décès, jamais il n’y eut de jour où les habitants de Médine avaient versé
autant de larmes. (Ibn Asir, Usd’ul-Ghabah, I, 244-245 ; Dhahabi, Siyar, I, 357-358).
Voici ce que rapporte à ce sujet Anas ibn Malik t :
« Je n’ai jamais connu de jour meilleur et plus radieux que ce jour où le
Messager d’Allah r et Abû Bakr t sont arrivés à Médine. Témoin le jour où le
Messager d’Allah r est mort, je n’ai jamais connu de jour plus sombre, plus triste et
plus terrible que ce jour-là. L’arrivée du Messager d’Allah r à Médine avait embrasé
toute chose, et à sa mort toute chose finit par sombrer dans les ténèbres. C’est à
contrecœur que nous l’ensevelîmes, parce que peu de gens croyaient qu’il fût mort. »
(Ahmad, III, 221, 268, 287 ; At Tirmidhi Manaqib, 1/3618 ; Darimi, Muqaddimah, 14).

Tous les troubles et autres tribulations que les Musulmans allaient subir par la
suite ne signifieraient rien.
Le Noble Prophète r a déclaré, en conséquence :
“Tout Musulman victime d’un trouble quelconque doit réfléchir et trouver,
par ma mort, consolation dans le trouble même dont il est affligé et rester patient”.
(Muwatta’, Janaiz, 41 ; Darimi, Muqaddimah, 14).
La Onzième Année de L’hégire 711

Le Noble Prophète r a aussi dit :


« Ma santé vous est bénéfique : vous parlez avec moi et je parle avec vous. Ma dis-
parition vous est aussi bénéfique : en voyant vos bonnes actions, je rends grâce à Allah
et en voyant vos mauvaises actions, je prie Allah pour votre pardon. » (Haythami, IX, 24).

Selon les dires d’Aïcha c le Noble Prophète r passa ses derniers instants à louer
le Tout-Puissant, à se repentir et à Le remercier. Il répétait sans cesse : “Subhânallâhi
wa bihamdihi astaghfirullâha wa atûbu ilayhi” : “Pureté et Gloire à Toi, ô Allah !
je Te demande pardon et me repens à Toi”. (Al Boukhari, Adhan, 123, 139; Muslim, Sâlat,
218220; Ahmad, I, 393; Ibn Sa’d, II, 192).

Le Prophète d’Allah r portait une marque divine située juste entre les omo-
plates, ce qui atteste qu’il reçut le don de prophétie. Maints Compagnons y nour-
rissaient en conséquence le vif désir d’embrasser cette marque. Après qu’il eut
rendu son dernier soupir et à la vue de son expression rayonnante et immuable,
les Compagnons y se mirent à douter qu’il fût vraiment mort. Asma bint Umays,
une parente du Noble Prophète r, entreprit alors d’examiner son dos afin de voir si
le sceau de la prophétie y était toujours présent. Constatant qu’il avait disparu, les
Compagnons y furent alors convaincus qu’il r avait entamé le voyage vers l’éter-
nité. (Ibn Sa’d, II, 272 ; Ibn Kathir, al-Bidaya, V, 231).
Le Noble Prophète r ne laissa ni dirham ni esclave. Son héritage ne comprenait
que la mule blanche qu’il montait, une arme et quelques terres à Khaybar et à Fadak
qu’il avait déjà cédées en fiducie aux voyageurs. (Al Boukhari, Maghazi, 83).
Le Noble Messager r décéda le lundi et fut enterré le lendemain. Les
Compagnons y accomplirent la prière funéraire individuellement : aucun imam ne
dirigea la congrégation. Certains suggérèrent qu’il soit enterré juste à côté du minbar
de la Mosquée. D’autres émirent l’avis que le cimetière al-Baqi conviendrait.
Abû Bakr t mit finalement un terme à la discussion en déclarant : « J’ai
entendu le Messager d’Allah r dire : “Chaque prophète est enterré là où il meurt”. »
De ce fait, les Compagnons se mirent à creuser à l’endroit exact où le Noble
Prophète r rendit son dernier souffle209.
Avant de procéder à la toilette mortuaire, les Compagnons y habilités tentèrent
d’enlever sa chemise quand soudain une voix se fit entendre qui leur ordonnait de
ne pas ôter sa chemise. C’est ainsi qu’ils le lavèrent avec sa chemise. (Muwatta, Janâiz,
27 ; Ahmad, VI, 267).

209. Qadi Iyad a dit : « Il ne fait aucun doute que l’endroit où repose le Prophète d’Allah r demeure la plus
noble parcelle de terre existante dans le monde. » (Shifa, II, 96). De même l’imam Busirî a dit : « Il n’y
a pas de meilleur parfum que la terre qui porte en son sein le corps sacré du Prophète bien-aimé r.
Qu’il est béni, celui qui a pu sentir et embrasser cette terre ! » (Qasidah-i Burdah, Bayt n°: 58).
712 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

‘Abdallah ibn Mas’ud t raconte :


« Notre bien-aimé Messager d’Allah r nous avait informés de sa mort un mois
auparavant. Nous lui demandâmes les yeux remplis de larmes:
“Qui conduira ta prière funéraire, ô Messager d’Allah ?”
Lui aussi se mit à verser des larmes lorsqu’il nous répondit :
“Accrochez-vous, qu’Allah ait pitié de vous tous ! Qu’il vous récompense par le
bien pour le bien de Son Prophète ! Après m’avoir lavé et enveloppé, allongez-moi
sur ma natte là-bas, près de ma tombe ici dans cette maison. Puis quittez la pièce
quelques instants, car mes deux amis Jîbril et Mikail accompliront la prière funéraire
à mon intention ; puis Israfil et l’Ange de la Mort avec une armée d’Anges à ses côtés.
Pénétrez ensuite dans la pièce en groupe, offrez la prière mortuaire et adressez vos
invocations et votre paix. En revanche, ne me bouleversez pas (outre mesure) en criant
ou en vociférant.»
«Que les membres masculins de ma famille procèdent d’abord à la prière mor-
tuaire, puis ce sera au tour des femmes.»
“Envoyez mes salutations à mes Compagnons qui ne sont pas présents ici !
Envoyez mes salutations à tous ceux qui me suivront dans ma religion, et ce jusqu’à
l’Heure Ultime”. » (Hayhtami IX 25 ; Ibn Sa’d II 256-257).
Tout eut lieu conformément aux vœux du Noble Prophète r.
Alî t dit alors :
« Que personne n’ait le moindre doute du fait qu’il n’y ait pas d’imam désigné
pour diriger la prière mortuaire. Il r est votre imam dans sa mort comme il l’était
dans sa vie. »
Puis, s’étant positionné près du corps du Noble Prophète r, il prononça ces
paroles :
« Que la paix, la miséricorde et les bénédictions te soient accordées, ô Messager
d’Allah !
Ô Allah ! Nous témoignons qu’il (nous) a transmis ce que Tu lui as révélé, qu’il
a conseillé sa communauté (oumma) et qu’il a combattu sur Ton sentier jusqu’à ce
que Tu aies rendu Ta religion suprême et accompli Ta parole !
Ô Allah ! Fais que nous soyons parmi ceux qui le suivent dans ce que Tu lui
as révélé ! Accorde-nous après lui la persévérance dans ce sentier ! Fais que nous
soyons réunis avec lui ! » On pouvait entendre un bourdonnement d’amin qui faisait
écho à cette invocation. (Ibn Sa’d, II, 291).
Quel bonheur pour la Terre de garder en son sein la plus noble créature de
toute la création !
La Onzième Année de L’hégire 713

Comme est jolie l’expression du poète pour décrire cela :


Sois le Prophète élu et une Miséricorde pour l’Univers
Sa tombe est à moi dit fièrement le ciel parce qu’il le reçoit
Visite ton Jardin lui a dit Gabriel al Amin
C’est le Paradis d’Eden restes-y éternellement...
Raif Bey décrit avec ce joli poème la jalousie du ciel pour la terre:
Ô face du Soleil ! La voûte céleste s’est embellie avec la terre
Lorsqu’elle vit, admirative elle se dit: «comme j’aurais aimé n’être que poussière!»
(An Naba verset 40).

Avec la religion devenue à présent parfaite et le témoignage unanime de tous


les Compagnons envers le Messager d’Allah r qui avait rempli son devoir de trans-
mettre ce qui lui avait été divinement révélé, la Lumière de l’Être était maintenant
appelée dans le royaume de l’éternité.
Il attend maintenant sa oumma dans la plaine de la Résurrection, sur le Sirat,
près du Bassin d’Al-Kawthar.
Ton intercession Ô Messager d’Allah
Ton aide Ô Messager d’Allah
Je t’en supplie Ô Messager d’Allah

Il r avait honoré le monde un lundi 12 Rabî’ al-Awwal et s’était vu confier


l’Apostolat prophétique un lundi du même mois.
Abû Qatada raconte : « Le Messager d’Allah r interrogé sur le jeûne un lundi
dit : “C’est le jour où je suis né et celui où je fus envoyé comme prophète”. » (Muslim,
Siyam, 197-198).

En outre, ce fut un matin du 12 Rabî’ al-Awwal que le Noble Prophète r entra


dans Médine et posa les fondations de la souveraineté islamique appelée à survivre
jusqu’à l’Heure Ultime.
Enfin il r allait aussi quitter ce monde un 12 Rabî’ al-Awwal afin de précéder
sa communauté (oumma) et intercéder avec compassion en sa faveur.
Dépeignant poétiquement le monde comme déloyal pour avoir enlevé le Noble
Prophète r, Azîz Mahmûd Hüdayî ç écrivit :
Qui peut s’attendre à la loyauté ?
N’es-tu pas qu’ un monde de tromperie ?
Toi qui a enlevé Muhammad Mustafâ
N’es-tu pas qu’ un monde de tromperie ?
714 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Un chagrin pour absorber tout l’univers


Peu après la mort du Noble Prophète r, Fâtima c dit en versant des larmes :

ĮÓƇ ĬƆ îŽ ƆÈÓĨ ƈ īĨ ƈ Ɔ


Ɔ įÖžƈ ò
Ɔ Ž ĮÓŽ ÝƆ ÖƆ ÈÓĺƆ
ĮÓƇ ĐƆ îÓƆ ÖƬ ò
Ɔ ÔÓ Ɔ äƆ ƆÈĮÓŽ ÝƆ ÖƆ ƆÈÓĺƆ
ĮÒƇ IJƆ ÉŽ Ĩ ƈ ƈ Ɔ
Ɔ öIJŽ îƆ óŽ ęĤŽ ÒÙƇ ĭƪ ä
Ɔ īŽ Ĩ Ɔ ĮÓŽ ÝƆ ÖƆ ÈÓĺƆ
ĮÓƇ đƆ ĭŽ ĬƆ ģĺ ƈ ĤƆ Ìƈ ĮÓŽ ÝƆ ÖƆ ƆÈÓĺ
Ɔ ƈó׎ äĵ Ɔ
« Ô mon cher père, Ton Seigneur t’a exaucé parce que nul autre que toi n’est plus
proche de Lui !
Ô mon cher père qui a répondu à l’invitation de son Seigneur !
Mon cher père qui séjourne dans le Paradis du Firdaous !
Mon cher père, à Jîbril, nous annonçons ta mort ! »
Et après son enterrement elle c dit à Anas t!
« Comment vos cœurs vous ont-ils permis de jeter de la terre sur le Messager
d’Allah ? » (Al Boukhari, Maghazi, 83 ; Darimi, Muqaddimah, 14).
Par courtoisie, Anas t ne répondit pas, mais son regard sombre disait : “Non,
Fâtima, nos cœurs ne nous l’ont pas permis, mais nous nous sommes forcés à obéir
à l’injonction du Prophète !” (Al Boukhari, Maghazi, 83 ; Darimi, Muqaddimah, 14).
Tassés à l’intérieur de la Mosquée, les Croyants gémissaient quand ils furent
interrompus par la voix d’Omar t qui en colère hurlait : « Que personne ne dise
“Muhammad est mort” sinon je lui tranche le cou avec mon épée. Le Messager
d’Allah r s’est évanoui de la même manière que Mûsâ c’est tout ! »
Et il prolongea son discours enflammé au point que l’écume sortait de sa bouche.
Après avoir reçu la triste nouvelle, Abû Bakr t enfourcha immédiatement son
cheval et galopa jusqu’à la Mosquée. La première chose qu’il accomplit fut de décou-
vrir le visage du Noble Prophète r sous le linceul. Et s’étant incliné sur son cadavre
sacré, il pleura en l’embrasant sur le front. Puis il dit :
« Par Allah ! Le Messager d’Allah est mort. Nous appartenons à Allah et à Lui
est notre retour. Que mon père et ma mère te soient sacrifiés ! Allah ne te laissera
pas goûter deux fois à la douleur de la mort ! Tu es mort une fois et tu as maintenant
franchi le seuil de la mort qui t’était prescrite ! Il n’y aura plus jamais de mort pour
toi, ô mon cher prophète ! »
La Onzième Année de L’hégire 715

Puis il s’inclina une seconde fois, embrassa le beau visage du Prophète r et


s’écria : « Ô mon ami le plus cher » tout en posant un autre baiser sur son front,
puis un autre.
Puis il poursuivit: « Tu étais beau dans la vie comme tu l’es dans la mort !
Comme sont belles ta vie et ta mort ! ».
Puis il remit le linceul sur le visage du Noble Prophète r et s’en alla ensuite à
la Mosquée.
Entre-temps, Omar t poursuivait son discours enflammé, exhortant les
Croyants à nier que le Prophète d’Allah r fût décédé.
Abou Bakr t lui fit cette remarque :
« Il est temps de t’asseoir maintenant, Omar! »
En proie à un chagrin inexprimable, Omar t n’avait pas l’intention de s’as-
seoir. Abû Bakr t ayant réitéré son conseil à plusieurs reprises, Omar tfinit par se
calmer et à s’asseoir enfin.
Abû Bakr t commença alors à s’exprimer :
« Allah le Très-Haut a informé Son prophète de son passage imminent alors
qu’il était encore vivant. Il vous a également informé de votre mort, le moment
venu. Nul parmi vous ne survivra à la mort. Que celui d’entre vous qui adorait
Muhammad sache que Muhammad est mort.
Quant à celui qui adore Allah, qu’il sache qu’Allah le Tout Haut, qui est le
Vivant, l’Immortel a dit :

ƈ ƈƈ ƈ
Ɔ ħŽ ÝƇ ׎ ĥƆ ĝƆ ĬÒģƆ ÝĜƇ IJŽ ƆÈÚÓ
ĵĥƆ Đ Ɔ ĨĪƈ Ɔ
ƪ ÍĘƆ ÈģƇ øƇ óĤÒ
ƫ įĥ׎ ĜƆ īĨÛŽ ĥƆ ì
Ɔ ïŽ ĜƆ Ģij Ɔ ƪ źÌƈ ïƄ ĩƪ éƆ ĨÓ
Ƅ øƇ ò Ƈ ĨƆ IJƆ
īĺ ƈ ƪ ųÒĸ ÑĻüųÒóąĺīĥĘįƈ Ļ×ĝƈ ĐĵĥĐÕĥƈ ĝĭĺīĨIJħġƈÖÓĝĐƆÈ
Ɔ ƈóĠÓýĤÒ ƇƩ ƈõåŽ ĻøƆ IJÓ
Ɔ Ɔ ƃ Ž Ɔ ƆƩ ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ž
« Muhammad n’est qu’un messager - des messagers avant lui sont passés -
S’il mourait, donc, ou s’il était tué, retourneriez-vous sur vos talons ? Quiconque
retourne sur ses talons ne nuira en rien à Allah ; et Allah récompensera bientôt
les reconnaissants. » (Al-‘Imrân, 3 : 144). »
Ce verset rappelé les fidèles commencèrent lentement à être conscient que le
Prophète d’Allah r était réellement décédé.
Ils furent si stupéfaits d’entendre Abû Bakr t réciter ce verset qu’ils eurent
l’impression de ne pas savoir qu’il avait déjà été révélé.
Omar t confessera plus tard:
716 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Par Allah c’était comme si je n’avais jamais entendu ce verset jusqu’à ce jour-
là. Dès que j’ai entendu Abû Bakr le réciter, mes pieds ne furent plus en mesure de
me porter, mes genoux se sont soudainement affaiblis et je me suis effondré sur le
sol. » (Ibn Sa’d, II, 266-272 ; Al Boukhari, Maghazi, 83 ; Haythami, IX, 32 ; Abdurrazzaq, V, 436).
Aussitôt après le discours percutant d’Abû Bakr t, Omar t se précipita sur le
corps du Noble Prophète r et l’embrassa sur le front, puis les yeux gonflés par les
larmes il s’écria :
« Que mon père et la mère te servent de rançon, ô Messager d’Allah, le tronc du
palmier sur lequel tu avais coutume de t’appuyer pleurait à cause de la douleur de la
séparation et ne se calmait que lorsque tu posais ta main sur lui… mais ton ami est
plus digne de pleurer et de se plaindre de la séparation que ce tronc de palmier ! Que
mon père et ma mère te servent de rançon, ô Messager d’Allah ! Ton Seigneur dit :

ųÒ
Ɔ Ʃ ĎÓ
Ɔ Ĉ Ɔ øƇ óĤÒďƈ ĉƈ ƇĺīŽ Ĩƪ
Ɔ ƆÈïŽ ĝƆ ĘƆ Ģij ƪ
« Quiconque obéit au Messager obéit certainement à Allah (…) » (An-Nisâ’,
4 : 80).

Cela a permis d’élever ta suprématie devant Lui, jusqu’au degré le plus élevé !
Que mon père et ma mère te servent de rançon, ô Messager d’Allah ! En dépit
de t’avoir envoyé comme dernier prophète, Allah le Très-Haut a de nouveau élevé
ta vertu au rang le plus élevé – en obtenant un serment d’allégeance210 de la part de
tous les prophètes antérieurs – pour croire et pour t’aider !
Que mon père et ma mère te servent de rançon, ô Messager d’Allah. La nostal-
gie des habitants de l’Enfer t’apparaîtra alors qu’ils subiront leur châtiment, comme
eux-mêmes l’avoueront :

źij
Ɔ øƇ óĤÒÓĭđĈƆÈIJųÒÓĭđĈƆÈÓĭÝĻĤÓĺ
ƪ Ɔ Ž Ɔ Ɔ ƆƩ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ ŽƆ Ɔ
« Hélas pour nous ! Si seulement nous avions obéi à Allah et obéi au
Messager ! » (Al-Ahzâb, 33 : 66).
Cette confession n’a d’effet que d’élever ta valeur aux yeux d’Allah jusqu’à son
degré ultime. » (Kastallani, II, 492).
Umm Salama c raconte les tristes souvenirs de cette journée :
« Nous nous étions rassemblés autour du Messager d’Allah r et pleurions sa
mort. Son beau cadavre se trouvait encore à l’intérieur de notre foyer et nous nous
consolions en le regardant.
210. Cf. Al- ‘imrân, 3 : 81.
La Onzième Année de L’hégire 717

Lorsque nous entendîmes le bruit des pioches juste après l’aube, nous nous
mîmes à gémir, tout comme la foule qui attendait à l’intérieur de la Mosquée.
Médine se mit à trembler au son d’un cri solitaire.
Le fait d’entendre Bilal sangloter en appelant à la prière, le passage “ashadu
anna Muhammadan Rasulullah,” avait aggravé d’autant plus notre chagrin. Alors
que les gens commençaient à se masser près de la fosse, ceux qui se trouvaient à l’in-
térieur fermèrent la porte sur eux. Quelle journée douloureuse ! Toutes les fois où
ultérieurement nous étions accablés par un problème quelconque, nous nous rappe-
lions instantanément de la douleur que nous avons ressentie le jour où le Messager
d’Allah r décéda et nous n’en tenions plus compte. » (Ibn Kathir, al-Bidayah, V, 256).
Comme ils l’aimaient plus que tout, les Compagnons y eurent beaucoup de
mal à la pensée d’être séparés du Noble Prophète r. Beaucoup parmi eux décla-
rèrent à ce propos “de ne plus pouvoir vivre sans lui parce qu’ils n’allaient plus le
voir, ni l’entendre parler”.
Le Noble Prophète r avait en effet prédit leur sort bien auparavant :
« Par Celui qui tient l’âme de Muhammad entre Ses Mains, viendra un jour
où vous ne me verrez plus. Me voir en votre compagnie deviendra alors plus cher et
plus digne de vous que sa famille et toute sa richesse ! » (Muslim, Fadail, 142 ; Al Boukhari,
Manaqib, 25).

Ils vécurent le reste de leur existence dans l’attente du jour où ils retrouveront
le Prophète d’Allah r et jouiront éternellement de sa présence.
Othman t raconte :
« S’il y avait bien quelqu’un qui parmi les Compagnons pleurait la mort du
Messager d’Allah r, c’était bien moi. D’autres, il est vrai, étaient aussi affligés.
Certains ont même développé de l’anxiété après sa mort et le deuil qui s’en est suivi.
Alors que j’étais assis à l’ombre d’un mur, Omar t passa près de moi et me salua.
Mais moi, je n’avais aperçu ni sa présence ni son salut. Omar t se rendit plus tard
auprès d’Abû Bakr t et lui dit : “Je viens de croiser ‘Uthmân, je l’ai salué mais il ne
m’a pas répondu. Y a-t-il chose plus bizarre que celle-ci ?”
Tous deux décidèrent de m’en parler. Abû Bakr me demanda :
«Ton frère Omar t est venu me dire qu’il t’a salué sans que tu lui aies répondu.
Quelle en est la raison ? »
Je répondis : « Je n’ai rien fait de tel ! »
Ce à quoi Omar t objecta :
« Par Allah, tu l’as fait ! »
Je dis alors :
718 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

« Par Allah je ne m’étais pas aperçu de ton passage et que tu m’avais salué ! »
Abou Bakr t conclut alors : «Uthmân dit la vérité !» (Ahmad, I, 6).
Peu de temps après le décès du Noble Prophète r Omar t suggéra à Abû Bakr
de rendre visite à Umm Sulaym c comme le faisait le Noble Prophète r de son
vivant. Ainsi firent-ils.
Umm Sulaym c, lorsqu’elle les aperçut venant à sa rencontre, fondit en larmes.
— Pourquoi pleures-tu ? lui demandèrent-ils. Ne sais-tu pas que les béné-
dictions qu’Allah a préparées pour le Prophète r sont bien meilleures que ce bas-
monde ?
— Je ne pleure pas à cause de cela, répondit-elle, je sais que les bénédictions
qu’Allah a préparées pour le Prophète r sont bien meilleures que ce bas-monde.
Je pleure parce que la Révélation a pris fin. Cette délicate appréciation eut tôt fait
d’émouvoir Abû Bakr et ‘Uthmân y. et eux aussi se joignirent à elle et versèrent des
larmes. (Muslim, Fadail’us-Sahabah, 103).
Des années plus tard, alors qu’Omar t patrouillait dans les rues en qualité
de calife, il remarqua qu’une bougie brillait à l’intérieur d’une maison. Alors qu’il
s’approchait, il aperçut une vieille femme qui filait de la laine et qui en même temps
récitait un poème :
« Que la paix des justes soit sur Muhammad… Pour ta miséricorde, que chaque
âme unique prie… Tu adorais la nuit et pleurais à l’aube… la mort approche jour
après jour… La demeure de l’au-delà me réunira avec toi… Ah si seulement je pou-
vais dire ! »
Omar t s’assit un moment, se mit à pleurer puis frappa à la porte.
La vieille femme demanda:
« Qui est là ? »
Omar t répondit :
« C’est Omar ibn al-Khâttab. »
La femme s’enquit avec frénésie :
« Que vient faire Omar t à cette heure de la nuit ? Que veut-il de moi ? »
Omar t voyant la porte s’entrouvrir la supplia :
« Pour ton amour d’Allah, s’il te plaît ouvre la porte. N’aie pas peur »
Puis il insista:
« Redis le poème que tu as lu il y a quelques instants.»
La vieille femme s’exécuta, jusqu’au dernier vers quand Omar t l’interrompit
et lui dit :
La Onzième Année de L’hégire 719

«Je t’en supplie, ajoute-moi à ta compagnie ! »


Elle rectifia donc le dernier vers de son poème, ce qui donna :
«La demeure de l’au-delà me réunira avec toi et Omar t… Si seulement je pou-
vais dire : Allah, le Pardonneur, aie pitié de Omar t !» Ce dernier s’en alla ensuite
satisfait. (Ali al-Muttaqi XII, 562/35762).
Anas t avait coutume de dire : « Pas une seule nuit ne passe sans que je voie
mon Bien-Aimé (le Prophète) en songe, et de pleurer. » (Ibn Sa’d, VII, 20).
Les Compagnons, lorsqu’ils parlaient du Noble Prophète r, le faisaient comme
s’il était toujours la en l’appelant “habibi” (mon bien-aimé) ou “khalil” (mon cher
ami ), autant de noms qui exprimaient l’amour débordant qu’ils avaient à son égard.
(Al Boukhari, TaHajjud, 33 ; Sawm, 60 ; Muslim, Musâfirîn, 85 ; Ibn Maja, Sadaqât, 10 ; Darimî, Sawm, 38;
Ahmad, V, 159 ; Ibn Sa’d, IV, 229).

En envoyant sans cesse des bénédictions de paix (salat wa salam) au Prophète


d’Allah r, les Compagnons lui manifestaient ainsi leur amour et leur attachement
éternels ; pourtant, le souvenir du Noble Prophète r qu’ils chérissaient n’était pas
uniquement réservé à cela.
La fidélité sans compromis au chemin qu’il a tracé, l’adhésion totale à sa
Tradition (Sunna), la mention constante de ses propos (ahadith) à chaque occasion
donnée – parmi les nombreux autres actes qu’ils eurent l’opportunité de concréti-
ser– étaient pour eux autant de moyens pour garder sa mémoire vivante à jamais.
Abû Dharr t a déclaré :
« Je promets par Allah que le Messager nous a laissés dans un tel état en partant
pour l’au-delà que même un oiseau qui bat des ailes dans le ciel nous rappelle une
de ses énonciations.
Il r a dit en effet : “Tout ce qui peut vous rapprocher du Paradis et vous éloigner
de l’Enfer, tout cela vous a été révélé”. » (Ahmad, V, 153, 162 ; Haythami, VIII, 263).
En conséquence, l’Islam exhorte impérativement tous les Musulmans à aimer
le Noble Prophète r plus que n’importe qui ou n’importe quoi, à préférer ses com-
mandements et interdictions plus que leurs propres désirs et à se conformer incon-
ditionnellement à ses paroles et à ses actes.
720

USWA AL-HASANA

L’excellent modèle
Au sein de la création tout entière, seuls les êtres humains ont l’honneur de
bénéficier de tous les Noms divins d’Allah le Très-Haut. En même temps, le Tout-
Puissant a doté les êtres humains de la disposition au bien et/ou mal.
Le but de la religion est donc de minimiser les aspects négatifs de l’ego humain
au point de les anéantir et de promouvoir les potentialités spirituelles à leur apogée.
Mais pour que le but soit réalisé, les êtres humains ont besoin d’un modèle
concret qu’ils peuvent suivre : un exemple parfait (uswa al-hasana).
L’une des grandes sagesses relatives à l’envoi de prophètes réside dans le fait
qu’ils représentent autant d’exemples incarnés.
Allah U déclare en effet :

ƈ Ʃ Īƈ ðŽ Íƈ Öƈ ĎÓĉƆ ĻĤƈ ƪ źÌƈ Ģij


ųÒ ƈ ĭƆ ĥŽ øòƆÈÓĨIJ
ƅ øòīĨÓ
Ɔ Ƈ Ƈ ƪ Ɔ Ž Ɔ Ɔ
« Nous n’avons envoyé de Messager que pour qu’il soit obéi, par la permis-
sion d’Allah (…) » (An-Nisâ’, 4 : 64).
Cette qualité en termes d’incarnation se trouve pleinement accomplie dans le
Noble Prophète r, comme le Tout-Puissant Lui-Même en témoigne :

Òƃ óĻáƈ Ġ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ óƆ ĠƆ ðƆ IJ
ƈ Ž ĦijĻĤŽ ÒIJųÒij
Ɔ óƆ ìŴÒ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ʃ äƇ óŽ ĺƆ ĪÓ
Ɔ ĠƆ
« En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle [à suivre],
pour quiconque espère en Allah et au Jour dernier et invoque Allah fréquem-
ment. » (Al-Azhâb, 33 : 21).
Aucun autre homme, encore moins un prophète, n’a vu l’exposé de sa vie consi-
gné dans les moindres détails. D’instant en instant, chaque parole, chaque acte et
chaque sentiment du Noble Prophète r constitue en propre un insigne d’honneur
dans l’Histoire. Le Coran stipule :

ƅ čƈ Đ
ħĻ Ɔ ěƅ ĥƇ ìĵĥ
Ƈ đƆ ĤƆ ğƆ Ĭƈƪ ÌIJƆ
« Et tu (Muhammad) es certes, d’une moralité éminente. » (Al-Qalam, 68 : 4).
Uswa Al-Hasana 721

Même avec ses seuls aspects saisissables par l’entendement humain, la vie et
le caractère sublime du Prophète d’Allah r se situent à la plus haute échelle du
comportement humain. Allah le Très-Haut le présente comme l’excellent modèle,
un idéal suprême pour toute l’humanité. Ce n’est pour une autre raison que le Tout-
Puissant a initié son chemin de vie en tant qu’orphelin vulnérable, puis l’a conduit à
travers toutes les étapes difficiles jusqu’à l’élever finalement au sommet du pouvoir
et de l’autorité, en tant que prophète et chef d’État, et ce pour que les individus
puissent trouver en lui le plus parfait exemple en matière de comportement – quel
que soit le niveau social auquel ils appartiennent – et chercher à concrétiser son
exemple au mieux de leurs capacités. Cela ne peut être atteint qu’en aimant le Noble
Prophète et en incarnant sa perfection spirituelle.
Le Noble Prophète r est à la fois le chef de la religion et de l’État. Il est un
modèle pour ceux qui pénètrent dans le jardin de l’Amour divin. Il est un modèle
dans la gratitude et la modestie quand le Tout-Puissant accorde Ses bienfaits en
abondance. Et tout comme il a incarné dans les moments terribles l’exemple pro-
bant de la patience et de la confiance en Allah, le Noble Prophète r a aussi été un
modèle de générosité et d’abstinence relativement au butin de guerre. Il a été un
modèle quand il s’agissait d’étendre son abondante compassion envers sa famille,
les esclaves, les faibles et les égarés, sans oublier la magnanimité et l’indulgence qu’il
faisait montre envers les coupables.
Si vous êtes riche, réfléchissez à l’humilité et à la générosité de ce grand pro-
phète qui a régné sur toute l’Arabie et qui par amour a conquis les cœurs de tous les
notables arabes…
Si vous êtes faible, prenez alors comme référence la vie du Noble Prophète r
qui a vécu sous le règne des polythéistes oppresseurs et usurpateurs de La Mecque…
Si vous êtes victorieux, prenez exemple sur la vie du Prophète courageux et
soumis qui a défait ses ennemis lors des batailles de Badr et de Hunayn…
S’il vous arrive d’essuyer une défaite – qu’Allah vous en préserve – souvenez-
vous du Noble Prophète r qui marchait avec dignité, courage et confiance en Allah
parmi ses Compagnons martyrs et blessés après la bataille d’Ouhoud…
Si vous êtes enseignant, pensez au Prophète délicat, sensible et affectueux qui,
dans sa Mosquée (Masjid an-Nabawi), transmettait les perles de son cœur aux Gens
de la Suffa…
Si vous êtes étudiant, représentez-vous le Noble Prophète r assis en face de
l’Ange Jîbril u au moment de la Révélation, prudent, motivé et empli de respect…
Si vous êtes prédicateur, un conseiller appelant au bien, alors écoutez la voix
agréable du Noble Prophète r qui faisait jaillir de son cœur des étincelles de sagesse
à l’intention de ses Compagnons…
722 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Si vous êtes seul dans votre désir de protéger et de communiquer la Vérité afin
de l’élever, alors considérez la vie du Noble Prophète r qui, à La Mecque, a annoncé
cette Vérité aux ignorants tout en les invitant à l’embrasser…
Si vous avez brisé la résistance de votre ennemi et détruit le mal pour annoncer
la Vérité, faites revivre en vous cette scène où, le jour de la conquête de La Mecque,
le Noble Prophète r entra dans la Cité sacrée humblement et avec reconnaissance,
à dos de chameau, alors qu’il était un commandant victorieux et gratifié…
Si vous êtes propriétaire terrien et souhaitez mettre les choses en ordre, prenez
exemple sur le Noble Prophète r qui, après avoir conquis les terres de Banû Nadir,
Khaybar et Fadak, choisit les personnes les plus aptes pour les raviver et les admi-
nistrer de la meilleure façon possible…
Si vous êtes seul, sans aucune compagnie, songez à celui qui était orphelin de
‘Abdallah et d’Amina, leur très cher et innocent fils unique…
Si vous êtes un adolescent, considérez attentivement la jeunesse de ce futur
Prophète r qui paissait le troupeau de son Abû Tâlib à La Mecque…
Si vous êtes un marchand et que vous voyagez pour commercer, réfléchissez à
l’intégrité de celui qui conduisit des caravanes à destination du Yémen et de Damas…
Si vous officiez en tant que juge, rappelez-vous de sa démarche juste et prudente
lorsqu’il avait replacé la Pierre Noire en son emplacement, à la Ka’ba, devant des
notables mecquois qui étaient sur le point de s’entretuer pour cette affaire…
Considérez une nouvelle fois l’Histoire et contemplez le Noble Prophète r qui
dans sa Mosquée à Médine jugeait parmi les hommes avec justice, qu’ils fussent
riches ou pauvres, comme on peut le penser…
Si vous êtes marié, considérez les émotions profondes et la compassion de
l’époux bien-aimé de Khâdija c et de ‘A’icha c…
Si vous avez des enfants, tâchez de comprendre l’attitude affectueuse du père de
Fâtima c, du grand-père de Hasan et de Husayn y…
Qui que vous soyez et quelles que soient les circonstances, en tout temps et
en tout lieu, vous avez en Muhammad Mustafâ r le plus parfait modèle de guide
spirituel…
Par l’entremise de ce guide et par la pertinence de sa Tradition (Sunna), vous
serez en mesure de corriger vos erreurs et de faire amende honorable quant à vos
efforts mal gérés. À la lumière de ses conseils, vous vous libérerez des inconvénients
de la vie et trouverez une vraie sérénité.
Si vous désirez vous échapper de l’esclavage matériel pour mener une vie spiri-
tuelle, inspirez-vous de ce que vous aimez chez Bilal, Yasir et Sawban y qui furent
éduqués par le Prophète r.
Uswa Al-Hasana 723

Devenez une personne digne de confiance en jouissant de leur compagnie, afin


d’acquérir un cœur sensible, élégant et réceptif. Souvenez-vous que c’est grâce aux
efforts du Noble Prophète r et pour avoir été constamment à ses côtés que le peuple
de l’ignorance a pu devenir un modèle digne de confiance.
Même Qitmir, le chien des Dormants (Ashâb al-Kahf) reçut une immense
bénédiction pour être resté constamment auprès de ces justes.
À l’invers l’épouse de Lût (Lot) et Kanan, le fils de Nûh (Noé), furent frappés
par la colère d’Allah pour s’être mêlés aux injustes. Tous deux finirent noyés dans
le tourbillon de leur ego, et subirent la même fin que les oppresseurs avec lesquels
ils étaient.
Alors efforcez-vous de consacrer le restant de vos jours en compagnie des
fidèles et justes dévots du Noble Prophète r pour ne pas vous retrouver parmi
les ignorants. Son existence s’apparente à un jardin orné des plus exquises et plus
parfumées roses. Et son impressionnante apparence complète la perfection de sa
constitution spirituelle unique.
Sa valeur inégalée aux yeux d’Allah a entraîné cette révélation coranique :

ƈ ųÒ ƈƈ ƈ Ʃ ĸƈ ïƆ ĺīĻÖÒijĨïžƈ ĝƆ ÜƇ źÒij ƈ


ďĻ
Ƅ ĩø Ɔ Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌųÒÒij Ɔ Ʃ ĝƇ ÜÒƪ IJ Ɔ įĤijøƇ òƆ IJ Ɔ ųÒ Ɔ Ɔ ŽƆ Ƈ Ɔ ƇĭĨÆƆ īĺ Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
ÒIJóıƆ åŽ ÜƆ źƆ IJ Ɔ Ĺƈžƈ ×ĭĤÒ
ƈ
ƪ ÚijŽ Ā Ɔ
Ɔ ĚƆ ijŽ ĘƆ ħŽ ġƇ ÜÒƆ ijƆ ĀŽ ÈÒijđƇ ĘƆ óŽ ÜƆ źÒij
Ɔ ƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ ħĻ ĥƈ Đ
Ƈ Ƅ Ɔ
Ɔ óƇ đƇ ýŽ ÜƆ źƆ ħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ
ĪIJ Ɔ Ɔ ×éŽ ÜĪ ƆÈăƅ đ×Ĥ ƈ ƈ Ɔ Ģƈ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÓƈÖįƇ ĤƆ
Ɔ ħŽ ġƇ ƇĤÓĩƆ ĐŽ Èć Ɔ Ɔ Ž Ɔ ħŽ ġƇ ąđŽ ÖƆ ƈóıŽ åƆ Ġ
« Ô vous qui avez cru ! Ne devancez pas Allah et Son messager. Et craignez
Allah. Allah est Audient et Omniscient. Ô vous qui avez cru ! N’élevez pas vos
voix au-dessus de la voix du Prophète, et ne haussez pas le ton en lui parlant,
comme vous le haussez les uns avec les autres, sinon vos œuvres deviendraient
vaines sans que vous vous en rendiez compte. » (Al-Hujurât 49 : 1-2).
Le Coran invite ainsi tous les Croyants à respecter le Prophète d’Allah r.
Bien qu’il s’adresse à tous les autres prophètes en citant leur nom (propre), le
Coran ne s’adresse jamais directement au Noble Prophète r par son nom propre,
préférant plutôt des appellations telles que “Nabi” ou “Rasul”. Dans le même temps,
Allah le Très-Haut enjoint les Musulmans à avoir une approche similaire :

Óąƃ đŽ Öħ ƈ ƈ øóĤÒÅÓĐƆ îÒij


Ɔ ġƇ ąđŽ ÖÅÓ
Ɔ ĐƆ ïƇ Ġ
Ɔ ħŽ ġƇ ĭƆ ĻŽ ÖƆ Ģij Ƈ ƪ Ƈ ĥƇ đƆ åŽ ÜƆ źƆ
« Ne considérez pas l’appel du messager comme un appel que vous vous
adresseriez les uns aux autres (…). » (An-Nûr, 24 : 63).
724 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Le verset révèle qu’il est contraire à la nature et à la conduite du Musulman de


se référer au Noble Messager que par le truchement de son nom.
Il est en effet de bon ton de prononcer son nom en citant ses attributs sublimes
et sacrés.
Lorsqu’on prononce son nom, il faut donc y ajouter des titres tels que Nabi,
Rasul, Rasulullah et Habibullah et, conformément à l’injonction citée dans le 56ème
verset de la sourate Al-Ahzâb, dire salat’u salam quand on entend son nom men-
tionné. Ceci est une partie importante des attitudes que le Tout-Puissant exige de
nous envers son Messager, ordonnant à l’oumma entière d’y souscrire.
Comme le que stipule le Coran :


 īĺ ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ Ĺƈžƈ ×ĭĤÒĵ
ƪ ĥƆ Đ Ɔ ĥƫ āƆ ƇĺįƇ ÝƆ ġƆ Ðƈ ŻƆ ĨƆ IJ
Ɔ Īij Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ Ì
ÓĩĻ ƈ Ɔ ĩĥžƈ øIJįƈ ĻĥƆ ĐÒijĥƫ ĀÒijƇĭĨÆ
ƃ ĥùŽ ÜÒij Ƈ Ɔ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ
« Certes, Allah et Ses Anges prient sur le Prophète ; ô vous qui croyez priez
sur lui et adresses [lui] vos salutations. » (Al-Azhâb, 33 : 56).
Non seulement le Noble Prophète r était un instructeur qui enseignait le Coran
de façon littérale, mais il était en même temps son incarnation vivante.
Dans un hadith rapporté par Jabir, le Noble Prophète r professe :
« Allah m’a envoyé pour parfaire les bonnes mœurs. » (Muwatta’, Husn’ul-Khuluq).
Tous les ouvrages islamiques écrits au cours des quatorze derniers siècles ont eu
pour but de faire connaître le Saint Coran et un seul homme : le Prophète d’Allah r.
Allah le Très-Haut considère sa vie précieuse qu’Il prête même serment sur elle.
Et il ne le fait que sur elle en disant dans le Coran:
«ħıƇ Ĭƈƪ ÌĞƆ óĩŽ đƆ ĤƆ «(je jures)Par ta vie ! «» (Al-Hijr, 15 : 72).
Ž Ƈ
Se rapprocher de la vérité muhammadienne est possible moins par la raison
que par l’amour. Et sans aucun doute, c’est cette vérité qui résout tous les mystères.
Acquérir une part de l’exemplarité parfaite du Noble Prophète r, se distancier
des plaisirs éphémères suscités par l’ego, s’engager dans le culte adoratif et s’emparer
de la sagesse qui dénoue toutes les énigmes liées à la condition de serviteur, voilà ce
qui permet d’ouvrir un passage en vue d’atteindre cette vérité.
Une fois que l’homme commence à acquérir une part de la vérité muham-
madienne, il en devient une élégante manifestation, une beauté de la création sur
laquelle sont brodées la lumière et la vérité des mystères attachés aux manifestations
divines. Les secrets du Coran se dévoilent à son cœur au point de devenir profon-
dément un avec la spiritualité du Noble Prophète r. Et quant à l’adhésion au Noble
Uswa Al-Hasana 725

Prophète r, la seule et incomparable norme pour toute l’humanité, Allah le Très-


Haut énonce :

ÒijıƇ ÝĬÓ
Ɔ ĘƆ įƇ ĭŽ Đ
Ɔ ħŽ ĠÓ
Ƈ ıƆ ĬƆ ÓĨƆ IJ
Ɔ ĮIJ
Ƈ ñƇ í
Ƈ ĘƆ Ģij Ƈ øƇ óĤÒħƇ ĠÓ ÜÆÓĨIJ
ƪ Ƈ Ɔ Ɔ Ɔ
ÔÓƈ ĝƆ đƈ ĤŽ Òïĺ
Ƈ ïƈ ü
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌųÒÒij
Ɔ Ʃ ĝƇ ÜÒƪ IJƆ
« (…) Prenez ce que le Messager vous donne ; et ce qu’il vous interdit, absen-
tez-vous en ; et craignez Allah car Allah est dur en punition. » (Al-Hashr, 59 : 7).

ħġƇ ĤƆ ÓĩƆ ĐŽ ƆÈÒijĥƇ ĉƈ ×ÜƇ źƆ IJĢijøóĤÒÒijđĻ ƈ Ɔ ųÒÒij


Ƈ ĈÈIJƆ Ɔ Ʃ đĻ
ƈƆ
Ƈ ĈÈÒijƇĭĨÆ
Ɔ īĺ
ƈ
Ɔ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ž Ž Ɔ Ɔ Ƈ ƪ
« Ô vous qui avez cru ! Obéissez à Allah, obéissez au Messager, et ne rendez
pas vaines vos œuvres. » (Muhammad, 47 : 33).

īĻƈ ƈ Ʃ ħƆ đƆ ĬŽ ƆÈīĺ ƈ ƈ Ƈ Ɔ øóĤÒIJųÒ ƈ


Ɔ Ļƈž ×ĭĤÒ
ƪ īƆ Ĩħ
ž ƈıĻŽ ĥƆ Đ Ɔ ƇųÒ Ɔ ñĤƪ ÒďƆ Ĩ
Ɔ ğƆ ÑÃĤƆ IJŽ ÉĘƆ Ģij Ƈ ƪ Ɔ Ɔ Ʃ ďƈ ĉƇĺīĨƆ IJƆ
ƃÓĝĻĘƈ ò ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ ƈ IJ
Ɔ ğƆ ÑÃĤƆ IJƇÈīƆ ùƇ èƆ IJ Ɔ īĻƆ éĤÓāĤÒ ƪ IJÅÒ
Ɔ ïƆ ıƆ ýĤÒ ƫ IJ
Ɔ īĻƆ ĝĺïž āĤÒ
ž Ɔ
« Quiconque obéit à Allah et au Messager... ceux-là seront avec ceux qu’Allah
a comblés de Ses bienfaits : les prophètes, les véridiques, les martyrs, et les ver-
tueux. Et quels compagnons que ceux-là ! » (An-Nisâ’, 4 : 69).

òij
Ƅ ęƇ ĔƆ ƇųÒ
Ʃ IJ
Ɔ ħŽ ġƇ Öij
ƈ
Ɔ ƇĬðƇ ħŽ ġƇ ĤƆ óŽ ęĕŽ ĺƆ IJ
Ɔ ƇųÒ
ƈ đƈ×ÜÓƪ ĘƆ ųÒ
Ʃ ħƇ ġƇ ×ƈŽ ×éŽ ƇĺĹĬij Ƈ Ɔ ×ƫ éƈ ÜƇ ħŽ ÝĭƇ ĠĪƈ
Ɔ Ʃ Īij Ƈ ÌģŽ ĜƇ
īĺ ƈ ƈ ųÒÒijđĻĈƈ ƆÈģŽ ĜƇ ħĻèƈ òƪ
Ɔ ƈóĘÓġƆ ĤŽ ÒÕƫ éƇĺƆźųÒ Ɔ Ʃ Īƈƪ ÍĘƆ ÒŽ ijŽ Ĥƪ ijƆ ÜĪƈ
Ɔ ÍĘĢij Ɔ øƇ óĤÒIJ
ƪ Ɔ ƆƩ Ž Ƈ Ƅ
« Dis : «Si vous aimez vraiment Allah, suivez-moi, Allah vous aimera alors
et vous pardonnera vos péchés. Allah est Pardonneur et Miséricordieux. Dis :
«Obéissez à Allah et au Messager. Et si vous tournez le dos... alors Allah n’aime
pas les infidèles ! » (Al-‘Imrân, 3 : 31-32).

Ɔ õƇ ÐÓƈ ęƆ ĤŽ ÒħƇ İ
ĪIJ ƈ
Ƈ ğƆ Ñƈ ĤƆ IJŽ ƇÉĘƆ įĝŽ Ýƪ ĺƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ûƆ íŽ ĺƆ IJ
Ɔ įƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ
Ɔ ųÒ
ƈ
Ɔ Ʃ ďƈ ĉƇĺīĨƆ IJƆ
« Et quiconque obéit à Allah et à Son messager, et craint Allah et Le redoute...
alors, voilà ceux qui récoltent le succès. » (An-Nûr, 24 : 52).
726 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

ĖIJ ƈ óđĩĤŽ ÓƈÖĪIJ óĨÉŽ ĺăƅ đŽ ÖÅÓ ƈ Ƈ ĭƆ Ĩƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJ


Ɔ ĻƆ ĤIJŽ ƆÈħŽ ıƇ ąƇ đŽ ÖƆ ÚÓ Ɔ ƇĭĨƈ ËŽ ĩƇ ĤŽ ÒIJƆ
Ɔ Īij
ƇŽ Ɔ Ɔ ƇƇ Ɔ
ųÒ ƈ ØƆ ÓĠƆ õĤÒĪij ƈ ƈóġĭ
Ɔ Ʃ ĪijƆ đĻ
Ƈ ĉƇĺIJ
Ɔ ƪ Ɔ ÜƇ ËŽ ƇĺIJ
Ɔ ØƆ ƆŻāĤÒ
ƪ Īij Ɔ ĩĻ Ƈ ĝƇĺIJƆ Ɔ ĩƇ ĤŽ Òīƈ Đ Ɔ ĪƆ ijŽ ıƆ ĭŽ ĺƆ IJƆ
ħĻġƈ è õĺ ƈõĐųÒĪƈÌųÒħıĩèóĻøğÑÃƈ ĤIJƇÈįĤijøòIJ
Ƅ Ɔ Ƅ Ɔ ƆƩ ƪ ƇƩ Ƈ Ƈ Ƈ Ɔ Ž Ɔ Ɔ Ɔ Ɔ Ž Ƈ Ɔ Ƈ Ɔ Ɔ
« Les croyants et les croyantes sont alliés les uns des autres. Ils commandent
le convenable, interdisent le blâmable accomplissent la Sâlat, acquittent la Zakat
et obéissent à Allah et à Son messager. Voilà ceux auxquels Allah fera miséri-
corde, car Allah est Puissant et Sage. » (At-Tawba, 9 : 71).

ƃÓčĻęƈ è Ɔ ĞƆ ÓĭƆ ĥŽ øƆ òŽ ƆÈÓĩƆ ĘƆ ĵĤƪ ijƆ Üī


Ɔ ħŽ ƈıĻŽ ĥƆ Đ Ɔ ĨƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ĎÓ
Ɔ Ĉ Ɔ øƇ óĤÒďƈ ĉƈ ƇĺīŽ Ĩƪ
Ɔ ƆÈïŽ ĝƆ ĘƆ Ģij ƪ
« Quiconque obéit au Messager obéit certainement à Allah. Et quiconque
tourne le dos... Nous ne t’avons pas envoyé à eux comme gardien. » (An-Nisâ’, 4 : 80).

 įƇ ĤƆ Īƪ ƆÉĘƆ įƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ


 ƈƈ Ɔ Ɔ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ îîÓéƆ ƇĺīĨ Ɔ įƇ Ĭƪ ÈÒŽ ijĩƇ ĥƆ đŽ ĺƆ ħŽ ĤƆ È
ħĻčƈ đƆ ĤŽ ÒĸƇ õŽ íƈ ĤŽ ÒğƆ Ĥƈ ðƆ ÓıĻ ƈ ƈ Ɔ ħĭıäòÓĬƆ
Ɔ ĘÒƃ ïĤÓì
Ƈ ƆƪƆ Ɔ Ɔ
« Ne savent-ils pas qu’en vérité quiconque s’oppose à Allah et à Son messa-
ger, aura le feu de l’Enfer pour y demeurer éternellement ? Et voilà l’immense
opprobre. » (At-Tawba, 9 : 63).


 ÕƆ İƆ ñŽ ÜƆ IJ ƈƆ
Ɔ ÒŽ ijĥƇ ýƆ ęŽ ÝƆ ĘƆ ÒŽ ijĐƇ ôÓ
Ɔ ĭƆ ÜƆ ƆźIJ
Ɔ įƇ ĤƆ ijøƇ òƆ IJ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ ÒŽ ijđĻ
Ƈ ĈÈIJƆ
īĺ
Ɔ ƈóƈÖÓāĤÒ
ƪ ďƆ Ĩ
Ɔ ųÒ
Ɔ Ʃ Īƈƪ ÌÒŽ IJóƈƇ ×ĀÒ
Ž IJ Ƈ ƈò
Ɔ ħŽ ġƇ éĺ
« Et obéissez à Allah et à Son messager ; et ne vous disputez pas, sinon vous
fléchirez et perdrez votre force. Et soyez endurants, car Allah est avec les endu-
rants. » (Al-Anfal, 8 : 46).
Ressentir toutes les sensations esthétiques s’animer devant l’amour du Noble
Prophète r et commencer à vider l’esprit de la présence de l’ego avec toutes ses
imperfections sont des signes certains que le Croyant est en voie d’acquérir une part
de l’amour du Noble messager r et de ses caractéristiques exemplaires.

Les héros du cœur qui ont pu tirer profit du noble caractère du Prophète d’Al-
lah r et dans lequel ils furent tous pratiquement anéantis – continuent à donner des
exemples édifiants montrant exactement ce que signifie aimer le Prophète d’Allah r.
La vie était ce qu’ils avaient trouvé dans la vérité du Prophète r.
Uswa Al-Hasana 727

L’un de ces héros se nommait Sayyid Ahmed Yasavi (prononcer Yachaoui) ç,


le grand saint du Turkestan.
Il jugea inapproprié de “ marcher sur terre ” plus longtemps après ses soixante-
trois ans, âge auquel le Bienheureux Prophète r décéda. De ce fait, il creusa dans le
sol une cellule souterraine en forme de tombe où il demeura le reste de sa vie.
Quand Uways al-Qarnî apprit qu’une dent du Prophète d’Allah r avait été
martyrisée lors de la bataille d’Ouhoud il cassa, par amour pour lui, toutes ses
dents car il ne savait pas de quelle dent précise il s’agissait. (Fariduddin Attar, p. 23).
L’Imam Malik, autre de ces héros, vécut chaque instant de sa vie dans l’extase
de ne faire qu’un avec le Noble Prophète r.
Par respect, il n’a jamais chevauché dans Médine.
L’Imam parlait toujours à voix basse lorsqu’il se trouvait près d’al-Rawda, la
zone située entre le minbar et la tombe bénie du Noble Prophète r.
Il avertit même une fois Abû Jafar Mansur, le calife de l’époque, parce que celui-
ci avait parlé momentanément à haute voix, disant :
« Baisse d’un ton en ce lieu, ô calife. L’avertissement d’Allah s’adressait à un
groupe beaucoup plus vertueux que toi ! »
Puis il poursuivit en rappelant au calife ce verset coranique :

ƈ Ɔ ƈ
įƇ ĤƆ ÒIJóıƆ åŽ ÜƆ źƆ IJ
Ƈ Ɔ Ĺƈžƈ ×ĭĤÒ
ƪ ÚijŽ Ā Ɔ ĚƆ ijŽ ĘƆ ħŽ ġƇ ÜÒƆ ijƆ ĀŽ ÈÒijđƇ ĘƆ óŽ ÜƆ źÒij
Ɔ ƇĭĨÆ
Ɔ īĺƆ ñĤƪ ÒÓıƆ ĺƫ ƆÈÓĺƆ
Ɔ óƇ đƇ ýŽ ÜƆ źƆ ħŽ ÝĬƇ ƆÈIJ
ĪIJ Ɔ Ɔ ×éŽ ÜĪ ƆÈăƅ đ×Ĥƈ ħġƇ ąƈ đÖƆ ƈóıŽ åƆ Ġ
Ɔ Ģƈ ijŽ ĝƆ ĤŽ ÓƈÖ
Ɔ ħŽ ġƇ ƇĤÓĩƆ ĐŽ Èć Ɔ Ɔ ŽƆ Ž Ž
« Ô vous qui avez cru ! N’élevez pas vos voix au-dessus de la voix du
Prophète, et ne haussez pas le ton en lui parlant, comme vous le haussez les uns
avec les autres, sinon vos œuvres deviendraient vaines sans que vous vous en
rendiez compte. » (Al-Hujurat, 49 : 2).
L’Imam Malik pardonna derechef au gouverneur de Médine qui lui avait causé
nombre d’ennuis injustifiés, disant :
« J’aurais honte de réclamer mes droits dans l’au-delà auprès de la postérité du
Prophète d’Allah r.
Exprimant la réalité que seul l’amour du Noble Prophète r avait reconstituée
son esprit, Bezm-i Alem Walide Sultan écrivit :
De l’amour est né Muhammad,
Sans Muhammad… l’amour est délaissé…
728 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’amoureux Yunus, lui aussi, exprime son amour brûlant pour le Prophète r
comme suit:
Si je trouve ton empreinte que je cherchais
Si je me frotte de la poussière de ton empreinte
Si le Véridique me destine de voir ton visage
Ô Muhammed mon âme te désire...
En 1678, le poète ottoman Nabi entreprit un pèlerinage en compagnie de plu-
sieurs représentants de l’État. Alors qu’ils se rapprochaient de Médine, l’anxiété et
l’excitation eurent tôt fait de prendre le dessus sur le poète qui perdit le sommeil.
Entre-temps, il remarqua qu’un fonctionnaire était allongé les jambes dirigées
vers Médine. Abattu par ce comportement, Nabi se mit à écrire sa célèbre ode
dédiée au Noble Prophète r. Alors que la caravane s’approchait de la Mosquée du
Prophète, Nabi, à sa grande surprise, entendit son ode lue à voix haute depuis le
minaret :
Abandonne le manque de respect que voilà
Ici c’est la terre du Bien-Aimé du Seigneur,
Le centre du regard divin, le site du Prophète…
Entre dans ce sanctuaire, ô Nabi,
toi qui est soucieux de la plus noble conduite,
Ici c’est le lieu où les prophètes s’embrassent,
Ici c’est l’enceinte du sacré…
Excité à l’extrême, Nabi trouva rapidement le muezzin et lui demanda d’où il
avait appris l’ode. Il lui expliqua:
« La nuit dernière j’ai entendu en songe le Messager d’Allah r dire :
“Un poète de ma communauté (oumma) du nom de Nabi est en chemin pour me
rendre visite ; un homme abondamment empli de mon amour. Accueillez-le donc en
récitant son ode depuis le minaret de la Mosquée”.
Ainsi donc, nous n’avons fait qu’obéir à son ordre. »
Nabi fut presque instantanément réduit à verser des larmes de joie.
« Ainsi le Prophète d’Allah me considère comme faisant partie de sa oumma !
s’exclama-t-il en pleurant. Alors il m’a accepté dans sa oumma ! »

Le poète Suleyman Çelebi dépeignant poétiquement dans son Mawlid l’amour


éternel que mêmes les éléments non-humains lui portent
« Une lumière unique autour de laquelle tourne le soleil »
Uswa Al-Hasana 729

Le Sultan Suleyman dit le Magnifique, qui composa des poèmes sous le pseudo-
nyme de “Muhibbi” envoie la requête suivante au Noble Prophète r :
Lumière de l’univers tu es, et même le bien-Aimé du Seigneur,
Ne bannis pas, même pour un instant, les amoureux qui siègent à ta porte…
‘Alî t raconte :
« J’avais coutume de marcher en compagnie du Messager d’Allah r à La
Mecque. Ensemble, un jour, nous sortîmes à l’extérieur de la ville. Toutes les pierres
et tous les arbres que nous croisions le saluèrent par ces mots : “Paix et bénédictions
sur toi, ô Messager d’Allah !” » (At Tirmidhi Manaqib, 6/3626).
Voici ci-dessous une autre manifestation de l’amour prophétique chez les élé-
ments non-humains :
Lors d’une campagne, le Noble Prophète r transmit l’Islam à un bédouin qu’il
avait croisé.
Le bédouin lui demanda une preuve de son apostolat prophétique.
Le Noble Prophète r fit signe à l’arbre qui était devant lui de le rejoindre.
L’arbre obéit aussitôt à l’ordre et, fendant la terre, s’approcha du Noble
Prophète r et répéta à trois reprises la chahada en sa présence.
Étonné par la scène dont il était témoin, le bédouin fit la remarque suivante
alors qu’il s’apprêtait à retourner auprès des siens : “Si ma tribu m’écoute, je la ferai
venir ; sinon, je reviendrai seul et resterai à tes côtés”. (Haythami, VIII, 292).

Non seulement les éléments non-humains, mais aussi les animaux ont reconnu
le Prophète d’Allah r et lui ont obéi.
L’un de ces récits est narré par Jabir ibn ‘‘Abdallah t :
« Alors que nous revenions d’une campagne avec le Messager d’Allah r, en
nous approchant des jardins d’Ibn’un-Najjar à Médine, nous apprîmes qu’un cha-
meau sauvage attaquait tous ceux qui essayaient d’entrer.
Le Messager d’Allah r, qui fut aussitôt avisé de la situation, pénétra dans le
jardin et appela ce chameau sauvage qui ne laissait personne l’approcher.
Entendant la voix du Prophète r, l’animal inclina la tête au point où ses lèvres
se trouvaient en contact avec le sol et marcha vers lui où il s’accroupit humblement.
Alors le Messager d’Allah r dit :
“Apportez-moi une corde”
Ayant placé la corde autour du cou du chameau, il la tendit à son propriétaire.
730 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Après cela il r dit


: “Hormis les humains et les djinns rebelles, toutes les entités qui se trouvent dans
les Cieux et sur la Terre savent que je suis le Messager d’Allah”. » (Ahmad, III, 310).

Nous devons penser et réévaluer la sincérité de notre obéissance et de notre


dévotion envers le Prophète d’Allah r par rapport à l’’amour profond que portent
les entités physiques et vivantes…
Nous avons besoin de sa spiritualité, surtout en ces temps tumultueux ; une
turbulence incitant le poète à interpeller le Noble Prophète r :
“Réveille-toi, Maître de l’univers, car le Jour du Jugement est proche211 !”
Quelle immense source de consolation bénéficions-nous dans nos salawat !
les salutations par lesquelles nous maintenons toujours vivante notre communi-
cation avec le Prophète d’Allah r, et ceci dans l’amour que nous éprouvons à son
endroit…
Les Musulmans empreints de sensibilité, dotés d’un esprit élégant, considèrent
le fait de se rapprocher de la vérité du Saint Prophète r, de s’engager dans son
chemin spirituel et de s’immerger dans l’énergie divine comme étant la plus grande
bénédiction que le monde puisse connaître.
L’extaordinaire nature du Noble Prophète r que nous avons tentée de résumer
jusqu’à présent va bien au-delà des possibilités limitées que nous offrent les mots.
En effet, ceux-ci ne sont que de simples rayons qui reflètent notre compréhension
de cette grande lumière de l’Être r.
Le secret qui se cache derrière wasil-i illahah (l’objectif d’atteindre Allah), c’est
être proche du Livre d’Allah et de la Sunna de Son Prophète r, avec sincérité de
cœur, aimer ceux qu’Allah et Son Messager r aiment et détester ce qu’ils détestent
La différence entre ces deux composantes est aussi infinie que la distance entre
a’la-i iliyyin et asfal-i safilin, c’est-à-dire le plus haut du plus haut et le plus bas du
plus bas.
Chérir le Noble Prophète r et détester tout ce qui lui est opposé est sans aucun
doute le catalyseur le plus puissant permettant de tirer profit de sa spiritualité.
Les grands personnages de l’Islam – qui tout au long de l’Histoire ont su imiter
l’excellent modèle du Noble Prophète r – ont atteint les sommets de la foi –(iman).
211. Bernard Shaw, qui avait pris conscience de ce fait, admet : « À notre époque où les problèmes
s’empilent les uns sur les autres, nous avons désespérément besoin du Prophète Muhammad qui peut
tous les résoudre avec facilité. »
Uswa Al-Hasana 731

Et en ayant perfectionné la tendance au bien inhérente à leur disposition


naturelle (fitra), ils sont devenus autant d’étoiles brillantes susceptibles de donner
l’exemple à d’autres.
Voilà donc la vérité muhammadienne exprimée dans la mesure où la connais-
sance restreinte d’un auteur peut en supporter la portée et les mots limités qu’il
utilise…
Nous devons admettre que les mots utilisés dans ce livre en ces divers sujets,
connus ou inconnus, ne sont que quelques gouttes d’eau dans un océan sans limites.
Et ils sont maintenant épuisés devant les portes majestueuses d’un silence sans fond.
Ô Allah… !
Fais de cet effort audacieux de notre part, alourdi par les possibilités limitées
offertes par les mots, un moyen de mettre en lumière Ta miséricorde infinie!
Accorde-nous ainsi une part de la vérité muhammadienne !
Fais que nous bénéficiions de la grande intercession de Ton Prophète, l’essence
et la source de l’amour !
Amin !
732

EN GUISE DE CONCLUSION

En tant que vision universelle du monde, il est naturel que l’Islam contienne
non seulement les principes de tous les enseignements tels que le droit, la morale et
l’économie qui régissent le comportement humain, mais il est aussi nécessaire qu’il
contienne ces normes, des plus simples et des plus concrètes aux plus complexes et
plus abstraites.
Certains de ces principes de l’Islam s’appliquent à tous, dans la mesure où ils se
rapportent à des affaires simples et quotidiennes.
Cela étant, d’autres comprennent des vérités de nature plus profonde, assez
pour laisser les esprits les plus pénétrants dans l’émerveillement. Il est donc diffi-
cile d’explorer de telles questions, en particulier par le biais de livres écrits pour les
transmettre. D’une certaine manière, cela pourrait être comparé au fait de tenter de
ramper sur un sommet abrupt, prêt à endurer une soif intransigeante pendant un
processus long et ardu.
Sans aucun doute, la tentative de verbaliser ces vérités complexes et abstraites
dans les limites des possibilités offertes par la langue est une poursuite attrayante
que la plupart trouve difficile à abandonner. Il n’en demeure pas moins qu’un succès
complet est toujours insaisissable.
Bien que ces questions dépassent de loin l’entendement humain, le principe
islamique recommande en revanche de ne pas abandonner une partie de ce qui ne
peut être complètement obtenu.
Nous insistons auprès de nos lecteurs pour qu’ils nous accordent le bénéfice du
doute en nous considérant comme ayant adhéré à ce principe et qu’ils pardonnent
nos déficiences de compréhension et d’expression.
Une autre chose que nous devons nous rappeler en relation est que la compré-
hension humaine agit à travers les impressions reçues du monde des sens.
L’impossibilité d’éviter des erreurs dans la connaissance ainsi que l’articulation
parfaite des vérités abstraites qui transcendent absolument l’expérience s’appliquent
donc également à la compréhension et à l’expression adéquate de la vérité du Noble
Prophète r, merveille de la création, et le joyau que constitue le Saint Coran, la
manifestation parfaite des Noms d’Allah le Très-Haut.
Paradis, Enfer et autres images similaires ne sont que des expressions usitées en
fonction de notre compréhension dont l’essence demeure la connaissance d’Allah
Seul.
En guise de Conclusion 733

Toutes les évaluations menées par l’intellect et le cœur purifié au sujet des
réalités métaphysiques de l’Islam sont véritables, bien que leur expression soit ina-
déquate.
Elles ne sont véritables que dans la mesure de leur compréhensibilité et de
l’étendue de leur explication qui est liée aux impressions reçues du monde des sens.
Mais celles-ci sont inadéquates.
La différence entre ces réalités métaphysiques et les analogies expérimentées
dans le monde des sens sur lequel repose notre prétendue compréhension repré-
sente en réalité l’infini multiplié par l’infini.
Pour saisir ces réalités, il faut un autre type de compréhension, une possibilité
distincte et des canaux idoines, par exemple la conscience de ruyatullah, c’est-à-dire
la possibilité de voir le Tout-Puissant dans l’au-delà.
On ne peut éviter de se demander si “voir” est suffisant pour décrire un évène-
ment appelé à être vécu par les Croyants dans l’au-delà.
En effet, c’est insuffisant, mais nécessaire pour communiquer ce qui est à venir.
Par conséquent les êtres humains ne peuvent pas collecter plus que ce que leur
tasse peut contenir de l’immense océan de vérité et il est absolument impossible de
faire entrer tout un océan dans une seule tasse. La tasse ou la coupe, ici, c’est le lan-
gage, c’est la raison. L’œil est une coupe par rapport à la vision.
De l’impuissance pure et simple !
Ce n’est pas comme si la Vérité allait se retenir au nom de la claudication de la
compréhension et de l’explication !
Le Tout-Puissant décrit ainsi Sa Majesté dépasse l’entendement humain :

ģƆ ×ĜƆ óéŽ ×ĤŽ ÒïƆ ęƈ ĭƆ ĤƆ ĹƈÖž ò ƈ ƈ ƈ ƈ


Ɔ ÚÓĩƆ ĥġƆ žĤÒîÒƃ ïƆ ĨóƇ éŽ ×Ɔ ĤŽ ÒĪÓ
Ɔ Ġ
Ɔ ijŽ Ĥƪ ģĜƇ
Ž Ƈ Ɔ
Òîƃ ïƆ Ĩ ƈƈ ƈ ƈ ijĤƆ IJĹƈ Ƈ ĩƆ ĥƈ Ġ Ɔ ƆÈ
Ɔ įĥᎠĩƈÖÓĭƆ ÑŽ ä Ž Ɔ Öž òƆ ÚÓ Ɔ ïƆ ęƆ ĭÜĪ
« Dis : «Si la mer était une encre [pour écrire] les paroles de mon Seigneur,
certes la mer s’épuiserait avant que ne soient épuisées les paroles de mon
Seigneur, quand même Nous lui apporterions son équivalent comme renfort». »
(Al-Kahf 18, 109).

Quelle est la capacité de la coupe humaine, il faut y réfléchir, en contraste avec


la vastitude du Tout-Puissant ?
Le sens que chaque mot prend sur lui-même ne peut conférer qu’un contenu
compatible avec la compréhension de la personne qui l’exprime.
734 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Pourtant, certains concepts comme Allah, l’univers et l’esprit contiennent une


profondeur infinie. Ceux qui utilisent ces concepts dans leur discours et leurs écrits
ne peuvent s’y plonger que si la profondeur de leur compréhension le permet.
C’est pareil pour ce que l’auditeur ou le lecteur comprend. Parmi ces concepts
dont le contenu dépasse l’imagination se trouvent les noms sacrés du Noble
Prophète r.
En conséquence, nous espérons en la miséricorde d’Allah le Très-Haut et Lui
demandons d’ignorer et de pardonner notre impuissance à communiquer la teneur
de ces noms et les insuffisances de nos lecteurs à les appréhender.
Nous sommes à présent dans l’obligation, encore une fois, de revenir à ce
silence qui offre la plus grande perspective de rallier la Vérité et de mettre ainsi un
terme à nos paroles.
Nous n’avons pas d’autre remède que de nous envelopper de la spiritualité du
Prophète Muhammad Mustafâ r. Il est, lui, le remède ultime pour le découragé…
Dahilak Ya Rasulallah…
735

TABLE DES MATIÈRES

AVANT-PROPOS / 7
INTRODUCTION / 11
La primauté de la vie du Saint Prophète r pour apprendre et vivre l’islam ................. 11
Le choix de la Péninsule Arabique comme berceau de l’islam .................................. 17
La Mecque : Mère des Cités ............................................................................................. 19
L’histoire de la Ka’ba et de son caractère sacré ............................................................ 25
L’Evènement de l’Eléphant témoigne de la protection divine.................................... 30
Le prophète Abraham u, la Hanîfiyyah ou foi en un Seul Dieu ............................. 32

PREMIÈRE PARTIE
LE SAINT PROPHÈTE AVANT LE MESSAGE / 37

LA NAISSANCE ET L’ENFANCE DU SAINT PROPHÈTE r .......................... 39


La Lumière Muhammadienne ................................................................................ 39
La lignée pure du Saint Prophète r ....................................................................... 42
Mariage des parents du Saint Prophète r Abdallah et Amina .......................... 43
Décès d’Abdallah ...................................................................................................... 45
Evènements annonçant la naissance du Saint Prophète r ................................ 45
La Sublime Naissance et les Evénements Extraordinaires ................................. 55
Les différents noms attribués au Saint prophète r ............................................. 58
Aux bons soins d’une nourrice ............................................................................... 59
Le premier Sharh’us-Sadr : L’ouverture du coeur ................................................ 63
Voyage à Médine et disparition d’Amina ........................................................... 64
Sous la protection d’Abd al-Muttalib ................................................................... 66
Sous la protection d’Abû Talib .............................................................................. 67
Le second Sharh’us–Sadr: la clémence et la compassion dans le cœur ........... 69

LES ANNÉES DE JEUNESSE ............................................................................... 71


Une croissance sous la protection divine .............................................................. 71
Muhammad comme berger ..................................................................................... 73
Voyages commerciaux avec ses oncles .................................................................. 74
La rencontre avec le moine Bahira ........................................................................ 75
La société de Hilfu’l-Fudûl ...................................................................................... 79
La vie du Saint Prophète r dans le monde des affaires ...................................... 81
736 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

Les observations du moine Nestor ......................................................................... 83


Mariage avec Khadîdja c ........................................................................................ 84
La sagesse des multiples mariages du Saint Prophète r ..................................... 86
Le Saint Prophète r affranchit et adopte Zayd ibn Harith t ........................... 93
Les enfants du Saint Prophète r ............................................................................ 95
L’arbitrage à la Ka’ba ............................................................................................... 97
Le discours de Quss ibn Saida................................................................................. 99
La retraite du Prophète r dans la grotte de Hira .............................................. 101
Aperçu de l’enfance et de la jeunesse du Saint Prophète r.............................. 104

DEUXIÈME PARTIE
LA PÉRIODE MECQUOISE DE L’APOSTOLAT PROPHÉTIQUE / 107

LA PÉRIODE MECQUOISE DE LA PROPHÉTIE ........................................... 109


Le début de la Révélation divine : Les rêves véridiques .................................... 109

LES TROIS PREMIÈRES ANNÉES DE LA PROPHÉTIE :


L’APPEL EN SECRET ........................................................................................ 111
La première révélation et l’intervalle .................................................................. 111
La réalité de la Révélation et les moyens de sa divulgation .............................. 117
La Prophétie : Nubuwwah et Risalah ................................................................... 127
Les attributs des prophètes L ............................................................................. 129
Sur l’humanité du Saint Prophète r .................................................................... 141
Le sens caché de l’illettrisme (ummi) du Saint Prophète r.............................. 143
Hilyat’us-Saadah ..................................................................................................... 146
Reprise de la Révélation ......................................................................................... 153
Les premiers Musulmans ....................................................................................... 154
Dar Al Arqam : Centre Éducatif pour Nouveaux Musulmans ........................ 162

LA QUATRIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE .............................................. 164


Révèle ce qui t’es ordonné et avertis tes proches .............................................. 164
Le Prophète r invite les Qurayshes à l’Islam sur le Mont Safa ....................... 168
L’importance de la prédication et sa méthode ................................................... 174
L’invitation à l’islam et l’œuvre des missionnaires ........................................... 187
L’attitude d’Abû Lahab et de sa femme face au Prophète r ............................ 188
Les tentatives de réconciliation des Mecquois.................................................... 190
L’inimitabilité (i’jaz) du Coran et son effet sur les auditeurs ........................... 197
L’attitude des idolâtres envers le Coran ............................................................. 207
Les allégations contre le Messager de Dieu r et le Coran ................................ 212
Le temps des tortures ............................................................................................. 216
La Patience et l’endurance recommandées aux croyants.................................. 224
Table des Matières 737

LA CINQUIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE ............................................... 229


L’émigration en Abyssinie ..................................................................................... 229
L’affaire dite des Gharânîq .................................................................................... 230
La seconde émigration en Abyssinie ................................................................... 232

LA SIXIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE ...................................................... 235


Les Mecquois demandent au Négus d’extrader les musulmans ...................... 235
Adhésion de Hamza t à l’islam ........................................................................... 239
Adhésion d’Omar t à l’islam ............................................................................... 243

DE LA SEPTIÈME À LA NEUVIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE.............. 248


Les idolâtres adoptent un embargo de trois ans .............................................. 248
La fin de l’embargo ................................................................................................. 251
Shaqqu’l-Qamar : le miracle de la scission de la lune........................................ 253
La poursuite de la prédication en dépit des circonstances .............................. 256

LA DIXIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE ..................................................... 259


L’année de la tristesse : décès de Khadîdja c et d’Abû Talib ........................... 259
Voyage à Ta’if ......................................................................................................... 262
Une miséricorde et une consolation uniques venues du Très-Compatissant 264
Un groupe de djinns acceptent l’islam après l’audition du Coran ................. 266
Rencontre avec différentes tribus et leur invitation à l’islam ........................... 269
Mariage avec Sawda................................................................................................ 276

LA QUATORZIÈME ANNÉE DE LA PROPHÉTIE ......................................... 277


La réunion d’Aqaba ................................................................................................ 277
Le troisième Sharh’us Sadr : une préparation à l’Ascension (al-Mi’raj)......... 278
L’Ascension : un cadeau spécial de Dieu à Son Bien-aimé .............................. 278
Quelques subtilités relatives à l’Ascension ......................................................... 290
Les répercussions de l’Ascension.......................................................................... 291

LES DOUZIÈME ET TREIZIÈME ANNÉES DE LA PROPHÉTIE.................. 295


Le premier sermon d’allégeance d’Aqaba ........................................................... 295
Médine est conquise par le biais du Coran enseigné par Mus’ab ibn Umayr t .. 295
Le second serment d’allégeance (L’an 13 de la prophétie) ............................... 299
L’analyse de la Période mecquoise ....................................................................... 303
Particularités des versets coraniques mecquois.................................................. 305
L’ultime solution du Saint Prophète : l’Hégire
L’autorisation d’émigrer et le voyage à Médine ................................................. 307
Le plan d’assassinat ourdi par les idolâtres ......................................................... 311
Le long voyage ......................................................................................................... 315
738 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

L’invité tant attendu .............................................................................................. 326


La Mosquée de Quba : une mosquée fondée sur la piété ................................. 328
La première prière du Vendredi dans la vallée de Ranûnâ .............................. 331
L’attente émue et enthousiaste à Médine ........................................................... 333

TROISIÈME PARTIE
LA PÉRIODE MÉDINOISE DE L’APOSTOLAT PROPHÉTIQUE / 337

PREMIÈRE ANNÉE DE L’HÉGIRE .................................................................. 339


Les jours du Noble Prophète à Médine ............................................................... 339
Abû Ayoub al-Ansarî t: le porte-étendard du Noble Prophète r ................ 340
Anas ibn Malik t au service du Noble Prophète r .......................................... 342
Le Pacte Fraternel entre Muhajirun et Ansar : Le Muakhat ............................ 344
Les vertus inhérentes aux Muhajirun et aux Ansar ........................................... 346
Madinat an Nabi ou la Constitution de Médine ................................................ 355
Médine : Cité proclamée Territoire sacré............................................................ 359
Le marché de Médine et la régulation du commerce ........................................ 360
Constructıon de la Mosqué et de la maison du Prophète r ............................ 363
L’Exhortation à la prière en commun.................................................................. 369
Le Premier Appel à la prière (Adhan) ................................................................ 372
Al-Suffa : l’École de la Science et de la Sagesse ................................................. 375
Le mariage du Saint Prophète avec Aïcha c ...................................................... 380
La situation à Médine ............................................................................................ 381
L’ordre divin : « Combattez ceux qui vous combattent ! » ............................... 384
Le jihad dans le sentier d’Allah U........................................................................ 388
Quelques campagnes militaires mineures .......................................................... 394

LA DEUXIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ........................................................... 397


Quelques batailles et la campagne de Bat’nu Nakhla ........................................ 397
Changement de direction de la Qibla ................................................................. 399
Jeûne, aumône de Fitr et autres aumônes .......................................................... 403
L’I’tikaf .................................................................................................................... 411
Une bataille majeure : Badr (17 Ramadan 2/ 13 Mars 624) ............................. 412
Le soutien des anges .............................................................................................. 424
Les lions de Badr .................................................................................................... 428
Le Retour de Badr ................................................................................................... 432
Quelques prescriptions relatives au butin .......................................................... 441
Le degré de martyr ................................................................................................. 443
L’arrivée de Zaynab à Médine .............................................................................. 447
Les Juifs et la Bataille de Banû Qaynuqa (Shawwal 2 /Avril 624) ................... 449
Table des Matières 739

L’expédition de Sawiq (Dhul-hijjah, 2 / Mai 624) ............................................. 454


Le mariage d’Alî t et de Fâtima c ...................................................................... 454
Ahl’ul-Bayt et l’amour d’Ahl’ul-Bayt .................................................................. 458

LA TROISIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE .......................................................... 461


Ouhoud : une bataille étayée par la sagesse ....................................................... 461
La passion du martyre chez les Compagnons y ................................................ 463
Hamza t, prince des martyrs .............................................................................. 467
Sa’d ibn Rabî t: le Compagnon qui rejeta toute excuse ................................. 475
Les martyrs d’Ouhoud .......................................................................................... 476
« Nous aimons Ouhoud et Ouhoud nous aime » ............................................. 481
Quelques leçons à tirer de la Bataille d’Ouhoud ............................................... 482
Hamra’ul-ASa’d (9 Shawwal, 3 / 24 mars 625) .................................................. 483
La question de l’héritage ....................................................................................... 484

LA QUATRIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ........................................................ 488


L’Embuscade de Raji / Safar 4 / juillet 625.......................................................... 488
L’Embuscade de Maouna (Safar, 4 / Juillet 625) ............................................... 491
Le complot perfide des Banû Nadir ..................................................................... 493
La prohibition de l’alcool et des jeux de hasard ................................................ 497
Dhât ar-Riqâ’ ........................................................................................................... 501
La deuxième expédition de Badr (Dhul Qadah 4 / Avril 626) ........................ 505

LA CINQUIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ......................................................... 507


La conversion et l’affranchissement de Salman al Farisi t ............................ 507
L’abolition de toute adoption d’enfant ................................................................ 513
La question du hijab ou l’injonction divine de se couvrir ................................ 516
La Bataille de Muraysi (Shaban-Ramadhan, 5 / Janvier-Février 627) ............ 518
Prescription du tayammum (ablutions sèches) ................................................. 520
L’incident du ifk ou le récit d’une calomnie ...................................................... 521
Ceux-ci sont les ennemis…. Méfiez-vous ! ........................................................ 527
Une épreuve difficile : la Bataille de Khandâq
(Shawwâl-, Dhul-Qa`dah, 5 / Mars 627) ............................................................ 530
De bonnes nouvelles amenées à Khandâq ......................................................... 532
Jâbir t fournit un repas abondant ..................................................................... 534
Les difficultés endurées à Khandâq ..................................................................... 536
Exploits courageux à Khandâq ............................................................................ 538
La guerre est une duperie ..................................................................................... 542
La marche sur Banû Qurayza (23 Dhul Qadah 5 – 15 Avril 627) .................. 544
740 Le Prophète Muhammad Mustafâ L’Élu

LA SIXIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ................................................................ 548


La clé de la victoire :
Le traité d’Al-Hudaybiya et l’émouvant chemin du retour à la Ka’ba............ 548
Le Serment de Ridwân : un serment agréé par le Tout-Haut .......................... 551
Le Traité d’Al-Hudaybiya : une nouvelle phase dans l’Appel ......................... 553
Une victoire évidente : une orientation sans cesse croissante ......................... 559

LA SEPTIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ............................................................. 563


L’invitation des souverains à l’Islam ................................................................... 563
La prıse de Khaybar: Le coup fatal aux juifs (Safar-Rabi I / Juin-Juillet 628) 578
Délicatesse envers les droits d’autrui .................................................................. 584
L’arrivée des Daws à Médine ............................................................................... 586
Le retour des immigrants d’Abyssinie ................................................................ 586
Le complot Juif pour empoisonner le Noble Prophète r ................................ 587
La question du mariage dit mut’a ....................................................................... 589
Le retour de Khaybar ............................................................................................ 590
Umrat’ul-Qada (Dhul-Qa’dah, 7 / Mars, 629) ................................................... 592

LA HUITIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ............................................................ 597


Le décès de Zaynab c, la fille du Noble Prophète r ........................................ 597
La Bataille de Mu’tah : Une légende écrite par une poignée de
Compagnons y (Jumaza al Awwal 8 /Août-Septembre 629) .......................... 597
La prouesse de Khâlid ibn Walid t comme Commandant ........................... 603
La conquête de La Mecque : La Vérité a surgi et le mensonge a
disparu (20 Ramadan 8 / 10 Janvier 630) ............................................................ 606
La Fête du Pardon .................................................................................................. 616
Le serment d’allégeance de La Mecque .............................................................. 620
Rendez les dépôts à leurs ayants-droit................................................................. 622
Une loyauté exceptionnelle .................................................................................. 624
La bataille de Hunayn (11 Chawwal, 8 / 1 Février, 630) .................................. 626
La bataille d’Awtâs (Chawwal, 8 / Février, 630) ................................................ 630
Le siège de Ta’if (Chawwal, 8 /Février, 630) ...................................................... 630
La distribution du butin ........................................................................................ 632
La punition pour avoir tué un Musulman ......................................................... 639
Affectation du gouverneur et d’enseignants à La Mecque ............................... 641

LA NEUVIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ........................................................... 643


L’épée du langage ................................................................................................... 643
Investiguez sur les nouvelles apportées par les pervers ! ................................. 647
La Campagne de Tabûk : un extraordinaire test de foi
(Rajab, 9 / septembre – octobre 630) ................................................................... 648
Table des Matières 741

Appel à verser des aumônes ................................................................................. 655


As-Saat’ul-Usra : Le Temps des Troubles .......................................................... 658
Le Martyr de Tabûk ............................................................................................... 665
La trahison des hypocrites et la Mosquée de l’Opposition
(Masjid al-Dirar) .................................................................................................... 667
Du petit jihad au grand jihad .............................................................................. 668
Les trois Compagnons y qui furent mis en quarantaine
jusqu’à leur repentir ............................................................................................... 669
À Allah appartient les trésors des Cieux et de la Terre .................................... 674
Il n’y a pas de bien dans une religion sans acte d’adoration ........................... 675
Autres évènements survenus à la suite de Tâbuk ............................................. 677
L’Année des Émissaires .......................................................................................... 679
Le Pèlerinage obligatoire (Al Hajj)....................................................................... 681

LA DIXIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE ............................................................... 684


L’adhésion d’Adiyy ibn Hâtim t à l’Islam ........................................................ 684
Le premier et dernier Hajj du Noble Prophète r : le Pèlerinage d’Adieu .... 686
Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion ...................................... 695
Quand la colère devient manifeste ...................................................................... 696

LA ONZIÈME ANNÉE DE L’HÉGIRE .............................................................. 701


L’Ultime Adieu ou le Sublime Voyage vers Al Rafiq Al A’lâ ......................... 701
Un chagrin pour absorber tout l’univers ........................................................... 714

USWA AL-HASANA ......................................................................................... 720


L’excellent modèle ................................................................................................. 720

EN GUISE DE CONCLUSION .......................................................................... 732

TABLE DES MATIÈRES .................................................................................... 735


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