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DROIT CONSTITUTIONNEL Q2 :

SYNTHÈSE
INTRODUCTION

Le droit constitutionnel est l’ensemble des règles qui encadre la vie politique. Il faut alors avoir à l’esprit les
faits politiques et sociaux mettent en jeu des règles de droit.

L’ACTUALITÉ

Plongée dans l’actualité constitutionnelle qui est au cœur également de l’actualité politique. Nous sommes
dans un tournant de notre État belge à ces deux niveaux.

En décembre 2018, le gouvernement Michel, devenu désormais le président du Conseil européen, démissionne
auprès du Roi car ce gouvernement n’est plus en mesure de gouverner en raison d’un conflit entre certains
partis. En Belgique il y a ce qu’on appelle la règle du régime parlementaire, le gouvernement est responsable
devant la chambre (Art 101 Constitution). Ça veut dire que si une majorité (+1) de député ne soutiens plus le
gouvernement, marque sa méfiance (motion), celui-ci se doit de démissionner. Dans le cas du gouvernement
de Michel, il anticipe la motion de méfiance qu’une majorité aurait peut-être pu adopter parce qu’il y a un
différent, un conflit qui oppose les parties qui forme les gouvernements, qui soutiennent les gouvernements.
Le gouvernement n’attend pas de recevoir une claque (une motion de méfiance), puisque le gouvernement
n’est plus cohérent, le premier ministre présente sa démission et la démission est accepté par le roi.

A ce moment-là commence alors une longue période d’incertitude. Les élections sont prévues le 26 mai 2019
car il y l’article 65 de la Constitution qui dit que la chambre des représentants est renouvelée tous les 5 ans.
Nous avons donc participé à des élections législatives fédérales, régionales et européennes le 26 mai 2019. En
attendant, ce gouvernement Michel renvoi les affaires courantes, ça veut dire qu’un gouvernement de plein
exercice peut faire tous ce que la Constitution lui permet de faire, mais une fois que la démission est actée, il
doit se limiter à expédier les affaires courantes (coutume constitutionnelle obligatoires et non écrites). Le
gouvernement devenu irresponsable est limité aux affaires banales qui ne pose pas des problèmes de
responsabilité, en cours (très largement réalisée et il s’agit simplement de les terminer) et les affaires urgentes.

Le 26 mai 2019 les élections se tiennent. Depuis, le Roi cherche une majorité et il nomme ses ministres (Article
96 Constitution) Il faut comprendre cette règle en la combinant avec la règle du contreseing ministériel (Article
106 de la Constitution). Aucuns actes du roi ne peuvent avoir d’effets s’il n’est pas approuvé par un ministre.
Dans le cadre de la formation d’un gouvernement, le roi dispose d’une marge de manœuvre, de liberté, il a un
pouvoir qu’il n’a à aucun moment. Pourquoi ? car nous sommes en démocratie, et contenu de la règle du
contreseing le roi doit toujours être en accord avec le gouvernement, si le gouvernement est de plein exercice

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qui a la confiance d’une majorité de député tout ce qu’il décide sera évidemment accepté par le roi (interprété
de l’article 106 = en cas de désaccord le roi doit s’incliner).

La règle du contreseing est formelle. Le roi doit trouver des représentants de partis politiques qui ensemble
possèdent une majorité de siège à la Chambre des représentants (moitié + 1). Il faut donc que les parties
s’entendent car en Belgique on pratique un système de scrutin proportionnel qui fait qu’aucun parti ne détient
la majorité à lui seul (comparé avec le Royaume-Unis le parti conservateur de Boris Johnson a à lui seul la
majorité des sièges à la Chambre).

Il faut une négociation. Le roi ne négocie pas directement, car il est inviolable et irresponsable (Article 88 de la
Constitution). Le roi va alors se faire aider par des informateurs. Si après avoir reçu des informations
concernant une majorité possible, il nomme un formateur. Ce formateur devient alors premier ministre s’il
parvient à réunir une majorité prête à former un gouvernement ayant un objectif.

Donc le roi a nommé un premier duo d’informateurs.

La règle du contreseing s’applique mais évidemment cette règle est tout à fait formelle puisque le
gouvernement Michel existe toujours, non plus avec Monsieur Michel, puisque qu’il n’est plus Premier Ministre
mais c’est Sophie Wilmes qui a remplacé Michel et s’entretient avec le roi.

Ce premier duo est constitué de Renders et Vandelanotte. Ils donnent des informations pas très rassurantes,
on ne voit pas comment faire pour former un gouvernement. La tâche est difficile car en effet, au vu des
résultats des élections, on a 150 députés et en vertu de l’article 43 de la Constitution, chaque chambre est
divisée en groupe linguistiques (français et néerlandais). Il y a aujourd’hui 89 néerlandophones et 61 sont dans
le groupe francophone. Aucune règle dans la constitution n’oblige la formation d’un gouvernement disposant
d’un soutien d’une majorité dans chacun des groupes linguistiques. Mais politiquement, il est extrêmement
préférable que ça soit le cas car un gouvernement sera évidemment plus légitime s’il est soutenu par une
majorité dans les deux groupes. C’est une règle qui n’a pas toujours été suivie mais est une directive politique.
Elle n’a été suivie du tout en 2014, quand on a formé le gouvernement Michel qui était minoritaire dans le
groupe français.

Pour les néerlandophones, dans les partis, notamment à la NVA, le premier du groupe, on dit que les
francophones ont acceptés d’être minoritaires dans le gouvernement Michel mais qu’eux n’accepterons pas
l’absence d’un soutien majoritaire dans le groupe flamand pour la formation d’un gouvernement. C’est ici que
ça se complique car la NVA possède 24 sièges et le Vlaams Belang possède 18 sièges, la majorité du groupe
linguistique néerlandophone c’est 45 sièges. Ils ratent la majorité à 4 sièges. La grande question aujourd’hui
c’est de savoir si des élections sont refaites, il se peut qu’ils atteignent la majorité. Le risque est la réclamation
de l’indépendance de la Belgique par le Vlaams Belang (partie séparatiste). La NVA est plus ambiguë, l’article
premier des statuts de ce parti dit que l’objectif du parti est l’indépendance de la Flandre et donc la fin de la
Belgique mais ils viennent d’adopter un programme qui se présente comme confédéraliste. Ce n’est pas très
rassurant pour le Roi qui n’est pas censé apprécier l’idée que le pays serait scindé.

Il y a une certaine méfiance de certains partis à l’égard de la NVA.

Le parti socialiste est le premier parti francophone. Ecolo et Groen forment une famille importante (21 sièges)
donc en réalité ce sont eux qui forment le premier parti mais ils ont dit qu’il n’irait jamais avec la NVA. Le PS ne
rejoindra pas lui non plus la NVA qui est un parti conservateur de droite, leurs objectifs politiques sont aux
antipodes l’un de l’autre.

Le problème auquel se heurte très vite notre duo d’informateurs c’est de constater qu’il n’y a pas de volonté
de former un gouvernement qui possède une majorité dans le groupe linguistique néerlandais. Car les
francophones ne veulent pas de la NVA, alors qu’elle (la NVA) s’estime comme incontournable et est appuyée
par le CD&V.

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Très vite on prend conscience du blocage et tous les autres informateurs, qui seront nommé par le roi pour
clarifier la situation, feront les mêmes constatations. Plus récemment, Boucher (MR) et Koens (CD&V) sont les
deux nouveaux informateurs et ils échouent dans le sens que leur rapport remis au roi ne diffère pas vraiment
des premiers et ne donne pas plus d’espoir de former un gouvernement qui a une majorité dans chacun des
deux groupes linguistiques. Le désaccord entre PS et NVA est insurmontable.

Le roi nomme une nouvelle personnalité, un missionnaire, c’est l’actuel vice-premier ministre du
gouvernement Wilmes, le ministre de la justice, Koen Geens. Les deux informateurs précédents disposaient de
plusieurs jours pour remettre un nouveau rapport mais brutalement ils sont convoqués au palais, déchargé de
leur mission et Monsieur Geens est nommé. Apparemment Monsieur Koens n’était pas au courant donc là le
roi se permet des libertés imprudentes.

La situation est grave et les citoyens ne s’en préoccupent guère plus. Les belges s’habituent à la situation de
crise au vu du passé. Mais il faut rester vigilant à la situation.

Il existe deux opinions publiques très différentes et on ne peut reprocher au PS ni à la NVA de refuser de
gouverner l’un avec l’autre.

Mais on refuse de revoir le processus électoral alors que si l’on pouvait s’entendre et élire un certain nombre
de député sur une circonscription électorale fédérale qui considérait avec la totalité du territoire Belge on
aurait évidemment des hommes et des femmes politique capable de s’expliquer dans les deux langues, on
aurait moins ce clivage de plus en plus dur entre deux opinions politiques qui ne se parlent pas et qui ne se
comprennent pas.

La crise est grave est la question se pose ; Faut-il réorganiser des élections ? Comment provoquer de nouvelles
élections ? En principe on peut programmer une dissolution anticipée de deux façons :

- Première manière de faire c’est en adoptant une déclaration de révision de la constitution (Art 195 de
la Constitution). Si une majorité de députés et le sénateur adopte une déclaration selon laquelle il y a
lieu de réviser la constitution, alors l’article 195 prévoit la dissolution automatique des chambres et la
convocation des électeurs.
- Deuxième manière de faire c’est l’ensemble des députés qui doivent voter leur propre dissolution
(Article 46, al 3 qui permet à une majorité de député d’admettre leur propre dissolution et donc la
convocation des électeurs)

Ce n’est pas exclu que l’on se dirige dans cette voie. L’avantage se serait de dire aux opinions publiques et en
particulier à l’opinion publique flamande qu’ils vont procéder à des élections en connaissance de cause. On
pourrait imaginer des élections claires sur la fin oui ou non de la Belgique mais ce n’est peut-être pas la bonne
solution car les opinions publiques ne sont pas prêtes à mesurer les enjeux du débat.

CHAPITRE 1 : DÉFINITION ET L’OBJET DU COURS

Le droit public est l’ensemble des règles qui trouve à s’appliquer en tout ou en parti dès qu’un organe public
est partie prenante a une relation juridique.

Comprend le droit constitutionnel, administratif, fiscal, de la sécurité, finances publiques, ect.

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Le droit constitutionnel est l’ensemble des règles qui accorde des droits fondamentaux (droits de l’homme,
libertés du bien, ect.) aux personnes particulières et aux groupements, s’intéresse aux règles de répression, de
compétences, de fonctionnement des organes supérieurs (état, communautés, régions, pouvoir exécutif et
législatif, ect)

Constitution au Constitution du
sens formel 7/02/1831

Droit LS ou lois
constitutionnel ordinaires

Constitution au
coutumes
sens matériel

jurisprudence

Les constituant (qui ont écrit la toute première constitution) étaient des hommes pratiques sortis directement
d’une révolution (avant 1830 la Belgique est sous un régime hollandais) Les constituant.

Une constitution est : Traversée par une logique interne, Robuste (elle est veille et toujours d’application)
Complexe, Courte : plus longue que lors de sa création

SECTION 1 : APPROCHE CRITIQUE ET INTERDISCIPLINAIRE DU DROIT CONSTITUTIONNEL

Première démarche : les organes de création et d’application du droit

Les ministres posent une question au Conseil d’état pour savoir si une consultation populaire est permis par la
Constitution. Le Conseil d’état répond en droit et dit qu’il y a deux raisons qui nous amenent à conclure que la
Constitution interdit l’assemblé. On trouve ce fondement dans les articles 33 et 36, 39 et 195 de la
Constitution. Les articles 33 et 36 disent que tous les pouvoirs emanent de la nation et sont désignies de la
manière établi par la Constitution. L’article 195 dit que pour reviser la Constitution il y a toute une procédure :
déclaration de révision, liste du pouvoir législatif des articles révisables, dissolution automatique des
Chambres, nouvelles élections qui vont procéder à la révision de la Constitution. Le Conseil d’état dit donc
qu’on voit que la Constitution ne prévoit pas de consultation populaire. En plus l’article 195 interdit les
referendum (qui selon eux a une différence simplement formelle avec la consultation populaire car les
sénateurs et ministres ne peuvent pas prendre ce que disent les citoyens comme un simple avi).

Deuxième démarche : la doctrine

Le droit ne peut pas etre appliquer qu’apres etre interprete. La doctrine intervient pour expliquer la
problematique et critiquer la reponse du Conseil d'Etat. Il y a deux oppinions :

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Si l’art 195 prevoit la dissolution automatique des chambres et une organisation de revision de la Constitution
c’est pour organiser une forme de constulation populaire, la compagne electorale va se derouler dans l’enjeux
constitutionnel et donc la prochaine chambre va reflete l’opinnion publique. Donc le but de l’article 195 est
d’organiser une consultation populaire a travers les elections.

Le Conseil d'Etat a tort parce que le principe c’est que la loi peut faire tout ce que la Constitution n’interdit pas
alors la Constitution interdit le referendum mais pas la consultation et la distinction qu’on doit faire entre un
avis et et une decision n’est pas simplement formelle.

Troisième étape : la science du droit

La science du droit va integrer toutes les donnes et expliquer le positionnement du CE et ses raisons et aussi
expliquer le debt doctrinal (les raisons juridiques en faveur et les objections) elle apporte un eclairage externe
sur les raisons du desacord et des raisons pourquoi c’est difficile (histoire, politique et pas seulement droit =>
points externes).

En belgique c’est difficile car dans l’histoire on a une consultation populaire en 1950 a propos du retour de Roi
Leopold III qui s’est tres mal termine ce qui fait qu’on ne veut plus de conslutation populaires car on a un
clivage entre les flamands et les francophones.

SECTION 2 : L’EPISTEMOLOGIE POSITIVISTE

On etudie le droit tel qu’il est a l’aide des elements exclusivement juridiques et on laisse les facteurs
explicatives et evaluatives non juridiques de cote. On isole l’objet du droit de tout contexte. On evite tout
jugement de valeur.

SECTION 3 : LA MÉTHODE CRITIQUE ET INTERDISCIPLINAIRE DU DROIT

Une science du droit constitutionnel critique et interdisciplinaire doit pouvoir aborder toutes les raisons qui
explique le droit tel qu’il est.

Point de vue externe modéré : c’est un point de vue interne au droit avec des ouvertures vers la science ou
philosophie politique

Science politique : la manière dans le pouvoir est effectivement acquis, exerce et transmit (actuellement). Le
pouvoir politique travail avec le droit mais pas seulement, et le juriste doit prendre compte de la politique aussi
tel qu’elle se vit dans les faits

Philosophie politique : éclaire sur les enjeux axiologiques en termes de valeur

SECTION 4 : DATES IMPORTANTES

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•Le régime électoral avant 1893 était un régime censitaire : participer à l’élection avec payement d’import, en 1893
le régime est remplacé par le soufrage universel masculin plural - que les hommes peuvent voter (certains reçoivent
des voies supplémentaires en fonction de patrimoine ou diplôme).
1893 •Révision de la constitution

•Loi de suffrage universel


1919

Après la guerre 1914-1918 : on ne peut pas accorder le suffrage universel car c’est de l’inégalité (anticonstitutionnel
car la Constitution prévoirait encore un soufrage plural). Et régularise le droit de vote
1921

•votes de femmes en vertu de la Constitution


1948

•Deuxième révision de la Constitution


1952

•Passage de l'état unitaire à l'état fédéral (1er réforme de l'état)


1970

•Création de la région wallone et flamande (2e réforme de l'état)


1980

•Création de la région cruxelloise (3e réforme de l'état)


1988

•poursuit la révision dans le sens d’accentuation de l’autonomie des communautés et régions (fédéralisme en part
d’un état unitaire et on le démembre pour que chacun puisse faire la loi pour ce qui la concerne) et modification
1993 dans la matière de droit de l’homme mais pas très soigné (4e réforme de l'état)

•Nouvelle numérotation de la Constitution


1994

•Nouvelle réforme de l'état faite par les lois spéciales (5e férorme)
2001

•grande réforme qui duré pendant un an et démi, l'accord papillion qui a permi de pacifier momentanément le
clivage communautaire (6e réforme)
2014

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PARTIE 1 : LES FONDEMENTS DE L’ÉTAT

L’état est le titulaire abstrait d’un pouvoir souverain et institutionnalisé exercé sur et en démocratie au nom de
la population d’un territoire déterminé.

Différences avec la définition identifiant trois éléments constitutifs de l’état : L’état, la population et le
territoire ce sont des éléments qui dérivent de la souveraineté parce que chaque état délimite son territoire
souverainement et la population quand elle se concerne aux nationaux est circonscrite souverainement par
l’état.

Différence avec approche du droit international public : Il y a trois éléments qui définissent l’état : population,
territoire, gouvernement effectif et indépendant. Si ces critères sont remplies ils pourront discuter de la
reconnaissances internationale de l’état (chaque état est souverain dans ca décision si un état a envie de
reconnaitre ou pas un autre état il a totalement le droit de le faire).

L’état démocratique : L’élément national est central. La population c’est l’ensemble des personnes qui résident
sur le territoire (étranges et nationaux). La nation c’est ceux qui ont la nationalité. La nation nous permet
d’introduire la notion de la constitution, en démocratie c’est la nation qui détient la souveraineté et elle va
exprimer sa souveraineté en adoptant une Constitution.

CHAPITRE 1 : LE POUVOIR DE L’ÉTAT DU POINT DE VUE JURIDIQUE

L’état est donc le titulaire abstrait d’un pouvoir souverain et institutionnalisé. Deux observations :

- L’état est une abstraction, une personne morale mais ceci ne veut pas dire que c’est quelque chose
d’irréelle.
- L’état sert prétendument l’intérêt général.

SECTION 1 : L’ÉTAT DU POUVOIR SOUVERAIN

Souveraineté : c’est la qualité propre, à un état spécifique propre, d’être une puissance à la fois suprême (au-
dessus de tout autre pouvoir, de toute autre puissance dans l’ordre juridique interne) et indépendante (qui
dans l’ordre international est à l’abris de toute subordination par rapport à une puissance étrangère).

Il y a donc deux facettes : interne et externe

Cette souveraineté on la définit au sens formel (1). L’état dispose d’une souveraineté formelle qui est la
compétence ultime, le pouvoir du dernier mot, la compétence de la compétence. La Belgique, la France, l’Italie
sont des états souverains même si ils ont transféré l’exercice du plusieurs attributs de la souveraineté, au sens
matériel, à l’Union européenne.

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La souveraineté au sens matériel (2) désigne une série de prérogatives concrètes inhérentes à la puissance
étatique : le pouvoir de juge, d’administrer, d’appliquer des peines etc.

Un état peut tout transférer à l’Union européenne sauf le fait de se retirer de l’UE et de retrouver sa
souveraineté intégrale formelle. Ceci est une souveraineté purement matériel.

On vise aussi l’organe unique (situé dans l’état) qui détient la souveraineté dans l’état qui est une approche
organique. On va donc chercher qui est le souverain, qui est le détenteur de la souveraineté dans l’état ?

Les propriétés de la souveraineté : illimité (en droit, l’état n’a pas a supporté une moindre limite à sa
puissance si ce n’est les limites qu’il se donne. L’état peut s’autolimiter par sa propre volonté),
irrésistible (quand une loi exige un comportement elle ne demande pas l’accord aux destinataires),
indivisible (la suprématie appartient à l’état à l’exclusion de toute autre puissance, la souveraineté est
impartageable dans son principe) et inaliénable (un état est souverain par définition. Il peut éventuellement
renoncer à certains attributs de la souveraineté).

Dans les faits, un état dispose de pouvoir limité, de pouvoir auquel résiste une série de pouvoir de faits, que le
pouvoir soit divisé et qu’il y a également un transfert de souveraineté. Mais en droit, l’état se définit par cette
détention de la puissance suprême.

Origine historique du concept : Les grand penseurs de l’état : Jean Bodin et Charles Loyseau mettent en avant
la souveraineté dans un but politique, ils s’affirment à la fois l’indépendance des nouveaux états à l’égard des
puissances externes et aussi la suprématie de l’état français à l’égard des seigneuries du moyen âge et ils
affirment aussi en quelques sorte la laïcité de l’état.

Souveraineté externe : on peut confirmer la définition et en même temps la relativiser =>


paradoxe

Confirmer Relativiser

Un état est souverain, il 1.Droit international public


est absolument libre de
faire tout ce qui est en Ce sont des exceptions qui sont de nature à relativiser, à nuancer la définition
son pouvoir et ce classique.
pouvoir n’étant limité
que s’il le veut. Le ius cognes : Les règles de droit internationales public ce sont quelques règles
fondamentales comme génocide l’esclavage, les actes d’agression et recourir à
L’idée, en droit la torture mais il n’y a pas de liste. Ces règles se trouvent dans les arrêts et son
international, c’est qu’il reconnus comme normes impératives (article 53 de la convention de vienne sur
y a des règles à le droit des traites)
respecter comme les
conventions (obligent
les états mais elles ne les
obligent que parce que

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les états ont accepté de
s’engager à les La coutume : La coutume propose une opposition mais dans un certains délais. Il
respecter. Nul état n’est y a encore la situation ou un nouveau émerge et certaines coutumes étaient
obligé d’accepter une déjà votes à ce moment-là il peut s’opposer à cet coutume même si c’est après
convention, mais à partir délais.
du moment où il
s’engage il doit accepter
les règles), les traités
Les principes généraux de droit international : Reconnus par les nations civilises
internationaux et les
(article 38 du statut de a cours internationale de justice) ce sont des principes
coutumes (Les coutumes
généraux de droit qu’on pourrai constater comme existant dans tous les ordres
sont des usages qui se
juridiques nationaux. Les principes de droit international sont propres aux droit
répètent mais avec la
international, sans lequel il ne pourra pas exister.
conviction que cet usage
est une obligation. Tout
état qui est souverain,
peut déclarer Les traites sont des pièges à volonté : ils sont un peu pièges pour avoir une idée
inopposable la coutume exacte des contraintes qui limitent la volonté des états on doit consulter la
qui est en train de se jurisprudence de la cours parce que cette cours a fait dire par la voie
cristalliser et liera d’interprétation aux articles certaines choses que les états ont dû respecter
d’autres états qui eux ne
se sont pas opposés à
cette coutume).
2.La construction européenne (TFE et TFUE)
Mais on ne peut donc
pas parler d’atteinte à la Approche formelle : On constate qu’aucun état n’est entré dans l’UE contre sa
souveraineté car la volonté (art. 49 TUE). Tout état peut demander à devenir membre de l’UE. À
faculté de contracter des chaque fois que le TUE et TFUE ont été modifiés, cela a dû se faire
engagements obligatoirement à l’unanimité des états membres de l’UE qui ont les droits de
internationaux est un véto. Chaque état membre de l’UE a accepté de perdre la maitrise d’une série de
des attributs de la pouvoirs car c’est l’UE qui va bénéficier du transfert de ces pouvoirs et va les
souveraineté. L’état est exercer à la place des états (art 48). Le principe d’attribution (article 5 §2 TUE)
un sujet de droit qui veut que l’UE ne peut agir que dans les domaines qui lui ont été attribué
international, il est souverainement par les états membres. L’état se donne toutes les compétences
capable de conclure et qu’il veut. L’UE n’est pas du tout dans ce cas de figure, elle n’est pas souveraine,
par conséquence de on lui donne que des compétences d’attribution. Tout état membre peut
s’engager et par décider de se retirer de l’UE selon l’article 50 TUE.
conséquence de se
contraindre à respecter
la règle qu’il a signé Approche matérielle : on doit constater que plusieurs attributs essentiels de
(arrêt Lotus) cette souveraineté ont été transférés - souverainement - par les états membres
au profit de l’UE. Dans certaines matières l’UE en tient des compétences
A l’article 2 de CNU §1
exclusives, où elle seule peut agir. La plupart de ses compétences ne sont pas
on y voit les principes
exclusives mais concurrentes. Les traités parlent de compétences partagées qui
qui fondent
sont des matières où les états peuvent encore agir. Bien évidemment le droit de
l’organisation des
l’UE prime sur le droit des états membres. dans la théorie générale de l’état,
nations-unies sous le
certains auteurs ont essayé de délimiter une sorte de noyau dur, un ensemble
principe de l’égalité
de matières dans lesquelles on ne conçoit pas qu’un état ne puisse pas agir
souveraine. On peut voir
comme la délimitation des territoires et des nationaux, les relations
une confirmation de la
internationales, le maintien de l’ordre à l’intérieur de l’état , les biens du
souveraineté qui est au
domaine et l’unicité de l’état. On observe d’abord que l’UE garde intacte la
cœur même du droit
souveraineté matérielle des états membres pour ce qui concerne la délimitation
international.
des territoires et des nationaux. L’UE n’est pas compétente pour trancher un
Produit de la conflit d’un état. On observe que l’état garde le monopole de la contrainte
souveraineté de certains physique. Jamais l’UE ne peut développer la contrainte physique. On observe
états dans la CNU : Art. aussi que l’UE a sans doute des compétences en matière de politiques
18, §1, CNU - chaque étrangères et de sécurité commune (la PESC), la politique européenne de
sécurité de défense aussi (la PESD). Mais ces quelques compétences dont l’UE

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membre de l’assemblée dispose, dans le TUE, on constate que dans ces matières les états conservent le
générale dispose d’une droit de véto donc la souveraineté est intacte dans ces matières. En ce qui
voix et art. 41 et 42 CNU concerne la structure de l’état et des régimes politiques, l’UE entend respecter
- les membres de l’identité constitutionnelle de chaque état membre. C’est l’article 4 §2 TUE qui
l’organisation doivent nous dit cela clairement. Cet article a été créé pour rassurer les états membres
s’abstenir de régler leur de l’UE attaché à leur souveraineté.
conflit par la force. Sauf
légitime défense selon Dans certains des volets énoncés on constate un transfert de souveraineté : A
l’article 51 CNU. l’article 77 TFUE, l’UE dispose de toute une série de compétences dans le
domaine du contrôle des frontières extérieures. La souveraineté budgétaire
dans l’article 126 TFUE Les états membres de l’UE ne peut pas se retrouver dans
ces cas listés dans l’article. La monnaie : Pour les états membres de l’UE, c’est la
banque centrale européenne qui a la maitrise de la politique monétaire. La
banque centrale monétaire est totalement indépendante selon l’article 128
TFUE et article 282 TFUE. Coopération policière et judiciaire en matière pénale
selon l’article 82 et suivants TFUE il faut savoir que l’UE est aujourd’hui
compétente pour définir un certain nombre d’infraction pour des crimes graves
et elle est également compétente pour fixer des règles de procédure pénale.

Donc il y a une disjonction entre souveraineté formelle et matérielle. Il faut


constater que certains attributs de la souveraineté matérielle ont été transférés
à l’UE dans certains cas, ce transfert va extrêmement loin.

La procédure législative ordinaire, au sein de l’UE, est de faire adopter ces


règlements et directives en codécision par le Parlement européen et le Conseil
des ministres. Pour qu’un règlement soit adopté à l’échelle de l’UE et soit
imposer sur les états membres, il faut une majorité au Parlement européen et
une majorité au sein du Conseil des ministres. Dès lors que la règle est la
majorité qualifiée, ça dit que potentiellement un état, deux états etc., peuvent
être mis en minorité. Ce qui nous explique que dans un certain nombre de
matière il y a eu des transferts, on applique le principe de l’unanimité. Là, les
états sont contents car leur souveraineté ne sera pas tout à fait perdue, la
matière est transférée à l’UE mais je garde quand même un droit de véto
puisque la règle c’est l’unanimité.

Souveraineté interne : la qualité qui vaut à l’état de détenir la puissance suprême. Une
puissance suprême au-dessus de tout pouvoir public ou privé.

Confirmant Relativisent

La supermatie du droit La nation souveraine ne peut entièrement abolir la temporalité qui


étatique : en droit, nécessairement la précède : le Congrès national a édicté la Constitution à partir
l’état a le pouvoir de février 1831 au nom du peuple belge. Donc, le souverain, le détenteur de la
d’imposer ses lois à puissance suprême, est le peuple belge. Et il se fait qu’à l’époque on considérait
tous ses citoyens qu’ils normal de réserver le droit de vote aux électeurs capables de payer un certain
le veulent ou non. Bien impôt : le suffrage censitaire. C’est ce gouvernement provisoire qui décide que
sûr, les citoyens vivent l’état belge va se doter d’une constitution à la suite d’une procédure qui est
en démocratie donc ils l’élection au suffrage censitaire. Le fondement de cette puissance suprême c’est
participent à des une révolution, des rapports de force politique. Dire que c’est la nation qui est
élections, ils sont au souveraine, c’est vrai, mais au fond la nation n’est pas tout à fait autonome mais
courant des lois. Mais hétéronormée. Car la nation est une abstraction, pour pouvoir se doter d’une
n’empêche, certains constitution elle doit recevoir des organes qui lui permettent de parler et donc il y

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citoyens peuvent ne a des règles à fixer avant l’édiction de la constitution. La nation n’est pas
pas être d’accords avec autonome, elle est dépendante de règles dont par hypothèse qui n’est pas son
certaines lois mais ils auteur.
doivent quand même
les respecter. Pluralisme juridique : La plupart des juristes ont tendance à penser que le seul
droit en vigueur, c’est le droit édicté par l’état ou dans le respect des prescriptions
Le monopole de la posées par l’état. Mais on peut changer de paires de lunette, on voit les
contrainte physique : phénomènes juridiques autrement. Je définis le droit comme formant un ordre
Cette suprématie juridique, tout groupement humain doté d’un ensemble de règles et d’institutions.
passe par le monopole Des règles qui se font effectivement respectées et dont la méconnaissance appelle
de la contrainte des sanctions applicables. Il n’y a rien qui m’empêche de définir le droit de cette
physique, il s’agit de manière. Si je pars de cette définition, je constate que l’église catholique forme un
forcer une personne groupement humain. En gros, il y a d’autres acteurs qui sont susceptibles de
de faire ce que la loi produire des règles juridiques que l’état seul.
exige.

Le titulaire unique et
indivisible de la Donnés liés au fédéralisme : Un état fédéral est un état dans lequel le pouvoir de
souveraineté faire la loi est partagée par plusieurs pouvoirs par opposition à l’état unitaire qui
organique : C’est la est un état dans lequel la loi est la même dans tout le territoire.
Constitution qui est la
norme suprême. Le Dans un état fédéral, chaque collectivité fédérée a le pouvoir de faire la loi en
pouvoir constituant se toute autonomie uniquement dans les matières que la Constitution lui a attribué.
subdivise en 2 Il y a également des états fédérés.
branches : le pouvoir
Il y a bien un partage de certains attributs de la souveraineté matérielle mais en ce
constituant originaire
qui concerne la souveraineté formelle, l’état détient la souveraineté et que lui.
et le pouvoir
constituant dérivé. En effet, dans un état fédéral, nous avons une Constitution qui organise le partage
du pouvoir notamment le partage de la fonction de légiférer. Les lois fédérales
En Belgique, le pouvoir
s’appliquent sur la totalité du territoire de l’état tandis que les lois fédérées
constituant originaire a
(décrets et ordonnances) ne s’appliquent que dans les limites de chaque
été exaucé par le
collectivités fédérées. Donc il y a un bien un partage de l’exercice de la
Congrès National (7
souveraineté mais la souveraineté formelle appartient au constituant qui est au-
février 1831). On parle
dessus du système fédéral puisque c’est lui qui l’organise.
de ce pouvoir pour
désigner l’auteur d’une Pluralité du pouvoir législatif mais unicité du pouvoir constituant : Bien sûr la
toute nouvelle Constitution peut être révisée et on verra qu’on associe les « états fédérés » à la
constitution qui n’est révision de la constitution mais ne sont pas souverains car ils peuvent subir une
pas reliée aux révision de la constitution fédéral contre leur volonté.
dispositions de la
constitution Unicité de la souveraineté interne : C’est l’état fédéral et non les états fédérés qui
précédente parce détient la souveraineté interne. Le droit de cessation, le droit de quitter
qu’on a voulu faire du unilatéralement la fédération n’appartient pas en principe aux états fédérés (art.
neuf. 50 TUE).
Dans la constitution
belge, nous avons Unicité de la souveraineté externe : Les états fédérés n’ont pas non plus la
l’article 195 qui nous souveraineté externe car disposer de la souveraineté externe cela signifierait
dit comment on doit d’être indépendant en droit international et d’être sujet de droit international
faire pour réviser la donc de disposer le droit de faire des traités. Chez nous en Belgique, les
constitution du 7 communautés et les régions ont le droit de conclure des traités avec d’autres états
février 1831. mais en vertu de la Constitution belge et non en vertu du droit international
même s’il reconnait cela. C’est l’état fédéral qui assume la responsabilité parce
Donc, ce pouvoir qu’en droit international la responsabilité internationale se concentre dans les
constituant dérivé mains des états. Ca arrive que la CJE (Cour de Justice européenne) constate que la
n’est pas souverain car Belgique a manqué a une de ses obligations qui découlent du droit européen, la
il doit se plier aux CJE condamne l’état belge quand bien même celui-ci dit que c’est la faute aux
règles qui régissent la collectivités fédérées.
procédure de révision.

11
Même si en pratique il
n’est pas loin de la Unicité de la souveraineté matérielle : Pour la souveraineté matérielle, il est
souveraineté surtout évident que chaque Constitution fédérale fait ce qu’elle veut, le pouvoir
qu’il n’y a aucun constituant est souverain. Donc s’il décide de transférer quelques attributs de la
contrôle sur la souveraineté matérielle aux collectivités fédérées rien ne lui empêche d’en
conformité des décider ainsi, tout est affaire de volonté politique.
procédures concernant
l’article 195.

La souveraineté de l’état belge : L’art 34 interdit à l’État belge de disparaître pour devenir un État fédéré
membre de l’UE dans l’hypothèse où l’UE deviendrait un État fédéral. Et si demain il y avait une volonté de
former les États-Unis d’Europe sur un modèle fédéral, comment faudrait-il faire ? Il faudrait réviser l’art 34 de
la constitution, mais il y a d’autres obstacles (notamment un décret de novembre 1830 qui proclame
l’indépendance du peuple belge et l’irrévocabilité de certaines normes). Il faudrait donc une révolution pour
engendrer les États-Unis d’Europe sur un modèle fédéral.

Pour une redéfinition de la souveraineté : La souveraineté est devenue une notion paradoxale, on ne peut
plus utiliser réellement la définition sans dire qu’il y a des éléments de nature à la relativiser ou la contester.

On peut considérer que les États demeurent souverains en ce qu’ils disposent d’une puissance supérieure en
droit au pouvoir privé et public autre que l’État. Donc on peut parler d’un degré de pouvoir supérieur à celui
dont disposent les autres puissances publiques et privées, mais la notion est relative. On ne peut plus
aujourd’hui parler de la souveraineté comme un pouvoir d’auto-détermination illimité.

On peut ajouter que, aujourd’hui, s’il y a une recommandation à adresser aux États, ce serait de renoncer à une
souveraineté exclusive. Par souveraineté exclusive, on entend une manière de l’exercer qui est extrêmement
tournée vers les intérêts nationaux, très peu attentive aux intérêts de toutes les autres nations. La
souveraineté exclusive est la tentation de toute une série d’États, il y a une tendance à un repli souverainiste.

Il faudrait une souveraineté inclusive, c’est-à-dire la souveraineté d’un État qui accepte de se lier les mains,
d’entrer dans un réseau d’obligations internationales, notamment pour assurer le respect des droits de
l’Homme. Le meilleur moyen pour respecter les droits de l’Homme es d’entrer dans quelque chose comme la
convention européenne des droits de l’Homme et accepter un regard extérieur comme celui de la cour
européenne des droits de l’Homme. Chaque État qui est entré dans ce traité l’a fait souverainement. C’est la
souveraineté inclusive et on a besoin d’États qui en sont adeptes. Si les États s’agrippent à leur souveraineté en
la faisant exclusive, il y aura des dégâts. Et c’est malheureusement la situation dans laquelle nous sommes
aujourd’hui.

SECTION 2 : L’ETAT EST UN POUVOIR INSTITUTIONNALISE

L’État n’est pas seulement un pouvoir souverain, on ne peut pas se limiter à la souveraineté, il faut
l’institutionnalisation. C’est un mécanisme essentiel sans lequel on ne peut pas parler d’État. Si on n’associe
pas l’institutionnalisation au pouvoir étatique, et qu’on définit juste l’État comme un pouvoir souverain, alors
on peut considérer qu’un individu qui prétendrait concentrer en lui tous les pouvoirs formeraient un État. Ce
serait un pouvoir souverain individualisé, mais ça c’est le contraire d’un État. L’État suppose nécessairement

12
une dissociation entre le pouvoir et les personnes physiques. Alors bien sûr, derrière l’État il y a des personnes
physiques, mais le propre de l’État, c’est d’être au-delà de l’addition de ces personnes physiques. La preuve en
est : quand ces personnes meurent, l’État demeure. Il y a un phénomène d’institutionnalisation qui est
absolument inhérent à la notion d’État.

L’institutionnalisation du pouvoir étatique passe nécessairement par des règles. Et là on voit déjà émerger la
notion de Constitution. La dissociation entre le pouvoir et les personnes physiques passe par les règles. Et donc
par la Constitution. C’est cela qui fait l’État avec la notion de souveraineté.

Il en découle deux caractéristiques majeures : le pouvoir étatique est à la fois un pouvoir permanent (Ce n’est
pas parce que les personnes physiques meurent que l’État meurt. Ce phénomène de l’intemporalité se
manifeste de plusieurs manières : une loi est valide tant qu’elle n’a pas été abrogée, sur le plan international, le
phénomène de la continuité de l’État est essentiel : les droits et obligations de l’État ne sont pas affectés par
les changements de gouvernement) et impersonnel (Il y a des personnes physiques, mais derrière ces
personnes, il y a une institution. Il en découle un effet de légitimation du pouvoir, le pouvoir et l’existence
même de l’État ne reposent pas sur les qualités exceptionnelles d’un chef charismatique. Cette forme de
légitimité ne fonctionne pas dans un État. C’est une domination rationnelle légale. Donc il y a une forme de
légitimation de l’État en raison de ce phénomène d’institutionnalisation. Cela joue, mais la légitimité et
l’existence de l’État ne sont pas en cause (ce n’est pas parce qu’on a un mauvais ministre que l’État va tomber).
Cela a aussi un effet de limitation du pouvoir, parce que qui dit institutionnalisation dit statut, règles, qui
s’interposent entre le pouvoir et ceux qui l’exercent. C’est la notion d’État de droit qui apparaît ici. Les
personnes physiques qui exercent concrètement le pouvoir sont limitées par des règles. Il y a aussi un effet de
pérennisation du pouvoir, et aussi un effet d’unification).

Cette théorie de l’institutionnalisation du pouvoir étatique trouve son origine historique dans une doctrine de
juristes qui ont inventé la théorie des 2 corps du roi : un corps mortel, physique et un corps mystique. Il y a
d’autres théories similaires : la théorie de la couronne, l’adage « le roi est mort, vive le roi », c’est aussi
l’obsession de la permanence, de la continuité d’un pouvoir, celui de l’État.

Principes juridiques découlant de la nation de pouvoir institutionnalisé

La La continuité de l’état La distinction


personnalité entre les intérêts
morale de de l’état et ceux
l’état de ses agents

On fait Ce sont donc des principes en quelques sortes présupposés par une C’est
comme si, série d’autres règles particulières, le principe pouvant être induit de ces l’interdiction
derrière la règles particulières. Il y en a toute une série en Belgique. d’une
multitude patrimonialisation
des Ex : le principe de la continuité de l’État : le fait qu’on est avec un privée de l’État.
personnes gouvernement en affaires courantes depuis un moment, car en Tout le droit fiscal
physiques, conciliation avec le principe de la responsabilité des ministres devant la est soucieux de
se cachait chambre, un gouvernement qui a démissionné ne peut faire que 3 cette distinction.
une choses : expédier les affaires en cours, expédier les affaires courantes
personne (banales), et assumer les affaires urgentes.
qui a des
droits, et qui En droit international, il y a une belle traduction du principe de la
peut se voir continuité de l’État dans la règle qui veut qu’un État reste

13
imposer des juridiquement le même alors que son territoire a subi d’importantes
obligations. modifications.

Ex : l’Allemagne reste l’Allemagne quand bien même l’Allemagne de


l’ouest et l’Allemagne de l’est se sont réunies après la chute du mur de
Berlin. Pareil avec les changements de régime.

CHAPITRE 2 : LE POUVOIR DE L’ÉTAT DU POINT DE VUE SCIOLOGIQUE

Le degré d’institutionnalisation des états

L’exemple type de l’état fort : la Exemple type de l’état faible : la Belgique


France

Plutôt la France du général de Gaulle, C’est le prototype de l’État faiblement institutionnalisé.


des années 1960. Cette France n’est
pas toute puissante mais elle projette
une vision d’elle-même qui consiste à
être une instance de détermination de
l’intérêt général par-delà tous les
clivages, avec une capacité d’imposer
toute une série de décisions, que cela
plaise ou non aux périphéries.

Indices du degré Indices du degré d’institutionnalisation faible :


d’institutionnalisation élevé :
Pour les périphéries sociales : il y a une puissance bien plus grande
Pour les périphéries sociales : il y a un des syndicats, du patronat, une présence beaucoup plus grande
très faible taux de syndicalisation, la des concertations sociales
politique économique et sociale du
gouvernement est relativement peu Pour les périphéries territoriales : nous avons 3 régions et 3
influencée par les grands syndicats. communautés qui ont le pouvoir de faire la loi, nous sommes dans
un État fédéral. Même avant cela, les communes avaient une
Pour les périphéries territoriales : Elle importance considérable. C’est un pays de bourgmestres
connaît le phénomène de
décentralisation, mais c’est un Pour les périphéries partisanes : la puissance des partis politiques
phénomène modeste, les régions ont est telle qu’on parle d’une partirait. C’est combinable avec la
un pouvoir réglementaire et non pas démocratie, pour autant que ce soit encadré par le droit.
législatif.
Pour les périphéries idéologiques et philosophiques : en Belgique,
Pour les périphéries partisanes : il on reconnaît toute une série de cultes (catholicisme, anglicanisme)
existe des partis politiques, mais leur et la laïcité est également reconnue comme une utilité publique et
puissance est faible. tous ces cultes sont financés.

Pour les périphéries idéologiques et Il n’y a pas d’école nationale d’administration, il y en a des
philosophiques : la laïcité est une régionales mais il n’y a rien de commun avec l’école française.
obligation pour les pouvoirs publics de
ne pas financer les cultes, la neutralité
de l'État est beaucoup plus en recul
par rapport aux tendances
philosophiques au sens large.

14
Il existe une école nationale
d’administration et les français en sont
très fiers (ce sera prestigieux d’en être
diplômé alors qu’en Belgique ce n’est
pas prestigieux d’être fonctionnaire).

La démocratie consociative : L’État faiblement institutionnalisé


que nous connaissons en Belgique s’accompagne d’une
démocratie consociative.

On s’intéresse ici au mode de régulation des conflits politiques. Il y


a deux catégories distinguées par les politologues : les
démocraties compétitives (c’est le régime de régulation des
conflits politiques approprié à une société politique suffisamment
homogène, dont la culture politique est suffisamment homogène
pour que les décisions qui tranchent des conflits soient adoptées à
des majorités. Il y a un gouvernement, soit à gauche soit à droite
et qui n’hésite pas à imposer un nombre de décisions, et ces
décisions sont tranchantes, clivâtes. Et les différentes parties
acceptent parfois d’être dans la minorité.) et les démocraties
consociatives (On a affaire à une société profondément clivée,
selon des lignes de clivage qui varient et qui structurent la vie
politique, Une démocratie consociative ne peut constituer un
mode de régulation efficace des conflits que si, à la tête de chaque
famille politique, il y a une élite dotée d’une certaine autorité,
capable de parler au nom de la communauté en question, Les
partis politiques correspondent à des mondes et les présidents à la
tête des partis ont une autorité incontestablement reconnue
aujourd’hui., Le mode de régulation des conflits par excellence est
d’éviter le principe de majorité, et de recourir plutôt à des
consensus, au terme d’une négociation qui met en présence les
autorités à la tête de chacun des groupes, chacune des familles,
des communautés, des partis. Donc qui dit démocratie
consociative, dit négociation, recherche du consensus.). Ces deux
notions s’opposent.

Les clivages en Belgique :

Le clivage Eglise-Etat, clivage entre les catholiques et les libéraux :


ce clivage porte sur la domination exercée par l’Église. Cette
domination était extrêmement grande au 17è siècle, et le parti
libéral s’est créé en réaction contre l’hégémonie de cette Église. Il
y a eu des conflits très durs, notamment quant au statut du cours
de religion dans certaines écoles. De même concernant la question
sur les écoles dont le pouvoir organisateur est les écoles
catholiques. Ce sont des conflits tellement ravageurs qu’on a
utilisé le terme de « guerres scolaires ». Il y en a eu deux. Le pacte
scolaire de 1958 : on a trouvé un consensus sur un compromis, et
ce compromis a été coulé sous la forme de ce pacte politique, le
pacte scolaire, signé par les présidents des 3 partis politiques
traditionnels. Et ce compromis, ce pacte scolaire, a été transformé
en loi en 1959, et les grands principes de ces loin ont été insérés
en 1988 dans l’art 24 de la Constitution quand l’État a transféré la

15
compétence de l’enseignement vers les communautés. Si on avait
été dans une démocratie compétitive, on aurait changé la
législation scolaire suivant si on avait une majorité laïque ou une
majorité catholique. Ce serait un mouvement de va et vient
permanent, on évite cela en faisant un compromis qui fait l’objet
d’un consensus, à travers ce pacte.

Le clivage possédants-travailleurs : il monte en puissance à la fin


du 19è siècle. C’est un clivage socio-économique entre les
partisans du libéralisme économique, qui défendent les intérêts
patronaux, et les socialistes qui souhaitent une intervention de
l’État pour plus de justice sociale. Ce clivage est à l’origine de la
création du parti ouvrier belge (ancêtre du parti socialiste), et ce
clivage appelle également à un mode de régulation consociatif à
travers la pratique de la concertation sociale. Nous avons une loi
en Belgique de 1968, les conventions collectives de travail : des
conventions passées entre le patronat et les syndicats pour régler
des points cruciaux dans la manière de travailler entre les
employés et les patrons.

Le clivage centre-périphérie (clivage communautaire entre


flamands et francophones) : il était déjà présente fin du 19è siècle.
Les francophones comprennent trop longtemps les revendications
légitimes des flamands à avoir un enseignement en néerlandais,
une justice en néerlandais… Les premières lois linguistiques datent
de 1870. Il y a également un mouvement contre les élites
francophones de Flandre et de Bruxelles, peu attentives aux
besoins de la Wallonie. Déjà en 1912, le clivage était très profond.
il faut déjà penser à des solutions de type fédéral pour régler ce
conflit. Le mouvement flamand est un peu décrédibilisé par le
comportement de certains d’entre eux durant la guerre 14-18
mais le mauvais sort réservé aux flamands explique une remontée
en puissance de la révolte pendant l’entre-deux guerres. La
seconde guerre mondiale a pour effet de refroidir ce clivage
communautaire, qui remonte de nouveau en puissance de
manière définitive dans les années 60, avec les grandes marches
du mouvement flamand organisées sur Bruxelles pour dire qu’il
faut des lois pour protéger la langue néerlandaise, sinon celle-ci va
disparaître sous l’effet de la francisation. On va progressivement
arriver à la solution fédérale, inscrite dans la constitution à partir
de 1970.

Dans notre Constitution, depuis 1970, nous avons inscrit des


mécanismes qui relèvent de la démocratie consociative, qui
s’expliquent par cette volonté de réguler les conflits
communautaires par des négociations qui peuvent déboucher
sur des consensus.

L’art 99 de la Constitution : article sur la partie linguistique dans le


conseil des ministres. il faut forcer flamands et francophones à
s’entendre, et on l’exige au plus haut niveau : au Conseil des
ministres. Cela ne signifie pas qu’en droit, il faut que le
gouvernement dispose de la confiance d’une majorité de députés
dans le groupe linguistique néerlandais mais aussi de la confiance
d’une majorité de députés dans le groupe linguistique français. La
constitution ne le dit pas. Mais il est évident qu’il est beaucoup

16
plus fonctionnel, légitime, de voir un gouvernement soutenu par
une majorité dans chacun des deux groupes linguistiques, que de
voir un gouvernement déséquilibré.

L’art 4 al3 de la Constitution : la catégorie des lois spéciales. C’est


un mécanisme typique de la démocratie consociative, car dans les
lois ordinaires, il est possible que la loi soit ordonnée contre les
attentes d’une majorité d'un des deux groupes linguistiques. Donc
dans les matières sensibles pour le contentieux communautaire, il
faut une loi spéciale.

L’art 54 de la Constitution : la sonnette d’alarme. C’est un


mécanisme qui a une efficacité préventive. L’idée est que si 3/4
des membres d'un des deux groupes linguistiques rend une
motion disant qu’un projet ou une proposition de loi porte
atteinte aux intérêts vitaux d’une communauté, la procédure
d’adoption du projet ou de la proposition de loi sera suspendue.
C’est renvoyé au Conseil des ministres, qui doit trouver une
solution.

SECTION 2 : LES TRANSFORMATINS DES MODES D’EXERCICE DE LA SOUVERAINETÉ

L’État est juridiquement le même mais le mode d’exercice du pouvoir étatique a très foncièrement changé.
Dans toutes les démocraties aujourd’hui, les États évitent de recourir à un mode de régulation purement
vertical (lois votées de manière autoritaire et imposées à une population sans concertation préalable). Il y a des
attentes de la part de la société civile, de négocier. Il y a une demande de gouvernance qui est fondée sur des
concertations, des délibérations, des procédures qui associent les représentants des secteurs concernés le plus
largement possible. Tout fait l’objet de délibérations.

Sur le plan international, on remarque aussi qu’on ne peut pas imaginer qu’un État, sous prétexte de sa
souveraineté externe, se replie sur lui-même et ne se préoccupe que de ses seuls intérêts. Il faut un mode
d’exercice inclusif. Les États doivent régler ce qui relèvent de leurs préoccupations, des préoccupations infra-
étatiques et des enjeux mondiaux.

CHAPITRE 3 : LE POUVOIR DE L’ETAT DU POINT DE VUE PHILOSOPHIQUE

Le grand outil est les droits de l’Homme, mais il n’y a pas que ça. La philosophie politique nous aide à réfléchir
au reste. L’État est au service de l’intérêt général.

Deux séries de considérations

Première série Deuxième série

L’idée que la polis est antérieure à J-M Fery : il propose une philosophie politique qui a l’avantage de
l’individu, on ne peut pas penser surmonter l’opposition dure entre les libéraux et les communautaires.
l’individu sans son insertion dans L’idée de Ferry est qu’il s’agit de concilier autant que possible, mais
une communauté politique qui le c’est impossible donc c’est un idéal, 3 pôles :
précède. Les penseurs du contrat
social (Hobbes, Rousseau, Locke,

17
Rawls) ont une propension à faire
comme si on pouvait penser - Le pôle du général, le pôle républicain de l’autonomie civique : le
l’individu avec ses droits, avant grand principe de la souveraineté populaire. Qui détient la
qu’il n’entre en société. Contre souveraineté interne ? La nation. Donc un État ne peut pas
cette théorie du contrat social, on ignorer ce que le peuple veut. Ce n’est pas l’alpha et l’oméga,
affirme avec Aristote que penser parce qu’il y a deux autres pôles.
de cette façon ne fait pas sens il
faut toujours se dire que la - Le pôle de l’universel : c’est les droits de l’Homme, « tous les
communauté politique vient avant
hommes naissent libres et égaux ». Allier ce pôle avec le pôle du
l’individu.
général ne va pas nécessairement de soi : quand une loi est
adoptée par une majorité de députés, elle est présumée légitime
en vertu du premier pôle, elle est l’expression de la volonté
L’action politique n’est pas à générale. Mais quand une cour constitutionnelle annule cette loi
confondre avec l’application d’une parce qu’elle contredit un des droits de l’Homme, on voit les deux
science ou d’une technique pôles s’entrechoquer.
déterminée. Un philosophe néo-
libéral va jusqu’à récuser la notion - Le pôle du singulier (pôle sur lequel les communautaires
même de projet politique, l’idée insistent) : ils insistent sur les mœurs, la morale particulière, la
qu’une communauté politique morale vivante, propre à la communauté historique particulière
puisse se donner à elle-même un dont l’État est l’organisation. L’idée est qu’un État est l’organe de
projet politique, car la seule valeur décision d’une nation (mais le terme communauté historique est
qu’il faut selon lui prendre en plus large), et cette communauté se caractérise par un certain
compte, c’est l’individu et ses nombre de valeurs, elle se reconnaît dans une forme d’identité
droits, valeurs et libertés. Il est en narrative, elle a ses symboles
faveur d’un État minimal dont
l’unique obsession est la
sauvegarde des libertés des
individus, la justice sociale est pour Il faut essayer de concilier au maximum ces trois pôles.
lui un mirage. Il y a essentiellement
3 règles : la propriété privée, la
liberté contractuelle et la Selon les 3 pôles :
responsabilité civile. L’État est
vraiment minimal. Mais cette Général : le peuple suisse peut adopter des décisions par referendum,
vision ne comprend pas ce c’est accepté dans la constitution
qu’Aristote avait compris, à savoir
que l’action politique (la praxis) Universel : c’est une catastrophe, c’est de la discrimination au
n’est pas une technique, n’est pas détriment du culte musulman
l’application d’une science, mais
l’application d’un mode de Singulier : dans la tradition suisse, les minarets n’ont pas leur place
raisonnement particulier, la
On a donc là 3 pôles pour penser la question de la légitimité.
phronesis.

18
PARTIE 2 : L’ÉTAT ET LA CONSTITUTION

CHAPITRE 1 : THÉORIE DE LA CONSTITUTION

SECTION 1 : DÉFINITIONS DE LA CONSTITUTION

Matérielle :

Premier sens : sens matériel strict : la Constitution désigne tous les principes, toutes les règles les plus
fondamentales pour la vie d’un État (les règles qui régissent l’organisation, le fonctionnement, les compétences
des autorités publiques les plus importantes, + les droits de l’Homme, + les principales sources du droit, + les
finalités de l’État). Ce sont des matières essentielles pour tout l’État (indépendamment de la question de savoir
si ces règles figurent dans un texte déterminé).

Deuxième sens : la Constitution au sens matériel large : on l’emploie dans un sens plus large que les États :
l’organisation internationale du travail dispose d’une Constitution. On l’emploie alors pour désigner toutes les
règles importantes pour une institution, quelle qu’elle soit (État ou pas). Le mot Constitution est alors diminué.

Formelle :

Premier sens : définition formelle au sens strict (définition que nous allons privilégier) : c’est l’ensemble des
règles qui émanent d’un acte juridique unilatéral posé par un pouvoir souverain, dans un écrit, et dont la
modification exige le respect de règles procédurales spécifiques. La Constitution belge du 7 février 1831, telle
qu’elle a été modifiée ultérieurement, répond exactement à cette définition.

Deuxième sens : Constitution au sens formel large : elle comprend plus largement, outre la Constitution au
sens formel strict, les autres règles situées au sommet de la hiérarchie des normes (écrites ou non écrites). On
place dans cette notion la Constitution belge, mais aussi les coutumes constitutionnelles, les principes
généraux du droit à valeur constitutionnelle, et aussi la jurisprudence constitutionnelle.

L’idée du constitutionnalisme c’est l’idée de mettre par écrit toutes les dispositions les plus importantes pour la
vie de l’état.

Première réflexion sur l’enjeu de constitutionnalisme. Il y a 2 façons de répondre à cet idéal de


constitutionnalisme : soit on travail par écrit soit on accepte que certaines règles constitutionnelles restent des
règles suprêmes, qu’on ne peut pas modifier n’importe comment, mais que ces règles ne soient pas
nécessairement écrites. On sort un peu de la Constitution au sens formel strict, c’est l’idée d’une Constitution
au sens formel large. Cette constitution vise toutes les règles supérieures et il n’y a pas seulement la
Constitution écrite, il y a aussi des coutumes, des principes généraux de droit, des jurisprudences. La question
est de savoir si on s’obsède à l’idée de tout mettre par écrit ou si l’on accepte que les règles importantes ne
soient pas écrites. La tendance contemporaine est de tenter de mettre un maximum par écrit mais ce n’est pas
toujours possible.

19
Deuxième commentaire, l’idée de départ, celle des révolutionnaires français et américains, c’est de doter l’état
d’une Constitution pour limiter les pouvoirs politiques. L’idée est de recourir à une constitution pour limiter et
encadrer. Cette idée est fondamentale, on la retrouve dans l’idée d’un état de droit, un état doté d’une
constitution qui s’impose aux pouvoirs publics qui ne peuvent pas se comportement n’importe comment. Le
constitutionnalisme va de pair avec la volonté de limiter. Mais, depuis la fin du 18e- 19 siècle beaucoup d’eau
est passé sous les ponts, on trouve dans les Constitutions contemporaines des objectifs politiques qui
impliquent, de la part des pouvoirs politiques, des marges importantes pour agir. Donc les Constitutions
modernes ne se contentent pas de limiter les pouvoirs mais exigent d’intervenir. Il y a là une ambivalence : la
Constitution est à la fois une limite mais en même temps le siège d’une obligation d’agir.

Troisième commentaire, l’idéal du constitutionnalisme passe par la généralisation de la justice


constitutionnelle. On entend par là des contrôles exercés par des juridictions portant sur la constitutionnalité
de toutes les autres règles de droit et en particulier la constitutionnalité des lois. L’idée est que la Constitution
est une norme suprême qui s’impose au pouvoir législatif lui-même. C’est la distinction entre le pouvoir
constituant, celui qui adopte la Constitution, et les lois qui doivent être conformes à la Constitution.
Évidemment, cette suprématie de la Constitution risque de ne pas être réalisée si on ne prévoit pas que des
juges puissent contrôler la conformité des lois elles-mêmes à la Constitution et, le cas échéant, que ces juges
puissent annuler/ne pas appliquer les lois inconstitutionnelles. Cette idée de justice constitutionnelle n’a pas
été d’amblé reçue universellement, elle est aujourd’hui en plein essor. Il n’y a pas tous les états qui sont dotés
d’une Cour constitutionnelle mais cette idée se fait progressivement.

Quatrième commentaire, ce phénomène de la justice constitutionnelle va de pair avec un vaste mouvement de


constitutionnalisation de toutes les branches du droit. A partir du moment où une Cour constitutionnelle peut
examiner la conformité des lois à la Constitution, nous allons avoir dans toutes les branches du droit que le
juge constitutionnel examine la conformité de ces lois à la constitution telle qu’il faut la comprendre
aujourd’hui.

L’idéal du constitutionnalisme n’est pas parfaitement atteignable pour 3 raisons :

La Constitution au sens formel ne pourra jamais englober toutes les règles de droit jugées importantes dans
l’état. Nul ne pourra nier l’importance du Code électoral, ce sont des centaines d’articles extrêmement précis.
Évidemment, nous n’allons pas mettre, dans une Constitution au sens formel stricte qui doit être lisible, toutes
les règles importantes.

Des règles de la Constitution au sens formel ne relèvent pas de la Constitution au sens matériel. Les hasards de
la vie politique expliquent que l’on trouve parfois, dans la Constitution, des règles qui sont assez anecdotiques.

Les états dépourvus de Constitution au sens formel, il n’y a qu’une Constitution au sens matériel.
Au Royaume-Unis il n’y a pas de Constitution formelle écrite avec des règles jurisprudentielles. Il y a également
des conventions de la Constitution, ce sont des pratiques considérées comme politiquement obligatoires mais
que les cours et tribunaux ne peuvent pas sanctionner, ne peuvent pas veiller à leur application.

SECTION 2 : ORIGINES HISTORIQUES ET SIGNIFICATION POLITIQUE DE LA CONSTITUTION

Emmanuel Joseph Sieyès (1748-1836)

Il définit la Constitution au sens formel. Le tiers-état est une notion de l’ancien régime, on distinguait 3 états
c’est-à-dire 3 assemblées regroupant les 3 principales classes sociales : la noblesse, le clergé et le tiers-état.

20
Sieyès dit « le temps des privilèges réservés au clergé et à la noblesse est révolu ». Il sent les idées égalitaires
qui caractérisent la révolution française. Il nous dit puisqu’il faut considérer que les privilèges doivent
disparaitre et c’est le tiers-état qui doit se déclarer assemblée générale. Aujourd’hui encore, l’assemblée
nationale demeure. Par cet abbaye Sieyès fournit le mode d’emploi pour les révolutionnaires. Il dit que c’est la
nation qui est détentrice de la souveraineté, le temps est fini où le souverain peut être le Roi. La nation va
exprimer sa souveraineté par l’adoption d’un acte juridique unilatéral qui est la Constitution. La Constitution
est l’œuvre de la Constitution. Nous trouvons donc une définition de la Constitution « les corps (3 pouvoirs) qui
existent et agissent par elle (la Constitution) ne peuvent point y toucher ».

Guerre d’indépendance et révolution américaine 1776 : « no taxation without representation »

Dès 1976, aux USA, les 13 colonies anglaises avaient fait la révolution. Ils proclament leur indépendance et se
dotent chacune d’une Constitution. L’idée de base qui anime les révolutionnaires américains, ce que les 13
colonies ne supportent pas c’est d’être obligés de payer des impôts levés par le Parlement de Westminter dans
lequel ils ne sont pas représentés. Ils veulent que leurs taxes soient décidées par des représentants à eux. C’est
précisément la Constitution de chaque ex-colonie qui va exposer ce principe. Donc la Constitution aux USA est
associée à une nécessaire limitation des pouvoirs politiques. En 1787, les colonies devenues états indépendants
et membres d’une confédération, renoncent à leur souveraineté et fondent les USA qui devient un état fédéral.
Il y a donc une Constitution qui chapote les Constitutions des états fédérés (des 13 colonies).

Cour suprême des USA : arrêt Marbury c. Madison du 24 février 1803

Il est le premier arrêt par lequel la Cour suprême se déclare compétente pour contrôler la constitutionnalité
des lois fédérales et fédérées. La Constitution écrite, formelle des USA, ne précisait pas que la Cour suprême
était compétente pour le contrôle de conformité des lois fédérales. La Cour suprême a donc du décidé si,
malgré ce silence de texte constitutionnel, elle pouvait se déclarer compétente pour contrôler la conformité
des lois fédérales. John Marchal raisonne d’un point de la vue du droit et d’un point de vue politique. En droit,
il dit ceci « c’est la norme suprême », il est bien établi que le pouvoir législatif doit respecter la Constitution,
donc il est logique que les juges de la Cour suprême soient les gardiens ultimes de la suprématie
constitutionnelle. La norme supérieure l’emporte sur une norme hiérarchiquement inférieure, donc le juge
peut contrôler la conformité d’une loi. Par ailleurs, il y a un raisonnement plus politique. Imaginons que nous,
cours suprêmes nous ne nous déclarons pas compétents de contrôler la constitutionnalité des lois fédérales.
On verra que chaque état fédéré va se faire juge lui-même de cette constitutionnalité des lois fédérales. Et de
fait, dans les états fédérés, les autorités politiques étaient disposées à contrôler les lois fédérées. Mais il y a un
danger de mort car si des lois fédérales (qui doivent s’appliquer dans tout l’état fédéral) s’appliquaient dans un
état mais pas dans un autre ce serait la mort de l’état fédéral américain, la Cour suprême dit qu’elle va vérifier
si les lois fédérales sont oui ou non conformes à la Constitution.

Deux idées :

La Constitution sert à limiter les pouvoirs des gouvernants. L’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme
et du citoyen mérite d’être méditer. La Constitution est associée à un instrument de limitation via par la
séparation des pouvoirs et par la consécration des droits fondamentaux.

La Constitution comme expression, comme manifestation juridique de la souveraineté nationale. La


Constitution c’est le moyen, pour la nation, d’exprimer sa souveraineté en vertu de l’article 3 de la Déclaration
des droits de l’Homme et du citoyen

21
Donc, la Constitution est alors un acte juridique unilatéral qui n’a plus rien à voir avec les pactes de l’ancien
régime. A l’époque de la monarchie, il existait des pactes passés entre le Roi et ses sujets. La Constitution au
sens formel et moderne du mot ce n’est pas un contrat, c’est un acte unilatéral car il n’y a que le peuple qui
peut lui donner à lui-même une Constitution.

SECTION 3 : LE POUVOIR CONSTITUANT

Pouvoir constituant originaire Pouvoir constituant dérivé

Le pouvoir qui, à la suite d’une révolution, à édicter une C’est un pouvoir institué par la Constitution. Nous sommes
nouvelle Constitution qui n’est pas reliée aux dispositions dans un fonctionnement normal d’un état de droit, la
constitutionnelles précédentes. Constitution a prévu elle-même dans quel cas son texte
pourra être révisé en toute régularité. En Belgique, c’est
Quand on étudie comment des Constitutions se sont l’article 195 C° qui impose les procédures pour réviser la
fabriquées, on constate qu’un pouvoir de fait c’est auto- Constitution.
institué pouvoir constituant en se liant à des règles de
procédures qui consistent par exemple d’élire un Congrès On recherche un équilibre entre l’immobilisme et la
national (le cas de la Belgique) en vertu d’une décision souplesse. On ne peut pas avoir l’orgueil de penser que la
politique prise par le gouvernement provisoire. En réalité, il y Constitution dure pour l’éternité, il faut permettre des
a des règles pré constitutionnelles indispensables pour révisions. Mais il existe de grandes variantes procédurales
pouvoir instituer l’assemblée du pouvoir constituant. et ces variantes procédurales sont associées à un certain
D’autres règles pré constitutionnelles sont présentes autres degré de rigidité. Nous avons des Constitutions hyper
parts dans le monde, par exemple la ratification d’un texte rigides et d’autres hyper souples.
par référendum. Il faut soumettre le texte de la première
Constitution à un référendum par lequel les citoyens peuvent
dire oui ou non.

Dans l’hypothèse d’une renaissance du pouvoir constituant


originaire à la faveur d’une révolution, on peut parler d’un
droit trans-constitutionnel qui sont des règles imaginées par
un pouvoir constituant qui veut briser avec l’ordre
constitutionnel antérieur.

Les techniques qui sont d’habitude utilisées pour la procédure de révision de la Constitution sont au nombre
de 5 :

La voie parlementaire consolide : suivre la mm procédure que pour une simple loi mais avec des majorités
renforces (quorums de présence, soufrage, ect)

La voie parlementaire étendue dans le temps : on ne va pas permettre à l’assemble législative d’adopter des
nouvelles dispositions, on va imposer un délai de réflexion T+1 on rediscute

La voie référendaire : l’entrée en vigueur de la Constitution est soumise à un referendum ou l’assemble des
citoyens prennent une décision

22
La voie fédérale : propre aux états fédéraux, dans un état fédéral on doit associe les collectivités fédères, on va
demander à l’ensemble des collectivités fédérés s’ils sont d’accord

La voie conventionnelle : exercer le pouvoir Constitution originaire mais on peut l’utiliser pour exercer le
pouvoir constituant dérive, élire une assemble compose d’élus donc l’unique mission est de réviser la
constitution

A ces 5 techniques est associe un degré de rigidité de la Constitution : selon l’exigence on parlera d’une
Constitution rigide ou peu rigide. A l’extrême la Constitution souple est une Constitution matérielle. Toutes ces
techniques peuvent se combiner.

Au plus une Constitution est rigide, plus est vouée à devenir flexible à travers ses interprétations, plus grand
est le pouvoir de ceux qui auront la charge de l’interpréter, au moins elle sera révisée, ce qui va faire que ceux
qui vont en adapter les prescriptions par rapport au développement de la société seront tous les organes
d’applications de la constitution, plus précisément en dernière instance la cour constitutionnelle ou la cour
suprême qui va dire la manière de comprendre la constitution. Pouvoir considérable ce qui a fait que le texte
de la constitution est resté intacte mais il y’a des manières de comprendre le texte tout à fait différent.

Les justifications de la rigidité constitutionnelle :

Conséquence de la suprématie constitutionnelle : Dans un état fédéral la rigidité de la constitution saute aux
yeux, il faut s’assurer le soutien des états fédérées ou du moins une majorité d’entre eux. La base d’un état
fédéral et des collectivités politiques fédérées c’est la constitution. Toutes révisions de la constitution mettent
potentiellement l’existence même et les compétences des collectivités fédérées en jeu. En Belgique ce n’est
pas le cas car on le vielle art 191 devenu 195 qui n’est pas adapté depuis 1831.

Justification de pure logique : la constitution se définit comme une norme suprême, au-dessus de toutes les
autres, c’est la traduction de la souveraineté du pouvoir étatique. Si on peut modifier la constitution comme
une loi alors la constitution ne serait pas suprême. Donc qui dit suprématie dit rigidité.

Temporalité de la nation : Le souci d’associé le peuple à la révision de la constitution par une majorité
renforcée plus large afin d’associer les minorités et donc pour élargir l’assise de la légitimité constitutionnelle.
On veut que tous les citoyens se sentent en mesure d’adopter la constitution. On se préoccupe aussi de la
même manière de protéger les minorités, c’est une notion essentielle en démocratie car la démocratie n’est
pas une tyrannie de la majorité. Pour réviser la constitution il faut une majorité de 2/3, on associe donc
nécessairement une partie de la minorité, la minorité est réduite.

Qualité de la délibération : Pas trop vite pour assurer la qualité de la délibération. La rigidité de la constitution
est souvent associée au souci de donner du temps au pouvoir constituant dériver pour travailler de manière
qualitative. Le temps est la meilleure garantie de délibération et donc de la qualité du texte.

Constitutionnalisme : Pas trop souvent, cela a pour but d’empêcher le pouvoir constituant dériver de modifier
trop souvent la constitution au détriment de sa stabilité car la constitution a un but de stabilité. Il faut une
juste mesure parce qu’il ne faut pas un immobilisme non plus.

23
Dans plusieurs constitutions on ne trouve aucune limite matérielle mais on laisse le pouvoir constituant dérivé
libre de réviser n’importe quel article. Or dans certains états comme l’Allemagne on trouve une liste d’articles
qui sont irrévisables. La constituant allemand décide de soustraire à la sensation de revenir en arrière et de
méconnaître les droits de l’homme qu’elle avait transgressé lors de la guerre. Donc le gouvernement allemand
a introduit cette clause d’éternité pour les droits fondamentaux de sa constitution. Dans la constitution on peut
dire que des articles ne sont pas révisable mais juridiquement le pouvoir constituant est souverain. Cependant
ça revient à dire qu’il n’y a pas de différence entre le pouvoir constituant originaire et le pouvoir constituant
dérivé. Pour les positivistes le pouvoir constituant originaire n’appliquait pas le droit, il l’a créé. Donc pour eux
le pouvoir constituant dériver est souverain comme Vetel le pensait et ceux qui pensent comme lui. S’ils
veulent faire la révolution et aller à l’encontre des principes fondamentaux alors il faut l’assumer, d’où l’intérêt
de ces clauses irrévisables. La seule personne qui peut contrôler le constituant c’est la cour constitutionnelle.
Rare sont les constitutions qui prévoient ce contrôle. Là où ce contrôle n’est pas prévu le pouvoir constituant
dériver respecte ou pas ces limites matérielles. Si le pouvoir constituant dériver ne respecte pas les articles
irrévisables alors le pouvoir fait une révolution et comme ça le peuple est alerté. L’intérêt de ces règles est
d’alerter le peuple.

SECTION 2 : LA SUPREMACIE CONSTITUTIONNELLE

C’est la caractéristique par excellence. La constitution au sens formelle a 2 caractéristiques : la rigidité et la


suprématie constitutionnelle.

Les garanties de la supermacie constitutionnelle La relativisation de la supermacie constitutionnelle

Cette suprématie qui caractérise la notion formelle de Une constitution est une norme suprême mais il faut bien
constitution serait largement théorique si elle n’était pas savoir qu’il y’a une série de normes constitutionnelles qui
accompagnée de garantie, qui peuvent être politique mais la échappent au contrôle du juge. On sait que la cour
garantie la plus forte est l’intervention de juges qui peuvent constitutionnelle n’est pas compétente pour vérifier la
vérifier la conformité des lois par rapport à la constitution. constitutionnalité de l’élaboration de la loi. Il y’a des règles
de droits qui échappent au contrôle constitutionnel. C’est le
Modèle américain caractérisé par 3 traits : droit politique notamment qui évite le contrôle de la cour
Contrôle diffus : car aux USA on estime que n’importe quel constitutionnelle, ce qui est en rapport avec la politique est
juge peut décider de ne pas appliquer une loi car elle est contrôler par des organes spécifiques.
contraire à la constitution, ils peuvent tous vérifier la
constitutionnalité des lois. Bien sûr en dernière instance c’est La force normative est relative car il y’a une série de règles où
la cour suprême qui assure la cohérence. En Belgique c’est un aucun juge ne peut statuer sur la constitutionnalité de ces
Contrôle concentré qui est uniquement dans les mains de la règles
cour constitutionnelle.
Contrôle concret : car on ne demande pas à la cour de statuer
sur n’importe quelle loi. On demande à un juge de se
prononcer sur un litige qui lui est soumis et que pour
trancher ce litige le juge doit voir par lui-même si la loi
respecte ou non la constitution. C’est un litige concret qui
donne au juge l’occasion d’examiner la constitutionnalité
d’une loi.
Contrôle relatif : l’autorité de choses jugées qui s’attache à
l’arrêt a une autorité de choses jugées relative c’est-à-dire
qui s’applique uniquement pour les partis au litige.
Cependant dans les pays où il y’a du common law, il y’a une
autorité non négligeable de la décision de la cour.

24
En Europe on n’a pas le common law avec la règle du
précédent obligatoire. En Europe on a été marqué par Hans
Kelsen qui a plaidé pour un contrôle juridictionnel de la
constitutionnalité des lois par un seul organe. Une cour de
spécialiste (pas tous juriste, aussi parlementaire) devrait avoir
la compétence directement et ne pas devoir attendre pour
statuer les appels jusqu’à elle. Arguments :

Force obligatoire de la Constitution : Une constitution est


suprême, c’est sa force obligatoire qui la caractérise. Cette
force obligatoire serait théorique si un juge n’était pas
compétent pour assurer l’effectivité de la suprématie de la
constitution.

Rigidité constitutionnelle : À quoi sert la rigidité


constitutionnelle qui caractérise la notion de constitution au
sens formel strict si on ne prévoit pas un contrôle
juridictionnel par rapport à la constitutionnalité des lois. Il
faut une sanction pour frapper le non respecte de la
constitution.

Protection de la démocratie : La garde de la démocratie est


assurée par le juge (juge gardien des promesses). La
constitution se préoccupe des droits de l’homme, de la
séparation des pouvoirs. Donc il faut un gardien pour assurer
le respect de ces valeurs ce qui est important pour la
démocratie qui se préoccupe des minorités et pas que des
majorités. Donc une minorité a tout intérêt de pouvoir saisir
un juge pour un problème d’inconstitutionnalité d’une loi.
Dispositif de protection des minorités et donc garanti de la
démocratie.

Le bon fonctionnement de la fédération : tout état fédéral a


besoin d’un juge constitutionnel car qui dit état fédéral dit
règles répartitrices de compétences, répartition du pouvoir
de légiférer entre le fédéral et le fédéré. Le fondement du
système est dans la constitution. Les règles de répartition
sont dans la constitution. Quand il y’a un désaccord entre
l’état fédéral et une des collectivités politique fédérées, il est
capital de trancher ce litige par un juge constitutionnelle qui
est au-dessus de la mêler.

Modèle européen pensé par Hans Kelsen :


Concentré : une seule juridiction monopolise le contrôle de la
constitutionnalité des lois.
Abstrait : contrôle portant sur la loi elle-même, quand un
requérant peut directement mettre en cause une loi et pas
nécessairement à l’occasion d’un litige. En Belgique, on peut
saisir la cour par un recours lors d’un litige mais on peut aussi
faire un litige abstrait qui porte uniquement sur la
constitutionnalité d’une loi. Mais c’est aussi possible sur
question préjudicielle où on s’interroge sur la conformité ou
pas d’une loi lorsque le juge doit trancher un litige, il va poser
cette question à la cour constitutionnelle avant de juger et il
va appliquer la loi ou non en fonction de la réponse de la cour
dans son arrêt.

25
Absolu, effet erga omnes : l’arrêt ayant une autorité de
choses jugées : lors d’un recours en annulation la décision de
la cour constitutionnelle d’annuler la loi a un effet large, la loi
est anéantie et tous les citoyens doivent le savoir. Plus
d’autorité de choses jugées dans la limite des partis au litige
mais une autorité absolue de choses jugées.

Il faut rappeler que pendant longtemps, essentiellement Quand on dit la constitution est par hypothèse une norme
pendant la seconde guerre mondiale, des pays ont refusé suprême on ajoute un normé superbe au sommet du system
qu’un juge puisse contrôler la constitutionnalité des lois car juridique national. Quand est-il de l’hypothétique conflit
on faisait confiance au parlement. Les parlementaires entre une règle constitutionnelle et une règle de droit
disaient qu’ils étaient les meilleurs garants de la international ou européen. Ce conflit se déroule assez
constitutionnalité de leur propre loi et se méfient d’une sorte rarement mais existe bien, ce conflit appel à un raisonnement
de gouvernement des juges. Il y’a des craintes d’un subtil. On est devant un problème théorique qui a encouragé
gouvernement des juges. les théoriciens du droit à théorisés des approches très
différentes :
De manière formelle, on admet que les juges contrôlent la
légalité des règlements mais ce contrôle n’est pas raisonné Monisme juridique avec primauté du droit interne : On a
autrement que le contrôle par les juges par rapport à la l’ensemble du droit international public, l’ensemble du droit
constitution. Dans tous les cas le juge regarde toujours la européen, l’ensemble du droit interne. Au fond le droit serait
conformité par rapport à d’autres règles et pas de jugement unique, pas lieu de distinguer le droit interne et international.
de valeur. Un seul droit mais la primauté revient au droit interne. Ces
juristes disent qu’il faut toujours partir du droit interne et
En réalité le juge constitutionnel a un pouvoir redoutable. Il analyser le droit international par rapport à ce fondement
ne fait pas que constater la conformité des lois par rapport à interne. Donc le fondement du droit international est le droit
la constitution, en réalité il interprète d’une manière ou interne. Donc chaque état construit lui-même son rapport
d’une autre. Cet acte d’interprétation n’est pas un pur acte avec le droit international. Pour ces juristes pas de doute, s’il
de connaissance, c’est à la fois poser un acte de connaissance y’a un conflit c’est toujours la norme interne qui l’emporte
de type scientifique en mettant en œuvre des techniques sur le droit international. Cette théorie va à l’encontre de
d’interprétation mais à un moment donné le juge va avoir le l’idée de droit international qui doit obliger les états. La
choix entre différentes interprétations. Il y’a des manières théorie du monisme avec primauté du droit interne contredit
différentes d’interpréter la loi qui est en cause et les normes l’existence même du droit international.
constitutionnelles pertinentes par rapport à la loi qui est
contrôlée. L’acte d’interprétation, pour Hans, c’est
déterminer un cadre ouvert à plusieurs possibilités. Monisme juridique avec primauté du droit international : Est
défendu par Hans mais cette théorie n’est pas parfaitement
Il y’a à un moment donné ce que l’intérêt général postule convaincante car on ne peut pas faire comme si le droit
donc c’est poser un acte politique. Mais cet acte politique est international était le fondement du droit interne. S’il y’a un
caché car un juge raisonne en droit contrairement à un acte droit international c’est parce qu’il y’a justement des états
politique. Donc le juge recouvre l’interprétation politique par souverains, le fondement du droit international c’est la
des raisons juridiques, on cache les motifs politiques. Souvent volonté des états. Prétendre que le droit international est
il n’y a pas qu’un raisonnement juridique. une sorte de règle répartitrices de compétences entre les
ordres juridiques nationaux c’est transformer la réalité et
L’essentiel est que les juges constitutionnels s’astreignent à heurter le concept même de constitution qui est
justifier en droit de la manière la plus complète possible. incompatible avec le monisme juridique avec primauté du
Dans les cas difficiles avec des enjeux politiques, on voit bien droit international. Dans la réalité on ne voit jamais un juge
que la cour constitutionnelle ne donne pas une motivation international annuler une loi interne, national, il n’a pas ce
parfaitement cohérente et parfois il y’a des tensions entre pouvoir.
juges ce qui fait que le texte de l’arrêt reflète une
incohérence. C’est la doctrine qui se charge d’interpréter les Les traités n’ont effet qu’après avoir l’assentiment de la
arrêts de la cour constitutionnelle. chambre des représentants. L’état belge a souverainement
décidé qu’à partir du moment où le roi et le ministre des
affaires étrangères a ratifié un traité, ce dernier entre dans
l’ordre juridique belge par l’effet d’une loi d’assentiment. Dès
que la chambre adopte une loi d’assentiment le traité entre
dans l’ordre juridique interne belge et peut être appliqué par
les juges belge.

26
L’arrêt Lusky dit que s’il y’a conflit entre loi interne et un
traité international, la cour de cassation dit que le juge doit
refuser d’appliquer la règle de droit interne contraire au droit
international, en Belgique.

Dualisme : Il consiste à dire qu’entre ces 2 monisme il y’a une


cloison étanche. Cette théorie dit que le droit n’est pas un,
pas de monisme juridique. Le droit est duel : il y’a le droit
international d’un côté et de l’autre le droit interne, avec
entre les 2 une cloison. Il y’a interpénétration, le rapport ente
le droit international et interne se rallie à une approche
pluraliste. Ça consiste à dire qu’il y’a une large autonomie du
droit international et droit interne mais il y’a des rapports
d’interpénétration mutuel, chacun influence l’autre. L’idée de
base de l’approche pluraliste du droit est qu’il faut accepter
la pluralité des points de vue. Les problèmes doivent être
abordé successivement sous le regard du droit international
et le point de vue interne.

Jamais un juge applique une règle de droit international, le


juge n’applique que des règles de droit interne. Les anglais
ont donc choisi une approche dualiste qui consiste à dire que
les règles de droit internationales doivent être transformer
en règles de droit interne pour pouvoir être appliquées par
les juges nationaux. Ces règles s’appliquent donc en tant que
loi. Cette hypothèse appelle des solutions très différentes en
fonction de si on est dans un état avec une approche
monisme (Belgique) et un état avec un approche dualiste (R-
U).

En Angleterre le juge Britannique raisonne d’une autre


manière. Quand un traité a été transformé en loi puis que par
après le Royaume-Uni adopte une loi postérieure qui va
contre le traité transformé en loi alors Le juge appliquera la
loi postérieure car là-bas la règle est que le postérieur prime
sur l’antérieur. Le Royaume-Uni pourra donc se faire
condamner par une juridiction de droit international qui va
considérer que le Royaume-Uni est internationalement
responsable d’avoir violé une loi internationale. C’est la
théorie du pluralisme juridique qui est pertinente pour voir
les rapports entre le droit interne et international. Les
conséquences de cette primauté vont varier en fonction de si
on se trouve dans un ordre juridique interne qui pratique le
monisme ou le dualisme.

La Cour de Justice de l’Union à imposer à tous les états


membres de l’UE un raisonnement moniste, qu’ils doivent
imposer la priorité du droit européen même si la règle de
droit interne s’y oppose et même si elle est constitutionnelle,
même si c’est une règle de la constitution.

Si le droit de l'Union européenne emprunte au droit


international certains principes fondamentaux, il se présente
néanmoins comme un ordre juridique foncièrement distinct.

27
Cette singularité se dégage en particulier de quelques arrêts
fondateurs de la Cour de justice de l’Union européenne.

Arrêt Van Gend en Loos rendu le 5 février 1963 : l’affaire


porte sur une question précise : est-ce que l’actuel art 30 du
TFUE produit des effets directs ? La règle qui est posée est
très claire : si on trouve, dans le traité, une règle
suffisamment claire, précise et inconditionnelle (ne
dépendant pas d’une condition qui consisterait en une
intervention supplémentaire, soit de l’UE, soit des États
membres), alors les juges nationaux doivent appliquer la
règle et satisfaire le justiciable devant lui, à son profit. Cet
article 30 est un article sur le paiement de frais de douanes,
et la société de transport Van Gend en Loos râle parce que
l’État néerlandais lui fait payer des frais de douane. On lui
conseille d’invoquer l’article 30 car il est suffisamment clair,
précis et inconditionnel et donc les Pays-Bas doivent annuler
ces frais de douane.

Arrêt Costa contre Enel : C’est l’arrêt le plus important de


tous les arrêts rendu par la cour justice de l’union car cet
arrêt constate le droit absolu de l’union sur tous les autres
droits. Un juge italien constate qu’il y a une contradiction
entre la loi italienne et certaines dispositions de la traite
européen. Ce juge va poser une question préjudicielle à la
Cour Constitutionnelle italienne et à la Cour de Justice de
l’Union. La Cour Constitutionnelle répond qu’elle pratique le
dualisme et estime que le juge doit appliquer la loi italienne
et qui dit que si l’UE n’est pas d’accord alors elle pourra
introduire un recours (..)La Cour de Justice de l’Union dit
qu’elle ne va pas attendre un recours mais que le juge doit
appliquer la loi conformément aux traites qui a été signiez
avec l’UE.

Arrêt Simmenthal, C.J.C.E., 9 mars 1978, 106/77 : cet arrêt dit


que le juge national n’a pas besoin d’une autorisation de son
ordre juridique interne pour faire ce qu’il doit faire, c’est-à-
dire refuser d’appliquer sa règle de droit interne contraire au
droit de l’UE. Et il va même plus loin : quand bien même
l’ordre juridique national ne donnerait pas ce pouvoir au juge
national d’écarter la règle de droit interne contraire au droit
de l’UE, la cour de justice impose au juge national de se
déclarer compétent pour écarter toute règle de droit interne
contraire au droit de l’UE.

Arrêt « Internationnale Handelsgesellschaft »

la cour constitutionnelle allemande qui a été la première à


s’énerver : elle a dit qu’il y a quand même un problème : la
cour de justice dit que le droit né des traités est issu d’une
source autonome par rapport à la volonté des États
membres. La cour constitutionnelle dit que c’est faux, le droit
né du traité est issu de la volonté concordante des États
membres de l’UE, et à la base de l'ordre juridique national de
chacun des États membres, il y a une constitution suprême.

28
Donc le droit né du traité n’est pas issu d’une source
autonome mais de la volonté souveraine des États, qui ont à
la base de leur ordre juridique une constitution suprême.
Donc la cour constitutionnelle allemande accepte la primauté
du droit de l’UE, mais pas sans réserve. Et les réserves de
constitutionnalité qu’elle leur oppose concerne
essentiellement 4 thématiques :

Les règles réparatrices de compétence entre l’UE et les États


membres : Les traités exposent les règles qui répartissent les
compétences entre l’UE et les États membres. La cour
constitutionnelle allemande dit qu’en dernière instance, c’est
elle qui sera juge du respect de ces règles répartitrices de
compétence. Donc si par malheur l’UE devait s’entêter à se
déclarer compétente pour agir ultra vires, c’est-à-dire au-delà
des attributions que les États ont conférées à l’UE, alors la
cour constitutionnelle se réserve le droit de ne pas appliquer
le droit européen.

Les droits de l’Homme : c’est un droit sacré en Allemagne,


donc pas question d’accepter que le droit de l’UE les
obligerait à méconnaitre un de ces droits

Les principes de la démocratie : si l’un de ces principes est


méconnu par le droit de l’UE, la cour constitutionnelle fera
prévaloir les principes démocratiques consacrés dans sa
constitution.

Tout ce qui a trait à l’identité nationale : c’est-à-dire les règles


les plus importantes consacrées par la constitution
allemande.

La cour constitutionnelle allemande se veut rassurante en


disant que normalement il n’y aura pas de problème, parce
que les valeurs de l’UE sont les mêmes que les valeurs
auxquelles les États membres tiennent le plus (art 2 TUE).

Dans le traité de Lisbonne entré en vigueur en 2009, on a


quand même traduit ces réserves de constitutionnalité, du
moins jusqu’à un certain point. Art 4§2 TUE : le traité lui-
même a entendu la résistance des cours constitutionnelles
(car la majorité des cours constitutionnelles a suivi la
résistance de la cour constitutionnelle allemande), et donc ils
ont inséré dans le TUE cet art 4§2 qui impose à l’UE de
respecter les identités nationales. Mais le problème n’est pas
réglé pour autant, car la cour de justice s’estime juge en
dernière instance du respect de cet art 4§2. Et dans l’art 4§3,
il est dit que les États doivent respecter le droit de l’UE. Donc
du point de vue de la cour de justice, en dernière instance,
c’est à elle de décider si les règles répartitrices de
compétences sont respectées ou pas. Mais la cour
constitutionnelle allemande, elle, se réserve le droit
d’opposer une réserve de constitutionnalité si elle n’est pas
d’accord avec une des règles. Il n’y a donc pas moyen de
s’entendre, sauf en faisant preuve de bonne volonté. Car la
cour de justice de l’UE, de son point de vue, a raison, mais les
cours constitutionnelles nationales, de leur point de vue, ont
aussi raison. C’est le principe du pluralisme juridique. La cour

29
de justice a pu interpréter le droit né du traité comme un
droit issu d’une source autonome, l’idée c’est que le droit de
l’UE n’est pas seulement un droit produit de la volonté des
États membres, il y a un intérêt général supranational qui
dépasse la somme des intérêts nationaux. Mais du côté de la
cour constitutionnelle nationale allemande, on peut aussi
comprendre que sa source suprême, c’est la constitution, et
que ce n’est pas illégitime de vouloir protéger ses intérêts
constitutionnels.

Si le dialogue entre les deux se passe bien, ça peut être très


positif. Pendant très longtemps, le droit européen ne
s’intéressait pas aux droits de l’Homme. Il n’y avait pas, dans
le passé, de catalogue de droits fondamentaux, et il n’y avait
pratiquement rien dans le droit des traités. La cour
constitutionnelle allemande a dit que cette situation n’allait
pas, et qu’aussi longtemps que le droit européen ne
contiendrait pas des garanties pour des droits de l’Homme, la
cour constitutionnelle allemande se réserverait le droit de
faire passer avant ses propres droits fondamentaux. Et du
coup la cour de justice de l’UE s’est dit qu’il faudrait combler
la lacune, et elle l’a fait. La cour a commencé à s’intéresser
aux droits fondamentaux et après est venue la charte. Donc
une relation dialectique entre les cours constitutionnelles et
la cour de justice peut être positive.

Mais il y a, du côté des pays de l’Europe centrale et orientale,


certaines juridictions et autorités politiques qui pourraient
profiter de ces réserves de constitutionnalité pour s’opposer
durement au droit européen et mettre alors end anger la
pérennité de ce droit. Donc attention, il y a potentiellement
une menace pour le droit européen si ces réserves de
constitutionnalité font l’objet d’un abus.

SECTION 5 : FONCTIONS DES CONSTITUTIONS

À quoi sert une constitution ? En assumant la part de convention de cette distinction, nous avançons qu’une
constitution cherche à endosser deux grandes fonctions qui se nourrissent mutuellement : une fonction
normative et une fonction intégrative. Étudier ces fonctions conduit à s’intéresser au rôle, aux effets et aux
usages de la Constitution, et donc à aller au-delà du point de vue interne au droit. Toutefois, considérer qu’une
Constitution ou qu’une clause constitutionnelle revêt, par exemple, un statut de symbole « n’implique
d’aucune manière que les normes en question sont dépourvues de force juridique. En d’autres termes, le
même texte peut très bien avoir une signification symbolique en même temps que juridique »

Fonction normative La Constitution a vocation à soumettre le pouvoir au droit. Cette fonction normative s’appuie sur la
suprématie constitutionnelle, en vertu de laquelle la Constitution est à la fois la norme suprême de
l’ordre juridique et y constitue la source des sources. Cette fonction normative entretient d’étroits
liens avec l’idéal démocratique. La Constitution forme un instrument de limitation des pouvoirs des
gouvernants et apporte des garanties essentielles aux droits et libertés. C’est la vocation

30
historiquement première du constitutionnalisme. Il ne faut pas placer dans la Constitution des espoirs
considérés, nulle Constitution n’a jamais protégé d’un coup d’État, nulle Constitution ne saurait
mettre un État à l’abri des dislocations qui le menacent, peut-elle servir de garde-fou et protéger
contre les entreprises de ceux qui, en l’absence de barrières, pourraient être incités à franchir trop
allégrement les parapets. La Constitution ne se borne pas à limiter les pouvoirs des gouvernants, elle
investit dans le même mouvement ces gouvernants de la puissance de l’État et exclut tout autre
prétendant de l’exercice des pouvoirs. La Constitution désigne ainsi les autorités habilitées à exercer
légitimement les pouvoirs de l’État. Elle justifie une division du travail politique. Cette force de
légitimation liée à la fonction normative n’est pas confinée à l’ordre interne. La Constitution tient
aussi lieu de carte de visite internationale de l’État. Un État digne de ce nom peut difficilement se
passer de ce document et du halo de respectabilité qui l’entoure, quand bien même il ne serait
qu’une façade occultant le caractère dictatorial de son régime politique.

Fonction d’intégration La Constitution est aussi appelée à remplir une fonction d’intégration. Elle contribue à rassembler
les membres d’une société pour former une communauté politique qui transcende les différences
et les conflits qui la traversent. La Constitution apparaît comme la garantie du consensus de base
nécessaire à la cohésion sociale.

Pour intégrer, la Constitution procède à une double opération de dénégation et de consécration.

Fonction de Légitimation de l’État : un grand nombre d’États se dotent de magnifiques constitutions dans
légitimation l’espoir de légitimer les pouvoirs publics, mais parfois elles sont juste une façade. Ça devient donc
une fonction purement idéologique, on recouvre d’un nuage de fumée des fonctions irrégulières.
Mais dans un idéal, la constitution assure cette triple fonction.

La constitution dépend en grande partie de ce que les citoyens veulent en faire. C’est aussi un
instrument de contestation des pouvoirs quand ceux-ci prennent des libertés avec la constitution.

Magnifiques constitutions, des véritables façades entre la pratique et la théorie = idéologie

SECTION 6 : L’INTERPRETATION DES CONSTITUTIONS

Toutes les règles de droit sont susceptibles de soulever des difficultés d’interprétation. La Constitution est
d’abord une règle de droit parmi d’autres. On ne saurait donc l’appliquer sans l’interpréter. Il est néanmoins
évident que la formulation de certaines règles ouvre le champ à une dynamique interprétative plus importante.
À cet égard, la Constitution comporte un grand nombre de normes vagues et indéterminées.

Méthodes d’interprétation de la Constitution : L’interprétation constitutionnelle se caractérise donc par une application
fréquente et intensive des méthodes d’interprétation du droit. On en évoquera cinq.

Méthode Le constituant est présumé s’exprimer en respectant le sens usuel des termes, en employant les mêmes
littérale termes pour qualifier les mêmes hypothèses et des expressions différentes pour qualifier des hypothèses
différentes. Dans un texte officiellement plurilingue comme la Constitution belge, l’interprète est invité à
tenir compte de ses différentes versions.

Méthode Tenir compte de sa place dans la loi ou dans la Constitution (intitules, chapitres, titres)
logique et
systématique

Historique Il s’agit d’interpréter le texte à la lumière soit de l’intention du constituant consigné dans les travaux
préparatoires, ceux de la convention ayant exercé le pouvoir constituant originaire ou ceux des assemblées

31
parlementaires délibérant sur les révisions, soit de ses différentes versions, soit du contexte historique dans
lequel la norme a été adoptée.

Téléologique S’appuie sur la finalité de la disposition constitutionnelle. C’est la méthode qui s’écarte le plus du texte,
puisque la raison d’être de la Constitution, son « esprit », dégagée par l’interprète s’inscrit dans le contexte
social et politique contemporain.

Doctrine La doctrine des originalités (cour suprême des USA) qui consiste à toujours se référer aux intentions des
pères fondateurs. Il faut continuer à interpréter aujourd’hui la constitution des USA en ayant en tête les
intentions originales, le sens originel.

La doctrine plus soucieuse de la nécessité d’adapter la constitution aux circonstances nouvelles. On ne peut
plus se référer uniquement à la volonté des pères fondateurs mais admettre que la constitution reçoit des
significations dynamiques au-delà de la signification originelle que le texte pouvait recevoir.

Ce sont des doctrines tout à fait opposées. Ce qui est déterminant, c’est une certaine politique
jurisprudentielle. Une cour constitutionnelle ne peut pas ne pas avoir une vision politique de ce que la
constitution doit servir, des fonctions que la constitution doit assumer, et c’est en décodant la jurisprudence
de la cour constitutionnelle que l’on peut percevoir les grands axes de cette politique jurisprudentielle.

CHAPITRE 2 : LA CONSTITUTION BELGE

SECTION 1 : LES COUCHES HIÉRARCHISÉES DE LA CONSTITUTION AU SENS FORMEL


LARGE

La supra constitutionnalité : Avant l'édiction de la Constitution proprement dite, deux décrets ont été adoptés
les 18 et 24 novembre 1830 par le Congrès national, l'un sur l'indépendance du peuple belge, l'autre sur
l'exclusion à perpétuité de tout pouvoir en Belgique de la famille des Orange-Nassau. Par un autre décret du 24
février 1831, le Congrès national déclare que « c’est comme corps constituant qu’il a porté ses décrets des 18
et 24 novembre 1830 ». Ces décrets ont ainsi été délibérément tenus à l'écart du texte de la Constitution
adoptée le 7 février 1831 pour qu'ils soient soustraits au pouvoir de révision régi par l'article 195.

Malgré l’intention contraire du Congrès national, la doctrine dominante considère que les décrets des 18 et 24
novembre 1830 sont révisables. Elle allègue que le Congrès ne pouvait pas leur conférer « une autorité dont il
ne disposait pas ». Ces décrets ayant été adoptés par le Congrès national en tant que corps constituant, ils ne
pourraient avoir qu'un rang constitutionnel, sans plus. Il est cependant permis de contester ce mode de
raisonnement. Il arrive qu'une même autorité émette des actes de valeur différente.

L’expression supra-constitutionnalité n’aide sans doute pas à clarifier le débat. La supériorité de pareille norme
réside dans l’impossibilité de les abroger par une révision constitutionnelle. Elles n’en restent pas moins de
nature constitutionnelle et peuvent être anéanties par l’autorité qui les a édictées, à savoir le pouvoir
constituant originaire.

Quant au fond des deux décrets, remarquons que si le sort réservé aux Orange-Nassau n'a qu'un intérêt
anecdotique et s’expose à plusieurs règles fondamentales du droit européen et international, il n'en va pas de
même du principe de l'indépendance de l'État. À supposer que ce principe n'ait pas été expressément érigé en
norme irrévisable, il y aurait d'excellents arguments pour en faire une limite inhérente ou tacite à l'exercice du
pouvoir constituant. En effet, l'indépendance de l'État, et donc son existence juridique, forme un présupposé

32
de toute Constitution. Il n'appartient dès lors pas au pouvoir constituant qui dérive de celle-ci d'en décider la
suppression. On est ici devant un raisonnement de logique élémentaire. Cela ne veut évidemment pas dire
qu'un État a nécessairement vocation à l'éternité, mais seulement que l'on ne peut pas le faire disparaître sans
une révolution juridique qui doit s'accomplir dans la conscience de ce qu'elle détruit sans pouvoir se couvrir
des apparences de la continuité constitutionnelle.

Ce qui est plus intéressant, c’est de combiner le décret du 18 novembre 1830 avec le décret du 24 novembre
1831. On ne trouve pas le décret du 18 novembre dans le corpus constitutionnel du 7 février 1831, mais le
décret existe, il a été adopté par le congrès national en tant que corps constituant. Il n’a pas été intégré dans la
constitution dans le but de rendre ce décret irréformable, parce qu’il échappe à l’art 195 de la constitution qui
régit la procédure de révision. Il y a des controverses à propos de cette irrévocabilité.

Une partie de la doctrine défend l’interprétation selon laquelle ce décret a une portée supérieure dans la
hiérarchie des normes à l’intérieur de la notion de constitution au sens formel, car c’est une disposition
irrévisable.

On peut considérer que ce décret est juridiquement irréformable car il signifie que le constituant a
délibérément soustrait ce décret sur l’indépendance du peuple belge à l’emprise du pouvoir constituant dérivé.
Car le pouvoir constituant dériver est organisé par l’art 195 de la constitution. Et dès lors que cet article ne
permet que de réviser les dispositions de la constitution formelle au sens strict, forcément, cet article ne
concerne pas le décret du 18 novembre 1830. Et cela a été volontaire.

Si demain on veut acter le divorce belge, si on veut décider de supprimer l’État belge, il faudrait abroger ce
décret. Or il est impossible de l’abroger, si ce n’est par une forme de révolution. Donc supprimer l’État belge
serait faire une révolution juridique. Il y a moyen d’encadrer cette révolution juridique.

Cela dit, il existe un autre courant dans la doctrine, qui est majoritaire, et qui consiste à dire que ce décret du
18 novembre 1830 a été délibérément soustrait à l’emprise du pouvoir constituant dérivé, mais c’est en tant
que corps constituant qu’il a été pris, et donc le pouvoir constituant dérivé, qui agit aussi en tant que pouvoir
constituant, pourrait l’abroger. Donc cette doctrine dit que le rang d’une norme dans la hiérarchie est
déterminé par la nature de l’organe qui l’a édictée.

Or c’est en tant que corps constituant que le congrès national a adopté ce décret du 18 novembre 1830, et
donc le rang dans la hiérarchie des normes de ce décret, c’est le rang constitutionnel, et donc on pourrait
abroger ce décret dans une révision de la constitution. Cette règle méthodologique n’est pas toujours absolue,
il n’est pas toujours vrai que le rang d’une norme est déterminé par la nature de l’organe qui l’a édictée (ex : la
loi spéciale). Ce décret n’est pas réformable autrement que par le réveil du pouvoir constituant originaire : avis
du professeur.

Reste à prendre en charge la délicate question des modalités par lesquelles le pouvoir constituant originaire
pourrait ressurgir et s’exprimer. En toute hypothèse, on ne voit pas comment l'on pourrait se passer d'un
référendum. Le statut de la Constitution justifie que sa refondation ou son abrogation repose sur la légitimité
particulière que confère cette procédure. Ce qui fonde la Constitution, c’est l’ensemble des citoyens qui ont en
commun la volonté de participer démocratiquement à leur propre organisation politique. Si cette volonté
n’existe plus, la Constitution perd à la fois son fondement et son objet. Elle doit s’apprêter à céder la place à
d’autres actes fondateurs. Mais un tel référendum constituant est-il juridiquement concevable ? La réponse
classique en Belgique est négative. Cette doctrine nous met face à un dilemme : soit la Constitution est
respectée et le référendum constituant est interdit, soit ce référendum est organisé et on verse dans
l’anarchie.

33
La Constitution au sens formel strict

Notions C’est ce texte adopté solennellement le 7 février 1831 par un congrès national composé d’élus au
suffrage censitaire, et ce congrès national a lui-même été convoqué par le gouvernement
provisoire, une autorité de fait qui avait dirigé la révolution belge de septembre 1830.

Le congrès national rédige cette constitution très vite, en quelques mois (élus le 3 novembre 1830
et la constitution a été adoptée le 7 février 1831).

Le 4 juin 1831, Léopold de Saxe-Cobourg Gotha est proclamé roi, il prend le trône le 21 juillet.

Fait dont tous les francophones de Belgique doivent se repentir : la traduction officielle de la
constitution en néerlandais n’a été promulguée qu’en faveur de la révision du 10 avril 1967. Cela
explique le ressentiment flamand à l’égard des francophones.

Il y a aussi une tradition officielle en allemand, depuis 1991 seulement.

Les Principes généraux du droit à valeur constitutionnelle

Les principes Primo, la Constitution écrite énonce elle-même certains principes généraux. C’est le cas des principes
repris dans le d’égalité et de non-discrimination repris aux articles 10 et 11 de la Constitution ou du principe de
texte même de la l’indépendance des juges repris à l’article 151 de la Constitution.
Constitution

Les principes généraux du droit peuvent être mis par écrit, et c’est la première espèce qu’on peut rencontrer
dans la constitution (ex : principe d’égalité et de non-discrimination art 10 et 11 de la constitution - ou
l’indépendance de la justice art 151 de la constitution et art 6 de la convention européenne des droits de
l’Homme).

L’intérêt de la catégorie des principes généraux du droit à valeur constitutionnelle, c’est d’englober d’autres
principes qui ne sont pas écrits.

Les principes Secundo, les principes généraux induits d’une généralisation de règles particulières de la Constitution. Ainsi,
généraux induits à partir d’une montée en généralité des articles 19 et 21 de la Constitution qui traitent d’aspects particuliers
d’une des relations entre les cultes et l’État, on peut déduire un principe de séparation Église/État.
généralisation de
règle particulière
de la Constitution
Principes généraux induits d’une généralisation de règles particulières de la constitution : art 19 et 21 de la
constitution : l’art 21 est un cas d’application d’un principe plus général, qui n’est pas écrit expressément
mais manifestement sous-entendu par cette règle particulière : le principe de la séparation des églises et de
l’État. Ce principe n’est pas écrit dans le texte constitutionnel, mais quand on lit les articles 19, 20 ou 21, on
voit que ce sont des règles particulières qui ne sont que l’application de ce principe plus général. Donc le
mode de raisonnement qui permet de rattacher ce principe général de droit à la constitution, c’est le fait
qu’on a précisément 3 articles de la constitution dont on peut induire ce principe (procédé de l’induction
amplifiante).

Principes Tertio, les principes généraux induits de l’économie générale de la Constitution. Ils n’apparaissent pas dans
généraux induits un article de la Constitution et ne peuvent être induits d’une disposition particulière de la Constitution, mais
de l’économie constituent le fondement d’un ensemble de dispositions. Ainsi en est-il du principe de la séparation des
pouvoirs1071. Ce principe découle de l’esprit du système de la Constitution, de la succession de ses articles

34
générale de la 36, 37 et 40, et de son Titre III, intitulé « des pouvoirs », structuré en chapitres correspondants au pouvoir
Constitution législatif, exécutif et judiciaire.

Principes généraux induits de l’économie générale de la constitution : on pratique de nouveau l’induction,


mais cette fois on part de la structure même du texte constitutionnel. Exemple type : le principe de la
séparation des pouvoirs. Ce principe n'est pas écrit en toutes lettres, mais quand on voit certains articles (36,
37 et suivants), comment est organisé le titre 3, on voit bien que tout le plan de la constitution est animé par
ce principe. Le congrès national a eu à l’esprit ce grand principe. Et il est à valeur constitutionnelle puisqu’on
le tire de l’économie générale du texte constitutionnel. Et la cour de cassation par exemple peut très bien
appliquer ce principe pour trancher des conflits.

Principes Quarto, les principes généraux du droit inhérents au système juridique. Cette catégorie suppose une montée
généraux en généralité supplémentaire. L’interdiction de se faire justice soi-même ou le principe d’État de droit sont
inhérant à l’ordre ainsi à ranger parmi ces principes indispensables au fonctionnement de l’ordre juridique.
juridique

Principes généraux inhérents à tout ordre juridique : exemple : le principe de la sécurité juridique, on ne
peut pas être piégé, on doit pouvoir savoir comment on sera traité par le droit (principe de prévisibilité).
Autre exemple : nul ne peut se faire justice à lui-même. Ici, on arrive à une montée en généralité
supplémentaire, on est au-delà du texte constitutionnel et de son économie générale, on s’appuie sur un
principe que pratiquement tous les juristes considèrent comme inhérent à un ordre juridique. On est là
devant un fondement qui va au-delà du texte constitutionnel. Il y a, dans la théorie générale du droit, la
notion de règle de reconnaissance de Hart. Ce juriste a montré qu’un système juridique ne peut pas
fonctionner sans un certain nombre de règles qui permettent d’identifier LES règles qui font partie d’un
système juridique. La règle de reconnaissance par excellence, c’est la constitution. Une constitution n’est
jamais exhaustive, elle est nécessairement débordée par quelques règles de reconnaissance qui renvoient
essentiellement à la pratique. Et c’est ce mélange d’effectivité et de légitimité, cette combinaison entre des
pratiques et un jugement de légitimité qui fondent les règles de reconnaissance qui vont au-delà du texte
constitutionnel, sans le contredire.

Place de ces règles : au sommet, en dessous du texte de la constitution. Il y a d’autres principes généraux du
droit qui ne sont pas à valeur constitutionnelle ! On les situe alors entre le niveau législatif et le niveau
réglementaire.

Les coutumes Classiquement, la combinaison de deux critères permet de définir la coutume : un comportement identique
constitutionnelles adopté de manière répétée pendant un temps suffisamment long et la conviction qu’il doit être suivi dans
les mêmes circonstances. La coutume constitutionnelle doit satisfaire deux critères supplémentaires : ces
comportements doivent être permis par les dispositions de la Constitution au sens formel strict et exigés par
un fonctionnement harmonieux des institutions. Ces quatre critères forment à notre estime la règle de
reconnaissance des coutumes constitutionnelles.

On entre dans une problématique : un certain nombre de juristes pensent qu’il n’y a pas de place en
Belgique pour des coutumes constitutionnelles. Argument contre cela : il remonte à la source, art 33. La
constitution, c’est la constitution du 7 février 1831, et l’art 33 fonde le principe de la plénitude
constitutionnelle. La constitution n’a donc pas de lacunes, et donc pas de place pour les coutumes. Selon lui
il n’y a pas de vide.

Dans l’ensemble de la doctrine, on reconnaît l’existence de coutumes constitutionnelles en droit belge. Le


principe de la plénitude du texte constitutionnel ne peut pas tenir la route, aucune constitution ne peut
prétendre à la complétude, il y a inévitablement des lacunes. Il faut donc interpréter autrement cet article
33, les pouvoirs doivent être exercés de la manière établie par la constitution au sens formel large. Donc la

35
constitution écrite prétend être au-dessus des coutumes constitutionnelles et des principes généraux du
droit.

Mais si on accepte l’existence des coutumes constitutionnelles, il faut encore s’entendre sur des critères
permettant de reconnaître les règles de droit coutumières, en évitant toute confusion avec des usages.

Une coutume ne peut pas être modifiée par une coutume contraire si la coutume est indissociable d’un
texte de la constitution. En revanche, on peut imaginer que d’autres coutumes, moins liées à un texte, soient
modifiées par une coutume en sens contraire. Dans un premier temps on viole la coutume, et puis au fur et
à mesure un processus coutumier émerge.

On doit en tout cas observer que le constituant dérivé est intervenu pour encadrer les hypothèses de
démission du gouvernement provoquées par la Chambre dans le cadre de l’introduction du parlementarisme
rationalisé au niveau fédéral. Auparavant, les cas et les conditions dans lesquels le gouvernement fédéral
devait de iure présenter collectivement sa démission était entièrement laissés à la coutume
constitutionnelle à partir d’une interprétation du principe de responsabilité ministérielle. La nécessité d’une
intervention du constituant dérivé par une révision de l’article 96 de la Constitution a pu être renforcée par
le fait que la coutume trouvait un ancrage dans les articles 88, 101, 102 et 106 de la Constitution consacrant
cette responsabilité, bien qu’en réalité c’est un processus typiquement coutumier – qui remonte du reste
aux origines britanniques du régime parlementaire – qui a engendré le contenu de ces normes. Par ailleurs,
aujourd’hui encore un cas de démission obligatoire de jure est passé, à notre estime, sous silence par
l’article 96 de la Constitution et ne trouve son fondement que dans la coutume constitutionnelle ou, plus
exactement, dans l’interprétation coutumière du concept de responsabilité politique : il s’agit de la
démission du gouvernement au lendemain des élections fédérales et de la démission du gouvernement
nouvellement formé qui ne parvient pas à obtenir la confiance de la Chambre qu’il doit obligatoirement
solliciter. Il n’en reste pas moins que d’autres coutumes constitutionnelles entretiennent un lien plus lâche
avec le texte constitutionnel. Prenons l’exemple de la règle du secret qui protège les délibérations du
Conseil des ministres. Cette règle coutumière est confirmée par la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité
de l’administration. Mais celle-ci se contente d’y soustraire les procès-verbaux du Conseil. Il reste que la
règle postule aussi traditionnellement la discrétion des ministres à propos du contenu de toutes les
délibérations gouvernementales. Or, ces dernières années, cette règle paraît de plus en plus souvent violée
par des ministres qui ne résistent pas au bonheur de distiller quelques indiscrétions lors d’interviews à
chaud à la sortie du 16, rue de la Loi, ou de livrer en primeur une information ou un état d’âme sur les
réseaux sociaux. Si ces transgressions devaient se multiplier à l’avenir sans aucune conséquence, il n’est pas
exclu qu’il faille un jour constater que la coutume a fait l’objet d’un processus d’abrogation par désuétude
sans aucune révision formelle de la Constitution.

Jurisprudence La jurisprudence, au sens de l’ensemble des règles qui se dégagent implicitement ou explicitement des
constitutionnelle décisions individuelles rendues par les juridictions, peut être rangée parmi les sources formelles du droit.
Dans ce cadre, la jurisprudence de la Cour constitutionnelle entre dans la notion de Constitution au sens
formel large. Cette jurisprudence s’impose, en effet, au législateur qui ne peut y toucher. Bien sûr, les juges
constitutionnels peuvent modifier leur propre jurisprudence. Mais en dehors de cette hypothèse, seule une
révision constitutionnelle peut produire ce résultat.

Le juge constitutionnel doit, en revanche, se soumettre à la Constitution au sens formel strict de laquelle il
puise sa compétence. Il n’est ainsi pas compétent pour se prononcer sur un recours en annulation d’une
disposition constitutionnelle. Selon une jurisprudence constante, il n’appartient pas à la Cour « de se
prononcer sur un moyen qui l’amènerait à apprécier un choix fait par le Constituant ». Cette jurisprudence
protège de toute censure juridictionnelle les lois qui reprennent le contenu de dispositions
constitutionnelles. Mais elle va plus loin. Il arrive que le constituant déclare explicitement que tel dispositif
en voie d’adoption est conforme à la Constitution. L’œuvre du législateur reçoit ainsi la bénédiction du
constituant. Cette bénédiction n’a pas pour conséquence de provoquer une mutation d’ordre organique de
la loi – celle-ci reste une loi et ne se transforme pas en disposition de la Constitution au sens formel strict
mais elle a pour effet d’immuniser ladite loi face aux reproches d’inconstitutionnalité qui pourraient lui être
adressés. Fort logiquement, une loi, lorsqu’elle est expressément ratifiée par le constituant, ne saurait être

36
critiquée sur la base de la Constitution elle-même. Ce procédé d’immunisation constitutionnelle a été
particulièrement prisé par les architectes de la 6e réforme de l’État.

On peut considérer aujourd’hui que la jurisprudence est une source du droit (même si ce n’est pas unanime
dans la doctrine). La jurisprudence, c’est l’ensemble des règles qui se dégagent, explicitement ou
implicitement, des décisions individuelles rendues par les juridictions. Les juges sont d’accord pour
interpréter certaines règles de la même manière. Et quand la cour constitutionnelle interprète une loi d’une
certaine manière, on doit accepter qu’elle colle avec le texte.

La Constitution au sens matériel

Les lois Définition : Avantages : Place hiérarchique : Danger de quantité


spéciales : Les des lois spéciales :
lois spéciales ne On doit partir du texte de l’article 4 §3 Protéger le Les lois spéciales
sont pas dans la C°. Une loi spéciale est spéciale, d’une groupe doivent se conformer à Il y a aujourd’hui,
constitution au part, en raison de son objet et, d’autre linguistique la constitution, donc la depuis la 6e réforme
sens formel large part, en raison de sa procédure. français et Cour constitutionnelle de l’état, une
car elles doivent néerlandais s’est déclarée tendance à
se conformer à la Nous obligeons tous nos députés et contre toute compétente pour surutiliser la
constitution et la sénateurs à entrer dans une groupe forme de vérifier la conformité technique des lois
cour linguistique français ou néerlandais. Ici, minorisation. des lois spéciales à la spéciales. Une
constitutionnelle il faut avoir à l’esprit la notion de constitution pour ce qui tendance à se méfier
est compétente groupe linguistique, cette notion est concerne des articles des uns et des autres
pour les annuler précisée dans l’article 43 C° (qui parle de la constitution que (clivage entre partis
des membres de la chambre) qui suit Stabilisation des la Cour peut faire politiques flamands
si elles ne
l’article 42 C° (qui parle des membres situations respecter (règles de et francophones) et
respectent pas la
de la chambre). politiques contrôle). Par ailleurs, donc quand on
constitution.
délicates. Les toutes les autres lois trouve une solution
Ce qu’il faut savoir c’est comment on solutions doivent se conformer on a tendance à la
fait pour répartir ces députés et trouvées sont aux lois spéciales. rendre intangible,
sénateurs dans ces groupes bétonnées. non modifiable en
linguistiques ? C’est dans l’article 1 §1 Mais cette exigeant une loi
du 3 juillet 1971. Les députés et bétonisation est spéciale.
sénateurs qui sont francophones, qui un désavantage Il y a une petite
habitent en Wallonie, vont également. controverse, est-ce que
automatiquement dans le groupe les lois spéciales ne
linguistique francophone et vice-versa. concernent que des La multiplication de
Là où ça se corse c’est à Bruxelles. A répartitions de ces exigences de
Bruxelles il y a également un collège Quand le compétences entre vote est
électoral, les députés et sénateurs sont constituant lui- l’état, les problématique car
répartis entre les deux groupes même ne communautés et en démocratie le
linguistiques en fonction de la langue trouve pas la régions ? Il y a de gros principe de majorité
utilisée pour prêter serment. Et si le solution à un arguments qui disent a ses légitimités et
sénateur/député veut prêter serment cas épineux, il que les lois spéciales paralyse ce principe
dans les 2 langues, ce sera le premier peut postposer priment les lois de majorité en
serment qui sera pris en compte. la solution de ce ordinaires, peu importe protégeant les
problème que les lois spéciales minorités. Du côté
La loi spéciale en fonction de son objet : épineux en contiennent ou non des flamand,
On se trouve dans un des cas disant dans la règles répartitrices de notamment, il y a
déterminés dans la Constitution, cas constitution, « il compétences entre une critique de cette
pour lesquels on recourt à la distinction y aura une loi l’état, les manière d’abuser de
entre les groupes linguistiques français spéciale qui communautés et les ces lois spéciales.
et néerlandais du Sénat et de la réglera le régions.
problème ».

37
Chambre. Ce sont des cas sensibles
pour les bonnes relations entre les
flamands et les francophones.

La loi spéciale en fonction de sa


procédure : Il faut un quorum de
présence, il faut une majorité des
membres de chaque chambre qui se
trouve réunie (1). Il faut un quorum de
suffrage, il faut une majorité des
suffrages exprimés dans chaque groupe
linguistique (2) (61 membres donc
majorité = moitié + 1 donc 31
membres). Les 2 groupes linguistiques
doit atteindre les 2/3 des

Les conventions Quand on a évoqué les différents degrés de rigidité de la constitution, nous avions au sommet des révisions
de la irréformables. Et en bas, on trouve la constitution britannique qui n’est qu’une constitution au sens matériel,
Constitution il n’y a pas de constitution écrite on peut donc uniquement se référer à des lois, à des jurisprudences, à des
coutumes et à des conventions de la constitution.

Ce sont des pratiques considérées comme politiquement obligatoires et non-justiciables donc aucun juge ne
pouvant les appliquer. Cette notion est utile pour résilier des règles et dont la doctrine est mal à l’aise à
qualifier.

Il y a, en réalité, des conventions de la constitution en Belgique, des normes qui sont pratiquées
effectivement, qui sont jugées tout à fait légitimes, sont considérées comme obligatoires et qui contredisent
un texte constitutionnel. Donc, ce sont des règles qui sont problématiques car elles contredisent le texte de la
constitution. Néanmoins, ces règles sont appliquées et sont considérées comme légitimes.

On parle de conventions de la constitution para-légales qui sont à la fois parallèles et, en même temps,
contre la constitution.

SECTION 3 : LA RIGIDITÉ DE LA CONSTITUTION BELGE

Rigidité de la Constitution

Auteur Le pouvoir législatif est l’auteur de la révision constitutionnelle mais ce n’est pas le pouvoir législatif habituel, mais
bien le pouvoir législatif issu des élections : c’est la technique du dédoublement fonctionnel c’est-à-dire qu’on peut
utiliser un même organe pour le mettre en service de 2 fonctions différentes. Ce pouvoir pourra faire la loi et, si et
seulement si, ce pouvoir législatif a été renouvelé à la suite d’élection déclenchée par la déclaration de révision, ce
même pouvoir législatif peut réviser la constitution.

Il y a moyen de recourir à une autre technique : la convention c’est-à-dire qu’on élit une assemblée qui a pour but de
réviser la constitution. Mais cette technique n’est pas utilisée en Belgique.

Rappelons-nous l’exemple de question qui montre comment on raisonne en droit et qu’on doit interpréter « est-ce
que cet article 195 permet d’organiser une consultation populaire ou un référendum sur la révision de la constitution
en Belgique » ? Ici, on voit que ce n’est pas le cas, l’article réserve le pouvoir de révision de la constitution au pouvoir
constituant dérivé.

Donc pas de référendum mais pourquoi pas une consultation populaire ? Il y a 2 interprétations différentes : certains
juristes (minoritaires) disaient que « les décisions ne pouvaient pas être prises par le peuple » mais d’autres juristes

38
disent « un simple avis bien ». On pourrait dire qu’un avis n’est pas la même chose qu’une décision, mais l’état a dit
« il y a des avis qui, sortis de certaine bouche, prenne une certaine forme impérative », la différence entre avis et
décision est purement formaliste.

Mais la consultation populaire n’est pas permise dans la cohérence de l’article 195. De toute évidence, on organise
des élections donc on fait parler le peuple. Il serait illogique de prétendre que l’article 195 permet d’organiser une
consultation populaire car le pouvoir constituant a choisi de recourir à des élections pour consulter le peuple donc
on ne va pas rajouter une consultation populaire en plus.

Procédure Déclaration Il s’agit d’identifier les articles que l’on veut rendre révisables. Chaque chambre adopte séparément sa
de révision de révision déclaration. Jusqu’à la dernière déclaration adoptée, on voyait toujours le gouvernement déposer un
projet de déclaration et ensuite la Chambre et le Sénat se prononçait. Jusqu’en 2019, on publiait au
MB 2 listes : celle des Chambres et celle du Roi et étaient révisables les articles qui se trouvaient dans
les 2 listes.

Tout change en 2019 car on se trouve dans un cas particulier : le gouvernement Michel est
démissionnaire et n’est pas capable de s’entendre pour déposer un projet de déclaration de révision.
Du coup, la Chambre adopte une liste, le Sénat adopte une autre liste en partie identique à celle de la
Chambre. Ensuite le Roi (gouvernement Michel) décide que, comme il est démissionnaire, il doit
appliquer la théorie des affaires courantes. Souvent, nous avons une déclaration relativement large et
tous les articles qui sont insérés dans la déclaration de révision ne sont pas révisés à l’issu de la
législature (5 ans).

Jusqu’en 2010, le gouvernement démissionnaire pouvait reprendre le reste des articles de la


déclaration de révision antérieure à la fin de la législature. Cette règle a été abandonnée en 2010, le
gouvernement ayant décidé d’élargir, alors qu’il était démissionnaire, la liste des articles au-delà du
résidus disponible à l’issue de la législature. L’essentiel est que la Chambre et le Sénat se prononce,
dès lors qu’une affaire est prises par les 2 Chambres, il n’y a pas de raison à se limiter aux affaires
courantes puisque ce sont ces 2 Chambres qui font tourner le gouvernement.

En 2019, le gouvernement Michel revient à l’ancienne pratique et considère que « seul pouvait être
insérés, dans la déclaration, les articles qui figuraient dans l’ancienne déclaration qui n’ont pas été
révisés ». Nous sommes dans l’incohérence aujourd’hui car ce gouvernement Michel ne s’est pas
contenté de reprendre l’ancienne déclaration, il a retenu une déclaration où il reprend d’autres
articles mais pas ceux qui se trouvaient dans la liste. On doit remarquer que nous sommes dans une
situation de brouillard concernant le pouvoir d’un gouvernement démissionnaire dans la déclaration
de révision de la constitution.

Pour voir clair, on doit utiliser des annexes du syllabus (page 14) : On voit la liste adoptée par la
Chambre des représentants et reproduite dans le MB en 2019. A la page 16, nous avons la liste
adoptée par le Sénat. Sont révisables les articles repris en commun par la Chambre et le Sénat mais ça
ne va pas car on doit attendre le choix du Roi. À la page 17, c’est la liste du Roi qui est une petite liste
des articles qui se trouvent dans les déclarations des Chambres et cette liste ne correspond pas à la
liste de 2014 car le gouvernement Michel n’a pas repris tous les articles de l’ancienne déclaration mais
a été au-delà. On est donc dans une confusion totale.

Dissolution La publication de la déclaration de révision de la constitutin au MB entraine la dissolution de la


des Chambre et du Sénat. En pratique, le jour même le Roi adopte un arrêté royal portant convocation des
Chambres collèges électoraux pour les élections de la Chambre ainsi que convocation des nouvelles Chambres. Il
doit respecter les délais fixés par la Constitution. Les électeurs doivent être convoqués dans les 40
jours et les Chambres dans les 3 mois.

L’acte de L’acte se fait à la majorité des 2/3 des membres de chaque Chambre moyennant la présence des 2/3
révision de chaque chambre. On considère aussi qu’on exige, pour l’adoption de la révision de la constitution,
une majorité des 2/3 des suffrages exprimés.

39
Petit détail, sur ces propositions de décisions, la section de législation du Conseil d’état ne peut pas se
prononcer et si c’était le cas jamais le texte constitutionnel n’aurait été rédigé aussi mal qui ne l’est
maintenant (compte tenu de la LCCE).

L’articulation entre l’intervention des Chambres préconstituantes et l’intervention des Chambres


constituantes est régie par 4 règles :

Les chambres constituantes sont mises en mesure de réviser tel et tel article dans la mesure où ces
articles figurent dans la liste. Ce n’est pas une obligation de réviser la constitution mais une faculté.

On observe régulièrement un procédé qui est irrégulier et que l’on appelle « la greffe ». C’est un
procédé inconstitutionnel mais qui est parfois appliqué. C’est le fait d’insérer, dans une disposition
constitutionnelle déclarée révisable, une règle afférente à une matière qui lui est étrangère.

Interdiction des révisions implicites, c’est le procédé inconstitutionnel qui consiste à modifier le sens
ou la portée d’une règle qui n’est pas déclarée révisable, à l’aide de la révision apportée à un autre
article qui lui est déclaré révisable. Nous avons un article dont on aurait souhaité assurer la révision
mais, pas de chance cet article n’est pas dans la déclaration mais on veut quand même le réviser. On
va chipoter avec la règle, on révise un autre article qui est révisable, on va donc modifier le sens de la
portée d’un autre article qui n’est pas révisable.

Le constituant n’est pas lié par les éventuelles indications données par le préconstituant quant au
sens ou au contenu de la révision à opérer. Prenons l’exemple de la déclaration de révision de 2014.
Les Chambres déclarent qu’il y a lieu de révision de l’article 12 al.3 afin de respecter la jurisprudence
européenne en ce qui concerne l’assistance d’un avocat dès la première audition. Ce « afin de
respecter », le but et le sens partagé par les Chambres préconstituantes en réalité ne lient pas les
chambres constituantes. Donc l’article 12 aurait pu être révisé dans un but différent.

Quid si la déclaration vise une disposition existante en vue de l’abroger ? Il est possible. Dans ce cas, la
décision d’abroger n’est pas nécessairement imposée donc le constituant n’est pas obligé d’abroger.
Mais si les Chambres constituantes modifient le texte elles ne peuvent que l’abroger.

Quid si le constituant dit qu’il y a lieu à révision de tel article en vue d’ajouter un nouvel article ? Ici, le
constituant ne peut pas profiter de cette déclaration pour ajouter une disposition dont la matière est
étrangère à celle que le préconstituant à envisager.

Limites Souvenons-nous, nous avons l’article 79 de la Loi fondamentale allemande qui déclare irrévisables certains articles
matérielles (noyaux durs des droits de l’Homme). Est-ce que nous avons la même chose en Belgique ? Oui, le décret du 18
novembre 1830.

Est-ce qu’il y a d’autres dispositions qui sont irrévisables ? Non, toutes les autres dispositions sont révisables même
si des textes de la constitution entendent le contraire (art. 25) car l’article 195 ne limite pas le pouvoir des Chambres
constituantes en disant que certains articles soient irrévisables.

La ratio legis de la procédure organisée par l’article 195 : Les grands objectifs qui sont poursuivis, par le constituant
originaire quand il écrit l’article 195, ce sont les suivants :

40
Critiques Pas trop souvent, c’est une procédure lourde qui vise à éviter des révisions trop fréquentes.
de l’article
195 Le constituant a le souci d’éviter que la déclaration se fasse trop vite car on ralentit la procédure via les 3 étapes
successives.

On associe le peuple à la révision de la constitution.

Si on prend ces 3 objectifs, ils sont largement ratés. Pourquoi ? Parce que cette procédure de révision de la
constitution est essentiellement viciée par l’exigence de cette déclaration préalable de cette révision. Cette exigence
de déterminer, avant les élections, la liste des articles que les Chambres constituantes pourront réviser après les
élections, cette exigence est intenable.

Elle est intenable pourquoi ? Car en Belgique on ne peut pas réviser la constitution sans de grandes discussions
politiques qui associent un nombre de partis suffisant pour former la majorité des 2/3 qu’exige l’article 195 dernier
alinéa. Et comment peut-on prévoir, aujourd’hui avant les élections, la majorité politique qui va sortir des urnes par
l’élection ? Impossible. Donc l’auteur de la déclaration de révision ne peut pas prévoir l’avenir. C’est la raison qui
explique des problèmes d’effectivité, des greffes et des révisions implicites.

Procédure La procédure est inefficace car elle ne parvient pas à atteindre les objectifs. En effet, dans un certain
inefficace nombre de cas on respecte quand même l’article 195, on évite les greffes, les révisions implicites.
Donc on ne révise pas certains articles et on ne va pas jusqu’au bout d’une réforme de sorte que la
première réforme est incomplète et par son incomplétude on va faire une 2e réforme etc… On ne
réforme jamais de manière large sans être handicapé par cette déclaration de révision.

Ce qu’on constate en pratique, c’est que lorsqu’il y a des élections, la question de la révision de la
constitution est mêlée à d’autres problématiques et on ne peut pas dire que c’est la première
préoccupation des électeurs dans la campagne électorale. En effet, quand on vote pour des élections,
on ne vote pas que pour la révision de la Constitution mais aussi pour d’autres enjeux.

L’objectif de révision qui soit mûrement réfléchi n’est pas non plus atteint par cette procédure en
plusieurs temps car quand on adopte une déclaration de révision de la Constitution, on n’a pas
forcément l’esprit qui est focalisé sur la question constitutionnelle. L’idée du constituant de 1831 est
qu’il faut prendre le temps de bien réfléchir la rédaction de la déclaration de la révision. En pratique,
la déclaration de révision est adoptée à un moment où on pense à la campagne électorale.

Procédure D’abord en raison de la pratique des greffes et des révisions implicites, ce sont des pratiques qui
ineffective violent l’article 195 donc l’article n’est ineffectivement pas appliqué. C’est aussi une raison pour
laquelle la constitution prévoit l’intervention du législateur spécial parce qu’au fond la loi spécial
permet de vider une partie de son contenu : on ne rédige pas une norme précise, on renvoie une loi
spéciale. Une loi spéciale on peut la modifier à tout moment, ce qui n’est pas le cas pour la
constitution.

Enfin, ce phénomène d’ineffectivité trouve son momentum le plus dramatique quand on voit le
pouvoir législatif adopter délibérément une loi contraire à la constitution. Parfois, le pouvoir législatif
n’a pas envie d’adopter une déclaration de révision de la constitution qui provoque la dissolution des
chambres donc le risque pour les députés de perdre leurs mandants. Ils ne vont donc pas respecter
l’article 195 car ils vont quand même la modifier sans faire une déclaration de révision.

Un cas est évoqué : le problème que posait la ratification du traité de Maastricht signé en 1991. Le
traité doit être ratifié et idéalement, avant sa ratification, la Chambre doit voter une loi d’assentiment.
On est en 1992 au milieu de la législature 1991- 1995. Le problème est le suivant : c’est que nous
avons dans le traité une disposition qui accorde le droit de vote et le droit d’éligibilité aux
ressortissants de l’UE donc entre autre le droit de vote aux élections communales et européennes.

Il y a l’article 8 dans la constitution qui, à l’époque, réservait aux seuls belges le droit politique de
voter aux élections communales, mais dans le traité de Maastricht, ouverture du droit de vote pour les
élections communales à tous les ressortissants européens, il y a une contradiction évidente. Que
décide le gouvernement ? De faire voter la loi d’assentiment malgré que ce soit contraire à la

41
constitution car les députés ne voulaient pas perdre leur mandat, d’affronter les électeurs pour réviser
l’article.

Procédure Dans l’article 195 on ne parle pas des communautés et des régions. Or, il est logique dans un état
inadaptée fédéral que les entités fédérées participent à la révision de la constitution fédérale. Le Sénat permet
à la logique une forme de participation mais indirecte des communautés et des régions (pas toutes) mais attention
fédérale les sénateurs sont libres de leur vote et ne sont pas tenus par un mandat de leur communauté ou de
leur région.

L’incohérence de l’article 195 par rapport à la logique fédérale apparait aussi quand on s’interroge sur
le degré de rigidité de la constitution, d’un côté, et de la loi spécial de l’autre.

La rigidité de la constitution devait être supérieure à la rigidité de la loi spéciale. A certains égards,
c’est la loi spéciale qui est plus rigide que la constitution ce qui est anormal. Pourquoi peut-on dire
cela ? Car il faut une majorité des suffrages exprimés dans chaque groupe linguistique, c’est une
exigence qu’on ne retrouve pas pour réviser la constitution dans l’article 195. Ce qui est paradoxale,
car dans la hiérarchie des normes, la constitution se trouve au-dessus des lois spéciales. A d’autres
égards, la constitution demeure plus rigide que la loi spéciale car pour réviser la constitution il faut
une déclaration de révision qui est une exigence assez lourde.

Disposition Nous sommes en 2010, avant les élections du 13 juin, une déclaration de révision est adoptée le 7 mai
transitoire 2010. Nous savons qu’une des grandes caractéristiques de cette période c’est l’exigence de la plupart
de la des partis politiques flamands de s’entendre sur une 6e réforme de l’état, sans quoi, il n’y aura pas de
sixième gouvernement. Les francophones disent d’abord « non », ça dure 1 an et demi.
réforme de
l’état Après 1 an et demi, Di Rupo a l’accord papillon. Évidemment, on fait la liste des articles de la
constitution qu’il faut modifier pour mettre en œuvre l’accord. Mais comme par hasard, on voit, lors
de la déclaration de révision, qu’il manque une série d’articles. Heureusement, les constitutionnalistes
disaient qu’il serait important, à cette époque, de mettre à révision l’article 195 non pas pour rédiger
une nouvelle procédure de révision mais dans le but d’y déroger juste pour la législature 2010-2014.
Mais ces partis n’ont pas révisé l’article 195 et ceci n’est toujours pas fait. La législature de 2010- 2014
a donc un article 195, disposition transitoire (texte qu’on insère dans l’article), terme hypocrite car il
aurait fallu écrire disposition dérogatoire.

Proposition Dans l’idéal, on doit distinguer 3 catégories de disposition :


de révision
de l’article Procédure ordinaire valable sauf exception : cette procédure reste rigide mais devrait faire intervenir les groupes
195 linguistiques, il faudrait éviter l’encombrante procédure de la déclaration de révision donc permettre que la
constitution soit révisée sans mettre fin à une législature. Mais donnons du temps au temps, au milieu d’une
législature on discute un texte, on adopte un nouveau texte mais il n’entre pas en vigueur, on se donne le temps
pour y réfléchir, pour accorder des débats et on pose des questions au peuple, la constitution est alors révisée.

Règles constitutionnelles dont la révision s’impose pour assurer la participation de l’état belge à l’union
européenne ou plus largement aux organisations internationales : quand l’UE engage une procédure de révision
des traités, est-ce que la Belgique peut dire à tous les autres pays « attention nous avons l’article 195 et on doit
réviser les articles donc il faut attendre » ? Ce n’est pas possible. Donc il faut une procédure plus rapide.

Quelques articles sont plus importants que d’autres et ceux-là on ne peut les réviser que moyennant la
convocation des électeurs. Donc discute, on adopte un texte sans qu’il entre en vigueur sous une législature A et le
texte sera entré en vigueur sous la législature B si elle est d’accord. Donc case élection mais pas de révision de
déclaration comme telle.

Ce que proposent les constitutionnalistes c’est un contrôle préventif, la section de législation du Conseil d’état n’est
pas compétente pour rendre un avis sur une déclaration de révision et il faudrait changer cette lacune.

SECTION 4 : LA SUPERMACIE DE LA CONSTITUTION BELGE

42
Confirmation de la suprématie constitutionnelle

Principe de Le principe est inscrit dans l’article 33. Le Conseil d’état a eu l’occasion de dire : certains articles de la
constitutionnalité constitution dont l’article 33 sont sous-tendus par le même principe général de droit à valeur constitutionnelle
et son corollaire que l’on peut induire, le principe de la hiérarchie des normes. Ce principe est fondamental et au sommet de la
hiérarchie des normes figure la constitution.

Il découle de cet article 33 et du principe de constitutionnalité un corolaire. Ce corolaire est le principe de


l’interdiction des subdélégations de pouvoir. Pourquoi ? On peut considérer qu’au départ c’est la nation qui a
tous les pouvoirs et puis elle délègue les pouvoirs au pouvoir constituant. Ce qui est interdit aux pouvoirs
constitués, c’est de déléguer eux-mêmes des pouvoirs à des autorités différentes sans accord. Donc un organe
déterminé, titulaire d’une compétence, en vertu de la constitution, ne peut pas disposer de cette compétence
de sa propre autorité en confiant cette compétence à un autre organe.

Évidemment, on dit bien interdiction sauf habilitation. On admet que le pouvoir de modifier les lois soient
transférés, délégués au Roi (phénomène de loi de pouvoirs spéciaux).

Il y a une exception à ce principe : on admet que, par arrêté royal, le roi délègue une compétence réglementaire
à un ministre, c’est une coutume praeter legem.

Garanties Contrôle Ce contrôle est obligatoire lors de la déclaration de révision. Le CE va examiner si le texte respecte
juridiques de la préventif la répartition des compétences, les dispositions constitutionnelles, correctement rédigé.
suprématie exercée
constitutionnelle par la Article 3 LCCE « or les cas d’urgence spécialement motives et certains nombres des lois formels
section de tous les avants projets de loi décret et ordonnances doivent être soumis à l’avis du conseil d’état
législation section de législation sauf exceptions »
du conseil
d’état Article 2 LCCE « saisi par le président ou si un tiers de membres de la saisie »

Contrôle Cour constitutionnelle : Cour Constitutionnelle se prononce sur les décrets, lois et ordonnances.
curatif Elle se prononce soit dans le cadre d’un recours en annulation soit d’une question préjudicielle.

Section du contentieux administratif du conseil d’état : SCACE lorsqu’il s’agit de demander


l’annulation d’une norme règlementaire ou acte administratif.

L’exception d’illégalité : Exception d’illégalité́ prévue à l’article 159 de la Constitution permettant


aux cours et tribunaux peuvent refuser l’application de normes infralégislatives.

Relativisation de la suprématie constitutionnelle

Siège de la Le siège de la matière c’est un article : l’article 34 qui a été introduit en 1970. On a pris des libertés dans la constitution
matière depuis 1951 (premier grand traité européen entré en vigueur), il faut attendre 1970 pour régulariser tous ces
transferts de pouvoirs consentis par l’état belge au profit de l’UE. Cet article 34 dit « seul l’exercice de pouvoirs
déterminés peut être attribués » donc ce sont certains attributs de la souveraineté qui peuvent être attribués à l’UE et
non la souveraineté même.

Le Conseil d’état, dans un avis (annexe p. 210 et 211) qui concerne le traité de Lisbonne, dit ceci « en vertu de cet
article, il est possible par dérogation à l’article 33 al.2, de transférer par un traité ou une loi à des institutions
internationales l’exercice de compétences qui sont confiées par la constitution aux organes de l’autorité fédérale, aux
communautés ou des régions ». L’idée est qu’il ne faut pas crier à l’inconstitutionnalité d’une loi d’assentiment à un

43
traité si ce traité se contente de dire ce que nous permet l’article 34 de faire c’est-à-dire de confier des pouvoirs qui
sont confiés dans la constitution à des autorités fédérales, communales ou régionales. Mais attention, cela ne
concerne que l’hypothèse où le traité confie certains pouvoirs à des organes comme le Conseil des ministres de
l’Union, le Conseil européen, la Cour de justice etc.

Le Conseil d’état, dans le même avis, dit ceci « lorsque les dispositions d’un traité vont au-delà de l’attribution de
pouvoir à une institution supranationale et lorsque, se faisant, elle porte atteinte à d’autres dispositions
constitutionnelles que celles relatives à l’exercice de ce pouvoir ». Dans ce cas-là, le Conseil d’état a toujours considéré
qu’un assentiment au traité n’est possible qu’après révision préalable des dispositions de la constitution en cause.

Donc ce que l’article 34 couvre c’est la constitutionnalité de pouvoirs attribués à certains organes, dans des institutions
de droit international public. L’article 34 ne couvre pas par exemple le droit de vote aux élections communales octroyé
aux citoyens européens par le traité de Maastricht.

Mais, une majorité de députés a voté la loi d’assentiment alors qu’elle était contraire au traité pour ne pas voir leurs
mandats se perdre. Donc on voit le principe, l’article 34 ne résout pas tous les problèmes et on en arrive au contrôle.

Lacunes du Le contrôle préventif est lacunaire car le Conseil d’état n’est pas toujours saisi et ensuite parce que la section de
contrôle législation ne rend qu’un avis et il peut être ignoré.
préventif
On peut se dire qu’il y a la Cour constitutionnelle qui nous dit à l’article 3 LSCC que les recours en annulation d’une loi,
d’un décret ou d’une ordonnance, par lesquels un traité reçoit l’assentiment, ne sont recevables que s’ils sont reçus
dans un délai de 60 jours suivant la publication de la loi. Donc la Cour constitutionnelle est compétente pour contrôler
la conformité à la constitution des traités via la loi d’assentiment. Bien sûr, le contrôle porte sur la loi d’assentiment du
traité et non pas directement sur le traité. Donc, la Cour constitutionnelle peut intervenir préventivement pour autant
que le Roi ne ratifie le traité qu’après l’arrêt rendu en annulation sur la loi portant assentiment au traité.

En effet, le conflit traité - constitution n’existe que si l’état belge s’est engagé internationalement en ratifiant le traité.
Si cette ratification n’a lieu qu’après l’arrêt de la Cour constitutionnelle sur le recours en annulation visant la loi
d’assentiment, le Roi ne va pas ratifier le traité s’il sait que la loi d’assentiment a été annulée.

A nouveau, le système est lacunaire car il n’y a rien qui oblige le Roi a ne ratifier le traité qu’après la loi d’assentiment.
Dans un monde idéal, on aurait d’abord la loi d’assentiment, ensuite un recours en annulation, puis on a un arrêt qui
statue sur le recours en annulation et puis seulement le Roi sait s’il peut ou non ratifier le trait. On a potentiellement
un problème.

Retenons la leçon, les contrôles préventifs assurés par la Cour constitutionnelle et par la section de législation du
Conseil d’état sont lacunaires.

Positions Cour de L’arrêt Leski dit qu’en cas de conflit entre un traité et une loi, la primauté revient à la règle de droit
des cassation internationale conventionnelle directement applicable et cette primauté s’applique même à
juridictions l’encontre d’une loi postérieure.
suprêmes
sur le La Cour de cassation dit que la nature même du droit international commande de faire primer la
conflit règle de droit international en manière telle que tout juge belge est obligé d’écarter l’application
de la règle de droit interne contraire au droit conventionnel international.

Là où la Cour de cassation commet une erreur ou un mensonge, c’est de prétendre que c’est la
nature même du droit international qui veut cela. Mais ce n’est pas vrai, sinon tous les états qui
pratiquent le dualisme sont en dehors de ce principe que la Cour assigne au droit international.
Donc c’est simplement la Cour qui a décidé d’imposer cette idée.

Le Conseil d’état a dit qu’il faut y voir un PGD de droit constitutionnel même si le texte de la
constitution ne le dit pas. En réalité, le problème est là, le constituant n’intervient pas et laisse se
débrouiller entre les juridictions. Si le constituant pouvait prendre la peine d’intervenir ça serait
beaucoup plus clair.

En 2004, on trouve les arrêts du 9 décembre et du 16 décembre dans les annexes. Les conventions
doivent donc primer la constitution.

44
Conseil d’état Le Conseil d’état a tranché cette affaire dans l’arrêt Orfinger. Cet arrêt concerne la contradiction
entre l’article 10 al. 2 c° et l’article 45 TFUE.

L’article 10 dit que seuls les belges sont admissibles aux emplois publics sauf exception. L’article 45
TFUE dit que la libre circulation des travailleurs est gérée par l’Union, elle implique l’interdiction de
discrimination fondée sur la nationalité. Mais, §4, les dispositions du présent article ne sont pas
applicables aux emplois de l’administration publique.

La constitution belge réserve aux belges l’accès aux emplois publics et le TFUE nous dit que tous les
emplois dans l’administration publique ne se voient pas appliqués le principe de l’interdiction de
discrimination fondée sur la nationalité. Donc, on se dit pas de problème, on peut écarter tous les
étrangers des emplois publics. Eh bien non car la Cour internationale de justice interprète cet
article 45 de manière restrictive, elle dit que le grand principe du droit européen c’est le principe
de la libre circulation et elle interprète très restrictivement les exceptions au principe.

Selon la Cour, on peut déroger à cet article que pour 2 catégories d’emplois publics : les emplois
liés à la sauvegarde des intérêts généraux de l’état et les emplois qui supposent la mobilisation de
l’imperium c’est-à-dire la puissance publique. Ces emplois-là sont réservés aux nationaux. Du coup,
contradiction avec l’article 10 al. 2. L’article 10 parle d’exceptions dans des cas particuliers mais ici
ce n’est pas le cas.

La section du contentieux administratif du Conseil d’état est saisi de l’affaire de l’arrêt Orfinger.
Le Conseil d’état est ambigu, il pose le problème comme ceci : il n’y a pas de contradiction entre la
constitution et l’article 45 TFUE mais la contradiction est née de la jurisprudence de la Cour de
justice.

Le Conseil d’état tire de son chapeau l’article 34, il consacre la primauté sur la constitution belge
des règles engendrées par les institutions du droit international public donc par les institutions
internationales et donc par la Cour de justice. La jurisprudence de la Cour de justice est donc
présentée comme un droit dérivé (= arrêts ou décisions).

Un peu plus loin dans l’arrêt, on verra que le Conseil d’état semble entendre que finalement,
indépendamment de la question d’interprétation de la Cour de justice, c’est le texte même et le
texte de tous les articles des traités européens qui priment sur la constitution en vertu de l’article
34. Mais ceci ne tient pas la route car l’article 34 ne dit pas ça, il dit qu’il prime les règles de droit
européen qui attribuent des pouvoirs par rapport aux règles de droit belge mais ne parle pas de la
primauté.

La section de législation du Conseil d’état aborde la question des limites de la primauté du droit
européen s’agissant du droit dérivé.

Le Conseil d’état est mal à l’aise, cela signifie que du moins en principe, si en application des
traités, un règlement ou une directive devrait être adopté à l’avenir, qui seraient soit contraires à
la constitution belge soit obligeraient les autorités belges à accomplir des actes incompatibles avec
la constitution, cela signifie que la constitution ne pourra pas être invoquée à l’encontre de ces
actes de droit européen dérivés.

Donc, la section de législation va très loin en disant « l’article 34 implique la primauté de tout le
droit dérivé de l’Union par rapport à toute norme de droit constitutionnelle belge », la constitution
s’efface derrière un simple règlement ou directive. Mais l’article 34 ne dit pas ça ! La suite de l’avis
le montre « dans l’avenir pour le cas où se poserait un conflit entre un traité et la constitution, il
serait nécessaire de modifier les dispositions constitutionnelles en cause ». La constitution ne
résout pas clairement le problème du droit dérivé par rapport à la constitution.

Cour La Cour constitutionnelle, au départ, s’est déclarée compétente pour examiner la conformité à la
constitutionnelle constitution d’une loi portant assentiment à un traité international. Il en résulte que la Cour
constitutionnelle aurait pu constater que telle ou telle disposition de la Convention européenne
des droits de l’Homme, compte tenu de son interprétation de la Cour européenne des droits de

45
l’Homme, compte tenu de l’interprétation de la Cour internationale de justice, contredit une
norme constitutionnelle.

La Cour constitutionnelle était prête à prévaloir la constitution considérant que, en cas de conflit
entre la Cour constitutionnelle et un traité international, la Cour constitutionnelle est susceptible
de la prévaloir. La loi spéciale du 06 janvier 1989 a empêché cette jurisprudence de prospérer en
ce qui concerne les questions préjudicielles. L’article 26 §1bis exclu de toute question préjudicielle
les lois par lesquelles un traité ou la Convention européenne des droits de l’Homme reçoit
l’assentiment. Donc si il y a une contradiction entre une disposition des traités instituant de l’Union
européenne ou une disposition de la Convention européenne des droits de l’Homme, aucun juge
ne peut poser une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle pour faire constater
l’inconstitutionnalité du traité à travers sa loi d’assentiment.

Cela revient à présumer la conformité à la constitution des dispositions des traités instituant
l’Union européenne et la Convention européenne des droits de l’Homme.

Le problème ne se pose guerre s’agissant de la Cour européenne des droits de l’homme car nous
avons une ressemblance entre le Titre II des droits de l’homme et cette Convention. La
constitution évite tout conflit en considérant que les droits de la Convention européenne des
droits de l’Homme et les lois du Titre II forment un ensemble indissociable. On évite donc
d’opposer la jurisprudence de la Convention européenne des droits de l’Homme à une
jurisprudence qui interprète les dispositions de notre constitution.

Dans l’arrêt n°26/91 du 16 octobre 1991 au considérant B.3, on peut voir comment la Cour
constitutionnelle envisageait la question de sa compétence pour traiter d’une question
préjudicielle pour une loi donnant assentiment à un traité.

La Cour constitutionnelle admettait et admet toujours sa compétence mais exception pour 2


catégories : pour les traités de l’Union européenne, d’une part, et de la Convention européenne
des droits de l’Homme d’autre part. Pour les autres traités, la Cour constitutionnelle n’exclue pas
sa compétence pour répondre à une question préjudicielle à une loi d’assentiment. Il y a donc
quelques contradictions et la possibilité de faire prévaloir la Cour constitutionnelle sur le traité. Ca
reste tout à fait très théorique.

Pour ce qui concerne les recours en annulation, la Cour constitutionnelle s’estime compétente
pour examiner la conformité à la constitution dans les limites des normes, des lois d’assentiment
des traités. Bien sûr, si le calendrier est bien géré, l’arrêt en annulation intervient avant que la
Belgique ne décide de ratifier le traité. En revanche, si l’arrêt qui annule la loi d’assentiment tombe
après ratification, il y a un problème car la Belgique y est responsable, ce traité ne pourrait donc
pas produire ces effets. Dans la pratique, il n’y a jamais eu de problème car la Cour
constitutionnelle a souvent déclaré le recours irrecevable.

Le raisonnement de la Cour constitutionnelle est logique dans l’arrêt du 3 février 1994. Le


constituant ne permet pas que le législateur adopte des normes législations internes contraires
aux normes constitutionnelles. Donc, le constituant n’a pas pu autorisé le législateur a violé la
constitution indirectement par le biais de l’assentiment donné à un traité. D’ailleurs, aucune
norme de droit international ne donne aux états le pouvoir de faire des traités contraires à leur
constitution.

En ce qui concerne l’hypothèse d’un conflit, non pas entre les dispositions des traités instituant
l’Union européenne, mais bien un acte de droit dérivé c’est-à-dire un acte adopté par une
institution et par la constitution. Dans ce cas-là, le Conseil d’état estimait, en vertu de l’article 34
de la constitution, que ces institutions peuvent décider de manière autonome comment ces
pouvoirs étaient attribués. Le SLCE laissait entendre que cet article autorisait même le droit dérivé
de l’Union européenne a dérogé à des dispositions constitutionnelles. Mais, le SLCE était mal à
l’aise, certains membres considéraient que cette faculté pour un acte de droit dérivé de déroger ne
va pas de soi et que l’article 34 ne le permet pas.

46
Ici, on a un arrêt intéressant de la Cour constitutionnelle, un arrêt du 28 avril 2016, qui pose le
principe suivant : L’article 34 C° permet évidemment d’appliquer les règlements, les directives
adoptés par les institutions européennes. Mais est-ce qu’elles peuvent déroger à n’importe quelle
règle constitutionnelle ? Non, l’article 34 ne peut pas interpréter de cette manière. L’article 4 §2
oblige l’Union européenne à respecter l’identité nationale des états membres. Et nous avons les
jurisprudences des Cours constitutionnelles qui veulent garder leur suprématie nationale même à
l’égard du droit européen si il y est question des valeurs fondamentales et en l’occurrence du
noyau dur des droits de l’homme. Là, la Cour constitutionnelle belge rejoint la plupart des Cours
constitutionnelles des états membres de l’Union européenne, qui acceptent la primauté du droit
de l’Union européenne mais pas une primauté absolue.

47
PARTIE 3 : L’ÉTAT ET LA NATION

CHAPITRE 1 : LA NATION AU SENS JURIDIQUE

SECTION 1 : LES CONCEPTS JURIDIQUES DE NOTION ET DE POPULATION

Notion diachronique Notion synchronique Notion synchronique Remarques Le peuple et la


constituante constituée population

Il s’agit de l’ensemble Il s’agit de l’ensemble des On vise l’ensemble des On peut se demander où se situe Il faut éviter de
des nationaux, qui nationaux, de l’ensemble qui nationaux, l’ensemble le pouvoir constituant dérivé ? confondre le
ont la nationalité de ont la nationalité belge mais de ceux qui ont la Ce pouvoir constituant dérivé peuple et la
l’état. On les qui se caractérise par nationalité mais c’est relève de la nation synchronique population/nation.
comprend dans une l’exercice du pouvoir l’ensemble des constitué car le pouvoir La population c’est
perspective constituant originaire. C’est nationaux qui constituant dérivé n’est pas l’ensemble de
diachronique c’est-à- donc cette nation belge qui a expriment leur volonté souverain, il doit respecter les ceux qui ont la
dire qui traverse le fait la révolution de 1830, qui dans le respect de la règles de la constitution. Mais nationalité de
temps. C’est une a édicté la constitution de constitution. Donc évidemment, en révisant la l’état + les
chaine de 1831 ou en tout cas c’est au c’est bien la nation constitution elle incorpore de étrangers qui
générations passées, nom de cette nation que la constituée, les nouvelles règles dans la résident sur le
présents et futurs constitution a été adoptée en personnes qui constitution originaire et peut territoire de l’état.
des nationaux dont février 1831. s’expriment par des éventuellement la modifier.
l’état est la canaux donnés par la
personnification constitution.
juridique.

SECTION 2 : LES CONCEPTS JURIDIQUESS DE NATIONALITÉ ET DE CITOYENNETÉ

La nationalité La citoyenneté

C’est le lien de droit qui unit les personnes physiques et morales à un état. Le lien a pour effet de conférer La citoyenneté peut être
un statut et donc des droits et obligations. La nationalité n’indique pas l’origine ethnique de la personne, il y comprise dans deux sens
a dans une nation des personnes d’origine ethnique très diverse mais elles ont en commun la nationalité. différents :

Le national dispose en particulier d’un droit dont ne dispose pas les étrangers. Quel est ce double droit ? Droits politiques
C’est le droit d’accéder au territoire de l’état dont on est le ressortissant et c’est aussi le droit de n’être (citoyenneté au sens
jamais expulsé. L’étranger n’a pas ce double droit et doit satisfaire à certaines conditions pour séjourner strict) c’est-à-dire le
dans un état, un étranger se retrouve tout le temps sous la menace d’une expulsion. La nationalité est, par droit de participer à la
ailleurs le plus souvent, une condition exigée pour jouir des droits politiques. La nationalité ne se limite pas à direction de la société.
des droits, elle s’accompagne de devoirs dont le devoir de voter du moins dans les états qui le pratique Le droit de vote,
encore. d’éligibilité, de faire son
service militaire, de
payer ses impôts etc.

48
La nationalité est sous la dépendance de l’état qui décide les critères qui doivent être satisfaits pour obtenir
la nationalité donc chaque état a son code de la nationalité. Est-ce à dire que le droit international et
européen n’ont rien à dire dans cette matière ? Non, le droit international public ne peut pas être indifférent Droits civils,
à la question de la nationalité. Pourquoi ? Car si on laisse faire les différents code de la nationalité, il se peut économiques, sociaux et
qu’un individu se trouve sans aucune nationalité qui est le cas de l’apatride. L’apatride n’a même pas le droit culturels (citoyenneté au
d’avoir des droits, c’est excessif car aujourd’hui on admet certains droits fondamentaux. Mais à certaine sens large) : Elle a connu
époque, l’apatride était dans cette situation. Donc il y a des conventions internationales conclues pour éviter un phénomène
des situations d’apatridie. En ce qui concerne la pluri-patridie, le fait d’avoir deux nationalité, était d’universalisation
problématique dans le passé par rapport au service militaire. Aujourd’hui, le droit international ne se montre contrairement à la
plus autant méfiant qu’avant par rapport aux binationaux. citoyenneté au sens
strict.
Quant au droit européen, il n’est pas non plus indifférent. On pense à l’arrêt Rottmann qui nous dit que
quand un état décidé de déchoir un individu de la nationalité, il doit se rendre compte que la déchéance va
de pair avec la perte de la citoyenneté européenne. Lorsqu’on a la nationalité, nous avons des droits qui font
partie de la citoyenneté européenne. Dans le contexte de l’affaire Rottmann, la personne se retrouvait sans
nationalité. Ce que le droit européen exige c’est de penser européen, il veut éviter la déchéance.

Les liens entre nationalité et citoyenneté

L’universalisation de la citoyenneté au sens large Les droits politiques réservés aux


nationaux

Pendant longtemps, on a considéré assez normal de priver les étrangers de toute une C’est une tendance tout à fait générale
série de droit civils, économiques sociaux et culturels et de les réserver aux nationaux. Ce encore aujourd’hui. Nous verrons en droit
temps est révolu, on considère que tout humain doit bénéficier des droits civils, belge, que le droit européen est passé par
économiques, sociaux et culturels sous un certain nombre de réserves mais le principe là. Il y a des droits politiques pour les
est là. Cela s’explique par 3 facteurs : étrangers qui ont la nationalité d’un des
états membres de l’union européenne.
Caractère massif des migrations transnationales après la seconde guerre mondiale : On L’Union européenne enfonce un coin dans
trouve des étrangers installés dans des états dont ils n’ont pas la nationalité. La Belgique cette connexion entre la nationalité et
a eu besoin de plusieurs mains d’œuvres, la Belgique a fait appel à une migration citoyenneté au sens strict.
également marocaine et turque pour creuser des tunnels. Et ces personnes ne sont pas
retournées dans leur pays d’origine. Peut-on imaginer une évolution de la
citoyenneté au sens strict ? Que demain on
Développement du droit international du droit de l’homme : Lisons l’article 1er, on est accordera la citoyenneté politique aux
placé sous l’autorité d’un état dès lors que nous sommes établis sur cet état. étrangers ? C’est l’idéal préconisé par un
certains nombres d’intellectuels de gauche.
Il y a un facteur moral qui consiste à faire référence aux droits de l’Homme au sens le plus Dès lors qu’on réside et qu’on travaille sur
strict. le territoire de l’état, c’est logique de
donner des droits politiques mais ceci reste
largement utopique.

CHAPITRE 2 : LA NATION AU SENS SOCIOLOGIQUE ET SELON LES THÉORIES POLITIQUES

SECTION 1 : LES DIFFÉRENTES CONCEPTIONS DE LA NATION

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La C’est une conception qui réduit la nation à l’ensemble des personnes qui partagent une caractéristique objective
conception commune, ont en commun le fait de parler la même langue, d’avoir la même religion, de partager la même histoire,
ethnique d’avoir le même passé commun. Évidemment, d’être issu d’une « même race ».
de la
nation La conception ethnique est problématique car enfermé la nation dans des critères parfaitement objectifs c’est soustraire
à la discussion démocratique les frontières du « nous ». Or, c’est le propre de la démocratie la mise en débat de tout ce
qui est pertinent sur le plan politique en ce compris les limites de la communauté politique. Et c’est ce que fait la
conception ethnique.

Par exemple, l’annexion de l’Allemagne nazie à l’Autriche. Comment l’Allemagne se justifie ? Ils parlent l’allemand et c’est
le critère décisif. On en voit tout de suite le danger de cette conception. Cette conception ethnique est incompatible avec
la démocratie.

Nous avons souvent dit que la conception ethnique est une conception germanique grâce à deux auteurs. Il est vrai que
dans les discours à la nation allemande prononcés entre 1807 et 1808, le philosophe Fichte en appelle à la création d’un
état allemand et s’appuie sur le critère linguistique. Quand Fichte s’exprime, l’Allemagne est divisée en 200 principautés
et cherchaient leur unité politique alors le critère de la langue a été pensée. Donc, ne parlons pas d’une conception
germanique et ne l’opposons pas à la conception civique qui est purement française.

La On retrouve Sieyès qui a écrit l’ouvrage « qu’est-ce que le tiers-état ». On se souvient que Sieyès on la rencontré car c’est
conception lui qui a pensé la notion de pouvoir constituant originaire et dérivé et c’est aussi lui qui va définir la nation dans la
civique de conception civique. Selon lui, la nation c’est l’ensemble des citoyens libres et égaux qui veulent vivre sous une loi
la nation commune. La conception civique est totalement démocratique, critère subjectif.

Mais en réalité, il faut y reconnaitre un caractère utopique. On a jamais vu une nation se former à la manière d’une
association donc dire que la nation c’est ceux qui veulent vivre sous une loi commune c’est faire comprendre que chacun
sont des associés. Donc, il y a quelque chose d’idéal et c’est un idéal que Sieyès veut proposer aux français parce qu’en
réalité la nation française elle préexiste à son discours de 1788. La nation française est déjà formée par les rois de France
à partir d’une logique territoriale où la langue française va jouer un rôle décisif.

C’est assez facile pour lui que dire que la nation c’est cela. Mais ce qu’il veut faire c’est exclure de la nation, les privilégiés
qui veulent conserver les privilèges, il définit la nation par référence à l’idéal démocratique de l’égalité. Qu’est-ce que le
tiers état ? C’est l’assemblée qui n’a pas de privilèges et qui forme les français.

La On pourrait se dire, au fond, la solution est de retenir un élément de la conception ethnique, un élément objectif en
conception l’occurrence le passé commun et puis de retenir un critère volontariste qui caractérise la conception civique. Si on
syncrétique amalgame que ces critères-là, nous avons la définition que Renan nous donne de sa conception.
de Renan
Renan nous dit « la nation c’est l’ensemble de ceux qui sont unis par un passé commun et qui veulent vivre ensemble sous
une loi commune ». Donc on se dit que là on tient une bonne définition ? Mais en réalité, Renan n’hésite pas à en appeler
une forme de manipulation de passé. Il écrit dans un contexte particulier et on ne peut pas l’ignorer, il fait son discours
dans le contexte de l’annexion de l’Alsace par l’Allemagne. Il réagit donc à l’encontre de la conception ethnique et il
n’hésite pas à en appeler au travail des historiens pour qu’ils manipulent le passé commun pour que la nation française se
solidifie. Il faut que les historiens manipulent les gloires passées, les conditions essentielles pour être un peuple. C’est
quelque chose de non recommandable en terme d’évaluation.

On se réfère à une approche – celle de Ferry – et il en appelle à une éthique reconstructive. Il nous appelle à jeter un
regard critique sur le passé national, chaque nation devrait regarder son propre passé sous un œil critique. Celui qui
magnifie la nation belge en faisant l’impasse sur les méfaits de la colonisation, on refuse.

Définir la Tâche impossible ! Il est difficile de définir la nation aujourd’hui, la nation est à la fois civique et ethnique c’est-à-dire que
notion dans la réalité historique il y a ces deux composantes.
aujourd’hui
Deux faces :

Objective : C’est une agrégation sociale, un réseau de connexion issu d’un processus complexe où on trouve pleins de
données (religieuses, économique etc.) dans les faits.

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Subjective : Elle concile un mythe de nature conservatrice et l’horizon démocratique. Le mythe de nature conservatrice
c’est la tendance de valoriser son passé que tous les états ont. Par ailleurs, il y a l’horizon démocratique c’est-à-dire
qu’une nation accepte de s’orienter vers l’universel et ne se contente pas d’activer un mythe de nature conservatrice.

On peut finalement retenir de manière presque pragmatique la définition de Will Kymlicka. On constate qu’un même état
contient souvent plusieurs nations. Évidemment pas des nations en droit mais au sens socio-politique : « forme une
nation une communauté intergénérationnelle plus au moins développée sur le plan institutionnel, occupant un territoire
donné, partageant une langue et une histoire distincte de sorte qu’un état est multinational pour autant que ce fait
constitue un aspect important de l’identité personnelle et de la vie politique ». Retenons cette définition même si elle
n’est pas parfaite.

SECTION 2 : L’INFLUANCE DES DIFFÉRENTES CONCEPTIONSS DE LA NATION SUR LE


DROIT DE LA NATIONALITÉ

Les codes de la nationalité Les codes de la nationalité Les codes de la nationalité qui favorisent l’octroi de la
privilégiant le ius sanguinis privilégiant le jus soli sont en nationalité sur la base d’un acte de volonté s’inscrivent dans
s’inscrivent dans la conception harmonie avec la conception le droit fil de la conception civique de la nation
ethnique de la nation civique de la nation

Nous pouvons remarquer que les Cette conception privilège le jus On a vu plusieurs codes de la nationalité qui facilitent l’octroi
codes de la nationalité sont soli, ces codes de la nationalité ce de la nationalité dès lors que la personne étrangère est animée
tributaires d’une conception sont des codes qui attribuent la d’une volonté de devenir belge par exemple. C’est l’acte de
dominante de la nation. La nationalité en fonction du lieu où volonté qui est donc déterminant. Ici, nous sommes bien dans
première hypothèse : des codes l’individu est né, l’élément le droit fil de la conception civique de la nation car c’est la
de la nation qui privilégie le ius déterminant est donc le sol. volonté de vivre ensemble sous une loi commune.
sanguinis.
Il y a une évolution de la plupart En effet, il y a une question essentielle qu’il faut se poser : la
La conception ethnique c’est une des codes qui consistent à conception civique de la nation est-elle compatible avec des
conception qui met en avant sois privilégier cette conception. Cela critères d’obtention de la nationalité tenant à la fois
disant des critères objectifs s’explique en partie par les connaissance de la langue nationale (ou d’une des langues
comme la langue, la race, la mouvements migratoires, les nationales) et à la connaissance de son histoire ? Si on veut
culture, l’histoire. Bien sûr ici travailleurs se sont installés dans épouser la conception civique, on comprend la nation comme
quand le critère déterminant notre pays et le fait qu’ils ont l’ensemble de ceux qui veulent vivre sous une loi commune,
pour accorder la nationalité à la l’intention de rester dans notre l’ensemble qui accepte d’être des citoyens au sens strict.
personne est le critère de la pays. On trouve normal que leurs
nationalité de son père ou de sa enfants et petits-enfants aient Si la conception civique s’appuie sur le critère de volonté est-ce
mère, il est évident que nous aussi la nationalité belge que ça suffit ? Prenons un exemple, un étranger qui veut avoir
sommes dans une conception indépendamment du ius la nationalité belge mais qui n’a absolument pas la
ethnique de la nation. sanguinis. connaissance de nos langues nationales, qui ne s’intéresse pas
à notre histoire et qu’il veut faire un usage strictement
Au fond, pour des états comme la Cette façon de concevoir ces instrumental de la nationalité belge pour des raisons qui n’ont
Russie et la Grèce, il s’agit de critères est en harmonie avec la rien à voir. On observe que certains sont favorables à une
garder un lien national avec ceux conception civique de la nation. exigence de connaissance de la langue nationale et de l’histoire
qui dictent le pays et émigrent, D’abord négativement parce qu’il de la société en question. On peut être d’accord pour autant
leur souhait est de conserver un n’y a rien d’ethnique dans ce qu’on se limite à une connaissance instrumentale de la langue
lien avec leurs émigrés. Il y a de procédé. Ce qui relève de la et une connaissance élémentaire de l’histoire. Si l’on veut
très lointains descendants qui conception civique c’est l’idée exiger de l’étranger qu’il connaisse par cœur le français, on est
conservent la nationalité russe qu’on présume, de la part des dans un processus d’assimilation et non d’intégration. Mais il
alors qu’ils ne vivent plus en enfants et des parents, qu’ils sont faut quand même connaitre un minimum la langue pour
Russie depuis longtemps. intégrés et qu’ils font partie de la pouvoir travailler.
cité.

51
CHAPITRE 3 : L’ÉTAT-NATION ET L’ÉTAT PLURINATIONAL

Si on prend le mot « nation » au sens sociologique, la coïncidence entre un état et une nation dans ce sens ne
se réalise que dans un petit nombre de cas. L’état nation au sens sociologique est une espèce rare.

SECTION 1 : L’IDÉOLOGIE DE L’ÉTAT-NATION

C’est une représentation de l’état comme personnification juridique d’une nation. Si on prend le mot « nation »
au sens de Kymlicka on voit que un état strictement mono national se présente rarement.

Mais, prenons Malberg – grand théoricien en France –, en droit il nous dit qu’il y a nécessairement une totale
congruence entre l’état et la nation. Dans son esprit, la nation est comprise à la fois au sens juridique et au sens
socio-politique. Là où on peut lui donner raison c’est sur un plan strictement juridique. Sur le plan strictement
juridique, il n’existe pas d’état plurinational car dans tous les états, même au sens socio-politique, il faut
reconnaitre que en droit ce sont des états nations. Car en droit un état nation c’est un état qui possède un seul
pouvoir constituant et nécessairement un état, par définition, possède qu’un pouvoir constituant sinon il y
aurait plusieurs états. Et qui dit pouvoir constituant dit nation et état.

C’est une vision très formaliste et dire que l’idéologie de l’état nation l’a emporté, c’est faux. La plupart des
états sont des états nations au sens sociologique.

SECTION 2 : L’ÉTAT PLURINATIONAL AU SENS SOCIOLOGIQUE EST-IL VIABLE ?

Selon les doctrines nationales Selon les doctrines cosmopolitiques ou post-nationales

Il faut considérer que l’idéal c’est de faire coïncider l’état au sens Ces doctrines répondent oui à notre question. L’état
juridique et la nation au sens socio-politique de Kymlicka. Le principe plurinational est viable car il y a aujourd’hui un tel mélange
nationaliste érige la congruence entre le principe de l’unité politique et le des origines nationales, des personnes qui vivent dans
principe d’une forme d’unité culturelle. L’identification entre l’état au notre pays, que la réalité est de plus en plus
sens d’une communauté politique avec une identité culturelle est érigée cosmopolitique. Des modes de vies sont affectés par cette
par tous les nationalistes. expérience d’un brouillage entre nous et eux.

Si on prend le nationalisme au sens fort c’est-à-dire à la fois ethnique et Donc, le point de départ de cette théorie cosmopolitique,
exclusif, on se rend compte que cette doctrine est extrêmement c’est une observation réaliste mais c’est une théorie
dangereuse. Elle est éthiquement inacceptable. C’est une doctrine politique qui nous dit qu’il est bon de tenter de faire vivre
violente car pour assurer l’homogénéité ethnique il faut tuer et expulser, ensemble des communautés politiques différentes.
ce qui est incompatible avec la démocratie. On ne peut pas le confondre
avec le nationalisme faible qui est civique et inclusif. Le cosmopolitisme fonde alors la coexistence des nations
infra-étatiques à l’intérieur d’un état sur la base du
Il faut aussi distinguer un nationalisme majoritaire et minoritaire. Cette patriotisme constitutionnel. C’est quoi le patriotisme
observation a son importance car au fond nous avons tendance à épouser constitutionnel ? C’est le nom donné à un attachement qui
les nôtres. En réalité, il y a une forme de nationalisme mais il est comporte une dimension émotionnel mais très raisonnable
majoritaire donc sans aucune conscience, dans tous les états. Quel état car c’est un attachement, non pas à des critères de type
ne fête pas leur fête national ? Quel état n’a aucun drapeau ? Quel est le culturels, religieux ou ethnique, mais bien un attachement à
pays dont les citoyens ne vibrent pas lors des compétitions sportives ? Il y des valeurs constitutionnelles universelles. Ces valeurs se

52
a, au fond, une tendance à s’identifier à la nation. Le nationalisme ne déclinent différemment d’un état à un autre bien
prend pas cette qualification de nationalisme qui est douce. évidemment.

En réalité, il peut y avoir une dérive ethnique et exclusive dans le Ces nations infra-étatiques peuvent garder une identité
nationalisme majoritaire et minoritaire. Évidemment, dans le distincte, on peut lui donner des instruments qui lui
nationalisme minoritaire on le voit plus. Mais, il ne faut pas fustiger ni l’un permettent de conserver cette identité. Mais ce qui les
ni l’autre dès lors qu’ils restent civiques et inclusifs. soude, c’est une même adhésion aux valeurs
constitutionnelles telles qu’elles sont déclinées dans la
Au fond, quelle est la réponse que les doctrines nationalistes donnent à constitution
notre question « l’état plurinational au sens sociologique est-il viable ? ».
Les doctrines nationalistes pures et dures disent que l’état plurinational Une question se pose : est-ce que cette théorie du
n’est pas viable, qu’il va disparaitre tôt ou tard du fait de cession de la patriotisme constitutionnelle est convaincante ? Il y a, sans
part des nations minoritaires. doute de la part de certains belges, une adhésion aux
grands principes qui sont inscrits dans notre constitution.
En ce qui concerne le nationalisme au sens faible sur la question, il n’est Outre le patriotisme, il faut une dimension un peu moins
pas exclu que l’état plurinational demeure viable mais cela reste difficile. rationnelle et plus émotive qui est « le désir de délibérer
Le nationalisme au sens faible admet que un degré d’autonomie puisse ensemble ».
être accordé pour autant que ce degré soit puissant au profit d’une
communauté nationale minoritaire.

SECTION 3 : LES NATIOS (AU SENS DE KYMLICKA) DISPOSENT-ELLES D’UN DROIT À


L’ÉTAT ?

C’est le droit de faire cessetion. C’est une partie de la population d’un état qui veut se retirer de cet état pour
proclamer sa transformation en un nouvel état. Est-ce que le droit vient au secours du nationalisme au sens
fort ? Non, mais distinguons la réponse du droit international d’une part et d’autre part la réponse du droit
constitutionnel.

En droit international En droit constitutionnel

Est-ce que le principe nationaliste au sens fort est traduit dans le droit des Le droit constitutionnel offre une série d’instruments
peuples à disposer d’eux-mêmes ? A première vue, on peut le croire si on lit pour permettre à des nations de bénéficier un
l’article 1er, §2 de la CNU. Mais, ils ont tort, en droit international, ce principe est certain degré d’autonomie. Mais on doit constater
interprété de manière résolument restrictive et ça se comprend. Pourquoi ? car que le droit constitutionnel n’est plus opposé
si on doit interpréter ce principe comme signifiant un droit pour toutes nations, totalement à un droit véritable de cessetion.
au sens de Kymlicka, de faire cessetion, nous allons mettre le monde à feu et à
sang. Donc, les Nations unies interprètent de manière restrictive le droit des • Dans un avis, à propos de la cessetion du
peuples à disposer d’eux-mêmes. Québec, la Cour suprême du Canada se
prononce. Le Québec à été presque marqué
Nous avons une déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux par une majorité de cessessionistes et le
peuples coloniaux (annexe p.10) qui nous dit « Tous les peuples ont le droit de Canada a tremblé car la plupart des
libre détermination; en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut Canadiens ne voulaient pas d’une cessetion.
politique et poursuivent librement leur développement économique, social et La Cour a été saisie d’une demande d’avis
culturel. ». Voilà donc une première question à ma réponse, qui peut avoir le « est-ce que le Québec a le droit à faire
droit de disposer d’eux-mêmes ? Tous les peuples qui ont été colonisés. Il faut cessetion ? ». Non mais il a le droit de
bien s’entendre sur ce qu’est une colonie : territoire géographiquement séparé demander la cessetion donc le reste du
et ethniquement ou culturellement distinct du pays qui l’administre. Canada est dans l’obligation de négocier. Le
reste du Canada ne peut pas dire au Québec
Deuxième catégorie, c’est le peuple soumis à une occupation étrangère. Ils ont « on ne discute pas de ça », si une majorité
le droit de faire cession. de québécois répond à une question sur
l’indépendance du Québec alors le Canada
Troisième catégorie, les peuples soumis à un régime raciste. a l’obligation d’entrer en négociation. Le

53
raisonnement de la Cour est fondé sur 4
En dehors de ces trois cas, le droit international ne reconnait pas un droit à la grands principes : le fédéralisme, la
cessetion. Il y a des discussion à propos d’une 4e hypothèse : on pourrait, selon démocratie, le constitutionnalisme et la
certains internationalistes, admettre un droit à la cessetion pour les peuples qui primauté du droit. La Cour dit qu’il n’y a pas
vivent dans des conditions épouvantables par rapport aux droits de l’Homme. de réponse à la question dans la
Mais, la Cour internationale de justice a évité de se prononcer sur ce 4e cas. constitution mais sur la base de ces grands
principes, elle doit admettre un droit à
Attention, les peuples enclavés dans des états multinationaux n’ont pas un droit demander la cessetion.
à faire cessetion en dehors de ces 3 cas. Mais ça ne veut pas dire que ces
peuples ne vont pas faire cessetion, ils n’ont pas le droit mais ça ne leur est pas • Le Royaume-Uni a aussi montré une
interdit. Pourquoi ? Si on parle de droit à faire cessetion il y aurait une certaine sagesse en adoptant une loi qui a
obligation, pour les autres états, d’y prêter main forte. Or, chaque état a le droit permis à l’Ecosse d’organiser un
au respect de son intégrité territoriale mais ce droit est opposable aux autres référendum d’indépendance. Le
états et donc si un peuple enclavé dans un état multinational fait cessetion, il n’y référendum a donné lieu à une réponse
aucune permission aux autres états de venir aider les cessionnistes car ils ont négative. Depuis lors, le temps est passé, il
droit à son intégrité territoriale. Le peuple qui veut faire cessetion n’y est pas y a eu le Brexit qui est le retrait du
empêché. Royaume-Uni et qui change la donne. Ce
référendum amène un nouveau
Il y a beaucoup de peuples qui souhaiteraient faire cessetion et devenir des états référendum avec le risque que l’Ecosse y
indépendants. Ils n’ont pas le droit et dans les faits ils sont souvent empêchés. réponde favorablement.
Ce qu’il faut souhaiter c’est que ces peuples disposent d’un certain degré
d’autonomie interne et ici le grand internationaliste italien dit « surtout ne vous • La crise catalane de 2017 montre que la
hypnotisez pas sur un territoire au point d’en faire une préoccupation Cour espagnole a été incapable de
obsessionnel et si c’est le cas vous allez être contre la paix ». raisonner comme la Cour suprême du
Canada.

CHAPITRE 4 : L’ÉTAT ET NATION EN BELGIQUE

SECTION 1 : LA NATION SELON LA CONSTITUTION BELGE

La nation diachronique La nation synchronique La nation synchronique


constituante constituée

C’est cette chaine de génération Dans la constitution belge on la On la retrouve dans l’article 42
des nationaux qui forment l’état. retrouve dans l’article 33. C’est la « Les membres des deux
Est-ce que l’on retrouve cette nation qui est titulaire du pouvoir Chambres représentent la nation,
conception dans la constitution ? constituant originaire et peut-être et non uniquement ceux qui les
Oui dans la formule liminaire de la que c’est elle qui va un jour se ont élus ». Ils sont élus
constitution du 7 février 1831. Le réveiller pour soit refonder l’état conformément à la constitution et
Congrès national a adopté la belge soit décider du divorce au code électorale qui représente
première constitution au nom du belgo-belge. la nation synchronique constituée
peuple belge dans le but de qui joue à travers les différents
traverser le temps canaux mis en place par la
constitution.

Donc unicité de la nation belge en droit, mais derrière cette unique nation belge se cache une ou des nations
au sens socio-politique. On reparlera de cette question une / des nations, il y a en tout cas une nation flamande

54
mais est-ce qu’il y a une nation wallonne ? Mais ce qui est sûr, en droit constitutionnel, on peut voir dans la
Constitution les notions de groupes linguistiques (art. 33, 44, 54, 99 al.2), une forme de reconnaissance de
l’existence de nations « infra-étatiques ».

Il faut également faire une distinction entre la nation et la population et elle apparait dans la constitution :
article 63 §2-§3. Cet article signifie que l’on tient compte non seulement des nationaux mais aussi des
étrangers à l’intérieur de chaque arrondissement électoral pour déterminer le nombre de sièges à pourvoir au
sein de la Chambre des représentants.

SECTION 2 : LES LANGUES DE L’ÉTAT BELGE

L’héritage de la Révolution 1830-1831 : article 30 de la Années 1967 : l’article 189 de la Constitution


française : une politique Constitution – liberté de l’emploi de 1870,1880,1890 – d’où le texte officiel de la
d’unification linguistiques sous langues mais phénomène de Constitution est enfin établi en
les régimes français et hollandais francisation institutionnelle néerlandais

Nous avons été occupés par des Les révolutionnaires belges ne Le défaut Dans les années 1920-1930, les
Français, par des Hollandais et on veulent plus des contraintes d’utilisation du responsables des politiques flamands
a pratiqué à ce moment-là une linguistiques issues de l’occupation néerlandais de la et wallons renoncent à l’idée d’un
pratique d’unification française et hollandaise. Ils part des autorités bilinguisme généralisé. L’idée d’un
linguistique. Il y a une politique proclament donc, dans l’article 30, la publiques appelle bilinguisme se heurte à une crainte
souvent adoptée par les états. En liberté de l’emploi de langues. Mais, une première série et à une ignorance. Une crainte
Allemagne, la langue allemande a à l’époque, tous les travaux du d’interventions légitime de nos amis
été un élément premier de Congrès national sont menés en législatives dans les néerlandophones à l’époque, c’est
cristallisation de l’état pour français. En réalité, il y a une domaines de la que quand on ouvre les vannes du
réunir tous les locuteurs de la domination des élites politiques justice, de bilinguisme c’est le francophone qui
langue allemande. En France c’est francisées partout même en Flandre. l’administration, de impose sa langue, une crainte que ce
l’inverse, l’état français s’est La langue néerlandaise était loin l’enseignement et soit une francisation de toute la
créée avant la nation au sens d’être généralisée, il y avait des publications Flandre. Du côté wallon, on ignore le
socio-politique donc les rois de beaucoup de dialectes. officielles. Mais, ça néerlandais.
France ont utilisé la langue ne suffit pas pour
comme instrument pour unifier Ceci va amener une contradiction donner satisfaction On s’oriente alors vers une autre
l’état. constitutionnelle. On ne peut à la aux revendications règle : homogénéité linguistique
fois dire que l’article 30 oblige légitimes du territoriale. En 1967, l’article 189
Il y a là un héritage que nous l’emploi des langues et en même mouvement nous dit qu’il y a bien un texte
avons endossé sous la Révolution temps constater que les autorités flamand. officiel établit en néerlandais et il
belge. publiques sont incapables d’utiliser faudra attendre 1991 pour les
le néerlandais. Ce sont des situations allemands.
insupportables.

Le principe de En première approximation, le principe de l’homogénéité territoriale signifie que la langue utilisée par toutes les
l’homogénéité autorités administratives sur le territoire d’une région unilingue, c’est la langue de cette région unilingue soit
territoriale et exclusivement soit en toute priorité.
les facilités
linguistiques On va également voir que ce principe est l’objet de certaines controverses, aujourd’hui il y a bien l’idée d’une
utilisation exclusive par les autorités et des institutions soumises à la législation linguistique mais cette interprétation
n’a pas été retenue sans de grandes controverses.

Avant d’examiner cette controverse, il faut faire l’histoire de l’émergence et de la fixation de la frontière linguistique.

55
L’émergence Le 31 juillet 1921, une loi consacre la notion de région linguistique c’est-à-dire un territoire où on applique le principe
et la fixation d’utilisation principale de la langue de la région et c’est aussi dans cette loi que l’on détermine une véritable frontière
de la frontière linguistique entre ces frontières linguistiques. Les frontières existent depuis longtemps mais sa consécration juridique
linguistique date de 1921.

Cette frontière était encore mobile en fonction des recensements linguistiques tous les 10 ans. Le constat c’est que de
recensement en recensement, on voit que la langue française gagne du terrain. C’est la langue de l’élite et le
mouvement flamand impacté par cette francisation craint le phénomène de la tâche d’huile francophone. C’est une
menace pour la culture flamande donc le mouvement flamand exige que la frontière linguistique ne soit plus mobile et
qu’elle soit fixée une fois pour toute.

C’est la raison pour laquelle, après la seconde guerre mondiale, la loi du 8 novembre 1962 fixe la frontière linguistique
et rectifie la limite des provinces. Il y a 2 communes qui vont beaucoup faire parler d’elles : les communes de Fourons
avec une grande majorité francophone et sont soustraites de la province de Liège pour être rattaché au Limbourg
donc à une région flamande. On pratique la solution inverse pour les communes de Mouscron Cormines-Warneton
avec une minorité francophone et on détache les communes de la Province de Flandre occidentale pour les rattacher
à la province du Hainaut.

C’est un deal mais les francophones ne vont pas accepter l’attachement, ils vont provoquer des actes de rébellions
dans les années 60. Nous signalons que cette loi du 8 novembre a été adoptée par la quasi-unanimité des députés
flamands et une minorité francophone. C’est l’origine de la demande des francophones de prévoir des lois spéciales. Si
ce rattachement de ces communes soit à la région de langue néerlandaise soit à la région de langue française s’était
fait sous l’égie d’une loi spéciale, jamais nous aurions pris cette décision car elle nécessite une majorité dans les deux
groupes linguistiques. Ca a donc été un traumatisme chez les députés francophones de voir qu’ils sont minoritaires
dans la Chambre des représentants.

Pour ce qui concerne les communes bruxelloises, il y avait une demande assez logique de la part des francophones
vivant dans 6 communes autour de Bruxelles, de rattachement de ces 6 communes à majorité francophone à
l’agglomération bruxelloise. On aurait vu Bruxelles s’élargir de 19 communes à 25. Au départ, le projet du
gouvernement de l’époque propose ce rattachement mais les mouvements flamands déclenchent une campagne
virulente contre ce projet et il va falloir reculer du côté francophone et ils le font sur base d’un compromis. Le
compromis consiste à délimiter 4 régions linguistiques, à enfermer Bruxelles dans les 19 communes et en
compensation on octroie des facilités linguistiques pour les francophones établie dans ces 6 communes périphériques.

L’histoire aboutit à la révision de la constitution mais juste avant la révision, une loi intègre les 6 communes
périphériques dans la région de langue néerlandaise. On maintient les facilités linguistiques. Puis intervient la révision
de 1970 qui consacre les 4 régions linguistiques et la frontière linguistique. On veut assurer la stabilité de la frontière
linguistique en prévoyant que aucune modification de cette frontière ne sera adoptée sans une majorité dans chacun
des groupes linguistiques.

! Lisons les articles 2 à 6 des lois coordonnées sur l’emploi des langues en matière administrative. Nous avons la liste
des communes qui font partie de chacune de ces régions.

Les facilités Les francophones n’obtiennent pas le rattachement des 6 communes à Bruxelles mais obtiennent des communes à
linguistiques facilité. Ces communes peuvent utiliser le français mais dans les limites. On doit regarder l’article 24 à 26 pour
comprendre les facilités.

Il n’y a pas que les communes périphériques, il faut bien lire l’article 5, 7 et 8 des LCEL (lois coordonnées sur l’emploi
des langues). Nous avons les 4 catégories suivantes : communes périphériques, les communes de langue allemande,
les communes malmédiennes et les communes de la frontière linguistique. Ce sont ces communes que vise l’article
129, §2, premier tiret de la Constitution, il nous signifie que tout changement du régime de l’emploi des langues dans
ces communes exige une loi spéciale.

Les Les différences entre les 3 Régions et les 4 Régions linguistiques :


interprétations
de l’article 4 1. Le ressort territorial : On constate que la région flamande au sens de l’article 3 coïncide territorialement avec la
de la région de langue néerlandaise. On constate aussi que la région bruxelloise coïncide avec la région bilingue de
Constitution :

56
distinction Bruxelles-capitale. C’est au Sud du pays que se trouve la solution à l’énigme. Il y a dans la Région wallonne deux
préalable Régions linguistiques : la Région de langue française et la Région de langue allemande.
2. La nature juridique : collectivité politique contre circonscription administrative
Les 3 régions sont des collectivités politiques qui sont des personnes morales de droit public qui ont des organes
élus pour assumer des compétences propres. Tandis que les Régions linguistiques sont des circonscriptions
administratives. Une circonscription administrative c’est une subdivision du territoire créée par une personne
morale de droit public pour atteindre un des deux objectifs suivants :
- Facilité l’action de cette personne morale par des services administratifs déconcentrés.
- Diversifier l’action de cette personne morale en différenciant les règles d’une même législation ou d’une
même réglementation en fonction du lieu auquel elle s’applique.

Au départ, les régions linguistiques ont été conçues exclusivement comme des circonscriptions administratives. C’est
donc bien une délimitation territoriale qui permet de différencier les règles de la législation linguistique en fonction
des lieux où elles s’appliquent.

On pourrait s’arrêter là ? : Les 4 Régions linguistiques sont des circonscriptions administratives, elles n’ont pas la
personnalité juridique, pas d’organe élu, pas de compétence propre donc ne sont pas des collectivités politiques. Il
s’agit juste de délimitation propre pour délimiter l’application des règles en fonction du lieu où elles s’appliquent.

2.1. Doctrine francophone : Ce qui est indiqué au-dessus c’est devenu la doctrine francophone. Du côté francophone,
on a pas imaginé qu’il était possible d’interpréter différemment l’article 4 §1. La doctrine francophone consistait à
dire qu’on ne peut évidemment identifier des règles sur l’emploi des langues qu’en combinant la notion de Région
linguistique avec les lois coordonnées sur l’emploi des langues en matière administrative. Mais il s’est développé
une jurisprudence dans le chef du Conseil d’état, c’est une véritable saga des arrêts ! Elle est la preuve des clivages
entre les différentes régions. Elle apparait être une juridiction qui peut faire de la politique à sa façon.
2.2. C.E. Germis n°15.990 du 17 août 1973 : Nous sommes à Beersel dans la région de langue néerlandaise avec pas
mal de francophones. Un certain nombres de conseillers communaux prêtent serment en français et le problème
c’est que les néerlandophones considèrent qu’il aurait fallu que ces conseillers prêtent serment exclusivement en
néerlandais. Est-ce que ces conseillers communaux sont obligés d’utiliser la langue néerlandaise pour un acte qui
consiste à prêter serment ? Le Conseil d’état, dans un arrêt présent ici, raisonne tout à fait au rebours de la
doctrine francophone. La doctrine nous dit que le grand principe c’est la liberté de l’emploi des langues (article
30). Donc la doctrine considère que s’il n’y a rien sur la législation sur l’emploi des langues qui exige l’utilisation
d’une langue déterminée, c’est la liberté qui prime. Lisons la législation sur l’emploi des langues en matière
administrative, elle ne dit rien. Conclusion des francophones : liberté de l’emploi des langues. Voyons le
raisonnement du Conseil d’état. Le point de départ du raisonnement, c’est l’article 4, il y a une Région de langue
néerlandaise. Si il y a une Région de langue néerlandaise dans la constitution, c’est parce que il y a lieu d’y voir un
principe sous-jacent. Le Conseil d’état développe donc une interprétation caractéristique de la méthode
téléologique. La raison d’être de la notion même de la Région linguistique dans la constitution, c’est d’imposer un
principe de l’homogénéité linguistique territorial. Le principe sous-jacent à cet article 4 c’est l’obligation, sauf
exception, d’employer la langue de la Région pour tous les actes administratifs. Donc, pas d’exception pour les
serments ! Cet acte doit être posé en néerlandais à peine de nullité. Les francophones tombent sur leur chaise car
ils partaient de l’article 30.
2.3. C.A. n°17/86 du 26 mars 1986 : La Cour constitutionnelle intervient. Elle est extrêmement prudente, elle ne
donne pas tout à fait raison au Conseil d’état mais ne lui donne pas tout à fait tort. La Cour constitutionnelle, en
effet, dit 2 choses :
L’article 4 comporte une restriction de la compétence des législateurs en matière de l’emploi des langues et
constitue ainsi la garantie constitutionnelle de la primauté. On ne dit pas de l’exclusivité mais de la primauté de la
langue. Là, la Cour constitutionnelle donne la main au Conseil d’état. Mais !
En soi, cet article 4 n’entraine pas une transformation de l’ordonnancement juridique. Là, la Cour
constitutionnelle donne raison à la doctrine francophone. Mais, l’histoire continue
2.4. C.E. 30 septembre 1986 : Le Conseil d’état, dans 5 arrêts, va persister dans la jurisprudence de l’arrêt Germis.
Arrêt n°26.943 : Cons. 5.4.1. : « Considérant tout d’abord, en ce qui concerne l’article [4] de la Constitution, qu’il
n’appert pas qu’en considérant (3.B.6. de son arrêt) : (…), la Cour d’arbitrage conçoive cette interprétation
comme un motif indissociablement lié au dispositif de son arrêt ».
Arrêt n°26.944 : Cons. 4.4. : « Considérant que l’article [4] de la Constitution contient l’exigence de principe que
les membres des organes des communes de la région de langue néerlandaise doivent utiliser et, partant,
connaître le néerlandais ; que cette exigence signifie que quiconque ne connaît pas ladite langue ne peut devenir

57
valablement membre d’un tel organe ».
Cette interprétation a été condamnée par la Cour constitutionnelle ! Mais, le Conseil d’état ne se laisse pas
démonter et estime que le considérant n’a pas autorité de chose jugée car c’est un propos tenu par la Cour
constitutionnelle qui est une interprétation comme un motif indissociablement lié au dispositif de son arrêt.
2.5. La loi du 9 août 1988 dite pacification communautaire : La question fouronnaise provoque une crise politique
majeure et fait la chute du gouvernement en 1987. Monsieur Happart ne se laisse pas faire et les politiques non
plus. Donc, la démocratie consociative belge se met en route et accouche une loi du 9 aout 1988 de pacification
communautaire. C’est l’article 68bis de la loi électorale communale qui institue une obligation de connaissance de
la langue de la Région correspondante. La loi confirme la jurisprudence du Conseil d’état mais il y a un compromis.
La loi considère qu’il y a une présomption de connaissance de la langue dans le chef des mandataires élus mais
pour les bourgmestres et échevins cette présomption peut être renversée à la demande d’un membre du Conseil
communal. Un compromis qui ne va pas engendre la paix
2.6. C.E. Walraet n°35.187 du 12 juin 1990 : Le Conseil d’état persiste en considérant que la jurisprudence de la Cour
constitutionnelle constitue toujours une interprétation comme un motif indissociablement lié au dispositif de son
arrêt. Il y a une obligation d’utilisation du néerlandais dans la Région de la langue néerlandaise donc le cas aussi
pour les conseillers communaux.
2.7. C.A. n°26/98 du 10 mars 1998 : La Cour d’arbitrage dit que compte tenu de la loi de pacification, il faut considérer
que l’obligation d’utiliser la langue de la Région au cours des séances communales s’applique qu’aux
bourgmestres et aux échevins et non aux conseillers communaux. Encore une fois, le Conseil d’état ne va pas
s’intéresser à cela
2.8. La circulaire Peeters sur les facilités linguistiques et C.E. arrêt n°138.860 à 864 du 23 décembre 2004 : Monsieur
Peeters signe une circulaire en 1997 qui prétend ne rien faire d’autre que d’exprimer sur ce qui se trouve sur la
législation des emplois des langues (art. 24, 26 et 28). Lisons l’article 26. La pratique était que - jusqu’au moment
où la circulaire est adoptée - dès lors qu’un francophone désir recevoir ses documents en français c’était bon.
Mais la circulaire refuse ! Il y a une obligation pour les francophones qui souhaitent recevoir les documents en
français de répéter la demande d’obtention d’une traduction en français à l’occasion de chaque acte. On veut
tracasser les francophones qui ne s’adaptent pas en parlant le néerlandais. Le Conseil d’état, dans un arrêt du 23
décembre 2004, valide cette interprétation restrictive fondée sur la jurisprudence Germis. L’idée est que tout doit
se passer dans la langue de la Région sauf exception. Les choses ne s’arrêtent pas là
2.9. La circulaire sur la langue des convocations électorales pour les élections communales : Une circulaire est
adoptée par un ministre flamand, une circulaire sur la langue des convocations électorales pour les élections
communales. L’idée est la suivante : dans le droit fil de l’arrêt de Conseil d’état du 23 décembre 2004, le ministre
dit que la langue utilisée dans la Région de langue néerlandaise est le néerlandais pour les des convocations
électorales pour les élections communales et ce n’est que par la demande des francophones que ça se fera en
français. 3 bourgmestres envoient toujours en français dans la Région de langue néerlandaise et d’autres
bourgmestres flamands ne l’entendent pas de cette oreille, ils disent que ces bourgmestres ne peuvent pas être
élus car ils ont enfreint la loi.
2.10. La 6e réforme de l’état : Au fond, le vrai problème est où ? Il est dans la jurisprudence du Conseil d’état car
l’affaire est locale. Les auteurs de la 6e réforme de l’état trouve une solution : on va forcer le Conseil d’état –
assemblée générale, bilingue – à s’exprimer sur cette question. Voyons l’article 13bis sur la nouvelle loi
communale. C’est la fin de l’histoire. Pour des questions comme celles-là, quand on se situe dans les communes
périphériques, en ce qui concerne la nomination du Bourgmestre, il y a une procédure réglée dans l’article 13bis.
S’il y a un recours en annulation contre la nomination du Bourgmestre, c’est l’assemblée générale du Conseil
d’état qui va devoir trancher le conflit. Avant de voir si ce pari va être gagné, un coup d’œil à l’article 160 de la
Constitution. On voit à quel point de la méfiance on est arrivé, cette saga des Régions linguistiques a choqué les
partis politiques francophones. On a trouvé une solution mais on veut éviter que cette solution soit abrogée à la
suite d’un vote de majorités de flamands, on dit bien dans cet article 160, que la solution – décision de faire
intervenir l’assemblée générale de la section du contentieux administratif du Conseil d’état bilingue – ne peut pas
être modifiée si ce n’est que par une loi spéciale donc on est sur qu’elle ne sera jamais modifiée. Est-ce que le pari
est gagné ? Oui un arrêt pacificateur est rendu (C.E., arrêt 227.776 du 20 juin 2014) et qui consiste à dire
ceci : « Dans ce contexte, d'une part, une large interprétation de ces droits, préconisée par le requérant, selon
laquelle les particuliers qui ont demandé une fois l'emploi du français reçoivent automatiquement à nouveau les
documents en français par la suite jusqu'à la fin de leurs jours n'est pas conciliable avec cette primauté; d'autre
part, l'interprétation préconisée par le Gouvernement flamand qui consiste à exiger de l'intéressé une démarche
spécifique chaque fois qu'il souhaite bénéficier de l'usage du français, restreint de manière disproportionnée les
droits garantis aux articles 25, 26 et 28, précités. Ces deux interprétations sont donc contraires au droit. ». Le
Conseil d’état trouve la solution en produisant une sorte d’arrêt de règlement c’est-à-dire un arrêt qui fabrique du

58
droit mais qui ne se contente pas de l’appliquer. Voilà la solution : « l'autorité communale doit se référer à la
connaissance qu'elle a de la langue du particulier, mais que celui-ci doit porter son désir d'être servi en français à
la connaissance de l'administration à intervalle régulier raisonnable. L'autorité communale doit se référer à ce
choix, dont elle ne peut prendre connaissance qu'au moyen d'une lettre que le particulier envoie à
l'administration communale ou y dépose à cette fin. Ce choix s'applique pendant un délai raisonnable, à savoir
pendant une période de quatre ans, à compter de la réception ou du dépôt de la lettre visée à l'administration
communale. Après l'expiration de ce délai de quatre ans, le particulier peut renouveler son choix par une lettre
adressée à l'administration communale, chaque fois pour une nouvelle période de quatre ans. L'administration
communale doit chaque fois, sans délai, envoyer un accusé de réception ou un reçu de dépôt de la lettre au
particulier concerné ».

SECTION 3 : LE DROIT BELGE DE LA NATIONALITÉ

Le point de départ du raisonnement est toujours dans la constitution, c’est l’article 8. Quelle est la loi dont
parle l’article 8 ? C’est le Code de la nationalité.

L’article 1er §1 du Code de la nationalité pose une distinction fondamentale, la distinction entre les modes
d’acquisition et les modes d’attribution de la nationalité belge.

L’obtention de la nationalité belge

Les modes d’attribution de la La nationalité est obtenue par l’intéressé indépendamment de tout acte de volonté donc par l’effet
nationalité belge de la loi.

On va distinguer 3 modes :

L’attribution par filiation : Elle est posée par l’article 8 du Code de la nationalité. C’est d’être né d’un
père/une mère belge, c’est le critère du sang.

L’attribution par la naissance en Belgique : Elle est posée par l’article 10. C’est le critère du jus soli.
C’est le fait d’être né en Belgique donc pas né d’un père/mère belge mais être né en Belgique. Il
faut distinguer 4 cas :

- C’est le fait d’être né en Belgique et d’être devenue apatride si le code de la nationalité


n’avait pas prévu qu’on serait, dès lors né en Belgique, belge. On veut éviter l’apatride.
- C’est l’enfant né trouvé en Belgique, il devient belge.
- Le 3e cas se trouve à l’article 11. On a affaire aux étrangers de la 3e génération, une
naissance en Belgique. Ce sont des enfants nés en Belgique d’un auteur étranger mais lui-
même né en Belgique, se voient attribuer la nationalité automatiquement.
- Le 4e cas est posé par l’article 11bis, ce sont les étrangers de la 2e génération, un enfant
d’un étranger se voit attribuer la nationalité belge SI ses parents, avant les 12 ans de
l’enfant, font une demande d’attribution de la nationalité. Il y a un acte de volonté mais
pas posé par l’enfant lui-même donc ce n’est pas un acte de volonté.
- L’attribution par l’effet collectif d’un acte d’acquisition : L’hypothèse se trouve à l’article
12. L’hypothèse suivante, le papa ou la maman sont étrangers mais acquièrent la
nationalité belge. En cas d’acquisition volontaire par le papa/la maman, tous les enfants se
voient attribuer la nationalité belge automatiquement.

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Les modes d’acquisition de la Par convention on appelle acquisition de la nationalité une façon de l’obtenir à la suite d’un acte
nationalité belge volontaire de l’intéressé.

L’acquisition par déclaration de nationalité :

Il y a une notion essentielle à bien comprendre, c’est que cette déclaration confère un droit
subjectif à acquérir la nationalité belge. Qui droit subjectif dit le pouvoir d’exiger d’un tiers – le sujet
passif – une action ou abstention en vertu d’une règle de droit objectif qui lie ce tiers de manière à
ne lui laisser aucun pouvoir d’appréciation discrétionnaire. Qui dit droit subjectif dit aussi le pouvoir
de saisir une juridiction pour contraindre le débiteur à s’exécuter (art. 144 et 145 de la
constitution).

La différence, entre l’acquisition par l’effet de déclaration et l’acquisition par l’effet d’une
procédure de naturalisation, c’est que dans le premier cas le déclarant a un droit subjectif. Alors
que celui qui demande à obtenir la nationalité par naturalisation, il se trouve devant la Chambre des
représentants et la Chambre a un pouvoir d’appréciation discrétionnaire, c’est elle qui décide de
donner ou de ne pas donner la nationalité.

Les conditions d’accès à l’acquisition de nationalité par déclaration :

Si ces conditions sont réunies, on peut demander la nationalité belge par déclaration :

Première hypothèse : cas de l’étranger né en Belgique, formule quasi-automatique de déclaration


de nationalité. Cette hypothèse se trouve à l’article 12bis, §1, 1°du code de la nationalité.

Cet étranger ne répond donc pas aux autres conditions pour se voir attribuer la nationalité mais il
peut faire une déclaration conformément à l’article 15. C’est un droit subjectif sur la seule réserve
résultant d’un fait personnel grave.

Deuxième hypothèse : cas de l’étranger qui réside légalement en Belgique depuis 5 ans, formule
courte de déclaration de nationalité. Ceci se trouve à l’article 12bis §1, 2°.

( La connaissance des langues s’arrête où ? On doit aller voir à l’article 1 §2, c’est une connaissance
minimale).

Troisième hypothèse : cas de l’étranger qui réside légalement en Belgique depuis 5 ans ET dont le
conjoint est belge ou qui a un enfant belge, formule courte de déclaration de nationalité assouplie.
Ceci se trouve également à l’article 12bis §1, 3°.

Quatrième hypothèse : cas de l’étranger qui réside légalement en Belgique depuis 5 ans ET qui ne
peut participer à la vie économique, formule courte de déclaration de nationalité assouplie. Ceci se
trouve à l’article 12bis, §1, 4° (personne handicapée, invalide ou retraitée).

Cinquième hypothèse : cas de l’étranger qui réside légalement en Belgique depuis 10 ans, formule
longue de déclaration de nationalité. Ceci se trouve à l’article 12bis, §1, 5°.

La procédure d’acquisition de la nationalité par déclaration :

Cette procédure passe d’abord par l’article 15 qui détaille la procédure. Retenons simplement
quelques éléments. Il faut d’abord signaler une référence à l’article 12bis §3 (renvoie), on doit
déclarer vouloir acquérir la nationalité belge et se soumettre à la constitution, à la convention des
droits de l’homme et aux lois du peuple belge.On est typiquement dans la conception civique de la
nation, la nation se définit comme l’ensemble de ceux qui veulent vivre ensemble sous une loi
commune.

60
La procédure est détaillée dans l’article 15, on retient ceci : le procureur du Roi est invité à remettre
un avis pour vérifier si les conditions sont réunies et éventuellement le Parquet va émettre une
objection en reprochant d’avoir commis un fait personnel grave à l’étranger. Un fait personnel
grave c’est quoi ? Il faut aller voir à l’article 1er §1.

Il y a donc un avis négatif remis par le procureur du Roi et la nationalité est refusée. Mais si
l’étranger persiste et signe, il peut saisir le tribunal de la famille. Là, se vérifie, que l’on a affaire à un
droit subjectif car qui dit droit subjectif dit possibilité de saisir une juridiction pour obtenir gain de
cause. Cette saisine possible du tribunal de la famille, on la trouve indiqué au §5 de l’article 15.

L’acquisition par naturalisation : Ici, nous avons pas droit subjectif car article 9 de la Constitution. Il
y a une vieille tradition qui veut que la naturalisation est une faveur accordée de manière
discrétionnaire par une autorité purement politique, en l’occurrence, par la Chambre des
représentants (= pouvoir législatif fédéral).

La Cour constitutionnelle a été amenée à se prononcer sur le caractère discriminatoire ou non de


cette procédure. Elle a répondu que c’est le constituant lui-même qui a décidé d’accorder un
pouvoir d’appréciation discrétionnaire au pouvoir législatif. Le constituant d’habitude donne au
pouvoir législatif la fonction normative et pas la fonction de prendre des décisions purement
individuelles.

Les conditions d’accès à l’acquisition de la nationalité par naturalisation :

Les conditions se trouvent dans l’article 19 du Code de la nationalité.

La procédure d’acquisition de la nationalité par naturalisation :

La procédure est détaillée à l’article 21 du Code de la nationalité. La naturalisation se fait très


rarement au vu des conditions.

On signale maintenant que dans les critères utilisés par la Chambre des représentants, le critère
linguistique n’a pas totalement disparu. Dans l’article 21 §5, la Chambre statue sur l'octroi de la
naturalisation selon les modalités déterminées dans son règlement. L'intégration et la connaissance
d'une des trois langues nationales constituent des éléments importants à cet égard, qui sont
précisés par la commission des naturalisations dans son règlement.

Caractéristique majeure de cette procédure, en cas de refus, aucun recours n’est prévu à l’encontre
de cette décision de refus. C’est bien la preuve que nous n’avons pas affaire à un droit subjectif.

La perte de la nationalité belge

La perte volontaire La perte automatique La perte judiciaire ou déchéance

C’est l’article 22 §1. On souhaite renoncer à la Ceci se trouve à l’article 22 §1 C’est une sanction, l’idée c’est que cette déchéance
nationalité belge mais on doit prouver que nous 3° - 6°. est prononcée à l’encontre d’une personne par un
avons une autre nationalité ou que nous allons juge. L’exemple type c’est le terroriste qui se voit
l’avoir pour éviter les cas d’apatride. déchoir de la nationalité belge.

Ceci se trouve à l’article 23/1 et 23/2 du Code de la


nationalité.

61
SECTION 4 : LA CONNESION NATIONALITÉ-CITOYENNETÉ EN DROIT BELGE

La nationalité est le lien de droit qui unie une personne physique/morale à un état avec pour conséquence de
conférer un statut. La citoyenneté au sens large est le bénéfice des droits civils, économiques, sociaux et
culturels. La citoyenneté au sens stricte c’est le bénéfice des droits politiques.

L’universalisation La tendance est celle de l’universalisation de la citoyenneté au sens large. Est-ce que en Belgique cette tendance se
des droits civils, confirme ? Oui, mais il y a des résidus de l’ancienne conception qui considérait normal de différencier les cas des
économiques, belges et des étrangers.
sociaux et
culturels En effet, quand on lit l’intitulé du Titre II de la constitution « des belges et de leurs droits » alors que ce n’est plus le
cas aujourd’hui.

L’article 191 est aussi tributaire de cette conception dépassée. Donc, cet article laisse entendre qu’il y a un principe
d’assimilation des étrangers aux belges s’agissant de la jouissance des droits civils, économiques, sociaux et cultures
sauf les exceptions établies par la loi. Il laisse entendre que le législateur peut déroger à ce principe. Comprendre
cet article comme cela indique que nous sommes dans l’erreur.

Pourquoi ? On doit tenter d’interpréter la Constitution pour la rendre la plus conciliable possible avec le droit
international des droits de l’Homme en particulier. Il dit, article 1er de la CEDH, que cette convention reconnait des
droits fondamentaux à toute personne placée sous l’autorité des états parties contractantes. Donc, les étrangers
sont bénéficiaires des droits fondamentaux.

Distinguer les nationaux des étrangers, ça ne va pas. Donc, la Cour constitutionnelle, dans un arrêt 61/94 du 14
juillet 1994 cons. B.2., nous dit qu’il ne faut pas interpréter l’exception que l’article 191 ouvre comme conférant un
pouvoir d’appréciation discrétionnaire au législateur en lui permettant de traiter autrement les étrangers par
rapport aux belges sans raison. Le législateur, lorsqu’il établit une différence de traitement au détriment des
étrangers, doit veiller au principe de non-discrimination (art. 10 et 11 constitution). Cet article 191 est ainsi
neutraliser, il faudrait l’abroger ou en tout cas le réviser.

La connexion On en arrive à la citoyenneté au sens strict donc aux droits politiques. Il y a évidemment le droit de payer ses
nationalité-droits impôts, ce droit n’est pas réservé aux nationaux, les étrangers qui vivent en Belgique ont aussi ce droit. Mais en ce
politiques qui concerne le droit à l’électorat, à l’éligibilité et à l’accès aux fonctions publiques, le principe c’est bien qu’il faut
être belge pour pouvoir les exercer.

La connexion nationalité – droits politique est une connexion telle que la nationalité conditionne le bénéfice de ces
droits politiques. Mais ! Il y a des exceptions.

Tout d’abord, le principe de base est exprimé à l’article 8, al.2 de la constitution : « La Constitution et les autres lois
relatives aux droits politiques, déterminent quelles sont, outre cette qualité, les conditions nécessaires pour
l'exercice de ces droits. ».

Que signifie « outre cette qualité » (examen) ? La constitution et les autres lois relatives aux droits politiques
déterminent quelles sont les conditions nécessaires pour l’exercice de ces droits et parmi ces conditions il doit y
avoir la qualité de belge.

Cet article 8, al.2 s’arrêtait là. En 1992, au moment où la Belgique ratifie le traité de Maastricht, l’article 8 s’arrêtait
au second alinéa. Il y a donc un problème. Le problème auquel l’alinéa 3 va répondre et qui sera inséré en 1998. Les
articles 20 et suivant du TUE consacrent le droit de vote et le droit d’éligibilité aux élections européennes et
communales aux résidant du pays membre de l’Union européenne. La contradiction constitution – traité est là.

Il fallait réviser la constitution et ceci a été fait d’une manière maladroite. La section de législation de Conseil d’état
n’est pas compétente pour rendre un avis pour un projet de déclaration de révision de la constitution. Le législateur
écrit « Par dérogation à l'alinéa 2, la loi peut organiser le droit de vote des citoyens de l'Union européenne n'ayant
pas la nationalité belge, conformément aux obligations internationales et supranationales de la Belgique. », donc le

62
problème est qu’on fait référence au droit de vote alors que l’article 20 du TUE dit que les citoyens de l’Union
jouissent du droit de vote ET d’éligibilité pour les élections communales. Donc, la formulation de l’article 8 al.3 est
maladroite.

On doit déduire qu’on doit réviser la constitution pour donner la compétence à la section de législation du Conseil
d’état de rendre des avis sur des projets de déclaration de révision de la constitution. Par ailleurs, à l’article 8 al.3,
on doit donc comprendre qu’on parle de droit de vote ET d’éligibilité même si ce n’est pas dit.

La loi électorale communale a pu, à l’article 1bis §1, conformément à l’article 8 al.3, ouvrir la qualité d’électeurs
pour les élections communales aux citoyens européens. A l’article 65, on parle d’éligibilité. Donc les citoyens
européens ont bien le droit à l’électorat et le droit à l’éligibilité à l’échelle communale.

L’article 8 ne s’arrête pas là. Il comprend l’alinéa 4 également, il comprend des étrangers qui n’ont pas la nationalité
d’un des états-membres de l’Union européenne. De nombreuses personnes ont été invitées à travailler en Belgique
et n’ont pas pris la nationalité belge. Quid de leurs droits politiques ? Le constituant, à l’alinéa 4, dit que le droit de
vote à l’alinéa suivant (droit de vote et l’éligibilité) peuvent être étendus aux résidants de la Belgique qui ne sont
pas des ressortissants d’un des pays-membres de l’Union selon certaines conditions. Le législateur a choisi, dans la
loi électorale commune à l’article 1er ter, d’ouvrir le droit à l’électorat et pas le droit à l’éligibilité. Ce droit à
l’électorat n’est pas ouvert sans condition.

L’article 65 de la loi communale ne renvoie pas à l’article 1er ter, conclusion : ils ne peuvent pas être candidats
communaux. On peut discuter de cette limitation des droits politiques des étrangers hors Union européenne ou
encore discuter de la limite des citoyens européens. Ils ont le droit de vote et d’éligibilité aux élections communales
mais pas aux élections régionales.

Il y a aussi un droit d’accès aux emplois publics. On retourne à une vieille formule, on trouvait normal de réserver ce
droit aux nationaux. L’article 10, al.2 de la constitution entre en conflit avec le TFUE. L’article 10 al. 2 dit que tous les
emplois publics sont réservés aux belges sauf exception établies par une loi pour des cas particuliers.

L’arrêt Orfinger parle de cela. L’article 45 TFUE parle de ces emplois publics. Au départ, on pensait qu’il n’y avait pas
de problème. Quand la Belgique a ratifié le TFUE, il n’y avait pas de problème, le §4 nous met à l’abri de toute
difficulté car comme notre constitution le TFUE écarte les citoyens européens qui n’ont pas la citoyenneté de l’état
membre de l’Union européenne. Mais la Cour de justice de l’Union européenne a l’habitude à la tendance
d’interpréter de manière résolument restrictive les exceptions au grand principe de la libre circulation.

SECTION 5 : LE POINT DE VUE SOCIO-POLITIQUE – LES NATIONS EN BELGIQUE

Le point de départ du raisonnement c’est le contraste entre l’analyse strictement juridique et l’analyse socio-
politique mais il y a un maillon intermédiaire que nous permet de passer de l’une à l’autre sans confusion. Le
point de départ c’est l’article 42, les élus représentent la nation mais il y a un article 43 qui nous dit que tous
les députés et sénateurs sont divisés en deux groupes linguistiques. Donc, il y a là un clivage qui est inscrit dans
le droit et qui nous amène à jeter un œil du point de vue socio-politique.

Belgitude

Pour aborder la question de consistance politique de la nation belge, on doit partir d’une notion inventée en 1976 par Paul Javaux et
Pierre Mertens. Ils avaient la bonne idée de proposer le néologisme « la belgitude » pour désigner l’ambivalence du sentiment
d’appartenance à la Belgique, sentiment éprouvé par la plupart des belges.

Le mot a été formé par un autre néologisme « négritude » pour désigner le mélange de fierté et de douleur concernant le sentiment
d’appartenance des africains. La belgitude exprime un peu la même chose. C’est un paradoxe car c’est à la fois une distanciation à

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l’égard de la référence de la Belgique et en même temps la persistance à l’égard de la Belgique. Au fond, il n’y a pas un véritable désir
inconditionnel de continuer à vivre ensemble et en même temps il n’y a pas de désir fort de se séparer.

Les facteurs Le sentiment d’appartenance à la nation est un facteur subjectif mais il y a des éléments objectifs dans l’existence de la
objectifs nation.
centrifuges
et Les On peut faire la liste des facteurs objectifs centrifuges c’est-à-dire qui nous éloigne les uns des autres, au
centripètes facteurs fond flamands et francophones :
qui objectifs
caractérisent centrifuges - Le facteur linguistique avec la saga des arrêts linguistiques.
la situation - Deux systèmes éducatifs séparés compte tenu de la communautarisation de l’enseignement.
nationale - Existence des systèmes médiatiques différents, flamands et francophones.
belge - Les partis politiques scindés en deux.
- Fédéralisme bipolaire qui associe les deux principales communautés. Il a permis d’éviter
l’éclatement du pays mais stimule la séparation entre les deux communautés.
- Différenciel de prospérité économique entre le Sud et le Nord.
- Paysage politique plus à droite au Nord que dans la partie francophone. On vient de le constater
lors des dernières élections.

Les Les facteurs centripètes, quant à eux, continuent à rapprocher et cimente la nation belge. Mais le
facteurs problème c’est que tous ces facteurs se prêtent à des réinterprétations de facteurs centrifuges :
objectifs
centripètes - Le passé historique commun. Le passé de la Belgique est plus ancien que la Flandre et de la
Wallonie. Mais ce que l’on constate c’est que ce passé commun se prête à des réinterprétations
plus centrifuges que centripètes. Pour les flamands, la partie flamande existe au-delà de la
Belgique et estime que la Belgique est créée après eux. C’est donc un élément centrifuge car c’est
faux.

- Il existe, par-delà les politiques culturelles publiques divergentes du côté flamand et francophone,
des traits culturels privés communs. Ce sous bassement provient d’une histoire longue qui est
celle de la Belgique après la scission des provinces unies entre le Nord et le Sud. Cette scission
entre les Pays-Bas du Nord et notre Belgique fait apparaitre un tissu social catholique. Est-ce que
ça rapproche les belges ? Oui et non. On observe qu’il n’y a que la Belgique pour utiliser des petits
rideaux aux fenêtres par exemple.

- Les piliers, l’idée qu’il y a 3 grandes familles politiques : catholique, libérale et socialiste qui
soutiennent la voûte de l’état. Ce pilier conserve encore des liens transcommunautaires mais
quand on regarde dans les familles politiques actuelles est-ce qu’il y a encore une famille
politique catholique (CD&V et CDH) ? On ne peut pas nier la profondeur du clivage entre les
flamands et francophones. Ils ont juste les valeurs chrétiennes mais lorsqu’on touche au
communautaire on voit bien un fossé. Idem pour les socialistes et libéraux.

- Culture politique commune qui est tirée de la démocratie consociative. Il faut observer la culture
du compromis qui est inhérente dans la notion de démocratie consociative, cette culture est un
facteur centripète mais on a constaté que pendant les longues crises de 2007 et 2011, elles
montrent que le compromis à la belge se fatigue.

- Un ordre juridique et institutionnel commun. Il y a toujours un état de droit, un régime


parlementaire, des institutions fédérales qui pratiquent le dialogue par-delà le clivage
linguistique. Mais on constate que de nouvelles attaques ont lieu dans le Nord du pays en faveur
d’une défédéralisation. Bien sûr, dans l’ordre juridique et institutionnel commun comment ne pas
parler de la monarchie ? Oui elle bénéficie d’un certain attachement mais il est fragile, s’il y a une
crise profonde le Roi ne peut rien faire pour empêcher un divorce belge.

- Intérêts économiques croisés. Nos régions entretiennent une relation d’interdépendance, si on


devait prononcer un divorce, le coût économique serait considérable. Chacun peut y perdre.
L’état belge est cimenté par une dette publique commune donc si on devait se séparer, il y aurait
ce problème de répartition de dettes.

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- L’Union européenne n’a aucun envie de voir un état comme l’état belge se couper en deux.
L’Union essaie d’intégrer les états dans une union toujours plus étroite. On pourrait aussi dire que
l’Union européenne favorise la séparation car sans la monnaie commune le divorce serait
accompagné d’une crise monétaire inconsidérable.

- Ni la Flandre, ni la Wallonie, ne peut s’emparer de Bruxelles ni s’en séparer. Une fraction du


mouvement nationaliste flamand veut absolument l’indépendance et sont prêts à lâcher
Bruxelles mais c’est une petite minorité.

Les facteurs C’est l’opinion subjective des belges, comment réagissent-ils quand on les interroge ? Du côté francophone, une
subjectifs majorité ne veut pas entendre parler d’un divorce de l’état belge. Du côté flamand, les séparatistes ne dépassent jamais
6% donc une minorité est pour une scission de l’état belge.

Attention, ce n’est pas parce que c’est une minorité à chaque fois qui est pour la scission de l’état belge que cela ne va
pas se faire

Une nation flamande :


Si la consistance de la nation belge est assez mince, quid des composantes infra-étatiques nationales ? Il y a
une nation flamande ? Oui. Le problème c’est que nous avons alors un très curieux pays, on peut dire qu’il y a
une nation flamande et wallonne mais il n’y a pas vraiment en fait une nation wallonne. Les wallons se disent
qu’ils sont belges ainsi que du côté bruxellois.

Cependant, on assiste à une émergence progressive d’un sentiment national wallon, il y a aussi un sentiment
d’appartenance à Bruxelles. Mais cela reste fragile.

Par ailleurs, il y a au Sud du pays une grosse difficulté. La nation flamande est assise sur son territoire, la région
flamande et la région de langue néerlandaise. Au sud du pays, nous avons d’un côté la fédération Wallonie-
Bruxelles et la région wallonne qui se dispute le sentiment d’appartenance, il y a un contentieux de type
politique entre les wallons qui souhaiteraient en finir avec la communauté française et transférer toutes les
matières à la région wallonne. A ce moment-là, le lien entre les wallons et les bruxellois disparaitrait et une
montée en puissance wallonne se fera ressentir.

Mais tous les partis politiques sont divisés par rapport à cela. Ils sont soudés et ne veulent pas se diviser.

65
PARTIE IV : L’ÉTAT ET LE TERRITOIRE

CHAPITRE 1 : LE TERRITOIRE EN GÉNÉRAL

Le territoire se définit, en droit, comme l’espace à l’intérieur duquel l’état exerce sa souveraineté. La
possession d’un territoire est une caractéristique des pouvoirs étatiques, on sait qu’il existe d’autres formes de
pouvoir mais ce ne sont pas des états, le propre d’un état est de posséder un territoire.

La La notion juridique du territoire se trouve à la croisée du droit constitutionnel et du droit international public, il y a bien
souveraineté lieu de comprendre que le territoire est à la fois une limite du pouvoir de l’état et un titre de compétence de l’état. Il y a
territoriale donc deux facettes.

La première facette, le territoire c’est une limite du pouvoir de l’état, une limite de la puissance publique car l’état n’a
de puissance que sur les personnes qui se trouvent sur son territoire. Cette théorie ne signifie pas qu’un état ne serait
pas en mesure d’agir en dehors de son territoire, c’est clair que les états adoptent un certain nombre de dispositions qui
s’appliquent à leurs nationaux quand bien même ceux-ci résident sur un autre état. Mais l’état ne peut poser des actes
de contrainte que sur son territoire.

La deuxième facette, le territoire de l’état c’est l’espace à l’intérieur duquel il est permis d’exécuter des actes d’état et
en particulier des actes de contrainte.

Le thème de la souveraineté territoriale apparait très clairement. L’état est le titulaire abstrait d’un pouvoir souverain et
institutionnalisé exercé sur la population assise dans un territoire déterminé. Donc, souveraineté et territoire sont
associés. En effet, la souveraineté territoriale signifie que l’état dispose du droit d’exercer l’ensemble des compétences
qu’il s’est donné lui-même à l’intérieur de son territoire, il y a donc un principe de plénitude et un principe d’exclusivité
car seul l’état peut déployer des actes de contrainte sur son territoire.

Alors, rappelons-nous l’article 2 de la Charte des Nations-unies qui interdit aux états de recourir à la force à l’intérieur
d’un autre état. C’est clair qu’un état ne peut pas agresser un autre état mais un état doit aussi protéger, à l’intérieur de
son territoire, les droits des autres états. Un état ne peut pas laisser se déployer à l’intérieur de son territoire des
activités qui sont destinées à menacer l’intégrité territoriale d’un autre état.

Enfin, terminons par une autre observation qui rappelle la connexion entre territoire et souveraineté. Le territoire est
unique et indivisible en ce sens que la souveraineté ne peut pas être divisée, il y a une puissance suprême au-dessus des
autres. De même, le territoire est indivisible et aussi inaliénable. Si un état veut abandonner sa souveraineté sur une
fraction de son territoire, il doit céder son territoire à un autre état mais il ne peut pas s’abstenir d’assumer ses
responsabilités.

La C’est clair, la fixation d’une frontière dépend de la volonté des états directement intéressés donc forcément c’est
délimitation l’accord entre états qui aboutit à délimiter des territoires et à fixer des frontières.
du territoire
et ses Donc, la théorie des frontières naturelles, des frontières d’ordre historique, des frontières démocratiques ne tient pas la
composantes route en droit international. La seule chose qui est déterminante en droit, dans ce contexte, c’est l’accord international
entre les états riverains.

Pour ce qui concerne la stabilité du territoire et de la frontière, une frontière doit être stable et définitive. La frontière
doit être complète et ininterrompue mais tout cela dans l’idéal car il y a toujours des conflits.

Les composantes du territoire il y en a plusieurs : terrestres (sol, sous-sol et eaux intérieures), l’espace maritime (zone
de mer adjacente aux côtes sans entrer dans les détails), aérien (surplombe les deux autres espaces).

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Le territoire D’abord un coup d’œil dans l’histoire. Le basculement du monde en un monde entièrement parcouru par des frontières
et ses des états, est relativement récente lors de la conclusion d’un traité après la guerre de 100 ans. Même si il y a une
frontières division du monde à ce moment-là, cette évolution trouve son origine bien avant les traités, déjà lors des premiers
au-delà de siècles des Capétiens.
l’approche
juridique Quid aujourd’hui ? Les frontières n’ont pas la même portée, nous sommes à l’aire de la mondialisation, de la
globalisation, des grandes intégrations régionales. Pour ce qui concerne l’Union européenne, tous les états membres ne
sont pas membres de la zone euro (19 états parmi les états membres de l’Union européenne), de même que l’espace
Schengen. Donc, on voit que les frontières se pluralisent, il y a un phénomène de dépassement des frontières.

Sur le plan économique, les territoires et frontières sont dépassés par le développement des technologies de la
communication. Les états sont mis au défi de conserver une certaine forme de souveraineté à l’égard de ces flux et la
maitrise en entrant dans des organisations internationales.

Mais, en même temps, on assiste à des phénomènes de renforcement des frontières. Le mur que Trump veut construire
en est un exemple.

CHAPITRE 2 : LE TERRITOIRE EN BELGIQUE

SECTION 1 : LA DÉLIMITATION DU TERRITOIRE BELGE

En regardons la carte de la Belgique et on voit que nous sommes environnés par les états que nous connaissons
que sont le Luxembourg, l’Allemagne et les Pays-Bas. On signale simplement qu’une des bases de la fixation du
territoire de l’état belge se trouve dans l’accord qui a été conclu lors de la conférence de Londres après la
proclamation de l’indépendance de l’état belge.

SECTION 2 : LA CONSTITUTION BELGE ET LE TERRITOIRE

Tout d’abord, ce n’est pas la constitution mais le Code pénal qui nous rappelle le principe de la souveraineté et
le principe que le territoire est l’espace à l’intérieur duquel l’état belge exerce de manière exclusive sa
souveraineté (art. 3 c.pén.).

Par le biais de la formule du serment constitutionnel, il y a une promesse faites par le Roi de protéger l’intégrité
du territoire (art. 91 al. 2 constitution).

Enfin, deux articles doivent retenir notre attention :

- L’article 7 de la constitution : Les limites de l'État, des provinces et des communes ne peuvent être
changées ou rectifiées qu'en vertu d'une loi.

- L’article 167, §1, al. 3 de la constitution confirme ce qui est dit dans l’article 7. Il s’agit d’une loi
d’autorisation, qui doit intervenir avant que le Roi et le ministre des affaires étrangères ne négocient
et ne signent un traité international.
Dans cet article, on dit bien que le Roi dirige les relations internationales y compris la conclusion des
traités. L’alinéa 3 nous dit que nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire, ne peut avoir
lieu qu'en vertu d'une loi.

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CHAPITRE 3 : LES DIVISIONS ET LES STRUCTURES D’UN ÉTAT EN GÉNÉRAL

L’idée c’est que dans tous les états on distingue, à l’intérieur de l’état, des collectivités politiques
(communautés, régions, provinces et communes). La question des « structures de l’état » c’est la question de
savoir comment s’articule les relations entre ces collectivités politiques et l’état ?

Ces structures différentes de l’état sont étudiées par le droit constitutionnel comparé à partir d’exemples
types. Donc, on centre les grandes tendances observables dans plusieurs types pour définir « un portrait-type »
mais en réalité chaque état est unique et n’est pas obligé d’entrer dans ces cases d’un état fédéral, d’un état
unitaire ou d’un état décentralisé.

Tout d’abord, nous allons commencer avec les divisions de l’état qui nous permettent de constater qu’à
l’intérieur de l’état il existe plusieurs collectivités politiques. Cette notion de collectivité politique est
fondamentale car nous allons l’utiliser pour le reste du cours. Une bonne définition en trois points :

- Personnalité morale de droit public : L’état lui-même est une collectivité politique, l’état répond à la
notion de personnalité morale car l’état à la personnalité juridique. Mais l’idée c’est qu’à l’intérieur de
l’état, on distingue des collectivités politiques infra-étatiques et elles ont chacune une personnalité
juridique distincte de celle de l’état.

- Compétences propres : Toute collectivité politique dispose de compétences qui lui sont réservées par
et en vertu de la Constitution pour gérer des intérêts qui lui sont spécifiques avec un contrôle plus ou
moins étendu de l’état. L’autonomie, avec laquelle les compétences propres d’une collectivité
politique sont exercées, peut varier que l’on soit d’une structure de l’état à une autre.

- Institutions particulières : Une collectivité politique a des institutions particulières mais parmi ces
institutions il doit y avoir des organes élus qui peuvent agir au nom et pour le compte de la collectivité
politique.

SECTION 1 : LA ÉCENTRALISATION

Cette notion de décentralisation on la retrouve dans tous les états y compris dans un état fédéral mais on va
parler de l’état unitaire décentralisé car l’état unitaire recourt qu’à la décentralisation.

Définition Distinction avec la


déconcentration

La décentralisation c’est la technique par laquelle une constitution attribue à des collectivités La déconcentration c’est la
politiques décentralisées le pouvoir de prendre des décisions, le pouvoir d’adopter des règlements délégation par l’autorité d’une
et des actes administratifs à portée individuelle au nom de la collectivité considérée en autonomie. partie de sa compétence à une
Mais une autonomie limitée à 2 égards : d’une part, la collectivité politique décentralisée doit autorité subordonnée à charge
respecter la légalité, et d’autre part, la collectivité politique décentralisée doit respecter l’intérêt pour celle-ci d’exercer la
général tel qu’il est conçu par la collectivité supérieure / centrale. compétence en question sous le
contrôle hiérarchique de
La décentralisation fait intervenir une notion fondamentale et donc une exception à l’autonomie l’autorité délégante.
des collectivités politiques : la tutelle. Une collectivité politique doit admettre qu’elle n’est pas
totalement autonome, c’est un degré d’autonomie limité car la tutelle désigne l’ensemble des La différence c’est que la
techniques (avis, pouvoir de suspension, pouvoir d’annulation) diversifiés qui permettent à une collectivité politique
autorité centrale de contraindre les collectivités politiques décentralisées à respecter la légalité et décentralisée a le bénéfice d’un

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l’intérêt général. L’autorité se trouvant supérieure à la collectivité politique peut annuler l’acte principe d’autonomie, bien sûr il
illégal qui ne respecterait pas un de ces deux principes. y a une hiérarchie mais la
hiérarchie est normative. Par
Donc, ce qui caractérise l’état unitaire c’est que il va recourir à la décentralisation. Donc, l’état contre, le service déconcentré est
unitaire décentralisé se définit comme un état où la loi est la même pour tous étant entendu que soumis à une hiérarchie
des collectivités politiques décentralisées se voient le pouvoir de faire des règlements en autonomie organique, d’organe à organe.
relative car existence de tutelle.

SECTION 2 : L’ÉTAT FÉDÉRAL

La décentralisation, au fond, on peut la situer sur une ligne continue du point 0 au point maximal de
l’autonomie. On met au point 0 la déconcentration, au point 1 la décentralisation, au point 2 l’état régional et
au point 3 les collectivités politiques dans l’état fédéral qui est le point maximal.

Définition L’état fédéral est un état dans lequel la Constitution partage le pouvoir d’adopter des normes ayant force de loi entre
la fédération et les collectivités fédérées qu’elle unit. L’autorité fédéral a donc le pouvoir de faire la loi dans les
compétences fédérales, elle demeure en possession de ce pouvoir législatif.

Mais cette autorité fédérale ne peut pas faire la loi dans tous les domaines. Il y a des domaines où la loi fédérale ne
peut pas intervenir parce que ce domaine est laissé à l’autonomie des collectivités politiques fédérées et dans ces
domaines-là celles-ci font chacune leur loi en toute autonomie et à l’abris de toute tutelle.

Si on veut compléter la définition, on doit faire intervenir outre le principe d’autonomie, un principe de participation.
Les collectivités politiques fédérées sont mises en mesure, par la Constitution, de participer à la conduite de l’état
fédéral. Comment ? A travers la révision de la constitution et à l’élaboration des lois fédérales elles-mêmes.

Commentaires Le partage de On a déjà souligné cette particularité lorsque nous avons définit la notion de souveraineté, dans un
l’exercice de état fédéral qui dispose de la souveraineté ? C’est le pouvoir constituant originaire. Donc, c’est très
la clair que les collectivités politiques fédérées n’ont pas la souveraineté formelle.
souveraineté
réalisé par le C’est bien l’état fédéral qui est formellement souverain mais l’exercice de certaines fractions de la
fédéralisme souveraineté matérielle sont confiées en toute autonomie à des collectivités fédérées.

La variété des Au-delà des 4 principes énoncés infra, il est difficile d’aller plus loin. Pourquoi ? Car chaque état
configurations fédéral a ses particularités donc il faut éviter de généraliser. Trois exemples pour illustrer notre
précises propos :
d’états
fédéraux Des compétences résiduelles au profit de l’état fédéral ou des entités fédérées : Non, on ne peut pas
dire que dans tous les états fédéraux les compétences résiduelles appartiennent aux entités
fédérées. Les compétences résiduelles sont des compétences qui n’ont été attribuées ni à l’état
fédéral ni aux entités fédérées. La liste des compétences attribuées à l’état fédéral, d’une part, et
aux entités fédérées, d’autre part, évidemment cette liste n’est pas complète. Ce sont des
compétences résiduelles. Ces compétences résiduelles tombent dans les mains de qui ? On ne peut
pas dire que ces compétences tombent dans les mains des entités fédérées. C’est le cas aux États-
Unis par exemple mais pas en Belgique.

Des compétences exclusives ou concurrantes : Si toutes les compétences sont exclusives cela veut
dire que ces compétences appartiennent soit à l’état fédéral à l’exclusion des collectivités fédérées
soit aux entités fédérées à l’exclusion de l’état fédéral. On ne peut pas dire que dans tous les états
les compétences sont exclusives mais la tendance dominante c’est que les compétences sont
exclusives. Dans beaucoup d’états (Allemagne) on trouve, à côté d’une liste de compétences
exclusives (toujours présente !!!) une liste de compétences concurrentes. Il existe des matières où

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les compétences sont concurrentes, cela veut dire que dans ces matières, en principe, les
collectivités fédérées sont en mesure de légiférer. Mais, si on a affaire à une matière concurrente
alors l’état fédéral peut (pas obligatoirement) décider d’exercer la compétence qu’il possède aussi
donc les deux sont compétents. Si l’état fédéral décide de légiférer, il va primer sur les lois des
collectivités fédérées.

L’exercice ou non d’un contrôle juridictionnel des lois fédérées : Non ! Mais nous sommes pas loin
d’un principe car il n’y a que la Suisse qui fait exception sinon partout ailleurs il existe un contrôle
juridictionnel des lois fédérales et fédérées. Il est logique d’instituer ce contrôle car il y a des conflits
de compétences. Il y a une exception en Suisse, il n’y a pas de contrôle juridictionnel pour les lois
fédérales car il existe un référendum abrogatif. Le peuple peut décider d’abroger une loi fédérale.

Les principales Les principes Concernant le principe d’autonomie, dans chaque état fédéral nous avons un partage de pouvoir de
caractéristiques d’autonomie faire la loi en toute autonomie entre l’état fédéral et les entités fédérées. Le principe d’autonomie
d’un état et d’égalité est à l’abris de toute tutelle.
fédéral
Mais le principe d’égalité, il va de pair avec le principe d’autonomie. Il signifie que dans toutes les
matières qui relèvent de la compétence exclusive de l’état fédéral ou des collectivités politiques
fédérées, la loi fédérale est juridiquement sur pied d’égalité avec la loi fédérée mais que si on est
juste dans le domaine des compétences exclusives. Évidemment, il y a au-dessus des lois fédérales
et fédérées, une Constitution.

Les principes Concernant le principe de participation, l’idée c’est que les collectivités fédérées ne sont pas
de seulement autonomes, elles sont aussi à s’inviter à s’occuper des affaires fédérales. Cette
participation participation se fait de deux manières différentes :
et de
coopération - On observe que les collectivités fédérées sont en mesure à participer à la révision de la
constitution. C’est logique car dans un état fédéral, la constitution est la base même de
l’existence des collectivités fédérées et de leurs compétences.
L’exemple type ce sont les États-Unis, il faut que ¾ des entités fédérées donnent leur
accord.

- Les collectivités fédérées participent à l’élaboration aux lois fédérales et on recourt au


bicaméralisme pour ce faire (Sénat et Chambre des représentants).

Enfin, le principe de coopération. Dans un état fédéral, on a partagé, on a divisé le pouvoir de


légiférer entre l’état fédéral et les collectivités politiques fédérées. Donc on a fragmenté les
responsabilités publiques, or, il y a souvent des occasions dans lesquelles nous avons besoin de
reconstituer une cohérence.

Les collectivités fédérées préfèrent rester dans la logique d’autonomie mais en y associant la
coopération. L’idée c’est que dans un certain nombre de matières l’état fédéral et les collectivités
fédérées doivent passer des accords de coopération.

Fédéralisme La plupart des états fédéraux obéissent au principe de territorialité. Dans le fédéralisme territorial, les collectivités
territorial politiques fédérées obéissent à la répartition des compétences. En ce sens que les collectivités fédérées n’exercent
contre ses fonctions qu’à l’intérieur de son territoire.
fédéralisme
personnel Quand on a plusieurs nations dispersées dans des territoires de manière telle que nous ne pouvons pas considéré
qu’à un territoire déterminé correspond une communauté nationale au sens socio-politique. La solution du
fédéralisme personnel consiste à dire que si nous ressentons appartenir à une nation infra-étatique, nous pouvons
décider d’en ressortir avec la même liberté que la liberté de culte par exemple, de la même manière nous avons une
liberté de se rattacher à une nation indépendamment du lieu où on réside.

On aurait pu y songer en Belgique mais imaginons que nous ayons pratiquer le fédéralisme personnel. Dans la région
de langue néerlandaise, il y aurait eu des francophones qui se seraient rattachés à la communauté française et la
culture et la langue néerlandaise auraient été menacées par cette francisation. Donc nous avons repousser ce

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fédéralisme personnel dans la Région wallonne et flamande mais par contre nous avons une forme de fédéralisme à
Bruxelles mais sans sous-nationalité (on y reviendra).

SECTION 3 : L’ÉTAT RÉGIONAL

Dans les états régionaux, on parle de l’état autonomique. Il s’agit d’une structure typiquement hybride qui
emprunte quelques éléments d’un état décentralisé et d’autres éléments d’un état fédéral. Il se fait que
l’Espagne et l’Italie ont choisi entre l’état unitaire décentralisé et l’état fédéral. Le principe d’autonomie y est
respecté mais avec certaines limites.

Prenons l’Espagne, nous avons des communautés autonomes qui reçoit, par la Constitution, le pouvoir de
légiférer en toute autonomie, en principe, dans une série de matières. En principe, il n’y a pas de tutelle mais il
y en a quand même une que l’on pensait théorique et puis les catalans sont traversés par une tendance
indépendantiste. Il recourt à un article qui a permis au gouvernement de prendre des mesures nécessaires
pour obliger les catalans.

SECTION 4 : LA COFÉDÉRATION D’ÉTATAS

C’est une union volontaire et durable d’états qui décident de mettre ensemble des compétences mais en
manière telle que ces états demeurent souverains.

Olivier Baud a eu l’idée de revoir les vieilles confédérations d’états. Il a découvert que la théorie classique a
simplifié et déformé la réalité. La définition classique de la confédération d’états : c’est une alliance entre des
états souverains et indépendants reconnus en tant que tel sur la scène internationale et qui décident
d’assumer les grandes tâches. Caractéristiques :

- La première caractéristique est le fondement, ce n’est pas une Constitution car c’est un acte juridique
unilatéral qui suppose la volonté d’un peuple. Par contre, avec la confédération d’états on parlera
d’un traité. Un traité qui ne se conclut et ne se modifie qu’à l’unanimité des états.

- Les organes de la confédération sont rudimentaires, c’est une assemblée délibérante – la Diète -
composée de délégués des états liés par un mandat impératif et ne prenant des décisions qu’à
l’unanimité.

- Les décisions confédérales ne sont pas directement applicables aux individus, elles ne lient que les
états confédérés qui doivent transposer les décisions en règle de droit liant leurs ressortissants.

- Il n’y a pas de nationalité confédérale.

- Les états confédérés disposent d’un droit de sécession unilatérale.

- Est-ce que les matières confiées aux organes sont nombreuses ? Dans les expériences historiques de
l’époque, oui les matières étaient peu nombreuses.

Tout une série de pays répondaient à ce traité mais ce n’est pas tout à fait vrai. Baud constate qu’à la base il y a
bien un pacte mais en ce qui concerne les organes de la confédération il observe que beaucoup de décisions
sont prises à des majorités. Contrairement à ce qu’on a dit dans la théorie classique, les décisions confédérales

71
sont directement applicables aux ressortissants, il y a un double lien de confédération (ressortissants de la
nation + ressortissants à la confédération) et il est loin d’être sûr que les états confédérés ont le droit de faire
sécession.

Il faut constater que ce qui caractérise ces confédérations, c’est d’être des unions volontaires et durables
d’états mais avec, pour caractéristique, qu’on ne voit pas où la souveraineté tombe. On ne peut pas dire que
ces confédérations ne sont pas souveraines, chaque état confédéré dispose d’un droit de veto mais on ne peut
pas dire non plus que les états confédérés conservent leur souveraineté intacte. Des décisions peuvent être
adoptées à des majorités renforcées donc contre la volonté de plusieurs états confédérés.

Cette structure montre que le passage de la confédération à l’état fédéral n’est pas aussi nette. Prenons
l’exemple des États-Unis qui a basculé brutalement. En réalité, ce n’était pas aussi clair car les états fédérés
avaient encore des réflexes issus de l’appartenance à l’ancienne confédération et il faudra plusieurs arrêts pour
clarifier la non-souveraineté des états fédérés.

Certains disent que l’Union européenne est une confédération des états mais ceci ne tient pas la route. C’est
une union volontaire et durable des états alors que dans l’Union européenne la souveraineté formelle est entre
les mains des états. Ce n’est pas non plus un état fédéral car les états membres ont chacun la souveraineté
formelle et l’Union européenne n’a que des compétences d’attribution. Alors c’est quoi ? C’est une espèce
d’une fédération plurinationale qui est une union volontaire et durable d’états attachés à leur souveraineté
formelle et à leur identité nationale mais ces états ont accepté de transférer l’exercice de plusieurs fractions de
leur souveraineté matérielle.

CHAPITRE 4 : L’ÉTAT BELGE ET SES DIVISIONS

SECTION 1 : LES DIVISIONS TERRITORIALES DE L’ÉTAT BELGE

Ces divisions territoriales ce sont les régions mais aussi les provinces, les communes, les districts, les
agglomérations et les organes territoriaux supra-communaux. Mais commençons par la division la plus
importante : les Régions.

Les Régions

Identification 3 Régions selon l’article 3 de la constitution :


des Régions
- La Région flamande.

- La Région wallonne.

- La Région bruxelloise.

Reprenons l’article 3 de la constitution. Mais nous allons tomber sur une autre appellation, par exemple à l’article 166
§2 de la constitution. On parle non pas de la Région bruxelloise mais de la Région de Bruxelles-Capitale, est-ce autre
chose ? La Constitution belge utilise deux mots différents pour viser la même réalité.

Explication, l’article 3 portait un autre numéro en 1970 « 107quater ». En 1970, on ne sait pas ce que la Région
bruxelloise va pouvoir faire, il n’y a pas d’accord politique sur les compétences, sur les organes et sur les pouvoirs. Ce
n’est qu’en 1980 que nous allons trouver des accords pour les deux autres Régions mais toujours pas pour la Région

72
bruxelloise. Pour les flamands, la Région bruxelloise ne pouvait pas être traitée de la même manière que les deux autres
Régions. L’accord politique qui va permettre à la Région bruxelloise de devenir une réalité, date de 1988 et l’article
107quater n’étant pas révisable, on a révisé implicitement l’article 3 en utilisant une autre appellation.

Cette Région bruxelloise, en effet, n’est pas la même que les autres car elle accueille la ville de Bruxelles qui est elle-
même le siège de la capitale de l’état belge.

Ressort Nous trouvons les ressorts territoriaux de la Région wallonne et de la Région flamande dans la constitution à l’article 5
territoriaux qui énumère les provinces.
des Régions
Un des désaccords qui ont rendu la création effective de la Région bruxelloise portait sur le ressort territorial. Nous
avons longtemps rêvé d’une grande Bruxelles, il y a autour de Bruxelles 6 communes périphériques où les
néerlandophones sont majoritaires. Ce rêve s’est fracassé sur l’intransigeance des flamands qui considéraient que si l’on
étendait Bruxelles au-delà des 19 communes, la tâche d’huile francophone s’étendra. Finalement, les francophones ont
été d’accords mais pas de gaieté de cœur donc on a caché le ressort territorial de Bruxelles.

On peut penser que le ressort territorial c’est le reste mais il faut un texte qui nous dise les choses clairement. Après
l’article 5, nous allons voir l’article 39 de la constitution car il parle des ressorts des Régions qui nous parle de loi
spéciale. Nous allons donc voir ce que la loi spéciale nous dit à propos des ressorts des Régions.

La loi spéciale du 12/01/1989 RIB (relative aux institutions bruxelloises) à l’article 2§1 nous dit que le territoire de la
Région bruxelloise comprend le territoire de l’arrondissement administratif de " Bruxelles-Capitale ", tel qu'il existe au
moment de l'entrée en vigueur de la présente loi. On le trouve dans une autre loi, les lois sur l’emploi des langues en
matière administrative à l’article 6.

Personnalité Nous avons définit la collectivité politique : elle a une personnalité juridique, des compétences propres et des
juridique des institutions propres.
Régions
Les Régions ont bien la personnalité juridique en vertu de l’article 3 LSRIB. En ce qui concerne la Région Bruxelloise, à
l’article 12 LSRIB, elle a aussi la personnalité juridique. Le premier critère est donc acquis.

Des Régions Les Le ressort territorial : On constate que la région flamande au sens de l’article 3 coïncide territorialement
distinctes et différences avec la région de langue néerlandaise. On constate aussi que la région bruxelloise coïncide avec la région
linguistiques entre les bilingue de Bruxelles-capitale. C’est au Sud du pays que se trouve la solution à l’énigme. Il y a dans la
Régions et Région wallonne deux Régions linguistiques : la Région de langue française et la Région de langue
Régions allemande.
linguistiques
La nature juridique diffère : Les 3 régions de l’article 3 sont des collectivités politiques alors que les 3
régions linguistiques de l’article 4 sont des circonscriptions administratives. Une circonscription
administrative est une délimitation du territoire qui est dénuée de la personnalité juridique, qui n’a pas
d’institution propre et pas de compétence propre mais qui a été créé par une personne morale publique
dans plusieurs objectifs

Les Les Régions sont des collectivités politiques, cela veut dire qu’elles ont chacune des compétences propres. Il faut revenir
compétences à l’article 39 de la Constitution « La loi attribue aux organes régionaux qu'elle crée et qui sont composés de mandataires
des Régions élus, la compétence de régler les matières qu'elle détermine, à l'exception de celles visées aux articles 30 et 127 à 129,
dans le ressort et selon le mode qu'elle établit. Cette loi doit être adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier
alinéa ».

Donc, il apparait qu’aux yeux de cet article, l’idée était d’établir une cloison étanche entre les compétences
communautaires et régionales. En réalité, cet article 39 a été révisé implicitement par plusieurs dispositions.

Mais d’abord examinons l’article 6 du 08/08/1980 LSRI car c’est le premier qui énonce la liste des matières régionales.
On va travailler sur les grandes rubriques et pointer quelques exemples :

- L’article 6, §1, I : Dans cet article, il n’y a pas d’exception c’est un bloc de compétences mais on va le voir,
quand on défile les rubriques on va voir que les blocs de compétences sont remplis d’exception.

- L’article 6, §1, II : Parle du domaine de l’environnement et a 2 exception.

73
- L’article 6, §1, IV : Le logement avec notamment les baux à loyers.

- L’article 6, §1, VI : L’économie avec des exceptions de sorte que l’état fédéral reste compétent par exemple
pour le droit commercial, le droit du travail et celui de la sécurité sociale.

- L’article 6, §1, VIII : Les provinces et communes avec des exceptions comme la police.

- L’article 6, §1, IX : La politique de l’emploi avec de nombreuses exceptions.

- L’article 6, §1, X : Les travaux publics et les transports avec de nombreuses exceptions.

- L’article 6, §1, XII : La sécurité routière avec de nombreuses exceptions.

Quelles sont les conclusions que l’on peut en tirer ? On peut déjà en tirer une conclusion pour comprendre l’actualité.
Pour gérer la crise du coronavirus, il est indispensable que l’état fédéral doit s’entendre avec les régions car les régions
ont aussi d’importantes compétences notamment en matière économique. Les communautés sont compétentes en
matière de l’enseignement, de la santé qui est une matière personnalisable.

Quoique l’État fédéral conserve des compétences de premier plan en ce qui concerne l’assurance maladie-invalidité et
donc la prise en charge de coûts liés à la crise sanitaire et une éventuelle vaccination obligatoire (art. 5, §1er, I, al. 1er, 1°,
a et b et art. 5, §1er, al 2, 1° et 2°.

A vrai dire, la matière de la santé publique est un des exemples les plus frappants pour illustrer l’imbrication des
compétences fédérales et fédérées!

La liste des compétences des Régions comprend un volet fiscal, ce pouvoir fiscal n’est pas réellement activable en ce qui
concerne les communautés car ni la communauté flamande, ni la communauté française ne sait dresser une liste des
contribuables car il n’y a pas de sous-nationalité mais les Régions ont un pouvoir fiscal propre.

En commentant l’article 39, cet article a prévu une cloison étanche entre les compétences régionales et
communautaires, cette cloison est poreuse. Pour quel motif ? On doit regarder les différentes révisions implicites dans
l’article 39, plusieurs articles ont été insérés dans la Constitution qui révisent l’article 39 :

- La première disposition à retenir, c’est l’article 137. C’est la disposition qui a permis à la communauté flamande
d’absorber la région flamande en manière telle que l’article 39 est révisé. Donc, il permet à la communauté
flamande d’exercer des compétences de la région flamande mais il permet aussi à la région française d’exercer
des compétences de la communauté wallonne même si aucun était d’accord. Mais la loi spéciale a écarté la
possibilité de lier institutionnellement la région française et la région wallonne mais en revanche elle a lié
institutionnellement la région flamande et la communauté flamande (art. 1, §1, LSRI 08/08/1980). Au fond, on
peut se passer d’un parlement et d’un gouvernement et on s’en est passé dans la région flamande car c’est le
parlement de la communauté et le gouvernement de la communauté qui servent pour la région. Pourquoi ? Car
la communauté englobe la région. On a mis en place un dispositif qui permet de faire l’économie d’un niveau
de gouvernement et de parlement.

- L’article 138 nous dit, en effet, qu’en ce qui concerne les rapports entre la communauté française et la région
wallonne, on fait l’inverse qu’au Nord du pays. La communauté française n’absorbe pas la région wallonne mais
la communauté française transfère ses compétences à la Région wallonne. C’est donc la commission
communautaire française qui va servir de réceptacle à ces compétences qui sont issus de la communauté
française. La région wallonne exerce des compétences de la communauté française, ce que l’article 39 ne
mentionne pas.

- L’article 139 aboutit également à une révision implicite. En effet, on voit que le parlement de la communauté
germanophone et le parlement de la région wallonne, peut décider que le parlement et le gouvernement de la
communauté germanophone exerce dans la région de langue allemande tout / en partie des compétences de
la région wallonne.

- L’article 135bis débouche sur des compétences communautaires exercées par la région de Bruxelles-Capitale.

74
Les organes Les régions sont des collectivités politiques, elles ont donc chacune des organes propres. L’article 39 nous dit que c’est
des Régions la loi spéciale qui va créer des organes régionaux mais le constituant lui-même va reprendre la plume pour cadrer ses
compétences.

L’article 115, §2 nous dit que les organes régionaux comprennent un parlement. Et l’article 116 nous dit de nouveau que
chaque parlement de régions est composé de membres élus au parlement.

On va constater que l’organisation d’une région n’est pas la même région par région, on va donc devoir travailler région
par région.

La région Il n’y a pas de parlement ni de gouvernement de la région flamande, il y a un parlement et un


flamande gouvernement de la communauté flamande, c’est l’article 1er du 08/08/1980 LSRI.

On peut déjà parler de l’organisation de la communauté flamande détaillée à l’article 24, §1 du


08/08/1980 LSRI et article 63, §1 et §4 du 08/08/1980.

Quand le parlement flamand exerce les compétences de la région flamande, il faut que les 6 membres
domiciliés sur la région bruxelloise s’abstiennent. Ils ne peuvent pas voter pour un décret de la région
flamande mais peuvent y débattre. C’est ce que dit l’article 50 du 08/08/1980 LSRI.

Enfin, l’article 19 §1, al.2 du 08/08/1980, les décrets du parlement flamand doivent préciser s’ils visent
une matière communautaire ou régionale. On évite la multiplication des instances, on évite d’avoir deux
parlements et deux gouvernements.

La région On a décidé de ne pas fusionner communauté française et région wallonne, de ne pas recourir à la même
wallonne liaison institutionnelle entre la région wallonne et la communauté française. On a donc vu la
communauté française transférer l’exercice d’une série de ses compétences à la région wallonne et à la
COCOF. Mais il reste des compétences et donc il y a encore une communauté française avec son
parlement et son gouvernement avec une région wallonne avec son parlement et son gouvernement.

Pour le parlement wallon, c’est l’article 24 §2 du 08/08/1980. Pour le gouvernement wallon, c’est
l’article 63 §3 et §4 08/08/1980.

Pourquoi ne pas avoir fait la même chose qu’en Flandre ? Diverses raisons ont joué, il faut se rendre
compte que les rapports de force démographique ne sont pas les mêmes. Quel est le poids des flamands
de Bruxelles dans l’ensemble de la communauté flamande ? 2%. Par contre le poids des francophones
bruxellois dans l’ensemble de la communauté française est plus costaud, 24%. Donc, mettons-nous à la
place d’un parlementaire wallon et lui dire que son parlement va être absorbé par le parlement de la
communauté française, il y aura un problème car le francophone bruxellois va s’occuper des matières qui
n’intéressent que Bruxelles. Les wallons ne veulent pas ça.

La deuxième explication, la communauté française souffre d’un problème d’argent. Imaginons, que l’on
ait fusionné la communauté française et région wallonne, pour refinancer la communauté française on
peut imaginer de recourir à des impôts mais la communauté ne peut pas lever d’impôt. Donc pour la
refinancer, dans l’hypothèse où on fusionnerait communauté et région, on ne pourrait recourir qu’à des
impôts que seuls les wallons peuvent payer. Donc, pour les wallons refinancer la communauté française
sans que les bruxellois aident c’est injuste. Donc pas de fusion communauté et région.

Il y a, enfin, une explication d’ordre symbolique. Imaginons que l’on parle uniquement de la
communauté française et plus jamais de la région wallonne, pour les wallons c’est insupportable.

La région Cette région bruxelloise comprend un parlement et un gouvernement. Examinons d’abord le parlement,
bruxelloise nous sommes dans la LS du 12/01/1989 relative aux institutions bruxelloises à l’article 10. Pourquoi 89
membres ? Initialement, jusqu’en 2004 on se contentait de 74 membres. Mais, le problème c’est que
nous sommes à Bruxelles, il y a une minorité flamande mais le nombre d’élus néerlandophones est assez
limité. Il y a 2 listes : néerlandophone et francophone donc on a vu le groupe linguistique néerlandais se
réduire.

75
Donc, en 2004, lors des accords de Lombard, nous avons décidé de protéger les minorités flamandes et
d’avoir minimum 17 sièges pour pouvoir accorder une sur représentation des flamands (art. 21 LS
12/01/1989). Donc on a gelé les rapports de force numérique : 72 francophones et 17 flamands.

Maintenant, examinons le gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale. Le gouvernement a fait


l’objet de longues discussions, il a fallu attendre 20 ans pour se mettre d’accord. Une des difficultés de
l’accord c’est de s’entendre sur la composition de ce gouvernement. Les partis politiques francophones
disaient qu’ils étaient majoritaires à Bruxelles et donc ils demandaient d’avoir un nombre de ministres
francophones qui reflètent cette majorité.

La position des partis politiques flamands était que, dans l’état belge, ils sont dans la majorité. Donc, ils
demandaient de montrer une générosité à l’échelle de la région bruxelloise. Ils demandent la parité.

On a trouvé la solution : on va donner raison aux uns et aux autres, en disant que le gouvernement se
compose de 2 membres du groupe linguistique français et néerlandais, outre le président (art. 34, §1,
al.2, LS 12/01/1989). Les flamands crient donc victoire car ils peuvent conclure qu’ils ont obtenu la
parité. Du côté des francophones, on sait que ce président sera élu par un parlement dont la majorité est
francophone et donc qu’il sera toujours francophone. Les francophones comptent déjà une petite
majorité du côté du président. Aux côtés du ministre il y a des secrétaires d’états dont 1 au moins
appartient au groupe linguistique le moins nombreux, donc 1 secrétaire d’état flamand (art. 41, §1, LS
12/01/1989). Les flamands acceptent et donc et les francophones crient victoire.

Cette région bruxelloise comprend un parlement et un gouvernement. Examinons d’abord le parlement,


nous sommes dans la LS du 12/01/1989 relative aux institutions bruxelloises à l’article 10. Pourquoi 89
membres ? Initialement, jusqu’en 2004 on se contentait de 74 membres. Mais, le problème c’est que
nous sommes à Bruxelles, il y a une minorité flamande mais le nombre d’élus néerlandophones est assez
limité. Il y a 2 listes : néerlandophone et francophone donc on a vu le groupe linguistique néerlandais se
réduire.

Donc, en 2004, lors des accords de Lombard, nous avons décidé de protéger les minorités flamandes et
d’avoir minimum 17 sièges pour pouvoir accorder une sur représentation des flamands (art. 21 LS
12/01/1989). Donc on a gelé les rapports de force numérique : 72 francophones et 17 flamands.

Maintenant, examinons le gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale. Le gouvernement a fait


l’objet de longues discussions, il a fallu attendre 20 ans pour se mettre d’accord. Une des difficultés de
l’accord c’est de s’entendre sur la composition de ce gouvernement. Les partis politiques francophones
disaient qu’ils étaient majoritaires à Bruxelles et donc ils demandaient d’avoir un nombre de ministres
francophones qui reflètent cette majorité.

La position des partis politiques flamands était que, dans l’état belge, ils sont dans la majorité. Donc, ils
demandaient de montrer une générosité à l’échelle de la région bruxelloise. Ils demandent la parité.

On a trouvé la solution : on va donner raison aux uns et aux autres, en disant que le gouvernement se
compose de 2 membres du groupe linguistique français et néerlandais, outre le président (art. 34, §1,
al.2, LS 12/01/1989). Les flamands crient donc victoire car ils peuvent conclure qu’ils ont obtenu la
parité. Du côté des francophones, on sait que ce président sera élu par un parlement dont la majorité est
francophone et donc qu’il sera toujours francophone. Les francophones comptent déjà une petite
majorité du côté du président. Aux côtés du ministre il y a des secrétaires d’états dont 1 au moins
appartient au groupe linguistique le moins nombreux, donc 1 secrétaire d’état flamand (art. 41, §1, LS
12/01/1989). Les flamands acceptent et donc et les francophones crient victoire.

Les provinces et communes

L’article 5 de la Constitution énumère les provinces qui se situent dans la région wallonne et dans la région flamande.

76
Identification On doit signaler que la province du brabant a été supprimée, scindée en 2. Donc, il n’y a plus de province de brabant, il
des provinces y a un brabant flamand et wallon et au milieu on trouve la région bruxelloise. Donc, la région bruxelloise échappe à la
et des division en province. Pourquoi a-t-on scindé la région du brabant ? Car elle était à cheval sur les deux brabants.
communes et
ressorts La région bruxelloise échappe à la scission d’où l’article 163 de la constitution : « Les compétences exercées dans les
territoriaux Régions wallonne et flamande par des organes provinciaux élus sont exercées, dans la région bilingue de Bruxelles-
Capitale, par les Communautés française et flamande et par la Commission communautaire commune, chacune en ce
qui concerne les matières relevant de leurs compétences en vertu des articles 127 et 128 et, en ce qui concerne les
autres matières, par la Région de Bruxelles-Capitale ». Donc, les autres collectivités politiques vont recueillir les
compétences qui auraient été exercées par la province s’il y avait encore une province à Bruxelles.

Une 2e caractéristique doit être évoquée. On doit observer qu’il y a eu, au fond, un compromis entre partisans et
opposants de la suppression des provinces à l’avenir. Nous sommes dans la 6e réforme de l’état et 2 thèses
s’affrontent : suppression des provinces, d’une part, maintenir les provinces, d’autre part. le résultat est un
compromis, nous avons décidé de ne pas décider.

Lisons l’article 41, al.1, de la constitution, il n’est pas dit que les provinces seront supprimées mais qu’on peut les
supprimer. Dans ce cas, la règle visée à l’article 134, peut remplacer les provinces par des collectivités supra-
communales qui seraient plus en phase de la vie contemporaine par rapport aux vieux tracés des provinces. Ce serait
bien des collectivités politiques au sens strict et donc c’est un décret régional wallon ou flamand qui pourrait prendre
cette décision.

L’article 6, §1, VIII du 08/08/1980, évoque l’hypothèse où le décret régional wallon ou flamand déciderait de
supprimer les provinces. Dans ce cas, si la région flamande / wallonne décide de supprimer les provinces, les provinces
demeurent sur un plan administratif et disparaitraient en tant que collectivités politiques. On aurait donc toujours des
gouverneurs chargés du maintien de l’ordre et de la bonne exécution des L-D-O.

Les limites des Qui peut modifier les limites de ces provinces et de ces communes ? Il y a une réponse dans
communes et la l’article 7 de la constitution : c’est la loi. Mais lorsque l’on regarde dans la loi spéciale du
fusion des 08/08/1980, on découvre une autre réponse.
communes
On découvre que c’est la région qui est compétence donc le décret régional flamand / wallon qui
est compétent pour changer les limites des provinces ou des communes (art. 6, §1, VIII du
08/08/1980).

Qui a raison ? Qui a tort ? La Cour d’arbitrage en 2003 a décidé que lorsqu’une disposition
constitutionnelle date d’avant le 24 décembre 1970 (entrée en vigueur de la loi spéciale du
08/08/1980), le terme du mot « loi » n’a pas une portée de règle répartitrice de compétences
entre l’état, les communautés et les régions. De sorte que, la loi spéciale par une attribution
expresse et précise peut confier la matière en cause dans la disposition constitutionnelle au
décret régional.

Les autorités Il faut savoir qu’il y a des communes, il y a des collectivités supra communales et des provinces.
intra communales Mais il existe à Anvers des districts « organes territoriales intra communales », donc nous
sommes devant une nouvelle collectivité politique. L’idée c’est que nous avons fusionnés les
communes dans les années 1970 car il y avait un grand nombre de communes dans le passé.

Du coup, à Anvers on ressent le besoin de compenser la création de cette grande commune par
l’institution de districts. En 1997, dans l’article 41, al. 2-5 de la Constitution, le décret régional
peut décider de créer des organes territoriaux intra communaux dans les communes de plus de
100.000 habitants. Ceci existe, pour le moment, que à Anvers.

Les La Constitution n’énumère pas une liste de matières provinciales / communales, de la même manière qu’elle établit
compétences une liste régionale et communautaire. On utilise une autre technique : on écrit dans l’article 41 et 62 de la
des provinces Constitution, la règle selon laquelle tout ce que les conseils communaux / provinciaux estiment de relever de la
et des commune / province entre dans la compétence de la commune / province en question.
communes

77
Mais elles ne peuvent pas faire n’importe quoi, il y a encore le principe de la hiérarchie des normes. Les règlements
communaux / provinciaux sont soumis au principe de la légalité. Il faut ajouter que les communes / provinces
s’établissent dans la structure de la décentralisation donc on parle de tutelle (art. 162 al.2 Constitution + art. 6, §1, VIII
08/08/1980).

Il faut ajouter que les communes doivent accepter aussi d’assumer un certain nombre de missions qui leur sont
demandées par les autorités supérieures. C’est l’article 6, §1, VIII 08/08/1980 (à la toute fin de l’article) : « Les actes,
règlements et ordonnances des autorités des provinces, des collectivités supra communales, des communes, des
agglomérations et des fédérations de communes et des autres autorités administratives ne peuvent être contraires aux
lois et aux arrêtés de l'autorité fédérale ou aux décrets et arrêtés des communautés, qui peuvent, en tout cas, charger
ces autorités de leur exécution, et d'autres missions, en ce compris donner un avis, ainsi que d'inscrire au budget toutes
les dépenses qu'elles imposent à ces autorités ».

Les organes Les principes On le voit dans l’article 162, al.2 Constitution, parmi les principes consacrés par la loi et par les
des provinces constitutionnels décrets, il y a l’élection directe des membres des Conseils communes / provinciaux.
et des
communes La régionalisation L’article 6, §1, VIII 1° (4e tiret dans lequel les régions ne sont pas compétentes par rapport à la
de la matière police mais bien l’état), 4° et 5° 08/08/1980 : « les régions sont compétentes pour régler
l’organisation, le fonctionnement et les compétences des provinces, des communes et des
collectivités supra communales ».

L’organisation des En ce qui concerne l’organisation, elle se trouve à l’article 1er de la nouvelle loi communale : « Il y
communes a dans chaque commune un corps communal composé de conseillers, du bourgmestre et des
échevins ».

Le conseil communal : Article 2 de la nouvelle loi communale, article 177 de la nouvelle loi
communale, 119 de la nouvelle loi communale.

Le collège des bourgemestres et échevins : Article 123 de la nouvelle loi communale.

Le bourgemestre : Article 133 de la nouvelle loi communale.

L’organisation des Article L2212-1 du code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation.


provinces

La nation de Le gouverneur est le commissaire du gouvernement régional dans la province et ce même gouverneur est le
dédoublement commissaire dans le gouvernement fédéral de la province. Quand il assure le maintien de l’ordre dans la province, il
fonctionnel : agit en tant qu’organe déconcentré dans l’état.
application
aux En ce qui concerne les communes, on retrouve le même fonctionnement du dédoublement fonctionnel. Dans les deux
gouverneurs cas, nous avons affaire à un organe qui se rattache à la fois à un niveau de pouvoir (province / commune) et l’état.
de province et
aux
bourgemestres

Les agglomérations et fédérations de communes

Nous avons des agglomérations / fédérations de communes dans les collectivités politiques territoriales, c’est l’article 165 de la
constitution. Les fédérations de communes n’existent plus et l’agglomération de communes c’est Bruxelles, on peut presque oublier ce
niveau de pouvoir mais pas tout à fait car l’article existe encore.

Ce texte date d’avant 1970, or, la fusion des communes a été décidée en 1975. On décide de rendre possible la création d’agglomération
de communes donc un ensemble de communes formant une agglomération. Puis, un ministre réussi en 1975 l’opération de fusions de
communes donc l’intérêt de ces agglomérations de communes disparait sauf à Bruxelles car on ne réussit pas la fusion de communes car
les bourgmestres sont trop attachés à leur commune.

78
L’agglomération bruxelloise est bien une collectivité politique, il y avait bien un Conseil de l’agglomération et un Collège mais tout cela
disparait par la région bruxelloise.

En ce qui concerne ses compétences, elles se trouvent à l’article 4, §1, §2bis, §2quater de la loi du 26 juillet 1971 organisant les
agglomérations et les fédérations de communes. Mais toutes ces compétences sont assumées par les organes de la région bruxelloise.
Pourquoi ? Parce que la constitution a du constaté en 1988-89, qu’une fois que la région bruxelloise a été créée, les 19 communes qui
forment l’agglomération bruxelloise coïncident avec la région de Bruxelles-Capitale. Donc, l’article 166, §2 de la constitution, nous dit
que les compétences de l’agglomération bruxelloise sont exercées par la région bruxelloise. Cela veut dire que des règlements
d’agglomération sont adoptés de temps en temps par le parlement de la région bruxelloise mais en tant que Conseil de l’agglomération
bruxelloise.

SECTION 2 : LES DIVISIONS COMMUNAUTAIRES DE L’ÉTAT BELGE

Les Communautés

Identification C’est l’article 2 de la Constitution qui nous dit : « La Belgique comprend trois communautés : la Communauté
des française, la Communauté flamande et la Communauté germanophone ».
communautés
et siège de la Petite parenthèse : l’appellation de « Wallonie-Bruxelles » n’est pas du tout conforme à la Constitution car la
matière Constitution nous dit « Communauté française », ce qui est insupportable pour les flamands de Bruxelles.

- La Communauté française, c’est le territoire de la région de langue française + les institutions francophones
établies dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale.
- La Communauté flamande, c’est le territoire de la région de langue néerlandaise + les institutions flamandes
établies dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale.
- La Communauté germanophone ce sont les communes de la région de langue allemande.

Personnalité La communauté a une personnalité juridique distincte de celle de l’état. Ceci se trouve dans l’article 3 du 08/08/1980
juridique en ce qui concerne la Communauté française et flamande. Et en ce qui concerne la Communauté germanophone, elle
s’y trouve à l’article 2 de la loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles pour la Communauté
germanophone.

Pourquoi une loi spéciale pour les 2 autres Communautés et une loi ordinaire pour la Communauté germanophone ?
Car l’organisation, les compétences et le fonctionnement de la Communauté germanophone ne sont pas matière de
grandes discussions entre les flamands et francophones au contraire des deux autres Communautés.

Ressort La Communauté germanophone est une division quasiment territoriale. Mais porte ce nom car elle a les mêmes
territorial de la compétences que les 2 autres Communautés (art. 3 31/12/1983). Toutes situations qui se trouvent sur le territoire de
communauté langue allemande est réglée par la Communauté germanophone.
germanophone
Les décrets que la Communauté germanophone adopte ont force de loi dans la région de langue allemande (art. 130,
§2, Constitution), donc aucune difficulté.

Les délimitations sont également très claires et se trouvent à l’article 5 des lois sur l’emploi des langues en matière
administrative coordonnées le 18 juillet 1966.

Les critères L’affaire se corse car il y a Bruxelles qui rend les choses compliquées. S’il n’y avait pas Bruxelles, nous aurions eu des
d’appartenance divisions purement territoriales. Mais si nous avons créés les Communautés c’est pour solidariser les francophones de
aux Bruxelles avec les Wallons et pour solidariser les flamands de Bruxelles avec les flamands de Flandre.
Communautés
française et Attention, il n’y a pas de sous-nationalité ! Les citoyens bruxellois n’ont pas de sous nationalité « flamande » ou
flamande « francophone ». Donc, il faut trouver un dispositif qui permet de rattacher une situation juridique soit à la

79
compétence des autorités de la Communauté française soit à la Communauté flamande. Il faudra trouver un autre
critère que la sous-nationalité.

Il existe aussi des communes à facilités qui sont situées sur le territoire de la région de langue néerlandaise et
française. Cela va rendre le dispositif un peu subtil s’agissant des compétences des Communautés.

L’idée clef est que l’on va distinguer le ressort territorial de la Communauté française, d’une part, et de la
Communauté flamande, d’autre part, en fonction du type de compétences assumées par cette Communauté. On doit
voir quelles sont les compétences pour pouvoir expliquer le ressort territorial de l’une et de l’autre.

La culture et l’enseignement à l’article 127 de la Constitution. Ensuite, les matières personnalisables (art. 128
Constitution) c’est-à-dire tout ce qui relève de l’aide aux personnes et des soins de santé. Et enfin, matière de
l’emploi de langue.

On va distinguer ces 3 blocs de compétence et on va déterminer le champs d’application dans l’espace des décrets
des 2 Communautés qui varient en fonction du type de compétence exercé.

1er hypothèse Si la communauté française / la Communauté flamande adopte des décrets dans le domaine de la
culture ou de l’enseignement. Le champs d’application de ces décrets est fixé par l’article 127, §2
Constitution : « Ces décrets ont force de loi respectivement dans la région de langue française et
dans la région de langue néerlandaise, ainsi qu'à l'égard des institutions établies dans la région
bilingue de Bruxelles-Capitale qui, en raison de leurs activités, doivent être considérées comme
appartenant exclusivement à l'une ou à l'autre communauté ».

Les décrets des 2 Communautés, en matière de culture et d’enseignement, s’appliquent dans


l’assise territoriale de base de chacune de ces 2 communautés - à savoir la région de langue
française (Communauté française) et la région de langue néerlandaise (Communauté flamande) -
mais cette assise territoriale de base connait un phénomène d’accroissement sur le territoire de la
Région bilingue de Bruxelles-Capitale. Mais !! Les décrets ne vont pas s’appliquer à l’égard des
personnes physiques mais aux institutions établies dans la région bruxelloise qui se rattache
exclusivement à la Communauté française ou Flamande en raison de leur activité.

L’idée : un théâtre situé sur le territoire de la région bruxelloise. Est-ce que ce théâtre doit se
soumettre au décret de la Communauté française ou flamande (= culture) ? Chaque communauté
va avoir ses propres politiques théâtrales ainsi que leur propre financement. Un théâtre est soit
flamand soit francophone, produit des pièces soit en français soit en flamand. Si ses activités sont
proposées en français alors il se rattache à la Communauté française et vice-versa.

Le problème c’est la fiscalité. La Communauté française n’a pas réellement le pouvoir fiscal propre
que lui attribue l’article 170, §2 de la Constitution car il n’y a pas de sous-nationalité. Ce que n’a pas
la Communauté flamande car très prospère.

2e hypothèse La Communauté française / flamande décide d’adopter un décret dans les matières
personnalisables (tournent autour de l’aide aux personnes et des soins de santé).

C’est l’article 128 §2 de la Constitution qui nous donne la réponse. Le décret de la Communauté
française / de la Communauté flamande dans une de ses matières personnalisables s’applique dans
l’assise territoriale de base. Nous sommes également dans le même phénomène d’extension de la
région bilingue de Bruxelles-Capitale et on exclus les personnes physiques donc les décrets ne
s’appliquent qu’aux institutions de la région bruxelloise.

Mais ! Il y a une différence, pour ce qui concerne ces matières, on va cibler les institutions en raison
de leur organisation et non pas de leur activité, doit être considéré comme appartenant
exclusivement à l’une ou l’autre communauté.

Pourquoi l’organisation ? Car dans les matières personnalisables nous avons les soins de santé.
Imaginons qu’on applique ce critère d’activité : on se fait renverser par une voiture, une ambulance
arrive. Si le critère était celui de l’activité, l’ambulancier doit demander « flamand ou
francophone ? » et selon la réponse on est renvoyé dans une clinique exclusivement flamande ou

80
francophone. Donc, heureusement, le constituant de 1980 n’en a pas voulu. Donc ces institutions
sont bilingues !

3e hypothèse L’emploi des langues

Ici, nous sommes devant un autre problème. Le problème n’est pas Bruxelles car on va éviter que
les 2 Communautés ne s’occupent de l’emploi des langues à Bruxelles. C’est une matière qui va être
réservée à l’état car on doit s’intéresser à l’emploi des langues, par hypothèse, dans une région
bilingue.

C’est ce que l’article 129, §2 de la Constitution nous dit : « Ces décrets ont force de loi
respectivement dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise, excepté
en ce qui concerne :.. ». On constate qu’on ne parle pas de la région bilingue de Bruxelles-Capitale.
Donc, les décrets des 2 Communautés ne s’appliquent pas dans la région bilingue puisqu’on n’en
parle pas ! Mais bien l’état qui est seul compétent.

Mais l’autre particularité, c’est que l’assise territoriale de base (région de langue française ou
région de langue néerlandaise) se rétrécie, a contrario, des 2 premières hypothèses qui
connaissaient un phénomène d’accroissement. Pourquoi ? Car dans la région de langue française il
y a des communes à facilités où l’état va protéger des minorités linguistiques et même chose dans
la région de langue néerlandaise. C’est ce qu’on voit à l’article 129, §2 de la Constitution : « les
communes ou groupes de communes contigus à une autre région linguistique et où la loi prescrit ou
permet l'emploi d'une autre langue que celle de la région dans laquelle ils sont situés ».

Les 6 périphériques échappent à la compétence des Communautés. Par contre, ces communes se
voient appliquer les décrets des Communautés dans les autres matières vus ci-dessus.

En conclusion On pratique un fédéralisme personnel à Bruxelles donc non pas territorial. Parce qu’on déroge au
traditionnel fédéralisme territorial qui veut que pour une même matière, les lois s’appliquent sur
l’ensemble du territoire – l’exclusion de toute autre collectivités politiques. On y déroge car deux
communautés (française et néerlandophone) peuvent exercer des compétences à l’intérieur d’un
même territoire à l’égard d’une même matière mais avec des destinataires différents.

Mais, on rejette toute forme de sous- nationalité. Au fond, quelle serait une sous-nationalité ?
Imaginons que les constituants aient voulus créer une sous-nationalité (ce que veut les flamands
ceci dit), il faudrait choisir – dans le chef des personnes physiques à Bruxelles - de se rattacher, de
manière exclusive et définitive, soit à la communauté française soit à la communauté
néerlandophone. Ceci n’est pas le cas, il apparait que le rattachement des personnes physiques à
Bruxelles est indirect, il ne se fait que par le biais de l’institution à laquelle la personne physique
décide librement de s’attacher.

Deuxièmement, il n’y a pas de sous-nationalité car le rattachement n’est pas obligatoire, il existe
des institutions biculturelles, des institutions qui ne se rattachent pas ni à l’une ni à l’autre
communauté. Le fédéralisme personnel permet donc aux personnes physiques de se rattacher à
une communauté indépendamment du lieu où elle réside.

En dehors de la région bruxelloise, on pratique un fédéralisme territorial. Pas question pour la


Communauté française de prétendre appliquer ses décrets pour que des écoles francophones
puissent prospérer sur le territoire de la région néerlandaise et vice versa.

Donc, dans la région de langue néerlandaise la Communauté néerlandaise est compétente et vice-
versa.

Les C’est l’article 38 de la Constitution : « Chaque communauté a les attributions qui lui sont reconnues par la Constitution
compétences ou par les lois prises en vertu de celle-ci ».
des
Communautés L’article 127 nous donne la première série de compétences : la culture et l’enseignement. Mais attention, pour les
matières culturelles, on constate qu’on renvoie à une loi spéciale pour identifier les matières culturelles. Pour

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l’enseignement, la technique est différente, le constituant lui-même fournit toutes les informations dans l’article
même, il n’y a pas de loi spéciale.

En revanche, pour les matières culturelles il y a une liste. Quelle est cette liste ? Allons voir à l’article 4 du 08/08/1980
LSRI. Prenons quelques exemples, les beaux-arts, les musées, etc. A ne pas oublier, certaines de ces matières ont été
transférées à la région wallonne et à la COCOF.

Maintenant, la deuxième série de compétences : les matières personnalisables. Elles sont évoquées dans l’article 128
avec la précision qu’une loi spéciale doit arrêter la liste des matières personnalisables. Pourquoi personnalisable ?
C’est un belgicisme, l’idée c’était qu’elles sont personnalisables car elles sont liées à l’intimité des personnes. Ce sont
3 catégories : la santé publique, l’aide aux personnes et prestations familiales. On va trouver cela à l’article 5 du
08/08/1980 LSRI.

Qu’est-ce qu’on découvre dans cette loi spéciale ? Les communautés sont compétences pour la santé publique à
l’exception d’une série de compétences dont l’état fédéral en est compétent.

Enfin, la troisième série de compétences : l’emploi des langues. L’emploi des langues c’est l’article 129, §1 de la
Constitution. Il n’y a pas de renvoie à une loi spéciale, toutes les compétences pour l’emploi des langues sont
énoncées par le constituant lui-même.

Les organes des Le point de départ du raisonnement, c’est l’article 115, §1 de la Constitution + article 116 avec une précision sur le
Communautés parlement. Bien sûr, l’article 121 §1, nous parle des gouvernements.

On est donc renvoyé à la loi spéciale pour voir comment se composent chaque parlement et chaque gouvernement.

Communauté Dans l’article 24, §3 du 08/08/1980, nous découvrons que le parlement de la Communauté
française française se compose de tous les députés de la région wallonne et également 19 membres élus par
le groupe linguistique français du parlement de la région bruxelloise en son sein.

Il y a également le gouvernement de la Communauté française qui compte 4 membres à l’article 63,


§2 du 08/08/1980, ce sont donc des personnes élues par le parlement de la communauté française.

Communauté Ici, il y a un seul parlement flamand de la région flamande qui se compose de 118 membres de la
flamande région flamande et on y ajoute des 6 bruxellois selon l’article 24 du 08/08/1980. A contrario, de la
région wallonne qui a un parlement et un gouvernement et la région de langue francophone qui a
un parlement et un gouvernement.

L’article 63, §1 du 08/08/1980 nous renseigne sur le Gouvernement flamand.

Rappelons l’article 19, §1 + 50 + 76 du 08/08/1980 qui permettent au parlement flamand de voter


des décrets communautaires et régionaux. Ces 3 articles permettent d’éviter les confusions.

Communauté Nous sommes dans la loi ordinaire de la loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles
germanophone pour la Communauté germanophone, article 8, concernant le parlement.

Le gouvernement se trouve à l’article 49 du 31 décembre 1983.

Les Commissions communautaires à Bruxelles

La Commission Pourquoi les commissions communautaires ont été créées à Bruxelles ? Parce que l’article 39 de la constitution a
communautaire rendu leur création indispensable. En effet, l’article 39 interdit à la loi spéciale de donner des compétences
française communautaires aux régions. Or, la Communauté française et flamande ont souhaité disposer d’une antenne à
(COCOF) et la Bruxelles pour s’occuper d’une série de matières communautaires mais en tenant compte des particularités du
Commission terreau bruxellois. Pour les flamands, il y a le soucis de ne pas laisser tomber les flamands de Bruxelles et la
communautaire Communauté flamande ne connait pas Bruxelles, a envie de se doter d’un prolongement à Bruxelles.
flamande (VGC)

82
Donc, on créée deux collectivités politiques supplémentaires : la COCOF pour prolonger l’action communautaire sur le
terrain bruxellois et surtout la VGC pour prolonger l’action pour la Communauté flamande à Bruxelles.

Pourquoi l’article 39 interdit, en principe, à la loi spéciale de donner des compétences communautaires aux régions ?
Car les flamands avaient la crainte de voir la région bruxelloise dominée par les francophones, empiétés sur les
compétences que la Communauté flamande veut exercer elle-même donc la VGC va faire l’affaire.

La solution est dans l’article 136 de la Constitution, voilà le fondement constitutionnel qui comporte aussi l’article 166
§3 de la Constitution. Cet article énonce les compétences de la COCOF et de la COCOM.

Personnalité La personnalité juridique est réglée dans l’article 60 al.1 du 12/01/1989 LSIB, les 3 institutions
juridique de la (COCOM, VGC, COCOF) ont la personnalité juridique.
COCOF et la VGC

Organes de la A l’article 60, al.2 du 12/01/1981 LSIB, il y a, pour ces matières une institution compétente : la
COCOF et de la « COCOF » avec ses organes.
VGC
Où allons-nous trouver ses organes ? Dans la région bruxelloise mais on ne peut pas se référer à
la région comme telle car l’article 39 nous l’interdit. On va simplement prendre le seul groupe
linguistique française de ce parlement de la région de la région bruxelloise et les seuls membres
du gouvernement appartenant au groupe linguistique française de la région bruxelloise et les
seuls secrétaires d’états régionaux appartenant au groupe linguistique français de la région
bruxelloise. Donc tout simplement, tous les francophones de la région bruxelloise.

Même chose du côté flamand, pour composer l’assemblée de la VGC on va prendre le groupe
linguistique néerlandais du parlement de la région bruxelloise. Et pour composer le collège de la
VGC on prend les membres du gouvernement de la région bruxelloise ainsi que les secrétaires
d’états de la région bruxelloise appartenant au groupe linguistique néerlandais.

C’est à nouveau la technique du dédoublement fonctionnel, on est parlementaire de la région


bruxelloise puis on travaille soit entre francophones / flamands donc nous avons la fonction de
membre de l’assemblée de la COCOF ou de la VGC (renvoie à l’article 76 du 12/01/1989).

Compétences Ces compétences on les trouve dans l’article 166, §3 de la Constitution. Ce sont les compétences de la COCOF et de la
de la COCOF et VGC et pour la COCOF on devra ajouter les compétences issues de la Communauté française qui lui ont été
de la VGC transférées.

Cet article 166, §3, il fait partie de la logique de la décentralisation. Cette logique est la même pour la COCOF et la
VGC comme ayant chacune les mêmes compétences qui sont présentes dans cet article :

- Toutes les matières communautaires sauf l’emploi des langues. Qu’est-ce que ça veut dire « la COCOF et la
VGC ont, chacune pour sa communauté, les mêmes compétences que les autres pouvoirs organisateurs » ? Ca
veut simplement dire que la COCOF et la VGC peuvent organiser des institutions actives dans leur domaine.

- Les organes exercent les compétences qui leur sont délégués par les parlements. Cela est également
présenté dans la loi spéciale relative aux institutions bruxelloises mais sans s’y attarder car dans la pratique
cette délégation n’est pas activée.

A l’article 64 du 12/01/1989, nous avons quelques exemples par rapport à ces matières. Par exemple, mettre en place
des crèches, des écoles, accorder des subsides etc.

Évidemment, la COCOF et la VGC ce sont des collectivités politiques décentralisées selon l’article 83 du 12/01/1989.
Elles ont une tutelle et sont donc des collectivités politiques décentralisées qui prolongent l’action des 2
Communautés sur le territoire de Bruxelles. La COCOF dépend de la Communauté français et la VGC dépend de la
Communauté flamande.

83
Pour la COCOF et uniquement pour la COCOF, il faut prendre en considération non seulement l’article 166 §3 mais il
faut prendre en considération également l’article 138 de la Constitution. C’est un article qui fonde les transferts de
compétences concédés par le parlement / gouvernement de la Communauté française à la région wallonne dans les
limites de la région de langue française et au groupe linguistique français du parlement de la région bruxelloise et de
la COCOF.

Donc, la COCOF a un double statut : collectivité politique décentralisée et collectivité politique fédérée qui légifère en
toute autonomie par des décrets dans les matières transférées par la Communauté française.

Quelques exemples pour illustrer ce propos, quels sont les domaines dans lesquels la COCOF agit :

- Centres planning familial.

- Services de soin à domicile.

- Formation professionnelle gérée par Bruxelles-formation.

- La politique des personnes handicapées.

- Les maisons de repos et de soins.

Tout cela dans la mesure où toutes ces institutions peuvent se rattacher à la Communauté française et donc à la
COCOF compte tenu du critère de l’organisation (art. 128, §2 de la Constitution).

La Commission On va se mette à la recherche des compétences de la COCOM tout en ayant des organes élus, des compétences
communautaire propres. Mais quelles sont ses compétences ? La COCOM va surement recueillir le reste des compétences qui ne sont
commune pas prises en charge ni par la Communauté française ni flamande, ni par la COCOF.
(COCOM)
Qui exerce les compétences bicommunautaires à Bruxelles ? Ce sont des compétences qui sont soit culturelles, soit
éducatives soit personnalisables, qui ne peuvent pas être rattachés exclusivement aux Communautés. Donc, qui est
compétent ? La COCOM ne prend pas tout l’ensemble des compétences bicommunautaires. C’est au niveau des
matières bipersonnalisables que l’on va voir la COCOM se mettre en place et disposer du pouvoir de légiférer.

L’emploi des Les Communautés ne sont pas compétences pour l’emploi des langues. Donc est-ce que la
langues COCOM est compétente ? Rappelons-nous l’article 129, §2 de la Constitution, à Bruxelles pas de
compétences des Communautés.

Qui est compétent ? Prenons l’article 30 de la Constitution et l’article 129, §2 et combinons-là


avec l’article 35 qui parle des matières résiduelles. Pour l’emploi des langues, c’est une
compétence résiduelle, et le résidus va appartenir soit aux communautés soit aux régions le jour
où il y aura une révision de la Constitution donc l’article 35 n’est pas encore en vigueur, il faut
attendre une révision constitutionnelle et une adoption d’une loi spéciale. Donc l’état fédéral est
seul compétent.

L’enseignement On relit l’article 127, §2 de la Constitution, on voit qu’en matière d’enseignement les
Communautés sont compétentes. Les décrets s’appliquent uniquement aux institutions qui, en
raison de leur activité, doivent appartenir exclusivement à l’une ou l’autre Communauté.

Donc, qui est compétent en matière d’enseignement à Bruxelles là où les deux Communautés ne
le sont pas ? C’est une matière bi-éducative et la réponse à la question c’est l’état fédéral au titre
des compétences résiduelles (art. 35).

La culture Jusqu’à la 6e réforme de l’état, le raisonnement est le même pour l’enseignement. Mais il va y
avoir un changement car on a inséré dans la constitution un article 135bis qui révise
implicitement l’article 39 qui est un cas particulier.

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Commençons par la règle générale, c’est l’article 127, §2 de la Constitution. Les décrets
s’appliquent qu’aux institutions qui ont des activités culturelles en français ou en néerlandais.
Quid du théâtre royal de la monnaie, l’orchestre national de Belgique, qu’on ne peut pas classer
en raison de leur activité ? C’est du biculturel, matières de compétences résiduelles donc c’est
l’état qui est compétent pour les matières biculturelles.

Sauf ! que l’article 135bis a permis de déroger à cette règle générale mais uniquement pour
certaines matières précisées dans une loi spéciale. L’article 135bis nous dit qu’une loi spéciale
peut attribuer à la région bruxelloise des compétences dans les matières culturelles, que les
Communautés ne peuvent pas assumer compte tenu de l’article 127, §2.

On constate, donc, que l’article 4bis du 12/01/1989 a été adopté, qui limite de manière
restrictive les matières biculturelles confiées à la région bruxelloise a 3 catégories : financement
et la subsidiassions des infrastructures sportives communales (1), la formation professionnelle
pour autant que les programmes s’inscrivent dans le cadre de la politique de l’emploi (2), les
matières biculturelles pour autant que ces matières soient d’intérêt régional (3).

C’est une liste très fermée des matières biculturelles qui relèvent de la compétence de la région
de Bruxelles-capitale. En dehors de cette liste, c’est la règne générale donc l’état fédéral qui est
compétent pour le biculturel.

Les matières C’est en effet, dans ces matières, que la COCOM a été investie du pouvoir de légiférer par des
personnalisables ordonnances. Expliquons tout cela.

L’article 135 est la clef du raisonnement. Cet article nous dit qu’une loi spéciale dit qui est
compétent à Bruxelles dans les matières personnalisables, là où les 2 Communautés ne sont pas
compétentes. Cela revient à dire qu’une loi spéciale nous dit qui est compétent pour les matières
bipersonnalisables.

C’est quoi une matière bipersonnalisable ? C’est une matière identifiée dans l’article 5 du
08/08/1980, qui, soit concernent directement les personnes physiques car il est question de leur
reconnaitre directement des droits / obligations, soit il est question d’institutions qui en raison
de leur organisation ne se rattachent ni à l’une ni à l’autre des Communautés.

Examinons maintenant cette fameuse loi spéciale : art. 60, al.4 du 12/01/1989. Pour former la
COCOM, on prend la COCOF et la VGC, on les remet ensemble et on donne à cette assemblée
réunie sous le nom de COCOM. Évidemment, le taux de passe-passe commence à devenir
artificiel car ce sont les mêmes hommes et les mêmes femmes qui composent le parlement de la
région bruxelloise, qui forment donc l’assemblée réunie COCOM.

Pourquoi créer une COCOM alors soi-disant distincte de la région bruxelloise ? Car la COCOM
fonctionne avec des particularités procédurales non-négligeables. Ce qui est particulier c’est
qu’elle adopte ses ordonnances à la majorité absolue des suffrages dans chacun des deux
groupes linguistiques et le Collège réuni fonctionne de la même manière.

Autre particularité pour distinguer la COCOM et la région bruxelloise : article 77 du 12/01/1989,


le collège réuni est présidé par le ministre - président du gouvernement de la région bruxelloise
qui n’a qu’une voix consultative.

On sait qu’elle a la personnalité juridique, elle a des organes propres mais examinons maintenant
la compétence qui est le pouvoir de faire des ordonnances dans les matières visées à l’article 5
du 08/08/1980. L’article 5 ce sont les matières personnalisables (bipersonnalisables).

Les matières Ces précisions concernent le cas particulier des prestations familiales qui fait partie des matières
personnalisables : personnalisables.
le cas particulier
des prestations Le problème est le suivant : si, lors de la 6e réforme de l’état, on avait pas prévu un dispositif
familiales particulier pour les prestations familiales, qu’est-ce qui aurait pu se passer ? Bien sûr, la COCOM

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aurait été compétente car pour obliger aux personnes physiques à Bruxelles de cotiser dedans,
on doit passer par la COCOM. Mais, il eut été possible, pour la Communauté flamande, de
prévoir l’octroi de compléments aux allocations familiales uniquement pour les bruxellois qui
décideraient de s’inscrire comme se rattachant à une institution soucieuse de la promotion des
intérêts des familles flamandes. Donc, si la Communauté flamande voulait attirer les bruxellois
en mettant en place une institution compétente pour octroyer des avantages, il n’y a rien qui
pourrait empêcher la Communauté de le faire.

La COCOF pourrait également réagir et faire la même chose via des institutions francophones.
Alors c’est une espèce de guéguerre entre les deux Communautés, qui attirent le plus de
Bruxellois. On veut éviter cela.

Donc, on barre la route et pour exclure la compétence de la Communauté flamande et de la


COCOF en matière de prestations familiales, on va revisiter l’article 128, §2 : « sauf si une loi
adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa, en dispose autrement », ceci a permis à
la loi spéciale du 12/01/1989 de prévoir, dans son article 63, al.2, que en ce qui concerne les
allocations familiales les décrets de la Communauté française (+ COCOF) / flamande, ne pourront
jamais s’appliquer aux institutions de la région bruxelloise.

Donc ce que l’article 63 nous dit, c’est que les prestations familiales, relèvent sur la région
bruxelloise, de la compétence exclusive du collège réunie et de l’assemblée réunie en ce qui
compris à l’égard des institutions qu’on aurait pu considérer appartenant à l’une ou l’autre
communauté. Donc que la COCOF et la communauté flamande ne se fatigue pas pour essayer de
décrocher des avantages. C’est la COCOM seulement qui gère cette matière.

Mais alors, en dehors du cas particulier des prestations familiales, quid ? En dehors, là on peut
imaginer que la Communauté flamande et la COCOF puissent agir et d’ailleurs c’est le cas. Mais,
via la logique des institutions, dans le domaine des soins de santé et de l’aide aux personnes à
Bruxelles, les nouvelles compétences communautaires créées par la 6e réforme de l’état, ont fait
l’objet d’un dispositif de financement qui accorde les dotations financières fédérales transférées
aux Communautés. Et ce transfert de compétence, à Bruxelles, a privilégié la COCOM. Donc, par
exemple, les maisons de repos et de soins (privées) relèvent de la COCOM.

CHAPITRE 5 : L’ÉTAT BELGE ET SES STRUCTURES (RAPPEL)

SECTION 1 : LES COLLECTIVITÉS POLITIQUES DÉCENTRALISÉES

Nous sommes obligés, pour voir clair, de distinguer les collectivités politiques décentralisées et fédérées. L’état
belge est bien un état fédéral mais ça n’empêche pas les Régions d’accueillir des collectivités politiques qui
obéissent à la décentralisation.

Les provinces, les communes, les collectivés supracommunales, les districts et les Les commissions
aglomerations de communes communautaires flamande et
pour partie française

Faisons rapidement la démonstration pour ce qu’il s’agit des provinces et des communes. Pour Petit rappel, la COCOF et la VGC
ce qui concerne les collectivités supracommunales c’est l’article 41 de la Constitution et pour les sont des collectivités politiques
districts ils n’ont d’importance qu’à Anvers qui est l’article 41 al.1-3 de la Constitution. Pour les décentralisées : article 166 §3 de
agglomérations de communes, tout est dit dans la Constitution à l’article 165. la Constitution. Elles ont chacune
les mêmes compétences pour
En revanche, on doit revenir aux provinces et aux communes : article 41 de la Constitution et toutes les matières
l’article 162 al.2, de la Constitution qui parlent des provinces, des communes et de la tutelle. Ce communautaires autre que la

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6° nous donne la définition de la notion de tutelle : « pour empêcher que la loi ne soit violée ou matière sur l’emploi des langues.
l’intérêt général blessé ». Donc, nous sommes dans le cadre de la décentralisation. On retrouve l’article 64 du
12/01/1989 pour expliquer
Il faut rappeler le grande principe de la hiérarchie normative se trouvant dans l’article 6 toutes les compétences.
08/08/1980, §1, VIII en ce qui concerne les pouvoirs supérieurs subordonnés, les actes /
règlements / ordonnances des autorités ne peuvent pas être contraires aux lois et aux arrêtés Petit autre rappel, l’article 83 du
qui se trouvent au-dessus. Ce principe hiérarchique se trouve à la fin du point VIII, donc la 12/01/1989 qui parle de la
démonstration est faites, ce sont des collectivités décentralisées. tutelle.

SECTION 2 : LES COLLECTIVITÉS POLITIQUES FÉDÉRÉES

Les grands principes du fédéralisme sont : le principe d’autonomie, de participation, de coopération et d’égalité. Examinons ces 4
principes

Le principe Les Ce principe d’autonomie signifie qu’une autorité politique fédérée dispose de faire la loi en toute
d’autonomie communautés autonomie, à l’abris de toute tutelle. Donc, que devons-nous faire ? L’article 127 §2, ce sont les
décrets dans le domaine de la culture et de l’enseignement, l’article 128, §2, nous dit la même
chose pour les matières personnalisables, l’article 129 §2, nous dit la même s’agissant des décrets
des Communautés en matière de l’emploi des langues, l’article 130, §2, pour la Communauté
germanophone. Nous venons de démontrer que les 3 communautés disposent le droit de légiférer.

Les régions Maintenant, faisons la même chose pour les Régions. L’article 39 de la Constitution ne nous dit pas
grand-chose, il parle de compétence de régler mais est-ce un pouvoir de nature réglementaire
(donc décentralisée) ou légiférer (donc fédérées) ? L’article 134 procure une interprétation
authentique de l’article 39 de la Constitution, les lois spéciales auxquelles l’article 39 renvoie,
déterminent la force juridique des règles que les organes régionaux prennent dans les matières
régionales. A l’alinéa 2 dit, ces lois spéciales peuvent (ne confèrent pas mais peuvent conférer)
donner à ces organes régionaux le pouvoir de prendre des décrets qui ont force de loi.

Voici l’article 19, §2 du 08/08/1980, qui s’applique à la fois aux décrets des communautés et aux
décrets de la région wallonne et flamande. Les décrets ont force de loi.

En revanche, lorsqu’on examine la loi spéciale du 12/01/1989, on découvre à l’article 7 qui nous dit
que « l’ordonnance peut abroger, compléter, modifier ou remplacer les dispositions législatives en
vigueur ». On ne dit pas que l’ordonnance a force de loi même si c’est la même chose mais pas tout
à fait parce que les ordonnances vont se différencier des décrets par deux traits (le premier que
nous examinerons ici et le 2e que nous examinerons dans le principe d’égalité) : le principe
d’autonomie est le principe qui veut que l’autorité fédérée exerce le pouvoir de légiférer à l’abris de
toute tutelle.

On découvre dans l’article 45 du 12/01/1989, dans les matières de l’urbanisme, de l’aménagement


du territoire, des travaux publics et des transports et uniquement dans ces matières-là, le Roi peut
suspendre une ordonnance et, in fine, la Chambre peut annuler l’ordonnance parce qu’elle n’est pas
conforme aux exigences de la fonction de capitale de Bruxelles. Il y a une tutelle !!! La Région
bruxelloise n’est pas tout à fait comme les autres d’où « Bruxelles-Capitale ».

Donc, la Région de Bruxelles-Capitale est biface : collectivité politique fédérée et décentralisée


puisque les ordonnances, dans les 4 matières énoncées, sont soumises à une tutelle de l’autorité
fédérale. Cette tutelle n’a jamais été activée.

La COCOF et La COCOF uniquement quand elle agit sur pieds de l’article 138 de la Constitution (sinon agit en tant
la COCOM que collectivité politique décentralisée). Et la COCOM n’est qu’une collectivité politique fédérée qui
peut adopter des ordonnances dans les matières bipersonnalisables (art. 45 de la Constitution).

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Examen : Quelles sont les définitions des matières bipersonnalisables ? Ce sont des matières
personnalisables (art. 5 08/08/1980) qui concernent soit directement les personnes physiques de la
Région bruxelloise soit les institutions qui, en raison de leur organisation, ne se rattache pas à l’une
ou à l’autre Communauté.

Conclusion : La Belgique comprend 8 entités fédérées à CQFD.

Le principe Dans un état fédéral, la loi fédérale et les fédérées sont sur pieds d’égalité sauf quand il y a des compétences
d’égalité concurrentes sinon nous devons appliquer le principe de la hiérarchie des normes (Allemagne). En Belgique, on
applique un principe d’exclusivité où l’état central est compétent là où les Communautés et les Régions ne le sont
pas, et vice-versa.

Lois/ décrets/ Attention, il y a une limite qui concerne les ordonnances (de la Région bruxelloise, de la COCOM,
ordonnances : régionales spécifiques). Les décrets et les ordonnances sont soumis au contrôle de leur
même pied constitutionnalité par la Cour constitutionnelle dans les limites de l’article 142 de la Constitution. Le
d’égalité conflit de compétence doit être tranché par la Cour constitutionnelle qui est le principe d’égalité
entre les lois fédérales et fédérées.

Ordonnance : Ici, intervient la particularité concernant les ordonnances. Elles se voient appliquer l’article 9 du
particularité 12/01/1989 qui nous dit là où la Cour constitutionnelle n’est pas compétente, les cours et tribunaux
le seront pour vérifier la conformité des ordonnances aux dispositions de la Constitution et de la loi
spéciale du 12/01/1989. En d’autres termes, les ordonnances bruxelloises et de la COCOM sont
soumises au contrôle de la Cour constitutionnelle mais aussi au contrôle des cours et tribunaux ! Les
cours et tribunaux peuvent refuser d’appliquer une ordonnance qui serait contraire à la
Constitution et à la loi spéciale du 12/01/1989.

Parenthèse : L’article 142 de la Constitution parle de « règles visées à l’article 134 » mais quelles
sont ces règles ? Ce sont les règles que les organes régionaux prennent dans les matières régionales
dans les décrets des Régions wallonne et flamande et les ordonnances de la Région bruxelloise.
Sont soumis au contrôle de constitutionnalité les lois, les décrets (des communautés) et les règles
visées à l’article 134 c’est-à-dire des décrets des régions et des ordonnances de la Région
bruxelloise et de la COCOM.

Le principe Dans l’état fédéral, les collectivités politiques fédérées peuvent participer à la révision de la Constitution et à
de l’élaboration des lois fédérales via le bicaméralisme.
participation
Participation Est-ce que l’article 195 de la Constitution est en cohérence du modèle fédéral qui postule ce
des entités principe de participation ? On voit que cet article date de 1831 dans une époque où il n’y avait pas
fédérées à la de Communauté, pas de Région, pas de groupe linguistique.
révision de la
constitution Mais, il y a tout de même un article 67 de la Constitution ! Le Sénat prévoit, dans sa composition,
non moins de 50 sénateurs qui sont issus de parlement de Communauté ou de Région. Donc le
principe de participation est satisfait car les Communautés et Régions y sont associées mais ce n’est
pas tout à fait la même chose de dire comme telle que les Régions et les Communautés sont
associées à la révision de la Constitution. Ces sénateurs, désignés au sein de leur parlement, n’ont
pas de demande impérative, ils peuvent voter comme ils l’entendent. Donc, on ne peut pas
vraiment dire qu’ils sont liés à un mandat impératif qui serait lié à leur Région ou à leur
Communauté.

Il y a une incohérence qui résulte de la rigidité de la Constitution par comparaison avec les lois
spéciales en ce qui concerne les quorums. Il y a un malaise car il n’est pas normal que les lois
spéciales sont plus difficiles à modifier par rapport aux normes constitutionnelles. Logiquement il
faudrait qu’on associe à la révision de la Constitution des groupes linguistiques même s’ils ne sont
pas, comme tels, des représentants des Communautés ou des Régions mais c’est sans doute la seule
manière d’associer les Communautés et des Régions sans tomber dans un système politique
insoutenable.

88
Participation Lisons l’article 67, §1, de la Constitution : nous avons 35 sénateurs flamands et 24 sénateurs
des entités francophones. Il n’y a donc pas de parité, pas d’égale représentation des entités fédérées. Mais, les
fédérées à francophones ont déjà le bénéfice d’avantages : démocratie consociative (article 4, article 54 et
l’élaboration article 99 al.2 de la Constitution) qui est une garantie en béton lors de l’élaboration des lois
des lois fédérales.
fédérales
Mais ce Sénat n’est pas systématiquement associé à l’élaboration des lois, il y a souvent utilisation
du régime monocamérale.

Le principe Article 92bis du 08/08/1980, c’est la possibilité pour l’état, des Régions et des Communautés de signer des accords
de de coopération entre l’état et telle Communauté etc. Ces accords de coopération sont très nombreux.
coopération
Ajoutons à cela qu’il y a, au cœur des organes chargés d’assurer une coopération entre l’état et les Communautés /
Régions, le comité de concertation de la loi ordinaire du 09/08/1980 à l’article 31 et 31/1.

SECTION 3 : LES LIMITES DU FÉDÉRALISME À LA BELGE ET LES DESSOUS D’UNE


ÉVENTUELLE MUTATION CONFÉDÉRALE

Les limites C’est un fédéralisme mais unique au monde, il n’y a pas un état fédéral qui ressemble au notre pour 3 raisons.
du
fédéralisme Le dualisme Il y a bien sûr 3 langues mais pour l’essentiel il y a 2 grandes Communautés : les flamands et les
à la belge francophones. Cette bipolarité entre les partis politiques flamands et francophones n’existe pas
seulement en politique mais aussi dans une série de règle de droit : il y a 2 groupes linguistiques,
l’article 4 exige une majorité dans chacun des deux groupes, article 99. Il faut savoir qu’une série de
règles assurent aussi la parité au niveau flamand et francophone, il y a également une règle de parité
linguistique à la Cour constitutionnelle, à la Cour de cassation et au Conseil d’état.

Ce dualisme va de pair avec une allure confédérale, ce qui est intéressant. C’est une alliance entre 1 ou
2 états qui conservent leur souveraineté et qui décident de gérer ensemble quelques matières. Est-ce
que la Belgique peut être qualifiée de confédération ? Non, mais politiquement il faut reconnaitre qu’il
y a un parfum de confédéralisme dans le fait que le rouage politique essentiel de l’état belge c’est le
Conseil des ministres et que ce Conseil est paritaire. Cela explique qu’on est pas loin d’un principe
d’unanimité comme celui qui est parfois appliqué dans les organes de confédération.

Mais juridiquement, cela ne nous autorise pas de parler d’une confédération car les ministres qui
composent le Conseil des ministres, ils ne sont pas en droit des représentants de leur Communauté ou
de leur Région. Il est nommé par le Roi et est responsable devant la Chambre des représentants, il n’est
pas nommé à l’intervention des Régions ou des Communautés.

La complexité On parle d’un fédéralisme de superposition puisque sur le même territoire, se superposent 3
Communautés et 3 Régions, cette distinction entre les divisions communautaires et territoriales est
unique au monde. C’est parce que à Bruxelles, il y a une minorité flamande, qu’il faut distinguer les
appartenances communautaires et régionales.

Peut-on simplifier et parler de 4 entités territoriales : Flandre, Bruxelles, Wallonie et le côté


germanophone ? Non, pas du côté des flamands.

Une C’est caractéristique du fédéralisme belge, c’est un fédéralisme qui démembre. A un moment donné,
dynamique on fait disparaitre l’état tout est redistribué.
centrifuge

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Les dessous On peut imaginer une mutation / d’une révolution qui fera passer l’état belge fédéral à une confédération ? Si on veut
d’une organiser une confédération au sens juridique, on doit organiser la scission de l’état belge en un certains nombres
éventuelle d’états souverains pour se réunir, ensuite, en signant un traité. Aucune procédure n’est réalisée à ce jour.
mutation
confédérale

CHAPITRE 6 : L’EXIGENCE DÉMOCRATIQUE

La notion de démocratie est difficile car nous avons à l’esprit la notion que Lincoln – ancien président américain
- nous a donné : « la démocratie c’est le gouvernement du peuple, par le peuple et, pour le peuple ». Celle-ci est
viciée par le silence qu’elle maintient sur les droits de l’Homme. Or, les droits de l’homme sont fondamentaux
dans une démocratie.

Avec ça nous avons pas de définition mais en réalité nous ne savons pas en faire une définition complète. On
peut simplement donner quelques approches, on peut également chercher du côté de la philosophie politique
etc.

SECTION 1 : POSSIBILITÉ ET LIMITE D’UNE APPROCHE GÉNÉTIQUE

La démocratie n’est pas un modèle tout fait et qu’il s’agirait de projeter dans la réalité comme s’il s’agissait
d’une affaire de tout ou rien. La démocratie est une sorte d’immense expérimentation historique en partie non
consciente de sa propre signification. Autrement dit, depuis l’invention grecque de la démocratie, l’humanité a
fait des expériences successives de ce que cette idée de démocratie peut postuler. C’est une aventure qui a
commencé au 5e siècle avant Jésus-Christ et aujourd’hui cette expérience continue. Donc boucler cette notion
dans une seule définition, n’est pas une bonne démarche.

Voyons les grandes démarches importantes dans le temps

L’invention grecque C’est la première fois que l’on vit une expérience d’une véritable direction démocratique d’une cité qui
est soucieuse de démocratie. Mais, c’est une expérience qui est éloignée de la nôtre. Il y a une réelle
participation populaire mais cette participation présente des caractéristiques qui sont éloignées des
nôtres. Pourquoi ? Car c’est une démocratie directe, par le peuple physiquement sans organe
intermédiaire, il y avait des tirages au sort pour élire des magistrats. Aujourd’hui, nous sommes dans une
démocratie représentative. La démocratie grecque repose également sur une base étendue de non
citoyens : les esclaves, les immigrés et les femmes sont exclus. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Enfin,
cette démocratie grecque ignore la liberté individuelle, elle se comprend comme une autonomie
collective donc une cité qui se gouverne elle-même, qui se donne à elle-même ses propres lois.

La commune médiévale A cette époque, les marchands des villes s’émancipent des pouvoirs seigneuriaux en leur arrachant des
franchises qui est une des premières traces de liberté.

L’apport du christianisme Dans les évangiles, on voit l’affirmation de ce que nous sommes tous. Paul a développé cette idée
d’égalité. Cela dit, le christianisme sera longtemps l’idée d’une société hiérarchisée.

La démocratie moderne On doit souligner l’apport des grandes révolutions américaine, anglaise et française. C’est l’entrée en
composition de deux notions différentes – même contradictoire – : la notion de l’état comprise comme

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pouvoir institutionnalisé, séparé de la société civile et la notion de souveraineté du peuple qui renvoie à
l’idée d’une adéquation de la société avec elle-même. La démocratie tente d’articuler ces deux notions.

SECTION 2 : POSSIBILITÉ ET LIMITES D’UNE APPROCHE PHILOSOPHIQUE

Paul Ricœur dit que « la démocratie c’est le régime dans lequel la participation à la décision est assurée à un
nombre toujours plus grand de citoyens ». Elle montre que la démocratie ne peut pas s’accommoder d’une très
grande apathie de la part d’un nombre de citoyens. Par ailleurs, il ajoute un deuxième trait : « c’est le régime
qui ne se propose pas d’éliminer les conflits mais qui inventent des procédures leur permettant de s’exprimer et
de rester négociable ».

Le philosophe Claude Lefort nous dit, au fond, la même chose mais dans des termes radicaux. Il dit : « la
démocratie c’est un régime qui procède d’une acceptation tacite de la reconnaissance de l’homme par l’homme,
à travers l’expérience de la division, du conflit, de la diversité des intérêts et des valeurs, de l’hétérogénéité de la
culture, de l’imprévisibilité de l’histoire, des interrogations continues, des fondements de la loi du pouvoir et de
la connaissance » (attention à ne pas connaitre !). Ce que Claude

SECTION 3 : POSSIBILITÉ ET LIMITES D’UNE APPROCHE JURIDIQUE

Il faut souligner le danger de prétendre inscrire, dans la loi, une définition de la démocratie qui serait exhaustive
parce qu’on risque de créer une catégorie des ennemis de la démocratie. Attention, on ne dit pas qu’il n’existe
pas des partis anti-démocratiques mais ne donnons pas une définition juridique de la démocratie qui pourrait
être à la source d’une qualification d’anti démocratique donnée à des partis politiques qui sont originaux, des
partis qui ne pensent pas comme les autres.

L’arrêt de la Cette définition exhaustive nous la trouvons dans un arrêt de la Cour constitutionnelle allemande du 23 octobre
Cour 1952. Elle parle du principe de la responsabilité gouvernementale notamment. Or, la responsabilité
constitutionnelle gouvernementale est une règle qui est associée au régime parlementaire mais ce n’est pas le cas dans un régime
allemande du 23 présidentiel (USA). Elle fétichise des contenus qui sont ceux de la loi fondamentale allemande en faisant comme si
octobre 1952 ses contenus étaient voués à l’éternité alors qu’une démocratie peut évoluer.

Intérêt et danger Dans le raisonnement, on reprend Lefort mais on examine les traits institutionnels qui retient pour approcher la
de la liste des notion démocratie. La démocratie peut aborder d’autres terrains que les institutions de l’état mais si on prend le
traits niveau institutionnel que dit-il ? Les grands traits d’une démocratie :
institutionnels
de Claude Lefort - Élections périodiques au suffrage universel, libre, secret et légal.

- Ces élections n’ont de sens seulement si les partis politiques sont en concurrence.

- Cette compétition électorale n’a pas de sens si on ne respectait pas les libertés d’expression, de réunion
et d’association.

- A la suite de ces élections, sont élus des parlementaires qui composent une assemblée et ont le pouvoir
de faire la loi. Attention, si on veut aller trop loin dans ce trait, il faudrait condamner les pouvoirs spéciaux
car le parlement adopte une loi permettant au gouvernement de faire la loi provisoirement. Sort-on pour
autant de la démocratie ?

91
- On accepte que la loi soit issue de la volonté majoritaire de l’assemblée qui reflète la majorité des
suffrages exprimés par le corps électoral.

- On protège les minorités.

- Principe de la légalité donc la soumission du pouvoir gouvernemental à la loi et la soumission aussi des
juges à la loi.

- Égalité devant loi et protection des individus contre l’arbitraire.

L’essentiel : la On peut dire que l’essentiel c’est la délibération. On dit souvent que la loi est l’expression de la volonté générale
délibération mais cette volonté générale n’est pas simplement l’addition de ce que les citoyens veulent, ils prennent conscience
de ce qu’ils veulent à la suite des délibérations. C’est donc la délibération qui est au cœur de la démocratie, qui
passe par un régime qui met en concurrence des partis politiques.

La bonne Si on veut armer le droit constitutionnel d’une définition juridique de la démocratie dans le but de se protéger
approche : les contre les ennemis de la démocratie en sachant qu’il existe des partis politiques anti démocratiques, on doit
droits de coucher sur papier une définition de la démocratie. Or, on a vu tous les dangers vers cette façon de faire.
l’homme,
conditions de la Philippe Gérard nous dit que « la démocratie c’est le grand principe de l’autonomie collective qui s’exprime, en
démocratie particulier, dans la souveraineté du peuple et le principe de l’égalité des membres de cette communauté politique.
Il ajoute « la condition de possibilité de la démocratie ainsi comprise, c’est le respect des droits de l’homme ». Voilà
une manière de se défendre contre les ennemis de la démocratie, on doit préciser que les partis politiques doivent
respecter les droits de l’homme et s’ils ne le font pas – qu’ils montrent une méconnaissance des droits de l’homme
– on doit pouvoir s’en défendre, en minimum, de leur couper les vivres (en ne donnant pas d’argent pour leur
campagne électorale).

Renvoie à la Enfin, nous sommes invités à lire la Convention européenne des droits de l’homme à propos de la démocratie. Il y
CEDH : article 8 à a l’article 8 à 11, §2, qui nous disent qu’en démocratie, dans un état de droit, on peut admettre un certain nombre
11 §2 et 3 du 1er de restrictions aux droits de l’homme si et seulement si elles sont nécessaires dans une société démocratique pour
protocole protéger des intérêts généraux ou pour protéger des droits d’autrui.
additionnel
Ceci intervient pour colorer l’admissibilité des restrictions qui peuvent être imposées au nom de l’intérêt général.
La Cour européenne des droits de l’homme ne s’est jamais – sauf exception – aventurée à enfermer la notion de
société démocratique dans une définition exhaustive. C’est d’arrêt en arrêt que la Cour européenne des droits de
l’homme a été amenée à dire que la tolérance, le pluralisme, l’esprit d’ouverture, sont importants. Elle met aussi
l’accent sur le droit à la minorité, sur la diversité, sur l’inadmissibilité de toutes différences de traitements sur
l’origine ethnique d’une personne.

Ensuite, la Cour va aller plus loin : « la CEDH doit être comprise comme un tout, on y trouve une référence à la
démocratie et à l’état de droit ». Elle ajoute dans l’arrêt que « la démocratie suppose de jouer un rôle au peuple,
seules peuvent être investies des pouvoirs et de l’autorité de l’état, des institutions crées par et pour le peuple. Les
lois doivent être appliquées et interprétées par un pouvoir indépendant. Il n’y a pas de démocratie lorsque la
population d’un état, même majoritairement, renonce à ces pouvoirs législatif et judiciaire au profit d’une entité
qui n’est pas responsable devant le peuple qu’elle gouverne, que cette entité soit laïque ou religieuse ».

Pour le surplus, la CEDH contient un article 3 qui nous dit que les états membres du Conseil de l’état doivent
organiser, de manière régulière, des élections au suffrage universel libre et légal. La Cour européenne des droits
de l’homme et la CEDH laisse toute la liberté aux états de choisir le régime que ces peuples veulent se donner
(présidentiel, parlementaire, directorial, état décentralisé, état fédéral etc.). Dans un arrêt la Cour va très loin en
disant qu’ « un parti politique peut utiliser la liberté d’expression, de réunion et d’association pour contester
l’existence même de l’état » c’est-à-dire qu’un mouvement séparatiste qui préconise la scission de l’état a le droit
de défendre ce type d’idée, pour autant qu’il le fasse avec des moyens légaux.

CHAPITRE 2 : LES DIFFÉRENTES FORMES DE DÉMOCRATIE

92
SECTION 1 : LA DÉMOCRATIE DIRECTE

La démocratie directe nous la présentons comme combinée avec le régime représentatif qui est considéré
comme une démocratie semi – directe. Pourquoi ? Car la démocratie directe suppose l’exercice du pouvoir par
le peuple, réuni en assemblée sans organe intermédiaire ou exclusivement par la technique du référendum.
Comment combiner une démocratie directe avec un régime représentatif ? Plusieurs techniques :

- Initiative populaire : C’est la possibilité, pour une fraction du corps électoral, de contraindre les
représentants / les élus à délibérer et à prendre position sur tel ou tel sujet déterminé.

- Référendum : Cette fois, invitation est faites au corps électoral à décider lui-même sur telle ou telle
norme. Alors, tout dépend de l’initiative. Cette initiative peut émaner de l’autorité publique elle-
même et constituer soit une faculté (liberté de telle ou telle gouvernant) soit une obligation ou
émaner d’une fraction du corps électoral lui-même.

- Consultation populaire : Elle donne au peuple qu’un pouvoir d’avis.

SECTION 2 : LA DÉMOCRATIE REPRÉSENTATIVE

Deux types de questions


Est-ce que cette démocratie représentative est compatible avec les techniques de démocratie directe ? Oui.

Est-ce qu’il y a une sorte d’opposition de principe entre ces techniques de démocratie directe et la
démocratie représentative ?

Oui il y a une différence. Dans la démocratie représentative il n’y a pas de mandat impératif c’est-à-dire que les
élus sont libres de voter, ils ne sont jamais enchainés par des instructions qui leur seraient soumises par un
groupe politique.

Alors que dans le référendum, les élus sont emprisonnés. Il y a une opposition de principe ici, quand le peuple
tranche une question politique par référendum, il empêche tout écart entre la volonté des élus et des
électeurs. La volonté des électeurs s’imposent aux élus. Mais on ne doit pas radicaliser l’opposition entre ces
deux régimes, les deux se combinent car ce sont deux manières différentes d’approcher le même idéal de
l’autogouvernement par le peuple au peuple.

Pourquoi combiner ? C’est la démocratie représentative qui régit le recours à la démocratie directe. C’est à des
lois qui appartiennent de fixer les recours aux techniques de la démocratie directe. Avant le référendum, nous
avons tout un travail, de la part des représentants élus de la nation, pour dire dans quelle mesure nous allons
recourir à ces techniques de la démocratie directe. Dès le lendemain du référendum, les élus doivent gérer les
décisions des citoyens. Il est malsain d’interroger un corps électoral sans d’abord organiser une délibération au
sein même de l’assemblée des élus et puis la délibération s’étend à l’ensemble d’un corps électoral moyennant
une série de balises.

Ainsi la démocratie peut s’enrichir en recourant à des techniques de démocratie directe.

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Quatre traits essentiels par Minin
L’élection des gouvernants par les gouvernés pour fonder la légitimité des gouvernants dans la volonté des
gouvernés.

L’interdiction du mandat impératif. Le mandat impératif est l’instruction obligatoirement respectée par l’élu
quand cette instruction a été délivrée par un électeur ou un groupe d’électeurs.

Le respect des libertés publiques, il n’y a pas de démocratie sans droit de l’homme. Cela renvoie à l’idée qu’il y
a un écart entre les gouvernants et les gouvernés, les gouvernants ont une certaine liberté par rapport aux
attentes des gouvernés car il n’y a pas de mandat impératif mais de même, les gouvernés peuvent critiquer les
gouvernants. Il y a une majorité qui décide mais les citoyens sont autorisés à contester la décision de la
majorité.

Le principe de délibération est fondamental, est au cœur de l’idée de démocratie représentative. C’est la raison
pour laquelle il n’y a pas de mandat impératif, si les élus étaient obligés de voter conformément aux
instructions des électeurs, il n’y a plus de délibération puisque les positions sont arrêtées à l’avance.

SECTION 4 : LES MUTATIONS DE LA DÉMOCRATIE REPRÉSENTATIVE

La démocratie Dans la démocratie parlementaire classique, les 4 traits se présentent comme suit :
parlementaire
classique - Le profil des élus : Ce sont des notables en qui les électeurs ont confiance. Nous sommes dans l’idée de
l’habilitation, on habilite des personnes en qui les électeurs ont confiance.

- L’interdiction du mandat impératif est effectivement respectée, le député est libre de ses votes.

- Entre le parlement et l’opinion publique il y a un grand écart car les élections ont lieu au suffrage censitaire.

- Dans cette première phase de la démocratie parlementaire classique, les parlements sont de véritables lieu de
délibération. L’idée que la délibération est au cœur de la démocratie, cette idée est effectivement réalisée.

La démocratie Nous sommes au 20e siècle, les partis politiques se sont formés, solidifiés, nous sommes passés au suffrage universel.
de partis Voyons comment les 4 traits se présentent :

- Le profil des élus : Les élus sont des hommes de partis, unis aux élections par une commune appartenance à
un mode sociologique déterminé. Rappelons-nous la notion de démocratie consociative, il y a vraiment des
mondes sociologiques différents qui existent en Belgique. Toutes les grandes étapes ont été marquées par des
rites de passage, ce temps-là est fini. Mais donc, nous sommes catholiques par exemple donc nous allons
voter pour le parti social-chrétien.

- L’interdiction du mandat impératif est respectée. Mais dans les faits, il est évident que la discipline de partis
est telle que les députés ne votent pas en âme et conscience mais conformément aux instructions que le
leader du parti leur donne.

- Entre le parlement et de l’opinion publique, moins d’écart. Il y a une sorte de coïncidence entre les élus et les
électeurs, elle est forte car de fait les électeurs se sentent bien représentés au parti pour lequel ils votent.

- Le parlement n’est plus un lieu de délibération. Les délibérations les plus décisives se passent en dehors du
parlement, dans des instances qui réunissent les partis.

94
La démocratie Elle se développe à partir des années 1960, les 4 traits se présentent comme suit :
du public
- Le profil des élus : Ce sont moins des hommes de partis, ce sont à nouveau des personnes dans lesquelles les
électeurs ont confiance. Les problèmes politiques sont devenus complexes et il n’y a plus de parfaites
cohérences des mondes sociologiques. Aujourd’hui, l’électeur a tendance à se repositionner à chaque élection
alors que les programmes politiques sont vagues.

- Dans la mesure où les partis essaient de séduire leur public par des images, ils disposent d’une marge de
manœuvre dans la mise en œuvre des engagements qu’ils prennent à travers leur programme. En droit, le
mandat impératif est interdit mais dans les faits les partis disposent d’une plus grande marge de manœuvre
parce qu’ils sont moins engagés par leur programme.

- Entre l’opinion publique et le parlement, il y a nouveau non-coïncidence. Nous sommes dans un régime de
crise de la représentation car les problèmes sont complexes et les mondes sociologiques ont éclaté. Donc,
forcément, les électeurs ne se sentent pas systématiquement parfaitement représentés par le parti pour
lequel ils ont voté.

- Le lieu de la délibération reste latérale par rapport au parlement mais a tendance à se déplacer vers des
assemblées de citoyens tirés au sort, vers des enquêtes qui permettent au peuple d’exprimer leurs attentes
au-delà des canaux classiques que sont les élections.

CHAPITRE 3 : LA SÉPARATION DES POUVOIRS ET LES RÉGIMES POLITIQUES

SECTION 1 : LES TROIS GRANDES FONCTIONS DE L’ÉTAT ET LA SÉPARATION DES


POUVOIRS

Les trois fonctions de l’état

La fonction normative La fonction administrative La fonction


juridictionnelle

qui est la fonction qui Au sens formel strict : La fonction consiste à éditer des actes administratifs à portée La fonction qui
consiste à produire des individuelle et des contrats. Un acte administratif unilatéral est un acte juridique à consiste à juger
normes et à imposer des portée individuelle, donc le contraire d’une norme, qui produit des effets à l’égard c’est-à-dire à
règles générales et d’un seul individu ou envers des personnes déterminées ou déterminables. trancher des
personnelles, applicables litiges par
à l’ensemble des 2 hypothèses : application du
citoyens. droit.
L’autorité administrative se trouve dans une compétence liée, ça veut dire que la
norme supérieure détermine le contenu de l’acte administratif et s’il y a Quelle différence
La fonction législative :
contestation ce sont les cours et tribunaux qui s’en chargent car c’est un droit entre un acte
La fonction de faire des
subjectif. administratif à
lois au sens matériel
c’est-à- dire des lois qui portée
La règle de droit ne détermine pas entièrement le contenu de l’acte administratif. individuelle et un
sont des normes On dira que le gouvernement a un pouvoir d’appréciation discrétionnaire donc on
générales et abstraites acte juridictionnel

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mais aussi des lois au pourra introduire un recours pour obtenir l’annulation de la décision sur la base ? Un acte
sens formel, dont la d’un pouvoir d’appréciation discrétionnaire. juridictionnel
validité n’est c’est un acte qui
subordonnée qu’au Le juge du Conseil d’état qui décide d’annuler l’acte administratif, cet arrêt ne va applique la règle
respect de la pas se substituer à l’autorité administrative mais le Conseil d’état va annuler l’acte de droit à un cas
Constitution et aux lois qui refuse d’accorder l’avantage parce que la règle de droit qui devait être particulier et on
répartitrices de respectée par l’autorité administrative ne l’a pas été. peut dire de
compétences. même pour un
acte administratif.
La différence est
Au sens formel large: La fonction administrative inclue la fonction réglementaire.
qu’il y a un conflit
La fonction Par exemple le gouvernement exécute les volontés du pouvoir législatif, il applique à trancher et
réglementaire : Un les lois mais comment ? En adoptant des règlements puis, in fine, en portant des également que le
règlement se définit actes à portée individuelle. juge est au
aussi comme une norme service du droit et
générale et pas au service des
impersonnelle et sa particuliers en
particularité c’est que Au sens matériel : C’est la fonction gouvernementale qui consiste à assumer la général.
c’est une règle générale fonction administrative au sens formel large mais en plus on va s’intéresser au
et abstraite contenu. Le contenu c’est définir les objectifs politiques de la collectivité, les
subordonnée aux lois. moyens politiques etc.

Les séparations des pouvoirs


Le principe de la séparation des pouvoirs a été pratiqué au Royaume-Unis, déjà théorisé par John Locke puis
Montesquieu. La liberté passe par un aménagement de ces différentes fonctions – légiférer, administrer, juger
– tel que aucun pouvoir ne pourra monopoliser toutes ces fonctions entre ses mains sinon c’est une dictature.
Pourquoi? Tout pouvoir est naturellement enclin à abuser de son pouvoir.

Donc, le principe est fondamental. Mais il ne signifie pas qu’il faut entrer dans une séparation rigide des
pouvoirs donc qu’un seul organe exerce une seule fonction, on peut imaginer des choses plus subtiles.

Plusieurs remarques :

- Distinguons bien les choses, si on se met à la place du pouvoir constituant, que signifie le principe de
séparation des pouvoirs ? C’est un précepte politique parce qu’au-dessus du pouvoir constituant
originaire il n’y a rien sauf du droit trans-constitutionnel. En revanche, en ce qui concerne le pouvoir
judiciaire il y a un droit international de l’homme qui garantit l’indépendance du pouvoir judiciaire.
Mais en ce qui concerne l’exécutif et le législatif il y a une certaine liberté.

- Mais, auparavant, on doit présupposer que l’on a affaire à une Constitution, le pouvoir constituant a
eu à l’esprit d’aménager les relations entre les pouvoirs selon une séparation. Le principe de
séparation des pouvoirs a été effectivement bien dans la tête du constituant, ce qu’on voit au Titre III
dans la Constitution. Donc, à ce moment-là, nous sommes devant un principe général de droit à valeur
constitutionnelle. Mais qu’est-ce qu’il interdit ? Ce qu’il interdit c’est que l’autorité qui relève d’un
pouvoir ne peut pas substituer son appréciation à celle d’une autorité relevant d’un autre pouvoir si
cette autorité n’a fait qu’exercer un pouvoir discrétionnaire qui lui est attribué par la Constitution ou
par la loi. Autrement dit, le pouvoir judiciaire ne peut pas censurer le pouvoir d’appréciation
discrétionnaire qui revient à l’autorité administrative là où elle n’est pas dans une compétence liée.

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SECTION 2 : LES RÉGIMES POLITIQUES

Le régime doctrinal Le régime présidentiel Le régime parlementaire

Ce régime porte un nom qui fait L’exemple type est les États-Unis La 5e république française connait un régime de semi-
référence à un moment non- : présidentiel, c’est un régime parlementaire mais avec un
négligeable, la Suisse est correctif présidentiel. Pourquoi est-ce un régime
pratiquement le seul exemple 1. Qui désigne les membres de parlementaire ? Car il répond aux conditions présentées
de ce principe. C’est un régime l’exécutif ? Le président de après. La caractéristique de ce régime correctif présidentiel,
qui, au départ, est tenté par l’exécutif est élu par le c’est que le président est une personne élue au suffrage
une sorte de confusion des peuple. Ce qui est frappant universel qui possède des attributions bien plus étendues des
pouvoirs au profit des deux c’est que cette élection au présidents que l’on connait dans les régimes parlementaires.
Chambres. suffrage universel du
président procure, à ce
L’article 148 de la Constitution président, une légitimité
fédérale de la Confédération égale à celle du Congrès.
suisse : « L'Assemblée fédérale
est l'autorité suprême de la 2. L’exécutif peut-il être
Confédération, sous réserve des contraint à la démission ?
L’exécutif est monocéphale, Sa genèse en Grande-Bretagne
droits du peuple et des cantons.
Elle se compose de deux incarné dans la personne de
Au départ, nous avons une monarchie et un monarque qui
Chambres, le Conseil national et son président et c’est lui qui
dispose d’un pouvoir absolu. A un moment donné, l’idée
le Conseil des Etats, dotées des nomme ses secrétaires
démocratique monte en puissance et c’est au cours du 17e
mêmes compétences ». Ca veut d’états et peut les révoquer.
siècle que les gens commencent à en avoir marre des abus du
dire que l’autorité fédérale Ces secrétaires d’états ne
Roi. Le problème c’est qu’on ne peut pas s’en prendre au Roi
concentre tous les pouvoirs sont responsables que
et la seule façon de s’en prendre au Roi c’est à travers ses
entre ses mains ? L’article 148 devant leur président, ils
ministres. La responsabilité des ministres était seulement
ne signifie pas cela mais il s’agit n’ont pas de compte à
d’ordre pénal – la procédure d’impeachment.
de montrer qu’il y a une sorte rendre devant le Congrès
de primauté pour l’assemblée donc le Congrès ne peut pas La glorieuse révolution de 1689 va être à la source du régime
fédérale. provoquer la démission du parlementaire. L’idée est que le Roi ne peut mal faire mais on
gouvernement. peut s’en prendre à ses ministres, on peut provoquer la
- Qui désigne les membres démission d’un ministre qui est la responsabilité politique.
de l’exécutif ? L’exécutif est 3. L’exécutif peut-il dissoudre le
Donc, le Roi nomme un gouvernement et ce gouvernement
élu par le pouvoir législatif. législatif ? Non.
est issu du parti majoritaire à la Chambre des communes et
En Suisse, on a l’assemblée ce gouvernement devient moteur de l’action politique. Le
fédérale qui élit le Conseil 4. L’exécutif a-t-il le pouvoir de
l’initiative législative ? Non, pouvoir du Roi devient un pouvoir symbolique, le réel
fédéral. pouvoir est détenu par le gouvernement nommé par le Roi.
même le président n’a pas le
- L’exécutif peut-il être pouvoir formel de déposer
contraint à la démission ? un projet de loi déposé à la
Non, l’exécutif est Chambre et au Sénat. Il doit
irrévocable, il est élu pour passer par un membre de
4 ans. Ceci lui donne une son parti.
force très grande en
réalité, cet exécutif est 5. Quel type de séparation des
soumis à l’autorité pouvoirs finalement ? C’est
suprême mais une séparation stricte des

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apparemment il est dans pouvoirs au départ mais
une relation de soumission. pondéré par des éléments Ses caractéristiques
Du fait, qu’il est importants. Éléments qui
irrévocable, il ne peut pas assouplissent la séparation Qui désigne les membres de l’exécutif ? L’exécutif est nommé
utiliser un moyen de stricte des pouvoirs : par le chef de l’état peu importe qu’il soit un Roi désigné par
pression comme dans le les lois de l’hérédité ou élu (président), qui n’a qu’un pouvoir
régime parlementaire : la - On peut parler du véto symbolique.
menace de démission. En suspensif dont le président
dispose à l’égard des lois. L’exécutif peut-il être contraint à la démission ? Oui,
Suisse, ceci ne peut pas
Donc, il faut savoir que le l’exécutif est bicéphale car il y a le Roi / le chef d’état et ses
marcher. Quand l’exécutif
président peut opposer son ministres. Donc, l’exécutif est révocable dans sa branche
n’est pas d’accord il doit se
véto aux lois votées par le gouvernementale, les ministres peuvent être contraint à la
plier à la volonté du Conseil
Congrès, ça veut dire que démission ce qui est au cœur du régime parlementaire.
fédéral.
dans l’immédiat le texte
L’exécutif peut-il dissoudre le législatif ? Oui, c’est un moyen
- L’exécutif peut-il dissoudre n’est pas adopté mais le
de défense : « si tu me renverses je te dissous ».
le législatif ? Non. Congrès peut persévérer.
Mais pour passer outre le L’exécutif a-t-il le pouvoir de l’initiative législative ? Oui, nous
- L’exécutif a-t-il le pouvoir véto du président, le Congrès avons des propositions de loi déposées par les députés et
de l’initiative législative ? doit revoter le même texte à sénateurs puis des projets de loi déposés par le
Oui, ceci donne à l’exécutif une majorité des 2/3. gouvernement.
un pouvoir considérable
car le gouvernement est - Nomination des hauts Quel type de séparation des pouvoirs finalement ? C’est une
bien équipé et est fonctionnaires fédéraux au séparation souple car le Roi c’est le chef en titre du pouvoir
compétent. service du président. Cette exécutif mais c’est aussi une branche du pouvoir législatif.
nomination est conditionnée
1. Quel type de par l’approbation du Sénat
séparation des donc le Sénat s’immisce dans
pouvoirs finalement ? la fonction administrative.
C’est un régime de
concentration des - La Chambre et le Sénat
pouvoirs dans les peuvent organiser une Son évolution : du régime parlementaire dualiste au régime
mains du Conseil commission d’enquête. Donc parlementaire moniste
fédéral mais c’est tout c’est un pouvoir qui peut
de même un régime de donner, au Congrès, des Au 19e siècle, il y a deux pouvoirs distincts : le pouvoir
séparation. moyens de s’intéresser de exécutif dont le chef est un Roi et le pouvoir législatif. Au 20e
près de la façon dont le siècle, le régime parlementaire devient un régime moniste
Il faut, maintenant, ajouter des pouvoir exécutif est assumé. parce que la dualité juridique entre le pouvoir législatif et
caractéristiques par rapport à la exécutif cache de moins en moins une unicité du pouvoir qui
démocratie consociative : Le - Procédure d’impeachment est incarné par la majorité, c’est le fait majoritaire.
gouvernement est composé en qui permet à la Chambre, à la
manière telle que les principaux majorité absolue, de décider Dès lors que les partis politiques montent en puissance, dès
partis sont dans le Conseil de mettre le président lui- lors que l’on attend de plus en plus du pouvoir exécutif une
fédéral. Donc on compose le même en accusation pour série de missions, pour que le gouvernement soit capable de
Conseil fédéral Suisse à la des crimes graves, devant le concevoir et d’appliquer des politiques publiques, il doit
proportionnelle, on veille à ce Sénat qui se transforme en disposer d’administration et doit être cohérent. Cela
que les grands pouvoirs haute Cour de justice qui se demande un gouvernement soutenu de manière constante
politiques puissent être au prononce à la majorité des par une majorité suffisamment cohérente voire disciplinée.
pouvoir. Il recourt également 2/3.
au référendum. Qu’est-ce qui se passe dans un régime parlementaire
ordinaire ? Un gouvernement a été formé, il est construit à
partir d’un accord politique conclu par plusieurs partis
politiques qui se mettent d’accord sur un programme et qui,
ensemble, totalisent une majorité de sièges à la Chambre.
Dès lors que ce gouvernement s’est formé, nous avons une
majorité qui domine le législatif et l’exécutif d’où « régime
parlementaire moniste ». Aussi longtemps que cette majorité
s’entend et qu’elle reste unie, le gouvernement peut déposer
tous les projets de loi qu’il veut.

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Donc, les gouvernements ne démissionnent pas à la suite
d’une motion de méfiance. Ce qui se passe, c’est que les
gouvernements sont parfois amenés à démissionner non pas
à la suite d’une motion de méfiance mais à la suite d’un
phénomène d’implosion. Autrement dit, c’est parce qu’ils
sont en désaccords et qu’un parti claque la porte, ce qui se
passe c’est que le premier ministre évoque lui-même sa
démission.

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