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ALVTICL IES
NOUS!
Variante du manifeste.
Nous nous appelons les Minoks pour nous
diférencier des « cinéastes », Lroupeau de chif-
fonniers qui fourguent assez bien leurs vieilleries.
Nous ne voyons aucun rapport entre la four-
herie et les caleuls des mercantis et le véritable
«kinokisme »,
Le ciné-drame psychologique russo-allemand
alourdi par les visions cl souvenirs d’enfance
est A nos yeux une ineplic.
Au film daventures américain, ce film plein
de dynamisme speclaculaire, aux mises en scéne
americaines a la Pinkerton, le kinok dit merci
pour la vilesse de passage des images, pour les
gros plans. C’est bon, mais désordonné, pas
fondé sur une étude précise du mouvement,
Un degré au-dessus du drame psychologique,
cela manque malgré Loul de fondement. Poncif.
Copie dune copie.
Note 1: Le texte qui suit est la traduction intégrale de
Védition russe : Dziga Vertov, «Stati, Dniévniki, Zamysly »,
publiée aux ISditions Isskoustvo A Moscou en 1966, sous la
direction de Serguéi Drobachenko.
15
}
!
|
|NOUS deéclarons que les vieux films romancés,
Uhéatralisés ct autres ont la lépre.
-— N’approchez pas d’eux !
Ne les touchez pas des yeux |
eo eeutle de itt!
Contagicus |
NOUS allirmons que Vayenir de Part cinéma-
lographique est la negation de son present.
La mort de la « cinématographie » est indis-
pensable pour que vive Hart cinématographique.
NOUS appelons @ accélérer sa mort.
Nous protestons contre le mélange des arts
que beaucoup qualifient de synthese. Le mélange
de manvaises couleurs, meme idéalement choisies
dans les teintes duo spectre, ne donnera jamais
du blane, mais de la salete,
On arrivera A la synthése au zénith des
reussiles de chaque ark et non avant.
NOUS épurons le cinéma des kinoks des
intrus : musique, littérature el theatre, nous
cherchons notre rythme propre qui waura été
vol nulle part cl nous le trouvons dans les
mouvements des choses.
NOUS appelons :
—- a fuir —
les doucereux enlaeements de Ja romance,
le poison du roman psychologique
Pétreinte du théatre de Vamant
A tourner Je dos a Ja musique
—- a fuir —
gagnons Je vaste champ, lespace aux quatre
dimensions (3. -- le temps), en quéte d'un
matérian, d'un métre et dun rythme pien a
nous.
Le « psychologique » empéche Phomme d'etre
aussi. précis qu'un chronometre, entrave son
aspiration 4 s’apparenter a la machine,
| Nous mavons aucune raison d’accorder dans
16:
|
|
Vart du mouvement I’essentiel de notre attention
4 homme daujourd’ hui.
Liincapacité des hommes a savoir se tenir
nous fait honte devant les machines, mais que
voulez-vous quwon y fasse, si les manieres infail-
libles de Vélectricité nous touchent davantage
que la housculade désordonnée des hommes
actifs cl Ja mollesse corruptrice des hommes
passifs
La joie que nous procurent les danses des
scies de la scierie est plus compréhensible et,
plus proche que celle que nous donnent les
uinches des hommes.
NOUS ne voulons: plus lemporairement filmer
Vhomme parce qivil ne sail pas diriger ses
mouvements.
Nous allons, par la poésie de la machine, du
ciloyen trainard a Uhomime électrique parfait.
En mettant a jour lame de la machine, en
rendant louvrier amourenx de son établi, la
paysanne de son tracteur, le machiniste de sa
locomotive,
nouns introduisons la joie crealrice dans chaque
travail mécanique,
nous apparentons Jes hommes aux machines,
nous éduquons des hommes nouveaux.
L’homme nouveau, alfranchi de la gaucherie
et de Ja maladresse, qui aura les mouvements
précis ct légers de la machine, sera le noble
sujet des films.
NOUS marchons, face dévoilée, vers la
reconi ance du rythme de la machine, de
lémerveillement du travail mécanique, vers la
perception de la heanté des processus chimiques,
nous chantons les tremblements de terre, nous
composons des ciné-pocmes avec les flammes
ct les centrales électriques, nous admirons les
mouvements des coméles el des météores, et
AZles gesles des projecteurs qui éblouissent les
éloiles.
Tous ceux qui aiment Jeur art cherchent
lessence profonde de leur technique.
La cinématographie qui a les nerfs en pelote
i teme rigourenx de mouvement
précis.
Le aetre, le ry thie, la nature du mouvement,
sa disposition precise par rapport aux axes des
coordonnées de limage, ct peut-clre, des axes
mondiaux des coordounées (trois dimensions
{ la quatriéme, le temps) doivent étre inven-
loriés et éLudiés par Lous les créateurs du cinéma.
Yécessilé, précision el vitesse: Lrois impé-
ralifs que nous posons au mouvement digne
elre filme et projele.
Etre un extrait, géomeétriqne due mouvement
au moyen de Pallernanee captivante des images,
voila ce quon demande au montage.
Le kinokisme est Cart @organiser les mou-
pements nécessaires
des choses dans Uespace,
grace a@ Culilisation d'un ensemble artistique
rythmique conforme aux propriélés dit materiau
ef au rythme intérieur de chaque chose.
Les intervalles (passayes (tn mouvement a
un autre), el nullement les mouvements eux-
memes, constituent le matériau (éléments de
Vart duo mouvement). sont cux (les inter-
valles) qui entrainent Paction vers le dénoue-
ment cinélique. Leorganisation du mouvement,
c'est organisation de ses éléments, c’est-a-dire
des intervalles, dans la phri On distingue
dans chaque phrase la montée, le point culmi-
nant ct Ja chute du mouvement (qui se mani-
festent a Lel ou tel degré). Une ceuvre est
faile de phrases de méme qu'une phrase T’est
dintervalles du mouvement.
Ayant congu un ciné-poéme ou un fragment,
18le kinok doit savoir le noter avec précision,
afin de lui donner vie sur l’écran lorsque des
- conditions techniques favorables se présenteront.
Evidemment le seénario le plus parfait ne
templacera pas ces notes, de méme que le livret
ne remplace pas la pantomime, de méme que
les commentaires lilléraires sur les quvres de
Scriabine ne donnent aucune idée de sa musique.
Alin de pouvoir représenter une étude dyna-
mique sur une feuille de papier, il faut posséder
les signes graphiques duo mouvement,
:
NOUS sonunes en quéle de la ciné-gamme.
NOUS tombons, nous nous relevons avec le
tythme des mouvements,
ralenlis cl accélérés,
courant Join de nous, pres de nous, sur nous,
en cerele, en droite, en ellipse,
a droite cl a gauche, avec les signes plus et
moins,
t les mouvements se courbent, se redressent,
I se parlagent,
| se fractionnent, se mulliplienl par ceux-mémes,
en transpergant silencieusement l’espace.
Le cinéma est également lart d'imaginer les
mouvements des choses dans Uespace, répondant
aux imperatifs de la science, il est incarnation
du réve de Vinventeur qu'il soit savant, artiste,
ingénicur ou charpentier ; il permet de réaliser
grace au kinokisme ce qui est irréalisable dans
Ja vie.
Dessins en mouvement. Croquis en mou-
vement. Projets davenir immeédiat. Théorie
de la relativilé a écran.
NOUS saluons le fantastique régulier des
mouvements. Portés par les ailes des hypo-
théses, nos yeux mus par des hélices se dis-
persent dans lavenir,
NOUS croyons que le moment est proche ot
19
—nous pourrons lancer dans lespace les ouragans
de mouyvements retenus par les lassos de notre
taclique,
Vive la géomelrie dynamique, les courses
points, de lignes, de surfaces, de. volume
Vive da poesie de ta machine mue el se
mouvanl, da poésie des leviers, roucs et ailes
(acier, le cri de fer des mouvements, les aveu-
dlantes grimaces des jets ineandescents.
de
(Publié dans la revue Winophet wet de Vy Premier
programme public dans la presse par le groupe des Kinoks-
documentaristes, fondé par Verloy en 1919.
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