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Ecole Militaire polytechnique Chapitre 5

Chapitre 5

Les files d’attente

5.1 Etude descriptive des systèmes d’attente

Les files d’attente sont des phénomènes qu’on observe fréquemment dans notre activité
quotidienne: dans le domaine économique, administratif, dans des procédés technologiques
etc. Ces phénomènes de congestion ont toujours leur source dans des fluctuations du système:
c’est parce que pendant certaines périodes la demande de service excède l’offre (la capacité
de service) que des files d’attente se créent.
Les caractéristiques d’un phénomène d’attente sont en général constituées par :

¾ Des arrivées d’unités à des intervalles de temps réguliers ou irréguliers dans un système
dont la structure sera précisée plus loin ; par exemple arrivées de bateaux dans un port.
L’origine de ces unités est appelée source.

¾ Le système comprend un centre d’attente et un centre de service. Ce dernier est constitué


par une ou plusieurs stations. Chaque unité doit passer dans une (ou plusieurs) station pour
y recevoir un certain service. La durée de service est en général aléatoire de sorte que les
unités peuvent avoir à attendre avant qu’une station soit disponible. Elles séjournent alors
dans le centre d’attente en constituant une file d’attente. On suppose que le passage du
centre d’attente au centre de service est instantané.
Pour fixer les idées nous considérons les exemples suivants :

Unités Service Stations


Bateaux Déchargement quais
Avions Atterrissage Pistes
Appels téléphoniques Conversation Central téléphonique
fichiers impression imprimante
Machines à réparer Réparation Atelier de réparation
Véhicules péage Poste de péage
Demande de traitement Traitement Processeur
Arrivées de voyageurs Contrôle de douane Douaniers

λ µ

Source
Centre d’attente
Centre de service
Système d’attente

Pour qu’une file d’attente apparaisse il suffit que les entées et / ou les sorties se produisent à
des intervalles irréguliers. Cette file peut encore se produire pour des intervalles constants des
entées et des temps de service si la durée de service est plus élevée que l’intervalle de temps
qui séparent les arrivées; alors la file d’attente augmente régulièrement et indéfiniment.

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L’étude d’un phénomène d’attente porte sur la qualité et le rendement du service fourni par le
système qui sera caractérisé par la description de la file d’attente (longueur, temps d’attente)
et l’activité du centre de service (durée d’oisiveté). Il s’agit donc souvent de trouver un
compromis entre l’attente des clients et l’attente des serveurs.
L’étude des phénomènes d’attente intervient surtout dans l’analyse et l’évaluation technico-
économique des projets et a pour but, en général, soit de déterminer le nombre optimal de
stations de service, soit de déterminer la structure du système à mettre en place compte tenu
d’un certain critère.

Exemples

1) Déterminer le nombre de lignes téléphoniques à prévoir de manière à ce que l’attente


pour obtenir une communication ne soit pas trop grande sans effectuer
d’investissement inutiles (lignes trop souvent inutilisées).

2) Combien faut-il construire de pistes dans un aérodrome de manière à ce que le temps


d’attente à l’atterrissage et au décollage ne soit pas excessif, convient-il de donner la
priorité à certains types d’appareils.

3) Combien faut-il prévoir de caisse dans un supermarché, convient-il de faire une caisse
devant chaque rayon ou tous les comptoirs à la sortie.

4) Dans une usine, un certain nombre de machines sont susceptibles de tomber en panne.
Combien de réparateurs doit-il y avoir pour que le fonctionnement de l’usine ne soit
pas perturbé, compte tenu du fait que chaque réparateur reçoit un salaire même quand
toutes les machines fonctionnent. Si certaines machines sont plus importantes que
d’autres pour le fonctionnement de l’usine convient-il de leur donner une priorité
dans leur traitement.

5.2 Caractéristiques des systèmes d’attente

La plus part des files d’attente qu’on rencontre peuvent être caractérisés par une séquence
de six symboles notés (a/ b/ c) (d/ e/ f), appelée notation de Kendall. Cette notation a été
adoptée par la conférence internationale sur la standardisation des notations dans la
théorie des files d’attente en 1971.
Ces symboles désignent respectivement:
9 Le processus d’arrivée
9 Le processus de service
9 Le nombre de serveurs (stations)
9 La borne supérieure du nombre d’unité dans le système
9 Le nombre d’unités dans la source
9 La discipline de la file
Ces différents paramètres seront explicités dans ce qui suit :

a) Le processus d’arrivées: On admet le plus souvent que les clients arrivent indépendamment
les uns des autres c’est-à-dire que les intervalles de temps séparant les arrivées de deux
unités successives sont des VA indépendantes ayant même loi. Les lois suivantes sont les
plus communes

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1) Arrivées régulières
Les unités arrivent à intervalles réguliers de longueurs 1 . Ce cas se rencontre dans la
λ
pratique dans une chaîne de montage, par exemple, où les pièces se présentent devant les
ouvriers toutes les τ secondes. Ce processus d’arrivées est représenté symboliquement par
la lettre D (déterministe).

2) Arrivées poissoniennes
C’est le cas où les instants d’arrivées forment un processus de Poisson ce processus est dit
complètement aléatoire car la probabilité pour qu’une arrivée se produise dans un
intervalle de temps (t,t+dt) est indépendante de t c’est-à-dire du temps qui s’est écoulé
depuis l’arrivée précédente. Ce processus d’arrivées est représenté symboliquement par la
lettre M (Markovien).

3) Arrivée selon une loi d’erlang d’ordre k

Il s’agit d’un processus d’arrivées qui peut se dériver du processus de Poisson de la façon
suivante : des unités fictives arrivent suivant un processus de Poisson et on ne retient
comme unités réelle que celles dont le rang d’arrivée est k , 2k , 3k , ……(une VA
d’erlang d’ordre k est la somme de k VA indépendantes de même loi exponentielle) . Ce
processus est représenté par la lettre Ek

4) Arrivée selon une loi générale

Si la distribution observée de l’intervalle de temps séparant deux arrivées successives ne


peut être ajustée à aucune loi précédente, on dit qu’on a une loi générale ce processus est
représenté par les lettres GI

b) Loi de la durée de service

On fait le plus souvent l’hypothèse que les durées de service d’un même serveur sont des
VA équidistribuées. On peut avoir :

1) Service régulier

Tous les services ont la même durée (si le serveur est une machine : une presse dans un
atelier par exemple). Cette loi est représentée par la lettre D

2) Service exponentiel

Les durées de services suivent une loi exponentielle .elle est représentée par la lettre M

3) Loi d’Erlang d’ordre k


Si le service consiste en la succession d’opérations élémentaires dont les durées sont
indépendantes et suivent une loi exponentielle, la durée totale de service suit une loi
d’Erlang d’ordre k. Les lois d’Erlang d’ordre k sont en fait utilisées dans un grand nombre
de situations réelles où les conditions ci-dessus ne sont pas remplies car elles peuvent être
ajustées de manière satisfaisantes à une large classe de distributions observées. Cette loi
est représentée par la lettre Ek

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4) Loi générale représentée par la lettre G.

c) Nombre de stations de service

Ce paramètre caractérise le nombre de stations en parallèle. On les suppose en général


identiques et représentées par la lettre S. Chaque serveur aura la même loi de service,
indépendante des arrivées des unités. De plus toutes les stations sont supposées
indépendantes entre elles.

d) La capacité du système

C’est-à-dire le nombre de stations plus la longueur maximum de la file d’attente permise


par le système. Ce paramètre sera noté N

e) Capacité de la source

Fréquemment, les unités arrivant dans le système sont en nombre illimité (nombre de
clients potentiels infini). Dans ce cas, le nombre de clients dans le système n’a aucune
influence sur le processus d’arrivée de nouveaux clients. Par exemple le cas d’une station
de service au bord d’une autoroute servant des clients de passage. Dans un tel cas, le
système étudié est dit ouvert. Il est alimenté par une source disposant d’un nombre infini
d’unités. Par contre dans un magasin de gros ayant un petit nombre de clients régulier, les
unités sortant du système retournent dans la source où elles séjournent pendant une durée
aléatoire et reviennent ensuite dans le système. Le nombre total dans le phénomène est
fini et constant. Dans ce cas le taux d’arrivées dépend du nombre d’unités dans le
système. Un tel système est dit fermé. C’est le cas des machines tombant en panne dans
l’exemple 5 ci-dessus.

f) La discipline de la file

Les plus courantes sont : FIFO (premier arrivé, premier servi et LIFO (dernier arrivé
premier servi). D’autre part des règles de priorité peuvent exister. Les unités peuvent
appartenir à des classes différentes où une unité de classe i ayant priorité sur une unité de
classe j. On distingue, la priorité relative pour laquelle l’arrivée d’une unité prioritaire
n’interrompt pas le service en cours et la priorité absolue, pour laquelle le service en cours
est interrompu.
Dans un système de files d’attente pour lequel les durées de service sont indépendantes,
on peut démontrer le résultat suivant : quelle que soit la discipline d’attente (à l’exclusion
de la priorité absolu), le temps total passé dans le système par l’ensemble des clients est le
même. La règle « premier arrivé premier servi » correspond à un critère d’équité dans le
sens où cette règle minimise la variance des durées de séjour.

En général, seuls les trois premiers paramètres sont utilisés. Dans ce cas la capacité du
système ainsi que la source sont supposées infinies et la discipline FIFO.
Ainsi (M/ M/ 1) ( ∞ /∞ / FIFO ) désigne une file d’attente où le processus d’arrivée est
poissonien, les durées de service suivent une loi exponentielle, il y a un seul serveur, il
n’y a pas de limite au nombre de clients dans le système, pas de corrélation entre le
nombre de clients dans le système et le processus d’arrivée ; enfin, la discipline de service

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est premier arrivée premier servi. Dans ce cas, on se contente des trois premiers, et cette
même file d’attente sera désignée (M/ M/ 1).

5.3) Notations et résultats généraux

Dans un phénomène d’attente, l’état du système est caractérisé par le nombre n d’unités
dans le système. Parmi les grandeurs caractéristiques que l’on peut rencontrer, citons
pour le cas des phénomènes stationnaires en régime permanent :

Pn = probabilité qu’il y ait n unités dans le système

N
LS= ∑np
n=0
n , nombre moyen d’unités dans le système

N
LQ = ∑(n− S)p
n = S +1
n , nombre moyen d’unités dans le centre d’attente (file)

S −1 S −1
LC = ∑np
n =0
n +S(1 - ∑p
n =0
n ), nombre moyen d’unités dans le centre de service

( nombre moyen de stations occupées)

S −1
Ψ= ∑(S −n)p
n =0
n , nombre moyen de stations inoccupées


WS = ∫ wS dF(wS ) , temps moyen d’attente dans le système
0


WQ = ∫ wQ dG(wQ ) , temps moyen d’attente dans le centre d’attente (file)
0
Où F(w) et G(w) sont les fonctions de répartition de la durée de séjour dans le service
et dans le centre d’attente respectivement.

λ = le taux moyen d’arrivées

µ = nombre moyen d’unités servies par unité de temps et par serveur occupé
ρ = λ = intensité du trafic (fraction du temps pendant laquelle le service est
µ
occupé).
Ces diverses grandeurs sont liées par des relations pouvant dépendre de la nature du
phénomène. Toutefois, il y a des relations très générales et évidentes qui peuvent être
établies. En effet à chaque instant t, on a :
LC(t) +ψ (t) = S (1)
LQ (t)+ LC(t) = n (2)
De plus, pour chaque client ;
WQ + V = WS (3)
Où V est la durée de service

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En prenant l’espérance mathématique des trois relations précédente, on obtient en


régime permanent :
LC +ψ = S ; (4)
LQ + LC = LS ; (5)
1
WQ + = WS (6)
µ
Il y a lieu de rappeler, à propos des relations entre les moyennes, que l’espérance d’une
somme de VA est la somme des espérances même quand ces VA ne sont pas
indépendantes.
A ces relations, on peut en ajouter d’autres. En particulier, on a, en régime permanent :

Flux moyen d’entrée = flux moyen de sortie (équation des débits) (7)

Ce caractère conservatif des flux moyens permet d’établir des relations importantes entre
les grandeurs caractéristiques du système. En particulier lorsque les entrées sont
indépendantes des sorties, on a :

LS = λ WS (8)

LQ = λ WQ (9)
Ces formules sont appelées formule de LITTLE.
La justification de ces deux formules est basée sur les deux remarques suivantes:
a) En régime permanent, le taux moyen de sortie = le taux moyen d’entrée = λ
b) Lorsqu’une unité arrive, elle trouve LS unités dans le système. Donc, le temps
moyen qu’elle passera dans le système est la somme de LS intervalles, chacun de
longueur moyenne 1 . D’où, WS = LS × 1 .
λ λ
Le même raisonnement vaut pour la relation (9).
Les trois relations (6), (8) et (9) permettent de calculer les quatre mesures de
performance du système : LS, LQ, WS et WQ si l’une d’elles est connue.
Par exemple si WS est connu, on a :
LS = λ WS ; WQ = WS - 1 et LQ = λ WQ.
µ
En multipliant par λ les deux membres de la relation WQ = WS - 1 , on obtient :
µ
LQ= LS - ρ (10)
Les relations précédentes ne sont pas valables dans le cas particulier où la capacité du
système est limitée (certaines arrivées sont rejetées). Dans ce cas, on définit
λeff = taux d’arrivées des unités qui rejoignent effectivement le système, et on
obtient :
λeff
LQ = LS - (11)
µ
Soit :
λeff = µ( LS-LQ) (12)
Et

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LS
WS = (13)
λeff
LQ
WQ = (14)
λeff

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