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Kinésithérapie respiratoire

Chez le même éditeur

Comprendre la kinésithérapie respiratoire. Du diagnostic au projet thérapeutique, par M. Antonello et D. Delplanque. 2009,
3e édition, 384 pages.
La réhabilitation du malade respiratoire chronique, par C. Préfaut et G. Ninot. 2009, 528 pages.
Référentiels en kinésithérapie respiratoire. Proposition d’un référentiel métier et compétences et d’un référentiel formation en
kinésithérapie- thérapie respiratoire, par le GTRTR (Groupe de Travail pour un Référentiel en Thérapie Respiratoire), 2012, 137 pages.
Kinésithérapie respiratoire
Sous la direction de

Gregory Reychler
Docteur en kinésithérapie,
Service de pneumologie et Service de médecine physique,
Université catholique de Louvain,
Cliniques universitaires Saint-Luc, Bruxelles

Jean Roeseler
Docteur en kinésithérapie,
Service des soins intensifs et urgences, et Service de médecine physique,
Université catholique de Louvain,
Cliniques universitaires Saint-Luc, Bruxelles

Pierre Delguste
Docteur en kinésithérapie,
Service de pneumologie et Service de médecine physique,
Université catholique de Louvain,
Cliniques universitaires Saint-Luc, Bruxelles

3e édition
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DANGER dans le domaine universitaire, le développement massif du « photo-copillage ». Cette pratique qui s'est généralisée,
notamment dans les établissements d'enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point que
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ISBN : 978-2-294-74038-1
ISBN e-book 978-2-294-74177-7

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www.elsevier-masson.fr
Auteurs

Abdellaoui Aldjia, Docteur en kinésithérapie, Clinique du Contal Olivier, Licencié en kinésithérapie PhD, Haute École
Souffle La Vallonie, groupe Fontalvie, 800, avenue Joseph- de santé (Vaud), 21, avenue de Beaumont, CH 1011 Lau-
Vallot, 34700 Lodève, France sanne, Suisse
Adam Jean-François, Service des soins intensifs, Clinique Coppens Thibault, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10,
Notre-Dame de Grâce, 212, chaussée de Nivelles, 6041 avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Gosselies, Belgique de Biourge Ingrid, Licenciée en kinésithérapie, Service de
Adler Dan, Médecin adjoint agrégé, Hôpitaux universitaires médecine physique, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10,
de Genève, service de pneumologie, 24, rue Michel-du- avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Crést, CH-1211 Genève, Suisse Debouche Sophie, Licenciée en kinésithérapie, Service de
médecine physique, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10,
Aubriot Anne-Sophie, kinésithérapeute, Centre de référence
avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
pour la mucoviscidose, Service de médecine ­physique,
Université catholique de Louvain, Cliniques universitaires Delguste Pierre, Docteur en kinésithérapie, Service de
Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique pneumologie et Service de médecine physique, Cliniques
universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200
Beaumont Marc, kinésithérapeute, Service de réhabilita- Bruxelles, Belgique
tion respiratoire, centre hospitalier des Pays-de-Morlaix, Denef Jean-François, MD, PhD, Unité de morphologie
BP 97237, 29672 Morlaix cedex, France expérimentale, Université catholique de Louvain, 52/5251
Bialais Émilie, Licenciée en kinésithérapie, Service de soins avenue E.-Mounier, 1200 Bruxelles, Belgique
intensifs et de médecine physique, Cliniques universitaires Desuter Gauthier, MD, PhD, Service d'ORL, Cliniques
Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200
Bodart Eddy, Médecin pneumopédiatre et urgentiste pédia- Bruxelles, Belgique
trique, Service de pédiatrie, CHU/Université catholique de Detaille Thierry, MD, Unité de soins intensifs pédiatriques,
Louvain Mont-Godinne – Dinant, 1, avenue Docteur G. cliniques universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate,
Thérasse, 5530 Yvoir, Belgique 1200 Bruxelles, Belgique
Bulpa Pierre, MD, CHU/Université catholique de Louvain Dethy Caroline, Licenciée en kinésithérapie, Service chirur-
Mont-Godinne – Dinant, 1, avenue Docteur G. Thérasse, gie thoracique et vasculaire et Service de médecine phy-
5530 Yvoir, Belgique sique, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippo-
Cabillic Michel, kinésithérapeute, IFMK Rennes crate, 1200 Bruxelles, Belgique
(IFPEK), 12, rue Jean-Louis Bertrand, 35000 Rennes et Devroey Marianne, Licenciée en kinésithérapie, Service
IFMK Nantes (IFM3R) 54, rue de la Baugerie, 44220 des soins intensifs, Hôpital académique Erasme, 808,
­St-Sébastien-sur-Loire, France route de Lennik, 1070 Bruxelles, Belgique
Caty Gilles, MD, PhD, Service de pneumologie, cliniques Dousse Nicolas, Licencié en kinésithérapie, Équipe des
universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 soins respiratoires, hôpitaux universitaires de Genève, 4,
Bruxelles, Belgique rue Gabrielle Perret-Gentil, CH-1211 Genève 14, Suisse
Colbrant Coralie, Licenciée en kinésithérapie, Service de Dubus Jean-Christophe, MD, PhD, Unité de pneumolo-
pneumologie, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10, ave- gie et médecine infantile, CRCM pédiatrique et CNRS
nue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique URMITE 6236, CHU Timone-Enfants, Marseille, France

V
Auteurs

Dugernier Jonathan, Licencié en kinésithérapie, Service Luts Alain, MD, Clinique des troubles anxieux, Cliniques
des soins intensifs, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10, universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200
avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique Bruxelles, Belgique
Duplaquet Fabrice, MD, CHU/Université catholique de Many Marie-Christine, PhD, Unité de morphologie expé-
Louvain Mont-Godinne – Dinant, 1, avenue Docteur G. rimentale, Université catholique de Louvain, 52/5251 ave-
Thérasse, 5530 Yvoir, Belgique nue E.-Mounier, 1200 Bruxelles, Belgique
Duprez Frédéric, Kinésithérapeute M.A., Laboratoire de Marchand Éric, MD, PhD, Service de pneumologie, CHU/
l'effort et du mouvement Condorcet Tournai, Service Université catholique de Louvain Mont-Godinne – Dinant,
soins intensifs Epicura Hornu, 63, route de Mons, 7301 1, avenue Docteur G. Thérasse, 5530 Yvoir, Belgique
Hornu, Belgique Menten Renaud, Médecin radiologue, Département de
Gouilly Pascal, Kinésithérapeute, cadre, IFMK Nancy, 57 radiologie pédiatrique, Cliniques universitaires Saint-Luc,
bis, rue de Nabécor, 54000 Nancy, France 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Guérot Emmanuel, Médecin réanimateur, Service de réani- Michotte Jean-Bernard, Licencié en kinésithérapie, Haute
mation médicale, Hôpital européen Georges-­Pompidou, école de santé Vaud, 21, avenue de Beaumont, CH–1011
20, rue Leblanc, 75015 Paris, France Lausanne, Suisse
Henin Pauline, Licenciée en kinésithérapie, Unité de soins Moerman Damien, Licencié en kinésithérapie, Service de
intensifs, Centre hospitalier de l'Ardenne, 35, avenue médecine physique, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10,
d'Houffalize, B6800 Libramont, Belgique avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Infante Vito, MD, Clinique des troubles anxieux, Cliniques Monnin Dominique, Responsable qualité/recherche phy-
universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 siothérapie, Hôpitaux universitaires de Genève, 26, ave-
Bruxelles, Belgique nue de Beau-Séjour, CH–1211 Genève 14, Suisse
Mouthuy Jonathan, Docteur en kinésithérapie, Service de
Janssens Jean-Paul, Médecin adjoint agrégé, Hôpitaux
pneumologie, Cliniques Universitaires Saint-Luc, 10, ave-
universitaires de Genève, Service de pneumologie, 24, rue
nue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Micheli-du-Crest, CH-1211 Genève, Suisse
Latiers Anne-Claire, Licenciée en kinésithérapie, Service Norrenberg Michelle, Licenciée en kinésithérapie, Ser-
de médecine physique, Cliniques universitaires Saint-Luc, vice des soins intensifs, Hôpital académique Erasme, 808,
10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique route de Lennik, 1070 Bruxelles, Belgique
Lamotte Michel, Licencié en éducation physique et en Nyssen-Behets Catherine, MD, PhD, Unité de morpho-
kinésithérapie, MSc, Service de kinésithérapie et cardiolo- logie expérimentale, Université catholique de Louvain,
gie médicochirurgicale, Centre de réadaptation physique 52/5251 avenue E.-Mounier, 1200 Bruxelles, Belgique
pluridisciplinaire (Denolin), 808, route de Lennik, 1070 Opdekamp Christian, Licencié en kinésithérapie, Service
Bruxelles, Belgique de kinésithérapie, Hôpital universitaire Erasme, 808 Route
Legrand Alexandre, Docteur en médecine, pneumologue de Lennik, 1070 Bruxelles, Belgique
réadaptateur, Chef du service de physiologie et pharma- Pieters Thierry, MD, Service de pneumologie, Cliniques
cologie, Université de Mons, 20, Place du parc 7000 Mons, universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200
Belgique Bruxelles, Belgique
Lemaire Muriel, Licenciée en kinésithérapie, Service des Pitance Laurent, Docteur en kinésithérapie, Service de sto-
soins intensifs, Hôpital académique Erasme, 808, route de matologie et chirurgie maxillo-faciale, Cliniques univer-
Lennik, 1070 Bruxelles, Belgique sitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles,
Lengelé Benoît, MD, PhD, Unité de morphologie expéri- Belgique
mentale, Université catholique de Louvain, 52/5251 ave- Poncin William, Licencié en kinésithérapie, Centre de
nue E.-Mounier, 1200 Bruxelles, Belgique ­référence pour la mucoviscidose, Service de médecine
Lessire Fred, kinésithérapeute, Zeepreventorium VZW, physique, Université catholique de Louvain, Cliniques
Konink­lijke Baan 5, B-8420 De Haan, Belgique universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200
Liistro Giuseppe, MD, Service de pneumologie, cliniques Bruxelles, Belgique
universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Reychler Gregory, Docteur en kinésithérapie, Service
Bruxelles, Belgique de pneumologie et Service de médecine physique,

VI
Auteurs

Université catholique de Louvain, cliniques universi- Thys Frédéric, MD, PhD, Service des urgences – départe-
taires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, ment de médecine aiguë, Cliniques universitaires Saint-
Belgique Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Roeseler Jean, Docteur en kinésithérapie, Service des soins Toussaint Michel, Docteur en kinésithérapie, Centre de
intensifs et urgences, et Service de médecine physique, ventilation mécanique et Centre de référence neuromus-
Cliniques universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, culaire Inkendaal-VUB (Vrije Universiteit van Brussel),
1200 Bruxelles, Belgique Ziekenhuis Inkendaal, 1602 Vlezenbeek, Belgique
Wittebole Xavier, MD, Service des soins intensifs, Cliniques Troosters Thierry, Docteur en kinésithérapie, Département
universitaires Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 de pneumologie, Unité de recherche des muscles respira-
Bruxelles, Belgique toires, division de réadaptation respiratoire, Université catho-
lique de Louvain, Belgique et Département de pneumologie,
Saey Didier, Docteur en kinésithérapie, Institut univer-
division de réadaptation respiratoire, Hôpital universitaire de
sitaire de cardiologie et de pneumologie, Université
Gasthuisberg, Herestraat 49, 3000 Louvain, Belgique
de Laval, 2725, chemin Sainte-Foy, G1V4G5, Québec,
Canada Van Caeneghem Olivier, MD, Pathologies cardiovascu-
laires intensives, Cliniques universitaires Saint-Luc, 10, ave-
Scheiff Jean-Marie, MD, PhD, Unité de morphologie expé-
nue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
rimentale, Université catholique de Louvain, 52/5251 ave-
nue E.-Mounier, 1200 Bruxelles, Belgique Vanpee Dominique, MD, PhD, pneumologue, urgentiste,
CHU/Université catholique de Louvain Mont-Godinne –
Selleron Bertrand, kinésithérapeute, Cabinet de kinésithé-
Dinant, 1, avenue Docteur G. Thérasse, 5530 Yvoir, ­Belgique
rapie respiratoire et de réentrainement, 4, rue de la Made-
leine, 45140 Saint-Jean-de-la-Ruelle, France Vecellio Laurent, ingénieur, PhD, Faculté de médecine,
INSERM U-618, IFR 135, Université de Tours, Équipe
Sottiaux Thierry, MD, Service des soins intensifs, Clinique
Aérosols, 37032 Tours cedex, France
Notre-Dame de Grâce, 212, chaussée de Nivelles, 6041
Gosselies, Belgique Vermeulen François, Licencié en kinésithérapie, Département
de l'enfant et de l'adolescent, Hôpitaux universitaires de
Soudon Philippe, MD, Centre de ventilation mécanique
Genève, 4, rue Gabrielle-Perret-Gentil, CH-1205 Genève, Suisse
et Centre de référence neuromusculaire Inkendaal-VUB
(Vrije Universiteit van Brussel), Ziekenhuis Inkendaal, Zech Francis, Médecin interniste, Cliniques universitaires
1602 Vlezenbeek, Belgique Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique

VII
Avant-propos à la troisième édition

Il y a tout juste sept ans sortait de presse la première édition des malades, mise en œuvre du matériel d'assistance ven-
de notre livre. Moins de deux ans plus tard, une deuxième tilatoire, d'oxygénothérapie, d'aérosolthérapie, etc. – sont
édition, enrichie de quatre chapitres, comblait les quelques rarement complexes. Par contre, le choix et les modalités
espaces jugés trop peu explorés en 2007. d'application de ces techniques, l'ajustement et les réglages
Sept ans, c'est l'âge de raison, le temps durant lequel Kinési- des appareils d'assistance ventilatoire, la surveillance, l'éva-
thérapie respiratoire est passé entre des centaines de mains, luation du patient et l'adaptation de ces pratiques selon les
a pénétré les esprits, suscité critiques positives et négatives résultats obtenus réclament des connaissances, un savoir-
et suggestions constructives débouchant assez naturelle- faire et un savoir-être extrêmement larges et précis qui
ment sur une nouvelle physionomie de notre « enfant ». reposent sur des bases scientifiques et cliniques cohérentes.
Il n'a pas grossi mais a gagné en densité. Ainsi, la partie IV L'ambition principale de cet ouvrage est de fournir aux divers
relative à l'assistance ventilatoire mécanique et aux aides praticiens et futurs diplômés en thérapies respiratoires les
techniques est passée de six à trois chapitres. Ce n'est certes bases théoriques indispensables à la bonne compréhension
pas par volonté de l'amputer mais par souci de regrouper de leurs multiples missions, mais également de proposer
certaines informations au sein de chapitres, selon nous, une série de pistes leur permettant d'opérer les bons choix
mieux structurés. quant aux techniques à mettre en œuvre et à leurs adapta-
Enfin, parvenu à l'âge de raison, Kinésithérapie respiratoire tions aux situations cliniques vécues par la personne malade.
méritait un toilettage de la plupart de ses chapitres par Vingt-neuf chapitres tentent de faire de ce livre un ouvrage
l'actualisation de nombreuses notions décrites dans les de référence, quoique non exhaustif, quant à l'état actuel des
éditions précédentes, par l'apport de références bibliogra- connaissances théoriques et pratiques indispensables pour
phiques récentes et l'accueil de plusieurs nouveaux spécia- une prise en charge réfléchie, judicieuse et efficace des patients
listes en tant que rédacteurs de parties de chapitres. souffrant de pathologies respiratoires et cardiaques diverses.
Ainsi donc et comme mentionné dans les deux premières Le lecteur identifiera sans difficulté quatre groupes de cha-
éditions, ce livre rédigé grâce à la collaboration de plus de pitres dans cet ouvrage.
soixante auteurs, kinésithérapeutes et médecins, devait être Les quatre premiers rappellent les principales notions d'ana-
écrit et doit occuper, tant les bibliothèques, les tables de tomie, de physiologie et de physiopathologie du système
travail tant celles des étudiants en kinésithérapie que celles respiratoire.
des praticiens en charge des pathologies du système respi- Suivent sept chapitres qui traitent de divers aspects de l'éva-
ratoire. Qu'ils soient ici tous remerciés de l'intérêt qu'ils ont luation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire.
porté à notre ouvrage collectif. Même si nous pensons que ce livre est susceptible de
Les maladies respiratoires ou complications respiratoires rendre service aux étudiants et praticiens de diverses pro-
d'autres pathologies font appel à des thérapeutiques et moda- fessions s'intéressant aux thérapies respiratoires, nous ne
lités de prises en charge les plus variées. Certaines relèvent de renions pas le fait qu'il est rédigé à l'adresse des kinésithé-
pratiques purement médicales, d'autres, et elles sont nom- rapeutes et s'adresse à eux en premier lieu. Ainsi, divers
breuses, réclament des interventions voire des prises en charge aspects de la kinésithérapie et de la revalidation respiratoire
principales par des thérapeutes issus de professions aussi et cardiaque occupent treize chapitres de l'ouvrage. Chacun
diverses que kinésithérapeutes, ergothérapeutes, infirmier(ère) de ces aspects mériterait certes à lui seul une publication
s, technicien(ne)s, diététicien(ne)s, psychologues, etc. de l'importance de notre livre. Le présent ouvrage se veut
Les gestes techniques qui composent ces thérapies respi- en être une synthèse et ses références bibliographiques ren-
ratoires – manœuvres de kinésithérapie, positionnement voient le lecteur vers des supports plus fouillés.
IX
Avant-propos à la troisième édition

Pour terminer, trois chapitres font le point par rapport L'âge de raison ouvrant la voie vers l'adolescence, notre sou-
aux principales thérapeutiques respiratoires faisant appel hait est de voir Kinésithérapie respiratoire évoluer au fil de
à diverses modalités d'assistance respiratoire mécanique et remises en question voire de petites révolutions suscitées
d'aides techniques, décrites au fil de six chapitres dans la par ses lecteurs. C'est avec plaisir que nous accueillerons
deuxième édition, et pour lesquelles les thérapeutes respi- leurs remarques et suggestions afin que ce livre chemine
ratoires, selon leurs qualifications respectives, ont un rôle vers toujours plus de maturité sans jamais quitter le dyna-
important à jouer au sein d'équipes multidisciplinaires. misme et la créativité de la jeunesse.
C'est en nous fondant sur les commentaires de lecteurs G. Reychler, J. Roeseler, P. Delguste
et avec le désir d'ouvrir les colonnes de notre ouvrage aux
compétences et expériences de nouveaux auteurs que
nous avons construit cette troisième édition.

X
Préface à la troisième édition

Kinésithérapie respiratoire ou kinésithérapie des mouvements passifs et actifs. Après de virulentes attaques
malades respiratoires ? de ses théories et méthodes, son succès fut tel qu'elle émi-
Étymologiquement (kinêsis signifie mouvement en grec), la gra en 1940 aux États-Unis, où furent créées plusieurs « Cli-
kinésithérapie est la thérapie par le mouvement ; le terme niques Kenny »2…
est apparu en 1847, mais faisait suite à une bien longue his- La définition de la kinésithérapie a été actualisée en 2009
toire : l'utilisation, par des bonzes taoïstes, de postures et du par le Conseil national (français) de l'Ordre des masseurs-
contrôle ventilatoire pour soulager des maladies remonte à kinésithérapeutes créé par la loi de santé publique de 2004 :
près de trois siècles av. J.-C. Plus connues sont les pratiques « La masso-kinésithérapie (physiotherapy) est une discipline
de massage et remise en forme lors des préparations aux de santé, une science clinique de l'Humain et un art. Elle est
jeux du stade, durant l'Antiquité. centrée sur le mouvement et l'activité de la personne. La
La pratique de la kinésithérapie est très variable d'un pays masso-kinésithérapie exercée dans un but thérapeutique
à l'autre, ne serait-ce que par les diverses terminologies uti- ou non, intervient à partir d'un diagnostic kinésithérapique
lisées, auxquelles correspondent des métiers légèrement et de l'évaluation concomitante à l'acte, notamment au
différents : la profession de kinésithérapeute existe princi- moyen de techniques éducatives, manuelles et instrumen-
palement en France (depuis 1946, date à laquelle elle fut tales. Elle favorise le maintien ou l'amélioration de la santé
créée notamment pour les blessés de guerre, faisant suite physique, psychique et sociale, la gestion du handicap et
aux moniteurs de gymnastique médicale institués en 1942) le mieux-être des personnes. » Cette définition est impor-
et en Belgique, ainsi qu'au Luxembourg et dans les pays du tante en ce qu'elle fait ressortir les différents domaines et
Maghreb. Dans nombre de pays anglo-saxons, les attributs notions couverts par cette discipline : la santé dans toutes
de cette profession reviennent aux physiothérapeutes, que ses dimensions et son opposé, le handicap, et les moyens
l'on trouve aussi au Québec (où la physiothérapie peut de les adresser : évaluation, thérapeutique, éducation…
également être pratiquée par le thérapeute en réadapta- Après cette introduction générale, penchons-nous plus
tion physique) et en Suisse. Le diplôme français est celui spécifiquement sur les maladies respiratoires aiguës et
de masseur-kinésithérapeute : au mouvement s'ajoute le chroniques, objet de cet ouvrage. Nombre d'entre elles
« pétrissage » (du grec massein). Le kinésithérapeute est un (si ce n'est leur totalité) présentent des caractéristiques
acteur central de la rééducation, qui elle aussi s'intègre dans potentiellement accessibles à la kinésithérapie, qui doit de
différentes terminologies de signification proche, comme la ce fait être partie prenante des ressources thérapeutiques
réadaptation ou la réhabilitation1. à envisager. Ces caractéristiques peuvent être classées de
Mais que cette énumération de dénominations ne nous diverses manières, dont voici un exemple (certainement
fasse pas oublier ceux qui, sans le moindre titre profes- non exhaustif) :
sionnel, ont promu l'avènement de ce domaine, comme – les anomalies de la clairance mucociliaire, dont des
sœur Elizabeth Kenny (1880–1952), une Australienne auto- prototypes peuvent être trouvés dans la BPCO, les dilata-
didacte qui créa en 1932 une clinique de prise en charge tions des bronches (quelle qu'en soit l'origine, comme la
des victimes de poliomyélite et de paralysie cérébrale, dans mucoviscidose ou des maladies ciliaires), et leurs exacer-
laquelle la prise en charge était largement fondée sur les bations. Des affections aiguës comme les bronchiolites
s'accompagnent aussi de telles anomalies ;

1
Source : IFRES-Alençon. En ligne : www.ifres-alencon.com/ 2
Source : Australian Dictionary of Biography 1983, Vol. 9. En ligne
institut-formation-kinesitherapie/historique adb.anu.edu.au/biography/kenny-elizabeth-6934

XI
Préface à la troisième édition

– les anomalies de la mécanique ventilatoire, dont un L'approche des thérapeutiques commence par le désen-
prototype est la BPCO, avec la distension statique et le combrement, manuel ou instrumental. Suivent la BPCO et
collapsus expiratoire trop précoce des voies aériennes le réentraînement à l'effort. D'autres maladies ou syndromes
liés à l'emphysème, et la distension dynamique liée à la font l'objet de chapitres spécifiques : mucoviscidose, mala-
limitation des débits aériens ; dies neuromusculaires, syndrome d'hyperventilation.
– les anomalies du contrôle de la ventilation, comme Les bases et les modalités du travail du kinésithérapeute
dans le syndrome d'hyperventilation qui, en sus de son sont aussi abordées dans plusieurs situations particulières
existence autonome, peut compliquer des maladies res- aussi diverses que spécifiques, et c'est là un atout fort de
piratoires chroniques (asthme, BPCO…) dont il aggrave ce recueil : les extrêmes de la vie (enfant et néonatalogie
les manifestations cliniques ; bien sûr, mais aussi sujet âgé fragile) font l'objet de chapitres
– les anomalies extrarespiratoires, comme le décon- dédiés, de même que la période péri-opératoire de chirur-
ditionnement cardiovasculaire et (surtout) musculaire gie thoraco-abdominale, la réanimation, l'oncologie et les
périphérique qui peuvent accompagner toute mala- soins palliatifs.
die respiratoire chronique dyspnéisante et sont, par là, Pour finir, la place des kinésithérapeutes dans le cadre de
source de réduction d'activité. diverses techniques instrumentales est présentée en détail :
Les patients en eux-mêmes, au-delà des aspects direc- ventilation assistée invasive ou non, administration des trai-
tement somatiques de leur maladie chronique, peuvent tements inhalés et aspiration endotrachéale.
bénéficier de plusieurs manières de l'apport des kinésithé- Au total, rien ne manque et, surtout, tout est référencé de
rapeutes : manière très complète. Les « utilisateurs » disposent ainsi
– par l'amélioration de leurs compétences d'autoges- d'une véritable référence à ne pas égarer ! Un seul regret
tion de leur souffle, de leurs sécrétions bronchiques, de (mais il n'est pas lié au livre lui-même) : l'examen des réfé-
leurs exacerbations, de leur activité physique… ; rences bibliographiques met en exergue le manque de
– par l'amélioration de l'observance, que le kinésithéra- preuves scientifiques à l'appui de nombreuses techniques
peute peut contribuer à motiver ; ou approches kinésithérapiques. Ce constat doit conduire
– par l'amélioration de la technique d'utilisation des à intensifier la recherche, passant par d'étroits partenariats
dispositifs d'administration des traitements inhalés, entre médecins et kinésithérapeutes afin de clarifier les
ou autres supports instrumentaux (oxygénothérapie, points qui le méritent et de renforcer la « kinésithérapie
ventilation…). fondée sur les preuves ». Les progrès dans cette direction
Et il ne s'agit là que d'exemples non limitatifs, constituant ont été très significatifs ces dernières années, notamment
autant d'objectifs de l'éducation thérapeutique, dans grâce aux travaux réalisés par plusieurs auteurs impliqués
laquelle le kinésithérapeute doit naturellement être impli- dans cet ouvrage collectif. Poursuivons dans cette voie et
qué. Objectifs qui doivent aussi être présents dans son amplifions nos efforts !
esprit lorsqu'il intervient en dehors de tout programme Comment clore cette préface ? À la lecture des diffé-
éducatif structuré. rentes parties de ce livre, le lecteur (du livre)–auteur (de la
Cet ouvrage développe à son début les bases de travail du préface) a pris conscience des multiples facettes de la kiné-
kinésithérapeute : l'anatomie et la physiologie (mécanique, sithérapie dite « respiratoire », de la masse de connaissances
échanges gazeux) thoracopulmonaires y sont évidemment et de compétences utiles pour le kinésithérapeute dans ce
au premier plan. Suivent les moyens d'exploration, fonde- domaine (peu de médecins en savent autant !). Au point
ments de l'indispensable bilan à partir duquel les décisions que le terme même de « kinésithérapie respiratoire » paraît
thérapeutiques seront prises. Y sont détaillées la fonction bien réducteur. Il s'agit plutôt ici de la kinésithérapie « des
respiratoire en premier lieu, bien sûr, mais aussi l'imagerie et malades respiratoires », sous toutes ses formes…
l'exploration de l'exercice. Sans oublier, à l'avant de la scène, Professeur Nicolas Roche
l'évaluation clinique non seulement physique mais aussi Service de pneumologie et soins intensifs respiratoires, hôpital Cochin–
symptomatique et anamnestique, incluant l'appréciation site Val-de-Grâce, Paris, France
de la qualité de vie.

XII
Préface à la deuxième édition

Quand Grégory Reychler m'a demandé de rédiger la pré- édition voit le jour… Il aurait été facile, à l'heure du tout
face de la deuxième édition de ce livre sur la kinésithérapie informatique, de réaliser de simples « coupés-collés » et le
respiratoire, co-dirigé par Pierre Delguste et Jean Roeseler, succès aurait été probablement là encore au rendez-vous.
j'ai tout de suite accepté avec grand plaisir. Il est en effet le Cependant, les auteurs, dans leur constant souci d ­ 'apporter
plus souvent assez simple d'écrire quelques lignes sur des le meilleur de leurs connaissances, ont non seulement
gens consciencieux et sympathiques qui, en plus de tout actualisé de nombreuses données déjà présentes dans la
cela, font un excellent travail… Il faut se souvenir que la pre- première édition, mais ils ont aussi développé des aspects
mière version de cet ouvrage, fruit de la collaboration d'une non traités initialement. Ainsi apparaît un nouveau chapi­
cinquantaine d'auteurs de langue française était déjà très tre sur la déglutition et ses répercussions possibles, en cas
achevée et méritait beaucoup d'éloges. de dysfonctionnement, sur le poumon. Un autre traite de la
Elle faisait le point, de façon originale et nouvelle mais réadaptation cardiaque. Un troisième aborde le problème
également de la façon la plus scientifique possible, sur une des infections respiratoires et initie le lecteur aux différentes
discipline en train de s'ouvrir à de nombreux domaines. bactéries. Enfin, pour compléter des données déjà riches sur
J'avais, lors de sa sortie, été particulièrement séduit par ce l'assistance ventilatoire mécani­que, un sous-chapitre a été
mélange parfaitement réussi entre données fondamentales adjoint sur l'humidification des gaz. Au total, cette nouvelle
et pratiques qui ne pouvait qu'intéresser l'ensemble des édition permet aux lecteurs une vue d'ensemble complète
acteurs de santé investis dans les pathologies respiratoires, sur cet organe qu'est le poumon, de son fonctionnement
du kinésithérapeute jusqu'au médecin, en passant par intime jusqu'au principe de son traitement lors de patholo-
l'infirmier. On y parlait certes de techniques de désencom­ gie. Ce livre s'impose donc comme un ouvrage de référence
brement, mais aussi de sujets très pointus ayant trait à la pour toute personne, praticien confirmé ou étudiant, en
ventilation non invasive, à l'oxygène, à la radiologie tho- charge de patients porteurs de troubles respiratoires.
racique ou à l'aérosolthérapie. De suite, les lecteurs ont Pr Jean-Christophe Dubus
fait un excellent accueil à cet ouvrage collectif et, victime Unité de Médecine, Pneumologie et CRCM pédiatriques, CHU
de son succès, il fallait impérativement qu'une deuxième Timone-Enfants, Marseille

XIII
Préface à la première édition

Il m'est agréable de présenter aux lecteurs de langue fran- BPCO. Mais restreindre la kinésithérapie à la BPCO serait
çaise ce remarquable ouvrage sur la kinésithérapie respira- amputer cette discipline de toute sa richesse et les lecteurs
toire, coordonné par Gregory Reychler, Pierre Delguste et retrouveront dans ce livre la diversité de cette profession
Jean Roeseler. Sans doute ces auteurs se sont-ils souvenus qui se décline aussi bien dans les services de pédiatrie qu'en
de mon admiration lors de l'année passée à leurs côtés gériatrie, dans les services d'oncologie, de soins palliatifs
(il y a plus de 15 ans maintenant) face à l'implication des ou de chirurgie thoracoabdominale, tant chez les patients
kinésithérapeutes des cliniques universitaires Saint-Luc… obèses que chez les patients neuromusculaires…
En ce début de millénaire, de nombreux efforts se déve- Ce livre, fruit de la collaboration d'une cinquantaine
loppent pour une meilleure prise en charge des bronchop- d'auteurs francophones, répond à une demande non seule-
neumopathies chroniques obstructives (BPCO). Cette ment des kinésithérapeutes mais aussi des médecins (pneu-
pathologie, principalement due au tabac, pose un pro- mologues et réanimateurs) et des infirmier(e)s qui prennent
blème majeur de santé publique (cinquième cause de mor- en charge au quotidien les pathologies respiratoires. J'ai de
talité dans le monde). Elle est responsable d'une mortalité nombreuses raisons de me réjouir de cette publication
en augmentation, même dans les pays dits « développés ». réussie et consciencieuse. Tout d'abord, il existe peu d'ou-
Chez ces patients BPCO, le développement des techniques vrages analogues à celui-ci et son caractère original en fait
de ventilation non invasive et du réentraînement à l'effort un outil de travail incontournable pour les professionnels
représente des avancées thérapeutiques significatives où la de santé qui le consulteront pour leur plus grand bien en
kinésithérapie occupe une place centrale au sein d'équipes maintes occasions. Cet ouvrage représente aussi une forme
multidisciplinaires. Ainsi, la ventilation non invasive, qui a de consécration de la discipline pour laquelle de fervents
vu récemment se développer ses indications, occupe main- docteurs en kinésithérapie œuvrent depuis longtemps.
tenant une place importante dans les stratégies thérapeu- Enfin, en donnant aux acteurs de terrain un document de
tiques. Son champ d'application s'est étendu des services grande valeur scientifique et didactique, les auteurs réus-
de pneumologie et de réanimation aux urgences, mais aussi sissent le tour de force d'allier la théorie et la pratique et
aux soins intensifs et à la pédiatrie. Cette technique, initiale- réaffirment une fois de plus la place centrale qu'occupent
ment réservée à quelques initiés, est actuellement de mieux les patients dans notre exercice professionnel.
en mieux codifiée et nécessite des équipes formées com- Pr Vincent Jounieaux
prenant médecins, kinésithérapeutes et infirmier(e)s. Il en Chef du service de pneumologie et réanimation respiratoire
est de même pour le réentraînement à l'effort dont l'intérêt Centre hospitalier universitaire d'Amiens, France
n'est plus à démontrer scientifiquement chez les patients

XV
Abréviations

4MGS 4-metre gait speed CVI capacité vitale inspiratoire


6MST 6-minute step test DA drainage autogène
6MWT 6-minute walk test DAV différence artérioveineuse
ACBT active cycle of breathing technique DC débit cardiaque
AD abdominodiaphragmatique DEP débit expiratoire de pointe
AET aspiration endotrachéale DEXA dual energy X-ray absorptiometry
AFE augmentation du flux expiratoire DLCO diffusion libre du CO
AI aide inspiratoire DMO densité minérale osseuse
AP activité physique DRR désobstruction rhinopharyngée rétrograde
ARDS acute respiratory distress syndrom DTM double trunk mask
ASA American Society of anesthesiologists ECG électrocardiogramme
ATP adénosine triphosphate ECH échangeur de chaleur et d’humidité
ATS American Thoracic Society ED entraînement dynamique
AVC accident vasculaire cérébral EDIC exercice à débit inspiratoire contrôlé
AVQ activités de la vie quotidienne EE épreuve d’effort
BDK bilan-diagnostic kinésithérapique EET exercice d’expansions thoraciques
BE base excess EFR épreuve fonctionnelle respiratoire
BIA bioelectrical impedance analysis ELPr expiration lente prolongée
BNP brain natriuretic peptide ELTGOL expiration lente et totale à glotte ouverte en
BPCO bronchopneumopathie chronique obstructive décubitus latéral
BRN bruit respiratoire normal EBM evidence based medecine
CA canal artériel EMG électromyogramme
CAT clinical assesment test EMS électromyostimulation
CIA communication interauriculaire EMST expiratory muscle strength training device
CIF  classification internationale du fonctionne- ERS European Respiratory Society
ment, du handicap et de la santé ES effect-size
CIV communication interventriculaire ESM électrostimulation musculaire
CMB circonférence musculaire brachiale ESV extrasystole ventriculaire
CMV contraction maximale volontaire ESWT endurance shuttle walk test
CPAP continuous positive airway pressure EVA échelle visuelle analogique
CPT capacité pulmonaire totale FA fibrillation auriculaire
CPT conventional chest physiotherapy FC fréquence cardiaque
CRF capacité résiduelle fonctionnelle FET forced expiration technique
CRQ chronic respiratory questionnaire FEVG fraction d’éjection ventriculaire gauche
CST chester step test Fi fraction inspiratoire
CT computerized tomography FMV force maximale volontaire
CV capacité vitale FR fréquence respiratoire
C-V cardiovasculaire GINA global initiative for asthma
CVF capacité vitale forcée GOLD global initiative for chronic obstructive lung disease
XVII
Abréviations

HAD hospitalization anxiety depression PEPi pression expiratoire positive intrinsèque


Hb hémoglobine pH pouvoir hydrogène
HFCWO high frequency chest wall oscillation Pi pression inspiratoire
HME heat and moisture exchanger PIM pression inspiratoire maximum
HR humidité relative P pl pression pleurale
HRB hyperréactivité bronchique P plat pression plateau
HTA hypertension artérielle PTCA percutaneous transluminal coronary angioplasty
HTAP hypertension artérielle pulmonaire Pv pression veineuse
ICP indice de coût physiologique QR quotient respiratoire
IDS intubation difficulty scale QVLS qualité de vie liée à la santé
IGF-1 insulin-like growth factor 1 Raw résistance des voies aériennes
IMC indice de masse corporelle RFE recommandations formalisées d’experts
IPPB intermittent positive pressure breathing RGO reflux gastro-œsophagien
IPV intrapulmonary percussive ventilation RIM resisted inspiratory manœuvre
IRA insuffisance respiratoire aiguë RM renforcement musculaire
IRC insuffisance respiratoire chronique RMNf résonance magnétique nucléaire fonctionnelle
ISWT incremental shuttle walk test RVA résistance des voies aériennes
LN lunettes nasales SD standard deviation
MCID minimal clinically important difference SDRA syndrome de détresse respiratoire aiguë
MDI metered dose inhaler SEM standard error of measurement
MHI manual hyperinflation SF-36 short form 36
MI-E mechanical insufflation–exsufflation SGRQ St. George’s respiratory questionnaire
MMAD mass median aerodynamic diameter SHV syndrome d’hyperventilation
mMRC modified medical research counsil SI spirométrie incitative
MNA Mini Nutritional Assessment® SIP sickness impact profile
MPC mobilisation passive continue SLA sclérose latérale amyotrophique
MRC medical research council SNIP sniff nasal inspiratory pressure
MRF-28 Maugeri Foundation respiratory failure questionnaire SOH syndrome d’obésité hypoventilation
MRS Methicillin-resistant Staphylococcus aureus Sp saturation pulsée
MS masque simple SPLF Société de pneumologie de langue française
NHP Nottingham health profile SRI severe respiratory insufficiency questionnaire
NM neuromusculaire SRLF Société de réanimation de langue française
NRM non rebreathing mask SSH sérum salé hypertonique
NYHA New York Heart Association SST sit-to-stand test
OAP œdème aigu du poumon ST6 stepper test de 6 minutes
OLD oxygénation de longue durée STEMI ST-segment elevation myocardial infarction
OMS Organisation mondiale de la santé SV seuil ventilatoire
OPEP pression expiratoire positive oscillante TDM tomodensitométrie
PA pression alvéolaire Te temps expiratoire
PA pression artérielle TENS transcutaneous electrical nerve stimulation
PAVM pneumopathie acquise sous ventilation TEP tomographie à émission de positrons
P br pression bronchique TET tube endotrachéal
PC20 provocative dose 20 Ti temps inspiratoire
PCF peak cough flow TILA technique insufflatoire de levée d’atélectasie
PCM processeur central médullaire TNF tumor necrosis factor
PEEP positive end expiratory pressure VA voies aériennes
PEF peak expiratory flow VAC ventilation assistée contrôlée
PEM pression expiratoire maximum VALI ventilator-associated lung injury
PEP pression expiratoire positive VAP ventilator-associated pneumonia

XVIII
Abréviations

VAS voies aériennes supérieures VPN ventilation en pression négative


VC ventilation contrôlée VR volume résiduel
VE ventilation exprimée VRE volume de réserve expiratoire
VEMS volume expiré maximal au cours de la première VS ventilation spontanée
seconde VS-AI ventilation spontanée en aide inspiratoire
VI ventilation invasive ventilation spontanée en pression positive
VS-PPC 
VILI ventilator-induced lung injury continue
VM ventilation mécanique Vt volume courant
VMV ventilation maximale volontaire Vte volume courant expiré
VNI ventilation non invasive Vti volume courant inspiré
VNILC ventilation non invasive au long cours WBE weight bearing exercises
VPI ventilation à percussions intrapulmonaires

XIX
Chapitre 1
Éléments d'anatomie
thoracopulmonaire
Catherine Nyssen-Behets, Marie-Christine Many,
Jean-Marie Scheiff, Jean-François Denef, Benoît Lengelé

PLAN DU CHAPITRE
Anatomie fonctionnelle de la paroi
thoracique 4
Anatomie systématique de l'arbre
bronchopulmonaire 12

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Les échanges gazeux entre le sang veineux et l'air atmosphé- cique abrite aussi le cœur, les poumons et les gros vaisseaux,
rique siègent dans les poumons. Ceux-ci sont abrités dans la ainsi que les viscères situés dans la partie supérieure de la
cage thoracique dont les parois squelettiques contribuent à la cavité abdominale.
dynamique ventilatoire. L'association anatomofonctionnelle
entre la cavité ostéomusculaire et les viscères bronchopul- Le squelette du thorax,
monaires qui y sont enfermés est indispensable à la réalisation
des échanges respiratoires. Les pages qui suivent envisageront
ses articulations
d'abord l'anatomie fonctionnelle de la paroi thoracique, puis et la biomécanique ventilatoire
l'anatomie systématique de l'arbre bronchopulmonaire.
Le squelette du thorax est constitué, d'arrière en avant, par
les douze vertèbres thoraciques, les douze paires de côtes,
les cartilages costaux et le sternum (fig. 1.1 et 1.2). Ces diffé-
Anatomie fonctionnelle rentes pièces squelettiques sont articulées entre elles pour
de la paroi thoracique former la cage thoracique à laquelle incombent la protec-
tion des viscères et les mouvements ventilatoires.
Le thorax est une cavité irrégulièrement cylindrique dont
les parois ostéomusculaires sont flexibles, car elles sont
Le squelette du thorax
constituées d'éléments segmentaires. Par son ouverture Les vertèbres thoraciques ont pour particularité de s'articu-
supérieure, étroite, il est en continuité avec la région du cou. ler avec les côtes. À cet effet, le corps de la plupart des ver-
Son ouverture inférieure, large, est fermée par le diaphragme tèbres thoraciques porte sur chacune de ses faces latérales
qui le sépare de la cavité abdominale. une demi-facette supérieure et une inférieure. Une facette
La principale fonction motrice du thorax est la respira- ovale additionnelle s'étale également à la face antérieure de
tion. Point d'ancrage du membre supérieur, la cage thora- chaque processus transverse.

A B
Fig. 1.1
Squelette du thorax en reconstruction 3D par imagerie médicale.
Vues : antérieure (A) et postérieure (B).
1. Deuxième vertèbre thoracique. 2. Douzième vertèbre thoracique. 3. Deuxième côte. 4. Septième côte. 5. Manubrium sternal. 6. Corps du sternum.
Source : Dr. R. Menten, cliniques universitaires Saint-Luc.

4
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

7 1 8 3 9

24 5 6

A B
10 6

4 5
C
Fig. 1.2
Articulations costovertébrales et costotransversaires.
Vues : latérale (A), postérieure (B) et supérieure (C).
1. Demi-facette supérieure du corps vertébral. 2. Demi-facette inférieure du corps vertébral. 3. Facette articulaire du processus transverse.
4. Tête costale. 5. Col de la côte. 6. Tubercule costal. 7. Ligament radié de la tête costale. 8. Ligament costotransversaire supérieur. 9. Ligament
costotransversaire latéral. 10. Ligament costotransversaire.
Source : Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant la médecine opératoire. Atlas. Tome I : planche 48. Paris : C. Delaunay ; 1831.

Les côtes sont des os plats qui se détachent de chaque faces interne et externe du corps de la côte sont délimitées
côté de la colonne vertébrale et se dirigent, comme autant par un bord supérieur mousse et un bord inférieur tran-
d'arcades, vers le sternum. Leur longueur augmente de chant. Ce dernier marque la limite inférieure du sillon costal
la première à la septième et diminue de la huitième à la qui court à la face interne de la côte et est occupé par le
douzième. Les sept premières ou « vraies » côtes s'articulent nerf et les vaisseaux intercostaux. L'extrémité antérieure de
en avant avec le sternum par l'intermédiaire d'un cartilage la côte, plus ou moins renflée et creusée d'une cavité ellip-
costal. Les cinq suivantes ou « fausses » côtes n'atteignent soïde, se continue dans le cartilage costal.
pas le sternum. Les huitième, neuvième et dixième côtes Les cartilages costaux présentent une configuration iden-
s'articulent par leur extrémité antérieure avec le cartilage tique à celle des côtes qu'ils prolongent. Leur extrémité laté-
de la côte précédente. Les deux dernières, dites « côtes flot- rale se continue avec la côte proprement dite. L'extrémité
tantes », ont une extrémité antérieure libre. médiale des sept premiers cartilages costaux s'articule avec le
L'extrémité postérieure de chaque côte est constituée sternum. Les trois cartilages suivants rejoignent chacun celui
d'un relief arrondi, la tête, auquel fait suite une portion plus de la côte précédente. Les cartilages des deux dernières côtes
étroite, le col, dirigé vers l'arrière et latéralement. L'union sont très réduits et se terminent librement. Chez le sujet âgé,
entre le col et le corps de la côte est marquée par une saillie les cartilages costaux se calcifient et perdent leur flexibilité.
à orientation postérieure, le tubercule costal. Le corps pro- Le sternum est un os plat, impair et médian, situé à la par-
longe ensuite le trajet du col pour s'infléchir rapidement tie antérieure du thorax. Sa direction est oblique vers le bas
vers l'avant et latéralement au niveau de l'angle costal. Les et vers l'avant. Il se compose de trois segments qui sont, en les
5
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

nommant de haut en bas, le manubrium, le corps et le pro- Les surfaces articulaires sont réunies par une membrane
cessus xiphoïde. Les symphyses manubriosternale et xiphos- fibreuse mince et par deux ligaments. Le ligament intra-
ternale s'ossifient habituellement à partir de la quarantaine. articulaire de la tête costale s'attache à la crête qui sépare
La face antérieure du sternum, rugueuse et plus ou moins les deux surfaces articulaires de la tête de la côte et se ter-
convexe dans le sens longitudinal, est directement en rap- mine sur le disque intervertébral. Il fait défaut au niveau de
port avec la peau sur la ligne médiane. Latéralement, elle la première et des deux dernières côtes. Le ligament radié
donne insertion aux muscles grands pectoraux. À l'union de la tête costale s'insère sur la partie antérieure de la tête
du manubrium avec le corps se trouve une crête transver- de la côte. De là, il se porte en direction médiale et s'étale en
sale, sommet d'un angle dièdre, saillant en avant et appelé éventail sur les versants latéraux des deux vertèbres voisines
« angle sternal de Louis ». Cet angle est situé à hauteur de et sur le disque intervertébral correspondant. Ces ligaments
l'articulation du deuxième cartilage costal avec le sternum très solides n'autorisent que des glissements de faible
et dans le même plan transversal que le disque séparant les amplitude, qui siègent dans les axes de mobilité réduite des
quatrième et cinquième vertèbres thoraciques. surfaces arthrodiales.
La face postérieure, légèrement concave de haut en bas, Les articulations costotransversaires, de type synovial,
donne insertion au muscle transverse du thorax. sont disposées entre le tubercule costal d'une côte et le
Les bords latéraux présentent sept incisures costales sommet du processus transverse de la vertèbre correspon-
pour l'articulation avec l'extrémité médiale des sept pre- dante. Les deux dernières côtes ne possèdent pas cette
miers cartilages costaux. articulation.
L'extrémité supérieure forme la partie la plus large et la Le tubercule costal est muni d'une surface articulaire
plus épaisse de l'os. Elle montre une échancrure médiane, arrondie, légèrement convexe, qui répond à la fossette cos-
l'incisure jugulaire, et de part et d'autre de celle-ci, deux inci- tale du processus transverse, un peu déprimée en gouttière.
sures claviculaires. Ainsi constituées, les articulations costotransversaires sont
L'extrémité inférieure, presque toujours cartilagineuse, donc des condyles élémentaires qui autorisent des mou-
correspond au processus xiphoïde. Sa configuration et vements de rotation multi-axiaux. Toutefois, à partir de la
ses dimensions sont assez variables. Parfois percé d'un ori- septième paire de côtes, les surfaces articulaires deviennent
fice appelé « trou sternal » ou « xiphoïdien », ce processus progressivement planes et réduisent ainsi leur mobilité à
donne insertion à la ligne blanche de l'abdomen. des glissements translationnels mono-axiaux.
Chaque articulation costotransversaire possède une
membrane fibreuse tapissée par une membrane synoviale
Les articulations du thorax rudimentaire et renforcée par trois ligaments. Le ligament
Les côtes sont rattachées à la colonne thoracique par leur costotransversaire est tendu entre le col de la côte et la
tête et leur tubercule (voir fig. 1.2). En avant, elles rejoignent face antérieure du processus transverse correspondant. Le
les cartilages costaux et le sternum grâce aux articulations ligament costotransversaire supérieur, très résistant, prend
costochondrales, interchondrales et chondrosternales. naissance sur le bord supérieur du col de la côte et se ter-
Les articulations costovertébrales, de type synovial, mine, après un trajet oblique en haut et latéralement, sur le
unissent les têtes costales au corps des vertèbres thora- processus transverse de la vertèbre sus-jacente. Le ligament
ciques. À l'exception de la première et des deux dernières, costotransversaire latéral, épais, unit le sommet du processus
chaque côte s'articule avec deux vertèbres contiguës. transverse à la surface rugueuse du tubercule costal adjacent.
La tête des côtes 2 à 10 présente en effet deux surfaces En mouvement, les articulations costotransversaires
articulaires planes inclinées l'une vers l'autre et séparées sont le siège de déplacements rotatoires et de glissements
par une crête mousse. Les première, onzième et douzième réduits dont l'amplitude est considérablement majorée dis-
côtes ne possèdent qu'une surface articulaire puisqu'elles talement, en raison de la longueur des arcs costaux.
ne s'articulent qu'avec la vertèbre correspondante. Les articulations costochondrales sont des jointures
Du côté des vertèbres thoraciques s'observent deux fibreuses unissant les extrémités antérieures des côtes aux
fossettes costales, une supérieure et une inférieure, appar- cartilages costaux. À leur niveau, le périoste qui entoure les
tenant l'une au bord inférieur de la vertèbre sus-jacente, côtes se continue par le périchondre des cartilages costaux.
l'autre au bord supérieur de la vertèbre sous-jacente. Ces Le mouvement d'une telle articulation consiste en une
deux fossettes forment ensemble un angle dièdre ouvert légère courbure du cartilage à la jonction.
latéralement. Le sommet de cet angle occupe le disque Les articulations chondrosternales rattachent les sept
intervertébral et répond à la crête de la tête costale. premiers cartilages costaux au sternum. Dans chaque inci-
6
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

sure costale du sternum existent deux surfaces articulaires cette inclinaison augmente en direction caudale, et qu'en
planes, une supérieure et une inférieure, inclinées l'une vers outre les articulations costotransversaires sont d'abord
l'autre de façon à constituer un angle dièdre ouvert laté- condyliennes, puis arthrodiales, le mouvement des côtes
ralement. Ces deux surfaces en rencontrent deux autres supérieures et inférieures varie selon le niveau considéré.
semblables, mais regardant en sens inverse, disposées à En inspiration, les mouvements des côtes de la deuxième
l'extrémité sternale du cartilage costal. L'articulation de à la cinquième s'opèrent autour d'un axe qui passe par leur
la première côte avec le sternum est le plus souvent une col et soulèvent en levier de pompe leur extrémité anté-
synchondrose. rieure, puis, avec elle, le sternum. Comme l'angle sternal
Une membrane fibreuse s'insère sur le pourtour de ces s'atténue, le diamètre sagittal du thorax augmente. L'axe du
surfaces articulaires. Elle est renforcée par deux ligaments. mouvement étant proche du plan frontal, il n'y a pratique-
Le ligament sternocostal intra-articulaire se trouve dans ment pas de mouvement latéral de ces côtes.
la cavité articulaire, entre le cartilage costal et le sternum. Le col des côtes, de la huitième à la dixième, est dirigé
Les ligaments sternocostaux radiés s'étendent en éventail nettement plus en arrière et se rapproche du plan sagittal.
depuis le cartilage costal jusqu'au sternum, en avant et en Les articulations costotransversaires correspondantes sont
arrière de l'articulation chondrosternale. Leurs fibres s'entre- planes, si bien que les surfaces peuvent glisser et pivoter
lacent avec celles des articulations adjacentes et hétérola- l'une contre l'autre. L'extrémité antérieure de ces côtes se
térales. À la face antérieure du sternum, ce treillis fibreux déplace donc latéralement et vers le haut, à l'image d'une
fusionne avec les fibres tendineuses du muscle grand pec- anse de seau qui se soulève, avec pour conséquence l'élar-
toral. Du fait de la présence du ligament sternocostal intra- gissement de l'angle infrasternal et l'augmentation du dia-
articulaire, les articulations sternocostales ont une cavité mètre transversal du thorax.
très réduite et deux membranes synoviales rudimentaires. Les sixième et septième côtes se soulèvent de manière
Les articulations chondrosternales permettent de faibles intermédiaire en direction antérieure et latérale. Enfin, les
mouvements de glissement vers le haut et vers le bas, suffi- deux dernières côtes, n'étant pas articulées en avant, inter-
sants cependant pour assurer une respiration aisée. viennent très peu dans l'augmentation de diamètre du
Les articulations interchondrales articulent les huitième, thorax.
neuvième et dixième cartilages costaux par une partie élar- Au cours de ces déplacements des côtes, le sternum est
gie de leur bord supérieur avec le bord inférieur du cartilage élevé et les cartilages costaux deviennent plus horizontaux.
sus-jacent. Le périchondre, qui passe sans s'interrompre Lors de l'expiration, les mouvements des côtes et du
d'un cartilage à l'autre, assure la contention. Les mouve- sternum s'inversent pour diminuer les diamètres antéro-
ments limités de ces articulations complètent la mobilité postérieur et transversal du thorax.
du cintre thoracique inférieur.

La biomécanique ventilatoire
Les muscles respiratoires principaux
et accessoires
Ensemble, les articulations des côtes avec les vertèbres et
avec le sternum permettent la mobilité thoracique spéci- La plupart des muscles respiratoires (fig.  1.3) ont pour
fique à la respiration. Sous l'action des muscles, les côtes se action d'élever les côtes et le sternum et sont donc inspira-
déplacent pour modifier les diamètres vertical, antéropos- teurs. L'expiration normale étant passive en raison de l'élas-
térieur et transversal du thorax. Les mouvements des arti- ticité de la paroi thoracique et du parenchyme pulmonaire,
culations costovertébrales ont une faible amplitude, mais les muscles expirateurs interviennent principalement dans
en raison de la longueur des côtes, ils sont considérable- l'expiration forcée.
ment amplifiés vers l'avant. L'addition de ces mouvements Les muscles respiratoires principaux regroupent :
élémentaires engendre ainsi des variations de volume très ● le diaphragme, qui constitue la paroi supérieure de l'ab-

significatives de la nasse thoracique. domen et assure les deux tiers de la capacité inspiratoire ;
Pris isolément, chaque côte et son cartilage costal ● les muscles profonds du thorax, spécifiquement affectés

peuvent être considérés comme un levier qui monte et des- aux mouvements des côtes, mais participant aussi, en ce
cend. L'axe du mouvement passe, le long du col de la côte, qui concerne les intercostaux, au maintien de la rigidité de
à travers les articulations costovertébrale et costotrans- la paroi thoracique ;
versaire. Il est oblique latéralement et vers le bas, suivant ● les muscles spinocostaux, qui constituent le plan pro-

l'inclinaison du processus transverse de la vertèbre. Comme fond des muscles plats du dos.

7
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

A B

C
Fig. 1.3
Les muscles respiratoires présentés après section frontale du tronc.
Vues : antérieure de la paroi postérieure (A), postérieure de la paroi antérieure (B) et postérieure du diaphragme et de ses orifices (C).
1. Muscle sterno-cléido-mastoïdien. 2. Muscles scalènes antérieur et moyen. 3. Muscle subclavier. 4. Muscle petit pectoral. 5. Muscle grand
pectoral. 6. Muscle dentelé antérieur. 7. Muscle diaphragme. 8. Muscles intercostaux. 9. Muscles subcostaux. 10. Muscle tranverse du thorax.
11. Muscle oblique externe de l'abdomen. 12. Muscle oblique interne de l'abdomen. 13. Muscle droit de l'abdomen. 14. Muscle grand dorsal.
Source : Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant la médecine opératoire. Atlas. Tome II : planches 75, 76 et 78. Paris : C. Delaunay ; 1831.

Les muscles respiratoires accessoires, extrinsèques, ● le muscle grand dorsal ;


comptent : ● la paroi antérolatérale de l'abdomen, impliquée dans
● le groupe antérolatéral du thorax, superficiel, dont font l'expiration forcée.
partie les muscles grand pectoral, petit pectoral, subclavier La description synthétique de tous ces muscles est don-
et dentelé antérieur. Destinés à mouvoir le membre thora- née brièvement dans le tableau  1.1 qui mentionne, pour
cique, ils interviennent dans l'inspiration forcée ; chacun d'eux, leurs insertions principales schématiques, leur
● la région latérale du cou ; action et leur innervation. La respiration est le mouvement
8
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

de la cage thoracique sous l'action coordonnée de ces dif- contracter en prenant le centre tendineux comme point
férents muscles. fixe. Les côtes s'élèvent, les premières en direction anté-
Durant l'inspiration de repos, les dimensions du thorax rieure à la manière d'un levier de pompe, les inférieures en
augmentent de quelques millimètres dans les trois plans de direction latérale selon le mouvement d'anse de seau déjà
l'espace, générant un gain de volume de quelque 500 mL. évoqué.
Les côtes inférieures étant stabilisées par les muscles inter- Les contributions respectives de la descente du
costaux, la contraction du diaphragme abaisse le centre diaphragme, de l'expansion abdominale et de l'élévation
tendineux de 1 à 2 cm et refoule les viscères abdominaux. des côtes pour accroître les dimensions de la cavité tho-
La limite de ce mouvement vers le bas étant rapidement racique varient d'un individu à l'autre. La respiration de
atteinte, les fibres charnues du diaphragme continuent à se type thoracique est habituellement plus prononcée chez la

Tableau 1.1 Les muscles respiratoires principaux et accessoires


Groupes Muscles Origine Terminaison Action Innervation
Muscles respiratoires principaux
Muscles Intercostaux Bord inférieur des côtes Bord supérieur des Élévation des Nerfs intercostaux
intrinsèques externes 1–11, du tubercule à la côtes sous-jacentes côtes
du thorax (11 paires) jonction chondrocostale (2–12)
(région Intercostaux Bord supérieur des côtes Bord inférieur des Abaissement des Nerfs intercostaux
costale) internes 2–12, de l'extrémité côtes sus-jacentes côtes
(11 paires) sternale du cartilage costal (1–11)
à l'angle de la côte
Intercostaux Moitié antérieure du bord Bord inférieur des Abaissement des Nerfs intercostaux
intimes supérieur des côtes 2–12 côtes sus-jacentes côtes
(< 11 paires) (1–11)
Élévateurs des Sommet des processus Face externe de Élévation des Rameaux
côtes transverses de C7–T11 la (des) côte(s) côtes dorsaux des
(12 paires) sous-jacente(s) nerfs thoraciques
correspondants
Subcostaux Face interne des côtes Face interne de Abaissement des Nerfs intercostaux
(inconstants) inférieures la (des) côte(s) côtes inférieures
(entre le tubercule et sous-jacente(s)
l'angle)
Transverse du Tiers inférieur de la face Face postérieure des Abaissement des Nerfs intercostaux
thorax postérieure du sternum cartilages costaux 2–6 cartilages osseux adjacents
(triangulaire du
sternum)
Muscles Dentelé postérieur Processus épineux de Face externe des côtes Inspiration Nerfs intercostaux
spinocostaux et supérieur C6–T2 2–5 2–5
Dentelé postérieur Processus épineux de Face externe des côtes Expiration Nerfs intercostaux
et inférieur T11–L2 9–12 9–12
Paroi Diaphragme Centre tendineux Face postérieure du Inspiration Nerf phrénique
supérieure de processus xiphoïde Presse abdominale
l'abdomen Face interne des côtes Pompe thoraco-
7–12 abdominale
Ligaments arqués
latéral et médial
Corps de L1–L3
(Suite)
9
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Tableau 1.1 Suite
Groupes Muscles Origine Terminaison Action Innervation
Muscles respiratoires accessoires
Muscles Grand pectoral Deux tiers médians du bord Lèvre latérale du sillon Adduction et Nerfs pectoraux
extrinsèques antérieur de la clavicule intertuberculaire de rotation médiale latéral et médial
du thorax Face antérieure du sternum l'humérus du bras
(région Face antérieure des Élévation des
antérolatérale) cartilages costaux 1–5 (6) côtes
Gaine du muscle droit de
l'abdomen
Petit pectoral Face antérieure des Sommet du processus Abaissement de la Nerfs pectoraux
côtes 3–5 (jonction coracoïde scapula latéral et médial
chondrocostale) Élévation des côtes
Subclavier Cartilage de la Face inférieure de la Abaissement de la Nerf subclavier
première côte clavicule clavicule
Élévation de la
première côte
Dentelé antérieur Face externe Bord médial de la Fixation de la Nerf thoracique
des côtes 1–9 (10) scapula scapula long de C. Bell
Rotation latérale
de la scapula
(sonnette externe)
Élévation des côtes
Région latérale Sterno- Face antérieure du Processus mastoïde Rotation, Nerf accessoire
du cou cléido-mastoïdien manubrium sternal Ligne nuchale inclinaison,
Quart médial du bord supérieure extension de la tête
postérieur de la clavicule Élévation de la
clavicule et du
sternum
Scalènes : Processus transverses de Première et deuxième Rotation, Plexus cervical
– antérieur C2–C7 côtes inclinaison du cou
– moyen Élévation des
– postérieur côtes 1–2
Muscles plats Grand dorsal Processus épineux de T7–L5 Lèvre médiale du sillon Extension, Nerf thoracodorsal
du dos Sacrum intertuberculaire de adduction et
Quart postérieur de la l'humérus rotation médiale
crête iliaque du bras
Face externe des côtes 9–12 Élévation des côtes
Muscles Droit de l'abdomen Bord supérieur du pubis Cartilages costaux 5–7 Flexion du tronc Nerfs intercostaux
antérolatéraux Processus xiphoïde Abaissement des 7–11
de l'abdomen côtes
Oblique externe de Face externe Crête iliaque Flexion et rotation Nerfs intercostaux
l'abdomen des côtes 5–12 Ligament inguinal du tronc 7–12
Pubis Presse abdominale Nerf
Ligne blanche Abaissement des ilio-hypo-gastrique
côtes
Oblique interne de Fascia thoracolombaire Bord inférieur des Flexion et rotation Nerfs intercostaux
l'abdomen Crête iliaque côtes 9–12 du tronc 8–12
Ligament inguinal Ligne blanche Presse abdominale Nerf
Pubis Abaissement des ilio-hypo-gastrique
côtes Nerf ilio-inguinal

10
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

femme, la respiration abdominale est pratiquement exclu- La plèvre, plan de glissement


sive chez le nouveau-né, dont les côtes sont horizontales.
En inspiration forcée, lors d'un effort physique intense pneumothoracique
ou en cas de bronchopneumopathie obstructive, le La plèvre est une membrane séreuse dérivée du cœlome
diaphragme peut s'abaisser de 6 à 10 cm. La capacité embryonnaire et destinée à faciliter le glissement du pou-
thoracique est encore accrue par l'activation des muscles mon sur les parois thoraciques. La plèvre du poumon
inspirateurs accessoires, dont les scalènes, les sterno-cléido- gauche est totalement indépendante de celle du poumon
mastoïdiens et les pectoraux, ainsi que les muscles érec- droit (fig. 1.4).
teurs du rachis qui redressent la colonne thoracique. La plèvre est un sac sans ouverture invaginé sur lui-
Indépendamment de l'activité respiratoire, la hauteur du même. On lui distingue un feuillet viscéral et un feuillet
diaphragme est tributaire de la distension ou du volume pariétal, qui se continuent l'un dans l'autre au niveau du
des viscères abdominaux. Elle varie aussi en fonction de la hile du poumon.
posture. En position debout et davantage encore en posi- Le feuillet viscéral de la plèvre adhère intimement au
tion assise, le diaphragme est plus bas et ses mouvements poumon qu'il recouvre dans toute son étendue, sauf au
ont une amplitude inférieure à celle obtenue en décubitus. niveau du hile où il se réfléchit sur les bronches et les vais-
En expiration, le diaphragme se relâche et retrouve sa seaux pour se continuer dans le feuillet pariétal. Il s'insinue
position initiale, assisté par la pression abdominale. L'air est dans les scissures interlobaires de telle manière que deux
chassé des poumons, dont la rétraction élastique favorise lobes voisins sont séparés par un double feuillet pleural et
la diminution de pression intrathoracique et le retour à la glissent ainsi l'un sur l'autre.
normale des dimensions thoraciques. Passive au repos, l'ex- Le feuillet pariétal de la plèvre revêt, dans toute son éten-
piration devient active quand elle est forcée, sous l'action due, la cavité où se loge le poumon. En fonction de ses rap-
des muscles antérolatéraux de l'abdomen qui accroissent ports topographiques, il est divisé en quatre secteurs.
la pression intra-abdominale, refoulent le diaphragme et En bas, la plèvre diaphragmatique s'étale sur la coupole
abaissent la cage thoracique. diaphragmatique et y adhère intimement.

1
3 5
3

4
7

2
6 2
6

A B

Fig. 1.4
Loges pleuropulmonaires et récessus pleuraux.
Vues : latérale de la loge pleuropulmonaire droite (A) et antérieure des deux loges ouvertes et du médiastin (B).
1. Plèvre pariétale costale ouverte. 2. Plèvre pariétale diaphragmatique. 3. Plèvre viscérale recouvrant les lobes supérieur, moyen et inférieur
du poumon droit. 4. Plèvre pariétale médiastinale. 5. Réflexion de la plèvre pariétale sur la plèvre viscérale au-devant du hile. 6. Récessus
costodiaphragmatique. 7. Récessus costomédiastinal.
Source : Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant la médecine opératoire. Atlas. Tome IV : planches 3 et 4. Paris : C. Delaunay ; 1836.

11
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

En haut, la plèvre cervicale forme un cul-de-sac appelé pour faciliter leur glissement réciproque. L'accolement des
« dôme pleural » qui se moule exactement sur le sommet feuillets pleuraux rend dès lors les poumons solidaires de
du poumon et déborde en avant, de 2 à 3 cm environ, la leur paroi thoracique qu'ils accompagnent dans les mouve-
moitié antérieure de la première côte. Sur la plèvre cervi- ments alternés de dilatation et de rétraction engendrés par
cale s'implantent des faisceaux musculaires et fibreux rudi- les muscles ventilatoires.
mentaires formant le diaphragme cervicothoracique de D'origine splanchnopleurale, la plèvre viscérale est irri-
Bourgery ; ils rattachent le sommet du sac pleural à la sep- guée par les vaisseaux bronchiques. La plèvre pariétale,
tième vertèbre cervicale et à la première côte et constituent provenant de la somatopleure, est tributaire des vaisseaux
ainsi l'appareil suspenseur de la plèvre. sanguins des parois correspondantes, c'est-à-dire les artères
Du côté médial, la plèvre médiastinale répond aux dif- intercostales, thoracique interne, diaphragmatique supé-
férents organes du médiastin. Se moulant sur le péricarde rieure et médiastinales. La plupart des veines pleurales
et les gros vaisseaux, elle se réfléchit sur la plèvre viscérale aboutissent dans les veines azygos et, de là, gagnent la veine
autour de la racine du poumon, sauf en dessous de celle-ci cave supérieure.
où elle forme deux replis frontaux qui, en s'accolant, consti- Le drainage lymphatique de la plèvre viscérale se confond
tuent le ligament pulmonaire. avec celui du poumon. Les vaisseaux lymphatiques de
Latéralement, la plèvre costale, épaisse, tapisse la face la plèvre pariétale se rendent aux nœuds lymphatiques
interne des côtes et des espaces intercostaux, depuis la médiastinaux, aux lymphatiques diaphragmatiques et aux
face postérieure du sternum jusqu'aux articulations cos- troncs intercostaux.
tovertébrales. Elle y adhère étroitement par l'intermé- Les nerfs de la plèvre viscérale proviennent des plexus
diaire d'une fine couche de tissu conjonctif lâche, le fascia pulmonaires. Ceux de la plèvre pariétale viennent des
endothoracique. nerfs intercostaux et, accessoirement, des nerfs phré-
La continuité de ces différents secteurs est marquée par nique et vague, ainsi que du segment thoracique du tronc
la présence de culs-de-sac. Le récessus costomédiastinal sympathique.
correspond au bord antérieur du poumon, où la plèvre
costale se continue dans la plèvre médiastinale. Le récessus,
à droite, s'étend à la face postérieure du sternum jusque sur Anatomie systématique
la ligne médiane. À gauche, marqué en bas par l'encoche
cardiaque, il s'insinue derrière le bord latéral du sternum, de l'arbre bronchopulmonaire
devant le sac péricardique, sans toutefois atteindre le plan
médian. Dans l'angle costodiaphragmatique, la plèvre forme L'arbre bronchopulmonaire rassemble les voies aériennes
un diverticule mince et profond, le sinus costodiaphrag- inférieures et est contenu dans le thorax. Il comprend
matique, qui descend beaucoup plus bas que la base pul- d'abord une zone de conduction, composée de la trachée
monaire. En forme de gouttière angulaire semi-circulaire, et des bronches principales, ainsi que des ramifications
ce récessus constitue la partie la plus déclive de la cavité bronchiques intrapulmonaires. Outre le passage de l'air, ces
pleurale. Il représente, par conséquent, le site habituel où conduits en assurent l'humidification, le réchauffement et
se collecte le liquide pleural lorsqu'il est produit en excès. l'épuration des particules les plus volumineuses. Ils abou-
Suivant approximativement le bord inférieur du cintre tissent ensuite aux bronchioles terminales qui donnent
costal en avant, il s'étend en arrière jusqu'au niveau de la accès à la zone respiratoire, ou étage alvéolaire.
première vertèbre lombale.
Ensemble, les feuillets viscéral et pariétal délimitent la La trachée et les bronches
cavité pleurale qui, dans les conditions normales, est vir-
tuelle et en légère dépression par rapport à la pression
principales
atmosphérique, grâce aux forces d'expansion de la cage Le conduit trachéobronchique s'étend du cartilage cri-
thoracique et d'élasticité du poumon qui s'y opposent. coïde au hile du poumon. Il est initialement constitué par
La cavité pleurale contient en outre quelques millilitres de un conduit unique, la trachée. Médian, ce canal occupe
liquide pleural, produit par les cellules mésothéliales. Par d'abord le cou, puis il pénètre dans le thorax où il se divise
sa tension superficielle, ce film liquidien accole les feuil- en deux bronches principales, une droite et une gauche, qui
lets pariétal et viscéral l'un à l'autre, tout en les lubrifiant se rendent aux poumons correspondants (fig. 1.5).

12
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

A B

C D
Fig. 1.5
Arbre trachéobronchique et segments pulmonaires.
A. Vue antérieure :
1. cartilage thyroïde ; 2. cartilage cricoïde ; 3. trachée ; 4. carina ; 5. bronche principale droite ; 6. bronche principale gauche ; 7. bronche
lobaire supérieure droite et ses bronches segmentaires apicale, antérieure et postérieure ; 8. bronche lobaire moyenne droite et ses bronches
segmentaires latérale et médiale ; 9. bronche lobaire inférieure droite et ses bronches segmentaires apicale, basale médiale, basale latérale,
basale antérieure et basale postérieure ; 10. bronche lobaire supérieure gauche ; 11. tronc ascendant et ses bronches segmentaires apicale,
antérieure et postérieure ; 12. tronc descendant et ses bronches segmentaires supérieure et inférieure ; 13. bronche lobaire inférieure gauche et
ses bronches segmentaires apicale, basale antérieure, basale postérieure et basale latérale.
B. Image histologique de la paroi trachéale en coupe transversale :
1. tunique cartilagineuse ; 2. épithélium pseudo-stratifié cilié ; 3. chorion ; 4. acini glandulaires ; 5. vaisseaux sanguins.
C et D. Vues antérieure (C) et postérieure (D) des poumons en reconstruction 3D par imagerie médicale :
– lobe supérieur droit : 1. segment apical ; 2. segment antérieur ; 3. segment postérieur ;
– lobe moyen : 4. segment latéral ; 5. segment médial ;
– lobe inférieur droit : 6. segment apicobasal ; 7. segment antérobasal ; 8. segment latérobasal ; 9. segment postérobasal ; 10. segment
médiobasal ;
– lobe supérieur gauche : 11. segment apical ; 12. segment antérieur ; 13. segment postérieur ; 14. segment lingulaire supérieur ; 15. segment
lingulaire inférieur ;
– lobe inférieur gauche : 16. segment apicobasal ; 17. segment antérobasal ; 18. segment latérobasal ; 19. segment postérobasal.
Sources : fig. 1.5a tirée de Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant la médecine opératoire. Atlas. Tome IV : planche 6. Paris : C. Delaunay ; 1836.
Fig. 1.5c et d fournies par le Dr R. Menten, cliniques universitaires Saint-Luc.

13
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

La trachée La vascularisation de la trachée est tributaire des vais-


seaux thyroïdiens inférieurs. Son drainage lymphatique
Dans la cavité thoracique, la trachée occupe le plan sagittal
s'effectue par les nombreux nœuds péritrachéaux. Son
médian. Elle suit toutefois un trajet légèrement oblique, en
innervation est assurée par le nerf vague et la chaîne
bas et en arrière. Au niveau du bord supérieur du manu-
sympathique.
brium sternal, elle est ainsi située à 1 cm de profondeur de
la peau cervicale. À sa bifurcation terminale, plus profonde,
elle est séparée de la peau par une distance d'environ 7 cm.
Les bronches principales
Sur tout son trajet, elle reste entourée d'une gaine cellulo- La division de la trachée en deux bronches principales est
graisseuse qui favorise ses mouvements. Sa face antérieure située à hauteur de la troisième ou de la quatrième vertèbre
est en rapport avec l'isthme thyroïdien, la veine brachiocé- thoracique, en arrière et au-dessus de la bifurcation du tronc
phalique gauche, le thymus et le manubrium sternal. Plus artériel pulmonaire. Elle est entourée par de nombreux
bas, elle répond au tronc artériel brachiocéphalique, à l'ar- nœuds lymphatiques dits inter- ou latérobronchiques et
tère carotide commune gauche et à la crosse de l'aorte qui par les branches des nerfs vagues qui constituent le plexus
y détermine une empreinte. En arrière, la trachée regarde pulmonaire. Le dernier cartilage de la trachée, conformé
l'œsophage. À droite, elle rencontre de haut en bas la plèvre en V ou en Y, est plus ou moins complètement divisé en
médiastinale droite, la veine cave supérieure et la crosse de deux parties par la carina, éperon saillant dirigé en bas et en
la veine azygos. Le versant gauche de la trachée est en rap- arrière, et bien visible en endoscopie.
port avec la plèvre médiastinale gauche, la crosse de l'aorte Les bronches principales se trouvent dans le médiastin
et le nerf laryngé récurrent gauche. moyen et s'écartent l'une de l'autre en formant entre elles
La trachée est un cylindre de 10 à 12 cm de longueur et un angle de 75 à 85°. La bronche principale droite est com-
de 1,5 à 2 cm de diamètre, légèrement aplati dans le sens prise entre la veine cave supérieure qui la recouvre en avant,
antéropostérieur et dont la paroi postérieure est plane. Elle la veine azygos qui court à sa face postérieure, et la crosse de
se compose d'une tunique externe fibrocartilagineuse et cette dernière qui surplombe sa face supérieure. Son trajet
d'une tunique interne muqueuse. La tunique externe est est presque vertical, oblique en direction latérale et surtout
formée de 15 à 20 cartilages en fer à cheval dont les extré- inférieure, dans le prolongement immédiat de la trachée.
mités libres sont dirigées vers l'arrière. Ces cartilages, dont Sa longueur ne dépassant pas 25 mm, ceci explique la plus
la hauteur varie de 2 à 4 mm, sont enfouis dans une lame grande fréquence des fausses routes bronchiques droites.
fibreuse riche en élastine qui les unit les uns aux autres. Croisée d'avant en arrière, puis de haut en bas par la crosse
Cette disposition confère à la trachée la flexibilité néces- de l'aorte, la bronche principale gauche est en rapport
saire à son étirement lors de l'inspiration et à son raccour- constant avec l'œsophage qui passe à sa face postérieure.
cissement pendant l'expiration. En arrière, cette membrane Longue d'environ 5 cm, elle a un trajet presque horizontal
fibroélastique est doublée d'une couche musculaire lisse, qui longe le bord supérieur du cœur pour atteindre le hile
le muscle trachéal, qui relie les extrémités des anneaux du poumon gauche. Son calibre est légèrement inférieur
cartilagineux. Chacun de ceux-ci agit dès lors comme un à celui de la bronche principale droite, car le volume du
ressort élastique, tendu par le muscle trachéal, et assure poumon droit est toujours plus important que celui du
la compliance dynamique de la lumière trachéale. Dans poumon gauche, en partie refoulé par le cœur.
la phase expiratoire, la contraction du muscle trachéal Les bronches principales présentent une structure ana-
augmente la pression et participe à l'expulsion de l'air. tomique similaire à celle de la trachée, mais les anneaux
Lors de la toux, elle contribue activement à propulser le cartilagineux y sont moins hauts et souvent incomplets. En
mucus vers le pharynx. La tunique muqueuse, qui tapisse outre, elles sont entourées d'une couche complète de fibres
la face interne de la tunique fibrocartilagineuse, est de type musculaires lisses disposées en spirale entre la muqueuse
respiratoire. Son épithélium pseudo-stratifié cilié permet et le cartilage. Elles sont vascularisées par les artères bron-
la remontée du mucus et des particules de poussière. Le chiques, branches collatérales de l'aorte thoracique qui se
chorion, bien vascularisé, est riche en fibres élastiques et distribuent également aux poumons (fig.  1.6). Les veines
contient des glandes mixtes qui sécrètent du mucus ainsi bronchiques rejoignent les veines azygos. Le drainage lym-
que du lysozyme, à effet bactéricide. Les amas lymphoïdes phatique est assuré par des nœuds disposés autour des
enfouis dans le chorion produisent des anticorps, notam- bronches (fig. 1.7). Les nerfs émanent, pour la plupart, du
ment des IgA. plexus pulmonaire postérieur (fig. 1.8).

14
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

A B

C
Fig. 1.6
Vascularisation de l'arbre bronchopulmonaire.
A. Vue postérieure.
B. Reconstruction par imagerie médicale.
C. Vue supérieure montrant l'arbre intrapulmonaire après dissection des lobes supérieurs gauche et droit.
1. Artère thyroïdienne inférieure. 2. Artères bronchiques. 3. Veines bronchiques. 4. Tronc pulmonaire. 5. Artère pulmonaire droite. 6. Artère
pulmonaire gauche. 7. Veines pulmonaires droites. 8. Veines pulmonaires gauches. 9. Crosse de l'aorte. 10. Veine cave supérieure. 11. Crosse
de la veine azygos. 12. Trachée. 13. Œsophage ; 14. Recessus costomédiastinal gauche.
Sources : fig. 1.6a et c tirées de Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant la médecine opératoire. Atlas. Tome IV : planches 5 et 8. Paris :
C. Delaunay ; 1836. Fig. 1.6b fournie par le Dr R. Menten, cliniques universitaires Saint-Luc.

Les poumons et leurs segments des bronches, puis la vascularisation et l'innervation de ces
organes.
anatomiques
Appendus aux extrémités du conduit trachéobronchique, Les poumons
les poumons contiennent la partie terminale de la zone Les poumons sont situés dans la cavité thoracique et se
conductrice dont la segmentation conduit à la zone res- moulent exactement sur ses parois ostéomusculaires. Ils
piratoire où s'opère l'hématose. Nous envisagerons suc- sont écartés l'un de l'autre par le médiastin, espace étroit en
cessivement la description des poumons, la segmentation sablier contenant différents organes qui occupent le centre
15
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

5
3

Fig. 1.7
Drainage lymphatique des plèvres et des poumons.
1. Nœuds bronchopulmonaires. 2. Nœuds trachéobronchiques. 3. Nœuds paratrachéaux. 4. Nœuds intercostaux. 5. Canal thoracique.
6. Conduit lymphatique droit.
Source : Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant la médecine opératoire. Atlas. Tome IV : planche 91. Paris : C. Delaunay ; 1836.

du thorax ou ne font que traverser le défilé interpulmo- respiratoire est établie tandis qu'il est supérieur à l'unité
naire (voir fig. 1.4). avant la première inspiration.
De couleur rouge foncé à la naissance, les poumons Chaque poumon a la forme d'un demi-cône. Sa base,
s'éclaircissent peu à peu pour devenir roses et même blancs large et concave, se moule sur la coupole diaphragmatique
au début de l'âge adulte. Ultérieurement, les poussières et correspondante et, par son bord latéral semi-circulaire, s'in-
les fumées dessinent des marbrures noires plus ou moins sinue plus ou moins loin dans le récessus costodiaphrag-
abondantes à leur surface. matique. Son sommet ou apex est arrondi et déborde
Le volume des poumons est en rapport avec la capacité de 20 à 25 mm l'ouverture supérieure du thorax. Il est en
de la cavité thoracique ou, ce qui revient au même, avec le rapport latéralement avec la première côte, en avant avec
degré de réplétion des alvéoles pulmonaires. La présence l'artère subclavière et en arrière avec le ganglion stellaire.
du cœur entraîne une réduction de volume du poumon La face latérale, convexe et lisse, répond à la face interne
gauche de l'ordre de 20 % par rapport à celui du poumon des côtes et aux espaces intercostaux. Elle présente une pro-
droit. Ensemble, les poumons pèsent environ 1 kg, mais leur fonde scissure qui la traverse entièrement, suivant un trajet
poids spécifique est inférieur à l'unité lorsque la fonction oblique en bas et en avant. Appelée scissure oblique, elle
16
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

inférieur. Le poumon gauche, pourvu d'une seule scissure,


n'a que deux lobes, un supérieur et un inférieur.
La face médiale des poumons, concave, est en rapport
avec le médiastin. Encore appelée « face médiastinale », elle
présente le hile pulmonaire qui est situé à l'union de son
quart postérieur et de ses trois quarts antérieurs, à égale dis-
tance du sommet et de la base du poumon. Au niveau du
2
hile, on observe successivement, d'avant en arrière, l'artère
pulmonaire, les deux veines pulmonaires, la bronche princi-
1 pale et les vaisseaux et nerfs bronchiques.
Le bord antérieur du poumon, mince et presque tran-
chant, est en rapport avec le plastron sternocostal. Celui
du poumon gauche est échancré à sa partie inférieure par
l'incisure cardiaque, qui répond à la pointe du cœur. Le
bord postérieur, très épais et régulièrement arrondi, occupe
l'angle costovertébral.
10
3

5
La segmentation bronchique
4 Pénétrant dans les poumons, les bronches principales se
6 divisent rapidement en bronches lobaires pour chacun
des lobes, puis en bronches segmentaires qui s'épuisent
7 progressivement au fil des divisions pour devenir de petits
8
9 conduits aériques, de moins de 1 mm de diamètre, appelés
«  bronchioles » (voir fig. 1.5).
Dans le parenchyme pulmonaire, l'arborisation des
artères pulmonaires suit celle de l'arbre bronchique, dont
l'organisation spatiale est constante. Ainsi chaque poumon
est-il divisé non seulement en plusieurs lobes, mais aussi
en plusieurs segments, qui reçoivent chacun une bronche
segmentaire, une branche de l'artère pulmonaire, accom-
Fig. 1.8 pagnée de la veine correspondante qui s'en écarte progres-
Innervation de l'appareil bronchopulmonaire. sivement, ainsi que des vaisseaux bronchiques, satellites du
1. Nerf phrénique droit. 2. Nerf vague droit. 3. Plexus pulmonaire
droit. 4. Plexus œsophagien droit. 5. Tronc sympathique thoracique conduit aérique.
droit. 6. Nerf et vaisseaux intercostaux droits. 7. Veine azygos. Le poumon droit possède trois lobes et dix segments
8. Canal thoracique. 9. Aorte thoracique. 10. Œsophage. dont la disposition peut être décrite comme suit. La
Source : Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme comprenant
la médecine opératoire. Atlas. Tome III : planche 43. Paris : C. Delaunay ; 1844. bronche principale droite amène l'air respiratoire aux
trois lobes du poumon droit par l'intermédiaire de trois
bronches dites « lobaire supérieure », « lobaire moyenne »
est simple sur le poumon gauche et bifurquée sur le pou- et « lobaire inférieure ». La bronche lobaire supérieure droite
mon droit (voir fig. 1.4). Un peu au-dessous de son origine, se détache de la bronche principale à environ 2,5  cm de
la scissure oblique droite envoie en effet un prolongement la bifurcation trachéale. C'est la seule bronche qui naît au-
horizontal en direction du bord antérieur du poumon. dessus du point de passage de l'artère pulmonaire et on
Cette nouvelle scissure, propre au poumon droit, est appe- l'appelle parfois, pour cette raison, la « bronche éparté-
lée scissure transversale. Profondes, les scissures s'étendent rielle ». Elle s'enfonce, après un trajet vertical, dans le lobe
jusqu'au voisinage du hile et divisent ainsi chaque poumon supérieur où elle se divise en trois bronches segmentaires,
en fragments distincts, appelés lobes. Elles-mêmes, pour une apicale, une antérieure et une postérieure, pour les seg-
cette raison, prennent le nom de scissures interlobaires. ments de même nom. La bronche lobaire moyenne quitte
Le poumon droit, qui possède deux scissures, est de cette la bronche principale à 3 cm de la bronche épartérielle. Elle
manière divisé en trois lobes, un supérieur, un moyen et un se divise, après un court trajet, en bronches segmentaires
17
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

latérale et médiale pour les deux segments moyens homo- au passage de l'air. Ces fibres musculaires alternent respec-
nymes. La bronche lobaire inférieure droite se continue tivement relâchement et contraction lors de l'inspiration et
dans la même direction générale que la bronche principale. de l'expiration. Le spasme bronchique résulte d'une stimu-
Très courte, elle se résout rapidement en cinq bronches lation excessive de leur contraction par des médiateurs tels
segmentaires que l'on distingue en apicale ou bronche que la sérotonine ou l'histamine. L'épithélium bronchique
de Nelson, basale médiale ou bronche cardiaque, basale devient progressivement cylindrique cilié, puis cubique, les
latérale, basale antérieure et basale postérieure. Ces cinq cils se raréfient et les cellules caliciformes, productrices de
bronches segmentaires ventilent les cinq segments basaux mucus, disparaissent. Les particules parvenant au-delà des
droits dits apicobasal, médiobasal ou cardiaque, latérobasal, bronchioles et dont le diamètre est inférieur à 3 μm sont
antérobasal et postérobasal. détruites par les macrophages des alvéoles pulmonaires.
Muni d'une seule scissure et plus petit que le poumon
droit, le poumon gauche possède deux lobes et neuf seg- La vascularisation et l'innervation
ments dont la disposition est organisée comme suit. La
bronche principale gauche se divise après un parcours hori-
des poumons
zontal d'environ 5 cm en une bronche lobaire supérieure Les poumons possèdent deux groupes de vaisseaux san-
et une bronche lobaire inférieure. La bronche lobaire supé- guins (voir fig. 1.6). Le premier est représenté par l'artère et
rieure gauche se porte latéralement et légèrement en haut, les veines pulmonaires, qui se capillarisent au niveau des
puis elle se divise, après un trajet de 10 à 15 mm, en un alvéoles. Assurant l'hématose, ces vaisseaux sont en rap-
tronc ascendant et un tronc descendant. Le tronc ascen- port respectivement avec le ventricule droit et l'oreillette
dant ou culminal se divise en trois bronches segmentaires, gauche. Constituant la « petite circulation », ils sont respon-
une apicale, une antérieure et une postérieure, homologues sables de la vascularisation fonctionnelle, à basse pression,
des bronches nées de la division de la bronche lobaire supé- des poumons. Le second groupe de vaisseaux, quantitati-
rieure droite. Le tronc descendant ou lingulaire, homologue vement moins important, est formé par les artères et les
de la bronche lobaire moyenne droite, suit un trajet oblique veines bronchiques qui sont les vaisseaux nourriciers des
en direction inférieure, antérieure et latérale. Il gagne ainsi poumons dont ils assurent la vascularisation trophique. De
la partie inférieure du lobe supérieur, qui est parfois net- nombreuses anastomoses existent entre ces deux réseaux.
tement individualisée et à laquelle on donne le nom de Après avoir pénétré dans le hile du poumon, l'artère pul-
« lingula ». Il s'y termine par deux bronches segmentaires, monaire, droite ou gauche, s'enroule en pas de vis autour de
dites « lingulaire supérieure » et « lingulaire inférieure ». La la bronche principale correspondante et se ramifie ensuite
bronche lobaire inférieure gauche prolonge la bronche prin- de la même manière que celle-ci. Chaque bronche est
cipale et donne quatre bronches segmentaires, une apicale ainsi accompagnée par une artère jusqu'aux canaux alvéo-
ou bronche de Nelson et trois basales qui se distinguent laires où elle se capillarise. Cette association systématique
en antérieure, latérale et postérieure. Le poumon gauche explique l'image en lunettes observée par les radiologues
est dépourvu de bronche segmentaire basale médiale. En qui voient côte à côte deux surfaces arrondies de même
termes de segments, le lobe inférieur du poumon gauche, taille, l'une radio-transparente et l'autre plus opaque, cor-
privé de segment médiobasal par l'empreinte qu'y occa- respondant respectivement à la section transversale d'une
sionne le cœur, comporte donc quatre unités, dites apico- bronche et d'une artère pulmonaire.
basale, antérobasale, postérobasale et latérobasale. Les veines pulmonaires, contenant du sang oxygéné,
Alors que les bronches lobaires et segmentaires et leurs proviennent du lit capillaire péri-alvéolaire et du réseau
ramifications ultérieures sont encore pourvues d'anneaux entourant les ramifications bronchiques. Elles se réunissent
cartilagineux incomplets, les bronchioles en sont dépour- pour former des troncs de plus en plus volumineux dont le
vues (fig.  1.9). La disparition des plaques cartilagineuses trajet, périphérique dans chaque segment, s'écarte sensible-
marque le début des petites voies aériennes, siège des ment de celui des bronches et des artères et chemine dans
bronchopneumopathies obstructives d'origine constric- des septa conjonctifs.
tive. En effet, leur paroi membraneuse reste encerclée de Les artères bronchiques naissent de la partie la plus éle-
fibres élastiques, responsables de la rétraction spontanée vée de l'aorte thoracique. Il en existe généralement une
du poumon. La proportion relative de fibres musculaires pour le poumon droit et une ou deux pour le poumon
lisses, dont le tonus est sous contrôle neuro-hormonal, gauche. Elles franchissent le hile pulmonaire en arrière de la
augmente au fur et à mesure que le calibre des conduits bronche principale. Les veines bronchiques, au nombre de
diminue, permettant des variations notables de résistance deux ou trois par poumon, suivent les artères bronchiques.
18
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

Fig. 1.9
Anatomie microscopique de l'arbre bronchique.
A. Division schématique des bronches.
B. Représentation schématique d'un lobule pulmonaire.
C. Bronche segmentaire.
D. Bronchiole.
E. Bronchiole terminale et canal alvéolaire.
F. Alvéole pulmonaire.
AB : artériole bronchique ; AP : ramification de l'artère pulmonaire ; BR : bronchiole respiratoire ; BS : bronche segmentaire : BT : bronchiole
terminale ; C : capillaire ; CA : canal alvéolaire ; VB : veinule bronchique ; VP : ramification de la veine pulmonaire ; M : macrophage ;
PI : pneumocyte de type I ; PII : pneumocyte de type II.

19
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Se drainant habituellement dans les veines azygos, elles se trajet par une branche de division de l'artère pulmonaire.
jettent parfois directement dans la veine cave supérieure. Elle forme, avec les cavités alvéolaires qui dépendent d'elle,
Les lymphatiques du poumon rejoignent le hile où une unité fonctionnelle appelée « acinus pulmonaire ».
sont amassés les ganglions hilaires (voir fig. 1.7). Les relais
ultérieurs sont représentés par les ganglions intertrachéo- Les alvéoles pulmonaires
bronchiques situés sous la carina, puis par les ganglions
latérotrachéaux et ceux de la cheminée médiastinale pos- Les canaux alvéolaires s'ouvrent sur cinq à six sacs alvéo-
térieure. Le drainage terminal suit les troncs lymphatiques laires, véritables grappes d'alvéoles (voir fig.  1.9). Chaque
collecteurs bronchomédiastinaux gauche et droit qui, poumon compte environ 150 millions d'alvéoles, siège de
respectivement, se jettent dans le canal thoracique et la la majeure partie des variations volumétriques liées à la
grande veine lymphatique. ventilation. Elles offrent ainsi une surface d'environ 140 m2
L'arbre bronchique et les alvéoles abritent les terminai- aux échanges gazeux. Cependant, les différentes régions
sons de fibres nerveuses réceptrices qui sont relayées au pulmonaires ne sont pas mobilisées de manière équiva-
système nerveux central par le nerf vague (voir fig.  1.8). lente. Au repos, l'expansion inspiratoire concerne surtout
Ce dernier fournit aussi des fibres effectrices parasympa- les territoires superficiels costaux et diaphragmatiques,
thiques dont les terminaisons cholinergiques provoquent directement en rapport avec les structures pariétales les
la contraction des muscles bronchiques et bronchiolaires plus mobiles.
ainsi que la sécrétion glandulaire et la vasodilatation. Des Les alvéoles sont des cavités arrondies ou polyédriques
fibres effectrices orthosympathiques proviennent des pre- dont le diamètre varie de 100 à 300 μm au cours de la res-
miers ganglions prévertébraux thoraciques. La stimulation piration. D'origine endoblastique, elles se forment à partir
de leurs terminaisons adrénergiques relâche les muscles de la 24e semaine de vie intra-utérine et se développent
bronchiques, inhibe les sécrétions et provoque une jusqu'à l'âge de 8 ans. Leur paroi mince, appelée « septum
vasoconstriction. interalvéolaire » (fig.  1.10), est constituée d'un épithélium
pavimenteux et d'un interstitium qui contient des macro-
phages, un réseau capillaire très dense et des fibres élas-
L'étage alvéolaire tiques responsables de la rétraction spontanée du poumon
lors de l'expiration. L'équilibrage de la pression entre les
Chaque bronchiole se divise en une à trois bronchioles ter-
alvéoles est assuré par des pores interalvéolaires, orifices
minales qui, à leur tour, se divisent chacune en trois bron-
d'environ 1 μm de diamètre qui font communiquer entre
chioles respiratoires, marquant la transition entre la zone
elles les alvéoles voisines.
de conduction et la zone respiratoire (voir fig. 1.9). Chaque
Les cellules de l'épithélium alvéolaire sont de deux types.
bronchiole respiratoire donne naissance à une dizaine
Les pneumocytes de type I sont responsables des échanges
de canaux alvéolaires dans lesquels s'abouchent les sacs
gazeux entre la lumière alvéolaire et les capillaires adjacents.
alvéolaires.
Les pneumocytes de type II produisent le surfactant, com-
L'unité morphologique du poumon, ou lobule pul-
plexe lipoprotéique comparable à un détergent, qui dimi-
monaire, est un territoire pyramidal entièrement délimité
nue la tension superficielle du mince film liquidien tapissant
par des septa conjonctivo-élastiques, dont le sommet est
les cavités alvéolaires et empêche ainsi leur affaissement
orienté vers le hile et la base appliquée contre la plèvre.
complet lors de l'expiration. En outre, le surfactant crée
Il comprend le territoire d'une bronchiole et de ses
un environnement défavorable à la prolifération de micro-
ramifications.
organismes et est riche en antioxydants. Produit au 7e mois
de vie intra-utérine, il fait défaut chez les prématurés, qui
Les bronchioles respiratoires présentent dès lors une détresse respiratoire connue sous
Les bronchioles respiratoires sont courtes et leur diamètre le nom de « maladie des membranes hyalines ».
varie de 0,5 à 1 mm. Elles sont déjà le siège d'échanges Les macrophages alvéolaires proviennent des mono-
respiratoires, car leur paroi est interrompue par l'évagina- cytes sanguins. Également appelés « cellules à poussières »,
tion d'alvéoles (voir fig.  1.9). Leur paroi est formée d'un ils phagocytent les plus petites particules inhalées parve-
épithélium cubique simple reposant sur un chorion qui nant aux alvéoles. Ces cellules ont une action bactéricide
ne contient plus que quelques cellules musculaires lisses puissante et assurent la stérilité des alvéoles. Quand la
annulaires, ainsi que des fibres de collagène et d'élastine. La concentration de particules non dégradables dépasse
bronchiole respiratoire est toujours accompagnée dans son la capacité des macrophages, ceux-ci meurent. Certains
20
1. Éléments d'anatomie thoracopulmonaire

sanguin, mais elle peut intervenir dans la diffusion d'autres


En
substances volatiles comme l'eau, l'alcool, les solvants, les
gaz anesthésiques ou toxiques, la fumée de cigarette, etc.
Alvéole
Alvéole
Alvéole En PII Points clés
PI ■
La mobilité respiratoire de la paroi thoracique
En
repose sur sa nature composite et sur la contri-
C C bution coordonnée de tous ses éléments osseux,
C
C articulaires et musculaires.
Alvéole
C En

La plèvre est le chaînon intermédiaire essentiel
Alvéole qui assure la synergie entre la paroi thoracique et
A les viscères bronchopulmonaires.

La zone conductrice de l'arbre respiratoire trans-
porte l'air tout en le conditionnant en vue des
Capillaire
échanges gazeux.

La zone respiratoire, surface épithéliale très
étendue tapissant les alvéoles pulmonaires, est le
En
siège des échanges gazeux avec le lit capillaire pul-
PI monaire. Sa tendance au collapsus, due aux fibres
PI
B MB Alvéole élastiques de son interstitium, est contrecarrée
par la production de surfactant.
Fig. 1.10
Septum interalvéolaire et membrane alvéolocapillaire.
A. Alvéoles voisines séparées par des septa contenant de nombreux
capillaires.
B. Agrandissement en microscopie électronique de la membrane
alvéolocapillaire encadrée en A. Pour en savoir plus
C : capillaire ; En : cellule endothéliale ; MB : membrane basale ; PI :
pneumocyte de type I ; PII : pneumocyte de type II. Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme com-
prenant la médecine opératoire. Atlas, Tome I. Paris : C. Delaunay ;
1831.
d'entre eux restent sur place, d'autres sont drainés vers les
Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme com-
lymphatiques bronchiques, d'autres enfin migrent vers la prenant la médecine opératoire. Atlas, Tome II. Paris : C. Delaunay ;
plèvre, entraînant les particules dans les septa conjonctifs, 1831.
la paroi des bronches et la plèvre, et donnent à la surface Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme com-
pulmonaire un aspect marbré. prenant la médecine opératoire. Atlas, Tome IV. Paris : C. Delaunay ;
1836.
L'accumulation de débris, comme les poussières miné- Bourgery JM, Jacob NH. Traité complet de l'anatomie de l'homme com-
rales, de micro-organismes allergisants ou infectieux ou de prenant la médecine opératoire. Atlas, Tome III. Paris : C. Delaunay ;
substances toxiques est à l'origine de syndromes dyspnéiques 1844.
connus sous le nom de « pneumopathies interstitielles », car Fawcett DW. Bloom and Fawcett, a textbook of histology. 12th ed. New
York : Chapman & Hall ; 1994.
ils affectent l'interstitium, siège des échanges gazeux.
Kamina P. Précis d'anatomie clinique. Tome III. Paris : Maloine ; 2004.
Kapandji IA. Physiologie articulaire. 3. Tronc et rachis. 5e éd. Paris :
La barrière alvéolocapillaire Maloine ; 2004.
Marieb EN. Anatomie et physiologie humaine. Paris : Pearson Education ;
La barrière alvéolocapillaire entre l'air et le sang résulte de 2005.
la proximité intime de l'épithélium alvéolaire et de l'endo- Moore KL, Dalley AF. Clinically oriented anatomy. 5th ed. Philadelphie :
thélium qui ne sont séparés que par une membrane basale Lippincott, Williams & Wilkins ; 2005.
Schuenke M, Schulte E, Schumacher U. Thieme atlas of anatomy. General
unique (voir fig.  1.10). Son épaisseur est réduite à 0,1 ou
anatomy and musculoskeletal system. Stuttgart : Thieme ; 2006.
0,2 μm. Elle facilite en priorité les échanges gazeux, c'est-à- Standring S. Gray's anatomy. The anatomical basis of clinical practice.
dire la captation de l'O2 alvéolaire et l'élimination du CO2 39th ed. Édimbourg : Elsevier, Churchill Livingstone ; 2005.

21
Chapitre 2
Notions de mécanique
thoracopulmonaire1
Pierre Delguste

PLAN DU CHAPITRE
Échangeur pulmonaire et pompe
respiratoire 24
Ventilation pulmonaire 26
Mécanique thoracopulmonaire
et ventilation mécanique 28
Action de la kinésithérapie
sur la mécanique thoraco-abdominale 29
Quelques notions de bronchomotricité 29
Actions et interactions des muscles
1
L'auteur remercie Sébastien Fosseprez pour les illustrations de ce
chapitre. respiratoires 33

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Poumons, cage thoracique, bronches, nerfs phréniques, voire étant abaissée, sauf dans des situations extrêmes.
capillaires pulmonaires, diaphragme, trachée, plèvre, L'hypoxémie isolée, véritable « marque de fabrique » des
centres respiratoires, compartiment abdominal… En vrac, pathologies de l'échangeur pulmonaire, s'explique par le fait
voici quelques éléments parmi beaucoup d'autres ayant un que l'hyperventilation des zones pulmonaires saines (non
rôle à jouer dans la respiration. atteintes par une pneumonie, par exemple) est capable
Les quelques notions, extrêmement succinctes, qui de compenser l'hypoventilation des zones malades quand
suivent tentent, à la suite de l'anatomiste, de décrire les au rejet de CO2, mais pas en ce qui concerne la diffusion
mécanismes de base qui permettent à une molécule d'O2 et le transport de l'O2. Ceci est dû en ordre principal aux
s'étant hasardeusement trouvée sur votre passage de se modes de transport des gaz respiratoires (principalement
retrouver en quelques instants au fin fond de votre poumon lié à l'hémoglobine pour l'O2 et dissout pour le CO2) et aux
avant d'être emportée par un torrent sanguin pour termi- capacités de diffusion respectives de ces gaz.
ner sa vie quelque part dans une cellule de votre foie, d'un Si l'échangeur pulmonaire a pour fonction d'assurer la
muscle de votre petit orteil ou de ce cerveau qui tente de diffusion et le transport des gaz respiratoires, il est totale-
comprendre et stocker les phrases que vous êtes en train de ment incapable, par lui-même, de remplir un rôle tout aussi
lire !… Sans omettre bien sûr le fait que cette molécule d'O2 important : le remplissage et la vidange pulmonaire entre l'air
aura croisé quelque part son cousin de mauvaise réputation, atmosphérique et le poumon. En effet, le poumon est un
le dioxyde de carbone, qui emprunte le chemin inverse. organe inerte, dépourvu d'innervation motrice susceptible de
modifier sa forme et donc de le remplir ou le vider de ses gaz
respiratoires. Au repos, c'est-à-dire en l'absence de toute force
exercée sur sa structure, le poumon prend la forme d'un petit
Échangeur pulmonaire et pompe amas de tissus, pratiquement vide de tout gaz et pas plus
respiratoire volumineux qu'un poing fermé, ramassé autour de son hile.
Au sein de l'appareil respiratoire, la forme du poumon
Échangeur pulmonaire et ses modifications géométriques durant la ventilation lui
sont données par cet autre élément essentiel du système
Le système respiratoire, c'est avant tout un « échangeur », respiratoire qu'est la pompe respiratoire.
un ensemble de structures fonctionnant selon des lois La kinésithérapie respiratoire ne dispose d'aucun moyen
physiques et chimiques permettant la diffusion et le trans- d'action directe sur le poumon malade. Elle traite ou agit
port du combustible qu'est l'O2 du poumon vers toutes les sur des symptômes : encombrement bronchique, dyspnée,
cellules du corps humain et, selon un itinéraire inverse, de déconditionnement. Pour atteindre ses objectifs, la kiné-
déverser dans les alvéoles le principal produit de déchet de sithérapie respiratoire ne peut agir que par l'intermédiaire
notre métabolisme, le dioxyde de carbone. des éléments de la pompe respiratoire.
Sous le regard du physiologiste, l'échangeur pulmonaire
est composé des voies aériennes (VA), des alvéoles pulmo-
naires et de la circulation sanguine pulmonaire. Pompe respiratoire
L'unité fonctionnelle respiratoire est représentée par l'aci-
La pompe respiratoire est constituée d'un groupe d'élé-
nus, composé d'une bronchiole respiratoire ainsi que des
ments anatomiques agissant en série et tous indispensables
sacs alvéolaires et capillaires pulmonaires qui en dépendent.
au bon fonctionnement de l'ensemble. Un dysfonction-
Ce chapitre ne traite pas de la physiologie des échanges
nement d'un quelconque de ses éléments rend caduque
gazeux, ce sujet étant évoqué au chapitre 3. Cependant,
l'action des autres.
pour la bonne compréhension des chapitres qui suivent,
Le rôle de la pompe respiratoire est d'assurer les dépla-
retenons l'essentiel :
cements des gaz respiratoires (l'air inspiré et expiré) depuis
● une situation pathologique (pneumonie, emphysème,
l'environnement extérieur vers le poumon et vice versa.
embolie pulmonaire…) atteignant un ou plusieurs élé-
ments de l'échangeur pulmonaire est responsable d'une
insuffisance respiratoire ;
Cage thoracique
● une insuffisance respiratoire se caractérise par une Elle est composée des côtes, du sternum, d'une partie de la
hypoxémie isolée : chute de la pression partielle en O2 du colonne vertébrale (D1 à D12) et du diaphragme. Elle représente
sang artériel (PaO2), la pression partielle en CO2 du sang le « contenant » de l'échangeur pulmonaire, la structure qui va
artériel (PaCO2) restant dans les limites de la normale, lui donner et modifier sa forme. Ainsi, en cas de ­déformations
24
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

importantes de la cage thoracique (cyphoscoliose grave, apla- Thorax


tissement du diaphragme), le poumon va en subir les consé-
quences et voir ses volumes également perturbés.
Poumon

Muscles respiratoires
Par elle-même, la cage thoracique n'est pas plus capable que
le poumon de modifier sa géométrie, d'augmenter ou de 1 2
diminuer ses dimensions. Ce rôle est celui des muscles res-
piratoires, souvent considérés de manière erronée comme
le moteur de la ventilation pulmonaire. Les muscles respira-
toires – diaphragme, intercostaux, scalènes, sterno-cléido-
mastoïdiens et muscles de la paroi abdominale – agissent Fig. 2.1
et interagissent afin de moduler de façon harmonieuse et Représentation schématique du système thoracopulmonaire
fonctionnelle la géométrie thoracique, tant durant l'inspira- « sans plèvre ».
tion que durant l'expiration. 1. Position de repos du poumon (< VR). 2. Position de repos du
thorax (± 75 % CPT). En absence de plèvre, le poumon n'est pas
Les actions et interactions des muscles respiratoires solidaire du thorax.
seront analysées plus en détail à la fin du chapitre.
proche de 75 % de la capacité pulmonaire totale ou CPT
Système nerveux (fig. 2.1).
En l'absence d'une structure reliant ces deux éléments,
Il est à peine nécessaire de rappeler que pour pouvoir se on comprend qu'il est totalement impossible de rendre le
contracter, les muscles nécessitent d'être stimulés. C'est le poumon solidaire du thorax et de lui permettre d'en suivre
rôle du système nerveux périphérique (nerfs phréniques, les mouvements afin de modifier ses volumes. Autrement
nerfs intercostaux, etc.) et central (moelle épinière, centres dit, sans interface poumon–thorax, pas de ventilation pul-
respiratoires et cortex cérébral), dernier élément de la monaire possible.
chaîne constituant la pompe respiratoire. La plèvre remplit ce rôle primordial dans la mécanique
thoracopulmonaire.
Interface échangeur–pompe respiratoire : Constituée de deux feuillets solidaires l'un de l'autre
rôle de la plèvre (en situation normale) dont l'un tapisse totalement la
surface des poumons (plèvre viscérale) et l'autre la sur-
Nous venons de voir que la pompe respiratoire représentait face du thorax et du diaphragme (plèvre pariétale), la
la structure capable de modifier la géométrie du poumon plèvre « oblige » le poumon et le thorax à quitter leur
et d'assurer la ventilation pulmonaire. Une structure ana- position de repos et à se situer dans une position inter-
tomique indispensable manque encore à cette description, médiaire correspondant à un équilibre parfait entre les
c'est le lien, l'interface entre le poumon en tant qu'échan- forces de recul pulmonaire et thoracique. Cette position
geur et le thorax, premier élément de la pompe respiratoire. dans laquelle les forces de recul pulmonaire et thoracique
Cette structure est la plèvre. sont égales et de sens opposé correspond à la capacité
Il est impossible de comprendre le rôle indispensable résiduelle fonctionnelle (CRF) et représente la position de
joué par la plèvre sans se rappeler quelques notions de repos de l'ensemble du système respiratoire (fig. 2.2). C'est
base relatives aux autres structures du système respiratoire. la position adoptée par un système respiratoire qui n'est
Tant le poumon que la cage thoracique sont des structures soumis à aucune action ou force extérieure (cadavre ou
élastiques, caractérisées notamment par une « position de personne curarisée).
repos » occupée par cette structure lorsqu'elle n'est soumise
à aucune force extérieure. Cette position peut être exprimée Conséquences des déficits de la pompe
par rapport au volume pulmonaire (mesurés en spirométrie)
auquel cette position correspond. respiratoire
Ainsi, la position de repos du poumon correspond à Nous avons vu plus haut que les déficits de l'échangeur pul-
un volume inférieur au volume résiduel (VR). La position monaire sont responsables d'une insuffisance respiratoire,
de repos du thorax, quant à elle, correspond à un volume elle-même stigmatisée par une hypoxémie isolée.
25
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

O O 3

Thorax
Plèvre –
5 –

O
O
2 1 Poumon 4
2 1

Fig. 2.2
Position de repos du système thoracopulmonaire. Fig. 2.3
1. Recul pulmonaire. 2. Recul thoracique (1 = 2). Système thoracopulmonaire au repos, avant l'inspiration ou en
fin d'expiration normale.
Remarque 1. Recul pulmonaire. 2. Recul thoracique (1 = 2). 3. Pression
atmosphérique. 4. Pression intrapulmonaire (3 = 4 = 0). 5. Pression
intrapleurale (P pl).
Les dysfonctionnements (graves) d'un ou plusieurs
éléments de la pompe respiratoire caractérisent 7
O
quant à eux une insuffisance ventilatoire. Cette
insuffisance du « soufflet » ne peut, par définition,
être compensée naturellement. La « marque de 4
5 –
fabrique » d'une insuffisance de la pompe respira-
toire est donc représentée par une « hypoventilation
alvéolaire », soit une hypoxémie et une hypercapnie. –
6
2
1
Ventilation pulmonaire 3

Au repos 4
Fig. 2.4
Lorsque le système respiratoire est au repos, il règne donc L'inspiration.
entre les deux feuillets pleuraux une pression négative 1. Recul pulmonaire. 2. Recul thoracique. 3. Force musculaire.
(infra-atmosphérique) due aux forces de recul thoracique 4. Thorax et poumons augmentent de volume. 5. Pression
intrapleurale (qui diminue). 6. Pression intrapulmonaire (qui
et pulmonaire transmises à la plèvre. C'est la pression intra- diminue). 7. L'air entre dans les poumons.
pleurale (P pl).
La pression régnant à ce moment à l'intérieur du pou- entre les forces de recul du thorax et du poumon est donc
mon (pression intrapulmonaire) est égale à zéro (pression rompu en faveur de celle du thorax. Le thorax augmente
atmosphérique). Il n'y a aucun déplacement gazeux entre de volume et la pression intrapleurale diminue. La pression
les poumons et l'air extérieur (fig. 2.3). intrapleurale, devenue donc plus négative, exerce une trac-
tion à la surface du poumon qui augmente de volume. Le
poumon se gonfle.
Inspiration L'augmentation de volume du poumon provoque une
Stimulés par le système nerveux, les muscles respira- chute de la pression intrapulmonaire qui devient infra-
toires (inspirateurs) se contractent. Ce faisant, ils agissent atmosphérique. De ce fait, un déplacement d'air se produit
sur le thorax et en augmentent le volume (descente du depuis l'extérieur vers l'intérieur du poumon : c'est l'inspi-
diaphragme et élévation des côtes). ration (fig.  2.4). On le voit, c'est bien la pression pleurale
Cette contraction musculaire agit donc comme une qui agit directement sur le poumon pour augmenter son
force qui s'ajoute à la force de recul du thorax. L'équilibre volume et permettre l'inspiration.
26
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

Remarque ● la pression pleurale est stabilisée à un niveau plus négatif


qu'au repos ;
● la pression intrapulmonaire est égale à la pression
La pression intrapleurale peut donc être considérée
comme le « moteur de la ventilation pulmonaire ». atmosphérique ;
● il n'y a aucun déplacement gazeux entrant ou sortant

Pas convaincu ? Imaginez ce qui se passe lorsque le fonc- des poumons.


tionnement pleural est perturbé, comme en cas de pneu-
mothorax complet par exemple. Dans ce cas, quelle que Expiration
soit la force musculaire appliquée au thorax, quelle que soit
l'augmentation de volume thoracique qui en résulte, cette Nous avons vu précédemment que le système thoracopul-
augmentation du volume du thorax ne sera d'aucun effet monaire est une structure élastique. Le système tend donc
sur la pression intrapleurale et donc sur le poumon. à revenir passivement vers sa position de repos, correspon-
Pour être tout à fait exact, notons encore que, lors de dant à la CRF. La séquence en est la suivante : la relaxation
l'inspiration, la pression négative qui règne à l'intérieur des des muscles inspirateurs supprime la force qui s'ajoutait
VA et permet le déplacement des gaz respiratoires agit au recul thoracique pour rendre la pression intrapleurale
également sur la plèvre en augmentant la pression négative plus négative et maintenir les poumons en ouverture. À ce
intrapleurale. moment, la force de recul du thorax est inférieure en valeur
absolue à celle du poumon. Celui-ci va donc retourner vers
À la fin de l'inspiration sa position de repos en diminuant de volume.
La pression intrapulmonaire devient dès lors positive et
L'ensemble thorax–poumons se situe dans une position les gaz contenus dans le poumon vont se diriger vers l'exté-
d'équilibre (fig. 2.5) dans laquelle : rieur du système. C'est l'expiration (fig. 2.6).
● la force de recul du poumon est plus élevée qu'au repos Pour prolonger l'expiration jusqu'au VR par exemple, les
(le poumon tend plus à se fermer) ; muscles expirateurs doivent être actifs à partir de la CRF. Leur
● la force de recul du thorax est moins élevée qu'au repos force s'ajoutera à la force de recul pulmonaire afin de s'opposer
(le thorax tend moins à s'ouvrir) ; au recul thoracique et permettre ainsi au volume de réserve
● la force de traction exercée par les muscles respiratoires expiratoire (VRE) d'être expulsé des poumons (fig. 2.7).
correspond exactement à la différence entre les forces de Durant l'expiration normale, la pression intrapleurale
recul pulmonaire et thoracique (recul pulmonaire = recul reste négative. En revanche, sous l'effet d'une forte contrac-
thoracique + force musculaire) ; tion des muscles expirateurs ou d'une pression externe

O
7
5 5
O 6

4 –
+ 6 2
4 –
3
1
5
O
2

1 3

5 5
Fig. 2.6
Fig. 2.5 L'expiration.
En fin d'inspiration. 1. Recul pulmonaire. 2. Recul thoracique (1 > 2). 3. Force musculaire
1. Recul pulmonaire. 2. Recul thoracique. 3. Force musculaire (nulle). 4. Pression intrapleurale (moins négative). 5. Diminution
(1 = 2 + 3). 4. Pression intrapleurale. 5. Pression intrapulmonaire. de volume du thorax et du poumon. 6. Pression intrapulmonaire
6. Pression atmosphérique (5 = 6 = 0). (devient positive). 7. L'air quitte les poumons.

27
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

O la paroi thoracique (thorax et abdomen) en la déplaçant


en position inspiratoire. La VM en pression négative (VPN)
6
agit ainsi tout simplement en remplacement des muscles
inspirateurs, le reste de la séquence ventilatoire restant
4 +
identique à la ventilation spontanée normale.
5 2
+

1
Stimulations électriques
des nerfs phréniques (pacing
diaphragmatique)
Le pacing diaphragmatique consiste à stimuler électri-
3 3 quement le diaphragme via des électrodes implantées
Fig. 2.7 à la surface d'un ou des deux nerfs phréniques. Cette
Expiration maximale ou forcée. modalité ventilatoire (dont les indications sont rares) vise
1. Recul pulmonaire (qui diminue). 2. Recul thoracique (qui donc à remplacer le maillon « système nerveux central »
augmente). 3. Force musculaire (des expirateurs) [1 + 3 > 2].
4. Pression intrapleurale (devient moins négative ou positive). de la pompe respiratoire, toute la mécanique ventilatoire
5. Pression intrapulmonaire (positive). 6. Expiration maximale. restant identique à celle de la ventilation spontanée par
ailleurs.
exercée sur la paroi thoracique, comme nous le verrons
plus loin, la pression intrapleurale peut devenir positive.
Dans ce cas, la force musculaire expiratoire s'ajoute à la
force de recul pulmonaire pour en diminuer le volume et Ventilation mécanique en pression
augmenter ainsi rapidement la pression intrapulmonaire positive
pour générer une « expiration forcée ».
Sans entrer dans les détails concernant les diverses moda-
lités de VM en pression positive (barométrique, volumé-
Mécanique thoracopulmonaire trique, en pression positive continue ou intermittente), son
principe d'action consiste, au moyen d'une pompe (le res-
et ventilation mécanique pirateur), à « injecter » de l'air à l'intérieur du poumon. Dans
Les chapitres 28 et 29 de cet ouvrage traiteront de la ven- ce cas, la dynamique ventilatoire est totalement modifiée,
tilation mécanique (VM), de ses indications, modalités puisque le respirateur remplace cette fois totalement le sys-
d'application et résultats. De façon grossière, on peut dire tème pompe respiratoire.
qu'une VM se voit indiquée lorsqu'un élément quelconque Ce n'est plus, comme en ventilation spontanée, l'ouver-
de la pompe respiratoire se révèle défaillant (coma, section ture pulmonaire qui crée une pression intrapulmonaire
de moelle épinière, fatigue musculaire, myopathie, cyphos- négative et « aspire » l'air à l'intérieur du poumon, mais le
coliose grave…). Les mécanismes d'action de la VM sur le volume aérien insufflé par le respirateur et l'augmentation
système mécanique thoracopulmonaire diffèrent selon les de pression intrapulmonaire qu'il engendre qui gonflent les
modalités ventilatoires concernées. poumons.
En VM en pression positive, la pression intrapleurale
n'est pas le moteur de la ventilation pulmonaire.
Ventilation mécanique en pression En cas d'utilisation de modes d'assistance ventila-
négative périthoracique toire mécanique partielle (aide inspiratoire, mode assisté
contrôlé…), le respirateur ne remplace pas totalement
Dans cette modalité ventilatoire représentée par le pou- la fonction pompe respiratoire mais la soutient. Dans ces
mon d'acier, la pression négative générée à l'intérieur du circonstances, la pression intrapleurale et le respirateur
poumon d'acier (par augmentation de son volume) agit sur agissent de concert pour gonfler les poumons.

28
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

Action de la kinésithérapie cements gazeux à l'intérieur du système respiratoire. Il s'agit


notamment de caractéristiques liées aux voies aériennes
sur la mécanique (VA) et qui gèrent la bronchomotricité.
thoraco-abdominale
Comme nous l'avons déjà signalé, le kinésithérapeute ne
Quelques notions
dispose d'aucun moyen d'accès direct à l'échangeur pulmo- de bronchomotricité [1]
naire. C'est donc par l'intermédiaire de la pompe respiratoire
que ses techniques tenteront d'agir sur l'encombrement Écoulement des gaz dans les voies
bronchopulmonaire ou la ventilation alvéolaire, par exemple.
Ainsi, la spirométrie incitative ou, plus simplement encore, aériennes
des stimulations verbales du patient agissent sur la compo- Pour que les gaz respiratoires s'écoulent – dans le sens ins-
sante neurologique centrale (stimuli, feedback…) de la pompe piratoire ou expiratoire – dans les VA, il faut qu'il y ait une
respiratoire pour inciter le patient à modifier ses contractions différence de pression entre la bouche (pression atmosphé-
musculaires respiratoires et ainsi agir sur la pression intrapleu- rique, le plus souvent) et le poumon.
rale qui, elle-même, modulera les débits et volumes gazeux Nous avons vu que, tout au moins en ventilation spon-
pulmonaires. Ce type de techniques de rééducation respira- tanée, c'est l'augmentation de volume du poumon qui crée
toire ne fait que stimuler le patient pour utiliser autrement une pression négative intrapulmonaire. La pression régnant
ou mieux ses propres possibilités. Ces modalités n'apportent à l'extérieur du système (pression atmosphérique) est consi-
aucun soutien mécanique au système thoracopulmonaire. dérée comme nulle et, pour autant que le poumon soit en
Parmi les manœuvres de désencombrement bronchique, liaison avec l'air extérieur (VA supérieures perméables), la dif-
nombreuses sont celles qui visent à augmenter le flux expira- férence de pression entre la bouche et le poumon représente
toire. Cette modulation du flux expiratoire peut être obtenue une pression dite « pression motrice » qui est responsable des
(notamment) par des expirations actives ou des pressions déplacements gazeux constituant la ventilation pulmonaire.
manuelles thoraco-abdominales. Dans ce dernier cas, les A priori, on pourrait imaginer que plus la pression
mains du kinésithérapeute agissent comme un muscle motrice est élevée et plus le débit aérien au travers des VA
expirateur supplémentaire dont la force s'oppose au recul est grand. En réalité, cette pression motrice n'est propor-
thoracique et s'additionnent au recul du poumon, rendant tionnelle au débit aérien qu'en présence d'un flux gazeux
souvent la pression intrapleurale positive et augmentant le laminaire (présent chez l'homme normal uniquement au
flux expiratoire. Nous verrons plus loin que cet effet n'est pas niveau des petites VA).
toujours rencontré, particulièrement chez les patients atteints Au sein de l'arbre bronche considéré dans son ensemble,
de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). les flux gazeux sont de type transitionnel et, dans ce cas,
Ces mêmes pressions manuelles thoraco-abdominales un même débit gazeux n'est possible que moyennant une
effectuées sur le temps expiratoire peuvent avoir un effet pression motrice nettement supérieure à celle générée en
mécanique inspiratoire lorsqu'elles sont prolongées au-delà cas de flux gazeux laminaire.
du niveau du CRF. Le relâchement, éventuellement brusque,
de cette pression qui a amené le système thoracopulmo-
naire jusqu'à un niveau proche du VR permet à la force de
Résistance des voies aériennes
recul du système (les reculs pulmonaire et thoracique sont La résistance des VA est égale au rapport entre la différence
dirigés dans le sens inspiratoire) de retourner rapidement pression alvéolaire moins pression mesurée à la bouche
à zéro, et ainsi de générer une inspiration (quasi) passive. (pression motrice) et le débit. Comme cette résistance est
C'est sur ce mécanisme d'action que se fonde le principe de directement liée au calibre des VA, on pourrait s'imaginer
fonctionnement du mode d'assistance ventilatoire qu'est la que le siège principal de la résistance des VA (RVA) se situe
« ceinture pneumatique thoraco-abdominale ». au niveau des petites VA. Il n'en est rien, les petites VA (au-
Nous venons d'analyser quelques modes d'action de delà de la huitième génération) ne contribuent qu'à hauteur
la kinésithérapie sur la mécanique ventilatoire. S'arrêter là d'environ 20 % à la résistance totale des VA. Ce fait est lié à
serait oublier un autre aspect, tout aussi important voire l'augmentation énorme de la surface totale de section des
plus, des propriétés mécaniques qui influencent les dépla- VA due à leur ramification vers les bronches de petit calibre.

29
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Le siège principal de la RVA se situe au niveau des VA de et de débits « effort-indépendants ». Ces derniers corres-
moyen calibre. pondent à ceux mesurés à moyens et bas volume pulmo-
La RVA dépend de divers facteurs. naire et sont dus à la compression dynamique des VA par la
Nous savons tous que la contraction des muscles lisses pression intrathoracique.
bronchiques (bronchospasme) diminue le calibre des VA et Durant l'inspiration, comme la pression qui règne à
augmente la résistance à l'écoulement de l'air. l'extérieur des VA (P pl) est toujours plus négative que celle
Moins connue est l'influence du volume pulmonaire qui existe à l'intérieur (pression bronchique [P br]), les VA
sur la RVA. En effet, les bronches doivent en partie leur sta- ont tendance à augmenter de calibre (fig. 2.9). La pression
bilité à l'action de traction exercée par le tissu pulmonaire transmurale (P pl − P br) est positive.
environnant. Ainsi, durant l'inspiration, le tissu pulmonaire Durant l'expiration normale (passive) chez un sujet nor-
effectue une traction radiale sur les bronches, en augmente mal, même si la pression intrapleurale devient moins néga-
le calibre et diminue ainsi la RVA. Durant l'expiration, le tive (proche de zéro), la pression transmurale, résultant des
tissu pulmonaire exerce une influence inverse et, à très bas forces exercées sur les parois bronchiques, reste une force
volume pulmonaire chez le sujet normal et parfois pour orientée vers l'ouverture bronchique (fig. 2.10).
des volumes proches du volume courant dans certaines Lors de l'expiration forcée, la pression pleurale devient
situations pathologiques, les petites VA ont tendance à se très positive (elle peut dépasser 150 cmH2O) et est
collaber, surtout au niveau des bases pulmonaires. identique à tous les niveaux du système respiratoire.
Ceci explique pourquoi, en cas de bronchospasme par Elle agit donc de la même façon tout le long de l'arbre
exemple, d'une part la dyspnée ressentie par le patient est à bronchique.
prédominance expiratoire et, d'autre part, le malade a ten- La pression alvéolaire (PA), supérieure à la pression pleu-
dance à respirer à hauts volumes pulmonaires, avec pour rale, est la force motrice qui génère le débit expiratoire (PA
conséquence une augmentation de CRF. − pression buccal). Cependant, du fait de la RVA et du
Au niveau des VA extrathoraciques (trachée, larynx…), flux gazeux, la pression endobronchique diminue entre le
on observe la situation inverse. Ces VA ne sont pas influen- poumon et la bouche. Comme la pression péribronchique
cées par les propriétés mécaniques du thorax et du pou- (très proche de la pression intrapleurale) est égale sur toute
mon, mais subissent uniquement l'action de la pression la longueur de la bronche, il existe donc un point, appelé
atmosphérique et de celle régnant à l'intérieur des VA. « point d'égale pression », où les pressions à l'extérieur et à
Durant l'inspiration, les VA extrathoraciques sont sou- l'intérieur de la bronche sont identiques. En aval de ce point
mises à la pression négative qui règne à l'intérieur des VA et (vers la bouche), le segment bronchique a tendance à se
leur calibre a donc tendance à diminuer (fig. 2.8). collaber par compression dynamique (fig. 2.11).
Cela explique la dyspnée à prédominance inspiratoire
observée en cas d'obstruction sévère des VA supérieures
(sténose trachéale, œdème laryngé…). Facteurs influençant le point d'égale pression [2]
Les propriétés physiques des gaz respiratoires (densité et
viscosité) influencent également la RVA. Relativement peu En cas d'obstruction bronchique, l'augmentation de la
résistance à l'écoulement des gaz respiratoires a pour
importante en situation normale, la modification de ces pro-
conséquence de faire chuter la pression à l'intérieur des
priétés peut être d'un effet non négligeable en pathologie. VA (la perte de charge augmente plus rapidement entre
Retenons à cet égard l'utilisation de mélanges gazeux hélium– le poumon et la bouche). De ce fait, le point d'égale pres-
O2 dans la prise en charge de la crise d'asthme, par exemple. sion va se déplacer vers l'amont et les VA de plus petit
Ce mélange, moins dense que l'air, n'a aucun effet thérapeu- calibre, et une zone plus importante de l'arbre bron-
tique direct sur le bronchospasme, mais il permet la mobilisa- chique sera comprimée.
tion de volumes gazeux accrus pour des variations de pression En cas d'hyperdistension pulmonaire avec perte d'élasti-
moindres que lors de la respiration d'un mélange azote–O2. cité, comme dans l'emphysème par exemple, la pression
motrice expiratoire est réduite à cause de la diminution
de la force de recul du poumon. Le point d'égale pression
Compression dynamique des voies sera donc également ramené vers l'alvéole.
aériennes Enfin, en cas de perte de stabilité bronchique (broncho-
malacie), la pression endobronchique a, comme dans
Dans le chapitre 6 traitant de l'exploration fonctionnelle res- l'emphysème, tendance à diminuer. Le point d'égale
piratoire et plus précisément de la « courbe débit/volume », pression se déplacera donc également vers l'amont.
il est question de débits expiratoires « effort-dépendants »
30
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

Fig. 2.9
Calibre des VA durant l'inspiration.
1. Pression péribronchique (correspond à la pression intrapleurale).
2. Pression intrapulmonaire et intrabronchique (P br). 3. Pression
transmurale.

Fig. 2.8
Diminution du calibre des VA extrathoraciques durant
l'inspiration.
1. Augmentation de volume du thorax et des poumons. 2. Pressions
intrapulmonaire et intrabronchique négatives. 3. Pression à
l'extérieur des VA extrathoraciques nulle. 4. Tendance au collapsus
des VA supérieures.

Fig. 2.11
Fig. 2.10 Expiration forcée et point d'égale pression.
Calibre des VA durant l'expiration normale. 1. Pression intrapleurale (devient positive). 2. Pression alvéolaire.
1. Pression intrapleurale (P pl). 2. Pression intrapulmonaire et 3. Pression buccale (= pression atmosphérique). 4. Point d'égale
intrabronchique. 3. Pression transmurale. pression.

31
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Hyperinflation dynamique Nous savons également qu'une respiration à fréquence


élevée a tendance d'une part à rendre moins homogène la
(ou hyperdistension) distribution de la ventilation pulmonaire et, d'autre part,
Deux altérations de la mécanique pulmonaire sont respon- à être susceptible d'aggraver l'hyperdistension pulmonaire
sables de l'hyperinflation pulmonaire (augmentation de la CRF). caractéristique de la BPCO, par exemple.
Nous savons que la CRF représente la position de repos Il est donc logique de prôner chez nos patients une res-
du système thoracopulmonaire, position dans laquelle les piration à bas débit aérien et à fréquence basse. Ainsi, lors
forces de recul pulmonaire et thoracique sont égales et de d'exercices de « spirométrie incitative », il faut impérative-
sens opposé. ment commander au patient d'effectuer des inspirations
L'emphysème est caractérisé, notamment, par une dimi- profondes (jusqu'à la CPT si possible) mais à bas débit inspi-
nution de la force de recul pulmonaire. Il s'ensuit donc tout ratoire. À cet effet, le fonctionnement des bons spiromètres
naturellement une augmentation de la CRF. incitatifs repose sur le principe d'un double feedback, en
Nous avons vu également que les pathologies pul- volume et en débit inspiratoires.
monaires obstructives (BPCO) se caractérisent par une L'aérosolthérapie vise, dans la majorité de ses indications,
compression dynamique des VA, parfois même durant à déposer des particules médicamenteuses au niveau des
la respiration calme. La limitation de débit qui en est la VA de moyen calibre. C'est également par une technique
conséquence allonge le temps de vidange expiratoire à tel d'inhalation correcte, privilégiant les bas débits inspira-
point que l'inspiration suivante débute avant que le volume toires, que ce but peut être atteint. Notons cependant qu'il
pulmonaire ne puisse revenir au niveau de la CRF. Celle-ci est illusoire voire néfaste de vouloir modifier à long terme
augmente donc. le pattern respiratoire des patients (surtout BPCO) par des
Les lésions anatomiques caractéristiques de la BPCO sont exercices de rééducation comme la « ventilation dirigée »
rarement homogènes. Ainsi, certaines zones présentent une ou la « respiration abdominodiaphragmatique ». Il a été
hyperinflation très sévère alors que d'autres sont relative- montré que ces méthodes, fort prisées durant les années
ment préservées (constantes de temps différentes). Durant 1970–1980, ont pour conséquence d'augmenter le travail
la respiration calme, à fréquence basse, les zones pulmo- respiratoire [4].
naires très atteintes peuvent « avoir le temps de se vider » D'autres techniques de rééducation respiratoire déve-
correctement à l'expiration et, ainsi, permettre à l'ensemble loppées en détail dans les chapitres 14, 15 et 17 sont sus-
du poumon de revenir à un niveau proche de la CRF. ceptibles d'avoir une influence bénéfique mais également
Lorsque la fréquence respiratoire augmente, comme délétère sur la mécanique ventilatoire.
à l'effort, par exemple, non seulement les zones pulmo- Les « pressions manuelles thoraco-abdominales », l'« aug-
naires malades vont aggraver leur hyperinflation mais, en mentation rapide du flux expiratoire » ou la « forced expira-
plus, cette hyperdistension dynamique peut comprimer tory technique » ont pour but de faciliter la mobilisation des
les zones moins atteintes et compromettre leur efficacité sécrétions bronchiques depuis les VA de calibre moyen vers
ventilatoire. Ceci explique partiellement la dyspnée parti- les gros troncs bronchiques et la trachée.
culièrement importante ressentie à l'effort chez les patients Nous savons qu'à moyen et bas volumes pulmonaires,
BPCO mais également le fait que les malades atteints d'un l'augmentation de pression pleurale n'a aucun effet sur la
emphysème très hétérogène sont généralement les plus force motrice efficace. L'utilisation de ces techniques doit
symptomatiques [3]. donc être limitée à de hauts volumes pulmonaires, dans
les 20 premiers pourcents de la CPT. Cependant, même à
ces hauts volumes pulmonaires, il a été démontré que des
pressions manuelles thoraco-abdominales pouvaient avoir
Implications pour la kinésithérapie pour effet de diminuer le débit expiratoire de pointe en cas
(quelques exemples concrets) de BPCO [5].
Plusieurs techniques ont pour but d'agir directement
Nous savons que les débits respiratoires normaux sont sur le calibre des VA en tentant de reculer le point d'égale
caractérisés par des flux aériens de type transitionnel. Seules pression vers la bouche. Ce sont les techniques instrumen-
les petites VA sont le siège d'un flux laminaire. tales d'expiration contre résistance (blow-bottle, barbo-
Un flux aérien turbulent est généré par des débits élevés, teur, PEP masque…), la ventilation spontanée en pression
surtout au niveau des VA de gros calibre et en présence de positive continue (VS-PEP) [continuous positive airway
nombreux obstacles (bifurcations et divisions bronchiques). pressure (CPAP) des Anglo-Saxons] ou, plus simplement, la
32
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

r­espiration à lèvres pincées (pursed lips breathing). Le pro- de stimulation inspiratoire telles que la « spirométrie inci-
blème de la plupart de ces techniques réside dans le fait que tative » existent et ont démontré leur efficacité lorsqu'elles
leur efficacité n'excède pas leur période d'utilisation. Il serait sont correctement indiquées et réalisées [6].
donc logique de privilégier l'apprentissage aux patients de la
respiration à lèvres pincées, relativement facile à appliquer
(discrètement) pour de longues périodes. Certains patients Actions et interactions
l'utilisent même de façon tout à fait spontanée et réflexe.
À l'inverse des manœuvres visant à déplacer le point des muscles respiratoires
d'égale pression vers l'aval, certaines techniques tentent
d'utiliser le déplacement du point d'égale pression vers les Après avoir analysé la façon dont l'air pénètre et ressort
VA de petit calibre afin de moduler ce calibre bronchique, des poumons grâce à la fonction pleurale, il est important
tout en prévenant le collapsus complet, dans le but d'aug- pour tout clinicien de savoir comment la paroi thoracique,
menter le flux expiratoire et par là, d'agir sur le désencom- la pression pleurale et donc la ventilation pulmonaire
brement bronchique. Ces techniques seront décrites et évoluent sous l'action des muscles respiratoires, mais éga-
discutées dans les chapitres 14, 15 et 17. Signalons simple- lement de comprendre ce qui se passe lorsque certains
ment que ces manœuvres reposent sur des expirations muscles ou groupes musculaires font défaut.
actives mais non forcées et sur la suppression du frein expi- Les points de vue considérés dans ce chapitre sont pure-
ratoire glottique. Cette suppression fait chuter la pression à ment mécaniques et fonctionnels. Il est cependant impor-
l'intérieur des VA proximales et donc augmente la perte de tant que le lecteur ait assimilé les aspects anatomiques
charge endobronchique durant l'expiration, ce qui a pour décrits au chapitre précédent.
effet de déplacer le point d'égale pression vers l'amont. Il est Du point de vue de la mécanique respiratoire, nous
possible – mais les données objectives manquent encore considérerons trois groupes de muscles respiratoires. Deux
pour l'affirmer – que des manœuvres utilisant le décubitus sont inspirateurs : le diaphragme et les muscles dits inspi-
latéral afin d'aider au désencombrement bronchique des rateurs accessoires. Le troisième groupe est constitué des
zones pulmonaires infralatérales agissent selon ce même muscles expirateurs considérés globalement.
mécanisme.
Enfin, une remarque s'impose par rapport à la mise en
œuvre de techniques de rééducation privilégiant l'expira- Muscles inspirateurs
tion. En effet, nous avons vu que la RVA augmente avec
Diaphragme
la diminution des volumes pulmonaires. Ainsi, il existe,
même chez le sujet normal, un volume pulmonaire appelé Du point de vue de la mécanique ventilatoire, le diaphragme,
« volume de fermeture » défini comme étant le volume à muscle clé et principal de l'inspiration, est constitué de
partir duquel, en expiration, les petites VA ont tendance à deux parties distinctes : la partie crurale et la partie costale.
se collaber. Le diaphragme est le seul muscle respiratoire qui reste
Des exercices respiratoires stimulant le patient à balayer actif en permanence, y compris durant toutes les phases
tous ses volumes pulmonaires et particulièrement les de sommeil.
bas volumes, proches du VR, sont donc potentiellement Lorsque la partie crurale du diaphragme (partie posté-
délétères dans certains cas. Nous pensons tout particuliè- rieure du dôme et insertions sur la face antérieure des trois
rement aux jeunes enfants dont les petites VA et les pou- premières vertèbres lombaires) se contracte, il présente un
mons ont une tendance au collapsus plus marquée que mouvement de haut en bas qui participe à l'abaissement des
chez l'adulte, et aux pathologies caractérisées par une dimi- coupoles diaphragmatiques lors de l'inspiration. Lorsque
nution des volumes pulmonaires mobilisables. Le patient cette partie crurale se relâche, elle permet la remontée de
en phase postopératoire en est le meilleur exemple. Outre ces coupoles vers la position de repos du muscle.
l'encombrement bronchique majeur et la pneumopathie, La partie costale du diaphragme se distingue de la précé-
le collapsus bronchique avec atélectasie passive représente dente par ses insertions sur la face interne des six dernières
la complication postopératoire majeure. Il semble donc paires de côtes et par l'orientation particulière de ces fibres
assez logique d'éviter autant que possible la mise en œuvre qui forment la zone d'apposition du diaphragme au grill costal.
de techniques de rééducation stimulant l'expiration pro- Pour bien comprendre le fonctionnement du diaphragme,
fonde (même si ces techniques sont généralement réalisées il faut se rappeler que ce muscle représente la structure qui
contre résistance) et ce, d'autant plus que des manœuvres sépare le compartiment thoracique de la cavité abdominale
33
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

et que ce compartiment abdominal joue un rôle important durant toute l'expiration. Sans ce « frein expiratoire », le
dans la mécanique ventilatoire. mouvement thoraco-abdominal expiratoire serait extrê-
mement rapide et brusque sous l'effet des seules forces de
recul thoracique et pulmonaire.
Action inspiratoire du diaphragme À noter encore que si l'on ne considère que l'action du
Lorsque le diaphragme se contracte (sous l'effet d'une diaphragme, la chute de pression pleurale occasionnée par
stimulation phrénique), sa partie crurale et sa portion le mouvement thoracique devrait entraîner un mouvement
costale descendent et augmentent le diamètre vertical paradoxal (dans le sens expiratoire) du grill costal supérieur.
du thorax. Dans sa descente, le diaphragme est soumis
à la résistance opposée par la cavité abdominale dont le Autres muscles inspirateurs
contenu est quasi incompressible. Grâce à cette caracté- Ils sont représentés par les muscles intercostaux externes
ristique et au tonus de la paroi abdominale antérieure, ainsi que par les muscles dits accessoires : scalènes et
le dôme diaphragmatique peut prendre appui sur le sterno-cléido-mastoïdiens notamment.
contenu abdominal. Il devient ainsi le point fixe du muscle Même si ces muscles ont une activité réduite
qui, en poursuivant sa contraction (partie costale), va durant la ventilation de repos, ils sont loin de pouvoir
tirer sur les insertions costales. Ces côtes vont ainsi être être considérés comme accessoires ! D'une part, ils se
entraînées dans un mouvement en anse de seau (du bas contractent effectivement, même durant la respiration
vers le haut) et donc augmenter le diamètre transversal calme et ont pour fonction, notamment, de contrecar-
du thorax (fig. 2.12). rer l'action paradoxale du diaphragme sur le grill costal
La course diaphragmatique est de l'ordre de 1 à 2 cm supérieur (fig.  2.13). D'autre part, ces muscles inspira-
durant la respiration de repos. Elle peut atteindre 10 cm lors teurs deviennent tout à fait importants et indispensables
d'une manœuvre d'inspiration maximale.

Action expiratoire du diaphragme


En fin d'inspiration, le diaphragme ne se relâche pas com-
plètement et certainement pas instantanément. Un léger
degré de tonus musculaire diaphragmatique subsiste

Fig. 2.13
Fig. 2.12 Action des muscles inspirateurs d'effort.
Mode d'action du diaphragme. 1. Contraction diaphragmatique. 2. La coupole diaphragmatique
1. Contraction du diaphragme. 2. La coupole diaphragmatique descend. 3. La paroi abdominale se déplace vers l'avant. 4. Sous
descend. 3. Le contenu abdominal étant quasi incompressible, l'effet de la chute de P pl (pression pleurale) liée à l'action du
la course diaphragmatique est limitée vers le bas. 4. La portion diaphragme et à l'augmentation de volume du thorax, le grill costal
du diaphragme correspondant à la zone d'apposition se contracte. supérieur devrait effectuer un mouvement paradoxal dans le sens
5. Le grill costal inférieur effectue un mouvement en anse de seau expiratoire. 5. La contraction des muscles inspirateurs d'effort
qui augmente le diamètre transversal du thorax. contrecarre ce mouvement paradoxal.

34
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

durant la ventilation à l'effort ou dans diverses situations


pathologiques. On préférera donc la dénomination
« muscles inspirateurs d'effort ».

Muscles expirateurs
Les muscles intercostaux internes ainsi que les muscles de
la paroi abdominale (grands droits et obliques internes et
externes) ne sont pas actifs lors de l'expiration de repos
chez le sujet normal.
La contraction des muscles expirateurs, principalement
les abdominaux, est indispensable lors de certains efforts,
dans certaines situations pathologiques comme l'obstruc-
tion bronchique sévère, et lors d'efforts expiratoires forcés
ou de la toux.
N'oublions pas cependant le rôle indispensable joué par
la paroi abdominale et par le tonus des muscles abdomi-
naux dans l'inspiration. En effet, c'est grâce à ce tonus qui
limite le déplacement antérieur de la paroi abdominale lié
au mouvement de piston du diaphragme et au caractère
incompressible du contenu abdominal que le diaphragme Fig. 2.14
peut prendre appui sur la cavité abdominale et, ainsi, mettre En cas de paralysie du diaphragme…
en jeu la zone d'apposition diaphragmatique et permettre 1. Le diaphragme étant paralysé… 2. Les muscles inspirateurs d'effort
se contractent. 3. Le thorax augmente de volume. 4. Sous l'effet de
le mouvement inspiratoire des côtes inférieures. la chute de P pl, le diaphragme (flasque) est « aspiré » vers la partie
supérieure du thorax et… 5. La paroi abdominale antérieure effectue
un mouvement vers l'arrière (mouvement paradoxal).
Conséquences du déficit des divers
groupes musculaires respiratoires
ce cas, la contraction diaphragmatique peut être respon-
Insuffisance diaphragmatique sable d'un mouvement en dedans des côtes inférieures et
donc d'une diminution de volume pulmonaire. C'est le
En cas d'insuffisance diaphragmatique, une ventilation pul-
signe de Hoover (fig. 2.15).
monaire adéquate peut être assurée par les muscles inspira-
Signalons enfin qu'une bonne fonction de tous les
teurs d'effort sauf durant le sommeil paradoxal. Cependant,
muscles inspirateurs est très importante afin de permettre
l'absence de fonction diaphragmatique a des conséquences
des expirations forcées ou la toux. Ces manœuvres d'expira-
sur la mécanique thoraco-abdominale.
tion forcée nécessitent en effet, préalablement à tout effort
La contraction des muscles inspirateurs d'effort aug-
expiratoire, une inspiration maximale, proche de la capacité
mente le volume du thorax et diminue donc la pression
pulmonaire totale, niveau qui requiert une fonction par-
pleurale (moteur de la ventilation). Cette chute de la pres-
faite des muscles inspirateurs.
sion pleurale agit sur le diaphragme flasque et le fait remon-
ter vers le thorax supérieur avec pour effet un mouvement
paradoxal de la paroi abdominale (fig. 2.14). La ventilation Insuffisance des muscles inspirateurs
pulmonaire liée à la mise en tension des seuls muscles d'ef-
d'effort
fort peut se révéler efficace. Elle l'est cependant nettement
moins que la respiration abdominodiaphragmatique. En cas de paralysie des muscles inspirateurs d'effort comme
Chez certains patients présentant une hyperdisten- dans certaines tétraplégies traumatiques par exemple,
sion pulmonaire sévère (BPCO emphysémateuse), le le diaphragme peut assurer une ventilation pulmonaire
diaphragme peut perdre une grande partie de son efficacité efficace. Cependant, on observera dans ce cas un mouve-
voire même être responsable d'une respiration paradoxale. ment paradoxal du grill costal supérieur dû à la chute de
C'est le cas lorsque, du fait de cette hyperdistention, le la pression pleurale et une perte de stabilisation du thorax
diaphragme perd sa forme de dôme et devient plat. Dans supérieur.
35
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Fig. 2.16
Fig. 2.15 En cas de paralysie des muscles abdominaux…
Signe de Hoover. 1. Le diaphragme se contracte. 2. La coupole diaphragmatique
1. Le diaphragme aplati se contracte. 2. La contraction du descend vers le compartiment abdominal. 3. La paroi musculaire
diaphragme rapproche les côtes du thorax inférieur (mouvement abdominale étant flasque, elle effectue un déplacement très
paradoxal). 3. Le diaphragme ne peut plus descendre vers le important vers l'avant, sous l'effet de la descente du diaphragme.
compartiment abdominal.

Insuffisance des muscles abdominaux


Les problèmes liés à une insuffisance des muscles abdomi-
naux dans leurs rôles expirateurs d'effort et dans la toux
sont évidents et bien connus. Cet aspect du problème est
largement développé au chapitre 20 traitant de la kinésithé-
rapie chez le malade neuromusculaire.
Mais une paralysie des muscles abdominaux peut
égale­ment avoir des répercussions négatives sur la fonc-
tion inspiratoire. Ainsi, dans cette situation, la portion
costale du diaphragme ne pourra utiliser une augmen-
tation de pression abdominale afin de prendre appui
sur le contenu abdominal et, donc, permettre aux fibres Fig. 2.17
diaphragmatiques de tirer sur les côtes inférieures pour Conséquence d'une paralysie des muscles abdominaux sur
augmenter le diamètre transversal du thorax (fig.  2.16 l'efficacité du diaphragme.
1. Le diaphragme se contracte. 2. La coupole diaphragmatique
et 2.17). descend vers le compartiment abdominal. 3. La pression
En pratique clinique, ce déficit lié à la perte de tonus abdominale n'augmente pas car la paroi abdominale n'oppose
de la paroi abdominale antérieure peut être partiellement aucune résistance à son déplacement. 4. Comme elles ne peuvent
prendre appui sur le contenu abdominal (pas d'augmentation de
compensé par la mise en place d'une ceinture abdominale pression abdominale), la partie costale du diaphragme est inefficace
de contention chez les patients atteints de paralysie des et… 5. Les côtes inférieures ne sont pas mobilisées et il n'y a pas
muscles abdominaux. d'augmentation du diamètre transversal du thorax.

36
2. Notions de mécanique thoracopulmonaire

Points clés Références



Préciser les rôles respectifs de l'échangeur pul- [1] West JB, La physiologie respiratoire [traduction : M. Nadeau]. 6e éd.
monaire, de la pompe respiratoire et de la plèvre Paris : EDESIM Maloine ; 2003.
[2] Mead J, Turner JM, Macklem PT, Little JB. Significance of the rela-
permet d'aborder la physiopathologie de l'insuffi- tionship between lung recoil and maximum expiratory flow. J Appl
sance respiratoire et de la défaillance ventilatoire. Physiol 1967 ; 22(1) : 95–108.

L'analyse des propriétés mécaniques du pou- [3] Khirani S, Polese G, Morlini G, et al. Pathophysiology of airflow limi-
mon, du thorax et de l'ensemble du système doit tation in COPD. In : Cazzola M, Celli B, Dahl R, Rennard S, editors.
Therapeutic strategies in COPD. Oxford : Clinical Publishing ; 2005.
rendre le kinésithérapeute apte à comprendre les
[4] Gosselink R. Controlled breathing and dyspnea in patients with
modes d'action et à orienter la mise en œuvre de chronic obstructive pulmonary disease (COPD). J Rehabil Res Dev
certaines de ses techniques. 2003 ; 40(5) : Suppl 2 : 25–33.

La bronchomotricité est régie par une série de méca- [5] Sivasothy P, Brown L, Smith IE, Shneerson JM. Effect of manually-
nismes relativement complexes. La physiopathologie assisted cough and mechanical insufflation on cough flow of nor-
mal subjects, patients with chronic obstructive pulmonary disease
de l'obstruction bronchique doit cependant être bien (COPD), and patients with respiratory muscle weakness. Thorax 2001 ;
comprise par le kinésithérapeute dont les connais- 56 : 438–44.
sances théoriques représentent le préalable indispen- [6] Celli BR, Rodriguez KS, Snider GL. A controlled trial of intermittent
sable quant aux choix thérapeutiques et aux modalités positive pressure breathing, incentive spirometry ans deep breathing
exercices in preventing pulmonary complications after abdominal
d'application de la kinésithérapie respiratoire.
surgery. Am Rev Respir Dis 1984 ; 130 : 12–5.

Il importe enfin pour le clinicien de connaître
les modes de fonctionnement des muscles respi-
ratoires, leurs actions et interactions afin d'être Pour en savoir plus
capable de déceler, au cours de son examen cli-
Schwartzstein RM, Parker MJ. Respiratory physiology : a clinical approach.
nique, les déficits musculaires susceptibles d'inter- Baltimore : Lippincott, Williams & Wilkins ; 2006.
férer avec la fonction ventilatoire du patient et, West JB. La physiologie respiratoire [traduction : M. Nadeau]. 6e éd. Paris :
ainsi, pouvoir tenter d'y remédier. EDESIM Maloine ; 2003.

37
Chapitre 3
L'oxygène : sa place en
physiologie respiratoire
et son rôle thérapeutique
Alexandre Legrand, Frédéric Duprez

PLAN DU CHAPITRE
Composition du gaz alvéolaire 40
Oxygène et ventilation 41
Diffusion alvéolocapillaire 41
Transport de l'oxygène 42
Échanges gazeux sang–tissus :
la diffusion tissulaire 44
Physiopathologie de l'hypoxémie 44
Administration d'oxygène 45
Recommandations lors de l'utilisation
d'oxygène 51

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

L'oxygène (O2) est fondamental à la vie sur terre. En effet,


le maintien de la vie nécessite de l'énergie. L'être humain,
comme la plupart des animaux, est hétérotrophe. Il ne peut
trouver son énergie que dans l'oxydation des matières orga-
niques contenues dans son alimentation. Dans les cellules,
l'O2 réagit au cours de différentes réactions enzymatiques
avec les molécules hydrocarbonées (les acides gras, les
hydrates de carbone et dans une moindre mesure les pro-
téines). Du dioxyde de carbone (CO2) est produit et l'éner-
gie libérée lors de ces réactions est utilisée pour synthétiser
de l'adénosine triphosphate (ATP). Cette molécule repré-
sente la principale ressource d'énergie de la cellule. D'autres
voies de production d'ATP existent (les voies anaérobies).
Elles ont cependant un rendement nettement inférieur
et ne permettent pas de maintenir un niveau énergétique Fig. 3.1
suffisant au fonctionnement cellulaire pour une longue Pressions en oxygène.
période de temps. Un apport régulier en O2 et l'élimination Pi : pression inspiratoire ; PA : pression alvéolaire ; Pv : pression
veineuse ; Pa . : pression artérielle ; R : quotient respiratoire ; Cste :
du CO2 produit par les réactions enzymatiques sont donc constante ; V : volume par unité de temps. Explications : voir texte.
indispensables à la survie cellulaire.
L'O2 nécessaire à ces réactions provient de l'air ambiant. Il
composé de différents gaz et exerçant une pression totale
est amené jusqu'à la cellule en plusieurs étapes :
connue, la pression partielle d'un gaz est la partie de la pres-
1. la conduction jusqu'à l'alvéole (cela correspond à la ven-
sion totale exercée par ce gaz. La pression partielle en oxy-
tilation alvéolaire développée dans le chapitre précédent) ;
gène dans l'air ambiant est ainsi de 160 mmHg [760 mmHg
2. la diffusion alvéolocapillaire ;
(pression atmosphérique2, Patm) × 0,21 (fraction molaire
3. le transport de l'oxygène jusqu'aux tissus.
de l'O2)]. La composition de l'air est légèrement modifiée
Si l'une de ces étapes ne peut se dérouler normalement,
lors de son passage au travers des fosses nasales. En effet,
une hypoxie cellulaire (manque d'oxygène dans la cellule)
l'air est réchauffé mais aussi humidifié. Quand il arrive au
peut apparaître et entraîner un mauvais fonctionnement,
niveau pharyngé, l'air s'est dilaté et est saturé en vapeur
voire une mort de la cellule. Un apport accru d'oxygène
d'eau. À 37 °C, la pression de vapeur d'eau saturante est de
(oxygénothérapie) peut corriger certaines de ces situations
47 mmHg. Cela veut dire que sur les 760 mmHg de pres-
pathologiques mais n'est pas toujours sans risque. Ces diffé-
sion totale exercée par le mélange gazeux dans les voies
rents aspects sont développés dans la suite de ce chapitre.
aériennes, 47 mmHg sont exercés par les molécules d'eau.
Le manque d'O2 dans le sang circulant est appelé hypoxémie
La pression partielle en oxygène dans l'air qui arrive à la
et est estimé couramment par la pression artérielle en oxy-
trachée (PiO2) est diminuée en proportion [(760 − 47) ×
gène (PaO2) et la saturation artérielle en O2 de l'hémoglobine
0,21] et est de 150 mmHg (fig. 3.1). Dans l'alvéole, une partie
(voir plus loin). Le manque d'O2 au niveau tissulaire est lui
des molécules d'oxygène est extraite du gaz alvéolaire et
appelé hypoxie et provient d'un déséquilibre entre l'apport
captée par le sang passant dans les capillaires de la paroi.
et le besoin local à un moment donné. De cette balance
La pression en oxygène dans le gaz alvéolaire (PAO2) est
dépendent le bon fonctionnement des tissus vivants et donc
donc plus basse que dans l'air inspiré. L'équation des gaz
le bon fonctionnement des organes dont ils sont les unités
alvéolaires (voir fig. 3.1) permet le calcul de la PAO2. Dans
fonctionnelles.
cette équation, les quantités d'O2 enlevées de l'alvéole sont
remplacées par les quantités de CO2 apportées à l'alvéole
Composition du gaz alvéolaire divisées par le quotient respiratoire (R)3. La baisse de la
PAO2 est donc égale à l'élévation de la PACO2 rapportée
Dans l'air sec, la fraction molaire de l'oxygène est de 20,95 %. au quotient respiratoire. Lorsque le renouvellement4 du gaz
Cela signifie que sur 100 molécules composant l'air que
nous inspirons, 21 sont des molécules de dioxygène. La 2
Une atmosphère = 760 mmHg = 1013 mbar.
fraction inspiratoire en O2 (FiO2) est donc de 0,21 ou 21 % 3
R = production de CO2/consommation en O2.
de la pression atmosphérique. Dans un mélange gazeux 4
C'est-à-dire la ventilation alvéolaire.

40
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

Le volume total d'air qui franchit les narines ne parti-


cipe pas aux échanges gazeux. En effet, la paroi des grosses
bronches est trop épaisse pour espérer qu'une quantité
significative d'oxygène les traverse. L'air qui en fin d'inspira-
tion se trouve à ce niveau est expiré sans avoir vu sa com-
position se modifier. Le long de l'arborisation bronchique,
les régions qui peuvent échanger l'O2 et le CO2 débutent
au niveau des bronchioles respiratoires et se terminent au
niveau des alvéoles [2]. Le volume d'air contenu dans les
bronches et les voies aériennes supérieures qui ne participe
pas aux échanges est appelé « espace mort anatomique ».
Fig. 3.2 Ce volume d'air respiré qui ne sert pas ou qui ne sert que
Évolution de la pression en oxygène dans l'alvéole . et. dans le sang partiellement aux échanges peut être augmenté par des
en fonction du rapport. ventilation/perfusion ( V/ Q ).
.
Au centre, le rapport V / Q est normal. Vers la gauche, le rapport maladies affectant les alvéoles ou par un appareillage d'assis-
s'abaisse et réalise la situation de shunt quand il est égal à zéro. tance respiratoire (masque, tube endotrachéal). L'ensemble
Vers la droite, le rapport s'élève et réalise la situation d'espace mort de ces volumes inutilement respirés forme alors ce qui
quand il est infini. Pour les symboles et abréviations, voir légende de
la fig. 3.1 ; pression en mmHg. est appelé l'« espace mort physiologique » (voir également
fig. 3.2). Si l'on soustrait de la ventilation minute la venti-
lation de ces espaces morts, on obtient la ventilation qui
contribue réellement aux échanges gazeux : la ventilation
alvéolaire est normal, la PACO2 est de ± 40 mmHg. Pour un
alvéolaire. La présence d'un espace mort a un retentisse-
quotient respiratoire de 0,8, la PAO2 est alors de 100 mmHg.
ment sur le travail respiratoire nécessaire pour assurer une
Si la ventilation alvéolaire diminue, moins d'O2 est apporté
oxygénation adéquate. Il peut donc être utile de calculer
à l'alvéole et la PAO2 s'abaisse en dessous de 100 mmHg
la proportion du volume d'air qui est respiré inutilement.
(fig.  3.2). De la même manière, si d'avantage d'O2 est ôté
Cette proportion est connue sur le vocable « Vd/Vt », où
de l'alvéole par une augmentation de la perfusion de sang
Vd est le volume de l'espace mort et Vt le volume inspiré
dans les capillaires pulmonaires, la PAO2 diminue égale-
(t pour tidal, le volume courant se disant tidal volume en
ment. La PAO2 dépend donc à la fois de la ventilation et de
anglais). Lorsque l'on expire, l'air de l'espace mort sans CO2
la perfusion de l'alvéole [1].
dilue le CO2 qui provient de l'alvéole. Plus la concentration
en CO2 dans l'air expiré est différente de la concentration
en CO2 de l'air alvéolaire, plus l'espace mort est grand. Le
Oxygène et ventilation rapport Vd/Vt est ainsi calculé par l'équation de Bohr :
La quantité d'air respirée doit être suffisante pour apporter Vd
=
(
PaCO2 - PeCO2 )
au corps l'O2 dont il a besoin et éliminer le CO2 produit Vt PaCO2
à chaque instant. Les concentrations de ces gaz dans le
corps sont en permanence perçues par les chémorécepteurs La ventilation alvéolaire permet de maintenir le taux d'O2
vasculaires (au niveau du glomus carotidien et crosse de alvéolaire élevé et le taux de CO2 alvéolaire bas. La concen-
l'aorte) et cérébraux. Les variations de la pression artérielle tration de ces gaz dans l'alvéole reste ainsi différente de leur
en oxygène (PaO2) et de la pression artérielle en dioxyde concentration dans le sang qui passe dans les capillaires
de carbone (PaCO2) sont détectées par les chémorécep- alvéolaires, ce qui maintient un gradient de concentration
teurs qui transmettent l'information au centre respiratoire. favorable à la diffusion au travers de la paroi alvéolocapillaire.
L'amplitude (l'importance du Vt, soit le volume inspiré) et
la fréquence respiratoire sont alors modulées pour assurer
l'adéquation de la ventilation. Les neurones bulbaires du Diffusion alvéolocapillaire
centre respiratoire stimulent les muscles respiratoires via les
voies efférentes. Leurs contractions distendent alors la paroi La paroi de l'alvéole forme une interface anatomique entre
du thorax et tendent à augmenter le volume des poumons. le milieu extérieur et le milieu intérieur. Le sang qui passe
Cet étirement génère une différence de pression entre les dans cette paroi capte l'oxygène contenu dans le gaz alvéolaire
alvéoles et la bouche, ce qui crée un flux d'air entrant. et le transporte dans le corps. Cette unité fonctionnelle
41
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

est appelée la membrane alvéolocapillaire. La surface de le sang dépasse la quantité apportée par la ventilation et
la membrane est recouverte d'un fin film hydrique dans la concentration en oxygène diminue dans l'alvéole. Dans
lequel l'oxygène du gaz alvéolaire se dissout. La concentra- ces situations où le rapport ventilation/perfusion (rapport
· ·
tion en oxygène dans ce film est ainsi proportionnelle à la V / Q ) est abaissé, la PAO2 diminue et réduit la diffusion
PAO25 (soit ± 100 mmHg en temps normal). À l'entrée du d'oxygène dans le sang. À la sortie du capillaire pulmonaire,
capillaire alvéolaire, la pression en oxygène dans le sang est la pression est aussi abaissée (hypoxémie). En poussant le
bien plus basse. En effet, le sang qui y pénètre revient des raisonnement à l'extrême, quand il n'y a aucun apport d'O2
tissus où l'oxygène a été consommé par le métabolisme. à l'alvéole, le sang ne peut capter aucune molécule d'oxy-
Cette pression est appelée la pression veineuse en oxygène gène. À la sortie du capillaire, la pression en oxygène est la
(PvO2) car elle correspond à la pression dans le sang vei- même qu'en y entrant et est égale à la PvO2. Cette situation
neux mêlé qui retourne au cœur droit. Deux milieux ayant dans laquelle le sang passe dans le poumon sans être oxy-
une concentration en oxygène fort différente sont donc en géné est connue sous le nom de « shunt » (voir fig. 3.2). Si
contact et l'oxygène se déplace du milieu le plus concentré par contre, l'alvéole est beaucoup moins perfusée que ven-
· ·
vers le moins concentré : c'est la diffusion. Le CO2 est lui tilée, le rapport V / Q s'élève et la PAO2 devient proche de la
· ·
produit dans le corps, il est donc plus concentré dans le PiO2. Si dans les situations physiologiques, le rapport V / Q
sang capillaire que dans l'alvéole et diffuse en sens inverse est en moyenne de 1, ce rapport est plus proche de 3 au
[3]. Cet échange entre gaz alvéolaires et gaz capillaires vei- sommet du poumon et de 0,6 à la base. Cela signifie que les
neux se fait de manière entièrement passive. Selon la loi bases sont mieux perfusées que ventilées et inversement
de Fick qui s'applique dans les phénomènes de diffusion, que les sommets sont mieux ventilés que perfusés. Ces
· ·
la quantité d'O2 qui diffuse par unité de temps est propor- rapports V / Q différents entraînent une hétérogénéité de
tionnelle à la différence de concentration (ou de pression) la PAO2 entre la base et l'apex du poumon (elle est plus éle-
en oxygène entre l'alvéole et le sang capillaire et à la surface vée au sommet). L'abaissement modéré de la PAO2 à la base
de la membrane alvéolocapillaire, mais est inversement n'affecte cependant que faiblement la pression moyenne
proportionnelle à l'épaisseur de la membrane. La surface de en oxygène au niveau artériel (PaO2) qui reste proche de la
la membrane alvéolocapillaire est de l'ordre de 50 à 100 m2 et PAO2. Le gradient alvéolo-artériel en oxygène (PAO2–PaO2)
son épaisseur n'est au contraire que de 0,3 μm. Ces carac- est de 5 à 10 mmHg (chez l'adulte jeune en bonne santé).
· ·
téristiques optimalisent la capacité de diffusion des gaz au Lorsque le rapport V / Q s'abaisse davantage (0,1 ou moins),
travers de la membrane alvéolocapillaire et l'oxygène peut la pression en oxygène à la sortie du capillaire est plus
passer rapidement et en grande quantité de l'alvéole au affectée. Afin de prévenir cette chute non souhaitable, il
· ·
sang. Au fur et à mesure que le sang avance dans le capil- existe un mécanisme de contrôle local du rapport V / Q
laire pulmonaire, il se charge en oxygène. En fait, au repos, la au niveau alvéolaire appelé « vasoconstriction hypoxique ».
concentration en oxygène dans le capillaire devient égale à Lorsque la PAO2 s'abaisse en dessous de 50 mmHg suite à
· ·
la concentration dans le film hydrique recouvrant l'alvéole une diminution du rapport V / Q , une hypoxie cellulaire
bien avant la sortie du capillaire pulmonaire. De ce fait, est perçue au niveau de la paroi vasculaire et entraîne une
même si le débit cardiaque augmente et même si le temps vasoconstriction artériolaire dans le territoire de la zone mal
mis par le sang pour traverser le capillaire pulmonaire dimi- ventilée. Cela permet de restaurer localement le rapport
· ·
nue (comme à l'effort par exemple), la pression en oxygène V / Q en réduisant la perfusion. Le sang est alors dévié vers
· ·
à la sortie du capillaire est pratiquement égale à la pression des zones du poumon à meilleur rapport V / Q . Ce méca-
en oxygène dans l'alvéole. Bien entendu, dans ces états phy- nisme empêche dans une certaine mesure l'apparition (ou
siologiques, la quantité d'oxygène apportée à l'alvéole par le maintien) d'un effet shunt.
la ventilation est suffisante pour remplacer l'oxygène ôté
par la perfusion. Pour cela, le rapport entre la ventilation
alvéolaire et la perfusion capillaire doit être proche de 1,
c'est-à-dire qu'il y ait autant d'air que de sang qui rentre Transport de l'oxygène
dans le poumon. Comme nous l'avons mentionné, si la
ventilation alvéolaire est plus basse ou si la perfusion est Une fois la membrane alvéolocapillaire franchie, l'oxygène
plus élevée, la quantité d'oxygène enlevée de l'alvéole par se trouve en solution dans le plasma. Cependant, l'O2 est
peu soluble dans l'eau. Si le sang ne contenait que cet O2
dissout, les quantités qu'il transporterait jusqu'aux tissus
Loi de Henry : concentration = pression × solubilité
5 seraient faibles et insuffisantes pour vivre normalement. Par
42
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

contre, le sang contient les globules rouges qui renferment la saturation doit donc diminuer et l'oxygène est libéré de
une protéine, l'hémoglobine, qui a une forte affinité pour l'hémoglobine. Il est à noter que la relation est sigmoïde.
l'O2. Cette protéine, en fixant de manière réversible l'O2, Pour une diminution de 100 à 60 mmHg, le changement de
augmente le contenu en O2 du sang. Des quantités impor- saturation est faible. Puis, pour un même changement de
tantes d'O2 peuvent alors être livrées aux tissus. Chacune pression, la chute de la saturation devient beaucoup plus
des quatre chaînes polypeptidiques qui composent l'hémo- rapide. Le cycle du transport de l'O2 correspond donc à
globine est reliée à une molécule d'hème par l'intermédiaire des aller-retour d'hémoglobine entre d'une part le poumon
d'un ion ferreux (Fe++). Une des valences de cet ion peut où la pression est élevée et où elle fixe l'O2 et d'autre part
de plus fixer une molécule d'O2. Au total, quatre molécules les tissus où la pression est base et où elle relâche l'O2. De
d'O2 peuvent donc être fixées par molécule d'hémoglobine. plus, l'affinité de l'hémoglobine pour l'oxygène est modu-
La propriété fondamentale de la liaison hémoglobine-O2 lée par des facteurs locaux : en présence d'une élévation
(HbO2 ou oxyhémoglobine) est sa réversibilité. En effet, du CO2 et d'un abaissement du pH, l'affinité diminue. Pour
après avoir capté l'O2 au niveau du poumon, l'oxyhémo- une même pression en oxygène la saturation est plus basse.
globine doit pouvoir le libérer au niveau tissulaire péri- C'est «  l'effet Bohr ». Ces conditions dans lesquelles l'affinité
phérique. Cette propriété est associée à un changement diminue sont précisément rencontrées dans les tissus méta-
d'affinité de l'hémoglobine pour l'oxygène en fonction du boliquement actifs, ce qui favorise encore plus la libération
contexte dans lequel se trouve la protéine. Cette variation de l'O2 à ce niveau. La quantité d'O2 réellement apportée
de l'affinité est décrite dans un graphique connu sous le aux tissus dépend du contenu en O2 du sang et de la per-
nom de « courbe de dissociation de l'hémoglobine » (fig. 3.3) fusion locale. Le contenu est la quantité d'O2 par volume
[4]. Cette courbe met en relation la pression en O2 dans le de sang. Comme nous l'avons dit, il y a une faible quantité
sang et la saturation de l'hémoglobine en O2. Chaque molé- d'O2 en solution (0,03 mL d'O2 par litre de sang par mmHg
cule d'hémoglobine peut fixer plusieurs molécules d'O2. La de PO2) et une quantité importante liée à l'hémoglobine.
saturation de l'hémoglobine en O2 représente le pourcentage Chaque gramme d'hémoglobine peut fixer 1,39 mL d'O2. Si
des places sur l'hémoglobine pour l'O2 qui sont réellement le sang du patient contient 15 g d'hémoglobine par 100 mL
occupées. C'est le rapport HbO2/Hbtotale exprimé en pour- et que la saturation est de 100 %, le contenu en oxygène
centage. Cette courbe de dissociation montre que lorsque est alors de 21 mL d'O2 par 100 mL de sang. Le « transport
la pression en oxygène est de 100 mmHg (comme dans en O2 » est le terme généralement utilisé pour décrire ce
le poumon) la saturation de l'hémoglobine est proche de que la circulation peut distribuer au corps tout entier. Ce
100 %. Par contre lorsque la pression diminue, la saturation transport est proportionnel au contenu en oxygène du
diminue. Dans les tissus, la pression en oxygène est faible, sang et au débit cardiaque. Ce transport peut être affecté
par des états pathologiques touchant l'un ou l'autre de ces
deux composants. Par exemple, l'anémie diminue le taux
d'hémoglobine dans le sang et pour une même PaO2 et une
même saturation de l'hémoglobine, le transport est donc
diminué. Inversement, l'érythropoïétine est l'hormone qui
stimule la synthèse des globules rouges et qui augmente le
taux d'hémoglobine sanguin. Son usage thérapeutique per-
met une augmentation du transport en O2 dans les tissus,
autorisant une plus grande activité métabolique tissulaire :

Transport O2 ( TaO2 ) : (Hb × 1, 39 × SaO2 ) + (PaO2 × 0 , 03)


× débit cardiaque
i
Au niveau tissulaire, les conditions circulatoires locales
sont variables en fonction de l'état de la pompe cardiaque
Fig. 3.3 (centrale) et des facteurs de vasodilatation (périphériques).
Courbe de dissociation de l'hémoglobine. Fonctionnellement et anatomiquement, le système
Variation de la quantité d'oxygène fixée sur l'hémoglobine circulatoire pulmonaire est différencié du système circu-
(saturation, SaO2 %) en fonction de la pression en O2 (PO2). Trait
continu : la relation dans les conditions régnant dans les poumons ; latoire périphérique. Le premier permet l'oxygénation du
trait discontinu : relation dans un tissu métaboliquement actif. sang et l'élimination du CO2 au niveau de l'interface milieu
43
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

ambiant/milieu interne qu'est la membrane alvéolocapil- Tableau 3.1 Réserves en oxygène (mL)


laire, alors que le deuxième permet d'amener l'O2 aux tissus Distribution du contenu en mL
et de capter le CO2 produit par le métabolisme cellulaire. O2 dans l'organisme
La régulation de la distribution du sang dans le poumon Alvéoles 370
est dès lors différente de celle dans les tissus. Nous avons
déjà vu le principe de la vasoconstriction hypoxique au Sang artériel 280
niveau pulmonaire. Au niveau tissulaire, l'hypoxie aura un San capillaire et veineux 600
effet exactement opposé. En effet, la distribution régionale Tissus sous forme dissoute 60
du débit cardiaque assure des apports en O2 au niveau des Myoglobine tissulaire 240
organes, et cela en fonction des besoins immédiats. Ces
Total 1550
besoins étant variables selon l'importance de la consom-
mation énergétique de l'organe, cette distribution s'adapte
aux conditions du moment afin d'éviter l'hypoxie cellulaire.
Dans les tissus, la baisse de la PO2 entraîne donc une vaso- du capillaire. À la sortie du capillaire, le sang arrive dans la
dilatation. Il n'est cependant pas possible de perfuser de veine désoxygénée. Quand les tissus sont métabolique-
manière importante tous les tissus en même temps. Des ment actifs, on assiste à une ouverture des sphincters pré-
mécanismes de protection favorisent certains organes : le capillaires qui permettent alors au sang de passer dans des
cerveau, les reins, le myocarde. En cas de besoins accrus capillaires jusque-là non perfusés. Le recrutement de capil-
ou de transport réduit, cela permet à ces organes vitaux laires élève la surface à travers laquelle l'O2 peut diffuser
d'assurer leurs fonctions. En dehors de ces conditions par- et les quantités d'O2 apportées aux tissus s'accroissent. Le
ticulières, la perfusion des tissus est régulée pour permettre maintien et l'adaptation immédiate des apports d'O2 uti-
un apport suffisant d'O2 pour couvrir les besoins. lisables par les tissus sont indispensables à la survie car les
réserves en O2 dans les tissus sont quasi nulles. Une estima-
tion approximative de cette réserve en O2 pour un adulte
Échanges gazeux sang–tissus : de 70 kg est de 1550 mL, soit une quantité permettant la
survie tissulaire pendant 6 minutes si tous les apports en
la diffusion tissulaire O2 s'arrêtent brusquement, ce qui est le cas lors d'un arrêt
cardiorespiratoire (tableau 3.1).
L'oxygénation tissulaire (et son corollaire l'élimination du
CO2) est la dernière étape du transport d'O2 des alvéoles
vers la cellule. La quantité d'O2 utilisée dans les tissus par
unité de temps s'appelle la consommation en O2 (symbolisé
·
Physiopathologie de l'hypoxémie
par le sigle V O2 , le point au-dessus du V signifiant qu'il s'agit
·
d'un débit). Cette V O2 est égale au produit du débit car- Une hypoxémie correspond à un manque d'O2 dans le
diaque (DC) par la différence artérioveineuse (DAV) en O2. sang artériel [5]. La diminution du contenu en oxygène par
Les facteurs déterminant les échanges gazeux au niveau des réduction du taux d'hémoglobine n'est généralement pas
capillaires tissulaires sont voisins de ceux déterminant ces considérée comme une hypoxémie. De même, le manque
mêmes échanges au niveau des capillaires pulmonaires. Les de perfusion locale conduisant à une hypoxie cellulaire n'est
différences de pression partielle entre les compartiments, pas non plus considéré comme une hypoxémie. L'hypoxémie
les caractéristiques de la membrane semi-perméable et les traduit une baisse de la pression en oxygène dans le sang
conditions chimiques de l'environnement influencent la artériel (↓ PaO2). Elle s'accompagne d'une diminution de
diffusion de l'O2 vers les tissus et du CO2 vers le capillaire. la saturation de l'hémoglobine en O2. Chacune des étapes
Le sang traversant les capillaires tissulaires arrive chargé de de l'entrée d'O2 dans le corps est susceptible d'être affectée
l'O2. Les cellules par contre utilisent continuellement l'O2 par une anomalie conduisant à un abaissement de la PaO2
et abaissent donc la PO2 au-dessous de la PO2 capillaire. (fig. 3.4). Le manque d'apport d'oxygène au poumon peut
Cela génère et entretient un gradient de concentration en entraîner une hypoxie. Cette carence peut provenir d'une
O2 créant les conditions idéales à la diffusion passive de l'O2 absence ou d'une diminution sévère de l'O2 dans l'air inspiré
vers les tissus. Suite à ce transfert, la PO2 capillaire diminue (hypoxie anoxique). C'est le cas en milieu confiné lorsque l'O2
au fur et à mesure que le sang avance dans le capillaire. est complètement consommé par une flamme ou déplacé
L'HbO2 se dissocie et libère l'O2 qui diffuse à son tour hors par un autre gaz (dans un accident industriel par exemple),
44
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

de la surface de la membrane. En ce qui concerne l'épais-


seur, la membrane peut être épaissie par du tissu conjonctif
dans l'interstitium (exemple : fibrose pulmonaire) ou par un
épaississement du film hydrique (exemple : œdème pulmo-
naire hémodynamique). Dans ces différentes présentations
cliniques, la diffusion est altérée en proportion de la sévérité
de l'atteinte. Celle-ci peut être tellement importante et la
diffusion tellement abaissée que le sang n'a plus le temps
d'être saturé en O2 avant sa sortie du capillaire pulmonaire.
Souvent, ce phénomène apparaît d'abord à l'effort. En effet,
le débit est alors augmenté et entraîne une accélération du
passage du sang dans le poumon. Le temps imparti pour
la diffusion est donc réduit. Ensuite, avec l'aggravation de la
maladie, l'hypoxémie apparaît également au repos.
La baisse de la PaO2 diminue le transport en O2 et peut
être un facteur favorisant l'hypoxie cellulaire. La correc-
tion de l'hypoxémie est donc souvent souhaitable. Outre
le traitement du facteur causal, il est possible de corriger
certaines hypoxémies par un apport accru d'O2 dans l'air
inhalé. L'élévation de la FiO2, en « normalisant » la PAO2,
Fig. 3.4 permet de résoudre l'hypoxémie anoxique mais aussi sou-
Mécanisme physiopathologique de l'hypoxémie. vent les hypoxémies secondaires à une hypoventilation
FiO2 : fraction inspiratoire en oxygène ; Patm : pression
· ·
atmosphérique ; V / Q : rapport ventilation perfusion. alvéolaire
· ·
modérée ou suite à un abaissement du rapport
V / Q (si supérieur à 0,01). Dans ces deux derniers cas, la
ventilation de l'alvéole est diminuée mais l'air apporté est
ou en haute altitude par diminution de la pression atmos- plus riche en oxygène ce qui compense. Cependant, si la
phérique. La réduction de l'apport au poumon peut égale- · ·
ventilation est trop diminuée (rapport V / Q < 0,01), même
ment être la conséquence d'une diminution de la ventilation en augmentant la concentration en O2, cela ne suffit pas et
(hypoventilation alvéolaire). Toute dépression du centre la PAO2 reste inférieure à la normale.
respiratoire (par exemple par une overdose morphinique) En élevant la PAO2 au-dessus de la normale, l'éléva-
est susceptible d'engendrer une hypoxémie qui s'accom- tion de la FiO2 accroît le gradient de pression en O2 entre
pagne alors toujours d'une hypercapnie (trop de CO2 dans l'alvéole et le capillaire pulmonaire. Cette élévation facilite
le sang artériel). Comme nous l'avons déjà mentionné, les la diffusion et peut compenser la diminution de diffusion
· ·
anomalies du rapport V / Q perturbent les échanges gazeux induite par un épaississement de la membrane alvéoloca-
· ·
[1]. Dans les zones à bas rapport V / Q , l'abaissement de la pillaire (comme dans la fibrose). Par contre, quand le rap-
PAO2 empêche que l'hémoglobine soit saturée à la sortie · ·
port V / Q est très bas ou en présence d'un shunt, l'apport
du capillaire pulmonaire. Lorsqu'il se mélange dans la veine d'O2 ne permet pas de normaliser la PaO2.
pulmonaire, ce sang capte alors l'oxygène fixé sur l'hémo-
globine provenant des autres régions du poumon et induit
une baisse de la PaO2. L'obstruction partielle d'une bronche
réduit la ventilation des alvéoles dépendantes de cette Administration d'oxygène
bronche et peut provoquer cet abaissement du rapport
· ·
V / Q (exemple : la bronchopneumopathie chronique obs- Indication de l'oxygénothérapie
tructive). Le shunt est la forme extrême d'anomalie du rap-
· ·
port V / Q , avec un rapport tombant à zéro. Une capacité de L'oxygénothérapie normobare consiste en une administration
diffusion anormale peut être à l'origine d'un autre mécanisme additionnelle d'O2 gazeux par voie aérienne à un taux supé-
induisant l'hypoxémie. La diffusion de l'O2 est proportion- rieur à celui rencontré dans l'air ambiant (FiO2 de 22 à 100 %).
nelle à la surface de la membrane alvéolocapillaire et inver- À court terme, l'objectif principal de l'oxygénothérapie est
sement proportionnelle à son épaisseur. Dans l'emphysème, d'élever la pression en oxygène dans le compartiment artériel
il y a une destruction des alvéoles et donc une réduction et de réduire le travail respiratoire nécessaire pour maintenir
45
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

les échanges gazeux. Le but final est bien entendu de préser- obstructifs chroniques et chez le patient obèse hypoventi-
ver une oxygénation tissulaire adéquate. À de très rares excep- lant [22] qui sont à risque d'hypercapnie. L'augmentation
tions près (gangrène gazeuse, intoxication au monoxyde de de la saturation au-dessus de 92 % ne change pas beau-
carbone, certains pneumothorax…), il n'y a pas d'utilité à éle- coup le transport en oxygène. L'administration d'O2 doit
ver la pression en oxygène au-dessus de la normale. Les seules être stoppée chez un malade stable qui présente une SpO2
indications basées sur des études scientifiques démontrant satisfaisante.
un bénéfice concernent donc des patients hypoxémiques. Les indications de l'oxygénothérapie sont :
Parfois prescrite pour soulager la dyspnée, elle n'apporte pas ● le patient hypoxémique :

d'avantages par rapport à l'air comprimé chez le patient non – lutte contre l'hypoxie tissulaire,
hypoxémique [6]. – réduction de la dyspnée,
L'O2 médical est un médicament et est donc soumis – réduction du travail respiratoire,
(hors urgence) à une prescription médicale. Il doit être mis – réduction du travail cardiaque (amélioration de sur-
en place par un personnel spécialisé habitué aux techniques vie associée) ;
d'oxygénothérapie et capable de réagir aux éventuelles ● le cluster headache ;

complications pouvant survenir en cours d'utilisation [7]. ● l'intoxication au monoxyde de carbone.

Son usage peut être de courte ou de longue durée selon


les cas. Les indications de l'oxygénation de longue durée
Risques associés à l'oxygénothérapie
(OLD) trouvent leur justification scientifique dans deux
études cliniques (NOTT et MRC) [8] qui ont démontré une La thérapie par oxygène peut entraîner des effets indési-
action bénéfique sur la survie des patients souffrant d'une rables relativement bénins tels que : sécheresse du nez,
insuffisance respiratoire chronique. Chez ces patients, au saignement nasal, irritation des muqueuses, fatigue et
repos, la PaO2 était inférieure ou égale à 55 mmHg à l'air céphalée matinale [14]. D'autres complications, détaillées
ambiant (lors de la ventilation à l'air libre). Cette valeur seuil ci-dessous, beaucoup moins fréquentes mais plus sévères
est donc retenue pour la prescription au long cours d'oxy- existent.
gène. L'administration d'oxygène chez ce type de patients
permet de réduire l'hypertension artérielle pulmonaire liée Hypercapnie
à la vasoconstriction hypoxique. Le travail du cœur droit
Le centre respiratoire n'est sensible à une hypoxémie que si
est amélioré et cela réduit le risque de décompensation
celle-ci est profonde. Le principal stimulant du centre respi-
cardiaque droite et la mortalité associée. La présence d'une
ratoire est la capnie (concentration du CO2 dans le sang).
hypercapnie n'est pas une contre-indication absolue à l'OLD
Une hypoxémie modérée module en fait l'effet stimulant du
à condition de vérifier le maintien d'une PaCO2 acceptable
CO2. Chez certains patients, la suppression de l'hypoxémie
sous O2. Lorsqu'une hypercapnie significative s'installe et
par l'administration d'O2 s'accompagne d'une majoration
s'accompagne d'un abaissement du pH, une ventilation
de l'hypercapnie. Les patients particulièrement à risque de
non invasive doit être envisagée en concomitance avec
développer ce phénomène sont ceux atteints d'une BPCO
l'OLD. Si la PaO2 est abaissée mais pas sous 55 mmHg, la
en exacerbation, d'un syndrome obésité–hypoventilation,
présence de signes cliniques du retentissement de l'hypoxé-
d'un asthme sévère chronique, d'une cyphoscoliose ou
mie chronique est un argument pour commencer l'OLD.
d'une maladie neuromusculaire [7, 15, 19]. Le mécanisme
Ces signes sont une polyglobulie, une surcharge vasculaire
exact est discuté mais l'hypercapnie peut s'aggraver progres-
droite, une hypertension artérielle pulmonaire secondaire,
sivement, entraîner une carbonarcose (coma sur intoxica-
des désaturations nocturnes ou à l'effort (un syndrome
tion par le CO2) et le décès du patient. Chez ces patients
d'apnée du sommeil doit être dépisté). Pour être efficace
susceptibles, il convient donc d'être prudent lors de l'admi-
sur la survie, la durée minimale de la prise d'O2 doit être au
nistration d'oxygène (voir ci-dessus).
moins de 15 h/jour.
En général, l'administration d'O2 doit être titrée en
observant régulièrement la valeur de la saturation pulsée Rétinopathie du prématuré
en O2 (SpO2) [9] et, si possible, par contrôle de la gazomé- Il s'agit d'un trouble du développement des vaisseaux san-
trie artérielle. L'intervalle de saturation pulsée en O2 visé guins au niveau de la rétine chez des enfants prématurés.
sous traitement doit être situé entre 94 et 98 %. Cette plage Cet événement est accentué lors d'une oxygénation trop
doit être ramenée entre 88 et 92 % chez certains patients généreuse. Cette pathologie peut entraîner une baisse

46
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

importante de l'acuité visuelle. C'est pour cette raison que Interactions pharmacologiques
la PaO2 de ces petits patients doit être maintenue en des-
La production de radicaux libres dérivés de l'oxygène est
sous de 140 mmHg.
accrue par certains médicaments (bléomycine) ou toxique
(Paraquat® : diméthyl-bipyridinium). L'utilisation de hautes
Toxicité pulmonaire (effet Lorrain Smith) FiO2 chez ces patients exposés à ces substances élève forte-
[18, 19, 20] ment le risque de fibrose pulmonaire [24, 25].
On décrit une altération de la surface alvéolaire lors d'une
exposition prolongée à de hautes concentrations d'O2. Dans Sources d'oxygène à domicile
des modèles animaux, on a pu montrer qu'à fortes concen-
trations, l'oxygène induit des lésions pulmonaires au niveau Oxygène gazeux
des jonctions intercellulaires endothéliales. On observe
alors une augmentation de la perméabilité capillaire entraî- L'oxygène gazeux peut être obtenu de prises murales dans
nant un œdème interstitiel et  alvéolaire. Le phénomène les institutions de soins ou de bonbonnes. Les bonbonnes
conduirait à long terme à un risque accru de fibrose pulmo- sont des récipients pressurisés à 200 bar au maximum
naire. Chez l'homme, on considère que des concentrations (pression de service), ce qui permet de « comprimer » leur
d'O2 supérieures à 50 % plus de 24 à 48 heures aggravent volume 200 fois (loi des gaz parfaits6). Ainsi, une bouteille
déjà les lésions tissulaires pulmonaires [20]. de 5 L de volume (bouteille B5), pressurisée à 100 bar peut
restituer 500 L d'O2 gazeux. L'autonomie est simple à cal-
culer : dans l'exemple précédent, si le débit d'oxygène est
Atélectasie par dénitrogénation [11]
de 2 L/min, le temps restant avant que la bonbonne soit
Chez les patients ayant des zones pulmonaires à bas rapports épuisée sera de :
· ·
V / Q , on peut observer le développement d'atélectasies (les  (100 bar ) (5 L ) 
alvéoles se collabent) lorsqu'ils respirent de l'oxygène à une  2 L/min à 1 bar  = 250 min, soit ± 4 heures
FiO2 proche de 1. L'explication physiopathologique de ce
phénomène est spéculative. À l'air ambiant, ces alvéoles à bas Les bonbonnes B2 (volume 2 L) sont réservées aux dépla-
· ·
rapports V / Q ont une ventilation trop faible pour remplacer cements à l'extérieur du domicile, mais leur poids (± 5 kg)
efficacement l'O2 ôté par la perfusion mais suffisante pour évi- peut majorer de façon importante la dépense énergétique
ter l'affaissement de l'alvéole. Lorsque de l'O2 pur est respiré, du patient. Des petites bonbonnes de 0,8 L en alliage léger
la pression en N2 dans les alvéoles (bien ventilées) et le corps ont été mises sur le marché pour pallier ce problème mais
diminue car il est remplacé par l'O2. Le N2 est ainsi éliminé par leur autonomie est limitée.
la ventilation. Par contre dans les alvéoles mal ventilées, le N2 Afin de diminuer les pertes en oxygène lors de la phase
ne peut être rincé de l'alvéole par la ventilation et sa pression y expiratoire, on peut utiliser un dispositif fixé entre le déten-
reste élevée. Ce gaz peut alors diffuser vers le sang comme l'O2 deur et la sortie de la lunette à O2, qui ne laisse passer l'oxy-
et le volume de l'alvéole diminue jusqu'au collapsus complet gène que pendant l'inspiration : c'est la valve économiseuse
provoquant l'atélectasie dite de dénitrogénation. d'O2. De plus, l'air inspiré en fin d'inspiration reste dans
l'espace mort et ne participe pas aux échanges. La valve ne
Vasoconstriction paradoxale en territoire délivre donc qu'un bolus d'oxygène réglable (débit pulsé)
ischémique [23] en début d'inspiration. Cette économie permet d'augmen-
ter l'autonomie de la bouteille. Il est important de noter que
Des données de la littérature laissent suspecter un effet le débit réellement délivré d'oxygène dépend directement
délétère d'une oxygénation excessive dans certaines patho- de la fréquence respiratoire et n'est donc pas constant. Le
logies ischémiques telles les infarctus du myocarde, les chiffre décrivant le volume du bolus délivré par la valve ne
accidents vasculaires cérébraux, la réanimation cardiopul- peut donc être converti simplement en litre par minute.
monaire. De hautes concentrations d'O2 pourraient réduire Il existe maintenant des systèmes permettant aux
la vasodilatation artérielle suite à une meilleure oxygéna- patients de remplir eux-mêmes des bonbonnes d'oxygène
tion tissulaire en général dans l'organe atteint. Cependant, à domicile à l'aide d'un oxyconcentrateur. La pression de
dans les territoires les moins bien perfusés, la disparition
de la vasodilatation régionale aggraverait l'hypoperfusion 6
P × V = nRT : la pression (P) multipliée par le volume (V) est une
entraînant des conséquences potentiellement délétères. constante si la température (T) ne change pas.

47
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

remplissage atteint ± 160 bar, ce qui limite l'autonomie. atteindre 6 L/min pour les modèles portables à 10 L/min
L'autonomie de remplissage est cependant un grand pour les appareils du domicile. Il existe des modèles por-
avantage. tables à débits pulsés délivrés uniquement durant la phase
inspiratoire.
Oxyconcentrateurs Les cuves à domicile sont rechargées lors du passage de
techniciens qualifiés. Elles peuvent aussi servir de source
Ces appareils ont pour principe d'extraire l'O2 présent dans
primaire pour remplir les réservoirs portables.
l'air atmosphérique. L'air ambiant est aspiré au travers d'un
Les récipients transportables modernes peuvent être
filtre à poussières, puis compressé au travers de deux tamis
utilisés en position horizontale, ce qui n'est pas le cas des
moléculaires remplis de zéolithe qui retiennent les molé-
modèles plus anciens. Un sac à dos ou un chariot à roulettes
cules d'azote. L'oxygène filtré est alors dirigé vers le débit-
peut être utilisé pour faciliter le transport des appareils.
mètre du patient. L'oxygène peut être produit sans limite
Le coût de ce mode d'oxygénation est nettement supé-
de temps. Notons que la fraction d'O2 (FO2) sortant de ces
rieur à celui des oxyconcentrateurs.
appareils oscille aux alentours de 95 %.
Il existe différentes catégories d'oxyconcentrateurs :
● les modèles fixes pour le domicile. Robustes, ils sont ali-
Accessoires pour l'administration
mentés sur secteur. Ils peuvent délivrer des débits pouvant d'oxygène
atteindre 8 L/min en continu pour les plus performants. Le
bruit, le poids, l'encombrement et la consommation élec- Rotamètres
trique varient selon les modèles ;
● les modèles transportables : d'un poids approximatif
Les rotamètres mesurent et déterminent le flux de gaz qui
de ± 5 kg, ces appareils délivrent l'O2 de manière pulsée. les traversent. En général, ils sont constitués d'une colonne
Leur autonomie sur batterie est de ± 8 h. Celle-ci peut être de verre graduée légèrement conique dans laquelle se
rechargée sur secteur ou sur l'allume-cigare du véhicule. trouve une bille en polystyrène. En fonction du débit
Certains modèles plus pesant peuvent fournir un débit demandé, la bille monte dans la colonne qui doit être verti-
continu jusqu'à 3 L/min mais avec une autonomie réduite ; cale. Pour lire la valeur du débit délivré, il suffit de regarder
● des modèles portables : pesant à peu près 2 kg, ces appa-
la graduation en regard du milieu de la bille. La précision de
reils délivrent eux aussi des doses pulsées d'oxygène. Leur ces appareils est imparfaite et peut varier fortement d'un
autonomie sur batterie est de 4 à 8 h (selon le nombre de débitmètre à l'autre [27]. L'exactitude est dépendante de
batteries). Les débits réellement délivrés sont nettement la température, de l'humidité, de l'électricité statique, du
plus limités et il convient de s'assurer de la pertinence de manque de verticalité de la colonne de verre.
ce type d'appareillage avant de succomber aux demandes
pressantes du patient. Tuyaux d'oxygène
Les modèles transportables et portables sont équipés de Selon les fabricants, la longueur des tuyaux d'oxygène ne
roulettes, facilitant le déplacement à l'extérieur du domicile. doit pas dépasser 15 m [28]. Cette recommandation est
valable pour les obus d'O2, les dispositifs d'O2 liquide et
Oxygène liquide les oxyconcentrateurs. D'après notre expérience, cette lon-
Le principe de stockage de l'O2 liquide repose sur le fonde- gueur peut atteindre 30 m pour la plupart des appareils
ment qu'un gaz se contracte lorsqu'il est refroidi. L'O2 liqué- utilisés. Un moyen simple de vérifier l'existence d'un débit
fié à une température de −183 °C restitue par évaporation de gaz au bout du tuyau est d'en plonger l'extrémité dans
850 fois son volume en gaz à pression atmosphérique et un verre d'eau. Les bulles de gaz indiqueront à l'utilisateur la
température ambiante. Autrement dit, 1 L d'O2 liquide cor- présence du flux de gaz.
respond à 850 L d'O2 gazeux.
L'O2 liquide est stocké dans des cuves isothermes (« bou- Humidificateur
teilles thermos »). Le volume de ces cuves est variable (de Dans le nez, l'air est réchauffé à 37 °C et saturé en vapeur d'eau
0,8 L pour les modèles portables à 46 L pour les cuves à (humidité relative 100 %). Dans les voies aériennes inférieures,
domicile). Une bouteille d'O2 liquide de 0,8 L pèse ± 3 kg et l'humidité absolue est de 44 mg H2O/L d'air. L'oxygène délivré
permet de restituer ± 700 L d'O2 gazeux, soit une autono- par les appareils d'oxygénothérapie présente une humidité
mie de 11 h à un débit de 1 L/min. Les débits d'O2 peuvent relative (HR) proche de 0 % et une température de ± 15 °C.

48
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

Afin de prévenir un dessèchement des voies respiratoires, les Sonde nasale


praticiens utilisent le barbotage à froid pour l'humidification
Il s'agit d'un tuyau souple d'une longueur de ± 40 cm
de l'O2. L'O2 traverse l'eau d'un container avant d'être dirigé
(Charrière 10) que l'on introduit perpendiculairement au
vers le patient. Ce procédé n'est en réalité pas d'une grande
plan de la face du patient dans l'orifice nasal. Cette longueur
utilité car l'eau des barboteurs est refroidie par le gaz le tra-
doit être équivalente à la distance tragus de l'oreille/coin de
versant. Dans ces conditions, la valeur maximale d'HR dans
l'œil. La fixation se fait à l'aide d'un adhésif sur l'arête du nez.
l'O2 une fois réchauffé n'est que de 29 %, ce qui est insuffisant
L'administration d'O2 par sonde nasale doit être évitée car
pour une humidification satisfaisante. De plus, une étude [30]
elle expose les malades à des risques d'incidents : insuffla-
démontre qu'à bas débit (< 4 L/min), le volume d'O2 inhalé
tion gastrique, nausées, lésion de la muqueuse [21].
(HR = 0 %) est faible comparé au volume d'air ambiant inspiré
en parallèle (HR > 55 %). L'humidité de l'air ambiant est donc
bien plus importante. L'humidification en routine pour des Masque simple (MS)
bas débits d'O2 n'est pas nécessaire tant que l'HR de la pièce Ces masques sont recommandés en cas d'hypoxémie
est suffisante (idéalement : de 30 à 60 %). moyenne à sévère. Le débit d'O2 doit être compris entre 5
et 10 L/min. Un débit d'O2 inférieur à 5 L/min exposerait
Systèmes d'administration de l'oxygène [31] le patient à un risque de réinhalation du CO2 expiré et/ou
une augmentation des résistances à l'inspiration [21, 32]. Le
Lunettes nasales (LN) MS est aussi conseillé lorsque la canule nasale n'est pas bien
Aussi appelé canules nasales, ce dispositif confortable, peu tolérée. Plusieurs publications ont montré que les patients
coûteux et bien toléré est le plus fréquemment utilisé en qui requièrent un débit moyen d'O2 préfèrent les canules
clinique et à domicile [39]. Il permet de lutter efficacement nasales au masque simple qui a tendance à être ôté plus
contre les hypoxémies modérées. Les LN peuvent être por- souvent [21, 25].
tées en continu et maintenues en place même si le patient Le MS permet d'atteindre des FiO2 comprises entre 40 et
mange ou se lave. L'extrémité des LN est constituée de deux 60 %. Pour un même débit d'oxygène, ces valeurs de FiO2
petits tuyaux d'une longueur approximative de 1 cm qui sont influencées par :
● le débit d'oxygène ;
sont introduits à la partie antérieure des narines. Le débit
● le débit inspiratoire ;
d'oxygène ne doit pas dépasser 6 L/min si l'on veut éviter de
● la fréquence respiratoire ;
provoquer des irritations importantes ainsi qu'une séche-
● l'espace mort du masque ;
resse des muqueuses [32]. Pour calculer simplement la FiO2
● l'étanchéité du masque sur le visage du patient ;
administrée en fonction du débit d'O2 apporté par les LN,
il existe deux équations dans les guidelines internationaux : ● le ratio
temps inspiratoire .
● FiO = 20 % + (4 % × débit O L/mn) ; temps expiratoire
2 2
● FiO = 21 % + (3 % × débit O  L/mn).
2 2 Non rebreathing mask (NRM) ou masque avec sac
Ces formules donnent des résultats acceptables pour réservoir
un adulte ventilant calmement (FR 15/min − Vt 400 mL −
Ce système ressemble au masque simple, mais un sac réser-
ratio inspiration/expiration = 1/2). Mais dès que la ventila-
voir d'O2 est placé à la partie inférieure du masque. L'oxygène
tion pulmonaire s'écarte de ce schéma, la FiO2 ne peut plus
est injecté directement dans ce sac qui se remplit pendant
être calculée de cette manière. En réalité, la FiO2 administrée
la phase expiratoire. Lors de l'inspiration, la pression néga-
est fonction du ratio :
Débit oxygène tive créée au sein du masque par la dépression dans les voies
aériennes ouvre une valve unidirectionnelle située entre le
Débit inspiratoire
sac et le masque. Deux autres valves unidirectionnelles pla-
D'après cette formule, pour un débit d'O2 inchangé, si le cées sur les faces latérales du masque viennent obturer les
débit inspiratoire augmente, la FiO2 diminue et vice versa. orifices de sortie d'air du masque. L'O2 accumulé dans le
Cette singularité doit alerter le kinésithérapeute qui effec- sac peut alors être inhalé par le patient sans apport d'air
tue de la rééducation à l'effort chez le patient oxygéné. En extérieur. La concentration de l'O2 dans l'air inspiré est donc
effet, dans ce cas, l'augmentation du débit inspiratoire dû plus importante. Durant la phase expiratoire, la surpression
à l'effort diminuera de facto la FiO2. Il sera donc nécessaire des voies aériennes ferme la valve unidirectionnelle entre le
d'augmenter le débit d'O2 durant la période d'effort afin masque et le sac, et ouvre les valves d'échappement sur les
que le patient reçoive une FiO2 adéquate. faces latérales. Le masque possède deux orifices d'échap-
49
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

pement à ce niveau. Si un seul est obturé par une valve, de de gaz générés par ce matériel. Pour d'autres, cette sonorité
l'air peut pénétrer dans le masque par l'autre orifice durant est considérée comme rassurante [23].
l'inspiration. La FiO2 est alors plus basse (FiO2 de 40 à 70 %
pour débit O2 de 6 à 10 L/min). Lorsque les deux orifices Optiflow® [38]
sont dotés d'une valve, la FiO2 monte entre 60 à 80 % pour Ce système est prévu pour délivrer un débit de gaz élevé à
un débit d'O2 de plus de 10 L/min. Ces NRM sont réservés une FiO2 précise (20 à 60 L/min en fonction du débitmètre
aux situations de profondes hypoxémies. Ils présentent une ou du respirateur, 21 à 100 %). L'O2 passe d'abord dans une
assez bonne efficacité tant que le volume d'O2 disponible chambre pour y être réchauffé et humidifié. Ensuite, il est
[volume d'O2 du sac + (débit d'O2 × temps inspiratoire)] délivré au patient via un tube annelé chauffé et des canules
est supérieur (ou égal) au volume courant du patient et nasales spécifiques permettant d'éviter un jet trop puissant.
si l'étanchéité du masque est garantie. Pour s'assurer de En plus des avantages mentionnés ci-dessus, l'Optiflow®
la bonne adhérence du masque, il est nécessaire de fixer permet un « lavage » de l'espace mort de la sphère ORL et
fermement celui-ci sur le visage du patient. Cette situation le maintien d'une pression positive dans les voies aériennes
génère parfois de la claustrophobie chez certaines per- supérieures en fin d'expiration (PEEP). Ce dernier élément
sonnes qui ont tendance à retirer leur masque. permettrait de diminuer le travail respiratoire. Des travaux
récents montrent ainsi une amélioration de l'oxygénation
Masque Venturi (ventimask – masque et une diminution de la fréquence respiratoire avec ce
de Campbell) système.
Ce matériel permet d'administrer des FiO2 contrôlées Ce système est bien toléré, mais le confort peut être réduit
indépendamment du débit d'O2 et du débit inspiratoire suite aux bruits engendrés par le débit. De plus, le poids des
développé par le patient. De l'oxygène est injecté dans une canules peut entraîner des escarres aux points de pression. La
buse Venturi. Des orifices latéraux situés à proximité de place de ce système dans l'arsenal thérapeutique des insuffi-
l'injecteur vont permettre à l'air ambiant de pénétrer dans sances respiratoires n'est pas encore clairement définie.
le masque. Ce phénomène crée une proportion constante
Tusk mask (fig. 3.5)
de mélange air/oxygène supérieure au débit inspiratoire
du patient. Cette caractéristique permet une oxygénation En 1998, Hnatiuk [39] décrit une adaptation originale du
constante et une meilleure élimination du CO2. Dans ce cas, masque avec sac réservoir en plaçant dans les faces latérales du
le risque de réinhalation est quasi nul. Les FiO2 disponibles masque un tuyau annelé (ISO 22 mm) d'une longueur de ±
sont : 24 %, 28 %, 35 %, 40 % et 60 %. Entre 24 et 40 %,
les FiO2 sont exactes. Au-delà, la précision de la valeur de
FiO2 diminue [35]. À 60 % de FiO2, la plupart des Venturi ne
procurent qu'une FiO2 de 50 %. Une étude [36] a montré
que si la fréquence respiratoire du patient excédait 30/min,
son débit inspiratoire devenait supérieur au débit fournit
par le masque. Dans ce cas, il se produit une diminution de
la FiO2 par « pollution » de l'air ambiant qui pénètre alors
dans le masque par ses orifices latéraux. Dans ce cas, on
peut augmenter de plus de 50 % le débit d'oxygène recom-
mandé par le constructeur afin d'augmenter le débit de gaz
enrichi pénétrant dans le masque [32]. Notons que l'aug-
mentation du débit d'oxygène n'élève pas la valeur de la
FiO2. Une perte d'étanchéité du masque entraîne une chute
de la FiO2. En théorie, ces masques devraient être utilisés
afin de diminuer la réinhalation du CO2 chez des patients à
risque. Une étude en cross-over [37] comparant le masque
Venturi versus la sonde nasale chez des patients BPCO a
montré que la SpO2 était sous les 90 % à peu près 5,4 h/
jour avec le Venturi Mask contre 3,7 h/jour avec la canule Fig. 3.5
nasale. Certains patients se plaignent du bruit et du débit Tusk mask.

50
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

10 cm. Cette amélioration permet d'obtenir des FiO2 proches de


1. Dans son expérience, l'inventeur n'a pas constaté d'augmen-
tation importante de la PaCO2 chez ses patients. Cependant, la
réalisation de ce masque est difficile, notamment par la confec-
tion des trous dans les faces latérales du masque.
Chechani [40] a démontré qu'avec le flux d'air régnant
dans ce type de masque, il n'y a pas d'augmentation signi-
ficative de la réinhalation d'air expiré malgré l'espace mort
accru de l'équipement dû aux tuyaux ajoutés.

Double trunk mask (DTM) (fig. 3.6)


Ce masque de fabrication « artisanale » est constitué de
deux tuyaux annelés de 22 mm de diamètre (« cornes »)
et d'une longueur de ± 20 cm chacun. Ces cornes sont
placées dans les orifices latéraux d'un masque aérosol. Le
DTM est placé sur le visage d'un patient oxygéné de façon
Fig. 3.7
conventionnelle avec des lunettes nasales. Son principe
De gauche à droite : Oxymask®, sonde nasale, masque Venturi,
est simple : durant la phase expiratoire, l'oxygène injecté masque à O2 simple, NRM, lunettes à oxygène.
par les canules nasales s'accumule à l'intérieur des cornes.
Lors de l'inspiration suivante, une faible dépression géné-
rée à l'intérieur des cornes sera suffisante pour « aspirer » le de s'assurer que le pH ne s'altère pas, il est recommandé
volume d'O2 accumulé. La FiO2 sera ainsi augmentée. Dans de pratiquer régulièrement des gazométries et de surveiller
notre expérience [41], ce masque nous permet d'oxygéner l'état clinique du patient. Dans notre pratique quotidienne,
des patients fortement hypoxémiques chez qui le masque nous n'avons pas constaté d'augmentation significative de
NRM ne donne pas les résultats attendus. Chez les patients la PaCO2 en utilisant ce masque.
adultes, et pour limiter le risque de réinhalation en CO2, le
débit d'oxygène doit être supérieur à 3 L/min. De plus, la Oxymask® (fig. 3.7)
fréquence respiratoire doit être inférieure à 35/min. Afin
Il s'agit d'un masque à O2 sans espace mort. L'injection de
l'oxygène se fait au travers d'un diffuseur spécial qui crée
un « vortex de molécules d'O2 » en direction des voies
aériennes. D'après le fabricant, ce masque permettrait d'ad-
ministrer des FiO2 allant de 24 à 90 %.

Recommandations lors
de l'utilisation d'oxygène
Il est conseillé de :
● ne pas fumer ;

● ne pas stocker les bouteilles à proximité d'une flamme

ou d'un point chaud


● ne jamais utiliser de graisse en présence d'O 7.
2
Il est conseillé d'avoir un extincteur dans la pièce la plus
fréquentée par l'utilisateur d'oxygène.
Fig. 3.6 7
Pas d'onguent gras dans la narine, pas de graisse sur les pièces du
Double trunk mask. détendeur.

51
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

[14] National Heart, Lung, and Blood Institute. What are the risk of
Coup de feu oxygenotherapy. En ligne : www.nhlbi.nih.gov/health/health-
topics/topics/oxt/risks.html.
Dans les obus d'O2, la pression est de 200 bar. Lorsqu'on [15] Kim V, Benditt JO, Wise RA, Sharafkhaneh A. Oxygen therapy in
ouvre le robinet principal de la bouteille, l'O2 s'engouffre chronic obstructive pulmonary disease. Proc Am Thorac Soc 2008 ;
dans la chambre basse pression qui est à la pression de 5(4) : 513–8.
1 bar. Il y a donc une montée brutale de la pression qui [16] O'Driscoll R. British Thoracic Society emergency oxygen audits.
passe de 1 à 200 bar en quelques secondes. Selon la loi British Thoracic Society Oxygenotherapy. Thorax. 2008 ; 63 : A126.
des gaz parfaits, l'augmentation de pression est corrélée [17] Branson RD, Johannigman JA. Pre-hospital oxygen therapy. Respir
Care 2013 Jan ; 58(1) : 86–97.
à l'augmentation de température. Dans ces conditions,
[18] Lorrain S. The pathological effect due to increase of oxygen tension
l'intérieur de la chambre peut atteindre 500 °C et tous les in the air breathed. Annales de chimie 1849 ; p. 496.
matériaux organiques présents s'enflamment instanta- [19] Huet O. Toxicité de l'oxygène : mythe ou réalité. In : Conférences
nément. Par conséquent, la moindre présence de matière d'actualisation 2006 SFAR Issy-les-Moulineaux : SFAR/Elsevier
organique (graisse, poussière, joint défectueux) peut Masson ; 2006. p. 207–15.
déclencher une combustion instantanée et l'inflamma- [20] West JB. Physiologie respiratoire. 6e éd. Paris : Maloine ; 2003.
tion du métal constituant le détendeur. Dans certaines [21] Tricoche S, Doucet O, Fusciardi J. Oxygénation périopératoire. In :
conditions extrêmes, on assiste à un « oxycoupage » de Conférence d'actualisation 2001 SFAR. Issy-les-Moulineaux : SFAR/
la bouteille (le métal fond) avec projection de gaz à très Elsevier Masson ; 2001. p. 165–84.
[22] Dejours P, Dejours S. The effects of barometric pressure accor-
haute température et de métal en fusion [33].
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52
3. L'oxygène : sa place en physiologie respiratoire et son rôle thérapeutique

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53
Chapitre 4
Interprétations pratiques
de l'équilibre acido-basique
Fabrice Duplaquet, Pierre Bulpa

PLAN DU CHAPITRE
Relation CO2-pH 56
Physiopathologie de l'équilibre
acido-basique 57
En clinique 58
En pratique 59

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Le système respiratoire joue un rôle important dans l'ho- L'organisme au cours de l'évolution, a développé trois
méostasie acido-basique du milieu intérieur. Cet équilibre est mécanismes pour s'adapter aux variations du pH intérieur
indispensable au bon fonctionnement cellulaire, car il condi- : la ventilation alvéolaire, l'excrétion rénale et le système
tionne le bon déroulement des processus physicochimiques tampon dont le plus important est celui impliquant les
utiles à la vie. Dans ce but, la concentration plasmatique en bicarbonates/acide carbonique (HCO3− /H2CO3).
ions hydrogènes (H+) doit être maintenue dans des limites La ventilation est le paramètre d'adaptation le plus rapide
précises. Le reflet de cette concentration en ions H+  peut en cas de variation du pH intérieur. En quelques secondes,
être mesuré en laboratoire par le pouvoir hydrogène (pH) la fréquence respiratoire et le volume courant mesurés par
qui par convention est l'unité de mesure de l'acidité d'un la ventilation minute peuvent se modifier après détection
milieu. Le pH peut s'exprimer sous forme d'une équation : par les chémorécepteurs d'une variation sanguine de PCO2
pH = − log [H+]. Par conséquent, toute augmentation de la ou de pH.
concentration en ions H+ entraînera une diminution du pH Le système des tampons est composé de différentes
et à l'inverse, toute diminution de la concentration en ions molécules dont le rôle est de fixer les ions H+ dans le but
H+ circulants entraînera une augmentation du pH. Le pH de limiter la baisse du pH. L'ion HCO3− est le tampon extra­
sanguin doit, à l'équilibre, se situer entre 7,35 et 7,45, cette cellulaire principal de l'organisme, il fixe l'ion H+ pour former
valeur est mesurée sur un prélèvement de sang artériel. une molécule de H2CO3. L'ion H+ n'étant plus présent sous
cette forme ne participe plus au pH.
CO2 + H2O ↔ H2CO3 ↔ HCO−3 + H+ Le système d'adaptation rénal est plus lent à agir (> 24 h)
Cette équation nous montre comment le pH est main- et permet, à long terme, de rétablir l'équilibre si les condi-
tenu grâce aux systèmes respiratoire et rénal (fig. 4.1). tions de déséquilibre persistent. Au terme de l'adaptation
Le système respiratoire permet l'élimination du CO2, rénale, l'hyperventilation compensatoire n'est plus le seul
par la diffusion passive au travers de la membrane alvéolo­ mécanisme mis à contribution, le travail respiratoire est
capillaire. Le système rénal permet l'élimination des ions H+. diminué et ainsi la fatigue des muscles respiratoires est
Le CO2 est le produit du métabolisme aérobie. Pendant évitée.
celui-ci, il est fabriqué dans la mitochondrie et évacué dans
le sang. La PCO2 du sang entrant dans les capillaires pulmo-
naires est normalement plus haute que la PCO2 alvéolaire. Relation CO2-pH
Cette différence de concentration entre les deux milieux
séparés par une membrane semi-perméable explique la Les chémorécepteurs périphériques et centraux, sensibles
diffusion du CO2 du sang vers l'alvéole. Cette diffusion pas- pour les premiers à la variation de concentration en ions
sive est donc, comme pour l'oxygène, liée à la différence H + et pour les seconds à la variation de PCO2, renvoient
de pression partielle en gaz CO2 de part et d'autre de la l'information au centre respiratoire, qui dans les conditions
membrane alvéolocapillaire. physiologiques adaptera les paramètres de la ventilation, la
Métabolisme des Métabolisme
acides aminés oxydatif cellulaire
Anaérobie

H+ + HCO3– H2CO3 H2O + CO2

REINS POUMONS

Lent Rapide
Fig. 4.1
Maintien du pH par élimination du CO2 (système respiratoire) et par élimination des ions H+ (système rénal).
56
4. Interprétations pratiques de l'équilibre acido-basique

fréquence et l'amplitude, afin que le pH reste entre 7,35 et l'acidose métabolique, l'alcalose respiratoire et l'alcalose
7,45. Cette adaptation ventilatoire influence la PCO2 alvéo- métabolique. Comme leurs noms l'indiquent, deux sont
laire. Une hypoventilation alvéolaire va entraîner l'accu- d'origine respiratoire et deux d'origine métabolique.
mulation de CO2 au niveau alvéolaire et ainsi diminuer la L'interprétation des gaz du sang est l'élément princi-
diffusion passive du CO2 au travers la membrane alvéolo- pal du diagnostic différentiel entre ces quatre tableaux
capillaire. Cela aura pour effet immédiat d'entraîner une cliniques. En routine clinique, le prélèvement se fait dans
augmentation sanguine du CO2 et donc de la PCO2. Ceci des conditions d'asepsie locale strictes en ponctionnant
provoquera une acidification du milieu intérieur. Les tam- l'artère radiale au niveau du poignet où elle est palpable,
pons de l'organisme vont alors limiter cette acidification car relativement superficielle. Son territoire étant desservi
en se liant aux ions H+. Enfin, si l'hypoventilation persiste, par une circulation collatérale cubitale, le vasospasme
l'excrétion rénale va s'adapter en retenant plus de bases et réactionnel à la ponction et la compression hémostatique
en éliminant plus d'ions H+. Cette diminution du pH est locale auront moins de répercussions. En cas de doute sur
appelée acidose respiratoire. À l'inverse, une augmentation la qualité de la circulation collatérale, le test d'Allen est
de la ventilation va entraîner une augmentation de l'élimi- réalisé.
nation du CO2 alvéolaire et ainsi faire diminuer la concen- L'analyse de ce prélèvement sanguin permet de déter-
tration de CO2 sanguin en entraînant une augmentation miner l'état acido-basique à un moment donné grâce
du pH, soit une alcalose respiratoire. aux informations fournies rapidement par un analyseur
La distribution locale de la ventilation alvéolaire est de gaz du sang (encadré 4.1). En plus du pH, les valeurs
adaptée au débit sanguin, ce qui optimise l'élimination de pressions partielles en oxygène (PO2) et en dioxyde
intra-alvéolaire du CO2. Le CO2 est aussi lié à l'hémoglobine de carbone (PCO2), la concentration en ions bicarbo-
sous forme de carbaminohémoglobine. La courbe de dis- nates (HCO3−), l'excès de base (BE) et le taux de lactates
sociation du CO2 n'est pas sigmoïde comme celle de l'O2, sont aussi mesurés par le même appareil. BE est l'abré-
mais linéaire et influencée par la PO2 : c'est l'effet Haldane. viation de base excess, soit excès de base en français.
Le phénomène physiologique, du nom du physiologiste Pour interpréter l'excès de base, il faut se poser la ques-
britannique John Scott Haldane, décrit la modification tion suivante : combien de bicarbonates faut-il ajouter
d'affinité entre l'hémoglobine et le CO2 en fonction de ou enlever pour obtenir un pH normal ? Si la valeur de
la PO2. L'oxyhémoglobine a une affinité réduite pour le bicarbonates est 18, il faut en ajouter 6 pour obtenir
dioxyde de carbone ce qui participe, dans les capillaires 24  donc l'excès de base est égal à −6 (6 trop peu). Si
alvéolaires où la PO2 est élevée, à la libération du CO2 vers par contre la valeur est 32, il faut alors en enlever 8 pour
l'alvéole. obtenir 24 soit un excès de base de + 8 (8 de trop). Le
L'évaluation de la commande centrale de la respiration, tableau 4.1 montre de manière simplifiée l'évolution des
en cas d'hypercapnie, peut se faire par un test dit de gaz du sang lors d'un déséquilibre acido-basique aigu et
« re-inhalation de CO2 » (rebreathing CO2). Le patient res- après compensation.
pire dans un circuit fermé contenant un mélange hyper- Il existe des représentations visuelles des déséquilibres
capnique–hyperoxique, ce qui permet d'augmenter la acido-basiques, tels les diagrammes de Van Ypersele de
PCO2 alvéolaire et donc la PCO2 plasmatique. Chez le sujet Strihou [1] et de Davenport [2] qui permettent sur un
normal, la réponse ventilatoire consiste en une augmenta- graphique en deux dimensions de nommer le déséqui-
tion linéaire. La pente de cette réponse ramenée sur un dia- libre acido-basique à partir du pH, de la PCO2 ou du
gramme décrit la sensibilité du centre respiratoire au CO2. bicarbonate.
Ce test est peu précis, car la majorité des individus ont une
réponse qui varie de 1 à 3 L.

ENCADRÉ 4.1 Valeurs normales


Physiopathologie de l'équilibre l pH = 7,37–7,43 (7,35–7,45)
pCO2 = 35–45 mmHg
acido-basique l

l pO > 80 mmHg
2

l HCO = 22–26 mmol/L
3
Un déséquilibre acido-basique survient lorsque les méca- l BE de −2 à + 2
nismes de compensation sont dépassés. Il existe quatre l Lactates max. 2 mmol/L

grandes catégories de déséquilibre : l'acidose respiratoire,


57
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Tableau 4.1 Évolution des gaz du sang lors


d'un déséquilibre aigu l Syndrome de Guillain-Barré
pH PCO2 HCO−
Type d'acidoses/d'alcaloses l Myopathies
3
l Syndromes d'apnées du sommeil
Gaz du sang lors d'un déséquilibre aigu l Syndrome de Pickwick

Diminué ↑ Normal à ↑ Acidose respiratoire l Malédiction d'Ondine

l Déformations thoraciques
Diminué ↓ ↓ Acidose métabolique
l Cyphoscoliose
Augmenté ↓ Normal à ↓ Alcalose respiratoire l Hypoventilation sur une pathologie des voies aériennes

Augmenté ↑ ↑ Alcalose métabolique supérieures


l Sténose laryngée aiguë sur laryngite ou épiglottite
Gaz du sang lors d'un déséquilibre en phase
l Sténose laryngée sur cancer ou corps étranger
de compensation
l Spasme laryngé sur tétanos
Diminué ↑ ↑↑ Acidose respiratoire
Quelques causes d'acidose métabolique
Diminué ↓ ↓ Acidose métabolique (pH < 7,35, PCO2 basse, bicarbonates bas)
Augmenté ↓ ↓↓ Alcalose respiratoire l Arrêt cardiocirculatoire

l Insuffisance rénale
Augmenté ↑ ↑ Alcalose métabolique
l Acidocétose diabétique

l Intoxication médicamenteuse ou toxique

En clinique l Acide acétylsalicylique

l Éthylène glycol

l Méthanol
L'anamnèse, l'examen du patient et l'analyse des gaz du
l Acidose lactique
sang nous donnent les clés diagnostiques nécessaires à la
compréhension. En effet, l'état de conscience, le pattern res-
piratoire, le taux de PCO2, le pH, l'excès de base et le taux de
bicarbonates permettent de poser une hypothèse diagnos-
tique et d'adapter le traitement en conséquence.
Les encadrés 4.2 et 4.3 listent quelques causes d'acidose ENCADRÉ 4.3 Causes d'alcalose
et d'alcalose.
Quelques causes d'alcalose respiratoire
(pH > 7,45, PCO2 basse, bicarbonates bas)
l Hyperventilation psychogène

ENCADRÉ 4.2 Causes d'acidose l Embolie pulmonaire

l Pathologie de haute montagne

Quelques causes d'acidose respiratoire l Pneumonie

(pH < 7,35, PCO2 élevée, bicarbonates l Œdèmes pulmonaires cardiogéniques ou non

normaux ou élevés) l Douleur aiguë

l Pulmonaire l Pathologies hépatiques chroniques

l BPCO
Quelques causes d'alcalose métabolique (pH
l Crise d'asthme
> 7,45, PCO2 normale ou élevée, bicarbonates
l Oxygénothérapie sur insuffisance respiratoire hyper­
élevés)
capnique (effet Haldane)
l Vomissements sévères
l Paralysie diaphragmatique
l Prise de diurétiques ou corticoïdes
l Pneumothorax
l Syndrome de Conn ou hyperaldostéronisme
l Pathologies restrictives
l Hypercalcémie et milk-alkali syndrome
l Syndrome de détresse respiratoire aiguë

l Sténose trachéale

l Hypoventilation alvéolaire d'origine centrale

l Abus de médicaments sédatifs

l Tumeur, hémorragie, thrombose cérébrale


Acidose respiratoire
l Neuromusculaire
En phase aiguë, la gazométrie montre un pH inférieur à
l Sclérose latérale amyotrophique
7,35 avec une PCO2 supérieure à 45 mmHg et des bicar-
bonates normaux ou légèrement augmentés. Elle survient
58
4. Interprétations pratiques de l'équilibre acido-basique

lorsque la ventilation alvéolaire n'est plus suffisante, par Alcalose respiratoire


exemple lors d'une sédation médicamenteuse du centre
respiratoire, lors d'une obstruction du débit expiratoire Elle est le reflet d'une hyperventilation qui entraîne une
(BPCO, asthme), en présence d'une obésité morbide, diminution de la PCO2 alvéolaire et finalement une aug-
secondairement à la réduction de la surface pulmonaire mentation du pH (> 7,45) par diminution des ions H+.
d'échanges gazeux (emphysème), suite à une déforma- Cela recouvre deux tableaux différents : soit une alca-
tion de la paroi thoracique (cyphoscoliose) ou encore lose respiratoire avec PO2 normale, typiquement le cas
dans les maladies neuromusculaires (sclérose latérale des hyperventilations psychogènes survenant dans un
amyotrophique). contexte d'anxiété, soit une alcalose respiratoire avec
Les symptômes sont ceux de la cause de l'hypoventi- hypoxémie. Dans ces derniers cas, il s'agit d'une hyperven-
lation, par exemple la somnolence en cas d'intoxication tilation réactionnelle à l'hypoxémie qui elle-même est
aux somnifères ou les signes de lutte de l'insuffisance secondaire à une pathologie respiratoire aiguë telle que
respiratoire aiguë, suivis, si la PCO2 continue d'aug- la pneumopathie, l'œdème aigu du poumon ou l'embo-
menter, d'un coma appelé « carbonarcose ». Le tableau lie pulmonaire. L'alcalose respiratoire peut entraîner des
clinique associe souvent une hypoxémie avec cyanose. troubles neuromusculaires, telle la tétanie, et dans les cas
À ce stade, soit la ventilation alvéolaire est rétablie, la les plus sévères, des convulsions. Le traitement consiste
PCO2 et le pH s'améliorent, soit la situation s'aggrave et en l'apport d'oxygène si l'origine de l'hyperventilation est
le recours à la ventilation non invasive s'impose. Enfin l'hypoxémie. Dans les cas de syndrome d'hyperventilation
dans les cas les plus sévères, il est nécessaire de recourir dont l'origine psychogène a pu être formellement déter-
à la ventilation invasive afin de permettre la survie du minée, une thérapie adaptée aux troubles psychologiques
patient. En cas de pathologie chronique, l'organisme identifiés sera appliquée.
doit, pour maintenir ses fonctions vitales, rétablir le
pH malgré une PCO 2 élevée. Dans ce cas, en quelques Alcalose métabolique
heures, les bicarbonates retenus par les reins s'élève-
ront dans le sang et normaliseront la concentration en N'ayant que peu de signes cliniques propres, elle est le plus
ions H+. La gazométrie montrera donc un pH normal souvent diagnostiquée lors du bilan de la pathologie à l'ori-
(ou quasi normal), une PCO 2, des bicarbonates et un gine du trouble métabolique. Un bilan de vomissements ou
BE élevés. un suivi de traitement par diurétiques faisant l'objet d'une
mesure de l'ionogramme sanguin mettra en évidence une
diminution du bicarbonate. La compensation respiratoire
Acidose métabolique consistera en une hypoventilation alvéolaire quasiment
impossible à mettre en évidence lors de l'examen clinique
Elle survient soit :
● par excès d'acides endogènes comme lors de l'acido­
sauf dans les cas extrêmes aggravant une hypoxémie pré-
existante. Encore une fois, l'analyse des gaz du sang permet-
cétose diabétique ou par l'accumulation de lactates suite à
tra un diagnostic précis et une estimation de la réponse
une hypoxie tissulaire prolongée ;
● par excès d'apport exogène d'acides comme lors d'une
compensatoire.
intoxication à l'acide acétylsalicylique (l'aspirine).
La troisième cause majeure d'acidose métabolique est
la défaillance rénale lors d'une insuffisance rénale aiguë ou En pratique
chronique ou lors d'une tubulopathie, mais ces pathologies
rénales sortent du sujet de ce chapitre. L'interprétation de la gazométrie complète l'interprétation
Enfin, la quatrième grande cause d'acidose métabolique des autres signes cliniques. L'analyse systématique des résul-
est la perte de bicarbonates par le tube digestif lors de tats peut se résumer comme suit (tableau 4.2) :
● le pH définit le type de déséquilibre : acidose ou
diarrhées importantes Elle associe une diminution du pH
(< 7,35) et des bicarbonates plasmatiques (< 22 mmol/L), alcalose ;
● la PCO identifie l'implication du poumon : une PCO
Les mécanismes de compensation vont se mettre en œuvre 2 2
sous la forme d'une hyperventilation pour faire diminuer diminuée implique une hyperventilation, alors qu'une
la PCO2 alvéolaire et ainsi faire diminuer la concentration PCO2 augmentée est le plus souvent secondaire à une
en ions H+. hypoventilation ;

59
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Tableau 4.2 Résumé des déséquilibres acido-basiques Points clés


Acidose Alcalose

L'équilibre acido-basique est un processus com-
Diminution du pH < 7,35 Augmentation du pH > 7,45
plexe qu'il est possible de mesurer par l'analyse des
Acidose métabolique : Alcalose métabolique : gaz du sang.
– augmentation production – augmentation réserve ■
L'interprétation de l'analyse des gaz du sang
acide (ion H+) alcaline (ion HCO3− )
repose sur la mesure du pH, la mesure de la PCO2
et/ou et/ou
– diminution réserve alcaline – diminution production
qui exprime la participation de la ventilation et la
(ion HCO3− ) acide (ion H+) mesure du bicarbonate qui exprime l'adaptation
rénale.
Acidose respiratoire : Alcalose respiratoire : ■
Ce résumé théorique est un compromis qui a
augmentation CO2 diminution CO2
pour but de rendre abordable un phénomène
complexe.

Les quatre tableaux mis à votre disposition
● les bicarbonates reflètent l'implication rénale : une
doivent vous aider à déterminer le type de troubles
concentration élevée indique une alcalinisation du sang
acido-basiques afin d'en déterminer la cause et
dont l'origine peut être métabolique si le pH est augmenté,
d'ap­pliquer un traitement correcteur adapté.
ou une compensation si le pH est diminué ou normal. À
l'inverse, une concentration en bicarbonates diminuée peut
expliquer une acidose métabolique si le pH est diminué, ou
exprimer une compensation si le pH est normal ou élevé ; Références
● ces trois informations sont utilisées pour classer le

trouble dans l'un des quatre déséquilibres décrits ; [1] Van Ypersele de Strihou, et al. The « carbon dioxide response curve »
● pour être complet, il est conseillé d'utiliser le diagramme de
for chronic hypercapnia in man. N Engl J Med 1966 ; 275(3) : 117–22.
[2] Davenport HW. The ABC of acid–base chemistry : the elements of
Davenport ou de Van Ypersele de Strihou pour déterminer les physiological blood-gas chemistry for medical students and physi-
situations intermédiaires et/ou suivre l'évolution du patient. cians. 6th ed. Chicago : The University of Chicago Press ; 1974.

60
Chapitre 5
Les bactéries des voies
respiratoires
Francis Zech
PLAN DU CHAPITRE
Flore bactérienne naturelle de la bouche 62
Infections par la flore bactérienne naturelle
de la bouche 62
Flore bactérienne naturelle du pharynx 63
Infections par la flore bactérienne naturelle
du pharynx 64
Flore bactérienne naturelle des fosses
nasales 65
Infections par la flore bactérienne
naturelle des fosses nasales 65
Flore bactérienne naturelle des narines 66
Infections par la flore bactérienne naturelle
des narines 66
Flore bactérienne de la trachée
et des bronches 66
Infections par la flore bactérienne
de la trachée et des bronches 67
Infections par des bactéries contagieuses 67
Infections par des bactéries aérosolisées 68
Infections par des « bactéries
des hôpitaux » 69
Antibiothérapie des voies respiratoires 70

Kinésithérapie respiratoire
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I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

Flore bactérienne naturelle qui se construit sur la surface des dents est remarquable par
son épaisseur, par sa solidité, et par le nombre de bactéries
de la bouche qui y habitent ; on lui donne le nom de « plaque dentaire ».
En aucun autre site du corps humain, même au sein de la
Les muqueuses de la bouche et du pharynx sont toujours flore intestinale, on ne trouve une densité aussi grande de
couvertes d'un nombre très important de bactéries, et germes. La plaque dentaire s'épaissit au cours de la vie, et la
ces bactéries appartiennent à des espèces multiples. En seule façon d'en limiter l'évolution naturelle est de recourir
temps normal, les espèces bactériennes qui s'implantent à des soins dentaires : il faut utiliser des moyens mécaniques
sur les muqueuses de la bouche sont celles qui adhèrent à pour attaquer cette couche solide, et aucun antiseptique ni
la fibronectine, une glycoprotéine de la salive qui se colle sur antibiotique n'est capable de rendre service dans ce com-
la surface des cellules épithéliales. L'alimentation apporte bat. Une plaque dentaire âgée et mal soignée évolue vers
dans la bouche d'autres espèces bactériennes, mais celles-ci une extension en surface : le biofilm s'insinue entre la sur-
n'y persistent pas : faute d'adhérence à la fibronectine, elles face de la racine dentaire et la gencive. Il en résulte un état
sont emportées par le flux de salive, par les mouvements de la inflammatoire permanent de la gencive, qui aboutit à un
langue et par le passage des boissons et des aliments. recul de celle-ci et à une fonte progressive de l'os alvéolaire :
Parmi les espèces les plus abondantes de la bouche, il y a c'est la « parodontite », nommée populairement « déchaus-
des streptocoques peu pathogènes – appelés des « strepto- sement dentaire ». La flore bactérienne d'une plaque den-
coques viridans » –, des petits bacilles à Gram négatif fragiles taire très évoluée se modifie : les streptocoques viridans
capnophiles (c'est-à-dire ayant besoin d'une concentra- qui prédominaient au début laissent la place à une quan-
tion élevée en gaz carbonique), des coques et des bacilles tité croissante d'espèces capnophiles, puis à une quantité
anaérobies. Dans l'ensemble, ce sont des espèces assez peu croissante de bacilles à Gram négatif anaérobies : parmi
virulentes, et qui n'interviennent que rarement dans les ces derniers, on voit surtout proliférer des Prevotella et des
infections des voies respiratoires. Les germes capnophiles et Fusobacterium ; ces espèces sont plus dangereuses et ont
anaérobies ont cependant un pouvoir nécrosant lorsqu'ils un pouvoir nécrosant plus prononcé encore que les autres
parviennent à pénétrer dans les tissus profonds. Les infec- espèces de la bouche.
tions provoquées par ces germes ont deux caractéristiques : Les espèces bactériennes qui adhèrent aux muqueuses
la première est qu'il faut une grande quantité de bactéries ou qui vivent dans la plaque dentaire peuvent se détacher :
pour déclencher l'infection ; la seconde est que les bactéries elles constituent le principal de la flore de la salive.
attaquent en mélange de plusieurs espèces, profitant de
synergies mutuelles (synergies d'explication assez mysté-
rieuse). Le prototype d'infection par ces germes est l'infec-
tion qui fait suite à une morsure : c'est une infection qui Infections par la flore
peut être sévère, avec une nécrose importante des tissus.
Qu'une infection sévère soit provoquée par des bactéries bactérienne naturelle
considérées comme peu virulentes s'explique par le fait de la bouche
qu'une morsure inocule une grande quantité de bactéries,
qu'elle inocule un mélange d'espèces qui peuvent bénéficier La flore bactérienne naturelle de la bouche intervient dans
de synergies entre elles, et par le fait que l'écrasement des certaines infections des voies respiratoires : une première
tissus au cours de la morsure crée d'emblée des zones de occasion est la fausse déglutition ; une autre occasion est la
tissus peu viables, propices à la multiplication bactérienne, colonisation de muqueuses respiratoires dégénérées.
mais défavorables à l'action des moyens de défense. Une fausse déglutition peut apporter brutalement une
L'écosystème le plus remarquable de la bouche est celui grande quantité de salive dans la profondeur de l'arbre
de la surface des dents. Au contact de la couronne des bronchique. Comme les bactéries sont abondantes et
dents, les bactéries sécrètent un matériel polysaccharidique variées dans la salive, et qu'elles peuvent exprimer une cer-
dur et collant : ces sécrétions se mêlent à des constituants taine virulence lorsqu'elles sont nombreuses et multiples,
de la salive, et forment une couche épaisse qui adhère il y a là un risque d'infection. Une pathologie pulmonaire
aux dents ; des bactéries s'installent dans cette couche. qui survient après une fausse déglutition n'est pourtant pas
L'ensemble constitue un « biofilm » ; la genèse d'un biofilm toujours une maladie infectieuse : le risque le plus grand
est une règle quasi universelle lorsque des bactéries ont pour les poumons est la fausse déglutition du contenu gas-
l'occasion de se déposer sur une surface inerte. Le biofilm trique, qui entraîne de redoutables lésions par une action
62
5. Les bactéries des voies respiratoires

chimique. Parmi les complications de la fausse déglutition, douleurs thoraciques provenant des bronches malades.
celles qui sont de nature infectieuse peuvent relever de la Autour des bronches atteintes, l'inflammation chronique
flore buccale ; nous n'envisageons ici que la flore buccale et ses exacerbations aiguës détruisent la trame élastique de
naturelle, et nous parlerons plus loin des modifications la paroi bronchique et du parenchyme pulmonaire avoisi-
de cette flore dans certaines situations pathologiques. On nant : les bronches se dilatent et, tout autour, le poumon se
peut s'y attendre : le danger infectieux de la fausse déglu- fibrose et se rétracte. La flore bactérienne de ces infections
tition est d'autant plus grand que la plaque dentaire est est de type buccal : bactéries abondantes, avec un mélange
évoluée, donc plus riche en bactéries, et surtout en bacté- de plusieurs germes, dont certains sont anaérobies (don-
ries nécrosantes. Le meilleur marqueur clinique du risque nant une odeur désagréable au pus), la plupart des espèces
de pneumonie infectieuse par la flore de la bouche est la étant réputées peu virulentes, puisque leur virulence ne
constatation d'une parodontite. On pose ce diagnostic s'exprime que si leur nombre est grand et si elles bénéficient
lorsqu'on constate un déchaussement des dents (une de synergie entre les espèces.
partie de la racine est apparente ; la dent branle dans son
socle), un liseré rouge et des saignements faciles au bord
libre de la gencive, voire un dépôt grisâtre et malodorant
à la jonction entre dent et gencive. En pratique, les pneu- Flore bactérienne naturelle
monies par la flore buccale sont exceptionnelles lorsque la du pharynx
santé des gencives est bonne. Les pneumonies provoquées
par la flore buccale sont particulièrement nécrosantes : ceci L'oropharynx est habité par une flore assez comparable à
se traduit par la fréquence des expectorations contenant celle de la bouche : on y trouve une grande abondance de
du sang, et par un creusement rapide du tissu pulmonaire, bactéries ; il y prédomine des streptocoques viridans ; il y a
visible par la radiographie – la « pneumonie nécrosante » des espèces anaérobies, mais moins abondantes que dans
évolue vers un « abcès du poumon ». L'abondance des la plaque dentaire. Une particularité de l'oropharynx est
bactéries anaérobies donne aux expectorations une odeur d'héberger assez souvent une espèce bactérienne virulente,
putride caractéristique. Streptococcus pyogenes, le « streptocoque bêta-hémolytique
Les muqueuses respiratoires dégénérées sont celles qui du groupe A ». La présence de ce germe de mauvaise répu-
ont perdu leur structure histologique naturelle : la couche tation est banale chez les enfants d'âge scolaire, et occa-
monocellulaire où prédominent les cellules ciliées et les sionnelle chez les adultes, surtout s'ils vivent au contact
cellules sécrétrices de mucus a été profondément détruite, d'enfants.
puis remplacée par un épithélium « à tout faire » multi- Le rhinopharynx est riche en bactéries. La plupart sont
couche, et non fonctionnel (un épithélium pavimenteux banales : des streptocoques viridans – pas exactement les
stratifié, comme celui qui tapisse la bouche). Ce qui a pro- mêmes espèces que dans la bouche –, des coques à Gram
voqué ce changement catastrophique n'est pas toujours négatif (Neisseria, notamment Moraxella catarrhalis), des
clair : on accuse souvent des infections respiratoires virales petits bacilles à Gram négatif (diverses espèces d'Haemo-
de la petite enfance, en particulier par le virus de la rougeole, philus, notamment Haemophilus influenzae), etc. Mais
ou parfois par le virus Respiratory syncytial – dans la petite le nasopharynx offre aussi la particularité remarquable
enfance, ces infections peuvent être sévères et se prolonger d'héberger parfois des espèces bactériennes de haute viru-
très longtemps – ; on observe aussi ce changement lorsque lence : Neisseria meningitidis (les « méningocoques »), ou des
le patient souffre d'une déficience en gammaglobulines ; on souches d'Haemophilus influenzae pourvues d'une capsule
connaît de rares cas où le problème provient d'une anoma- et, plus souvent encore, Streptococcus pneumoniae (les
lie congénitale des cils vibratiles de l'épithélium respiratoire. « pneumocoques »). Il s'agit là de l'échantillon des germes les
L'épithélium respiratoire dégénéré est la cause des sinusites plus dangereux de la bactériologie : ils provoquent parfois
chroniques et des bronchectasies. Dans ces deux maladies, des infections sanguines sévères et rapides et des ménin-
il y a une prolifération bactérienne presque permanente à gites, surtout chez les enfants. Heureusement, la présence
la surface de muqueuses qui devraient normalement être de ces espèces dans le nasopharynx n'est pas automatique-
stériles ; il en résulte un état inflammatoire habituel et des ment synonyme d'infection. Dans nos régions, les souches
écoulements purulents fréquents. Des poussées d'exacer- d'Haemophilus influenzae pourvues d'une capsule sont
bations peuvent être responsables : de fièvre ; de tension devenues rares, grâce à la vaccination systématique au cours
douloureuse dans le sinus malade et de rhinorrhée puru- de l'enfance, tandis que les souches non capsulées d'Hae-
lente ; d'expectorations purulentes ou sanglantes et de mophilus influenzae, de virulence bien moins considérable,
63
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

continuent à coloniser le nasopharynx d'une large propor- modèles différents. Il est intéressant de noter qu'après une
tion de la population. Quant aux méningocoques et aux attaque par l'un de ces germes virulents, la colonisation du
pneumocoques, leur présence dans le nasopharynx devient nasopharynx se prolonge pendant plusieurs mois.
plus rare au cours de la vie, sauf contacts fréquents avec des Streptococcus pyogenes se comporte probablement de
enfants ; chez les vieillards, les pneumocoques sont statisti- la même façon : installation d'une souche nouvelle à la
quement rares, mais il en reste assez souvent pour provo- surface de l'oropharynx, puis attaque des tissus profonds,
quer de sérieux problèmes cliniques. et enfin colonisation prolongée sans inconvénients. Cette
Le nasopharynx peut encore héberger de façon naturelle espèce s'intéresse assez peu aux muqueuses des voies
un des sérotypes respiratoires de Klebsiella pneumoniae. respiratoires profondes : son site de pénétration préféré
Ces sérotypes sont rares, et il ne faut pas les confondre avec est un épithélium pavimenteux stratifié, comme celui de
les sérotypes supérieurs, beaucoup plus fréquents, qui ne l'oropharynx ou celui de la peau. Les infections sont des
font pas partie de la flore naturelle des voies respiratoires. pharyngites et des dermites. À l'heure actuelle, les souches
de Streptococcus pyogenes qui attaquent le pharynx ne sont
pas très virulentes, et une pharyngite streptococcique ne
Infections par la flore met d'ordinaire pas la vie en danger. Il y a quelques décen-
nies, des souches plus virulentes provoquaient parfois des
bactérienne naturelle maladies plus sévères, et l'infection s'étendait alors à par-
du pharynx tir de la muqueuse du pharynx vers les sinus, les oreilles
moyennes et les cavités mastoïdes, les bronches et les pou-
Neisseria meningitidis, les souches d'Haemophilus influen- mons : on voit encore occasionnellement des cas d'otites
zae pourvues d'une capsule et Streptococcus pneumoniae et de mastoïdites ; les bronchites et bronchopneumonies
passent parfois directement de la surface des muqueuses sont exceptionnelles, parfois comme complication d'une
nasopharyngées vers le sang : c'est dans ces cas que l'on pneumonie par le virus de la varicelle.
observe des infections sanguines compliquées d'un choc La présence de pneumocoques dans le nasopharynx
sévère ou l'implantation de bactéries dans les espaces est souvent bien tolérée ; elle expose cependant à une
méningés. On sait de ces infections que l'attaque se produit complication majeure : la pneumonie. On suppose que la
assez rapidement après que la souche s'est installée dans le cause immédiate des pneumonies est une fausse déglu-
nasopharynx : le germe prend une ou deux semaines pour tition ; cette hypothèse se vérifie dans la moitié des cas,
s'adapter, puis franchit par ses propres moyens la barrière où l'on retrouve un antécédent d'intoxication éthylique,
des cellules épithéliales. Le destin de la victime dépend : d'abus de sédatifs, de crise d'épilepsie, de coma ou d'anes-
● du temps dont il a disposé pour synthétiser déjà des thésie générale. En fait, même si le langage quotidien
anticorps valables ; associe souvent la notion de fausse déglutition avec le
● ou de la chance qu'il a de posséder à l'avance des anti- risque de pneumonie nécrosante et d'abcès du poumon
corps dirigés contre d'autres espèces bactériennes, moins par la flore buccale, c'est la pneumonie par Streptococcus
dangereuses, qu'il a rencontrées auparavant, et dont la sur- pneumoniae qui est la conséquence la plus fréquente de
face ressemble plus ou moins à celle du germe virulent ; la fausse route. Alternativement, un certain nombre de
● d'une prédisposition génétique. pneumonies à pneumocoques surviennent comme compli-
En fait, tous les êtres humains font face à plusieurs reprises cation d'une infection virale des voies respiratoires : on
à des attaques de ce genre, et la bataille se produit souvent incrimine ici un défaut du tapis mucociliaire qui devrait
de façon fort discrète, tournant rapidement à l'avantage du faire obstacle à la migration des bactéries des voies respi-
patient ; une petite fraction seulement de ces attaques évo- ratoires hautes vers la profondeur des poumons.
lue mal, et donne alors lieu à une maladie. Ceci se produit Un patient peut posséder suffisamment d'anticorps pour
souvent chez les enfants de moins de 2 ans. Avec l'âge, le s'opposer au passage sanguin direct de Streptococcus pneu-
répertoire des anticorps spécifiques ou approximatifs s'enri- moniae à partir du pharynx, il n'est pas pour autant protégé
chit : pour les méningocoques, dont il n'existe que deux contre la pneumonie : sans doute, le nombre de germes qui
modèles dans nos régions, et pour les souches d'Haemophi- attaquent simultanément au niveau des alvéoles est trop
lus influenzae pourvues d'une capsule, dont il n'existe qu'un grand pour se suffire des anticorps. D'ailleurs la vaccination
seul modèle fréquent dans nos régions, il est relativement contre les souches les plus fréquentes de pneumocoques
facile de s'équiper en anticorps ; la chose est plus difficile met à l'abri contre les infections sanguines spontanées mais
pour les pneumocoques, dont il existe plusieurs dizaines de pas contre les pneumonies provoquées par ces souches.
64
5. Les bactéries des voies respiratoires

Streptococcus pneumoniae possède un pouvoir pro- des bronches est poussé vers le larynx. Les bactéries qui se
inflammatoire extraordinaire, qui donne à la pneumonie déposent sur la couche de mucus sont ainsi ramenées vers
une touche clinique bien particulière : extension très rapide d'autres sites, plus superficiels ; ces bactéries sont celles qui
de l'inflammation à une zone considérable du poumon à entreprennent une migration à la surface de l'épithélium, à
partir d'un petit foyer alvéolaire ; vasodilatation majeure des partir du pharynx, ou celles qui tourbillonnent en suspen-
vaisseaux sanguins interalvéolaires, avec effet de shunt et sion dans l'air inspiré. Mais un autre facteur intervient : la
dyspnée ; exsudation abondante dans les alvéoles ; exten- plupart des espèces bactériennes vivent mal à la surface du
sion fréquente vers la surface pulmonaire, qui donne une mucus ou dans le mucus. Vivre au contact du mucus des
auscultation riche, et souvent une douleur pleurale par un voies respiratoires requiert des propriétés particulières et
dépôt de fibrine à la surface. L'infection pneumococcique est une spécialisation ; parmi les espèces naturelles des voies
dont il est question ici est une pathologie alvéolaire, avec respiratoires, trois seulement sont douées pour cet écosys-
une participation minime des bronches : il en résulte que tème : Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae
les expectorations sont tardives et que la place de la kinési- (souches non capsulées incluses) et Moraxella catarrhalis.
thérapie respiratoire est limitée dans cette maladie. Qu'elles apprécient de vivre dans le mucus paraît probable,
Dans le passé, les souches d'Haemophilus influenzae puisqu'elles sécrètent toutes trois des facteurs ciliostatiques,
pourvues d'une capsule pouvaient occasionnellement qui réduisent l'activité des cils vibratiles, favorisant ainsi la
provoquer une pneumonie semblable. Cela n'a jamais été stagnation du mucus ; de toute façon, ce sont les seules
fréquent et est devenu bien rare depuis que les enfants de espèces bactériennes naturelles que l'on retrouve régulière-
nos régions sont vaccinés systématiquement. Les souches ment à la surface des voies respiratoires tapissées de mucus.
d'Haemophilus influenzae que nous côtoyons tous les jours
ne sont pas capsulées, sont beaucoup moins virulentes et
ne provoquent pas les mêmes infections. Infections par la flore
Bien rarement, on voit encore des pneumonies sem-
blables provoquées par l'un des sérotypes respiratoires de bactérienne naturelle des fosses
Klebsiella pneumoniae. Il s'agit des sérotypes numérotés de nasales
1 à 6 ; ce ne sont pas ceux que nous rencontrons quotidien-
nement dans nos hôpitaux ou que nous observons parfois Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae et
dans la flore intestinale naturelle. Moraxella catarrhalis peuvent faire partie de la flore normale
L'importance du pharynx comme réservoir de bactéries des fosses nasales. Les rhinites infectieuses ne sont pas des
dépasse ce qui a été dit jusqu'à présent : certaines espèces maladies d'étiologie bactérienne, mais sont la conséquence
qui colonisent le nasopharynx envahissent d'autres terri- d'infections virales des muqueuses respiratoires. En cas de
toires de l'arbre respiratoire. Nous étudierons les consé- rhinite virale, on observe quelque chose d'intéressant, dont
quences de cette migration dans les rubriques suivantes. on pourra tirer parti pour comprendre d'autres modèles
d'infection : l'infection d'origine virale provoque une inflam-
mation catarrhale, c'est-à-dire avec un mucus plus abon-
dant et de fluidité différente ; les bactéries prolifèrent dans
Flore bactérienne naturelle ce mucus modifié ; leur prolifération entraîne la migration
des fosses nasales de nombreux globules blancs neutrophiles, si bien que le
mucus se transforme en un muco-pus, de consistance plus
Bouche et pharynx hébergent des bactéries en très grand épaisse. Un rhume débute avec un écoulement muqueux
nombre. Il n'en est pas de même pour les fosses nasales. Nous transparent et fluide, pour évoluer vers une rhinorrhée
arrivons ici dans un écosystème différent : des muqueuses colorée et épaisse. Que ce muco-pus soit riche en bactéries
couvertes d'une couche épaisse de mucus. Le mucus est importe peu : il se draine facilement, et il est bien établi qu'il
hostile aux bactéries. Il l'est de deux façons. D'abord parce n'y a pas là l'indication de prescrire un antibiotique. Mais la
que le mucus est mobile : la couche de mucus qui tapisse rhinite nous donne une occasion privilégiée d'observer les
une bonne partie de l'arbre respiratoire se déplace, par relations entre virus et bactéries dans les voies respiratoires.
l'action des cils vibratiles. Le mucus des fosses nasales est Ces relations éclairent le mécanisme des sinusites. Une
progressivement poussé soit en avant, vers les narines, sinusite est d'ordinaire une maladie virale, l'extension d'une
soit en arrière, vers le nasopharynx. Le mucus des sinus est rhinite. En temps normal, le mucus qui tapisse la surface des
poussé vers les fosses nasales. Le mucus de la trachée et sinus est pratiquement dépourvu de bactéries, grâce à la
65
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

mobilisation par les cils vibratiles. L'inflammation d'origine veineux, injections de drogues dans les veines, etc. Cette
virale modifie le mucus et altère la fonction des cellules épi- bactérie s'intéresse peu aux voies respiratoires. Elle attaque
théliales ciliées. Au bout d'une dizaine de jours, on voit le cependant comme complication des infections virales
mucus des sinus envahi de bactéries provenant des fosses accompagnées d'une nécrose des cellules épithéliales qui
nasales, appartenant aux espèces Streptococcus pneumoniae, tapissent les bronches : la grippe vraie, celle qui est provo-
Haemophilus influenzae ou Moraxella catarrhalis ; cette pro- quée par le virus influenza, en est l'occasion privilégiée. On
lifération s'accompagne d'une migration de globules blancs voit aussi souvent Staphylococcus aureus provoquer des
neutrophiles dans la cavité sinusale, avec une purulence du bronchites sévères ou des bronchopneumonies chez les
contenu de cette cavité ; ce muco-pus s'écoule sans pro- patients dont l'arbre respiratoire est fragilisé par une intu-
blème ou s'accumule de façon plus ou moins prolongée, bation trachéale ou par une trachéostomie.
dépendant des conditions anatomiques qui déterminent le Il commence à circuler des souches de staphylocoques
drainage vers les fosses nasales. Infections virales, les sinu- dorés particulièrement dangereuses, qui sécrètent la toxine
sites peuvent devenir secondairement des infections bacté- « de Panton-Valentine » : cette toxine inhibe l'action des glo-
riennes : une antibiothérapie peut rendre certains services bules blancs neutrophiles, de telle manière que les infections
dans les cas difficiles, avec une mauvaise évacuation spon- sont particulièrement sévères et nécrosantes ; comme tous
tanée du muco-pus. les staphylocoques, ces souches s'intéressent en premier à la
peau, mais il existe des cas de pneumonies nécrosantes, évo-
luant vers la formation de multiples abcès dans les poumons.
Flore bactérienne naturelle
des narines
Flore bactérienne de la trachée
En avant des fosses nasales, les narines sont un écosystème et des bronches
hostile : l'épithélium est de type cutané ; la température est
peu élevée ; les mouvements de l'air font que cette région est Les muqueuses de la trachée et des bronches sont recou-
sèche. Seules des bactéries très rudes peuvent vivre à la sur- vertes d'une couche épaisse de mucus. Ce mucus est
face des narines. C'est le royaume des staphylocoques ; des déplacé vers le pharynx par l'action des cellules ciliées. En
staphylocoques « blancs », peu pathogènes, chez tous ; des temps normal, très peu de bactéries résistent à ce système
staphylocoques « dorés » (Staphylococcus aureus) par inter- protecteur, et on peut considérer que trachée et bronches
mittence, chez bon nombre de gens. Ces staphylocoques sont très pauvres en bactéries.
dorés doivent nous préoccuper : il s'agit d'une espèce de Dans certaines circonstances, ce système est perturbé.
grande virulence, capable de provoquer des infections très On voit alors des bactéries s'installer de façon plus ou moins
purulentes et nécrosantes, douée d'un grand pouvoir de cir- durable dans l'arbre respiratoire profond. Les premières à
culer dans le sang et de s'implanter ainsi dans toutes sortes profiter de ces occasions sont celles qui appartiennent
d'organes profonds. Les narines sont le réservoir principal de à la flore naturelle du rhinopharynx, et qui sont douées
Staphylococcus aureus, mais ce germe peut se disséminer large- pour la survie dans le mucus : Streptococcus pneumoniae,
ment à la surface de la peau et sur toutes les muqueuses. Sur Haemophilus influenzae (souches non capsulées incluses)
les muqueuses, c'est rarement une bactérie prépondérante : et Moraxella catarrhalis.
elle n'est présente qu'en petite quantité. Une première occasion de migrer vers le mucus des bronches
est l'infection virale des voies respiratoires. L'inflammation virale
modifie le mucus quantitativement et qualitativement, don-
Infections par la flore nant pendant quelques jours l'opportunité pour ces espèces
bactériennes de descendre à partir du pharynx.
bactérienne naturelle Une deuxième occasion est l'irritation de l'arbre tra-
des narines chéobronchique par la présence d'un tube endotrachéal
ou d'une canule de trachéotomie.
Staphylococcus aureus attaque rarement de sa propre initia- La bronchopneumopathie chronique obstructive han-
tive : il profite plutôt de brèches dans nos systèmes naturels dicape progressivement le mécanisme de migration du
de défense. Des brèches, il en trouve surtout au niveau de la mucus ; celui-ci devient plus abondant, tandis que les cellules
peau : plaies accidentelles ou chirurgicales, cathéters intra- ciliées qui doivent le déplacer deviennent plus rares et que
66
5. Les bactéries des voies respiratoires

la force expulsive de la toux devient médiocre : au bout de existe des exacerbations qui semblent déclenchées par des
quelques années d'évolution, les patients atteints par cette changements des molécules de surface des Haemophilus
maladie voient leurs bronches colonisées de façon perma- influenzae qui colonisent les bronches (ces bactéries sont
nente par les espèces bactériennes citées plus haut. Les cures capables de modifier de temps en temps leurs molécules de
d'antibiotiques qui sont souvent prescrites chez ces patients surface) ; et il y a des exacerbations qui coïncident avec une
se révèlent peu efficaces pour interrompre cette colonisation. réponse en anticorps contre les pneumocoques qui colo-
Les patients souffrant de mucoviscidose ont un mucus de nisent les bronches, démontrant que ces germes ne sont
composition bien particulière et la stagnation de ce mucus pas des hôtes inertes. On sait que les mêmes espèces bacté-
est un de leurs plus grands problèmes : leurs bronches sont riennes habitent les bronches des patients atteints de bron-
constamment habitées par des bactéries, soit celles citées, chopneumopathie obstructive pendant les exacerbations
soit d'autres encore, profitant d'une adaptation privilégiée et dans les intervalles asymptomatiques entre celles-ci. Leur
à ce mucus inhabituel : staphylocoques dorés et certaines nombre semble invariable, mais on a dit que les bactéries
souches de Pseudomonas aeruginosa. descendent plus profondément dans l'arbre bronchique
On a déjà signalé le cas des patients atteints de bron- pendant les exacerbations. Les bénéfices de cures d'antibio-
chectasies, dont les bronches malades hébergent presque tiques dirigées contre les espèces qui occupent les bronches
en permanence des bactéries de la flore buccale. ne donnent que des résultats cliniques modestes, et ceux-ci
ne sont démontrés que dans les cas les plus sévères : la plu-
part des praticiens prescrivent cependant un antibiotique
Infections par la flore en cas d'exacerbation de la bronchite chronique.
Les bronchopneumonies sont des infections des bron-
bactérienne de la trachée chioles et du parenchyme pulmonaire dont l'étiologie est
et des bronches souvent bactérienne : parmi les germes responsables, des
bactéries capables de vivre dans le mucus tiennent une
Les bactéries capables de vivre dans le mucus participent place considérable, en particulier Streptococcus pneumoniae
aux infections virales des bronches. Le déroulement de et, plus rarement, des souches non capsulées d'Haemophi-
l'infection est semblable à celui que nous avons décrit à lus influenzae ; Moraxella catarrhalis, espèce de nature peu
propos des sinusites : inflammation virale catarrhale, avec virulente, ne tient ici qu'une place anecdotique. Les broncho-
modification et stagnation du mucus ; prolifération bac- pneumonies sont des « maladies de terrain », ce qui signifie
térienne dans la lumière des bronches ; réponse par une qu'elles ne surviennent que chez des patients affaiblis. Une
migration de globules blancs neutrophiles, avec formation bronchiole normale est dépourvue de mucus, et n'offre pas
de muco-pus. Chez un patient dont les voies respiratoires à sa surface de quoi stimuler l'adhérence des bactéries, sous
sont dépourvues de tare, la chose n'est pas bien grave : le réserve de quelques espèces spécialisées dont nous parlerons
muco-pus est évacué par la toux, et il n'y a pas là l'indication plus loin. Une bronchiole malade semble offrir une opportu-
de prescrire un antibiotique. Chez les patients souffrant de nité d'adhérence : l'adhérence aux cellules épithéliales est la
bronchopneumopathie chronique obstructive, par contre, première étape, obligatoire, pour déclencher une infection.
dont le mucus est plus abondant, et dont la force expulsive Les bronchioles peuvent être malades par l'action d'un virus
des sécrétions bronchiques est moindre, l'évacuation d'un nécrosant (virus influenza), ou parce que l'arbre respiratoire
muco-pus épais peut provoquer un grand inconfort. est ventilé de façon artificielle ; les bronchioles peuvent être
L'importance de la flore bactérienne des bronches malades parce que le patient est dénutri ou souffre de défail-
dans les bronchopneumopathies chroniques obstructives lance cardiaque, de cirrhose, d'insuffisance rénale.
reste un sujet de débat. Tous s'accordent à dire que ce Un cas particulier de bronchopneumonie est celui de l'ex-
ne sont pas les bactéries qui provoquent cette maladie : tension d'une infection autour d'un foyer de bronchectasie.
la colonisation des bronches par des bactéries ne débute
qu'après plusieurs années d'évolution, et un usage libéral
des antibiotiques ne modifie guère l'évolution à long terme Infections par des bactéries
de cette pathologie. Mais il y a des controverses quant à contagieuses
l'importance des bactéries bronchiques dans les exacerba-
tions des bronchopneumopathies chroniques obstructives. Il existe des bactéries qui ne font pas partie de la flore natu-
La majorité de ces exacerbations sont déclenchées par des relle des humains et qui infectent l'arbre respiratoire : on ne
infections virales ou par des pics de pollution de l'air. Mais il devient malade qu'au contact d'un patient atteint lui-même
67
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

de la maladie. Parmi ces bactéries, les plus fréquentes dans espèces qualifiées actuellement de « bactéries des hôpi-
nos régions sont Mycoplasma pneumoniae et l'agent de la taux ». Ce sont des espèces dont les niches écologiques pri-
coqueluche, Bordetella pertussis. maires sont les eaux naturelles (lacs et rivières), les sols et la
Ces deux espèces ont en commun de se répandre sur rhizosphère des végétaux. Une méconnaissance des règles
une large surface des muqueuses respiratoires, et de s'y d'hygiène expliquait que ces bactéries proliféraient parfois
implanter de manière prolongée ; la réaction inflamma- dans des solutions de médicaments préparées à l'avance,
toire qu'elles provoquent est de nature peu purulente. Les qui étaient introduites en grande quantité dans les voies
expectorations sont rares ou absentes, et lorsqu'elles sont respiratoires profondes par le chemin des aérosols. Cette
présentes ne sont qu'occasionnellement colorées pour complication ne se voit pratiquement plus depuis que l'on
Mycoplasma pneumoniae ; quant à la coqueluche, elle est a appris à protéger soigneusement les solutions de médica-
caractérisée par une toux obstinément non productive. ments et les appareils d'aérosolisation de la contamination
Les bronches sont atteintes, mais aussi, bien souvent, les bactérienne.
bronchioles ; l'affinité particulière de ces espèces pour les Les bactéries du genre Legionella n'ont été connues que
bronchioles leur donne souvent une touche clinique ori- plus tard. Ce sont aussi des espèces qui vivent dans les eaux
ginale : en cas d'atteinte diffuse, l'inflammation à ce niveau naturelles ; elles y vivent en symbiose avec des amibes. Elles
peut être source de dyspnée. peuvent proliférer dans des réservoirs d'eau dans nos habi-
Si Mycoplasma pneumoniae est avant tout une infection tations. Des infections pulmonaires se produisent parfois
des bronches, grandes ou petites, le processus inflamma- lorsque des eaux contaminées sont aérosolisées dans le
toire qu'il provoque peut déborder largement dans l'inters- processus de conditionnement de l'air, ou par des douches
titium entre les alvéoles, et même dans les alvéoles : on parle ou d'autres techniques utilisant des jets d'eau. Il est plus
dans ce cas de « pneumonie atypique » ; l'examen clinique difficile de contrôler la prolifération des Legionella que celle
des poumons est pauvre, tandis que la radiologie permet des entérobactéries ou des non-fermentants, parce que
de découvrir des densifications dans les poumons. ces germes résistent relativement mieux à la chaleur et aux
Les infections par Mycoplasma pneumoniae et Bordetella désinfectants.
pertussis sont souvent de longue durée. La coqueluche La pneumonie à Legionella ressemble à celle qui est
a mérité le surnom de « la toux des cent jours » ; avec provoquée par les pneumocoques : c'est surtout une mala-
Mycoplasma, on peut voir des périodes successives d'amé- die des alvéoles, avec une participation bronchique très
lioration puis de rechute. Les antibiotiques déçoivent dans modeste.
ces infections. Quelques épidémies spectaculaires de pneumonies
On connaît d'autres espèces dont l'histoire naturelle res- sévères provoquées par des Legionella ont laissé une
semble à celle de l'infection par Mycoplasma pneumoniae : impression qu'il s'agit de bactéries fort virulentes. Il convient
par exemple, Chlamydophila pneumoniae. La place de ce peut-être de revoir cette première impression : les contacts
germe dans les infections respiratoires de nos régions n'est avec des Legionella sont très fréquents dans la vie quoti-
pas encore très claire. dienne et ne débouchent pas toujours sur des infections
sévères. La gravité des pneumonies décrites au cours des
épidémies paraît surtout liée à la grande quantité de bac-
téries qui sont introduites dans les poumons au moyen
Infections par des bactéries d'aérosols contaminés. En dehors de ce contexte particu-
aérosolisées lier, il n'est pas rare d'isoler des Legionella dans les poumons
de patients atteints d'une pneumonie dont un autre germe
L'administration de médicaments sous forme d'aérosols est responsable, par exemple un pneumocoque. En fait, de
a été un progrès dans la stratégie de soins en pathologie nombreuses personnes hébergent quelques Legionella dans
respiratoire. Les débuts de cette technique furent marqués leurs poumons de façon chronique et asymptomatique :
par une complication imprévue : la pneumonie multifocale les bactéries vivent chez eux à l'intérieur des macrophages
nécrosante. Les bactéries impliquées dans ces pneumonies alvéolaires, de la même manière qu'elles peuvent vivre à
étaient des bacilles à Gram négatif, soit des entérobactéries, l'intérieur d'amibes dans les eaux naturelles ; l'activation des
de nature voisine à celle d'Escherichia coli, soit des non- macrophages alvéolaires au cours d'une infection d'autre
fermentants, dont le prototype est Pseudomonas aerugi- étiologie pourrait être le facteur déclenchant d'une sortie
nosa. Les noms les plus fréquents de ces bactéries étaient : et d'une multiplication de ces bactéries. Dans cette hypo-
Klebsiella, Serratia, Enterobacter, Pseudomonas, toutes thèse, les rôles respectifs de l'agent infectieux initial et de
68
5. Les bactéries des voies respiratoires

Legionella sont difficiles à préciser ; on connaît des exemples cultiver, et poussent rapidement dans les milieux de labo-
de pneumonies provoquées par des pneumocoques, au ratoire, en masquant les espèces plus intéressantes, dont la
cours desquelles des Legionella ont été cultivées dans les culture est plus lente et plus difficile.
sécrétions respiratoires, et dont l'évolution a été bonne alors Chez les patients souffrant de bronchopneumopathie
que l'antibiotique utilisé était sans action sur Legionella. chronique obstructive, il arrive parfois que le mucus bron-
chique soit colonisé par des bactéries d'hôpitaux, plutôt que
par des pneumocoques ou par Haemophilus influenzae : ce
changement de flore est surtout le fait des patients dont
Infections par des « bactéries la maladie est déjà sévère, qui ont subi plusieurs hospitali-
des  hôpitaux » sations et plusieurs cures d'antibiotiques. Un changement
de flore similaire est observé dans les cas sévères de muco-
Les « bactéries des hôpitaux » sont principalement des bac- viscidose ou de bronchectasies. La mise en place d'un tube
téries du sol, des rivières et des lacs. Elles sont douées d'une endotrachéal ou d'une canule de trachéotomie stimule for-
grande résistance aux antibiotiques et aux antiseptiques. tement la sécrétion de mucus par les bronches : voilà encore
Elles se sont adaptées à coloniser la peau et les muqueuses une autre condition qui favorise la prolifération de bactéries
des humains. Cette colonisation ne se produit que lorsque dans l'arbre trachéobronchique ; ce sont souvent des bacté-
la flore bactérienne naturelle diminue en nombre : un pre- ries d'hôpitaux qui profitent de cette opportunité.
mier facteur est celui de l'utilisation d'antibiotiques, qui La présence de ces bactéries dans le mucus des bronches
s'attaquent à la flore naturelle ; un autre facteur est toute ne mérite probablement pas beaucoup d'attention. Les
maladie cachectisante, qui réduit la production salivaire traitements antibiotiques sont peu efficaces pour faire
de fibronectine, sur laquelle s'attache la flore naturelle des disparaître la colonisation des bronches, et leur utilisation
voies respiratoires supérieures. En pratique, ces bactéries est sans doute superflue dans la majorité des cas. Mais la
viennent coloniser les grands malades, surtout lorsqu'ils présence de ces bactéries dans le mucus des voies respira-
sont hospitalisés. Ce sont des bacilles à Gram négatif, du toires constitue une menace de bronchopneumonie. En cas
groupe des entérobactéries (Klebsiella, Serratia, Enterobacter, de bronchopneumonie, un traitement par un antibiotique
Citrobacter, Proteus, Morganella, Providentia) ou du groupe devient utile.
des « non-fermentants » (Pseudomonas, Stenotrophomonas, On peut donc voir des bronchopneumonies provo-
Burkholderia). Résistantes déjà de façon spontanée à de quées par ces espèces bactériennes. Comme les autres
nombreux antibiotiques, les souches qui circulent dans bronchopneumonies, ce sont des infections qui menacent
les hôpitaux échangent entre elles des plasmides et des les patients déjà affaiblis ; la majorité des bronchopneumo-
transposons, qui enrichissent encore leur pouvoir de résis- nies auxquelles participent des bactéries d'hôpitaux sur-
tance. Les soignants ont une certaine responsabilité dans la viennent chez des patients sous respiration artificielle. On
transmission de ces bactéries, car ils les véhiculent souvent pose ce diagnostic lorsqu'il y a de la fièvre ou des signes
d'un patient colonisé vers un autre patient réceptif, par généraux d'infection et qu'il y a des foyers de condensation
l'intermédiaire des mains ; on a déjà signalé le danger que pulmonaire visibles radiologiquement. Le traitement de ces
peut représenter une mauvaise hygiène des aérosols dans la bronchopneumonies peut être difficile, puisque ce sont des
transmission de ces espèces bactériennes. bactéries souvent résistantes à plusieurs antibiotiques.
Ces espèces nous posent de grands problèmes de dia- Certaines souches de staphylocoques dorés
gnostic. De nombreux malades en hébergent dans leurs (Staphylococcus aureus) sont venues rejoindre les bacilles
voies respiratoires supérieures, alors que leurs voies res- à Gram négatif pour compléter la panoplie des bactéries
piratoires profondes sont infectées par des bactéries plus d'hôpitaux. Ces souches sont des descendantes des staphy-
classiques : l'exemple le plus fréquent est celui du patient locoques dorés de la flore naturelle, qui ont acquis une viru-
atteint d'une pneumonie à pneumocoques, dont l'état lence plus grande et une résistance aux antibiotiques les plus
général est très altéré, qui est hospitalisé depuis plusieurs utilisés. On nomme ces staphylocoques MRSA (Methicillin-
jours, et qui reçoit un antibiotique ; lorsqu'on tente d'ana- resistant Staphylococcus aureus). Chez les patients hospi-
lyser ses expectorations et que le produit obtenu est fort talisés, ces souches s'installent dans les voies respiratoires
contaminé par de la salive, on découvre au laboratoire des supérieures, ou dans les plaies chroniques (ulcères de
bacilles à Gram négatif, alors que le vrai responsable de la jambes, escarres de décubitus). Elles passent d'un patient
pneumonie est un autre germe. L'erreur se produit d'autant hospitalisé à un autre, surtout par l'intermédiaire des mains
plus facilement que ces bactéries d'hôpitaux sont faciles à des soignants. Tout comme les bacilles à Gram négatif, elles
69
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

peuvent coloniser le mucus des bronches ou occasionner produisent ; de nombreux bacilles à Gram négatif d'hôpi-
des bronchopneumonies. Elles posent parfois de gros pro- taux en produisent.
blèmes pour le traitement, à cause de leur résistance à cer- Une première façon de résoudre le problème des
tains antibiotiques. β-lactamases est de combiner l'antibiotique avec une molé-
cule inhibitrice de ces enzymes. L'exemple le plus heureux
est la combinaison d'amoxicilline et de clavulanate : cette
association permet de restaurer l'activité de l'amoxicilline
Antibiothérapie des voies vis-à-vis des Haemophilus, des anaérobies et de la plupart
respiratoires des staphylocoques dorés. Cette association reste perfor-
mante pour l'administration par voie orale.
β-lactamines Une seconde façon de surmonter l'obstacle des
β-lactamases a été de concevoir des molécules qui restent
Les β-lactamines constituent une grande famille d'anti- stables face à l'action enzymatique de ces enzymes.
biotiques dont la formule chimique dérive de celle de la C'est ainsi que l'oxacilline et la flucloxacilline sont utilisées
pénicilline. En général, ce sont des antibiotiques faciles à uti- pour traiter les staphylocoques. Ce sont des β-lactamines
liser, et relativement peu toxiques : de nombreux praticiens peu actives, et la plupart des autres espèces bactériennes
considèrent que lorsque le choix est possible, il est toujours échappent à leur action ; leur résorption par voie orale est
préférable d'utiliser un antibiotique de cette famille. incomplète.
Les β-lactamines sont bien adaptées à l'administration Les céphalosporines forment un grand groupe de
par voie veineuse ; pour les traitements par voie orale, les β-lactamines conçues pour leur stabilité vis-à-vis des
possibilités sont plus limitées, et seules quelques molécules β-lactamases. La recherche pharmaceutique en a créé
donnent satisfaction. plusieurs, de plus en plus stables : mais les progrès ont été
On pourrait présenter comme prototype de cette orientés en priorité vers la stabilité face aux β-lactamases des
famille l'amoxicilline. C'est un excellent antibiotique, dont bacilles à Gram négatif (entérobactéries et non-fermentants) ;
les performances par voie orale sont presque équivalentes c'est ainsi que certaines céphalosporines sont mal adaptées
à celles obtenues par voie intraveineuse. La plupart des au traitement des infections respiratoires, et qu'aucune
espèces bactériennes virulentes de la flore naturelle du céphalosporine n'est stable face aux β-lactamases des bac-
pharynx étaient initialement sensibles à ce médicament. téries anaérobies.
Pendant des décennies, l'amoxicilline est restée le meil- Les céphalosporines de première génération (par
leur antibiotique vis-à-vis de Streptococcus pneumoniae. exemple, la céfazoline) déçoivent en pathologie respira-
Malheureusement, on a vu apparaître des souches fran- toire : activité modeste vis-à-vis des pneumocoques, des
chement résistantes dans le sud de l'Europe, et des souches staphylocoques et surtout des Haemophilus. La plupart des
de sensibilité amoindrie dans le nord de l'Europe ; pour ces céphalosporines disponibles en Europe pour l'administra-
dernières, l'amoxicilline convient encore, mais on recom- tion par voie orale sont de première génération (céfalexine,
mande d'en augmenter la dose. céfadroxyl, céfatrizine).
Pour ces souches récalcitrantes de pneumocoques, Une céphalosporine de deuxième génération, le céfu-
la cible moléculaire des β-lactamines s'est modifiée, et la roxime, corrige ces défauts et convient pour la plupart des
perte d'activité ne se limite pas à l'amoxicilline, mais atteint bactéries des infections respiratoires, sans surpasser toute-
l'ensemble de la famille. De la même manière, on a vu appa- fois l'amoxicilline ou l'association amoxicilline–clavulanate.
raître dans nos hôpitaux des souches de Staphylococcus La forme orale du céfuroxime est malheureusement de
aureus qui ont perdu complètement la sensibilité à l'en- résorption incomplète et irrégulière.
semble des β-lactamines. Les céphalosporines de troisième génération sont des
De nombreuses bactéries qui présentent un intérêt en molécules de grande activité intrinsèque, et de bonne
pathologie respiratoire sont devenues résistantes d'une stabilité vis-à-vis de nombreuses β-lactamases. Certaines
autre façon : elles secrètent des β-lactamases, c'est-à- conviennent remarquablement bien pour traiter des infec-
dire des enzymes qui dénaturent certaines β-lactamines. tions par pneumocoques ou par Haemophilus : céfotaxime
L'amoxicilline est facilement détruite par ces β-lactamases. et ceftriaxone. Bon nombre de « bactéries d'hôpitaux »
Un faible pourcentage des Haemophilus influenzae en sont sensibles à ces molécules. La troisième génération
produisent ; la plupart des Staphylococcus aureus en pro- comporte aussi des antibiotiques qui sont meilleurs encore
duisent ; la moitié des bactéries anaérobies de la bouche en pour les bactéries d'hôpitaux, comme Pseudomonas aeru-
70
5. Les bactéries des voies respiratoires

ginosa, mais dont l'activité est insuffisante pour traiter des Au laboratoire, Mycoplasma et Chlamydophila sont
infections pneumococciques : c'est le cas de la ceftazidime. sensibles aux macrolides. En fait, aucune étude clinique ne
Les céphalosporines de quatrième génération, comme confirme l'utilité de ces antibiotiques, sauf dans les rares cas
le céfépime, cumulent une bonne activité sur les pneumo- de pneumonies asphyxiantes suraiguës auxquelles parti-
coques et sur de nombreux bacilles à Gram négatif d'hôpitaux. cipent ces germes : c'est une loi générale de l'antibiothé-
Les carbapénèmes (imipénème, méropénème) consti- rapie que des bactéries qui se divisent lentement sont peu
tuent le « haut du panier » : ils jouissent d'une grande sensibles aux antibiotiques, et l'on sait que Mycoplasma
activité intrinsèque et d'une grande stabilité face à la majo- pneumoniae et Chlamydophila pneumoniae se divisent à
rité des β-lactamases. Les espèces importantes de la flore un rythme très lent.
naturelle des voies respiratoires sont souvent sensibles, de Malgré la fréquence des résistances parmi les pneu-
même que la majorité des bactéries d'hôpitaux, et que les mocoques, certains praticiens restent fidèles aux
espèces anaérobies. On pourrait croire que ce groupe d'an- macrolides dans les cas d'exacerbation de la broncho-
tibiotiques permet de traiter toutes les infections des voies pneumopathie chronique obstructive : ils invoquent un
respiratoires : ce n'est pas le cas, car certaines espèces des effet anti-inflammatoire de ces antibiotiques. Mais cet
hôpitaux, comme les Stenotrophomonas et les Burkholderia effet anti-inflammatoire ne se manifeste qu'après plu-
sont insensibles ; d'autres espèces des hôpitaux, sensibles sieurs jours de traitement. Le bénéfice des macrolides
initialement, développent progressivement de nouvelles par le biais de cet effet anti-inflammatoire est clairement
β-lactamases, des « carbapénèmases » ou des « métallo- démontré dans les cas de mucoviscidose.
β-lactamases » ; quant aux pneumocoques de sensibilité
amoindrie ou abolie vis-à-vis de l'amoxicilline et aux sta-
phylocoques MRSA, ce n'est pas par la sécrétion d'une Tétracyclines
β-lactamase qu'ils se montrent rebelles aux β-lactamines,
Les principales tétracyclines sont la doxycycline et la mino-
mais par une modification de la cible de cette famille
cycline. Ces antibiotiques sont surtout utilisés par voie
d'antibiotiques, et cette modification invalide aussi les
orale en milieu extra-hospitalier.
carbapénèmes. Notons encore que le spectre très large
On pourrait presque répéter à propos de ces antibio-
des carbapénèmes provoque de gros bouleversements de
tiques ce qui a été dit des macrolides : résistance de près
l'écologie microbienne, avec une abondance anormale des
d'un tiers des pneumocoques, activité sur Legionella, activité
levures sur les muqueuses.
au laboratoire sur Mycoplasma et Chlamydophila, effet anti-
Les β-lactamines sont toutes inactives sur les Legionella,
inflammatoire, etc. Notons qu'ici l'effet anti-inflammatoire
les Mycoplasma et les Chlamydophila.
se manifeste dès le début du traitement, et que les tétracy-
clines apportent encore dans les cas de bronchopneumo-
Macrolides pathie chronique obstructive l'avantage d'un effet fluidifiant
du mucus.
Les principaux macrolides sont l'érythromycine, la clari-
thromycine et l'azithromycine. Tous conviennent pour
l'administration par voie orale, et les deux premiers sont Cotrimoxazole
disponibles par voie veineuse.
Autrefois très utilisés en pathologie respiratoire, ces anti- Le cotrimoxazole est utilisé principalement par voie orale ;
biotiques ont perdu beaucoup de leur intérêt, en raison de il est possible de l'injecter par voie veineuse, mais c'est un
la résistance très fréquente du pathogène respiratoire prin- médicament irritant pour les veines. Dans le passé, cet
cipal, Streptococcus pneumoniae : en Europe occidentale, un antibiotique a été fort utilisé en pathologie respiratoire.
tiers des souches sont résistantes. La résistance est fréquente L'intérêt a décru, d'une part parce qu'on a pris conscience
aussi parmi les staphylocoques et les espèces anaérobies. de cas d'allergies parfois sévères (comme le redoutable
Les macrolides les plus récents, clarithromycine et azi- syndrome de Lyell, avec des décollements de large surface
thromycine, conviennent pour traiter Legionella : on les de l'épiderme), et d'autre part parce que des souches résis-
utilise simultanément à une β-lactamine dans les pneu- tantes sont apparues.
monies sévères, pour assurer une action à la fois sur les Ce médicament peut encore rendre des services dans
pneumocoques et sur Legionella ; on les utilise aussi lorsque des cas particuliers, lorsqu'on peut s'assurer par l'antibio-
les prélèvements bactériologiques permettent d'affirmer la gramme que la souche bactérienne responsable de l'infec-
présence de Legionella. tion est sensible. Beaucoup de staphylocoques résistants
71
I. Anatomie, physiologie et physiopathologie du système respiratoire

aux β-lactamines (MRSA) sont sensibles au cotrimoxa- β-lactamine comme l'amoxicilline ou une céphalosporine,
zole, de même que certains bacilles à Gram négatif de la il peut en compléter le spectre pour les infections mixtes,
« flore des hôpitaux ». On utilise rarement le cotrimoxazole comme les pneumonies nécrosantes provoquées par la
comme premier antibiotique, mais il a sa place comme flore dentaire.
antibiotique de relais, pour succéder à un autre traitement
débuté à l'hôpital par voie veineuse.
Aminoglycosides
Les principaux aminoglycosides sont la gentamicine et
Quinolones l'amikacine.
La plupart des quinolones peuvent être administrées aussi Les antibiotiques de cette famille ne sont pas résorbés
bien par voie veineuse que par voie orale. par voie orale.
L'antibiotique le plus connu de cette famille est sans Le spectre d'action des aminoglycosides n'est guère
doute la ciprofloxacine. Son profil d'activité est représenta- intéressant en pathologie respiratoire. Ce sont surtout
tif du groupe : il s'agit surtout d'une action très intéressante des antibiotiques utiles pour traiter les infections par des
sur les bacilles à Gram négatif, y compris de nombreuses bacilles à Gram négatif ; les pneumocoques sont toujours
« bactéries des hôpitaux ». Pour la pathologie respiratoire, résistants, de même que les Legionella, les Mycoplasma,
c'est un antibiotique mineur : les pneumocoques, les sta- les Chlamydophila et les espèces anaérobies. Sur les sta-
phylocoques, les espèces anaérobies sont peu sensibles. Les phylocoques, on obtient un résultat transitoire, parce qu'il
Legionella sont sensibles. émerge rapidement une sous-population résistante.
La lévofloxacine bénéficie d'une meilleure activité sur Les aminoglycosides sont inactivés par l'acidité du pus ;
les germes respiratoires : on peut traiter des infections ils ne diffusent guère dans le mucus de l'arbre respiratoire.
par pneumocoques et, au laboratoire, Mycoplasma et On ne voit guère d'intérêt à cette famille d'antibio-
Chlamydophila sont sensibles. tiques en pathologie respiratoire, sauf pour le traitement
La moxifloxacine est théoriquement la molécule la plus en urgence d'infections sévères lorsqu'on pense qu'inter-
intéressante de la famille, parce qu'elle est encore plus viennent des bacilles à Gram négatif de la « flore des
active sur les pneumocoques, tout en restant active sur les hôpitaux », en attendant de disposer d'une identification
Legionella, Mycoplasma et Chlamydophila. bactérienne et d'un antibiogramme.
Les quinolones sont malheureusement plus toxiques On a cru longtemps à une synergie entre les β-lactamines
que les β-lactamines. Il y a des cas de ruptures tendineuses ; et les aminoglycosides, mais les études cliniques permettent
des douleurs articulaires sont possibles ; certains patients d'affirmer que cette synergie est exceptionnelle.
souffrent de problèmes neurologiques. La moxifloxacine Administrés par voie veineuse ou musculaire, les ami-
offre une certaine insécurité du côté du rythme cardiaque noglycosides sont toxiques pour les reins et pour l'oreille
(allongement de l'espace QT, qui fragilise vis-à-vis des tor- interne (ouïe et équilibre).
sades de pointe) et du côté du foie (toxicité hépatique Les aminoglycosides sont parfois utilisés sous forme
occasionnelle). d'aérosols : même s'ils se montrent parfois irritants pour
Lévofloxacine ou moxifloxacine sont souvent considé- les bronches, avec un risque de réactions asthmatiformes,
rées comme les antibiotiques les plus adéquats lorsqu'il la tolérance à ce mode d'administration est considérée
faut traiter une pneumonie dans les régions d'Europe où comme satisfaisante. L'usage le plus fréquent de ces aérosols
circulent des souches de pneumocoques complètement est le traitement de la mucoviscidose, lorsque des souches
résistantes aux β-lactamines. de Pseudomonas aeruginosa colonisent les bronches.
L'aérosolisation expose malheureusement à l'émergence
rapide de souches résistantes.
Métronidazole
Le métronidazole peut être administré par voie veineuse Antibiotiques des staphylocoques
et par voie orale. C'est un bon antibiotique des bactéries résistants aux β-lactamines
anaérobies, mais son spectre d'action s'arrête là. Comme il
n'y a guère d'infections au cours desquelles interviennent Face aux infections provoquées par les souches de
uniquement des espèces anaérobies, le métronidazole n'est Staphylococcus aureus devenues résistantes aux
pas utilisé seul en pathologie respiratoire. Combiné à une β-lactamines (MRSA), on peut faire appel aux glycopep-
72
5. Les bactéries des voies respiratoires

tides, par voie veineuse ou musculaire, au linézolide Le linézolide est surtout actif sur les bactéries à Gram
par voie orale ou veineuse, ou à la tigécycline par voie positif. Ses indications sont les mêmes que celles des gly-
veineuse. copeptides, avec la possibilité d'un traitement par voie
Les principaux glycopeptides sont la vancomycine et orale. Le linézolide peut se montrer toxique : baisse du
la teicoplanine. Les glycopeptides ont un spectre d'action nombre des plaquettes sanguines ; toxicité pour les nerfs
limité aux germes à Gram positif. On s'en sert surtout pour périphériques. C'est un médicament très coûteux.
les infections par staphylocoques, mais ils peuvent convenir La tigécycline provient d'une amélioration des tétracy-
vis-à-vis des pneumocoques. Ils ont une certaine toxicité clines. C'est en fait un antibiotique à spectre d'action très
pour les reins et l'oreille interne, qui se manifeste surtout large. On peut s'en servir pour les staphylocoques ou les
en cas de surdosage ; l'élimination de ces antibiotiques se pneumocoques résistants aux β-lactamines et pour cer-
fait par les reins, et la dose quotidienne doit être soigneu- tains bacilles à Gram négatif de la « flore des hôpitaux ».
sement calculée en tenant compte de la fonction rénale de L'inconvénient principal est la grande fréquence de nausées
chaque patient. et de vomissements.

73
Chapitre 6
Notions d'épreuves
fonctionnelles respiratoires
Giuseppe Liistro, Jonathan Mouthuy

PLAN DU CHAPITRE
Subdivision des volumes pulmonaires 78
Volumes pulmonaires dynamiques 78
Autres tests pharmacodynamiques 80
Mesure de pression inspiratoire
et expiratoire maximale 81
Mesure de la diffusion 81
Débitmètre de pointe 81
Autres tests fonctionnels respiratoires 82

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Les tests fonctionnels respiratoires sont utilisés pour le


diagnostic, le dépistage et le suivi de l'évolution de patho-

Volume pulmonaire (L)


logies respiratoires telles que l'asthme ou la bronchopneu- CV
VRI
mopathie chronique obstructive (BPCO). La fonction
respiratoire est également utilisée pour prévoir les risques
CPT
préopératoires, par exemple dans le cadre d'une résec- VT
tion pulmonaire. Elle permet également d'orienter le VRE
diagnostic d'une dyspnée : est-elle d'origine cardiaque ou CRF
pulmonaire ? VR
Les tests fonctionnels respiratoires seuls ne peuvent
pas mener à un diagnostic clinique, par exemple une TEMPS (s)
fibrose pulmonaire ou un emphysème. Les résultats Fig. 6.1
des tests fonctionnels doivent être considérés à la Subdivision des volumes pulmonaires : les volumes « statiques ».
lumière de l'histoire du patient, de l'examen clinique, VRI : volume de réserve inspiratoire ; VT : volume courant ;
des radiographies et de certains résultats de laboratoire. VRE : volume de réserve expiratoire ; CV : capacité vitale ; CRF :
capacité résiduelle fonctionnelle ; CPT : capacité pulmonaire totale.
Néanmoins, certains tests suggèrent fortement la pré-
sence de certaines conditions pathologiques comme
la fibrose pulmonaire. Un autre exemple est la courbe Subdivision des volumes
débit/volume, qui peut montrer de manière tout à fait
caractéristique des lésions au niveau des voies aériennes pulmonaires
supérieures.
Si la fonction respiratoire peut apporter des résultats La subdivision classique des volumes pulmonaires statiques,
très importants aux cliniciens, elle doit être réalisée égale- c'est-à-dire ceux qui sont réalisés au cours de manœuvres
ment par des mains expertes. Les opérateurs de la fonction respiratoires lentes, est décrite sur la figure 6.1.
respiratoire doivent avoir une formation complète, com- Les plus importants sont la capacité vitale (CV), le
prenant bien sûr les aspects théoriques mais également volume résiduel (VR) et la capacité pulmonaire totale (CPT).
un volet pratique leur permettant de mener à bien les Contrairement à la CPT et au VR, la CV peut être mesurée
tests de fonction respiratoire dans la plupart des circons- par des spiromètres simplifiés. En revanche, la CPT et le
tances, et ce avec des patients parfois affaiblis. L'expertise VR doivent être mesurés par un spiromètre utilisant une
des opérateurs ne peut suffire non plus à la qualité des méthode de dilution à l'hélium ou par pléthysmographie
tests respiratoires, en partie dépendants de l'effort et de la corporelle. L'intérêt de la mesure de ces volumes pulmo-
collaboration du patient. Une nouvelle variable s'ajoute à naires est de dépister les maladies respiratoires restrictives.
cette problématique : il s'agit de la multiplicité des appa- La capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) est le volume de
reils de fonction respiratoire. En effet, depuis une dizaine gaz présent dans les poumons à la fin d'une expiration nor-
d'années, de nombreux appareils de spirométrie appa- male et inclut donc le volume de réserve expiratoire (VRE)
raissent sur le marché et sont de plus en plus simplifiés, et le VR. L'encadré 6.1 montre le diagnostic différentiel des
permettant de réaliser la fonction respiratoire dans des troubles ventilatoires restrictifs.
circonstances comme la médecine du travail, ou pouvant
être employés par un médecin généraliste au domicile du
patient. Volumes pulmonaires dynamiques
Enfin, la fonction respiratoire est encore largement sous-
employée. Par exemple, nous dépistons encore beaucoup Ces variables sont basées sur la manœuvre suivante : le sujet
trop de patients à un stade sévère de la BPCO, alors que respire calmement dans le spiromètre, puis on lui demande
la fonction respiratoire permet de dépister cette maladie d'inspirer rapidement jusqu'à la CPT. Ensuite, on demande
déjà au stade très léger, vers 40–45 ans. À ce moment, l'arrêt au sujet d'expirer le plus rapidement possible et ce jusqu'au
du tabac peut encore permettre au patient de garder une VR. Une fois la fin de l'expiration atteinte, on demande
fonction respiratoire lui permettant de vivre une vie tout à au sujet de réinspirer rapidement. Au cours de cette
fait normale, ce qui n'est pas le cas si l'intervention se fait à manœuvre, nous mesurons les volumes mobilisables mais
un stade plus avancé de la maladie. également les débits expiratoires et inspiratoires forcés.

78
6. Notions d'épreuves fonctionnelles respiratoires

En dessous de cette valeur, on considère que le patient est


atteint d'un trouble ventilatoire obstructif.
ENCADRÉ 6.1 Causes principales
des troubles ventilatoires Remarque
restrictifs
l Commande : atteinte du système nerveux central, sclé-
La BPCO est une entité clinique actuellement bien
rose latérale amyotrophique, poliomyélite antérieure aiguë, codifiée sur le plan diagnostic. Il se base sur la pré-
lésion phrénique… sence d'un facteur de risque (le tabagisme dans
l Jonction neuromusculaire : myasthénie, curarisants… 90 % des cas) et d'une fonction respiratoire mon-
l Muscles : myopathies trant un trouble ventilatoire obstructif. Une simple
l Paroi : cyphoscoliose, côtes fracturées ou déformées… spirométrie accompagnée d'un test de bronchodi-
l Plèvre : pneumothorax, pleurésie, masse pleurale, latation (le plus souvent négatif) permettra géné-
pachypleurite… ralement de poser le diagnostic.
l Poumon : résection pulmonaire, pneumopathies Dans les cas d'asthme, les recommandations
interstitielles
internationales GINA, pour global initiative for
l Abdomen : masse sous-diaphramatique, ascite
asthma, proposent d'utiliser le rapport VEMS/
CVF. Ceci modifie quelque peu les valeurs de
La figure 6.2 montre le spirogramme (représentation gra- l'indice, mais ne modifie en rien le diagnostic qui
phique des volumes respiratoires en fonction du temps). Au repose essentiellement sur la réversibilité de l'obs-
cours de cette manœuvre sont mesurés la capacité vitale truction (voir ci-dessous et plus loin Autres tests
forcée (CVF) mais également le volume expiré maximal au pharmacodynamiques).
cours de la première seconde (VEMS). La CVF est normale-
ment la même que la CV mesurée au cours d'une manœuvre La représentation la plus simple des résultats de la
lente comme celle qui accompagne la mesure des volumes manœuvre d'inspiration et d'expiration forcées est la
pulmonaires statiques. Cependant, chez des patients atteints courbe débit/volume (fig.  6.3). Sur cette courbe, on peut
d'un trouble obstructif, la CVF est généralement plus petite remarquer une partie expiratoire asymétrique et une partie
que la CV lente. Ceci est dû au collapsus des petites voies inspiratoire relativement symétrique. Le point culminant
aériennes induit par la manœuvre spirométrique elle-même. de la courbe expiratoire est le débit expiratoire de pointe
Un indice très important permettant de dépister une obs- (DEP), puis la courbe décroît rapidement en débit pour
truction des voies aériennes est l'indice de Tiffeneau (VEMS/
(L/min)
CV). En effet, en présence d'un trouble ventilatoire obstructif,
la diminution du VEMS est plus marquée que celle de la CV, Débit exp. de pointe
et donc cet indice diminue. De manière à standardiser le dia-
gnostic de la BPCO, les directives internationales de dépistage
et de prise en charge de cette maladie (les critères internatio- Exp
naux GOLD pour global initiative for chronic obstructive lung
disease) ont fixé la limite inférieure de l'indice de Tiffeneau à 0,7.

Volume (L)
VEMS CVF
Volume

Tiffeneau : VEMS Insp


1 sec CV(F)
Temps Fig. 6.3
La courbe débit/volume.
Fig. 6.2
L'axe vertical représente le débit (ici en litres par minute) et l'axe
Le spirogramme au cours d'une expiration forcée. horizontal le volume inspiré ou expiré, en litres. La flèche épaisse montre
Le volume mesuré 1 seconde après le début de l'expiration forcée le sommet de la courbe expiratoire où est mesuré le débit expiratoire
est le VEMS. La CVF est la capacité vitale forcée. de pointe. La petite boucle est mesurée pendant la respiration calme.

79
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Autres tests pharmacodynamiques


ENCADRÉ 6.2 Causes principales des
Le premier test pharmacodynamique que nous avons vu
troubles ventilatoires obstructifs est le test de bronchodilatation, mais nous pouvons égale­
l BPCO : bronchite chronique et emphysème ment faire l'inverse, c'est-à-dire un test de provocation
l Bronchiectasies et mucoviscidose bronchique ou de bronchoconstriction.
l Asthme
L'exemple le plus fréquent est un patient chez qui un
l Bronchiolite oblitérante
asthme est suspecté mais qui a une fonction normale. Si
l Sténose ou obstruction des voies aériennes supérieures,

de la trachée ou des troncs souches la clinique n'est pas entièrement évocatrice d'un asthme
bronchique, le clinicien demande un test de provocation
bronchique avec histamine ou un dérivé de l'acétylcho-
line. Ces agents bronchoconstricteurs sont donnés à doses
atteindre la fin de l'expiration forcée, et la manœuvre ins-
croissantes et permettent de mesurer la concentration
piratoire peut recommencer. L'encadré  6.2 montre le dia-
à partir de laquelle le VEMS chute de 20 % par rapport à
gnostic différentiel des troubles ventilatoires obstructifs.
la meilleure valeur de base du sujet. Cette concentration,
L'étape suivante de la démarche diagnostique est de
appelée PC20 (provocative dose 20), permet de dépister les
vérifier s'il s'agit d'un trouble ventilatoire obstructif réversible
patients atteints d'une hyperréactivité bronchique (HRB).
ou non. Une épreuve de bronchodilatation est proposée
Avec une PC20 inférieur à 8 mg/mL d'agent bronchocons-
au patient. Une dose standardisée de 200 à 400 μg d'un
tricteur, nous affirmerons que le patient présente une HRB.
bronchodilatateur à courte durée d'action, comme le sal-
Cependant, l'HRB n'est pas systématiquement synonyme
butamol, est administrée au sujet. Les mesures du VEMS
d'asthme. Plusieurs pathologies, comme la rhinite allergique
et de la CVF sont répétées une vingtaine de minutes après
ou la BPCO, peuvent s'accompagner d'un test de provo­
l'inhalation du bronchodilatateur. Si le VEMS et/ou la CVF
cation positif. En revanche, ce test est très utile pour exclure
augmentent d'au moins 12 % et 200 mL, le test de broncho-
un asthme. En effet, si un patient présente des épisodes
dilatation est considéré comme positif, signant la levée du
de dyspnée paroxystique atypique et que le test à l'hista-
bronchospasme.
mine ou à la méthacholine est négatif, le clinicien pourra
Ici, une distinction importante s'impose entre l'asthme
avec confiance exclure un asthme bronchique si bien sûr
et la BPCO : en effet, la définition de la BPCO implique un
les médicaments contre l'asthme n'ont pas été administrés
trouble ventilatoire obstructif non réversible ou peu réversible.
avant le test.
En revanche, si nous pouvons démontrer que le syndrome
obstructif est réversible, c'est-à-dire qu'après bronchodilata-
tion le sujet obtient des valeurs normales de CVF et VEMS Remarque
(ou à défaut une amélioration significative), il s'agira plutôt
d'un asthme. Ainsi, grâce à un spiromètre très simple, nous Les tests de provocation avec des agents non spéci-
pouvons faire le dépistage de la BPCO ou de l'asthme. fiques (histamine, méthacholine…) sont très sen-
sibles pour dépister l'hyperréactivité bronchique,
mais très peu spécifiques. En effet, bien que l'HRB
Remarque fasse partie intégrante des caractéristiques de
l'asthme, elle peut exister également dans d'autres
Ces petits appareils ne peuvent pas mesurer la pathologies. À titre d'exemple, environ 30 % des
CPT, donc, en cas d'une diminution isolée, par patients atteints de rhinite allergique ont égale-
exemple de la CVF, nous ne pourrons pas affirmer ment une hyperréactivité bronchique. L'HRB peut
la présence d'un trouble ventilatoire restrictif. Il aussi apparaître dans certaines pathologies car-
faudra adresser le patient au laboratoire de fonc- diaques (insuffisance congestive), et même dans
tion respiratoire pour une mesure de la CPT. certains cas de BPCO.
Sa valeur prédictive négative est par contre excel-
Si nous avons affaire à la combinaison d'un trouble ven- lente. En effet, si un patient présente des épisodes de
tilatoire restrictif (CPT inférieure aux valeurs normales) et dyspnée paroxystique atypique et que le test à l'his-
obstructif (rapport VEMS/CV inférieur à 0,7), il s'agira d'un tamine ou à la méthacholine est négatif, le clinicien
syndrome mixte. pourra avec confiance exclure un asthme bronchique.
80
6. Notions d'épreuves fonctionnelles respiratoires

Il existe d'autres tests de provocation, cette fois, spéci- ment de la paroi de la membrane alvéolocapillaire mais c'est
fiques. Ces tests prévoient de mettre le patient en contact plutôt une diminution de la surface d'échange des gaz qui
avec un agent (dans certains cas un allergène) qui est sus- conduit à une altération de la diffusion. La mesure de la
pecté pour induire des symptômes d'asthme. Ces tests diffusion doit être réalisée dans des conditions bien strictes
ne sont pas sans risque et doivent donc être réalisés sous avec un repos précédant la mesure afin de stabiliser le débit
surveillance médicale étroite. Ils sont réservés au besoin de cardiaque. Le laboratoire doit également être averti si le
recherche, ou de dépistage de l'asthme professionnel dont patient présente une anémie ou au contraire une polyglo-
ils font partie intégrante de la démarche diagnostique. bulie (augmentation du taux d'hémoglobine dans le sang).
En effet, dans le cas d'une anémie par exemple, la mesure de
la diffusion sera faussement abaissée par manque de trans-
Mesure de pression inspiratoire porteur du CO au cours de cette manœuvre.

et expiratoire maximale
Débitmètre de pointe
On demande au sujet d'expirer profondément, puis
connecté à un manomètre, il tente d'inspirer au maximum Le débitmètre de pointe ou peak-flow meter est un appa-
afin de générer la pression inspiratoire la plus élevée pos- reil très simple qui permet d'enregistrer le débit expira-
sible. La manœuvre inverse est faite en expiration. Le sujet toire maximal au cours d'une expiration forcée. Il ne faut
inspire profondément et à la CPT, il est connecté au mano- cependant pas penser qu'un débitmètre de pointe peut
mètre. À ce moment, il expire le plus fort possible pour remplacer un test respiratoire complet. Par exemple,
mesurer sa pression expiratoire maximale. la mesure du débit expiratoire de pointe est inutile dans
Ce test permet d'aider au diagnostic différentiel des la BPCO. Les patients BPCO peuvent garder des débits
troubles ventilatoires restrictifs. En effet, un patient atteint expiratoires normaux, alors que leur VEMS est effondré.
d'une pathologie neuromusculaire va avoir une diminution La figure  6.4 montre les valeurs de débit expiratoire de
des volumes pulmonaires statiques mais également des pointe (en pourcentage des valeurs prédites) mesurées
pressions respiratoires. En revanche, les patients présen- au cours d'une journée de dépistage de l'asthme et de la
tant un trouble ventilatoire restrictif associé à une maladie BPCO en Belgique. À gauche du graphique se trouvent les
pulmo­naire parenchymateuse comme une fibrose pulmo- sujets sans obstruction des voies aériennes et à droite, ceux
naire vont garder en général des pressions inspiratoire et qui avaient un indice de Tiffeneau inférieur à 70 %. Il est
expiratoire maximales normales. Ce test demande de la
part du patient, comme pour la plupart des tests fonction-
nels respiratoires, une collaboration maximale, ce qui est
parfois très difficile à obtenir. Un autre problème lié à ce
test est la grande dispersion des valeurs normales, princi-
palement chez la femme chez qui la limite inférieure des
valeurs prédites peut, selon certains auteurs, atteindre zéro !

Mesure de la diffusion
La mesure de la capacité de diffusion du poumon (DLCO) est
également un test très utile pratiqué au laboratoire de fonc-
tion respiratoire. Les patients présentant une anomalie de
la membrane alvéolocapillaire, comme une fibrose pulmo­
naire avec un épaississement marqué de cette membrane Fig. 6.4
et une disparition des capillaires pulmonaires, vont avoir un Débits expiratoires de pointe en pourcentage des valeurs
trouble de la diffusion. C'est également le cas dans l'emphy- prédites mesurés au cours d'une journée de dépistage
sème pulmonaire où les parois alvéolaires sont progressive- de l'asthme et de la BPCO.
Le DEP ne permet pas de distinguer le groupe avec trouble
ment détruites par les processus inflammatoires liés à cette ventilatoire obstructif (VEMS/CVF < 70 %, à droite) des sujets sans
maladie. Dans ce cas, ce n'est pas un problème d'épaississe­ trouble ventilatoire obstructif (VEMS < CVF > 70 %, à gauche).

81
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

évident que les deux ­populations ne peuvent pas être sépa- Points clés
rées sur base du débit expiratoire de pointe. En revanche,
le débitmètre de pointe est un instrument de monitoring ■
Les tests fonctionnels respiratoires sont acces-
utile pour suivre les patients asthmatiques au domicile. La sibles dans de nombreux hôpitaux ou centres
variabilité importante du débit de pointe caractéristique de privés, mais ils sont également de plus en plus
l'asthme sert au clinicien pour pouvoir ajuster le traitement accessibles aux médecins généralistes et aux
anti-asthmatique. kinésithérapeutes.

Une fois passée la période d'apprentissage
indispensable pour connaître les principes de
Autres tests fonctionnels mesure, la manière de diriger les tests, d'en
corriger les erreurs, etc., les dispensateurs de
respiratoires soins posséderont un outil fiable de diagnos-
tic et de suivi des patients atteints de troubles
La mesure de la résistance des voies aériennes et de la respiratoires.
compliance pulmonaire est également effectuée dans les
laboratoires de fonction respiratoire. Si la mesure de la résis-
tance des voies aériennes par pléthysmographie corporelle
est encore largement utilisée, il n'en va pas de même pour Pour en savoir plus
la mesure des propriétés élastiques des poumons et de la
cage thoracique. Ces mesures de la mécanique respiratoire Global Initiative for asthma (GINA). Global Strategy for asthma manage-
apportent généralement peu de renseignements par rap- ment and prevention. Mise à jour décembre 2012. En ligne : www.
port aux données fournies par le VEMS, la CV, les volumes ginasthma.org.
Global Initiative for chronic obstructive lung disease (GOLD). Global
pulmonaires statiques et la mesure de la diffusion. Strategy for the diagnosis, management and prevention of COPD.
La mesure des gaz du sang ainsi que des paramètres Mise à jour janvier 2014. En ligne : www.goldcopd.org.
mesurables au cours d'une épreuve d'effort fait également Miller MR, Hankinson J, Brusasco V, et al. Standardisation of spirometry.
partie de l'évaluation fonctionnelle du patient et sera Eur Respir J 2005 ; 26(2) : 319–38.
décrite dans le chapitre 11.

82
Chapitre 7
Éléments de radiologie
thoracique
Renaud Menten

PLAN DU CHAPITRE
Bases de l'imagerie thoracique 84
Thorax normal : anatomie radiologique
du cliché de thorax normal 85
Clés d'interprétation du cliché de thorax
standard 86
Les grands syndromes de la radiologie
thoracique 86
Spécificités pédiatriques 90
Check-list de lecture d'un cliché de thorax
standard 91

Kinésithérapie respiratoire
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II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Le poumon et, dans un sens plus large, le thorax restent, Critères de qualité technique d'une
malgré l'arrivée régulière de nouvelles techniques d'ima-
gerie, l'un des bastions privilégiés de la radiographie image radiologique
conventionnelle. Technique
La connaissance de la sémiologie de base du bilan
radiographique standard (cliché de face et de profil) reste Sans entrer dans des détails de pure technique radiolo-
indispensable. gique, les clichés réalisés en routine sont des clichés de type
haute tension permettant des temps de pose plus courts
(réduction du flou cinétique) et une moindre densité appa-
rente des structures pariétales (structures osseuses, ombres
Bases de l'imagerie thoracique mammaires).
Le cliché de face de base, chez l'adulte ou le grand enfant,
Principes de formation de l'image est réalisé debout, en postéro-antérieur (face contre la
plaque radiologique). Cette position permet, en projection,
Le cliché de thorax standard va reproduire, en deux dimen- de réduire l'agrandissement du cœur. Pour la même raison,
sions, une réalité thoracique tridimensionnelle. Elle va tra- le cliché de profil est réalisé côté gauche contre la plaque.
duire en chaque point d'une surface plane (le film, la plaque Chez le jeune enfant, jusqu'à 8 à 10 ans, les clichés sont
phosphore…) le cumul des densités rencontrées (fonction réalisés en position couchée, pour des raisons de stabilité,
de la masse atomique du milieu rencontré). entraînant un étalement de la silhouette cardiomédiasti-
nale et une redistribution vasculaire vers les sommets (voir
plus bas).
Rappel de l'échelle des densités
radiographiques Incidence
On distingue quatre densités « biologiques » fondamen- La projection des têtes claviculaires symétrique par rapport
tales : le calcium, l'eau, la graisse et l'air. Elles opposent, au rachis est un bon indicateur de la qualité de l'incidence
dans cet ordre, une résistance décroissante aux rayons X de face (beaucoup plus fiable que la position de la trachée).
(tableau 7.1). De profil, l'indicateur est le rachis dorsal dont les apophyses
On retiendra que la notion d'opacité qualifie une struc- articulaires droites et gauches doivent se superposer et ne
ture apparaissant blanche et qu'une clarté, traduisant une former qu'un seul alignement (les arcs costaux postérieurs
plus grande transparence, apparaîtra noire : ces notions ne peuvent réaliser une superposition parfaite du fait de
peuvent sembler paradoxales mais se comprennent aisé- l'importante différence d'agrandissement faisant apparaître
ment si on se rappelle qu'elles se rapportent à un cliché de les arcs gauches, plus éloignés du plan film, plus grands que
type « négatif ». les arcs droits).

Tableau 7.1 Densités radiologiques


Nature Correspondance anatomique Densité relative Aspect Terminologie
Métal Matériel (prothèses, fils de ++++ Blanc Opacité
sternotomie, stents…)
Calcium Os (côtes sternum, clavicules, +++
omoplates)
Eau Cœur, vaisseaux ++
Graisse Graisse médiastinale, sous-pleurale, +
thymus
Air Air – Noir Clarté

84
7. Éléments de radiologie thoracique

Inspiration Bords
Sauf indication spéciale (recherche de petits pneumotho- Le médiastin est bordé :
rax ou d'un piégeage aérien sur obstacle bronchique partiel, l à droite, de haut en bas, par la veine cave supérieure, la

situations où le cliché en expiration apporte un important crosse azygos, l'oreillette droite, la veine cave inférieure ;
complément d'information), les clichés de base doivent être l à gauche, de haut en bas : le bouton aortique, l'arc

réalisés en fin d'inspiration. Cinq côtes au moins doivent moyen gauche (comprend le tronc commun de l'artère
être entièrement visibles, jusqu'à leur extrémité antérieure, pulmonaire et l'auricule gauche), le ventricule gauche.
la coupole diaphragmatique « coupant » la sixième côte.

Lignes
Thorax normal : anatomie Les lignes médiastinales sont visibles au sein de la silhouette
cardiomédiastinale. On note : la ligne para-aortique, les
radiologique du cliché de thorax lignes paraspinales, la ligne para-azygo-œsophagienne, les
normal lignes médiastinales antérieure et postérieure.

Médiastin Poumon
C'est dans cette région que se situe l'essentiel des interfaces À l'état normal, les structures vasculaires sont les seuls élé-
entre les densités aériques et hydriques, dont la connais- ments visibles des poumons. Les éléments de l'interstitium
sance est indispensable à l'interprétation du cliché de tho- sont en deçà de la résolution spatiale d'un cliché conven-
rax standard. Ces interfaces déterminent les lignes et bords tionnel, de même que les parois bronchiques, à l'exception
médiastinaux (fig. 7.1). des gros troncs segmentaires.

Lignes Médiastinales
Postérieure
Antérieure

Bouton
Ligne para-azygos aortique

Lignes para-spinales Arc moyen


gauche
Ligne para-azygo-
œsophagienne Bord cardiaque
gauche

Ligne
para-aortique
Bord cardiaque droit

Fig. 7.1
Lignes médiastinales.

85
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Plèvre présenter les multiples projections possibles de toutes les


structures pariétales (mamelons, lésions cutanées, omo-
Sur le cliché de thorax normal, les seuls éléments pleuraux plates). Le cliché de profil et une éventuelle scopie seront
visibles sont les accolements des feuillets de plèvre viscérale des adjuvants utiles.
constitués au sein des scissures. Les grandes scissures droite Une fois déterminé le caractère intrapulmonaire d'une
et gauche ne sont usuellement visibles que sur les clichés de anomalie, il faut se rappeler l'anatomie élémentaire de pro-
profil. La petite scissure, séparant le lobe supérieur droit du jection radiographique des lobes pulmonaires pour donner
lobe moyen, peut également être visible de face si elle offre une première localisation en termes de lobe (fig. 7.2).
une tangence suffisante à l'axe des rayons. Toutes appa- Ce schéma quelque peu simpliste rappelle la projection
raissent comme de fines opacités linéaires. très crâniale du segment apical des lobes inférieurs droit et
Il existe également des scissures accessoires, dont la plus gauche, et la projection très caudale, paracardiaque gauche,
fréquente est la pseudo-scissure azygos (située au sommet de la lingula (partie intégrante du lobe supérieur gauche).
droit). Un exemple est visible en figure 7.4.

Paroi Les grands syndromes


Les structures limitant le thorax sont :
de la radiologie thoracique
l au contact des plèvres : le sternum, le rachis, les côtes,
L'ensemble de la pathologie pulmonaire peut, sur le plan
les structures musculaires intercostales, les clavicules et le radiologique, se décomposer en grands syndromes.
diaphragme ;
l sans contact pleural : les omoplates, les muscles dorsaux

et pectoraux, les glandes mammaires, la peau. Syndrome médiastinal


Ses signes traduisent la présence d'anomalies de la sil-
houette médiastinale : présence d'air libre, de liquide ou de
Clés d'interprétation tissus anormal.
du cliché de thorax standard Opacités médiastinales
Par contraste avec l'air pulmonaire, la plupart des patholo- Dans cette entité, l'analyse par tomodensitométrie est
gies vont se traduire par des opacités anormales. quasi incontournable. Il importe néanmoins toujours de les
Le premier travail avant la localisation, en termes de reconnaître sur les clichés de routine.
lobe et de segment, est d'établir la topographie intra- ou Ces anomalies vont se présenter sous forme d'efface-
extrathoracique d'une opacité. Il importe, pour cela, d'avoir ment ou de déplacement de lignes et bords du médiastin
une bonne connaissance des diverses images que peuvent décrits en début de chapitre à la figure 7.1. Plusieurs critères

Poumon droit Poumon gauche


Profil Profil
Lobes inférieurs Lobe moyen Lobes supérieurs

Fig. 7.2
Projection des scissures pulmonaires.

86
7. Éléments de radiologie thoracique

renforcent le caractère médiastinal de ces anomalies : une On retiendra toutefois que les scissures ne constituent
limite nette présentant une convexité vers l'un des pou- pas une barrière absolue à l'extension du comblement
mons, l'absence de limite médiastinale bien définie, des alvéolaire.
raccords en pente douce, sans angle aigu, avec le médiastin.
Le cliché de profil aide à la localisation en médiastin Bronchogramme aérique ou aérien
antérieur (en avant d'un axe craniocaudal défini par le Alors que celles-ci ne sont classiquement pas visibles dans
bord antérieur de la trachée et le bord postérieur du cœur), l'environnement alvéolaire aérique du poumon normal, les
moyen (jusqu'à 1 cm en arrière de la limite antérieure des bronches, en raison même de leur contenu aérique, vont
corps vertébraux) ou postérieur (en arrière du précédent). apparaître en négatif au sein d'un foyer de comblement
alvéolaire.
Pneumomédiastin
Il se présente sous forme de clartés linéaires bordant les Signe de la silhouette (fig. 7.3)
contours cardiaques fusant fréquemment en cervical, réa- l L'opacité du comblement alvéolaire étant de tonalité
lisant un emphysème sous-cutané à ce niveau. hydrique, elle va entraîner, là où elle siège, la perte des inter-
faces « eau–air » qui constituent les principaux éléments de
Syndrome alvéolaire ou syndrome l'image thoracique normale.
l Les bords cardiaques droit et gauche ne seront plus
de comblement alvéolaire visibles au contact de foyers de comblement alvéolaire res-
On l'a vu, globalement, les poumons apparaissent comme pectivement lobaire moyen et lingulaire.
l Les limites diaphragmatiques vont s'effacer au contact
des clartés séparées par le médiastin, parcourues par les opa-
cités vasculaires de densité hydrique et de bronches dont de foyers basaux.
l La disparition de la ligne para-aortique signe un foyer
les branches de division ne sont pas visibles à l'état normal.
Le remplacement de l'air alvéolaire par du liquide ou par rétrocardiaque gauche.
des cellules va générer des opacités anormales responsables
du syndrome de comblement alvéolaire. Cas particulier : l'œdème aigu du poumon
On retrouve le caractère flou et confluent, mais la topo-
Caractéristiques radiologiques graphie est particulière, généralement péri-hilaire bilatérale,
Opacité à contours flous réalisant l'image classique en ailes de papillons (fig. 7.4).

L'aspect flou des limites tient à la physiopathologie de la


lésion. Le comblement des alvéoles pulmonaires se propage
par les multiples communications existant au niveau des
structures aériennes distales notamment entre les alvéoles
et entre celles-ci et les bronchioles terminales.
Les dimensions de l'unité de base, l'alvéole, étant infé-
rieures à la résolution spatiale du cliché standard, les limites
d'extension du comblement apparaissent floues.

Confluence
Elle est également due à la communication entre les unités
de base.

Systématisation
L'aspect flou des limites de l'infiltrat se verra toutefois limité
par les lignes d'arrêt que sont les scissures interlobaires. Fig. 7.3
Cet aspect est qualifié de « systématisation de l'infiltrat ». Il Foyer de comblement alvéolaire lobaire moyen typique
avec effacement (silhouettage) du bord cardiaque droit,
permet également de préciser aisément la topographie des bronchogramme aérique et abaissement de la petite scissure
lésions. signant son caractère partiellement collabant.

87
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Bronchectasies : dilatation de la lumière


bronchique
Même si les bronchectasies peuvent parfois être suspectées
par cette technique, il ne s'agit pas d'un diagnostic basé sur
le cliché standard. Le diagnostic sera posé par la tomoden-
sitométrie (CT-scanner).
Techniquement, celle-ci est réalisée en coupes fines (mil-
limétriques) et en inspiration forcée.
L'interprétation de base de ces images est simple : une
bronche dont le calibre excède celui de l'artère pulmonaire
voisine doit être considérée comme dilatée (fig. 7.5).

Obstruction de la lumière bronchique


Ce sont les signes indirects fournis par les anomalies de ven-
Fig. 7.4 tilation qui prédominent (fig. 7.6).
Cardiomégalie dans un contexte de cardiopathie congénitale.
Pléthore vasculaire centrale et infiltrats flous périvasculaires Obstruction complète
signant l'œdème pulmonaire. À noter, en outre, la présence d'un
pneumothorax apical gauche (*) et d'une pseudo-scissure azygos L'obstruction complète est à l'origine d'une atélectasie
(** : variante). apparaissant sous forme d'un territoire pulmonaire lobaire,
segmentaire ou sous-segmentaire densifié et de volume
réduit. Cette réduction de volume s'accompagne de divers
Causes phénomènes de déplacement et attraction de structures
voisines : scissures, médiastin, déformations de paroi…
Elles sont multiples : infections, infarctus, hémorragies,
En marge de ces atélectasies majeures sur obstruction
inhalation, néoplasme…
bronchique, il existe de petites atélectasies en bande, fré-
quemment juxtaphréniques, souvent observées dans
le décours d'interventions chirurgicales thoraciques ou
Syndrome bronchique abdominales. Il s'agit de petites bandes denses résultant
Le concept de syndrome bronchique regroupe les signes d'une hypoventilation sous-segmentaire, le plus souvent
directs et/ou indirects traduisant l'épaississement des parois transitoire.
bronchiques, une dilatation de la lumière bronchique ou
encore une obstruction (partielle ou complète) de cette
lumière.

Épaississement de paroi
À l'état normal, les parois bronchiques ne sont pas visibles
et seules les bronches souches et la trachée sont visibles,
bénéficiant du contraste fourni par la densité hydrique du
médiastin et des hiles vasculaires pulmonaires.
La visibilité des parois bronchiques au-delà de ces struc-
tures traduit soit une atteinte de la muqueuse bronchique,
soit un œdème de l'interstitium péribronchovasculaire.
La notion d'images en rail (couple bronche–vaisseau
pulmonaire vu dans son grand axe) ou en lunettes (vue face
Fig. 7.5
à l'axe de la bronche et du vaisseau) peut sembler obsolète
Épaississements de parois et bronchectasies de la pyramide
et peu scientifique, mais reste une expression imagée tra- basale droite mises en évidence par la différence de calibre
duisant bien l'aspect de ces images pathologiques. bronche/artère pulmonaire voisine.

88
7. Éléments de radiologie thoracique

A B
Fig. 7.6
Inhalation d'un corps étranger chez un jeune enfant.
Dans ce cas d'inhalation d'un corps étranger chez un jeune enfant,
on note déjà, sur le cliché en inspiration, cliché de gauche (A),
une transparence plus marquée du poumon droit. Sur le cliché
de droite (B), en expiration, cette asymétrie devient flagrante :
l'exsufflation normale du seul poumon gauche diminue nettement
sa transparence et libère de la place pour le médiastin qui bascule
de ce côté, entraînant la trachée. L'ascension des coupoles est
également asymétrique.
Fig. 7.7
Obstruction incomplète Pneumopathie interstitielle dans un contexte de
lymphohistiocytose : épaississement diffus de l'interstitium
L'obstruction incomplète, au contraire, montre classique- rendant sa trame visible au cliché standard.
ment une hyperinflation du territoire concerné par pié- À noter le caractère périphérique, réticulonodulaire et non
geage d'air. Ces signes sont mieux mis en évidence par la confluent des opacités.
réalisation de clichés en expiration forcée : déplacement du La présence d'air dans l'interstitium (emphysème inters-
médiastin vers le côté sain, bombement des scissures vers titiel) constitue une particularité pédiatrique résultant,
les lobes normaux. principalement en période néonatale, d'une ventilation
assistée agressive.
Bronchopneumopathie chronique
obstructive Syndrome vasculaire
Les bronchopneumopathies chroniques obstructives On l'a vu, les vaisseaux pulmonaires constituent quasiment
(BPCO) n'ont pas une traduction radiographique uni- les uniques structures intrapulmonaires visibles sur une radio-
voque. Elles vont regrouper un ensemble de signes de type graphie de thorax normale. Le syndrome vasculaire regroupe
épaississement des parois bronchiques, diverses formes l'ensemble des signes traduisant des modifications physiolo-
d'emphysèmes (bulles, emphysème centro- ou panlo- giques ou pathologiques de la vascularisation pulmonaire.
bulaire)… L'hyperinflation pulmonaire diffuse se traduit On notera que, physiologiquement, le flux vasculaire pul-
par l'élargissement de la clarté rétrosternale, l'hyperclarté monaire se distribue préférentiellement vers les zones déclives :
des champs pulmonaires et l'aplatissement des coupoles ceci se traduit sur le cliché de face, réalisé en position debout
diaphragmatiques. chez le patient adulte, par un calibre plus large des vaisseaux
pulmonaires aux bases qu'aux sommets. Cette observation
Syndrome interstitiel disparaît lorsque le cliché est réalisé en décubitus dorsal.

Le tissu interstitiel est constitué de l'ensemble des structures Augmentation globale de calibre
de soutien du poumon. On distingue les composantes des vaisseaux pulmonaires
péribronchovasculaires, périlobulaires et intralobulaires.
Augmentation de débit artériel pulmonaire
Le secteur interstitiel n'est pas visible sur un cliché de
thorax normal. Dans ce cas, on n'observe pas de redistribution vasculaire
Le syndrome interstitiel va se traduire par un épaissis- vers les sommets.
sement de l'interstitium par de l'œdème, une infiltration Elle peut être physiologique (grossesse, effort, fièvre) ou
cellulaire ou de la fibrose (fig. 7.7). pathologique, résultant d'un shunt droite–gauche (com-
Son analyse fine est réalisée par tomodensitométrie munication interauriculaire [CIA], communication inter-
haute résolution. ventriculaire [CIV], canal artériel [CA] perméable).
89
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Hypertension veineuse pulmonaire L'épanchement peut être cloisonné et ne pas se présen-


ter en position déclive. Des lames liquidiennes peuvent être
La circulation droite est un système à haut débit et basse
piégées au sein des scissures.
pression dont résulte sa distribution principalement déclive
En raison d'une rigidité pulmonaire anormale, l'épanche-
(gravité). Dans ces conditions, les sommets constituent,
ment peut rester sous-pulmonaire, simulant une ascension
pour le flux sanguin pulmonaire, une réserve de volume
de la coupole.
dont le recrutement, en cas de majoration de la pression
d'aval, va se traduire par une égalisation puis une redistribu-
Pneumothorax
tion des flux vers les sommets.
La présence d'air entre les feuillets pleuraux va se traduire
Diminution globale de calibre radiologiquement par :
l une hyperclarté du champ pulmonaire du côté concerné ;
des vaisseaux pulmonaires l un décollement pleural : il se traduit par la visibilité du

Cardiopathies congénitales avec sténose de l'artère feuillet pleural viscéral et l'absence de structure vasculaire
pulmonaire. en dehors de celui-ci. Ce décollement apparaît initialement
à l'apex pulmonaire chez le patient debout, l'air occupant
Diminution localisée du calibre spontanément une position antidéclive (voir le sommet
des vaisseaux pulmonaires gauche : fig. 6.4) ;
l dans les cas de petits pneumothorax, ces signes ne
Embolie, cardiopathie congénitale avec sténose localisée de peuvent être visibles qu'en expiration forcée ;
l'artère pulmonaire, emphysème obstructif… l à l'extrême, le poumon est collabé et le médiastin refoulé

du côté sain.
Augmentation de calibre des vaisseaux
centraux et diminution de calibre Syndrome pariétal
des vaisseaux périphériques
Il comprend l'ensemble des signes radiologiques qui tra-
Ce tableau réalise l'image de l'hypertension artérielle duisent une anomalie de la paroi thoracique.
pulmonaire. Il importe de garder présent à l'esprit le fait que la radio-
graphie pulmonaire est justement appelée « radiographie
du thorax » et qu'elle présente, par transparence, les images
Syndrome pleural cumulées du poumon, du médiastin mais aussi de tout ce
Il traduit la présence de liquide, d'air ou de tissu anormal qui les entoure (colonne, sternum, côtes, muscles, glandes
entre les feuillets pleuraux. mammaires, peau).
Cela implique qu'elles doivent faire l'objet d'une analyse sys-
Épanchement pleural tématique de la part du radiologue : on comprend aisément
qu'en cas de bilan de pathologie néoplasique à la recherche
Présentation classique de localisations pulmonaires secondaires, on recherchera acti-
Le liquide entre les feuillets pleuraux va apparaître sous vement d'éventuelles lésions osseuses, par exemple.
forme d'une opacité homogène dont la mobilité rendra
compte de l'aspect variable selon la position du patient.
Sur le cliché de face réalisé en position debout, le liquide
Spécificités pédiatriques
accumulé dans la partie la plus déclive va, selon sa quantité, Quelques points doivent être bien présents à l'esprit lors de
d'abord combler le cul-de-sac ou sinus costodiaphragma- la lecture de clichés de thorax d'enfant.
tique, puis croître crânialement et vers la ligne médiane, l Chez les jeunes enfants, les clichés sont systématique-
réalisant la classique ligne de Damoiseau. ment réalisés en position couchée, notamment pour des
raisons évidentes de stabilité.
Autres présentations l La nécessité d'obtenir des clichés en inspiration ren-

Le liquide libre s'accumulant en position déclive, chez le contre ici des problèmes liés à l'absence de collaboration du
patient couché, l'épanchement se traduira par un voile jeune enfant : le technologue doit donc observer le patient
liquidien rétropulmonaire diffus sans limite nette. durant plusieurs cycles respiratoires et anticiper.
90
7. Éléments de radiologie thoracique

l Plus encore que chez l'adulte, il faut veiller à obtenir une tant et se traduisant par une grisaille pulmonaire diffuse,
incidence de face optimale, une rotation minime entraînant, finement granitée. Les critères de gradation sont, dans un
vu le faible volume pulmonaire traversé, d'importantes asy- ordre évoluant vers le plus péjoratif, la présence d'un bron-
métries de transparence des champs pulmonaires. chogramme aérique, un silhouettage des bords cardiaques
l La présence du thymus, volumineux chez le jeune enfant, (et diaphragmatiques), des poumons plus denses que
génère fréquemment un élargissement, parfois impression- clairs. L'assistance ventilatoire agressive peut provoquer un
nant, des silhouettes médiastinale ou cardiomédiastinale. Les emphysème interstitiel.
caractéristiques permettant de reconnaître le thymus sont :
– sa topographie, d'expansion variable mais présentant
toujours un ancrage au médiastin antérieur et supérieur ; Check-list de lecture d'un cliché
– une densité relativement faible permettant la visualisation
de vaisseaux au travers. Pas de bronchogramme aérique ; de thorax standard
– un gradient de densité dégressif du bas vers le haut.
l Les deux signes suivants sont typiques mais inconstants, Conditions techniques
nécessitant un volume thymique suffisant : l Quelle position ? Plusieurs signes s'interprètent différem-
– le signe de la voile latine : formation triangulaire repo-
ment si le cliché est réalisé debout ou en décubitus.
sant sur la petite scissure et répondant aux critères de l Face correcte ? Voir la projection des têtes claviculaires.
densité ci-dessus ; l Degré d'inspiration suffisant ? Les coupoles diaphragma-
– le signe de la vaguelette : aspect festonné des limites
tiques coupent-elles au moins l'arc antérieur de la sixième
externes du thymus répondant aux empreintes costales.
l La pneumonie ronde constitue un aspect particulier très
côte ?
l Dose correcte  ? Visibilité des vaisseaux jusqu'en péri-
fréquent des pneumopathies infectieuses pédiatriques. Il
phérie (pas de surexposition) et derrière le cœur (dose
importe de reconnaître les caractéristiques permettant de
suffisante).
les distinguer des masses tumorales : outre le contexte cli-
nique et la fréquence nettement plus élevée de la patholo-
gie infectieuse chez l'enfant, les critères classiques du foyer Lecture diagnostique
infectieux – bronchogramme aérique, limites peu nettes –
seront systématiquement recherchés.
l Le médiastin : les lignes et bords usuels sont-ils bien
l La maladie des membranes hyalines (fig.  7.8) est une visibles sans déplacement ni effet de silhouette ?
l Les vaisseaux :
pathologie du prématuré résultant d'un défaut de surfac-
– sont visibles partout, symétriques et avec une régres-
sion de calibre harmonieuse des hiles vers la périphérie ;
– asymétrie de transparence des champs pulmonaires : le
cliché est-il bien de face ? Existe-t-il une asymétrie nette
des troncs artériels pulmonaires ?
– absence complète de vaisseaux en périphérie du pou-
mon, en particulier à l'apex pulmonaire : recherche de la
limite pleurale dans le cadre d'un pneumothorax ;
– paucité vasculaire focale grossièrement arrondie :
bulle ?
l Dans les champs pulmonaires et en projection sur ceux-ci :

– toutes les structures opaques sont normales si on


peut en définir le caractère vasculaire ou pariétal normal ;
– la notion d'image construite, image résultant de la
combinaison de plusieurs densités situées à des profon-
deurs différentes, doit être manipulée avec précaution :
on ne parle d'« image construite » que quand on peut
Fig. 7.8
définir les divers éléments qui la construisent (souvent
Maladie des membranes hyalines avec une grisaille pulmonaire
diffuse, finement granitée, avec un bronchogramme aérique, une combinaison d'éléments osseux, costaux ou autres,
effaçant le bord cardiaque droit du cœur. et vasculaires).
91
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

l En présence d'une opacité en projection sur les champs l Enfin il va de soi que, notamment dans la pratique de la
pulmonaires : kinésithérapie respiratoire, l'ensemble de ces clés de lecture
– vraie lésion pulmonaire ? devra être appliqué à l'évaluation de l'évolution sur base de
– pour déterminer s'il s'agit d'une opacité intrapulmo- clichés successifs.
naire, il faut s'aider du cliché de profil pour en exclure le
caractère pariétal ou pleural ; Pour en savoir plus
– où ?
– une fois le caractère pulmonaire affirmé, localiser Felson B, Goodman LR. Felson's principles of chest roentgenology : a pro-
l'anomalie en s'aidant des effets de silhouettage et/ou de grammed text. 2nd ed. Toronto : WB Saunders ; 1999.
Frija J. Radiologie du thorax. 3e éd. Coll. Imagerie médicale Formation.
systématisation : quels bords sont effacés par l'opacité ?
Paris : Masson ; 2002.
Existe-t-il une scissure limitant de manière nette l'exten- Hassan M. Guide d'interprétation de la radiographie thoracique de
sion d'une densité ? On dispose généralement du profil, l'enfant. Paris : Flammarion ; 2005.
mais l'essentiel des informations est souvent fourni par le Kernec J. Sémiologie radiologique thoracique. Antenne de pneumologie
seul cliché de face ; de l'université de Rennes ; 2006. En ligne : www.med.univ-rennes1.fr/
cerf/edicerf/SEMIOLOGIE/003.html.
– bronchogramme aérique et limites floues sont deux Remy J, Capdeville C, Coussement A. Le poumon pathologique : atlas
bons indices pour distinguer un syndrome de comble- de séméiologie radiologique. 3e éd. revue et augmentée. Nice :
ment alvéolaire d'une formation charnue. Coussement ; 1983[épuisé].

92
Chapitre 8
Sémiologie respiratoire
de l'adulte et de l'enfant
Dominique Vanpee, Eddy Bodart

PLAN DU CHAPITRE
Interrogatoire ou anamnèse 94
Examen clinique 97
Particularités pédiatriques 99

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Si le traitement par kinésithérapie fait le plus souvent suite Principaux symptômes respiratoires
à une prescription médicale, la prise en charge d'un patient
atteint de maladie respiratoire ne consiste pas seulement à Face à un patient avec un problème respiratoire, une pre-
appliquer des techniques. Il est important pour le kinési- mière distinction doit être faite entre une maladie aiguë
thérapeute de connaître les principaux signes cliniques des et une maladie subaiguë (comme une pneumonie ou
pathologies respiratoires les plus fréquentes afin notam- une embolie pulmonaire), entre une maladie chronique
ment de vérifier l'absence de complications et l'évolution (exemple du syndrome restrictif sur cyphoscoliose ou de
de son patient durant le traitement. la BPCO à l'état stable) et une exacerbation d'une maladie
Dans le cadre des objectifs de ce livre, nous ne parle- chronique (exemple de la surinfection de BPCO).
rons ici que des problèmes en relation avec des situations Les cinq principaux symptômes des maladies respira-
fréquentes que peuvent rencontrer des kinésithéra- toires sont : la dyspnée (essoufflement, impression d'être
peutes dans leur profession. La description du recueil de à court d'haleine, de manquer d'air), la douleur thora-
l'évaluation clinique ne sera donc pas exhaustive dans cique, la toux, les expectorations et l'hémoptysie. En plus
ce cadre. de ces symptômes cardinaux, d'autres signes systémiques
L'évaluation clinique d'un patient est divisée schémati- doivent être recherchés en fonction du contexte (fièvre,
quement en deux phases : le recueil d'information, inter- amaigrissement).
rogatoire ou anamnèse, et la recherche de signes cliniques
objectifs par l'examen physique. Dyspnée
La respiration est un acte le plus souvent largement auto-
Interrogatoire ou anamnèse matique et peu ou pas perçu. Dans certaines circonstances
physiopathologiques, l'acte de respirer peut devenir difficile :
c'est la dyspnée. En grec dys signifie « difficile », « pénible »
Introduction et pnée « respiration ». La dyspnée est une sensation sub-
L'anamnèse est une première approche du patient. Elle jective qui est rapportée par les patients sous des vocables
représente l'ensemble des renseignements obtenus auprès différents : essoufflement, difficulté à respirer (prendre ou
du malade et parfois de son entourage (important en vider ses poumons), oppression, soif d'air, souffle court, sen-
pédiatrie et gériatrie). En établissant le contact avec le sation d'être hors d'haleine, de suffoquer…
patient, il est primordial de réunir les conditions pour le L'anamnèse ou interrogatoire est une étape essentielle
mettre en confiance. qui permet d'évoquer très souvent la cause d'une dyspnée
Dans notre cadre, elle sera structurée en trois phases : aiguë. Il est important de préciser les circonstances de sur-
le dossier administratif, les antécédents du patient et son venue (installation brutale ou progressive) et le type de
problème actuel. dyspnée (orthopnée, dyspnée d'effort ou de repos…).
On commence souvent l'anamnèse par le recueil de De manière arbitraire, la dyspnée est définie comme
l'affection actuelle ; le patient expose les raisons pour les- aiguë si la symptomatologie dure depuis moins de
quelles il a besoin de vos services (un essoufflement, un 15 jours.
encombrement, une douleur…). La dyspnée survient soit chez des sujets sans antécédent
Les antécédents du patient sont importants à connu et le problème diagnostique est en premier plan, soit
recueillir. chez des patients avec des antécédents cardiovasculaires
On tiendra compte de ses antécédents médicaux déjà connus (BPCO, asthme, décompensation cardiaque…)
respiratoires (BPCO, asthme, mucoviscidose, bronchec- et chez qui il faudra analyser les facteurs de décompensa-
tasies… et non respiratoires (cardiopathie ischémique, tion. Les mécanismes de la dyspnée sont complexes et non
diabète, hypertension artérielle…), de ses antécédents évoqués ici.
chirurgicaux (pneumonectomie, lobectomie, exérèse Une dyspnée suggérant une certaine variabilité est révé-
de bulles d'emphysème…) et de son traitement habi- latrice d'une pathologie obstructive variable dans le temps
tuel (prise de corticoïdes, de théophylline, d'aérosol comme la maladie asthmatique. Une dyspnée aiguë et bru-
bronchodilatateur…). tale évoque a priori un œdème aigu du poumon, un pneu-
La partie administrative doit comprendre au minimum mothorax, une embolie pulmonaire ou un asthme.
l'âge du patient, son état civil, sa profession et son lieu Les principales causes de dyspnée sont rapportées dans
d'habitation. l'encadré 8.1.
94
8. Sémiologie respiratoire de l'adulte et de l'enfant

ENCADRÉ 8.1 Principales causes ENCADRÉ 8.2 Principaux signes


de dyspnée de la détresse respiratoire
1. Causes pulmonaires l Difficulté à parler (incapacité à faire des phrases
l Obstruction des voies aériennes supérieures (dyspnée complètes)
inspiratoire) : l Cyanose

– œdème l Tirage (dépression thoracique sus- ou sous-sternale lors

– infections (dont la laryngite aiguë sous-glottique chez de l'inspiration forcée)


l'enfant) l Battement des ailes du nez (chez l'enfant)

– corps étranger l Tirage intercostal (dépression au niveau des espaces

l Obstruction bronchique : intercostaux)


– asthme l Mise en jeu de muscles respiratoires accessoires

– BPCO l Respiration thoraco-abdominale

l Maladies parenchymateuses/interstitielles : l Brady- ou tachypnée

– pneumonie l Brady- ou tachycardie

– fibrose pulmonaire l Respiration superficielle

– pneumoconiose l Troubles de la conscience (agitation/coma)

l Pathologies pleurales :

– pneumothorax
– pleurésie
– fibrothorax
l Pathologies neuromusculaires : ENCADRÉ 8.3 Gradation rapide
– myopathies
– anomalies pariétales (cyphoscoliose)
d'une dyspnée par ordre
2. Causes cardiovasculaires
de sévérité
l Insuffisance ventriculaire gauche l Grade I : pour des efforts importants
l Valvulopathies l Grade II : pour des efforts modérés
l Troubles du rythme l Grade III : pour des efforts légers

l Pathologies péricardiques l Grade IV : au moindre effort ou au repos

l Embolie pulmonaire

3. Causes métaboliques
l Anémie ficile et mise en jeu des muscles respiratoires accessoires
l Acidose métabolique comme cela est fréquemment rencontré dans l'asthme ou
la BPCO.
4. Causes psychogènes
l Syndrome d'hyperventilation
Il est important aussi de distinguer la dyspnée (sensa-
tion subjective du patient) de la détresse respiratoire aiguë.
Dans ce dernier cas, la tolérance à la dyspnée est médiocre
et s'accompagne de défaillance respiratoire, hémodyna-
La dyspnée peut être inspiratoire ou expiratoire. Nous mique et parfois neurologique. Les signes présents en cas
dirons ici seulement quelques mots sur la dyspnée de détresse respiratoire sont rapportés dans l'encadré 8.2.
inspiratoire. En cas de détresse respiratoire, on devra pratiquer dans
En cas de dyspnée inspiratoire, le patient présente très un même temps une prise en charge diagnostique et
fréquemment des signes de tirage et de stridor (sifflement thérapeutique.
laryngotrachéal de type cornage). L'inspiration est pro- Il est souvent utile d'évaluer la sévérité d'une dyspnée et
longée, lente et pénible et l'expiration courte. Ce type de ses répercussions sur la vie de tous les jours (encadré 8.3).
dyspnée est secondaire à un problème au niveau du larynx
(néoplasie, œdème, spasme des cordes vocales…) ou de la
Douleur thoracique
trachée (goitre). Pour certains patients, la distinction entre douleur et
En cas de dyspnée expiratoire, nous avons un allonge- dyspnée n'est pas toujours facile. Classiquement, on
ment du temps expiratoire avec expiration lente et dif- distingue les douleurs thoraciques de type central
95
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

(rétrosternal) ou latéral (latérothoracique). Les douleurs tions est cependant parfois difficile à évaluer. L'adulte
rétrosternales doivent faire avant tout penser à un pro- moins souvent que l'enfant avale ses expectorations.
blème au niveau cardiaque (surtout si la douleur est Les patients qui disent expectorer quotidiennement la
de type constrictif et qu'elle irradie dans la mâchoire quantité d'une « tasse à café » souffrent possiblement
inférieure et/ou les membres supérieurs). Il est impor- de bronchectasies, parfois d'un abcès pulmonaire, et de
tant de préciser si la douleur augmente à l'inspiration manière tout à fait exceptionnelle d'un carcinome bron-
ou à la toux (douleur respiro-dépendante). Les douleurs chiolo-alvéolaire. En cas de bronchite ou de pneumo-
latérothoraciques respiro-dépendantes, dites aussi dou- nie, le patient se plaint généralement de la présence de
leurs pleurétiques, sont dues aux frottements des deux quelques crachats par jour. Il est indispensable de regarder
surfaces pleurales l'une sur l'autre. Cette douleur peut l'échantillon d'expectorations. Les crachats peuvent être
être le fait d'une irritation pleurale secondaire à : une « tout rouges » ou teintés de filets de sang : on parle alors
pneumonie ; un infarctus pulmonaire secondaire à une d'hémoptysie. Dans les autres cas, ils sont généralement
embolie pulmonaire périphérique ; une pleurésie virale. classés en quatre catégories : séreux, muqueux, mucopu-
À signaler aussi que le pneumothorax donne fréquem- rulents ou purulents. Chez un fumeur, la notion de fré-
ment une douleur latérothoracique aiguë qui disparaît quence des expectorations est utile pour le diagnostic de
rapidement pour laisser apparaître, dans un second bronchite chronique (expectoration quotidienne, 3 mois
temps, une dyspnée. consécutifs pendant 2 années de suite). L'expectoration
La dyspnée et la douleur thoracique sont souvent asso- mousseuse et rosée est notée dans l'œdème pulmonaire
ciées chez un même patient ; par exemple, les diagnostics cardiogénique.
les plus importants à évoquer en cas de dyspnée, dans
le décours ou accompagnée d'une douleur thoracique Hémoptysie
­respiro-dépendante, sont : le pneumothorax, l'embolie pul-
Elle se définit comme le rejet de sang par la bouche au
monaire, la péricardite, la pleurésie (isolée ou associée à une
cours d'un effort de toux. Sur le terrain, la réalité de l'hé-
pneumonie).
moptysie est parfois difficile à confirmer. S'agit-il de sang
provenant réellement des voies aériennes sous-glottiques
Toux (hémoptysie) ou s'agit-il de sang provenant de l'estomac
Il s'agit d'un symptôme très fréquent témoignant d'une (hématémèse), ou encore de sang ayant une origine oto-
irritation de la muqueuse du tractus respiratoire (du pha- rhino-laryngologique (épistaxis postérieure ou saigne-
rynx jusqu'aux bronchioles terminales). La stimulation ment pharyngolaryngé) ? L'abondance de l'hémoptysie
des récepteurs de la muqueuse peut être d'origine infec- est importante à préciser. S'agit-il de simples crachats
tieuse, inflammatoire, tumorale ou liée à la présence d'un teintés de sang, d'une hémoptysie modérée ou massive ?
corps étranger. En pratique clinique, on distingue classi- La réponse à ces questions oriente bien évidemment la
quement la toux sèche de la toux productive. La toux rapidité de la prise en charge thérapeutique. Les princi-
en rapport avec une trachéite est classiquement sèche pales étiologies des hémoptysies sont rapportées dans
et douloureuse, celle provenant des voies aériennes infé- l'encadré 8.4.
rieures est souvent associée à une expectoration (toux
dite productive) comme en cas de bronchite, de pneu-
monie ou de bronchectasies. La toux secondaire à une
rhinorrhée postérieure (rhinite et sinusite) est associée à ENCADRÉ 8.4 Principales causes
une sensation de « nez bouché » et à des reniflements. La d'hémoptysie
toux est un facteur protecteur contre l'encombrement
l Carcinome bronchique
bronchique et doit, à ce titre, être respectée autant que
l Embolie pulmonaire avec infarctus
possible. l Tuberculose

l Infection pulmonaire

l Surinfection de bronchectasies
Expectorations
l Décompensation cardiaque gauche aiguë
Face à un patient se plaignant de présenter des expec- l Trouble de la coagulation (maladie ou traitement anti-

torations, il est important de préciser au minimum leur coagulant)


abondance et leur aspect. L'abondance des expectora-
96
8. Sémiologie respiratoire de l'adulte et de l'enfant

Examen clinique côtes qui tendent à s'horizontaliser avec un espace inter-


costal agrandi et avec une ampliation thoracique faible ;
● il est nécessaire d'observer la symétrie du mouvement
L'examen clinique proprement dit est divisé en quatre
points  : inspection, palpation, percussion et auscultation. costal. L'expansion thoracique est-elle complète ou limi-
L'objectif n'est pas ici de faire un examen clinique com- tée ? Un pneumothorax complet entraîne par exemple
plet comme le ferait un médecin, mais de donner au une diminution de mouvement du côté où il est pré-
lecteur quelques éléments utiles pour sa profession de sent. Une dépression (rétraction) hémithoracique avec
kinésithérapeute. un manque d'ampliation peut être vue en cas d'atélec-
tasie pulmonaire par compression ou obstruction d'une
bronche ;
Inspection du patient ● les muscles respiratoires accessoires du cou se contractent

à l'inspiration dans les cas de détresse respiratoire. Dans ce


Inspection générale cas, il y a élévation des clavicules et creusement de l'espace
Beaucoup d'éléments peuvent être recherchés en fonction sus-claviculaire. Pour mieux utiliser ses muscles accessoires,
de votre contexte de travail : un patient BPCO ou asthmatique en crise sévère se tiendra
● l'anxiété et l'agitation présentes en cas d'hypoxie ou la assis sur une chaise légèrement inclinée en avant, bras recti-
somnolence présente en cas d'hypercapnie sont facilement lignes appuyés sur les genoux ;
perçues sur le visage du patient ; ● la fréquence respiratoire (FR) au repos est normalement

● la cyanose est visible au niveau du lit de l'ongle, dans la comprise entre 12 à 15/min. Quand la FR est augmentée, on
région péribuccale ou sous la face inférieure de la langue ; parle de polypnée. La polypnée s'observe en cas de fièvre,
● l'érythrose témoignant d'une polyglobulie secondaire à d'anémie, d'affections pleuropulmonaires ou cardiovascu-
l'hypoxie peut être observée au niveau des ailes du nez, des laires aiguës ou chroniques qui réduisent l'oxygénation de
lobules de l'oreille et sur les joues ; sang, mais se voit aussi en cas de stress ou à l'effort… La
● les veines jugulaires saillantes (distendues) présentes en bradypnée se voit par exemple dans le cadre des détresses
cas de décompensation cardiaque droite sont observées au inspiratoires (corps étranger laryngé, œdème laryngé), dans
niveau du cou du patient ; les atteintes du centre respiratoire (hypertension intracrâ-
● les patients en bronchospasme expirent généralement nienne traumatique ou tumorale) ou lors d'intoxication,
lèvres pincées ; comme par la morphine ;
● l'hippocratisme digital qui n'est pas nécessairement spé- ● le rythme respiratoire et sa régularité doivent pouvoir

cifique d'une maladie respiratoire doit pouvoir être observé. être observés. Nous citerons deux respirations particu-
Il s'agit d'un bombement des ongles en dos de cuiller et lières :
d'un élargissement en baguette de tambour des phalanges – la respiration de Cheyne-Stokes : après une phase
distales. d'apnée de plusieurs secondes, la FR augmente progres-
sivement jusqu'à un maximum puis décroît progressive-
Inspection du thorax ment avant la phase d'apnée suivante,
– la respiration de Kussmaul traduit le plus souvent
Le patient dénudé, l'inspection consiste à regarder la forme un patient en acidose métabolique. Dans ce cadre, le
générale du thorax et à observer la manière dont le patient patient a une respiration très profonde avec présence
respire. La respiration libre s'observe à l'insu du patient afin d'une courte pause en fin d'inspiration et d'expiration
d'éviter les modifications volontaires ou non. Dans des (respiration en quatre phases) ;
circonstances normales, l'inspiration est active et due aux ● en cas de douleur pleurale, le patient peut arrêter bruta-

muscles inspirateurs qui augmentent le diamètre antéro- lement son inspiration en grimaçant du visage.
postérieur et transverse du thorax. Le diaphragme agrandit
le diamètre vertical. L'expiration est normalement passive
Inspection de la colonne vertébrale
grâce à l'élasticité pulmonaire.
Quelques éléments sont à rechercher : L'examen de la colonne vertébrale est utile pour la recherche
● on peut observer une dépression sternale caractéristique de syndrome restrictif. On inspecte le patient de profil à la
du pectus excavatum ; recherche d'une cyphose dorsale. En cas de thorax cypho-
● le patient BPCO emphysémateux a un diamètre anté- tique, la courbure de la colonne dorsale est exagérée. Dans
ropostérieur fortement augmenté (thorax en tonneau), des ce cadre, le thorax est court et bombé. En inspectant le
97
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

patient de dos, on peut observer une scoliose. En cas de


scoliose, le thorax devient asymétrique à cause d'une dévia-
tion latérale de la colonne vertébrale.
ENCADRÉ 8.5 Causes de diminution
des bruits respiratoires normaux
Limitation de l'expansion pulmonaire :
Palpation du thorax l

– respiration superficielle
La palpation sert à rechercher les vibrations vocales. Le – douleur pariétale (fracture costale)
maximum de vibrations est produit par la consonne n. Dire – atteinte parenchymateuse pulmonaire (emphysème)
« trente-trois » est une alternative. Une voix grave produit plus – atteinte pleurale (pleurésie, pneumothorax, pachy-
pleurite)
de vibrations qu'une voix aiguë. Pour percevoir ces vibrations
l Perméabilité diminuée des conduits aériques (diminution
vocales, on appuie fermement sur la peau du patient avec la de la ventilation) :
base des doigts ou avec le bord cubital de la main au niveau – corps étranger
des principaux champs pulmonaires (devant et derrière), en – sténose trachéale
demandant au patient de dire « trente-trois ». Les vibrations – tumeur bénigne ou maligne
sont diminuées globalement chez le patient obèse ou for- l Causes pariétales :

tement musclé. Elles sont diminuées localement s'il y a une – obésité


diminution de la densité pulmonaire, comme chez le BPCO – œdème
emphysémateux, ou s'il y a une augmentation de la distance
entre le poumon et le doigt de l'examinateur, comme en cas
de pneumothorax ou d'épanchement liquidien. Les vibra- doux et continu. Il est audible également durant le premier
tions vocales sont accrues en cas d'augmentation de la den- tiers de la phase expiratoire. En cas de pathologie, le BRN
sité pulmonaire comme dans la pneumonie. peut être modifié et/ou s'accompagner de bruits adventices.
Les causes de diminution des BRN sont rapportées dans
l'encadré 8.5.
Percussion du thorax Au niveau du larynx, de la trachée et de la zone de pro-
La percussion provoque des sons et donne une sensation jection cutanée des grosses bronches en avant et en arrière,
tactile particulière (sensation de résistance ressentie par le on retrouve classiquement un bruit nettement soufflant,
doigt percuteur). Le caractère des sons permet d'apprécier plus rude et plus intense que le bruit respiratoire normal.
l'état des poumons examinés. Ainsi, lors de la percussion On l'appelle le bruit respiratoire bronchique. En cas de
des poumons, on recherche globalement trois éléments : pathologie, ce bruit respiratoire bronchique peut s'entendre
la sonorité normale (poumon normal), l'hypersonorité (ou en des endroits où il n'est normalement pas audible. C'est
tympanisme) due à un « excès d'air », la présence d'une le cas lorsque le patient présente une densification pulmo-
matité (son sourd comme lors de la percussion d'un organe naire suite à une pneumonie ou à une atélectasie.
plein tel le foie). Un organe plein ne vibre pas, il produira Les bruits adventices sont des bruits n'existant pas à l'état
donc un son faible et bref (matité). normal.
L'épanchement pleural donnera donc une matité, de On distingue classiquement : les sibilances (bruits musi-
même qu'une pneumonie à un stade avancé (hépatisation) caux) et les crépitants (sons non musicaux et discontinus).
ou une atélectasie pulmonaire. À l'inverse, en cas de pneu- Les sifflements sont caractéristiques du bronchospasme.
mothorax ou d'emphysème pulmonaire, on trouvera une Les crépitants peuvent être généralisés, mais avec une
augmentation de la sonorité. sonorité différente comme dans le cadre d'un œdème aigu
du poumon ou d'une fibrose pulmonaire.
En cas de pneumonie, on perçoit des crépitants localisés
Auscultation des bronches à l'endroit du comblement alvéolaire.
et du poumon Lors d'un examen clinique, il est utile d'associer chaque
élément retrouvé afin de déterminer une entité patholo-
L'auscultation consiste à écouter grâce à un stéthoscope les gique. À titre d'exemple :
sons qui naissent dans le corps humain. ● en cas de condensation pulmonaire, on trouvera : une

Chez le sujet normal, le son audible en périphérie du pou- matité immobile, une diminution des bruits respiratoires
mon est appelé bruit respiratoire normal (BRN). On le per- normaux, des vibrations vocales augmentées et des bruits
çoit pendant la phase inspiratoire sous forme d'un murmure bronchiques en périphérie du poumon ;
98
8. Sémiologie respiratoire de l'adulte et de l'enfant

● lors d'un épanchement, à la percussion, on retrouve une Les voies aériennes distales se ferment à bas volume
matité déclive. À l'auscultation, il y a une diminution ou (= volume de fermeture).
disparition des BRN, les vibrations vocales sont atténuées En respiration nasale, la pénétration distale des parti-
et des bruits bronchiques sont parfois perçus en cas d'até- cules inhalées de taille inférieure à 5 μm est facilitée chez
lectasie sous-jacente. le nourrisson avant l'âge de 1 an, alors qu'elles sont filtrées
à plus ou moins 50 % par le nez chez l'enfant plus grand et
surtout chez l'adulte.
Particularités pédiatriques
Quelles sont les conséquences
Introduction de cette immaturité ?
Les facteurs irritants (virus, toxiques, polluants…) peuvent
L'enfant n'est pas un adulte en miniature. Son appareil bron-
rapidement entraîner un syndrome obstructif bronchique
chopulmonaire se développe surtout au cours des premières
ou bronchiolo-alvéolaire. Le risque d'insuffisance respira-
années de vie. Le nourrisson et le petit enfant sont donc
toire aiguë est plus important dans les premiers mois de
ainsi plus vulnérables vis-à-vis d'une agression respiratoire.
vie. L'immaturité des systèmes de défense (en particulier
des immunoglobulines) accroît le risque infectieux. Les
Immaturité anatomique capacités de récupération pulmonaire en cas de malfor-
Les conduits aériens distaux sont plus étroits chez le mation ou d'une pathologie survenant les premiers mois
nourrisson. de vie sont plus importantes les deux premières années,
La masse cartilagineuse s'accroît progressivement durant au moment de la multiplication alvéolaire. L'essai de bron-
les premières années. La compliance des parois bronchiques chodilatateurs reste logique chez le nourrisson : le muscle
est plus élevée chez le nourrisson, entraînant un risque de lisse bronchique possède à la naissance une structure
collapsus expiratoire. mature capable de se contracter et parfaitement innervée,
Les glandes muqueuses sont en proportion plus nom- même si son pourcentage est plus faible au niveau des
breuses. Tout facteur irritatif (infectieux ou polluant) voies aériennes distales.
aggrave cette hyperplasie relative et entraîne une hyperpro-
duction de mucus. Interrogatoire
Les connexions interalvéolaires (pores de Khon) sont en
nombre plus réduit chez le petit enfant, expliquant la sur- L'anamnèse va porter sur les antécédents personnels et
venue d'atélectasies localisées. familiaux documentés. L'interrogatoire doit être véritable-
ment « policier », c'est-à-dire qu'il doit être complet et ne
Immaturité immunologique rien laisser au hasard. Il faut prendre le temps d'interroger
les parents, parfois trop peu précis et malheureusement
Les immunoglobulines de classes M et G sont basses trop souvent subjectifs quand il s'agit de décrire les symp-
jusqu'à l'âge de 15 à 18  mois, les immunoglobulines A tômes de leur enfant.
jusqu'à l'âge de 4 ans. Le nourrisson doit produire ses
propres immunoglobulines après avoir bénéficié de celles Antécédents personnels
de sa mère.
Les fonctions B aussi bien que T des lymphocytes sont On recherchera l'existence d'une prématurité, d'une hypo-
immatures. trophie à la naissance, d'une ventilation en période périnatale
et d'une éventuelle évolution dans la dysplasie bronchopul-
monaire. L'anamnèse recherchera l'existence d'une derma-
Immaturité fonctionnelle
tite atopique, de troubles digestifs à type de régurgitations
La compliance pulmonaire globale est plus basse. ou de selles fréquentes.
Une fatigabilité musculaire accrue est notée, surtout Le mode de garde chez le nourrisson ou le petit enfant
au niveau du diaphragme, en raison d'une répartition plus (fréquentation d'une collectivité…) sera recherché, de
faible de fibres résistantes à la fatigue. même que la survenue d'épisodes infectieux récurrents
Une réponse ventilatoire paradoxale à l'hypoxie est touchant les voies respiratoires supérieures et/ou infé-
décrite chez le nourrisson. rieures (cures d'antibiotiques…).
99
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Antécédents familiaux Tableau 8.1 Fréquences respiratoire et cardiaque


en fonction de l'âge
Les antécédents familiaux devront néanmoins être
Âge 30 jours 5 ans 12 ans 18 ans
prouvés. On connaît le risque relatif de développer une
allergie chez les enfants nés de parents atopiques. On Fréquence 30 20 18 14
s'attachera néanmoins essentiellement à la fratrie et aux respiratoire (/min)
parents. Fréquence 130 100 90 70
La malchance de développer une allergie est de 5 à cardiaque (/min)
15 % pour un nourrisson sans antécédent familial d'ato-
pie, de 25 à 35 % quand la fratrie est atteinte, de 20 à
40 % si la mère ou le père est allergique et de 40 à 60 % Dans l'obstruction haute, touchant les voies respiratoires
si les deux le sont. Il est sans doute aux alentours de supérieures, l'atteinte touchera essentiellement mais pas
70 % si les deux parents souffrent de la même pathologie exclusivement le temps inspiratoire avec comme symp-
allergique. tôme cardinal le stridor.
À l'anamnèse, on va s'attacher à retrouver : Dans l'obstruction basse, touchant les voies respiratoires
● la date du début des symptômes ;
inférieures, c'est essentiellement le temps expiratoire qui sera
● son mode de révélation ;
touché, avec le wheezing comme symptôme d'appel. Nous
● son éventuelle récurrence ;
reviendrons sur les pathologies les plus fréquemment retrou-
● l'existence ou non d'un intervalle libre entre deux
vées dans le cadre de ces syndromes obstructifs en pédiatrie,
épisodes ; à savoir la laryngite aiguë sous-glottique ou, mieux, la laryngo-
● l'existence de signes associés aux manifestations respira-
trachéo-bronchite virale dans le cadre des obstructions hautes
toires (symptômes ORL, digestifs ; température…) ; et l'asthme dans le cadre des obstructions basses.
● l'existence de facteurs déclenchants (facteurs psycholo-
La morphologie du thorax doit être appréciée pour
giques, climatiques, infectieux…) ; chercher une dystrophie (thorax en entonnoir, pectus
● le retentissement sur la vie quotidienne (symptômes
excavatum…), mais aussi pour mettre en évidence une dis-
nocturnes, participation aux activités physiques à l'école et tension fréquente chez le petit enfant à la cage thoracique
à la maison, absentéisme scolaire…) ; très compliante.
● les éventuelles tentatives thérapeutiques avec leur On recherchera par ailleurs systématiquement un hip-
efficacité. pocratisme digital, qui ne préjuge néanmoins en rien du
caractère chronique de la symptomatologie puisqu'il peut
Examen clinique apparaître et disparaître rapidement en moins de quelques
mois chez le petit enfant.
À l'examen clinique, on recherchera des traits atopiques Dans le cadre des obstructions hautes, en dehors du
en attachant une importance relative à la peau sèche, à la stridor laryngé congénital essentiel ou laryngomalacie,
présence ou non d'un eczéma, à la présence de fissures au qui est symptomatique dès les premières semaines de vie
niveau des lobes des oreilles et des doigts, des articulations avec encombrement haut situé, ronronnement, stridor
du coude ou au niveau des creux poplités. audible à la bouche, éventuels troubles de la déglutition et
Le comportement de l'enfant allergique est souvent difficultés alimentaires qui vont disparaître spontanément
évocateur : il est plus turbulent, il peut présenter un prurit en quelques mois, la laryngite aiguë sous-glottique repré-
nasal, des clignements des paupières, des salves sternuta- sente la pathologie infectieuse la plus fréquente dans cette
toires… tranche d'âge.
Le comportement ventilatoire sera analysé : on notera la Le score de Westley (tableau 8.2) nous permet d'appré-
fréquence respiratoire qui diminue avec l'âge et la fréquence cier la sévérité de l'atteinte laryngée et de moduler notre
cardiaque (tableau 8.1), le type de respiration, son caractère prise en charge thérapeutique en fonction de son intensité.
symétrique ou non, l'existence d'une cyanose localisée ou Plus le score est important, plus la pathologie est sérieuse.
généralisée. La cyanose ne sera visible cliniquement que Ce score analyse le stridor, l'importance du tirage sus-ster-
pour des valeurs de saturation transcutanée en O2 infé- nal et intercostal, l'entrée d'air et l'éventuelle présence d'une
rieures à 85 %. cyanose au repos ou quand l'enfant est agité.

100
8. Sémiologie respiratoire de l'adulte et de l'enfant

Tableau 8.2 Score de Westley dans le cadre d'une obstruction laryngée


0 1 2 3 4 5
Stridor Absent Au repos Au repos, au stéthoscope – – –
Tirage Absent Mineur Modéré Sévère – –
Entrée d'air Normale Diminuée Diminuée ++ – – –
Cyanose Absente – – – À l'agitation Au repos

Tableau 8.3 Score clinique (Downes simplifié)


0 1 2 3
Cyanose À l'air FiO2 < 0,4 FiO2 > 0,4
Murmure vésiculaire Normal Légèrement ↓ Fortement ↓ Absent
Tirage Modéré Maximal
Wheezing Modéré Maximal
Conscience Normale Altérée

De la même manière, des scores cliniques vont pouvoir culaire qui prend en compte non seulement le régime
nous aider en cas de crise d'asthme où le wheezing prédo- ventilatoire, mais également l'éventuelle amputation des
mine et où des sibilances sont audibles à l'auscultation des capacités d'échange du poumon. L'auscultation pulmo-
poumons. naire en pédiatrie ne peut donc s'improviser et reste difficile
Le score de Downes définit l'existence ou non d'une cya- par rapport à celle de l'adulte.
nose, la qualité du murmure vésiculaire, la présence ou non L'examen ORL doit faire partie de l'examen clinique
d'un wheezing, l'état de conscience de l'enfant et l'existence d'un enfant souffrant d'une pathologie respiratoire. En
ou non d'un tirage intercostal (tableau 8.3). Plus le score est effet, on note un continuum entre les voies respiratoires
élevé, plus la crise est sérieuse. supérieures et les voies respiratoires inférieures : par
L'auscultation pulmonaire doit être réalisée en com- exemple, le faciès adénoïdien, témoin d'une hypertro-
portement le plus stable possible et aussi à la suite d'une phie des végétations adénoïdes, sera facile à isoler avec
manœuvre d'hyperventilation et d'expiration forcée. Il est respiration buccale, « joues de hamster  » et éventuel
facile de mettre en évidence des sibilances ou râles sibi- rétrognathisme.
lants au temps expiratoire, parfois aussi au temps inspi- Enfin, dans la population pédiatrique, on s'attachera
ratoire. Il est plus délicat de percevoir l'existence de râles à préciser l'existence ou non d'une toux, symptôme très
bronchiques qu'il faut différencier des bruits transmis. fréquemment retrouvé à l'anamnèse systématique. On
L'enfant devra respirer par la bouche de façon à écarter les parlera d'une toux chronique après 4 semaines d'évolu-
sons en provenance des voies aériennes supérieures. Dans tion. On en définira le début et l'existence ou non d'une
la bronchiolite, de fins crépitants inspiratoires, témoins composante diurne, de troubles alimentaires surajoutés,
de l'atteinte alvéolaire, seront audibles à un moment de d'une bronchorrhée voire de symptômes accompagna-
l'évolution. teurs. En fonction de l'existence ou non de ces différents
Il faut apprécier la symétrie à l'auscultation ainsi que la items, un diagnostic différentiel pourra être posé entre
présence éventuelle de râles fixes dans un même territoire une pathologie banale (infection virale, reflux gastro-
lors de plusieurs examens cliniques successifs (bronchecta- œsophagien) et une pathologie grave (mucoviscidose,
sies, atélectasie fixée ?). dyskinésie ciliaire), l'asthme représentant entre les deux
La difficulté majeure en pédiatrie à l'auscultation reste la pathologie chronique respiratoire la plus fréquente
l'évaluation objective d'une diminution du murmure vési- (tableau 8.4).

101
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Tableau 8.4 Toux chronique supérieure à 4 semaines


Symptômes ? Bronchorrhée ? Épisodique ? Troubles Toux diurne ? Début ?
alimentaires
(nocturnes) ?
– Sifflements (Période néonatale) – Hivernale – Sèche – En période
– Facteurs – Infection des voies – Tabagisme – Répétitive diurne néonatale
déclenchants aériennes supérieures – Âge préscolaire – Caverneuse – Début brutal
– Eczéma – IVR (infections des voies – Théâtrale
– Anamnèse familiale respiratoires) inférieures
– Rhinite – Prise de poids insuffisante
– Ronflements
– Halitose
– Céphalées
↓ ↓ ↓ ↓ ↓ ↓
Asthme ORL – Mucoviscidose Infections virales Reflux gastro- Toux psychogène – Mucoviscidose
– Dyskinésie ciliaire œsophagien – Dyskinésie
primitive ciliaire primitive
– Anomalie congénitale – Corps étranger
– Bronchectasies inhalé
– Immunodéficience

Points clés Pour en savoir plus



Le recueil précis, exact et complet des plaintes Bodart E, Dab I, De Boeck K, Mossay C, Raes M. L'asthme et l'enfant :
de chaque patient est à la base de toute prise en guide pour le praticien. Bruxelles : GSK ; 2004.
Crompton GK. Le système respiratoire. In : Munro JF, Campbell IW, edi-
charge en kinésithérapie respiratoire. tors. Sémiologie clinique. Paris : Maloine ; 2001. p. 117–44.

Les cinq principales plaintes respiratoires sont :
la dyspnée, la douleur thoracique, la toux, les
expectorations et l'hémoptysie.

L'examen clinique respiratoire comprend quatre
grands points : l'inspection, la palpation, la percus-
sion et l'auscultation.

L'inspection générale, l'inspection du thorax et
la manière dont le patient respire sont capitales
dans tout bilan de kinésithérapie respiratoire.

Il est primordial de distinguer un patient avec
simple dyspnée d'un patient en détresse respiratoire.

L'enfant n'est pas un adulte en miniature.

Probablement encore plus que chez l'adulte,
l'interrogatoire de l'enfant doit être « policier ».

L'examen clinique de l'enfant doit comprendre
un bilan ORL.

Le comportement ventilatoire sera évalué en
fonction de l'âge de l'enfant.

Le score de Westley est utile dans l'évaluation
d'une laryngite aiguë sous-glottique et le score de
Downes en cas de crise d'asthme où le wheezing
prédomine.
102
Chapitre 9
Sémiologie des grands
syndromes en pathologie
cardiaque et prise en charge
Olivier Van Caeneghem

PLAN DU CHAPITRE
Plaintes du patient cardiaque 104
Maladie coronaire 105
Insuffisance cardiaque 107

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Les kinésithérapeutes travaillent régulièrement avec des est appelée douleur «  angoreuse  » ou «  angineuse 
».
patients cardiaques. Ils sont confrontés à la pathologie car- Classiquement, elle est rétrosternale, de type constrictive
diaque soit lors de la prise en charge d'un patient insuffisant (impression de serrement du thorax comme dans « un
cardiaque ou ayant été victime d'un accident coronaire aigu, étau ») et irradie vers les épaules, les bras et la mâchoire
soit, indirectement, par exemple lors des rééducations neu- inférieure.
romusculaires ou respiratoires chez des patients aux anté-
cédents de maladie cardiaque. Dans ces deux contextes, il
est utile que le kinésithérapeute puisse connaître les mani- Dyspnée
festations générales des principales affections cardiaques.
La dyspnée est un des signes de l'insuffisance cardiaque.
Déjà décrite dans le chapitre 8, la dyspnée d'origine car-
Plaintes du patient cardiaque diaque présente quelques particularités. Aux premiers
stades de la maladie, elle survient seulement à l'effort. Le
Les plaintes les plus fréquemment rencontrées sont : patient se dit essoufflé pour monter des escaliers ou effec-
● la douleur thoracique ; tuer des taches de la vie courante qu'il effectuait aupa-
● les signes d'insuffisance cardiaque : ravant sans aucune difficulté (par exemple aller faire ses
– dyspnée, courses, travailler dans le jardin). Le symptôme s'aggravant
– œdèmes des membres inférieurs, avec l'évolution de la maladie, la dyspnée va survenir pour
– fatigue ; des efforts de moins en moins importants, voire même
● les palpitations ; au repos. On peut quantifier la dyspnée en se basant sur
● les lipothymies et syncopes. l'importance de l'effort qui la fait apparaître (nombre
d'étages ou de marches, distance parcourue à pied). La
Douleur thoracique dyspnée d'origine cardiaque est classiquement exacerbée
en position couchée : c'est l'orthopnée. Le patient a plus
Les douleurs thoraciques ont des origines très diverses de difficultés à respirer en position couchée, l'obligeant à
(tableau  9.1). Certaines sont bénignes, d'autres poten- s'asseoir ou à dormir en position surélevée (par exemple
tiellement mortelles. La douleur d'origine coronarienne avec des coussins).

Tableau 9.1 Diagnostic différentiel des douleurs thoraciques


Origine Coronarienne Infarctus du myocarde Douleur rétrosternale, constrictive
cardiovasculaire Angor Irradiation vers les épaules, les bras, la mâchoire
Cardiaque autre Péricardite Douleur variant avec la position et la respiration
Myocardite
Vasculaire Dissection aortique Douleur thoracique intense, irradiant dans le dos
entre les omoplates et vers les jambes
Embolie pulmonaire Douleur respiro-dépendante, dyspnée, hémoptysie
Origine pulmonaire Pleurale Pleurésie Douleur latérothoracique et respiro-dépendante
Pneumothorax
Mésothéliome
Parenchymateuse Pneumonie
Origine médiastinale Œsophagite Douleur rétrosternale basse et épigastrique
Spasmes œsophagiens
Origine extrathoracique Ulcère gastroduodénal Douleur épigastrique, éveillée par la palpation
Colique hépatique abdominale
Origine pariétale Fracture costale Douleur latérothoracique variant avec la position
Syndrome de Tietze et la respiration
Tassement vertébral Douleur éveillée par la palpation thoracique

104
9. Sémiologie des grands syndromes en pathologie cardiaque et prise en charge

Œdèmes des membres inférieurs tômes associés (angor, dyspnée, lipothymies ou syncope)
pourront orienter l'anamnèse.
Les œdèmes des membres inférieurs sont un autre signe
d'insuffisance cardiaque. Ils sont la conséquence de la réten-
tion hydrosodée observée dans cette maladie. Les œdèmes Lipothymies et syncopes
de l'insuffisance cardiaque sont bilatéraux, symétriques, La lipothymie est un malaise brutal avec sensation de perte
indolores et prédominants aux membres inférieurs. Une de connaissance imminente sans que celle-ci survienne. Le
pression prolongée (par exemple avec le pouce) déplace les patient décrit une sensation de vertige, une faiblesse générale,
liquides et laisse une dépression ; c'est le signe du « godet » un dérobement des jambes, un « voile noir » devant les yeux.
(fig. 9.1). Au fur et à mesure de l'aggravation de la rétention, La syncope d'origine cardiaque est une perte de connais-
l'œdème remonte vers les cuisses, le scrotum et la région sance brutale secondaire à un défaut de perfusion céré-
abdominale. On parle alors d'anasarque. brale. Elle survient sans signe prémonitoire. Elle est parfois
Les œdèmes peuvent entreprendre les séreuses et responsable d'une chute qui peut être traumatique (frac-
les viscères sous la forme d'ascite et d'épanchements ture, hématome). Les causes de syncope cardiaque sont
pleuraux. les bradycardies (troubles de conduction cardiaque), les
tachycardies ventriculaires (fréquence cardiaque très rapide
Palpitations et chute du débit cardiaque) et le rétrécissement de la valve
aortique.
Les palpitations sont des plaintes subjectives relatives à la La syncope vagale est une perte de connaissance précé-
perception anormale, voire désagréable, des battements dée de prodromes tels que bouffées de chaleur, vertiges,
cardiaques. C'est un terme peu spécifique. Il peut faire pâleur, nausées, vision trouble… Elle survient chez des
référence à une anomalie du rythme cardiaque (irrégulier) personnes anxieuses dans des situations de stress : prise de
ou de la fréquence cardiaque (tachycardie). Parfois simple- sang, peur, émotion…
ment le patient se plaint de « sentir son cœur battre ».
Les irrégularités du rythme cardiaque peuvent être la
conséquence d'extrasystoles ou de fibrillation auriculaire.
Les crises de tachycardie peuvent être bénignes (tachycar- Maladie coronaire
die atriale, flutter auriculaire) ou potentiellement mortelles
Encore appelée « cardiopathie ischémique », cette affection
(tachycardie ventriculaire).
est caractérisée par le rétrécissement progressif des artères
Des éléments comme les circonstances de la crise (effort,
coronaires suite au processus d'athérosclérose, avec pour
forte émotion), la durée, la répétition des accès ou les symp-
conséquence un apport insuffisant en sang (et en oxygène)
pour le myocarde [1].
Il existe des facteurs de risque cardiovasculaires qui sont :
● le diabète ;

● l'hypertension artérielle ;

● le tabac ;

● l'hypercholestérolémie ;

● les antécédents familiaux cardiaques.

Angor
Le déséquilibre entre la demande en oxygène du myocarde
et l'apport limité par la sténose coronaire est responsable
de l'apparition de douleurs angoreuses (angor ou angine de
poitrine). La douleur dure de quelques secondes à quelques
minutes. Elle peut apparaître à l'effort (angor d'effort) et
disparaître au repos. Plus grave, elle peut survenir en dehors
Fig. 9.1 de tout effort (angor de repos). Elle est favorisée par le froid
Œdème malléolaire avec signe du godet. intense, le vent ou un repas copieux.
105
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Accidents coronariens aigus [2] ● si le patient ne peut être pris en charge dans un centre
d'angioplastie, une alternative consiste à perfuser un puis-
Les accidents coronariens aigus regroupent : sant médicament en vue de détruire le caillot. C'est la
● l'angor instable ;
thrombolyse. Ce traitement comporte un risque d'hémor-
● l'infarctus STEMI ;
ragie grave et doit être limité aux patients ne pouvant être
● l'infarctus non-STEMI.
transférés dans un centre d'angioplastie.
On parle d'angor instable en cas d'aggravation de la fré- Parmi les complications de l'infarctus, on distingue :
quence des crises, de l'apparition de crises angoreuses pour ● les arythmies supraventriculaires (fibrillation auriculaire)

des efforts moindres ou d'angor de repos. C'est souvent un ou ventriculaires (tachycardie ventriculaire, fibrillation
état précédent l'infarctus du myocarde. ventriculaire). Ces dernières peuvent entraîner le décès du
Les infarctus sont caractérisés par une nécrose myocar- patient [8] ;
dique secondaire à l'occlusion totale (STEMI) ou temporaire ● l'insuffisance cardiaque. En cas de nécrose myocardique

(non-STEMI) d'une artère coronaire. L'occlusion est secon- étendue, le cœur ne peut plus assurer sa fonction de pompe.
daire à la formation d'un thrombus (caillot plaquettaire) Le patient peut développer un œdème aigu du poumon
au niveau d'une plaque d'athérome (dépôts de cholestérol ou OAP (stase pulmonaire responsable d'une dyspnée
dans la paroi artérielle). L'irrigation du muscle cardiaque brutale) ou un choc cardiogénique (hypotension artérielle,
ne se fait pas et les cellules myocardiques meurent par malperfusion et dysfonction d'organes secondaires). Dans
manque d'oxygène. ce dernier cas, le patient présente des signes de bas débit
Les symptômes de l'infarctus du myocarde sont dominés cardiaque, tels que extrémités froides, marbrures cutanées
par la douleur angoreuse, mais plus longue et plus intense (fig. 9.2), oligurie, et des troubles de la conscience (agitation,
qu'en cas d'angor. La douleur est souvent accompagnée anxiété). La mortalité du choc cardiogénique est de 40 à
d'angoisse et de sensation de mort imminente. D'autres 60 % [9, 10] ;
signes peuvent être présents tels que : ● les complications mécaniques. La nécrose cellulaire peut

● nausées, vomissements ;
se compliquer de rupture myocardique : communication
● pâleur, sueurs froides, couleur grisâtre ;
interventriculaire [11], tamponnade [12], insuffisance
● dyspnée ;
mitrale par rupture de pilier [13]. La mortalité de ces com-
● collapsus (trouble du rythme) ;
plications est également élevée.
● hypotension artérielle (en cas de choc cardiogénique).

Le diagnostic repose sur les plaintes du patient, les


anomalies observées sur l'électrocardiogramme (onde de
Pardee = sus-décalage du segment ST ; sous-décalage du
segment ST) et la biologie clinique. La nécrose des cellules
musculaires cardiaques libère dans le sang des protéines
appelées biomarqueurs détectables dans les prises de sang
(troponine, CPK, SGOT, LDH). L'échographie cardiaque
peut aider au diagnostic en mettant en évidence des zones
du muscle cardiaque qui ne se contractent plus.
Les accidents coronaires aigus justifient une admission
aux soins intensifs. Leur traitement repose sur [3, 4] :
● des médicaments visant à dissoudre le caillot : anti-­

agrégants plaquettaires [5–7] et anticoagulants ;


● la reperfusion des artères coronaires. Pour cela, il est

indiqué de pratiquer en urgence une coronarographie et


une angioplastie coronaire (PTCA). Une sonde est intro-
duite par l'artère fémorale ou radiale dans la circulation
jusqu'à l'artère coronaire malade qui est dilatée au moyen
d'un ballonnet. Un « stent » (prothèse métallique, comme
un ressort) est alors placé dans la lésion coronaire afin de Fig. 9.2
maintenir l'artère ouverte ; Marbrures cutanées.

106
9. Sémiologie des grands syndromes en pathologie cardiaque et prise en charge

Insuffisance cardiaque ou dans l'insuffisance ventriculaire gauche terminale com-


pliquée d'hypertension artérielle pulmonaire.
Définition
Symptômes et signes cliniques
C'est un état où soit le cœur est dans l'incapacité d'assurer sa
fonction de pompe et à propulser le sang vers les organes afin Les signes d'insuffisance ventriculaire gauche associent des
de subvenir aux besoins métaboliques de l'organisme, soit où signes de rétention hydrosodée et des signes de malperfusion :
● dyspnée ; orthopnée ;
il pourvoit aux besoins de l'organisme en travaillant avec des
● tachycardie ;
pressions de remplissage élevées dans les cavités cardiaques. La
● fatigue ;
défaillance peut notamment être liée à : un défaut de contrac-
● difficultés de digestion ;
tilité, un défaut de relaxation, un mauvais fonctionnement des
● extrémités froides  ; marbrures cutanées (vasoconstric-
valves cardiaques ou une anomalie du rythme cardiaque [14].
L'insuffisance cardiaque est dite chronique si elle évolue tion périphérique) ;
● œdèmes des membres inférieurs ;
progressivement (plusieurs semaines ou mois) ou aiguë si
● dysfonctions d'organes secondaires. En cas de bas débit
elle est d'installation brutale (quelques heures ou jours).
L'insuffisance ventriculaire gauche est l'évolution finale cardiaque, la mauvaise perfusion des autres organes a des
de toutes les pathologies cardiaques (encadré  9.1). Les répercussions sur le fonctionnement des autres organes :
causes les plus fréquentes sont la cardiopathie ischémique insuffisance rénale, insuffisance hépatique, troubles de la
et les cardiomyopathies dilatées idiopathiques. conscience (bas débit cérébral).
Rarement, l'insuffisance ventriculaire droite est liée à Le tableau d'insuffisance ventriculaire droite est dominé
une anomalie proprement cardiaque, comme l'infarctus du par l'hyperpression veineuse et les signes de rétention
ventricule droit [15]. La plupart du temps, elle est la consé- hydrosodée :
● jugulaires saillantes ;
quence d'une hypertension artérielle pulmonaire générant
● reflux hépatojugulaire ;
une augmentation de la post-charge du ventricule droit.
● ascite ;
C'est le cas dans l'embolie pulmonaire [16], les maladies
● hépatomégalie (congestion hépatique) ;
pulmonaires chroniques (BPCO, syndromes restrictifs…)
● œdèmes des membres inférieurs.

La limitation fonctionnelle des patients insuffisants car-


diaques est souvent exprimée selon les critères de la New
York Heart Association (NYHA) [17] :
ENCADRÉ 9.1 Causes les plus ● classe I : aucune limitation d'activité physique ;

● classe II : dyspnée survenant lors d'efforts importants de la


fréquentes d'insuffisance vie quotidienne (courir, monter plusieurs volées d'escaliers…) ;
cardiaque ● classe III : dyspnée survenant lors d'efforts légers entraî-

nant une importante limitation de l'activité physique (mar-


Étiologies de l'insuffisance ventriculaire gauche cher, monter une volée d'escaliers) ;
l Cardiopathie ischémique
● classe IV : dyspnée au moindre effort (se laver), voire
l Cardiopathie dilatée idiopathique

l Cardiopathie hypertensive
même au repos.
l Maladies valvulaires (rétrécissement ou insuffisance

mitrale et aortique) Examens complémentaires


l Cardiopathies toxiques (alcool, chimiothérapie)

l Myocardite Dans la biologie, on notera l'hyponatrémie (de mauvais pro-


nostic dans l'insuffisance cardiaque [18]), l'acidose lactique
Étiologies de l'insuffisance ventriculaire droite
l Infarctus du ventricule droit
[19] (hypoperfusion tissulaire) et les marqueurs de fonction
l Embolie pulmonaire
rénale (créatinine) et hépatique (bilirubine, transaminases,
l Insuffisance respiratoire chronique (BPCO, syndrome
gamma-GT). Le BNP [20] est une hormone sécrétée par le
restrictif) = cœur pulmonaire chronique cœur en cas d'élévation des pressions intracardiaques ; elle est
l Insuffisance ventriculaire gauche terminale avec HTAP présente en quantités élevées en cas d'insuffisance cardiaque.
l HTAP primitive L'échographie cardiaque permet d'évaluer le fonction-
nement du cœur, des valves, du péricarde et de mesurer la
107
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

force de contractilité du myocarde. C'est un examen incon- without persistent ST-segment elevation : the Task Force for the
tournable dans l'insuffisance cardiaque. management of acute coronary syndromes (ACS) in patients pre-
senting without persistent ST-segment elevation of the European
L'électrocardiogramme permet de faire le diagnostic Society of Cardiology (ESC). Eur Heart J 2011 ; 32 : 2999–3054.
d'accident coronaire aigu qui est la cause de 30 % des insuf- [4] Task Force on the management of STseamiotESoC, Steg PG, James
fisances cardiaques aiguës [21]. SK, et al. ESC Guidelines for the management of acute myocardial
infarction in patients presenting with ST-segment elevation. Eur
Heart J 2012 ; 33 : 2569–619.
Œdème aigu du poumon [5] Wallentin L, Becker RC, Budaj A, et al. Ticagrelor versus clopidogrel
in patients with acute coronary syndromes. N Engl J Med 2009 ; 361 :
L'œdème aigu du poumon (OAP) est un des formes d'in- 1045–57.
suffisance cardiaque aiguë [22]. Dans l'OAP, l'augmentation [6] Investigators C-O, Mehta SR, Bassand JP, et al. Dose comparisons of
de pression dans la circulation pulmonaire est responsable clopidogrel and aspirin in acute coronary syndromes. N Engl J Med
2010 ; 363 : 930–42.
d'une inondation des alvéoles pulmonaires par du plasma [7] Wiviott SD, Braunwald E, McCabe CH, et al. Prasugrel versus clo-
qui traverse la paroi des capillaires. Il est la conséquence pidogrel in patients with acute coronary syndromes. N Engl J Med
d'une augmentation brutale de la pression artérielle (aug- 2007 ; 357 : 2001–15.
mentation de la post-charge du ventricule gauche) ou [8] Prystowsky EN. Primary prevention of sudden cardiac death : the
time of your life. Circulation 2004 ; 109 : 1073–5.
d'une diminution de la contractilité du ventricule gauche
[9] Ng R, Yeghiazarians Y. Post myocardial infarction cardiogenic
avec rétention hydrosodée importante. shock : a review of current therapies. J Intensive Care Med 2013 ;
Dans l'OAP, le patient présente donc un tableau de 28 : 151–65.
détresse respiratoire associant dyspnée, orthopnée et [10] Reynolds HR, Hochman JS. Cardiogenic shock : current concepts
hypoxie. Le pronostic vital peut-être engagé. and improving outcomes. Circulation 2008 ; 117 : 686–97.
[11] Menon V, Webb JG, Hillis LD, et al. Outcome and profile of ventri-
Le traitement vise à diminuer la pression artérielle (vaso- cular septal rupture with cardiogenic shock after myocardial infarc-
dilatateurs), la surcharge hydrique (diurétiques) et amélio- tion : a report from the SHOCK Trial Registry. Should we emergently
rer l'oxygénation (ventilation). revascularize occluded coronaries in cardiogenic shock ? J Am Coll
Cardiol 2000 ; 36 : 1110–6.
[12] Slater J, Brown RJ, Antonelli TA, et al. Cardiogenic shock due to car-
Points clés diac free-wall rupture or tamponade after acute myocardial infarc-
tion : a report from the SHOCK Trial Registry. Should we emergently
revascularize occluded coronaries for cardiogenic shock ? J Am Coll

Les maladies cardiovasculaires sont la première
Cardiol 2000 ; 36 : 1117–22.
cause de mortalité dans les pays industrialisés, et [13] Thompson CR, Buller CE, Sleeper LA, et al. Cardiogenic shock due
parmi les principales causes d'admission à l'hôpi- to acute severe mitral regurgitation complicating acute myocar-
tal. Les kinésithérapeutes sont donc amenés à ren- dial infarction: a report from the SHOCK Trial Registry. SHould we
contrer très régulièrement ce type de patients. use emergently revascularize occluded coronaries in cardiogenic
shock ? J Am Coll Cardiol 2000 ; 36 : 1104–9.

La particularité des pathologies cardiaques [14] McMurray JJ, Adamopoulos S, Anker SD, et al. ESC Guidelines for
est qu'elles sont souvent évolutives. Les patients the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure
peuvent à tout moment aggraver leur état sous 2012: the Task Force for the diagnosis and treatment of acute and
la forme d'une dyspnée aiguë, d'une syncope ou chronic heart failure 2012 of the European Society of cardiology.
Developed in collaboration with the Heart Failure Association
d'une douleur thoracique.
(HFA) of the ESC. Eur Heart J 2012 ; 33 : 1787–847.

Il est primordial que le kinésithérapeute recon- [15] Hamon M, Agostini D, Le Page O, et al. Prognostic impact of right
naisse les signes de gravité et la pathologie pour ventricular involvement in patients with acute myocardial infarc-
réagir de manière adéquate. tion: meta-analysis. Crit Care Med 2008 ; 36 : 2023–33.
[16] Tapson VF. Acute pulmonary embolism. N Engl J Med 2008 ; 358 :
1037–52.
[17] Fisher JD. New York Heart Association classification. Arch Intern
Références Med 1972 ; 129 : 836.
[18] Gheorghiade M, Abraham WT, Albert NM, et  al. Relationship
[1] Libby P. Mechanisms of acute coronary syndromes and their impli- between admission serum sodium concentration and clinical out-
cations for therapy. N Engl J Med 2013 ; 368 : 2004–13. comes in patients hospitalized for heart failure: an analysis from the
[2] Yiadom MY. Acute coronary syndrome clinical presentations and OPTIMIZE-HF registry. Eur Heart J 2007 ; 28 : 980–8.
diagnostic approaches in the emergency department. Emerg Med [19] Vermeulen RP, Hoekstra M, Nijsten MW, et al. Clinical correlates of
Clin North Am 2011 ; 29 : 689–97. arterial lactate levels in patients with ST-segment elevation myocar-
[3] Hamm CW, Bassand JP, Agewall S, et  al. ESC Guidelines for the dial infarction at admission: a descriptive study. Crit Care 2010 ; 14 :
management of acute coronary syndromes in patients presenting R164.

108
9. Sémiologie des grands syndromes en pathologie cardiaque et prise en charge

[20] Braunwald E. Biomarkers in heart failure. N Engl J Med 2008 ; 358 :


2148–59.
Pour en savoir plus
[21] Nieminen MS, Brutsaert D, Dickstein K, et  al. EuroHeart Failure
Boustani F. L'essentiel en cardiologie. Montpellier : Sauramps Médical ;
Survey II (EHFS II): a survey on hospitalized acute heart failure
2012.
patients: description of population. Eur Heart J 2006 ; 27 : 2725–36.
Harrison, Fauci AS, Kasper DL, Hauser SL, Jameson JL, Loscalzo J, et  al.
[22] Follath F, Yilmaz MB, Delgado JF, et al. Clinical presentation, mana-
Harrison – Principes de médecine interne. Médecine Sciences
gement and outcomes in the Acute Heart Failure Global Survey of
Publications. 18e éd. Cachan : Lavoisier ; 2013.
Standard Treatment (ALARM-HF). Intensive Care Med 2011 ; 37 :
619–26.

109
Chapitre 10
Bilan en kinésithérapie
respiratoire
Pascal Gouilly, Michel Cabillic, Bertrand Selleron

PLAN DU CHAPITRE
Une démarche d'évaluation structurée
par la classification internationale du
fonctionnement, du handicap
et de la santé (CIF) 112
Fonctions et structures corporelles 113
Activité et participation 117

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Une démarche d'évaluation observées et/ou mesurées afin d'établir un programme de


traitement et de choisir les actes de kinésithérapie à mettre
structurée par la classification en œuvre.
internationale du La déficience de fonction (systèmes organiques) et de
structure (anatomiques/impairment) se caractérise selon
fonctionnement, du handicap la CIF par des problèmes dans la fonction organique ou la
et de la santé (CIF) structure anatomique, tels un écart ou une perte impor-
tante. Les recommandations de la Société de pneumologie
Il n'existe pas un bilan type en kinésithérapie respiratoire de langue française (SPLF) dans la prise en charge de la
car la démarche diagnostique est toujours orientée [1] bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO)
par la prescription de kinésithérapie qui contient, le plus donnent comme indicateurs de déficience : les épreuves
souvent de manière implicite, deux dimensions primor- fonctionnelles respiratoires, les gaz du sang, la force des
diales : le diagnostic médical (la ou les maladies dont le muscles respiratoires et des muscles périphériques [3]. La
patient est atteint) et le projet thérapeutique (ou le motif limitation d'activité (disability ou incapacité) correspond
d'hospitalisation). aux difficultés que rencontre une personne dans l'exécu-
La démarche diagnostique du kinésithérapeute (intitu- tion de certaines activités. L'activité désigne l'exécution
lée bilan-diagnostic kinésithérapique ou BDK) peut alors d'une tâche par une personne (personne–individu ; per-
se schématiser selon les principales catégories de mala- sonne–être social). Les indicateurs pertinents de limitation
dies (trouble ventilatoire obstructif ou restrictif, situation d'activité dans la BPCO sont l'évaluation de la dyspnée, le
aiguë ou chronique) et le projet thérapeutique (dépistage, test de 6 minutes de marche (TM6) et les épreuves d'ef-
prévention, rééducation ou réhabilitation, soins palliatifs). fort [3]. L'étude des activités de la vie quotidienne (AVQ)
Néanmoins, la kinésithérapie, en particulier respiratoire, ne rentre également dans l'analyse des limitations d'activité.
s'adresse pas directement à la maladie mais à ses consé- Les déficiences ou limitations d'activité sont rarement tran-
quences organiques, psychologiques et sociales du fonc- sitoires ou réversibles en pneumologie et sont, à l'inverse,
tionnement, du handicap et de la santé (CIF, OMS, 2001) [1, 2] le plus souvent permanentes et irréversibles. La restriction
et constitue une grille d'évaluation pertinente des consé- de participation (désavantage ou handicap) résulte des
quences des maladies respiratoires justifiant l'intervention déficiences et/ou limitations d'activité. Elle désigne les pro-
du kinésithérapeute (fig. 10.1). blèmes qu'une personne peut rencontrer en s'impliquant
Cette démarche de BDK repose sur l'évaluation et l'ana- dans une situation de vie réelle, elle repose sur des facteurs
lyse des déficiences et limitations d'activité (incapacités) personnels mais aussi sur les facteurs environnementaux

Problèmes de santé
(troubles/ maladies)

Fonctions &
structures
corporelles Activités Particiation
(déficiences) (Limitations) (Restrictions)

Facteurs Facteurs
environnementaux personnels

Fig. 10.1
Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF).
Source : OMS (www.who.int/classification/icf)

112
10. Bilan en kinésithérapie respiratoire

(environnement physique, social et attitudinal dans lequel échelle cotée de 0 à 10 (0 correspondant à l'absence
les gens vivent et mènent leur vie). La qualité de la vie [4], d'essoufflement, 10 à une dyspnée permanente). Le stade
les loisirs, le travail, la morbidité et la mortalité sont des élé- d'apparition de la dyspnée d'effort peut être évalué par le
ments concrets que l'on mesure en pneumologie. thérapeute sur les dires du patient. Il est coté de 0 à 5 selon
La CIF encourage à un BDK négatif et positif, c'est- la cotation de Sadoul ou de 0 à 4 selon la cotation du MRC
à-dire mettant en évidence les ressources ou potentialités (tableau  10.2) utilisée pour calculer l'index BODE. Dans
dont dispose le patient pour suppléer à ses déficiences, où la CIF, la dyspnée est classée comme une incapacité. Elle
sur lesquelles le kinésithérapeute va pouvoir s'appuyer pour peut être également évaluée en lien avec les AVQ à la suite
aider le patient à développer des stratégies de compensa- d'observations (TM6, stepper-test, test de l'escalier, shuttle
tion. Le concept repose sur une démarche biopsychoso- walking test, test en endurance et épreuve d'effort…).
ciale qui diffère de la démarche biomédicale classique. La douleur est étudiée de manière classique. Sa recherche
est plus particulièrement dans les atteintes pariétales. Une
grille spécifique issue du questionnaire de Melzack a été
Fonctions et structures adaptée aux suites de chirurgie thoracique [6].

corporelles
Fonctions du système
Les principales fonctions organiques intéressantes à évaluer cardiovasculaire
en kinésithérapie respiratoire sont les fonctions :
● émotionnelles ; La fréquence cardiaque permet de corréler la réaction
● sensorielles (dyspnée, douleur…) ; du corps à des sollicitations externes. L'évolution de la
● du système cardiovasculaire (adaptation à l'effort) ; fréquence cardiaque au cours d'un effort peut-être enre-
● du système respiratoire (encombrement, obstruction gistrée pour le calcul de l'indice de coût physiologique
bronchique, hématose, mouvements ventilatoires…) ; (ICP) ou de la fréquence cardiaque plateau au cours du
● de l'appareil locomoteur (éléments périphériques de test de marche de 6 minutes. Les pressions artérielles
l'adaptation à l'effort). systo­liques et diastoliques sont des paramètres de base
L'analyse des déficiences passe par l'évaluation de ces à mesurer au repos et à l'effort. Nous citerons l'intérêt du
différentes fonctions. pouls paradoxal dans l'étude des facteurs de gravité de la
crise d'asthme [7].

Fonctions émotionnelles : évaluation


de l'anxiété
L'anxiété est un facteur courant chez les patients ayant des Tableau 10.1 Échelle de Borg modifiée
pathologies respiratoires, touchant un patient sur deux
10 Essoufflement maximal
atteint de BPCO. Pour la mesurer l'autoquestionnaire le plus
fiable, sensible et utile en pratique est l'échelle HAD (hos- 9 Essoufflement extrêmement
pitalization anxiety depression) [5]. Des items spécifiques sévère
de questionnaires de qualité de vie permettent également 8
d'évaluer l'anxiété. 7 Essoufflement très sévère
6
Fonctions sensorielles : évaluation 5 Essoufflement sévère
de la dyspnée et de la douleur 4 Essoufflement presque sévère

La dyspnée peut être évaluée à court terme en utilisant des 3 Essoufflement modéré
échelles d'intensité par le patient (EVA, Borg) ou par le thé- 2 Essoufflement léger
rapeute qui analyse la répercussion de la dyspnée sur des 1 Essoufflement très léger
situations précises (Sadoul, Borg). Le patient auto-évalue 0,5 Essoufflement à peine notable
sa perception de l'essoufflement en utilisant une échelle
0 Aucun essoufflement
visuelle analogique ou une échelle de Borg (tableau 10.1),
113
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Tableau 10.2 Échelles de Sadoul et MRC de la toux et justifie une aide au désencombrement bron-
chique. Un DEP à la toux inférieur à 160 L/min témoigne
Cotation de MRC
Sadoul d'une inefficacité à la toux qui justifie le recours à une aide
instrumentale à la toux [8].
0 Absence Absence de
de dyspnée dyspnée
1 Dyspnée à l'exercice Dyspnée pour les
Évaluation de l'encombrement bronchique
(montée de plus de efforts importants Expectorations (quantité, qualité,
deux étages à vive (hâter le pas ou couleur des expectorations)
allure) monter une pente)
Il n'existe pas de mesure instrumentale de l'encombrement
2 Dyspnée en Dyspnée à la
montant une côte marche à plat en
bronchique. Les techniques proposées visent à étudier les
à allure normale ou allure normale facteurs favorisant l'encombrement. Les méthodes d'éva-
lors de la montée luation de l'épuration du mucus des voies aériennes vont
de plus d'un étage des plus simples (volume des sécrétions) aux techniques
à vive allure plus complexes (clairance mucociliaire). L'étude de la quan-
3 Dyspnée en Dyspnée à la tité des crachats sur 24 heures se heurte à de nombreux
marchant sur marche lente problèmes : physiologique (l'évacuation des sécrétions est
terrain plat au assurée par la déglutition), psychologique (la collection de
rythme d'un crachats dans un crachoir ne fait pas partie des habitudes),
accompagnateur critère de pertinence quant à la mesure (faut-il mesurer le
4 Dyspnée en Dyspnée poids sec, le volume ?). Il est cependant important d'étu-
marchant à son au moindre dier la répartition sur la journée pour établir le plan de
propre rythme avec effort : toilette, traitement.
arrêts fréquents déshabillage, repas Parallèlement, on suivra l'odeur et la couleur des sécré-
5 Dyspnée au tions. Des sécrétions mucopurulentes (de couleur jaune)
moindre effort : ou purulentes (vertes) signeront une infection plus ou
pour les gestes moins importante, alors qu'une hémoptysie affûtera la vigi-
élémentaires lance du thérapeute.
comme l'habillage, L'augmentation de la viscosité des sécrétions donne au
le rasage… crachat la consistance d'une huile épaisse qui s'écoule dif-
ficilement le long des parois du crachoir. Leur adhérence
Fonctions du système respiratoire témoigne de l'hydratation. Quand celle-ci diminue, c'est
l'image du crachat qui colle au fond et sur les parois du
Évaluation de la toux crachoir renversé. La filance témoigne des difficultés qu'a
le patient à se débarrasser des fils de sécrétions qui vont de
L'analyse de la toux passe par l'anamnèse qui collecte des
la bouche au crachoir après le dépôt. L'étude de l'élasticité
renseignements tels que sa fréquence, ses caractéristiques
n'apporte rien au diagnostic kinésithérapique.
(sèche ou grasse), son horaire (nocturne plus en phase avec
un problème inflammatoire, matinal plus en phase avec un
Auscultation
problème mécanique d'encombrement) et ses caractéris-
tiques (quinteuse, irritative ou productive). Il ne faut pas L'auscultation pulmonaire est une technique simple qui
oublier que la réelle efficacité de la toux est superficielle consiste à écouter et à analyser les bruits normaux et anor-
(20 % du territoire pulmonaire). Cette notion souvent igno- maux et à évaluer les techniques de prise en charge en kiné-
rée est pourtant fondamentale puisque ce n'est pas parce sithérapie [9].
que le patient ne tousse pas qu'il n'est pas encombré et de Le poumon sain est caractérisé par la présence du bruit
même ce n'est pas parce qu'il tousse qu'il se désencombrera. respiratoire normal (BRN), encore appelé murmure vésicu-
L'efficacité de la toux doit être mesurée chez les patients laire. C'est un bruit de faible intensité que fait l'air en rentrant
ayant une pathologie neuromusculaire en calculant le débit dans les bronches lobaires et segmentaires (flux turbulent).
expiratoire de pointe (DEP) à la toux. Un DEP à la toux infé- On le perçoit principalement pendant l'inspiration. Sa dimi-
rieur à 270 L/min traduit une altération des mécanismes nution peut caractériser une hypoventilation alors que son
114
10. Bilan en kinésithérapie respiratoire

augmentation peut traduire une hyperventilation. Il peut Évaluation de la ventilation


s'accompagner de bruits adventices [10] :
● les craquements (crépitants) sont des bruits discontinus.
On décrit la ventilation classiquement dite physiologique
(abdominodiaphragmatique ou AD) et la respiration costale
Ils témoignent d'un encombrement plus ou moins distal
supérieure et/ou inférieure utilisant uniquement le gril costal :
selon la hauteur du bruit (fréquence en analyse stéthacous-
est-elle nasale, buccale, à lèvres pincées, en ventilation sponta-
tique). Un bruit discontinu grave est appelé gros crépitant
née ou forcée ? Le thérapeute analyse également la qualité de
(synonymes : coarse crackles, sous-crépitant, craquement
cette respiration. On décrit comme ventilation pathologique :
de basse fréquence) et correspond à un encombrement ● la respiration paradoxale qui inverse la respiration AD.
proximal (gros troncs). Un bruit discontinu aigu est appelé
C'est un signe pathologique témoignant d'un épuise-
crépitant fin (synonymes : fine crackles, crépitant, craque-
ment du diaphragme ainsi que de la mise en jeu des ins-
ment de haute fréquence) et correspond à des encombre-
pirateurs accessoires. On l'appelle aussi « balancement
ments plus distaux (poumon profond). La localisation dans
thoraco-abdominal »  ;
le cycle inspiratoire permet également d'affiner l'approche ● le signe de Hoover qui s'observe à la partie inférieure du
thérapeutique (début d'inspiration = trouble ventilatoire
thorax à l'inspiration. Lorsque le signe de Hoover est pré-
obstructif sévère ; mi-inspiration = bronchiectasie) ;
● les sibilances sont des bruits continus aigus que l'on
sent, le diamètre transversal diminue à l'inspiration (alors
qu'il devrait augmenter), les parois thoraciques se rap-
perçoit surtout à l'expiration. Ils signent la présence d'une
prochent au lieu de s'écarter ;
hyperréactivité bronchique, ce que l'on trouve lors d'une ● la respiration de Cheyne-Stokes qui se caractérise par
crise d'asthme.
une apnée de 20 à 30 secondes suivie d'une reprise de res-
De très nombreux écrits montrent la faible fiabilité inter­
piration devenant progressivement plus rapide pour dimi-
observateurs de l'auscultation et de l'exactitude des résul-
nuer de nouveau avant une autre période d'apnée. Elle est
tats. Les causes en sont la variabilité des nomenclatures [11]
retrouvée dans les cas d'urémie ;
et l'absence d'une formation spécifique. ● la respiration de Kussmaul qui se caractérise par une fré-

quence normale ou augmentée ou l'inspiration et l'expira-


Évaluation des échanges gazeux tion est profonde, égale et régulière. Elle est retrouvée dans
Une hypoxémie se traduit par une cyanose dont la corré- les cas d'acidose du coma diabétique ;
● la respiration de Biot qui se caractérise par une respira-
lation avec la SpO2 n'a pas été établie (le patient anémique
hypoxémique n'aura pas d'extrémités cyanosées, contraire- tion périodique avec pauses prolongées et irrégulières. Elle
ment au patient polyglobulique). est retrouvée dans les cas d'hypertension intracrânienne.
La présence d'un hippocratisme digital (convexité des La fréquence respiratoire est étudiée (sans le signaler au
ongles) peut être le reflet d'une hypoxémie mais également patient pour lui permettre de respirer normalement) à l'aide
traduire une souffrance du poumon (cancer) ou du cœur. d'un chronomètre sur une durée minimum de 30 secondes.
Une hypercapnie se traduit soit par un énervement, Sa valeur moyenne est de 12 à 16 cycles/minute chez l'adulte
soit par une torpeur annonciatrice d'un coma hypercap- et l'adolescent. Une augmentation est appelée tachypnée et
nique. Elle s'accompagne de sueurs et de tremblements que résulte d'une adaptation de l'appareil respiratoire à un dys-
Sadoul matérialise à travers le test de l'écriture qui devient fonctionnement. Une diminution est appelée bradypnée.
illisible proportionnellement à l'augmentation de l'hyper- Les tirages témoignent de l'activité anormale lors de la ven-
capnie. Elle peut être décelée également par des céphalées tilation de repos des inspirateurs d'effort. Ce sont les sterno-
en fin de nuit. À moyen terme, elle explique les problèmes cléido-mastoïdiens ou l'activité des scalènes que l'on met en
cognitifs. évidence. La contraction des intercostaux ou le battement des
Les mesures quantitatives comme la SpO2, la TcPCO2, la ailes du nez peuvent témoigner d'une détresse respiratoire.
PaCO2, la PaO2 sont traitées dans les chapitres 3 et 4.
Évaluation des déformations
Évaluation de l'obstruction bronchique thoracorachidiennes
Elle est réalisée par les épreuves fonctionnelles respiratoires Le bilan morphologique visualise les déformations :
● rachidiennes : hypercyphose, scoliose… ;
(EFR) en mettant en évidence une altération du VEMS et
● thoraciques : carène (fig.  10.2a), entonnoir xyphoïdien
des paramètres de la courbe débit-volume. Cette dernière
permet de distinguer les obstructions intra- et extrathora- (fig.  10.2b), ailerons de Sigaud (fig.  10.2c), thorax en ton-
cique. Le chapitre 6 est consacré à ce thème. neau (fig. 10.2d).
115
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

A B

D
Fig. 10.2
Thorax.
a. Carène.
b. Entonnoir xyphoïdien.
c. Ailerons de Sigaud.
d. En tonneau.

116
10. Bilan en kinésithérapie respiratoire

La mobilité du thorax est analysée par une centimétrie Les tests fonctionnels qui évaluent la limitation des
axillaire et xyphoïdienne avec un mètre ruban, mesure très capacités d'exercice (TM6, stepper-test, test de l'escalier,
reproductible [12]. La valeur normale du différentiel ins- shuttle walking test, test en endurance) sont décrits dans
piration/expiration thoracique axillaire est de 7 cm, cette le chapitre 11.
valeur est légèrement inférieure chez la femme. Elle dimi- Les échelles de qualité de vie envisagent de nombreux
nue nettement avec l'âge et certaines pathologies comme items permettant d'analyser les limitations d'activités, elles
la BPCO et la pelvispondylite rhumatismale. Il semble par sont traitées dans le chapitre 13.
contre que l'hétérogénéité des valeurs obtenues chez le
sujet sain comme chez le sujet pathologique constitue un
Point clé
réel problème pour la réalisation du BDK : à partir de quelle
valeur faut-il envisager des techniques de rééducation ? Il
Le diagnostic kinésithérapique consiste à répondre
restera enfin à envisager l'impact de la kinésithérapie sur la
à huit questions :
variation des valeurs de l'expansion costale. La mesure de ■
Le patient a-t-il un encombrement bronchique ?
la mobilité abdominale n'est pas fiable et ne doit pas être ■
A-t-il un déficit d'hématose ?
réalisée. ■
A-t-il une obstruction bronchique ?

A-t-il un problème de mécanique ventilatoire
Évaluation de la fonction musculaire qui recoupe les problèmes d'hyperinflation sta-
La fonction musculaire est étudiée selon les cotations du tique ou dynamique ou encore un trouble venti-
testing. Il est complété par le calcul de la pression inspira- latoire restrictif ?
toire maximum (PIM), des pressions inspiratoires lors du ■
A-t-il les connaissances nécessaires à l'auto­
reniflement (SNIP) et de la pression expiratoire maximum gestion de la maladie et de son traitement ?
(PEM) afin de quantifier plus précisément les valeurs (la ■
A-t-il une désadaptation à l'effort ?
valeur normale est de 90 à 110 cm d'H2O). La méta-analyse ■
Comment l'atteinte respiratoire influence sa
de Gosselink donne comme valeur minimale à atteindre qualité de vie ?
une PIM de 60 cm d'H2O [13]. Il est également essentiel de ■
De quelles ressources (fonctionnalités) person-
mesurer la force des muscles périphériques (quadriceps et nelles et environnementales dispose-t-il ?
force de préhension) avec un dynamomètre ou en utilisant
des poids classiques. La force maximale volontaire (FMV ou Pour répondre à ces questions, il peut s'aider de
1RM) est la force développée par le patient sans contrainte fiche de bilan synthétique comme celle que la
de durée, elle est fiable [14]. Le temps d'endurance consiste SPLF a mise à la disposition des praticiens [16, 17].
à chronométrer le temps de maintien d'une contraction
à 70 % de la FMV. Des tests fonctionnels comme le test
d'accroupissement peuvent être ajoutés. Références
[1] Antonello M, Delplanque D. Comprendre la kinésithérapie respira-
toire. 3e éd. Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson ; 2011.
Activité et participation [2] Huber EO, Cieza A. introduction de la CIF dans la pratique clinique.
Kinésither Rev 2008 ; 73 : 12–8.
Les principales activités à évaluer en kinésithérapie res- [3] Bürge E, et  al. Les catégories d'interventions CIF s'appliquant à la
piratoire sont la communication, la mobilité, l'entretien physiothérapie des affections des systèmes et organes internes.
Kinésither Rev 2008 ; 73 : 40–9.
personnel, la vie domestique et les relations avec autrui. [4] Recommandations SPLF sur la réhabilitation du malade atteint de
L'analyse des activités peut être réalisée par un test généra- BPCO. Rev Mal Respir 2005 ; 22 : 696–704.
liste, l'échelle fonctionnelle spécifique au patient [15]. Il lui [5] Spruit MA. An Official American Thoracic Society/European
est demandé de citer jusqu'à cinq activités qu'il a le plus de Respiratory Society Statement : key concepts and advances in pul-
difficulté à réaliser en raison de son problème de santé et monary rehabilitation. Am J Respir Crit Care Med 2013 ; 188(8) :
e13–64.
d'évaluer le niveau de difficulté sur une échelle numérique [6] Ninot G. L'anxiété et la dépression associées à la BPCO : une revue
de 0 à 10 (11 grades). Une mesure de suivi permet de noter de question. Rev Mal Respir 2011 ; 28 : 739–48.
l'amélioration ou la régression du patient. Une différence de [7] Selleron B, Agnez M, De Renzis C. Évaluation et kinésithérapie de la
2 points sur la moyenne des activités est le minimum pour douleur après chirurgie thoracique. Cah Kinésithér 1996 ; 182(6) :
55–60.
détecter un changement.
117
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

[8] Roeseler J, Delguste P, Reynaert M. Les critères de gravité de [13] Gouilly P, Reggiori B, Gnos PL, Schuh O, Muller K, Dominguez A.
l'asthme. Ann Kinésithér 1989 ; 16(5) : 213–9. À propos de la mesure de l'ampliation thoracique. Kinesither Rev
[9] HAS. Prise en charge des personnes atteintes de SLA. Conférence 2009 ; 88 : 49–55.
de consensus 23 et 24 novembre 2005, Nice. Version Longue. En [14] Gosselink R, De Vos J, van den Heuvel SP, Segers J, Decramer M,
ligne : www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/ Kwakkel G. Impact of inspiratory muscle training in patients with
Sclerose_laterale_amyotrophique_long.pdf. COPD : what is the evidence ? Eur Respir J 2011 ; 37 : 416–25.
[10] Recommandations des Journées internationales de kinésithérapie [15] Villiot-Danger E, Dupuis J, Girard F. Le muscle du patient atteint
respiratoire instrumentale (JIKRI), 2000, Lyon. Ann Kinésithér 2001 ; de bronchopneumopathie chronique obstructive en réanima-
28 : 166–78. En ligne : www.em-consulte.com/article/74182/article/ tion : un enjeu pour le kinésithérapeute. Réanimation 2013 ; 22 :
recommandations-des-journees-internationales-de-ki. 109–18.
[11] Postiaux G, Lens E, Napoleone P, Lahaye JM. Objectivation stétha- [16] Trudelle P. L'échelle fonctionnelle spécifique au patient, un vrai cou-
coustique de la toilette bronchique distale par détection et analyse teau suisse du praticien pressé. Kinesither Rev 2010 ; 107 : 34–5.
des craquements pulmonaires. Ann Kinésithér 1989 ; 16(9) : 377–85. [17] Selleron B, Bouric G, Gouilly P. La fiche bilan en kinésithérapie respi-
[12] Postiaux G. Nomenclature d'auscultation pulmonaire : nécessité ratoire de l'adulte. Kinesither Rev 2010 ; 99 : 30–2.
d'un consensus francophone. Rev Mal Respir 2009 ; 26 : 93–4.

118
Chapitre 11
Évaluation fonctionnelle
des patients atteints
de pathologies respiratoires
Marc Beaumont, Gregory Reychler, Christian Opdekamp

PLAN DU CHAPITRE
Épreuve d'effort 120
Tests de terrain 125
Conclusion 130

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Les patients atteints de pathologies respiratoires présentent une augmentation de la charge de travail, il n'y a plus
régulièrement une diminution de la capacité physique ainsi d'augmentation de la consommation d'O2. Celle-ci atteint
que de la tolérance à l'effort. Ces limitations, d'autant plus un plateau et l'exercice, faute d'apport supplémentaire en
marquées que l'atteinte respiratoire est importante, ont un énergie, doit s'interrompre. Ce plateau n'est atteint que très
retentissement sur leur qualité de vie et nécessitent bien rarement chez des sportifs de très haut niveau. À l'inverse,
souvent une réhabilitation appropriée dont les contours chez le sujet sédentaire et le patient, on parle habituelle-
sont détaillés par ailleurs dans ce livre. Pour les kinésithéra- ment d'« intolérance à l'effort » et la consommation en O2
peutes, l'évaluation des différents paramètres caractérisant est limitée par la symptomatologie (VO2 max) ; la VO2 au
la capacité physique et la tolérance à l'effort fait partie inté- pic de l'effort (VO2 pic) est limitée par rapport au sujet sain.
grante de leur prise en charge. Différentes mesures existent. L'intolérance à l'effort dans les pathologies respiratoires
Chacune possède des spécificités propres et leur choix s'ef- chroniques a des implications importantes sur la qualité de
fectue en fonction des objectifs. Il est important de noter vie [1, 2], la fréquence d'hospitalisation [3–5] et la survie des
qu'il s'agit bien d'une évaluation fonctionnelle globale, patients [6–8].
puisque de nombreuses composantes y sont mises en jeu.
Elle ne présente qu'une faible corrélation avec la fonction
respiratoire et peut être avantageusement complétée par
Objectifs
des questionnaires de qualité de vie. Cette épreuve permet d'analyser l'adaptation des trois
Deux grandes catégories de tests existent : les tests de grandes fonctions vitales de l'organisme à l'effort, à savoir
terrain et ceux de laboratoire. Les kinésithérapeutes sont l'adaptation des systèmes pulmonaire, cardiovasculaire et
plus directement impliqués dans les premiers, mais une musculaire, et d'évaluer les limites et les mécanismes de la
connaissance de la seconde catégorie est nécessaire, étant tolérance à l'effort.
donné son caractère déterminant dans l'élaboration des Les principaux objectifs sont de :
programmes de réadaptation pulmonaire. Ces tests de ● évaluer la tolérance à l'effort de l'individu ;

laboratoire englobent les différentes épreuves d'effort qui ● objectiver les facteurs limitants de l'exercice ;

ont fait leurs preuves et dont l'intérêt ne fait aucun doute ● aider au diagnostic (dyspnée d'origine cardiaque ou pul-

en matière d'évaluation de la capacité physique. Ils sont monaire, asthme induit par l'effort) ;
d'ailleurs le standard en la matière. La lourdeur de ces tests ● évaluer la sévérité du handicap fonctionnel (indemnité) ;

les rend cependant peu utilisables au quotidien comme ● personnaliser le réentraînement à l'effort et en évaluer

mesure de la tolérance à l'effort, contrairement aux tests les effets ;


de terrain, plus aisément réalisables et moins coûteux. ● aider au diagnostic d'urgence d'inscription sur une liste

Généralement, les tests de terrain se rapprochent plus, d'attente de transplantation cardiaque et pulmonaire ;
du fait de leur intensité sous-maximale, des activités de la ● évaluer les risques de morbidité et de mortalité postopé-

vie quotidienne. Ce chapitre passe en revue les principaux ratoires (chirurgie abdominale ou thoracique).
moyens d'évaluation de la capacité physique et de la tolé-
rance à l'effort et tente de guider le kinésithérapeute dans
leur interprétation. Contre-indications du test d'effort [9]
Les contre-indications au test d'effort peuvent être abso-
lues ou relatives (encadré 11.1).
Épreuve d'effort
Indications d'interruption du test
L'épreuve d'effort progressivement croissant ou ergospiro-
métrie est le gold standard dans l'évaluation de la tolérance d'effort [9]
à l'effort de l'individu. Ce test a pour but de déterminer la
consommation maximale en O2 (VO2 max) à l'effort, c'est-
Signes ou symptômes
à-dire la quantité maximale d'O2 qui peut être consom- ● Pâleur et transpiration soudaine.
mée en 1 minute lors d'un exercice maximal. La VO2 max ● Dyspnée sévère.
définit donc aussi l'intensité la plus élevée que l'on puisse ● Douleur thoracique soudaine.
atteindre en utilisant essentiellement les processus méta- ● Cyanose, vertige.
boliques aérobies. On dit avoir atteint la VO2 max si, pour ● Impossibilité à soutenir la cadence de pédalage.

120
11. Évaluation fonctionnelle des patients atteints de pathologies respiratoires

● Lactatémie > 9 mmol/L.


Quotient respiratoire > 1,20.
ENCADRÉ 11.1 Contre-indications

● Absence de réserve ventilatoire.


absolues et relatives au test ● Acidose importante avec pH < 7,30.
d'effort ● Dyspnée ou fatigue ≥ 7 sur l'échelle de Borg.
Contre-indications absolues
l Infarctus du myocarde récent (< 5 j) Protocole [9, 11]
l Angine de poitrine instable

l Sténose aortique sévère


L'épreuve d'effort est réalisée dans un laboratoire d'explora-
l Décompensation cardiaque non contrôlée tions fonctionnelles, dans des conditions de température et
l Péricardite ou myocardite aiguë d'humidité ambiantes stables. Elle nécessite un appareillage
l Embolie pulmonaire sophistiqué et un personnel expérimenté. Le matériel de
l Œdème pulmonaire mesure permet l'appréciation des échanges gazeux cellu-
l Arythmie incontrôlée
laires à partir des flux aériens le plus souvent mesurés au
l Thrombose des membres inférieurs
niveau de la bouche par un masque facial (respiration naso-
l Décompensation aiguë non cardiaque pouvant être
buccale permettant la mesure de la VO2 et de la VCO2).
aggravée par l'exercice (infection, insuffisance rénale)
Contre-indications relatives Cyclo-ergomètre versus tapis roulant
l Sténose coronaire

l Hypertension artérielle au repos non traitée


L'avantage du cyclo-ergomètre est d'offrir : une plus grande
l HTAP modérée à sévère (> 60 mmHg) facilité à l'expérimentateur pour effectuer les différentes
l Tachy- ou bradyarythmie mesures de surveillance et de prélèvements (prise de ten-
l Bloc atrioventriculaire sévère sion et de gazométrie artérielle) ; une plus grande stabilité
l Cardiomyopathie hypertrophique pour le sujet évalué en fonction de la pathologie sous-
l Sténose valvulaire modérée jacente (problèmes ostéoarticulaire ou orthopédique) ; une
l Asthme mal contrôlé
plus grande sécurité en cas de malaise ou de trouble de
l Anomalie électrolytique
l'équilibre.
l Défaillance mentale menant à un manque de
L'avantage théorique du tapis roulant est de reproduire
collaboration
un effort plus physiologique (la marche) et de mettre en
jeu une masse musculaire plus élevée. Sur tapis, la VO2 pic
sera de 5 à 10 % plus élevée par rapport au cyclo-ergomètre.
Tracé ECG L'inconvénient majeur du tapis est que la charge imposée
● Sous-décalage du segment ST supérieur à 0,1 mV avec est moins précisément quantifiable car dépendante du
ST descendant ou horizontal. poids du sujet, de la vitesse et de la pente du tapis. Mais
● Extrasystole ventriculaire (ESV) et tachycardie ventricu- un test individualisé peut être utilisé : le patient détermine
laire paroxystique. une vitesse de marche confortable pour lui, sans pente
● Fibrillation auriculaire (FA) en cours d'effort. pendant 3 minutes, puis la pente est augmentée de 1 à 2 %
● Apparition d'un bloc de branche. toutes les minutes [12]. Il peut également être utilisé pour
les patients ne pouvant pas faire du vélo (pathologies du
Tension artérielle genou, ou patients ne pouvant soutenir le pédalage à cause
d'un manque de force des membres inférieurs).
Tension artérielle systolique supérieure à 250 mmHg ou
diastolique supérieure à 120–130 mmHg [10]. Choix du protocole
Paramètres physiologiques et cliniques Il se fait en fonction de l'indication de l'épreuve d'effort.
Les réponses physiologiques diffèrent en fonction de
témoins d'un effort « maximal »
l'incrémentation de la charge. Le but de l'épreuve d'effort
● Plafonnement de la VO2. maximale est de tester et de stresser suffisamment les sys-
● Fréquence cardiaque (FC) proche de la FC maximale tèmes pulmonaire, cardiovasculaire et musculaire de façon
théorique : FC max théorique = (220 − âge) ou 210 − méthodologique et contrôlée par la sollicitation de larges
(0,65 × âge) ± 10 %. groupes musculaires à l'exercice.
121
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

L'exercice doit être quantifiable en termes de travail ou ­ ossible d'estimer la puissance maximale théo-
p
de puissance développée. Et celle-ci sera significativement rique à ± 120 W. En tenant compte de la période
modifiée en fonction du protocole envisagé. C'est pourquoi d'échauffement qui est réalisée à 20 % de ce chiffre
la durée du test est importante. En dessous de 6 minutes, (10 à 20 W), on peut s'attendre à réaliser des paliers
le test est trop court, la puissance augmente trop rapide- de 10 W pour atteindre les 100 W en 10 min.
ment et le nombre de mesures est insuffisant. Au-delà de
12 minutes, le test devient trop long et se termine par la Phase de récupération active
fatigue du sujet avant même d'avoir atteint la puissance
maximale, soit par une sensation inconfortable liée à l'exa- Deux à trois minutes à la puissance d'échauffement per-
men, soit par des douleurs musculaires exacerbées. mettent aux composantes hémodynamiques (débit
Le protocole le plus adéquat est le protocole à charge cardiaque et tension artérielle) de diminuer et de revenir
croissante individualisée décrit par Wasserman et Whipps progressivement aux valeurs de repos.
[11]. L'individualisation de l'incrément de charge permet
d'atteindre un effort maximal, y compris chez les patients Paramètres étudiés
les plus sévèrement atteints. Le test aura idéalement une
durée de 8 à 12 minutes et comportera plusieurs phases. Avant l'épreuve d'effort, différents examens seront réali-
sés. La fonction respiratoire sera mesurée par une épreuve
Phase de repos fonctionnelle respiratoire. Un ECG de repos (12 pistes) et
D'une durée de 3 minutes, elle permet d'explorer les para- une mesure de la tension artérielle seront effectués avant
mètres cardiovasculaires et ventilatoires avant de débuter la période d'échauffement. On aura conseillé au patient de
l'exercice. s'alimenter légèrement avant l'effort. De nombreux para-
mètres peuvent être mesurés. Certains sont indispensables :
● VO (L/min ou mL/min × kg de poids corporel) ;
Phase d'échauffement 2
● puissance développée au pic de l'effort (W) ;

Trois minutes à faible intensité (0 à 20 W) permettent un ● VCO (L/min) ;


2
démarrage progressif de l'effort avec une fréquence de ● ventilation minute (VE) [L/min] ;

pédalage constante située entre 60 et 70 tours/min. ● ECG (12 pistes) ;

● pression artérielle (mmHg) ;

Phase d'incrémentation progressive ● fréquence respiratoire (FR) : cycle/min ;

● saturation artérielle en O (SaO ) en pourcentage ;


La charge de travail augmente par palier de 1 minute jusqu'à 2 2
● renseignements sur les causes de l'arrêt de l'effort.
épuisement du sujet (incapacité à maintenir une vitesse de
pédalage de 60 à 70 tours/min et ceci malgré les encou- D'autres paramètres peuvent ensuite être calculés :
ragements) ou à l'apparition d'une limitation ou anomalie
● quotient respiratoire ou QR
 VCO2 
cardiaque, ventilatoire ou métabolique.  VO  ;
2
Le choix de l'incrément se fera en fonction de l'état ● pouls d'O
 VO2 
2  ;
clinique, de l'estimation théorique de la VO2 max et du  FC 
volume expiratoire maximum par seconde (VEMS) du ● équivalents respiratoires en O2 et en dioxyde de carbone
patient.
 VE VE 
 VO et VCO  .
2 2
Exemple

Si la VO2 max théorique est de 2,5 L/min et que


le rapport VEMS mesuré/VEMS théorique est de Interprétation de l'épreuve d'effort
60 %, la VO2 max estimée est de 1,5 L/min. Il faut
encore retirer de cette valeur la VO2 de repos L'interprétation des paramètres mesurés lors de l'épreuve
(0,3  L/min) afin d'avoir la VO2 max estimée à d'effort est essentielle pour mettre en évidence les facteurs
­l'effort : 1,5 − 0,3 = 1,2 L/min. (cardiaque, ventilatoire, vasculaire ou musculaire) respon-
Vu la relation entre la VO2 et la puissance (1 W sables de la limitation à l'effort du patient et permettre
équivaut à une VO2 de 0,0103 L/min), il est d'établir une stratégie thérapeutique pour améliorer la qua-

122
11. Évaluation fonctionnelle des patients atteints de pathologies respiratoires

lité de vie du sujet et le maintien de sa santé. L'aptitude bicarbonates (CO3H−) pour donner de l'acide carbonique
physique aérobie est déterminée par la VO2 pic et par le (CO3H2), lequel se dissociera en CO2 et en H2O. Cette forma-
seuil ventilatoire. Les facteurs pouvant influencer la VO2 pic tion extra- ou non métabolique de CO2 stimule les centres
sont l'âge, le sexe, la maladie et la pratique sportive. respiratoires et induit l'augmentation de la ventilation.
On considère que la VO2 d'un sujet peu actif diminue Avec la poursuite de l'effort croissant, on observe une
physiologiquement de 0,4 mL/min/kg/an, mais que l'acti- nouvelle augmentation du contenu plasmatique en lactate.
vité physique pratiquée régulièrement pendant 6  mois Le système tampon est débordé et c'est l'augmentation
peut améliorer la VO2 de 15 à 20 %. Avec la maladie, la des protons qui va directement stimuler les centres respira-
condition physique du sujet diminue et l'intolérance à toires, avec comme conséquence une nouvelle augmenta-
l'effort est considérée comme modérée si la VO2 pic se tion abrupte de la ventilation (SV2). Chez le sujet sédentaire,
situe en dessous de 85 % de la valeur théorique, sévère le seuil ventilatoire (SV1) apparaît entre 50 et 60 % de la VO2
lorsqu'elle est inférieure à 60 % et très sévère si elle est pic. Le sportif endurant laissera apparaître ce seuil aux alen-
inférieure à 40 %. tours des 70 %. Le second seuil ventilatoire (SV2) apparaîtra
Le seuil ventilatoire correspond à l'intensité pour laquelle pour le sédentaire à 70 % de la VO2 pic et à 85–90 % chez
apparaît une augmentation non linéaire entre la VO2 et la le sportif.
ventilation, et une lactatémie plus marquée au cours de Le seuil ventilatoire est généralement utilisé pour
l'exercice. En fonction des auteurs, il est défini comme le individualiser l'intensité à laquelle le patient doit être
niveau d'effort où l'augmentation de la VCO2 progresse réentraîné lors d'un programme de reconditionnement à
plus rapidement que celle de la VO2 [13], ou en se basant l'effort. Un signe d'amélioration de la condition physique
 VE  de l'individu est le déplacement de ces seuils ventilatoires
sur l'augmentation de l'équivalent respiratoire en O2 
 VO2  vers la droite.
sans augmentation concomitante de l'équivalent respira- L'augmentation de la ventilation au cours de l'exer-
 VE  cice est indispensable pour assurer la régulation des
toire en dioxyde de carbone  [14] (fig. 11.1).
 VCO2  gaz du sang et permettre à l'organisme de s'adapter aux
Au début de l'effort, le peu de lactate formé est immé- besoins énergétiques de la fonction musculaire à l'effort.
diatement réoxydé dans les fibres musculaires de type I et L'adaptation de la ventilation sera possible grâce à l'adap-
le myocarde. Le quotient respiratoire est de 0,7, témoignant tation de ces deux composantes, à savoir le volume cou-
d'une utilisation prioritaire des lipides par rapport aux glu- rant (Vt) et la FR.
cides. Le premier seuil ventilatoire (SV1) survient comme La ventilation maximale volontaire (VMV) théorique
la conséquence du tamponnement de la production du pouvant être atteinte pendant une épreuve d'effort maxi-
lactate par les bicarbonates. L'augmentation de la produc- male peut être évaluée en multipliant le VEMS par 35 ou
tion des lactates par rapport à la vitesse de leur élimination 40. Chez un sujet sain, la VMV ne sera jamais atteinte. La
pendant un effort croissant s'accompagne d'une émission VE n'excédera pas plus de 65 à 70 % de la VMV. On par-
de protons (H+) qui vont être tamponnés par des ions lera donc en fin d'effort d'une ventilation maximale (VE
max). Il persistera une réserve ventilatoire de ± 30 %. On se
basera donc généralement sur l'existence de cette réserve
ventilatoire pour affirmer que l'effort et la VO2 pic ne sont
pas limités par la ventilation. Chez les patients atteints de
VCO2
VO2 pathologies pulmonaires, cette réserve est fortement dimi-
Fc nuée, voire nulle.

L'épreuve d'effort doit être cliniquement


interprétable
L'arrêt prématuré de l'effort ne peut être lié à la motivation
du sujet ou à l'arrêt de l'effort pour une raison d'inconfort
SV1 SV2
VO2
0 50-70 % 70-90 % VO2pic liée à l'installation du patient. L'analyse du rapport
W
Fig. 11.1 (10,3 mL d'O2/min/W) permet d'interpréter et de suivre la
Seuil ventilatoire lors de l'épreuve d'effort. cinétique de l'effort.
123
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Le test d'effort doit être maximal Fonction cardiaque


Le débit cardiaque (Q = FC × volume d'éjection systolique)
Il ne sera pas maximal si :
● le quotient respiratoire reste inférieur à 1,1 ;
[L/min] est normal pour une consommation d'O2 donnée
● la réserve cardiaque persiste (FC max : 220 − âge ou
au cours de l'effort. Cependant, la FC est généralement éle-
vée pour une consommation d'O2 donnée, et le volume
210 − 0,65 × âge ± 10 % n'est pas atteinte) ;
● les équivalents respiratoires en O et CO sont peu élevés
d'éjection habituellement bas. La FC pic est basse à cause
2 2 d'une VO2 pic basse. La FC pic peut être à la limite de la
(normalité : 25–40) ;
● l'acidose métabolique montre un pH artériel supérieur à
normalité en cas de pathologie légère. La fraction d'éjec-
tion ventriculaire droite est habituellement déficiente à
7,35 ;
● l'acide lactique dans le sang veineux est trop peu élevé.
l'exercice, expliquant en partie les pressions artérielles pul-
monaires augmentées.

Valeurs normales Ventilation et pattern respiratoire


Les patients obstructifs et restrictifs ont pour la plupart
La tolérance à l'effort sera maximale et normale pour : une augmentation de l'espace mort durant l'exercice par
● VO pic supérieur à 85 % de la VO max prédite ;
2 2 rapport aux sujets sains. Leur ventilation alvéolaire est
● FC pic = FC max prédite ± 15/min ;
habituellement plus basse (BPCO) ou identique (restrictif)
● rapport VE/VMV inférieur à 75 % ;
au sujet sain à un niveau donné de VO2. La capacité ven-
● ↓ SaO inférieure à 4 % ;
2 tilatoire maximale est déficiente à cause d'une mécanique
● PaCO inférieure à PaCO repos ;
2 2 pulmonaire anormale et de la faiblesse des muscles inspi-
● seuil lactate supérieur à 35 % VO max prédite.
2 ratoires. La réduction de la capacité ventilatoire maximale
est un facteur prépondérant dans la détérioration de la
Causes de diminution de la tolérance performance maximale à l'exercice des patients BPCO. Le
rapport entre la VE et la capacité ventilatoire maximale est
Atteinte du système ventilatoire, cardiovasculaire
plus élevé par rapport au sujet sain. Il peut donc y avoir une
ou périphérique
diminution voire une disparition de la réserve ventilatoire
Les répercussions de ces différentes atteintes sont résumées qui place le patient dans l'incapacité de poursuivre le test
au tableau 11.1. d'effort par manque de ventilation. Le Vt est moindre et
la FR plus grande à un niveau de ventilation donné durant
Plus spécifiquement : pathologies respiratoires l'exercice chez les patients pulmonaires par rapport aux
(tableau 11.2) sujets sains. Le Vt de fin d'effort est aussi significativement
plus bas.
Consommation en oxygène (VO2) [L/min]
Significativement plus élevée chez les patients obstructifs Fonction des muscles inspiratoires
et restrictifs au repos, elle évolue normalement au cours de La force musculaire inspiratoire est diminuée au repos
l'effort pour un effort sous-maximal donné. Excepté pour chez les patients obstructifs et restrictifs. Elle diminue à
une atteinte légère, elle sera inférieure à la normale au pic l'exercice suite à l'hyperinflation dynamique. Les pressions
de l'effort. que les muscles inspiratoires ont à générer durant l'exer-

Tableau 11.1 Répercussions des limitations respiratoire, cardiovasculaire et périphérique


Limitation respiratoire Limitation cardiovasculaire Limitation périphérique
VO2 SL ↓↓ ↓↓ ↓
Réserve ventilatoire ↓↓ ou ↓ Normale ou ↓ Normale
FR ↑↑ ↑ Normale ou ↑
PaO2 Normale ou ↑↑↑ Normale ou ↓ Normale
Réserve chronotrope ↑↑ ↑ Normale
Pouls d'O2 Normal ou ↓ = ou ↓ Normal ou ↓
VD/Vt ↑ ↑ ou ↑↑ Normal
Seuil lactique Normal ou ↓ Normal ou ↓ ↓
VO2 SL : consommation en O2 limitée par les symptômes ; PaO2 : pression partielle en O2 ; VD/Vt : rapport espace mort/Vt.

124
11. Évaluation fonctionnelle des patients atteints de pathologies respiratoires

Tableau 11.2 Récapitulatif des paramètres physiologiques de l'arrêt prématuré de l'effort. L'inconfort lié aux muscles
du BPCO à l'effort périphériques ou combiné à la dyspnée est la cause la plus
À l'effort maximal À l'effort sous-maximal fréquente de l'arrêt de l'effort.
VO2 pic et W pic ↓ VO2 normale ou légèrement ↓
VE ↓ VE ↑ Test d'endurance sur ergocycle
VE/VMV ↑ FR ↑, Vt ↓ Ce test est intéressant car c'est un meilleur marqueur de
Vt ↓ PaO2 ↓, PaCO2 normale ou ↑ l'évolution de la capacité en endurance dans le cadre d'un
FC ↓, pouls O2 ↓ FC ↑ et volume d'éjection programme de réhabilitation respiratoire [15], comparati-
systolique ↓ vement aux tests incrémentaux ou au test de marche de
6 minutes [16].
Acidose métabolique ↓ Acidose métabolique ↑
Il consiste à faire pédaler le patient à 80 % de la puissance
maximale obtenue lors de l'épreuve d'effort à une cadence
cice sont plus importantes chez les patients obstructifs par de pédalage comprise entre 50 et 60 tours/min. Le test se
rapport aux sujets sains. Ces pressions sont augmentées termine lorsque le patient ne parvient plus à maintenir une
à cause de l'hyperinflation, de l'augmentation de la résis- cadence de pédalage supérieure à 40 tours/min. Un seuil
tance inspiratoire, de la VE et de la distorsion de la cage minimum d'amélioration cliniquement significatif de
thoracique. Ceci est la raison majeure de l'augmentation 100–200 secondes est proposé [15].
de la dyspnée chez les patients obstructifs et restrictifs au
repos et à l'exercice.
Gaz sanguins
Tests de terrain
Les patients obstructifs et restrictifs ont habituellement Les tests de terrain peuvent compléter l'information fournie
une PaO2 au repos plus basse que les sujets sains. La PaO2 par les épreuves d'effort ou, selon la situation, s'y substituer.
à l'exercice peut augmenter, diminuer ou rester stable. La Les objectifs de ces tests sont de : évaluer une aptitude phy-
désaturation en O2 durant l'exercice est plus marquée chez sique ; évaluer l'efficacité d'un programme de réentraine-
les patients restrictifs et chez les patients BPCO sévères. Les ment à l'effort ; diagnostiquer une désaturation à l'effort. En
patients BPCO ont habituellement une PaCO2 plus élevée grande majorité basés sur l'activité des membres inférieurs
que le sujet normal à la même charge de travail. Beaucoup ou la marche, composante importante de la qualité de vie,
de patients BPCO ont une PaCO2 élevée à l'exercice. les différents tests sont accessibles à la plupart des patients.
Acidose métabolique
La plupart des patients BPCO développent une acidose
Test de marche de 6 minutes
métabolique durant l'exercice à de plus basses charges que
le sujet sain. Cette acidose contribue à l'augmentation de la Le test de marche de 6 minutes (TM6) ou 6-minute walk test
ventilation durant l'exercice. (6MWT) doit son origine au test de marche de 12 minutes,
décrit par Cooper en 1968, dont l'objectif était d'évaluer la
Muscles périphériques
capacité fonctionnelle de sujets sains.
La force des muscles périphériques est souvent réduite chez
Mac Gavin [17], en 1976, a prouvé qu'il pouvait être
les patients BPCO au repos. De plus, il paraît évident qu'une
adopté pour les patients atteints de BPCO. Puis, en 1982,
dysfonction des muscles périphériques durant l'exercice
Butland [18] a démontré qu'il y avait une corrélation entre
contribue à la limitation à l'effort. Cette possible dysfonc-
le test de 12 minutes et le 6MWT dans les maladies respi-
tion musculaire peut être liée à : la malnutrition ; l'inactivité ;
ratoires. Par la suite, de nombreuses études ont été menées
une mauvaise perfusion des muscles ; une hypoxie ; une
afin d'affiner les modalités du 6MWT et de préciser les dif-
myopathie due aux cytokines circulantes.
férences entre les protocoles [19].
Symptômes En 2002, l'American Thoracic Society (ATS) a rédigé un
Les patients obstructifs et restrictifs ont habituellement guide pratique pour la réalisation du 6MWT afin d'unifor-
une dyspnée plus marquée et un plus grand inconfort lié miser les modalités du test, pour que sa reproductibilité
aux muscles périphériques par rapport aux sujets sains. La soit maximale et qu'il soit le moins possible dépendant de
dyspnée comme seul symptôme n'explique qu'une partie l'opérateur [1]. En 2005, l'ATS/ERS et la SPLF ont considéré
125
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

que le 6MWT est une mesure de base incontournable un médecin, défibrillateur semi-automatique) et en dehors
faisant partie de l'évaluation d'une réhabilitation chez un de contre-indications (syndrome coronarien aigu récent,
patient atteint de BPCO. tachycardie de repos > 120 battements par minute, HTA
C'est ainsi que le 6MWT a été adopté comme test sous- > 18/10 au repos) [21].
maximal pour évaluer la tolérance à l'effort dans les actes Les mesures retenues pour évaluer le 6MWT sont la dis-
de la vie quotidienne [20]. Il permet également d'objectiver tance totale parcourue et la sensation de dyspnée sur une
la désaturation à l'effort, ce qui permet d'adapter le débit échelle de dyspnée (EVA ou échelle de Borg modifiée) en
d'oxygène (O2) à administrer. fin de test.
Le test de marche requiert un couloir de 30 mètres mini- Sa simplicité, son faible coût, sa réalisation relativement
mum, plat, non encombré. Le patient doit se reposer avant rapide (environ un quart d'heure, explications comprises) et
le test en bénéficiant du débit d'O2 prescrit pour le 6MWT si le peu de matériel nécessaire (un saturomètre, un chrono­
nécessaire. Le nom du patient, la date et l'heure, le débit d'O2, mètre et une échelle de dyspnée [Borg ou EVA]) sont les
la saturation transcutanée en O2, la fréquence cardiaque (FC) principaux avantages du 6MWT.
et la sensation de dyspnée doivent être relevés au début du La validité, la reproductibilité et la sensibilité ont été
test. Des instructions doivent être délivrées au patient avant vérifiées [17, 18, 22, 23]. La supériorité de ce test, en compa-
le départ. La SPLF recommande de lire le texte suivant : raison aux autres tests de terrain, est démontrée dans une
« Le but de ce test est de marcher le plus possible pendant revue de littérature [24]. L'inconvénient majeur de ce test
6 minutes. Vous marcherez aller et retour dans ce couloir. est l'influence sur la distance parcourue de facteurs tels que
Marcher 6 minutes, c'est long, et donc vous devrez faire un la motivation du patient et de l'expérimentateur, le fait de
effort. Vous allez probablement vous sentir hors d'haleine et marcher avec le patient, les encouragements éventuels et
fatigué. Vous pouvez donc ralentir, vous arrêter ou vous repo- l'effet d'entraînement. Cependant, le respect des recom-
ser si nécessaire. Vous pouvez vous appuyer contre le mur mandations doit permettre de minimiser ces inconvénients.
pendant le repos, mais reprendre la marche dès que possible. Il existe un autre inconvénient à ce test : la nécessité d'un
Vous parcourrez le couloir aller et retour en tournant autour couloir de 30 mètres. De ce fait, ce test est réalisable uni-
des cônes. Vous devez contourner les cônes et continuer sans quement en institution, ce qui motive les recherches pour
hésiter. Maintenant, je vais vous montrer. Voilà comment je d'autres tests de terrain réalisables quel que soit le lieu.
fais demi-tour sans hésiter. Pendant le test, vous ne pouvez pas Redelmeier a démontré en 1997 [23] qu'entre deux
parler, car cela influence vos performances. Je vous indiquerai 6MWT, une différence en termes de périmètre de marche
le temps restant toutes les minutes. Je vous demanderai de de plus 40 mètres ou de moins 70 mètres était synonyme
vous arrêter après 6 minutes. Êtes-vous prêt ? Je vais compter d'amélioration ou de détérioration clinique pour le patient.
les demi-tours que vous faites. Rappelez-vous que vous devez Depuis, d'autres auteurs ont établi des évolutions de dis-
marcher aussi loin que possible pendant 6 minutes, mais tance considérées comme cliniquement significative pour
sans courir. Allez-y maintenant ou dès que vous êtes prêt. » le patient : 25 m [25], 35 m [26], 86 m [27]. La valeur de
Pendant le test, des informations sont données toutes 35 m, pour les patients atteints de BPCO modérée à sévère,
les 30 secondes de la manière suivante : proposée par Puhan semble le mieux refléter le bénéfice
● « C'est très bien, continuez ainsi » à 30 secondes ; réel des patients, car il se fonde sur l'amélioration de la qua-
● « C'est très bien, plus que 5 minutes, continuez ainsi  » à la lité de vie [26]. De même pour les patients atteints d'HTAP,
première minute ; la modification de distance cliniquement significative est
● « C'est très bien, continuez ainsi » à 1 minute 30 secondes ; 33  m, en se fondant également sur la modification de la
● « C'est très bien, plus que 4 minutes, continuez ainsi  » à la qualité de vie [28]. L'encouragement lors du test et l'entraî-
deuxième minute ; nement produisent respectivement une amélioration de
● et ainsi de suite jusqu'au terme des 6 minutes. 30 m [29] et 60 m [22]. Pour ces raisons, il est indispensable
Le 6MWT doit être effectué deux fois afin que le patient de suivre les recommandations en vigueur pour la réalisa-
se familiarise avec le test, avec un repos minimum de tion de ce test afin de pouvoir comparer les résultats en
15  minutes entre les deux tests. Le test qui aboutit aux limitant au maximum les différentes influences [21].
meilleurs résultats est utilisé comme valeur de référence. Pour l'interprétation, la distance parcourue est comparée
Le 6MWT doit être réalisé dans un environnement où soit aux résultats précédents du patient, soit aux normes
des mesures d'urgence peuvent être appliquées rapide- obtenues par des équations de référence faisant intervenir
ment (proximité d'un médecin, téléphone pour joindre l'âge, le poids, la taille et le sexe (tableau 11.3).

126
11. Évaluation fonctionnelle des patients atteints de pathologies respiratoires

Tableau 11.3 Équations prédictives de la distance pour évaluer la capacité physique mais surtout la tolérance
parcourues lors du 6MWT [21] à l'effort en routine. Le 6MWT reste un effort à intensité
Auteur Tranche Équation Nombre de sous-maximale, comme pour la plupart des activités de
d'âge sujets la vie quotidienne, pouvant cependant devenir maximale
Priesnitz 6–12 ans 145,343 + (11,78 × âge) 92 M–96 F pour un patient présentant une atteinte sévère.
+ (292,22 × taille en m + Les indications du 6MWT sont le suivi des patients en
0,611 × différence de FC) phase pré- et postopératoire de chirurgie cardiothoracique,
− (2,684 × poids en kg) notamment en vue de chirurgie de réduction pulmonaire,
Geiger 3–18 ans M : 196,72 + (39,81 × âge) 280 M–248 F ainsi que de l'entrée en liste d'attente pour une transplanta-
− (1,36 × âge2) + (132,28 tion pulmonaire, et l'évaluation de l'effet d'un programme
× taille en m) de réadaptation pulmonaire. Le 6MWT est intégré à l'index
F : 188,61 + (51,50 × âge) BODE : index composite incluant l'IMC (indice de masse
− (1,86 × âge2) + (86,10 × corporelle ou Body mass index), le VEMS (Obstruction), la
taille en m) dyspnée sur l'échelle MMRC (Dyspnea) et la distance de
Li 7–16 ans M : 554,16 − 805 M–640 F marche au 6MWT (Exercise) [31]. L'index BODE est prédic-
(différence de FC × 1,76) tif de mortalité [31] et reflète mieux la sévérité de la BPCO
− (taille en cm × 1,23) « maladie générale », alors que le VEMS ne représente que
F : 526,79 − (différence de la part respiratoire de la maladie (classification GOLD). En
FC × 1,66) − (taille en cm Belgique, il est un des critères pour le remboursement de
× 0,62)
l'oxygénothérapie au long cours. En France, il est un argu-
Enright 40–80 ans M : (7,57 × taille en cm) 117 M–173 F ment pour permettre l'oxygénation exclusive à l'effort.
− (5,02 × âge) − (1,76 ×
poids en kg) − 309 m
F : (2,11 × taille en cm) Tests de la navette
− (2,29 × poids en kg) −
(5,78 × âge) + 667 m Il existe deux tests de navette : le test de la navette incré-
Camarri 55–75 ans 64,69 + (3,12 × taille en 33 M–37 F mental ou incremental shuttle walk test (ISWT) et le test
cm) + (23,29 × VEMS de la navette en endurance ou endurance shuttle walk test
en L) (ESWT). Ces tests consistent à réaliser des aller-retour entre
Troosters 50–85 ans 218 + (5,14 × taille en cm 29 M–22 F deux marques, d'où leur nom de « tests de navette », soit
− 5,32 × âge) − (1,80 × à intensité croissante (ISWT), soit à intensité constante
poids + 51,31 × sexe) (ESWT).
Sexe = 1 (M) ou 0 (F)
FC : fréquence cardiaque ; M : homme ; F : femme. Incremental shuttle walk test (ISWT)
L'ISWT est le plus fréquemment rencontré des deux [24],
L'évolution de la saturation transcutanée en O2 entre mais il reste moins répandu que le 6MWT. Cependant, on
le début et la fin du test renseigne sur une désaturation le retrouve de plus en plus souvent utilisé dans la littérature.
éventuelle qui, par définition, correspond à une diminu- Les différences majeures par rapport au 6MWT résident
tion de 4 %. La FC est observée également. La prise de ces dans un rythme de marche imposé et graduellement crois-
deux mesures après les 2 minutes de repos qui suivent sant, et dans le fait qu'il s'agit d'un test à intensité maximale.
l'arrêt du test permet d'évaluer la récupération du patient. L'ISWT [32] a été introduit par Singh en 1992 et découle
L'évolution de la dyspnée suite à l'effort est mise en rapport du test de Léger. Il consiste à faire marcher le patient, à un
avec ces deux paramètres pour permettre une interpréta- rythme donné par une bande sonore, entre deux repères
tion globale du test. séparés de 9 m. Le patient fait des aller-retour de 10 m, un
La bonne corrélation relevée entre la distance de marche, « bip » signale au patient le moment où il doit se trouver
la VO2 max et la charge maximale développée lors d'une près d'un plot ; le changement de rythme est précédé d'un
épreuve d'effort sur cyclo-ergomètre, aussi bien chez les triple « bip ». À chacun des 12 paliers de 1 minute, la vitesse
patients BPCO [17] que chez les enfants atteints de muco- croît progressivement (tableau  11.4). Le soignant peut
viscidose [30], renforce l'intérêt du 6MWT comme outil accompagner le patient durant la première minute pour

127
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Tableau 11.4 Vitesses et distances parcourues à chaque


palier du SWT
ENCADRÉ 11.2 Équations
Palier Vitesse (m/s) Distance
parcourue à
prédictives de la VO2 max
chaque palier (m) à partir de la distance atteinte
1 0,50 30 lors du ISWT
2 0,67 70 VO2 max (L/min) = 0,023 × distance (m) + 5,9
3 0,84 120 VO2 max (mL/kg/min) = 0,024 × distance (m) − 0,06
× poids (kg) + 0,06 × âge (années) + 6,44
4 1,01 180
5 1,18 250
6 1,35 330 pathique [37], chez les sujets âgés de plus de 70 ans [38] et
7 1,52 420 dans les pathologies cardiaques [39]. Dans les cancers (pul-
8 1,69 520 monaires non à petites cellules), il est prédictif – comme
9 1,86 630
le 6MWT – des résultats postopératoires, de la durée de
séjour à l'hôpital en postopératoire et de la survie [40].
10 2,03 750 Comme le 6MWT, l'ISWT est, chez des patients atteints
11 2,20 880 de BPCO inclus dans un programme de réhabilitation res-
12 2,37 1020 piratoire, associé un risque de mortalité 2,84 fois plus élevé
pour les patients qui font moins de 170 m au ISWT [41].
L'intensité maximale de l'ISWT est bien montrée par la
l'aider à gérer sa vitesse. Le test s'arrête quand le patient est bonne corrélation entre la VO2 max mesurée lors de l'ISWT
trop essoufflé pour maintenir la vitesse imposée, quand le et lors d'une épreuve d'effort sur cyclo-ergomètre ou sur
patient est à plus de 50 cm du plot lorsque le bip retentit tapis roulant [42]. De ce fait, il semble important d'avoir
ou si la fréquence cardiaque est à plus de 85 % de la fré- une connaissance des antécédents et risques cardiovascu-
quence maximale théorique [32]. Comme pour le 6MWT, laires du patient. Même s'il n'est pas obligatoire de réaliser
les consignes données par l'opérateur doivent être précises une épreuve fonctionnelle à l'exercice au préalable, elle est
et standardisées. Le texte suivant est lu : souhaitable et recommandée. Dans tous les cas, l'enregis-
« Vous allez marcher en aller-retour, d'un plot à l'autre, en trement et l'interprétation d'un ECG de repos sont indis-
vous adaptant à la vitesse des bips que vous allez entendre. pensables, comme pour le 6MWT.
Le triple bip signale qu'il faut accélérer. Le départ est très lent,
vous avez tout votre temps, puis progressivement vous aurez
Endurance shuttle walk test (ESWT)
à accélérer pour atteindre le plot à l'instant ou le bip retentit. »
Les paramètres mesurés sont la saturation transcutanée L'ESWT, introduit par Revill en 1999 [43], consiste en une
en O2, la FC, la dyspnée et le nombre de paliers atteints. Pour marche rythmée par une bande audio, entre deux repères
ce qui est des trois premiers, leur interprétation est iden- séparés de 9 m, à une intensité correspondant à 85 % de
tique à celle du 6MWT. À partir du dernier palier atteint et celle obtenue lors d'un ISWT, après environ 100 secondes de
des équations, on estime la VO2 max (encadré 11.2). L'ISWT marche d'échauffement. La réalisation d'un ISWT est donc
possède des valeurs de référence [33]. nécessaire au préalable. Sans que le patient soit au courant
Une augmentation de la distance parcourue entre le de la limite de temps, le test s'arrête après 20 minutes, sauf
premier et le second ISWT est notée [34]. Il est nécessaire si la dyspnée ou un autre symptôme nécessitent l'arrêt pré-
et fortement recommandé de réaliser deux tests initiaux maturément. Les paramètres évalués sont à nouveau iden-
afin de pouvoir évaluer un programme de réhabilitation tiques à ceux du 6MWT et de l'ISWT.
respiratoire. Une amélioration de 47,5 mètres est considé- L'ESWT donne un résultat reproductible dès la première
rée comme cliniquement significative après un programme tentative et est plus sensible que l'ISWT pour évaluer les
de réhabilitation respiratoire chez des patients atteints de effets d'une revalidation pulmonaire [43]. Il est également
BPCO [35]. une alternative au 6MWT pour évaluer une désaturation
L'ISWT est également validé pour l'évaluation de la capa- à l'effort [44], un traitement médicamenteux [45] ou un
cité à l'exercice dans la mucoviscidose [36], la fibrose idio- programme de réhabilitation respiratoire [46].

128
11. Évaluation fonctionnelle des patients atteints de pathologies respiratoires

Une amélioration de 65 secondes et 95 mètres au (nombre de répétitions du test nécessaire, valeurs norma-
ESWT est cliniquement significative pour le patient après tives, seuil minimal clinique significatif…).
bronchodilatation. Mais un seuil minimal de différence Une adaptation du SST consiste à répéter 5 fois le lever
clinique significative après un programme de réhabili- le plus rapidement possible. Ce test est fiable, valide et un
tation respiratoire n'a pu être démontré [47], alors qu'il marqueur de la capacité fonctionnelle dans un programme
semble être le meilleur outil pour évaluer la capacité en de réhabilitation respiratoire [53]. Un seuil minimal clini-
endurance après un programme de réhabilitation respi- quement significatif d'évolution du test à 1,7 seconde a été
ratoire [16]. proposé. Il est particulièrement adapté pour une évaluation
au domicile du patient.
Stepper test de 6 minutes
Step test de 6 minutes
Le stepper test de 6 minutes (ST6) a été mis au point pour
Le step test de 6 minutes ou 6-minute step test (6MST), issu
permettre un test sous-maximal dans un espace réduit.
du test de Harvard, consiste à monter et descendre une
Le test consiste à effectuer le plus grand nombre de steps
marche de 20 cm (représente la hauteur d'une marche d'es-
en 6 minutes, les consignes étant littéralement basées sur
calier) pendant 6 minutes. Les consignes et les paramètres
celles du 6MWT et les paramètres évalués identiques. Borel
évalués sont issus du 6MWT. Ce test est sous-maximal,
a montré que ce test était reproductible, sensible et sûr
fiable, reproductible et permet de montrer des désatura-
chez des patients atteints de BPCO [48]. Le ST6 semblait en
tions à l'exercice dans la fibrose idiopathique [54]. Il est éga-
outre bien corrélé au 6MWT.
lement reproductible dans la BPCO s'il est effectué par le
Le nombre de steps au ST6 est amélioré après un pro-
même opérateur et la réalisation d'un seul test est suffisante
gramme de réhabilitation respiratoire à domicile [49] et
[55]. Il est un marqueur de la capacité à l'exercice dans un
une étude est en cours pour évaluer si le ST6 peut être
programme de réhabilitation respiratoire, mais il est moins
un marqueur de la tolérance à l'effort au cours d'un pro-
sensible que le 6MWT [56].
gramme de réhabilitation respiratoire. Enfin, dans la fibrose
idiopathique, le nombre de steps est fortement corrélé à la
distance de marche au 6MWT. Ce test est réalisable et sûr Chester step test (CST)
pour les patients atteints de fibrose idiopathique. Il s'agit de monter et descendre d'une marche à une
Ce test est prometteur quant à son exploitation intra- cadence imposée et croissante toutes les 2 minutes (cinq
individuelle, son faible coût et la possibilité de le faire niveaux maximum). Ce test est reproductible pour des
partout. Cependant, il nécessite une standardisation patients BPCO mais ils ne parviennent pas à dépasser
notamment au point de vue du matériel qui peut présenter le deuxième niveau, ce qui semble montrer que l'incré-
des différences de résistance limitant la comparaison des mentation entre chaque niveau mériterait d'être adaptée
tests entre différents lieux. pour ces patients [57]. Ce test est bien corrélé au 6MWT
et à l'ISWT et est valide pour évaluer la capacité fonction-
Test du lever de chaise ou nelle [58].

sit-to-stand test
Test des escaliers
Le sit-to-stand test (SST) consiste à se lever d'une chaise sans
accoudoir (d'une hauteur standard de 46 cm) et de se ras- Ce test est apparu il y a longtemps (1948) mais son manque
seoir le plus grand nombre de fois possible en 1 minute. de standardisation (hauteur de marche, critères d'arrêt,
Il a été comparé au 6MWT dans la BPCO et les résultats nombre d'étages, durée du test…) ne permet pas une utili-
des deux tests sont bien corrélés entre eux, mais le SST pro- sation courante [59]. Il est utilisé en préopératoire comme
duit un stress cardiovasculaire moins important [50]. Une outil prédictif de complications cardiopulmonaires et de
bonne corrélation entre les effets neurophysiologiques des risque de mortalité après une résection pulmonaire. Le
deux tests a été notée [51]. Le SST semble bien corrélé à test des escaliers de 2 minutes chez des patients atteints
l'index BODE et a servi de moyen d'évaluation d'un pro- de BPCO montre des résultats similaires en termes de
gramme de réhabilitation respiratoire [52]. variation de saturation de pouls et de fréquence cardiaque
Cependant, ce test très simple d'exécution nécessite comparativement au 6MWT, avec une dyspnée plus
des études pour le valider et l'utiliser en pratique courante importante [60].
129
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Test de vitesse des 4 mètres ■


Ces tests permettent de suivre l'évolution de
la tolérance à l'effort des patients et de la mettre
Le test de vitesse des 4 mètres ou 4-metre gait speed (4MGS) en relation avec les normes lorsque ces dernières
est utilisé chez les personnes âgées. C'est un test chrono- existent.
métré qui consiste à demander au patient de marcher sur
une distance de 4 mètres à vitesse habituelle. Ce test est
standardisé, fiable, valide et reproductible pour les patients
atteints de BPCO [61, 62]. Ce test est amélioré après un pro-
gramme de réhabilitation respiratoire avec un MCID estimé
Références
à 0,11 m/s [62]. [1] ATS statement : guidelines for the six-minute walk test. Am J Respir
Crit Care Med 2002 Jul 1 ; 166(1) : 111–7.
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Conclusion [3] Garcia-Aymerich J, Lange P, Benet M, Schnohr P, Anto JM. Regular
physical activity reduces hospital admission and mortality in chro-
De nombreux tests ont fait l'objet de travaux ces dernières nic obstructive pulmonary disease : a population based cohort
années. Même si ces tests présentent tous un intérêt, le study. Thorax 2006 Sep ; 61(9) : 772–8.
manque de valeurs prédictives et de seuil clinique signifi- [4] Garcia-Aymerich J, Farrero E, Felez MA, Izquierdo J, Marrades RM,
Anto JM. Risk factors of readmission to hospital for a COPD exacer-
catif limite leur utilisation et le 6MWT reste le plus simple bation : a prospective study. Thorax 2003 Feb ; 58(2) : 100–5.
et plus courant dans le suivi de la tolérance à l'effort et de [5] Garcia-Aymerich J, Monso E, Marrades RM, Escarrabill J, et al. Risk
la capacité physique de tout patient atteint de pathologie factors for hospitalization for a chronic obstructive pulmonary
cardiorespiratoire au quotidien. Il nécessite une rigueur disease exacerbation EFRAM study. Am J Respir Crit Care Med
2001 Sep 15 ; 164(6) : 1002–7.
d'exécution en accord avec les recommandations scienti- [6] Celli BR, Cote CG, Lareau SC, Meek PM. Predictors of Survival in
fiques pour pouvoir être exploité au mieux. Il ne remplace COPD : more than just the FEV1. Respir Med 2008 Jun ; 102(Suppl.
cependant pas les épreuves d'effort réalisées en laboratoire 1) : S27–35.
pour une évaluation plus approfondie. Seuls l'absence [7] Polkey MI, Spruit MA, Edwards LD, Watkins ML, et al. Six-minute-walk
d'équations prédictives et le manque de collaboration test in chronic obstructive pulmonary disease : minimal clinically
important difference for death or hospitalization. Am J Respir Crit
obtenue en bas âge peuvent le rendre moins utilisable en Care Med 2013 Feb 15 ; 187(4) : 382–6.
pédiatrie, bien qu'avec un peu de patience il soit souvent [8] Spruit MA, Polkey MI, Celli B, Edwards LD, et  al. Predicting out-
réalisable à partir de 6 ans. comes from 6-minute walk distance in chronic obstructive pulmo-
nary disease. J Am Med Dir Assoc 2012 Mar ; 13(3) : 291–7.
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La méthodologie, les indications, les contre-
[13] Beaver WL, Wasserman K, Whipp BJ. A new method for detecting
indications et l'interprétation de l'épreuve d'effort anaerobic threshold by gas exchange. J Appl Physiol 1985 Jun ; 60(6) :
sont bien établies, mais sa réalisation demande un 2020–7.
matériel sophistiqué et un personnel expérimenté. [14] Wasserman K, Whipp BJ, Koyl SN, Beaver WL. Anaerobic threshold

Dans les pathologies respiratoires chroniques, and respiratory gas exchange during exercise. J Appl Physiol 1973
Aug ; 35(2) : 236–43.
l'évaluation par un test d'effort progressivement [15] Laviolette L, Bourbeau J, Bernard S, Lacasse Y, et al. Assessing the
croissant prend toute son importance étant impact of pulmonary rehabilitation on functional status in COPD.
donné les implications de l'intolérance à l'effort Thorax 2008 Feb ; 63(2) : 115–21.
sur la qualité de vie, la fréquence d'hospitalisation [16] Borel B, Provencher S, Saey D, Maltais F. Responsiveness of various
exercise-testing protocols to therapeutic interventions in COPD.
et la survie de ces patients.
Pulm Med 2013 ; 2013 : 410748.

Différents tests de terrain existent comme alter- [17] Mc Gavin CR, Gupta SP, Mc Hardy GJ. Twelve minute walking test
natives, dont le test de 6 minutes de marche est un for assessing dissability in chronic bronchitis. BMJ 1976 ;1 : 822–3.
des plus courants.

130
11. Évaluation fonctionnelle des patients atteints de pathologies respiratoires

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II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

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132
Chapitre 12
Nutrition et
bronchopneumopathie
chronique obstructive
Coralie Colbrant, Éric Marchand

PLAN DU CHAPITRE
Pourquoi évaluer l'état nutritionnel ? 134
Comment évaluer l'état nutritionnel ? 135
Rôle du kinésithérapeute 137

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

L'importance de la nutrition comme déterminant de l'état cette baisse de compliance est due à une diminution de la
de santé général est largement acceptée. L'intérêt de l'état fibre élastique [12, 13]. Dans l'obésité, elle est plutôt due
nutritionnel des patients atteints de bronchopneumo- à une baisse de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF)
pathie chronique obstructive (BPCO) est de plus en plus [3, 10]. L'hyperinflation, bien connue dans la BPCO, est
prédominant. Depuis longtemps, les études se sont princi- présente pour les deux états nutritionnels mais est moins
palement concentrées sur la dénutrition et ont démontré importante dans l'obésité [10]. Chez les patients dénutris, il
que les patients BPCO sont plus à risque au fur et à mesure existe une perte de la force des muscles respiratoires, de la
que la maladie évolue [1]. Cependant, le surpoids et l'obé- ventilation maximale et de la capacité vitale (CV) [14]. Chez
sité sont davantage pris en compte dans la BPCO [2]. En les patients obèses, il y a une baisse de la CRF, du volume
effet, il est de mieux en mieux reconnu qu'il existe un lien de réserve expiratoire (VRE) et de la capacité pulmonaire
entre la BPCO et l'obésité malgré le peu de connaissance totale (CPT) [3, 11, 15].
quant à la nature de cette relation [3].
L'état nutritionnel influence
Pourquoi évaluer l'état la tolérance à l'exercice
nutritionnel ? La dyspnée et l'intolérance à l'exercice sont des symptômes
majeurs pour les patients souffrant de BPCO.
Détecter les problèmes alimentaires par un dépistage nutri- La diminution de l'activité physique quotidienne peut
tionnel est important. Ceci permet de prendre des mesures être liée à un risque accru d'hospitalisation et d'une
appropriées pour améliorer la qualité de vie, la santé, le survie plus courte. À côté des paramètres fonctionnels
pronostic vital ainsi que pour diminuer les coûts des soins respiratoires évaluant l'obstruction des voies aériennes et
médicaux liés à la BPCO [1, 4]. les anomalies des échanges gazeux respiratoires, d'autres
La prévalence de la dénutrition se situe entre 20 et 70 % déterminants de la tolérance à l'exercice ont été mis en
chez les patients BPCO [5–7]. Il est évident que la dénutri- évidence. Parmi ceux-ci, la capacité des muscles locomo-
tion est partiellement associée à la sévérité de l'obstruction teurs et respiratoires occupe une place importante [16,
bronchique. Lorsque la dénutrition est définie par un poids 17]. Les patients BPCO ayant un indice de masse corporel
corporel de moins de 90 % du poids idéal, alors 20 à 50 % des (IMC) diminué présentent une diminution de la capacité
patients BPCO présentent une insuffisance pondérale [8]. des muscles inspiratoires évaluée par la pression inspira-
La prévalence de la BPCO et de l'obésité augmente par- toire maximale (PI max) [18, 19]. La fonction des muscles
tout dans le monde [3]. Au Pays-Bas, une étude sur l'obésité a squelettiques des membres inférieurs et supérieurs est
été réalisée dans une large population de patients BPCO et a par ailleurs très étroitement associée à la masse maigre
montré une prévalence de 18 % tous stades confondus. Plus chez les patients BPCO comme dans la population géné-
précisément, la prévalence variait entre 16 et 24 % pour les rale [20].
stades GOLD 1 et 2 et était de 6 % pour le stade GOLD 4 [9]. Il n'est donc pas étonnant que la capacité aérobique
La dénutrition et l'obésité ont toutes les deux une maximale (consommation maximale en O2) soit diminuée
influence sur les mêmes aspects tels que la fonction pulmo- chez les patients BPCO dont l'IMC est abaissé [21, 22].
naire, la performance physique et le pronostic. Cependant
leur impact n'est pas comparable à tous les niveaux. L'obésité L'état nutritionnel influence
a également des effets sur les symptômes de la BPCO que la
dénutrition n'a pas, comme une augmentation de la dyspnée le pronostic vital
et une baisse de la qualité de vie avec un niveau de fatigue Dans la population générale, il existe un excès de mortalité
plus élevé que les patients BPCO de poids normal [10, 11]. tant chez les patients dénutris que chez les patients obèses.
À l'inverse, chez les patients BPCO, si un IMC abaissé est
L'état nutritionnel influence effectivement associé à une mortalité très augmentée,
la fonction pulmonaire l'obésité est associée à un meilleur pronostic vital, en tout
cas lorsque le VEMS chute sous 50 % [23]. Lorsque l'IMC
La compliance pulmonaire est diminuée dans les deux situa- est normal, une masse maigre abaissée est également un
tions mais pour des raisons différentes. Dans la dénutrition, facteur de mauvais pronostic vital [24].

134
12. Nutrition et bronchopneumopathie chronique obstructive

L'évolution de l'état nutritionnel d'un patient BPCO faible. Cependant, il n'y a toujours pas de données pré-
est également un déterminant important du pronostic cises concernant cette baisse progressive de la masse
vital. Ainsi, comme dans la population générale, une musculaire chez les BPCO par rapport aux sujets âgés
perte de poids est associée à une mortalité augmentée. sains [10].
Chez les patients BPCO présentant un IMC inférieur Nous distinguons de multiples méthodes afin d'évaluer
à 25, une prise pondérale améliore le pronostic vital l'état nutritionnel du patient BPCO. Parmi celles-ci, il existe
[25]. Ceci rejoint des observations faites par l'équipe la mesure du poids corporel (exprimé en kg), le calcul de
de Maastricht, qui avait constaté que les patients qui l'IMC (kg/m2), les indices anthropométriques, impliquant
gagnaient du poids dans un programme de supplémen- les plis cutanés et la mesure de la circonférence brachiale,
tation nutritionnelle avaient un meilleur pronostic vital et les méthodes physiques et d'imageries comprenant
[26]. l'impédancemétrie et l'absorptiométrie biénergétique. La
tomodensitométrie peut également analyser la composi-
tion corporelle [30]. Il existe aussi un questionnaire nommé
Comment évaluer l'état Mini Nutritional Assessment® (MNA) qui permet d'évaluer
le risque de malnutrition.
nutritionnel ?
En général, l'évaluation nutritionnelle chez les patients Calcul du poids et de l'indice
BPCO n'est pas encore assez rigoureuse et devrait être sys- de masse corporelle
tématique lors de l'évaluation clinique initiale, au même
titre que la spirométrie [27]. Il semble donc important de La mesure du poids s'effectue idéalement en sous-vêtements,
mentionner les différentes mesures qui existent afin d'éva- le matin à jeun.
luer l'état nutritionnel dans la BPCO. Le poids du sujet est comparé à une valeur nor-
Avant toute chose, il est important de savoir qu'il existe male de référence pour évaluer son état nutritionnel.
plusieurs modèles de la composition corporelle. Le plus uti- Deux méthodes sont couramment utilisées. La pre-
lisé et le plus simple est celui à deux compartiments, repre- mière consiste à exprimer le poids en pourcentage du
nant la masse maigre et la masse grasse [28]. poids idéal établi en fonction des tables des compagnies
La masse maigre inclut le plus souvent la masse osseuse, d'assurance-vie [31]. On considère généralement qu'il
les organes et le tissu musculaire [28, 29]. En vieillissant, il y a existe une dénutrition lorsque le poids observé est
une modification importante de la composition corporelle inférieur à 90 % du poids idéal. La seconde méthode
chez l'être humain. Une augmentation du pourcentage de consiste à calculer l'indice de masse corporelle (IMC)
la masse grasse et une diminution de la masse maigre ont ou l'indice de Quételet. L'IMC est une mesure simple
été constatées [29]. Entre 35 et 85 ans il y a une perte de du poids par rapport à la taille couramment utilisée
masse maigre de 15 % chez les hommes et de 14 % chez les pour estimer le surpoids et l'obésité chez l'adulte. Il
femmes [28]. correspond au poids divisé par le carré de la taille,
La diminution de la masse musculaire explique en exprimé en kg/m 2 [32].
majeure partie la perte de la masse maigre au cours du vieil- Le poids ou l'IMC ne suffisent pas et peuvent sous-
lissement [28, 29]. Il est intéressant de savoir que la masse estimer la dénutrition. Ainsi un poids corporel normal
musculaire recouvre une partie considérable de la masse peut dissimuler une faible masse maigre par une aug-
maigre représentant environ 10 à 20 % du poids du corps mentation de la masse grasse. Inversement, la masse
total [10]. maigre peut être conservée pour un IMC abaissé [33].
Actuellement, il est bien établi que les patients Ainsi, il a été montré que la dénutrition était présente
autant dénutris qu'obèses ont une perte de masse chez 10 à 20 % des sujets BPCO, alors que leur poids est
maigre et, par conséquent, de force, particulièrement considéré comme normal [5]. L'évaluation de la com-
au niveau des membres inférieurs (quadriceps). Des position corporelle permet donc de situer où la perte
études ont montré que les patients BPCO avaient une se produit et d'effectuer une mesure quantitative des
masse musculaire squelettique plus basse que les sujets variations du poids. Elle donne également une informa-
âgés n'étant pas atteints de BPCO. Une hypothèse serait tion plus précise que l'IMC quant à la perte de masse
que ces patients démarrent avec une masse maigre plus maigre.

135
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Indices anthropométriques mesurer l'état nutritionnel en analysant distinctement la


masse maigre et la masse grasse [38].
Il existe deux mesures anthropométriques différentes
afin d'évaluer l'état nutritionnel : les plis cutanés et la Impédancemétrie bioélectrique ou BIA
mesure de la circonférence brachiale. Cependant, ces
deux indices ont été peu utilisés dans l'évaluation nutri- Elle étudie la composition corporelle et donne des infor-
tionnelle des patients atteints de pathologies respira- mations plus précises sur la sarcopénie. Le principe de l'im-
toires chroniques. pédancemétrie repose sur le fait que la masse maigre est
un meilleur conducteur d'électricité que la masse grasse,
due aux électrolytes dissous dans l'eau. La membrane
Plis cutanés cellulaire joue le rôle de la capacité électrique entre deux
L'évaluation de la masse grasse de l'organisme se fait par résistances (intra- et extracellulaire). Pour des fréquences
la mesure de l'épaisseur du pli cutané qui consiste en une basses (1 à 5 hertz), le courant franchit les liquides extra-
double couche de peau et de graisse sous-cutanée [34]. cellulaires, tandis que pour des fréquences plus hautes
Ces mesures sont effectuées avec un compas adapté et (plus de 500 hertz), il traverse les deux secteurs cellulaires.
réalisées au niveau bicipital, tricipital, supra-iliaque et Ceci permet de mesurer la totalité de l'eau en intra- et
sous-scapulaire. Une relation constante entre la masse extracellulaire. Ce courant généré permet de mesurer la
grasse totale et l'épaisseur de la graisse sous-cutanée masse non grasse et l'eau totale du corps donnant ainsi
existe aux endroits où les mesures sont effectuées. Ceci un modèle à deux compartiments : non gras et gras. Les
n'est cependant pas toujours le cas, surtout chez les per- valeurs obtenues avec cette évaluation sont comparées à
sonnes âgées, car la graisse s'installe le plus souvent au des valeurs prédites d'hommes et de femmes âgés entre
niveau du tronc. Cette méthode peut alors surestimer 15 et 94 ans. Ainsi, une déplétion de la masse maigre existe
la masse maigre et sous-estimer la masse grasse chez les lorsque la valeur est inférieure à 16 kg/m2 chez l'homme ou
patients BPCO [35]. 15 kg/m2 chez la femme [5].

Mesure de la circonférence brachiale Absorptiométrie biénergétique ou DEXA


La mesure de la circonférence brachiale s'effectue au DEXA est une méthode d'évaluation directe non invasive
même endroit que les plis cutanés bicipital et tricipital, de la composition corporelle. Celle-ci mesure directement
c'est-à-dire à mi-distance entre l'acromion et l'olécrâne. trois composantes de la composition corporelle incluant
Elle permet d'estimer la masse musculaire. La circonfé- la masse maigre, la masse minérale osseuse et la masse
rence musculaire brachiale (CMB) s'obtient par la formule grasse. Cette méthode est la référence en recherche cli-
suivante : CMB = CB − (π × PCT), CB correspondant à la nique mais est également utilisée dans la pratique cli-
circonférence brachiale et PCT à la mesure du pli cutané nique. DEXA est intéressant chez les patients qui ont une
tricipital [36, 37]. augmentation du risque de perte de masse maigre et d'os-
téoporose (BPCO). En pratique clinique quotidienne, l'uti-
lisation de DEXA est limitée dans la plupart des centres
Méthodes physiques et d'imageries par le coût élevé de cette méthode ainsi qu'en raison de
l'exposition supplémentaire à des radiations, même si
La méthode physique est l'impédancemétrie ou, en anglais, celle-ci est faible [30].
bioelectrical impedance analysis (BIA) et la technique d'ima-
gerie correspond à l'absorptiométrie biénergétique ou, en
anglais, dual energy X-ray absorptiometry (DEXA) ainsi que
Tomodensitométrie ou CT
la tomodensitométrie ou, en anglais, computerized tomo- Le CT ou scanner est une technique un peu plus récente
graphy (CT). Ces trois méthodes permettent une estima- qui permet une quantification précise de la composition
tion de la masse maigre et la masse grasse. du corps entier. Il analyse de manière régionale la masse
Il est important de savoir que la meilleure manière de maigre et la masse grasse au niveau de la troisième vertèbre
dépister les patients à risque de dénutrition ou d'obésité lombaire. Il fournit des détails sur des muscles spécifiques,
est d'évaluer la composition corporelle [4, 8]. Celle-ci reflète les tissus adipeux et les organes qui ne sont pas donnés par
les apports nutritionnels, les pertes et les dépenses éner- DEXA ou BIA. Il est également, avec une image ciblée sur la
gétiques variant au cours du temps. Elle permet donc de cuisse droite, à mi-chemin entre la symphyse pubienne et
136
12. Nutrition et bronchopneumopathie chronique obstructive

le condyle inférieur du fémur, un prédicateur de la mortalité La prescription d'une intervention nutritionnelle n'est
chez les patients BPCO sévère avec une insuffisance respira- bien entendu pas du ressort du kinésithérapeute. Celui-ci
toire chronique [30]. pourra cependant renforcer le message en connaissant
quelques conseils simples. Chez des patients très dys-
pnéiques, le repas est souvent interrompu. Le fractionne-
Mini Nutritional Assessment® ment peut donc être utile et limiter ainsi une réduction des
(MNA) apports caloriques liés à ces problèmes. Le kinésithérapeute
peut également recommander d'éviter les aliments favori-
Le MNA® est un questionnaire qui identifie les risques sant une réplétion gazeuse de l'estomac (boissons gazeuses,
de malnutrition ainsi que les caractéristiques de style de pois, choux…) qui aggravera souvent la dyspnée.
vie associées à un risque nutritionnel, alors que le taux La problématique de l'obésité ne doit pas être négligée.
d'albumine et l'IMC sont encore dans les normes [39]. Une surcharge de poids est souvent un facteur aggravant
Chez les patients ambulatoires et hospitalisés, le MNA® la dyspnée. Bien que l'obésité soit un facteur de bon pro-
est prédictif de la mortalité et des coûts des soins. Pour nostic sur le plan vital chez le patient BPCO sévère et que
ceux vivant à domicile ou dans des maisons de repos, ce l'amaigrissement non volontaire soit au contraire asso-
test se base sur les conditions de vie, les habitudes nutri- cié à une mortalité accrue, il est raisonnable de proposer
tionnelles et les maladies chroniques. Il permet donc une un régime hypocalorique en cas d'obésité jouant un rôle
intervention ciblée et est un facteur prédictif de morta- dans les symptômes. On veillera toujours dans ce cas à un
lité. Il est utilisé pour des interventions nutritionnelles, apport protéique suffisant, en particulier pour les patients
des programmes d'éducation nutritionnelle ainsi que des bénéficiant d'un programme de réentraînement à l'effort.
programmes d'intervention physique chez les personnes Le programme de revalidation pulmonaire a plusieurs
âgées. Les scores supérieurs ou égaux à 24 correspondent objectifs dont celui de renforcer les muscles. Le kinésithé-
à un état nutritionnel adéquat, ceux entre 17 et 23,5 rapeute peut donc jouer un rôle dans l'augmentation de la
indiquent un risque de malnutrition et tous les scores masse musculaire et par conséquent de la masse maigre.
inférieurs à 17 correspondent à une malnutrition pro-
téino-calorique [40, 41].
Points clés

L'état nutritionnel est un déterminant impor-
Rôle du kinésithérapeute tant de la tolérance à l'exercice, la qualité de vie et
du pronostic vital dans la BPCO.
L'état nutritionnel est un facteur important dans le traite- ■
Les mesures du poids et de l'IMC sont des
ment de la BPCO, vu les conséquences de la malnutrition mesures de base faisant partie intégrante de l'éva-
chez ces patients. Parmi les recommandations de l'American luation clinique des patients atteints de BPCO,
Thoracic Society (ATS) et de l'European Respiratory Society tant lors de l'évaluation initiale que lors des
(ERS), il est indiqué qu'une intervention et une éducation contrôles ultérieurs.
nutritionnelle des patients BPCO font partie intégrante de ■
Il est important d'évaluer la composition corpo-
la réhabilitation pulmonaire, un des éléments clé du traite- relle du patient BPCO afin de déterminer la masse
ment de ces patients [42]. Le poids est un élément impor- maigre et la masse grasse.
tant dans l'évaluation clinique de tout patient présentant ■
La masse musculaire étant un composant essen-
une maladie respiratoire chronique. Il est important de tiel de la masse maigre et un déterminant impor-
détecter, lors d'une première évaluation, les patients pré- tant de la tolérance à l'exercice chez les patients
sentant un risque de déplétion nutritionnelle. Par ailleurs, BPCO, il peut être utile de l'évaluer, en particulier
l'évolution du poids est un élément au moins aussi impor- lorsque l'IMC est faible.
tant. Ce paramètre sera donc contrôlé sur base régulière, en ■
Bien que la prescription d'une intervention nutri-
particulier chez les patients bénéficiant d'un programme de tionnelle ne soit pas du recours du kinésithérapeute,
réentraînement à l'effort ou chez ceux ayant subi une exa- celui-ci peut concourir à sensibiliser le patient à
cerbation sévère de leur maladie. On s'inquiétera en cas de l'importance de son état nutritionnel pour sa santé
perte de poids non volontaire supérieure à 10 % en 6 mois et à renforcer le message véhiculé par d'autres pres-
ou 5 % en 1 mois. tataires de soins par des conseils simples.

137
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

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139
Chapitre 13
Évaluation de la qualité de vie
chez l'insuffisant respiratoire
chronique
Dominique Monnin, Dan Adler, Jean-Paul Janssens

PLAN DU CHAPITRE
Éducation thérapeutique et qualité de vie 142
Qualité de vie, qualité de vie liée à la santé,
état de santé 147
Conclusion 151

Kinésithérapie respiratoire
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II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Éducation thérapeutique fois indifféremment avec ceux d'adhérence ou d'adhésion.


L'observance thérapeutique désigne la manière dont une
et qualité de vie personne suit plus ou moins scrupuleusement ce qu'un
soignant lui a prescrit. « L'observance fait référence à l'exé-
Les notions d'éducation thérapeutique et de mesure cution d'une règle, d'une loi, surtout en matière religieuse
de la qualité de vie sont indissociablement liées dans les et ne suppose pas l'accord de celui qui exécute. À l'inverse,
contextes de traitement et de réhabilitation : l'une comme l'adhérence évoque une “soudure” de deux éléments
moyen utilisé par les soignants pour aider les patients d'égale valeur. Entre ces deux pôles, l'adhésion s'intéresse à
à mieux vivre avec leur problème de santé ; l'autre pour la dimension contractuelle de la relation médecin–patient
mesurer à quel point leur qualité de vie est affectée par en incluant le sens de consentement et d'approbation. » [1]
la maladie ou quantifier l'efficacité des interventions thé- La quasi-totalité des textes publiés à ce sujet discutent la
rapeutiques dont le but annoncé est d'aider les patients à même question : une bonne part des gens ne font pas ce
être plus satisfaits de leur vie. qui figure sur l'ordonnance établie à leur intention (médi-
Les moyens déployés sous l'appellation « éducation caments non ingérés, régimes alimentaires non respec-
thérapeutique » couvrent une vaste palette d'interventions tés, hygiène de vie négligée…). Après analyse, les auteurs
qui va de l'enseignement d'une technique de soins comme proposent généralement une manière d'améliorer cette
l'inhalation d'un médicament jusqu'à des psychothérapies situation qui, toutes pathologies confondues, motive plus
– le plus souvent d'orientation comportementale – en de 10 % des hospitalisations aux États-Unis et dont le coût
passant par diverses formes de support et plans d'action. annuel se chiffre en milliards de dollars [2]. On comprend
La dynamique de groupe est souvent mise à contribution que les gestionnaires de santé s'y intéressent, ainsi que les
pour permettre aux patients de bénéficier de l'expérience soignants qui se sentent mis en cause dans leur efficacité
des personnes qui vivent avec une affection similaire à la par ces patients peu observant !
leur et de lutter contre les risques de désocialisation. Dans les faits, tout semble pourtant simple : sujette à un
Les soignants disposent aujourd'hui d'un certain nombre problème respiratoire, une personne consulte son méde-
d'outils qui leur permettent de mesurer la qualité de vie cin ou un centre d'urgences. L'homme de l'art établit un
des patients ou, du moins, la façon dont ceux-ci s'estiment diagnostic, explique son problème au patient et lui fixe la
satisfaits de leur vie. Il s'agit toujours de questionnaires dans conduite à adopter pour cheminer vers la stabilisation,
lesquels les patients sont invités à prendre position sur des l'amélioration ou, le plus souvent heureusement, la guérison
postulats proposés à leur appréciation. Certains ont pour but de son affection. À l'hôpital, il consigne ce qui doit être fait
de dresser un tableau de qualité de vie globale (short form 36 et administré dans le dossier du patient. En consultation, il
ou SF-36), d'autres cherchent à préciser le degré de satisfaction confirme la substance de son discours sur une ordonnance
de patients atteints d'une même affection (par ex. : St. George's (ou prescription). Et pourtant… Si les prescriptions sont rela-
Respiratory Questionnaire ou SGRQ, pour les patients atteints tivement bien suivies par les patients atteints de problèmes
de BPCO). Une fois les données récoltées, reste cependant à ponctuels, l'assiduité chute jusqu'à 50 % lorsque ces derniers
déterminer quels types d'informations fournissent ces ques- sont atteints d'une affection chronique [3]. Les institutions
tionnaires et à quel point ces informations sont fiables pour résolvent assez simplement la question : le personnel soi-
évaluer les effets d'un traitement ou le devenir d'un patient. gnant distribue les médicaments et supervise leur ingestion,
Ce chapitre tentera une approche compréhensive des prescrit la diète et vérifie que poches, tiroirs ou armoires ne
notions que recouvre le terme d'« éducation thérapeu- regorgent pas de sucreries, propose une activité physique
tique », puis décrira les apports et limites des outils d'éva- et la fait exécuter sous contrôle. Malgré cela, combien de
luation de la qualité de vie. médicaments alimentent le gazon, les lavabos et autres WC
des établissements de soins ! Et la question reprend toute
Observance, adhérence et autres son acuité le jour où le patient retourne chez lui.
écarts
Un phénomène complexe
La médecine occidentale produit une abondante littéra-
ture consacrée à l'observance thérapeutique. Cette notion La non-observance revêt des formes très diverses : horaires
apparaît dans la littérature anglophone sous le terme de erronés, dosages inexacts, interruptions prématurées,
compliance. Certains auteurs francophones l'utilisent par- pauses, voire même oubli total du traitement. Les raisons le

142
13. Évaluation de la qualité de vie chez l'insuffisant respiratoire chronique

plus souvent invoquées par les patients réfèrent à l'impres- la forme de « prescrire par ordonnance ». Prescrire signifie
sion qu'ils n'ont pas besoin d'un tel traitement, que celui-ci d'abord « condamner, enrôler  », puis devient progressi-
ne servira à rien, qu'il pourrait s'avérer néfaste ou qu'ils n'ont vement « fixer de façon précise, exiger, rendre une chose
pas bien compris les instructions qu'ils ont reçues [4]. L'avis indispensable ». Le préfixe pre- marque le lieu, « devant »,
des médecins à ce sujet varie parfois considérablement mais aussi l'antériorité. La prescription a été pensée et écrite
par rapport à celui de leurs patients. À titre d'exemple, les par quelqu'un d'autre ; elle figure là, sur un papier. Ne reste
médecins considèrent que si les diabétiques ne suivent pas plus qu'à la mettre en pratique. Elle provient d'un supérieur
le régime qui leur est prescrit, c'est à 80 % une question de qui jouit d'un pouvoir comparable à celui de la justice, plus
motivation ; les conditions économiques, l'environnement important même puisqu'en fin de compte, ce feuillet sur
socio-familial, les limitations physiques ou physiologiques lequel ont été jetés quelques mots est susceptible d'enga-
invoqués par les patients ne sont pas considérés comme ger l'avenir du patient ; plus encore, son absence d'avenir,
des interférences plausibles [5]. sa mort. C'est dans ce contexte que le patient est appelé à
Le même écart se manifeste dans la manière dont les se montrer compliant, c'est-à-dire se plier à « une règle, un
douleurs des patients sont prises en considération par ordre, quelque chose que quelqu'un d'autre veut qu'il fasse »
les soignants : d'un côté, « un professionnel soucieux du [12] ; à moins qu'il ne réagisse contre cette prescription car,
contrôle de la douleur du et par le patient », en face de si le préfixe co- signifie habituellement « avec », il est bon
lui, un être souffrant « qui se plaint que les soignants ne de se rappeler que cet « avec » veut dire à la fois rassemble-
l'écoutent pas » [6]. Les deux parties peinent à trouver la ment et opposition, « le partenaire étant aussi l'adversaire ».
voie qui permettrait d'exprimer douleur et souffrance avec Dans des circonstances comme le sport, faire une partie de
des mots. À l'évidence, chacun ne place pas les mêmes tennis avec un ami signifie aussi jouer contre cet ami. Il n'y
attentes dans la rencontre que constituent la consultation a qu'un pas de l'obéissance à la révolte ; le patient qui ne
ou la séance de traitement [7]. Les patients se focalisent fait pas vraiment siennes les prescriptions médicales a de
sur leurs symptômes et la manière dont ils seront recon- multiples raisons de les biaiser, de les contourner ou tout
nus, éprouvent un corps devenu étrange, vivent l'angoisse simplement de les ignorer.
de la maladie, s'inquiètent de l'avenir, expérimentent un
sentiment bizarre de solitude, d'exclusion de leur groupe
social… Mais le besoin d'écoute, de compréhension au sens
Relation soignant–soigné
profondément humain du terme qui les habite vient sou- À parcourir la littérature médicale, deux évidences s'im-
vent se briser sur les impératifs d'efficacité anamnestique posent d'emblée : « Lorsque les patients sont encouragés à
et horaire que s'impose le soignant, interrompant ainsi le participer à leur traitement (…), l'évolution de la maladie et
récit de son interlocuteur [8]. Quand l'un confie son vécu, les résultats de la thérapie en sont améliorés [mais] cepen-
son interlocuteur lui répond en termes scientifiques. La spi- dant, il serait naïf d'imaginer que le simple fait de fournir
rale des messages indirects est entamée. « Soumis au stress des informations amènera infailliblement le patient à être
et à l'anxiété provoqués par la maladie, certains patients compliant [à son traitement]. » [13] Les spécialistes utilisent
régressent vers des besoins infantiles auxquels les méde- des modes de communication qui laissent peu de place à
cins ne sont pas habitués à faire face. Irrités de cette non- l'implication du patient [14]. À la sortie d'une consultation
réponse à leur attente, ils manifestent leur insatisfaction par de pédiatrie, près d'une mère sur quatre ne peut pas expli-
des attitudes de non-compliance. » [9, 10] citer clairement les indications que le médecin lui a fournies
concernant le traitement de son enfant [15] ! Il s'avère donc
Éclairage sémantique primordial « de clarifier les composantes de l'interaction qui
permettent de définir une approche centrée sur le patient,
Le malentendu se retrouve au sein même des mots qui à même non seulement de fournir les éléments d'une
constituent le dialogue. Le Dictionnaire historique de la anamnèse médicale et sociale complète et fiable, mais aussi
langue française nous apprend que la racine latine du mot d'identifier les problèmes émotionnels » [16]. Le vécu du
ordonnance réfère à « mettre en ordre, mettre de l'ordre, patient ne peut pas entrer dans une dichotomie savoir/
d'où gouverner, disposer de » [11]. D'abord utilisé dans vécu. Il forme un savoir spécifique sur la manière dont le
le langage juridique, le mot ordonnance « exprime l'idée patient vit sa maladie, entièrement dépendant des chemins
d'une volonté, d'une décision émanant d'un supérieur » et que celui-ci a empruntés pour l'acquérir. Un savoir qui prend
sera repris au xvie siècle dans le vocabulaire médical sous la forme d'un gain de sens constitue une ­manifestation de

143
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

l'intention. Quelle est la nature de l'interaction qui permet au-delà de simples interventions comportementalistes, à
l'accès à cette conscience, quelles en sont les exigences et, accompagner une personne dans son processus de forma-
partant, quel en sera le contenu ? tion au sens large du terme, celui qui permet à l'individu
Historiquement, le médecin a d'abord été celui qui de dévoiler et de vivre les possibles de sa vie, parfois dans
écoute et conseille. Plus tard, le développement scientifique la douleur et la souffrance ? En d'autres termes, si la société
a proposé des techniques d'investigation qui permettent le fait pour certaines vaccinations rendues obligatoires
de quantifier un certain nombre de données biologiques par exemple, une personne peut-elle s'arroger le droit de
et de les utiliser comme autant d'indicateurs pour dia- contraindre une autre personne, positivement ou négative-
gnostiquer une affection et suivre son évolution. Depuis ment, sous motif de promouvoir sa santé ?
quelques années, le monitoring nous garantit des infor- Dans un ouvrage de vulgarisation autant que de référence
mations en temps réel. Une puce électronique parvient à [18], A. Giordan montre bien comment les trois grandes
relever le nombre de médicaments sortis d'un emballage, traditions de la pédagogie ne cessent de s'entrecroiser pour
la fréquence, la durée, les horaires d'utilisation d'un appareil, tisser la toile du savoir efficient. L'apprendre ne peut se résu-
ou d'autres paramètres que le soignant consulte à espaces mer à un « simple mécanisme d'enregistrement » effectué
réguliers, sur l'appareil ou par télémétrie. Mais si le « mou- par un cerveau qui accumulerait les informations provenant
chard » dit combien de comprimés sont sortis de la boîte, d'une source extérieure. Pas plus qu'il ne peut être réduit au
il ne précise pas s'ils ont été absorbés [17] ! Et, sur un autre résultat d'un entraînement dans lequel l'enseignant divise-
plan, même entrés dans la pratique quotidienne, il faut bien rait les tâches à accomplir en activités effectuées par l'appre-
reconnaître qu'analyse et monitoring revêtent un caractère nant dont l'intérêt serait tenu en éveil par des récompenses
inquisiteur et ne devraient être utilisés qu'avec le consen- ou des pénalisations. Pas question enfin de considérer que
tement du patient. En témoignent les discussions éthiques l'apprentissage puisse s'effectuer par la seule propension des
autour des tests de dépistage du Sida : peut-on ou non les individus à rechercher et sélectionner des informations en
pratiquer à l'insu d'un individu ? Il demeure néanmoins que réponse à leur curiosité naturelle. Essayons donc avec l'au-
ces avancées technologiques constituent des outils inté- teur de poser les critères essentiels de l'apprendre :
ressants, souvent même décisifs dans le suivi d'un grand l « Un savoir est une chose que l'on s'invente pour expli-

nombre d'affections. quer – c'est-à-dire donner du sens à – une situation [et] ce


Dans la foulée de l'avènement des sciences cognitives, sens (…) n'est jamais directement accessible. »
ont fleuri les concepts d'éducation thérapeutique et d'édu- l «  Apprendre consiste dès lors à s'apercevoir que ses
cation à la santé. Ces interventions de type pédagogique savoirs sont peu ou pas adéquats pour traiter [une]
reposent toutes plus ou moins sur les principes de la psy- situation. »
chologie comportementale : la maladie constitue un bou- l « La compréhension d'un savoir nouveau est le résultat

leversement dans la vie d'un individu. Face à cet imprévu, d'une transformation – souvent radicale – de la représen-
celui-ci s'enlise dans la dépression ou travaille à développer tation mentale de l'apprenant. (…) L'Autre (un inconnu
des adaptations. Cela requiert un processus d'apprentissage rencontré au hasard ou un professionnel – enseignant,
qui progressera d'autant mieux que l'apprenant sera épaulé médiateur) doit faciliter la production de sens de chaque
et disposera d'indicateurs qui lui permettent de juger de la individu, en l'accompagnant et en interférant avec ses
difficulté à laquelle il est confronté, des stratégies à dévelop- conceptions. »
per, des moyens à engager et des progrès déjà réalisés pour l « Cette transformation ne peut se réaliser sans une cer-

parvenir à son but. On peine à compter les séminaires, for- taine confiance en soi ni une certaine confiance en l'autre,
mations et autres ouvrages qui garantissent tous les secrets en celui qui peut faciliter. »
de ce type d'approche aux soignants. l « [Sinon], on n'apprend que ce qui nous fait plaisir ou

ce qui renforce nos convictions ; en fait, ce que l'on connaît


déjà. »
Quelle approche pédagogique ? l « Intimement liée à l'histoire de l'individu, [la représen-

Hors des querelles d'école, demeure une question cruciale : tation] forme le soubassement de son identité et plonge
les soignants doivent-ils développer des approches péda- ses racines dans la culture ambiante. [Elle] fait office de
gogiques à même d'aider le patient, voire tout un chacun, filtre pour décoder le réel et permet d'agir, d'échafauder des
à cheminer dans un processus d'apprentissage qui l'aidera explications, de formuler des hypothèses, d'effectuer des
à respecter des préceptes édictés par eux ou ont-ils, bien prévisions ou encore de prendre des décisions. »

144
13. Évaluation de la qualité de vie chez l'insuffisant respiratoire chronique

l « Ce n'est que lorsqu'une connaissance revêt pour lui un réalisation provisoire mais efficace d'un équilibre de sur-
sens [qu'un individu] se l'approprie et fait évoluer son sys- vie, même malheureux » [19]. L'auteur ne propose pas
tème de représentation. » d'abandonner les malades à leur sort, il interroge les soi-
l « La prise en compte des conceptions de l'apprenant gnants sur leur « ambition de nous délivrer de la mort » et
doit impérativement devenir le point de départ obligé de martèle qu'« il est plus commode de faire la morale aux
tout projet éducatif. » gens sur les causes du cancer que de les soutenir et de
l « Le projet devient vraiment mobilisateur quand [les les éclairer dans le cheminement souvent chaotique de
apprenants] ont la possibilité de réfléchir sur l'action entre- leur liberté vers une plus entière responsabilité à l'égard
prise, la capacité à coopérer et à négocier ou à prendre des d'eux-mêmes, des autres… ». Il rappelle aussi que « le tra-
responsabilités dans l'élaboration des stratégies. » vail psychique auquel chacun de nous est appelé face à
Le patient se construit au sein d'un environnement dans la mort qui vient n'est codifié dans nul mode opératoire
lequel il se sent en sécurité, un monde cohérent, mais pas préétabli, (…) que ce travail est toujours pénible et diffi-
forcément logique au sens scientifique du terme. Au point cile, qu'il comporte toujours sa part d'angoisse et de souf-
que cet univers peut paraître plus ou moins insensé à tout france » pour le patient comme pour le soignant « qui, lui
autre que lui. Cette représentation n'est cependant pas aussi – et son art le lui rappelle chaque jour –, s'achemine
figée ; elle peut évoluer. Elle le fera si le sujet est suffisam- inexorablement vers la mort ».
ment ébranlé pour remettre la cohérence de son monde Science et bon sens dictent de chercher ce projet de
en question et si la nouvelle représentation qui émerge a un vie chez et avec le patient. Mais le réduire à une straté-
sens pour lui. Mais il ne peut accepter d'aller vers l'inconnu gie, un plan d'action, revient à l'amputer de sa substance
que s'il possède une certaine confiance en lui et en la per- vitale, feindre de croire que nous maîtrisons la totalité et
sonne qui l'incite au changement. la complexité des causalités qui conditionnent l'action.
La non-observance surgirait donc lorsque l'ordon- B. Honoré met en garde contre cette attitude qui oublie
nance s'inscrit dans un contexte d'opposition plutôt que « le sens existentiel de la santé et du projet comme
de collaboration. Le déséquilibre induit par le soignant va expression d'un dévoilement des possibles, d'une liberté,
au-delà de ce que permet le lien de confiance qui unit donc d'un choix lui-même possible parmi les possibles,
les deux protagonistes. Déplacé trop loin de ses bases, le d'un dépassement toujours ouvert sur un accomplisse-
patient se trouve face à quelque chose dont il ne voit pas ment jamais achevé. [Où la santé] n'est pas une succes-
le sens ; il s'en méfie ou prend franchement peur. Il trouve sion d'états scientifiquement observables, mesurables,
tout naturellement la réassurance dans ses habitudes prévisibles, mais ce qui les traverse, les relie en un cours
antérieures et continue donc à fonctionner dans cette de vie » [20].
cohérence, consciemment ou non. Si l'évolution person- Les interventions de type enseignement thérapeutique
nelle passe obligatoirement par la remise en question des visent à permettre au patient de maîtriser des procédures
conceptions établies, quelle attitude facilite cette remise comme la prise de médicaments, le fonctionnement d'un
en question tout en garantissant l'autonomie de l'autre, appareil (inhalation, ventilation) ou les comportements à
sa capacité de fixer lui-même ses propres normes ? Que adopter en fonction d'un plan d'action. L'éducation théra-
peut-on dire de la relation à établir lors de la rencontre peutique va plus loin. Selon la définition de l'OMS (1998) :
soignant–soigné ? « Elle vise à aider les patients et leurs familles à comprendre
la maladie et le traitement, à coopérer avec les soignants, à
vivre plus sainement et à maintenir ou améliorer leur qua-
Décider, guider ou accompagner ?
lité de vie. » L'accompagnement thérapeutique propose un
Autre question intéressante, qu'est-ce qui légitime ou modèle relationnel pour gérer le long terme des relations
simplement pousse le soignant à mettre sa propension avec un patient qui n'est plus l'objet des sollicitudes et des
à la bienfaisance en œuvre dans des prises de position interventions des soignants, mais un sujet, un interlocuteur
qui visent à autoriser, imposer ou interdire une attitude, actif, doté de droits et qui les exerce. Ce qui place les soi-
un geste, un mode de vie à un patient ? Traitant ce sujet, gnants dans une posture inhabituelle, dans laquelle ils se
J.-F. Malherbe n'hésite pas à parler de furor sanandi et à sentent parfois mal à l'aise car « accompagner, c'est marcher
stigmatiser la médecine occidentale qui « refuse de consi- avec son compagnon, partager son pain avec l'autre, c'est le
dérer la maladie comme un langage, un dialogue du sujet partage de compétences professionnelles avec ouverture et
avec lui-même dans un environnement géo-bio-social, la attention à l'autre » [21].

145
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

Le processus de formation voie qui convient le mieux aux possibilités de son client,
celle aussi qui, à son appréciation, est à sa portée et lui pro-
En tant que crise, la maladie représente un événement curera le plus de satisfaction. Le client choisit ; tous deux
au sens décrit par H. Maldiney, « une épreuve dans et se mettent en route. La compétence de l'un n'exclut pas
par laquelle nous nous apprenons nous-mêmes avec le celle de l'autre, pas plus qu'elle n'en remplace les efforts, le
monde. Résoudre la crise, c'est intégrer l'événement en se mérite et la fatigue à l'arrivée. Au lendemain d'un projet qui
transformant ». L'événement ne se prévoit pas plus qu'il l'a amené à préparer (pendant plus de 1 an) puis à réaliser
ne s'organise, il surgit de notre rencontre avec le monde. l'ascension du mont Blanc avec six adolescents, un guide
« Rencontrer, c'est se trouver en présence d'un autre, dont confie : « Tenir compte de leur âge, de leur inexpérience, de
nous ne possédons pas la formule et qu'il nous est impos- leur diversité, de leurs potentialités engendre de nouvelles
sible de ramener au même, à l'identité du projet dont nous approches à développer en plus des règles alpines clas-
sommes l'ouvreur. » [22] Mais cet « autre en tant que per- siques. » Toute analogie avec une situation de soin ne serait
sonne ne peut pas être mis à découvert. Il se révèle ou il ne pas nécessairement fortuite… D'autant que cet exemple
se révèle pas. [Sa] connaissance est toujours aussi connais- illustre la dynamisation des projets personnels au sein d'un
sance de soi, à travers celle d'un individu ; elle se fait mais groupe. La maladie est toujours l'expérience douloureuse
elle nous fait aussi ; elle est comparable à un voyage, à une d'une distanciation d'avec nos proches. Qui n'a pas ressenti
véritable aventure, dont on ne sort pas indemne » [23]. cette rupture du lien social à l'occasion d'une maladie d'en-
La marge de manœuvre est infime, le formateur ne le sait fance ? Cette rupture peut survenir plus tard aussi même
que trop bien car tout « projet est recherche d'un ailleurs, si, adultes, nous nous interdisons bien souvent de laisser
d'un inexistant et ne va jamais sans son alter ego, le rejet » émerger ce type de sentiments sous couvert de raison.
[24]. Bousculé trop fort, trop loin de ses bases, le patient se Dans les sociétés traditionnelles, le chaman maintient
referme sur lui-même, laisse passer l'orage pour reprendre le tissu social en présidant à des rituels de guérison en
son chemin initial à la première accalmie. Comment le thé- groupe. L'individualité occidentale cherche dans l'« épreuve
rapeute respecte-t-il l'autonomie du patient, son droit à se partagée » [27] à renouer le fil qui permet d'inscrire le mal-
réaliser selon ses croyances et ses valeurs ? Sans que cette heur individuel dans le tissu de l'amitié. Les visites à une
attitude ne fige les positions, mais autorise chacun, patient connaissance hospitalisée, les associations de malades, la
et/ou soignant, à faire évoluer ses valeurs et ses croyances si participation aux funérailles illustrent ce travail de support
cela lui paraît judicieux [25]. (au sens que Winnicott donne à ce terme) du souffrant par
Comment instaurer ce déséquilibre constructif ? Par la son entourage et ceux qui ont traversé la même épreuve. Le
mise en place d'un cadre bienveillant et rassurant, le forma- groupe garantit à la personne malade ou handicapée qu'elle
teur crée les conditions où la personne peut se rendre dis- est toujours bien des siens, les pairs témoignent qu'il est
ponible à son vécu. Il l'aide à mobiliser ses ressources pour possible de « faire avec » : une vie est encore envisageable
s'engager dans un processus de changement et recueille ce malgré la maladie. Dans la prolongation de ce prendre-soin
qu'elle exprime afin de l'accompagner dans la formulation social, il y a certainement une place dans les interventions
de significations nouvelles, puis l'aide à clarifier un projet de professionnelles des soignants pour cultiver le lien inter-
vie et à l'exprimer en termes d'objectif, propose B. Honoré. personnel, en prenant à l'occasion appui sur les ressources
Ce processus se construit par une réflexion sur le vécu de formatrices de celles et ceux qui ont déjà traversé la crise,
la personne, par un retour en arrière sur le concret de son afin de permettre à celui qui souffre de trouver et mobiliser
existence, sur ses pratiques. Cette réflexion « ne se limite l'énergie nécessaire pour franchir le cap du désespoir vers
donc pas à l'analyse qui donne à la pratique une certaine une nouvelle forme de santé.
intelligibilité selon un mode d'approche et des concepts « Pareille approche contraint à prendre de la distance vis-
particuliers à une théorie. L'analyse seule ferme le sens par à-vis de notre propre conception de la santé au moment où
une explication ou une interprétation. L'activité réflexive nous sommes partie prenante de l'action, à renoncer à toute
ouvre la question du sens et découvre des possibles. Elle certitude, à inclure dans la critique celle de nos propres
transforme donc la pratique et la rend elle-même transfor- idées sur ce qui paraît nécessaire pour guider l'action », pré-
matrice des situations » [26]. cise B. Honoré [20]. Nous sommes alors amenés à cheminer
Le soignant tient le rôle de guide, au sens du guide de dans l'acceptation de l'inachèvement et de l'incertitude, le
montagne qui entreprend une course avec son client vers renoncement à une action qui vise à débarrasser la vie de la
le sommet que celui-ci a choisi d'atteindre. Disponible, maladie et de la mort qui comptent définitivement parmi
attentif, bienveillant autant que rigoureux, il propose la ses éléments constitutifs. Reste alors le privilège d'accom-
146
13. Évaluation de la qualité de vie chez l'insuffisant respiratoire chronique

pagner des patients – humains en tous points semblables fonctions pulmonaires, leur capacité à produire des efforts
à nous – au fil d'une vie qui s'épanouit avec la maladie et et les jours d'absence au travail [29] ;
la mort, où la maladie n'est pas seulement un avatar, mais l une simple information au sujet des causes de l'asthme et

aussi, selon l'expression de P. Bruckner [27], « une occasion de son traitement ne réduit pas le nombre d'hospitalisations
de réorganiser son rapport au réel, non au réel biologique des patients, pas plus qu'elle n'a d'effets sur le nombre de
mais au réel de l'impossible tout dire impliqué par le fait visites chez le médecin, la fonction pulmonaire, la consom-
du langage ; (…) l'occasion d'inaugurer une nouvelle voie mation de médicaments ou les jours d'arrêt de travail [30] ;
de frayage  ». Au-delà de l'apprentissage d'un geste ou l un programme d'éducation thérapeutique permet aux

d'une attitude plus ou moins automatisé, accepté, assimilé, enfants atteints d'asthme d'améliorer leur débit de pointe
le prendre-soin se découvre alors accompagnement du et leur indépendance par rapport à la maladie. Il permet
patient dans sa recherche d'un sens à ce qu'il vit et la mise aussi de diminuer quelque peu le nombre de jours où ils
en projet de son avenir. doivent réduire leur activité et le nombre de passages aux
urgences. Les effets de l'éducation thérapeutique sont
Quels résultats ? plus marqués chez les patients dont l'atteinte est modé-
rée à sévère par rapport à ceux dont l'atteinte est faible à
Faisant référence au processus d'éducation thérapeutique, modérée. De même, elle donne de meilleurs résultats pour
la littérature anglo-saxonne parle de patient education, de les stratégies basées sur le débit de pointe que pour celles
self-management education, de counselling ou encore de basées sur le contrôle des symptômes [31] ;
cognitive behavioural therapy. La variété de ces approches, l l'éducation thérapeutique permet aux patients asthma-

rarement décrites avec précision, presque jamais utilisées tiques de mieux contrôler les symptômes de leur maladie,
autrement que comme approche globale par du person- de réduire le nombre des hospitalisations. Les études dis-
nel non spécialisé, rend ardue la comparaison des résultats ponibles ne permettent pas de se prononcer clairement
publiés. De plus, les critères de qualité de vie utilisés sont quant aux effets sur le débit de pointe, la qualité de vie, les
presque tous différents d'une étude à l'autre. Nombre de interruptions de scolarité ou les jours d'arrêt de travail [32].
consultations médicales, consommation de médicaments, Malheureusement, la grande majorité des études ne
épisodes infectieux, dyspnée, périmètre de marche, échelles relatent qu'un suivi des patients limité à 6 mois, ce qui est
de dépression ou questionnaires spécifiques de qualité de insuffisant pour se forger une idée claire de l'efficacité d'une
vie constituent les indicateurs le plus souvent retenus. intervention. À titre d'exemple, la revue systématique de
Cette multiplicité constitue certainement un indice de la Wolf et  al. [31] montre que les effets significatifs 6  mois
difficulté actuelle à cerner la notion de « qualité de vie » et à après l'intervention l'étaient encore plus après 12 mois.
la mesurer. De plus, les études qualitatives menées à ce sujet
indiquent qu'il est fort probable que les questionnaires de
qualité de vie ne parviennent pas à saisir toutes les facettes
concernées par les processus de changement et de coping Qualité de vie, qualité de vie liée
avec la maladie et ses manifestations. à la santé, état de santé
Les recherches consacrées à l'efficacité de l'éducation
thérapeutique sont aujourd'hui assez nombreuses pour En pathologie respiratoire, les premiers grands travaux fai-
qu'il soit possible de les colliger en revues systématiques et sant mention d'une évaluation standardisée de la qualité de
d'en effectuer des méta-analyses : vie sont les études portant sur l'oxygénothérapie au long
l l'éducation thérapeutique appliquée aux patients cours, et sur l'utilité de l'IPPB (intermittent positive pressure
atteints de mucoviscidose améliore les connaissances de la breathing) dans l'insuffisance respiratoire chronique liée
maladie des patients mais, paradoxalement, pas celles de à la BPCO, au début des années 1980 [33, 34]. Depuis ces
leurs parents, ni des soignants. Elle permet aux patients et travaux, l'importance de quantifier l'impact d'une maladie
aux soignants de changer un certain nombre de comporte- respiratoire chronique et de son traitement sur la qualité de
ments [28] ; vie est totalement reconnue. L'évaluation de la qualité de
l les patients atteints de BPCO qui ont bénéficié d'éduca- vie est désormais considérée comme un objectif (end-point)
tion thérapeutique parviennent à diminuer leur dyspnée et en soi dans la plupart des essais cliniques, que ce soit dans
le risque d'être hospitalisé. Ils ne se distinguent par contre l'évaluation d'interventions pharmacologiques (broncho-
pas des autres patients en ce qui concerne le nombre d'exa- dilatateurs à longue demi-vie, stéroïdes inhalés, prévention
cerbations de la maladie, les passages aux urgences, les des exacerbations par des macrolides ou par un inhibiteur
147
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

de la phosphodiestérase-4…) ou non pharmacologiques l des questionnaires dits génériques, qui s'intéressent à


(réhabilitation respiratoire, éducation thérapeutique). l'impact d'une maladie sur une multitude d'aspects de la
Parmi les quelque 780 questionnaires actuellement dis- vie du patient : ces outils ne sont pas spécifiques d'un type
ponibles (www.proqolid.org), une trentaine est conçue de maladie particulière et permettent la comparaison de
spécifiquement pour l'évaluation de la qualité de vie, groupes de patients souffrant d'affections très diverses
notamment chez des sujets souffrant d'asthme, de BPCO (par exemple des patients souffrant d'une insuffisance car-
ou de syndrome d'apnées obstructives du sommeil. diaque sévère ou d'un cancer) ; en pathologie respiratoire,
De nombreux travaux ont montré que la corrélation les scores génériques les plus communément utilisés (et
entre les variables communément utilisées par le clini- validés en français) sont le SF-36 et le Nottingham Health
cien pour apprécier la sévérité d'une affection respiratoire Profile (NHP) ;
(VEMS, gaz du sang, SaO2) et la qualité de vie mesurée à l des questionnaires spécifiques : ces outils sont conçus

l'aide d'échelles validées était faible, voire non significative autour des préoccupations de patients souffrants d'une
[35–37]. Une mesure indépendante de la qualité de vie même maladie et ne sont utilisables que pour ce type de
apporte donc clairement des informations complémen- patients. Il en existe donc pour la plupart des maladies res-
taires au bilan physiologique, informations ne pouvant être piratoires chroniques. Ils ont l'avantage d'être plus sensibles
simplement extrapolées à partir des mesures usuelles. Cette aux changements induits par un traitement ou aux varia-
démarche a aussi l'avantage de mettre au premier plan les tions spontanées de la qualité de vie d'un patient au cours
préoccupations immédiates du patient plutôt que celles du temps que les scores génériques. Les outils spécifiques
du soignant. Enfin, l'appréciation de la qualité de vie inté- communément utilisés pour la BPCO (et validés en fran-
resse aussi les « décideurs » et les autorités sanitaires dans çais) sont le chronic respiratory questionnaire (CRQ) [42],
la mesure où une altération de la qualité de vie est mieux le SGRQ [43] et le questionnaire de la Maugeri Foundation
corrélée à l'utilisation des structures de soins (taux d'hospi- (MRF-28) [44, 45]. Le severe respiratory insufficiency ques-
talisation ou de réadmission en milieu hospitalier, consul- tionnaire (SRI) est utilisé pour les patients insuffisants
tations en urgence, fréquence des exacerbations…) que les respiratoires les plus sévères, qui sont appareillés par une
paramètres physiologiques usuels [38–40]. ventilation non invasive au domicile [46]. De nombreux
Lors d'évaluations standardisées, l'appréciation de la questionnaires spécifiques existent aussi pour l'asthme. Il
qualité de vie est nécessairement restrictive, et ne tient pas est important de reconnaître qu'ils ne sont pas interchan-
compte de certains aspects pourtant fondamentaux dans geables en raison de leur mauvaise concordance entre eux,
la qualité de vie de chacun (vie affective, cadre et niveau de le plus probablement parce qu'ils n'explorent pas exacte-
vie, environnement, activité et satisfaction professionnelles, ment les mêmes thèmes [47, 48].
stress, liberté). C'est pourquoi les Anglo-Saxons ont pris l'ha- La structure des questionnaires de QVLS comprend
bitude de distinguer la qualité de vie liée à la santé ou QVLS toujours un certain nombre de thèmes (appelés domaines)
(health-related quality of life) de l'état de santé (health status) regroupant des questions spécifiques (items), avec un
[41]. La première est très importante sur le plan conceptuel énoncé dont la réponse peut être binaire ou ordinale
mais impossible à mesurer alors que le second est un mar- (échelle de 0 à 5, par exemple). Le calcul du résultat des
queur indirect plus facilement mesurable. La nuance est plus questionnaires de QVLS tient compte le plus souvent de
que sémantique : l'industrie pharmaceutique utilise large- coefficients de pondération attribués aux différents items
ment les résultats des scores de QVLS pour mettre en avant lors du processus de validation, rendant parfois le calcul
l'impact de traitements sur la qualité de vie lors de la promo- des scores finaux relativement complexe. Lors d'analyses de
tion de nouveaux traitements pharmacologiques, concept groupes, des stratégies sont proposées pour certains ques-
beaucoup plus porteur commercialement que celui d'état tionnaires afin de suppléer aux réponses manquantes [49].
de santé. Les commentaires qui suivent concernent donc L'utilisation de traductions d'un questionnaire de QVLS
différents aspects de l'évaluation de la QVLS. nécessite une validation spécifique, qui comprend une pre-
mière traduction, une retraduction dans la langue d'origine
Comment mesurer la qualité de vie par des experts indépendants, une correction sur la base de
liée à la santé ? la retraduction, puis une validation de la traduction dans
un collectif de patients, le plus souvent en comparant les
Actuellement, les investigateurs disposent de deux types résultats du questionnaire avec une ou plusieurs échelles
d'outils de mesure [35] : préexistantes [45].

148
13. Évaluation de la qualité de vie chez l'insuffisant respiratoire chronique

Caractéristiques opérationnelles 100

des questionnaires de qualité de vie 80


liée à la santé
60

Score (%)
Un certain nombre de propriétés des scores de QVLS
doivent être connues du clinicien afin de pouvoir appré-
cier la pertinence d'un résultat dans une situation clinique 40
donnée [35].
Tout d'abord, il faut déterminer si l'outil utilisé est
20
assez sensible pour détecter un changement. De manière
générale, un questionnaire spécifique est plus sensible au
0
changement qu'un questionnaire générique. Ainsi, dans MRF-28 SGRQ SIP
une étude néerlandaise portant sur une population de 56 Fig. 13.1
sujets BPCO et asthmatiques, il est probable que le choix Distribution des scores de différents questionnaires.
d'un outil générique pour mesurer la QVLS (NHP) explique Distribution des scores dans une population d'insuffisants
l'absence d'impact mesurable des stéroïdes inhalés sur la respiratoires souffrant de BPCO sévère et de cyphoscoliose, obtenus
à l'aide de deux questionnaires spécifiques pour les affections
QVLS en dépit d'une amélioration fonctionnelle et d'une respiratoires chroniques (SGRQ et MRF-28) et d'un questionnaire
diminution des symptômes, ce qui contraste avec les résul- générique (SIP), illustrant l'effet « plancher » du score générique, et
tats favorables obtenus avec un score spécifique de QVLS son plus faible pouvoir discriminant dans cette population.
Source : Carone M et al. [44].
dans l'étude ISOLDE (SGRQ) [50, 51]. De même, les modi-
fications de la QVLS consécutives à l'introduction d'une dépend de la cohérence interne du score (déterminée par
ventilation non invasive dans l'insuffisance respiratoire sont le coefficient de Cronbach). Une valeur d'au moins 0,90 est
mieux appréciées par le questionnaire SRI (spécifique) que un prérequis pour qu'un test puisse être utilisé pour le suivi
par le SF-36 (générique) [52]. individuel de patients. Ceci n'est pas le cas pour la plupart
Il faut ensuite connaître la capacité discriminative du des questionnaires de QVLS d'utilisation courante chez des
score dans la population étudiée : la distribution des sujets BPCO, tels que le SF-36, le NHP, le SGRQ, le CRQ ou
résultats souffre-t-elle d'un effet « plancher » ou d'un effet le MRF-28 [49]. Toutefois, des efforts considérables sont
« plafond » ? C'est fréquent lorsqu'on utilise des question- réalisés actuellement pour développer des questionnaires
naires génériques pour étudier des sujets souffrant d'une capables d'approcher la variabilité interpersonnelle dans
pathologie respiratoire chronique. La présence d'un effet l'appréciation de la qualité de vie et ainsi fournir au clinicien
« plancher » ou « plafond » entraîne à la fois une perte du une information individuelle sur un patient particulier [54].
pouvoir discriminant du questionnaire et de sa sensibi- Il faut déterminer si le questionnaire de QVLS autorise,
lité au changement. On augmente donc la probabilité de du fait de sa structure, la comparaison entre individus : ainsi
résultats faussement négatifs. Ces caractéristiques varient l'administration du CRQ comprend une individualisation
selon l'outil de QVLS choisi : ainsi, chez des sujets BPCO, des scores (choix d'items jugés pertinents par le sujet lors
le NHP souffre apparemment plus fréquemment d'effets de l'évaluation initiale) qui n'autorise pas, en principe, la
« plancher » et « plafond » que le SF-36 [53]. La figure 13.1 comparaison entre individus, ne permettant dès lors que la
illustre l'effet « plancher » des scores du SIP (sickness impact comparaison de données longitudinales [42].
profile, score générique) par opposition à une distribution Enfin, lors de la comparaison entre groupes, ou d'un
large, et donc un meilleur pouvoir discriminant, de deux suivi longitudinal, il faut connaître la différence minimale
questionnaires spécifiques : le MRF-28 et le SGRQ dans cliniquement significative (minimal clinically important
un groupe de patients sous ventilation à domicile. Le SIP difference ou MCID) établie pour le score utilisé. En effet,
utilisé seul dans cette population serait peu sensible pour un résultat statistiquement significatif n'est pas nécessaire-
détecter un changement induit par une modification du ment cliniquement pertinent. La détermination du MCID
traitement [44]. permet de quantifier, pour un score de QVLS donné, le
Lors de l'analyse longitudinale de données, il faut changement le plus faible qu'un patient ou qu'un groupe
savoir si la structure du questionnaire autorise l'analyse de de patients perçoivent comme significatif ou bénéfique. En
résultats individuels ou seulement celle de groupes : ceci somme, il s'agit de déterminer, pour chaque score de QVLS,

149
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

l'équivalent de la distance de 35 m, considérée comme « dif- Pour un des deux scores génériques les plus fréquemment
férence minimale associée à un changement perceptible de utilisés chez des patients insuffisants respiratoires, le NHP, le
la capacité de déambulation » lors de tests de marche stan- MCID est indéterminé. Pour le SF-36, deux travaux ont quan-
dardisés sériés [55], ou d'un gain de 15 % sur le VEMS pour tifié le MCID chez des sujets souffrant d'affections ostéoarti-
l'impact d'un bronchodilatateur. culaires et cardiaques. Récemment, Wyrwich et al. ont établi
le MCID pour le SF-36 chez des sujets BPCO, asthmatiques
et souffrant de cardiopathie chronique (tableau  13.1) [61,
Quand un changement de score 62]. Cette information est capitale pour comprendre la
signification clinique des résultats publiés dans la littérature
de qualité de vie liée à la santé médicale au-delà de la significativité statistique.
est-il cliniquement significatif ? Lorsque le MCID n'a pas été spécifiquement déter-
miné, il existe certaines alternatives que nous analyserons
Pour certains scores de QVLS, le MCID a été clairement brièvement.
établi, et il est donc aisé d'apprécier l'importance d'un Pour déterminer si les scores mesurés chez un sujet ou
changement de score lors d'une analyse longitudinale ou un groupe de sujets diffèrent de manière cliniquement per-
d'une différence de scores dans une analyse comparative tinente des valeurs d'une population de référence, on peut
entre groupes. se référer à l'écart type (standard deviation ou SD), au SEM
Ainsi, pour le CRQ, un des questionnaires spécifiques (standard error of measurement) des valeurs de référence
de QVLS les plus largement utilisés, comprenant quatre ou aux percentiles. On peut alors arbitrairement détermi-
domaines (Dyspnée, Maîtrise, Fatigue et Émotions), le MCID ner comme différence cliniquement significative 0,5  SD,
a été déterminé en compilant les résultats de trois essais 1  SD, ou le fait d'être en dehors du 5e ou 95e percentile.
thérapeutiques, et en mesurant simultanément les chan- Bien que logique, ce type d'approche ne fait pas l'objet d'un
gements du CRQ et d'une échelle qualitative comportant consensus méthodologique.
15 points. Sur cette base, il a été établi que le MCID, pour Certains auteurs recommandent, lors de l'évaluation lon-
chaque item du CRQ, était de 0,5 point : en d'autres termes, gitudinale d'un groupe de sujets, de calculer l'importance
pour qu'un changement soit perceptible et donc clini- de l'effet (effect-size ou ES des Anglo-Saxons) [63]. Ainsi, lors
quement pertinent, il faut qu'il représente 2,5 points pour de mesures sériées dans un même groupe de sujets :
le domaine Dyspnée, 2 points pour le domaine Fatigue,
3,5 points pour le domaine Maîtrise et 2 points pour le ES = (M2 − M1 ) / S1
domaine Émotions (qui comprennent respectivement cinq,
quatre, sept et quatre questions) [57–59]. Établi selon une où M1 = moyenne des valeurs mesurées au temps 0 ;
méthodologie similaire, le MCID a été fixé à 4 points par M2  = moyenne des valeurs mesurées après la période
domaine (Symptômes, Activité, Impact et Score total) pour d'observation ou l'intervention ; S1 = écart type des valeurs
le SGRQ [60]. mesurées au temps 0. Le calcul peut aussi porter sur la dif-

Tableau 13.1 MCID pour les items composant le SF-36


Fonctionnement Rôle Douleur Santé Vitalité Fonctionnement Rôle Santé
physique physique physique perçue social émotionnel mentale
Changement cliniquement significatif
Faible 10 12,5 10 10 12,5 12,5 8,3 10
Modéré 20 25 20 20 25 25 16,7 20
Important 30 37,5 30 30 37,5 37,5 25 30
Population de référence
Moyenne 84 75,2 72,2 71 56,7 77,9 73,8 67,9
Écart type 22,7 35,9 23,9 19,8 17,8 21,5 36,3 18,6
Valeurs déterminées comme cliniquement significatives pour un changement faible, modéré et important, et à titre de comparaison, valeurs de
référence d'une population normale suisse romande, avec écart type (Wyrwich et al., 2005 [63] ; Richard et al. Raisons de santé 2000 ; 28 ; Institut de
médecine sociale et préventive, Lausanne).

150
13. Évaluation de la qualité de vie chez l'insuffisant respiratoire chronique

férence entre une population étudiée et une population de Points clés


référence. M1 est alors la moyenne des valeurs de référence,
S1 leur écart type et M2 la moyenne des valeurs du groupe 1. L'éducation thérapeutique est entrée de plain-
étudié. pied dans les programmes de rééducation des
Lors de mesures multiples chez un sujet : patients insuffisants respiratoires. Elle renvoie aux
notions de compliance et de qualité de vie.
ES = ( x 2 − x1 ) / s1 Paradoxalement, les études ne montrent pas un
bénéfice indiscutable de ces approches qui ne
où x1 = moyenne des valeurs mesurées au temps 0 ; x2 reposent presque jamais sur une méthodologie
= moyenne des valeurs mesurées après la période d'obser- clairement définie, standardisée et précisée.
vation ou l'intervention ; s1 = écart type des valeurs mesu- Les études futures devront préciser quels patients
rées au temps 0. tirent clairement bénéfice de chacun des nom-
On parle de changement de QVLS d'importance faible breux supports d'éducation thérapeutique utilisés
pour un ES de 0,2 unité SD, de changement modéré pour aujourd'hui dans les centres de rééducation.
un ES de 0,5 unité SD lorsqu'il s'agit de groupes (0,6 pour 2. Qu'est-ce qu'une différence de qualité de vie cli-
des individus), et de changement important pour un niquement significative ?
ES  de 0,8  unité SD lorsqu'il s'agit de groupes (1 pour des ■
L'appréciation de la pertinence clinique d'un
­individus). Cette approche a l'avantage d'être facilement changement de QVLS doit tenir compte des pro-
utilisable et de faire l'objet d'un certain consensus. priétés inhérentes de l'outil utilisé.

« Statistiquement significatif  » ne signifie pas
« cliniquement pertinent ».
Conclusion ■
Trois informations sont indispensables pour
déterminer si un changement de score de QVLS
Pour porter les fruits attendus, un programme d'éducation est significatif : le choix du questionnaire est-il
thérapeutique destiné aux patients atteints d'une affection approprié ?  ; sensibilité au changement ; capacité
respiratoire doit non seulement reposer sur la connaissance discriminante dans la population étudiée.
de la maladie, la maîtrise d'un certain nombre de procédures, ■
Questionnaire conçu pour la comparaison entre
mais aussi sur les processus qui permettent de faciliter et individus ?
supporter le changement ainsi que l'autonomie des patients. ■
Une valeur minimale cliniquement significative
Il est urgent que des études fondées sur une méthodolo- (MCID) a-t-elle été déterminée pour ce score ?
gie rigoureuse et sur des programmes standardisés viennent ■
Si tel n'est pas le cas, a-t-on pu avoir recours à
confirmer l'intuition des cliniciens qui veut que les patients une alternative au MCID pour justifier la perti-
aient besoin et bénéficient d'une intervention d'éducation nence clinique du changement mesuré (écart
thérapeutique pour mieux vivre avec leur maladie ; il est type, percentiles, ES) ?
urgent également que les soignants puissent disposer des
moyens qui leur permettent de proposer à chaque patient
le support d'éducation thérapeutique le plus approprié à
ses besoins. Références
Lorsque les soignants utilisent des échelles pour mesurer
la QVLS ou l'état de santé des patients, ils ne peuvent faire [1] Languérand E. De l'observance à une adhésion sans adhérence.
l'économie d'une approche critique des résultats obtenus. Mémoire de Maîtrise no 20200406, université Paris VII ; 2004–2005.
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significatif et cliniquement pertinent, déterminer pourquoi [3] Balkrishnan R. The importance of medication adherence in impro-
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151
II. Évaluation fonctionnelle et clinique du malade respiratoire

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152
13. Évaluation de la qualité de vie chez l'insuffisant respiratoire chronique

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153
Chapitre 14
Kinésithérapie
du désencombrement
des voies aériennes
Anne-Sophie Aubriot, William Poncin

PLAN DU CHAPITRE
Principes du désencombrement bronchique 158
Techniques de désencombrement des voies
aériennes extrathoraciques 159
Techniques manuelles de désencombrement
des voies aériennes intrathoraciques 160
Techniques instrumentales
de désencombrement des voies aériennes
intrathoraciques 167
Conclusion 173

Kinésithérapie respiratoire
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III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Principes du désencombrement tandis que peu de place est accordée à l'étiquette dia-
gnostique du patient. Les techniques de désencombre-
bronchique ment bronchique les plus appropriées sont alors retenues.
L'objectif est la mobilisation et l'évacuation des sécrétions
Le désencombrement bronchique occupe une part impor- bronchiques en s'appuyant sur des variations de volumes
tante de la kinésithérapie respiratoire. De nombreuses pulmonaires et de débits aériens, afin de s'opposer aux ano-
techniques sont utilisées, sans pour autant être scientifi- malies rhéologiques du mucus ou aux déficits de la muscu-
quement validées avec un niveau de preuve élevé. En effet, lature respiratoire.
malgré une littérature abondante, il est extrêmement diffi- Trois éléments sont à considérer dans le désencombre-
cile d'objectiver la supériorité d'une technique par rapport ment :
à une autre. En réalité, leur utilisation repose même parfois ● l'obtention d'un volume inspiratoire suffisamment
uniquement sur des convictions personnelles, mais cela ne important pour pouvoir générer un débit expiratoire effi-
remet pas en cause la nécessité et l'utilité du désencom- cace contribuant à la mobilisation des sécrétions. En effet,
brement qui font souvent l'unanimité dans les réunions de la capacité d'un patient à inspirer un volume d'air maximal
consensus. va conditionner son aptitude à générer un débit expiratoire
Dans ce chapitre, nous abordons les techniques de suffisant, et donc une toux efficace [1] ;
désencombrement bronchique manuelles et instrumen- ● la modulation du flux expiratoire, essentiellement
tales. Sans être exhaustives, les descriptions ont pour but dépendante des variations de pression [2]. Par les tech-
de présenter les techniques les plus usuelles au travers de niques de désencombrement, le kinésithérapeute cherche
différentes écoles et courants de pensée. à générer une pression motrice (différence entre la pression
L'encombrement bronchique, élément central d'un véri- alvéolaire et la pression buccale) produisant un flux expi-
table cercle vicieux (fig. 14.1), se définit comme une stase ratoire optimal afin de drainer les sécrétions localisées au
anormale de mucus dans le tractus bronchique liée à un niveau des voies aériennes. Cette pression motrice découle
déséquilibre de la balance sécrétion/clairance mucociliaire. d'une augmentation de la pression intrapleurale produite
Il peut progressivement diminuer la ventilation d'un ter- par l'action des muscles expirateurs, qui se répercute sur
ritoire pulmonaire et évoluer vers une décompensation les parois bronchiques et vise l'évacuation de l'air contenu
respiratoire. Le kinésithérapeute tente de rompre ce cercle dans les poumons. La pression intrabronchique, générée
vicieux au moyen de différentes techniques en s'appuyant à l'intérieur des bronches par l'accumulation d'air lors de
surtout sur l'anamnèse et le bilan clinique (voir chapitre 10) l'inspiration, diminue progressivement de la périphérie vers

Encombrement bronchique

du travail Ventilation
respiratoire ou absente

Détérioration des des résistances


échanges gazeux respiratoires

Fig. 14.1
Cercle vicieux de l'encombrement bronchique.

158
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

Le désencombrement des voies aériennes supérieures


P pleurale
peut se réaliser de plusieurs manières.

Palv 12 10 8 6 4 PIP 2 0 Aspiration mécanique


Patm

Définition
Cette technique consiste en une désobstruction des voies
Point d’égale pression
aériennes supérieures, à l'aide d'une sonde d'aspiration et
d'un système aspiratif afin d'assurer la perméabilité des
Fig. 14.2 voies supérieures.
Compression dynamique des voies aériennes.
Schématisation des voies aériennes comprimées lors de l'expiration
forcée. Patm : pression à la bouche ; Palv : pression alvéolaire ; PIB : Description
pression intrabronchique. Les chiffres 12, 10, 8, 6, 4, 0 expriment des
pressions en centimètres d'eau. ● Aspiration nasopharyngée pour les sécrétions situées
entre le nez et le pharynx.
● Aspiration dans la bouche et l'arrière-gorge, en surveil-

la sphère ORL tout au long de l'arbre bronchique pour lant attentivement la survenue d'un réflexe vagal ou de
devenir nulle au niveau de la bouche. L'équilibre entre la vomissement. Il faut veiller à ne pas dépasser le niveau des
pression intrapleurale et la pression intrabronchique régit voies aériennes supérieures.
la compression dynamique des voies aériennes. Le point
d'égale pression est le point d'équilibre où ces deux pres-
sions s'égalisent (fig. 14.2). En aval de celui-ci (c'est-à-dire en Douche nasale
se rapprochant des voies respiratoires supérieures), la pres-
sion intrabronchique devient inférieure à la pression pleu- Définition
rale et une compression se produit [3]. Cette compression En général, réalisée à l'aide d'une cruche avec un long bec
dynamique des voies aériennes génère localement et tran- appelée Lota® ou Jala-Neti®, cette technique issue du yoga
sitoirement une augmentation du flux aérien et favorise est spécialement conçue pour le lavage du nez. Cette
l'expulsion des sécrétions bronchiques vers la trachée ; méthode simple permet un désencombrement nasal en
● l'accélération de la clairance mucociliaire, dépendante
éliminant une grande quantité de mucus, de poussières et
notamment des stimulations mécaniques intrabronchiques de pollens. La toilette nasale se fait avec du sérum isoto-
(force de frottement de l'air sur l'endothélium bronchique, nique préparé avec 250 mL d'eau tiède (36 à 38°) mélangé
gradient de pression transépithélial…) [4] que le kinésithé- à une cuillère à café de sel de cuisine. Une solution hyper-
rapeute est probablement capable d'augmenter par ses tonique avec une concentration en sel de 2,5 à 3 ℅ peut
manœuvres. également être utilisée. En pratique, elle est recommandée
Le kinésithérapeute va s'appliquer à utiliser ces trois prin- dans les rhinosinusites et devrait précéder, chaque fois qu'il
cipes afin de parvenir au désencombrement bronchique du est nécessaire, le désencombrement des voies aériennes
patient. inférieures.

Description
Techniques de désencombrement
La tête inclinée sur le côté à 90°, on place le bec de la cruche
des voies aériennes au niveau de la narine supérieure, l'écoulement se fait par
extrathoraciques la narine inférieure. Une respiration buccale continue est
demandée au patient (compter ou chantonner) afin d'évi-
Les voies aériennes supérieures comprennent les fosses ter le passage de l'eau en arrière-gorge. Quand le pot est à
nasales, le cavum, la cavité buccale et le pharynx jusqu'au moitié vide, un mouchage en douceur de chaque narine est
carrefour aérodigestif et la glotte. Le larynx fait le lien préconisé. Ensuite, pour l'autre moitié du pot, on applique
entre les voies aériennes supérieures et les voies aériennes le même protocole à la seconde narine. Un reniflement
inférieures. final peut être réalisé.
159
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Littérature largement décrite par la littérature anglo-saxonne. Il en est


donc difficile de déterminer l'efficacité propre du drainage
La littérature disponible sur les bénéfices de la toilette
postural.
nasale suggère son efficacité dans diverses pathologies rhi-
L'ensemble « percussion et drainage postural » est uti-
nosinusales comme la rhinosinusite aiguë [5] et chronique
lisé depuis les années 1950 dans le traitement contre la
[6] mais aussi chez l'enfant allergique aux pollens [7]. Une
mucoviscidose et les études subséquentes (entre 1971
bonne tolérance chez l'enfant est décrite indépendamment
et 1988) démontrent que la technique est plus efficace
de l'âge [8]. Une revue de littérature met en avant la bonne
que la toux seule (contrôle) pour évacuer les sécrétions
tolérance chez l'adulte et des effets secondaires restreints
et ralentir le déclin de la fonction pulmonaire. Les études
à la technique [9]. L'efficacité reste modérée pour les rhi-
ne démontrent pas sa supériorité par rapport à une autre
nosinusites aiguës mais des études complémentaires à plus
technique. Cependant la technique est longue, requiert
grande échelle sur le sujet sont nécessaires. Cependant,
souvent l'assistance d'une seconde personne et est incon-
dans les rhinosinusites chroniques, la toilette nasale s'ins-
fortable. De plus, la technique est associée à plusieurs effets
crit comme une pierre angulaire du traitement, l'utilisation
secondaires (reflux chez les nourrissons muco, épisodes
d'une solution hypertonique permet d'ailleurs de contre-
hypoxiques chez les patients muco avec atteinte pulmo-
carrer les infections [10].
naire modérée à sévère, modification du rythme cardiaque
et augmentation de la pression intracrânienne), d'où main-
tenant l'utilisation du modified postural drainage qui exclut
Techniques manuelles les positions la tête en bas [13].
Le concept physiopathologique sur lequel est basé
de désencombrement des voies le drainage postural est par contre sujet à discussion. En
aériennes intrathoraciques effet, deux équipes étudient les effets du drainage postu-
ral par scintigraphie pulmonaire, ce qui permet d'imager
Techniques sans modulation du flux et de mieux localiser la clairance des sécrétions pulmo-
naires. Mortensen et al. ont comparé le drainage postural
(postures et ondes de choc) à la pression expiratoire positive (PEP). Le drainage postu-
ral est réalisé en décubitus latéral avec 20° de déclive en
Drainage postural Trendelenburg afin de faciliter théoriquement la clairance
Définition de la base du poumon, tandis que le PEP est réalisé en posi-
tion assise. Les auteurs ne démontrent aucune différence
Le drainage postural est une technique utilisant les effets
entre les deux techniques en ce qui concerne la clairance de
de la pesanteur dans le but de favoriser l'écoulement des
la base du poumon [14]. Lannefors et al. vérifient quant à
sécrétions des bronches segmentaires vers les bronches de
eux l'effet du drainage postural en décubitus latéral gauche
gros calibre et ensuite de celles-ci vers la trachée.
afin de drainer préférentiellement le poumon droit, mais les
auteurs ne constatent aucune différence entre la clairance
Description des poumons droit et gauche [15].
Les postures adoptées sont déduites de l'orientation anato- Outre l'efficacité démontrée, l'adhérence thérapeutique
mique des territoires pulmonaires et donc des bronches à liée à la technique est un concept tout aussi important à
drainer [11]. La partie distale du segment à drainer doit être envisager. L'adhérence thérapeutique en kinésithérapie res-
positionnée au-dessus de la partie proximale. Douze pos- piratoire a surtout été étudiée dans la mucoviscidose, et les
tures sont décrites dans la littérature [12], correspondantes guidelines proposent d'accorder davantage d'intérêt, à effi-
aux différents lobes et segments pulmonaires. Leur degré cacité égale, aux techniques auto-administrées ou aux tech-
de déclivité varie en fonction du territoire à drainer [13]. niques que les patients préfèrent pour améliorer l'adhérence
au traitement [16]. En ce sens, McIlwaine et al. dénotent une
préférence marquée des patients pour le drainage autogène
Littérature
(DA) en comparaison au drainage postural + percussion,
Le drainage postural est rarement utilisé seul mais très avec une sensation d'efficacité plus importante pour le DA
souvent associé aux percussions, vibrations et expirations rapporté par le patient [17]. De plus, une revue Cochrane
forcées. L'addition de ces techniques est souvent regroupée récente a conclu en une différence marquée des préférences
sous le terme de conventional chest physiotherapy (CPT) individuelles en faveur des techniques comme l'AD et le PEP,
160
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

principalement car ces techniques facilitent l'indépendance de la phase expiratoire. Il est à noter que le vocable « vibra-
du patient mais aussi pour des raisons de confort, de facilité tion » est souvent utilisé pour désigner les mouvements
d'utilisation ou de flexibilité sur le timing du traitement [18]. oscillatoires générés manuellement combinés à des com-
La préférence du patient et le confort ressenti lors d'une pressions thoraciques [25]. Les vibrations auxquelles nous
séance de drainage postural, associé ou non à une autre faisons référence ici ne concernent que ces mouvements
technique, doivent donc être investigués avec précaution oscillatoires.
afin de maintenir son adhérence au traitement.
Description
Percussions thoraciques manuelles Les vibrations thoraciques manuelles découlent d'une
Définition contraction tétanisante des fléchisseurs/extenseurs du poi-
gnet du thérapeute dont la fréquence est comprise entre
Les percussions thoraciques manuelles, mieux connues sous 20 et 100 Hz, alors que les mains sont posées sur la cage
le vocable de clapping, ont longtemps été utilisées de façon thoracique du patient [26]. Les vibrations s'effectuent avec
empirique et associées au drainage postural. Leur efficacité une légère pression manuelle pendant l'expiration [27]. La
en tant que technique isolée reste à démontrer. En effet, source d'énergie émettrice des vibrations peut également
les percussions sont dans la plupart des études associées à être instrumentale [28].
d'autres techniques, ce qui rend leur évaluation difficile.
Littérature
Description
On attribue aux vibrations manuelles un meilleur effet sur
Les percussions thoraciques manuelles sont appliquées en
la clairance des sécrétions pour les raisons suivantes :
regard de la zone à traiter, afin de décoller et de fragmenter les ● les vibrations entraîneraient une modification rhéolo-

sécrétions bronchiques [19]. Elles doivent être appliquées pré-


gique (diminution de la viscosité) des sécrétions ;
férentiellement sur le temps expiratoire [20, 21]. Leurs moda- ● les vibrations amélioreraient la fréquence des batte-

lités d'application varient selon les auteurs, tant au niveau de


ments des cils de l'épithélium bronchique du fait de l'effet
leur fréquence (lente ou rapide) que de leur manière d'appli-
de résonance engendré par ces vibrations ;
cation (tapotements des mains en cuillère, hachures). ● les vibrations permettent de potentialiser le débit expi-

ratoire, ce qui permettrait de bouger les sécrétions vers la


Littérature
bouche.
Pour mobiliser le mucus, la gamme de fréquence d'éner- La première hypothèse a été démontrée chez le chien
gie des percussions devrait se situer entre 25 et 35 Hz, ce anesthésié, avec une veste oscillatoire afin de standardiser
qui semble en dehors des capacités manuelles (fréquence les mesures, pour autant que la fréquence des oscillations
variant de 1 à 8 Hz) [22]. soit comprise entre 5 et 17 Hz (les meilleurs effets sont
Les percussions thoraciques manuelles sont rarement observés entre 11 et 15 Hz avec une efficacité maximale à
utilisées seules, mais presque toujours associées aux autres 13 Hz) [29]. Mais ces effets restent à être démontrés clini-
techniques de désencombrement. D'après la littérature, quement chez l'humain.
elles sont surtout indiquées pour les sécrétions volumi- La deuxième hypothèse ne repose encore sur aucune
neuses, situées de préférence dans les gros troncs [23]. Une évidence scientifique. La fréquence naturelle des bat-
étude semble effectivement démontrer chez des patients tements ciliaires étant comprise entre 12 et 15 Hz [30],
hypersécrétant que l'addition des percussions au drainage l'idée est de surimposer sur cette fréquence naturelle la
postural augmente plus rapidement la quantité des sécré- fréquence des vibrations manuelles afin d'obtenir un effet
tions expectorées [24]. de résonance, et donc une meilleure fréquence de batte-
ment ciliaire.
Vibrations thoraciques manuelles Enfin, la dernière hypothèse a été vérifiée par McCarren
et  al. Ses études démontrent que la pression intrathora-
Définition
cique et donc logiquement le débit expiratoire de pointe
Comme les percussions thoraciques manuelles, les vibra- chez le sujet sain sont plus élevés lorsque les compressions
tions sont souvent associées au drainage postural. Elles thoraciques sont accompagnées de vibrations, comparées
consistent en l'application de vibrations sur le thorax lors à une simple compression thoracique uniquement [31, 32].

161
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Les vibrations permettent donc de potentialiser le débit Littérature


expiratoire ce qui devrait théoriquement faciliter la clai-
La technique repose uniquement sur l'empirisme et n'a
rance des sécrétions [33].
jamais été réellement étudiée seule. On la retrouve uni-
Reste le problème de la variabilité observée lors de
quement dans une étude et combinée avec les expirations
la reproduction de la technique. Une étude récente
lentes prolongées [35]. Néanmoins, il reste intuitif et cohé-
démontre que, lors de la réalisation de la technique « com-
rent d'essayer de dégager les voies aériennes supérieures
pression–vibration », la force exercée ainsi que la durée et
pour tenter d'enrayer le cercle vicieux encombrement →
fréquence (mais pas l'amplitude) des oscillations sont hau-
inflammation/infection → encombrement, mais aussi pour
tement variables. Un même kinésithérapeute ne reproduit
soulager le mode principal respiratoire du nourrisson étant
pas la même technique dans le temps (variabilité observée
donné la situation anatomique du larynx.
déjà après 24 h, et la variabilité est plus importante encore
6 mois plus tard) ou d'un sujet à l'autre. Et c'est encore plus
vrai d'un kinésithérapeute à un autre [34]. Si les vibrations
Technique inspiratoire lente : EDIC
ont un réel impact sur le désencombrement, l'importance Définition
de sa variabilité sur les effets physiologiques doit être prise
Les techniques inspiratoires lentes sont surtout décrites
compte. Cela pose aussi un problème majeur dans l'inter-
pour lutter contre les atélectasies postopératoires. Ces
prétation des études portant sur l'exécution des vibrations
techniques ont également été proposées pour désencom-
manuelles.
brer les petites voies aériennes [36], d'où leurs descriptions
dans ce chapitre. Dans la littérature, on retrouve surtout
Techniques avec modulation du flux les deep breathing (inspirations profondes) et la spiro-
métrie incitative qui sera présentée dans les techniques
Technique inspiratoire rapide : instrumentales. Les exercices à débit inspiratoire contrôlé
désobstruction rhinopharyngée (EDIC) ont également été décrits dans le but d'étirer loca-
lement le parenchyme pulmonaire afin de remettre de l'air
rétrograde (DRR)
spécifiquement dans les zones pulmonaires atélectasiées.
Définition L'EDIC est aussi proposé comme méthode de désencom-
Le drainage rhinopharyngé rétrograde (reniflement) est brement pour traiter les pneumonies localement [36]. À
une technique qui vise à rendre perméable le nasopharynx. ce jour, aucune étude n'étaye encore l'efficacité ou non
L'avantage de cette technique par rapport au mouchage de l'EDIC.
classique vient du fait qu'elle peut être réalisée passivement
Description
chez le nourrisson (< 2 ans).
La désobstruction rhinopharyngée rétrograde est sur- Le patient est en décubitus latéral, le poumon à étirer
tout utile lorsque le kinésithérapeute ne dispose pas d'aide étant le poumon supralatéral pour favoriser l'inflation
mécanique (poire, mouche-bébé…) pour moucher pas- maximale de la zone ciblée. Par cette simple position,
sivement le nourrisson. Il s'agit d'un reniflement que l'on le poumon supralatéral est déjà automatiquement étiré
peut obtenir passivement en maintenant la bouche du avant toute action du kinésithérapeute. En effet, la
petit enfant fermée pendant l'inspiration. Ce simple geste pesanteur agissant, les alvéoles du poumon supralatéral
force l'enfant à inspirer rapidement par le nez, dégageant sont plus distendues que celles localisées dans le pou-
ainsi ce dernier. mon infralatéral du fait de la traction exercée par le poids
L'instillation préalable de sérum physiologique à du poumon [3].
0,9 % en décubitus latéral peut potentialiser l'effet de Le patient inspire par le nez, profondément et lentement,
désencombrement. jusqu'à la capacité pulmonaire totale (CPT). Il réalise ensuite
La manœuvre peut être réalisée juste après une tech- une pause télé-inspiratoire avant d'expirer passivement.
nique expiratoire. On peut alors profiter du réflexe L'inspiration lente, profonde et l'apnée télé-inspiratoire sont
de Hering-Breuer qui stimule l'inspiration rapide et préconisées afin de potentialiser l'homogénéisation de la
profonde. ventilation grâce à la ventilation collatérale (pore de Kohn

162
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

Description
La toux est un mécanisme complexe qui se subdivise en
cinq étapes [40] :
● phase d'irritation : la toux est déclenchée par un

processus chimique et physique irritant dans l'arbre


trachéobronchique. Il y a de nombreux capteurs de ces
irritants (nasopharynx et arbre trachéobronchique) mais
la densité des tussi-récepteurs est faible en périphérie, ce
qui explique qu'un encombrement périphérique ne pro-
voque pas de toux. Si l'encombrement remonte dans les
voies aériennes centrales par l'action ciliaire ou par la toi-
lette bronchique, la présence de sécrétions peut déclen-
cher la toux ;
● phase inspiratoire : les capteurs vont déclencher une

phase inspiratoire glotte ouverte. La relation tension–­


Fig. 14.3 longueur des muscles respiratoires est optimalisée, le recul
Illustration de l'EDIC avec stimulation de l'inspiration par potentiel élastique est maximalisé ;
spirométrie incitative.
● phase de fermeture glottique ;
Le kinésithérapeute stimule tactilement l'ouverture maximale du
poumon supralatéral. ● phase de compression (200 ms) : les muscles expira-

toires compressent la cavité thoracique ; la glotte étant


fermée (manœuvre de Valsalva), la pression intrapleurale
augmente rapidement pour atteindre 300 mmHg ;
● phase d'expulsion : la glotte s'ouvre libérant ainsi la pres-
et canaux de Lambert) et de contrecarrer l'asynchronisme
ventilatoire [3]. Il est d'usage de combiner cette technique sion ce qui emmène les sécrétions vers l'extérieur.
à des mobilisations thoraciques (actives ou passives) et/ Chacune des étapes pouvant être altérée, il faut repérer
ou à l'utilisation d'un spiromètre incitatif (voir plus loin) la ou les étapes remises en cause et s'interroger sur les fac-
(fig.  14.3). L'effet recherché est une hyperinflation relative teurs limitants de celle(s)-ci, afin de la(les) pallier si possible.
du poumon supralatéral. En kinésithérapie, la toux peut être :
● provoquée : la toux provoquée est une toux réflexe

déclenchée suite à une stimulation manuelle des centres


Techniques expiratoires rapides tussigènes de la trachée qui implique cependant l'intégrité
de la boucle réflexe (parfois absente, notamment chez le
Toux
prématuré et dans certaines affections neurologiques).
Définition Notons qu'à partir de 3–4 ans, ce réflexe de toux dispa-
Avec la clairance mucociliaire, la toux est un élément indis- raît et que par ailleurs, il s'épuise rapidement pendant la
pensable à la préservation de l'intégrité pulmonaire. Lors séance. La toux provoquée est obtenue par une pression
d'une hyperréactivité bronchique, en cas d'hypersécrétion, brève du pouce sur la face antérieure de la trachée, juste
la toux devient indispensable pour évacuer l'amas sécré- au-dessus de la fourchette sternale (entre les deux muscles
toire et sauvegarder ainsi l'intégrité pulmonaire [37]. sterno-cléido-mastoïdiens, sous le cartilage cricoïde). Elle
On estime que le pic de toux (peak cough flow, PCF) d'un est réalisée au début du temps expiratoire. La toux pro-
adulte en bonne santé est supérieur ou égal à 400 L/min. Les voquée s'adresse presque exclusivement aux nourrissons
adultes (et probablement les enfants) avec un PCF inférieur et aux jeunes enfants. Cette technique potentiellement
à 270  L/min seront à risque d'insuffisance respiratoire en cas traumatisante ne doit pas être utilisée systématique-
d'agression pulmonaire, tandis que les patients avec un PCF infé- ment. Le cas échéant, elle est exécutée prudemment, en
rieur à 270 160 L/min ou les patients avec atteintes bulbaires et un particulier à partir de 3–4 ans, où les cartilages trachéaux
PCF inférieur à 270 255 L/min seront incapables de dégager effi- devenus progressivement plus rigides peuvent la rendre
cacement leurs voies aériennes, peu importe la situation [38, 39]. douloureuse ;

163
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

● dirigée : le débit expiratoire de pointe est majoré lors d'une telle


– la toux dirigée est une toux modulée et guidée par manœuvre chez l'adulte [42]. Chez le nourrisson, la valida-
le kinésithérapeute, en jouant de façon isolée ou com- tion de cette technique a surtout été étudiée dans le cas de
binée sur les volumes pulmonaires, la pression (pour un la bronchiolite. La manœuvre est réalisée et répétée passi-
volume donné) et la répétition [41], vement pendant la séance. Deux études ont récemment
– le guidage de la toux se fait verbalement (consignes relaté l'efficacité de cette technique. L'étude multicen-
adéquates) et/ou manuellement (pressions thoraciques trique de Gajdos et al. (France) a porté sur la pratique des
manuelles d'aide à l'expiration). Il est souvent essentiel manœuvres expiratoires rapides et forcées [43], tandis que
d'éduquer le patient aux différentes étapes de la toux, Rochat et al. (Suisse) ont utilisé des AFE lentes en addition
afin d'optimiser l'efficacité de celle-ci. Pour ce faire, il faut avec les expirations lentes prolongées [44]. Cette seconde
sensibiliser le patient à ne tousser que lorsque les sécré- étude sera par conséquent discutée dans la section qui lui
tions sont proximales [41]. En effet, le patient encombré convient (AFE lente). Gajdos et al. n'observent aucun effet
a souvent tendance à tousser inefficacement, de manière positif de la kinésithérapie respiratoire avec AFE versus des
répétitive et inutilement. Cette succession de toux inef- aspirations nasales seules. En outre, l'application de la tech-
ficaces l'épuise et le rend incapable de déclencher une nique apporte une plus grande fréquence de vomissement
toux efficace au moment opportun. et de déstabilisation respiratoire transitoire comparée à
Cette technique est utilisée soit directement en cas celles du groupe d'enfants ne recevant que les aspirations
d'encombrement proximal (bruits à la bouche), soit après nasales. Il est à noter que cette technique a été associée
différentes techniques de modulation du flux expiratoire à un risque de fractures costales chez les nourrissons [45],
afin de provoquer une expectoration. ce qui pourrait limiter les recommandations de cette tech-
nique dans ce cadre précis.
Augmentation du flux expiratoire et forced
expiration technique Active cycle of breathing technique
Définition Définition
L'augmentation du flux expiratoire (AFE) est une augmen- L'active cycle of breathing technique (ACBT) est surtout
tation active, active aidée ou passive du flux expiratoire, décrite et utilisée dans les pays anglo-saxons [46]. L'ACBT
à plus ou moins haut volume pulmonaire, dans le but de découle initialement de la FET [11] avant d'évoluer en un
mobiliser et d'évacuer les sécrétions trachéobronchiques. enchaînement d'un cycle composé de trois techniques dif-
La vitesse, la force et la durée peuvent varier. Par analogie, férentes. La phase la plus efficace concerne probablement
la FET (forced expiration technique) est la partie « forcée » les expirations forcées [47]. De ce fait, nous avons préféré
des AFE. La FET est souvent étudiée en concomitance inscrire l'ACBT comme une technique expiratoire rapide,
avec d'autres techniques par les Anglo-Saxons (drainage bien que cette classification arbitraire puisse être débattue.
postural, vibrations, percussions, expansions thoraciques) Description
ce qui limite à nouveau l'étude de l'efficacité des FET L'ACBT consiste en un cycle comprenant l'enchaînement
uniquement. de trois techniques :
● la respiration contrôlée (période de repos) qui permet
Description
L'exercice expiratoire se fait toujours glotte ouverte lorsque au patient de récupérer avant les techniques suivantes ;
● les exercices d'expansions thoraciques (EET) ou inspira-
cela s'avère possible. La consigne donnée au patient est
d'inspirer lentement et profondément par le nez avant d'ex- tions profondes qui ont pour but de mobiliser l'air derrière
pirer brutalement par la bouche. Le kinésithérapeute aide à les sécrétions. Une apnée télé-inspiratoire est préconisée
la réalisation de cette technique, de manière activo-passive afin de potentialiser cet effet grâce à la ventilation collaté-
ou passive (nourrisson, patient inconscient), en exerçant rale (pore de Kohn et canaux de Lambert) et de contre-
des pressions manuelles sur le thorax et l'abdomen tout en carrer l'asynchronisme ventilatoire car l'apnée permet
respectant la cinématique respiratoire. d'homogénéiser la ventilation ;
● les expirations forcées ou AFE rapides qui sont utilisées

Littérature pour expulser les sécrétions remontées lors des phases


Les AFE rapides ou FET sont surtout utilisées afin de précédentes.
chasser les sécrétions proximales (manœuvre de chasse L'enchaînement des techniques est tout à fait flexible
ou huffing) ou pour augmenter l'efficacité de la toux car et dépend de l'état du patient. Le rappel de quelques
164
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

respirations contrôlées après quelques expansions thora- Littérature


ciques et avant les AFE peut être utile pour les patients À ce jour, la technique est encore très peu décrite dans la
très fatigués par exemple. L'ACBT est soit utilisé en posi- littérature scientifique. Quatre études faisant état de cette
tion assise, soit dans une position qui permet l'adjonction technique ont été élaborées [35, 44, 49, 50]. Les études
de la gravité pour aider le drainage des sécrétions (drai- s'accordent à démontrer un effet positif mais modeste et
nage postural). relativement bref de la technique sur le score clinique de
Littérature Wang (par l'amélioration du tirage et du wheezing) ou sur
Une méta-analyse récente détaille l'efficacité de l'ACBT le besoin d'oxygénothérapie, même si l'expiration lente
dans de multiples pathologies (mucoviscidose, bron- prolongée ne semble pas plus efficace que la kinésithéra-
chectasies non mucoviscidosiques, bronchite chronique, pie conventionnelle [35]. Toutefois, aucun avantage n'est
BPCO et détresse respiratoire aiguë) chez l'enfant et chez constaté quant à la vitesse de rétablissement de l'état cli-
l'adulte [48]. Les conclusions de cette revue démontrent nique du nourrisson, ce qui limite les recommandations de
qu'à court terme (< 1 h), la technique est plus bénéfique la kinésithérapie respiratoire pour les nourrissons atteints
qu'en situation contrôle, et est au moins aussi efficace (ver- de la bronchiolite [51].
sus RIM, PEP et OPEP) voire plus efficace (versus CCPT et Augmentation du flux expiratoire lente
veste oscillante) que les autres techniques pour drainer les
sécrétions pulmonaires, bien que l'effet disparaisse lorsque Définition
l'étude compare la quantité de sécrétions obtenue sur 24 h. Les augmentations du flux expiratoire (AFE) lentes ont été
Néanmoins, l'acceptabilité et l'adhérence au traitement développées en parallèle aux AFE rapides mais cette fois
doivent être évaluées car l'ACBT est souvent reçue par dans le but de mobiliser et d'évacuer les sécrétions plus dis-
le patient comme moins confortable ou moins préférée tales. C'est la partie exclusivement lente des AFE.
qu'une autre technique. Description
La description de la technique s'apparente à celle des AFE
Techniques expiratoires lentes rapides. Chez les nourrissons, la différence avec l'ELPr est
Expiration lente prolongée que les AFE ne se font que sur un seul temps expiratoire.
À notre connaissance, seuls Rochat et al. ont étudié cette
Définition
technique en addition avec les expirations lentes prolongées
L'expiration lente prolongée (ELPr) a été proposée et
(voir supra) [44]. Les résultats ont été décrits dans la partie
décrite principalement pour traiter la bronchiolite du
ci-dessus : effet modeste sur le score r­ espiratoire (à attribuer
nourrisson en conséquence au manque d'efficacité des
à l'amélioration des sons adventices à l­'auscultation) mais
techniques classiques décrites par les Anglo-Saxons (AFE
aucun sur la vitesse de rétablissement clinique de l'enfant.
rapide + clapping + vibrations + drainage postural). La
technique amène le système thoracopulmonaire du petit Expiration lente et totale à glotte ouverte
enfant lentement en déflation complète sur plusieurs en infralatéral
temps expiratoires [36].
Définition
Description Également mise au point par l'équipe de G. Postiaux,
L'enfant est en décubitus dorsal. La main craniale du kiné- l'expiration lente et totale à glotte ouverte en infralatéral
sithérapeute empaume largement le thorax tandis que sa (ELTGOL) est une technique d'expirations lentes initiée
main caudale vient exercer un contre-appui sur l'abdomen à la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) et poursuivie
du patient. À la fin du temps expiratoire, les mains viennent jusqu'au volume résiduel [52].
accompagner et prolonger lentement les mouvements Cette technique s'adresse essentiellement aux patients à
expiratoires du nourrisson. Sur le temps inspiratoire sui- partir de 8–12 ans. Sa pratique montre une meilleure tolé-
vant, les mains du kinésithérapeute empêchent le retour rance chez les patients bronchoréactifs et un coût énergé-
thoracique et abdominal en position inspiratoire. Ce cycle tique plus modeste qu'avec les expirations forcées [36].
est répété plusieurs fois (généralement deux ou trois expi-
rations consécutives suffisent) jusqu'à amener le système Description
thoracopulmonaire au volume résiduel. La technique est Le patient est installé en décubitus latéral, le poumon à
totalement passive étant donné l'impossibilité du nourris- désencombrer étant placé en position infralatérale sur un
son à collaborer. plan dur (fig.  14.4). Le kinésithérapeute, placé derrière le

165
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Drainage autogène
Définition
Le drainage autogène (DA) a été développé et décrit par
le Belge J. Chevaillier en 1967 [57]. Aujourd'hui, cette tech-
nique est utilisée principalement chez les patients hyper-
sécrétants, comme dans la mucoviscidose [58]. Basé sur
une expiration lente contrôlée à différents niveaux de la
capacité vitale, il permet de mobiliser des sécrétions situées
dans différents étages bronchiques. Sa bonne tolérance et
sa possibilité de le pratiquer de manière autonome après
apprentissage améliorent l'adhérence au traitement chez
les patients avec des pathologies chroniques [59].
Description
Fig. 14.4
Bien que préconisé en position assise, toutes les positions
Illustration de l'ELTGOL.
Le patient est installé en décubitus latéral. Le kinésithérapeute sont possibles pourvu qu'elles soient réalisées sur une sur-
exerce des pressions manuelles dans la direction des flèches. face dure. Le patient doit être confortablement installé
pour améliorer sa relaxation et sa concentration, afin d'évi-
ter des mouvements paradoxaux et faciliter la respiration
patient, lui demande d'expirer lentement à glotte ouverte diaphragmatique.
jusqu'au volume résiduel, en accompagnant la manœuvre La technique consiste en une progression de trois phases
avec ses mains. La main caudale empaume le plus large- réalisées à différents volumes pulmonaires : une première
ment possible l'hémi-abdomen infralatéral et exerce une phase de décollement des sécrétions qui se fait à bas volume,
pression lente dirigée vers la tête du patient, d'arrière en une seconde phase de rassemblement obtenue par des cycles
avant et de bas en haut. La main craniale, positionnée sur le respiratoires à moyen volume, une dernière phase d'évacua-
gril costal supralatéral, réalise un contre-appui. L'action des tion par une respiration à haut volume. Le kinésithérapeute
mains aide à obtenir une déflation pulmonaire progressive aide le patient à travailler au niveau du volume pulmonaire
et maximale. L'intérêt de cette position est de permettre adéquat, selon les feedback auditifs (craquements) et tactiles
une déflation maximale du poumon infralatéral. Une aide (vibrations générées par les sécrétions) perçus.
instrumentale pour l'effet PEP peut être utilisée. L'inspiration doit être nasale et lente, suivie d'une pause
Cette technique s'adresse à des patients de préférence télé-inspiratoire de 3 à 4 secondes afin d'éviter l'asynchro-
coopérants, présentant un encombrement bronchique nisme ventilatoire et de favoriser un remplissage uniforme
périphérique. Le patient doit être capable de supporter la des différentes régions pulmonaires (voir inspiration lente).
position, ce qui peut être problématique pour des patients L'expiration est abdominale et exécutée par la bouche,
en insuffisance respiratoire grave. glotte ouverte, sous forme de « soupirs », de manière à
garantir un débit maximal, sans toutefois forcer pour éviter
Littérature de générer un collapsus des bronches.
Cette technique se montre sans danger et aucune désatu- Le manque de coopération du sujet est une limite évi-
ration n'a été recensée lors de sa pratique chez les patients dente du drainage autogène. Il est conseillé à partir de
BPCO [53, 54]. Elle permet une amélioration de la clairance 8  ans, mais avec l'aide d'un kinésithérapeute respiratoire ;
mucociliaire périphérique des voies aériennes chez les un apprentissage progressif peut être pratiqué dès 4–5 ans
patients bronchiteux chroniques et ce de façon plus mar- selon les enfants. Pour être réalisé de façon optimale, un
quée chez les patients ayant une atteinte modérée [55]. écolage rigoureux est utile. La mauvaise observance habi-
Cependant, l'intérêt de la technique lors d'exacerbation tuelle de la part des patients chroniques amène à conseiller
chez des patients BPCO n'a pas été montré [56]. la présence du thérapeute de manière régulière.
Une étude de comparaison entre l'ELTGOL et le Flutter
VRP1®, montre que seul l'ELTGOL augmente l'élimination Littérature
des sécrétions pulmonaires, mais que les deux techniques La littérature concerne spécifiquement les patients atteints
permettent une diminution de l'hyperinflation pulmonaire de mucoviscidose. McIlwaine et  al. ont publié la seule
chez les patients ayant des bronchectasies [57]. étude à long terme évaluant la technique du DA par rap-
166
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

port à la combinaison (percussion + drainage postural) Description


[12]. Une préférence marquée des patients pour le DA
Plusieurs types d'appareils peuvent être utilisés pour
a été mise en avant, cependant les critères d'évaluation
créer cette PEP continue (TheraPep®, PEPmask®,
montrent des bénéfices similaires avec les deux techniques
Threshold® expiratoire ou PariPEP® : fig.  14.5). Suivant
[16]. Cependant, dans une étude récemment parue, Flores
le dispositif choisi, le patient, en position assise, après
et al. suggèrent une meilleure adhérence des patients aux
une inspiration normale, expire de manière légèrement
techniques à PEP qui sont moins difficiles à exécuter [60].
active au travers d'un masque ou d'un embout buccal.
La dernière revue Cochrane sur l'intérêt de la kinési-
Ce dernier est muni d'une valve unidirectionnelle à
thérapie dans la mucoviscidose est venue remettre en
résistance variable et d'un manomètre permettant de
évidence le manque d'études de qualité et le manque de
contrôler la pression exercée, habituellement demandée
critères d'évaluation permettant de juger de son efficacité.
entre 10 et 20 cm H2O.
Cependant l'efficacité du désencombrement à court terme,
La technique consiste habituellement à réaliser une série
par différentes techniques de kinésithérapie dont le DA, a
de 15 à 20 expirations à travers l'appareil à PEP continue
été confirmée [61].
choisi, suivie d'une série d'expirations forcées et de toux.
L'ensemble sera généralement répété 3 à 5 fois durant une
période de 15 à 20 minutes.
Techniques instrumentales L'effet recherché est un prolongement du temps expi-
ratoire pendant lequel l'excrétion du mucus bronchique
de désencombrement des voies serait favorisée par :
aériennes intrathoraciques ● d'une part, un accroissement du volume d'air en amont

des sécrétions grâce à une augmentation de la ventilation


collatérale ;
Techniques instrumentales légères ● d'autre part, une diminution de la compression dyna-

Pression expiratoire positive mique des voies aériennes lors de l'expiration qui facilite le
désencombrement.
Définition Les avantages mis en évidence sont : la possibilité d'être
Ces techniques instrumentales consistent à créer une utilisé de manière autonome, les frais modestes [63, 64] et
pression positive s'opposant à l'expiration du patient. La le fait qu'il n'entraîne pas une majoration du reflux chez les
pression expiratoire positive (PEP) permet de diminuer patients BPCO et bronchectasiques [65].
la compression dynamique des bronches, de stabiliser le
diamètre des voies aériennes et de favoriser la ventilation Littérature
collatérale. Elle réduit l'hyperinflation et augmente le débit Ce matériel très étudié dans différentes pathologies obs-
aérien de fin d'expiration, favorisant ainsi l'évacuation des tructives s'avère aussi efficace comme technique adjuvante
sécrétions pulmonaires [62]. ou de remplacement des techniques de kinésithérapie

A B C D
Fig. 14.5
Appareils permettant de créer une pression expiratoire positive : TheraPep® (A), PEPmask® (B), Threshold® expiratoire (C) ou PariPEP®
(D).
167
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

respiratoire manuelles telles que le drainage postural, les Description


percussions et les vibrations [66, 67]. Le rapport des débits
Différents matériels permettent de créer une PEP oscillante.
de pointe expiratoire et inspiratoire ne semble pas favo-
rable à l'évacuation des sécrétions [68]. À l'opposé, cer- Flutter VRP1®
taines études montrent une amélioration de la quantité Le Flutter® est un appareil en forme de pipe (fig. 14.6A). Il
de sécrétions [69], de la ventilation et du volume résiduel est formé d'un embout buccal, d'un capuchon amovible
[70]. percé de trous et d'une bille en acier inoxydable de haute
Une étude de McIlwaine [71] au long cours chez les densité mobilisée au sein du cône qui la soutient par le
patients atteints de mucoviscidose montre une amé- flux expiratoire du patient. Lors de la phase expiratoire,
lioration de la fonction respiratoire pour le PEP compa- cette vibration verticale de la bille produit des oscillations
rativement au drainage postural. Pour ces patients, les du flux d'air, de fréquence allant de 10 à 25  Hz. L'angle
recommandations de la conférence de consensus de 2002 d'inclinaison du Flutter VRP1® modifie la résistance au
font clairement une place au PEP dans l'arsenal thérapeu- mouvement de la bille et par la même occasion, la PEP
tique en plus d'être la technique avec la meilleure observance créée [76].
thérapeutique [72]. Toutefois une revue Cochrane remet en
Acapella®
cause cette idée par manque de preuves suffisantes [73].
L'Acapella® est un instrument composé d'un levier, d'un
Récemment, une étude randomisée et multicentrique
contrepoids et d'un aimant (fig. 14.6B). Le patient expire au
évaluant le désencombrement chez les patients BPCO, en
travers d'un cône refermé de manière intermittente grâce
état stable et lors d'exacerbations, ne montre aucun intérêt
à un système de levier aimanté. Un flux d'air oscillant est
de l'utilisation du PEP [74].
produit. Un bouton situé à l'extrémité de l'appareil permet
L'utilisation d'un PEP masque chez les enfants avec une
de régler la proximité de l'aimant et donc la résistance de
trachéomalacie augmente le débit de pointe à la toux, per-
la PEP mais aucune mesure objective du réglage n'est pos-
mettant le maintien de la trachée ouverte. Il devient alors
sible. Il existe un modèle pour les patients pouvant expirer
un complément utile au désencombrement [75].
plus de 15 L/min pendant au moins 3 secondes et un autre
modèle pour les patients avec un flux expiratoire moins
Remarque important.

La bouteille d'eau dans laquelle le patient expire RC Cornet®


au moyen d'un tuyau est un montage souvent Le RC Cornet® consiste en un embout buccal fixé sur un
utilisé comme alternative pour avoir une PEP. tube courbé renfermant un boyau-soupape en caout-
Il faut toutefois noter qu'il y a une augmenta- chouc (fig.  14.6C). Ce dernier est très peu utilisé en
tion de pression, durant le temps nécessaire pratique.
à la montée de la colonne d'eau. Lors de cette
Littérature
période, aucun débit n'est généré. Une dyspnée
peut être induite par l'utilisation de la bouteille, Flutter VRP1®. La littérature décrit cet instrument comme
effet que l'on ne trouve pas forcément avec le sans danger, efficace dans la clairance des sécrétions et
PEP masque. Il est à noter que pour éviter une ne provoquant pas de désaturation chez les BPCO [53].
contamination bactérienne, l'eau doit être chan- L'amplitude de la pression produite par rapport à l'autre PEP
gée quotidiennement. oscillante (Acapella®) s'avère meilleure et avec une fréquence
d'oscillation plus importante, ces deux critères facilitent le
transport des sécrétions respiratoires. Toutefois, le niveau de
Pression expiratoire positive oscillante PEP atteint est similaire pour les deux appareils [77].
(OPEP) Acapella®. Une étude intéressante chez les patients
avec des bronchectasies comparant l'appareil à un
Définition
groupe contrôle (pas de traitement kinésithérapie)
Ces techniques instrumentales consistent à créer une montre un bénéfice légèrement significatif en faveur de
pression positive discontinue s'opposant à l'expiration du l'Acapella® [78]. Ce dispositif se montre aussi efficace
patient. Les oscillations ainsi obtenues diminuant la visco- que le PEP masque lors d'exacerbations chez les patients
sité des sécrétions. mucoviscidosiques.

168
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

A B

Fig. 14.6
Appareils permettant de créer une pression expiratoire oscillante :
C Flutter® (A), Acapella® (B), RC Cornet® (C).

La dernière revue Cochrane publiée sur les OPEP dans le maximale qu'il est capable de maintenir. Les pauses entre
traitement des patients ayant la mucoviscidose ne montre les efforts sont dégressives, passant de 1 minute à 45, 30, 15,
pas d'efficacité plus importante par rapport à d'autres tech- 10 et 5 secondes à la fin. L'exercice s'arrête lorsque le patient
niques de kinésithérapie [79]. n'arrive plus à atteindre les 80 % de la pression inspiratoire
maximale.
Resisted inspiratory manœuvre
Littérature
Définition
Trois études (dont un abstract) évaluent la RIM dans
La resisted inspiratory manœuvre (RIM) est un instrument le désencombrement à court terme, l'outil de mesure
facilement transportable à la base désignée pour évaluer et étant la quantité de sécrétions expectorées. Chez
ré-entraîner les muscles inspiratoires puisqu'il s'agit d'inspi- le patient atteint de la mucoviscidose, les résultats
rer contre une certaine charge. Quelques auteurs l'ont éga- sont contradictoires : Howard et  al. démontrent que
lement proposé dans une optique de désencombrement, l'ACBT est bien plus efficace que la RIM [53] tandis
d'où sa place dans ce chapitre. que Chatham et  al. montrent exactement l'inverse
[80]. Patterson et al. arrivent à la même conclusion que
Description Howard et al. mais sur le patient atteint de bronchecta-
Le protocole de désencombrement proposé est identique sies [81]. Les mécanismes qui expliquent l'augmentation
dans les études (voir ci-dessous) : le patient doit réaliser des de la clairance des sécrétions ne sont pas clairs mais les
inspirations successives dont la pression inspiratoire qu'il résultats obtenus par Chatham et al. sont surprenants.
doit atteindre correspond à 80 % de la pression inspiratoire D'autres études sont attendues afin de pouvoir mieux
169
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

définir les mécanismes et le rôle de la RIM dans le En ce qui concerne le choix d'un appareil fonction-
désencombrement. nant soit en débit ou en volume, la littérature semble
encourager les appareils à volume [82, 84]. En effet, ces
Spirométrie incitative derniers semblent améliorer l'activité diaphragmatique
et diminuer le travail respiratoire lors de l'effort com-
Définition paré aux appareils à débit, ce qui rend les spiromètres à
Les spiromètres incitatifs sont des appareils qui ont volume théoriquement plus adaptés dans des conditions
comme intérêt d'inciter, via un feedback visuel, le patient à postopératoires.
inspirer profondément afin de lutter contre les atélectasies
postopératoires. Le feedback peut être soit sous forme de Techniques instrumentales lourdes
volume à atteindre (appareil à volume), soit sous forme
d'un débit à obtenir (appareil à débit), soit les deux [50]. Oscillation extrathoracique à haute
La spirométrie incitative (SI) est également décrite comme fréquence (high frequency chest wall
un outil de désencombrement, d'où sa place dans ce cha-
oscillation ou HFCWO)
pitre [82].
Définition
Description Il s'agit d'un gilet gonflable relié à un système d'air pulsé
Le spiromètre incitatif est constitué d'un embout buccal que l'on enfile autour du thorax. À l'origine, développé
relié à une chambre volumétrique par un tuyau flexible. pour évaluer les effets d'une kinésithérapie conventionnelle
Assis et redressé, le patient expire librement. Dans un (compression–vibrations) standardisée (tout est contrôlé :
second temps, il met l'embout buccal en bouche et ins- fréquence des oscillations, force de compression…) [86], le
pire lentement et profondément en suivant du regard les gilet est maintenant étudié comme outil thérapeutique à
indicateurs de volume et/ou de débit. Lorsque l'inhala- part entière.
tion est maximale, le patient retire l'embout et retient sa
respiration pendant quelques secondes (habituellement Description
cinq), avant de ré-expirer normalement [83, 84]. Lors de Des compressions thoraciques à hautes fréquences sont
chaque répétition, le patient contrôle son amélioration administrées au patient par l'intermédiaire d'une veste
volumétrique éventuelle, tout en vérifiant la constance gonflable reliée à un système à air pulsé qui produit des
du flux. La SI offre une certaine autonomie au patient qui inflations–déflations successives. On peut régler la force de
peut l'utiliser seul, lequel reste motivé grâce aux feedback compression et la fréquence des oscillations. L'effet recher-
visuels. ché est toujours le même que pour les autres techniques :
La SI n'ayant pas encore fait ses preuves, il n'existe pas compression pour permettre le drainage des sécrétions
un protocole type à recommander (répétitions…), mais il bronchiques par augmentation du flux expiratoire et oscil-
existe des guidelines proposant plusieurs pistes [84]. lation pour une diminution potentielle de la viscosité du
mucus.
Littérature
La SI dans un but postopératoire sera explicitée plus en Littérature
détail dans le chapitre 19. En quelques mots, les dernières La veste est l'une des techniques les plus étudiées ces der-
revues sont décourageantes en ce qui concerne la SI mais nières années. À court terme, la conclusion générale que
soulignent très souvent la mauvaise qualité des études, l'on peut retirer de la littérature est que la veste est un
ce qui ne permet pas encore de trancher définitivement module thérapeutique sûr, souvent démontré comme
sur son efficacité [82, 85]. Elle reste néanmoins très fré- étant efficace mais souvent semblable aux autres tech-
quemment utilisée, car on lui attribue un rôle important niques thérapeutiques et ce pour de nombreuses situations
dans la réduction ou la prévention des complications pathologiques [87–97]. Rares sont les études démontrant
pulmonaires postopératoires. À notre connaissance, il un (dés)avantage de la veste [98–101]. Difficile d'en tirer
n'existe pas d'étude utilisant la spirométrie incitative en une conclusion définitive, surtout sur un design d'études
tant qu'outil thérapeutique de désencombrement à part menées essentiellement à court terme. De plus, étant
entière. donné l'investissement financier de départ, cela limite

170
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

fort sa recommandation. Notons toutefois un important est de mise (le chapitre 18 détaille davantage la VPI pour les
nombre d'étude où l'on retrouve un conflit d'intérêt. patients neuromusculaires).
À notre connaissance, la seule étude à long terme La VPI ne semble cependant pas aussi avantageuse
(1 an) a été réalisée très récemment par McIlwaine et al. dans d'autres pathologies plutôt obstructives (mucovis-
chez des patients atteints de la mucoviscidose et com- cidose, BPCO…) mais des études de meilleures qualités
parait l'efficacité de deux traitements : la veste et le PEP devront le confirmer. Par contre, dans des pathologies où
masque. L'étude démontre un avantage considérable en la kinésithérapie respiratoire classique par abord externe
faveur du PEP masque : le nombre d'exacerbations pul- (thoraco-abdominale) est contre-indiquée (fracture de
monaires est significativement plus important chez les côte, ostéogenèse imparfaite…) malgré l'encombrement,
patients ayant eu la veste pendant 1 an comme traite- la VPI a toute sa place du fait de son abord endobron-
ment [102]. chique [105].
Enfin, en ce qui concerne la nébulisation, le design de la
Ventilation à percussion intrapulmonaire VPI la rend trop inadéquate pour administrer efficacement
les particules médicamenteuses dans le poumon [106, 107].
(intrapulmonary percussive ventilation
ou IPV)
Insufflation–exsufflation mécanique
Définition
(mechanical insufflation–exsufflation
La ventilation à percussion intrapulmonaire (VPI) est un ou MI-E)
instrument qui délivre une pression oscillatoire intrapulmo-
naire par l'intermédiaire soit d'un masque facial, soit d'un Définition
embout buccal ou via une canule de trachéotomie. Cette technique vise essentiellement au désencombre-
ment des sécrétions proximales chez les patients ayant une
Description toux inefficace due à un affaiblissement général ou à une
La VPI peut être réglée de différentes manières, mais le pathologie neuromusculaire spécifique. L'appareil assiste,
mode d'emploi reste approximatif. Sur les appareils clas- potentialise la toux. À l'inspiration, une pression positive est
siques, deux grands réglages sont possibles : la pression de administrée au patient, tandis qu'à l'expiration un brusque
travail et la fréquence des percussions. Sur les appareils plus inversement de pression va entraîner une exsufflation.
élaborés, il est également possible de régler le rapport ins- Cette modalité est décrite plus en détail dans le chapitre 18.
piration/expiration, le débit et la pression expiratoire conti-
nue. Une proposition de réglage du dispositif en fonction Description
des buts thérapeutiques recherchés a été décrite par Riffard L'appareil permet le réglage d'une pression inspiratoire, d'un
et Toussaint [103]. débit inspiratoire (lent ou rapide), d'une pression d'insuffla-
La VPI a plusieurs effets théoriques : elle est censée com- tion–exsufflation, et peut être utilisé en mode manuel ou
biner ventilation, drainage bronchique (par diminution de automatique (fig. 14.7). Une description détaillée des para-
la viscosité des sécrétions et en mettant de l'air derrière les mètres à régler peut être retrouvée autre part [108]. Une
sécrétions) et nébulisation. fois les réglages adaptés au patient, le traitement s'effectue
au moyen d'un masque facial, d'un embout buccal, d'une
Littérature sonde endotrachéale ou directement sur la canule de tra-
Au vu de la diversité des réglages, il est difficile de compa- chéotomie. Des pauses doivent être observées entre les
rer les résultats des études. Néanmoins, une récente revue répétitions pour ne pas épuiser le patient.
de la littérature a été réalisée par Riffard et Toussaint [104]. L'effet recherché consiste à imiter une toux efficace
Malgré le manque d'étude de haute qualité, la VPI démontre chez le patient. Le Cough-Assist® (marque la plus utilisée
surtout en général son efficacité dans des situations où le dans les études) facilite le désencombrement de sécrétions
patient ne peut physiquement (patients restrictifs, neuro- proximales par deux effets différents. L'insufflation méca-
musculaires) ou mentalement (coma…) pas collaborer. En nique augmente le volume inhalé et, par conséquent, les
effet, la VPI étant un traitement « passif » et permettant un forces de recul thoracique et pulmonaire, tandis que l'exsuf-
support ventilatoire, elle constitue un avantage non négli- flation (pression négative) opère une véritable manœuvre
geable face aux techniques classiques où la collaboration d'aspiration, d'appel des sécrétions bronchiques.

171
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

conditionnant l'efficacité de cette dernière. La technique


ne semble pas indiquée chez les patients BPCO, probable-
ment à cause du collapsus dynamique des voies aériennes
fréquemment observé chez cette population lors de
manœuvres forcées, limitant par conséquent l'efficacité
de la toux [114].
Les dernières études démontrent également l'intérêt
de la technique dans les unités de soins intensifs [116] et
pas seulement chez les patients neuromusculaires [117].
L'utilisation du Cough-Assist® permet d'améliorer les succès
d'extubation et de diminuer le temps de séjour aux soins
intensifs.
Une revue plus complète peut se retrouver au cha-
pitre 18 de ce livre.

Technique insufflatoire de levée


d'atélectasie
Un seul article traite de la technique insufflatoire de
levée d'atélectasie (TILA) comme technique insuffla-
toire en réanimation néonatale [118]. Comme son nom
Fig. 14.7
l'indique, il s'agit d'une technique visant essentiellement
Cough-Assist®.
1 : réglages des temps respiratoires lorsque l'appareil est réglé en la résolution des atélectasies. Lorsque le nouveau-né est
mode automatique. sous ventilation mécanique en pression contrôlée et qu'il
2 : manomètre mesurant la pression au masque. y a objectivation d'atélectasies localisées, la technique
3 : réglages des pressions d'insufflation et d'exsufflation.
consiste à venir maintenir les segments thoracopulmo-
naires sains en position expiratoire. Cela permet de diri-
ger l'air vers les segments atteints et d'aérer localement
Le Cough-Assist®, comme son nom l'indique, assiste la le parenchyme touché de manière optimale. L'auteur
toux mais ne la remplace pas. Il demande une participa- observe par radiographie pré- et post-intervention un
tion active du patient qui doit fermer sa glotte à l'étape excellent taux de réussite : 15 atélectasies sur 16 (93 %)
correspondante de la toux. En cas d'atteinte bulbaire com- ont été levées. Même si l'étude souffre de quelques
promettant l'intégrité du contrôle de la glotte ou chez des lacunes méthodologiques (absence de groupe contrôle,
enfants ou adultes non collaborants, le Cough-Assist® reste détail de la technique…), ses résultats n'en restent pas
applicable mais par voie invasive uniquement. Dans ce cas, moins surprenants et intéressants. Curieusement, aucune
la machine crée une toux artificielle. En effet, la pression étude n'a tenté de reproduire cette technique. D'autres
générée par l'insufflation–exsufflation est directement études sont attendues sur ce sujet afin de confirmer ou
appliquée dans la trachée au niveau de la région subglot- infirmer ses résultats.
tique [109]. Cependant, à cause de la résistance induite par
le tube, les pressions doivent être augmentées pour main-
tenir l'efficacité de l'appareil [110].
Conclusion
Littérature
Il est difficile d'établir un protocole type de traitement, vu
Pour les raisons expliquées ci-dessus, cette technique est que la validation des différentes techniques de désencom-
surtout utilisée chez les patients ayant une toux inef- brement ne repose que, dans le meilleur des cas, sur des
ficace et plus particulièrement chez les patients ayant présomptions scientifiques basées sur des études de niveau
une atteinte neuromusculaire (myopathe, blessé médul- intermédiaire de preuves, tels des essais comparatifs ran-
laire…) [111]. Les études s'accordent à noter une amélio- domisés de faible puissance, des études comparatives non
ration du débit de pointe à la toux [112–115], paramètre randomisées bien menées ou des études de cohortes. Dans

172
14. Kinésithérapie du désencombrement des voies aériennes

ce contexte, l'expertise et l'évaluation à chaque traitement [3] West J. L'essentiel sur la physiologie respiratoire. 6e éd Baltimore :
et au cours du traitement par le kinésithérapeute sont pri- Lippincott, Williams & Wilkins ; 2003.
[4] Button B, Boucher RC. Role of mechanical stress in regulating
mordiales pour assurer une prise en charge optimale. airway surface hydration and mucus clearance rates. Respir Physiol
Ainsi, avec l'ensemble de ces techniques, le kinésithéra- Neurobiol 2008 ; 163(1–3) : 189–201.
peute dispose d'un vaste choix de possibilités thérapeu- [5] Wang YH, Yang CP, Ku MS. Efficacy of nasal irrigation in the treat-
tiques. Il lui incombe de sélectionner une technique ou d'en ment of acute sinusitis in children. Int J Pediatr Otorhinolaryngol
2009 ; 73 : 1696–701.
associer plusieurs, afin de répondre à un certain nombre de
[6] Shoseyov D, Bibi H, Shai P. Treatment with hypertonic saline versus
critères : normal saline nasal wash of pediatric chronic sinusitis. J Allergy Clin
● ne pas épuiser exagérément le patient ;
Immunol 1998 ; 101 : 602–5.
● obtenir un désencombrement efficace des voies [7] Garavello W, Romagnoli M, Sordo L. Hypersaline nasal irrigation in
ariennes ; children with symptomatic seasonal allergic rhinitis : a randomized
● s'adapter au mieux au patient ;
study. Pediatr Allergy Immunol 2003 ; 14 : 140–3.
[8] Jeffe JS, Bhushan B, Schroeder JW, et al. Int J Pediatr Otorhinolaryngol
● assurer un apprentissage de certaines techniques pour
2012 ; 76 : 409–13.
garantir une certaine autonomie au patient. [9] Khianey R, Oppenheimer J. Is nasal saline irrigation all it is cracked
Dans le choix des techniques, le kinésithérapeute anticipe up to be ? Ann Allergy Asthma Immunol 2012 ; 109 : 20–8.
[10] Achilles N, Mösges R. Nasal saline irrigations for the symptoms of
leurs éventuels effets délétères. Citons par exemple les risques
acute and chronic rhinosinusitis. Curr Allergy Asthma Rep 2013 ;
de barotraumatismes ou hémoptysies pour les techniques à 13(2) : 229–35.
pression positive, les risques de fracture dans la pratique de [11] Pryor JA. Physiotherapy for airway clearance in adults. Eur Respir J
techniques de percussions ou de compressions, les modifi- 1999 ; 14 : 1418–24.
cations du rapport ventilation/perfusion pour les patients [12] McIlwaine M. Chest physical therapy, breathing techniques and
exercise in children with CF. Paediatr Respir Rev 2007 ; 8(1) : 8–16.
positionnés en décubitus latéral, ou encore la diminution du [13] Mazzocco MC, Owens GR, Kirilloff LH, et  al. Chest percussion
retour veineux lors des manœuvres expiratoires forcées. and postural drainage in patients with bronchiectasis. Chest 1985 ;
Enfin, les traitements respiratoires, et plus particuliè- 88(3) : 360–3.
rement ceux relatifs au désencombrement bronchique, [14] Mortensen J, Falk M, Groth S, et al. The effects of postural drainage
and positive expiratory pressure physiotherapy on tracheobron-
nécessitent une hygiène stricte tant pour le patient que
chial clearance in cystic fibrosis. Chest 1991 ; 100(5) : 1350–7.
pour le kinésithérapeute [119]. [15] Lannefors L, Wollmer P. Mucus clearance with three chest physio-
therapy regimes in cystic fibrosis : a comparison between postural
drainage, PEP and physical exercise. Eur Respir J 1992 ; 65(6) : 748–53.
Point clé [16] Bolt J, Blumenthal S, Buxton M, et al. Guidelines for the physiothe-
rapy management of the adult, medical, spontaneously breathing
Ce chapitre a pour objectif de présenter les tech- patient. Thorax 2009 ; 64(Suppl. 1) : i1–i51.
[17] McIlwaine M, Wong LT, Chilvers M, et al. Long-term comparative
niques de désencombrement les plus présentes
trial of two different physiotherapy techniques ; postural drainage
dans la littérature et les plus usuellement utilisées with percussion and autogenic drainage, in the treatment of cystic
dans la pratique de routine. Ces techniques de fibrosis. Pediatr Pulmonol 2010 ; 45(11) : 1064–9.
désencombrement sont de types non instrumen- [18] Schans C. Conventional chest physiotherapy compared to other
tales ou instrumentales. Elles ne sont pas présen- airway clearance techniques for cystic fibrosis. Cochrane Database
Syst Rev 2005 ; 25(1) CD002011.
tées ni décrites de manières exhaustives. L'efficacité [19] Cornudella R, Sangenis M. Chest physical therapy. Eur Respir Rev
dépendra de la pertinence du choix de la ou des 1991 ; 1(6) : 503–6.
techniques associées en lien avec la situation cli- [20] Vandevenne A. Rééducation respiratoire des bronchopneumopa-
nique, ainsi que d'une réalisation et adaptation thies chroniques obstructives. Monographies de Bois-Larris. 2e éd
Paris : Masson ; 1988.
adéquates de ces techniques pour chaque patient.
[21] Diziain AM, Plas-Bourey M. Rééducation respiratoire : bases pra-
tiques et applications thérapeutiques. Monographies Bois-Larris.
Paris : Masson ; 1978.
[22] Radford R, Barutt J, Billinsley JG, et  al. A rational basis for
Références ­percussion-augmented mucociliary clearance. Respir Care 1982 ;
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III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

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176
Chapitre 15
Kinésithérapie
et bronchopneumopathie
chronique obstructive
Gregory Reychler, Coralie Colbrant, Pierre Delguste, Gilles Caty,
Giuseppe Liistro, Thierry Pieters

PLAN DU CHAPITRE
Définitions (selon GOLD) 178
Classification 179
Symptômes 179
Facteurs de risque 180
Physiopathologie 180
Stratégie de prise en charge de la BPCO 180
Traitements de la BPCO et kinésithérapie 181

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) tation de débit est habituellement progressive et associée
est une maladie dont la prévalence augmente sans cesse à une augmentation de la réponse inflammatoire des voies
et qui touche plus de 65 millions de personnes de par le aériennes à une exposition à des particules ou gaz nocifs,
monde selon les derniers chiffres de l'OMS. D'ici 2030, elle tels que le tabac ou la pollution atmosphérique, ainsi qu'à
fera partie des trois principales causes de décès alors qu'il y des poussières minérales et industrielles. Les exacerbations
a peu, elle se situait encore au-delà de la 5e position [1]. Une et les comorbidités participent à la sévérité de la mala-
étude récente a montré que la prévalence de la BCPO avait die de manière individuelle [7]. L'évolution clinique ainsi
doublé en 8 ans passant de 7 à 14 % [2], sans compter que que le pronostic de la BPCO sont influencés de manière
le diagnostic n'est souvent pas posé ou tardif [3]. importante par les comorbidités qui sont nombreuses et
Pendant longtemps, la bronchopneumopathie chro- variées (tableau 15.1). Cependant, le mécanisme de ces der-
nique obstructive (BPCO) a été considérée comme une nières et surtout leur prévalence s'accompagnent encore
entité regroupant une série de maladies pulmonaires chro- d'ambiguïté.
niques telles que bronchite chronique, emphysème [4], Sans les inclure en tant que telles dans sa définition, la
asthme [5]. La tuberculose et la mucoviscidose y ont même notion de BPCO a longtemps fait référence en ordre princi-
été associées en certaines occasions. pal à la bronchite chronique et à l'emphysème, deux mala-
Vers la fin du xxe siècle, le monde médical s'est rendu dies aux caractéristiques très intriquées.
compte de l'intérêt de mieux définir la BPCO. C'est ainsi qu'un L'emphysème répond à une définition anatomique (dia-
consortium – global initiative for chronic obstructive lung gnostic reposant sur l'imagerie médicale, TDM computé-
disease (GOLD) – regroupant différentes « sociétés savantes » risée en particulier) et se caractérise par une destruction
issues du monde scientifique et clinique international s'est permanente et une dilatation de territoires pulmonaires
réuni pour synthétiser les connaissances relatives à la BPCO situés en aval des bronchioles terminales. Cette destruction
et surtout proposer une « stratégie globale pour le diagnostic, est responsable d'un collapsus des voies aériennes et d'une
la prise en charge et la prévention de la BPCO ». Une initiative diminution des forces de recul pulmonaire causant une
du même type a vu le jour en France en 2005, sous l'égide du hyperdistension statique et dynamique des poumons.
ministère de la Santé et des Solidarités, en collaboration avec La bronchite chronique, quant à elle, repose sur une défi-
la Société de pneumologie de langue française (SPLF), sous le nition et un diagnostic clinique, à savoir une augmentation
titre Programme d'actions en faveur de la bronchopneumopa- chronique et récurrente de production de sécrétions bron-
thie chronique obstructive (BPCO) 2005–2010 [6]. chiques responsables d'expectorations durant au minimum
3 mois par an et au moins 2 années consécutives. Cette hyper-
sécrétion bronchique est à mettre en relation avec l'augmen-
Définitions (selon GOLD) tation de la taille et du nombre des glandes à mucus.
Ces définitions d'emphysème et de bronchite chro-
La BPCO est une maladie évitable et traitable, caractérisée nique perdent aujourd'hui de leur signification à la lumière
par une limitation persistante des débits aériens. Cette limi- de la définition de GOLD, qui repose sur la fonction res-

Tableau 15.1 Comorbidités liées à la BPCO et leur prévalence exprimée en pourcentage


N Arthrite Cardiaques Hypertension Diabète Psychologiques Gastro- Cancer Ostéoporose
intestinales
Van Manen 1145 36 13 23 5 9 15 6 –
(2001)
Mapel (2000) 200 22 65 45 12 17 32 18 –
Soriano 2699 28 22 – – 10 26 4 –
(2005)
Sidney (2005) 45966 – 18 18 2 – – – –
Walsh (2006) 3000 70 50 52 16 38 62 4 32
Chatila 995 54 – 60 16 21 – 16 17
(2008)
Adapté d'après Chatila et al. [8].
178
15. Kinésithérapie et bronchopneumopathie chronique obstructive

piratoire, et plus particulièrement sur la notion de limita- Tableau 15.2 Classification de la BPCO en termes de gravité
tion du débit expiratoire, et sur la symptomatologie et les de la maladie, selon la première version de GOLD
exacerbations. Degré de gravité Caractéristiques
Notons cependant que la définition anatomique d'em- 0 À risque VEMS/CVF normal (> 80 %)
physème (hyperdistension objectivée par l'imagerie médi- Présence de symptômes chroniques
cale) reste utile dans le cadre d'indications chirurgicales
I BPCO légère VEMS/CVF < 70 %
(chirurgie de réduction pulmonaire ou transplantation).
VEMS > 80 % de la norme
Avec ou sans symptômes
II BPCO modérée VEMS/CVF < 70 %
Classification 50 % < VEMS < 80 % de la norme
Avec ou sans symptômes
Pendant longtemps, la classification des patients selon la III BPCO sévère VEMS/CVF < 70 %
sévérité de leur maladie a reposé principalement sur l'évo- 30 % < VEMS < 50 % de la norme
lution de leur limitation de débit, elle-même objectivée Avec ou sans symptômes
par spirométrie et plus particulièrement par la mesure du
IV BPCO très sévère VEMS/CVF < 70 %
VEMS et du rapport de Tiffeneau (VEMS/CVF) réalisée VEMS < 30 % de la norme ou VEMS
après bronchodilatation, ainsi que sur la présence ou non < 50 % de la norme et défaillance
de symptômes cliniques. respiratoire
Cinq niveaux de sévérité de la BPCO ont été initiale-
ment proposés, allant de « patient à risque » jusqu'à « très
sévère ». Ce dernier est celui de la défaillance respiratoire Symptômes
caractérisée par une hypoxémie grave (PaO2 < 60 mmHg)
avec ou sans hypercapnie ou un VEMS inférieur à 30 % de Les principaux symptômes de la BPCO sont la toux, la dys-
la valeur prédite (tableau  15.2). Très rapidement le degré pnée et l'expectoration [7]. La toux est souvent le premier
zéro a été abandonné pour ne conserver que quatre stades. signe de la BPCO. Au départ progressive et épisodique, elle
Récemment une mise à jour a été réalisée pour inclure en persiste pour devenir quotidienne. Toutefois, il est possible
plus de la fonction respiratoire, les symptômes, la qualité de de développer une limitation des débits aériens sans que
vie et la fréquence des exacerbations (fig. 15.1). ce symptôme ne soit présent [7]. La dyspnée est décrite

GOLD IV
VEMS < 50 %
C D ou
≥ 2 exacerbations / an
GOLD III

GOLD II
VEMS ≥ 50 %
A B et
0 à 1 exacerbation/an
GOLD I

Peu de symptômes Plus de symptômes


(CAT < 10 ou mMRC 0-1) (CAT ≥ 10 ou mMRC ≥ 2)

Fig. 15.1
Nouvelle classification selon GOLD basée sur le CAT (clinical assesment test – score clinique) et mMRC (modified medical research
counsil – échelle de dyspnée), le VEMS et les exacerbations.

179
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

par les patients comme une sensation d'essoufflement, un auquel la personne a débuté sa consommation de tabac
manque d'air et un effort pour respirer. C'est tout d'abord ainsi que l'état actuel du tabagisme de celle-ci influencent la
une dyspnée à l'effort et ce n'est que dans les stades plus mortalité [11, 14]. Le tabagisme passif constitue également
avancés qu'elle se fait ressentir au repos [9]. La dyspnée un facteur de risque.
est un symptôme prédominant dans la BPCO. Il va, chez
la plupart des malades, être à l'origine d'anxiété et contri-
buer à l'invalidité [7]. L'expectoration est le troisième Physiopathologie
symptôme principal de la BPCO. Avec une toux efficace, le
patient peut expectorer une petite quantité de sécrétions. La limitation partiellement non réversible du flux expiratoire
Celles-ci peuvent être dégluties et non expectorées, ce qui est due à l'inflammation bronchique et au rétrécissement du
rend difficile l'évaluation de la production réelle d'expecto- calibre bronchique. L'inhalation de particules ou gaz nocifs
ration. Dans le cas où elle devient excessive et chronique, cause cette inflammation qui touche principalement les
des bronchectasies [10], anomalies anatomofonctionnelles voies aériennes, le parenchyme et l'arbre vasculaire pulmo-
sans lien étiologique avec la BPCO, peuvent être suspec- naire. Cette inflammation est une réponse normale à l'expo-
tées. Les expectorations peuvent être séreuses, muqueuses, sition de ces facteurs toxiques. Une modification de cette
(muco-)purulentes ou hémoptysiques [7]. réponse inflammatoire semble survenir chez les personnes
Une majoration de ces trois symptômes, appelée exacer- développant une BPCO [7]. Elle détruit le tissu parenchy-
bation ou décompensation, peut, dans certains cas, mettre mateux (responsable de l'emphysème) et  altère les méca-
en jeu le pronostic vital du patient [11]. Elle peut être définie nismes normaux de défense et de réparation, entraînant un
comme une aggravation aiguë des symptômes respiratoires remodelage des petites voies aériennes (épaississement de
au-delà de l'état habituel, entraînant une détérioration de la la membrane basale, hyperplasie des cellules musculaires
fonction pulmonaire et de la qualité de vie, et une augmen- lisses et des glandes à mucus, néovascularisation) [7]. Une
tation du risque de mortalité et d'hospitalisation, et menant augmentation de la compliance pulmonaire et des résis-
à une majoration du traitement [7, 12]. Leurs fréquences tances des débits aériens est liée à cette limitation. En rai-
s'amplifient avec le déclin du VEMS [13]. Prévenir, détecter ou son de l'obstruction bronchique, l'air piégé à l'intérieur des
traiter rapidement sont donc trois actions primordiales afin poumons lors de l'expiration va provoquer une distension
de diminuer les conséquences de ces décompensations [7]. pulmonaire. Celle-ci diminue la capacité inspiratoire et par
conséquent augmente la capacité résiduelle fonctionnelle
(CRF) ce qui contribue à la dyspnée, une restriction de la
Facteurs de risque capacité d'exercice et une limitation dans les activités de la
vie journalière. Cependant, l'intolérance à l'effort semble mal
Nous pouvons classer les facteurs de risque en deux caté- corrélée avec l'altération de la fonction respiratoire.
gories :
● les facteurs endogènes qui comprennent les facteurs géné-

tiques (déficit de la protéine alpha-1-antitrypsine), l'âge et le


sexe, l'asthme et l'hyperréactivité bronchique, le reflux gastro- Stratégie de prise en charge
œsophagien et l'immaturité du système respiratoire [7, 11] ; de la BPCO
● les facteurs exogènes qui englobent le tabagisme, les

risques professionnels, la pollution atmosphérique et La prise en charge des malades atteints de BPCO repose,
domestique, les infections respiratoires et le statut socio- selon GOLD, sur quatre piliers :
● le diagnostic et le monitorage de la maladie ;
économique [7, 11].
● la diminution des facteurs de risque (prévention et lutte
Le lien avec l'âge pourrait s'expliquer par le vieillissement
en tant que tel ou l'accumulation d'expositions nocives, contre le tabagisme, contrôle de l'exposition aux polluants et
notamment au tabac, tout au long de la vie [11]. Ce dernier lutte contre la pollution domestique et environnementale) ;
● la prise en charge des malades en état stable selon trois
élément explique aussi le fait que les hommes soient plus
touchés même si cette tendance s'amenuise. axes : l'éducation du patient, les traitements pharmaco­lo­­
Le tabac est sans nul doute le principal facteur de risque giques et les traitements non pharmacologiques (réadap-
de la BPCO [7]. Environs 80 % des patients BPCO sont (ex-) tation, nutrition, oxygénothérapie, chirurgie, assistance
fumeurs mais uniquement 15 à 20 % de ceux-ci souffrent ventilatoire mécanique) ;
● la prise en charge des malades en exacerbation.
de la maladie [11]. Le nombre d'unités paquet-année, l'âge
180
15. Kinésithérapie et bronchopneumopathie chronique obstructive

Le kinésithérapeute peut jouer un rôle à chaque niveau pratiques ayant démontré leur efficacité et les modalités de
de cette stratégie de prise en charge de la BPCO. Par sa prise en charge et les techniques de kinésithérapie mises en
participation à certains examens fonctionnels respiratoires œuvre au quotidien de façon empirique par la majeure par-
(spirométrie, test de marche de 6 minutes) et/ou à la réa- tie des kinésithérapeutes européens, soutenus et stimulés
lisation de bilans spécifiques (notamment au niveau mus- par nombre de médecins prescripteurs [17]. Ceci explique
culaire), le kinésithérapeute intervient dans l'évaluation du sans doute pourquoi GOLD décrit et recommande le pro-
patient atteint de BPCO. cessus de réadaptation pulmonaire à l'intérieur duquel le
De façon non spécifique, le kinésithérapeute doit inter- réentraînement à l'effort occupe une place de choix, alors
venir dans la lutte contre le tabagisme et l'éducation du que la kinésithérapie n'est même pas citée !
patient, notamment en l'encourageant à augmenter ou
maintenir à tout le moins son niveau d'activité physique
qui est moindre que pour une population contrôle [15] et
qui est le principal facteur prédictif de mortalité [16]. Traitements de la BPCO
Le rôle important du kinésithérapeute dans les traite- et kinésithérapie
ments pharmacologiques de la BPCO, en particulier l'aéro-
solthérapie, et dans l'éducation thérapeutique est moins Le traitement de la BPCO peut se regrouper principale-
documenté dans la BPCO que dans l'asthme mais il semble ment en deux grandes catégories. L'une correspond au
logique pour les mêmes raisons. C'est évidemment dans traitement pharmacologique (non abordé dans ce cha-
le cadre des traitements non pharmacologiques au béné- pitre, hormis tableau  15.3) et l'autre, au traitement non
fice des malades en état stable et en exacerbation que la pharmaco­ logique, incluant notamment la réadaptation
kinésithérapie trouve sa place principale dans la stratégie pulmonaire et la kinésithérapie.
thérapeutique de la BPCO. Seuls le réentraînement à l'effort et, dans une moindre
Contrairement aux États-Unis et au Canada où la profes- mesure, le renforcement des muscles squelettiques et res-
sion s'articule différemment, en Europe, le métier de kinési- piratoires ont obtenu un niveau d'évidence élevé en termes
thérapeute respiratoire correspond autant à celui du chest d'EBM et ce, même en cas d'exacerbations [18].
physiotherapist qu'à celui du respiratory therapist où la part La place, les modalités d'application et les résultats du
prise par l'une ou l'autre de ces activités dans sa pratique de réentraînement à l'effort ainsi que de l'entraînement des
terrain est fonction du niveau de compétence, d'autono- muscles respiratoires dans le cadre de programmes de réha-
mie et de collaboration acquis par le kinésithérapeute au bilitation pulmonaire sont largement décrits par ailleurs.
sein de son milieu de travail. Nous n'y reviendrons pas dans ce chapitre.
À la lecture des recommandations GOLD, exprimées La kinésithérapie respiratoire du patient BPCO trouve
sur base de la seule EBM (evidence based medecine), on à tout le moins une place lorsque le patient présente des
mesure l'importance du « porte à faux » qui existe entre les expectorations. Un volume de sécrétions de 20 à 25 mL par

Tableau 15.3 Traitements pharmacologiques en fonction de GOLD


Groupe Classification Exacerbations mMRC CAT 1re intention 2e intention
spirométrique* par an
A GOLD grade I ≤1 0–1 < 10 SAMA ou SABA LAMA ou LABA ou SABA + SAMA
ou II au besoin
B ≥2 ≥ 10 LAMA ou LABA LAMA + LABA
C GOLD grade III ≥2 0–1 < 10 CSI + LABA OU LAMA + LABA
D ou IV ≥2 ≥ 10 LAMA CSI + LAMA ou CSI + LABA +
LAMA ou CSI + LABA + PDE4-I ou
LAMA + LABA ou LAMA + I-PDE4
* VEMS/CVF < 70 % ; GOLD 1 = VEMS ≥ 80 ; 2 = VEMS < 80 ≥ 50 ; 3 = VEMS < 50 ≥ 30.
CSI = corticoïdes inhalés ; LABA = β2-agoniste longue durée d'action ; LAMA = antagoniste muscarinique longue durée d'action ; PDE4-I = inhibiteur
de la phosphodiestérase ; SABA = β2-agoniste courte durée d'action ; SAMA = antagoniste muscarinique courte durée d'action.

181
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

jour est mentionné dans la littérature même si d'un point montré une supériorité en termes d'efficacité. Le kinésithé-
de vue clinique cela peut sembler peu objectif. Un lien avec rapeute aura toujours à l'esprit que des bronchectasies sont
une entrave à la qualité de vie semblerait plus judicieux. assez souvent associées à la BPCO et pourront influencer
Il revient au kinésithérapeute de choisir et d'appliquer ce choix.
les techniques qui lui semblent les mieux adaptées aux
patients qui lui sont confiés, sans jamais omettre d'évaluer
son action tout en tenant compte de l'avis de son patient.
Kinésithérapie et dyspnée
La kinésithérapie n'a, en soi, aucun effet direct sur la dys-
pnée du patient BPCO. Néanmoins, par l'amélioration de
Kinésithérapie et encombrement la perméabilité bronchique, le drainage bronchique dimi-
bronchique nue souvent la sensation de dyspnée [3]. Les techniques
de « ventilation abdominodiaphragmatique » et de « ven-
Le consensus international de GOLD ne fait pas mention tilation dirigée à basse fréquence » telles que proposées par
du désencombrement bronchique du patient BPCO, ni Gimenez et très en vogue dans les années 1980 ne sont plus
en état stable, ni en exacerbation. Cependant même si le recommandées à l'heure actuelle. En effet, si leurs effets sont
bénéfice est faible, à certains moments, il pourrait être pris bien réels et potentiellement positifs, par exemple sur la
en considération [19]. diminution de la capacité résiduelle fonctionnelle, ces tech-
Cliniquement, l'encombrement bronchique peut repré- niques s'accompagnent également – et c'est nettement
senter un problème pour nombre de patients BPCO, qu'il moins intéressant – d'une aggravation de l'asynchronisme
s'agisse d'un encombrement situé distalement, au niveau ventilatoire et d'une respiration paradoxale [24]. Ces exer-
des petites voies aériennes, et peu ou pas mobilisable par cices regroupés sous le vocable de breathing exercises n'ont
la toux, ou qu'il s'agisse de l'impossibilité pour un malade en réalité pas de vraie place dans la gestion de la dyspnée de
très affaibli de mobiliser et d'expulser des sécrétions bron- repos chez les patients BPCO [25]. Par contre, la « respira-
chiques abondantes, muqueuses et purulentes situées au tion à lèvres pincées » (pursed lips breathing) correctement
niveau des voies aériennes proximales (trachée et gros enseignée au patient, s'il ne la pratique pas spontanément,
troncs bronchiques). Sans en préciser les modalités, dès peut avoir un effet bénéfique sur la dyspnée, particulière-
1985, la kinésithérapie de désencombrement bronchique ment à l'effort [26–28].
était ainsi reconnue comme globalement efficace chez le
patient BPCO [20].
Après avoir évalué cliniquement tant l'importance et la Kinésithérapie
localisation de l'encombrement que la nécessité d'apporter et déconditionnement physique
une aide extérieure à la toilette bronchique du patient, une
aide à la toux voire à la mobilisation de sécrétions distales Comme mentionné précédemment, les programmes
ou proximales pourrait être utile, mais ce sans aucun fonde- structurés de réadaptation pulmonaire sont indiqués chez
ment scientifique [21]. Cette aide consiste principalement les patients BPCO en état stable voire en exacerbation
à prodiguer de simples conseils visant à faire réaliser au quitte à adapter ce programme. En réalité, même durant
patient une toux à haut volume pulmonaire et en évitant la cette dernière phase, le maintien en activité est primordial
toux en quinte, moins efficace quant à l'expulsion de sécré- pour éviter les pertes musculaires qui y sont associées.
tions. L'aide à la toux peut également être réalisée en toute Dans ces situations, le recours à l'électrostimulation peut
logique, par exemple chez un patient affaibli, par pressions être utile [29, 30]. La dyspnée, l'oxygénothérapie, voire un
manuelles thoraco-abdominales réalisées lors de la phase support ventilatoire par VNI ne représentent pas des contre-
d'expulsion de la toux [22]. Cependant, il a été montré que indications aux exercices physiques. Ils peuvent même être
cette aide à la toux manuelle voire pire encore de nature mis en place pour les permettre ou les favoriser. L'utilisation
mécanique risque de diminuer le débit de pointe à la toux. d'un cadre de marche ou d'un déambulateur lors de la
De ce fait, l'efficacité de cette dernière est réduite [23]. Le remise à la marche d'un patient au décours d'une décom-
recours aux techniques de désencombrement dépendra de pensation présente deux intérêts potentiels majeurs : d'une
la localisation des sécrétions et de l'état clinique du patient. part, la sécurité et la prévention des chutes (fragilité osseuse
Si, intuitivement, on peut penser qu'une pression expira- augmentée des patients BPCO) et d'autre part, le support
toire positive pourrait être utile, les résultats scientifiques respiratoire permis par l'appui des bras du patient sur le
ne le montrent pas. Globalement, aucune technique n'a cadre de marche. Cet appui permet de modifier l'action
182
15. Kinésithérapie et bronchopneumopathie chronique obstructive

des muscles de la partie supérieure du thorax et de l'épaule [9] Burki NK, Lee LY. Mechanisms of dyspnea. Chest 2010 ; 138 :
dans le sens d'une action inspiratoire d'effort. La position 1196–201.
[10] Alcolea BS, Villamor LJ, Alvarez-Sala R. Nutritional Status in COPD.
adoptée par la personne marchant en appui sur un cadre Arch Bronconeumol 2007 ; 43 : 283–8.
de marche se rapproche de la position dite « du cocher ». [11] SPLF. Recommendation for the clinical practice management of
Cette position est connue comme étant la plus efficace et COPD. Rev Mal Respir 2010 ; 27 : 522–48.
la moins coûteuse en énergie du point de vue de la méca- [12] Tseng CM, Chen YT, Ou SM, Hsiao YH, Li SY, et al. The effect of
cold temperature on increased exacerbation of chronic obstructive
nique thoraco-abdominale [31].
pulmonary disease : a nationwide study. PLoS One 2013 ; 8 : e57066.
[13] Anzueto A. Impact of exacerbations on COPD. Eur Respir Rev
2010 ; 19 : 113–8.
Points clés [14] Pitta F, Takaki MY, Oliveira NH, Sant'Anna TJ, Fontana AD, et  al.
Relationship between pulmonary function and physical activity in

La BPCO est une maladie caractérisée par une daily life in patients with COPD. Respir Med 2008 ; 102 : 1203–7.
[15] Van RH, Hornikx M, Demeyer H, Langer D, Burtin C, et  al. Daily
limitation de débit, à prédominance expiratoire et
physical activity in subjects with newly diagnosed COPD. Thorax
non totalement réversible. 2013 ; 68 : 962–3.

GOLD classe les patients en quatre stades, sur [16] Waschki B, Kirsten A, Holz O, Muller KC, Meyer T, et  al. Physical
base du VEMS, des symptômes, de la qualité de vie activity is the strongest predictor of all-cause mortality in patients
et des exacerbations. with COPD : a prospective cohort study. Chest 2011 ; 140 : 331–42.
[17] Siafakas NM, Vermeire P, Pride NB, Paoletti P, Gibson J, et al. Optimal

Le kinésithérapeute peut intervenir à tous les assessment and management of chronic obstructive pulmonary
niveaux de la stratégie thérapeutique définie par disease (COPD). The European Respiratory Society Task Force. Eur
GOLD (évaluation, aérosolthérapie, éducation du Respir J 1995 ; 8 : 1398–420.
patient, assistance ventilatoire mécanique…) mais [18] Bott J, Blumenthal S, Buxton M, Ellum S, Falconer C, et al. Guidelines
for the physiotherapy management of the adult, medical, sponta-
du point de vue de la kinésithérapie proprement
neously breathing patient. Thorax 2009 ; 64(Suppl. 1) : i1–51.
dite, seul le réentraînement à l'effort a démontré [19] Osadnik CR, McDonald CF, Jones AP, Holland AE. Airway clearance
son efficacité. techniques for chronic obstructive pulmonary disease. Cochrane

La kinésithérapie semble se justifier par l'aide Database Syst Rev 2012 ; 3 : CD008328.
au désencombrement bronchique afin d'atté- [20] Kirilloff LH, Owens GR, Rogers RM, Mazzocco MC. Does chest phy-
sical therapy work ? Chest 1985 ; 88 : 436–44.
nuer l'inconfort du patient, notamment lors [21] Hill K, Vogiatzis I, Burtin C. The importance of components of pul-
d'exacerbations. monary rehabilitation, other than exercise training, in COPD. Eur
Respir Rev 2013 ; 22 : 405–13.
[22] Hasani A, Pavia D, Agnew JE, Clarke SW. Regional mucus transport
Références following unproductive cough and forced expiration technique in
patients with airways obstruction. Chest 1994 ; 105 : 1420–5.
[23] Sivasothy P, Brown L, Smith IE, Shneerson JM. Effect of manually
[1] Murray CJ, Lopez AD. Mortality by cause for eight regions of the
assisted cough and mechanical insufflation on cough flow of nor-
world : Global Burden of Disease Study. Lancet 1997 ; 349 : 1269–76.
mal subjects, patients with chronic obstructive pulmonary disease
[2] Waatevik M, Skorge TD, Omenaas E, Bakke PS, Gulsvik A, et  al.
(COPD), and patients with respiratory muscle weakness. Thorax
Increased prevalence of chronic obstructive pulmonary disease in
2001 ; 56 : 438–44.
a general population. Respir Med 2013 ; 107 : 1037–45.
[24] Willeput R, Vachaudez JP, Lenders D, Nys A, Knoops T, et  al.
[3] Huchon G. Epidemiological data on chronic bronchitis in France.
Thoracoabdominal motion during chest physiotherapy in patients
Presse Med 2001 ; 30 : 7–10.
affected by chronic obstructive lung disease. Respiration 1983 ; 44 :
[4] Wedzicha JA. The heterogeneity of chronic obstructive pulmonary
204–14.
disease. Thorax 2000 ; 55 : 631–2.
[25] Holland AE, Hill CJ, Jones AY, McDonald CF. Breathing exercises for
[5] Kim SR, Rhee YK. Overlap between asthma and COPD : where
chronic obstructive pulmonary disease. Cochrane Database Syst
the two diseases converge. Allergy Asthma Immunol Res 2010 ; 2 :
Rev 2012 ; 10 : CD008250.
209–14.
[26] Bhatt SP, Luqman-Arafath TK, Gupta AK, Mohan A, Stoltzfus JC,
[6] SPLF. Programme d'action en faveur de la bronchopneumopathie
et al. Volitional pursed lips breathing in patients with stable chronic
chronique obstructive (BPCO) 2005–2010. « Connaître, prévenir et
obstructive pulmonary disease improves exercise capacity. Chron
mieux prendre en charge la BPCO ». SPLF ; 2005.
Respir Dis 2013 ; 10 : 5–10.
[7] Vestbo J, Hurd SS, Agusti AG, Jones PW, Vogelmeier C, et al. Global
[27] Nield MA, Soo Hoo GW, Roper JM, Santiago S. Efficacy of pursed-
strategy for the diagnosis, management, and prevention of chronic
lips breathing : a breathing pattern retraining strategy for dyspnea
obstructive pulmonary disease : GOLD executive summary. Am
reduction. J Cardiopulm Rehabil Prev 2007 ; 27 : 237–44.
J Respir Crit Care Med 2013 ; 187 : 347–65.
[28] Spahija J, Marchie M, Ghezzo H, Grassino A. Factors discriminating
[8] Chatila WM, Thomashow BM, Minai OA, Criner GJ, Make BJ.
spontaneous pursed-lips breathing use in patients with COPD.
Comorbidities in chronic obstructive pulmonary disease. Proc Am
COPD 2010 ; 7 : 254–61.
Thorac Soc 2008 ; 5 : 549–55.

183
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

[29] Abdellaoui A, Prefaut C, Gouzi F, Couillard A, Coisy-Quivy M, et al.


Skeletal muscle effects of electrostimulation after COPD exacerba-
Pour en savoir plus
tion : a pilot study. Eur Respir J 2011 ; 38 : 781–8.
Langer D, Hendriks E, Burtin C, Probst V, et al. A clinical practice guideline
[30] Vivodtzev I, Lacasse Y, Maltais F. Neuromuscular electrical sti-
for physiotherapists treating patients with chronic obstructive pul-
mulation of the lower limbs in patients with chronic obstruc-
monary disease based on a systematic review of available evidence.
tive pulmonary disease. J Cardiopulm Rehabil Prev 2008 ; 28 :
Clin Rehabil 2009 May ; 23(5) : 445–62.
79–91.
Prefaut C, Ninot G. La réhabilitation du malade respiratoire chronique.
[31] Willeput R, Sergysels R. Respiratory patterns induced by bent pos-
Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson ; 2009. p. 502.
ture in COPD patients. Rev Mal Respir 1991 ; 8 : 577–82.

184
Chapitre 16
Réadaptation pulmonaire
de l'insuffisant respiratoire
chronique
Didier Saey, Gregory Reychler, Thierry Troosters

PLAN DU CHAPITRE
Structure d'un programme
de réentraînement à l'effort 187
Modalités 187
Effets du réentraînement à l'effort 191
Interventions complémentaires pouvant
optimaliser les effets de l'entraînement 192
La réadaptation pulmonaire plutôt
que le réentraînement à l'effort ? 194

Kinésithérapie respiratoire
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III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

La réadaptation respiratoire se définit comme l'ensemble des


interventions personnalisées, dispensées par une équipe plu-
ridisciplinaire aux patients atteints d'une maladie respiratoire
chronique. Cette définition adoptée conjointement par l'Euro-
pean Respiratory Society (ERS) et par l'American Thoracic Society
(ATS) met en évidence plusieurs des aspects fondamentaux de
la réadaptation respiratoire au long cours. Dans un document
plus récent les objectifs de la réadaptation ont été précisés [1].
La réadaptation cherche à améliorer les conditions physique
et psychologique des personnes souffrant de maladies respi-
ratoires chroniques et à favoriser une adhérence à long terme
à des comportements visant l'amélioration de la santé. Ces
modifications comportementales sont un véritable challenge Fig. 16.1
pour les équipes. Si les bénéfices physiques et psychologiques Force musculaire mesurée dans une population importante de
patients admis dans quatre centres de réadaptation en Belgique
sont connus, la diminution des coûts en soins de santé a été (VEMS 40 ± 12 % théorique).
montrée pour des patients forts consommateurs en soins. Tout Les forces de préhension (HF) et du quadriceps (QF), ainsi que
en excluant formellement toute sélection uniquement basée les pressions inspiratoire (PImax) et expiratoire (PEmax) maximales
sont exprimées en pourcentage de la valeur théorique. Chaque
sur la fonction pulmonaire, elle souligne que la prescription des point représente un patient. La valeur normale minimale de ces
modalités d'intervention de la réadaptation respiratoire doit tests se situe entre 75 à 80 %.
être individualisée et adaptée aux besoins du patient.
Les symptômes de la bronchopneumopathie chronique pauvre influence sur la survie des patients, la réadaptation
obstructive (BPCO) étant aggravés par l'effort, ils conduisent pulmonaire, comprenant notamment un programme d'exer-
le patient à éviter l'exercice et l'entraînent progressivement cice  physique, apparaît comme une intervention thérapeu-
vers un processus de déconditionnement, lui-même à l'ori- tique incontournable du traitement des patients souffrant
gine de l'aggravation de la dyspnée. Plus le patient devient d'une BPCO modérée à sévère [1, 9–13]. Ses effets sur la qualité
inactif, plus le risque d'hospitalisation augmente [2]. Ce pro- de vie font actuellement consensus. Plusieurs méta-analyses
cessus aussi appelé la « spirale du déconditionnement dans la ont démontré que les programmes de réadaptation pulmo-
BPCO » conduit inexorablement le patient vers une détério- naire, tout en augmentant la tolérance à l'effort, diminuaient la
ration de son état de santé, de sa qualité de vie ainsi que de dyspnée et la fatigue musculaire et augmentaient la sensation
sa tolérance à l'effort, qui est nettement plus marquée chez de contrôle vis-à-vis de la maladie [14, 15]. Économiquement,
les patients ayant une BPCO que chez les sujets sains [3]. les programmes de réadaptation contribuent ainsi à la réduc-
Tout comme plusieurs autres maladies chroniques, la BPCO tion de l'utilisation des services de santé [16].
a été considérée durant la dernière décennie comme une
maladie présentant des complications systémiques ayant Remarque
des impacts fonctionnels importants [4]. C'est ainsi que la
perte de masse  musculaire, associée à une diminution de Suite à des state of the art [12, 17] et aux dernières
la force musculaire et à une diminution de la masse maigre, mises à jour des recommandations conjointes
devient un indice important de la gravité de la maladie res- de l'ERS et de l'ATS [1, 11], il devient tout à fait
piratoire [5]. De fait, la capacité fonctionnelle, mesurée par clair que les effets à court et long terme d'un
le test de marche de 6 min, le recours aux soins de santé et programme de réadaptation pulmonaire associé
l'espérance de vie sont corrélés à la faiblesse musculaire ou à à un suivi médical optimal sont plus bénéfiques
la diminution de la masse musculaire et ce, indépendamment en termes de tolérance à l'effort et de qualité de
de l'atteinte de la fonction respiratoire [5–8]. Un exemple illus- vie que l'ajout d'un nouveau bronchodilatateur
trant la fréquence de la faiblesse musculaire évaluée dans une ou d'un corticostéroïde inhalé. Et c'est à ce titre
population importante de patients admis dans quatre centres que  les nouveaux guides de pratique font une
de réadaptation en Belgique est représenté en figure 16.1. place de plus en plus importante aux programmes
Le dysfonctionnement musculaire et la diminution de la de réadaptation pulmonaire dans le traitement de
tolérance à l'effort peuvent être traités par des programmes la BPCO. La structure et la complexité de ces pro-
de réentraînement appropriés et individualisés. En effet, paral- grammes varient en fonction de la sévérité de la
lèlement au traitement pharmacologique et en dépit de sa maladie (fig. 16.2) [1, 9, 11, 12, 18].
186
16. Réadaptation pulmonaire de l'insuffisant respiratoire chronique

Présentation clinique complexe et suscite encore beaucoup de questionnements


À risque exacerbation
Insuffisance [25], dans de nombreuses pathologies chroniques, dont
Symptomatique
respiratoire l'insuffisance cardiaque congestive et la BPCO, la stimula-
tion appropriée d'un muscle squelettique au cours de pro-
Interventions
grammes d'exercices physiques adaptés (réentraînement à
Cessation tabagique
l'effort et exercices musculaires) conduit à une amélioration
Management de la maladie progressive de sa fonction. L'efficacité des programmes de
renforcement musculaire et de réentraînement à l'effort est
Réadaptation respiratoire dépendante de ses modalités qui se déclinent par rapport à
Autres options
la durée du programme de réentraînement, à la durée et la
fréquence des séances, et à l'intensité de l'effort [26, 27]. À ce
Progression de la maladie propos, le réentraînement à l'effort doit comporter au mini-
VEMS
Symptômes mum des séances d'entraînement de 30 minutes, et être
effectué 3 fois par semaine. La durée du programme doit
Fig. 16.2 être la plus longue possible. Il a en effet été démontré que
Place de la réadaptation pulmonaire sans le traitement de les bénéfices sont nettement supérieurs après 7  semaines
la BPCO telle que recommandée par les guides de pratique d'entraînement qu'après 4  semaines [28]. Notre équipe a
conjoints de l'ERS et de l'ATS.
Figure adaptée de Celli BR, MacNee W. Standards for diagnosis and treatment of également démontré que chez les patients ayant une BPCO
patients with COPD : a summary of the ATS/ERS position paper. Eur Respir J 2004 ;
23(6) : 932-46.
sévère, les effets d'un programme de réadaptation étaient
plus marqués après 6 mois qu'après 3 mois [29]. Ceci a été
confirmé récemment dans une méta-analyse [30].
Ce chapitre évoquera les connaissances acquises au cours
Classiquement, la littérature rapporte trois types de
de la dernière décennie sur le réentraînement à l'effort. Les
programmes de réadaptation pulmonaire essentiellement
différentes stratégies d'entraînement chez les patients por-
basés sur le lieu de l'intervention :
teurs d'une BPCO seront discutées et leurs résultats respec- ● en hospitalisation complète ou en centre de
tifs analysés. Enfin, l'entraînement à l'effort sera situé dans
réadaptation ;
un contexte plus général de soins pluridisciplinaires adap- ● en ambulatoire dans un centre de réadaptation ;
tés à ces patients. Récemment, la littérature anglo-saxonne ● au domicile du patient.
a publié des travaux de synthèse concernant ce sujet que
Bien que la polémique existe quant aux effets de la réa-
le lecteur est invité à consulter [1, 9, 11, 14, 18–20]. Des
daptation à domicile des patients les plus sévères [31, 32],
recommandations françaises existent aussi.
chacun de ces trois types de programmes s'est avéré effi-
cace. Chaque type de structures ayant des avantages et des
inconvénients qui influencent l'orientation des patients, le
Structure d'un programme lieu et la structure du programme de réadaptation pulmo-
de réentraînement à l'effort naire devront être déterminés en fonction des besoins du
patient, de sa motivation et des ressources locales.
Outre l'atteinte de la fonction respiratoire, la diminution pro-
gressive de la tolérance à l'effort est une des conséquences
habituelles de la BPCO qui affectent la fonction et la qualité Modalités
de vie des patients qui en sont atteints [21, 22]. De même,
une dysfonction musculaire particulièrement marquée aux Plusieurs études cliniques portant sur les effets de l'entraîne­
muscles locomoteurs a largement été décrite dans la BPCO ment dans la BPCO ont utilisé soit la marche, soit la bicy-
et a récemment fait l'objet de plusieurs revues de littérature clette stationnaire comme seules modalités d'exercice
[20, 23–25]. Cette dysfonction se caractérise essentiellement [33–35]. Cependant, d'un point de vue plus clinique,
par une atrophie et une diminution de leur métabolisme l'entraînement des patients ayant une BPCO est classi-
oxydatif. Ces adaptations progressent avec la sévérité de la quement conçu sous forme de circuit au cours duquel le
maladie et ont des conséquences importantes non seule- patient alterne diverses formes d'entraînements, incluant
ment sur la fonction musculaire elle-même, mais aussi sur la l'entraînement à l'effort (bicyclette stationnaire, marche,
capacité fonctionnelle, la tolérance à l'effort et la qualité de escalier), l'entraînement musculaire des muscles périphé-
vie des patients ayant une BPCO. Quoique son étiologie soit riques (exercices des membres supérieurs et des membres
187
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

inférieurs) et éventuellement l'entraînement des muscles de se donner une latitude pour ajuster leurs prescriptions
respiratoires. Ces différentes modalités seront tour à tour selon les symptômes de leurs patients. Pour assurer une
analysées dans la section subséquente de ce chapitre [31, progression optimale tout au long du programme de réa-
36, 37]. Quelques investigateurs ont également introduit daptation, nous pensons utile de recourir à des algorithmes
avec un certain succès des modalités gymniques à leur pro- de progression (un exemple est donné au tableau 16.1). À
gramme d'entraînement [38]. Pris ensemble, les résultats condition d'être observés par le patient, ces algorithmes sont
de ces études mettent en évidence l'intérêt d'inclure dans garants d'une progression vers des exercices de haute inten-
les programmes de réadaptation des exercices variés et sité. Ils nécessitent cependant une supervision étroite de la
proches de la gestuelle et des besoins de la vie quotidienne part des professionnels pour ajuster régulièrement l'intensité
et ce, d'autant plus qu'une amélioration de l'efficacité du de l'exercice tout au long du programme de réadaptation.
mouvement est un des résultats escomptés par les pro- Dans ces conditions, il a été montré qu'une augmentation
grammes de réadaptation pulmonaire. hebdomadaire de la charge de travail était possible chez les
patients ayant une BPCO (fig. 16.3) [36, 39, 40].
L'utilisation d'échelles de perception de l'effort a aussi
Réentraînement à l'effort (bicyclette été pressentie non seulement pour la prescription initiale
de l'exercice, mais aussi pour l'ajustement subséquent de
stationnaire et marche) son intensité. À cet effet, un groupe de chercheurs a pro-
L'intensité de l'exercice est sans doute la composante la posé qu'une intensité cotée entre 4 et 6 sur l'échelle de
plus importante de la prescription du réentraînement à perception modifiée de Borg (dont le score maximal est
l'effort. Quelle que soit la modalité de l'intervention, une de 10 points) indiquait en général une intensité adéquate
intensité suffisante est requise pour l'obtention des résul- pour l'entraînement à l'effort des patients ayant une BPCO
tats escomptés par les programmes de réadaptation. À cet [41]. De plus, il a été montré que les scores de perception
effet, les données de la littérature récente semblent confir- obtenus au cours d'un test d'effort à charge croissante
mer qu'une intensité comprise entre 60 et 80 % de la capa- demeuraient stables pour un effort relatif tout au long
cité maximale mesurée doit être ciblée pour l'entraînement du programme de réadaptation [42] et pourraient donc
à l'effort (marche, bicyclette stationnaire). être  utiles pour guider le professionnel dans l'ajustement
Il reste que la limitation de la tolérance à l'effort étant très de l'intensité de l'exercice durant le programme. Quoiqu'il
variable d'un patient à l'autre, les professionnels ont besoin ne soit pas encore certain que ces échelles de perception de

Tableau 16.1 Progression anticipée de la charge de travail pour un entraînement à l'effort sur bicyclette stationnaire
au cours d'un programme de réadaptation de 12 semaines
Semaine Entraînement continu Entraînement par intervalle Charge de travail
Durée (min) Durée (min) Série (watts maximaux)

1 10 (2 × 5) 2×2 5 fois 60 %
2 12 (2 × 6) 2×2 6 fois 60 %
3 12 (2 × 6) 2×2 6 fois 65 %
4 14 (2 × 7) 2×2 7 fois 65 %
5 14 (2 × 7) 2×2 7 fois 70 %
6 14 (2 × 7) 2×2 7 fois 70 %
7 14 (2 × 7) 2×2 7 fois 75 %
8 16 (2 × 8) 2×2 8 fois 75 %
9 16 (2 × 8) 2×2 8 fois 80 %
10 16 (2 × 8) 2×2 8 fois 80 %
11 16 (2 × 8) 2×2 8 fois 85 %
12 16 (2 × 8) 2×2 8 fois 85 %
Tableau adapté de Gosselink R et al. Werboek Respiratoire Revalidatie. Leuven : Afdeling Respiratoire Revalidatie ; 2004.
188
16. Réadaptation pulmonaire de l'insuffisant respiratoire chronique

Charge
125 Durée
80
Charge (% initial 1RM)

Charge (% Wmax)
100
60

75 25
40

Durée
(min)
15

50 20 5

0 4 8 12 0 4 8 12
Temps (semaines) Temps (semaines)
Fig. 16.3
Évolution au cours du temps de l'intensité utilisée durant l'entraînement.
La figure A représente l'entraînement en résistance du quadriceps. L'intensité de l'entraînement est exprimée en % de la charge maximale que le
patient peut soulever une fois (% initial 1RM).
La figure B concerne l'entraînement en endurance. La charge soutenue sur cyclo-ergomètre est exprimée en % du travail maximal (% Wmax O)
pendant un test d'intensité croissante. La durée de la séance en minutes est représentée sur l'axe de droite.
La durée du programme est exprimée en semaines. Les valeurs représentent les moyennes et déviation standard.
Figures adaptées de Spruit MA et al. [40].

l'effort ou de la dyspnée soient suffisamment fiables pour marche de 6 minutes peut avantageusement être utilisée
permettre à elles seules la prescription optimale du niveau comme valeur de référence pour la prescription de l'entraî-
d'intensité de l'exercice, l'échelle de perception de Borg a nement sur tapis roulant.
été utilisée dans nombre d'essais cliniques pour guider la En raison de leurs limitations ventilatoires ou de leur
progression de l'intensité de l'effort en cours de programme faiblesse musculaire, il arrive que certains patients ne
de réadaptation [10, 16, 32, 36, 43, 44]. soient pas capables de soutenir l'effort (à la marche ou
Pour le travail sur bicyclette stationnaire, la charge de sur la bicyclette stationnaire) à l'intensité ciblée pour une
travail initiale devrait être basée sur les tests de mesure longue période de temps. La durée de l'exercice peut alors
de la capacité fonctionnelle maximale réalisés au cours être segmentée en plusieurs petites périodes de travail (par
d'épreuves ergospirométriques à charge croissante. exemple 2 minutes) entrecoupées de périodes de récupé-
Une  intensité comprise entre 60 et 80 % de la capacité ration [46–48].
maximale (exprimée en watts) semble appropriée. Il Il est aussi important de se rappeler que la marche
convient ici de se rappeler que la capacité de travail maxi- engage de plus grands groupes musculaires que l'exercice
male obtenue lors d'une épreuve ergospirométrique à sur bicyclette stationnaire et est donc, musculairement
charge croissante est fortement dépendante du protocole parlant, moins exigeante pour des patients limités par leur
utilisé. En effet, il a été montré qu'une épreuve utilisant une ventilation. À ce sujet, un groupe de recherche de Québec
petite incrémentation de la résistance (par exemple 5 W/ [49] a démontré auprès d'un groupe de patients ayant une
min) se traduisait par une capacité maximale de travail BPCO que la fatigue contractile des muscles locomoteurs
significativement plus basse qu'une incrémentation plus était significativement moins prononcée suite à un exer-
élevée (par exemple 20  W/min) [45]. Par conséquent, la cice de marche que suite à un exercice de même intensité
charge de travail ciblée initialement devrait être placée à un sur bicyclette stationnaire. L'entraînement sur bicyclette
pourcentage légèrement plus élevé pour les épreuves ayant stationnaire, du fait de la stimulation des muscles loco-
été conduites avec de faibles incrémentations (par exemple moteurs qu'il exerce, reste donc la modalité privilégiée de
80 % de la capacité maximale) et légèrement plus bas (par tout programme d'entraînement à l'effort. Cependant, il est
exemple 60 % de la capacité maximale) pour les épreuves indéniable que la marche, du fait de son aspect fonctionnel,
au cours desquelles une forte incrémentation a été utilisée. est aussi une modalité d'entraînement incontournable des
De même, la vitesse de marche obtenue au cours du test de programmes de réadaptation pulmonaire.
189
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Entraînement musculaire Une méta-analyse récente a confirmé l'efficacité propre-


ment dite de l'entraînement musculaire en résistance chez
en résistance des muscles le malade ayant une BPCO [52]. Cependant, la combinai-
périphériques son de modalités d'entraînement musculaire et d'entraîne-
ment à l'effort semble la stratégie optimale en réadaptation
La prescription de l'intensité dans le réentraînement mus-
pulmonaire [1, 9, 11, 12, 18, 53].
culaire se fait en général en fonction de la charge maximale
L'avantage clinique le plus intéressant de l'entraînement
que le patient peut soulever une seule fois (1RM) dans toute
musculaire réside dans la faible demande ventilatoire impo-
l'amplitude du mouvement sans compensation. Basées sur
sée par l'exercice. En effet, de petits groupes musculaires isolés
les recommandations faites par l'American College of sport
peuvent être engagés dans l'effort, permettant ainsi d'atteindre
medicine pour l'entraînement musculaire d'une population
des niveaux d'intensité de travail relativement élevés sans sur-
en bonne santé et vieillissante [50], les caractéristiques spé-
charge ventilatoire additionnelle. Ceci en fait une modalité
cifiques d'un programme de renforcement musculaire sont
d'intervention privilégiée pour les patients dont les limites ven-
résumées au tableau 16.2.
tilatoires sont particulièrement abaissées, comme les patients
Pour des résultats optimaux, les exercices musculaires
en stade avancé de la maladie ou en cours d'exacerbation.
excentriques et concentriques, uni- et poly-articulaires sont
Même si les muscles des membres supérieurs semblent
recommandés. Pour les gains en force pure, peu de répéti-
moins affectés par le déconditionnement que les muscles
tions (une à huit) proches de la résistance maximale (80 à
locomoteurs, quelques patients présentent une dysfonction
100 % de 1RM) devraient être ciblées. Une augmentation
de ceux-ci [54–57]. Celle-ci étant réversible par l'entraînement
de la charge de travail de 2 à 10 % devrait se faire dès que
musculaire, une stratégie de renforcement musculaire des
l'exercice peut être réalisé pour une ou deux répétitions
membres supérieurs devrait être considérée chez ces patients.
supplémentaires. Une période de 2 à 3 minutes de repos
devrait aussi être allouée entre deux séries d'exercices [51],
et la fréquence optimale de traitement devrait être de 4 à Entraînement des muscles
5 fois par semaine (mais 1 à 2 fois par semaine serait suffisant respiratoires
pour maintenir les acquis des patients déjà engagés dans
un programme de renforcement musculaire) [50]. Plusieurs L'entraînement des muscles respiratoires constitue une
études s'adressant à des patients BPCO ont utilisé une pres- forme particulière du réentraînement musculaire des
cription de trois séries de huit répétitions avec des charges malades ayant une BPCO. Parmi les différentes modalités,
de 70 à 80 % de 1RM pour leur entraînement musculaire les programmes d'entraînement spécifique des muscles
(un exemple de progression est donné au tableau 16.3). inspiratoires les plus utilisés sont ceux faisant appel à des

Tableau 16.2 Caractéristiques d'un programme de renforcement musculaire


Force–résistance Force–endurance Endurance
Charge 80 à 100 % de 1RM 70 à 85 % de 1RM 30 à 80 % de 1RM
Volume 1–3 séries de 1–8 répétitions 3 séries de 8–12 répétitions 1–3 séries de 20–30 répétitions
Période de repos (min) 2–3 1–2 1
Fréquence 4–6 fois/semaine 2–4 fois/semaine 2–4 fois/semaine
(maintien 1–2 fois/semaine)
Progression 2–10 % Débutants : 60 à 70 % de 1RM
Bénéfices anticipés Augmentation de la masse Hypertrophie, augmentation de Augmentation de la capacité
musculaire, de la force la masse musculaire, de la force oxydative et de la capillarisation
et de la densité osseuse et de la densité osseuse musculaire
Amélioration de l'endurance Amélioration de l'endurance
musculaire et de la capacité musculaire et de la capacité
fonctionnelle fonctionnelle
1RM : charge maximale que le patient peut soulever une seule fois dans toute l'amplitude du mouvement sans compensation.
Tableau d'après Kramer WJ et al. [50].

190
16. Réadaptation pulmonaire de l'insuffisant respiratoire chronique

Tableau 16.3 Progression anticipée de la charge pas conseillée comme seule modalité d'intervention chez
de travail pour un entraînement musculaire au cours les patients ayant une BPCO.
d'un programme de réadaptation de 12 semaines
Semaine Charge de travail Nombre de
répétitions Effets du réentraînement
1 70 % 1RM 3×8
à l'effort
2 70 % 1RM 3×8
3 76 % 1RM 3×8 Les effets d'un entraînement à l'effort sur la qualité de
4 82 % 1RM 3×8 vie et la tolérance à l'effort sont bien connus [66] et sont
nettement supérieurs à l'effet clinique minimal. Notre
5 88 % 1RM 3×8
groupe parmi d'autres a démontré que les effets duraient
6 94 % 1RM 3×8 davantage si le programme était de longue durée (6 mois)
7 100 % 1RM 3×8 [29, 30]. Lorsque le programme du réentraînement à
8 106 % 1RM 3×8 l'effort est approprié, les anomalies de la fonction mus-
culaire peuvent être corrigées [34]. Les capacités oxyda-
9 112 % 1RM 3×8
tives des muscles squelettiques sont améliorées comme
10 115 % 1RM 3×8 en témoignent l'amélioration de l'énergétique musculaire
11 118 % 1RM 3×8 [34], la cinétique plus rapide de la consommation d'O2
12 121 % 1RM 3×8 [67], la diminution significative de la ventilation et de la
production de lactate pour une même charge de travail
1RM : charge maximale que le patient peut soulever une seule fois dans
toute l'amplitude du mouvement sans compensation. [68]. Au niveau cellulaire, l'activité des enzymes oxydatives
Tableau adapté de Gosselink R et al. Werboek Respiratoire Revalidatie. augmente [69] et la proportion des fibres musculaires
Leuven : Afdeling Respiratoire Revalidatie ; 2004. oxydatives (types I et IIA) ainsi que la surface de section
occupée par ces fibres se normalisent [69, 70]. Après un
résistances inspiratoires directes et ceux limitant le débit réentraînement général en endurance, les muscles sque-
inspiratoire. Ces programmes relativement peu oné- lettiques des patients BPCO sont plus résistants à la fatigue
reux nécessitent cependant une supervision régulière. [71] et les capacités d'endurance du quadriceps augmen-
L'hyperpnée normocapnique a été également appliquée, tent de façon significative [72]. La force maximale des
quoique moins fréquemment, dans la BPCO [58]. muscles squelettiques s'améliore d'environ 15 % [36, 73]
Il est actuellement bien accepté que quand la charge de et ce, même après un entraînement général en endurance
travail est appropriée (contrôlée et d'une intensité supérieure [40]. Toutefois, les bénéfices observés au niveau de la force
ou égale à 30 à 40 % de la pression inspiratoire maximale [PI musculaire peuvent être plus importants lorsque le réen-
max]), l'entraînement des muscles inspiratoires se traduit traînement en endurance est associé à un réentraînement
par une diminution significative de la dyspnée et améliore spécifique en résistance [37, 53]. Ces bénéfices physiolo-
les mesures de performance des muscles inspiratoires [59]. giques contribuent clairement à l'allégement des symp-
Cependant, les effets de cet entraînement spécifique sur la tômes chez le patient BPCO. La diminution de production
tolérance à l'effort et la qualité de vie sont largement moins de lactate et l'amélioration de l'efficacité mécanique
consensuels [59–62]. Par conséquent, il y a eu un large débat diminuent la ventilation pour un travail donné. De plus,
afin de déterminer si l'entraînement des muscles inspira- O'Donnell et al. ont démontré qu'après un entraînement à
toires devait systématiquement faire partie des programmes l'effort, les patients BPCO ressentaient une dyspnée moins
de réadaptation des patients ayant une BPCO. Les directives importante pour un niveau de ventilation donné [74].
actuelles sont que cette modalité ne devrait pas être une L'amélioration de la force musculaire et de l'endurance
composante de routine des programmes de réadaptation et peut probablement contribuer à la réduction de la fatigue
qu'elle devrait être réservée à des patients présentant une fai- musculaire, un symptôme majeur de la BPCO. Ces effets
blesse significative de leur musculature respiratoire [63–65]. du réentraînement sont observés indépendamment de
Notre compréhension actuelle de l'entraînement des l'âge du patient [75] et de sa fonction pulmonaire [76].
muscles inspiratoires est que cette modalité reste toujours Des effets bénéfiques peuvent également être obtenus
une composante complémentaire possible dans le cadre chez des patients hypoxémiques et hypercapniques [77]
d'un programme d'entraînement complet mais qu'elle n'est après réentraînement.
191
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Malgré ces résultats globalement positifs, il est impor- peroxydation lipidique et de l'oxydation des protéines
tant de mentionner qu'environ un tiers des patients ne dans le muscle a été observée après une session d'exercices
bénéficie pas d'améliorations significatives après un réen- exhaustifs [82]. Enfin, une légère augmentation des taux
traînement [78]. De manière similaire aux sujets sains, des sériques de TNF-α (tumor necrosis factor) a été notée chez
différences de nature génétique jouent certainement un des patients BPCO sévères après un exercice modéré de
rôle dans cette absence de réponse à l'entraînement [79]. 10 minutes [83]. Ces observations suggèrent que certains
Il est également probable que d'autres mécanismes inter- patients pourraient présenter un déséquilibre du système
viennent. Parmi ces facteurs explicatifs, les modalités du oxydant/antioxydant et donc développer un stress oxy-
réentraînement à l'effort sont à prendre en compte. Par dant pendant un exercice d'intensité modérée. Ces don-
exemple, notre équipe a mis en évidence que les patients nées confirment celles obtenues par un groupe canadien
très limités au niveau ventilatoire mais avec une force montrant une accumulation de lipofuscine (marqueur
musculaire relativement préservée répondaient peu au du stress oxydatif) dans le vaste latéral des patients BPCO
réentraînement à l'effort en endurance [78]. Un entraîne- [84]. La réduction des capacités antioxydantes des muscles
ment musculaire en résistance pourrait être plus efficace squelettiques est surtout observée chez les patients BPCO
pour reconditionner les muscles squelettiques de ces ayant les indices de masse corporelle les plus bas [85]. Il
patients puisque le système respiratoire est peu sollicité. est ainsi envisageable que des traitements visant à rétablir
En effet, il a été démontré qu'un entraînement local en l'équilibre de la balance oxydant/antioxydant pourraient
résistance (charges supérieures à 70 % de la charge maxi- améliorer la réponse à l'entraînement chez cette mino-
male) est aussi efficace sur la fonction musculaire qu'un rité de patients. Une étude récente supporte cette voie
entraînement général en endurance [40]. Si ces deux types de réflexion puisque l'administration de N-acétylcystéine
d'entraînements (entraînement à l'effort et entraînement aurait un effet protecteur contre le stress oxydatif après un
musculaire) étaient combinés, il est probable que les béné- exercice aigu [86].
fices seraient encore plus importants [53]. L'entraînement À l'évidence, des recherches doivent être conduites afin
en résistance est basé sur la mobilisation de poids adaptés de déterminer pourquoi certains patients ne répondent
à chaque patient et sur l'utilisation de divers dispositifs peu ou pas à un réentraînement à l'effort adapté à leur
de musculation. Comme pour l'entraînement à l'effort, pathologie.
l'intensité de la charge résistive doit être ajustée régulière­
ment au cours du réentraînement à l'effort. L'intérêt prin-
cipal de l'entraînement local en résistance est qu'il vise Interventions complémentaires
la stimulation d'un petit groupe musculaire, diminuant
ainsi la demande ventilatoire et donc la dyspnée chez des pouvant optimaliser les effets
patients relativement limités au niveau respiratoire [80]. de l'entraînement
Ainsi, cette forme d'entraînement est bien tolérée par les
patients BPCO. Lorsque l'échauffement est correctement Plusieurs interventions ont le potentiel d'augmenter l'effet
réalisé, le réentraînement en résistance ne présente pas global de l'entraînement. Ces interventions peuvent être
de contre-indications majeures. Concernant le réentraîne- divisées en deux classes distinctes : d'une part celles qui
ment en endurance, le concept d'interval training est effi- permettent d'atteindre des intensités d'entraînement plus
cace [46, 47, 81]. Les patients les plus sévères peuvent ainsi élevées telles que l'apport de supplément d'O2 ou d'héliox
limiter l'hypercapnie et l'hypoxémie qui sont aggravées (encore controversé) et la ventilation non invasive (VNI) ;
lorsqu'un effort à intensité élevée est réalisé sans pause. d'autre part celles qui peuvent augmenter les effets anabo-
En plus, la monotonie d'un travail à charge constante peut lisants du stimulus de l'entraînement, telles que la prise de
être évitée. stéroïdes anabolisants ou de suppléments alimentaires sous
D'un autre côté, l'absence de réponse physiologique de diverses formes.
certains patients au réentraînement à l'effort pourrait être Les interventions qui sont actuellement employées de
liée à des anomalies intrinsèques de leurs muscles squelet- façon complémentaire à la réadaptation pulmonaire sont
tiques. Le stress oxydatif pourrait être un candidat, puisque brièvement discutées ci-dessous. Pour une revue de littéra-
Rabinovich et al. ont montré que le potentiel antioxydant ture plus exhaustive, nous vous proposons de vous référer à
des patients BPCO était diminué après un réentraînement une revue récente [12] et aux directives communes de l'ERS
à l'effort [35]. Plus récemment, une augmentation de la et de l'ATS [11].

192
16. Réadaptation pulmonaire de l'insuffisant respiratoire chronique

Oxygène importants suite à l'entraînement à l'effort assisté par VNI.


Cependant, d'autres essais réalisés avec des patients moins
Les données actuelles mettent en évidence que l'apport sévèrement atteints n'ont pas confirmé ces résultats [101].
d'un supplément d'O2 en cours d'exercice diminue signi- Il faut toutefois mentionner que cette modalité particu-
ficativement la contrainte respiratoire pour un niveau lièrement complexe devrait être réservée aux patients les
de travail donné et augmente ainsi la tolérance maxi- plus sévères et sous supervision étroite. Une autre appli-
male d'effort, même chez les patients sans désaturation cation de la VNI consiste à l'ajouter la nuit pendant le pro-
appréciable à l'exercice [87]. En dépit de ces effets aigus, gramme de réadaptation avec un bénéfice à long terme
la plupart des études n'ont pas pu mettre en évidence sur différents éléments chez des patients présentant une
d'amélioration de la tolérance à l'effort par un apport hypercapnie [102].
supplémentaire d'O2 à l'effort en cours d'entraînement en
comparaison avec celle obtenue suite aux programmes
de réadaptation réalisés sans apport d'O2 supplémen- Stimulation neuromusculaire
taire [88–90]. Ceci a mené à croire que les effets de la transcutanée
supplémentation en O2 à l'effort au cours des séances
d'entraînement seraient relativement limités. La ques- La stimulation électrique transcutanée est une forme
tion a cependant récemment été abordée par Emtner particulière de stimulation musculaire. Chez le sujet sain,
et  al. qui ont étudié dans une étude randomisée l'effet la stimulation électrique neuromusculaire a été proposée
d'une supplémentation d'O2 chez des patients ayant une afin de prévenir les effets néfastes de l'inactivité muscu-
BPCO sans signe de désaturation à l'effort et engagés laire et particulièrement l'atrophie musculaire [103]. Chez
dans un programme d'entraînement à l'effort de haute le malade ayant une BPCO, plusieurs essais cliniques ont
intensité [91]. Les auteurs ont mis en évidence que les mis en évidence des avantages directs de cette forme
patients ayant reçu un apport supplémentaire d'O2 en spécifique de stimulation musculaire [104–107]. Ces
cours d'exercice avaient réussi à s'entraîner à des inten- études ont en effet montré des bénéfices fonctionnels
sités supérieures par rapport à ceux qui n'en avaient pas et musculaires après la stimulation neuromusculaire de
reçu. Fonctionnellement, l'amélioration de la tolérance plusieurs groupes musculaires impliqués dans la loco-
d'exercice était aussi plus grande chez les patients qui motion (notamment le quadriceps et les triceps suraux).
se sont exercés avec la supplémentation d'O2 que chez Cette modalité thérapeutique pourrait donc être consi-
les autres. dérée comme une option intéressante chez les patients
Ces données suggèrent donc qu'un apport supplémen- présentant de fortes atrophies musculaires et ne pouvant
taire en O2 à l'exercice peut être un outil accessible aux cli- pas participer à des sessions régulières d'exercice. Un des
niciens en vue de pouvoir augmenter l'intensité de travail avantages incontestables de la stimulation neuromuscu-
des patients ayant une BPCO [92]. laire transcutanée réside dans le fait qu'elle peut être réa-
lisée au domicile du patient, si celui-ci est bien instruit. Il
semble cependant raisonnable de combiner l'entraînement
Ventilation non invasive fonctionnel à cette forme d'entraînement du muscle
squelettique [1].
Il a déjà été démontré que la ventilation non invasive (VNI)
soulageait le travail des muscles respiratoires [93]. Il a aussi
été clairement rapporté que cette modalité permettait de Stimulants anaboliques
diminuer la sensation de dyspnée et d'améliorer la tolé-
rance à l'exercice des patients ayant une BPCO [94–97], L'hypogonadisme étant fréquent chez les patients ayant
des sujets en bonne santé [98] et même des sujets porteurs une BPCO [108], une supplémentation en testosté-
d'insuffisance cardiaque [99]. rone peut améliorer les effets de l'entraînement chez les
Par conséquent, l'assistance ventilatoire non inva- patients porteurs d'hypogonadisme. En effet, basé sur la
sive peut être pressentie pour permettre d'atteindre des restauration des niveaux physiologiques de testostérones,
niveaux d'entraînement d'intensité plus élevée. Deux essais cet apport permet d'augmenter le gain de force induit par
cliniques, réalisés auprès de patients sévères et hyper- l'entraînement musculaire. À ce propos, il a récemment
capniques, ont confirmé cette hypothèse [96, 100] en été démontré que l'apport de stéroïdes anabolisants par
montrant des avantages physiologiques légèrement plus injection intramusculaire était particulièrement intéres-

193
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

sant chez les patients ayant été traités avec des corticos- moniteurs du niveau d'activité valides et faciles d'utilisa-
téroïdes [109]. tion existent [122].

Suppléments nutritionnels
La réadaptation pulmonaire
Il est clairement impossible dans ce chapitre de passer en
revue toutes les possibilités de supplémentations alimen-
plutôt que le réentraînement
taires chez les patients ayant une BPCO. Il existe par ail- à l'effort ?
leurs d'excellents travaux de synthèse concernant ce sujet
que le lecteur est invité à consulter [110–112]. De façon Outre l'intolérance à l'effort, les patients BPCO présentent
générale, les interventions alimentaires devraient être d'autres difficultés qui doivent être prises en charge par
réservées aux patients présentant un déséquilibre entre différents professionnels. La réadaptation pulmonaire est
l'apport énergétique et la dépense énergétique. Dans le un programme pluridisciplinaire qui prend en compte l'en-
contexte des programmes de réadaptation pulmonaire, il semble des répercussions biopsychosociales de la patholo-
est important de se souvenir que les patients augmen- gie dans un programme adapté à chaque patient. L'objectif
tent sensiblement leur dépense énergétique (exercices et principal des programmes de réadaptation s'adressant à des
activités physiques impliqués pour venir au programme). patients ayant une BPCO est d'améliorer leur qualité de vie.
L'apport calorique (particulièrement au niveau protéique) Ceci est possible en réduisant la dyspnée via l'amélioration
devrait être adapté à cette augmentation de la dépense de l'aptitude physique aérobie, et en amenant le patient à
énergétique [113]. mieux gérer sa maladie et ses conséquences.
Le rôle des suppléments alimentaires spécifiques tels Anxiété et états dépressifs sont 2,5 fois plus fréquents
que le monohydrate de créatine [114], les acides gras poly- dans cette population [123]. Le soutien psychosocial doit
insaturés [115] ou les antioxydants [86] n'est aujourd'hui s'adresser en premier lieu aux patients mais également aux
pas assez clair pour faire des recommandations fermes familles lors des programmes de réadaptation pulmonaire.
même s'ils semblent efficaces dans des sous-groupes de Dans un article récent, Bergs et  al. [124] qualifiaient les
patients. conjoints des patients BPCO de patients « cachés ». Cet
article démontre que la prise en charge de la BPCO s'adresse
au patient lui-même mais aussi à son environnement social
Améliorer le niveau d'activité proche. Sans un soutien efficace de la part des profession-
physique, un challenge nels de santé, le patient est plus enclin à abandonner le
de la réadaptation pulmonaire programme de réadaptation dans lequel il est engagé [125].
Par conséquent, il est fondamental de s'intéresser aux pro-
Les récentes recommandations précisent que pour main- blèmes psychosociaux des patients afin de permettre leur
tenir l'amélioration de la fonction musculaire, le niveau bonne compliance à la réadaptation au travers de leur bien-
d'activité physique devrait être augmenté. Actuellement, être mental.
la réadaptation pulmonaire n'a qu'un effet modeste sur Les patients ayant une BPCO sont souvent dénutris ou
cet aspect [116]. Il est évident que l'amélioration de la obèses. Or un indice de masse corporelle (IMC) abaissé
tolérance à l'effort ne s'accompagne pas forcément d'un ou une perte de poids sont souvent de mauvais pronostic
niveau d'activité augmenté. Des études récentes ont [126]. Grâce à un suivi diététique adapté, certains patients
investigué l'effet de différentes interventions pour l'amé- dénutris augmentent leur poids corporel, et chez ceux-ci le
lioration du niveau d'activité : coaching par Internet [117], pronostic vital est alors amélioré [127]. Éventuellement, les
intervention comportementale et feedback grâce à un obèses peuvent diminuer leur surcharge pondérale.
podomètre [118–120] ou marches en groupe [121]. Les Les activités de la vie quotidienne peuvent être forte-
résultats sont prometteurs même s'il manque des études ment réduites en raison de handicaps associés à la BPCO.
multicentriques pour les confirmer. Néanmoins, il est Les ergothérapeutes ont pour objectif de faciliter l'auto-
évident que les kinésithérapeutes devraient être attentifs nomie de chaque patient en mettant en place des outils
aux patients présentant un niveau d'activité faible et les adaptés. Par exemple, un programme d'aide à la marche au
évaluer de manière répétée pendant le programme. Des travers de dispositifs de soutien pourrait aider un patient

194
16. Réadaptation pulmonaire de l'insuffisant respiratoire chronique

qui aurait des difficultés à marcher [128, 129]. Le gain un entraînement musculaire en résistance et un
d'autonomie par rapport aux besoins de la vie quotidienne entraînement à l'effort pouvant éventuellement
chez les BPCO, comme chez toute personne âgée, se justifie se faire par intervalle.
par l'amélioration de la qualité de vie qui en découle. ■
La prescription de l'exercice doit donc se faire
L'éducation thérapeutique a pour objectif d'améliorer en fonction d'une évaluation préalable du patient.
les connaissances qu'a le patient de sa maladie afin de lui Cette évaluation inclura idéalement des épreuves
permettre une meilleure autogestion thérapeutique. Par pour déterminer les capacités maximales et fonc-
exemple, de nombreux patients utilisent les aérosols de tionnelles des patients mais aussi une évaluation
manière inefficace. Des programmes éducatifs visant à ce de la force et de l'endurance des muscles périphé-
que les patients se conforment mieux à la prescription des riques et respiratoires.
aérosols et à leur utilisation correcte peuvent contribuer ■
Au fil des années, plusieurs autres interven-
à une amélioration de la fonction pulmonaire [29, 33]. La tions incluant la VNI, la stimulation électrique
sensibilisation et la responsabilisation du patient ont pour neuromusculaire ou les stimulants anaboliques
conséquence une diminution du nombre de réadmissions ont été développées et employées avec succès
à l'hôpital [130]. pour optimiser les effets de l'entraînement des
Ainsi, grâce à sa pluridisciplinarité, la réadaptation pul- patients ayant une BPCO. Cependant, davantage
monaire améliore non seulement la fonction musculaire de recherches sont encore nécessaires pour mieux
et la tolérance à l'effort des patients ayant une BPCO, mais définir les sous-groupes de patients pour les-
également leur qualité de vie au travers d'une plus grande quels ces interventions devraient idéalement être
autonomie dans les activités de la vie quotidienne et d'une appliquées.
diminution de leur état dépressif ou d'anxiété [131].
La réadaptation pulmonaire apparaît donc être la moda-
lité de prise en charge la plus adaptée et la plus efficace
à proposer aux patients BPCO. Toutefois, elle doit obliga-
toirement inclure un réentraînement à l'effort sous peine
Références
d'être totalement inefficace. Le réentraînement à l'effort [1] Spruit MA, Singh SJ, Garvey C, et al. An official American Thoracic
reste la pierre angulaire de la réadaptation pulmonaire, qui Society/European Respiratory Society statement : key concepts
doit continuer à évoluer selon les besoins des patients. and advances in pulmonary rehabilitation. Am J Respir Crit Care
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Ce chapitre illustre que l'entraînement est la [3] Spencer S, Calverley PM, Sherwood BP, et al. Health status dete-
rioration in patients with chronic obstructive pulmonary disease.
pierre angulaire sur laquelle s'appuient les pro-
Am J Respir Crit Care Med 2001 ; 163(1) : 122–8.
grammes de réadaptation pulmonaire. Chez le [4] Reid MB. COPD as a muscle disease. Am J Respir Crit Care Med
patient traité mais néanmoins symptomatique, 2001 ; 164 : 1101–5.
la réadaptation est probablement la stratégie [5] Marquis K, Debigare R, Lacasse Y, et al. Midthigh muscle cross-
thérapeutique la plus efficace pour alléger les sectional area is a better predictor of mortality than body mass
index in patients with chronic obstructive pulmonary disease.
symptômes de la maladie et pour renverser les Am J Respir Crit Care Med 2002 ; 166(6) : 809–13.
conséquences systémiques de la BPCO. En outre, [6] Gosselink R, Troosters T, Decramer M. Peripheral muscle weakness
la réadaptation pulmonaire diminue le recours contributes to exercise limitation in COPD. Am J Respir Crit Care
aux soins de santé et augmente clairement la qua- Med 1996 ; 153(3) : 976–80.
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lité de la vie.
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Les programmes d'entraînement visent à ren- 261S.
verser les anomalies du muscle squelettique, et [8] Decramer M, Gosselink R, Troosters T, et al. Muscle weakness is
s'avèrent plus efficaces si l'intensité de travail est related to utilization of health care resources in COPD patients.
maintenue relativement haute. Afin de soumettre Eur Respir J 1997 ; 10(2) : 417–23.
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199
Chapitre 17
Kinésithérapie respiratoire
en pédiatrie et néonatologie
François Vermeulen, Damien Moerman, Thibault Coppens

PLAN DU CHAPITRE
Particularités respiratoires de l'enfant 202
Évaluation de la fonction respiratoire
de l'enfant 204
Prévenir le risque d'arrêt respiratoire
et cardiaque 205
Spécificités du désencombrement
des voies aériennes de l'enfant 206
Conclusion 208

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Le terme « enfant » désigne habituellement une personne probablement plus importantes que celles calculées par la
âgée de 0 à 16 ans. E. Claparède, médecin et psychologue loi de Poiseuille.
suisse, a dit que « l'enfant n'est pas un adulte en miniature Par ailleurs, le comportement de ce flux aérien n'est
et sa mentalité n'est pas quantitativement mais aussi qua- pas uniquement influencé par les caractéristiques
litativement différente de celle de l'adulte, si bien que l'en- propres de la bronche considérée et par la force de retour
fant n'est pas seulement plus petit, il est aussi différent » [1]. liée à l'élasticité pulmonaire mais également par les
Dans le contexte de la physiologie respiratoire de l'enfant, forces que nous appliquons lorsque nous réalisons des
cette affirmation peut être précisée. En effet, on pourrait compressions thoraciques. Dans ce cadre, la compliance
dire qu'un nourrisson n'est pas un enfant de 2 ans en minia- du grill costal du jeune enfant joue un rôle fondamen-
ture, qu'un enfant de 2 ans n'est pas un enfant de 5 ans tal. En effet, chez le nourrisson, la compliance de la cage
en miniature, etc. Ainsi les caractéristiques anatomiques, thoracique est plus élevée que celle des poumons. Elle
mécaniques et physiologiques du système respiratoire de diminuera progressivement au cours de la croissance [6].
l'enfant évoluent au cours de sa croissance. Ainsi, les pressions que nous appliquons sur le thorax du
Ce chapitre a pour objectif de passer en revue les diffé- nourrisson sont directement transmises aux poumons.
rents éléments indispensables à connaître en vue de réaliser On pourrait appeler cela un « accès privilégié ». Il permet
la kinésithérapie respiratoire chez l'enfant. de réaliser des gestes très fins en termes de mobilisation
thoracique. Néanmoins, on peut tout aussi facilement,
et d'autant plus que le parenchyme pulmonaire et l'arbre
bronchique sont en situation pathologique, amener le
Particularités respiratoires patient à ventiler sous son volume de fermeture, ce qui
de l'enfant n'est pas souhaitable (voir plus loin).

Le système respiratoire du petit enfant est en développe-


ment constant. Celui-ci débute avant la naissance et se ter- Particularités anatomiques
mine vers l'âge de 2–3 ans [2, 3]. du tractus respiratoire du nourrisson
La taille de l'enfant implique bien naturellement que ses
voies aériennes soient plus petites que celles de l'adulte, et Nous nous intéressons ici volontairement qu'au nour-
ce, aussi bien en termes de longueur que de diamètre. Les risson, car c'est à cet âge que les spécificités sont les
faibles valeurs de ces deux paramètres influencent le com- plus marquées. Il convient au praticien d'affiner ses
portement des débits gazeux inspiratoires et expiratoires et connaissances afin de connaître les différentes étapes
par conséquent les résistances au flux aérien. Afin de mieux de l'évolution des voies aériennes de la naissance à l'âge
comprendre ces effets, il faut se référer la loi de Poiseuille. adulte.
Elle décrit les caractéristiques pression/débit d'un flux lami-
naire passant à travers un tube cylindrique [4] : Filière nasale
V’ = Pπr 4 / 8 ηl
Dès la naissance, les structures endonasales sont pré-
où V′ est le débit, P est la perte de pression sur la lon- sentes mais elles doivent encore se développer. Les
gueur, r est le rayon du tube, η est le coefficient de viscosité cornets étant volumineux, ils augmentent les difficultés
du fluide, et l est la longueur du tube. d'écoulement dans la filière nasale [7]. Chez un enfant
La résistance au flux (R) étant égale à la pression motrice sain, les résistances nasales au passage de l'air corres-
par unité de flux, on peut écrire : pondent au tiers des résistances totales du système
R = 8 ηl / πr 4 respiratoire [7, 8]. Ces résistances nasales peuvent être
Par conséquent, dans un tube cylindrique donné, la influencées par des facteurs anthropométriques [9],
résistance au passage de l'air est directement proportion- liées à la position de la tête [10] ou augmentées par la
nelle à la longueur du tube et inversement proportionnelle présence d'une sonde nasogastrique [11]. Tout épisode
à la quatrième puissance du rayon de ce même tube. inflammatoire au niveau de la muqueuse, même mineur,
Chez l'Homme, cette loi n'est pas d'application telle pourra dès lors devenir une cause d'obstruction nasale
quelle, car le flux gazeux n'est pas laminaire tout au long majeure. Au cours de la croissance, les dimensions du nez
des voies aériennes humaines [5]. Les résistances au pas- augmentent de façon linéaire jusqu'à la fin de la puberté
sage du flux gazeux dans les voies aériennes seront donc où elles ont pratiquement doublé par rapport à la nais-
202
17. Kinésithérapie respiratoire en pédiatrie et néonatologie

sance [12]. Le débit susceptible de passer à travers le nez, voir boire tout en respirant. Cette particularité disparaît
pour une pression donnée, double également au cours progressivement à partir de 6  mois. Toute obstruction
de la croissance [13]. nasale compromettra ce mécanisme et obligera l'enfant
à adopter une respiration buccale, perturbant ce proces-
Pharynx sus et augmentant le risque de fausse déglutition et de
déshydratation.
Le pharynx du nouveau-né est court et large [14] et suit
L'étroitesse de cette filière nasale ainsi que l'immaturité
une légère courbe du nasopharynx à l'hypopharynx. Au
du système immunitaire du jeune enfant expliquent la
cours de la croissance, l'angle entre le nasopharynx et
plus grande fréquence des affections des voies respiratoires
l'oropharynx va progressivement approcher la valeur de
hautes ainsi que l'importance de leur retentissement sur la
90° [15].
respiration, particulièrement chez le nourrisson.
Cavité buccale
Voies aériennes inférieures
Par rapport à l'adulte, la langue est proportionnellement
plus volumineuse et le volume de la bouche du nouveau- Chez l'enfant de moins de 5 ans, les petites voies aériennes
né est inférieur. Ceci s'explique par le fait que la mandibule contribuent pour 50 % – contre 20 % chez l'adulte – à la
est relativement petite et restreinte. résistance totale des voies aériennes [19]. Cette valeur dimi-
nue au cours de la croissance de l'enfant [20]. Cette impor-
Larynx tance relative des résistances des voies aériennes inférieures
de l'enfant explique que les répercussions cliniques d'une
À la naissance, le larynx se situe à hauteur de la troi- pathologie affectant la périphérie des poumons (une bron-
sième vertèbre cervicale. Après une descente rapide chiolite par exemple) soient beaucoup plus importantes
durant les cinq premières années de vie, il descend chez un nourrisson que chez un adulte [21].
plus progressivement durant le reste de la croissance
pour se retrouver à hauteur de la cinquième ou sixième
vertèbre cervicale à l'âge adulte [16]. Ce déplacement Particularités physiologiques
engendre notamment une augmentation de l'espace respiratoires du nourrisson
pharyngé.
L'épiglotte, orientée verticalement chez l'adulte, est plu- La fréquence respiratoire (FR) du nourrisson est plus éle-
tôt horizontale chez le nourrisson et fait saillie dans le pha- vée que celle de l'adulte. Elle diminue avec la croissance.
rynx. Son bord libre est très proche du voile du palais, ce qui Au cours de cette évolution, le temps inspiratoire (Ti) aug-
rend la respiration nasale quasi obligatoire jusqu'à l'âge de mente proportionnellement moins que le temps expira-
4 mois. En cas d'obstruction nasale, une respiration buccale toire (Te) et diminue même légèrement en cas de détresse
est néanmoins possible [17]. respiratoire. C'est alors essentiellement la diminution du
Le larynx a une forme de cône tronqué à base supé- temps expiratoire qui permet au nourrisson d'augmenter
rieure dont la partie inférieure, la plus étroite (± 6 mm) sa FR (tableau 17.1) [22, 23].
et la moins extensive, se situe à la hauteur du cartilage
cricoïde [18]. Tableau 17.1 Paramètres respiratoires d'un nourrisson
Les cordes vocales sont orientées vers le bas et vers observé en période de sommeil calme [23]
l'avant et déterminent une aire glottique estimée, chez Jours Vt Ttot Ti (s) Te Ti/ Vt/Ti Vt/Ttot
le nouveau-né, à 14 mm2 [19]. Par ailleurs, la taille des (mL) (s) (s) Ttot (mL/s) (mL/s)
deux aryténoïdes évolue peu au cours de la croissance, 10 17,5 1,56 0,53 1 0,36 33 11,5
ce qui leur donne une taille relativement importante à la
30 21 1,6 0,52 1,15 0,32 41 13
naissance [16].
De manière globale, la position de la tête joue un 60 32,5 1,8 0,6 1,2 0,33 53,5 17,5
rôle très important du fait de l'obstruction laryngée 90 36,7 1,8 0,56 1,2 0,32 64 20,5
pouvant survenir en cas de flexion ou d'extension trop 120 45 2 0,65 1,4 0,32 70 22,5
importante.
Vt : volume courant ; Ttot : durée du cycle ventilatoire ; Ti : temps
Ces différences anatomiques ont un rôle essentiel dans inspiratoire ; Te : temps expiratoire ; Ti/Ttot : rappport inspiration/
l'alimentation du nourrisson. Elles lui permettent de pou- expiration ; Vt/Ti : débit inspiratoire ; Vt/Ttot : volume-minute.

203
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Évaluation de la fonction l'état habituel de l'enfant (qualité de la ventilation, de la prise


alimentaire, du sommeil), ce qui permet de juger de l'impor-
respiratoire de l'enfant tance relative des signes observés. En effet, dans de nom-
breuses situations, la norme du patient n'est pas toujours
Outre les informations médicales et chirurgicales concer- égale à la norme théorique d'une population. Dans ce cas,
nant les antécédents et la situation actuelle du patient, il faut impérativement connaître la norme propre au patient
les examens cliniques seront à rechercher. Parmi ceux-ci, afin d'ajuster au mieux les objectifs et moyens de traitement.
la gazométrie sanguine et la radiographie de thorax sont
importantes et présentent des spécificités qu'il convient de
connaître. Ne pouvant aborder ces deux sujets de manière Approche douce
complète dans le cadre de ce chapitre, nous incitons le lec-
Un enfant en détresse respiratoire peut facilement se dégra-
teur à se référer à des ouvrages de référence [24, 25].
der du simple fait du stress lié à l'environnement et/ou à la
présence du praticien. Il est donc fondamental d'approcher
Anamnèse l'enfant de manière douce et délicate (ton de voix doux et de
faible intensité) et ce, même s'il est en situation de détresse res-
Comme toute évaluation clinique, celle de la fonction res- piratoire importante. Il est bien clair que ceci ne s'applique que
piratoire de l'enfant débutera par une anamnèse précise lorsque le pronostic vital n'est pas engagé à court terme. Il faut
(avec les parents et/ou l'enfant si son âge le permet). Elle malgré tout garder en permanence à l'esprit que, du point de
permettra notamment de déterminer les éventuels anté- vue de l'enfant, nous sommes très impressionnants.
cédents influençant la situation actuelle, son historique, sa
cinétique ainsi que les potentiels facteurs de risque.
Période d'observation
Approche de l'enfant – intégration Cette phase représente le temps principal de l'évaluation
des parents clinique de l'état respiratoire de l'enfant. Le comporte-
ment et le mode respiratoire (ventilation superficielle ou
Une des particularités de la pédiatrie réside dans le fait de profonde, pauses respiratoires [< 20 s] ou apnées [> 20 s],
la présence, quasi systématique, des parents. Si cela peut régularité de la ventilation, symétrie de la ventilation,
être perçu comme déroutant pour le jeune praticien, les balancement thoraco-abdominal, rapport inspiration/
parents représentent néanmoins une source d'information expiration) du jeune enfant sont très dépendants de son
très importante. Ils fournissent de précieux renseignements état de stress et ce, plus particulièrement lorsqu'il est en
sur l'état de leur enfant et son évolution au cours des der- insuffisance respiratoire. La fréquence et la régularité des
niers jours, voire des dernières heures. En cas de pathologies efforts inspiratoires devront donc faire l'objet d'une atten-
chroniques, les parents transmettent des informations sur tion particulière (tableau 17.2).

Tableau 17.2 Signes de détresse respiratoire observables chez le jeune enfant


Cyanose [26] Elle apparaît cliniquement dès qu'il y a 5 g d'hémoglobine non oxygénée par décilitre de sang. Attention, les
enfants anémiques pourront être non cyanosés malgré la présence d'une hypoxémie. À l'inverse, les patients
polyglobuliques seront plus vite cyanosés en présence d'une hypoxémie. La cyanose est un signe tardif et
inconstant, apparent au niveau des muqueuses de la bouche et du lit de l'ongle. Lorsqu'elle est limitée aux
extrémités, elle est plus souvent due à un problème circulatoire (environnement froid par exemple).
Battement des ailes Lors de l'inspiration, les parois des ailes du nez s'écartent afin d'augmenter le volume du nez, de limiter les
du nez résistances nasales et de faciliter le passage de l'air.
Balancement Chez le nourrisson, la compliance de la cage thoracique est plus élevée que celle des poumons. De ce fait,
thoraco-abdominal lors d'un effort inspiratoire important, l'intensité de la contraction du diaphragme provoque un affaissement
de la cage thoracique, par dépression intrapulmonaire, et un bombement de l'abdomen. Ce mouvement
paradoxal est très spécifique à l'enfant.
Geignement Bruit lié à la fermeture prématurée de la glotte au cours de l'expiration. Cette dernière réalise une
pressurisation positive des voies aériennes inférieures permettant d'éviter leur collapsus.

204
17. Kinésithérapie respiratoire en pédiatrie et néonatologie

Balancement Durant l'inspiration, la tête est portée vers l'avant et vers le bas. Durant l'expiration, elle revient à sa position
de la tête initiale. Ce mouvement est lié à l'activité des muscles respiratoires accessoires suprasternaux.
Tirage Inspiratoire. Accompagné d'un stridor, il suggère une obstruction des voies aériennes supérieures.
Accompagné d'un geignement ou d'une respiration laborieuse, il suggère une diminution de la compliance
pulmonaire (atteinte parenchymateuse).
Expiration active Due à la présence d'une restriction expiratoire des voies aériennes, elle est caractérisée par une contraction
des muscles abdominaux lors de l'expiration.
Sifflement Bruit généré au niveau des voies aériennes distales lié à une obstruction partielle de celles-ci.
expiratoire

Du fait du métabolisme élevé du nouveau-né (double de risson et peut donc facilement, en cas de distension, per-
celui de l'adulte), le moindre problème d'oxygénation – qu'il turber la ventilation pulmonaire. L'utilisation par l'enfant
soit d'origine respiratoire, cardiaque, métabolique, infec- des muscles abdominaux lors de l'expiration signe la
tieuse, etc. – se manifestera précocement par une tachypnée. présence d'une obstruction expiratoire. La localisation
Chez un jeune enfant, une fréquence respiratoire élevée et le type d'obstruction peuvent être qualifiés plus tard
qui diminue vers des valeurs normales, pour autant qu'elle lors de l'auscultation.
soit corrélée avec l'amélioration des autres signes cliniques Enfin, outre la mesure des paramètres physiologiques
(tirage, conscience, coloration, etc.), peut être le signe d'une classiques (fréquences respiratoire et cardiaque, saturation
amélioration. En revanche, une diminution rapide de la fré- de l'hémoglobine en O2, tension artérielle), l'observation du
quence respiratoire et/ou un rythme respiratoire qui devient tonus global et de l'état de conscience complétera le bilan
irrégulier avec détérioration du niveau de conscience sont respiratoire.
souvent associés à une aggravation de la situation qui doit
faire craindre un arrêt respiratoire imminent.
Il est d'un grand intérêt d'observer l'enfant pendant qu'il Prévenir le risque d'arrêt
dort. Cela permet de collecter des informations complé- respiratoire et cardiaque
mentaires très intéressantes sur sa dynamique respiratoire
lorsqu'elle n'est pas influencée par l'environnement et le Les pathologies respiratoires sont les causes les plus fré-
stress. quentes d'arrêt cardiorespiratoire chez l'enfant. En cas de
Le premier temps de l'évaluation de l'enfant ne nécessite risque d'arrêt respiratoire – puis cardiaque – imminent,
donc pas de contact physique. Il s'agit d'observer, d'écouter certains signes spécifiques peuvent être observés (enca-
et de parler à l'enfant s'il ne dort pas, afin de limiter autant dré 17.1). La survenue de ceux-ci doit inciter le praticien à
que possible son anxiété et qu'il s'habitue progressivement recourir rapidement à un service d'urgences.
à notre présence.
Dans un deuxième temps, l'enfant est déshabillé afin que
l'on puisse observer directement le tronc. L'observation se
fera de haut en bas en prenant soin d'analyser la symétrie
des mouvements, les tirages et/ou rétractions ainsi que les ENCADRÉ 17.1 Signes
activités musculaires visibles. de décompensations
Outre l'aspect visuel, l'audition des bruits respiratoires respiratoires majeures [27]
entendus à la bouche et/ou au nez est extrêmement
importante et contributive. Une oreille expérimentée l Fréquence respiratoire augmentée ou en diminution
rapide et irrégulière
reconnaîtra des craquements et/ou sibilances d'intensi-
l Efforts respiratoires majorés
tés et de tonalités variables permettant de localiser et l Diminution des bruits respiratoires
de qualifier l'un ou l'autre type d'obstruction des voies l Diminution du niveau de conscience, surtout si absence
aériennes. de réponse à la douleur
Il ne faudra surtout pas oublier de s'attarder quelques l Hypotonie musculaire

instants sur l'abdomen de l'enfant. Pour rappel, celui-ci l Cyanose, marbrures

occupe les 2/3 inférieurs du volume du tronc du nour-


205
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Spécificités cette technique. Elle représente néanmoins un geste cou-


rant, réservé au milieu hospitalier, chez l'enfant prématuré
du désencombrement et également un geste d'urgence en cas d'obstruction naso-
des voies aériennes de l'enfant pharyngo-laryngée majeure et ce, quel que soit l'âge du
patient.
Rôle du nez, techniques
Désencombrement bronchique
de désencombrement nasopharyngé
Depuis une vingtaine d'années, plusieurs techniques issues
Bien qu'un nourrisson ne soit pas obligé de respirer par le nez de différentes « écoles » ont été décrites. Dans les pays
et puisse donc, en cas d'obstruction, développer une respira- anglo-saxons, l'ensemble des techniques sont reprises sous
tion buccale [17, 27], la qualité de la perméabilité du nez et le terme chest physiotherapy associant percussions, vibra-
son influence sur la résistance au flux aérien jouent un rôle tions et drainage postural. Dans le monde francophone, la
très important chez un enfant en situation de détresse respi- technique d'augmentation du flux expiratoire est principa-
ratoire. L'interprétation des bruits perçus lors de la respiration lement proposée et se base sur le principe du déplacement
exclusivement nasale, par fermeture de la bouche, peut déter- du point d'égale pression [29]. Bien que quelques livres
miner les moyens de prise en charge. Une évaluation simple et articles décrivent ces techniques, aucune validation de
de la perméabilité nasale consiste à observer la respiration de niveau scientifique élevé n'a pu être réalisée. Ceci est fort
l'enfant. En temps normal, celui-ci doit avoir une respiration probablement lié à la complexité de la méthodologie à
nasale. Tout encombrement provoquera l'ouverture de la mettre en place pour évaluer ce type de traitements.
bouche et une respiration buccale, non physiologique. À défaut de pouvoir tirer des conclusions statistiques
Le désencombrement des voies aériennes supérieures sur l'efficacité de telle ou telle technique, il faut prendre en
fait, à ce jour, l'objet de peu de publications. De nombreuses considération les aspects physiologiques et physiopatholo-
techniques sont utilisées sans avoir été validées rigoureuse- giques du système respiratoire de l'enfant. À ce point de
ment. De façon empirique, il nous paraît essentiel d'assu- vue, bon nombre d'avis d'experts concordent pour dire que
rer un nettoyage efficace de cette zone par un rinçage au ces techniques sont « physiologiquement acceptables » et
sérum physiologique. La mécanique nous fait dire qu'il est répondent donc à une certaine logique scientifique.
préférable de privilégier la quantité plutôt que la puissance. Néanmoins, pour désencombrer les bronches d'un
Cette quantité de liquide peut varier de quelques dizaines enfant, il existe différentes possibilités d'influencer la
de millilitres chez le nourrisson à quelques centaines de dynamique ventilatoire du patient. Ainsi, grâce à des
millilitres chez le plus grand enfant. L'enfant sera placé en techniques de mobilisation de volumes pulmonaires et/
couché latéral ou avec une inclinaison latérale de la tête. Le ou de modulation du débit gazeux au sein du système
liquide sera instillé dans la narine supérieure pour ressortir respiratoire, il est possible de mobiliser puis d'évacuer des
ensuite par la narine inférieure. La continuité de l'écoule- sécrétions localisées à différents niveaux de l'arbre bron-
ment sera recherchée plus que la puissance de propulsion chique. Comme précisé plus haut, la souplesse de la cage
du liquide. Ces quantités importantes (100 mL) ont été uti- thoracique de l'enfant est un élément facilitant « l'accès »
lisées dans une étude en 2012 et elles ont montré, chez des aux poumons.
enfants de moins de 18 ans atteints de congestion nasale, Avant chaque séance, une prise de contact ainsi
une amélioration des symptômes alors qu'il existait, au qu'une palpation du thorax et de l'abdomen de l'enfant
départ, une réticence des parents quant à l'acceptation du doivent permettre d'évaluer sa tolérance lors de la mise en
traitement par leur enfant [28]. Bien que n'ayant fait l'objet, contrainte de ces deux éléments [30].
à notre connaissance, d'aucune autre validation scientifique, Chaque partie du cycle ventilatoire a son importance.
cette technique semble en pratique courante plus efficace Les deux phases – inspiratoire et expiratoire – doivent faire
que le mouche-bébé. Ce dernier ne semble assurer qu'une l'objet d'une attention particulière.
vidange des narines, excluant la zone rhinopharyngée. De La phase inspiratoire est bien souvent négligée par le pra-
plus, par la variabilité de la dépression imposée au système, ticien. Elle est pourtant incontournable puisque, détermi-
une mise en garde doit être faite quant aux répercussions nante de la qualité et de la quantité du volume inspiré, elle
sur la trompe d'Eustache et l'oreille moyenne. influence directement la quantité et la qualité du volume
Enfin, l'aspiration nasopharyngéenne doit être considé- expiré. Un volume inspiré suffisamment important permet
rée qu'en deuxième intention en raison des risques liés à de moduler au mieux le débit expiratoire.
206
17. Kinésithérapie respiratoire en pédiatrie et néonatologie

La phase expiratoire est bien sûr primordiale puisque Le contrôle de l'application de ces pressions nécessite une
la modulation du flux expiratoire a pour but d'assurer la bonne perception des sensations tactiles au niveau de la face
mobilisation des sécrétions à différents niveaux de volumes palmaire des mains du praticien. Afin d'assurer la qualité de
pulmonaires (et donc à différents niveaux de l'arbre bron- ces perceptions et une action efficace sur les débits expira-
chique), pour aboutir finalement à leur évacuation. toires, le geste doit donc être doux, adapté et mesuré. Tout
geste rapide, non maîtrisé, est contre-indiqué ; en effet, des
Application de la pression fractures de côtes ont été rapportées quand les manœuvres
au niveau du thorax ne respectaient pas la physiologie respiratoire de l'enfant
[34]. Le drainage dans les bas volumes pulmonaires pourrait
Pour le praticien, toute la difficulté du geste réside dans la aussi entraîner chez l'enfant des épisodes de désaturation
possibilité de prolonger la durée du débit expiratoire en (liés au volume de fermeture) et une augmentation de la
appliquant une pression transthoracique optimale. Une fréquence respiratoire (liée à la diminution du Vt). Dans le
trop faible pression engendre une intensité insuffisante de décours d'une chirurgie cardiaque, l'appui thoracique doit
débit et donc un geste inefficace. À l'inverse, une pression être symétrique de part et d'autre de la cicatrice sternale afin
trop fortement appliquée provoque une limitation du de ne pas retarder ou perturber la qualité du cal osseux. Qui
débit expiratoire liée à la fermeture plus ou moins com- plus est, la cage thoracique étant très souple, les manœuvres
plète des voies aériennes périphériques. Dans ce dernier peuvent avoir un effet plus ou moins direct sur le cœur avec
cas, l'effet provoqué sera alors inverse à celui escompté. des risques hémodynamiques non négligeables, notam-
Le défi consiste donc à trouver un subtil équilibre entre la ment chez les prématurés et dans les cardiopathies.
pression positive transthoracique et la stabilité des voies En ce qui concerne la néonatologie, l'abord du désen-
aériennes [31]. combrement bronchique est presque identique à celui pra-
En pratique, une main (dite thoracique) empaume le tiqué en pédiatrie. Il nécessite néanmoins une adaptation
thorax, tandis que l'autre (dite abdominale) est posée sur extrêmement fine du geste du fait même de la structure et
l'abdomen [32]. Au début de l'expiration, la main thoracique des comportements particuliers de la cage thoracique et du
va simplement accompagner le mouvement expiratoire parenchyme pulmonaire de l'enfant prématuré. Afin d'évi-
du thorax. La compression douce et maîtrisée du thorax ter l'augmentation de la pression intracrânienne, il ne sera
peut se poursuivre dans les bas volumes pulmonaires et pas exercé de contre-appui abdominal. Le pouce et l'index
permettre ainsi un drainage des territoires les plus périphé- de la main abdominale s'appuient alors au niveau des der-
riques. En outre, la prolongation passive de l'expiration va nières côtes, de part et d'autre du thorax, de manière à créer
engendrer de manière réflexe une inspiration consécutive un pont. Ce positionnement permet un meilleur contrôle
plus profonde qui permet d'augmenter le volume courant du geste [35, 36].
(Vt) suivant la manœuvre. La kinésithérapie respiratoire pédiatrique est contre-­
Durant le traitement, la main thoracique peut éga- indiquée en présence de pneumothorax non drainé,
lement avoir une action de contrôle du mouvement de trouble sévère de la coagulation, maladie des membranes
ré-­expansion thoracique en maintenant les poumons à hyalines en période aiguë, assistance ventriculaire extra-
des niveaux de volume inférieurs à la capacité résiduelle cardiaque, hémorragie pulmonaire, entérocolites, hernie
spontanée [33]. De cette manière, une modification de diaphragmatique et prématurée inférieure à 1000 g surtout
la distribution régionale du volume inspiré pourrait être dans les 72 premières heures [37].
provoquée. Ce volume inspiré doit donc, d'une certaine
manière, être « guidé » afin d'être amené au niveau pulmo-
naire que l'on souhaite drainer. Une autre façon de réaliser
Vibrations extrathoraciques
cette manœuvre consiste à placer une sangle autour du Les vibrations sont administrées soit manuellement lors
thorax de l'enfant. de la phase expiratoire, soit mécaniquement par l'intermé-
La main abdominale réalise quant à elle une douce diaire d'un vibromasseur ou d'une brosse à dents électrique
contre-pression permettant d'éviter la dissipation des dont l'extrémité a été emballée dans la ouate. La fréquence
forces, amenées par l'action de la main thoracique, au des vibrations manuelles est comprise entre 5 et 10 Hz.
niveau abdominal [32]. Néanmoins, en présence de reflux L'intérêt de ces vibrations est assez discuté. Malgré le fait
gastro-œsophagien, de pathologie abdominale ou bien que les vibrations produisent une augmentation du débit
encore de matériel placé dans l'abdomen (gastrostomie par expiratoire, il n'existe aujourd'hui aucune preuve de son
exemple), la contre-pression ne peut être réalisée. effet sur la viscosité du mucus [38, 39].
207
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Les percussions sont appliquées par des tapotements En Europe, la kinésithérapie respiratoire est également
manuels ou à l'aide d'un masque de ventilation. Les controversée. En effet, la littérature est pauvre et, par
risques liés à cette technique, notamment chez l'enfant ailleurs, discutable sur le plan méthodologique. De ce
prématuré, ne sont pas négligeables : des lésions céré- fait, aucune conclusion ne peut être tirée sur l'efficacité
brales et des fractures de côtes ont ainsi été décrites ou non de la kinésithérapie respiratoire. Elle doit donc
[40, 41]. être prescrite en fonction de l'état clinique du patient
et non de façon systématique. Les bronchiolites légères
Toux provoquée ne devraient pas avoir recours à la kinésithérapie. Les
bronchiolites modérées sont probablement la meilleure
Elle consiste à stimuler, par une pression sur la trachée
indication. Dans les formes sévères, le kinésithérapeute
au niveau suprasternal, des récepteurs trachéaux afin de
aura un rôle dans la mise en place de la ventilation non
déclencher un réflexe de toux [42]. Réalisé par un prati-
invasive.
cien peu ou pas expérimenté, ce geste peut être doulou-
reux, inefficace et accompagné d'une bradycardie chez le
nourrisson.
Au-delà de l'aspect purement technique de ce geste, il Conclusion
faut, dans certains cas, se poser la question de la pertinence
de provoquer une toux qui survient souvent spontané- Les thèmes abordés au cours de ce chapitre ne se veulent
ment dans les minutes suivant la période de désencom- qu'un éclairage sur les spécificités de la prise en charge de
brement bronchique. Néanmoins, dans certaines situations l'encombrement des voies aériennes de l'enfant. Un appro-
particulières, le patient ne peut réaliser une toux efficace, fondissement théorique et une bonne formation pratique,
notamment dans les atteintes neuromusculaires. Dans ces notamment par la supervision d'un praticien expérimenté,
cas, des techniques instrumentales telles l'aspiration ou le sont indispensables pour qui souhaite prendre en charge
Cough-Assist® pourront être discutées. un jeune enfant en détresse respiratoire.
Au cours du temps, l'accroissement des connaissances
et de l'expertise du praticien doit lui permettre de guider
L'enfant qui pleure et d'adapter au mieux son geste tout en restant très vigilant
L'utilité des pleurs qui faciliteraient le désencombrement par rapport à l'état du petit patient. Il faut toujours garder
bronchique n'est pas évidente. Si l'enfant réalise effecti- à l'esprit que plus l'état respiratoire de l'enfant est dégradé,
vement, à ce moment, des inspirations plus profondes, plus le geste thérapeutique est susceptible d'aggraver une
les pleurs provoquent un frein expiratoire plus ou décompensation respiratoire. Cette dernière peut, dans cer-
moins important. Ce dernier limite le débit expiratoire tains cas, rapidement influencer les fonctions vitales et le
et donc, les possibilités de mobilisation des sécrétions devenir du patient. Il est donc fondamental que le praticien
bronchiques. En outre, durant les pleurs, l'enfant semble connaisse ses limites et puisse se faire assister quand cela
déplacer son Vt plus haut vers son volume de réserve s'avère nécessaire, voire qu'il s'abstienne de tout acte dans
inspiratoire. Il augmente alors sa capacité résiduelle certains cas.
fonctionnelle et réalise ainsi un mouvement contraire à
celui recherché lors du désencombrement des bronches
les plus périphériques. Points clés

Les caractéristiques anatomiques, mécaniques
Bronchiolite et physiologiques du système respiratoire de l'en-
La bronchiolite est une infection respiratoire virale fréquente fant évoluent au fil de sa croissance.
chez le nourrisson jusqu'à l'âge de 2 ans. La kinésithérapie ■
La petite taille de l'enfant sous-entend des
respiratoire est souvent proposée comme traitement de dimensions des voies aériennes inférieures à celles
choix mais reste largement débattue et d'une efficacité non de l'adulte et ce, aussi bien en termes de longueur
prouvée [43]. que de diamètre. Ceci va influencer le comporte-
La chest physiotherapy n'a pas montré d'effets sur l'amélio- ment du flux gazeux lors de son passage dans les
ration de la durée d'hospitalisation, le score clinique de gra- voies aériennes.
vité et le nombre d'heures d'oxygénothérapie et n'est donc ■
Il est fondamental d'approcher l'enfant de
pas recommandée dans le monde anglo-saxon [44–46]. manière douce et délicate et de garder en perma-
208
17. Kinésithérapie respiratoire en pédiatrie et néonatologie

nence à l'esprit que, du point de vue de l'enfant, [10] Martin RJ, Siner B, Carlo WA, et al. Head position alters the distribu-
nous sommes très impressionnants. tion of nasal airflow in infants. Pediatr Res 1987 ; 4 : 368A.
[11] Stocks J. Effect of nasogastric tubes on nasal resistance during

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monaires et/ou de modulation du débit gazeux ryngeal cavity in normal infants and young children. Cleft Palate
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sécrétions localisées à différents niveaux de l'arbre [16] Eavey RD. The pediatric larynx. In : Fried MP, editor. The larynx, a
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Toute la difficulté du désencombrement bron-
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chique réside dans la capacité de prolonger le tory nasal breathers. Am Rev Respir Dis 1985 ; 131 : 343–7.
débit expiratoire en appliquant une pression [18] Narcy P, et  al. Particularités anatomiques et croissance du larynx
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L'application de pressions sur le thorax du disorders of respiratory tract in children. 6e éd. Toronto : WB
patient doit être douce, adaptée et mesurée. Tout Saunders ; 1998. p. 27–73.
geste rapide, non maîtrisé, est contre-indiqué. [20] Lanteri CJ, Sly PD. Changes in respiratory mechanics with age. J Appl
Physiol 1993 ; 74(1) : 369–78.

Le kinésithérapeute doit garder à l'esprit que
[21] Goldsmith JP, Karotkin EH. In : Assisted ventilation of the neonate.
chez un enfant en détresse respiratoire, les gestes 4e éd. Appendice 3. Philadephie : Elsevier ; 2003. p. 534.
thérapeutiques, même correctement exécutés, [22] South M, Morley CJ. Respiratory timing in intubated neonates with
peuvent aggraver la situation clinique. respiratory distress syndrome. Arch Dis Child 1992 ; 67 : 446–8.
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209
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

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210
Chapitre 18
Kinésithérapie et mucoviscidose
Anne-Sophie Aubriot, Fred Lessire,
Christian Opdekamp, Gregory Reychler

PLAN DU CHAPITRE
Kinésithérapie respiratoire 212
Activité physique et sport 215
Kinésithérapie à visée
musculo-ostéoarticulaire 219
Kinésithérapie à visée préventive
de l'ostéoporose 219
Aérosolthérapie 220
Conclusion 221

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

La mucoviscidose est une maladie génétique dont la pre- précise de la physiologie respiratoire et de la physiopatho-
mière cause de morbidité et de mortalité est l'atteinte logie de la mucoviscidose.
respiratoire. Si elle reste à l'heure actuelle incurable malgré L'accumulation des sécrétions, caractéristique majeure
des avancées thérapeutiques significatives, son pronostic de cette pathologie, provient d'un dysfonctionnement au
ne cesse de s'améliorer. Les progrès considérables réalisés niveau du système mucociliaire et du déficit d'une pro-
au niveau des connaissances et du traitement des diverses téine transmembranaire (protéine CFTR). Secondaire à ce
complications liées à la maladie y ont beaucoup contri- dernier, la perturbation de l'équilibre ionique au niveau des
bué, tout comme la prise en charge multidisciplinaire des cellules du tissu pulmonaire provoque une déshydratation
patients en centres spécialisés. L'amélioration de l'espérance des sécrétions qui augmente fortement leur viscosité et par
de vie n'est pas sans influence sur la kinésithérapie. À l'origine, là même l'obstruction bronchique. Une stase bronchique
la kinésithérapie visait exclusivement à lutter contre l'encom- s'installe progressivement et des infections apparaissent
brement présent chez la grande majorité des patients. accompagnées d'une réaction inflammatoire. Des compli-
Étant donné l'apparition d'une catégorie de patients dits cations telles que atélectasies, bronchiectasies… peuvent
« cliniquement asymptomatiques », la kinésithérapie s'est survenir avec des conséquences potentiellement néfastes
adaptée et a ouvert son champ d'action, notamment aux pour le patient [2].
complications musculo-ostéoarticulaires qui deviennent La kinésithérapie joue un rôle prépondérant dans l'éli-
de plus en plus fréquentes chez des patients vivant plus mination des sécrétions bronchiques. Elle vise à rompre le
longtemps. L'aérosolthérapie a également évolué du fait : cercle vicieux hypersécrétion–inflammation–infection et
● de l'apparition de nébuliseurs de nouvelle génération qui tente de ralentir au maximum la détérioration du tissu pul-
raccourcissent le temps de traitement, procurant une meil- monaire. Le dépistage systématique à la naissance se répand
leure qualité de vie ; de plus en plus et contribue à l'accroissement du nombre
● du recours à de nouvelles substances inhalées. de patients cliniquement asymptomatiques. Ces patients
Comme le montrent les différents registres nationaux sont cependant malades et l'introduction de la kinésithé-
relatifs à la mucoviscidose, la kinésithérapie et les nébulisa- rapie dans la prise en charge dès la découverte du dia-
tions occupent une place importante, et même croissante gnostic, même en l'absence de symptômes, prévaut pour
pour la kinésithérapie, dans le traitement de la maladie. En bon nombre de cliniciens. La raison en est double. D'une
Belgique, 91 % et 89,7 % des patients ont recours respec- part, l'inflammation apparaît très tôt dans le décours de la
tivement aux nébulisations (principalement des muco- maladie – dès les premières semaines de vie – et certaine­
litiques) et à la kinésithérapie (registre belge 20108). La ment avant la survenue des premiers symptômes. Ainsi,
variabilité importante au niveau des manifestations de la les épreuves fonctionnelles respiratoires, réalisées depuis
mucoviscidose se retrouve également au niveau des moda- plusieurs années dès 3–4 ans, chez des enfants a priori
lités thérapeutiques et explique la diversité des techniques asymptomatiques, montrent des valeurs inférieures aux
de kinésithérapie existantes. Le choix de la technique la valeurs prédites, notamment pour le débit expiratoire forcé
plus appropriée dépend du patient et de ses préférences, entre 25 et 75 % de la capacité vitale, alors qu'à la naissance
de sa situation psychosociale, de son âge… et, il faut bien le les poumons sont histologiquement sains. De même, chez
reconnaître, de l'influence des écoles locales. des patients cliniquement asymptomatiques, des prélève-
ments bactériologiques montrent la présence de germes
pathogènes au niveau des voies aériennes. D'autre part, une
introduction précoce de la kinésithérapie pourrait favori-
Kinésithérapie respiratoire ser une bonne compliance au traitement en faisant entrer
la kinésithérapie dans les habitudes quotidiennes. Cette
La kinésithérapie à visée respiratoire rencontre plusieurs compliance, garante d'une évolution meilleure et difficile à
objectifs, à savoir l'amélioration de la ventilation, de la clai- obtenir, doit être une préoccupation du kinésithérapeute.
rance mucociliaire et des échanges gazeux, la diminution On sait en effet qu'elle a été associée à la conviction du
de la résistance des voies aériennes et de l'obstruction bron- patient en l'efficacité et en la nécessité de la kinésithérapie,
chique, et le ralentissement de l'évolution de la maladie [1]. à la durée des séances, à l'inconfort d'une technique, à la las-
La recherche de tels objectifs requiert une connaissance situde dans la succession des séances, à la mauvaise relation
avec le(s) thérapeute(s)…, autant d'éléments sur lesquels
celui-ci a une influence. L'éducation du patient comme la
www.cysticfibrosisdata.org
8 recherche de techniques les mieux adaptées trouvent ici
212
18. Kinésithérapie et mucoviscidose

tout leur sens. Aussi, des adjuvants (musique…) rendant la employées varient (tableau 18.1) et leur utilisation dépend
kinésithérapie plus agréable pour les enfants et les parents souvent plus de la localisation géographique du patient
devraient être investigués. L'absence de symptômes au et du lieu d'origine de la technique que de son efficacité
quotidien et le manque de validation des techniques uti- réelle. Privilégier les techniques dites d'expiration lente
lisées peuvent entraîner une démotivation chez les kiné- qui minimisent les épisodes de toux est la seule évidence
sithérapeutes, d'où l'intérêt de la combinaison de deux reconnue par la plupart des kinésithérapeutes spécialisés.
thérapeutes pour un même patient. Une approche provenant de Suède préconise le recours
Le nouvel état asymptomatique des patients modifie la à l'activité physique dans différentes positions combinée
kinésithérapie dans son ensemble mais aussi son versant à des manœuvres de kinésithérapie respiratoire comme
purement respiratoire. Si l'élimination des sécrétions reste programme de prise en charge [6]. Celle-ci va dans le sens
un élément important du traitement pour de nombreux des études qui ont mis en évidence l'impact bénéfique de
patients, le maintien d'une bonne fonction respiratoire l'activité physique sur le désencombrement.
et capacité physique est un challenge plus global et qui L'élimination naturelle des sécrétions bronchiques
devient prépondérant pour le kinésithérapeute. dépend principalement de l'action ciliaire. Pour favoriser
Les techniques de kinésithérapie, même si elles ont bien cette épuration ciliaire, altérée dans le cas de la mucovis-
souvent la même finalité, peuvent être fort différentes les cidose, la modulation du flux expiratoire est le facteur
unes des autres. Leur choix va dépendre de divers para- essentiel. L'efficacité de la kinésithérapie dépend de cette
mètres, dont l'âge et le niveau de collaboration ne sont modulation qui doit permettre d'obtenir localement un flux
pas les moindres. Chez le petit enfant, la kinésithérapie est expiratoire maximal. La toux termine le travail en évacuant
exclusivement passive pour évoluer vers une autonomie les sécrétions collectées dans les voies aériennes supérieures.
maximale dans la pratique de la technique à l'âge adulte. Étant un symptôme en tant que tel, la toux doit cependant
Cette autonomie contribue à l'amélioration de la qualité être limitée pour minimiser la composante bronchospas-
de vie et favorise la compliance thérapeutique. Dès l'âge de tique, transitoire mais souvent présente chez ces patients.
2 ans, l'enfant commence à participer activement aux exer- Au vu des différentes techniques recensées en rapport
cices respiratoires. Les jeux permettent de lui faire décou- avec la mucoviscidose, le choix s'avère difficile. Le drainage
vrir, par lui-même, les différents principes de la respiration. postural, dont l'indication principale reste les bronchectasies
En bas âge, l'aspect ludique occupe une place importante souvent retrouvées chez ces patients, est, lorsqu'il est encore
dans la séance de kinésithérapie.
Quels que soient l'âge et l'état du patient, la kinésithéra- Tableau 18.1 Pourcentage de centres (n = 166) spécialisés
pie doit être efficace, confortable et réalisable aisément. Un utilisant les différentes techniques de désencombrement
plan de traitement est élaboré avec les parents et l'enfant en chez les enfants atteints de mucoviscidose (IPG/CF 2005)
essayant de les y impliquer pleinement. Le terrain culturel, Techniques de Centres spécialisés utilisant
l'état de la maladie, le coût de la technique et les sensations désencombrement la technique (en %)
des patients interviennent dans ce plan. La connaissance
Drainage postural 55
des processus physiologiques du désencombrement ainsi
que les modifications provoquées par la maladie doivent Drainage postural modifié 47
être bien maîtrisées par le thérapeute. Percussions manuelles 35
L'importance du désencombrement bronchique n'est Vibrations manuelles 52
pas discutable. En effet, plusieurs études démontrent tant Vibrations mécaniques 9
à court qu'à moyen terme la dégradation de la fonction
respiratoire chez le patient ne bénéficiant pas de kinésithé- Drainage autogène 19
rapie respiratoire [3, 4]. À l'origine, la kinésithérapie conven- Augmentation du flux 17
tionnelle consistait en du drainage postural accompagné expiratoire
de percussions. Toutefois, depuis quelques années, avec Approche suédoise 19
l'amélioration des connaissances, de nouvelles techniques Pression expiratoire positive 14
ont vu le jour, d'une efficacité similaire voire supérieure à
Stimulation de la toux 31
celle de la kinésithérapie conventionnelle mais souvent et aspiration
mieux adaptées à la pathologie. Cependant, aucune d'elles
n'est réellement parvenue à faire l'unanimité [5], en partie Positionnement pour 58
améliorer la ventilation
faute d'études randomisées et contrôlées. Les techniques
213
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

utilisé, combiné à d'autres techniques (PEP, FET, ELTGOL, forcées, peut être débutée assez tôt, vers l'âge de 2 ans, et
Flutter®…). Le manque d'évidence, la durée d'une posture permet comme le drainage autogène d'acquérir avec le
(de 5 à 10 min), leur nombre (entre quatre et vingt selon temps une autonomie dans le traitement.
les écoles), la désaturation et l'inconfort qui sont associés au L'utilité de la PEP a été étudiée à plusieurs reprises dans
drainage postural sont des inconvénients qui dissuadent les la mucoviscidose. Cette technique où le patient expire au
kinésithérapeutes d'y avoir recours. Les postures en déclive travers d'un masque ou d'un embout buccal muni d'une
sont à éviter du fait de l'accentuation des reflux gastro-œso- résistance permet de limiter la compression dynamique
phagiens qu'elles produisent [7, 8], ces derniers ayant déjà une des voies aériennes (fig. 18.2) et de maintenir un haut degré
incidence supérieure à la normale chez les enfants atteints de d'autonomie du patient. Dans une étude randomisée à long
mucoviscidose et pouvant être délétères pour l'évolution res- terme, un effet bénéfique au niveau de la fonction respi-
piratoire de ces patients. Ceci a d'ailleurs justifié une révision ratoire a été noté comparativement au drainage postural
des postures du drainage postural classique [9]. combiné avec des percussions [12]. Grâce à la PEP, l'élimina-
Le drainage autogène minimise les épisodes de toux et tion des sécrétions est facilitée [13], la ventilation est amélio-
offre une grande autonomie au patient. Pour ces raisons, il rée et le volume résiduel est diminué [14]. Cette technique a
est spécialement indiqué dans la mucoviscidose, d'autant l'avantage de s'adapter aussi bien aux enfants qu'aux adultes.
plus qu'il ne provoque pas de reflux gastro-œsophagiens Les appareils produisant des oscillations de la pression
[10]. Chez les enfants qui ne peuvent le pratiquer seul, il peut positive sans risque d'hyperpression tels que le Flutter®,
devenir un « drainage autogène assisté » et éventuellement le Cornet® et l'Acapella® ont pour objectif de diminuer la
se combiner à un mouvement rythmique de hauts et bas viscosité des sécrétions. Bien qu'insuffisamment validés
(bouncing) réalisé avec l'enfant sur un ballon [11] (fig. 18.1). scientifiquement, ils sont régulièrement retrouvés dans
L'active cycle of breathing technique (ACBT), compo-
sée de trois phases cycliques comprenant une respiration A
contrôlée, des expansions thoraciques et des expirations

Fig. 18.2
Illustration de l'effet d'une pression respiratoire positive sur la
compression dynamique des voies aériennes
A. Compression des voies aériennes lors d'une expiration.
Fig. 18.1 B. Stabilisation du diamètre des voies aériennes lors d'une expiration
Séance de bouncing. à travers une résistance.

214
18. Kinésithérapie et mucoviscidose

le traitement des patients atteints de mucoviscidose. patients asymptomatiques, chez qui la kinésithérapie respi-
L'utilisation de ces derniers est généralement combinée à ratoire ne se justifie pas systématiquement, sont plus fré-
d'autres techniques. Comparativement à la PEP, sur le long quemment encouragés à la pratique d'une activité sportive.
terme, le Flutter VRP1® n'est pas aussi efficace [15]. Si l'on sait que la survie du patient est liée à son statut nutri-
Les percussions mécaniques n'ont pu réellement tionnel et respiratoire, elle est également indirectement liée
démontrer de bénéfices cliniques tandis que les percus- à sa condition physique. Stimuler le patient à la pratique
sions manuelles, mieux connues sous le terme de clap- d'une activité physique est un objectif incontournable dans
ping, manquent de standardisation et de reproductibilité. la prise en charge au long cours. L'évaluation de sa condi-
Elles sont tombées en désuétude, notamment à cause du tion physique est devenue un paramètre de surveillance au
manque de preuves d'efficacité et de l'hypoxémie qu'elles même titre que sa fonction respiratoire [26].
provoquent. Les vibrations, qu'elles soient mécaniques ou
manuelles, restent sujettes à controverse. Actuellement,
trop peu de données sont disponibles pour justifier l'usage Recommandations internationales
d'une de ces différentes techniques en routine dans la et réalité pratique
mucoviscidose. En Amérique du Nord, les compressions
thoraciques à haute fréquence sont considérées comme Les recommandations internationales sur le maintien de la
une alternative aux autres techniques de désencombre- santé physique globale et de la condition physique encou-
ment. Le contexte global de la kinésithérapie y est fort diffé- ragent toute personne à s'engager dans un effort ­d'intensité
rent, vu l'impossibilité de disposer quotidiennement d'une modérée ou intense, respectivement d'un minimum
séance de kinésithérapie réalisée par un professionnel. Les 30 minutes par jour, 5 fois par semaine, ou de 25 minutes,
techniques garantissant une autonomie plus importante 3 fois par semaine avec une dépense énergétique atteignant
y sont tout naturellement plus fréquentes. Les effets des 500 à 1000 METs/semaine. Ces recommandations sont aussi
compressions thoraciques à haute fréquence sont cepen- applicables aux adultes présentant certaines pathologies
dant contestés et les résultats expérimentaux attendent chroniques à condition qu'ils soient évalués et surveillés par
confirmation par des études cliniques. Tout récemment, des professionnels de la santé [27].
une étude clinique au long court a montré que cette tech- Dans la population générale, durant l'enfance, les
nique était moins efficace que le PEP masque [16]. activités ludiques ou sportives sont multiples. L'enfant
La ventilation à percussions intrapulmonaires, bien que se bouge naturellement mais en grandissant et particu-
reconnue comme technique d'aide au désencombrement lièrement à partir de l'adolescence, la participation aux
dans certaines pathologies pulmonaires restrictives [17], activités physiques diminue fortement. Il en va de même
manque encore de validation clinique dans le cas de la chez le patient atteint de mucoviscidose. Si les activités
mucoviscidose. Cette modalité ne s'avère pas être indiquée légères et le nombre de pas parcourus quotidiennement
pour la nébulisation de substances médicamenteuses [18]. sont superposables à la population générale, la littéra-
Le coût et le problème de contamination bactérienne ture démontre une diminution significative des activités
des appareillages utilisés représentent un inconvénient non modérées et intenses chez le patient par rapport au sujet
négligeable dont il faut tenir compte, notamment dans le sain [28–32].
cas de la mucoviscidose où le traitement de base est déjà La différence de participation homme/femme aux
onéreux pour les patients. activités sportives est présente dans la population saine
comme dans la population des patients et ce à partir de la
puberté. Comparativement à la patiente dite « fort active »,
la patiente cataloguée « peu active » a un plus grand déclin
Activité physique et sport respiratoire annuel [33–35]. Ces mêmes activités modérées
et intenses sont corrélées à la condition physique aéro-
Les premières études sur l'influence du sport sur la fonc- bie [36] et au pronostic de survie [37–40]. Globalement
tion respiratoire du patient atteint de mucoviscidose ont la capacité maximale à l'effort (VO2 pic et W max) du
été publiées au début des années 1970 [19, 20]. Le sport patient par rapport au sujet sain est diminuée [41–43].
a longtemps été considéré comme secondaire par rapport Ceci est d'autant plus vrai que les atteintes respiratoire et
à la kinésithérapie de désencombrement bronchique [21] nutritionnelle sont présentes. Les paramètres à l'origine de
bien que le côté bénéfique et non dangereux de l'exercice cette diminution peuvent être ventilatoire, cardiaque ou
ait été démontré dès le début des années 1980 [22–25]. Les musculaire.
215
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Condition physique et paramètres Fonction musculaire et statut nutritionnel


limitant La problématique du statut nutritionnel dans la muco-
viscidose est liée à la malabsorption alimentaire due à
Fonction pulmonaire l'insuffisance pancréatique avec comme conséquence
La mucoviscidose se caractérise par un syndrome pulmo- une diminution importante de la masse graisseuse et de
naire obstructif léger (89 % < VEMS < 70 % vp), modéré la masse maigre. Cette dernière est directement impliquée
(69 < VEMS < 40 % vp) ou sévère (VEMS < 40 % vp). En dans la VO2 pic. La fonction musculaire sera, en cas de défi-
cas d'atteinte pulmonaire légère à modérée, la fonction pul- cit respiratoire léger à modéré, l'élément limitant de l'effort.
monaire n'est pas un facteur limitatif. La corrélation entre Le muscle du patient présente des anomalies quantitative
la fonction pulmonaire et la capacité maximale à l'effort et qualitative. La littérature met en évidence une perte de
est faible. La VO2 pic reste plus ou moins stable [44–46] 15 à 35 % de la force et de la masse musculaire des muscles
pour autant que d'autres paramètres limitant l'effort squelettiques périphériques du patient par rapport aux
n'interviennent pas. La fonction pulmonaire deviendra un sujets contrôles par opposition aux muscles respiratoires
facteur limitant l'effort dès l'instant où la réserve ventila- qui ne présentent pas de différences par rapport à la
toire est nulle, c'est-à-dire lorsque la ventilation maximale normalité [54–57]. La cinétique de la VO2 est également
volontaire théorique (VMV) est atteinte au cours de l'effort modifiée par un temps de reconstitution en phospho-
[47]. Celle-ci se calcule théoriquement est multipliant le créatine plus lent que les sujets contrôles ou autres por-
VEMS par 35 ou 40. La présence d'une hyperinflation sta- teurs de maladie respiratoire. Ce qui explique la VO2 pic
tique (définie comme une augmentation du rapport VR/ plus basse atteinte lors de l'épreuve d'effort cardiorespira-
CPT > 30 %) n'est pas associée au début à des contraintes toire maximale [43, 58]. Ce déficit musculaire est aussi lié
ventilatoires à l'effort [48]. Par contre en cas d'atteinte pul- à l'évolution de la maladie. Les patients ont une dépense
monaire modérée à sévère, cette hyperinflation statique énergétique de repos de 10 à 30 % plus élevée que celle
va s'accompagner d'une augmentation de l'hyperinflation des sujets sains. Cette dépense énergétique majorée pro-
dynamique, elle-même à l'origine d'une augmentation du vient du coût de la respiration, des effets systémiques de
travail des muscles respiratoires avec le risque d'hypoventi- l'inflammation pulmonaire chronique, de la malnutrition,
lation alvéolaire et de carbonarcose [49]. Cette dernière est de l'anomalie génétique [59–61] et du déconditionne­
connue aussi comme un facteur contribuant à un déclin ment physique [57–63]. Un coût énergétique plus élevé
plus rapide du VEMS [50]. Le degré d'hyperventilation à de l'activité physique chez le patient a aussi été démontré
un niveau d'effort sous-maximal peut également aider à la [64]. L'insuffisance pancréatique peut aussi être à l'origine
programmation du moment de la transplantation. Le rap- d'un diabète. L'incidence du diabète chez le patient atteint
port VE/VMV (ventilation exprimée en pourcentage de la de mucoviscidose est de 2 % chez l'enfant, 19 % chez
ventilation maximale volontaire) au seuil lactique supérieur l'adolescent et 40–50 % chez l'adulte [65]. Un diabète mal
à 70 % indique un risque majeur de décès en liste d'attente équilibré et un déficit nutritionnel mènent inévitablement
de greffe pulmonaire [51]. à une perte de masse musculaire.

Fonction cardiaque
Activités recommandées
ou déconseillées
Chez le patient à déficience respiratoire légère à modérée,
on note une tachycardie de repos et d'effort. L'adaptation Qu'elle soit ludique ou sportive, la pratique d'une activité
du débit cardiaque est normale au cours de l'effort inten- physique doit s'installer dès le plus jeune âge. L'activité phy-
sif malgré une limitation du volume d'éjection systolique sique est une hygiène de vie qui sera d'autant plus facile à
[52]. Très souvent, on constate à la fin de l'effort le maintien inculquer que le déficit respiratoire lié à la maladie est peu
d'une réserve chronotrope. Chez les patients plus sévères, ou pas présent. Qu'elle soit individuelle ou collective, le
il peut apparaître un dysfonctionnement cardiaque secon- libre choix de l'activité pratiquée est primordial. Celle-ci sera
daire à l'insuffisance respiratoire. Suite à l'hyperinflation sta- choisie en fonction du style de vie, de l'aptitude physique
tique et dynamique, au déconditionnement physique et à et des possibilités géographiques qui s'offrent au patient.
la malnutrition, la fonction ventriculaire droite puis gauche L'amusement et l'épanouissement doivent être recherchés
peut s'altérer [53]. et seront importants pour le maintien de la pratique à long
216
18. Kinésithérapie et mucoviscidose

terme. La plupart des sports sont encouragés [66]. Jogging, artérielle est indispensable. Une échographie cardiaque
vélo, marche, natation, trampoline, musculation, volley, avec recherche d'une HTAP doit être réalisée. Certains
tennis de table, danse ou badminton sont les activités les paramètres peuvent prédire une éventuelle diminution de
plus fréquemment rencontrées. La combinaison de plu- la saturation au cours d'un effort intense : SaO2 de repos
sieurs activités comme proposées dans les salles de sport inférieure à 92 % de la valeur prédite, VO2 pic inférieure à
ou de fitness est également attrayante et offre l'avantage 55 % de la valeur prédite avec un seuil ventilatoire inférieur
d'être moins lassante à long terme. à 40 %, ou désaturation nocturne [71]. Un supplément d'O2
Avec le temps et la dégradation progressive de la capa- sera prescrit au repos et/ou à l'effort, si la valeur de la pres-
cité respiratoire, certains sports sont déconseillés tels que sion partielle en O2 dans le sang artériel (PaO2) est inférieure
les sports de contact (rugby, karaté, judo…) ou les sports à 55 mmHg, ce qui correspond à une saturation du sang
d'altitude ou d'eau (parachutisme, parapente, alpinisme, artériel en O2 inférieure à 90 %.
spéléologie ou plongée sous-marine) pour les risques
potentiels de fractures, de pneumothorax, de traumatisme
hépatique ou splénique et de barotraumatisme qu'ils pour- Activités physiques
raient engendrer. en cas d'exacerbation
La surinfection pulmonaire aiguë est à l'origine d'une
Activités physiques diminution des activités physiques quotidiennes du
patient hospitalisé ou non. Le nombre quotidien de pas
en cas de diabète et la dépense énergétique active, qui correspond aux acti-
L'exercice physique doit également être encouragé chez le vités physiques modérées à intenses, au plus bas à l'entrée
patient diabétique. Bien que le seul traitement du diabète du séjour hospitalier s'améliorent au cours de ce dernier.
reconnu actuellement soit l'insuline [67], l'exercice physique Il faudra cependant plus d'un mois post-hospitalisation
est reconnu comme un moyen de contrôler et de diminuer pour revenir à la valeur prédite du groupe contrôle [72],
la glycémie. Ceci a été démontré chez le patient diabétique ce qui sous-entend que pour les patients hospitalisés
de type 2 non mucoviscidosique [68]. Un contrôle optimal plusieurs fois par an, la récupération de cette activité
de la glycémie durant l'effort est important afin de main- quotidienne active pourrait ne pas être totale. La force
tenir un taux de sucre adéquat au niveau musculaire. Il est musculaire diminue également mais de façon plus indivi-
important d'éviter une hypoglycémie induite par l'exercice duelle. Il semblerait que ce soit les patients présentant le
qui serait à l'origine d'une fatigue prématurée et d'une plus faible niveau d'activité physique modérée (−10 min/
réduction de la capacité à l'effort. Cependant, les risques jour) à l'entrée de l'hospitalisation qui soient les patients
d'hypoglycémie sont possibles et certaines précautions les plus sensibles à connaître cette diminution [73]. Si
sont à prendre : les efforts physiques doivent être program- l'activité physique doit être adaptée aux symptômes, elle
més et la dose d'insuline adaptée en fonction de la durée ne doit cependant pas être totalement arrêtée pendant
et de l'intensité de l'effort. Les mesures urgentes à prendre une exacerbation.
pour corriger les signes d'hypoglycémie sont enseignées au
patient et à son entourage.
Activités physiques
contre-indiquées
Activités physiques
en cas d'hypoxémie L'incidence d'événements potentiellement sérieux et
dangereux durant l'épreuve d'effort maximale sur cyclo-­
L'activité physique n'est certainement pas contre-indiquée ergomètre est inférieure à 1 % [74], ce qui ne veut pas dire
chez les patients oxygéno-dépendants en attente ou non que l'activité sportive soit sans danger. L'activité physique
de transplantation mais doit être appropriée. L'hypoxémie est suspendue en cas d'HTAP de repos (> 60 mmHg) et
induite par l'exercice est fréquente [69] mais il est impor- de décompensation cardiaque. En cas d'HTAP se majorant
tant que tout risque potentiel soit connu et identifié afin à l'effort avec une désaturation en oxygène non contrôlée
de rendre l'accès au sport et à l'effort le plus sûr et sécurisé par l'oxygénothérapie, en présence de pneumothorax ou
possible [70]. Une épreuve d'effort préalable avec surveil- d'hémoptysies et de douleurs thoraciques, l'effort est une
lance de l'ECG, de la saturation en oxygène et de la pression contre-indication absolue [75].
217
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Modalités pratiques cette activité. Plus l'activité perdure dans le temps (6 mois),
plus les bénéfices s'installent et perdurent. La condition
de l'activité physique physique revient à ses valeurs initiales dans les 6 mois après
Fréquence l'arrêt de toute activité. En revanche, le maintien de l'activité
à une fréquence de 1 à 2 fois par semaine permet de pré-
Idéalement, la fréquence optimale est de 3 fois par semaine. server partiellement les acquis physiologiques et le bénéfice
Une plus grande fréquence est possible mais souvent syno- sur la qualité de vie.
nyme d'échec. La récupération entre les séances devient
insuffisante, entraîne à la longue une fatigue et un plus
grand risque de blessures musculotendineuses.
Bénéfices liés à la pratique
d'une activité physique régulière
Intensité
Après une période d'échauffement, l'intensité de l'exer- Ralentissement du déclin de la fonction
cice doit, pour être efficace, varier entre 60 et 80 % du W respiratoire
max de l'épreuve d'effort. Ceci correspondant à une FC Le déclin physiologique de la fonction respiratoire chez le
comprise entre 70 et 85 % de la FC max. En présence de sujet sain apparaît à partir de la trentaine et correspond
facteurs limitants (ventilatoire, cardiaque ou musculaire), à une perte annuelle de plus ou moins 1 % de la capa-
on recherche un entraînement à la FC atteinte au niveau cité respiratoire. Chez le sujet atteint de mucoviscidose,
du seuil ventilatoire (SV). Une FC cible minimum et un l'évolution de la maladie va dans le sens d'une perte de
essoufflement modéré sont nécessaires pour obtenir la capacité fonctionnelle respiratoire de 2 à 3 % par an.
des bénéfices. Pour contrôler la FC, on conseille le port L'apparition et l'importance de ce déclin sont fonction
d'un cardiofréquencemètre et pour les patients oxygéno- du degré d'inflammation bronchique et du type d'agents
dépendants, la surveillance se fait à l'aide d'un saturo- pathogènes présents au niveau de l'arbre respiratoire. Si la
mètre. En l'absence de saturomètre, si le patient est non pratique régulière d'une activité physique ne va pas fonda-
oxygéno-dépendant et que, durant l'épreuve d'effort ini- mentalement améliorer la fonction respiratoire du patient,
tiale, il montre des signes de désaturation (SaO2 < 90 %), on observe cependant un ralentissement du déclin de
par sécurité, on conseille que l'entraînement se fasse à une leur fonction respiratoire par opposition à une diminution
intensité de 10 à 15 battements inférieure à celle de l'appa- plus nette chez les patients ne pratiquant aucune activité.
rition de l'anomalie. Si l'impact d'un programme spécifique d'exercices sur la
fonction respiratoire se manifeste à court terme [34, 76,
Durée d'une séance 77] avec l'amélioration de certains paramètres comme le
VEMS, la capacité vitale inspiratoire (CVI), l'hyperinflation
Idéalement, d'un minimum de 30 à 45 minutes, la séance ou l'inflammation pulmonaire [78], c'est surtout à long
comprend 5 à 10 minutes d'échauffement et 5 minutes terme que ces programmes ont démontré leur intérêt par
de retour au calme. Au départ, le déconditionnement un moindre déclin annuel statistiquement significatif de
physique peut être tel que la durée n'excède pas 10 à la CVF par rapport au groupe contrôle recevant les soins
15 minutes. Avec le temps et l'amélioration de l'inconfort usuels [79–82].
respiratoire, on tente de progresser de quelques minutes
par tranche de trois séances et tendre progressivement vers
une durée de 60 à 90 minutes. La séance comportera un Amélioration de la capacité physique
entraînement de type aérobie et anaérobie.
et de la survie
La littérature démontre régulièrement que les enfants et
Durée globale les adultes atteints de mucoviscidose ont la capacité d'aug-
L'activité physique et sportive devrait être un élément d'hy- menter leur tolérance à l'effort et ce, quelle que soit leur
giène de vie et donc se perpétuer dans le temps, avec toutes atteinte respiratoire [76, 80, 83–85]. Une corrélation entre la
les difficultés de compliance que cela implique. Une durée capacité aérobie et la survie de ces patients a été rapportée
minimum de 6 à 8  semaines est indispensable pour voir pour la première fois en 1992 [37] et confirmée plus récem-
apparaître et ressentir physiologiquement les bénéfices de ment en 2005 [38].
218
18. Kinésithérapie et mucoviscidose

Amélioration de la clairance mucociliaire charge excessive imposée par la respiration à ces enfants
pendant leur développement est probablement aussi un
La combinaison de l'exercice physique avec la kinésithéra-
élément causal. En outre, tous les muscles du tronc parti-
pie respiratoire de désencombrement offre de plus grands
cipent concomitamment à la respiration et à la posture et
bénéfices que le traitement de kinésithérapie seul en termes
toute surcharge de ceux-ci rejaillit sur ces deux fonctions.
de quantité de mucus expectoré, de rhéologie et de clai-
Les pressions anormalement élevées développées, secon-
rance mucociliaire et d'amélioration de la fonction respi-
daires à la pathologie pulmonaire, retentissent négative-
ratoire [86–89]. Il apparaît dès lors judicieux de considérer
ment sur le thorax qui se déforme. Ainsi, des cyphoses ont
le sport comme une aide supplémentaire à l'épuration des
été relevées chez 62 % des patients et des douleurs dorsales
voies respiratoires. Il ne peut cependant s'y substituer en
chez 94 % des patients, ce qui justifie la nécessité d'une prise
cas d'encombrement bronchique. Par contre en l'absence
en charge [100]. L'incontinence urinaire dont l'incidence est
de symptômes, l'exercice physique prend toute son impor-
supérieure chez les jeunes femmes atteintes de mucovis-
tance pour le maintien de la capacité respiratoire à long
cidose [101–103] découle de ce même raisonnement. Les
terme.
douleurs entraînent un dysfonctionnement des muscles
du tronc qui risque à la longue de favoriser les déforma-
Amélioration de la qualité de vie tions. Dans ce domaine, la prévention est plus efficace que
L'amélioration de la condition physique du patient peut la correction d'une déformation installée. Après un bilan
avoir un impact non négligeable sur sa qualité de vie. spécifique montrant les premiers signes de déformation
Moins dyspnéique dans les tâches quotidiennes, le patient chez un jeune patient, des exercices de mobilisation des
retrouve confiance, estime de soi, bien-être, dynamisme, articulations, d'ouverture, d'assouplissement et de renforce-
ouverture sociale et une amélioration de son image corpo- ment des muscles peuvent être proposés quotidiennement
relle [85, 90, 91]. aux patients. Une activité physique normale complète par-
faitement ce programme sans nécessiter le recours à un
Amélioration de la densité osseuse réentraînement spécifique. Le massage trouve sa place dans
le soulagement des douleurs musculaires et peut s'avérer
Un déficit en densité osseuse a bien été documenté chez contributif au bien-être des patients, principalement ceux
les patients atteints de mucoviscidose [92–95] et ce, mal- présentant une atteinte modérée à sévère. Au même titre
gré un statut pondéral et anthropométrique normal [96]. que les séances de relaxation, il favorise également une
Il a été rapporté des corrélations entre le niveau d'activité détente corporelle.
physique, la durée, l'intensité de l'effort et la densité osseuse
chez les adolescents et adultes mucoviscidosiques [97, 98].
L'exercice physique a démontré maintenir et augmenter
la densité osseuse dans une population non atteinte de
Kinésithérapie à visée
mucoviscidose [99] mais à l'heure actuelle, il n'existe pas préventive de l'ostéoporose
d'étude contrôlée interventionnelle sur l'accroissement de
la masse osseuse et sur l'effet thérapeutique de l'exercice L'évaluation de l'ostéoporose dans la mucoviscidose est
sur cette dernière chez le patient atteint de mucoviscidose. récente. De plus en plus étudiée, elle est à mettre en lien
avec une espérance de vie croissante des patients. Avec des
causes multifactorielles, la prévalence de la déminéralisa-
tion osseuse touche 34 % des adultes atteints de mucovis-
Kinésithérapie à visée cidose [97].
musculo-ostéoarticulaire Le rôle de prévention ou de prise en charge du kinési-
thérapeute passe par l'activité physique. En effet, il y a une
Cette facette de la kinésithérapie occupe une part gran- corrélation positive entre l'exercice et la densité minérale
dissante dans le traitement des patients atteints de osseuse (DMO) obtenue chez les patients atteints de
mucoviscidose et ne peut être passée sous silence. Avec mucoviscidose [104–106].
l'augmentation de l'espérance de vie apparaissent des com- La littérature actuelle préconise les weight bearing exer-
plications musculo-ostéoarticulaires. Cyphose, myalgies et cises (WBE) [107], catégorie d'exercices où le corps subit
arthralgies et douleurs surviennent dès la puberté et font une contrainte mécanique suite à la mise en charge via
partie des plaintes quotidiennes de beaucoup d'adultes. La le poids corporel ou à un impact : par exemple, marche,
219
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

danse, sports raquette, course à pied… [108]. Plusieurs intérêts : une meilleure reproductibilité de la dose délivrée,
paramètres sont à prendre en compte lors de l'élaboration moins de perte expiratoire pour les médicaments onéreux,
d'un programme sportif avec WBE [108–111] : une meilleure déposition pulmonaire et enfin un meilleur
● la durée doit être de 20 à 30 minutes, plusieurs petites ciblage des petites voies aériennes (siège primaire de l'atteinte
séances étant préférables à une seule grande séance ; pulmonaire dans la mucoviscidose) [116].
● une fréquence de 2 à 3 fois par semaine est conseillée Parallèlement, de nouvelles molécules apparaissent et
avec un temps de repos permettant une meilleure adapta- notamment des antibiotiques qui sont de plus en plus
tion osseuse ; fréquemment utilisés par voie inhalée. Les médications par
● l'ampleur de la contrainte doit être suffisante pour obte- voie inhalée (tableau 18.2) varient en fonction de l'âge et
nir une réponse ostéogénique de remodelage, cependant des symptômes des patients.
une évolution progressive des charges et des impacts est Globalement, on peut considérer qu'il existe cinq
souhaitable ; grandes familles de médication :
● une distribution inhabituelle et intermittente de la ● les antibiotiques, dont la gamme disponible est en plein

contrainte donne une réponse osseuse plus bénéfique essor, se présentent généralement sous forme nébulisable
(corde à sauter, trampoline, gymnastique) [112]. mais également depuis peu sous forme de poudres sèches
Il est aussi important d'inclure des activités choisies par [117, 118]. Cette dernière formule offre une facilité de prise
le patient pour favoriser son adhérence et son intérêt. et un gain de temps non négligeable pour le patient. Les
antibiotiques jouent un rôle dans l'éradication précoce du
Pseudomonas aeruginosa en vu de post-poser une coloni-
Aérosolthérapie sation chronique et dans le traitement des exacerbations
respiratoires ;
● les bronchodilatateurs, dont l'utilisation varie considéra-
L'aérosolthérapie est, comme la kinésithérapie, primordiale
dans le traitement de la mucoviscidose. Les dispositifs d'inha- blement d'un pays à l'autre, trouvent tout leur sens pour
lations disponibles sur le marché sont en évolution constante, contrecarrer la bronchoconstriction que peuvent induire
toujours à la recherche d'une meilleure efficacité [113, 114]. certaines médications irritantes comme les antibiotiques,
Actuellement, le progrès majeur est la réduction du temps les mucolytiques et les agents osmotiques ;
● les corticoïdes, dont l'attrait est lié à la présence très
de prise. En effet, celui-ci influence négativement l'adhérence
thérapeutique. Récemment, de nouvelles générations de précoce de l'inflammation au niveau pulmonaire chez ces
nébulisateurs ont vu le jour, ils permettent une adaptation patients, n'ont jamais pu faire preuve de leur efficacité. Ils
et une synchronisation de la nébulisation sur l'inspiration de sont préférentiellement administrés par aérosols-doseurs
chaque patient [115]. Ce type de système présente plusieurs pressurisés ou à poudre ;

Tableau 18.2 Médications par voie inhalée : données issues du registre français de la mucoviscidose 2011
Classes d'âge (années)
00–04 05–09 10–14 15–19 20–24 25–29 30–34 35–39 40+ Total %
Effectif total 815 911 876 798 822 607 451 298 415 5993
Patients sous 327 655 756 710 705 488 369 220 315 4545 75,8
aérosolthérapie*
Antibiotiques inhalés 111 195 327 378 430 295 230 112 160 2238 37,3
Bronchodilatateurs 180 380 459 436 483 334 254 170 238 2934 49,0
inhalés
Corticoïdes inhalés 172 336 406 368 343 239 182 114 190 2350 39,2
NaCl hypertonique 19 17 31 34 26 31 23 16 17 214 3,6
inhalé
RhDNase 92 481 615 551 429 260 163 93 128 2812 46,9
* Par nébulisation, spray et/ou poudre.

220
18. Kinésithérapie et mucoviscidose

lation à privilégier lors des nébulisations n'est pas différente


ENCADRÉ 18.1 Proposition de celle classiquement décrite.
La chronologie des inhalations des diverses substances,
de recommandations pratiques et par rapport à la kinésithérapie, prête à discussion et
pour l'entretien du matériel est influencée par le mélange ou non des différentes
de nébulisation médications. Les antibiotiques sont administrés après le
désencombrement ou simultanément mélangés aux bron-
Après chaque utilisation, nettoyer le matériel = a + b + c chodilatateurs pour diminuer la durée des nébulisations.
+d+e:
Une spécificité liée à la mucoviscidose concerne l'hy-
l a. désassembler ;

l b. nettoyer à l'eau chaude additionnée d'un détergent de


giène du matériel de nébulisation dont la contamination
vaisselle ; bactérienne a été décrite par différents auteurs [126–128].
l c. rincer abondamment, sous un robinet d'eau chaude ;
Une désinfection simple à base d'hypochlorite a montré
l d. sécher avec soin, à l'air libre puis au moyen d'un linge son efficacité sur la plupart des germes pathogènes et peut
propre, d'un essuie-tout ou d'un sèche-cheveux ; être proposée aux patients, pour autant qu'il n'y ait pas de
l e. stocker dans un endroit propre et sec le matériel pièces métalliques, pour limiter les risques de contamina-
emballé dans un linge propre et sec, différent de celui qui a, tion [129] (encadré 18.1). Un stérilisateur pour biberons
le cas échéant, servi pour le séchage. peut également faire l'affaire pour autant que le matériel
Une fois par jour, désinfecter le matériel = a + b + c, puis supporte les hautes températures.
tremper le matériel pendant 20 min dans une solution
chlorée (± 180 ppm) obtenue en ajoutant 1 cuillère à café
(5 mL) d'eau de Javel à 12° par litre d'eau, c + d + e
Cette solution est à renouveler chaque jour. Conclusion
Remarques :
l l'eau de Javel est à tenir hors de portée des enfants (plus Si tout le monde semble d'accord pour dire que la kinési-
accessoirement, elle tache les vêtements) ; thérapie revêt une importance capitale pour les patients
l remplacer chaque jour l'eau de la cuve des appareils
atteints de mucoviscidose, il n'y a aujourd'hui toujours pas
ultrasoniques ; la nettoyer 1 fois par semaine à l'eau chaude
de consensus par rapport à une technique de désencom-
et au détergent de vaisselle, puis la rincer à l'eau courante
et la sécher avec un linge propre ou un essuie-tout. brement idéale. Paradoxalement, le thérapeute peut en tirer
profit pour disposer d'un arsenal lui permettant d'adapter
son traitement en fonction du moment et de la situation.
● les agents osmotiques, comme la solution saline hyper- L'adaptation au patient et l'application d'une technique
tonique et le mannitol, montrent un effet bénéfique sur la confortable s'ajoutent à la perception de l'efficacité clinique
clairance mucociliaire à long terme [119, 120]. L'utilisation dans le choix de la technique employée. Le recours à l'acti-
de sérum salé hypertonique (SSH) apporte une légère amé- vité physique est vivement conseillé pour ces patients qui
lioration de la fonction respiratoire en état stable [121] et en tirent un bénéfice tant au niveau de la qualité de vie et
en exacerbations ainsi qu'une réduction du temps d'hos- de la capacité physique que du désencombrement. Outre
pitalisation [122]. Une étude au long court chez l'enfant ces deux domaines, le versant musculosquelettique ne doit
montre que le SSH ne diminue pas la fréquence des hos- pas être négligé par le kinésithérapeute et occupe même de
pitalisations [123]. Le rôle anti-inflammatoire et antimicro- plus en plus de place dans le traitement, suite à l'augmenta-
bien reste encore à étudier [124] ; tion de l'espérance de vie qui entraîne l'apparition de défor-
● les mucolytiques classiques, qu'il faut distinguer de la
mations ostéoarticulaires plus nombreuses qu'auparavant.
DNase, n'ont jamais démontré leur efficacité. À l'inverse,
la DNase apporte un bénéfice évident aux patients [125].
Cette dernière nécessite des précautions particulières et Références
doit être nébulisée seule et à heure fixe avec un appareil qui
ne produit pas d'échauffement pour éviter que la molécule [1] Zach MS, Oberwaldner B. Chest physiotherapy : the mechanical
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ne se dégrade.
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224
18. Kinésithérapie et mucoviscidose

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225
Chapitre 19
Kinésithérapie peropératoire
Émilie Bialais, Caroline Dethy

PLAN DU CHAPITRE
Identification des facteurs de risque 228
Mise en place d'un programme
de prise en charge global 230
À la phase préopératoire 230
À la phase postopératoire immédiate 232
Dans les services non aigus 235
Lors du retour à domicile : la revalidation
pulmonaire 236

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Les complications pulmonaires postopératoires se défi- Facteurs de risque liés au patient


nissent comme n'importe quelle anomalie respiratoire se
déroulant dans la période postopératoire et provoquant L'âge est un facteur de risque puissant, principalement
une dysfonction affectant le déroulement clinique [1, 2]. Il au-delà de 60 ans. En effet, les personnes âgées sont plus
s'agit principalement d'atélectasies, de pneumonies ou de sensibles du fait de la diminution de leur capacité physique
dysfonctions pulmonaires postopératoires telles que res- et fonctionnelle. La dépendance fonctionnelle quant à elle,
piration superficielle, augmentation du travail respiratoire, qu'elle soit liée à l'âge ou non, est un facteur de risque dans
toux inefficace, hypoxémie et/ou hypercapnie, encombre- le développement des complications pulmonaires pos­
ment bronchique, etc. Elles sont majoritairement présentes topératoires, dans la mesure où cette dépendance est sou-
en cas de chirurgie thoracique ou abdominale haute (sus- vent associée à une diminution de la capacité physique [8].
ombilicale) [2, 3]. D'après de récentes études, l'obésité n'est pas direc-
L'intervention chirurgicale joue un rôle clé dans ces tement responsable d'une augmentation du risque de
atteintes par l'intermédiaire de différents mécanismes  : développer une complication postopératoire, même en
diminution de la mobilité du diaphragme, dépression cas d'obésité morbide. Toutefois, ces patients sont plus
du système nerveux central, altération du rapport ven- sensibles, du fait du syndrome restrictif lié à l'obésité. La
tilation–perfusion, diminution des volumes ou de la malnutrition, en revanche, augmente de manière significa-
capacité pulmonaire… [1, 4]. Il y a dès lors une altération tive le risque de développer des complications pulmonaires
des échanges gazeux, de la mécanique respiratoire, ou postopératoires [8, 9].
des deux [2]. Elles peuvent avoir une incidence variable L'American Society of anesthesiologists (ASA) a développé
de 8 à 80 % et augmentent la durée de séjour et le coût une classification capable de prédire la mortalité peropéra-
hospitalier. Elles ont également un impact important sur toire (tableau 19.1). Elle est également corrélée au risque de
la mortalité [2, 4]. complications pulmonaires et cardiaques postopératoires.
Il existe une controverse importante dans la litté- En effet, un classement ASA plus élevé est significativement
rature quant à la kinésithérapie chez ces patients. En corrélé à un risque plus important [8].
effet, certains auteurs ne parviennent pas à démontrer
l'intérêt de ce type de prises en charge [5, 6], alors que Tableau 19.1 Classification de l'American Society of
d'autres mettent en évidence une économie de plus de anesthesiologists [8]
40 000 euros depuis l'introduction dans leur hôpital d'un Classe ASA Définition % CPP
programme prophylactique de kinésithérapie pour les Classe I Patient normal, en 1,2 %
patients subissant une lobectomie [7]. Cette économie bonne santé
est liée à une diminution de la durée de séjour, induite
Classe II Affection 5,4 %
par une plus faible morbidité.
systémique peu
La prise en charge kinésithérapique des patients chirur- sévère
gicaux s'attachera principalement à limiter les risques de
Classe III Affection 11,4 %
développement de ces complications et dysfonctions, tout
systémique sévère,
en permettant une récupération fonctionnelle rapide.
limitation d'activité,
pas d'incapacité
Classe IV Affection 10,9 %
Identification des facteurs systémique qui
de risque entraîne une
incapacité, menace
vitale constante
Tout patient programmé pour une chirurgie doit être éva-
lué consciencieusement. Cette évaluation a pour but de Classe V Patient moribond, NA
mettre en évidence d'éventuels facteurs de risque [8]. Le survie à 24 h
programme de prise en charge kinésithérapique sera éta- improbable avec ou
sans intervention
bli en fonction de ces différents facteurs de risque et de
manière à diminuer le risque de complications pulmonaires CPP = complications pulmonaires postopératoires, NA = non
applicable.
postopératoires.

228
19. Kinésithérapie peropératoire

L'insuffisance cardiaque congestive est également


un facteur de risque important du développement des
complications pulmonaires postopératoires. En effet, les
symptômes liés à cette dernière, tels que dyspnée, œdème
pulmonaire ou des membres inférieurs, sont majorés sous
l'effet de l'anesthésie [8].
La présence d'une BPCO est un facteur de risque cou-
rant. Du fait de l'altération de la mécanique respiratoire
sous-jacente à la pathologie, ces patients sont plus sensibles
à l'anesthésie et à la ventilation mécanique. De la même
manière, l'atteinte musculaire présente chez les patients
BPCO impacte la récupération physique et fonctionnelle
faisant suite à la chirurgie. L'asthme, quant à lui, n'est pas un
facteur de risque [8].
Les apnées du sommeil obstructives augmentent les
difficultés de gestion des voies aériennes dans la période
postopératoire immédiate, mais leur implication dans le
développement des complications postopératoires n'a pas
été investiguée à ce jour [8]. Fig. 19.1
Les données disponibles concernant le tabagisme sug- Cicatrice de sternotomie, voie d'abord utilisée en chirurgie
gèrent une augmentation du risque de complications cardiaque.
pulmonaires postopératoires. L'arrêt du tabac à la phase
préopératoire mériterait de plus amples investigations. Les
données disponibles actuellement sont présentées dans
le paragraphe dédié à la prise en charge préopératoire [8],
p. 230.

Facteurs de risque liés


à l'intervention
L'anesthésie générale, associée à la position déclive prolon-
gée provoque un déplacement du diaphragme vers le haut,
un relâchement de la cage thoracique, une altération de la
compliance de la cage thoracique ainsi qu'un déplacement
du volume sanguin de l'abdomen vers la cage thoracique.
Ces facteurs sont responsables d'une perturbation du
rapport ventilation–perfusion avec un shunt pulmonaire
anormal [8].
La sternotomie (fig. 19.1) et la thoracotomie (fig. 19.2)
entraînent une diminution des pressions dans les voies
aériennes et  altèrent la mécanique thoracopulmonaire.
Ce type d'abord peut entraîner des dommages des nerfs
(phréniques ou intercostaux) et induire une inhibition du
diaphragme [2, 3]. Les voies d'abord utilisées lors des chirur-
gies abdominales hautes (fig. 19.3) sont également respon-
sables d'une diminution des volumes pulmonaires. En effet, Fig. 19.2
elles provoquent l'élévation des coupoles diaphragma- Cicatrice de thoracotomie, voie d'abord utilisée en chirurgie
tiques et des atélectasies au niveau des lobes inférieurs [3]. pulmonaire.

229
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Prise en charge globale


Toutes les chirurgies ne peuvent pas bénéficier d'une pro-
cédure fast-track. Il n'est pour autant pas impossible d'ima-
giner une prise en charge globale de ces patients, avec pour
objectif de minimiser l'impact de la chirurgie sur la qualité
de vie. Dans le but de réduire la durée du séjour hospita-
lier, la morbidité postopératoire et la perte fonctionnelle,
un certain nombre d'études ont proposé des programmes
de prise en charge démarrant quelques semaines avant la
chirurgie, lors d'une consultation préopératoire, et se pour-
suivant au minimum jusqu'au retour à domicile [11, 12].
Malheureusement il n'existe pas, à l'heure actuelle, d'éva-
luation du bénéfice de ce type de prise en charge globale.
Les études disponibles actuellement s'attachant dans un
premier temps à décrire leur faisabilité.

À la phase préopératoire
La kinésithérapie préopératoire a un rôle de sensibilisation
Fig. 19.3 auprès des patients et de leur entourage. Cette sensibilisa-
Cicatrice abdominale haute, voie d'abord utilisée lors d'une greffe tion s'articule autour de trois axes : habitudes tabagiques,
hépatique. habitudes nutritionnelles et activité physique, de manière à
Le bypass cardiopulmonaire, nécessaire lors de certaines limiter la sédentarité peropératoire. L'entourage va jouer un
chirurgies, provoque des altérations pulmonaires supplé- rôle important de stimulation du patient et doit recevoir
mentaires. Les patients sont habituellement hypoxémiques, la même attention. Le rôle préventif de cette sensibilisation
sans altération du rapport ventilation–perfusion. Au-delà sera alors maximisé. La kinésithérapie préopératoire permet
de l'altération de la perfusion, il existe donc une hypoventi- également de mettre en place la prise en charge postopé-
lation majeure [2]. ratoire, en informant le patient des techniques qui vont
être utilisées et en lui apprenant celles qui nécessitent une
habituation.
Mise en place d'un programme
de prise en charge global Arrêt du tabac
Nous avons vu que la consommation tabagique est un
Fast-track facteur de risque de développer des complications pulmo-
La procédure fast-track consiste en un ensemble de naires postopératoires. Il est important que le patient en
méthodes simples visant à réduire la morbidité et la durée prenne conscience et qu'il puisse recevoir le soutien néces-
de séjour hospitalier. Cette procédure est basée sur la mini- saire à la cessation de cette consommation. De la même
misation des abords invasifs lors de la chirurgie et sur des manière, l'entourage du patient doit être sensibilisé et sti-
objectifs de normovolémie, de normothermie, de bonne mulé à accompagner le patient dans cet arrêt du tabac [8].
oxygénation et de glycémie normale. Elle se base également Møller et al. [13] ont pu mettre en évidence l'intérêt d'un
sur l'utilisation minimale, voire l'abolition de l'antibiothéra- programme de prise en charge tabacologique appliqué 6 à
pie et de l'analgésie systématique par opioïdes, l'analgésie 8  semaines avant l'intervention chirurgicale. Il semblerait
étant contrôlée par le patient lui-même. Cette procédure que l'arrêt du tabac, au moins 6 semaines avant l'interven-
s'attache également à restaurer l'autonomie fonctionnelle tion, réduise de plus de la moitié les complications postopé-
du patient dans les premières heures suivant la chirurgie, ratoires, principalement les complications cardiovasculaires
avec pour objectif l'ambulation et l'alimentation orale, le et celles liées à la cicatrisation. D'après Bluman et al. [14],
plus précocement possible [1, 10]. les fumeurs ont 6 fois plus de risque de développer des
230
19. Kinésithérapie peropératoire

complications pulmonaires postopératoires par rapport connues, elles seront mieux effectuées, avec moins d'anxiété.
aux non-fumeurs. De plus, les patients qui réduisent leur Les programmes qui sont réalisés au stade post­opératoire
consommation tabagique de minimum 50 %, voient le peuvent comprendre des exercices de respiration diaphrag-
risque de développer des complications pulmonaires matique, de respiration à lèvres pincées, de ventilation pro-
diminuer par sept par rapport aux patients qui gardent la fonde et dirigée, l'utilisation du spiromètre incitatif, ainsi que
même consommation. Enfin les patients qui stoppent leur des exercices de toux dirigée (voir chapitre 14) [15–17]. Ces
consommation tabagique moins d'un mois avant l'inter- exercices effectués en préopératoire permettent de dimi-
vention chirurgicale sont ceux qui ont le plus grand risque nuer la durée d'hospitalisation et d'améliorer les échanges
de développer des complications pulmonaires. Ceci semble gazeux. Il est également possible, en préopératoire, de pro-
être dû à l'augmentation transitoire de la production de poser un programme de renforcement des muscles inspira-
sécrétions bronchiques suivant l'arrêt du tabac. Pourtant toires. Ce type d'exercice diminue le risque de développer
une abstinence tabagique préopératoire, même de courte des complications pulmonaires postopératoires [16–20].
durée semble intéressante puisque le patient bénéficie de
taux moins élevés de monoxyde de carbone.
Thérapie physique
Prise en charge nutritionnelle La mobilisation précoce et les exercices de recondition-
nement physique ont un rôle important dans la prise en
La malnutrition est associée à une morbidité plus élevée. Il
charge des patients subissant une chirurgie. Comme nous
n'existe pourtant aucune prise en charge nutritionnelle qui
l'avons déjà vu, une mauvaise condition physique préopé-
ait pu mettre en évidence une diminution significative de
ratoire est un facteur de risque de développer des com-
ce risque [8, 9]. Il semble qu'une évaluation précise des
plications pulmonaires postopératoires. La mise en place
besoins métaboliques du patient, par calorimétrie indi-
d'un programme d'entraînement préopératoire peut être
recte  par exemple, associée à une éducation nutrition-
intéressante de manière à améliorer les capacités physiques
nelle, puisse être un apport intéressant à la prise en charge
du patient. De plus, un gain préopératoire en masse mus-
peropératoire des patients présentant ce type de risque.
culaire peut être avantageux si l'on prend en compte la
Cette stratégie présente d'autant plus d'intérêt si l'hospita-
perte musculaire résultant d'un séjour prolongé en réani-
lisation postopératoire en réanimation est longue. En effet,
mation [18].
le catabolisme musculaire très important lors du passage
Plusieurs études [12, 15, 16, 21] s'attachent à mettre en
en réanimation, lié à l'alitement, la sédation et la ventilation
place un programme de réentraînement préopératoire. Les
mécanique, nécessite un apport énergétique ciblé et adapté.
programmes proposés comprennent des exercices d'amé-
lioration de la force musculaire, des capacités aérobies et
Apprentissage des techniques fonctionnelles. De plus, les patients sont sensibilisés à l'im-
portance de l'activité physique et sont stimulés à réaliser
de kinésithérapie utilisées un maximum d'exercices physiques à domicile, tels que la
en postopératoire marche ou le vélo, voire à suivre un programme de réentraî-
nement prédéfini.
Le patient n'étant pas forcément hospitalisé longtemps
La mise en place de ce type de programme permet de
avant son départ pour la salle d'opération, cet apprentis-
diminuer le risque d'atélectasie et de pneumonie. Donckers
sage peut se faire lors d'un rendez-vous en ambulatoire
et al. [12] ont pu mettre en évidence une corrélation signi-
précédent l'hospitalisation.
ficative entre le nombre de complications pulmonaires
postopératoires et le nombre de pas réalisés quotidienne-
Techniques respiratoires ment par le patient. Le test de marche de 6 minutes est
L'apprentissage préopératoire des techniques respiratoires également significativement amélioré [12, 16, 18]. En outre,
permet au patient de les réaliser de manière plus efficace, ces programmes préopératoires permettent de diminuer la
notamment à la période postopératoire immédiate. En durée de séjour et d'améliorer la qualité de vie des patients
effet, l'apprentissage de nouvelles techniques dans l'envi- [16, 18, 21].
ronnement de la réanimation, associé à l'appréhension des En plus de ces exercices, le rôle du kinésithérapeute
mouvements respiratoires profonds du fait de la douleur, est d'informer le patient sur la manière de se mobiliser en
est plus difficile qu'en préopératoire. Si les techniques sont postopératoire. En effet, la douleur, la présence de drains,
231
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

de cathéters, de pansements, etc. limitent la mobilisa- et de la déambulation, de manière à limiter la douleur lors
tion spontanée du patient. Le kinésithérapeute doit alors des contractions/étirements des muscles abdominaux.
apprendre au patient à se tourner ou à s'asseoir au bord Une étude de 1983 conclut à l'intérêt du bandage abdomi-
du lit, tout en sécurisant le matériel invasif, en apprenant à nal pour minimiser le syndrome restrictif issu de l'incision
réaliser les mouvements avec le minimum de douleur et en abdominale haute, favorisant ainsi une meilleure fonction
régulant sa respiration en fonction de ces efforts [19]. pulmonaire dans les cinq premiers jours postopératoires.
Toutefois une étude plus récente, de 2009, ne met pas en
évidence de différence significative sur la fonction pulmo-
À la phase postopératoire naire lors de l'utilisation de ce bandage, alors que la douleur
et la quantité d'analgésie n'ont pas été évaluées [25].
immédiate
Du fait de la fréquence élevée des complications pulmo- Gestion du stress
naires postopératoires, certains patients ayant fraîchement Il est possible de mettre en place un programme incluant
subi une chirurgie thoraco-abdominale sont placés sous des techniques de relaxation permettant une diminution
surveillance en réanimation. Le séjour en réanimation com- du stress pour le patient et une moindre appréhension
porte en lui-même certaines implications pour le devenir de la douleur [21]. Les techniques de relaxation peuvent
du patient et demande une prise en charge spécifique. Le être apprises au patient en préopératoire et les séances de
kinésithérapeute vise alors l'autonomie du patient, associée relaxation sont effectuées dans les premiers jours postopé-
à une ventilation et une mobilisation optimales. ratoires, associées à des exercices de respiration profonde.

Gestion de la douleur Mobilisation précoce


En postopératoire immédiat, la douleur est un facteur très La mobilisation précoce est l'un des piliers de la prise en
important de limitation des mouvements respiratoires et charge kinésithérapique en réanimation. Elle permet d'aug-
de la mobilisation. Pour une prise en charge optimale, il est menter les volumes pulmonaires, d'améliorer le rapport
indispensable que celle-ci soit gérée de manière adéquate. ventilation/perfusion et d'activer la clairance mucociliaire.
Plusieurs outils peuvent être utilisés par le kinésithérapeute. Elle diminue le travail respiratoire et le travail cardiaque.
La mobilisation des patients de réanimation permet éga-
Neurostimulation électrique transcutanée lement la diminution des risques liés à l'alitement, à la
(TENS) ventilation mécanique et à la sédation, ainsi que l'amélio-
ration de l'état de conscience des patients, le ressenti de
Plusieurs études ont évalué l'intérêt de l'utilisation du TENS
la douleur, l'indépendance fonctionnelle et les capacités
(transcutaneous electrical nerve stimulation) en postopéra-
cardiovasculaires [1, 26, 27]. En postopératoire immédiat,
toire [22–24]. Habituellement, les séances de TENS sont
la mobilisation précoce permet de diminuer le risque de
effectuées pendant 30 minutes, 2 à 3 fois par jour, dans
complications pulmonaires postopératoires (diminution
les premières 48 à 72 heures postopératoires. Cette tech-
des atélectasies, des bronchopneumonies et donc des
nique permet de diminuer les douleurs postopératoires
besoins en antibiothérapie) [21, 28]. Elle n'a par contre,
et l'administration de substances analgésiques. Elle per-
aucun effet sur l'incidence des pneumothorax. Associée à
met également une meilleure récupération de la fonction
une prise en charge respiratoire intensive, la mobilisation
pulmonaire en termes de CVF, de VEMs et de force des
précoce permet de diminuer la durée de séjour, le risque
muscles respiratoires [23, 24].
de réintubation et améliore les échanges gazeux [15, 21, 28].
La mobilisation passive peut être initiée immédiatement
Bandage abdominal après l'admission en réanimation. La mobilisation active
Il n'existe pas d'évidence quant à l'utilisation du bandage sera effectuée dès que le patient atteindra une stabilité
en postopératoire des chirurgies abdominales hautes. cardiaque et hémodynamique [29]. Les limitations à la
Toutefois celui-ci reste largement utilisé de manière à soute- déambulation rencontrées dans la littérature sont les hypo-
nir la musculature abdominale et éviter un éventuel lâchage tensions et les troubles du rythme, le refus du patient, la
de sutures pouvant entraîner une éviscération. Il peut être douleur, les nausées et les vomissements, la sédation et la
intéressant, principalement lors des exercices respiratoires présence de saignements actifs [30, 31].
232
19. Kinésithérapie peropératoire

Les programmes de mobilisation précoce comprennent tion de la cage thoracique. Les percussions intrapulmonaires
des exercices des membres, qu'ils soient passifs, actifs ou peuvent être utilisées pour faciliter la clairance mucociliaire
actifs aidés (réalisés manuellement par le kinésithérapeute et permettre le recrutement alvéolaire. Enfin, l'aspiration
ou avec l'aide d'outils tels que des cyclo-ergomètres), ainsi endotrachéale peut être utilisée pour évacuer les sécrétions
que des exercices de transfert au lit, du lit au fauteuil ou des [26, 27, 32].
exercices de déambulation. En outre, ceux-ci permettent La ventilation mécanique entraîne un grand nombre
l'optimalisation du transport de l'oxygène et l'activation des d'effets délétères : faiblesse musculaire, déconditionnement,
stimuli gravitationnels pour une meilleure répartition des altération de la qualité de vie. Les patients requérant une
fluides [1, 26, 27]. ventilation mécanique prolongée sont plus à risque de déve-
lopper des polyneuro/myopathies acquises de réanimation.
Le patient doit être autonomisé rapidement et le sevrage
Prise en charge respiratoire
de la ventilation mécanique doit s'effectuer de manière pré-
La prise en charge respiratoire postopératoire dépend des coce. Pour ce faire, des tests de ventilation spontanée sont
conditions pulmonaires du patient et s'articule autour de la réalisés régulièrement, dès que les paramètres de ventilation
récupération de l'autonomie ventilatoire, du désencombre- le permettent. Le patient est extubé dès qu'il est en mesure
ment et de l'expansion pulmonaire. Avant toute chose, il de ventiler spontanément de manière sécuritaire, que son
faut veiller à ce que le patient soit correctement positionné, état de conscience le permet et qu'il est en mesure de pro-
en privilégiant la position assise ou semi-assise. téger ses voies aériennes (déglutition et toux satisfaisantes).
Après l'extubation, la ventilation non invasive peut être
Interventions spécifiques au patient un outil intéressant, aussi bien prophylactique que théra-
ventilé peutique, pour améliorer les échanges gazeux [33].

La prise en charge spécifique des patients de réanimation Chez le patient extubé


est plus amplement développée dans le chapitre 21. Nous
ne verrons ici que les techniques qui seront utilisées au La mobilisation des compartiments thoraco-abdominaux
stade postopératoire immédiat. est particulièrement importante en postopératoire. La
Pour les patients qui sont pris en charge en réanimation, littérature propose un très grand nombre d'exercices res-
il n'est pas rare qu'après une chirurgie thoraco-abdominale, piratoires différents, pourtant l'objectif de ces différentes
la ventilation mécanique soit maintenue au-delà de la salle modalités de prises en charge reste toujours le même. Les
d'opération. L'augmentation de la durée de ventilation patients doivent être capables d'évacuer les sécrétions
mécanique est associée à une augmentation de la morbi- bronchiques et de ventiler de manière homogène, en sup-
dité. Chez ce type de patient, intubé et ventilé, la kinésithé- portant l'augmentation du travail respiratoire imposée par
rapie s'articule autour du désencombrement bronchique et des exercices physiques modérés.
du sevrage de la ventilation mécanique.
Désencombrement bronchique
La présence de la ventilation mécanique et du tube
endotrachéal est un frein à la remontée et à l'évacuation Le désencombrement bronchique est difficile chez les
des sécrétions. Plusieurs techniques permettent de favoriser patients en postopératoire immédiat. Les patients ne
le désencombrement chez ce type de patient. Les hyper­ sont pas toujours aptes à mobiliser des volumes pulmo-
inflations manuelles permettent de prévenir le collapsus naires suffisants pour activer la clairance mucociliaire et le
pulmonaire, améliorent l'oxygénation et la compliance pul- drainage des sécrétions. De plus, les efforts de toux sont
monaire et facilitent la migration des sécrétions vers les gros généralement inefficaces chez ces patients du fait des dou-
troncs. Elles doivent cependant être utilisées avec prudence leurs qu'ils impliquent. Plusieurs exercices sont utilisables
chez les patients à risque de barotraumatisme, volotrauma- de manière à rassembler les sécrétions vers les gros troncs
tisme ou hémodynamiquement instables. Les insufflations– bronchiques.
exsufflations mécaniques permettent de reproduire les Les manœuvres de modulation du flux expiratoire, glotte
efforts de toux. Toutefois cette technique, impliquant une ouverte, permettent cette migration des sécrétions. Elles
pressurisation importante du système thoracopulmonaire doivent être réalisées avec un soutien au niveau de l'abord
suivie d'une brusque dépression permettant l'évacuation chirurgical et sont effectuées d'autant plus efficace­ment si
des sécrétions, doit être effectuée avec prudence chez les le patient a été sensibilisé à cette technique en préopéra-
patients présentant des douleurs importantes à la mobilisa- toire [19, 28, 34].
233
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Si l'état du patient ne permet pas sa coopération, il est Expansion pulmonaire


possible d'utiliser des manœuvres de drainage autogène
Pour travailler l'expansion pulmonaire, un certain nombre
adapté. Le kinésithérapeute bloquera la ventilation spon-
de manœuvres peuvent être utilisées, visant l'ouverture du
tanée du patient dans son volume de réserve expiratoire,
système thoracopulmonaire et le travail dans le volume de
permettant ainsi la remontée des sécrétions. Ce drainage
réserve inspiratoire.
s'effectuera à différents volumes pulmonaires et est relati-
L'objectif est de mobiliser de grands volumes pulmo-
vement confortable en postopératoire, car il n'implique pas
naires. Le patient doit réaliser des inspirations lentes et
de grands mouvements thoraco-abdominaux [31].
profondes, allant jusqu'à la capacité pulmonaire totale.
Si les parois bronchiques sont instables, il est possible
Cette inspiration profonde peut s'effectuer en plusieurs
qu'il y ait un collapsus de celles-ci lors des manœuvres de
temps, avec l'accumulation de trois inspirations lentes,
modulation du flux expiratoire. Un certain nombre d'ou-
entrecoupées de courtes pauses isovolémiques. Cette
tils sont alors utilisables de manière à drainer les sécré-
accumulation est ensuite suivie d'une expiration passive
tions, tout en maintenant les voies aériennes ouvertes.
et lente. Les inspirations profondes sont maintenues
Les expirations à lèvres pincées permettent de créer une
quelques minutes de manière à maximiser l'ouverture
résistance à la bouche qui déplace le point d'égale pres-
alvéolaire, surtout dans les zones les plus difficiles à ouvrir
sion et limite le collapsus expiratoire. Dans cette optique,
[4, 15, 19, 28, 31, 36].
le PEP masque est un outil intéressant. Il applique à la
L'expansion thoracique et la mobilisation de grands
bouche une résistance plus importante. La pression
volumes inspiratoires sont facilitées dans les zones où la
générée reste toutefois dépendante du débit expiratoire
compliance est normale, en revanche les zones à faible
du patient. Pour un effet identique à moindre coût, il est
compliance souffriront d'une faible expansion. C'est pour-
possible de réaliser des exercices respiratoires à l'aide d'un
quoi le kinésithérapeute peut mettre en place des exercices
barboteur [31, 35].
d'inspiration dirigée dans différentes zones pulmonaires
Pour évacuer les sécrétions, la toux est indispensable.
(diaphragmatique, thoracique inférieure, moyenne ou
Pourtant l'instabilité de la paroi thoraco-abdominale faisant
supérieure). Une stimulation tactile des zones à ventiler
suite à une chirurgie réduit la capacité de toux du patient
facilite la compréhension du patient [4, 15, 19].
et provoque des douleurs importantes. Il est indispensable
L'utilisation de l'expiration à lèvres pincées, du bar-
que le kinésithérapeute enseigne au patient des moyens de
boteur ou du PEP masque limite le collapsus des voies
réduire cette instabilité. Dans un premier temps, le patient
aériennes lors de l'expiration. Ces techniques ont donc
devra réapprendre à tousser de manière efficace et sans
également du sens lors du travail en expansion pulmo-
appréhension de la douleur. C'est donc le kinésithérapeute,
naire [4, 15, 31]. L'effet de recrutement du PEP masque est
par un soutien manuel de la zone d'abord chirurgical, qui va
comparable à celui de la CPAP (continuous positive airway
maintenir la paroi thoraco-abdominale. Ensuite, le patient
pressure) si celui-ci est correctement utilisé 5 minutes
devra apprendre par lui-même à la soutenir, de manière à
toutes les heures, quand le patient est éveillé. Il limite ainsi
pouvoir évacuer les sécrétions bronchiques en l'absence du
le développement des atélectasies après les chirurgies
kinésithérapeute. Plusieurs techniques peuvent être utilisées
abdominales [35].
pour limiter l'instabilité de la paroi : le patient peut effectuer
Enfin, il est possible de proposer au patient des exercices
un soutien manuel de la zone d'abord, comme en cas de
d'expansion globale du système thoracopulmonaire, via
sternotomie ou de cicatrice sus-ombilicale. Pour les cicatrices
des exercices d'inspiration associés à des mouvements des
thoraciques plus importantes, le patient peut enrouler ses
membres supérieurs ou inférieurs facilitant l'ouverture des
bras autour de son thorax. Enfin, il peut utiliser un coussin
zones à reventiler. Ces exercices peuvent être proposés sous
appliqué au niveau de la cage thoracique ou de l'abdomen, de
forme d'une gymnastique associant ventilation et mobili-
manière à limiter les mouvements incontrôlés de la zone opé-
sation [4, 19].
rée. Chez les patients qui seraient incapables de produire des
La ventilation non invasive (VNI) est un outil intéres-
efforts de toux suffisant, l'insufflateur–exsufflateur mécanique
sant pour permettre la réexpansion du système thoraco-
peut être utilisé, mais comme chez le patient intubé, il est
pulmonaire. Elle peut également être intéressante pour
indispensable de prendre en compte l'instabilité de la paroi
soutenir les efforts ventilatoires du patient lors des séances
thoraco-­abdominale avant ­d'appliquer les pressions–dépres-
de mobilisation. Il faut cependant garder à l'esprit que la
sions importantes de cette technique [19, 26, 28, 31, 34, 36].
présence de sutures des voies digestives hautes peut-être

234
19. Kinésithérapie peropératoire

une contre-indication à l'utilisation de la VNI. La conférence des contre-indications à l'utilisation de la spirométrie inci-
de consensus [37] sur la VNI au cours de l'insuffisance respi- tative [44]. Elle pourrait éventuellement avoir un intérêt en
ratoire aiguë de 2006 n'a pas pu établir de manière certaine préopératoire de manière à évaluer approximativement les
l'intérêt de la VNI en postopératoire des chirurgies tho- débits et volumes inspiratoires maximaux que le patient
raco-abdominales. Cette incertitude est notamment basée peut générer avant la chirurgie [43].
sur le manque d'évidence, bien que les premières études Comme n'importe quel muscle squelettique, les muscles
semblent intéressantes [33]. respiratoires peuvent être affectés par la chirurgie, la
La pression positive continue peut être utilisée seule, sous pathologie sous-jacente ou l'alitement. La faiblesse de ces
forme de CPAP. Elle peut jouer un rôle important dans la muscles entraîne des difficultés de sevrage de la ventilation
limitation des complications pulmonaires postopératoires. mécanique [27, 32]. En postopératoire, les exercices de
En effet, elle permet d'éviter les atélectasies, en améliorant le renforcement des muscles respiratoires, effectués à l'aide
recrutement alvéolaire, et de limiter l'apparition des pneu- de Threshold IMT® par exemple, permettent d'augmenter
monies [38]. Chez Barbagallo et al. [39], l'application 2 fois la force et l'endurance des muscles inspirateurs. De ce fait,
par jour de 2 heures de CPAP permet d'améliorer significa- les patients ont une plus grande résistance à la fatigue, une
tivement l'oxygénation des patients et diminue la durée de meilleure fonction pulmonaire et améliorent leur réserve
séjour hospitalier. Olsen et al. [40], en 2002, ont comparé respiratoire en diminuant le travail respiratoire [4, 21]. Il
l'application d'une pression positive de 10 cmH2O via un est également possible de renforcer ces muscles en préo-
masque (PEP masque) ou via une VNI (CPAP). L'application pératoire. Cela permet une diminution de l'incidence des
de la VNI permet de diminuer significativement le taux de complications pulmonaires postopératoires, ainsi qu'une
réintubation et la durée de ventilation chez des patients diminution de la durée de séjour hospitalier [1, 18, 20].
ayant subi une résection de l'œsophage. La ventilation Il n'existe pas de données significatives suggérant l'inté-
non invasive à deux niveaux de pression (BiPAP®) permet rêt particulier de l'une plutôt que l'autre de ces techniques.
d'associer à la pression expiratoire positive, une pression Dans la pratique clinique courante, il semblerait que le plus
inspiratoire. Ainsi, il est également possible d'augmenter les intéressant soit d'utiliser une association de ces différentes
volumes pulmonaires. Toutefois l'augmentation du volume techniques en fonction des capacités du patient, du thé-
pulmonaire étant passive, puisque générée par la machine, rapeute et des possibilités des services. La mise en place
la ventilation se fait préférentiellement dans les zones à d'un programme de prise en charge respiratoire pour ces
meilleure compliance et moindres résistances. Il n'est donc patients semble diminuer l'incidence des complications
pas garanti que cette technique permette l'augmentation pulmonaires postopératoires, principalement des atélecta-
de la ventilation dans les zones à basse compliance [4]. sies et des bronchopneumonies [20, 31, 36].
Pasquina et  al. [41], comparant les effets de la CPAP et
de la BiPAP® chez les patients en phase postopératoire de Dans les services non aigus
chirurgie cardiaque, ont pu mettre en évidence une meil-
leure prévention de l'apparition des atélectasies grâce à la Dans les services non aigus, le ratio soignant/patient est
BiPAP®. En 2000, Matte et  al. [42] comparaient les effets moins important que dans les services aigus. Ceci implique
d'une kinésithérapie conventionnelle associée à la spiromé- que le kinésithérapeute a également un rôle dans la surveil-
trie incitative, à la CPAP ou à la BiPAP®. Les auteurs n'ont lance. Dès lors, une partie de la prise en charge doit se faire
pu mettre en évidence de différence significative entre les de manière systématique, dans un but préventif. Cela per-
effets de la CPAP et ceux de la BiPAP®, ces deux dernières mettra de diminuer la durée d'hospitalisation en limitant la
étaient toutefois significativement plus intéressantes que la morbidité hospitalière.
spirométrie incitative.
La spirométrie incitative est très largement utilisée dans
la pratique courante pour ce type de patient. Pourtant
Mobilisation précoce
de  très nombreuses études soulignent le manque d'évi- Comme expliqué précédemment, les bénéfices de la mobi-
dence à son utilisation [1, 34–36, 43–46]. En postopéra- lisation précoce sont multiples. Après une chirurgie, qu'elle
toire immédiat, elle est rarement utilisée car elle nécessite soit thoracique ou abdominale haute, il est préconisé de
une bonne coopération du patient [27]. En effet, le manque mobiliser les patients dès le premier jour postopératoire, en
de coopération, la confusion, la sédation ou le coma sont dehors de contre-indications spécifiques [31].

235
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Hirschhorn et  al. [47] proposent une prise en charge plémentaire par rapport à d'autres exercices, tels que des
pendant toute la durée de l'hospitalisation. Les exercices exercices d'inspirations dirigées ou d'inspirations lentes et
sont effectués 2 fois par jour. Le premier jour postopéra- profondes. Par contre, lors de la prise en charge dans les
toire, les exercices consistent en des transferts au fauteuil et services non aigus, l'appareil peut être utilisé par le patient
des exercices de marche sur place (trois répétitions d'une lorsque celui-ci est seul, régulièrement au cours de la jour-
minute). Le deuxième jour postopératoire, le patient quitte née. De plus, le feedback visuel peut guider le patient dans
sa chambre pour 100 mètres de déambulation le matin la pratique de cet exercice. Ceci semble intéressant dans le
et 5  minutes de marche l'après-midi. Le troisième jour, la cas d'un patient orienté, compliant et qui réalise correcte-
déambulation est augmentée à 5 minutes de marche le ment l'exercice, car cela apporte une continuité au traite-
matin et l'après-midi. À partir du quatrième jour postopé- ment réalisé par le thérapeute.
ratoire, la durée de déambulation est progressivement aug-
mentée jusqu'à 10 minutes, associée à des exercices dans les
escaliers. Pendant l'hospitalisation, ces exercices d'intensité
modérée permettent d'améliorer significativement les capa-
Lors du retour à domicile :
cités d'exercice sous-maximal lors du retour à domicile. Il la revalidation pulmonaire
n'existe aucun risque spécifique à ce type d'exercice chez les
patients en postopératoire de chirurgie cardiaque. En effet, Lors du retour à domicile, en l'absence de prise en charge
cette prise en charge n'est pas associée à une augmentation kinésithérapique, les bénéfices acquis durant l'hospitalisa-
des effets secondaires délétères ou des complications pos- tion ont tendance à s'amoindrir [47]. Il est donc indispen-
topératoires. De plus, les auteurs ont pu mettre en évidence sable de poursuivre cette prise en charge. Ces traitements
que chez ces patients, si la prise en charge de mobilisation seront principalement axés sur la récupération fonction-
est suffisamment intense, y associer un traitement respira- nelle et la capacité d'effort. Les traitements respiratoires
toire n'apporte pas d'effet supplémentaire. En effet, lorsque seront effectués en fonction des besoins des patients.
les patients récupèrent leur capacité de mobilisation, ils Chez les patients ayant subi une chirurgie cardiaque, la
deviennent capables de ventiler de manière plus homogène, revalidation est préconisée car elle réduit la mortalité et la
avec des volumes plus amples, et se désencombrer. morbidité, ainsi que le risque de réhospitalisation [49–52].
Si l'environnement du patient ne permet pas un péri- Elle commence généralement entre 4 et 6 semaines post­
mètre de déambulation important (présence d'un drain opératoires. La revalidation a pour objectif de familiariser
aspiratif, matériel inadapté au transport…), la même équipe, le patient à la pratique d'une activité physique régulière. En
en 2012 [48], conseille des exercices d'intensité modérée sur effet, la sédentarité est un facteur aggravant important. De
cyclo-ergomètre. Les mêmes bénéfices sont observés et il plus, la revalidation agit également sur d'autres facteurs de
n'existe pas plus d'effets secondaires. risque [50, 51] : obésité, cholestérol, consommation taba-
gique, diabète, hypertension artérielle… Les patients ayant
Prise en charge respiratoire suivi des séances de revalidation constatent une améliora-
tion de leur qualité de vie [49].
La prise en charge respiratoire s'articule autour des mêmes Le programme de revalidation comprend des séances
techniques que celles décrites précédemment. Elle a éga- d'entraînement aérobie avec des exercices contre une
lement pour but d'améliorer l'homogénéité de la venti- résistance modérée (cyclo-ergomètre, tapis de marche,
lation, l'ampliation thoracique et le désencombrement. rameur…). Ils permettent une amélioration des capacités
Toutefois cette prise en charge est réalisée de manière plus physiques des patients. Jelinek et al. [49] ont pu mettre en
systématique qu'en postopératoire immédiat. En effet, la évidence, après 6 semaines de revalidation, une amélioration
surveillance étant moins rapprochée que dans les services significative du test de marche de 6 minutes, ainsi que de
aigus, il est indispensable qu'une part de la prise en charge la VO2 max. Cette amélioration est associée à une diminu-
kinésithérapique ait un rôle de surveillance des fonctions tion de la variabilité de la fréquence cardiaque. Plus récem-
respiratoires. Dès lors, les exercices de ventilation et de ment, l'entraînement par interval training a montré certains
désencombrement permettent aussi bien de prévenir les bénéfices [53]. En effet, il induit des améliorations cliniques
complications pulmonaires que de monitorer les capacités substantielles plus importantes que celles atteintes avec
respiratoires des patients. un entraînement d'intensité continue et modérée. Ce type
De nombreuses études [1, 34–36, 43–46] ont montré d'entraînement engendre des bénéfices sur la consomma-
que la spirométrie incitative n'apporte aucun bénéfice sup- tion d'O2, la fonction ventriculaire, la fonction endothéliale,
236
19. Kinésithérapie peropératoire

ainsi que sur la qualité de vie. Peuvent être associés à ces pendant l'hospitalisation en période postopéra-
entraînements, des exercices de gymnastique douce, d'éti- toire, que lors du retour à domicile, avec la revali-
rement et de relaxation. Ces derniers n'auront pas d'effets dation par exemple ou tout autre exercice.
sur les capacités cardiopulmonaires, mais seront effectués
dans une optique d'entretien de la souplesse articulaire et
de bien-être. Cette composante psychologique n'est pas à
négliger puisqu'elle va avoir un rôle important dans l'adhé- Références
rence du patient à son traitement.
La revalidation est aussi conseillée chez les patients ayant [1] Makhabah DN, Martino F, Ambrosino N. Peri-operative physiothe-
subi une chirurgie pulmonaire. En effet, Bobbia et al. [54] rapy. Multidscip Respir Med 2013 Jan 23 ; 8(1) : 4.
[2] Wynne R, Botti M. Postoperative pulmonary dysfunction in adults
montrent une diminution de la tolérance à l'effort 3 mois after cardiac surgery with cardiopulmonary bypass : clinical significance
après une lobectomie, en l'absence de revalidation. De and implications for practice. Am J Crit Care 2004 ; 13(5) : 384–93.
plus, ce type de patients présente souvent un décondi- [3] Laghi F, Tobin MJ. Disorders of the respiratory muscles. Am J Respir
tionnement physique, une diminution de la VO2 max et Crit Care Med 2003 ; 168(1) : 10–48.
[4] Grams ST, Ono LM, Noronha MA, Schivinski CI, Paulin E. Breathing
des pathologies associées. Jones et  al. [55] décrivent un
exercises in upper abdominal surgery : a systematic review and
entraînement spécifique pour la revalidation pulmonaire meta-analysis. Rev Bras Fisioter 2012 ; 16(5) : 345–53.
sur 14 semaines. L'entraînement commence donc par des [5] Reeve JC, Nicol K, Stiller K, McPherson KM, Birch P, Gordon IR,
exercices d'intensité modérée sur cyclo-ergomètre ; celle- et  al. Does physiotherapy reduce the incidence of postoperative
ci est progressivement augmentée, jusqu'à atteindre une pulmonary complications following pulmonary resection via open
thoracotomy ? A preliminary randomised single-blind clinical trial.
intensité élevée. Cet entraînement est sans danger et bien Eur J Cardiothorac Surg 2010 ; 37(5) : 1158–66.
toléré par les patients. La revalidation pulmonaire améliore [6] Pasquina P, Tramèr MR, Walder B. Prophylactic respiratory phy-
la tolérance à l'effort, les paramètres cardiovasculaires et la siotherapy after cardiac surgery : systematic review. BMJ 2003 ;
qualité de vie [55, 56]. 327(7428) : 1379.
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La kinésithérapie peropératoire s'attache à mini- strategies to reduce perioperative pulmonary complications for
miser l'apparition des complications pulmonaires patients undergoing noncardiothoracic surgery : a guideline from
postopératoires ainsi que des complications liées à the American College of Physicians. Ann Intern Med 2006 ; 144(8) :
l'alitement faisant suite à la chirurgie. 575–80.
[9] Lawrence VA, Cornell JE, Smetana GW. American College of

Il convient d'identifier les facteurs de risque Physicians. Strategies to reduce postoperative pulmonary com-
d'apparition des complications pulmonaires plications after noncardiothoracic surgery : systematic review for
postopératoires et d'y sensibiliser le patient. La the American College of Physicians. Ann Intern Med 2006 ; 144(8) :
consommation tabagique, les habitudes nutri- 596–608.
[10] Das-Neves-Pereira JC, Bagan P, Coimbra-Israel AP, et  al. Fast-track
tionnelles et l'activité physique sont des facteurs rehabilitation for lung cancer lobectomy : a five-year experience.
de risque sur lesquels il est possible d'agir au stade Eur J Cardiothorac Surg 2009 ; 36(2) : 383–91.
préopératoire. [11] Granger CL, Chao C, McDonald CF, Berney S, Denehy L. Safety and

La prise en charge respiratoire a deux compo- feasibility of an exercise intervention for patients following lung
santes importantes : le désencombrement et la resection : a pilot randomized controlled trial. Integr Cancer Ther
2013 ; 12(3) : 213–24.
récupération d'une ventilation homogène. Il existe [12] Dronkers JJ, Lamberts H, Reutelingsperger IM, et  al. Preoperative
un certain nombre de techniques qui peuvent therapeutic programme for elderly patients scheduled for elective
être utilisées dans cette optique lors de la prise en abdominal oncological surgery : a randomized controlled pilot
charge postopératoire. study. Clin Rehabil 2010 ; 24(7) : 614–22.
[13] Møller AM, Villebro N, Pedersen T, Tonnesen H. Effect of preope-

La mobilisation précoce est indispensable, aussi rative smoking intervention on postoperative complications : a
bien pour limiter l'apparition des complications randomized clinical trial. Lancet 2002 ; 359(9301) : 114–7.
pulmonaires postopératoires que celles liées à l'ali- [14] Bluman LG, Mosca L, Newman N, Simon DG. Preoperative smo-
tement. Le patient doit retrouver au plus vite ses king habits and postoperative pulmonary complications. Chest
capacités fonctionnelles. De plus, il est nécessaire 1998 ; 113(4) : 883–9.
[15] Pehlivan E, Turna A, Gurses A, Gurses HN. The effects of preope-
de poursuivre une activité physique aussi bien rative short-term intense physical therapy in lung cancer patients :

237
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

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238
19. Kinésithérapie peropératoire

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239
Chapitre 20
Kinésithérapie respiratoire et
pathologies neuromusculaires
Michel Toussaint, Philippe Soudon

PLAN DU CHAPITRE
Restriction 242
Désobstruction 242
Maintien de la souplesse
thoracopulmonaire 250
Entraînement des muscles respiratoires 251
Conclusion 251

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Chez les patients atteints de maladie neuromusculaire bronchique ou d'atteinte bronchopulmonaire chronique.
(NM) et présentant un syndrome respiratoire restrictif lié On estime chez l'adulte qu'une CV supérieure à 2 L (40–50 %
à une faiblesse de la pompe ventilatoire, la fonction respi- des valeurs prédites) expose à de faibles risques respiratoires,
ratoire peut être à ce point réduite qu'ils ne peuvent plus mais que ceux-ci se majorent sous cette valeur.
respirer ou tousser sans aide technique. Ces patients ne Il n'est malheureusement pas rare de proposer au patient
représentent qu'une minorité de l'ensemble des insuffisants restrictif des traitements classiquement utilisés chez les
respiratoires, mais leur nombre croît régulièrement en rai- obstructifs, comme les bronchodilatateurs, une oxygéno-
son des survies importantes proposées par la ventilation thérapie ou des techniques de kinésithérapie exigeant une
assistée au domicile [1–3]. collaboration « physique » active du patient [4]. Très logi-
Différents objectifs de la kinésithérapie respiratoire quement, de telles inadéquations de traitement mènent
(chest physiotherapy) sont théoriquement utiles chez ces toujours à des pertes inutiles de temps et d'énergie, et par-
patients : fois à des catastrophes prévisibles.
● la désobstruction et/ou l'homogénéisation de la
ventilation ;
● le maintien de la compliance thoracopulmonaire ; Désobstruction
● l'entraînement des muscles respiratoires.

Le but de ce chapitre est, dans un premier temps, d'argu- Auprès d'un malade restrictif encombré, la première étape
menter le bien-fondé de ces objectifs et, dans un second temps, consiste à vidanger sa trachée. Chez ce dernier, les sécrétions
de définir les techniques de chest physiotherapy rentables stagnant à la base de la trachée vont certes y induire un
chez ces patients. Le contenu de ce chapitre est adaptable à réflexe de toux, mais la réponse musculaire à ce réflexe sera
un grand nombre de pathologies restrictives, dont certaines insuffisante. Cette toux, fatigante et inefficace, doit donc
sont définitives (paraplégie, tétraplégie, amyotrophie spinale, impérativement être aidée mécaniquement.
infirmité motrice cérébrale, polyhandicap, cyphoscoliose inva- Le drainage périphérique a pour vocation ultime d'améliorer
lidante) ou, à l'inverse, connaissent une évolution progressive la ventilation alvéolaire. S'il est efficace, il aboutira dans un pre-
plus ou moins rapide vers la paralysie complète (dystrophies mier temps à augmenter l'encombrement proximal du patient.
musculaires, sclérose latérale amyotrophique [SLA], sclérose en La SpO2 pourra donc demeurer basse, mais cette désaturation
plaques). Dans certaines maladies, néanmoins, une améliora- sera cette fois moins le reflet d'une mauvaise ventilation alvéo-
tion peut être attendue (myasthénie, maladie de Guillain-Barré, laire que d'une obstruction proximale. La SpO2 normale est
polynévrites, myopathies cortisoniques, coma). Globalement, égale ou supérieure à 95 %. La tradition médicale considère
les sujets peu restrictifs (maladies peu invalidantes ou patients acceptable toute saturation supérieure à 89 %, mais il s'agit
en début d'évolution) répondent aux techniques habituelles là d'habitudes concernant les patients obstructifs. Chez les
de chest physiotherapy et, dans ce cas, le lecteur peut se réfé- patients restrictifs, on est plus strict, considérant toute « mini-
rer au chapitre 12. Cependant, si la restriction est sévère (force, désaturation » (par exemple : 92 % < SpO2 < 94 %) comme
volumes et débits < 50 % des valeurs prédites), alors des tech- un signe d'encombrement trachéobronchique significatif. Les
niques spécifiques doivent être envisagées [4]. séances de drainage périphérique sont donc impérativement
suivies d'une vidange trachéale complète. Ce plan chrono­
logique (vidange trachéale–vidange périphérique–vidange
trachéale) est d'un intérêt essentiel chez ces patients [6].
Restriction
Les maladies NM ont en commun d'induire une incapacité à Désobstruction proximale :
générer des pressions (forces inspiratoire et expiratoire), des imiter la toux en créant des débits
volumes (capacité vitale [CV], volume courant [Vt], ventila- expiratoires élevés
tion maximale volontaire) et des débits maximaux (débit de
pointe expiratoire à la toux) normaux. De plus, une perte de Beaucoup de patients restrictifs présentent des valeurs de
souplesse (compliance) thoracique et pulmonaire se déve- débit de pointe à la toux (peak cough flow [PCF]) effondrées,
loppe très précocement, surajoutant une contrainte méca- inférieures à 100 L/min. Suivant les auteurs, un PCF minimal
nique chez ces sujets déjà affaiblis [4, 5]. Au plan clinique, de 160 L/min [7, 8] à 180 L/min [6] serait nécessaire pour
le syndrome restrictif se définit comme une diminution expectorer efficacement. Le but de la toux assistée sera donc
importante de la CV sans présence d'éléments de spasme d'augmenter le PCF [9] pour atteindre ou dépasser 180 L/min.

242
20. Kinésithérapie respiratoire et pathologies neuromusculaires

Chez les patients restrictifs, les trois phases de la toux Mécaniquement aidée : le stockage d'air
sont altérées :
● le volume inspiratoire prétussif est limité par la réduction
La méthode de stockage d'air (air-stacking) repose sur la
constatation physiologique que le débit expiré lors de la
de la force inspiratoire maximale et par la baisse de com-
toux dépend davantage du volume maximal inspiré avant
pliance thoracique ;
● la phase de compression à glotte fermée est limitée par la
la toux [15, 16] que de la force des muscles expiratoires [17].
Il s'agira donc de permettre au patient restrictif paralysé
réduction de la force expiratoire maximale et aussi, parfois,
d'emmagasiner, via une pompe externe, un ou plusieurs
par l'incompétence de la fermeture glottique ;
● la phase d'expulsion explosive génère un débit maximal de
volumes d'air supplémentaires pour tousser à partir d'un
poumon artificiellement « rempli ». Le débit à la toux (PCF)
pointe réduit suite à la limitation des deux premières phases,
sera ainsi spectaculairement amélioré dans 90 % des cas
malgré l'absence de toute composante obstructive [10].
(gain souvent supérieur à 100 %) [12].
C'est pourquoi les techniques de toux assistée sont
Cette insufflation mécanique supplémentaire s'obtient
regroupées en deux catégories :
● celles qui augmentent le volume inspiré prétussif (aide
soit à partir du respirateur (fig. 20.1), soit à partir d'un bal-
lon Ambu® (fig. 20.2) actionné par un tiers [18]. Le patient
inspiratoire) [11] ;
● celles qui compensent le manque de force expiratoire
prend une première salve d'air. Ensuite, au lieu d'expirer,
(aide expiratoire) [12, 13].
L'incompétence glottique ne pourra pas se corriger si
elle est de pure origine bulbaire, mais pourra s'améliorer si
elle est uniquement liée à une désaturation en O2 en voie
de normalisation.

Aide inspiratoire
Spontanée : la respiration glossopharyngée
Cette technique, destinée à augmenter la capacité inspi-
ratoire, est sous-utilisée car difficile à apprendre à autrui.
Cependant, certaines équipes médicales expertes sont
aujourd'hui capables de l'apprendre en quelques jours à une
majorité de leurs patients NM [14]. La respiration glosso-
pharyngée (FROG-breathing) est basée sur la capacité à pro-
pulser activement de l'air vers la trachée par mouvements Fig. 20.1
de rétropulsion de la langue pour, finalement, remplir les Air-stacking au moyen du respirateur.
poumons avec de l'air « avalé de travers ». En effectuant la
manœuvre très rapidement, certains patients sont capables
en quelques secondes de remplir leurs poumons de plu-
sieurs centaines de millilitres d'air, et de générer ainsi un Vt
et une CV acceptables. Ceci est particulièrement intéres-
sant pour la sécurité physique de personnes dépendantes
du respirateur, en cas de panne de celui-ci, ou pour assister
la toux sans aide technique.

En pratique

Cette technique est sous-utilisée car difficile à


enseigner. S'ils maîtrisent la technique, les patients
tousseront à partir d'un volume inspiré supérieur
à celui qu'ils auraient obtenu par la contraction de Fig. 20.2
leurs propres muscles inspiratoires. Air-stacking au moyen du ballon Ambu®.

243
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

il ferme sa glotte jusqu'à la salve suivante, qu'il ajoutera l'enfant [22]. En revanche, cette technique est peu coû-
et « stockera » à la première salve. Ainsi, par exemple, tel teuse et facilement transportable. Le stockage d'air est
patient reçoit par son respirateur 600 mL de Vt, mais est également possible chez les sujets ventilés par trachéo-
capable d'emmagasiner deux ou trois salves successives, tomie, à condition d'être muni d'une valve parlante sur le
soit respectivement 1200 ou 1800 mL, avant de tousser. Au circuit inspiratoire [23], ce qui sous-entend de travailler
départ d'un PCF spontané de 130 L/min, ce patient attein- sur une canule à ballonnet dégonflé (deflated cuff) ou
dra par exemple 280 L/min (+ 125 %) après stockage d'air sans ballonnet (cuffless) [6].
(fig. 20.3). Cette augmentation du débit à la toux est encore
favorisée par l'augmentation de la pression de rétraction
En pratique
élastique du système thorax–poumons [4] dont les struc-
tures thoracopulmonaires ont perdu de leur souplesse, un
Le sujet doit disposer d'une source d'insufflation :
peu comme un ressort moins extensible revient plus vite à
soit un respirateur, soit un ballon Ambu® (mais
sa position de départ.
alors aussi d'une tierce personne : voir fig.  20.2).
L'insufflation au respirateur est vite apprise [18]. Elle a
À la fin de l'insufflation passive, le sujet doit
l'avantage de ne nécessiter aucune tierce personne pour la
apprendre à ne pas expirer et à fermer sa glotte
réaliser, à condition de bien contrôler la glotte : le patient
pour retenir l'air ainsi emprisonné en attendant la
est donc autonome pour tousser (voir fig.  20.1). Cette
salve d'insufflation suivante. Le même processus
technique est particulièrement précieuse au domicile,
se déroule pour la seconde insufflation et ainsi de
la nuit et le week-end, quand une aide immédiate n'est
suite. Ayant stocké plusieurs salves (deux à trois
pas toujours disponible. Rappelons qu'un bon contrôle
en général), il peut ensuite tousser sur base du
glottique [19] est apprécié par un rapport PCF/PEF (peak
volume qu'il vient de stocker, et qui est nettement
expiratory flow) supérieur à 1 [20]. Une insufflation pas-
supérieur à sa CV spontanée.
sive d'une salve d'air unique par pression positive inter-
mittente (intermittent positive pressure breathing [IPPB]) a
également été démontrée efficace en augmentant le PCF
Aide expiratoire
de 63 % [21], ce qui est moindre qu'en stockant plusieurs
salves d'air. Le stockage d'air au moyen d'un ballon Ambu® Lors de la toux, les patients NM ont un important défi-
est aussi efficace que celui par respirateur, chez l'adulte et cit de force expiratoire [10]. Nous savons cependant que
toute augmentation de la force expiratoire maximale
(PEMax) au-delà de 50 cmH2O n'engendrera plus d'ac-
Débit (L/min) croissement du débit expiratoire de pointe [16–18]. Il sera
donc inutile de compenser la PEMax si celle-ci dépasse
600 50 cmH2O. Dans ces conditions, le patient toussera sans
aide mécanique [6]. L'aide expiratoire la plus utilisée est
400 la compression manuelle, soit thoracique (fig.  20.4), soit
thoraco-abdominale (fig. 20.5). La compression manuelle
sera explosive [13] et synchrone avec la toux spontanée
200 du patient. Ceci requiert évidemment une parfaite coor-
dination entre le thérapeute et le malade. Les meilleurs
résultats s'obtiennent généralement par compression tho-
CPT VR raco-abdominale en position couchée sur le dos [6]. Si le
Volume (mL)
sujet est assis, la compression thoracique de part et d'autre
Fig. 20.3 du sternum (hémithorax gauche et droit) sera néanmoins
Courbe débit/volume : principe du stockage d'air chez le patient rentable.
restrictif.
Toute augmentation de volume inspiré (flèche horizontale) Pour rappel, l'aide expiratoire est délétère chez des
engendre une augmentation du débit maximal expiré (flèche sujets atteints de BPCO : le PCF assisté chute d'un tiers de
verticale). La courbe débit/volume spontanée (trait plein) est sa valeur obtenue sans assistance [24]. Chez les BPCO, la
agrandie grâce au stockage d'air (traits discontinus). Traits
pointillés : courbe normale théorique. compression thoracique manuelle peut causer la ferme-

244
20. Kinésithérapie respiratoire et pathologies neuromusculaires

ture prématurée des voies respiratoires périphériques et, En pratique


en conséquence, diminuer les débits expirés. Le kinésithé-
rapeute n'utilisera donc la toux manuellement assistée que La position idéale est le couché dorsal (voir
si le sujet est très faible et en l'absence de composante obs- fig. 20.5A). La compression thoracique et abdomi-
tructive chronique. nale sera très forte (30 à 40 kg de poussée chez
l'adulte), sous peine d'inefficacité. Le kinésithéra-
peute s'aidera du poids de son corps pour cette
manœuvre. Cette compression sera poursuivie
après chaque toux (éviter les quintes) par une
expiration forcée prolongée (en déflation for-
cée, voir plus bas) : le thérapeute maintiendra la
compression durant plusieurs secondes jusqu'à
l'expiration complète (volume résiduel). L'avant-
bras supérieur comprimera le sternum, la main
inférieure (la droite chez les droitiers) comprimera
la masse abdominale dans un mouvement de
poussée apicale (voir fig. 20.5B). La main abdomi-
nale évitera de toucher les côtes flottantes, dou-
loureuses si elles sont comprimées. Les facteurs
limitants sont :

la coordination du patient qui doit être syn-
chrone avec le thérapeute ;

les douleurs thoraciques qui peuvent survenir
après quelques jours de traitement.

Le kinésithérapeute inexpérimenté péchera sou-


vent par son manque d'audace en comprimant
Fig. 20.4 très fortement le thorax et l'abdomen.
Aide manuelle thoracique à la toux.
Remarquer la forte pression manuelle. Le patient sera
préférentiellement adossé au mur pour éviter la chute arrière.

A B
Fig. 20.5
Aide manuelle thoraco-abdominale à la toux.
A. Le thérapeute prépare les mains sur le thorax dès l'inspiration.
B. La compression manuelle est explosive et prolongée après la toux.

245
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Aide combinée (inspiratoire + cmH2O), un volume inspiratoire prétussif au patient. Ce


expiratoire) dernier se laisse insuffler passivement (fig. 20.6A). Le MI-E
produit ensuite, en un temps très court, une dépression
La capacité de toux est augmentée de manière optimale (maximum : −60 cmH2O) capable de générer un débit
en associant les aides inspiratoires et expiratoires chez expiratoire très important [32] (> 300–500 L/min) pen-
les patients capables d'une bonne coordination de leurs dant lequel le sujet tousse (fermeture + ouverture glot-
efforts [25]. tique active). Les pressions et dépressions générées par
l'appareil, ainsi que les temps inspiratoire et expiratoire,
Stockage d'air + compression manuelle sont réglables.
L'intérêt clinique du MI-E est largement confirmé [30],
Il s'agit de l'association des techniques décrites précédem-
surtout s'il est synchronisé à la compression thoracique
ment : air-stacking (aide inspiratoire) idéalement suivi de
manuelle [28, 33] (fig.  20.6B). Chez des sujets atteints de
la compression manuelle (aide expiratoire) dans la même
SLA [34], l'efficacité a été démontrée en absence de syn-
manœuvre de toux assistée [18].
drome bulbaire (pas d'efficacité démontrée sans contrôle
glottique) [26] chez des patients très faibles [26, 27]. Dans
Insufflation–exsufflation mécanique
diverses pathologies NM, le MI-E a été comparé aux autres
Cette technique d'aide à la toux n'est disponible en techniques d'aide à la toux [29], produisant toujours des
Europe que depuis 2002. Elle est extrêmement efficace débits supérieurs à celles-ci. Le comparant au PCF spon-
chez les sujets restrictifs à la fois très faibles et très encom- tané, Bach et  al. [35] ont mesuré des gains de PCF dans
brés [26, 27]. Elle est rapportée comme simple à utiliser à l'ordre croissant suivant :
condition d'être parfaitement synchronisée à la machine ● air-stacking : + 87 % ;

[28]. Dans la littérature, l'insufflation–­exsufflation méca- ● air-stacking + compression manuelle : + 137 % ;

nique (Cough-Assist®, États-Unis) se note MI-E (mecha- ● MI-E : + 315 %.

nical insufflation–exsufflation). En pathologie restrictive, Sur une période de traitement au MI-E (> 1 an) chez
le MI-E par voie non invasive permet de doubler le PCF des sujets NM jeunes (< 12 ans), la fréquence des infec-
spontané [29, 30]. Cette technique peut s'appliquer sur tions et la sévérité des atélectasies ont diminué [36]. Chez
trachéotomie ou tube [30] en prenant soin d'adapter des des patients tétraplégiques cervicaux [37] et thoraciques
pressions plus grandes si le calibre du tube est réduit [31]. hauts [38], la CV et le PCF se sont également améliorés.
Le principe du MI-E est celui d'une aspiration méca- Moins utile et parfois délétère chez les sujets obstructifs,
nique non invasive de la trachée. Dans un premier temps, le MI-E a toutefois permis une amélioration de la SpO2
l'appareil délivre, en pression positive (maximum : + 40 tout en diminuant la dyspnée chez des patients BPCO

A B

Fig. 20.6
Aide à la toux par insufflation–exsufflation mécanique.
A. Insufflation : préparation de la main libre du thérapeute sur le thorax.
B. Exsufflation : toux assistée instrumentale et manuelle.

246
20. Kinésithérapie respiratoire et pathologies neuromusculaires

[39]. Enfin, chez des patients NM [40, 41] et tétraplé- et augmenter le temps expiratoire pour obtenir
giques [38] trachéotomisés, le MI-E a été comparé à une expiration prolongée après la toux. Si le sujet
l'aspiration endotrachéale sur canule à cuff gonflé [40] ou n'arrive pas à expectorer après quatre à cinq toux
en absence de cuff [41]. Le MI-E a été jugé par les patients successives, la technique sera jugée inefficace
comme plus efficace, moins irritant, douloureux, fatigant pour ce patient, sachant qu'elle est généralement
et inconfortable [38], et a aussi été supporté plus longue- utilisable chez 70 % des sujets NM environ [43].
ment au cours d'une même séance [40] que l'aspiration La consigne au patient est de lui demander de
invasive : le MI-E permet en effet de ventiler (pression tousser une fraction de seconde avant la dépres-
positive) avant d'aspirer le mucus (pression négative) sion, de sorte à être « prêt » pour tousser (posi-
[41]. L'insufflation–exsufflation mécanique est supposée tion glotte ouverte). En cas d'application avec
drainer des sécrétions plus profondément et bilatérale- trachéotomie, il est conseillé de passer une sonde
ment par rapport à l'aspiration endotrachéale (super­ d'aspiration dans la canule afin d'éviter l'invasion
ficielle et unilatérale) en évitant les nombreux problèmes de mucus dans les tuyaux et filtres de l'appareil-
qui y sont liés (saignements, irritations, granulomes) lage [41] (fig. 20.7).
[38]. Si la compliance thoracopulmonaire est réduite
et/ou les résistances augmentées, la dépression du MI-E
sera réglée à sa valeur maximale [42] (−60 cmH2O). Les
En cas de trachéotomie : l'aspiration
prérequis pour utiliser le MI-E sont la compréhension endotrachéale
intellectuelle du sujet et un contrôle glottique suffisant La trachéotomie présente l'avantage technique de per-
(pas d'efficacité démontrée dans le cas contraire) [26]. Le mettre l'aspiration trachéale directe. Quelques précau-
nouveau modèle Cough-Assist® E70 proposé par Philips tions sont cependant nécessaires [44] : si le sujet dispose
Respironics est compact et muni de batteries, et permet de peu de réserves ventilatoires (volumes de réserve très
l'adjonction d'oscillations. Nous n'en connaissons mal- amputés), il sera ventilé et/ou oxygéné durant 30 s environ
heureusement pas l'intérêt clinique. L'utilisation du MI-E pendant et après l'aspiration. L'insufflation–­exsufflation
semble avoir des jours prometteurs en unité de soins est également disponible pour remplacer l'aspiration
intensifs où il pourrait aider à désencombrer des patients endotrachéale et ventiler pendant l'aspiration (voir plus
difficiles à extuber [43]. haut). Contrairement à l'aspiration endotrachéale, le tra-
vail par insufflation–exsufflation n'est pas un acte médi-
En pratique cal confié, ce qui lui donne un avantage supplémentaire
sur l'aspiration. Par ailleurs, l'aspiration nasotrachéale,
Cette technique est utile chez des sujets très souvent employée pour vidanger la trachée en absence
faibles, très encombrés et disposant de débits
expiratoires effondrés. Elle est à utiliser avec un
masque facial (voir fig. 20.6). Le thérapeute tient
le masque (le sujet étant paralysé). On peut
apprendre la technique en mode « manuel » en
suivant la fréquence respiratoire (FR) du patient :
le kinésithérapeute fait manuellement basculer
la machine de la pression positive à la pression
négative. Il faut passer ensuite assez vite en mode
« automatique », libérant ainsi une main du théra-
peute. Cette main servira à comprimer le thorax
pour augmenter encore l'efficacité de la tech-
nique [33]. Commencer avec une pression faible
(+ 20 à −20 cmH2O). Atteindre ensuite de −40 à
−60 cmH2O en dépression expiratoire dès la pre-
mière séance. Commencer avec des temps stan- Fig. 20.7
dard tels que : inspiration : 2 s ; expiration : 2 s ; Aspiration non invasive Cough-Assist®.
pause : 2 s. Diminuer ensuite le temps inspiratoire Une sonde d'aspiration est placée dans le connecteur trachéal.

247
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

de trachéotomie, est hasardeuse et dangereuse. Elle est il n'y a chez eux aucun déficit du réflexe tussif. La réponse
déconseillée en utilisation de routine, à l'exception des cas au réflexe ne peut que produire une toux inefficace et fati-
d'urgence [45]. gante (voir plus haut).

Techniques non adaptées Désobstruction périphérique :


Aérosolthérapie augmenter la qualité
Mucolytiques de la ventilation en périphérie
Ces substances ont pour effet d'augmenter de facto la
Il s'agit ici des techniques qui vont favoriser la désobs-
fluidité mais aussi la quantité de sécrétions [6]. Utilisés
truction des territoires bronchopulmonaires en amont
sans précaution chez un patient NM sévère (toux ineffi-
des grosses bronches. Il faut d'emblée préciser qu'une des
cace), les mucolytiques peuvent induire de remarquables
conséquences d'un traitement périphérique efficace sera
hypersécrétions, avec désaturations marquées et risques
d'augmenter l'encombrement trachéal (accompagné d'une
de noyade. En revanche, employés juste avant une
chute de SpO2) et de pratique, en fin de thérapie, une
séance de kinésithérapie bien conduite, avec utilisation
vidange trachéale assistée.
de techniques de vidange active de la trachée (voir ci-
Plusieurs techniques courantes de désobstruction péri-
dessus), les mucolytiques peuvent être un adjuvant pré-
phérique sont à la disposition théorique du thérapeute.
cieux. Cependant il faut éviter la voie orale, dont l'effet
Rappelons qu'a priori, ne sont applicables chez les patients
lent et prolongé peut se manifester bien après le départ
restrictifs que les techniques de désobstruction qui ne se
du kinésithérapeute, et privilégier les formes en aéro-
basent ni sur les volumes ni sur les pressions générées par
sol, dont la durée d'action est plus courte et ainsi plus
le patient lui-même [4, 47]. L'utilisation de ces techniques
programmable.
inadaptées entraînerait chez le malade une fatigue intense,
associée à un sentiment de découragement devant l'inanité
Anti-inflammatoires des efforts consentis.
Chez de nombreux patients hypersécrétants, les corti- Au contraire de la vidange trachéale qui vise l'obtention
coïdes en aérosols (exemple : budésonide) diminuent la de débits les plus élevés possible, le désencombrement péri-
production de sécrétions, vraisemblablement en « étei- phérique vise le développement de débits expirés contrôlés
gnant » un certain nombre de petits foyers inflamma- pour favoriser l'homogénéisation de la ventilation, en lut-
toires infracliniques qui entretiennent l'hypersécrétion. tant activement contre l'apparition ou le maintien de zones
Le thérapeute évitera de nébuliser des produits médi- perfusées mal ventilées (atélectasies). Il sera très difficile de
camenteux par la ventilation à percussions intrapulmo- maintenir ici une différence, fût-ce à titre pédagogique,
naires ou IPV (voir plus bas) puisqu'elle a été démontrée entre ventilation et drainage [6]. Ces deux concepts sont ici
inefficace par ce biais [46]. indissociablement liés.

En pratique Ventilation à percussions intrapulmonaires


L'IPV [48, 49] est utilisée pour faciliter le drainage périphé-
Les aérosols sont rarement nécessaires. Les muco- rique des patients incapables de collaboration active [49] :
lytiques sont à utiliser avec précaution car ils patients anesthésiés ou comateux [50–52], pathologies
peuvent augmenter la quantité de mucus dans les post-traumatiques [50], patients tétraplégiques ou NM très
voies respiratoires proximales. Les anti-inflamma- encombrés [53–55]. L'IPV augmente la ventilation alvéo-
toires sont parfois utiles chez des sujets chroni- laire et améliore la diffusion de l'O2 [51]. Elle augmente l'en-
quement hypersécrétants. combrement trachéal, suggérant un drainage périphérique
accru. Ce dernier effet est surtout visible chez les patients
Stimulation du réflexe de toux
hypersécrétants [54]. Le patient restrictif sévère s'adapte
L'obtention d'un réflexe de toux par la stimulation digitale d'autant plus facilement à la technique qu'il est en détresse
de la fourchette sus-sternale est une méthode habituelle en ventilatoire [43] et que les résistances à l'écoulement de
neuropédiatrie (polyhandicapé, infirme moteur cérébral). l'air dans les voies respiratoires sont élevées [52]. Ceci en
Chez les patients restrictifs, cette méthode est inutile car fait donc une technique de choix en cas d'encombrement
248
20. Kinésithérapie respiratoire et pathologies neuromusculaires

massif (pour ventiler efficacement malgré les résistances


élevées) ou de détresse respiratoire aiguë. L'avantage de
la méthode est qu'elle est applicable indépendamment
du degré de collaboration du patient [48], y compris chez
l'enfant [53, 56]. Les inconvénients sont la complexité de
l'appareillage ainsi que son prix très élevé [48]. Les effets
mécaniques de l'IPV dans les poumons ont été récemment
décrits, notamment le fait que, sous IPV, les débits expirés
soient largement plus élevés que les débits inspirés. Ceci
pourrait partiellement expliquer l'aide au transport des
sécrétions [57].

En pratique
Fig. 20.8
L'utilisation se fait via un masque facial (fig. 20.8) Ventilation à percussions intrapulmonaires.
ou via la canule de trachéotomie (via le tube en Appareil équipé d'un compresseur interne pour permettre le travail
au domicile (IMP2® BREAS, Molnlycke, Suède).
soins intensifs), ce qui permet de travailler, chez
le sujet NM adulte, avec des pressions moyennes
à élevées (de 10 à 40 cmH2O). Chez les jeunes (strapping : une ou deux sangles parallèles), ce qui abaisse
enfants, des pressions de 10–15 cmH2O seront passivement la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) [58]
suffisantes. Si le sujet est dépendant du ventila- jusqu'à près de 30 % de sa valeur de départ [59]. L'ensemble
teur, il faudra rechercher un réglage à basse fré- des volumes diminuent, excepté le Vt qui maintient une
quence (60–100 cycles/min, plus rapide chez distribution régionale normale de l'air sous strapping [60].
l'enfant >  200/min) et un rapport inspiratoire/ Les principes du strapping sont bien étudiés chez le sujet
expiratoire augmenté (2/1) pour éviter l'hypo- sain mais ne sont malheureusement que présumés chez les
ventilation. Si le sujet n'est pas dépendant du res- malades restrictifs. Chez le sujet sain, le strapping fait chuter
pirateur, l'effet « percussif » sera recherché par une la CV de 34 % [61] à 44 % [59] en fonction du degré de
fréquence augmentée (100–180) et un rapport sanglage.
diminué (1/1). Les sessions de 1 à 5 minutes sont Ceci constitue un avantage certain en kinésithérapie de
entrecoupées de périodes de repos (1 à 2 minutes) désencombrement puisque plus le strapping est intense,
en fonction du confort du patient, et ceci durant 15 plus les débits expiratoires forcés (PEF) – mesurés à 50 %
à 30 minutes. Le taux de CO2 sera éventuellement de la chest physiotherapy de contrôle – augmentent [62]. Ils
contrôlé s'il existe un risque d'hyperventilation croissent significativement, de 47 % [59] à 81 % [61] suivant
avec l'IPV (sujets se plaignant de fourmillements et les études. Cet effet est probablement lié à :
de vertiges). En fin de traitement, l'encombrement ● la compression dynamique des voies respiratoires au-

trachéal provoqué par l'IPV sera contrôlé et traité si dessus du point d'égale pression [60, 58] ;
nécessaire (voir techniques ci-dessus). La consigne ● l'augmentation de la pression de retour élastique du sys-

au patient est de se laisser insuffler passivement tème thorax–poumons [60–62].


par la machine. Les patients restrictifs apprécient Le strapping abdominal engendre des effets similaires
généralement la sensation d'étirement des struc- mais moindres que le strapping thoracique, excepté chez
tures thoraciques et pulmonaires garantie par l'IPV. les sujets tétraplégiques chez qui le strapping abdominal a
peu d'effets sur les débits de pointe [63].
Associé à la ventilation mécanique ou à l'IPV, l'effet de
Déflation : le drainage autogène adapté
mobilisation périphérique des sécrétions se révèle inté-
par sanglage ressant [6]. En outre, l'expérience clinique montre l'inté-
Le drainage autogène utilisé comme tel est peu indiqué rêt de prolonger les expirations (expiration lente totale
chez les patients restrictifs sévères, souvent polypnéiques. glotte ouverte en infralatéral [ELTGOL]) par compres-
Dans ce cas, l'adaptation s'obtient très facilement par le sion manuelle du kinésithérapeute sur le thorax, même
sanglage du thorax avec une ou deux sangles élastiques lorsque le thérapeute a le sentiment que les débits expirés

249
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

deviennent nuls : c'est à cet instant que, souvent, chez les Prévention des infections
restrictifs sévères, les sécrétions se mettent en mouve-
ment [6]. respiratoires basses
Deux travaux réalisés au long cours chez des sujets NM ont
En pratique montré l'intérêt de pratiquer la kinésithérapie respiratoire
préventive quotidienne par IPV : le nombre, la durée et la
La déflation est facilement obtenue par san- sévérité des infections [56], la durée d'hospitalisation et la
glage thoracique. Le résultat, très rapide chez les prise d'antibiotiques [55] étaient significativement dimi-
patients encombrés, se traduit à l'auscultation nués. L'efficacité au long cours du Cough-Assist® chez des
par une augmentation des craquements. Si le enfants NM sous assistance ventilatoire s'est également
sujet a tendance à hypoventiler à cause d'un san- montrée utile pour prévenir des complications pulmo-
glage trop intense, il est utile de ventiler par tout naires chez ces patients [36]. De manière générale, les hype-
appareillage en pression positive pour assurer des rinsufflations « préventives » en pression positive (IPPB)
échanges gazeux normaux (exemple : association chez les sujets NM sont traditionnellement proposées en
sanglage–IPV). Europe [21, 56, 73, 74] et aux États-Unis [75], bien que leur
efficacité ne soit pas formellement prouvée.
Techniques peu ou non adaptées
Drainage postural Conclusions sur
Outre son manque d'évidence scientifique [64, 65], le drai-
le désencombrement
nage postural présente aussi de nombreux inconvénients La spécificité du patient restrictif paralysé est marquée par
[66] : la position idéale et les modifications de positions la défaillance des muscles inspiratoires et expiratoires pour
s'obtiennent difficilement chez les patients paralysés et produire une toux efficace. Ceci implique le rejet a priori de
souvent déformés sur le plan orthopédique. toute technique qui nécessite un effort actif du patient, et
son remplacement par des techniques où le rôle actif est
Percussions et vibrations : manuelles assuré par le thérapeute lui-même et/ou par de l'appareil-
ou mécaniques externes lage. Il est en outre très important de ne pas se cantonner
Les vestes ou ponchos appliquant une pression positive dans une seule procédure. Il ne faut pas hésiter à mélanger,
périthoracique à haute fréquence (high frequency chest wall durant la même séance, différentes techniques efficaces [6,
oscillation [HFCWO]) sont surtout utilisés chez les patients 33]. En outre, on privilégiera une succession de traitements
obstructifs chroniques [67, 68]. Cette technique est peu étu- courts, qui respectent la fatigabilité du patient. Le kinési-
diée chez les sujets NM, chez qui elle semble néanmoins bien thérapeute terminera toujours sa session par la vidange
tolérée [69], mais dont l'efficacité est aléatoire et limitée [70]. trachéale.

PEP masque et Flutter VRP1®


Ces techniques, utilisées dans les pathologies avec instabi- Maintien de la souplesse
lité des parois bronchiques [71], requièrent la capacité des thoracopulmonaire
patients à ventiler contre un frein expiratoire. Elles obligent
les sujets à : Beaucoup d'équipes, surtout françaises, proposent un tra-
● expirer plus longtemps ; vail d'IPPB régulier dans le but de maintenir la souplesse du
● utiliser une force expiratoire dont ne disposent pas thorax et des poumons. Les effets bénéfiques sont incer-
(plus) les patients restrictifs sévères. tains [73–75] : à raison de 30 minutes par jour, leur relative
Elles sont donc peu adaptées en cas d'encombrement inutilité a été suggérée dans les années 1980. Une récente
majeur chez les sujets restrictifs polypnéiques. De plus, ces étude a cependant démontré que des hyperinsufflations
techniques sont contre-indiquées en cas d'insuffisance car- régulières peuvent améliorer les malformations thoraciques
diaque gauche, de type bas débit, typiquement rencontrées chez des enfants atteints d'amyotrophie spinale de type 1
chez de nombreux malades NM présentant une fraction [76]. Une autre étude a démontré que des hyperinsuffla-
éjectée gauche diminuée [72]. tions à raison de 5 minutes par jour permettent, chez des
250
20. Kinésithérapie respiratoire et pathologies neuromusculaires

patients Duchenne, de maintenir la souplesse du système [3] Eagle M, Bourke J, Bullock R. Managing Duchenne muscular dys-
thoracopulmonaire [77]. Ces effets seraient possiblement trophy – the additive effect of spinal surgery and home nocturnal
ventilation in improving survival. Neuromuscul Disord 2007 ; 17 :
plus visibles si les patients avaient l'occasion de travailler 470–5.
durant plusieurs heures par jour. Mais ceci irait alors à l'en- [4] Finder JD, Birnkrant D, Carl J, et al. Respiratory care of the patient
contre de leur qualité de vie. with Duchenne muscular dystrophy : ATS consensus statement.
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Ce sujet est controversé [78]. En réalité, les travaux ayant for patients with Duchenne muscular dystrophy. Chest 1997 ; 112 :
mis en évidence une amélioration de la force, mais sur- 1024–8.
[8] Bach JR. Amyotrophic lateral sclerosis : predictors for prolongation
tout de l'endurance des muscles respiratoires portaient of life by noninvasive respiratory aids. Arch Phys Med Rehabil 1995 ;
sur des  sujets jeunes [79] ayant une forte proportion de 76 : 828–32.
fibres musculaires encore saines. Lorsqu'il s'agissait de sujets [9] Kang SW, Kang YS, Moon JH, et al. Assisted cough and pulmonary
plus  âgés ne disposant que de peu de muscles sains, les compliance in patients with Duchenne muscular dystrophy. Yonsei
Med J 2005 ; 46 : 233–8.
effets étaient limités, voire inexistants [78]. L'entraînement
[10] Szeinberg A, Tabachnick E, Rashed N. Cough capacity in patients
est considéré inutile chez les sujets NM sévères (à l'excep- with muscular dystrophy. Chest 1988 ; 94 : 1232–5.
tion des patients myasthéniques) [80], mais il est utile chez [11] Bach JR. Pulmonary rehabilitation considerations for Duchenne
les patients avec déformation thoracique sans maladie muscular dystrophy : the prolongation of life by respiratory muscle
NM [78]. Ils sont également utiles chez les sujets para- et aids. Crit Rev Phys Rehabil Med 1992 ; 3 : 239–69.
[12] Bach JR. Mechanical insufflation-exsufflation : comparison of peak
tétraplégiques, chez lesquels les muscles encore innervés flows with manually assisted and unassisted coughing techniques.
bénéficieront de l'entraînement musculaire. Ainsi, des Chest 1993 ; 104 : 1553–62.
sujets tétraplégiques cervicaux ne disposant pratiquement [13] Bach JR. Update and perspective on noninvasive respiratory muscle
plus de leur diaphragme pourront, par entraînement des aids. Part 2 : the expiratory aids. Chest 1994 ; 105 : 1538–44.
[14] Bianchi C, Carrara R, Khirani S, et al. Independent cough flow aug-
muscles accessoires (scalènes, sterno-cléido-mastoïdiens,
mentation by glossopharyngeal breathing plus table thrust in mus-
portion claviculaire du grand pectoral), récupérer une CV cular dystrophy. Am J Phys Med Rehabil 2014 ; 93(1) : 43–8.
leur permettant d'expectorer et d'assurer durant quelques [15] Kang SW, Bach JR. Maximum insufflation capacity. Chest 2000 ;
heures une respiration spontanée équilibrée [81, 82]. 118 : 61–5.
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is flow-limited and effort-independent in normal subjects. Am J
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La kinésithérapie respiratoire chez les patients NM est essen-
[18] Toussaint M, Boitano LJ, Gathot V, et al. Limits of ­cough-­augmentation
tiellement instrumentale et/ou manuellement assistée. Ces techniques in patients with neuromuscular disease. Respir Care
patients sont en effet incapables de participer activement 2009 ; 54 : 359–66.
aux techniques qui exigent trop de collaboration physique [19] Smeltzer S, Cook S, Troiano R, et al. Assessment of the mechanical
de leur part. Le travail de prévention des infections respi- effectiveness of cough. Am J Respir Crit Care Med 1994 ; 149 : A186.
[20] Suarez AA, Pessolano FA, Monteiro SG, et al. Peak flow and peak
ratoires basses semble être utile, mais l'entraînement des cough flow in the evaluation of expiratory muscle weakness and
muscles respiratoires n'est pas indiqué. bulbar impairment in patients with neuromuscular disease. Am J
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253
Chapitre 21
Spécificités de la kinésithérapie
en réanimation
Marianne Devroey, Nicolas Dousse, Muriel Lemaire, Michelle Norrenberg

PLAN DU CHAPITRE
Examen clinique du patient 256
Kinésithérapie chez le patient ventilé 256
Positionnement 257
Sevrage respiratoire 258
Techniques de désencombrement
bronchique 258
Ventilation non invasive 260
Déglutition 261
Mobilisation précoce et réhabilitation 261
Conclusion 265

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Les kinésithérapeutes de réanimation participent pleine- ● l'auscultation pulmonaire, l'interprétation des gaz du
ment à la prise en charge pluridisciplinaire des patients sang artériel et la lecture de la radiographie de thorax. Ces
souffrant de défaillances multiviscérales engageant le pro- trois derniers éléments lui permettront d'élaborer son plan
nostic vital. de traitement (positionnement par exemple) et de vérifier
Leur rôle varie considérablement d'un service de réani- par la suite, par un nouvel examen, si la prise en charge a été
mation à l'autre, en fonction de différents facteurs comme bénéfique au patient ;
la permanence du kinésithérapeute 24 h/24, sa qualification ● l'analyse des expectorations permettant de détecter une

scientifique et technique ainsi que son investissement per- infection respiratoire.


sonnel… [1, 2].
Comme dans d'autres services, le kinésithérapeute doit
prévenir et corriger les troubles de la fonction pulmonaire Kinésithérapie chez le patient
ainsi que les lésions musculo-articulaires d'origine trauma- ventilé
tique, neurologique ou liées à l'alitement.
De plus, chez des patients souffrant d'une pathologie La clairance mucociliaire du patient ventilé est altérée pour
aiguë, grave et complexe, il intervient aussi dans : la surveil- de multiples raisons : présence du tube endotrachéal ou de
lance et le réglage du respirateur ; le sevrage de la ventilation la canule de trachéotomie, ventilation mécanique avec une
mécanique et l'extubation ; la mise en place et la surveil- FiO2 élevée, humidification insuffisante, sédation, immobi-
lance de la ventilation non invasive (VNI) ; la réhabilitation lisation… Tous ces phénomènes induisent une augmen-
précoce du patient… [3–8]. tation de la production de mucus ; des foyers infectieux
Dans ce chapitre, nous aborderons différents aspects de ou des atélectasies peuvent se développer et les échanges
cette prise en charge : gazeux peuvent se dégrader. Le kinésithérapeute joue donc
● l'examen clinique du patient ;
un rôle essentiel dans la mobilisation et l'élimination des
● la kinésithérapie chez le patient ventilé ;
sécrétions bronchiques.
● le rôle du positionnement ;
Les techniques de désencombrement bronchique sont
● le sevrage respiratoire ;
utilisées en pratique courante chez les patients souffrant
● les techniques spécifiques de désencombrement d'insuffisance respiratoire aiguë (IRA). Des recommanda-
bronchique ; tions concernant l'emploi et l'efficacité de ces techniques
● la ventilation non invasive ;
ont été publiées au terme d'une conférence de consensus
● l'évaluation des troubles de déglutition ;
(Lyon, 1994) [9].
● la mobilisation précoce et la réhabilitation.
Cependant, en unités de réanimation, de nombreux
facteurs liés notamment à la pathologie sous-jacente (poly-
traumatisme), aux conditions respiratoires (intubation
Examen clinique du patient endotrachéale, ventilation mécanique…), à l'état hémo­
dynamique (insuffisance cardiaque, choc circulatoire…) ou
Le kinésithérapeute pratique un examen clinique et paracli- neurologique (coma, déficits moteurs…) limitent souvent le
nique du patient plusieurs fois par jour. Celui-ci comprend kinésithérapeute dans le choix du traitement à administrer.
l'observation du patient et des paramètres affichés au Actuellement, le choix du thérapeute se porte sur dif-
monitoring de même que l'analyse et l'interprétation des férentes techniques : positionnement, techniques de flux
examens mis à sa disposition : expiratoire contrôlé (augmentation du flux expiratoire, drai-
● le bilan visuel de l'état respiratoire, hémodynamique et
nage autogène, technique d'expiration forcée, expiration
locomoteur du patient ; lente totale glotte ouverte en décubitus latéral [ELTGOL]),
● la vérification du schéma respiratoire et la détection de
toux ou aspirations endotrachéales. Ces différentes tech-
tout signe de détresse respiratoire : fréquence respiratoire, niques sont très généralement utilisées en association.
type de respiration, tirage inspiratoire, battement des ailes Le drainage postural, les percussions thoraciques ainsi
du nez, stridor, expiration active, bronchospasme, signe de que les vibrations sont obsolètes.
Hoover, pause respiratoire ; Certains protocoles ajoutent des hyperinflations manuelles
● la détermination du niveau de dyspnée par une échelle
(MHI) ou mécaniques, des percussions intrapulmonaires,
visuelle analogique ou l'échelle de Borg en cas de difficultés des vibrations thoraciques mécaniques, l'intermittent positive
respiratoires ; pressure breathing (IPPB), la spirométrie incitative (SI)…

256
21. Spécificités de la kinésithérapie en réanimation

Nous verrons les effets de ces différentes techniques un dorsal risque de présenter des condensations dans les zones
peu plus loin dans le chapitre. pulmonaires dépendantes, là où la perfusion est prédomi-
Chez le patient intubé ou trachéotomisé, le kinésithé- nante avec pour conséquence une hypoxémie par effet
rapeute pratique régulièrement des traitements visant à shunt ou shunt vrai. Cependant, Bittner et al., en compa-
évacuer ces sécrétions et aspire le patient. En cas de sécré- rant trois positions (décubitus dorsal 0°, 30° et 45°), n'a pas
tions très collantes, ces aspirations endotrachéales peuvent pu montrer de différence significative en termes de PaO2
être précédées de l'instillation de 5 à 10 mL de sérum phy- pour aucune de celles-ci [22].
siologique à 0,9 %. Toutefois, cette pratique est controver- En plus du décubitus dorsal, le décubitus latéral est éga-
sée quant à son efficacité sur les propriétés rhéologiques lement utilisé chez la majorité des patients, notamment
du mucus [10] ; l'instillation d'une solution mucolytique dans les pathologies unilatérales. Les échanges gazeux sont
pourrait cependant favoriser l'élimination de bouchons de généralement améliorés en couchant le patient sur le côté
sécrétions [11, 12]. du poumon sain. Ceci est observé aussi bien chez le sujet
L'aspiration endotrachéale doit être pratiquée avec pré- respirant spontanément [20, 23, 24] que chez le sujet en
caution [13]. Elle peut en effet entraîner un dé-recrutement ventilation mécanique [25–27]. Ces améliorations de l'oxy-
alvéolaire et une hypoxémie. Ces deux effets peuvent être génation permettent une diminution de la concentration
limités ou évités par l'usage d'aspiration en circuit fermé, en O2 des gaz inspirés. Les deux mécanismes impliqués sont
par une aspiration de courte durée (< 15 secondes) et par une diminution du shunt intrapulmonaire – et donc une
une préoxygénation à 100 %. amélioration du rapport ventilation/perfusion (Va/Q) – et
D'autres complications peuvent aussi survenir, telles que une amélioration de la ventilation régionale et de la CRF.
le risque infectieux, le risque traumatique pour la trachée, Les changements réguliers de position permettent d'évi-
l'augmentation de la pression intracrânienne et le danger ter ou de retarder les perturbations des rapports Va/Q et
de troubles du rythme cardiaque (arythmie) et d'hyperten- des échanges gazeux, et de diminuer le risque de pneumo-
sion artérielle. nies et d'atélectasies ainsi que la morbidité postopératoire
[28–30].
Pour les patients souffrant d'ARDS, la ventilation méca-
Positionnement nique en décubitus ventral a démontré des résultats positifs.
On observe une amélioration significative de l'oxygénation
D'après une étude européenne sur l'activité des kinésithé- lors du passage du décubitus dorsal en décubitus ventral.
rapeutes en réanimation, Norrenberg et al. ont montré que Cette amélioration est due à une modification des rapports
près de 90 % d'entre eux sont responsables du positionne- Va/Q dans les régions dorsales du poumon qui, en présence
ment du patient [1]. d'œdème pulmonaire lésionnel, tendent à s'atélectasier en
La position semi-assise à 45° est recommandée pour la décubitus dorsal. La durée recommandée de ce type de
grande majorité des patients en ventilation mécanique ou décubitus est actuellement de plus de 16 heures. La prédic-
en respiration spontanée. Cette position permet d'augmen- tion de l'amélioration de l'état respiratoire, la diminution du
ter la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) [14]. Elle joue séjour aux soins intensifs de même que la mortalité restent,
également un rôle préventif en limitant, par rapport au quant à elles, controversées [31–33].
décubitus dorsal, le risque de régurgitation et d'inhalation Lors de la mise en position ventrale, le kinésithérapeute
du contenu gastrique responsables du développement de doit veiller à éviter les complications liées au retourne-
pneumonies d'inhalation [15]. Ceci est d'autant plus mar- ment du patient (déplacement de cathéters, extubation
qué chez les patients qui sont intubés et porteurs d'une accidentelle, perturbations hémodynamiques, luxation de
sonde gastrique destinée à la nutrition [16, 17]. l'épaule…) et au décubitus prolongé (escarres, contractures
Cependant, bien que bénéfique et peu coûteuse, cette musculaires, compressions nerveuses…). L'installation de
position semi-assise n'est pas toujours respectée. Différents coussins en dessous des épaules, des crêtes iliaques, des
auteurs ont démontré que le redressement du tronc genoux et des chevilles, les changements de position de la
comme recommandé est rarement atteint et ce, indépen- tête et des bras toutes les 2 heures sont sous sa responsa-
damment de l'état hémodynamique du patient [18, 19]. bilité [34].
La position peut également jouer un rôle dans l'opti- Chez les patients présentant des problèmes neuro­
misation des échanges gazeux et des rapports ventilation/ logiques sévères et plus spécifiquement avec une hyperten-
perfusion [20, 21]. En effet, un patient restant en décubitus sion intracrânienne, il est recommandé de placer le patient

257
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

en décubitus dorsal avec une élévation du tronc n'excédant composante musculaire diaphragmatique) [44] et les causes
pas 30°. Une inclinaison du tronc dépassant 30° entraîne- cardiologiques (soit par augmentation de pré-charge ou
rait une augmentation de la pression intracrânienne et une post-charge gauche ou par diminution de compliance ventri-
diminution du débit sanguin cérébral [35]. culaire gauche) sont les principales causes d'échec de sevrage.
La ventilation non invasive peut être indiquée en cas
d'échec de l'extubation afin d'éviter la ré-intubation [45].
Sevrage respiratoire
Le kinésithérapeute est impliqué dans le sevrage de la venti- Techniques de désencombrement
lation mécanique et ce, d'autant plus qu'il travaille unique-
ment aux soins intensifs [36]. bronchique
Le sevrage respiratoire doit être envisagé le plus précoce­
ment possible. Depuis les travaux d'Ely et al. [37–39], il a été Effets des techniques de
clairement établi que l'utilisation d'un protocole de sevrage désencombrement
simple applicable quotidiennement par les kinésithérapeutes
et/ou les infirmières pour établir la sevrabilité du patient Actuellement, le choix du thérapeute se porte sur diffé-
réduisait à la fois la durée de ventilation, mais aussi les compli- rentes techniques qui reposent toutes sur le principe de la
cations respiratoires liées à la ventilation mécanique [40–42]. modulation du flux expiratoire (augmentation passive ou
Ce protocole est centré sur quatre items simples éva- active, drainage autogène, technique d'expiration forcée,
luant l'absence d'hypoxémie (SpO2 > 92 % avec FiO2 ELTGOL) et qui sont généralement associées à un position-
≤ 0,5 et PEP ≤ 5 cmH2O), l'absence de sédation (RASS nement en décubitus latéral, une toux assistée et/ou une
Richmond assessment seduction score 0 ; −1), une force aspiration endotrachéale.
de toux suffisante et l'absence d'amines, garantissant une Les effets de ces techniques sur les échanges gazeux,
hémodynamique stable. Le kinésithérapeute évalue aussi la mécanique ventilatoire et la clairance mucociliaire sont
les performances de la mécanique thoracopulmonaire, sujets à controverse. Ces résultats parfois contradictoires
l'importance de l'encombrement trachéobronchique, l'état rapportés dans la littérature sont probablement la consé-
neurologique et neuromusculaire du patient [43]. quence de l'absence d'indications claires au drainage
Il existe trois grandes modalités de réalisation de l'épreuve bronchique, du manque de standardisation du traitement
de ventilation spontanée (VS) : le tube en T, l'aide inspira- (technique explicite, choix de la position…), de la diversité
toire à faible niveau (de 5 à 10 cmH2O dans la littérature) des critères cliniques et physiologiques, immédiats et diffé-
avec ou sans PEP (généralement 4 cmH2O) et la pression rés, estimant les bénéfices du traitement et de la difficulté
positive continue (CPAP). de suivre le patient à moyen et à long terme [46].
La durée de ce test doit durer de 20 à 30 minutes en Les effets du drainage bronchique sur les échanges gazeux
ventilation spontanée sur tube en T pour la majorité des varient dans la littérature : certaines études montrent l'effet
patients, mais il peut se prolonger sur plusieurs jours lors du hypoxémiant des techniques de désencombrement [47],
sevrage progressif en aide inspiratoire. d'autres relèvent au contraire un effet bénéfique sur l'oxy-
Cette épreuve de sevrage est à réaliser idéalement le génation [48].
matin après la toilette et avant le tour médical. Fourrier et  al. [49] ont montré une amélioration plus
Les critères de surveillance sont la fréquence cardiaque, rapide du rapport PaO2/FiO2 après kinésithérapie par rap-
respiratoire, la pression artérielle, la SpO2, l'apparition de port à la fibroscopie endobronchique dans le traitement
sueurs, d'agitation, voire de troubles de conscience. Durant des atélectasies lobaires aiguës.
cette période et au moment de l'extubation, le kinésithéra- Devroey [50], dans une méta-analyse, a mis en évidence
peute recherche les signes cliniques de fatigue respiratoire un effet bénéfique indiscutable du désencombrement
et veille aussi à ce que le patient ne s'encombre pas, ce qui bronchique sur la prévention et la levée des atélectasies
pourrait conduire à un échec de sevrage. chez des patients atteints d'insuffisance respiratoire aiguë.
En cas d'échec de l'épreuve de VS, il est indispensable Ainsi, Stiller et al. [51] ont mis en évidence l'intérêt de l'ad-
d'identifier le(s) facteur(s) d'échec : le non-contrôle de la dition du positionnement associé à des vibrations en plus
pathologie causale ou la survenue d'une complication d'hyperinflations dans le traitement d'atélectasies lobaires
intercurrente (pneumopathie acquise sous ventilation ou aiguës [52]. Dans une étude ultérieure, ces auteurs ont
PAVM), la défaillance respiratoire (essentiellement dans sa comparé les effets de cinq traitements de kinésithérapie
258
21. Spécificités de la kinésithérapie en réanimation

respiratoire dans la levée des atélectasies lobaires aiguës. seront guidés par une auscultation soigneuse et l'examen
Ils ont confirmé l'efficacité du positionnement associé aux de la radiographie du thorax.
hyperinflations et aspiration. Ils ont également observé L'administration du traitement chez des patients ins-
qu'un traitement répété (6 fois sur une période de 6 h) est tables nécessite cependant un monitorage continu des
plus efficace qu'un seul traitement. échanges gazeux ainsi que des paramètres hémodyna-
De plus, dans la prévention et la levée du collapsus miques afin de détecter immédiatement tout effet indé-
alvéolaire, l'adjonction d'une fibroscopie endoscopique ne sirable [65].
rajoute pas de bénéfice supplémentaire par rapport au trai-
tement kinésithérapeutique [49, 53, 54].
Dans une étude prospective, contrôlée et randomisée, Techniques instrumentales
Ntoumenopoulos et al. [55] ont démontré que l'adminis- adjuvantes au drainage bronchique
tration biquotidienne d'un traitement comprenant posi-
tionnement en décubitus latéral, vibrations et aspirations Nous avons vu que les techniques manuelles de désen-
diminuaient l'incidence des pneumonies chez des patients combrement bronchique peuvent être complétées par des
intubés et en ventilation mécanique. En revanche, ils n'ont techniques instrumentales telles qu'aspirations endotra-
pas observé de différence dans la durée de ventilation méca- chéales, aérosolthérapie, spirométrie incitative, fibroscopie
nique, la durée du séjour en réanimation ou de la mortalité. endoscopique…
De plus larges études contrôlées seront nécessaires pour D'autres techniques peuvent améliorer l'efficacité du
confirmer ces résultats et déterminer, si possible, quels sont traitement administré par le kinésithérapeute chez les
les composants du drainage bronchique les plus efficaces patients de réanimation. Ces différentes modalités sont
dans la prévention des complications pulmonaires. présentées dans les chapitres 14 et 20.
La kinésithérapie respiratoire joue un rôle prépondérant
dans la prévention des complications pulmonaires après Percussions intrapulmonaires
chirurgie abdominale [56, 57]. Par contre, la place de la kiné- Le Percussionnaire® est un générateur de pression qui
sithérapie respiratoire prophylactique dans la chirurgie coro- délivre un flux variable en pression positive (0–5 cmH2O)
narienne devrait être revue [58] ; le kinésithérapeute doit et ce, à haute fréquence (60–300/min). Ce flux se super-
surveiller l'apparition de signes cliniques de complications posant à la ventilation sous-jacente, qu'elle soit spontanée
postopératoires chez ces patients et ne traiter que ceux-ci [59]. ou mécanique, engendre des vibrations intrapulmonaires
Une importante étude contrôlée de Malkoç et al. [60] susceptibles d'assurer le désencombrement bronchique
(n = 501) a mis en évidence une réduction de la durée de et de recruter des territoires pulmonaires non ventilés.
ventilation mécanique et du séjour en réanimation dans le L'administration simultanée de solution physiologique à
groupe qui bénéficiait d'un traitement comprenant kinési- 0,9 % permet une hydratation des sécrétions mais au vu
thérapie respiratoire et mobilisation par rapport au groupe d'études récentes, cette modalité ne peut être utilisée pour
contrôle. Cependant, il est difficile de déterminer quelle l'administration de substances médicamenteuses [66, 67].
modalité de traitement est la plus efficace. Des propriétés aérodynamiques défavorables et une dépo-
Les diverses techniques de désencombrement bron- sition pulmonaire inférieure par rapport à un nébuliseur
chique (et particulièrement les aspirations endotrachéales pneumatique classique rendent l'utilisation de la ventila-
et les hyperinflations) doivent être administrées avec pru- tion à percussions intrapulmonaires peu indiquée pour la
dence et discernement chez les patients en réanimation. nébulisation. L'efficacité de cette technique a été argumen-
Elles peuvent, en effet, augmenter la fréquence cardiaque tée dans certaines pathologies pulmonaires restrictives [68]
ou provoquer des arythmies, modifier la tension artérielle, et dans la levée d'atélectasies [69]. En revanche, une revue
augmenter la consommation d'oxygène et la pression intra- de la littérature [70] ne relève aucun effet de la technique
crânienne [61–64]. sur le poids des sécrétions bronchiques [71], le transport
La kinésithérapie respiratoire facilite le désencombre- mucociliaire [72] et la fonction pulmonaire [73].
ment bronchique en réanimation, pour autant qu'elle
réponde à une indication thérapeutique bien établie. Le
kinésithérapeute aura soin de choisir les techniques per-
Hyperinflations manuelles
mettant un meilleur recrutement alvéolaire. Le traitement Les MHI (manual hyperinflation), consistant à délivrer au
sera poursuivi jusqu'à ce qu'un bénéfice clinique soit objec- respirateur ou au ballon (type Ambu®) idéalement un
tivé. Le choix de la position et la durée de son maintien volume courant (Vt) de 150 % par rapport au Vt normal,
259
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

sont utilisées en pratique courante, particulièrement dans suffisance respiratoire aiguë hypoxémique et en cours d'in-
les pays scandinaves et anglo-saxons. Les effets à court vestigation pour la ventilation postopératoire, la période de
terme de ces manœuvres sont sujets à controverse : certains sevrage ou l'aide à la pratique du lavage broncho-alvéolaire.
auteurs ont montré une amélioration de l'oxygénation et Les effets attendus de la VNI sont liés à :
une augmentation de la compliance thoracopulmonaire de ● une pression expiratoire positive, qui diminue le travail

16 % après ces MHI [74], d'autres des fluctuations impor- inspiratoire des patients BPCO et contribue à l'homogénéi-
tantes des pressions intrathoraciques pouvant provoquer sation des rapports ventilation/perfusion ;
notamment des chutes du débit cardiaque (DC) ou des ● une pression inspiratoire positive qui entraîne une aug-

barotraumatismes [75]. mentation du volume courant et une diminution de la fré-


quence respiratoire ;
Cough-Assist® ● une absence de prothèse endotrachéale qui contribue à

la diminution de ses complications, au confort du patient et


Ce système consiste à appliquer dans les voies aériennes du rend plus facile l'instauration d'une ventilation et son arrêt.
patient une pression positive et ensuite, très rapidement, Les conditions de la mise en œuvre d'une VNI sont :
une pression négative favorisant le transport des sécrétions ● le choix de l'interface : un masque facial est utilisé en pre-

des petites voies aériennes vers les voies aériennes plus mière intention chez un patient en insuffisance respiratoire
proximales. Cette pression négative produit un débit expi- aiguë. Il peut être nécessaire de changer d'interface en cours
ratoire élevé au niveau des voies aériennes simulant la toux. de ventilation ;
Des expériences cliniques récentes chez les patients souf- ● le choix du mode ventilatoire : les deux modes les plus

frant de pathologies neuromusculaires semblent indiquer utilisés sont l'aide inspiratoire et la ventilation assistée
un effet bénéfique bien qu'encore non démontré par des contrôlée ;
études au long cours (voir chapitre 20). ● le choix d'un appareil de ventilation : les appareils de

réanimation ont tendance à être utilisés de préférence aux


PEP masque appareils de ventilation à domicile. Ils permettent souvent
une meilleure adaptation de la ventilation à la demande du
La technique consiste à appliquer une pression positive
patient ;
dans les voies aériennes durant la phase expiratoire. Cette ● une organisation adaptée : une administration de la VNI
technique agit sur les voies aériennes périphériques en
adaptée et surveillée. La surveillance a pour rôle essentiel
favorisant la ventilation collatérale. Elle maintient ouverte
de : vérifier la tolérance et la réponse du patient à la VNI ;
les voies aériennes et facilite l'arrivée d'air en amont des
prévenir les complications potentielles ; gérer un échec
sécrétions.
éventuel.
L'application du PEP masque pourrait être une tech-
L'implication du kinésithérapeute dans la VNI varie en
nique bénéfique chez les patients porteurs de BPCO en
fonction des institutions hospitalières, de l'organisation du
décompensation aiguë [76, 77].
service de réanimation, de son niveau de compétence et du
temps qu'il peut consacrer au patient [1]. La présence d'un
kinésithérapeute 24 h/24 permet un investissement en temps
Ventilation non invasive et en savoir-faire beaucoup plus important dans la technique.
Le kinésithérapeute participe à la mise en route de la
La ventilation non invasive (VNI) se définit comme une VNI.
technique destinée à augmenter la ventilation alvéolaire Il doit en premier lieu commencer par expliquer la pro-
sans utiliser de dispositif intratrachéal. Elle est réalisée grâce cédure au patient afin de s'assurer de sa coopération en
à une pression positive administrée dans les voies aériennes maintenant un environnement calme et serein.
par l'intermédiaire d'un masque. Avant toute séance de VNI, il doit également désencom-
La VNI ou la CPAP sont largement utilisées dans la prise brer le patient ; en effet, un encombrement persistant est
en charge des patients en détresse respiratoire sévère ou une cause d'échec de la technique [82]. À noter que la VNI
d'œdème aigu du poumon [78–81]. La VNI est à instaurer peut être une technique adjuvante au drainage bronchique,
en première intention et le plus tôt possible. particulièrement chez les patients présentant des difficultés
Les indications de VNI sont actuellement bien établies à expectorer [77]. En effet, en diminuant l'effort inspiratoire,
pour l'insuffisance respiratoire aiguë avec hypoventilation l'aide inspiratoire prévient la fatigue du patient et potentia-
(décompensation de BPCO), moins documentées pour l'in- lise la toux et l'expectoration.
260
21. Spécificités de la kinésithérapie en réanimation

Il doit optimiser le choix de l'interface pour chaque cité d'endurance, diminution des amplitudes articulaires,
patient. Le choix du masque est en effet l'un des élé- rétractions musculotendineuses, déminéralisation osseuse
ments essentiels à la bonne réalisation de la technique et augmentation du risque de développer des escarres
[83]. L'interface idéale n'existe pas, mais le masque devrait [88–94].
posséder un maximum de qualités essentielles : bonne En cas de sepsis, l'alitement prolongé favorise l'apparition
étanchéité évitant les fuites et garantissant un niveau de d'un processus inflammatoire systémique qui se traduit par
pression efficace pour la ventilation ; confort optimal pour une augmentation du taux de radicaux libres (stress oxyda-
une bonne tolérance, peu de risque de nécrose cutanée ; tif) et la production de cytokines pro-inflammatoires. Ces
faible espace mort ; mise en place et ablation facile ; faible éléments vont diminuer la capacité contractile du muscle
poids. L'alternance des interfaces permet le confort et évite et donc favoriser l'amyotrophie [95–99].
les pressions locales (risque de nécrose cutanée). L'atrophie musculaire – présente au niveau non seule-
Le kinésithérapeute participe également au choix du ment des muscles périphériques, mais aussi des muscles
ventilateur et du mode ventilatoire à adapter au patient. respiratoires et lisses – et la perte de stimuli induits par
Son rôle est prépondérant dans la surveillance du patient la gravité apparaissent très précocement dans la période
tant au niveau des signes cliniques d'amélioration (ou de d'alitement [100]. De plus, la diminution ou la suppression
détérioration) de la défaillance respiratoire que du suivi de l'activité nerveuse sympathique au niveau du muscle
gazométrique et cardiorespiratoire du patient. Il est vital de jouent également un rôle dans l'atrophie [101].
retenir que la VNI a ses limites et qu'il faut savoir s'arrêter et Ces effets défavorables peuvent être majorés par des
ne pas retarder l'intubation. Les aspects techniques (choix agents pharmacologiques comme les corticostéroïdes, les
de l'interface, du ventilateur, aérosolthérapie…) sont abor- myorelaxants, les agents paralysants et même certains anti-
dés aux chapitres 28 et 29. biotiques [102, 103].
Le patient peut développer une faiblesse neuromus-
culaire acquise (icu acquired weakness) en réanimation
Déglutition [104–106], responsable d'échecs de sevrage de la ventila-
tion mécanique [107].
Les complications liées à l'intubation prolongée ou à la tra- Celle-ci risque de compromettre, à court et à long terme,
chéotomie expliquent la fréquence des troubles de la déglu- l'évolution physique et fonctionnelle ainsi que la qualité de
tition [84]. L'incidence varie de 15 à 87 % selon les séries mais vie du patient.
toutes les études s'accordent à dire que l'intubation prolon- L'alitement prolongé et l'immobilisation vont également
gée et la mise en place de dispositifs destinés à protéger les avoir des répercussions sur le système cardiovasculaire :
voies respiratoires et/ou alimenter le patient ont des consé- troubles orthostatiques, diminution des volumes éjectés et
quences néfastes et parfois durables sur la déglutition [85]. diminution de la taille du cœur notamment du ventricule
Les risques engendrés par les fausses routes (pneumopathie gauche [108–110].
d'inhalation) expliquent la nécessité du recours systéma- Au niveau pulmonaire, la diminution des volumes pul-
tique à l'évaluation et à la rééducation de ces troubles [86]. monaires, l'altération des gaz du sang (hypoxémie) ainsi
Cette prise en charge – faite par le kinésithérapeute ou que le développement d'atélectasies et de pneumonies
le logopède, en fonction de l'organisation de l'institution d'inhalation sont aussi rapportés [90, 111, 112].
– pourrait diminuer les effets délétères à court et moyen Des altérations de l'humeur et du sommeil favorisant
terme d'une intubation prolongée [85, 87]. l'anxiété sont aussi décrites comme des répercussions de
l'alitement [113].
On comprend dès lors tout l'intérêt d'instaurer un pro-
gramme de réhabilitation précoce en réanimation
Mobilisation précoce
et réhabilitation
Faisabilité de la réhabilitation
Effets de l'immobilisation précoce
Au niveau du système musculosquelettique, l'immobilité Avant de mobiliser un patient en réanimation, il est indis-
prolongée entraîne des effets bien connus : diminution de pensable de s'assurer non seulement de sa fonction neu-
la force et de la masse musculaires, diminution de la capa- romusculaire, mais aussi de ses réserves cardiorespiratoires
261
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

afin que le traitement lui soit profitable plutôt que délétère. par jour pendant 7 jours peut restaurer la balance inflam-
Il faut donc mettre en balance les risques d'une mobilisation matoire et diminuer la durée de séjour en réanimation. Ils
trop « agressive » et ceux encourus par une immobilité trop ont également rapporté l'existence d'une corrélation entre
prolongée. Chaque patient doit être envisagé individuelle- la durée, l'intensité de l'exercice et le taux en IL-10 [130].
ment et le thérapeute doit surveiller les adaptations phy- Morris et al. [127] ont inclus 165 patients dans un pro-
siologiques à l'augmentation de demande en O2 durant un gramme de réhabilitation qu'ils ont comparé à 165 patients
exercice physique, même passif [114]. L'état neurologique, témoins ayant reçu des soins usuels sans mobilisation. Après
cutané-trophique et orthopédique est aussi à prendre en 48 heures de ventilation mécanique, les patients du groupe
compte au même titre que les dispositifs (invasifs ou non) physiothérapie ont reçu une mobilisation passive (3 fois/j)
reliés au patient [115]. Sur la base de cette évaluation et de associée, en fonction de leur état d'éveil et de collaboration,
l'observation clinique du patient, le kinésithérapeute peut à des exercices plus actifs allant jusqu'au transfert au fau-
déterminer s'il peut ou non débuter une séance de réhabi- teuil. Les auteurs en ont montré les effets positifs : une mise
litation précoce, et s'il doit la stopper en cas de variations au fauteuil plus précoce, une durée de séjour plus courte en
trop importantes des paramètres vitaux durant la séance réanimation et à l'hôpital.
de réhabilitation précoce. Schweickert et  al. [117] ont démontré que la mobi-
Des données rationnelles récentes semblent conforter lisation précoce a permis à 59 % des patients du groupe
l'idée de la faisabilité d'une telle stratégie de soins [116– mobilisation de retrouver un statut d'indépendance fonc-
118]. Pour que la mobilisation précoce se déroule en toute tionnelle lors de leur sortie de l'hôpital versus 35 % pour le
sécurité, elle requiert une concertation et une collaboration groupe contrôle. Ils ont également observé plus de jours
étroite entre le personnel infirmier, le kinésithérapeute et le sans ventilation mécanique et une durée de délirium plus
médecin. courte pour les patients mobilisés.
Selon les récentes recommandations formalisées d'ex- Enfin, Burtin et  al. [126] ont comparé un groupe de
perts (RFE) sur la mobilisation précoce en réanimation de patients ayant été mobilisés de façon routinière à un groupe
la Société de réanimation de langue française (SRLF) [119], où on ajoutait à la mobilisation classique des exercices sur
il faut qu'au moins un kinésithérapeute formé soit attaché cyclo-ergomètre. Ceux du groupe cyclo-ergomètre ont pré-
au service de réanimation. Actuellement, la présence de ce senté un meilleur test de marche de 6 minutes, un meilleur
dernier n'est pas systématique et la réhabilitation précoce score SF-36 (qui évalue la qualité de vie, l'indépendance
ne se pratique pas encore partout [120–124]. Un change- fonctionnelle et l'état émotionnel du patient) ainsi qu'une
ment de mentalité et de nouveaux projets institutionnels meilleure force isométrique du quadriceps à la sortie de
seraient nécessaires. l'hôpital.
La réhabilitation précoce ne semble pas augmenter les
coûts hospitaliers [127] et, au contraire, tendrait à les dimi-
Utilité de la réhabilitation précoce nuer [131].
Les études randomisées évaluant les bénéfices d'un pro- L'interruption quotidienne de la sédation et la mobilisa-
gramme complet de réhabilitation précoce passive et/ou tion précoce sont actuellement décrites comme des options
active rapportent une augmentation de la force et de la thérapeutiques pour prévenir les faiblesses neuromusculaires
masse musculaires [123, 124], une diminution des durées acquises en réanimation. Cependant, le niveau d'évidence
de ventilation mécanique [117, 125], de délirium [117], de reste faible. De plus, il existe peu de travaux évaluant la charge
séjour en réanimation [126, 127] et à l'hôpital [127], ainsi de travail des différents intervenants, les coûts réels générés
qu'une amélioration de la fonction physique [117] et de la par le personnel soignant et le matériel utile à la mobilisation
qualité de vie [117, 126, 128]. précoce. Davantage d'études seraient nécessaires.
Plusieurs études ont montré que l'exercice physique
pouvait réduire le stress oxydatif et le processus inflam- Techniques de mobilisation
matoire. Winkelman et al. ont montré que la mobilisation
passive avait tendance à diminuer le taux de cytokines pro-­ De nombreuses techniques de mobilisation sont appli-
inflammatoires associées à la faiblesse neuromusculaire et cables en réanimation en fonction de l'état de conscience
d'augmenter les taux d'un antioxydant (IL-10), aboutissant et de collaboration du patient.
ainsi à une moindre réaction inflammatoire [129]. Ces Un grand nombre de ces techniques (tableau  21.1)
auteurs suggèrent que la pratique de 20 minutes d'exercice relèvent spécifiquement du rôle du kinésithérapeute,

262
21. Spécificités de la kinésithérapie en réanimation

Tableau 21.1 Définition et objectifs des techniques de mobilisation


Technique Définition But Kinésithérapeute* Équipe de
réanimation*
Mobilisation analytique : – Mobilisation de chaque – Maintien des amplitudes +
– passive articulation dans chaque articulaires et étirement des
– active aidée degré de liberté tissus mous
– active – Le choix du mode de – Nutrition des composants
mobilisation est réalisé en articulaires (cartilage,
fonction des capacités de synoviale, etc.)
participation du patient – Antalgie
– Entretien de la trophicité et
contractilité musculaire (active
et active assistée)
– Maintien du schéma moteur
Renforcement Travail actif contre résistance Récupération de la force, +
musculaire par groupes musculaires en de la trophicité et de l'endurance
fonction de leur mode de musculaire
contraction physiologique
(concentrique, excentrique et/
ou isométrique)
Électrostimulation Contraction musculaire – Entretien de la trophicité + choix des + l'arrêt de la
musculaire transcutanée induite pour un courant et contractilité musculaire paramètres utilisés séance
électrique externe – Aide au renforcement
musculaire
Travail moteur avec – Mobilisation passive avec – Cf. mobilisation passive + initiation, + pour l'arrêt
aide technique (cyclo- aide technique – Cf. renforcement musculaire paramétrage, de la séance
ergomètre ou autre – Travail musculaire en réévaluation
appareil de mobilisation) endurance avec aide
technique
Travail d'équilibre Travail proprioceptif, Améliorer la proprioception +
de renforcement et l'équilibre postural assis et
musculaire statique contre debout
déstabilisations, au bord du lit
ou debout
Postures spécifiques Maintien d'une articulation – Antalgie + aide à la mise + maintien des
(n'appartient pas à la dans une position – Prévention des attitudes en œuvre postures au
mobilisation précoce à donnée en fonction des vicieuses cours du séjour
proprement parler) comorbidités du patient – Contention post-traumatique
(pied équin, traumatisme
ostéoarticulaire, mise en
place d'attelles, etc.)
Plan de verticalisation Verticalisation du patient sur – Prévention des troubles +
une table hémodynamiques,
respiratoires, trophiques,
ostéoarticulaires et cutanés,
liés à l'alitement prolongé
– Récupération du tonus
musculaire
(Suite)

263
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Tableau 21.1 Suite
Technique Définition But Kinésithérapeute* Équipe de
réanimation*
Aide à la mobilisation Aide totale ou partielle aux Éviter les complications de +
(n'appartient pas à la mouvements du patient l'alitement
mobilisation précoce à
proprement parler)
Bord de lit Mise au patient au bord du lit – Évaluer la tolérance du patient + première fois +
dans la position assise
– Évaluer la capacité du patient à
réaliser ce transfert
Mise au fauteuil de façon Transfert du patient au – Prévenir les troubles liés à +
passive fauteuil de façon passive en l'alitement
le portant ou avec une aide – Favoriser la reprise
mécanique d'autonomie
– Améliorer la tolérance
hémodynamique et ventilation
du patient
Mise au fauteuil de façon Transfert au fauteuil avec une – Cf. mise au fauteuil passive + pour la première + pour les fois
active sollicitation active du patient – Cf. renforcement musculaire fois suivantes
Marche active ou aidée Marche avec déambulateur Vise à rétablir les possibilités de + première fois +
ou encore aide humaine déambulation et l'autonomie et si besoin d'une
rééducation
spécifique
* Le signe + correspond aux personnels concernés et il peut être suivi si nécessaire de certaines conditions. L'absence du signe correspond au fait que
ce type de mobilisation ne doit pas être initié ou effectué par ce personnel.

d'autres nécessitent l'entraide et l'implication de l'équipe culaires, d'augmenter le flux sanguin et l'apport nutritionnel
pluridisciplinaire (kinésithérapeute, personnel infirmier, local ; elle facilite le retour veineux et diminue la formation
aide-soignant, médecin) afin d'assurer efficacité et sécurité d'œdème de stase ; enfin, elle crée des sollicitations senso-
pour le patient [119]. rielles et entretient la notion de mouvement.
Certaines techniques de mobilisation, telles que la sta- Elle peut être effectuée soit manuellement, soit à l'aide
tion assise au bord du lit, la verticalisation, les transferts d'attelle ou d'ergocycle motorisés.
au fauteuil, la mise en station debout et la déambulation La mobilisation passive continue (MPC) sur attelle élec-
du patient, nécessitent la participation de minimum deux trique permet de réduire l'atrophie musculaire (évaluée par
à trois personnes, voire quatre pour la déambulation. Le biopsie) et de préserver l'architecture du muscle, en parti-
nombre de soignants nécessaire est également fonction culier, celle des fibres musculaires de type I (lentes) [132].
de l'état clinique, de l'environnement externe (tube endo­ De Prato et al. ont également montré que la mobilisation
trachéal, cathéters, drains…) et de la corpulence du patient. passive sur ergocycle (2 fois 30 minutes/jour) de patients
Le programme de mobilisation devrait comporter une traumatisés crâniens pouvait diminuer la fonte musculaire
à trois sessions journalières, 5 à 7 jours par semaine [119]. [133].
L'électrostimulation musculaire (ESM) est une technique
adjuvante qui peut être associée à la mobilisation passive à
Mobilisation passive analytique ce stade de la prise en charge du patient. L'ESM pourrait :
Chez le patient sédaté ou comateux, la mobilisation passive limiter le catabolisme musculaire de malades immobili-
peut être réalisée dès le premier jour, plusieurs fois par jour, sés en réanimation [134] ; améliorer la force musculaire et
pour autant que l'état hémodynamique et respiratoire du diminuer le nombre de jours nécessaires au transfert lit–
patient soit stable. Elle permet de maintenir les amplitudes fauteuil de patients BPCO sous ventilation mécanique [23] ;
articulaires, de prévenir les rétractions tendineuses et mus- préserver la masse musculaire (évaluée par échographie) ;

264
21. Spécificités de la kinésithérapie en réanimation

présenter des effets systémiques positifs sur la microcircu- [5] Gosselink R, Bott J, Johnson M, Dean E, Nava S, Norrenberg M, et al.
lation des tissus musculaires [135, 136] ; prévenir le déve- Physiotherapy for adult patients with critical illness : recommenda-
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L'ESM ne semble pas influencer les paramètres vitaux unit mobility therapy in the treatment of acute respiratory failure.
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(fréquence cardiaque, pression artérielle, saturation arté-
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Dès que le patient est conscient et collaborant, les défi-
[11] Henke CA, Hertz M, Gustafson P. Combined bronchoscopy and
cits neuromusculaires peuvent être évalués, par exemple mucolytic therapy for patients with severe refractory status asth-
au moyen du score MRC (medical research council), avant maticus on mechanical ventilation : a case report and review of the
de débuter les exercices de mobilisation active (voir literature. Crit Care Med 1994 ; 22 : 1880–3.
tableau 21.1) [119]. [12] Durward A, Forte V, Shermie SD. Resolution of mucus plugging and
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surveille et améliore la fonction ventilatoire, notamment [15] Orozco-Levi M, Torres A, Ferrer M, et al. Semirecumbent position
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récupération neuromusculaire et une reprise d'autonomie [18] Grap MJ, Munro CL, Hummel RS, Elswick RK, Mc Kinney JL, Sessler
plus précoce. CN. Effect of backrest elevation on the development of ventilator-
Cette prise en charge complète du patient s'inscrit dans associated pneumonia. Am J Crit Care 2005 ; 14 : 325–32.
une réduction de la durée de séjour et du coût de l'hospi- [19] Van Nieuwenhoven CA, Vandenbrouck-Grauls C, van Tiels FH,
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268
Chapitre 22
Kinésithérapie
de la personne âgée
Emmanuel Guérot, Aldjia Abdellaoui

PLAN DU CHAPITRE
Définition du patient gériatrique 270
Physiopathologie de l'appareil
cardiorespiratoire chez la personne âgée 270
Différents outils mis à la disposition
du kinésithérapeute lors d'affections
respiratoires 272
Activité physique 274
Soins de confort en gériatrie 276

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Définition du patient gériatrique les modifications physiologiques, notamment musculaires,


respiratoires et cardiovasculaires, liées au vieillissement,
L'amélioration des conditions de vie (alimentation, hygiène, indépendamment de toute pathologie intercurrente.
conditions socio-économiques…) et les progrès de la méde-
cine ont permis un allongement considérable de l'espérance Modifications musculaires
de vie au cours du xxe siècle, particulièrement dans les pays
développés. Ainsi, les personnes âgées de plus de 65 ans Le vieillissement est associé à une amyotrophie, générale-
constituent actuellement 12 % de la population des États-Unis ment appelée « sarcopénie » [4]. La sarcopénie est un phé-
et plus de 15 % de celle de l'Union européenne. Cette ten- nomène progressif ; sur le plan anatomique, on estime à 5 %
dance, associée à une baisse relative des naissances dans ces la perte de masse musculaire enregistrée sur une période
pays, explique que la part des sujets âgés pris en charge dans de 10 ans, à partir de 40 ans, avec une perte majorée après
les structures hospitalières ne cesse d'augmenter et qu'il est 65 ans [5]. Elle s'accompagne également d'une infiltration
désormais indispensable d'en bien connaître les particularités. intramusculaire de tissu adipeux et d'un remodelage du
Définir ce qu'est une personne âgée est une tâche difficile. tissu conjonctif musculaire. L'utilisation de marquages
L'âge chronologique est habituellement utilisé, mais le seuil immuno-histochimiques a permis d'établir que cette atro-
retenu est très variable. L'Organisation mondiale de la santé phie résulte à la fois d'une diminution du nombre de fibres
(OMS) considère un sujet comme « âgé » au-delà de 65 ans ; musculaires, affectant de manière similaire les fibres oxy-
c'est pourquoi un grand nombre d'études, notamment les datives (type I) et les fibres glycolitiques (type II), et d'une
plus anciennes, utilisent cette valeur. Toutefois, la population réduction de la surface de section affectant préférentielle-
ainsi définie paraît très hétérogène, au moins dans les pays ment les fibres de type II [6, 7].
développés, ce qui a amené un certain nombre d'auteurs À ces modifications anatomiques s'ajoutent des altéra-
à la scinder en trois sous-groupes : 65–74 ans, 75–84  ans, tions fonctionnelles. En effet, le vieillissement est associé à
> 85 ans. L'étude de la littérature médicale permet ainsi de une diminution progressive de la force musculaire, chez les
retrouver de multiples définitions (65, 70, 75 ans…) avec femmes et chez les hommes, aussi bien pour les muscles des
cependant une très nette tendance à reculer la limite au- membres inférieurs que pour ceux des membres supérieurs
delà de 75 ans, puis de 80 ans [1], certaines études récentes [5, 8]. La dysfonction musculaire devient apparente à partir de
s'intéressant même spécifiquement aux patients de plus de 60 ans, et une réduction d'environ 50 % est souvent rapportée
90 ans [2]. L'analyse de ces travaux montre que, quelles que à un âge avancé [5, 9]. Elle est associée à une augmentation
soient les conditions de prise en charge (médicale ou chirur- du risque de chutes, en affectant notablement la qualité de
gicale, aiguë ou chronique) le pronostic des personnes âgées la marche [8]. Cette dysfonction musculaire est attribuée à
est avant tout dépendant de leur état de santé antérieur et l'association de facteurs quantitatifs (perte de masse) et qua-
des comorbidités plus ou moins importantes qu'elles pré- litatifs (force par surface de section musculaire, variation de
sentent, alors que l'âge chronologique pris isolément n'influe la typologie musculaire et des propriétés métaboliques) [5].
que très modérément sur leur devenir [3]. L'ensemble de ces données fonctionnelles a mené à une
En l'absence de consensus ou de définition stricte, on redéfinition récente de la sarcopénie. À l'origine proposé en
peut actuellement proposer l'âge de 80 ans comme limite 1989, le terme sarcopénie désignait uniquement la perte
pour une population gériatrique, tout en insistant sur la de masse musculaire survenant au cours du vieillissement
nécessaire prise en compte de l'état de santé antérieur et [4]. Aujourd'hui, le groupe européen de réflexion sur la
des comorbidités afin d'obtenir des groupes de patients sarcopénie des personnes âgées insiste sur la nécessité de
relativement homogènes. prendre en compte à la fois la perte de masse et la perte de
fonction musculaire que ce soit pour la définition ou pour
le diagnostic de la sarcopénie [10, 11].
Physiopathologie de l'appareil Même si les mécanismes d'apparition de la sarcopénie
ne sont pas encore parfaitement élucidés, il semblerait
cardiorespiratoire qu'une association des altérations localisées au niveau des
chez la personne âgée cellules musculaires à des facteurs systémiques soit à l'ori-
gine de cette dysfonction. Parmi les facteurs ­systémiques,
Afin de pouvoir prendre en charge de façon adaptée des le vieillissement s'accompagne d'une réduction de la
patients de plus en plus âgés, il est nécessaire de connaître concentration circulante en hormone de croissance et en

270
22. Kinésithérapie de la personne âgée

IGF-1 (insulin-like growth factor 1) [12]. Ces hormones sont alors que la capacité vitale diminue, la capacité pulmonaire
connues pour les effets anabolisants qu'elles exercent. Des totale ne variant pas avec l'âge [16, 20]. Il existe aussi très
modifications anatomiques et fonctionnelles du système fréquemment une limitation expiratoire importante, quelle
nerveux semblent également en mesure d'influer sur les que soit la façon dont elle est explorée [21]. Ainsi, le VEMS
pertes de masse et de fonction musculaires. En effet, le est diminué, alors que le rapport de Tiffeneau ne se modifie
vieillissement s'accompagne de la diminution du nombre pas en raison de la baisse de la capacité vitale ; de même on
et de la fonctionnalité des unités motrices [9]. De plus, des retrouve très fréquemment une limitation significative des
facteurs liés au mode de vie peuvent également contribuer débits expiratoires [19, 21].
à l'aggravation de la sarcopénie. En effet, la diminution On considère usuellement que la PaO2 diminue avec
d'activité physique pratiquée par les personnes âgées, ainsi l'âge et plusieurs auteurs ont proposé des équations cor-
que des apports nutritionnels non adaptés aux besoins de rectives pour tenir compte de cette baisse. En fait, cette
l'organisme pourraient également influencer de manière réduction de la PaO2 semble être d'importance très rela-
négative la masse et la fonction musculaire [13]. tive et surtout sa relation avec l'âge n'est pas linéaire. Si on
À l'échelon cellulaire, de nombreux mécanismes pou- observe effectivement une réduction de la PaO2 liée à l'âge
vant participer au développement de la sarcopénie ont jusqu'à 74 ans, la PaO2 devient indépendante de l'âge dans
été proposés, parmi lesquels nous pouvons citer à titre une population de sujets sains âgés de plus de 75 ans [22].
d'exemple : une augmentation de la dégradation des pro- Il n'existe par ailleurs aucun effet de l'âge sur le pH ou la
téines [14], une diminution des défenses antioxydantes, des PaCO2. Enfin, la sensibilité à l'hypercapnie semble réduite
perturbations de l'activité mitochondriale, des anomalies chez les sujets âgés.
de l'expression des gènes impliqués dans la régulation du Si le réflexe de toux n'est pas altéré chez les personnes
métabolisme, la capacité de réparation de l'ADN, l'inflam- âgées [23], l'efficacité de la clairance mucociliaire diminue
mation et l'activité du protéasome [5]. significativement avec l'âge [24]. Cette modification, associée
au collapsus expiratoire déjà décrit, à la réduction de la force
musculaire respiratoire et à la forte prévalence des troubles
Modifications respiratoires de déglutition, explique la fréquence des atélectasies et la
Avec l'âge, la structure histologique et anatomique du précarité du drainage bronchique dans cette population.
parenchyme pulmonaire se modifie. Des altérations du
renouvellement des fibres élastiques et collagènes et sur- Modifications cardiaques
tout des liaisons entre ces fibres entraînent une augmenta-
tion de la compliance pulmonaire [15, 16]. Les bronchioles Au niveau cardiaque, le vieillissement est associé à une aug-
terminales et les alvéoles tendent à se dilater avec réduc- mentation de la masse myocardique ventriculaire, principa-
tion de la surface d'échange alvéolaire, associée à une lement au niveau du septum interventriculaire. Sur le plan
diminution du nombre de capillaires par alvéole. Enfin, les histologique, il existe une réduction du nombre de myocytes
bronches périphériques ont une tendance accrue au collap- compensée par une hypertrophie de ceux-ci et une accu-
sus expiratoire en raison de la diminution de leur force de mulation de fibres collagènes [25]. Ces anomalies, entraînant
tension élastique, participant à l'augmentation du volume une réduction de la compliance pariétale ventriculaire et des
résiduel que nous reverrons [16, 17]. troubles de la relaxation, sont à l'origine des perturbations de
Du fait du développement de calcifications des carti- la fonction diastolique observées [26]. Le remplissage passif
lages intercostaux, d'arthrose costovertébrale et de cyphos- du ventricule gauche est ainsi considérablement réduit et
coliose, la compliance pariétale diminue [18]. La force des le maintien d'un débit cardiaque normal devient alors de
muscles respiratoires, notamment le diaphragme et les plus en plus dépendant de l'efficacité de la systole auricu-
abdominaux, diminue nettement [19], alors que le rôle des laire [27]. Le maintien d'un rythme sinusal apparaît ainsi
muscles intercostaux est très réduit en raison de la rigidité capital, toutefois il est fréquemment retrouvé des dépôts
de la paroi thoracique. amyloïdes au niveau auriculaire après 70 ans. De même, les
L'augmentation de la rigidité pariétale, la diminution de cellules pacemaker du nœud sinusal se raréfient, remplacées
l'élasticité pulmonaire et la diminution de la force musculaire par de la fibrose. Ces modifications expliquent la fréquence
respiratoire expliquent les modifications fonctionnelles res- de la survenue de troubles du  rythme ­supraventriculaires,
piratoires observées chez les sujets âgés. Le volume résiduel parfois responsables d'altérations majeures de la fonction
ainsi que la capacité résiduelle fonctionnelle augmentent cardiaque, chez les sujets âgés.

271
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Adaptation à l'effort de plus de 70 ans ont 10 fois plus de risque de dévelop-


per une pneumonie que des sujets plus jeunes. De plus,
L'adaptation à l'effort des personnes âgées se fait par des 90 % des décès liés à une pneumonie surviennent chez
mécanismes différents de celle de sujets plus jeunes. Le les patients âgés [29]. Différentes techniques peuvent
niveau d'effort maximal, apprécié par la consommation être mises en œuvre au cours de la prise en charge de
maximale d'oxygène (VO2 max), est réduit avec l'âge, quel telles affections.
que soit le niveau d'entraînement [28]. Au contraire des
sujets jeunes, la fonction cardiaque n'est pas le facteur limi-
tant principal chez les sujets âgés. Le débit cardiaque maxi- Oxygénothérapie
mal à l'effort n'est, en effet, pas modifié par l'âge. Toutefois,
cette augmentation du débit cardiaque liée à l'effort se fait Toutes les affections respiratoires sévères entraînent
par augmentation du volume télédiastolique ventriculaire une hypoxémie plus ou moins profonde. Celle-ci relève
gauche, entraînant selon le mécanisme de Frank-Starling de divers mécanismes : hypoventilation alvéolaire, effet
une augmentation du volume éjecté, et non par une accé- shunt, voire troubles de diffusion, nécessitant un traite-
lération de la fréquence cardiaque comme chez le sujet ment spécifique adapté. À ces différentes interventions, on
jeune [26]. C'est pourquoi le maintien d'un rythme sinusal associera toujours l'oxygénothérapie comme traitement
est primordial pour assurer l'adaptation à l'effort des per- symptomatique.
sonnes âgées. L'oxygène peut être délivré par des lunettes nasales
La limitation à l'effort des sujets âgés est donc le plus ou un masque facial éventuellement muni d'une réserve
souvent conditionnée par la fonction respiratoire [19]. Les permettant d'augmenter la FiO2 délivrée. Le choix de ces
modifications histologiques et fonctionnelles décrites plus dispositifs dépendra de la tolérance et de la préférence des
haut, notamment l'augmentation de la compliance pul- patients, ainsi que du débit d'O2 nécessaire. L'inconvénient
monaire et de la rigidité pariétale, expliquent que les sujets principal de l'oxygénothérapie est un assèchement des
âgés ne peuvent pas augmenter leur ventilation minute muqueuses des voies aériennes, d'autant plus que le débit
maximale autant que des sujets plus jeunes [28]. En effet, d'O2 est important.
cette augmentation se fait chez eux plus par augmenta-
tion de la fréquence respiratoire que du volume courant.
Ce mode d'adaptation, moins efficace et plus coûteux en
Aérosolthérapie [30, 31]
dépense énergétique, explique la réduction de la VO2 max Il n'y a pas de spécificités liées à l'âge concernant les indica-
déjà mentionnée. tions de l'aérosolthérapie. Cependant, la plupart des effets
Ces limites d'adaptation à l'effort des personnes âgées secondaires des molécules ainsi administrées sont aggravés
sont toutefois également liées au déconditionnement par le vieillissement :
cardiovasculaire secondaire à la réduction d'activité et ● augmentation des tremblements et de l'anxiété et sur-

l'augmentation de la sédentarité de ces personnes et tout tachycardie avec risque d'ischémie myocardique avec
restent donc accessibles, au moins partiellement, au réen- les β2-agonistes ;
traînement. Ainsi, la VO2 max de sujets âgés soumis à un ● exacerbation du glaucome et de l'hypertrophie prosta-

entraînement régulier, bien qu'inférieure à celle de sujets tique avec les anticholinergiques ;
plus jeunes, atteint une valeur double de celle de sujets de ● perturbation de la glycémie et effets systémiques avec

même âge non entraînés [28]. les corticoïdes.


L'usage d'aérosols-doseurs ne permet pas d'obtenir
des résultats meilleurs par rapport aux nébulisateurs en
Différents outils mis à la termes d'efficacité. De plus, l'utilisation d'un aérosol-doseur
demande la collaboration du patient, l'ajustement adéquat
disposition du kinésithérapeute de l'embout avec la bouche et la capacité à fournir un débit
lors d'affections respiratoires inspiratoire suffisant. Ces trois conditions ne se retrouvent
pas souvent dans une population gériatrique. L'évaluation
Les modifications physiologiques liées au vieillissement des capacités physiques et intellectuelles des patients est
prédisposent les sujets âgés aux pathologies pulmo- indispensable afin de déterminer le meilleur mode de
naires, en particulier infectieuses. Les personnes âgées délivrance.

272
22. Kinésithérapie de la personne âgée

Techniques d'aide geste banal et peut provoquer des effets néfastes tels des
réactions vagales pouvant aller jusqu'à la syncope et des
au désencombrement bronchique complications hémorragiques, en particulier des hémopty-
chez la personne âgée sies, d'autant plus fréquentes que la population gériatrique
est souvent exposée aux anti-agrégants plaquettaires et
La faiblesse des muscles respiratoires, la diminution de l'effi-
aux anticoagulants. Pour limiter ces effets indésirables, ce
cacité de la clairance mucociliaire et le collapsus expiratoire
geste sera réalisé avec un matériel adéquat (une sonde de
liés au vieillissement rendent moins efficace le drainage
Charrière 12 et un gel lubrifiant). Des informations sont
bronchique chez le sujet âgé. Ceci est particulièrement
données au préalable au malade afin de le rassurer.
important lors d'épisodes infectieux, l'encombrement
bronchique ainsi favorisé étant à l'origine d'une augmen-
tation parfois importante de l'espace mort physiologique. Place de la ventilation non invasive
Plusieurs techniques d'aide au désencombrement existent.
en gériatrie
Augmentation du flux expiratoire Brochard et al. ont montré que, dans le cadre d'une exa-
L'augmentation du flux expiratoire par des pressions sur cerbation aiguë de BPCO avec hypercapnie, des séances
le  thorax peut s'appliquer à toute la population géria- de ventilation non invasive (VNI) comparées à un traite-
trique quel que soit le niveau de collaboration du malade. ment médical standard avec oxygénothérapie permet-
Malgré l'ostéoporose fréquente dans cette tranche d'âge, taient une réduction significative du recours à l'intubation
le risque  de fracture du gril costal semble peu important endotrachéale (26 % versus 74 % dans le groupe médical),
surtout si les manœuvres sont coordonnées avec les mou- de la durée d'hospitalisation (22 ± 16  jours versus 39 ±
vements du thorax. Cependant, elles ne peuvent se réaliser 31 jours) et de la mortalité intra-hospitalière (19 % versus
sur une zone abritant un boîtier de pacemaker. 29 %) [33].
Cependant, l'application de la VNI chez les personnes
Drainage autogène âgées se heurte à un certain nombre de difficultés et de
complications [34, 35]. Celles-ci ne sont pas forcément spé-
Le diaphragme, muscle respiratoire principal, est bien sûr cifiques de cette tranche d'âge, mais surviennent souvent
touché par les modifications musculaires liées au vieillis- plus rapidement ou prennent plus d'importance que chez
sement déjà décrites [32]. Un fonctionnement diaphrag- des sujets plus jeunes, imposant parfois l'arrêt prématuré
matique altéré aboutit à un asynchronisme ventilatoire et de la VNI.
une répartition inégale de l'air dans les différents territoires Les problèmes les plus fréquemment rencontrés sont :
pulmonaires. Lors de la phase expiratoire, il y aura alors ● des douleurs et/ou des lésions cutanées, particulière-

dans certains territoires un faible débit d'air pour déplacer ment au niveau des zones d'appui du masque (ailes du nez,
les sécrétions. Cependant, le manque de coopération de pommettes, pointe du menton) ;
certains patients peut limiter l'intérêt de cette technique. ● des fuites aériennes importantes en l'absence du dentier

ou chez les personnes édentées, ou en présence d'os sail-


Pressions expiratoires positives lants (malnutrition) ;
● une agitation ou des difficultés de coopération, dont les
Les systèmes avec pression expiratoire positive (PEP) per-
mettent de lutter contre le collapsus expiratoire. On dis- facteurs sont souvent multiples : l'insuffisance respiratoire
tingue deux catégories : les PEP oscillantes (ex. : flutter) et les elle-même, l'anxiété, un déclin cognitif ou des difficultés de
PEP continues (ex. : barboteur, lèvres pincées…). Ces tech- communication (baisse de l'acuité auditive…) ;
● la sécheresse des muqueuses nasale et/ou buccale ;
niques peuvent être des adjuvants aux autres techniques de
● enfin, il ne faut pas méconnaître les troubles de dégluti-
désencombrement et ce, avec la collaboration des patients.
tion, fréquents dans cette population, qui selon leur impor-
tance constitueront des contre-indications à l'utilisation
Aspiration endotrachéale de la VNI ou au moins imposeront une surveillance très
L'aspiration endotrachéale (AET) peut faciliter le désen- rapprochée.
combrement bronchique lorsque les autres techniques Dans le but de limiter ces désagréments, plusieurs élé-
sont inefficaces. Toutefois, ce geste invasif n'est pas un ments sont importants [34–36].

273
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Le choix d'un masque adéquat est essentiel. Il est sou- application. Dans notre expérience, le meilleur compromis
haitable de pouvoir disposer de plusieurs tailles et types est la réalisation de VNI en continu pendant les 12 pre-
de masques afin de pouvoir choisir le modèle assurant la mières heures, avec surveillance de l'état de conscience,
meilleure étanchéité tout en garantissant un confort et des paramètres respiratoires, hémodynamiques et gazomé-
une tolérance acceptables. Dans les situations aiguës, un triques à 1, 3, 6 et 12 heures. En cas d'amélioration rapide, le
consensus s'est dégagé pour recommander l'utilisation sevrage de la VNI pourra être alors débuté, avec réalisation
de masques faciaux [37], l'emploi du masque nasal étant de séances de 3 heures de VNI espacées par des périodes
plutôt réservé aux phases chroniques ou aux aggravations de ventilation spontanée progressivement croissantes. Au
très modérées, subaiguës. Dans l'ensemble, les masques contraire, une dépendance importante à l'assistance ven-
avec jupe souple permettent un bon compromis étan- tilatoire au-delà de la 24e heure devra faire rapidement
chéité–confort, toutefois des masques à bourrelet gon- discuter l'éventualité d'une intubation endotrachéale, le
flable sont parfois mieux adaptés en cas de déformation risque de complications cutanées devenant dès lors très
faciale ou d'édentation importante. L'intérêt des masques important.
de type « scaphandre  » ou « heaume  », dont l'espace Bien que les échecs de la VNI soient estimés à 30 à
mort est considérable, n'a pas été clairement établi, tant 40 %, un nombre croissant de patients âgés sont admis
en ce qui concerne un éventuel gain de confort qu'en en réanimation afin d'en bénéficier. Il ne semble pas que
termes d'efficacité de ventilation, particulièrement pour les échecs soient plus fréquents chez les patients âgés.
les  patients âgés. Bien que leur efficacité n'ait pas non De plus, cette technique est une alternative intéressante
plus été démontrée, certaines équipes utilisent des pro- entre traitement médical standard (oxygénothérapie,
tections hydrocolloïdes au niveau des zones d'appui les aérosolthérapie, kinésithérapie…) et ventilation invasive,
plus sensibles. Enfin, le positionnement du masque et son en particulier pour des patients dont l'état général ou
degré de contention devront être soigneusement vérifiés. l'existence d'une pathologie sous-jacente compromet-
Il est capital de limiter au maximum la pression exercée tant à court terme le pronostic vital rend le recours à
par le masque sur la peau en s'assurant d'une position l'intubation endotrachéale discutable. Ainsi, Benhamou
optimale du masque. De plus, le harnais de maintien doit et al. [38] rapportent dans une série de 30 patients âgés,
être réglé de la façon la plus lâche possible mais sans pour présentant une indication à la ventilation mécanique et
autant provoquer des fuites. pour lesquels l'intubation endotrachéale avait été récu-
Il faut également rassurer les patients. La dyspnée ressen- sée, un taux de succès de la VNI de 60 %, comparable aux
tie peut rendre très angoissante et parfois inconfortable la résultats observés pour des patients plus jeunes ou sans
VNI. Il est très important d'expliquer les différentes étapes limitation thérapeutique.
de sa mise en place. Ceci est d'autant plus important que
l'admission en urgence est déjà une source de confusion et
d'angoisse pour des personnes âgées. Il est également néces- Activité physique
saire de surveiller étroitement l'efficacité et la tolérance de
la VNI dans les premiers instants de son application, afin de Chercher à améliorer la qualité de vie en retardant la dépen-
pouvoir modifier si besoin les réglages du ventilateur. De dance est un objectif de vie noble justifiant à lui seul la pra-
même, il faut être très vigilant sur les besoins de drainage tique d'une activité physique (AP). En effet, l'âge avançant,
de patients encombrés. L'augmentation du flux expiratoire l'inactivité devient un facteur important de la diminution
assurée par la VNI, résultant du travail fourni directement de la qualité de vie [39].
par le ventilateur et de l'amélioration des performances L'intérêt pour l'activité physique remonte à l'Antiquité.
diaphragmatiques (meilleures conditions géométriques de Hippocrate et Galien conseillaient déjà la pratique d'une
travail, réduction de la fatigue…), permet un meilleur drai- activité physique : « L'alimentation seule ne suffit pas à
nage bronchique. Il peut alors être nécessaire de débran- maintenir un homme ; celui-ci doit également pratiquer
cher transitoirement le patient afin d'assurer une séance de de l'exercice. Nourriture et exercice, même si leurs qualités
désencombrement avant de poursuivre la VNI. sont en apparence opposées, marchent ensemble pour la
Afin d'optimiser l'efficacité de la VNI, il est recommandé santé. » (Hippocrate) Toutefois, ce n'est que tardivement
d'en pratiquer le plus possible au cours des 24 premières que cette intuition clinique a pu être étayée scientifique-
heures [37]. Toutefois, les complications cutanées et l'into- ment, permettant l'élaboration de recommandations sur la
lérance à la VNI sont proportionnelles à la durée de son pratique d'AP [40, 41].

274
22. Kinésithérapie de la personne âgée

L'AP se définit comme tout mouvement corporel pro- de la capacité oxydative associée à une meilleure capillarisa-
duisant une contraction des muscles striés squelettiques tion du muscle et, ainsi, par une amélioration de la diffusion
augmentant la dépense énergétique au-delà de son niveau de l'oxygène et de son utilisation dans le muscle. De plus,
de repos [42]. Il existe principalement deux types différents ce type d'AP permet de prévenir l'amyotrophie du vieillis-
d'AP : l'entraînement en force (renforcement musculaire) et sement en augmentant les flux de synthèse des protéines
l'entraînement en endurance. musculaires [56].
Comme pour l'entraînement en force, le programme
d'entraînement en endurance provoque une augmentation
Entraînement en force de la transcription des gènes qui codent pour les formes
lentes des fibres, alors que les transcrits pour les formes
Plusieurs études expérimentales ont évalué les effets des
rapides diminuent [57]. Toutes ces adaptations permettent
programmes d'entraînements en force [43, 44]. Ce type
au muscle de mieux résister à la fatigue.
d'entraînements se traduit par une augmentation de la
Les recommandations actuelles sur la pratique d'acti-
masse musculaire et par conséquent de la force [11, 45, 46],
vité physique pour les personnes âgées préconisent la
y compris chez des sujets très âgés [47]. La croissance du
combinaison de ces deux types d'entraînements [58].
muscle varie en fonction du programme d'entraînement,
Ces recommandations s'appliquent à tous les adultes
mais en moyenne l'accroissement de la masse est de l'ordre
âgés de 65 ans et plus, et aux adultes de 50 à 64 ans
de 0,1 % par jour [48].
souffrant de maladies chroniques. Ainsi, les programmes
Au niveau cellulaire, l'entraînement en force permet
d'activité physique devraient comporter quatre compo-
d'augmenter la taille de tout type de fibres musculaires [49].
santes [58] :
Cet effet résulte d'une augmentation des flux de synthèse ● le réentraînement à l'exercice en endurance, vélo et/ou
de l'ensemble des protéines musculaires, y compris après
marche (au moins 30 minutes d'activité à intensité modé-
90 ans [50]. On observe en revanche une augmentation de
rée, 5 fois par semaine) ;
la transcription des gènes qui codent pour les formes lentes ● le renforcement musculaire (à raison de deux séances
des fibres et une réduction de la transcription des gènes qui
par semaine, 2 jours non consécutifs) ;
codent pour les formes rapides. Par conséquent, la transi- ● les étirements/souplesses musculaires ;
tion du phénotype vers une forme plus lente, observée au ● le travail en équilibre.
cours du vieillissement, ne peut pas être corrigée par l'en-
Le minimum de sessions pour obtenir un effet clinique-
traînement en force ; seule la taille des éléments cellulaires
ment pertinent est de vingt [59]. Par ailleurs, il faut noter
peut être affectée [50, 51].
que l'activité physique à elle seule ne suffit pas. En effet, il
Enfin, l'entraînement en force améliore la locomotion, la
est recommandé d'y associer un programme d'éducation à
vitesse de marche, la mobilité générale et par conséquent
la santé et une bonne alimentation.
l'autonomie et la qualité de vie [7, 52]. Il apparaît comme
une des interventions les plus efficaces pour atténuer la
sarcopénie [53].
Électromyostimulation, une prise
en charge spécifique
Entraînement en endurance L'électromyostimulation (EMS) est une technique passive
À l'inverse, l'entraînement en endurance, qui se définit de renforcement musculaire. Le principe de cette tech-
comme la répétition sur de longues périodes d'exercices nique consiste à produire une contraction musculaire en
d'intensité modérée, a des effets plus globaux. Il se pro- imposant une stimulation électrique par l'intermédiaire
pose avant tout d'augmenter la capacité d'endurance à d'électrodes appliquées sur la peau (Fig. 22.1).
l'effort. De plus, il est bien avéré que l'entraînement en L'EMS est une technique non invasive, sans sollicitation
endurance (encore appelé entraînement aérobie) dimi- cardiorespiratoire [60]. Ainsi, elle apparaît comme une
nue le risque cardiovasculaire et exerce des effets positifs alternative intéressante pour des personnes âgées présen-
sur la pression artérielle et sur le syndrome métabolique tant une sarcopénie sévère associée ou non à une intolé-
[54, 55]. rance à l'effort.
Au niveau musculaire, les effets de ce type d'entraîne- L'utilisation de l'EMS comme modalité d'entraînement
ments se traduisent principalement par une augmentation permet de préserver et/ou de récupérer la masse et la

275
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

ment vigilant quant à sa tolérance. Lorsque la VNI est peu


efficace ou mal tolérée, il est nécessaire de recourir à un trai-
tement médicamenteux à visée anxiolytique et antalgique,
associant benzodiazépines et morphiniques.
L'AET est traumatisante et s'oppose à la notion de soins
de confort. En cas d'encombrement bronchique important,
l'usage précoce de la scopolamine par voie sous-cutanée
peut permettre de réduire les sécrétions.

Points clés

Le vieillissement s'accompagne de modifications
physiologiques, notamment musculaires, respira-
toires et cardiovasculaires, indépendamment de
toute pathologie intercurrente. Ces détériorations
peuvent mener le sujet âgé à une perte progres-
sive d'autonomie et conduire à une réduction de
l'espérance de vie.

Différentes techniques peuvent être mises
Fig. 22.1 en œuvre par le kinésithérapeute au cours de
Les électrodes sont appliquées sur la surface de la peau la prise en charge de ces patients. En effet, suite
du muscle à stimuler. aux modifications de l'appareil respiratoire, le
drainage bronchique est rendu difficile lors d'un
fonction musculaire [61–63]. Au-delà des bénéfices seg- épisode infectieux. Cependant, la kinésithérapie
mentaires, certains auteurs ont également rapporté des offre bon nombre de techniques dont l'augmen-
bénéfices généraux induits par l'EMS, tels que l'augmenta- tation du flux expiratoire, le drainage autogène,
tion de la tolérance à l'effort et/ou l'amélioration de l'auto- les systèmes avec pression expiratoire positive et
nomie fonctionnelle. l'aspiration endotrachéale particulièrement inté-
En conclusion, l'AP représente un des moyens les plus ressantes chez la personne âgée afin de mobiliser
efficaces et les plus facilement applicables pour réduire les sécrétions.
l'impact du vieillissement et prévenir l'amyotrophie. Elle ■
La VNI occupe une place prépondérante entre
peut être considérée comme un outil de prévention : pri- le traitement médical standard et la ventilation
maire en retardant l'apparition des symptômes induisant invasive. Lorsque l'intubation endotrachéale est
des déficits (sarcopénie, dyspnée…) ; secondaire avec la discutable et que le pronostic vital à court terme
disparition des symptômes liés au vieillissement ; voire ter- semble compromis, le taux de réussite de la VNI
tiaire, en ralentissant la progression des symptômes. avoisine les 60 %.

L'activité physique régulière représente un des
moyens les plus efficaces et les plus facilement
Soins de confort en gériatrie applicables pour réduire l'impact du vieillisse-
ment et prévenir l'amyotrophie. Les programmes
Les soins de confort sont fréquemment mis en place dans d'activité physique devraient comporter quatre
les services de gériatrie. En complément des traitements de composantes : le réentraînement en endurance,
l'anxiété et de la douleur, le soulagement de la dyspnée et le renforcement musculaire, les étirements/sou-
de l'encombrement bronchique fait partie intégrante de ce plesses musculaires et le travail en équilibre.
type de prises en charge. ■
Les équipes soignantes ont pour objectif de
La VNI, mise en place précocement, peut soulager l'acti- rendre un maximum d'autonomie à la personne
vité des muscles respiratoires et, de ce fait, réduire la sensa- âgée. Néanmoins, l'évolution défavorable de cer-
tion de dyspnée. Il est donc possible de l'utiliser dans une taines pathologies les amène à viser le confort du
stratégie de soins de confort [34, 38], en étant particulière- patient et à suppléer à ses besoins.

276
22. Kinésithérapie de la personne âgée

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278
Chapitre 23
Kinésithérapie en oncologie
et soins palliatifs
Anne-Claire Latiers, Ingrid de Biourge, Sophie Debouche

PLAN DU CHAPITRE
Oncologie 280
Soins palliatifs 283
Trachéotomie chez les patients cancéreux 285

Kinésithérapie respiratoire
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III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Le cancer peut toucher de nombreux organes et pose des Atteintes respiratoires liées
problèmes spécifiques dont l'importance, découlant de
leur fréquence et de leur gravité, est élevée. Cette maladie au cancer
multisystémique nécessite une attention particulière et sa Cancer ORL
prise en charge variée requiert une réflexion multidiscipli-
naire impérative. La prise en charge par le kinésithérapeute Les cancers ORL regroupent l'ensemble des cancers de la
est très variable mais s'intègre toujours dans une démarche bouche, du pharynx, du larynx et des sinus de la face. Ces
globale, tant au niveau respiratoire, moteur et psycholo- zones anatomiques sont essentielles à la vie pour respirer,
gique que social. Dans ce cadre, la gestion de la douleur fait avaler et communiquer par la parole. Dans plus de 95 % des
partie intégrante du rôle du kinésithérapeute qui se doit de cas, ces cancers sont des carcinomes de type épidermoïde
joindre au côté technique une prise en charge humaine et et dans neuf cas sur dix, ces cancers touchent les hommes.
créative. L'âge moyen de survenue est de 55 ans, mais la fréquence
Si l'évolution du cancer peut être défavorable et mener à du tabagisme dès l'adolescence explique qu'aujourd'hui
une prise en charge purement palliative, il est important de plus de 25 % des cas soient diagnostiqués avant 50 ans [2].
maintenir une distinction nette entre l'oncologie et les soins
palliatifs. En effet, la prise en charge par le kinésithérapeute Symptomatologie
d'un patient cancéreux peut être curative ou palliative. La Au moment du diagnostic, on retrouve des troubles de
prise en charge palliative correspond à tout traitement mis type dysphagie (difficulté à avaler) chez deux tiers des
en place pour soulager le patient sans chercher à le guérir, patients, de dysphonie (anomalies de la voix), ou respira-
elle touche toutes les pathologies. toires : une toux persistante, une dyspnée, un stridor, des
crachats sanglants… Les métastases, non exceptionnelles,
sont plus tardives et surtout pulmonaires. Cette maladie ne
Oncologie se guérit qu'au stade locorégional et est donc considérée
comme incurable dès la présence de métastases.
Manifestations cliniques Environ un tiers des patients dysphagiques développe-
ront une pneumonie d'inhalation durant leur traitement,
Le diagnostic de cancer est souvent posé suite à l'apparition avec un taux de mortalité élevé. C'est pourquoi ces signes
de signes d'alerte locaux (saignements, troubles fonction- et symptômes doivent être activement recherchés par
nels digestifs ou urinaires, plaie qui ne guérit pas, apparition chaque spécialiste à toutes les étapes des traitements [3].
de nodules, toux persistante…). En dehors de ces signes, les La gravité de ces cancers présentant une agressivité
circonstances de découverte sont souvent plus tardives et locale marquée impose une prise en charge rapide et des
extrêmement variées [1]. traitements combinés (chirurgie, chimiothérapie, radiothé-
Le kinésithérapeute devra, dans sa prise en charge, être rapie) et agressifs ayant des conséquences morphologiques
attentif et tenir compte de nombreux symptômes influen- et fonctionnelles importantes, nécessitant parfois la pose
çant l'état général du patient. L'un d'entre eux, et non le d'une trachéotomie transitoire ou définitive.
moindre, est la fatigue intense, souvent mentionnée par
les patients et qui entraîne une importante diminution de Complications secondaires
la qualité de vie. Elle est liée à la maladie, aux traitements
Les complications secondaires sont généralement liées
reçus et effets secondaires qui en découlent, de même
aux traitements (troubles de la déglutition, douleur, séche-
qu'aux difficultés psychologiques qui exigent un surcroît
resse buccale, troubles de la voix, mucite, encombrement
d'énergie.
oropharyngé ou bronchique…) ou à la présence d'une
Un autre symptôme fréquemment observé est la perte
trachéotomie.
de poids due aux changements du métabolisme, à l'anxiété
et aux effets secondaires des traitements, elle peut avoir un
Rôle du kinésithérapeute
impact sur l'état général, psychique et physique du patient.
Enfin, suite aux traitements, des plaies dans la sphère Le kinésithérapeute permettra d'atténuer voire de traiter les
digestive et respiratoire supérieure peuvent apparaître, symptômes des patients atteints d'un cancer ORL. Outre la
nécessitant des soins adaptés voire une modification du prise en charge motrice liée aux conséquences de la chirur-
traitement reçu. gie, le kinésithérapeute respiratoire tiendra un rôle dans la

280
23. Kinésithérapie en oncologie et soins palliatifs

gestion de l'encombrement des voies aériennes supérieures le patient cancéreux bronchique. Le risque d'infection est
et bronchiques. En effet, ces patients présentent souvent en effet majoré par l'existence d'une obstruction bron-
une stase de fond de gorge, pouvant entraîner à plus long chique tumorale et, chez les patients tabagiques, par une
terme des infections pulmonaires. Dès lors, le kinésithéra- diminution des mécanismes de défense de l'arbre trachéo-
peute sera attentif à prévenir le risque d'augmentation de bronchique. Parallèlement à cela, l'impact de la chimio-
cet encombrement, en offrant une surveillance rappro- thérapie sur les défenses immunitaires accroît ce risque de
chée de l'état respiratoire du patient et une kinésithérapie surinfection ;
respiratoire de ventilation et de désencombrement si cela ● hémoptysie : 10 à 30 % des patients souffrant d'un can-

s'avérait nécessaire. Il coordonnera ses soins avec l'infirmière cer du poumon développeront des hémoptysies dans le
pour veiller à l'état buccal du patient et avec la logopède décours de leur maladie, et 10 % de ces patients souffrent
en cas de troubles de la déglutition. Une prise en charge d'hémoptysies sévères [8] ;
particulière sera mise en place en cas de trachéotomie (voir ● épanchement pleural et pleurésie : il survient suite à l'enva-

plus loin). hissement de la plèvre viscérale et est parfois lié à une até-
lectasie [1]. C'est une complication fréquente et de mauvais
Cancer pulmonaire pronostic chez le patient cancéreux au stade avancé [9]. La
pleurésie néoplasique constitue une atteinte directe de la
Le cancer pulmonaire est la première cause de décès par
plèvre par l'infection maligne. Notons que l'atteinte pleurale
cancer dans le monde, avec comme principal facteur de
est une des causes principales de détresse respiratoire chez
risque le tabagisme [4, 5]. Il existe deux types de cancers
le patient cancéreux [10] ;
pulmonaires dont le traitement médical et le pronostic ● toux chronique et non productive ;

diffèrent : le cancer bronchique à petites cellules dont le ● syndrome restrictif pulmonaire : il peut être la consé-

pouvoir métastatique est majeur et le cancer bronchique


quence d'une chirurgie ou de la présence d'atélectasies, de
non à petites cellules.
raideurs et de douleurs thoraciques ;
Il faut différencier le néoplasme pulmonaire primaire et ● détresse respiratoire : liée à la maladie elle-même, à la

le néoplasme pulmonaire secondaire (métastases pulmo-


bronchite chronique (fréquente) et aux traitements, elle est
naires). Les complications pulmonaires et la kinésithérapie
la conséquence des différentes atteintes précitées ;
sont cependant identiques. ● métastases osseuses : lorsque la paroi thoracique est

touchée, les risques de douleur limitant la mobilité de


Symptomatologie
même que le risque de fractures peuvent entraver la
Les signes cliniques les plus fréquents liés à la tumeur bron- ventilation ;
chique sont : la toux, l'hémoptysie, la dyspnée, les expecto- ● lymphangite carcinomateuse : forme particulière de dis-

rations, les douleurs thoraciques [6]. Notons que la dyspnée sémination métastatique intrapulmonaire, elle est caracté-
d'origine primaire est liée à la compression partielle ou risée par l'infiltration des canaux lymphatiques autour des
totale d'une ou plusieurs bronches et a pour conséquence bronches. Son symptôme pulmonaire principal est la dys-
une diminution de la ventilation pulmonaire. La présence pnée [11].
d'expectorations purulentes peut être liée à une infection
en amont d'une sténose ou à une nécrose tumorale. Rôle du kinésithérapeute
Toutes les complications précitées ne nécessitent pas obliga-
Complications pulmonaires
toirement l'intervention du kinésithérapeute. Néanmoins, il
Le poumon est le site métastatique le plus commun pour est conseillé d'évaluer tous les bénéfices qu'elle peut engen-
de nombreuses tumeurs malignes. Les atteintes les plus drer par rapport à la symptomatologie du patient, guide de
fréquentes sont les nodules pulmonaires solitaires ou mul- la prise en charge respiratoire.
tiples et les lymphangites carcinomateuses [7]. Elle consiste en une ventilation manuelle, un travail
Les complications pulmonaires sont nombreuses et d'expiration contre résistance, l'utilisation de la spiromé-
seront prises en charge par le kinésithérapeute de manière trie incitative et le travail d'ouverture thoracique. Dans le
similaire à une prise en charge dont l'atteinte d'origine n'est cadre  de la dyspnée primaire, le kinésithérapeute tiendra
pas néoplasique : un rôle dans l'apprentissage des techniques d'ouverture
● infection pulmonaire : observée chez de nombreux
thoracique et d'exercices visant à augmenter la capacité
patients cancéreux, elle est fréquemment présente chez inspiratoire des autres territoires pulmonaires. Ces mêmes

281
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

techniques peuvent être utiles pour limiter la dyspnée sanguine. Dans ce dernier cas, une chambre de perfusion
secondaire dont l'étiologie est très variable (épanchement implantable pour accès veineux permanent (port-à-cath :
pleural, encombrement…). fig.  23.1) peut être placée le plus souvent sous les tégu-
Dans le cadre d'un encombrement bronchique, le kiné- ments thoraciques. La chambre de perfusion, apparente
sithérapeute effectuera les manœuvres de désencombre- sous la peau de la paroi thoracique, est reliée à un cathé-
ment classiques : ventilation manuelle, augmentation du ter qui est introduit dans la veine cave via la veine sous-
flux expiratoire, drainage postural, exercices à pression posi- clavière. De manière générale et surtout si le port-à-cath
tive expiratoire. est relié à une aiguille et une pompe ou perfusion pour
Outre la prise en charge de ces symptômes respiratoires, un traitement en cours, il vous faudra simplement éviter
le kinésithérapeute réfléchira sur les possibilités et le béné- de prendre appui sur celui-ci lors de vos manœuvres de
fice d'une revalidation cardiopulmonaire. L'activité phy- ventilation.
sique garde en effet une place prépondérante dans la prise
en charge générale du patient mais aussi dans ses objectifs Impacts sur la prise en charge de kinésithérapie
de recrutement pulmonaire. La chimiothérapie peut engendrer une fatigue et une
De nombreuses études ont également démontré qu'à la asthénie importante, complémentaire à celle liée à la
suite du traitement de la maladie, un programme de réha- maladie elle-même. Le kinésithérapeute devra adapter sa
bilitation améliore la capacité pulmonaire et la tolérance à prise en charge et maintenir l'état général de son patient
l'exercice des patients cancéreux [12, 13]. afin d'éviter la spirale du déconditionnement général et
cardiorespiratoire.
Complications liées aux traitements Par ailleurs, son impact sur la prise de sang (toxicité
hématologique) doit également être connu du kinési-
Le traitement classique du cancer peut comporter de la thérapeute. En effet, la diminution du taux de globules
chimiothérapie, de la radiothérapie et de la chirurgie, uti- rouges (anémie) peut engendrer un essoufflement
lisées de manière distincte ou associée. Certains cancers, important pouvant limiter la prise en charge. Le traite-
principalement le cancer du sein et de la prostate, peuvent ment devra donc être adapté, voire morcelé. L'éducation
également être traités par hormonothérapie. du patient à des techniques d'autotraitement prend
Tout traitement peut engendrer des effets secondaires ici tout son sens. La neutropénie (diminution des glo-
non négligeables pour lesquels la kinésithérapie prend tout bules blancs) augmente, quant à elle, le risque d'infec-
son sens mais impose également quelques précautions tion pulmonaire et diminue la capacité du corps à se
pour la prise en charge. L'instauration, la durée et la fré- défendre lorsque celle-ci se présente. Du point de vue
quence des traitements seront établies en fonction de la respiratoire, le kinésithérapeute veillera donc à limiter
capacité du patient à collaborer. les risques d'infection et accordera une vigilance impor-
tante à la gestion de tout encombrement supérieur et/
Chimiothérapie ou inférieur.
Généralités
C
La chimiothérapie est l'usage de médicaments destinés à
enrayer la multiplication anarchique des cellules cancé-
reuses. Leur effet ne se limite malheureusement pas aux
cellules malignes et touche également les autres cellules A
à renouvellement rapide. Notons que des toxicités héma-
tologiques, cardiaques, pulmonaires, neurologiques,
rénales, hépatiques ou gonadiques peuvent également
B
survenir lors de l'utilisation de certaines molécules
chimiques. Fig. 23.1
Il existe plusieurs types de chimiothérapies et de pro- Accès veineux implantable.
A. Chambre implantable en coupe.
tocoles. Une chimiothérapie peut être administrée per B. Chambre implantable.
os, par voie intrathécale, par voie musculaire ou par voie C. Aiguille pour port-à-cath.

282
23. Kinésithérapie en oncologie et soins palliatifs

Radiothérapie Résection chirurgicale


Généralités La chirurgie peut être partielle (fonctionnalité conservée)
ou mutilante (perte de la fonction de l'organe).
La radiothérapie utilise des rayonnements de très haute
Dans le cadre d'une chirurgie pulmonaire, un syndrome
énergie qui perturbent la multiplication des cellules et
restrictif peut être marqué, de manière plus ou moins
finissent par les détruire. Tous les tissus peuvent être tou-
importante. Néanmoins, une chirurgie visant à diminuer
chés, mais ce sont les tissus à haut renouvellement cellu-
l'obstruction bronchique, primaire ou secondaire, améliore
laire qui y sont les plus sensibles. La radiothérapie peut être
significativement la qualité de vie du patient et augmente
externe (irradiation émise par des accélérateurs linéaires de
également le temps de survie [17].
particules) ou interne (substance radioactive mise directe-
ment au contact de la tumeur) [14].
Prise en charge de kinésithérapie
Prise en charge de kinésithérapie Selon la localisation et le type de chirurgie effectuée, nous
Pendant la phase de traitement externe, principalement recommandons au lecteur de se référer au chapitre 19.
dans le cadre des tumeurs ORL, des brûlures locorégionales
d'ampleur variable peuvent apparaître au niveau cutané et
dans les muqueuses. Ces brûlures ont pour conséquence
Aspect psychologique
des douleurs importantes et une sécheresse buccale qui Tout nouveau symptôme ou dégradation est souvent vécu
peuvent entraver la toux et la déglutition. Une hygiène par le malade et sa famille comme un témoignage de l'évolu-
importante de l'ensemble de la sphère respiratoire supé- tion de la maladie. D'une manière générale, le kinésithérapeute
rieure reste un moyen de prévention essentiel. Lors de veillera donc, dans la mesure de ses possibilités, au maintien
l'apparition d'un encombrement proximal ou distal, il est de l'autonomie et au contrôle des différents symptômes.
conseillé d'être vigilant dans le contrôle des symptômes et Les difficultés respiratoires demandent à ce titre une
d'éventuellement mettre en place un traitement antalgique attention particulière. En effet, elles sont bien souvent une
avant la kinésithérapie afin de permettre au patient d'effec- cause anxiogène importante (peur d'une dépendance à
tuer une toux efficace et d'empêcher de la sorte une stase l'O2 ou à l'aide du kinésithérapeute, peur d'une mort dans la
buccale et/ou pulmonaire. souffrance, peur de l'étouffement…). Des conseils adéquats,
La radiothérapie peut également causer des effets l'explication des symptômes et de ce qu'ils engendrent
secondaires retardés tels que la pneumonie radique et la seront souvent nécessaires.
fibrose pulmonaire. La pneumonie radique se développe
dans les territoires irradiés dans les 6 mois suivant le traite-
ment. Elle aboutit fréquemment à une fibrose pulmonaire Soins palliatifs
[15]. La fibrose pulmonaire est une maladie chronique dont
les causes sont très variées. L'une d'elles est la radiothérapie La priorité fixée par les soins palliatifs est, sans conteste,
thoracique qui provoque une inflammation et la cicatrisa- une optimalisation de la qualité de vie du patient et de son
tion des alvéoles ainsi que des tissus interstitiels des pou- confort dans le respect de ses désirs et de ses capacités. Une
mons. La prise en charge kinésithérapique sera identique à concertation interdisciplinaire régulière est donc nécessaire
celle effectuée pour toutes les autres causes : programme afin de prendre en charge la souffrance globale du patient
d'éducation et de réadaptation pulmonaire pour améliorer en tenant compte des aspects physiques, psychologiques,
l'oxygénation des tissus et maximiser l'efficacité des tissus sociaux, familiaux et spirituels du patient.
sains ; traitement rapide des infections et oxygénothérapie La démarche délicate du kinésithérapeute sera de trou-
éventuelle. ver un juste milieu dans les traitements qu'il propose afin
Il est important de préciser que la fatigue engendrée par d'éviter tout risque d'escalade ou de désescalade théra-
les traitements doit être prise en compte durant les traite- peutique trop rapide. Chaque traitement fera l'objet d'une
ments de kinésithérapie. Cette fatigue, très peu améliorée réflexion sur le bénéfice escompté et la réalisation de celui-
par le repos, pourra l'être cependant par l'activité physique. ci en fonction de la durée de vie, des contraintes et des
C'est pourquoi, le maintien et la poursuite d'une activité priorités du patient correspondant au projet thérapeutique
physique durant les traitements sont indispensables [16]. établi par le patient et le médecin.

283
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Symptômes respiratoires rencontrés Enfin, le positionnement du patient (couché avec le


tronc redressé de 30 à 45°, assis tronc en avant, bras soute-
en soins palliatifs nus, changements de position fréquents), la mise en place
Les symptômes respiratoires représentent environ 50 % des d'aides techniques à la marche, la stimulation électrique des
symptômes rencontrés dans la dernière année de vie. Le muscles des membres inférieurs doivent pouvoir participer
kinésithérapeute ne pourra pas les éviter mais tiendra un à soulager la dyspnée du patient [20].
rôle important dans leur gestion. En conclusion et au vu de la littérature, le lien entre la
description de la dyspnée, son étiologie et l'intervention
Dyspnée non pharmacologique la plus adaptée doit encore être
plus amplement étudié, même si l'on peut déjà noter l'effet
La dyspnée est vécue par le patient comme une détresse de l'anxiété sur la dyspnée et l'impact positif que l'on peut
physique et psychologique, altérant sa qualité de vie et avoir sur celle-ci, notamment par le massage [20].
associée à de l'anxiété ou de la dépression. Notons que
l'anxiété et la dyspnée s'exacerbent mutuellement et que ce Encombrement bronchique
cercle vicieux complexifie la prise en charge de la dyspnée.
La prévalence de la dyspnée augmente en fin de vie et Il touche 48 à 92 % des patients en fin de vie [22], surtout
est un facteur de mauvais pronostic. Des études révèlent en cas de cancer du poumon ou du cerveau ou d'agonie de
que dans les dernières semaines de vie, 95 % des patients longue durée. L'étanchéité des voies respiratoires, une acti-
atteints de BPCO, 65 à 70 % des patients atteints de cancer vité parasympathique plus élevée et un apport excessif de
et de démences, 60 % des patients insuffisants cardiaques liquide sont mis en cause [23]. C'est également une source
et 50 % des patients sclérose latérale amyotrophique (SLA) d'angoisse pour le patient et ses proches, d'où la nécessité
connaissent une expérience de dyspnée. L'étiologie de la de ne pas banaliser ce symptôme et de pouvoir informer et
dyspnée est multiple et n'est pas clairement identifiable soutenir le patient et son entourage.
dans 24 % des cas [18]. Le kinésithérapeute aura un rôle de dépistage et de sur-
L'évaluation de la dyspnée se fonde essentiellement sur veillance de l'état d'encombrement respiratoire du patient.
la description du patient qui restera tout au long de la En effet, celui-ci peut fluctuer dans le temps et se dégrader
prise en charge le seul indicateur fiable de l'intensité de au cours d'une même journée. L'impact des troubles de la
la dyspnée. Il n'y a pas d'outil spécifique au patient en fin déglutition fréquents en soins palliatifs doit également rete-
de vie mais l'évaluation quantitative de la dyspnée peut nir toute l'attention du kinésithérapeute.
se faire via l'échelle numérique, verbale ou visuelle ana- Dans la mesure où le patient est encore capable
logique, l'échelle de Borg ou encore l'échelle de Sadoul. d'expectorer, le rôle du kinésithérapeute sera de l'aider
Nous associerons à cette évaluation l'aspect qualitatif en grâce aux manœuvres de ventilation manuelle et d'aide à
évaluant le vécu psycho-émotionnel du patient lié à la l'expectoration. Dans la mesure des possibilités du théra-
présence de la dyspnée. peute et de l'état de fatigue du patient, les séances seront
Le traitement médicamenteux est composé essentielle- idéalement de courte durée et répétées plusieurs fois dans
ment des opiacés (diminution de la sensibilité des centres la journée.
respiratoires, de la fréquence respiratoire et cardiaque et de
la tension artérielle avec effet sédatif) et des benzodiazé- Toux
pines en cas d'anxiété. L'administration d'oxygène est uni-
quement prouvée chez les patients BPCO et ne montre pas On la retrouve dans 50 % des cancers terminaux et dans
systématiquement une réduction de l'intensité de la dys- 80 % des cancers pulmonaires et elle est présente chez 47
pnée chez les patients cancéreux. Par contre, les patients à 86 % des patients en fin de vie. Elle nécessite une mise
disent se sentir mieux suite à la présence d'oxygène [19, 20]. en action des muscles inspiratoires et expiratoires, ce qui
Le traitement de kinésithérapie à proprement parler fait particulièrement défaut chez nos patients étant donné
consiste à utiliser différentes techniques en fonction de leur fatigue musculaire très importante. Elle entraîne des
l'état du patient et de l'étiologie de la dyspnée telles que complications (nausées, céphalées, fatigue, douleurs tho-
l'apprentissage du contrôle respiratoire en dehors des raciques) qui ont un impact négatif sur la qualité de vie.
périodes de crise, le contrôle de l'angoisse (par les massages, En cas de toux grasse non productive, l'aspiration sera la
une présence adéquate, la relaxation…), l'utilisation de la seule alternative possible en association avec le traitement
VNI et de l'oxygénation à haut débit nasal [21]. pharmacologique d'anticholinergique.
284
23. Kinésithérapie en oncologie et soins palliatifs

Spécificités de la phase terminale ficace ou encore lors d'une chirurgie d'ablation (laryngo-
ou pharyngolaryngectomie).
Râles du mourant
Signe de l'approche de la mort, le râle du mourant est un
bruit respiratoire dû au mouvement des sécrétions dans
Avantages, inconvénients
les voies aériennes, d'abord expiratoires puis survenant aux et complications
deux temps de la respiration. Ce symptôme est présent
La trachéotomie permet au patient d'améliorer la fonction
chez 48 à 92 % des patients en fin de vie [23]. À ce stade, le
respiratoire et donc de respirer plus confortablement et d'être
patient n'est souvent plus conscient. Ces râles sont souvent
désencombré plus facilement. En cas de survenue après une
anxiogènes pour la famille. Il convient donc de les rassurer
intubation, la trachéotomie limite les dommages ORL, dimi-
et de leur expliquer au mieux le traitement choisi visant le
nue le risque de pneumopathies nosocomiales, permet un
meilleur confort du patient.
éventuel sevrage ventilatoire et une diminution du travail
En association avec l'aspiration et essentiellement en fin
ventilatoire, facilite les soins d'aspiration, les soins de bouche
de vie, on optera pour l'utilisation d'anticholinergiques (sco-
et de changement de canule, rend la communication et la
polamine, Robinul®), dont le mécanisme d'action permet
déglutition possible, induit une mobilisation plus précoce du
une réduction des sécrétions salivaires et respiratoires et un
patient et son transfert dans des unités non intensives [25].
effet bronchodilatateur, qui sont malheureusement peu effi-
Par contre, la trachéotomie est une source d'infections et
caces si les sécrétions sont infectées ou abondantes. En cas
de traumatismes locaux liés à la présence du ballonnet dans
d'encombrement important, on recommande une aspira-
la trachée. Le risque de bouchons muqueux est également
tion avant la mise en place du traitement médicamenteux.
très présent, dû à une augmentation des sécrétions par la
seule présence de la trachéotomie, un déficit d'humidifica-
Aspiration endotrachéale tion, de filtration et du réchauffement naturel de l'air et il est
La technique de l'aspiration requiert compétence et surtout potentiellement mortel [25]. Outre l'obstruction par
expérience afin de minimiser le côté désagréable, parfois des sécrétions, une obstruction de la canule due aux maté-
traumatisant et douloureux de l'acte. Elle ne doit être uti- riaux (collapsus) ou, dans ce cadre oncologique, une dévia-
lisée qu'en cas de réel soulagement du patient. Il faudra tion de la canule ou un écrasement de celle-ci par la tumeur
peser le pour et le contre en tenant compte de l'inconfort peuvent être possibles. Les complications liées à la trachéo-
provoqué. Elle se fera toujours avec douceur et respect tomie peuvent être classées de manière chronologique [26] :
● complications à court terme : déplacement de canule
du patient et de ses proches. Les consignes globales de
l'aspiration seront : sonde la plus fine possible adaptée à (toux, inconfort, détresse respiratoire, voire emphysème
la consistance et à la quantité de sécrétions et enduite de sous-cutané associé), bouchons muqueux, décanula-
gel lubrifiant, position de la tête en hyperextension, niveau tion accidentelle, risque d'infection, problèmes liés à la
de dépression entre 70 et 170 mmHg, descente sans aspi- déglutition ;
● complications à long terme : fistule trachéo-­
rer et remontée en aspirant et en tournant la sonde entre
les doigts de manière intermittente (durée maximum œsophagienne, trachéomalacie, sténose trachéale, nécrose
15 secondes) [24]. trachéale, retard de cicatrisation, paralysie des cordes
vocales, stridor, toux, dyspnée ou enrouement, hyposensi-
bilité des voies aériennes supérieures.
Trachéotomie chez les patients Soixante-cinq pour cent des patients trachéotomisés
présenteront une complication à long terme. Bien entendu,
cancéreux toutes les complications ne se présentent pas de manière si
évidente dans le temps [27].
La trachéotomie est la mise en place d'une canule entre
le deuxième et le troisième anneau trachéal afin d'amé-
liorer la fonction respiratoire. Elle peut être transitoire Description du matériel (fig. 23.2)
(trachéotomie) ou définitive (trachéostomie). Dans le
cadre du cancer, elle peut s'avérer nécessaire lors d'un La canule externe permet le passage de l'air dans la trachée
obstacle laryngé majeur, de troubles de la déglutition et est munie d'un cordon de fixation autour du cou qui la
avec inhalation, d'un encombrement avec une toux inef- maintient dans l'axe de la trachée.

285
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

A Soins de canule
par le kinésithérapeute
B
Les guidelines existent et permettent à tout soignant de réa-
liser des soins optimaux de trachéotomie. Ils doivent être
utilisés et référencés [28].
D
La canule interne doit être nettoyée 3 fois/24 h afin d'évi-
ter une réduction de la lumière de la canule par l'accumula-
tion de sécrétions. Ce sont des soins propres et non stériles.
Il y a un intérêt à posséder un deuxième jeu de canule
pour faciliter les changements et contrôler les situations
C
E de détresse respiratoire. Le kinésithérapeute veillera au net-
toyage avant et après son traitement.
Le ballonnet doit être dégonflé au moins 2 fois/24 h
en association avec les aspirations pour limiter les dom-
mages liés à la présence de celui-ci et éliminer les sécrétions
éventuellement accumulées en amont (placer la sonde
Fig. 23.2
d'aspiration au niveau inférieur de la canule interne lors du
Canule de trachéotomie.
A. Chemise externe. dégonflement).
B. Chemise interne. Le nez artificiel est à renouveler dès qu'il est souillé et au
C. Filtre. minimum 1 fois/24 h.
D. Ballonnet.
E. Témoin de gonflage du ballonnet. Les soins bucco-dentaires et nettoyage du nez ne doivent
pas être oubliés afin de continuer à sensibiliser cette zone
sous-utilisée en vue d'une rééducation.
La canule interne est de diamètre inférieur, ce qui lui per-
met d'être introduite au sein de la canule externe. Elle est
mobile et interchangeable. Une valve phonatoire (clapet
articulé ou un bouchon mobilisateur) peut être ajoutée
Kinésithérapie
afin de permettre la phonation. Le kinésithérapeute a cinq rôles fondamentaux à jouer
Le filtre, appelé communément « nez », doit être placé auprès du patient trachéotomisé : kinésithérapie respi-
sur l'embout externe de la trachéotomie afin d'humidifier ratoire ; mobilisation et revalidation adaptée à l'état du
et de filtrer l'air inhalé. Il permet également l'apport d'oxy- patient et à son projet thérapeutique ; relaxation ; collabo-
gène au patient. ration dans les soins avec l'équipe soignante ; éducation et
La compresse, intercalée entre la peau et la canule, évite soutien du patient et de son entourage.
les lésions cutanées dues à l'humidité des sécrétions et les En ce qui concerne l'état respiratoire du patient trachéoto-
infections. misé à proprement parler, le kinésithérapeute se devra d'être
Pour certains types de canules, un ballonnet relié à attentif à tout signe de détresse respiratoire (cyanose, œdème,
un cuff à l'extérieur protège le patient contre le risque dyspnée, hypersécrétion, fièvre…) et surveillera son patient de
de fausses déglutitions ou de reflux gastro-œsophagiens près, notamment par rapport aux troubles de la déglutition et
(RGO) en adhérant aux parois de la trachée. En cas de leurs répercussions sur l'état respiratoire du patient.
ventilation artificielle, cela permet d'éviter les fuites. Le L'aérosolthérapie sera principalement utilisée pour
gonflement de ce ballonnet doit être réalisé au moyen humidifier (à l'aide de sérum physiologique) ou fluidifier les
d'un manomètre et adapté à la morphologie de chaque sécrétions (à l'aide de mucolytiques). Il se place en face de
patient. la canule, dépourvue du filtre, et est fixé par un élastique
Il existe de nombreux types de canules – avec ou sans autour du cou. Un nébuliseur ne doit jamais fonctionner « à
ballonnet, fenestrée (pour permettre la phonation) ou vide », sous peine d'être délétère (assèchement).
non, minicanules (Larytube®, Stomastent®…) – dont le Le traitement proprement dit visera le maintien ou
choix variera en fonction de l'objectif du traitement et l'amélioration de la fonction respiratoire. En cas de sevrage
des capacités du patient à protéger ses voies aériennes, à de trachéotomie, le kinésithérapeute devra réapprendre
déglutir… au patient à expectorer par les voies aériennes supérieures
286
23. Kinésithérapie en oncologie et soins palliatifs

de manière efficace en attendant la fermeture complète Références


du trachéostome. Pour ce faire, une compression supplé-
mentaire au niveau de l'orifice à l'aide des doigts peut être [1] Machiels JP. Notes de cours d'oncologie. Bruxelles ; 2013–2012.
nécessaire au moment de la toux. [2] Ligue nationale contre le cancer. Cancer des voies aérodigestives
supérieures ; Janvier 2009.
L'aspiration du patient trachéotomisé se fait si et
[3] Russi EG, Corvò R, Merlotti A, Alterio D, et al. Swallowing dysfunc-
seulement si le patient ne peut se dégager suffisam- tion in head and neck cancer patients treated by radiotherapy  :
ment par ses propres moyens ou en situation d'urgence review and recommendations of the supportive task group of the
(ex. : bouchon muqueux). L'utilisation d'une sonde d'un Italian Association of Radiation Oncology. Cancer Treat Rev 2012 ;
calibre inférieur à la moitié du diamètre de la canule est 38(8) : 1033–49.
[4] Ferlay J, Steliarova-Foucher E, Lortet-Tieulent J, Rosso S, et al. Cancer
recommandée. incidence and mortality patterns in Europe : estimates for 40
La mise en place d'une VNI est identique aux autres countries in 2012. Eur J Cancer 2013 ; 49(6) : 1374–403.
patients à condition de porter une attention soutenue à [5] National Cancer Institute. Surveillance, epidemiology, and end
l'humidification et au soutien des tubulures afin d'éviter results program. En ligne : seer.cancer.gov/statfacts/html/all.html.
[6] National Lung Cancer Partnership. En ligne : www.nationallungcan-
une décanulation progressive due au poids du matériel.
cerpartnership.org.
Enfin, il faut être tout particulièrement attentif à la prise [7] Etienne-Mastroïanni B, Freyer G, Cordier JF. Secondary lung cancers.
en charge au domicile, pour laquelle cette systématisation Rev Prat 2003 ; 53(7) : 756–9.
des soins peut encore être améliorée et le kinésithérapeute [8] Park HS, Kim YI, Kim HY, Zo JI, et al. Bronchial artery and systemic
peut apporter toutes ses compétences, notamment respi- artery embolization in the management of primary lung cancer
patients with hemoptysis. Cardiovasc Intervent Radiol 2007 ; 30(4) :
ratoires, auprès du patient trachéotomisé [27]. 638–43.
[9] Roberts ME, Neville E, Berrisford RG, Antunes G, Ali NJ. BTS Pleural
Disease Guideline Group. Management of a malignant pleural
Points clés effusion : British Thoracic Society pleural disease guideline 2010.
Thorax 2010 ; 65(Suppl. 2) : ii32–40.

Le kinésithérapeute, comme tout autre soignant, [10] Light RW. Pleural diseases. 5th ed. Lippincott Williams & Wilkins ;
2007 427 p.
se doit d'être alerte aux symptômes diagnostiques [11] King Jr TE, Schwarz MI, editors. Interstitial lung disease. 4th ed.
du cancer : amaigrissement, fatigue, troubles Hamilton : B.C. Decker ; 2003.
digestifs, dyspnée, toux, plaie qui ne guérit pas. [12] Fong DYT, Ho JWC, Hui BPH, Lee AM, et  al. Physical activity for

Le patient cancéreux est bien souvent une per- cancer survivors : meta-analysis of randomised controlled trial. BMJ
2012 ; 344 : e70.
sonne fatiguée et fatigable : il est donc nécessaire
[13] Institut national du cancer. Activité physique et cancer. Fiche
d'adapter le traitement et de surveiller toute alté- repère : état des connaissances en date du 30 janvier 2012. En ligne :
ration de l'état général. www.e-cancer.fr/rss-prevention/6875.

Dans le cadre du cancer ORL, la prise en charge [14] Fondation contre le cancer. La radiothérapie. Fondation contre le
respiratoire est liée à la pathologie mais aussi aux cancer ; 2013.
[15] Quoix E, Mornex F, Milleron B, Pauli G. Manifestations respiratoires
effets secondaires des traitements. radio- et chimio-induites. Revue des maladies respiratoires ; 14(5) :

Dans le cadre du cancer pulmonaire (primaire 341–53.
ou métastase), de nombreuses complications [16] Cramp F, Byron-Daniel J. Exercise for the management of cancer-
nécessitent une prise en charge respiratoire pré- related fatigue in adults. Cochrane Database Syst Rev 2012 ; 11 :
CD006145.
ventive, éducative et de désencombrement.
[17] Unger M. Endobronchial therapy of neoplasms. Chest Surg Clin N

Les traitements oncologiques (chimiothérapie, Am 2003 ; 13(1) : 129–47.
radiothérapie et chirurgie) ont une agressivité [18] Pralong G, Fellrath F. La dyspnée en soins palliatifs. Guide des soins
locale et générale variable. palliatifs du médecin vaudois. vol. 10 ; 2009.

L'aspect psychologique de cette pathologie ne [19] Cranston JM, Crockett A, Currow D, Ekström M. Withdrawn :
oxygen therapy for dyspnoea in adults. Cochrane Database Syst
peut être négligé : une prise en charge globale du Rev 2013 ; 11 : CD004769.
patient s'impose et nécessite une écoute attentive [20] Currow D, Johnson M, White P, Abernethy A. Evidence-based
et un soutien de qualité. ­intervention for chronic refractory breathlessness : practical thera-

Les soins palliatifs, ce doit être « ajouter de la vie pies that make a difference. Br J Gen Pract 2013 ; 63(616) : 609–10.
[21] Bausewein C, Booth S, Gysels M, Higginson I. Non-pharmacological
aux jours plutôt que des jours à la vie ».
interventions for breathlessness in advanced stages of malignant

La combinaison trachéotomie et traitements de and non-malignant diseases. Cochrane Database Syst Rev 2008 ; 2 :
kinésithérapie à domicile facilite l'éducation. CD005623.

287
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

[22] Mercadante S, Villari P, Ferrera P. Refractory death rattle : deep aspi-


ration facilitates the effects of antisecretory agents. J Pain Symptom
Pour en savoir plus
Manage 2011 ; 41(3) : 637–9.
[23] Vinay P, Belleau L, Dallaire M, Daneault S, et al. Soigner les râles termi- Hoerni B. Cancérologie et hématologie. Coll. Pour le praticien. Paris :
naux. Médecine palliative : Soins de support – Accompagnement – Masson ; 2001.
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[24] American Association for respiratory care. AARC Clinical Practice 45(11), special issue.
Guidelines. Endotracheal suctioning of mechanically ventilated Rubenfeld G, Curtis J. Palliative respiratory care. Part II. Respir Care 2000 ;
patients with artificial airways 2010. Respir Care 2010 ; 55(6) : 45(12), special issue.
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2013 ; 148(1) : 6–20.
[28] The Intensive Care Society. Standards for the care of adult patients
with a temporary tracheostomy ; 2011.

288
Chapitre 24
L'entraînement physique
en réadaptation cardiaque
Michel Lamotte

PLAN DU CHAPITRE
Prévention primaire 290
Prévention secondaire 290
Réadaptation pluridisciplinaire 290
Programmation de l'entraînement 291
Renforcement musculaire 293
Cours de gymnastique collectifs
en réadaptation cardiaque 295
Conditions climatiques et activité physique 295
Quels genres d'activité physique proposer ? 295
Conclusion 296

Kinésithérapie respiratoire
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III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

L'effet d'une activité physique bien dosée sur la santé n'est programme d'exercices. Après 1 an, et de manière plus mar-
plus à démontrer, tant en prévention primaire (« que dois- quée encore après 2 et 4 ans, l'évolution des patients du
je faire pour rester en bonne santé ? »), qu'en prévention groupe « exercice » était nettement plus favorable que celle
secondaire (« j'ai été victime d'un problème de santé : que du groupe « dilatation », tant en termes de capacité phy-
dois-je faire pour éviter de récidiver ? »). Pour atteindre un sique (VO2 max) que de réadmission à l'hôpital, de morbi-
impact significatif, cette activité doit répondre à certains dité, de mortalité et même de coût. La « survie sans nouvel
critères : reposer sur l'entraînement dynamique ; être pro- événement » à 4 ans était de 70 % dans le groupe « exer-
gressive, régulière, adaptée ; représenter un volume et une cice » pour seulement 50 % dans le groupe « dilatation ».
intensité suffisante. Cette étude a été confirmée plusieurs fois et notamment
Lorsque le traitement est optimal, seul un entraînement par une équipe belge [3]. Enfin, en ce qui concerne l'insuffi-
bien conçu permet de maintenir ou de retrouver une capa- sance cardiaque, la méta-analyse Extra-match [4] démontre
cité physique aussi normale que possible. Il s'agit d'un véri- un effet bénéfique de l'entraînement quel que soit l'âge
table « challenge » entre les mains des kinésithérapeutes. (< ou > 60 ans), la classe fonctionnelle (NYHA I-II ou III-IV),
la fraction d'éjection ventriculaire gauche (FEVG) (< ou >
27 %) ou la capacité fonctionnelle (< ou > 15 mL/ kg/min).
Ces données sont d'autant plus intéressantes que l'entraî-
Prévention primaire nement était considéré comme une contre-indication pour
L'activité physique contribue notamment à la prévention ce type de patients il y a 15 ans [4–8].
des maladies cardiovasculaires (C-V), à lutter contre l'ostéo-
porose, la perte de masse musculaire, l'obésité et le diabète
(tous deux facteurs de risque cardiovasculaire), et permet Réadaptation pluridisciplinaire
de diminuer la survenue de certains cancers. De nom-
breuses études ont quantifié la diminution de mortalité liée
à la pratique d'une activité physique régulière. Dans une de
Types de prises en charge après
celles-ci, réalisée sur près de 17 000 personnes suivies pen- un événement aigu
dant 16 ans, le risque de mortalité était diminué de 27 % Après un événement aigu, un enrôlement dans un pro-
pour une pratique d'activité modérée et de près de 50 % gramme structuré de réadaptation est souvent préconisé.
pour une pratique plus importante [1]. À la sortie de l'hôpital, cette prise en charge peut toutefois
prendre différentes formes :
● en centre fermé (convalescence) immédiatement ou 1 à

Prévention secondaire 2 semaines plus tard ;


● en pratique libérale dès la sortie ;

L'effet de l'activité physique en prévention secondaire ● en «  ambulatoire » (centre spécialisé), immédiatement


(C-V) n'est plus à démontrer. Certaines études ont mis en ou quelques semaines plus tard.
évidence que des patients s'engageant dans la correction Les centres « fermés » sont nombreux en France et en
des différents facteurs de risque peuvent présenter, après la Suisse où coexiste éventuellement un centre ambulatoire
réadaptation, un risque relatif inférieur à celui d'une popu- pour la suite de la prise en charge. Au Luxembourg, la réa-
lation de même âge et n'ayant pas (encore) eu d'infarctus. daptation cardiaque ne peut se faire qu'en centre hospita-
Plusieurs études ont démontré, il y a plus de 15 ans lier (en centre fermé ou ambulatoire) et en Belgique, elle
déjà, une réduction de mortalité de 20 à 30 % chez les est le plus souvent ambulatoire. D'autres facteurs plus indi-
patients pratiquant la réadaptation comparés aux patients viduels conditionnent également ce choix : éloignement,
ne s'engageant pas dans un tel programme. Ce bénéfice accès, reprise du travail, tempérament plus individuel, coût,
a, depuis, été démontré dans différentes populations de motivation, limitation physique très importante, etc.
« cardiaques » (coronariens, valvulaires, ou plus récemment Les trois études européennes successives Euroaspire
dans le cadre de l'insuffisance cardiaque). Dans une étude [9–11] indiquent que seulement 22 % des patients pou-
particulièrement intéressante [2], 100 patients ayant été vant bénéficier de réadaptation cardiaque la pratiquent :
victimes d'un accident cardiaque ont été répartis au hasard les hommes plus souvent que les femmes, les jeunes plus
dans deux groupes ; dans le premier, les patients ont subi souvent que les personnes âgées, les opérés et les « dilatés »
une dilatation coronaire ; dans le second, ils ont suivi un plus souvent que les patients traités médicalement.
290
24. L'entraînement physique en réadaptation cardiaque

Intérêts de la prise en charge évidemment, quand on débute un programme, il faut être


progressif, mais régulier. Les séances doivent débuter par un
pluridisciplinaire échauffement (charges faibles ou gymnastique « douce »)
Un soutien psychologique (30 % de dépressions après et se terminer par une phase de retour au calme (exercices
un événement aigu), diététique (28 % des patients « car- d'étirement ou de relaxation) [17].
diaques » sont diabétiques, 47 % hypercholestérolémiques,
61 % hypertendus, 38 % obèses), un aménagement de la Constitution d'un programme
reprise du travail ou un soutien pour l'arrêt du tabac (18 %
de fumeur) sont nécessaires pour de nombreux patients Le « corps » d'un programme classique de réadaptation se
[11, 12]. Cette prise en charge pluridisciplinaire est propo- compose d'une partie d'entraînement dit d'endurance et
sée dans les centres spécialisés. Hors de ces structures, outre d'une partie de renforcement musculaire. Comme nous
la possibilité de référer aux autres paramédicaux en pra- le verrons plus loin, le terme « endurance », largement
tique libérale, il est possible de se procurer des fascicules de utilisé, ne convient pas tout à fait puisque parfois il s'agit
sensibilisation aux facteurs de risque auprès de nombreuses également d'entraîner les filières anaérobies. On devrait
associations impliquées dans la prévention. De nombreuses plus précisément parler d'entraînement dynamique (ED)
publications reprennent les « recommandations » sous ces ou d'entraînement à visée cardiorespiratoire, et de renfor-
différents aspects [13–15]. Ces informations papier ne rem- cement musculaire (RM) appelé également au départ de
placent en aucun cas la prise en charge par un spécialiste. la terminologie anglo-saxonne entraînement résistif. On
considère que deux tiers à trois quarts du temps doivent être
consacrés à l'ED et le reste au RM segmentaire.
Formation à la réanimation
Tout thérapeute prenant en charge des patients « car-
diaques » doit maîtriser les techniques de réanimation et
Volume de l'entraînement
avoir en tête une procédure d'urgence bien réfléchie en cas et relation volume/bénéfice
de « problème ». Cette compétence est bien illustrée dans
De nombreuses études ont déterminé la quantité d'effort
une étude américaine qui relate que sur 21 patients présen-
nécessaire afin d'obtenir un effet de protection C-V. La relation
tant un arrêt cardiaque (relevés en 5 ans dans 167 centres),
« volume d'exercice/bénéfice C-V » présente clairement un
18 ont été réanimés avec succès [16].
continuum jusqu'à une quantité d'exercices très importante.
Dans l'étude faisant référence en ce domaine, Paffenbarger [1]
a démontré une baisse de mortalité (totale) de moitié chez les
Programmation sujets pratiquant l'équivalent de 2500 kcal/semaine d'activité
de l'entraînement physique comparés à des sédentaires (< 500 kcal/semaine).
On considère, tant en prévention primaire qu'en prévention
Très schématiquement, au cours de la réadaptation, le secondaire, que la « dose idéale » d'exercices doit correspondre
patient doit apprendre les « bons » et les « mauvais » efforts à une dépense énergétique de 1500 à 2000 kcal/semaine. Au
et les bonnes méthodes de travail pour obtenir un effet cours des séances de réadaptation, la dépense énergétique
protecteur et/ou de lutte contre les facteurs de risque. Il dépend de l'intensité de l'entraînement ; une séance « type »
apprend également à se contrôler et à connaître ses limites permet de dépenser entre 200 et 400 kcal [18] (dont la partie
(qui sont la plupart du temps bien plus élevées qu'il ne le RM ne représente que plus ou moins 100 kcal en fonction des
pense). Bien que la capacité physique (VO2 max) augmente charges imposées [19]). Il est conseillé aux patients de com-
classiquement de 10 à 40 % au cours d'une réadaptation pléter leurs séances par une activité physique moins intense
« encadrée », le facteur le plus important de ces séances (la marche) afin d'atteindre la dépense énergétique hebdo-
d'exercices est, comme pour le reste de la réadaptation car- madaire optimale. Dans une étude intéressante, Hambrecht
diaque, « d'apprendre les règles » et de continuer à les appli- [20] a mis en évidence un arrêt de la progression de l'athé-
quer à long terme. rosclérose dans un groupe de patients dépensant 1500 kcal
Afin de réaliser une réadaptation optimale, et donc d'activité physique hebdomadaire (activité intensive), et une
d'obtenir un « effet protecteur C-V », l'activité physique régression des lésions coronaires dans un sous-groupe dépen-
proposée doit répondre principalement à deux critères : un sant plus de 2200 kcal. Bien qu'abordable, peu de patients, et
volume de travail minimum et une intensité suffisante. Bien de sujets « sains » d'ailleurs, parviennent à l'objectif fixé dans
291
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

les recommandations. Un moyen simple de quantifier l'éner- Cette FC cible peut être calculée au départ de la formule
gie nécessaire lors de la « marche » (entre 3 à 12 km/h) est de d'Astrand : FC max = 220 − âge. Cette formule n'est abso-
considérer que l'on dépense 1 kcal/kg de poids/km parcouru lument pas applicable pour, notamment, une personne
(à plat), soit pour une personne de 70 kg qui parcourt 5 km en qui prend des médicaments influençant la FC et/ou la PA,
1 h : 350 kcal. On considère également qu'il est plus important comme c'est le cas de nombreux patients « cardiaques ».
d'augmenter la quantité d'exercices par rapport aux habitudes Afin de programmer au mieux un entraînement, il est impé-
antérieures plutôt que de considérer un chiffre comme « suffi- ratif d'obtenir une épreuve d'effort (EE) :
sant » en soi et ce, particulièrement pour les sujets totalement ● au-delà de 40 ans pour les hommes et de 50 ans pour les

sédentaires pour lesquels l'objectif de 1500–2000 kcal paraît femmes ;


inaccessible. Il existe actuellement des appareils portables ● en présence de médications influençant la FC ou la PA ;

fournissant une valeur de dépense énergétique fiable. ● en présence de facteurs de risque C-V (tabac, obésité,

En termes de risques cardiovasculaires, la capacité phy- cholestérol, etc.) ;


sique maximale (VO2 max) atteinte est importante mais les ● en présence de pathologie C-V.

améliorations obtenues en cours de réadaptation le sont Cette EE peut être une EE dite « simple ». Dans ce cas, on
aussi. C'est ainsi que l'on considère que pour chaque milli- réalise une épreuve sur vélo ou tapis roulant, qui consiste
litre de VO2/kg/min « gagné », la mortalité cardiaque diminue en une augmentation progressive de la charge imposée en
de 10 % [21] ou que chaque pourcentage de VO2 « gagné » est observant l'ECG et la PA. L'arrêt de l'effort sera déterminé
accompagné d'une baisse de mortalité C-V de 2 % [22]. par la symptomatologie ou la décision du médecin. Si la
Il ne suffit donc pas de « bouger » (même un volume suf- technique est disponible, il est préférable de réaliser une
fisant), il faut développer sa capacité physique (VO2 max) « ergospirométrie » au cours de laquelle seront observées, en
pour obtenir ce « gain de survie », associé à un gain fonction- plus des paramètres obtenus lors d'une épreuve « simple »,
nel. Il est dès lors important de considérer l'effet « intensité/ les variables ventilatoires et métaboliques. Elle fournit de
bénéfice ». nombreuses informations permettant de mieux discerner le
facteur limitant à l'effort et de programmer plus précisément
l'entraînement. Cette épreuve fournit également plusieurs
Intensité de l'entraînement facteurs pronostiques importants (VO2 max, seuil anaéro-
et  relation « intensité/bénéfice » bie, les pentes Ve/VCO2, Ve/VO2, VO2/W, les ERO2 et PetCO2
maximaux et au seuil anaérobie, etc.) [26, 27]. Une deuxième
Si l'effet « volume d'exercice/bénéfice C-V » abordé ci-dessus
EE doit être proposée après environ 3 mois d'entraînement
est connu depuis longtemps, l'effet « intensité de travail/
afin d'évaluer les bénéfices mais également de revoir éven-
bénéfice » a été mis en évidence plus récemment. S'il est vrai
tuellement la programmation dudit entraînement.
que le travail à basse intensité induit certains bénéfices (effet
Une fois ce test obtenu, le travail peut se fonder sur dif-
sur le poids, baisse du « mauvais » cholestérol, effet sur l'hy-
férents critères :
pertension artérielle), le travail à haute intensité engendre des ● la FC atteinte au seuil ventilatoire (surtout en pneumo-

bénéfices plus importants sur ces mêmes paramètres. Plusieurs


logie) ou au seuil anaérobie ;
travaux ont comparé des quantités équivalentes d'exercices ● l'échelle de dyspnée ou l'échelle de Borg ;

hebdomadaires réalisés à des intensités différentes afin de ● la FC max atteinte.

dégager cette relation intensité/bénéfice. Dans une méta-


Nous détaillerons par la suite essentiellement la program-
analyse publiée en 2006, Swain [23] démontre cette relation
mation utilisant les pourcentages de la FC max atteinte lors
tant pour la capacité physique que pour d'autres paramètres
de l'ergospirométrie ou de l'épreuve « simple ».
métaboliques tels que le diabète, le BMI, la pression artérielle
Il est important de surveiller la FC, au moins lors des pre-
(PA), les lipides sanguins ou le cholestérol. D'autres études se
miers entraînements. Outre un ECG simplifié utilisé lors des
sont intéressées uniquement à la relation intensité/bénéfice
premières séances, un système de monitoring (portable
en termes de VO2 max et sont aussi éloquentes [24–25].
et personnel) peut être proposé aux patients. Ce moni-
toring permet au patient de « doser » ses efforts grâce au
Épreuve d'effort et dosage de l'intensité
contrôle fiable d'un paramètre physiologique. Toutefois le
Lors de l'épreuve d'effort (ED), la notion d'intensité est patient devra progressivement apprendre à se passer de ce
« facilement dosable » par la mesure de la fréquence car- contrôle systématique et s'entraîner « à la sensation ». Il faut
diaque (FC) : on parle de FC cible. également évaluer la PA, tant au repos qu'à l'effort.

292
24. L'entraînement physique en réadaptation cardiaque

Afin d'atteindre un volume suffisant, l'ED devrait Complément de l'entraînement


durer au minimum 20 à 30 minutes. Il est très rare qu'un dynamique
patient ne soit pas capable de s'exercer ce temps défini
pour autant que les charges de travail soient bien choisies. Le tapis roulant, le rameur, le stepper (escaliers), l'ergomètre
Classiquement, les niveaux d'intensité proposés dans la lit- à bras ou d'autres ergomètres encore (machine à ski de
térature afin d'améliorer la capacité physique sont compris fond, vélo elliptique, stepper avec aide des bras) permettent
entre 40 et 85 % de la VO2 max, correspondant à 63 à 93 % d'augmenter le volume de travail en évitant la lassitude
de la FC max. Chez le patient, l'intensité la plus couramment tout en entraînant d'autres groupes musculaires. Différents
appliquée est comprise entre 70 et 90 % de la FC max mesu- types de programmes basés sur l'âge sont proposés par
rée lors de l'EE. les constructeurs. La programmation individuelle utilisant
des niveaux de FC basés sur une EE est de loin préférable
car elle permet d'ajuster l'entraînement à la capacité et à
Entraînement continu et entraînement la médication du patient. Enfin, il faut également se méfier
par intervalles d'appareils sollicitant de grandes masses musculaires (bras
L'entraînement continu (sans modification de charge) uti- et jambes en même temps) qui peuvent chez certains
lise des charges amenant la FC dans une zone comprise patients imposer une « surcharge » au niveau central (car-
entre 70 et 85 % de la FC max atteinte lors de l'EE. diaque), alors que le patient ne se sent pas limité par l'effort
Pour le travail en intervalles (avec modifications de au niveau périphérique (musculaire), celui-ci étant réparti
charge au cours de l'entraînement), l'intensité de chaque sur une grande masse musculaire. La FC cible sur ces dif-
phase dépend de leur durée et peut varier d'un rapport férents ergomètres sera comprise entre 70 et 90 % de la FC
30 s (difficile)/30 s (facile) à un rapport 4 min/4 min. La max atteinte lors de l'EE.
durée des phases de récupération est au minimum aussi
longue que la durée des phases intenses. Les phases de Limites de la programmation
récupération ne doivent toutefois pas être trop aisées afin en pourcentage de la FC max
de permettre une élimination optimale des lactates accu-
Ce mode de programmation a le mérite d'être simple,
mulés pendant la phase intense [28]. En réadaptation,
basé sur un paramètre physiologique facile à surveiller et
un rapport 2/1 (récupération/phase intense) est souvent
applicable chez bon nombre de patients. Il n'est cependant
proposé. Pratiquement, le travail en intervalles propose,
pas rare de devoir proposer des programmes utilisant des
par exemple, des alternances de charges faisant varier la
FC cibles plus élevées (EE sous-maximale, chronotropisme
FC entre 80 à 90 % de la FC max en charge dite « haute »
fort limité, etc.), ou moins élevées (modification de l'ECG,
(période intense, pendant 2 min) et 65 à 75 % en charge
limitation ventilatoire, réponse tensionnelle inadéquate,
dite « basse » (ou de récupération, pendant 4 min). Le
seuil anaérobie abaissé). Cette programmation au cas par
temps total sera équivalent au temps proposé pour un
cas repose sur l'expérience et elle est peu décrite dans la
travail continu. Les avantages du travail par intervalles
littérature.
sont notamment :
● une moins grande lassitude ;

● un travail à intensité plus élevée pour une fatigue

moindre ; Renforcement musculaire


● un effet plus marqué sur le seuil anaérobie et la VO
2
max. Importance et utilité du travail
Assez curieusement, l'entraînement par intervalles est de musculation
proposé pour des patients très déconditionnés (notam-
ment en pneumologie) et à l'opposé pour les patients ou Il ressort de nombreuses études que le travail de muscu-
les sportifs déjà performants. Tout récemment, une étude lation est un complément indispensable en réadaptation
menée chez l'insuffisant cardiaque a démontré clairement (notamment C-V). Ce type d'entraînement permet évidem-
une amélioration plus importante de la VO2 max et du seuil ment d'augmenter la force et la fonctionnalité du patient
anaérobie, mais également de la FEVG lors d'un entraîne- mais aussi d'obtenir des gains plus importants en termes
ment par intervalles comparé à un entraînement continu de VO2 max. Pour démontrer cela, Mc Cartney [34] a
[29–33]. réparti au hasard, après 5 mois d'entraînement, des patients

293
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

c­ oronariens en deux groupes ; chaque groupe a poursuivi également une amélioration « fonctionnelle » plus impor-
un ED commun mais le premier groupe complétait celui-ci tante [41]. La notion « série plus longue = endurance versus
par du tennis de table ou du volley-ball alors que l'autre série plus courte = force », bien établie chez les sujets jeunes
réalisait quelques exercices de RM (2 × 4 postes, dix répé- et sains, semble moins évidente dans des populations plus
titions à 40–80 % de la contraction maximale volontaire âgées et/ou pathologiques pour lesquelles les gains, notam-
[CMV]). Les gains force/VO2 étaient de 13/2 % dans le pre- ment fonctionnels, sont toujours plus élevés avec des charges
mier groupe et 43/15 % dans le second ! lourdes [42–44]. Notons enfin que pour lutter contre l'ostéo-
porose, également fréquente chez les patients cardiaques,
les contraintes (charges) doivent être importantes.
Recommandations générales En ce qui concerne l'impact hémodynamique, il a été
Les modalités générales de travail permettant un bénéfice démontré dans différents travaux que contrairement à
fonctionnel optimal sont bien connues des kinésithéra- l'idée reçue, pour un travail total équivalent, l'utilisation
peutes. Pour rappel : les charges utilisées doivent être supé- de charges plus lourdes combinée à un nombre réduit de
rieures à 40 % CMV, en fonction de la charge. Les séries 1 à répétitions (3 × 10 × 75 % CMV) induit une charge hémo-
5 à réaliser comprendront de 5 à 25 répétitions d'un travail dynamique moindre (PA et FC) que l'utilisation de charges
qui doit être « explosif ». Le travail pyramidal consistant à plus légères répétées un plus grand nombre de fois (3 ×
augmenter progressivement les charges en diminuant le 17 × 45 % CMV). Ceci s'explique essentiellement par une
nombre de répétitions au fil des séries semble également différence de durée entre les deux modalités [45, 46].
plus efficace [35].
Temps de récupération
Renforcement musculaire Les temps de récupération entre les séries proposés dans
la littérature varient entre 30 secondes et 3 minutes. En
en réadaptation cardiaque général, les recommandations préconisent 1 minute. Du
Il convient de choisir des modalités afin de trouver un com- point de vue des substrats énergétiques, on considère qu'il
promis permettant : faut entre 30 secondes et 5 minutes pour régénérer les
● un travail efficace sur le plan musculaire et fonctionnel ; stocks musculaires. Dans la population qui nous concerne
● de ne pas faire courir de risques au patient (sur le plan ici, il ne semble pas intéressant de raccourcir ces temps de
hémodynamique) ; repos afin d'obtenir une fatigue musculaire supplémen-
● un rapport « temps d'entraînement/bénéfice » optimal. taire. De plus, un temps compris entre 60 et 90 secondes
entre les séries successives est indispensable à un retour
Nombre de séries des paramètres hémodynamiques à leurs valeurs de repos
[47].
Le nombre de séries à exécuter est toujours sujet à discussion.
Plusieurs travaux ont tenté de montrer la supériorité d'un travail
Vitesse d'exécution
en cinq séries comparées à trois ou de trois séries comparées à
une. Les résultats sont mitigés, pratiquement il est courant de Les vitesses proposées dans la littérature varient de 1 seconde
proposer trois séries, mais la littérature propose régulièrement (phase concentrique), 1 seconde (phase excentrique) à
des programmes d'une seule série réalisée jusqu'à épuisement 6 fois plus lentement. Il semble toutefois que le travail à
et confirme que l'intensité est plus importante que le nombre « haute vitesse », pour une charge donnée, soit préférable au
de séries pour développer la force [36–38]. travail lent [48, 49]. En effet, la contrainte hémodynamique
est d'autant plus importante que la vitesse d'exécution est
Intensité lente. Un plus grand nombre de manœuvres de Valsalva
en cas de travail « lent » et une plus longue durée des
Les résistances doivent être comprises entre 40 et 80 % CMV. Si séries (si effectuées lentement) expliquent cette surcharge
un test maximum n'est pas réalisé, on peut utiliser, par aug- hémodynamique.
mentation progressive, un poids qui permet de réaliser dix
répétitions avec difficulté, ce qui correspond à environ 70 %
Remarques complémentaires
CMV [37–40]. Plusieurs travaux montrent un intérêt à utili-
ser des charges plutôt lourdes et des séries plus courtes afin Les progrès en musculation sont rapides au début de l'en-
d'obtenir un gain plus important en termes de force mais traînement et il est nécessaire de très souvent adapter les
294
24. L'entraînement physique en réadaptation cardiaque

charges mobilisées pour que celui-ci reste « éprouvant », ce pratique d'exercices chez certaines personnes. Adapter le
qui est indispensable pour obtenir des bénéfices. Afin de rythme en fonction du surcroît de travail face au vent et
limiter la charge hémodynamique, il faut impérativement porter des vêtements adaptés permettent de sortir sans
éviter tout blocage respiratoire (manœuvre de Valsalva), risque.
ne pas hésiter à utiliser des charges lourdes combinées à En ce qui concerne l'altitude, en dessous de 1500 m, il
un nombre de répétitions plus limité, travailler rapidement faut simplement être attentif à un essoufflement inhabi-
et prendre un temps de récupération suffisant entre les tuel. Au-dessus de 1500 m, une montée progressive (300 m
séries. par jour) et une « écoute de son corps » sont les clés de la
Il est recommandé de faire travailler les groupes mus- sécurité.
culaires importants des membres supérieurs et inférieurs,
agonistes et antagonistes, sans oublier les abdominaux et
les dorsaux. Quels genres d'activité physique
Les douleurs musculaires ressenties après les pre-
mières séances de musculation, culminant 48 h après les
proposer ?
exercices, sont très fréquentes mais régressent au fil des
séances. Enfin, certains médicaments (statines) augmen- Marche
tent la survenue des douleurs musculaires. Les étirements,
La marche est une activité physique facile à organiser et
indispensables quand on pratique de la musculation,
à adapter quelles que soient les circonstances. Si elle est
permettent éventuellement de diminuer ces douleurs
soutenue (> 5 km/h), prolongée (> 30 min) ou en terrain
musculaires.
difficile, elle peut avoir un effet bénéfique en termes de
santé. Tout dépend, une fois de plus, de l'effort relatif qu'elle
représente. Pour atteindre les recommandations en termes
Cours de gymnastique collectifs de santé, il faut marcher 30 à 60 minutes par jour, à 4 ou
5 km/h.
en réadaptation cardiaque
Dans de nombreux centres de réadaptation, des cours Jogging et course à pied
de gymnastique collectifs sont proposés. Ils visent à
entretenir la souplesse, l'équilibre et le travail fonction- Au même titre que la marche, ces activités sont idéales
nel. L'intensité du travail est difficilement quantifiable pour « la santé ». Toutefois chez un patient n'ayant jamais
lors de telles activités et gérer ces séances de groupes en couru, ou plus couru depuis très longtemps et/ou présen-
étant attentif au niveau d'effort que cela représente pour tant un « léger » excès de poids, le jogging (7 à 10 km/h)
chacun est une tâche qui demande un haut niveau de ou la course à pied (> 10 km/h) risque de provoquer diffé-
compétence. rents problèmes ostéoarticulaires (tendinites, contractures
importantes, maux de dos, etc.). Il faudra augmenter pro-
gressivement le nombre de kilomètres parcourus (pas plus
de 10 % d'augmentation par semaine) et contrôler la FC
Conditions climatiques et activité cible. Il est recommandé de toujours privilégier la quantité
physique (arriver à environ 30 min), plutôt que la qualité (courir vite,
mais pas longtemps).
S'il fait très chaud ou très humide, l'exercice physique Pour atteindre les recommandations en termes de santé,
demande plus d'énergie afin de garder une température il faut courir par exemple 3 fois 8 km par semaine.
interne stable. Il faut s'hydrater convenablement (le poids
corporel ne doit pas varier de plus de 500 g entre le début
et la fin d'une séance d'exercice).
Natation
Le froid augmente également le travail cardiaque. Il est La natation est souvent considérée comme un excellent
cependant facile, jusqu'à une température de −10 °C, de sport, pour tous et à tout âge. Cette activité permet de
s'habiller en conséquence et de ne courir aucun risque travailler de nombreux groupes musculaires différents, ainsi
pendant la pratique d'une activité physique. Le vent est que la capacité pulmonaire. Pour atteindre un objectif de
parfois considéré comme un facteur défavorable pour la prévention, il faut, à terme, nager suffisamment (> 1/2 heure
295
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

sans s'arrêter), quelle que soit la nage et maintenir un rythme Conclusion


au minimum modéré.
L'entraînement physique est une partie importante de la
Aquagym réadaptation cardiaque. Les effets, tant psychologiques que
physiologiques, obtenus par cet entraînement influencent
Entre la gymnastique et la natation, l'aquagym permet éga- la morbidité et la mortalité des patients de manière signi-
lement d'entretenir un bon tonus musculaire. Si le rythme ficative. Pour obtenir ces résultats, l'entraînement doit
imposé est important, l'aquagym permet peut-être d'obte- répondre à certains critères : reposer sur l'entraînement
nir un léger effet bénéfique C-V. dynamique, être régulier, reposer (idéalement) sur une
épreuve d'effort, et représenter un volume et une inten-
Ski sité suffisants. Un travail de renforcement musculaire est
complémentaire.
Le ski alpin n'apporte aucun effet protecteur C-V. Sa pra- Il s'agit d'un « challenge » particulièrement efficace et
tique nécessite toutefois une bonne préparation (mus- passionnant, résidant essentiellement dans les mains des
culaire). Le ski de fond, par contre, permet de développer kinésithérapeutes et entraîneurs physiques.
la capacité physique et d'obtenir un effet protecteur. En
tenant compte des précautions liées à la haute altitude
(séjour au-dessus de 2500 m) et aux conditions climatiques,
le ski n'est pas déconseillé. Il peut être intéressant de propo- Références
ser un contrôle épisodique de la FC (ski de fond).
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Ce sont des activités physiques qui procurent du bien- with exercise training in patients with stable CAD : a randomized
trial. Circulation 2004 ; 109(11) : 1371–8.
être, entretiennent la souplesse, ont une influence sur le [3] Dendale P, Berger J, Hansen D, et al. Cardiac rehabilitation reduces
stress, travaillent la respiration et ont bien d'autres effets the rate of major adverse cardiac events after PTCA intervention.
encore. Ces activités ne sont pas accompagnées d'effets Eur J Cardiovasc Nurs 2005 ; 4(2) : 113–6.
protecteurs C-V, mais leur pratique n'est évidemment pas [4] Ades PA. Cardiac rehabilitation and secondary prevention of CHD.
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contre-indiquée. [5] Kavanagh T, Mertens DJ, Hamm LF, et  al. Prediction of long-
term prognosis in 12 169 men referred for cardiac rehabilitation.
Travail en salle de fitness Circulation 2002 ; 106(6) : 666–71.
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tion after PTCA : the ETICA trial. J Am Coll Cardiol 2001 ; 37(7) :
Le travail en salle de fitness permet de développer toutes
1891–900.
les facettes de la capacité physique. Comme dans les pro- [7] Belardinelli R, Lacalaprice F, Faccenda E, Volpe L. Clinical benefits of
grammes de réadaptation cardiaque, la proportion temps a metabolic approach in the cardiac rehabilitation of patients with
d'entraînement dynamique/musculation devrait être de CAD. Am J Cardiol 2006 ; 98(5A) : 25J–33J.
deux tiers/un tiers. La supervision par du personnel com- [8] Perk J, Malkes P, Gohlke H, et  al. Cardiovascular prevention and
rehabilitation. London : Springer-Verlag ; 2007.
pétent est indispensable. Pour l'ED, le contrôle de la FC (et [9] Mayer Jr O, Simon J, Heidrich J, et al. Educational level and risk pro-
de la PA) est important et doit se faire dans les règles citées file of cardiac patients in EUROASPIRE II. J Epidemiol Community
ci-dessus. Health 2004 ; 58(1) : 47–52.
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Spining countries : Findings from EUROASPIRE II survey. Atherosclerosis
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Très en vogue dans les salles de fitness, ces séances de vélo [11] EUROASPIRE. A European Society of Cardiology survey of secon-
fixe menées en musique à un rythme variable et imposé par dary prevention of CHD : principal results. Eur Heart J 1997 ; 18(10) :
un moniteur sont particulièrement entraînantes. Le béné- 1569–82.
[12] Kindermann M, Adam O, Werner N, Böhm M. Clinical trial
fice en termes de capacité physique est indéniable mais updates and hotline sessions presented at the European Society
le risque « d'aller trop loin » est également bien présent. Il of Cardiology Congress 2007. Clin Res Cardiol 2007 ; 96(11) :
conviendra de contrôler épisodiquement la FC. 767–86.

296
24. L'entraînement physique en réadaptation cardiaque

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297
Chapitre 25
Respiration et anxiété
Gregory Reychler, Vito Infante, Alain Luts

PLAN DU CHAPITRE
Physiologie des émotions 300
Définition du syndrome d'hyperventilation 300
Physiopathologie 300
Classification et symptômes 301
Étiologies 302
Diagnostic 303
Syndrome d'hyperventilation chez l'enfant 305
Prise en charge 305

Kinésithérapie respiratoire
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III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Physiologie des émotions Physiologiquement, une hyperventilation entraîne une


perte excessive de CO2, aboutissant à une hypocapnie et
Chez l'Homme, la respiration est modulée par les émo- une alcalose respiratoire. Ses conséquences sont une hyper­
tions [1, 2] et l'anxiété [3] via le système limbique jouant excitabilité du système nerveux [9] ainsi qu'une hypoxie
lui-même un rôle dans les émotions [4]. La respiration et cérébrale et cardiaque, suite à la vasoconstriction et à l'aug-
ses mécanismes de contrôle jouent donc un rôle important mentation de l'affinité de l'hémoglobine pour l'O2 [10]. Une
dans la production anormale d'anxiété et en particulier du hyperventilation prolongée peut entraîner une chute de la
trouble panique. De là, une attaque de panique s'accom- PaCO2 de moitié et la maintenir à ce niveau. Chez une per-
pagne logiquement d'un certain nombre de symptômes sonne non pathologique, l'amplitude et la fréquence respi-
cardiorespiratoires liés à l'hyperventialtion associée [5]. ratoires sont sensibles aux stimuli émotionnels et physiques
Aujourd'hui, il serait probablement plus juste de parler tels que la chaleur, le froid, la peur, l'excitation, le bonheur, la
de dysfonctionnements du pattern respiratoire plutôt que douleur. Ceci entraîne des variations de la PaCO2.
d'hyperventilation. Ces dysfonctionnements du pattern Le CO2 est l'un des facteurs les plus importants qui régissent
respiratoire peuvent produire des symptômes semblables l'activité du système nerveux. Des changements de PaCO2
à ceux de maladies respiratoires sévères. Paradoxalement, sont ainsi suivis de modifications dans les cellules nerveuses.
les examens classiques pour évaluer ces symptômes ne La chute de la PaCO2 rend les cellules nerveuses alcalines
montrent souvent rien d'anormal, ce qui rend le diagnos- et leur activité augmente, aussi bien dans les nerfs moteurs
tic difficile et fait parfois que le patient s'entend dire qu'« il que sensitifs. Les signes de cette hyperexcitabilité motrice et
n'a rien » voire qu'« il est fou » et ce, de manière totalement sensitive sont une anxiété, des tremblements, une tétanie au
injuste. Ces dysfonctionnements du pattern respiratoire niveau des mains (occasionnellement), d'anormales sensa-
sont cependant relativement fréquents puisque 10 % tions comme un engourdissement et une vitesse des réflexes
des patients en médecine interne en sont affectés avec moteurs somatiques augmentée. Ces symptômes neurolo-
une nette prédominance pour les femmes (ratio de 2 à 7 giques s'expliquent par le taux de lactate qui est augmenté
pour 1) et les personnes de 15 à 55 ans. au niveau cérébral [11]. De plus, le patient présente des signes
de dépression du système nerveux parasympathique tels que
de l'hyperréactivité, une tension nerveuse, de la transpiration,
une instabilité émotionnelle, des troubles cardiaques, intes-
Définition du syndrome tinaux et vésicaux. Le flux sanguin cérébral est également
d'hyperventilation contrôlé par le CO2. Lorsque la PaCO2 chute, le flux sanguin
cérébral diminue, menant à une hypoxie cérébrale [12]. Si la
En 1984, une définition du syndrome d'hyperventilation baisse de la PaCO2 n'est pas compensée par une production
(SHV) a été publiée : « syndrome caractérisé par une variété de bicarbonates par les reins, alors le pH sanguin augmente
de signes somatiques, induits par une hyperventilation phy- d'où l'alcalose respiratoire. Il en résulte que la courbe de dis-
siologiquement inappropriée et entièrement ou partielle- sociation de L'HbO2 se déplace vers la gauche et l'O2 est alors
ment reproductible par une hyperventilation volontaire » [6]. moins disponible pour les tissus du corps humain.
Mais la conséquence principale de l'hypocapnie est une
vasoconstriction dont les caractéristiques se retrouvent à
Physiopathologie différents niveaux. Tout d'abord au plan cérébral, lorsque la
PaCO2 est inférieure à 22 mmHg à chaque fois qu'elle dimi-
L'hyperventilation est une anomalie du contrôle respira- nue d'encore 1 mmHg, le débit cérébral perd 2 % de sa valeur
toire, définie comme un déséquilibre entre la ventilation et initiale [13]. Ceci explique une série de symptômes tels que
la demande métabolique du patient. Le SHV s'accompagne vertiges, syncopes, troubles visuels, céphalées, troubles de la
d'un schéma respiratoire particulier [7], même s'il n'est pas conscience. À ce même niveau, l'électro-encéphalogramme
spécifique. Chez les patients présentant un SHV, la principale présente quelques bouleversements. Au niveau des coro-
caractéristique physiologique en lien avec le pattern respira- naires, l'angor, les douleurs atypiques, les perturbations
toire au repos est la diminution progressive de la concen- du rythme et les modifications de l'électrocardiogramme
tration fractionnaire de CO2 en fin d'expiration (FetCO2). s'expliquent par la diminution du débit sanguin. La vaso-
Cette hyperventilation progresse vers un état stable chez la constriction est également responsable d'une froideur des
plupart des patients. Après une hyperventilation volontaire, extrémités. Des douleurs musculaires et des troubles diges-
le retour à une ventilation normale est lent [8]. tifs peuvent également perturber le patient [14].
300
25. Respiration et anxiété

Classification et symptômes panique et ceux du SHV puisque les attaques de panique


s'accompagnent d'essoufflement, de sensation d'étouffe-
Le SHV s'accompagne d'une symptomatologie peu spéci- ment, de nausées, d'une altération de la perception ou de la
fique et variable en fonction des patients. Certains tableaux peur de mourir et de perdre le contrôle [5].
sont très évocateurs. Un patient jeune, perfectionniste,
méticuleux dans son travail, nerveux, soupirant, ayant une Forme subaiguë
peur effrénée de souffrir d'une maladie grave, qui consulte
fréquemment son médecin, qui se sent fatigué, qui a les La forme subaiguë, plus fréquente (35 % des cas), est carac-
mains moites et présentant des tremblements et une tachy- térisée par une persistance de l'hyperventilation, malgré le
cardie offre toutes les caractéristiques annonciatrices d'un tarissement de la cause primitive. Seule la mise en évidence
SHV. Ce patient se sent généralement tendu et est facile- du diagnostic et la mise en place du traitement adapté
ment irritable [12]. Quatre formes peuvent être distinguées. permettent d'éviter de tomber dans cette forme subai-
guë. Autrement, le patient rentre dans un cercle vicieux
(Fig.  25.1) qui fait que les symptômes deviennent, à leur
Forme aiguë tour, source d'angoisse.
La forme aiguë est la moins fréquente des trois (10 % des
personnes hyperventilant). L'hyperventilation est sévère, Forme chronique
accompagnée de spasmes et d'angoisse, ce qui lui donne
un caractère spectaculaire pouvant amener le patient à se La forme chronique, fréquemment rencontrée (plus
présenter dans un service des urgences. Des signes majeurs de 50 % des cas), se présente sous un nombre impor-
peuvent être associés à la crise, comme, et de manière non tant de tableaux cliniques. Cette forme est en quelque
exhaustive, une dyspnée (voire une asphyxie), des attaques sorte la finalité de la maladie, tandis que le cercle vicieux
de panique, des douleurs thoraciques, des paresthésies, hyperventilation–angoisse perdure. Dans 59 % des cas,
des vertiges ou malaises, des palpitations et des myalgies. la forme chronique est corrélée à un état dépressif. Les
Il y a un chevauchement entre les symptômes du trouble symptômes principaux sont une fatigue importante,

Fig. 25.1
Cercle vicieux du mécanisme du syndrome d'hyperventilation.
301
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

voire un épuisement. Le SHV peut parfois être associé Étiologies


au syndrome de fatigue chronique. D'autres symptômes
étranges tels qu'une douleur faciale peuvent être rencon- Alors que certaines personnes développent des symp-
trés [8]. Plusieurs signes respiratoires caractérisent cette tômes dans diverses circonstances, d'autres réagissent
forme. Une dyspnée est présente dans 50 à 90 % des cas. excessivement lorsqu'elles sont exposées à un stimulus
Une douleur thoracique est constatée fréquemment ainsi émotionnel [12]. L'hyperventilation est une réaction phy-
qu'une toux, irritante et persistante, qui, chez le fumeur, siologique (et donc normale !) au stress. Rares sont les per-
peut être pseudo-tumorante. Cinquante pour cent des sonnes qui n'ont pas déjà décrit des symptômes tels qu'une
patients rapportent des signes cardiovasculaires tels que tachycardie, une faiblesse des jambes, une transpiration,
des palpitations, des arythmies, des précordialgies, des une boule dans la gorge…, lors d'une situation stressante.
froideurs des extrémités des membres (voire un syn- Dans des situations non pathologiques, ces signes passent
drome de Raynaud), des modifications de l'ECG. On note pour être sans grande importance et disparaissent une fois
également des signes neurovégétatifs (étourdissements, la situation stressante terminée.
céphalées, tremblements, troubles de la vue, acouphènes, D'après Lum (1975), l'hyperventilation ne serait qu'une
paresthésies) qui sont plus volontiers unilatéraux [15]. mauvaise habitude respiratoire : la respiration serait alors
Une paresthésie asymétrique peut survenir occasionnelle- essentiellement thoracique, à défaut d'être abdominale, et
ment et pouvant même devenir unilatérale. La paresthésie serait sensible à un stimulus physique ou émotionnel, faisant
unilatérale pouvant être associée à une faiblesse unilaté- basculer le patient en hyperventilation. Une origine psycho-
rale subjective. L'hyperventilation provoquerait ainsi une gène a été opposée à une anomalie de la ventilation. Les deux
paresthésie unilatérale prédominante dans 16 % des cas, mécanismes sont probablement susceptibles de s'intriquer.
impliquant le côté gauche du corps pour 60 % d'entre eux Dans le SHV, il existe des interactions complexes entre les
et ce, sans réelle explication connue à ce jour. troubles organiques, psychiatriques et physiologiques [5].
Les patients peuvent également rapporter des signes
psychiatriques (anxiété, panique, phobie, insomnie, cau-
chemars, dépressions, nervosité, irréalité, désorientation…). Organiques
D'après Saisch [16], dans 87 % des cas, une urgence orga-
nique peut être perçue telle que infarctus du myocarde Il serait irréaliste d'attribuer l'hyperventilation à une seule
(48 %), intoxication (17 %), épilepsie (4 %), diabète (4 %), cause. De nombreux troubles respiratoires et organiques
crise d'asthme… sont associés à une hyperventilation [17].
Lors de la pose du diagnostic, il est primordial de vérifier Le système pulmonaire est particulièrement concerné.
si le patient ne présente aucune de ces pathologies. En effet, L'une des principales causes organiques du SHV est l'asthme
un patient sur trois souffre réellement d'asthme et un sur [8]. Lors d'une crise d'asthme, une hypocapnie peut survenir.
quatre est atteint de trouble psychique. Une intoxication Il arrive que l'asthme soit découvert lors d'une crise d'an-
médicamenteuse, une prise d'alcool ou de drogues doivent goisse ou d'un SHV. Selon une étude menée par Carvalho,
également être recherchées. dans un échantillon de 189 patients souffrant d'asthme, 36 %
présentaient un SHV [18]. La relation entre le SHV et l'asthme
peut être considérée selon deux perspectives : le SHV est
Forme dite « essoufflement confondu avec l'asthme chez des patients qui ne souffrent
pas de pathologies respiratoires ou les deux maladies
disproportionné » coexistent [19]. La majorité des patients atteints d'asthme
Gardner a mis en évidence une quatrième forme d'hy- et du SHV sont des femmes (78 %). En outre, les patients
perventilation [8]. Un essoufflement disproportionné en souffrant d'asthme et du SHV avec dyspnée sont plus sen-
l'absence de pathologie organique ou psychologique détec- sibles à l'anxiété et plus exposés aux exacerbations [18] et
table peut être considéré comme un syndrome à part dans présentent tous les symptômes de l'asthme sévère [19]. Il est
les formes d'hyperventilation. Sans grande importance, ce possible que l'hypocapnie induite par l'hyperventilation crée
symptôme ne nécessite que rarement un traitement spéci- des symptômes que les patients asthmatiques ne peuvent
fique. L'essoufflement se produit habituellement pendant pas contrôler à l'aide de médicaments contre l'asthme, et que
ou immédiatement après un exercice. L'étiologie de cet leur perception de contrôle sur la gestion de leur maladie soit
essoufflement est obscure tant chez les patients SHV que mauvaise. L'anxiété et les manifestations cliniques de panique
chez les autres personnes. affectent en effet la perception des symptômes [20].
302
25. Respiration et anxiété

La douleur peut aussi déclencher une hyperventilation. les signes d'une hyperventilation. Par contre, une simple
En effet, lorsque les fibres nerveuses afférentes sont stimu- anxiété n'est pas la cause mais plutôt la conséquence de
lées, comme dans les cas de cholécystite ou de gastrite, le l'hyperventilation. L'attaque de panique peut être égale-
patient hyperventile [21]. ment la cause ou la conséquence d'une hyperventilation.
Des intoxications médicamenteuses (par exemple à La panique est alors associée à un mauvais décodage des
l'aspirine) ou œnoliques provoquent également une aug- signes de l'hyperventilation. Le patient craint une mala-
mentation de la fréquence respiratoire. L'hyperventilation die grave, voire mortelle. De là, naît un cercle vicieux qui
est également associée à la thyrotoxicose ou encore à une ne fait qu'augmenter l'anxiété et donc l'hyperventilation.
insuffisance hépatocellulaire. Dans le contexte de cette Métaboliquement, l'hyperventilation provoque des déré-
dernière pathologie, l'hyperventilation peut imiter les gulations qui entraînent à leur tour une multitude de symp-
signes d'une acidocétose diabétique ou d'une hypoglycé- tômes, semblables à ceux rencontrés lors d'une attaque de
mie [22]. panique. Ceci favorise et renforce l'intensité des troubles de
panique. Il est souvent difficile de déterminer si l'hyperven-
tilation est la cause ou la conséquence des troubles de
Physiologiques panique.
Plusieurs circonstances physiologiques peuvent induire
une hyperventilation [8, 23, 24]. Chez les femmes, pendant
le cycle menstruel et particulièrement sa seconde moitié, Diagnostic
la progestérone est susceptible de diminuer la PaCO2 de
manière importante [25] et rend donc les femmes plus Pour affirmer le diagnostic, il est primordial d'écarter toute
sujettes à l'hyperventilation pendant cette période. autre pathologie pouvant entraîner une hyperventilation
Une hyperventilation peut également être secondaire à comme, par exemple et de manière non exhaustive, une
une longue conversation [26]. En effet, six sujets sur sept coronaropathie, un asthme bronchique, une pathologie
présentent une augmentation de 6 à 21 % de la ventilation interstitielle, une embolie pulmonaire ou encore une insuf-
minute lors de la lecture d'un texte à voix haute. La fré- fisance cardiaque. Une grande part du diagnostic reste
quence et la durée de l'inspiration sont inchangées. aujourd'hui un travail d'exclusion [14].
Lorsqu'on se trouve en altitude, la pression atmosphé-
rique diminue mais les proportions de gaz constituant l'air
restent inchangées. La pression partielle en O2 diminue, la Interrogatoire
pression alvéolaire se trouve aussi diminuée et l'O2 diffuse Une anamnèse rigoureuse et de qualité est un élément
moins facilement. L'O2 est alors moins disponible pour indispensable de l'évaluation initiale. Elle doit être réalisée
les tissus périphériques : c'est ce qu'on appelle l'hypoxie avec empathie et écoute et permet de relever les médi-
d'altitude. Cette diminution de la PaO2 est détectée par les cations du patient, son passé médical (allergies, trauma-
chémorécepteurs périphériques qui stimulent les centres tisme émotionnel…), la prise de drogues acceptables (café,
respiratoires afin d'augmenter la ventilation [8]. tabac, alcool) et non acceptables, les examens médicaux
L'état fébrile agit directement sur les corpuscules caroti- antérieurs et finalement les thérapies alternatives déjà uti-
diens qui stimulent donc la respiration [27]. lisées. Lors de l'anamnèse, le patient émet une multitude
de plaintes et présente une symptomatologie atypique.
Psychogéniques Une personnalité caractéristique ainsi que la crainte d'une
maladie grave sont à noter. Selon Bass et Gardner, 50 %
Les causes psychogéniques ont un grand rôle à jouer dans des patients souffrant du SHV présenteraient également
le SHV [8]. Bien que l'anxiété soit un élément important un passé psychiatrique. Il est aussi fréquent que le patient
dans la description du SHV et qu'elle soit souvent considé- soit agoraphobe ou claustrophobe [28]. L'interrogatoire est
rée comme étant le principal facteur étiologique, la relation complété idéalement par le questionnaire de Nijmegen qui
entre les deux entités est pourtant complexe. Le SHV est présente une sensibilité de 91 % et une spécificité de 95 %. Il
souvent corrélé à certains états émotionnels. Dans le cadre est composé de 16 items côtés de 0 à 4 points en fonction
de névrose d'angoisse, le SHV chronique est quasi toujours de la fréquence du symptôme. Le test s'avère positif lorsque
lié à un facteur psychiatrique. Toutefois, un état de grande le total excède 23/64 points [29]. Ce questionnaire n'est
anxiété peut provoquer une hypocapnie, mimant ainsi réservé qu'à l'adulte.
303
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Diagnostic biologique tale de l'amplitude et de la fréquence respiratoire, incapacité


de prendre des inspirations profondes) ont été rencontrés
L'ionogramme sanguin révèle une hypophosphorémie, une lors des deux tests. Seule l'oppression thoracique a été men-
hypokaliémie ou hyperkaliémie, selon les cas, tandis que la tionnée dans le test d'hyperventilation provoquée [31]. Par
natrémie reste subnormale. La chlorémie, la calcémie et la ailleurs, il n'y a pas de relation entre l'âge, le sexe et les symp-
magnésémie sont normales. La concentration d'électrolytes tômes. Les symptômes n'étant pas spécifiques, le principal
(sels, acides, bases) dans les différents liquides organiques inconvénient de ce test réside donc dans le fait qu'il ne nous
(sang, urines, liquide céphalorachidien) reste normale. permet pas de distinguer les symptômes induits par l'hypo-
capnie et ceux produits par d'autres facteurs comme l'aspect
Examens paracliniques stressant du test. Une hyperventilation isocapnique peut
induire des symptômes similaires à ceux retrouvés dans le
Une part du diagnostic repose sur les tests de provocation de SHV mais de façon moins importante que le test d'hyperven-
l'hyperventilation. Ils sont devenus une procédure de routine tilation provoquée standard [34]. Le test placebo ne permet
dans le diagnostic du SHV [30] ; le test est considéré comme pas de distinguer les vrais positifs des faux positifs [31]. L'utilité
positif si les symptômes induits par le test sont semblables à des tests de provocation doit donc être nuancée.
ceux rencontrés lors des hyperventilations dans la vie quo- Les modalités de tests de provocation sont nombreuses.
tidienne. Le test d'hyperventilation provoquée est basé sur Le test de référence se déroule comme suit : le patient
l'hypothèse que l'hypocapnie est le déclencheur principal des est surveillé par capnographie et oxymétrie. Le patient,
symptômes induits par ce test mais des changements phy- après 3 minutes de repos, hyperventile volontairement
siologiques spécifiques sont généralement mal perçus [31]. de façon intensive pendant 3 minutes ; il bénéficie ensuite
Le patient hyperventile volontairement pendant trois [29] d'une récupération de 5 minutes. Chez un sujet normal, la
ou quatre minutes [32]. Normalement sans risque, ces tests PetCO2 est supérieure à 30 mmHg au repos et inférieure à
peuvent être cependant responsables d'un malaise vagal. Ces 20 mmHg lorsque le sujet hyperventile ; de plus, elle doit
épreuves sont contre-indiquées chez les patients souffrant avoir retrouvé sa valeur initiale en moins de 5 minutes.
d'insuffisance respiratoire hypercapnique, d'apnée, de mala- Chez un sujet souffrant du SHV, la PetCO2 est inférieure à
dies coronariennes, de maladies vasculaires cérébrales, d'épi- 30 mmHg au repos ainsi qu'après 5 minutes de récupéra-
lepsie, de drépanocytose. Ces tests sont néanmoins trop peu tion ; l'observation du temps nécessaire pour retrouver une
discriminatifs. Dans une étude portant sur 90 patients chez PetCO2 normale est un élément important pour le dia-
qui un SHV était suspecté, le questionnaire de Nijmegen, gnostic [35]. Au cours du test, le patient émet également
le test d'hyperventilation provoquée et la FetCO2 ont été au moins deux plaintes retrouvées dans le questionnaire de
comparés [33]. Une bonne concordance a été montrée Nijmegen ; cependant, si le patient ne se plaint de rien, ceci
chez 77 patients (86 %) entre les deux premiers. La FetCO2 ne suffit pas pour exclure le diagnostic.
durant le test de provocation apporte peu de valeur diagnos- Au cours d'une étude, Malmberg a évalué la réponse
tique supplémentaire et ne permet pas de diagnostiquer les ventilatoire au changement de position (de couché dorsal
cas douteux [33]. L'expérience subjective des symptômes à debout) chez des patients souffrant de SHV [36]. Pour
au cours du test d'hyperventilation provoquée peut être cela, il a récolté les gaz respiratoires de 16 patients atteints
influencée par des facteurs situationnels (espérance, anxiété de SHV et 13 sujets « contrôle ». Les échanges pulmonaires
anticipatrice) et des variables personnelles (anxiété, peur de ont été enregistrés après 10 minutes de coucher dorsal et
ressentir des sensations physiques, tendance à signaler des après 8 minutes de station debout. Alors qu'au repos, il n'y
symptômes) [31]. Hornsveld a comparé les symptômes ren- a pas de différence significative entre les paramètres respira-
contrés lors d'un test d'hyperventilation provoquée et ceux toires des deux groupes, ils sont significativement différents
rencontrés lors d'un test placebo (hyperventilation isocap- lors de la station debout : la ventilation minute (VE) ainsi
nique) et noté une faible spécificité du test d'hyperventilation que l'équivalent respiratoire en O2 (VE/VO2) et en CO2 (VE/
provoquée [31]. En effet, 60 à 66 % des symptômes induits VCO2) augmentent dans les deux groupes (VE plus signifi-
par les tests d'hyperventilation provoquée ont également été cativement chez les sujets SHV). La FetCO2 tend à diminuer
rencontrés lors du test placebo et le test d'hyperventilation significativement plus chez les patients SHV que chez les
provoquée induit des symptômes psychologiques (état de sujets « contrôle ». Enfin, la réponse aux changements de
tension, anxiété, sensation d'irréalité) qui ne semblent pas position du corps chez les patients SHV est une augmen-
liés à l'hypocapnie. Les symptômes respiratoires (oppression tation accentuée de la ventilation. Ce test peut être utilisé
thoracique, essoufflement, gorge serrée, augmentation bru- dans l'évaluation clinique des patients.
304
25. Respiration et anxiété

Par ailleurs, la gazométrie renseigne sur le taux de CO2 articulations) sont évalués. La sensibilité est de 99 % et la
sanguin. Le patient souffrant d'hyperventilation présente, la spécificité de 24 % et 36 % respectivement pour les signes
plupart du temps, une hypocapnie (PaCO2 < 32 mmHg), respiratoires et non respiratoires [41].
une hyperoxie ainsi qu'une alcalose respiratoire (pH > Sznajder a distingué les signes mineurs des signes
7,45). Si la gazométrie est normale, le diagnostic d'hy- majeurs tant respiratoires que non respiratoires [42]. Les
perventilation n'est pas à exclure pour autant. Lors d'une signes respiratoires majeurs sont un raclement de gorge,
hyperventilation chronique, le patient peut présenter une une toux diurne et au coucher, une boule dans la gorge,
compensation métabolique avec une PaCO2 abaissée et un un blocage de la respiration, tandis que les signes mineurs
taux de bicarbonates bas [37]. sont une difficulté à prendre une inspiration et la présence
Le mieux reste de pouvoir enregistrer la PaCO2 pendant de soupirs. En outre, les signes non respiratoires majeurs
une crise d'hyperventilation dans la vie quotidienne. Cela a sont l'anxiété, une difficulté d'endormissement, des maux
d'ailleurs permis de constater que toutes les crises ne sont de tête, une crampe, des ballonnements abdominaux et les
pas accompagnées d'une chute de la PaCO2 [34]. signes mineurs sont des douleurs articulaires, des maux de
Des examens d'imagerie cérébrale, cardiaques et pulmo- ventre, des douleurs fluctuantes, des réveils nocturnes et
naires vont compléter le diagnostic et permettre d'exclure des démangeaisons. Ainsi, un questionnaire simplifié com-
des maladies organiques voire, simplement mais de manière posé de 17 items a été conçu. Les cotations sont 0–3–6 ou
importante, de rassurer le patient. Les tests de la fonction 0–1–2 respectivement pour les signes majeurs et mineurs
pulmonaire sont parfois difficiles à réaliser et les résultats en fonction de la fréquence des survenues (« jamais ou
sont souvent normaux. L'ECG va exclure une hypertension presque jamais », « quelquefois », « souvent ou très sou-
pulmonaire, un CT-scan pour une maladie interstitielle pul- vent »). Si le score global atteint 25, l'enfant présente un
monaire. Ces examens ne seront prescrits qu'après l'anam- SHV [42].
nèse et en fonction de la situation. En aucun cas, il ne s'agit
d'une routine.
Prise en charge
Le SHV concerne à la fois la psychiatrie, la pneumologie, la
Syndrome d'hyperventilation cardiologie et la physiologie. De ce fait, la prise en charge sera
chez l'enfant globale [35] avec des points d'appels variables (l'hyperven-
tilation proprement dite, des symptômes ou l'anxiété). Le
Chez l'enfant, la pathologie est encore mal connue et la défi consiste à rompre le cercle vicieux entre ces trois élé-
littérature est pauvre. La forme aiguë est rare. Les jeunes ments. Le traitement est valable tant chez l'adulte que chez
filles sont plus fréquemment atteintes que les garçons [38] l'enfant. La seule différence réside dans le fait que, lors de la
et l'enfant présenterait plus fréquemment des malaises ou prise en charge des enfants, le thérapeute doit impliquer les
syncopes lors de la forme aiguë et chronique [39]. parents. Ceux-ci doivent tenir leur rôle d'accompagnateur
La physiopathologie et le tableau clinique sont par et ils participeront aux exercices. L'objectif de cette implica-
contre semblables à ceux de l'adulte [38, 40]. Il est impor- tion est de diminuer l'anxiété des parents qui influence celle
tant de détecter le SHV afin d'empêcher à long terme une de leurs enfants.
anxiété chronique et de possibles troubles psychiatriques
(attaque de panique et troubles phobiques) [38, 41]. La Pharmacologie
démarche diagnostic est identique à celle de l'adulte avec
une absence de test infaillible. Les outils sont cependant Un traitement médicamenteux semble souvent prescrit
les mêmes. La différence majeure réside peut-être dans la bien que les médicaments aient un rôle limité dans le trai-
nécessité de gérer les parents avec leurs angoisses ou leur tement symptomatique du SHV.
déni. L'aspect pharmacologique est complexe et ne fait pas
Bidat a proposé un questionnaire facilitant le diagnostic l'unanimité. De manière non exhaustive, quelques médica-
du SHV chez l'enfant sain ou asthmatique [41]. Cinq signes tions peuvent être citées. Les bêtabloquants sont préconisés
cliniques respiratoires (raclement de gorge, reniflement, lorsque des signes causés par le système nerveux sympa-
difficulté à prendre une inspiration, soupirs, bâillements) et thique sont présents (mains moites, palpitations, tremble-
cinq signes non respiratoires (anxiété, difficulté d'endormis- ments). Ce traitement est additionnel à la kinésithérapie. Les
sement, fatigue générale, maux de ventre, douleurs dans les anxiolytiques (benzodiazépines) sont probablement trop
305
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

utilisés dans ce syndrome et devraient plutôt être évités sur- doit se sentir écouter et compris pour pouvoir se confier
tout pour un traitement à long terme en raison du risque [29]. Il est également indispensable de relativiser la situa-
d'addiction [8]. Les antidépresseurs sont principalement tion sans pour autant la négliger [45]. Le thérapeute doit
prescrits pour les attaques de panique [43] mais ont un délai conseiller le patient quant à son hygiène de vie : l'alcool, le
d'action long (2 à 6 semaines). thé, le café, les drogues et le tabac sont à éviter voire à pros-
crire. La pratique d'un sport – de manière préférentielle,
d'endurance – est recommandée.
Kinésithérapie
La kinésithérapie vise à apprendre la respiration diaphrag- Rééducation respiratoire
matique et à corriger le mode respiratoire et la fréquence Apnée volontaire
respiratoire en la ralentissant. La relaxation et ses différentes
techniques trouvent également une place dans le traite- L'apnée volontaire ou plus fréquemment l'hypoventilation
ment [12]. Dans une étude sur 1350 patients, 80 % sont volontaire a pour objectif de rétablir aussi rapidement que
devenus asymptomatiques à l'issue de la prise en charge possible la PACO2 lors des crises d'hyperventilation. Ceci
[7]. La prise en charge comporte deux facettes principales : pourrait bien être le traitement principal utilisable par tous
l'éducation du patient et la rééducation respiratoire en elle- les patients lorsqu'ils sentent qu'une crise arrive, quand les
même [44]. premiers symptômes apparaissent. Le patient devient le
maître de la situation même s'il est important de préciser
En aigu que cette manœuvre n'agit que dans l'immédiateté. Aucune
action rémanente n'existe. En pratique, les patients doivent
Pendant la crise, le patient doit retrouver une normocapnie ralentir leur fréquence respiratoire en instaurant une apnée
le plus rapidement possible. Pour cela, il existe différentes confortable (dont lui seul détermine la durée) en fin de
façons de procéder : le patient respire dans un sachet en chaque inspiration, expiration ou les deux (respiration en
papier ; il doit être étanche autour de la bouche et du nez. carré) selon les écoles. Après un entraînement, les patients
Ceci consiste en la ré-inspiration du CO2 expiré permet- réalisent l'exercice pendant une dizaine de respirations lors
tant le maintien de la PaCO2 dans les valeurs normales. Un de chaque inconfort.
rythme de 12 respirations par minute pendant 3 minutes
est suggéré. Ensuite, le patient adopte une respiration Rééducation de la mécanique thoraco-abdominale
calme, abdominale, pendant 5 minutes avant de reprendre
l'exercice, si nécessaire. Cette technique ne doit être utilisée Elle consiste en des exercices de coordination des mouve-
que momentanément ou lors de crise que le patient n'ar- ments respiratoires afin de corriger les mauvaises habitudes.
rive pas à contrôler. En aucun cas, elle ne doit être réalisée Pour cela, le patient positionne ses mains sur la poitrine
systématiquement. et l'autre sur la partie supérieure de l'abdomen. Lors d'une
respiration normale, la main du haut ne se soulève pas,
contrairement à la main se trouvant sur l'abdomen. Lors de
Éducation du patient
l'expiration, le patient doit se détendre, de façon à ce que
La prise en charge est essentiellement basée sur la com- sa respiration soit silencieuse et sans effort. Le thérapeute
préhension de la physiologie respiratoire et de la physiopa- demande au patient de gonfler le ventre lors de l'inspiration
thologie, ce qui aide le patient à se corriger. Le thérapeute et de le rentrer lors de l'expiration. Des séances d'entraîne-
explique les effets de l'hyperventilation et la relation de ment régulières sont nécessaires afin de retrouver une res-
cause à effet de l'hyperventilation et des symptômes. Le fait piration normale. Suite à une étude auprès de 640 patients,
de mieux comprendre son syndrome diminuera la compo- Lum a estimé le taux de réussite à 70 %. Vingt-cinq séances
sante émotionnelle et anxiogène ainsi que la symptoma- seraient nécessaires pour modifier la cinétique thoraco-
tologie. Des exercices avec le feedback d'un capnographe abdominale. Dans une étude, Monday a investigué trois
peuvent aider le patient à comprendre que l'accélération approches thérapeutiques non médicamenteuses, à savoir
de sa respiration est responsable de l'hypocapnie et de des explications théoriques sur la physiologie respiratoire et
l'ensemble des symptômes. L'éducation du patient consiste les principes de traitement sans pratique [1], avec apprentis-
également à lui apprendre à déceler les signes annoncia- sage de la respiration diaphragmatique [2] ou avec appren-
teurs d'une crise afin qu'il essaie de la contrôler. La relation tissage de la respiration diaphragmatique accompagné de
entre le patient et le thérapeute est primordiale. Le patient séances de relaxation type Jacobson [3]. Bien qu'une amélio-

306
25. Respiration et anxiété

ration ait été avérée dans les trois cas, l'éducation accompa- Acupuncture
gnée d'exercice pratique a montré des résultats supérieurs à
L'acupuncture est une technique thérapeutique très
ceux obtenus chez les autres patients [29]. Par contre, dans
ancienne qui a vu le jour en Chine entre 2000 et 100 av. J.-C.
une étude à long terme, il s'est avéré que les patients béné-
Elle consiste à piquer la peau avec des aiguilles courtes et
ficiaient d'un programme de rééducation respiratoire tant
aussi fines qu'un cheveu, à de multiples endroits précis du
sur les symptômes que sur leur qualité de vie, tout en dimi-
corps : les points d'acupuncture [48]. Selon Hui, l'acupunc-
nuant le recours aux services des urgences [46].
ture a de profonds effets sur l'activité des neurones céré-
braux, dans les aires subcorticales et les régions cérébrales
Reconditionnement physique
limbiques [49]. En ce sens, Gibson a cherché à évaluer les
Son but est de remédier à l'amyotrophie afin d'améliorer le bénéfices potentiels de l'acupuncture dans le traitement
rendement musculaire à l'effort et de redonner confiance du SHV et a montré un effet statistiquement significatif sur
au patient quant à ses performances physiques d'autant les scores d'anxiété et la sévérité des symptômes du SHV.
plus que l'activité physique est souvent associée aux crises Néanmoins, les effets à long terme restent à prouver [50].
vu l'hyperventilation normale générée lors de celle-ci. Le
programme de reconditionnement physique est classique. Thérapie cognitivo-comportementale
Lorsqu'il arrive à contrôler sa respiration au repos, le patient
réalisera ensuite les exercices respiratoires en position assise Pour les patients souffrant de troubles de panique, la thé-
puis debout et enfin pendant la marche en gardant une fré- rapie cognitivo-comportementale peut être une perspec-
quence respiratoire lente et régulière. tive intéressante et est parfois considérée comme plus
efficace que les soins médicaux [34]. La thérapie cognitivo-­
Relaxation comportementale cible les menaces irréalistes du patient.
Elle a pour objectifs de modifier les croyances erronées
Le thérapeute peut effectuer des séances de relaxation, panique et anxiété, aussi bien que les expériences, les sures-
individuelle ou en groupe. Elles sont complémentaires à la timations des menaces et dangers les représentations des
kinésithérapie voire occupent même une place de choix. attaques [51]. Le principe de base du modèle cognitif est
Elles permettent de réduire l'anxiété du patient, prédomi- que le patient anxieux a déformé le traitement de l'informa-
nant dans le SHV et favorisent la reprise d'une respiration tion. La thérapie cognitivo-­comportementale possède plu-
paisible aussi vite que possible [38]. Jacobson (1938) a sieurs composantes qui peuvent être utiles dans la prise en
affirmé qu'une relaxation musculaire mène à une relaxation charge des patients anxieux. Afin de travailler sur les chan-
de l'esprit, car la relaxation inhibe les générateurs de pen- gements cognitifs et comportementaux, les patients ont
sées et d'émotions et élimine aussi les effets de l'hyperten- besoin de démystifier les attaques de panique en compre-
sion neuromusculaire sur le corps. La relaxation n'est autre nant les causes et les mécanismes déclenchant, ainsi que les
qu'une absence de tension dans le muscle. Il existe de nom- facteurs qui maintiennent l'anxiété [52] et ce qu'ils peuvent
breuses méthodes de relaxation. Selon Conrad, la technique faire pour la réduire [51]. Pour cette raison, la psycho-éduca-
de relaxation musculaire est cliniquement efficace dans le tion est un élément essentiel de la thérapie. La surveillance
traitement des troubles anxieux [47]. L'important reste de des pensées et les techniques de recadrage sont largement
trouver celle qui convient le mieux au patient. utilisées dans la thérapie cognitivo-comportementale. Elles
impliquent l'identification et la défiance des mauvaises per-
ceptions du patient. Les techniques de recadrage cognitif
Autres ne sont pas toujours efficaces quand elles sont utilisées de
manière isolée. Les expériences comportementales sont
Psychothérapie un élément clé de la thérapie : elles défient les perceptions
Une psychothérapie trouve sa place dans le traitement du irréalistes du patient au travers d'expériences directes. Les
SHV dans la mesure où elle permettra au patient de conscien- expériences comportementales sont un outil puissant
tiser la corrélation entre les symptômes, les stimuli internes et pour modifier les pensées catastrophiques, car les patients
externes et les émotions [37]. Elle peut être proposée avec testent leurs hypothèses dans le monde réel et apprennent,
prudence au patient. Le thérapeute ne doit pas brusquer le par expérience, qu'elles sont incorrectes. Ces techniques
patient ; c'est à lui d'évoquer le besoin d'un suivi. Dans le cas sont particulièrement adaptées pour une utilisation dans
contraire, il pourrait ne pas participer au programme. un temps limité. Le traitement peut prendre plusieurs mois

307
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

vu que les habitudes respiratoires ne peuvent se modifier [14] Le BC, Leroyer C, Chenu E, Dewitte JD, Clavier J. Chronic hyperven-
du jour au lendemain [12]. Selon Gardner, les patients pré- tilation syndrome. Rev Pneumol Clin 1995 ; 51(2) : 53–8.
[15] Blau JN, Wiles CM, Solomon FS. Unilateral somatic symptoms due
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309
Chapitre 26
Troubles de la déglutition
et leur rééducation
Gauthier Desuter, Anne-Claire Latiers, Laurent Pitance

PLAN DU CHAPITRE
Physiologie 312
Physiopathologie 317
Rééducation du patient dysphagique 318
Conclusion 328

Kinésithérapie respiratoire
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Physiologie Le tableau 26.1 résume les différents muscles impliqués


dans ce processus ainsi que leurs innervations [1–2].
La plupart des auteurs s'accordent à scinder l'acte de déglu- Enfin, la mastication ne peut s'opérer que sur un bolus
tir en trois phases successives parfaitement coordonnées rendu « captif » par un sphincter antérieur assuré par l'orbi-
entre elles de manière séquentielle. culaire de la bouche encore appelé sphincter labial, et pos-
La première phase est nommée temps buccal. Toutes térieur assuré par la contraction des muscles palatoglosses
les actions réalisées durant cette phase sont sous contrôle abaissant le voile du palais mou.
cortical volontaire. Son rôle essentiel consiste en une pré- Le bolus étant parfaitement confiné à la cavité buccale,
paration adéquate du bolus alimentaire. Celui-ci, une fois la respiration n'est donc nullement interrompue durant
conditionné, sera « transmis », de façon parfaitement coor- cette phase volontaire de durée très variable.
donnée, au deuxième temps de la déglutition.
Ce deuxième temps est nommé temps pharyngien. Il Temps buccal proprement dit
s'agit d'un temps extrêmement court (± 1 seconde), sous Ce temps correspond à la rétropulsion du bolus alimentaire
contrôle essentiellement bulbaire, durant lequel le bolus est correctement conditionné vers l'oropharynx avant l'initiali-
transmis à l'œsophage en mettant en œuvre tous les méca- sation du temps pharyngo-œsophagien.
nismes propulseurs et protecteurs nécessaires afin d'éviter Cela se traduit par une activité musculaire volontaire
toute fausse route. intense qui peut se schématiser chronologiquement de la
Enfin le troisième temps, appelé temps œsophagien, façon suivante :
assure le transfert du bolus du sphincter œsophagien ● fermeture de la mandibule sous l'action des muscles

jusqu'au cardia sous contrôle nerveux autonomique. temporaux, masséters et ptérygoïdiens médiaux ;
● rassemblement du bolus alimentaire au niveau de la

voûte palatine par l'action des muscles génioglosses ;


Les trois temps de la déglutition ● pression caudocraniale et antéropostérieure de la langue

mobile sur le bolus alimentaire sous l'action coordonnée


Le temps buccal
des muscles extrinsèques, styloglosses, palatoglosses et
Temps préparatoire pharyngoglosses, et intrinsèques, vertical, longitudinaux et
Durant ce temps, plusieurs fonctions coexistent et collaborent transverse. Le tout donnant un aspect de propulsion ondu-
afin d'aboutir à un seul et unique résultat : un bolus alimen- latoire quasi péristaltique [3] ;
● fermeture du rhinopharynx par élévation du voile du
taire apte à passer sans encombre les deux phases suivantes.
Ces fonctions sont les suivantes : palais sous l'action des muscles élévateurs du voile innervés
● préhension buccale : l'ouverture des lèvres est assurée par
par le plexus pharyngien (X et IX) ;
● abaissement de la base de langue par contraction du
les muscles releveurs de la lèvre supérieure, zygomatiques
et risorius pour la lèvre supérieure, par les muscles abais- muscle hyoglosse [4].
seurs de la lèvre inférieure et mentonnier pour la lèvre infé- La fin de ce temps buccal est caractérisée par l'arrivée au
rieure. L'innervation motrice de ces muscles est assurée par niveau du pilier antérieur de la loge palatine (muscle palato­
les nerfs faciaux ; glosse) du complexe « langue mobile–bolus ». Le  temps
● contention antérieure : réalisée par les lèvres, muent par
réflexe pharyngo-œsophagien entre alors en action.
le muscle orbiculaire de la bouche et les muscles abaisseurs
de l'angle de la bouche innervés par des branches termi-
Le temps pharyngien
nales des nerfs faciaux ; Il s'agit du temps le plus fascinant de cette physiologie. En
● mastication (uniquement pour les aliments solides effet, c'est le temps qui voit le bolus franchir en une seconde
et semi-solides) : il s'agit d'un mouvement complexe des le carrefour aérodigestif, sans fausse route, pour rejoindre
lèvres, des joues, de la langue et de la mandibule s'opérant la lumière œsophagienne. La bonne coordination dans le
dans les trois plans. temps des différents événements musculaires constitue la
L'efficacité de cette fonction dépend en grande partie pierre angulaire de toute cette phase.
de l'état dentaire du patient. Les mouvements synchrones La première question à se poser est donc la suivante :
et coordonnés de la mandibule et de la langue n'auront de quel est le temps zéro de ce temps ? Autrement dit, sur quel
cesse de « présenter » le bolus aux dents ou, à défaut, au temps T initial les autres actions devront-elles se baser pour
palais dur et aux crêtes gingivales. initier leur mouvement ?
312
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

Tableau 26.1 Muscles et nerfs impliqués dans la mastication


Groupes fonctionnels Muscles Innervation motrice
de la mastication
Muscles abaisseurs – Muscles géniohyoïdiens XII
de la mandibule – Muscles mylohyoïdiens
– Ventres antérieurs des muscles digastriques

Muscles élévateurs – Muscle temporal V3


de la mandibule – Muscles masséters
– Muscles ptérygoïdiens internes (action bilatérale)

Muscles diducteurs – Muscles ptérygoïdiens médiaux V3


(action unilatérale) – Muscles ptérygoïdiens latéraux

Muscles linguaux Intrinsèques – Muscles longitudinaux XII


inférieurs
– Muscle longitudinal
supérieur*
– Muscle transverse de la
langue*
– Muscle vertical de la langue*

Extrinsèques – Muscles génioglosses


– Muscles hyoglosses
– Muscles styloglosses
– Muscles palatoglosses
– Muscles chondroglosses

Muscle jugal Muscles buccinateurs VII


* muscle impair ; V3 : branche inférieure du nerf trijumeau ; VII : nerf facial ; XII : nerf grand hypoglosse.

Nous tâcherons d'y répondre même si aucune réponse gée a donc été évoquée comme mouvement initial du
formelle n'existe à ce jour. temps réflexe.
Il est bien évident que la transition entre la première Et c'est en fait un mouvement uniquement visible en
et la deuxième phase de la déglutition se fait sur le mode vidéofibroscopie qui détermine, selon les articles les plus
«  fondu enchaîné ». récents, le temps zéro du temps pharyngo-œsophagien :
Cependant, d'un point de vue pathologique, il est parfois la médialisation aryténoïdienne, antérieure de quelque
important de déterminer la limite entre le premier temps 0,341 seconde sur l'élévation hyoïdienne [5, 6].
volontaire et le deuxième temps réflexe, de façon à pou- La latence entre la rétropulsion linguale et la médiali-
voir déterminer, par exemple, une latence d'initialisation du sation aryténoïdienne est donc importante à observer en
temps réflexe. pratique courante. Une latence trop longue, autrement
On a cru longtemps que la rétropulsion linguale ou, plus dit, un réflexe trop retardé, provoque inévitablement une
exactement, le franchissement du plan frontal composé par fausse route primaire par non-activation des mécanismes
les muscles palatoglosses (piliers antérieurs de la loge amygda- propulseurs et protecteurs.
lienne) constituait le temps initial du temps réflexe. Il s'agirait En effet, le temps pharyngo-œsophagien de la dégluti-
plutôt de la fin du temps buccal, au vu de la littérature récente. tion peut se comprendre comme un ensemble de proces-
Les données vidéofluoroscopiques ont permis par la sus que l'on peut catégoriser en mécanismes propulseurs et
suite d'observer un départ d'ascension laryngée plus pré- protecteurs. Ces processus agissent de manière séquentielle
coce de quelques centièmes de seconde. L'ascension laryn- ou simultanée mais toujours de manière coordonnée.
313
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Cette intégration des processus est assurée par les D'autres afférences interviennent bien évidemment
centres bulbaire et suprabulbaire de la déglutition. dont celles liées à la déglutition.
On pourrait schématiser celles-ci comme suit : un cer-
Mécanismes propulseurs tain nombre de connexions inhibitrices partent des centres
bulbaires de la déglutition vers leurs centres homologues
Deux types de pressions vont être appliqués sur le bolus respiratoires au moment même où l'ordre de déglutition
alimentaire : est transmis aux muscles effecteurs. La respiration s'inter-
● la première pression est exercée par la base de langue
rompt donc à la fin du temps buccal durant un peu plus
grâce à la contraction des muscles styloglosses et palato- d'une seconde. Cette apnée est immédiatement suivie
glosses innervés par le nerf grand hypoglosse. Cette pres- d'une expiration dont le rôle semble bien être protecteur
sion est habituellement nommée le piston lingual ; également [7].
● la deuxième pression est assurée par le raccourcissement
Plusieurs auteurs ont émis l'hypothèse d'une prolon-
longitudinal et horizontal des muscles constricteurs du gation de cette apnée induite par le centre bulbaire de la
pharynx réalisant une véritable vague de péristaltisme cra- déglutition en réponse à une stimulation sensitive excessive
niocaudal. Cette onde péristaltique se propage à la vitesse du nerf laryngé supérieur, chez les enfants souffrant d'une
de 12 à 25 cm/sec. Son initialisation correspond au déclen- immaturité nerveuse centrale, notamment chez les enfants
chement du piston lingual. prématurés.
Fort logiquement, les muscles constricteurs se D'après Nishino et al. [8], le nerf laryngé supérieur occu-
contractent de manière séquentielle en débutant par perait une place prépondérante dans la régulation de
la contraction du muscle constricteur supérieur dès le cette inhibition. En effet, chez l'animal, la stimulation du
nasopharynx, suivie de la contraction du muscle constric- nerf laryngé supérieur occasionne une apnée ainsi qu'une
teur moyen pour terminer par la contraction du muscle déglutition complète.
constricteur inférieur. Si le réflexe de déglutition peut intervenir à n'importe
Toutes ces actions sont réalisées sous contrôle nerveux quelle phase du cycle respiratoire, celle-ci s'opérera huit fois
du plexus pharyngien, rassemblant des fibres des nerfs sur dix durant la phase expiratoire.
glosso­pharyngien (IX), vague (X) et accessoire (XI). Enfin, toujours selon Nishino et  al., le volume courant
Ce péristaltisme s'opère simultanément à l'action au cours du cycle respiratoire suivant une déglutition est
d'autres muscles, notamment le salpingopharyngien augmenté, ce qui expliquerait les épisodes de désaturation
innervé par le plexus pharyngien (IX, X, XI), mais surtout des patients souffrant d'une BPCO durant les repas.
les stylopharyngiens innervés par le nerf glossopharyngien
(IX) opérant un raccourcissement craniocaudal de la filière Occlusion glottique
pharyngée. On l'a vu, l'occlusion glottique semble bien être la pre-
Contrairement au péristaltisme œsophagien, la gravité mière action musculaire de la phase réflexe pharyngo-­
ne joue aucun rôle « propulseur » au niveau du carrefour œsophagienne. Son initialisation représente l'action étalon
aérodigestif. sur laquelle toutes les autres actions musculaires se coor-
donnent dans le temps.
Mécanismes protecteurs des voies aériennes Cette occlusion est réalisée par les muscles adducteurs
des cordes vocales, crico-aryténoïdiens latéraux, thyro-
Inhibition des centres respiratoires aryténoïdiens et inter-aryténoïdiens sous contrôle nerveux
La respiration est sous contrôle du système nerveux central. du nerf récurrent (branche du nerf vague X), et par les
Plus exactement, la respiration volontaire est sous contrôle muscles tenseurs des cordes vocales, cricothyroïdiens sous
du cortex cérébral et la respiration autonomique sous contrôle nerveux du nerf laryngé supérieur (branche du
contrôle des centres respiratoires bulbaires. Ces centres res- nerf vague X).
piratoires guident leurs actions en fonction d'afférences très
diverses. Ascension laryngée
Les plus connues sont les chémorécepteurs périphériques Combinée à la rétropulsion linguale terminant le temps
(corpuscules carotidiens) ou centraux (médullaires) réagis- buccal, elle représente un des mécanismes protecteurs
sant aux variations de pression partielle en oxygène et les les plus efficaces. Pour s'en convaincre, il suffit d'observer
mécanorécepteurs de Hering-Breuer réagissant aux disten- l'importance des troubles de la déglutition présentés par les
sions du tissu pulmonaire. patients trachéotomisés sans autre étiologie de dysphagie,

314
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

la trachéotomie ancrant le larynx aux structures cutanéo- noïdien, le sinus pyriforme hétérolatéral sera bien souvent
musculaires superficielles. privilégié.
Cette ascension laryngée est conditionnée par la L'intégrité du cartilage aryténoïdien est également une
contraction d'un groupe musculaire que l'on peut qua- condition sine qua non de la compétence glottique.
lifier de sus-hyoïdien (ventres antérieurs des muscles Ouverture du sphincter supérieur de l'œsophage
digastriques, muscles mylohyoïdiens innervés par le nerf ou bouche de Killian
trijumeaux, muscles géniohyoïdiens innervés par le nerf Le sphincter supérieur de l'œsophage est en fait constitué
grand hypoglosse, muscles stylohyoïdiens innervés par les de plusieurs contingents de fibres musculaires appartenant
nerfs faciaux et glossopharyngiens), et d'un groupe mus- à différents muscles : les faisceaux cricopharyngiens du
culaire que l'on peut qualifier de sous-hyoïdien (muscles muscle constricteur inférieur du pharynx, le muscle crico-
thyrohyoïdiens innervés par les nerfs grands hypoglosses pharyngien et les premières fibres longitudinales de l'œso-
et les muscles pharyngostaphylins innervés par les nerfs phage cervical.
vagues). Deux phénomènes distincts interviennent dans le
L'action de ces muscles sera rendue possible par la fer- mécanisme d'ouverture du sphincter supérieur de l'œso-
meture mandibulaire assurée par l'action des muscles élé- phage, d'une part sa relaxation, conditionnée par l'inner-
vateurs de la mandibule. L'ascension laryngée est, en effet, vation du nerf vague, et d'autre part sa distension passive,
quasi irréalisable bouche ouverte. conditionnée par l'élévation laryngée et la pression du
L'action de toute cette musculature est grandement bolus [12].
influencée par la posture cervicocéphalique du patient. Le sphincter supérieur de l'œsophage est une zone de
Celle-ci évite le décubitus dorsal et tout mouvement de haute pression, longue de 2,5 à 4,5 cm centrée sur le muscle
flexion ou de torsion de l'axe cervicocéphalique. cricopharyngien. Le tonus musculaire sous contrôle du
Bascule de l'épiglotte sur les cartilages aryténoïdes nerf vague permet d'y maintenir une pression endolumi-
L'épiglotte, sorte de « pétale de rose » cartilagineux, se voit nale moyenne de 35 mmHg. C'est ce tonus qui permet
cisaillée entre d'une part la rétropulsion basi-linguale et d'éviter l'intromission d'air dans l'œsophage en dehors des
d'autre part le mouvement cranio-antérieur du « boîtier repas.
cartilagineux » laryngé. Ce mouvement de cisaillement est Ce tonus est naturellement réduit dès le début du péris-
appréciable en vidéofluoroscopie. L'action des muscles ary- taltisme pharyngé et précède l'ouverture proprement dite
épiglottiques innervés par le nerf récurrent ainsi que la pres- du sphincter par distension.
sion du bolus alimentaire ont pour effet de faire basculer Cette distension est exercée par traction antérieure du
l'épiglotte sur le vestibule laryngé et plus particulièrement chaton cricoïdien lors de l'élévation laryngée. Le sphincter
la face craniale des cartilages aryténoïdes. s'ouvre 150 ms après l'élévation du larynx et reste ouvert
Il ne s'agit cependant pas d'un mécanisme protecteur environ pendant 500 ms [13].
essentiel de la filière aérienne comme en atteste le peu de
problèmes dysphagiques que présentent les patients ayant Le temps œsophagien
bénéficié d'une épiglottectomie au laser CO2 pour raison Au moment de la déglutition, à la fin de la contraction du
carcinologique ou fonctionnelle [9]. pharynx, le sphincter pharyngo-œsophagien se relâche
De même, la pexie linguolaryngée dont bénéficie la durant une demi-seconde.
plupart du temps les patients opérés de laryngectomie Ensuite, une onde péristaltique parcourt l'œsophage de
horizontale supraglottique leur assure un recouvrement haut en bas à la vitesse de 2 à 4 cm/s. Moins de 2 secondes
satisfaisant de leur fonction déglutatoire dans un délai tout après la relaxation du sphincter supérieur, le sphincter
à fait acceptable [10, 11]. gastro-œsophagien se relâche. Cette relaxation dure 5 à
Si le rôle de l'épiglotte semble peu important, il n'en va 10  secondes. Elle se termine par une contraction qui
pas de même des cartilages aryténoïdes. Leur présence ana- ­prolonge l'onde péristaltique et se maintient pendant une
tomique, bien plus encore que la fonctionnalité de leur arti- dizaine de secondes. Ensuite, le tonus de base se rétablit.
culation crico-aryténoïdienne, s'avère déterminante pour la L'onde péristaltique induite par la déglutition est appe-
protection des voies aériennes durant la déglutition. lée onde péristaltique primaire.
Le relief aryténoïdien constitue une barrière anato- Sous le nom de péristaltisme secondaire, on désigne
mique importante aux fausses déglutitions tant primaires l'onde de propulsion déclenchée par la distension de la
que secondaires. En cas de résection d'un cartilage aryté- paroi œsophagienne [14].
315
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

Contrôle nerveux de la déglutition Afférentations Afférentations


sensitives périphériques corticales
Le contrôle nerveux de la déglutition peut conceptuelle-
ment se subdiviser en trois éléments distincts (figure 26.1) :
● le processeur central médullaire (PCM) ;

● les afférences, sensorielles périphériques et corticales ;

● les efférences motrices.

Noyaux solitaires
Processeur central médullaire dorsaux
Véritable centre organisateur des différents mouvements
musculaires nécessaires à l'accomplissement d'une dégluti-
tion, il déclenche, module et séquence cette dernière.
PROCESSEUR CENTRAL MÉDULLAIRE
Il se situe au niveau médullaire et se compose de deux PCM
groupes dorsaux situés au niveau des noyaux solitaires
et de deux groupes ventraux situés en avant des noyaux
ambigus. Il existe des connexions nerveuses étroites d'une
Noyaux ambigus
part entre les groupes dorsaux et ventraux et d'autre part, ventraux
de part et d'autre de la ligne médiane. L'ensemble de ce
dispositif constitue le PCM, siège des afférences à la fois
périphériques et corticales [15].
Des études expérimentales récentes soulignent le rôle
de déclencheur et de modulateur des groupes dorsaux
(noyaux solitaires), les groupes ventraux (noyaux ambigus)
intervenants dans un second temps, sous l'impulsion des
groupes dorsaux, en tant que déclencheur « prémotoneu- Efférentations motrices
ronal » des différents noyaux centraux des nerfs crâniens
tout proches (V, VII, IX,X, XII). Fig. 26.1
Une inhibition rostrocaudale, entre les groupes dorsaux Contrôle nerveux de la déglutition.
et ventraux, expliquant la « pseudo-péristaltique » de l'oro-
pharynx à l'œsophage, a par ailleurs été évoquée par cer-
tains auteurs [15].
On a longtemps évoqué deux types bien distincts de
contrôles nerveux de la déglutition :
Afférentations ● l'un, involontaire, arc réflexe pur, sans afférentations

Afférentations sensitives périphériques corticales ;


● l'autre, volontaire, sous commande corticale.
Les afférences sensitives, générées au niveau de récepteurs
Des études très récentes, fondées sur la résonance
muqueux oropharyngés et de méchano-récepteurs pala-
magnétique nucléaire fonctionnelle (RMNf) liée à la tomo-
topharyngés, sont transmises via le V, IX et le X au PCM,
graphie à émission de positrons (TEP), viennent infirmer
ainsi qu'au cortex. Le volume ainsi que la texture du bolus
cette conception ancienne. En effet, bon nombre de zones
ingéré entraînent une modification du « pattern dégluta-
corticales sont actives lors de la déglutition dite involon-
toire » par les groupes dorsaux du PCM, soit directement,
taire. De plus, que ce soit pour la déglutition volontaire
soit indirecte­ment, sous l'action d'afférentations corticales.
ou involontaire, les territoires centraux concernés sont
Afférentations corticales multiples et bilatéraux. D'un point de vue clinique, ceci
explique la forte incidence de dysphagies lors d'accidents
Il est possible de déglutir en l'absence d'action corticale. vasculaires cérébraux (AVC) dans des territoires cérébraux
Des déglutitions ont en effet été objectivées chez le fœtus pourtant divers.
anencéphale. Il s'agit alors d'un arc réflexe simple sensitivo- Parmi les territoires impliqués, citons : le gyrus précentral
moteur rendu possible par la présence du PCM. latéral, le cortex pariétal somatosensoriel, le cortex tempo-

316
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

ral, le cortex cingulaire, l'opercule insulaire et frontal ainsi ● un mouvement contraire et coordonné du piston (la
que le thalamus. En l'état actuel des connaissances, l'hémis- langue) et de la partie antérieure de son fût (le larynx)
phère droit semble être prépondérant. conditionné par :
L'ensemble de ces territoires transmet des afférenta- – une bonne physiologie de la musculature sus- et
tions modulatrices (excitatrices et inhibitrices) aux groupes sous-hyoïdienne,
dorsaux des PCM. Ils sont notamment responsables de la – une absence d'entrave à l'ascension laryngée.
commande volontaire de déglutition, le déclenchement de Ce piston agit également de manière coordonnée,
la cascade d'événements musculaires dépendant quant à exigeant une intégration nerveuse sensitivomotrice par-
lui du PCM. faite ainsi qu'une coordination fine avec la physiologie
respiratoire.
Efférentations
L'impulsion de la commande motrice émane des groupes Classement physiopathologique
ventraux (noyaux ambigus) du PCM vers les différents des altérations de la déglutition
noyaux motoneuronaux tout proches. Cette action des
noyaux ventraux est subordonnée aux influx des noyaux Les pathologies sont classées en cinq catégories distinctes :
dorsaux sous l'influence des noyaux périphériques et ● les atteintes de la phase préparatoire de déglutition :

supramédullaires. – xérostomie,
– démence,
– certains types d'accidents vasculaires cérébraux,
Physiopathologie – sclérose latérale amyotrophique,
– édentation, etc. ;
● les atteintes prépondérantes des mécanismes propul-

Introduction seurs :
Fred Mc Connel proposa dès la fin des années 1980 une – sclérodermie,
modélisation de l'acte de déglutir appelée « le modèle du – dermatopolymyosite,
piston » [16]. Ce modèle compare le segment pharyngo- – sclérose latérale amyotrophique,
œsophagien à un piston – la base de langue – évoluant de – myasténie,
haut en bas dans un fût – la lumière pharyngée. – dystrophie myotoniques de Steinert,
Le franchissement sans encombre du pharynx durant le – dystrophie musculaire de Duchenne, etc.,
deuxième temps de la déglutition est fonction de la qualité – résection vélaire,
de ce piston. Par qualité, on entend une parfaite maîtrise – intoxication médicamenteuse,
des mécanismes propulseurs et protecteurs, et ceci en un – déficit anatomique lingual, etc. ;
● les atteintes prépondérantes des mécanismes protec-
temps record de l'ordre de la seconde.
Pour que ce piston soit compétent, un certain nombre teurs :
de conditions devront être réunies : – paralysie glottique en abduction,
● un hermétisme du fût pharyngé conditionné par : – déficit anatomique laryngé,
– une intégrité anatomique pharyngolinguale, – atteinte sensitives du pharyngolarynx (AVC),
– une intégrité anatomique vélaire, – trachéotomie, etc. ;
● les atteintes mixtes :
– une occlusion étanche du larynx ;
● une absence de résistance en aval conditionnée par : – par atteinte mixte, on entend une atteinte simultanée
– une relaxation et une ouverture passive du sphincter des mécanismes propulseurs et des mécanismes pro-
supérieur de l'œsophage, tecteurs. Ces présentations sont polymorphes. En voici
– une absence de compression intrinsèque ou extrin- quelques exemples non exhaustifs :
sèque de la lumière pharyngo-œsophagienne ; – les patients atteints de dystrophie myotonique de
● une bonne pression de « chasse » conditionnée par : Steinert cumulent souvent une atteinte simultanée
– un bon tonus de base et une bonne contractilité des des muscles constricteurs du pharynx (atteinte des
muscles linguaux, mécanismes propulseurs) et des muscles élévateurs
– un bon tonus de base et une bonne contractilité des et antérogrades du larynx (atteinte des mécanismes
muscles pharyngés ; protecteurs),

317
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

– les patients présentant un AVC peuvent présenter L'examen clinique inclut l'inspection de la cavité buccale
des symptomatologies mixtes en fonction du caractère ainsi que l'évaluation de ses capacités motrices et sensitives.
sensitif ou moteur des territoires corticaux atteints, Les mouvements du cartilage thyroïde, du larynx ainsi que
– les patients parkinsoniens présentent le plus sou- la synchronisation entre la déglutition et la respiration
vent un retard de réflexe de déclenchement de phase sont évalués. Il permet de mettre en évidence la présence
2 de déglutition (déficit protecteur), couplé à une de fausses routes pour autant qu'il n'y ait pas d'aspirations
impotence contractile des constricteurs du pharynx silencieuses. Il constitue une source de renseignements
(déficit propulseur) ; importante à la fois dans le bilan global du patient mais
– les atteintes mixtes sont, par définition, les atteintes aussi pour la prise en charge thérapeutique.
dont la prise en charge sera la plus ardue, L'examen clinique comporte un interrogatoire (si la
● les autres mécanismes rares : asynchronismes apnée– coopération du patient le permet), un examen mor-
déglutition rencontrés dans les multiple system atrophy ; phologique, un examen fonctionnel ainsi qu'un examen
impactions de corps étrangers, thromboses de veines jugu- de la déglutition salivaire dans un premier temps et ali-
laires internes, etc. mentaire dans un second temps si l'état du patient le
permet.
Bilan Lors de l'interrogatoire, on s'intéresse à :
● l'anamnèse médicale, réalisée préalablement par l'ORL,

Le bilan comporte un examen ORL complet avec une comprenant le diagnostic ainsi que l'histoire de la patho-
attention toute particulière portée à l'intégrité des struc- logie. L'historique des symptômes de la dysphagie (ancien-
tures anatomiques et des paires crâniennes. neté, mode d'apparition, évolution…) ;
Le bilan clinique est complété par une fibroscopie souple ● l'évaluation du statut nutritionnel (index de masse cor-

de déglutition où le patient déglutit un bolus coloré de tex- porelle, perte de poids, déshydratation, sélection alimen-
ture variable sous contrôle fibroscopique. taire, textures préférentielles, sensation de faim et de soif…)
La vidéofluorographie complète parfaitement le bilan en qui aura été réalisée préalablement par le nutritionniste ;
mettant l'accent sur les incidences de profil, les structures ● l'évaluation du statut respiratoire du patient (présence

osseuses ainsi que la physiologie du corps de l'œsophage. d'une trachéotomie, efficacité de la toux volontaire, pré-
D'autres techniques plus élaborées telles la vidéofluoro- sence d'encombrement respiratoire, fréquence des infec-
manométrie et l'électromyographie permettent dans cer- tions respiratoires…).
taines circonstances d'affiner le diagnostic. L'examen morphologique et fonctionnel réalisé par le
rééducateur comporte les évaluations suivantes :
● évaluation de l'état de souplesse et de la mobilité de la

Rééducation du patient colonne cervicale : on évalue les mouvements de rotation,


dysphagique de flexion, d'extension et d'inclinaison du rachis cervical en
termes de mobilité et de douleur ;
● évaluation de l'anatomie, de la fonctionnalité et de la

Examen clinique au lit du patient sensibilité de la bouche : cet examen évalue l'intégrité des
Une fois que le diagnostic médical a été posé, il est de différentes paires de nerfs crâniens impliqués dans la déglu-
bonne pratique pour les rééducateurs de refaire un examen tition (tableau  26.2). Les différentes phases de l'examen
clinique. Dans la pratique, cet examen poursuit plusieurs sont les suivantes :
buts [17] : – l'observation du patient et l'examen des muscles
● déterminer la présence d'aspirations ; peauciers et principalement du contrôle labial et jugal
● déterminer la nécessité d'un examen instrumental, telle (bavage, incompétence labiale, symétrie du visage…)
la vidéofluorographie, qui n'aurait pas été réalisé en pre- permettent de mettre en évidence la présence d'une
mière intention ; paralysie faciale (nerf crânien VII),
● donner des recommandations pour l'éventuelle alimen- – l'examen de l'ouverture maximale de la bouche
tation orale. renseigne sur la présence éventuelle d'une limitation
En outre, il sert de bilan de début de rééducation et (trismus). L'examen des mouvements mandibulaires
offre de ce fait la possibilité d'une réévaluation fréquente en (fermeture, latéralité, propulsion) permet de mettre en
cours de rééducation. évidence une atteinte du nerf crânien V3,

318
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

Tableau 26.2 Évaluation sensitive et motrice des paires crâniennes intervenant dans les mécanismes de la déglutition
Nerfs craniens Évaluation sensitive Évaluation motrice
Nerf trijumeau V Test de la sensibilité endobuccale (palais, Évaluation de la mobilité mandibulaire
joues, langue sensitive non gustative) et (muscles masticateurs) et de l'ascension
exobuccale (lèvres, menton, joues) laryngée (muscles mylohyoïdiens)
Nerf facial VII Test de la sensibilité gustative des 2/3 Évaluation de la mobilité des muscles
antérieurs de la langue (corde du tympan) peauciers (symétrie faciale, compétence
labiale) et de l'ascension laryngée (muscles
ventre postérieur du digastrique et
géniohyoïdiens)
Nerf glossopharyngien IX – Test de sensibilité de la base de langue – Évaluation de l'ascension laryngée
et de piliers (zone de déclenchement du (muscles stylopharyngiens)
réflexe de déglutition) – Évaluation de l'élévation du voile du
– Test de sensibilité gustative du 1/3 palais
postérieur de la langue
– Test du réflexe nauséeux

Nerf vague X Évaluation du réflexe de déglutition et du – Évaluation du reflux pharyngonasal


réflexe de toux – Signe du rideau

Nerf spinal XI Évaluation de la rotation céphalique et de


l'élévation de l'épaule
Nerf grand hypoglosse XII – Évaluation des mouvements linguaux
– Évaluation de l'élévation laryngée
(muscles géniohyoïdiens)

– l'observation globale de la cavité buccale informe sur ● examen de la déglutition salivaire au cours duquel on
le statut dentaire du patient, sur l'absence ou la présence observe :
excessive (stase) de salive, – l'ascension laryngée,
– l'examinateur s'intéresse également à la mobilité lin- – la présence de toux,
guale. Il demande au patient différents mouvements tels – la présence d'une stase pharyngée (voix mouillée)
que tirer la langue vers l'avant et vers les côtés, reculer la [18] ;
langue, pousser la langue contre le palais (nerf crânien ● examen de la déglutition alimentaire :

XII), – installation du patient : l'examinateur veille à instal-


– l'examen de la sensibilité exobuccale (lèvres, joues) et ler le patient dans une position confortable. On pré-
endobuccale (langue, joues, palais, piliers antérieurs) ainsi conise la position assise, buste droit, nuque stabilisée
que l'évaluation du réflexe nauséeux peuvent se faire à en légère antéflexion afin d'améliorer la protection
l'aide d'un long « coton-tige » dont l'extrémité est trem- laryngée,
pée dans de l'eau glacée. Il nous renseigne sur la présence – choix de la texture : la texture alimentaire est choisie
de déficits sensitifs (nerfs crâniens V, VII et IX) et est en fonction des examens morphologiques, fonctionnels
d'une grande utilité lors des premiers tests alimentaires ; et paracliniques. A priori, on choisit une texture homo-
● évaluation de la mobilité laryngée : gène la plus facile pour le patient :
– la palpation manuelle évalue dans un premier temps – chez les patients présentant des troubles de la pro-
la liberté de mouvement de l'os hyoïde et du cartilage tection des voies aériennes prédominants, on choisit
thyroïde, une texture semi-solide de type eau gélifiée, flanc,
– l'élévation laryngée est évaluée lors de la déglutition yaourt, crème de soja…,
salivaire. Le larynx s'élève de 2 cm lors d'une déglutition – chez les patients chez qui les troubles de la propul-
salivaire normale. La prononciation de sons aigus permet sion sont prédominants, on choisit une texture plus
d'évaluer la possibilité d'élévation laryngée ; proche du liquide,

319
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

– si l'essai est satisfaisant avec la texture choisie, on lors de l'examen fibroscopique. Le 3-ounce water swallow
peut alors tester des textures différentes. L'évolution test permet également la recommandation des structures
des textures se fait généralement dans cet ordre : lisse, alimentaires adaptées aux patients sans recourir à une
mixé, mouliné, haché, entier ; évaluation instrumentale [17]. Il peut être réalisé réguliè-
– propriétés physico-chimique des aliments : afin de sti- rement afin de suivre l'évolution du patient [23].
muler un maximum le réflexe de déglutition on choisit Les résultats des examens cliniques et paracliniques
des aliments aux températures (glacé ou chaud) et aux seront au centre des réflexions de l'équipe pluridiscipli-
goûts (acide, amer, sucré, salé) contrastés, naire, mode de prise en charge indispensable pour garantir
– volume du bol alimentaire : commencer avec des une qualité optimale de soins au patient dysphagique [24].
petits volumes (cuillère à café) pour ensuite augmenter En cas de trachéotomie par exemple, ce fonctionnement a
si les essais sont positifs, un effet positif sur les prises de décisions cliniques, le rôle
– aides : l'examinateur peut utiliser des aides techniques de chaque intervenant, la qualité des soins, le sevrage de la
telles qu'un verre à encoche nasale afin d'éviter l'extension canule, la longueur de séjour, l'utilisation des valves pho-
céphalique lors de la prise des liquides. Il peut également natoires, le vécu psychologique du patient et l'expertise et
choisir le lieu de déposition du bol alimentaire en fonc- la confiance des soignants [25]. En cas de cancer de la tête
tion de l'examen de la sensibilité endobuccale (linguale), et du cou, le patient pris en charge de manière multidis-
– observations : ciplinaire présente une meilleure adhérence et une meil-
– temps et efficacité de la phase buccale, leure compliance face à son traitement dysphagique [26].
– temps et nombre de déglutitions nécessaires pour
déglutir le volume proposé,
– mouvements céphaliques lors de la déglutition, Rééducation du patient dysphagique
– synchronisation déglutition–respiration,
– stase buccale après la déglutition, La rééducation du patient dysphagique poursuit plusieurs
– stase pharyngienne après la déglutition (voix objectifs. Les objectifs primaires sont de prévenir la malnu-
mouillée), trition et la déshydratation ainsi que de prévenir les risques
– toux pendant ou à distance de la déglutition (pré- de fausses routes. La récupération d'une alimentation
dicteur de la présence d'aspiration [19]). Attention ! orale sûre et efficace, l'éducation spécifique du patient par
L'absence de toux ne signifie pas l'absence de rapport à sa situation thérapeutique ainsi que les conseils
fausses routes ! [20] ; prétraitements médicaux (telles la chirurgie ou la radiothé-
– contres-indications de l'examen alimentaire : il est rapie dans le cadre des cancers de la tête et du cou) font
contre-indiqué chez le patient avec un niveau d'éveil également partie des objectifs de la rééducation [27, 28],
insuffisant [21] et chez le patient fébrile. L'examinateur le tout dans le but d'une amélioration de la qualité de vie.
évite aussi les premiers essais alimentaires s'il ne dispose La rééducation du patient dysphagique comprend tout
pas de matériel d'aspiration à proximité, ce qui est mis en œuvre pour améliorer la déglutition. Elle
– le 3-ounce water swallow test est classiquement utilisé ­comprend l'éducation, les techniques de compensation et de
dans la littérature afin de dépister les sujets à risque de facilitation ainsi que les techniques de rééducation ­proprement
dysphagie oropharyngée et d'aspirations [22]. Il consiste dites. La prise en charge du patient dysphagique est adaptée à
à demander au patient de boire 90 cc d'eau sans inter- chaque patient en fonction des résultats des e­ xamens cliniques
ruption. Les critères pris en compte pour une demande et instrumentaux. Cette prise en charge nécessite une collabo-
d'examen instrumentaux de la déglutition sont : l'impos- ration et une cohérence entre les intervenants de l'équipe plu-
sibilité de réaliser le test complètement, la toux, l'étouffe- ridisciplinaire ainsi qu'avec la famille du patient [21].
ment, ou la voix mouillée directement ou dans la minute Afin de faciliter la lecture et de permettre une meilleure
suivant la réalisation du test [22]. Suiter et Leder [17] ont vision d'ensemble de la prise en charge des patients dys-
récemment montré que ce test présente une très bonne phagiques, nous présentons au lecteur un tableau récapi-
sensibilité de 96,5 % et une spécificité de 48,7 % en compa- tulatif des grands mécanismes d'atteintes de la déglutition.
raison avec un examen fibroscopique. Concrètement, si le Pour chacun de ces mécanismes, nous y associons des
patient n'éprouve pas de difficulté lors du test, il y a 96,5 % exemples de pathologies, les anomalies de la dégluti-
de chance qu'il ne présente pas d'aspirations à l'examen tion les plus fréquemment rencontrées, et proposons les
fibroscopique. Le patient qui éprouve des difficultés lors techniques rééducatives les plus adaptées (tableau  26.3).
du test à 48,7 % de chance de présenter des aspirations Le kinésithérapeute peut dès lors avoir une lecture très
320
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

Tableau 26.3 Les différentes atteintes de la déglutition : exemples de pathologies, anomalies et techniques rééducatives
Atteintes Atteintes de la phase Atteintes des mécanismes Atteintes des mécanismes Atteintes mixtes
préparatoire de propulsion de protection
Exemples de – Xérostomie – Pathologies neurologiques – Atteintes sensitives – Maladie de
pathologies – Édentation – Atteintes du système pharyngolaryngée Steinert
– Pelviglossectomie nerveux central – Atteintes sensitives – Atteintes
– Muscite post-radique – Traumatismes crâniens consécutives à un AVC sensitivomotrices
– Démence – Atteintes motrices – Atteintes du centre de consécutives à un
– Paralysies faciales consécutives à un ACV contrôle respiratoire AVC
– Atteintes sensitives – Sclérose latérale – Laryngectomies – Parkinson
consécutives à un AVC amyotrophique (atteinte – Paralysie récurentielle – Concomitance
– Parkinson XII, VII, X) – Déficit anatomique de pathologies
– Parkinson larynx et pharynx propulsives et
– Atteintes – Résection vélaire résistives
neuromusculaires – Présence d'une
– Dermatopolymyosite trachéotomie
– Myopathie de Steinert – Parkinson
– Dystrophie musculaire de – Fibrose post-
Duchenne radiochimiothérapie
– Atteinte de la jonction – …
neuromusculaire
– Myasténie
– Résection vélaire
– Intoxication
médicamenteuse
– Déficit anatomique lingual
– …
Anomalies – Occlusion labiale – Retard ou absence du – Occlusion
insuffisante réflexe de déglutition vélopharyngée
– Réduction de la tension – Diminution du incomplète
intrabuccale péristaltisme pharyngé – Ascension laryngée
– Réduction des (stases valléculaires et des réduite
mouvements linguaux sinus piriformes) – Protection laryngée
– Diminution de la sensibilité – Déficit de la sensibilité insuffisante
buccale laryngée – Absence d'apnée lors de
– Sécheresse buccale – Dysfonction du SSO la déglutition
– Difficultés masticatoires (sphincter supérieur de – …
– … l'œsophage)
– …
Techniques – Praxies buccofaciales – Posture menton–sternum – Posture
– Posture en inclinaison – Posture en rotation menton–sternum
latérale céphalique – Posture couché latéral
– Déglutition forcée – Posture couché latéral – Manœuvre de
– Déglutitions multiples – Posture en inclinaison Mendelshon
– Adaptation du bol latérale – Déglutition (super-)
alimentaire – Déglutition forcée supraglottique
– Exercices de renforcement – Déglutitions multiples – Adaptation du bol
lingual – Adaptation alimentaire
– Exercices de praxies du bol alimentaire – Stimulation électrique
orofaciales – Stimulation thermotactile muscles suprahyoïdiens
– Biofeedback – Exercices de renforcement – Exercices de Shaker
lingual – Biofeedback

321
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

pratique de ce tableau pour tout patient présentant une les essais alimentaires. La figure  26.2 présente le rôle du
pathologie entraînant une dysphagie ou présentant des kinésithérapeute durant le parcours du patient dyspha-
signes clairs de dysphagie. Dans la suite de ce chapitre, gique [29]. On constate qu'il présente également un rôle
nous ne nous attarderons pas en détail sur les différentes préventif face au risque de pneumopathies d'inhalation et
pathologies étant donné que la rééducation sera princi- qu'il est chargé de la surveillance et du suivi de l'état respi-
palement basée sur les résultats des examens cliniques et ratoire du patient dysphagique tout au long de son séjour
paracliniques. Par contre, l'accent sera mis sur la descrip- hospitalier. Le kinésithérapeute devra être attentif à :
tion des différentes techniques rééducatives ainsi que leurs – maintenir son patient en position semi-assise de 30 à
actions respectives. 45° pour favoriser un état respiratoire idéal [30],
Avant de décrire en détail ces différentes techniques, – tenir compte de l'état de conscience du patient pour
nous tenons à revenir sur deux points qui nous semblent débuter la rééducation proprement dite.
des plus importants dans la prise en charge du patient dys-
phagique : Techniques de compensation
● importance du travail de la détente cervicoscapulaire  :

nous avons vu dans la première partie de ce chapitre, Les techniques de compensation sont définies comme des
l'importance de la mobilité des structures de la face anté- stratégies permettant un effet direct mais transitoire sur
rieure du cou (ascension laryngée et hyoïdienne) dans l'efficacité et la sécurité de la déglutition. Ces techniques
les mécanismes de déglutition. De plus, nous verrons compensent mais ne remédient pas au problème de dys-
que de nombreuses techniques de rééducation néces- phagie. Elles doivent donc être correctement réalisées afin
sitent une bonne mobilité de l'ensemble de la colonne de prévenir les épisodes de fausses routes. Elles sont clas-
cervicale (flexion, rotation, inclinaison…). Dès lors, nous sées en trois grandes catégories : les techniques posturales,
recommandons, en parallèle à toute rééducation de la les manœuvres et l'adaptation des caractéristiques du bol
dysphagie, un travail d'assouplissement et de mobilité de alimentaire.
la colonne cervicale y compris de la jonction craniocer-
vicale et cervicoscapulaire. Ceci est particulièrement vrai Techniques posturales
en cas de traitement (ou d'antécédent de traitement) de Les techniques posturales éliminent les phénomènes d'as-
radiothérapie de cette région ou suite à la présence d'une piration chez 75 à 85 % des patients [31].
trachéotomie. En effet, outre les problèmes de dégluti- L'effet des techniques posturales a été étudié chez un
tion engendrés, on observe une difficulté à la mobilisation groupe de 165 patients présentant des aspirations [32].
chez ces patients due à une modification physiologique L'évaluation par vidéofluoroscopie a montré que la réali-
des structures anatomiques ou à des contractures mus- sation de ces manœuvres permettait d'éliminer les aspira-
culaires installées provoquées par des douleurs ou du tions chez 127 patients (77 %). Les postures doivent être
stress lié à la pathologie ; individualisées en fonction de la pathologie et des struc-
● importance de la kinésithérapie respiratoire : le patient
tures anatomiques atteintes. Le choix de la posture peut
dysphagique est particulièrement à risque de fausses dès lors être proposé lors d'une évaluation vidéofluorosco-
routes pouvant mener à des surinfections pulmonaires. Le pique mettant en évidence l'effet des différentes postures
travail de rééducation respiratoire a pour but de diminuer sur les aspirations [21, 32].
voire de supprimer les inhalations bronchopulmonaires en
favorisant, notamment, la protection des voies aériennes Posture menton–sternum (chin–thuk)
et la coordination entre la respiration et la déglutition. En En pratique
effet, toute déglutition implique une apnée [7] et donc On demande au patient une flexion de la tête vers l'avant
une réserve respiratoire. L'éducation et l'apprentissage amenant le menton vers le sternum.
d'une toux efficace doivent aussi être envisagés. Avant Indications
toute séance de rééducation à la déglutition ainsi qu'avant Elle présente un intérêt chez les patients présentant un
tout essai alimentaire, nous recommandons un contrôle retard d'initiation du temps pharyngien de la déglutition
de l'encombrement pulmonaire ainsi qu'une kinésithé- induisant un risque de fausse route avant la déglutition
rapie de désencombrement bronchique, si elle s'avère [33, 34] ainsi que chez les patients présentant un déficit de
nécessaire, afin que le patient soit dans les meilleures recul de la base de langue et/ou une protection des voies
conditions respiratoires possibles. Il en va de même après aériennes réduite lors de la déglutition [35].

322
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

Patient

Rééducation
Sédaté et ventilé Vigile
alimentation orale

Cas particulier du patient trachéotomisé


Trachéotomisé Intubé Dysphagique
Cas particulier de la sonde nasogastrique

A jeun per os avec alimentation :


Essais Reprise progressive
- Entérale (SNG, gastrostomie)
alimentaires de l’alimentation
-Parentérale
Kiné

Amélioration des fonctions respiratoires Surveillance respiratoire

Kiné! Kiné!

Prévention des pneumopathies d’inhalation

Fig. 26.2
Place du kinésithérapeute respiratoire face à un patient dysphagique [29].

La posture chin–thuck a été largement étudiée chez pourrait affecter la coordination entre la déglutition et
des sujets sains [36], mais également chez des patients en la respiration [42]. Enfin, chez les sujets sains réalisant la
traitement de cancer de la tête et du cou [37, 38] et des posture, Bullow [36] a mis en évidence un affaiblissement
patients présentant des dysfonctions neurologiques [32, des muscles constricteurs du pharynx. La posture pourrait
39, 40]. dès lors affecter la protection des voies aériennes chez les
La posture chin–thuck a un effet direct sur le temps pha- patients présentant une faiblesse des muscles constricteurs
ryngien par le biais de différents mécanismes : du pharynx.
● amélioration de la protection des voies aériennes [40] ;

● lrecul de la base de langue et de l'épiglotte contre le mur


Posture en rotation céphalique
En pratique
postérieur pharyngien [36, 40] ;
● élargissement de l'espace valléculaire [31] ;
On demande au patient d'effectuer une rotation cépha-
● diminution de l'espace entre le larynx, l'os hyoïde et la
lique du côté opposé au sinus piriforme vers lequel on
vise à diriger le bol alimentaire. Cette posture est utili-
mandibule [36] ;
● réduction de l'importance de la pénétration de liquide
sée pour compenser une parésie pharyngée unilatérale
[43–45].
dans le larynx et la trachée lors d'épisodes de fausse route
[41] ; Indications
● diminution des fausses routes [32, 38]. Elle est indiquée chez les patients présentant une dysfonc-
Toutefois, la posture chin–thuck n'a pas d'efficacité dans tion laryngée unilatérale à risque de fausse route se produi-
la protection des voies aériennes des aspirations lorsque la sant avant la déglutition.
substance à avaler pénètre dans les sinus piriformes avant La rotation céphalique induit une pression externe sur
que le temps pharyngien ne soit initié [39]. De plus, elle le cartilage thyroïde, augmentant l'adduction de la corde

323
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

vocale, ce qui améliore la protection des voies aériennes Indications


lors de la déglutition [31]. Cette posture est également Elle est indiquée chez des patients présentant un déficit
­indiquée chez les patients présentant une dysfonction de l'élévation laryngée ou une diminution de l'ouverture
cryco­pharyngienne [44, 45]. crycopharyngienne.
La manœuvre de Mendelsohn a été étudiée chez des
Posture en couché latéral
sujets sains ayant une déglutition normale [46–48], chez
En pratique
des patients en traitement pour des cancers de la tête et
On demande au patient de prendre une posture en décu-
du cou [49, 50] ainsi que chez des patients présentant des
bitus latéral.
atteintes neurologiques [51]. Les effets de la manœuvre
Indications sont bien décrits :
Cette posture assez peu étudiée est préconisée afin de ● augmentation de l'amplitude et de la durée de l'éléva-

prévenir les fausses routes chez les patients présentant tion laryngée [47] ;
une faiblesse pharyngienne bilatérale et une diminu- ● augmentation de l'amplitude et de la durée de l'ouver-

tion de la contraction des muscles pharyngiens. Elle est ture cricopharyngée ;


indiquée également chez les patients présentant une ● augmentation de l'amplitude et de la durée de la

diminution de l'ascension laryngée qui inhalent des rési- contraction pharyngienne [48] ;
dus alimentaires provenant des sinus piriformes après la ● augmentation de l'activité des muscles sous-­mentonniers

déglutition [31]. Cette posture améliore le transit oral et [46] ;


diminue la présence de résidus laryngés. Rasley et al. [32] ● amélioration de la coordination du temps pharyngien

ont montré un intérêt de cette posture dans la préven- de la déglutition [49] ;


tion des inhalations uniquement pour une faible quantité ● augmentation de la durée de contact entre la base de

de liquide. langue et le mur pharyngé postérieur [46, 50] ;


● amélioration de la clairance du bolus alimentaire lors de
Posture head tilt (inclinaison latérale)
En pratique la déglutition [46] ;
● diminution des inhalations [46].
On demande au patient d'incliner la tête du même côté
du sinus piriforme vers lequel on vise à diriger le bol Manœuvre de déglutition forcée
alimentaire. En pratique
Indications On demande au patient de forcer le mouvement de déglu-
Cette posture est utilisée chez les patients présentant une tition afin de stimuler le recul de la base de langue.
dysfonction linguale unilatérale ou une faiblesse pharyn-
gienne unilatérale [31]. Indications
Elle est recommandée pour les patients ayant une diminu-
tion du recul de la langue ou un déficit de la contraction
Manœuvres de facilitation
des muscles du pharynx.
Les manœuvres sont utilisées dans le but d'influencer Les études chez des sujets sains et des sujets présentant
la durée des phases de déglutition et le débit du bolus des troubles neurologiques ont mis en évidence :
alimentaire. Elles sont proposées au patient en cours de ● une augmentation de l'amplitude et de la durée de la

rééducation et tant que la déglutition n'est pas améliorée. pression pharyngienne durant la déglutition [52–56] ;
L'apprentissage et l'exécution correcte de ces manœuvres ● une diminution de la pénétration laryngée [41] ;

demandent une bonne compréhension et une partici- ● une augmentation du recul de la langue pendant le

pation active du patient. Certaines de ces manœuvres temps pharyngien de la déglutition [55].
nécessitent un effort musculaire important de la part du La manœuvre de déglutition forcée présente toutefois
patient. quelques effets potentiellement négatifs comme :
● une diminution de l'élévation laryngée [36] ;
Manœuvre de Mendelsohn ● un relâchement incomplet du segment pharyngo-­
En pratique
œsophagien [41] :
On demande au patient d'initier la déglutition et de main- ● un retardement du début de la contraction pharyn-
tenir le larynx dans sa position la plus haute pendant 5
gienne [54].
secondes.

324
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

Déglutition supraglottique et super-supraglottique Adaptation des caractéristiques du bol alimentaire


En pratique
Variation du volume
Pour la déglutition supraglottique, on demande au patient
De nombreux aspects des phases orale et pharyngée sont
de mettre l'aliment en bouche, d'inspirer par le nez, d'avaler
influencés par le volume du bol alimentaire. Les mouve-
tout en maintenant l'apnée inspiratoire et enfin de tousser
ments d'élévation et d'antériorisation hyolaryngés, l'ouver-
immédiatement après la déglutition [33, 34]. La toux en fin
ture du sphincter supérieur de l'œsophage, le recul de la
de manœuvre est réalisée afin de chasser les résidus alimen-
base de langue ainsi que le temps d'apnée durant la déglu-
taires stagnant au niveau des sinus piriformes et risquant
tition sont influencés par le volume dégluti [59–61]. Une
d'être inhalés lors de l'inspiration suivant la déglutition. La
augmentation du volume augmente l'activité musculaire
déglutition super-supraglottique est identique en ajoutant
linguale et laryngée.
une flexion de la tête avec une résistance frontale lors de la
Lors de la rééducation, on modifie les volumes en préfé-
déglutition.
rant une petite quantité (type cuillère à café). En effet, chez
Indications tout individu, l'augmentation du volume du bol alimentaire
Ces manœuvres sont particulièrement indiquées chez les augmente le temps de la phase orale et pharyngée. Chez le
patients présentant une diminution de la fermeture des patient ayant présenté un AVC, ces phases sont déjà aug-
voies aériennes et plus spécifiquement les patients ayant mentées [62], on leur proposera donc un petit volume à
bénéficié d'une laryngectomie ou d'un traitement par déglutir. En fonction de l'évolution du patient, on peut aug-
radiothérapie au niveau du larynx ou du pharynx. Elles sont menter progressivement les volumes proposés.
également indiquées chez les patients présentant un retard
de fermeture des voies aériennes. Variation de la viscosité
Les deux manœuvres ont pour but commun de réduire L'augmentation de la viscosité des aliments chez le patient
le risque de fausse route avant, pendant et après la déglu- dysphagique est souvent utilisée lors des essais alimentaires,
tition [51, 57] en assurant une fermeture des vraies et voire donnée comme consigne de préparation alimentaire
fausses cordes vocales. La manœuvre super-supraglot- pour les repas [63]. Classiquement, on conseille une pro-
tique semble toutefois allonger le temps de protection gression de l'aliment mixé vers l'aliment solide. On peut
des voies aériennes supérieures. Les études réalisées chez également varier la viscosité des liquides. L'eau épaissie
des sujets sains ainsi que chez les patients présentant des permet de ralentir son arrivée au niveau de l'hypopharynx,
troubles neurologiques ou étant suivi pour les cancers de alors que le larynx peut encore être ouvert. Notons que
la tête et du cou après chirurgie ou après radiothérapie la perception de la viscosité se détériore avec l'âge et ce,
montrent : d'autant plus que le sujet est de sexe masculin [64].
● une augmentation du temps et de l'amplitude de l'éléva-

tion laryngée et de la fermeture glottique [36, 58] ; Variation du goût et de la stimulation tactile
● une augmentation du temps et de l'amplitude de l'ou- La stimulation de la déglutition en utilisant un goût amer
verture du segment pharyngo-œsophagien [36, 58] ; semble faciliter la déglutition. L'augmentation de la stimu-
● une augmentation de la rétraction de la base de lation des récepteurs situés dans l'oropharynx induit une
langue ; déglutition plus rapide et plus forte. L'étude de cette sti-
● une initiation plus précoce de la fermeture des vraies mulation chez des patients sains et des sujets atteints de
cordes vocales et de la fermeture des aryténoïdes [58]. pathologies neurologiques montrent :
● une amélioration du timing de la déglutition ;

● une augmentation de la force musculaire pendant la


Déglutitions multiples
En pratique déglutition ;
● une diminution de l'incidence des fausses routes ;
On demande au patient de déglutir plusieurs fois à la suite
● une augmentation du nombre de déglutitions sponta-
dans le but d'assurer une vidange buccale et pharyngée
optimale. nées après présentation du bolus alimentaire amer (chez les
sujets atteints de pathologies neurologiques) [65].
Indications Certaines personnes éprouvant des difficultés à diffé-
Cette technique est proposée chez les patients présentant rencier les goûts peuvent ne pas bénéficier de ce type de
un déficit de vidange buccale ou pharyngée. stimulation.

325
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

L'utilisation de substances gazeuses semble améliorer la coordination des différentes phases de la déglutition. Elles
déglutition oropharyngée en diminuant la quantité de rési- sont utilisées essentiellement pour minimiser les symp-
dus et en diminuant les aspirations [60] ; elles sont conseil- tômes de la phase pharyngée. Pratiquement, il ne faut
lées chez les patients dysphagiques [66]. pas négliger la stimulation possible d'autres muscles de
la région du cou à cause de la stimulation électrique non
sélective [70].
Rééducation
La rééducation de la dysphagie comprend toutes les tech- Indications
niques qui permettent avec le temps d'induire des change- De manière générale, Blumenfeld et  al. [71] et Tan et  al.
ments permanents de la physiologie et des mécanismes de [72] ont comparé l'utilisation de stimulations électriques
la déglutition du patient dysphagique. Parmi les techniques à un traitement classique et ont montré une meilleure
proposées, on distingue les techniques de stimulation et les amélioration de la fonction dans le groupe de patients
exercices qui seront appris aux patients et reproduits par traités par stimulations électriques. Toutefois, Kiger et  al.
ceux-ci. [73] ne sont pas parvenus à montrer une différence entre
Les techniques proposées ne nécessitent pas de déglu- un traitement classique et un traitement par stimulations
tition proprement dite. Elles sont d'une grande utilité électriques.
dans le traitement des patients présentant des dysphagies Freed et  al. [74] montrent, quant à eux, l'intérêt de la
sévères. Elles permettent à ces patients de progresser en stimulation électrique par rapport à la technique plus tradi-
toute sécurité sans les limitations imposées par d'autres tionnelle de stimulation tactile dans le traitement de la dys-
techniques nécessitant des déglutitions de bol alimen- phagie chez les patients ayant subi un AVC. Dans le même
taire [67]. cadre, Lim et al. [75] montrent des améliorations au niveau
du score de la fonction de déglutition, du taux d'inhalation
et du temps de transit pharyngé. Les patients du groupe
Techniques de stimulation
traités sont aussi plus satisfaits. Gallas et al. [76] montrent
Stimulations thermotactiles un effet positif de la stimulation pendant la déglutition
En pratique chez ces patients et évoquent le phénomène de plasticité
La stimulation des arcs palatoglosses (piliers antérieurs du cérébrale. Kushner et  al. [77] avancent que la stimulation
voile du palais) selon la technique de Logemann utilise un électrique combinée à un traitement classique comparé à
miroir laryngé de faible diamètre pour stimuler le réflexe ce dernier uniquement diminue la dépendance des patients
de déglutition. Le miroir peut être refroidi avec des glaçons dysphagiques à leur sonde alimentaire. Bülow et al. [78] et
afin d'accentuer la stimulation [68]. Le thérapeute stimule Tan et al. [72] ne montrent, par contre, pas de différence sta-
les arcs palatoglosses à l'aide du miroir refroidi en encou- tistiquement significative entre ces deux types de groupes.
rageant le patient à déglutir sa salive après chaque série de Leelamanit [79] a montré qu'une stimulation des
stimulations. On observe une amélioration immédiate et muscles sous-hyoïdiens synchronisée avec la déglutition
temporaire de la vitesse de déglutition. permettait de restaurer une déglutition normale chez des
sujets présentant un déficit d'ascension laryngée et per-
Indications
mettait en plus de diminuer l'incidence de nutrition par
Les stimulations sont proposées chez les patients présen-
sonde nasogastrique ou par gastrostomie. Park et al. [80]
tant un retard d'initiation du temps pharyngien de la déglu-
constatent une amélioration sur l'élévation de l'os hyoïde
tition [69].
suite à une étude menée sur des sujets sains mais conclut
L'efficacité de cette technique à long terme n'a pas été
par une nécessité d'évaluer ces résultats à plus long terme.
montrée.
Au contraire, Humbert et  al. [81] ont quant à eux mon-
Stimulations électriques tré une diminution de l'élévation maximale de l'os hyoïde
En pratique et de l'élévation laryngée durant la déglutition chez des
L'utilisation des stimulations électriques dans le cadre de sujets sains stimulés électriquement. Ils en concluent que
la rééducation de la dysphagie a été largement étudiée ces la stimulation électrique des muscles sus- et sous-hyoï-
dernières années, principalement chez des individus sains diens pourrait être délétère chez les patients dysphagiques
et chez des patients souffrant de déficits neurologiques. Les présentant un déficit de l'élévation laryngée. Ludlow [82]
stimulations électriques visent à améliorer la force muscu- confirme les observations de Humbert chez des patients
laire et à corriger un tonus anormal tout en rééduquant la dysphagiques chroniques et met en garde de la possibi-
326
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

lité d'induire une diminution de l'élévation hyo-laryngée Exercices de praxies buccofaciales


nécessaire à la protection des voies aériennes lors de la En pratique
déglutition. On demande au patient de réaliser divers mouvements
Humbert et  al. [83] rajoutent que ces stimulations ne linguaux et labiaux. Ces mouvements sont expliqués au
produisent pas une adduction suffisante des cordes vocales patient qui peut ensuite les reproduire devant le miroir.
pour protéger les voies aériennes et que la position des
Indications
électrodes peut même provoquer une augmentation de
Les praxies buccofaciales sont indiquées chez les patients
l'ouverture.
présentant des troubles de la phase préparatoire de la
En cas de dysphagie suite à un traitement pour un can-
déglutition.
cer de la tête et du cou, Ryu et al. [84] montrent un effet
Si le thérapeute est confronté à une limitation de l'ouver-
supérieur (mais non significatif) en cas de stimulation élec-
ture buccale, des exercices de détente des muscles masti-
trique combinée au traitement classique.
cateurs seront proposés en parallèle avec des exercices de
Chez des patients atteints de sclérose multiple présen-
mobilité mandibulaire. L'utilisation du Therabite® peut égale-
tant des problèmes de déglutition, Bogaardt et  al. [85]
ment aider les patients présentant une limitation d'ouverture
présentent une diminution de la production de salive et
buccale [89] et principalement les patients bénéficiant d'un
du taux d'inhalation suite à un traitement de stimulation
traitement combiné de radiothérapie et chimiothérapie.
électrique neuromusculaire.
En conclusion, nous avons encore besoin de ­comprendre Exercices de renforcement lingual
certains effets de la stimulation électrique en cas de La force des muscles de la langue est corrélée avec le temps
­problèmes dysphagiques et son intérêt en fonction du de transit alimentaire pour les phases orale et pharyn-
niveau de gravité avant d'appliquer ce type de traitements gienne de la déglutition jouant un rôle dans la dysphagie
à toute la population de ces patients. Les études tendent oropharyngienne [90]. La faiblesse de ces muscles est quant
à montrer un effet positif (amélioration moyenne de 20 % à elle corrélée à une augmentation du temps oral de la
dans les performances à la déglutition après traitement déglutition et à la présence de résidus alimentaires sur la
toutes pathologies confondues d'après Carnaby-Mann langue après la déglutition. Ces constatations supportent
et  al. [86]), mais il reste des questions sans réponses et l'utilisation d'exercices de renforcement de la musculature
les preuves scientifiques à l'aide d'études rigoureuses et linguale.
d'échantillons plus grands manquent encore [70, 87, 88].
On peut néanmoins préciser qu'aucune étude ne relate En pratique
de complications liées à l'application d'une stimulation On demande au patient des répétitions de contractions
électrique. isométriques de 5 secondes contre résistance. Le patient est
amené à pousser la langue contre un abaisse-langue dans
Exercices trois directions : vers l'avant, vers la gauche et vers la droite.
On demande également au patient des exercices de main-
La réalisation d'exercices spécifiques influence et amé-
tien du recul maximal de la langue. Enfin, on peut stimuler
liore la déglutition chez le sujet dysphagique. Les études
la pulsion de la langue contre le palais. Les exercices seront
récentes sur la plasticité cérébrale ont montré l'impor-
adaptés en fonction des buts recherchés. Le rééducateur
tance de la répétition des exercices pour induire des
peut dès lors proposer des exercices plutôt en force ou plu-
changements cérébraux et les maintenir en place. Dans
tôt en résistance [91].
la pratique clinique, ces travaux supportent la nécessité
Les programmes d'exercices augmentent la force lin-
d'une pratique régulière et consistante des exercices
guale [92–94], les pressions enregistrées lors de la déglu-
afin d'acquérir et de maintenir une amélioration de la
tition [93, 95, 96], et améliorent la protection des voies
déglutition [67]. La notion d'intensité ou de dosage des
aériennes [96].
stimulations est tout aussi importante. Il semblerait qu'il
y ait d'une part un seuil critique à partir duquel l'exercice Indications
devient efficace et d'autre part, un seuil de stimulation Robbins [95] a montré l'intérêt spécifique de ce type
à ne pas dépasser afin que le travail ne devienne pas d'exercices chez les personnes âgées dans la réduction des
toxique. Les travaux futurs établiront certainement des effets de comorbidité de la dysphagie (pneumonie, mal-
balises à l'intérieur desquelles le thérapeute pourra navi- nutrition et déshydratation) et l'amélioration de la qualité
guer sans risque. de vie. Carnaby-Mann et al. [97] ont montré l'intérêt d'un
327
III. Kinésithérapie et réhabilitation respiratoire

programme d'exercices incluant le renforcement de la la coordination entre la respiration et la déglutition. Des


musculature linguale et mandibulaire, associé à une adap- capteurs intra-oraux peuvent être utilisés pour travailler
tation de l'alimentation chez des patients bénéficiant d'un les exercices de renforcement de la musculature linguale.
traitement par chimiothérapie pour un cancer de la tête et L'EMG peut également être utilisé dans l'apprentissage
du cou. Enfin, Carroll [29] a montré que la réalisation d'un des manœuvres de facilitation telle que la manœuvre de
programme d'exercices (incluant des exercices de renforce- Mendelsohn [46].
ment lingual, de Shaker et des manœuvres de facilitations)
Exercices de renforcements des muscles expiratoires
avant un traitement combiné de chimiothérapie et radio-
Les exercices de renforcements des muscles expiratoires
thérapie améliorait la déglutition de ces patients après le
ont montré leur efficacité dans l'amélioration des para-
traitement.
mètres respiratoires, de la voix et de la toux. Ils ont pour
Exercices de « Shaker » but de permettre aux patients de générer des pressions
En pratique expiratoires plus importantes.
Le patient est installé en décubitus dorsal. On lui demande En pratique
de décoller la tête du sol comme s'il voulait regarder ses Ces exercices consistent à expirer contre une résistance
orteils. Pour un travail en isométrique, on demande au constante (variant de 0 à 150 cmH2O), la résistance étant
patient de maintenir la position pendant 1 minute, de répé- réglée en fonction de la pression expiratoire maximale
ter l'exercice 3 fois avec 1 minute de repos entre les répéti- générée par le patient. Sapienza et al. [101] ont développé
tions. Pour un travail isotonique, on demande au patient de et étudié l'expiratory muscle strength training device (EMST)
décoller la tête du sol comme s'il voulait regarder ses orteils qui permet de réaliser ces exercices. Le protocole d'exercices
pour ensuite directement revenir à la position de départ. proposé par Sapienza est le suivant : réalisation d'exercices à
L'exercice est répété 30 fois. Les deux modalités ­d'exercices domicile durant 15 à 20 minutes par jour. La résistance de
sont réalisées 5 fois par jour. Ces exercices renforcent l'appareil est modifiée chaque semaine et est réglée à 75 %
les muscles suprahyoïdiens et améliorent l'ouverture du de la pression expiratoire maximale du patient.
sphincter supérieur de l'œsophage. Weelher [102] a montré une augmentation de l'activité
Indications des muscles sous-mentonniers lors de la réalisation des
Ils sont particulièrement indiqués chez les patients qui font exercices avec l'EMST en comparaison à l'activité muscu-
des fausses routes après la déglutition, secondairement à laire lors de la déglutition salivaire.
une diminution de l'ascension hyolaryngée et de l'ouver- Indications
ture du sphincter supérieur de l'œsophage [98, 99]. Par l'action de renforcement des muscles sous-mentonniers
Exercices de biofeedback qu'ils produisent, ces exercices pourraient être intéressants
La Swallowing Workstation® (Kay Elemetrics corp, Pine chez les patients présentant une faiblesse de ces muscles
Brook, NJ) ainsi que des systèmes de biofeedback portatifs utiles à l'élévation laryngée (patients après un traitement de
[100] permettent de travailler les exercices de mobilisation radiothérapie suite à un cancer de la tête et du cou, patients
laryngée. alimentés artificiellement, patients parkinsoniens…) [103].

En pratique
Une électrode de surface est positionnée sous le muscle ou Conclusion
le groupe musculaire à travailler. À chaque contraction, le
patient est informé de l'effort fourni par un feedback auditif La déglutition est un acte sensori-moteur complexe
ou visuel. nécessitant l'intervention de nombreuses structures ana-
Indications tomiques. Cette horlogerie fine peut malheureusement
Les exercices sont indiqués chez les patients présentant une être perturbée dans de nombreuses situations. Face à cette
diminution de l'élévation laryngée, un asynchronisme respi- perturbation, nous aurons à conduire des bilans cliniques et
ration–déglutition ou chez qui il est nécessaire de tonifier paracliniques des plus minutieux. Les rééducateurs se base-
les muscles linguaux. ront sur ces bilans afin de construire leur schéma rééducatif
Le biofeedback apporte une stimulation supplémentaire et permettre de la sorte d'éviter les épisodes de fausse route
pour le patient lors de la rééducation. L'enregistrement ainsi que la morbidité qui y est associée. Pour ce faire, il dis-
EMG combiné au tracé respiratoire permet de travailler pose d'un arsenal de postures, manœuvres, adaptations ali-

328
26. Troubles de la déglutition et leur rééducation

mentaires et techniques rééducatives qui seront adaptées [19] Logemann JA, Veis S, Colangelo L. A screening procedure for oro-
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331
Chapitre 27
Principes et pratique
de l'aérosolthérapie
Reychler Gregory, Jean-Christophe Dubus, Laurent Vecellio

PLAN DU CHAPITRE
Qu'est-ce qu'un aérosol ? 336
Quels moyens d'administration ? 336
Que devient le médicament ? 338
Où vont les aérosols inhalés ? 339
Facteurs influençant ? 340
Quelle hygiène ? 341
Kinésithérapeute et aérosolthérapie :
une relation étroite 342

Kinésithérapie respiratoire
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IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

L'aérosolthérapie est une modalité d'administration naire obtenu avec ces appareils va de 10 à 40 % de la
médicamenteuse utilisée depuis bien longtemps pour le dose de départ et est influencé principalement par la
traitement des pathologies respiratoires (BPCO, asthme, qualité de la technique d'inhalation et la synchronisa-
mucoviscidose…) et qui vise aujourd'hui de nouvelles tion de l'inspiration avec l'activation du dispositif [1].
indications (bronchiolite du nourrisson, hypertension L'impaction des particules au niveau oropharyngé qui
pulmonaire, chimiothérapie…). L'intérêt est de pouvoir découle du débit médicamenteux élevé contribue aux
administrer directement la substance active au niveau du effets indésirables de certaines molécules. Des aérosols-
site d'action et de profiter de la grande surface de diffusion doseurs munis d'un système permettant de délivrer la
qu'offrent les poumons pour un passage systémique. De substance médicamenteuse après déclenchement du
nombreux appareils existent et cette diversité peut contri- système d'expulsion par l'inspiration du patient existent.
buer à perturber les intervenants vu les spécificités propres L'avantage d'un tel système est de pallier les problèmes
à chacun d'eux. liés à une mauvaise coordination tout en évitant l'utilisa-
tion d'une chambre d'inhalation [2]. Un débit inspiratoire
minimal étant nécessaire à la délivrance du produit, son
utilisation pourrait poser des difficultés chez les enfants
Qu'est-ce qu'un aérosol ? [3] ou les personnes âgées. Ces dernières le préfèrent et
Un aérosol est un ensemble de particules en suspension l'utilisent plus facilement [4], tandis que les enfants ne
dans l'air. Ces particules, lorsqu'elles sont suffisamment fines, semblent pas commettre plus d'erreurs avec ce système
peuvent pénétrer et se déposer dans les voies respiratoires. comparativement à ceux des autres familles [5].
Dans le cadre de la nébulisation, les particules sont des Les chambres d'inhalation sont en plastique ou métal-
gouttelettes de liquide qui mesurent quelques micromètres liques. De forme et de volume variables, l'aérosol-doseur
et qui ont une forme sphérique. Cet aérosol nébulisé est s'y insère d'un côté et le patient respire du côté opposé
polydispersé, c'est-à-dire constitué de particules de tailles par un embout buccal. Un masque facial peut y être
différentes. Pour interpréter statistiquement cette distribu- adapté, indispensable pour les enfants de moins de 4 ans.
tion de taille de particules, on utilise le terme de MMAD Ces chambres sont parfois munies d'une ou deux valves
(mass median aerodynamic diameter ou diamètre aérody- de caractéristiques variables selon le modèle. L'utilisation
namique médian en masse). Le MMAD est un paramètre d'une chambre d'inhalation permet au patient d'éviter le
statistique qui représente la taille de l'aérosol produit et qui problème de coordination entre l'activation de l'aérosol et
prédit le site de dépôt de l'aérosol. Il s'agit du diamètre pour l'inspiration. En outre, l'utilisation d'une chambre permet
lequel 50 % de la masse sont compris dans des particules de de réduire la vitesse des particules en éloignant l'aéro-
taille inférieure. Cela signifie que pour un MMAD de 3 μm, sol-doseur de la bouche du patient, tout en piégeant les
50 % de la masse des particules sont compris dans des par- grosses particules (> 10 μm) à l'intérieur de la chambre.
ticules de diamètre inférieur à 3 μm. Ces deux caractéristiques auront pour effet de réduire le
dépôt oropharyngée et d'augmenter la quantité de parti-
cules médicamenteuses inhalées en minimisant le dépôt
extrathoracique, tout en favorisant une meilleure dépo-
Quels moyens d'administration ? sition périphérique [6]. Le choix d'une chambre d'inhala-
tion dépend de plusieurs critères. Favoriser une chambre
Aérosols-doseurs pressurisés de faible volume avec un masque chez un nourrisson ou
et chambres d'inhalation un volume plus important et un embout buccal chez
l'enfant à partir de 4 à 5 ans et chez l'adulte sera opti-
Les aérosols-doseurs pressurisés (MDI ou pMDI) sont mal [7]. Toutes les chambres d'inhalation ne sont pas
transportables, résistants aux chocs, multidoses et munis, compatibles avec tous les aérosols-doseurs ni toutes les
pour certains, d'un compteur du nombre de doses res- molécules. La compatibilité doit donc être respectée.
tant. Une substance médicamenteuse est contenue dans L'attraction électrostatique qui s'exerce au niveau de la
un flacon pressurisé sous forme liquidienne. Ces systèmes surface de certaines chambres d'inhalation en plastique et
délivrent une dose précise de médicament lors de l'acti- attire les molécules de la substance médicamenteuse est
vation. Aujourd'hui, les hydrofluoroalcanes (HFA) ont un facteur qui affecte fortement le dépôt pulmonaire. Ce
remplacé les chlorofluorocarbones (CFC) comme gaz problème sera contourné soit en utilisant des chambres
pour la propulsion médicamenteuse. Le dépôt pulmo- d'inhalation métalliques dont le coût est plus élevé, soit
336
27. Principes et pratique de l'aérosolthérapie

en les nettoyant à l'aide d'un détergent (liquide de vais-


selle) et en les laissant sécher à l'air libre [8]. Le volume de
ces chambres d'inhalation peut constituer un frein à leur
utilisation régulière chez les patients actifs ne voulant pas
s'en encombrer en la transportant avec eux.

Inhalateurs à poudre sèche


Le médicament est conditionné sous forme d'une poudre
sèche et délivrée en dose unitaire grâce à l'inspiration du
patient. Un débit inspiratoire suffisant (globalement de 30
à 60 L/min) est requis en fonction du dispositif utilisé [9]. En
dessous de 6, voire 8 ans, ces dispositifs sont peu conseillés Réservoir
[10]. L'inhalateur à poudre sèche permet cependant d'évi-
ter les problèmes de coordination liés aux aérosols-doseurs
pressurisés. Il peut être à réservoir, comprenant alors plu-
sieurs doses, ou à capsule unidose. Les capsules sont per-
cées, vidées lors de l'inhalation, retirées puis jetées après
chaque utilisation. Le dépôt pulmonaire des inhalateurs à
poudre sèche peut aller jusqu'à 40 % [11] et est influencé
Fig. 27.1
par la technique du patient ainsi que les résistances propres
Exemple de nébuliseur pneumatique.
à l'inhalateur utilisé. Notons que les inhalateurs à poudre 1 : gaz comprimé, 2 : sélection des particules par le déflecteur, 3 :
sèche de dernière génération présentent une résistance recyclage des particules, 4 : particules les plus fines sortant du
moins importante et permettent une meilleure déposition nébuliseur, 5 : air additionnel, 6 : sélection des particules par les
parois du nébuliseur, 7 : atomisation.
pulmonaire pour une même dose nominale. La sensibilité
à l'humidité de ces dispositifs rend essentiel d'expirer en
dehors de l'embout buccal afin que la vapeur d'eau conte-
nue dans l'air expiré ne perturbe pas le bon fonctionne- d'aérosol produit pendant l'inhalation du patient et réduit
ment de l'appareil [12]. Un contrôle d'administration soit les pertes hors du nébuliseur lors de l'expiration. Les nébuli-
auditif soit gustatif (présence de lactose dans la poudre) seurs dosimétriques génèrent l'aérosol uniquement durant
peut exister. la phase inspiratoire du patient et limitent les pertes d'aéro-
sols à l'expiration.
Nébuliseurs
Nébuliseurs ultrasoniques
Un nébuliseur est un générateur d'aérosol liquide néces-
sitant une introduction de médicament dans le réser- Les nébuliseurs ultrasoniques (Fig. 27.2) utilisent la vibration
voir de celui-ci. Il existe actuellement quatre types de à haute fréquence d'un cristal piézo-électrique qui génère
nébuliseurs. l'aérosol. Ils ne nébulisent ni les huiles, ni les suspensions
[14] et peuvent provoquer une hausse de la température
du médicament nébulisé. Les nébuliseurs ultrasoniques
Nébuliseurs pneumatiques
peuvent être classés en deux catégories : avec ou sans inter-
Les nébuliseurs pneumatiques (Fig.  27.1) fonctionnent à face d'eau. Les nébuliseurs sans interface d'eau ont l'incon-
l'aide d'une source de gaz comprimé (compresseur ou prise vénient d'être difficiles d'entretien et de chauffer, ce qui
d'air murale). Ils nébulisent toutes sortes de médicaments pose problème pour des médicaments thermosensibles.
liquides (solutions, suspensions, huiles). Il existe trois types Avec les nébuliseurs à interface d'eau, des coupelles jetables
de nébuliseurs pneumatiques : les nébuliseurs traditionnels, contenant le médicament garantissent une bonne hygiène
les nébuliseurs à Venturi actif (ou à double Venturi) et les de l'aérosolthérapie et l'eau située entre le cristal et le médi-
nébuliseurs dosimétriques [13]. Les nébuliseurs à Venturi cament limite la hausse de température. Globalement, le
actif se distinguent des premiers par leur système de prise coût élevé et l'entretien inhérent à ces appareils les rendent
d'air additionnel. Cette prise d'air augmente la quantité peu fréquents aujourd'hui.
337
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Air

aérosol

Fontaine

ondes
Médicament
liquide

Quartz
Fig. 27.2
Exemple de nébuliseur ultrasonique.

Nébuliseurs à tamis tion du patient et du type de médication. Ces nébuliseurs


n'administrent la médication que pendant une partie de
Les nébuliseurs à tamis (Fig.  27.3) sont des nébuliseurs
l'inspiration en fonction de la cible pulmonaire. Ils per-
plus récents. Ils ont l'avantage d'être portables, silencieux
mettent d'obtenir une déposition pulmonaire nettement
et autonomes. Ils sont composés d'une membrane percée
supérieure (70 %) aux autres modalités [17], mais leur coût
d'une grande quantité de trous coniques microscopiques
très élevé les rend encore aujourd'hui peu accessibles.
(environ 4000). Les tamis sont statiques ou vibrants [15]. Le
nébuliseur à tamis statique utilise un quartz pour pousser
le liquide médicamenteux à travers le tamis, créant ainsi
un aérosol inhalable. Le nébuliseur à tamis vibrant utilise Que devient le médicament ?
un quartz piézo-électrique entourant le tamis pour le faire
La dose prescrite correspond à la dose nominale (Fig. 27.4).
vibrer, créant ainsi un phénomène de pompage et d'éjec-
Pour la nébulisation, une grande partie de cette dose reste
tion des gouttelettes directement inhalables [16].
souvent piégée dans le nébuliseur (à l'exception des nébu-
liseurs à tamis) et n'est donc pas disponible pour le patient
Nébuliseurs synchronisés à la respiration (volume résiduel). Elle peut varier de 0,1 mL à plus de 3 mL
Très récemment sont apparus des nébuliseurs qui délivrent selon les nébuliseurs. De même, l'aérosol produit par le
le médicament de manière synchronisée à la respiration. La nébuliseur ou l'aérosol-doseur (dose émise) n'est pas tota-
délivrance commence lorsque le patient inspire et la respi- lement inhalé par le patient. Lors de la phase expiratoire,
ration est guidée de manière électronique pour obtenir un certains nébuliseurs continuent à produire l'aérosol. Une
débit inspiratoire lent. Le nombre d'inhalations est déter- partie du médicament est alors perdue dans l'air ambiant
miné en fonction de la dose médicamenteuse à délivrer ce ou dans un filtre. En définitive, la quantité de médicament
qui permet d'assurer une dose délivrée fixe. Les paramètres inhalée par le patient représente de 5 à 40 % de la dose
de délivrance sont déterminés par le thérapeute en fonc- nominale.
338
27. Principes et pratique de l'aérosolthérapie

Aérosol
Réservoir
Où vont les aérosols inhalés ?
Médicament
inhalé
Le devenir des aérosols inhalés dans les voies aériennes est
fonction des propriétés physiques de l'aérosol (la taille des
particules notamment), des conditions d'inhalation et de
Tamis l'anatomie des voies respiratoires [18]. Lorsque l'inhalation
Ouverture
est réalisée par la voie nasale, les particules les plus grosses
vont se déposer majoritairement dans les voies aériennes
supérieures, en particulier dans les poils, premier filtre pour
les plus grosses particules [19]. Lorsque l'inhalation a lieu
par la bouche, les particules dont la taille est supérieure à
5 μm de diamètre aérodynamique se déposent préférentiel-
lement dans la sphère ORL, celles comprises entre 2 et 6 μm
de diamètre aérodynamique dans les bronches et celles
Embout
buccal comprises entre 0,5 et 3 μm de diamètre aérodynamique
dans le poumon profond. Une partie des particules inhalées
se dépose aux niveaux oropharyngé et extrathoracique.
Les modalités d'inhalation par le patient influent égale-
ment sur le dépôt de l'aérosol. Les vitesses des particules
sont déterminées par le générateur et influencées par le
patient. Un débit d'inspiration rapide (30–120 L/min)
Inspiration augmente le dépôt des aérosols dans les voies aériennes
supérieures. A contrario, une inspiration lente et profonde
Air
diminue l'impaction des particules dans la sphère ORL et
Aérosol favorise un dépôt dans les voies respiratoires basses.
Fig. 27.3 L'anatomie des voies respiratoires chez des patients avec
Exemple de nébuliseur à tamis vibrant. des voies obstruées affecte considérablement le dépôt de

Masse de médicament
dans le générateur d’aérosol
Pertes durant la
phase expiratoire

Masse résiduelle
dans le nébuliseur

Masse de médicament
inhalée par le patient

Masse exhalée

Masse déposée
hors poumons (ex : ORL)

Masse de médicament
déposée dans les poumons

Fig. 27.4
Organigramme représentant les pertes de médicament par nébulisation.

339
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

l'aérosol. Cette obstruction des voies aériennes entraîne Les paramètres à prendre en compte sont la quantité et
une augmentation de la quantité d'aérosol inhalée [8] mais le débit d'aérosol produits par le système de nébulisation
aussi une non-uniformité du dépôt dans les voies respira- et disponibles pour le patient, et la taille des particules, et
toires [20]. L'obstacle doit, dans la mesure du possible, être plus particulièrement le MMAD, ainsi que la fraction respi-
éliminé avant l'administration par aérosol (rinçage du nez, rable ou fraction de fines particules (pourcentage de par-
désencombrement…). ticules comprises dans un intervalle de tailles bien défini ;
généralement, lorsqu'on parle d'aérosols médicaux, entre
Facteurs influençant ? 1 et 5 μm).

Certains facteurs influencent le dépôt pulmonaire dont Interface


l'importance varie.
L'administration d'un aérosol est réalisée par le nez ou par
Propriétés aérodynamiques des particules la bouche. Chez l'adulte, au niveau de la cavité nasale, les
particules sont captées par les poils qui ont une action pro-
émises tectrice. Chez le nouveau-né, leur absence au niveau nasal
Les propriétés aérodynamiques, propres à chaque nébuli- rend le passage de l'aérosol par le nez moins néfaste pour le
seur et à chaque molécule, influencent le choix du nébu- dépôt pulmonaire.
liseur en fonction des indications, étant donné que la Pour éviter le filtre nasal, le recours à l'embout buc-
localisation de la déposition des particules est directement cal est à privilégier, sauf en cas de non-collaboration des
liée à leur taille (Fig. 27.5) [21] et à l'efficacité thérapeutique. patients (petits enfants, patients neurologiques, personnes
Les plus fines particules ont le plus de chance d'arriver loin, âgées…). En effet, chez l'enfant dès 5 ans et chez l'adulte, il
mais les trop petites particules seront plus facilement exha- a été montré que le dépôt pulmonaire est réduit lorsque
lées lors de l'expiration. Les systèmes de nébulisation béné- le masque facial est préféré à l'embout buccal [22]. En
ficient maintenant d'une norme européenne spécifique : la revanche, le masque facial est préférable chez le petit
norme NF-EN 13544.1. La norme informe plus particuliè- enfant qui a une respiration nasale au repos. Cependant,
rement sur les caractéristiques techniques de l'appareil, ses l'obstruction nasale fréquente limite le passage de la subs-
performances et son utilisation. tance nébulisée par le nez. En cas de recours au masque,
90
Dose centrale
80 Dose périphérique
Dose pulmonaire
70
Dose oropharyngée
60 Dose corporelle totale
(% dose inhalée)

50
Dépôt

40

30

20

10

0
0.1 1 10
MMAD (microns)
Fig. 27.5
Représentation graphique de la relation entre le diamètre aérodynamique médian en masse (MMAD) et le dépôt chez des sujets sains
adultes (basée sur des modèles in vitro).
Source : figure modifiée avec permission de Clark A. The use of laser diffraction for the evaluation of the aerosol clouds generated by medical nebulizers. Int J Pharm 1995 ; 115(1) : 69–78.

340
27. Principes et pratique de l'aérosolthérapie

une application contre la peau s'impose car l'écarter de Volume de remplissage et volume résiduel
1 cm du visage de l'enfant réduit de 50 % la dose délivrée
La quantité de produit délivrée par un nébuliseur est pro-
[23]. Dans certaines situations, d'autres interfaces peuvent
portionnelle au volume de remplissage (volume placé dans
être utilisées. Une tente recouvrant le visage de l'enfant,
le collecteur). Si diluer la solution de départ augmente la
sans nécessiter de contact direct [24], peut ainsi être utili-
dose pulmonaire, réduire la concentration médicamen-
sée avec une efficacité similaire mais une acceptation plus
teuse du volume résiduel [34, 35] accroît également le
difficile des parents [25].
temps de nébulisation, élément néfaste à la compliance
[36]. Le volume de remplissage est adapté en fonction du
Schéma respiratoire volume résiduel propre à l'appareil utilisé.
Le type de schéma respiratoire utilisé par les patients pen- La fin de la nébulisation est caractérisée par l'apparition
dant la séance de nébulisation influence les modes de dépo- du sputtering point, moment où le bruit lié à la nébulisation
sition, dépendant du volume inspiratoire et de la fréquence devient discontinu et au-delà duquel il n'y a plus de dépôt
respiratoire. Respirer lentement et profondément favorise médicamenteux au niveau pulmonaire.
une déposition pulmonaire optimale par sédimentation
[26]. La pause respiratoire suivant de cette inspiration, Débit d'air
essentielle lors de la prise d'un aérosol-doseur ou à poudre,
ne semble pas indispensable dans le cas des nébulisations, Chaque nébuliseur pneumatique fonctionne optimale-
car elle ne modifie pas le dépôt pulmonaire [27]. Dans le ment pour un débit d'air précis. En dehors de ce débit, les
cas des nébuliseurs pneumatiques à Venturi actif, un débit propriétés aérodynamiques des particules émises peuvent
inspiratoire supérieur au débit du compresseur (classique- s'en retrouver modifiées et devenir inadaptées à une dépo-
ment entre 4 et 10 L/min) provoque un entraînement d'air sition pulmonaire. Le couple compresseur–nébuliseur est
[28]. Pour les aérosols-doseurs, le débit inspiratoire a beau- donc indissociable. Lors du renouvellement du nébuliseur,
coup d'influence et va dépendre du modèle prescrit et de il est important de veiller à ce que les propriétés du com-
sa résistance propre pour les aérosols à poudre sèche. presseur soient compatibles avec le nébuliseur sous peine
Le dépôt se produisant principalement pendant la phase d'obtenir une nébulisation inefficace. Le MMAD et le
inspiratoire et plus précisément pendant la première moitié temps de nébulisation sont inversement proportionnels au
de celle-ci, le duty cycle, ou rapport du temps inspiratoire débit, tandis que le débit médicamenteux de particules de
et du temps total, influence la dose délivrée aux poumons. taille optimale lui est proportionnel [37].
Une réduction du duty cycle comme retrouvé lors des
pleurs d'un enfant ou chez les patients présentant une obs-
truction des voies aériennes diminue le dépôt pulmonaire
[29, 30]. Éviter les pleurs est donc souhaitable autant que Quelle hygiène ?
faire se peut.
La contamination bactérienne du matériel de nébulisation,
que ce soit à domicile ou en milieu hospitalier, a été démon-
Âge trée, et ce pour différentes catégories de patients : grands brû-
Le diamètre des voies aériennes est proportionnel à la taille, lés [38], soins intensifs [39], mucoviscidose [40–44], asthme
ce qui explique que chez l'enfant, la résistance des voies [45, 46]. Le risque de contamination des patients par le
aériennes est augmentée du fait de la relation inversement matériel est faible mais répétitif étant donné la fréquence
proportionnelle de cette dernière avec la quatrième puis- des séances.
sance du rayon. Cette augmentation de résistance favorise Une maintenance régulière des nébuliseurs permet non
une déposition plus centrale [31], comme dans le cas des seulement de maintenir les propriétés aérodynamiques par
pathologies obstructives [32]. un nettoyage [47, 48], mais aussi de réduire le risque de
La dose inhalée exprimée en fonction du poids corpo- contamination par une désinfection [40]. Les recomman-
rel total est identique chez l'enfant et chez l'adulte, étant dations en matière d'hygiène doivent évidemment être
donné la différence de surface corporelle et l'absence adaptées en fonction de la situation, du modèle de nébu-
d'entraînement d'air retrouvée chez l'enfant [28]. La dose liseur et du type de patient. Pour un patient atteint d'une
pulmonaire et l'exposition systémique sont dépendantes pathologie aiguë, un simple nettoyage peut suffire entre
de l'âge, ce qui justifie l'utilisation de doses nominales iden- chaque utilisation, tandis que pour des pathologies chro-
tiques chez l'enfant et chez l'adulte [33]. niques, une désinfection régulière précédée d'un nettoyage
341
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

s'avère indispensable. Diverses modalités de désinfection de la bonne position (assis redressé) adoptée par le patient
sont recommandées par les manufacturiers, associations de sont essentiels. Les recommandations en matière de main-
patients, équipes médicales… En fonction de la patholo- tenance et d'hygiène sont également importantes. Enfin,
gie, il est essentiel de s'informer et de choisir une méthode le contrôle de l'adhérence – qui pose souvent problème
adaptée. Une méthode relativement universelle consiste, [50, 51] – et la surveillance de l'efficacité du traitement
après un nettoyage à l'eau savonneuse, à tremper les dif- ainsi que de la survenue éventuelle d'effets secondaires
férentes pièces des nébuliseurs dans une solution à base sont importants et concernent également le kinésithé-
d'eau de Javel (5 mL de Javel à 12° pour 1 L d'eau) pendant rapeute. Une faible adhérence est associée notamment à
20 minutes [49], sauf pour les pièces métalliques telles que une méconnaissance de l'importance du traitement ou de
les tamis des nébuliseurs à tamis. Un rinçage et un séchage l'appareillage, ou à un manque d'information, lacunes que
complètent toute procédure. L'utilisation d'un stérilisa- le kinésithérapeute est dans la majorité des cas habilité à
teur à biberons est également une bonne solution pour combler.
autant que le matériau le supporte. En ce qui concerne La chronologie de l'administration des différentes subs-
les ­aérosols-doseurs, il reste beaucoup de questions sans tances médicamenteuses et des séances de kinésithérapie
réponse même si intuitivement, on peut penser que le est sujette à discussion. Peu de certitudes existent à ce sujet,
risque de contamination existe. et il arrive bien souvent qu'elles reposent principalement
sur une réflexion intuitive. L'exemple de la désoxyribonu-
cléase I recombinante humaine (rhDNase), mucolytique
Kinésithérapeute spécifique à la mucoviscidose, est assez explicite. Étant
donné son action fluidifiante, il semble logique de l'admi-
et aérosolthérapie : nistrer préalablement (environ une demi-heure avant) à la
une relation étroite séance de désencombrement de façon à en tirer un béné-
fice maximal. Cependant, une étude a démontré que ce
Le kinésithérapeute a un rôle indéniable à jouer dans la bénéfice est similaire sur le volume expiratoire maximum
mise en œuvre et le suivi quotidien de l'aérosolthérapie. par seconde (VEMS) lorsqu'elle est administrée une demi-
Sa présence régulière voire parfois quotidienne auprès des heure après la séance de désencombrement, et qu'il s'avère
patients en fait un acteur privilégié. Une bonne éducation même supérieur chez les patients les plus malades (coloni-
thérapeutique optimisera l'aérosolthérapie et favorisera une sés par le Pseudomonas aeruginosa) [52]. Si ce résultat peut
efficacité thérapeutique optimale. On sait que, de manière paraître un peu surprenant et le VEMS probablement pas le
globale, 50 % des patients utilisent les aérosols-doseurs ou meilleur paramètre pour évaluer l'effet immédiat du désen-
à poudre de manière incorrecte. L'éducation thérapeutique combrement, il suggère principalement qu'une plus grande
doit être suffisamment longue (minimum 5 minutes), per- flexibilité dans la chronologie des traitements inhalés et les
mettre une mise en pratique par le patient et ne pas se limi- séances de kinésithérapie est souhaitable.
ter au moment de la mise en route du traitement mais être En pratique, la chronologie pose également un pro-
répétée à intervalles réguliers. blème d'organisation. Selon le type de traitement prescrit
Une connaissance des appareils disponibles sur le marché et la pathologie, il est plus ou moins facile de combiner
et de leurs avantages et inconvénients respectifs permet de la kinésithérapie et l'aérosolthérapie, tenant compte des
contribuer au choix de l'appareil le plus propice à la situation contingences de la vie des patients et des horaires du kiné-
(âge du patient, domicile ou hospitalisation, en ventilation, sithérapeute. Ainsi, pour maintenir une adhérence élevée,
patient aigu ou chronique…) même si la multitude des la chronologie « idéale » – pour autant qu'il y en ait une –
appareils disponibles rend la tâche compliquée. La facilité dans la combinaison kinésithérapie et aérosolthérapie peut
d'utilisation, la transportabilité, la durée de nébulisation, le parfois être adaptée selon les situations. De nombreux
débit de sortie, la taille des particules et la quantité de pro- points restent à éclaircir concernant cette combinaison et
duit émis interviennent certainement lors de ce choix. La expliquent l'absence de consensus sur la question.
combinaison médication–patient–appareil doit être prise En conclusion, une bonne connaissance des différents
en compte, ce qui complique également le choix. Ainsi un aspects de l'aérosolthérapie fait partie intégrante de la
appareil peut-il être adapté à une situation et non à une formation des kinésithérapeutes amenés à prendre en
autre. charge des patients atteints de pathologies respiratoires de
Ensuite, le choix de l'interface, l'apprentissage et le manière à pouvoir les conseiller efficacement et à leur assu-
contrôle du schéma respiratoire adapté et la vérification rer la meilleure efficacité thérapeutique possible.
342
27. Principes et pratique de l'aérosolthérapie

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344
Chapitre 28
Les bases de la ventilation
mécanique
Jonathan Dugernier, Jean-Bernard Michotte, Jean Roeseler,
Thierry Sottiaux, Jean-François Adam, Xavier Wittebole

PLAN DU CHAPITRE
Bases de la ventilation mécanique 346
Adaptation de la ventilation mécanique
à la pathologie respiratoire du patient 357
Complications de l'intubation 361
Humidification des gaz respiratoires 365
Aérosolthérapie en ventilation
mécanique invasive 369

Kinésithérapie respiratoire
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IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Les buts de la ventilation mécanique sont de : Volume courant (Vt)


● assister ou suppléer le travail respiratoire du patient lorsque Le Vt est ajusté entre 6 et 8 mL/kg de poids idéal du patient.
ce dernier ne parvient plus à générer une force musculaire res- Pour calculer celui-ci, on peut utiliser, par exemple, la for-
piratoire suffisante pour assurer une ventilation minimale ; mule de Lorentz :
● améliorer ou normaliser les échanges gazeux en venti- ● homme : taille (cm) − 100 − [(taille − 150)/4] ;

lant le patient d'une façon optimale tout en limitant les ● femme : taille (cm) − 100 – [(taille − 150)/2,5].

effets délétères au niveau du parenchyme pulmonaire et de


Temps inspiratoire (Ti)
l'hémodynamique.
Le Ti correspond à la durée de la phase inspiratoire. Celle-ci
peut être subdivisée en :
Bases de la ventilation mécanique ● un temps d'insufflation : administration du Vt (phase

dynamique ou phase de débit) ;


● un temps de pause inspiratoire : maintien du volume
Ce point est subdivisé en deux parties :
● la ventilation assistée contrôlée (VAC) ; délivré dans les voies aériennes (phase de débit nul)
● la ventilation spontanée. (fig. 28.2).
Le rapport du temps inspiratoire sur le temps expiratoire
définit le rapport I/E.
Ventilation assistée contrôlée
Fréquence respiratoire (FR)
La ventilation assistée contrôlée (VAC) est un mode ven- Si le patient ne produit aucun effort respiratoire, la FR cor-
tilatoire qui permet au patient de déclencher un certain respond à celle imposée par le clinicien. La FR normale est
nombre de cycles ventilatoires tout en assurant une fré- programmée entre 14 et 16 cycles/min.
quence respiratoire (FR) minimale (fig. 28.1). Si le patient produit des efforts respiratoires, la FR totale
correspond à celle imposée par le clinicien additionnée de
Ventilation assistée contrôlée la FR du malade.
en volume contrôlé Le produit de la FR par le Vt correspond à la ventilation
Définition minute.
La ventilation en volume contrôlé est une ventilation à Niveau de pression expiratoire positive (PEP)
volume courant et débit constant. Le niveau de PEP correspond à une pression positive
régnant dans les voies respiratoires en fin d'expiration.
Paramètres à régler
Les paramètres à régler sont les suivants :
Fraction inspirée en oxygène (FiO2) 50 Pression crête
La FiO2 sera comprise entre 21 et 100 % en fonction du Pression
degré d'hypoxémie du patient, tout en essayant de ventiler
Pression plateau
le patient à une FiO2 la plus proche de 21 %.
Paw
50 –5 Temps
mbar
Temps d'insuflation
Cycles déclenchés 100 Débit inspiratoire Temps de pause
Cycles contrôlés par le patient
Débit
Pause inspiratoire

Temps

Temps Ti
– 100
Trigger inspiratoire
Fig. 28.2
Fig. 28.1 Visualisation du temps d'insufflation et du temps de pause
Courbe de pression en fonction du temps en mode volume assisté inspiratoire sur les courbes de pression et de débit en fonction
contrôlé. du temps dans le mode volume assisté contrôlé.

346
28. Les bases de la ventilation mécanique

Sans PEP Avec PEP Par l'augmentation de la surface d'échange et/ou le


recrutement alvéolaire, le niveau de PEP permet d'amé-
liorer l'oxygénation et sera donc déterminé en fonction
de la PaO2 et/ou SpO2 (fig. 28.3). Toute augmentation du
Inspi Expi Inspi Expi
niveau de PEP peut, dans certains cas, engendrer des effets
délétères au niveau hémodynamique et du parenchyme
pulmonaire.

Débit inspiratoire
En fonction du respirateur utilisé, le débit inspiratoire est
soit réglé manuellement (entre 40 et 60 L/min), soit déter-
miné automatiquement par le respirateur en fonction
du Vt (fig.  28.4A), du Ti (fig.  28.4B), du temps de pause
Fig. 28.3
Principe de la PEP.
(fig. 28.4C) et de la FR.

A
B

Fig. 28.4
Variation du débit inspiratoire en fonction du Vt (A), du Ti (B) et du
C temps de pause (C) en mode volume assisté contrôlé.

347
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Trigger inspiratoire mal réglé. Ceci risque d'entraîner une désynchronisation


Le trigger inspiratoire, ou « seuil de déclenchement inspi- entre le patient et le respirateur et par la suite une fatigue
ratoire », est le système qui permet au patient de déclen- respiratoire. Un trigger inspiratoire trop sensible peut aussi
cher une phase inspiratoire par un effort inspiratoire. entraîner des autodéclenchements.
Le seuil de déclenchement peut être programmé en
pression ou en débit. Ce dernier est plus sensible et permet Monitorage de la ventilation assistée contrôlée
donc une diminution du travail respiratoire. en volume contrôlé
Lorsque le patient déclenche le trigger inspiratoire, la FR La figure  28.6 présente les courbes de pression, débit et
peut augmenter et, dans ce cas, entraîner une augmenta- volume en fonction du temps en mode volume contrôlé.
tion de la ventilation minute. L'observation de certains paramètres permet de surveiller
La figure 28.5 montre une courbe de pression en fonc- et d'optimaliser la ventilation du patient.
tion du temps, alors que le seuil de trigger inspiratoire est
Volume courant expiré (Vte)
En théorie, le Vte expiré doit correspondre au Vt insufflé
(Vti). Toute fuite génère un Vte inférieur au Vti.
La présence d'une fuite peut être visualisée sur la courbe
de volume en fonction du temps (fig. 28.7).
Niveaux de pression dans les voies aériennes
En mode volume contrôlé, on observe deux niveaux de
pression sur la courbe de pression en fonction du temps :
● le niveau de la pression de pointe ou pression de crête

(voir fig. 28.6A) correspond à la pression maximale mesurée


dans les voies aériennes. Celle-ci rend compte de la pression
nécessaire pour vaincre les résistances (patient et ventila-
Fig. 28.5 teur) et la compliance du système thoracopulmonaire. De
Courbe de pression en fonction du temps en mode volume assisté plus, ce niveau dépend notamment du Vti, du débit inspi-
contrôlé avec un seuil de trigger inspiratoire mal adapté. ratoire, du niveau de PEP, etc. ;

Pression / temps A B
50
mbar
C

–5
Débit / temps D
100 E
L/min

–100
Volume / temps F
1500
mL

G H

Fig. 28.6
Courbes de pression, débit et volume en fonction du temps en mode volume assisté contrôlé.
A : pression de pointe ; B : pression plateau ; C : PEP ; D : débit inspiratoire ; E : temps de pause inspiratoire ; F : débit expiratoire ; G : Vti ; H : Vte.

348
28. Les bases de la ventilation mécanique

mbar
60

50

40

30

20 lat - Ppic
Gradient Pp
Pression
10 Pression plateau plateau

0
Fig. 28.7 –10
Détection d'une fuite par l'observation de la courbe de volume 0 2 4 6
en fonction du temps en mode volume assisté contrôlé.
Fig. 28.9
En mode volume assisté contrôlé, l'augmentation de la pression
plateau sans modification du gradient entre la pression de pointe
et la pression plateau témoigne d'une diminution.
Pression
mbar
60
50
ion crê
te Calcul de la compliance statique
Press
40 La compliance statique peut être calculée par la formule
30 suivante :
Compliance (mL/cmH2O) = Vt/ (P plat − PEP − PEPi)
20
Pression plateau
10
0
où Vt = volume courant ; P plat = niveau de pression pla-
–10 teau ; PEPv niveau de la pression expiratoire positive ; PEPi =
0 2 4 6 Temps
niveau de pression expiratoire positive intrinsèque.
Fig. 28.8 L'exemple de la figure 28.9 montre une augmentation de
L'augmentation de la pression de pointe sans modification la pression plateau, sans modification du gradient entre la
de la pression plateau témoigne d'une augmentation
des résistances en mode volume assisté contrôlé. pression de pointe et la pression plateau, témoignant une
diminution de la compliance statique.
● le niveau de la pression plateau (P plat) ou pression de Pression expiratoire positive intrinsèque (PEPi)
pause inspiratoire (voir fig. 28.6B) correspond à la pression La PEPi, appelée également auto-PEP, correspond à une
nécessaire pour vaincre la compliance du système thoraco- pression positive régnant dans les voies aériennes en fin
pulmonaire. Ce niveau ne peut dépasser 30 cmH2O. Une d'expiration, due à une vidange incomplète du poumon. La
pression plateau dépassant ce niveau peut engendrer des PEPi est objectivée par une courbe de débit expiratoire ne
lésions pulmonaires (barotraumatisme). s'annulant pas en fin de phase expiratoire.
Toute modification du Vti et du niveau de PEP fait varier Pour mesurer cette PEPi, une pause expiratoire
le niveau de pression plateau. par une occlusion de la valve expiratoire durant 6 à
8  secondes est indispensable. En présence du phéno-
Calcul des résistances mène, la courbe de pression/temps montre une élé-
Les résistances des voies aériennes peuvent être calculées vation de pression en fin d'expiration qui s'ajoute au
par la formule suivante : niveau de PEP (fig. 28.10) :

Résistance (cmH2O/L /s) = (pression crête PEPi = PEP totale − PEP réglée par le clinicien
pression plateau)/débit inspiratoire Il ne sera possible de mesurer cette PEPi qu'à la condition
de s'assurer d'une sédation profonde, voire d'une curarisa-
Sans modification des paramètres ventilatoires, une aug- tion du patient.
mentation des résistances s'observe par une augmentation Ce phénomène s'observe principalement chez les
du gradient entre la pression de pointe et la pression pla- patients présentant des résistances respiratoires élevées
teau (fig. 28.8). (BPCO, par exemple).
349
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Fig. 28.10
Mesure de la PEPi par la technique d'occlusion en mode volume assisté contrôlé.

Débit (L/min)
100 Débit (L/min)
50

50
25

0
0

–50
–25

–100 –50
0 2 4 Temps 0 2 4 6 Temps
A B
Fig. 28.11
Courbe de débit expiratoire en fonction du temps en mode volume assisté contrôlé montrant une vidange complète (A) et une vidange
incomplète (B) du système respiratoire.

Courbe de débit expiratoire Ventilation minute


Le débit expiratoire est un phénomène passif qui dépend La ventilation minute du patient, produit du Vti par la FR,
des caractéristiques thoracopulmonaires du patient. doit être surveillée afin d'éviter toute hyperventilation.
Un débit expiratoire nul à la fin du temps expiratoire
(Te) est le reflet d'une vidange complète du poumon Ventilation assistée contrôlée
(fig. 28.11A). en pression contrôlée
L'allure de la courbe de débit expiratoire en fonc-
tion du temps permet de déceler certaines pathologies Définition
respiratoires. À cet égard, la figure  28.11B illustre une La ventilation en pression contrôlée est un mode ventilatoire
vidange incomplète du poumon objectivée par un au cours duquel le respirateur génère un niveau de pression
débit expiratoire ne revenant pas à zéro à la fin du Te. inspiratoire prédéterminé pendant un Ti préréglé. Le Vti
Ceci s'observe, par exemple, en cas d'obstruction des dépend du niveau de pression inspiratoire prédéterminé et
voies aériennes. des caractéristiques mécaniques du système respiratoire.
Fréquence respiratoire
Paramètres à régler
La FR est établie par le patient ou par la fréquence minimale
imposée par le respirateur, si le patient ne produit aucun Fraction inspirée en oxygène (FiO2)
effort respiratoire. Le monitorage d'une FR maximale doit La FiO2 sera comprise entre 21 et 100 % en fonction du degré
être suivi afin d'éviter toute hyperventilation. d'hypoxémie du patient. Elle sera déterminée en fonction
350
28. Les bases de la ventilation mécanique

des valeurs de la PaO2 et/ou de la SpO2, tout en essayant de Fréquence respiratoire (FR/min)
ventiler le patient à une FiO2 la plus proche de 21 %. Si le patient ne produit aucun effort respiratoire, la FR/min
correspond à celle imposée par le clinicien.
Niveau de pression inspiratoire
La FR/min normale est programmée entre 14 et 16
En fonction du respirateur utilisé, ce niveau de pression cor-
cycles/min.
respond au niveau de pression soit préréglé, soit ajouté au
Si le patient produit des efforts respiratoires, La FR/min
niveau de la PEP (fig. 28.12).
correspond à celle imposée par le clinicien additionnée de
Ce niveau de pression est réglé afin d'obtenir un Vti compris
la FR/min du malade.
entre 6 et 8 mL/kg du poids idéal, tout en ne dépassant pas
Le produit de la FR/min par le Vt correspond à la venti-
une pression maximale dans les voies aériennes de 30 cmH2O.
lation minute.
Temps inspiratoire (Ti)
Niveau de pression expiratoire positive (PEP)
Le Ti correspond à la durée de pressurisation des voies
Le niveau de PEP correspond à une pression régnant dans
aériennes (fig. 28.13).
les voies respiratoires en fin d'expiration.
Par l'augmentation de la surface d'échange et/ou le
B
25 cmH2O
recrutement alvéolaire, le niveau de PEP permet d'amélio-
rer l'oxygénation et sera donc déterminé en fonction de la
20 cmH2O A PaO2 et/ou SpO2 (voir fig.  28.3). Toute augmentation du
niveau de PEP peut engendrer des effets délétères au niveau
hémodynamique et du parenchyme pulmonaire.
Rampe
5 cmH2O La rampe correspond à la vitesse de pressurisation pour
atteindre le niveau de pression inspiratoire prédéterminé
Temps (fig. 28.14).
(Sec) Trigger inspiratoire
Fig. 28.12 Le trigger inspiratoire, ou « seuil de déclenchement inspira-
Courbe de pression en fonction du temps en mode pression toire », est le système qui permet au patient de déclencher
assistée contrôlée.
En fonction des respirateurs utilisés, la pression inspiratoire est soit
une phase inspiratoire par un effort inspiratoire.
maximale (A), soit ajoutée au niveau de PEP (B). L'exemple ci-dessus Le seuil de déclenchement peut être programmé en
montre les deux possibilités d'ajustement avec une pression pression ou en débit. Ce dernier, plus sensible, permet une
inspiratoire de 20 cmH2O et une PEP de 5 cmH2O.
diminution du travail respiratoire.
Lorsque le patient déclenche le trigger, la FR/min aug-
Paw (cmH2O)
mente et peut entraîner une augmentation de la ventila-
40
tion minute.

mbar
60
Pression inspiratoire 50

20 40
30
(A) (B)
20
10

0 0
–10
Ti
0 2 4 6
–10
Fig. 28.14
0 2 Temps
Variation de la rampe de montée en pression en mode pression
Fig. 28.13 assistée contrôlée.
En mode pression assistée contrôlée, le Ti détermine le temps L'exemple ci-dessus montre un ajustement de la rampe de montée à
de pressurisation des voies aériennes. 1 seconde (A) et à 0,10 seconde (B).

351
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

50 B
mbar
A
C

D E
100
L/min

–100
F
1000
mL
G H

Fig. 28.15
Courbes de pression, débit et volume en fonction du temps en mode pression assistée contrôlée.
A : rampe de pressurisation ; B : pression inspiratoire ; C : PEP ; D : débit inspiratoire de pointe ; E : débit inspiratoire nul ; F : débit expiratoire ;
G : Vti ; H : Vte.

La figure 28.5 montre une courbe de pression en fonc- Ventilation minute


tion du temps, alors que le seuil de trigger est mal réglé. En l'absence d'effort inspiratoire, le volume minute expiré
Ceci risque d'entraîner une désynchronisation patient/res- est directement proportionnel au Vti. Dans ces conditions,
pirateur et par la suite une fatigue respiratoire. Un trigger toute modification de résistance et/ou de compliance du sys-
trop sensible peut aussi entraîner des autodéclenchements. tème respiratoire du patient se traduit par une modification
du volume minute expiré. Ainsi, la surveillance du volume
Monitorage de la ventilation assistée contrôlée minute expiré permet de déceler une éventuelle diminution
en pression contrôlée du Vti secondaire à une augmentation des résistances des
voies aériennes (encombrement, bronchospasme…) ou à
La figure  28.15 présente les courbes de pression, débit et une diminution de la compliance du système respiratoire
volume en fonction du temps en mode pression contrôlée. (atélectasies, pneumopathies, pneumothorax…) [1].
L'observation de certains paramètres nous permet de sur-
veiller et d'optimaliser la ventilation du patient. Courbe de débit en fonction du temps
Volume courant inspiré (Vti) Courbe de débit inspiratoire
Le Vti dépend du niveau de pression inspiratoire, du temps La courbe de débit inspiratoire en fonction du temps
inspiratoire et des caractéristiques mécaniques du système montre un débit inspiratoire décéléré. En effet, ce débit est
respiratoire. Une diminution de la compliance peut, par égal à la variation de pression entre la pression inspiratoire
exemple, générer une hypoventilation par une diminution préréglée et la pression alvéolaire (Delta P) divisée par la
du Vti (fig. 28.16). résistance (R) :

Fréquence respiratoire (FR) Débit (cmH2O/L/ s ) = (P insp. P alv. )/R (fig. 28.17)


La FR est établie par le patient ou par la fréquence minimale
imposée par le respirateur, si le patient ne produit aucun Un débit inspiratoire nul en fin d'insufflation signifie que
effort respiratoire. Le monitorage d'une FR maximale doit la pression alvéolaire a atteint la pression inspiratoire fixée
être suivi afin d'éviter toute hyperventilation. par le clinicien (équilibre des pressions dans le système).

352
28. Les bases de la ventilation mécanique

60 60

40 40

20 20

0 0
–10 –10
0 2 4 6 8 0 2 4 6 8
mL V mL V
1000 1000

800 800

600 600

400 400

200 200

0 0
0 2 4 6 8 0 2 4 6 8
Fig. 28.16
Diminution du Vti pour un même niveau de pression témoignant d'une diminution de la compliance thoracopulmonaire.

P insp Débit (L/min)


100
Paw
P alv 50

0
Temps
–50

Débit
Débit = (P insp – P alv)/R –100
0 2 4 6 8 6 8
Temps
Temps
Fig. 28.18
Annulation du débit inspiratoire par augmentation du temps
inspiratoire.
Fig. 28.17
Évolution du débit inspiratoire en fonction du gradient entre la
pression inspiratoire programmée et la pression alvéolaire durant
le temps inspiratoire.
P alv. : pression alvéolaire ; P insp. : pression inspiratoire
programmée ; R : résistance. Un débit expiratoire nul à la fin du Te est le reflet d'une
vidange complète du poumon (fig. 28.19).
D'une manière générale, cette annulation du débit est L'allure de la courbe de débit expiratoire en fonction
recherchée lors du réglage du Ti (fig. 28.18). du temps permet de déceler certaines pathologies respi-
ratoires. La figure 28.20 illustre une vidange incomplète du
Courbe de débit expiratoire poumon objectivée par un débit expiratoire ne revenant
Le débit expiratoire est un phénomène passif qui dépend pas à zéro à la fin du Te. Ceci s'observe, par exemple, en cas
des caractéristiques thoracopulmonaires du patient. d'obstruction des voies aériennes.

353
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Débit (L/min) Pause inspiratoire


100
100
50
0
–50
50 –100
0 2 4 6 8 6 8 6 8
mL V V V
1000
800
0 600
400
200
0
0 2 4 6 8 6 8 6 8
–50
Fig. 28.21
Maximisation du Vti par augmentation du Ti en mode pression
assistée contrôlée.
–100
0 2 Temps
la courbe de pression/temps montre une élévation de pres-
Fig. 28.19
sion en fin d'expiration qui s'ajoute au niveau de PEP :
Un débit expiratoire nul reflète une vidange complète
du poumon. PEPi = PEP totale PEP réglée par le clinicien
Il ne sera possible de mesurer cette PEPi qu'à la condition
de s'assurer d'une sédation profonde, voire d'une curarisa-
Débit (L/min)
tion du patient.
100
Ce phénomène s'observe principalement chez les
patients présentant des résistances respiratoires élevées
50 (BPCO, par exemple).
Calcul de la compliance statique
0
La compliance statique peut être calculée par la formule
suivante :
–50
Compliance (mL / cmH2O) = Vt/(P max − PEP − PEPi)
–100
0 2 Temps
où Vt = volume courant ; P max = niveau de pression
maximale ; PEP = niveau de la pression expiratoire positive ;
Fig. 28.20
PEPi = niveau de pression expiratoire positive intrinsèque.
Courbe de débit expiratoire en fonction du temps en mode
pression assistée contrôlée montrant une vidange incomplète
du système respiratoire.
Ventilation spontanée
La ventilation spontanée est un mode où tous les cycles
respiratoires sont déclenchés par un effort inspiratoire du
Temps inspiratoire
patient.
La durée du Ti est ajustée afin d'obtenir un débit inspira-
Dans cette partie, nous aborderons la ventilation spon-
toire nul en fin d'inspiration (fig. 28.21).
tanée en pression positive continue, appelée également
Pression expiratoire positive intrinsèque (PEPi) CPAP et le mode aide inspiratoire + PEP.
ou auto-PEP
La PEPi correspond à une pression régnant dans les voies Ventilation spontanée en pression
aériennes en fin d'expiration, due à une vidange incomplète positive continue (VS-PPC)
du poumon. Elle est objectivée par une courbe de débit
expiratoire ne s'annulant pas en fin de phase expiratoire. Définition
Pour mesurer cette PEPi, une pause expiratoire de 6 à La terminologie VS-PPC correspond à la version anglaise
8 secondes est indispensable. En présence du phénomène, CPAP pour continuous positive airaway pressure. Nous uti-
354
28. Les bases de la ventilation mécanique

liserons dans ce chapitre le terme CPAP. Dans ce mode, le la valve de Boussignac. Le choix de l'appareillage dépendra
patient respire à un niveau de pression supérieure à la pres- de l'endroit d'application de la technique, du monitoring à
sion atmosphérique et la pression mesurée dans les voies suivre et de la pathologie du patient.
aériennes, tant en phase inspiratoire qu'en phase expiratoire,
est toujours positive. Cette technique est principalement Aide inspiratoire + PEP : définition
utilisée pour améliorer l'oxygénation, par augmentation de
L'aide inspiratoire + PEP est un mode spontané à deux
la surface d'échange et recrutement alvéoléaire. Elle est éga-
niveaux de pression, un niveau inspiratoire et un niveau
lement appliquée dans le syndrome d'apnée obstructive du
expiratoire. Le Vt dépend de la variation entre ces deux
sommeil et dans l'œdème aigu du poumon (fig. 28.22).
niveaux de pression. Cette technique est principalement
Réglage du niveau de pression utilisée pour améliorer la ventilation alvéolaire et l'oxygé-
nation (fig. 28.23).
Le réglage du niveau de pression se base principalement sur
la PaO2 et/ou SpO2, sur l'état clinique du patient (pression Trigger inspiratoire
artérielle, fréquence respiratoire…) et sur la tolérance du
Le trigger inspiratoire, ou « seuil de déclenchement inspira-
patient. Le niveau de pression est généralement titré par
toire », est le système qui permet au patient de déclencher
paliers de 2 cmH2O, avec un niveau initial de 4 à 5 cmH2O.
une phase inspiratoire par un effort inspiratoire. En fonc-
Mode d'administration tion des ventilateurs, le seuil de déclenchement peut être
géré soit par un algorithme automatisé, soit réglé manuelle-
L'application de cette technique peut être réalisée avec dif- ment en pression ou en débit.
férents types d'appareillages. Citons par exemple les venti-
lateurs à turbine, les ventilateurs de réanimation ou encore
Pression (mbar)

B
Pression (mbar)

B 30 A C
30 A
20 20
10 10
0 0
–10 –10
0 2 4 6 s 0 2 4 6

L/min L/min
50 Flow 100 D
F
E
C 75
50
Débit (L/min)
Débit (L/min)

25
25
0 0
–25
D
–25 –50
–75 F
–50 –100
0 2 4 6 s 0 2 4 6

L L
1.0 1.0

0.8 0.8
Volume (L)

Volume (L)

E F
0.6 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0 0
0 2 4 6 0 2 4 6
Fig. 28.22 Fig. 28.23
Courbes de pression, débit et volume en fonction du temps en Courbes de pression, débit et volume en fonction du temps en
ventilation spontanée en pression positive continue (VS-PPC). ventilation spontanée en aide inspiratoire + PEP.
A : courbe de pression (phase inspiratoire) ; B : courbe de pression A : rampe de pressurisation ; B : niveau d'aide inspiratoire ; C : niveau
(phase expiratoire) ; C : débit inspiratoire ; D : débit expiratoire ; de pression expiratoire positive ; D : débit inspiratoire de pointe ;
E : Vti ; F : Vte. E : trigger expiratoire ; F : débit expiratoire ; G : Vti ; H : Vte.

355
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

La sensibilité du trigger inspiratoire doit permettre le Le plus souvent, le réglage de la pression d'AI correspond
déclenchement de la pressurisation à chaque effort inspira- au niveau de pression au-dessus de la PEP. Cependant, sur
toire du patient et éviter des déclenchements intempestifs certains ventilateurs, ce réglage concerne le niveau de pres-
(autodéclenchements). En cas d'absence de détection d'un sion inspiratoire total.
effort inspiratoire du patient, on parle d'effort inspiratoire Le réglage optimal du niveau d'AI dépend du motif de
non récompensé ou d'effort inefficace [2]. ventilation et de la situation clinique [3].

Rampe de montée en pression (fig. 28.24) Trigger expiratoire


La rampe correspond à la vitesse de pressurisation pour Le trigger expiratoire, ou « cyclage inspiration–expiration »,
atteindre le niveau de pression inspiratoire prédéterminé. est le système qui permet au ventilateur de déclencher une
Le réglage de ce paramètre doit permettre une adéqua- phase expiratoire. Il existe différents types de trigger expi-
tion entre la demande inspiratoire du patient et l'« offre » ratoire :
du ventilateur. Une rampe trop faible par rapport à la ● le trigger basé sur le temps inspiratoire : en fonction

demande du patient augmente le travail de celui-ci. des respirateurs dès que la phase inspiratoire dépasse une
Tandis qu'une rampe trop importante peut entraîner un valeur préréglée sur le temps, le ventilateur déclenche l'arrêt
inconfort du patient. de la pressurisation ;
● le trigger basé sur la surpression : en fonction des respi-

Niveau d'aide inspiratoire (AI) rateurs, dès qu'une surpression apparaît dans le circuit, le
Le niveau d'aide inspiratoire correspond à l'assistance ventilateur déclenche l'arrêt de la pressurisation ;
● le trigger basé sur des algorithmes complexes : en fonc-
fournie par le respirateur lors de la phase inspiratoire du
patient. Il permet de prendre en charge une partie de tion des respirateurs, ces algorithmes sont basés sur des
la charge ventilatoire et de déterminer le Vt. Ainsi, un combinaisons de paramètres ventilatoires (Vt, débit, pres-
niveau de pression inspiratoire insuffisant peut entraîner sion, Ti…) ;
● le trigger basé sur le débit inspiratoire : en fonction des
une augmentation du travail respiratoire et une hypo-
ventilation alvéolaire. À l'inverse, un niveau de pression respirateurs, dès que le débit inspiratoire de type décélé-
inspiratoire excessif peut engendrer une surassistance rant atteint une valeur correspondant à un pourcentage
et entraîner une hyperventilation et, dans certains cas, de la valeur du débit inspiratoire de pointe, le ventilateur
aggraver une hyperinflation dynamique en cas de patho- déclenche l'arrêt de la pressurisation. Cette valeur peut être
logie obstructive. fixée soit par défaut (généralement à 25 % du débit inspira-
toire de pointe), soit ajustée dans une « fourchette » variant
en fonction des ventilateurs.
Lorsque l'arrêt de la pressurisation a lieu avant l'arrêt
mbar
60 de la phase inspiratoire du patient, on parlera d'un
50 cyclage précoce. Cette asynchronie peut être à l'origine
40 d'une sous-assistance et d'une diminution du confort du
30
patient.
(A) (B)
À l'inverse, lorsque l'arrêt de la pressurisation a lieu
20
après l'arrêt de la phase inspiratoire du patient, on par-
10
lera de cyclage tardif. Celui-ci peut engendrer une dimi-
0 nution du confort du patient, une augmentation du
–10 travail ventilatoire et une aggravation de l'hyperinflation
0 2 4 6 dynamique.
Fig. 28.24
Variation de la rampe de montée en pression en mode aide Niveau de pression expiratoire positive
inspiratoire + PEP.
L'exemple ci-dessus montre une rampe de montée trop faible Le niveau de PEP correspond à une pression régnant
par rapport à la demande inspiratoire du patient (A). On observe dans les voies respiratoires en fin d'expiration. Outre l'ef-
une concavité de la rampe de montée sur la courbe de pression fet positif sur l'oxygénation, le réglage de ce paramètre
en fonction du temps. Une rampe de montée plus rapide permet
l'adéquation entre la demande inspiratoire du patient et l'« offre » permet de compenser la charge ventilatoire générée par
du ventilateur (B). la PEPi.
356
28. Les bases de la ventilation mécanique

Points clés En toute situation, on établira des objectifs adaptés au


patient (PaO2, SaO2, SpO2, PaCO2, P plat, objectifs hémo-

La ventilation mécanique se définit comme tout dynamiques) : ces objectifs doivent impérativement tenir
support ventilatoire permettant d'assurer totale­ compte des recommandations actuelles de stratégie ven-
ment ou partiellement le travail respiratoire et tilatoire protectrice, dans le but prioritaire de limiter les
les échanges gazeux chez le patient en défaillance lésions pulmonaires induites par la ventilation.
respiratoire.
Ce support peut être classé selon deux modes
Ventilation d'un patient présentant

ventilatoires principaux : le mode assisté contrôlé,


où un certain nombre de cycles respiratoires sont un syndrome de détresse
assurés par le respirateur en l'absence d'effort du respiratoire aiguë
patient, celui-ci ayant la possibilité de déclencher
des cycles supplémentaires ; le mode spontané, où Caractéristiques du syndrome de détresse
la fréquence, les temps inspiratoire et expiratoire respiratoire aiguë
sont déterminés par le patient.

À l'heure actuelle, bien que de nombreuses termi- Le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) corres-
nologies existent pour définir les différents modes pond à la survenue de phénomènes inflammatoires aigus
ventilatoires, la plupart des ventilateurs conven- importants entraînant une augmentation de la perméabi-
tionnels utilisés assurent une ventilation en pression lité de la membrane alvéolocapillaire [4]. Il en résulte une
positive en contrôlant soit la pression inspiratoire véritable inondation des alvéoles. Le poumon est gorgé de
(ventilateur de type barométrique) soit le débit ins- liquide ; son poids augmente considérablement. Les zones
piratoire (ventilation de type volumétrique). pulmonaires les plus déclives (dorsales chez le patient cou-

Le choix du mode ventilatoire détermine les ché, basales chez le patient debout) sont véritablement
réglages disponibles pour optimaliser la ventilation. écrasées par le poids du poumon sus-jacent. Les alvéoles

L'observation des courbes pression/temps, proclives sont le siège d'un œdème mais restent générale-
volume/temps et débit/temps disponibles sur la ment ouvertes et assez aisément ventilables (fig. 28.25). En
plupart des respirateurs de réanimation apporte zones déclives par contre, les phénomènes de compression
une aide précieuse dans l'amélioration des interac-
tions patient/machine.

Adaptation de la ventilation
mécanique à la pathologie
respiratoire du patient
Nous envisageons deux situations :
● la première évoque le patient présentant un syndrome

de détresse respiratoire aiguë (SDRA) : dans ce cas, les pou-


mons sont le siège d'un œdème important duquel résulte
notamment le développement de larges zones de conden-
sation et/ou collapsus alvéolaires. La zone pulmonaire ven-
tilée est réduite : la stratégie ventilatoire aura donc comme
objectif essentiel d'augmenter et de protéger les zones
ventilées ;
● la seconde situation évoque le patient présentant un

asthme aigu sévère nécessitant le recours à la ventilation Fig. 28.25


mécanique (VM) : la résistance des voies aériennes (Raw) CT-scan thoracique d'un patient présentant un SDRA.
Les zones supérieures (« noires ») apparaissent les plus aérées.
est augmentée et la dynamique expiratoire est sévèrement Les zones inférieures (« blanches ») paraissent écrasées (condensées)
perturbée. par le poumon sus-jacent (et par le cœur).

357
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

sont tels que ces zones sont collabées, difficilement venti-


lables, voire non ventilables. Entre ces deux zones extrêmes,
existent des zones intermédiaires : la ventilation à pression
positive peut les ouvrir mais ces zones risquent bien de se
refermer en expiration si l'on n'applique pas un niveau de
pression expiratoire positive (PEP) suffisant [5, 6].

Conséquences en termes
de ventilation mécanique
Dans de telles conditions, lorsqu'un volume courant (VT)
est insufflé par le respirateur, on notera une tendance à une
hétérogénéité de distribution ventilatoire [6]. Le mélange
gazeux se dirigera préférentiellement vers les zones proclives
et la ventilation des zones déclives sera pauvre voire inexis-
tante. Cette hétérogénéité ventilatoire est dangereuse : si
le VT n'est pas réduit, il y a un risque de surdistension des Fig. 28.26
zones préférentiellement ventilées et il y a également un CT-scan thoracique réalisé 2 mois après la sortie d'un patient,
risque d'instabilité alvéolaire dans les zones intermédiaires sans antécédent pulmonaire, ayant été ventilé plusieurs semaines
pour un SDRA sévère.
(la pression inspiratoire positive peut ouvrir les alvéoles mais On observe des lésions broncho-emphysémateuses diffuses qui
ces dernières se referment en cours d'expiration sous l'effet pourraient être, au moins partiellement, associées à une ventilation
des phénomènes de compression). Ces phénomènes de sur- mécanique à haut VT et/ou haute pression.
distension et d'instabilité alvéolaires peuvent entraîner des
lésions pulmonaires sévères, dites VILI (ventilator-induced
lung injury) ou VALI (ventilator-associated lung injury) [7].
Tableau 28.1 Table VT (6 mL/kg poids idéal) en fonction
La ventilation mécanique inadaptée dans le SDRA du sexe et de la taille
expose donc à des risques réels, essentiellement caractéri-
sés par l'aggravation de la pathologie pulmonaire présen- Taille Homme Femme
tée par le patient et par l'évolution vers des complications 149 281 254
graves : pneumothorax, altérations graves et persistantes du 150 287 260
parenchyme pulmonaire… (fig. 28.26). 151 292 265

Stratégie ventilatoire 152 298 271


153 303 276
Il est donc nécessaire d'appliquer une stratégie ventilatoire
répondant aux éléments caractéristiques du SDRA : éviter de 154 309 282
surdistendre les zones proclives, tenter d'ouvrir les alvéoles 155 314 287
fermées sous l'effet des phénomènes de compression et évi- 156 320 293
ter que ces alvéoles ne se ferment en fin d'expiration. 157 325 298
Sur la base de ces considérations physiopathologiques,
158 331 304
des recommandations ont été émises : limitation du VT (6 à
8 mL/kg, sur base du poids idéal) [8] (tableau 28.1) et de la 159 336 309
pression de fin d'inspiration, mesurée à débit nul, qui permet 160 341 314
d'évaluer la pression alvéolaire (P plat inférieure à 25 cmH2O). 161 347 320
Le recours à la PEP permet de limiter le dérecrutement
162 352 325
expiratoire. Le choix du niveau de PEP fait encore l'objet de
controverses : il doit être basé sur les effets de la PEP sur la 163 358 331
mécanique respiratoire, les paramètres hémodynamiques 164 363 336
et les échanges gazeux [9]. En outre, il faut éviter de décon- 165 369 342
necter le patient du respirateur : la suppression brutale de la
166 374 347
PEP risque d'engendrer un collapsus alvéolaire massif.
358
28. Les bases de la ventilation mécanique

Taille Homme Femme ment adaptée – sur base de la courbe débit/temps – de


façon à assurer un temps expiratoire suffisant (pour per-
167 380 353
mettre au patient d'expirer le VT insufflé). Le titrage de la
168 385 358 PEP peut, éventuellement, être réglé de façon à assurer une
169 391 364 P plat aux environs de 25 cmH2O. La FiO2 est adaptée aux
170 396 369 objectifs gazométriques, sans négliger les risques potentiels
171 402 375 de hautes FiO2 prolongées.
172 407 380
Ventilation d'un patient présentant
173 412 385
174 418 391
asthme aigu sévère
175 423 396 Phase expiratoire
176 429 402 L'expiration est un phénomène passif [11]. La « force
177 434 407 motrice » est la force de recul élastique du système thoraco­
178 440 413 pulmonaire. Si l'élasticité du système augmente, le débit
expiratoire augmente et le temps nécessaire pour expirer le
179 445 418
VT est plus court. La force « opposante » est la résistance des
180 451 424 voies aériennes (Raw). Si les voies aériennes sont obstruées
181 456 429 ou rétrécies, l'augmentation de la Raw ralentit le débit expi-
182 462 435 ratoire et le Te utile pour arriver à la position d'équilibre
183 467 440
télé-expiratoire est augmenté. Dans ce contexte, la notion
de « constante de temps » (τ) est intéressante : τ est le temps
184 473 446 nécessaire pour une équilibration passive entre la pression
185 478 451 alvéolaire et la pression à la bouche si le débit aérien est
186 483 456 constant :
187 489 462 équation1: τ = CRS × Raw
188 494 467
où τ est la constante de temps (secondes), CRS la com-
189 500 473
pliance du système thoracopulmonaire (L/cmH2O) et Raw
D'après S. Jaber (Montpellier), avec l'aimable autorisation de l'auteur. (cmH2O/L/sec) la résistance des voies respiratoires au débit
aérien.
En raison de la limitation du VT, il existe un risque En conditions normales, CRS = 0,1 L/cmH2O et Raw ≅
d'augmentation de la PaCO2 et même d'acidose respira- 3 cmH2O/L/sec :
toire [10]. Il est donc important de contrôler les situations
τ = 0,1 × 3 = 0,3 seconde
génératrices d'une augmentation de production de CO2
(fièvre, agitation psychique et/ou motrice, anxiété, douleur, Prenons l'exemple de la phase expiratoire : les alvéoles se
tremblements, myoclonies, convulsions). De même, il est vident sous l'effet de la pression élastique (Pel) du système.
essentiel d'augmenter l'élimination pulmonaire de CO2 : en Cette Pel diminue cependant en cours d'expiration puisque
raison de la faible compliance pulmonaire en situation de le volume alvéolaire diminue. La phase expiratoire n'évo-
SDRA, l'expiration du VT demande peu de temps et il est lue donc pas de façon linéaire mais de façon exponentielle
souvent possible d'augmenter la fréquence respiratoire (et (fig. 28.27) :
donc la ventilation/minute) sans générer d'auto-PEP.
équation 2 : Te = 4 × τ = 4 × CRS × Raw
Quelques points pratiques
Te = 4 × 0,3 = 1,2 seconde
En toute situation répondant à la définition de SDRA, la
limitation du VT est la règle de base. L'utilisation d'une En conditions normales, l'expiration du VT jusqu'au
table au lit du patient est un moyen rapide et efficace (voir niveau d'équilibre passif des forces élastiques pulmonaires
tableau  28.1). La fréquence respiratoire peut être rapide- et thoraciques est donc de 1,2 seconde.
359
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Si, chez un patient BPCO en exacerbation aiguë, CRS τ = 0,1 × 15 = 1,5 seconde
égale 0,1 L/cmH2O et Raw égale environ 15 cmH2O/L/
sec : Te = 4 × τ ,soit 6 secondes

Réglage du respirateur
Volume Chez ce patient en crise d'asthme sévère nécessitant une
intubation endotrachéale et une VM, il faut donc program-
mer un cycle respiratoire LONG afin de permettre d'aug-
menter Te (jusqu'à 4 à 6 secondes) [12].
La règle d'un VT bas reste cruciale. Il pourra donc être sug-
géré d'utiliser une fréquence respiratoire relativement basse
VT (10 par minute, par exemple), d'insuffler un VT de 6–8 mL/
kg (poids idéal) avec un débit suffisamment élevé (0,6 à 1
L/sec) de façon à pouvoir raccourcir le Ti (<  1  seconde)
et permettre un Te de l'ordre de 5 secondes environ.
Deux manœuvres de mesure doivent alors être réalisées
1t 2t 3t 4t pour s'assurer du bon réglage des paramètres : manœuvre
Temps
d'occlusion télé-inspiratoire pour mesurer la pression télé-
inspiratoire à débit nul (P plat, qui doit rester inférieure à
Fig. 28.27
25–30 cmH2O) et manœuvre d'occlusion télé-expiratoire
Courbe volume/temps au cours de l'équilibration passive
de la pression alvéolaire et de la pression buccale. pour mesurer l'auto-PEP (fig. 28.28) [13, 14].
La figure montre le déroulement de la phase expiratoire. Si les Une pierre angulaire de l'approche est évidemment le
poumons se dégonflaient de façon linéaire, le temps expiratoire traitement du bronchospasme afin de diminuer la Raw et,
(Te) serait égal à la constante de temps (τ). Cependant, les forces
de recul élastique diminuent en cours d'expiration et on voit que Te de là, permettre une expiration complète en un Te plus
nécessaire pour expirer le VT est de 4 fois τ. court.

Fig. 28.28
Mesure de la pression positve en fin d'expiration.
Après activation du bouton d'occlusion (flèche blanche), on voit une augmentation nette de la pression télé-expiratoire au-delà du niveau de
PEP préréglé. La PETTOT s'élève à 22 cmH2O. L'auto-PEP s'élève donc à 22 − 5 cmH2O, soit 17 cmH2O. L'existence d'une auto-PEP résulte du
fait que le Te est trop court pour permettre au système thoracopulmonaire de retourner à la position d'équilibre passif des forces élastiques
thoraciques et pulmonaires (situation dite d'hyperinflation dynamique). L'augmentation de la pression intrathoracique moyenne qui en résulte
peut avoir des effets pulmonaires et hémodynamiques indésirables.

360
28. Les bases de la ventilation mécanique

Point clé pharynx, dislocation des aryténoïdes), digestives (régurgita-


tion du contenu gastrique et aspiration de celui-ci) ou de
L'instauration d'une ventilation mécanique, appli- positionnement [17, 18]. Si certaines d'entre elles sont par-
quée par voie invasive ou non invasive, répond à ticulièrement fréquentes (hypoxémie > 25 %, choc : 25 %)
des indications diverses : assister la pompe ventila- [4], d'autres sont bien heureusement plus rares (décès < 1
toire défaillante, optimaliser les échanges gazeux, %) [4]. Il est probable que l'état clinique, hémodynamique
assister la fonction ventriculaire. Ces indications et respiratoire du patient au moment de l'intubation joue
correspondent à des situations physiopatholo- également un rôle dans la morbidité des complications les
giques différentes (mais souvent intriquées). Le plus redoutables.
choix de la stratégie ventilatoire doit être guidé Les complications liées à une malposition doivent être
par l'indication même de ventilation et par les recherchées de manière systématique par la personne qui
caractéristiques (respiratoires, notamment) du place le TET. Pour ce faire, il est nécessaire d'ausculter le
patient. Des paramètres ventilatoires inadaptés patient (champs pulmonaires, en particulier champs supé-
peuvent influencer négativement le pronostic du rieurs, et épigastre) pour exclure une intubation bronchique
patient. Une surveillance étroite des paramètres sélective ou œsophagienne. Une radiographie du thorax
ventilatoires s'impose au cours de la ventilation peut être réalisée pour contrôler le positionnement du
mécanique. tube par rapport à la carène, certains auteurs préconisant
le contrôle radiographique systématique après intubation
[19]. Malheureusement, une intubation œsophagienne ne
Complications de l'intubation pourra être diagnostiquée sur la radiographie du thorax
­réalisée au lit du malade (l'œsophage étant derrière la trachée) ;
Quel que soit le motif pour lequel un patient doit être mis le monitoring du CO2 expiré (end tidal CO2) revêt ainsi une
sous assistance respiratoire invasive, une manœuvre d'intu- importance particulière et est d'ailleurs recommandé par
bation trachéale par voie nasale ou buccopharyngée s'avé- les guidelines de la European Resuscitation Council publiés
rera nécessaire. Pour ce faire, la personne qui assurera cette en 2010 [20]. D'autres techniques comme l'échographie
manœuvre devra placer un tube (dit « endotrachéal ») au- pulmonaire et la mesure de l'impédance thoracique ont
delà des cordes vocales du patient. Un ballonnet situé au également été proposées pour vérifier le bon positionne-
niveau de la partie distale du tube, et se trouvant dans la tra- ment du tube endotrachéal.
chée, sera gonflé afin de maintenir l'étanchéité du système Enfin, le geste d'intubation endotrachéale sera réalisé
et éviter des fuites au cours de la ventilation mécanique, avec une extrême prudence en cas de traumatisme crâ-
ainsi que l'écoulement de sécrétions à partir du pharynx nien (risque de majoration de la pression intracrânienne)
vers l'arbre trachéobronchique distal. Tant la manœuvre ou cervical (risque de lésion médullaire en cas de fracture
d'intubation en tant que telle que la présence du tube instable).
endotrachéal (TET) peuvent être source de complications.
Complications liées au tube
Complications au moment endotrachéal pendant
de la mise en place la ventilation mécanique
du tube endotrachéal
Les complications, en rapport avec la présence d'un TET,
La nature urgente de l'intubation par rapport à une intu- que l'on peut observer au cours de la ventilation mécanique
bation élective [15], la difficulté du geste d'intubation (qui sont principalement liées à des phénomènes obstructifs,
peut s'exprimer par le score IDS pour intubation difficulty soit parce que le tube est obstrué par des sécrétions qui
scale [16]) et le manque d'expérience de la personne qui se solidifient progressivement (fig. 28.29), soit parce que le
place le TET sont des facteurs de risque de complications tube est mal positionné et est coudé.
[17]. Les complications pouvant se présenter au moment de Si le TET n'est pas correctement fixé, celui-ci peut pro-
l'intubation peuvent être classées en complications respira- gressivement être mobilisé (mouvements de déglutition
toires (hypoxémie), cardiovasculaires (hypertension, hypo- du malade) et éventuellement se fixer au niveau d'un tronc
tension et choc, arythmies, arrêt cardiaque), traumatiques souche pulmonaire (en général le tronc souche droit du fait
(blessure de lèvres, perte de dent, blessure du palais ou du des particularités anatomiques). Il en résulte une ventilation
361
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Fig. 28.29
Tube obstrué par des sécrétions.
Fig. 28.30
Radiographie d'un balonnement excessivement gonflé.
mécanique sélective qui peut aboutir à des complications
de type baro- ou volotraumatisme (la ventilation n'étant
plus délivrée que sur un seul poumon). Il faut noter que si
le TET doit être correctement fixé, il convient cependant
de le changer régulièrement de place dans la bouche, afin
d'éviter le développement d'escarres au niveau des lèvres
ou de la langue.
Des extubations réalisées par le patient lui-même
(non programmées) peuvent également survenir en
particulier chez les patients agités et confus. Outre
les risques liés à la perte de la ventilation mécanique
(hypoxémie, hypercapnie éventuelle), ceci peut entraî-
ner des lésions trachéales ou pharyngées secondaires
voire tardives. Le patient peut également mordre le
TET, obstruant ainsi la ventilation mécanique. Ces
morsures peuvent, dans de rares cas, induire une fuite Fig. 28.31
via un orifice ainsi créé dans le TET. Le monitoring des Œsogastroscopie montrant la présence d'un tube endotrachéal
dans l'œsophage.
volumes courants inspirés et expirés (et la différence
entre les deux valeurs) permettra de suspecter cette
complication. piration endotrachéale de gavage, l'imagerie par CT-scan,
Une complication redoutable qui peut survenir pen- la fibroscopie endobronchique voire l'œsogastroscopie
dant la présence du TET (ou lors de sa mise en place (fig.  28.31) permettront de suspecter puis de confirmer
si celle-ci est traumatique) est la rupture trachéale, qui le diagnostic. La prise en charge de cette complication
peut elle-même se compliquer de fistule trachéo-œso- est multidisciplinaire (gastro-entérologues, pneumolo-
phagienne. Le facteur de risque principal est une pression gues, ORL, chirurgiens). Des arbres décisionnels ont été
trop importante dans le ballonnet suite à un gonflement publiés [21]. Le pronostic est particulièrement réservé et
excessif, ce qui peut se voir sur la radiographie thoracique des décès sont fréquents (fig. 28.32).
de face (fig.  28.30). Il conviendra donc de vérifier régu- Enfin, la présence du TET peut être source d'autres
lièrement cette pression via un manomètre et d'adapter complications (comme la présence d'hématomes intra-
le gonflement du ballonnet en conséquence. D'autres muqueux œsophagiens [22]), notamment infectieuses
facteurs de risque ont également été décrits : facteurs comme la sinusite (en cas d'intubation par voie nasale), la
mécaniques mais également anatomiques ou liés au trachéobronchite ou la pneumonie (pneumonie acquise
patient (anomalies congénitales, corticothérapie chro- sous ventilation mécanique ou PAVM ou VAP pour ventila-
nique…). L'apparition d'un emphysème sous-cutané, l'as- tor associated pneumonia).
362
28. Les bases de la ventilation mécanique

volume expiré ; test quantitatif) ou encore de faire expirer le


patient contre résistance (en obstruant le TET par exemple)
après avoir dégonflé le ballonnet (et écouter la fuite d'air ;
test qualitatif). Le principe du test repose sur l'hypothèse
que le passage d'air autour du ballonnet dégonflé serait
inversement proportionnel à l'obstruction liée à un éven-
tuel œdème laryngé [23]. Cette technique semble être un
outil intéressant dans la détection de patients à risque de
complications après extubation [24]. Lorsque cet œdème
est présent ou suspecté, un traitement par corticothérapie
peut être proposé [25] et semble être efficace, en particu-
lier dans les populations à risque [26]. L'étude de François
et al. a permis de démontrer que le sexe féminin, la durée
de ventilation mécanique et le diamètre du TET (rapport
taille/diamètre du TET) sont des facteurs de risque de com-
plications après extubation [25].
La présence d'un œdème laryngé significatif peut donc
induire comme mentionné plus haut un œdème pulmo-
naire à pression négative (fig. 28.33). En effet, la respiration
contre glotte fermée va induire une pression négative intra-
Fig. 28.32 thoracique importante qui peut aboutir à une rupture de
Fistule trachéo-œsophagienne démontrée à l'autopsie.
la membrane alvéolocapillaire, ce qui permet l'apparition
de l'œdème. De même, cette pression négative intrathora-
cique va induire une majoration du retour sanguin veineux,
Complications au moment ce qui va également favoriser l'apparition de cet œdème,
de l'extubation par majoration de la pression hydrostatique. Enfin, l'état
de détresse (état hyperadrénergique), lié à l'hypoxémie
Les complications que l'on rencontre au moment de l'ex- et l'hypercapnie, peut induire une altération de fonction
tubation programmée sont liées au développement d'un myocardique et une majoration du volume sanguin intra-
laryngospasme ou à la présence de lésions laryngées, en pulmonaire, aboutissant in fine à une diminution du débit
particulier un œdème laryngé. La physiopathologie des cardiaque (suite au shift septal induit par la majoration de
conséquences de la présence de l'œdème laryngé repose sur pression dans les cavités cardiaques droites).
l'application de la loi de l'écoulement de Poiseuille (relation Le traitement de l'œdème pulmonaire à pression négative
entre le débit d'un écoulement et la viscosité du fluide, la consiste en l'application d'une pression positive par la mise
différence de pression entre les extrémités de la canalisation, en place d'une CPAP. Dans certains cas, cette manœuvre
la longueur et le rayon de la canalisation) et le théorème sera insuffisante et il sera nécessaire de réintuber le patient.
de Bernoulli (qui exprime la constance de pression le long La guérison est systématique et est généralement obtenue
d'une ligne de courant dans un fluide incompressible). La au bout de quelques heures.
présence de l'œdème laryngé induit donc une majoration
de vitesse des flux au niveau du rétrécissement (à l'endroit
de l'œdème) et une diminution de pression dans la lumière Complications dans le décours
à ce niveau, ce qui peut aboutir à une obstruction complète plus tardif du retrait du tube
du larynx, le patient faisant alors des efforts de respiration endotrachéal
glotte fermée (manœuvre de Müller). Il en résulte un risque
de développement de l'œdème pulmonaire dit à pression Outre les douleurs pharyngées et la raucité de voix tem-
négative (voir ci-dessous). poraires ainsi que des troubles de déglutition, les compli-
Pour évaluer la présence d'un œdème laryngé avant cations qui surviennent à distance du retrait du TET sont
l'extubation du patient, un « test de fuite » peut être réa- principalement marquées par des problèmes au niveau des
lisé. Il s'agit de faire respirer le patient intubé avec ballon- cordes vocales (paralysie, granulome) et par le développe-
net gonflé puis dégonflé (et comparer les différences de ment de lésions trachéales de type sténose ou granulome.
363
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Obstruction des voies


aériennes supérieures

Inspiration contre glotte Hypoxie – Hypercapnie


fermée État hyperadrénergique

Majoration du retour sanguin Pression Intrathoracique Majoration du volume sanguin


veineux négative intrapulmonaire

Majoration de la pression Altération de la membrane


hydrostatique vasculaire Distention du ventricule droit
alvéolocapillaire

Transudation de liquide à Majoration de la perméabilité


Shift septal interventriculaire
partir de l’espace capillaire vasculaire pulmonaire
vers l’espace interstitiel
Diminution de la
contractilité
Œdème pulmonaire myocardique

Diminution du débit cardiaque

Fig. 28.33
Relation entre l'obstruction des voies aériennes supérieures et l'œdème pulmonaire.

Les sténoses trachéales liées à la présence d'une trachéo- (dyspnée) et les résultats des examens complémentaires
tomie ont été décrites dès 1886 par J. Colles qui analysa comme les épreuves fonctionnelles respiratoires (aplatisse-
une série de patients ayant nécessité une mise en place de ment de la courbe débit-volume), la fibroscopie endobron-
trachéotomie pour court-circuiter les voies aériennes supé- chique et l'imagerie (scanner et résonance magnétique).
rieures suite à leur obstruction par une réaction inflamma- Ces derniers examens permettront le diagnostic précis, la
toire locale secondaire à une laryngo-trachéo-bronchite localisation exacte de la sténose et, éventuellement, appor-
aiguë (croup) ou à des pseudo-membranes diphtériques teront une aide à la décision de la modalité thérapeutique.
[27]. La reconnaissance de cette complication chez le Le traitement peut inclure la mise en place d'une prothèse
patient qui a été ventilé de manière mécanique via un TET endotrachéale, la destruction de la sténose par LASER, la
n'est venue que dans les années 1960 [28]. La physiopatho- résection trachéale ou encore la brachythérapie endo-
logie de ces sténoses trachéales est liée à une compression bronchique. À noter que les techniques de transplantation
excessive, par un ballonnet gonflé de manière inappropriée, trachéobronchique pourraient également s'avérer utiles à
des structures muqueuses et cartilagineuses. Il en résulte l'avenir.
une ischémie locale (par raréfaction vasculaire [29]) qui
induit une perte de la muqueuse et de l'intégrité structu-
relle de la paroi trachéale. La guérison de cette lésion induit
secondairement une cicatrisation avec stricture locale. Les Points clés
facteurs de risque pour le développement de la sténose
trachéale sont multiples. On retiendra en particulier une ■
La mise en place, la présence au cours de la ven-
taille inadaptée du TET, une pression trop importante dans tilation mécanique et le retrait du TET sont source
le ballonnet, la durée de la ventilation mécanique, la pré- de complications respiratoires, dont certaines
sence concomitante d'une sonde gastrique, une intubation peuvent avoir des conséquences redoutables. Il
traumatique, la présence d'un choc (et le besoin de vaso- convient de retenir qu'au moment de l'intuba-
presseurs), etc. Ces sténoses sont classifiées en sténoses en tion, une auscultation systématique des champs
anneau (web-like stenoses) et sténoses complexes. Le dia- pulmonaires et de l'épigastre doit être réalisée.
gnostic sera fondé sur l'historique du patient, ses plaintes Pendant la ventilation mécanique, un contrôle
364
28. Les bases de la ventilation mécanique

régulier des pressions du ballonnet du TET doit niveau énergétique nettement plus élevé que dans la forme
se faire pour détecter les sur-pressions (source liquide. L'évaporation, passage de l'état liquide à l'état
de complication y compris à distance). Enfin, au gazeux, demande donc de l'énergie. Cette énergie est puisée
moment de l'extubation, un test de fuite devrait dans la chaleur du milieu ambiant. L'évaporation entraîne
être réalisé chez les patients à risque de dévelop- ainsi un refroidissement local. À l'inverse, la transformation
per un œdème laryngé. de l'eau de l'état gazeux à l'état liquide, appelée conden-

Ces manœuvres simples doivent permettre sation, libère de l'énergie, sous forme de chaleur [30]. La
une diminution de l'incidence des complications « valeur de saturation » est la quantité maximale d'eau pou-
liées au TET. Enfin, il convient de se rappeler que vant exister sous forme de vapeur dans un mélange gazeux
le développement d'une insuffisance respiratoire (fig. 28.34).
dans le décours de l'extubation doit faire suspec- Un gaz est dit « saturé en vapeur d'eau » lorsqu'il en
ter la présence d'un œdème laryngé compliqué contient le maximum possible en fonction de la tem-
d'œdème pulmonaire à pression négative. pérature. Un gaz chauffé à 37  °C et contenant 44 mg
d'eau par litre est saturé en vapeur d'eau. L'humidité
relative est le rapport entre la quantité de vapeur d'eau
Humidification présente et la quantité maximale théorique, la valeur de
des gaz respiratoires saturation. Un gaz chauffé à 37° et qui contient 22 mg
d'eau par litre présente une humidité relative de 50  %.
La nécessité d'humidifier et de réchauffer les gaz respira- En d'autres mots, lorsqu'un gaz saturé en vapeur d'eau
toires administrés au patient intubé et ventilé est démon- est refroidi, sa capacité à contenir de la vapeur diminue ;
trée de longue date. L'absence de « conditionnement » des une condensation d'eau, sous forme liquide, survient.
gaz induit un risque majeur d'obstruction des voies respi- En conséquence, la présence de condensation dans un
ratoires et du tube endotrachéal par des sécrétions bron- tuyau de ventilation prouve que le gaz (inspiré ou expiré)
chiques desséchées. est saturé en vapeur d'eau et qu'il subit un certain degré
de refroidissement [30].
En conclusion :
Notions physiques ● l'évaporation d'eau entraîne un refroidissement local ;

● la condensation survient si l'air saturé en vapeur d'eau


L'eau peut exister sous forme solide, liquide ou gazeuse.
Dans la forme gazeuse, les molécules d'eau présentent un est refroidi.

60

50

44
Absolute humidity (mg/litre)

40

30

20
17

10
39 % Relative
humidity

0
–20 –10 0 10 20 30 37 40 50
Temperature (°C)

Fig. 28.34
Relation entre la « valeur de saturation » (absolute humidity) et la température.
La valeur de saturation augmente avec la température : elle est de l'ordre de 17 mgH2O/L à 20 °C et de 44 mgH2O/L à 37 °C.

365
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Notions physiologiques
L'air que nous respirons dans nos bâtiments est générale-
ment réchauffé à 20 °C, contient ± 10 mg d'eau par litre et
présente donc une humidité relative de l'ordre de 50–60 %.
Les conditions climatiques peuvent, bien entendu, varier
considérablement. Quelles que soient ces conditions cli-
matiques, l'air qui pénètre dans les alvéoles est réchauffé à
la température du corps et saturé en vapeur d'eau.
Richement vascularisée et recouverte d'une sécrétion
contenant 95 % d'eau, la muqueuse respiratoire humidifie et
réchauffe les gaz inspirés. Ce sont, de loin, les voies aériennes
supérieures qui se chargent de la majeure partie du travail.
Dans les conditions physiologiques, l'air qui pénètre dans la Fig. 28.35
trachée est déjà réchauffé à 30 °C au moins et quasi saturé Obstruction complète d'un tube endotrachéal par des sécrétions
en vapeur d'eau. Sur le plan pratique, nous prendrons la réfé- desséchées.
rence 30 °C − 30 mg d'eau par litre comme référence physio-
logique pour évaluer les performances des humidificateurs.
Au cours de l'expiration, la muqueuse respiratoire récu- liquide, réchauffée par énergie électrique. Le gaz passe
père une partie (30 %) de la chaleur et de l'humidité qu'elle sur la nappe d'eau (ou « bulle » dans l'eau via une tubu-
avait transférée au cours de l'inspiration. L'air expiré est lure plongeant dans le liquide). Le niveau d'évaporation
donc relativement chaud et humidifié. On considère que, dépend de la température du milieu, de la surface et du
en conditions physiologiques, la température de l'air expiré temps de contact eau–liquide. Le gaz sort de l'humidifica-
est de 30 °C et que son humidité est de 30 mg d'eau par litre teur chauffant saturé en vapeur d'eau à une température
(donc saturé). Dans les conditions habituelles, le coût du oscillant entre 30 et 50 °C suivant le type d'humidificateur.
conditionnement des gaz respirés est de l'ordre de 10 à 15 g Si le tuyau inspiratoire n'est pas isolé thermiquement, le
d'eau par heure et de 10 à 15 kcal/heure [31]. gaz se refroidit au cours de sa progression vers le patient :
il y a donc condensation dans le tuyau inspiratoire. Les
humidificateurs les plus modernes sont de type pass
Ventilation contrôlée en soins over (le gaz « passe » sur le liquide sans buller dans l'eau)
intensifs avec thermostat basé sur une prise de température au
niveau de l'entrée du tube endotrachéal. Le circuit inspi-
Les patients intubés et ventilés reçoivent des gaz secs et ratoire est chauffé de façon à limiter les phénomènes de
frais provenant de réserves. L'intubation court-circuite les condensation.
structures physiologiquement les plus importantes dans le Les gaz expirés par le patient sont relativement chauds
cadre de la climatisation des gaz. La muqueuse trachéale et (30 °C) et humides (30 mg d'eau/litre ou plus). Il y a donc
bronchique doit effectuer tout le travail de climatisation. également condensation d'eau dans la voie expiratoire, sauf
Ce travail peut véritablement dessécher la muqueuse et si le tuyau est réchauffé.
entraîner l'obstruction des voies aériennes et du tube endo- Les désavantages classiquement cités sont :
trachéal (fig.  28.35). De nombreux autres effets délétères ● la charge de travail (vidange des tuyaux) ;

ont été décrits (obstruction des petites voies aériennes, ● le volume compressible (généralement 1 à 2 mL/

atélectasies, hyperréactivité bronchique…) [32]. cmH2O) ;


● la résistance au débit aérien (des systèmes avec bullage) ;

● le prix ;
Humidification et réchauffement ● l'encombrement « technique » ;

des gaz inhalés ● les risques bactériologiques ;

● les risques de contamination bactérienne sont plus

Humidificateurs chauffants théoriques que réels. Il n'existe, en effet, aucune corrélation


La technique la plus ancienne et la plus utilisée reste l'hu- entre la contamination bactérienne des circuits de ventila-
midificateur chauffant. L'humidificateur contient de l'eau tion et l'incidence de la pneumopathie nosocomiale.
366
28. Les bases de la ventilation mécanique

Les humidificateurs chauffants de dernière génération L'air chaud et humide traverse la membrane et, outre
présentent l'avantage d'un haut niveau de performance, les phénomènes de condensation (avec absorption de
indépendant de la température ambiante et d'une résis- l'eau), la vapeur d'eau est également « attirée » par le
tance au débit aérien [33, 34]. sel présent dans la membrane (« adsorption », liaison
chimique faible). L'ECH hygroscopique est nettement
Échangeurs de chaleur et d'humidité plus performant. Après passage au travers de ce type
d'ECH, l'air expiré ne contient plus que 10 mg d'eau par
« Récupérer » une partie de la chaleur et de l'humidité expi-
litre. L'utilisation des ECH permet ainsi de maintenir les
rées est une idée qui copie la fonction physiologique expi-
circuits de ventilation au sec. C'est un avantage consi-
ratoire des voies aériennes supérieures.
dérable en termes de charge de travail et de risques liés
Les premiers échangeurs de chaleur et d'humidité (ECH)
à l'accumulation d'eau dans le circuit de ventilation. Les
ont été produits par des équipes ORL pour les patients
études montrent que les meilleurs ECH hygroscopiques
trachéotomisés. Il s'agit d'ECH constitués de fines tubulures
procurent un air inspiré dont la température est égale ou
métalliques [35]. L'air expiré traverse des petits cylindres
supérieure à 30 °C et l'humidité absolue égale ou supé-
métalliques et le métal récupère une partie de la chaleur et
rieure à 30 mg d'eau par litre environ [38]. Il faut cepen-
de l'humidité expirées pour la rendre à l'air inspiré au cours
dant insister sur le fait que certains ECH présentent des
du cycle respiratoire suivant. On montre que ces systèmes
performances nettement plus médiocres [39].
récupèrent environ 10 mg d'eau par litre (la perte hydrique
expiratoire passe de 30 à 20 mg d'eau par litre). Ces pre- Limites des ECH ?
miers ECH sont dits « hydrophobes » car ils n'absorbent
ni adsorbent l'eau. L'eau qui condense au cours de l'expi- Les performances des ECH diminuent si le volume courant
ration s'accumule dans l'ECH sous forme de gouttelettes (Vt) ou le volume/minute augmentent. Cette notion a
[35]. Certains ECH hydrophobes ont été introduits en soins relativement peu d'impact pour les Vt de l'ordre de 300 à
intensifs et en anesthésiologie. Il s'agit généralement d'ECH 600 mL lors de l'utilisation d'ECH performants. Par contre, si
dont la membrane est un filtre antibactérien (fibres de céra- la ventilation/minute dépasse 10 litres, les risques de sous-
miques enrobées d'une résine hydrophobe). Les qualités du humidification existent.
filtre antibactérien sont réelles mais pas absolues [36]. Les Autre facteur important, la température du patient. En
qualités de réchauffement et d'humidification sont insuf- deçà de 32 °C de température corporelle, l'ECH le plus per-
fisantes et exposent le patient aux risques sévères de sous- formant ne peut humidifier le gaz inspiré au-delà de 25 mg
humidification [37]. Les ECH ont ensuite été faits d'une d'eau par litre. On considère généralement que l'hypother-
membrane de cellulose ou de polyuréthane imprégné d'un mie en deçà de 32 °C est une contre-indication à l'utilisa-
sel, généralement le chlorure de calcium : ces ECH sont tion d'un ECH [40].
«  hygroscopiques » (fig. 28.36). Enfin, les fuites aériques en cours de ventilation sont
un facteur de chute de performance d'un ECH. En effet, le
volume d'air perdu dans les fuites (fuites au niveau du tube
endotrachéal, fistule bronchopulmonaire, fuite au niveau
d'un masque de VNI) ne repasse pas par l'ECH. Il y a donc
un déséquilibre entre Vt inspiré et Vt expiré.

Peut-on améliorer la performance d'un ECH ?


Il est actuellement possible d'associer l'ECH à un mini-­
humidificateur chauffant (Booster®, Hygrovent Gold®,
Humid-Heat®) placé entre le patient et l'ECH. Cette asso-
ciation ECH–mini-humidificateur chauffant (appelée ECH
actif) réchauffe le gaz et l'humidifie en apportant de la
vapeur d'eau. On peut considérer qu'il augmente la tempé-
rature d'environ 2 °C et augmente l'humidification d'envi-
ron 2 mg d'eau par litre. Ces systèmes sont peu évalués dans
Fig. 28.36 la littérature et le risque d'accumulation d'eau dans l'ECH
Exemple d'ECH hygroscopique. est accru [41].
367
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

De nombreux ECH actuels contiennent, en outre, une ment l'ECH plusieurs fois par jour. S'il est macroscopique-
membrane de filtration bactérienne (soit des fibres de céra- ment contaminé, il faut le changer. Le risque de blocage
mique, soit des fibres de polypropylène). La fonction filtre complet est rare mais existe. Il faut donc y penser en cas
de ces ECH (généralement appelés ECHF ou nez-filtres) de situation critique.
est bonne mais pas absolue. Sur le plan clinique, les études Pour les malades en ventilation spontanée ou en ven-
montrent que la face « patient » de l'ECH se contamine tilation assistée, l'ECH génère donc une surcharge de tra-
rapidement si le patient est porteur de germes au niveau de vail respiratoire (augmentation de la ventilation/minute
ses voies respiratoires. Par contre, l'ECH face « circuit » est et du travail respiratoire secondaire à l'effet espace mort
très rarement colonisé et, quand c'est le cas, le nombre de et à la résistance de l'ECH). On considère généralement
colonies bactériennes est très réduit. Sur le plan pratique, que la surcharge de travail induite par un ECH est com-
en termes de micro-organismes, on considère donc que pensée par une aide inspiratoire de l'ordre de 5 cm d'eau
l'ECH protège effectivement le circuit de ventilation [42]. [45]. Si un sevrage respiratoire s'avère difficile, il faut
aussi envisager de remplacer l'ECH par un humidificateur
Espace mort instrumental et résistance au débit chauffant.
aérien
Doit-on changer l'ECH tous les jours ?
Il ne faut cependant pas perdre de vue que les ECH ont un
volume interne de 40 à 100 mL. Il s'agit d'un espace mort Selon les producteurs, oui ; selon la littérature, non [46]. Le
supplémentaire puisque l'ECH est placé au sein de l'espace changement tous les deux jours (voire même tous les trois
mort instrumental. L'ECH entraîne donc une augmentation ou quatre) peut être appliqué s'il n'y a pas de problème
de la ré-inhalation de CO2 expiré. Au cours de la ventilation particulier.
à petit Vt, il sera peut-être utile de remplacer l'ECH par un
humidificateur traditionnel pour limiter l'hypercapnie [43]. Doit-on limiter la durée d'humidification passive
D'autre part, l'ECH représente une certaine résistance au cours de la ventilation contrôlée ?
inspiratoire et expiratoire [44]. Si l'ECH est sec, il y a peu
de risque. Mais si des sécrétions ou de l'eau s'accumulent Il n'y a pas d'évaluation claire à ce sujet. Le bon sens vou-
dans l'ECH, le risque d'augmentation de résistance n'est drait qu'après 4 à 7  jours de ventilation, on recoure à un
pas négligeable du tout. En pratique, afin d'éviter que système actif. On peut, en effet, supposer que la ventilation
de l'eau ou des sécrétions ne s'accumulent – à partir du au long cours altère les capacités physiologiques des voies
patient –, il est conseillé de placer l'ECH à la verticale du respiratoires (inflammation, sécrétions moins fluides voire
tube endotrachéal ou, en tout cas, au-dessus du tube moins abondantes). Il faut évidemment changer plus tôt
(fig. 28.37). Sur le plan pratique, il faut inspecter visuelle- s'il existe des suspicions d'insuffisance d'humidification par
l'ECH ou s'il faut remplacer l'ECH plusieurs fois par jour à
cause de l'accumulation des sécrétions.

Peut-on utiliser un ECH en VNI ?


À cause du phénomène de ré-inhalation de CO2 (aug-
mentation du travail respiratoire) et en raison des fuites
fréquentes en VNI (diminution d'efficacité de l'ECH),
l'utilisation d'un ECH en VNI peut poser problème.
Rappelons que la sous-humidification en VNI est une
réalité (gaz muraux secs, suppléments d'oxygène mural,
hauts débits gazeux, fuites aériques). Les conséquences
de la sous-humidification peuvent être graves (épistaxis,
obstruction nasale, hyperréactivité bronchique, obs-
truction des voies aériennes par du mucus desséché).
En dehors de la VNI intermittente dite à « petite dose »
Fig. 28.37
(1/2  h par 3–4 heures, par exemple), il faut utiliser un
Échangeur de chaleur et d'humidité (ECH).
L'ECH est placé pour favoriser le drainage de l'eau condensée humidificateur, chauffant s'il existe des fuites clinique-
dans le tube endotrachéal. ment évidentes (fig. 28.38) [47].
368
28. Les bases de la ventilation mécanique

Quelle conduite pratique tenir ?


● Ventilation de première intention (sauf contre-­indication)
avec un ECH(F) hygroscopique et un circuit de ventilation
simplifié.
● Changement de l'ECH toutes les 48 heures ou plus fré-

quemment en fonction des conditions « macroscopiques ».


● Recours conseillé à l'humidificateur chauffant. Au-delà

de 4 à 7 jours de ventilation mécanique avec un échangeur


de chaleur et d'humidité.
● Sécrétions abondantes et/ou visqueuses et/ou san-

glantes.
● Ventilation à haut ou à bas Vt.
Fig. 28.38
● Sevrage ventilatoire difficile.
VNI à l'aide d'un masque nasobuccal.
● Fuites aériques.
Un humidificateur actif est employé (non vu sur la photo). Le tuyau
inspiratoire (en bleu) est chauffé afin d'éviter un refroidissement ● Hypothermie.
(avec condensation d'eau) du mélange gazeux inspiratoire. ● Ventilation non invasive.

L'ECH apporte-t-il un bénéfice en termes d'infection Point clé


nosocomiale ?
La contamination du circuit de ventilation provient générale- L'humidification adéquate des gaz inhalés en
ment des germes présents dans la sphère trachéobronchique cours de ventilation mécanique est absolument
du patient. Elle se réalise de proche en proche et atteint indispensable chez le patient intubé (ou trachéo-
d'abord la voie expiratoire. L'eau condensée dans le circuit tomisé) et généralement souhaitable en VNI.
est généralement contaminée également. L'intérêt d'un ECH L'ECH est généralement une bonne technique
résulte de son étanchéité (membrane hydrophobe) et du chez les patients intubés. Il existe quelques contre-
mécanisme de filtration aérodynamique qui se déroule dans indications et limites. La surveillance étroite s'im-
la membrane filtrante. Les circuits de ventilation sont donc pose. Au cours de la VNI, si une humidification
secs et stériles ou quasi stériles. Il ne faut cependant pas perdre est décidée, il semble préférable de recourir aux
de vue qu'il n'existe aucune corrélation entre la contamina- humidificateurs chauffants traditionnels.
tion bactérienne des circuits de ventilation et l'incidence de la
pneumopathie liée à la ventilation. Il ne faut donc pas attendre Aérosolthérapie en ventilation
des ECH qu'ils diminuent l'incidence de ces pneumopathies
associées à l'intubation [48]. Il est d'ailleurs démontré depuis
mécanique invasive
longtemps que la pneumopathie infectieuse est générale- Un aérosol est une suspension de particules solides ou
ment due aux germes propres du patient (modification de la liquides dans un milieu [49]. L'aérosolthérapie en ventilation
flore oropharyngée, stagnation des sécrétions sur le ballonnet mécanique est une voie d'administration médicamenteuse
du tube, micro-inhalations, etc.). principalement localisée au système respiratoire. Elle utilise
le débit aérien fournit au patient (assistance ventilatoire) en
Quelles sont les contre-indications des ECH ?
vue d'obtenir de hautes concentrations de médicaments
En résumé, on retient : sur le site pulmonaire visé tout en minimisant le risque de
● baisse prolongée de la température corporelle en deçà
toxicité systémique inhérent à ceux-ci [50].
de 32 °C ; Une enquête internationale de Stephan Ehrmann réu-
● fuites aériques dépassant 25 % du volume courant
nissant 70 pays montre qu'en 2013, l'aérosolthérapie en
inspiré ; ventilation mécanique invasive est une pratique courante
● sécrétions abondantes (ou hémoptysies) nécessitant de
(fig. 28.39) [51]. Les trois classes de médicaments les plus
changer l'ECH 3 fois ou plus de 3 fois par jour ; fréquemment prescrites par les cliniciens sont d'abord les
● volume/minute supérieur à 10 litres ;
bronchodilatateurs et les corticostéroïdes et, ensuite, les
● ventilation à bas Vt.
antibiotiques.
369
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

1% 2%

ENCADRÉ 28.1 Facteurs influençant


le taux et la distribution de
la déposition d'un aérosol en
ventilation mécanique invasive
43 %
l Caractéristiques de l'aérosol :
54 %
– particules : diamètre, forme et densité
– gaz propulseur : pression, débit et densité
– choix du dispositif d'aérosolisation, position dans le
circuit, présence d'une chambre d'inhalation
– synchronisation dispositif–respirateur (moment d'ac-
tivation dans le cycle respiratoire)
l Assistance ventilatoire :

– paramètres ventilatoires : débit inspiratoire, temps ins-


Jamais pratiquée piratoire, volume courant, pause télé-inspiratoire
Aérosol-doseur – mode ventilatoire
– synchronisation patient–respirateur
Nébuliseur l Voies aériennes artificielles :

Nébuliseur + Aérosol-doseur – Caractéristiques du tube endotrachéal et du circuit


ventilatoire : diamètre, longueur, angulation, matériel
Fig. 28.39 – gaz inhalé (vecteur) : humidité, température, densité
Pratique de l'aérosolthérapie en ventilation mécanique invasive l Patient : âge, niveaux de ventilations régionales, méca-
selon l'enquête internationale de Stephan Ehrmann [51]. nisme et sévérité de l'obstruction, pattern respiratoire
Seuls 2 % des 611 services de soins intensifs interrogés rapportent ne
jamais avoir eu recours à cette voie d'administration en ventilation
mécanique. Les nébuliseurs et les aérosols-doseurs sont les deux
dispositifs d'aérosolisation disponibles.

trachéal ou de la sonde de trachéotomie est faible, plus


La ventilation mécanique, la proportion de particules piégées par ceux-ci est impor-
une barrière à la déposition ? tante, particulièrement en pédiatrie [56–58] ;
● la présence d'un capteur de débit proximal, entre la pièce

Il y a 20 ans, la ventilation mécanique était une barrière à Y du circuit ventilatoire et le raccord annelé du tube endo-
la déposition pulmonaire des particules aérosolisées (dose trachéal, diminue de 25 % la dose pulmonaire (fig. 28.40)
pulmonaire de 2 à 3 % seulement). L'analyse de la dépo- [59]. Ce capteur est indispensable sur certains respirateurs
sition par scintigraphie révélait les deux grandes limites à pour un monitoring complet du patient ;
la déposition pulmonaire : l'inefficacité d'aérosolisation du ● la présence d'un humidificateur chauffant diminue de 40

nébuliseur pneumatique utilisé et des conditions de nébuli- à 50 % la dose pulmonaire à la sortie du tube endotrachéal
sation aléatoires, car inconnues à l'époque [52, 53]. par effet hygroscopique et diminution des performances
Au cours de la ventilation mécanique, la quantité de de l'aérosol-doseur, responsable d'une augmentation du
médicaments déposée au niveau des voies aériennes phénomène d'impaction au niveau des voies aériennes
dépend de nombreux facteurs relatifs aux caractéristiques artificielles [60–64]. Réaliser l'aérosol immédiatement après
de l'aérosol, à l'assistance ventilatoire, aux voies aériennes avoir éteint l'humidificateur chauffant ne permet pas d'aug-
artificielles et au patient (encadré 28.1) [54, 55]. Rendre les menter la dose pulmonaire à une valeur similaire à celle
particules aérosolisées disponibles aux poumons du patient obtenue avec un circuit sec [65] ;
est d'autant plus important car parmi ces facteurs, certains ● le pattern respiratoire du patient présentant une activité

ne sont pas totalement contrôlables : respiratoire spontanée, surtout chez le patient en acidose
● la déposition de particules au niveau des voies aériennes
métabolique compensée ventilant à une fréquence respira-
artificielles (circuit ventilatoire, chambre d'expansion, tube toire élevée ;
endotrachéal ou sonde de trachéotomie) peut être mini- ● la stratégie de ventilation protectrice imposée par l'at-

misée mais pas annulée. Plus le diamètre du tube endo- teinte respiratoire du patient en SDRA.
370
28. Les bases de la ventilation mécanique

p < 0.05
30

Amikacin (mg)
20

10

Y-piece + CDP

Y-piece
Fig. 28.40
Impact du capteur de débit proximal (CDP) sur la déposition pulmonaire d'amikacine obtenue avec un nébuliseur à membrane vibrante
connecté directement sur la pièce en Y avec et sans CDP (A). La présence du CDP diminue de 25 % la dose pulmonaire d'amikacine
mesurée sur un filtre placé à la sortie du tube endotrachéal. La photo B illustre la barrière que représente la membrane de ce capteur.

Tableau 28.2 Dispositifs d'aérosolisation disponibles en ventilation mécanique invasive


Dispositifs Avantages Inconvénients
Aérosol-doseur − Rendement, si bien exécuté − Exige une technique rigoureuse
− Rapidité d'exécution − Dose limitée (μg, pas d'antibiotiques)
− Coût − Chambre d'expansion indispensable
− Fiabilité des doses
Nébuliseur pneumatique − Coût − Volume résiduel (environ 1 mL)
− Pénétration de l'aérosol par rapport à − Faible rendement (pas d'antibiotiques)
l'aérosol-doseur − Perturbe la ventilation
− Médicaments disponibles par rapport à
l'aérosol-doseur
Nébuliseur ultrasonique − Rendement par rapport au nébuliseur − Coût, volume résiduel, peu pratique car
pneumatique volumineux
− Rapidité d'exécution − Augmente la température de la solution
− Ne perturbe pas la ventilation − Risque d'infection par contamination
Nébuliseur à membrane − Meilleur rendement (résidu négligeable) − Coût
vibrante − Rapidité d'exécution − Encrassement de la membrane (nettoyage
− Ne perturbe pas la ventilation rigoureux)
− Existe en version stérilisable et en version
jetable (patient unique)

En 2010, l'utilisation d'un nébuliseur à membrane vibrante Dispositifs d'aérosolthérapie


et la mise en place de conditions de nébulisation optimales
(ventilation contrôlée, paramètres ventilatoires optimaux, en ventilation mécanique
absence d'humidificateur chauffant, utilisation d'hélium Quatre types de dispositif sont disponibles en ventilation
comme gaz vecteur) ont permis de hautes concentrations mécanique : les aérosols-doseurs, les nébuliseurs pneuma-
pulmonaires d'antibiotiques au niveau de segments sub- tiques, les nébuliseurs ultrasoniques et les nébuliseurs à
pleuraux disséqués chez le cochon (dose pulmonaire de membrane vibrante (tableau 28.2). La rapidité d'exécution
40 à 66 %) [66–68]. et le moindre coût des aérosols-doseurs en font un disposi-
371
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

tif de choix pour l'aérosolthérapie en ventilation mécanique ● veiller à la bonne position de l'extrémité distale du tube endo-
[69]. De plus, ils sont capables d'un bon rendement de dépo- trachéal et de la canule de trachéotomie (niveau d'enfonce-
sition pulmonaire, à condition que la technique d'utilisation ment du tube, orientation de la sonde de trachéotomie) ;
soit rigoureuse [70]. Ne contenant que de faibles doses de ● relever le dossier du lit du patient à 30° minimum d'incli-

médicament (μg), le choix des molécules est cependant naison, voire même réaliser l'aérosol après mise au fauteuil
limité avec les aérosols-doseurs (pas d'antibiotiques). du patient ;
Parmi les nébuliseurs disponibles en 2013, l'enquête inter- ● s'assurer d'une synchronisation patient–respirateur optimale ;

nationale de Stephan Ehrmann rapporte que les nébuliseurs ● s'assurer que les paramètres ventilatoires soient dans des

pneumatiques sont les plus utilisés (55 %, 456/854 cliniciens limites « habituelles » (volume courant suffisant entre 6 et
interrogés), malgré leur faible rendement dû notamment à 8 mL/kg de poids idéal) ;
un volume résiduel élevé (0,5 à 2 mL). À l'inverse, cette même ● retirer le filtre échangeur de chaleur et d'humidité (HME

enquête révèle que les nébuliseurs à membrane vibrante, pour heat and moisture exchanger) s'il est présent entre le
pourtant recommandés en routine en réanimation, sont raccord annelé et la pièce Y. L'effet de l'absence du filtre
utilisés par seulement 14 % (116/854) des cliniciens interro- HME pendant la nébulisation sur l'intégrité de la muqueuse
gés [51]. La technologie d'aérosolisation caractéristique des bronchique doit être investigué. Il est toutefois recom-
nébuliseurs à membrane vibrante et des nébuliseurs ultra- mandé que la nébulisation ne dépasse pas 15 minutes [69].
soniques a permis d'augmenter considérablement la dose Il faut, bien entendu, être attentif à bien replacer le filtre
émise par le nébuliseur et, in fine, la dose pulmonaire [69, HME à la fin de l'administration de l'aérosol.
71–73]. Bien que le rendement des nébuliseurs ultrasoniques
soit similaire à celui des nébuliseurs à membrane vibrante
en ventilation mécanique [17], leur utilisation est sujet de
débat, en raison des doutes concernant l'éventuelle déna- Remarque
turation des solutions protéiques engendrée par l'élévation
de la température dans le réservoir de ce type de nébuliseur. Placer un filtre entre la branche expiratoire et
La rareté des études comparatives, l'absence de standar- le respirateur permet de protéger les capteurs
disation (techniques d'administration aléatoires) et l'effica- de pression et de débit du respirateur contre la
cité variable des différents modèles au sein d'un même type déposition des particules expirées par le patient.
de dispositif compliquent leur comparaison. C'est surtout Préférer un filtre antibactérien de type HEPA
le respect des règles de bonne technique d'administration (high effeciency particules absorption) utilisé en
qui conditionne la réussite de l'aérosolthérapie et moins le spirométrie dont la fonction n'est pas de capter
choix du type de dispositif (débat nébuliseur pneumatique l'humidité des gaz expirés [26]. Si un filtre HME est
contre aérosol-doseur). utilisé, il est indispensable de le changer régulière-
ment (toutes les 24 h) pour éviter son obstruction,
une augmentation du travail respiratoire, voire
Technique d'administration même des conséquences dramatiques telles que
l'arrêt cardiorespiratoire du patient [75, 76].
L'optimalisation de la déposition pulmonaire d'un aérosol
Une fois ces précautions prises, la position adéquate
passe par deux attitudes complémentaires : rendre les par-
du dispositif d'aérosolisation sur le circuit ventilatoire
ticules disponibles aux poumons par des gestes simples,
et l'utilisation correcte de celui-ci sont primordiales.
jusqu'à la mise en place de conditions d'aérosolisation exi-
L'efficacité clinique des bronchodilatateurs dépend
geantes lorsque la situation (sévérité de l'atteinte respira-
simplement d'une utilisation et d'une position adé-
toire ou de la thérapie elle-même) l'impose. Dans le cadre
quate des dispositifs d'aérosolisation [77, 78].
de l'aérosolthérapie en ventilation mécanique, « le démon
est dans les détails » [74].

Disponibilité des particules aérosolisées Position adéquate des dispositifs d'aérosolisation


Avant la réalisation de l'aérosol chez les patients intubés et Définir une position idéale sur le circuit ventilatoire pour
ventilés, de simples précautions doivent être prises : chaque dispositif d'aérosolisation est compliqué car celle-
● veiller au désencombrement trachéobronchique du ci dépend de nombreux facteurs (paramètres ventilatoires,
patient par l'aspiration des sécrétions endotrachéales ; diamètre et composants du circuit, type d'humidificateur…).
372
28. Les bases de la ventilation mécanique

Expiration
Nébuliseur

Peu de particules
perdues Expi

Bias flow Inspi Réservoir


à particules optimal
Fig. 28.41
Problématique du bias flow durant une nébulisation continue (durant tout le cycle respiratoire).
À l'expiration, un débit aérien (bias flow) est maintenu dans la branche inspiratoire. De ce fait, les particules générées durant la phase
expiratoire sont perdues dans la branche expiratoire. Si le nébuliseur est positionné prêt du respirateur, la branche inspiratoire devient un
réservoir à particules qui seront inhalées à l'inspiration suivante.

A
B BF > 2L/min
C BF > 2L/min

Filtre de
Expi protection
Pièce Y

C B Inspi
BF < 2L/min BF < 2L/min

Fig. 28.42
Position adéquate des trois types de nébuliseurs disponibles en ventilation mécanique lors d'une nébulisation continue : le nébuliseur
pneumatique (A), le nébuliseur ultrasonique (B) et le nébuliseur à membrane vibrante (C).
Le nébuliseur A présente le meilleur rendement à 15 cm du respirateur, quelle que soit la valeur du bias flow (BF). Pour un BF < 2 L/min, le
nébuliseur B doit être placé à 15 à 40 cm de la pièce Y et le nébuliseur C à 15 cm de la pièce Y. Pour un BF > 2 L/min, il est recommandé de les
placer à 15 cm du respirateur pour bénéficier d'un effet réservoir optimal de la branche inspiratoire.

Lors d'une nébulisation continue (durant l'entièreté dispositif doit être placé au plus près du patient, suivant
du cycle respiratoire), le nébuliseur doit être placé loin la performance de synchronisation dispositif–respirateur
du patient pour éviter de perdre les particules émises (fig. 28.43) [60, 71, 84].
durant la phase expiratoire [79, 80]. La branche inspira-
toire agit alors comme un réservoir à particules à condi-
tion qu'elles ne soient pas chassées de celle-ci par le bias Utilisation adéquate des dispositifs d'aérosolisation
flow (fig.  28.41) [81, 82]. Le bias flow est un débit d'air L'utilisation adéquate des dispositifs est un minimum
généré par la plupart des respirateurs pour détecter la requis. Une technique inadéquate est toujours inefficace
variation de débit (trigger inspiratoire en débit) engen- (100 puffs de β2-mimétiques administrés sans précaution
drée par l'initiation de l'inspiration du patient [83]. La technique particulière chez un patient intubé sont inopé-
position adéquate sur le circuit ventilatoire dépend rants) [85]. Les nébuliseurs ultrasoniques et les nébuliseurs
majoritairement du type de dispositif utilisé, et de la à membrane vibrante sont les plus sophistiqués mais aussi
valeur du bias flow (fig.  28.42) [70, 82]. Ces positions les plus simples. Par contre, l'utilisation des nébuliseurs
semblent valables que le circuit soit humidifié ou non, pneumatiques et des aérosols-doseurs mérite d'être décrite
sur un circuit ventilatoire adulte comme sur un circuit en détail.
ventilatoire pédiatrique [81, 82]. Les aérosols-doseurs peuvent se connecter au circuit
Lors de l'utilisation d'un aérosol-doseur ou d'un dispo- ventilatoire par plusieurs types d'adaptateurs. Tous ne
sitif de nébulisation synchronisé au temps inspiratoire, le sont pas égaux en termes de délivrance pulmonaire [69].
373
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Tube endotrachéal

C Filtre de
protection
Pièce Y Expi

Raccord
annelé
A B Inspi
Fig. 28.43
Position adéquate des dispositifs d'aérosolisation synchronisés au temps inspiratoire sur le circuit ventilatoire.
L'aérosol-doseur associé à sa chambre d'expansion (A : difficile à synchroniser) et le nébuliseur pneumatique (B : mauvaise synchronisation
nébuliseur–respirateur) présentent un meilleur rendement lorsqu'ils sont positionnés sur la branche inspiratoire, à 15 cm de la pièce en Y. Le
nébuliseur Pulmonary Drug Delivery System® (C), prototype de nébuliseur à membrane vibrante qui propose une synchronisation optimale au
temps inspiratoire par un capteur de pression sur la branche inspiratoire, se connecte directement au tube endotrachéal.

1. Volume courant = 8 mL/kg PI


si possible, > 500 mL

2. Fréquence respiratoire pour


obtenir une Vminute = 8 L/min

3. Pause téléinspi de 20 % (*)


4. Rapport Ti/Ttot > 30 %
Pour obtenir un débit
inspiratoire > 30 L/min(**)

5. Sevrage précoce de la FiO2

Fig. 28.44
Paramétrage du respirateur en ventilation mécanique contrôlée.

L'utilisation de l'aérosol-doseur en association avec une Augmenter le volume de solution jusqu'à 4 mL minimum
chambre d'expansion, idéalement de forme conique, est permet d'améliorer le rendement des nébuliseurs pneuma-
fortement recommandée (fig.  28.44). Chauffer, secouer et tiques [80, 88]. Avec un nébuliseur pneumatique, les par-
synchroniser correctement l'aérosol est indispensable pour ticules d'aérosol sont générées par un gaz provenant soit
assurer les performances de l'aérosol-doseur et obtenir une d'une source murale, soit du respirateur si la fonction de
dose pulmonaire de médicaments suffisante [60, 86]. nébulisation est disponible.
Il faut savoir que déclencher l'aérosol-doseur directe- Le gaz d'une source murale est sous haute pression, le
ment à l'entrée du tube endotrachéal n'est pas conseillé débit est réglable par le clinicien (respecter 6 à 8 L/min),
car cela implique une déconnexion prolongée du patient mais génère des particules durant l'entièreté du cycle respi-
de son support ventilatoire. De plus, la majorité des parti- ratoire. Les particules générées durant la phase expiratoire
cules sont perdues, impactées sur les parois du tube endo- sont donc perdues. De plus, ce débit de gaz s'additionne
trachéal et ne sont donc pas délivrées au patient [85, 87]. à celui délivré par le respirateur ce qui peut entraîner une
L'encadré 28.2 résume les recommandations pratiques lors désynchronisation patient–respirateur et donc exige une
de l'utilisation d'un aérosol-doseur. adaptation des paramètres ventilatoires.
Les nébuliseurs pneumatiques ont un volume résiduel Le gaz fournit par le respirateur synchronise la nébulisa-
élevé, variable toutefois d'un modèle à l'autre (0,5 à 2 mL). tion à l'inspiration du patient. Provenant du respirateur, ce
374
28. Les bases de la ventilation mécanique

Une pratique exigeante lorsque


ENCADRÉ 28.2 Utilisation la situation l'impose
d'un nébuliseur pneumatique Optimaliser la déposition pulmonaire des médicaments
l Précautions : désencombrement, patient à 0°, synchro- aérosolisés en ventilation mécanique est primordiale dans
nisation patient–respirateur, paramètres ventilatoires dans certaines situations :
● augmenter les doses de bronchodilatateur si besoin,
des limites « habituelles », retirer le filtre HME proximal,
placer un filtre de protection par exemple dans l'exacerbation aiguë de la BPCO. Il faut
l Minimum 4 mL de solution médicamenteuse dans le savoir que la pratique d'une technique d'administration exi-
réservoir du nébuliseur geante, telle que décrite ci-dessous, n'influence que modé-
l Position : sur la branche inspiratoire si volume courant rément l'efficacité thérapeutique des bronchodilatateurs,
< 300 mL, près du respirateur à conditions que les paramètres ventilatoires soient dans
l Gaz propulseur :
des limites « habituelles » et que les doses soient adéquates
– préférer la synchronisation nébuliseur–respirateur si
[89–91] ;
fonction disponible sur le respirateur
● dans le cadre d'une antibiothérapie inhalée où de hautes
– sinon, source externe à 6–8 L/min (adaptation des
paramètres ventilatoires si perturbation de la ventilation) concentrations en antibiotiques sont attendues en péri-
l Tapoter le nébuliseur en cours de traitement pour phérie des poumons, au niveau du parenchyme pulmo-
réduire le volume résiduel naire infecté [68, 76, 92, 93] ;
l Enlever et nettoyer le nébuliseur ● l'administration d'autres médicaments (moins fréquents)

l Remettre en place le filtre HME proximal si besoin et nécessaires en haute concentration et/ou destinés aux ter-
enlever le filtre de protection du respirateur ritoires pulmonaires périphériques tels que la prostacycline,
l Évaluer
puissant vasodilatateur artériel pulmonaire, et l'amphotéri-
cine B dans le traitement de l'infection fongique.
Optimaliser la déposition pulmonaire passe par la mise en
place d'une technique d'administration exigeante : modifier
le paramétrage du respirateur (réglage des paramètres ven-
ENCADRÉ 28.3 Utilisation d'un tilatoires et changement du mode ventilatoire) pour viser
aérosol-doseur un pattern respiratoire cible en vue de l'aérosolthérapie,
voire même substituer le mélange O2-azote classique par
l Précautions : désencombrement, patient à 30°, synchro-
nisation patient–respirateur, paramètres ventilatoires dans un mélange O2-hélium comme gaz vecteur de l'aérosol.
des limites « habituelles », retirer le filtre HME proximal Le paramétrage du respirateur vise deux objectifs :
● limiter le phénomène d'impaction au niveau des voies
l Retirer la condensation de la chambre d'expansion

l Position : sur la branche inspiratoire, à 15 cm de la pièce Y aériennes artificielles et des voies aériennes inférieures
l Agiter, chauffer et placer l'aérosol-doseur sur la chambre proximales pour obtenir une meilleure pénétration de
d'expansion l'aérosol jusqu'aux territoires distaux. Pour cela, il faut dimi-
l Déclencher l'aérosol en phase télé-expiratoire nuer la vitesse des particules qui les entraîne hors du flux
l Agiter à nouveau l'aérosol-doseur
aérien et diminuer la turbulence du flux [49]. Les lignes de
l Attendre 30 s à 1 min d'intervalle entre chaque activation
flux désordonnées qui caractérisent le flux turbulent ampli-
l Remettre le filtre HME proximal si besoin
fient le phénomène d'impaction des particules, empêchant
l Évaluer
celles-ci d'atteindre la périphérie des poumons [94] ;
● augmenter la proportion de particules atteignant le

système respiratoire et favoriser la sédimentation des


gaz ne perturbe pas la ventilation du patient, les paramètres particules.
ventilatoires étant adaptés automatiquement par le respi- En ventilation contrôlée, il est recommandé de ventiler
rateur. La fonction de nébulisation du respirateur est à pri- le patient en mode volumétrique afin de bénéficier d'un
vilégier, à condition de s'assurer que la pression et le débit débit inspiratoire constant, permettant de diminuer la
délivrés soient suffisants pour obtenir un DAMM optimal turbulence du flux. Selon plusieurs travaux in vitro, aug-
et que la synchronisation nébuliseur–respirateur soit effi- menter le volume courant (Vt < 500 mL) [61] et allonger
cace [63, 73]. L'encadré 28.3 résume les recommandations le temps inspiratoire (rapport Ti/Ttot > 30 %) [62, 80],
pratiques lors de l'utilisation d'un nébuliseur pneumatique. tout en maintenant un débit inspiratoire faible (30–50 L/
375
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

min) [62, 95, 96], permettent d'augmenter la dose pul- tion mécanique. Le bénéfice réel d'une telle pratique sur la
monaire de médicaments. Finalement, permettre une déposition pulmonaire et sur l'impact clinique de la molé-
pause télé-inspiratoire favoriserait la sédimentation des cule aérosolisée doit être confirmé pour être recommandé
particules et donc réduirait la proportion de particules en routine.
expirées [97]. Cependant, le bénéfice réel sur la déposi- Le mélange O2–hélium (héliox) est moins dense et
tion pulmonaire d'une pause en fin d'inspiration n'est pas plus visqueux que l'O2 ou que le mélange O2–azote
encore clair. La figure 28.44 montre le pattern respiratoire [99]. Il en résulte une diminution de la turbulence du
cible à viser pour réaliser une aérosolthérapie en ventila- flux et le maintien d'un flux de type laminaire [100].
tion contrôlée [69]. Utiliser l'héliox comme gaz vecteur diminue la déposi-
En ventilation assistée, le mode conventionnel est tion de l'aérosol au niveau de la chambre d'expansion
la ventilation spontanée en aide inspiratoire (VS-AI). et du tube endotrachéal, permettant à une plus grande
L'activité respiratoire spontanée d'un patient en VS-AI quantité de médicament d'atteindre les voies aériennes
(faible volume courant, fréquence respiratoire parfois inférieures [99]. Le flux laminaire (lignes de flux orien-
très élevée) est bien souvent contraire à la stratégie ven- tées dans la même direction) permet alors une meilleure
tilatoire visée en vue de l'administration d'un aérosol. pénétration de l'aérosol au sein des voies aériennes
Dans ce cas, la marge de manœuvre du clinicien quant inférieures jusqu'aux territoires périphériques [94, 101].
au réglage des paramètres ventilatoires pour atteindre À l'inverse de l'hélium, 100 % d'oxygène est plus dense
le pattern respiratoire cible avant l'aérosol est faible. De que le mélange O2–azote et donc augmente le niveau de
plus, la VS-AI est un mode barométrique, par consé- turbulence [99]. Sevrer rapidement la fraction d'oxygène
quent caractérisé par un débit inspiratoire décélérant inspiré (FiO2) permettrait donc d'améliorer la déposition
avec un débit inspiratoire de pointe élevé. Or, ce débit pulmonaire. De plus, générer les particules d'un nébu-
inspiratoire décélérant diminue significativement la dose liseur pneumatique à l'aide d'oxygène pure améliore la
pulmonaire par rapport à un débit inspiratoire constant, performance de celui-ci [99].
type de débit inspiratoire obtenu en mode contrôlé par
la sédation du patient [59].
Certaines précautions sont à prendre lors du paramé- Points clés
trage du respirateur [98] :
● ne pas dépasser un volume courant supérieur à 8 mL/kg ■
Pour mettre en place une aérosolthérapie chez
de poids idéal pour éviter un volotraumatisme ; le patient intubé et ventilé, les « pièges » sont très
● ne pas négliger la phase expiratoire pour éviter l'ins- nombreux et le risque d'inefficacité thérapeutique
tallation d'une pression expiratoire positive intrinsèque totale de la technique est une menace réelle si les
(PEPi) ; conditions d'application ne sont pas optimalisées.
● maintenir une ventilation minute suffisante, en ven- ■
L'efficacité clinique des bronchodilatateurs
tilation contrôlée, chez des patients sensibles à l'hyper- dépend, dans la majorité des cas, d'une technique
capnie ou dans le cas d'une nébulisation prolongée d'administration correctement menée (précau-
(synchronisée) pour éviter l'hypoventilation alvéolaire tions, position et utilisation adéquate du disposi-
du patient. Il faut pouvoir augmenter la fréquence tif). Par contre, l'efficacité (effet bactéricide) des
respiratoire tout en évitant l'installation d'une PEPi. antibiotiques inhalés semble conditionnée par
Supprimer la pause télé-inspiratoire permet de pouvoir l'application de conditions de nébulisation opti-
diminuer le temps inspiratoire tout en maintenant un males, voire même exigeantes en termes de charge
débit inspiratoire faible ; de travail et de coût.
● passer d'un mode ventilatoire spontané à un mode ■
La recherche dans le domaine de l'aérosolthéra-
contrôlé exige la sédation du patient pour éviter tout pie en ventilation mécanique doit être poursuivie
inconfort respiratoire (pattern respiratoire recommandé afin de répondre aux questions fondamentales de
difficilement supportable en spontané) et donc une la déposition pulmonaire distale des antibiotiques
mauvaise synchronisation patient–respirateur [97]. Cette et du bénéfice clinique des bronchodilatateurs
pratique semble, à première vue, aller à l'encontre de la stra- et des antibiotiques, concernant l'évolution du
tégie thérapeutique en réanimation qui est de minimiser le patient (symptomatique, sevrage de la ventilation
niveau de sédation pour un sevrage précoce de la ventila- mécanique) et la mortalité.

376
28. Les bases de la ventilation mécanique

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378
28. Les bases de la ventilation mécanique

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379
Chapitre 29
Ventilation mécanique
non invasive
Olivier Contal, Pierre Delguste, Thierry Detaille, Pauline Henin, Damien
Moerman, Frédéric Thys

PLAN DU CHAPITRE
Spécificités de la ventilation
mécanique non invasive 382
Ventilation mécanique non invasive
chez l'adulte 383
Ventilation mécanique non invasive
en pédiatrie 389

Kinésithérapie respiratoire
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IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

L'origine de la ventilation mécanique (VM) se situe à la fin Bien qu'elle soit d'application depuis plus de 20 ans dans
du xviiie siècle avec l'apparition des caissons permettant le cadre de l'assistance ventilatoire au long cours d'enfants
d'assurer une assistance ventilatoire mécanique en pression atteints de maladies neuromusculaires, la VNI en réani-
négative (VPN). Ces ancêtres du poumon d'acier (fig. 29.1) mation pédiatrique n'a connu un réel essor que depuis le
représentaient donc (déjà) des modalités de ventilation début des années 2000.
mécanique non invasive (VNI). Après avoir décrit quelques généralités relatives à la VNI,
Ce n'est que dans les années 1950 qu'est née la ventila- le présent chapitre s'attachera successivement à l'analyse
tion mécanique en pression positive par trachéotomie, dans des indications, spécificités et résultats de la VNI chez des
le cadre des grandes épidémies de poliomyélite. À cette patients adultes et pédiatriques au cours de l'insuffisance
époque, l'efficacité et la relative facilité de mise en œuvre de respiratoire aiguë et lors de la ventilation au long cours.
la VM par trachéotomie et ensuite via tube endotrachéal
ont fait disparaître la VPN des services de réanimation.
C'est au début des années 1960 que l'on voit apparaître Spécificités de la ventilation
les premières expériences de VNI en pression positive
intermittente, tant dans des indications de longue durée mécanique non invasive
[1] qu'en réanimation médicale, au bénéfice de patients
en décompensation de BPCO [2]. Dans cette dernière Le problème majeur lié à l'absence de protection des voies
indication, la VNI a été abandonnée en raison des progrès aériennes est le risque de fausse déglutition et son cortège
réalisés dans la conception des interfaces invasives (tubes de complications. Ainsi, quel que soit le cadre dans lequel
et canules de trachéotomie) et du fait de l'absence de res- une VNI est envisagée, l'impossibilité d'assurer une protec-
pirateurs adaptés à la VNI en situations aiguës. tion des VA (déficit de déglutition, coma, troubles digestifs
Dans ses indications de longue durée au bénéfice de majeurs…) représente la contre-indication principale et
patients en insuffisance respiratoire chronique d'origine absolue à la VNI. Les autres contre-indications, dont il sera
neuromusculaire (poliomyélite, myopathies, tétraplégies fait état dans la suite de ce chapitre, tiennent plus à l'inef-
traumatiques…), la VNI n'a cessé de se développer, tant ficacité de la VNI dans divers types de pathologies qu'à ses
en Amérique du Nord qu'en Europe [3, 4]. C'est dans ce dangers.
cadre qu'elle a démontré son efficacité et a permis la mise En phase aiguë, le recours à la VNI présente un certain
au point d'un matériel de mieux en mieux adapté aux spé- nombre d'avantages par rapport à la ventilation invasive
cificités de la VNI [5]. (VI). C'est dans la prévention des complications liées à l'in-
Au début des années 1990, la VNI fait son retour dans les tubation et à la trachéotomie que la VNI trouve sa première
services de réanimation et d'urgence, cette fois probable- justification.
ment pour ne plus les quitter [6]. Malgré les progrès incontestables réalisés dans la mise
au point de canules de trachéotomie et tubes endotra-
chéaux, la VM par méthodes invasives est grevée d'un
certain nombre de complications en termes d'infections
nosocomiales [7, 8] et de lésions traumatiques locales [9].
L'incidence de ces pathologies associées est largement
diminuée en VNI [10].
En opposition à la ventilation invasive, deux points
doivent toutefois être pris en compte lors de la mise en
place d'une ventilation non invasive.

Absence de protection
des voies aériennes
Le problème majeur lié à cette absence de protection des
voies aériennes est le risque de fausse déglutition et son
Fig. 29.1 cortège de complications. Ainsi, quel que soit le cadre dans
Poumon d'acier. Respirateur destiné à la ventilation en pression lequel une VNI est envisagée, l'impossibilité d'assurer une
négative périthoracique. protection des VA (déficit de déglutition, coma, troubles
382
29. Ventilation mécanique non invasive

digestifs majeurs…) représente la contre-indication princi- À l'heure actuelle, la grande majorité des VM instaurées
pale et absolue à la VNI. Les autres contre-indications dont au long cours le sont par VNI : par masque nasal dans une
il sera fait état dans la suite de ce chapitre tiennent plus à majorité des cas, mais également par masque nasobuccal et
l'inefficacité de la VNI dans divers types de pathologies qu'à par voie buccale. Cette VNI peut se voir instaurée en mode
ses dangers. barométrique, à deux niveaux de pression positive (VNI-2P)
ou en mode volumétrique.

Maintien de la fonction des voies


aériennes supérieures (VAS) Ventilation mécanique
Les rôles d'humidification et de réchauffement des gaz
non invasive chez l'adulte
respiratoires sont conservés, au moins partiellement
durant la VNI, mais c'est dans la fonction des cordes Objectif de la ventilation
vocales que se situe la différence majeure entre VNI et mécanique non invasive
VM invasive.
La phonation, incluant ses impacts positifs sur la colla- La VNI en milieu hospitalier lors d'une décompensation
boration et le stress du malade, est possible en dehors des respiratoire aiguë présente certaines particularités compa-
périodes de VM. rativement à la mise en place de la VNI en phase chronique.
La fermeture glottique, phase indispensable du méca- Les objectifs et les moyens sont différents d'une situation à
nisme de toux, est maintenue alors que via un tube l'autre. La différence principale est certes le contexte hospi-
endotrachéal ou une canule de trachéotomie, seules des talier où, lors de la mise en place d'une VNI en phase aiguë,
expirations forcées sont envisageables. un personnel formé et présent en continu et un monito-
Durant l'éveil mais, surtout, durant le sommeil sous VNI, rage précis du patient sont requis. La VNI au long cours
les cordes vocales peuvent être le siège de modifications impose également une implication du patient ou de son
importantes du calibre des voies aériennes. Ainsi, l'adduc- entourage. De même, l'évaluation de la qualité de la venti-
tion des cordes vocales peut aller jusqu'à provoquer des lation se fera avec d'autres objectifs et outils comparative-
apnées obstructives durant le VNI [11]. Ce phénomène ment à la VNI en situation chronique. Nous allons dans ce
explique en partie les grandes variations observées parfois chapitre distinguer les deux situations.
entre l'efficacité d'une VNI durant le sommeil par rapport à
l'éveil du patient. Ventilation mécanique
Par ailleurs et sans que ce ne soit clairement étayé dans
la littérature, il est évident que la possibilité de recourir à non invasive en situation aiguë
la VNI a pour effet d'inciter l'urgentiste ou le réanimateur
à mettre en œuvre beaucoup plus rapidement une VM
Généralités
chez un patient en décompensation aiguë de BPCO, par Avant de débuter une VNI par voie non invasive, il faut que
exemple. les conditions suivantes soient respectées : personnel formé
L'utilisation de la VNI pour les patients IRC (insuffi- et avec une expérience en CPAP ou en VNI, disponibilité
sance rénale chronique) implique également de nom- 24 h/24, accès rapide à l'intubation endotrachéale, monito-
breux avantages. À son origine, l'assistance ventilatoire rage adéquat.
au long cours fut instaurée chez des patients présentant L'établissement de protocoles locaux est nécessaire
des séquelles de poliomyélite. Il s'agissait alors d'une VPN pour identifier précocement les patients non répondeurs
par poumons d'acier. Les années 1960 virent les premières et éviter ainsi un délai délétère à l'intubation [13, 14]. Les
installations à domicile de VM en pression positive par indications absolues d'intubation endotrachéale contre-
trachéotomie et les indications se diversifièrent (myopa- indiquent les supports non invasifs. Le respect des contre-
thies, cyphoscolioses, tétraplégies traumatiques, hypo- indications à la VNI s'impose (encadré 29.1) [15].
ventilations centrales primitives…) [12]. Le masque facial (ou nasobuccal) est le plus souvent
Les premières publications faisant état d'expériences de adapté aux situations d'insuffisances respiratoires aiguës.
VM au long cours en pression positive par méthode non Toutefois, par son expérience technique, le kinésithérapeute
invasive, au masque nasal, datent du début des années peut jouer un rôle fondamental dans le choix d'autres types
1990 [5]. d'interfaces.
383
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Indications
ENCADRÉ 29.1 Contre-indications La VNI en phase aiguë trouve son indication de choix dans
de la ventilation non invasive la décompensation respiratoire du patient BPCO [16].
d'après la conférence Parmi les nombreuses autres indications possibles, les plus
fréquentes sont brièvement décrites ci-dessous.
de consensus internationale [61]
l Arrêt cardiaque ou respiratoire Œdème pulmonaire aigu cardiogénique (OAPc)
l Défaillance d'organe autre que respiratoire :
Dans cette indication, plusieurs études ont été menées et
− encéphalopathie sévère (GCS < 10)
confirment l'efficacité de la CPAP dans cette pathologie.
− saignement digestif haut sévère
− instabilité hémodynamique ou arythmie cardiaque Son utilisation diminue le taux d'intubation et améliore
sévère la survie des patients, y compris dans la population géria-
l Chirurgie faciale, traumatisme ou déformation trique. Il n'existe pas d'arguments suffisants pour proposer
l Obstruction des voies aériennes supérieures dans cette indication le recours à la VNI-2P, même en pré-
l Impossibilité de coopération et/ou de protection des sence d'un OAPc hypercapnique (tableau 29.1) [17–23].
voies aériennes supérieures
l Impossibilité de drainer les sécrétions respiratoires

l Risque élevé d'inhalation À retenir

Recommandations pratiques OAPc :



toujours CPAP devant un OAPc de gravité
moyenne à sévère

CPAP si OAPc peu sévère initialement non amé-
ENCADRÉ 29.2 Principales lioré par un traitement médical adapté
essai VNI-2P si échec de la CPAP
complications potentielles

de la VNI-2P Exacerbation de BPCO


l Claustrophobie
l Escarres
L'intérêt de l'utilisation précoce de la VNI-2P au cours des
l Conjonctivites décompensations aiguës de BPCO dans les services des
l Dilatation gastrique urgences a été validé par un certain nombre d'études pros-
l Fausse déglutition pectives randomisées contrôlées [24–28]. L'application
l Espace mort augmenté précoce de la VNI-2P améliore les paramètres cliniques,
l Sécheresse de la sphère ORL diminue les recours à la ventilation invasive, la morbidité et
la durée de séjour hospitalier. Les patients avec un pH arté-
riel inférieur à 7,30 semblent être les meilleurs bénéficiaires
de cette approche (tableau 29.2) [29].
Une surveillance clinique stricte avec une mesure
répétée de la fréquence respiratoire et de la pression
artérielle ainsi qu'un monitorage de la fréquence car-
À retenir
diaque et de l'oxymétrie de pouls est nécessaire surtout ■
Exacerbation aiguë de BPCO : recommandations
lors de l'initiation de la technique. En VNI-2P, le volume
pratiques
courant expiré, les fuites et la détection de l'asynchro- ■
VNI-2P en première intention surtout si pH
nisme font également partie du monitorage à réaliser.
< 7,35
On réservera les contrôles gazométriques à l'absence
d'amélioration clinique, lors du processus de décision
Projet thérapeutique limité
d'arrêt de la technique ou lors de changements des
paramètres du ventilateur ou de la FiO2. On surveillera Chez des patients pour lesquels l'intubation trachéale ne
et préviendra la survenue des complications potentielles semble pas acceptable (pronostic à court terme péjoratif
de ces techniques (encadré 29.2). suite à une pathologie associée, âge très avancé, refus de

384
29. Ventilation mécanique non invasive

Tableau 29.1 Principaux effets respiratoires et hémodynamiques de la CPAP dans l'œdème pulmonaire aigu cardiogénique
Conséquences Effet CPAP Mécanismes
Diminution de la capacité Augmentation CRF – Recrutement alvéolaire
résiduelle fonctionnelle – Lutte contre l'occlusion des bronchioles terminales
– Redistribution liquidienne vers interstitium
Augmentation du travail – Diminution des résistances expiratoires Idem
ventilatoire – Diminution du travail ventilatoire
– Diminution du gradient pression
télé-inspiratoire/télé-expiratoire
Diminution de la compliance Augmentation de la compliance Recrutement alvéolaire
Diminution de l'oxygénation Amélioration de l'hématose – Amélioration de la diffusion alvéolaire de l'oxygène
tissulaire – Diminution du shunt intrapulmonaire
– Redistribution de la perfusion pulmonaire
Altérations hémodynamiques Amélioration de l'index cardiaque et – Diminution des précharge et post-charge gauche
systolique ssi c. congestive – Diminution de la pression transmurale
– Amélioration de l'oxygénation

Tableau 29.2 Principaux effets de la VNI-2P dans l'exacerbation aiguë d'une BPCO


Conséquences Effet VNI-2P Mécanismes
Hyperinflation et auto-PEEP Pression expiratoire positive contrecarrant – Diminution du gradient pression en
les effets délétères proto-inspiratoire
– Diminution de l'effort inspiratoire
– Déclenchement du trigger inspiratoire facilité
Diminution du volume Par adjonction, aide inspiratoire : amélioration – Augmentation du volume courant
courant–acidose respiratoire de la performance à l'effort inspiratoire – Diminution de la fréquence respiratoire
– Élimination accrue du gaz carbonique
– Meilleure oxygénation musculaire

l'intubation par le patient ou sa famille), le taux global de s'envisager que comme dernier recours avant l'intubation
succès des supports non invasifs est de 60 à 70 %, surtout endotrachéale et dans des conditions de sécurité optimali-
s'il existe une hypercapnie préexistante [30–32]. sées (équipe experte) [34–39].
Il est donc légitime d'envisager cette alternative avec le Sous ces conditions, elle pourrait éviter un recours à la
patient et sa famille. Le projet thérapeutique doit être dis- ventilation invasive.
cuté et anticipé avec la famille et son entourage [33].
Décompensation respiratoire
À retenir et syndrome d'obésité hypoventilation

Projet thérapeutique limité : recommandations L'augmentation de la prévalence de l'obésité [40] conduit
pratiques naturellement a une très forte augmentation du nombre de

Dans l'arsenal thérapeutique, les supports non patients hospitalisés pour une décompensation respiratoire
invasifs peuvent être envisagés aiguë due à un syndrome d'obésité hypoventilation (SOH)
[41]. L'initiation de la VNI chez cette population obtient la
même efficacité que chez les patients BPCO avec de meil-
Asthme aigu grave
leurs résultats à long terme en ce qui concerne la mortalité
Dans ce contexte, l'utilisation de la VNI-2P est controver- et rencontre significativement moins de complications et
sée et mérite des recommandations strictes. Elle ne peut échecs de la VNI en phase aiguë [41].

385
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Ventilation mécanique non invasive Ainsi, dans une majorité de cas, l'histoire naturelle de la
maladie est relativement bien connue et une surveillance
en situation chronique clinique régulière permet de dépister à temps les signes de
Indications défaillance respiratoire, de poser l'indication de VM élective
et d'instaurer le traitement « à froid » et dans les meilleures
Théoriquement, toute insuffisance respiratoire chronique conditions possibles.
(IRC) associée à une hypercapnie chronique est susceptible Sans entrer dans les détails, précisons que, du fait des
de représenter une indication de ventilation non invasive adaptations physiologiques normales liées au sommeil
au long cours (VNILC). Ainsi, quelques équipes ont proposé (modification du contrôle ventilatoire central, diminution
l'instauration d'une VM chez des patients BPCO très gra- du tonus musculaire…), l'évaluation du sommeil et son
vement atteints [42]. Cette indication est cependant fort influence sur la respiration des patients sont au centre de
contestée, notamment parce que cette stratégie thérapeu- la prise en charge des malades candidats potentiels à une
tique n'a, jusqu'à présent, pas démontré sa supériorité par VNILC (oxymétrie nocturne, polysomnographie).
rapport à l'oxygénothérapie de longue durée en termes de Chez un patient IRC restrictif par déficit de la pompe
survie et de qualité de vie des malades. respiratoire et donc, en principe, « à poumons sains », l'ob-
C'est très clairement dans l'IRC d'origine restrictive (dimi- jectivation de périodes de désaturations en oxygène (SvO2)
nution de la CPT) qu'il faut trouver les indications princi- durant le sommeil représente actuellement la condition
pales et incontestées de la VNILC. Ce tableau clinique se nécessaire et suffisante à l'instauration d'une VM (noc-
retrouve dans la plupart des maladies responsables d'un turne) au long cours.
déficit important de la pompe respiratoire : À l'heure actuelle, la grande majorité des VM instaurées
● système nerveux :
au long cours le sont par VNI : par masque nasal dans une
– hypoventilation centrale primitive (maladie d'Ondine), majorité des cas, mais également par masque nasobuccal
– atteinte du tronc cérébral, et par voie buccale.
– tétraplégie traumatique haute, La qualité de la VNI se fera sur différents critères. Sans être
– paralysie phrénique, exhaustif, le clinicien prendra en compte un ensemble de
– amyotrophie spinale ; paramètres qui peuvent aller du plus simple au plus compli-
● muscles respiratoires :
qué : examen clinique (échange entre le clinicien et le patient),
– dystrophies musculaires, éventuellement téléchargement des données enregistrées par
– myopathies ; le ventilateur (afin d'objectiver le nombre d'heures d'utilisation
● thorax : cyphoscoliose ;
et la présence de fuites non intentionnelles), une oxymétrie
● plèvre :
nocturne (pour s'assurer de l'absence de désaturation), une
– pachypleurite, capnographie (pour s'assurer de la correction de la ventilation
– séquelles de tuberculose ; du patient au cours du sommeil), une polysomnographie (qui
● + syndrome d'hypoventilation de l'obèse.
est actuellement l'examen le plus complet pour déterminer la
qualité de la ventilation du patient) [43].
But Nous considérons ici l'instauration d'une VNILC élective.
On peut classer selon deux groupes les circonstances de Selon les pays, les services hospitaliers mais, surtout, les
mise en œuvre de VM au long cours : les indications « élec- niveaux de compétences et la place occupée par les kinési-
tives » et celles « de nécessité ». thérapeutes au sein des équipes, le rôle du kinésithérapeute
Par VM « de nécessité », on entend la mise en œuvre dans le processus de VM au long cours peut être très diffé-
d'une VM (quelle que soit la méthode) devenue indispen- rent. Certains se bornent à une mission d'adaptation et de
sable à la survie du malade, à court ou moyen terme. Il s'agit surveillance des interfaces, d'autres sont impliqués dans la
dans ce cas, soit de patients ayant nécessité une VM suite surveillance et le suivi de la tolérance au traitement, d'autres
à une décompensation aiguë et chez lesquels un sevrage encore occupent une place centrale et, tout en se référant
respiratoire complet s'est avéré impossible, soit de malades au médecin prescripteur, disposent d'une très large auto-
ayant évolué vers une hypercapnie chronique durant l'éveil. nomie dans le choix des modalités ventilatoires mises en
La stratégie actuelle de suivi des personnes à risque d'IRC œuvre, le réglage des paramètres du respirateur, l'adaptation
restrictives graves tente de prévenir les complications liées du malade à la machine et son suivi à court et long terme.
à cette IRC et, donc, d'éviter l'obligation de recourir à une En règle générale, dans notre expérience clinique, la
VM de nécessité. mise en œuvre, l'adaptation et le contrôle d'efficacité d'une
386
29. Ventilation mécanique non invasive

ENCADRÉ 29.3 Information et prise


de contact du patient
avec le matériel
l Choix du mode ventilatoire et de l'interface
l Essais diurnes (patient éveillé)
l Contrôles de tolérance

l Essais nocturnes sous surveillance clinique et oxymé-

trique
l Apprentissage à l'autonomie par rapport à la VNI

l Contrôle final d'efficacité par capnographie et ou

poly(somno)graphie
l Retour à domicile

l Contrôle de tous les aspects pratiques de la VNI à domicile Fig. 29.2


Respirateur de type volumétrique destiné à la VM au long cours
à domicile.

VNILC nécessite une semaine d'hospitalisation pour le


patient. Les phases du processus mis en place peuvent être
résumées comme suit dans l'encadré 29.3.

Type de ventilateurs
Les ventilateurs dédiés à la VNI ont beaucoup évolué ces
dernières années tant en soins intensifs que pour les appa-
reils dédiés la ventilation au long cours.
En situations aiguës, en urgence ou en réanimation, les
modes ventilatoires utilisés en VNI sont majoritairement de
type barométriques (AI, VNI-2P…).
Concernant les appareils dédiés aux SI des modules
spécifiques sont apparus sur les ventilateurs. Malgré des
performances mécaniques bien supérieures aux ventila- Fig. 29.3
teurs de domicile [44], il est plus difficile d'avoir une bonne Respirateur « multifonctions » destiné tant à la VM au long cours
qu'à la VNI en milieu hospitalier.
synchronisation entre le patient et le ventilateur avec ce
type d'appareils [45], certainement par la difficulté pour ces
appareils à compenser les fuites. compétences des personnes impliquées que sur de réelles
Jusqu'il y a quelques années, la VM instaurée chez les supériorités objectives de l'une ou l'autre alternative.
patients atteints de maladies neuromusculaires par exemple
était toujours de type volumétrique. Les respirateurs mis au Ventilation mécanique « à fuites »
point pour un usage de longue durée à domicile étaient
tous des appareils de cette famille (fig. 29.2). Depuis l'arrivée Que la voie d'abord soit nasale, nasobuccale ou buccale,
récente sur le marché de respirateurs polyvalents pouvant elle sous-entend pratiquement toujours que la VNI est une
fonctionner tant en mode barométrique que volumétrique modalité ventilatoire « à fuites » : fuites autour de l'inter-
et particulièrement souples à l'emploi, tant pour les soi- face ou fuites buccales ou nasales [47]. Cette caractéris-
gnants que pour les patients (fig. 29.3), les choses ont bien tique peut réduire certains risques de complications liées
changé. La règle selon laquelle la VM volumétrique est le à la VM en pression positive par exemple, mais rend par
« maître choix » pour la VNILC des malades neuromuscu- contre la VNI potentiellement moins efficace que la VM
laires est devenue obsolète. Tous les modes ventilatoires par méthodes invasives. Elle réclame en tout état de cause
peuvent s'avérer efficaces et bien tolérés par les patients [46] une surveillance très stricte quant à l'efficacité de la VM en
et les modalités choisies reposent plus sur les habitudes et toutes circonstances, notamment durant le sommeil.
387
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Cette ventilation mécanique « à fuites » justifie également d'équipes pluridisciplinaires situent le rôle principal du
souvent le choix de la voie nasobuccale et l'utilisation de res- kinésithérapeute dans la VNI.
pirateurs capables de compenser les fuites de façon optimale. On distingue deux catégories de masques : les masques
sans fuites sont adaptés aux respirateurs à valve expiratoire ;
Modalités ventilatoires les masques présentant des fuites intentionnelles sont des-
tinés aux respirateurs fonctionnant sans valve expiratoire.
Il n'existe pas de différences notoires entre les modes venti- Toutefois ces fuites intentionnelles vont avoir des caracté-
latoires applicables à la VNI et ceux utilisés en VM invasive. ristiques différentes et spécifiques à chaque masque. Ceci
Il s'agit de la ventilation mécanique en pression positive peut avoir des répercussions sur la pressurisation de venti-
intermittente de type volumétrique (VC ou VAC) et la lateur mais également sur les capacités de synchronisation
VM barométrique représentée par diverses modalités très respirateur–patient [50].
proches les unes des autres (AI, pressure support, VNI-2P,
ventilation en pression contrôlée…) [48]. Masque nasal
Signalons que, le plus souvent, les modes ventilatoires
En ventilation au long cours, le masque nasal est le choix
utilisés en VNI sont de type « assisté », faisant de la VNI une
de première intention. En effet, cette modalité peut se révé-
technique d'assistance ventilatoire « partielle ». Par ailleurs,
ler efficace en toutes circonstances, est la moins lourde à
le choix entre les modes barométriques et volumétriques
supporter par le malade et minimise les complications
repose essentiellement sur l'expérience et les compétences
(fig. 29.4). Des dizaines de modèles et de tailles sont actuel-
particulières des équipes de soins [49].
lement disponibles sur le marché et ne justifient plus que
très rarement le recours à des masques moulés.
Kinésithérapeute et respirateur La VM par masque nasobuccal ou facial peut être envi-
sagée et est même parfois indispensable lorsqu'il est impos-
Dans ce contexte, il importe au kinésithérapeute d'avoir une
sible de gérer efficacement les fuites buccales durant la VM.
parfaite connaissance du type de ventilateurs qui est utilisé
Il faut cependant savoir que le port d'un masque facial n'est
pour un patient donné. Chaque ventilateur possède ses spé-
pas exempt de dangers (en cas de vomissements, panne
cificités que ce soit le type de trigger utilisé, le nom des modes
de respirateur…) et qu'il est impératif pour le patient de
ventilatoires, le fonctionnement des consignes de cyclages, etc.
pouvoir s'en dégager en quelques instants.
Un point essentiel ne doit jamais laisser de place au doute.
Le kinésithérapeute doit savoir, en fonction du ventilateur uti-
lisé, si le fonctionnement de l'appareil se fait avec fuite inten- Masque nasobuccal
tionnel ou si la phase expiratoire se fait par l'intermédiaire Dans une proportion importante de VNI instaurées en
d'une valve expiratoire. Ceci afin d'éviter la ventilation d'un situations aiguës, la voie nasobuccale se révèle indispen-
patient sans présence de fuite intentionnelle par exemple, ce sable et représente même la norme. Il en va de même dans
qui aurait pour conséquence une ré-inhalation du dioxyde de
carbone expiré et une augmentation du travail respiratoire.
De nombreux phénomènes peuvent altérer le bon fonc-
tionnement de la ventilation chez un patient.

Interfaces respirateur–patient en
ventilation mécanique non invasive
La particularité principale de la VNI est l'utilisation d'une inter-
face non invasive et plus particulièrement d'un masque. Tant
dans le choix du matériel que dans sa mise en œuvre, il faut
tenir compte des spécificités de la VNI telles que décrites p. 382.

Types de masques
C'est au niveau du choix de l'interface, de son adaptation Fig. 29.4
et de la surveillance de sa tolérance qu'un grand nombre Masque nasal.

388
29. Ventilation mécanique non invasive

une minorité d'indications de VM au long cours, chez cer- personnes sont en ventilation au masque durant le som-
tains patients myopathes par exemple (fig. 29.5). meil et utilisent l'embout buccal durant la journée, ce qui
leur permet de parler et de se nourrir. Souvent cette moda-
lité réclame quelques modifications des réglages mais, sur-
tout, nécessite des adaptations très efficaces et sûres quant
à l'accès à l'embout buccal par des patients généralement
tétraplégiques fonctionnels.

Ventilation mécanique
non invasive en pédiatrie
Introduction
Développée initialement pour le support ventilatoire au
long cours de pathologies respiratoires chroniques comme
Fig. 29.5 l'insuffisance respiratoire progressive des neuromyopathies
Masque nasobuccal (facial). ou le syndrome d'apnée du sommeil, la VNI est régulière-
Il s'agit ici d'un masque « sans fuites » destiné à la VM par respirateur ment appliquée en situation aiguë dans nos unités de soins
doté d'une valve expiratoire.
intensifs, adultes et pédiatriques. Malgré une littérature
croissante, la justification de l'utilisation de la VNI en pédia-
Voie buccale trie n'est actuellement supportée que par des descriptions
de cas isolés ou de petites séries.
La voie buccale « à la pipette » (fig. 29.6) représente une inter-
Les particularités respiratoires de l'enfant, à savoir
face très intéressante pour les patients nécessitant de nom-
notamment un rapport compliance de la cage thora-
breuses heures de VM quotidienne [51]. Généralement, ces
cique/compliance pulmonaire plus élevé, une moindre
surface disponible pour les échanges gazeux, des résis-
tances vasculaires pulmonaires plus élevées chez l'enfant
en bas âge, une fatigabilité diaphragmatique plus impor-
tante et une immaturité du contrôle central chez le nour-
risson, rendent difficile l'application en bloc des données
adultes à l'enfant.
Nous allons tenter de résumer les objectifs, indications,
contre-indications et modalités de la VNI comme support
respiratoire aigu chez l'enfant.

Effets physiologiques
Effets respiratoires
L'instauration d'une ventilation en pression positive permet
de restaurer une capacité résiduelle fonctionnelle adéquate
dans des pathologies où la perte de volume pulmonaire
prédomine. Le recrutement alvéolaire ainsi obtenu amé-
liore la compliance pulmonaire, optimise les échanges
gazeux au niveau capillaire et diminue les shunts intra-
Fig. 29.6 pulmonaires. L'application d'une pression positive tout au
Ventilation de type volumétrique par « pipette buccale ». long du cycle respiratoire permet de contrecarrer l'effet de
Notez le système de fixation de l'embout buccal au cou du patient. la PEP intrinsèque. L'utilisation de deux niveaux de pression
389
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

est ­responsable d'une diminution du travail respiratoire Indications


de l'enfant, ainsi que d'une amélioration de la ventilation
minute. La VNI permet ainsi de soutenir une dynamique L'intérêt pour la VNI dans le cadre pédiatrique est grandis-
respiratoire altérée. sant. En effet, celle-ci apparaît, au vu de l'essor des publica-
tions la concernant, comme un outil prometteur dans la
Effets hémodynamiques prise en charge des pathologies respiratoires aiguës de l'en-
fant. Cependant, les indications pédiatriques de la VNI sont
Il ne faut pas banaliser les effets cardiovasculaires de la VNI. très peu basées sur l'évidence suite au manque d'études cli-
L'application d'une pression positive intrathoracique est niques randomisées dans ce domaine. Certaines indications
responsable d'une diminution de la précharge ventriculaire peuvent tout de même être mises en avant.
droite et gauche qui peut engendrer une baisse significa-
tive du débit cardiaque. Celle-ci peut dans certains cas être Bronchiolite
contrecarrée par la diminution de la post-charge ventricu-
laire gauche liée à la diminution de la pression transmurale. Théoriquement, l'application d'une PEP via l'usage d'une
L'effet de la VNI sur la FC et la pression artérielle est variable, VS-PEP permettrait d'une part d'éviter le collapsus expi-
en fonction des réponses respiratoires et hémodynamiques. ratoire par maintien de la perméabilité des petites voies
aériennes et d'autre part de réduire le travail inspiratoire
Autres effets nécessaire pour contrecarrer la PEP intrinsèque [54]. En
pratique, une étude randomisée a démontré une dimi-
La VNI peut être responsable d'une augmentation de la nution significative de la PaCO2 suite à l'application d'une
pression intracrânienne secondaire aux répercussions de la VS-PEP et cela d'autant plus qu'elle est appliquée préco-
pression thoracique positive sur le retour veineux cérébral cement [55]. La VS-PEP permet également de diminuer
et au possible inconfort de la technique. l'effort inspiratoire mais aussi de réduire les résistances
à l'expiration rendant l'effort expiratoire quasiment nul
[56]. La littérature démontre donc que la VNI, dans le
Pourquoi la ventilation non invasive cadre de la bronchiolite, mérite d'être tentée en première
chez l'enfant ? intention.
Chez l'enfant comme chez l'adulte, les complications
traumatiques liées à l'insertion d'une sonde d'intubation
État de mal asthmatique
ne sont pas rares [8]. L'œdème de glotte post-extubation Dans le cadre de l'état de mal asthmatique, l'usage de la
est responsable d'un nombre important de réintubations. VNI est largement controversé notamment par les consé-
L'apparition d'une sténose laryngée acquise peut engendrer quences théoriquement néfastes de la PEP qui apparaît
une morbidité significative. La VNI, en raison de l'absence comme une pression supplémentaire à vaincre et qui, dès
de corps étranger intratrachéal, n'expose pas à ce genre de lors, réduit la pression expiratoire motrice [57]. Cependant,
complications. une étude réalisée sur 83 enfants présentant un asthme
Le caractère moins invasif de la VNI permet, par opposi- réfractaire au traitement pharmacologique conventionnel a
tion avec la ventilation sur sonde endotrachéale, une appli- permis de montrer une diminution de la fréquence respira-
cation intermittente, le masque pouvant être retiré plus ou toire ainsi qu'une amélioration de la SaO2 chez les patients
moins régulièrement. Ce caractère intermittent permet une mis sous VNI-2P [58]. Une étude cross-over randomisée
meilleure communication entre l'enfant et son entourage, comparant un programme de traitement standard (O2, β2-
une sédation souvent moins importante et même une ali- agonistes, corticostéroïdes) à un programme de 2 heures
mentation orale. de VNI couplé à la thérapie standard a démontré une amé-
L'absence de sonde endotrachéale et la sédation lioration significative du score clinique d'asthme suite à la
moindre des patients permettent de conserver intacts les période de VNI, alors qu'aucune amélioration de ce genre
mécanismes de protection des voies respiratoires, en parti- n'avait été observée lors de la période de thérapie standard
culier la toux et la déglutition. [59]. Les inquiétudes théoriques liées à la PEP extrinsèque
Les avantages potentiels de la VNI par rapport à la ven- ne semblent donc pas se refléter dans la pratique clinique
tilation conventionnelle pourraient être responsables d'un relatée dans les études. La VNI-2P apparaît dès lors comme
moindre coût financier en médecine pédiatrique, comme un adjuvant efficace et sécurisé au traitement médicamen-
cela a été montré en pathologies adultes [52, 53]. teux conventionnel de l'état de mal asthmatique.
390
29. Ventilation mécanique non invasive

Complications respiratoires turne lorsque les critères ci-dessus sont présents pendant
postopératoires la journée [66]. La VNI au long cours améliore surtout la
survie et la qualité de vie de l'enfant et de sa famille. Elle
Une analyse rétrospective de l'usage de la VNI-2P chez permet aussi de corriger les échanges gazeux, de favoriser
des enfants présentant des atélectasies postopératoires la qualité du sommeil et de réduire la fréquence des hos-
dans le décours d'une chirurgie cardiaque a montré une pitalisations chez l'enfant neuromusculaire. Elle pourrait
différence significative de tous les paramètres étudiés également jouer un rôle dans la croissance pulmonaire
(FiO2 nécessaire, PaCO 2, SpO 2 et fréquence respiratoire) et dans le maintien de la fonction pulmonaire [67–72].
[60]. Cependant, elle pourrait connaître ses limites en l'absence
L'usage de la VNI-2P dans le cadre de la transplantation de contrôle bulbaire et de troubles de la déglutition [73].
hépatique a également été étudié et a montré un taux de Malgré ses nombreux bénéfices, la VNI au long cours
réintubations pour cause de complications respiratoires reste un sujet éthique difficile, particulièrement chez les
significativement plus faible pour les enfants mis sous enfants très jeunes.
VNI [61]. Cette étude a aussi démontré une stabilisation
des paramètres respiratoires (PaCO2 et SpO2), ainsi qu'une Mucoviscidose
prévention de l'aggravation des atélectasies suite à l'usage
d'une VNI. Une étude française a rapporté que la VNI était le plus
La VNI-2P semble donc avoir sa place en postopératoire souvent utilisée, comme traitement de première intention,
chez l'enfant, notamment dans le cadre de la chirurgie car- dans le décours d'une décompensation respiratoire avec
diaque et de la transplantation hépatique. Sa recommanda- hypercapnie sévère. La VNI au long cours est ensuite pro-
tion dans la littérature actuelle concerne essentiellement la posée à la sortie des soins intensifs en cas d'hypoxémie et/
présence d'atélectasies [62]. ou d'hypercapnie nocturne [74].

Prophylaxie Obstruction des voies aériennes


Une étude a comparé l'application d'une VNI-2P immédia-
supérieures (VAS)
tement après l'extubation d'enfants à risque de complica- Au niveau des voies respiratoires hautes, l'application
tions à celle d'enfants développant une détresse respiratoire d'une pression positive permet de contrecarrer le col-
dans les 48 heures post-extubation. Les résultats suggèrent lapsus inspiratoire rencontré dans un certain nombre
que la VNI prophylactique en post-extubation semble être de pathologies des VAS (laryngomalacie, trachéo-
utile afin d'éviter la réintubation chez les enfants à risque malacie, œdème laryngé post-extubation), assez fré-
lorsqu'elle est appliquée immédiatement après l'extuba- quentes en pédiatrie et responsables d'un syndrome
tion [63]. obstructif [75].
Une étude menée sur dix enfants a permis d'évaluer
Pathologies neuromusculaires l'efficacité de la ventilation spontanée avec PEP (VS-PEP)
comprise entre 8 et 12 cmH2O dans les obstructions des
Les complications respiratoires sont une cause majeure de
VAS. Les auteurs rapportent une diminution de la fré-
morbidité et de mortalité dans les maladies neuromuscu-
quence respiratoire, du Ti/Ttot et de tous les paramètres de
laires. Les premiers symptômes chez les enfants peuvent
l'effort respiratoire en VS-PEP par rapport à la ventilation
apparaître dès la naissance, ils sont souvent présents dans
spontanée [76].
l'amyotrophie spinale. La forme la plus sévère peut entraî-
ner le décès dans la première année de vie. La majorité des
patients atteints d'une dystrophie musculaire de Duchenne Appareillage
présentent pour leur part des problèmes respiratoires à
partir de l'adolescence [64]. Le matériel nécessaire à la réalisation de la VNI est le géné-
La VM nocturne devrait être instaurée en présence rateur de pression et l'interface faciale.
d'une hypoventilation durant le sommeil (PaCO2 > L'utilisation de la VNI en pédiatrie nécessite une atten-
50  mmHg) accompagnée d'une désaturation (SaO2 < tion toute particulière en ce qui concerne le matériel utilisé.
92 %) ou lors de nombreuses hospitalisations pour pneu- En effet, une des difficultés rencontrées chez l'enfant est
monie ou atélectasies [65]. Le support ventilatoire diurne l'utilisation d'un matériel essentiellement développé pour
est souvent préconisé en continuité de la ventilation noc- l'adulte.
391
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Générateurs de pression positive autres avantages. Elle permet, en utilisant un débit de gaz
supérieur au débit inspiratoire de pointe, de contrôler la
Il existe essentiellement deux types de générateurs de pres-
FiO2 administrée. Le mélange air–oxygène administré est
sion : les turbines et les respirateurs dits « de soins inten-
humidifié et réchauffé, assurant un meilleur confort au
sifs ». Les turbines ont l'avantage d'être plus économiques
patient. Ses indications, contre-indications et effets secon-
à l'achat, plus faciles à manipuler, d'être capables de com-
daires doivent cependant encore étudiés. Son utilisation ne
penser les fuites autour d'un masque pas toujours parfaite-
doit en outre pas retarder le sevrage tant du support de
ment adapté. Elles ont les désavantages de leurs avantages,
pression que de l'oxygène chez l'enfant [77, 78].
à savoir une simplicité d'usage n'autorisant que peu de
réglages, une absence, pour la plupart, de mesure du VT, et
un fonctionnement prévu à l'air ambiant. Les respirateurs
Interfaces
de soins intensifs autorisent davantage de réglages, comme L'interface est sans doute l'élément le plus caractéristique
celui du trigger inspiratoire et expiratoire sur les plus récents de la ventilation non invasive. Elle joue un rôle détermi-
d'entre eux. Ils permettent d'utiliser un mélange air–O2 ou nant dans la réussite d'une VNI. Il existe plusieurs types
hélium–O2 à une concentration donnée et d'humidifier d'interfaces utilisables chez l'enfant : les masques nasaux et
ce mélange facilement. Ils sont équipés de monitoring de nasobuccaux, les canules nasales et le casque « Helmet »
courbes permettant un réglage fin du support respiratoire. (fig. 29.7). Le nombre de ces interfaces industrielles adap-
Ils permettent de travailler de manière sûre grâce à la déter- tées à l'usage pédiatrique est en augmentation mais reste
mination d'alarmes de volume et de pression. La sensibi- tout de même insuffisant [79].
lité du trigger est souvent supérieure à celle des appareils à Le masque nasal permet de préserver l'utilisation de la
turbine. Enfin, les nouvelles générations de respirateurs de parole et l'usage de la tétine, souvent important pour ras-
soins intensifs intègrent des algorithmes destinés à la VNI surer l'enfant. Le masque nasal est souvent choisi comme
permettant de compenser les fuites au niveau du masque. l'interface de référence dans les maladies neuromusculaires
Les inconvénients de ce type de respirateurs sont essentiel- [73]. Cependant, son emploi est plus difficile en situation
lement leur coût et leur encombrement. aiguë. En effet, la respiration devenant buccale, l'usage du
Les caractéristiques de l'enfant qui le différencient de masque nasobuccal est alors plus approprié.
l'adulte sont un espace mort anatomique proportionnel- Chez le nouveau-né, les canules binasales sont l'interface
lement plus grand, une FR de base plus élevée et une col- de prédilection avec son bonnet adapté. Ceci s'explique par
laboration souvent plus difficile à obtenir. L'utilisation d'un le fait que la respiration, jusqu'à l'âge de 3 mois, est exclu-
générateur de pression le plus adéquat possible est capitale. sivement nasale. La taille de la canule doit être rigoureuse-
Celui-ci doit permettre de : détecter l'effort inspiratoire du ment adaptée à l'enfant et la surveillance de la position de
patient de manière à obtenir une synchronisation la plus celle-ci doit être constante dans le but d'éviter les risques
parfaite possible ; délivrer un débit inspiratoire correct ; d'escarres ou de fuites. Une alternance des canules avec un
compenser les fuites liées au fréquent manque d'étanchéité petit masque nasal permet de varier les appuis et de mini-
de l'interface faciale ; pratiquer un monitorage du support miser davantage les traumatismes cutanés. Avec ce type
administré. Notre choix, en ce qui concerne la VNI pédia- d'interface, il est important de veiller à une désobstruction
trique, va certainement vers les respirateurs de soins inten- nasale régulière pour que l'efficacité de la VNI soit conser-
sifs de la nouvelle génération, comme l'Evita IV® (Dräger vée [79].
Medical) ou le Servo-i® (Maquet) qui sont plus adaptés à la Enfin, la VNI chez l'enfant peut également être adminis-
pédiatrie par : leur trigger très sensible ; la compensation des trée via un casque Helmet maintenu par l'intermédiaire de
fuites ; la possibilité de régler la FiO2 et d'humidifier les gaz ; fixation aux aisselles ou en salopette chez les plus petits. Le
la mesure précise du support apporté au patient. casque n'adhère pas au visage du patient, il ne cause donc
Depuis quelques années, l'oxygénothérapie à haut débit pas de lésion cutanée et améliore ainsi le confort de l'en-
via des canules nasales a fait son apparition en pédiatrie. fant [80]. Cependant, elle nécessite l'usage d'un respirateur
Il s'agit d'une technique que l'on peut placer à la frontière capable d'une part, de générer des débits très élevés afin
de la ventilation non invasive, puisque la littérature semble d'éviter la réinhalation du CO2 et d'autre part, de posséder
lui attribuer un effet PEP. Bien qu'utilisée du prématuré au des trigger très sensibles.
grand enfant, l'intérêt de l'oxygénothérapie à haut débit, L'interface devra être choisie en fonction de la situation
et en particulier de son effet PEP, n'est pas encore bien clinique (aiguë ou chronique) et des caractéristiques indi-
démontré. Cette technique présente néanmoins certains viduelles du patient (âge et poids notamment). L'interface

392
29. Ventilation mécanique non invasive

Fig. 29.7
Interfaces pédiatriques.
A. Masque nasobuccal. B. Masque nasal. C. Canules binasales. D. Casque Helmet.

adaptée doit être disponible en plusieurs tailles et offrir un également disposer d'un personnel médical et paramédi-
maximum d'étanchéité tout en restant le moins trauma- cal formé à la technique. L'initiation d'une VNI nécessite
tique possible pour la peau fragile des enfants. Elle doit souvent une période plus ou moins longue d'adaptation
être idéalement transparente (afin de pouvoir vérifier le pendant laquelle le soignant doit rester au chevet, vérifier le
bon positionnement, l'absence d'encombrement ou de positionnement du masque, adapter les paramètres venti-
vomissement), aisée à installer et à retirer. La protection de latoires et expliquer à l'enfant et à ses parents ses différents
la peau par des pansements colloïdaux de type Comfeel® gestes. L'instauration et la surveillance d'une VNI ou d'une
évite l'apparition de lésions cutanées de pression. ventilation conventionnelle demandent initialement une
charge de travail identique à celle chez l'adulte [81]. Il est
vraisemblable que la charge en temps est plus grande chez
Conditions d'utilisation
l'enfant, liée au positionnement adéquat du masque et à la
La VNI est un mode de ventilation à part entière. Peut-être phase d'adaptation initiale.
en opposition à ce qui se fait en médecine adulte, il est Dans le même ordre d'idée, la VNI ne doit être instaurée
communément admis que la VNI doit se pratiquer dans que si l'on dispose des moyens humains, médicamenteux
un environnement sécurisant pour l'enfant et le personnel et techniques nécessaires pour débuter une ventilation
soignant. Les fonctions cardiaque, respiratoire et neurolo- invasive rapidement en cas de besoin. En effet, jusqu'à un
gique du patient doivent être surveillées adéquatement. tiers d'intubations sont rapportés en cas d'instauration de
Un monitoring cardiorespiratoire incluant une mesure de VNI pour une détresse respiratoire aiguë.
la SpO2 en continu est un minimum. L'utilisation de la gazo- Idéalement, une voie d'accès intraveineuse et une sonde
métrie artérielle n'est en revanche pas une priorité en ce gastrique doivent être en place au moment de l'instaura-
qui concerne l'instauration d'une VNI chez un enfant. Il faut tion de la VNI.
393
IV. Assistance ventilatoire mécanique et aides techniques

Contre-indications En pratique
Les contre-indications absolues de la VNI sont l'arrêt car- Une fois l'indication posée et l'absence de contre-indication
diocirculatoire, l'absence de possibilité pour le patient de reconnue, les modalités pratiques de la mise en route de la
protéger ses voies respiratoires (troubles de la déglutition VNI sont dans la mesure du possible expliquées à l'enfant et
et/ou de la toux), ainsi que l'absence de coopération. La à ses parents. Les paramètres hémodynamiques et respira-
coopération du patient pédiatrique n'est pas toujours toires sont mesurés en continu. L'interface faciale est choisie
aisée à obtenir et nécessite d'être présent aux côtés de l'en- et montrée à l'enfant. Très souvent, elle est appliquée briè-
fant, de lui expliquer correctement la procédure dès qu'il vement sur son visage sans être connectée au respirateur
est en âge de comprendre, et de ne pas oublier d'expliquer pour qu'il puisse l'« apprivoiser ». L'enfant est souvent placé
également la technique à ses parents afin de diminuer en position semi-assise. Avant de débuter le traitement, on
le stress transmis. Dans certains cas, et dans un environ- s'assure que le matériel d'intubation et les médicaments anal-
nement adéquat, une sédation médicamenteuse peut gosédatifs sont disponibles, qu'une voie d'accès est posée et,
s'avérer nécessaire. Enfin, il existe également des contre- en général, qu'une sonde gastrique est en place. Le générateur
indications relatives, à savoir la présence de difformités au de pression est réglé. Généralement, on débute avec une PEP,
niveau du visage, l'existence d'un traumatisme facial, d'un pression expiratoire, de 4 cmH2O et une PIP, pression inspira-
pneumothorax non drainé. Ces contre-indications sont toire maximale de 10 cmH2O. La FiO2 est réglée pour obtenir
à interpréter en fonction de l'expérience de la personne la SpO2 souhaitée. Les pressions sont réglées par paliers de 2
chargée du patient. cmH2O en fonction de l'évolution de la SpO2 et de la FiO2
L'atteinte d'une autre fonction que la fonction respi- pour ce qui concerne la PEP en fonction de la fréquence et
ratoire représente aussi une contre-indication relative, de l'effort respiratoires, du Vt mesuré et des fuites en ce qui
puisqu'elle augmente de façon considérable le risque concerne la PIP. La pente inspiratoire peut dans certains cas
d'échec de la VNI. être adaptée en fonction du confort du patient. La personne
responsable de la VNI reste au chevet de l'enfant jusqu'à ce
Effets secondaires qu'il soit stabilisé. Cette stabilisation doit être précoce : la
question de l'utilité de poursuivre la VNI et/ou d'instaurer
Si toutes les conditions d'utilisation sont rencontrées, si les une ventilation conventionnelle doit être posée chez un
indications et contre-indications sont respectées, les véri- enfant en décompensation respiratoire aiguë qui ne s'adapte
tables effets secondaires de la VNI sont rares. Le principal, pas à la VNI ou qui ne s'améliore pas dans l'heure.
et le plus urgent à reconnaître, est l'échec. Mayordomo-
Colunga et  al. ont quant à eux montré que l'échec de la
VNI était lié à une diminution plus faible de la fréquence Conclusions relatives à la ventilation
respiratoire à 1 heure et à 24 heures après l'initiation de non invasive pédiatrique
la VNI [82]. L'expérience montre cependant qu'une colla-
boration du patient, une synchronisation de la VNI avec La VNI est une technique de ventilation qui a démon-
l'effort inspiratoire du patient et une utilisation précoce, tré son efficacité dans la prise en charge de décompen-
avant que la situation ne soit dépassée, favorisent le succès sations respiratoires aiguës de l'adulte. À ce titre, elle a
[63]. Munoz-Bonet et al. ont constaté qu'une amélioration trouvé sa place comme support respiratoire dans les
précoce (dans les 2 à 4 heures) sous VNI de la fréquence unités de soins intensifs adultes. Progressivement, elle a
cardiaque et de la PaCO2 était corrélée à une meilleure été introduite en soins intensifs pédiatriques. Malgré une
réussite de la VNI instaurée [83]. Bernet a montré chez des utilisation de plus en plus importante et la description
enfants traités par VNI pour une décompensation respira- prometteuse de succès chez de petites séries de patients
toire aiguë que l'évolution de la FiO2 après 1 h de traite- pédiatriques en insuffisance respiratoire aiguë, ses indi-
ment était le seul marqueur prédictif de réussite ou d'échec cations, limites et conditions d'utilisation doivent encore
[84]. Parmi les autres effets secondaires rapportés, citons : être précisées de manière rigoureuse par des études
les lésions de pression au niveau du visage qui ont justifié cliniques. L'industrie biomédicale doit également pour-
dans notre unité l'application de pansements protecteurs suivre le travail débuté et pouvoir fournir des interfaces
prophylactiques ; la distension gastrique qui justifie l'utilisa- encore plus performantes, adaptées à l'utilisation chez le
tion quasi routinière d'une sonde gastrique ; le sentiment petit enfant. Comme toute technique, son succès est éga-
de claustrophobie. lement dépendant de l'acquisition d'un niveau d'exper-
394
29. Ventilation mécanique non invasive

tise que l'utilisation dans un environnement spécialisé et [4] Lloy-Owen J, Donaldson GC, Ambrosino N, et al. Patterns of home
adéquat doit garantir. Il est certain que la place occupée mechanical ventilation use in Europe : results from the Eurovent
survey. Eur Respir J 2005 ; 25(6) : 1025–31.
par la VNI dans nos unités de soins intensifs pédiatriques [5] Kerby GR, Mayer LS, Pingleton SK. Nocturnal positive pressure ven-
va encore augmenter à l'avenir. tilation via nasal mask. Am Rev Respir Dis 1987 ; 135 : 738–40.
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La VNI occupe depuis une bonne quinzaine ventilation : a prospective study of 354 consecutive episodes. Am J
d'années une place de choix dans la prise en charge Med 1974 ; 57 : 161–70.
[8] Mac Intyre NR. Current issues in mechanical ventilation for respira-
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Chez le patient en exacerbation aiguë de BPCO [9] Stauffer J, Silvestri RC. Complications of endotracheal intuba-
par exemple, la VNI se voit généralement appli- tion, tracheostomy, ad artificial airways. Respir Care 1982 ; 27 :
quée en urgence et en unité de soins intensifs au 417–34.
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La CPAP est indiquée en première intention [11] Jounieaux J, Aubert G, Dury M, et al. Effects of nasal positive-pressure
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La VNI n'a investi les services de réanimation cile des insuffisants respiratoires chroniques. Rev Fr Mal Respir
pédiatrique que depuis peu. Ses résultats encoura- 1983 ; 11 : 923–36.
geants doivent encore être confirmés tout comme [13] Sottiaux T. Noninvasive positive pressure ventilation in the emer-
doivent être précisées ses indications et modalités gency room. Communication to the editor. Chest 1999 ; 115 :
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d'application pratique. [14] Elliott MW, Confalonieri M, Nava S. Where to perform noninvasive

L'expérience accumulée par la VNI de longue ventilation ? Eur Respir J 2002 ; 19 : 1159–66.
durée est nettement plus ancienne ; les patients [15] Evans TW, Albert RK, Angus DC, et al. Non-invasive positive pres-
atteints de maladies neuromusculaires respon- sure ventilation in acute respiratory failure. International consen-
sables d'IRC de type restrictif en sont les princi- sus conference in intensive care medicine. Réanimation 2001 ; 10 :
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paux bénéficiaires. [16] Brochard L, Mancebo J, Wysocki M, et al. Non invasive ventilation

L'efficacité de cette stratégie thérapeutique n'est for acute exacerbation of chronic obstructive disease. N Engl J Med
plus à démontrer. Les avancées récentes dans ce 1995 ; 333 : 817–22.
type de VNI tiennent surtout dans l'amélioration [17] Park M, Sangean MC, Volpe MS, et  al. Randomized, prospective
trial of oxygen, continuous positive airway pressure, and bilevel
du matériel de VNI, dans l'élargissement de ses positive airway pressure by face mask in acute cardiogenic pulmo-
indications et dans la précision des contre-indica- nary edema. Crit Care Med 2004 ; 32 : 2407–15.
tions réelles à la VNI au long cours. [18] Mehta S, Jay GD, Woolard RH, et al. Randomized prospective trial

L'acquisition des données théoriques concer- of bilevel versus continuous positive airway pressure in acute pul-
nant la VNI doit être complétée par l'apprentis- monary edema. Crit Care Med 1997 ; 25 : 620–8.
[19] Crane SD, Elliott MW, Gilligan P, et  al. Randomised controlled
sage d'un savoir-faire dans le cadre d'ateliers ou de comparison of continuous positive airways pressure, bilevel non-
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