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Cercle Napoléon

semaine du 19 au 25 février
au sommaire 
 

AVEZ-VOUS BIEN LU LE PRÉCÉDENT ENVOI ?


LA VIE DE L'ASSOCIATION 
NOS AMIS
ADHÉSION 2023
ACTIVITÉS FUTURES
IN MEMORIAM : MARCEL GUÉRY
 

DE NOS AMIS DE
L'ASSOCIATION BELGE NAPOLÉONIENNE
FEUILLETEZ L'UNE DE LEURS REVUES
ET ABONNEZ-VOUS À PRIX AMICAL
 

NOS ÉPHÉMÉRIDES 
• 19 FÉVRIER 1814 :
NAPOLÉON ET LES SHAKOS AUTRICHIENS DE MONTEREAU
• 19 FÉVRIER 1800 :
BONAPARTE S’INSTALLE AUX TUILERIES
• 20 FÉVRIER 1811 :
CHATEAUBRIAND EST ÉLU À L’ACADÉMIE FRANÇAISE
• 21 FÉVRIER 1809 :
SARRAGOSSE CAPITULE DEVANT LANNES
• 21 FÉVRIER 1824 :
MORT D'EUGÈNE DE BEAUHARNAIS
• 22 FÉVRIER 1793 :
BONAPARTE, PREMIÈRE OPÉRATION MILITAIRE,
À LA MADDALENA
• 23 FÉVRIER 1814 :
NAPOLÉON REÇOIT L’OFFRE D’UN ARMISTICE
• 24 FÉVRIER 1785 :
CHARLES BONAPARTE MEURT À MONTPELLIER 
• 25 FEVRIER 1796 :
JEAN-NICOLAS STOFFLET EST FUSILLÉ
• 25 ET 26 FÉVRIER 1814 :
CAMPAGNE DE FRANCE,
NAPOLÉON À TROYES
 

vous avez raté les éphémérides de la semaine dernière ?


Cliquez plus bas

retrouvez la semaine du 12 au 18 février

 
 

  avez-vous bien lu le précédent envoi


?
 

• La question de la semaine dernière:


 

Eylau. 8 février 1807. Quel est le nom de ce colonel du 1er


régiment de grenadiers à cheval de la Garde Impériale qui fut
nommé général par Napoléon sur le champ de bataille ?

C'était le montpelliérain Louis Lepic

Bravo à Jean-Pascal Sotgiou, Dominique Morincôme, Pierre


Murat, Annie Bugnot, Michel Orcel, Bernard Gourrier, Gilbert
Bouche, Michèle Lequesne, Pierrick Denis, Laurette Licciardi,
Danielle Jérôme, Gaël Grosdemanche, Charlie Vertonghen,
Catherine Brunel, Jean-Pierre Poncet, Renée et Jacques
Delpech, Jean-Louis Beziat, Bernard Genin, Jean-Luc Pons,
Jean-Claude Perroto, Marie Houpert, Maurice et Chantal Fabre,
et Cyrille Jullien.

• La question de cette semaine:


 
Lors d'une bataille de la Campagne de France, Napoléon s'est
écrié: "Allez mes amis, ne craignez rien, le boulet qui me tuera
n'est pas encore fondu !"
Quel est le nom de cette bataille ?

cliquez ici pour envoyer votre réponse

Vous organisez une manifestation napoléonienne ? Vous


voulez nous parler de votre association de reconstitution ? Ou
d'un lieu insolite, ou peu connu en relation avec
l'Empire ? Faites-nous en part, nous le
publierons par courriel (1200 envois) et aussi sur Facebook, où
nous avons 10547 abonnés.

Et merci de renvoyer vous-même ce courriel à tous vos amis


sensibles à l'épopée napoléonienne.
 

Pour que Vive l'Empereur !

 
 

la vie de l'association  
 

LE CERCLE NAPOLÉON EST AFFILIÉ À


L'INSTITUT NAPOLÉON
LE SOUVENIR FRANÇAIS
LA SOCIÉTÉ DES AMIS DU MUSÉE DE LA LÉGION ÉTRANGÈRE

LE CERCLE NAPOLÉON EST AMI AVEC


BONAPARTE À VALENCE
POUR LE PANACHE
L'ASSOCIATION BELGE NAPOLÉONENNE
LES AMIS DU BARON LARREY
MUSEO MEDAGLIERE DELL' EUROPA NAPOLEONICA
MUSEO DI MARENGO
LA SOCIÉTÉ  EUROPÉENNE D'HISTOIRE DE LA MÉDECINE
SOUS LE 1er EMPIRE  
LA SOCIÉTÉ NAPOLÉONIENNE
MUSEO GLAUCO LOMBARDI DE PARME

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Voyez comment se terminent nos conférences

     

prochaines activités
du Cercle Napoléon
 

dans le cadre des sorties culturelles du Cercle Napoléon


VISITE COMMENTÉE DE L’ARLES ANTIQUE
vendredi 24 février 2023
• 10h15 Rendez-vous au Musée de l’Arles Antique
le “musée bleu”, Avenue 1ere division de la France libre 13200
Arles
•10h30 Visite de l’extension du musée, avec DavidDjaoui,
plongeur et archéologue du Musée départemental de l’Arles
Antique, qui nous racontera l’histoire de la barque Arles Rhône III,
chaland de 31 m de long, de sa découverte, son découpage, sa
sortie de l’eau et sa conservation.
• 12h30 Repas en compagnie des archéologues 
• 14h15 Visite du centre ancien d’Arles, avec Jean Piton,
archéologue au Musée départemental de l’Arles antique et
céramologue. Évocation de ce que l’on voit et aussi de ce que l’on
ne voit pas : nécropoles du Mouleyrès et des Alyscamps, voie
aurélienne, amphithéâtre, théâtre antique, obélisque de la place de
la mairie...
Nous longerons les quais du Rhône où tant de trésors ont été
découverts avant de terminer notre journée autour du verre de
l’Amitié.
• 35€ par personne, par chèque libellé au nom du Cercle
Napoléon,
à adresser à Gérald Mongin, 11 rue du grenache, 34090
Montpellier, correspondant à l’entrée dans le musée, le repas, la
présence des deux archéologues, et le pot de l’Amitié,

• Merci de confirmer votre envoi postal par un courriel à


contact@cercle-napoleon.fr en indiquant votre n° de téléphone
portable

envoyez votre courriel au Cercle Napoléon en cliquant ici

DIORAMAS DE BATAILLES
NAPOLÉONIENNES
samedi 25 et dimanche 26 février 2023
Venez y admirer les huit dioramas exposés par Jean-Pascal
Sotgiou:
dans l'allée 14/6:  Aspern-Essling, la Grande Batterie de
Wagram, le carré à quatre rangs, Malojaroslavets,
l'affrontement des gardes à Austerlitz, Champaubert, le verrou
de Hoff, et Mohilev.
L'Assemblée Générale Annuelle de notre association
prolongera cette conférence
et sera suivie par un pot de l'Amitié offert à tous les
présents.

confirmez votre participation à l'assemblée générale et au pot de


l'Amitié par mail au Cercle Napoléon

regardez la conférence sur Murat, Roi de Naples, par


le Prince Joachim Murat, sur notre chaine YouTube
en cliquant ici

accédez à toute notre chaine Youtube Cercle Napoléon

Notre Ami Marcel Guéry nous a quittés


 

Nous étions tous quatre, avec Monique et Pierre Franco,


le 15 décembre 2019, anniversaire du Retour des
Cendres de l'Aigle et de l'Aiglon, aux Invalides devant
leurs tombeaux.
Repose en paix, Marcel, tu as maintenant rejoint les
Anciens de la Grande Armée. Sûr qu'ils t'accueilleront
comme tu le mérites.
GM
a
De nos Amis Belges de l'ABN
  
Nos amis de l'Association Belge Napoléonienne éditent
une excellente revue, digne de celles de notre ami David
Chanteranne. Feuilletez-la, vous avez un lien, vous jugerez
ainsi de sa qualité.
 

Ils nous proposent une abonnement à tarif réduit:  cinq


revues par an, une par trimestre, plus un hors-série, au
tarif de 42,50€ à la place de 50€. Utilisez le code promo
CN2023 sur cette page:
https://www.associationbelgenapoleonienne.be/produit/nouvel-
abonnement-2/
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abonnement à tarif préférentiel

feuilletez une revue de l'Association Belge Napoléonienne

 
 

  Nos éphémérides  
 
19 FÉVRIER 1814 - NAPOLÉON ET LES
SHAKOS AUTRICHIENS DE MONTEREAU

Les officiers russes et autrichiens, qui prétendaient encore,


début février 1814, apporter la paix aux populations, ont laissé
leurs troupes commettre de nombreuses exactions sur le territoire
qu’ils avaient conquis. Impôts forcés, réquisitions, vols, pillages,
incendies, dévastations, viols, exécutions sommaires, crimes et
excès de toutes sortes, tels étaient le quotidien des Français
occupés.

Après la victoire de Montereau, où les autrichiens ont fui en


débandade, sans avoir eu le temps de détruire les ponts, la ville et
ses environs sont jonchés, selon un rapport au préfet, “de shakos,
de fusils et de débris de toute nature, que l’ennemi a abandonnés”.
Que faire de tout cet amas d’effets militaires dont les autrichiens,
en fuyant, se sont débarrassés ? Certains proposent de les réunir et
de les brûler dans de grands feux de joie.

Mais Napoléon intervient et tranche. Il ordonne que l’on jette les


shakos à la rivière, pour les laisser flotter et porter par le courant
jusqu’à Paris. Ainsi, annonce-t-il, tout au long de la Seine, les
populations locales, martyrisées par les troupes alliées, verront que
l’Empereur les a vengées. Et à Paris, on aura la preuve palpable de
la victoire de Montereau…
19 FÉVRIER 1800 : BONAPARTE S’INSTALLE
AUX TUILERIES
 

Le 19 février 1800, à son réveil, Bonaparte, Premier Consul, dit


à son secrétaire: “Eh bien, Bourrienne, c’est donc aujourd’hui que
nous allons coucher aux Tuileries !” 
Au Palais du Luxembourg s’organise le cortège. Trois mille
hommes d’élite, dont le superbe régiment des guides, et cent
cinquante musiciens marchent en tête. Suivent Bessières, Lannes et
Murat avec leur états-majors à cheval, les ministres dans leurs
voitures, ou dans des fiacres, dont on a recouvert le numéro avec
du papier. 

Dans un carrosse tracté par six chevaux blancs, cadeau de


l'empereur d'Allemagne après le traité de Campo-Formio,
Bonaparte, avec Cambacérès à sa gauche et Lebrun à sa droite,
traverse sous les vivats et les acclamations de la foule une grande
partie de Paris. Partout on entend crier: "Vive le premier consul !”
Sur son trajet, toutes les fenêtres, et même des croisées sur la place
du Carrousel, ont été louées très cher. 

La garde des consuls forme une haie d’honneur depuis le


guichet du Carrousel jusqu’à la porte des Tuileries. Dès que la
voiture des consuls s’y arrête, Bonaparte, en habit rouge de consul
et bicorne noir, en descend rapidement, monte à cheval, et passe
les troupes des 30e, 40e et 96e demi-brigades en revue. Il passe
dans tous les rangs, adresse des paroles flatteuses aux chefs des
corps, puis vient se placer auprès de la porte des Tuileries, avec
Murat à sa droite, Lannes à sa gauche, et derrière lui un nombreux
état-major de jeunes et vaillants guerriers. 

Passent alors, devant lui, les drapeaux de la quatre-vingt-


seizième, de la quarante-troisième et de la trentième demi-
brigade, hampes surmontées de quelques lambeaux criblés de
balles et noircis par la poudre. A leur passage, Bonaparte ôte son
chapeau, et s’incline en signe de respect.

Pendant ce temps là, les deux autres consuls sont montés dans
les appartements, où les attendent le conseil d’État et les
ministres. Madame Bonaparte, entourée d’un grand nombre
d’élégantes, sont aux fenêtres du troisième consul, au pavillon de
Flore. 

A la fin de la revue des troupes, Bonaparte monte quatre à


quatre l’escalier des Tuileries. Arrivé dans la salle, il s’y fait
présenter par le ministre de l’Intérieur, les membres des autorités
administratives de Paris, par le ministre de la guerre, l’état-major
de la dix-septième division militaire, par le ministre de la Marine,
plusieurs officiers de cette arme. Et Murat lui présente l’état-major
de la garde des consuls. 
Ensuite, au cours d’un grand diner, Bonaparte reçoit à sa table les
deux autres consuls, les ministres et les présidents des grands corps
de l’État, Murat les chefs de l’armée, et Lucien le conseil d’État
tout entier.

Le soir, Bonaparte s’installe dans les anciens appartements de


Louis XIV et de Louis XVI, au premier étage, côté jardin, et son
épouse Joséphine dans les appartements de Marie-Antoinette au
rez-de-chaussée. Bonaparte dit à Bourrienne: “ce n’est pas le tout
d’être aux Tuileries, il faut y rester…”
20 FÉVRIER 1811 : CHATEAUBRIAND EST ÉLU
À L’ACADÉMIE FRANÇAISE
 

En cette proximité de l'anniversaire de l’élection de


Chateaubriand à l’Académie française, le 20 février 1811,
intéressons-nous à ce personnage qui a marqué son époque. On
pourrait même dire que deux hommes ont plané sur ce monde
finissant avec la Révolution et sur le début d’un autre. Napoléon a
gouverné la France politique et Chateaubriand a gouverné la
France littéraire. 

Si le premier est mort prématurément par la fatalité du sort et


les rigueurs d’un abominable climat, sur l’île de Sainte-Hélène, le
second a pu vivre près de 80 ans pour raconter leur histoire. 

Régulièrement il se place dans une relation presque intime,


dans ses célèbres Mémoires d’Outre-Tombe, avec l’homme
qu’il a tant admiré et tant combattu. Ainsi, lorsqu’il évoque sa
jeunesse, il explique que Napoléon et lui entrèrent tous les deux
inconnus dans l’ère révolutionnaire mais que leur destin ne fut pas
le même. 

Au fond ils avaient des idées similaires et fort compatibles.


Lecteurs de Rousseau, ils ont aimé les idées nouvelles, mais la
barbarie de la Terreur et les discours des idéologues les ont
détournés du mouvement qui apparaissait. Ils incarnent tous les
deux l’équilibre entre le meilleur de la Monarchie et le meilleur de
la Révolution. Ce sont les excès qui ont fait fuir Chateaubriand. Il
le dit: "La Révolution m’aurait entraîné". Mais il emploie le
conditionnel. Les crimes lui firent horreur, de même que la mort du
Duc d’Enghien, qu’il considéra comme une faute, provoqua sa
rupture avec le Premier Consul en 1804.

Car, c’est un fait peu connu, les deux hommes ont en quelque
sorte travaillé ensemble. Chateaubriand eut l’honneur d’être
présenté à Bonaparte après le succès de son Génie du
Christianisme. L’admiration fut réciproque. Peu après cette
entrevue, Chateaubriand fut nommé secrétaire de l’ambassade de
France à Rome en 1803.
Après 1804, les relations entre les deux hommes furent
orageuses. L’Empereur chercha à s’attacher une nouvelle fois
Chateaubriand, qu’il estimait, et à faire reconnaître son talent, mais
sa tentative fut vaine. L’épisode de l’Académie montra toute
l’indépendance dont voulait faire preuve le breton. 

Fidèle à la tradition française du duel entre la plume et le


sceptre, il fut ce que Saint-Simon fut à Louis XIV, Voltaire à
Louis XV et Victor Hugo à Napoléon III. Son discours ne
manquait pas de piquant pour le pouvoir de l’Empereur. Il admirait
son génie (1) mais abhorrait ce qu’il considérait être du
despotisme. Le discours de Chateaubriand à l’Académie ne put
jamais être prononcé et il n’y siégea que plus tard, sous la
Restauration. 

Napoléon fut irrité. À un membre de l’Institut qui défendait le


discours que voulait prononcer Chateaubriand, il répondit:
"Sommes-nous donc des bandits, et ne suis-je qu’un usurpateur ?
Je n’ai détrôné personne, monsieur, j’ai trouvé, j’ai relevé la
couronne dans le ruisseau, et le peuple l’a mise sur ma tête. Qu’on
respecte ses actes !”

Chateaubriand s’exila loin de Paris, dans la campagne de


l’Essonne, à la Vallée-aux-Loups, où il fit publier en 1814 sa
terrible brochure, "De Buonaparte et des Bourbons", dont Louis
XVIII déclara qu’elle lui avait profité plus qu’une armée de cent
mille hommes. L’Empereur, à Fontainebleau, jugea cette brochure
avec impartialité. Il dit au duc de Bassano: "Ceci est juste; Cela
n’est pas juste. Je n’ai point de reproche à faire à Chateaubriand; il
m’a résisté dans ma puissance; mais ces canailles, tels et tels !" (et
il les nommait dans sa colère). 
Peu avant de mourir, un article publié par Chateaubriand en
France parvint à Sainte-Hélène jusqu’à l’Empereur. Il disait: "Né
dans une île pour aller mourir dans une île, aux limites de trois
continents; jeté au milieu des mers où Camoëns sembla le
prophétiser en y plaçant le génie des tempêtes, Bonaparte ne se
peut remuer sur son rocher que nous n’en soyons avertis par une
secousse; un pas du nouvel Adamastor à l’autre pôle se fait sentir à
celui-ci. Si Napoléon, échappé aux mains de ses geôliers, se retirait
aux Etats-Unis, ses regards attachés sur l’Océan suffiraient pour
troubler les peuples de l’ancien monde; sa seule présence sur le
rivage américain de l’Atlantique forcerait l’Europe à camper sur le
rivage opposé." 

L’Empereur dit alors à M. de Montholon (c’est Chateaubriand


qui le raconte): "Chateaubriand a reçu de la nature le feu sacré: ses
ouvrages l’attestent. Son style n’est pas celui de Racine, c’est celui
du prophète. Si jamais il arrive au timon des affaires, il est possible
que Chateaubriand s’égare: tant d’autres y ont trouvé leur perte !
Mais ce qui est certain, c’est que tout ce qui est grand et national
doit convenir à son génie, et qu’il eût repoussé avec indignation
ces actes infamants de l’administration d’alors.”

Et Chateaubriand de conclure: "Telles ont mes dernières


relations avec Bonaparte. Pourquoi ne conviendrais-je pas que ce
jugement chatouille de mon cœur l’orgueilleuse faiblesse (2) ?
Bien de petits hommes à qui j’ai rendu de grands services ne m’ont
pas jugé si favorablement que le géant dont j’avais osé attaquer la
puissance.”

Ainsi fut la relation pleine de contrastes et de paradoxes entre


les deux grands hommes. Napoléon fut le plus grand homme que
la France ait connu, et Chateaubriand le plus grand écrivain de
notre littérature pourtant si fastueuse. On retrouve ce paradoxe
dans le jugement de Chateaubriand concernant la Restauration
qu’il avait pourtant appelé de ses vœux et dont il fut un acteur
politique important. Il dit: "Retomber de Bonaparte et de l’Empire
à ce qui les a suivis, c’est tomber de la réalité dans le néant, du
sommet d’une montagne dans un gouffre". 

(1) "Mon admiration pour Bonaparte a toujours été grande et


sincère, alors même que j’attaquais Napoléon avec le plus de
vivacité." (Mémoires d’Outre-Tombe, livre vingt-deuxième,
chapitre 15). 
(2) Référence à “Iphigénie”. 

Merci à Pierre Aliotti, membre du Cercle Napoléon, pour ce


texte.
21 FÉVRIER 1809 : SARRAGOSSE CAPITULE
DEVANT LANNES  
 

Depuis 1808, en Espagne, c’est une guerre cruelle entre les


Français et les Espagnols animés de sentiments nationaux et un
fanatisme religieux. Après une période de victoires sur les troupes
régulières espagnoles, les Français doivent s’opposer à un corps
expéditionnaire anglais et à des guérilleros. En hiver 1808-1809,
l’armée française investit maison par maison Saragosse, qui
capitulera le 21 février 1809
 

• Lisons la description du siège de Saragosse, par


le général Marbot:

Avant la grande insurrection amenée par la captivité de


Ferdinand VII, la ville de Saragosse n’était pas fortifiée; mais en
apprenant les événements de Bayonne et les violences que
Napoléon voulait faire à l’Espagne pour placer son frère Joseph sur
le trône, Saragosse donna le signal de la résistance. 

Sa nombreuse population se leva comme un seul homme; les


moines, les femmes et même les enfants prirent les armes.
D’immenses couvents, aux murailles épaisses et solides,
entouraient la ville; on les fortifia, et des canons y furent placés;
toutes les maisons furent crénelées, les rues barricadées; on
fabriqua de la poudre, des boulets, des balles, et l’on réunit de très
grands approvisionnements de bouche. 
Tous les habitants s’enrégimentèrent et prirent pour chef le comte
Palafox, l’un des colonels des gardes du corps, et ami dévoué de
Ferdinand VII, qu’il avait suivi à Bayonne, d’où il s’était rendu en
Aragon après l’arrestation du roi. […] [Le] premier siège fut […]
manqué; mais nos troupes étant rentrées victorieuses en Aragon, le
maréchal [Lannes] venait en 1809 attaquer de nouveau Saragosse.
 
Cette ville se trouvait alors dans de bien meilleures conditions
de défense, car ses fortifications étaient achevées, et toute la
population belliqueuse de l’Aragon s’était mise dans la place, dont
la garnison avait été renforcée par une grande partie des troupes
espagnoles de l’armée de Castaños, battues par nous à Tudela, de
sorte que le nombre des défenseurs de Saragosse s’élevait à plus de
quatre-vingt mille hommes, le maréchal n’en ayant que trente mille
pour en faire le siège.

Mais nous avions d’excellents officiers. L’ordre et la discipline


régnaient dans nos rangs, tandis que dans la ville tout était
inexpérience et confusion. Les assiégés n’étaient d’accord que sur
un seul point: se défendre jusqu’à la mort ! Les paysans étaient les
plus acharnés ! Entrés dans la ville avec leurs femmes, leurs
enfants et même leurs troupeaux, on avait assigné à chaque groupe
le quartier ou la maison qu’il devait habiter, en jurant de le
défendre. 

Là, les gens vivaient entassés pêle-mêle avec leur bétail et


plongés dans la saleté la plus dégoûtante, car ils ne jetaient
aucune ordure au dehors. Les entrailles des animaux pourrissaient
dans les cours, dans les chambres, et les assiégés ne prenaient
même pas la peine d’enlever les cadavres des hommes morts par
suite de l’affreuse épidémie qu’une telle négligence ne tarda pas à
développer. Le fanatisme religieux et l’amour du sacré de la patrie
exaltant leur courage, ils s’abandonnèrent aveuglement à la volonté
de Dieu…  
 

• Lisons maintenant Pedro Rújula:

Le 24 mai 1808, la population de Saragosse prend le contrôle


du gouvernement de la ville. En quelques jours, le jeune José de
Palafox parvient à galvaniser la population et à la préparer pour la
défense. Contre toute attente, ils réussissent à parer l’attaque et
obligent les troupes impériales à faire le siège. A partir de ce
moment-là la défense sera menée principalement par des civils. Le
mythe d’un peuple en armes prendra forme à la mi-août, quand cet
effort trouvera sa récompense dans la retraite des Français.
Quand, en décembre de la même année, les troupes françaises
reviennent, l’affrontement avec la ville sera brutal. Il opposera
ceux qui s’obstinaient à croire qu’ils pouvaient vaincre une armée
organisée, aguerrie et bien équipée, à ceux qui avaient besoin
d’annihiler le mythe de la résistance civile pour s’épargner d’autres
épisodes de résistance. Le déchaînement de violence et les
innombrables victimes causées par la prise de la ville ont fait de
Saragosse, pour reprendre les termes du capitaine Billon, "le plus
meurtrier de tous les sièges qui ont eu lieu dans l’histoire".

• Lisons ensuite l’histoire du trésor de Notre-Dame


du Pilar, raconté dans ses Mémoires par la
duchesse d’Abrantès:

Saragosse pris, les cinquante mille cadavres empestés jetés


dans l’Ebre ou dans les fosses, une sorte de tranquillité sourde
rétablie dans la ville, les moines furent examinés dans leur
conduite passée pour en faire un exemple. C’était une mesure
qu’on jugeait nécessaire et à la bonne heure; mais si elle était
nécessaire, elle pouvait opérer autant et plus de mal que produire
de bien, surtout en l’exécutant comme on le fit. 

On mit des moines dans des sacs, puis on les jeta dans l’Ebre.
L’Ebre qui n’aime pas ces poissons-là, les rejeta sur sa rive, et le
peuple de Saragosse put voir ses moines étranglés et noyés. Cela fit
un effet détestable. Les autres moines eurent peur; et un beau
matin, une députation du chapitre de la cathédrale de Saragosse,
qui est Notre-Dame du Pilar, s’en vint s’agenouiller devant le
maréchal Lannes, en lui demandant comme une faveur d’accepter
le petit présent qu’elle lui apportait, et qui était le tiers du trésor de
Notre-Dame du Pilar. Ils avaient, disaient-ils, destiné les deux
autres tiers au duc d’Abrantès et au duc de Trévise. 

Le maréchal Lannes se fâcha contre les chanoines députés ou


tels députés chargés de l’affaire, et leur dit qu’avant de venir à lui
ils devaient s’en aller au duc d’Abrantès et au duc de Trévise, pour
leur offrir ce qui leur était destiné. Dans la situation d’esprit où
était Junot, je laisse à penser comme il reçut les députés. Il leur
demanda s’ils se riaient de lui, et les mit dehors presque par les
épaules.

Quant au duc de Trévise, qui n’avait pas les mêmes sujets


d’humeur que le duc d’Abrantès, il fut plus poli; mais il
n’accepta pas. Les chanoines enchantés, remportèrent le trésor de
Notre-Dame du Pilar dans son église, et furent les plus heureux du
monde de n’avoir pas à donner un seul de ses diamants.

Dans la soirée du même jour, le maréchal Lannes envoya un de


ses officiers pour demander le trésor en totalité, et il l’apporta à
Paris.
 

• Et pour finir, le général Thoumas, biographe de


Lannes:

Au point de vue militaire, ce siège doit être considéré comme


une des principaux titres de gloire de l'armée française et de
Lannes en particulier. Pour le juger il faut tenir compte de la
grande infériorité numérique des assaillants, des difficultés qu'il
éprouvait pour s'approvisionner de vivres et de munitions, de la
constance avec laquelle ils supportèrent des privations et des
fatigues inouïes, du courage qu'ils opposèrent pendant cinquante
trois jours et cinquante trois nuits à des dangers continus. 
L'activité du maréchal Lannes, qui ne s'épargnait à aucun
moment la peine et la fatigue, le sang-froid qu'il montra dans les
dispositions les plus critiques, l'ardeur et la patience dont il donna
l'exemple aux troupes, furent pour beaucoup dans le succès.
21 FÉVRIER 1824 : MORT D'EUGÈNE DE
BEAUHARNAIS

Le Vice-roi d’Italie meurt à Munich d'une attaque d'apoplexie,


à seulement 42 ans. Son corps sera exposé 3 jours au palais du Roi
de Bavière, son beau-père, qui conduira lui-même le deuil.

Goethe écrira: "C’était un de ces grands caractères qui


deviennent  de plus en plus rares, et le monde est appauvri d’un
homme remarquable. Je le connaissais personnellement; l’été
dernier nous étions ensemble à Marienbad. C’était un bel homme
d’environ 42 ans, mais qui paraissait plus âgé, et cela ne peut
étonner quand on pense à ce qu’il a souffert et quand on se rappelle
sa vie, où campagnes et grands faits se succèdent sans
interruption."
22 FÉVRIER 1793 : BONAPARTE, PREMIÈRE
OPÉRATION MILITAIRE, À LA MADDALENA
 

Toute première bataille de Napoléon Bonaparte, dans l'archipel


de La Maddalena, entre Bonifacio et le nord-est de la Sardaigne,
est en fait une diversion des l’attaque française sur la Sardaigne,
l’attaque principale étant sur Cagliari.
 

• Voici quelques extraits du rapport rédigé le 22


mars 1793 par Bonaparte lui-même sur cette
affaire:

A quatre heures de l'après-midi [22 février], ils sont arrivés


aux îles de la Madeleine. Ils ont opéré le débarquement à l'île
Saint-Etienne [150 grenadiers du 52e régiment et 450 hommes du
2e bataillon de volontaires corses], ayant à leur tête leurs deux
lieutenants-colonels [Quenza et Bonaparte]. La résistance des
ennemis à été vaine: nous n'avons eu qu'un seul homme de blessé.
Si, à ce moment même, l'on eût envoyé les effets nécessaires pour
construire une batterie vis-à-vis le village de la Madeleine et si, à
l'entrée de la nuit, l'on eût tenté la descente, il est bien probable que
nous eussions rempli promptement l'objet de notre mission, mais
l'on a perdu le moment favorable qui, à la guerre, décide de
tout (1)[…].

Pendant la journée du 23, nous nous sommes emparés de la


Tour de Saint-Etienne, tour bien flanquée, avec un fossé, un
pont-levis, vingt-cinq hommes de garnison [des Suisses] et trois
pièces de canon. […]. Dans la nuit du 23 au 24 [le matériel avait
été enfin débarqué dans la journée], nous avons commencé à tirer
des bombes et à jeter des boulets rouges dans la ville de la
Madeleine. Nous avons continué toute la journée du 24 et du 25.
Nous avons quatre fois mis le feu aux maisons de la Madeleine.
Nous avons incendié un chantier de bois et nous avons à peu près
écrasé quatre-vingt maisons. L’île de la Madeleine avait été
ravitaillée et avait reçu un renfort de huit cents Sardes : trois ou
quatre mille Sardes se faisaient voir sur les côtes de la Sardaigne
[…].
Cependant, ce qui nous étonna, ce fut la fuite précipitée de
notre corvette [la Fauvette] qui abandonna son convoi pour
prendre le large [l'équipage s'était mutiné]. Le citoyen Colonna-
Cesari [le commandant de l'expédition], qui s'embarquait dessus,
nous envoya, le 25, l'ordre de nous retirer promptement [...]. Nous
travaillâmes sans perdre de temps; unis à tout le reste de notre
petite armée, nous parvînmes à transporter toutes nos pièces avec
des peines infinies jusqu'au bord de la mer. Mais arrivés là, nous
trouvâmes que les bâtiments du convoi s'étaient déjà mis à la voile.
Nous n'eûmes plus que le temps de faire embarquer notre troupe et
de jeter à la mer notre mortier et nos canons [deux pièces de
quatre] […].

Voilà le récit fidèle, citoyen ministre, de cette honteuse


expédition. Nous avons fait notre devoir; et les intérêts comme la
gloire de la République exigent que l'on recherche et que l'on
punisse les lâches ou les traîtres qui nous ont fait échouer.
 

• Les coupables ne tardèrent pas être nommés. 

Ainsi, le 14 mars 1793, à l'initiative de Lucien, la société


républicaine de Toulon écrivait cette adresse à la Convention :
Le malheureux succès de l'expédition de la Sardaigne doit lui être
principalement attribué. Le conseil exécutif avait donné des ordres
pour qu'elle fût attaquée au mois de novembre dernier: Paoli,
requis par le général qui commandait l'armée d'Italie, refusa de
fournir les gardes nationales qui lui étaient demandées pour cette
expédition, et prétendit n'avoir d'ordre à recevoir que du conseil
exécutif. 

Lorsqu'enfin l'escadre de l'amiral Truguet eut abordé en


Corse, et que l'embarquement des gardes nationales était sur le
point d'être effectué, on sut, par des combinaisons affreuses,
déjouer encore le succès de cette entreprise, en semant la division
entre les Corses et les troupes françaises, au point que les premiers
refusèrent d'agir de concert, et se réservèrent de faire une attaque
particulière dans la partie du Nord, tandis que les autres se
portèrent avec l'escadre sur Cagliari.

C'est à cette funeste division que nous devons le défaut de nos


succès et la honte de notre retraite. Paoli est coupable de cette
division et des malheurs qui l'ont amenée; j'en appelle au
témoignage de quelques députés corses, à qui on la fit pressentir, et
qui l'annoncèrent avant même que les troupes françaises eussent
débarqué dans leur île.

Le 2 avril suivant, Paoli était décrété d’arrestation. Le 24 mai,


ses partisans pillèrent et brulèrent la maison familiale des
Bonaparte à Ajaccio. Quelque jours plus tard, la famille décida de
quitter la Corse et de s’embarquer pour la France…
 

• Qu’en dit l’Empereur ?

Napoléon garda longtemps le souvenir de cette équipée. Il


rappellera en 1794, dans ses états de services, qu’il “commandait
un bataillon à la prise de l’île de la Magdeleine”. Au début de ses
Mémoires sur la guerre d’Italie, il mentionne cette contre-attaque
que commandait Colonna-Césari.

A Sainte-Hélène aussi, il dira que ce fut en Sardaigne qu’il vit


le feu pour la première fois. Mais il gardera toujours le silence
sur le rôle qu’il joua. Bonaparte était en sous-ordre; il avait dû
assister à une déroute houleuse, en spectateur impuissant; il avait
dû laisser aux mains du roi de Sardaigne le mortier qu’il avait
pointé de sa main; il n’était pas homme à ne pas garder inguéris-
sable une pareille blessure à son amour-propre. Il ne devait jamais
pardonner pareille chose à Césari et à Paoli…

(1) à propos du moment favorable qui, à la guerre, décide de


tout, voyez la conférence de Jean Mouton sur la fenêtre de tir de
la bataille d'Austerlitz sur la chaine Youtube du Cercle Napoléon:
https://www.youtube.com/watch?v=8_pzBnrqdzE

la fenêtre de tir de la bataille d'Austerlitz, par Jean Mouton


23 FÉVRIER 1814 : NAPOLÉON REÇOIT
L’OFFRE D’UN ARMISTICE
 

En pleine Campagne de France, les Autrichiens souhaitent-ils


un armistice ?
 

• Lisons ce qu’en raconte le comte de Ségur:


Le 23 février enfin, se sentant ainsi renforcé, on paradait,
déployé devant Troyes, sur les hauteurs de Barberey; une
nombreuse cavalerie allait être lancée en avant pour nous
reconnaître, quand l’apparition de l’armée impériale, débouchant
sur trois colonnes, fit évanouir tout cet appareil. Il était à peine huit
heures du matin, et déjà, chez le roi de Prusse, un nouveau conseil
s'était rassemblé. 

Schwartzenberg y prit la parole. Ce fut pour proposer la


retraite. Il allégua l’attaque inattendue d'Augereau, en arrière à
gauche des coalisés; déjà sa marche, victorieuse vers Genève,
atteignait la Suisse, menaçait leur base d'opération. Bubna essayait
en vain de résister; il criait au secours ! Il fallait, de ce côté,
détacher cinquante mille hommes, sans quoi bagages, ambulances,
magasins, renforts, enfin tout ce qui, sur une ligne capitale, occupe
l'intervalle du point de départ au point d'action, serait en péril. 

Eux-mêmes, s'ils perdaient une bataille, que deviendrait leur


retraite ? Passerait-elle intacte devant cette armée de Lyon prête à
ressaisir la Franche-Comté ? Dévierait-on en Lorraine et en Alsace,
pour l'éviter ? Mais quoi: se risquer entre les citadelles de ces
provinces, au travers de leurs fleuves, de leurs montagnes, de leurs
défilés, et de leurs populations guerrières, déjà soulevées ? Il était
donc plus prudent de se rapprocher de sa base, de raccourcir ainsi
cette trop longue ligne d'opérations, et, dans le cas d'un revers, la
longueur d'une aussi périlleuse retraite. 

Metternich appuya ces considérations de raisons encore plus


puissantes; cet avis passa: et aussitôt malgré leur force quadruple
de la nôtre, les coalisés n'hésitèrent plus à se retirer. Ils poussèrent
encore plus loin la prudence. Pendant que, derrière un rideau de
troupes légères, laissées sur les hauteurs de Barberey, l'armée
ennemie achevait de repasser Troyes et la Seine, un parlementaire
se présenta à nos avant-postes.

Il apportait, au nom de Schwartzenberg, l'offre réitérée d'un


armistice, la promesse d'une prompte paix, et demandait à parler à
l’Empereur. Il n'alla pas loin: il le trouva au hameau de Châtres,
entre les quatre murs tout nus de la chaumière d'un charron, où il
venait de passer la nuit. Cet envoyé était un prince de Lichtenstein,
aide de camp du généralissime. Sa mission en parut plus
significative. Il apportait une réponse de l'empereur d'Autriche.
Elle était pacifique; elle avouait le désappointement résultant de
revers inattendus; elle reconnaissait dans notre Empereur
l'ascendant d'une éclatante et ancienne supériorité renaissante.
L'attitude, les paroles de l'aide de camp furent d'accord avec l'esprit
de cette dépêche et ce qu'il venait demander. 

Quelque peu sûre que fût cette occasion de sonder les


intentions de ses ennemis, Napoléon essaya de s'en servir. Il
interpella ce parlementaire. "Le plan favori de l'Angleterre avait
donc enfin prévalu dans les conseils des coalisés ! Leur guerre était
devenue personnelle. C'était décidément à sa dynastie qu'on en
voulait." 

L'aide de camp protesta vivement contre cette supposition.


Mais l'Empereur lui en prouva la réalité: il lui montra le duc de
Berry à Jersey; le comte d'Artois, le duc d'Angoulême, l'un, suivant
de loin l'armée coalisée; l'autre, marchant avec le quartier général
anglais; et, ce qu'il ne pouvait se persuader, l'empereur d'Autriche,
son beau-père, paraissant lui-même concourir au détrônement de sa
fille ! 

Ici l'Autrichien se récria plus fortement encore: "Un semblable


projet serait une idée contre nature; son empereur ne s'y prêterait
jamais ! Quant à la présence des Bourbons, on ne devait la
considérer que comme un moyen de guerre, ou plutôt d'obtenir une
paix dont sa mission prouvait assez le désir." 

Napoléon, satisfait, répondit qu'il voulait coucher à Troyes que,


le lendemain, il enverrait un général négocier l'armistice; et,
Berthier ayant écrit dans ce sens au généralissime, on congédia le
parlementaire. 
 

• Que veulent réellement les Alliés ?

Aucun des trois souverains alliés ne veut laisser Napoléon sur


le trône de France. Si l’Autrichien et le Prussiens optent pour le
retour des Bourbons, Alexandre, lui, y verrait bien Bernadotte… 

Les trois alliés demandent que la France revienne dans ses


limites de 1789 et perde la rive gauche du Rhin. C’est le général
de division comte Flahaut qui est envoyé par Napoléon auprès des
plénipotentiaires autrichiens, russes et prussiens pour les
pourparlers. Flahaut tente de gagner du temps en souhaitant une
nouvelle victoire des Français, et espère une paix séparée avec
l’Autriche. Toute suspension d’armes est refusée. Les discussions
trainent en longueur,  à Châtillon, puis à Lusigny, sans résultat,
jusqu’au 28 février.

Mais les Alliés sont-ils vraiment sincères ? La diplomatie


anglaise les a fortement motivés à n’en rien faire, et, dès le 1er
mars, ils signeront avec Lord Castlereagh le pacte de Chaumont:
tous les ans, pendant vingt ans, ils recevront 150 millions de francs
pour renoncer à toute paix séparée avec la France et purger la
France et l’Europe du jacobinisme botté. Encore et toujours la
Cavalerie de Saint-George…

24 FÉVRIER 1785 : CHARLES BONAPARTE


MEURT À MONTPELLIER 
 

• Lisons “les Bonaparte à Montpellier, par M.


Grasset-Morel, dans la section des Lettres de
l’Académie des Sciences et Lettres de Montpellier,
2e série, tome 3e, 1900-1907.

Vers la fin de 1784, débarquaient à Montpellier deux inconnus,


l'un dans la force de l'âge et l'autre, son fils, encore adolescent.
Craignant de s'y trouver bien isolés, ils arrivaient munis de lettres
de recommandation pour M. Bimar, grand entrepreneur de
diligences, et pour M. Durand de Saint-Maurice, président à la
Cour des comptes, aides et finances. Ils portaient un nom étrange,
et ceux qui l'entendaient prononcer le remarquaient à cause de son
origine italienne. 

Qui se serait douté que, dans quelques années, après s'être rendu
célèbre en France et au delà des monts, les échos glorieux le
rediraient, non seulement en Europe, mais aux quatre coins de
l'Univers. Ces deux hommes étaient Charles de Buonaparte et son
fils aîné Joseph, l'un âgé de trente-huit ans et l'autre de seize
environ. La famille Buonaparte ou Bonaparte, comme on l'a
appelée depuis, était d'origine italienne et avait émigré de Florence
en Corse. 

Pendant le premier Empire, des généalogistes découvrirent que


ses aïeux avaient régné à Trévise. Napoléon trouva suffisante sa
propre renommée et dédaigna de rechercher celle de ses
ascendants, aussi n'attacha t-il aucune importance à cette
découverte; il n'en fut pas de même, dit-on, de l'empereur
d'Autriche, qui voulut se persuader que son gendre n'était pas un
parvenu. Quoiqu'il en soit, Charles Bonaparte était gentilhomme et
fut, comme tel, député de la noblesse Corse à la Cour, en 1777.

Il avait fait confirmer ses preuves de noblesse par d'Hozier de


Sérigny, juge d'armes. Homme paisible et doux, il s'était rangé
cependant du côté de Paoli et avait lutté d'abord pour
l'indépendance de l'île, poussé probablement par sa femme Letizia
Ramolino, qui était au contraire d'un caractère très décidé. Puis,
ayant embrassé la cause de ses nouveaux maîtres, il se fit bien voir
du gouverneur de la Corse, le comte de Marboeuf. Grâce à la
protection de celui-ci, grâce aux lettres de recommandation qu'il
obtint du grand duc Léopold auprès de sa soeur Marie-Antoinette,
reine de France, des bourses pour l'éducation de plusieurs de ses
enfants lui furent accordées.

En 1783, pendant un voyage sur le Continent, Charles ressentit


les premières atteintes du mal qui devait l’emporter. Se trouvant
à Paris, il eut recours aux soins du docteur de la Sonde, médecin de
la Reine, qui apporta un grand soulagement à ses douleurs.
Néanmoins, sa santé préoccupait Letizia, qui ne cessait de lui
prodiguer les soins les plus empressés. L'année suivante, la
maladie faisait de nouveaux progrès; il en fut tellement affecté que,
sur les instances des siens, il se décida, à reprendre le chemin de
France pour se remettre entre les mains de ce même docteur. Il lui
en coûtait cependant d'abandonner sa femme dans un état de
grossesse très avancé de cet enfant qui devait être le futur roi de
Westphalie.

Enfin il s'embarqua, accompagné de son fils aîné Joseph et de


son beau-frère Fesch, le 9 novembre 1784. La traversée fut
pénible et les fatigues du voyage augmentèrent ses souffrances à
tel point que, en débarquant, il se vit obligé de renoncer à aller
jusqu'à Paris retrouver le docteur de la Sonde. Il s'arrêta d'abord à
Aix, ou il devait laisser au Séminaire son jeune beau-frère, qui
allait y poursuivre ses études théologiques. Là, il se mit entre les
mains de l'un des meilleurs praticiens de Provence, le docteur
Tournatori, qui jugea son cas très grave et lui conseilla vivement
d'aller jusqu'à Montpellier, où il trouverait, comme à Aix, un
climat assez semblable à celui de son île, et de plus grandes
ressources au point de vue médical. Ne pouvant affronter, au début
de l'hiver, un voyage à la Capitale, il se résigna à prendre le
chemin du Languedoc, toujours suivi de Joseph, après avoir laissé
Fesch au Séminaire d’Aix.

Peu fortuné et chargé d'une nombreuse famille, Charles


voyageait la bourse légèrement garnie. En arrivant à
Montpellier, il alla loger dans une modeste auberge, ne sachant pas
si les médecins qu'il devait consulter lui ordonneraient un
traitement et un séjour plus ou moins longs.

La duchesse d'Abrantès, montpelliéraine par sa naissance,


dans ses Mémoires, raconte que son père, M. de Permon, qui,
après s'être enrichi dans les subsistances de l'armée de
Rochambeau, avait occupe une place de finances à Ajaccio, se
trouvait alors à Montpellier, où il remplissait les mêmes fonctions.
Ayant appris, un certain jour, que deux habitants de la Corse
étaient arrivés dans la ville, il eut la curiosité de savoir si, par
hasard, il ne retrouverait pas d'anciennes connaissances d'Ajaccio.
Il se mit en campagne et finit par découvrir leur logis. 

Quelle ne fut pas sa surprise de reconnaitre Charles


Bonaparte, avec lequel il avait été très lié dans l'île, accompagné
de son fils Joseph et non de son beau-frère Fesch, comme le dit par
erreur l'auteur des Mémoires. Il souffrit de les voir si mal logés et
parvint, grâce à ses instances et à celles de sa femme, à leur faire
accepter l'hospitalité sous son toit, où les soins que nécessitait l'état
de la santé du père seraient assurés.

Tous ceux qui ont parlé du séjour de Charles Bonaparte à


Montpellier se sont naturellement reportés au récit de Mme
d'Abrantès, qui paraissait plus que personne à même de ne pas se
tromper. Cependant, nous relevons, dans ce passage de ses
Mémoires, quelques erreurs. D'abord, Mme de Permon qui venait
de mettre au monde sa fille Laure, aurait pu à la rigueur offrir
l'hospitalité aux deux étrangers, mais eut été bien en peine de leur
prodiguer ses soins. Du reste, il semblerait qu'elle ne se trouvât à
Montpellier que par occasion, venant y faire ses couches ou bien
ayant été surprise par les douleurs de l'enfantement. D'après l'acte
de baptême de cette fille, son mari, étant receveur particulier des
finances du diocèse de Narbonne, avait sa résidence dans cette
ville et ne se trouvait à Montpellier, en ce moment-là, qu'à cause
des Etats de Languedoc, qui y tenaient leurs assises à la fin de
l’année […]. 

Après que la Faculté se fut prononcée pour un séjour prolongé


de Charles Bonaparte à Montpellier, celui-ci songea à quitter
l'auberge et à prendre un appartement. Il jeta son dévolu sur une
petite maison retirée, hors la ville, entre les murailles et le cours
des Casernes, dans la rue appelée aujourd'hui Castilhon et à l'angle
N.-O. de la rue du Cheval-Vert; elle est encore telle à peu près
qu'elle était alors, avec son seul étage au-dessus du rez-de-
chaussée. 

Ce quartier ne comprenait que de rares maisons entourées de


jardins; c'était réellement le faubourg. La personne qui loua cette
maison au gentilhomme corse était une dame Delon, qui le soigna
avec un dévouement de chaque jour. Il recevait là, en dehors des
Montpelliérains auxquels il avait été recommandé, comme nous
l'avons vu, l'abbé Pradier, aumônier du régiment de Vermandois,
en garnison dans la ville, et l'abbé Coustou, jeune vicaire de Saint-
Denis. 
Cet entourage n'est certes pas celui d'un libre-penseur, d'un
philosophe, comme on disait alors, d'un ennemi irréconciliable de
la religion, que certains auteurs ont voulu voir en Charles
Bonaparte. Profondément attaché à la foi de ses pères, au contraire,
dès les premiers temps de son séjour à Montpellier, se trouvant
dans l'impossibilité de sortir, il manifesta le désir de recevoir chez
lui le sacrement de l'eucharistie. M. Manen, curé de Saint-Denis, sa
paroisse, prenant en considération son état de santé, accéda à sa
demande et confia le soin de lui apporter le viatique à son vicaire
l'abbé Coustou; c'est la source naturelle des rapports fréquents qui
s'établirent entre le malade et le jeune prêtre. 

Ce séjour forcé à Montpellier était pour le gentilhomme corse


un véritable exil qui venait aggraver ses souffrances. Sa pensée se
reportait continuellement sur la patrie absente, sur sa femme, sur
ses enfants, séparés de lui par l'immensité de la mer. Il lui arrivait
souvent de faire ses confidences à l'abbé Coustou ; il l'entretenait
de sa vie passée, de ses jeunes années écoulées dans la lutte pour
l'indépendance de l'île, de la force d'âme de Letizia, sa femme,
véritable amazone, qui ne craignait pas de le suivre dans le maquis,
enfin de ses nombreux enfants et du cadet, alors à l'école de
Brienne, sur le compte duquel il fondait de grandes espérances.
“Celui-ci, je crois, disait-il, fera son chemin, mais je ne le verrai
pas”. Pour si convaincu qu'il fût du brillant avenir de cet enfant, il
ne pouvait certes pas supposer que sa prédiction irait bien au delà
de ses espérances.

Tandis que ce dernier jouissait d'une bourse à l'École de


Brienne, Joseph en avait obtenu une de son côté au collège
d'Autun, l'aînée de ses filles, Marie-Anne, en avait une troisième à
Saint-Cyr. Charles Bonaparte se montrait très reconnaissant de ces
faveurs et ne cessait dans ses entretiens de louer la bonté du roi à
son égard. 

Malheureusement, ni les soins assidus de la femme Louise


Delon, ni le traitement ordonné par le professeur Vigarous, son
médecin, ne parvenaient à enrayer le mal, qui faisait rapides
progrès; l'alimentation avait lieu péniblement, les vomissements
redoublaient de fréquence; la Faculté se prononça pour un ulcère
de l'estomac, vers le pylore. Néanmoins, le malade acceptait ses
souffrances avec la plus grande résignation; il se préoccupait
surtout de sa femme, à peine rétablie de ses couches; il
recommandait bien qu'on lui cachât la gravité de son état, car elle
aurait trop souffert, si elle fût parvenue à connaître la vérité,
empêchée qu'elle était de se mettre en route pour lui prodiguer ses
soins.

Lorsque la maladie toucha à son terme et que tout espoir fut


perdu, sentant sa fin approcher, Charles Bonaparte désira recevoir
les suprêmes consolations de la religion. Ce fut son autre ami,
l'abbé Pradier, qu'il désigna pour lui administrer les derniers
sacrements. 

Le 24 février 1785, il rendait son âme à Dieu. Ses restes ne


devaient pas reposer dans ce sol natal qu'il avait aimé, près de ceux
qu'il chérissait. D'abord, le trajet eût tant été bien long, et les
modestes ressources de la famille ne lui permettaient pas de grands
frais. Il fut donc décidé que l'inhumation aurait lieu à Montpellier.
L'abbé Pradier, qui avait assisté Charles dans son agonie, en sa
double qualité de prêtre et d'ami, fit une proposition qui fut
acceptée avec reconnaissance. Ayant été autrefois religieux
cordelier, il entretenait d'excellents rapports avec le couvent de
l'Observance; à force de démarches, il obtint pour la dépouille du
gentilhomme corse une place dans le caveau des Cordeliers, ainsi
que le constate l'acte de décès inscrit sur les registres de la paroisse
de Saint-Denis, qui mérite d'être reproduit.

“L'an que dessus, lit-on, et le vingt-quatre février, Messire


Charles Buonaparte, ancien député de la noblesse des Etats de
Corse à la Cour, époux de dame Marie-Letitia de Ramolini. décédé
le même jour, âgé d'environ trente-neuf ans, muni des sacrements
de l'Église, a été inhumé dans un des caveaux du couvent des RR.
PP. Cordeliers. Présents: MM. Méjan. et Coustou prêtres vicaires,
et M. Pradié, prêtre aumônier du régiment de Vermandois, signés
avec nous curé. - Pradié, prêtre, Méjan, Coustou, Manen, curé”
[…].

Son père mort, Joseph se trouva bien seul à Montpellier.


Certainement, ce jeune homme de seize ans se vit entouré par les
quelques personnes de la ville qui s'étaient intéressées au sort des
exilés. Les mémoires prétendent même que Mme de Permon, qui
était de l'âge de sa mère, le recueillit chez elle. Quoi qu'il en soit,
son oncle Fesch. que l'on avertit au dernier moment de l'imminence
du danger, accourut aussitôt d'Aix, mais arriva trop tard pour
recevoir le dernier soupir de son beau-frère...
25 FEVRIER 1796 : JEAN-NICOLAS STOFFLET
EST FUSILLÉ

Jean-Nicolas Stofflet, né en 1753 à Bathelémont (Lorraine),


s’engage, à 17 ans, dans le régiment de Lorraine-Infanterie. En
1787, il entre au service du comte de Maulévrier comme garde
principal des bois. Sa sœur, gouvernante des enfants du comte, est
en Vendée où vit une petite colonie lorraine. Stofflet aurait-il sauvé
la vie du comte de Maulévrier à Lunéville ? Aurait-il rencontré le
marquis de La Rochejaquelein ? 

De fait, il rejoindra les Vendéens quand ceux-ci se révolteront


contre la Révolution pour défendre leur religion et leurs principes
royalistes; avec Cathelineau, qui est sans aucune instruction, ce qui
tranche, notons-le, avec la culture des grands chefs. Mais “eux
deux sauront commander sans défaillance à leurs maîtres de la
veille” (Émile Gabory).

On retrouve Stofflet lors des affaires de Fontenay, Cholet,


Saumur, Beaupré, Laval et Antrain. A Doué, il est grièvement
blessé. En 1794, il succède à Henri de La Rochejaquelein comme
général en chef de l’armée royaliste. Il signe en mai 1795, ainsi
que Charrette, un traité de paix qui sera vite caduc.

Mais dans la nuit du 23 au 24 février 1796, il est surpris, blessé,


fait prisonnier, et fusillé à Angers le lendemain. Il refuse que
l’on lui bande les yeux: “Un général vendéen n’a pas peur des
balles.” Puis il commande lui-même le feu en lançant: “vive la
religion, vive le roi.”
 

• Lisons les mémoires de Victoire de Donnissan de


La Rochejaquelein:

Stofflet était à la tête des paroisses du côté de Maulévrier. Il


était Alsacien [en fait, il était lorrain], et avait été soldat. Lors de la
révolte, il était garde-chasse au château de Maulévrier: il avait
alors quarante ans; il était grand et robuste. Les soldats ne
l'aimaient pas, parce qu'il était dur et brutal; mais ils lui obéissaient
mieux qu'à personne, et cela le rendait fort utile. 
Les généraux avaient grande confiance en lui; il était actif,
intelligent et brave. À la fin, de mauvais conseillers se sont
emparés de son esprit, l'ont gouverné et lui ont inspiré un orgueil,
une vanité qui ne lui étaient pas naturels, et qui lui ont fait
commettre de grandes fautes et causé beaucoup de tort au parti.
Alors qu'il était, comme tout le monde, dévoué à faire le mieux
possible, sans songer à lui.
 

• Et cette belle critique du livre de Jean-Joël


Brégeon, Les héros de la Vendée, éditions du Cerf
(2019), dans la revue Iliade:

Si la guerre de Vendée compte parmi les épisodes les plus


sanglants de l’histoire de France, son récit relève d’une épopée
grandiose et tragique que Napoléon qualifia de “guerre de géants”.
C’est aux chefs de cette insurrection que Jean-Joël Brégeon,
historien spécialiste de la Révolution française et du Premier
Empire, consacre son dernier livre Les héros de la Vendée
(éditions du Cerf), restituant à travers une galerie de portraits la
dimension épique de leur engagement qui les conduira jusqu’au
sacrifice ultime.

Blancs ou Bleus, la révolte d’une génération

Jean-Joël Brégeon considère que la Vendée représenta la


“révolte d’une génération”. La Révolution française permit, chez
les républicains comme chez les royalistes, l’émergence d’une
nouvelle génération de chefs militaires qui bouleversa les concepts
de la guerre classique. Au sein des armées de la République,
Marceau, Hoche, Kléber, Travot sortirent du rang à la faveur de la
Révolution. 
Mais ceux-ci avaient choisi le métier des armes, pour affronter
“l’effroi du monde, la tragédie de la vie, l’incertitude des
jours…” (Sylvain Tesson), tandis qu’au contraire, les futurs
généraux insurgés aspiraient, pour la plupart, à mener une vie
paisible, loin du fracas des armes et des tumultes des batailles.
Sans la Révolution, tous seraient restés de parfaits inconnus. Mais
c’était sans compter l’imprévu de l’Histoire, transformant leur vie
en destin, et changeant leur statut d’hommes ordinaires en celui de
héros.

Les chefs de l’armée blanche sont issus, en effet, de milieux


divers, la plupart n’ont pas d’expérience militaire, mais si les
hommes du peuple ne manquent pas, l’essentiel du commandement
revient à la noblesse. Ces chefs sauront évoluer dans leur stratégie,
par choix ou poussés par les évènements. La guerre de Vendée
connaîtra ainsi deux phases distinctes: aux grandes batailles
rangées du début du conflit succédera la “petite guerre”, faite de
coups de main et d’embuscades, s’appuyant sur le soutien de la
population. “La Vendée a fait réfléchir les plus grands stratèges,
Napoléon, Jomini, Clausewitz. Plus tard en Russie, les chefs
bolcheviks nourriront leur réflexion de cet exemple”.

Avec honneur, fidélité et panache

Une phrase, sous la plume de Jean-Joël Brégeon, résume


l’engagement des généraux vendéens: “Les Vendéens ne se
battent pas pour la victoire finale, ils se battent pour l’honneur, par
fidélité”. "Honneur", "fidélité", ces mots reviennent souvent dans
le récit, tout comme celui de "panache". Beaucoup sont sans
illusion sur l’issue tragique de la bataille mais tous plongent sans
hésiter dans le chaudron rougeoyant de l’insurrection. Pour
illustrer cette attitude, Jean-Joël Brégeon cite Rabelais, “parce que
les gens libres, bien nés, bien éduqués, vivant en bonne société, ont
naturellement un instinct, un aiguillon qu’ils appellent honneur et
qui les pousse toujours à agir vertueusement”.

À la lecture de la vie de ces généraux, on reste subjugué devant


leur droite attitude, guidés par une éthique chevaleresque mêlant
ardeur au combat et magnanimité pour les vaincus, affrontant avec
lucidité leur destin malgré des conditions dantesques. Cathelineau,
Lescure, d’Elbée, Bonchamps passèrent comme des éclairs
fulgurants dans l’Histoire, fauchés dès les premiers mois du
soulèvement. La Rochejaquelein, celui qui “ne voulait être qu’un
hussard, pour avoir le plaisir de se battre”, mourra à 21 ans, moins
d’un an après son engagement dans l’insurrection. Charette et
Stofflet, les deux derniers “géants”, tinrent trois ans à peine face
aux armées républicaines lancées à leurs trousses.

Le livre présente également l’entourage de chaque chef


vendéen sous forme de courtes notices biographiques. Leur lecture
laisse songeur: enfants ou vieillards, nobles ou paysans, hommes
ou femmes, mères, sœurs ou filles, tous ou presque ont péri, sur
l’échafaud, fusillés, noyés, tués au feu. Leur évocation laisse
deviner l’ampleur du cataclysme qui dévasta la Vendée martyre.

Au-delà du caractère quasi romanesque de la vie des “héros de


la Vendée”, Jean-Joël Brégeon consacre la troisième partie de son
livre aux abondantes sources historiographiques – plus de
cinquante mille – traitant du soulèvement de 1793 et aborde
notamment la controverse sur la reconnaissance du génocide
vendéen, née de la célébration du bicentenaire de la Révolution.
S’il se refuse à confondre histoire et mémoire, l’auteur reconnaît
que le débat ainsi engendré a fait progresser la recherche historique
et démontré la réalité de “l’extermination de populations civiles”
par la République.

En tête de chacun des chapitres consacrés à la vie d’un général


vendéen, Jean-Joël Brégeon a choisi de faire figurer une citation
appropriée de l’Iliade. C’est un choix heureux. À travers son livre,
il dit le courage de La Rochejaquelein qui, comme Hector, affronte
en combat singulier ses ennemis, il dit la ruse de Charette qui,
comme Ulysse "aux mille ruses", sut échapper tant de fois à de
nombreux périls, il dit la bonté d’âme de Bonchamps qui, comme
Priam, pardonne à ses ennemis… À trente siècles de distance, c’est
un même sang et une même éthique qui traversent  et portent ces
héros.

La dimension éminemment tragique de l’insurrection


vendéenne, qui fut un échec sanglant, ne fut pas vaine pour autant.
“Si les dieux ont infligé la mort à tant d’hommes, c’est pour
donner des chants aux gens de l’avenir” (VIII, 579–580) nous dit
Homère dans l’Iliade. Selon la formule de Dominique Venner dans
son livre Le samouraï d’Occident, la geste héroïque des Vendéens
a ainsi “transcendé le malheur en beauté”.
25 ET 26 FÉVRIER 1814 : CAMPAGNE DE
FRANCE, NAPOLÉON À TROYES

La ville de Troyes avait été depuis le 7 février 1814, envahie et


pillée de fond en comble par l’ennemi. 70 000 alliés, soldats
russes, autrichiens, bavarois, wurtembergeois, transitant par la
ville, exigent nourriture, vins et alcools, menaçant les habitants
d’incendier leurs maisons, ou même de les tuer, s’ils n’ont pas ce
qu’ils exigent. Les viols ne s'y comptent plus. 

On y voit pêle-mêle cavaliers, fantassins, artilleurs, ainsi


qu’une multitude de chariots destinés à transporter les produits
des pillages. Les passants, en pleine rue se retrouvent dépouillés de
leur montre, de leur argent, de leurs chaussures et même de tous
leurs vêtements. Boutiques et maisons sont pillées, leurs
propriétaires maltraités et dépouillés. Les habitants ne peuvent que
se réfugier dans les caves ou les combles de leurs maisons
envahies par les pillards. Certaines habitations sont la proie des
flammes, avec leurs habitants enfermés à l’intérieur…

Troyes est frappée de multiples réquisitions par le prince de


Würtemberg. Des monceaux de viande, poissons, légumes, œufs,
café, sucre, vins, champagne, rhum, cognac, sucreries, chocolat,
farine, riz, sel, avoine, foin, chaussures, cuirs, draps, toiles fines,
fers à cheval, clous, sont exigés journellement en plus du pain et
des bougies.

Le 8 février, arrivent à Troyes le roi de Prusse et son fils le


prince royal Frédéric-Guillaume, le Tsar de Russie avec son
frère le grand-duc Constantin, l’empereur d’Autriche et son fils le
prince impérial Ferdinand-Charles. Le 16 février, alors que le
pillage est intense, les incendies nombreux, les agressions
permanentes, les viols encore plus fréquents, il est demandé au
maire d’assurer pour le lendemain la fourniture en pain, vin et
viande pour nourrir 24 000 hommes !

Dès le 23 février, on perçoit au loin le son du canon. Les Alliés


organisent leur retraite, coupent, détruisent ou brûlent les ponts, et
multiplient destructions et incendies.
Dans la soirée, les 400 hommes d’une brigade du 5e de
cavalerie affrontent et repoussent les 1500 soldats d’un corps
ennemi, qui perd dans cette chasse, 300 chevaux et environ 265
prisonniers.

Le 24 février, au petit matin, les Français, débouchant par les


deux routes de Nogent, s’établissent dans la plaine de Troyes.
En avant de la ville, la division des dragons Roussel, bien qu’en
nombre largement inférieur, attaque les dix-huit escadrons et les
seize canons de la cavalerie du prince de Lichtenstein et les force à
une retraite précipitée. Arrive alors le général Ameil, avec une
brigade de cavalerie légère et le 22e dragons, qui achève le travail
et prend six canons et deux cent quatre vingts chevaux.

Dans Troyes, ne restent, pour protéger le départ précipité des


Alliés, que le général Wolkmann et une brigade bavaroise, avec de
l’artillerie. Après quelques échanges d’obus et sous la menace que
soit brisée, par une batterie de douze, la porte de la Prèze, un
parlementaire allié propose que le reste de ses troupes quitte de
nuit sans combat les lieux. Il précise qu’en cas de refus, ils
mettraient le feu à cette ville qui avait déjà beaucoup souffert de
leur occupation. Pour ne pas voir croître la désolation, l’Empereur
accepte la proposition Alliée.

Le lendemain, 25 février 1814, le général Nansouty, à la tête de


la cavalerie de la garde, entre dans la ville, et nettoie les dernières
poches de résistance en faisant cent quatre vingts prisonniers.

L’Empereur entre dans Troyes à 11 heures, sous les


acclamations de la population. Il est reçu dans la joie de la
libération, tous les habitants désirent le revoir, et reconnaissent que
sa cause est devenue la leur. Napoléon établit son quartier général
à Troyes, il a fait, dans la reprise de cette ville, 3000 prisonniers,
sans compter les 1000 blessés qui étaient hospitalisés. Il destitue le
préfet et en nomme un autre à sa place, fait exécuter ceux qui ont
trahi en ayant accompagné ou guidé les troupes ennemies, et ceux
qui, pendant l’occupation alliée, avait porté les insignes de
l’Ancien Régime.

Mais le 27 février, Napoléon est obligé de quitter Troyes, et le 4


mars, l’ennemi occupe à nouveau la ville…

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