Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
N° 3 - 1988
-
L ’ article proposé ci apr è s est un travail de deux élè ves - ingé nieurs de
l ’ Ecole des Mines de Paris, mené dans le cadre de l ’ enseignement " Systèmes de
production" de deuxi ème année profess é par Hugues MOLET, Vice- Pr é sident de
....
l ’ A F G I Cet article s ' appuie essentiellement sur l ' ouvrage de S SHINGO .
" Système SMED, une r é volution en gestion de production" , il le ré sume et donne
des applications significatives de la mé thode .
1 - POURQUOI LE SMED ?
Dans tous les domaines , le march é é volue vers une demande de plus en plus
.
diversifi ée Quel que soit le produit, le consommateur souhaite se voir proposer
un choix entre plusieurs modè les , la quantit é de chaque modè le diminuant ainsi
.
iné vitablement Cette nouvelle donnée doit venir s ' inscrire dans un système
industriel , cr éé à l ' origine pour de tr è s grandes s é ries , qu ' il faut donc
modifier pour le rendre capable de r é pondre sans gaspillage aux variations du
marché .
C ' est dans cet esprit que fut pr éconisé e la mé thode de gestion en flux
tendus ( juste à temps , Kanban ...
) , qui pr é conise d ' ajuster en permanence la
production à la demande , quitte à ne faire que de petits lots Ces principes , . .
parfaitement appliqué s , conduiraient é videmment à une situation de " z é ro stock " -
Malheureusement , les changements d ' outils et r é glages n écessaires au d ébut
de chaque nouveau lot sont g én éralement longs ( plusieurs heures ) et compliqué s
.
( né cessitant des ouvriers hautement qualifi é s ) En effet , ces changements ayant,
jusqu ' à pr é sent , eu lieu avec une faible fr é quence du fait de la grande taille
des lots, ne se posaient pas en probl ème et n ' ont donc jamais é t é é tudi é s en vue
.
d ' amé liorations é ventuelles Progressivement , leur lourdeur a fini par para î tre
normale , puis iné vitable .
Revue franç aise de Gestion industrielle 0242- 9780 /88 /03 17 12 /$ 3.20/ © Gauthier - Villars
!
ü
li!
C ' est pourquoi les industriels ont pré f ér é traditionnellement une production
-
par lots importants , puisqu ' avec ceux ci , on observe une diminution de l ' effet
relatif des temps de ré glage par rapport aux temps de production effective, comme
le montre le tableau suivant :
Temps de
1 ' opération
Temps de Taille principale Temps d ' opération
de r é glage du lot par pi è ce
8 h lOOp 1 mn 5,8 mn
8 h 1 OOOp 1 mn 1,48 mn
8 h 10 OOOp 1 mn 1,048 mn
Le syst ème SMED ne s ' applique pas aux commandes uniques, mais aux commandes
r é pé titives, en s é parant des lots qui , jusque-là rassembl és en un seul ,
j entraî naient un gaspillage en faisant produire trop ou trop tSt .
il
i
2 - THEORIE DE DEVELOPPEMENT DU SMED
Le SMED, bas é avant tout sur le bon sens , consiste à chercher POURQUOI les
choses sont faites afin de changer le COMMENT elles sont faites Il comporte .
!! quatre grandes é tapes :
i. - éé tape
-
tape 0 : observer ce qui se passe
1 : s éparer les r églages internes et externes
! - é tape 2 : transformer des r é glages internes en r é glages externes
- étape 3 : rationaliser les r églages et fixations.
2.1 - ETAPE 0 : OBSERVER CE QUI SE PASSE
Un changement d ' outil comporte plusieurs types d ' opérations , que l ' on peut
s éparer en quatre phases :
'
Coûts
Figure I
Coû ts
n P
Effets du
reglage
Figure 2
M
.
2.1 1 - Phase de pr éparation
Elle comprend toutes les mesures et calibrages auxquels on doit proc éder :
.
2.1 4 - Phase d ' ajustements
Dans cette phase, des ajustements sont faits par approximations successives
.
apr è s l ' usinage de pi è ces d ' essai Plus la pr écision des mesures et r églages
.
faits pendant la phase pr é c é dente est grande , plus faciles sont les ajustements
! Les parts de temps respectives de ces diff érentes phases sont , dans un
; r é glage classique :
!!: !
1i ; - phase
phase 1 : 30 %
!; : - 2 : 5 %
- phase 3 : 15 %
- phase 4 : 50 %
-.
Les Aigtagu intzAnu sont ceux qui ne peuvent ê tre faits que lorsque la
machine est arr ê t é e
il .
Les ti& gZage i zxteAnu sont ceux qui peuvent ê tre faits lorsque la machine
est en marche, tels que : apporter le nouvel outil de son lieu de stockage, y
rapporter l ' ancien outil , chercher le matériel nécessaire pour fixer l ' outil ,
etc...
Ces concepts , à la base du SMED, sont né s en 1950 à l ' usine Mazda à
.
Hiroshima De grosses presses de moulage y cr é aient un goulot d ' é tranglement .
Lors d ' un changement de moule, et pendant l ' arr ê t de la machine, SHINGO observa
que les ouvriers couraient de tous cSt é s à la recherche d ' un boulon manquant pour
.
fixer le nouveau moule Il a donc é tabli comme proc é dure externe, à effectuer
avant l ' arrê t de la machine , la v érification que tous les boulons sont pr ê ts pour
.
le réglage à ’ venir Le simple fait de trier et ranger les boulons utiles a
.
augment é la productivité de 50 % et fait dispara î tre le goulot d ' é tranglement
I
Le système S MED 21
Une bonne mé thode pour s ' assurer que les r é glages externes sont r
faits pendant que la machine est en marche consiste à utiliser une checké ellement
toutes les pi è ces et phases né cessaires au changement d outil A list de
. ,
-
' cet
l ' utilisation d ' une table de vérification peut s avérer tr è s utile C effet
'
table sur laquelle sont dessiné s toutes les pi è ces et outillages né ' .
est une
.
réglage Les pi è ces correspondantes sont pos ées avant le début du récessaires au
glage sur le
.
dessin qui les repr é sente C ' est un contrBle visuel extr êmement efficace
convient aussi de s ' assurer du bon état de marche de tout ce matériel , avant Il .
1 ' arr ê t de la machine .
Cette premi ère é tape ne modifie donc en rien le mé canisme de changement de
l ' outil , et ne fait qu ' en ordonnancer les taches diff é remment .
Ce n ' est qu ' à
partir de l ' é tape suivante que l ' on voit de r éelles transformations appara î tre .
2.3 - ETAPE 2 : TRANSFORMER DES REGLAGES INTERNES EN REGLAGES EXTERNES
C ' est en 1957, sur le chantier naval Mitsubishi à Hiroshima, que SHINGO a
pour la premi è re fois appliqué cette idé e , sans toutefois
. en r é
l ' importance Etudiant la productivité d ' une rectifieuse, il avait remarqualiser
le centrage des pi è ces à usiner é tait fait sur la table de la rectifieuse é que
.
ellermëme Il eut donc l ' idée d ' installer une seconde table de rectifieuse
d ' y faire s é parément les opé rations de r é glage, pendant le fonctionne afin
ment de la
machine .
Il ne formalisa le concept de transformation des r é glages internes en
ré glages externes qu ' en 1969, lors d ' une visite à l usine Toyota , où il
' proposa
le même type d ' installation sur une grosse presse .
Par dé finition, un r églage interne ne peut ê tre effectué que lorsque la
.
machine est arr ê t ée Né anmoins , si Ton ne considère que la partie v éritablemen
fonctionnelle de la machine ( par exemple les v é rins dans une presse ) , alorst
nombre de r é glages qui é taient internes par rapport à la machine toute enti è re
deviennent externes par rapport à son " coeur
” .
La deuxi ème é tape du SMED consiste à transformer ces r é glages là en ré glages
.
externes par rapport à la machine enti ère Pour appliquer cette é tape, il faut -
donc repé rer tout d ' abord la partie fonctionnelle de la machine , puis ses organes
.
concerné s par le changement En effet , on peut parfois les dé doubler, permettant
ainsi au r é glage de se faire à cBt é de la machine , alors que celle-ci est en
marche .
2.4 - ETAPE 3 : RATIONALISER REGLAGES ET FIXATIONS
Cette é tape concerne principalement les réglages internes qui n ont pas pu
ê tre transformé s en r é glages externes , puisque ce sont eux qui dé '
terminent le
temps d ' arr ê t de la machine
rationalisation :
. De nombreuses techniques concourent à leur
. -
2.4 1 Synchronisation des t âches
Les opé rations sur les grosses machines né cessitent de travailler à la fois
- .
à l ' avant et à l ' arrière de celle ci Dans ce cas , faire ex écuter le changement
en parall è le par deux ouvriers supprime les dé placements inutiles , et acc élè re le
rr .*
.
travail L à o ù un ouvrier seul met 30 mn, deux ouvriers mettront moins de la
.
moiti é du temps, soit environ 10 mn
Avec le syst ème SMED, le changement doit ê tre rapide et simple l ' assistance,
peut donc être faite par n ' importe quel ouvrier non qualifi é , qui ne devra pour
.
cela quitter son poste que quelques minutes Il est donc aisé de sejfaire aider
par quelqu ' un profitant d ' un moment de calme ou par l ' opérateur d ' une machine
.
automatique On peut aussi envisager d ' affecter à temps complet une personne à
l ' aide aux changements d ' outils .
Dans tous les cas , il est essentiel de veiller à la sécurité des opé rateurs ,
et il faut donc mettre au point des mé canismes de synchronisation emp êchant la ;
mise en marche de la machine si l ' ouvrier à l ' arri ère n ' a pas ( par exemple )
baissé une manette .
. - Elimination des ajustements
2.4 2
Dans une opé ration classique de changement d ' outils , la phase d ' ajustements
.
prend de 50 à 70 % du temps de r é glage interne C ' est é norme ! En effet, il
s ' agit d ' amener l ' outil dans sa position de travail , par approximations
successives ( essai , correction , essai , ) ... .
D ' une fa ç on gé nérale, sur les moyens mé caniques , les positionnements sont en
.
nombres illimité s et les déplacements se font en continu Or, dans la pratique,
.
quelques positions seulement sont utilis é es Il suffit donc de les rep érer et de
mettre au point des syst èmes permettant de les retrouver directement Pour cela , .
on peut utiliser cales , gabarits, micro - rupteurs , etc ...
En particulier , il peut ê tre int éressant de conserver la derni ère pi è ce d ' un
lot pour s ' en servir comme gabarit au début du prochain lot identique Ainsi , on .
ne fait l' ajustement qu ' une fois pour toutes : à la premi ère pi è ce du premier
ï lot.
!: . - Utilisation des serrages fonctionnels
2.4 3
Un serrage fonctionnel est un système de fixation maintenant des objets en
.
place avec un minimum d ' effort Par minimum d ' effort , il faut comprendre :
- ne maintenir l ' objet que dans les - directions suivant lesquelles il sera
sollicit é lors de l ' opération de production,
- dans chaque direction , ne pas fixer l ' objet plus qu ' il n ' est né cessaire .
Les mé thodes classiques de fixation, vis , é crou, boulons, ne sont pas du
tout des serrages fonctionnels .
Si le boulon a 15 filets, il ne peut ê tre serr é que si l ' écrou a fait 15
:|
''
.
tours En réalit é, ce n ' est que le dernier tour qui serre le boulon, et le
.
premier qui le desserre Les 14 autres tours ne servent à rien De plus , les .
ü. ! 1!
frottements dOs aux 15 filets viennent s ' opposer à l ' effort de serrage .
i:
Les écrous posent un autre probl ème : celui de leur mise en place à
l ' extr émit é de la tige filet é e , qui ne se fait correctement que si les deux
.
pi è ces sont parfaitement dans l ' axe Cette phase fait g énéralement perdre
beaucoup de temps , et de plus elle contribue notablement à la dé t é rioration des
.
filetages Il faudrait donc pouvoir retirer la pi è ce sans retirer l ' écrou, ce qui
semble paradoxal , le r 61 e de l ' é crou é tant bel et bien de maintenir la pi èce en
!: place !
3
Le système SM ED 23
3 - APPLICATIONS
C ' est essentiellement dans l ' industrie automobile , sur des machines de type
" presse " ou " usinage " , que le SMED a ét é mis au point. C ' est pourquoi la mé thode
est encore peu dé veloppé e dans les autres secteurs technologiques ( chimie ,
production .
..
textile, etc. ) , les industriels objectant qu ' elle n ' est pas adapt é e à leur
Les quelques exemples qui suivent ont pour but de montrer que le SMED est,
non pas une liste de solutions universelles toutes faites , mais une v éritable
mé thode d ' analyse et de r é solution des probl èmes de changement d outils ,
applicable à tout type de production On verra que chacune des é tapes ' de SMED
.
peut se traduire par des modifications paraissant tr è s diff é rentes selon les
machines , avec pourtant toujours le même concept à la base .
5 mise en marche 20
7 desserrer C 28
10 mise en marche 20
i!
1:' ! i
ï
iUÜ
Le système SMED 25
Temps
s
- .
mm
o
"
SÎ <1)1 g '
ï% U8
50 -<sÜ
H P
(
P
1°
P
H TJ
eu
1
S
i>
§
U
•H
ï —O|
i
a
CL) CO
•P
1<
’O D
< T5
<u
Ê
en
0>
a
S
comme suit :
-- pomper
faire joindre la partie mobile d ' un moule à sa partie fixe,
l air pour faire le vide dans le moule,
'
- injecter la r é sine,
- ouvrir le moule et retirer le produit fini .
Le moulage n ' est de bonne qualit é que si un vide presque parfait est é tabli
.
dans le moule Beaucoup de temps est donc consacr é à la deuxi ème phase de
l ' opé ration , non pas seulement lors du changement de moule , mais pour chacune des
pi èces à mouler .
i:
Sur ce genre d ' exemple, on a beaucoup de mal à voir, à priori, comment
pourrait s ' appliquer la méthode de SHINGO .
ü Cependant, en analysant le probl ème , on constate que seule la pompe à vide
.
travaille pendant la phase qui nous int éresse Pendant ce temps , le moule, qui
peut ê tre considé r é comme le " corps " de la machine , ne fait que subir le pompage .
On souhaite donc transformer celui -ci en une opération externe, c ' est à dire --
faire le vide pendant l ' injection de la r é sine ! Cela para î t absurde , et
pourtant, une solution a é t é trouv ée : elle consiste à installer une cuve à vide
! .
d ' environ 1000 fois le volume du moule Lorsque le moule et la cuve seront
connecté s , la pression dans le moule sera diminuée d ' environ 1000 fois en 1
! .
seconde L ' opération interne de la pompe à vide sera donc réduite à l ' extraction
de l ' air restant , apr ès quoi elle refera le vide dans la cuve , en r é glage externe
!;
;!
cette fois .
!(
il :
. il .
il !! s
.
Le syst ème SM ED 27
Attacher
et enlever ici
Plus originale est la mé thode des filets entaill é s, gr âce à laquelle on peut
retirer compl è tement l ' écrou d ' un long filetage, sans pour autrant devoir lui
faire effectuer plus d ' 1/ 3 de tour .
! !
4 - CONCLUSIONS
Sur des exemples chiffr é s datant de 1975, on constate une r é duction moyenne
!
.
à l/ 20 ème des temps d ' origine Le syst ème s ' é tant amélior é au cours de ces
derni ères années , on obtient aujourd ' hui des temps de Tordre de l/ 40ëme des
temps d ' origine .
'i
!
lii: j