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© Guy Trédaniel Éditeur, 2010, 2016 pour la version française

© Findhorn Press, Mai 2010 pour la version anglaise

www.editions-tredaniel.com

info@guytredaniel.fr

ISBN : 978-2-8132-1402-7

L’acte de pardon suprême,

c’est de pouvoir vous pardonner à vous-même pour toutes les blessures que
vous avez provoquées dans votre vie. Le pardon est un acte d’amour envers
soi-même. Quand vous vous pardonnez, vous commencez à vous accepter et
à vous aimer davantage.

Don Miguel Ruiz

Hommes, pardonnez-vous. O mes frères, vous êtes Dans le vent, dans le


gouffre obscur, dans les tempêtes : Pardonnez-vous. Les cœurs saignent, les
ans sont courts : Ah ! Donnez-vous les uns aux autres ce secours !

Oui, même quand j’ai fait le mal, quand je trébuche Et tombe, l’ombre étant
la cause de l’embûche, La nuit faisant l’erreur, l’hiver faisant le froid, Être
absous, pardonné, plaint, aimé, c’est mon droit.

Victor Hugo, extrait de Fraternité

Table

Couverture

Page de titre

Page de copyright

Introduction

PREMIÈRE PARTIE : RENAÎTRE À


TEOTIHUACAN

Chapitre 1 : Une rencontre inoubliable

Les Quatre Accords Toltèques

Chapitre 2 : Le jaguar de cristal

Chapitre 3 : Le Don du Pardon

Témoignages

Le témoignage de Virginie

Le témoignage de Sylvie

Le témoignage de Jacqueline

Le témoignage de Gérard

DEUXIÈME PARTIE : COMPRENDRE ET

UTILISER LE DON DU PARDON

Chapitre 4 : Réflexions a posteriori sur le Don

du Pardon

Chapitre 5 : Comment utiliser le Don du

Pardon

Ma première pratique en solo

Et maintenant, si vous l’essayiez ?…

Étape 1 : Préparer un cadre adapté

Étape 2 : Atteindre le calme intérieur


Étape 3 : Demander pardon aux autres

Étape 4 : Demander pardon au diable et à Dieu

Étape 5 : Se demander pardon à soi-même

Étape 6 : Exprimer sa gratitude

Chapitre 6 : Questions et réponses

Question : Est-il vraiment possible de pratiquer le Don

du Pardon seul, sans l’avoir expérimenté dans un

environnement contenant ?

Question : Si, au cours de ce processus, je demande

pardon à quelqu’un qui m’a vraiment fait du mal, n’est-

ce pas comme si je le laissais s’en tirer en toute

impunité ?

Question : Avec quelle fréquence devrais-je pratiquer le

Don du Pardon ?

Question : Je ne crois ni au diable, ni à Dieu. Qu’est-ce

que je fais de cette étape du processus ?

Question : Comment savoir si les gens à qui je demande

pardon me pardonnent vraiment ?

Question : Dans quels cas le Don du Pardon ne convient-

il pas ? Quand n’est-il pas l’outil adapté à la situation ?


CONCLUSION : L’AMOUR EST DIEU

APPENDICE : LES DEUX RENVERSEMENTS

D’ACCORDS TOLTÈQUES

Le premier Renversement d’Accord Toltèque :

« Prenez tout personnellement »

Le second Renversement d’Accord Toltèque :

« Faites de nombreuses suppositions »

Remerciements

À propos de l’auteur

Adresses utiles

Lectures recommandées

ITRODUCTION

« Désormais, tu as un nouveau livre à écrire ! », enchaîne à mon attention le


chamane toltèque Don Miguel Ruiz, après avoir gentiment balayé d’un « Ça,
c’est déjà du passé », l’annonce enthousiaste que je viens de lui faire de la
parution en France, en ce moment même, de mon dernier livre : Médecine,
religion et peur (Jouvence, 1999). Il se trouve en effet que mon titre sort pile
ce jour de septembre 1999 où Miguel et moi nous sommes en train de
prendre un verre ensemble dans l’un des salons du complexe Villas
Arqueologicas où nous sommes logés, situé juste à côté des fameuses ruines
de Teotihuacan, au Mexique. L’atmosphère unique de ce lieu sacré ne fait
qu’amplifier la dimension quasi surréaliste de cet échange.

Tout à la joie de publier un nouvel ouvrage, plus de 12 ans après le dernier


que j’ai écrit, je suis cet après-midi-là à des lieues de penser à ce que je
pourrais bien écrire d’autre par la suite. Pourtant, à peine Don Miguel a-t-il
prononcé ces mots, en me fixant de son regard pénétrant, accompagné d’un
large sourire, que je sais exactement ce à quoi il fait allusion et que
j’imagine aussitôt le livre en question. Au cours des cinq jours que nous
venons de passer ensemble, avec

un petit groupe venu de France et de Suisse, il m’a en effet fait vivre une
expérience bouleversante – dont je ne mesurerai pleinement l’impact que des
années plus tard – et m’a du même coup fait don d’un puissant outil de
transformation personnelle et d’ouverture du cœur, dont je trouve le nom
sitôt que Miguel m’évoque l’idée de ce livre : le Don du Pardon.

Avant

ce

voyage

au

Mexique,

j’adhérais

intellectuellement – comme beaucoup de gens sans doute – aux grandes


injonctions « Il faut savoir pardonner », « Aime tes ennemis », tout en les
trouvant bien difficiles à mettre concrètement en œuvre, car les sentiments
ne se plient pas facilement à notre volonté ni à nos pensées. Le pardon
m’apparaissait comme un fruit, c’est-à-dire comme l’aboutissement d’un
long processus qu’il est impossible d’accélérer et qui comporte tout d’abord
le développement de feuilles et l’éclosion d’une fleur, symboles d’un patient
travail intérieur sur ses pensées et ses sentiments.

Mais l’approche du pardon que venait de me faire vivre Don Miguel Ruiz
était aux antipodes de tout ce que j’avais imaginé jusque-là, passant par un
renversement complet de la manière dont nous abordons généralement cette
question : la clé de ce processus, en effet – comme nous le verrons – n’est
pas de pardonner, mais de demander pardon. C’est effectivement une
inversion totale de posture (au propre et au figuré), avec pour conséquence
des résultats pratiquement immédiats et franchement impressionnants. En
l’espace de quelques heures, le deuxième soir après l’arrivée de Miguel, le
Don du

Pardon qu’il m’a fait découvrir – nous a fait découvrir, car tout notre groupe
en a bénéficié – m’a libéré d’un immense fardeau de rancunes, de griefs,
d’amertume, de ressentiment et de colère refoulée, que j’avais accumulé
durant des années. Faute de parvenir à pardonner comme j’imaginais devoir
le faire, cette véritable armure de sentiments négatifs avait considérablement
réduit ma capacité à aimer, étouffant mon cœur de toutes parts. Ce soir-là,
j’ai connu une expérience paroxystique doublée d’une renaissance mais,
surtout – au-delà de ce que j’ai vécu en la présence de Miguel – j’ai reçu un
outil d’une simplicité qui n’a d’égale que sa puissance, que j’ai ensuite pu
réutiliser de nombreuses fois tout seul, mais que j’ai aussi partagé avec de
nombreuses personnes, avec toujours autant d’efficacité.

Il m’aura pourtant fallu dix ans de maturation avant d’écrire ce livre. De


multiples raisons – bonnes et mauvaises – m’ont longtemps fait remettre à
plus tard sa rédaction. J’hésitais à me dévoiler plus personnellement à mes
lecteurs que je ne le fais habituellement dans mes essais, je ne voulais pas
surfer opportunément sur le succès de Miguel Ruiz…

Surtout, j’avais conscience qu’autant une expérience peut être profondément


transformatrice pour celui qui la vit, autant elle peut être difficile à restituer
d’une matière qui permette à ceux qui ne l’ont pas vécue de la partager, d’en
saisir l’essence, sans s’arrêter à sa forme qui, dans mon propre cas, a
effectivement de quoi en surprendre et en interpeller plus d’un, de prime
abord.

Le pardon est en effet pour beaucoup d’entre nous

un sujet très délicat. Sa seule évocation suffit à heurter certaines sensibilités


exacerbées par des siècles d’influence judéo-chrétienne. Cela tient
premièrement au fait qu’il est étroitement lié dans nos esprits à la notion de
culpabilité : si le pardon est nécessaire, c’est qu’il y a eu faute, non ? Donc,
si je demande pardon, par exemple, c’est que je m’estime coupable ?…

Comment, dès lors, puis-je demander pardon quand c’est moi qui ai été
victime d’autrui ??? Le renversement auquel nous convie Don Miguel avec
le Don du Pardon peut a priori paraître inconcevable, impossible, choquant
même.

Pour sortir de ce dilemme et comprendre comment opère cet outil «


renversant » qu’est le Don du Pardon, il faut d’emblée l’inscrire dans cette
nouvelle dynamique de développement personnel et de cheminement
spirituel qui vise à restituer à l’individu la pleine liberté de ses sentiments et
de ses pensées. De toute évidence, je ne suis pas libre tant que je fais
dépendre mon état intérieur de ce que quelqu’un d’autre pense, ressent, dit et
fait… ou non. La véritable liberté intérieure ne consiste pas à réussir à
contrôler les actes ou les propos des autres, ce qui est impossible, mais à être
capable de choisir délibérément et consciemment comment je réagis à ce qui
m’arrive.

Comment je réagis à une vexation, une insulte, un conflit, une agression ?


De manière automatique et inconsciente, ou choisie et consciente ?

Dans cette perspective, l’approche du pardon proposée par Miguel Ruiz est
exempte de toute attente sur autrui et ne vise plus qu’à libérer celui qui la
pratique de tout ce qui – en lui-même – fait entrave à

l’expression pleine et entière de l’amour (l’amour étant au cœur de tout


l’enseignement toltèque transmis par Don Miguel). La demande de pardon
qu’elle met en œuvre est avant tout un acte de lâcher-prise par lequel on se
libère de l’illusion que l’autre – en particulier celui qui nous fait du mal – a
tout pouvoir sur notre état intérieur, sur l’amour ou la haine, la joie ou le
ressentiment qui nous habitent. Entre l’acte d’autrui et notre propre réaction
existe en effet un espace de liberté, de choix conscient – que beaucoup
d’entre nous ne connaissent pas, faute d’y avoir été sensibilisés – qui fait
toute la différence entre une machine et un être humain : la première réagit
automatiquement sitôt qu’on appuie sur l’un de ses boutons ; le second peut
apprendre à choisir et à maîtriser

ses

réactions,

c’est-à-dire
à

agir

consciemment

et

non

plus

seulement

réagir

mécaniquement. Le Don du Pardon est une merveilleuse porte d’accès à cet


espace de liberté. La demande de pardon n’est donc pas ici une
reconnaissance de culpabilité, mais bien la prise de conscience d’une illusion
qui fait obstacle à cette liberté intérieure.

L’idée du pardon suscite un second malaise dans nos esprits occidentaux


qu’il me faut également tenter de dissiper ici. Il y a pour beaucoup de gens
quelque chose d’ humiliant à demander pardon. Est-il pourtant obligatoire
que pardon rime avec humiliation ? Pas dans l’optique du Don du Pardon.
L’humiliation cède ici simplement la place à une authentique posture d’
humilité, ce qui est très différent. Être humilié, c’est subir quelque chose de
la part d’autrui, se faire

rabaisser… ce que personne ne souhaite, évidemment.

Mais lorsqu’on fait soi-même le choix d’adopter une posture humble, de se


défaire de ses prétentions, de son bon droit, du pouvoir qu’on s’imagine
détenir sur autrui (celui de pardonner ou non, en particulier), on pose encore
une fois un acte libérateur qui tranche toute relation de pouvoir avec autrui et
permet à l’amour de nous traverser à nouveau librement.

L’humilité dont il est question ici est une humilité devant l’amour, l’amour
qui nous dépasse, cet amour dont nos cristallisations mentales nous coupent
et laissent notre cœur desséché.

Le Don du Pardon nous donne donc accès à un pardon sans culpabilité, un


pardon sans humiliation, un pardon qui nous restitue notre liberté – à
commencer par celle d’aimer – en nous libérant du pouvoir que nous avons
inconsciemment donné à d’autres de dicter notre état intérieur.

Dix ans se sont donc écoulés depuis que j’ai reçu ce Don du Pardon, dix ans
qui m’ont à la fois permis d’approfondir

cette

expérience

et

de

mieux

comprendre comment utiliser cet outil et – j’espère –

comment le présenter pour que le plus grand nombre puisse en bénéficier.

Je me sens désormais prêt à franchir ce nouveau pas dans l’écriture et


surtout, il me semble opportun de partager plus largement par l’écrit que je
ne l’ai fait oralement ces années durant ce don merveilleux que m’a fait
Miguel Ruiz, d’autant qu’il ne figure dans aucun des livres qu’il a lui-même
publiés depuis, ni

dans ceux qu’ont également rédigés nombre de ses apprentis .

Par une jolie coïncidence, sans que je ne m’en sois douté le moins du monde,
la rédaction de ce livre s’est faite parallèlement à celle du Cinquième Accord
Toltèque que Don Miguel Ruiz a lui-même écrit en 2009 avec son fils don
José, et dont, comme ses autres ouvrages, je me suis vu confier la traduction
française, à peine mon propre titre terminé. Ainsi, en même temps que paraît
ce nouvel accord qui complète Les Quatre Accords Toltèques ayant fait
connaître Miguel Ruiz dans le monde entier, Le Don du Pardon offre au
public – à vous – un autre puissant outil toltèque, inconnu à ce jour de ses
lecteurs.

La première partie de ce livre relate ma rencontre avec Don Miguel à


Teotihuacan et détaille l’expérience bouleversante qu’il m’a fait vivre devant
tout notre groupe, qui constitue le fondement du Don du Pardon.

La seconde partie explique en détail comment chacun d’entre nous peut


utiliser ce puissant outil chez soi, tout(e) seul(e), pour parvenir au même
résultat, c’est-à-dire pour se libérer des ressentiments, des rancunes, de
l’amertume, la haine et autres noirs sentiments qui étouffent notre cœur et
l’empêchent d’aimer librement. Elle s’appuie à la fois sur la pratique que j’ai
accumulée de cet outil en 10 ans et sur l’expérience de toutes les personnes
avec lesquelles j’ai déjà eu l’occasion de le partager. Elle s’achève par une
section « Questions et réponses » qui

passe en revue les questions les plus fréquentes que soulève la pratique du
Don du Pardon : si certaines d’entre elles surgissent en vous en cours de
lecture et qu’elles en gênent la poursuite, n’hésitez pas à vous y référer sans
attendre d’arriver à cette section.

Enfin, à titre de “bonus”, j’ai également inclus dans l’appendice de ce livre


les deux Renversements d’Accord Toltèques que j’ai élaborés au cours de ma
propre pratique de la voie toltèque et des quatre accords originaux. Je les
utilise fréquemment depuis 10 ans et j’ai souvent eu l’occasion de les
recommander à d’autres : ce sont des inversions des 2ème et 3ème accords
toltèques ( Quoi qu’il arrive, n’en fais pas une affaire personnelle, et, Ne
fais pas de supposition), qui me donnaient souvent du fil à retordre. Ces
Renversements d’Accord Toltèques ouvrent des perspectives très
intéressantes et, selon la sensibilité de chacun, peuvent s’utiliser
conjointement ou alternativement avec les versions originales de ces deux
accords. Ils ont déjà rendu service à de nombreuses personnes.

Mais pour commencer, en route pour le Mexique !

Olivier Clerc, janvier 2010


1. Dans le nagualisme toltèque, on nomme « apprenti »

celui qui se forme auprès d’un nagual ou chamane toltèque.

PREMIÈRE PARTIE

RENAÎTRE A TEOTIHUACAN

UNE RENCONTRE

INOUBLIABLE

C’est à Maud Séjournant que je dois ma rencontre avec Miguel Ruiz.


Française expatriée depuis longtemps aux États-Unis – au Nouveau-
Mexique, pour être précis – Maud s’est rapidement immergée dans la
tradition chamanique amérindienne. Le récit de son initiation personnelle a
d’ailleurs fait l’objet d’un livre passionnant, Le Cercle de Vie, paru aux
Éditions Albin Michel. Par la suite, elle a eu la chance d’être parmi les
premières apprenties d’un nagual toltèque mexicain, qui résidait lui aussi au
Nouveau-Mexique à l’époque et allait bientôt être mondialement connu :
Don Miguel Ruiz, précisément.

À l’été 1998, Maud vient me voir à Genève pour me proposer de créer aux
éditions Jouvence (dont je suis alors directeur littéraire) une collection de
livres qu’elle dirigerait et alimenterait, grâce à une excellente connaissance
des dernières parutions américaines en matière de sagesse amérindienne,
toltèque et chamanique. Elle apporte avec elle une grande pile de livres dans
laquelle figure justement un petit volume intriguant que je dévore d’une
traite le soir même : The Four Agreements, de ce chamane toltèque auprès
duquel, me dit-elle, elle se forme depuis longtemps.
Je découvre là un vrai petit bijou, comme on en

déniche rarement dans ce métier : un condensé de sagesse pratique,


parfaitement applicable par le lecteur, exprimé avec une simplicité et une
clarté rares.

Dans la même veine toltèque, j’avais autrefois lu avec intérêt la série des
Castaneda – plus proche à mon avis de la sorcellerie, parfois très noire, que
de la spiritualité –, tout comme j’avais aussi adoré Les sept plumes de
l’aigle, de Gougaud : mais ni dans l’un ni dans l’autre je n’avais trouvé des
outils aussi simples et puissants, aussi adaptés à la mentalité occidentale
moderne, que ce que propose ce Miguel Ruiz. J’ai un coup de cœur
immédiat.

LES QUATRE ACCORDS TOLTÈQUES

Ce petit livre de Miguel Ruiz condense à l’attention des lecteurs occidentaux


la Maîtrise de la Transformation, seconde maîtrise des enseignements
toltèques qui en comprennent trois, sous la forme de Quatre Accords à
conclure avec soi-même, destinés à modifier notre manière de penser, de
parler et d’agir. Ces Quatre Accords Toltèques, si simples en apparence et
pourtant si puissants quand on s’astreint à les mettre en œuvre et à s’y tenir,
sont les suivants :

1) Que ta parole soit impeccable.

2) Quoi qu’il arrive, n’en fais pas une affaire personnelle.

3) Ne fais pas de suppositions.

4) Fais toujours de ton mieux.

À mes yeux, Ruiz joue dans ce livre le même rôle par rapport à la tradition
toltèque qu’ont assumé ou assument encore un Lama Yeshé par rapport à
certains courants de la tradition tibétaine, un Cheikh Khaled Bentounès par
rapport à la tradition soufie ou une

Sobonfu Somé par rapport à sa tradition dagara du Burkina-Faso : en effet,


Don Miguel parvient à restituer l’essentiel de la lignée spirituelle dont il est
issu d’une manière accessible au plus grand nombre, en la dotant d’une
forme moderne, plus lisible, très pratique, mais parfaitement fidèle à ses
principes fondamentaux.

Par chance, l’ouvrage est encore peu connu et je peux facilement en acquérir
les droits francophones pour une somme très raisonnable, avant que la
célébrité de Ruiz fasse monter haut les enchères. Il devient ainsi le premier
volume de la collection Cercle de Vie de Maud Séjournant, dont j’assure
moi-même la traduction.

Ayant faite mienne la devise de Jacques Maire, fondateur de Jouvence, « Je


ne publie pas des livres, mais des auteurs », il m’arrive fréquemment de
rencontrer les auteurs que je traduis et publie, pour voir qui se trouve
derrière le livre et découvrir s’ils

« marchent leur parole », comme disent les Amérindiens, c’est-à-dire s’ils


sont cohérents avec ce qu’ils écrivent, s’ils sont bien eux-mêmes les
exemples vivants de ce qu’ils enseignent. C’est bien la moindre des choses,
me semble-t-il, quand on parle de spiritualité ou de développement
personnel. Je venais par exemple de me former à la communication non-
violente avec Marshall Rosenberg, son fondateur, avant de publier la version
française de son livre : la cohérence entre l’auteur et son message était plus
que probante, dans ce cas.

Dès la première lecture de ce qui allait devenir en français Les Quatre


Accords Toltèques, je ressens donc

tout naturellement l’envie de rencontrer cet auteur hors du commun, de


découvrir par moi-même s’il incarne vraiment les principes qu’il enseigne,
comme le laisse supposer son style simple et plein d’amour, déjà éloquent en
soi. L’occasion va m’en être donnée très rapidement, puisque Maud
m’annonce début 1999

qu’elle organise au mois de septembre un voyage avec Don Miguel, réservé


à des francophones, avec traduction simultanée pour ceux qui ne parlent ni
l’anglais ni l’espagnol.

Une aubaine !
Le voyage comportera une première semaine au Mexique, sur le site sacré de
Teotihuacan, en présence de Miguel Ruiz, suivie d’une deuxième semaine au
Nouveau-Mexique, où notre formation se poursuivra avec Maud elle-même
et Brandt Morgan, un autre apprenti de longue date de Miguel. Le fait que ce
voyage doive débuter pile le jour de mon 38ème anniversaire m’apparaît
comme le signe évident que je dois bel et bien entreprendre ce périple, à la
fois au Mexique et en moi-même. Je souris rétrospectivement aujourd’hui de
voir combien nous sommes facilement enclins à trouver des « signes » pour
nous rassurer et confirmer des choix que nous avons en réalité déjà faits !

Les Quatre Accords Toltèques se terminent par un texte intitulé L’initiation


de la mort : embrasser l’Ange de la Mort qui me parle beaucoup à cette
époque. J’ai en effet le sentiment de stagner, je ressens le besoin de passer à
autre chose, de mourir à mon ancienne vie pour renaître à une vie nouvelle…
mais laquelle ? Je n’en sais trop rien. « Si vous ne mourez pas, vous ne

vivrez pas », disait le Christ. Symboliquement parlant, il faut souvent lâcher


un trapèze en plein vol avant d’en attraper un autre ; de même, il est parfois
nécessaire d’accepter l’idée de mourir à quelque chose sans savoir à quoi
l’on va renaître. C’est donc animé de cette motivation-là – en plus de celle
de rencontrer Miguel Ruiz – que j’envisage mon voyage au Mexique :
mourir et renaître, abandonner une vieille peau. Advienne que pourra !

À la mi-septembre, je m’envole donc de Paris avec les autres participants –


presqu’une vingtaine au total, dont deux Suisses – pour Mexico City où nous
attendent Maud et son assistante. Nous y passons deux jours à faire du
tourisme et à nous découvrir un peu les uns les autres. En réalité, durant ces
premiers temps passés ensemble, nous arborons encore tous nos divers
masques sociaux : la responsable formation d’une grande chaîne d’hôtel, un
manager d’une grosse boîte française

d’informatique,

un

psychothérapeute
renommé de Grenoble, etc., et moi avec mes valorisantes casquettes
d’auteur, traducteur de Ruiz et directeur littéraire.

Le troisième jour, un car nous conduit à Teotihuacan, l’antique cité toltèque


avec ses pyramides monumentales et sa fameuse Allée des Morts qui
s’étendait autrefois sur cinq kilomètres.

Nous logeons d’ailleurs dans un complexe hôtelier, Villas Arqueologicas,


qui se trouve pile sur ce qui était autrefois le tracé de cette allée, à deux
minutes à pied de l’entrée de ce site majestueux. Comme pour le Taj Mahal,
que je n’ai vu en vrai qu’après l’avoir longtemps contemplé en photo, je suis
impressionné

par la différence entre ce que l’on perçoit de tels monuments sur un cliché,
aussi réussi soit-il, et ce que l’on ressent physiquement en leur présence : je
suis littéralement saisi par la puissance de ce lieu, sa dimension atemporelle,
cette force vivante qu’il semble encore abriter et dégager, bien qu’à l’état de
ruines. Quelle vie, dans cette Allée des Morts !

Le premier soir, tout notre groupe se réunit dans la grande salle mise à notre
disposition par l’hôtel : en effet, si une partie importante du travail qui nous
est proposé se fera directement sur le site de Teotihuacan, l’autre se
déroulera matin et soir dans ce vaste salon confortable.

Nous sommes là depuis quelques minutes à peine, répartis à travers toute la


pièce à échanger librement, quand Miguel Ruiz arrive. Je l’aperçois depuis
l’autre extrémité du salon où je me trouve moi-même. Maud vient à sa
rencontre et ils se mettent à discuter.

L’apparence physique de Don Miguel est on ne peut plus ordinaire : des


jeans et un vieux T-shirt sous une chemise. Pourtant, je ressens
immédiatement sa présence, comme s’il se dégageait silencieusement de sa
personne quelque chose d’indicible, mais de tangible. Ayant eu la chance de
côtoyer un nombre non négligeable de personnes remarquables, je ne suis
pas enclin à idéaliser les gens, mais dans le cas présent ce que j’éprouve
relève de la perception physique et non de la projection mentale.
Soudain, Miguel et Maud se tournent dans ma direction. À distance, je
devine que Maud lui explique que je suis son traducteur et éditeur
francophone. À

peine a-t-elle terminé que Don Miguel me fait signe

d’approcher. Ravi de pouvoir le rencontrer en personne, et même un peu


ému, je traverse alors le grand salon en diagonale, sans me douter un instant
de ce qui va suivre.

Don Miguel arbore un large sourire, le regard à la fois profond et


particulièrement expressif. Parvenu à sa hauteur, il ouvre les bras et m’offre
en toute simplicité un des ces hug – “étreinte”, “embrassade”, dirait-on en
français – dont les Américains ont le secret : il me serre très vigoureusement
et chaleureusement dans les bras, tout contre lui. Aux yeux d’un observateur
extérieur, cette scène aurait sans doute semblé parfaitement anodine. Rien
d’unique ou de spécial. Pas de roulement de tambour pour attirer l’attention
de tout le monde. Aucun spot braqué sur nous. Rien. Nada. Et pourtant…
Pourtant, à travers ce premier regard et cette étreinte dont Miguel Ruiz me
gratifie, aussi banals puissent-ils paraître de l’extérieur, je vis un moment
d’une intensité d’autant plus exceptionnelle que je suis pris complètement au
dépourvu. Je venais simplement lui dire bonjour, et voilà que je me sens
subitement lavé de tous les jugements qui ont pu être posés sur moi depuis
ma naissance, je me sens vu et reconnu pour ce que je suis véritablement.
Plus de parasitage, rien qui brouille le contact entre nous : je suis aimé d’une
manière littéralement inconditionnelle, simple, vraie.

J’en suis bouleversé, scotché. C’est comme si venait de m’être ôté des
épaules le fardeau que je porte depuis toujours ou, autre image, comme si je
me retrouvais soudain libéré de l’armure épaisse à laquelle, bien malgré moi,
j’ai fini par m’identifier.

Adieu les jugements, les projections, les étiquettes, les qualificatifs multiples
et variés dont j’ai pu faire l’objet jusqu’ici !

Dans le milieu du développement personnel et de la spiritualité où mes


activités éditoriales me font évoluer depuis déjà 20 ans, à l’époque, je ne
compte plus les gens
qui

écrivent

et

parlent

de

l’“amour

inconditionnel”. Mais jusqu’à cet automne 1999, les auteurs et formateurs


que j’ai entendus se présenter comme des sources vivantes d’amour
inconditionnel confondaient fréquemment à mes yeux le sentiment de
profonde satisfaction et de pouvoir sur les autres qui accompagnait leur
réussite personnelle avec un “amour inconditionnel” véritable et
désintéressé. Dit d’une autre façon, avant ma rencontre avec Don Miguel,
j’avais davantage observé d’“amour du pouvoir” que de “pouvoir de
l’amour”.

Au cours de cette brève étreinte entre Miguel et moi, pas un seul mot n’est
échangé. Pourtant, toute son attitude, sa façon d’être, me « parle » plus
puissamment qu’aucun mot ne pourrait le faire. Ce n’est pas avec mes
oreilles que j’entends son message, mais avec mon cœur et chacune de mes
cellules. En réalité, je ne pense pas que Don Miguel m’adresse
spécifiquement le moindre message : il serait sans doute plus exact de dire
qu’il est lui-même ce message.

Sa personne semble émettre une mélodie bien différente de celles que j’ai
l’habitude d’entendre.

Volontairement ou non, sa vibration provoque des résonances puissantes


chez autrui, comme les autres membres du groupe le constateront à leur tour
durant les jours qui suivent. Des amis ayant plusieurs fois

assisté à des darshan – étreinte, là aussi – avec Amma, la sainte indienne


contemporaine, décrivent quelque chose d’analogue.
Une précision s’impose : loin de moi l’intention d’idéaliser Miguel Ruiz et
d’en faire quelque surhomme ou demi-dieu. Je le répète, ma route a croisé
celle de nombreuses personnes hors du commun qui, toutes, avaient leurs
qualités, leurs connaissances et leurs dons spécifiques. Toutes avaient
également leurs limites, leurs angles morts et leurs défauts. Sans mettre Don
Miguel sur un piédestal, je tiens cependant à rendre hommage à cette
exceptionnelle qualité d’amour qu’il incarne et qui, aux yeux de beaucoup,
est sa marque, sa signature. C’est suffisamment rare aujourd’hui pour être
salué. Je me prête parfois à rêver du jour où une énergie d’amour de ce
genre-là sera moins rare et où il sera donné à chacun l’occasion d’en faire
l’expérience… avant d’en devenir un jour soi-même le vecteur.

Cette énergie d’amour qui se dégage de lui a d’ailleurs pour résultat


immédiat, ce soir-là, en l’espace d’à peine une ou deux heures de partage,
que nous laissons tous tomber les masques sociaux que nous arborions
jusque-là pour revenir à notre humanité première, à ce qui sous-tend l’image
publique que nous adoptons généralement pour dissimuler notre vraie nature.
Quand vient l’heure d’aller nous coucher, nous ne sommes plus un
assemblage hétéroclite d’individus séparés, chacun prisonnier de son ego :
nous formons désormais un groupe uni, avec une connexion profonde,
partageant un niveau de communication que nombre d’entre nous ne

connaissent habituellement qu’avec des amis de longue date.

Ce

changement

dans

nos

relations

est

particulièrement probant dans mon cas. Il se trouve en effet qu’à notre


arrivée à Mexico City, je me suis vu attribuer la même chambre que Gérard,
un grand gars dans la cinquantaine, plutôt bel homme, travaillant dans le
monde de l’informatique, avec lequel je ne ressens d’emblée aucune affinité
(et j’ai l’impression qu’il me le rend bien !). Il me donne l’impression de
quelqu’un de très rationnel, plus intéressé par la science et les faits que par
ce qui relève du spirituel ou du cœur. J’avoue m’être même demandé ce qu’il
fiche dans ce voyage, tellement il me paraît à des lieues de l’objectif d’un tel
stage. Des jugements… je sais ! À

peine débarqué que je contrevenais déjà en pensée au premier des quatre


accords toltèques, Que ta parole soit impeccable. Une fois tous transférés à
Teotihuacan

– bingo ! – je me retrouve à nouveau dans la même chambre que Gérard : à


croire que c’est karmique…

Sauf qu’au terme de ce premier soir mémorable en compagnie de Don


Miguel, quelque chose a changé entre Gérard et moi. Une amitié vient de
naître qui ne fera que se renforcer au cours des dix ans qui suivront, et dont
je demeure très reconnaissant aujourd’hui. Je n’aurais jamais pensé au départ
que deux personnes provenant d’univers aussi différents que les nôtres
puissent tisser entre elles autre chose qu’un lien aimable et poli : j’avais tort.

J’étais venu en terre toltèque pour vérifier notamment quel genre d’homme
se trouvait derrière les livres

1 de Miguel Ruiz qui m’avaient tant touché.

La réponse m’est donnée dès cette première soirée en sa présence, à


Teotihuacan. Mais je ne suis pas au bout de mes surprises…

1. Les livres, au pluriel, car le deuxième, La Maîtrise de l’Amour, était paru


en anglais juste avant notre voyage

2
LE JAGUAR DE CRISTAL

Le lendemain matin, Don Miguel, accompagné de Maud et de son assistante,


nous conduit sur le site des pyramides de Teotihuacan. Au cours des quatre
jours qu’il nous reste avant de poursuivre notre voyage au Nouveau-
Mexique, nous allons en effet parcourir sous sa direction les dix étapes du
parcours initiatique qui conduit finalement au sommet de la pyramide du
Soleil, la plus haute des trois (les deux autres étant celle de Vénus et celle de
la Lune).

Dans l’excellent ouvrage qu’elle a écrit en collaboration avec Miguel, Au-


delà de la peur, paru avant Les Quatre Accords Toltèques, Mary-Caroll
Nelson décrit en détail chaque point de ce parcours, ainsi que les symboles et
rituels qui leur correspondent à chaque fois. L’ayant lu avant de partir, j’ai
l’impression de me retrouver plongé dans son livre, comme le héros de
L’histoire sans fin, car nous suivons très exactement le cheminement qu’elle
a parcouru elle-même quelques années plus tôt.

Dans mon cas, toutefois, l’étape la plus importante du parcours ne figure pas
parmi les dix qu’elle détaille et ne se déroulera d’ailleurs même pas sur le
site de Teotihuacan. Elle m’attend le soir même, dans le salon où nous avons
nos quartiers… Mais pour l’heure, je me laisse emporter par la majesté des
lieux et l’énergie

atemporelle dont ils semblent partout habités. Don Miguel les déchiffre en
effet pour nous, nous faisant revivre aujourd’hui – à quelques enjambées de
rares touristes dont la présence en devient anachronique par moments – les
mêmes rituels par lesquels il est passé lui aussi et que la lignée de naguals
toltèques dont il est issu continue de transmettre depuis des générations et
des générations.

Pour avoir bénéficié à Mexico City d’un guide nous ayant donné la version
officielle de l’histoire de Teotihuacan, des gens qui y vivaient, de leur vie,
leurs croyances et leurs pratiques, je ne peux qu’être interpellé par l’écart qui
sépare cette reconstitution archéologique du passé et la présentation que
nous en fait Don Miguel, basée sur une tradition orale ininterrompue dont lui
et ses fils sont aujourd’hui les chaînons vivants.
L’analogie que m’inspire cet écart, sur le moment, est la suivante :
imaginons que dans quelques siècles ou millénaires, après la disparition de
notre civilisation et de sa technologie, des hommes redécouvrent quelques
CDs et DVDs en creusant le sol, seuls vestiges de notre époque. Ils se diront
peut-être que c’étaient des armes de jet, ou un palet comme les disques que
lançaient les Grecs anciens, ou encore un jouet. Mais imagineront-ils un
instant l’information invisible stockée sur ces supports ? Comment se
douteraient-ils de la musique, des jeux ou des films susceptibles de jaillir de
ces bouts de polycarbonate et d’aluminium, une fois insérés dans un lecteur
approprié ?

De manière analogue, là où la version archéologique

s’arrête à la pierre, à la matière, Don Miguel nous révèle l’information


contenue dans ces pierres, ces monuments et leur agencement sur ce site
sacré. À la distinction classique entre tradition orale et tradition scripturale,
il conviendrait peut-être d’ajouter une troisième composante, une tradition
subtile – qu’elle soit chamanique, spirituelle ou initiatique – qui, de même
que nous sommes capables de lire et écrire sur des CDs et DVDs des
informations indéchiffrables à l’œil nu, est capable d’écrire et de lire des
données dans la matière, dans la pierre, dans des édifices, que certains
pourront encore déchiffrer des siècles ou des millénaires plus tard. Notre
orgueil occidental nous pousse à nous croire supérieurs à toutes les
civilisations qui nous ont précédés, mais on ne peut écarter l’hypothèse –
que confortent au passage nombre d’énigmes non résolues du passé1 – que
des cultures

aujourd’hui

disparues

aient

eu

des

connaissances qui dépassent certaines des nôtres et dont notre science ignore
tout.
Le soir venu, après nos premiers pas au milieu des pyramides, nous nous
retrouvons tous dans notre hôtel, au milieu du complexe Villas
Arqueologicas, pour un copieux repas mexicain. L’altitude, ça creuse ! Il
faut dire que Teotihuacan est situé à 2300 m, ce que cet immense plateau a
facilement tendance à nous faire oublier.

Après le dîner, nous prenons place dans le grand salon où nous étions la
veille. Sitôt assis, Don Miguel me demande de venir à ses côtés. Surpris, je
m’exécute, sans du tout savoir à quoi m’attendre. Il sort alors de sa poche un
petit paquet bien emballé et

me le tend. J’en extrais délicatement un magnifique petit jaguar de cristal,


semblable à ceux que l’on trouve en vente dans les boutiques à proximité du
site de Teotihuacan.

« Est-ce que tu sais pourquoi je t’offre ce présent ? », me demande alors Don


Miguel.

« Euh… parce que j’ai eu mon anniversaire le jour de mon arrivée au


Mexique ?… », dis-je, incapable sur le moment de trouver une autre raison à
ce cadeau.

Franchement, n’était-ce pas brillamment deviné de ma part ? Miguel Ruiz


est un type tellement formidable qu’il fait de petits cadeaux à toutes les
personnes qui se trouvent avoir leur anniversaire durant un des ateliers qu’il
anime ! C’est pas cool, ça ?…

Tout faux. J’étais complètement à côté.

« Non », répond Miguel. « Je t’offre ce cristal parce que je te prends comme


apprenti. Tu es désormais un Chevalier du Jaguar ( Jaguar Knight). »

Bigre ! Je ne m’attendais pas du tout à cela. Cela ne figurait absolument pas


dans mes plans. Plutôt le contraire, même.

En effet, à l’inverse des autres participants, je n’étais pas venu au Mexique


pour devenir un
« Jaguar », comme on nomme en raccourci les apprentis, dans la tradition
toltèque que suit Don Miguel. J’étais même le seul à ne pas avoir apporté un
bâton, un tissu rouge, deux plumes et deux petits cristaux pour la confection
d’un bâton de pouvoir toltèque par Brandt Morgan, prévue la semaine

suivante, comme rituel d’entrée dans la voie toltèque.

Non, j’étais venu là pour rencontrer Miguel Ruiz, pour vivre une belle
expérience et si possible mourir à mon vieux moi. Point. Je n’avais aucune
intention de me consacrer à cette voie spirituelle en particulier, malgré tout
le bien que j’en pensais et l’usage que je faisais déjà de certains de ses outils.
J’avais déjà mon propre cheminement spirituel, tout en restant très ouvert à
d’autres idées – je suis d’un éclectisme incurable ! –

aussi n’avais-je pas la moindre intention de m’engager fermement sur une


autre voie.

De plus, au moment de débuter ce partenariat éditorial avec Maud


Séjournant, cette dernière m’avait clairement indiqué que Don Miguel ne
prenait désormais plus de nouveaux apprentis, qu’il avait passé la main et
que c’était donc des personnes comme elle et Brandt, formateurs toltèques
certifiés, qui s’occupaient maintenant des débutants. Autant dire que l’idée
de devenir l’apprenti de Miguel ne m’avait donc jamais ne serait-ce que
traversé l’esprit et que, eût-ce été possible, je n’en caressais même pas le
désir.

Imaginez donc ma surprise à l’annonce que vient de faire Don Miguel


devant tout le monde ! Je me sens submergé de sentiments totalement
contradictoires.

D’un côté, je suis indéniablement touché par ce cadeau qu’il me fait et ce


que représente cette invitation à être son apprenti. Comme lors de notre
première rencontre, hier soir, j’y vois indéniablement une forme de
reconnaissance, d’autant plus précieuse à mes yeux qu’elle émane de
quelqu’un pour qui j’éprouve à la fois de l’estime et… oui, de l’amour. De
l’autre – par
manque de maturité spirituelle, sans doute – je crains de trahir mon propre
engagement spirituel en acceptant sa proposition. Avec le recul, toutefois, je
sais aujourd’hui que ces deux voies, en dépit des formes culturelles très
différentes qui les caractérisent, présentent en réalité de nombreuses
convergences. Si j’avais décidé de m’engager dans cet apprentissage
toltèque, cela n’aurait donc nullement porté atteinte à mes autres affiliations
spirituelles.

Au final, j’étais tiraillé entre une certaine fierté (teintée d’embarras, en


raison de la présence du groupe) à être ainsi élu par Miguel et, je l’avoue, la
contrariété que j’éprouvais à ce qu’il ait annoncé sa décision devant tout le
monde, sans me prévenir. Je me disais qu’il aurait au moins pu me demander
avant si j’étais partant ou non (« C’est vrai, à la fin : pour qui il se prend ?
»). C’est que mon ego n’avait pas été consulté, voyez-vous !

Mais, à l’époque, j’étais trop coincé ou timide pour partager ouvertement


mes sentiments avec Don Miguel, surtout dans ce contexte-là. Peut-être
craignais-je qu’il ne me juge bien prétentieux de ne pas réaliser quel cadeau
inestimable il me faisait là ?

(Miguel, me juger ? Si ça, ce n’est pas de la projection !) Je n’ai donc rien


dit cette nuit-là, ni plus tard d’ailleurs. Enveloppé dans l’amour et la
reconnaissance que je recevais de lui, ainsi que dans la chaleur et la sécurité
que m’apportait le groupe, j’ai mis mes sentiments plus ambigus de côté,
pour pleinement apprécier les aspects très positifs de ce moment intense. Je
me sentais incapable de prendre une décision.

Ces émotions peu reluisantes n’en ont pas disparu pour

autant.

Elles

devaient

avoir

certaines
conséquences dans ma vie, à la fois durant le reste du voyage et peu après,
une fois revenu en France. En effet, une semaine plus tard, au Nouveau-
Mexique, Brandt Morgan passa une nuit entière à exécuter la cérémonie de
confection des bâtons de pouvoir à l’attention de tous ceux qui voulaient
devenir des

« Jaguars » toltèques. À cette occasion, on me demanda si je voulais bien


prêter mon petit jaguar de cristal pour qu’il figure sur l’autel dressé à cet
effet.

J’acquiesçai bien volontiers. Mais lorsqu’on me le rendit, une fois la


cérémonie achevée, l’une de ses pattes était cassée… Je ne pus m’empêcher
d’y voir un effet de mes sentiments ambigus à l’égard de la proposition que
m’avait faite Miguel. Les maux qui atteignent nos pieds – comme les pattes
du jaguar –

nous parlent souvent de notre difficulté à prendre position et à savoir… sur


quel pied danser. De retour en France, je parvins facilement à recoller la
petite patte brisée, sans que ce soit trop visible. Je mis ensuite le jaguar de
cristal à côté d’autres objets de même nature qui m’étaient chers, sur un petit
autel au-dessus de mon piano. Au nombre de ces objets figurait une
magnifique statuette tibétaine ancienne, en bronze, que je possédais depuis
près de 20 ans. C’était le seul objet auquel j’étais attaché, non en raison de sa
valeur financière (si tant est qu’elle en eût une), mais à cause de la posture
incroyablement gracieuse de la déité qu’elle représente, dont j’ignore
toujours le nom.

Quelques semaines plus tard, pendant que j’étais au bureau, mon


appartement fut cambriolé. De retour à la

maison, j’eus la surprise de constater que je ne parvenais pas à ouvrir la


porte d’entrée. Je remarquai alors des marques et éraflures grossières dans
l’encadrement de la porte, indiquant que quelqu’un s’était introduit de force
à l’intérieur. Je ressortis de la maison, quelque peu inquiet, pour me rendre
prudemment dans le jardin : je vis qu’une des fenêtres de l’appartement était
ouverte – visiblement celle par laquelle le cambrioleur s’était enfui – et
parvins à m’y introduire tant bien que mal, sous le coup d’une vive émotion.
Étonnamment, très peu de choses avaient été volées, constatai-je aussitôt, à
mon grand soulagement. Le cambrioleur était apparemment surtout intéressé
par mon scooter dont il avait pris les clés dans la maison, avant de repartir
avec. En l’occurrence, c’était plutôt une bonne nouvelle pour moi : je venais
en effet d’apprendre par mon garagiste que cet engin avait certainement
beaucoup plus de kilomètres que n’en indiquait le compteur et que le
vendeur m’avait visiblement roulé – c’est le cas de le dire ! – au moment de
l’achat. Grâce à l’assurance, j’allais donc pouvoir en acquérir un autre de
meilleure qualité !

Le voleur avait aussi emporté mon ordinateur portable. Coup de chance là


encore, puisque je comptais remplacer ce vieux Mac pour un modèle plus
puissant, et que j’avais des backups de pratiquement tous mes fichiers.

La troisième et dernière chose qui m’avait été volée, contre toute attente,
était précisément mon petit jaguar de cristal. C’était tout bonnement
incroyable ! Cet objet n’avait en effet absolument aucune valeur

financière (surtout après avoir été recollé), malgré ses jolies formes en cristal
et le bout de ses pattes et de la queue teinté d’or. Il était surtout le dépositaire
des sentiments ambivalents que j’avais éprouvés en le recevant des mains de
Miguel, avec sa proposition d’apprentissage, restée en suspens. Le
cambrioleur avait dû être séduit par son éclat et sa finesse, sans se poser plus
de questions… laissant du même coup tous les autres objets présents dans
mon appartement, à commencer par ma statuette tibétaine préférée, qui se
trouvait juste à côté et qui trône encore devant moi au moment de rédiger ces
lignes. Le teint terne de son vieux bronze n’a pas dû trouver grâce aux yeux
de ce chapardeur, qui est finalement reparti avec trois objets de peu de
valeur.

Une fois remis de mes émotions – il n’est jamais plaisant de sentir son
espace de vie violé de cette manière – j’ai résolu de prendre ce vol, au
déroulement si singulier, comme la confirmation finale que mon lien
intérieur avec Don Miguel resterait avant tout de nature subtile et spirituelle :
une puissante connexion d’amour. Celle-ci n’avait pas besoin de forme
matérielle particulière, qu’il s’agisse d’un ravissant jaguar de cristal ou de
documents écrits, tels ceux qui devaient m’être adressés en tant qu’apprenti
toltèque de Miguel …mais que je ne reçus en réalité jamais.
Dix ans se sont écoulés depuis, et notre lien est toujours resté vivant.

En outre, ce n’est pas le moment où Don Miguel m’invita à devenir son


apprenti qui devait être son plus grand cadeau à mon attention, et du même
coup le point culminant de mon voyage. Ce fut juste l’instant

d’après.

1. La façon dont a été taillé le crâne de cristal de Mitchell-Hedges, dont parle


en détail le Dr Stanislav Grof dans Quand l’impossible arrive,
(GuyTrédaniel Éd.). À la perfection de sa forme, où ne se décèle aucune
trace d’outil (alors qu’il a été sculpté à rebours du grain), s’ajoutent des
propriétés optiques incroyables.

LE DON DU PARDON

Je suis encore sous l’effet de la surprise et de la confusion qu’a provoquée en


moi l’annonce publique de Don Miguel, quand il m’invite soudain à
m’agenouiller

devant

Véronique,

l’une

des

participantes de notre groupe. Elle se trouve juste à deux ou trois mètres de


moi, à l’une des extrémités du long banc garni de coussins qui longe, en
formant un angle droit, deux des murs de la pièce où nous sommes réunis.
« Agenouille-toi et demande-lui pardon », m’intime gentiment Don Miguel.

Je suis complètement pris au dépourvu par cette demande des plus insolites.
Aurais-je fait du tort à cette femme, de quelque manière ? Miguel l’aurait-il
perçu, alors que je n’ai moi-même rien vu ?… Mais, que cela soit le cas ou
non, est-il vraiment nécessaire que je m’agenouille ? Mon mental se met en
surrégime et – oubliant le troisième accord toltèque : Ne fais pas de
suppositions – multiplie les hypothèses pouvant justifier le geste
invraisemblable qu’il m’est demandé de faire. Je passe en revue tout ce qui
s’est passé au cours des trois derniers jours, depuis notre arrivée au Mexique.
Ce faisant, je réalise que je n’ai pas encore établi de lien chaleureux et
amical avec cette femme : j’identifie même une légère difficulté à le faire, de
ma

part, sans que je sache pourquoi. Peut-être que quelque chose en elle vient
me titiller, me déranger ? C’est tout ce que je parviens à trouver pour tenter
de comprendre la requête hallucinante que m’a faite Miguel. Je ravale donc
ma fierté – le lien profond qui s’est établi entre nous depuis 24h m’incite à
avoir confiance en lui, malgré mon incompréhension et je fais ce qui m’est
demandé : je m’agenouille devant Véronique.

« Je te demande pardon », lui dis-je, enchaînant aussitôt, « de ne pas avoir…


»

Avant même que je puisse continuer, Don Miguel me coupe la parole :

« Demande-lui simplement pardon », me précise-t-il. « N’ajoute rien ».

Je m’arrête en plein vol, carrément déconcerté.

Pourquoi donc dois-je lui demander pardon… à genoux ?

« Puis, » poursuit Miguel, « fais la même chose avec la personne assise à


côté d’elle, puis la suivante, et ainsi de suite, jusqu’à ce que tu aies demandé
pardon à toutes les personnes présentes dans cette pièce. »

Bon sang ! Quelle requête !! Si je m’attendais à une chose pareille !!! Il va


me falloir demander à pardon à genoux à plus de 20 personnes, y compris
Maud et son assistante. Je trouvais déjà difficile de le faire publiquement
devant une seule personne… mais tout un groupe ?

Confronté à une situation aussi inattendue et invraisemblable, qui vient


éveiller en moi tout un maelström d’émotions intenses, mon mental disjoncte
:

je me retrouve aussitôt l’esprit complètement vide, incapable de penser quoi


que ce soit. Écran blanc. Ce n’est que beaucoup plus tard, une fois tout cet
épisode terminé, que je réalise que si Don Miguel m’a demandé de
demander à pardon à Véronique, c’est simplement parce que c’est la
personne la plus proche de nous deux, puisqu’elle est assise tout au bout du
banc, et non parce qu’il aurait « détecté » un quelconque problème entre elle
et moi. C’est quoi, déjà, le troisième accord toltèque : « Ne fais pas de
suppositions », non ?… Dès lors, toujours agenouillé, je me glisse vers la
personne assise juste à côté de Véronique. Comme précédemment, mais sans
plus chercher de raison à ce que je fais, je dis, « Je te demande pardon », tout
en regardant mon interlocuteur droit dans les yeux. L’émotion est forte pour
nous deux, comme je le lis dans son regard. Je passe ensuite à la personne
suivante. « Je te demande pardon ». Des larmes coulent de ses yeux. Je passe
à la suivante. « Je te demande pardon »…

Plus je répète ce rituel tout simple, que je veux le plus sincère et le plus vrai
possible, à chaque fois, plus je me sens glisser doucement dans un autre état
de conscience. Devant moi défilent les uns après les autres les visages de
tous les membres du groupe, où s’affichent tour à tour l’amour, la
compassion, la compréhension, parfois teintés d’une touche de gêne ou de
perplexité, encore que de moins en moins, à mesure que j’avance. L’impact
de cette cérémonie paraît se propager peu à peu à toutes les personnes
présentes qui semblent presque aussi bouleversées que moi. À part mes
demandes en pardon, il règne dans ce

salon un silence d’une densité palpable, chargé d’émotion.

Il y a là des gens très différents, de toutes provenances, avec un écart d’âge


de près de 30 ans entre le plus jeune et la plus âgée du groupe. Soudain, non
seulement je comprends, mais je ressens au plus profond de mon être, avec
mon cœur et mes tripes, qu’en demandant pardon à toutes ces personnes
différentes, que je connais à peine, je suis en réalité en train de demander
pardon à toutes les personnes que j’ai connues dans ma vie, et même au-
delà.

Je ne suis pas seulement en train de demander pardon à un homme ou une


femme en particulier, qui défile tour à tour brièvement devant moi. Chacun
de ces individus est en réalité un symbole, une icône, une fenêtre ; il est lié à
des centaines et des milliers d’autres, de multiples façons : dans sa manière
d’être, dans ses origines, sa famille, sa religion, sa sensibilité, son âme… En
réalité, à travers chacun d’eux, je demande pardon à toutes les personnes que
je suis susceptible d’avoir blessées dans ma vie, à tous ceux à qui j’ai pu
faire du mal, où qu’ils soient, à quelque époque passée que ce soit. Ma
demande en pardon s’étend même spontanément à tous celles et ceux qui
m’ont fait du mal, pour leur avoir fermé mon cœur et m’être ainsi coupé du
flot d’amour qui traverse spontanément

un

cœur

sain.

J’ai

quasiment

l’impression de demander pardon à toute l’humanité d’un seul coup.


L’expérience très personnelle que je vis

comporte

visiblement

une

dimension

transpersonnelle qui me dépasse non seulement moi-même, mais aussi toutes


les personnes assises devant
moi.

Mais ce n’est pas fini.

Quand j’atteins la dernière personne du groupe, Don Miguel me demande de


me lever et de le rejoindre.

« Maintenant », me dit-il, « demande pardon au diable. Car nous n’utilisons


pas seulement les autres comme prétexte à fermer notre cœur et à rester dans
le ressentiment, les rancunes et la haine, mais aussi le diable, les « forces du
mal » : nous nous croyons ainsi autorisés à haïr ce monde-là. Demande
pardon au diable de l’avoir utilisé pour justifier la fermeture de ton cœur. » -

Mon mental ne contrôlait déjà plus rien, aussi je m’exécute simplement, sans
réfléchir sur le moment.

Je demande silencieusement pardon à ce « monde noir », comme l’appellent


certains, que nous nous sentons dans notre bon droit de combattre, animés de
sentiments souvent aussi… noirs que lui. Qu’il est tentant et facile de trouver
des motifs à une « sainte colère », ou d’évacuer sa violence dans une
prétendue

« lutte contre le mal » !

« Ensuite », enchaîne Don Miguel, « demande pardon à Dieu. Nous nous


servons aussi de Dieu pour justifier de ne plus aimer, de cultiver des
sentiments négatifs : nous Le rendons responsable de ce qui ne va pas dans
notre vie et dans le monde. Si nous étions à Sa place, nous ferions tellement
mieux que Lui !…

Alors, demande pardon à Dieu de L’avoir utilisé pour fermer ton cœur à
l’amour divin. »

Je ressens tellement la justesse des propos de Miguel et je suis à ce point en


contact avec mon cœur,

sans interférence du mental, que je n’ai aucune difficulté

à
faire

ce

qu’il

me

demande,

silencieusement, au plus profond de moi-même.

« Enfin », dit Miguel Ruiz qui ne me lâche pas de son regard d’amour, « –
mais c’est aussi ce qu’il y a de plus difficile à faire – demande-toi
maintenant pardon à toi-même. Pardon de t’être jugé, pardon de t’en être
voulu, pardon d’avoir cessé de t’aimer, de t’être toi-même coupé de ce flot
d’amour qui ne demande qu’à te traverser le cœur. Demande-toi pardon à
toi-même. »

À ce stade, je perçois pleinement combien ce qu’il dit là est vrai. Notre plus
grand juge n’est pas Dieu –

ou plutôt l’image que chacun s’en fait dans la tête –

mais nous-mêmes. Même pour qui croit en Dieu, les jugements que l’on
redoute de sa part ne sont jamais qu’une projection des propres jugements
que l’on a envers soi-même. C’est pourquoi si toutes mes défenses, tous mes
jugements envers moi-même n’avaient pas déjà été considérablement
affaiblis par toutes les étapes ayant précédé celle-ci, je ne sais pas si je serais
parvenu sincèrement à ce stade ultime du pardon qu’est le pardon de soi.

Alors, au plus intime de mon être, je me demande pardon à moi-même,


prononçant intérieurement « Je te demande pardon » une dernière fois.
Aussitôt j’éprouve une indescriptible sensation de soulagement, une vague
de bien-être, le sentiment d’un abandon total, d’une capitulation absolue et
sans condition.

C’est comme si le dernier nœud qui me maintenait enchaîné à mes


revendications, à mes griefs et mes jugements était enfin définitivement
tranché. La cage

de mon cœur s’ouvre enfin tout grand, j’ai l’impression de renaître,


d’accéder à une nouvelle lumière. Je me sens pour la première fois libre
d’aimer et d’être aimé. Je suis complètement submergé par l’amour qui me
traverse désormais librement, qui entre et sort de moi sans entrave, comme
un souffle chaud qui fait chanter la flûte de mon être, pendant que Don
Miguel éclaire le processus de quelques ultimes commentaires.

« Nous croyons devoir pardonner aux autres ce qu’ils nous ont fait, alors que
c’est nous qui prenons prétexte de leurs actes pour les juger, pour fermer
notre cœur et cesser d’aimer. Et sitôt qu’on arrête d’aimer une personne, on
réduit le flot d’amour qui nous traverse le cœur, et on est le premier à en
pâtir.

C’est donc à nous de leur demander pardon à eux, pour guérir notre cœur, et
non l’inverse. Nous leur demandons pardon – aux autres, au diable, à Dieu et
à soi-même – de les avoir utilisés, de nous être servis d’eux pour nous
couper de l’amour, tout en leur reprochant le choix que nous avons fait nous-
mêmes. »

Don Miguel demande ensuite à tout le groupe de se lever, de former tout


d’abord un cercle autour de nous, puis un véritable tas compact d’êtres
humains agglutinés les uns contre les autres, une masse débordante d’amour
et de compassion. J’imagine la tête d’un membre du personnel de l’hôtel, s’il
était entré à ce moment-là !…

Au cœur de ce concentré d’humanité vibrante, je me sens comme un


nouveau-né entouré d’amour, libéré de toutes les couches de peurs et de
jugements dans lequel mon cœur était enfermé comme dans une

armure, depuis des années. J’ai l’impression d’être à la fois extrêmement


vulnérable, en l’absence des défenses qui m’entouraient durant toutes ces
années, et pourtant plein d’une nouvelle force de vie, puisque mon énergie
n’est désormais plus consumée par un ego surprotecteur. Mais surtout,
j’éprouve une immense gratitude pour Don Miguel qui vient de me faire
vivre cette inoubliable expérience, faisant ainsi cadeau à la fois au groupe et
à moi-même de cet outil merveilleux et puissant qu’est le Don du Pardon.
Quelques instants plus tard, après la dissolution en douceur de notre tas
humain, Miguel ajoute à mon attention, mais aussi pour tout le groupe : « Tu
peux refaire ce processus à nouveau tout seul, quand tu veux, chaque fois
que tu en éprouveras le besoin. Il n’est pas nécessaire que d’autres personnes
soient présentes. Fais simplement une méditation, ferme les yeux, va
profondément en toi-même, puis visualise les personnes auxquelles tu veux
demander pardon, et refais exactement ce que nous avons fait ensemble ce
soir. Termine également en demandant pardon au diable, à Dieu et enfin à
toi-même. Et tu parviendras au même résultat, chaque fois. Tu te libéreras
des jugements que tu aurais accumulés dans l’intervalle, tu te sentiras
nettoyé et ton cœur pourra à nouveau aimer pleinement, sans restriction. »

À mon réveil, le lendemain matin, j’ai le sentiment très net d’avoir changé
de centre de gravité (c’est la métaphore qui me vient sur le moment). Je me
sens plus ancré, moins dans la tête, plus ouvert et beaucoup plus calme.
Jusque-là, j’avais tendance à avaler mes repas trop rapidement, le mental
perdu dans ses

pensées. Je me retrouve désormais à manger lentement, sans aucun effort


conscient : je savoure et apprécie chaque bouchée, prenant le temps de
respirer et de me remplir des arômes et saveurs de ce que je mange. Je me
sens globalement plus vivant, plus en contact avec autrui, à commencer par
tous les membres de notre groupe. Ma tête m’arrache bien moins à l’ici et
maintenant ; elle conserve une certaine activité normale, mais sans que je
m’y identifie. Je suis plus beaucoup plus présent. C’est le début d’une
nouvelle vie !

TÉMOIGNAGES

Au moment de rédiger ces lignes, dix ans après avoir vécu cette expérience
paroxystique qui a changé ma vie, j’ai eu envie de savoir le souvenir qu’en
gardaient certains membres de notre groupe avec lesquels je suis resté en
contact. Voici ce que trois d’entre eux m’ont répondu :

LE TÉMOIGNAGE DE VIRGINIE

« Ce moment particulier m'a laissé une impression puissante. Au début de


cette séance, j'ai ressenti de l'étrangeté. Mon mental s'est révolté, j’ai
associé le pardon demandé à Olivier de cette façon, agenouillé, avec une
forme presque d'humiliation. J'ai repensé à l'aspect culpabilisant que la
religion véhiculait, selon moi, au travers du pardon.

« Et puis au fur et à mesure qu'Olivier s'agenouillait devant chaque


personne, j'ai senti le lien entre nous tous dans cette pièce comme palpable :
c'était presque une matière. La seule chose présente et importante devenait
la dimension d'amour universel, bien au-delà du concept mental, car vécu
par toutes les parties de mon Être. Et les autres aspects, comme les
caractères et les différences des personnes présentes, devenaient
accessoires. Le temps s'était arrêté et j'avais la conscience de vivre une
expérience essentielle, même si je ne la comprenais pas au sens intellectuel
du terme, à cet instant-là.

« Ce qui m'est resté de ce moment et des journées

passées auprès de Don Miguel, c'est je crois – pour la première fois de ma


vie – la rencontre avec l'Amour.

C'était pour moi l'ouverture à cette dimension, de manière vécue. L'Amour


qui sous-tend toutes les formes qu'il peut prendre ensuite. La source
d'amour.

J’ai toujours décrit Don Miguel, après ma rencontre avec lui, comme une «
boule d'amour ». C'est exactement cela qui rayonne de lui, par sa simple
présence.

« Plus tard, au fil de mes recherches et de mes découvertes, j'ai aussi


compris mentalement ce qui s'était passé ce jour-là. Aujourd'hui, je relie ce
processus à la pratique hawaïenne de l' Ho'oponopono , qui recommande «
tout simplement » de demander pardon et d'aimer les aspects malades en
nous, souvent exprimés en miroir par les personnes que nous rencontrons.
Le pardon nous ouvre la voie de l'inclusion, et non du rejet. Ainsi, la
pratique du pardon nous délivre et nous offre la guérison. Je le pratique
presque quotidiennement, et à chaque fois cela illumine ma vie. »

Virginie Pré

LE TÉMOIGNAGE DE SYLVIE
« Depuis dix ans, le souvenir de cet instant est resté intact dans ma mémoire,
comme gravé par sa puissante émotion.

« Nous nous connaissions à peine et voilà qu'Olivier s'agenouille et


prononce cette phrase étrange et merveilleuse. Le temps s'est arrêté. J'étais
surprise et

émue par la beauté et la pureté de cet instant qui se répétait devant chacun
de nous. Je pleurais comme beaucoup d'autres, sans savoir pourquoi, et ce
n’est que plus tard, l'émotion dissipée, que j'ai compris pourquoi : c'était si
beau et tellement puissant. Le renversement ; la sortie de la victimisation et
la prise de responsabilité totale qui nous redonnait enfin notre véritable
filiation divine : JE SUIS RESPONSABLE

DE CE QUE J’AI CRÉÉ.

« Comment oublier une prise de conscience pareille ?

« Elle a changé ma perception des événements de la vie et m'a


considérablement aidé dans mes relations.

Le pardon est devenu une clé et non plus un acte de contrition. »

Sylvie Tarlet

LE TÉMOIGNAGE DE JACQUELINE

« Avant ma rencontre avec Miguel, j'avais vécu une expérience très forte du
pardon. J'avais éprouvé longtemps de la haine envers un homme, par lequel
notre famille avait beaucoup souffert, et après un long processus, j'avais
ressenti le besoin de le rencontrer pour me guérir moi-même, pour me
libérer. Je n'oublierai jamais ce moment-là, qui dépassait tout ce que j'avais
imaginé ! Car à l'instant même, où nous nous pardonnions mutuellement,
mon cœur a explosé !

Au bout du chemin, si long, si douloureux, c'est mon âme que je


rencontrais…

« Quand quelques années plus tard, Don Miguel a


demandé à Olivier de s'agenouiller devant chacun de nous pour nous
demander pardon, j'ai d'abord été très surprise. C'était inattendu et rapide !
Et le souvenir de mon expérience passée est remonté en moi immédiatement.
A la différence que cette fois, à travers lui, c'étaient tous les hommes qui me
demandaient pardon. J'étais très émue. J'avais souffert pendant des années
pour arriver à ma première expérience, et là, avec le groupe, porté par
l'amour de Miguel, le pardon était instantané ! Tous les cœurs s'ouvraient.

Nous étions hors du temps, l'humanité entière était là, unie dans l'amour.
C'était simple et bouleversant, puissant, magnifique, inoubliable !

« Riche de ces deux expériences, tellement loin du pardon-devoir, du


pardon-humiliation, du pardonn'en-parlons-plus, j'ai ensuite animé des
stages sur le thème du pardon. A chaque fois, c'est une libération, une
guérison profonde qui s’opère. Le pardon permet de retrouver le divin en
nous et nous ouvre à une nouvelle vie. Pour moi, c'est la clé de la paix
intérieure et le plus beau cadeau qu'on puisse se faire à soi-même ! »

Jacqueline Ruffier

LE TÉMOIGNAGE DE GÉRARD

« Olivier avait bien raison de se demander ce qu’un gars comme moi


pouvait bien faire dans ce stage : je me le suis souvent demandé moi-même,
du moins pendant la première semaine. J’étais un Martien qui atterrissait
sur une autre planète, un Provincial qui débarquait à Paris ! Ou plutôt
l’inverse.

« Bien des messages donnés par Miguel me sont largement passés au-dessus
de la tête. Et en premier lieu ce rituel qu’Olivier décrit merveilleusement
dans ce livre. « C’est quoi ce truc où l’on se met à genoux pour demander
pardon à tout le monde !? Est-ce que je vais devoir aussi y passer ?… », me
suis-je demandé.

« Ce livre éclaire ce rituel et lui redonne tout son sens, ainsi qu’à la
démarche de pardon qui lui est associée. Il m’a aidé à comprendre cet outil
fantastique, au point que le soir même, j’ai eu envie de le vivre ! Même si je
me suis un peu emmêlé les pinceaux en cours de route, le résultat est là et je
vais le reprendre dans les jours qui viennent.

« Les noms qui me venaient étaient ceux des gens à qui j’ai le sentiment
d’avoir fait du tort, et non ceux qui auraient pu m’en avoir fait.
Curieusement, je ne trouvais personne qui m’avait fait du mal !

« Je dis quelques fois que je n’ai sans doute pas pris plus de 10 % de tout ce
qui était offert là, pendant ces 15 jours. 10 %… et encore ! Pourtant, ce fut
un voyage aller simple : au retour, je n’étais plus le même. Une impulsion
venait de me faire complètement dévier de ma trajectoire. C’était la
deuxième

“inflexion” majeure que je vivais depuis ma naissance. Et comme pour la


première, je n’avais absolument pas conscience de son impact au moment où
je la vivais. Avec désormais un recul de dix ans, je peux aujourd’hui mesurer
quel changement majeur cela a apporté dans ma vie ! »

Gérard Meyer

DEUXIÈME PARTIE

COMPRENDRE ET UTILISER

LE DON DU PARDON

RÉFLEXIONS A POSTERIORI

SUR LE DON DU PARDON


Le processus que Don Miguel m’a fait vivre était si intense, il m’a tellement
pris au dépourvu – surtout dans ce contexte de groupe – que ce n’est
qu’après-coup que j’ai pu l’approfondir et mesurer pleinement sa portée et sa
signification profonde. C’est d’ailleurs l’une des caractéristiques du
cheminement spirituel ou initiatique : on commence par vivre les choses, très
concrètement, dans tout son être, avant de les analyser et de les comprendre.
Tout le contraire de notre fonctionnement habituel, où l’on veut
généralement commencer par tout comprendre avant d’entreprendre quoi
que ce soit !

À mon retour, donc, en prenant le temps de réfléchir à ce qu’il m’avait été


donné de vivre, j’ai réalisé que l’une des clés fondamentales du Don du
Pardon est un renversement complet de notre compréhension habituelle du
processus même du pardon et, par conséquent, des actes que nous jugeons
adéquat de poser pour y parvenir.

Voyons cela de plus près.

Tous autant que nous sommes, nous avons un jour ou l’autre été blessés. Des
gens nous ont fait du mal, parfois beaucoup, parfois souvent. Nous sommes
donc nombreux à éprouver du ressentiment ou de la colère,

à être animés de sentiments d’injustice, voire de vengeance, envers ceux que


nous jugeons responsables de nos souffrances. Ces réactions sont d’ailleurs
naturelles : il est « normal », au départ, de vouloir rendre la pareille à celui
qui nous fait du tort. Cette attitude a d’ailleurs longtemps eu un équivalent
juridique dans la fameuse « Loi du Talion » œil pour œil, dent pour dent –
qui n’a pas disparu de la planète.

Par ailleurs, dans la société judéo-chrétienne qui reste encore la nôtre, sous
son vernis laïc, on nous a enseigné à « aimer nos ennemis », à « tendre
l’autre joue », ces nouvelles règles de conduite introduites bien plus tard
dans l’histoire par le Christ. La vengeance est ici censée céder le pas à des
sentiments plus élevés – on ne riposte plus, on ne hait plus –

traçant un chemin conduisant ultimement au pardon.


Mais, même si l’on en a envie, même quand on voudrait bien y parvenir, on
rencontre habituellement de grandes difficultés, quand cela ne s’avère pas
tout bonnement impossible. Vouloir pardonner, y penser, en avoir envie :
cela ne suffit souvent pas, cela ne fonctionne pas. Le pardon émane du cœur
et, comme l’a souligné Pascal, « le cœur a ses raisons que la raison ne
connaît point ».

Les sentiments ne se plient pas à notre volonté. Ils ont une vie propre. Alors,
nous avons beau essayer, nous sommes fréquemment incapables d’accorder
notre pardon aux gens qui nous ont fait du tort. Du coup, nous nous
retrouvons souvent tiraillés entre l’envie de pardonner et l’impossibilité d’y
arriver, d’où

apparition de sentiments de culpabilité dus au ressentiment, à la colère ou la


haine qui nous habitent malgré tout. Ce qui donne naissance à un cercle
vicieux : plus nous essayons de nous forcer à pardonner (« Je dois lui
pardonner ! »,

« Il faut que je lui pardonne ! »), plus nous soulevons de résistances dans
notre cœur, plus nous nous en voulons, et plus notre colère nous empêche
encore plus de pardonner.

Parfois, aussi, je peux estimer que je suis dans mon bon droit, que l’autre ne
mérite pas mon pardon et qu’il m’est de toute façon impossible de le lui
accorder, compte tenu de ce qu’il m’a fait. Je me considère alors supérieur à
lui. Moi, je suis bon ; lui, méchant. Je me mets ainsi dans le rôle d’un roi ou
d’un juge, de celui qui a le droit de condamner autrui ou de lui octroyer sa
grâce, son pardon. Je peux même éprouver une certaine jouissance à sentir
ce pouvoir que j’estime détenir sur l’autre. Le pardon, si je veux !

La pratique du Don du Pardon inverse totalement notre perspective sur cette


question et, partant, modifie du même coup notre scénario et le rôle que nous
estimons devoir y jouer. Nous ne siégeons plus sur le trône de notre ego.
Nous ne cherchons plus à évaluer de cette hauteur s’il convient, dans notre
magnificence et notre grandeur, de pardonner à ceux qui nous ont fait du
mal. Au contraire. Nous prenons plutôt conscience de nos propres
jugements. Et nous réalisons du même coup combien ce sont ces jugements-
là qui nous ont conduits à fermer notre cœur, à le barricader et, par
conséquent, à nous faire encore plus de tort à nous-mêmes, en utilisant pour

cela les actes et propos des autres comme prétexte et justification. En


mettant en œuvre le Don du Pardon, c’est donc nous qui leur demandons
pardon.

Que se passe-t-il alors ?

Pourquoi est-ce que ça change tout ?

En faisant le choix de demander pardon, nous troquons notre orgueil et


l’importance que nous nous accordons contre l’humilité et la simplicité.
Nous renonçons à nos prétentions, à notre soi-disant supériorité, nous
redescendons de notre tour d’ivoire…

et quelque chose s’ouvre soudain en nous. En nous défaisant de notre


armure, en lâchant prise de nos griefs, nous retrouvons notre liberté.

Rappelez-vous les mots de Don Miguel : la partie la plus importante du Don


du Pardon ne concerne pas les autres ; elle nous concerne nous et les
jugements sans merci que nous portons si promptement sur nous-mêmes. («
Je ne me pardonnerai jamais d’avoir fait…

dit… été… cela. ») Depuis que j’ai reçu cet outil, je n’essaie plus de me
pardonner pour ce que j’ai fait, pour toutes ces choses que mon juge intérieur
trouve encore parfois le moyen de condamner : je préfère humblement me
demander pardon pour tout cela. Sitôt que j’adopte cette attitude, cette
posture, tout l’acte d’accusation se décompose de lui-même et toutes les
charges qui pesaient sur moi disparaissent.

La finalité première du Don du Pardon, c’est de rétablir le flot maximal


d’amour à travers notre cœur, son écoulement libre et spontané, qu’avaient
entravé –

voire totalement gelé – les diverses blessures dont nous avons été victimes.
Sitôt que j’arrête d’aimer ou
que je réduis simplement le débit d’amour qui jaillit de mon cœur, je suis le
premier à en souffrir. Je deviens froid, sec, je me mets sur la défensive, je me
blinde.

J’y perds ainsi ma joie naturelle, ma chaleur.

Qu’il soit bien clair, cependant, que quand nous demandons pardon à autrui,
le but n’est pas de devenir les meilleurs amis du monde avec ceux qui nous
ont fait du tort ; l’objectif est simplement d’arrêter de fermer notre cœur et
de nous emprisonner nous-mêmes dans le ressentiment, la haine et autres
sentiments qui nous isolent et nous empoisonnent. Nous n’avons pas à aimer
activement nos ennemis, au sens de sympathiser avec eux et de les apprécier
; il ne s’agit pas d’en faire nos potes, mais simplement d’arrêter de les
utiliser comme prétexte à aimer moins, à rétrécir notre cœur et à des sécher
ainsi progressivement la source de notre amour. C’est une différence très
importante.

Travailler sur le cœur, apprendre à aimer, développer son humilité et


apprendre à demander pardon ne signifie pas renoncer à tout discernement,
comme certains semblent le croire. En effet, dans la mesure où l’ouverture
du cœur passe par le « non-jugement » – une valeur très en vogue
aujourd’hui –

on voit de nombreuses personnes se fourvoyer et adopter à la place le non-


discernement, ce qui est très préjudiciable. Parce qu’elles s’efforcent de
rouvrir leur cœur, de revendiquer leurs sentiments, de développer leur
compassion, elles ont du même coup tendance à rejeter leur raison, leurs
facultés analytiques et intellectuelles. Le cœur, c’est bien ; la tête, c’est nul,
c’est mauvais. Vraiment ?…

Ce n’est pas ce qui nous est demandé pour parvenir

au non-jugement. Si nous possédons à la fois un cœur et un intellect, c’est de


toute évidence parce que nous avons besoin des deux pour bien fonctionner.
Le monde actuel reflète à l’envi les conséquences négatives qu’entraîne
l’usage immodéré de l’intellect, non contrebalancé par le cœur : cynisme,
froideur, incivilité, exploitation sans vergogne de la nature et des autres, et
autres comportements tristement familiers. Mais un cœur non équilibré par
la raison et les facultés intellectuelles ne vaut guère mieux. Il ouvre la porte
aux illusions, aux choix mal informés, au risque d’être berné et manipulé, et
autres problèmes du même genre.

Le Don du Pardon nous aide à nous libérer de nos jugements, pas de notre
discernement. Il permet à notre cœur de sortir de la prison de nos peurs, de
notre colère et de nos rancunes. Mais cela ne veut pas dire pour autant
qu’une fois cette porte ouverte, il nous faille laisser rentrer n’importe qui,
sans distinction, sans réflexion. C’est là que le discernement entre en jeu.

En résumé, le Don du Pardon est un outil merveilleux, mais ce n’est ni un


couteau suisse qui vous permettra de résoudre tous vos problèmes, ni une
solution miracle qui marchera instantanément, n’importe comment. Ces
solutions-là n’existent pas, quoi qu’en disent certains livres et ateliers de
développement

personnel.

Rappelez-vous

cette

merveilleuse observation d’Abraham Maslow : « À

ceux qui n’ont qu’un marteau, tous les problèmes semblent être des clous ».
Un marteau est un outil formidable, mais nous avons également besoin d’un

tournevis, de pinces, d’une scie, et ainsi de suite, pour bien bricoler.


Considérez donc le Don du Pardon comme un bel outil, judicieusement
conçu par Miguel Ruiz. Il occupera une place de choix dans votre boîte à
outils de développement personnel ; mais continuez d’enrichir

votre

outillage,

afin

de
pouvoir

progressivement gérer toutes sortes de situations et de problèmes.

COMMENT UTILISER

LE DON DU PARDON

L’expérience du Don du Pardon vécue au Mexique avec Don Miguel, en


présence de tout le groupe, eut sur moi un impact profond qui se prolongea
tel quel plus de trois mois après mon retour en France. Dans ma vie privée
comme au travail, je fonctionnais beaucoup moins dans la tête, j’étais plus
dans le cœur et je constatais combien cela modifiait positivement toutes mes
relations. Pourtant, petit à petit, certaines vieilles habitudes, certains
comportements de longue date, refirent discrètement leur apparition : des
jugements me venaient à l’esprit, le mental recommençait à prendre le
dessus et je constatai un jour que mon cœur n’était plus aussi ouvert et
aimant qu’au cours de ce voyage à Teotihuacan. Il était visiblement temps
pour moi de faire un peu de nettoyage intérieur, de démonter les murs que
mon intellect rebâtissait subrepticement, brique par brique, pensée négative
par pensée négative, autour de la source jaillissante de mon cœur.

Don Miguel nous avait dit que nous pouvions utiliser le Don du Pardon
chaque fois que nous en aurions besoin, une fois revenus chez nous ; qu’il
n’était pas du tout nécessaire que lui-même ou le groupe soient présents ;
que chacun d’entre nous

pouvait simplement répéter les étapes du processus que j’avais vécu, tout
seul, chez soi, et parvenir ainsi au même résultat. La magie de cet outil ne
tenait ni à sa personne, ni à la présence des autres, mais à l’attitude intérieure
que ce processus développait en nous et au basculement qu’il provoquait,
pour peu qu’on s’y investisse pleinement.

Un soir, donc, juste avant de m’endormir, j’entrepris de suivre ses conseils et


de refaire tout le processus par moi-même, confortablement assis en posture
de méditation dans mon lit.

MA PREMIÈRE PRATIQUE EN SOLO

J’ai commencé par méditer un moment, afin de me libérer des


préoccupations et des pensées de la journée, et d’atteindre un état de calme
intérieur. Puis, j’ai visualisé dans ma tête la première personne à qui je
voulais demander pardon. J’ai pris le temps de laisser remonter en moi les
tensions qui existaient entre nous : les jugements que j’avais à son égard, les
sentiments qui surgissaient en moi sitôt que je pensais à elle, la sensation
d’être dans mon bon droit… dont j’essayais maladroitement de me
convaincre. Bientôt, j’ai ressenti à la fois dans mon cœur et dans corps
m’envahir à nouveau toutes les sensations déplaisantes et les émotions
stressantes que cette situation évoquait.

Je voyais bien à quel point ces tensions me nuisaient et m’affaiblissaient,


diminuant ma capacité à aimer et à me sentir bien. J’observais également la
façon dont mon mental s’efforçait de justifier intellectuellement mes
sentiments et de me donner raison.

Dans la mesure où je n’avais pas une personne en chair et en os devant moi,


il fallait – pour que le processus fasse effet et ne soit pas juste superficiel ou
abstrait – que je me lie intérieurement de tout mon cœur à cette personne,
sans rien nier des sentiments difficiles existant entre nous.

Quand j’ai senti que ce lien était là, bien palpable et vivant, j’ai su que j’étais
prêt et j’ai alors dit à cette personne, du fond du cœur : « Je te demande
pardon ».

J’ai alors pris le temps d’observer ce que suscitait dans mon corps cette
demande de pardon : j’ai senti mes muscles se relaxer (en particulier la
mâchoire, la nuque et les épaules), mon plexus solaire s’ouvrir, l’agréable
sensation de lâcher prise de mes griefs, un sentiment d’humilité
et

de

dilatation

accompagner

le

renoncement à la position de supériorité d’où je croyais pouvoir, moi,


accorder mon pardon à cette personne. Sous l’effet de cette transformation
physique, je suis même spontanément passé de la position du lotus à une
posture de prosternation, le front contre le sol, les paumes des mains aussi :
une manifestation littérale d’humilité, terme tiré d’ humus, la terre. Je me
suis senti profondément soulagé de ne plus juger de haut cette personne, de
laisser se rouvrir les portes de cette partie de mon cœur que j’avais
condamnées. J’ai senti croître en moi le débit et le rythme naturels de
l’amour, libéré des vannes et des digues qui le retenaient jusqu’ici. À ce
stade, j’ai senti que j’en avais terminé avec cette première personne et que je
pouvais passer à la suivante.

Comme j’étais seul, en train de visualiser des individus réels envers qui
j’entretenais des sentiments

négatifs – et non face à des gens faisant office de substituts, de symboles – je


pouvais prendre tout le temps qui me paraissait nécessaire avec chacun
d’eux, jusqu’à atteindre un sentiment de complétude, d’accomplissement et
de paix. Je ne passais à la personne suivante qu’après en avoir complètement
fini avec la précédente, comme me le signifiait clairement mon ressenti
intérieur.

Une fois le processus lancé, j’ai senti qu’il acquérait sa dynamique propre et
qu’il me fallait simplement le suivre et le laisser progresser jusqu’à son
terme, jusqu’à ce que toutes les émotions négatives qui me parasitaient et
m’empoisonnaient le cœur sur le moment aient été soumises à ces demandes
en pardon libératrices. De nombreux visages ont ainsi défilé devant moi, les
uns après les autres : membres de ma famille, amis, collègues, contacts
divers, personnes perdues de vue parfois depuis longtemps, décédées même
pour certaines d’entre elles. C’était comme égrener lentement un chapelet.

Ensuite, conformément à ce que j’avais vécu à Teotihuacan, j’ai demandé


pardon au diable. Dans cet état sans doute plus conscient qu’au Mexique –
j’étais cette fois moins bouleversé par le contexte ! – je me suis rendu
compte à quel point il était facile d’utiliser les « énergies négatives » et le «
monde noir » pour s’en tenir à une position de supériorité (qui se veut
spirituelle) et s’estimer en droit de retenir son amour.

C’est d’ailleurs un piège du monde du développement personnel, du new-


age et de la spiritualité, où l’on peut être tenté de se considérer comme un «
guerrier de lumière », aligné sur les « forces du bien ». On se sent

alors justifié dans son combat contre le « côté obscur de la force » fût-ce
sous la forme d’un patron ou d’un partenaire amoureux – au risque de laisser
notre cœur dangereusement se refroidir, tandis que nous livrons notre propre
guerre sainte. Confronté à ce piège, j’aime à me rappeler l’adage chinois
plein de sagesse qui recommande : « Ne combattez pas l’obscurité : apportez
la lumière ». Face à la haine, face au mal, il est plus important de garder un
cœur vivant et rempli d’amour – et un esprit lumineux en prime ! – que de
batailler contre les forces noires. J’ai donc demandé intérieurement pardon
au « diable » – en tant que symbole global de ces forces dites noires, et non
comme personnage à sabots et cornes –, pardon de me laisser encore parfois
aller à utiliser le mal comme prétexte à enfermer mon cœur dans une armure
qui se voudrait spirituelle.

Puis, en suivant toujours les étapes du Don du Pardon, j’ai demandé pardon
à Dieu. Là encore, combien il est tentant de cultiver des sentiments négatifs
envers notre représentation – quelle qu’elle soit – de ce qui nous dépasse,
qu’on l’appelle la Source, l’Énergie, l’Amour, l’Intelligence cosmique, le
Grand Tout ou que sais-je. Quand les choses ne vont pas comme on veut,
quand les épreuves et les souffrances sont au rendez-vous, quand on est
confronté à l’injustice et à l’absurdité de la vie, quand les pertes et les deuils
se multiplient, nous en faisons parfois reproche à Dieu, à l’inconnaissable
qui tient le fil de nos destinées, adoptant alors la posture de victime soumise
aux desseins insondables d’un
créateur capricieux (pour ceux qui souscrivent à cette vision exclusivement
masculine du divin). Ce faisant, malheureusement, nous nous coupons de
l’amour divin ou de l’amour tout court ; nous tranchons le lien qui nous relie
aux énergies qui nous dépassent et nous sommes évidemment les premiers à
pâtir de cette aliénation d’une dimension de transcendance.

Il me faut ici ouvrir une parenthèse pour expliquer le sens que prend à mes
yeux la notion de demande en pardon à Dieu. Pour ma part, j’ai fait mienne
l’idée –

présente dans de nombreuses traditions, notamment la chrétienne – que Dieu


est amour, avant tout. En effet, au cours des diverses expériences mystiques
qu’il m’a été donné de vivre, ce qui m’a chaque fois émerveillé (et même
bouleversé) a été la prise de conscience que l’amour est cette force qui, à
chaque instant, assure la cohésion de l’univers, des atomes aux galaxies, en
passant par toute la chaîne du vivant. L’amour n’est pas seulement (ni même
essentiellement) ce sentiment merveilleux que l’on éprouve dans son cœur :
c’est le ciment vivant qui assure la cohésion de toutes choses, grandes et
petites.

Derrière toutes les forces physiques et les réactions chimiques qu’identifie


pour l’instant la science, c’est fondamentalement l’amour qui tient et
maintient le monde. Que l’amour vienne à disparaître, et il ne resterait rien.
Plus un seul corps, plus un atome ou une seule molécule ne subsisterait : tout
se disperserait, se désagrégerait et retournerait au néant. C’est l’amour qui
tient les particules subatomiques en semble, c’est l’amour qui unit les
molécules et les cellules, c’est l’amour qui assure la cohésion et l’unité de
tous les

organismes vivants, qu’ils en aient ou non conscience.

Percevoir que Dieu est amour, ce n’est alors plus seulement se dire que Dieu
aime chaque être et chaque chose, d’un amour lointain (depuis le nuage où
certains

l’imaginent

assis…),
transcendant

et

désincarné : c’est avoir conscience que cet amour-là est au contraire


extrêmement concret, très agissant, puisqu’il est la condition même de
l’existence du monde et de toutes les formes de vie qui s’y développent.

Si une intelligence et une sagesse infinies président à l’évolution de tout le


vivant, dont notre propre intellect n’est pour l’instant qu’un modeste reflet,
un amour infini soutient donc les innombrables formes de vie à travers
lesquelles s’effectue ce cheminement vers toujours plus de conscience. Il n’y
a pas de vie sans amour, car la vie naît de l’amour.

Dans cette perspective, demander pardon à Dieu, pour moi, c’est d’abord
demander pardon à l’amour, à cet amour omniprésent que nous ne percevons
plus, mais qui soutient pourtant notre corps et notre vie même ; à cet amour,
aussi, qui s’échange entre nous et tous les êtres qu’il nous est donné d’aimer,
parfois passionnément, et que par ignorance ou maladresse il nous arrive de
trahir, de renier ou de salir, après une séparation ou un conflit. Il ne faudrait
jamais renier ni oublier l’amour qu’on a connu et vécu, même lorsqu’il a
cessé de s’échanger entre nous et une autre personne.

L’amour est sacré, car il n’est de vie sans amour.

Renier l’amour, trahir ou salir l’amour qu’on a vécu et échangé, l’amour qui
nous a fait chanter et vibrer, c’est porter atteinte à son propre cœur, à ce qu’il
y a de plus

quintessentiel en soi.

Demander pardon à l’amour, c’est prendre conscience qu’au-delà de tous nos


jugements et de nos incompréhensions, au-delà de nos révoltes et de nos
rebellions, au-delà de notre amertume et de nos déceptions, une force
d’amour ne cesse pas une seule seconde de nous soutenir, de nous porter, de
nous donner vie, de nous permettre même de cultiver ces sombres pensées et
sentiments-là à son égard. C’est renouer avec ce courant indéfectible
d’amour dont nous sommes une manifestation, c’est se laisser à nouveau
traverser, purifier et vivifier par lui, et retrouver du même coup notre lien
avec tout le vivant qu’il alimente de la même manière.

Si, en plus de cet amour absolu, j’inclus en « Dieu »

la notion d’une intelligence infinie, alors, en lui demandant pardon, non


seulement je rétablis une connexion vivante d’amour avec Lui, mais je
reconnais aussi l’existence d’une sagesse qui dépasse la compréhension
limitée de mon intellect et j’accède ainsi à des niveaux de sens qui échappent
à la vision limitée de ce dernier. Au lieu de chercher un sens à ma vie, je
laisse alors s’exprimer en moi le sens de la vie.

J’ai alors de nouveau le sentiment de faire partie de l’Univers, d’avoir une


place irremplaçable dans la grande toile cosmique de la vie.

En pratiquant le Don du Pardon seul chez moi, ce soir-là, j’ai donc demandé
pardon à Dieu, à ma représentation personnelle de ce qui me dépasse, de ce
qui est à l’œuvre dans ma vie, au-delà de mon seul ego. J’ai pris une fois
encore le temps de pleinement ressentir les intentions négatives que je
projetais

parfois sur Lui, et de mesurer le tort que je faisais tant à moi-même qu’à tout
le vivant, chaque fois que – par inconscience, par négligence, ignorance ou
mépris – je manquais de respect et de reconnaissance envers cette infinie
énergie d’amour qui porte inlassablement le monde. Cela m’a permis de
donner tout son sens et sa force à cette étape importante du processus.

Je suis enfin parvenu au dernier stade du Don du Pardon, celui où il faut se


demander pardon à soi-même. Les premières fois que j’ai fait ce processus
tout seul, cette étape m’est apparue difficile : je ressentais une grosse
résistance en moi-même. Mon juge intérieur était dur, exigeant, intransigeant
même.

Il m’arrivait de me sentir momentanément tout à fait indigne d’être


pardonné… par moi. C’est comme si j’avais peur qu’en cessant de me
soumettre à une telle pression, en me libérant de cet impitoyable tyran
intérieur, ses menaces permanentes finissent par se réaliser : « Tu ne
réussiras jamais rien », « T’es vraiment trop nul », « Tu n’es qu’un bon à
rien, un paresseux », et autres critiques du même style.

Pourtant, dès la première fois, j’ai constaté qu’il se produit exactement


l’inverse. Sitôt que je parviens à me pardonner, à lâcher prise de mes
jugements envers moi-même, je suis autrement plus capable de m’ouvrir, de
m’épanouir, de donner et recevoir de l’amour, d’une manière qui favorise de
nouvelles opportunités et améliore toutes mes relations. En fait, quand
j’atteins enfin ce stade ultime qu’est celui du pardon de soi, je pousse à
chaque fois un immense soupir de soulagement intérieur qui vient clore tout
le processus

et en signe l’aboutissement. C’est comme si l’on m’ôtait un clamp


chirurgical des valvules cardiaques et que l’amour pouvait à nouveau
librement circuler en moi, à pleine vitesse et à haut débit.

Ce soir-là, je me suis donc humblement et sincèrement demandé pardon et,


comme la première fois avec Don Miguel, j’ai senti ce déclic intérieur, ce
basculement définitif, préparé par toutes les étapes précédentes, ce
soulagement ultime qu’apporte la rupture de la dernière digue de jugement
faisant barrage à l’amour. Un pur moment de grâce…

Au terme de toute la procédure du Don du Pardon, cette nuit-là, j’ai à


nouveau constaté que toutes mes tensions musculaires – tant dans le corps
que sur mon visage – avaient disparu, preuve manifeste que tout mon stress
intérieur et mes jugements s’étaient dissous. Le lendemain, je me suis
réveillé frais, dispo, léger, heureux ; je me sentais bien dans ma tête, dans
mon cœur et dans mon corps.

À mes yeux, pratiquer le Don du Pardon avant de s’endormir a pour


bénéfice secondaire que tout le processus s’approfondit ensuite durant le
sommeil et que le subconscient intègre ainsi ce nouvel état d’esprit (« état de
cœur », aussi). J’observe cela à chaque fois.

Je me sens ensuite ouvert, rajeuni. J’éprouve un formidable sentiment de


bien-être !
La pratique du Don du Pardon n’est pas destinée à avoir un impact sur
autrui, même si elle en a indirectement un : elle a pour vocation première
d’agir sur nous, sur notre ouverture, sur ce qui nous pousse à décider – le
plus souvent inconsciemment – quand, où

et envers qui nous exprimons ou non notre amour. Elle nous aide à
reconsidérer les raisons qui nous font fermer notre robinet intérieur et tarir la
source de notre amour. Si nous restons ouverts et capables d’aimer, nous
influençons autrui et, de la sorte, le Don du Pardon aura bel et bien des
effets indirects probants sur les autres.

ET MAINTENANT, SI VOUS L’ESSAYIEZ ?...

Si vous désirez commencer à mettre en pratique le Don du Pardon, voici une


description étape par étape du processus, basée sur ce que m’a enseigné Don
Miguel en groupe et sur la pratique que j’en ai acquise ensuite moi-même en
solo. Grâce à l’expérience de tous ceux avec qui je l’ai partagée oralement,
j’ai pu maintes fois constater que, dès la première fois que quelqu’un

l’exécute,

seul

chez

lui,

sans

accompagnement, le rituel du Don du Pardon opère sa magie. C’est


précisément ce qui, en plus de sa simplicité, fait la force de cette méthode :
chacun peut l’utiliser quand il veut, où il veut. Vérifiez-le par vous-même !

Étape 1 : Préparer un cadre adapté

Si vous pratiquez le Don du Pardon dans la journée, mettez-vous dans un


endroit calme où vous ne serez pas dérangé pendant au minimum une demi-
heure, idéalement une heure (surtout les premières fois).
Débranchez votre ou vos téléphones. Adoptez une position confortable. Vous
pouvez vous asseoir dans

un fauteuil, vous mettre en posture de méditation, ou à genoux comme Don


Miguel me l’avait demandé à Teotihuacan, voire vous prosterner. L’idée
d’adopter une telle position peut éventuellement soulever des résistances
chez certains : n’est-il pas humiliant de se prosterner ? N’est-ce pas une
façon de se rabaisser ?

Une précision s’impose donc ici : ne confondons pas l’ humilité, une posture
intérieure qu’on choisit délibérément, et l’ humiliation qui nous est imposée
de l’extérieur par autrui. Le Don du Pardon nous aide à devenir humbles, à
remettre notre ego à sa juste place, à renoncer à une position illusoire de
supériorité ; il ne nous humilie jamais. Je vous invite donc à aborder le choix
de la meilleure position à adopter dans un esprit d’ouverture et
d’expérimentation (je dirais presque de jeu) : essayez, voyez ce que cela
provoque en vous, vous serez peut-être surpris du résultat. Ne sous-estimez
pas la puissance des postures du corps : en effet, il s’agit d’un langage en
soi, et chaque position est porteuse d’une signification puissante. Si vous
vous agenouillez, si vous vous prosternez, vous constaterez sans doute
qu’apparaît encore plus rapidement en vous un sentiment de véritable
humilité : vous vous sentirez physiquement prêt à demander pardon. Et si ça
ne vous convient pas, installez-vous simplement de la façon qui vous sied le
mieux.

Étape 2 : Atteindre le calme intérieur Si vous avez l’habitude d’utiliser


une méthode de relaxation ou une technique de méditation, quelle

qu’elle soit, servez-vous-en pour établir le calme intérieur en vous. Si vous


ne connaissez aucune méthode particulière, fermez simplement les yeux et,
durant quelques minutes, concentrez-vous sur votre inspiration et votre
expiration, à mesure que l’air entre et sort sans effort de vos poumons.
L’objectif est de créer un espace en vous, pour pouvoir faire la transition
entre les pensées et les préoccupations de la journée et le processus intérieur
que vous vous apprêtez à débuter. En quelques minutes vous verrez votre
respiration se faire plus profonde, ralentir, et votre bavardage mental
diminuer. Des pensées continueront immanquablement de surgir. C’est
normal. N’essayez pas de les arrêter ou de les repousser : contentez-vous de
les observer et de les laisser défiler, comme les nuages dans le ciel, et
revenez en douceur à la concentration sur votre respiration. Dès que vous
vous sentez intérieurement plus calme, détendu, disponible, vous êtes prêt à
commencer le Don du Pardon.

Étape 3 : Demander pardon aux autres

Une fois que vous avez atteint le calme intérieur, visualisez la première
personne à qui vous voulez demander pardon. Il n’y a pas d’ordre particulier
à respecter pour cela. Choisissez simplement le premier visage qui vous
vient à l’esprit. Prenez alors conscience des tensions, des conflits et des
sentiments négatifs qui vous ont conduit à fermer votre cœur à cette
personne.

Que vous a-t-elle fait ? Pourquoi lui en voulez-

vous ? Quels sont les griefs que vous formulez à son encontre ? Que
ressentez-vous quand vous pensez à elle, dans votre corps, dans votre cœur,
dans vos pensées ? Qu’est-ce que cela vous fait de nourrir de tels sentiments
à son égard ? Dans quel état cela vous met-il ?

Autant que possible, contentez-vous d’observer vos réactions sans les juger :
elles ont leur raison d’être. Il ne s’agit pas de les juger bonnes ou mauvaises,
justifiées ou non, simplement d’en prendre conscience, de les voir, de sentir
en vous leur impact, leurs conséquences. Ne vous censurez pas. Laissez-
vous pleinement habiter par les émotions que provoquent en vous cette
personne et ce que vous lui reprochez. Plus vous êtes en contact avec vos
sentiments, avec la réalité de cette relation, plus la demande de pardon
consécutive sera sincère et puissante. Attention toutefois de ne pas vous
complaire dans ces émotions : il s’agit juste de les rendre présentes et
accessibles au travail qui suit.

Quand vous y êtes, regardez intérieurement cette personne dans les yeux et
dites-lui silencieusement :

« Je te demande pardon ». Libérez-vous de vos griefs, lâchez prise de vos


tensions, de ce qui étouffe votre cœur chaque fois que vous pensez à elle ou
que vous la voyez. Renoncez à toute position de supériorité, au sentiment
d’être dans votre bon droit, en ayant conscience de tout ce que vous perdez à
bloquer ainsi votre amour, fût-ce juste un peu. Par contraste, sentez dans
votre corps ce que vous gagnez à vous ouvrir à nouveau, à abattre vos digues
intérieures, à laisser l’amour vous traverser librement. Observez ce que cela

déclenche dans vos muscles, votre plexus solaire, dans le ventre, le dos, la
nuque… Quel soulagement !

Une fois que vous en avez terminé avec cette personne, une fois que vous
sentez que quelque chose s’est débloqué et a bougé en vous, passez au
prochain visage qui se présente à vous et répétez toute cette étape depuis le
début. Parfois, cela prendra juste une minute ; d’autres fois, cela durera plus
longtemps, selon la relation spécifique que vous avez avec cet individu en
particulier. Il n’y a pas de règle en la matière. Sentez-vous donc libre de
prendre autant ou aussi peu de temps qu’il vous paraît nécessaire, à chaque
fois.

Vous pouvez aussi inclure dans cette étape toutes les personnes auxquelles
vous estimez avoir fait du tort, c’est-à-dire celles auxquelles il semble
normal de demander pardon. Si vous vous en voulez de leur avoir fait du
mal, ou d’avoir simplement nourri des sentiments et pensées très négatifs à
leur égard, profitez-en pour les englober dans ce processus et pouvoir ainsi
plus facilement vous demander pardon à vous-même, à la dernière étape du
Don du Pardon.

Notez que vous n’êtes pas obligé de passer en revue toutes les personnes
avec lesquelles vous avez des problèmes en l’espace d’une seule séance :
vous pouvez poursuivre le lendemain ou un autre jour, en choisissant à
chaque fois de traiter autant de relations difficiles que vous le désirez. La
première fois – ou les quelques premières fois – que vous pratiquerez le Don
du Pardon, vous constaterez sans doute que vous avez une liste assez longue
de personnes à qui demander pardon, dont certaines sont peut-être absentes
de votre

vie actuelle depuis longtemps, voire décédées. Même si elles sont loin de
vous, même si elles sont mortes, comme c’est essentiellement sur vous
qu’agit le Don du Pardon, le processus fera effet. Puis, viendra un jour où
vous ne travaillerez plus que sur des conflits et des tensions relativement
récents, de telle sorte que toute la procédure prendra beaucoup moins de
temps (de 30 à 60 minutes maximum).

Quand vous estimez avoir terminé de demander pardon aux autres, du moins
pour ce jour-là, passez à l’étape suivante.

Étape 4 : Demander pardon au diable

et à Dieu

Comme nous l’avons vu, nous ne nous servons pas seulement des autres
pour justifier notre décision de fermer notre cœur : nous utilisons également
le diable et Dieu, à cet effet. C’est pourquoi il faut également leur demander
pardon.

En demandant d’abord pardon au diable – aussi bizarre que cela puisse vous
sembler, a priori – vous récupérez le pou voir que vous avez donné aux

« forces noires » et autres « énergies négatives ».

Rappelez-vous qu’il n’y a que vous qui puissiez réduire le flot d’amour qui
passe à travers votre cœur.

Quand vous dites « Je te demande pardon » au diable –

ou à toute autre forme que prend à vos yeux le monde noir, les forces
contraires, ce qui s’oppose à vous –

vous vous libérez de l’étreinte étouffante que vous l’avez laissé exercer sur
votre cœur. Vous recouvrez la pleine capacité à aimer, en dépit de toute la
négativité

que vous observez autour de vous et dans le monde.

Oui, le mal existe dans notre société : c’est une réalité. Et il se peut même
qu’on vous ait fait du mal à vous, personnellement. Mais cela ne fait pas
automatiquement de vous une victime obligée de fermer son cœur.
Demandez donc pardon au diable de l’avoir rendu responsable d’un choix
qui ne tient en réalité qu’à vous.
Puis, demandez aussi pardon à Dieu, c’est-à-dire –

quelle qu’en soit la forme – à l’Amour universel, à l’Intelligence cosmique,


la Source, le Tao, à ce qui gouverne votre vie, au-delà de votre seule volonté
consciente. Demandez pardon à cette dimension, à ce monde auxquels vous
reprochez par moments vos difficultés, vos épreuves, vos souffrances. Il
nous arrive tous de nous résigner à notre sort, de faire le gros dos devant le
destin, de trouver la vie injuste et l’univers absurde, et d’en éprouver
frustration et ressentiment. Même si vous n’adhérez pas à une religion ou à
un système de croyances en particulier, laissez remonter en vous les
sentiments que vous cultivez contre ce « quelque chose » qui vous dépasse

– ça peut être tout simplement la vie – et que vous trouvez injuste, que vous
jugez trop dur, accablant, et par conséquent responsable de votre état, de vos
malheurs.

Beaucoup de croyants n’osent pas exprimer ouvertement de tels sentiments,


par peur des conséquences divines. Faut-il s’en étonner ? Malgré deux mille
ans de christianisme, l’idée que Dieu soit un père aimant – comme l’a
suggéré Jésus à l’époque –

est encore loin d’avoir effacé la représentation

précédente que véhiculait l’Ancien Testament, où Dieu apparaissait souvent


comme un être courroucé, vengeur et impitoyable. C’est dire si les nouvelles
représentations de Dieu qui émergent aujourd’hui, prenant notamment en
compte la dimension féminine du divin, prendront sans doute elles aussi du
temps à se propager ! Alors, quand vous dites « Je te demande pardon » à
Dieu, ce sont aussi toutes ces projections archaïques d’un dieu qui s’en fiche,
d’un dieu qui juge, d’un dieu masculin de sagesse implacable auquel manque
une dimension d’amour, dont vous vous libérez, pour vous reconnecter à un
Dieu qui est amour avant tout.

Par cette demande en pardon, vous cessez de faire de Dieu le miroir de vos
propres jugements envers vous-même, vous vous reconnectez à l’amour
divin, à cet amour – comme nombreux l’ont perçu en méditation, en
contemplation, en état de conscience élargi – qui soutient toute forme de vie
et sans lequel rien n’existerait dans l’univers. En demandant pardon à Dieu,
vous vous libérez du sentiment d’isolement et de séparation qu’engendrent
vos jugements et vos peurs.

Étape 5 : Se demander pardon à soi-même Au cours de cette dernière


étape du pardon, il vous reste maintenant à vous demander pardon à vous-
même. Ce faisant, vous démissionnerez du rôle de juge intérieur permanent
de vos actes, de vos paroles et pensées. Vous rétablirez ainsi le lien avec la
partie de vous-même qui « fait toujours de son mieux » (comme

le suggère le 4ème accord toltèque).

Bien sûr, nous commettons des erreurs. Bien sûr, nous sommes imparfaits…
comparés à l’idéal de perfection qu’on nous a inculqué (mais est-il vrai ?).

Bien sûr, nous ne sommes souvent pas à la hauteur de nos idéaux, de nos
buts et de nos attentes. Et alors ?

Quel mal y a-t-il à cela ? Couvre-t-on de reproches le bambin qui ne parvient


pas à marcher à la perfection dès la première fois qu’il se met debout ? Est-
ce que ça l’aiderait à mieux marcher ? Et nous, est-ce que cela nous aide de
nous juger et de nous critiquer de manière aussi impitoyable ?

Qu’est-ce qui nous empêche de nous aimer à chaque étape du chemin, à


chaque pas que nous franchissons, à mesure que nous grandissons et
évoluons dans notre vie ? Nous faut-il attendre la fin – si tant est qu’une telle
chose existe, au cours de notre évolution permanente, dans cette vie-ci et
peut-être dans d’autres

– quand nous aurons enfin atteint la perfection ?

L’amour de soi n’a-t-il pas davantage de chances de favoriser nos progrès et


notre amélioration que les reproches, les accusations et les jugements ?
Pourquoi ne pas rire un bon coup de nos erreurs et de nos défauts, pour
changer ? Bienheureux celui qui sait rire de lui-même… il n’a pas fini de
rigoler !

Le pardon de soi vient en dernier, dans le Don du Pardon, mais il est de


toute première importance.
Comme la clé de voûte d’une arche en pierre, qui maintient en place toute la
structure et la renforce, le pardon de soi soutient et renforce tout l’édifice de
notre vie. Le pardon de soi est la clé de voûte de l’architecture du Don du
Pardon.

Rappelez-vous : l’impact des jugements d’autrui est directement


proportionnel à l’intensité des jugements que vous portez contre vous-même.
Si vous vous jugez beaucoup, les jugements d’autrui feront écho aux vôtres
et auront une influence considérable sur vous.

Inversement, si vous n’avez que très peu de jugements envers vous-même,


ceux des autres vous traverseront librement, sans faire résonner la moindre
corde dissonante en vous.

De manière analogue, si vous êtes incapable de vous pardonner à vous-


même, vous aurez du mal à croire que les autres, ou même Dieu, puissent
vous pardonner ; alors que si vous vous pardonnez, vous trouverez tout à fait
normal que d’autres, y compris le diable et Dieu, vous accordent également
leur pardon.

Ce sont vos croyances intérieures qui donnent le

“la” aux autres : il n’y a que vous qui puissiez déterminer l’impact positif ou
négatif qu’aura sur vous une personne ou une énergie extérieure (fusse-t-elle
même diabolique ou divine). Les autres ne sont qu’un miroir qui reflète la
manière dont vous vous jugez ou vous vous aimez vous-même.

Si je me juge idiot, je vais réagir très vivement à toute personne qui dit que
je ne suis pas intelligent. A contrario, si je m’estime intelligent, je peux me
faire traiter d’idiot sans que cela m’affecte le moins du monde… sinon d’une
manière amusante. « Passer pour un idiot aux yeux d’un imbécile est une
volupté de fin gourmet », disait Courteline, suggérant, malgré le jugement
douteux que comporte cette citation, qu’il y a de multiples manières de
réagir à l’opinion d’autrui :

là où certains se vexent, s’offusquent, montent sur leurs grands chevaux,


d’autres sourient ou n’ont aucune réaction particulière.
Demandez-vous donc pardon pour tous les jugements que vous portez contre
vous (qui sont souvent les versions intériorisées de ceux dont vous avez été
l’objet dans l’enfance). Ce sont eux qui vous rendent si sensible à l’opinion
d’autrui et qui, plus que tout le reste, font de votre vie un enfer. Demandez-
vous pardon du fond du cœur, le plus sincèrement possible.

Cette ultime étape du Don du Pardon est vraiment cruciale. Elle vient en
dernier pour vous laisser assez de temps pour vous préparer à cet acte
majeur, définitif, à cette ultime capitulation intérieure. En général, quand
vous parvenez à cette phase finale du processus, les étapes précédentes vous
ont rendu tellement humble, elles ont ouvert tant de failles dans votre armure
et ont déjà libéré tellement de tensions et de jugements, que cette étape
apparaît comme la conséquence naturelle de tout le cheminement parcouru
jusque-là. C’est comme une rose magnifique qui ne peut qu’atteindre la
pleine floraison, une fois que sa tige, ses feuilles et son bourgeon ont déjà
poussé.

Observez bien ce qui se passe en vous : au moment où vous vous


demanderez sincèrement pardon à vous-même, un déclic final se fera en
vous, le dernier boulon de vos vannes intérieures cédera, et vous vous
sentirez à nouveau traversé par tout l’amour auquel vous faisiez barrage
jusque-là. Oui, l’amour pourra désormais à nouveau irriguer vos terres et
faire

refleurir votre monde intérieur, avant de déborder de tous côtés sur


l’extérieur.

Étape 6 : Exprimer sa gratitude

Ces flots d’amour et de vie qui surgiront soudain en vous, au terme du Don
du Pardon, se traduiront souvent juste après par des élans spontanés de
gratitude. Quand je pratique le Don du Pardon, un immense Merci ! de
reconnaissance et de soulagement jaillit généralement de mes lèvres à la fin.
À

Teotihuacan,

ces
sentiments

s’adressaient

prioritairement à Don Miguel Ruiz, pour m’avoir fait ce cadeau immense et


précieux, et m’avoir accompagné la toute première fois qu’il m’a été donné
de vivre ce processus. Quand je le fais tout seul chez moi (ou n’importe où),
j’adresse ma gratitude à la vie, à l’amour, à cet inconnaissable qui me
dépasse, aux personnes à qui je viens de demander pardon, à tous ceux qui
m’ont guidé, éclairé, formé, instruit au cours de ma vie, à ma amille, mes
amis, tous les gens qui me sont chers.

Vous pouvez ensuite vous endormir, si vous avez pratiqué le Don du Pardon
au coucher, ou simplement reprendre vos activités, si vous l’avez fait à un
autre moment de la journée. Dans ce dernier cas, j’aimerais partager avec
vous une prière magnifique qui m’a été donnée par Bashistya Shivananta, un
sage inspiré. Elle vous aidera, si vous le voulez, à insuffler une intention
positive dans toutes vos interactions avec autrui, à vous laisser traverser par
quelque chose de lumineux, de chaleureux et vivifiant qui fera du bien
autour de

vous :

« Là où se pose mon regard,

que l'espoir renaisse et que la conscience s'établisse ;

« Là où porte ma voix,

que fleurissent l’amour et la sagesse ;

« Là où se pose ma main,

que recircule la vie abondante et généreuse ;

« Là où je passe,

que le bonheur afflue ;


« Là où je demeure,

que la vérité transparaisse ;

« Là où je siège,

que la lumière soit. »

QUESTIONS ET RÉPONSES

Certaines questions me sont régulièrement posées quand je partage le Don


du Pardon avec d’autres personnes. Je me suis donc efforcé de répondre aux
plus courantes d’entre elles. Toutefois, si – après avoir lu ce qui suit – vous
réalisez qu’une de vos questions reste sans réponse, dans l’esprit de ce
livre… je vous demande pardon !

Question : Est-il vraiment possible

de pratiquer le Don du Pardon seul, sans l’avoir expérimenté dans un


environnement contenant ?

Réponse : Le contexte dans lequel il m’a été donné de vivre cette


formidable expérience et de découvrir cet outil pousse tout naturellement
certains à s’interroger sur le rôle qu’ont pu jouer Don Miguel et le groupe
sur ce que j’ai vécu, et par conséquent sur l’efficacité de ce processus dans
un cadre tout différent. Comme le savait Don Miguel, en me recommandant
d’écrire ce livre, cette méthode peut tout à fait être mise en œuvre
individuellement. En pratiquant le Don du Pardon chez vous, vous n’aurez
certes pas la présence de Don Miguel à vos côtés…
mais vous n’aurez pas non plus à gérer celle d’une vingtaine de personnes
devant lesquelles vous mettre à

genoux, ni les réactions que cela peut provoquer au niveau de votre ego !
Les témoignages que j’ai reçus à ce jour de celles et ceux qui ont
expérimenté cet outil seuls chez eux confirment qu’il fonctionne tout à fait
dans ce cadre. Si, toutefois, vous avez envie de mettre en pratique cet outil
dans le cadre bienveillant d’un groupe, vous trouverez en fin d’ouvrage les
informations relatives aux stages qui sont organisés à cet effet.

Question : Si, au cours de ce processus, je demande pardon à quelqu’un

qui m’a vraiment fait du mal, n’est-ce pas comme si je le laissais s’en
tirer en toute impunité ?

Réponse : Le Don du Pardon a pour vocation de vous libérer des chaînes de


la colère, du ressentiment, de la peur et de l’esprit de vengeance qui
étouffent votre cœur et font obstacle à votre capacité naturelle à aimer. Il
s’agit donc avant tout et essentiellement d’un processus intérieur destiné à
vous soulager de vos propres souffrances.

Encore plus précisément : le Don du Pardon a pour objectif de vous libérer


de la prison de vos sentiments négatifs, mais pas de vous faire renoncer à la
justice.

Si vous devez prendre des mesures légales contre quelqu’un, en raison de ce


qu’il vous a fait subir, vous pouvez et devriez le faire, si vous en ressentez la
nécessité. Mais, avant d’entreprendre une quelconque action dans le monde
extérieur, si vous prenez le temps de commencer par pratiquer le Don du
Pardon, vos

actes émaneront d’un état intérieur d’équilibre et de paix, et non du


ressentiment, de la haine ou de l’envie de revanche. Ce qui fait une énorme
différence !

Aucun dépôt de plainte, aucun procès ne vous apportera la paix intérieure,


même si la personne qui vous a fait du tort est jugée coupable et que vous
touchez une compensation financière ou d’une autre nature, pour ses méfaits.
La pratique du Don du Pardon peut donc vous aider à atteindre un état
d’équilibre émotionnel qui vous permettra de vous remettre, de guérir
intérieurement, indépendamment de toute mesure légale que vous jugeriez
appropriée.

Autrement dit, il faut clairement faire la distinction entre processus intérieur


et procédures extérieures. Ce sont deux choses différentes. Faites le travail
intérieur dont vous avez besoin pour retrouver votre bien-être, guérir vos
blessures et retrouver votre intégrité et votre complétude. Puis, si nécessaire,
prenez les mesures extérieures qui s’imposent.

Sous sa forme la plus élevée, l’amour n’est pas seulement un sentiment :


c’est un état de conscience.

Et, à partir de cet état-là, vous pouvez entreprendre tout ce que vous jugez
nécessaire, même si cela implique de se montrer ferme, intransigeant et
sévère.

L’amour n’est ni de la faiblesse, ni de la mièvrerie.

Il y a, de nos jours, beaucoup d’incompréhension autour des notions d’«


amour inconditionnel » et d’« aimer ses ennemis ». L’amour dont il est
question ici n’est pas de l’affection, de l’amour sentimental, comme on peut
en éprouver pour les êtres qui nous sont chers. C’est un état d’esprit (ou état
d’âme) qui

est libre de sentiments et émotions négatives, où le cœur n’est pas fermé. Cet
état permet de voir l’individu qui nous a fait du tort comme une personne à
part entière, avec sa lumière et son ombre, ses qualités et ses défauts, sans la
réduire à ses actes les plus noirs, puis, fort de cette conscience-là, de prendre
les

mesures

qui

s’avèrent

pertinentes.
Malheureusement, les exemples d’un amour de cette sorte restent rares ; dès
lors, de nombreuses personnes ont tendance à adopter une attitude en matière
d’amour et de pardon qui relève davantage de la sentimentalité.

Une telle posture est très différente de l’amour et du pardon sincères


auxquels donne accès la pratique du Don du Pardon.

Vous pouvez donc utiliser cet outil pour votre propre bien-être, sans avoir à «
aimer » (au sens d’ aimer bien) toutes les personnes auxquelles vous
demandez pardon. Pas plus que vous n’avez à prendre de mesures légales, si
vous ne les jugez pas nécessaires. Pour illustrer cette attitude paradoxale,
permettez-moi de terminer cette réponse par une blague qui me paraît tout à
fait appropriée ici : Un mari à sa femme : « Chérie, si nous n’avions plus
notre château de 24 pièces, notre maison sur la Côte d'Azur, notre chalet en
Suisse, les deux jets, la Rolls-Royce, le chauffeur, le cuisinier et la bonne,
ainsi que notre yacht en Bretagne, est-ce que tu m’aimerais encore ? »

Réponse de sa femme : « Mais enfin, bien sûûûûr, mon amour ! …Mais


qu’est-ce que tu me manquerais ! »

Vous voyez ? Nos sentiments et notre état intérieur ne doivent pas


obligatoirement se traduire par des comportements classiques et
conventionnels : on peut tout à fait continuer d’aimer son mari… et le quitter
!

Question : Avec quelle fréquence devrais-je pratiquer le Don du Pardon


?

Réponse :Matin et soir, tous les jours, jusqu’à la fin de vos jours. Non, je
plaisante ! Il n’y a pas de règles particulières à suivre en la matière. Je
constate simplement qu’en général, quand on commence à travailler sur le
pardon, on a tendance à le pratiquer assez intensément et régulièrement
durant quelques jours ou quelques semaines. Comme je l’ai dit plus haut,
une seule séance peut s’avérer insuffisante à traiter tous les problèmes non
réglés que nous traînons avec nous depuis longtemps. Par la suite, il pourra
s’écouler des semaines ou des mois sans que vous éprouviez le besoin de
ressortir ce bel outil de votre boîte.
Cela dit, il se peut tout à fait que vous viviez une expérience tellement forte,
la première fois que vous utiliserez le Don du Pardon, que vous n’y
reviendrez pas de sitôt. Prêtez simplement attention à ce qui se passe en
vous, à votre état, vos sentiments, vos besoins. Soyez honnête avec vous-
même et vous saurez quand et à quelle fréquence l’utiliser.

Question : Je ne crois ni au diable, ni à Dieu.

Qu’est-ce que je fais de cette étape du processus ?

Réponse : Considérez le diable comme votre projection la plus négative, et


Dieu comme la plus positive. Nous faisons tous des projections, même les
plus « conscients » ou les plus « éveillés » d’entre nous : la seule différence
est que certains sont justement plus « conscients » que ce sont des
projections.

Dans la Cabbale, on trouve ces mots : « Avant que le monde fût créé, le
visage ne regardait pas le visage ». C’est une manière de suggérer que la
Création est une projection, un miroir permettant au Créateur de se connaître
lui-même. Il semble, par analogie, que nous ayons besoin de quelque chose
d’extérieur pour projeter ce qui est en nous avant de pouvoir pleinement
nous l’approprier : nous projetons donc nos propres démons et divinités,
notre univers intérieur plus ou moins conscient, sur la nature, sur des
représentations divines ou diaboliques, sur les autres, et ainsi de suite. Pour
connaître et intégrer ces dimensions de nous-mêmes, il semble que cette
tendance

commencer

par

projeter

soit

incontournable.
Même si vous ne croyez pas au diable et à Dieu – et, sous les représentations
simplistes qu’en véhicule la religion, c’est aussi mon cas – vous considérez
probablement

que

certaines

forces

extérieures

majeures vous influencent (voire que vous en êtes la victime), que celles-ci
soient positives ou négatives.

On leur donne de nombreux noms différents : la

chance ou la malchance, le destin, le hasard, « les autres », la vie, la nature,


les circonstances, l’hérédité, les gènes… ou, pourquoi pas, le gouvernement,
le système, les multinationales, etc., que certains n’hésitent pas à diaboliser !

Avant de commencer le processus du Don du Pardon, prenez donc le temps


d’identifier les forces impersonnelles – ou transpersonnelles – auxquelles
vous donnez un certain pouvoir, celles-là mêmes que vous incriminez
ensuite quand les choses vous échappent ou ne se déroulent pas comme
prévu. Si cela vous semble trop compliqué ou difficile, vous pouvez
également – au moment d’atteindre cette étape du processus – demander
simplement pardon à tous les facteurs et forces impersonnels, quels qu’ils
soient, dont vous vous servez pour justifier votre fermeture et la réduction du
flot naturel de votre amour.

L’idée est que vous parveniez à vous sentir à nouveau pleinement


responsable de votre capacité à aimer, en soutirant à toute personne,
circonstance ou chose extérieures – réelles ou virtuelles, vraies ou
imaginaires – le pouvoir que vous leur avez donné de vous empêcher
d’aimer. Quand nous demandons pardon aux autres, au diable et à Dieu,
nous sommes en réalité en train de dire : « Je vous demande pardon de vous
avoir rendus responsables de mon choix inconscient de ne plus aimer ou
d’aimer moins, de vous avoir accusés de quelque chose que moi seul suis en
mesure de décider et de changer. » On peut aussi bien utiliser des gens que
des événements, des circonstances, la nature, des concepts abstraits et des
croyances comme prétexte pour tenter de justifier

pourquoi on s’est fermé comme une huître.

Peu importe, au fond, quel écran nous utilisons pour nos projections :
l’important est de revendiquer la propriété de ces projections, de nous
réapproprier la responsabilité de nos choix et d’arrêter de reprocher à des
facteurs extérieurs ce qui relève exclusivement de notre contrôle à nous. Si
Dieu et le diable ne relèvent pas des divers écrans dont vous vous servez
pour vos propres projections, cela n’a aucune importance.

L’objectif de cette étape est de vous amener à vous occuper des facteurs
extérieurs impersonnels auxquels vous donnez pouvoir et dont vous croyez
être victime.

Question : Comment savoir si les gens à qui je demande pardon me


pardonnent vraiment ?

Réponse : Rappelez-vous que la clé du Don du Pardon est le changement


d’état intérieur qu’il induit en vous. Au lieu de vous considérer au-dessus
des autres, et donc apte à les juger et à leur accorder en toute magnanimité
votre pardon, vous inversez la situation : vous leur demandez à eux de vous
pardonner. C’est ce renversement qui favorise la guérison et permet à votre
cœur de se rouvrir.

Cette manière d’inverser les choses n’est d’ailleurs pas une exclusivité du
travail de Don Miguel Ruiz.

Chez Byron Katie, par exemple, dans la démarche de questionnement qu’elle


propose, le Travail, on trouve le même genre de renversements. Par
exemple, si quelqu’un éprouve des émotions négatives, parce qu’il se dit, «
Mon père me juge tout le temps », Byron

Katie suggère des renversements de cette affirmation comme « Je juge


toujours mon père » ou « Mon père ne me juge jamais ». Cette gymnastique
mentale libère l’esprit de ses ornières de pensée habituelles, ce qui libère à
son tour le cœur et lui permet d’aimer à nouveau.
Dans de nombreux cas, les personnes que vous jugez n’ont sans doute même
pas conscience que vous avez des raisons de leur demander pardon, parce
qu’elles ne se rendent pas compte que vous les jugez, que vous les couvrez
de reproches ou les accusez de quelque chose. Et, même si elles étaient
conscientes de vos sentiments négatifs, elles ne trouveraient peut-être rien
d’anormal à cela, compte tenu de la société dans laquelle nous vivons, et
elles ne s’y attarderaient pas.

Cependant, si vous pratiquez le Don du Pardon chez vous et que vous


demandez à telle ou telle personne de vous pardonner, il se pourrait bien, la
prochaine fois que vous la croiserez, que vous constatiez que quelque chose
a changé dans son attitude à votre égard, du fait de la transformation
intervenue dans votre propre cœur. Quelque chose se sera dénoué entre vous,
à distance, sans avoir eu à en parler. Il n’y a là de magie que pour ceux qui
ignorent les liens subtils qui nous relient les uns aux autres, par delà le temps
et l’espace.

Alors, que les gens auxquels vous demandez pardon vous pardonnent
effectivement ou non, le Don du Pardon agira sur vous et pourrait tout à fait
modifier l’attitude de ces personnes à votre égard.

Question : Dans quels cas le Don du Pardon

ne convient-il pas ? Quand n’est-il pas l’outil adapté à la situation ?

Réponse : Le Don du Pardon est “une” clé correspondant à une porte, mais
dans certains cas lourds (viol, inceste, violences familiales, etc.), il faut
franchir plusieurs autres portes avant d’atteindre celle-là. Redisons-le : le
Don du Pardon n’est ni un passe-partout qui ouvrirait toutes les portes, ni
une boîte à outils complète en soi.

Certaines personnes commencent tout juste à se libérer de la culpabilité


qu’elles ont longtemps éprouvée pour les violences qu’elles ont subies, à
admettre qu’elles ont bel et bien été victimes, qu’elles ne sont en rien
responsables de ce qui leur est arrivé.

Elles osent pour la première fois sortir, expulser les sentiments accumulés en
elles : rancœur, dégoût, colère, haine, etc. Cette étape est incontournable,
vouloir

la

court-circuiter

serait

tout

fait

contreproductif.

Miguel Ruiz compare la guérison de certaines blessures émotionnelles à


celle d’un abcès. Il faut alors commencer par inciser l’abcès, en vider le pus,
désinfecter, avant que la plaie puisse cicatriser. C’est la vérité qui fait office
de scalpel, c’est elle qui fait sortir les choses les plus noires et toxiques au
grand jour. C’est ensuite la réflexion et l’analyse qui désinfectent. Ce n’est
que dans un dernier temps que le pardon et l’amour accomplissent l’ultime
étape de cicatrisation.

Se sentir responsable d’actes odieux, alors qu’on les a en réalité subis, c’est
littéralement porter en soi du

poison qui nous ronge de l’intérieur. Un travail thérapeutique de mise en


lumière de ce qui s’est vraiment passé, une redistribution juste et véritable
des responsabilités, afin de pouvoir évacuer ce pus qui n’a pas à être présent
en soi, ce sont là des étapes préliminaires qui s’imposent dans ces cas-là et
qui nécessitent souvent un soutien psychothérapeutique.

A contrario, et pour rester dans la métaphore de la blessure physique, le Don


du Pardon convient particulièrement aux nombreuses situations où il y a
blessure ouverte – on nous a fait du mal, les choses sont claires – mais où
l’ego s’acharne à entretenir cette blessure, à la rouvrir, à retourner le couteau
dans la plaie, à l’empêcher de cicatriser.
Mais si la blessure est grave, profonde, insidieuse, si elle s’est infectée, ce
serait griller les étapes que de vouloir la cicatriser à ce stade avec le Don du
Pardon.

On ne dépasse pas un état avant d’y être passé ou, comme le dit Jean-Yves
Revault ,

1 « on ne se dépasse pas avant de s’être rejoint ». La guérison a une


chronologie à respecter. L’incision d’un abcès est souvent

douloureuse,

mais

elle

précède

obligatoirement sa désinfection et sa cicatrisation.

Si donc le processus du Don du Pardon vous semble totalement impossible à


envisager dans une certaine situation, par rapport à une personne bien
précise, si le seul fait d’imaginer sa mise en œuvre suscite en vous des
résistances violentes et insurmontables, c’est peut-être le signe qu’il y a
d’autres étapes préliminaires à franchir, d’autres outils à mettre en œuvre
avant celui-ci.

Il faut savoir distinguer les oppositions normales de l’ego au pardon, qui


doivent être surmontées, de ces résistances plus profondes qui doivent au
contraire être écoutées, puisqu’elles signalent qu’un travail préalable doit
être entrepris avant d’en venir au Don du Pardon proprement dit.

Tout outil peut faire du mal, s’il est utilisé au mauvais moment, dans la
mauvaise situation, de la mauvaise manière. On ne le dit pas assez.
N’entamez donc pas un travail sur le pardon si vos signaux internes vous
indiquent clairement que vous avez d’autres portes à ouvrir et à franchir,
avant d’arriver à celle qu’ouvre la clé présentée dans ces pages.

1. La guérison par l’écriture, Jean-Yves Revault, Editions Jouvence, 2003.


CONCLUSION : L’AMOUR EST DIEU

Chaque jour, nous nous lavons les mains et nous prenons une douche, car,
aussi attentifs que nous soyons, nos activités nous salissent et laissent
fréquemment sur nous un arôme qui n’est pas franchement celui de la rose…
De manière analogue, le Don du Pardon procure à notre cœur un

« bain-douche » d’amour, une énergie purificatrice de pardon, quand nous


avons laissé trop de

« saletés » émotionnelles s’accumuler en lui.

Dans l’idéal, il serait judicieux de prendre un temps chaque soir, avant de se


coucher, pour se laver intérieurement le cœur, le débarrasser de tout
sentiment négatif, de toute émotion perturbante, de toute tension, tout
blocage. Avec l’habitude, quelques minutes suffisent à cette hygiène interne
salutaire et bienfaisante.

Si nous laissons le temps à un minuscule cristal de ressentiment, de haine ou


de rancœur de se solidifer en nous, celui-ci risque ensuite de croître,
favorisant la cristallisation des autres sentiments noirs qui nous traversent.
Et en l’espace de peu de temps, à notre insu, tout un caillot de tensions non
résolues peut se développer progressivement dans notre cœur et en limiter
chaque jour un peu plus la capacité à aimer. La seule vraie « maladie
d’amour » est précisément cette perte progressive de l’aptitude à aimer.

L’époque n’est pas si lointaine où il était

déconseillé aux personnes de prendre un bain, où l’hygiène était plus que


rudimentaire et les gens sentaient mauvais. La société a ensuite compris
l’importance de la propreté et la salle de bains a fait son apparition dans tous
les logements. Ce développement de l’hygiène physique est d’ailleurs la
cause principale de diminution ou de disparition des pathologies qui ont
ravagé les siècles passés. De manière analogue, les impuretés du cœur sont
elles aussi un poison émotionnel contagieux qui porte atteinte à notre santé
émotionnelle collective, à la qualité de nos relations. La pureté est à notre
cœur ce que la propreté est à notre corps.

Alors, pourquoi ne pas faire de la pureté du cœur notre nouvelle priorité ?

Un cœur aimant est au moins aussi important à notre bonheur qu’un corps en
bonne santé. Tant de maladies sont dues à des sentiments négatifs
cristallisés, somatisés, qu’un cœur pur et aimant ne contribue pas seulement
à notre santé émotionnelle, mais physique aussi, et nous ouvre les portes à
bien plus encore.

« Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu ! », disait Jésus. Et
l’on explique habituellement ce lien entre la pureté du cœur et la capacité à
voir Dieu en rappelant que Dieu est amour, comme l’affirment nombre de
traditions religieuses et spirituelles. Ainsi, celui qui a le cœur pur reçoit sans
obstruction l’amour divin, qui le traverse et irradie autour de lui.

Je me plais toutefois à cultiver également l’explication inverse, avec laquelle


peuvent même

jouer des personnes non croyantes. Si je considère cette fois que L’Amour est
Dieu – autrement dit l’amour, sous sa forme la plus universelle,
inconditionnelle et totale, est ce que nous nommons Dieu – alors “Dieu”
n’existe que si je le manifeste en moi par ma propre capacité à aimer, je ne
vois

“Dieu” que lorsque j’aime pleinement ! Le choix m’appartient. Il appartient


à chacun d’entre nous.

Aimer est un verbe, rappelle Steven Covey dans le même ordre d’idées : on
peut donc décider d’aimer, vouloir aimer. La question, dès lors, n’est plus de
savoir si Dieu existe dans l’absolu, de manière abstraite et indépendante,
mais si je Le fais exister dans ma vie, en tant qu’Amour, si je me laisse
librement être traversé par Lui, en me libérant volontairement des obstacles
et obstructions à l’amour que forment mes peurs, mes ressentiments et tous
mes sentiments négatifs.
C’est à mes yeux un renversement de point de vue stimulant et
responsabilisant. Il implique qu’il est en notre pouvoir, à la portée de chacun
d’entre nous, de laisser grandir le divin en soi, c’est-à-dire d’augmenter sans
cesse sa capacité à aimer.

Le Don du Pardon est un outil merveilleux de simplicité et d’efficacité pour


atteindre et entretenir la pureté du cœur dont il est question ici. Plus qu’un
outil, d’ailleurs, c’est une posture, une manière de se positionner face à la
vie, aux autres, aux difficultés et aux souffrances.

Je vous souhaite beaucoup de bonheur à travailler avec. Vous n’avez besoin


d’aucune connaissance ou expérience antérieures pour qu’il opère sa magie
en

vous. Et si vous y consacrez du temps, je suis convaincu qu’il aura une


influence extrêmement positive sur votre vie, comme pour moi et tous celles
et ceux qui l’ont utilisé à ce jour.

Puisse-t-il vous faire autant de bien qu’à nous dans votre vie quotidienne !

APPENDICE :

LES DEUX RENVERSEMENTS

D’ACCORDS TOLTÈQUES

Après avoir lu les livres de Don Miguel Ruiz et eu l’occasion de le


rencontrer au Mexique, voici dix ans, j’ai continué d’utiliser les principes
exposés dans Les Quatre Accords Toltèques. J’ai d’ailleurs écrit à l’époque
une série d’articles sur les outils toltèques que propose Don Miguel, qui sont
parus dans divers médias français et suisses.
C’est avec les deuxième et troisième accords toltèques que j’ai rencontré le
plus de difficultés :

« Quoi qu’il arrive, n’en fais pas une affaire personnelle » et « Ne fais pas de
suppositions ».

Cela tient sans doute à leur formulation négative, en

« ne… pas ». On sait en effet aujourd’hui que le cerveau, et plus


particulièrement le subconscient, a du mal à comprendre les ordres négatifs,
voire – pire

– qu’il fait exactement ce qu’on lui intime de ne pas faire. Dites par exemple
à un enfant sur son vélo,

« Ne t’approche pas trop de ce trou ! », et – devinez quoi ? – il se dirigera


droit dessus et tombera dedans.

Très tôt, dans la vie, j’ai pris l’habitude de prendre le contre-pied de mes
propres pensées, d’inverser et de retourner mon point de vue. Je faisais cela
au début par jeu et par simple curiosité, mais, par la suite, j’ai compris qu’un
point de vue

unique ne permet jamais d’avoir une vision complète de ce qu’on observe,


de même qu’un seul spot lumineux produira immanquablement une ombre
de l’autre côté de l’objet qu’on éclaire. Il faut au minimum deux spots –
idéalement plusieurs –

pour éviter les ombres.

Dès lors, chaque fois que j’avais du mal à appliquer les deuxième et
troisième accords toltèques, je faisais ce qu’il m’était naturel de faire : je les
inversais. Les résultats se révélèrent si intéressants que j’ai fini par en faire
deux Renversements d’Accord Toltèques, comme j’aime à les appeler, et que
j’ai élaboré au fil des ans une manière de travailler avec eux que d’autres ont
également trouvé utile.

À titre de complément au Don du Pardon, je vous offre donc ces deux


Renversements d’Accord Toltèques ci-dessous, tirés des deuxième et
troisième accords de Don Miguel : « Prenez tout personnellement » et «
Faites de nombreuses suppositions » !

Le premier Renversement d’Accord Toltèque :

« Prenez tout personnellement »

Quand j’ai commencé à mettre en pratique les Quatre Accords Toltèques,


j’avais du mal à appliquer le deuxième, « Quoi qu’il arrive n’en faites pas
une affaire personnelle » ou, en abrégé, « Ne prenez rien personnellement ».
C’est vrai : comment s’y prend-on ? Bien sûr, j’ai suivi les instructions de
Don Miguel qui explique que ce que les autres disent de moi n’a en

réalité rien à voir avec moi. Mais à mes yeux, cette approche comporte un
danger caché, surtout quand on l’applique de manière simpliste : elle peut
pousser les gens – comme on le voit parfois dans le milieu du
développement personnel – à s’enfermer dans une bulle. Dès lors,
évidemment, tout ce qui dit autrui cesse de les affecter, de les faire réagir.
Mais le risque est de se retrouver ainsi complètement coupé des autres !
Quoi que disent les gens, ces personnes là répondent, « C’est ton affaire », «
C’est ton problème

», « C’est ton point de vue », « C’est toi qui vois cela comme ça », etc.
L’échange n’est plus vraiment possible, tout glisse sur elles comme l’eau sur
les plumes d’un canard. Or, « ne pas prendre les choses personnellement »
ne signifie pas ne pas les prendre du tout ! Le but n’est pas de devenir
imperméable, insensible, isolé.

Par ailleurs, je m’étais rendu compte que lorsque je prends les choses
personnellement, c’est toujours parce que les jugements et les remarques
négatives d’autrui sont venus faire écho à toutes les critiques que je
m’adresse à moi-même. C’est comme lorsqu’on gratte la corde de ré d’une
guitare et que, par résonance, la même corde d’autres instruments se
trouvant à proximité – guitare, violon ou piano – se met à vibrer à son tour.
Mes réactions à ce qu’autrui dit ou fait m’indiquent donc quels sont les
jugements que je continue d’avoir sur moi-même. Par conséquent, en les
utilisant de manière judicieuse, ces réactions peuvent en réalité m’aider à les
identifier et à m’en défaire.
J’ai

donc

décidé

de

Tout

prendre

personnellement », de délibérément laisser les autres appuyer sur mes


boutons, d’observer ce que cela déclenchait en moi, sans essayer de m’y
soustraire ou de l’éviter. Dès que je me suis mis à fonctionner ainsi, j’ai
développé une conscience encore plus aigüe de ce qu’autrui déclenchait chez
moi. Sitôt que j’identifiais un jugement intérieur en moi – c’est-à-dire la
raison interne de ma réaction à des déclencheurs externes –

j’utilisais les outils que décrit Don Miguel dans Pratique de la Voie Toltèque
(et d’autres que j’ai découverts au fil des ans) pour me libérer de ce
jugement contre moi-même.

Je commençais généralement par identifier l’origine de ce jugement. On a en


effet tendance à se juger de la même manière que nous jugeaient nos parents,
nos professeurs et autres figures d’autorité, quand nous étions enfants. Petit,
je n’avais pas d’autre choix que d’accepter les étiquettes que me collaient les
adultes, mais devenu grand à mon tour, je me rends bien compte – si je
prends le temps de les remettre en question – que ces jugements sont biaisés,
partiels et inexacts. L’opinion d’autrui l’est toujours, d’ailleurs : personne
n’est 100 % objectif à notre sujet. En prenant conscience de cela, pas
seulement globalement, mais jugement par jugement, opinion par opinion,
j’ai progressivement retiré à autrui le pouvoir de me juger et de me définir,
ou – plus exactement – le pouvoir de laisser ces jugements et définitions
avoir le moindre impact sur moi.
J’ai constaté que chaque fois que je parvenais à identifier et à me libérer de
l’un des jugements que je portais sur moi-même, je me libérais du même
coup

des critiques de même nature émanant des autres, qui cessaient de


m’affecter… sans pour autant que j’aie à me couper de ces personnes ou à ne
pas écouter et recevoir ce qu’elles disaient. Comme le dit le cinquième
accord toltèque : « Soyez sceptique, mais apprenez à écouter ». Or, plus je
me libère de mon propre juge intérieur, plus je suis libre des jugements
d’autrui, moins j’ai la moindre chose à craindre ou à défendre, ce qui me
permet d’être tout à fait ouvert et réceptif à ce que disent les autres. Le
Renversement d’Accord « Prenez tout personnellement » est donc un bon
moyen d’identifier la façon dont les autres réfléchissent dans notre direction
notre propre négativité envers nous-mêmes. L’opinion et les jugements
d’autrui n’ont de pouvoir que dans la mesure où ils ont cet effet miroir.
Musicalement parlant, c’est nous qui donnons aux autres le pouvoir de nous
faire réagir, en conservant en nous des cordes dissonantes, susceptibles
d’entrer en résonance avec les propos désagréables qu’ils peuvent tenir.

Sitôt que nous avons éliminé cette corde dissonante de notre registre ou –
image plus pertinente ici – que nous l’avons ré-accordée sur ce qu’il y a de
meilleur en nous, nous ne résonnons plus de la même manière.

Les vibrations négatives de notre entourage ne déclenchent plus rien chez


nous : elles nous traversent librement, sans nous affecter le moins du monde.
Nous restons tout à fait capables d’entendre ce qui nous est dit, d’en
apprendre même quelque chose (ne serait-ce que le point de vue de notre
interlocuteur, ce qu’il projette sur nous), mais nous n’avons plus de réactions
personnelles négatives, puisque nous ne portons plus

ces jugements-là contre nous-mêmes.

Il y a, je trouve, quelque chose de jubilatoire à pouvoir passer de la crainte


de prendre les choses d’une manière personnelle – et de l’effort d’éviter à
tout prix de telles réactions – à l’acceptation de réagir personnellement à ce
que les gens peuvent dire ou faire. On finit même par inviter consciemment
des réactions de ce genre, afin de mieux se connaître et d’avoir de précieux
indices sur ce qu’il reste à transformer en soi, pour progresser vers la liberté
intérieure. On aborde alors chaque journée en se disant, « Qu’est-ce que je
vais apprendre sur moi aujourd’hui de mes interactions avec mon conjoint,
ma famille, mes voisins et mes collègues ? Quelles réactions vont-ils
éventuellement déclencher en moi ? ». Quand on les accueille avec cette
attitude-là, nos réactions ne nous font plus peur, nous ne les fuyons plus,
nous ne craignons plus qu’elles soient le signe que « nous ne sommes pas
assez spirituels ou évolués ». Nous les interprétons au contraire comme les
symptômes révélateurs de ce qui cherche à se résoudre et à guérir en nous.
Et rien n’empêche d’en faire un jeu !

Cette approche n’est pas forcément destinée à tout le monde (y en a-t-il une
qui le soit ?). À vous de voir si elle vous convient ou non. Mais, rappelez-
vous : les vérités et les outils spirituels sont pareils à des fruits délicieux,
gorgés de vie. Si quelqu’un vous offre une mangue parfumée et juteuse, vous
n’allez pas l’encadrer pour la mettre au mur de votre chambre, ni la disposer
religieusement sur un petit autel privé pour brûler de l’encens devant, en
priant. Non. Vous allez

mordre joyeusement dedans, y planter les crocs, en savourer le jus et


l’arôme, la réduire en bouillie dans votre bouche avant de l’avaler. Puis,
votre système digestif en triera méticuleusement les composants, de sorte
que vous finirez par en assimiler tous les nutriments

essentiels

dont

vous

avez

besoin

(vitamines, sucres, oligoéléments, etc.) avant de rejeter dans vos urines et


vos selles tout ce qui ne vous sert pas. Les vérités spirituelles qui nous sont
offertes sont appelées à subir le même sort. Nous devons joyeusement les
déguster, en extraire les énergies et la vie qu’elles contiennent, puis faire un
tri en fonction de notre propre structure et de nos besoins. Il nous reste alors
à intégrer ce qui nous est utile, puis à éliminer les parties que notre
organisme, notre être intérieur, ne peut assimiler.

Voilà ce que tout maître spirituel authentique attend de ses apprentis ou de


ses disciples. Une telle attitude est d’ailleurs un excellent antidote aux
attitudes sectaires que développent certains, qui nuisent autant au guide
spirituel qu’à ses dévots fanatiques. Il faut parfois savoir trahir la forme, ou
tout au moins la changer, pour rester fidèle au fond.

Le second Renversement d’Accord Toltèque :

« Faites de nombreuses suppositions »

Le troisième accord toltèque – « Ne faites pas de suppositions » était encore


plus difficile à appliquer pour moi que le second. Moi, ne pas faire de
suppositions ? La bonne blague ! Autant demander à un singe de ne pas faire
de grimaces. Je fais des

suppositions tout le temps !

Bien sûr, il y a de nombreuses situations où je peux facilement arrêter d’en


faire, et le troisième accord toltèque m’a été bien utile pour cela. Par
exemple, au lieu d’essayer de deviner ce que pense quelqu’un, ce qu’il a
l’intention de faire, je peux parfaitement le lui demander ! Chaque fois que
c’est possible, cette attitude permet d’éviter tous les problèmes et conflits qui
voient le jour simplement parce qu’on s’imagine ce que les autres ont en tête
ou dans le cœur, qu’on leur prête des intentions, au lieu de vérifier
directement auprès d’eux ce qu’il en est.

Mais il y a aussi de multiples situations où on l’on ne peut pas demander ce


qui motive les actes, propos ou décisions d’autrui. Je ne peux pas demander
au conducteur qui me double dans un virage ce qui le pousse à rouler aussi
dangereusement. Je ne peux pas demander à un ami qui est en retard et
injoignable par téléphone, pourquoi il n’est pas à l’heure. Je ne peux pas
demander à un leader politique pourquoi il a pris telle décision qui a sur ma
vie un impact que je déplore. Et ainsi de suite.

De toute évidence, nous sommes tous confrontés à des événements au sujet


desquels il nous est impossible de savoir ce qui se passe vraiment, d’en
connaître les tenants et aboutissants, de sorte que nous tentons naturellement
de deviner ce que nous ignorons, faisant spontanément des suppositions
quant aux causes et aux intentions en jeu dans ce que nous observons.

Mais, quand on y regarde de plus près, le problème

n’est pas que nous fassions des suppositions.

Le vrai problème, me suis-je rendu compte, n’est pas de faire des


suppositions, au pluriel ; c’est de faire une supposition, au singulier, puis de
croire qu’elle est vraie.

En effet, si nous n’y prêtons pas attention, notre première supposition


découle le plus souvent des intentions négatives que nous prêtons – ce qui
implique clairement que ce sont les nôtres – aux autres. Dès lors, à travers le
comportement d’autrui, nous réagissons personnellement à nos propres
intentions, après les avoir projetées sur lui !

Pour éviter cela, et au lieu de ne faire aucune supposition – ce qui est trop
demander à un mental comme le mien – j’ai résolu de m’astreindre à faire au
moins deux suppositions contraires, dans toute situation, voire davantage :
trois, quatre, cinq ! Par exemple : un conducteur me fait une queue de
poisson dans le trafic. Ma première supposition est peut-être que ce n’est
qu’un chauffard de plus, quelqu’un qui se fiche des autres et ne pense qu’à
lui. Aussitôt, au lieu de croire cette première supposition automatique,
presque inconsciente, j’élabore immédiatement et consciemment deux autres
suppositions totalement différentes : si ça se trouve, sa femme est en train
d’accoucher sur la banquette arrière et il fonce à l’hôpital ; ou alors, il est en
pleine crise d’asthme et doit trouver une pharmacie au plus vite pour avoir sa
Ventoline. Vous comprenez le principe. Le plus important, c’est qu’en
multipliant les suppositions, je prends clairement conscience que je n’ai
aucune idée de ce qui motive véritablement le comportement qui

me dérange. Bien sûr, je continuerai de trouver ce comportement déplaisant,


mais je ne me laisserai pas aller à cultiver du ressentiment, à émettre des
jugements et à ruminer des pensées négatives. Je ne fais pas un problème
mental d’une contrariété concrète.
Quand nous ne faisons qu’une seule supposition, notre mental projette une
intention négative sur les actes d’autrui et, de la sorte, justifie les sentiments
peu reluisants que ceux-ci éveillent en nous. La tête devient alors le valet de
l’ego, et notre cœur se laisse submerger par les voix de la colère et du
ressentiment qui l’empressent de se refermer. Au lieu d’utiliser toutes ses
capacités de réflexion, le mental en est ainsi réduit à être l’esclave de nos
émotions les plus sombres.

l’inverse,

quand

nous

cultivons

délibérément plusieurs suppositions très différentes, l’intellect déploie toute


son aptitude à penser – si la pensée à des ailes, ce n’est pas pour rester
derrière les barreaux de nos peurs –, ce qui lui permet d’envisager la même
situation sous plusieurs angles, afin de garder le cœur ouvert et de ne pas se
fermer à la première contrariété. Le mental projette alors de multiples
éclairages sur une même situation, évitant ainsi de créer des ombres uniques.
Il empêche de la sorte le cœur de mariner dans des eaux froides, sombres et
marécageuses, le maintenant au contraire dans une lumière chaleureuse.

À ce propos, certains exégètes de la Bible suggèrent que l’invitation de Jésus


à « tendre l’autre joue », quand quelqu’un nous frappe, fait référence à cette
polarité intérieure que nous possédons tous : l’intellect

(les pensées, les idées) et le cœur (les sentiments, les émotions). Quand
quelqu’un vous frappe sur la joue gauche – le cœur – et que vous êtes
submergé de sentiments négatifs, tendez la droite, utilisez votre intellect :
pensez, réfléchissez, activez vos méninges, pour vous sortir au plus vite du
marais boueux de vos émotions. Inversement, quand on vous frappe sur la
joue droite – l’intellect – quand vous n’arrivez plus à penser clairement et
que votre mental rumine les mêmes idées noires, branchez-vous sur votre
cœur et vos sentiments : cultivez des sentiments chaleureux, exprimez de
l’affection autour de vous (fût-ce à un animal de compagnie), laissez l’eau de
l’amour réhydrater le sol de votre vie qu’ont desséché les vents du mental.

Dans la Grèce antique, les sophistes apprenaient à leurs étudiants à défendre


une idée de la manière la plus convaincante possible, avec les meilleurs
arguments, avant d’adopter le point de vue totalement opposé… et de le
défendre avec autant de vigueur et de

talent.

Ce

genre

de

compétences

fait

malheureusement cruellement défaut dans l’éducation moderne. Par


conséquent, nous sommes souvent des cyclopes de la pensée, limités à un
seul point de vue (et à une seule supposition) sur chaque chose, prisonniers
de réactions limitées et privés d’une véritable liberté de pensée.

Qui plus est, la majeure partie de notre système éducatif se concentre


exclusivement sur les facultés intellectuelles, au détriment du cœur, de
l’affectif.

Nous ne recevons donc pratiquement ni information, ni formation sur les


interactions qui se produisent entre

ces deux polarités fondamentales de notre être : la tête et le cœur. Comment


mes sentiments influencent-ils et parfois déforment-ils mes pensées ?
Comment mes pensées déclenchent-elles, justifient-elles ou contrent-elles
mes sentiments ? Qu’est-ce qui prédomine en moi ? Suis-je libre de mes
pensées et de mes sentiments ? Ou suis-je l’esclave de peurs, de croyances,
d’émotions dont j’ignore totalement l’origine et les conséquences ?…
Dans la tradition toltèque, la première maîtrise est la Maîtrise de la
Conscience. Et, effectivement, si nous voulons devenir libres, nous devons
tout d’abord prendre conscience de ce qui se passe en nous.

Apprendre à multiplier les suppositions, sitôt qu’arrive quelque chose qui


déclenche en nous un a priori négatif, est une manière à la fois simple et
puissante de recouvrer toute notre liberté intellectuelle et mentale.

Cela nous permet d’être moins victimes des émotions et sentiments négatifs
qui nous submergent par moment.

Si vous avez un intellect vif et bien développé, qui démarre au quart de tour,
toujours prompt à faire des suppositions et à réfléchir, ce second
Renversement d’Accord Toltèque peut se révéler particulièrement efficace.
Ce qu’il y a de merveilleux, dans cette façon de faire, c’est que plus vous
multipliez les suppositions les

plus

contradictoires,

moins

vous

croirez

automatiquement l’une ou l’autre d’entre elles : vous renforcerez ainsi votre


capacité à accorder la même valeur à plusieurs idées conflictuelles. Les
bénéfices potentiels sont énormes : vous accéderez à une vraie liberté de
pensée et, conjointement, vous deviendrez

de plus en plus capable de choisir les sentiments que vous voulez cultiver
dans votre cœur. Ça, c’est une véritable libération !

Ces deux Renversements d’Accord apportent simplement un autre éclairage


sur les enseignements toltèques de Don Miguel Ruiz. Ils concordent
d’ailleurs avec ceux de diverses autres traditions. Le contraire d’une vérité
est aussi une vérité, affirment de nombreux sages. Qui plus est, vous n’avez
pas à choisir entre les accords toltèques originaux ou leur version inversée :
vous pouvez librement utiliser les uns ou les autres, en fonction de vos
préférences, et varier d’un jour à l’autre d’après vos besoins.

Je n’ai pas jugé utile d’inventer des contre-accords au premier accord


toltèque (« Que ta parole soit impeccable »), ni au quatrième (« Fais toujours
de ton mieux »). Cela ne m’a pas paru nécessaire, ayant du plaisir à les
pratiquer tels quels. Avoir une parole impeccable – aussi difficile que cela
puisse être par moment – est une injonction que l’on retrouve dans de
nombreuses voies spirituelles. Jésus, par exemple, disait : « Ce n'est pas ce
qui entre dans la bouche qui rend l'homme impur. Mais ce qui sort de la
bouche, voilà ce qui rend l'homme impur. » Et Maître Philippe de Lyon, l’un
des plus grands guérisseurs du 20ème siècle, parfois appelé le « maître
inconnu », demandait comme seul “paiement” à ses guérisons souvent
miraculeuses : « Ne dites pas de mal d’autrui durant

[selon la personne concernée] une heure… un jour…

un mois… [ou davantage] ». Voilà, je trouve, qui en dit très long sur la
puissance du premier accord

toltèque, dont Miguel Ruiz souligne qu’à lui seul il peut totalement
transformer toute notre vie.

De manière analogue, j’utilise le quatrième accord toltèque tel qu’il est. «


Faire de son mieux » : une injonction toute simple en apparence, que certains
jugeront hâtivement un peu boy-scout, mais dont la portée est autrement plus
grande qu’il n’y paraît de prime abord. Je me rappelle avoir entendu
Marshall Rosenberg, fondateur de la communication non-violente (CNV),
faire un renversement très intéressant du dicton, « Ce qui mérite d’être fait,
mérite d’être bien fait ». Il disait plutôt : « Ce qui mérite d’être fait, mérite
même d’être fait de manière approximative ».

Que voulait-il dire par là ? Que si quelque chose mérite vraiment d’être fait,
cela vaut la peine de le tenter, même si l’on n’y parvient pas très bien. Qu’il
vaut mieux « faire de son mieux », fût-ce imparfaitement, que de ne rien
faire du tout, sous prétexte que ce ne sera pas parfait.
En résumé, les renversements, les inversions peuvent parfois nous ouvrir des
perspectives insoupçonnées, quand on se sent coincé, quand tel outil, telle
idée ou solution ne semble plus donner de résultat, quand ce que nous
croyons vrai nous fait ruminer des pensées et des sentiments négatifs. Et si
on allait voir de l’autre côté ? Et si on prenait tout cela par l’autre bout ? Et
si on faisait tout le contraire ? Ça donnerait quoi ?…

Le merveilleux symbole du Tao nous rappelle que, dans la nature,


l’harmonie résulte des interactions entre

énergies différentes de même valeur. Les tigres et les éléphants, par exemple,
jouissent d’une force qui les place au sommet de la chaîne alimentaire… à
l’autre extrémité de laquelle on trouve les virus et les microbes qui, en dépit
de leur taille infinitésimale, possèdent eux aussi un pouvoir considérable et
peuvent affaiblir ou même tuer des créatures considérablement plus grandes
qu’eux. Le pouvoir se répartit ainsi équitablement entre polarités opposées.

Dès lors, quand nous nous sentons impuissants, démunis, désemparés, c’est
peut-être le signe qu’il est temps d’essayer le contraire de ce qu’on a fait
jusque-là, d’aller vers la polarité opposée. La vie ne cesse de nous inviter à
ne pas nous limiter, à explorer plus loin, à continuer d’avancer et de
progresser. Cette progression est sans fin, de sorte que sitôt que nous croyons
que « nous y sommes », que nous avons atteint notre destination, une
nouvelle route s’ouvre déjà devant nous. N’est-ce pas merveilleux ?

Je vous souhaite tout le meilleur sur votre propre chemin !

REMERCIEMENTS

Un immense et chaleureux merci à Don Miguel Ruiz : non seulement pour


ce merveilleux Don du Pardon, mais aussi les jours mémorables que nous
avons partagés au Mexique et toute cette sagesse débordante d’amour dont
regorgent ses livres.

Un très grand merci à Maud Séjournant : pour m’avoir fait découvrir


l’enseignement et les livres de Don Miguel ; pour m’avoir donné l’occasion
de les traduire et de les publier en français ; pour avoir organisé ce voyage
inoubliable à Teotihuacan, ainsi que la rencontre avec Brandt Morgan au
Nouveau-Mexique ; et enfin pour tous les autres livres et projets auxquels
nous avons collaboré au fil des ans.

Merci beaucoup aussi à Brandt Morgan, d’être non seulement un


remarquable mentor toltèque de la lignée de Don Miguel, mais aussi un frère
spirituel.

Comme le reste de notre groupe, j’ai eu la chance d’être là, à Santa Fe,
quand Brandt a subitement trouvé l’inspiration devant nous de créer la

« Marche de Vision » que nous avons été les premiers à expérimenter dans le
ranch où nous séjournions. (Je me rappelle encore la réponse que

j’ai reçue à ma première question !). Je suis très heureux que, depuis, grâce
au livre qu’il a rédigé, cet outil formidable soit désormais accessible aux
lecteurs francophones et anglophones.

Merci à tous les membres de notre groupe de 1999, à Teotihuacan, et plus


particulièrement à Gérard, Maria-Elena, Virginie, Désirée, Eric, Anne,
Jacqueline, Sylvie et Alexandrine : cette expérience n’aurait pas été la même
sans votre présence, vos qualités, votre humour et votre amour.

Enfin, je tiens également à remercier Franck Bonneveau,

Jean-Yves

Revault,

Fabienne

Marsaudon, Isabelle Patin et Philippe Besse pour la relecture très attentive


qu’ils ont chacun faite de mon texte et pour leurs remarques et suggestions
qui m’ont été très précieuses.

À PROPOS DE L’AUTEUR

Né en 1961 à Genève, Olivier Clerc s’est passionné très tôt pour la


philosophie, les capacités du cerveau et la conscience. Il rédige à 21 ans un
premier livre sur l’acquisition de la conscience en rêve ( Vivre ses rêves,
Hélios, 1984). Deux ans plus tard, il publie un autre ouvrage sur les caissons
d’isolation sensorielle et les états de conscience élargis ( L’océan intérieur,
Soleil, 1985).

Olivier Clerc cumule depuis 28 ans une carrière d’écrivain, conférencier et


traducteur qui lui a fait croiser la route de nombreuses personnes qu’il a
traduites ou auprès desquelles il s’est formé, dont Don Miguel Ruiz (sagesse
toltèque), Marshall Rosenberg (communication non-violente), Patricia
Garfield (rêve lucide), Charles Rojzman (thérapie sociale) et le Dr Stanislav
Grof (psychologie transpersonnelle).

Pour compenser la pensée analytique dominante du cerveau gauche, Olivier


Clerc développe une pensée analogique qui permet de recréer du lien et du
sens. Il illustre le potentiel et la portée de ce mode de pensée dans des
domaines aussi variés que

la médecine ( Médecine, religion et peur : l’influence cachée des croyances,


Jouvence, 1999) ou la violence ( Le Tigre et l’Araignée : les deux visages de
la violence, Jouvence, 2004). Ses métaphores sont aujourd’hui reprises par le
monde de l’entreprise.

Ses derniers livres, La grenouille qui ne savait pas qu’elle était cuite… et
autres leçons de vie (JC

Lattès, 2005, traduit en 9 langues) et Même lorsqu’elle recule, la rivière


avance : neuf histoires à vivre debout (Lattès, 2010), proposent de
nombreuses métaphores et allégories, comme autant de graines de sens à
semer dans sa vie, son entreprise ou ses projets, reprises aussi bien par des
partis politiques que des associations, des parents d’élèves ou des
enseignants.

Olivier Clerc anime désormais sa propre rubrique, Paraboles à l’antenne,


sur une web-TV québécoise :

www.repere.tv.

Sites

Internet
:

www.olivierclerc.com-

www.dondupardon.fr

ADRESSES UTILES

Pour connaître les lieux et dates où des stages sur le Don du Pardon sont
organisés, consultez :

www.dondupardon.fr

Pour en savoir plus sur les enseignements donnés par Don Miguel Ruiz et
ses fils, Don José et Don Miguel Jr. :

www.miguelruiz.com

Pour connaître les enseignements toltèques de la lignée de Don Miguel


disponibles en français :

www.cercledevie.com

LECTURES RECOMMANDÉES

Clerc, Olivier, La grenouille qui ne savait pas qu’elle était cuite… et autres
leçons de vie, Éditions JC Lattès, 2005. Clerc, Olivier, Même lorsqu’elle
recule, la rivière avance :

petites histoires à vivre debout, Éditions JC

Lattès, 2010.

Katie, Byron et Stephen Mitchell. Aimer ce qui est, Éditions Ariane, 2003.

Morgan, Brandt. La Marche de Vision, Éditions Jouvence, 2006.

Nelson, Mary Carroll et Don Miguel Ruiz. Au-delà de la peur : les clés de la
sagesse toltèque, Éditions Jouvence, 2004.
Revault, Jean-Yves. La guérison par l’écriture, Editions Jouvence, 2003.

Rosenberg, Marshall. La communication non-violente, Éditions Syros, 1999.

Ruiz, Don Miguel. Les Quatre Accords Toltèques, Éditions Jouvence, 1999.

Ruiz, Don Miguel. La Maîtrise de l’Amour, Éditions Jouvence, 1999.

Ruiz, Don Miguel et Janet Mills. La Voix de la

Connaissance, Éditions Trédaniel, 2005.

Ruiz, Don Miguel et Janet Mills. Pratique de la Voie Toltèque, Éditions


Jouvence, 2000.

Ruiz, Don Miguel, Ruiz, Don José, et Janet Mills, Le

Cinquième

Accord

Toltèque,

Éditions

Trédaniel, 2010.

Séjournant, Maud. Le Cercle de Vie : Initiation chamanique d'une


Psychothérapeute. Albin Michel., 1997.
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Page de copyright
Table
Introduction
PREMIÈRE PARTIE : RENAÎTRE À TEOTIHUACAN
Chapitre 1 : Une rencontre inoubliable
Les Quatre Accords Toltèques
Chapitre 2 : Le jaguar de cristal
Chapitre 3 : Le Don du Pardon
Témoignages
Le témoignage de Virginie
Le témoignage de Sylvie
Le témoignage de Jacqueline
Le témoignage de Gérard
DEUXIÈME PARTIE : COMPRENDRE ET UTILISER LE DON DU
PARDON
Chapitre 4 : Réflexions a posteriori sur le Don du Pardon
Chapitre 5 : Comment utiliser le Don du Pardon
Ma première pratique en solo
Et maintenant, si vous l’essayiez ?…
Étape 1 : Préparer un cadre adapté
Étape 2 : Atteindre le calme intérieur
Étape 3 : Demander pardon aux autres
Étape 4 : Demander pardon au diable et à Dieu
Étape 5 : Se demander pardon à soi-même
Étape 6 : Exprimer sa gratitude
Chapitre 6 : Questions et réponses
Question : Est-il vraiment possible de pratiquer le Don du
Pardon seul, sans l’avoir expérimenté dans un
environnement contenant ?
Question : Si, au cours de ce processus, je demande pardon à
quelqu’un qui m’a vraiment fait du mal, n’est-ce pas comme
si je le laissais s’en tirer en toute impunité ?
Question : Avec quelle fréquence devrais-je pratiquer le Don
du Pardon ?
Question : Je ne crois ni au diable, ni à Dieu. Qu’est-ce que
je fais de cette étape du processus ?
Question : Comment savoir si les gens à qui je demande
pardon me pardonnent vraiment ?
Question : Dans quels cas le Don du Pardon ne convient-il
pas ? Quand n’est-il pas l’outil adapté à la situation ?
CONCLUSION : L’AMOUR EST DIEU
APPENDICE : LES DEUX RENVERSEMENTS D’ACCORDS
TOLTÈQUES
Le premier Renversement d’Accord Toltèque : « Prenez tout
personnellement »
Le second Renversement d’Accord Toltèque : « Faites de
nombreuses suppositions »
Remerciements
À propos de l’auteur
Adresses utiles
Lectures recommandées
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Page de titre
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Table
Introduction
PREMIÈRE PARTIE : RENAÎTRE À TEOTIHUACAN
Chapitre 1 : Une rencontre inoubliable
Les Quatre Accords Toltèques
Chapitre 2 : Le jaguar de cristal
Chapitre 3 : Le Don du Pardon
Témoignages
Le témoignage de Virginie
Le témoignage de Sylvie
Le témoignage de Jacqueline
Le témoignage de Gérard
DEUXIÈME PARTIE : COMPRENDRE ET UTILISER LE DON DU
PARDON
Chapitre 4 : Réflexions a posteriori sur le Don du Pardon
Chapitre 5 : Comment utiliser le Don du Pardon
Ma première pratique en solo
Et maintenant, si vous l’essayiez ?…
Étape 1 : Préparer un cadre adapté
Étape 2 : Atteindre le calme intérieur
Étape 3 : Demander pardon aux autres
Étape 4 : Demander pardon au diable et à
Dieu
Étape 5 : Se demander pardon à soi-même
Étape 6 : Exprimer sa gratitude
Chapitre 6 : Questions et réponses
Question : Est-il vraiment possible de
pratiquer le Don du Pardon seul, sans l’avoir
expérimenté dans un environnement
contenant ?
Question : Si, au cours de ce processus, je
demande pardon à quelqu’un qui m’a
vraiment fait du mal, n’est-ce pas comme si je
le laissais s’en tirer en toute impunité ?
Question : Avec quelle fréquence devrais-je
pratiquer le Don du Pardon ?
Question : Je ne crois ni au diable, ni à Dieu.
Qu’est-ce que je fais de cette étape du
processus ?
Question : Comment savoir si les gens à qui
je demande pardon me pardonnent vraiment ?
Question : Dans quels cas le Don du Pardon
ne convient-il pas ? Quand n’est-il pas l’outil
adapté à la situation ?
CONCLUSION : L’AMOUR EST DIEU
APPENDICE : LES DEUX RENVERSEMENTS D’ACCORDS
TOLTÈQUES
Le premier Renversement d’Accord Toltèque : « Prenez tout
personnellement »
Le second Renversement d’Accord Toltèque : « Faites de
nombreuses suppositions »
Remerciements
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