Vous êtes sur la page 1sur 8

CHAPITRE 16

Eragon ouvrit les yeux.

Il sentit Trianna à son côté, nue contre lui. Il fronça les sourcils et s’assit sur le bord du lit. Il s’aperçut
de sa nudité. Qu’avait-il donc fait ?

Craignant de se mettre à crier d’impuissance, il se leva et s’habilla en silence. Laissant Trianna dormir,
il sortit et l’air frais de la nuit s’engouffra dans ses cheveux ébouriffés. Il leva la tête vers le ciel.

La lune était à demi pleine. Arya se transformerait bientôt.

Arya.

Drôle d’impression que celle d’être à la fois son ami et de dormir avec elle tout en la sentant aussi
étrangère qu’une autre femme. Il ne savait plus où il en était avec elle.

Il décida de rentrer à sa tente et se mit en marche. Le silence régnait dans le camp. Un silence
paisible, pur.

Le jeune homme ne prêtait pas attention à où il posait les pieds. Il fut donc surpris quand il entra en
collision avec quelqu’un.

− Crénom de nom, Chaud-bouillant ! jura-t-elle. Fais attention !

− Slytha ?

− Non, le roi en personne ! Bien sûr que c’est moi, qui d’autre ?! Nom d’une pipe ! Tu aurais pu
regarder où tu mets les pieds ! Ah mais !

− Excuse-moi, Slytha Svit-Kona.

Elle se redressa brusquement :

− Ah non. Moi, tu me sers pas du Svit-Kona. Tu le réserves à Arya, pas à moi, nigaud. Réfléchis. J’air
l’air d’avoir autant de sagesse que mââdââme Arya ? Non. Bon, alors !

− D’accord. Pardonne-moi.

− Voilà qui est mieux. Mhm… tu n’étais pas avec Arya, dit-elle en plissant les yeux.

Il ne dit rien. Était-ce si évident ? Elle eut un sourire mystérieux :

− Viens.

Elle l’attrapa par le bras et l’entraîna à sa suite.

− Mais enfin, où m’emmènes-tu ?


− Je me suis dit que tu ignorais beaucoup de choses sur Arya. Et puisque tu n’as aucun scrupule à
coucher avec Trianna, je vais te montrer qu’Arya peut très bien se passer de toi pour la nuit ! Je dirai
même mieux : ça lui permet de… dormir avec la personne de son choix !

− Dormir ? Avec qui ?

− Enfin, dormir… oui, mais après avoir fait l’amour, évidemment. Sinon, ce n’est pas amusant.

Eragon se raidit :

− Arya a un… amant ?

Slytha sourit, une étincelle dans les yeux :

− Ça, tu verras.

− Mais…

− Patience, Chaud-bouillant. Et je te signale que c’est un peu ta faute. Si tu ne t’étais pas vautré dans
les ras de Trianna, tu n’en serais pas là et tu aurais passé la nuit avec Arya. Eh bah tant pis ! Ce sera
quelqu’un d’autre à ta place !

Le Dragonnier ne dit rien. S’il croyait Slytha, Arya se passait de lui et avait trouvé une autre personne,
qui comblait ses nuits. Arya avait un amant. Il en était dégoûté, rien qu’en imaginant un autre
homme la toucher, la caresser, l’embrasser, et elle gémir de plaisir dans ces bras, se laisser faire…
Mais quel homme ?

Kaelig ? Ou plutôt, Faölìn ?

Dragan ?

Eragon s’ébroua, mais rien n’y fit. La scène était ancrée dans son esprit.

Slytha l’arrêta :

− Voilà, dit-elle tout bas. Tu entres et tu regardes.

Il fronça les sourcils :

− Mais… je ne peux pas, protesta-t-il. Ça ne se fait pas. Je…

− Tut tut tut. Tu y vas. Point.

− Mais…

− Si tu ne le fais pas, je te prive d’une partie très importante de ton anatomie. Pigé ?

Il se figea. Serait-elle capable de le…

− Évidemment, Chaud-bouillant, fit-elle, exaspérée. Allez, zou.

Sans prévenir, elle le poussa.


Il trébucha et…

… tomba.

Dans la tente d’Arya.

Il se tétanisa.

Arya était bien là. Mais elle ne l’avait pas entendu.

Et pour cause.

Eragon se replia dans un coin de la tente et observa, à la fois fasciné et horrifié. Il ne pouvait pas
sortir. Slytha aurait tôt fait de s’occuper de lui. Alors il plia ses jambes contre lui et resta immobile,
les yeux rivé sur la scène qui se déroulait devant lui.

Arya était allongée, nue.

Et elle embrassait quelqu’un. Mais ce n’était pas un amant.

C’était une amante.

Une femme.

Elle avait de longs cheveux blonds, la peau plus halée que celle d’Arya et elle se tenait au-dessus de
l’elfe. La couverture avait glissé jusqu’au bas de son dos et les muscles de ses épaules jouaient à la
perfection sous sa peau. Ses avant-bras musclés étaient de chaque côté d’Arya, qui les tenait
fermement de ses mains. Les deux femmes s’embrassaient en plein sur la bouche, nues, peau contre
peau.

La femme blonde déposa des baisers dans le cou d’Arya et son visage descendit le long de son corps.
Son épaules, sa poitrine, son ventre…

Arya gémit.

Eragon se crispa.

La femme blonde remonta la tête. Ses lèvres firent le trajet inverse, se coulèrent entre le galbe des
seins d’Arya, remontèrent vers un mamelon tendu à l’extrême.

Se refermèrent sur lui.

Tandis la respiration d’Arya s’accélérait brutalement, sa compagne le fit rouler sous sa langue, le
lécha, le mordilla…

Gémissement.

Les jambes d’Arya s’ouvrirent.

Eragon écarquilla les yeux.


La main gauche de la femme blonde s’insinua entre ses cuisses, remontèrent jusqu’à effleurer son
sexe. Du bout des doigts, elle cueillit la goutte de désir qui y perlait. La porta à sa bouche.

Gémissement.

La main de la femme revint à la source. Se fit plus audacieuse, plus pressante. Arya arqua les reins.
Lorsqu’ enfin, son amante glissa un doigt en elle, elle poussa un cri sourd.

La bouche de la femme s’écrasa contre la sienne.

Alors que leur baiser prenait des accents sauvages, le doigt de la femme entama une sarabande
brûlante.

Arya feula et se cabra contre sa compagne.

Eragon ne put retenir une exclamation choquée, trop tard étouffée. Il plaqua sa main sur sa bouche,
mortifié.

Si Arya le voyait, c’en était fini de leur amitié. Jamais elle ne lui pardonnerait cette intrusion dans son
intimité.

L’elfe se redressa :

− Qu’est-ce que c’était ?

Sa compagne scruta les ténèbres de la tente et Eragon jura qu’elle le vit, tapi dans l’ombre.

− Aucune idée, fit-elle d’un ton neutre.

Sa voix était plus grave que celle d’Arya, mais elle était tout aussi mélodieuse et exotique. La femme
se tourna vers Arya :

− Où en étions-nous ?

− Je…

− Tu ?

Arya sourit. Elle prit le visage de son amante dans ses mains et l’embrassa avec passion. Elles se
rallongèrent. En même temps, Arya pivota et se retrouva au-dessus de sa compagne.

Eragon en avait trop vu.

Profitant d’un énième échange sauvage des deux femmes, le Dragonnier s’éclipsa. Une fois dehors, il
fut pris de tremblements incontrôlables.

− Ben quoi ? fit innocemment Slytha.

− Arya a… une… une…

− … amante ? suggéra l’elfe. Ça, je le savais, gros malin.

− Mais… mais… po… pourq…


Il s’interrompit et déglutit avec difficulté. Ses tremblements menaçaient de faire céder ses jambes
sous son propre poids.

− Pourquoi ? fit Slytha.

Il acquiesça mollement. Slytha fit mine de réfléchir :

− Hum… eh bien… dois-je te rappeler que tu as couché avec Trianna, Donc si tu abandonnes la cour
que tu faisais à Arya, si tu la laisses, elle va se trouver quelqu’un d’autre. Et encore, là, tu as de la
chance, c’aurait pu être un homme. Ce qui aurait été plus enquiquinant.

Eragon s’en alla, écœuré.

Il n’en revenait pas. Arya avait une relation amoureuse, non pas avec un homme, mais avec une
femme ! En se remémorant la scène à laquelle il avait bien involontairement assisté, il eut un haut-le-
cœur.

Il entra dans sa tente et s’affala sur son lit.

Il s’endormit sur le champ.

***

Eragon para une attaque, bondit de côté, se baissa et riposta. Son adversaire, surpris, ne fut pas aussi
rapide que lui. Le Dragonnier posa la pointe de sa lame sur sa jugulaire :

− Tu es mort. On recommence.

Devnor se mit en garde. Aussitôt, il passa à l’attaque. Il enchaîna offensive sur offensive, mais rien n’y
fit, Eragon interceptait toujours son épée. Le Dragonnier en profita pour contre-attaquer. Il pivota,
donna des coups d’estoc et de taille, que son adversaire peina à bloquer. Devnor esquiva. Eragon
réitéra un assaut.

Un mouvement sur sa droite le déconcentra. Inquiet, il jeta un œil sur le côté. Une personne se tenait
légèrement en retrait, calme et silencieuse, et les observait.

C’était Arya.

Eragon la revit avec son amante, échangeant de fougueux baisers, leurs corps parfaits nus l’un contre
l’autre…

Il dérapa.

Devnor se coula le long de Brisingr et posa sa lame sur la gorge du Dragonnier :

− Tu es mort.

Eragon hocha la tête.

− C’est bien. Va te rafraîchir.


Pendant que Devnor s’éloignait, le Dragonnier se porta à la rencontre d’Arya. Ils échangèrent les
politesses d’usage, puis il dit :

− Que me vaut ta présence, Arya Svit-Kona ?

− Je pars.

Il tiqua :

− Quand ?

− Dans un quart d’heure.

− Pour l’île des Métamorphes ?

Elle acquiesça doucement.

− Marchons, proposa-t-il.

Ils cheminèrent en silence. Au bout d’un moment, Eragon prit la parole :

− Pendant combien de temps seras-tu absente ?

− Deux semaines.

− Tu y vas seule ou… accompagnée ?

Il se doutait de la réponse. Aussi quand Arya répondit, il ne fut guère surpris.

−Accompagnée. Avec Dragan, Kaelig, Wilhen et…

− Oui ?

− Brunhild.

Eragon fronça les sourcils. Un prénom de femme. La voix d’Arya avait hésité.

Se pouvait-il que…

« Que… ? » demanda Saphira.

Il lui ferma l’accès à son esprit. Pas question qu’elle sache ce à quoi il avait assisté.

− Qui est-ce ?

Une fois encore, Arya hésita, puis répondit :

− Une… amie. Une Métamorphe.

− Et… comment est-elle ?

Le regard d’Arya se perdit au loin :

− Grande, mince, yeux rouges et cheveux blonds assez longs.


Eragon se raidit.

− Comment irez-vous ?

− Je ne sais pas. Brunhild a refusé de me répondre.

− J’espère que tu trouveras ce que tu cherches, Arya Svit-Kona.

Il porta deux doigts à ses lèvres er repartit entraîner ses soldats.

Arya pivota vers Saphira, tout aussi incrédule que l’elfe.

« Je ne sais rien, Arya. Il ne m’a rien dit et me bloque l’accès à ses pensées. »

L’elfe tourna les talons.

* *

Eragon salua Nasuada et la chef des Vardens déclara :

− J’ai parlé avec Dame Lorana, qui m’a aimablement proposé de mettre son château à

notre disposition.

− C’est-à-dire ?

− Elle nous prête des appartements, des soins pour les blessés, et des chambres.

Personnellement, je reste au camp, mais toi, tu pourras profiter de ceux qui te sont

attribués.

− Mais…

− Tu n’as pas le choix. Avec Trianna qui te tourne autour, c’est la meilleure solution.

Il s’inclina :

− Bien, ma Dame.

Il ressortit et se figea.

Arya était là.

Avec Dragan, Kaelig, Wilhen et une femme blonde aux yeux aussi pourpres que des rubis.
Ils étaient juchés sur quatre prédateurs aussi hauts que des chevaux, mais bien plus massifs. Dragan
montait un tigre au pelage doré ; Kaelig, un loup noir ; Wilhen, une hyène, et les deux femmes, un
tigre blanc. Arya serrait la taille de sa compagne avec ses bras.

Le Dragonnier les salua. La Métamorphe blonde sourit :

− Je te la rends bientôt…, dit-elle si bas que seul Eragon et Arya put l’entendre.

Arya se raidit et Brunhild rit. Dragan déclara :

− Ne perdons pas de temps.

Les prédateurs s’élancèrent.

Vous aimerez peut-être aussi