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Obélix revient en Avec les

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Femina et

g
GuideTV

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Son réalisateur, Alain
Chabat, est ravi 35-36

Stephane
p
Marion
Cotillard
Les positions
9 juillet 2023
No 28 | FR. 5,50 - € 5 politiques de
(TVA 2,5% incluse)
JAA 1000 Lausanne 1 l’actrice font
débat 19

Sécheresses, ● Encouragées par le boom de la consommation,

les stars se mettent toutes à produire du rosé 13
incendies,
canicules
marines, l’été
sera chaud
Photos: Serge Chapuis pour Miraval/Alamy Stock Photo/Patrick Bruel-Facebook/Getty Images/Photomontage Alberto Pizzoli AFP/Getty Images/fStop

● Allons-nous revivre les records de 2022

avec des chaleurs étouffantes, des manques
d’eau et des mégafeux?
L’Espagne a ouvert la sai- pératures supérieures à la
son puisque, fin juin, la moyenne sur l’ensemble
chaleur était déjà montée de l’Europe et un temps
à 40°C à Madrid. Depuis plus humide que la
quelques jours, la même moyenne au sud de notre
température touche la continent. Quelles consé-
Roumanie. Copernicus, quences en matière de
l’organisme européen de sécheresses, d’incendies
surveillance du climat, et de canicules marines?
prévoit deux tendances Les spécialistes ex-
pour l’été 2023: des tem- pliquent. Pages 2-3

«On peut qualifier les casseurs du

Flon d’émeutiers consuméristes»
VIOLENCES Qui sont les mineurs qui ont brisé des
vitrines de magasins le 1er juillet à Lausanne? Dans
quel but se sont-ils rassemblés? Le municipal chargé
de la Sécurité, Pierre-Antoine Hildbrand, livre son
analyse. Page 4

Les Cantons mettent en garde

contre les cyanobactéries des lacs
CONTAMINATIONS Bienne, lac de la Gruyère: les der- Brad Pitt, Kylie Minogue, Patrick Bruel, Carla Bruni ont chacun leur marque de rosé. Mais le récent rachat du Château Minuty
nières intoxications aux cyanobactéries montrent que par le groupe LVMH de Bernard Arnault a encore accru la cote du vin rosé.
le problème demeure dans les eaux romandes. Il faut
désormais être prudent avant de mettre un pied dans
l’eau et suivre les conseils des Cantons. Page 6 La météo Jura 14°29° Plateau 16°34° Alpes 14°28° Voir votre météo
complète en page 22
2 Suisse
L’éd
dito
Ariane
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Rédacttrice
en che
ef
Les
sauvageons
O
n sait tout ce qu’ils ne sont
pas. Pas de grosses frappes,
pas des aguerris du combat,
pas les soldats d’une cause.
Rien de réellement politique,
aucune revendication générationnelle
ou sociétale, pas forcément d’ancrage
dans un vécu parallèle. Mais que sont-
ils alors? Qui sont ces mineurs de 15 à 17
ans qui ont cassé des vitrines à Lau-
sanne le 1er juillet passé?
La question est légitime, puisque les
premières enquêtes montrent que,
contrairement à ce que voulaient faire
croire certains, ils n’ont pas réellement
puisé leur motivation dans le drame qui
a entraîné des heurts en France, la mort
du jeune Nahel abattu par la police à
Nanterre. Les appels au rassemblement
de Lausanne ne le mentionnaient pas.
Pour le coup, les casseurs du Flon
laissent les sociologues, les journalistes
aussi d’ailleurs, dans le désarroi. Depuis
une semaine, tous ai-
meraient comprendre
et se retrouvent bien
impuissants. Les
sources de la violence
«La violence
des jeunes des cités
gratuite,
françaises sont relati-
éruptive,
vement simples à dé-
convoquée
coder. Mais comment
abruptement
saisir la motivation
sur un réseau
de ces adolescents ro-
social peut
mands si elle ne tient
surgir en
pas à une réelle
geyser.»
colère sociale de
groupe? Agissent-ils
juste pour l’adrénaline, ou pour piquer
des baskets neuves et des natels? C’est
si peu politique qu’on peine à le croire.
Mais c’est sans doute vrai.
Sur le fond, cette absence de motifs
structurels devrait nous rassurer. Ça
veut dire qu’il n’y a pas de poches socio-
logiques bouillonnantes que nous au-
rions mal identifiées. Pas de bombe à re-
tardement ignorée. Mais c’est justement
ça qui déstabilise, puisque ça signifie
que la violence gratuite, éruptive,
convoquée abruptement sur un réseau
social peut surgir en geyser n’importe
quand. Moins ça a de racines, moins
c’est prévisible, ce qui renforce la me-
nace.
Le municipal lausannois responsable
de la police, Pierre-Antoine Hildbrand a
trouvé le mot pour désigner ces jeunes
casseurs: des sauvageons. En bota-
nique, c’est un arbre non greffé. En hu-
main, c’est pareil, un enfant farouche
qui a poussé comme il a pu. Il y en a
beaucoup.
À LIRE EN PAGE 4
ariane.dayer@lematindimanche.ch
L’Europe
s’attend
à un nouvel
été très chaud
CLIMAT Après les records
historiques de 2022, la chaleur
est de retour sur notre
continent. Avec elle, les
craintes de sécheresse, de
canicules et de feux de forêt.
VIRGINIE LENK
virginie.lenk@lematindimanche.ch
Plus de 44 °C à l’ombre… L’Espagne a lan-
cé le bal des vagues de chaleur fin juin,
avec un mercure qui s’est affolé autour des
40 °C à Madrid et dans l’ouest de l’Anda-
lousie. Et depuis quelques jours, c’est en
Roumanie que le mercure frise les 40 °C.
Une situation qui devrait durer. Alors l’Eu-
rope va-t-elle à nouveau transpirer cet été?
Allons-nous manquer d’eau? Faut-il
craindre une saison de mégafeux? Bref, al-
lons-nous revivre l’été 2022, l’été de tous
les records?
Pour parler météo, les prévisions de Co-
pernicus – l’organisme européen de surveil-
lance du climat – sont en la matière les plus
fiables. Elles s’appuient sur une dizaine de
centres tels que Météo France, le Met Of-
fice anglais, ou le Centre européen pour les
prévisions météorologiques à moyen terme
(ECMWF). Il faut bien sûr garder à l’esprit
que les prévisions sur quelques mois sont
à prendre avec beaucoup de précautions.
Cela étant dit, Copernicus dégage deux ten-
dances: des températures supérieures à la
moyenne sur l’ensemble de l’Europe et un
temps plus humide que la moyenne au sud
de notre continent.
La hausse des températures n’est pas une
surprise. Elle fait écho à la situation histo-
rique de l’été 2022. L’Europe se réchauffe
deux fois plus vite que la moyenne mon-
diale, +2,2 °C depuis l’ère préindustrielle,
contre +1,2 °C pour la planète dans son en-
semble. Et c’est dans le nord que cette
hausse est la plus visible. L’été 2022 avait
déjà été marqué par une chaleur sans pré-
cédent au Royaume-Uni, elle se répète ces
jours-ci, après un mois de juin de tous les
records. Mais de manière générale, aucune
zone européenne, de la Belgique au Portu-
gal en passant par la Pologne, ne s’annonce,
cet été, plus fraîche que la moyenne.
«Plus chaud ne veut cependant pas dire
systématiquement canicule, tempère Fré-
déric Glassey, directeur de la météorologie
chez MeteoNews. Cela peut signifier par
exemple des nuits plus chaudes, mais des
jours qui ne dépassent pas les 30 ou 35 °C.»
De même, cet été ne sera pas forcément le
théâtre d’orages plus nombreux ou plus
violents que d’ordinaire, selon l’expert.
«Tout dépend de la situation météo du mo-
ment et du potentiel de toute une série de
paramètres plus ou moins alignés.»
Pluies incertaines
Côté précipitations, l’été pourrait être moins
désastreux que 2022 pour le sud du conti-
nent, où elles devraient être supérieures à
la moyenne, toujours selon Copernicus.
«Mais comme la zone méditerranéenne est
habituellement sèche en été, il ne faut pas
beaucoup de pluie pour avoir des excédents
pluviométriques», précise MétéoSuisse.
En revanche, le nord sera moins arrosé
en juillet, et les estimations de l’institut
restent très imprécises pour le mois d’août.
«La fiabilité des prévisions pour les tempé-
ratures est meilleure que celle pour les pré-
cipitations, explique Frédéric Glassey. Ce
paramètre doit être pris avec beaucoup de
prudence. Les orages d’été peuvent arro-
ser par exemple copieusement certaines
régions et en épargner complètement
d’autres.» Difficile dès lors de recomman-
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
der aux vacanciers le camping en Bretagne
plutôt qu’à Saint-Tropez…
Et à l’avenir? À quels étés devons-nous
nous préparer dans cinq, dix, vingt ans?
«Notre continent se dirige vers cette hausse
globale des températures, qui dépendra in
fine des politiques mondiales pour lutter
contre les conséquences des gaz à effet de
serre, commente Martin Beniston, clima-
tologue et professeur honoraire à l’Univer-
sité de Genève. Si l’on observe les prévi-
sions climatiques sur ces trente prochaines
années, le sud connaîtra des sécheresses
de plus en plus accentuées, alors que le
nord pourrait avoir des précipitations plus
abondantes. La zone entre deux, qui va de
la France à la mer Noire en englobant la
Suisse, subira les fluctuations saisonnières
des pluies, avec des hivers un peu plus ar-
rosés mais des étés beaucoup plus secs qui
influenceront les débits de cours d’eau.» La
remontée du climat méditerranéen est d’ail-
leurs déjà visible, avec Genève qui connaît,
par exemple aujourd’hui, les températures
de Toulouse d’il y a cinquante ans. «Cer-
taines prévisions qui tablent sur un scéna- 23 août 2022: le réservoir de Rialb, en Catalogne
rio médian de +3 °C de réchauffement an-
noncent, d’ici à la fin du siècle, un climat à
Londres identique à celui de Barcelone au- INCENDIES
jourd’hui», note Martin Beniston.
«Nous avons pris
Et en Suisse?
Enfin, à quoi s’attendre cet été en Suisse ?
sur les prévisions
Pour ceux qui ont décidé de passer leurs Il y a d’abord la bonne nouvelle.
vacances entre lacs et Alpes, MétéoSuisse Pendant plus d’un mois, en mai, le
annonce également un été plus chaud que pourtour de la Méditerranée a
la normale. En Suisse romande, un tel scé- connu des pluies, bienvenues en
nario a près de 60% de chances de se pro- cette période de sécheresse.
duire. Il devrait faire relativement sec, mais «Même si toute l’eau ne s’infiltre
probablement pas de manière prolongée, pas dans le sol, on a peu relevé ce
avec des précipitations qui se situent à peu côté positif qui fait qu’il y aura
près dans la norme. Côté nappes phréa- peut-être moins d’incendies de
tiques, les pluies de mars et d’avril ont forêts cet été, ou en tout cas de
certes fait du bien à nos sous-sols, mais les manière moins précoce que d’or-
données de la Confédération sur le suivi dinaire», souligne Frédéric Glas-
des eaux souterraines montraient fin juin sey, chez MeteoNews.
encore quelques valeurs basses au centre Malgré tout, l’Europe est sur le
et au sud du pays. Et même s’il a plu ces qui-vive. Pas question de revivre
derniers jours encore, le débit préoccupant l’été dévastateur de 2022, lors du-
des cours d’eau a poussé certaines com- quel plus de 785’000 hectares
munes romandes à imposer des restrictions sont partis en fumée sur l’en-
d’arrosage à la population.
«Certaines prévisions
qui tablent sur un
scénario médian
de +3 °C de réchauffement
annoncent d’ici à la fin du
siècle un climat à Londres
identique à celui de
Barcelone aujourd’hui.»
Martin Beniston, climatologue et
professeur honoraire à l’Université
de Genève
«Si cet été devait se confirmer dans la
chaleur et la sécheresse, il serait dans la
continuité du changement climatique», ex-
plique encore Frédéric Glassey. À long
terme, le climat en Suisse va lui aussi évo-
luer vers un climat plus sec, abonde Mar-
tin Beniston. «La chaleur estivale que l’on
connaît aujourd’hui démarrera déjà au prin-
temps et se prolongera en automne. Les ca-
nicules seront plus fréquentes, plus in-
tenses et plus longues. Les modèles clima-
Boris Horvat/AFP
tiques prédisent des hivers un peu plus
arrosés mais plus doux, avec peut-être un
peu plus de neige à haute altitude mais
presque plus en plaine. Et les précipitations
hivernales ne compenseront pas la fonte
estivale des glaciers.» Après la Méditerranée l’an passé, on redoute cette
 Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
(Espagne), est à sec. Angel Garcia/Bloomberg/Getty Images
malheureusement de l’avance
climatiques»
semble du continent, soit plus du
double de la moyenne annuelle
des quinze années précédentes. En
première ligne, l’Espagne et la
France ont renforcé la prévention,
obligeant le débroussaillement
dans les zones à risques, alors que
l’Union européenne a doublé les
capacités de sa flotte de lutte
contre les incendies. Après les mé-
gafeux en Gironde en 2022, les
spécialistes redoutent un déplace-
ment des incendies vers le nord du
continent, souvent sous-doté en
matière de lutte. La Scandinavie
est particulièrement fragile: de pe-
tits feux de forêts ont déjà éclaté en
Norvège, en Suède, au Danemark,
année un fort réchauffement de l’Atlantique Nord.
en Finlande ainsi qu’en Écosse, et
les experts craignent que la situa-
tion ne s’aggrave si des précipita-
tions importantes ne surviennent
pas dans les semaines à venir.
«La situation climatique que
nous vivons actuellement était
prévue par les experts du GIEC en
2040, voire 2050, rappelle Martin
Beniston, de l’Université de Ge-
nève. Et les incendies qui se sont
déclarés ces dernières années dans
des régions inattendues montrent
que, comme pour beaucoup de
phénomènes extrêmes, nous
avons pris malheureusement de
l’avance sur les prévisions clima-
tiques.»
21 juillet 2022: une femme pompier éteint un feu près du village de Louchats, en Gironde (France). Nathan Laine/Bloomberg/Getty Images
CANICULES MARINES
«L’année passée en Méditerranée, de nombreuses espèces
marines sont mortes en masse»
Le phénomène avait marqué l’été
2022, avec une Méditerranée qui
a dépassé les 30 °C. Cet été, c’est
l’Atlantique Nord qui inquiète les
scientifiques. Depuis quelques se-
maines, ses eaux se réchauffent
de manière anormale, avec
jusqu’à 5 °C de plus que la
moyenne dans certaines zones en
Irlande. «Les canicules marines
sont comme des canicules ter-
restres, explique Marina Lévy,
océanographe et directrice de re-
cherche au Centre national de la
recherche scientifique (CNRS), à
Paris. Lors de conditions atmos-
phériques sans vent, la chaleur
s’accumule à la surface de l’océan,
sans possibilité d’être mélangée
avec les eaux plus profondes et
plus froides. Les courants marins
(ou gyres) empêchent le mélange
de ces eaux avec les eaux avoisi-
nantes.»
Ces canicules ont toujours exis-
té, rappelle la chercheuse, mais
avec le changement climatique,
elles sont plus fréquentes, plus in-
tenses et plus étendues. Un pro-
blème de plus pour l’océan qui,
jusque-là, agissait comme un cli-
matiseur géant pour la planète,
absorbant près de 90% de l’excé-
dent de chaleur généré par les ac-
tivités humaines, et captant près
de 30% de nos émissions de CO2.
SÉCHERESSE
«Il faudrait des mois de pluie
pour recharger les nappes,
voire des années»
Après un hiver très sec et des
nappes phréatiques au plus
bas ce printemps, faut-il
s’attendre cet été à une sé-
cheresse comparable à celle
de 2022? «Les précipitations
de ces derniers mois dans le
sud de la France ont surtout
fait du bien à la végétation
qui a capté l’essentiel de
l’eau, explique Fabienne
Trolard, géochimiste des
sols et des eaux et directrice
de recherche au sein de
l’Institut national de la re-
cherche agronomique en
France. Mais le déficit est
encore entre 50 et 72% selon
les régions françaises. Dans
les Pyrénées-Atlantiques,
les cultures d’hiver et de
printemps ont à peu près
passé le cap. La crainte reste
la violence des orages qui
peut détruire cet été les ré-
coltes.» La situation est en-
core difficile en Espagne, et
l’Europe aborde la saison en
relative mauvaise posture.
«Il faudrait des mois de pluie
pour recharger les nappes,
voire des années pour celles
qui ont été exploitées massi-
vement, notamment pour
les eaux minérales.»
En plus de la sécheresse
habituelle au sud, le phéno-
L’influence sur tout l’écosystème
marin est inquiétante. «On voit
des poissons tropicaux qui
migrent vers le nord, note l’ex-
perte. La taille adulte de certaines
espèces diminue à cause du ré-
chauffement des eaux. L’année
passée en Méditerranée, de nom-
breuses espèces marines sont
mortes en masse.»
Les chercheurs se mobilisent de
plus en plus pour mieux com-
prendre le phénomène des cani-
cules marines et ses consé-
quences, explique Marina Lévy. Et
les changements à long terme sur
nos océans sont encore source
d’interrogations.
Suisse 3
mène ponctuel frappe les
pays nordiques: le Dane-
mark a enregistré son mois
de mai le plus sec de ces
quinze dernières années et
en Suède, les agriculteurs
redoutent le scénario catas-
trophe de la sécheresse de
2018. Alors verrons-nous
cet été les mêmes images
montrant le Rhin ou la Ta-
mise au plus bas? «On ne
peut pas le dire, avertit l’ex-
perte. L’année dernière,
l’Europe était sous l’in-
fluence d’un anticyclone
très tenace, bloqué par les
jet-streams. Rien ne nous
dit que ce phénomène va se
remettre en place cette an-
née. On sait seulement
qu’avec la hausse des tem-
pératures, il y a davantage
d’énergie dans le cycle de
l’eau, avec une intensifica-
tion des phénomènes
d’orages ou de sécheresses.»
Le problème à l’avenir, se-
lon elle, sera celui des sé-
cheresses récurrentes qu’il
va falloir gérer, notamment
en retraitant mieux les eaux
usées. «En France, un vo-
lume d’eau est utilisé une
fois, mais c’est deux fois en
Espagne et en Italie, et cinq
fois en Israël.»
4 Suisse
«Ces jeunes casseurs sont
dans l’émeute consumériste»
FLON Qui sont les mineurs qui
se sont réunis à une centaine
pour casser des vitrines à
Lausanne il y a une semaine?
Le municipal responsable de la
Sécurité et de l’Économie,
Pierre-Antoine Hildbrand,
revient sur les événements.
ARIANE DAYER
ariane.dayer@lematindimanche.ch
Les mineurs qui ont cassé des vitrines sa-
medi 1er juillet au Flon vous ont-ils sur-
pris?
Ça m’a plutôt inquiété. Inquiété parce
qu’ils ne se rendent pas compte de la gra-
vité de leurs actes ni de l’importance des
délits qu’ils commettent. Ce qui m’a sur-
pris, c’est qu’il y a parfois des casseurs en
marge de certaines manifestations mais,
cette fois, des jeunes gens ont appelé à se
réunir pour casser et attaquer des maga-
sins.
Pourquoi les avez-vous appelés les «sau-
vageons»?
Ça fait référence à une expression qu’avait
utilisée Jean-Pierre Chevènement, ancien
ministre français de l’Intérieur, qui a tou-
jours abordé ces questions sans arrogance
ni naïveté. Cela résume bien le lien entre la
sécurité et l’éducation.
Vanessa Cardoso
Quel est le profil des jeunes que la police a
arrêtés?
Je ne peux, bien sûr, que rester général. La
quasi-totalité des jeunes sont des non-
Lausannois, des mineurs entre 15 et
17 ans. Certains sont par ailleurs déjà
connus de la police.
«Il n’y a, à mon avis,
aucune excuse. Il n’y a
rien qui puisse
justifier ce type de
comportement.»
Pierre-Antoine Hildbrand, municipal
lausannois
Vous dites non-Lausannois, mais ils sont
Vaudois?
Ils ne viennent pas des communes limi-
trophes de Lausanne, plutôt de la Broye.
Parmi les six mineurs arrêtés, il y avait
trois filles, il n’y a donc pas de différence
de sexe?
En effet.
En quoi pensez-vous qu’ils ne mesurent
pas la gravité de leurs actes?
Il y a deux éléments. Le fait d’appeler à un
groupement massif en vue d’attaquer en
groupe des magasins est un délit impor-
tant, la participation à une émeute aussi.
Ce sont des délits cités dans l’article 260
du Code pénal, qui prévoit «une peine
privative de liberté de 3 ans au plus ou
une peine pécuniaire». On n’est pas dans
le vol à l’étalage, là, on s’attaque à la paix
publique.
Est-ce que ces jeunes ont des prove-
nances sociologiques communes?
Nous n’avons pas d’indice d’une sorte de
déstructuration totale, on n’est pas du
tout dans ce cas de figure. Et il existe
beaucoup de personnes qui vivent mo-
destement et qui ne commettent aucun
délit. Je tiens à souligner qu’il n’y a, à
mon avis, aucune excuse. Il n’y a rien qui
puisse justifier ce type de comporte-
ment.
Même pas la volonté de dénoncer la mort
du jeune Nahel en France?
Nous n’avons aucune trace, dans les ap-
pels qui ont été passés, d’une quelconque
motivation pseudo-politique. On est
juste dans une émeute consumériste.
Pierre-Antoine Hildbrand commente les émeutes du 1er juillet.
À Lausanne, les vitrines de la Fnac,
de Pomp it up et de Maniak ont été
brisées. Cyril Zingaro/Keystone
Vous dites que certains étaient connus de
la police. Cela signifie que les peines en-
courues auparavant n’ont pas été suffisam-
ment dissuasives?
Il faut rester modeste. Toutes les sanctions
prises à l’égard d’un certain nombre de dé-
linquants ne portent pas toujours leurs
fruits. Il arrive aussi parfois que les mesures
édictées ne soient pas pleinement effec-
tives.
Cela signifie-t-il qu’on doit être plus sévère
avec les jeunes mineurs dès les premiers
actes?
Je pense que les choses ne se règlent pas
avec des coups de menton. Il faut agir sans
naïveté, mais sans dureté excessive. Un
nombre disproportionné de délits est com-
mis par une petite minorité. Cela implique
qu’on s’occupe tout particulièrement de ces
mineurs, mais aussi de leurs parents, qui
sont parfois dépassés.
Qui doit renforcer la prévention: la police,
l’école, les parents ou la politique?
Comme autorité politique, je dois veiller à
l’ordre public, donc donner les moyens aux
corps de police de faire leur travail. En ville
de Lausanne, toutes les administrations
tentent d’identifier les profils, puisque les
problèmes ont plusieurs causes. La police
fait de la prévention dans les classes. Le Tri-
bunal des mineurs intervient. Il y a des me-
sures éducatives, sociales, de la protection
de la jeunesse. La situation particulière du
jeune est examinée, ses parents, sa scolari-
sation, où il habite. Les professionnels par-
tagent le diagnostic pour atteindre un but:
que ces personnes sortent de la criminalité.
Louis Dasselborne/Keystone
Quelque 140 pompiers sont intervenus pour lutter contre
l’incendie qui a dévasté la zone industrielle de Vétroz.
Les agriculteurs
sont suspendus
aux analyses
INCENDIE Voici
pourquoi le Canton a
interdit par précau-
tion la pâture du
bétail et la récolte
des fruits et légumes
entre Vétroz et
Bramois.
À Bramois (VS), près de Sion,
ils sont plusieurs producteurs
de fruits et légumes. Mais le
seul qui décroche son télé-
phone, c’est Gérard Varone, co-
directeur de bioverger.ch.
«Nous avons mis au frigo tous
les fruits concernés par l’inter-
diction. Désormais, on attend.»
Après l’incendie qui a détruit
une halle industrielle jeudi soir
à Vétroz, les autorités ont tenu
une nouvelle séance de crise
Mais là, puisqu’ils ne sont pas Lausannois, samedi soir. Si l’interdiction de
vous ne pouvez pas aller aussi loin? se baigner a pu être levée, la
C’est vrai, on se heurte aux frontières com- pâture des animaux et la ré-
munales. colte des fruits, légumes, four-
Ces jeunes ont-ils forcément des parents
absents? «Nous
Je ne peux de nouveau parler que de façon
générale, mais ce qui ressort d’un certain
appliquons
nombre de cas, c’est que soit les parents ne le principe
sont pas au courant de la situation, soit ils de précaution. Et la
ne sont plus en mesure d’exercer leur auto-
rité et doivent être aidés.
question qui se pose
est de savoir quand
Dans le débat en France, certains envi- et comment il
sagent de punir les parents. Une bonne pourra être levé.»
idée?
Je dois dire que je n’aimerais pas être politi-
Christophe Darbellay,
cien en France ces jours-ci… En fait, notre
conseiller d’État chargé de
État de droit ne peut pas fonctionner sur la
l’Économie
base de punitions collectives. Sanctionner
les parents est une idée populiste qui ne
créerait que des problèmes supplémen- rages et cultures reste pros-
taires. Punir quelqu’un qui n’est pas res- crite. Et ce sur une dizaine de
ponsable, ça heurte l’idée que je me fais de kilomètres en remontant le
la justice. Rhône. En pleine saison des
abricots, la nouvelle tombe
En France, certains proposent aussi d’in- mal. Le blé est aussi à bout tou-
terdire les réseaux sociaux, notamment chant, bientôt ce seront les ce-
Snapchat et TikTok. rises et les légumes.
Ce n’est pas comme ça qu’on règle les pro-
blèmes dans une démocratie de marché. Détritus tranchants
On n’interdit pas un média parce que cer- Pour les producteurs, l’attente
tains en font un mauvais usage. Par contre, commence. «Nous appliquons
lorsqu’il y a appel à l’émeute, il faut qu’on le principe de précaution. Et la
puisse intervenir très vite auprès de ce mé- question qui se pose est de sa-
dia pour savoir qui se cache derrière. On a voir quand et comment il pour-
les moyens de le faire. Il faut se méfier de la ra être levé. Nous espérons en
comparaison: la France est confrontée à savoir plus ces prochains jours
des problèmes dont on n’imagine pas l’am- avec les premiers résultats»,
pleur et je comprends que, dans l’urgence, explique Christophe Darbellay,
on débatte de certaines choses. La France a conseiller d’État chargé de
tout de même vécu des attentats isla- l’Économie. Mais il tient à pré-
mistes, les «gilets jaunes», des événements ciser. «Il n’y a aucun risque avec
très lourds. les produits vendus dans le
commerce. Ceux qui auraient
Est-ce que les «sauvageons» vont créer de été récoltés dans la zone sont
la contagion au point que vous deviez ren- stockés séparément.»
forcer les effectifs de police tous les soirs Si les mesures sont dras-
au Flon? tiques, c’est en raison des nom-
Ce que je sais, c’est qu’à chaque fois qu’on a breux éléments qui se sont
une policière ou un policier dans la rue, on échappés du brasier. Il y a
améliore la situation. Il y a un effet clair, d’abord les détritus issus des
net sur les délits, les incivilités, le harcèle- panneaux solaires qui cou-
ment et le sentiment d’insécurité. vraient les toits. «Particulière-
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
ment tranchants, ils peuvent
être mortels pour les animaux
qui les mangent», détaille Yves
Degoumois, adjoint à la cheffe
du Service de l’environnement
et spécialiste des sites pollués.
Le fort vent de vendredi soir
les a dispersés à large échelle.
Fumées, scories et suies
On trouve aussi des scories is-
sues de la combustion incom-
plète de matériaux, comme
l’isolation du bâtiment. Les ré-
cupérer est un travail fasti-
dieux. «Mais, on sait le faire»,
ajoute Georg Bregy, du Service
de l’agriculture. Une centaine
de personnes sont engagées.
L’autre conséquence, ce sont
les fumées. Selon plusieurs ha-
bitants, le nuage noir était im-
pressionnant. «La qualité de
l’air a été affectée par ces pous-
sières fines en suspension, ré-
agit Yves Degoumois. La petite
pluie de samedi matin a per-
mis de lessiver l’air, mais pas
suffisamment.» Si la concen-
tration reste élevée, il rassure:
«Elle est inférieure à la valeur
limite journalière définie par
l’ordonnance sur la protection
de l’air.»
Pour évaluer les dépôts de
ces poussières quasi invisibles,
des échantillons de végétaux
ont été prélevés à différents en-
droits de la plaine du Rhône.
Vient encore le problème des
suies, dont la composition res-
semble à celle des poussières,
mais qui sont visibles. Ce sont
en majeure partie des parti-
cules résiduelles de combus-
tion, dont certaines s’appa-
rentent à ce qui est émis par le
trafic automobile. Mais lorsque
les fruits et légumes en sont re-
couverts, comme c’est le cas à
proximité de l’incendie, les la-
ver ne suffit pas. La souillure
ne permet plus leur commer-
cialisation.
Enfin, pour analyser la pol-
lution des sols, des échantil-
lons de poussières ont été en-
voyés en laboratoire. Il faudra
au moins une semaine pour
connaître les niveaux. «L’ef-
fet de cet incendie sur les sols
est-il comparable à une année
de trafic routier et autres
émissions liées à nos activi-
tés ou l’échelle est-elle beau-
coup plus grande encore? Ce
sont ces réponses-là que nous
attendons», résume Yves De-
goumois.
Reste la question des in-
demnités pour les produc-
teurs touchés. Sur ce point,
Christophe Darbellay botte en
touche. «Aujourd’hui, c’est la
sécurité des consommateurs
qui prime. Les questions d’as-
surance, de RC ou d’un éven-
tuel soutien de l’État, tout ce-
la viendra plus tard, cas
échéant.» FLORENT QUIQUE-
REZ
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 Suisse 5

Le robot Lio se L’initiative anti-feux d’artifice

vise à être prête au 1er août
forme à l’hôpital
ZURICH Au centre de soins
d’Embrach, le robot assistant
Lio est en formation depuis
juin 2022. S’il décharge le per-
sonnel, la présence humaine TRADITION Les initiants ont déjà
reste indispensable pour de
nombreuses tâches. Le robot
plus de 90’000 signatures et
passe de chambre en chambre, espèrent faire aboutir le texte pour
raconte des blagues et des his- la Fête nationale. Un symbole et une
toires, passe de la musique ou polémique assurée.
donne la météo. Dans le cadre
de ce projet pilote prévu sur
deux à trois ans, il augmente
régulièrement ses compé- FLORENT QUIQUEREZ
tences. ATS florent.quiquerez@lematindimanche.ch

Fribourg est la dernière à rejoindre le club des com-

Les agriculteurs
auront moins d’eau
BERNE Face au réchauffement
climatique, la consommation
d’eau doit être réduite sur les ex-
ploitations agricoles suisses, se-
munes qui renoncent à un feu d’artifice du 1er Août.
Fin juin, le Conseil communal expliquait que «les
conditions météorologiques des dernières années,
sécheresse et risques d’incendie» avaient pesé dans
ce choix, ainsi que «les désagréments pour la faune
et la nature». Si un espace est mis à disposition pour
l’utilisation privée d’engins pyrotechniques, il fau-

lon Christian Hofer, directeur de
l’Office fédéral de l’agriculture
(OFAG). Il appelle dans la presse
à investir dans les systèmes d’ir-
rigation intelligents. Les inves-
tissements seront multipliés par
quatre d’ici à dix ans, assure-t-il,
samedi, dans les titres aléma-
niques du groupe Tamedia. ATS
Plus de 55’000
personnes au NIFFF
NEUCHÂTEL La 22e édition du
Neuchâtel International Fan-
tastic Film Festival (NIFFF)
s’est terminée samedi avec une
fréquentation record de plus de
55’000 festivaliers. Le prix Nar-
cisse H.R. Giger, doté de
10’000 francs, a été remis à «Ti-
ger Stripes», un film malaisien.
La compétition internationale
était présidée par la
comédienne, autrice et scéna-
riste française Josiane Balas-
ko. ATS
Décès de
Jean-Michel Gros
GENÈVE L’ancien conseiller
national Jean-Michel Gros, fi-
gure de la droite genevoise, est
mort à l’âge de 70 ans. Il s’est
éteint sereinement le 30 juin,
indique sa famille dans la «Tri-
bune de Genève». Membre de
feu le Parti libéral suisse, qui a
fusionné avec le Parti radical
en 2009, Jean-Michel Gros a
été conseiller national entre
1987 et 1999. Il a notamment
été à l’origine du partenariat
enregistré sur le plan fédé-
ral. ATS
dra en profiter. Ces objets-là aussi sont menacés.
L’initiative populaire anti-feux d’artifice a déjà
recueilli 90’000 paraphes. «Notre objectif est d’at-
teindre les 100’000 en août, explique Corinne
Meister, membre du comité. En espérant que ce
soit le 1er août.» Faire aboutir le texte le jour de la
fête nationale, voilà qui marquerait les esprits.
Selon le texte, la vente et l’utilisation de pièces
d’artifice «qui causent du bruit» seraient interdites.
Seule exception: les événements d’importance su-
prarégionale. Mais attention, pour que ceux-ci aient
lieu, les autorités cantonales devraient accorder
«des autorisations exceptionnelles».
Des spectacles de drones
Comment justifier un tel durcissement? «Les pé-
tards sont une source de stress pour les personnes
sensibles au bruit ou qui souhaitent passer une soi-
rée de détente en plein air, écrit le comité d’initia-
tive. Ils provoquent la panique chez les enfants en
bas âge ainsi que les animaux domestiques, sau-
vages et d’élevage, et les empêchent de dormir.»
Au bruit s’ajoutent les risques d’incendies. «Lors
d’une sécheresse en été, les feux d’artifice incon-
trôlés mettent en danger la flore et la faune.»
«Que cette initiative
aboutisse, je m’y attendais.
Mais je ne crois pas qu’elle
puisse passer. Le texte est trop
extrême.»
Jean-Pascal Guinand, codirecteur
de l’entreprise Sugyp
Une aberration pour Roman Huber, à l’origine du
texte: «La Suisse se dote de normes toujours plus
sévères, que ce soit contre le bruit et la pollution
des voitures ou pour le climat. Mais les nuisances
causées par les feux d’artifice peuvent perdurer
sans autre. Ça n’a aucun sens.»
Alors que pour des générations de Suisses, les
feux d’artifice sont synonymes de souvenirs d’en-
fance et de réjouissances, les initiants refusent
ystone
Valentin Flauraud/Key
Le texte ne vise pas à interdire les feux d’artifice organisés par les communes mais ceux des privés.
d’être traités de rabat-joie. «Notre initiative ne
concerne pas les grandes fêtes traditionnelles, mais
vise uniquement à limiter les feux d’artifice pri-
vés», rétorque Corinne Meister. D’après elle, il y a
près de trente jours de désagrément dans certaines
régions. Elle rappelle aussi que les feux d’artifice
«calmes et beaux comme les volcans» pourront
continuer à être allumés. Et de se réjouir que des
communes misent désormais sur d’autres spec-
tacles, comme ceux de drones.
Les feux d’artifice devenus indésirables? Dans la
grande distribution, Migros n’en propose déjà plus
que dans deux régions: Valais et Neuchâtel. Et en-
core, uniquement dans quelques magasins. Coop
ne vend plus que des petites pièces, comme des
allumettes de Bengale ou des petits volcans. Des
produits dont la demande est stable.
Un peu de tolérance
Du côté du Bureau suisse de coordination pour les
feux d’artifice (SKF), qui réunit fabricants, grossistes
et artificiers, le texte constitue un danger. «Si l’ini-
tiative passe, c’est la fin des feux d’artifice en Suisse»,
réagit Jean-Pascal Guinand, codirecteur de l’entre-
prise Sugyp à Grandson (VD), membre de la faîtière.
Dans sa voix, on sent davantage de colère que
d’inquiétude. «Que cette initiative aboutisse, je
m’y attendais. Mais je ne crois pas qu’elle puisse
passer. Le texte est trop extrême. Dans les faits, il
s’agit d’une interdiction de tous les feux, même si
les initiants prétendent le contraire. C’est comme
si on voulait bannir les chiens, parce que certains
sont dérangés par leurs crottes. Il faut revenir à un
peu de tolérance.»
Quant au remplacement des feux d’artifice par
des drones, il relativise: «Notre entreprise organi-
sera 300 feux pour le 1er Août. Et nous ne sommes
Daniel Koch, ancien
«Monsieur Covid»,
est sans doute la
personnalité la plus
connue à défendre
l’initiative. Nicole
Philipp
de loin pas les seuls actifs dans ce domaine en
Suisse. Certaines communes qui ont misé sur des
spectacles de drones l’an dernier sont revenues en
arrière. Il faut dire que c’est quatre fois plus cher
qu’un feu traditionnel.»
Reste cette question: alors que certaines initia-
tives peinent à recueillir suffisamment de signa-
tures, comment expliquer le succès de ce texte? La
réponse n’est pas politique, puisque les initiants
n’ont pas de relais sous la Coupole fédérale, ni
même financière, puisqu’ils travaillent bénévole-
ment pendant leur temps libre. La réponse se trouve
du côté des relais du monde associatif.
Entre la Protection suisse des animaux, la Fonda-
tion Franz Weber, Pro Natura, Greenpeace, quatre
mastodontes sont déjà dans la course. Si on y ajoute
les organisations de défense des papillons, des élé-
phants, des loups, le Zoo de Zurich ou la Ligue suisse
contre le bruit, plus d’une centaine d’associations
sont répertoriées sur le site de l’initiative. Sans ou-
blier une guest star: Daniel Koch. L’ex-«Monsieur
Covid» est désormais un soutien officiel du texte.
Et si les fers de lance du texte sont pour l’heure
surtout alémaniques, c’est bel et bien un débat na-
tional qui devrait embraser la Suisse sur un objet
qui s’annonce déjà comme très émotionnel.

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6 Suisse
Des cyanobactéries ont été observées sur le Hüttnersee, dans le canton de Zurich. Amt für Abfall, Wasser, Energie und
Luft, ZH, Institut Fédéral Suisse des Sciences et Technologies de l’Eau ( EWAG)
Face aux cyanobactéries, les
cantons appellent à la prudence
CONTAMINATION Vaud et
Fribourg mettent en garde
contre la prolifération
d’«algues bleues», phénomène
potentiellement mortel pour
les chiens. Comment les
repérer?
GABRIEL SASSOON
gabriel.sassoon@lematindimanche.ch
L’été vient à peine de commencer et, déjà,
elles montrent leur potentiel de nuisance.
À la mi-juin, des cyanobactéries ont été
identifiées sur le lac de Bienne, poussant
les autorités à y déconseiller la baignade.
Aucune intoxication n’a été signalée. Un
jeune chien a eu moins de chance à la fin
du mois de mai. Il est décédé après une bai-
gnade dans le lac de la Gruyère. Des ana-
lyses sont en cours pour déterminer si les
«algues bleues» en sont la cause.
Ces cas rappellent qu’en période estivale,
et encore plus lors de fortes chaleurs, il faut
désormais faire preuve de prudence avant
de mettre un pied dans l’eau. Les cyano-
bactéries sont en effet présentes en plus
grand nombre dans nos lacs et cours d’eau.
La faute au réchauffement climatique, ex-
pliquait récemment le Conseil fédéral en
réponse à une interpellation sur le sujet. La
situation ne va pas s’améliorer. «En raison
des changements climatiques et de la
hausse des températures de l’eau qui en
découle, les cyanobactéries devraient pro-
liférer encore davantage à l’avenir», aver-
tissait-il.
Pour prévenir plutôt que guérir, des can-
tons sensibilisent au phénomène. Depuis
le décès d’un chien l’été dernier, Fribourg
a décidé qu’il mettrait la population en
Conseils pratiques
Les adultes: faites preuve de pru-
dence lors de fortes chaleurs,
dans les eaux stagnantes ou en
présence de dépôts à la surface
de l’eau. Évitez de vous baigner
dans une eau forte-
ment colorée et
trouble, dans
les zones re-
couvertes d’un
tapis d’algues
ou de dépôts.
Privilégiez les
zones de baignade
prévues à cet effet et évitez
d’avaler l’eau. Douchez-vous
après la baignade.
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
Des lacs suisses, comme le lac de Zurich, prennent parfois une teinte rouge à cause des
cyanobactéries. Prof. Thomas Posch/Universität Zürich, EWAG
Chronologie des
proliférations
JUIN 2023 Des «algues bleues»
sont découvertes dans le port
garde chaque année avant le début de l’été. mais en faible concentration. C’est lorsqu’elles de Vigneules, sur le lac de
«Cet épisode a soulevé beaucoup de prolifèrent qu’elles peuvent devenir dange- Bienne. La Ville déconseille la
craintes. Les cas de prolifération sont tou- reuses, car il arrive qu’elles produisent des baignade dans la zone où sont
jours plus nombreux et nous voulons rap- toxines. Toutes ne sont pas nocives. Com- amarrés des bateaux. Recom-
peler les règles de prudence», explique Elise
«Les cas de plément alimentaire bien connu, la spiruline mandation levée aujourd’hui.
Folly, cheffe du secteur Eaux superficielles appartient ainsi à ce groupe très divers comp-
à l’État de Fribourg. prolifération tant plus de 2000 espèces. Mais l’évaluation MAI 2023 Un chien de 2 ans
sont toujours de la dangerosité étant très difficile à réali- décède après une baignade
Eaux propices
plus ser en temps réel, les autorités appellent à la dans le lac de la Gruyère, sur la
Le Canton de Vaud a lancé un appel à la vi- prudence en présence d’un «bloom», l’autre plage de Gumefens. Des ana-
gilance au début du mois de juin, pratique nombreux et nom donné à une prolifération. lyses sont en cours. Dans le
qu’il envisage d’inscrire sur la durée. Chef- nous voulons Le développement des cyanobactéries canton de Zurich, deux chiens
fe de la division Protection des eaux de rappeler les est très variable, mais une eau calme et décèdent après une baignade
l’État de Vaud, Florence Dapples explique chaude, des températures élevées et une dans le lac de Greifen.
où les baigneurs ont le plus de risques de règles de forte intensité lumineuse favorisent leur
tomber sur lesdits organismes: «On les prudence.» multiplication. La présence abondante de FÉVRIER 2023 Des cyanobac-
trouve le plus souvent dans les zones litto- nutriments dans l’eau également. Elles re- téries colorent en rouge une
rales peu profondes, dans les eaux sta- Elise Folly, cheffe montent alors à la surface pour former un partie des rives du lac de Zoug.
gnantes, calmes et exposées à un fort en- du secteur Eaux amas flottant bien visible. Celui-ci res-
soleillement.» superficielles à semble à une traînée ou à un tapis spon- JANVIER 2023 Des amas sont
De par sa topographie, le Léman est a l’État de Fribourg gieux et gluant. Le spectre de couleurs va repérés à plusieurs endroits le
priori moins à risque. «Le lac est rapide- du vert au bleu en passant par le brun et le long du lac de Zurich. Interrogé
ment plus profond. Cela explique sans rouge. Les formations peuvent aussi don- par le «Tages-Anzeiger», un
doute pourquoi nous n’avons pas reçu de ner une coloration inhabituelle à l’eau et la spécialiste estime que les tem-
signalements d’amas visibles ces dernières rendre trouble, rappellent les cantons. La pératures automnales anorma-
années», poursuit-elle. lement élevées expliqueraient
Les eaux du lac de Neuchâtel, avec ses pourquoi des cyanobactéries
zones peu profondes et moins bien venti- «Vu que le se sont propagées cet hiver.
lées, sont en revanche propices à leur dé- phénomène est
veloppement. Personne n’a oublié l’été JUIN-JUILLET 2022 Deux
meurtrier de 2020, quand plusieurs chiens
naturel, il n’est pas chiens meurent après s’être
avaient péri après une baignade. Cette an- possible de le prévoir.» rafraîchis dans le lac de Neu-
née, aucune formation importante n’a été châtel. Les vétérinaires sont
observée et très peu de cas ont été annon- Yann Berger, chimiste cantonal convaincus qu’il s’agit d’une
cés, mais les autorités veillent. «Des de Neuchâtel intoxication aux «algues
contrôles sont régulièrement effectués, rap- bleues». Dans le canton de Fri-
porte Yann Berger, chimiste cantonal de bourg, un chien décède après
Neuchâtel. Mais vu que le phénomène est présence de bulles ou un dépôt noir-rouge s’être baigné dans le lac de la
naturel, il n’est pas possible de le prévoir.» sur les pierres malgré une eau claire peuvent Gruyère, près de la plage de
également être le signe d’une prolifération. Gumefens. Les analyses d’eau
Présence naturelle révèlent la présence de cyano-
Apparues sur Terre il y a plus de deux mil- Mortel pour les chiens bactéries et de toxines.
liards d’années, les cyanobactéries sont pré- C’est pour les chiens que les cyanobacté-
sentes naturellement dans nos lacs et rivières, ries représentent le plus grand danger, SEPTEMBRE 2021 En Valais,
puisqu’ils peuvent boire de grandes quan- des toxines de cyanobactéries
tités d’eau du lac. Les toxines produites par sont décelées dans le lac de la
certaines espèces peuvent entraîner la mort Corne, à Sierre, et dans la
de l’animal. gouille du camping TCS, à
Les êtres humains peuvent eux aussi être Sion. C’est une première dans
intoxiqués et les tout-petits, en particulier, le canton. À Neuchâtel, le vé-
Les enfants: sur- période chaude. Le Canton incite à doivent faire l’objet d’une surveillance ac- térinaire cantonal attribue
veillez les jeunes tenir son chien en laisse aux abords crue, puisqu’ils ont tendance à avaler l’eau aux micro-organismes la mort
enfants afin de plans d’eau. Si celui-ci s’est jeté à lors de baignades. Une intoxication peut d’un chien. L’animal était dé-
qu’ils ne boivent l’eau, rincez-lui la gueule avec de surtout provoquer des symptômes gastro- cédé vingt minutes après en
pas l’eau du lac. l’eau en bouteille. Emmenez-le intestinaux tels que maux de ventre, diar- avoir ingéré dans un étang pri-
Veillez à ce qu’ils ne chez le vétérinaire dès l’apparition rhée ou vomissements. Elle peut aussi cau- vé.
portent pas à leur bouche de symptômes (abattement ou hy- ser de la fièvre ou des irritations de la peau.
des galets de plage. peractivité, hypersalivation, vo- Selon l’Organisation mondiale de la san- JUILLET 2020 Six chiens
missements, diarrhée, tremble- té, les seuls décès humains documentés et meurent après s’être baignés
Les chiens: Vaud, Genève et Berne ments, difficultés respiratoires, étayés par des preuves scientifiques ont été dans le lac de Neuchâtel, entre
recommandent de ne pas laisser les muqueuses pâles ou causés par l’exposition aux cyanobactéries Colombier et l’embouchure de
animaux se baigner ou s’abreuver état de choc). S’il durant une dialyse. «À ma connaissance, il l’Areuse. Les cantons riverains
dans les eaux stagnantes lors d’épi- n’a que les pattes n’y a pas de cas connu en Suisse. Il faudrait interdisent la baignade pen-
sodes de chaleur ou en cas de suspi- mouillées, rin- boire beaucoup d’eau et manger des amas dant six jours. Les analyses
cion de prolifération. Fribourg dé- cez-lui abon- de cyanobactéries, d’apparence peu ragoû- menées sur deux des animaux
conseille la baignade des chiens damment le pe- tante, ce que l’être humain ne fait en prin- confirment que des cyanobac-
dans tous les lacs pendant toute la lage à l’eau claire. cipe pas», complète Elise Folly. téries sont responsables.
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
La Santé? Ce sera
pour le nouveau
BERNE Après le
retrait du conseiller
fédéral Alain Berset,
aucun ministre en
place ne devrait
revendiquer le
Département de
l’intérieur.
DELPHINE GASCHE
delphine.gasche
@lematindimanche.ch
La démission d’un ministre
est généralement synonyme
de rocade. Les conseillers fé-
déraux en place en profitent
pour mettre le grappin sur un
dicastère plus prestigieux. Ça
tombe bien, l’un d’entre eux
se libère. Le Département fé-
déral de l’intérieur (DFI), cou-
vrant des thématiques qui
vont des primes maladie à la
culture, en passant par les re-
traites. Son chef actuel a ac-
quis une notoriété inhabi-
tuelle en Suisse. La pandémie
de coronavirus y est pour
quelque chose, mais pas seu-
lement.
Le départ d’Alain Berset de-
vrait donc aiguiser les appé-
tits. Parmi les potentiels inté-
ressés, les projecteurs se
braquent d’abord sur Élisa-
beth Baume-Schneider et
Ignazio Cassis.
Un an, c’est trop court
Dernière élue, Élisabeth
Baume-Schneider n’a pas
vraiment pu choisir et s’est re-
trouvée avec la Justice et Po-
lice. La socialiste est devenue
du même coup la nouvelle
cible privilégiée de l’UDC, qui
l’accuse sans relâche de favo-
«Ignazio
Cassis l’a
déclaré: son
activité aux
Affaires Étrangères
lui donne pleine
satisfaction.»
Nicolas Bideau, chef
communication du DFAE
riser l’arrivée de requérants
d’asile. L’ancienne assistante
sociale se lasserait-elle de cet
acharnement? Absolument
pas. Très investie dans ses dos-
siers, elle se sent bien à la tête
d’un département diversifié,
nous apprend-on en coulisses.
Changer après un an seulement
n’est pas une option. Et rien
n’indique que le travail serait
plus simple au DFI. La ministre
devrait défendre la réforme du
2e pilier, combattue par son
propre camp, la gauche et les
syndicats. Le combat s’an-
Alain Berset va bientôt raccrocher son chapeau. Qui pourrait
l’enfiler? Alessandro della Valle/Keystone
nonce donc rude. Quitte à se
faire taper dessus, autant que
ce soit par ses adversaires tra-
ditionnels.
Et Ignazio Cassis? Tentera-t-
il de redonner l’Intérieur à la
droite après douze ans en main
socialiste? Le ministre des
Affaires étrangères est embour-
bé dans le dossier européen.
Après avoir abandonné les né-
gociations sur l’accord-cadre,
le PLR peine à relancer les re-
lations avec l’Union euro-
péenne, épuisant les secré-
taires d’État les uns après les
autres. L’ancien médecin can-
tonal serait-il plus dans son élé-
ment à la Santé? Son porte-
parole coupe court. «Comme
Ignazio Cassis l’a déjà déclaré
cette année, son activité de
chef du Département fédéral
des affaires étrangères lui
donne pleine satisfaction. Et il
se met à disposition des insti-
tutions pour les quatre pro-
chaines années», précise Nico-
las Bideau.
On ne voit pas non plus les
autres ministres bouger. Prin-
cipalement, pour des questions
de timing. Les derniers chan-
gements datent d’à peine plus
de six mois. Ceux qui voulaient
évoluer l’ont fait. À l’image
de Karin Keller-Sutter, qui a
obtenu le Département des
finances, où elle se plaît.
Satisfaits, les autres sont res-
tés dans leurs pénates. Guy Par-
melin, qui dirige l’Économie,
la Formation et la Recherche,
a d’ailleurs déjà changé une fois
de département. Pour le Vau-
dois, c’est suffisant sur un man-
dat. S’il assure vouloir faire une
nouvelle législature, l’ancien
vigneron aura l’âge de la re-
traite en 2024. Bon vivant, il
pourrait vouloir en profiter et
quitter plus tôt le Conseil fédé-
ral. Ça aurait peu de sens de
changer aussi près du départ.
Quant à Viola Amherd, elle
s’était vu dérouler un tapis
rouge pour reprendre le Dépar-
tement prestigieux de l’envi-
ronnement, des transports, de
l’énergie et de la communica-
tion, après la démission de Si-
monetta Sommaruga. La Valai-
sanne a toutefois balayé l’op-
tion d’un revers de main,
préférant rester à la tête de la
Défense. Un choix surprenant
pour de nombreux observa-
teurs. Son refus a ouvert la voie
à Albert Rösti. L’ancien pré-
sident de Swissoil et d’Auto-
Suisse a décroché le dicastère
de ses rêves. Aucune raison,
pour lui, de le quitter rapide-
ment. Il pourrait d’ailleurs en
profiter pour donner une nou-
velle orientation à un dicastère,
dirigé jusque-là par deux
femmes favorables à la sortie
des énergies fossiles.
Une seule option reste: le
nouveau enfilera les chaus-
sures d’Alain Berset. À voir
de quelle couleur politique il
sera.
Des consommateurs de drogue se retrouvent devant le Quai 9, à Genève, le 6 juillet 2023. Magali Girardin
Genève refuse l’idée
d’un lieu dédié au crack
DROGUE Alors que le Quai 9
a stoppé l’accueil des
consommateurs de crack,
l’État ne souhaite pas
la création d’un autre lieu.
Pourtant, les associations
le demandent.
JULIEN CULET
julien.culet@lematindimanche.ch
«Nous avons désormais atteint un pic. La
situation est catastrophique.» Pour cette
habitante des Pâquis, la consommation de
crack est arrivée à son paroxysme dans le
quartier genevois. Bagarres et matériel de
shoot sont omniprésents ces derniers
temps, dit-elle. Il faut dire que le local de
consommation de drogue Quai 9 a renon-
cé depuis deux semaines à accueillir en
ses murs les dépendants au crack. Ils ne
peuvent plus fumer ce dérivé de la cocaïne
à l’intérieur du lieu situé derrière la gare.
La cohabitation entre consommateurs
d’héroïne, drogue «historique» du Quai 9,
et de crack a engendré des tensions, les ef-
fets des deux substances étant opposés. L’as-
sociation Première ligne, qui gère les lieux,
a donc dû fermer le local une semaine et le
rouvrir en excluant le crack, comme annon-
cé dans la «Tribune de Genève». Deux se-
maines plus tard, quelle est la situation au-
tour de cette drogue à Genève? Thomas Her-
quel, directeur de Première ligne, rapporte
que «la mesure a permis de calmer le jeu à
l’intérieur du Quai 9. C’était important pour
que nous puissions passer l’été, qui est tou-
jours une période compliquée au vu de la
chaleur et de la consommation d’alcool.»
Les consommateurs de crack sont mal-
gré tout encore nombreux sur le parking
qui jouxte le local. Ils peuvent être plusieurs
dizaines, excités par les effets de la subs-
tance. «Pour l’instant, nous avons fait le
choix, conjointement avec la police, de gar-
der cette zone de tolérance et de leur per-
mettre de rester ici, explique Thomas Her-
quel. Ça évite qu’ils soient isolés et s’épar-
pillent sur d’autres parkings ou dans des
allées d’immeubles. Nous pouvons inter-
venir avec du personnel formé en cas d’ur-
gence.»
La police indique que cette présence sur
le parking «génère un champ de tension aux
alentours du site, ce qui nécessite un enga-
gement soutenu des forces de police afin
de contenir les problèmes d’ordre et de sécu-
rité publics».
Cette mesure doit durer jusqu’en septembre.
Les consommateurs de crack peuvent en re-
vanche encore venir se reposer au sleep-in,
qui propose douze lits. Première ligne leur
fournit aussi nourriture et boissons. Le direc-
teur estime qu’une réflexion est indispensable
pour savoir comment mieux prendre en charge
ces personnes, qui sont dans une grande pré-
carité. «Nous devons réfléchir quant à l’ouver-
ture de nouveaux locaux, ce qui peut prendre
plusieurs mois», indique Thomas Herquel.
Local de consommation refusé
Si la création d’un nouveau Quai 9 dédié au
crack est parfois évoquée, le nouveau mi-
nistre de la Santé, Pierre Maudet, y est fer-
mement opposé. «L’État n’est pas favorable
à l’ouverture d’un lieu de consommation dé-
dié», affirme-t-il ainsi. Le conseiller d’État
s’est déplacé vendredi aux Pâquis pour
constater les dégâts de cette drogue. «L’en-
jeu n’est pas l’ouverture d’un local de
consommation dédié au crack, mais bel et
bien la gestion des effets dramatiques, après
inhalation, sur l’état des consommateurs, qui
nemaîtrisentplusleursbesoinsetsemontrent
très agressifs à l’endroit de la population»,
constate Pierre Maudet.
Georges Cabrera
Le conseiller d’État estime que la situation
est «particulièrement préoccupante à proxi-
mité de l’école des Pâquis, très fréquentée
également durant l’été, du fait de la confron-
tation des enfants à ces consommateurs, qui
se trouvent dans un état physique et psy-
chique déplorable et se livrent par exemple
à la prostitution sauvage ou à la mendicité
intrusive».
Une stratégie de lutte contre cette drogue
doit être développée par les acteurs concer-
nés d’ici à l’automne. «Cette approche doit
être plurielle, abordant des problématiques
tant sécuritaires que sanitaires et sociales,
explique Aglaé Tardin, médecin cantonale
genevoise. Elle doit prendre en compte de
nombreuses variables. Elle doit également,
pour être efficace et viable, être élaborée par
toutes les parties prenantes, qui incluent des
professionnels du terrain, de la police, de la
santé et du social.»
Solution qui a «fait ses preuves»
Première ligne, qui n’a pas encore rencontré
Pierre Maudet, regrette la position du magis-
trat quant à l’ouverture d’un nouveau lieu de
consommation. C’est également le cas du dé-
puté socialiste et travailleur social Sylvain
Thévoz. «Il devrait ajuster sa nouvelle cas-
Suisse 7
quette de ministre de la Santé, mais il a,
semble-t-il gardé son ancienne, très sécuri-
taire, bien vissée sur sa tête, critique l’élu. Il
est dommage de fermer la porte à une solu-
tion qui a fait ses preuves.»
Le député socialiste salue le travail du
Quai 9, «qui ne pourra pas faire face seul». Il
demande davantage de moyens. «Nous de-
vons réfléchir à des lieux d’accueil, propose
Sylvain Thévoz. Ils pourraient se trouver ail-
leurs, afin d’éviter que ce soient toujours les
mêmes quartiers qui subissent.»
Le député PLR Pierre Nicollier estime éga-
lement qu’il est trop tôt pour renoncer à de
nouveaux lieux. «On sait qu’il est difficile d’en
ouvrir, car personne n’en veut à côté de chez
soi, mais s’il s’avère que cela peut permettre
de stabiliser et d’intégrer ces personnes, il
faudra malgré tout le faire», réagit l’élu libé-
ral-radical.
«L’État n’est pas
favorable à
l’ouverture d’un lieu
de consommation dédié.»
Pierre Maudet, conseiller d’État
chargé du Département de la santé
et des mobilités
Du côté du MCG, opposant historique au
Quai 9, on se veut plus sceptique, réclamant
des mesures urgentes, notamment en ma-
tière de deal, plutôt qu’une extension des lo-
caux actuels. «Nous étions contre la vision de
Première ligne de trop grandir et d’accepter
tous les consommateurs, même de France
voisine, rappelle le président du MCG, Fran-
çois Baertschi. Je me garderais bien de leur
donner des leçons, mais je suis surpris qu’ils
n’acceptent pas d’accueillir une nouvelle
forme de toxicomanie dans leurs murs.»
8 Suisse Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

En vacances, il faut à réfléchir à d’autres temporalités dans le

travail. «Mille possibilités s’offrent à la ré-
flexion pour s’inscrire dans la durée:
concentrer ses activités sur quatre jours,

dix jours pour décrocher

télétravailler pour changer de rythme,
oser le top sharing (direction en binôme)
afin de partager des responsabilités écra-
santes, revisiter le temps partiel, annua-
liser ses horaires… Et surtout prendre
réellement la main sur l’évolution de sa
carrière, ce qui est la meilleure manière
d’éviter un burn-out.»

Retour en douceur
Annika Månsson, fondatrice de l’entre-
prise Happy at Work, va s’arrêter trois se-
maines et demie. Enfin, presque: «Je vais
déconnecter durant les deux premières
semaines. Ensuite, je vais travailler une
ou deux heures par jour pour me remettre
peu à peu dans le rythme.» Elle conseille
d’ailleurs à celles et ceux qui le peuvent
de prévoir un retour doux dans le monde
professionnel. Le plus important, à ses
yeux, est de s’éloigner de son activité ha-
bituelle durant les premières semaines
de congé. Regarder ses e-mails à la plage
ou à la montagne? Oubliez! Il faudrait aus-
si éviter de garder 150 trucs à faire pour
ses vacances. Rendre visite à un parent
éloigné ou repeindre la cuisine, ce n’est
pas un super programme si on y est
contraint. «Le but est de s’autoriser à faire
ce que l’on veut et à son rythme, plutôt
que de subir.»
Et puis, la coach conseille de se deman-

«Le but est de

s’autoriser à faire ce
que l’on veut et à son
rythme, plutôt que
de subir.»
Annika Månsson, fondatrice de
l’entreprise Happy at Work

der, quand on retournera au bureau, si

CONGÉS Combien de temps
faut-il pour se déconnecter du
travail et, du coup, quelle est la
durée idéale des vacances?
Réponses et conseils d’experts.
CAROLINE ZUERCHER
caroline zuercher@lematindimanche.ch
Ah, vous les attendiez, ces vacances! Au
moment où elles arrivent, on les trouve for-
cément trop courtes. Et le corps, que nous
dit-il? Combien de temps faut-il pour re-
charger les batteries? La question n’inté-
resse pas seulement les veinards qui
bouclent leurs valises. Nous avons deman-
dé leur avis à des spécialistes.
Selon une étude néerlandaise, publiée
en 2012 dans le bien nommé «Journal of
Happiness Studies» et basée sur les décla-
rations de 54 personnes parties en moyenne
23 jours, la santé et le bien-être augmen-
tent rapidement au début des vacances,
pour atteindre leur maximum au huitième
jour et diminuer par la suite. Damien Da-
venne, chronobiologiste et professeur à
l’Université de Caen (F), estime d’ailleurs
que, du point de vue physiologique, il faut
une dizaine de jours consécutifs pour dé-
crocher. Ce constat conduit à un arrêt de
deux semaines. «S’il est plus long, cela fait
du bien, mais le retour risque d’être plus
difficile, détaille Damien Davenne. À l’in-
verse, les expériences du monde éduca-
tif montrent qu’une semaine ne suffit pas,
ni aux enfants ni aux adultes qui s’en oc-
cupent.»
L’idée est aussi de pouvoir s’évader au
moins deux fois par année. Le professeur
précise que, pour les enfants, on préconise
deux semaines de pause toutes les sept se-
maines. Et pour les adultes? «Les élèves ont
fait l’objet de plus d’études. Mais d’un point
de vue personnel, je trouve que les quatre
à cinq semaines généralement accordées
ne sont pas suffisantes. Il me semble que
le mieux serait sept semaines.» Et s’il vous
reste malgré tout cinq jours à caser, la pause
de fin d’année entre Noël et Nouvel-An
semble «vraiment indispensable».
Souffler toute l’année!
Pour beaucoup, le bien-être acquis dans
son hamac s’estompe malheureusement
vite quand on retourne au labeur. L’idéal
ne serait-il pas d’avoir un rythme moins fa-
tigant toute l’année? Un brin provocateur,
Stéphane Haefliger, membre de direction
au sein du cabinet Vicario Consulting, es-
time que la durée idéale des vacances de-
vrait être de… zéro jour – l’idée étant d’équi-
librer le flux et le volume de travail tout au
long de l’année, en y intégrant des temps
de réflexion et de formation avec des mi-
crorespirations régulières et acceptées.
«Considérer que les vacances d’été sont
des espaces de récupération imposés signi-
fie en fait que nous sommes dans une
course effrénée le reste de l’année, pour-
suit cet expert des ressources humaines.
Nous vivons avec le mythe que deux se-
Règle d’or pour se maines en Toscane vont enfin revitaliser la
reposer pendant ses machine, comme l’on recharge les batte-
vacances: se ries de sa voiture électrique. Mais croire
déconnecter. Et qu’une pause suffira après avoir travaillé
donc ne surtout pas avec une intensité totale reste illusoire.»
consulter ses Selon lui, c’est aussi un piège idéologique,
e-mails car les carrières modernes se construisent
professionels. Getty sur le surinvestissement professionnel et
Images/Westend61 sur la patience ou, autrement dit, «sur notre
capacité d’être inoxydables à la pression».
Dans cette logique, Stéphane Haefliger
juge la conception traditionnelle des va-
cances «historiquement datée» et appelle
Et le sommeil dans tout ça?
Il y a la fatigue mentale, et celle liée au
manque de sommeil. Là encore, les va-
cances peuvent être bénéfiques. «La
bonne nouvelle est que même si l’on a une
énorme dette de sommeil, on peut retrou-
ver son état de forme sans avoir besoin de
la rembourser dans son intégralité», pré-
cise Raphaël Heinzer, médecin respon-
sable du Centre d’investigation et de re-
cherche sur le sommeil au CHUV. Des ex-
périences montrent que si on laisse des
gens fatigués dormir autant qu’ils le sou-
haitent, ils vont retrouver après trois ou
quatre jours un rythme plus normal. Vous
en doutez? Le médecin donne l’exemple
de l’homme qui a battu le record du temps
passé sans dormir. Eh bien, après avoir
gardé les yeux ouverts onze jours d’affilée,
l’on ne pourrait pas garder un rituel ins-
tauré durant les vacances, histoire d’en
prolonger les bienfaits. Comme Stéphane
Haefliger, elle juge que le mieux serait de
pouvoir compter sur des moments de re-
pos douze mois durant. Elle suggère dé-
jà de prévoir au moins deux ou trois ar-
rêts de cinq minutes dans sa journée de
boulot, durant lesquels on peut par
exemple se concentrer sur sa respiration
ou s’installer dans un lieu calme. Certes,
il n’y aura ni plage ni montagne. Mais ce
sera une petite pause.
ce monsieur est retombé sur ses pattes dès
le quatrième jour de repos.
Que vous soyez du matin ou du soir, la
pause estivale est souvent l’occasion de re-
trouver son rythme naturel. Selon Raphaël
Heinzer, cela peut être le moment idéal
pour mieux se connaître, découvrir de com-
bien d’heures de sommeil on a besoin ou
quel est son rythme biologique, justement.
Ainsi, vous pourrez peut-être essayer par la
suite d’adapter un peu votre quotidien pour
mieux répondre à vos besoins. Si ce n’est
pas possible, le médecin recommande de se
remettre dans l’horaire adéquat un peu
avant la rentrée. Et si vous partez loin, n’ou-
bliez pas que le décalage horaire peut jouer
des tours, à l’aller et au retour. Il faudra là
aussi quelques jours d’adaptation.

Comment Credit Suisse dissimulait les bonus

BANQUE Un Le 23 mai, la ministre des Fi-
nances Karin Keller-Sutter a or-
document du donné de cesser le paiement de
Département des bonus. Or certaines subtilités
finances montre permettent de contourner ce
comment Credit principe. La décision explique
la manière dont argent liquide
Suisse distribuait et papiers-valeurs étaient dis-
des bonus sans les tribués.
déclarer. Payé en cash, Le plan le plus sophistiqué,
l’Asset Management Fund
le conseil Carry, dissimule des versements
d’administration qui n’apparaissent pas dans la
s’en tire bien. comptabilité de Credit Suisse.
Il s’agit d’une «commission liée
aux résultats versée par les in-
vestisseurs d’un fonds de capi-
tal-investissement au gestion-
naire du fonds». Ce n’est pas une
rémunération et ce ne sera donc
pas raboté.
Vifs débats
Au CS les débats ont été vifs.
Ces versements profitent aux
employés les mieux rémunérés.
Selon un ex-administrateur
d’UBS et un ex-chef du groupe
CS, ils sont très inhabituels et
auraient dû être supprimés de-
puis longtemps. Cinq gérants
de fortune encaissaient chaque
année entre 10 et 20 millions de
francs. Les mieux payés sont
John G. Popp, cadre supérieur
de longue date au CS et ancien
chef de la banque d’investisse-
ment Robert Shafir. Un insider
révèle qu’en 2019 Eric Varvel,
président de la gestion de for-
tune, a dû effectuer deux paie-
ments de 50 millions à Shafir et
ses fidèles lieutenants, un mo-
dèle autorisé personnellement
par Brady Dougan vers 2012.
Credit Suisse a toujours pré-
tendu ne pas verser d’indemni-
tés de départ. Elles existent. Ap-
pelés cash severance, ces verse-
ments en liquide ne doivent pas,
selon Berne, être remboursés par
ceux qui en ont bénéficié. En re-
vanche les indemnités de départ
versées en actions seront resti-
tuées. Peu logique. Payés sur-
tout en cash, les membres du
conseil d’administration jubilent.
Axel Lehmann, António Horta-
Osório et le stratège déchu Urs
Rohner ne verront pas fondre
leurs biens.
Seuls les ex-chefs Tidjane
Thiam, Thomas Gottsein et Ulrich
Körner tremblent. Le CS doit exa-
miner «les possibilités juridiques
de récupérer les rémunérations
versées depuis le 1er janvier 2019
aux membres actuels et anciens
du directoire du groupe».
ARTHUR RUTISHAUSER
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
À Prilly (VD), la tour Malley Phare atteindra 60 mètres. CCHE
Les gratte-ciel en
bois visent de
plus en plus haut
TENDANCE De Prilly à Zurich,
les projets de tours boisées se
multiplient en Suisse. Les
velléités écologiques des
promoteurs expliquent ce
boom, mais pas seulement.
GABRIEL SASSOON
gabriel.sassoon@lematindimanche.ch
Le temps où logement en bois rimait avec
chalet est définitivement révolu. Il suffit de
regarder du côté de Winterthour, où se pré-
pare un projet immobilier ambitieux. La
réalisation en est encore au stade de la pla-
nification, mais son annonce a fait le tour
du globe. Avec ses 100 mètres de hauteur
prévus, ce gratte-ciel deviendrait la plus
haute tour résidentielle en bois du monde.
Winterthour n’est pas la seule ville suisse
à clignoter dans cette course à la verticali-
té d’un nouveau genre. De Zurich à Prilly
(VD), en passant par Ostermundigen (BE),
les projets de tours se multiplient et visent
toujours plus haut (lire encadré). Leur point
commun: réduire l’utilisation de béton et
d’acier à la faveur d’un matériau naturel et
renouvelable.
Cette tendance, on la doit à une adapta-
tion progressive des prescriptions anti-
incendie. Longtemps, les bâtiments en bois
ne pouvaient pas excéder deux étages. En
2005, la limite est passée à six niveaux, soit
l’équivalent de 30 mètres. Le tournant est
Voici à quoi devrait ressembler la plus haute tour d’habitation en bois du monde. Prévu à Winterthour, le projet intervenu en 2015, lorsqu’est tombée la res-
est au stade de l’étude préliminaire. Ina Invest / Implenia triction quant à la hauteur.
«Pour en arriver là, il a fallu prouver que
les prescriptions n’étaient plus adaptées
aux connaissances actuelles et aux avan-
Réalisations cées techniques, se félicite Daniel Ingold,
directeur romand de Lignum, la faîtière de
et projets l’économie suisse du bois.
En 2018, le premier immeuble élevé Stockage du CO2
construit avec une structure hybride Les préoccupations écologiques grandis-
bois-béton est de terre à Risch- santes ont donné un élan supplémentaire
Rotkreuz (ZG). Il s’agissait d’une tour au mouvement. Pour les promoteurs im-
de bureaux de 36 mètres. L’année sui- mobiliers et maîtres d’ouvrage qui
vante, au même endroit, un bâtiment cherchent à réduire leur empreinte car-
de 60 mètres a complété le paysage. bone et à verdir leur image, le bois fait fi-
En Suisse romande, l’immeuble d’ha- gure d’alternative de choix. Et pour cause.
bitation Malley Phare, à Prilly, culmine- Si la fabrication de béton provoque des
ra bientôt à 60 m. Dans la même com- émissions massives, le bois permet de
mune, le projet de tour Tilla, avec une stocker naturellement le carbone. «Un
structure mixte bois-béton, vise mètre cube de bois, c’est 1 tonne de CO2
85 mètres de haut. pour toute la durée de sa mise en œuvre,
À Zoug, l’immeuble «Pi» doit s’élever par exemple dans la construction», rap-
à 80 mètres de haut. Il doit être conçu pelle Daniel Ingold.
avec un squelette entièrement en bois. À Winterthour (ZH), Ina Invest, une fi-
Le début des travaux est prévu pour liale d’Implenia, prévoit de se fournir en
2026. À Winterthour, le projet Rocket & Suisse, en Allemagne et en Autriche pour
Tigerli doit faire 20 mètres de plus. donner corps à Rocket & Tigerli, la tour
UBS, de son côté, prévoit de construire record. Le recours au bois permet de ré-
un immeuble de 108 mètres dans le duire de 30% les émissions carbone, es-
quartier d’Altstetten, en ville de Zurich. time Marc Pointet, directeur général de
la société immobilière. «Mais un projet
Projet d’une tour de 108 mètres pour UBS à Zurich. UBS AG de cette ampleur est lié à de nombreux
défis inédits, souligne-t-il. L’étude préli-
Suisse 9
minaire montrera si ceux-ci peuvent être
surmontés.» Le début des travaux est
agendé à l’an prochain.
À Prilly, ce sont du hêtre, du frêne et
de l’épicéa qui composeront 80% de la
structure de Malley Phare, une surélé-
vation en bois de 14 étages culminant à
60 mètres. Les essences sont issues en
majeure partie de la région et entière-
ment de Suisse, rapporte Fabio Leo, ar-
chitecte et chef de projet au sein du bu-
reau CCHE.
Ici, le bois s’est imposé comme un ma-
tériau idéal pour répondre aux critères
du label société à 2000 watts du quartier.
Comment les architectes s’y prennent-ils
pour protéger l’immeuble contre les in-
cendies? Les structures boisées seront en-
robées avec un matériau incombustible.
Là où il est prévu de les laisser apparentes,
un sprinkler sera installé. «L’utilisation
du bois impose évidemment des
contraintes de protection incendie, mais
cela reste maîtrisable», dit Fabio Leo.
Chantier plus rapide
La légèreté du bois est un autre atout mis
en avant, tout comme la durée du chan-
tier. Les pièces en bois sont préfabriquées
dans un atelier, ce qui permet de prendre
de l’avance. «Quand les travaux com-
mencent, le camion arrive, on décharge,
et on est prêt pour le montage», raconte
Fabio Leo. Les travaux préparatoires ont
débuté au printemps 2022 et l’immeuble
devrait être terminé fin 2024.
«Un mètre cube de
bois, c’est 1 tonne de
CO2 pour toute la
durée de sa mise en œuvre.»
Daniel Ingold, directeur romand de
Lignum, la faîtière de l’économie suisse
du bois
Pour les investisseurs, ce gain de temps
permet de mettre l’objet en location plus
rapidement. Et donc d’en retirer un ren-
dement plus vite. «Cela compense le fait
que le bois comme matériau reste tendan-
ciellement plus cher. Dans l’analyse glo-
bale, le prix de l’ouvrage est en réalité équi-
valent», estime Daniel Ingold.
Par rapport au béton, construire avec du
bois serait de 5 à 15% plus cher pour le gros
œuvre, rapporte Marc Pointet. «En re-
vanche, il existe des avantages potentiels
en termes d’efficacité dans l’exécution,
parce que le bois permet de déplacer de
nombreuses étapes vers la préproduction.»
Selon Fabio Leo, le bois est désormais de-
venu tout aussi concurrentiel. «À l’origine,
nous avons envisagé une construction en
métal ou en bois et avons identifié que les
deux techniques tiennent dans le même
cadre budgétaire.»
10 Monde Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Visiter le Colisée et la Sixtine Mortelle chaleur

peut virer à la grosse arnaque

ESCROQUERIE Entrer dans
le célèbre amphithéâtre et
les Musées du Vatican l’été
est quasi impossible. À moins
d’acheter à un revendeur peu
scrupuleux un billet dix fois
plus cher que le prix normal.
DOMINIQUE DUNGLAS, ROME
Une famille originaire de Nantes, les pa-
rents et deux enfants, fait la queue devant
la billetterie du Colisée depuis une demi-
heure. Quand une rumeur parcourt la file
d’attente: plus de billet disponible pour au-
jourd’hui. L’adolescente, excédée, lève les
yeux de son portable: «Papa, je t’avais dit
de réserver sur internet, tu n’écoutes ja-
mais.» «Chérie, sur internet, il n’y avait pas
de billet disponible avant le 28 juillet», ré-
pond le père.
Français, Allemands, Indiens, Russes,
Américains: écrasée de chaleur malgré
l’heure matinale, la Via dei Fori Imperiali
qui longe le Colisée est une Babel de lan-
gues, d’ethnies et de couleurs. Parmi les
milliers de touristes s’agitent des individus
portant des gilets indiquant «staff». Le plus
proche d’entre eux se précipite sur la fa-
mille française. «Je peux vous faire entrer
dans une visite guidée qui part dans une
heure. Vous sautez toutes les files. C’est
60 euros par personne, pas de tarif réduit
pour les enfants.»
Les Nantais hésitent. C’est beaucoup plus
que 16 euros, prix officiel du billet. Mais le
petit dernier qui collectionne les Astérix
éclate en sanglot. Vaincu, le père de famille
sort son portefeuille de sa poche. Quelques
minutes plus tard, nous le retrouvons en
train de gesticuler avec l’homme portant
le gilet «staff». «Il ne m’a pas dit que la vi-
site guidée était en allemand. Deux cent
quarante euros pour une visite en allemand,
je ne suis pas d’accord.» La discussion s’en-
venime désormais entre plusieurs reven-
deurs de billets pour savoir qui va devoir
rembourser. Le ton monte et on en vient
presque aux mains. Les abords de l’amphi-
théâtre Flavien se transforment en souk.
Finalement remboursés, les Nantais
s’éloignent avec le pas lent des esclaves hu-
miliés.
flés par des agences dès la première minute
de leur mise en vente. Ils sont revendus
avec visite guidée jusqu’à 12 fois le prix
d’achat. Ainsi, à Pâques, la visite du Coli-
sée peut atteindre 200 euros. La direction
du Colisée encaisse 100 millions par an de
la vente des billets à 16 euros. Mais au-de-
là des revenus supplémentaires réalisés par
les revendeurs, les dommages du trafic sont
énormes. Le cabinet d’audit Deloitte a en
effet calculé que la valeur attractive du Co-
lisée dans le monde pour toute la filière
touristique s’élève à 1,4 milliard. Combien
de touristes renonceront-ils à visiter Rome
lorsqu’un parent ou un ami leur racontera
l’arnaque dont ils ont été victimes devant
le Colisée?
Les autorités ont bien tenté de limiter le
mécanisme en bloquant les achats groupés
sur internet. Mais des algorithmes sophis-
tiqués appelés Robot contournent l’inter-
dit en diversifiant à l’infini les adresses IP
et en imitant les hésitations d’un acquéreur
normal effectuant l’achat. Impossible pour
la plate-forme officielle de discerner s’il
s’agit de 100 touristes différents ou d’une
agence qui s’approprie 100 billets.
Un kilomètre de file d’attente
Direction le Vatican. Faute de gladiateurs,
le visiteur frustré espère se consoler avec
les merveilles du musée, l’enchantement
de la chapelle Sixtine. Et il compte sur la
dans des prisons
ÉTATS-UNIS Malaises, voire
morts: la chaleur fait des ra-
vages dans les prisons
texanes. Le personnel, en
sous-effectif, est aussi exposé
rigueur de la sainte Église romaine pour à ces vagues de chaleur et s’est
éviter le chaos du Colisée. Mauvaise pioche! plaint de conditions de travail
Nous sommes mercredi et de nombreux dégradées, évoquant des tour-
pèlerins ont au programme l’audience pu- nées par plus de 43 °C avec des
«Il ne m’a pas blique hebdomadaire de pape François gilets pare-balles, face à des
place Saint-Pierre… et la visite des Musées détenus énervés par la cha-
dit que la du Vatican. Certes, des billets sont encore leur. AFP
visite guidée disponibles à 17 euros et la file d’attente
était en est plus ordonnée qu’au Colisée… mais elle
s’étend sur plus d’un kilomètre le long des Gaz: interrogations
allemand. murs torrides de la cité léonine.
Deux cent Deux jeunes Chinois s’abritent sous
sur l’hiver prochain
quarante l’ombre minuscule d’un panneau de sens FRANCE Le PDG de TotalE-
interdit. «On est là depuis deux heures, on nergies, Patrick Pouyanné, n’a
euros pour doit être à la moitié de la file. » C’est alors pas écarté la possibilité de
une visite qu’une Sud-Américaine, sans gilet «staff» problèmes de gaz en hiver,
en allemand, mais arborant un badge illisible, nous soulignant la faiblesse des ca-
aborde en espagnol: «Visite guidée? C’est pacités de stockage en Eu-
je ne suis pas 55 euros et on entre dans un quart d’heure.» rope. Ça ne signifie pas néces-
d’accord.» Armés de la patience de Confucius, les étu- sairement que les Européens
diants chinois refusent, mais un groupe de manqueront de gaz, mais les
Un touriste dames proches de l’évanouissement importations nécessaires pour
français victime suivent la Sud-Américaine. répondre à la demande auront
d’une arnaque Nous retrouvons alors notre famille nan- un coût élevé. AFP
taise au bord de la crise de nerfs. Après
l’échec du Colisée, elle vient de renoncer
aux quatre heures de file ou au billet à 22 morts dans une
55 euros pour le Vatican. Les enfants sont
anéantis, les parents excédés. «Basta
attaque au Burkina
culture, demain, on va dans un parc aqua- OUAGADOUGOU Vingt-deux
tique, lance le père pour remonter le mo- civils, dont 20 supplétifs de
ral des troupes. Et l’an prochain, on reste l’armée, ont été tués vendredi
en Bretagne.» dans deux attaques de djiha-
distes présumés au Burkina
Faso. Le pays est pris depuis
2015 dans une spirale de vio-
lences djihadistes. Il est dirigé
depuis septembre 2022 par le
capitaine Ibrahim Traoré, arri-
vé au pouvoir par un coup
d’État, le deuxième en huit
mois, et qui a affiché sa déter-
mination à combattre les
djihadistes malgré la multipli-
cation des attaques. AFP
Izïa Higelin parle
de lyncher Macron

Escrocs à gogo
Avec 7,5 millions de visiteurs par an, le Co-
lisée est le monument payant le plus visi-
Valery HACHE / AFP

té en Italie. Mais comme l’amphithéâtre ne

peut, pour des raisons de sécurité, accueil-
lir plus de 3000 visiteurs en même temps,
la demande de billets dépasse l’offre du-
rant les mois d’été. Et des petits malins en
profitent.
Proposés à 16 euros en ligne un mois
avant la date de la visite, les billets sont ra- Le Colisée, à Rome, est un des monuments les plus visités d’Italie. keystone-sda.ch NICE Une enquête visant la
chanteuse, fille de Jacques Hi-
gelin, pour «provocation pu-
blique à commettre un crime
ou un délit» a été ouverte

Le Royaume-Uni se démarque sur après qu’Izïa Higelin a évoqué

en concert un lynchage du
président Emmanuel Macron

la livraison des bombes à sous-munitions lors de son concert, jeudi soir,

UKRAINE La Grande-
Bretagne et de nom-
breuses organisations
humanitaires ont réagi
à l’annonce américaine
de livraisons d’armes
à sous-munitions.
La Russie ne se prive pas
de critiquer à son tour.
«Le Royaume-Uni est signataire
d’une convention qui interdit la pro-
duction et l’utilisation d’armes à
sous-munitions et décourage leur
utilisation», a déclaré samedi le pre-
mier ministre britannique Rishi Su-
nak. Sa déclaration à la presse lors
d’un déplacement électoral fait suite
à la promesse américaine de livrer
à l’Ukraine des armes à sous-muni-
tions.
«C’est une peine de mort pour les
civils sur le long terme. Il y a des
personnes qui ne sont pas encore
nées qui en seront les victimes», a
dénoncé de son côté Baptiste Cha-
puis, de l’organisation Handicap In-
ternational – Humanity and Inclu-
sion (HI).
Des armes controversées
Les bombes à sous-munitions dis-
persent de façon indiscriminée et sur
une zone supérieure à plusieurs ter-
rains de football une multitude de pe-
tits explosifs, dont une partie impor-
tante n’explose pas et s’enterre dans
le sol. Elles entrent alors, de facto,
dans la catégorie des mines antiper-
sonnel.
«Un aveu de faiblesse»
La Russie a estimé samedi que la li-
vraison de bombes à sous-munitions
à l’Ukraine, décidée par les États-Unis,
était un «aveu de faiblesse» qui ren-
dra Washington «complice» des morts
civiles provoquée par cette arme
controversée.
En août 2022, le Cluster Munition
Monitor, qui rassemble plusieurs ONG
spécialisées, notait que l’Ukraine était
alors le seul théâtre où ces armes
étaient utilisées, en l’occurrence par
l’armée russe.
Le Kremlin furieux contre Zelensky
Par ailleurs, le Kremlin a fustigé, same-
di, le rapatriement par le président
à Beaulieu-sur-Mer, dans le
cadre d’un festival dans le sud
de la France. ATS
Zelensky de plusieurs commandants
ukrainiens qui avaient fait l’objet d’un
échange de prisonniers et qui devaient Effondrement d’un
rester en Turquie jusqu’à la fin du
immeuble au Brésil
conflit selon un accord entre Moscou
et Kiev. Kiev a confirmé avoir obtenu RIO DE JANEIRO Au moins
le retour de ces membres du régiment onze personnes ont perdu la
Azov, célébrés comme des héros en vie dans l’effondrement d’un
Ukraine pour leur résistance au sein de immeuble à Paulista, non loin
l’usine Azovstal lors du siège de Ma- de Recife, dans le nord-est du
rioupol, après des «négociations avec Brésil. L’immeuble de trois
la partie turque». étages jouxtait un important
Le porte-parole du Kremlin Dmitri complexe d’habitations, selon
Peskov a lié ce retour à «l’échec de la des images diffusées par la
contre-offensive» ukrainienne et à la presse locale. Les apparte-
volonté d’Ankara de montrer sa «soli- ments y avaient été fermés en
darité» avant le Sommet de l’OTAN de 2010 en raison d’un risque
Vilnius les 11 et 12 juillet. «Les prépara- d’effondrement, mais ils
tifs du Sommet de l’OTAN sont en cours étaient occupés illégalement,
et, bien sûr, il y a eu beaucoup de pres- a ajouté la Protection ci-
sion sur la Turquie», a-t-il déclaré. AFP vile. ATS
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
Dans moins de dix ans,
l’Europe roulera-t-elle chinois?
AUTOMOBILE Le bascu-
lement vers les moteurs
électriques place la Chine
en position de force. Avec
l’abandon annoncé des
moteurs thermiques en
2035, le Vieux-Continent
est la cible désignée pour
exporter leurs propres
marques.
IVAN RADJA
ivan.radja@lematindimanche.ch
«Brutalité est le mot qui convient pour
décrire l’amplitude du changement qui
nous est imposé dans un espace-temps
très limité»: ces mots sont ceux de Car-
los Tavares, lâchés ce mercredi dans
«Le Figaro» pour résumer la tâche qui
attend les constructeurs automobiles
français et européens. À savoir passer,
dans un laps de temps très court, d’une
technologie «affûtée pendant plus d’un
siècle» à une technologie encore «bal-
butiante». En clair, du moteur ther-
mique au moteur électrique.
Un domaine où l’Europe accuse en-
core du retard par rapport aux acteurs
chinois. «Auparavant, avec le moteur
thermique, les constructeurs européens
et japonais avaient une longueur
d’avance, rappelle Jérôme Schupp, ana-
lyste chez Prime Partners. Ce n’est plus
le cas avec la voiture électrique, où tout
se joue sur la batterie et le software.»
Or, poursuit le CEO de Stellantis (Peu-
geot, Citroën, Fiat-Chrysler), avec la fin
des moteurs à explosion décrétée pour
2035, «l’Europe a calé sa réglementa-
tion sur ce qui est précisément le point
de force des constructeurs chinois, at-
tirés par un marché rentable. Nous leur
avons déroulé le tapis rouge».
Les Européens sont bien position-
nés sur le haut de gamme mais, relève
Jérôme Schupp, «tout va se jouer sur
le bas et le moyen de gamme, ce qui
implique que les constructeurs fran-
çais et allemands devront fournir des
voitures moins chères, avec autant ou
plus d’autonomie, et un software de
qualité». Car les ambitions chinoises
sont immenses.
Fin juin, Michael Shu, directeur eu-
ropéen de BYD, premier constructeur
automobile chinois, annonçait claire-
ment la couleur dans les colonnes du
«Financial Times»: «Nous voulons être
dans le top trois des marques de la ré-
gion d’ici à la fin de la décennie, et nu-
méro un si nous le pouvons.» Ce ne
sont pas des paroles en l’air. BYD a
conclu en partenariat avec Sixt, la plus
grosse société de location de voitures
en Allemagne, qui lui achètera, d’ici à
2028, 100’000 véhicules (le modèle At-
to 3, un véhicule utilitaire sport com-
pact) pour ses opérations européennes.
C’est une nouveauté. Jusqu’ici les
constructeurs chinois avançaient «mas-
qués», si l’on peut dire. Le groupe Geely,
qui a racheté Volvo en 2010, avec la Po-
lestar, désormais considérée comme
une marque à part entière, et chinoise,
par les analystes. Ou SAIC, qui a fait
main basse sur MG en Grande-Bretagne.
«Tout va se jouer
sur le bas et le
moyen de gamme,
ce qui implique qu’il
faudra fournir des
voitures moins chères,
avec autant ou plus
d’autonomie, et un
software de qualité.»
Jérôme Schupp,
analyste chez Prime Partners
Désormais, ce sont BYD, mais aussi Link
& Co, Nio ou Chery qui sont sur la grille
de départ. Ce dernier prévoit, par
exemple, d’ouvrir 50 salles d’exposition
rien qu’au Royaume-Uni l’année pro-
chaine, le double d’ici à 2025. Une étude
de KPMG estime que les groupes chinois
pourraient s’adjuger 15% du marché des
voitures neuves en Europe dans les
deux ans, soit davantage que Renault.
En Chine, la bascule a déjà eu lieu,
et les ventes des constructeurs euro-
péens dégringolent face à la toute-puis-
sance des marques locales. VW Group
a même esquissé les contours d’un
vaste plan de restructuration de 5 mil-
liards d’euros pour amortir le choc. En
langage militaire, cela s’appelle une re-
traite. Le géant allemand, premier eu-
ropéen à pénétrer ce marché au début
des années 80, ne représentait plus
que 2% des ventes de voitures élec-
triques sur les cinq premiers mois de
cette année, nettement distancé par
BYD, qui s’arroge 35% de parts de mar-
ché avec plus d’un million de véhicules
La guerre pour le lithium
La Chine a annoncé fin juin
qu’elle allait investir 1,4 milliard de
dollars, en partenariat avec la Rus-
sie, dans l’ouverture en Bolivie de
deux mines de lithium. Ce métal
indispensable à la confection de
batteries pour les véhicules élec-
triques ou hybrides est l’objet de
toutes les convoitises. En s’appro-
visionnant en Amérique du Sud,
mais aussi en Australie ainsi que
sur son propre territoire, la Chine
assure à elle seule 77% de la pro-
duction mondiale.
Si elle entend produire ses
propres batteries en nombre suffi-
sant, l’Europe doit multiplier les
sources d’approvisionnement. «Le
lithium va aussi venir d’Australie,
explique Jérôme Schupp, mais il y
a aussi des possibilités d’ouvrir des
Économie 11
En haut: le modèle
Atto 3 du constructeur
chinois BYD. De g.
à dr.: une Polestar
du groupe Geely,
une MG 4 de MG Motor
et une Lynk & Co. BYD/
Plestar/MG Motor/ Lynk & Co
écoulés (électriques et hybrides) du-
rant la même période.
Pris de court
Les japonais Toyota et Nissan marquent
également le pas. Selon le CEO de Nis-
san, «les progrès technologiques [de la
Chine] ont été beaucoup plus rapides
que prévu». Tout le monde semble pris
de court. Carlos Tavares, encore: «Les
constructeurs chinois se sont lancés
avant les autres, en catimini, et on nous
disait à l’époque de ne pas nous inquié-
ter.»
Le marché intérieur arrivant inexo-
rablement à maturation, c’est en toute
logique que les Chinois sont contraints
à l’exportation pour maintenir la crois-
sance du secteur. «Des entreprises telles
que Nio, BYD, Li Auto, Xpeng et Great
Wall ont tourné les yeux vers l’étran-
mines au Portugal et en Serbie par
exemple, voire de filtrer l’eau pour
en extraire le minerai, notamment
à la frontière entre la France et l’Al-
lemagne.»
Il y a dix jours, Imerys, spécia-
liste des minéraux industriels, a
annoncé un partenariat avec Bri-
tish Lithium en vue d’exploiter les
ressources en «or blanc» de sa car-
rière de kaolin à St. Austell, dans
les Cornouailles. Le potentiel y est
de 20’000 tonnes de carbonate de
lithium par an, soit une production
suffisante pour alimenter la fabri-
cation de 500’000 véhicules élec-
triques. La France prévoit pour sa
part la mise en exploitation d’ici à
2027 de l’une des plus grandes
mines d’Europe de lithium, dans le
Massif central. IRA
ger», note le «Financial Times». Or «les
trois grands marchés pour la voiture
électrique sont la Chine, l’Europe puis
les États-Unis, souligne Jérôme Schupp.
L’Amérique du Sud, l’Afrique et l’Inde
restent des marchés marginaux, en rai-
son du manque d’infrastructures.»
Pour l’heure, les exportations
chinoises vers l’Europe sont encore mo-
destes. «Au premier trimestre de cette
année, avec 69’600 unités, elles ne re-
présentaient que 2,4% du marché total
des voitures individuelles, mais 7,1%
des électriques», constate l’analyste al-
lemand Matthias Schmidt, spécialiste
du secteur automobile. Il faut préciser
que ces chiffres ne comprennent pas
les voitures européennes électriques,
fabriquées en Chine et écoulées sur nos
marchés, mais uniquement les marques
chinoises.
Croissance rapide
Mais les volumes vont croître très vite,
poursuit Matthias Schmidt: «Il y a eu
206’000 unités en 2022, et cette année
on devrait atteindre les 306’000, soit
3,4% de parts de marché, puis dépas-
ser les 600’000 en 2024, avec 5% de
parts de marché.» En 2030, le nombre
de voitures neuves chinoises élec-
triques mises en circulation devrait être
de 1,2 million, soit 9% du marché total,
et 13% des électriques. Conséquent,
mais loin de la première place visée par
BYD. Les effets d’annonce participent
aussi de cette guerre économique. «À
ce stade, cela suppose de toute façon
une production locale en Europe, afin
de se conformer aux mesures protec-
tionnistes suggérées par le président
français Emmanuel Macron cette se-
maine», précise l’analyste.
Pour éviter les droits de douane et les
taxes à l’importation, les constructeurs
chinois laissent d’ores et déjà entendre
qu’ils vont construire des centres de
production en Europe. Quitte à s’ali-
gner sur les prix: BYD a annoncé que
certains de ses modèles seraient ven-
dus au même prix que le ID.2 de VW.
Selon Matthias Schmidt, cette parité se-
rait temporaire, «le temps pour eux de
s’établir sur le marché. Mais par la suite,
rien ne dit qu’ils ne vont pas casser les
prix.»
12 La semaine en dessins Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Ont dessiné ce numéro: Ben, Caro, Pierre Gudel, Tony Marchand, Racalbuto, Vincent di Silvestro
Profils
Le Matin Dimanche Dimanche 9 juillet 2023

Chaleur La grotte du glacier du Rhône vit

peut-être sa dernière année 15
Mon animal «Skar», le berger allemand
qui sait flairer les explosifs 17
Léman Express Les vitres des gares du CEVA
sont mortelles pour les oiseaux 18

Les amoureux du vin

voient la vie en rosé
● Le rachat, en 2023, du Château Minuty, géant provençal,
par le groupe LVMH de Bernard Arnault est un nouveau coup
d’accélérateur dans la montée en puissance du rosé sur
le marché du vin. Un triomphe estival chaque année plus
spectaculaire, en Suisse aussi.

CHRISTOPHE PASSER évolution qui est sœur du tourisme de

christophe.passer@lematindimanche.ch
La Piscine: un vague décilitre de rosé ad-
ditionné d’une grosse ration de glaçons,
le tout vendu le plus cher possible. Ce sa-
crilège œnologique est depuis long-
temps un des signes extravagants des
plages de Pampelonne. Mais on trouve
désormais ce cocktail de l’été de Saint-
Tropez jusqu’aux terrasses de Montreux.
Il est emblématique d’un triomphe: celui
qui fait du rosé le marché le plus dyna-
mique du vin mondial, particulièrement
en Provence, dont la production lui est
presque entièrement dédiée.
Vin d’été, vin facile, vin lifestyle, vin
ludique, le rosé n’en finit pas d’atteindre
de nouveaux records. Il frise désormais
les 40% de la consommation annuelle
de vin tranquille en France, et ça ne
cesse de monter. En Belgique, c’est plus
de 20%. Les Suisses sont sur la troi-
sième marche de ce podium, à égalité,
15%, avec les Américains. Le prix des
terres de vignoble prend le même che-
min: en 2022, il fallait dépenser 125’000
euros pour un hectare de l’appellation
bandol, et 100’000 pour l’équivalent
sur le littoral provençal.
C’est pourtant là que Bernard Arnault,
l’homme le plus riche du monde, PDG
du groupe LVMH (chiffre d’affaires de
79 milliards d’euros l’an dernier), a dé-
cidé de frapper. Déjà leader sur le mar-
ché du champagne, LVMH a acquis, fin
janvier, pour une somme non commu-
niquée officiellement, mais que le quo-
tidien «Le Monde» évalue à 350 mil-
lions d’euros, le Château Minuty. Pro-
priétaire des châteaux d’Esclans (qui
produit le Whispering Angel, rosé le
plus vendu aux États-Unis), Galoupet et
Jas d’Esclans, LVMH est ainsi devenu le
principal producteur de vin en Pro-
vence. Car
Minuty, à un jet de cochonnet de Saint-
Tropez, c’est une grosse affaire:
170 hectares, 9 millions de bouteilles
produites en 2022, à 90% en rosé. Et
une longue palette de vins dans toutes
les gammes: du M, environ une dizaine
de francs, jusqu’à la cuvée de luxe 281
(environ une cinquantaine de francs).
Inventé par les congés payés
L’arrivée de LVMH marque une nouvelle
évolution dans l’histoire récente du rosé,
un vin qui demeure relativement bon
marché (l’essentiel des flacons se situe
entre 10 et 25 francs), malgré les hausses
masse et suit la même logique de hausse,
qui amènera ensuite nombre de vedettes
et people à s’y intéresser.
On ne les compte plus, désormais.
George Clooney est propriétaire du do-
maine du Canadel, à Brignoles. Carla Bru-
ni fait office d’ambassadrice du Rose-
blood, rosé haut de gamme produit au
Château d’Estoublon. Patrick Bruel est le
propriétaire du Domaine de Leos, à l’Isle-
sur-la-Sorgue. La chanteuse australienne
Kylie Minogue a associé son nom à cer-
taines cuvées de rosé du Château Sainte-
«Le consommateur
choisit le rosé d’abord
pour sa couleur,
il est aussi sensible au
packaging, à la forme ou
à l’élégance de la bouteille,
à l’image véhiculée par telle
ou telle star.»
Pierre Thomas,
journaliste spécialisé dans le vin
Roseline. Tony Parker travaille avec le BERNARD ARNAULT
Château La Mascaronne. Et, par-dessus Déjà leader sur le marché
tout, il y a le Domaine de Miraval, dont du champagne, Bernard
Brad Pitt, après son divorce d’avec Ange- Arnault, le PDG du groupe
lina Jolie, est demeuré copropriétaire: son de luxe LVMH, investit
rosé a fait un carton international, notam- désormais également
ment aux États-Unis, où il est un des pre- dans le rosé. AFP/Ludovic
miers du classement des ventes de vins Marin
français.
Si la récente offensive des people et fi-
nanciers est une étape, c’est aussi parce
qu’elle souligne qu’on est passé d’un vin
de vacances à un vin à la mode, et qu’il
est question maintenant de solidifier ce pas seulement une boisson d’apéro
marché. La spéculation et la montée des produite dans l’année. «Christian
prix vont confronter le rosé à deux pro- Roulleau, propriétaire du Château
blématiques compliquées: la qualité et le La Bégude, en Bandol, est de ceux-
climat. là, poursuit Pierre Thomas. L’idée
serait de produire des rosés pas for-
Devenir un vin de garde? cément destinés à être bus aussi ra-
La qualité, d’abord. À la tête du blog Tho- pidement, mais qui gagneraient à
mas Vino, le journaliste spécialisé Pierre vieillir un peu.»
Thomas l’explique: «Le rosé reste tout de Autre possibilité: «Souligner
même un vin souvent acratopège, et il de- mieux les différences de cépages,
meure difficile de dire pourquoi l’un est selon les régions. Au-delà du sud de
meilleur que l’autre, cela reste une affaire la France, les cartes de rosés, dans la
très personnelle. Mais ça ne semble pour restauration, demeurent assez fa-
le moment n’avoir que peu d’influence sur méliques. Or, si la Provence travaille
Lionel Moulet

constantes de ces dernières années. Ré-
puté par les historiens comme un des plus
anciens vins du monde, le rosé a cepen-
dant très peu existé dans l’imaginaire du
consommateur jusqu’au XXe siècle. Il a en
le consommateur. On sait qu’il choisit le
rosé d’abord pour sa couleur, qu’il est aus-
si sensible au packaging, à la forme ou à
l’élégance de la bouteille, à l’image véhi-
d’abord le cinsault et le grenache, ou
le Bandol le mourvèdre, il existe
beaucoup de façons de se démar-
quer.» En Suisse, l’œil-de-perdrix,
Credit

quelque sorte été «inventé» par les congés
payés français dès 1936. C’est en effet en
fonçant pour leurs vacances au Sud que
les Français le découvrent alors et en font
le synonyme de la Provence, de la plage,
du soleil et des parties de pétanque. Une
culée par telle ou telle star. Pas grand-
chose à voir avec le vin, finalement. À par-
tir d’un certain niveau de prix, ça peut de-
venir difficile à tenir.»
Certains propriétaires en sont
conscients et imaginent, par exemple, de
faire du rosé davantage un vin de garde et
par exemple. «Mais le vigneron vau-
dois Vincent Chollet propose quant
à lui un rosé à base de mondeuse,
cépage savoyard», poursuit Tho-
mas. «Le Tessinois Giorgio Rossi a
lancé un rosé fait de bondola, un cé-
page rare.» Autrement, le pinot noir ➜
14 Profils Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

➜ fonctionne très bien, comme dans le

«Rosé des Copains» de Marie-Thérèse En quelques chiffres
Chappaz, qui lui ajoute du gamay. À Ge-

+ 516%
nève, ce même gamay est souvent à l’hon-
neur. En Bordelais, on travaille le rosé
avec du merlot et du cabernet sauvignon,
etc. Autrement dit, il s’agit d’éviter que L’explosion, en volume, des ventes à
tous les rosés se ressemblent, sinon de- l’étranger, surtout dans les pays limi-
main pourrait ressembler à une gueule de trophes et aux États-Unis, du rosé fran-
bois. çais entre 2010 et 2020. Si l’on compte
L’autre enjeu, c’est le réchauffement en valeur, le chiffre à l’exportation
climatique. Un phénomène qui ne monte à +963%.
touche certes pas que le rosé, mais où ça
peut devenir encore plus problématique.
Car un peu comme le chasselas pour le
blanc, l’alliage cinsault-grenache n’a
donné longtemps que des teneurs en al- 350
millions
cool relativement légères, environ 12 de-
grés. Pour un «vin de soif», estival, il est
important de ne pas trop dépasser ces va-

d’euros
leurs. Mais le soleil et le réchauffement KYLIE MINOGUE
font leur œuvre. Pierre Thomas: «J’ai ré- Le nom de la chanteuse australienne figure carrément
cemment goûté un rosé de Chamoson à sur l’étiquette de certaines cuvées de rosé du Château
13,5 degrés. Le rosé est un vin du mo- Sainte-Roseline. Alamy Stock Photo - DR
ment, de partage, qui doit rester facile à Le prix qu’aurait payé Bernard
boire, et si le taux d’alcool monte trop, ça Arnault, patron du groupe LVMH,
peut devenir gênant.» Sinon, on pourra pour acheter ce printemps le Château
toujours rajouter les fameux glaçons tro- Minuty, grand cru des rosés de
péziens dans le verre, mais mettre de Provence.
l’eau dans son vin n’est pas une solution
œnologique satisfaisante. En attendant,

90%
le vin transparent et frais façon ciel
au-dessus de l’aube est tiré, et toout
le monde veut le boire: voici ven nu le
temps du nouvel or rose du marrché La part du vignoble provençal consa-
du vin. crée au rosé. Et ça augmente encore.
L’appellation bandol produisait 80%
de rouge il y a dix ans: elle est passée
désormais à 64% de rosé.
PATRICK BRUEL

157
Le chanteur français est le
propriétaire du Domaine de Leoss,
à L’Isle-sur-la-Sorgue Patrick Bruel//

millions
Facebook - DR

Le nombre de bouteilles de rosé pro-

duites en Provence l’an dernier.

BRAD PITT
L’acteur, après son divorce d’avec
Angelina Jolie, est resté copropriétaire
du Domaine de Miraval, dont le rosé
e 40%
L’augmentation de la consommation
cartonne. Il est devenu l’un des de rosé dans le monde en vingt ans.
premiers vins français aux États-
Unis. Serge Chapuis pour Miraval -
LionelMoulet

7,6
millions
CARLA BRUNI
La chanteuse et
ancien mannequin
de litres
fait office La part actuelle du rosé dans la pro-
d’ambassadrice duction en Suisse en 2022, sur environ
du Roseblood, rosé 100 millions de litres au total.
haut de gamme
produit au Château
d’Estoublon. AFP/
Anne-Christine Poujoulat
- DR
15%
La part en pourcentage de la consomma-
tion de rosé en Suisse, équivalant à celle
des États-Unis. Il n’y a que les Français
(34%) et les Belges pour faire mieux.

«Un bon rosé, c’est un rosé qui marche»

PIERRE THOMAS
Journaliste spécialisé en vins
Dans l’explosion de l’offre actuelle,
comment distinguer un bon
d’un mauvais rosé?
Les dégustateurs ont longtemps eu
du mal avec le rosé. Ce n’est pas à
proprement parler un vin de terroir,
sa typicité est difficile à déterminer.
Et on est en face d’un cas particu-
lier: on lui demande le moins de
couleur possible, le moins de goût
possible, on préfère les millésimes
les plus jeunes et, en plus, il se
consomme très frais, ce qui atténue
encore les arômes. Comment choi-
sir? Depuis 2004, un jury de profes-
sionnel décerne des médailles
propres au rosé dans le cadre des Vi-
nalies de France. On peut s’y fier,
comme aussi au concours spéci-
fique au rosé organisé depuis deux
ans par le Mondial de Bruxelles.
Mais la réponse appartient au
consommateur: un bon rosé, c’est
un rosé qui marche.
C’est juste un vin marketing,
alors?
D’abord un vin techno et moderne.
Techno parce que, pour réussir un
rosé, il faut maîtriser le pressurage
direct, façon dont on produit au-
jourd’hui l’essentiel de ce vin: on
prend des cépages rouges (principa-
lement du cinsault et du grenache,
en Provence) et on vinifie ça comme
si c’était du blanc. Il faut des pres-
soirs dernier cri, de la précision à
toutes les étapes. Et ce rosé se
consomme ensuite vite, ne se garde
guère, c’est une production à flux
tendu, ce qui en fait un vin mo-
derne, bankable, si l’on peut dire.
Ce qui explique que people
et investisseurs s’y intéressent?
Oui, mais remarquez que le Domaine
Ott, une des stars de Provence, avait
été racheté dès 2004 par Louis Roe-
derer, producteur de champagne.
Minuty l’est par LVMH, propriétaire
notamment du géant Moët & Chan-
don. Il y a des synergies entre cham-
pagne et rosé. Ils se complètent, en
matière de consommation: environ
40% du champagne se vend entre
octobre et décembre. Le rosé, c’est
entre la fin du printemps et l’été.
Et les vignerons suisses,
sur ce marché?
Des chiffres spécifiques au rosé pro-
duit en Suisse ont été publiés cette
année pour la première fois: 6,7 mil-
lions de litres de rosé suisse ont été
bus en 2022. Un rosé de Bernard
Bosseau, à base de pinot noir, a été
classé meilleur rosé genevois. C’est
aussi un pinot, «Osé», de Richard
Aguet, à Féchy, qui a gagné chez les
Vaudois. À Neuchâtel, c’est l’œil-
de-perdrix du domaine Brunner qui
s’est distingué. Il y a de bons rosés
suisses, et je crois que la curiosité
reste le moteur du plaisir.
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
Chaque fin de printemps, sous la glace, un tunnel d’une centaine de mètres est percé sous le glacier du Rhône. Mais il ne sera bientôt plus possible d’y arriver.
La grotte du glacier du Rhône vit
ses dernières processions
FONTE Creusé chaque
année depuis 150 ans,
le tunnel de glace
pourrait accueillir
des visiteurs pour
la dernière fois cette
année. Reportage.
TEXTE ET PHOTOS:
JULIEN WICKY
julien.wicky
@lematindimanche.ch
L’objet des convoitises a dispa-
ru depuis longtemps des flancs
du col de la Furka, de grands
rocs gris arrosés désormais par
de puissantes cascades. Loin
derrière, le glacier du Rhône et
la fameuse grotte creusée dans
ses entrailles sont masqués et
les grands écriteaux publici-
taires semblent bien seuls à ré-
sister à l’effet inéluctable des
températures qui grimpent.
Car ce qui devait arriver est
train de se matérialiser: après
cent cinquante ans d’exploita-
tion, la grotte vit sans doute sa
dernière saison. C’est en tout cas
ce qu’a laissé entendre Philipp
Carlen, gérant des lieux, à nos
confrères du «Walliser Bote»
cette semaine. Un symbole pour
cette famille qui accueille
chaque été des milliers de visi-
teurs depuis un siècle et demi.
Malheureusement, Philipp Car-
len n’a pas souhaité répondre à
nos questions.
Visiteurs par centaines
Il n’est que 10 h 30 ce vendredi
matin et, déjà, le soleil cogne
fort sur les flancs du col. Il ne
reste que ce petit courant frais
qui évacue dans l’air l’odeur
culpabilisante des gaz d’échap-
pement des bus, voitures et mo-
tos qui s’empilent sur le parking
de l’épingle du fameux hôtel
Belvédère, fermé depuis bien-
tôt dix ans. Mais même si on n’y
passe plus la nuit, on s’arrête
encore en masse ici. Sur l’as-
phalte, c’est Babel, et il suffit
d’observer trois plaques d’im-
matriculation pour voyager de
l’Espagne à la Hongrie, en pas-
sant par le Royaume-Uni.
Il faut ensuite suivre la file in-
dienne et traverser le bazar où se
mêlent polaires en laine, pe-
luches en tous genres et cristaux
scintillants. Au bout, les adultes
s’acquitteront de 9 francs, les en-
fants de 6, pour franchir le tour-
niquet. Encore quelques mètres
et les locaux prendront le coup
qu’ils sont venus chercher. Ils
étaient prévenus, mais un glacier
qui perd jusqu’à 10 mètres
d’épaisseur en un an et une
langue qui n’en finit plus de se
noyer dans le lac à son front, ce-
la fait mal au ventre. Les tou-
ristes, eux, se laissent encore naï-
vement séduire par un monstre
de glace qui se déroule toujours
sur plusieurs kilomètres. L’effet
«waouh!» s’estompe en principe
à la lecture des premiers pan-
neaux arborant les photos d’ar-
chives.
Des bâches qui gênent
Depuis une décennie environ,
les Carlen ont entrepris de cou-
vrir l’avant du glacier de gigan-
tesques bâches blanches, pour
retarder l’inéluctable fonte et
sauver leur business. Ça a fonc-
tionné un temps. Mais ces toiles,
Au bout du chemin, les visiteurs découvrent les bâches posées sur
ce qui reste du front du glacier; plusieurs dérivent sur le lac.
«L’histoire
de ce site a
une véritable
valeur d’éducation
face à la glaciologie
et au changement
climatique.»
Jim et Judith, touristes
britanniques
qui semblaient hier encore être
les habits d’un malade dans un
état critique, ont aujourd’hui
tout d’un suaire masquant un
cadavre en décomposition.
À peine exagérée, la méta-
phore est incarnée par des
bouts de toile qui dérivent
dans le lac, traînés par de très
éphémères icebergs détachés
du glacier. Cela vaut aux Car-
len, cette semaine encore, l’ire
de guides de montagne locaux
et de défenseurs de la nature
ainsi qu’une procédure du Ser-
vice cantonal de l’environne-
ment.
Du bord du lac remonte du
vacarme. En tendant l’oreille,
on devine les cris d’une mani-
festation contre l’occupation
du glacier. Un cortège qui se
heurte à une voix familière,
Profils 15
«C’est
tie, il regrette. «J’aurais aimé dans l’aménagement des lieux
pouvoir comparer et me rendre ne les gêne. «L’histoire de ce
artificiel mais compte de l’importance du site a une véritable valeur
toujours très changement. Et malgré le fait d’éducation face à la glaciolo-
beau. C’est triste que tout ça soit très artificiel, gie et au changement clima-
c’est toujours très beau. C’est tique. Pour nous, à moins de
que ça s’arrête, mais triste que ça s’arrête, mais la venir ici, c’est une réalité très
la nature est plus nature est plus forte», soupire- difficile à imaginer.» Vient alors
forte.» t-il avant de reprendre la route la question de deux très jeunes
vers Saint-Tropez avec sa visiteurs, Mathis (8 ans) et sa
femme Frauke et leur fils Mar- sœur Elsa (6 ans). «La grotte
André, touriste allemand
kus. va disparaître, mais il va se pas-
de passage avec sa famille
Peu après eux, Jim et Judith, ser quoi quand tout le glacier
couple de retraités britan- aura fondu?» Il est sans doute
niques, sont subjugués. Rien temps de repartir.
celle d’un propriétaire bourru
renvoyant ces «vieilles buses»
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d’où elles viennent. Cette voix
est celle de Vincent Kucholl,
acteur dans une future série Partenaire média
de la RTS en cours de produc-
tion. À cet instant, la réalité
dépasse la fiction.
Dans le tunnel bleu glacé
d’une centaine de mètres sous
les bâches brunes et blanches
qui pendouillent, Thomas et
Marion, qui travaillent sur le
tournage, ont du mal à cacher
leur malaise. «Ça aurait dû être
fermé il y a longtemps, c’est TAPAS
assez triste de s’acharner ain-
si contre la nature», lâche le PLANCHETTES
ALE
premier. «C’est en fait carré- AMBIANCE MUSIC
RA MIQUE
ment inquiétant», ajoute la se- VUE PANO
conde.
Trop dangereux
Chaque année, six ou sept ou-
Les jeudis et vendre
vriers recreusent un tunnel. dis
du 6 juillet au 25 ao
Mais chaque année, l’épaisseur ût
et le mardi 1er août
du «plafond» s’étiole, compli- dès
17h jusqu’à minuit.
quant leur tâche. Et il y a deux
semaines, un pan de la langue
glaciaire non loin de là s’est ef-
fondré. Le bruit de l’appareil
pour cartes de crédit a beau Tous les jeudis et vendredis en juillet et août,
être régulier, il n’a plus l’air de rendez-vous avec vos amis, collègues ou
pouvoir compenser le coût des votre famille sur la terrasse du TOM Café
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mace. Il y a trente-cinq ans, de
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cé à visiter le site. En franchis-
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Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 Mon animal et moi 17

«Quand Skar met son harnais,

c’est comme s’il enfilait l’uniforme»
● À la Brigade des chiens
de Genève, le binôme est
chargé de sillonner la ville Leurs
lors d’opérations de sécuri- indispensables
té, et notamment pour
dénicher des explosifs.

TEXTES: CHRISTOPHE PINOL

PHOTOS: YVAIN GENEVAY

À quelque chose malheur est bon, si

l’on en croit le dicton… L’histoire entre
l’appointé Christophe O. et le chien de
police Skar commence ainsi sur une
triste note: le décès d’une personne
âgée qui avait jeté son dévolu sur ce LE HARNAIS
berger allemand dans un élevage fri- «Quand il le porte, il sait qu’il est en
bourgeois. L’agent, lui, après six ans mode «travail». Ça permet aussi aux
passés à Police-secours, venait de réus- gens de comprendre que c’est un
sir l’examen de conducteur de chien et chien de police.»
cherchait justement un chiot quand sa
hiérarchie lui a proposé de se charger
de l’éducation de Skar, alors âgé de 3
mois.
«À l’origine, la personne l’avait appe-
lé Samy. Mais j’ai trouvé que ça ne fai-
sait pas très «chien de police», nous
glisse-t-il avec un sourire. Selon
l’usage, je devais choisir un nom en S et
je trouvais que Skar sonnait bien. C’est
aussi le frère du roi dans «Le roi lion.»

«Fin mai dernier,

on a assuré la L’EAU
sécurité de la «C’est son carburant. La première
chose qu’on fait quand on contrôle
cathédrale Saint-Pierre l’équipement, c’est que son jerrycan
avant la prestation de soit plein.»
serment du Conseil
d’État genevois.»
Christophe O., conducteur de chien

Comme tout chien de police, Skar a

suivi une formation axée sur des
thèmes bien spécifiques: l’obéissance
(marche au pied, rappel…), la défense
(interception de personne), la quête
d’hommes (il aboie dès qu’il trouve la
personne en question) ou encore la
recherche d’objets (il se couche à côté
aussitôt déniché). Il a ensuite été diri-
gé vers la recherche d’explosifs en for-
mation spécialisée. «Fin mai dernier,
on a d’ailleurs assuré la sécurité de la
cathédrale Saint-Pierre avant la pres-
tation de serment du nouveau
Conseil d’État genevois. Mais on
fouille aussi, par exemple, les
chambres des grands hôtels avec une
unité de déminage avant l’arrivée de
personnalités importantes.»
Le jeu au centre
Nous sommes dans les sous-sols de
l’Hôtel de police de Genève, quartier
général de la Brigade des chiens. Et
tandis que l’agent cynophile nous fait
faire le tour du propriétaire, Skar ne
tient pas en place, tout excité. Son
maître lui lance sa balle fétiche pour le
CHRISTOPHE O.
Conducteur de chien de
36 ans. Il vit à Genève
calmer un peu. «Ce jouet, c’est le
centre de son univers. Je l’ai toujours
avec moi pour le récompenser. Il ferait
tout pour avoir le droit de s’amuser
avec. Toute la base de l’éducation ca-
nine est basée sur le jeu.»
Contrairement à d’autres unités eu-
ropéennes, où les chiens de police
dorment en chenil, à Genève, ceux-ci
vivent en famille, avec leur conduc-
teur. «En fait, Skar, c’est mon chien.
C’est moi qui l’ai acheté, même si
l’État me rembourse une partie des
frais quand il passe l’examen de chien
policier. Et lorsqu’il partira à la re-
traite, vers 10 ans, il restera avec moi.»
Christophe poursuit en évoquant
les liens étroits, quasi fusionnels, que
tous deux ont développés: «Normal,
SKAR Berger
allemand mâle
de 4 ans
on est 24 h/24 ensemble. Je le vois
plus que ma femme et mon fils. J’ai
aussi un labrador à la maison, mais
avec Skar on a tissé des liens beau-
coup plus profonds liés aux missions
effectuées ensemble: on a interpellé
des gens en travail de piste, découvert
des objets délictueux… Tout ça ren-
force. Et puis ma femme et mon fils
l’adorent aussi.»
Skar dissocie-t-il sa vie au travail de
celle à la maison? Jusqu’à adopter un
comportement différent? «Totale-
ment, confirme le policier. Quand il
porte son harnais, c’est comme s’il en-
filait son uniforme. Il est alors plus at-
tentif, plus en alerte. Alors qu’à la mai-
son il est plus relax, très affectueux,
même avec des amis de passage. Il sait
LA BOULE
«C
C’est sa récompense
prréférée. S’il trouve
un objet ou un
qu’il peut se balader tranquillement in
ndividu, il sait qu’il
en promenade et aller renifler d’autres va pouvoiir jouer avec.»
chiens. Sinon, il les ignore.»
Pour l’heure, c’est une nouvelle
journée de travail qui attend le bi-
nôme. Le policier fait signe à son
chien de sauter dans l’aménagement
arrière, prévu pour lui, de sa voiture
banalisée, et les voilà repartis pa-
trouiller dans les «bas-fonds» de la Ci--
té de Calvin.
Vous avez envie de raconter votre
lien, en texte et images, avec votre
LA TENUE D’ATTAQUE
animal de compagnie? Écrivez-nous
«Pour entraîner son mordant. Quand
à: lematindimanche@
on court avec ça en été, on perd vite
lematindimanche.ch
du poids!»

Quand? Quand? Quand? Le questionnaire
Quand «Skar» vous a-t-il fait honte?
Skar ne l’a jamais fait, mais ça peut arriver
que des chiens de police fassent leur be-
soin en mission. Et si on est à l’aéroport, à
la recherche d’explosifs, que les gens nous
regardent, ou dans un hôtel grand luxe,
c’est toujours délicat.
Quand est-ce que vous avez envie de faire
un break?
Quand je le pose au chenil pour partir en
vacances, ça nous fait du bien à tous les
deux de se reposer. Et quand je le re-
trouve, il est dix fois plus motivé pour le
travail.
Le conseil de la semaine
«L’important, c’est un chien équilibré»
Quand est-ce qu’il vous aime? «Ça fait plus de vingt ans avant la saillie. Quand les «À 6 semaines, je com-
Le matin, quand il vient me lécher le vi- que je fournis des chiens nouveau-nés sont là, je les mence déjà les exercices
sage pour me réveiller. Ou quand il est au à l’armée suisse, à la po- prends dans la main dès le de flair et de mordant. On
pied du canapé et qu’il met sa tête en ar- lice de Genève, du Jura, deuxième jour. À cet âge, sélectionne ceux qui se
rière pour réclamer des caresses. Mais il le de Berne, de Saint-Gall… ils ne peuvent compter calment le plus vite après
fait plutôt en congé, pas au travail. MARUSKA L’important, c’est d’avoir que sur leur flair et mon le jeu. C’est très important
FERRARI un chien équilibré, sa- odeur est une menace, pour le chien de service, ce
Quand avez-vous eu peur pour lui? Éleveuse et chant faire la différence mais je remarque vite ceux côté «on-off». Après avoir
En entraînement à la campagne, un vieux instructrice entre le travail et la vie de qui sont le plus en commencé avec des ber-
monsieur arrivait en voiture. Mon col- à La Polvere famille. Il doit être bien confiance. Quand ils gers allemands, je travaille
lègue lui a fait signe de s’arrêter parce que Nera (TI) dans sa tête pour faire du ouvrent les yeux et les maintenant avec des mali-
Skar était pile devant lui et ne l’avait pas bon boulot.» oreilles, je note les plus cu- nois, plus résistants face
vu mais il a continué comme si de rien «Je commence par rieux, les moins craintifs aux problèmes physiques
n’était. J’ai dû tirer comme un fou sur la choisir dans la lignée, face aux bruits étrangers.» ou de santé.»
longe pour sortir le chien de sa trajectoire.
 18 Profils Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

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Léman Express
à p. de 679.– tuent des oiseaux
par personne,
forfait tout compris ● Des volatiles tions avec nos impôts.» Au-delà causés par les édifices vitrés.
des volatiles, il s’inquiète égale- Une brochure de BirdLife ex-
p. ex. le 16.9.23 percutent réguliè- ment pour les personnes dis- plique ainsi que les stations or-
rement les vitres des traites ou malvoyantes, qui nithologiques d’Allemagne ont
nouvelles gares pourraient elles aussi percuter estimé que, chaque année, 100
dès genevoises. Une les parois des gares. à 115 millions d’oiseaux sont
340 pétition demande
Texte en préparation
L’association suisse de pro-
victimes d’impacts contre des
vitres outre-Rhin.
à les modifier. Un tection des oiseaux BirdLife ef- À Genève, les choses de-
Vol de Berne, p. ex. avec Helvetic Airways règlement sera bientôt fectue un travail d’information vraient bientôt changer pour
sur les dangers que peuvent éviter ces problèmes. Une direc-
CRÈTE Gouves Water Park Holiday Resort à p. de 679.–** adopté. constituer les bâtiments vitrés. tive est en cours d’élaboration
RHODES Sun Beach Resort à p. de 869.–** «En effet, les vitres (que ce
soient les fenêtres des bâti-
par le Canton, afin de garantir
une meilleure protection de la
ANTALYA Starlight Resort Hotel à p. de 898.–** JULIEN CULET
julien.culet
ments ou les parois transpa-
rentes des abribus, des murs an-
faune dans les projets de
construction. Pauline de Salis,
*demi-pension **forfait tout compris plus
@lematindimanche.ch tibruit, etc.) constituent un porte-parole du Département
Info: www.vacances-migros.ch/departs-de-berne.theme grand danger pour les oiseaux», du territoire, explique que
Les gares flambant neuves du confirme Eva Inderwildi, res- «cette directive sera un guide
Léman Express causeraient- pour les constructeurs et préci-
billet d’entrée 2 jours compris, si EUROPA-PARK LOCARNO elles une hécatombe chez les oi- sera les précautions que doit
2 adultes/2 enfants (de moins de12 ans)
Camp Resort M à p. de 215.– Hôtel dell’Angelo MMM à p. de 239.– seaux genevois? L’association «Il serait bien s’engager à prendre tout requé-
Convive, qui défend la nature rant d’autorisation de
1n.,acheminement ind.,p.déj.,p.ex.le 26.8.23 www.vacances-migros.ch/h-36782 3 n., acheminement ind.,p.déj., p.ex.le16.8.23 www.vacances-migros.ch/h-60384
en ville, affirme en tout cas
moins construire pour s’assurer que sa
MARSEILLE PRAGUE avoir constaté de nombreux im- coûteux de construction ne prétéritera pas
pacts sur les vitres des édifices prendre des mesures la faune sauvage, comme
Best Western Plus Hotel La Joliette MMMM à p. de 258.– Royal Court Hotel MMM à p. de 378.– inaugurés en 2019. Ces vitres en amont plutôt que l’exige la législation en vi-
3 n., en train de GVA,s.rep., p.ex.le 29.10.23 www.vacances-migros.ch/train-10 2 n., vol de GVA,s.rep., p.ex.le 28.10.23 www.vacances-migros.ch/h-122414 seraient effectivement au cœur gueur».
du problème, car les volatiles de devoir effectuer Le texte couvrira donc un
BARCELONE BRUXELLES les percuteraient, ne pouvant des modifications champ bien plus large que la
abba Balmoral MMMM à p. de 388.– NH Brussels Stéphanie MMMM à p. de 398.– voir ces barrières infranchis- avec nos impôts.» seule protection des oiseaux. «Il
2 n., vol de GVA,s.rep., p.ex.le 30.8.23 www.vacances-migros.ch/h-8498 3 n., en train de GVA,s.rep.,p.ex.le 3.9.23 www.vacances-migros.ch/train-11
sables. «Le phénomène est par- traitera notamment des pièges,
ticulièrement visible pour les Guy Loutan, président des obstacles, de l’éclairage, des
ALPES SAVOYARDES gares situées le long de la Voie de l’association Convive vitres, des arbres, des biotopes
CHYPRE /AYIA NAPA
verte, puisque celle-ci constitue naturels et de la compensation
Hôtel Pic Blanc MMMM à p. de 415.– Hôtel Stamatia MMMd à p. de 469.– un corridor biologique», rap- écologique, mais aussi des me-
5 n.,acheminement ind.,p.déj., p.ex.le 6.8.23 www.vacances-migros.ch/h-47792 1s., vol de BRN,p.déj., p.ex.le 16.9.23 www.vacances-migros.ch/h-5035 porte Guy Loutan, président de sures à prendre pour ne pas
Convive. ponsable de la communication avoir de problèmes avec la
ESPAGNE/COSTA DORADA MAJORQUE Il a déposé une pétition réu- de l’association. S’il n’existe pas faune plus tard (par exemple
nissant 416 signatures au Grand de chiffres précis, des estima- pigeons, moustiques tigres,
Estival Park MMMM à p. de 498.– au lieu de 648.– Zafiro Cala Mesquida MMMM à p. de 649.– Conseil. Le texte a séduit les dé- tions permettent de se faire une punaises de lit)», précise Pau-
1s., vol de GVA,p.déj., p.ex.le 30.9.23 www.vacances-migros.ch/h-608739 1s., vol de BRN,p.déj., p.ex.le 17.9.23 www.vacances-migros.ch/h-98717
putés en commission. Il a été idée de l’ampleur des dégâts line de Salis.
renvoyé au Conseil d’État, et
CROATIE /DUBROVNIK TUNISIE/ DJERBA celui-ci doit donc se prononcer.
Hôtel Astarea I & II MMM à p. de 675.– Hôtel Meninx Family Club MMM à p. de 688.– Pour Guy Loutan, il est néces-
saire d’aménager les vitrages.
1s., vol de GVA,demi-p., p.ex.le 14.10.23 www.vacances-migros.ch/h-8093 1s., vol de GVA,f.t.c., p.ex.le 9.9.23 www.vacances-migros.ch/h-14384
«Le plus simple est de mettre
COS CORFOU des éléments opaques, rap-
porte-t-il. Ça peut être, par
Akti Beach Club MMMM à p. de 729.– Mareblue Beach Resort MMMM à p. de 735.– exemple, des lignes verticales
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mètres, puisque les oiseaux
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mettre de la décoration, comme
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doit s’agir de quelque chose de
OFFRE DE LA SEMAINE bien visible par les oiseaux.»
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Scanner Le pétitionnaire regrette que
et explorer
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en base abonnement demi-tarif, 2ème classe; offres croisières valables pour 8 jours/7
nuits, départ/arrivée du port. Transfert individuel sur demande. s. = semaine, n. = nuits, vaise volonté. Je pense qu’il
Malte/Île de Gozo s.r. = sans repas, p. déj. = petit déjeuner, demi-p. = demi-pension, p. compl. = pension
complète, f.t.c. = forfait tout compris. GVA = Genève, BSL = Bâle, BRN = Berne ZRH =
s’agit surtout d’ignorance ou de
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Il serait pourtant bien moins
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0800 88 88 12 sures en amont plutôt que de
devoir effectuer des modifica-
À Lancy-Bachet également, rien n’est mis en place pour empêcher
les oiseaux de heurter les grandes vitres. Laurent Guiraud
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Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 People 19

«Les
activistes qui
demandent
une action du
gouvernement
à la hauteur
de l’urgence sont
aujourd’hui qualifiés
de criminels ou
d’écoterroristes.»
Marion Cotillard
sur Instagram, le 25 juin

ENGAGÉE Marion Cotillard miilite pour le climat

AMBIGUË Sur un yach ht avec Guiillaume Canet. de longue date, comme ici, en 2013. AFP/Fred Dufour
Cette photo est du pain bénit pour ses détracteurs. Twitter

Marion Cotillard,
une star écolo et
ses contradictions
● Souvent malmenée pour
ses prises de position, l’actrice
est la cible de critiques pour
son soutien à Greenpeace.
Ce qu’on lui reproche cette
fois? De prôner la décroissance
tout en menant un train
de vie luxueux.
JENNIFER SEGUI
Peut-on militer sur les navires de Green-
peace et prendre ensuite quelques jours
de repos sur un yacht? Est-il cohérent de
parcourir la planète en jet tout en pro-
testant contre la déforestation et les gaz
à effet de serre au cœur de l’Amazonie? À
en croire l’avalanche de critiques, voire
d’insultes, reçue par Marion Cotillard
sur les réseaux sociaux et dans certains
médias ces dernières semaines, c’est
non!
Qu’on l’aime un peu, beaucoup, pas-
sionnément ou pas du tout, il faut bien se
rendre à l’évidence: l’actrice française la
plus bankable outre-Atlantique, révélée
en 1998 par les premiers volets des films
«Taxi» et oscarisée pour son rôle d’Edith
Piaf dans le biopic «La Môme» sorti dix
ans plus tard, irrite. Énerve. Agace
même. Et cristallise bien souvent la co-
lère et la frustration, plus particulière-
ment en France où ceux qui réussissent
sont rarement prophètes en leur pays.
Un post controversé
Dernière polémique en date pour celle
qui s’engage aux côtés de Greenpeace
depuis plus de vingt ans, un message
publié sur Instagram le dimanche 25
juin. Dans ce long post, Marion Cotillard
affiche son «soutien absolu» aux Soulè-
vements de la Terre, un collectif poli-
tique et contestataire écologiste.
Créée en 2021, cette organisation du
genre plutôt musclée vient d’être dis-
soute par la France. Impliquée dans de
récents affrontements avec les forces de
l’ordre, elle est perçue, selon le ministre
de l’Intérieur Gérald Darmanin, comme
ayant un «rôle majeur dans la concep-
tion, la diffusion et la légitimation de
modes opératoires violents».
Pour expliquer son appui, Marion Co-
tillard écrit: «Celles et ceux qui alertent
sur la dérive éminemment dangereuse
de notre monde et de notre humanité,
les activistes qui demandent une action
du gouvernement à la hauteur de l’ur-
gence sont aujourd’hui qualifiés de cri-
minels ou d’écoterroristes.» Des paroles
que beaucoup parmi son million et demi
de followers saluent.
Mais les critiques pleuvent aussi, à
coups de phrases incendiaires, contre
celle qu’ils considèrent comme une
«donneuse de leçons» mal placée pour
parler d’écologie. Des propos accompa-
gnés d’images, trouvées on ne sait où, la
montrant descendre d’un énorme SUV
de luxe ou bronzer sur un yacht en com-
pagnie de son compagnon Guillaume
Canet et de leurs deux enfants de 12 et
5 ans. À la télévision, les éditorialistes, le
plus souvent situés à droite,
s’échauffent. Comme le journaliste Pas-
AMOUREUSE Le couple qu’elle form
Canet est né en 2007. Stephane Cardinaale/Corbis via Getty
Images
cal Praud qui, sur CN
News,
GLAMOUR Lors s’emporte contre cette «révvolu-
de la Fashion tionnaire qui s’habille en Cha-
C
Week k parisienne, nel».
en juiillet dernier,
elle se
e rend au Toujours militante
défilé
é Chanel. Getty/ Une magnifique carrière inter-
i
Imagess/Jacopo Raule/GC nationale soulignée par ded nom-
Imagess breuses distinctions. Des colla-
borations avec les réalisateurs
les plus courus du momentt. Des
tapis rouges aux côtés des plus
p
grandes stars. Une belle unio on avec
Guillaume Canet. Et des contrrats
d’égérie Dior puis Chanel pour le côté
glamour… Marion Cotillard ne s’’est ja-
mais rangée dans la catégorie de celles
c
qui adoptent le «sois belle et tais-ttoi».
«Elle me fait chier,
Cotillard!»
Emmanuel Macron, cité dans
«Le traître et le néant» de Fabrice
e
Lhomme et Gérard Davet
Sa notoriété et ses moyens, c’est au
service de la protection de l’environne-
ment qu’elle les place. Et peu imp porte
qu’on lui ressorte ses propos mala adroits
tenus en 2007 autour de doutes su ur les
événements du 11 Septembre, ou qu’on
la moque pour sa scène de mort ra atée
dans le volet de «Batman: The Darrk
Knight Rises».
Rien n’arrête l’actrice de 47 ans. Pro-
ductrice du documentaire écolo o «Big-
ger Than Us» de Flore Vasseurr ou en-
core cofondatrice avec Cyril Dion
D de
Newtopia, une maison de pro oduc-
tion qui veut proposer «des ré écits
ambitieux pour imaginer un mondem
soutenable et désirable», ellle
continue le combat à sa man nière.
Quitte, par ses déclarations, à faire
sortir de ses gonds Emmanuel Ma acron.
Le président de la République fran nçaise
aurait, ainsi que le rapportent les jour-
nalistes Fabrice Lhomme et Gérarrd Da-
vet dans leur livre «Le traître et le
me avec Guillaume néant», hurlé un très élégant: «Ellle me
fait chier, Cotillard!»
Une preuve que les propos d’un ne ac-
trice, même bourrée de paradoxess,
comptent. Et que, si le diable s’ha abille
en Prada, une révolutionnaire peu ut bel
et bien se cacher sous un tailleur C Chanel.
20 Annonces classées
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Dimanche 9 juillet 2023
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Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
Vu de Paris
Une justice sans faiblesse, mais
pas pour tous
Alain Rebetez
Correspondant à Paris
C’
était au Tribunal de Bobigny,
mardi dernier, sur le coup de
10 heures du soir. Tout le
monde était fatigué, on atten-
dait le jugement de deux
jeunes émeutiers, et ce n’était pas fini, car
d’autres dossiers devaient encore passer en
comparution immédiate cette nuit-là…
Deux avocats m’interpellent. Il y a Paul, la
quarantaine bien passée, cheveux gris et
sourcils broussailleux, et puis Sarah, plus
jeune, un beau visage aux traits maghré-
bins: «Vous qui venez de l’étranger, qu’est-
ce que vous pensez de la France? Qu’est-ce
que vous dites d’un pays où les manifes-
tants se font éborgner, où les associations
qui critiquent le pouvoir se font dissoudre,
où la police, après avoir tué un jeune
homme, fait savoir par ses syndicats qu’il
n’y a aucun problème, où c’est toujours la
même partie de la population qui fait l’objet
des discriminations policières et de la sévé-
rité de la justice?…»
Briefing
La querelle des OGM va reprendre
Pierre Veya
Chef de la rubrique Économie
● La Commission européenne
ouvre la porte aux nouvelles
techniques génomiques.
Que va faire la Suisse?
L
a Commission européenne a pris,
le 5 juillet, une décision majeure.
Qui relance le débat et les contro-
verses sur les OGM. L’Exécutif
européen propose d’assouplir les
règles sur l’usage des technologies géné-
tiques pour les plantes. Elle veut, à la
demande des géants de l’industrie des se-
mences, favoriser la mise sur le marché de
végétaux plus résistants au changement
climatique et moins gourmands en pesti-
cides. En clair, elle ouvre la grande porte
aux techniques de l’édition du génome,
connues sous l’acronyme NTG (new geno-
mic techniques). L’approche des NTG est
différente des OGM conventionnels sur un
Je réponds vaguement que oui… le pays
ne va pas bien… c’est problématique… Ils
rigolent, ironiques: «Problématique? C’est
bien plus grave que ça! C’est une dérive au-
toritaire.» J’hésite, prends mon souffle et
puis je me lance: «Oui, il y a des traits autori-
taires, mais il ne faut pas oublier la respon-
sabilité de celui qui a tout déclenché:
conduire sans permis une voiture ultra-
puissante, rouler à tombeau ouvert à tra-
vers une ville et refuser d’obtempérer, ce
n’est pas anodin, c’est mettre la vie des
autres en danger et la sienne propre. Ça
n’enlève rien à la responsabilité du policier,
mais Nahel aussi doit prendre sa part. Il faut
une éthique de la responsabilité, pour tout
le monde, sinon jamais on n’en sortira.»
Le dialogue est long, difficile, ils m’ob-
jectent que je ne sais rien des discrimina-
tions dont sont victimes les Noirs et les mu-
sulmans, ils parlent de «racisme systé-
mique». Je ne suis pas d’accord: le racisme
est répandu au sein de la police, certes,
mais ce n’est pas un système mis en place
par l’État. «La différence est faible», sourit
Sarah. «Éthique de la responsabilité, on voit
bien que vous êtes protestant», rigole
Paul…
Quelques jours après, vendredi, en lisant
«Le Figaro», je repense à cette discussion.
Éric Ciotti, le président des Républicains,
explique qu’après les émeutes il faut sévir.
Il propose une avalanche de mesures qui
visent un coupable bien défini: l’immigra-
tion et les populations des cités qui en sont
issues. «Toute tiédeur sera perçue comme
de la faiblesse», avertit-il dans une formule
un brin inquiétante dans la bouche d’un
homme censé représenter la droite respon-
sable. Pas un mot en revanche sur les pro-
blèmes de la police. Pas un.
Parmi les 24 mesures réclamées par Les
Républicains, plusieurs visent les parents,
point crucial: on n’introduit pas un gène
étranger à la plante dans son patrimoine,
mais on modifie un ou plusieurs gènes
d’une même plante de façon ciblée et à un
endroit très précis.
Les NTG ont été rendus possibles par les
fameux ciseaux moléculaires mis au point
par Emmanuelle Charpentier, Prix Nobel
de chimie en 2020. Depuis, toute une sé-
rie d’autres outils cherchent également à
influencer l’expression d’un gène ou à dé-
placer un gène dans l’ADN ou l’ARN d’une
même espèce. Pour les promoteurs de ces
technologies génomiques, la législation
actuelle sur les OGM n’est plus adaptée.
Au fond, les NTG ne feraient qu’accélérer
des mutations que la nature effectue de
manière aléatoire ou que l’homme réussit
à obtenir depuis des décennies par hybri-
dation et la sélection conventionnelle. Cet
argument de similarité avec les processus
naturels fonde la décision de la Commis-
sion européenne. Ainsi, sous réserve d’un
nombre limité de modifications, les nou-
velles semences seront considérées
comme «équivalentes» aux variétés tradi-
tionnelles. Elles devront toutefois être en-
registrées dans une banque de données
publique et étiquetées en tant que telles
pour que les agriculteurs puissent faire
leur choix. Une restriction de taille:
aucune variété ne pourra prétendre être
bio.
Selon la Commission, les coûts de déve-
loppement des graines NTG seraient forte-
ment raccourcis (de dix à quatre ans) et
cinq fois moins coûteux pour un maïs ré-
sistant aux pathogènes susceptible de ré-
duire jusqu’à 80% l’usage des pesticides.
Les opposants traditionnels aux OGM ne
sont pas convaincus. Ils considèrent que
ces techniques ne doivent pas déroger aux
règles d’homologation des OGM et esti-
Le dialogue est long,
difficile, ils
m’objectent que je ne
sais rien des discriminations
dont sont victimes les Noirs
et les musulmans, ils parlent
de «racisme systémique».
par exemple la suspension des allocations
familiales en cas d’actes de délinquance
d’enfants mineurs. Il me revient alors à
l’esprit deux faits divers pas très anciens.
Début mai, le fils aîné d’Éric Zemmour a
été brièvement placé en garde à vue pour
avoir, en état d’ivresse au volant, grave-
ment blessé un couple à scooter à qui il
avait refusé la priorité. Quelques semaines
plus tard, fin mai, c’était le tour d’un des
fils de Nadine Morano, pour délit de fuite
après un accident et conduite sous em-
prise de stupéfiants.
Je sais, ça n’a pas grand-chose à voir, les
enfants de ces deux politiciens champions
d’une répression sans faiblesse envers les
délinquants étrangers ne sont ni étrangers
ni mineurs et leurs parents ne touchent
pas d’allocations familiales. En revanche
je constate qu’ils n’ont pas eu à subir la
justice expéditive de comparution immé-
diate. Et je pense que Sarah ou Paul pour-
raient faire valoir que, pour eux, police et
tribunaux n’ont pas eu le même visage que
pour leurs collègues délinquants de ban-
lieue. Ont-ils vraiment tort?
Facebook Le Matin Dimanche
Retrouvez les textes des
personnalités du Cercle du Matin
Dimanche et participez au débat
ment que les semences NTG exigent des
études plus approfondies sur les risques
systémiques de disséminations ou de
contaminations à d’autres espèces de
plantes ou d’insectes. L’Alliance suisse
pour une agriculture sans génie génétique
(qui regroupe toutes les organisations op-
posées aux OGM) plaide pour un maintien
du statu quo (interdiction). Dans son rap-
port sur les nouvelles techniques de génie
génétique dans le domaine non humain,
datant de février 2023, le Conseil fédéral
écrit que le principe de précaution de-
meure central dans la stratégie suisse.
Mais, et c’est nouveau, il entrouvre la
porte à la possibilité d’un assouplissement
de la législation pour certaines applica-
tions des NTG. Mais tout le monde com-
prend déjà que la Suisse va calquer la posi-
tion qui sera retenue en définitive par
l’Union européenne (la législation doit
encore être approuvée par le Parlement
européen). La décision sera éminemment
politique.
Les milieux scientifiques – c’est dans
leur nature – sont divisés sur les bénéfices
potentiels et les risques. Beaucoup
semblent reconnaître que la législation
OGM doit évoluer pour tenir compte de
ces nouveaux outils, utiles pour réduire
l’usage des pesticides sans mettre en dan-
ger la sécurité alimentaire et améliorer la
résistance à la sécheresse. Le dialogue de
sourds sur les OGM semble pourtant iné-
vitable. Et, comme le dit Peter Rogowsky,
directeur scientifique de l’Institut de re-
cherche agronomique français (Inrae), «il
n’est pas certain que le consommateur
comprenne au final que l’édition du gé-
nome NTG et les OGM sont deux techno-
logies très différentes».
pierre.veya@lematindimanche.ch
Chroniques 21
1000 vies
Alain Delon
C
e qui lui arrive est infiniment
triste. Parce qu’on ne comprend
rien de l’intime des gens quand
la nuit vient, ce qui les terrorise,
ce qui les tient encore debout.
Les trois enfants d’Alain Delon ont déposé
une plainte, ensemble, contre la «dame de
compagnie» de leur père, une Japonaise de
66 ans qui suit sa fin de vie en misan-
thrope, à Douchy, propriété que l’acteur
possède depuis un demi-siècle. Ils pensent
qu’il y a «abus de faiblesse», qu’elle l’isole,
qu’elle trie courrier et messages télépho-
niques ne lui parvenant plus, qu’elle dé-
nigre famille et proches pour accroître un
genre d’emprise, ce mot si à la mode. La
dame a été expulsée, sans manières ni poli-
tesses. La justice va faire œuvre.
Ce qui lui arrive est infiniment triste et
assez banal: la solitude et l’âge, ceux qui
essaient d’en profiter, vous savez tous des
histoires de ce genre. Et Alain Delon n’a pas
que des amis ou des admirateurs. Ce truc
un peu pathétique peut même les faire
sourire, le vieux beau gosse du cinéma en
perdition, le schnock de droite et ses ou-
trances, tout ça qui finit mal. Il y a plein de
ses proches qui racontent désormais des
signes, messages auxquels il ne répondait
plus. L’ayant fréquenté un tout petit peu,
le dernier que je lui ai mis, c’étaient trois
mots pour son anniversaire, en 2021. Long-
temps, il répondait à ce genre de chose,
brièvement. Mais, comme d’autres, je met-
tais le silence total de ces dernières années
sur le compte de sa fatigue, de ses difficul-
tés après son AVC.
Ce qui lui arrive est infiniment triste
parce que c’est un héros écran large, Delon,
pas un people. Il est plus et mieux que cer-
tains le pensent, je l’ai vu se comporter en
seigneur, en type généreux et fraternel.
Sous le numéro d’ombrageux, il y avait
l’ombre de ses détresses, l’enfance pas
simple, le départ comme soldat en Indo-
chine, une façon de violence pour se proté-
ger, puis toutes les lumières et toutes les
filles du monde sur lui. Mais Romy partie,
Mireille partie, Nathalie partie. Quand
j’étais adolescent, je me déguisais en Tu-
lipe noire lors de fêtes avec des amis, et je
lui avais raconté ça. Je pense que ça l’avait
touché, nous avons alors eu quelques ren-
contres heureuses. Il aimait bien que je
l’appelle Saint-Preux, son nom dans «La
Tulipe noire». Je le trouvais à la fois im-
pressionnant et simple comme un enfant.
Ce qui lui arrive est infiniment triste
parce que ce n’est pas lui, cette affaire du
naufrage de l’âge. Alain Delon est un
homme d’une infinie pudeur qui voudrait
laisser trace forte et lumineuse, sûrement
pas cette histoire glauque, entre rumeurs
et chien battu. Je souhaite à ses enfants de
pouvoir encore lui donner de l’amour et de
savoir recevoir le sien. J’espère qu’il ira
mieux, qu’il y aura encore du so-
leil. «On a quelquefois is assez
souffert pour avoir le droit de
ne jamais dire: je suiss trop
heureux», Alexandre Dumas,
1850, dans «La Tulipe e noire».
Christophe
Passer
Journaliste
Facebook Le Matin Dimanche
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22 Météo Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Dimanche 9 juillet Calendrier Soleil Lune Dicton du jour Météorologue en direct au

Semaine 27 5 h 49 21 h 27 0 h 44 13 h 08 «Après Saint-Procule 0900 575 775 (CHF 3.20/min
arrive la canicule.» www.meteonews.ch
Amandine, Irma, Procule Jour 190 –1 minute Pleine lune: 01 -08 depuis le réseau fixe suisse.)

La météo du dimanche Danger d’incendies

Matinée Après-midi
Bâle
Bâle Bâle Delémont Zurich
h
18° 17° St-Gall
35° 34° St-Gall
St-Gall
Delémont Zu
Zurich Delémont Zuric
Zurich
20° 30°
16° 35° Lucerne
Neuch
Neuchâtel
tel
Lucerne
ne Lucerne
Luce Coire
ire
Neuchâtel
Neu âtel Berne 16° Neuchâtel
âtel Berne 33° Berne
rne
Coire Coire
19° Fribourg
18° 33° Fribourg
33°
17° 34° Lausanne Jungfraujoch
rau Saint-Moritz
rit
16° 32°
Saint-Moritz
rit Saint-Moritz
Sa
Lausanne Jungfraujoch
joc Lausanne
usanne
20° 6° 32° Jungfraujoch
Ju
24° Genève Sion
2° 5° Loca
Locarno

Genève Locarno Genève

nève Locarno
Sion 17° Sion 35° Zermatt
rmatt
18° Zermatt 17° 35° Zermatt
tt 32°
11° 27°
Danger d’incendies actuellement en Suisse
Belle matinée malgré le passage de voiles d’altitude Soleil de plomb et (très) forte chaleur en toutes régions.
et chaleur s’imposant rapidement partout. Orages isolés pas exclus sur le Jura et dans les Alpes. faible limité marqué fort très fort

Loisirs Risques météo Les plus de la semaine écoulée en Suisse

Course à pied Fortes chaleurs ! - Le plus chaud (plaine): Würenlingen (AG), 32.1 °C (vendredi) Météo dans le monde
Plage / Piscine Vent, tempête - Le plus froid (plaine): Frutigen (BE), 8.6 °C (vendredi) Europe Reste du monde
Grillades Pluie - Le plus arrosé: Monte Generoso (TI), 79.1 l/m2 (mardi) Amsterdam 26° Auckland 15°
Balades Orages, grêle - Le plus venteux: Jungfraujoch (BE), 141.8 km/h (jeudi) Athènes 32° Bangkok 32°
Barcelone 30° Buenos Aires 16°
La semaine prochaine beau éclaircies variable couvert pluie neige orageux brouillard
Berlin 33° Le Caire 39°
lundi 10 mardi 11 mercredi 12 jeudi 13 vendredi 14 samedi 15 Bruxelles 29° Le Cap 13°
Budapest 32° Los Angeles 21°
Jura Florence 38° Miami 34°
1000 m
15° 26° 17° 30° 13° 21° 11° 22° 10° 23° 12° 24° Helsinki 20° Montréal 24°
Lisbonne 29° Nairobi 25°
Léman et Londres 24° New Delhi 30°
Plateau Madrid 36° New York 28°
18° 32° 18° 35° 17° 26° 15° 26° 13° 27° 15° 29°
Moscou 24° Pékin 39°
Plaine Nice 31° Rio de Janeiro 25°
du Rhône Oslo 26° Sydney 19°
18° 34° 19° 36° 17° 27° 16° 28° 14° 29° 16° 31°
Paris 29° San Francisco 17°
Rome 33° Santiago 15°
Alpes
1500 m Stockholm 24° Tokyo 28°
14° 26° 16° 29° 12° 21° 11° 20° 10° 21° 12° 23° Venise 32° Tunis 38°

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Sports
Le Matin Dimanche Dimanche 9 juillet 2023

Analyse Lewis Hamilton veut rester chez

Mercedes, mais rien n’est encore signé 27
Décryptage L’héritage du Tour de France,
un an après son détour vaudois 28-29
Sports pour nous Les conseils pratiques
avant de se lancer dans le trail 31

Isabel Infantes

Commentaire
ntaire

Florian
Müller
Chef
de rubrique

Petites balles
et gros spleen

L
es effluves de crème solaire,
le crépitement des barbe-
cues, les rumeurs de trans-
fert autour de Kylian Mbap-
pé: autant de marqueurs im-
muables qui, chaque année,
rappellent que l’été s’est ins-
tallé. Au même moment, dans le sud de
Londres, un tournoi de tennis entretient ja-
lousement des rituels qui ont valeur de patri-
moine. À Wimbledon, quand sonne l’ouver-
ture des portes, les secondes et les minutes
s’étirent en longs méandres, qui comme la
Tamise mènent vers un horizon infini. Une
quinzaine hors d’âge, sinon de ce pré bardé
de lignes blanches que
de petites balles jaunes
viennent peu à peu dé-
garnir, comme pour rap-
peler que oui, malgré
«Qu’il tout, le temps passe.
pleuve, Or, ici, il s’agit de tout
qu’il vente, faire pour surmonter
qu’il grêle, l’inexorable angoisse,
tout va bien que tout ceci – la vie – fi-
tant qu’on nisse un satané jour pour
de bon. Alors on se pou-
a un verre
ponne, on se bichonne,
de Pimm’s on se cajole. Les ladies
à la main.» coiffent robe et chapeau,
les gentlemen nouent
ascot et redingote. Qu’il pleuve, qu’il vente,
qu’il grêle, tout va bien tant qu’on a un verre
de Pimm’s à la main. Tout va bien tant qu’on
peut oublier quelques instants que le monde
existe au-delà des grilles du All England
Lawn Tennis and Croquet Club. La distinc-
tion n’est jamais surjouée, mais parfaitement
incarnée, car érigée en art de vivre: plein de
tam-tam mais jamais de chichi. Les para-

WIMBLEDON
pluies fleurissent sans que les sourires ne
fanent, les files d’attente se figent sans que la
joie ne s’évapore. Chaque pépin se savoure,
chaque averse est le prétexte d’un fou rire.
Sous le ciel anglais, il relève du devoir, limite
de la fierté cocardière, d’adopter le détache-
ment en posture.
Au contour de Church Road, un spleen su-

Le plaisir
Près de l’entrée du tournoi de tennis
londonien, des milliers de fans font la
file dans un parc pour obtenir un billet.
ranné berce le plus grand tournoi du monde,
où l’on cultive l’élégance comme une forme
d’insouciance. Mis à part les matches, rien ne
se perd, rien ne se gagne, tout se transforme.

d’attendre
Face à la fatalité, le flegme est la seule pos-
Patienter est ici une expérience sociale.
ture convenable. Plus qu’un abandon, voire
un renoncement, c’est ici le triomphe de l’au-
À LIRE EN PAGES 24-25 todérision sur la futilité de l’existence qui se
joue. Sûrement l’héritage majeur de la
culture britannique au monde: le plus grand
raffinement est celui de ne pas se prendre au
sérieux.
24 Tennis
La file qui s’étend dans Wimbledon Park, nommée The Queue, représente peut-être la meilleure définition du chaos parfaitement organisé. Pour être certain d’obtenir une place sur les deux grands courts du
Dans la queue de
Comment s’organisent les
courageux qui campent pour
voir Wimbledon? Qui sont-ils,
comment sont-ils organisés?
Rencontre avec le peuple de la
Patrick Smith/Getty Images
plus célèbre queue du monde.
MATHIEU AESCHMANN, LONDRES
mathieu.aeschmann
@lematindimanche.ch
Combien sont-ils à perdre patience, ven-
dredi à 15 heures, sur le trottoir de Wim-
bledon Park Road? Deux cents, trois cents
peut-être. Objet de toutes les convoitises,
le Centre Court n’est éloigné que d’un pe-
tit kilomètre. Mais pour ce groupe de retar-
dataires, voir le Temple et Andy Murray
restera un fantasme. «J’ai mes tickets et on
me dit que ma section a été appelée, que
c’est trop tard, s’insurge un père de famille.
Imaginez la déception de mes filles. C’est
dégoûtant!» Face à lui, un stewart jongle
avec autorité, flegme et empathie. «Je com-
prends parfaitement votre frustration, mais
la procédure est limpide.» Vraiment? Que
Julian Finney/Getty Images
«J’aime
retrouver
l’ambiance
et mes amis de la
queue.»
DR
Rita, vient seule mais ne le reste jamais
font alors tous ces gens au bord de la route?
«C’est une queue sauvage qui s’est créée
dans l’espoir de rejoindre la vraie queue,
souffle un bénévole. Ils patientent sans au-
cune chance d’entrer dans le stade.»
Qu’est-il donc arrivé à The Queue, tradi-
tion presque centenaire et quintessence du
savoir-vivre anglais? Ce mythe de l’ordre
par adhésion collective serait-il devenu un
triste capharnaüm? L’arrivée dans Wimble-
don Park renforce l’angoisse. Sur la gauche,
des files de gens debout attendent un si-
Les spectatrices présentes dans la file d’attente doivent s’armer de patience. Humour et autodérision gnal. À droite, trois rangées de tentes sont
font entièrement partie de l’expérience. Adrian Dennis/AFP alignées. Or, au premier coup d’œil, il est
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
impossible de trouver une logique à ces ali-
gnements. «Tout cela semble un peu chao-
tique, se marre John dans sa chasuble
orange. C’est parce que la queue du jour et
celle du lendemain cohabitent. Pour com-
prendre, il faut chercher le drapeau.»
Un drapeau en guise de phare? Au bout
du parc, juste avant les terrains commu-
naux, un retraité brandit un étendard vert,
floqué d’un immense «Q». Le signal est cru-
cial. Il indique la fin de la queue, ou plutôt
son début. Pour aider les courageux, le tour-
noi édite et distribue chaque année un
«guide de la queue» de 19 pages. Mais il lui
suffirait de diffuser ce slogan: «Trouvez le
drapeau et laissez-vous porter.» Car une
fois installé au bon endroit, tout devient
limpide. Il est 15h30. Kyle et Waverley
montent leur tente. «C’est mon anniver-
saire, annonce ce trentenaire originaire
d’Édimbourg. On pensait venir un peu plus
tard. Mais en suivant un compte spéciali-
sé sur Twitter, on a appris qu’il y avait dé-
jà 100 personnes à 10 heures du matin. On
a donc quitté le travail plus tôt de peur d’ar-
river trop tard. Ne le dites pas à mon boss.»
Comme tout le monde, ils attendent leur
ticket (ndlr: chacun reçoit un numéro qui té-
moigne de sa position dans la queue). Mais
l’homme au drapeau les accueille avec une
estimation à l’œil. «Je pense que vous êtes
en 600e position, le grand court est garan-
ti.»
Fan culture d’un autre type
Pour comprendre, il faut rappeler la règle.
Chaque jour (jusqu’au deuxième mercre-
di), le tournoi met en vente un contingent
de 500 billets pour chacun des trois courts
principaux (CC, No 1 et No 2) et plus ou
moins 6000 ground tickets, le sésame qui
ouvre les portes du site et des courts an-
nexes. Le principe: premier arrivé, premier
servi. Chaque matin, l’herbe de Wimble-
don Park devient ainsi la scène d’un étrange
ballet. Les courageux de la veille com-
mencent leur procession vers les grilles du
stade et font place à ceux qui commencent
une journée d’attente. Car pour être sûr de
s’asseoir sur le Centre Court le premier
week-end, mieux vaut arriver en matinée.
Comme Arthur Nunes, un habitué brésilien
qui «[s’]arrange pour placer des meetings
à Londres durant Wimbledon». Ou Dongye
qui est venu en voisin et avec son fils de
9 mois. «Ma femme va rentrer avec lui. Mais
on passe la journée en famille dans le parc.
 Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
tournoi londonien, il faut s’installer pour la nuit. Patrick Smith/Julian Finney/Getty Images
Wimbledon, l’attente est sacrée
«The Queue
est une
vraie
expérience
sociale.»
DR
Katie, arrivée à 4h du matin
On refait la queue cette année pour ma fille
Ye, qui commence à jouer. Je veux qu’elle
voie les champions en vrai et s’en inspire.»
Dongye connaît les règles – interdiction
de quitter sa place plus de trente minutes.
Voilà pourquoi sa famille opère de savants
allers-retours afin de garantir ses trois tic-
kets. «Seuls mes deux grands enfants pas-
seront la nuit dehors avec moi.» Ainsi se
décline la sociologie de The Queue. Plus on
la remonte, plus elle se «professionnalise».
Si bien qu’une fois arrivé parmi les «tentes
de tête», le regard du curieux découvre un
monde en soi: une fan culture d’un autre
type. «Ils sont fous, sourit un bénévole as-
sis dans l’herbe à remonter le moral de trois
ladies découragées. Mercredi, le No 1 a re-
fusé d’avancer. Il n’aimait pas le programme
du Centre Court. Il est resté une nuit de
plus pour faire le doublé en première posi-
tion.»
Dix jours de camping
Installée sur sa chaise pliable, Rita semble
moins sanguine. «Je campe chaque année
durant dix jours, ce qui me fait cinq jour-
nées de tennis dans le stade, annonce-t-
elle en vieille habituée. Je viens seule mais
ne le reste jamais. C’est une communauté.
Ici, on vit loin des tumultes du monde.
L’année dernière, j’ai appris à la roulotte
de café, le dernier jour, que Boris Johnson
avait démissionné. J’aime retrouver l’am-
biance et mes amis de la queue.» D’ailleurs,
ceux-ci ne tardent pas à rappliquer. Il y a
Catherine, fan historique d’Andy Murray,
qui filera précipitamment parce que «ma-
man Judy» lui aura trouvé un billet pour
voir le fiston. Et puis voici l’inénarrable
Colm qui, le bras sur votre épaule, raconte
ses expéditions à Halle sur les traces du
«Maître». «Ça vous dit de prendre un taxi
pour Hyde Park? lance-t-il hilare. Ce soir,
Roger y sera pour le concert de Bruce
Springsteen.»
Tous font le même constat: «La queue
s’est calmée sans Federer. Ses fans se com-
portaient comme une secte. Ils sortaient
du stade sitôt son match terminé pour re-
venir en courant reprendre place dans la
queue.» Et ce joyeux groupe y ajoute un
souhait: «On espère que Djokovic et
Wawrinka n’arriveront pas à finir. Comme
ça, on verra la fin samedi.» À deux points
près, les vœux des superfans étaient exau-
cés. Mais sans doute se sont-ils consolés
en dissertant toute la nuit sur le tweet de
Ben Rothenberg, l’influent journaliste du
«New York Times», qui s’est attaqué, ven-
dredi soir, à The Queue. «Il y a sûrement
en 2023 une meilleure façon, plus claire,
plus facile, moins abrutissante, de distri-
buer des billets de tennis qu’une sorte de
«Koh-Lanta.» Vraiment? Sans doute le bio-
graphe de Naomi Osaka n’a-t-il jamais pris
le temps de déjeuner avec «le peuple de
la queue» sur Wimbledon Park.
Samedi matin à 8h15, les food-trucks
tournent à plein régime; il n’y a pas d’heure
pour un burger. Colm, Tina et leurs amis
ont déjà plié leur tente depuis longtemps
(6h45) quand la rangée No 8 se met en
branle. Le flux nous amène vers Bertie,
Face à Swiatek, Belinda Bencic aura tout à gagner
C’est un honneur qui n’est pas
sans conséquence: entrer sur le
Centre Court de Wimbledon
implique d’y retrouver un gros
calibre. Belinda Bencic pourra
goûter à cette sensation aigre-
douce ce dimanche lorsqu’elle
verra, au bout du couloir me-
nant au plus beau terrain de
tennis du monde, se dessiner la
silhouette de la No 1 mondiale,
Iga Swiatek, le rouleau com-
presseur de Varsovie, monstre
de régularité, qui étouffe ses
adversaires sous le rythme ef-
fréné de ses frappes en ca-
dence. À tout juste 22 ans, la
Polonaise compte déjà quatre
titres du Grand Chelem à son
palmarès et, pourtant, elle n’a
jamais dépassé le quatrième
tour à Church Road. Une ano-
Sam, Dale, Katie et Hannah, cinq amis qui
n’ont pas l’air d’aventuriers affamés. Dans
Le prix leur sac, houmous, légumes, prosecco et
leur fierté: les cocktail sausages au miel et
à la moutarde. «Pour n’importe quel autre
27
événement sportif d’envergure, il faut dé-
penser au moins 150 francs. Et je ne parle
même pas des Jeux olympiques, qui sont
réservés à une élite, explique Dale. Grâce
En livres (soit 30 à The Queue, il te coûte seulement de la
francs suisses), le patience et 27 livres (le prix du ground tic-
tarif minimum – en ket) pour passer une journée à Wimbledon.»
plus de la patience
– pour passer une Un moment de partage
journée à Wimble- Quant à l’argument de la pénibilité, il est
don. balayé par Katie. «The Queue est une ex-
périence sociale. Nous sommes arrivés à 4
heures du matin (en 2900e position) et nous
avons fait des pop quiz en buvant des
verres.» Le phénomène dépasse donc le
sportif. C’est un moment de plaisir, convi-
vial et patrimonial. «Faire la queue, c’est
reconnaître qu’il y avait quelqu’un avant
toi. J’y vois une règle tacite, un engagement
moral, disserte Sam. On reçoit ce guide de
bonne conduite mais il ne sert à rien. C’est
quelque chose que nous recevons en héri-
tage.»
malie qu’elle compte bien recti- de nos jours mais aussi dans
fier en passant sur le corps de toute l’histoire du tennis.»
Belinda Bencic. «Je me sens Avant de se refaire la cerise:
plus détendue cette année, «J’aime bien affronter des pun-
avertit Swiatek. C’est sûrement cheuses comme elle, des filles
parce que j’ai gagné Roland qui te mettent dos au mur, sans
Garros et qu’après cela, la pres- cesse sous pression, que tu dois
sion est un peu retombée. J’ai contrer et qui ne te laissent pas
atteint mon grand objectif pour le temps de t’endormir.»
la saison et, désormais, je ne À Church Road, pour son
pense plus à autre chose qu’à «tournoi préféré», Bencic ap-
jouer.» Le genre de déclaration précie la vie au vert, la vie en
qui sonne comme un avertisse- communauté avec son staff
ment. dans une petite maison à dix
Pas de quoi impressionner minutes à pied du Centre Court.
Belinda Bencic, qui monte en Un tableau idyllique, si ce n’est
puissance depuis le début du cette satanée épaule qui la fait
tournoi. Enfin si, quand même souffrir et qui se recouvre à
un peu: «Swiatek est incroyable chaque match d’un bandage
dans sa manière de se mouvoir. supplémentaire. «Après le gros
C’est sûrement une des match de jeudi (ndlr: contre Col-
joueuses qui bougent le mieux, lins), ça tirait dans l’épaule.
Tennis 25
«Faire la queue, c’est
reconnaître qu’il y
avait quelqu’un avant
toi. J’y vois une règle tacite,
un engagement moral.»
Sam, philosophe matinal à Wimbledon
À bien la regarder, The Queue est même
peut-être bien l’exact contraire de «Koh-Lan-
ta». L’incarnation d’un vivre-ensemble sans
compétition ni conflit. «En plus, j’ai l’im-
pression que la queue pousse les gens à res-
ter jusqu’à la dernière balle dans les gradins,
notait Roger Federer en 2015. C’est une his-
toire de respect. Comme si les chanceux ne
pouvaient pas trahir ceux qui ont tant don-
né sans réussir à entrer.» Il est 9h30, la file
avance vers les grilles lorsqu’un jeune
homme remonte le courant, extatique, en
brandissant un bracelet vert. «J’ai un ticket
pour le court No 2, hurle-t-il. Je vais voir Di-
mitrov-Tiafoe!» Cinq minutes plus tard, la
pluie commençait à tomber sur Wimbledon
Park.
Mais avec les soins et le strap-
ping, elle a heureusement tenu,
souffle la Saint-Galloise. Je suis
contente d’avoir une journée de
repos samedi.» La faute aux ca-
prices du ciel, c’est la première
fois depuis le début du tournoi
que la championne olympique
peut souffler. Tout sauf un luxe,
mais l’essentiel n’est pas là. «J’ai
pu emmagasiner de la
confiance dans mon jeu et,
maintenant, c’est le défi ultime
qui s’offre à moi, se réjouit Ben-
cic. Face à Swiatek, je n’aurai
rien à perdre et tout à gagner.»
Pour une place en quarts de fi-
nale, à départager entre deux
anciennes vainqueures juniors
du tournoi désormais dans la
cour des grandes. FLORIAN
MÜLLER, LONDRES
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Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 Formule 1 27

Lewis Hamilton est à la

recherche du temps perdu
● Le Britannique n’a pas années supplémentaires, soit jusqu’à fin
2023.
encore renouvelé son contrat Jeudi, lorsque Lewis Hamilton s’est adres-
chez Mercedes. Cette année, sé à ses fans, lors d’une tribune organisée
la prestigieuse écurie n’a par la chaîne de télévision Sky, le pilote a
toujours pas gagné, mais son dévoilé qu’il comptait rester en Formule 1
encore longtemps, et qu’il ne se voyait nulle
pilote prévoit tout de même part ailleurs que chez Mercedes: «J’ai l’im-
d’y rester cinq ans de plus. pression d’avoir encore cinq années de pi-
lotage en moi, au moins», a-t-il lancé à la
foule. À 38 ans, le Britannique est en effet
LUC DOMENJOZ encore loin des 42 ans que Fernando Alon-
luc.domenjoz@lematindimanche.ch so s’apprête à célébrer le 29 juillet prochain.
Vu la complexité de son contrat et la nature
Cette saison, Lewis Hamilton pilote au sein de ses sponsors personnels, on n’imagine
de l’écurie Mercedes pour la onzième de toute façon guère Lewis Hamilton en
année consécutive. Une longévité qui cons- mesure de piloter pour Ferrari ou pour Red
titue un record dans l’histoire tumultueuse Bull. Depuis son arrivée en F1, en 2007, il
de la Formule 1. a toujours roulé avec un moteur Mercedes,
Les records existent toutefois pour être bat- et il se sent totalement intégré à la marque
tus, comme tout sportif le sait. Il y a un peu allemande, même lorsque les résultats ne
plus d'un mois, Toto Wolff, le patron de sont pas à la hauteur de ses espoirs, comme
l’équipe Mercedes, laissait en effet entendre
qu’il était sur le point de signer un nouveau
contrat avec son pilote. «Demain, Lewis vien-
dra nous rendre visite à l’usine, lâchait-il pen- «Je veux revenir
dant le Grand Prix d’Espagne. Nous n’avons au sommet avec
qu’à nous asseoir devant un café pour régler Mercedes. Nous
la question du renouvellement de son contrat.
C’est d’ailleurs toujours le même depuis 2013,
avons encore beaucoup à
nous ne faisons qu’en varier les détails.» faire avec cette équipe.»
Un contrat toujours pas prolongé Lewis Hamilton
Le lendemain, pourtant, aucune annonce
n’est venue le confirmer. Un café, ça sem-
blait un peu juste pour régler des détails qui
n’en sont pas vraiment, comme le nombre depuis l’an dernier. «Je me sens bien plus
de journées que le pilote doit consacrer aux proche de l’écurie aujourd’hui que quand
différents partenaires de l’écurie. j’y ai débuté, ajoute le Britannique. Bon,
L’équipe Mercedes AMG appartient à trois je dois m’entraîner plus dur maintenant
actionnaires en possédant un tiers chacun: pour être aussi en forme qu’à 20 ans, j’ai
le groupe Daimler, la société britannique moins de résistance naturelle. Mais je tra-
AP

vaille mieux, aussi, grâce à mon expé-

Le Britannique pilote au sein de l’écurie Mercedes pour la onzième année consécutive. Une belle longévité.
«Nous n’avons qu’à
nous asseoir devant
un café pour régler
la question du
renouvellement du contrat
de Lewis Hamilton.»
Toto Wolff, patron de l’écurie Mercedes
INEOS, et Toto Wolff lui-même. Mais l’équipe
est financée par de nombreux sponsors. Cha-
cun d’eux, en échange des millions versés,
exige de disposer des pilotes pour ses jour-
nées de promotion, et aussi qu’ils viennent
rendre visite à leurs invités sur chaque cir-
cuit.
Verstappen en pole
La pluie qui avait détrempé le
circuit de Silverstone, hier
matin, annonçait des qualifi-
cations disputées - d’autant
que le tracé s’est vite asséché
au cours de la séance.
Des conditions changeantes
qui ont surpris et coûté cher à
bien des pilotes, comme le
Mexicain Sergio Perez (Red
Bull), éliminé en Q1, ou le
Français Esteban Ocon (Al-
pine), sorti à l’occasion de la
Q2.
A la fin, c’est à nouveau Max
Verstappen qui a signé la po-
le. Mais derrière, la surprise a
été créée par les deux McLa-
ren: Lando Norris partagera
la première ligne avec la Red
Bull, tandis qu’Oscar Piastre
partira juste derrière. Départ
cet après-midi à 16 heures
(heure suisse).
Ces détails compliquent la vie des pi-
lotes et peuvent être très longs à négo-
cier. Pour le coup, le renouvellement du
contrat de Lewis Hamilton, espéré par
Toto Wolff il y a plus d’un mois, ne s’est
pas encore concrétisé.
Lewis Hamilton et Mercedes sont cou-
tumiers de ces feuilletons à rallonge. En
2020, en pleine pandémie de Covid, ils
avaient prévu de signer un nouveau
contrat avant les vacances d’été. Puis
pour le mois d’octobre. Puis, c’était sûr,
avant Noël. Mais ce ne fut finalement
qu'en février que le contrat 2021 avait
été signé, et pour un an seulement.
Puis, cinq mois plus tard, c’était ici, à
Silverstone, que les deux parties avaient
prolongé ce même contrat pour deux
rience. Et j’ai encore plus faim de victoires.
Je veux revenir au sommet avec Mercedes.
Nous avons encore beaucoup à faire avec
cette équipe, sur la piste et en dehors, pour
rendre le sport plus diversifié.»
Toto Wolff l’a assuré hier: la partie For-
mule 1 de son contrat ainsi que le montant
à verser au pilote sont décidés. «C’est sur
le reste que nous discutons, assure le pa-
tron autrichien. Les avocats ont les choses
en main.»
Si le Britannique reste cinq ans de plus
chez Mercedes, il aura alors piloté seize
ans pour l’équipe, un record qu’il sera dif-
ficile de battre. Mais un record qui ne fait
pourtant pas peur à un certain… Max Vers-
tappen. Le Néerlandais a débuté chez Red
Bull en 2016, et a déjà signé pour l’écurie
autrichienne jusqu’en 2028, soit pour
treize saisons au total. Les records sont
décidément faits pour être battus.

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26 – 31 DECEMBER 202 3
28 Cyclisme Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Loteries La 9e étape du Tour de France arrive aujourd’hui au sommet du géant d’Auvergne. Un

ORDRE EXACT:
Tirages du 8 juillet 2023

TOUS LES ORDRES:

5
8
4
Fr. 810.50
Fr. 135.10
Un duel volcanique pour
MILIEU: Fr. 8.10
SIMON MEIER, LIMOGES
simon.meier@lematindimanche.ch
9 1
4 4 Même pas 11’000 ans au compteur, aucun
ORDRE EXACT: Aucun gagnant
arbre sur le caillou, juste une antenne qu’on
TOUS LES ORDRES: Fr. 473.10 voit très loin à la ronde. Le géant d’Auvergne
1er CHIFFRE: Fr. 5.70 culmine à une altitude (1465 m) qui ferait
pouffer les Préalpes, mais sa stature, son
caractère volcanique et sa déclivité finale
imposent le respect des géologues comme
celui des cyclistes. Monceau de lave posé
1 3 4 5 8 12 15 sur un socle de granit, piton vert mais lu-
17 19 25 26 37 39 naire, le puy de Dôme devient pour ainsi
41 44 52 53 59 60 64 dire un cône aux icônes, dès lors que le Tour
de France vient lui chatouiller les flancs.
Seule la liste officielle des résultats Aujourd’hui, l’arrivée de la 9e étape y sera
de la Loterie Romande fait foi.
www.loro.ch jugée au sommet, un duel du même nom
s’y profile.
Le théâtre est ancestral, monumental,
Tirages du 8 juillet 2023 pour tout dire à la hauteur de la bagarre que
se livrent Jonas Vingegaard et Tadej Poga-
car depuis le week-end passé au Pays
basque. Pour les deux prétendants au graal
le 23 juillet, vendredi aura en quelque sorte
constitué un jour de repos à plat entre Mont-
7 13 18 20 23 40
de-Marsan et Bordeaux (170 bornes quand
6 2 même) et la journée d’hier, quoique plus
longue (200,7 km), nerveuse et vallonnée
Keystone/Martin Divisek

No + No Chance Gagnants Gains (Fr.)

entre Libourne et Limoges, leur aura per-
6+1 0 -
6+0 0 - mis de remonter en régime tout en ména-
5+1 8 9'300.10 geant la bête. Les crayons sont affûtés, il ne
5+0 39 1'000.00 reste plus qu’à mettre la gomme et tourner
4+1 377 144.00
le film, avec les hélicos mais sans public
4+0 2'017 69.85
3+1 5'887 23.20 dans les derniers kilomètres – faune et flore
3+0 31'128 9.35 disent merci.
Pogacar (à g.) et Vingegaard sont adversaires, ce qui n’empêche pas un certain respect mutuel. C’est la quatorzième fois que le Tour es-
Prochain Jackpot: Fr. 10'000'000.-*

6 2 8 3 9 5

6/6
No

5 derniers
4 derniers
Gagnants
0
2
13
Gains (Fr.)
-
10'000.00
1'000.00
Un an après, les Vaudois
n’ont pas oublié le Tour
3 derniers 122 100.00
2 derniers 1'243 10.00
Prochain Jackpot: Fr. 550'000.-*

*Montants estimés en francs, non garantis.

À partager entre les gagnants du 1er rang.

● En juillet 2022, le reine ou de simples curieux. noise et à développer la pratique

Une année après jour pour jour, féminine du vélo.»
Tirages du 7 juillet 2023 peloton de la Grande les sourires et les souvenirs de- En ce sens, la volonté com-
Boucle avait sillonné meurent. Et les retombées, par- mune de la Ville de Lausanne
les quatre coins fois indirectes, continuent de se et du Canton de Vaud d’accueil-
du canton de Vaud. faire sentir. lir à l’horizon 2026-2027 une
2 11 12 19 38 4 8 «Les retombées économiques étape du Tour de France fémi-
Douze mois après sont difficiles à évaluer, reprend nin n’est pas totalement un ha-
N° + Étoiles Gagnants Gains (Fr.) ce passage remarqué, Emilie Moeschler. Cela se joue sard. Un souhait visiblement
5+ 0 -
5+ 1 715'122.20 que reste-t-il? sur le moyen et le long terme. partagé par les organisateurs de
5 6 54'356.80 Nous avons toujours dit qu’on la course.
4+ 50 2'031.70 accueillait le Tour de France «La bonne nouvelle, c’est
4+ 926 202.10 pour promouvoir Lausanne qu’Amaury Sport Organisation
3+ 2'466 80.20
4 2'115 65.75 «Il y a quelques semaines en- comme destination touristique, (ASO) aimerait apparemment
2+ 33'617 20.70 core, on m’a dit: «C’était vrai- beaucoup revenir à Lausanne»,
3+ 42'976 18.05 ment incroyable, ce Tour de se réjouit la municipale. Il faut
3 95'953 15.05 France, n’est-ce pas Mme dire qu’ASO a particulièrement
1+ 165'314 10.60
Moeschler?» C’est un événe- «Cette apprécié «le professionnalisme
2+ 586'538 9.40
2 1'288'917 6.90 ment qui a véritablement mar- visibilité et l’expérience dans l’organisa-
qué la mémoire collective lau- à travers le tion de grandes manifestations» L’arrivée de la plus grand bénéfice de cet évé-
2 12 24 28 40 sannoise et pour longtemps.» démontrés par la capitale olym- 8e étape du Tour de nement se situe vraiment là. Des
La mémoire collective vau-
monde, grâce à la pique il y a un an. France 2022 avait touristes belges, qui se ren-
No
5/5
Gagnants
1
Gains (Fr.)
125'735.95 doise, serait-on même tenté télévision, Lausanne attiré plus de daient en vacances en Italie, se
4/5 224 352.85 d’ajouter aux propos de la mu- Tourisme n’aurait Le Tour féminin à Lausanne? 100’000 personnes sont par exemple arrêtés récem-
3/5 8'466 18.25 nicipale lausannoise chargée Un éventuel retour de la Grande dans les rues de ment en Lavaux, car ils avaient
des Sports et de la Cohésion so-
jamais pu se l’offrir.» Boucle – féminine cette fois – Lausanne. KEYSTONE/ vu cette région à la télévision
Prochain Jackpot: Fr. 71'000'000.-*
ciale. sur le territoire vaudois offrirait Jean-Christophe Bott durant le Tour de France.»
Car les 9 et 10 juillet 2022, ils Emilie Lambelet, cheffe une nouvelle exposition de
étaient des centaines de milliers de projet Presse à Vaud grande ampleur au canton, ain- Afflux de camping-cars
X547H Promotion
à s’être agglutinés sur les bords si qu’à ses acteurs économiques Ce dernier a aussi permis à la
Rangs Gagnants Gains (Fr.) des routes du canton. À Lau- et touristiques. Car les étapes vallée de Joux de rayonner bien
1 1 250'000.00
sanne pour l’arrivée de la «vaudoises» du Tour 2022 au-delà des frontières grâce à
2 1 12'146.10
3 4 2'530.45 8e étape, mais aussi à la vallée booster la pratique du vélo et avaient été diffusées en direct son fameux «anneau éphé-
4 13 1'090.05 de Joux quelques heures plus plus généralement le sport au dans 190 pays, touchant des mère». «Ce grand cadran horlo-
5 59 205.85 tôt, pour la grande entrée en quotidien. Ces dernières an- centaines de millions de télés- ger en bois, construit pour l’évé-
6 112 58.80
Suisse du peloton de la Grande nées, nous constatons une aug- pectateurs. La série «Tour de nement à l’instar de nombreuses
7 187 24.40
8 1'259 10.45 Boucle. Ainsi que le lendemain, mentation annuelle de 20 à 25% France: Au cœur du peloton», autres décorations présentes
9 12'355 4.10 dans le Chablais, pour le départ du nombre de personnes qui sortie le 8 juin dernier sur la pla- dans les champs, a engendré des
*Montant estimé en francs, non garanti. de la 9e étape depuis Aigle. font de la bicyclette à Lausanne. teforme Netflix et dont les retombées médiatiques jusqu’en
À partager entre les gagnants du 1er rang. Comme d’autres manifestations caméras ont longuement filmé Asie, notamment dans des ma-
La pratique du vélo boostée cyclistes, la Grande Boucle et des plans en Lavaux et ses pa- gazines spécialisés en architec-
Finalement, l’effervescence toutes les activités organisées noramas de carte postale, a re- ture, en bois et design, reprend
Loto français n’est jamais retombée durant ce en marge de l’événement, no- mis une pièce dans le juke-box. Emilie Lambelet. L’attrait et l’im-
Tirage du samedi 8 juillet 2023 week-end de fête populaire. tamment pour les femmes, ain- «Cette visibilité à travers le portance du Tour de France ont
6 - 10 - 19 - 32 - 48 Gros-de-Vaud, Riviera, Lavaux, si que les infrastructures mises monde, grâce à la télévision, été très porteurs dans ce cas-là.»
Numéro de la chance: 5
Alpes vaudoises: chaque région en place, telles que les pistes cy- Lausanne Tourisme n’aurait Depuis le passage de la Grande
Joker: 1 140 947
traversée par la plus grande clables, tout cela contribue à at- jamais pu se l’offrir, reconnaît Boucle, une tendance semble
Option 2e tirage: course cycliste du monde dé- teindre ce chiffre, à renforcer la Emilie Lambelet, cheffe de pro- d’ailleurs se dessiner à la vallée
17 - 19 - 33 - 39 - 41 bordait d’amateurs de la petite communauté cycliste lausan- jet Presse à Vaud Promotion. Le de Joux, où beaucoup de cam-
 Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
n théâtre historique, à la hauteur du passionnant combat que se livrent Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar.
réveiller le puy de Dôme
calade le puy de Dôme, depuis la première
en 1952 avec la victoire de Fausto Coppi –
les grands Federico Bahamontes (59), Fe-
lice Gimondi (67), Luis Ocaña (71 et 73), Lu-
cien Van Impe (75) et Joop Zoetelmek (76
et 78) y ont aussi triomphé, de même que
le Suisse Erich Maechler en 1986. Mais ça
fait trente-cinq ans que l’idylle avait été
rompue entre l’auguste montagne et la
Grande Boucle, pour des affaires de gros
sous, de politique, de personnes, d’écolo-
gie aussi.
«La première chose que j’ai écrite quand
on m’a donné mon ordinateur au mois de
janvier 2004 (ndlr: il fut l’adjoint de Jean-
Marie Leblanc avant de lui succéder en 2007),
c’était: «Objectif puy de Dôme», explique le
directeur du Tour, Christian Prudhomme.
Et en dessous: «Ne pas s’interdire de rêver.»
J’en avais rêvé pour 2012, mais ça ne s’était
pas fait. Ça participe à un mythe. Il y a eu
en France un 12 juillet avant celui de 1998
(ndlr: premier titre de championne du monde
de foot), qui fut peut-être aussi fort. Là, on
est dans la mémoire, les racines.»
Le 12 juillet, avant celui de Zizou & Co.,
c’était en 1964. Vingtième étape du Tour, à
quarante-huit heures de l’arrivée à Paris.
Cinquante-six secondes séparent Jacques
Anquetil et Raymond Poulidor, qui eux-
mêmes divisent la France de par leurs styles
et leurs personnages opposés. «Poupou»
versus «Maître Jacques». Un coude-à-coude
resté fameux, magnifié par un noir et blanc
sublime et ce décor naturel somptueux.
Poulidor, auquel un hommage sera rendu
Les chiffres clés de l'arrivée à Lausanne du 9 juillet 2022
Fréquentation quotidienne
ping-cars font escale. Toujours
selon Vaud Promotion, le Tour
a aussi amené une plus-value
aux Alpes vaudoises dans leur
stratégie de développement et
de positionnement en ce qui
concerne le cyclisme sur route.
Une discipline qui est d’ail-
leurs en pleine reprise depuis la
pandémie de coronavirus. Provenance des visiteurs
«À partir de 2020, l’augmenta-
tion du nombre de nouveaux
membres a été constante, se
félicite Lars Schnyder, le pré-
sident du Vélo Club Orbe. L’en-
gouement autour du cyclisme a
aussi été important en 2022 et
on l’a ressenti au niveau du
nombre de licenciés. Je dois re-
connaître que l’enchaînement
Covid-Tour de France a été très
positif pour notre club, puisqu’on Nuitées enregistrées
est passé de 98 à un total de 158
adhérents.»
12’471
Le détour vaudois du troi- équivalents nuitées
sième événement sportif le plus le 9 juillet 2022
suivi au monde a visiblement
permis, comme espéré, de boos- * Du 24 juin au 24 juillet 2022
ter tout un canton. Graphique: O. Chiacchiari. Source: Rapport d'analyse de la 8e étape Dole-Lausanne du Tour de France 2022. Travail de master de Joël Brunisholz/ISSUL.
CHRIS GEIGER
Cyclisme 29
au départ de Saint-Léonard-de-Noblat au-
jourd’hui, ne reprend que 42 secondes et
termine deuxième dans le vieux Parc des
Princes.
La grande histoire venait de s’écrire et,
«Il y a eu en ces derniers jours, une petite idée faisait
France un son chemin parmi les suiveurs contempo-
12 juillet rains. Et si, plus d’un demi-siècle plus tard,
tout était réuni pour assister, le romantisme
avant celui et la patine en moins, à une joute aussi mé-
de 1998, qui morable? On est certes trop près des Alpes
fut peut-être et trop loin des Champs-Élysées pour s’at-
tendre à un K.-O. technique. Mais le com-
aussi fort.» bat entre le Danois Jonas Vingegaard, te-
nant du Tour et maillot jaune, et le Slovène
Christian Tadej Pogacar, double lauréat en 2020 et
Prudhomme, 2021 qui pointe à 25 secondes, fait saliver,
directeur du Tour quitte à ce que la concurrence en bave.
de France, qui Hier, elle en a profité pendant que les
compare football cracks se neutralisaient à grande vitesse. Et
et cyclisme dans cette France en rogne contre les puis-
sants, le Tour a montré l’exemple: un autre
Danois, Mads Pedersen, a renversé in ex-
tremis le roi du sprint, le Belge Jasper Phi-
lipsen. Plus tôt dans la journée, un autre
monarque, Mark Cavendish, avait chuté
AFP/Anne-Christine Poujoulat
bien plus lourdement.
Épaule touchée, abandon, larmes. Le Bri-
tannique de 38 ans, qui avait failli rempor-
ter sa 35e victoire sur la Grande Boucle la
veille et dépasser ainsi Eddy Merckx, dit
adieu à l’épreuve dans la douleur. Les épo-
pées qui fusent et les destins qui basculent,
le Tour connaît bien. Le puy de Dôme aus-
si. Ces derniers jours, d’aucuns l’ont vu tré-
pigner. Le duel entre le Danois et le Slovène va se poursuivre aujourd’hui au puy de Dôme.
Le public cible décrypté
grâce aux smartphones
Données générales Profil des visiteurs
Le profil type du spectateur échappé au recensement de
50,1% 49,9% qui s’est massé à l’arrivée lau- l’étude.
176 coureurs hommes femmes sannoise du Tour de France, Malgré ces quelques biais
le 9 juillet 2022, ne ressemble de la méthode, l’étude a dé-
CH 1,5 mio de budget pas seulement au cliché du nombré 103’671 personnes
retraité, bob Cochonou soli- présentes dans le périmètre
300 médias représentés dement vissé sur la tête et d’analyse lausannois (Pon-
16,2% 20,5% journal «L’Équipe» en main. taise, centre-ville, Ouchy) et
+ de 64 ans - de 20 ans Une proportion de genre possédant un téléphone mo-
197 bénévoles
quasi identique et une répar- bile actif: 91’000 spectateurs
89’000 comptes touchés tition des tranches d’âge très suisses et 12’600 visiteurs
sur «letouralausanne» hétéroclite (20,5% de jeunes étrangers (en majorité des
36,6% 26,7%
40-64 ans 21-39 ans
de moins de 20 ans) ont vibré Français et des Américains).
dans les rues lausannoises.
C’est ce que révèle notam- Stratégie marketing ciblée
ment l’étude d’impact réali- Les données ont aussi permis
sée par des chercheurs de d’analyser le temps passé sur
l’Institut des sciences du place par les visiteurs de
103’671 105’000
sport de l’Université de Lau- l’événement et la segmenta-
spectateurs uniques sanne (ISSUL), en collabora- tion entre résidents, excur-
le jour de l'étape sur 100’000
les périmètres tion avec l’Observatoire de sionnistes (personne résidant
95’000 Vaud Promotion. en dehors de Lausanne et
d'Ouchy-Centre-ville
-Pontaise 90’000 Pour mener à bien ce projet sans nuitée) ou touristes (ré-
85’000 sur les villes d’arrivée (Lau- sidents hors Lausanne et
80’000 sanne) et de départ (Aigle), ayant dormi sur place). Une
14 h-18 h une méthode inédite dans augmentation de la fréquen-
Fréquentation 75’000
l’événementiel sportif en tation des sites de 27% et des
maximum sur 70’000
ce créneau Suisse a été utilisée. Elle s’est équivalents nuitées de 1,4% a
65’000 basée sur les données de télé- pu être constatée lors du pas-
horaire
24/06 30/06 06/07 12/07 18/07 24/07 phonies mobiles anonymi- sage du Tour de France à Lau-
sées, agréées et collectées par sanne. «Pouvoir collecter des
Swisscom. Et conformément données quasi en temps réel
à la réglementation appli- offre des perspectives d’ave-
cable en matière de protec- nir très intéressantes, notam-
Cantons les plus Nationalités étrangères
tion des données. ment pour des événements
88% représentés les plus représentées
ouverts, où il n’y a pas de bil-
de Suisses 75'290 4450
Cartes SIM géolocalisées letterie», se réjouit Joël Bru-
3390 1280 La géolocalisation des cartes nisholz, qui a réalisé l’étude
1 2290 1 1170
12% 2 2 SIM, puis un redressement dans le cadre de son travail
d’étrangers 3 3 réalisé par Swisscom à l’aide de master à l’ISSUL. «C’est
d’algorithmes – en se basant une forte valeur ajoutée pour
sur les parts de marché des nos partenaires, grâce au fait
autres opérateurs de télépho- que l’on peut connaître la
nie mobile – ont permis provenance du spectateur
11’064 d’identifier le public suisse et par localité, se réjouit Flo-
étranger (grâce au roaming). rence Wargnier, responsable
+1,4% Les spectateurs étrangers de l’Observatoire et durabilité
par rapport
à la moyenne
1407 non connectés au roaming de Vaud Promotion. Et ces
de la période
observée*
Swisscom et les utilisateurs données nous offrent la pos-
suisses ayant expressément sibilité de réorienter notre
Suisses Étrangers
demandé à Swisscom de blo- stratégie marketing.»
quer leur carte SIM ont, eux, SYLVAIN BOLT
30 Sports
Chronique
Patience, patience
E
ntre la montée en Super League et l’arrivée des
nouveaux propriétaires, beaucoup de choses ont
changé ici récemment et je vis tout cela de façon
très positive. Yverdon-Sport repart sur un nouvel
élan avec des gens bien installés dans le monde du
football et respectueux du passé du club. Dans une telle si-
tuation, la confiance s’avère primordiale. Elle doit égale-
ment être réciproque et c’est le cas.
Si je suis positif, c’est aussi parce que j’ai appris à être
patient avec les années. À cause de cette histoire de licence
qui a duré presque deux semaines, on a perdu du temps et
on se situe légèrement en retard par rapport aux a autrest
formations. La spécificité du championnat su uisse, qui
débute bien avant les ligues étrangères, ne fa acilite pas
l’intégration des nouveaux joueurs afin qu’ilss soient
prêts pour la première rencontre à Zurich.
Chaque entraîneur souhaiterait avoir son contingent
c à Berne.
au complet avant la reprise, mais cela est pressque im-
possible. Il y a vingt ans, j’aurais probablemen nt été
rouge comme une tomate pour différentes
raisons liées à cette situation. Aujourd’hui,
je reste calme.
J’ai conscience que l’équipe qui sera sur
le terrain à la reprise ne sera pas la version
définitive et que des joueurs arriveront
plus tard pendant l’été. Je ne panique pas,
parce que j’ai tout de même un groupe de
qualité à disposition. Puisqu’on est passés
dans la ligue d’au-dessus, le volume de jeu
et la dimension physique seront supérieurs.
On a ainsi besoin de joueurs capables d’af-
fronter cela car on vise le maintien en Super
League. En ce sens, l’arrivée de Boris Ces-
pedes me réjouit.
La condition physique représente, heu-
reusement, l’un de nos points forts. En
2022-2023, on a souvent gagné des
matches dans les arrêts de jeu, il n’y a donc
pas de grandes modifications à faire durant
Publicité
Une légère
oscillation
Un livre plein d'humour qui met
l'accent sur les techniques déplo-
rables de gestion d'entreprise et
nous invite à suivre le per-sonnage
principal dans son parcours amu-
sant et très particulier de guérison
après un gros ras-le-bol professi-
onnel.
Cette satire sociale, qui épingle les
injonc-tions parfois creuses et les
excès du déve-loppement person-
nel, se présente comme le récit
d'une bienfaisante insurrection in-
térieure, d'une délicieuse lucidité.
Clément Baudouin
Format : 13 x 22 cm, 160 pages
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Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
En bref
BASKETBALL FOOTBALL
Le prodige français Victor Wemba- Grâce à sa victoire au terme d’un
nyama (19 ans) a rendu une copie match étouffant contre l’Espagne
contrastée pour sa première sous le (1-0) hier en Géorgie, l’Angleterre a
maillot des San Antonio Spurs, ven- remporté l’Euro M21, décrochant
dredi en Summer League à Las son troisième succès dans la com-
cette préparation. La principale adaptation concerne le Vegas. Devant des spectateurs qui pétition. Le héros anglais s’appelle
rythme de jeu. La Super League est plus exigeante de ce n’avaient d’yeux que pour lui, le James Trafford: le portier formé à
point de vue. Il conviendra d’apprivoiser cette différence au No 1 de la draft, a inscrit 9 points et Manchester City a repoussé un pe-
fil des rencontres, car tu peux faire tout ce que tu veux à l’en- collecté 8 rebonds en 27 minutes. nalty à la dernière minute du temps
Mais l’ancien des Mets de Boulogne- additionnel, conservant sa cage in-
traînement, rien ne remplace la réalité des matches. Il nous
Levallois a été à la peine aux tirs, violée durant les six matches de la
faudra donc être patient. On a du temps à disposition, mais réalisant un 2/13 (1/6 à 3 points). Il compétition.
pas trop non plus. a en revanche été plus à son avan-
Ce n’est pas pour autant qu’il faudra avoir la trouille. Je dis tage en défense, infligeant 5 contres, RUGBY
toujours: «Respecter l’adversaire, oui, en avoir peur, non!» bien aidé par son immense taille Jean Dujardin, grand amateur de
C’était notre philosophie il y a un an, elle a bien fonctionné, (2m24). rugby, sera aux manettes de la cé-
et ça ne changera pas. Il est clair qu’on ne pourra pas pro- rémonie d’ouverture du Mondial
duire
d i le l mêmême football, mais je ne suis pas un entraîneur FOOTBALL 2023 en France (du 8 septembre au
défensif. JJe préfère tenter de décrocher la victoire que David de Gea (32 ans) a annoncé 28 octobre). Il l’a coécrite et il inter-
de me con ntenter d’un match nul. Je ne suis cependant hier sur Twitter qu’il quittait Man- prétera l’un des rôles principaux,
chester United après douze années ont annoncé, hier, les organisateurs.
ni naïf, nii fou. Je sais pertinemment que je ne pourrai
passées au sein du club anglais. Le L’acteur français partagera la scène
pas miserr sur un pressing total et permanent à Bâle ou gardien international espagnol a été avec le chef Guy Savoy et la dan-
critiqué en fin de saison dernière seuse étoile Alice Renavand.
On cherchera à jouer vers l’avant et à créer du jeu. pour plusieurs erreurs grossières.
Avec cettte idée offensive, il y a toujours le risque de se Son contrat avec United a expiré à BEACHVOLLEY
pren ndre une claque de temps en temps. Mais je la fin du mois de juin, sans qu’au- Il n'y a plus de Suisses au Tournoi
préfère subir une lourde défaite avec cette
p cun nouvel accord n’ait été trouvé Beach Pro Tour Elite 16 de Gstaad.
philosophie et rebondir la semaine suivante malgré les discussions qui ont eu Derniers Helvètes en lice, Marco
avec la même approche, que de viser le 0-0. lieu tout au long de la saison. Selon Krattiger et Florian Breer n'ont pas
la presse, le club mancunien passé le cap des repêchages hier
La clé sera de trouver le bon dosage entre
cherche à faire du gardien de l’In- matin. Ils se sont inclinés en trois
développer notre jeu et se préserver. Et là ter Milan, le Camerounais André sets face aux Brésiliens Pedro Sol-
encore, tout est une question de patience. Onana, son successeur. berg et Gustavo Carvalhaes, vain-
queurs 22-24 22-20 et 15-8.
FOOTBALL
Marco Schällibaum
M L’ancien gardien de l’Ajax Amster- AUTOMOBILISME
dam Edwin van der Sar, toujours
E
Entraîneur Yverdon hospitalisé aux soins intensifs après
Le Valaisan Ralph Boschung
(25 ans) a terminé vingtième de
S
Sport une hémorragie cérébrale survenue
vendredi, est dans un état stable
l'épreuve sprint du GP de Grande-
Bretagne de Formule 2 de Silver-
mais toujours préoccupant, a an- stone. C'est le Danois Frédérik Ves-
noncé le club hier. Âgé de 52 ans, ti qui s'est imposé, confortant sa
Ceette chronique
le Néerlandais était en vacances sur place de leader du championnat du
esst assurée en alternance par Marc Lüthi, une île en Croatie lorsqu’il s’est sen- monde. En Formule 3, le Jurassien
Kim Métraux, Camille Rast, Simon Pellaud,
K ti mal. Van der Sar a joué pour l’Ajax Grégoire Saucy (23 ans) a pris le
Laaurent Meuwly, Marco Schällibaum entre 1990 et 1999, remportant la 23e rang d'une course gagnée par
et Maxime Chabloz.
e Ligue des champions en 1995. l'Argentin Franco Colapinto.
Rendez-vous
Best-seller acclamé
par le public et la critique
Un roman drôle et décapant qui
traite de sujets profonds: et si l'art
pouvait nous (re)donner de la
force, du courage, de la confiance,
de l'envie?
L’héroïne de ce roman, inspirée
par le vécu de l’auteure, cumule
les rôles et les défis, entre travail,
enfants, deuils à surmonter, an-
nées qui passent, déménagement
à gé-rer et amour à retrouver. Avec
un seul ob-jectif: rester vivante,
toujours, et attentive à l’essentiel.
Un livre qui fait un bien fou!
-24 % Martina Chyba
Format : 15 x 23.5 cm, 208 pages
-12 %
Je commande :
exemplaire(s) du livre exemplaire(s) du livre
Une légère oscillation Rendez-vous
au prix de Fr. 13.–* au lieu de 17.– au prix de Fr. 22.–* au lieu de 25.–
*TVA incluse. Frais de port en sus à la charge des lecteurs: Fr. 3.- pour 1 exemplaire, frais offerts
à partir de 2 exemplaires commandés. La commande sera envoyée directement par les éditions partenaires
et ne peut être groupée que par éditeur. Un délai de livraison de 10 à 20 jours est à prévoir. Dans la limite des
stocks disponibles.
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Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 Course à pied 31

Sports
pour Les secrets du trail pour se
nous lancer en tant qu’amateur
L’engouement pour les courses de montagne attire chaque année de nouveaux adeptes. La spécialiste
vaudoise Simone Troxler dévoile ses conseils pour débuter avec les bons réflexes dans la discipline.
RUBEN STEIGER
ruben.steiger@lematindimanche.ch
La saison des trails bat son plein. Les
épreuves s’enchaînent tous les week-ends
dans un calendrier toujours plus surchar-
gé. L’engouement médiatique pour les
courses de montagne augmente lui aussi
de façon croissante. Toutes les compéti-
tions du circuit Golden Trail World Series,
dont fait partie Sierre-Zinal, sont diffusées
sur la chaîne Eurosport.
Mais il n’y a pas que chez les élites que
la pratique a la cote. Chaque année, de nom-
breux amateurs se lancent sur les parcours
montagneux pour défier les kilomètres et
le dénivelé. Dans cette discipline, le plaisir
et l’envie de se dépasser prennent souvent
le dessus sur la soif d’exploser les chronos.
Comment et où débuter?
La Suisse, grâce à ses nombreux chemins
alpestres, représente un terrain de jeu idéal
pour découvrir le trail. Lorsqu’on débute,
il n’est presque exclusivement question que
de plaisir. «C’est le point primordial, il faut
commencer gentiment et ne pas se fixer
des objectifs irréalisables», confirme
Simone Troxler, championne de Suisse
2022 de la discipline.
«À mes débuts, courir dans des endroits
que je connaissais m’a grandement aidée,
car on peut visualiser le parcours, conseille
la Vaudoise de 26 ans, qui s’est mise à la
course à pied à 20 ans. Un lieu familier est
plus simple à se représenter en termes d’ef-
fort que 20 kilomètres inconnus avec un
certain dénivelé.»
Lors de ses premières sorties en mon-
tagne, il convient également de bien s’en-
tourer et de profiter du savoir d’autrui. «J’al-
lais courir avec des gens qui s’y connais-
saient. Ils me donnaient toutes leurs astuces
ainsi que des idées d’itinéraires adaptés»,
se remémore la doctorante en médecine.
Les chaussures: une priorité
Le matériel, contrairement à celui néces-
saire dans d’autres sports, est relativement
sommaire. Choisir la bonne chaussure
s’avère néanmoins indispensable afin de
garantir plaisir et sécurité. «L’erreur à ne
pas commettre est d’acheter ses chaussures
en ligne en se basant uniquement sur le
design», met en garde Simone Troxler. Une
mauvaise chaussure peut provoquer des
douleurs pendant l’effort et ainsi entraîner
des blessures.
«C’est important de trouver une basket
qui correspond à son style de course, c’est
même la première chose à faire avant de se
lancer dans le trail», ajoute la gagnante du
Marathon de la Jungfrau en 2019. Pour ce
faire, de nombreux magasins spécialisés
proposent une analyse de la manière de
courir, afin de trouver la chaussure idoine.
Elle doit être confortable, respirante et plu-
tôt légère. Sa semelle légèrement crampon-
née garantit l’adhérence sur les terrains par-
fois accidentés de trail. Une fois la paire
idéale dégotée, il est nécessaire de la for-
mer avant d’avaler les kilomètres.
Le matériel obligatoire
Outre les baskets, plusieurs éléments sont
indispensables si vous décidez de vous lan-
cer dans les courses de montagne. À com-
mencer par le sac de trail. «Il permet de
transporter toutes les choses nécessaires
pendant une épreuve.» Simone Troxler y
glisse une veste imperméable, une réserve
d’eau, de la nourriture, un sifflet, une cou-
verture de survie, un gobelet réutilisable
et un téléphone. Le contenu du sac varie
en fonction de la distance, mais certains
éléments ne doivent pas être oubliés, tant
pour les élites que pour les amateurs.
«La réserve d’eau, variable selon les
courses, est indispensable. Tout comme la
veste imperméable et la couverture de sur-
vie. Pour des raisons écologiques, le verre
réutilisable l’est aussi, car on ne nous donne
plus de gobelets en plastique aux ravitail-
lements sur certaines compétitions. Le sif-
flet, afin d’appeler à l’aide en cas de dan-
ger, est aussi obligatoire.»
Un non-respect des règles peut entraîner
la disqualification, peu importe la catégo-
rie. «Les contrôles sont fréquents et aléa-
toires. Ils peuvent survenir tant sur la ligne
de départ que d’arrivée.»
Une préparation spécifique
En trail, mieux vaut ne pas s’aventurer dans
une course sans entraînement. Une prépa-
ration s’impose afin de prendre du plaisir.
Cette dernière dépend fortement de la
condition physique du débutant.
«Pour une personne active sportivement
et en bonne santé, je dirais qu’il faut aller
courir trois fois par semaine et s’y mettre
trois mois avant la course», estime Simone
Troxler. Pas la peine néanmoins d’effectuer
l’entièreté du parcours avant la compéti-
tion, cela demande trop d’énergie. «Il vaut
mieux s’entraîner spécifiquement en
tenant compte du parcours de l’épreuve à
laquelle on s’est inscrit. On peut aussi faire
des reconnaissances partielles. S’entraîner
à prendre un ravitaillement et à manger en
courant est aussi important.»
En ce qui concerne l’alimentation, nul
besoin de chambouler de bonnes habitudes
la semaine précédant le jour J. En revanche,
il faut respecter certaines règles avant la
course. «Il est recommandé de manger trois
heures avant le départ et d’éviter les fibres.
Si vous partez le matin, mieux vaut privi-
légier les glucides, comme du pain blanc
avec de la confiture.»
Les pièges à éviter le jour J
Plusieurs pièges sont à éviter absolument.
Ne pas boire suffisamment ou ne pas man-
ger correctement sont les risques qui
guettent les novices du trail. «Si on attend
Pour la Vaudoise Simone Troxler, le trail est avant tout une question de plaisir. Dans cette discipline, d’avoir soif ou faim, le danger existe d’être
l’envie de se dépasser prend souvent le dessus sur la soif d’exploser les chronos. Marco Zanoni déshydraté ou de tomber en hypoglycé-
mie», rappelle «Simi».
Mais comment s’alimenter lors d’une
Veste imperméable et Dans certaines cabanes épreuve? «Pour les boissons, tout dépend
couverture de survie d’altitude, la pièce de du nombre de ravitaillements, mais je
sont indispensables. 5 francs peut être le seul conseille d’avoir une réserve de 1 litre. En
moyen de paiement. termes de nourriture, on dit qu’il faut entre
60 et 100 g de glucides par heure.» Cette
énergie peut être ingurgitée sous forme de
gels, de barres énergétiques ou de boissons
isotoniques en poudre. Attention, l’oubli
de sel peut s’avérer fatal. «Puisqu’on trans-
pire beaucoup, il est recommandé de mettre
des pastilles de sel dans l’eau ou d’avoir
une boisson contenant des électrolytes.»
Vous êtes maintenant presque prêts à
vous lancer dans le trail. «Il ne vous reste
plus qu’à prendre du plaisir et à mettre de
la crème solaire. C’est le détail que j’oublie
régulièrement et que je regrette ensuite»,
rigole Simone Troxler.

Trouver la chaussure adéquate est une Le contenu du sac de trail, qui

priorité avant de se lancer dans le trail. s’enfile comme un gilet, varie en
Une analyse de la manière de courir peut fonction de la distance parcourue.
être faite en amont. La semelle des Un litre de boissons (isotoniques Sifflet pour appeler à l’aide et
baskets est légèrement cramponnée pour en poudre ou eau) est conseillé. téléphone sont obligatoires.
garantir une adhérence tout terrain. Gels et barres énergétiques
apportent de l’énergie.
32 Voyages
Emblématique de Madâ’in Sâlih, le tombeau de
Lihyan, connu sous le nom de «château solitaire».
Arabie saoudite
Sur les traces de l’Orient éternel
Dans le nord-ouest du pays, Hégra, deuxième ville la
plus importante des Nabatéens après la jordanienne
Pétra, est désormais une destination tant archéologique
que touristique dans la région d’al-Ula. Cette ouverture
déverrouille comme jamais le royaume des Saoud.
«N’
TEXTES: VALÉRIE SASPORTAS
PHOTOS: STANISLAS FAUTRÉ
as-tu pas déjà vu des pay-
sages pareils? » Oui, à Pé-
tra. Mais en arrivant à Hé-
gra, on comprend qu’on
n’a pas tout vu, pas tout
compris. Hégra, inscrite au Patrimoine
mondial de l’Unesco en 2008, ouvre un
nouveau chapitre sur les Nabatéens. Deu-
xième ville phare de leur royaume après
leur capitale jordanienne. Les tombeaux
rupestres y sont plus petits, mais répartis
sur une étendue bien plus vaste aussi, et
leur vision soudaine est une pure mer-
veille. Il faut les voir quand le soleil cou-
chant teint d’ocre ces chefs-d’œuvre tro-
glodytiques qui s’érigent comme des
joyaux dans les grands cirques sablon-
neux ceints de barrières rocheuses. Au
nord-ouest de la péninsule Arabique,
cette région abrite les principaux lieux
saints de l’Islam que sont La Mecque et
Médine. Or on est là dans une histoire pré-
islamique.
Et c’est le lieu choisi par le prince héri-
tier Mohammed Ben Salmane pour lancer
l’ouverture de son pays ultraconservateur,
sur un axe correspondant à celui utilisé
durant des siècles par les pèlerins, le long
de la ligne de chemin de fer du Hedjaz.
Son programme lancé en 2016 et baptisé
Vision 2030 est d’abord une collaboration
archéologique inédite avec la France. Un
projet de «plus grande oasis culturelle du
monde», une «épine piétonne verte» avec
une ligne de tramway à faible émission
carbone de 46 km, jusqu’à l’aéroport in-
ternational d’al-Ula. Ce gros bourg de
35’000 habitants aux maisons blanches et
basses jouxte la cité antique dont la pre-
mière vue laisse perplexe: sous l’écheveau
inextricable de constructions grises effon-
drées se cachent des venelles et des mai-
sons de pierre et de pisé dont les murs re-
cèlent des peintures colorées de palmiers.
Comment saisir à Madâ’in Sâlih, l’an-
cienne Hégra, toute l’épaisseur de l’his-
toire? «Hégra est mentionnée dans «Géo-
graphie», de Ptolémée, savant de langue
grecque du IIe siècle ap. J.-C., comme ville
d’Arabie heureuse», rappelle l’épigra-
phiste Laïla Nehmé, dans un guide unique
sur la région, «Archéologie au pays des Na-
batéens d’Arabie» (Hémisphères, 2019).
Les Nabatéens, rois du commerce cara-
vanier de l’encens et des aromates, se sont
installés ici entre la fin du IIe siècle av. J.-C.
et la fin du Ier siècle de notre ère. Au-delà
des remparts de leur cité, ils ont construit
des nécropoles en face de petits villages,
taillé leur monde des morts en miroir de
celui des vivants. Mais ce dernier, fait de
maisons en terre crue, a fondu. Et l’on dé-
couvre, médusé, leur Orient éternel. «Les
façades arborent un répertoire architectu-
ral et décoratif issu de toutes les civilisa-
tions avec lesquelles les Nabatéens ont
commercé: ici, des merlons au sommet
inspirés des Perses, une gorge égyptienne
comme on en voit à Karnak, un attique
simple issu de l’architecture classique,
une corniche gréco-romaine, un bas évo-
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
quant des temples grecs encore avec des
pilastres aux angles, des chapiteaux à
corne, invention nabatéenne comme on
en voit en Syrie, à Bosra», décrypte Ingrid
Périssé, directrice de l’archéologie et du
patrimoine au sein de l’Agence française
pour le développement d’al-Ula. «Le site
était considéré comme maudit par les Bé-
douins. Il n’a jamais été habité comme Pé-
tra. Les tombes avaient été vidées, sauf
celles protégées par des avancées de
dunes. Autre différence: des inscriptions
nabatéennes datées nomment souvent les
morts et offrent des aperçus uniques sur la
vie des anciens habitants d’Hégra.»
Accroupie dans le flanc du massif de
grès rouge, de l’autre côté de la palmeraie,
Chloé Girardi nettoie le sol à l’aide d’une
brosse et d’un pinceau. L’anthropologue
cherche une tombe dadanite. «Après Hé-
gra, Dadan sera sans doute le site le plus
important d'Arabie saoudite», assure In-
grid Périssé. «Dans la région, la plus an-
cienne ville que l’on connaisse, c’est Da-
dan, qui a sans doute été fondée au
IIIe millénaire av. J.-C., connu son apogée
deux mille ans plus tard, puis a été sup-
plantée par Hégra un peu avant le tour-
nant de l’ère», poursuit Jérôme Rohmer,
codirecteur de cette fouille. C’est à Dadan
qu’a été trouvée l’extraordinaire statue li-
hyanite prêtée au Musée du Louvre. Les
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
archéologues ont sanctuarisé ce périmètre
de la montagne. Deux niches ont été mises
au jour, plusieurs dizaines de fragments
de statues et 21 visages. Chloé a trouvé le
premier, mais aussi des tables à offrandes,
des brûle-encens, une statue à taille hu-
maine effondrée face contre terre, des bé-
tyles, des pierres dressées connues chez
les Nabatéens mais dont on ne soupçon-
nait pas l’existence chez les Dadanites.
«C’est un ensemble cultuel laissé tel quel
par les habitants de Dadan il y a 2100,
Des chefs-d’œuvre
troglodytiques
s’érigent comme
des joyaux dans les grands
cirques sablonneux ceints
de barrières rocheuses.
2200 ans! » s’exclame Jérôme Rohmer.
Les Nabatéens ont raconté leur vie en
l’écrivant dans la roche de grès tendre. On
touche la pierre, elle s’effrite. Comment ces
gravures ont-elles pu résister au temps?
Sans autre attente que l’émerveillement, on
se laisse éblouir par d’incroyables paysages
géomorphiques. Ici, Jabal al-Fil, le rocher
de l’éléphant avec sa trompe attachée au
sol. Là, le Rainbow Rock, fantastique arc-
en-ciel pariétal comme sculpté par le vent
et incrusté de quartz. Le désert change le
regard. Les Nabatéens ne sont qu’un pré-
texte. Le site d’al-Ula est une destination en
soi qui a fait son lit dans la vallée d’Ashar.
Distant de 218 km, Khaybar est un site de
vestiges extraordinaire: 15’000 tombes sur
seulement 56 km2. Longtemps l’oasis fut in-
terdite, bastion chiite dans ce pays sunnite,
royaume des juifs d’Arabie qu’une illustre
bataille opposa aux musulmans de Maho-
met, qui en sortit vainqueur lors de la sep-
tième année de l’hégire (628-629). Au-
jourd'hui, il s’ouvre au tourisme, même s’il
n’y a pas encore foule. L’itinéraire d’Oussa-
ma ben Laden et le meurtre d’État du jour-
naliste Jamal Khashoggi ont terni l’image
du pays. Pourtant, on ne soupçonne pas
l’ouverture d’esprit des femmes et des
hommes de ce pays honni des opinions pu-
bliques. Les yeux rieurs derrière son niqab
noir, une jeune mère croisée dans la rue de-
mande en anglais d’où l’on vient. Sa petite
fille sourit, dit bonjour et part jouer sur son
camion à pédales électrique. Les femmes
conduisent. Le tourisme a ouvert les yeux
d’Ebtessem: elle a tombé le niqab en ac-
cueillant les voyageurs. «Comment dire
bienvenue sans sourire? On ne peut pas
être connecté si on ne vous voit pas», justi-
fie-t-elle. Quelque 75% des emplois touris-
tiques sont occupés par des femmes.
Jardins de manguiers, de lavande…
Entre les monts résonne l’appel à la
prière. Face au sanctuaire dadanite s’étire
une immense oasis plantée de palmiers
que les archéobotanistes viennent de da-
ter à l’époque d’Hégra. La vieille ville
d’al-Ula ouvre sur ces jardins plantés de
manguiers, de bananiers, de thym, de la-
vande et de romarin qu’irriguent les qa-
nats, développés au Ier millénaire av. J.-C.
Dans la vieille ville, les visiteurs goûtent
aux premiers émois touristiques du pays.
Au restaurant Suhail, on a dressé des
tables pour les étrangers qui ne mangent
pas par terre, comme il est de coutume de
le faire ici sur de jolis tapis colorés. Le
parfum du biryani au poulet embaume
l’air. Partageant le repas, Soliman, trente-
naire local, s’enflamme: «Les jeunes
Saoudiens s’intéressent plus à la culture
que leurs parents qui, eux, étaient cen-
trés sur leur jeune nation nouvellement
indépendante», raconte-t-il en faisant ré-
férence à la naissance du royaume, le
21 septembre 1932, de la fusion des pro-
vinces du Nejd, berceau de la dynastie
des Saoud, et du Hedjaz. «Je comprends
toutes les visions négatives qui étaient
dites sur mon pays quand il était fermé.
Mais, à présent qu’il est ouvert, je dis:
«Venez, après vous jugerez.» Nous
sommes allés dans la mauvaise direction
et, maintenant, avec la Vision 2030, nous
reconstruisons le passé pour construire
l’avenir. Les Saoudiens ont repris leur
destin en main.»
LE FIGARO MAGAZINE, 2022
Où dormir, que visiter…
HÔTELS
Banyan Tree al-Ula. Dans la
même vallée d’Ashar, un cinq-
étoiles de 79 villas posées
comme des podiums dans le
sable et coiffées de toiles de
tentes blanches avec piscines
privées. L’architecture s’est
inspirée des textures du dé-
sert: traitement des façades en
pisé qui reprend les strates des
falaises et intérieurs avec mo-
tifs nabatéens et œuvres d’ar-
tistes saoudiens. Deux restau-
rants, un spa et une piscine
suspendue entre deux falaises.
Dès 539 fr. la nuit (3 nuits mini-
mum) (00 966 14 512 00 00,
Banyantree.com).
Habitas al-Ula. Un an après son
ouverture dans la vallée d’As-
har, ce cinq-étoiles est un re-
fuge au luxe convivial. No-
nante-six villas se déploient
autour d’un chemin qui sil-
lonne en pente douce jusqu’au
restaurant au bord d’une in-
croyable piscine dans le désert.
Toute la construction, qui se
veut la moins invasive pos-
sible, est posée sur des pon-
tons de bois et peut être dé-
montée sans laisser de traces.
La table aux saveurs locales est
exquise. Dès 990 fr. env.
(Ourhabitas.com).
Caravan By Habitas. Et pour
une expérience insolite et vin-
tage, vivez comme un hippie
en Arabie, en dormant dans
des combis argentés disposés
autour d’une khaïma et d’un
food truck distributeur de
glaces. Dès 500 fr. env.
(Ourhabitas.com).
À FAIRE
Explorer la réserve naturelle
de Sharaan. Elle a été créée en
2019 en bordure de la vallée
d’al-Ula et du site de Madâ’in
Sâlih pour restaurer le patri-
moine naturel de la région. Le
pastoralisme y est désormais
interdit. On explore avec un
ranger, en 4x4, l’immense es-
pace (re)peuplé d’espèces me-
nacées comme le léopard
d’Arabie, mais aussi de bou-
quetins de Nubie, de gazelles
des montagnes. D’antiques
peintures rupestres ornent les
massifs aux formes inouïes.
Visiter le vieux Djeddah. En
pleins travaux pour s’imposer
comme une nouvelle destina-
tion balnéaire sur la mer
Rouge, la deuxième ville du
pays recèle une superbe archi-
tecture traditionnelle dans ses
quartiers séculaires d’al-Balad
et d’al-Faisalyah: les rawashin.
Ces balcons grillagés en bois
colorés filtrent la chaleur et
protègent des regards. Des
échoppes typiques y vendent
toutes sortes d’ouds et d’en-
cens. Un musée, la cité inter-
nationale d’al-Tayebat, révèle
NIE
JORDA
Pétra
Hégra
(Madâ’in Sâlih)
Vallée
d’Ashar
Me
ÉG
Ro
Khaybar
YP
u
ge
TE
Al-Ula
(vieille ville)
Djeddah
Carte: I. Caudullo
Voyages 33
À g.: du haut de ces escaliers,
la vue plonge sur la vieille ville
d’al-Ula.
Ci-contre: il vaut la peine
de descendre à Djeddah,
pour admirer les «rawashin»
qui ornent les façades
dans la vieille ville.
Ci-dessous, à g.: grâce à de
précieuses nappes phréatiques,
une immense palmeraie verdit
la vallée d’al-Ula.
Ci-dessous, à dr.: seul le 4 × 4
d’un guide peut s’immiscer
parmi les merveilles
géologiques de la réserve
naturelle du Sharaan.
la diversité des cultures
dans le pays.
Découvrir Diriya et Ushaiger,
près de Riyad. Une incroyable
énergie baigne la capitale.
Dans ses faubourgs nord-
ouest, un vaste plan de déve-
loppement culturel et touris-
tique réenchante la vieille ville
de Diriya, que Riyad détrôna.
Un musée innovant en raconte
l’histoire (qui passe par
le cheval). Un peu plus loin,
dans le village d’Ushaiger,
typique de cette région
centrale du Nejd, al-Salem,
l’unique musée privé du
royaume rassemble des trésors
dignes de la caverne d’Ali Baba.
Mémo pratique
Meilleure période:
entre décembre et février,
mois les moins chauds.
Décalage horaire: plus 1 heure.
Monnaie: le riyal saoudien
(SAR). 1 CHF égale
4,20 SAR env.
IRAK
ARABIE
SAOUDITE
Sharaan
Pe
Go ique
rs
lfe
(Réserve naturelle)
Région d’Al-Ula
Riyad
Médine
ARABIE
SAOUDITE
La Mecque 200 km
34 Jeux Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Les mots fléchés Par Guillaume Sweig N° 941 Le Sudoku

INSECTE b CÉPAGE b SUBTILISA b b b MESSAGE b EMPLOI b Les chiffres vont de 1 à 9 et n’apparaissent qu’une
PARASITE FRANÇAIS TROU INDÉSI-
CAVE
TRAITEMENT HOMME
ELLE
PRATIQUE À VINS
DANS LA RABLE MÉTAL QUI
NE ROUILLE
seule fois par ligne, colonne et carré.
CEINTURE
HIVERNAL DE LA MER LA BRASSE EN AVANT PAS
a d d d d
Grille n° 1337 - Force 1

VOIE D’EAU c PROUE c

DE BONNE PASSER
ENTORSE HEURE SOUS
À LA RÈGLE SILENCE
a d d PERSONNEL c
CHÂTEAU
DE DIANE
DE POITIERS
ENSEMBLE b SE MOQUER b PRATIQUE c d c b DÉCLAME b
XÉNON CHANSON
DE RELIGIEUSE SANS SUFFIXE PERSONNE UN POÈME
TRIBUNAUX ACCES- ENTOUR-
SOIRE PASSAS VERBAL PROCHE GÂTEAU RESTE DE PROPHÈTE
LOUPE
BEL ENFANT DE HOCKEY À TABLE SEC MOISSON HÉBREU
a d d PIQUANT c d d d d PUISSANTE c
d d
FEMME
RÈGLERA
UN EXIGER DE
PROBLÈME NOUVEAU
PRÈS DE c BASE DE c d BRUIT DE c d
ANGOISSE c
SES SOUS FERMENTS COULOIR
COUTEAU ABSENCE
CÂBLE DÉPITÉ DE POCHE D’ACTIVITÉ
a c d d LIT c d POUR DEUX c
FILET VÉGÉTAL
NE
DE PÊCHE MOUCHE SUPPORTE
AFRICAINE PAS
c d d
NETTOYER SPORT c HAMEAU c
DE COMBAT LIEN ENTRE
EMPEREUR LE MUSCLE
ROMAIN MOUSSES ET L’OS Grille n° 1338 - Force 3
a c d ÉDIFICE c d
FRUIT DU
AGRÉA-
6 2 4
CACAOYER RELIGIEUX
BLEMENT
TERME DE SURPRIS
JAUGÉ POLITESSE
SANC- c d c d EXPERT c d
4 3 7 1
POINT DANS TIONNÉ DÉLAI EN VERS COLÈRES
LE CIEL VIBRATION LIMITÉ D’ANTAN
7 1 5
REPÈRE
DÉCHIFFRER TEMPOREL
a d d c c d MÈCHE c d
MENTION
PRÎT FROID
AU DOS
D’UN
REBELLE
COUPELLE
3 9
CHÈQUE À ESSAIS
PERSÉ-
VÉRER
c DANSE c
HONGROISE ANCIEN
c d 2 7 5 3
SOUVERAIN
ATTÉNUÉ DÉICTIQUE
SLAVE
9 6
a c d c
RUDE AU
TOUCHER
MORCEAU
DE VIANDE
2 9
c c c c 1 6
ARBRE COUPÉE CARGO SUPPORTS
AFRICAIN COURT DE LIGNE DE BALLES
6 3 4 7

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Le mot mystérieux A découvrir: un mot de 7 lettres Les mots croisés N° 2706 A
ACCENTUES Horizontalement
C N E U Q I D I P I L U O A I N F I M E B
ADRENERGIQUE A. Permis accordé. B. Aux couleurs de l’arc-en-ciel.
E N O I R T N E T P E S C B D O D A E D Couronné après avoir remporté un prix. C. Difficile C
ADULATION
AFFIXE
D B N I L E R G L T R C S A A E N S N I à trouver. Fromage de vache anglais. D. Direction.
D
AGRAFE R O E V T F R B T I E A E R P A C I U U Un constituant de la toison du lama. Symbole
AJOURNER E N O I B A G O U N C G D R G R O O E R numéro 4. E. Dame qui occupa les pensées de E
ALIZES S J P V V R L O T O R E I E E E L T T N don Quichotte. Filet à l’anglaise. F. Une grande F
ARDEUR partie du monde. Elle fait l’objet d’un jeu de piste.
I O D E E G N U C A U M R U E T O A A E G
BARREURS G. Homophonies poétiques. Auxiliaire de l’état.
L U U U N A E H D R E E B R S I N P T I
BONJOUR H. Il cachait un fruit défendu. Cortège très impo- H
BONNETIER I R M R V S E U S A I M X S S R E E O T sant de chef arabe. I. Possessif. Transmise à voix
I
BRIDES S E A E N E E I E C E R T I E F L T N E haute. J. Sécrétion de conduit. Sommet de mon-
CAPETIEN S I S N O Z T R N R S N M I F S S O S P tagne. K. Elle traverse Albertville. Composition J
CEDRES musicale. Symbole de l’argon. L. Livrée en botte,
O T C N T I M E R E E T N U E F I B N A K
COLONELS elle est appréciée pour sa pointe. Négation.
F E A O N L N E C M C H A T D T A I O C L
DARWINISME M. Plante fourragère. Service d’achats. N. Les
I N R T E A N I E U C H T N A M I R I D druides le considéraient comme sacré. Réunit une
DECOTE M
DELICE S N A A M R F L N E C E A N N T U U T E grande quantité. O. C’est toxique. Un individu peu
U O D R U E U O T R R M I N A I O D I C sociable. P. Baie du Japon. Totalement disparue. N
DEPRIME
DIRIMANT L B E O L E N O U R O M D A G N F U D R O
DIURNE C P J A U M O S A R I O D U R E Y E E I Verticalement
1. Terrier à poil dur. Agence américaine. D’humeur
P
DUM-DUM
X A M G O Z E S E L I H P O L A H S R R
DUVETE enjouée. 2. Septième planète du Système solaire.
ECHANGE
E U Q I G R E N E R D A R W I N I S M E Ils éduquent des animaux. 3. Où ranger ses éco- Solutions des jeux précédents
ECRIRE nomies. Rachat. 4. N’a pas froid aux yeux. Les Mots fléchés n° 940
EDITION GRAVEURS MASCARADE ROMAND boucler est un gage de sécurité. 5. Extrait de par- R P T D A A D

ELIMINATION GRELIN MENTON SACOCHE tition. Mesure de longueur. Repère de marin. Ses M A R I O N N E T T I S T E
N E T T A C O T T I N
EMBUER GUEULEMENTS MENUET SARRETTE pensées font rire. 6. A demi dessinées sur l’écu. S A V O N T U T E U R E R

EVANOUIR HALOPHILES NIAOULI SEPTENTRION Enfant de nature espiègle. 7. Ensemble de pays K C T U N I Q U E I R E N E A M

B I Z A R R E P U R S A N G S E M B L E

EXCLUSIF IN-DOUZE NON-MOI SETTER accablés par de graves problèmes économiques. T E T E E E P E E E T E L S E R I N

E C L A T E N O L F R E R E S R I M E
FESSEE INFIME PATOIS SIT-IN Un service en or. 8. Retrait de texte. Pointe d’aro- H E R I S S O N F I E S G O A L E U

FOSSILISER IODURE PENSER STANNIFERE mate. Pièce de charpente. 9. Endommagé par un V E S A N I E S A U C E T U R B A N R

N C E D R E T E E J A M B O N L
FRITER IONIEN PERMANENCIER SYNANTHERE choc. Porcelaine chinoise de couleur vert pâle. S E P T A I S S E L L E R E E L M O N

GABION IRIENS RATONNER TATONS L’âne en est friand. 10. Centre de formation. Fatale. T R E K N O E L E C O T T I M I D E
E T E I N E P T E S H U E R E I D E R
GLOTTE LIPIDIQUE REMUER TATOUER Bretonne blonde et passionnée. 11. Plante voisine E T I R E E S S U Y E R B A S S I N E

GOULUMENT MALEFICES RESURCHAUFFE VIVEUR de la gesse. Grande école. Gloussé. 12. Petites
GRADUE MANAGER RIBOTE ZOOTECHNIE souris. Quelle salade ! Mots croisés n° 2705 Sudoku n° 1335
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
A S A N G U I N O L E N T
B T R O U N I G E R I A
C A B D I Q U E R M B

floyd, ledichat lasecolère estllère, je dirj'earrisi c'voueestpasdedelala

D G O A L I M E R I N A
bertschy.co 4477

du voi si n t que
E N U L L I T E E T A T

mauvai consei à sagesse

F E S E L S A M E D I

t'estuunvasgroslui patapouf! vais donc pardonner

G R I M M E L S E I E

après?courir
H E U E U S T O R R

à ce chat. fainéantise.
I G R A T I N E T E E
J A I L A S R U T
K L E T O T S E V R E
L E R P O I L U R O T
Sudoku n° 1336
M J U P E Q U E T E U R
N A D I P E U S E S V I 7 4 8 6 2 9 3 1 5
O D I T L E I A L E P 1 5 2 3 7 4 6 9 8
P E T A L A N O R M E E 6 9 3 5 8 1 4 7 2
9 3 6 8 1 7 5 2 4
2 7 1 4 5 3 8 6 9
Le mot mystérieux 5 8 4 9 6 2 7 3 1
CAMERA 8 1 9 7 3 5 2 4 6
3 2 5 1 4 6 9 8 7
4 6 7 2 9 8 1 5 3
Le Matin Dimanche Dimanche 9 juillet 2023
Jardin
Mains d’or Des feuilles
Chez Pierre Louis, Architecture à la racine,
luthier à La Le Stone Garden, on croque
Neuveville le persil

Getty Images
prouesse signée
37 Lina Ghotmeh à Beyrouth 41
Laurian Ghinitoiu
tubéreux 43

Cultura
Yvain Genevay

«Ma
mission de
divertir est
loin d’être
terminée»
EXCLUSIF «Astérix et Obélix
- Mission Cléopâtre» ressort
en salle dans une version
restaurée. Avec une image
telle qu’Alain Chabat l’avait
rêvée. Interview.
JEAN-PHILIPPE BERNARD
jean-philippe.bernard@lematindimanche.ch

Plus de 14 millions d’entrées en France, près de

500’000 en Suisse, s’il est un film qui incarne
le triomphe d’un cinéma populaire français de
qualité, c’est bien «Astérix et Obélix - Mission
Cléopâtre». Seuls Dany Boon («Bienvenue chez
les Ch’tis»), Olivier Nakache et Eric Toledano
(«Intouchables») et Gérard Oury («La grande
vadrouille») ont fait mieux. À l’occasion de son
21e anniversaire, le long métrage réalisé par
Alain Chabat a bénéficié, comme toute œuvre
classique digne de ce nom, d’une restauration
numérique scrupuleuse. Pour le plus grand
plaisir d’un réalisateur auquel le succès n’a pas
fait tourner la tête.

«Mission Cléopâtre» revient sur les écrans

en version remastérisée. Vous n’en avez pas
marre de devoir parler de ce film?
À vrai dire, en vous appelant, je me demandais
ce que j’allais pouvoir vous dire d’inédit sur
cette affaire-là. Si vous voulez que nous par-
lions d’autre chose, surtout n’hésitez pas
(rires)!

À la sortie du film, en 2002, vous disiez que

vous concrétisiez là un rêve d’enfant. Par la
suite, avez-vous continué à porter un regard
émerveillé sur les aventures du petit Gaulois?
Absolument. L’univers d’Astérix me touche
Alain Chabat garde un très bon souvenir du tournage de «Mission Cléopâtre». «Nous étions toujours prêts à déconner.» T. Laisné/Contour by Getty Images toujours autant, il me ramène à l’enfant ➜
36 Cultura Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Passagge
du livrre
«Mission Cléopâtre»,
porté par le duo
Depardieu-Clavier,
est un régal de
comédie. Pathé Films Michel Audé état
Journaliste

Pierre Michon:
la résurgence
d’un désir brûlant
Il arrive que les rivières disparaissent,
cheminent sous terre et ressurgissent
quelques kilomètres plus loin. Les livres
de Pierre Michon peuvent faire de
même. Un texte ancien et baptisé du
nom d’une rivière («La grande Beune»,
1996), le seul de cet auteur que l’on
puisse qualifier de roman, a repris son
cours à l’air libre près d’un quart de
siècle plus tard. «La petite Beune»
s’ajoute ainsi à la grande dans un livre
qui les réunit: «Les deux Beune». Cet im-
mense écrivain français n’avait plus rien
publié depuis «Les Onze» (Verdier), en
2009; on reçoit donc cette suite comme
un cadeau tombé du ciel.
De nouvelles couleurs pour un film irrésistible «La grande Beune» s’achevait sur un
désir tout à la fois exacerbé et suspendu.
Instituteur de 20 ans nommé dans un
Depuis quelques jours, les HDR, Dolby Atmos). De fait, dès paru en 1965, narrée ici sur un qu’ils ont à faire: cogner sur les village périgourdin, à deux pas des
hauts responsables de la mai- les premiers plans, l’immaculé ton bienveillant par le regretté Romains et venir en aide à tous grottes de Lascaux et à l’aube des années
son Pathé rivalisent de tirades de la copie interpelle. Le son Pierre Tchernia. On jubile dès la les autres. Plaisir intact, bon- 1960, le narrateur restait là sans avoir as-
riches en informations tech- clair, nuancé, claque en toutes première scène de ménage heur total. souvi le désir taraudant qui le poussait
niques savantes dans le but de circonstances alors qu’un nou- entre Cléopâtre (Monica Belluc- vers la buraliste Yvonne, plus âgée que
convaincre le grand public que vel étalonnage permet aux cou- ci) et Jules César (Alain Chabat) lui, dont l’aplomb et la peau laiteuse lui
le retour au cinéma d’«Astérix leurs d’irradier comme jamais et devant les cafouillages de À VOIR avaient mis «d’abominables pensées
et Obélix - Mission Cléopâtre» dans la lumière intense de l’architecte Numérobis (Jamel «AAstérix et Obélix dans le sang». Le récit reprend quelques
constitue l’un des événements l’Égypte antique (en fait, autour Debbouze, génial). Le reste de- - Mission mois plus tard. À l’automne noyé de
de l’été 2023. Pathé a donc in- de la ville marocaine de Ouar- meure un régal de comédie fa- Cléopâtre»,
C de et pluies succède un hiver bruegélien qui
vesti un budget que l’on ima- zazate). miliale, drôle, inspirée, pi- avvec Alain Chabat, mord le lecteur. Temps de carnaval, de
gine pharaonique pour offrir au En plus du résultat grandiose, quante mais jamais méchante ett Christian Clavier, masques et de valeurs retournées.
film d’Alain Chabat un lifting le spectateur se régale, une fois tout au long de laquelle Astérix Gérard
G Depardieu, Temps feuilleté où le narrateur sent le
(très) haute définition avec la encore, de l’histoire basée sur (Christian Clavier) et Obélix Bellucci, Jamel Debbouze
Monica Bellucc passé remuer sous ses pieds: la vieille
technologie la plus pointue (4K, l’album «Astérix et Cléopâtre», (Gérard Depardieu) font bien ce (1 h 47). En salle. République des «barbichus» à la Jules
Ferry, le Moyen Âge des fabliaux et, plus
bas encore, ce fond des âges où des tail-
leurs de silex sont allés peindre au flanc
des cavernes ces images de bêtes qui ont
➜ que j’étais et à celui que je suis resté. Je re- au cinéma. Les autres sont souvent odieux qui ne sait rien dire d’autre que: «Ça va tiré le genre humain hors de l’animalité.
lis tous les albums avec un plaisir infini. Ce considérées comme d’épouvantables navets. être dur de passer après moi. Et pourquoi tu «Les deux Beune» est un roman de
qu’ont fait Goscinny et Uderzo est tout de N’est-ce pas excessif? ne m’as pas pris pour jouer César, parce que l’origine, de l’archaïque, des causes pre-
même incroyable. Aujourd’hui encore, ces per- Même si, bien entendu, je suis content que Cassel, franchement…» (Rires.) Guillaume et mières. Dans cette prose si belle, dense
sonnages continuent à vivre avec d’autres au- mon film soit apprécié, je partage votre avis: Vincent Cassel sont venus et ont joué le jeu, et impétueuse, ardente et parfois crue,
teurs, sur différents supports aussi. Je trouve c’est excessif et injuste. Les Astérix sont des c’était magnifique! Pierre Michon représente une danse des
ça beau. films compliqués à faire. Tous les metteurs en sexes qui s’observent, se jaugent, s’at-
scène qui se sont frottés à l’exercice forment Vous venez d’évoquer «Le Late», programme tirent, se frôlent et veulent l’assouvisse-
Quels souvenirs gardez-vous du tournage? pour moi une petite famille. Famille à laquelle éphémère désormais culte. Avez-vous regret- ment. Son livre tourne ainsi autour d’un
C’était très joyeux. Nous étions toujours prêts à je suis ravi d’appartenir. Il faut rester humble: té que cette aventure télévisuelle ne dure pas point obscur où s’entremêlent l’anima-
déconner même si tout le monde se donnait à si j’ai pu réaliser mon film, c’est parce qu’aupa- plus longtemps? lité et l’humanité, le profane et le sacré,
fond. Personnellement, je me concentrais sur ravant «Astérix et Obélix contre César», de Non! On savait au départ qu’on avait ces dix pe- le visible et l’invisible, la chair brûlante
chaque scène et je ne pensais pas à l’enjeu fi- Claude Zidi (ndlr: en 1999, avec déjà Christian tits spots durant la Coupe du monde de Foot- et «l’amour qui meut les étoiles».
nancier ou au bordel que je voyais autour de ce Clavier et Gérard Depardieu), avait rencontré ball pour faire un late show. Dix émissions, ça
projet spectaculaire. Avec du recul, je pense un énorme succès. Sur tous ces longs métrages, évite de sombrer dans la routine! On a bossé
que j’étais inconscient, dans le bon sens. il y a la vision d’un metteur en scène. Ainsi «As- très fort et le plaisir fut au rendez-vous. Après,
térix aux Jeux olympiques», de Frédéric Fores- il faut savoir que la grille de TF1 n’est pas
Ressortir le film, c’est votre idée? tier et Thomas Langmann, demeure un gigan- construite pour accueillir une émission tous
Sincèrement, non. En général, la restauration tesque spectacle. Dans «Au service de Sa Ma- les soirs à 23 h, car les programmes prime time
des ouvrages du catalogue Pathé est une entre- jesté», de Laurent Tirard, ce que fait Edouard n’ont pas tous la même durée, contrairement
prise réservée aux vieux films ou aux grands Baer avec le personnage d’Astérix est égale- aux grilles américaines qui sont construites à À LIRE
succès. Il s’agit d’abord de les protéger. Certes, ment fort intéressant. Enfin, cette année, Guil- l’heure ou à la demi-heure. Là, on savait qu’on «Les deux Beune»,
je savais que mon film était concerné, car toute laume Canet a osé renouveler tout le casting bénéficiait d’une exception grâce aux matches P
Pierre Michon,
mon équipe technique avait été sollicitée. Mais avant de prendre un peu ses distances avec la qui étaient tous censés se terminer à la même V
Verdier, 160 p.
j’ai appris bien plus tard que Pathé souhaitait le comédie pour réaliser un vrai grand film heure. Si la grille de TF1 venait à changer et
relancer en salle… d’aventures. permettait du même coup de faire un late show
sur 150 dates, je pense que les émissions n’au-
Que pensez-vous de cette restauration? raient pas la même allure que celles que vous
Je ne l’ai pas encore vue (rires)! En revanche, gardez en mémoire. Elles étaient très écrites et
«L’univers d’Astérix me
Laurent Dailland, mon chef opérateur, est très
touche toujours autant,
ne laissaient, au final, que peu de place à l’im- Le top 10
heureux du résultat. Il m’a dit récemment: provisation.
«C’est le film que tu nous avais demandé il y a il me ramène à l’enfant
vingt ans et qu’on ne pouvait pas complète- que j’étais et à celui que je suis «Santa & Cie», le dernier film que vous avez
Tous rayons confondus,
ment faire à l’époque.» réalisé, remonte à 2017. Quand allez-vous
resté. Je relis tous les albums vous décider à repasser derrière la caméra?
du 26 juin au 1er juillet
Pour quelles raisons? avec un plaisir infini.» Pour le coup, je suis encore en train de travail- 1. La faiseuse d'étoiles Mélissa Da Costa - LGF/
Des raisons de rendu visuel, avant tout. Je vou- ler sur Astérix. Ce sera une série d’animation Le Livre de Poche
lais certaines couleurs, sur les sols, sur les Alain Chabat, réalisateur qui sera diffusée l’an prochain sur Netflix. 2. Sur la dalle Fred Vargas - Flammarion
braies d’Obélix, certaines rouges, certaines Après, j’aimerais faire un ou deux films avec 3. Faire paysan Blaise Hofmann - Zoé
bleues… On me répondait: «On va pouvoir ré- des acteurs de chair et d’os. J’ai quelques idées 4. Tant que le café est encore chaud Toshikazu
Kawaguchi - LGF/Le Livre de Poche
pondre à tes demandes dans certains cas. Dans et j’espère que ce sera marrant.
5. Il nous restera ça Virginie Grimaldi - LGF/Le
d’autres, non.» Aujourd’hui, on dispose d’ou- Un film d’aventures démoli par la critique… Livre de Poche
tils numériques qui font que ce n’est plus un J’avoue que j’ai du mal à comprendre: Guil- On vous fait confiance! Récemment aussi, 6. Kilomètre zéro Maud Ankaoua - J'ai Lu
problème. Et comme on a toutes les informa- laume est un travailleur infatigable et il a fait on vous a vu exceller dans un registre plus 7. Les sept sœurs. Tome 8, Atlas, l'histoire de
tions sur la pellicule super 35 d’origine, on peut «L’Empire du Milieu» avec énergie, avec dramatique que de coutume dans «Je suis là». Pa Salt Lucinda Riley, Harry Whittaker -
les ressortir avec une précision stupéfiante. amour… J’avais très envie qu’il vienne dans C’est une voie que vous comptez explorer? Charleston
Aujourd’hui, je me réjouis de découvrir en salle «Le Late», l’émission que j’ai animée l’au- J’ai aimé faire ce film-là mais, a priori, le drame 8. Le don suprême. Librement adapté du texte
de Henry Drummond Paulo Coelho -
le film comme je l’avais rêvé. tomne dernier sur TF1, afin qu’on s’amuse au- ne m’attire pas. Je préfère de très loin la comé- Flammarion
tour du fait que mon film est considéré par die. C’est mon domaine, je m’y sens bien et ma 9. Les cahiers d'Esther. Tome 8, Histoire de
«Mission Cléopâtre» demeure la référence beaucoup – mais pas par moi – comme intou- mission, celle qui consiste à divertir mes sem- mes 17 ans Riad Sattouf - Allary éditions
indétrônable des adaptations d’Astérix chable. Ça m’a permis de jouer le rôle du mec blables, est loin d’être terminée. 10. Les masques éphémères Donna Leon - Points
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
2/7
Métiers
d’art
Pierre Louis, l’homme
qui fait chanter les arbres
TEXTE: ALEXANDRE LANZ
PHOTOS: YVAIN GENEVAY
«Vous entrez dans une zone blanche. Merci
d’éteindre votre téléphone portable et vos
appareils connectés. Merci de penser à la
santé des résidents!»: sur le chemin fores-
tier menant à sa demeure dans la nature sur
les hauteurs de La Neuveville (BE), Pierre
Louis a planté un panneau avec un télé-
phone portable barré. Ici, le wi-fi n’existe
pas et l’itinéraire bucolique s’avère une
voie impénétrable pour les ondes de ré-
seaux mobiles, toutes générations confon-
dues. Le luthier souffre d’électrohypersen-
sibilité. Un mal que la médecine ne dia-
gnostique pas et qu’aucune assurance ne
prend en charge, sauf en ayant recours à la
psychiatrie dans certains cas. Il déplore ce
manque de reconnaissance, mais salue sa
chance d’avoir trouvé un endroit où il
puisse concilier sa vie de famille et son tra-
vail en toute harmonie.
Pour fuir les ondes invisibles qui brouillent
son cerveau et torturent ses sens, il a été
contraint de venir s’installer dans cette
clairière il y a cinq ans. Au loin, la rumeur
d’une chute d’eau met d’emblée au diapa-
son. Ici, la nature est reine et l’on s’adapte
à son rythme. Un petit coin de paradis au-
quel il a néanmoins dû s’habituer. «Quand
j’ai vraiment compris la source de mon mal,
on a cherché à déménager, déclare-t-il. Au
début, je ne voulais pas venir ici, c’est un
trou. C’était pénible. On manque de déga-
gement, mais les antennes envahissent
les endroits dégagés. Il m’a fallu une année
pour comprendre que je suis bien ici et j’ap-
précie dans cet environnement ce qui
Tout l’été, nous donnons la parole à huit artisanes et artisans d’art, qui nous font découvrir
leur métier. Cette semaine, un luthier domicilié à La Neuveville (BE) nous raconte sa passion
pour les instruments à cordes.
n’existe pas ailleurs. Je vais me promener
autour de la cascade de la combe du Pilouvi
et je n’avais jamais autant joué de musique
auparavant.»
«L’épicéa Un métier de solitaire
doit avoir Dans son atelier, l’artisan de 59 ans forme
poussé un tandem éphémère avec son neveu
Théo, qui profite de l’expertise de son oncle
en forêt, pour fabriquer sa contrebasse. Bien qu’il
entouré apprécie énormément les rencontres et les
d’autres moments passés entre amis dans le privé,
arbres qui l’empêchent au travail Pierre Louis est plutôt un soli-
taire. C’est une des raisons pour lesquelles
d’avoir trop de branches, il a choisi le métier de luthier quand il était
de préférence en altitude, adolescent. «Au départ, j’aimais travailler
où il pousse lentement.» le bois. J’avais pris goût à la construction de
bateaux avec mon père, se souvient-il.
Pierre Louis, luthier Nous avions visité des chantiers navals,
mais j’ai rapidement compris qu’un bateau,
Ce minuscule rabot permettent de creuser le Le métier de luthier est dévolu, en grande partie, à la
bois avec précision. réparation d’instruments. Ceux-ci attendent de l’être.
Cultura 37
avec un peu de chance, tu en construis
peut-être un dans ta vie, car en Suisse, on
fait surtout de la rénovation, ça m’a décou-
ragé.» À cet âge-là, rien ne presse, rien n’est
grave. Dans sa quête, le jeune violoncelliste
songe à son luthier, un métier solitaire jus-
tement. À 14 ans, il réussit l’examen pour
intégrer l’école de lutherie à Brienz. Il com-
mence une année plus tard, en 1980. D’une
pierre deux coups, il apprend un métier…
et l’allemand sur le tas. Six ans après le dé-
but de sa formation, il se met à son compte.
Cela fait maintenant trente-cinq ans que la
passion est intacte.
Dans le contexte actuel, on pourrait
qualifier son métier de particulièrement
durable. La vie d’un violon n’est pas pro-
grammée pour l’obsolescence. Au
contraire, sa matière première, le bois, vit,
bouge, se restaure. L’instrument se
soigne, se transmet. Pour la plupart pri-
vés, ses clients viennent de toute la Suisse
et apprécient le cœur qu’il met à l’ouvrage.
«Des Zurichois viennent régler leur violon
chez moi, car je prends le temps de bien
faire les choses. La lutherie est un travail
de précision, je ne me stresse pas. Chaque
instrument réagit différemment et il
existe tant de facteurs qui peuvent in-
fluencer le résultat. C’est hypersensible,
si tu déplaces l’âme d’un demi-millimètre,
cela peut tout changer. C’est un équilibre
à trouver.» À son actif, le luthier compte
une centaine d’instruments à ce jour. Il
faut environ cent cinquante heures de tra-
vail pour un violon, soit un gros mois.
L’épicéa du Chasseral est incomparable
Dans le cas des instruments créés par
Pierre Louis, la durabilité ne se limite pas à
un label de marketing. Il y a quelque chose
de magique dans son récit. Construire des
instruments à base d’une matière première
vivante extraordinaire qui pousse au grand
air, qui permettent ensuite de jouer de la
musique, cela s’apparente à la symphonie
du vent qui se faufile entre les branches.
Pour la touche et les chevilles, il sculpte
l’ébène. Quant à la table en épicéa, cela fait
trente ans qu’il travaille avec des arbres de
Électrohyper- sa région, qui poussent sur le Chasseral.
sensible, Pierre Rares, mais les meilleurs selon lui. Il en
Louis a dû installer trouve également dans la forêt du Risoux,
son atelier de dans la vallée de Joux. «La table de réso-
lutherie à l’écart nance est une voûte qui doit vibrer. Le bois
de La Neuveville, solide permet une table fine et le son de-
là où les ondes vient beaucoup plus libre et cristallin. Par
magnétiques contre, un bois lourd et peu solide a ten-
sont bannies. dance à étouffer le son. L’épicéa du Chasse-
Il a, à ce jour, créé ral est incroyable, mais cependant ce n’est
une centaine pas n’importe lequel. Il date de plus de 250
d’instruments. ans et il faut trouver le bon. Il doit avoir
poussé en forêt, entouré d’autres arbres qui
l’empêchent d’avoir trop de branches, de
préférence en altitude, où il pousse lente-
ment. Ceux qui poussent trop vite ont des
cernes irréguliers et c’est moins bon. Il faut
également éviter les arbres qui ont poussé
dans un endroit trop pentu, sinon cela crée
des tensions dans le bois.»
Chaque étape de la fabrication requiert une lame
différente pour un rendu minutieux.
 38 Cultura Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Les rendez-vous de l’été Six écrivaines et écrivains

parlent de leur classique préféré. Une invitation!

Sarah Jollien-Fardel
«Ce que j’aime chez Eluard, c’est sa simplicité»
DÈS CE MERCREDI PASCALE FREY, PARIS m’impressionnait beaucoup. J’étais adolescente la première
MERCREDI – 12 JUILLET Avec «Sa préférée», elle a créé
Un jour j’ai osé entrer, et je ne
me souviens plus si c’est la li-
fois que je les ai lus. Je n’avais
évidemment pas la vie d’une

MATT POKORA
l’événement lors de la rentrée
littéraire de l’automne dernier.
En ce début d’été, elle vient
tout juste de terminer sa tour-
braire qui me l’a conseillé ou si femme de 52 ans. Je retenais
je l’ai pris par hasard. davantage la flamme, la pas-
sion. Et puis en vieillissant,
Vous souvenez-vous l’amour s’assagit, il y a eu des

BIGFLO ET OLI
née des librairies et des salons.
Maintenant, elle va pouvoir se
remettre à la tâche et se lancer
dans son deuxième roman, un
de ce que vous avez éprouvé hauts et des bas, il s’est modi-
la première fois que vous avez fié en quelque chose de plus
lu ces poèmes? apaisé mais très fort, j’ai donc
Je ne me rappelle plus précisé- toujours autant d’émotion

JOSS STONE NIK WEST

passage difficile pour un auteur
dont le premier livre fut un suc-
cès. Mais toujours enthou-
siaste, Sarah Jollien-Fardel
semble confiante. Nous aussi.
Et c’est avec beaucoup d’intérêt
JEUDI – 13 JUILLET que nous l’avons écoutée parler
ment mais en tout cas ce fut un
choc. Ce que j’aime chez
Eluard, c’est sa simplicité. Sa
pureté. Il n’y a aucune grandi-
loquence. Il y a un autre livre
de lui que j’ai beaucoup aimé,
«L’immaculée conception»,
quand je lis ces poèmes.
Eluard a-t-il influencé
votre vocation d’écrivain?
Non. Pas plus que mes lec-
tures d’enfant, la comtesse de
Ségur ou «Le club des cinq» ne

SOPRANO MPLET
de son classique. qu’il a écrit avec André Breton. l’ont fait. Mais j’aime sa sim-
plicité et c’est peut-être dans
Quel classique avez-vous Relisez-vous ce poète? ce sens qu’il m’a influencée.
choisi? Très souvent. Lorsque je me Un autre livre a peut-être da-

MIKA
Adolescente, j’adorais «Rêverie trouve en panne d’écriture, je vantage déclenché mon désir

CO
d’un promeneur solitaire», de
Jean-Jacques Rousseau, que
l’on étudiait à l’école. J’aimais
aussi Alexandre Dumas, Albert
picore au hasard. Relire des d’écrire: «Rapport aux bêtes»
phrases aussi limpides que les de Noëlle Revaz. Ce n’est pas
siennes me remet en jambes. un classique parce qu’il n’a
Plusieurs fois par semaine, je que 20 ans. C’est son premier

LOUIS BERTIGNAC WINTERSHOME

Cohen mais, après mûre ré-
flexion, j’ai choisi un recueil de
poésie qui me suit depuis que
j’ai 17 ans. Je l’ai acheté en dé-
cembre 1989, et à partir de ce
VENDREDI – 14 JUILLET jour j’ai développé un amour
reprends le livre d’un grand
auteur et j’ouvre une page au
hasard. Cela pourrait me dé-
courager, me prouvant que je
n’arrive pas à leur cheville en
me montrant tout le chemin
livre publié chez Gallimard, je
l’ai adoré, l’ai relu, avec tou-
jours la même émotion. Ce
qu’elle a provoqué en moi –
car je voulais écrire et être pu-
bliée à Paris –, c’est que c’était

-M-
fou pour Paul Eluard. Il y a des
textes que l’on aime jeune et
puis cet engouement passe
avec le temps. Mais ces «Der-
niers poèmes d’amour», je les ai
qu’il me reste à parcourir, mais
finalement cela me stimule.
Car écrire est vital pour moi.
Est-ce que votre lecture
possible.
Écrivez-vous de la poésie?
Lorsque j’étais jeune, mais
je n’ose plus. J’ai récemment

FLORENT PAGNY
lus à toutes les étapes de ma
vie. Aujourd’hui, j’ai 52 ans, je
suis un peu u plus sage,
sage mais je
l’aime toujours autant.
de ces poèmes a changé
au fil des années?
éprouvé un choc absolu à la lec-
ture d’un jeune Palestinien qui
vivait au Danemark,
Danemar Yahya Has-
san. Il n’a eu le tem
mps d’écrire

DAVE EVANS VERONICA FUSARO

qu’un seul livre e avant d’être
Comment l’aviez-vous choisi? assassiné. Être poète, c’est
C’était à la librairie
l de Sion, La aussi voir la vie autre-
Liseuse. À ll’époque, cet endroit ment. Écrire e d’où l’on
vient, où l’o
on est.

SAMEDI – 15 JUILLET Quels autre es classiques

GIMS & DADJU

nous conse eillerez-vous?
«Le livre dde ma mère»,
d’Albert Co ohen. «De-
main dès l’aube», de

TAYC
Victor Hug go, le poème
qu’il a écrit pour sa fille.
«Le comte d de Monte-
Cristo», d’Ale exandre Du-
mas que j’ai découvert à

HATIK FRANGLISH «Derniers

poèmes
la téléviision avec ma
grand d-mère, et que
j’ai lu
enfi
u plus tard. Et
fin «Madame
d’amour», Boovary», de
DIMANCHE – 16 JUILLET le recueil Fllaubert, que

STARS 80
de poésies j’’ai beaucoup
d’Eluard, aimé même si
a
suit Sarah jje détestais
Jollien- Emma, pré-
Fardel nom que l’on

UMBERTO TOZZI
depuis retrouve
ses 17 ans. dans mon
Yvain livre.
Genevay

YANN LAMBIEL «Sa préférée» est un roman, pas une autofiction

Lorsque «Sa préférée» est sorti, personne ne
voulait, ne pouvait croire que ce roman n’était
pas son histoire. Au fil des rencontres et des in-
terviews, Sarah Jollien-Fardel a dû rappeler, cla-
mer et proclamer qu’elle aimait son père, le plus
charmant des hommes! C’était sa punition pour
avoir le talent de raconter des événements de
manière si vivante que le lecteur a confondu fic-
tion et réalité. «Sa préférée» raconte donc l’his-
toire d’un père violent. Il a la main leste et
violence, décrite avec cette simplicité qu’elle dit
aimer tant chez les autres, traverse le livre de
bout en bout. Elle changera la vie de la narra-
trice, la rendant inapte à l’amour, celle de sa
sœur de manière tragique et aura fait de la mère
un otage incapable de se rebeller. Ne relâchant
jamais la tension, Sarah Jollien-Fardel a terminé
son roman avec une fin ouverte. Au lecteur de
décider celle qu’il préfère.

INFOS ET BILLETS : lorsqu’il a bu, ce qui arrive souvent, un wagon

d’injures se déverse de sa bouche. Tout le

SIONSOUSLESETOILES.CH monde en prend pour son grade, la narratrice

(Jeanne), sa sœur (Emma), la «préférée» de leur
père, leur mère. Tout le village sait ce qu’il se À LIRE
passe, et personne n’intervient, pas même le «Sa
« préférée», Sarah Jollien-
médecin venu soigner des blessures qui ne Fardel,
F Éditions Sabine
laissent aucun doute quant à leur origine. La Wespieser,
W 200 p.
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 Cultura 39

Mavis Staples,
la voix
est libre

MUSIQUE L’ahurissante chanteuse de Chicago les meilleurs faiseurs de hits de Dieu. À

revient créer l’événement à Montreux. Amie
de Dieu comme de Dylan, de Prince comme
de vous et moi, voici l’une des voix du siècle.
CHRISTOPHE PASSER
christophe.passer@lematindimanche.ch
Au jour de ses 8 ans, en 1947, quelque part
dans une église du sud de Chicago, l’un
des lieux les plus terribles de l’Amérique,
là où l’homme blanc raciste repousse sans
cesse l’homme black, cette gosse s’avance.
Il vous faut fermer les yeux et retourner
vers ces temps anciens, tenter de deviner
à la fois sa confiance et sa timidité se fai-
sant face, mais surtout son cœur qui
s’ouvre, laissant place à la voix qui s’élève,
et qui dit le gospel. Alors, dans l’assistance
médusée, la gamine voit quelque chose
qu’elle ne comprend pas tout de suite.
Des fidèles se mettent à pleurer. Sa mère,
quand elle a fini, doit longuement lui ex-
pliquer: «Mavis, ils ne pleurent pas parce
qu’ils sont tristes, mais parce que tu les
rends heureux.»
Cette épiphanie du chant de Mavis
Staples est décisive. On pourrait presque
arrêter là les tentatives de dire le génie de
son art, qui, de la petite fille de jadis à l’oc-
togénaire d’aujourd’hui, cherche sans
la violence et l’amour, l’étreinte et la prière,
le blues, le funk et le R’n’B, criés en ouvrant
les bras.
Berceau de musique
Elle est venue au monde dans un berceau
de musique. Celle de son père, Roebuck
«Pops» Staples, bon guitariste de blues et
gospel qui crée dès le début des fifties un
family group, les Staples Singers. Il y a là
Mavis, ses sœurs Cleotha et Yvonne, son
frère Pervis et daddy Staples qui les ac-
compagne. Durant des années, ils font
la «route du gospel», d’église en église,
créant les harmonies bleues du chant sa-
cré. Au milieu d’eux, cependant, Mavis
s’impose vite. Voix forte, voix profonde,
transe, voix grave: elle devient ensuite ro-
cailleuse, énorme. Mavis est une voix-
montagne, de celles qui inspirent et en-
tendent aussi accompagner vers le haut le
mouvement naissant des droits civiques.
À partir de 1957, une fois ses études ter-
minées, Mavis et le groupe sont lancés,
emmenant dans tout le pays ce qui est
considéré alors comme la plus importante
formation vocale d’inspiration divine
d’Amérique. On dit des Staples Singers
qu’ils sont les «God’s Greatest Hitmakers»,
Avec Norah Jones, une affaire d’amitié
partir du milieu des années 60, le groupe
devient proche du pasteur Martin Luther
King, et le son militant de cet homme, ré-
volte non violente et rassembleuse, ça de-
vient eux plus que toute autre musique.
«When We Will Be Paid» ou «Long Walk to
D.C.» prennent le rang d’hymnes. Mavis
Staples chante ainsi pour King lors des
marches de Selma à Montgomery. De cette
époque, elle racontera plus tard une anec-
dote: Bob Dylan demandant à papa
Staples d’épouser sa fille Mavis. Mais elle
le rembarre. Ce qui ne les empêche pas de
demeurer amis. Et elle chante souvent,
seule ou avec le groupe, quelques fa-
meuses chansons de Dylan.
Le 4 avril 1968, King est assassiné à
Memphis. Dès l’année suivante, Mavis
entame une carrière solo, qui va l’amener
vers une seconde épiphanie. À l’été 69,
le Harlem Cultural Festival, véritable
Woodstock noir, rassemble à New York
300’000 personnes en quelques week-
ends, dans une totale indifférence des
médias, qui ratent l’événement auquel
le film «Summer of Soul» rendra sa place
historique en 2021. Nina Simone, Won-
der, Sly Stone ou B.B. King, tous sont là.
Il y a aussi Mahalia Jackson, la reine his-
torique du gospel. À un moment, elle en-
tame «Precious Lord Take My Hand»,
thème préféré du pasteur King, et invite
Mavis Staples à le chanter avec elle. Lors
de ces quelques minutes stupéfiantes, il
se passe quelque chose de l’ordre du mi-
racle, deux femmes habitées, Dieu est
présent au premier rang, les couvrant de
Mavis Staples,
une voix-montagne
force et de tendresse. Mahalia fait plus
que chanter avec Mavis dont elle est
que voulait épouser
Bob Dylan et
l’idole: elle l’adoube, elle lui montre le
chemin de la voix libre.
pour laquelle Nick
Cave ou Ry Cooder Un statut à part
ont écrit
des chansons.
Le reste, ce sont des tubes seventies formi-
dables, encore avec les Staples Singers,
David Wolff/Getty Images comme «I’ll Take You There» en 1972. Puis
les années passent et Mavis développe une
carrière en solo qui lui donne peu à peu un
statut à part, dès les années 90 surtout.
Tout à coup, cette géante de l’art vocal ap-
paraît d’évidence comme n’ayant aucune
limite. Le chant de la révolution (le mer-
veilleux album «We’ll Never Turn Back», en
2007), le funk («The Voice», produit par
Prince, en 1993), le pur gospel («Spirituals &
Gospel», avec l’organiste Lucky Peterson,
en 1996), l’americana version black (le for-
midable «You’re Not Alone», en 2010). Elle
reçoit quelques médailles d’Obama ou
d’autres, et l’allégeance du monde de la
musique, du rock au blues, elle qui a croisé
autour des micros aussi bien le rappeur Pu-
sha T que Ray Charles, Dylan, Ann Peebles
ou Norah Jones, elle pour qui ont écrit des
chansons Nick Cave ou Ry Cooder.
Le 10 juillet, sur la scène du festival de
Montreux, Mavis Staples fêtera pile ses
À VOIR 84 ans. On peut galvauder le mot de lé-
Mavis Staples, gende: en voilà une pour de vrai. On peut
Norah Jones, galvauder la métaphore sur un chant si
Auditorium ample qu’il est une bibliothèque vivante
Stravinski, de la musique black depuis cent ans: c’est
Montreux Jazz cependant exactement cela. La petite fille
Festival, lundi qui créait des larmes de joie s’avance, c’est
10 juillet. son histoire qu’elle nous offre.
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La Menuhin Academy
Les Musiciens de

cesse cette élévation, cette fracture solaire Programmée le même ou de rock la douceur dans lesquels elle s’est SUR LES ROUTES DES FESTIVALS
qui explose le plexus de l’auditeur pour le soir au Stravinski, Norah d’un art vocal finalement lancée depuis, il y a en un
révéler à lui-même, à l’émotion qui le dé-
chire et soudain déborde de joie, ou d’une
Jones ne semble pas avoir
grand-chose en commun
assez… folk. Et son talent
est sans doute de ne pas
qui retient l’attention: sa
paire de duos avec Mavis
ÉTÉ 2023
colère qui met en mouvement, ou encore avec le chant divinement s’être perdue en route, Staples. Le premier, «I’ll Rencontres Musicales d’Évian
de larmes qui soignent. Nous n’avons pas furieux de Mavis Staples. d’éviter les tentations si- Be Gone», est sorti en France - 8 juillet
affaire avec Mavis Staples à une bonne Mais elle partage avec elle rupeuses ou trop gla- 2019. Le second, le ma-
chanteuse ordinaire, il y en a dans tous les une manière de s’ouvrir à mour, sa manière demeu- gnifique «Friendship», Festival de Bellerive
coins de scène ou de plateforme de strea- d’autres sonorités. Après rant à la fois très person- publié en 2022, était l’un Genève - Suisse - 12 juillet
ming. Mavis Staples est d’une autre catégo- ses débuts classés jazz nelle et reconnaissable en des derniers titres enre-
rie. C’est l’une des chanteuses du siècle, («Come Away With Me» quelques inflexions. gistrés par «Pops» Staples Festival Pablo Casals
peut-être la plus unique de toutes, entre au printemps 2002, cinq Le retour de la New- avant de s’en aller en Prades - France - juillet-août
Aretha, Ella, Tina, Mahalia, Etta, toutes Grammy Awards, 20 mil- Yorkaise, 44 ans, à Mon- 2000. Mavis et Norah
sœurs en espérance. Pour un peu, elle les lions de copies écoulées), treux s’est pourtant fait sont donc amies: la pro- IMMA Gstaad Menuhin Festival
additionnerait presque. Cela parce que de- la fille de Ravi Shankar a attendre: on ne l’y avait messe d’une rencontre Suisse - 24 août
www.menuhin.com
puis plus de sept décennies, elle raconte rapidement teinté de plus entendue depuis sur scène lundi à Mon-
Orchestre résident du Rosey Concert Hall
son temps en prise directe avec la mélodie, country, de pop, de blues 2010. Parmi les projets treux?
40 Cultura Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023

Le Stone Garden à Beyrouth

est une tour de logements
où béton et verdure
s’harmonisent. Situé non
loin du port, il a résisté
à l’effroyable explosion
des silos en août 2020.
Iwan Baan. Gilbert Hage

En 2017, Lina Ghotmeh obtient Le pavillon de la Serpentine Gallery

deux distinctions pour le Musée national est à voir à Londres jusqu’à fin
estonien. Takuji Shimmura/courtesy to DGT octobre. Iwan Baan

ARCHITECTURE Lina ponds de manière spontanée, je dirais

qu’en tant que femme je ne m’identifie pas
Ghotmeh conçoit son métier complètement dans la façon dont les
d’architecte comme une villes sont construites. Je trouve qu’il
«archéologie du futur». Le nous manque de la nature, du sensible, de
public pourra la rencontrer la porosité, de la terre, de la poésie. Est-ce
que c’est féminin? Je ne sais pas.
lors d’une conférence qu’elle
donnera samedi prochain à Que pensez-vous justement
Lausanne. du star-système dans l’architecture?
Si on remarque autant certains archi-
tectes, c’est parce qu’ils proposent des bâ-
timents que l’on habite peu dans les villes,
MARIKA BUFFAT ce sont comme des objets qu’on y dépose.
Moi, je défends une architecture de qua-
La Franco-Libanaise Lina Ghotmeh, basée lité liée à l’environnement proche, pour
à Paris, a accompli, à 43 ans, un parcours mieux habiter, pour prouver que l’archi-
architectural déjà brillant. Reconnue à tecture est essentielle et que la beauté ne
l’international dès 2016 avec la construc- doit pas être un luxe. Mieux vivre et mieux
tion du Musée national d’Estonie, elle en- habiter notre environnement, c’est fonda-
chaîne ensuite les projets remarquables, mental pour vivre en paix.
parmi lesquels le Stone Garden à Bey-
routh, une tour de logements à l’appa- Alors, comment rendre l’architecture
rence organique dont la structure astu- accessible au plus grand nombre?
cieuse a résisté à l’effroyable explosion Une architecture doit émaner d’un
des silos du port de la ville en août 2020. contexte, d’une situation. Il faut qu’on se
L’architecte vient d’inaugurer, il y a sente bien dans les bâtiments, qu’on ait ce
quelques jours à Londres, un pavillon rapport convivial et chaleureux à un es-
éphémère d’inspiration malienne pour la pace qui nous amène à interagir, à tou-
Serpentine Gallery. cher, à être plus dans un rapport sensoriel.
De Paris à Pékin en passant par Tokyo, Par exemple, j’ai livré un bâtiment indus-
ses réalisations entre innovation et poésie triel pour Hermès, mais j’ai essayé de dé-
sont unanimement saluées par la critique velopper une architecture qui va au-delà
et ont été récompensées par de nombreux de l’industriel et qui donne une grande di-
prix. gnité à la fonction de manufacture en va-
lorisant les espaces, pour donner un réel
bien-être aux artisans qui vont y travailler.
«Le défi, c’est de

«Mieux habiter notre

Nous avons en Suisse un problème
pouvoir retrouver de mitage du territoire. Mais, dans
cette micro-échelle le même temps, les tours d’habitation
dans une habitation en sont très mal vues et passent rarement
l’épreuve en votation référendaire.
hauteur: un village vertical

environnement,
Que faut-il faire pour donner envie
où on aurait des habitations, aux gens d’habiter différemment?
de l’agriculture, des lieux C’est le même problème en France. À Paris
de pédagogie, des espaces aussi, on déteste les tours. Les tours ont

c’est fondamental
été stigmatisées comme des bâtiments
d’échange.» austères, en béton, de tristes boîtes verti-
cales sans rapport à la nature. Alors bien
sûr on va préférer la petite villa et le petit
C’est dans le cadre de son exposition jardin, une micro-échelle qui semble plus

pour vivre en paix»

«Beyrouth. Les temps du design» que le humaine. Le défi, c’est de pouvoir retrou-
Mudac, à Lausanne, a convié Lina Ghot- ver cette micro-échelle dans une habita-
meh à parler de sa conception de l’archi- tion en hauteur: un village vertical où on
tecture et de son approche du paysage. aurait des habitations, de l’agriculture,
Elle donnera sa conférence, intitulée des lieux de pédagogie, des espaces
«Vivre en symbiose – une archéologie du d’échange.
futur», samedi à 16 h à Plateforme 10.
Votre pavillon pour la Serpentine
Lina Ghotmeh, vous êtes née à Beyrouth, Gallery est entièrement démontable et
une ville en perpétuelle reconstruction. recyclable. Habiterons-nous tous un jour
Auriez-vous pu être autre chose des maisons démontables et recyclables?
qu’architecte? Irons-nous dans des musées,
(Rires.) J’aurais pu être médecin parce que des bâtiments administratifs
j’aimais aussi ce métier, le rapport au démontables et recyclables?
corps, aux soins, et je pense que c’est lié à J’espère en tout cas qu’on pourra réutiliser
l’histoire de Beyrouth. Mais pour moi, l’ar- les matériaux avec lesquels on construit,
chitecture aussi est un métier qui a un fort ce qui ne serait même pas une révolution
rapport au corps. puisque ça a été fait depuis la nuit des
temps: on réutilisait la pierre des temples
Parlez-nous de l’architecture que vous pour construire les maisons. Certains
défendez, que vous définissez comme temples au Japon sont complètement dé-
une «archéologie du futur». montables et on peut les bouger d’un lieu
L’archéologie du futur, c’est une méthode à un autre… Mais c’est une réflexion qui
de conception: mon projet d’architecture vient d’une pensée circulaire où tout est
commence par de la recherche, je suis ressource, rien n’est déchet. Je ne pense
comme une archéologue qui fouille dans pas que c’est une option, en fait. Nous de-
la terre pour trouver des indices, pour re- vons aujourd’hui avoir une responsabilité
trouver l’histoire du lieu. Il faut écouter environnementale et sociale, minimiser
ses ressources et apprendre de son his- l’empreinte carbone des constructions.
toire. Mais c’est aussi une projection dans Il est indispensable de réfléchir à la fois à
le futur, parce que l’on construit ce qui l’usage, à l’impact environnemental et à la
n’existe pas. symbiose avec la nature.

Vous avez travaillé dans de grandes

agences, chez des «architectes stars»
comme Jean Nouvel et Norman Foster.
Pensez-vous qu’il y a une vision À VOIR
masculine de l’architecture versus Lausanne,
L conférence-
une vision féminine? rencontre
r avec Lina
C’est une question très complexe qui Ghotmeh,
G Mudac,
pourrait faire l’objet d’une étude sociolo- samedi
s 15 juillet à 16 h.
gique et anthropologique. Mais, si je ré- mudac.ch
m
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
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Georgette,
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CONCERTS La moitié des
soirées des Georges est
payante, l’autre gratuite
(lundi, jeudi et vendredi).
Demain justement,
Pongo clôturera la soirée
en beauté sur la Grande
scène, après les concerts
de Lakna et Billy No-
mates. Si une soirée
payante vous branche
et que vous vous appelez
Georges, Georgette, Gior-
gio, Jorge, Georg ou Joris,
profitez: l’entrée sera gra-
tuite (sur présentation
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Cultura 41
Le Rive
Jazzy fête
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anniversaire, quelque
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économique (supplément business sur
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Zanzibar. • L’accueil et l’assistance à l’aéroport
• Tous les transferts indiqués
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tourisme de masse. véhicule 4x4, entièrement équipé pour le
safari, très confortable, avec glacière ou
Délai d’inscription: 28 juillet 2023 frigo et toit ouvrant totalement privatisé
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professionnel francophone
• Les repas et l’hébergement en lodges/
hôtels comme précisé sur l’itinéraire ou
similaire
• Les droits d’entrée dans les parcs
et réserves nationaux, et taxes
gouvernementales
• Une bonbonne d’eau dans le véhicule
avec une glacière ou un mini frigo à bord
du véhicule durant les safaris, prévoir des
gourdes individuelles
• Le vol Arusha/Zanzibar avec la
compagnie aérienne Flight Link
42
Bien vivre
Bientôt
un congé
en cas
de fausse
couche?
Près d’une femme sur quatre subit une fausse couche au cours de son existence. Getty Images/ljubaphoto
SANTÉ Le Conseil fédéral pourrait instaurer
un congé payé permettant aux femmes
de se remettre de cet accident très souvent
traumatisant. L’initiative est inédite.
LAETITIA GRIMALDI
laetitia.grimaldi@planetesante.ch
A
ujourd’hui, dès la 23e semaine
d’aménorrhée (absence de
règles), les mères ont droit à
l’allocation de maternité,
même en cas de mort périna-
tale. En revanche, si un arrêt de la gros-
sesse survient avant la 23e semaine, rien
n’est officiellement prévu. Les choses
pourraient changer. Estimant que «les
conséquences d’événements aussi mar-
quants doivent être mieux prises en
considération», la Commission de la sé-
curité sociale et de la santé publique du
Conseil des États (CSSS-E) a indiqué dans
un communiqué de presse le 23 mai der-
nier* qu’elle souhaite charger le Conseil
fédéral d’envisager l’instauration d’un
congé payé en cas de fausse couche ou de
mort périnatale. Si le postulat est confir-
mé au sein de la CSSS-E, «il sera transmis
au Conseil fédéral qui disposera de deux
ans pour remplir son mandat, par
exemple en établissant un rapport ou, à
tout le moins, en informant l’Assemblée
fédérale de l’avancée de ses travaux»,
précise Harald Sohns, chef suppléant
communication à l’Office fédéral des as-
surances sociales (OFAS).
Les modalités d’un tel congé ne sont pas
encore connues, mais ce projet laisse entre-
voir un progrès majeur, à savoir «lutter
contre la banalisation des fausses
couches», résume la Dre Lamyae Benza-
kour, médecin adjointe, responsable de
l’Unité de psychiatrie de liaison aux Hôpi-
taux universitaires de Genève (HUG).
Fausse couche: démêler le vrai du faux
Quand une fausse couche survient, le
sentiment de culpabilité des femmes est
fréquent et les idées reçues associées
sont encore nombreuses. Zoom sur deux
d’entre elles avec le Pr David Baud, mé-
decin-chef d’obstétrique au Départe-
ment femme-mère-enfant du CHUV.
● Le plus souvent, l’hygiène de vie
n’est pas en cause
Vrai, ou presque. Le stress de tous les
jours, les activités sportives, les rapports
sexuels, les voyages: autant de facteurs
régulièrement évoqués en cas de fausses
couches. À tort.
Parmi les facteurs de risques: diabète,
malformation utérine, maladie auto-im-
Un deuil compliqué
«Près d’une femme sur quatre connaît une
fausse couche au moins une fois dans sa
vie», souligne le Pr David Baud, médecin-
chef d’obstétrique au Département
femme-mère-enfant du Centre hospitalier
universitaire vaudois (CHUV). «Cette pro-
portion considérable conduit à un para-
doxe souvent dommageable: du côté des
soignants et des proches, une fausse
couche peut être assimilée à un événe-
ment banal, presque naturel. Pour la
femme, voire le couple, qui la subit, il n’en
est rien et l’effroi peut être total.» Un
constat partagé par la Dre Benzakour: «Que
la grossesse ait été désirée ou non, investie
ou non, qu’elle soit tardive ou pas, une
mune (lupus, par exemple) peuvent être
associés aux fausses couches et néces-
sitent donc un suivi médical pour identi-
fier la maladie et la soigner.
● Dans un cas sur deux, l’origine
de la fausse couche est inconnue
Vrai. Dans 50% des cas de fausse couche,
aucune cause n’est identifiée à l’issue
des investigations médicales. Un fait
souvent déstabilisant ou frustrant, tant
pour les soignants que pour la femme ou
le couple concernés, mais qui a l’avan-
tage d’exclure la présence d’une malfor-
mation génitale ou d’une pathologie
pouvant mettre à mal les chances d’une
nouvelle grossesse.
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023
«Réfléchir, c’est prendre du recul
et essayer de mieux comprendre
un problème, quel qu’il soit.
Réfléchir sur soi-même
a un objectif similaire…»
James Pennebaker, psychologue social à l’Université
du Texas à Austin, cité dans «Cerveau & Psycho»
Marsha Miller/The University of Texas
fausse couche est tout sauf anodine. Elle
peut exposer à une souffrance profonde et
représenter un deuil particulièrement
compliqué à entreprendre.»
Un congé spécial permettrait d’offrir un
temps pour entamer ce processus de deuil
et de rétablissement, mais les experts
alertent: «Selon ses modalités, il pourrait
ne pas convenir à toutes les femmes, ex-
plique la Dre Benzakour. Et pour cause,
chaque histoire est unique et il n’existe
pas de règle universelle pour définir le
temps dont une femme a besoin pour sur-
monter une fausse couche.» Le Pr Baud
ajoute: «Aujourd’hui, des arrêts maladie
sont établis au cas par cas, quand cela est
nécessaire, sur la base d’un diagnostic
évaluant la santé physique et psycholo-
gique. Même si un congé spécial est mis en
place, il est primordial que ce suivi médi-
cal personnalisé demeure.»
Quand consulter?
Si des conséquences physiques (risques
d’hémorragie ou d’infection, par exemple)
surviennent parfois, les répercussions sur
le long terme sont le plus souvent d’ordre
psychologique. Un article paru en 2021
dans «The Lancet»** a ainsi rapporté les ré-
sultats d’une étude portant sur 537 femmes
victimes de fausse couche: neuf mois après
une perte de grossesse, 18% d’entre elles
répondaient aux critères de stress post-
traumatique, 17% d’anxiété modérée ou
sévère et 6% de dépression modérée ou sé-
vère. Comment savoir, quand le choc sur-
vient, si la détresse est normale ou s’il faut
consulter? «La première phase suivant une
fausse couche est souvent très éprouvante,
car il s’agit de réaliser que «c’est fini». Cette
souffrance est en lien avec ce deuil si parti-
culier lié au fait de dire au revoir avant
d’avoir vécu une histoire avec l’enfant à
naître, explique la Dre Benzakour. Comme
pour tout deuil, le temps nécessaire est
propre à chaque personne. Mais il est cru-
cial de consulter si la tristesse s’installe,
s’accompagne de symptômes de dépres-
sion (perte d’élan, troubles du sommeil,
voire pensées suicidaires) ou de stress
post-traumatique (flash-back, cauche-
mars, crainte de retourner sur le lieu où
s’est produite la fausse couche, etc.).»
EN COLLABORATION
AVEC PLANÈTE SANTÉ
*https://www.parlament.ch/press-releases/
Pages/mm-sgk-s-2023-05-23.aspx
**Quenby S et al. Miscarriage matters: the
epidemiological, physical, psychological,
and economic costs of early pregnancy loss.
Lancet. 2021 May 1;397(10 285):1658-1667.
«Que la
grossesse
ait été
désirée ou Faire le deuil avant
non, investie une nouvelle tentative
ou non,
une fausse Retenter sa chance, vite retomber en-
ceinte: l’élan peut être légitime, sembler
couche est vital parfois. Toutefois, la prudence est
tout sauf de mise: «Après une fausse couche, le
anodine.» temps du deuil est essentiel, autant pour
la grossesse qui s’est interrompue préma-
Dre Lamyae turément que pour celle qui peut suivre,
Benzakour, indique la Dre Lamyae Benzakour, méde-
responsable cin adjointe, responsable de l’Unité de
de l’Unité de psychiatrie de liaison aux HUG. Dans le
psychiatrie de cas contraire, la femme risque de vivre la
liaison aux HUG nouvelle grossesse comme la continuité
de la précédente, mais également comme
sa réparation, dans un contexte de cha-
grin et d’anxiété encore bien présents.
Au-delà de la grossesse elle-même, il ar-
rive que ce nouvel enfant soit vécu
comme un enfant de remplacement char-
gé, plus ou moins consciemment, de
consoler ses parents.» Quand sait-on
qu’une nouvelle grossesse dans les meil-
leures conditions est possible? «Les indi-
cateurs sont subtils et très personnels,
mais ils sont de l’ordre d’un sentiment
d’apaisement, comme si les choses
s’étaient posées et permettaient d’entre-
prendre une nouvelle grossesse dans de
bonnes conditions», répond l’experte.
Le Matin Dimanche
Dimanche 9 juillet 2023 Bien vivre 43

Sagesse
Par Rosette Poletti
«Je suis très atteinte par ce qui se passe
en France, ces hordes de jeunes gens
en colère. Ils ont eu la chance d’aller
à l’école, on leur a créé des centres
de loisirs, de sport… Quelle est la
solution? La colère n’est pas négative,
elle doit être gérée, c’est tout!»

M
erci à notre correspon-
dante pour son long e-
mail. En effet, la situa-
tion de ces derniers
jours en France, entre
autres, est difficile à vivre pour les
gens dont le gagne-pain a été dé-
truit, pour les maires, les policiers,
les pompiers qui mettent leur vie en
Cuite, la racine du persil dégage un fumet de céleri et de noisette. Crue, elle est croquante danger pour tenter de rétablir
et très aromatique. SujaImages/Shutterstock l’ordre. Rien n’est simple ici, et il n’y
a pas de solution facile, malgré ce
une responsabilité à assumer en uti-
lisant ses capacités, tout ce qui
existe autour de soi de positif. Puis,
en étant attentif aux autres, à ceux
que nous côtoyons, à leurs besoins.
Il s’agit aussi de retrouver la satis-
faction d’être un membre de la socié-
té, de la commune où nous habi-
tons… De plus en plus de personnes
donnent de leur temps de diverses
façons: elles agissent pour la protec-
tion de la nature, accompagnent des

Le persil se mange
que disent certains. Le philosophe
et psychanalyste Miguel Benasayag
a écrit un excellent article souli-
gnant que notre époque est caracté-
risée individuellement et collective-
gens en fin de vie, en deuil, en situa-
tion de handicap, organisent des loi-
sirs pour des enfants… En Suisse,
1,2 million de personnes exercent
une activité bénévole au sein d’une

aussi par la racine

ment par un ensemble de problèmes
sans solution. Ce postulat est diffi-
cile à accepter pour l’homme mo-
derne qui pense l’ensemble de sa vie
et de l’histoire sociale en termes de
solutions. Cet auteur écrit que le fait
marquant de l’époque est «la décou-
verte catastrophique qui s’exprime
sous la forme d’une plainte doulou-
JARDIN Cette apiacée aux feuilles plates ou frisées, reuse: nous sommes assaillis par des
problèmes sans solution».
dont on agrémente nos plats, cache sous terre un autre Il existe des aménagements pos-
sibles, des moyens de limiter les dé-
délice culinaire. À tenter sans tarder. gâts, mais guère plus! Comme le dit
Benasayag, c’est catastrophique et
c’est notre réalité. En effet, com-
GISÈLE VOEGELI ou en pots et surtout la plus commune. ment enseigner à tous ces jeunes
organisation ou d’une association, et
2,3 millions pratiquent une activité
bénévole informelle, telle que garde
d’enfant, aide entre voisins ou soins à
des proches. Il est essentiel de ne ja-
mais perdre de vue cette réalité! Elle
est source d’espérance, même au
cœur de problèmes insolubles!
Finalement, il y a aussi ce nombre
important de personnes qui
cherchent et trouvent des moyens
de mieux se connaître elles-mêmes,
de mieux se comprendre, de vivre
positivement leurs émotions, de dé-
velopper leur capacité d’empathie,
d’amour altruiste et de compassion.

D
e la carotte au fenouil, de la co-
riandre au céleri mais aussi de la
berce à la ciguë, les apiacées (ex.
ombellifères) savent réjouir nos
papilles tout comme nous
conduire dans l’au-delà! La famille impose
la prudence. Dans la nature, l’œil de l’ex-
pert est nécessaire avant de se lancer dans
des cueillettes de cerfeuil ou de cumin
sauvage tant les possibilités de confusions
sont légion. Au jardin d’aromatiques, par
contre, le risque est moindre puisque, par
instinct de survie, l’on introduit unique-
ment les membres bienveillants et comes-
tibles de cette gigantesque tribu.
Mystérieux
Trois fois tenté, trois fois loupé. Mauvais
emplacement, manque de savoir-faire, vi-
site de mulot, graines caractérielles… qui
sait? Dans mon for intérieur je pense plu-
tôt qu’il s’agit d’une cabale. La cabale du
persil tubéreux récalcitrant. Semé ou en
minimottes, ce n’est tout de même pas si
compliqué de faire pousser une touffe de
persil, que celui-ci soit plat, frisé, géant,
nain, doré ou vert foncé.
C’est ce que je croyais, jusqu’au jour où
je me suis mis en tête d’en cultiver un, non
plus pour ses feuilles mais pour sa partie
souterraine, sa fabuleuse racine. Racine
que j’avais eu l’incommensurable joie de
déguster la semaine précédente, chez des
amis découvreurs de saveurs inédites. Un
concentré de sapidités inouïes à s’en rele-
ver la nuit pour lécher le fond du plat.
Sitôt cette expérience vécue, je me suis
mise en quête de ladite merveille que
mes hôtes avaient remarquée chez un
maraîcher local, entre une botte de ca-
rottes et un fagot de poireaux nouveaux.
Au-delà de l’introduire dans mes créa-
tions culinaires, est né en moi le souhait
de la cultiver: la guetter, la chouchouter,
la voir pointer, grandir et grossir jusqu’au
jour où, enfin, j’extirperai délicatement
son pivot blanc crème d’apparence li-
gneuse. Mais voilà, cette ambition sobre
au demeurant, s’est révélée bien moins
aisée que je ne l’imaginais, contrairement
à sa réputation d’herbette facile à vivre.
Aérien
Elle est peut-être la condimentaire la
plus courante, la plus cultivée en jardin
Mais, rançon de la gloire, souvent mal
valorisée en cuisine jusqu’à en devenir
banale. Facile et peu exigeant, on dit du
persil à feuilles qu’il n’est guère
capricieux. C’est vrai pour autant qu’on
évite de le cultiver toujours au même
Petit Plus Planète endroit. Un tournus de quatre ans lui
serait même favorable. Le plus de cette
Chers rejets pratique est que l’on peut, pour le plus
de framboisiers, grand bonheur des insectes
je connais votre environnants, laisser fleurir et grainer
large propension les plants de l’année précédente. Semés,
à laisser vos éclaircis et repiqués au début du
racines dévelop- printemps, les petits bouquets
per de futurs nouveaux couvrent la saison, voire
plants un peu davantage si les gelées sont
partout sur le raisonnables. Plat ou frisé, le large choix
territoire que je de variétés permet de moduler saveurs
vous ai attribué. et sensations en bouche, en fonction du
Cette générosité type et du degré de ciselage des feuilles.
qui pourrait
me contrarier Souterrain
me réjouit. Elle Insolite et peu connu à ce jour, ce n’est
me permet de pourtant pas un perdreau de l’année.
récupérer – avant Originaire du Proche-Orient, adulé pour
arrachage des ses vertus tonifiantes, introduit dans les
rejets inutiles empires respectifs des Grecs et des Ro-
– leurs vigousses mains, il tombe en disgrâce au Moyen
et jeunes feuilles. Âge car associé au Malin. Le persil tubé-
Une fois qu’elles reux Petroselinum crispum tuberosum, à
auront séché l’instar du cerfeuil tout aussi tubéreux,
avec celles est à considérer comme un légume an-
des cassissiers cien, légume aromatique qui a la bonne
et celles de la idée depuis peu de revenir sur le devant
mélisse, je vous de la scène.
associerai aux Tout comme nombre de ses cousins de
fleurs de tilleul la famille Apiacée, la plante bisannuelle
récoltées début est dotée d’une vigoureuse racine pivot
juin. Ce joyeux dont la spécificité est de développer
mélange donnera d’envoûtants et relevés fumets de céleri
d’agréables et de noisette. Si d’aucuns la cuisent
tisanes digestives telle une vulgaire carotte, je la trouve
et apaisantes à pour ma part incomparablement cra-
consommer l’été quante et croquante, crue. Émincée telle
durant, chaudes une truffe en sveltes rondelles à disposer
ou froides. G. V. en fleur, elle orne une tapenade de cour-
gettes, rehausse une salade fraîchement
cueillie ou épice avec un filet d’huile
d’olive un légume vapeur.
Côté culture, j’ai cette année mis trem-
per mes graines vingt-quatre heures
dans de l’eau tiède avant de les glisser en
terre. Depuis avril, de jeunes feuilles –
que je ne récolte pas afin de ne pas affai-
blir leur pivot – se développent paisible-
ment. Tout espoir reste donc permis!
«sans foi ni loi» à gérer leurs frustra- L’absurde et la grâce
tions, comme se le demande notre Le philosophe et théologien Jean-
correspondante? Comment leur en- Yves Leloup parle de notre réalité
seigner que la vie n’est pas toujours comme contenant l’absurde et la
comme on voudrait qu’elle soit? Ou grâce. «Notre défi, dit-il, c’est voir du
que la formation est une richesse? même regard à la fois l’absurdité de
Tout cela s’acquiert surtout dans les l’enfant qui meurt et la beauté du co-
cinq premières années de vie. On est quelicot qui fleurit. L’absurde et la
peut-être arrivé à un point de non- grâce dans le même regard. Tout est
retour pour ce système démocra- absurde et tout est grâce, il faut donc
tique si précieux, soucieux de res- faire tenir les deux ensemble, ce
pect, de liberté et de défense des sont les deux aspects d’une même
droits humains. réalité qu’il faut apprendre à accep-
Avant Benasayag, le psychiatre ter dans son entièreté.»
suisse Carl Gustav Jung écrivait déjà: On ne dépassera jamais cette né-
«Les plus grands et les plus impor- cessité d’accepter ce qui ne peut pas
tants problèmes de la vie sont fonda- être changé tout en travaillant à mo-
mentalement insolubles. Ils ne difier ce qui peut l’être, en commen-
peuvent pas être résolus, seulement çant par nous-mêmes et nos rela-
dépassés.» Actuellement, tant de si- tions avec les autres! C’est ainsi que
tuations semblent sans solution: l’avenir se construit!
l’immigration, le réchauffement cli- Très belle semaine à chacun de
matique, la violence, la haine entre vous, amis lecteurs.
communautés, l’injustice sociale
avec le fossé qui se creuse toujourss
plus entre ultrariches et pauvres, la a
fracture numérique, les dictaturess
féroces, etc. Autant de sources de d dé-
sespoir, de déstabilisation, de rési--
gnation déprimée.
Voir la forêt qui pousse
Tout cela – «l’arbre qui tombe» – est
réel. Mais il y a aussi autre chose à
voir: «la forêt qui pousse»! Partoutt,
même dans les endroits et les
contextes les plus improbables, des
humains deviennent conscients
qu’aucun système politique,
qu’aucune religion, qu’aucune
découverte matérielle n’appor-
tera de solution. Chacun est
responsable de sa vie, de ce qu’il
en fait. Il n’y a personne à blâ-
mer, personne à condamner. Il y a
À LIRE
«Un art de vivre et d’aimer
par temps de catastrophe»,
Jean-Yves Leloup (Points).
«Résister, c’est créer», Florence
Aubenas et Miguel Benasayag
(La Découverte).
«L’art de la tendresse»,
Véronique Aïache (Flammarion)..
Le Matin Dimanche
9 juillet 2023 • No 603
Écrit par la rédaction de Play Bac Presse (rédacteur en chef : f.dufour@playbac.fr)
L’INFO DE
LA SEMAINE
L’Indonésie se construit
une nouvelle capitale
Parfois, un pays change de capitale.
Ce sera bientôt le cas de l’Indonésie.
L’actuelle capitale de ce pays d’Asie
est Jakarta, mais cette ville s’enfonce
d’environ 25 cm dans le sol chaque
année ! Les raisons : la montée
du niveau de la mer, le poids des
nombreuses constructions, un
trop gros pompage des nappes
phréatiques… Avec plus de
30 millions d’habitants, Jakarta est
une ville surpeuplée, embouteillée
et très polluée. En 2019, le président
indonésien a donc pris la décision
de constr uire une nouvelle
capitale. Elle se trouvera sur l’île
de Bornéo, à environ 2000 km de
l’ancienne, située sur l’île de Java.
Son nom sera Nusantara (mot
indonésien signifiant «archipel»).
LA PHOTO DE LA SEMAINE
Rafraîchissant. Il y a quelques jours, une fillette se rafraîchissait sous
des fontaines en forme de douches géantes, à Vilnius (la capitale de la
Lituanie).
LE COIN DES INCOLLABLES
1. En 1960, Rio de Janeiro a
été remplacée par une autre
capitale au Brésil (Amérique).
Laquelle ?
2. Vrai ou faux ? Le Rubik’s Cube
porte le nom de son inventeur.
LA SEMAINE EN DESSINS
En Namibie (Afrique), il y a eu une vente aux
enchères de crocodiles. Ces animaux sont
trop nombreux dans certaines rivières.
Record : le Rubik’s Cube
résolu en 3 secondes !
Max Park a 21 ans. Quand il était enfant, ses parents l’ont
encouragé à jouer au Rubik’s Cube pour lutter contre son
autisme. En participant à des compétitions de ce jeu,
Capture d’écran Twitter
qui lui plaisait, Max a réussi à mieux communiquer avec
les autres. Le garçon est devenu un champion. Le mois
dernier, aux États- Unis, il a battu le record de vitesse
de résolution de Rubik’s Cube. Il a mis 3 secondes et
13 centièmes. Vidéo : tinyurl.com/yup5awrz.
L’Indonésie
JAPON
Indonésie
mi Superficie : CHINE
p
1,88 million de km2 Mer
Population : du Japon
250 millions d’habitants
Capitale :
Des milliers d’îles
Jakarta L’Indonésie est formée de plus de 13 000 îles,
Langue :
dont moins de la moitié sont habitées. Parmi les plus
indonésien
Monnaie : grandes, on trouve Sumatra, Java, Kalimantan, Bali,
rupiah (roupie indonésienne) Célèbes, Timor... N
O E
Mer Les cultures
de Chine
Montagnes, chaleur et humidité méridionale S Le riz est la principale culture
Océan du pays. On trouve aussi du café,
La plupart des îles indonésiennes sont Pacifique du tabac, du thé, du caoutchouc…
montagneuses et souvent volcaniques.
Il y fait chaud et humide.
Les animaux sauvages
PHILIPPINES
De nombreux animaux vivent
en Indonésie : des oiseaux,
AP/A. Ibrahim
BRUNEI les orangs-outans (victimes de
MALAISIE Bandar Seri Begawan la destruction des forêts par
Medan Kuala Lumpur les êtres humains),
MALAISIE Orang-outan
les tigres de Sumatra,
Moluques
SINGAPOUR Bornéo
les dragons de Komodo
Nusantara (des grands reptiles)…
Cette ville s’étendra au milieu des Sumatra
Océan Kalimantan
arbres, car Bornéo abrite l’une Indien INDONÉSIE Jayapura
des plus grandes forêts tropicales Palembang
Mer Célèbes
Mer Papouasie PAPOUASIE-
du monde. Des vidéos montrent de Java (Sulawesi)
de Banda NOUVELLE-
Jakarta Java Bali
à quoi ressemblera Nusantara : GUINÉE
Surabaya Dili
de grands bâtiments en verre, des Java
TIMOR-
passerelles, des constructions Cette île compte une centaine Sumbawa ORIENTAL
sur pilotis, des étendues d’eau… de volcans. La moitié Sumba
des Indonésiens vivent à Java. Bornéo Bali
La fin des travaux est prévue
C’est là que se trouve Jakarta, Cette île est partagée entre Destination touristique très connue,
en 2045, mais cette ville sera la la capitale. la Malaisie, l’Indonésie Bali possède de belles plages et
capitale indonésienne dès l’an et le sultanat de Brunei. de nombreux temples hindouistes.
prochain. Des déménagements Les orangs-outans, menacés
sont prévus : Nusantara abritera de disparition, vivent
le palais présidentiel et plusieurs
à Bornéo et à Sumatra. De nombreux peuples
Des forêts
ministères. Mais pas question de L’Indonésie est le 4e pays
Grâce à la chaleur et à l'humidité, la forêt recouvre le plus peuplé du monde,
chasser les habitants de Jakarta, qui
environ la moitié du territoire indonésien. Mais derrière l’Inde, la Chine (Asie)
ne va pas disparaître ! L’ancienne elle est de plus en plus détruite par les êtres humains.
AUSTRALIE
et les États-Unis (Amérique).
capitale restera l’une des plus Ils coupent du bois pour le vendre et ils cherchent De nombreux peuples y vivent :
grandes villes du monde. Il s’agit de nouveaux terrains pour cultiver (ex. : des palmiers des Javanais, des Malais,
à huile) et pour construire des bâtiments. des Papous… La plupart
surtout de la rendre plus vivable. des habitants sont musulmans
(ils ont l’islam pour religion). Danseuse
balinaise
À RETENIR
Sultanat
1 L’Indonésie est un pays d’Asie du 3 L’Indonésie a un climat chaud
Pays dirigé par un sultan
Sud-Est. 13 000 îles la composent. et humide. La forêt recouvre (un chef de religion
Moins de la moitié sont habitées. environ la moitié du territoire. musulmane).
Hindouiste
2 C’est le 4e pays le plus peuplé 4 On trouve de nombreux animaux Qui concerne l’hindouisme,
une religion très pratiquée
du monde. La plupart des habitants sauvages en Indonésie : orangs- en Inde (Asie).
sont musulmans. outans, tigres, oiseaux...
LA QUESTION DE LA SEMAINE
Qu’est-ce qui fait pousser les végétaux : le soleil ou la pluie ?
la transformation du CO2 en nutriments d’atteindre les racines. La plante
AP/M. Kulbis
Elle répond – Alicia Ayerdi-Gotor,
enseignante-chercheuse à UniLaSalle dont la plante a besoin pour grandir. n’arrive plus à respirer, et elle meurt.
Beauvais (France). Cette photosynthèse est rendue Recevoir trop d’eau augmente
possible par la lumière du soleil. La également le risque de maladie.
Graines. « Les 2 ! Pour pousser, les plante continue d’avoir besoin d’eau L’excès de lumière, lui, n’est le plus
végétaux ont besoin à la fois d’eau et toute sa vie : elle lui permet de garder souvent pas dangereux. Mais un grand
de soleil. Cependant, au tout début ses stomates ouverts. C’est par ces trous ensoleillement s’accompagne souvent
de sa croissance, une plante n’a que la plante respire, absorbe du CO2 et de températures très élevées. Pour se
besoin que d’eau. Lorsqu’elle est sous transpire. Si les stomates d’une plante protéger, la plante transpire alors. Si
3. Traduis «eau» en anglais. forme de graine, l’eau lui permet de se ferment, la photosynthèse n’est plus elle ne reçoit pas assez d’eau pour
4. Qu’est-ce que la NBA ? commencer sa germination. » possible.» compenser, elle risque d’en souffrir.»
de basket.
4. Le championnat nord-américain
Lumière. « Une fois la première feuille Trop. « À l’inverse, être trop arrosée Germination
3. Water.
2. Vrai. Ernö Rubik l’a créé en 1974.
sortie de terre, la plante démarre la n’est pas bon pour une plante. Un Moment où la première racine sort
1. Brasilia.
photosynthèse. La photosynthèse, c’est excès (trop) d’eau empêche l’oxygène de la graine.
Des écoliers français ont enterré une Des frères jumeaux ont été sélectionnés Un milliardaire est à la recherche d’un dogsitter La 2e Coupe du monde de rugby-cochon a
«capsule temporelle» remplie d’objets de pour jouer au basket en NBA. Mais ils seront pour s’occuper de ses 2 chiens à son domicile eu lieu en France. Les participants ont joué
2023. Elle sera ouverte en 2050. dans des équipes concurrentes ! de Londres. Salaire : 115000 francs par an ! dans 30 cm de boue.