Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
profils
L’OUTIL INDISPENSABLE
ET VIVRE MIEUX
GRETCHEN RUBIN
Du même auteur
Ma vie en mieux, Flammarion, 2016
Opération Bonheur, Belfond, 2011
Titre original : The four tendencies: the Indispensable Personality Profiles That Reveal How to Make
Your Life Better (and Other People’s Live Better, Too)
Copyright © Gretchen Rubin 2017
Tous droits réservés.
Publié aux États-Unis par Harmony Books, du Crown Publishing Group, une division de Penguin
Random House LLC, New York, http://crownpublishing.com/
© Dunod, 2018
11 rue paul Bert, 92240 Malakoff
ISBN : 978-2-10-078994-8
Pour Christy Fletcher (Pointilleuse)
SOMMAIRE
Votre Profil
1. Les quatre profils
2. Identifier son profil
Le Discipliné
« Pour moi, la discipline, c’est la liberté »
3. Comprendre le Discipliné
4. Interagir avec un Discipliné
Le Pointilleux
« Je le ferai, si tu me donnes une bonne raison de le faire »
5. Comprendre le Pointilleux
6. Interagir avec un Pointilleux
Le Dévoué
« Tu peux compter sur moi, et je compte sur toi pour compter sur
moi »
7. Comprendre le Dévoué
8. Interagir avec un Dévoué
Le Rebelle
« Personne ne peut m’y forcer, pas même moi »
9. Comprendre le Rebelle
10. Interagir avec un Rebelle
Appendice
Remerciements
Quizz des quatre profils de Gretchen Rubin
Ressources complémentaires
Notes
J’ai fini par comprendre que mon plus grand objectif est d’être ce que je suis déjà.
Et voici ce que j’en ai déduit : selon l’attitude d’une personne face aux
attentes et engagements extérieurs et intérieurs, cette personne se range
dans l’une de ces quatre catégories :
Les Disciplinés répondent aisément aux attentes extérieures et intérieures.
Les Pointilleux remettent en question toutes les attentes ; ils ne respectent un engagement que
s’ils le jugent justifié, et par conséquent, ils ne respectent que les engagements intérieurs.
Les Dévoués se plient volontiers aux attentes extérieures, mais peinent à répondre à leurs propres
attentes.
Les Rebelles résistent à toutes les attentes, qu’elles soient extérieures ou intérieures.
Connaître son profil permet aussi d’être plus indulgent avec soi-même.
« Je suis comme je suis, il n’y a pas de mal à cela, et je vais en tirer le
meilleur parti. » Ainsi une Disciplinée me confiait : « Mes parents me
disaient toujours de lâcher prise. Mon mari, qui est aujourd’hui décédé, me
disait aussi de lâcher prise. Maintenant, c’est ma fille qui me dit de lâcher
prise. Mais je sais au fond de moi que je suis plus heureuse dans un cadre
que je me suis établi. »
Un Rebelle en témoigne :
Apprendre que j’étais un Rebelle m’a fait comprendre pourquoi toutes ces années de
psychothérapie n’avaient rien donné. Avec le psy, nous avons essayé de comprendre d’où venait
mon manque de discipline et avons tenté de nombreuses techniques pour y remédier. Toutes ont
échoué lamentablement. Le problème n’était pas tant de trouver une technique qui marche pour
les Rebelles, mais peut-être d’arrêter de croire (à force de se l’entendre dire) que quelque chose
ne va pas chez les Rebelles. Il y a pourtant des gens très intelligents qui mènent de brillantes
carrières, mais qui peinent à régler leurs factures, à mener à terme leurs projets et à aller au bout
des choses. Ils ont du mal à répondre aux attentes des autres et à leurs propres attentes. Dans le
monde d’aujourd’hui, un tel mode de fonctionnement n’est pas seulement taxé d’inhabituel, il
est considéré comme pathologique. Votre approche montre que ça ne l’est pas. Comme ce fut
libérateur de me concentrer sur ce qui marche pour moi plutôt que de traquer ce qui ne va pas
en moi !
1. Avez-vous déjà tenu une résolution prise au Nouvel An, même si vous
n’aviez pas de compte à rendre à quelqu’un, comme la résolution de
boire plus d’eau ou de tenir un journal ?
a. Oui. Je tiens toutes les résolutions que je prends au Nouvel An, même
celles dont personne n’est au courant.
b. Quand je prends une bonne résolution, je m’y tiens en général, mais je
le fais quand je le juge nécessaire. Je n’attends pas le Nouvel An. Le
1er janvier est une date arbitraire.
c. J’ai du mal avec les bonnes résolutions, quelles qu’elles soient, alors je
préfère ne pas en prendre. Quand je me fixe moi-même un objectif, j’ai
du mal à m’y tenir.
d. Non. Je déteste me contraindre d’une façon ou d’une autre.
10. Il m’arrive de ne pas faire quelque chose juste parce que quelqu’un
veut que je le fasse.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord
11. J’aime faire plaisir aux autres.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord
Résultats
1. a = Discipliné / b = Pointilleux / c = Dévoué / d = Rebelle
2. a = Pointilleux / b = Dévoué / c = Rebelle / d = Discipliné
3. a = Pointilleux / b = Rebel / c = Dévoué / d = Discipliné
4. a = Discipliné / b = Pointilleux / c = Dévoué / d = Rebelle
5. a = Discipliné / b = Pointilleux / c = Dévoué / d = Rebelle
6. a = Dévoué / b = Discipliné / c = Rebelle / d = Pointilleux
7. « Plutôt d’accord » correspond à Rebelle
8. « Plutôt d’accord » correspond à Pointilleux
9. « Plutôt d’accord » correspond à Dévoué
10. « Plutôt d’accord » correspond à Rebelle
11. « Plutôt d’accord » correspond à Dévoué
12. « Plutôt d’accord » correspond à Rebelle
13. « Plutôt d’accord » correspond à Pointilleux
LE DISCIPLINÉ
« Pour moi, la discipline, c’est la liberté »
« Fais-le. »
3
Comprendre le Discipliné
« Fais ce qu’il faut, quitte à passer
pour psychorigide »
Forces (et faiblesses) • Faiblesses (et forces) • Variations au sein du profil • Pourquoi les Disciplinés
ont un fort instinct de préservation • Comment les Disciplinés peuvent gérer leur inflexibilité •
Pourquoi les Disciplinés doivent exprimer clairement ce qu’ils attendent d’eux-mêmes
Comme les Disciplinés sont fiables, les autres ont tendance à compter sur
eux, comme le rapporte une Disciplinée :
Je m’étais toujours demandé pourquoi, quand je commençais un régime, un nouveau loisir ou
que je me remettais au sport, les gens voulaient se joindre à moi. Je me disais qu’ils avaient
besoin de soutien moral. “Appelle-moi quand tu fais une sortie à vélo, je te rejoindrai au parc.”
Maintenant, je sais qu’ils voulaient tout simplement profiter de mon élan et qu’ils comptaient
sur ma détermination pour les motiver.
Bien qu’il soit gratifiant d’aider les autres à atteindre leurs objectifs, je
préférerais qu’ils ne comptent pas systématiquement sur moi pour les
motiver.
Les Disciplinés ne se sentent pas prisonniers des contraintes, qu’elles leur
soient imposées ou qu’ils se les fixent eux-mêmes. Au contraire, cela libère
leur créativité et leur permet d’atteindre leurs objectifs. Si je décide d’écrire
un livre en été ou de ne plus consommer de sucre, je le fais et je m’y tiens,
même si cela ne concerne personne d’autre que moi-même. Cette certitude
me donne un profond sentiment de liberté, de maîtrise et m’ouvre tout un
champ de possibles.
Cela dit, il ne faut pas croire que les Disciplinés ne peinent jamais
à atteindre leurs objectifs. Je dois me pousser pour faire du sport
régulièrement, passer certains coups de fil et aller faire les courses. Il
m’arrive aussi de procrastiner et de déroger à la règle. Mais de façon
générale, il est plus facile pour les Disciplinés que pour les autres profils de
tenir leurs engagements.
Ils se plient volontiers aux règles qu’on leur impose ou qu’ils s’imposent
eux-mêmes. Mais pour cela, ils doivent la comprendre, ce qui les pousse
parfois à chercher quelle règle se cache derrière les règles – notamment en
matière d’éthique ou de morale. Hermione Granger est probablement l’une
des Disciplinées les plus célèbres. Ce personnage de la série Harry Potter
de J. K. Rowling fait toujours ses devoirs à temps et rappelle constamment
à Harry et Ron les lois qui régissent l’univers magique. Chacune de leurs
transgressions est pour elle source de contrariété. Cela dit, quand elle
considère que les usages sont injustes, elle se révolte. Elle voit les règles au-
delà des règles, malgré l’indifférence des autres ou leur désapprobation
manifeste. Ainsi se bat-elle pour améliorer le sort des elfes de maison et
n’hésite pas à quitter l’école pour s’opposer au ministère de la Magie et
combattre Voldemort. Elle respecte les règles et les lois de la société tant
qu’elles ne sont pas en conflit avec son sens de la justice. Si c’est le cas,
elle les rejette.
J’adore la série Harry Potter, notamment pour le rôle central que joue
une Disciplinée. Et Hermione incarne cette nature avec un tel brio ! Je me
demande si nous sommes tous particulièrement attirés par la description de
notre profil ?
Comme les Disciplinés se plient volontiers aux attentes extérieures et
intérieures, ils éprouvent peu de ressentiment, sont rarement sujets aux
burn-out et n’ont besoin de personne pour se motiver ou les superviser. Leur
discipline personnelle peut les faire passer pour des gens coincés et rigides,
alors qu’ils se sentent libres, puissants et indépendants.
Après la diffusion de cet épisode, une auditrice nous a fait part de son
point de vue très critique. Je la soupçonne d’être une Dévouée. Pour elle, le
problème n’était pas tant de profiter ou pas de mes vacances – comme
Elizabeth me le faisait remarquer – mais de diminuer le plaisir des autres.
Elle a écrit :
Vous avez l’air de trouver parfaitement normal de rester à l’heure de la côte est, parce que vous
êtes une Disciplinée, mais en ce faisant, vous avez peut-être gâché les vacances des autres. Je
trouve que c’est un manque d’égard de votre part. Plutôt que de profiter du moment présent
avec Elizabeth et sa famille, qui ont pris le temps d’être avec vous et votre fille, vous avez fait
passer votre confort en priorité.
Je lui ai répondu :
Vous avez fait remarquer qu’Elizabeth et sa famille avaient pris du temps pour être avec nous.
Ce qui est vrai, mais il en est de même pour ma fille et moi.
Nous avions pris le temps de traverser tout le pays, de New York à Los Angeles – ce qui n’est
pas rien – pour nous rendre à un endroit qui ne soit pas trop loin de chez eux en voiture. Ne
pouvaient-ils pas raisonnablement faire l’effort de se caler sur notre fuseau horaire pour deux
jours ? De prendre le petit-déjeuner et de dîner en même temps que nous ?
Je ne pense pas qu’une personne ou l’autre ait « raison », je pense juste que nous avons des
points de vue différents.
Cela peut paraître un peu abrupt, mais je dois avouer qu’en tant que
Disciplinée, il m’arrive souvent de souhaiter que mes proches prennent
autant soin d’eux que je prends soin de moi. Cela m’éviterait d’avoir
à m’inquiéter de leur confort. Je comprends parfaitement le point de vue du
petit ami de la lectrice Dévouée qui m’a écrit : « Mon compagnon est un
Discipliné et il trouve parfois que j’en attends trop de lui. Au lieu de faire
ce qui me ferait plaisir, j’attends de savoir ce qui lui ferait plaisir, et je le
fais. Il pourrait être content de voir son bonheur passer en premier, mais il
préférerait que je fasse ce qui me plaît d’abord. »
Bien que les Disciplinés tirent une grande satisfaction à suivre leurs
habitudes et leur emploi du temps, pour les autres, cette rigueur peut
paraître d’une austérité rédhibitoire.
Je soupçonne les Disciplinés du monde du spectacle et des arts de cacher
leur tendance disciplinée pour paraître plus fantaisistes et hédonistes qu’ils
ne le sont par nature. La rigueur n’a rien de glamour ni de très séduisant. Ce
n’est pas très vendeur, et cela ne fait pas rêver. Dans son tube Shake it off, la
chanteuse Taylor Swift se targue de se coucher à des heures indues et de
sortir avec beaucoup trop de garçons. Mais veille-t-elle si tard que ça ?
Mmmm. Je me le demande. Taylor Swift m’a l’air d’être une bonne
Disciplinée comme moi.
FORCES PROBABLES
Entreprenants
Autonomes
Consciencieux
Fiables
Rigoureux
Respectent ce qui est prévu
Aiment comprendre et répondre aux attentes
FAIBLESSES PROBABLES
Sur la défensive
Rigides
Manquent de souplesse face aux imprévus
Peuvent paraître dépourvus d’humour ou coincés
Mal à l’aise quand les règles sont ambiguës ou quand elles ne sont pas définies
Impatients quand il faut rappeler les autres à l’ordre, leur fixer des délais, les superviser ou les
reprendre
Exigeants
Peuvent stresser pour respecter des règles qui n’existent même pas
4
Interagir avec un Discipliné
« Just do it »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière
Le collègue Discipliné
Les disciplinés peuvent faire d’excellents collègues. Ils ont l’esprit
d’initiative, ils vont chercher la performance, ils n’ont pas besoin d’être
supervisés et ils savent reconnaître leurs limites.
C’est motivant pour les autres de travailler avec des gens qui font ce
qu’ils disent. Quand un Discipliné dit qu’il fera quelque chose, on peut lui
faire confiance, il le fera. Il suffit que son supérieur lui demande : « Quand
tu auras le temps, tu pourras jeter un œil à ce problème et me dire ce que tu
en penses ? » pour que le Discipliné lui remette un rapport en bonne et due
forme six semaines plus tard, sans même qu’il ait eu besoin de le lui
rappeler.
Les Disciplinés font également de très bons dirigeants, parce qu’ils
établissent clairement les objectifs à atteindre et qu’ils sont eux-mêmes très
rigoureux. Un chef Discipliné va dire ce qu’il attend de chacun. Il sera juste
en fixant les règles et les échéances. Il saura prévoir à long terme ce qu’il
faut pour atteindre l’objectif fixé. Un chef Discipliné ne va pas changer
subitement d’objectifs, de méthode ou d’échéances.
Les Disciplinés feront également de bons entrepreneurs et travailleurs
indépendants. Ils n’auront aucun mal à jongler avec plusieurs
responsabilités, parce qu’ils sont très déterminés. Ils savent identifier ce
qu’il faut faire et le faire, même s’ils n’ont pas de clients ou de supérieurs
à qui rendre des comptes. En analysant les données de mon sondage
national, j’ai constaté que plus les revenus étaient élevés et plus il y avait de
chances que la personne soit une Disciplinée (et moins il y avait de chances
qu’elle soit une Rebelle).
Les Disciplinés ne comprennent pas que l’on puisse avoir du mal
à répondre aux obligations, et ils peuvent manifester leur impatience. Un
chef Discipliné pourrait ne pas vouloir répondre aux questions du
Pointilleux en objectant : « Nous avons reçu une circulaire établissant une
nouvelle échéance. Je suis sûr qu’il y a une bonne raison à cela, alors cessez
de poser des questions et mettez-vous au travail. » Un chef Discipliné
pourrait refuser de mettre en place un système de responsabilisation (alors
que les Dévoués en ont besoin), comme fixer des échéances ou imposer des
jours de congé, parce qu’il n’en comprend pas la nécessité. Travailler avec
des employés Rebelles relève du défi pour les Disciplinés (et
réciproquement).
Les Disciplinés sont contrariés quand les autres ne respectent pas leurs
engagements, comme l’explique un lecteur :
Je suis médecin et Discipliné. Je travaille dans un cabinet médical avec des associés Pointilleux
et Rebelles. Ils ont fixé des règles de fonctionnement plus ou moins irréalistes, mais en tant que
Discipliné, je suis très mal à l’aise quand ils les contournent ou les enfreignent. Souvent, je suis
le seul à les respecter, et parfois même, je me retrouve dans la situation très inconfortable
d’avoir à rappeler mes associés à l’ordre. Pourtant, ce sont des règles que nous avons fixées
ensemble. Le pire, c’est que je vais focaliser sur ces infractions au lieu d’en profiter pour
instaurer une nouvelle règle : celle de faire usage de notre bon sens au cas par cas.
Les Disciplinés peuvent avoir du mal à déléguer, parce qu’ils pensent que
les autres ne respecteront pas leurs engagements ou ne feront pas du bon
travail.
Ils ont parfois du mal à sortir de leurs habitudes ou du programme qu’ils
se sont fixés. Renoncer à une attente, même quand cette dernière n’a aucun
sens, n’est pas aisée. Ils ne voient pas toujours quand il est nécessaire de
s’adapter ou de passer à autre chose. Ils peuvent également avoir du mal
à gérer les imprévus. Leur entourage a tout intérêt à les prévenir
suffisamment en avance pour qu’ils puissent s’organiser.
Si vous dirigez une équipe dans laquelle se trouvent des Disciplinés,
souvenez-vous qu’ils détestent déroger aux attentes et qu’ils peuvent avoir
du mal à établir des priorités, car toutes les attentes leur semblent être
d’importance égale. Pour pallier cela, il faudra fixer des priorités : « Je veux
un rapport tous les vendredis, mais en période de bilan annuel, ce n’est pas
grave si vous n’avez pas le temps de faire les rapports hebdomadaires. Le
bilan annuel est prioritaire. »
Parce que les Disciplinés cherchent à répondre aux attentes extérieures et
intérieures, ils peuvent se montrer réticents à aider les autres s’ils doivent
pour cela mettre de côté leurs propres obligations.
Ils n’aiment pas – voire ne supportent pas – faire des erreurs ou manquer
à un engagement. Une amie Disciplinée et éditrice pour un journal
important m’a dit : « Je déteste quand il y a une erreur dans un article sur
lequel j’ai travaillé. Les autres l’acceptent sans sourciller, alors que je
culpabilise terriblement. » Ne leur dites pas avec désinvolture : « Ce n’est
pas grave » ou « Personne ne le remarquera », mais plutôt : « Tu as fait ce
que tu pouvais, on ne pouvait pas faire mieux. » Parce qu’ils détestent être
pris en défaut, les Disciplinés peuvent être sur la défensive, voire hostiles,
quand on leur fait remarquer qu’ils se sont trompés.
Comme ils mettent un point d’honneur à atteindre les objectifs fixés, ils
peuvent refuser de relever un nouveau défi par peur de ne pas être en
mesure de l’atteindre. C’est parfois utile, bien sûr, parce qu’il faut savoir se
fixer des limites, mais ce peut être aussi dommage de ne pas essayer de se
dépasser par crainte de ne pas pouvoir « le faire bien ».
Le conjoint Discipliné
Le profil Discipliné – comme tous autres profils – présente des avantages
comme des inconvénients. Être marié à un Discipliné peut être un vrai
plaisir, mais il faut s’attendre à ce qu’il apporte des dossiers en vacances ou
qu’il travaille son violon alors qu’il y a des invités pour le week-end.
Connaître les spécificités du profil d’une personne permet de mieux
comprendre son point de vue. Une amie Disciplinée m’a rapporté comment
la typologie des quatre profils lui avait permis d’éviter une dispute avec son
mari.
Nous étions dans le train, en route pour aller voir mes parents. Notre fils avait fêté ses 12 ans la
veille, et de ce fait, il ne bénéficiait plus du tarif jeune enfant. Son ticket passait de 75 cents à
8,50 dollars. Si l’on ne payait pas le tarif plein, cela m’aurait turlupiné tout le week-end. Mon
mari, qui est un Pointilleux, n’était pas du même avis. « C’est complètement arbitraire, il n’a
qu’un jour de plus. Ce serait plus juste s’il payait l’ancien tarif. » À ses yeux, c’était plus
logique. Un Rebelle aurait certainement dit : « Personne ne m’obligera à payer ce montant ! »
Le fait de comprendre rend plus tolérant.
L’enfant Discipliné
De façon générale, les parents d’enfants Disciplinés ont la vie facile. Les
enfants Disciplinés veulent comprendre ce qu’on attend d’eux et répondre
à ces attentes. Ils sont assez autonomes. Leurs parents n’auront pas besoin
de batailler pour leur faire faire leurs devoirs ou leur rappeler de nourrir le
poisson rouge. Un enfant Discipliné va travailler son piano sans que
personne ne lui dise de le faire. Il préparera sa tenue de sport les jours
d’entraînement et connaîtra son emploi du temps de la semaine.
Les parents apprécient cette rigueur, mais cela peut s’avérer fatigant
quand elle tourne à la manie. Un enfant Discipliné peut faire un drame s’il
n’a pas fait les trente minutes de lecture quotidienne recommandées par son
professeur ou s’il arrive avec cinq minutes de retard à l’école.
Encore une fois, il faut choisir les arguments qui parlent à sa nature pour
le convaincre. Ainsi ses parents peuvent lui expliquer : « Ton professeur
veut que tu lises trente minutes tous les soirs avant d’aller te coucher, mais
aujourd’hui, on va rendre visite à grand-mère, et il sera l’heure d’aller se
coucher quand on rentrera. Tu as besoin de dormir pour être en forme pour
l’école. C’est plus important que de lire ce soir. » Ils peuvent aussi lui dire :
« Les professeurs savent que les enfants ne peuvent pas toujours faire leurs
devoirs et que ce n’est pas de leur faute. Il n’y a pas de soucis. » Rien ne
sert de leur dire : « Ce n’est pas grave », « Le professeur ne le remarquera
pas », « Ce n’est pas le professeur qui commande » ou « Trente minutes de
lecture, c’est une consigne complètement arbitraire ».
Les enfants Disciplinés peuvent également avoir du mal avec les
changements de dernière minute. Ils n’aiment pas laisser une tâche
inachevée ou se retrouver dans des situations où les attentes ne sont pas
clairement définies.
Si la plupart des parents trouvent facile d’élever un enfant Discipliné, la
relation parent-enfant entre un Discipliné et un Rebelle peut s’avérer
difficile à gérer, pour l’un comme pour l’autre.
Comme c’est le cas pour les conjoints des Disciplinés, les parents
d’enfants Disciplinés devraient se garder d’introduire des règles ou des
attentes inutiles. Les Disciplinés s’approprient très facilement un objectif et
vont consacrer beaucoup de temps et d’énergie à essayer de l’atteindre,
même si ce n’est pas quelque chose dont ils ont envie, même si ce n’est pas
une bonne idée. Une remarque anodine comme : « Tu devrais participer
à des concours d’orthographe » peut faire boule de neige.
Les adultes proches d’un enfant Discipliné doivent l’aider à déterminer et
formuler clairement ses attentes pour qu’il puisse les accorder avec les
attentes extérieures.
Le patient Discipliné
Pour les médecins et le personnel médical, les patients Disciplinés sont du
pain béni. Ils prennent les instructions des médecins au sérieux. Ils prennent
leurs médicaments consciencieusement et font leurs exercices de
rééducation avec assiduité.
Au cours de mon étude, je n’ai pas été surprise de découvrir que des
quatre profils, les Disciplinés étaient à 70 % plutôt pas d’accord avec
l’affirmation : « Mon médecin m’a expliqué pourquoi je devais changer
certaines choses dans mon mode de vie, mais je ne l’ai toujours pas fait. »
En fait, les Disciplinés vont plutôt connaître le problème inverse : ils vont
suivre les instructions des médecins à la lettre sans forcément se poser de
questions. Quand j’avais vingt ans, un orthodontiste m’a dit : « Votre
mâchoire aurait besoin d’être refaite. Vous n’avez encore aucune douleur,
mais croyez-moi sur parole, à trente ans, vous commencerez à souffrir de
douleurs chroniques. » J’ai réussi à ne pas prendre pour argent comptant ses
paroles, mais cela m’a demandé beaucoup d’effort. Et je n’ai toujours aucun
problème de mâchoire.
Les professionnels de santé devraient garder en tête que les Disciplinés
ont tendance à faire ce que l’on attend d’eux, quitte à en faire trop, ce n’est
donc pas la peine d’en rajouter pour être sûrs d’être entendus. D’un autre
côté, l’instinct de préservation des Disciplinés va les aider à mettre le holà
quand une attente devient trop pesante. Quand j’ai changé de coach sportif
pour mon programme de musculation intensif, je n’ai eu aucun mal à lui
dire : « Vous me donnez des poids beaucoup trop lourds. Je les veux très
lourds, mais là, c’est trop pour moi. »
« C’est ça ou rien. »
« Une devise, pour quoi faire ? »
5
Comprendre le Pointilleux
« Mais pourquoi ? »
Forces • Faiblesses • Les variations au sein du profil • Pourquoi les Pointilleux n’aiment pas être
remis en question • Comment sortir des questions sans fin • Comment les Pointilleux peuvent
répondre à une attente injustifiée en la justifiant
Aimant faire des recherches, les Pointilleux sont souvent des mines
d’informations, et ils partagent volontiers leurs connaissances.
Dans le même ordre d’idées, ils aiment améliorer les procédés et les
procédures. Ils vont chercher à éliminer les erreurs et perfectionner les
pratiques existantes. Un ami Pointilleux m’a dit s’épanouir comme
contrôleur d’informations, un autre m’a confié qu’un de ses hobbies était de
chercher à optimiser des interfaces utilisateurs.
Cela ne sert à rien de dire à un Pointilleux : « Nous avons toujours fait
comme ça », « C’est la procédure habituelle » ou « C’est moi, le chef ». Ce
qu’il veut savoir, c’est « Pourquoi ? » Le Pointilleux va interroger toutes les
hypothèses, examiner toutes les alternatives et rejeter les idées reçues. Une
pointilleuse m’a écrit :
Plus jeune, je ne voyais pas l’intérêt de suivre la mode ou de me maquiller. Mais avec l’âge et
l’expérience du monde du travail, je me suis rendu compte (par moi-même et en faisant des
recherches objectives) que notre apparence avait un impact sur notre carrière et nos relations
avec les autres. Dès lors, j’ai fait ce que je pensais être des efforts raisonnables pour être
séduisante. Cela dit, je consacre beaucoup plus de temps à cultiver ma beauté intérieure, que je
trouve bien plus importante.
Même si les questions des Pointilleux peuvent fatiguer les gens qui les
entourent, ces derniers ont tout intérêt à y répondre s’ils veulent avoir gain
de cause.
Les Pointilleux eux-mêmes aimeraient parfois être capables d’agir sans se
poser mille questions. « Il me faut toujours une information de plus pour me
décider, et ça ne s’arrête jamais ». « Je remets trop souvent les règles en
question. Les gens me disent : arrête de te prendre la tête. Accepte les
choses telles qu’elles sont. » Toutes ces questions prennent du temps et de
l’énergie. Une amie qui était à la fac de droit avec moi a passé des
entretiens dans des dizaines de cabinets d’avocats. Je n’en ai passé que six,
et nous nous sommes retrouvées dans la même firme.
À vouloir toujours en savoir plus, à tout passer à la loupe avant de se
décider, les Pointilleux peuvent se retrouver bloqués. C’est ce qu’on appelle
la « paralysie analytique ». Ils attendent d’être absolument sûrs de pouvoir
faire le bon choix, mais dans la vie, il faut parfois se décider et avancer sans
certitude.
Nombreux sont ceux qui, lorsqu’ils doivent suivre un avis médical, se
demandent s’ils ne feraient pas mieux de se renseigner pour s’assurer que
cet avis est fondé ou même pour trouver une autre approche qui serait
meilleure. Ils finissent parfois par ne rien faire du tout.
Comme ils excellent à chercher des justifications et à remettre en
question les décisions, quand ils veulent échapper à une attente ou à une
contrainte, ils y parviennent toujours. Aucune faille ne leur échappe. Un
Pointilleux l’explique très bien :
J’arrive toujours à m’en sortir avec une bonne justification. Dans ma tête, c’est comme si le
docteur Jekyll et M. Hyde conversaient en permanence : “Tu devrais faire de l’exercice”, “Mais
il fait trop froid dehors”, “Fais du sport en salle !”, “J’ai trop de travail, et c’est quand même
plus important que le sport.” Ce ping-pong intérieur m’exténue et je finis par regarder la télé
pour ne plus penser à rien.
Leur besoin de tout « faire à leur sauce » et leur propension à remettre en
question l’avis des experts eux-mêmes peuvent être très frustrants pour
ceux à qui ils demandent des conseils, de l’aide ou des services, à savoir
leurs professeurs, patrons, collègues, médecins, conseillers d’orientation,
plombiers, agents d’entretien… J’ai lu un sondage selon lequel 26 % des
médecins étaient plutôt d’accord avec l’affirmation : « Mes patients pensent
qu’ils savent mieux que moi ce qui est bon pour eux », je me suis dit qu’ils
devaient certainement penser aux Pointilleux. Un Pointilleux m’a d’ailleurs
écrit : « En général, je ne tiens pas compte des recommandations des
experts. Mon dentiste dit qu’il faut faire des radios de contrôle tous les ans.
J’en fais tous les cinq ans, parce qu’une exposition trop fréquente aux
rayons X peut développer un cancer. Juste pour un contrôle de routine, le
risque n’en vaut pas la peine. »
Un autre Pointilleux résume très bien cet état d’esprit : « Toute personne
appartenant au corps médical doit se crisper en me voyant, parce qu’elle sait
que j’arrive avec une batterie de questions et que je ne repartirai pas tant
que je n’aurai pas mes réponses. Si j’ai mon opinion sur le sujet, j’agirai en
conséquence, que cela soit en accord ou non avec les recommandations
médicales. Si je ne sais rien sur le sujet, je prendrai note des réponses à mes
questions et je me renseignerai avant de décider, si oui ou non, je suivrai les
recommandations des médecins. »
Les Pointilleux n’agissent que s’ils ont une raison valable de le faire, du
moins une raison qu’ils jugent valable, mais qui ne l’est pas forcément.
Quitte à rejeter l’avis des experts et à passer pour des fous. « Crois-tu
vraiment en savoir plus sur la pneumonie que le médecin ? », « Tout le
monde présente ses rapports de la même façon, pourquoi t’obstines-tu
à utiliser ce format ? »
D’après les documents que j’ai lus quand je travaillais à ma biographie de
John F. Kennedy, Forty Ways to Look at JFK, je suspecte de nombreux
théoriciens du complot d’être des Pointilleux.
Il arrive que ce côté « tête de mule » des Pointilleux irrite leur entourage.
L’entrepreneur et inventeur américain Steve Jobs était un Pointilleux.
Quand il était jeune, il était persuadé que son régime alimentaire végétarien
riche en fruits lui permettait de ne plus dégager d’odeurs corporelles, alors
même que son entourage lui disait que ce n’était pas le cas. Cet aspect de la
nature des Pointilleux peut avoir de lourdes conséquences. Quand les
médecins lui ont diagnostiqué un cancer, Jobs a rejeté tout protocole de
chimiothérapie et de chirurgie pour s’en tenir – malheureusement sans
succès – à un régime végétarien strict, des séances d’acupuncture, divers
remèdes à base d’herbes et d’autres traitements non-conventionnels. Il n’a
accepté de se faire opérer qu’en dernier recours.
Comme tout le monde, avec un peu de sagesse et d’expérience, les
Pointilleux peuvent apprendre à compenser les faiblesses de leur nature. Un
Pointilleux le résume très bien : « En tant que Pointilleux, j’ai appris
qu’ignorer certaines règles pouvait m’attirer des ennuis. Maintenant, je suis
les règles, je les change… ou je passe à autre chose. »
Notons une chose étonnante chez les Pointilleux : ils m’ont souvent fait la
réflexion qu’ils détestaient faire la queue. Un ami m’a confié : « Je déteste
tellement ça que cela m’empêche de faire la conversation quand j’attends
qu’une table se libère au restaurant. » Peut-être ont-ils l’impression de
perdre leur temps.
Le Pointilleux passe à l’acte quand tout est clair pour lui, mais cela ne
veut pas dire que sa décision sera du goût de tout le monde.
FORCES PROBABLES
S’appuient sur des faits
Impartiaux (selon leur propre jugement)
Tendent à créer des systèmes efficaces et utiles
Font volontiers l’avocat du diable
Prêts à renverser le système si nécessaire
Autonomes
N’acceptent pas l’autorité sans justification
FAIBLESSES PROBABLES
Peuvent souffrir de paralysie analytique
S’irritent de ce qu’ils considèrent comme de la complaisance chez les autres
Peuvent s’enfermer dans leurs lubies
Incapables de tourner la page s’il reste des questions en suspens, même si tout le monde passe outre
Peuvent refuser de répondre à des contraintes que les autres trouvent justes ou du moins
indispensables (comme le Code de la route)
Peuvent refuser de répondre aux questions des autres
6
Interagir avec un Pointilleux
« Une devise, pour quoi faire ? »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière
Le collègue Pointilleux
Les Pointilleux sont des atouts de poids au sein d’une organisation, car ils
poseront des questions essentielles comme : « Pourquoi procéder de cette
façon ? Faut-il seulement le faire ? Ne devrions-nous pas demander d’autres
avis ? N’y a-t-il pas un meilleur moyen de nous organiser ? »
Les Pointilleux vont chercher la petite bête, déterminer ce qui marche et
ce qui ne marche pas, éliminer ce qui est irrationnel. Pas question pour eux
d’accepter la solution de facilité qui consisterait à dire : « C’est comme ça
qu’on a toujours fait. » Leur questionnement permanent assurera une
gestion optimale des ressources, même si ce n’est pas toujours très bien
vécu par leurs collègues ou supérieurs, comme en témoigne un Pointilleux :
Être un Pointilleux m’a permis d’être très efficace au travail. Mais quand il y a des projets
communs et que les gens cherchent le consensus, ils considèrent mes questions comme un
manque d’esprit d’équipe. Je reste pourtant toujours très poli, et mes questions ont pour seul but
de clarifier notre stratégie, d’éviter de faire des erreurs, de perdre le moins de temps et d’argent
possible. Mon zèle est le plus souvent apprécié, mais certains prennent mes interventions
comme des critiques et le vivent mal. Ils me répondent alors : « Parce qu’untel ou untel l’a dit »
ou « Parce qu’on a toujours fait comme ça », les deux pires excuses que l’on puisse opposer
à un Pointilleux.
Quand les Pointilleux refusent de suivre une pratique usuelle, quand ils
passent leur temps à remettre en question des sujets que tout le monde
considère comme clos ou quand ils n’arrivent pas à se décider, ils peuvent
être difficiles à gérer. Pour désamorcer ces situations, leurs collègues
peuvent fixer des limites claires. Par exemple, un responsable peut dire à un
Pointilleux chargé de recruter un nouveau collaborateur de se fixer une date
à partir de laquelle il devra choisir entre les cinq meilleures candidatures en
sa possession. Les limites poussent à l’action.
Comme les Pointilleux ont confiance en leur aptitude à analyser et
à évaluer les choses, ils peuvent camper sur leurs positions et refuser d’en
démordre.
Un chef d’entreprise m’a dit : « Mon sous-directeur est un homme
brillant, mais je ne supporte pas de travailler avec lui. Il remet en question
tout ce que je dis et tout ce que je fais. Il sape mon autorité et nie mes
compétences.
– Il ne veut probablement pas saper votre autorité, c’est juste dans sa
nature de tout remettre en question.
– Quoi qu’il en soit, il n’y a plus aucun dialogue possible entre nous.
Nous devons passer par un intermédiaire. »
Quand les gens comprennent qu’un Pointilleux ne cherche pas la
confrontation ou qu’il ne veut pas miner le travail d’équipe, mais qu’il se
comporte juste selon sa nature, ils donneront plus volontiers les
informations dont il a besoin. Un Dévoué m’a rapporté : « Je suis un
enseignant Montessori et je travaille étroitement avec deux Pointilleux. Ils
me rendaient fou à me poser des questions à tout bout de champ.
Maintenant, je leur suggère des ouvrages à lire et des sites Internet
à consulter pour trouver des réponses à leurs questions. »
Quand les Pointilleux travaillent à leur compte – quand ils montent leur
propre entreprise ou décident du travail qu’ils doivent faire – ils excellent
à toutes les tâches qui méritent qu’ils y consacrent leur temps et leur
énergie. Quand ils ont une bonne raison de faire quelque chose, ils s’y
engagent. Encore une fois, cet état d’esprit peut être à leur avantage comme
à leur désavantage. Les Pointilleux pourraient ne pas vouloir perdre de
temps à discuter de choses et d’autres avec des clients potentiels… À moins
qu’ils ne se disent que cela peut les aider à conclure une affaire.
Peut-être feraient-ils bien d’anticiper la paralysie analytique, car travailler
seul implique beaucoup d’organisation en amont. Quel est le meilleur
système de classification, ou le meilleur logiciel de comptabilité ? Quelle
est la meilleure assurance ou stratégie commerciale ? Un Pointilleux qui
travaille seul peut se retrouver bloqué par l’indécision.
Le conjoint Pointilleux
Un lecteur m’a écrit : « Je suis un Pointilleux et je me demande toujours
comment faire pour améliorer les choses. Ma femme me taquine et me dit
qu’elle sait que notre mariage durera, parce que j’ai dû étudier la question
avant de dire oui. Et elle a raison ! »
Je connais bien les Pointilleux, parce que mon mari, Jamie, en est un. Être
marié à un Pointilleux s’avère utile pour la Disciplinée que je suis, qui
a tendance à répondre aux attentes sans les remettre en question. Il m’arrive
même de voir des attentes là où il n’y en a pas, ou de vouloir respecter des
règles inutiles, juste parce qu’il le faut. Jamie, lui, remet toujours en
question les attentes avant d’y répondre et avec le temps, j’ai appris à en
faire de même plus souvent.
Bien que je respecte et encourage parfois cet aspect de sa personnalité,
cela a encore le don de m’exaspérer. Je préférerais parfois un peu plus de
coopération de sa part, mais je sais aussi qu’il ne cherche pas à s’opposer
à moi, il veut tout simplement savoir pourquoi il doit faire ce que je lui
demande.
Il n’y a pas longtemps, je lui ai demandé de passer prendre de la dinde
rôtie en rentrant du sport. Je sais qu’il déteste faire la queue chez le traiteur
(de façon générale, les Pointilleux détestent faire la queue). Avant de savoir
qu’il était un Pointilleux, je lui aurais envoyé un message disant : « Passe
prendre de la dinde fumée sur le chemin du retour. » Et je peux être sûre
qu’il aurait ignoré ma demande. Non pas parce qu’il s’en fiche, mais parce
qu’il se serait dit : « Pourquoi me donner la peine de faire ça ? Le frigo est
plein. Quelle perte de temps ! » Maintenant, je lui écris : « Passe prendre de
la dinde fumée sur le chemin du retour. Il faut des sandwichs pour les deux
sorties scolaires d’Eleanor cette semaine. » Il est allé acheter de la dinde.
Parfois, les salves de questions des Pointilleux peuvent donner
l’impression à leur conjoint d’être agressé au lieu d’être soutenu. Une
Pointilleuse m’a écrit :
Il faut toujours que je comprenne le pourquoi du comment, et cela pèse sur ma relation de
couple. Mon mari a l’impression de ne pas être respecté, parce qu’il doit sans cesse se justifier.
Un simple : “Chérie, tu veux bien acheter une ampoule de rechange ?” génère une dispute de
deux jours. Il n’est pas question pour moi d’aller acheter une ampoule si je ne sais pas
exactement pourquoi.
Une amie Pointilleuse est mariée à un Discipliné. « Mon mari déteste voir
les tiroirs et les portes de placards ouverts dans la cuisine. Il m’a dit :
“Établissons une règle : bien refermer les tiroirs et les portes des placards de
la cuisine.” J’ai acquiescé : “Pour un Discipliné, une fois qu’une règle est
fixée, elle sera suivie.” Mais elle a poursuivi : “Je lui ai alors demandé ce
qui lui donnait le droit de fixer une règle.” Il m’a répondu : “Accorde-moi
cette règle, et tu pourras toi aussi en fixer une.” À quoi j’ai répondu : “Je ne
veux pas fixer de règle que tu serais obligé de suivre. À quoi ça servirait ?
Et puis, pourquoi les portes des placards devraient être tout le temps
fermées ? Si tu y tiens tant, tu n’as qu’à le faire toi-même. Si cela ne me
dérange pas qu’elles soient ouvertes, pourquoi devrais-je m’en soucier ?” »
J’ai éclaté de rire : « Typique d’une Pointilleuse et d’un Discipliné ! »
J’adore voir les profils à l’œuvre !
Comme les Pointilleux accordent beaucoup de poids à leur analyse, ils
peuvent résister aux avis des « experts », ce qui peut être source de
frustration pour leur conjoint. Une lectrice m’a écrit : « Mon Pointilleux de
mari croit tout savoir sur tout, et il a souvent raison, ce qui n’arrange rien.
Si je veux consulter un conseiller fiscal, il va me dire que c’est une dépense
inutile, parce qu’il pense qu’avec un peu d’efforts, il pourra me renseigner
tout aussi bien. » Cette attitude peut finir par agacer, mais elle peut surtout
être dangereuse si un Pointilleux décide par exemple d’ignorer des
consignes de sécurité sous prétexte qu’elles ne servent à rien.
Le besoin d’avoir un maximum d’informations avant de prendre une
décision peut acculer un couple à la paralysie analytique, comme une
lectrice en témoigne :
Mon mari étant un Pointilleux, chez nous, tout reste en suspens. J’ai trouvé une école
maternelle qui semble parfaite pour notre enfant, mais mon mari n’en est pas si sûr. Nous avons
décidé de faire poser des marches en béton, mais il a remis en cause les plans de l’entrepreneur.
J’essaie de faire avancer les choses, mais il freine des quatre fers et pose tellement de questions
que je finis par laisser tomber.
Elle devrait essayer les stratégies évoquées pour débloquer les situations
de paralysie analytique, comme : fixer des dates limites, suivre les conseils
d’une autorité respectée ou limiter les sources d’information.
Comme pour tous les autres profils, les forces des Pointilleux peuvent
aussi devenir des faiblesses. Leurs conjoints ne le savent que trop bien.
L’enfant Pointilleux
Dire à un enfant Pointilleux, « Parce que je l’ai décidé », « On a toujours
fait comme ça » et « C’est comme ça, un point c’est tout », ne fera que le
braquer.
Un Pointilleux a besoin de comprendre. Si les parents d’un enfant
Pointilleux veulent le faire travailler son piano, ils devront anticiper ses
questions : « Du piano, pour quoi faire ? Pourquoi faut-il faire des
gammes ? Pourquoi tant de cours par semaine ? Pourquoi avec ce
professeur et pas un autre ? La musique, d’accord, mais pourquoi en jouer,
et pas se contenter d’en écouter ? » Un enfant Pointilleux qui comprend
pourquoi on lui demande telle ou telle chose sera plus enclin à obtempérer.
Si son besoin de comprendre n’est pas satisfait, il résistera.
Le refus de faire comme tout le monde peut irriter ses parents et ses
professeurs. L’enfant va demander : « Pourquoi je ne peux pas aller
à l’école déguisé ? Tonton Jimmy n’est pas poli avec moi, pourquoi je
devrais l’être avec lui ? À quoi ça sert d’aller à la fac ? » Un lecteur m’a
écrit : « Mon fils est un Pointilleux. Il vient d’avoir son permis. Je l’ai
surpris à conduire pieds nus après une baignade. « Chausse-toi, c’est
interdit de conduire pieds nus » lui ai-je dit (je suis un Discipliné). Il m’a
répondu : « Pourquoi ? Il n’y a aucune raison ! » (Les Pointilleux ont
vraiment beaucoup de mal avec le Code de la route.)
La soif de comprendre de l’enfant Pointilleux peut enthousiasmer ses
professeurs, car ses questions témoignent de sa motivation et poussent
l’ensemble de la classe à réfléchir, mais elle peut aussi agacer quand elle
empêche tout le monde d’avancer, sape l’autorité de l’enseignant ou pousse
à la dissipation générale. Un élève Pointilleux peut aussi rechigner devant
certaines consignes.
L’enfance est parfois une étape délicate pour les Pointilleux, parce que les
enfants doivent obéir aux adultes sans discuter. Un père m’a dit : « Mon fils
est très intelligent, mais il a de mauvais résultats scolaires. Il a d’excellentes
notes aux examens, mais refuse de faire les devoirs à la maison, parce qu’il
considère que ça ne sert à rien. »
Cela peut avoir des conséquences à long terme sur sa scolarité. Face à un
enfant Pointilleux qui refuse de répondre à une attente, il est important de
comprendre pourquoi il se braque. Alors qu’un enfant Rebelle va penser :
« Vous ne m’obligerez pas à le faire », un enfant Pointilleux attend peut-être
tout simplement d’être convaincu. Un Pointilleux se souvient :
Petit, j’avais une écriture illisible, et mes professeurs avaient l’air d’y attacher beaucoup
d’importance. J’étais un élève plutôt doué. Un jour, je me suis rendu compte que je savais
toutes les réponses des exercices et j’ai décidé que je n’avais pas besoin de les mettre par écrit.
Si les professeurs voulaient vérifier que j’avais compris, ils n’avaient qu’à m’interroger ! Mais
ils m’ont puni et traité de fainéant, de tête de mule. À aucun moment, ils ne m’ont expliqué
pourquoi j’avais tort (avais-je tort, d’ailleurs ?). Ce n’est que lorsque les exercices se sont
compliqués que j’ai ressenti le besoin de faire mes raisonnements à l’écrit pour ne pas perdre le
fil de ma pensée.
Le patient Pointilleux
Il est crucial (bien que pas toujours possible) pour les professionnels de
santé de répondre aux questions des Pointilleux. S’ils sont convaincus, ils
suivront volontiers les recommandations médicales. Ils prendront leur
traitement, changeront leurs habitudes alimentaires et iront aux rendez-vous
de contrôle. S’ils ne sont pas convaincus, ils ne feront rien de tout ça.
Bien souvent, les médecins pensent avoir suffisamment justifié leurs
attentes, mais ils laissent des questions en suspens et de ce fait, les
Pointilleux ne suivent pas leurs recommandations. Un dentiste qui dirait :
« Vous devez vous brosser les dents au moins deux fois par jour pendant
deux minutes pour éviter la formation de tartre » pense certainement être
assez clair. Mais qu’est-ce que le tartre ? A-t-il des conséquences néfastes
sur la santé dentaire ? Pourquoi devrait-on éviter qu’il ne se forme alors
qu’il suffit d’aller chez le dentiste pour un détartrage ? Un Pointilleux bien
informé sera un Pointilleux plus coopératif.
Il est bon de noter que les Pointilleux aiment adapter les choses à leurs
besoins. Ils vont suivre des instructions, mais ils vont le faire à leur façon,
c’est-à-dire pas tout à fait comme selon la prescription. C’est pourquoi il est
important de leur expliquer pourquoi il faut suivre certaines prescriptions
à la lettre : « Ce médicament doit se prendre à l’heure des repas sinon il
provoque de fortes nausées. »
Les Pointilleux ont besoin de comprendre. Pourquoi réduire sa
consommation de sucre ? Pourquoi se lever et marcher un peu pendant les
longs trajets en avion ? S’ils font confiance à la personne qui leur donne des
conseils, ils le feront, sinon, ils s’abstiendront. Les Pointilleux ne font les
choses que s’ils ont une bonne raison de les faire et si elles leur sont
adaptées. Un ami Pointilleux m’a confié :
Quand on a appris que j’avais un diabète de type 2, ma petite amie s’est dit que j’allais avoir du
mal à changer de régime alimentaire, mais moi, je savais que j’y arriverai. Elle a trouvé que
j’avais dépassé les bornes en posant autant de questions au médecin, mais j’avais besoin
d’informations concrètes. Une fois que je suis décidé, je ne recule pas. Mais j’ai été honnête
avec le médecin, je lui ai dit : « Je vais manger comme il faut, mais je boirai six bières par
semaine. C’est comme ça que je tiendrai. »
Ce côté « tête de mule » des Pointilleux (cela peut paraître un peu dur de
ma part, mais comment voulez-vous appeler des gens qui s’accrochent
obstinément à leurs conclusions de savants du dimanche ?) se révèle
souvent en matière de santé. Cela vient d’une part de la possibilité de faire
des recherches approfondies, notamment sur des sites Internet peu fiables,
et cela répond d’autre part à leur volonté de tout accommoder à leur goût.
Certains Pointilleux ont leur propre théorie sur les causes de leurs
problèmes de santé ou sur la façon de les traiter. Mais souvent, les
professionnels de santé ne tiennent pas compte de ce qu’ils ont à dire et se
contentent de répéter leur diagnostic en se disant qu’ils finiront par se
ranger à leur savoir. Mais cela ne marche pas sur les Pointilleux. Ils feraient
mieux d’expliquer en quoi la théorie de leur patient n’est pas fondée avant
d’exposer la leur.
Le mari Pointilleux d’une amie a décidé de soigner seul son cancer, au
grand dam de sa femme et de ses médecins. Ils croyaient lui faire entendre
raison en lui répétant : « Pensez-vous en savoir plus que toute une équipe
d’oncologues ? » Mais il s’était renseigné et avait tiré ses propres
conclusions, ce qui avait plus de poids à ses yeux qu’une expertise
médicale. Pour le faire changer d’avis, ses proches auraient mieux fait
d’examiner attentivement ses arguments pour comprendre comment il en
est arrivé à ses conclusions, et lui expliquer point par point le raisonnement
du corps médical plutôt que de lui répéter simplement : « Écoute les
médecins, voyons ! »
Que ce soit dans le domaine médical ou non, les Pointilleux accorderont
plus facilement leur adhésion si on suit les penchants de leur nature :
« Essaie toujours. Tu ne t’engages à rien. Si ça marche, tant mieux, et ça ne
marche pas, tu essaieras autre chose. » Cette façon de procéder va répondre
à leur besoin de collecter des informations et de personnaliser les
approches. Les Pointilleux peuvent également suivre l’exemple d’une
personne qu’ils estiment : « Si cela marche pour elle, ça pourrait marcher
pour moi. »
« Tu peux compter sur moi, et je compte sur toi pour compter sur
moi. »
« En aidant les autres, je m’aide moi-même. »
« Si je dois, je fais ; si je veux, je ne fais pas. »
Tous les jours, on doit faire face à des montagnes d’attentes – celles que
les autres nous imposent (ou essaient de nous imposer) et celles que nous
nous imposons (ou essayons de nous imposer) à nous-mêmes.
Les Dévoués répondent volontiers aux attentes imposées par les autres,
mais ils ont du mal à respecter celles qu’ils veulent se donner. En identifiant
le profil Dévoué, j’ai pu répondre au problème de mon amie qui voulait se
remettre à la course à pied et qui disait : « Avant, je ne manquais aucun
entraînement. Je ne comprends pas pourquoi je n’arrive pas à m’y
remettre. » Quand elle avait un entraîneur et une équipe qui comptaient sur
elle, quand elle devait répondre à des attentes extérieures, elle n’avait aucun
mal à être assidue aux entraînements ; maintenant qu’elle doit se motiver
toute seule, cela ne suffit plus.
Les Dévoués ont besoin de rendre des comptes. Au saut du lit, la
première chose qu’ils se disent, c’est : « Que dois-je faire, aujourd’hui ?
Pour qui ? » Quand l’attente vient de l’extérieur – d’un patron, client,
membre de la famille, médecin, entraîneur, groupe de soutien, collègue, etc.
– les Dévoués répondent infailliblement. En général, ils respectent les
délais, tiennent leurs promesses et vont au bout de ce qu’ils font pour les
autres.
En revanche, ils ont des difficultés à faire des choses pour eux. Pour les
Dévoués, ce sont les attentes intérieures qui posent problème. Quelle que
soit leur volonté d’atteindre l’objectif qu’ils se sont fixé – faire du sport,
prendre des cours du soir, créer leur propre entreprise – ils vont presque
inévitablement échouer. C’est dur à dire, mais c’est ainsi.
Heureusement, il est facile d’y remédier… une fois que le Dévoué sait
comment s’y prendre. Alors, que doit faire un Dévoué pour répondre à une
attente intérieure ? Créer des contraintes extérieures. Une fois qu’il
a compris que ce qui lui manquait, c’était un garant extérieur, la solution est
assez simple et facile à mettre en place.
Pour cette raison, les Dévoués sont ceux qui ont le plus à gagner
à connaître leur profil. Plus que les Disciplinés, les Pointilleux et les
Rebelles, le cadre des quatre profils va aider les Dévoués à trouver des
stratégies pour s’accommoder des inconvénients de leur nature. Cela
permettra également à leur entourage de comprendre comment les
influencer efficacement.
Ce qui n’est pas rien, car de tous les profils, celui des Dévoués est le plus
répandu, chez les hommes comme chez les femmes.
Certains Dévoués se décrivent comme des gens qui aiment faire plaisir
aux autres, mais ils ne se sentent pas tous « obligés » de la même façon.
Certains se sentent obligés d’en faire beaucoup, d’autres très peu. Faut-il
envoyer des cartes de remerciements manuscrites ? Veiller tard les soirs de
bouclage au travail ? Accepter de faire une tâche dont personne ne veut ?
Certains Dévoués se sentent obligés de le faire, d’autres pas.
Certains se laissent facilement happer par les attentes, comme ce lecteur
qui m’a écrit : « Vous savez que vous êtes un Dévoué quand la première
chose qui vous vient en tête, c’est : “Fais le test des quatre profils, il faut
aider Gretchen à rassembler des données.” »
Les attentes ont sur eux un tel pouvoir qu’ils se sentent parfois obligés de
faire des choses que personne ne leur demande. « Tout le monde s’attend
à ce que j’intègre des diapos dans ma présentation. » (Ah bon ?) « On ne
peut pas laisser la vaisselle dans l’évier toute une nuit. » (Qui le dit ?)
« Tout le monde compte sur moi pour organiser la conférence. »
(Vraiment ? Quand bien même ce serait le cas, qu’est-ce que cela peut
faire ?)
Ces attentes extérieures que personne ne leur impose, ils se les imposent
eux-mêmes. Mais encore une fois, la motivation, la pression vient de
l’extérieur. Une Dévouée l’explique :
Si je pense que les autres attendent quelque chose de moi, j’aurais tendance à le faire. Par
exemple, je me suis chargée plusieurs fois de sortir les ordures, parce que mon mari était en
retard au travail, et c’est devenu une de mes tâches… non pas parce que mon mari s’attend à ce
que je le fasse, mais parce que je crois qu’il s’y attend… même si je sais que ce n’est pas le
cas ! C’est pareil pour le yoga… Je me suis forcée à y aller plusieurs fois, et depuis, je suis
assidue, parce que sinon, je me dis que la prof sera déçue.
Elle ne fait pas les choses, parce qu’elle en a envie, mais parce qu’elle se
sent obligée par les autres, même quand ils n’attendent rien d’elle.
Tous les Dévoués ne sont pas aussi sensibles à la pression extérieure.
S’ils ne risquent pas de sanction, ils ne s’en inquiètent pas nécessairement.
Leur promptitude à répondre aux attentes tient également à leurs degrés
d’énergie. Les Dévoués très énergiques répondront plus facilement aux
attentes, tandis que les Dévoués peu énergiques atteindront plus rapidement
le point de saturation.
Son mari accepterait sans doute volontiers son aide comme garant, mais
c’est ce rôle qu’elle refuse de tenir.
Comme ce n’est pas toujours facile de trouver un garant fiable parmi ses
amis et sa famille, les Dévoués ont peut-être intérêt à se tourner vers des
professionnels, coachs personnels et autres conseillers pour se fixer des
objectifs concrets, poser des échéances et superviser leurs progrès. Étant
payés pour le faire, ils ne pourront pas se défausser. Cela a un coût, bien sûr,
mais pour un Dévoué, c’est peut-être le prix à payer pour se réaliser
pleinement.
En faisant partie d’un groupe
Ceux qui ne veulent pas engager un professionnel ou s’en remettre à un seul
garant peuvent très bien créer ou joindre un groupe de soutien. Cela peut
être des amis, de la famille, des collègues ou de parfaits étrangers ayant la
volonté de se responsabiliser les uns les autres, comme en témoigne le
succès des Alcooliques Anonymes, Weight Watchers et autres groupes
d’études universitaires : les membres se motivent entre eux, se soutiennent,
s’encouragent et s’échangent des idées.
Pour la plupart des Dévoués, rien ne vaut le face-à-face, mais quand cela
n’est pas possible, la technologie peut prendre le relais. Il existe une
myriade de plateformes, d’applications et de groupes de responsabilisation
en ligne, y compris mon application Better (en anglais), qui facilite la
création de ce genre de groupes. La responsabilisation virtuelle est moins
coercitive, mais plus commode.
Dans ces groupes, les Dévoués doivent cependant faire attention à ne pas
se laisser emporter par les attentes des autres. Un lecteur m’a confié :
« Avant de me rendre compte que j’étais un Dévoué, je passais un temps
fou à gérer ces groupes. J’ai fini par saturer et tout rejeter en bloc. Chaque
profil a ses raisons de joindre un groupe de soutien, les Dévoués doivent
faire attention aux gens avec qui ils vont former ces groupes. »
Par un client ou un employé
Par définition, les clients imposent de respecter des engagements, comme
l’explique un Dévoué : « Je remettais sans cesse à plus tard la création
d’une formation en ligne pour accompagner mon podcast sur l’édition
à compte d’auteur. Dans mon dernier épisode, j’ai offert un abonnement
gratuit aux 25 premiers auditeurs qui en feraient la demande. Comme j’ai
reçu des demandes, je suis maintenant obligé de créer cette formation. »
Il en est de même pour cet autre Dévoué qui raconte : « Je n’invitais pas
les gens chez moi, parce que c’était le bazar. Alors j’ai inversé la situation :
j’ai invité des gens, et ça m’a forcé à faire le ménage. Je m’étais rendu
compte que je fonctionnais comme ça avant même de lire votre livre, mais
je croyais que c’était la honte qui me motivait. Grâce à vous, je sais que
c’est une question de responsabilisation. »
Une amie m’a dit que sa mère, une Dévouée, s’était forcée à faire de
l’exercice en devenant elle-même prof de fitness. J’ai effectivement
rencontré de nombreux Dévoués qui ont utilisé leur travail ou le bénévolat
comme stratégie de responsabilisation.
Inversement, pour s’engager, ils peuvent engager quelqu’un. « Engager
une aide est une façon pour moi de ranger le cellier, m’occuper du
jardin, etc. Cela m’oblige à fixer une date et donc à dégager du temps pour
le faire. J’aurais moins tendance à annuler si c’est quelqu’un que je paie
plutôt que si c’était un membre de ma famille. »
Au profit des autres
Souvent, les Dévoués arrivent à faire des choses pour les autres qu’ils ne
feraient pas pour eux-mêmes. Ils peuvent donc se motiver en se disant que
cela profitera à d’autres au lieu de se concentrer sur la valeur intrinsèque de
ce qu’ils veulent faire. De nombreux Dévoués m’ont confié avoir fini par
divorcer pour le bien de leurs enfants.
Un lecteur m’a dit : « Je gère une entreprise, et pour me responsabiliser,
je lie mes engagements personnels à mes obligations professionnelles : je
dois dormir suffisamment pour être efficace au travail, faire du sport
régulièrement pour être plus énergique et perdre moins de temps chez le
chiropraticien. »
Une lectrice m’a écrit : « Même si cela va à l’encontre de ma fibre
féministe, je prépare tous les jours un déjeuner à emporter à mon
compagnon (et à moi-même au passage), parce que je n’aurais jamais réussi
à en faire une habitude s’il ne comptait pas sur moi. »
Le besoin ou l’envie d’être un modèle exemplaire pour les autres peut
également pousser les Dévoués à répondre à une attente. L’un d’eux
a trouvé une solution originale : « J’ai instauré une règle à la maison :
quand je suis sur mon téléphone, les enfants ont le droit d’être sur les
leurs. »
Les Dévoués ne manquent pas d’ingéniosité pour trouver des façons de
faire du bien aux autres… pour leur propre bien. « Ma femme adore faire du
sport. Pas moi. On s’est mis d’accord : elle ne peut faire du sport que si j’ai,
moi-même, fait une séance la veille. Je me sens coupable de la priver de son
plaisir. » « Ma belle-sœur et moi avons dressé une liste de bonnes habitudes
que nous avons décidé d’adopter. Si nous les tenons, nous nous offrons une
journée de spa. Nous sommes toutes les deux des Dévouées, et l’idée est de
se responsabiliser l’une envers l’autre. Si je craque, elle perd une journée de
spa, et inversement. Nous savons pertinemment qu’aucune de nous ne fera
défaut à l’autre. »
C’est parfois en se projetant dans l’avenir que les Dévoués se
responsabilisent. Pendant longtemps j’étais perplexe d’entendre : « Je tiens
un journal que mes enfants liront après ma mort » ou « J’entretiens ce jardin
pour mes enfants plus tard ». Je me disais que ces enfants n’auraient peut-
être pas envie de lire la vie de leur père par le menu détail ou qu’ils ne
vivraient certainement pas dans cette maison, malgré son beau jardin.
Maintenant, je comprends en quoi cela peut être une bonne stratégie pour
les Dévoués.
La plupart des Dévoués ont du mal à dire non, même s’ils sont par
ailleurs débordés. Pour ne pas céder systématiquement, ils peuvent se
rappeler que dire non à quelqu’un leur permettra de dire oui à quelqu’un
d’autre. « À mon travail, les gens restent toujours très tard le soir, mais j’ai
eu une discussion avec ma famille, et nous aimerions bien dîner ensemble
plus souvent. Maintenant, j’arrive à dire non à mon équipe pour ne pas
décevoir ma femme et mes enfants. »
Un grand professeur, qui acceptait de donner trop de conférences à son
goût, a réussi à décliner les demandes en se disant : « En refusant de faire le
discours inaugural de cet événement, je laisse la possibilité à quelqu’un
d’autre de prendre la parole. »
Quand la Disciplinée que je suis entend : « Je me suis rendu compte que
je devais faire ça pour être un meilleur parent/employé/ami », j’ai envie
d’objecter : « Non, fais-le pour toi-même ! » Mais pour les Dévoués, c’est
parfois le seul moyen de faire, en fin de compte, des choses pour eux-
mêmes.
D’autres stratégies de responsabilisation
J’admire la créativité dont font preuve les Dévoués pour trouver des
stratégies de responsabilisation. À la fin d’une lecture, un jeune homme m’a
dit : « Je fais du sport avec un ami, et à la fin de chaque séance, chacun
repart avec les baskets de l’autre. Comme ça, si je ne vais pas à la salle de
sport, mon ami ne peut pas s’entraîner. » L’astuce que je préfère vient d’un
lecteur : « Je veux me lever tôt, mais je vis seul. Alors, j’ai créé un post
Facebook très embarrassant qui s’affichera automatiquement si je ne le
désactive pas avant 8 heures du matin. »
Quel que soit l’objectif que veut se fixer un Dévoué, quel que soit son
tempérament, il existe un moyen de l’y engager. Un professeur de musique
m’a écrit : « J’ai plein d’astuces pour aider mes élèves Dévoués à travailler
assidûment : faire partie d’un groupe ou d’un orchestre (et cela marche
particulièrement bien si l’élève a une place spéciale, comme la clarinette
basse dans un quartet), devenir tuteur d’un musicien en herbe, organiser des
sessions de travail avec un binôme en faisant en sorte de pénaliser son
partenaire en cas d’absence, ou faire un pacte avec un proche le privant
d’une activité auquel il tient si le Dévoué ne travaille pas. »
Je ne le répéterais jamais assez : pour répondre à une attente intérieure, le
Dévoué doit trouver une source de motivation extérieure.
Prenez par exemple William Shawn, le rédacteur en chef mythique du
New Yorker, qui apparaît clairement comme un Dévoué dans la biographie
de Lillian Ross, Here But Not Here.
Shawn était un rédacteur en chef important et estimé qui vivait d’un côté
avec sa femme et ses trois enfants, et d’un autre côté avec sa maîtresse
Lillian. Cela a duré 40 ans et sa femme était au courant.
D’un point de vue extérieur, il avait la vie qu’il voulait. Lillian
a cependant révélé que Shawn se sentait prisonnier de son rôle de rédacteur
en chef et qu’il aurait aimé écrire lui-même, mais il se sentait obligé
d’assumer ses responsabilités, parce que : « Personne n’aurait pu faire
tourner ce magazine… Je ne pouvais quand même pas laisser tomber tout le
monde. » Il avait confié à sa maîtresse : « J’ai vécu la vie d’un autre. » Bien
qu’ils aient été passionnément amoureux, il a partagé son temps en deux.
Lillian Ross a expliqué : « J’étais d’accord pour qu’il reste avec Cecile…
Elle voulait qu’il reste quoi qu’il en soit. »
Comment William Shawn aurait-il pu avoir la vie qu’il voulait vraiment ?
Il aurait pu signer un contrat d’écriture avec une maison d’édition qui lui
aurait fixé une date de remise du manuscrit. Il aurait pu donner une chance
à ses collaborateurs de faire leurs preuves en leur délégant une partie de ses
responsabilités. Il aurait pu demander à sa maîtresse de l’aider à divorcer, et
ils l’auraient fait ensemble.
Quand il n’y a plus de garant
Quand on parle de responsabilisation, j’ai souvent entendu dire que les
institutions autoritaires comme l’armée annihaient tout libre arbitre. Dans
son autobiographie, World Within World, le poète Stephen Spender
observe : « Comme c’est le cas pour la majorité des soldats, l’armée l’a
discipliné en brisant toute aptitude à l’autodiscipline. En dehors de l’armée,
il semblait n’avoir aucune volonté, aucun objectif dans la vie, parce qu’il
avait été formaté par les sanctions et les instructions. » Je ne suis pas
d’accord avec son analyse de la dynamique militaire. Je pense qu’en
imposant un cadre très strict de contraintes, une institution ne va pas casser
la volonté des Dévoués, elle va simplement leur donner l’occasion de ne pas
avoir à en trouver par eux-mêmes. Dans la vie de tous les jours, la plupart
des Dévoués se rendent compte qu’ils ont besoin de contraintes extérieures
pour réussir. Quand c’est une institution qui fournit ces contraintes, les
Dévoués n’ont plus besoin de s’en inventer. En quittant ce cadre, ils sont
effectivement un peu perdus, mais ce n’est pas parce que leur libre arbitre
a été réduit à néant.
Se libérer de toutes contraintes – imposées par un travail, un programme
d’entraînement, un ordre religieux ou l’école – peut être risqué pour les
Dévoués. Si tout se passe bien dans un cadre responsabilisant, ils peuvent se
retrouver paralysés, sans trop savoir pourquoi, quand ces contraintes
s’évanouissent. Un Dévoué témoigne : « Dans mon ancien travail, j’étais
responsable d’une grosse unité. J’avais la réputation de pouvoir tout
faire. Quand je me suis mis à mon compte, je n’ai eu plus personne sous ma
responsabilité et j’ai commencé à avoir du mal à aller au bout des choses. »
De même, une amie enseignante m’a dit : « Certaines écoles privées
donnent des directives très strictes et très détaillées, que ce soit sur la tenue
vestimentaire ou sur la façon de travailler. Certains s’épanouissent dans cet
environnement, mais une fois à la fac, ils sont complètement perdus.
– De nombreux facteurs entrent en compte, j’imagine, mais pour les
élèves Dévoués, je me demande si le problème ne vient pas du fait qu’à la
fac, il leur manque ces contraintes si importantes pour eux. C’est comme si
tout le monde se fiche de ce qu’ils font ou ne font pas. »
Un Dévoué peut être un excellent élève dans les petites classes et dériver
complètement après le lycée. « Je m’inscrirai à la fac de médecine
à l’automne », « J’enverrai des CV », « Je vais écrire un roman » ou « Il
faut que je fasse une demande de bourse… » La rentrée venue, il n’est
inscrit nulle part, n’a rempli aucun dossier et se retrouve sans objectifs, sans
consignes à suivre, sans professeurs à épater.
De la même façon, un Dévoué qui démissionne d’un emploi à temps plein
pour monter sa société peut avoir du mal à avancer ; un Dévoué entre deux
emplois peut se retrouver bloqué et un Dévoué dont les enfants seraient
partis de la maison peut se sentir perdu.
La solution ? Les contraintes extérieures.
Un Dévoué m’a dit : « C’est parce que nous faisons passer les autres en
premier. » J’ai dû me retenir de lui rétorquer : « Pas du tout ! » pour lui
répondre calmement : « Je ne pense pas que les Dévoués fassent passer les
autres en premier et que, de ce fait, ils n’ont plus de temps ou d’énergie
pour s’occuper d’eux. C’est juste qu’ils ne répondent qu’aux attentes
extérieures, et pas aux attentes intérieures. Ce n’est pas la même chose. »
Ce n’est qu’en comprenant vraiment le mode de fonctionnement de leur
profil que les Dévoués pourront en tirer le meilleur. Un Dévoué m’a confié :
« Maintenant que je sais que je suis un Dévoué, au lieu d’aller contre ma
nature, je laisse ma nature me guider. »
De même que les attentes d’un membre de la famille tombent du côté des
attentes intérieures, un membre de la famille ne saurait être un bon garant
pour le Dévoué.
Un homme d’affaires brillant le confirme :
Pendant des années, ma femme m’a dit : « Prends du temps pour toi, fais du sport. Tu t’investis
trop dans ton entreprise, tu ferais bien d’aller voir le médecin, et patati, patata. » J’ai fait la
sourde oreille. Comme si je n’avais que ça à faire ! Mais quand le président du conseil
d’administration m’a dit : « Ed, l’année s’annonce difficile et j’ai l’impression que tu es au bord
de la crise cardiaque. On a besoin que tu sois au top. Trop de choses dépendent de toi. Perds un
peu de poids, fais du sport, repose-toi, va voir le médecin. » Je l’ai fait.
Bien entendu, les ruptures ne sont pas réservées aux Dévoués. Mais dans
le cas d’une rébellion de Dévoué, elles ont un caractère abrupt. Tout semble
aller bien jusqu’à ce que le Dévoué craque. Un Dévoué décrit cela comme
une bombe qui explose et dont il ne maîtrise pas les dégâts. Certains parlent
de bouillonnement, d’envenimement, de ronger son frein, d’éruption et de
volcan.
Si ces rébellions peuvent être violentes et dramatiques, elles peuvent
aussi passer presque inaperçues et être symboliques. Un Dévoué a écrit :
« Quand je suis en retard, même de quelques minutes, un collègue me le fait
remarquer chaque fois. Ça m’énerve tellement que lorsque je suis en
avance, j’attends une minute dans ma voiture. Je déteste être en retard, mais
je ne supporte pas ses réflexions systématiques. Plus il me le reprochera et
moins je serai à l’heure. »
Notons qu’être délibérément en retard est une forme courante de rébellion
pour un Dévoué. Un de mes lecteurs m’a envoyé un lien vers un site de
vente de tee-shirts personnalisés avec ce modèle qui en saisit parfaitement
l’esprit :
FORCES PROBABLES
Bons patrons, leaders responsables, ont un bon esprit d’équipe
Se sentent obligés de répondre aux attentes des autres
Prêts à assumer les responsabilités quitte à se mettre en quatre
Répondent aux contraintes extérieures
FAIBLESSES PROBABLES
Exposés au surmenage et au burn-out
Peuvent entrer en rébellion
Facilement exploitables
Enclins au ressentiment
Ont du mal à dire non ou à fixer des limites
8
Interagir avec un Dévoué
« Accepte d’en faire moins »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière
Le collègue Dévoué
De façon générale, les Dévoués font d’excellents collègues ou patrons. Ils
font ce qu’ils disent, ils sont toujours prêts à donner un coup de main,
à prendre du travail en plus et à s’adapter aux changements.
Les Dévoués répondent aux attentes que l’environnement professionnel
fournit presque inévitablement : échéances, objectifs et évaluations. Il vaut
mieux que ces attentes soient clairement fixées, de vagues exhortations ne
suffiront pas.
Un ami écrivain et Dévoué se souvient : « Quand j’ai signé mon contrat,
j’ai dit à mon éditeur : “Je ne peux écrire que quand je dois rendre quelque
chose. Donnez-moi quelques échéances intermédiaires.
– Ne vous inquiétez pas, m’a-t-il répondu. Ce livre sera très bien et vous
y arriverez sans mal.”
Il ne voulait pas comprendre.
– Que s’est-il passé ? ai-je demandé.
– Je n’ai pu m’y mettre que trois semaines avant de le rendre. J’aurais fait
tellement mieux si j’avais commencé plus tôt. »
Faute de connaître le fonctionnement de son auteur, l’éditeur a refusé de
lui donner des contraintes. S’il avait compris que mon ami était un Dévoué,
il aurait eu une approche différente.
Cet exemple illustre bien comment, à force de ne pas vouloir dire non, les
Dévoués finissent par tout refuser en bloc.
Comme ils sont très souvent de précieux employés, les managers ont tout
intérêt à les ménager pour ne pas se retrouver en situation de rébellion. Un
Dévoué à bout peut claquer la porte sans crier gare.
Pour éviter d’en arriver là, ses supérieurs, collègues ou employés peuvent
l’aider à fixer des limites raisonnables :
– En lui rappelant que dire non, c’est pouvoir dire oui à une tâche
plus importante : « J’ai besoin de votre rapport vendredi. Si vous vous
laissez distraire par les tâches de vos collègues, vous ne serez pas prêt
à temps. »
– En imposant des limites pour éviter le surmenage : « Tu as droit à des
vacances, et tu vas devoir les prendre. »
– En empêchant que les autres profitent de lui : « Nous avons un délai
à respecter, et tout le monde ici doit faire sa part de travail. »
– En le présentant comme un modèle à suivre : « Si tu restes jusqu’à
21 heures, tu vas donner le mauvais exemple à ton équipe. »
– En lui retirant du travail s’il en a pris trop. Un ami dans la finance
m’a confié : « J’avais un excellent employé, le meilleur qui soit. Tout le
monde voulait travailler avec lui, parce que c’était toujours très
gratifiant. Mais il ne pouvait pas continuer à dire oui à tout le monde. Il
n’allait jamais tenir. Lors de sa dernière évaluation, je lui ai dit : « Tu en
fais trop, et tu le fais trop bien, mais ce n’est pas un compliment. » Il
n’arrivait pas à déléguer ou à en faire moins, alors nous lui avons retiré
un gros compte, et il va beaucoup mieux. »
Les Dévoués font d’excellents patrons et de grands leaders, parce qu’ils
se dévouent corps et âme à leur entreprise. Ils sont responsables et ont du
répondant. Mais, comme tout le monde, ils ont parfois du mal à comprendre
le raisonnement de ceux qui les entourent. Un manager Dévoué admet :
« J’ai du mal à accepter qu’on me dise non ou qu’on remette toujours tout
en question. » Ce n’est pas facile de diriger des gens qui ne pensent pas
comme nous. Et la première chose qu’il faut faire, c’est reconnaître cette
différence.
Les Dévoués vont répondre aux attentes extérieures comme par réflexe, et
cela peut leur attirer des ennuis. Un ami Discipliné se plaignait de sa
patronne, une Dévouée qu’il qualifie d’extrême : « Elle est PDG, mais elle
va tout laisser en plan pour aider un client ou un employé. C’est un vrai
frein à notre productivité. Rien ne se fait. »
Travailler seul relève du défi pour les Dévoués. S’ils sont très productifs
au sein d’une entreprise, ils peuvent stagner quand ils se mettent à leur
compte. Pour réussir, ils ont intérêt à fixer dès le départ un système de
contraintes et d’engagements forts. Qu’importe si ces engagements viennent
d’un conseiller financier, d’un mentor, des clients, des étudiants (même s’ils
ne paient pas… encore) ou d’un groupe de soutien, tant qu’elles émanent de
quelqu’un d’autre.
Une fois établis comme entrepreneurs, les Dévoués n’auront certainement
aucun mal à répondre aux engagements de leur travail, à savoir respecter les
délais donnés aux clients, gérer l’administratif et répondre au téléphone. Ils
peuvent toutefois avoir plus de difficulté à accomplir des tâches plus
générales comme développer le réseautage et les relations d’affaires, dire
non à des clients trop exigeants ou à des requêtes chronophages. Comme
toujours, la solution pour eux est dans l’élaboration d’un cadre de
contraintes externes.
Le conjoint Dévoué
Les Dévoués font d’excellents conjoints, car ils accordent beaucoup
d’importance aux attentes de l’autre. Mais leur compagnon a tout intérêt
à bien connaître leur façon de fonctionner.
Si un Dévoué demande à son conjoint d’être son garant, ce dernier doit
accepter ou trouver un autre moyen de le responsabiliser. Une Dévouée
raconte :
Je réussis à faire du sport tous les jours, parce que mon mari me demande tous les soirs en
rentrant si je suis allée à la gym. Il est très encourageant et enthousiaste, du coup, quand je
loupe une séance, je m’assure de ne pas louper la suivante. La santé est quelque chose qui
compte beaucoup pour lui, alors cela me donne envie d’être assidue. Même si c’est moi qui lui
ai demandé d’être mon garant, je me sens obligée d’être à la hauteur pour lui. C’est
complètement fou !
Les conjoints des Dévoués ont également un rôle à jouer pour éviter
qu’ils n’en fassent trop et finissent par craquer. « Tu as besoin de te poser.
Va faire une petite sieste, fais-le pour moi ! »
Une Dévouée raconte : « Mon mari m’a proposé de garder les enfants le
samedi matin pour que je puisse aller à un cours de spinning, mais je ne sais
pas pourquoi, je ne m’y autorise pas. » Pour l’en persuader, son mari devrait
essayer de lui dire : « Montre le bon exemple aux enfants en faisant du sport
régulièrement » ou « Cela nous permettrait aux enfants et à moi de passer
un moment rien qu’entre nous. » Pour convaincre les Dévoués, il faut faire
appel aux valeurs qui comptent à leurs yeux.
Une auditrice du podcast a écrit :
Découvrir que mon mari est un Dévoué a été une révélation. Il est adorable, et j’ai une chance
folle, mais il a tendance à s’oublier, alors je dois penser à lui pour lui. Il suffit que je lui
demande de l’aide pour qu’il mette de côté ses propres projets. Je dois veiller à ce qu’il ne
renonce à rien de trop important. Son ex-femme profitait de sa nature dévouée, alors je fais en
sorte de fixer des limites pour lui.
En « fixant des limites » pour son mari – en l’aidant à dire non (même
à elle) et en faisant en sorte que les autres ne profitent pas de lui – elle
l’aide à se prémunir des rébellions. Il faut anticiper, en effet. Et tout
l’entourage peut y mettre du sien. Imaginons qu’un ou une personne doit
partir en voyage d’affaires et laisser son conjoint Dévoué à la maison en
charge de leurs trois enfants, il ou elle pourrait dire à son retour : « Tu t’es
occupé des enfants tout seul (ou toute seule), et je t’en remercie. J’aimerais
que tu prennes ce week-end pour te ressourcer, pour te faire plaisir. Je
m’occuperai des enfants. »
Comme les Dévoués se sentent obligés de répondre aux attentes
extérieures, leurs conjoints doivent faire attention à ne pas suggérer des
attentes sans le vouloir, car ils peuvent les prendre très au sérieux. Une
femme peut lancer de façon anodine à son mari Dévoué : « Peut-être que tu
devrais coacher l’équipe de foot… » Et boum !
L’enfant Dévoué
D’après ce que j’ai pu observer, il est souvent difficile de dire si un enfant
est un Dévoué ou non. Les Disciplinés et les Rebelles appartiennent à des
types de personnalités très extrêmes qui se manifestent relativement tôt. Et
comme les adultes gèrent en grande partie la vie des enfants, il peut être
difficile d’identifier les caractéristiques du profil Dévoué.
Quand il est clair qu’un enfant est un Dévoué, ses parents peuvent tenir
compte des spécificités de son profil. Comme tous les Dévoués, l’enfant
Dévoué répond aux contraintes. S’il fait du piano, il peut être utile de lui
prévoir un programme détaillé, et de le passer en revue avec lui. On peut
aussi gentiment le rappeler à l’ordre : « Il est 16 heures, l’heure de travailler
ton piano. » Son professeur de musique peut aussi lui expliquer : « Je le
vois bien quand tu n’as pas travaillé. »
Quand un enfant Dévoué veut répondre à une attente intérieure, ses
parents devraient l’aider à mettre en place un système de responsabilisation
pour renforcer sa motivation. Une maman dont la fille voulait apprendre des
tours à son chiot lui a répondu : « Super ! Et si on t’inscrivait au cours
d’agility ? »
Il faut cependant prendre garde à ne pas fixer d’objectifs trop ambitieux.
Très sensible à la pression des attentes extérieures, l’enfant pourrait se
sentir obligé d’atteindre à tout prix cet objectif. Et à trop le forcer, il
pourrait entrer en mode rébellion. Plus important encore, il faut s’assurer
que l’enfant ne cherche pas trop à faire plaisir aux autres (y compris à ses
parents) pour éviter qu’il ne s’épuise et qu’il perde de vue ce qui lui fait
plaisir à lui et ce qui lui plaît vraiment.
Quel que soit le contexte, quand une personne réclame d’être
responsabilisée, il est important de l’aider à le faire. Une femme est venue
me voir à un événement au cours duquel j’avais pris la parole. « Ma fille
n’arrêtait pas de me dire qu’elle voulait passer le test GRE (Graduate
Record Examinations) et qu’elle voulait suivre des cours de préparation. Je
lui répondais chaque fois que cela ne servait à rien, qu’elle pouvait très bien
étudier toute seule. Maintenant, je me rends compte qu’elle aurait dû
s’inscrire aux cours comme elle le voulait. »
Les gens qui demandent à être responsabilisés savent qu’ils en ont besoin.
Le patient Dévoué
Des quatre profils, celles des Dévoués est le plus répandu, ce qui veut dire
que les professionnels de santé ont affaire à de nombreux Dévoués. De
manière générale, les Dévoués sont réceptifs au suivi des médecins,
infirmières, nutritionnistes, entraîneurs, coachs ou professeurs. Un coach
sportif, par exemple, peut prévenir ses élèves que toute absence sera notée
et entraînera l’envoi d’un mail de notification. Il peut aussi leur dire qu’il
sera déçu ou contrarié par leur manque d’assiduité.
J’ai parlé des quatre profils lors d’un congrès sportif à New York. Une
coach sportive m’a expliqué : « Pour responsabiliser les gens, on nous dit
de les appeler par leur prénom si possible.
– C’est une excellente idée, ai-je convenu.
– Mais je viens de penser à quelque chose d’autre. À la fin du cours,
j’avais l’habitude de dire : “Au revoir. Vous me trouverez ici même la
semaine prochaine.” Maintenant, je crois que je vais leur dire : “On se voit
la semaine prochaine !” Comme ça, les gens auront l’impression que je vais
les attendre.
– Excellent ! »
Comme toujours, quand quelqu’un demande à être responsabilisé, il est
avisé de l’aider autant que possible. Un Dévoué se souvient : « J’ai dit à ma
dentiste : “S’il vous plaît, faites-moi tenir ma promesse d’utiliser du fil
dentaire régulièrement. Si à ma prochaine visite de contrôle, mes dents sont
dans un mauvais état, rappelez-moi ma promesse !” Elle a ri, mais a accepté
de le faire. Depuis, je passe le fil dentaire tous les soirs. »
Il existe toujours plus de gadgets, d’appareils, d’applications et de
services pour inciter les gens à adopter une bonne hygiène de vie. Il suffit
de trouver celui qui correspondra à ses besoins. Pour certains Dévoués, un
simple mail de rappel peut suffire pour prendre ses médicaments, ou un
moniteur d’activités pour faire de l’exercice au quotidien. Pour d’autres, il
faut la menace d’une pénalité ou d’une sanction. Les groupes de soutien ou
de responsabilisation permettent d’avoir un ou des garants en personne.
Des études ont montré que beaucoup de gens étaient prêts à payer plus
cher pour être sûrs de rester motivés. Si j’étais coach sportif, je dirais à mes
élèves : « Les séances annulées moins de 24 heures à l’avance vous seront
quand même décomptées. Mais si vous préférez, nous pouvons vous la faire
payer trois fois plus cher si vous annulez moins de 24 heures avant. »
Plusieurs Dévoués m’ont affirmé qu’ils opteraient pour la deuxième
solution.
Comme les Dévoués ont plus de facilité à faire les choses pour les autres,
ils seraient peut-être plus enclins à suivre les recommandations de santé si
on leur rappelait les conséquences bénéfiques que cela aurait sur leur
entourage. Une Dévouée a écrit :
Je suis enceinte de six mois et les cinq premiers mois, j’ai pris mes vitamines prénatales tous les
jours, pensant avant tout à la santé de mon bébé. Il y a un mois, j’ai lu un article qui expliquait
que le bébé ne pouvait pas manquer de vitamines, ponctionnant au besoin le stock de sa mère.
Les vitamines sont donc pour la mère. Maintenant que j’ai lié les vitamines à ma santé et non
plus à celle du bébé, je ne les prends plus qu’un jour sur deux, et encore !
Les Rebelles prennent un malin plaisir à défier les attentes des autres.
« Depuis que l’on m’a dit que je risquais de me faire agresser dans la
Coulée verte près de chez moi, j’y vais régulièrement faire une marche. Ce
n’est peut-être pas la meilleure raison de faire de l’exercice, mais ça
fonctionne ! » Un autre Rebelle raconte : « Les gens n’arrêtaient pas de me
dire que je ne pourrais jamais arrêter de boire. Je leur ai prouvé le contraire
et j’adore leur rappeler comme ils avaient tort. » Dans les réponses à mon
questionnaire, les Rebelles étaient les plus enclins à être d’accord avec
l’affirmation : « Cela ne me dérange pas d’enfreindre les règles ou les
usages, et parfois même, cela me plaît ».
Même s’ils n’en font qu’à leur tête, les Rebelles sont souvent durs avec
eux-mêmes, surtout quand ils ont quelque chose à prouver, comme en
témoigne une lectrice :
Le test dit que je suis une Rebelle, et j’ai tout de suite pensé que ça ne pouvait pas être vrai. Je
suis culturiste et je fais de la compétition en catégorie bikini. J’ai un régime alimentaire et un
programme d’entraînement très stricts. Pour moi, un Rebelle n’aurait pas pu s’imposer ça. Mais
d’un autre côté, je fais du culturisme parce que cela me plaît. Et je le fais comme il me plaît de
le faire. Je le fais même si mon mari ne comprend pas pourquoi, même si mes amis trouvent ça
bizarre et même si cela me demande énormément de travail. J’adore voir la tête que font les
gens quand je leur dis que je suis une bodybuildeuse (j’ai une silhouette fine et non massive),
ou quand je leur dis que j’étais électricienne dans la Marine. J’aime être à contre-courant. Je
comprends maintenant en quoi je suis une Rebelle.
En lisant ces mots, je me suis dit : « Peut-être que ces travaux ont duré
plus d’un an, parce qu’elle était toujours sur son dos. »
Les Rebelles ont du mal avec tout ce qui est programmé. Voir un
événement sur le calendrier leur donne le sentiment d’être coincés, et quand
ils prévoient des choses, ils les annulent souvent à la dernière minute.
Ils n’aiment pas les tâches répétitives et ennuyeuses comme sortir les
poubelles ou tenir des comptes, et ne le font que lorsqu’ils ne peuvent plus
y échapper. Ils ont souvent recours aux prélèvements automatiques pour
régler leurs factures et quand ils peuvent se le permettre, ils engagent
quelqu’un pour les tâches ménagères. Ils ont bien vu aussi que d’autres
finissaient souvent par faire les choses à leur place.
Comme tout le monde, quand ils ne peuvent faire autrement, les Rebelles
s’exécutent… sans toutefois perdre leur esprit frondeur. J’ai demandé à une
amie Rebelle comment elle faisait pour régler ses factures à temps. Elle m’a
répondu du tac au tac : « Je le fais quand je suis au bureau, quand je suis
censée travailler. » Un ami Rebelle fait systématiquement et ostensiblement
des mots croisés sur sa tablette pendant les réunions. On peut certes
l’obliger à être présent, on ne peut pas l’obliger à participer.
Même quand ils reconnaissent la validité d’une contrainte, les Rebelles
ont du mal à l’accepter. Un Rebelle m’a confié : « Je suis marié depuis
cinq ans, et j’aime ma femme, mais le concept de monogamie me dérange.
Je ne supporte pas qu’on me dise ce que je peux ou ne peux pas faire. Je
veux pouvoir tout expérimenter et me réaliser pleinement, et cela implique
d’être avec plus d’une personne. » (Il a divorcé depuis.)
Les Rebelles refusent de recevoir une étiquette, même pertinente. Ils vont
ainsi déménager ou changer souvent de travail pour ne pas être prisonniers
d’un personnage. Certains vont aller à l’encontre même de ce qu’ils ont pu
dire pour ne pas se sentir enchaînés à ce point de vue. Ils refuseront alors de
faire ce qu’ils avaient dit, parce qu’ils ne veulent pas être tenus par quoi que
ce soit, même par leur propre parole. Ils n’accordent aucune importance
à leur réputation. Être considérés comme difficiles ou différents ne leur
déplaît pas (ce qui est autant un avantage qu’un inconvénient).
Les Rebelles n’aiment pas que l’on puisse décider à leur place ou dicter
leur comportement. J’ai constaté une constante intéressante : quand les
Rebelles s’inscrivent à une école, ils n’en choisissent qu’une. Ils savent où
ils veulent aller et ne veulent pas laisser un comité d’admission choisir leur
avenir pour eux.
S’ils résistent aux attentes qui leur sont imposées, certains Rebelles
n’hésitent pas à imposer les leurs. Comme Samuel Johnson le faisait
remarquer : « Ceux qui réclament la liberté à cor et à cri sont peu enclins
à l’accorder. » Une Rebelle a écrit non sans autodérision : « Je veux que les
autres fassent ce que je veux, et je veux pouvoir faire ce que je veux. »
Face à un Rebelle, mieux vaut tenir compte de sa nature frondeuse. Ce
n’est pas feint et cela ne lui passera pas. Une lectrice Rebelle m’a envoyé
un mail poignant : « Mais nous allons bien finir par nous rendre compte que
nous ne pouvons pas toujours faire ce que nous voulons, non ? Ce n’est pas
ça être adulte ! » Et pourtant, il y a des adultes comme ça. Et les Rebelles
sont comme ça. Pour le meilleur et pour le pire.
Comme c’est le cas pour tous les profils, le profil des Rebelles en recoupe
deux autres, celui des Pointilleux (qui résistent également aux attentes
extérieures) et celui des Dévoués (qui résistent également aux attentes
intérieures). Les Rebelles à tendance Pointilleux sont très différents des
Rebelles à tendance Dévoués.
Les REBELLES/Pointilleux tendent plus à réaliser leurs désirs qu’à
résister aux attentes extérieures. Leur esprit de contradiction reste fort, mais
ils accordent plus d’importance à faire ce qu’ils veulent qu’à défier les
autres. Les REBELLES/Pointilleux ne résistent pas vraiment à leurs
aspirations, comme l’un d’eux le fait remarquer : « Si je n’ai rien contre
quoi me rebeller, ça va. Comme tout le monde se fiche de savoir si je fais
du sport ou pas, j’en fais tout le temps. J’adore travailler pour moi-même,
j’ai plus de mal quand c’est pour les autres. »
Les REBELLES/Dévoués ont un esprit de contradiction et une volonté
d’échapper à un contrôle plus poussé. Les deux aspects de leur nature
résistant aux attentes intérieures, ils seront davantage exposés à la
frustration et à la rébellion. C’est pourquoi les REBELLES/Dévoués seront
plus enclins à s’obstiner : « Rien ne peut m’obliger ! » même pour répondre
à leurs propres désirs. Ainsi, dans son essai I Refuse to Be a Grown-Up (Je
refuse d’être une adulte), Elizabeth Wurtzel déclare : « Je fais ce que je
veux. Je ne fais pas ce que les autres veulent que je fasse. Il m’arrive aussi
de ne pas faire ce que je veux, parce que quelqu’un d’autre veut absolument
que je le fasse. »
Même quand ils ont envie de faire quelque chose, l’approbation ou les
encouragements des autres vont déclencher leur résistance. Un Rebelle
explique comment la bienveillance de ses parents le freine : « Quand
j’essaie de prendre de bonnes habitudes comme me lever tôt ou manger
sain, je finis par abandonner, parce que je sais que ce sont des choses que
mes parents approuvent (même s’ils ne me font aucune remarque). »
Pour résumer, les REBELLES/Pointilleux penseront : « Je fais ce que j’ai
choisi de faire », tandis que les REBELLES/Dévoués se diront : « Je refuse
de faire ce qu’on me dit de faire ».
Bien entendu, les différents traits de caractère vont nuancer tout cela. Un
Rebelle empathique se comportera différemment d’un Rebelle que les
autres laissent indifférent. La vie d’un Rebelle ambitieux n’aura rien à voir
avec celle d’un Rebelle qui n’accorde aucune importance à la réussite. Chez
certains, la rébellion se manifestera ouvertement et frontalement, chez
d’autres, elle prendra des formes plus discrètes et non conflictuelles.
Certains Rebelles adhèrent complètement à leur nature profonde, comme
l’atteste ce témoignage :
J’ai entrepris des choses que les gens pensaient impossibles. Les Rebelles n’ont pas froid aux
yeux, ce sont de véritables révolutionnaires. Ils vont changer la donne, parce qu’ils sortent des
sentiers battus. Étant un Rebelle, j’incite les autres à sortir de leur zone de confort, à voir et
à faire les choses « autrement ».
Une fois qu’ils ont compris les spécificités de leur nature, les Rebelles
peuvent trouver des moyens d’en compenser les mauvais côtés.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de compromis possible. Au lieu
d’imposer une date précise à un Rebelle, laissez-lui le choix d’en fixer une
dans un laps de temps donné. Ainsi, un collègue pourrait dire : « Le patron
nous rebat les oreilles avec le budget prévisionnel de l’année prochaine. Ce
serait bien qu’on puisse faire le point la semaine prochaine. Tu me diras
quand cela t’arrange. » Un ami pourrait dire : « Je vais être débordé dans les
mois qui viennent, mais je suis libre ce week-end. Appelle-moi si tu veux
qu’on se voie. »
Information, conséquences, choix.
Les Rebelles veulent rester fidèles à eux-mêmes. Ils peuvent tenir une
habitude si elle est en accord avec l’idée qu’ils ont d’eux-mêmes. Un
Rebelle explique : « Si une habitude fait partie de ce que je suis, elle ne
m’enchaîne pas. Elle me permet au contraire d’être qui je suis. » Pour
respecter un budget, le Rebelle peut se projeter comme celui qui fait des
choix avisés. Une Rebelle a écrit : « Je ne m’oblige pas à faire de l’exercice,
manger sainement, etc., je le fais par respect pour moi-même, parce que je
suis une personne qui prend soin de mon corps. Comme cela fait partie de
qui je suis, je le fais tout naturellement. »
Pour composer avec leur nature, certains Rebelles savent faire preuve
d’imagination : « Quand je dois faire des tâches répétitives, tout en moi se
rebelle. Alors, je joue à un jeu que j’appelle « Comme si… » Je fais comme
si j’étais quelqu’un d’autre, comme si j’étais un acteur en train de jouer un
majordome, un grand chef, un architecte d’intérieur, un célèbre poète, un
scientifique super cool… C’est idiot, mais ça marche. »
Une Rebelle a combiné la stratégie de l’identité et son goût pour les
défis : « Pour faire les choses, je me lance des défis. Je me dis : « Je suis
une Rebelle capable d’assumer le quotidien et d’aller au bout des choses. »
J’aime les défis. Je trouve ça subversif d’être une Rebelle capable d’être
disciplinée, parce que justement, on ne s’y attend pas. »
De même, les Rebelles peuvent lier une activité à une valeur qui leur est
chère. « J’ai réussi à faire du sport en m’inscrivant à un marathon dont les
fonds sont reversés à une cause humanitaire à laquelle je tiens. En liant
cette course à mon besoin de “faire quelque chose” pour cette cause, je
garantis mon assiduité. »
Inversement, un Rebelle recommande d’utiliser la stratégie de l’aversion.
Les Rebelles n’aiment pas être prisonniers d’une étiquette, même celle de
Rebelle. Il explique : « J’ai conscience de ma nature Rebelle, alors (et c’est
le plus important) je me rebelle contre ma nature Rebelle pour choisir ce qui
va m’aider à atteindre mon objectif. »
L’identité du Rebelle peut se définir par défaut. Ainsi, un Rebelle peut
décider de se fixer des habitudes pour ne pas devenir tel ou tel personnage.
« Je ne suis pas le genre d’entraîneur à faire attendre les enfants parce qu’il
est en retard. Je suis quelqu’un de responsable, probablement parce que ma
mère, la personne contre laquelle je me suis le plus rebellé, disait toujours
que j’étais irresponsable. »
Les Rebelles rivalisent d’ingéniosité pour ne pas chatouiller leur esprit de
contradiction. Ils en font un jeu, un défi, un choix, comme en témoigne l’un
d’eux : « Entre deux projets de longue haleine (importants certes, mais que
je trouve barbants) je me lance des petits défis, comme faire toute la
paperasse des free-lances de la société en quelques jours. » Un autre
Rebelle transforme les tâches routinières ou planifiées en un jeu :
Au lieu de dresser des listes de choses à faire, je les écris sur des petits bouts de papier pour les
tirer au sort un par un. Je ne peux procéder à un tirage qu’après avoir fini la tâche précédente.
Cela donne un petit côté aléatoire qui me plaît et c’est moins intimidant de voir ces bouts de
papier qu’une longue liste de tâches à faire.
Un autre Rebelle joue sur le pouvoir des mots. « Dès que je vois “à faire”
sur une liste, je me sens obligé de le faire, et donc je ne le fais pas. Une liste
de choses “à envisager” en revanche me rappelle que je peux choisir de
faire telle ou telle tâche. »
Parfois, il suffit aussi de changer de perspective. Au lieu de se dire
« Cette personne s’attend à ce que je fasse telle chose », ce qui va
automatiquement déclencher son esprit de contradiction, le Rebelle peut
penser : « Cette personne va dans mon sens, cela m’aidera à atteindre mon
objectif », ou « À ce poste, j’acquiers les compétences que je voulais ». Une
amie m’a raconté : « Ma conseillère financière avait besoin d’informations
que je refusais de lui envoyer… parce qu’elle me les avait demandées. J’ai
fini par me dire : “Elle travaille pour moi, elle va m’aider à renégocier mon
emprunt et faire des économies. Ce sera toujours ça que les banques
n’auront pas.” J’ai pu alors lui envoyer ce qu’elle me demandait. »
Les Rebelles n’aiment pas être tenus à un emploi du temps, ils s’en
sortent mieux quand ils peuvent faire ce qu’ils veulent, quand ils le veulent,
sans qu’on n’attende rien d’eux. S’ils veulent faire du sport, au lieu de
programmer des alarmes sur leur téléphone pour leur rappeler d’aller à la
gym, ils peuvent répertorier les cours disponibles dans le secteur pour
pouvoir, quand ils seront d’humeur, en choisir un qui leur convient sur le
moment.
Les Rebelles font ce qu’ils veulent. Ils peuvent aussi agir pour éviter
quelque chose. Un Rebelle m’a dit :
Je fais ma déclaration de revenus à temps pour ne pas avoir à me battre avec les impôts. C’est
épuisant, et je parle d’expérience. Je mets mon clignotant avant de tourner, non par respect du
Code de la route, mais pour éviter qu’un crétin me rentre dedans.
Certains vont se forcer à faire quelque chose, parce que refuser de le faire
entraînerait des conséquences encore plus indésirables. Pour rester
prolifique, une auteure Rebelle donnait son argent aussitôt gagné. Elle
savait que si elle n’était pas obligée d’écrire pour avoir de l’argent, elle
n’aurait plus écrit.
Ce n’est qu’en comprenant les spécificités de leur profil que les Rebelles
pourront en tirer parti et réussir à faire tout ce qu’ils veulent vraiment.
Pourquoi les Rebelles peuvent être attirés par des vies très
réglées
La personnalité Rebelle n’est pas sans paradoxes. Il n’est pas rare de voir
des Rebelles intégrer des institutions très réglementées et contraignantes,
comme l’armée, la police, les grandes entreprises ou le clergé.
Cela témoigne d’un besoin viscéral de sens : « L’armée ou l’église attirent
le Rebelle, parce qu’ils donnent du sens à ce monde de fou. Dans un bureau,
le Rebelle se sent prisonnier d’une cage (c’est mon cas). » Un autre Rebelle
le confirme : « Vous verrez des Rebelles dans l’armée et le clergé, parce
qu’ils trouvent quelque chose digne de leur dévouement. »
Les Rebelles, tirant souvent leur énergie et leur motivation de la
dissidence, ont parfois besoin d’un environnement très réglementé pour
avoir suffisamment de règles à ignorer, de limites à ne pas dépasser, de
conventions à violer. Un Rebelle témoigne :
En tant qu’ancien membre des Marines, je confirme la présence d’un certain nombre de
Rebelles dans l’armée. Étant moi-même un Rebelle, je sais que les Rebelles ont le don de
s’attirer des ennuis en refusant d’adhérer aux règles de la société. Certains n’ont même plus le
choix : c’est l’armée ou la prison (je connais deux personnes qui se sont retrouvées dans cette
situation). Par ailleurs, l’armée fournit pléthore de règles à suivre et donc autant d’occasions de
les enfreindre. C’est ce qui m’a permis de survivre à la rigidité des Marines. Quand enfreindre
une règle est sans danger, je le fais sans ciller. Cela ne m’a pas empêché d’avoir une belle
carrière et de décrocher de nombreuses récompenses.
Travailler dans un cadre très structuré peut convenir aux Rebelles qui
finissent par tourner en rond quand ils n’ont rien à quoi s’opposer : « Je me
bats contre l’ordre établi, mais je veux qu’il y ait cet ordre pour avoir
quelque chose contre quoi me battre. »
En m’intéressant à l’attirance qu’ont les Rebelles pour les systèmes
hautement régulés, l’exemple de Thomas Merton m’a frappée. Les écrits de
ce moine cistercien-trappiste ont eu une grande influence dans les
années 1950 et 1960. En 2015, le pape François l’a cité parmi les quatre
figures américaines les plus influentes. Dans ses écrits, Merton n’a cessé
d’exprimer sa rébellion : son opposition instinctive, sa soif de liberté, sa
détermination à suivre sa propre voie.
Les Rebelles placent la liberté au-dessus de tout, et pour Merton, la
liberté découle d’une soumission totale à la volonté de Dieu. Seule cette
soumission offre une échappatoire à la rébellion, aux exigences, aux
tumultes et aux souffrances de l’ego.
En 1941, Merton entre dans l’ordre des moines trappistes de l’abbaye de
Gethsemani dans le Kentucky, mais ce n’est pas un prêtre comme les autres.
Bien que le quotidien des trappistes soit très strictement réglé par le travail
communal, Merton obtient la permission de l’abbé d’établir un ermitage où
il est exempté des travaux quotidiens et libre de presque toutes les
obligations monastiques. Les visiteurs, et ils sont nombreux, viennent
s’entretenir avec lui en toute liberté.
Sa rébellion la plus marquante éclate en 1966 quand, après une opération,
il tombe fou amoureux d’une élève infirmière. Il n’hésite pas une seconde
à enfreindre les règles. Les deux tourtereaux se voient, s’écrivent et
s’appellent en cachette. Merton met ses amis en porte-à-faux en leur
demandant d’arranger leurs rencontres. Il semblerait qu’à ses yeux, Dieu ne
pouvait qu’approuver.
Le profil Rebelle est tout en puissance et en paradoxe.
FORCES PROBABLES
Indépendants
Capables de sortir des sentiers battus
Non assujettis aux conventions
Prêts à suivre leur propre voie, à rejeter les conventions sociales
À l’écoute de leurs désirs
Spontanés
FAIBLESSES PROBABLES
Enclins à résister quand on leur demande ou qu’on leur dit de faire quelque chose
Peu coopératifs
Peu délicats envers les autres
Peu assidus quand il s’agit de tâches répétitives
Ignorent les règles communes
Instables : peuvent avoir du mal à se poser, avoir un emploi, un domicile ou une relation durable
Ont du mal avec le quotidien et ce qui est planifié
Peuvent être indifférents à la réputation
10
Interagir avec un Rebelle
« Personne ne décide pour moi »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière
Le collègue Rebelle
Les Rebelles possèdent de grands atouts : leur aptitude à briser les
conventions, à sortir des sentiers battus, à se connecter à leurs désirs et
centres d’intérêt. Un Rebelle m’a envoyé cette devise typique des Rebelles :
« Si je devais me décrire en un seul mot, ce serait : “ne suit pas les
instructions” ».
Un Pointilleux a écrit :
Quand j’ai compris que mon ancienne responsable était une Rebelle, tout s’est éclairé. Quand
elle recevait des ordres de son supérieur, elle trouvait toujours à redire, même si cela faisait
partie de ses attributions. Quand on mettait une procédure en place, elle la rejetait une semaine
plus tard.
En tant que Pointilleux, c’était très difficile de travailler sous les ordres d’une Rebelle. Je ne
comprenais pas pourquoi elle prenait telle ou telle décision ou pourquoi elle n’arrivait pas à s’y
tenir. J’avais l’impression qu’il n’y avait aucune logique derrière ses choix ou ses consignes.
Le conjoint Rebelle
Le couple Rebelle-Dévoué
Vivre une histoire d’amour avec un ou une Rebelle relevant du défi, plus
d’une personne m’a demandé : « Est-ce que les Rebelles sont allergiques
aux relations durables ? » Les résultats de l’étude que j’ai menée montrent
que les Rebelles ont autant de chances que les autres profils d’avoir des
relations durables.
Comprendre qu’une personne est de nature Rebelle permet de mieux
comprendre son comportement. Une amie de la fac m’a dit : « Savoir que
mon mari est un Rebelle me fait voir notre relation différemment. Je ne
prends plus personnellement certaines de ses remarques. Quand je lui dis :
“Faisons ça” et qu’il me répond : “Jamais je ne ferai ça”, je sais que cela n’a
rien à voir avec ce qu’il ressent pour moi. C’est juste sa façon d’être. »
Les Rebelles, comme tout le monde, sont prêts à faire des efforts pour
éviter quelque chose de pénible. Une Disciplinée raconte comme son mari,
par amour, a changé quand elle a demandé le divorce :
À vrai dire, au début, c’est moi qui faisais tout. En moins d’un an, notre mariage s’est écroulé.
Mais c’est mon mari qui m’a convaincue d’aller voir un conseiller conjugal. Depuis, nous
avons appris à respecter nos différences.
En tant que Disciplinée, je suis motivée par toutes sortes de choses. Mon mari, un Rebelle, n’est
motivé que par une seule chose : l’amour. Il sait ce qui compte pour moi et fait tout pour me
soutenir, parce qu’il m’aime. Nos profils très particuliers font que nous avons une vie peu
conventionnelle : je dirige une entreprise prospère et mon mari s’occupe de nos enfants.
Ce n’est pas aussi difficile pour tous les couples. À un dîner, j’étais assise
à côté d’un Discipliné marié à une Rebelle. Quand je lui ai demandé – avec
beaucoup plus de tact – comment il s’en sortait, il m’a répondu : « Cela
marche, parce que ma femme est quelqu’un de très attentionné et très
aimant.
– Intéressant, ai-je pensé. Cela montre bien que le profil naturel d’une
personne n’est qu’un des nombreux aspects de sa personnalité.
– Si je lui demande de faire quelque chose, a-t-il poursuivi, elle va
commencer par me dire non, mais au bout d’une semaine ou deux, elle va
me proposer quelque chose qui tiendra compte de mes attentes.
– Comme quoi ?
– Elle m’avait montré des meubles pour la véranda et je lui avais dit
qu’ils étaient trop massifs. Elle m’a répondu : “Mais pas du tout, ça ira très
bien.” Une semaine après, elle m’a montré d’autres meubles beaucoup plus
adaptés.
– Je vois. Est-ce qu’elle a déjà refusé de faire quelque chose qui vous
tenait à cœur ?
– Oui. Après notre mariage, elle n’a pas voulu écrire de cartes de
remerciements. Et ça m’a dérangé.
– Ne pouviez-vous pas le faire quand même ?
– J’aurais pu, mais quand je me suis rendu compte que cela poserait
problème, nous avions déjà commencé à ouvrir les paquets sans tenir
compte de l’identité de ceux qui nous les avaient offerts. C’était trop tard.
(Il a soupiré.) Ça m’énerve rien que d’y penser. »
Une Disciplinée mariée à un Rebelle m’expliquait leur dynamique :
Mon mari et moi nous sommes rencontrés à la fac et nos profils respectifs étaient clairement
définis. J’avais d’excellents résultats, il a failli être recalé. Il est incroyablement intelligent,
mais quand le sujet d’un examen ne lui plaisait pas, il décidait de traiter un sujet de son choix.
Il apprenait, mais il le faisait à sa façon, ce qui lui valait des notes catastrophiques. C’était un
étudiant à part. Il n’a commencé son cursus universitaire qu’à 24 ans. Il a toujours pris le temps
de faire ce qu’il voulait quand il le voulait. Moi, j’étais une étudiante disciplinée qui menait de
front deux cursus.
J’ai mis un certain temps à comprendre qu’il faisait souvent le contraire de ce que je lui
conseillais ou demandais. Si pour certains, ces différences peuvent être insurmontables, moi,
j’aime l’esprit d’indépendance de mon mari.
Sa nature Rebelle nous permet d’avoir une vie peu conventionnelle. Je tiens à ma carrière, et il
a accepté de déménager plusieurs fois pour que je puisse avancer professionnellement.
Actuellement, c’est moi qui subviens à nos besoins. Nous n’avons pas d’enfant par choix. Mon
mari travaille à la maison, il écrit un roman. Il m’a financièrement (et émotionnellement)
soutenue quand je passais mon master et mon doctorat. Il a démissionné dès que possible pour
pouvoir écrire. Nous partageons les tâches domestiques et cuisinons chacun de notre côté.
J’aime que sa nature Rebelle me laisse en dehors de ses choix de vie (bien que cela peut devenir
délicat quand ses choix de vie empiètent sur les miens), parce que de toute façon, je ne peux pas
le forcer à faire quoi que ce soit.
L’enfant Rebelle
De nombreux Rebelles m’ont spontanément parlé du moment où ils ont
compris, enfants, que personne ne pouvait les obliger à faire quoi que ce
soit. « J’étais assis par terre et ma mère voulait que je mette mes
chaussures, m’a écrit un Rebelle. J’ai pensé : “Elle ne peut pas m’obliger !”
et j’ai refusé tout net. Je suis resté assis là pendant deux heures. »
Avoir un enfant Rebelle n’est pas de tout repos. Il suffit de lui demander
ou de lui dire de faire quelque chose pour qu’il s’y oppose. Il veut faire
comme il veut, et n’aime pas faire ce qu’on attend de lui. Une amie m’a
raconté à propos de sa fille Rebelle : « Je lui ai dit que je venais la coucher
dans cinq minutes.
– Et pourquoi pas quatre ? »
Rien ne sert de forcer un Rebelle, comme l’explique cet adolescent de
15 ans :
J’ai vécu avec ma mère pendant douze ans. Elle était très permissive et libre d’esprit. Puis, j’ai
emménagé chez mon père, qui est plus conservateur et à cheval sur la discipline. Quand je fais
quelque chose qui plaît à mon père, il va manifester sa satisfaction et me dire : « Si seulement
tu faisais ça plus souvent ! » Quand il ne me fait pas ce genre de réflexions, tout va bien. Mais
dès qu’il me demande de faire quelque chose, je bloque. Il ne comprend pas comment je
fonctionne et il trouve que je suis paresseux et irrespectueux.
Ce père n’a pas compris que cela ne servait à rien de dire à un enfant
Rebelle ce qu’il doit faire. Bien sûr, il est possible de lui faire faire quelque
chose, en fixant des sanctions, mais ce n’est pas très productif au long
cours.
Qu’est-ce qui marche, alors ? La même formule qu’avec les adultes :
information – conséquences – choix, sans insister, sans le faire culpabiliser.
Ce n’est pas facile. Ce peut être effrayant de laisser un enfant faire ce
qu’il veut, mais comme cela ne sert à rien de le pousser ou de le diriger (au
contraire, ce peut être pire), autant avoir confiance en leur jugement.
Un parent de Rebelle m’a expliqué : « La meilleure façon de gérer un
enfant Rebelle est de lui donner les informations nécessaires à sa prise de
décision, de lui présenter le problème sous forme de question à laquelle lui
seul peut répondre, et de le laisser agir sans avoir à vous en faire part. Qu’il
se décide tout seul dans son coin. Ne lui imposez pas de dialogue. Qui dit
dialogue, dit attentes, contraintes. S’il voit que vous ne le surveillez pas, il
n’aura pas besoin de se rebeller contre vous. »
L’un des problèmes majeurs avec un enfant Rebelle, c’est lorsqu’il veut
quitter l’école, comme dans cette famille :
Ma sœur Lynne est une Rebelle, cela ne fait aucun doute. Elle a des difficultés scolaires depuis
le jardin d’enfants, mais ce n’est pas une question de niveau intellectuel. Depuis qu’elle est au
lycée, elle parle de quitter l’école. Cet été, alors qu’il ne lui restait plus qu’un an, nous avons
bien cru qu’elle allait le faire.
Avant que mes parents ne lui parlent, j’ai suggéré à ma mère de laisser Lynne faire ce qu’elle
voulait. Je lui ai expliqué les spécificités de sa personnalité Rebelle et l’ai rassurée : Lynne
trouverait le moyen de faire ce qu’elle veut. Ma mère a accepté à contrecœur.
Quelques semaines plus tard, Lynne a émis l’idée de finir le lycée par correspondance au lieu
de tout arrêter. Elle m’a dit aujourd’hui qu’elle retournait à l’école. Ils ont aménagé son emploi
du temps.
C’est parce que mes parents l’ont laissée prendre ces décisions toute seule qu’on en est là.
Lynne a le sentiment d’être aux commandes de sa vie (et elle l’est). Je me demande ce qui serait
arrivé s’ils l’avaient forcée à rester à l’école.
Le patient Rebelle
Les Rebelles peuvent avoir de sérieux problèmes de santé, parce qu’ils vont
avoir tendance à s’opposer aux prescriptions médicales. Ce qui marche avec
les Disciplinés, les Pointilleux et les Dévoués peut avoir l’effet contraire
avec les Rebelles. Cette résistance systématique peut être très frustrante
pour les professionnels de santé qui veulent les aider. Conseils,
encouragements, rappels, et remontrances peuvent pousser les Rebelles
à faire le contraire de ce qu’ils devraient. Les Rebelles résistent au
diagnostic lui-même, comme l’explique l’un d’eux :
J’ai un diabète de type 1, et j’ai du mal à accepter qu’une maladie puisse contrôler ce que je
ressens et ce que je fais. Je sais que je devrais me dire que c’est moi qui contrôle mon diabète et
non l’inverse, mais je n’y arrive pas. Je vérifie rarement ma glycémie, je prends de l’insuline de
façon sporadique, alors que je n’aime pas manger à heures fixes, et je n’ai pas vu mon
endocrinologue depuis des années. Je ne connais même pas mon taux d’HbA1c.
Encore une fois, la meilleure façon d’aider un Rebelle, c’est de s’en tenir
à la formule : information – conséquences – choix. Un médecin Discipliné
raconte :
Je suis médecin généraliste et une de mes patientes refuse de suivre mes recommandations pour
perdre du poids et soigner sa résistance à l’insuline. Au cours d’une consultation, l’étiquette
« Rebelle » m’est venue à l’esprit. J’ai aussitôt changé mon fusil d’épaule en lui suggérant tout
ce qu’elle pouvait essayer « si elle en avait envie ». À la visite suivante, elle avait perdu du
poids et se portait beaucoup mieux. Elle avait tout simplement essayé une de mes suggestions.
Je n’aurais pas eu le même résultat en étant directif, car c’est une approche efficace avec les
Disciplinés, les Dévoués et même les Pointilleux, parce que j’explique toujours en détail mes
instructions, mais pour un Rebelle, cela ne marche pas.
J’ai reçu un mail d’une lectrice qui ne sait plus quoi faire pour pousser
son mari à arrêter de fumer. Cela va sans dire, son insistance n’a eu aucun
effet, même s’il avoue vouloir arrêter de fumer. Elle m’a demandé si j’avais
des conseils à lui donner. Voici ce que j’ai répondu :
Peut-être que votre mari peut essayer de voir les choses autrement.
• Les Rebelles détestent se sentir coincés, forcés. Ils peuvent voir la
cigarette comme un piège : « Je suis dépendant, je suis perdu sans mes
cigarettes. »
• Les Rebelles détestent se faire exploiter : « Mon argent va directement
dans les poches des industriels du tabac. »
• Les Rebelles sont fiers de ce qu’ils sont : « Je suis un non-fumeur, parce
que j’ai choisi de l’être, parce que je le veux. »
• Les Rebelles accordent de l’importance au plaisir : « Ce serait bien de se
réveiller sans tousser ou avoir une mauvaise haleine, de ne plus
s’essouffler en montant les escaliers. »
• Les Rebelles accordent de l’importance à la liberté : « Dans les lieux
publics, je ne peux pas fumer où je veux. »
• Les Rebelles aiment faire les choses à leur façon : au lieu de suivre une
méthode classique, ils peuvent trouver leur propre façon d’arrêter.
• NOTA BENE : les Rebelles ont toujours un petit côté : « Vous allez voir
ce que vous allez voir ! » Essayez : « Chéri, je crois que c’est vraiment
trop dur. Ta dépendance au tabac est trop forte, ce n’est peut-être pas la
peine de lutter. Ça ne sert à rien. »
Elle m’a réécrit pour me donner des nouvelles : « La stratégie la plus
efficace a été une variation de votre nota bene. Je lui ai dit que son fil de
18 ans pensait qu’un vieux croûton comme lui n’arriverait jamais à arrêter
de fumer (et c’est vrai). Je sens qu’il va essayer de lui donner tort. »
Pour les Rebelles, c’est important de vivre selon leurs valeurs. Lier une
habitude à une valeur constitutive de leur profil peut les inciter à changer.
Aucune relation n’est vouée à l’échec ou n’est gagnée d’avance, quel que
soient les profils en jeu. On observe cependant de grandes constantes entre
les différentes associations.
Ce qui nous plaît au départ chez une personne est aussi souvent ce qui
finit par nous exaspérer. Un Discipliné peut être intrigué par le refus du
Rebelle de se plier aux règles, le Rebelle peut être attiré par l’efficacité du
Discipliné, mais après cinq ans de mariage, ces qualités peuvent leur
sembler beaucoup moins séduisantes.
Cela ne fera pas tout, mais connaître les caractéristiques de chaque profil
peut nous aider à mieux comprendre la dynamique de nos relations avec les
autres.
Discipliné-Discipliné
J’ai rencontré peu de couples de Disciplinés. Soit parce que les Disciplinés
ne vont pas très bien ensemble, soit parce que c’est un profil assez peu
représenté dans la population.
J’aime beaucoup travailler avec d’autres Disciplinés : je peux compter sur
eux pour faire ce qu’il faut sans avoir à être sur leur dos, et ils me diront
franchement si je leur en demande trop.
Je ne suis pas sûre cependant de vouloir me marier avec un Discipliné.
Toute cette rigueur peut être un peu contraignante. Même si deux
Disciplinés s’entendent bien, ils peuvent être un peu durs l’un envers
l’autre, comme l’illustre ce témoignage :
Mon mari et moi sommes des Disciplinés, et ma fille de 13 ans nous dit toujours : « Je ne
connais aucun parent comme vous. » Je le prends comme un compliment. Mon mari et moi
accordons beaucoup d’importance à la force de caractère et à la discipline. Je suis coach sportif
et il est professeur de tennis. Avec nos clients et nos élèves, nous sommes très attentionnés et
compatissants, mais « en coulisses », nous sommes très critiques. Nous avons beaucoup de mal
quand les gens ne font pas ce qu’ils ont dit.
Discipliné-Pointilleux
Disciplinés et Pointilleux font bon ménage. Mon mariage en est un parfait
exemple. Et je pense que c’est une combinaison bénéfique pour les deux
parties. Les Disciplinés répondent instinctivement aux attentes, et la
présence d’un Pointilleux va les aider à prendre le temps de se poser des
questions, voire à refuser d’y répondre.
Comme ma sœur me l’a fait remarquer, je suis une Disciplinée avec deux
Pointilleux à des positions stratégiques dans ma vie : mon mari et mon
agent littéraire. Leurs questions m’évitent de faire des choses inutiles, à la
maison comme au travail.
Pour la sortie en format poche de Ma vie en mieux, on m’a demandé
d’écrire un article pour un magazine avec comme consigne : inventer une
histoire à la première personne sur le thème des quatre profils avec une
brève introduction présentant chaque profil et un conseil sur la meilleure
façon de prendre de bonnes habitudes pour chacune d’eux. Le tout en
1 000 mots. Gratuitement.
C’était un exercice qui allait me demander beaucoup de temps et d’effort,
et cela me fatiguait rien que de lire les consignes. Mais je me suis dit que
j’avais une voie de sortie : j’ai envoyé un mail à Christy : « Est-ce que je le
fais ? », « Pas question ! » m’a-t-elle aussitôt répondu.
Avoir un mari Pointilleux m’aide à me poser plus de questions (peut-être
que Jamie aurait préféré ne pas déteindre autant sur moi, parce qu’après
tout, c’est plus pratique d’avoir une compagne qui fait ce qu’on lui
demande sans poser de question !) Mais d’un autre côté, son refus d’agir
s’il n’a pas eu de réponses à ses questions m’exaspère, sans compter le fait
qu’en bon Pointilleux, il n’aime pas être lui-même remis en question.
Quoi qu’il en soit, il est très appréciable pour les Disciplinés comme pour
les Pointilleux d’avoir un compagnon enclin à répondre à ses propres
attentes.
Les parents Disciplinés peuvent ne pas apprécier le questionnement
incessant de leurs enfants Pointilleux, parce qu’ils s’attendent à ce que les
enfants obéissent sans rechigner, comme en témoigne ce père :
Il m’arrive de perdre patience avec mon fils Pointilleux. J’ai du mal à comprendre pourquoi il
ne se contente pas de faire ce qu’il faut. Bien sûr, les enfants ont toujours mieux à faire, mais
quand il s’agit de mettre ses chaussures, prendre une douche ou ce genre de choses, il n’y a pas
de question à se poser. Avec un enfant Pointilleux, il faut tout négocier.
Discipliné-Dévoué
Comme tous les profils, les Disciplinés s’entendent bien avec les Dévoués.
Partageant tous deux le désir de répondre aux attentes extérieures
(contrairement aux Pointilleux et aux Rebelles), ils vont coopérer et
respecter les volontés de chacun.
Les Disciplinés savent qu’ils peuvent compter (en général) sur les
Dévoués pour répondre aux attentes extérieures, mais ils peuvent
s’impatienter devant l’inaptitude de ces derniers à répondre à leurs propres
attentes.
Ils ne comprennent pas pourquoi les Dévoués vivent ces attentes comme
des obligations. Imaginons qu’un Dévoué dise à son patron : « Je suis
fatigué, parce que j’ai veillé jusqu’à 3 heures du matin pendant cinq jours
pour finir ce rapport. » Au lieu de lui témoigner son appréciation, le patron
Discipliné pourrait très bien lui répondre : « Il va falloir que tu apprennes
à mieux gérer ton temps de travail. Pour être performant, il faut dormir. »
Si de leur côté, les Dévoués apprécient que les Disciplinés répondent aux
attentes extérieures, ils peuvent se sentir oppressés par les attentes des
Disciplinés, se sentir jugés ou incompris quand ils peinent à répondre aux
attentes intérieures.
Les Dévoués trouvent parfois les Disciplinés froids ou égoïstes quand ces
derniers donnent la priorité à une attente intérieure sur une attente
extérieure. Une Dévouée (qui me semble au bord de la rébellion) a écrit :
Au cours de nos neuf ans de mariage, mon mari a fait la fac de médecine et son internat. Que
j’étais contente quand il a décroché son diplôme ! J’allais enfin pouvoir profiter de lui. Mais il
s’est aussitôt lancé dans un autre projet. J’ai vite compris qu’il y aurait toujours quelque chose
d’autre. En bonne Dévouée, je m’étais approprié ses attentes, j’avais pris sur moi ses
obligations pour qu’il puisse se concentrer sur ses études.
Ses projets actuels ne concernent que lui, et cela m’agace de le voir courir après des objectifs
que je ne trouve pas forcément importants. Nous avons trois enfants en bas âge et il m’aide
beaucoup, je le reconnais, mais parfois j’ai l’impression qu’il se dépêche de faire ses devoirs de
père pour pouvoir s’occuper de ses choses à lui. Il se lève très tôt (5 heures du matin) pour tout
faire, mais du coup, il me réveille. Après toutes ces années à me lever plusieurs fois par nuit
à cause des petits, cela me fatigue d’être réveillée, parce que monsieur a des projets.
Il fait comme s’il était débordé, mais ce n’est pas vraiment le cas, puisque rien ne l’oblige
à faire tout ça. Je suis à bout, et j’aimerais qu’il se concentre sur notre famille, sans se fixer des
objectifs superflus qui finissent toujours par me retomber dessus. Si je me montre indifférente
à ce qu’il fait, c’est comme si je n’existais pas, parce qu’il n’y a que ses objectifs qui comptent.
Je comprends leurs deux points de vue. Ce témoignage montre très bien
comment la frustration et le ressentiment peuvent naître entre un Dévoué et
un Discipliné.
Les Dévoués peuvent être contrariés quand les Disciplinés refusent d’être
leur garant, et inversement, les Disciplinés peuvent se sentir gênés quand
les Dévoués leur disent : « Je fais ça, parce que tu me l’as demandé » ou
« Je le fais pour toi ». Les Disciplinés veulent que les gens fassent les
choses pour eux-mêmes, ce qui est beaucoup demandé !
Connaître le profil des gens permet de désamorcer les conflits, comme le
raconte une Disciplinée : « Apprendre que mon compagnon est un Dévoué
a fait beaucoup de bien à notre relation. S’il ne va pas au bout de ses
objectifs, je sais maintenant que ce n’est pas parce qu’il s’en fiche ou qu’il
manque de rigueur, il a juste besoin d’y être obligé. »
Discipliné-Rebelle
En général, Disciplinés et Rebelles ne s’entendent pas très bien. Ils ne
voient pas le monde de la même façon et fréquentent des milieux différents.
Enfreindre les règles met le Discipliné mal à l’aise, alors que le Rebelle
s’en amuse. Avec le temps, cela peut être source de conflits, comme le
rapporte une lectrice : « Je suis une Disciplinée mariée à un Rebelle. Mon
mari a beaucoup de mal à répondre aux ordres de quelqu’un. Quand il doit
travailler, il est le plus souvent malheureux. Il déteste notre paroisse. À la
maison, il ne fait que les tâches qu’il veut bien. J’ai décidé d’aller voir un
conseiller conjugal, mais lui s’y refuse. Je l’aime vraiment. Il a été mon
héros pendant ma longue bataille contre le cancer (aucun signe du Rebelle
alors !) »
Les Disciplinés ont un faible pour les plannings, les programmes, les
plans, les consignes, ils n’aiment pas les changements et ils n’aiment pas
renoncer à qui a été prévu. Les Rebelles, eux, résistent à tout engagement.
Plus le Discipliné essaiera de prévoir quelque chose à l’avance, et plus le
Rebelle s’efforcera de l’ignorer.
Les relations parents-enfants entre Discipliné et Rebelle peuvent être
houleuses, dans un sens comme dans l’autre.
Une amie Rebelle a un fils Discipliné.
« Imaginons qu’à l’école de ton fils, les enfants doivent obligatoirement
porter une chemise à boutons le vendredi. Que ferais-tu ?
– Si c’est important pour lui, je lui achèterai une chemise, a-t-elle
répondu après avoir pris le temps de réfléchir (C’est une Rebelle qui met un
point d’honneur à être une mère attentive.) Mais je ne l’obligerais jamais
à la porter. »
Bien entendu, l’entente entre Discipliné et Rebelle dépendra beaucoup de
leurs autres traits de caractère. Une relation de couple peut fonctionner si le
Rebelle veut être un compagnon aimant et attentionné.
Un Rebelle et un Discipliné peuvent vivre ensemble s’ils n’en attendent
pas trop l’un de l’autre, comme le rapporte cette lectrice : « Ma colocataire
est une Disciplinée qui est absolument horrifiée de me voir me lever à une
heure différente tous les jours. Et moi, je suis horrifiée par le fait qu’elle
retrouve les mêmes têtes tous les jours dans le métro ! » Elles sont toutes les
deux effarées par le comportement de l’autre, mais cela n’affecte en rien
leur mode de vie, et donc leur amitié.
Aucune relation, quelles que soient les personnalités en jeu, n’est
condamnée. Selon le caractère de chacun et les circonstances, toutes les
combinaisons sont possibles et peuvent être fructueuses, comme une
Disciplinée l’explique :
La nature Rebelle de ma compagne m’équilibre et permet d’assouplir mon côté Discipliné.
J’adore être une Disciplinée, mais cela n’a pas toujours été un avantage, surtout quand il a fallu
que j’assume mon homosexualité. J’avais l’impression de décevoir ma famille, de me décevoir
aussi, ce qui, pour une Disciplinée, était très lourd à porter.
De son côté, ma compagne a assumé son homosexualité très jeune, et n’a jamais eu de mal avec
ça. Au contraire, cela lui plaisait d’être différente. C’est sa nature Rebelle qui l’a aidé
à traverser une épreuve que la plupart des gens trouvent émotionnellement difficile. J’admire sa
confiance en elle et son assurance.
Sa spontanéité est parfois déroutante, mais c’est aussi ce qui me force à lâcher prise quand je
me contrôle juste pour être dans le contrôle. Par exemple, j’ai du mal à annuler quelque chose
de prévu. Il m’arrive cependant de le faire après une semaine stressante ou parce que je ne me
sens pas bien. Elle prend alors un malin plaisir à me voir culpabiliser de ne pas avoir répondu
à un engagement que je m’étais fixé. Malgré son profil Rebelle, elle tient à me faire plaisir et se
plie à mes listes, calendriers et autres programmes bien planifiés (non sans apporter une bonne
dose d’humour).
Une autre Rebelle m’expliquait pourquoi elle pensait que le couple
Discipliné-Rebelle pouvait fonctionner : « Mon mari est un Discipliné et
j’admire sa détermination sans faille à poursuivre ses objectifs. Il apprécie
mon indépendance et mon anticonformisme. Nous appartenons tous deux
à des profils extrêmes et aucun de nous ne comprend vraiment les Dévoués
ou les Pointilleux, qui ne savent pas ce qu’ils veulent, ou qui sont
incapables de s’imposer face aux autres ! »
Disciplinés et Rebelles ont beaucoup à apprendre les uns des autres.
J’avais écrit qu’en tant que Disciplinée, j’avais pour devise : « La
discipline, c’est la liberté. » Un Rebelle m’a répondu : « Si je devais trouver
une devise pour les Rebelles, Gretchen, je proposerais d’inverser la vôtre,
puisqu’après tout, les profils Rebelle et Discipliné peuvent être considérées
comme antithétiques. Si votre devise, c’est : “La discipline, c’est la liberté”,
la mienne serait : “La liberté comme seule discipline”. »
Pointilleux-Pointilleux
Pour beaucoup, les relations entre Pointilleux ne peuvent que fonctionner,
parce que les deux parties comprennent et apprécient le besoin de chacun
d’avoir des réponses à ses questions. Une Pointilleuse explique :
Mon mari et moi sommes tous les deux Pointilleux, chacun à notre façon. Il passe des heures
à faire des recherches pour acheter une tente, alors que je me décide très rapidement pour les
achats. Même si faire ce genre de recherches ne me viendrait pas à l’esprit, je suis contente
qu’il s’en charge. J’ai remarqué que nous étions très différents des autres couples, parce que
nous ne nous sentons pas menacés ou critiqués quand l’autre nous remet en question. Nous
comprenons le besoin de multiplier les points de vue avant de prendre une décision. Nous
trouvons cela utile et non superflu. C’est agréable de savoir qu’il ne prendra pas
personnellement mes remarques sur ses décisions, achats, projets, etc. Il comprend, et même, il
apprécie.
D’un autre côté, deux Pointilleux peuvent avoir parfois du mal à prendre
des décisions, comme me l’a fait remarquer un ami : « Comme on est
Pointilleux tous les deux, il nous arrive d’être bloqués.
– C’est-à-dire ?
– Quand on a fait des travaux dans la maison, il a fallu déplacer le lave-
vaisselle. Mais chaque fois qu’on réfléchissait à un nouvel emplacement, on
finissait dans le jardin en train de nous demander s’il fallait construire un
deuxième étage. Chaque question amenait une autre question, nous ne nous
en sortions pas.
– Avez-vous réussi à vous décider finalement ?
– Pendant deux ans, nous avons vécu avec un lave-vaisselle qui n’était
pas branché, parce que nous ne savions pas où le mettre. J’ai fini par me
dire qu’un lave-vaisselle n’importe où, c’était mieux que pas de lave-
vaisselle du tout. Et j’ai déclaré : “Nous recevons des invités le mois
prochain, le lave-vaisselle marchera d’ici là.” Nous aimons tous les deux
respecter les délais. »
La combinaison parents Pointilleux/enfants Pointilleux fonctionne bien
aussi. Le parent comprend la réticence de l’enfant à obéir à des injonctions
arbitraires ou injustifiées, et il donnera volontiers des explications. L’enfant
Pointilleux respectera les décisions mûrement réfléchies de son parent
Pointilleux.
Mais leur répugnance à être remis en question peut être source de
frustrations. Quand le parent dit : « Tu verras bien ce qu’on mangera ce
soir » ou quand l’enfant dit : « Je suis en train de faire mes devoirs, je n’ai
pas envie d’en parler », ils refusent tous deux de donner des explications,
alors qu’il y en a (ce sont des Pointilleux après tout), parce qu’ils n’aiment
pas avoir à se justifier.
Pointilleux-Dévoué
Dévoués et Pointilleux font bonne équipe, même si leurs relations peuvent
être parfois conflictuelles. Une Dévouée en donne un exemple flagrant :
« Je traverse dans les passages cloutés et respecte les panneaux de
signalisation pour les piétons, tandis que mon mari, qui est un Pointilleux,
s’en fiche complètement et traverse où bon lui semble. »
Les Dévoués peuvent aussi s’exaspérer du besoin constant des Pointilleux
d’informations et de justifications. Un Dévoué se souvient :
Je travaillais pour une Pointilleuse qui avait besoin de compiler un maximum de données et ne
prenait de décision qu’à la dernière minute. J’étais chargé de lui fournir des projections
financières et je passais des heures et des heures à créer de nouveaux modèles, tout ça pour
arriver à peu de choses près au même résultat que le modèle de départ.
Les Dévoués ont tout intérêt à se rappeler que les Pointilleux sont plus
coopératifs quand ils comprennent pourquoi on leur demande de faire
quelque chose, comme l’explique cette lectrice : « Maintenant, quand je
demande quelque chose à mon mari, je sais que je dois lui expliquer
pourquoi c’est important. Avant, je pensais qu’il suffisait qu’il sache que ce
devait être fait, mais en fait, il a besoin d’avoir une raison de le faire. Toutes
ces interminables discussions que nous aurions pu éviter si j’avais
commencé à lui expliquer pourquoi ! »
Un parent Dévoué peut vite perdre patience avec les questions
incessantes ou impertinentes de son enfant Pointilleux. L’un d’eux raconte :
En tant que Dévoué, quand un parent, professeur ou entraîneur vous dit de faire quelque chose,
vous le faites, sans poser de question. Mais ma fille, qui est une Pointilleuse, refuse de faire
quoi que ce soit si elle ne sait pas pourquoi on le lui demande. Moi, je sais que ce n’est pas de
l’impertinence ou de la mauvaise volonté, mais tout le monde ne va pas être aussi patient avec
elle.
Pointilleux-Rebelle
Pointilleux et Rebelles ont incontestablement des affinités. Les deux profils
se sentent en droit – à un degré plus ou moins élevé – de suivre leurs
propres règles et de rejeter toutes attentes extérieures. Un Rebelle a écrit :
« Je m’entends bien avec les Pointilleux. Ils se fichent de ce que les autres
disent ou pensent, de ce qu’il faut faire. S’ils jugent ça idiot, ils ne le feront
pas. Pour moi, c’est pareil. »
Pour les Disciplinés et les Dévoués, ce genre d’attitude peut passer pour
un mépris total et égoïste des obligations de tout un chacun, alors que les
Pointilleux et les Rebelles ne comprennent même pas comment il est
possible de fonctionner autrement.
Cela dit, les Pointilleux peuvent s’irriter du refus systématique du Rebelle
à faire ce qui est utile ou raisonnable. Les Rebelles quant à eux restent de
marbre devant l’insistance des Pointilleux à s’informer ou se justifier. Un
lecteur témoigne :
Je suis un Pointilleux et un Rebelle vient d’être engagé au bureau. Il fait les choses comme il le
sent et perd du temps avec des détails qui n’ont aucun intérêt, alors que l’équipe a déjà établi un
programme bien précis. J’adore mon travail, parce qu’il consiste à trouver des solutions basées
sur des données et des études. Et cela m’énerve qu’il ne tienne pas compte des nouvelles
données et des nouvelles avancées. Il n’en fait qu’à sa tête. Il ne respecte pas les délais et ne
répond pas à mes questions, cela me met hors de moi.
Dévoué-Dévoué
Une relation entre Dévoués peut être très harmonieuse. Deux des couples
les plus heureux que je connaisse sont des Dévoués, même si tout n’est pas
rose tous les jours. Une Dévouée raconte : « On veut faire attention à notre
alimentation, mais il suffit que l’un propose : “Ça te dirait une pizza ?” pour
que l’autre réponde aussitôt : “Oh oui !” On a beaucoup de mal à nous
motiver à faire des activités saines ensemble. On fait des plans sur la
comète, mais rien ne se concrétise. »
La solution est de se créer un système de responsabilisation ou de
contraintes extérieures, ce qui implique, dans le cas des couples 100 %
Dévoués, des contraintes extérieures au couple. Pour respecter un budget
commun, mieux vaut pour eux ne pas se fier à l’autre, mais prendre
régulièrement rendez-vous avec un conseiller financier.
Parent et enfant Dévoués s’entendent également très bien. Le parent se
sent responsable de son enfant et l’enfant se sent redevable vis-à-vis de son
parent. C’est une dynamique très fructueuse, comme en témoigne une
lectrice :
J’ai du mal à me forcer à me lever tôt, et ma mère aussi, alors je lui ai proposé d’être mon
binôme spirituel. Je l’appelle à 7 heures, on papote un peu, on lit un passage de la Bible, on en
discute, puis on prie l’une pour l’autre. C’est la solution idéale, parce que cela nous pousse
à nous lever tôt le matin tout en instaurant l’habitude de lire la Bible quotidiennement, ce que
j’ai toujours voulu faire. Cerise sur le gâteau : nous partageons ce moment ensemble.
Dévoué-Rebelle
Nous avons déjà parlé de cette association récurrente dans la section « Le
conjoint Rebelle » au chapitre 10.
Si le tandem Dévoué-Rebelle fonctionne bien, le quotidien n’est pas
forcément sans accrocs. Par exemple, de nombreux enfants Dévoués
devenus adultes m’ont confié qu’il était difficile d’avoir un parent Rebelle.
Une amie m’a dit : « Ma mère adore ses petits-enfants, mais si je lui
demande de les garder, elle exige qu’on les conduise chez elle à l’heure
qu’elle aura choisie. Tout doit toujours se faire selon ses propres termes. Et
c’est dommage, parce qu’elle manque plein de choses. Mon mari et moins
ne lui proposons plus de participer aux activités familiales, parce qu’elle ne
sera pas à l’heure et ne voudra pas faire les choses de telle ou telle façon ».
Un autre Dévoué m’a écrit : « Une fois, j’ai dit à mon père d’être là à
18 heures, parce que cela commençait à 18 heures, alors qu’en fait cela ne
commençait qu’à 19 heures. Il est toujours en retard. Il m’a dit que j’étais
un manipulateur. Ce n’est pas faux. »
Manipulateur ou réaliste ? Il n’y a qu’un pas entre les deux.
Rebelle-Rebelle
Les Rebelles ont souvent du mal à s’entendre avec d’autres Rebelles. Une
Dévouée rapporte : « Mon mari et ma fille sont tous les deux Rebelles. Et le
comble, c’est qu’ils détestent chacun le côté Rebelle de l’autre. Ils vont
reprocher à l’autre ce qu’ils font eux-mêmes. Ils se traitent de paresseux, se
critiquent et se prennent le chou à longueur de temps. »
Un lecteur m’a écrit : « Je connais un couple Rebelle-Rebelle qui
fonctionne pour deux raisons. Premièrement, le mari gagne beaucoup
d’argent, il est à son compte et adore ce qu’il fait. La femme ne travaille pas
et fait absolument ce qu’elle veut après avoir déposé les enfants à l’école.
Deuxièmement, ce sont deux fortes personnalités pour qui il est important
d’être de bons parents. »
Intriguée de voir cette combinaison de profils si rare, j’ai demandé par
retour de courrier : « Comment décident-ils, par exemple, du lieu ou des
dates de leurs prochaines vacances ? » Les Rebelles rechignent en général
à suivre le mouvement initié par d’autres, même si c’est pour faire quelque
chose qui leur plaît.
Le lecteur m’a répondu :
J’adore les écouter nous raconter comment ils organisent leurs vacances. La femme décide de
l’endroit où aller, et le mari décide ensuite s’il a envie de se joindre à eux. Ils passent rarement
ses vacances seul, mais elle ne l’oblige à rien. Et lui non plus. S’il lui demandait de se charger
des vacances, elle rechignerait certainement. Ils procèdent comme ça pour presque tout. Celui
qui y tient s’en occupe, et l’autre prend le train en marche… ou pas. Quant aux enfants, ils s’en
chargent chacun leur tour autant que possible. Ils ont tous les deux beaucoup de mal avec ce
qu’il « faut » faire, et leur relation serait certainement moins harmonieuse s’ils n’avaient pas les
moyens de se décharger d’une bonne partie des obligations.
Sur une note plus amère, une lectrice a écrit : « J’aime bien mon médecin,
mais quand je lui ai dit que j’avais besoin d’être davantage responsabilisée,
elle est restée sceptique. Elle est persuadée que je dois apprendre à me
motiver et à faire les choses pour moi. Bien entendu, cela ne marche pas. Je
n’ai jamais pu fonctionner comme ça. Je veux juste quelque chose qui
marche pour moi. »
Combien de fois ai-je entendu ça ! J’avoue ne pas comprendre pourquoi
ce serait déshonorant d’avoir besoin de contraintes extérieures pour se
motiver. Tant que ça marche, où est le problème ? À chacun sa stratégie !
Souvent, quand les gens veulent changer un comportement, chez eux
comme chez les autres, ils commettent l’erreur commune de dire : « Tu
devrais… »
– « Si tu tiens à ta santé, tu devrais faire du sport régulièrement. »
– « Si tu prends ce travail au sérieux, tu devrais respecter les délais que je
t’ai donnés. »
– « Si tu veux vraiment conclure cette vente, tu devrais pouvoir ignorer
quelques règles. »
– « Si tu me respectes, tu devrais faire ce que je t’ai dit sans rechigner. »
– « Si tu te respectes, tu devrais trouver le temps d’écrire. »
Qu’importe ce que les autres pensent (ou ce que nous pensons) qu’untel
ou untel « devrait faire », ce qui compte, c’est ce qu’il peut faire et
comment il peut le faire. Si nous voulons aider les gens à changer leurs
habitudes ou leur comportement, nous devons les aider à trouver la stratégie
qui garantira leur succès. Certains ont besoin de clarification,
d’informations, d’autres de responsabilisation, de contraintes ou de choix.
Une lectrice m’a écrit : « Je suis une Dévouée et mon mari est un
Pointilleux. Quand je lui ai parlé du principe des quatre profils, il a enfin
compris pourquoi je voulais qu’il me demande tous les jours si j’avais
mangé équilibré. J’avais besoin de lui comme référent. Avant, il trouvait ça
bizarre comme demande. Si je voulais manger équilibré, il suffisait que je le
décide. »
Quand on saisit les particularités de chaque profil, on peut faire en sorte
que les circonstances soient favorables à chacun. Imaginons un chef de
projet responsable d’une équipe comportant tous les types de profils. Il
pourrait annoncer la mise en place d’un nouveau système informatique en
disant : « Si vous pensez en savoir suffisamment sur le nouveau système,
vous pouvez retourner à vos tâches. Si vous voulez en savoir plus, restez, je
suis là pour répondre à vos questions. » De cette façon, il ne fait pas perdre
de temps à ceux qui n’ont pas besoin d’en savoir plus (principalement des
Dévoués et des Disciplinés), et il reste disponible pour ceux (probablement
des Pointilleux) qui ont besoin d’un maximum d’informations pour accepter
la nouveauté. Les Rebelles verront sur le moment de quel côté ils penchent.
Pour être sûr de se faire comprendre par tous les étudiants, un professeur
pourrait expliquer le but et les objectifs de toutes les matières obligatoires :
« Au fil des années, les étudiants ont constaté que faire des résumés des
cours les aidait à les retenir. Notez que ces résumés vous seront
extrêmement utiles en période de révisions. » Et dans l’année, il pourrait
demander à ses élèves de le tenir au courant de leurs progressions par mail
une fois par mois. Il pourrait également proposer trois sujets de devoir
plutôt qu’un seul. En tenant compte des quatre profils, il peut aider ses
étudiants à réussir leur année.
On fait souvent toujours les mêmes erreurs. Quand ils veulent convaincre,
les Disciplinés et les Pointilleux vont mettre l’accent sur l’importance de
clarifier les attentes intérieures : « Qu’est-ce que tu veux ? Décide-toi. »,
« Tu dois savoir ce que tu veux vraiment. », « Détermine tes priorités et tes
besoins. » Ce sont d’excellents conseils, à n’en pas douter, mais uniquement
pour les Disciplinés ou les Pointilleux. Les Dévoués auront tendance
à avancer : « Ça va gêner untel », « Tu es obligé de le faire, ça fait partie de
ton travail », « Tu ne peux pas exiger à quelqu’un de faire ça ». Ce sont
également de très bons arguments… pour des Dévoués.
Cette affiche a indéniablement été rédigée par une Dévouée pour les
Dévouées : « Si je ne le fais pas pour moi, je le fais pour les autres. » Pour
convaincre un Rebelle, il aurait mieux valu dire le contraire : « Gardez les
lieux propres pour vous, si ce n’est pour les autres. » De plus, ces « oui » et
« non » ne provoqueraient pas seulement la résistance des Rebelles, mais
celle des Pointilleux aussi… et même des Disciplinés comme moi !
Veuillez noter que des fourmis ont été aperçues à cet étage. Aidez-nous à protéger les ouvrages de la
bibliothèque.Boisson et nourriture sont interdites.
Chers clients,
Veuillez garder les portes coulissantes fermées.
L’humidité de Floride crée un phénomène de condensation causant de nombreux dégâts matériels.
Si les baies restent ouvertes, l’air conditionné se coupera automatiquement et des insectes entreront dans la
chambre.
Pour qu’un message fasse mouche, il doit s’adresser à tous les profils.
Quand, à l’approche de l’ouragan Sandy, le maire de New York Michael
Bloomberg a ordonné l’évacuation des zones inondables de la ville,
beaucoup d’habitants ont refusé de quitter leur domicile, ce qu’une
Disciplinée comme moi trouve complètement aberrant.
Comment pourrait-on formuler un ordre d’évacuation qui s’adresserait
à tous les habitants, quelle que soit leur profil ?
Pour que les Disciplinés s’exécutent, il faudrait leur en donner l’ordre
express et stipuler clairement que tous les habitants doivent évacuer les
lieux. Il n’en faut pas plus pour les convaincre.
Pour que les Pointilleux s’exécutent, il faudrait que le risque soit attesté.
Ainsi l’ordre d’évacuation doit préciser quand, où et avec quelle force
l’ouragan va frapper, quels sont les risques, pourquoi il faut quitter les
lieux, pourquoi tel quartier plutôt qu’un autre et pourquoi les domiciles bien
construits et élevés présentent quand même des risques. Il faudrait
également leur expliquer que des experts (météorologues, ingénieurs,
architectes) ont été consultés, et il faudrait éviter de comparer cet ouragan
au précédent, car si ces personnes n’avaient pas été inquiétées alors, elles
pourraient estimer qu’elles n’ont de nouveau rien à craindre.
Pour que les Dévoués s’exécutent, il faudrait les responsabiliser et
insister sur le fait qu’un refus d’évacuer les lieux mettrait leur famille ainsi
que les secouristes en danger. Il faudrait également spécifier que les agents
de la ville auront l’ordre de signaler les réfractaires qui seront verbalisés
pour refus d’obtempérer. On pourrait aussi leur rappeler leurs obligations
envers leur famille et leurs voisins ainsi que leur devoir citoyen de montrer
l’exemple, car le meilleur moyen de garantir la sécurité de tous (y compris
celle des animaux de compagnie) est d’évacuer.
Les Rebelles détestent recevoir des ordres, mais ils accepteront plus
volontiers d’évacuer les lieux s’ils risquent de perdre leur liberté et leur
confort. Il faudrait donc insister sur le fait qu’ils risquent de rester bloqués
sur place pendant plusieurs jours, dans des conditions dangereuses ou du
moins inconfortables, sans électricité, eau courante, ascenseurs, transports
publics et livraisons de plats à domicile.
Les autorités pourraient également prévenir les gens que leur identité
serait relevée. Quel que soit son profil, on n’agit pas de la même façon sans
le couvert de l’anonymat.
Dans ma quête de signalétique s’adressant aux quatre profils, je jette
toujours un œil dans l’espace cuisine des entreprises que je visite. Les
messages, notes et autres affiches sur les réfrigérateurs, placards ou au-
dessus des éviers sont des pépites de communication, qu’elle soit efficace…
ou non ! J’avais lancé une discussion sur le meilleur message à mettre dans
la cuisine pour éviter que l’évier déborde de vaisselle sale.
Un Dévoué a proposé ceci :
Merci de mettre votre vaisselle sale dans le lave-vaisselle. S’il est plein, videz-le. S’il est en
marche, placez votre vaisselle préalablement rincée dans l’évier et revenez plus tard la placer
dans le lave-vaisselle. Votre mère n’est pas là pour le faire à votre place.
Notre profil façonne nos expériences et notre façon de voir les choses.
Nous répondons différemment aux circonstances et au langage et nous nous
épanouissons dans différents environnements.
Mais quelle que soit notre profil, la sagesse et l’expérience peuvent nous
aider à exploiter les forces et compenser les faiblesses de notre nature.
À la fin d’une conférence sur les quatre profils, un homme m’a demandé :
« Quel profil rend les gens plus heureux ? » Cette question toute simple ne
m’avait jamais traversé l’esprit. « Et lequel permet de réussir le mieux dans
sa vie ? » a-t-il poursuivi.
La réponse était – comme le plus souvent – « Ça dépend. » Tout dépend
de la façon dont la personne gère les avantages et les inconvénients de sa
nature. Les gens les plus heureux, ceux qui réussissent le mieux, sont ceux
qui savent tirer le meilleur parti des avantages de leur nature et, ce qui est
tout aussi important, qui savent s’accommoder au mieux de leurs
inconvénients.
Nous pouvons tous construire la vie que nous voulons, et nous devons le
faire de la manière la plus adéquate.
Une phrase me hante, celle du romancier Rebelle John Gardner : « Que
l’on enfreigne la loi ou qu’on lui obéisse, tout se paie, toujours. »
Disciplinés, Pointilleux, Dévoués et Rebelles, nous devons tous composer
avec notre profil, quels que soient ses forces, ses faiblesses, ses singularités
et ses travers.
Et puisque tout se paie, la connaissance de notre nature profonde est ce
qui nous permettra de comprendre comment, quand et pourquoi nous allons
payer… et comment construire la vie que nous voulons.
APPENDICE
REMERCIEMENTS
À propos des mails, posts sur le blog et autres témoignages : j’ai modifié
les détails permettant d’identifier les auteurs et j’ai adapté la longueur des
textes, mais je n’ai rien inventé. Tous les témoignages sont authentiques.
« Une étude sur les statuts postés sur les réseaux sociaux… », Matt
Huston, « Status Updates Don’t Lie », PsychologyToday.com,
8 juillet 2015,
https://www.psychologytoday.com/intl/articles/201507/status-updates-don-
t-lie.
« un article dans le New York Times sur les différentes distributions des
rôles dans le couple… », Claire Cain Miller et Quoc Trung Bui, « Rise in
Marriages of Equals Helps Fuel Divisions by Class », New York Times,
27 février 2016.