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Les 4

profils
L’OUTIL INDISPENSABLE

POUR ENFIN SE COMPRENDRE

ET VIVRE MIEUX

GRETCHEN RUBIN
Du même auteur
Ma vie en mieux, Flammarion, 2016
Opération Bonheur, Belfond, 2011

Titre original : The four tendencies: the Indispensable Personality Profiles That Reveal How to Make
Your Life Better (and Other People’s Live Better, Too)
Copyright © Gretchen Rubin 2017
Tous droits réservés.
Publié aux États-Unis par Harmony Books, du Crown Publishing Group, une division de Penguin
Random House LLC, New York, http://crownpublishing.com/

Traduction : Nouannipha Simon

© Dunod, 2018
11 rue paul Bert, 92240 Malakoff
ISBN : 978-2-10-078994-8
Pour Christy Fletcher (Pointilleuse)
SOMMAIRE

Votre Profil
1. Les quatre profils
2. Identifier son profil

Le Discipliné
« Pour moi, la discipline, c’est la liberté »
3. Comprendre le Discipliné
4. Interagir avec un Discipliné

Le Pointilleux
« Je le ferai, si tu me donnes une bonne raison de le faire »
5. Comprendre le Pointilleux
6. Interagir avec un Pointilleux

Le Dévoué
« Tu peux compter sur moi, et je compte sur toi pour compter sur
moi »
7. Comprendre le Dévoué
8. Interagir avec un Dévoué

Le Rebelle
« Personne ne peut m’y forcer, pas même moi »
9. Comprendre le Rebelle
10. Interagir avec un Rebelle

Les 4 profils en pratique


11. Les affinités
12. Communiquer efficacement avec chaque profil
13. Apprendre à tirer parti de ses forces, quelle que soit son profil

Appendice
Remerciements
Quizz des quatre profils de Gretchen Rubin
Ressources complémentaires
Notes
J’ai fini par comprendre que mon plus grand objectif est d’être ce que je suis déjà.

Journal of Thomas Merton (Rebelle)


VOTRE PROFIL
1
Les quatre profils
Les origines des quatre profils. • Comment ces profils façonnent nos caractères ? • En quoi est-il
utile d’identifier son profil ? • En quoi est-il utile d’identifier le profil des autres ?

Je ne savais pas, en passant les portes de l’Atlantic Grill en cet après-midi


d’hiver, que j’allais avoir l’une des conversations les plus marquantes de ma
vie.
Alors que je mordais à pleines dents dans mon cheeseburger, l’amie qui
m’accompagnait en picorant une salade, a dit quelque chose qui allait
m’occuper l’esprit pendant plusieurs années. Elle a fait remarquer de façon
très désinvolte qu’elle voulait se remettre à la course à pied, mais qu’elle
n’y arrivait pas et que cela l’ennuyait beaucoup. Puis, elle a ajouté, et c’est
ce qui a particulièrement retenu mon attention : « Je faisais pourtant partie
de l’équipe d’athlétisme du lycée et je ne manquais aucun entraînement. Je
ne comprends pas pourquoi je n’arrive pas à m’y remettre.
– Comment cela se fait ? ai-je demandé.
– C’est tellement dur de trouver du temps pour soi.
– Mmmm… »
La discussion a dévié sur d’autres sujets et nous nous sommes quittées
sans revenir dessus. Mais ce bref échange n’a cessé d’occuper mon esprit.
Mon amie n’avait pas changé depuis le lycée et elle voulait se remettre
à une activité qu’elle connaissait bien. Elle n’avait eu aucun problème
à courir par le passé, mais elle n’y arrivait plus. Pourquoi ? Était-ce une
question d’âge ? De motivation ? De situation familiale ? De situation
géographique ? D’esprit d’équipe ? Ou d’autre chose ?
Elle était persuadée que tout le monde avait du mal à trouver du temps
pour soi. Pas moi. Je n’ai aucun mal à trouver du temps pour moi. En quoi
sommes-nous différentes ?
J’ai passé les années qui ont suivi à essayer de répondre à ces questions.

Les origines des quatre profils


On dit qu’il y a deux sortes de personnes : ceux qui divisent le monde en
deux catégories de personnes, et ceux qui ne le font pas.
Je fais incontestablement partie du premier groupe. Mon intérêt pour la
nature humaine m’a toujours poussée à décortiquer les mécanismes qui font
que nous agissons de telle ou telle façon, et à essayer de comprendre
pourquoi nous le faisons.
Cela fait maintenant plusieurs années que j’étudie le bonheur et les
habitudes, et il m’apparaît de plus en plus clairement qu’il n’y a pas de
solution magique pour mener une vie heureuse, saine et productive. Il n’y
a pas de stratégie unique et universelle. Ce qui fonctionne pour l’un peut
être l’exact contraire de ce qui marche pour l’autre. Il y a des gens du matin
et des oiseaux de nuit. Certaines personnes préfèrent bannir toutes
tentations, alors que d’autres auront de meilleurs résultats dans un cadre
plus souple. Certains aiment la simplicité, d’autres s’épanouissent dans
l’opulence.
En réfléchissant à ce que mon amie m’avait confié sur ses habitudes
sportives, je me suis dit qu’en plus de la distinction entre « les gens du
matin et les gens du soir », il devait exister une différence plus
fondamentale, plus structurelle, plus audacieuse et en même temps plus
évidente, mais elle m’échappait encore.
Pour mieux cerner ce que je pressentais comme une vérité essentielle, j’ai
posé une série de questions aux visiteurs de mon site Internet. En voici
quelques-unes : « Que pensez-vous des résolutions du Nouvel An ?
Respectez-vous le Code de la route ? Pourquoi ? Vous êtes-vous déjà inscrit
à un cours juste pour le plaisir ? » À mesure que j’en recevais les réponses,
et elles étaient nombreuses, j’ai vu émerger plusieurs grandes constantes.
C’était d’ailleurs assez déroutant de voir autant de personnes répondre de
façon presque identique.
Ainsi, au sujet des résolutions du Nouvel An, tout un groupe m’a
répondu : « Si une résolution semble bonne pour moi, je la prends et je m’y
tiens, mais je n’attends pas le Nouvel An pour le faire, parce que le
1er janvier est une date arbitraire. » Presque toutes les personnes de ce
groupe ont utilisé le mot « arbitraire ». Le choix d’un terme aussi spécifique
m’a intriguée, parce que l’arbitraire du 1er janvier ne m’avait jamais
particulièrement frappée. Et pourtant ces gens me donnaient tous la même
réponse. Qu’avaient-ils donc en commun ?
Ils ont été également nombreux à répondre : « Je ne prends plus de
résolutions au Nouvel An, parce que je n’arrive jamais à les tenir. Je ne
prends pas le temps de m’occuper de moi. »
Un autre groupe a répondu : « Je ne prends jamais de résolution au
Nouvel An, parce que je n’aime pas les contraintes. »
Ces constantes voulaient dire quelque chose, j’en avais l’intime
conviction, mais je n’arrivais pas encore à voir quoi exactement.
Puis, après des mois de réflexion, j’ai eu une révélation. J’étais chez moi,
assise à mon bureau, quand mes yeux se sont attardés sur une de mes listes
de « choses à faire ». Tout s’est soudain éclairé. La question, toute simple,
mais qui rassemblait toutes les autres, était : « Quel est votre rapport aux
engagements ? » Eurêka !
J’avais enfin trouvé !
Mon esprit s’est emballé, tout s’articulait parfaitement. Dans la vie, nous
avons tous affaire à deux grandes catégories d’engagements, d’attentes ou
de contraintes :
Les attentes extérieures, à savoir ce que les autres attendent de nous, par
exemple rendre un travail à une date donnée.
Les attentes intérieures, à savoir les objectifs ou les engagements que
nous nous fixons nous-mêmes, comme les résolutions du Nouvel An.

Et voici ce que j’en ai déduit : selon l’attitude d’une personne face aux
attentes et engagements extérieurs et intérieurs, cette personne se range
dans l’une de ces quatre catégories :
Les Disciplinés répondent aisément aux attentes extérieures et intérieures.
Les Pointilleux remettent en question toutes les attentes ; ils ne respectent un engagement que
s’ils le jugent justifié, et par conséquent, ils ne respectent que les engagements intérieurs.
Les Dévoués se plient volontiers aux attentes extérieures, mais peinent à répondre à leurs propres
attentes.
Les Rebelles résistent à toutes les attentes, qu’elles soient extérieures ou intérieures.

C’était simple. Avec une seule question, on pouvait catégoriser toute


l’humanité sous ces quatre archétypes.
Je comprenais alors pourquoi mon amie avait du mal à se remettre à la
course à pied, c’était une Dévouée. Quand elle faisait partie d’une équipe,
ses camarades et son entraîneur comptaient sur elle, et c’est ce qui
garantissait son assiduité. Maintenant qu’elle était seule, elle avait du mal
à se motiver. Je comprenais mieux les commentaires que les gens faisaient
sur les résolutions du Nouvel An. Beaucoup de choses s’éclairaient
subitement.
La répartition des caractères en quatre profils confirme et explique les
grandes lignes que j’avais pressenties. Elle explique ce que tout le monde
peut voir, mais que personne n’avait remarqué.
Pour schématiser ma réflexion, j’ai tracé quatre cercles symétriques
imbriqués. Devant une telle simplicité et une telle élégance, j’ai eu le
sentiment d’avoir découvert une loi fondamentale de la nature, celle de la
nature humaine. Peut-être même avais-je créé une sorte de Choixpeau
magique pour Moldu.
Une fois ce cadre posé, j’ai cherché à approfondir ce que j’avais compris.
La « stratégie des quatre profils » est devenue le premier chapitre de Mieux
qu’avant, mon ouvrage sur les habitudes. J’en ai également parlé sur mon
site Internet, gretchenrubin.com, ainsi que dans Happier with Gretchen
Rubin, le podcast hebdomadaire que j’anime avec ma sœur et collaboratrice
Elizabeth Craft. Chaque fois que j’ai ouvert une discussion sur les quatre
profils, les lecteurs et les auditeurs m’ont répondu avec enthousiasme.
La plupart des gens parviennent à identifier leur profil à partir d’une
brève description, mais pour ceux qui ne sont pas sûrs de la réponse, j’ai
mis au point un petit test, que vous retrouverez au chapitre deux de cet
ouvrage. Des centaines de milliers de personnes ont fait ce test sur mon site
Internet et ont accepté de répondre à quelques questions ouvertes
supplémentaires. Leurs réponses ont été un trésor de connaissances. J’ai
remarqué que selon leur profil, les gens étaient plus ou moins disposés
à faire le test. « Pourquoi perdrais-je mon temps à faire ce test ? »
objectaient parfois les Pointilleux, alors que les Rebelles commençaient par
refuser tout net : « Vous voulez que je fasse ce test ? Et puis quoi
encore ? ! »
Afin de mettre cette typologie à l’épreuve, j’ai mené une étude à l’échelle
nationale avec des échantillons représentatifs de la population par classe
d’âge, par sexe, par région et par revenus.
J’ai pu ainsi déterminer les proportions de chaque profil dans la
population américaine. Avec 41 % des personnes sondées, les Dévoués
forment le profil majoritaire. Viennent ensuite les Pointilleux avec 24 %.
Les Rebelles constituent le profil minoritaire avec 17 %, chiffre qui m’a
étonnée, car je m’attendais à moins. Quant à mon propre profil, celui des
Disciplinés, il affiche un peu plus de 19 %. L’étude a également confirmé
bon nombre de mes observations sur les quatre profils. Ainsi, les
Disciplinés sont les plus enclins à prendre de bonnes résolutions au
Nouvel An. Les Rebelles n’aiment pas les résolutions, les Pointilleux
adoptent des résolutions quand bon leur semble, sans attendre une date
arbitraire, et les Dévoués y ont le plus souvent renoncé, parce qu’ils ont eu
du mal à les tenir par le passé.
En peaufinant ma classification, j’ai attribué une couleur à chaque profil
sur le modèle des feux de circulation. L’orange représente ainsi les
Pointilleux, parce que le feu orange invite à la prudence, à marquer une
pause pour nous demander ce qu’il faut faire. Les Pointilleux vont toujours
se demander « Pourquoi ? » avant de répondre à une attente. Le vert
représente les Dévoués, qui sont toujours prêts à foncer. Le rouge représente
les Rebelles qui sont le plus enclins à s’arrêter pour signifier leur
opposition. Comme il n’y a pas de quatrième couleur aux feux de
circulation, j’ai choisi le bleu pour représenter les Disciplinés, parce que je
trouve que cette couleur leur correspond bien.
Plus j’approfondissais ma réflexion sur les quatre profils, plus je voyais
partout leur influence.
Grâce au système des quatre profils, on se comprend mieux, et cette
connaissance de soi est indispensable pour être heureux et avoir une
existence conforme à sa nature profonde, ses intérêts et ses valeurs.
Et ce qui est tout aussi important, on comprend mieux les gens qui nous
entourent. On vit et on travaille plus harmonieusement avec les autres
quand on identifie leur profil, qu’ils soient nos collègues, supérieurs,
professeurs, coachs, mari, femme, enfants, médecins ou patients.
Connaître les spécificités de chaque profil nous donne une
compréhension plus profonde du monde.

Comment ces profils façonnent nos personnalités ?


Ces profils sont viscéralement ancrés en nous. Ils ne découlent pas du
milieu social, de l’éducation que nous donnent nos parents, de nos
croyances religieuses ou de notre sexe. Ils ne sont pas liés au fait que nous
soyons extravertis ou introvertis. Ils ne changent pas selon les
circonstances, que nous soyons en famille, au travail ou avec des amis. De
même qu’ils ne changent pas avec l’âge. Nous venons au monde avec un
profil dominant.
Cela dit, il est parfois difficile d’identifier le profil d’un enfant (je
n’arrive toujours pas à savoir quel est le profil d’une de mes filles). À l’âge
adulte, nous finissons cependant par nous ranger clairement sous un profil
qui va façonner nos perceptions et nos comportements. À moins de vivre
une expérience très forte et à proprement parler bouleversante – comme
échapper à la mort, souffrir d’une grave maladie ou développer une
addiction – nous ne changeons pas de profil.
Selon les circonstances ou le pays, le profil d’une personne lui facilitera
plus ou moins la vie. En Corée du Nord, les questions d’un Pointilleux
pourraient lui valoir la prison, alors que dans la Silicon Valley, elles lui
vaudraient certainement une promotion.
Il y a un panel très large de personnalités au sein d’un même profil.
Quelle que soit leur profil, certains seront plus ou moins attentionnés,
ambitieux, intellectuels, autoritaires, charismatiques, doux, angoissés,
dynamiques ou aventuriers. Ces traits de caractère vont d’ailleurs très
fortement influencer l’expression de leur profil. Un Rebelle ayant
l’ambition d’être un homme d’affaires respecté va se comporter
différemment d’un Rebelle qui ne fait aucun cas de la réussite
professionnelle.
Les gens me disent souvent qu’ils sont une association de deux profils :
« Je suis à la fois un Dévoué et un Discipliné » ou « Selon où je suis et avec
qui je suis, je change de profil ». Pourquoi pas, me diriez-vous, mais il suffit
que je leur pose quelques questions supplémentaires pour que se démarque
un profil unique. Et cela fonctionne pratiquement à tous les coups.
Une chose est sûre, comme nous le verrons dans les passages sur les
« Variations au sein d’un profil », c’est que si les gens penchent parfois en
direction d’un profil qui recoupe la leur, ils restent fermement ancrés dans
leur profil principal.
Il est vrai aussi que, quelle que soit notre profil naturel, nous avons tous
en nous une part Disciplinée, Pointilleuse, Dévouée et Rebelle.
Nous savons tous faire preuve de discipline pour éviter une sanction.
Même le plus rebelle des Rebelles attachera sa ceinture de sécurité après
avoir payé quelques amendes bien salées.
Il nous est arrivé à tous de remettre en question la pertinence d’une
contrainte, d’être ennuyés par son inefficacité ou de refuser de faire quelque
chose qui nous semblait arbitraire.
Il nous est déjà arrivé à tous de nous plier à certaines contraintes parce
qu’elles importaient à d’autres, ou de bousculer nos petites habitudes pour
quelqu’un. Ainsi, le Discipliné le plus strict sacrifiera sa sacro-sainte
réunion du lundi pour rester au chevet de son enfant malade.
De même, nous aspirons tous à l’autonomie, quelle que soit notre
personnalité. Nous répondrons ainsi plus volontiers à une demande qu’à un
ordre. Les contraintes trop étouffantes engendreront un phénomène de
« réactance ». Nous résisterons alors en bloc aux contraintes, parce qu’elles
représenteront une menace pour notre liberté individuelle.
Lors d’une conférence au cours de laquelle j’ai parlé des quatre profils,
un homme est venu vers moi et m’a dit : « Je pense que l’on devrait pouvoir
rouler à la vitesse que l’on veut, je dois être un Pointilleux. »
J’ai souri. Ce n’est pas aussi simple. Ce n’est pas parce que « j’ignore les
limitations de vitesse, que je suis un Pointilleux » ou « parce que je refuse
de laver la vaisselle, je suis un Rebelle » ou encore « j’adore faire des listes,
je suis un Discipliné ». Pour identifier son profil, il faut multiplier les
situations et analyser ce qui motive chaque décision. Un même résultat peut
avoir deux causes différentes. Un Pointilleux et un Rebelle peuvent tous
deux rejeter une contrainte, mais le premier se dira : « Je ne le ferai pas,
parce que je n’en vois pas l’utilité », alors que le second pensera : « Je ne le
ferai pas, parce que je n’ai aucun ordre à recevoir ».
Je me suis rendu compte que si chaque nature a ses avantages et ses
inconvénients, la plupart des gens trouvent plus compliqué d’être un
Dévoué ou de côtoyer un Rebelle (c’est pourquoi les chapitres dédiés aux
Dévoués et aux Rebelles seront plus longs que ceux dédiés aux Disciplinés
et aux Pointilleux).
On a souvent comparé la typologie des quatre profils à d’autres modèles
de personnalité ou outils d’évaluation psychologique comme les Big Five,
le StrengthsFinder, l’Ennéagramme, l’indicateur typologique de Myers-
Briggs, le test de l’institut VIA ou même la répartition des quatre maisons
de Poudlard.
Je suis fascinée par tout ce qui peut m’aider à mieux comprendre la
nature humaine, mais je pense que c’est une erreur de dire que toutes les
théories se valent. À vouloir tout mettre au même niveau, on perd de vue la
pertinence de chaque approche. Aucun système à lui seul ne saurait rendre
compte de la complexité et de la variété de la nature humaine.
Alors que la plupart des modèles de personnalité multiplient les critères
de différenciation, les quatre profils s’attachent à un seul aspect de la
personnalité, un aspect déterminant, certes, mais qui ne représente qu’une
des nombreuses qualités d’un individu. Pourquoi nous agissons et pourquoi
nous n’agissons pas ? C’est à cette seule question à laquelle elles veulent
répondre.

En quoi est-il utile d’identifier son profil ?


Quand j’explique le principe des quatre profils, j’ai parfois l’impression que
les gens vont essayer de déterminer quelle est le « meilleur » profil pour s’y
conformer. Il n’y a pas de « meilleur » ou de « pire » profil. Les personnes
les plus heureuses, les plus productives, ne sont pas d’un profil particulier.
Ce sont des personnes qui ont appris à canaliser les forces de leur profil,
à en compenser les faiblesses et à se construire une vie qui leur convient.
Avec un peu de sagesse, d’expérience, et forts de la connaissance des
quatre profils, nous serons plus efficaces, plus productifs, nous saurons
prendre de meilleures décisions, avoir une vie plus saine et des rapports
plus harmonieux avec les gens qui nous entourent.
Cela nous permettra également d’identifier les causes de nos succès ou de
nos échecs pour en tirer des leçons. Un agent littéraire m’a dit :
« Je m’occupe d’un journaliste expérimenté et consciencieux, qui n’a
jamais eu de problème pour rendre ses articles à temps. Mais depuis qu’il
est en congé sabbatique pour écrire un livre, il fait un blocage.
– Je ne pense pas que ce soit le syndrome de la page blanche, ai-je
répondu. Votre auteur est probablement un Dévoué. Il n’a aucun mal
à travailler quand il a des délais à respecter, mais avec une échéance
lointaine et très peu de contraintes, il n’arrive pas à s’y mettre. Il devrait
demander à son éditeur de faire le point avec lui toutes les semaines. Ou il
pourrait participer à un atelier d’écriture ou encore vous soumettre un
certain nombre de feuillets tous les mois. Il faut juste qu’il ait des comptes
à rendre à quelqu’un. »
Quand on cerne un peu le profil des gens, on évite aussi de leur demander
l’impossible, d’avoir des attentes disproportionnées. Une lectrice m’a écrit :
« Mon mari est un Rebelle. C’est très frustrant pour moi de me dire que
c’est ainsi, qu’il ne changera jamais. Est-il possible qu’un Rebelle soit
quelqu’un qui n’aurait juste « pas fini de grandir », et qu’en se rendant
compte qu’il ne peut pas uniquement faire ce qui lui plaît, quand ça lui
plaît, il finira par changer ? » Je ne voudrais pas être abrupte dans ma
réponse, mais grands Dieux, non, cela m’étonnerait qu’il change un jour.
On me demande souvent si un profil peut et doit déterminer le choix
d’une carrière. Tous les profils se retrouvent dans tous les corps de métiers,
mais il est intéressant de se pencher sur les relations qu’il peut y avoir entre
chaque profil et les différents secteurs d’activité. Je connais un éducateur
canin Discipliné, qui apporte sans conteste une touche de rigueur à ce qu’il
fait. Mais j’imagine aisément des Pointilleux, des Dévoués ou des Rebelles
faire le même métier.
Dire que nous pouvons embrasser n’importe quelle carrière, quelle que
soit notre profil, ne veut pas dire que tous les métiers nous conviendront de
la même façon. Et c’est là que le système des quatre profils s’avère utile : il
va nous aider à identifier quel type de métier correspond le plus ou le moins
à notre nature profonde. Un lecteur m’a écrit : « Maintenant, je sais
pourquoi je déteste tant mon travail. Je suis conseiller fiscal alors que je
suis à 100 % Pointilleux. Ne voyant pas l’intérêt de suivre à la lettre un
ensemble de règles arbitraires, je n’avance pas et je ne m’épanouis pas dans
mon travail. »

Connaître son profil permet aussi d’être plus indulgent avec soi-même.
« Je suis comme je suis, il n’y a pas de mal à cela, et je vais en tirer le
meilleur parti. » Ainsi une Disciplinée me confiait : « Mes parents me
disaient toujours de lâcher prise. Mon mari, qui est aujourd’hui décédé, me
disait aussi de lâcher prise. Maintenant, c’est ma fille qui me dit de lâcher
prise. Mais je sais au fond de moi que je suis plus heureuse dans un cadre
que je me suis établi. »
Un Rebelle en témoigne :
Apprendre que j’étais un Rebelle m’a fait comprendre pourquoi toutes ces années de
psychothérapie n’avaient rien donné. Avec le psy, nous avons essayé de comprendre d’où venait
mon manque de discipline et avons tenté de nombreuses techniques pour y remédier. Toutes ont
échoué lamentablement. Le problème n’était pas tant de trouver une technique qui marche pour
les Rebelles, mais peut-être d’arrêter de croire (à force de se l’entendre dire) que quelque chose
ne va pas chez les Rebelles. Il y a pourtant des gens très intelligents qui mènent de brillantes
carrières, mais qui peinent à régler leurs factures, à mener à terme leurs projets et à aller au bout
des choses. Ils ont du mal à répondre aux attentes des autres et à leurs propres attentes. Dans le
monde d’aujourd’hui, un tel mode de fonctionnement n’est pas seulement taxé d’inhabituel, il
est considéré comme pathologique. Votre approche montre que ça ne l’est pas. Comme ce fut
libérateur de me concentrer sur ce qui marche pour moi plutôt que de traquer ce qui ne va pas
en moi !

Un Dévoué m’a écrit :


Je suis auteur pour la télévision et je lutte constamment contre mon inaptitude à me fixer une
discipline de travail, même si je rends toujours mes scripts à temps. J’ai longtemps pensé que
c’était de la paresse, de l’irresponsabilité. Je m’en voulais beaucoup et me considérais comme
un enfant dans la peau d’un adulte. En me qualifiant de Dévoué, vous m’avez donné la
possibilité de m’accepter comme tel. Au lieu de désespérer de mon mode de fonctionnement,
j’ai commencé à chercher des astuces pour me forcer à faire les choses. Et me voilà déjà
beaucoup plus productif, et surtout, beaucoup plus heureux !
Connaître les spécificités de son profil donne les moyens de se mettre en
situation de réussite. S’il est pratiquement impossible de changer sa nature,
il est relativement facile d’adapter les circonstances à ses besoins – que l’on
recherche la rigueur, le sens, la responsabilité ou la liberté. Une bonne
connaissance de notre profil va nous aider à créer des situations où nous
nous épanouirons.

En quoi est-il utile d’identifier le profil des autres ?


L’intérêt d’identifier le profil des gens qui nous entourent, c’est de ne plus
se sentir personnellement visé par tel ou tel comportement. Cela nous
permet d’être plus indulgents et moins exigeants. Ce Pointilleux ne pose pas
de questions en vue de décrédibiliser son supérieur ou de saper l’autorité
d’un professeur, il pose des questions, parce que c’est un Pointilleux, tout
simplement. Une lectrice m’a écrit : « Je vis avec un Rebelle depuis
sept ans. Il est rassurant de savoir que son comportement est aussi naturel
pour lui que le mien l’est pour moi, qui suis une Dévouée. »
Connaître le profil des gens peut également nous aider à mieux les
convaincre, les soutenir ou éviter d’entrer en conflit avec eux. Ignorer le
profil de la personne à qui nous parlons, c’est prendre le risque d’avancer
des arguments qui n’auront aucun poids ou pire, qui produiront l’effet
inverse de ce que nous recherchions. Pour communiquer de façon efficace,
il faut utiliser non pas le langage qui nous correspond le mieux, mais celui
qui va convaincre notre interlocuteur. En tenant compte de la nature de
chacun, nous pouvons ciseler nos arguments et les rendre plus pertinents.
Inversement, nous réduisons considérablement nos chances de réussite en
ignorant ou en allant à l’encontre des dispositions de chacun. Plus un
Discipliné sermonnera un Rebelle, plus le Rebelle lui résistera. Un
Pointilleux pourra énumérer à un Dévoué toutes les bonnes raisons de faire
une chose, aucun de ses arguments n’aura le même poids qu’une contrainte
extérieure.
Un lecteur m’a envoyé cette compilation de blagues qui saisit
parfaitement les spécificités de chaque profil :
Que faire pour qu’un Discipliné change une ampoule ?
Réponse : rien, il l’a déjà changée.
Que faire pour qu’un Pointilleux change une ampoule ?
Réponse : a-t-on vraiment besoin de changer l’ampoule ?
Que faire pour qu’un Dévoué change une ampoule ?
Réponse : lui demander de la changer.
Que faire pour qu’un Rebelle change une ampoule ?
Réponse : le faire soi-même.
Une nutritionniste Pointilleuse m’a dit : « Mon objectif est que les
Américains mangent mieux. J’écris un livre pour expliquer comment les
systèmes culturels et économiques ont façonné les habitudes alimentaires
aux États-Unis. » Elle est intimement persuadée qu’en présentant les choses
de façon argumentée, elle arrivera à convaincre les Américains de changer
leurs habitudes alimentaires. Ce n’est pas une Pointilleuse pour rien !
Or pour convaincre les gens, il faut toucher leur corde sensible, non la
sienne. Les médecins, enseignants, entraîneurs, directeurs, conjoints,
parents, collègues, voisins le savent bien. C’est valable pour tous ceux qui
veulent convaincre quelqu’un de faire quelque chose. En d’autres termes,
c’est valable pour tout le monde.
Même lorsque le message s’adresse à un large public, il est possible de
cibler spécifiquement chaque profil. J’en ai eu la preuve lors d’une
conférence où l’organisateur nous a longuement expliqué pourquoi il était
important d’être à l’heure aux lieux de rendez-vous des différentes activités
prévues au programme du week-end.
Après mon intervention, j’ai eu la joie de l’entendre rappeler ses
consignes en s’adressant à chaque profil : « Les Disciplinés, je vous
remercie par avance pour votre coopération et votre ponctualité. Les
Pointilleux, je vous ai expliqué pourquoi il était important d’être à l’heure
à toutes les réunions. Les Dévoués, je vous ai à l’œil et je compte sur vous
pour être ponctuels. Les Rebelles, vous pourrez lâcher prise au bar en fin de
journée. » Je n’aurais pas su dire mieux !
Le vocabulaire est aussi très important. Les mots n’ont pas le même effet
selon la personne à qui l’on s’adresse. Un enfant Rebelle sera plus réceptif
si on lui demande : « Cela te dirait de faire du piano maintenant ? » alors
qu’un enfant Discipliné sera ravi qu’on lui rappelle « C’est l’heure de ta
leçon de piano. »
Dans le domaine de la santé, résister aux injonctions des médecins a de
lourdes conséquences. Mauvaise alimentation, sédentarité, alcoolisme, abus
de médicaments et tabagisme sont les premières causes de morbidité et de
mortalité aux États-Unis. Tous ces comportements à risque relèvent
pourtant d’actes conscients. En tenant compte de la personnalité de chacun,
il sera plus aisé de convaincre telle ou telle personne de réduire sa
consommation de sucre, de marcher vingt minutes tous les jours, d’être
assidu au programme de rééducation, d’arrêter de boire ou de suivre un
traitement.
Il est important de rappeler que le système des quatre profils est fait pour
nous aider à mieux nous comprendre, et non à nous enfermer dans un cadre
restrictif. Il est courant d’entendre dire : « Se définir, c’est se limiter ». Pour
moi, se définir, c’est se donner un point de départ pour apprendre à mieux
se connaître. Les quatre profils ne sont pas des moules dans lesquels se
conformer, ou des étiquettes exclusives et exhaustives, ce sont plutôt des
projecteurs qui vont éclairer des aspects cachés de notre nature.
En apprenant à se connaître et en tenant compte de son profil naturel, on
peut plus facilement adapter les circonstances à ses dispositions. Et en
cherchant à comprendre comment les autres fonctionnent, on se donne les
moyens d’interagir de façon plus efficace et harmonieuse.
Grâce à la typologie des quatre profils, on voit comment quelques mots
bien choisis, une simple conversation ou une approche biaisée peuvent faire
la différence. Si ce patient suit son traitement avec assiduité, il vivra plus
longtemps. Si cette étudiante fait consciencieusement les exercices donnés
par son professeur, elle réussira son examen. Si cet homme et cette femme
discutent calmement de leurs problèmes, ils seront plus heureux dans leur
couple. Si j’arrête d’envoyer des mails professionnels le week-end, j’aurai
de meilleurs rapports avec mes collègues de travail.
L’un des plus grands défis que nous avons tous à relever au quotidien est
de savoir : « Comment faire pour que les gens, moi y compris, fassent ce
que je veux ? » Une fois que l’on s’est familiarisé avec le système des
quatre profils, cela devient beaucoup plus facile.
2
Identifier son profil
Test des quatre profils
« De toutes les tâches qu’un homme doit accomplir dans la vie, s’éduquer et former son caractère sont les plus
importantes […]. Il doit pour cela étudier calmement et attentivement ses dispositions sans minimiser ses
défauts, idéaliser ses qualités ou laisser le pessimisme nier son aptitude à faire le bien. Il doit éviter le fatalisme
qui lui ferait croire qu’il n’a aucune emprise sur sa nature, mais il doit aussi savoir que son pouvoir en la matière
n’est pas illimité. »

William Edward Hartpole Lecky, The Map of Life

Pour identifier votre profil, faites le test ci-dessous.


Choisissez les réponses qui vous paraissent le plus souvent vraies pour
vous. Ne cherchez pas les exceptions et ne focalisez pas sur un aspect
particulier de votre vie.
Si vous obtenez le même nombre de réponses dans deux catégories, n’en
concluez pas que vous êtes un mélange de ces deux profils. Choisissez celui
qui reflète le mieux votre nature.
C’est vous qui êtes le meilleur juge de vous-même. Si vous pensez qu’un
profil vous décrit mieux qu’une autre, ayez confiance en votre jugement.

1. Avez-vous déjà tenu une résolution prise au Nouvel An, même si vous
n’aviez pas de compte à rendre à quelqu’un, comme la résolution de
boire plus d’eau ou de tenir un journal ?
a. Oui. Je tiens toutes les résolutions que je prends au Nouvel An, même
celles dont personne n’est au courant.
b. Quand je prends une bonne résolution, je m’y tiens en général, mais je
le fais quand je le juge nécessaire. Je n’attends pas le Nouvel An. Le
1er janvier est une date arbitraire.
c. J’ai du mal avec les bonnes résolutions, quelles qu’elles soient, alors je
préfère ne pas en prendre. Quand je me fixe moi-même un objectif, j’ai
du mal à m’y tenir.
d. Non. Je déteste me contraindre d’une façon ou d’une autre.

2. Quelle affirmation décrit le mieux votre rapport aux engagements ?


a. Je ne prends d’engagements que si je suis certain qu’ils sont bons.
b. Si je dois rendre des comptes à quelqu’un, je n’ai aucun problème
à tenir mes engagements. Seul, j’ai plus de mal.
c. J’évite autant que possible de m’engager.
d. Je prends les engagements très au sérieux, qu’ils soient envers moi-
même ou envers les autres.

3. Il arrive à tout le monde de s’énerver contre soi-même. Cela vous


arrive quand…
a. Mon besoin constant d’informations m’épuise.
b. Je me bloque dès le moment où l’on attend quelque chose de moi.
c. J’arrive à trouver du temps pour les autres, mais pas pour moi.
d. Je n’arrive pas à me défaire de mes habitudes ou à déroger à une règle,
même si je le veux.

4. Qu’est-ce qui vous aide à garder une bonne habitude ?


a. C’est facile pour moi de garder des habitudes, même si tout le monde
s’en fiche.
b. Faire des recherches exhaustives sur l’intérêt d’avoir cette habitude et
les meilleurs moyens de la garder.
c. Je ne garde une bonne habitude que si je dois rendre des comptes
à quelqu’un.
d. En général, je préfère ne pas m’engager.

5. Quand les gens se plaignent de votre comportement, vous n’êtes pas


surpris de les entendre dire…
a. Tu fais ce que tu as prévu de faire, même si cela dérange les autres,
parce que c’est important pour toi.
b. Tu poses trop de questions.
c. Tu trouves le temps de faire les choses quand les autres te le
demandent, mais tu ne trouves jamais de temps pour toi.
d. Tu n’en fais qu’à ta tête.

6. Qu’est-ce qui vous décrit le mieux ?


a. Fait passer les autres – clients, famille, voisins, collègues – avant.
b. Discipliné, même quand ce n’est pas nécessaire.
c. Refuse de se faire dicter sa conduite par les autres.
d. Pose les questions qu’il faut.

7. J’énerve les gens, car s’ils me demandent de faire quelque chose, je


vais avoir tendance à ne pas le faire (même s’il s’agit de mon supérieur
ou d’un client).
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord

8. Je fais ce qui me paraît le plus sensé, même si cela va à l’encontre des


règles ou des attentes d’autres personnes.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord

9. Quand je m’engage auprès de quelqu’un, je tiens ma parole, mais


quand cela n’engage que moi, je n’y accorde pas une grande
importance.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord

10. Il m’arrive de ne pas faire quelque chose juste parce que quelqu’un
veut que je le fasse.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord
11. J’aime faire plaisir aux autres.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord

12. Cela ne me dérange pas d’enfreindre les règles ou les usages, et


parfois même, cela me plaît.
Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord

13. Je m’interroge sur la validité de la typologie des quatre profils.


Plutôt d’accord
Ni en accord ni en désaccord
Plutôt pas d’accord

Résultats
1. a = Discipliné / b = Pointilleux / c = Dévoué / d = Rebelle
2. a = Pointilleux / b = Dévoué / c = Rebelle / d = Discipliné
3. a = Pointilleux / b = Rebel / c = Dévoué / d = Discipliné
4. a = Discipliné / b = Pointilleux / c = Dévoué / d = Rebelle
5. a = Discipliné / b = Pointilleux / c = Dévoué / d = Rebelle
6. a = Dévoué / b = Discipliné / c = Rebelle / d = Pointilleux
7. « Plutôt d’accord » correspond à Rebelle
8. « Plutôt d’accord » correspond à Pointilleux
9. « Plutôt d’accord » correspond à Dévoué
10. « Plutôt d’accord » correspond à Rebelle
11. « Plutôt d’accord » correspond à Dévoué
12. « Plutôt d’accord » correspond à Rebelle
13. « Plutôt d’accord » correspond à Pointilleux
LE DISCIPLINÉ
« Pour moi, la discipline, c’est la liberté »

« Je fais ce que je veux, mais je peux aussi faire ce que je ne veux


pas.

« Pourquoi ne fais-tu pas comme je t’ai dit de faire ? »

« Ton manque d’organisation n’est pas mon problème. »


« Fais ce qu’il faut, quitte à passer pour
psychorigide.

« Fais-le. »
3
Comprendre le Discipliné
« Fais ce qu’il faut, quitte à passer
pour psychorigide »
Forces (et faiblesses) • Faiblesses (et forces) • Variations au sein du profil • Pourquoi les Disciplinés
ont un fort instinct de préservation • Comment les Disciplinés peuvent gérer leur inflexibilité •
Pourquoi les Disciplinés doivent exprimer clairement ce qu’ils attendent d’eux-mêmes

Dans la vie, il y a deux sortes d’obligations. Celles qui nous sont


imposées, comme le fait de devoir rendre un dossier à telle date, et celles
que nous nous fixons, comme d’aller nous coucher tous les soirs avant telle
heure.
Dans le cadre des quatre profils, les Disciplinés sont ceux qui répondent
aux attentes extérieures et aux attentes intérieures de la même façon. Ils
respectent les échéances professionnelles et tiennent les résolutions prises
au Nouvel An sans trop de peine.
Ce que les autres attendent d’eux et ce qu’ils attendent d’eux-mêmes ont
généralement la même importance. Leur promptitude à respecter les
attentes extérieures et intérieures fait qu’ils ont tendance à aimer ce qui est
planifié et régulier. Quand ils se réveillent le matin, ils se disent : « Quel est
le programme de la journée ? » Ils aiment savoir ce qu’on attend d’eux. Ils
n’aiment pas se tromper, décevoir les gens ou se décevoir.
Les Disciplinés n’ont pas de mal à prendre des décisions et à les
appliquer. Ils ont également des facilités à se couler dans des habitudes.
Je connais bien le profil Discipliné, parce que c’est le mien. Et c’est
probablement pour cela que je commence par le décrire en premier.
J’ai longtemps pensé que la plupart des gens étaient comme moi, et j’étais
toujours étonnée ou agacée quand ils ne faisaient pas ou ne pensaient pas
comme moi. Tout s’est éclairé quand j’ai compris que la nature humaine se
distribuait en quatre profils et que j’étais une Disciplinée. C’est un profil
assez rare, car il caractérise une personnalité assez extrême. Je devais bien
être la seule à être surprise d’apprendre que c’est une personnalité rare et
extrême !
Savoir que je suis une Disciplinée m’a permis de répondre à une question
qui me taraudait depuis longtemps. Dans mes ouvrages Opération bonheur
et Happier at Home, je parle des résolutions et des habitudes qui m’aident
à être plus heureuse, plus en forme et plus productive. Beaucoup de gens
m’ont demandé après les avoir lus : « Comment faites-vous pour vous
obliger à faire tout ça ? À poster des articles sur votre blog tous les jours,
à débattre de questions de droit avec votre mari et à aller à la gym ?
– Je me suis rendu compte que ces choses me faisaient du bien, alors… je
les ai faites.
– Oui, mais comment ? »
Je ne comprenais pas pourquoi cette question revenait si souvent et de
façon aussi insistante.
Maintenant, je comprends. Pour la Disciplinée que je suis, le passage
à l’acte ne pose pas de problème, alors que pour la plupart des gens, ce n’est
pas aussi simple.

Forces (et faiblesses)


Je peux dire par expérience (et donc, de façon tout à fait subjective) qu’il
y a beaucoup d’avantages à être un Discipliné. On peut compter sur les
Disciplinés, et les Disciplinés peuvent compter sur eux-mêmes.
Ils répondent volontiers aux attentes extérieures. Ils sont autonomes et
respectent sans peine les échéances, plannings et autres obligations
professionnelles. Nul besoin de les superviser, de vérifier ce qu’ils font ou
de les rappeler à l’ordre.
Les Disciplinés sont attirés par tout ce qui ressemble à des règles. Quand,
par exemple, je passe devant un règlement intérieur affiché à l’entrée d’une
piscine ou de l’espace commun d’une entreprise, je ne peux m’empêcher de
le lire et de respecter ensuite les consignes. Les Disciplinés ne voient pas
d’inconvénient à porter un uniforme, à suivre une recette de cuisine à la
lettre ou à obéir à des instructions.
De même que les Disciplinés répondent volontiers aux attentes qui leur
sont imposées, ils répondent sans peine à celles qui émanent d’eux-mêmes.
Quand ils décident de faire quelque chose, ils le font, même si tout le
monde s’en fiche ou même quand les autres sont réticents.
Partant de là, je sais, qu’en tant que Disciplinée, je peux compter sur moi-
même. Je peux compter sur moi-même plus que sur quiconque.
En général, quand je prends un engagement, je l’honore, seule s’il le faut.
Pour passer l’examen du barreau, j’ai étudié chez moi avec des cours sur
cassettes audio. Je révisais et prenais des notes toute seule, dans ma cuisine.
Mes amis ont préféré s’inscrire à des cours collectifs, parce qu’ils avaient
peur de décrocher s’ils n’étaient pas tenus par un programme strict et
régulier de révision. Je n’avais pas besoin de cela pour être assidue.
Parce qu’ils aiment atteindre les objectifs qu’on leur fixe ou qu’ils se
fixent eux-mêmes, les Disciplinés sont indépendants, fiables et ils ont une
bonne maîtrise d’eux-mêmes. S’ils vous disent qu’ils vont faire quelque
chose, ils le font.

Comme les Disciplinés sont fiables, les autres ont tendance à compter sur
eux, comme le rapporte une Disciplinée :
Je m’étais toujours demandé pourquoi, quand je commençais un régime, un nouveau loisir ou
que je me remettais au sport, les gens voulaient se joindre à moi. Je me disais qu’ils avaient
besoin de soutien moral. “Appelle-moi quand tu fais une sortie à vélo, je te rejoindrai au parc.”
Maintenant, je sais qu’ils voulaient tout simplement profiter de mon élan et qu’ils comptaient
sur ma détermination pour les motiver.

Bien qu’il soit gratifiant d’aider les autres à atteindre leurs objectifs, je
préférerais qu’ils ne comptent pas systématiquement sur moi pour les
motiver.
Les Disciplinés ne se sentent pas prisonniers des contraintes, qu’elles leur
soient imposées ou qu’ils se les fixent eux-mêmes. Au contraire, cela libère
leur créativité et leur permet d’atteindre leurs objectifs. Si je décide d’écrire
un livre en été ou de ne plus consommer de sucre, je le fais et je m’y tiens,
même si cela ne concerne personne d’autre que moi-même. Cette certitude
me donne un profond sentiment de liberté, de maîtrise et m’ouvre tout un
champ de possibles.
Cela dit, il ne faut pas croire que les Disciplinés ne peinent jamais
à atteindre leurs objectifs. Je dois me pousser pour faire du sport
régulièrement, passer certains coups de fil et aller faire les courses. Il
m’arrive aussi de procrastiner et de déroger à la règle. Mais de façon
générale, il est plus facile pour les Disciplinés que pour les autres profils de
tenir leurs engagements.
Ils se plient volontiers aux règles qu’on leur impose ou qu’ils s’imposent
eux-mêmes. Mais pour cela, ils doivent la comprendre, ce qui les pousse
parfois à chercher quelle règle se cache derrière les règles – notamment en
matière d’éthique ou de morale. Hermione Granger est probablement l’une
des Disciplinées les plus célèbres. Ce personnage de la série Harry Potter
de J. K. Rowling fait toujours ses devoirs à temps et rappelle constamment
à Harry et Ron les lois qui régissent l’univers magique. Chacune de leurs
transgressions est pour elle source de contrariété. Cela dit, quand elle
considère que les usages sont injustes, elle se révolte. Elle voit les règles au-
delà des règles, malgré l’indifférence des autres ou leur désapprobation
manifeste. Ainsi se bat-elle pour améliorer le sort des elfes de maison et
n’hésite pas à quitter l’école pour s’opposer au ministère de la Magie et
combattre Voldemort. Elle respecte les règles et les lois de la société tant
qu’elles ne sont pas en conflit avec son sens de la justice. Si c’est le cas,
elle les rejette.
J’adore la série Harry Potter, notamment pour le rôle central que joue
une Disciplinée. Et Hermione incarne cette nature avec un tel brio ! Je me
demande si nous sommes tous particulièrement attirés par la description de
notre profil ?
Comme les Disciplinés se plient volontiers aux attentes extérieures et
intérieures, ils éprouvent peu de ressentiment, sont rarement sujets aux
burn-out et n’ont besoin de personne pour se motiver ou les superviser. Leur
discipline personnelle peut les faire passer pour des gens coincés et rigides,
alors qu’ils se sentent libres, puissants et indépendants.

Faiblesses (et forces)


Comme c’est le cas pour tous les profils, les forces des Disciplinés peuvent
aussi devenir des faiblesses.
Ils peuvent être de fervents militants contre les injustices, des juges
implacables, des élèves qui rapportent scrupuleusement les bêtises de leurs
camarades ou encore des chefs de projet qui rejettent un dossier parce qu’ils
l’ont reçu avec une heure de retard.
Étant enclins à répondre à toutes les attentes, les Disciplinés peuvent se
sentir obligés de respecter toutes les règles, même quand il est préférable de
les ignorer. Par exemple, je peux sans problème utiliser des toilettes
unisexes, mais je ne peux pas me faire à l’idée d’utiliser celles qui sont
réservées aux hommes, même s’il s’agit de cabines individuelles. Une amie
Disciplinée m’a confié : « Sur le chemin de la maternité, j’ai dit à mon mari
de ne pas conduire trop vite et j’ai insisté pour qu’il se gare correctement,
alors que j’ai accouché dans le quart d’heure qui a suivi notre arrivée. »
Les Disciplinés s’impatientent facilement et peuvent même se montrer
intolérants quand les autres ne répondent pas aux attentes, n’arrivent pas
à se fixer des objectifs ou ne remettent rien en question. Une lectrice
Dévouée m’a écrit : « J’ai dit à une collègue Disciplinée que je n’arrivais
pas à prendre mes vitamines, parce que j’avais besoin qu’on me rappelle de
les prendre. Elle a levé les yeux au ciel : “Grandis un peu !” » Cela ne
m’étonne pas d’une Disciplinée. Une Disciplinée pas très sympa, mais une
Disciplinée à n’en pas douter !
En tant que Disciplinée, je n’exige pas seulement des autres qu’ils
répondent aux attentes, ils doivent aussi vouloir y répondre. J’aime dresser
des listes de choses à faire et procéder méthodiquement. J’aime me fixer
des échéances et suivre des instructions. Qu’on puisse avoir une autre
approche de la vie m’a longtemps plongée dans des abîmes de perplexité.
Maintenant, je comprends que mon désir de ne pas être exigeante me rend
encore plus exigeante.
Les Disciplinés n’aiment pas voir les autres enfreindre des règles, même
anodines, et ils ne cachent pas forcément leur désapprobation. Je vais me
crisper si on me chuchote quelque chose en pleine réunion. Mon côté
discipliné fait parfois ressortir mon incivilité. J’ai tellement peur d’être en
retard ou de ne pas suivre les instructions comme il faut, que je peux me
montrer brusque ou autoritaire sans le vouloir.
Les Disciplinés ont du mal à déléguer, parce qu’ils doutent de la capacité
des autres à aller jusqu’au bout. Un lecteur m’a écrit : « Je suis marié à une
Disciplinée. Tous les dimanches, elle répertorie les tâches de la semaine sur
des fiches cartonnées. Il y a une fiche pour chaque jour. Et le plus
incroyable, c’est qu’elle fait scrupuleusement tout ce qui figure sur ces
listes. Elle s’occupe de nos enfants, de nos petits-enfants, de nos parents, de
sa sœur, etc. Mais elle n’arrête pas de répéter : “Pourquoi personne d’autre
dans cette famille n’arrive à se débrouiller ?” »
Cela dit – et cela peut sembler surprenant – les Disciplinés ont du mal
à demander des comptes aux autres, même si ces derniers le demandent.
N’ayant pas ou peu besoin d’avoir de comptes à rendre, les Disciplinés ne
comprennent pas qu’on puisse en avoir besoin. Comme ils ressentent la
pression des attentes extérieures, ils rechignent à en accabler les autres. Par
exemple, je n’aime pas pousser ou contraindre les gens à faire quelque
chose, même mes enfants. Je devrais rappeler à mes filles de faire leur lit,
de bien se tenir à table, de lire plus, mais la perspective d’avoir à le leur
dire, à être derrière elles et à le leur rappeler m’est pénible.
Les Disciplinés n’aiment pas voir leurs habitudes ou leur planning
bousculés. Récemment, mon mari et moi étions à Boston pour un mariage.
Le carton d’invitation disait : « Le bus partira de l’hôtel pour se rendre
à l’église à 18 heures. » Au petit-déjeuner, la mère de la mariée nous
a prévenus qu’en fait, le bus partirait à 17 h 45.
« Mais, le carton disait 18 heures, ai-je protesté.
– Certes, mais à cause de la circulation, il partira à 17 h 45.
Alors qu’elle s’éloignait, je me suis plaint à Jamie :
– Comment peuvent-ils changer l’heure à la dernière minute ? Le carton
disait 18 h 00 ! » En tant que Pointilleux, Jamie n’était pas aussi perturbé
par ce changement que moi.
Pour les autres, le mode de fonctionnement des Disciplinés peut sembler
extrême. Je connais un Discipliné qui a un portefeuille rien que pour ranger
les fiches cartonnées sur lesquelles il écrit ce qu’il doit faire dans la
semaine. La liste des choses à faire du jour est en vert, celle de la semaine
en rose. Le jaune est réservé à ce qui est d’ordre professionnel et qui
n’apparaît pas sur les listes vertes et roses. Le blanc est pour tout ce qui est
personnel. « Quand les gens voient mon système de listes, ils me prennent
pour un grand malade, avoue-t-il. » L’utilisation de fiches cartonnées
semble d’ailleurs caractéristique d’une nature disciplinée.

Pour des non-Disciplinés, le strict respect des attentes extérieures et


intérieures a un côté froid et inflexible comme le fait remarquer une
lectrice :
Je trouve que souvent, les Disciplinés manquent de souplesse. Si on ne les prévient pas
suffisamment à l’avance, ils refuseront de changer leurs plans, même pour rendre service. Par
exemple, un Discipliné dira : “Nous avons prévu de partir à telle heure, alors, non, nous ne
pouvons pas faire un détour pour aller chercher une autre personne.” Je compte parmi mes amis
de nombreuses mères qui travaillent. Les Dévouées sont toujours les plus flexibles et les plus
réactives quand il s’agit de dépanner les autres mamans avec leurs enfants. Les Disciplinées
auront tendance à dire : “Nous avons déjà tout prévu, il est donc impossible pour nous de vous
aider.” Ce sont des personnes sur qui on peut compter… mais pas en cas d’imprévus !

Je ne peux qu’acquiescer. Les Disciplinés, dont je fais partie, ont du mal


à changer de plan à la dernière minute, surtout quand nous nous disons :
« Comment se fait-il que vous n’ayez pas résolu ce problème de transport
hier ? »
J’adore être une Disciplinée, mais j’en vois aussi les inconvénients. Je
suis très forte – parfois même trop – pour me forcer à faire des choses que
je n’ai pas envie de faire. Je peux consacrer beaucoup de temps et d’énergie
à une tâche juste parce qu’il le faut, sans vraiment me demander pourquoi.
Et pourtant, j’adore être Disciplinée.

Variations au sein du profil


Comme c’est le cas pour tous les profils, il y a toutes sortes de
Disciplinés. Chaque personne a ses traits de caractère. Un Discipliné pourra
être ambitieux, intelligent, anxieux, sociable, lunatique, aimant ou créatif en
plus de sa nature Disciplinée.
Chaque profil recoupe deux autres profils. Une personne de tel ou tel
profil penchera dans l’une ou l’autre direction. Ainsi les Disciplinés
pourront avoir une tendance Pointilleuse (qui respecte également les
attentes intérieures) ou une tendance Dévouée (qui respecte également les
attentes extérieures).
Le DISCIPLINÉ/Pointilleux remettra plus facilement en question les
contraintes extérieures et sera donc plus enclin à les rejeter : « Mon patron
dit que je dois faire ce déplacement, mais est-ce vraiment nécessaire ? » Il
remettra également plus facilement en question le bien-fondé de ses propres
attentes. Je me souviens m’être dit : « Je médite tous les matins depuis
plusieurs mois sans grands résultats. Ne devrais-je pas laisser tomber ? Oui,
il est temps d’arrêter. » (En tant que Disciplinée, cela faisait un bon moment
que je m’y tenais.)
Le DISCIPLINÉ/Pointilleux sera également plus enclin à rejeter les
attentes dominantes de la société. En cas de conflit entre des attentes
intérieures et extérieures, il accordera plus de poids aux attentes intérieures,
comme les Pointilleux en général. « Nous avons une grosse réunion demain,
et mon collègue m’a demandé de relire son rapport pour lui dire ce que j’en
pensais, mais je n’ai pas encore finalisé le mien, alors je lui ai dit que je
n’avais pas le temps. »
De leurs côtés, les DISCIPLINÉS/Dévoués auront tendance à répondre
aux attentes extérieures au détriment de leurs attentes intérieures
lorsqu’elles sont en concurrence, parce qu’ils sont plus sensibles à la
pression extérieure. En général, ils parviennent aisément à répondre aux
deux types d’attentes, mais comme ils peinent à se fixer des limites, à trop
en faire, ils peuvent finir par saturer et craquer, faute d’avoir pris le temps
de souffler. Du coup, ils font un blocage et se rebellent.

À l’occasion d’une soirée, j’ai longuement bavardé avec une amie


romancière. Nous n’arrivions pas à déterminer si elle était une Disciplinée
ou une Dévouée. Le lendemain matin, elle m’a envoyé un mail :
Je mange des choses que je n’aime pas forcément, je vais à des événements qui sont de
véritables tortures pour moi et je ne dis rien à des gens dont les propos frisent la grossièreté. Je
suis très disciplinée quand il s’agit d’écrire, de faire mes exercices et de lire. Je poursuis mes
objectifs dans la mesure où ils n’empiètent pas sur ceux des autres. Et j’arrive à le faire en me
ménageant de grandes plages de temps où je suis seule, sans contraintes et sans comptes
à rendre. Je me connais bien et je sais comment me préserver : en ayant un très bon système de
garde pour mes enfants et en ayant un espace de travail loin de la maison.

D’après cette description, je dirais que c’est une DISCIPLINÉE/Dévouée.


Elle arrive à répondre aux contraintes intérieures sans avoir de comptes
à rendre, mais uniquement quand il n’y a pas de contraintes extérieures.
Bien que les DISCIPLINÉS/Dévoués se sentent tenus par les contraintes
intérieures comme les contraintes extérieures, ils ont du mal à ignorer les
attentes extérieures. Ils ont donc tout intérêt à déterminer clairement leurs
attentes intérieures et à établir des limites très claires pour les protéger des
interférences extérieures.
Pour certains Disciplinés, le respect de leurs engagements personnels est
ce qui leur donne la force de répondre ensuite aux attentes des autres, d’où
leur détermination à les respecter. Comme devise, un Discipliné a suggéré :
« Pour aider les autres, je dois d’abord m’aider moi-même. » C’est
parfaitement dans l’esprit d’un DISCIPLINÉ/Dévoué. En tant que
DISCIPLINÉE/Pointilleuse, je ne ressens pas le besoin de me justifier. Je
réponds à mes engagements personnels, parce que c’est important pour moi.

Pourquoi les Disciplinés ont un fort instinct de préservation


Parce qu’ils répondent aux attentes extérieures et intérieures, on pourrait
penser que des quatre profils, les Disciplinés sont les plus exposés au stress
et au surmenage. Ce sont en fait les Dévoués qui souffrent le plus du poids
des attentes. Les deux profils répondent aux attentes extérieures, mais en
respectant tout autant leurs attentes intérieures, les Disciplinés ne se
sentiront pas frustrés, contrairement aux Dévoués.
Cela en surprendra plus d’un, mais les Disciplinés savent profiter de la
vie et prendre soin d’eux-mêmes. Une étude des réseaux sociaux a montré
que les gens les plus organisés et les plus efficaces parlaient beaucoup de
leurs loisirs. On trouve fréquemment les mots « week-end » et « détente »
dans leurs posts.
Les Disciplinés prévoient du temps pour se détendre. « Ne rien faire »
figure sur leur liste de choses à faire. Un auditeur m’a confié : « L’année de
rendu de sa thèse, ma femme s’est levée tous les matins à 5 heures pour
travailler. À 16 heures, elle s’arrêtait et allait à la gym. Quel manque de
fantaisie ! C’est pourtant quelqu’un qui aime s’amuser. Mais à ce moment-
là, sa personnalité Disciplinée se manifeste de façon très directive. »
Les Disciplinés auront tendance à ignorer les attentes des autres pour
pouvoir répondre aux leurs. J’étais à une soirée chez un ami Discipliné,
quand il s’est levé soudainement et nous a dit : « Bon, tout le monde
dehors ! Il faut que j’aille dormir. » Dans l’ascenseur, un de nos amis
communs s’est plaint : « C’est fou comme il nous a mis dehors ! Tu ne
trouves pas ça rude ? » Peut-être que ça l’était, mais pour la Disciplinée que
je suis, c’était une demande parfaitement raisonnable.
Les Disciplinés tiennent à garder une certaine maîtrise de soi et une
certaine efficacité. De ce fait, ils tirent une grande satisfaction à avoir de
bonnes habitudes. Ils vont faire attention à dormir suffisamment, à faire de
l’exercice, à se détendre, à faire le plein d’essence, etc. Dans mon étude
nationale, les Disciplinés avaient plutôt tendance à dire : « Je garde de
bonnes habitudes même si tout le monde s’en fiche. »
On dit souvent aux Disciplinés : « Ne sois pas aussi exigeant avec toi-
même », « Ce n’est pas sain d’être aussi rigide », ou « Personne ne respecte
cette règle », alors qu’ils trouvent très gratifiant de répondre aux attentes,
qu’elles leur soient imposées ou qu’elles émanent d’eux. Les autres, surtout
les Rebelles, ont du mal à le concevoir. Je me souviens d’une conversation
avec une amie Rebelle :
Pour moi, avec la discipline vient la liberté.
– Qui dit discipline, dit limite, a-t-elle objecté. Qui veut obéir aux règles ?
– En me fixant des limites, je me permets d’être libre.
Elle a secoué la tête.
– Ça ne veut rien dire. Être libre, c’est ne pas avoir de limite. C’est faire ce que l’on veut.

Nous nous sommes regardées et avons éclaté de rire. De toute évidence,


aucune de nous n’allait convaincre l’autre.
De la même façon, j’ai remarqué que lorsque les gens des autres profils
veulent s’accorder une faveur, ils trouvent une excuse pour échapper à un
engagement. Ils vont se dire, par exemple : « Après une journée aussi
fatigante, je peux bien me permettre de louper un cours de CrossFit. » En
tant que Disciplinée, un tel laisser-aller ne me ferait aucun bien, au
contraire !
L’importance que les Disciplinés accordent à la maîtrise de soi explique
peut-être certains résultats de mon étude. 24 % des Disciplinés n’étaient
plutôt pas d’accord avec l’affirmation : « J’ai des problèmes d’addictions ».
Les trois autres profils obtiennent des résultats sensiblement similaires
(34 %, 32 % et 32 %). Il semblerait donc qu’il y ait quelque chose de
spécifique aux Disciplinés qui les préserverait des addictions.
La volonté des Disciplinés à respecter les attentes peut les faire paraître
un peu… froids. Il y a un côté imperturbable en eux. Ils feront ce qu’il faut,
même si cela peut incommoder les autres ou si cela les met en porte-à-faux.
Ma sœur Elizabeth est une Dévouée. Nous animons un podcast
hebdomadaire Happier with Gretchen Rubin et avons consacré les
épisodes 35, 36, 37 et 38 aux quatre profils. Elizabeth a fait remarquer :
« Être ta sœur, Gretchen, m’a permis, au fil des années, de voir les
avantages et les inconvénients de ta nature Disciplinée. » Elle a alors
raconté un voyage en famille que nous avions fait quelques années plus tôt.
À la dernière minute, Jamie, mon mari, et ma fille aînée Eliza n’ont pas pu
nous accompagner. Eleanor, ma plus jeune fille, et moi avons rejoint
Elizabeth, Adam, son mari, et Jack, son fils, dans un club de vacances non
loin de chez eux, à Los Angeles.
« Nous étions à Los Angeles, à l’heure de la côte ouest, a rappelé
Elizabeth, et tu avais décidé qu’avec Eleanor, vous resteriez à l’heure de la
côte est, soit avec trois heures de décalage. Vous dîniez tous les jours vers
16 h 30 et vous vous couchiez à 19 h 30. Adam, Jack et moi avons passé
des vacances complètement à part entre 19 h 30 et minuit.
– Effectivement.
– J’avais l’impression que tu passais à côté de tout ce qui faisait l’intérêt
des vacances. »
Je voyais ce qu’elle voulait dire, mais je trouvais que ça ne valait pas la
peine de lutter contre le sommeil à l’heure du dîner, pour devoir, au retour
des vacances, batailler pour se recaler à l’heure de chez nous.

Après la diffusion de cet épisode, une auditrice nous a fait part de son
point de vue très critique. Je la soupçonne d’être une Dévouée. Pour elle, le
problème n’était pas tant de profiter ou pas de mes vacances – comme
Elizabeth me le faisait remarquer – mais de diminuer le plaisir des autres.
Elle a écrit :
Vous avez l’air de trouver parfaitement normal de rester à l’heure de la côte est, parce que vous
êtes une Disciplinée, mais en ce faisant, vous avez peut-être gâché les vacances des autres. Je
trouve que c’est un manque d’égard de votre part. Plutôt que de profiter du moment présent
avec Elizabeth et sa famille, qui ont pris le temps d’être avec vous et votre fille, vous avez fait
passer votre confort en priorité.

Je lui ai répondu :
Vous avez fait remarquer qu’Elizabeth et sa famille avaient pris du temps pour être avec nous.
Ce qui est vrai, mais il en est de même pour ma fille et moi.
Nous avions pris le temps de traverser tout le pays, de New York à Los Angeles – ce qui n’est
pas rien – pour nous rendre à un endroit qui ne soit pas trop loin de chez eux en voiture. Ne
pouvaient-ils pas raisonnablement faire l’effort de se caler sur notre fuseau horaire pour deux
jours ? De prendre le petit-déjeuner et de dîner en même temps que nous ?
Je ne pense pas qu’une personne ou l’autre ait « raison », je pense juste que nous avons des
points de vue différents.

Cela peut paraître un peu abrupt, mais je dois avouer qu’en tant que
Disciplinée, il m’arrive souvent de souhaiter que mes proches prennent
autant soin d’eux que je prends soin de moi. Cela m’éviterait d’avoir
à m’inquiéter de leur confort. Je comprends parfaitement le point de vue du
petit ami de la lectrice Dévouée qui m’a écrit : « Mon compagnon est un
Discipliné et il trouve parfois que j’en attends trop de lui. Au lieu de faire
ce qui me ferait plaisir, j’attends de savoir ce qui lui ferait plaisir, et je le
fais. Il pourrait être content de voir son bonheur passer en premier, mais il
préférerait que je fasse ce qui me plaît d’abord. »
Bien que les Disciplinés tirent une grande satisfaction à suivre leurs
habitudes et leur emploi du temps, pour les autres, cette rigueur peut
paraître d’une austérité rédhibitoire.
Je soupçonne les Disciplinés du monde du spectacle et des arts de cacher
leur tendance disciplinée pour paraître plus fantaisistes et hédonistes qu’ils
ne le sont par nature. La rigueur n’a rien de glamour ni de très séduisant. Ce
n’est pas très vendeur, et cela ne fait pas rêver. Dans son tube Shake it off, la
chanteuse Taylor Swift se targue de se coucher à des heures indues et de
sortir avec beaucoup trop de garçons. Mais veille-t-elle si tard que ça ?
Mmmm. Je me le demande. Taylor Swift m’a l’air d’être une bonne
Disciplinée comme moi.

Comment les Disciplinés peuvent gérer leur inflexibilité


Bien que les Disciplinés sachent en général se préserver, leur nature
rigoureuse les enferme parfois dans une certaine rigidité.
Quand il s’agit de respecter ses propres engagements, les trois autres
profils vont souvent commencer sur les chapeaux de roues et se relâcher
avec le temps. Ils vont chercher des failles, des exceptions possibles pour
finalement se montrer moins rigoureux. Cela m’arrive aussi. Mais comme
je suis une Disciplinée, je tombe plutôt dans l’excès inverse. Au lieu de me
relâcher avec le temps, je vais avoir de plus en plus de mal à faire une
exception, à m’accorder des pauses, à lâcher prise. Cette rigueur est une
bonne chose comme une mauvaise.
Une amie Disciplinée souffrait de myalgies. Je l’ai convaincue d’essayer
mes cours de renforcement musculaires. Elle faisait déjà régulièrement du
sport, mais j’ai pensé que ces exercices pouvaient lui faire du bien. Elle s’y
est mise et ses douleurs ont disparu, mais ces cours étaient loin de chez elle
et ce n’était pas pratique. Elle a donc décidé de trouver un autre endroit plus
proche de chez elle. Elle avait décidé d’arrêter d’y aller, elle n’y arrivait
pas. Sa nature Disciplinée ne voulait pas lâcher prise. Une autre Disciplinée
m’a confié avec une certaine autodérision : « Comme je me fixais des
objectifs Fitbit toujours plus élevés, il m’arrivait de courir autour de mon lit
pour les atteindre avant de m’autoriser à me coucher. » C’est ce que
j’appelle de la rigidité.
Une Disciplinée en a fait l’expérience au travail : « Pour répondre à une
surcharge de travail, j’ai commencé à aller au bureau à 7 heures du matin,
alors que la journée ne commence officiellement qu’à 9 heures. Les choses
se sont calmées depuis, mais je continue d’y aller à 7 heures. De façon
générale, cette nouvelle habitude me plaît, mais j’aimerais m’accorder le
droit d’aller un peu plus tard quand je veux prendre le petit-déjeuner avec
mon mari, par exemple. »
Comment les Disciplinés peuvent-ils combattre cette rigidité parfois
pesante ? En étant vigilant à repérer les schémas psychorigides et en
essayant de voir si ces attentes valent vraiment la peine d’être respectées.
Les Disciplinés peuvent se rappeler qu’en se fixant des contraintes toujours
plus strictes, ils risquent de perdre en efficacité et en maîtrise. Et bien sûr,
ils doivent veiller à bien déterminer leurs attentes intérieures.
Un de mes auteurs préférés, l’essayiste et lexicographe du XVIIIe siècle
Samuel Johnson, a écrit : « Toute rigueur qui ne tend pas à faire le bien ou
à empêcher le mal est vaine. » C’est une maxime que tout Discipliné devrait
faire sienne.
Pourquoi les Disciplinés doivent énoncer clairement leurs
attentes
Les Disciplinés peuvent rejeter des attentes extérieures pour répondre
à leurs propres attentes, or ils ne savent pas toujours très clairement ce
qu’ils attendent d’eux-mêmes. Pour qu’une attente intérieure soit remplie,
elle doit être clairement énoncée. Il faut donc que les Disciplinés s’attachent
à bien définir ce qu’ils veulent et pourquoi ils y tiennent. La clarté est ici
essentielle.
Je le dis en connaissance de cause. Je ne savais pas trop dans quel
domaine m’orienter professionnellement. La faculté de droit préparant à de
nombreux métiers, il est possible de changer de spécialité en cours de route.
Je me suis donc inscrite en droit à Yale.
Le droit séduit les Disciplinés : les modalités d’admission et de réussite
sont clairement définies et en plus, le but d’une formation en droit est de
comprendre et d’appliquer la loi. Pour moi, c’était le bon choix et j’ai eu
d’excellents résultats. J’étais rédactrice en chef de la revue juridique de
l’université, j’ai gagné un prix d’écriture et j’ai décroché un stage dans
l’équipe de Sandra Day O’Connor (ancienne juge assesseur de la Cour
suprême des États-Unis).
Mais au cours de mon stage, j’ai compris que ce que je voulais vraiment,
c’était écrire.
Une fois cette envie devenue claire, je n’ai eu aucun mal à abandonner
ma carrière d’avocate pour tout recommencer, sans me fixer de date butoir
ou d’objectifs spécifiques. « Mais comment as-tu fait ? » me demande-t-on
souvent. « Comment as-tu réussi à te contraindre à travailler sur un livre et
trouver un agent de ton propre chef ? » C’est simple, à partir du moment où
j’avais compris ce que je voulais vraiment, j’ai agi en conséquence. Mais
j’ai mis un certain temps à savoir vraiment ce que je voulais.

LES DISCIPLINÉS EN QUELQUES MOTS

FORCES PROBABLES
Entreprenants
Autonomes
Consciencieux
Fiables
Rigoureux
Respectent ce qui est prévu
Aiment comprendre et répondre aux attentes

FAIBLESSES PROBABLES
Sur la défensive
Rigides
Manquent de souplesse face aux imprévus
Peuvent paraître dépourvus d’humour ou coincés
Mal à l’aise quand les règles sont ambiguës ou quand elles ne sont pas définies
Impatients quand il faut rappeler les autres à l’ordre, leur fixer des délais, les superviser ou les
reprendre
Exigeants
Peuvent stresser pour respecter des règles qui n’existent même pas
4
Interagir avec un Discipliné
« Just do it »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière

Le collègue Discipliné
Les disciplinés peuvent faire d’excellents collègues. Ils ont l’esprit
d’initiative, ils vont chercher la performance, ils n’ont pas besoin d’être
supervisés et ils savent reconnaître leurs limites.
C’est motivant pour les autres de travailler avec des gens qui font ce
qu’ils disent. Quand un Discipliné dit qu’il fera quelque chose, on peut lui
faire confiance, il le fera. Il suffit que son supérieur lui demande : « Quand
tu auras le temps, tu pourras jeter un œil à ce problème et me dire ce que tu
en penses ? » pour que le Discipliné lui remette un rapport en bonne et due
forme six semaines plus tard, sans même qu’il ait eu besoin de le lui
rappeler.
Les Disciplinés font également de très bons dirigeants, parce qu’ils
établissent clairement les objectifs à atteindre et qu’ils sont eux-mêmes très
rigoureux. Un chef Discipliné va dire ce qu’il attend de chacun. Il sera juste
en fixant les règles et les échéances. Il saura prévoir à long terme ce qu’il
faut pour atteindre l’objectif fixé. Un chef Discipliné ne va pas changer
subitement d’objectifs, de méthode ou d’échéances.
Les Disciplinés feront également de bons entrepreneurs et travailleurs
indépendants. Ils n’auront aucun mal à jongler avec plusieurs
responsabilités, parce qu’ils sont très déterminés. Ils savent identifier ce
qu’il faut faire et le faire, même s’ils n’ont pas de clients ou de supérieurs
à qui rendre des comptes. En analysant les données de mon sondage
national, j’ai constaté que plus les revenus étaient élevés et plus il y avait de
chances que la personne soit une Disciplinée (et moins il y avait de chances
qu’elle soit une Rebelle).
Les Disciplinés ne comprennent pas que l’on puisse avoir du mal
à répondre aux obligations, et ils peuvent manifester leur impatience. Un
chef Discipliné pourrait ne pas vouloir répondre aux questions du
Pointilleux en objectant : « Nous avons reçu une circulaire établissant une
nouvelle échéance. Je suis sûr qu’il y a une bonne raison à cela, alors cessez
de poser des questions et mettez-vous au travail. » Un chef Discipliné
pourrait refuser de mettre en place un système de responsabilisation (alors
que les Dévoués en ont besoin), comme fixer des échéances ou imposer des
jours de congé, parce qu’il n’en comprend pas la nécessité. Travailler avec
des employés Rebelles relève du défi pour les Disciplinés (et
réciproquement).

Les Disciplinés sont contrariés quand les autres ne respectent pas leurs
engagements, comme l’explique un lecteur :
Je suis médecin et Discipliné. Je travaille dans un cabinet médical avec des associés Pointilleux
et Rebelles. Ils ont fixé des règles de fonctionnement plus ou moins irréalistes, mais en tant que
Discipliné, je suis très mal à l’aise quand ils les contournent ou les enfreignent. Souvent, je suis
le seul à les respecter, et parfois même, je me retrouve dans la situation très inconfortable
d’avoir à rappeler mes associés à l’ordre. Pourtant, ce sont des règles que nous avons fixées
ensemble. Le pire, c’est que je vais focaliser sur ces infractions au lieu d’en profiter pour
instaurer une nouvelle règle : celle de faire usage de notre bon sens au cas par cas.

Les Disciplinés peuvent avoir du mal à déléguer, parce qu’ils pensent que
les autres ne respecteront pas leurs engagements ou ne feront pas du bon
travail.
Ils ont parfois du mal à sortir de leurs habitudes ou du programme qu’ils
se sont fixés. Renoncer à une attente, même quand cette dernière n’a aucun
sens, n’est pas aisée. Ils ne voient pas toujours quand il est nécessaire de
s’adapter ou de passer à autre chose. Ils peuvent également avoir du mal
à gérer les imprévus. Leur entourage a tout intérêt à les prévenir
suffisamment en avance pour qu’ils puissent s’organiser.
Si vous dirigez une équipe dans laquelle se trouvent des Disciplinés,
souvenez-vous qu’ils détestent déroger aux attentes et qu’ils peuvent avoir
du mal à établir des priorités, car toutes les attentes leur semblent être
d’importance égale. Pour pallier cela, il faudra fixer des priorités : « Je veux
un rapport tous les vendredis, mais en période de bilan annuel, ce n’est pas
grave si vous n’avez pas le temps de faire les rapports hebdomadaires. Le
bilan annuel est prioritaire. »
Parce que les Disciplinés cherchent à répondre aux attentes extérieures et
intérieures, ils peuvent se montrer réticents à aider les autres s’ils doivent
pour cela mettre de côté leurs propres obligations.
Ils n’aiment pas – voire ne supportent pas – faire des erreurs ou manquer
à un engagement. Une amie Disciplinée et éditrice pour un journal
important m’a dit : « Je déteste quand il y a une erreur dans un article sur
lequel j’ai travaillé. Les autres l’acceptent sans sourciller, alors que je
culpabilise terriblement. » Ne leur dites pas avec désinvolture : « Ce n’est
pas grave » ou « Personne ne le remarquera », mais plutôt : « Tu as fait ce
que tu pouvais, on ne pouvait pas faire mieux. » Parce qu’ils détestent être
pris en défaut, les Disciplinés peuvent être sur la défensive, voire hostiles,
quand on leur fait remarquer qu’ils se sont trompés.
Comme ils mettent un point d’honneur à atteindre les objectifs fixés, ils
peuvent refuser de relever un nouveau défi par peur de ne pas être en
mesure de l’atteindre. C’est parfois utile, bien sûr, parce qu’il faut savoir se
fixer des limites, mais ce peut être aussi dommage de ne pas essayer de se
dépasser par crainte de ne pas pouvoir « le faire bien ».

Le conjoint Discipliné
Le profil Discipliné – comme tous autres profils – présente des avantages
comme des inconvénients. Être marié à un Discipliné peut être un vrai
plaisir, mais il faut s’attendre à ce qu’il apporte des dossiers en vacances ou
qu’il travaille son violon alors qu’il y a des invités pour le week-end.
Connaître les spécificités du profil d’une personne permet de mieux
comprendre son point de vue. Une amie Disciplinée m’a rapporté comment
la typologie des quatre profils lui avait permis d’éviter une dispute avec son
mari.
Nous étions dans le train, en route pour aller voir mes parents. Notre fils avait fêté ses 12 ans la
veille, et de ce fait, il ne bénéficiait plus du tarif jeune enfant. Son ticket passait de 75 cents à
8,50 dollars. Si l’on ne payait pas le tarif plein, cela m’aurait turlupiné tout le week-end. Mon
mari, qui est un Pointilleux, n’était pas du même avis. « C’est complètement arbitraire, il n’a
qu’un jour de plus. Ce serait plus juste s’il payait l’ancien tarif. » À ses yeux, c’était plus
logique. Un Rebelle aurait certainement dit : « Personne ne m’obligera à payer ce montant ! »
Le fait de comprendre rend plus tolérant.

Les Disciplinés n’aiment pas les changements de programme. Mon mari


refuse de répondre à mes questions. Je pense que c’est d’une part à cause de
sa nature Pointilleuse, et d’autre part pour éviter de créer une attente
particulière chez moi, qui suis une Disciplinée. S’il me dit qu’il faudra
partir de la maison à 19 heures pour aller à une soirée, et qu’il repousse
l’heure du départ à 19 heures 15, j’aurais tendance à m’opposer au
changement. Il préfère ne rien me dire tant que ce n’est pas nécessaire pour
éviter tout conflit possible.
Les Disciplinés se sentent obligés de répondre aux attentes, même quand
cela n’a aucune espèce d’importance, ce qui peut agacer leur conjoint. Pour
défendre son point de vue, ce dernier a tout intérêt à adapter ses arguments
en disant par exemple : « Je vois bien que le panneau indique “Personnel
autorisé uniquement”, mais je pense que dans ce cas particulier nous
pouvons être considérés comme du “personnel autorisé” » ou encore : « Ils
disent que la somme est due à partir du 1er juin, mais la date limite de
règlement est en septembre. Cette société veut juste notre argent au plus
vite. Je pense qu’on peut très bien payer le 15 juin ».
Le conjoint d’un Discipliné devrait se garder de suggérer une attente,
aussi anodine soit-elle, au risque de la voir adoptée sur-le-champ, même si
ce n’est pas une bonne idée. De simples idées lancées en l’air comme « Tu
devrais diriger le comité de voisinage », « Tu devrais te présenter au comité
paroissial » ou « Tu devrais gérer tes employés de façon plus efficace »,
peuvent avoir une répercussion disproportionnée chez un Discipliné.
Quand on vit avec un Discipliné, il est bon de lui rappeler ses attentes
intérieures en lui disant : « Tu n’es pas obligé de faire ça », « Est-ce
vraiment important pour toi ? » ou « Tu as fait de ton mieux, tout le monde
fait des erreurs ».
Les Disciplinés peuvent manifester une certaine impatience quand leur
conjoint rechigne à répondre à une attente. Les Pointilleux mariés à des
Disciplinés devront parfois leur rappeler qu’en tant que Pointilleux, ils ont
besoin d’avoir une bonne raison d’agir ; de même que les Dévoués auront
besoin d’un garant et les Rebelles d’avoir le choix et de se sentir libres.

L’enfant Discipliné
De façon générale, les parents d’enfants Disciplinés ont la vie facile. Les
enfants Disciplinés veulent comprendre ce qu’on attend d’eux et répondre
à ces attentes. Ils sont assez autonomes. Leurs parents n’auront pas besoin
de batailler pour leur faire faire leurs devoirs ou leur rappeler de nourrir le
poisson rouge. Un enfant Discipliné va travailler son piano sans que
personne ne lui dise de le faire. Il préparera sa tenue de sport les jours
d’entraînement et connaîtra son emploi du temps de la semaine.
Les parents apprécient cette rigueur, mais cela peut s’avérer fatigant
quand elle tourne à la manie. Un enfant Discipliné peut faire un drame s’il
n’a pas fait les trente minutes de lecture quotidienne recommandées par son
professeur ou s’il arrive avec cinq minutes de retard à l’école.
Encore une fois, il faut choisir les arguments qui parlent à sa nature pour
le convaincre. Ainsi ses parents peuvent lui expliquer : « Ton professeur
veut que tu lises trente minutes tous les soirs avant d’aller te coucher, mais
aujourd’hui, on va rendre visite à grand-mère, et il sera l’heure d’aller se
coucher quand on rentrera. Tu as besoin de dormir pour être en forme pour
l’école. C’est plus important que de lire ce soir. » Ils peuvent aussi lui dire :
« Les professeurs savent que les enfants ne peuvent pas toujours faire leurs
devoirs et que ce n’est pas de leur faute. Il n’y a pas de soucis. » Rien ne
sert de leur dire : « Ce n’est pas grave », « Le professeur ne le remarquera
pas », « Ce n’est pas le professeur qui commande » ou « Trente minutes de
lecture, c’est une consigne complètement arbitraire ».
Les enfants Disciplinés peuvent également avoir du mal avec les
changements de dernière minute. Ils n’aiment pas laisser une tâche
inachevée ou se retrouver dans des situations où les attentes ne sont pas
clairement définies.
Si la plupart des parents trouvent facile d’élever un enfant Discipliné, la
relation parent-enfant entre un Discipliné et un Rebelle peut s’avérer
difficile à gérer, pour l’un comme pour l’autre.
Comme c’est le cas pour les conjoints des Disciplinés, les parents
d’enfants Disciplinés devraient se garder d’introduire des règles ou des
attentes inutiles. Les Disciplinés s’approprient très facilement un objectif et
vont consacrer beaucoup de temps et d’énergie à essayer de l’atteindre,
même si ce n’est pas quelque chose dont ils ont envie, même si ce n’est pas
une bonne idée. Une remarque anodine comme : « Tu devrais participer
à des concours d’orthographe » peut faire boule de neige.
Les adultes proches d’un enfant Discipliné doivent l’aider à déterminer et
formuler clairement ses attentes pour qu’il puisse les accorder avec les
attentes extérieures.

Le patient Discipliné
Pour les médecins et le personnel médical, les patients Disciplinés sont du
pain béni. Ils prennent les instructions des médecins au sérieux. Ils prennent
leurs médicaments consciencieusement et font leurs exercices de
rééducation avec assiduité.
Au cours de mon étude, je n’ai pas été surprise de découvrir que des
quatre profils, les Disciplinés étaient à 70 % plutôt pas d’accord avec
l’affirmation : « Mon médecin m’a expliqué pourquoi je devais changer
certaines choses dans mon mode de vie, mais je ne l’ai toujours pas fait. »
En fait, les Disciplinés vont plutôt connaître le problème inverse : ils vont
suivre les instructions des médecins à la lettre sans forcément se poser de
questions. Quand j’avais vingt ans, un orthodontiste m’a dit : « Votre
mâchoire aurait besoin d’être refaite. Vous n’avez encore aucune douleur,
mais croyez-moi sur parole, à trente ans, vous commencerez à souffrir de
douleurs chroniques. » J’ai réussi à ne pas prendre pour argent comptant ses
paroles, mais cela m’a demandé beaucoup d’effort. Et je n’ai toujours aucun
problème de mâchoire.
Les professionnels de santé devraient garder en tête que les Disciplinés
ont tendance à faire ce que l’on attend d’eux, quitte à en faire trop, ce n’est
donc pas la peine d’en rajouter pour être sûrs d’être entendus. D’un autre
côté, l’instinct de préservation des Disciplinés va les aider à mettre le holà
quand une attente devient trop pesante. Quand j’ai changé de coach sportif
pour mon programme de musculation intensif, je n’ai eu aucun mal à lui
dire : « Vous me donnez des poids beaucoup trop lourds. Je les veux très
lourds, mais là, c’est trop pour moi. »

Choix de carrière pour un Discipliné


Quand on aborde le sujet du choix de carrière, il serait grotesque de dire :
« Les Disciplinés devraient travailler comme régulateurs bancaires ou
agents de la circulation, pour pouvoir faire appliquer la loi tous les jours. »
Quel que soit votre profil, tous les métiers vous sont ouverts. Chaque profil
l’exercera à sa façon, même s’il est vrai que certains contextes favorisent tel
ou tel profil.
Les Disciplinés réussissent dans des domaines où il faut faire preuve
d’esprit d’initiative comme la création d’entreprise, le conseil ou le travail
indépendant. Une fois qu’ils se sont fixé un objectif, ils vont y travailler
sans avoir besoin d’être dirigés ou de rendre des comptes à quelqu’un. Les
Disciplinés arrivent à se forcer à faire des choses qu’ils n’ont pas forcément
envie de faire, ce qui est un atout considérable quand on travaille seul, sans
collègues à qui déléguer certaines tâches.
Les disciplinés s’épanouissent quand les règles sont bien définies, parce
qu’ils tirent une grande satisfaction à répondre aux attentes. Ils peuvent
avoir plus de difficultés dans des secteurs où il faut gérer des imprévus ou
des changements de planning et d’objectifs, comme le raconte un lecteur :
« Je suis un Discipliné, et de ce fait, je suis doué pour comprendre les règles
et les faire appliquer. La flexibilité est très appréciée là où je travaille, mais
ce n’est pas vraiment mon point fort. »
Ils peuvent être mal à l’aise dans un secteur où les attentes ne sont pas
claires, où les règles sont ambiguës, où l’on s’attend à ce qu’ils les
déforment à leur avantage. Si vous cherchez un avocat capable d’interpréter
les lois fiscales de façon agressive et créative, n’engagez pas un Discipliné.
J’ai remarqué que les Disciplinés peuvent être attirés par des activités de
conseils où ils peuvent aider les gens à atteindre leurs objectifs. Je connais
un entraîneur sportif de haut niveau et plusieurs auteurs (comme moi)
d’ouvrages de développement personnel, tous Disciplinés.
Cela dit, comme les Disciplinés n’ont aucun mal à répondre aux attentes
extérieures et intérieures, ils ont du mal à comprendre pourquoi les autres
« ne le font pas », ce qui fait qu’ils ne sont pas toujours de bons conseils.
Un Discipliné m’a écrit : « Je suis coach sportif et je montre toujours
l’exemple quand j’explique à mes clients le mode d’alimentation et de vie
que j’espère leur faire adopter. Et je suis toujours à l’heure aux rendez-vous.
Mais il m’arrive d’être très frustré quand ils ne sont pas aussi motivés que
je le souhaitais. »
Lors d’un dîner, j’étais assise à côté du PDG d’une grande société
pharmaceutique et je n’ai pas pu m’empêcher (comme cela m’arrive
souvent) de parler des quatre profils. Il a tout de suite saisi le concept.
« Je suis un Discipliné, m’a-t-il dit. Et je parie que la plupart des PDG ici
présents le sont également.
– Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?
– Pour être PDG d’une société ouverte, il faut maîtriser les règles du
marché et répondre aux attentes écrasantes que les gens placent en vous. Il
faut aussi savoir prendre des initiatives, faire valoir son point de vue et dire
non aux gens. »
Un ami Discipliné et banquier d’affaires s’est joint à la conversation.
« Je suis d’accord. De la même façon, un Dévoué fait un excellent
numéro deux…
– Mon bras droit est effectivement un Dévoué, a confirmé le PDG, et il
est remarquable.
– Un bon PDG doit être capable de dire : “Je tiens compte de l’avis des
autres, mais en en fin de compte, je sais ce que je veux faire.” Cela
demande beaucoup de discipline pour tenir ce rôle, et cela n’est possible
que lorsque les attentes extérieures et intérieures coïncident. De cette façon,
il n’y aura pas de ressentiment ou de conflit intérieur.
– Je ne sais pas si je suis d’accord, ai-je fait en secouant la tête. Je pense
que l’on peut trouver d’excellents leaders dans les quatre profils.
– Les Pointilleux et les Rebelles feraient d’excellents fondateurs et
innovateurs, a reconnu le PDG Mais je crois qu’ils auraient du mal
à développer une société sur le long terme. Comment ferait un Rebelle au
poste de PDG d’une société ouverte où tout est réglementé, codé, jusqu’à la
tenue vestimentaire ou la façon de prendre la parole au conseil
d’administration ? »
Ses remarques étaient convaincantes, mais dans cette conversation, trois
Disciplinés se sont accordés pour dire que seuls les Disciplinés pouvaient
être de bons PDG d’une société ouverte. Je me suis demandé si trois
Pointilleux ou trois Dévoués seraient arrivés aux mêmes conclusions pour
leur profil respectif. Quant aux Rebelles, il y a de grandes chances qu’un
Rebelle lui-même reconnaisse qu’il est peu probable qu’un Rebelle fasse un
bon PDG pour une société ouverte.

POUR RÉSUMER : INTERAGIR AVEC UN DISCIPLINÉ


Il répond volontiers aux attentes extérieures et intérieures.
Il est autonome, il respecte les échéances, il peut porter un projet et prendre des initiatives sans être
vraiment dirigé.
Il aime ses habitudes et a du mal à s’en défaire ou à s’adapter à un imprévu.
Il déteste faire des erreurs, et par conséquent…
Il peut s’énerver ou être sur la défensive si on suggère qu’il n’est pas à la hauteur ou qu’il a fait une
erreur.
Il aime aller au bout des choses.
Il faut parfois lui rappeler que les autres, contrairement à lui, ne sont pas nécessairement rassurés ou
dynamisés en faisant les choses qui étaient prévues.
Il a du mal à déléguer, parce qu’il soupçonne les autres de ne pas être fiables.
LE POINTILLEUX
« Je le ferai, si tu me donnes
une bonne raison de le faire. »

« Je le ferai, si tu me donnes une bonne raison de le faire »


« Prouve-le. »
« Parce que tu l’as dit ? Je ne crois pas, non ! »

« N’oublie pas le pourquoi du comment. »


« L’obéissance aveugle, c’est la servitude, non ? »
« Attends, quoi ? »
« Justifier, c’est se motiver. »

« Cherche, creuse toujours plus… peut-


être que tu trouveras. »
« Optimiser sa vie… même quand on n’en a pas envie. »
« Mais pourquoi ? »

« C’est ça ou rien. »
« Une devise, pour quoi faire ? »
5
Comprendre le Pointilleux
« Mais pourquoi ? »
Forces • Faiblesses • Les variations au sein du profil • Pourquoi les Pointilleux n’aiment pas être
remis en question • Comment sortir des questions sans fin • Comment les Pointilleux peuvent
répondre à une attente injustifiée en la justifiant

Au travail, à la maison, dans la vie, nous sommes en permanence


confrontés à des attentes extérieures et intérieures. Si les Disciplinés
répondent volontiers aux deux, les Pointilleux ne répondent qu’aux attentes
qu’ils se sont fixées. Il faut noter cependant que cela inclut les attentes
extérieures qu’ils se sont appropriées.
Les Pointilleux accordent une grande importance au savoir, à la logique et
à l’utilité des choses. Ils vont rassembler un maximum d’informations avant
de prendre une décision et n’agiront qu’en connaissance de cause. Ils vont
résister à tout ce qu’ils considèrent comme arbitraire, injustifié, illogique ou
inutile. Les Pointilleux sont le profil le plus représenté après les Dévoués.
Les Pointilleux ne répondent à une attente extérieure que s’ils la jugent
raisonnable et utile, sinon ils la rejettent. Par exemple, un Pointilleux se
dira : « Mon père me dit sans arrêt de vérifier le niveau d’huile de la
voiture, mais ce n’est absolument pas nécessaire pour l’instant, alors
j’ignore son conseil » ou « Le mot au-dessus de l’évier dit que chacun doit
laver sa vaisselle, mais je considère que mon temps est trop précieux pour
le perdre à faire ce genre de tâche. Il est préférable de laisser l’équipe du
soir s’en charger, alors je laisse ma tasse dans l’évier. »
En revanche, le Pointilleux répond volontiers à une attente extérieure
qu’il trouve justifiée. De ce fait, il l’intégrera comme une attente intérieure.
Ainsi, il pensera : « Mon professeur m’a expliqué que je ferais plus vite mes
exercices de maths si je connaissais par cœur les tables de multiplication,
alors je vais les apprendre » ou « Cela faisait des mois que ma femme me
demandait de ranger la chambre d’amis. Je ne le faisais pas, parce qu’elle
ne servait pas. Mais des amis ont prévu de venir dans quelques semaines,
alors je vais m’en occuper. »
Les Pointilleux se lèvent tous les matins en se disant : « Qu’est-ce qu’il
y a à faire aujourd’hui, et pourquoi ? » Ils jugent par eux-mêmes s’il est
utile ou nécessaire de faire quelque chose. Un Pointilleux à qui son patron
demanderait de lui rendre un rapport ce vendredi pourrait très bien se dire :
« Personne ne va lire ce rapport avant mercredi. Je suis plus productif en
début de semaine, je m’y mettrai donc lundi et j’aurai largement le temps de
le finir pour mercredi. » Sans grande surprise, l’enquête quantitative que
j’ai menée a montré que des quatre profils, les Pointilleux étaient les plus
enclins à être d’accord avec l’affirmation : « Je fais ce qui me semble le
plus sensé, quitte à enfreindre des règles ou même si cela va à l’encontre de
l’attente des autres. »
Une fois que le Pointilleux a reconnu la validité d’une attente, il va
y répondre de lui-même, sans avoir à y être contraint. Un patron qui veut
convaincre un Pointilleux d’utiliser un nouveau programme de facturation,
un médecin qui veut prescrire un traitement à un patient Pointilleux ou une
femme qui veut que son mari Pointilleux l’aide à vider la cave ont tout
intérêt à justifier leur demande en expliquant pourquoi ils le demandent,
pourquoi il faut que ce soit fait de telle façon et maintenant. Si et seulement
si l’argument le convainc, le Pointilleux s’exécutera, et il le fera
consciencieusement.
Il en est de même pour les attentes que les Pointilleux considèrent comme
les leurs. Ils font les choses pour eux-mêmes une fois qu’ils en ont reconnu
le bien-fondé. Un Pointilleux désirant se remettre en condition physique va
prendre le temps de se renseigner, de peser le pour et le contre de chaque
option et de choisir le type d’exercices qu’il pense le plus adapté et le plus
efficace pour lui. Il n’avait jusque-là pas tenu compte des recommandations
de son médecin, des piques de sa femme ou de la proposition de son
collègue de faire du sport avec lui, mais s’il décide que le CrossFit ou la
course à pied est le sport qui lui convient le mieux, il s’y mettra avec
assiduité.
Les Pointilleux remettent toujours tout en question. Au cours d’une
conférence, j’ai demandé aux participants de se répartir sous le profil qui les
décrivait le mieux et d’en inventer la devise. Quand ce fut au tour des
Pointilleux de prendre la parole, ils m’ont objecté : « Une devise ? Pour
quoi faire ? » J’aurais dû m’y attendre !

Forces (et faiblesses)


Comme les Pointilleux ne se fient qu’à leur jugement, une fois qu’ils se
sont fixé une ligne de conduite, ils restent plutôt cohérents. Les Pointilleux
ont l’autonomie des Disciplinés, la fiabilité des Dévoués et l’authenticité
des Rebelles.
Les Pointilleux vont remettre en question les usages et les opinions
communément admises. « Est-ce que je veux vraiment me marier ? » « Tu
es mon supérieur, mais dois-je vraiment faire ce que tu me dis de faire ? »
« Pourquoi les enfants n’auraient-ils pas le droit de dire des gros mots ? »

Il est indispensable qu’une attente soit raisonnable et justifiée. Obéir


à une règle par principe, très peu pour eux. Une Pointilleuse a écrit :
Je décide au coup par coup quelle règle suivre. Je prends autant d’articles qu’il le faut dans la
cabine d’essayage, parce que ce n’est pas pratique d’avoir à retourner en rayon à tout bout de
champ. Je pense que la règle des deux, trois ou quatre articles n’existe que pour éviter les vols
(ce que je ne ferai jamais) et réduire le temps d’attente quand il y a du monde. Comme je ne
fais du shopping qu’en dehors des heures d’affluence, la règle n’a pas lieu d’être, alors je ne la
suis pas.

Un autre Pointilleux trouvera cette approche pleine de bon sens ; un


Rebelle pourrait trouver un certain plaisir à enfreindre le règlement ou du
moins à l’ignorer, mais un Discipliné ou un Dévoué objecterait : « Pourquoi
serais-tu exemptée d’une règle qui s’applique à tout le monde ? »
Les Pointilleux ne répondent presque jamais à une attente sans d’abord la
remettre en question. Une Pointilleuse m’a confié : « Quand j’ai voulu
intégrer la sororité des Kappa Kappa Gamma à la fac, les filles m’ont dit
que je devais m’engager à me conduire « en femme intègre ». Mais qu’est-
ce que ça pouvait bien vouloir dire ? J’ai éclaté de rire et j’ai retiré ma
candidature. »
Comme les Pointilleux vérifient toujours le bien-fondé de leurs actions,
ils peuvent être d’une grande utilité pour leur entourage, parce qu’il
s’assure que personne n’acceptera sans réfléchir des contraintes injustifiées.
« À quoi servent ces réunions du personnel ? Pourquoi utilisons-nous ce
logiciel ? Pourquoi passons-nous autant de temps à relancer ce client ? »
Les Pointilleux sont souvent étonnés devant la capacité des autres à agir
de façon inconsidérée. Un Pointilleux se plaignait : « Pourquoi les gens font
des choses qu’ils trouvent injustes ? Pourquoi obéir comme des moutons ?
Et pourquoi, quand ils voient qu’une chose est nécessaire, ils ne la font
pas ? » (Notez au passage que son indignation s’articule en trois questions.)
Pour être sûrs de prendre une décision éclairée, les Pointilleux sont prêts
à faire des recherches exhaustives. Ils veulent pouvoir comparer toutes les
options possibles et imaginables. De même que les Disciplinés adorent les
fiches cartonnées, les Pointilleux adorent les tableaux Excel. Ils ont
également tendance à inonder les gens d’articles et de références en tous
genres.

Un Pointilleux m’a écrit :


Je suis en master et je n’ai pas encore de sujet de thèse. Ce semestre, nous avons eu la
possibilité de rendre des devoirs portant sur notre futur sujet de recherche de façon à nous
y préparer. La plupart de mes camarades de classe ont écrit tout le semestre sur le sujet qu’ils
comptaient rendre. Moi, j’en ai profité pour traiter un sujet différent à chaque devoir. Cela m’a
demandé beaucoup de travail en plus. Aujourd’hui, je comprends pourquoi je l’ai fait : en tant
que Pointilleux, j’ai besoin d’en savoir plus sur un sujet avant de m’engager.

Aimant faire des recherches, les Pointilleux sont souvent des mines
d’informations, et ils partagent volontiers leurs connaissances.
Dans le même ordre d’idées, ils aiment améliorer les procédés et les
procédures. Ils vont chercher à éliminer les erreurs et perfectionner les
pratiques existantes. Un ami Pointilleux m’a dit s’épanouir comme
contrôleur d’informations, un autre m’a confié qu’un de ses hobbies était de
chercher à optimiser des interfaces utilisateurs.
Cela ne sert à rien de dire à un Pointilleux : « Nous avons toujours fait
comme ça », « C’est la procédure habituelle » ou « C’est moi, le chef ». Ce
qu’il veut savoir, c’est « Pourquoi ? » Le Pointilleux va interroger toutes les
hypothèses, examiner toutes les alternatives et rejeter les idées reçues. Une
pointilleuse m’a écrit :
Plus jeune, je ne voyais pas l’intérêt de suivre la mode ou de me maquiller. Mais avec l’âge et
l’expérience du monde du travail, je me suis rendu compte (par moi-même et en faisant des
recherches objectives) que notre apparence avait un impact sur notre carrière et nos relations
avec les autres. Dès lors, j’ai fait ce que je pensais être des efforts raisonnables pour être
séduisante. Cela dit, je consacre beaucoup plus de temps à cultiver ma beauté intérieure, que je
trouve bien plus importante.

C’est une façon de voir très Pointilleuse.


Les Pointilleux veulent décider par eux-mêmes, même quand ils ont
l’avis d’un « expert ». Pas question pour eux d’obéir à une quelconque
autorité sans y mettre leur grain de sel. « Pourquoi devrais-je écouter cette
personne ? » Ainsi, avant de s’inscrire à un cours, ils auront tendance
à vouloir interroger le professeur, assister à quelques cours et se renseigner
sur sa réputation.
« Quand j’ai décidé de perdre du poids, m’a rapporté une Pointilleuse,
j’ai fait des tableaux répertoriant les différents nutritionnistes et
programmes alimentaires qui me tentaient et en notant le pour et le contre
de chacun. J’ai ainsi déterminé la nutritionniste qui me convenait et j’ai
suivi son programme en l’accommodant à mes besoins. » Cet exemple
montre bien comme les Pointilleux aiment personnaliser les choses.
Un autre Pointilleux témoigne (et confirme par la même occasion le fait
que les Pointilleux n’aiment pas l’arbitraire des résolutions du Nouvel An) :
« J’avais relevé un défi sportif de 30 jours et j’en avais fait une vidéo. Au
lieu de filmer des jours consécutifs, j’avais tourné tous les deux jours.
J’avais commencé le 1er janvier, mais j’insistais toujours sur le fait que
c’était un pur hasard. Ce n’était pas une résolution du Nouvel An.
À l’époque, je ne savais pas encore que j’étais un Pointilleux, maintenant, je
comprends pourquoi il était aussi important pour moi de clarifier ce point. »

Faiblesses (et forces)


Comme c’est le cas pour tous les autres profils, les forces des Pointilleux
peuvent également devenir des faiblesses. Une Pointilleuse l’explique très
bien : « Si ma nature Pointilleuse m’a avantagée sur le plan professionnel –
je suis cadre supérieure dans une grande entreprise et mère de jeunes
enfants – ce n’est pas facile tous les jours. Je remets absolument tout en
question, à propos de tout, tout le temps. »
Quand les Pointilleux considèrent qu’une contrainte est injustifiée, ils
refuseront d’y répondre, et cela peut leur valoir quelques problèmes. Chez
eux comme au travail, leur questionnement permanent peut finir par
fatiguer, irriter les autres et leur nuire. Pour certains, cette manie de couper
les cheveux en quatre est pénible, d’autant qu’elle n’est pas nécessaire ; ils
pensent que les Pointilleux rejettent l’autorité ou les décisions prises. Un
Pointilleux m’a dit : « Quand on adopte une nouvelle procédure au travail,
je refuse de m’y plier tant que l’on ne m’en a pas justifié l’utilité. » Un
autre Pointilleux abonderait dans son sens, mais son supérieur ou ses
collègues pourraient ne pas être du même avis.
Faute de comprendre le fonctionnement d’un Pointilleux, il pourrait
trouver son attitude énervante, voire irrespectueuse, ou lui reprocher son
manque d’esprit d’équipe. Un Pointilleux m’a dit avoir été renvoyé alors
qu’il faisait du bon travail, parce que son patron susceptible avait interprété
ses questions comme une insubordination.
De la même façon, les jeunes Pointilleux peuvent éprouver des difficultés
à l’école, car les enseignants et le personnel encadrant ne se sentent pas
obligés de justifier les règles. Les Pointilleux peuvent alors avoir du mal
à se motiver et leur comportement peut les faire passer pour des élèves
indisciplinés ou effrontés. Une Pointilleuse m’a écrit :
Je montre des tendances Pointilleuses depuis toute petite. Je me souviens avoir fait une crise
parce que je devais envoyer une carte de Saint-Valentin à tous les enfants de ma classe. Dans
mon esprit d’enfant de 8 ans, si j’envoyais une carte à tout le monde, y compris aux élèves que
je n’aimais pas, celles qui étaient destinées à ceux que j’appréciais ne voulaient plus dire grand-
chose. L’école élémentaire peut être un passage extrêmement frustrant pour nous, les
Pointilleux.

Le problème ne se limite pas à l’école primaire, comme l’explique très


bien un autre Pointilleux :
En tant que Pointilleux, j’ai tendance à remettre en question ou à ne pas respecter les
contraintes que je trouve idiotes, inutiles ou arbitraires. À la fac, j’avais du mal à faire les
travaux que je jugeais arbitraires, comme répondre à un questionnaire hebdomadaire pour
justifier mes lectures. Je travaillais volontiers aux projets et autres travaux pratiques que je
trouvais instructifs et stimulants.

Même si les questions des Pointilleux peuvent fatiguer les gens qui les
entourent, ces derniers ont tout intérêt à y répondre s’ils veulent avoir gain
de cause.
Les Pointilleux eux-mêmes aimeraient parfois être capables d’agir sans se
poser mille questions. « Il me faut toujours une information de plus pour me
décider, et ça ne s’arrête jamais ». « Je remets trop souvent les règles en
question. Les gens me disent : arrête de te prendre la tête. Accepte les
choses telles qu’elles sont. » Toutes ces questions prennent du temps et de
l’énergie. Une amie qui était à la fac de droit avec moi a passé des
entretiens dans des dizaines de cabinets d’avocats. Je n’en ai passé que six,
et nous nous sommes retrouvées dans la même firme.
À vouloir toujours en savoir plus, à tout passer à la loupe avant de se
décider, les Pointilleux peuvent se retrouver bloqués. C’est ce qu’on appelle
la « paralysie analytique ». Ils attendent d’être absolument sûrs de pouvoir
faire le bon choix, mais dans la vie, il faut parfois se décider et avancer sans
certitude.
Nombreux sont ceux qui, lorsqu’ils doivent suivre un avis médical, se
demandent s’ils ne feraient pas mieux de se renseigner pour s’assurer que
cet avis est fondé ou même pour trouver une autre approche qui serait
meilleure. Ils finissent parfois par ne rien faire du tout.
Comme ils excellent à chercher des justifications et à remettre en
question les décisions, quand ils veulent échapper à une attente ou à une
contrainte, ils y parviennent toujours. Aucune faille ne leur échappe. Un
Pointilleux l’explique très bien :
J’arrive toujours à m’en sortir avec une bonne justification. Dans ma tête, c’est comme si le
docteur Jekyll et M. Hyde conversaient en permanence : “Tu devrais faire de l’exercice”, “Mais
il fait trop froid dehors”, “Fais du sport en salle !”, “J’ai trop de travail, et c’est quand même
plus important que le sport.” Ce ping-pong intérieur m’exténue et je finis par regarder la télé
pour ne plus penser à rien.
Leur besoin de tout « faire à leur sauce » et leur propension à remettre en
question l’avis des experts eux-mêmes peuvent être très frustrants pour
ceux à qui ils demandent des conseils, de l’aide ou des services, à savoir
leurs professeurs, patrons, collègues, médecins, conseillers d’orientation,
plombiers, agents d’entretien… J’ai lu un sondage selon lequel 26 % des
médecins étaient plutôt d’accord avec l’affirmation : « Mes patients pensent
qu’ils savent mieux que moi ce qui est bon pour eux », je me suis dit qu’ils
devaient certainement penser aux Pointilleux. Un Pointilleux m’a d’ailleurs
écrit : « En général, je ne tiens pas compte des recommandations des
experts. Mon dentiste dit qu’il faut faire des radios de contrôle tous les ans.
J’en fais tous les cinq ans, parce qu’une exposition trop fréquente aux
rayons X peut développer un cancer. Juste pour un contrôle de routine, le
risque n’en vaut pas la peine. »
Un autre Pointilleux résume très bien cet état d’esprit : « Toute personne
appartenant au corps médical doit se crisper en me voyant, parce qu’elle sait
que j’arrive avec une batterie de questions et que je ne repartirai pas tant
que je n’aurai pas mes réponses. Si j’ai mon opinion sur le sujet, j’agirai en
conséquence, que cela soit en accord ou non avec les recommandations
médicales. Si je ne sais rien sur le sujet, je prendrai note des réponses à mes
questions et je me renseignerai avant de décider, si oui ou non, je suivrai les
recommandations des médecins. »
Les Pointilleux n’agissent que s’ils ont une raison valable de le faire, du
moins une raison qu’ils jugent valable, mais qui ne l’est pas forcément.
Quitte à rejeter l’avis des experts et à passer pour des fous. « Crois-tu
vraiment en savoir plus sur la pneumonie que le médecin ? », « Tout le
monde présente ses rapports de la même façon, pourquoi t’obstines-tu
à utiliser ce format ? »
D’après les documents que j’ai lus quand je travaillais à ma biographie de
John F. Kennedy, Forty Ways to Look at JFK, je suspecte de nombreux
théoriciens du complot d’être des Pointilleux.
Il arrive que ce côté « tête de mule » des Pointilleux irrite leur entourage.
L’entrepreneur et inventeur américain Steve Jobs était un Pointilleux.
Quand il était jeune, il était persuadé que son régime alimentaire végétarien
riche en fruits lui permettait de ne plus dégager d’odeurs corporelles, alors
même que son entourage lui disait que ce n’était pas le cas. Cet aspect de la
nature des Pointilleux peut avoir de lourdes conséquences. Quand les
médecins lui ont diagnostiqué un cancer, Jobs a rejeté tout protocole de
chimiothérapie et de chirurgie pour s’en tenir – malheureusement sans
succès – à un régime végétarien strict, des séances d’acupuncture, divers
remèdes à base d’herbes et d’autres traitements non-conventionnels. Il n’a
accepté de se faire opérer qu’en dernier recours.
Comme tout le monde, avec un peu de sagesse et d’expérience, les
Pointilleux peuvent apprendre à compenser les faiblesses de leur nature. Un
Pointilleux le résume très bien : « En tant que Pointilleux, j’ai appris
qu’ignorer certaines règles pouvait m’attirer des ennuis. Maintenant, je suis
les règles, je les change… ou je passe à autre chose. »
Notons une chose étonnante chez les Pointilleux : ils m’ont souvent fait la
réflexion qu’ils détestaient faire la queue. Un ami m’a confié : « Je déteste
tellement ça que cela m’empêche de faire la conversation quand j’attends
qu’une table se libère au restaurant. » Peut-être ont-ils l’impression de
perdre leur temps.

Variations au sein du profil


Comme c’est le cas pour tous les profils, il y a toutes sortes de
Pointilleux.
Le profil des Pointilleux recoupe celle des Disciplinés (qui répondent
également aux attentes intérieures) et des Rebelles (qui résistent également
aux attentes extérieures).
Les POINTILLEUX/Disciplinés seront plus enclins à répondre aux
attentes extérieures, parce qu’ils reconnaissent volontiers le bien-fondé des
règles générales de la société, comme l’explique un
POINTILLEUX/Discipliné : « Toute règle a probablement une bonne raison
d’être, même si je ne la connais pas, j’en suis intimement convaincu. Je n’ai
pas envie d’avoir des ennuis et je ne veux pas gêner les autres quand je fais
part de mes opinions. En revanche, si je ne trouve aucune utilité à une
activité, je ne peux me résoudre à la faire. »
Jamie, mon mari, est un POINTILLEUX/Discipliné. Il remet tout en
question, mais on peut aisément le convaincre de répondre à une attente. La
Disciplinée que je suis aurait certainement du mal à s’épanouir avec un
mari qui ne serait pas un tant soit peu discipliné. Voilà qui donne
à réfléchir…
D’un autre côté, les Pointilleux peuvent également avoir des dispositions
Rebelles. À s’opposer aussi férocement aux attentes extérieures et à les
rejeter aussi souvent, ils peuvent même passer pour des Rebelles pur jus.
Comment faire pour les distinguer ? Les Pointilleux résistent aux attentes
parce qu’ils les considèrent injustifiées, les Rebelles résistent aux attentes
parce qu’ils refusent toute ingérence extérieure. Et quand les Pointilleux se
fixent une contrainte, ils n’ont pas de mal à la respecter, contrairement aux
Rebelles.
Peut-être est-ce ma nature Disciplinée, mais je trouve hilarant, voire
surréaliste, d’entendre des POINTILLEUX/Rebelles discuter des raisons
qu’ils ont de ne pas respecter les règles.
Certains, par exemple, ne respectent pas le Code de la route. L’un a écrit :
« Je ne tiens pas compte des limites de vitesse et roule à la vitesse qui me
convient. » Je lui ai alors répondu : « Pensez-vous que tous les conducteurs
devraient avoir le droit de rouler à la vitesse qu’ils jugent bonne ? » Sa
réponse ne s’est pas fait attendre : « Oui, ce pourrait être une bonne idée,
d’autant que la plupart des gens ne dépasseront jamais une certaine vitesse
quoi qu’il arrive. C’est comme les lois antidrogues, elles ne servent à rien. »
Cet exemple illustre bien le point de vue d’un POINTILLEUX/Rebelle :
l’inutilité et l’arbitraire d’une loi générale la rendent illégitime. De ce fait,
elle devrait être abandonnée.
Un autre POINTILLEUX/Rebelle a écrit : « J’ai reçu une amende pour
m’être garé dans le mauvais sens de la rue. Je ne vois pas en quoi se garer
dans un sens ou l’autre représente un danger pour qui que ce soit. Il n’est
donc pas question que je paie. » Je me suis retenue de lui répondre :
« Bonne chance pour que cela passe ! »
Si les Pointilleux ne sont pas d’accord avec une attente extérieure, ils se
sentent en droit de ne pas y répondre.
Selon leur profil, les Pointilleux présentent différents degrés d’indécision
pouvant aller jusqu’au blocage. Leur besoin d’informations supplémentaires
les empêche alors d’avancer. Un Pointilleux l’explique ainsi : « Je vais faire
des recherches intensives sur chaque marque, chaque société, chaque offre
pour faire un achat tout simple. Cela me prend parfois plusieurs semaines
éreintantes avant de pouvoir choisir. »
Certains Pointilleux au contraire hésitent très peu. En bon Pointilleux,
Jamie, mon mari, veut savoir pourquoi il faut faire certaines choses, mais
une fois qu’il a la réponse, il passe aussitôt à l’action.

L’hésitation dépend souvent des circonstances, comme l’explique une


Pointilleuse :
Il m’arrive d’être bloquée par la paralysie analytique, mais paradoxalement, cela concerne le
plus souvent des décisions sans grande importance. Je n’ai eu aucun mal à choisir ma spécialité
à l’université, à savoir si j’étais trop jeune pour me marier, à adopter ou non un chien. Mais j’ai
passé des mois à me demander quel agenda choisir pour l’année à venir. Mon mari (un Dévoué)
m’a regardée faire sans trop comprendre. Quand j’ai enfin validé ma commande, il m’a dit :
« On peut arrêter de parler d’agenda, maintenant ? »

Les Pointilleux ayant de bonnes compétences sociales parviennent


à poser leurs questions sans gêner, irriter les autres ou les pousser dans leurs
retranchements. Les Pointilleux à qui l’on a déjà reproché de poser trop de
questions, de manquer d’esprit d’équipe ou de ne pas être coopératif,
auraient tout intérêt à apprendre à mieux formuler leurs questions. Au lieu
d’interrompre leur patron en pleine réunion en disant brusquement : « Cette
nouvelle règle ne sert à rien ! », ils peuvent essayer : « Pourriez-vous
m’expliquer pourquoi cette règle a été créée ? J’arriverai plus facilement
à l’appliquer si j’en comprends la nécessité. » En changeant de formulation,
l’opposition devient constructive.
J’ai remarqué une constante très intéressante chez les Pointilleux :
beaucoup remettent en question la typologie des quatre profils. Certains
éclatent même de rire quand ils m’entendent en parler pour la première
fois… avant de hocher la tête quand je leur dis : « Si votre première
réaction aux quatre profils est de remettre en question la validité de cette
catégorisation, vous êtes probablement un Pointilleux. »
Cela vient en partie de leur nature pointilleuse, bien sûr. Les Pointilleux
émettent des réserves, des objections, trouvent des exceptions aux réponses
qu’ils font au test des quatre profils. Ils doutent également de la valeur
scientifique des fondements d’une telle typologie, et se demandent si elle
peut vraiment s’appliquer à toute l’humanité. Ils ont été nombreux à me
dire : « Je doute de la pertinence de réduire l’humanité en quatre grandes
catégories. »
À quoi je réponds invariablement : « Quand j’expose la théorie des
quatre profils, beaucoup de gens réagissent comme vous. Ils me font la
même objection, pratiquement mot pour mot. Ce qui est amusant, parce que
leur méfiance elle-même les met dans une de ces catégories. »
Je pense que ce scepticisme tient aussi au fait que le profil Pointilleux est
le moins distinctif des quatre. Les Disciplinés, les Dévoués et les Rebelles
voient tout de suite ce qui les différencie des autres, alors que les
Pointilleux mettent leur questionnement sur le compte de la logique, d’un
besoin de sens partagé par tous. Ils ne voient pas cela comme une
spécificité de leur disposition. Un ami Pointilleux m’a dit : « Je suis un
Pointilleux, cela ne fait aucun doute. Mais n’est-ce pas le cas de tout le
monde ? Ou du moins d’une grande partie des gens ? » Non, pas du tout.
Au cours d’une intervention dans le lycée que j’ai fréquenté, j’ai parlé des
quatre profils. Un élève de dernière année était persuadé d’être une
association de deux profils. « Selon les situations, je n’agis pas de la même
façon.
– C’est-à-dire ?
– Quand un professeur que j’estime me donne un devoir à faire, je le fais
sans problème. En cela, je suis un Discipliné. Mais si je n’ai pas d’estime
pour le professeur, je ne le ferai pas. En cela, je suis un Rebelle. Vous
voyez, je ne suis pas le même selon le contexte.
– En fait, vous êtes un Pointilleux à 100 %. Le Pointilleux commencera
par se poser la question : Pourquoi devrais-je vous écouter ? »

Pourquoi les Pointilleux n’aiment pas qu’on les remette en


question
Il y a une grande ironie cachée au sein de la nature Pointilleuse.
Les Pointilleux posent beaucoup de questions, mais celle que m’a posée
une auditrice d’un podcast m’a particulièrement intriguée : « Avez-vous
remarqué comme les Pointilleux n’aiment pas qu’on leur pose des
questions ? » C’est effectivement le cas de mon mari, un Pointilleux. En
fait, son refus de répondre aux questions est devenu proverbial chez nous. Il
n’accepte de répondre qu’aux « JBS » (j’ai besoin de savoir). Mais si on lui
demande « Qu’est-ce qu’on mange ce soir ? » ou « Quand vas-tu
commencer ton nouveau travail ? », il refuse de répondre. Et cela a le don
de m’exaspérer.
Je pensais que c’était une manie qui lui était propre. Je sais maintenant
que c’est une caractéristique de sa nature Pointilleuse. Si les Pointilleux
partagent volontiers leurs connaissances, la plupart (pas tous) n’aiment pas
qu’on remette en question leur jugement ou leurs décisions. Ce qui est
parfois source de tensions, comme l’explique l’un d’eux :
Les Pointilleux, dont je fais partie, s’exaspèrent de ce que les autres ne cherchent pas à en
savoir plus, à se renseigner, à poser les bonnes questions, à peser le pour et le contre. Si je
décide de faire un régime pauvre en glucides et qu’un non-Pointilleux commence à m’objecter :
“J’ai entendu dire que ces régimes étaient très mauvais pour le foie” ou “Mais Robert Atkins
n’est pas mort jeune ?” Ça m’énerve très vite. Si ces objections étaient fondées, je le saurais et
je ne me serais pas embarquée dans ce régime ! (soupir.)

Un autre Pointilleux confirme : « Je préfère ne pas avoir à m’expliquer ou


à justifier mes actions. En tant que Pointilleux, toutes mes décisions sont
fondées et rationnelles. A) C’est fatigant d’avoir à expliquer tout ce
cheminement logique. B) Je sais que j’ai raison, je ne vois pas pourquoi je
devrais me justifier. »
Parce que les Pointilleux réfléchissent mûrement avant d’agir, ils sont
agacés, ou se sentent même insultés, quand on remet en question leur
décision. C’est le comble ! Ils devraient y penser quand ils assaillent les
autres de leurs questions.
Ils n’aiment pas perdre leur temps à répondre à des questions qu’ils
considèrent inutiles. « Pourquoi devrais-je vous répondre ? » Ils seront plus
enclins à s’expliquer s’ils comprennent pourquoi on le leur demande. Au
lieu de dire : « À quelle heure doit-on partir ? », il sera plus judicieux de
demander : « À quelle heure doit-on partir, parce que j’aimerais savoir si
j’ai le temps d’aller à la gym ? »
Sans surprise, le refus des Pointilleux de répondre aux questions ne
manque pas d’agacer les autres. Un Pointilleux explique : « Je ne prends
des décisions que mûrement réfléchies, alors je trouve exaspérant de voir
mes délibérations ignorées, écartées ou… remises en question. » Entendu,
mais les autres aussi ont besoin de réponses.
Que faire ? Au lieu de donner l’impression aux Pointilleux de remettre en
question leur point de vue, demandez-leur de vous expliquer comment ils
sont arrivés à cette conclusion. Certains Pointilleux aiment partager ce
qu’ils savent ou l’enseigner. « J’aimerais connaître ton raisonnement. Cela
m’aiderait à comprendre comment tu en es arrivé là » ou « C’est intéressant
que tu aies choisi ce logiciel, je serais curieux d’en connaître les
avantages. »

Comment les Pointilleux peuvent surmonter la paralysie


analytique
Comme nous l’avons déjà dit, à trop vouloir bien faire, certains Pointilleux
ont du mal à dépasser le stade de la réflexion pour passer à l’action. Une
Pointilleuse a écrit : « Dès que je me fixe un objectif (régime, sport, budget,
travail), je vais essayer de trouver la stratégie la plus efficace pour
l’atteindre. Cela me prend un temps fou en recherches, et c’est
complètement contre-productif ! Toute nouvelle méthode va retenir mon
attention. »
C’est pour cette raison que les Pointilleux doivent savoir mettre des
limites à leur délibération. Pour ne pas être tenté de couper les cheveux en
quatre, ils devraient se concentrer sur leur objectif final. Une amie m’a dit :
« J’ai un besoin insatiable d’informations, et quand j’ai l’impression d’être
bloquée en mode “recherches”, je me pose la question : “Est-ce que cette
information est pertinente pour prendre ma décision ? Pourquoi devrais-je
consacrer du temps et de l’énergie dessus ?” »
« Tu remets en question ta question elle-même ! »
Une autre Pointilleuse m’a confié : « Quand j’étais en rendez-vous avec
des clients, j’avais du mal à respecter le temps alloué à chaque dossier,
parce que ma nature Pointilleuse voulait toujours en savoir plus ou fournir
plus d’informations.
– Comment as-tu géré ça ?
– J’ai fait appel à un autre aspect de ma nature Pointilleuse et je me
rappelle toutes les bonnes raisons de respecter le planning pour mes clients
et pour moi-même. »
Plus radicalement, les Pointilleux pourraient essayer d’éviter les
situations générant beaucoup de recherches, de réflexion ou requérant de
nombreuses prises de décision. Une Pointilleuse se souvient avec
amertume : « Concevoir et construire ma maison ? Mais qu’est-ce qui m’a
pris ? J’ai passé des heures en ligne à écumer les sites de matériaux, les
forums de discussions pour savoir ce qu’il y avait de “mieux”, que ce soit
pour le revêtement du sol ou le système d’aspiration centralisée. Encore si
j’avais aimé faire ça. Mais non ! » Peut-être aurait-elle mieux fait d’engager
un entrepreneur de confiance pour faire ces travaux.
Trouver un entrepreneur de confiance n’est pas une mince affaire, mais
s’en remettre aux conseils d’une personne avisée pour réduire le champ des
possibles peut aider le Pointilleux à dépasser la paralysie analytique. Il peut
ainsi se référer aux avis d’association de consommateurs, à un médecin, un
spécialiste ou autres autorités compétentes en lesquelles il sait qu’il peut
avoir confiance, comme un ami ou de la famille. Il peut aussi décider, par
exemple, que les vendeurs de telle enseigne sont compétents, et qu’il
achètera sa tente là et nulle part ailleurs.
Ils peuvent également se fixer une date à laquelle ils devront arrêter leur
décision ou demander à leurs proches de le faire pour eux : « Il nous faut
une réponse vendredi. » Cela dit, les Pointilleux risquent de remettre en
question toute échéance, comme l’explique l’un d’eux : « Je trouve que
l’idée de se fixer des dates limites a elle-même ses limites. Je ne respecte
les échéances que si elles veulent dire quelque chose, pas celles fixées de
façon arbitraire. »
Les Pointilleux qui ont du mal à prendre une bonne habitude ? Ou qui
n’arrivent pas à atteindre un objectif personnel ? Le problème vient souvent
d’un manque de clarté dans la formulation de cet objectif. C’est uniquement
parce qu’ils ne comprennent pas clairement pourquoi ils doivent faire
quelque chose et pourquoi ils doivent le faire de cette façon qu’ils n’y
arrivent pas. Les Pointilleux ont besoin que les choses soient claires. Tout
est dans l’art de se poser les bonnes questions. La nature même de leurs
questions peut expliquer pourquoi ils font des choses que certains
pourraient désapprouver.

Pourquoi devrais-je m’embêter à faire ça ?

Pourquoi devrais-je t’écouter ? Que vaut ton autorité sur la question ?


« Est-ce que ce nutritionniste est suffisamment qualifié pour me dire quoi
manger ? »

Pourquoi devrais-je faire ça ? Pourquoi quelqu’un d’autre ne s’en


chargerait pas ?
« Est-ce que je peux me faire opérer plutôt que de faire des séances de
kiné ? »

Pourrais-je en savoir plus ?

Est-ce que je peux accommoder les contraintes à mes besoins ?


« J’ai ressenti des effets secondaires, alors j’ai baissé le dosage de mon
traitement. Je ne vois pas l’intérêt d’en parler à mon médecin. »

N’y a-t-il pas un meilleur moyen de faire ça ?


« Si je prends tous les médicaments le matin, je n’ai plus à m’en soucier
de la journée. »

Est-ce que cette approche est la bonne ?


« Je ne vois pas pourquoi je devrais prendre ce médicament si je ne
ressens aucune amélioration. »

À qui cela profite ? Qu’est-ce qui a motivé la mise en place de cette


règle ?
« Le médecin gagne plus d’argent si je suis ce protocole toutes les
semaines. »

Une fois qu’il y voit clair, le Pointilleux peut passer à l’action :


Savoir que je suis un Pointilleux m’a aidé à ne plus consommer de sucre. J’avais une vague
idée des méfaits du sucre sur notre santé, mais cela ne suffisait pas pour que j’arrête d’en
consommer. J’avais besoin d’en savoir plus. J’ai assisté à des conférences, parcouru le Net et
j’ai lu Pourquoi on grossit de Gary Taubes. Depuis, j’ai éradiqué le sucre de mon alimentation.
Il me fallait des faits clairs et précis. Quand je les ai eus, changer mes habitudes alimentaires
a été une simple formalité.

Le Pointilleux passe à l’acte quand tout est clair pour lui, mais cela ne
veut pas dire que sa décision sera du goût de tout le monde.

Comment les Pointilleux peuvent répondre à une attente


injustifiée en trouvant leur propre justification
Les Pointilleux se retrouvent en position délicate quand ils doivent répondre
à une attente qu’ils jugent arbitraire, inutile ou injustifiée.
Ils peuvent alors se rappeler que l’on peut céder à une exigence, aussi
arbitraire soit-elle, pour faire plaisir à quelqu’un ou pour son propre intérêt.
Une Pointilleuse se souvient :
J’ai mis beaucoup de temps à comprendre que faire plaisir à ma grand-mère était une raison
suffisante pour lui obéir sans discuter. Plus jeune, je la rendais folle en remettant
systématiquement en question ce qu’elle me demandait de faire. Pourquoi essuyer la vaisselle,
alors qu’elle peut sécher sur l’égouttoir ? Pourquoi ne pouvais-je pas m’habiller tout le temps
en noir ? Maintenant, cela ne me dérange pas de faire comme elle veut. Et ce n’est pas inutile,
puisque cela lui fait plaisir.

Un étudiant en médecine m’a fait part de son inquiétude : « Comment


puis-je me forcer à faire quelque chose que je trouve arbitraire ou idiot ?
Cela m’arrive presque tous les jours et j’ai beaucoup de mal à le gérer.
– C’est courant chez les Pointilleux.
– Que dois-je faire ?
– Ne focalisez pas sur les raisons apparentes, mais sur les raisons sous-
jacentes. Vous le faites pour vous. « Oui, ce devoir ne rime à rien et il me
fait perdre mon temps, mais je veux gagner le respect de mes professeurs.
Je vais donc faire ce devoir. »
Comme l’illustrent ces exemples, même quand il n’y a pas de raisons
apparentes, les Pointilleux peuvent se raccrocher aux raisons sous-jacentes
pour justifier une action. Il faut qu’ils se rappellent qu’ils doivent le faire
s’ils veulent ensuite pouvoir faire ce qu’ils veulent.

LES POINTILLEUX EN QUELQUES MOTS

FORCES PROBABLES
S’appuient sur des faits
Impartiaux (selon leur propre jugement)
Tendent à créer des systèmes efficaces et utiles
Font volontiers l’avocat du diable
Prêts à renverser le système si nécessaire
Autonomes
N’acceptent pas l’autorité sans justification

FAIBLESSES PROBABLES
Peuvent souffrir de paralysie analytique
S’irritent de ce qu’ils considèrent comme de la complaisance chez les autres
Peuvent s’enfermer dans leurs lubies
Incapables de tourner la page s’il reste des questions en suspens, même si tout le monde passe outre
Peuvent refuser de répondre à des contraintes que les autres trouvent justes ou du moins
indispensables (comme le Code de la route)
Peuvent refuser de répondre aux questions des autres
6
Interagir avec un Pointilleux
« Une devise, pour quoi faire ? »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière

Le collègue Pointilleux
Les Pointilleux sont des atouts de poids au sein d’une organisation, car ils
poseront des questions essentielles comme : « Pourquoi procéder de cette
façon ? Faut-il seulement le faire ? Ne devrions-nous pas demander d’autres
avis ? N’y a-t-il pas un meilleur moyen de nous organiser ? »
Les Pointilleux vont chercher la petite bête, déterminer ce qui marche et
ce qui ne marche pas, éliminer ce qui est irrationnel. Pas question pour eux
d’accepter la solution de facilité qui consisterait à dire : « C’est comme ça
qu’on a toujours fait. » Leur questionnement permanent assurera une
gestion optimale des ressources, même si ce n’est pas toujours très bien
vécu par leurs collègues ou supérieurs, comme en témoigne un Pointilleux :
Être un Pointilleux m’a permis d’être très efficace au travail. Mais quand il y a des projets
communs et que les gens cherchent le consensus, ils considèrent mes questions comme un
manque d’esprit d’équipe. Je reste pourtant toujours très poli, et mes questions ont pour seul but
de clarifier notre stratégie, d’éviter de faire des erreurs, de perdre le moins de temps et d’argent
possible. Mon zèle est le plus souvent apprécié, mais certains prennent mes interventions
comme des critiques et le vivent mal. Ils me répondent alors : « Parce qu’untel ou untel l’a dit »
ou « Parce qu’on a toujours fait comme ça », les deux pires excuses que l’on puisse opposer
à un Pointilleux.

Quand les Pointilleux refusent de suivre une pratique usuelle, quand ils
passent leur temps à remettre en question des sujets que tout le monde
considère comme clos ou quand ils n’arrivent pas à se décider, ils peuvent
être difficiles à gérer. Pour désamorcer ces situations, leurs collègues
peuvent fixer des limites claires. Par exemple, un responsable peut dire à un
Pointilleux chargé de recruter un nouveau collaborateur de se fixer une date
à partir de laquelle il devra choisir entre les cinq meilleures candidatures en
sa possession. Les limites poussent à l’action.
Comme les Pointilleux ont confiance en leur aptitude à analyser et
à évaluer les choses, ils peuvent camper sur leurs positions et refuser d’en
démordre.
Un chef d’entreprise m’a dit : « Mon sous-directeur est un homme
brillant, mais je ne supporte pas de travailler avec lui. Il remet en question
tout ce que je dis et tout ce que je fais. Il sape mon autorité et nie mes
compétences.
– Il ne veut probablement pas saper votre autorité, c’est juste dans sa
nature de tout remettre en question.
– Quoi qu’il en soit, il n’y a plus aucun dialogue possible entre nous.
Nous devons passer par un intermédiaire. »
Quand les gens comprennent qu’un Pointilleux ne cherche pas la
confrontation ou qu’il ne veut pas miner le travail d’équipe, mais qu’il se
comporte juste selon sa nature, ils donneront plus volontiers les
informations dont il a besoin. Un Dévoué m’a rapporté : « Je suis un
enseignant Montessori et je travaille étroitement avec deux Pointilleux. Ils
me rendaient fou à me poser des questions à tout bout de champ.
Maintenant, je leur suggère des ouvrages à lire et des sites Internet
à consulter pour trouver des réponses à leurs questions. »
Quand les Pointilleux travaillent à leur compte – quand ils montent leur
propre entreprise ou décident du travail qu’ils doivent faire – ils excellent
à toutes les tâches qui méritent qu’ils y consacrent leur temps et leur
énergie. Quand ils ont une bonne raison de faire quelque chose, ils s’y
engagent. Encore une fois, cet état d’esprit peut être à leur avantage comme
à leur désavantage. Les Pointilleux pourraient ne pas vouloir perdre de
temps à discuter de choses et d’autres avec des clients potentiels… À moins
qu’ils ne se disent que cela peut les aider à conclure une affaire.
Peut-être feraient-ils bien d’anticiper la paralysie analytique, car travailler
seul implique beaucoup d’organisation en amont. Quel est le meilleur
système de classification, ou le meilleur logiciel de comptabilité ? Quelle
est la meilleure assurance ou stratégie commerciale ? Un Pointilleux qui
travaille seul peut se retrouver bloqué par l’indécision.
Le conjoint Pointilleux
Un lecteur m’a écrit : « Je suis un Pointilleux et je me demande toujours
comment faire pour améliorer les choses. Ma femme me taquine et me dit
qu’elle sait que notre mariage durera, parce que j’ai dû étudier la question
avant de dire oui. Et elle a raison ! »
Je connais bien les Pointilleux, parce que mon mari, Jamie, en est un. Être
marié à un Pointilleux s’avère utile pour la Disciplinée que je suis, qui
a tendance à répondre aux attentes sans les remettre en question. Il m’arrive
même de voir des attentes là où il n’y en a pas, ou de vouloir respecter des
règles inutiles, juste parce qu’il le faut. Jamie, lui, remet toujours en
question les attentes avant d’y répondre et avec le temps, j’ai appris à en
faire de même plus souvent.
Bien que je respecte et encourage parfois cet aspect de sa personnalité,
cela a encore le don de m’exaspérer. Je préférerais parfois un peu plus de
coopération de sa part, mais je sais aussi qu’il ne cherche pas à s’opposer
à moi, il veut tout simplement savoir pourquoi il doit faire ce que je lui
demande.
Il n’y a pas longtemps, je lui ai demandé de passer prendre de la dinde
rôtie en rentrant du sport. Je sais qu’il déteste faire la queue chez le traiteur
(de façon générale, les Pointilleux détestent faire la queue). Avant de savoir
qu’il était un Pointilleux, je lui aurais envoyé un message disant : « Passe
prendre de la dinde fumée sur le chemin du retour. » Et je peux être sûre
qu’il aurait ignoré ma demande. Non pas parce qu’il s’en fiche, mais parce
qu’il se serait dit : « Pourquoi me donner la peine de faire ça ? Le frigo est
plein. Quelle perte de temps ! » Maintenant, je lui écris : « Passe prendre de
la dinde fumée sur le chemin du retour. Il faut des sandwichs pour les deux
sorties scolaires d’Eleanor cette semaine. » Il est allé acheter de la dinde.
Parfois, les salves de questions des Pointilleux peuvent donner
l’impression à leur conjoint d’être agressé au lieu d’être soutenu. Une
Pointilleuse m’a écrit :
Il faut toujours que je comprenne le pourquoi du comment, et cela pèse sur ma relation de
couple. Mon mari a l’impression de ne pas être respecté, parce qu’il doit sans cesse se justifier.
Un simple : “Chérie, tu veux bien acheter une ampoule de rechange ?” génère une dispute de
deux jours. Il n’est pas question pour moi d’aller acheter une ampoule si je ne sais pas
exactement pourquoi.

Une amie Pointilleuse est mariée à un Discipliné. « Mon mari déteste voir
les tiroirs et les portes de placards ouverts dans la cuisine. Il m’a dit :
“Établissons une règle : bien refermer les tiroirs et les portes des placards de
la cuisine.” J’ai acquiescé : “Pour un Discipliné, une fois qu’une règle est
fixée, elle sera suivie.” Mais elle a poursuivi : “Je lui ai alors demandé ce
qui lui donnait le droit de fixer une règle.” Il m’a répondu : “Accorde-moi
cette règle, et tu pourras toi aussi en fixer une.” À quoi j’ai répondu : “Je ne
veux pas fixer de règle que tu serais obligé de suivre. À quoi ça servirait ?
Et puis, pourquoi les portes des placards devraient être tout le temps
fermées ? Si tu y tiens tant, tu n’as qu’à le faire toi-même. Si cela ne me
dérange pas qu’elles soient ouvertes, pourquoi devrais-je m’en soucier ?” »
J’ai éclaté de rire : « Typique d’une Pointilleuse et d’un Discipliné ! »
J’adore voir les profils à l’œuvre !
Comme les Pointilleux accordent beaucoup de poids à leur analyse, ils
peuvent résister aux avis des « experts », ce qui peut être source de
frustration pour leur conjoint. Une lectrice m’a écrit : « Mon Pointilleux de
mari croit tout savoir sur tout, et il a souvent raison, ce qui n’arrange rien.
Si je veux consulter un conseiller fiscal, il va me dire que c’est une dépense
inutile, parce qu’il pense qu’avec un peu d’efforts, il pourra me renseigner
tout aussi bien. » Cette attitude peut finir par agacer, mais elle peut surtout
être dangereuse si un Pointilleux décide par exemple d’ignorer des
consignes de sécurité sous prétexte qu’elles ne servent à rien.
Le besoin d’avoir un maximum d’informations avant de prendre une
décision peut acculer un couple à la paralysie analytique, comme une
lectrice en témoigne :
Mon mari étant un Pointilleux, chez nous, tout reste en suspens. J’ai trouvé une école
maternelle qui semble parfaite pour notre enfant, mais mon mari n’en est pas si sûr. Nous avons
décidé de faire poser des marches en béton, mais il a remis en cause les plans de l’entrepreneur.
J’essaie de faire avancer les choses, mais il freine des quatre fers et pose tellement de questions
que je finis par laisser tomber.

Elle devrait essayer les stratégies évoquées pour débloquer les situations
de paralysie analytique, comme : fixer des dates limites, suivre les conseils
d’une autorité respectée ou limiter les sources d’information.
Comme pour tous les autres profils, les forces des Pointilleux peuvent
aussi devenir des faiblesses. Leurs conjoints ne le savent que trop bien.

L’enfant Pointilleux
Dire à un enfant Pointilleux, « Parce que je l’ai décidé », « On a toujours
fait comme ça » et « C’est comme ça, un point c’est tout », ne fera que le
braquer.
Un Pointilleux a besoin de comprendre. Si les parents d’un enfant
Pointilleux veulent le faire travailler son piano, ils devront anticiper ses
questions : « Du piano, pour quoi faire ? Pourquoi faut-il faire des
gammes ? Pourquoi tant de cours par semaine ? Pourquoi avec ce
professeur et pas un autre ? La musique, d’accord, mais pourquoi en jouer,
et pas se contenter d’en écouter ? » Un enfant Pointilleux qui comprend
pourquoi on lui demande telle ou telle chose sera plus enclin à obtempérer.
Si son besoin de comprendre n’est pas satisfait, il résistera.
Le refus de faire comme tout le monde peut irriter ses parents et ses
professeurs. L’enfant va demander : « Pourquoi je ne peux pas aller
à l’école déguisé ? Tonton Jimmy n’est pas poli avec moi, pourquoi je
devrais l’être avec lui ? À quoi ça sert d’aller à la fac ? » Un lecteur m’a
écrit : « Mon fils est un Pointilleux. Il vient d’avoir son permis. Je l’ai
surpris à conduire pieds nus après une baignade. « Chausse-toi, c’est
interdit de conduire pieds nus » lui ai-je dit (je suis un Discipliné). Il m’a
répondu : « Pourquoi ? Il n’y a aucune raison ! » (Les Pointilleux ont
vraiment beaucoup de mal avec le Code de la route.)
La soif de comprendre de l’enfant Pointilleux peut enthousiasmer ses
professeurs, car ses questions témoignent de sa motivation et poussent
l’ensemble de la classe à réfléchir, mais elle peut aussi agacer quand elle
empêche tout le monde d’avancer, sape l’autorité de l’enseignant ou pousse
à la dissipation générale. Un élève Pointilleux peut aussi rechigner devant
certaines consignes.
L’enfance est parfois une étape délicate pour les Pointilleux, parce que les
enfants doivent obéir aux adultes sans discuter. Un père m’a dit : « Mon fils
est très intelligent, mais il a de mauvais résultats scolaires. Il a d’excellentes
notes aux examens, mais refuse de faire les devoirs à la maison, parce qu’il
considère que ça ne sert à rien. »
Cela peut avoir des conséquences à long terme sur sa scolarité. Face à un
enfant Pointilleux qui refuse de répondre à une attente, il est important de
comprendre pourquoi il se braque. Alors qu’un enfant Rebelle va penser :
« Vous ne m’obligerez pas à le faire », un enfant Pointilleux attend peut-être
tout simplement d’être convaincu. Un Pointilleux se souvient :
Petit, j’avais une écriture illisible, et mes professeurs avaient l’air d’y attacher beaucoup
d’importance. J’étais un élève plutôt doué. Un jour, je me suis rendu compte que je savais
toutes les réponses des exercices et j’ai décidé que je n’avais pas besoin de les mettre par écrit.
Si les professeurs voulaient vérifier que j’avais compris, ils n’avaient qu’à m’interroger ! Mais
ils m’ont puni et traité de fainéant, de tête de mule. À aucun moment, ils ne m’ont expliqué
pourquoi j’avais tort (avais-je tort, d’ailleurs ?). Ce n’est que lorsque les exercices se sont
compliqués que j’ai ressenti le besoin de faire mes raisonnements à l’écrit pour ne pas perdre le
fil de ma pensée.

Si un enseignant avait pris le temps de chercher à comprendre son refus


des consignes et de lui donner de bonnes raisons de les respecter, ce conflit
se serait résolu plus tôt.
Il est vrai que les enfants Pointilleux ont du mal avec l’autorité. J’aime
bien trouver des exemples des quatre profils dans la vie, dans la littérature,
au cinéma ou à la télévision. En relisant Jane Eyre de Charlotte Brontë, j’ai
eu le plaisir de constater dès la première page que Mme Reed se plaint de la
nature Pointilleuse de sa nièce : « Jane, n’aime pas qu’on me questionne ! »
Quand un enfant Pointilleux remet en question des attentes ou des
contraintes, ses professeurs ou ses parents ont tout intérêt à lui fournir de
bonnes justifications. Si un élève Pointilleux demande : « Pourquoi devrais-
je apprendre l’histoire de la Mésopotamie ? Cela ne me servira jamais
à rien », il est préférable de ne pas lui répondre : « C’est au programme,
alors apprends tes leçons », mais « Ce travail sur la Mésopotamie va te
permettre d’apprendre à analyser des documents, à identifier les
informations principales, à prendre des notes et à expliquer les choses avec
tes propres mots. Ce sont des compétences qui te serviront dans toutes tes
études. »
Comme les adultes, les enfants sont sensibles aux raisons indirectes.
Pourquoi ne faut-il pas conduire pieds nus ? Pour ne pas payer d’amende ou
avoir un retrait de permis si tu te fais arrêter par la police. Pourquoi suivre
ces cours qui n’ont aucun intérêt ? Parce que nous n’avons pas les moyens
de te payer la fac et que ces cours te rendent éligible à une bourse. Pourquoi
être gentil avec l’oncle Jimmy ? Parce que les tensions familiales font de la
peine à grand-père et que tu ne veux pas lui faire de la peine.

Le patient Pointilleux
Il est crucial (bien que pas toujours possible) pour les professionnels de
santé de répondre aux questions des Pointilleux. S’ils sont convaincus, ils
suivront volontiers les recommandations médicales. Ils prendront leur
traitement, changeront leurs habitudes alimentaires et iront aux rendez-vous
de contrôle. S’ils ne sont pas convaincus, ils ne feront rien de tout ça.
Bien souvent, les médecins pensent avoir suffisamment justifié leurs
attentes, mais ils laissent des questions en suspens et de ce fait, les
Pointilleux ne suivent pas leurs recommandations. Un dentiste qui dirait :
« Vous devez vous brosser les dents au moins deux fois par jour pendant
deux minutes pour éviter la formation de tartre » pense certainement être
assez clair. Mais qu’est-ce que le tartre ? A-t-il des conséquences néfastes
sur la santé dentaire ? Pourquoi devrait-on éviter qu’il ne se forme alors
qu’il suffit d’aller chez le dentiste pour un détartrage ? Un Pointilleux bien
informé sera un Pointilleux plus coopératif.
Il est bon de noter que les Pointilleux aiment adapter les choses à leurs
besoins. Ils vont suivre des instructions, mais ils vont le faire à leur façon,
c’est-à-dire pas tout à fait comme selon la prescription. C’est pourquoi il est
important de leur expliquer pourquoi il faut suivre certaines prescriptions
à la lettre : « Ce médicament doit se prendre à l’heure des repas sinon il
provoque de fortes nausées. »
Les Pointilleux ont besoin de comprendre. Pourquoi réduire sa
consommation de sucre ? Pourquoi se lever et marcher un peu pendant les
longs trajets en avion ? S’ils font confiance à la personne qui leur donne des
conseils, ils le feront, sinon, ils s’abstiendront. Les Pointilleux ne font les
choses que s’ils ont une bonne raison de les faire et si elles leur sont
adaptées. Un ami Pointilleux m’a confié :
Quand on a appris que j’avais un diabète de type 2, ma petite amie s’est dit que j’allais avoir du
mal à changer de régime alimentaire, mais moi, je savais que j’y arriverai. Elle a trouvé que
j’avais dépassé les bornes en posant autant de questions au médecin, mais j’avais besoin
d’informations concrètes. Une fois que je suis décidé, je ne recule pas. Mais j’ai été honnête
avec le médecin, je lui ai dit : « Je vais manger comme il faut, mais je boirai six bières par
semaine. C’est comme ça que je tiendrai. »

Ce côté « tête de mule » des Pointilleux (cela peut paraître un peu dur de
ma part, mais comment voulez-vous appeler des gens qui s’accrochent
obstinément à leurs conclusions de savants du dimanche ?) se révèle
souvent en matière de santé. Cela vient d’une part de la possibilité de faire
des recherches approfondies, notamment sur des sites Internet peu fiables,
et cela répond d’autre part à leur volonté de tout accommoder à leur goût.
Certains Pointilleux ont leur propre théorie sur les causes de leurs
problèmes de santé ou sur la façon de les traiter. Mais souvent, les
professionnels de santé ne tiennent pas compte de ce qu’ils ont à dire et se
contentent de répéter leur diagnostic en se disant qu’ils finiront par se
ranger à leur savoir. Mais cela ne marche pas sur les Pointilleux. Ils feraient
mieux d’expliquer en quoi la théorie de leur patient n’est pas fondée avant
d’exposer la leur.
Le mari Pointilleux d’une amie a décidé de soigner seul son cancer, au
grand dam de sa femme et de ses médecins. Ils croyaient lui faire entendre
raison en lui répétant : « Pensez-vous en savoir plus que toute une équipe
d’oncologues ? » Mais il s’était renseigné et avait tiré ses propres
conclusions, ce qui avait plus de poids à ses yeux qu’une expertise
médicale. Pour le faire changer d’avis, ses proches auraient mieux fait
d’examiner attentivement ses arguments pour comprendre comment il en
est arrivé à ses conclusions, et lui expliquer point par point le raisonnement
du corps médical plutôt que de lui répéter simplement : « Écoute les
médecins, voyons ! »
Que ce soit dans le domaine médical ou non, les Pointilleux accorderont
plus facilement leur adhésion si on suit les penchants de leur nature :
« Essaie toujours. Tu ne t’engages à rien. Si ça marche, tant mieux, et ça ne
marche pas, tu essaieras autre chose. » Cette façon de procéder va répondre
à leur besoin de collecter des informations et de personnaliser les
approches. Les Pointilleux peuvent également suivre l’exemple d’une
personne qu’ils estiment : « Si cela marche pour elle, ça pourrait marcher
pour moi. »

Choix de carrière pour un Pointilleux


J’entends parfois dire : « Je suis journaliste, je dois donc être un
Pointilleux » ou « Les Pointilleux sont probablement destinés à être des
scientifiques ». Mais ce n’est pas aussi simple. Tous les métiers ou presque
conviennent à tous les profils, parce que de nombreux autres facteurs que
les profils contribuent au succès d’une carrière. La typologie des quatre
profils ne fait que décrire comment les gens répondent aux attentes. Elle ne
dit rien sur leurs qualités, leurs dons, leur personnalité, leur intelligence ou
leurs centres d’intérêt. J’ai une amie qui est un excellent médecin. Elle aime
faire des recherches, elle se pose des tas de questions… et c’est une
Dévouée. Elle répond volontiers aux attentes extérieures, mais elle a du mal
à répondre à celles qui la concernent seule.
Cela dit, les Pointilleux sont généralement attirés par les métiers de
l’information et de l’analyse. Ils s’épanouissent dans des domaines qui
mettent en avant la recherche. Ils aiment chercher à améliorer les systèmes,
comme l’explique un Pointilleux :
Je suis vérificateur interne dans une grande multinationale. Cela fait vingt ans que je me
demande pourquoi mon entreprise fait les choses comme elle le fait, et ce qu’on pourrait faire
pour améliorer nos méthodes de travail. J’ai gagné le respect de mes collègues en prenant
toujours le temps d’expliquer mes recommandations et en restant à l’écoute de leurs
suggestions. Je n’aurais certainement pas eu le même succès si j’avais en un autre profil.

De nombreuses professions profitent de l’attachement des Pointilleux au


raisonnement et à l’optimisation, comme en témoigne l’un d’eux :
Je suis un POINTILLEUX/Discipliné. Je travaille à l’aménagement de l’espace urbain d’une
petite municipalité. Je m’occupe plus particulièrement des programmes fonciers. Je m’assure
que les projets de construction respectent les normes d’urbanisme de la ville (le bâtiment doit
faire tant de mètres de haut, être à telle distance de la rue, etc.) Beaucoup de critères sont sujets
à interprétation. Ma nature Pointilleuse me permet de travailler en bonne intelligence avec les
promoteurs : je ne leur impose que des choses pratiques et adaptées au site ; je leur explique
comment répartir leur budget. Mon collègue en revanche est un Discipliné. Il s’en tient
strictement aux règles, qu’elles soient applicables ou non. Son manque de souplesse crée des
tensions entre les développeurs, nos responsables et le conseil municipal.

Les Pointilleux seront à l’aise dans des environnements qui encouragent


et récompensent la curiosité, avec des collègues qui acceptent d’être remis
en question. Ils ne s’entendront pas avec des gens qui coupent court au
dialogue en disant : « Parce que j’en ai décidé ainsi » ou « Parce qu’on
a toujours fait comme ça ».
Autant que possible, les Pointilleux devront se tenir à distance de
collègues ou supérieurs qui se sentent agressés ou remis en cause par un
questionnement permanent. Un Pointilleux se souvient : « Je travaillais pour
un patron qui ne jurait que sur l’esprit d’équipe. Je considère que j’ai un
bon esprit d’équipe, et mon rôle était de m’assurer qu’on faisait de notre
mieux, de la meilleure façon possible. Mais chaque fois que je posais une
question, il me regardait comme le mouton noir du groupe. »
Comme les Pointilleux ont besoin de comprendre pourquoi ils font
quelque chose, ils vont chercher à être leur propre patron. Ils pourront ainsi
se poser les questions qu’ils voudront et prendre leurs propres décisions.
Comme les Pointilleux détestent ce qui est arbitraire, irrationnel ou
inutile, ils ont intérêt à en tenir compte dans leur choix de carrière, quel que
soit le domaine dans lequel ils se lancent. Les Pointilleux qui ont tendance
à trop réfléchir feraient bien de chercher un métier avec des échéances qui
forcent à l’action, ou à demander à leurs collègues ou patron de les aider
à fixer des limites à leur délibération.

EN RÉSUMÉ : INTERAGIR AVEC UN POINTILLEUX


Ils remettent en question toutes les attentes et ne répondent qu’à celles qu’ils jugent justifiées, ce qui
fait qu’ils peuvent ne répondre qu’aux attentes intérieures.
Ils accordent de l’importance à la recherche et à l’information.
Ils ne prennent de décision qu’en connaissance de cause et pour de bonnes raisons, parfois il suffit
que cela importe à quelqu’un.
Ils ne suivent les recommandations des « autorités » que s’ils croient en leur expertise.
Ils se fient à leur propre jugement, même s’il va à l’encontre de la parole d’experts qui (soi-disant) en
savent plus qu’eux.
Ils posent sans cesse des questions, ce qui peut passer pour de la méfiance ou de l’opposition.
Ils détestent l’arbitraire comme le fait de devoir prendre des bonnes résolutions à la nouvelle année.
Ils n’aiment pas être remis en question ; leurs décisions sont mûrement réfléchies, alors ils trouvent
ennuyeux ou insultant d’avoir à se justifier.
Ils ont du mal à déléguer la prise de décision, parce qu’ils craignent que les autres agissent de façon
irréfléchie.
LE DÉVOUÉ
« Tu peux compter sur moi, et je compte sur toi pour
compter sur moi »

« Tu peux compter sur moi, et je compte sur toi pour compter sur
moi. »
« En aidant les autres, je m’aide moi-même. »
« Si je dois, je fais ; si je veux, je ne fais pas. »

« Je ferai tout ce que tu veux… jusqu’à ce


que j’arrête de le faire. »
« On a besoin d’un garant extérieur… même pour rester en
tête à tête avec soi-même. »

« Accepte d’en faire moins. »


« Je peux faire beaucoup, mais pas longtemps. »

« Aime-toi comme tu aimes ton prochain. »


« En quoi puis-je t’aider ? »
« Je ne veux pas, mais je le ferai quand même. »

« Tous pour un, et un pour tous. »


7
Comprendre le Dévoué
« Je ferai tout ce que tu veux… jusqu’à ce que
j’arrête de le faire. »
Forces • Faiblesses • Les variations au sein du profil • Comment les Dévoués peuvent répondre aux
attentes intérieures en se fixant des contraintes extérieures même quand il n’y en a pas • Comment
les Dévoués peuvent gérer les avantages et les inconvénients de leur profil • Comprendre et
anticiper la rébellion d’un Dévoué

Tous les jours, on doit faire face à des montagnes d’attentes – celles que
les autres nous imposent (ou essaient de nous imposer) et celles que nous
nous imposons (ou essayons de nous imposer) à nous-mêmes.
Les Dévoués répondent volontiers aux attentes imposées par les autres,
mais ils ont du mal à respecter celles qu’ils veulent se donner. En identifiant
le profil Dévoué, j’ai pu répondre au problème de mon amie qui voulait se
remettre à la course à pied et qui disait : « Avant, je ne manquais aucun
entraînement. Je ne comprends pas pourquoi je n’arrive pas à m’y
remettre. » Quand elle avait un entraîneur et une équipe qui comptaient sur
elle, quand elle devait répondre à des attentes extérieures, elle n’avait aucun
mal à être assidue aux entraînements ; maintenant qu’elle doit se motiver
toute seule, cela ne suffit plus.
Les Dévoués ont besoin de rendre des comptes. Au saut du lit, la
première chose qu’ils se disent, c’est : « Que dois-je faire, aujourd’hui ?
Pour qui ? » Quand l’attente vient de l’extérieur – d’un patron, client,
membre de la famille, médecin, entraîneur, groupe de soutien, collègue, etc.
– les Dévoués répondent infailliblement. En général, ils respectent les
délais, tiennent leurs promesses et vont au bout de ce qu’ils font pour les
autres.
En revanche, ils ont des difficultés à faire des choses pour eux. Pour les
Dévoués, ce sont les attentes intérieures qui posent problème. Quelle que
soit leur volonté d’atteindre l’objectif qu’ils se sont fixé – faire du sport,
prendre des cours du soir, créer leur propre entreprise – ils vont presque
inévitablement échouer. C’est dur à dire, mais c’est ainsi.
Heureusement, il est facile d’y remédier… une fois que le Dévoué sait
comment s’y prendre. Alors, que doit faire un Dévoué pour répondre à une
attente intérieure ? Créer des contraintes extérieures. Une fois qu’il
a compris que ce qui lui manquait, c’était un garant extérieur, la solution est
assez simple et facile à mettre en place.
Pour cette raison, les Dévoués sont ceux qui ont le plus à gagner
à connaître leur profil. Plus que les Disciplinés, les Pointilleux et les
Rebelles, le cadre des quatre profils va aider les Dévoués à trouver des
stratégies pour s’accommoder des inconvénients de leur nature. Cela
permettra également à leur entourage de comprendre comment les
influencer efficacement.
Ce qui n’est pas rien, car de tous les profils, celui des Dévoués est le plus
répandu, chez les hommes comme chez les femmes.

Forces (et faiblesses)


Le monde repose sur les Dévoués. Dans quelque milieu que ce soit, leur
profil est le plus représenté, et c’est sur eux que l’on compte le plus.
Toujours prêts, ils sont disponibles 24 heures sur 24, ils respectent les
délais, ils assument leurs responsabilités, ils font du bénévolat, ils rendent
service. Que ce soit au travail ou à la maison, on peut en général compter
sur la coopération des Dévoués.
Je préparais mon intervention à une conférence sur les quatre profils
quand l’organisateur de l’événement a insisté pour que j’inclue des
diapositives dans ma présentation, ce que je ne fais en général jamais. « Je
ne sais pas comment faire ça, ai-je avoué.
– Envoyez-moi votre texte, je le ferai pour vous.
– Mmmm, ai-je fait dubitative.
– Je suis un Dévoué, a-t-il précisé.
– Oh, dans ce cas, je vous remercie. Pourriez-vous me renvoyer le tout
vendredi ?
– Bien sûr. »
Nous avons tous les deux ri.
Les Dévoués excellent à répondre aux demandes des autres et à tenir les
délais qu’on leur impose. Par leur dévouement, ils font de très bons leaders,
équipiers, amis et proches. Les Dévoués sont les piliers de toutes les
communautés. S’ils devaient se définir, ils pourraient dire : « Je fais passer
mes patients, mes clients, mes collègues et ma famille avant moi. »
Si les Dévoués devaient être un groupe sanguin, ils seraient O, donneurs
universels. Les Dévoués s’entendent bien avec les trois autres profils.
Quand les Dévoués peuvent s’appuyer sur des contraintes extérieures
pour accomplir leur attente intérieure, ils ne ressentent aucune frustration.
Souvent leur environnement, notamment le lieu de travail, leur fournit ces
contraintes. Quand ce que les autres attendent d’eux correspond à ce qu’ils
attendent d’eux-mêmes, tout va bien.
Ma mère en est le parfait exemple. C’est une Dévouée qui trouve
toujours, de son fait ou par chance, les contraintes extérieures nécessaires
pour accomplir ses objectifs personnels. Depuis des années, elle fait de
l’exercice quotidiennement en allant marcher avec une de ses amies et
voisine. Elle adore lire et fait partie d’un groupe de lecture. Les Dévoués
comme ma mère ne sont pas déçus par leur difficulté à répondre à leurs
attentes intérieures – certains ne doivent même pas s’en rendre compte –
parce qu’ils se sont créé un cadre de vie qui leur permet de faire les choses
sans trop y penser.

Faiblesses (et forces)


Malgré toute leur bonne volonté, s’ils n’ont pas de contraintes extérieures,
les Dévoués vont échouer à répondre à leurs attentes personnelles. Dans
l’échantillon représentatif de la population américaine que j’ai étudié, plus
des deux tiers des Dévoués ont répondu que ce qui les énervait le plus chez
eux était qu’ils n’avaient aucun mal à prendre du temps pour les autres,
mais pas pour eux.
C’est pour cela qu’ils peinent à travailler sur leur thèse de doctorat,
à écrire un script spéculatif, à assister à des événements de réseautage
d’affaires, à faire la révision de la voiture ou même à s’offrir un massage. Et
cela peut être très handicapant. Un Dévoué qui aimerait par exemple lancer
sa start-up, changer de carrière ou arrêter de grignoter pourrait se désespérer
de son inaptitude à aller au bout de ses objectifs. Un Dévoué résume cela
très bien : « Les promesses que l’on se fait peuvent être brisées, celles que
l’on fait aux autres ne devraient jamais l’être. »
Les Dévoués dépendent de garants extérieurs pour répondre aux attentes,
qu’elles soient intérieures ou extérieures. Sans garant, ils peinent à se
motiver.
Quand le poids des attentes extérieures devient trop lourd, ils entrent en
rébellion : ils se donnent encore et encore jusqu’au point de saturation. Dès
lors, ils refusent tout en bloc. Leurs rébellions peuvent être discrètes et
symboliques ou spectaculaires et destructrices.
Si les Dévoués ont besoin de garants extérieurs pour répondre aux
attentes, ils ont aussi besoin de se préserver pour éviter de saturer et de
craquer.

Variations au sein du profil


Les Dévoués répondent tous aux attentes extérieures, mais chacun le fait
à sa façon.
Comme les autres profils, le profil Dévoué en recoupe deux autres : celui
des Disciplinés (ils répondent aussi aux attentes extérieures) et celui des
Rebelles (ils résistent aussi aux attentes intérieures).
On pourrait penser que les DÉVOUÉS/Disciplinés, enclins à répondre
à toutes les attentes, auront le plus de pression sur les épaules et seront les
plus exposés au surmenage et à la frustration, mais ce n’est pas forcément le
cas. Ils sont en général conscients de leurs capacités et de leurs limites. Ils
savent aussi ce qu’ils veulent et sont capables de dire non comme les
Disciplinés.
Ma sœur Elizabeth est une DÉVOUÉE/Disciplinée. C’est une Dévouée
qui répond volontiers aux attentes extérieures et qui a du mal à répondre
à ses propres attentes. Elle est néanmoins capable de dire : « Non, désolée,
je ne peux pas. » Elle déteste refuser son aide, mais quand elle sait qu’elle
ne pourra pas tenir sa promesse, elle n’a pas trop de mal à dire non. Elle sait
que si elle dit oui à cette personne, elle devra dire non à quelqu’un d’autre.
Et c’est ce qui lui permet de refuser. Ni elle ni moi n’avons beaucoup de
souvenirs de crise de rébellion de sa part. Je me rappelle cependant la fois
où elle s’était arrêtée au supermarché pour acheter un paquet de chips
qu’elle a mangé sur le parking. « Je n’avais jamais fait ça avant, m’a-t-elle
confié. J’avais l’impression de faire quelque chose d’illégal. »
Les DÉVOUÉS/Rebelles répondent aux attentes extérieures, mais avec
moins de complaisance. Ils ont l’impression que les autres leur forcent la
main et ils se braquent face aux contraintes, mais ils ont du mal à faire les
choses d’eux-mêmes. Leur nature Dévouée fait qu’ils auront des difficultés
à dire non, mais ils risquent de développer une certaine amertume, qui
conduira à la saturation et à la rébellion. Ils répondent aux attentes, mais
jusqu’à un certain point (ce qui peut arriver très vite). Passé ce cap, ils se
bloquent. Comme les Rebelles, ils n’aiment pas forcément ce qui est
routinier, programmé et trop structuré.
Un lecteur a écrit :
Je me sens obligé de répondre aux attentes des autres, et au fond, je leur en veux. Je trouve ça
particulièrement fatigant au travail. Je me rebelle intérieurement chaque fois que je reçois un
mail qui me demande de faire quelque chose ou de planifier un projet, mais je me sens quand
même obligé de le faire. Je sais qu’avoir des comptes à rendre m’aiderait à adopter les
habitudes que je voudrais avoir, mais la perspective de créer un système de contraintes
extérieures me hérisse la peau. Je déteste qu’on me dise quoi faire.

Certains Dévoués se décrivent comme des gens qui aiment faire plaisir
aux autres, mais ils ne se sentent pas tous « obligés » de la même façon.
Certains se sentent obligés d’en faire beaucoup, d’autres très peu. Faut-il
envoyer des cartes de remerciements manuscrites ? Veiller tard les soirs de
bouclage au travail ? Accepter de faire une tâche dont personne ne veut ?
Certains Dévoués se sentent obligés de le faire, d’autres pas.
Certains se laissent facilement happer par les attentes, comme ce lecteur
qui m’a écrit : « Vous savez que vous êtes un Dévoué quand la première
chose qui vous vient en tête, c’est : “Fais le test des quatre profils, il faut
aider Gretchen à rassembler des données.” »
Les attentes ont sur eux un tel pouvoir qu’ils se sentent parfois obligés de
faire des choses que personne ne leur demande. « Tout le monde s’attend
à ce que j’intègre des diapos dans ma présentation. » (Ah bon ?) « On ne
peut pas laisser la vaisselle dans l’évier toute une nuit. » (Qui le dit ?)
« Tout le monde compte sur moi pour organiser la conférence. »
(Vraiment ? Quand bien même ce serait le cas, qu’est-ce que cela peut
faire ?)
Ces attentes extérieures que personne ne leur impose, ils se les imposent
eux-mêmes. Mais encore une fois, la motivation, la pression vient de
l’extérieur. Une Dévouée l’explique :
Si je pense que les autres attendent quelque chose de moi, j’aurais tendance à le faire. Par
exemple, je me suis chargée plusieurs fois de sortir les ordures, parce que mon mari était en
retard au travail, et c’est devenu une de mes tâches… non pas parce que mon mari s’attend à ce
que je le fasse, mais parce que je crois qu’il s’y attend… même si je sais que ce n’est pas le
cas ! C’est pareil pour le yoga… Je me suis forcée à y aller plusieurs fois, et depuis, je suis
assidue, parce que sinon, je me dis que la prof sera déçue.

Elle ne fait pas les choses, parce qu’elle en a envie, mais parce qu’elle se
sent obligée par les autres, même quand ils n’attendent rien d’elle.
Tous les Dévoués ne sont pas aussi sensibles à la pression extérieure.
S’ils ne risquent pas de sanction, ils ne s’en inquiètent pas nécessairement.
Leur promptitude à répondre aux attentes tient également à leurs degrés
d’énergie. Les Dévoués très énergiques répondront plus facilement aux
attentes, tandis que les Dévoués peu énergiques atteindront plus rapidement
le point de saturation.

Comment les Dévoués peuvent répondre aux attentes


intérieures en se fixant des contraintes extérieures
Que peuvent faire les Dévoués pour atteindre un objectif qu’ils se sont
fixé ? C’est simple et relativement facile, du moins en théorie. Pour
répondre à des attentes intérieures, les Dévoués doivent créer un cadre de
contraintes extérieures. Ils ont besoin de garants, d’échéances précises, de
sanctions en cas de retard ou d’accompagnement. Ils doivent avoir des
comptes à rendre pour tenir les promesses qu’ils se font à eux-mêmes. Les
Dévoués ne peuvent compter sur leur seule volonté ou sur un raisonnement
infaillible. Il leur faut une motivation extérieure.
Ce n’est qu’avec le sentiment d’avoir des contraintes extérieures qu’ils
peuvent agir, comme l’explique très bien une lectrice :
J’ai du mal à faire les tâches quotidiennes quand je suis seule, mais il m’arrive souvent de
garder les cinq enfants de ma sœur ou les six enfants de mon frère le temps d’un week-end pour
qu’ils puissent partir en amoureux. Je passe alors en mode automatique et gère sans problème le
coucher, les repas, la messe du dimanche, etc. Je me suis demandé pourquoi j’arrivais plus
facilement à me couler dans la routine du quotidien quand j’avais des enfants à charge.
C’était déjà la même chose quand, à l’âge de 21 ans, j’ai servi dix-huit mois comme
missionnaire pour mon église. On nous attribuait un binôme pour toute la durée de la mission et
nous devions rester ensemble 24 heures sur 24, à portée de vue l’un de l’autre. Notre emploi du
temps était strict et détaillé. Nous devions nous lever tôt, faire nos dévotions, un peu d’exercice
et nous préparer à travailler de 9 heures 30 à 19 heures 30. Je me suis épanouie dans ce cadre.
On ne choisissait pas d’être en binôme et cela impliquait de faire la même chose en même
temps, tous les jours. Nous pouvions et devions compter l’un sur l’autre pour respecter les
consignes.
Cela m’a permis d’adopter de bonnes habitudes de sommeil, d’alimentation, de dévotion,
d’exercice et de travail… Il m’arrive de regretter de ne pas avoir un binôme à temps complet
avec qui travailler et avec qui partager des objectifs.
La semaine dernière, j’avais des amis à la maison. Je me suis levée tôt tous les jours pour
préparer les repas et faire les tâches ménagères. Mes invités sont partis ce matin et j’étais
contente de voir ma cuisine impeccable malgré ces jours bien chargés. Après le déjeuner, j’ai
tout laissé en plan, et je me suis surprise à me dire : « Ce n’est pas grave, il n’y a personne. »
Pour me forcer à nettoyer la cuisine, j’ai fait comme si mes neveux et nièces allaient venir me
rendre visite cet après-midi.

Le secret du succès ? Trouver la bonne contrainte. Et elle n’est pas la


même pour tous les Dévoués.
Pour certains, il suffit de peu : un mail autogénéré, une application qui
rappelle ce qu’il reste à faire ou la sonnerie d’un bracelet d’activité.
D’autres en revanche auront besoin d’un garant en chair et en os, comme
en témoigne un Dévoué : « J’ai dit à tout le monde que j’avais arrêté le
sucre, et je n’ai aucun mal à ne pas en prendre quand je suis entouré. La
seule fois où j’ai craqué, c’était un après-midi où je me suis retrouvé tout
seul à la maison. » Pour un Discipliné, un Pointilleux ou un Rebelle, être
seul à la maison n’aurait rien changé, mais pour un Dévoué, cela a été
déterminant.

Un Dévoué a analysé ce qui marchait et ce qui ne marchait pas pour lui :


Sachant que j’ai besoin de contraintes extérieures, j’ai renoncé à faire de la musculation à la
maison et je me suis inscrit à des cours collectifs. Comme ils sont très demandés, le coach nous
a demandé de nous inscrire en ligne pour chaque session. Toute annulation doit être signalée
deux heures avant le début du cours sous peine d’une pénalité de 5 dollars. Ce n’est pas tant la
pénalité de 5 dollars qui me pousse à ne pas manquer le cours que l’idée de prendre la place de
quelqu’un qui aurait pu s’inscrire à ma place.

Je suis frappée de voir le nombre de Dévoués que la perspective de perdre


de l’argent ne motive pas. Une amie m’a avoué : « J’ai toujours voulu
essayer le yoga, et pendant des années je me disais qu’il fallait que je
m’inscrive à un cours. J’ai fini par le faire… et j’y suis allée une fois. Ce
qui m’a fait un cours de yoga à 300 dollars. » L’argent dépensé ne l’oblige
pas, mais peut-être parce que c’est le sien. S’ils gaspillaient l’argent des
autres, ces Dévoués auraient peut-être l’obligation de rendre des comptes.
Pour s’obliger à faire quelque chose, les Dévoués peuvent se fixer eux-
mêmes des contraintes extérieures : des listes, des calendriers, des agendas
sur leur téléphone. Vus de l’extérieur, ces Dévoués pourraient passer pour
des Disciplinés, parce qu’ils semblent respecter leurs attentes intérieures.
Mais en fait, ils le font uniquement parce qu’ils ont l’impression de
respecter des contraintes extérieures.
Certains Dévoués arrivent même à se créer des contraintes extérieures en
pensant à eux-mêmes à la troisième personne. « Je ne me sens pas vraiment
obligé de faire des choses pour moi sur le moment, mais je culpabilise
à l’idée de manquer aux besoins de mon futur-moi. Je déteste aller au sport,
mais mon futur-moi va regretter de ne pas avoir été assidu… même si mon
moi de maintenant n’aime pas ça. »
Cela dit, la plupart des Dévoués peinent à respecter des contraintes
imaginaires. Ils ont besoin d’en avoir de vraies. Ils ont besoin de pouvoir
s’y fier vraiment, comme l’explique une Dévouée :
J’ai du mal à répondre aux fausses contraintes. Si une personne se propose comme référant pour
m’aider à atteindre un objectif, je sais que je n’ai aucune réelle obligation envers elle. Quand
j’étais en doctorat, je voyais régulièrement ma directrice de thèse, mais je n’avançais pas pour
autant dans la rédaction de mon mémoire. Je prenais du retard et cela la désolait, mais je savais
que cela n’aurait aucune conséquence sur sa carrière. Il n’y avait que moi qui en pâtissais
vraiment. La seule chose qui m’a fait travailler, c’est de trouver un autre doctorant ayant le
même problème de procrastination que moi. Nous comptions l’un sur l’autre. Je savais que si je
n’assurais pas ou si je manquais une séance, mon binôme perdrait toute motivation et arrêterait
de travailler.
Certains Dévoués particulièrement introvertis préfèrent les contraintes
impersonnelles, comme les notifications d’une application ou les mails d’un
coach rémunéré.
Pour certains, les incitations sont plus efficaces que des rappels à l’ordre
ou les contraintes trop strictes, qui auraient tendance à les pousser au point
de rupture, et donc, à la rébellion. Ces Dévoués sont plus sensibles aux
encouragements et aux éloges. L’un d’eux a écrit : « Quand je demande
à quelqu’un de superviser mes efforts, j’ai l’impression d’être à sa merci,
mais quand je demande qu’on m’encourage, je me sens soutenu et fort. Les
encouragements sont moins invasifs. »
Se pose alors la grande question : comment les Dévoués peuvent-ils se
responsabiliser ?
En ayant un garant
Les Dévoués peuvent faire équipe avec un binôme qui leur servira de
garant : un camarade de classe, un coach, un entraîneur, un assistant
médical, un parent ou un ami. Une étude a montré que les personnes
participant à un programme de perte de poids avec un binôme ou un
référent avaient plus de résultats que les personnes l’entreprenant seules.
Certains Dévoués disent utiliser leurs enfants pour se responsabiliser.
Selon une étude, grâce à un groupe d’enfants entraînés comme référents,
leur mère perdait plus de poids et faisait plus d’activités physiques que les
mères du groupe de contrôle.
Malheureusement, les binômes informels ne sont pas toujours fiables. Il
suffit qu’ils ne soient plus eux-mêmes motivés, qu’ils soient distraits ou
qu’ils ne veuillent plus jouer au garant, et le Dévoué se relâche aussitôt. Un
auteur s’en désole : « Je suis très déçu quand mon binôme d’écriture
m’avoue ne pas avoir travaillé à son roman, parce que du coup, j’ai
l’impression que je n’ai pas besoin d’écrire non plus. »
Il arrive aussi que les Dévoués cherchent à recruter leurs proches comme
garants, et qu’ils se heurtent à un refus catégorique. Les Disciplinés, par
exemple, rechignent à réclamer des comptes à qui que ce soit, comme cette
lectrice :
« Mon mari me désespère. Il dit toujours qu’il veut retourner à l’école, trouver un nouvel
emploi, etc., mais il ne fait rien. Qu’il ne compte pas sur moi pour le motiver ! Si c’est vraiment
ce qu’il veut, il n’a qu’à le faire. Qu’attend-il ? C’est sûr qu’il passerait plus probablement
à l’action si je l’y poussais… »

Son mari accepterait sans doute volontiers son aide comme garant, mais
c’est ce rôle qu’elle refuse de tenir.
Comme ce n’est pas toujours facile de trouver un garant fiable parmi ses
amis et sa famille, les Dévoués ont peut-être intérêt à se tourner vers des
professionnels, coachs personnels et autres conseillers pour se fixer des
objectifs concrets, poser des échéances et superviser leurs progrès. Étant
payés pour le faire, ils ne pourront pas se défausser. Cela a un coût, bien sûr,
mais pour un Dévoué, c’est peut-être le prix à payer pour se réaliser
pleinement.
En faisant partie d’un groupe
Ceux qui ne veulent pas engager un professionnel ou s’en remettre à un seul
garant peuvent très bien créer ou joindre un groupe de soutien. Cela peut
être des amis, de la famille, des collègues ou de parfaits étrangers ayant la
volonté de se responsabiliser les uns les autres, comme en témoigne le
succès des Alcooliques Anonymes, Weight Watchers et autres groupes
d’études universitaires : les membres se motivent entre eux, se soutiennent,
s’encouragent et s’échangent des idées.
Pour la plupart des Dévoués, rien ne vaut le face-à-face, mais quand cela
n’est pas possible, la technologie peut prendre le relais. Il existe une
myriade de plateformes, d’applications et de groupes de responsabilisation
en ligne, y compris mon application Better (en anglais), qui facilite la
création de ce genre de groupes. La responsabilisation virtuelle est moins
coercitive, mais plus commode.
Dans ces groupes, les Dévoués doivent cependant faire attention à ne pas
se laisser emporter par les attentes des autres. Un lecteur m’a confié :
« Avant de me rendre compte que j’étais un Dévoué, je passais un temps
fou à gérer ces groupes. J’ai fini par saturer et tout rejeter en bloc. Chaque
profil a ses raisons de joindre un groupe de soutien, les Dévoués doivent
faire attention aux gens avec qui ils vont former ces groupes. »
Par un client ou un employé
Par définition, les clients imposent de respecter des engagements, comme
l’explique un Dévoué : « Je remettais sans cesse à plus tard la création
d’une formation en ligne pour accompagner mon podcast sur l’édition
à compte d’auteur. Dans mon dernier épisode, j’ai offert un abonnement
gratuit aux 25 premiers auditeurs qui en feraient la demande. Comme j’ai
reçu des demandes, je suis maintenant obligé de créer cette formation. »
Il en est de même pour cet autre Dévoué qui raconte : « Je n’invitais pas
les gens chez moi, parce que c’était le bazar. Alors j’ai inversé la situation :
j’ai invité des gens, et ça m’a forcé à faire le ménage. Je m’étais rendu
compte que je fonctionnais comme ça avant même de lire votre livre, mais
je croyais que c’était la honte qui me motivait. Grâce à vous, je sais que
c’est une question de responsabilisation. »
Une amie m’a dit que sa mère, une Dévouée, s’était forcée à faire de
l’exercice en devenant elle-même prof de fitness. J’ai effectivement
rencontré de nombreux Dévoués qui ont utilisé leur travail ou le bénévolat
comme stratégie de responsabilisation.
Inversement, pour s’engager, ils peuvent engager quelqu’un. « Engager
une aide est une façon pour moi de ranger le cellier, m’occuper du
jardin, etc. Cela m’oblige à fixer une date et donc à dégager du temps pour
le faire. J’aurais moins tendance à annuler si c’est quelqu’un que je paie
plutôt que si c’était un membre de ma famille. »
Au profit des autres
Souvent, les Dévoués arrivent à faire des choses pour les autres qu’ils ne
feraient pas pour eux-mêmes. Ils peuvent donc se motiver en se disant que
cela profitera à d’autres au lieu de se concentrer sur la valeur intrinsèque de
ce qu’ils veulent faire. De nombreux Dévoués m’ont confié avoir fini par
divorcer pour le bien de leurs enfants.
Un lecteur m’a dit : « Je gère une entreprise, et pour me responsabiliser,
je lie mes engagements personnels à mes obligations professionnelles : je
dois dormir suffisamment pour être efficace au travail, faire du sport
régulièrement pour être plus énergique et perdre moins de temps chez le
chiropraticien. »
Une lectrice m’a écrit : « Même si cela va à l’encontre de ma fibre
féministe, je prépare tous les jours un déjeuner à emporter à mon
compagnon (et à moi-même au passage), parce que je n’aurais jamais réussi
à en faire une habitude s’il ne comptait pas sur moi. »
Le besoin ou l’envie d’être un modèle exemplaire pour les autres peut
également pousser les Dévoués à répondre à une attente. L’un d’eux
a trouvé une solution originale : « J’ai instauré une règle à la maison :
quand je suis sur mon téléphone, les enfants ont le droit d’être sur les
leurs. »
Les Dévoués ne manquent pas d’ingéniosité pour trouver des façons de
faire du bien aux autres… pour leur propre bien. « Ma femme adore faire du
sport. Pas moi. On s’est mis d’accord : elle ne peut faire du sport que si j’ai,
moi-même, fait une séance la veille. Je me sens coupable de la priver de son
plaisir. » « Ma belle-sœur et moi avons dressé une liste de bonnes habitudes
que nous avons décidé d’adopter. Si nous les tenons, nous nous offrons une
journée de spa. Nous sommes toutes les deux des Dévouées, et l’idée est de
se responsabiliser l’une envers l’autre. Si je craque, elle perd une journée de
spa, et inversement. Nous savons pertinemment qu’aucune de nous ne fera
défaut à l’autre. »
C’est parfois en se projetant dans l’avenir que les Dévoués se
responsabilisent. Pendant longtemps j’étais perplexe d’entendre : « Je tiens
un journal que mes enfants liront après ma mort » ou « J’entretiens ce jardin
pour mes enfants plus tard ». Je me disais que ces enfants n’auraient peut-
être pas envie de lire la vie de leur père par le menu détail ou qu’ils ne
vivraient certainement pas dans cette maison, malgré son beau jardin.
Maintenant, je comprends en quoi cela peut être une bonne stratégie pour
les Dévoués.
La plupart des Dévoués ont du mal à dire non, même s’ils sont par
ailleurs débordés. Pour ne pas céder systématiquement, ils peuvent se
rappeler que dire non à quelqu’un leur permettra de dire oui à quelqu’un
d’autre. « À mon travail, les gens restent toujours très tard le soir, mais j’ai
eu une discussion avec ma famille, et nous aimerions bien dîner ensemble
plus souvent. Maintenant, j’arrive à dire non à mon équipe pour ne pas
décevoir ma femme et mes enfants. »
Un grand professeur, qui acceptait de donner trop de conférences à son
goût, a réussi à décliner les demandes en se disant : « En refusant de faire le
discours inaugural de cet événement, je laisse la possibilité à quelqu’un
d’autre de prendre la parole. »
Quand la Disciplinée que je suis entend : « Je me suis rendu compte que
je devais faire ça pour être un meilleur parent/employé/ami », j’ai envie
d’objecter : « Non, fais-le pour toi-même ! » Mais pour les Dévoués, c’est
parfois le seul moyen de faire, en fin de compte, des choses pour eux-
mêmes.
D’autres stratégies de responsabilisation
J’admire la créativité dont font preuve les Dévoués pour trouver des
stratégies de responsabilisation. À la fin d’une lecture, un jeune homme m’a
dit : « Je fais du sport avec un ami, et à la fin de chaque séance, chacun
repart avec les baskets de l’autre. Comme ça, si je ne vais pas à la salle de
sport, mon ami ne peut pas s’entraîner. » L’astuce que je préfère vient d’un
lecteur : « Je veux me lever tôt, mais je vis seul. Alors, j’ai créé un post
Facebook très embarrassant qui s’affichera automatiquement si je ne le
désactive pas avant 8 heures du matin. »
Quel que soit l’objectif que veut se fixer un Dévoué, quel que soit son
tempérament, il existe un moyen de l’y engager. Un professeur de musique
m’a écrit : « J’ai plein d’astuces pour aider mes élèves Dévoués à travailler
assidûment : faire partie d’un groupe ou d’un orchestre (et cela marche
particulièrement bien si l’élève a une place spéciale, comme la clarinette
basse dans un quartet), devenir tuteur d’un musicien en herbe, organiser des
sessions de travail avec un binôme en faisant en sorte de pénaliser son
partenaire en cas d’absence, ou faire un pacte avec un proche le privant
d’une activité auquel il tient si le Dévoué ne travaille pas. »
Je ne le répéterais jamais assez : pour répondre à une attente intérieure, le
Dévoué doit trouver une source de motivation extérieure.
Prenez par exemple William Shawn, le rédacteur en chef mythique du
New Yorker, qui apparaît clairement comme un Dévoué dans la biographie
de Lillian Ross, Here But Not Here.
Shawn était un rédacteur en chef important et estimé qui vivait d’un côté
avec sa femme et ses trois enfants, et d’un autre côté avec sa maîtresse
Lillian. Cela a duré 40 ans et sa femme était au courant.
D’un point de vue extérieur, il avait la vie qu’il voulait. Lillian
a cependant révélé que Shawn se sentait prisonnier de son rôle de rédacteur
en chef et qu’il aurait aimé écrire lui-même, mais il se sentait obligé
d’assumer ses responsabilités, parce que : « Personne n’aurait pu faire
tourner ce magazine… Je ne pouvais quand même pas laisser tomber tout le
monde. » Il avait confié à sa maîtresse : « J’ai vécu la vie d’un autre. » Bien
qu’ils aient été passionnément amoureux, il a partagé son temps en deux.
Lillian Ross a expliqué : « J’étais d’accord pour qu’il reste avec Cecile…
Elle voulait qu’il reste quoi qu’il en soit. »
Comment William Shawn aurait-il pu avoir la vie qu’il voulait vraiment ?
Il aurait pu signer un contrat d’écriture avec une maison d’édition qui lui
aurait fixé une date de remise du manuscrit. Il aurait pu donner une chance
à ses collaborateurs de faire leurs preuves en leur délégant une partie de ses
responsabilités. Il aurait pu demander à sa maîtresse de l’aider à divorcer, et
ils l’auraient fait ensemble.
Quand il n’y a plus de garant
Quand on parle de responsabilisation, j’ai souvent entendu dire que les
institutions autoritaires comme l’armée annihaient tout libre arbitre. Dans
son autobiographie, World Within World, le poète Stephen Spender
observe : « Comme c’est le cas pour la majorité des soldats, l’armée l’a
discipliné en brisant toute aptitude à l’autodiscipline. En dehors de l’armée,
il semblait n’avoir aucune volonté, aucun objectif dans la vie, parce qu’il
avait été formaté par les sanctions et les instructions. » Je ne suis pas
d’accord avec son analyse de la dynamique militaire. Je pense qu’en
imposant un cadre très strict de contraintes, une institution ne va pas casser
la volonté des Dévoués, elle va simplement leur donner l’occasion de ne pas
avoir à en trouver par eux-mêmes. Dans la vie de tous les jours, la plupart
des Dévoués se rendent compte qu’ils ont besoin de contraintes extérieures
pour réussir. Quand c’est une institution qui fournit ces contraintes, les
Dévoués n’ont plus besoin de s’en inventer. En quittant ce cadre, ils sont
effectivement un peu perdus, mais ce n’est pas parce que leur libre arbitre
a été réduit à néant.
Se libérer de toutes contraintes – imposées par un travail, un programme
d’entraînement, un ordre religieux ou l’école – peut être risqué pour les
Dévoués. Si tout se passe bien dans un cadre responsabilisant, ils peuvent se
retrouver paralysés, sans trop savoir pourquoi, quand ces contraintes
s’évanouissent. Un Dévoué témoigne : « Dans mon ancien travail, j’étais
responsable d’une grosse unité. J’avais la réputation de pouvoir tout
faire. Quand je me suis mis à mon compte, je n’ai eu plus personne sous ma
responsabilité et j’ai commencé à avoir du mal à aller au bout des choses. »
De même, une amie enseignante m’a dit : « Certaines écoles privées
donnent des directives très strictes et très détaillées, que ce soit sur la tenue
vestimentaire ou sur la façon de travailler. Certains s’épanouissent dans cet
environnement, mais une fois à la fac, ils sont complètement perdus.
– De nombreux facteurs entrent en compte, j’imagine, mais pour les
élèves Dévoués, je me demande si le problème ne vient pas du fait qu’à la
fac, il leur manque ces contraintes si importantes pour eux. C’est comme si
tout le monde se fiche de ce qu’ils font ou ne font pas. »
Un Dévoué peut être un excellent élève dans les petites classes et dériver
complètement après le lycée. « Je m’inscrirai à la fac de médecine
à l’automne », « J’enverrai des CV », « Je vais écrire un roman » ou « Il
faut que je fasse une demande de bourse… » La rentrée venue, il n’est
inscrit nulle part, n’a rempli aucun dossier et se retrouve sans objectifs, sans
consignes à suivre, sans professeurs à épater.
De la même façon, un Dévoué qui démissionne d’un emploi à temps plein
pour monter sa société peut avoir du mal à avancer ; un Dévoué entre deux
emplois peut se retrouver bloqué et un Dévoué dont les enfants seraient
partis de la maison peut se sentir perdu.
La solution ? Les contraintes extérieures.

Comment les Dévoués peuvent gérer les avantages et les


inconvénients de leur profil
Certains Dévoués adorent leur profil et n’y voient que des avantages.
Ils tirent une grande fierté à donner la priorité aux autres, comme me
l’affirmait un monsieur : « Mes clients peuvent compter sur moi, quoi qu’il
arrive. C’est ma marque de fabrique. C’est comme ça que je suis et que je
veux être. Et je tiens à ce que les gens qui travaillent pour moi aient cet état
d’esprit. » Ce à quoi un autre Dévoué ne peut qu’acquiescer : « Celui qui
m’engage a de la chance. Mes engagements auprès de ma société, de mes
collègues et de nos clients sont sacrés à mes yeux. Ils passent avant mes
propres besoins. »
Il en va ainsi au travail comme en famille. De nombreux Dévoués m’ont
dit non sans fierté : « Les besoins de ma famille passent avant tout,
toujours. »
C’est d’ailleurs une qualité que les enseignements religieux incitent
à cultiver.
Mais d’un autre côté, les Dévoués sont les plus susceptibles – bien plus
que les Disciplinés, les Pointilleux ou les Rebelles – de vouloir changer de
profil. À quoi est-ce dû ?
Pour les trois autres profils, la frustration vient en général des autres et
non de soi. Les gens peuvent s’irriter de la rigidité d’un Discipliné, des
questions d’un Pointilleux ou de l’opposition systématique d’un Rebelle,
mais c’est leur problème. Dans le cas des Dévoués, ils sont les seuls à subir
les mauvais côtés de leur profil, à se sentir frustrés parce qu’ils répondent
aux attentes des autres, mais jamais aux leurs.
Un Dévoué m’a écrit : « Je n’ai aucun mal à faire mon travail, et mes
amis savent qu’ils peuvent compter sur moi, mais je me demande souvent :
“Qu’as-tu fait aujourd’hui pour réaliser tes rêves ?” Malheureusement, la
réponse est souvent : “rien” ».
Quand on fait remarquer aux Dévoués qu’il suffit de contraintes
extérieures pour qu’ils arrivent à répondre à leurs objectifs personnels, ils
ne sont pas soulagés pour autant. Bien sûr, la solution est simple et à leur
portée, mais ils détestent se savoir dépendants d’un système de contraintes
extérieures.
Lors d’une conférence sur les quatre profils, un Dévoué m’a demandé :
« Est-ce qu’un Dévoué peut devenir un Discipliné ? J’aimerais tenir les
engagements que je me fais à moi-même sans dépendre de qui ou de quoi
que ce soit, parce que c’est de la faiblesse.
– Je pense que c’est vraiment très dur de changer un aspect fondamental
de sa nature, ai-je répondu prudemment. Je ne sais même pas si c’est
possible. En revanche, c’est assez simple de se fixer des contraintes
extérieures. Pourquoi ne pas prendre la solution de facilité ? »
Au lieu de se focaliser sur les inconvénients de leur profil, les Dévoués
devraient peut-être tout simplement chercher à s’en accommoder.
Le même comportement peut être interprété et vécu différemment. Alors
qu’une personne se dira : « J’ai 10 kg de trop, je ne fais pas de sport et je
devrais vraiment prendre rendez-vous chez le dentiste. Mais je suis
irréprochable au travail, je suis une épouse formidable et une mère toujours
présente pour ses enfants. Je suis fière de moi », une autre pensera : « Je
suis irréprochable au travail, je suis une épouse formidable et une mère
toujours présente pour ses enfants, mais j’ai 10 kg de trop, je ne fais jamais
de sport, et je devrais vraiment prendre rendez-vous chez le dentiste. J’ai
honte de moi. »
Qu’ils acceptent ou qu’ils déplorent leur profil, les Dévoués interprètent
souvent mal leur comportement. Même lorsqu’ils se rendent compte qu’ils
répondent sans problème aux attentes extérieures, mais qu’ils peinent
à répondre aux leurs, ils se trompent dans le diagnostic de la cause.
Certains pensent que c’est une question de loyauté et de temps : « Je ne
peux pas faire quelque chose pour moi s’il y a quelque chose que je peux
faire pour mes clients à la place. Et il y a toujours quelque chose à faire
pour mes clients. »
Certains tirent une grande fierté à montrer jusqu’où ils peuvent aller pour
répondre à une attente. Un lecteur m’a parlé de sa patronne Dévouée à qui
le médecin avait dit de rester à l’hôpital, parce qu’elle venait de se faire
opérer de la colonne vertébrale, mais qui a tenu à se rendre à un dîner
professionnel.
Certains parlent de sacrifice : « Je mets toujours les priorités des autres
avant les miennes », « Je n’arrive pas à trouver du temps pour moi », « Les
gens me disent toujours de penser un peu à moi. »
D’autres expliquent leur comportement par un manque d’estime de soi,
un manque de motivation ou une faiblesse de caractère.
Un ami qui n’arrivait pas à s’inscrire à une formation qui aurait fait
avancer sa carrière me disait :
« Je suis paresseux, c’est ça, le problème.
– Ce n’est pas vrai, ai-je protesté. Tu rends toujours ton travail à temps et
tu diriges un club.
– C’est vrai, a-t-il admis.
– Tu n’es pas paresseux. Le problème est ailleurs. »
Le comportement du Dévoué ne relève pas du sacrifice, d’un manque
d’estime de soi, de limites, de motivation, de discipline ou de la volonté de
faire plaisir aux autres, mais, je le répète encore une fois, de contraintes
extérieures.
Parce que les Dévoués se méprennent sur leur fonctionnement, ils font
l’erreur de se libérer des contraintes extérieures qu’ils pensent être un frein
à la réalisation de leurs attentes propres. Ainsi, certains vont quitter un
travail très exigeant en croyant se donner le loisir de s’attaquer à leurs
ambitions.
Attention ! Dans la plupart des cas, l’absence de cadre contraignant
n’aide en rien les Dévoués à répondre à leurs attentes. Comme me l’a dit un
lecteur : « Se dégager du temps pour réaliser ses objectifs ne marche pas
pour un Dévoué. J’ai fait cette erreur pendant des années. »
Il est indispensable pour les Dévoués de reconnaître leur besoin de
contraintes extérieures, parce qu’ils risquent de bouleverser leur vie avec
l’espoir de réaliser enfin leurs attentes et qu’ils n’y arriveront pas mieux.
Une lectrice a posté sur mon blog :
J’ai un doctorat (grâce à mes nombreuses qualités de Dévouée), mais après avoir passé cinq ans
à travailler sur des sujets qui importaient beaucoup plus aux autres qu’à moi, j’ai décidé de
prendre du temps pour m’atteler à mes propres objectifs. Je voulais principalement perdre du
poids, écrire un deuxième livre, commencer un blog, monter un projet caritatif et finir la
rénovation de ma maison. Je n’ai toujours pas commencé le livre ou le blog, j’ai pris 6 kg et
demi et j’ai abandonné l’idée du projet caritatif pour l’instant. Il n’y a que les travaux de la
maison qui ont bien avancé, parce que je sais que cela fait plaisir à mon mari de les voir
progresser.
Un autre Dévoué à la retraite a partagé une expérience très similaire :
Après avoir travaillé vingt-cinq ans dans la fonction publique et élevé deux filles avec ma
femme, j’avais hâte de prendre ma retraite. Enfin j’allais pouvoir m’adonner à ce qui
m’intéressait vraiment ! J’avais même accepté une réduction de pension pour partir cinq ans
plus tôt.
Mais très vite, je me suis trouvé à court de motivation pour toutes ces activités qui devaient tant
me faire plaisir : suivre des cours, faire du sport et finir les travaux de la maison.
Je n’ai réussi à faire qu’une chose : m’inscrire à un club de randonnée et marcher tous les
mercredis et samedis matin. Je sais pourquoi maintenant : les autres comptent sur ma présence,
du coup, j’arrive à préparer mes affaires la veille et à quitter la maison à 7 heures du matin.
N’arrivant pas à accomplir les autres objectifs que je m’étais fixés, je me décevais de plus en
plus. Quel soulagement de découvrir les quatre profils ! Je me dis que je vais peut-être
finalement réussir à faire ce que je veux.

Un Dévoué m’a dit : « C’est parce que nous faisons passer les autres en
premier. » J’ai dû me retenir de lui rétorquer : « Pas du tout ! » pour lui
répondre calmement : « Je ne pense pas que les Dévoués fassent passer les
autres en premier et que, de ce fait, ils n’ont plus de temps ou d’énergie
pour s’occuper d’eux. C’est juste qu’ils ne répondent qu’aux attentes
extérieures, et pas aux attentes intérieures. Ce n’est pas la même chose. »
Ce n’est qu’en comprenant vraiment le mode de fonctionnement de leur
profil que les Dévoués pourront en tirer le meilleur. Un Dévoué m’a confié :
« Maintenant que je sais que je suis un Dévoué, au lieu d’aller contre ma
nature, je laisse ma nature me guider. »

Comment les Dévoués peuvent transformer des attentes


intérieures en attentes extérieures
Tous les Dévoués répondent aux attentes extérieures et résistent aux attentes
intérieures, mais chacun a son interprétation de ce qui vient de l’extérieur et
ce qui vient de soi.
Pour de nombreux Dévoués, la famille a un statut à part. Les conjoints et
enfants sont comme une extension d’eux-mêmes. Ainsi les attentes du
conjoint deviennent des attentes intérieures et sont par conséquent ignorées.
Une Pointilleuse témoigne de sa frustration : « Mon mari me traite avec
aussi peu de considération que lui-même. Je n’exagère pas. J’aimerais qu’il
se traite mieux et qu’il me traite mieux. »
Ma sœur Elizabeth m’a dit : « Si on doit régler quelque chose par chèque,
je vais donner ou transférer la facture à Adam plutôt que le lui demander
dans un mail à part, parce qu’il y a plus de chances qu’il le fasse si la
demande vient de quelqu’un d’autre. »
Parfois, c’est le contexte qui détermine si la famille est considérée
comme « extérieure » ou « intérieure ». Un de mes amis Dévoués est un
père prévenant qui considère ses responsabilités envers ses enfants comme
des engagements extérieurs, et donc les respecte. Mais quand ses
obligations professionnelles entrent en compte, ses clients, étant plus
« extérieurs », passent en priorité.
Ce déplacement de la démarcation entre extérieur et intérieur peut être
source de conflit dans une relation de couple, comme en fait l’expérience
une Dévouée :
Je suis une Dévouée et les tensions avec mon mari surviennent dès lors que nous sommes avec
d’autres personnes. Au lieu de répondre aux attentes de mon mari, je réponds aux attentes des
autres. Cela le déstabilise. Il a l’habitude que je sois très attentionnée avec lui. Je le traite alors
comme moi-même, ce qui veut dire que ses besoins ou ses envies passent après ceux des gens
qui sont en notre compagnie. Cela dégénère chaque fois en dispute.

De même que les attentes d’un membre de la famille tombent du côté des
attentes intérieures, un membre de la famille ne saurait être un bon garant
pour le Dévoué.
Un homme d’affaires brillant le confirme :
Pendant des années, ma femme m’a dit : « Prends du temps pour toi, fais du sport. Tu t’investis
trop dans ton entreprise, tu ferais bien d’aller voir le médecin, et patati, patata. » J’ai fait la
sourde oreille. Comme si je n’avais que ça à faire ! Mais quand le président du conseil
d’administration m’a dit : « Ed, l’année s’annonce difficile et j’ai l’impression que tu es au bord
de la crise cardiaque. On a besoin que tu sois au top. Trop de choses dépendent de toi. Perds un
peu de poids, fais du sport, repose-toi, va voir le médecin. » Je l’ai fait.

Comprendre et anticiper la rébellion d’un Dévoué


Les Dévoués ont parfois le sentiment d’être exploités… à juste titre. Quand
on a un service à demander à quelqu’un, à qui demande-t-on ? À un
Discipliné, un Pointilleux, un Rebelle ou un Dévoué ? À un Dévoué, bien
sûr, parce qu’ils sont toujours prêts à donner un coup de main.
Dans son essai, The Rage Cage, Caroline Knapp raconte une histoire qui
illustre bien nos propos :
Une amie m’a demandé de promener son chien, un service qui semble anodin, mais qui m’a
beaucoup énervée. Ce qui m’a ennuyé, ce n’est pas de promener le chien, c’est la raison pour
laquelle elle me l’a demandé. Elle avait dû promener son chien deux fois la veille, parce que
son petit ami avait la grippe. Elle n’avait pas envie de le faire deux jours de suite et avait en
plus un devoir à rendre. Et moi, alors ? Je promène mon chien deux fois par jour, tous les jours,
et j’ai le temps de faire mes devoirs. Sa demande était ridicule et presque insultante. Mais au
lieu de l’envoyer paître, j’ai pris sur moi et je suis allé chercher son chien à 6 heures et demie
du matin pour l’emmener trottiner autour du lac avant de le rendre à ses maîtres. J’ai passé
ensuite le reste de la semaine à avoir le sentiment de m’être fait marcher sur les pieds. Bref,
j’étais furieuse.

Si cette personne avait demandé à un Discipliné, un Pointilleux ou un


Rebelle qui ne voulait pas le faire, la réponse aurait été non. La Disciplinée
que je suis aurait pensé : « Désolée, j’ai mes propres obligations à remplir. »
Un Pointilleux aurait demandé : « Pourquoi devrais-je promener ton chien,
alors que je suis encore plus occupé que toi ? » Un Rebelle se serait tout
simplement dit : « Je n’ai pas envie de le faire, alors je ne le ferai pas. »
Mais voilà, cette personne savait qu’il fallait s’adresser à un Dévoué, parce
que le Dévoué va accepter de promener son chien même s’il a son propre
chien à promener et un emploi du temps chargé.
Les autres profils ne comprennent pas que les Dévoués se sentent obligés
de répondre à certaines attentes, même s’ils n’en ont, au fond, pas envie. Ils
ne vont donc pas compatir s’ils en souffrent. Alors que les Dévoués peuvent
trouver leur comportement admirable : « Je fais passer les besoins des
autres avant les miens », les autres ne le voient pas du même œil. « Si c’est
si important pour toi de jouer de la guitare, arrête d’en parler et joue. » « Si
tu n’as pas envie de faire cette tâche, pourquoi avoir accepté de la faire ? »
« Tu penses qu’il faut assister à tous les dîners d’affaires, je ne suis pas
d’accord, alors je n’irai pas. »
C’est pour cela que les Dévoués sont parfois amers et ne se sentent pas
toujours appréciés à leur juste valeur. Ils peuvent aussi considérer les
Disciplinés, les Pointilleux et les Rebelles comme des individus égoïstes et
égocentriques. Les Disciplinés et les Pointilleux sont en effet tournés sur
eux-mêmes, car leurs actions sont motivées par des engagements intérieurs.
Les Rebelles aussi peuvent paraître égoïstes, mais pour différentes raisons.
Les Dévoués ont du mal à déléguer, et c’est une des raisons pour
lesquelles ils finissent par saturer ou se sentir exploités. Ils se sentent
obligés de faire les choses eux-mêmes : « Personne ne le fera, et c’est
encore sur moi que ça retombe » ou « Personne ne le fera aussi bien que
moi ».
Après avoir évoqué cet aspect du profil Dévoué lors d’une conférence, un
homme est venu me voir. « Ma femme est une Dévouée et vous avez mis le
doigt sur quelque chose qui a le don de me rendre fou. Elle insiste toujours
pour inviter sa famille pour Thanksgiving, et après, elle se plaint du travail
que ça demande, à savoir la cuisine et le ménage. Je lui ai suggéré de tout
commander chez le traiteur et de prendre une femme de ménage, mais elle
refuse. Elle veut en revanche que je l’aide, alors que je n’ai aucune envie de
faire la cuisine ou le ménage pendant les fêtes ! Je lui ai déjà dit : “Si cela te
donne trop de travail, n’invite pas autant de monde, ou alors paie quelqu’un
pour tout faire. Si tu t’obstines à les inviter et à tout faire toi-même, arrête
de te plaindre. Et ne m’entraîne pas dans ta galère.” »
Je lui ai suggéré : « Vous pourriez lui dire : “À vouloir tout faire toi-
même, tu n’auras ni le temps ni l’énergie de bien accueillir ta famille et de
profiter d’eux. On ne les voit que quelques fois dans l’année, autant engager
quelqu’un et passer un maximum de temps avec eux.” Ou encore : “À tout
vouloir gérer, tu seras épuisée et distraite, si ce n’est irritable. Faisons en
sorte que ce soit un moment agréable pour tout le monde et engageons un
traiteur. Je serais déçu si tu ne suivais pas mon conseil.” »

Un ami m’a expliqué comment sa femme composait avec sa nature


Dévouée :
Elle me connaît par cœur. Je me suis mis en tête de tondre moi-même notre pelouse, même si je
déteste faire ça. Et comme je travaille souvent le week-end, je n’ai jamais le temps de le faire,
et ça la rend folle, d’autant que je refuse d’appeler une entreprise de jardinage. Un jour, elle
a déclaré : « Le fils du voisin va venir tondre la pelouse. Il a besoin d’argent pour la fac. »
Depuis, je ne veux pas décevoir le gamin.

Au travail, les Dévoués ont beaucoup de mal à dire non et peuvent


rechigner à déléguer, ce qui les prédispose au surmenage. Qu’ils prennent
garde à s’organiser en amont ou à déléguer.
Comme ils sont enclins à se sentir négligés ou exploités, les Dévoués sont
parfois sujets à un phénomène assez déroutant. Quand la pression des
attentes extérieures se fait trop forte, ils atteignent un point de rupture et
entrent en rébellion. Ils refusent dès lors tout en bloc sans crier gare. Tout
d’un coup, ils décident de dire non : « Ça suffit ! »
Cette rébellion peut être un phénomène isolé ou devenir un
comportement récurrent. Elle peut passer pratiquement inaperçue, sous
forme de refus cachés, ou être une explosion spectaculaire qui va tout
bouleverser autour d’elle.
Le joueur de tennis Andre Agassi, que son autobiographie Open décrit
comme un parfait Dévoué, a connu ces rébellions. Il répondait aux attentes
extérieures – son père avait décidé qu’il serait champion, et sa petite amie
Brooke Shields avait décidé qu’ils se marieraient – mais il peinait
à répondre à ses propres attentes. Ses rébellions étaient modestes et
symboliques. Il défiait le conservatisme du milieu tennistique avec ses
shorts en jeans et sa crinière atypique. C’était sa façon à lui de réagir au
sentiment de ne rien choisir dans sa vie. Agassi témoigne de l’incroyable
énergie qu’un Dévoué peut déployer pour accomplir les attentes des autres
ainsi que du ressentiment accumulé quand il a l’impression de ne répondre
qu’aux attentes extérieures des autres.
Un autre Dévoué et athlète célèbre, Tiger Woods, est entré en rébellion de
façon spectaculaire. Il n’avait cessé de répéter à ses proches qu’il voulait
arrêter le golf pour s’engager dans les Navy SEALs, le corps d’élite de la
marine américaine, mais ils l’en ont dissuadé, parce qu’ils voulaient en faire
une star du green. Il a fini par se rebeller.
De nombreuses situations peuvent provoquer la rébellion d’un Dévoué. Si
les attentes :
• sont démesurées : « Tu peux battre le record des ventes cette année ! »
• sont injustes dans la mesure où les autres ne font pas leur part : « Tant
que tu y es, tu n’as qu’à relire mon rapport aussi. »
• s’accompagnent d’un reproche : « C’est pénible de voir comme ta
chambre est en pagaille. »
• sont insistantes ou désapprobatrices : « Vas-tu enfin aller à la gym ? »
• impliquent des tâches ingrates ou rébarbatives : « Tu vas commencer par
du démarchage téléphonique. »
• le privent de tout mérite : « Tu perds du poids grâce à moi, parce que je
t’ai dit comment faire. »
• sont imposées par des personnes difficiles à satisfaire ou des personnes
qui ne comptent pas pour lui : « Si c’est tout ce dont tu es capable, on va
devoir s’en contenter. »
• lui donnent le sentiment d’être exploité ou de ne pas avoir de volonté
propre : « Tu resteras plus tard ce soir, bien sûr ? »
• ne reflètent pas du tout ce qu’il espère devenir : « Avec tes aptitudes
pour les sciences, tu feras un excellent médecin. Il faut que tu fasses
médecine. »
• sont des ultimatums : « Nous allons réduire nos effectifs, tu vas devoir
gérer dix clients de plus. »
• sont source de culpabilité ou de honte : « Tu dois dire ton taux de
glycémie à tout le groupe. »
Les Dévoués sont souvent les premiers surpris par leurs épisodes de
rébellion. Ils ne comprennent pas pourquoi cela arrive et n’ont aucun
contrôle dessus. Ils ont l’impression de ne pas être eux-mêmes. Un Dévoué
appelle ça : « Un “non” massif qui bouleverse ma vie pendant un moment ».
Un autre dit :
Je suis un doctorant ambitieux et dans un an, je présente ma thèse en biologie moléculaire. Mais
pour la première fois de ma vie, je rends des travaux faits sans conviction ou en retard. À croire
qu’un alien a pris possession de mon corps. Du coup, je me pose plein de questions : que
m’arrive-t-il ? Qu’est-ce qui a changé ? J’en suis même à me demander (et c’est proprement
effrayant) pourquoi je fais cette thèse ? Comprendre que je suis un Dévoué m’a aidé à voir que
ce doctorat répondait avant tout à une attente de ma femme, ma famille, mes amis et mes
directeurs de recherches, et non à mes aspirations profondes.

Comme ce témoignage le montre, la rébellion d’un Dévoué n’éclate pas


seulement quand il se sent exploité, mais aussi quand il comprend qu’il ne
fait que courir après les attentes des autres et qu’elles ne lui permettront pas
de s’épanouir.
Par ailleurs, les Dévoués n’aiment pas se plaindre d’une situation qui les
dérange : une répartition injuste du travail ou un manque de reconnaissance.
Pourquoi ? Parce qu’ils pensent qu’ils ne devraient pas avoir besoin de
manifester leur embarras. Ils s’imaginent que les autres vont s’en rendre
compte et qu’ils vont (comme il se doit) relâcher la pression sans qu’ils
aient besoin de le demander. Les Dévoués s’attendent à ce que les autres
cessent d’imposer leurs attentes sans qu’on le leur demande. Mais le plus
souvent, cela n’arrive pas, ce qui les agace. Ils s’irritent d’avoir à répondre
à des attentes trop exigeantes alors qu’ils n’avaient émis aucune objection.
Mais pourquoi les autres ne relâchent-ils pas la pression ? Comme nous le
disions, les autres profils ne ressentent pas les contraintes extérieures de la
même façon, alors ils ne se rendent pas forcément compte du caractère
accablant de ce qu’ils imposent. Et comme ils savent résister aux pressions
extérieures, ils s’attendent à ce que les Dévoués sachent aussi le faire : « Si
tu ne voulais pas, pourquoi as-tu accepté de le faire ? », « Si tu es déjà
débordé, pourquoi as-tu accepté du travail en plus ? »
En s’obstinant sans protester, les Dévoués ne donnent pas aux autres
l’occasion de désamorcer la situation, ils finissent alors par saturer et
exploser d’un coup. Certains vont même jusqu’à claquer la porte de leur
travail ou rompre définitivement une relation amoureuse ou amicale du jour
au lendemain. Une Dévouée se souvient :
Mes rébellions se sont faites dans un calme absolu, mais elles étaient implacables. Deux
amitiés, un emploi et un mariage y sont passés. Et tout s’est fait en un claquement de doigts.
Après des mois à courir après des objectifs aberrants sans aucune reconnaissance, j’ai appelé un
autre employeur un lundi matin et j’ai démissionné l’après-midi même. Je ne voulais pas en
discuter, même quand on m’a demandé :
« Que pouvons-nous faire pour que vous restiez ?
– Rien. Vous n’existez plus à mes yeux. » C’est aussi ce que j’ai ressenti après 18 ans de
mariage. Après des années à tout faire pour que la relation marche, je me suis réveillée un
matin en sachant très clairement que c’était fini et qu’il n’y avait pas de retour en arrière
possible.
Je ne regrette aucune de ces ruptures, mais je suis reconnaissante d’avoir un cadre conceptuel
qui explique mon comportement et qui permet d’identifier les signes avant-coureurs de telles
rébellions. Je sais désormais que ma tendance à me dévouer, à prendre sur moi, n’est pas sans
risque.

Bien entendu, les ruptures ne sont pas réservées aux Dévoués. Mais dans
le cas d’une rébellion de Dévoué, elles ont un caractère abrupt. Tout semble
aller bien jusqu’à ce que le Dévoué craque. Un Dévoué décrit cela comme
une bombe qui explose et dont il ne maîtrise pas les dégâts. Certains parlent
de bouillonnement, d’envenimement, de ronger son frein, d’éruption et de
volcan.
Si ces rébellions peuvent être violentes et dramatiques, elles peuvent
aussi passer presque inaperçues et être symboliques. Un Dévoué a écrit :
« Quand je suis en retard, même de quelques minutes, un collègue me le fait
remarquer chaque fois. Ça m’énerve tellement que lorsque je suis en
avance, j’attends une minute dans ma voiture. Je déteste être en retard, mais
je ne supporte pas ses réflexions systématiques. Plus il me le reprochera et
moins je serai à l’heure. »
Notons qu’être délibérément en retard est une forme courante de rébellion
pour un Dévoué. Un de mes lecteurs m’a envoyé un lien vers un site de
vente de tee-shirts personnalisés avec ce modèle qui en saisit parfaitement
l’esprit :

Désolé du retard, je n’avais pas envie de venir.


Alors que certains Dévoués canalisent leurs rébellions et en limitent les
dégâts, d’autres ont le don de s’auto-saboter : « Je vais faire en sorte d’être
le seul à en subir les conséquences. Ceux qui m’ont demandé, poussé ou
forcé à le faire ne seront en rien impactés. Par exemple, je vais aller à un
entretien ou faire une présentation les mains dans les poches. Je me force
tout en me rebellant. Je ne fais de tort à personne si ce n’est à moi-même. »

Ces rébellions peuvent englober tout un domaine d’attentes, et c’est en


général celui de la santé, comme pour ce Dévoué :
Quand il s’agit de travail, de bénévolat pour l’église ou d’autres associations caritatives, de
relations sociales ou d’éducation des enfants, j’ai tendance à faire ce qu’on attend de moi ; mais
si on me demande de perdre du poids ou faire du sport, je pars en courant. Je ne vous dis même
pas combien d’argent j’ai perdu en abonnement en club de gym et en programmes de perte de
poids. Je finis toujours par ne plus mettre un pied à la salle de gym et à abandonner les régimes,
gagnant le plus souvent du poids au passage !

Pourquoi le domaine de la santé plus particulièrement ? Peut-être parce


que c’est un domaine où les pressions extérieures sont les plus fortes alors
que les conséquences retombent exclusivement sur les Dévoués.
En analysant les résultats de mon enquête, j’ai été étonnée de constater
que les Dévoués comme les Rebelles étaient plutôt d’accord avec
l’affirmation : « Mon médecin m’a expliqué pourquoi il fallait que je
change certaines choses dans ma vie, mais je n’ai rien fait. » Autant je
m’attendais à la réponse des Rebelles, autant celle des Dévoués m’a
surprise. J’y vois deux facteurs possibles : le manque de contraintes ou de
responsabilisation et le rejet possible de toutes les attentes de santé.
Si ces rébellions peuvent être de véritables obstacles à l’épanouissement
des Dévoués, elles sont aussi une forme d’auto-défense agissant comme des
poignées d’arrêt d’urgence. Elles vont leur permettre de quitter ce travail
détesté, ce conjoint insupportable, cette relation toxique, cette obligation
trop aliénante. C’est la valve de sécurité qui va libérer le trop-plein de
pression.
En général, la rébellion finit par se dissiper, même si rien n’a changé.
Mais il est préférable d’anticiper ces rébellions en évitant que le Dévoué ne
sature ou ne se sente lésé.
Comment anticiper ces rébellions ?
Une fois que les Dévoués ont identifié ce schéma comportemental, ils
vont pouvoir en reconnaître les signes annonciateurs et enrayer le cycle de
la rébellion en disant quelque chose comme : « Est-ce qu’on peut revoir la
répartition des astreintes ? », « Je suis déjà sur trois comités », « Je ne vais
pas pouvoir gérer les activités des enfants toute seule ce week-end, il faut
qu’on se répartisse les tâches. »
Les Dévoués étant enclins au surmenage, leur entourage – famille, amis,
collègues, personnel soignant, etc. – peut les aider à éviter d’en arriver là.
Ils peuvent mettre en place un système leur permettant de dire non, de
déléguer, de faire des pauses, de refuser certaines demandes, de prendre du
temps pour eux, etc. Une Pointilleuse a écrit :
Mon fiancé est un Dévoué, et j’ai l’impression que l’on fait surtout ce que j’ai envie de faire et
pas ce qu’il aurait, lui, envie de faire. Pour que ce soit plus juste, on a récemment décidé de
prendre le temps, tous les samedis matin, de faire une liste de ce qu’on veut faire le week-end.
Il arrive maintenant à dire ce qu’il veut faire, parce que je le lui demande.

Quand les Dévoués entrent en rébellion, c’est qu’ils ont besoin de


relâcher la pression, mais ils ont paradoxalement besoin d’une contrainte
externe pour le faire. Un patron qui voit un Dévoué surmené peut le
soulager de certaines obligations ou vérifier qu’il n’est pas en train de faire
le travail des autres.
L’aspect dramatique de ces rébellions en fait d’excellents sujets
cinématographiques, comme dans le grand classique, La Vie est belle, de
Frank Capra. George Bailey, joué par James Stewart, répond
systématiquement aux attentes extérieures sans jamais s’occuper des
siennes. Quand il entre en rébellion, ce n’est pas contre les autres, mais
contre lui-même et il envisage alors de se jeter dans la rivière. C’est son
ange gardien qui lui sauvera la vie. George Bailey est le parfait exemple de
Dévoué qui se sent obligé d’être à la hauteur d’un certain idéal. Pourquoi
son jeune frère Harry n’a-t-il pas repris l’entreprise familiale comme
prévu ? Et s’il n’en avait pas envie, pourquoi n’a-t-il pas cherché une
solution au lieu de laisser son aîné s’en charger ?
LES DÉVOUÉS EN QUELQUES MOTS

FORCES PROBABLES
Bons patrons, leaders responsables, ont un bon esprit d’équipe
Se sentent obligés de répondre aux attentes des autres
Prêts à assumer les responsabilités quitte à se mettre en quatre
Répondent aux contraintes extérieures

FAIBLESSES PROBABLES
Exposés au surmenage et au burn-out
Peuvent entrer en rébellion
Facilement exploitables
Enclins au ressentiment
Ont du mal à dire non ou à fixer des limites
8
Interagir avec un Dévoué
« Accepte d’en faire moins »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière

Le collègue Dévoué
De façon générale, les Dévoués font d’excellents collègues ou patrons. Ils
font ce qu’ils disent, ils sont toujours prêts à donner un coup de main,
à prendre du travail en plus et à s’adapter aux changements.
Les Dévoués répondent aux attentes que l’environnement professionnel
fournit presque inévitablement : échéances, objectifs et évaluations. Il vaut
mieux que ces attentes soient clairement fixées, de vagues exhortations ne
suffiront pas.
Un ami écrivain et Dévoué se souvient : « Quand j’ai signé mon contrat,
j’ai dit à mon éditeur : “Je ne peux écrire que quand je dois rendre quelque
chose. Donnez-moi quelques échéances intermédiaires.
– Ne vous inquiétez pas, m’a-t-il répondu. Ce livre sera très bien et vous
y arriverez sans mal.”
Il ne voulait pas comprendre.
– Que s’est-il passé ? ai-je demandé.
– Je n’ai pu m’y mettre que trois semaines avant de le rendre. J’aurais fait
tellement mieux si j’avais commencé plus tôt. »
Faute de connaître le fonctionnement de son auteur, l’éditeur a refusé de
lui donner des contraintes. S’il avait compris que mon ami était un Dévoué,
il aurait eu une approche différente.

Quel que soit le contexte, quand quelqu’un réclame un engagement, il


faut le lui donner. En général, la personne sait qu’elle en a besoin. Ce
Dévoué le confirme : « J’ai dit à mon responsable que j’avais besoin d’avoir
un chef dur et exigeant pour travailler plus et mieux. »
Les Dévoués doivent cependant faire attention à ce que les autres ne
profitent pas d’eux sinon ils s’exposent à la saturation et à la rébellion, ce
qui est toujours très difficile à gérer dans le milieu professionnel. Une
Dévouée raconte :
Je suis infirmière, et il y a toujours des problèmes de personnel dans mon service à cause des
absences, les jours chargés, etc. Cela fait trois ans que je travaille dans cet hôpital et mon chef
a bien repéré les Dévoués. Il nous demande toujours de faire des heures supplémentaires. Et
c’est très énervant quand celles qui ne travaillent pas, soi-disant parce qu’elles sont
« malades », postent toute la journée sur les réseaux sociaux alors que l’on enchaîne les
services. J’ai longtemps accepté cette situation, mais elle a fatalement conduit au surmenage.
Maintenant, je dis systématiquement non.

Cet exemple illustre bien comment, à force de ne pas vouloir dire non, les
Dévoués finissent par tout refuser en bloc.
Comme ils sont très souvent de précieux employés, les managers ont tout
intérêt à les ménager pour ne pas se retrouver en situation de rébellion. Un
Dévoué à bout peut claquer la porte sans crier gare.
Pour éviter d’en arriver là, ses supérieurs, collègues ou employés peuvent
l’aider à fixer des limites raisonnables :
– En lui rappelant que dire non, c’est pouvoir dire oui à une tâche
plus importante : « J’ai besoin de votre rapport vendredi. Si vous vous
laissez distraire par les tâches de vos collègues, vous ne serez pas prêt
à temps. »
– En imposant des limites pour éviter le surmenage : « Tu as droit à des
vacances, et tu vas devoir les prendre. »
– En empêchant que les autres profitent de lui : « Nous avons un délai
à respecter, et tout le monde ici doit faire sa part de travail. »
– En le présentant comme un modèle à suivre : « Si tu restes jusqu’à
21 heures, tu vas donner le mauvais exemple à ton équipe. »
– En lui retirant du travail s’il en a pris trop. Un ami dans la finance
m’a confié : « J’avais un excellent employé, le meilleur qui soit. Tout le
monde voulait travailler avec lui, parce que c’était toujours très
gratifiant. Mais il ne pouvait pas continuer à dire oui à tout le monde. Il
n’allait jamais tenir. Lors de sa dernière évaluation, je lui ai dit : « Tu en
fais trop, et tu le fais trop bien, mais ce n’est pas un compliment. » Il
n’arrivait pas à déléguer ou à en faire moins, alors nous lui avons retiré
un gros compte, et il va beaucoup mieux. »
Les Dévoués font d’excellents patrons et de grands leaders, parce qu’ils
se dévouent corps et âme à leur entreprise. Ils sont responsables et ont du
répondant. Mais, comme tout le monde, ils ont parfois du mal à comprendre
le raisonnement de ceux qui les entourent. Un manager Dévoué admet :
« J’ai du mal à accepter qu’on me dise non ou qu’on remette toujours tout
en question. » Ce n’est pas facile de diriger des gens qui ne pensent pas
comme nous. Et la première chose qu’il faut faire, c’est reconnaître cette
différence.
Les Dévoués vont répondre aux attentes extérieures comme par réflexe, et
cela peut leur attirer des ennuis. Un ami Discipliné se plaignait de sa
patronne, une Dévouée qu’il qualifie d’extrême : « Elle est PDG, mais elle
va tout laisser en plan pour aider un client ou un employé. C’est un vrai
frein à notre productivité. Rien ne se fait. »
Travailler seul relève du défi pour les Dévoués. S’ils sont très productifs
au sein d’une entreprise, ils peuvent stagner quand ils se mettent à leur
compte. Pour réussir, ils ont intérêt à fixer dès le départ un système de
contraintes et d’engagements forts. Qu’importe si ces engagements viennent
d’un conseiller financier, d’un mentor, des clients, des étudiants (même s’ils
ne paient pas… encore) ou d’un groupe de soutien, tant qu’elles émanent de
quelqu’un d’autre.
Une fois établis comme entrepreneurs, les Dévoués n’auront certainement
aucun mal à répondre aux engagements de leur travail, à savoir respecter les
délais donnés aux clients, gérer l’administratif et répondre au téléphone. Ils
peuvent toutefois avoir plus de difficulté à accomplir des tâches plus
générales comme développer le réseautage et les relations d’affaires, dire
non à des clients trop exigeants ou à des requêtes chronophages. Comme
toujours, la solution pour eux est dans l’élaboration d’un cadre de
contraintes externes.

Le conjoint Dévoué
Les Dévoués font d’excellents conjoints, car ils accordent beaucoup
d’importance aux attentes de l’autre. Mais leur compagnon a tout intérêt
à bien connaître leur façon de fonctionner.
Si un Dévoué demande à son conjoint d’être son garant, ce dernier doit
accepter ou trouver un autre moyen de le responsabiliser. Une Dévouée
raconte :
Je réussis à faire du sport tous les jours, parce que mon mari me demande tous les soirs en
rentrant si je suis allée à la gym. Il est très encourageant et enthousiaste, du coup, quand je
loupe une séance, je m’assure de ne pas louper la suivante. La santé est quelque chose qui
compte beaucoup pour lui, alors cela me donne envie d’être assidue. Même si c’est moi qui lui
ai demandé d’être mon garant, je me sens obligée d’être à la hauteur pour lui. C’est
complètement fou !

Les conjoints des Dévoués ont également un rôle à jouer pour éviter
qu’ils n’en fassent trop et finissent par craquer. « Tu as besoin de te poser.
Va faire une petite sieste, fais-le pour moi ! »
Une Dévouée raconte : « Mon mari m’a proposé de garder les enfants le
samedi matin pour que je puisse aller à un cours de spinning, mais je ne sais
pas pourquoi, je ne m’y autorise pas. » Pour l’en persuader, son mari devrait
essayer de lui dire : « Montre le bon exemple aux enfants en faisant du sport
régulièrement » ou « Cela nous permettrait aux enfants et à moi de passer
un moment rien qu’entre nous. » Pour convaincre les Dévoués, il faut faire
appel aux valeurs qui comptent à leurs yeux.
Une auditrice du podcast a écrit :
Découvrir que mon mari est un Dévoué a été une révélation. Il est adorable, et j’ai une chance
folle, mais il a tendance à s’oublier, alors je dois penser à lui pour lui. Il suffit que je lui
demande de l’aide pour qu’il mette de côté ses propres projets. Je dois veiller à ce qu’il ne
renonce à rien de trop important. Son ex-femme profitait de sa nature dévouée, alors je fais en
sorte de fixer des limites pour lui.

En « fixant des limites » pour son mari – en l’aidant à dire non (même
à elle) et en faisant en sorte que les autres ne profitent pas de lui – elle
l’aide à se prémunir des rébellions. Il faut anticiper, en effet. Et tout
l’entourage peut y mettre du sien. Imaginons qu’un ou une personne doit
partir en voyage d’affaires et laisser son conjoint Dévoué à la maison en
charge de leurs trois enfants, il ou elle pourrait dire à son retour : « Tu t’es
occupé des enfants tout seul (ou toute seule), et je t’en remercie. J’aimerais
que tu prennes ce week-end pour te ressourcer, pour te faire plaisir. Je
m’occuperai des enfants. »
Comme les Dévoués se sentent obligés de répondre aux attentes
extérieures, leurs conjoints doivent faire attention à ne pas suggérer des
attentes sans le vouloir, car ils peuvent les prendre très au sérieux. Une
femme peut lancer de façon anodine à son mari Dévoué : « Peut-être que tu
devrais coacher l’équipe de foot… » Et boum !

L’enfant Dévoué
D’après ce que j’ai pu observer, il est souvent difficile de dire si un enfant
est un Dévoué ou non. Les Disciplinés et les Rebelles appartiennent à des
types de personnalités très extrêmes qui se manifestent relativement tôt. Et
comme les adultes gèrent en grande partie la vie des enfants, il peut être
difficile d’identifier les caractéristiques du profil Dévoué.
Quand il est clair qu’un enfant est un Dévoué, ses parents peuvent tenir
compte des spécificités de son profil. Comme tous les Dévoués, l’enfant
Dévoué répond aux contraintes. S’il fait du piano, il peut être utile de lui
prévoir un programme détaillé, et de le passer en revue avec lui. On peut
aussi gentiment le rappeler à l’ordre : « Il est 16 heures, l’heure de travailler
ton piano. » Son professeur de musique peut aussi lui expliquer : « Je le
vois bien quand tu n’as pas travaillé. »
Quand un enfant Dévoué veut répondre à une attente intérieure, ses
parents devraient l’aider à mettre en place un système de responsabilisation
pour renforcer sa motivation. Une maman dont la fille voulait apprendre des
tours à son chiot lui a répondu : « Super ! Et si on t’inscrivait au cours
d’agility ? »
Il faut cependant prendre garde à ne pas fixer d’objectifs trop ambitieux.
Très sensible à la pression des attentes extérieures, l’enfant pourrait se
sentir obligé d’atteindre à tout prix cet objectif. Et à trop le forcer, il
pourrait entrer en mode rébellion. Plus important encore, il faut s’assurer
que l’enfant ne cherche pas trop à faire plaisir aux autres (y compris à ses
parents) pour éviter qu’il ne s’épuise et qu’il perde de vue ce qui lui fait
plaisir à lui et ce qui lui plaît vraiment.
Quel que soit le contexte, quand une personne réclame d’être
responsabilisée, il est important de l’aider à le faire. Une femme est venue
me voir à un événement au cours duquel j’avais pris la parole. « Ma fille
n’arrêtait pas de me dire qu’elle voulait passer le test GRE (Graduate
Record Examinations) et qu’elle voulait suivre des cours de préparation. Je
lui répondais chaque fois que cela ne servait à rien, qu’elle pouvait très bien
étudier toute seule. Maintenant, je me rends compte qu’elle aurait dû
s’inscrire aux cours comme elle le voulait. »
Les gens qui demandent à être responsabilisés savent qu’ils en ont besoin.

Le patient Dévoué
Des quatre profils, celles des Dévoués est le plus répandu, ce qui veut dire
que les professionnels de santé ont affaire à de nombreux Dévoués. De
manière générale, les Dévoués sont réceptifs au suivi des médecins,
infirmières, nutritionnistes, entraîneurs, coachs ou professeurs. Un coach
sportif, par exemple, peut prévenir ses élèves que toute absence sera notée
et entraînera l’envoi d’un mail de notification. Il peut aussi leur dire qu’il
sera déçu ou contrarié par leur manque d’assiduité.
J’ai parlé des quatre profils lors d’un congrès sportif à New York. Une
coach sportive m’a expliqué : « Pour responsabiliser les gens, on nous dit
de les appeler par leur prénom si possible.
– C’est une excellente idée, ai-je convenu.
– Mais je viens de penser à quelque chose d’autre. À la fin du cours,
j’avais l’habitude de dire : “Au revoir. Vous me trouverez ici même la
semaine prochaine.” Maintenant, je crois que je vais leur dire : “On se voit
la semaine prochaine !” Comme ça, les gens auront l’impression que je vais
les attendre.
– Excellent ! »
Comme toujours, quand quelqu’un demande à être responsabilisé, il est
avisé de l’aider autant que possible. Un Dévoué se souvient : « J’ai dit à ma
dentiste : “S’il vous plaît, faites-moi tenir ma promesse d’utiliser du fil
dentaire régulièrement. Si à ma prochaine visite de contrôle, mes dents sont
dans un mauvais état, rappelez-moi ma promesse !” Elle a ri, mais a accepté
de le faire. Depuis, je passe le fil dentaire tous les soirs. »
Il existe toujours plus de gadgets, d’appareils, d’applications et de
services pour inciter les gens à adopter une bonne hygiène de vie. Il suffit
de trouver celui qui correspondra à ses besoins. Pour certains Dévoués, un
simple mail de rappel peut suffire pour prendre ses médicaments, ou un
moniteur d’activités pour faire de l’exercice au quotidien. Pour d’autres, il
faut la menace d’une pénalité ou d’une sanction. Les groupes de soutien ou
de responsabilisation permettent d’avoir un ou des garants en personne.
Des études ont montré que beaucoup de gens étaient prêts à payer plus
cher pour être sûrs de rester motivés. Si j’étais coach sportif, je dirais à mes
élèves : « Les séances annulées moins de 24 heures à l’avance vous seront
quand même décomptées. Mais si vous préférez, nous pouvons vous la faire
payer trois fois plus cher si vous annulez moins de 24 heures avant. »
Plusieurs Dévoués m’ont affirmé qu’ils opteraient pour la deuxième
solution.
Comme les Dévoués ont plus de facilité à faire les choses pour les autres,
ils seraient peut-être plus enclins à suivre les recommandations de santé si
on leur rappelait les conséquences bénéfiques que cela aurait sur leur
entourage. Une Dévouée a écrit :
Je suis enceinte de six mois et les cinq premiers mois, j’ai pris mes vitamines prénatales tous les
jours, pensant avant tout à la santé de mon bébé. Il y a un mois, j’ai lu un article qui expliquait
que le bébé ne pouvait pas manquer de vitamines, ponctionnant au besoin le stock de sa mère.
Les vitamines sont donc pour la mère. Maintenant que j’ai lié les vitamines à ma santé et non
plus à celle du bébé, je ne les prends plus qu’un jour sur deux, et encore !

L’entourage des Dévoués doit leur fournir un cadre responsabilisant en


prenant garde toutefois de ne pas provoquer de rébellion en insistant trop ou
en fixant des objectifs trop intimidants. Mais encourager sans accabler,
soutenir sans forcer, et responsabiliser raisonnablement est plus facile à dire
qu’à faire.

Choix de carrière pour un Dévoué


Les Dévoués peuvent réussir dans tous les domaines… pour peu qu’ils aient
des comptes à rendre et qu’ils anticipent leurs crises de rébellion. Ils
devraient avant tout garder en tête qu’ils sont plus productifs dans un cadre
qui les responsabilise. Un lecteur explique :
Je me suis récemment réorienté vers une carrière plus adaptée à ma nature Dévouée. J’étais
dans le domaine de la recherche universitaire, et au début, tout allait bien : je devais
régulièrement rendre des comptes à mon directeur de thèse et produire des articles. Mais j’ai
fini par avoir de moins en moins d’obligations, si ce n’est envers moi-même. Et c’est là que j’ai
commencé à manquer de motivation. J’ai quitté le domaine de la recherche pour un poste
d’enseignant, et j’adore ça. Chaque jour est l’occasion renouvelée de répondre aux attentes des
autres.

Un patron Dévoué a déclaré : « Le profil Dévoué convient parfaitement


à ma société qui fonctionne par mission et repose sur l’esprit d’équipe. »
En choisissant leur carrière, les Dévoués doivent éviter de s’en remettre
aux attentes de leur entourage au détriment de leurs propres aspirations.
Trouver un équilibre entre les attentes extérieures et intérieures, c’est toute
la problématique du profil Dévoué. Ce n’est qu’en déterminant ce qu’ils
veulent vraiment que les Dévoués pourront mettre en place un cadre
extérieur qui garantira leurs aspirations personnelles. S’ils ne le font pas, ils
risquent de se retrouver à exercer une profession qui ne leur convient pas du
tout, s’exposant ainsi à la frustration et à la rébellion.
Tous les métiers sont ouverts aux Dévoués si les conditions sont
favorables, mais de nombreux Dévoués m’ont dit avoir choisi des domaines
où leur nature était pratiquement un prérequis, à savoir le droit des sociétés,
le social, la gestion de patrimoine ou la médecine. « On passe régulièrement
des nuits blanches à faire de la programmation, m’a expliqué un Dévoué.
Quand un nouveau arrive dans l’équipe et qu’il refuse de travailler la nuit,
on sait qu’il ne fera pas long feu chez nous. »
Après avoir parlé à un groupe d’hommes d’affaires, l’un d’eux est venu
me voir : « Maintenant que j’ai découvert la typologie des quatre profils, je
ne vais engager que des Dévoués. Je veux des employés prêts à tout pour
atteindre leurs objectifs. Pouvez-vous me dire comment les repérer au cours
des entretiens ? » Sa demande m’a laissée pantoise. Cet homme n’avait
clairement pas les intérêts de ses employés à cœur.
EN RÉSUMÉ : INTERAGIR AVEC UN DÉVOUÉ
Ils répondent volontiers aux attentes extérieures, mais résistent à leurs attentes.
Ils accordent une grande importance aux engagements qu’ils prennent avec les autres.
Ils réussissent quand ils ont des comptes à rendre, des échéances précises, un suivi extérieur ou
d’autres formes de responsabilisation comme la volonté de servir de modèle.
Ils peuvent avoir du mal à fixer des limites aux exigences des autres.
Ils peuvent avoir du mal à déléguer, parce qu’ils se sentent personnellement obligés de faire telle ou
telle chose.
Ils ont besoin d’un garant ou d’un engagement extérieur pour répondre à leurs aspirations.
Les gens profitent facilement d’eux et à cause de cela…
Ils peuvent devenir amers, en vouloir aux gens et saturer, auquel cas…
Ils peuvent avoir besoin qu’on relâche la pression, sinon, ils entreront en rébellion.
LE REBELLE
« Personne ne peut m’y forcer, pas même moi »

« J’ai du mal quand je dois, c’est plus simple quand je veux. »

« Que les ponts que je brûle éclairent ma route. »


« Personne ne décide pour moi. »
« Je n’en fais qu’à ma tête… ce qui est une bénédiction et une malédiction. »

« Mieux vaut demander pardon que demander la


permission. »
« Je fais ce que je veux. »

« Parce que j’en ai envie. »


« Ne regarde pas, saute ! »
« Les règles sont faites pour être brisées. Mais alors, même celle-ci ? »

« La liberté comme seule discipline. »


« Personne ne peut m’y forcer, pas même
moi. »
« Je suis bien quand rien ne m’oblige. »
« Rebelle rime avec essentiel. »
9
Comprendre le Rebelle
« J’ai du mal quand je dois, c’est plus simple quand
je veux »
Forces • Faiblesses • Les variations au sein du profil • Comment inciter les Rebelles à répondre
à une attente • Comment les Rebelles peuvent s’efforcer à répondre à une attente • Pourquoi les
Rebelles peuvent être attirés par des vies très réglées

Tous les jours et à longueur de journée, nous sommes confrontés à des


attentes extérieures et à des attentes intérieures, et nous devons prendre la
décision d’y répondre ou d’y résister.
Pour les Rebelles, la réponse est simple : résister à toutes les attentes, aux
leurs comme à celles des autres. Ils ne veulent faire que ce qu’ils veulent,
comme ils le veulent et au moment où ils le veulent. Quand on leur
demande de faire quelque chose, ils résistent. Ils ne veulent même pas se
dire à eux-mêmes ce qu’il faut faire. Ils résistent à leurs attentes aussi
fortement qu’à celles qui leur sont imposées de l’extérieur.
Les Rebelles veulent avoir le sentiment d’avoir le choix, d’être libres, de
pouvoir s’exprimer. Le matin, la première chose qu’ils se disent, c’est :
« Qu’est-ce que j’ai envie de faire aujourd’hui ? » Ils résistent à toute forme
de contrôle, y compris le leur, et prennent un malin plaisir à déjouer les
règles, les attentes et les convenances.
Des arguments comme : « On compte sur toi », « Tu as déjà payé », « J’ai
fait ceci, pourrais-tu faire cela ? », « Je pense que c’est très important,
mettons-nous d’accord dès maintenant pour le faire », « C’est comme ça
qu’on fait », « Tu avais rendez-vous… », « Tu avais dit que tu le ferais »,
« Ça marchera mieux comme ça », « Ça gênera untel », « C’est contraire au
règlement », « C’est la tradition », « C’est la date limite » ou « C’est
malpoli » n’auront aucun effet sur les Rebelles.
Ils seront beaucoup plus réceptifs si on leur dit : « Ce sera sympa »,
« C’est ce que tu voulais », « Ça me stresse un peu, tu crois que tu peux le
faire ? », « C’est très important pour moi, et toi, qu’en penses-tu ? » Les
Rebelles peuvent tout faire du moment qu’ils le veulent.
Pour les Rebelles, la possibilité de choisir compte tellement qu’ils sont
capables de choisir quelque chose (qui les dessert ou qui leur déplaît) juste
pour pouvoir se dire qu’ils pouvaient le faire.
Au cours de mon étude, quand je demandais aux gens quelle était leur
aptitude à garder de bonnes habitudes, les Rebelles avaient tendance
à répondre : « En général, je préfère ne pas m’engager à l’avance. »
Des quatre profils, les Rebelles sont les moins nombreux. C’est un groupe
petit, certes, mais qui sait se faire remarquer !

Forces (et faiblesses)


Les Rebelles ne font que les choses qu’ils ont choisi de faire, ce qui les met
à l’abri des pressions auxquelles les autres profils sont exposés.
Ils aiment relever les défis à condition de pouvoir le faire à leur façon,
comme l’explique un entrepreneur :
En tant que Rebelle, il n’y a rien de tel qu’un défi pour me motiver. Vous croyez que je ne suis
pas capable de monter ma propre boîte ? Vous allez voir ce que vous allez voir. Dès que je me
surprends à penser : « Je ne peux pas… » ou « Je ne pourrais jamais… » Cela me donne envie
de le faire. Je n’en reviens pas des choses que j’ai réussi à faire juste pour me prouver que j’en
étais capable. On pourrait aisément manipuler un Rebelle ou du moins le mettre en danger en le
défiant. En tout cas, cela aurait de grandes chances de marcher sur moi.

Les Rebelles prennent un malin plaisir à défier les attentes des autres.
« Depuis que l’on m’a dit que je risquais de me faire agresser dans la
Coulée verte près de chez moi, j’y vais régulièrement faire une marche. Ce
n’est peut-être pas la meilleure raison de faire de l’exercice, mais ça
fonctionne ! » Un autre Rebelle raconte : « Les gens n’arrêtaient pas de me
dire que je ne pourrais jamais arrêter de boire. Je leur ai prouvé le contraire
et j’adore leur rappeler comme ils avaient tort. » Dans les réponses à mon
questionnaire, les Rebelles étaient les plus enclins à être d’accord avec
l’affirmation : « Cela ne me dérange pas d’enfreindre les règles ou les
usages, et parfois même, cela me plaît ».
Même s’ils n’en font qu’à leur tête, les Rebelles sont souvent durs avec
eux-mêmes, surtout quand ils ont quelque chose à prouver, comme en
témoigne une lectrice :
Le test dit que je suis une Rebelle, et j’ai tout de suite pensé que ça ne pouvait pas être vrai. Je
suis culturiste et je fais de la compétition en catégorie bikini. J’ai un régime alimentaire et un
programme d’entraînement très stricts. Pour moi, un Rebelle n’aurait pas pu s’imposer ça. Mais
d’un autre côté, je fais du culturisme parce que cela me plaît. Et je le fais comme il me plaît de
le faire. Je le fais même si mon mari ne comprend pas pourquoi, même si mes amis trouvent ça
bizarre et même si cela me demande énormément de travail. J’adore voir la tête que font les
gens quand je leur dis que je suis une bodybuildeuse (j’ai une silhouette fine et non massive),
ou quand je leur dis que j’étais électricienne dans la Marine. J’aime être à contre-courant. Je
comprends maintenant en quoi je suis une Rebelle.

Les Rebelles se moquent des conventions. J’ai rencontré plusieurs


couples de Rebelles où c’est la femme qui fait bouillir la marmite. J’ai
également lu un article dans le New York Times sur les différentes
distributions des rôles dans le couple. Les économistes avaient constaté
que : « les femmes qui gagnent plus [que leur mari] font aussi plus de
tâches ménagères et s’occupent plus de leurs enfants, peut-être pour que
leur mari se sente moins menacé. » Moi, je me suis dit que ces hommes
étaient peut-être des Rebelles qui se fichaient des conventions sociales, et
qu’à la façon des Rebelles, ils n’avaient aucune inclination à contribuer aux
tâches ingrates ou routinières du quotidien. Ce ne serait donc pas une
question de masculinité, mais de profil.
Les Rebelles sont des éléments indispensables de la société, comme un
Pointilleux le faisait remarquer : « Leur atout ? C’est leur capacité à entrer
en dissidence. Nous ne devrions pas essayer de les mater, de les faire rentrer
dans le moule ou de leur reprocher leur résistance. C’est en étant comme ils
sont qu’ils nous protègent tous. » Les « Rebelles avec une cause » mettent
leur esprit de contradiction au service des principes auxquels ils croient :
« J’ai toujours ressenti le besoin de défier l’autorité, mais j’agis toujours
pour le bien. Je ne suis pas d’accord avec certaines règles et il m’arrive de
les enfreindre délibérément pour tous ceux qui en ont subi les injustices. »
Quand j’entends parler d’une personne qui sort des sentiers battus – la
première femme à travailler sur une plate-forme pétrolière par exemple – je
me dis que c’est probablement une Rebelle.

Voici un fervent témoignage :


Un Rebelle en mission est une force de la nature, rien ne lui résiste. Pas besoin de programme
d’attaque, de répétitions, de règles ou d’habitudes pour que ce soit fait. Il a un besoin vital de
croire en quelque chose et de se battre pour. Et quand il croit en quelque chose, rien ni personne
ne saurait l’en faire démordre. Le Rebelle se sent à part, unique, voire supérieur. Il a quelque
chose d’arrogant. Seule une cause en laquelle il croira saura le dompter.

Le choix du vocabulaire est également très révélateur. Je connais un


Rebelle qui prenait un grand plaisir à parler des non-Rebelles comme des
Moldus.
Les Rebelles accordent la plus haute importance à l’authenticité, au libre
arbitre. Leur vie elle-même doit être l’expression de ces valeurs. La
compagnie des Rebelles peut être très libératrice, surtout pour les Dévoués,
qui admirent cette liberté et cette capacité à rejeter les obligations.
Les Rebelles aiment faire les choses à leur façon, aussi délirante soit-elle.
Avant de me présenter à une de ses connaissances, une amie m’a murmuré :
« Juste un petit détail : c’est un adepte du “check”. » « Du quoi ? » me suis-
je demandé. J’ai fini par comprendre quand, en lui tendant la main pour le
saluer, il m’a présenté son poing. Il n’était pas question pour lui de serrer la
main comme tout le monde. Le fils d’un ami Rebelle a refusé de s’inscrire
à la fac jusqu’à ce qu’il dégote une université internationale que personne
ne connaissait. Ce n’est qu’en trouvant lui-même sa voie, qu’il a pu
s’engager.
Moins il y a d’attentes, mieux les Rebelles se porteront. Une Rebelle m’a
confié avoir eu ses meilleures notes au dernier trimestre du lycée, quand
elle a su qu’elle était admise à l’université, et au dernier semestre de la fac,
quand elle a reçu une réponse positive à une demande d’emploi. Un Rebelle
m’a dit : « J’écris un livre et je vais le finir avant de chercher un éditeur,
parce que je sais qu’à partir du moment où j’aurais un éditeur et une date de
remise du manuscrit, je n’aurai plus envie d’écrire. »
En tant que Disciplinée, j’ai beaucoup appris en étudiant mon profil
« opposé », le Rebelle. Les Rebelles m’ont montré que nous étions plus
libres que nous ne le croyions. Si je décidais de ne pas me lever avant
10 heures du matin, ma famille et mes collègues finiraient par s’en
accommoder. Si je décide de porter des pantalons de yoga et des baskets
jusqu’à la fin de ma vie, personne ne m’en empêcherait.
Nous sommes beaucoup plus libres que nous ne le croyons.

Faiblesses (et forces)


Les Rebelles ne manquent pas de qualités, loin de là, mais ils ont aussi l’art
et la manière d’énerver les autres (et de s’énerver eux-mêmes).
Quand on leur demande ou quand on leur dit de faire quelque chose, les
Rebelles refuseront instinctivement. Et ce n’est pas toujours facile à gérer
pour leur conjoint, médecin, parents, professeurs ou supérieurs. Plus ces
derniers insisteront, et plus les Rebelles résisteront. J’ai beaucoup ri quand
une de mes amies m’a raconté : « Personne ne peut me dire ce que je dois
faire. Il n’y a pas longtemps, j’ai reçu un mail avec comme objet : “À lire”.
Je l’ai aussitôt supprimé. »
Les Rebelles sont réfractaires à tout ce qu’ils perçoivent comme une
tentative de les contrôler, que ce soit un téléphone qui sonne, un carton
d’invitation ou une réunion programmée. Et cela, même s’ils comprennent
que leur résistance est dommageable, contre-productive ou contraire à leurs
propres aspirations. Un Rebelle m’a confié : « Le sucre me rend malade,
mais il m’arrive de me dire que je vais manger du sucre, juste parce que je
refuse l’idée de ne pas pouvoir faire ce que je veux. » Un autre Rebelle
a écrit : « Au lycée, j’ai commencé à prendre du Ritaline pour réguler mon
hyperactivité. J’arrivais beaucoup mieux à me concentrer, mais je me suis
demandé de quel droit un médicament pouvait contrôler ma personnalité, de
quel droit un petit comprimé pouvait faire de moi un meilleur élève. C’était
pourtant le but recherché. Mon attention s’est améliorée, mais pas mes
notes. »
Un étudiant en droit a écrit :
Je m’en sors plutôt bien dans la vie, mais je ne me coule pas dans les normes. Comme je suis en
droit, tout le monde s’attend à ce que j’étudie jour et nuit en bibliothèque, du coup, j’étudie
l’après-midi dans un café. À mon école, tous les étudiants vont chercher à se faire embaucher
par de grands cabinets, parce que ce sont eux qui paient le mieux, du coup je vais me spécialiser
en droit constitutionnel. Ma nature Rebelle m’attire parfois des ennuis. Cela fait des mois que je
dois rendre un relevé d’heures de travail et j’ai loupé pas mal de cours obligatoires.

Son témoignage illustre un paradoxe important : en voulant à tout prix


être libres, les Rebelles peuvent se laisser déterminer indirectement ou
négativement par les circonstances. Cet étudiant s’est spécialisé en droit
constitutionnel non pas parce que cela l’intéressait, mais parce qu’on
s’attendait à ce qu’il se spécialise en droit des affaires. Se rebeller, c’est
s’opposer, ce n’est pas forcément être libre.
Un autre Rebelle m’a dit : « Sur moi, l’émulation a l’effet contraire de
celui recherché. Si on essaie de me convaincre de faire quelque chose, je
vais me rebeller et faire systématiquement le contraire. »
Les Rebelles ont leur propre agenda et si quelqu’un les presse à agir, ils
auront tendance à résister et à prendre encore plus leur temps, au risque de
se faire taxer de procrastineurs. Mais ce n’est pas nécessairement parce
qu’ils rechignent à se mettre à travailler, ils refusent juste de se faire
commander. Plus on les poussera à faire quelque chose et moins ils le
feront.
Pour leur entourage, ce peut être extrêmement frustrant, comme le
rapporte une Dévouée :
J’ai tendance à prendre les choses en mains quand mon mari ne le fait pas. J’ai attendu six mois
pour qu’il s’y mette, avant de finir par le faire moi-même. C’était plus simple. Il dit que tout ne
peut pas être fait à mon rythme. Une fois, il a entrepris des travaux dans la maison. Ce qui
aurait dû lui prendre deux semaines s’est éternisé sur plus d’un an. Ça l’énervait quand je le lui
rappelais. Il n’aimait pas se sentir obligé de faire quelque chose et je n’aimais pas que les
travaux restent en plan.

En lisant ces mots, je me suis dit : « Peut-être que ces travaux ont duré
plus d’un an, parce qu’elle était toujours sur son dos. »
Les Rebelles ont du mal avec tout ce qui est programmé. Voir un
événement sur le calendrier leur donne le sentiment d’être coincés, et quand
ils prévoient des choses, ils les annulent souvent à la dernière minute.
Ils n’aiment pas les tâches répétitives et ennuyeuses comme sortir les
poubelles ou tenir des comptes, et ne le font que lorsqu’ils ne peuvent plus
y échapper. Ils ont souvent recours aux prélèvements automatiques pour
régler leurs factures et quand ils peuvent se le permettre, ils engagent
quelqu’un pour les tâches ménagères. Ils ont bien vu aussi que d’autres
finissaient souvent par faire les choses à leur place.
Comme tout le monde, quand ils ne peuvent faire autrement, les Rebelles
s’exécutent… sans toutefois perdre leur esprit frondeur. J’ai demandé à une
amie Rebelle comment elle faisait pour régler ses factures à temps. Elle m’a
répondu du tac au tac : « Je le fais quand je suis au bureau, quand je suis
censée travailler. » Un ami Rebelle fait systématiquement et ostensiblement
des mots croisés sur sa tablette pendant les réunions. On peut certes
l’obliger à être présent, on ne peut pas l’obliger à participer.
Même quand ils reconnaissent la validité d’une contrainte, les Rebelles
ont du mal à l’accepter. Un Rebelle m’a confié : « Je suis marié depuis
cinq ans, et j’aime ma femme, mais le concept de monogamie me dérange.
Je ne supporte pas qu’on me dise ce que je peux ou ne peux pas faire. Je
veux pouvoir tout expérimenter et me réaliser pleinement, et cela implique
d’être avec plus d’une personne. » (Il a divorcé depuis.)
Les Rebelles refusent de recevoir une étiquette, même pertinente. Ils vont
ainsi déménager ou changer souvent de travail pour ne pas être prisonniers
d’un personnage. Certains vont aller à l’encontre même de ce qu’ils ont pu
dire pour ne pas se sentir enchaînés à ce point de vue. Ils refuseront alors de
faire ce qu’ils avaient dit, parce qu’ils ne veulent pas être tenus par quoi que
ce soit, même par leur propre parole. Ils n’accordent aucune importance
à leur réputation. Être considérés comme difficiles ou différents ne leur
déplaît pas (ce qui est autant un avantage qu’un inconvénient).
Les Rebelles n’aiment pas que l’on puisse décider à leur place ou dicter
leur comportement. J’ai constaté une constante intéressante : quand les
Rebelles s’inscrivent à une école, ils n’en choisissent qu’une. Ils savent où
ils veulent aller et ne veulent pas laisser un comité d’admission choisir leur
avenir pour eux.
S’ils résistent aux attentes qui leur sont imposées, certains Rebelles
n’hésitent pas à imposer les leurs. Comme Samuel Johnson le faisait
remarquer : « Ceux qui réclament la liberté à cor et à cri sont peu enclins
à l’accorder. » Une Rebelle a écrit non sans autodérision : « Je veux que les
autres fassent ce que je veux, et je veux pouvoir faire ce que je veux. »
Face à un Rebelle, mieux vaut tenir compte de sa nature frondeuse. Ce
n’est pas feint et cela ne lui passera pas. Une lectrice Rebelle m’a envoyé
un mail poignant : « Mais nous allons bien finir par nous rendre compte que
nous ne pouvons pas toujours faire ce que nous voulons, non ? Ce n’est pas
ça être adulte ! » Et pourtant, il y a des adultes comme ça. Et les Rebelles
sont comme ça. Pour le meilleur et pour le pire.

Variations au sein du profil

Comme c’est le cas pour tous les profils, le profil des Rebelles en recoupe
deux autres, celui des Pointilleux (qui résistent également aux attentes
extérieures) et celui des Dévoués (qui résistent également aux attentes
intérieures). Les Rebelles à tendance Pointilleux sont très différents des
Rebelles à tendance Dévoués.
Les REBELLES/Pointilleux tendent plus à réaliser leurs désirs qu’à
résister aux attentes extérieures. Leur esprit de contradiction reste fort, mais
ils accordent plus d’importance à faire ce qu’ils veulent qu’à défier les
autres. Les REBELLES/Pointilleux ne résistent pas vraiment à leurs
aspirations, comme l’un d’eux le fait remarquer : « Si je n’ai rien contre
quoi me rebeller, ça va. Comme tout le monde se fiche de savoir si je fais
du sport ou pas, j’en fais tout le temps. J’adore travailler pour moi-même,
j’ai plus de mal quand c’est pour les autres. »
Les REBELLES/Dévoués ont un esprit de contradiction et une volonté
d’échapper à un contrôle plus poussé. Les deux aspects de leur nature
résistant aux attentes intérieures, ils seront davantage exposés à la
frustration et à la rébellion. C’est pourquoi les REBELLES/Dévoués seront
plus enclins à s’obstiner : « Rien ne peut m’obliger ! » même pour répondre
à leurs propres désirs. Ainsi, dans son essai I Refuse to Be a Grown-Up (Je
refuse d’être une adulte), Elizabeth Wurtzel déclare : « Je fais ce que je
veux. Je ne fais pas ce que les autres veulent que je fasse. Il m’arrive aussi
de ne pas faire ce que je veux, parce que quelqu’un d’autre veut absolument
que je le fasse. »
Même quand ils ont envie de faire quelque chose, l’approbation ou les
encouragements des autres vont déclencher leur résistance. Un Rebelle
explique comment la bienveillance de ses parents le freine : « Quand
j’essaie de prendre de bonnes habitudes comme me lever tôt ou manger
sain, je finis par abandonner, parce que je sais que ce sont des choses que
mes parents approuvent (même s’ils ne me font aucune remarque). »
Pour résumer, les REBELLES/Pointilleux penseront : « Je fais ce que j’ai
choisi de faire », tandis que les REBELLES/Dévoués se diront : « Je refuse
de faire ce qu’on me dit de faire ».
Bien entendu, les différents traits de caractère vont nuancer tout cela. Un
Rebelle empathique se comportera différemment d’un Rebelle que les
autres laissent indifférent. La vie d’un Rebelle ambitieux n’aura rien à voir
avec celle d’un Rebelle qui n’accorde aucune importance à la réussite. Chez
certains, la rébellion se manifestera ouvertement et frontalement, chez
d’autres, elle prendra des formes plus discrètes et non conflictuelles.
Certains Rebelles adhèrent complètement à leur nature profonde, comme
l’atteste ce témoignage :
J’ai entrepris des choses que les gens pensaient impossibles. Les Rebelles n’ont pas froid aux
yeux, ce sont de véritables révolutionnaires. Ils vont changer la donne, parce qu’ils sortent des
sentiers battus. Étant un Rebelle, j’incite les autres à sortir de leur zone de confort, à voir et
à faire les choses « autrement ».

Certains Rebelles (comme certains Dévoués) vivent mal leur tendance


naturelle et souhaiteraient avoir un autre profil. Plusieurs personnes m’ont
avoué être ce qu’elles appellent des « Rebelles réticentes », parce qu’elles
se sentent isolées ou frustrées d’être en perpétuel conflit avec les autres et
elles-mêmes. Un photographe s’explique :
J’envie les autres profils. J’ai souvent l’impression que les gens sont plus épanouis et s’en
sortent mieux que moi en tant « qu’adulte ». Je suis malheureux, parce que je n’arrive pas
à concrétiser mes grands projets. Je suis pourtant très créatif. Je gagne ma vie principalement
avec mes photos. Cela devrait me pousser à développer cette activité, mais rien que d’y penser,
je n’ai plus envie de toucher à mon appareil. J’ai peur qu’en me lançant vraiment dans cette
carrière, je finisse par détester ça.

Une fois qu’ils ont compris les spécificités de leur nature, les Rebelles
peuvent trouver des moyens d’en compenser les mauvais côtés.

Comment inciter les Rebelles à répondre à une attente


Les Rebelles font ce qu’ils veulent, pour les raisons qui leur sont propres. Si
on leur demande de faire quelque chose, ils auront tendance à refuser. Leur
entourage doit se garder de mettre le feu aux poudres sans le faire exprès.
Ce qui est plus facile à dire qu’à faire.
Un Rebelle doit pouvoir se dire : « Ça vient de moi ». Sachant cela, la
meilleure stratégie est peut-être de lui faire croire qu’il en a eu l’idée.
Comment avoir des relations constructives avec un Rebelle ? Pour faire
simple, je dirais : informations, conséquences et choix. Il faut lui donner les
informations nécessaires pour éclairer son raisonnement, le prévenir des
conséquences possibles de ses actions et le laisser prendre sa décision sans
lui faire la leçon, sans insister, sans le bousculer.
• Un parent pourrait dire : « Les enfants qui restent longtemps dehors
peuvent prendre des coups de soleil. Et ça fait très mal. Certains ont
même des cloques et ils pèlent. Ils sont alors obligés de rester à la
maison pendant que les copains s’amusent dehors. Tu veux mettre de la
crème solaire ou porter une casquette et un t-shirt à manches longues ?
• Un enseignant pourrait dire : « Pour décrocher leur diplôme, les élèves
doivent faire cent heures de bénévolat. Ceux qui s’y mettent dès la
première ou la deuxième année pourront choisir leur projet et répartir ces
heures comme ils le veulent. J’ai connu des élèves qui n’ont commencé
qu’en dernière année et qui ont dû y consacrer toutes leurs vacances de
printemps. Je reste à votre disposition pour discuter des différents projets
proposés. »
• Un mari ou une femme pourrait dire : « Les emplois du temps des
enfants sont très chargés et toutes les activités sont programmées
à l’avance. Si l’on ne donne pas la date des réunions de meute une
semaine à l’avance, tous les Louveteaux ne pourront pas y assister. Ton
fils sera tout penaud. C’est toi le chef de meute, c’est à toi de décider du
planning. »
• Un médecin pourrait dire : « Des études très sérieuses ont montré qu’une
activité physique régulière, passés 60 ans, prévient les conséquences
débilitantes des chutes et diminue les risques de perte d’autonomie. Si
cela vous intéresse, ce dépliant présente toutes sortes d’activités
adaptées. »
• Un patron pourrait dire : « Le client nous a donné un budget et un délai
d’un mois pour ce projet. S’il est satisfait de notre travail, il nous passera
d’autres commandes, plus importantes. Cela veut dire potentiellement
beaucoup d’argent en perspective. Est-ce que tu es partant ? »
Les Rebelles font ce qu’ils veulent, mais si leur action a des
conséquences déplaisantes, ils peuvent décider d’y renoncer. Même s’ils ont
tendance à s’entêter et à ne pas vouloir écouter quand on leur dit : « C’est
comme tu veux, mais tu as vu que… ? », ils finissent par intégrer cette
information.
Pour que la formule information-conséquences-choix fonctionne, il faut
que les conséquences encourues soient vraiment préjudiciables pour leur
santé, leur réputation ou leur confort. Et il faut les laisser subir les
conséquences de leurs actions, même si ce n’est pas agréable à voir, et
même si ces conséquences affectent d’autres personnes aussi, car si
quelqu’un se charge du problème à leur place, ils n’auront plus aucune
raison d’agir.
J’en discutais avec un ami Dévoué dont la femme est une Rebelle : « Je
comprends bien, mais le problème, c’est qu’il n’y a pas qu’elle qui en subit
les conséquences, moi aussi. Quand elle ne paie pas les factures, on me
coupe les chaînes du câble. Quand elle décide à la dernière minute de ne pas
aller à ce concert, je perds le prix des billets.
– Quoi qu’il en soit, ai-je dit en essayant de ne pas être trop dure, tu vas
devoir trouver un moyen de composer avec sa nature, ou alors tu devras
chaque fois en subir les conséquences. »
Une amie me parlait d’une connaissance commune : « Elle était invitée
à une grande soirée caritative, mais a refusé de confirmer sa présence par
retour de courrier. L’association l’a appelée plusieurs fois en lui précisant
que le traiteur avait besoin de connaître le nombre d’invités présents au
dîner, mais elle ne leur a jamais répondu. Le soir en question, elle est
arrivée et s’est plainte toute la soirée de la table à laquelle ils l’avaient
placée.
– Tu vois, ai-je fait en sautant sur l’occasion de mentionner les quatre
profils, l’association s’y est mal prise ! Ils auraient dû appliquer la formule
information-conséquences-choix en disant : “Si vous nous répondez
rapidement, vous aurez le choix de la table et des convives. Si vous tardez
à répondre, les tables seront prises et nous serons obligés de vous placer
avec des inconnus. Faites-nous savoir ce que vous avez décidé.” »
Information, conséquences, choix. Sans reproche, sans condescendance et
sans pression.
La nature contrariante des Rebelles est aussi ce qui les rend facilement
manipulables. Il suffit d’exploiter leur penchant à se dire : « Personne ne
m’obligera », « Je te prouverai le contraire » ou « Tu vas voir ce que tu vas
voir ». Une amie, qui avait du mal à décoller sa fille Rebelle de l’écran de
télé, a fini par lui dire : « Tu as beaucoup travaillé ces derniers jours. Tu
devrais te détendre, rester à la maison quelques jours et regarder la télé. »
À peine avait-elle fini de dire ça, que sa fille s’est levée et a éteint la télé
avant de sortir.
« Je ne pense pas que tu puisses finir ce rapport pour vendredi », « Tu
n’arriveras jamais à arrêter le sucre » ou « Ça m’étonnerait que tu aimes
ça » ne manqueront pas de titiller l’esprit de contradiction du Rebelle
(certains ne se laisseront pourtant pas avoir !). Il suffit parfois de dire :
« Ah, tu ne vas pas à la gym, aujourd’hui » pour que le Rebelle en prenne
aussitôt le contre-pied : « Bien sûr que si ! » Si au contraire vous dites :
« Tu ne devrais pas aller à la gym aujourd’hui ? », il sera enclin à vous
répondre : « Non, je n’y vais pas. »
Certains psychothérapeutes ont recours à « l’intervention paradoxale » ou
psychologie inversée. Ils vont prescrire le comportement inverse de celui
qu’ils souhaitent suggérer. De nombreuses raisons expliquent le succès de
telles techniques, et je parie que cela marche avec les Rebelles. Si un enfant
fait une crise chaque fois qu’on lui dit de faire son lit, ses parents pourraient
lui dire : « Avant de faire ton lit, prends quelques minutes et crie aussi fort
que tu peux. »
Une Rebelle explique comment elle a appris à déjouer son esprit de
contradiction : « En tant que Rebelle, ma première réaction, quand on me
demande de faire quelque chose, ou pire, quand on vérifie ce que je fais,
c’est de dire : “Non, laissez-moi tranquille.” Quand cela m’arrive, je me
force à me rappeler que je suis libre de faire ce que je veux, qu’on me le
demande ou pas. Ne pas faire quelque chose juste parce qu’on me l’a
demandé est tout aussi contraignant que de le faire, parce qu’on me l’a
demandé. »
Malgré leur tendance à résister quand on leur demande de faire quelque
chose, les Rebelles peuvent décider de le faire par amour. Ils agissent alors
par désir et non par obligation. Ils peuvent décider de répondre à une attente
pour montrer leur amour. Cela reste un choix. Un adolescent explique : « Je
voulais faire plaisir à ma mère et j’avais prévu de faire le ménage pendant
qu’elle faisait les courses. Mais en partant, elle m’a dit de nettoyer la
maison. J’ai tout de suite pensé : “Oh non ! C’était sympa quand c’était
pour te faire une surprise ! Maintenant, c’est devenu une corvée”. »
Quand les médecins, parents, conjoints, professeurs, amis ou patrons
poussent les Rebelles à faire quelque chose, ils ne font que les pousser
à leur résister.
Leur promettre une récompense peut même avoir l’effet contraire de celui
que l’on recherche. « Si tu finis ton travail vite, tu pourras partir plus tôt »
ne marche pas forcément. Les félicitations ou les encouragements peuvent
aussi les braquer au lieu de les motiver, comme une Rebelle en témoigne :
Je me suis mise à la course à pied l’été dernier avec un programme
progressif de 0 à 5 kilomètres. Quand j’ai atteint mon premier kilomètre, je
l’ai annoncé sur les réseaux sociaux. J’ai eu plein de messages
d’encouragements et de félicitations : “Continue comme ça !”, “Aux
5 kilomètres dès cet automne !” Sur le moment, ça m’a fait plaisir. Mais j’ai
arrêté de courir. Au début, j’ai mis ça sur le compte du travail, du mauvais
temps… mais en fait, je me rebellais contre toutes ces attentes. »

Un autre Rebelle rapporte une expérience similaire :


J’étais à la fac et j’étudiais quelque chose qui me plaisait depuis toujours. J’avais de très bons
résultats (18 de moyenne), quand le professeur m’a convoqué dans son bureau et m’a dit :
« Vous pourriez faire encore mieux. » Dès lors, mes notes ont baissé. J’avais l’impression que si
j’arrivais à 20 de moyenne comme il le voulait, je le laissais gagner.

Les Rebelles n’aiment suivre les injonctions de personne, même pour


faire quelque chose qui leur plaît, comme une lectrice l’écrit :
Au début de mon mariage, je ne comprenais pas pourquoi mon mari ne se jetait pas sur moi
quand je mettais de la lingerie sexy. J’ai fini par en rire. Je sais maintenant que si je veux passer
une soirée tranquille, il me suffit de porter de la dentelle noire. J’ai compris que mon mari est
un Rebelle. Il ne veut même pas qu’on lui « suggère » quand faire l’amour. Après vingt ans de
mariage, j’ai appris à faire des avances très discrètes, pour qu’il ait l’impression que cela vient
de lui et non de moi.

De même, lorsqu’un Rebelle propose de faire quelque chose, il est


préférable de ne pas proposer quelque chose de « mieux » :
Si mon mari est d’humeur à faire quelque chose qui m’arrange, je n’ai pas intérêt à laisser
l’occasion filer. Elle pourrait ne pas se représenter avant un bout de temps ! Avant, s’il m’avait
dit un soir de semaine : « Je vais ranger le garage », j’aurais certainement répondu : « Attend le
week-end, on aura plus de temps et on pourra emmener directement ce qui ne nous sert plus aux
bonnes œuvres, etc. » Maintenant, je dis : « Super ! »

L’entourage d’un Rebelle veut souvent l’aider, l’encourager, lui rappeler


ses obligations, mais en ce faisant, il ne va que le pousser à résister,
obtenant ainsi le contraire de ce qu’il voulait. Une Rebelle s’en désole :
J’allais commencer une recherche d’emploi quand mon mari (un Dévoué) s’est mis à me
bombarder de questions. Il m’a dit que je ne faisais pas assez d’effort. J’ai arrêté de chercher.
C’est plus fort que moi, je bloque, parce que je me sens scrutée et acculée. Il dit qu’il veut
m’aider dans mes recherches. Il ne me fait pas confiance pour gérer ça toute seule. Tout se
serait bien passé s’il ne s’en était pas mêlé.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de compromis possible. Au lieu
d’imposer une date précise à un Rebelle, laissez-lui le choix d’en fixer une
dans un laps de temps donné. Ainsi, un collègue pourrait dire : « Le patron
nous rebat les oreilles avec le budget prévisionnel de l’année prochaine. Ce
serait bien qu’on puisse faire le point la semaine prochaine. Tu me diras
quand cela t’arrange. » Un ami pourrait dire : « Je vais être débordé dans les
mois qui viennent, mais je suis libre ce week-end. Appelle-moi si tu veux
qu’on se voie. »
Information, conséquences, choix.

Comment les Rebelles peuvent s’efforcer de répondre à une


attente
Si les Rebelles ont l’art d’agacer les autres avec leur esprit de contradiction,
ils se déçoivent parfois eux-mêmes en s’empêchant de faire ce qu’ils
veulent vraiment. C’est l’effet pervers de la rébellion systématique. Une
Dévouée a écrit :
J’ai posé quelques questions du test à mon mari sans lui dire que c’était un test de personnalité
(il aurait refusé de le faire si je le lui avais demandé). Toutes ses réponses entrent dans la
catégorie Rebelle : il ne veut pas se sentir coincé, si l’on arrive à lui soutirer un engagement, il
finit le plus souvent par changer d’avis, et il fait en général le contraire de ce qu’on attend de
lui. Ça l’énerve de ne pas réussir à se forcer à faire ce qu’il veut pour être heureux. Il s’en veut
de ne pas faire de sport. Il est triste de voir que les gens pensent qu’il n’est pas fiable, qu’on ne
peut pas compter sur lui. Moi, j’admire sa ténacité et sa fermeté, mais que voulez-vous faire
quand vous n’êtes pas capable de répondre à vos propres aspirations ?

En mettant leur liberté au-dessus de tout, les Rebelles confondent parfois


libre arbitre et indiscipline.
Ils résistent à tout ce qui est prévu et programmé, même si c’est conforme
à leur volonté. (Je tiens toutefois à préciser que certains Rebelles adorent les
plannings clairs et les listes de choses à faire. Cela peut sembler contraire
à leur nature rebelle, mais ils s’y tiendront si c’est ce qu’ils veulent faire.)
Ils aimeraient parfois adopter certaines habitudes – faire du sport, éditer
leurs factures, démarcher des clients – mais n’y arrivent pas à cause de leur
refus de se sentir tenus par quelque chose. Les stratégies utilisées par les
autres profils sont souvent inefficaces avec eux.
Que peut donc faire un Rebelle ? Ceux qui ne supportent pas les
habitudes, les engagements et les choses déterminées à l’avance peuvent
trouver des moyens de faire les choses à leur façon. Ce qu’il faut retenir,
c’est : ils peuvent faire tout ce qu’ils veulent du moment qu’ils le veulent.
Les Rebelles peuvent répondre aux attentes quand elles sont l’expression
de leur identité, quand elles leur permettent d’être le genre de personne
qu’ils veulent être. Un écrivain raconte :
Si je m’inscris à un défi de 30 jours d’écriture, je me condamne à la panne sèche. Le pire serait
d’annoncer sur mon blog que je suis en train de préparer quelque chose. Je me bloquerais net.
Ce que je fais plutôt, c’est me dire que je veux être le genre d’auteur à écrire tous les jours.
J’imagine alors ce que serait ma vie si je me levais le matin et que je me mettais à écrire, la
sensation que cela me procurerait une fois que j’aurais écrit, et là, je le fais.

Les Rebelles veulent rester fidèles à eux-mêmes. Ils peuvent tenir une
habitude si elle est en accord avec l’idée qu’ils ont d’eux-mêmes. Un
Rebelle explique : « Si une habitude fait partie de ce que je suis, elle ne
m’enchaîne pas. Elle me permet au contraire d’être qui je suis. » Pour
respecter un budget, le Rebelle peut se projeter comme celui qui fait des
choix avisés. Une Rebelle a écrit : « Je ne m’oblige pas à faire de l’exercice,
manger sainement, etc., je le fais par respect pour moi-même, parce que je
suis une personne qui prend soin de mon corps. Comme cela fait partie de
qui je suis, je le fais tout naturellement. »
Pour composer avec leur nature, certains Rebelles savent faire preuve
d’imagination : « Quand je dois faire des tâches répétitives, tout en moi se
rebelle. Alors, je joue à un jeu que j’appelle « Comme si… » Je fais comme
si j’étais quelqu’un d’autre, comme si j’étais un acteur en train de jouer un
majordome, un grand chef, un architecte d’intérieur, un célèbre poète, un
scientifique super cool… C’est idiot, mais ça marche. »
Une Rebelle a combiné la stratégie de l’identité et son goût pour les
défis : « Pour faire les choses, je me lance des défis. Je me dis : « Je suis
une Rebelle capable d’assumer le quotidien et d’aller au bout des choses. »
J’aime les défis. Je trouve ça subversif d’être une Rebelle capable d’être
disciplinée, parce que justement, on ne s’y attend pas. »
De même, les Rebelles peuvent lier une activité à une valeur qui leur est
chère. « J’ai réussi à faire du sport en m’inscrivant à un marathon dont les
fonds sont reversés à une cause humanitaire à laquelle je tiens. En liant
cette course à mon besoin de “faire quelque chose” pour cette cause, je
garantis mon assiduité. »
Inversement, un Rebelle recommande d’utiliser la stratégie de l’aversion.
Les Rebelles n’aiment pas être prisonniers d’une étiquette, même celle de
Rebelle. Il explique : « J’ai conscience de ma nature Rebelle, alors (et c’est
le plus important) je me rebelle contre ma nature Rebelle pour choisir ce qui
va m’aider à atteindre mon objectif. »
L’identité du Rebelle peut se définir par défaut. Ainsi, un Rebelle peut
décider de se fixer des habitudes pour ne pas devenir tel ou tel personnage.
« Je ne suis pas le genre d’entraîneur à faire attendre les enfants parce qu’il
est en retard. Je suis quelqu’un de responsable, probablement parce que ma
mère, la personne contre laquelle je me suis le plus rebellé, disait toujours
que j’étais irresponsable. »
Les Rebelles rivalisent d’ingéniosité pour ne pas chatouiller leur esprit de
contradiction. Ils en font un jeu, un défi, un choix, comme en témoigne l’un
d’eux : « Entre deux projets de longue haleine (importants certes, mais que
je trouve barbants) je me lance des petits défis, comme faire toute la
paperasse des free-lances de la société en quelques jours. » Un autre
Rebelle transforme les tâches routinières ou planifiées en un jeu :
Au lieu de dresser des listes de choses à faire, je les écris sur des petits bouts de papier pour les
tirer au sort un par un. Je ne peux procéder à un tirage qu’après avoir fini la tâche précédente.
Cela donne un petit côté aléatoire qui me plaît et c’est moins intimidant de voir ces bouts de
papier qu’une longue liste de tâches à faire.

Un autre Rebelle joue sur le pouvoir des mots. « Dès que je vois “à faire”
sur une liste, je me sens obligé de le faire, et donc je ne le fais pas. Une liste
de choses “à envisager” en revanche me rappelle que je peux choisir de
faire telle ou telle tâche. »
Parfois, il suffit aussi de changer de perspective. Au lieu de se dire
« Cette personne s’attend à ce que je fasse telle chose », ce qui va
automatiquement déclencher son esprit de contradiction, le Rebelle peut
penser : « Cette personne va dans mon sens, cela m’aidera à atteindre mon
objectif », ou « À ce poste, j’acquiers les compétences que je voulais ». Une
amie m’a raconté : « Ma conseillère financière avait besoin d’informations
que je refusais de lui envoyer… parce qu’elle me les avait demandées. J’ai
fini par me dire : “Elle travaille pour moi, elle va m’aider à renégocier mon
emprunt et faire des économies. Ce sera toujours ça que les banques
n’auront pas.” J’ai pu alors lui envoyer ce qu’elle me demandait. »

L’aversion des contraintes peut motiver les Rebelles à se libérer des


comportements addictifs. Ainsi, ils renonceront à la cigarette, à la
malbouffe, à l’alcool ou à la technologie pour ne pas en être dépendants.
Une Rebelle a écrit :
Avant, quand j’essayais de suivre un régime, je me disais : « Je ne peux plus faire ce que je
veux », et cela suffisait pour que j’abandonne. Maintenant, je vois les choses autrement : « Je
fais ce que je veux, et c’est de cette façon que je veux manger dorénavant. »
Je trouve que les industriels nous poussent à manger n’importe quoi. Ils bourrent leurs produits
de gras et de sucre pour nous faire aimer leurs cochonneries. Ils veulent qu’on en redemande,
qu’on soit accro, qu’on soit dépendant. Qu’ils gardent leurs camelotes hors de prix ! Il n’est pas
question que je touche à leurs cookies, biscuits apéritifs, chips, farine blanche, sucre raffiné et
autres produits bobos qui se posent comme des alternatives saines. C’est assez rebelle pour
vous ?
Je n’ai pas l’impression de me priver de quoi que ce soit à cause de ma nature Rebelle. Il
m’arrive de déroger à mes règles et de grignoter quand j’en ai envie, mais de façon générale, je
suis contre la malbouffe industrielle.

Les Rebelles n’aiment pas être tenus à un emploi du temps, ils s’en
sortent mieux quand ils peuvent faire ce qu’ils veulent, quand ils le veulent,
sans qu’on n’attende rien d’eux. S’ils veulent faire du sport, au lieu de
programmer des alarmes sur leur téléphone pour leur rappeler d’aller à la
gym, ils peuvent répertorier les cours disponibles dans le secteur pour
pouvoir, quand ils seront d’humeur, en choisir un qui leur convient sur le
moment.
Les Rebelles font ce qu’ils veulent. Ils peuvent aussi agir pour éviter
quelque chose. Un Rebelle m’a dit :
Je fais ma déclaration de revenus à temps pour ne pas avoir à me battre avec les impôts. C’est
épuisant, et je parle d’expérience. Je mets mon clignotant avant de tourner, non par respect du
Code de la route, mais pour éviter qu’un crétin me rentre dedans.

Certains vont se forcer à faire quelque chose, parce que refuser de le faire
entraînerait des conséquences encore plus indésirables. Pour rester
prolifique, une auteure Rebelle donnait son argent aussitôt gagné. Elle
savait que si elle n’était pas obligée d’écrire pour avoir de l’argent, elle
n’aurait plus écrit.
Ce n’est qu’en comprenant les spécificités de leur profil que les Rebelles
pourront en tirer parti et réussir à faire tout ce qu’ils veulent vraiment.

Pourquoi les Rebelles peuvent être attirés par des vies très
réglées
La personnalité Rebelle n’est pas sans paradoxes. Il n’est pas rare de voir
des Rebelles intégrer des institutions très réglementées et contraignantes,
comme l’armée, la police, les grandes entreprises ou le clergé.
Cela témoigne d’un besoin viscéral de sens : « L’armée ou l’église attirent
le Rebelle, parce qu’ils donnent du sens à ce monde de fou. Dans un bureau,
le Rebelle se sent prisonnier d’une cage (c’est mon cas). » Un autre Rebelle
le confirme : « Vous verrez des Rebelles dans l’armée et le clergé, parce
qu’ils trouvent quelque chose digne de leur dévouement. »
Les Rebelles, tirant souvent leur énergie et leur motivation de la
dissidence, ont parfois besoin d’un environnement très réglementé pour
avoir suffisamment de règles à ignorer, de limites à ne pas dépasser, de
conventions à violer. Un Rebelle témoigne :
En tant qu’ancien membre des Marines, je confirme la présence d’un certain nombre de
Rebelles dans l’armée. Étant moi-même un Rebelle, je sais que les Rebelles ont le don de
s’attirer des ennuis en refusant d’adhérer aux règles de la société. Certains n’ont même plus le
choix : c’est l’armée ou la prison (je connais deux personnes qui se sont retrouvées dans cette
situation). Par ailleurs, l’armée fournit pléthore de règles à suivre et donc autant d’occasions de
les enfreindre. C’est ce qui m’a permis de survivre à la rigidité des Marines. Quand enfreindre
une règle est sans danger, je le fais sans ciller. Cela ne m’a pas empêché d’avoir une belle
carrière et de décrocher de nombreuses récompenses.

Travailler dans un cadre très structuré peut convenir aux Rebelles qui
finissent par tourner en rond quand ils n’ont rien à quoi s’opposer : « Je me
bats contre l’ordre établi, mais je veux qu’il y ait cet ordre pour avoir
quelque chose contre quoi me battre. »
En m’intéressant à l’attirance qu’ont les Rebelles pour les systèmes
hautement régulés, l’exemple de Thomas Merton m’a frappée. Les écrits de
ce moine cistercien-trappiste ont eu une grande influence dans les
années 1950 et 1960. En 2015, le pape François l’a cité parmi les quatre
figures américaines les plus influentes. Dans ses écrits, Merton n’a cessé
d’exprimer sa rébellion : son opposition instinctive, sa soif de liberté, sa
détermination à suivre sa propre voie.
Les Rebelles placent la liberté au-dessus de tout, et pour Merton, la
liberté découle d’une soumission totale à la volonté de Dieu. Seule cette
soumission offre une échappatoire à la rébellion, aux exigences, aux
tumultes et aux souffrances de l’ego.
En 1941, Merton entre dans l’ordre des moines trappistes de l’abbaye de
Gethsemani dans le Kentucky, mais ce n’est pas un prêtre comme les autres.
Bien que le quotidien des trappistes soit très strictement réglé par le travail
communal, Merton obtient la permission de l’abbé d’établir un ermitage où
il est exempté des travaux quotidiens et libre de presque toutes les
obligations monastiques. Les visiteurs, et ils sont nombreux, viennent
s’entretenir avec lui en toute liberté.
Sa rébellion la plus marquante éclate en 1966 quand, après une opération,
il tombe fou amoureux d’une élève infirmière. Il n’hésite pas une seconde
à enfreindre les règles. Les deux tourtereaux se voient, s’écrivent et
s’appellent en cachette. Merton met ses amis en porte-à-faux en leur
demandant d’arranger leurs rencontres. Il semblerait qu’à ses yeux, Dieu ne
pouvait qu’approuver.
Le profil Rebelle est tout en puissance et en paradoxe.

LES REBELLES EN QUELQUES MOTS

FORCES PROBABLES
Indépendants
Capables de sortir des sentiers battus
Non assujettis aux conventions
Prêts à suivre leur propre voie, à rejeter les conventions sociales
À l’écoute de leurs désirs
Spontanés

FAIBLESSES PROBABLES
Enclins à résister quand on leur demande ou qu’on leur dit de faire quelque chose
Peu coopératifs
Peu délicats envers les autres
Peu assidus quand il s’agit de tâches répétitives
Ignorent les règles communes
Instables : peuvent avoir du mal à se poser, avoir un emploi, un domicile ou une relation durable
Ont du mal avec le quotidien et ce qui est planifié
Peuvent être indifférents à la réputation
10
Interagir avec un Rebelle
« Personne ne décide pour moi »
Le collègue • Le conjoint • L’enfant • Le patient • Choix de carrière

Le collègue Rebelle
Les Rebelles possèdent de grands atouts : leur aptitude à briser les
conventions, à sortir des sentiers battus, à se connecter à leurs désirs et
centres d’intérêt. Un Rebelle m’a envoyé cette devise typique des Rebelles :
« Si je devais me décrire en un seul mot, ce serait : “ne suit pas les
instructions” ».

Les Rebelles s’épanouissent professionnellement quand les objectifs sont


en accord avec leurs propres aspirations.
Ils peuvent être très productifs s’ils ont le droit de faire les choses comme
ils l’endentent. Moins ils seront surveillés et contrôlés, mieux ce sera,
même si paradoxalement, certains Rebelles ont besoin de contraintes
à ignorer ou à rejeter.
La plupart ont le goût du défi et s’épanouissent dans des environnements
où ils ont les coudées franches. L’un d’eux m’a écrit :
Mon diplôme en poche, j’ai décroché un premier travail dans une grande agence de conseil.
J’avais un patron fantastique. Il m’a donné un dossier difficile en me disant : “Il y a un gros
problème, et je ne sais pas comment le résoudre. À toi de jouer. Reviens me voir dans un mois
avec une solution. Appelle-moi s’il y a un souci.” J’ai pu donner le meilleur de moi-même dans
ces conditions. J’ai adoré. Mais il est parti, et celui qui a repris les rênes voulait tout contrôler.
J’ai démissionné et j’ai monté ma propre agence.

Notons au passage que la façon de travailler du premier patron, très


efficace avec un Rebelle, aurait eu de piètres résultats avec un Dévoué.
Si les Rebelles aiment relever les défis, ils peinent à accomplir les tâches
quotidiennes et répétitives, ce qui peut être plus ou moins gênant selon où
ils travaillent. Une lectrice témoigne : « Je ne m’occupe pas des tâches
routinières, alors pour compenser, je mets les bouchées doubles quand il
s’agit de projets difficiles qui me plaisent. J’ai une belle carrière, mais je
pense mériter mieux étant donné le travail que je fournis. Je passe une
bonne partie de mon temps à compenser tout ce que je ne fais pas. » Peut-
être qu’elle pourrait, avec son patron, redistribuer ces tâches qui l’ennuient
tant (et qui ne sont pas faites de toute façon) pour qu’elle puisse se
concentrer sur les missions plus importantes.
Si les Rebelles n’aiment pas recevoir d’ordres ou de directives, ils
peuvent être de très bons leaders, comme l’explique l’un d’eux : « Tout le
monde doit faire comme je veux, c’est valable pour mes employés comme
pour mes enfants. Être Rebelle et refuser de se conformer à quoi que ce soit
peut être problématique, alors je n’engage que des gens qui acceptent ma
façon de faire. »
Un ami et professeur respecté m’a dit : « Les Rebelles sont attirés par le
monde universitaire.
– Quelle est leur position par rapport à la titularisation ? ai-je demandé.
– Pour être titularisé, il faut publier, mais c’est vous qui choisissez si vous
préférez écrire un livre, deux livres ou une série d’articles. Une fois
titularisé, tout ce qu’on vous demande, c’est de donner des cours. Et là,
vous avez une grande liberté d’action. Le directeur ne vous dira jamais :
“Vous devriez publier quelque chose, cela fait dix ans que vous n’avez rien
écrit”, même s’il le pense. Si j’écris, c’est parce que j’en ai envie, pas parce
qu’on me le demande. »
Les Rebelles font d’excellents patrons. Ils peuvent se montrer créatifs et
enthousiastes. Ils ont la détermination et l’ambition nécessaires pour mener
les projets à bien. Mais ce ne sera pas toujours facile de travailler pour eux.

Un Pointilleux a écrit :
Quand j’ai compris que mon ancienne responsable était une Rebelle, tout s’est éclairé. Quand
elle recevait des ordres de son supérieur, elle trouvait toujours à redire, même si cela faisait
partie de ses attributions. Quand on mettait une procédure en place, elle la rejetait une semaine
plus tard.
En tant que Pointilleux, c’était très difficile de travailler sous les ordres d’une Rebelle. Je ne
comprenais pas pourquoi elle prenait telle ou telle décision ou pourquoi elle n’arrivait pas à s’y
tenir. J’avais l’impression qu’il n’y avait aucune logique derrière ses choix ou ses consignes.

Au travail, la formule « information, conséquences, choix » évoquée plus


tôt est également valable. « C’est au cours de la réunion hebdomadaire que
l’on prend des décisions importantes et que l’on répartit le travail. Si tu n’y
assistes pas, tu n’auras pas ton mot à dire sur ce qui se fait et tu risques de te
retrouver avec les tâches dont personne n’a voulu. »
Un Rebelle voulant être considéré comme un bon leader, un visionnaire,
un patron présent pour ses employés, va choisir d’agir en conséquence.
« Quand vous venez à ces réunions, l’équipe voit que vous vous intéressez
aux opinions de chacun. Quand vous ne venez pas, vous donnez
l’impression d’être inaccessible et de n’accorder aucune importance à ce
que les autres pensent. »
Souvent, les Rebelles montent leur propre entreprise ou travaillent en
indépendants pour pouvoir être totalement libres, et ne pas avoir de compte
à rendre. Mais ce n’est pas toujours facile, parce qu’ils n’aiment pas se
contraindre, respecter des délais ou des plannings, faire des tâches
répétitives. C’est pourquoi les entrepreneurs Rebelles s’associent souvent
avec quelqu’un – en général un Dévoué – qui se charge de tout cela. J’ai
discuté avec le créateur d’un site Internet qui marche très bien : « C’est moi
qui en ai eu l’idée. Je suis l’esprit de la marque, je donne les idées et la
direction à suivre. Je vais au bureau, mais pas tous les jours. C’est mon
associé et cofondateur du site qui gère les annonceurs et les employés. C’est
lui qui se charge du côté financier. »
De même que les Rebelles s’associent le plus souvent avec des Dévoués,
ils vont travailler plus facilement avec des membres de leur famille, peut-
être parce que les proches comprennent et tolèrent mieux les spécificités de
leur nature.

Le conjoint Rebelle
Le couple Rebelle-Dévoué
Vivre une histoire d’amour avec un ou une Rebelle relevant du défi, plus
d’une personne m’a demandé : « Est-ce que les Rebelles sont allergiques
aux relations durables ? » Les résultats de l’étude que j’ai menée montrent
que les Rebelles ont autant de chances que les autres profils d’avoir des
relations durables.
Comprendre qu’une personne est de nature Rebelle permet de mieux
comprendre son comportement. Une amie de la fac m’a dit : « Savoir que
mon mari est un Rebelle me fait voir notre relation différemment. Je ne
prends plus personnellement certaines de ses remarques. Quand je lui dis :
“Faisons ça” et qu’il me répond : “Jamais je ne ferai ça”, je sais que cela n’a
rien à voir avec ce qu’il ressent pour moi. C’est juste sa façon d’être. »
Les Rebelles, comme tout le monde, sont prêts à faire des efforts pour
éviter quelque chose de pénible. Une Disciplinée raconte comme son mari,
par amour, a changé quand elle a demandé le divorce :
À vrai dire, au début, c’est moi qui faisais tout. En moins d’un an, notre mariage s’est écroulé.
Mais c’est mon mari qui m’a convaincue d’aller voir un conseiller conjugal. Depuis, nous
avons appris à respecter nos différences.
En tant que Disciplinée, je suis motivée par toutes sortes de choses. Mon mari, un Rebelle, n’est
motivé que par une seule chose : l’amour. Il sait ce qui compte pour moi et fait tout pour me
soutenir, parce qu’il m’aime. Nos profils très particuliers font que nous avons une vie peu
conventionnelle : je dirige une entreprise prospère et mon mari s’occupe de nos enfants.

Le secret d’une union heureuse avec un Rebelle ? Ne pas trop lui en


demander. La femme d’un Rebelle m’a confié : « J’ai mis 20 ans
à comprendre que moins j’en demandais et plus je recevais. »
Souvent, les relations durables avec les Rebelles, qu’elles soient
professionnelles ou amoureuses, sont avec un ou une Dévouée.
Les Disciplinés ou les Pointilleux ont plus de mal à supporter les
Rebelles. Les Discipliné les jugeront impulsifs et irresponsables, alors que
les Rebelles taxeront les Disciplinés de psychorigides. Les Pointilleux
s’exaspéreront de voir les Rebelles se fier uniquement à leur instinct, et les
Rebelles se désespéreront de voir les Pointilleux couper les cheveux en
quatre.
Les Dévoués, bien plus que les Disciplinés ou les Pointilleux, admirent le
comportement des Rebelles et gagnent à voir les choses de leur point de
vue. Peut-être envient-ils cette aptitude à rejeter sans ciller les attentes
extérieures. Une Dévouée mariée à un Rebelle raconte : « À l’occasion d’un
événement littéraire, on a offert à mon mari un séjour tout compris dans un
pays exotique. Nous y sommes allés. Il y avait des ateliers, des cocktails,
des soirées et les organisateurs voulaient qu’on y participe. J’ai dit : “Ils
nous ont invités, ils ont tout payé, nous devons faire notre part.” Mon mari
m’a répondu : “On ne doit rien du tout.” Et à aucun moment, nous ne nous
sommes forcés à faire ce qui ne nous plaisait pas. »
Une Dévouée (à tendance Rebelle) m’expliquait pourquoi elle appréciait
la compagnie des Rebelles :
Les Dévoués, dont je fais partie, ont des penchants rebelles (j’aime les cheveux teints de
couleurs bizarres). C’est pour ça que nous aimons les Rebelles. Ils nous font comprendre qu’il
est possible de céder à sa nature rebelle, de se libérer de certaines obligations. Mon mari et ma
meilleure amie sont des Rebelles. Avec eux, je trouve la vie plus légère. Et ils aiment ma
« drôle de façon de faire ». Ils me rappellent de prendre soin de moi quand ils voient que je suis
au bord du burn-out, alors que les Pointilleux et les Disciplinés (mon frère et mon beau-père)
vont se contenter de me demander pourquoi j’ai pris autant d’engagements si je ne pouvais pas
tous les honorer.

En encourageant les Dévoués à résister aux attentes extérieures, les


Rebelles les aident à ne pas tomber dans la rébellion. Comme le dit très bien
une Dévouée : « Vivre avec un Rebelle n’est pas de tout repos, mais s’il est
une chose qu’il comprend parfaitement, c’est le mot “non”. Pour lui, c’est
normal de ne pas avoir envie de faire quelque chose, alors il ne s’attend pas
à ce que je dise oui à tout. Comme il est plus difficile pour moi de résister
à une attente que d’y répondre, cela me permet d’être un peu moi-même. »
Le Rebelle agit comme une soupape de sécurité permettant au Dévoué de
relâcher la pression extérieure.
Pour le Rebelle, il est plus facile d’ignorer les contraintes du quotidien
auprès d’un Dévoué, parce que ce dernier s’en chargera à sa place. Une
Rebelle a écrit : « Mon mari me rend la vie plus aisée en s’occupant des
tâches quotidiennes. En contrepartie, il me dit que je l’aide à vivre le
moment présent et profiter de la vie. » Un mariage ne peut être heureux que
si chaque partie y trouve son compte.
Une amie Dévouée m’a raconté : « Dans notre quartier, le stationnement
se fait par télépéage. J’ai pris un badge pour mon mari, un Rebelle, et je l’ai
laissé sur la table. Il n’avait plus qu’à le mettre dans sa voiture, mais il l’a
“perdu”. Maintenant, il a une pile monstrueuse d’amendes.
– Ça ne l’ennuie pas d’avoir à payer tout ça ?
– Non, il sait que je vais finir par appeler la municipalité pour dire que
nous avons un badge, mais qu’il est défectueux. Les amendes seront
annulées. Mais voilà, c’est encore une corvée qui me retombe dessus, parce
qu’il ne supporte pas l’idée de payer le stationnement. »
La Disciplinée que je suis est restée sans voix.
Une autre amie mariée à un Rebelle m’a confié : « Avant de me marier, je
suis allée chez une amie et j’ai vu, épinglée sur le frigo, une liste de corvées
pour lui et pour elle. Cela m’a effarée. Je me suis dit : “Je ne ferai jamais ça.
Je ne veux pas d’un mariage où l’on tiendrait ce genre de comptes.” Pour
moi, ce serait sujet à tensions. Je préférerais en faire plus que de tenir des
comptes sur ce que fait l’autre. »
Étant une Disciplinée, les listes me paraissent plus justes que son
arrangement tacite. J’en voudrais à Jamie s’il m’imposait des obligations
sans assumer les siennes. Mais peut-être qu’aux yeux de mon amie, je fais
partie de ces personnes horribles qui tiennent des comptes.
Un ami m’a dit avec une certaine amertume : « Les Rebelles sont
finalement à notre charge. » Et c’est effectivement l’un des paradoxes de ce
profil : à ne vouloir dépendre de rien, les Rebelles deviennent dépendants.
Leur détachement des obligations quotidiennes et triviales n’est souvent
possible que si quelqu’un s’en charge à leur place.
De la même façon, en refusant de prévoir quoi que ce soit, les Rebelles
laissent la possibilité aux autres de prendre la main. Une Rebelle explique :
« Je m’amuse plus quand mon mari (qui a tout prévu) ne me dévoile rien
à l’avance. Il me dit alors : “Voilà ce qu’on fait. Tu peux te joindre à nous si
tu veux…” Nous passons alors d’une activité à une autre. J’adore ce côté
spontané. » Eh bien, même si cela paraît spontané et qu’elle a l’impression
de faire ces activités librement, c’est en réalité quelqu’un d’autre qui a tout
choisi. Quand les Rebelles sont en couple avec des Disciplinés ou des
Pointilleux, leurs relations exigent plus d’efforts d’un côté et de l’autre. Une
Pointilleuse mariée à un Rebelle a écrit :
Je comprends comment l’esprit Rebelle a fait des merveilles dans les rangs de la Résistance.
Mais nous ne vivons plus sous l’Occupation. Je regrette de m’être mariée à un Rebelle. Il était
beaucoup plus enclin à répondre à mes attentes quand nous ne faisions que sortir ensemble. Une
fois marié, il a arrêté. Nous faisons tous les deux des efforts, mais c’est beaucoup plus difficile
que si j’étais mariée à un Dévoué. De plus, je le rends fou avec mes questions.

Ce n’est pas aussi difficile pour tous les couples. À un dîner, j’étais assise
à côté d’un Discipliné marié à une Rebelle. Quand je lui ai demandé – avec
beaucoup plus de tact – comment il s’en sortait, il m’a répondu : « Cela
marche, parce que ma femme est quelqu’un de très attentionné et très
aimant.
– Intéressant, ai-je pensé. Cela montre bien que le profil naturel d’une
personne n’est qu’un des nombreux aspects de sa personnalité.
– Si je lui demande de faire quelque chose, a-t-il poursuivi, elle va
commencer par me dire non, mais au bout d’une semaine ou deux, elle va
me proposer quelque chose qui tiendra compte de mes attentes.
– Comme quoi ?
– Elle m’avait montré des meubles pour la véranda et je lui avais dit
qu’ils étaient trop massifs. Elle m’a répondu : “Mais pas du tout, ça ira très
bien.” Une semaine après, elle m’a montré d’autres meubles beaucoup plus
adaptés.
– Je vois. Est-ce qu’elle a déjà refusé de faire quelque chose qui vous
tenait à cœur ?
– Oui. Après notre mariage, elle n’a pas voulu écrire de cartes de
remerciements. Et ça m’a dérangé.
– Ne pouviez-vous pas le faire quand même ?
– J’aurais pu, mais quand je me suis rendu compte que cela poserait
problème, nous avions déjà commencé à ouvrir les paquets sans tenir
compte de l’identité de ceux qui nous les avaient offerts. C’était trop tard.
(Il a soupiré.) Ça m’énerve rien que d’y penser. »
Une Disciplinée mariée à un Rebelle m’expliquait leur dynamique :
Mon mari et moi nous sommes rencontrés à la fac et nos profils respectifs étaient clairement
définis. J’avais d’excellents résultats, il a failli être recalé. Il est incroyablement intelligent,
mais quand le sujet d’un examen ne lui plaisait pas, il décidait de traiter un sujet de son choix.
Il apprenait, mais il le faisait à sa façon, ce qui lui valait des notes catastrophiques. C’était un
étudiant à part. Il n’a commencé son cursus universitaire qu’à 24 ans. Il a toujours pris le temps
de faire ce qu’il voulait quand il le voulait. Moi, j’étais une étudiante disciplinée qui menait de
front deux cursus.
J’ai mis un certain temps à comprendre qu’il faisait souvent le contraire de ce que je lui
conseillais ou demandais. Si pour certains, ces différences peuvent être insurmontables, moi,
j’aime l’esprit d’indépendance de mon mari.
Sa nature Rebelle nous permet d’avoir une vie peu conventionnelle. Je tiens à ma carrière, et il
a accepté de déménager plusieurs fois pour que je puisse avancer professionnellement.
Actuellement, c’est moi qui subviens à nos besoins. Nous n’avons pas d’enfant par choix. Mon
mari travaille à la maison, il écrit un roman. Il m’a financièrement (et émotionnellement)
soutenue quand je passais mon master et mon doctorat. Il a démissionné dès que possible pour
pouvoir écrire. Nous partageons les tâches domestiques et cuisinons chacun de notre côté.
J’aime que sa nature Rebelle me laisse en dehors de ses choix de vie (bien que cela peut devenir
délicat quand ses choix de vie empiètent sur les miens), parce que de toute façon, je ne peux pas
le forcer à faire quoi que ce soit.

Quelles que soient les combinaisons de profils, l’harmonie n’est possible


que si chacun se concentre sur les qualités de l’être aimé.

L’enfant Rebelle
De nombreux Rebelles m’ont spontanément parlé du moment où ils ont
compris, enfants, que personne ne pouvait les obliger à faire quoi que ce
soit. « J’étais assis par terre et ma mère voulait que je mette mes
chaussures, m’a écrit un Rebelle. J’ai pensé : “Elle ne peut pas m’obliger !”
et j’ai refusé tout net. Je suis resté assis là pendant deux heures. »
Avoir un enfant Rebelle n’est pas de tout repos. Il suffit de lui demander
ou de lui dire de faire quelque chose pour qu’il s’y oppose. Il veut faire
comme il veut, et n’aime pas faire ce qu’on attend de lui. Une amie m’a
raconté à propos de sa fille Rebelle : « Je lui ai dit que je venais la coucher
dans cinq minutes.
– Et pourquoi pas quatre ? »
Rien ne sert de forcer un Rebelle, comme l’explique cet adolescent de
15 ans :
J’ai vécu avec ma mère pendant douze ans. Elle était très permissive et libre d’esprit. Puis, j’ai
emménagé chez mon père, qui est plus conservateur et à cheval sur la discipline. Quand je fais
quelque chose qui plaît à mon père, il va manifester sa satisfaction et me dire : « Si seulement
tu faisais ça plus souvent ! » Quand il ne me fait pas ce genre de réflexions, tout va bien. Mais
dès qu’il me demande de faire quelque chose, je bloque. Il ne comprend pas comment je
fonctionne et il trouve que je suis paresseux et irrespectueux.

Ce père n’a pas compris que cela ne servait à rien de dire à un enfant
Rebelle ce qu’il doit faire. Bien sûr, il est possible de lui faire faire quelque
chose, en fixant des sanctions, mais ce n’est pas très productif au long
cours.
Qu’est-ce qui marche, alors ? La même formule qu’avec les adultes :
information – conséquences – choix, sans insister, sans le faire culpabiliser.
Ce n’est pas facile. Ce peut être effrayant de laisser un enfant faire ce
qu’il veut, mais comme cela ne sert à rien de le pousser ou de le diriger (au
contraire, ce peut être pire), autant avoir confiance en leur jugement.
Un parent de Rebelle m’a expliqué : « La meilleure façon de gérer un
enfant Rebelle est de lui donner les informations nécessaires à sa prise de
décision, de lui présenter le problème sous forme de question à laquelle lui
seul peut répondre, et de le laisser agir sans avoir à vous en faire part. Qu’il
se décide tout seul dans son coin. Ne lui imposez pas de dialogue. Qui dit
dialogue, dit attentes, contraintes. S’il voit que vous ne le surveillez pas, il
n’aura pas besoin de se rebeller contre vous. »

L’un des problèmes majeurs avec un enfant Rebelle, c’est lorsqu’il veut
quitter l’école, comme dans cette famille :
Ma sœur Lynne est une Rebelle, cela ne fait aucun doute. Elle a des difficultés scolaires depuis
le jardin d’enfants, mais ce n’est pas une question de niveau intellectuel. Depuis qu’elle est au
lycée, elle parle de quitter l’école. Cet été, alors qu’il ne lui restait plus qu’un an, nous avons
bien cru qu’elle allait le faire.
Avant que mes parents ne lui parlent, j’ai suggéré à ma mère de laisser Lynne faire ce qu’elle
voulait. Je lui ai expliqué les spécificités de sa personnalité Rebelle et l’ai rassurée : Lynne
trouverait le moyen de faire ce qu’elle veut. Ma mère a accepté à contrecœur.
Quelques semaines plus tard, Lynne a émis l’idée de finir le lycée par correspondance au lieu
de tout arrêter. Elle m’a dit aujourd’hui qu’elle retournait à l’école. Ils ont aménagé son emploi
du temps.
C’est parce que mes parents l’ont laissée prendre ces décisions toute seule qu’on en est là.
Lynne a le sentiment d’être aux commandes de sa vie (et elle l’est). Je me demande ce qui serait
arrivé s’ils l’avaient forcée à rester à l’école.

Dans le même esprit, j’ai entendu un enseignant dire :


J’enseigne en milieu pénitentiaire. J’aide les détenus à préparer des diplômes du secondaire ou
des équivalences pour accéder à des études supérieures. Une de mes élèves présentait de
grosses difficultés comportementales. Elle s’en prenait aux gardiens et ne faisait pas ses
devoirs. Elle m’avait pourtant assuré vouloir décrocher un diplôme, et je la croyais, même si
elle ne faisait pas de progrès.
Puis, j’ai compris qu’elle était une Rebelle. Je lui ai parlé de votre théorie des quatre profils et
cela l’a aidé à avoir une image plus positive d’elle-même. J’ai arrêté de lui donner des devoirs
à faire et l’ai laissée décider à chaque séance de ce qu’elle voulait faire : travailler sur
l’ordinateur, assister à un cours commun ou à un cours particulier, ou ne rien faire du tout. À ce
jour, elle a passé et réussi les cinq épreuves de l’équivalent du diplôme de fin d’études.

Les Rebelles peuvent faire tout ce qu’ils veulent.


Tout ce qui ressemble à un ordre ne fera que braquer l’enfant Rebelle, il
faudra donc bien choisir ses mots et sa façon de tourner les choses. Un
parent n’aura pas forcément l’impression de donner un ordre en lançant :
« Chéri, dis à tante Jane comme tu t’es bien amusé », mais pour l’enfant
Rebelle, c’en est un. Peut-être allait-il spontanément dire quelque chose de
gentil, mais là, il ne le fera plus. Ses parents pourraient faire remarquer dans
la voiture avant d’arriver : « Même si ce n’est pas très amusant de rendre
visite à tante Jane, tu as toujours pensé à la remercier en partant. La
politesse est une forme de prévenance. » Et le laisser décider par lui-même
de son comportement.

Un professeur de musique explique comment elle s’est adaptée à un élève


Rebelle :
J’ai essayé d’aider un élève Rebelle à être un meneur plutôt qu’un « perturbateur ». Quand je
lui demandais des choses comme distribuer le matériel ou aider un de ses camarades, il refusait
de le faire. J’avais pourtant constaté qu’il aimait prendre les choses en main… pourquoi ne
saisissait-il pas l’occasion de le faire en montrant l’exemple et en aidant ses camarades ? J’ai
fini par comprendre qu’il refusait de le faire, parce qu’il voulait que cela vienne de lui, pas de
moi. Alors, je me suis adressée à toute la classe : « Montrez-moi ce que vous savez faire, tout le
monde en même temps. J’aimerais voir qui s’en sort le mieux pour trouver un meneur. » Je lui
laissais le choix : allait-il faire un effort ou se débiner ? Il a donné le meilleur de lui-même,
alors je lui ai demandé : « Est-ce que tu veux être le meneur de cette section ? » Je ne lui ai pas
dit de l’être, je lui ai demandé s’il voulait l’être. Il a dit oui. Et il était ravi !

Pour essayer de canaliser l’énergie et l’intérêt d’un enfant Rebelle, il sera


utile de faire remarquer comme il prend plaisir à faire telle ou telle activité.
Cela pourrait l’inciter à vouloir continuer de la faire. « Tu as l’air de
beaucoup aimer écrire pour le journal de l’école. C’est sympa de voir ton
nom imprimé et de passer du temps avec les autres rédacteurs en herbe. »
« C’est agréable de voir son nom sur le tableau d’honneur, non ? »
Les parents et les enseignants peuvent faire valoir les raisons pour
lesquelles l’enfant aimerait répondre à certaines attentes : « Les élèves
ayant de bonnes notes ce trimestre pourront aller avec l’école visiter la
Maison-Blanche au printemps. » Un professeur de musique explique :
« Pour motiver les élèves Rebelles, je mets l’accent sur toutes les portes qui
s’ouvriront s’ils jouent bien. C’est ce qui a marché pour moi… l’envie
d’être admiré ! »
Les Rebelles sont plus réceptifs quand on leur présente les choses en
termes de choix, de liberté d’action et d’expression. « Quand tu auras envie
d’apprendre à faire du vélo, tu le feras et tu pourras alors partir à l’aventure
avec tes copains. »
Il est essentiel de leur exposer clairement ce qui les attend s’ils ne
répondent pas à une attente, et de les laisser en subir les conséquences s’ils
s’entêtent, même si cela peut être difficile pour lui comme pour ses parents.
Un Rebelle explique :
En tant que Rebelle, si j’ai un conseil à vous donner, ce serait celui-ci : laissez le Rebelle subir
les conséquences de ses décisions. Je vous assure que je paie mes factures à temps et que tout
fonctionne parfaitement chez moi. Si vous avez un enfant Rebelle, vous allez certes souffrir
avec lui le temps qu’il apprenne les conséquences de ses actes. Mais plus vite vous lui en
laisserez l’occasion, plus vite il comprendra ce qu’il peut ou ne peut pas faire.

Et comme les Rebelles ont un sentiment d’identité très fort, pourquoi ne


pas lier une action à une valeur constitutive de sa nature ? Une Rebelle se
souvient :
La stratégie la plus efficace est de proposer un choix en harmonie avec l’identité du Rebelle. La
ponctualité a été une source de tensions permanente entre ma mère et moi. Qu’elle me le
rappelle gentiment ou avec insistance, rien n’y faisait. Jusqu’au jour où elle m’a dit : « Écoute,
j’ai l’impression de ne pas pouvoir te faire confiance. Quand tu me fais attendre, j’ai aussi
l’impression que tu considères que ton temps est plus précieux que le mien. Si tu veux être une
personne sur qui on ne peut pas compter et qui donne l’impression aux gens de ne pas compter,
d’accord. Mais tu peux aussi être une personne sur qui l’on peut compter, avec qui on se sent
valorisé. C’est à toi de choisir. » Ça changeait tout, parce qu’elle me laissait le choix. Et cela
faisait écho à qui je suis profondément. Tout devenait plus simple.

Les enfants adorent s’amuser, qu’ils soient Rebelles ou non. Autant en


profiter. « Pour inciter mon fils à se brosser les dents, a rapporté un père, on
inventait des jeux. Il prétendait être un vétérinaire en train de brosser les
dents d’un ours ou un mécano en train de nettoyer une machine. » Les
enfants Rebelles sont également sensibles aux défis : « Je parie que tu
n’arriveras pas battre ton record et te préparer en moins de deux minutes.
Tu essaies ?! »
Il y a une stratégie intéressante dans La Petite Maison dans la prairie, un
de mes livres préférés. À 16 ans, Laura Ingalls devient institutrice. C’est
une Pointilleuse et elle a dans sa classe un Rebelle, Clarence, qui refuse
d’apprendre. Il ne supporte pas qu’on lui dise ce qu’il doit faire et refuse de
travailler, bien qu’il soit intelligent et avide de connaissances.
Laura demande alors conseil à ses parents. Sa mère lui dit : « Cela ne
servira à rien de le forcer à faire quoi que ce soit. Il ne le fera pas. » Laura
décide de changer d’approche. Après avoir donné les devoirs à toute la
classe, elle se tourne vers Clarence : « Pas toi, Clarence. Cela te prendrait
beaucoup trop de temps. Combien de pages penses-tu pouvoir apprendre ?
Si je te dis trois, cela ne te semble pas trop ? »
Non seulement Clarence a le choix des consignes, mais il a en plus la
possibilité de défier les attentes de son institutrice. En suggérant qu’il
n’arrivera pas à retenir trois pages, alors que les autres en ont beaucoup plus
à apprendre, elle va l’inciter à se dire : « Ah oui ? Elle va voir ce qu’elle va
voir ! » En une semaine, Clarence va rattraper son retard.
Les Rebelles doivent avant tout avoir l’impression de faire ce qu’ils
veulent et non ce que les autres veulent. Un Rebelle écrit : « Si vous me
dites quoi faire, j’aurais l’impression d’être votre prisonnier. Mais si vous
me dites : “Voici quatre possibilités, à vous de choisir”, il y a de grandes
chances que j’en choisisse une. »
J’ai remarqué que les enfants Rebelles étaient souvent très proches de
leurs grands-parents, peut-être parce qu’avec ces derniers, ils sentent moins
le poids des attentes.
Les parents eux-mêmes Rebelles ont moins de difficultés avec des
enfants Rebelles, parce qu’ils les comprennent. Une mère Rebelle a écrit :
« Ma fille de 4 ans est une Rebelle aussi. Elle aime avoir le choix et décider
pour elle et pour nous tous. Je comprends parfaitement, alors je la laisse
choisir ses vêtements, mes vêtements, dormir quelques minutes de plus,
quitte à être en retard à l’école, manger des spaghettis au petit-déjeuner et
un œuf au plat du dîner. » Cette façon de fonctionner a de quoi étonner. Une
amie Rebelle m’a confié en soupirant : « Au restaurant, je ne peux pas dire
à mon fils d’arrêter de souffler dans la moutarde avec sa paille. J’ai envie de
faire la même chose. »
En tenant compte des spécificités de chaque profil, on se donne les
moyens de communiquer plus efficacement et plus harmonieusement. On
a beau aimer quelqu’un de tout son cœur, si l’on ne sait pas comment lui
parler, tout ce qu’on dira n’aura aucun sens.

Le patient Rebelle
Les Rebelles peuvent avoir de sérieux problèmes de santé, parce qu’ils vont
avoir tendance à s’opposer aux prescriptions médicales. Ce qui marche avec
les Disciplinés, les Pointilleux et les Dévoués peut avoir l’effet contraire
avec les Rebelles. Cette résistance systématique peut être très frustrante
pour les professionnels de santé qui veulent les aider. Conseils,
encouragements, rappels, et remontrances peuvent pousser les Rebelles
à faire le contraire de ce qu’ils devraient. Les Rebelles résistent au
diagnostic lui-même, comme l’explique l’un d’eux :
J’ai un diabète de type 1, et j’ai du mal à accepter qu’une maladie puisse contrôler ce que je
ressens et ce que je fais. Je sais que je devrais me dire que c’est moi qui contrôle mon diabète et
non l’inverse, mais je n’y arrive pas. Je vérifie rarement ma glycémie, je prends de l’insuline de
façon sporadique, alors que je n’aime pas manger à heures fixes, et je n’ai pas vu mon
endocrinologue depuis des années. Je ne connais même pas mon taux d’HbA1c.

Le Rebelle ne supporte pas l’idée de « suivre les ordres du médecin ». Si


un médecin a le malheur de le féliciter en disant : « Vous allez mieux, vous
avez bien suivi mes instructions », le patient Rebelle serait capable de tout
arrêter, juste pour prouver qu’il est libre de le faire.
Il est plus réceptif si on lui rappelle que lui seul peut décider. Au lieu de
lui dire : « Il faut faire ça », le médecin devrait suggérer : « C’est à vous de
voir, mais souvent, ça marche », « Avez-vous pensé à essayer ça ? », « Que
pensez-vous de ça ? », « Certains ont trouvé cela très efficace. », « Que
diriez-vous d’inclure ça ou ça ? »
Les Rebelles résistent même aux règles qu’ils veulent s’imposer. Un
étudiant Rebelle raconte : « J’ai du mal à perdre mes kilos en trop. Dès le
moment où je m’interdis de manger la nuit, je me mets à manger encore
plus la nuit. Dès que je me dis que je vais arrêter le pain, je fonce à la
boulangerie. » Une étudiante Rebelle explique comment elle a réussi
à déjouer cette résistance instinctive : « Quand je veux manger sain, je
commence la journée en prenant du chocolat ou quelque chose que je ne
devrais pas. Comme ça, je me prouve que je fais ce que je veux. Et le reste
de la journée, j’ai moins besoin de me rebeller. »

Encore une fois, la meilleure façon d’aider un Rebelle, c’est de s’en tenir
à la formule : information – conséquences – choix. Un médecin Discipliné
raconte :
Je suis médecin généraliste et une de mes patientes refuse de suivre mes recommandations pour
perdre du poids et soigner sa résistance à l’insuline. Au cours d’une consultation, l’étiquette
« Rebelle » m’est venue à l’esprit. J’ai aussitôt changé mon fusil d’épaule en lui suggérant tout
ce qu’elle pouvait essayer « si elle en avait envie ». À la visite suivante, elle avait perdu du
poids et se portait beaucoup mieux. Elle avait tout simplement essayé une de mes suggestions.
Je n’aurais pas eu le même résultat en étant directif, car c’est une approche efficace avec les
Disciplinés, les Dévoués et même les Pointilleux, parce que j’explique toujours en détail mes
instructions, mais pour un Rebelle, cela ne marche pas.

Les Rebelles peuvent trouver utile de connaître leurs variations de poids


ou le nombre de pas qu’ils font par jour, et il est préférable d’encourager
cette surveillance en disant : « Ce serait intéressant et utile de savoir quelle
est ton activité physique quotidienne », plutôt qu’en disant : « Il faut faire
au moins 10 000 pas par jour. Tu devrais porter ce moniteur d’activité
physique. »
Il faut leur montrer qu’ils ont le choix, faire appel à leur libre arbitre et au
plaisir qu’ils peuvent en tirer : « Ce régime/sport/médicament/mode de vie
va te faire du bien, te donner la pêche, soulager tes douleurs, améliorer tes
performances, pimenter ta vie sexuelle, te permettre de mener la vie que tu
veux. » Un nutritionniste pourrait dire : « Un de mes patients, joueur de
tennis, a constaté qu’en réduisant sa consommation de sucre, il avait plus
d’énergie et était plus performant sur le court. » Au lieu de lui dire quoi
faire, il donne à son patient les informations qui vont l’aider à se décider.
Un Rebelle raconte :
Mon coach me disait toujours : « Fais le pendant une semaine, et si ça ne te plaît pas, laisse
tomber. » Pas de pression, pas de culpabilisation, pas de règles immuables. Il s’agissait d’être
à l’écoute de ses sensations, et surtout d’être toujours, toujours à contre-courant. Je n’arrive pas
à me tenir à un programme précis. Je trouve ces défis en 30 jours trop restrictifs. Si je décide de
faire un programme, je dois enfreindre au moins une règle.

L’entourage du Rebelle peut également lui proposer de l’aide : « Ça ne te


faciliterait pas la vie si je m’occupais de préparer tes médicaments pour la
semaine ? », « Est-ce que tu aimerais marcher davantage si je
t’accompagnais ? »

J’ai reçu un mail d’une lectrice qui ne sait plus quoi faire pour pousser
son mari à arrêter de fumer. Cela va sans dire, son insistance n’a eu aucun
effet, même s’il avoue vouloir arrêter de fumer. Elle m’a demandé si j’avais
des conseils à lui donner. Voici ce que j’ai répondu :
Peut-être que votre mari peut essayer de voir les choses autrement.
• Les Rebelles détestent se sentir coincés, forcés. Ils peuvent voir la
cigarette comme un piège : « Je suis dépendant, je suis perdu sans mes
cigarettes. »
• Les Rebelles détestent se faire exploiter : « Mon argent va directement
dans les poches des industriels du tabac. »
• Les Rebelles sont fiers de ce qu’ils sont : « Je suis un non-fumeur, parce
que j’ai choisi de l’être, parce que je le veux. »
• Les Rebelles accordent de l’importance au plaisir : « Ce serait bien de se
réveiller sans tousser ou avoir une mauvaise haleine, de ne plus
s’essouffler en montant les escaliers. »
• Les Rebelles accordent de l’importance à la liberté : « Dans les lieux
publics, je ne peux pas fumer où je veux. »
• Les Rebelles aiment faire les choses à leur façon : au lieu de suivre une
méthode classique, ils peuvent trouver leur propre façon d’arrêter.
• NOTA BENE : les Rebelles ont toujours un petit côté : « Vous allez voir
ce que vous allez voir ! » Essayez : « Chéri, je crois que c’est vraiment
trop dur. Ta dépendance au tabac est trop forte, ce n’est peut-être pas la
peine de lutter. Ça ne sert à rien. »
Elle m’a réécrit pour me donner des nouvelles : « La stratégie la plus
efficace a été une variation de votre nota bene. Je lui ai dit que son fil de
18 ans pensait qu’un vieux croûton comme lui n’arriverait jamais à arrêter
de fumer (et c’est vrai). Je sens qu’il va essayer de lui donner tort. »

Les Rebelles aiment également déjouer les conventions et montrer qu’ils


sont bien trop malins pour se laisser manipuler par des stratégies
élémentaires. Un Rebelle a arrêté de boire par rébellion :
Soudainement, ça m’a fait tilt : j’aime boire, mais ça me fait grossir, ce qui n’est pas une bonne
chose. L’alcool coûte cher, ce qui n’est pas une bonne chose non plus. Je n’aime pas
m’embarrasser en soirée et je n’aime pas avoir la gueule de bois. Une fois que j’ai compris que
l’on se fichait de nous à vanter l’alcool comme quelque chose de cool en nous montrant des
gens minces, jeunes et beaux qui boivent tout ce qu’ils veulent sans jamais être malade ou gros,
et bien, cela a été plus facile pour moi d’arrêter.

Pour les Rebelles, c’est important de vivre selon leurs valeurs. Lier une
habitude à une valeur constitutive de leur profil peut les inciter à changer.

Choix de carrière pour un Rebelle


Je le répète : les Rebelles peuvent faire tout ce qu’ils veulent. Cela dit, ils
vont le plus souvent se tourner vers des carrières qui leur offrent une
certaine flexibilité, la possibilité d’établir leur propre emploi du temps et de
ne pas avoir de comptes à rendre. D’après les témoignages que j’ai pu
collecter, les Rebelles sont particulièrement doués pour faire que les jours
se suivent et ne se ressemblent pas. « J’ai un emploi du temps extrêmement
flexible. Avant, je travaillais dans un bureau, et je détestais ça. Maintenant,
je suis chef de projet et responsable du personnel d’un restaurant. Je
travaille aussi bien chez moi qu’au restaurant. Je fais moi-même mon
planning tous les matins et il n’y a pas une journée pareille. », « Je suis
prestataire de sous-traitance informatique. Je m’ennuie vite et je change
souvent de travail, mais il m’arrive très souvent (trop) d’être sans emploi. »,
« Je suis comptable dans un cabinet de conseil fiscal. Dates limites, règles
arbitraires et absurdes sont mon quotidien. Mais mon statut de travailleur
indépendant me permet de gérer mes heures et ma clientèle comme je
l’entends. »
Les Rebelles montent souvent leur propre affaire pour n’avoir de comptes
à ne rendre à personne, si ce n’est à eux-mêmes… et c’est là que le bât
blesse. Ils n’aiment pas avoir à se rendre de comptes non plus. Un Rebelle
rencontré à une conférence sur la technologie m’a dit : « Je travaille à mon
compte, parce que le matin, quand je me lève, je veux pouvoir faire ce que
je veux et uniquement ce que je veux.
– Mais vous devez quand même faire tourner votre affaire. Il y a
forcément des choses que vous n’aimez pas faire, mais que vous faites
quand même.
– Vous mettez le doigt sur un gros problème, a-t-il admis avec
abattement. Je ne m’y résous que lorsque c’est absolument nécessaire. Et
c’est très handicapant pour les affaires. »
Un autre entrepreneur m’a dit : « Les Rebelles seuls ne sont pas très
efficaces. Ils n’aiment pas gérer les détails administratifs, les plannings, etc.
J’ai créé trois sociétés avec ma femme qui est une Disciplinée. Elle
compense mon côté Rebelle. Ensemble, nous formons une équipe
gagnante. »
Les Rebelles s’épanouissent quand on les laisse relever les défis à leur
manière. C’est peut-être pour ça qu’il y a autant de Rebelles dans le milieu
de la vente où ce sont les résultats qui comptent. La femme d’un Rebelle le
confirme : « Entre mon mari et son patron, c’est toujours très tendu, mais il
est le meilleur commercial de la société. C’est parce qu’il ignore les règles
fixées par son patron qu’il conclut autant de ventes. »
Dans les milieux créatifs aussi, ce sont les résultats qui comptent. Ma
sœur Elizabeth, qui est auteure et productrice pour la télévision, a remarqué
qu’à Hollywood : « Les Rebelles peuvent enfreindre toutes les règles qu’ils
veulent s’ils produisent quelque chose de bon. Les réalisateurs se fichent de
ce que les autres pensent, et d’un point de vue créatif, cela peut donner
d’excellents résultats, même si tout le monde en bave autour d’eux. »
Je discutais avec une avocate d’affaires – un métier qui a priori ne semble
pas convenir à une nature Rebelle – et je lui ai demandé : « Comment
faites-vous ?
– J’adore ça. On fait appel à moi en temps de crise, quand les gens sont
prêts à prendre des risques. J’identifie ce qui ne marche pas, je trouve des
solutions et je passe à autre chose. Dès que les choses sont stables et que le
cadre est posé, j’étouffe. »
À l’inverse, comme nous l’avons évoqué plus tôt, les Rebelles peuvent
être attirés par des milieux très structurés comme la police, l’armée ou le
clergé.

EN RÉSUMÉ : INTERAGIR AVEC UN REBELLE


Ils résistent aux attentes extérieures et à leurs propres attentes.
Ils veulent avant tout être libres, pouvoir choisir, être eux-mêmes et s’exprimer sans contraintes.
Si on leur demande ou on leur dit de faire quelque chose, ils auront tendance à s’y opposer.
Ils se laissent facilement défier : « Tu vas voir ce que tu vas voir », « Je vais te montrer », « Tu ne
m’obligeras pas », « Personne ne me commande ».
Ils peuvent agir par amour, sens du devoir ou pour une cause.
Ils ont du mal à se forcer à faire quoi que ce soit, même s’ils en ont envie.
Ils font les choses à leur façon, selon leur bon vouloir.
Ils n’aiment pas être surveillés, conseillés ou dirigés.
Ils savent en général déléguer.
S’ils sont dans une relation durable, c’est probablement avec un Dévoué.
Les quatre profils en pratique
11
Les affinités

Aucune relation n’est vouée à l’échec ou n’est gagnée d’avance, quel que
soient les profils en jeu. On observe cependant de grandes constantes entre
les différentes associations.
Ce qui nous plaît au départ chez une personne est aussi souvent ce qui
finit par nous exaspérer. Un Discipliné peut être intrigué par le refus du
Rebelle de se plier aux règles, le Rebelle peut être attiré par l’efficacité du
Discipliné, mais après cinq ans de mariage, ces qualités peuvent leur
sembler beaucoup moins séduisantes.
Cela ne fera pas tout, mais connaître les caractéristiques de chaque profil
peut nous aider à mieux comprendre la dynamique de nos relations avec les
autres.

Discipliné-Discipliné
J’ai rencontré peu de couples de Disciplinés. Soit parce que les Disciplinés
ne vont pas très bien ensemble, soit parce que c’est un profil assez peu
représenté dans la population.
J’aime beaucoup travailler avec d’autres Disciplinés : je peux compter sur
eux pour faire ce qu’il faut sans avoir à être sur leur dos, et ils me diront
franchement si je leur en demande trop.
Je ne suis pas sûre cependant de vouloir me marier avec un Discipliné.
Toute cette rigueur peut être un peu contraignante. Même si deux
Disciplinés s’entendent bien, ils peuvent être un peu durs l’un envers
l’autre, comme l’illustre ce témoignage :
Mon mari et moi sommes des Disciplinés, et ma fille de 13 ans nous dit toujours : « Je ne
connais aucun parent comme vous. » Je le prends comme un compliment. Mon mari et moi
accordons beaucoup d’importance à la force de caractère et à la discipline. Je suis coach sportif
et il est professeur de tennis. Avec nos clients et nos élèves, nous sommes très attentionnés et
compatissants, mais « en coulisses », nous sommes très critiques. Nous avons beaucoup de mal
quand les gens ne font pas ce qu’ils ont dit.

Avec deux Disciplinés, aucun risque de procrastiner ou de tergiverser,


mais cela n’a pas que des avantages. Nous avons fait un voyage avec une
autre famille dont le père est un Discipliné comme moi. Un après-midi, le
père et moi avons décidé d’emmener nos enfants faire une visite de Berlin
en bateau. Il y avait plusieurs compagnies le long de la Spree et un guide
nous a indiqué un stand : « Le prochain bateau partira de là. » Et nous voilà,
en bons Disciplinés que nous sommes, avec nos enfants, debout devant un
stand vide à regarder les gens embarquer depuis le stand voisin. « Il nous
avait dit que le prochain départ se faisait ici, a fait remarquer mon ami en
regardant le bateau s’éloigner du quai.
– Je sais bien ! »
Nous avons fini par en rire. Nous avions bien vu que notre stand était
vide alors que celui d’à côté était bondé, mais nous nous sommes fiés à ce
que « l’expert » nous avait dit. Si Jamie avait été là, nous aurions rejoint les
autres et n’aurions pas loupé le bateau. C’est ça l’avantage d’avoir un
Pointilleux avec soi !

Discipliné-Pointilleux
Disciplinés et Pointilleux font bon ménage. Mon mariage en est un parfait
exemple. Et je pense que c’est une combinaison bénéfique pour les deux
parties. Les Disciplinés répondent instinctivement aux attentes, et la
présence d’un Pointilleux va les aider à prendre le temps de se poser des
questions, voire à refuser d’y répondre.
Comme ma sœur me l’a fait remarquer, je suis une Disciplinée avec deux
Pointilleux à des positions stratégiques dans ma vie : mon mari et mon
agent littéraire. Leurs questions m’évitent de faire des choses inutiles, à la
maison comme au travail.
Pour la sortie en format poche de Ma vie en mieux, on m’a demandé
d’écrire un article pour un magazine avec comme consigne : inventer une
histoire à la première personne sur le thème des quatre profils avec une
brève introduction présentant chaque profil et un conseil sur la meilleure
façon de prendre de bonnes habitudes pour chacune d’eux. Le tout en
1 000 mots. Gratuitement.
C’était un exercice qui allait me demander beaucoup de temps et d’effort,
et cela me fatiguait rien que de lire les consignes. Mais je me suis dit que
j’avais une voie de sortie : j’ai envoyé un mail à Christy : « Est-ce que je le
fais ? », « Pas question ! » m’a-t-elle aussitôt répondu.
Avoir un mari Pointilleux m’aide à me poser plus de questions (peut-être
que Jamie aurait préféré ne pas déteindre autant sur moi, parce qu’après
tout, c’est plus pratique d’avoir une compagne qui fait ce qu’on lui
demande sans poser de question !) Mais d’un autre côté, son refus d’agir
s’il n’a pas eu de réponses à ses questions m’exaspère, sans compter le fait
qu’en bon Pointilleux, il n’aime pas être lui-même remis en question.
Quoi qu’il en soit, il est très appréciable pour les Disciplinés comme pour
les Pointilleux d’avoir un compagnon enclin à répondre à ses propres
attentes.
Les parents Disciplinés peuvent ne pas apprécier le questionnement
incessant de leurs enfants Pointilleux, parce qu’ils s’attendent à ce que les
enfants obéissent sans rechigner, comme en témoigne ce père :
Il m’arrive de perdre patience avec mon fils Pointilleux. J’ai du mal à comprendre pourquoi il
ne se contente pas de faire ce qu’il faut. Bien sûr, les enfants ont toujours mieux à faire, mais
quand il s’agit de mettre ses chaussures, prendre une douche ou ce genre de choses, il n’y a pas
de question à se poser. Avec un enfant Pointilleux, il faut tout négocier.

Discipliné-Dévoué
Comme tous les profils, les Disciplinés s’entendent bien avec les Dévoués.
Partageant tous deux le désir de répondre aux attentes extérieures
(contrairement aux Pointilleux et aux Rebelles), ils vont coopérer et
respecter les volontés de chacun.
Les Disciplinés savent qu’ils peuvent compter (en général) sur les
Dévoués pour répondre aux attentes extérieures, mais ils peuvent
s’impatienter devant l’inaptitude de ces derniers à répondre à leurs propres
attentes.
Ils ne comprennent pas pourquoi les Dévoués vivent ces attentes comme
des obligations. Imaginons qu’un Dévoué dise à son patron : « Je suis
fatigué, parce que j’ai veillé jusqu’à 3 heures du matin pendant cinq jours
pour finir ce rapport. » Au lieu de lui témoigner son appréciation, le patron
Discipliné pourrait très bien lui répondre : « Il va falloir que tu apprennes
à mieux gérer ton temps de travail. Pour être performant, il faut dormir. »
Si de leur côté, les Dévoués apprécient que les Disciplinés répondent aux
attentes extérieures, ils peuvent se sentir oppressés par les attentes des
Disciplinés, se sentir jugés ou incompris quand ils peinent à répondre aux
attentes intérieures.
Les Dévoués trouvent parfois les Disciplinés froids ou égoïstes quand ces
derniers donnent la priorité à une attente intérieure sur une attente
extérieure. Une Dévouée (qui me semble au bord de la rébellion) a écrit :
Au cours de nos neuf ans de mariage, mon mari a fait la fac de médecine et son internat. Que
j’étais contente quand il a décroché son diplôme ! J’allais enfin pouvoir profiter de lui. Mais il
s’est aussitôt lancé dans un autre projet. J’ai vite compris qu’il y aurait toujours quelque chose
d’autre. En bonne Dévouée, je m’étais approprié ses attentes, j’avais pris sur moi ses
obligations pour qu’il puisse se concentrer sur ses études.
Ses projets actuels ne concernent que lui, et cela m’agace de le voir courir après des objectifs
que je ne trouve pas forcément importants. Nous avons trois enfants en bas âge et il m’aide
beaucoup, je le reconnais, mais parfois j’ai l’impression qu’il se dépêche de faire ses devoirs de
père pour pouvoir s’occuper de ses choses à lui. Il se lève très tôt (5 heures du matin) pour tout
faire, mais du coup, il me réveille. Après toutes ces années à me lever plusieurs fois par nuit
à cause des petits, cela me fatigue d’être réveillée, parce que monsieur a des projets.
Il fait comme s’il était débordé, mais ce n’est pas vraiment le cas, puisque rien ne l’oblige
à faire tout ça. Je suis à bout, et j’aimerais qu’il se concentre sur notre famille, sans se fixer des
objectifs superflus qui finissent toujours par me retomber dessus. Si je me montre indifférente
à ce qu’il fait, c’est comme si je n’existais pas, parce qu’il n’y a que ses objectifs qui comptent.
Je comprends leurs deux points de vue. Ce témoignage montre très bien
comment la frustration et le ressentiment peuvent naître entre un Dévoué et
un Discipliné.
Les Dévoués peuvent être contrariés quand les Disciplinés refusent d’être
leur garant, et inversement, les Disciplinés peuvent se sentir gênés quand
les Dévoués leur disent : « Je fais ça, parce que tu me l’as demandé » ou
« Je le fais pour toi ». Les Disciplinés veulent que les gens fassent les
choses pour eux-mêmes, ce qui est beaucoup demandé !
Connaître le profil des gens permet de désamorcer les conflits, comme le
raconte une Disciplinée : « Apprendre que mon compagnon est un Dévoué
a fait beaucoup de bien à notre relation. S’il ne va pas au bout de ses
objectifs, je sais maintenant que ce n’est pas parce qu’il s’en fiche ou qu’il
manque de rigueur, il a juste besoin d’y être obligé. »

Discipliné-Rebelle
En général, Disciplinés et Rebelles ne s’entendent pas très bien. Ils ne
voient pas le monde de la même façon et fréquentent des milieux différents.
Enfreindre les règles met le Discipliné mal à l’aise, alors que le Rebelle
s’en amuse. Avec le temps, cela peut être source de conflits, comme le
rapporte une lectrice : « Je suis une Disciplinée mariée à un Rebelle. Mon
mari a beaucoup de mal à répondre aux ordres de quelqu’un. Quand il doit
travailler, il est le plus souvent malheureux. Il déteste notre paroisse. À la
maison, il ne fait que les tâches qu’il veut bien. J’ai décidé d’aller voir un
conseiller conjugal, mais lui s’y refuse. Je l’aime vraiment. Il a été mon
héros pendant ma longue bataille contre le cancer (aucun signe du Rebelle
alors !) »
Les Disciplinés ont un faible pour les plannings, les programmes, les
plans, les consignes, ils n’aiment pas les changements et ils n’aiment pas
renoncer à qui a été prévu. Les Rebelles, eux, résistent à tout engagement.
Plus le Discipliné essaiera de prévoir quelque chose à l’avance, et plus le
Rebelle s’efforcera de l’ignorer.
Les relations parents-enfants entre Discipliné et Rebelle peuvent être
houleuses, dans un sens comme dans l’autre.
Une amie Rebelle a un fils Discipliné.
« Imaginons qu’à l’école de ton fils, les enfants doivent obligatoirement
porter une chemise à boutons le vendredi. Que ferais-tu ?
– Si c’est important pour lui, je lui achèterai une chemise, a-t-elle
répondu après avoir pris le temps de réfléchir (C’est une Rebelle qui met un
point d’honneur à être une mère attentive.) Mais je ne l’obligerais jamais
à la porter. »
Bien entendu, l’entente entre Discipliné et Rebelle dépendra beaucoup de
leurs autres traits de caractère. Une relation de couple peut fonctionner si le
Rebelle veut être un compagnon aimant et attentionné.
Un Rebelle et un Discipliné peuvent vivre ensemble s’ils n’en attendent
pas trop l’un de l’autre, comme le rapporte cette lectrice : « Ma colocataire
est une Disciplinée qui est absolument horrifiée de me voir me lever à une
heure différente tous les jours. Et moi, je suis horrifiée par le fait qu’elle
retrouve les mêmes têtes tous les jours dans le métro ! » Elles sont toutes les
deux effarées par le comportement de l’autre, mais cela n’affecte en rien
leur mode de vie, et donc leur amitié.
Aucune relation, quelles que soient les personnalités en jeu, n’est
condamnée. Selon le caractère de chacun et les circonstances, toutes les
combinaisons sont possibles et peuvent être fructueuses, comme une
Disciplinée l’explique :
La nature Rebelle de ma compagne m’équilibre et permet d’assouplir mon côté Discipliné.
J’adore être une Disciplinée, mais cela n’a pas toujours été un avantage, surtout quand il a fallu
que j’assume mon homosexualité. J’avais l’impression de décevoir ma famille, de me décevoir
aussi, ce qui, pour une Disciplinée, était très lourd à porter.
De son côté, ma compagne a assumé son homosexualité très jeune, et n’a jamais eu de mal avec
ça. Au contraire, cela lui plaisait d’être différente. C’est sa nature Rebelle qui l’a aidé
à traverser une épreuve que la plupart des gens trouvent émotionnellement difficile. J’admire sa
confiance en elle et son assurance.
Sa spontanéité est parfois déroutante, mais c’est aussi ce qui me force à lâcher prise quand je
me contrôle juste pour être dans le contrôle. Par exemple, j’ai du mal à annuler quelque chose
de prévu. Il m’arrive cependant de le faire après une semaine stressante ou parce que je ne me
sens pas bien. Elle prend alors un malin plaisir à me voir culpabiliser de ne pas avoir répondu
à un engagement que je m’étais fixé. Malgré son profil Rebelle, elle tient à me faire plaisir et se
plie à mes listes, calendriers et autres programmes bien planifiés (non sans apporter une bonne
dose d’humour).
Une autre Rebelle m’expliquait pourquoi elle pensait que le couple
Discipliné-Rebelle pouvait fonctionner : « Mon mari est un Discipliné et
j’admire sa détermination sans faille à poursuivre ses objectifs. Il apprécie
mon indépendance et mon anticonformisme. Nous appartenons tous deux
à des profils extrêmes et aucun de nous ne comprend vraiment les Dévoués
ou les Pointilleux, qui ne savent pas ce qu’ils veulent, ou qui sont
incapables de s’imposer face aux autres ! »
Disciplinés et Rebelles ont beaucoup à apprendre les uns des autres.
J’avais écrit qu’en tant que Disciplinée, j’avais pour devise : « La
discipline, c’est la liberté. » Un Rebelle m’a répondu : « Si je devais trouver
une devise pour les Rebelles, Gretchen, je proposerais d’inverser la vôtre,
puisqu’après tout, les profils Rebelle et Discipliné peuvent être considérées
comme antithétiques. Si votre devise, c’est : “La discipline, c’est la liberté”,
la mienne serait : “La liberté comme seule discipline”. »

Pointilleux-Pointilleux
Pour beaucoup, les relations entre Pointilleux ne peuvent que fonctionner,
parce que les deux parties comprennent et apprécient le besoin de chacun
d’avoir des réponses à ses questions. Une Pointilleuse explique :
Mon mari et moi sommes tous les deux Pointilleux, chacun à notre façon. Il passe des heures
à faire des recherches pour acheter une tente, alors que je me décide très rapidement pour les
achats. Même si faire ce genre de recherches ne me viendrait pas à l’esprit, je suis contente
qu’il s’en charge. J’ai remarqué que nous étions très différents des autres couples, parce que
nous ne nous sentons pas menacés ou critiqués quand l’autre nous remet en question. Nous
comprenons le besoin de multiplier les points de vue avant de prendre une décision. Nous
trouvons cela utile et non superflu. C’est agréable de savoir qu’il ne prendra pas
personnellement mes remarques sur ses décisions, achats, projets, etc. Il comprend, et même, il
apprécie.

D’un autre côté, deux Pointilleux peuvent avoir parfois du mal à prendre
des décisions, comme me l’a fait remarquer un ami : « Comme on est
Pointilleux tous les deux, il nous arrive d’être bloqués.
– C’est-à-dire ?
– Quand on a fait des travaux dans la maison, il a fallu déplacer le lave-
vaisselle. Mais chaque fois qu’on réfléchissait à un nouvel emplacement, on
finissait dans le jardin en train de nous demander s’il fallait construire un
deuxième étage. Chaque question amenait une autre question, nous ne nous
en sortions pas.
– Avez-vous réussi à vous décider finalement ?
– Pendant deux ans, nous avons vécu avec un lave-vaisselle qui n’était
pas branché, parce que nous ne savions pas où le mettre. J’ai fini par me
dire qu’un lave-vaisselle n’importe où, c’était mieux que pas de lave-
vaisselle du tout. Et j’ai déclaré : “Nous recevons des invités le mois
prochain, le lave-vaisselle marchera d’ici là.” Nous aimons tous les deux
respecter les délais. »
La combinaison parents Pointilleux/enfants Pointilleux fonctionne bien
aussi. Le parent comprend la réticence de l’enfant à obéir à des injonctions
arbitraires ou injustifiées, et il donnera volontiers des explications. L’enfant
Pointilleux respectera les décisions mûrement réfléchies de son parent
Pointilleux.
Mais leur répugnance à être remis en question peut être source de
frustrations. Quand le parent dit : « Tu verras bien ce qu’on mangera ce
soir » ou quand l’enfant dit : « Je suis en train de faire mes devoirs, je n’ai
pas envie d’en parler », ils refusent tous deux de donner des explications,
alors qu’il y en a (ce sont des Pointilleux après tout), parce qu’ils n’aiment
pas avoir à se justifier.

Pointilleux-Dévoué
Dévoués et Pointilleux font bonne équipe, même si leurs relations peuvent
être parfois conflictuelles. Une Dévouée en donne un exemple flagrant :
« Je traverse dans les passages cloutés et respecte les panneaux de
signalisation pour les piétons, tandis que mon mari, qui est un Pointilleux,
s’en fiche complètement et traverse où bon lui semble. »
Les Dévoués peuvent aussi s’exaspérer du besoin constant des Pointilleux
d’informations et de justifications. Un Dévoué se souvient :
Je travaillais pour une Pointilleuse qui avait besoin de compiler un maximum de données et ne
prenait de décision qu’à la dernière minute. J’étais chargé de lui fournir des projections
financières et je passais des heures et des heures à créer de nouveaux modèles, tout ça pour
arriver à peu de choses près au même résultat que le modèle de départ.

Les Dévoués ont tout intérêt à se rappeler que les Pointilleux sont plus
coopératifs quand ils comprennent pourquoi on leur demande de faire
quelque chose, comme l’explique cette lectrice : « Maintenant, quand je
demande quelque chose à mon mari, je sais que je dois lui expliquer
pourquoi c’est important. Avant, je pensais qu’il suffisait qu’il sache que ce
devait être fait, mais en fait, il a besoin d’avoir une raison de le faire. Toutes
ces interminables discussions que nous aurions pu éviter si j’avais
commencé à lui expliquer pourquoi ! »
Un parent Dévoué peut vite perdre patience avec les questions
incessantes ou impertinentes de son enfant Pointilleux. L’un d’eux raconte :
En tant que Dévoué, quand un parent, professeur ou entraîneur vous dit de faire quelque chose,
vous le faites, sans poser de question. Mais ma fille, qui est une Pointilleuse, refuse de faire
quoi que ce soit si elle ne sait pas pourquoi on le lui demande. Moi, je sais que ce n’est pas de
l’impertinence ou de la mauvaise volonté, mais tout le monde ne va pas être aussi patient avec
elle.

Quand les Pointilleux voient les Dévoués manquer à un engagement


personnel, ils peuvent se montrer durs et blessants. N’ayant eux-mêmes
aucun mal à répondre à leurs attentes, ils ne voient aucune raison de
compatir. De même, ils ne comprennent pas qu’un Dévoué se plaigne
d’avoir à faire quelque chose : « Si tu n’as pas envie de le faire, ne le fais
pas » ou « Pourquoi as-tu dit que tu le ferais si tu n’en avais pas envie ? »

Pointilleux-Rebelle
Pointilleux et Rebelles ont incontestablement des affinités. Les deux profils
se sentent en droit – à un degré plus ou moins élevé – de suivre leurs
propres règles et de rejeter toutes attentes extérieures. Un Rebelle a écrit :
« Je m’entends bien avec les Pointilleux. Ils se fichent de ce que les autres
disent ou pensent, de ce qu’il faut faire. S’ils jugent ça idiot, ils ne le feront
pas. Pour moi, c’est pareil. »
Pour les Disciplinés et les Dévoués, ce genre d’attitude peut passer pour
un mépris total et égoïste des obligations de tout un chacun, alors que les
Pointilleux et les Rebelles ne comprennent même pas comment il est
possible de fonctionner autrement.
Cela dit, les Pointilleux peuvent s’irriter du refus systématique du Rebelle
à faire ce qui est utile ou raisonnable. Les Rebelles quant à eux restent de
marbre devant l’insistance des Pointilleux à s’informer ou se justifier. Un
lecteur témoigne :
Je suis un Pointilleux et un Rebelle vient d’être engagé au bureau. Il fait les choses comme il le
sent et perd du temps avec des détails qui n’ont aucun intérêt, alors que l’équipe a déjà établi un
programme bien précis. J’adore mon travail, parce qu’il consiste à trouver des solutions basées
sur des données et des études. Et cela m’énerve qu’il ne tienne pas compte des nouvelles
données et des nouvelles avancées. Il n’en fait qu’à sa tête. Il ne respecte pas les délais et ne
répond pas à mes questions, cela me met hors de moi.

Une Pointilleuse en couple avec un Rebelle dresse la liste des avantages


et des inconvénients de leur relation :
Nous nous comprenons vraiment quand nous prenons des décisions décalées, à contre-courant.
Je me suis renseignée et je suis sûre de mon choix. Quant à lui, il est content de faire quelque
chose d’inattendu. Mais quand il s’agit de choisir une voiture, par exemple, je me perds en
conjectures et il est terrifié à l’idée d’être coincé avec un modèle. Nous nous accordons en
général pour ne pas tenir compte des attentes extérieures.

Dévoué-Dévoué
Une relation entre Dévoués peut être très harmonieuse. Deux des couples
les plus heureux que je connaisse sont des Dévoués, même si tout n’est pas
rose tous les jours. Une Dévouée raconte : « On veut faire attention à notre
alimentation, mais il suffit que l’un propose : “Ça te dirait une pizza ?” pour
que l’autre réponde aussitôt : “Oh oui !” On a beaucoup de mal à nous
motiver à faire des activités saines ensemble. On fait des plans sur la
comète, mais rien ne se concrétise. »
La solution est de se créer un système de responsabilisation ou de
contraintes extérieures, ce qui implique, dans le cas des couples 100 %
Dévoués, des contraintes extérieures au couple. Pour respecter un budget
commun, mieux vaut pour eux ne pas se fier à l’autre, mais prendre
régulièrement rendez-vous avec un conseiller financier.
Parent et enfant Dévoués s’entendent également très bien. Le parent se
sent responsable de son enfant et l’enfant se sent redevable vis-à-vis de son
parent. C’est une dynamique très fructueuse, comme en témoigne une
lectrice :
J’ai du mal à me forcer à me lever tôt, et ma mère aussi, alors je lui ai proposé d’être mon
binôme spirituel. Je l’appelle à 7 heures, on papote un peu, on lit un passage de la Bible, on en
discute, puis on prie l’une pour l’autre. C’est la solution idéale, parce que cela nous pousse
à nous lever tôt le matin tout en instaurant l’habitude de lire la Bible quotidiennement, ce que
j’ai toujours voulu faire. Cerise sur le gâteau : nous partageons ce moment ensemble.

Dévoué-Rebelle
Nous avons déjà parlé de cette association récurrente dans la section « Le
conjoint Rebelle » au chapitre 10.
Si le tandem Dévoué-Rebelle fonctionne bien, le quotidien n’est pas
forcément sans accrocs. Par exemple, de nombreux enfants Dévoués
devenus adultes m’ont confié qu’il était difficile d’avoir un parent Rebelle.
Une amie m’a dit : « Ma mère adore ses petits-enfants, mais si je lui
demande de les garder, elle exige qu’on les conduise chez elle à l’heure
qu’elle aura choisie. Tout doit toujours se faire selon ses propres termes. Et
c’est dommage, parce qu’elle manque plein de choses. Mon mari et moins
ne lui proposons plus de participer aux activités familiales, parce qu’elle ne
sera pas à l’heure et ne voudra pas faire les choses de telle ou telle façon ».
Un autre Dévoué m’a écrit : « Une fois, j’ai dit à mon père d’être là à
18 heures, parce que cela commençait à 18 heures, alors qu’en fait cela ne
commençait qu’à 19 heures. Il est toujours en retard. Il m’a dit que j’étais
un manipulateur. Ce n’est pas faux. »
Manipulateur ou réaliste ? Il n’y a qu’un pas entre les deux.

Rebelle-Rebelle
Les Rebelles ont souvent du mal à s’entendre avec d’autres Rebelles. Une
Dévouée rapporte : « Mon mari et ma fille sont tous les deux Rebelles. Et le
comble, c’est qu’ils détestent chacun le côté Rebelle de l’autre. Ils vont
reprocher à l’autre ce qu’ils font eux-mêmes. Ils se traitent de paresseux, se
critiquent et se prennent le chou à longueur de temps. »
Un lecteur m’a écrit : « Je connais un couple Rebelle-Rebelle qui
fonctionne pour deux raisons. Premièrement, le mari gagne beaucoup
d’argent, il est à son compte et adore ce qu’il fait. La femme ne travaille pas
et fait absolument ce qu’elle veut après avoir déposé les enfants à l’école.
Deuxièmement, ce sont deux fortes personnalités pour qui il est important
d’être de bons parents. »
Intriguée de voir cette combinaison de profils si rare, j’ai demandé par
retour de courrier : « Comment décident-ils, par exemple, du lieu ou des
dates de leurs prochaines vacances ? » Les Rebelles rechignent en général
à suivre le mouvement initié par d’autres, même si c’est pour faire quelque
chose qui leur plaît.
Le lecteur m’a répondu :
J’adore les écouter nous raconter comment ils organisent leurs vacances. La femme décide de
l’endroit où aller, et le mari décide ensuite s’il a envie de se joindre à eux. Ils passent rarement
ses vacances seul, mais elle ne l’oblige à rien. Et lui non plus. S’il lui demandait de se charger
des vacances, elle rechignerait certainement. Ils procèdent comme ça pour presque tout. Celui
qui y tient s’en occupe, et l’autre prend le train en marche… ou pas. Quant aux enfants, ils s’en
chargent chacun leur tour autant que possible. Ils ont tous les deux beaucoup de mal avec ce
qu’il « faut » faire, et leur relation serait certainement moins harmonieuse s’ils n’avaient pas les
moyens de se décharger d’une bonne partie des obligations.

Une Rebelle décrit sa relation avec un autre Rebelle :


Je suis du genre « rebelle libertaire » (c’est-à-dire REBELLE/Dévouée). J’ai besoin
d’autonomie, d’espace, de liberté, de flexibilité, de pouvoir déménager, changer de point de
vue, et j’étouffe dans des cadres trop stricts. À peine je commence à prévoir quelque chose dans
ma tête que je veux le changer. Mon mari est différent, bien qu’il soit un Rebelle aussi. Pour
moi, c’est un « rebelle identitaire » (c’est-à-dire REBELLE/Pointilleux). Il aime être à part,
faire les choses à sa façon, et être fidèle à lui-même.
Notre relation n’a pas grand-chose d’un couple. Nous ne travaillons pas dans la même ville et
avons donc chacun notre appartement. Quand nous passons quelques jours ensemble, je me
sens rapidement étouffer. Aucun de nous ne voit l’intérêt de consacrer du temps, de l’énergie ou
de l’argent à nous occuper de ces appartements, alors nous consacrons très peu de temps aux
tâches ménagères.
Ces deux Rebelles forment un couple heureux, parce qu’ils tiennent
compte de leur nature respective et n’essaient pas de se conformer à un
modèle de couple conventionnel.
Beaucoup de gens m’ont dit : « Je suis un Rebelle et mon enfant est un
Rebelle. Je ne sais pas comment font les parents non-Rebelles pour gérer
leur enfant Rebelle. » Une mère m’a confié : « Avant, je culpabilisais de ne
pas être tout le temps derrière ma fille à lui rappeler de faire ses devoirs ou
ce genre de choses. Maintenant que j’ai compris qu’elle est une Rebelle
comme moi, je me dis que c’est mieux comme ça. »
Certaines relations sont plus harmonieuses que d’autres, et cela dépend
beaucoup des circonstances. Quand surgit un conflit, que ce soit au travail
comme à la maison, la solution la plus efficace est de laisser l’autre faire les
choses à sa façon.
Cela peut sembler évident, mais souvent, notre profil (et notre nature
humaine en général) nous pousse à vouloir dicter les choses aux autres au
lieu de les laisser se débrouiller comme ils l’entendent.
Ainsi, la Disciplinée que je suis veut toujours suivre les règles et faire les
choses sans tarder. En tant que Pointilleux, Jamie veut trouver la façon de
procéder la plus efficace. La solution ? Je gère mes tâches à ma façon, il
gère les siennes à sa façon, et aucun de nous n’interfère dans les affaires de
l’autre.
On a beau se dire que l’on sait « mieux » ce que les autres « devraient »
faire, mais du moment où les choses sont faites, il vaut mieux laisser les
gens faire comme ils le veulent. Acceptons que chacun puisse avoir sa
propre vision du monde, nos relations n’en seront que meilleures.
12
Communiquer efficacement avec
chaque profil

Au travail, à la maison, partout, nous essayons de convaincre les autres de


se plier à notre volonté (même quand nous voulons qu’ils nous laissent
tranquilles). Quand nous avons affaire à une personne du même profil que
nous, il suffit de trouver les arguments qui nous convaincront et de créer les
circonstances qui s’y prêtent ; quand nous avons affaire aux autres profils, il
faut trouver des arguments qui les convaincront et créer des circonstances
qui leur seront favorables.
Nous avons souvent tendance à penser que ce qui nous convainc suffira
à convaincre les autres aussi, or c’est faux. Adultes, nous découvrons que
nous ressemblons plus aux autres que nous ne le supposions et nous leur
ressemblons moins que nous ne le pensions. C’est très dur de garder ça en
tête.
En bref, pour inciter quelqu’un à faire quelque chose, il est bon de se
rappeler que :
• Les Disciplinés veulent savoir ce qu’il faut faire
• Les Pointilleux veulent en connaître les raisons
• Les Dévoués ont besoin d’être responsabilisés
• Les Rebelles veulent être libres de faire comme bon leur semble
De la même façon, l’argumentaire sera plus convaincant s’il repose sur
des valeurs qui parlent à chaque profil :
• Les Disciplinés accordent de la valeur à la maîtrise de soi et à la
performance
• Les Pointilleux accordent de la valeur au sens et au raisonnement
• Les Dévoués accordent de la valeur au travail d’équipe et au devoir
• Les Rebelles accordent de la valeur à la liberté et à leur identité

Chaque profil ayant sa propre approche du monde, il n’y a pas de solution


unique et universelle pour convaincre les autres de se plier à notre volonté.
Je fais du sport régulièrement, parce que cela fait partie des choses que j’ai
prévu de faire ; un Pointilleux en fait, parce qu’il sait que c’est bon pour sa
santé ; un Dévoué fait une sortie hebdomadaire à vélo depuis qu’il a trouvé
un binôme ; un Rebelle court quand il en a envie.
Mon père, un Pointilleux, m’a raconté comment il avait arrêté de fumer :
« Ta mère et moi avions du mal à joindre les deux bouts, et j’avais calculé
combien j’économiserais en arrêtant de fumer et combien je gagnerais en
investissant cet argent. » Il a donc fait ses calculs et s’est focalisé sur les
avantages d’arrêter la cigarette. Un ami Dévoué, lui, s’est arrêté de fumer
à la naissance de son fils : « Maintenant que j’ai un enfant, je ne peux plus
prendre de risques inutiles. Je veux être un modèle pour lui. » Une Rebelle,
elle, pourrait se dire : « Je refuse d’être esclave de la nicotine. »
Connaître les spécificités de chaque profil nous permettra de déterminer
comment les aider, quel rôle jouer dans leur vie. Par exemple, les
diabétiques doivent prendre leur traitement, manger correctement, faire de
l’exercice et voir leur médecin régulièrement. Ma sœur Elizabeth, qui
souffre de diabète de type 1, m’a raconté : « Mon médecin m’a dit que
certains patients avaient arrêté d’aller le voir, parce qu’il était “trop gentil”.
– Comment ça, trop gentil ? ai-je demandé, perplexe.
– Pas assez dur avec eux s’ils ne suivaient pas ses instructions.
– Je parie que ce sont des Dévoués qui ont besoin d’un garant plus strict !
Pour toi, des rendez-vous réguliers suffisent pour te responsabiliser, mais
pour certains Dévoués, ce n’est pas assez contraignant. Ils vont choisir un
médecin plus sévère. »
S’il tenait compte du profil de ses patients, ce médecin pourrait adapter
ses conseils et personnaliser son encadrement thérapeutique.
Certains professionnels de la santé ont déjà commencé à utiliser la
typologie des quatre profils.
Je suis une Disciplinée pur jus. Je travaille comme diététicienne à la clinique Mayo dans le
service des consultations externes. J’ai longtemps été perplexe quand les patients n’arrivaient
pas à changer leurs habitudes alimentaires. La plupart savaient pourtant que cela avait des
répercussions directes sur l’évolution de leur maladie, mais rien n’y faisait. Découvrir le
principe des quatre profils a bouleversé ma façon de voir les choses et m’a permis d’offrir des
soins et des conseils beaucoup plus pertinents à mes patients.

Un kinésithérapeute m’a rapporté :


« Je travaille en réadaptation cardiaque et une grande partie de ma mission consiste
à encourager mes patients à adopter de bonnes habitudes de vie. Maintenant, je classe mes
patients selon leur profil :
– Les Disciplinés : « C’est ce qu’il faut faire ? Alors, je vais le faire. »
– Les Pointilleux : « Pourquoi devrais-je faire ça ? Expliquez-moi et prouvez-moi que ça
marche. »
– Les Dévoués : « Je vais vous montrer comme je fais ça bien. »
– Les Rebelles : « Ce n’est pas vous qui allez me dire quoi manger ou quoi faire. »

Sur une note plus amère, une lectrice a écrit : « J’aime bien mon médecin,
mais quand je lui ai dit que j’avais besoin d’être davantage responsabilisée,
elle est restée sceptique. Elle est persuadée que je dois apprendre à me
motiver et à faire les choses pour moi. Bien entendu, cela ne marche pas. Je
n’ai jamais pu fonctionner comme ça. Je veux juste quelque chose qui
marche pour moi. »
Combien de fois ai-je entendu ça ! J’avoue ne pas comprendre pourquoi
ce serait déshonorant d’avoir besoin de contraintes extérieures pour se
motiver. Tant que ça marche, où est le problème ? À chacun sa stratégie !
Souvent, quand les gens veulent changer un comportement, chez eux
comme chez les autres, ils commettent l’erreur commune de dire : « Tu
devrais… »
– « Si tu tiens à ta santé, tu devrais faire du sport régulièrement. »
– « Si tu prends ce travail au sérieux, tu devrais respecter les délais que je
t’ai donnés. »
– « Si tu veux vraiment conclure cette vente, tu devrais pouvoir ignorer
quelques règles. »
– « Si tu me respectes, tu devrais faire ce que je t’ai dit sans rechigner. »
– « Si tu te respectes, tu devrais trouver le temps d’écrire. »

Qu’importe ce que les autres pensent (ou ce que nous pensons) qu’untel
ou untel « devrait faire », ce qui compte, c’est ce qu’il peut faire et
comment il peut le faire. Si nous voulons aider les gens à changer leurs
habitudes ou leur comportement, nous devons les aider à trouver la stratégie
qui garantira leur succès. Certains ont besoin de clarification,
d’informations, d’autres de responsabilisation, de contraintes ou de choix.
Une lectrice m’a écrit : « Je suis une Dévouée et mon mari est un
Pointilleux. Quand je lui ai parlé du principe des quatre profils, il a enfin
compris pourquoi je voulais qu’il me demande tous les jours si j’avais
mangé équilibré. J’avais besoin de lui comme référent. Avant, il trouvait ça
bizarre comme demande. Si je voulais manger équilibré, il suffisait que je le
décide. »
Quand on saisit les particularités de chaque profil, on peut faire en sorte
que les circonstances soient favorables à chacun. Imaginons un chef de
projet responsable d’une équipe comportant tous les types de profils. Il
pourrait annoncer la mise en place d’un nouveau système informatique en
disant : « Si vous pensez en savoir suffisamment sur le nouveau système,
vous pouvez retourner à vos tâches. Si vous voulez en savoir plus, restez, je
suis là pour répondre à vos questions. » De cette façon, il ne fait pas perdre
de temps à ceux qui n’ont pas besoin d’en savoir plus (principalement des
Dévoués et des Disciplinés), et il reste disponible pour ceux (probablement
des Pointilleux) qui ont besoin d’un maximum d’informations pour accepter
la nouveauté. Les Rebelles verront sur le moment de quel côté ils penchent.
Pour être sûr de se faire comprendre par tous les étudiants, un professeur
pourrait expliquer le but et les objectifs de toutes les matières obligatoires :
« Au fil des années, les étudiants ont constaté que faire des résumés des
cours les aidait à les retenir. Notez que ces résumés vous seront
extrêmement utiles en période de révisions. » Et dans l’année, il pourrait
demander à ses élèves de le tenir au courant de leurs progressions par mail
une fois par mois. Il pourrait également proposer trois sujets de devoir
plutôt qu’un seul. En tenant compte des quatre profils, il peut aider ses
étudiants à réussir leur année.
On fait souvent toujours les mêmes erreurs. Quand ils veulent convaincre,
les Disciplinés et les Pointilleux vont mettre l’accent sur l’importance de
clarifier les attentes intérieures : « Qu’est-ce que tu veux ? Décide-toi. »,
« Tu dois savoir ce que tu veux vraiment. », « Détermine tes priorités et tes
besoins. » Ce sont d’excellents conseils, à n’en pas douter, mais uniquement
pour les Disciplinés ou les Pointilleux. Les Dévoués auront tendance
à avancer : « Ça va gêner untel », « Tu es obligé de le faire, ça fait partie de
ton travail », « Tu ne peux pas exiger à quelqu’un de faire ça ». Ce sont
également de très bons arguments… pour des Dévoués.

Une institutrice a écrit :


Tous les enseignants doués utilisent consciemment ou non la typologie des profils. En voici un
exemple : mes élèves, qui ont entre quatre et cinq ans, font tous la sieste l’après-midi. Certains,
bien qu’ayant besoin de sommeil, ont du mal à se calmer.
Aux Disciplinés, je dis : « Nous avons fait plein de choses aujourd’hui. Vous avez beaucoup
couru et vous êtes fatigués. Après la sieste, j’ai prévu de faire un jeu, alors je veux que vous
repreniez des forces. »
Aux Pointilleux, je dis : « Pourquoi croyez-vous que je vous demande de faire la sieste tous les
jours ? Pourquoi est-ce si important de faire la sieste ? » Ils ont toujours plein de réponses à me
donner, sur lesquelles je renchéris : « Exactement ! Alors, tu es d’accord pour te reposer ? » Ils
répondent « oui », parce que pour eux, cela tombe sous le sens.
Aux Dévoués, je dis : « Je serai très fière de vous si vous faites une grosse sieste comme hier. Je
suis sûre que c’est possible. Vous vous sentirez tellement bien quand vous vous réveillerez ! »
Aux Rebelles, je dis : « Vous n’êtes pas obligés de faire la sieste, mais pourriez-vous rester
tranquillement allongés quelques minutes ? Si vous n’avez pas envie de dormir après ça, vous
pourrez prendre un livre. » (Ils aiment savoir que ce sont eux qui décident ou non de faire la
sieste, et finissent invariablement par s’endormir.)

Me référer aux quatre profils m’a souvent permis de comprendre


pourquoi on ne s’entendait pas avec telle ou telle personne. Ce sont les
petits travers propres à notre profil qui exaspèrent les autres. Un Discipliné
va répéter inlassablement à son équipe : « Il suffit de le vouloir ! » Un
Pointilleux va continuer d’inonder la boîte mail d’un collègue Dévoué avec
des études sur la productivité au travail. Un Dévoué va s’entêter à offrir à sa
compagne Rebelle des abonnements à des clubs de gym. Un Rebelle va
conseiller à un Discipliné d’être moins coincé. Même si cela part d’une
bonne intention, cela ne fera que braquer l’autre.
Dans certaines situations, la méconnaissance des mécanismes de base de
chaque nature peut avoir de lourdes conséquences. Un policier qui dirait
à un Pointilleux ou à un Rebelle : « Sortez du véhicule » pourrait se voir
répondre : « Pour quelle raison ? », « Qu’est-ce qui vous donne le droit de
me demander ça ? », « Je ne faisais rien de mal, c’est une interpellation
arbitraire », « Je n’ai pas d’ordre à recevoir de vous ». Plus l’agent insistera
et plus il provoquera l’esprit de contradiction de son interlocuteur. La
situation peut vite tourner au drame.
Cela m’amuse beaucoup de voir si la signalétique des lieux publics
s’adresse ou non aux quatre profils. L’on voit bien que tout est question de
formulation.
Pour s’assurer que le message sera compris par tous, rien de tel que la
formule : information, conséquences et choix. Cela marche bien sur les
Rebelles, comme nous l’avons vu. Les Pointilleux seront également plus
enclins à coopérer s’ils savent pourquoi. Les Dévoués obtempéreront selon
les conséquences et les Disciplinés suivront la règle, tout naturellement.
J’ai pris cette photo lors de la visite des locaux d’une entreprise. C’était
affiché dans les toilettes des femmes. Le message ne s’adresse clairement
pas aux quatre personnalités.
Règles de savoir-vivre
Oui… je jette mes déchets dans la poubelle, je nettoie les projections d’eau autour de l’évier et de la cuvette des
toilettes. Oui… je tire la chasse d’eau et je m’assure que tout est parti.Oui… je fais encore plus attention qu’à la
maison, parce que c’est un lieu public. Si je ne le fais pas pour moi, je le fais pour les autres. Non… je ne jette pas les
serviettes hygiéniques ou les tampons dans les toilettes, les poubelles sont là pour ça. Merci de nous aider à garder
les toilettes propres et agréables !

Cette affiche a indéniablement été rédigée par une Dévouée pour les
Dévouées : « Si je ne le fais pas pour moi, je le fais pour les autres. » Pour
convaincre un Rebelle, il aurait mieux valu dire le contraire : « Gardez les
lieux propres pour vous, si ce n’est pour les autres. » De plus, ces « oui » et
« non » ne provoqueraient pas seulement la résistance des Rebelles, mais
celle des Pointilleux aussi… et même des Disciplinés comme moi !

Merci de ne pas fumer

C’est incroyable comme il est facile de susciter l’opposition. Un Rebelle


a écrit : « Quand je vois les panneaux “Merci de ne pas fumer”, cela me
donne aussitôt envie de fumer, alors que je ne fume pas ! Je ne supporte pas
qu’on me donne des ordres. »
Dans les rayonnages d’une bibliothèque de New York que j’adore, j’ai eu
l’agréable surprise de lire ce panneau qui, en quelques mots, s’adresse avec
succès aux quatre profils :

Veuillez noter que des fourmis ont été aperçues à cet étage. Aidez-nous à protéger les ouvrages de la
bibliothèque.Boisson et nourriture sont interdites.

Cela s’adresse aux Disciplinés : voici les règles, suivez-les. Cela


s’adresse aux Pointilleux : boisson et nourriture sont interdites, parce qu’ils
attirent les fourmis qui endommagent les livres. Cela s’adresse aux
Dévoués : les bibliothécaires savent que le règlement n’a pas été respecté,
parce qu’il y a eu des fourmis, alors arrêtez. Cela s’adresse aux Rebelles :
les usagers de la bibliothèque sont des gens qui accordent de la valeur aux
livres, ils font en sorte de ne pas les dégrader et respectent les règles en
vigueur. De plus, qui a envie de travailler dans une pièce grouillante de
fourmis ?
Le message laissé dans les salles de bains de l’hôtel Willard
à Washington tient également compte des quatre profils. Notez la dernière
ligne en gras directement adressée aux Rebelles.
Nos efforts pour protéger et réduire.
Réutiliser les serviettes de bain évite de gaspiller des milliers de litres de détergent et d’eau par an.
Si vous avez l’intention de réutiliser vos serviettes, accrochez-les.
Sinon, déposez-les dans la baignoire.
Nous vous remercions de participer à notre démarche,
Et bien sûr,
Le choix vous appartient.

L’hôtel Ritz-Carlton sur l’île d’Amelia en Floride a visiblement eu des


problèmes avec des clients qui laissaient les baies vitrées ouvertes. Certains
doivent se dire : « La condensation et les dégâts à long terme, ce n’est pas
mon problème, c’est celui de l’hôtel. Mais plus d’air conditionné et une
chambre pleine d’insectes ? Ah non ! »

Chers clients,
Veuillez garder les portes coulissantes fermées.
L’humidité de Floride crée un phénomène de condensation causant de nombreux dégâts matériels.
Si les baies restent ouvertes, l’air conditionné se coupera automatiquement et des insectes entreront dans la
chambre.

Ce panneau s’adresse également à tous les profils grâce à la formule :


information – conséquences – choix. Une remarque sur l’identité ne fait pas
de mal non plus.
L’urine des chiens tue les plantes et leurs excréments sentent mauvais.
Ayez l’amabilité de nous aider à garder ce lieu agréable.
Merci.

Pour qu’un message fasse mouche, il doit s’adresser à tous les profils.
Quand, à l’approche de l’ouragan Sandy, le maire de New York Michael
Bloomberg a ordonné l’évacuation des zones inondables de la ville,
beaucoup d’habitants ont refusé de quitter leur domicile, ce qu’une
Disciplinée comme moi trouve complètement aberrant.
Comment pourrait-on formuler un ordre d’évacuation qui s’adresserait
à tous les habitants, quelle que soit leur profil ?
Pour que les Disciplinés s’exécutent, il faudrait leur en donner l’ordre
express et stipuler clairement que tous les habitants doivent évacuer les
lieux. Il n’en faut pas plus pour les convaincre.
Pour que les Pointilleux s’exécutent, il faudrait que le risque soit attesté.
Ainsi l’ordre d’évacuation doit préciser quand, où et avec quelle force
l’ouragan va frapper, quels sont les risques, pourquoi il faut quitter les
lieux, pourquoi tel quartier plutôt qu’un autre et pourquoi les domiciles bien
construits et élevés présentent quand même des risques. Il faudrait
également leur expliquer que des experts (météorologues, ingénieurs,
architectes) ont été consultés, et il faudrait éviter de comparer cet ouragan
au précédent, car si ces personnes n’avaient pas été inquiétées alors, elles
pourraient estimer qu’elles n’ont de nouveau rien à craindre.
Pour que les Dévoués s’exécutent, il faudrait les responsabiliser et
insister sur le fait qu’un refus d’évacuer les lieux mettrait leur famille ainsi
que les secouristes en danger. Il faudrait également spécifier que les agents
de la ville auront l’ordre de signaler les réfractaires qui seront verbalisés
pour refus d’obtempérer. On pourrait aussi leur rappeler leurs obligations
envers leur famille et leurs voisins ainsi que leur devoir citoyen de montrer
l’exemple, car le meilleur moyen de garantir la sécurité de tous (y compris
celle des animaux de compagnie) est d’évacuer.
Les Rebelles détestent recevoir des ordres, mais ils accepteront plus
volontiers d’évacuer les lieux s’ils risquent de perdre leur liberté et leur
confort. Il faudrait donc insister sur le fait qu’ils risquent de rester bloqués
sur place pendant plusieurs jours, dans des conditions dangereuses ou du
moins inconfortables, sans électricité, eau courante, ascenseurs, transports
publics et livraisons de plats à domicile.
Les autorités pourraient également prévenir les gens que leur identité
serait relevée. Quel que soit son profil, on n’agit pas de la même façon sans
le couvert de l’anonymat.
Dans ma quête de signalétique s’adressant aux quatre profils, je jette
toujours un œil dans l’espace cuisine des entreprises que je visite. Les
messages, notes et autres affiches sur les réfrigérateurs, placards ou au-
dessus des éviers sont des pépites de communication, qu’elle soit efficace…
ou non ! J’avais lancé une discussion sur le meilleur message à mettre dans
la cuisine pour éviter que l’évier déborde de vaisselle sale.
Un Dévoué a proposé ceci :
Merci de mettre votre vaisselle sale dans le lave-vaisselle. S’il est plein, videz-le. S’il est en
marche, placez votre vaisselle préalablement rincée dans l’évier et revenez plus tard la placer
dans le lave-vaisselle. Votre mère n’est pas là pour le faire à votre place.

Eh bien, cela ne marchera jamais, et pour toutes sortes de raisons !


Parfois, il n’y a même pas besoin de message. Il suffit d’une bonne idée,
comme celle de distribuer des mugs personnalisés. D’une part, on s’occupe
instinctivement de ce qui est à nous, et d’autre part, on ne peut plus laisser
traîner ses affaires anonymement.
Après délibérations, nous avons conclu que les meilleures façons de faire
passer le message étaient la formule « information – conséquences –
choix », la personnalisation des mugs, et l’humour, bien sûr. Un message
humoristique peut être à la fois informatif et percutant sans pour autant
provoquer de tensions. Un dessin ou un trait d’humour passe parfois bien
mieux qu’un long paragraphe d’instructions. Je me souviens d’un panneau
à la piscine municipale : « Nous ne nageons pas dans vos toilettes, ne faites
pas pipi dans notre piscine. » Pour la cuisine du bureau, un Rebelle
a suggéré : « Si la cuisine reste propre, nous retirerons tous les messages
demandant aux gens de la garder propre. »
Quelle que soit la situation, un message formulé en fonction des
caractéristiques des quatre profils assurera la coopération de tous. En
général, quand nous voulons convaincre les autres, nous utilisons des
stratégies qui fonctionneraient sur nous. La typologie des quatre profils
nous permet de comprendre qu’il est plus judicieux de s’adapter à son
interlocuteur. La communication n’en sera que plus harmonieuse.
13
Apprendre à tirer parti de ses forces,
quel que soit son profil
De même que le café pousse à moins de 2 000 mètres et le cèdre à plus de 2 000 mètres, chaque humain
a besoin d’un certain type de terreau, une certaine température et une certaine altitude pour être libre et
heureux, c’est-à-dire libre de développer tout le potentiel de sa nature. Certains s’acclimatent presque partout,
d’autres ne s’épanouissent que sous des latitudes précises. On peut se sentir complètement libre dans un
monastère trappiste ou à la cour de Berlin ; mais il faudrait avoir une personnalité inhabituelle et
inhabituellement gracieuse pour se sentir libre dans les deux endroits pareillement.

Isak Dinesen, Correspondance, 19 août 1923

Notre profil façonne nos expériences et notre façon de voir les choses.
Nous répondons différemment aux circonstances et au langage et nous nous
épanouissons dans différents environnements.
Mais quelle que soit notre profil, la sagesse et l’expérience peuvent nous
aider à exploiter les forces et compenser les faiblesses de notre nature.
À la fin d’une conférence sur les quatre profils, un homme m’a demandé :
« Quel profil rend les gens plus heureux ? » Cette question toute simple ne
m’avait jamais traversé l’esprit. « Et lequel permet de réussir le mieux dans
sa vie ? » a-t-il poursuivi.
La réponse était – comme le plus souvent – « Ça dépend. » Tout dépend
de la façon dont la personne gère les avantages et les inconvénients de sa
nature. Les gens les plus heureux, ceux qui réussissent le mieux, sont ceux
qui savent tirer le meilleur parti des avantages de leur nature et, ce qui est
tout aussi important, qui savent s’accommoder au mieux de leurs
inconvénients.
Nous pouvons tous construire la vie que nous voulons, et nous devons le
faire de la manière la plus adéquate.
Une phrase me hante, celle du romancier Rebelle John Gardner : « Que
l’on enfreigne la loi ou qu’on lui obéisse, tout se paie, toujours. »
Disciplinés, Pointilleux, Dévoués et Rebelles, nous devons tous composer
avec notre profil, quels que soient ses forces, ses faiblesses, ses singularités
et ses travers.
Et puisque tout se paie, la connaissance de notre nature profonde est ce
qui nous permettra de comprendre comment, quand et pourquoi nous allons
payer… et comment construire la vie que nous voulons.
APPENDICE
REMERCIEMENTS

Quel plaisir j’ai eu d’écrire Les 4 Profils ! Il y a tellement de personnes


que j’aimerais remercier pour leur aide et leurs réflexions pertinentes sur le
principe des quatre profils.
Tout d’abord, je remercie ma famille, qui m’écoute parler des quatre
profils pratiquement tous les jours depuis plusieurs années.
Merci à mon agent, Christy Fletcher, à Sylvie Greenberg, Grainne Fox,
Sarah Fuentes, et Mink Choi de Fletcher & Co.
Merci à mon éditrice Mary Reynics et à l’équipe de Diana Baroni, Sarah
Breivogel, Julie Cepler, Aaron Wehner et à tous ceux qui ont travaillé avec
moi sur Les 4 Profils.
Merci également à Lisa Highton de Two Roads.
Beth Rashbaum m’a beaucoup aidée à clarifier mes idées.
Mike Courtney et Quyen Nguyen d’Aperio Insights ont fait un travail
remarquable en élaborant et gérant le test des quatre profils.
Merci au personnel de Worthy Marketing : Jayme Johnson, Jody
Matchett, David Struve et tous les autres.
Crystal Ellefsen contribue tous les jours à diffuser mes idées à travers le
monde.
Mighty Networks a créé, mis en service et gère l’application Better.
Un grand merci à Gina Bianchini, Audra Lindsay, Brian Vu, Rachel
Masters, et toute l’équipe de Mighty Networks.
Pour le podcast, j’aimerais remercier les membres de Panoply : la
productrice Kristen Meinzer, l’ancien producteur Henry Molofsky, ainsi
qu’Andy Bowers et Laura Mayer.
J’aimerais également remercier ma co-animatrice et sœur, la très sage
Elizabeth Craft.
QUIZZ DES QUATRE PROFILS DE GRETCHEN
RUBIN

De nombreux lecteurs m’ont demandé une méthode simple et rapide pour


déterminer le profil de quelqu’un. Parmi eux, il y avait des DRH qui
voulaient un outil de recrutement, des enseignants qui voulaient mieux
comprendre leurs élèves, des professionnels de santé qui voulaient pouvoir
personnaliser leurs conseils médicaux, des célibataires qui voulaient
pouvoir cerner une personne au premier rendez-vous ou tout simplement
des gens qui voulaient avoir un sujet de conversation pour briser la glace en
soirée.
Il suffit de quelques questions pertinentes pour cerner le profil des gens.
Mais il ne faut pas tant s’attacher aux réponses qu’ils donnent, qu’au
raisonnement qu’il y a derrière, au vocabulaire utilisé. La façon de penser
en dit long, plus que n’importe quelle réponse.
Comme tous les profils se recoupent, deux profils peuvent répondre de la
même façon à certaines questions.
Les Pointilleux et les Dévoués étant les plus nombreux, il y a de grandes
chances que vous ayez à faire à un Pointilleux ou un Dévoué.
Sachez également que les gens ne répondront pas toujours de façon
sincère de peur de se faire juger.

« Que pensez-vous des résolutions du Nouvel An ? »


En général, les Disciplinés prennent de bonnes résolutions au Nouvel An.
Ils en prennent à d’autres moments de l’année aussi.
Les Pointilleux prennent de bonnes résolutions et s’y tiennent, mais ils
rejetteront l’arbitraire du 1er janvier. Pour eux, c’est contre-productif
d’attendre le Nouvel An pour bien faire.
Les Dévoués ont le plus souvent fait une croix sur les résolutions du
Nouvel An, parce qu’ils n’ont jamais réussi à les tenir. Certains continuent
d’en prendre, mais ils finissent souvent par les abandonner.
De manière générale, les Rebelles n’aiment pas s’engager. Mais il arrive
que certains trouvent amusant de prendre de bonnes résolutions au
Nouvel An. Ils en font alors grand cas et relèvent le défi avec enthousiasme.

« Imaginez un panneau “Interdiction de téléphoner”. Je prends mon


portable et je passe un appel. Comment le vivez-vous ? »
Les Disciplinés sont au supplice.
Les Pointilleux essaient de voir si cette interdiction est justifiée. S’ils
jugent que ce n’est pas le cas, ils ne voient aucun inconvénient à ce que
vous l’enfreignez.
Les Dévoués n’apprécient pas et expliquent leur embarras en disant que
l’usage du téléphone portable dans les lieux publics dérange les autres ou
que vous risquez de vous faire prendre.
Les Rebelles s’en fichent. Ils peuvent même prendre un malin plaisir
à enfreindre cet interdit.

« Vous êtes-vous déjà inscrit à un cours gratuit juste pour le plaisir ? Si


oui, et si une personne de votre entourage vous disait que ça la gêne que
vous preniez ce cours, que feriez-vous ? »
La plupart des gens diraient « Cela dépend. En quoi c’est gênant pour
cette personne et à quel point ; et aussi, quelle importance ce cours a pour
moi ? » Rassurez-les, la gêne serait minime pour l’autre personne.
Les Disciplinés auront tendance à y aller quand même. Ils en ont envie,
ils se sont inscrits, ils sont désolés si cela gêne quelqu’un, mais cela ne les
empêchera pas d’y aller. Ils insisteront sur l’importance pour eux de faire ce
qu’ils ont prévu et d’aller au bout de leurs engagements.
Les Pointilleux feront de même, mais ils mettront l’accent sur ce qui
justifie leur inscription à ce cours.
Les Dévoués hésiteront à y aller, parce que cela gêne cette personne.
C’est un véritable cas de conscience pour eux et ils le vivront mal.
Les Rebelles diront qu’ils ne s’y rendront pas s’ils n’en ont pas envie. Ils
peuvent faire remarquer qu’ils ne s’inscriraient jamais à un cours, car
comment voulez-vous qu’ils sachent maintenant ce qu’ils auront envie de
faire ce jour-là ? Et s’ils se sont déjà inscrits, ils ne s’y rendront que s’ils en
ont envie.

« Vous souvenez-vous avoir déjà changé une habitude importante dans


votre vie ? »
Une réponse comme : « Pendant des années j’ai marché tous les matins
avec ma voisine, mais elle a déménagé, et depuis, je ne le fais plus » pointe
en direction du Dévoué ; alors que : « Je me suis renseigné et j’ai lu
beaucoup de choses sur l’intérêt de faire du renforcement musculaire, et
après avoir parlé à quelques coachs sportifs, je m’y suis mis » pointe en
direction du Pointilleux ; « Je fais du jogging quand j’en ai envie » pointe
en direction du Rebelle. Les Disciplinés auront une kyrielle d’exemples
à vous donner.

« Quand vous faites une liste de choses à faire, arrivez-vous à traiter


toutes les tâches ? Et lorsque c’est une liste que vous donne quelqu’un
d’autre ? »
Les Disciplinés font aisément tout ce qu’il y a sur leurs listes, et sur celles
qu’on leur donne.
Les Pointilleux sont plus enclins à faire ce qu’ils ont mis sur leur liste.
Les Dévoués sont plus enclins à faire ce qu’il y a sur une liste qu’on leur
donne.
Les Rebelles ne tiennent pas compte des listes de choses à faire, ou alors,
ils le font à leur façon : « J’ai fait une liste ouverte que je pioche dans
n’importe quel ordre quand je suis d’humeur à faire quelque chose. »

Quelques questions à répondre du tac au tac :


« Vous a-t-on déjà dit que vous étiez rigide ? »
« Oui » suggère un Discipliné.
« Vous a-t-on déjà dit que vous posiez trop de questions ? »
« Oui » suggère un Pointilleux.
« Êtes-vous d’accord : les promesses que l’on se fait peuvent être brisées,
celles que l’on fait aux autres ne devraient jamais l’être ? »
« Oui » suggère un Dévoué.
« Pensez-vous qu’enfreindre les règles donne du piquant aux choses ? »
« Oui » suggère un Rebelle.

Pour chaque profil, cette question prime :


Les Disciplinés demanderont : « Dois-je le faire ? »
Les Pointilleux demanderont : « Est-ce que ça tient debout ? »
Les Dévoués demanderont : « Est-ce que cela compte pour quelqu’un ? »
Les Rebelles demanderont : « Est-ce la personne que je veux être ? »
RESSOURCES COMPLÉMENTAIRES

J’ai rassemblé de nombreuses ressources pour vous aider à mieux


comprendre et à utiliser la typologie des quatre profils.
L’outil principal est l’application Better (en anglais uniquement), qui
vous permettra d’utiliser les quatre profils dans la vie de tous les jours pour
atteindre vos objectifs (ou aider les autres à le faire). Vous y trouverez
également un « kit spécial » pour créer un groupe de responsabilisation.
Plus de renseignements sur mon site : https://gretchenrubin.com/books/the-
four-tendencies/the-app/.
J’ai élaboré deux guides sommaires servant de références aux quatre
profils. Ils sont téléchargeables en anglais au format PDF sur mon site
https://gretchenrubin.com.
Vous pouvez également me demander par mail :
– Un quizz pour déterminer le profil d’une personne ;
– Un guide qui résume les caractéristiques de chaque profil ;
– Un guide de discussion sur les quatre profils, destiné aux clubs de
lecture, groupes de travail, groupes de responsabilisation et autres groupes ;
– Un kit de création de groupe de responsabilisation ;
– Des lectures complémentaires sur d’autres modèles de personnalités –
si vous aimez les outils d’évaluation psychologique autant que moi, cela
devrait vous intéresser.

Je parle régulièrement des quatre profils sur mon blog,


https://gretchenrubin.com, et j’en discute dans le podcast que j’anime avec
ma sœur Elizabeth Craft, Happier with Gretchen Rubin. Nous avons
consacré les épisodes 35, 36, 37 et 38 à chaque profil.
NOTES

À propos des mails, posts sur le blog et autres témoignages : j’ai modifié
les détails permettant d’identifier les auteurs et j’ai adapté la longueur des
textes, mais je n’ai rien inventé. Tous les témoignages sont authentiques.

Chapitre 1 : Les quatre profils

« Pour mettre mes observations sur les quatre profils à l’épreuve… »,


Enquête quantitative conduite par Aperio Insights sur des échantillons
représentatifs de la population adulte américaine de sexes, d’âges et revenus
différents sur tout le territoire. Sondage en ligne du 18 juillet au
2 août 2016, n = 1,564.

Chapitre 3 : Comprendre le Discipliné

« Une étude sur les statuts postés sur les réseaux sociaux… », Matt
Huston, « Status Updates Don’t Lie », PsychologyToday.com,
8 juillet 2015,
https://www.psychologytoday.com/intl/articles/201507/status-updates-don-
t-lie.

Chapitre 5 : Comprendre le Pointilleux

« L’entrepreneur et inventeur américain Steve Jobs… », Walter Isaacson,


Steve Jobs, Simon & Schuster, 2011, p. 43, 453-56.

Chapitre 7 : Comprendre le Dévoué

« les personnes participant un programme de perte de poids avec un


binôme… », Kelly McGonigal, The Will-power Instinct: How Self-control
Works, Why It Matters and What You Can Do to Get More of It, Avery,
2013.
« quand un groupe d’enfants entraînés comme… », Nalika Gunawardena,
et collab., « School-based Intervention to Enable School Children to Act as
Change Agents on Weight, Physical Activity and Diet of Mothers :
A Cluster Randomized Controlled Trial », International Journal of
Behavioral Nutrition and Physical Activity, n° 13, 2016.

Chapitre 9 : Comprendre le Rebelle

« un article dans le New York Times sur les différentes distributions des
rôles dans le couple… », Claire Cain Miller et Quoc Trung Bui, « Rise in
Marriages of Equals Helps Fuel Divisions by Class », New York Times,
27 février 2016.

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