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Revue de la Société
des Amis de Versailles
Schwartz Selma, Cochefert Robert, Girault Maurice. Un « air d’Antiquité ». Le service de Sèvres réalisé pour la laiterie de
Marie-Antoinette à Rambouillet. In: Versalia. Revue de la Société des Amis de Versailles, n°10, 2007. pp. 154-181;
doi : https://doi.org/10.3406/versa.2007.878
https://www.persee.fr/doc/versa_1285-8412_2007_num_10_1_878
Un « air d’Antiquité»
armi les productions les plus connues mité de ce domaine permettait au roi de s’y
Louis XVI à acheter le domaine de Rambouil- les mettre au goût du jour dans un style plus
let au duc de Penthièvre en 17832. La proxi- pittoresque, ne conservant « point de lignes
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droites dans les chemins5 ». En 1779, le duc de nouvelles beautés, / De surprise en surprise et
Penthièvre en avait déjà transformé une partie l’amuse et l’entraîne, / D’une scène qui fuit fait
en jardin anglo-chinois pour sa belle-fille, la naître une autre scène, / Et toujours remplis-
princesse de Lamballe6. Ce lieu de promenade sant ou piquant son désir, / Souvent, pour
paisible orné de fabriques amusantes ressem- l’augmenter, diffère son plaisir. / L’architecture
blait au hameau du Petit Trianon, retraite fa- encore au fond de ces bocages / M’attend,
vorite de Marie-Antoinette. Dans l’espoir, sans pour les orner d’édifices charmans7. »
doute, d’attirer la reine à Rambouillet, on édi- Les mémoires rédigés par les contemporains
fia, pour satisfaire ses distractions favorites, regorgent de relations de visites effectuées
une nouvelle laiterie qui lui rappellerait celle dans ces jardins à la mode, à pied, en voiture
du Hameau. ou en gondole, en compagnie de musiciens.
Objectif ou terme de la promenade, la laiterie
offrait au visiteur la fraîcheur de ses murs et
La laiterie au XVIIIe siècle les délices d’une collation disponible à tout
moment, au gré des visites. Les laitages
Au cours des années 1780, la laiterie était de- étaient présentés dans des services de céra-
venue partie intégrante du jardin pittoresque mique : pour sa laiterie de Chantilly8, le prince
à la française. Celles de Marie-Antoinette au de Condé disposait de cent quarante-huit
hameau de Trianon et à Rambouillet sont à la pièces de porcelaine et de faïence décorées de
fois les plus connues et parmi les très rares ses armes ; le duc d’Orléans, pour sa part,
qui aient subsisté en France. Les guides de avait fait l’acquisition d’un service en Wedg-
voyages, les livres sur les jardins et les mé- wood, réalisé en une terre connue sous la dé-
moires de l’époque montrent à quel point les nomination de cane-ware9 ; au hameau de Tria-
laiteries étaient en vogue. On cite celles de la non, le service de Marie-Antoinette avait été
duchesse de Liancourt, du financier Charles commandé à la manufacture de la rue Thiroux
Robert Boutin, du duc de Chartres à Monceau, à Paris, en 178610. Quant au financier Boutin, il
de J.-J. de Laborde à Méréville, de Claude Bau- possédait, dans sa laiterie, une exceptionnelle
dard de Saint-James à Neuilly, de M. de Bou- vaisselle en or11. Selon le duc de Croÿ, dont la
logne à La Chapelle, du prince de Ligne à Be- relation qu’il fit de sa visite à Chantilly reste
loeil, de Mme de Boufflers à Auteuil, du duc un des rares témoignages descriptifs de ce
d’Orléans au Raincy, du duc de Wurtemberg à que pouvait être une laiterie, les rafraîchisse-
Étapes ainsi que celles de Chantilly et de Che- ments offerts consistaient en une « belle col-
villy. lation de glaces, de fruits et de toutes sortes
On connaît, au XVIIe siècle, quelques exemples de laiteries12 ». L’introduction des crèmes gla-
de laiteries, toutes rattachées à une ménage- cées nommées « beurre, parce qu’elles ont la
rie, comme ce fut le cas pour la laiterie de la consistance, le goût et la couleur de cette
duchesse de Bourgogne à Versailles. Au substance », date de 1774, époque au cours
XVIIIe siècle, la vogue croissante des laiteries, de laquelle les laiteries connurent une vogue
indépendantes et autonomes, est liée à la grandissante 13 . Marie-Antoinette raffolait
mode des jardins pittoresques, organisés en aussi d’une sorte de crème glacée faite de
une série de vues composées comme de véri- crème et de jaunes d’œufs, appelée « fromage
tables tableaux soigneusement élaborés pour glacé14 ». En plus du lait et de la crème, le vi-
paraître naturels. Le paysage n’était pas des- siteur pouvait goûter au « fromage de crème
Un “ air d’Antiquité ” : le service de Sèvres réalisé pour la laiterie…
tiné à une vue d’ensemble dont aurait profité frais », une sorte de fromage doux saupoudré
un spectateur situé en un lieu privilégié, tel de sucre15.
qu’une terrasse ; la découverte du jardin de- Le bâtiment de laiterie devait répondre à des
vait s’effectuer peu à peu, au cours d’une pro- exigences de température et de propreté défi-
menade obéissant aux méandres des sentiers nies dans un article de l’Encyclopédie : « Il faut
ou des cours d’eau, et révélant, à chaque mou- qu’il […] ait un côté frais et non exposé au so-
vement de terrain, une scène dont l’élément leil, vouté s’il se peut, assez spatieux, et sur-
central serait un bâtiment isolé d’une inspira- tout tenu avec beaucoup de propreté, […] et
tion aussi variée que possible, une laiterie, par en confier le soin à une servante entendue et
exemple. C’est dans un des poèmes qu’il a amie de la netteté 16 . » La plupart des do-
composés sur les jardins que l’abbé Delille maines possédant une laiterie, tel le Hameau
nous donne la meilleure définition de ce type de Versailles, disposaient en fait de deux lo-
d’agencement. Il suit le promeneur au cours caux distincts : la « laiterie de préparation »,
d’une visite qui « Lui découvre en passant des destinée à l’élaboration des produits, et la
sites enchantés, / Lui réserve au retour de « laiterie de propreté » ou laiterie d’agrément,
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1. Adolf Ulrik
Wertmüller, Adélaïde
Henriette Augié,
1787, Stockholm,
Nationalmuseum,
inv. NM 4881 destinée à leur consommation17. À l’inverse consommaient. Selon Jacques-François Blon-
des laiteries ordinaires, les laiteries d’agré- del, la laiterie d’une « maison de plaisance »
ment possédaient un décor intérieur luxueux. est l’endroit où « les dames viennent prendre
Le revêtement de marbre dont elles étaient le lait, battre le beurre, et faire des fromages
dotées en majorité assurait fraîcheur et pro- pour se délasser des courses et des amuse-
preté. Celle de Chevilly était couverte de ments champêtres19 », ce qui laisse supposer
nacre18. que les laiteries étaient plus qu’un simple lieu
Selma Schwartz
On se demande toujours si les visiteurs parti- prévu pour des rafraîchissements. Les inven-
cipaient à la fabrication des produits qu’ils taires des services de porcelaine – qu’il
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s’agisse de ceux de Chantilly, de celui de la laiterie proprement dite se trouve dans une
Marie-Antoinette au hameau de Trianon, ou lettre de Pierre Julien en date du 29 novembre
encore de celui de l’impératrice Marie-Louise 178524, lettre dans laquelle il s’engage à exécu-
pour cette même laiterie de Versailles20 – nous ter les ouvrages de sculpture. La construction
aident à comprendre le rôle et le fonctionne- fut confiée à Jacques-Jean Thévenin, architecte-
ment d’une laiterie au XVIIIe siècle. La plupart maçon des Bâtiments du roi. Les documents
de ces pièces étaient destinées au service : qui nous sont parvenus laissent supposer
tasses et soucoupes, bols, pots, sucriers et qu’Hubert Robert devait superviser la plupart,
parfois beurriers. Certaines autres servaient sinon la totalité, des aspects du projet, en
aux préparations. À Chantilly existaient « des jouant un rôle d’intermédiaire entre le comte
bassins propres à battre le beurre21 », tandis d’Angiviller, directeur général des Bâtiments
que le service de la rue Thiroux comptait, du Roi et gouverneur général du domaine de
parmi les éléments les plus coûteux, deux Rambouillet, et le sculpteur Julien25. Le mobi-
« bat-beurre ». Les nombreuses « terrines » lier de la laiterie, selon les termes de la facture
du hameau de Marie-Antoinette et les « jattes établie par Georges Jacob, fut réalisé « d’après
à lait, dites Lavabos ordinaires pour faire écré- le dessin de mondit sieur Robert et sur le mo-
mer le lait », appartenant au service de Marie- dèle qui en fut fait ». Robert approuva la fac-
Louise, semblent indiquer que le lait était tra- ture avant de l’adresser à d’Angiviller26, et il
vaillé dans la « laiterie de propreté ». En 1787, semble qu’il soit intervenu dans la conception
à l’époque où fut réalisée la laiterie de Ram- des modèles de porcelaine.
bouillet, Mme Augier, « femme de chambre » La laiterie fut établie à peu de distance de la
de Marie-Antoinette, se fit portraiturer dans le pointe nord-ouest du canal grâce auquel on
décor minéral d’un intérieur de laiterie sem- accédait au jardin anglo-chinois du duc de
blable à celui de Rambouillet (fig. 1). Elle Penthièvre. Le choix de son emplacement
porte une de ces robes à la mode paysanne confirme le souci que l’on eut de l’intégrer au
dont le caractère de simplicité avait séduit la jardin pittoresque, auquel il était facile d’accé-
reine et son entourage, et qui lui donne, sur le der en gondole, mode de transport très à la
tableau, l’allure d’une jeune laitière. Mais la mode pour la visite des jardins. Lorsque le
cruche qu’elle tient en main est un objet de duc de Croÿ visita la laiterie de Chantilly, ce fut
luxe probablement réalisé en grès d’une ma- à bord de yachts27 que toute sa compagnie
tière particulière, constituée d’une pâte plus embarqua. Pour ce qui est de Rambouillet, les
ou moins teintée dans la masse, mise au point inventaires du Garde-Meuble font état d’« une
par Josiah Wedgwood en 1775 et nommée Jas- gondole vénitienne » et d’une « chaloupe »28.
per ware. L’année précédente, Élisabeth Vigée Selon les documents dont nous disposons,
Le Brun avait exécuté un portrait semblable l’inauguration eut lieu en juin 1787. La corres-
de la marquise de Puységur, fille de Baudard pondance de Julien et de d’Angiviller montre
de Saint-James22. que Julien était pressé d’achever la sculpture
Dans le cas de Rambouillet, il est évident que pour la saison de 1787 à Rambouillet29. Les
la laiterie était destinée seulement à la lettres de d’Angiviller concernant les gondo-
consommation de rafraîchissements. Bien liers de Rambouillet précisent que l’on envisa-
que Sèvres eût, à l’origine, reçu commande geait un voyage « du Roi à Rambouillet » pour
de quatre beurriers et de huit écrémoirs, ces le 22 mai 178730. Une partie du service de por-
pièces ne firent pas partie du service définitif. celaine fut livrée le 25 mai31 et la plus grande
Un “ air d’Antiquité ” : le service de Sèvres réalisé pour la laiterie…
Il est donc probable que la laiterie de Ram- partie du mobilier le 2932. Le 9 juin, Julien de-
bouillet fut simplement une laiterie de plai- mandait une rallonge de paiement, parce que
sance. La « laiterie de préparation » était si- « la nécessité d’avoir à faire au terme donné »
tuée dans les sous-sols de l’une des tours avait entraîné une augmentation des coûts33,
rondes à l’entrée du domaine. ce qui nous laisse supposer que la commande
avait été honorée. Aucun document ne nous
permet de vérifier qu’il y eut bien inaugura-
La construction de la laiterie tion ni, dans l’affirmative, à quelle date elle a
pu se dérouler. Le journal de Louis XVI ne
Nous ne disposons actuellement d’aucune mentionne qu’une visite de Marie-Antoinette
documentation permettant de dater de ma- à Rambouillet après les livraisons de
nière précise la décision de construire une lai- mai 1787. Pour le 26 juin, on peut lire : « Élisa-
terie à Rambouillet. Hubert Robert était à beth a chassé, la Reine a soupé34 », mais on ne
l’œuvre dans les jardins du domaine vers le trouve aucune mention de la laiterie. Les
mois d’août 178423 et la première référence à comptes de la Maison du roi signalent l’ajour-
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nement du « voyage » prévu pour le 15 juin35. D’une géométrie sévère, la façade de la laiterie
En effet, la fille cadette du couple royal, So- est dépourvue de tout ornement, si ce n’est
phie Hélène Béatrice, était au plus mal et l’en- une paire de colonnes en appareil de style
fant devait décéder le 19 juin 1787. Peut-être « rustique » et un fronton incurvé surmontant
la date retenue était-elle celle de l’inaugura- la porte munie de l’inscription : « Laiterie de la
tion. En tout cas les compliments jaillirent de Reine ». Le médaillon en bas relief de Julien,
toutes parts. Le 8 août, d’Angiviller écrivait à représentant une vache allaitant son veau,
Julien : « Vous aurez reçu ceux qui pouvaient ressemble à un camée publié dans les Antiqui-
vous intéresser le plus, c’est-à-dire les éloges tés du comte de Caylus et donne une première
du Roi et les suffrages de toute la Cour36. » indication sur l’inspiration résolument clas-
sique du décor37. La première salle, une ro-
tonde de forme incontestablement classique,
L’Antiquité ressuscitée couverte d’une coupole à caissons décorée de
rosaces et ne recevant la lumière du jour que
L’architecture et le mobilier de la laiterie ont d’un oculus sommital, rappelle un dessin
été très marqués par l’Antiquité classique. d’Hubert Robert, inspiré des thermes de Dio-
Mais, tandis que la première période néo- clétien 38 . Le mur circulaire, creusé de six
classique puisait son inspiration dans les niches en cul-de-four, est bordé d’une tablette
exemples de l’architecture et de la sculpture de marbre supportée par des consoles, décor
des monuments publics, la période archéolo- jugé trop dépouillé par Napoléon, qui crut
gique qui suivit s’inspira des décors intérieurs bon d’y introduire une certaine polychromie.
et des objets mis au jour lors des fouilles La salle suivante, dans l’axe de la première, de
d’Herculanum et de Pompéi. forme rectangulaire, couverte d’une voûte à
Cataloguées abusivement comme « étrusques » caissons, également dotée d’un éclairage zéni-
à la fin du XVIIIe siècle, ces pièces furent popu- thal, se termine par une grotte. L’ordonnance-
2. Gravure par larisées par les récits de voyageurs, leurs re- ment général, comprenant les niches en cul-
Jean-Jacques Lagrenée,
Recueil, 1782, Paris, présentations gravées et leur exposition dans de-four de la rotonde, correspond de manière
Bibliothèque nationale les collections particulières. frappante à une gravure de catacombes sici-
liennes publiée par Saint-Non dans son Voyage
pittoresque ou Description des royaumes de Naples et
2 de Sicile39, fruit des voyages qu’il avait entrepris
en compagnie d’Hubert Robert et de Frago-
nard. Notons avec intérêt, à ce propos, que ce
compte rendu d’un voyage effectué dans les
années 1760 ne parut qu’au cours des années
1780, signe probable d’une très lente évolu-
tion du goût et de la mode en France.
Hubert Robert, Julien et Jean-Jacques Lagre-
née effectuèrent des séjours importants à
Rome. À la suite de plusieurs voyages dans le
sud de l’Italie, dont un en compagnie de
l’abbé de Saint-Non à Pouzzoles, Herculanum
et Pompéi en 1760, Hubert Robert visita Cora
en Étrurie en compagnie de Piranèse en 1763.
Quant à Lagrenée, peintre décorateur nommé
directeur artistique adjoint à Sèvres en 1785, il
séjourna à Rome de 1765 à 1769. Si l’on se ré-
fère aux paroles prononcées lors de son éloge
funèbre, Lagrenée aurait été « passionné par
les ouvrages des anciens » et aurait reproduit
« les peintures des Thermes, celles des vases
étrusques et des arabesques »40. Durant son
séjour romain, il mit au point un lexique fondé
sur l’examen de peintures murales romaines.
Il publia plusieurs séries de compositions gra-
vées « d’après l’antique ». Son Recueil de diffé-
Selma Schwartz
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en 1782, est constitué de planches représen- ton en 1769, soit dix-sept bonnes années
tant des figures semblables à celles que l’on avant la création du service de Rambouillet.
trouve sur des vases antiques, encadrées de La porcelaine de Wedgwood avait déjà fait
bordures aux motifs dérivés de peintures mu- l’objet d’une publicité à Paris en 177143 et, en
rales. Imprimées selon un procédé de dichro- 1787, le marchand-mercier Daguerre commen-
mie utilisant un rouge orangé et un brun çait à travailler comme agent de Wedgwood à
foncé, elles font ressortir leur parenté étroite Paris44. Ses préférences personnelles, et peut-
avec les vases antiques (fig. 2). être aussi le succès de Wedgwood, poussèrent
Ainsi, le programme de sculpture prévu pour d’Angiviller à imposer à la manufacture de
la laiterie de Rambouillet était-il d’inspiration Sèvres un style plus nettement inspiré des
résolument antique, traitant des scènes my- modèles antiques. D’Angiviller dut d’abord
thologiques avec des personnages en vête- vaincre les réticences d’Antoine Régnier, le di-
ments antiques qui accomplissaient des tra- recteur de la manufacture, qui ne croyait pas
vaux des champs au milieu d’un décor de au succès commercial du nouveau style.
vases eux-mêmes antiques. Les bas-reliefs et J. E. Montucla, commis de d’Angiviller, chargé
les médaillons sculptés par Julien constituent d’assurer la liaison avec la manufacture, écri-
la seule décoration murale intérieure41. La vit à Régnier en 1783, au sujet du service Ara-
grotte abrite le groupe de la nymphe Amal- besque, pour l’inciter à exaucer les vœux de
thée et de la chèvre qui allaita Jupiter enfant. d’Angiviller dont il soulignait la détermina-
Le mobilier en acajou massif était présenté tion : « Je vous dirai maintenant d’amitié que
dans le mémoire de Jacob comme « de forme vous ne scauriez mieux faire votre cour à M. le
nouvelle du genre étrusque », définition qui comte qu’en mettant beaucoup de zèle pour la
soulignait avec emphase la nouveauté de ce réussite de ce projet. J’ai cru m’apercevoir par
style42. Le terme d’« étrusque » était égale- quelques choses que vous m’avez dites que
ment le terme choisi par Sèvres pour quali- vous prévoyiez des difficultés considérables
fier la plus grande partie du service de porce- ou que vous doutiez du succez, mais ça n’est
laine. plus votre affaire. Il faut faire tous les efforts
Le style de la laiterie doit probablement beau- pour surmonter les difficultés. Quant au suc-
coup au goût du comte d’Angiviller, respon- cèz, je serois porté à penser si le service n’en a
sable du projet. Promoteur de l’art antique, il pas, ce seroit uniquement parce que ce genre
insista sur la nécessité de confronter les ar- de beauté est trop au-dessus du goût de la
tistes avec des modèles antiques et fit inclure plupart des consommateurs. Ce n’est plus au
au programme de séjour des pensionnaires de reste notre affaire. M. le comte y prend un vif
l’Académie de France à Rome la visite des intérêt et comme vous êtes son premier lieu-
fouilles entreprises dans la région de Naples. tenant, je crois que vous lui ferez beaucoup
Empêché, faute de moyens financiers, de raser votre cour en mettant tout le zèle et l’activité
le vieux château de Rambouillet et d’en dont vous êtes capable pour l’exécution45. »
construire un tout neuf, d’Angiviller se Sans doute, pour venir à bout de l’opposition
consola en édifiant la résidence du gouver- de Régnier, d’Angiviller procéda-t-il à deux no-
neur en style néo-classique. La laiterie lui ser- minations qui l’assureraient de parvenir à la
vit de terrain d’essai et lui permit de mettre au réalisation impeccable de ses objectifs. Pour
point dans les moindres détails les caractéris- commencer, en 1784, il nomma Jean-Jacques
tiques de ce style. Hettlinger au poste d’« inspecteur » et codi-
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années 1780, devaient paraître bien démodées année contre six assiettes54. Enfin il acquit
à d’Angiviller. Par l’annonce de cette nomina- personnellement en 1787 trois séries gravées
tion à Sèvres, d’Angiviller souligne que le style d’arabesques de Raphaël, probablement de
décoratif « est encore loin d’y avoir atteint le celles qu’avait réalisées Ottaviani d’après les
degré de perfection dont [il] la sent suscep- décors des Stanze du Vatican55.
tible47 ». Décidé à régler le problème, il affirma Les auteurs de ces publications insistaient la
que la tâche nécessitait « les Talens reunis de plupart du temps sur les applications com-
deux artistes ». Son choix se porta sur Lagre- merciales que permettrait leur consultation et
née « dont les compositions ingénieuses sont ne cachaient pas leur intention de réformer les
connues de tous les amateurs des beaux arts » arts. Dans la préface qu’il avait rédigée en
et dont les tableaux apparaissaient, selon le 1766 pour le catalogue de la collection de
catalogue du Salon de 1785, « dans le style de vases réunis par William Hamilton, d’Hancar-
ceux que l’on a decouvert sous les ruine d’Her- ville exprimait l’espoir de voir « bientôt les ar-
culanum48 », c’est-à-dire exactement le style tistes instruits selon les vrais principes de leur
que d’Angiviller voulait promouvoir à la ma- art, venir à bout de ces formes gothiques, que
nufacture. seule l’habitude rend supportables56 ». Il visait
De son côté, Lagrenée avait bien compris ce les « fabricants d’objets en terre cuite et en
qu’on attendait de lui. Remerciant d’Angiviller porcelaine, et […] ceux qui font des vases en
de sa nomination, il écrit : « Je ferai tous mes argent, en cuivre, en verre, en marbre, etc.57 ».
efforts pour entrer dans vos vues, et satisfaire Il souligne également que les publications an-
à l’envie que vous avez de perfectionner les térieures, principalement celles de l’abbé
ouvrages de cette manufacture49 . » En oc- Montfaucon et du comte de Caylus, ne pou-
tobre 1785, Lagrenée fit une demande de vaient donner qu’une idée approximative des
fonds destinés à lui permettre d’engager un objets représentés, tandis que lui-même mon-
assistant. Ce dernier réaliserait des dessins, trait chaque pièce en trois dimensions, avec
qui seraient copiés par les peintres de la ma- présentation de l’objet en coupe et de ses
nufacture et qui pourraient « contribuer à ré- mensurations détaillées, fournissant ainsi
former le gout50 ». Le frère de Lagrenée, alors l’avantage d’avoir sous les yeux un modèle
directeur de l’Académie de France à Rome, in- exact à copier. La correspondance de Wedg-
tervint à propos pour affirmer que la nomina- wood révèle que la manufacture trouvait ses
tion de Lagrenée donnerait à la manufacture sources d’inspiration dans le fonds constitué
« un Gout un peu plus Italien qu’elle n’a eu par ces trois publications58.
jusqu’alors51 ». Une lettre datée de Paris 1767 expose les rai-
Quelques mois après son arrivée, Lagrenée sons pour lesquelles il serait bon de traduire
dessina une tasse qu’on peut considérer les volumes des Antichità di Ercolano esposte, édi-
comme le premier modèle de style vraiment tées et distribuées à titre privé par le roi de
archéologique réalisé à Sèvres « en peinture Naples. L’argumentation s’appuie sur l’intérêt
étrusque […] fond noir à figures rouges- commercial de ses utilisations : « Je vois que
aurore, qui donne un air d’antiquité52 ». En vous n’êtes pas très au courant de la réalité.
outre, Hettlinger se fit le promoteur exigeant Certes vous ne toucherez pas aujourd’hui
de ce type de décoration sur des formes déri- deux mille riches antiquaires ou hommes de
vées de l’Antiquité : « Il aurait mieux valu de lettres au monde, mais les Antichità di Ercolano
ne pas y mettre des Filets d’or, et que si cette permettent d’atteindre un autre objectif. Or-
Peinture etoit appliquée à des Pieces de forme fèvres, bijoutiers-passementiers, peintres de
antique, et sans or, elle seroit recherchée du carrosses et de panneaux décoratifs, ont tous
Public. » Lagrenée, pour sa part, ne se borna besoin de cet ouvrage. Votre Excellence sait-
pas à dessiner des décors. À partir de 1785, il elle que, de nos jours, tout est à la grecque, ce
fournit aussi des modèles de vases, d’encriers, qui revient à dire à l’Herculanum59 ? »
de pots-pourris, de tasses et de soucoupes. Un dernier achat fut d’une importance capi-
Lagrenée put enrichir ses connaissances de tale pour le service de Rambouillet. En 1785,
l’Antiquité grâce à un fonds de documents d’Angiviller, agissant pour le compte de
gravés que lui fournit la manufacture, fonds Louis XVI, négocia l’achat d’une collection de
constitué d’une part des prestigieux volumes cinq cent vingt-cinq vases « étrusques » réunis
reproduisant la collection Hamilton achetés par Dominique Vivant Denon à Naples60. On
par Montucla en 1786, et dont Wedgwood se mit d’accord sur la somme de 30 000 livres,
s’était servi pendant près de vingt ans53, et, que d’Angiviller était incapable de verser en
Selma Schwartz
d’autre part, du second volume des Antiquités 1786, mais dont il espérait pouvoir disposer
de M. l’abbé de La Chaux, acquis la même en 1787. La collection était destinée au
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blement la pénurie de correspondance dispo- celle des gobelets, ait été prolongée jusqu’à la
nible, concernant ce service. fin de 1787. Deux tiers des ouvriers de l’atelier
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4. « Plan de la Laiterie
de Rambouillet »,
AMNS, R 2, D 4. Voir
4 § 3 dans l’appendice
de pâte dure furent employés à la réalisation cuments font référence ultérieurement à une
du service en 1787, à commencer par les ou- « première table » et à une « seconde table »,
vriers les mieux payés de chaque catégorie. indiquant de quelle manière les pièces de-
On fabriqua systématiquement plus de pièces vaient être réparties sur la tablette sur con-
de chaque modèle qu’il n’était nécessaire. soles pour chaque moitié de la rotonde. Peut-
Ainsi on produisit dix fois plus de gobelets et être avait-on envisagé dès l’origine deux
de soucoupes. Il est évident que la multiplica- livraisons correspondant chacune à une moi-
tion de ces formes correspondait à une inten- tié du service. En tout cas le mystère reste
tion commerciale et l’on retrouve de nom- entier.
breuses rééditions des formes du service de En pointant la liste des pièces prévues pour
Rambouillet, ornées d’un décor plus tardif. une moitié de la rotonde, on arrive à un total
Le service fut livré en deux fois. Manque de cent huit, si l’on compte comme unité un
de temps, d’argent, ou problèmes de pro- ensemble tel que tasse et soucoupe. Quelque
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de part et d’autre de la salle, au milieu d’un rons, bien que Lagrenée ait pu avoir la respon-
ensemble de pièces plus petites, et deux des sabilité du dessin d’un certain nombre de
grandes terrines équipées de supports. La formes, il avait été, en priorité, chargé de leur
niche centrale abritait un grand vase au- décoration. Un exemple de ses aquarelles
dessus d’un seau, tandis que des vases plus conservées aux archives de la manufacture
petits étaient disposés dans les niches laté- correspond exactement aux détails du décor
rales. Une grande terrine ainsi que six gobe- décrit dans le bordereau de livraison de 1787
lets avec leurs soucoupes garnissaient la table et se retrouve sur les pièces qui nous sont par-
centrale. venues, à quelques détails près parfois dans
les formes.
Les inscriptions portées sur les dessins prépa-
Les dessinateurs ratoires à la réalisation des formes et une
mention portée sur le registre de l’atelier de
La tradition attribue le dessin du service à La- pâte dure nous permettent de penser que l’on
grenée, en association avec Hubert Robert, peut créditer Louis-Simon Boizot, directeur de
sans qu’aucun fonds documentaire solide la sculpture à la manufacture, du dessin d’au
vienne étayer cette hypothèse. Hubert Robert moins six pièces. L’une des formes de gobe-
est, en fait, mentionné dans une lettre de lets est attribuée à Charles-François Bolvry,
d’Angiviller datée du 16 octobre 1786 : « Je chef de l’atelier de pâte dure. On connaît en
marque à M. Hettlinger que j’ai chargé Mr Ro- effet la référence d’un « gobelet de la laiterie
bert de se concerter pour des vases qui forme Bolvry76 ». Selon toute probabilité, le
doivent être exécutés pour une laiterie. » Il dessin des formes fut un travail d’équipe, sans
semble donc bien qu’Hubert Robert ait pu doute supervisé par Hubert Robert, Lagrenée
avoir la direction artistique générale des des- ayant la responsabilité principale du décor.
sins de Sèvres, comme ce fut le cas pour la
sculpture et le mobilier. Deux de ses planches
de dessins représentant des formes de vases, Le décor
de pots et de gobelets, des motifs décoratifs
de poterie antique et un groupe de figures Le décor de base fait appel à la représentation
avec un mouton, ont pu constituer des bases d’animaux liés à la production laitière (vaches,
pour l’élaboration du service75. chèvres, brebis), parfois accompagnés de fi-
L’attribution du service à Lagrenée doit son gures humaines. Les compositions font écho
origine à une référence inscrite au dos du aux thèmes traités par Julien sur les médail-
« Profile des pièces » libellée ainsi : « Laiterie lons de la rotonde. Elles sont peintes sur le
Vases en différentes formes de pièces de Ser- fond blanc avec des bandes de couleurs enri-
5. Canthare attique, vice par Mr Lagrenée jne. » Comme nous le ver- chies de motifs ornementaux. Le parti pris de
ancienne collection créer une division du décor en registres par le
Denon, Musée national
de céramique, recours à une frise entourant le corps de la
inv. MNC 210 porcelaine, et non à une série de réserves,
conformes à la tradition de Sèvres, trahit une
référence nette à la poterie grecque. Les figures
évoluent sur un plan sans profondeur, vêtues à
l’antique, avec une gestuelle semblable à celle
que montre la poterie antique. Malgré leur res-
semblance avec des modèles antiques, les per-
sonnages sont marqués, dans leur traitement
individuel, par l’invention personnelle de La-
grenée, à l’instar des figures de son Recueil de
différentes compositions. Le décor est complété par
des motifs de fleurs des champs convenant
parfaitement au thème pastoral. La plupart
des pièces connues du service sont ornées
d’un décor de roseaux, sans que cette plante
soit porteuse d’un symbolisme évident, en
dépit de l’allusion possible au mythe du Jupi-
ter nouveau-né, découvert, tout comme Moïse,
Selma Schwartz
164
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porcelaine feraient ainsi allusion à la nymphe foncé, alors que d’autres couleurs existaient. Il
Amalthée et à la chèvre qui allaita Jupiter. reflète l’influence des vases antiques peints en
La décoration secondaire, généralement exé- fond rouge et noir. Quelques pièces avaient
cutée en noir ou en carmin, au-dessus des déjà été décorées de couleurs « étrusques »
bandeaux polychromes, fait référence aux avant la réalisation du service de Rambouil-
« ornements étrusques » du bordereau de li- let : la coupe expérimentale décorée en 1785
vraison de 1787 et apparaît sur toutes les d’après un dessin de Lagrenée (voir supra
pièces du service, sauf sur celles qui furent p. 160) et une pièce à « fond rouge et noir, fi-
réalisées à l’imitation du bois. Tous les motifs gures Étrusques » en 178677. Le service de la
relèvent des poteries antiques et se caracté- laiterie, cependant, offre la première utilisa-
risent par l’emploi du rang de palmettes re- tion de cette couleur de fond à grande échelle.
liées par des arcades, le cercle pointillé entou- Même lorsque la couleur de fond « étrusque »
rant un grand pointillé et la ligne continue en est employée pour les bordures décoratives,
pointillé. Le motif des hachures pointillées et malgré la similitude existant entre les per-
qui décore le « gobelet cornet » (fig. 15) se rap- sonnages humains ou les animaux du service
proche de la décoration d’un Canthare attique de et ceux des pièces antiques, la ressemblance
la collection Denon, conservé au Musée natio- avec la poterie antique est contrariée par la
nal de céramique (fig. 5). Le seul motif spéci- polychromie des figures peintes sur fond
fiquement décrit dans le bordereau de livrai- blanc.
son (« décoration étrusque sous arcades ») Bien que nombre de manufactures aient pro-
consistant en une suite de palmettes reliées duit des pièces en noir et rouge de style an-
par des arcatures apparaît fréquemment tique, il semble que Sèvres n’ait pas adhéré
comme une bordure dans les volumes d’Han- totalement au style archéologique. L’auteur
carville. Il se retrouve sur tous les « gobelets à de cet article ne connaît en effet qu’un exem-
anses étrusques » (fig. 18 et 19). Le terme plaire de ce type de décor, encore que d’une
d’« arabesques » pourrait convenir, en gros, date postérieure et d’un esprit différent78. Si la
pour définir un ensemble distinct de motifs conception du service de porcelaine avait été
colorés, consistant en volutes de rinceaux, d’une inspiration aussi archéologique que le
brindilles en forme de feuilles, festons, fleurs bâtiment de la laiterie ou son mobilier d’aca-
étoilées et parasols à motif floral, bien percep- jou massif, on aurait pu s’attendre à trouver
tibles sur la « grande terrine basse » (fig. 7). Ils la totalité du service décorée d’un fond
sont caractéristiques du vocabulaire décoratif « étrusque ». Au contraire, près des deux tiers
dont Lagrenée avait trouvé l’inspiration sur les des pièces furent décorés d’une palette d’au
fresques des thermes romains et les décors moins neuf couleurs pâles nommées « petit
réalisés par Raphaël au Vatican. violet », « violet tendre », « petit bleu », « gris
Comme Hettlinger pensait que la dorure ne de lin », « gris », « petit gris », « jonquille »,
convenait pas à des pièces de forme antique « vert anglais » et une couleur « Dauphine »
décorées dans le « style étrusque », le service non identifiée.
ne fut pas doré, mais reçut un décor en noir ou
en carmin. Le fond coloré décrit dans le bor-
dereau de livraison de 1787 ne recouvre pas la Les modèles
totalité de l’objet, contrairement à la tradition
de la manufacture, mais se limite à des bandes Nous désignerons chacun des modèles
Un “ air d’Antiquité ” : le service de Sèvres réalisé pour la laiterie…
placées en bordure des surfaces blanches sur constitutifs du service, y compris ceux des
lesquelles sont appliqués les décors. On re- pièces retirées avant 1788, par la dénomina-
lève douze fonds différents. Les teintes domi- tion qui leur avait été attribuée au XVIIIe siècle,
nantes sont un « grès » et un « étrusque », accompagnée du nom du dessinateur et de la
pour vingt-quatre des cinquante-neuf pièces description de son décor. Le titre principal est
dont la couleur de fond est répertoriée. On ne tiré du « Profile des pièces », avec adjonction
sait pas quel était le décor des vases. Le de titres provenant d’autres documents rela-
« grès », qui est la couleur du fond de la tifs à Rambouillet, essentiellement des re-
« grande terrine basse », est particulièrement gistres de l’atelier de pâte dure. La lettre pla-
en accord avec la teinte du matériau dont est cée entre parenthèses fait référence au
constituée la laiterie. Il est également proche système de notation utilisé dans le « Profile
de la teinte orange pâle de la poterie. des pièces ». Les dimensions, calculées
Le « Profile des pièces » peut induire en er- d’après l’échelle de mesure de la même
reur, car toutes les formes qu’il présente sont feuille, sont indiquées en centimètres, selon
couvertes de la couleur « étrusque » orange le rapport de 2,707 cm pour 1 pouce.
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À l’origine, quatre spécimens furent prévus lifiés furent appelés pour la réalisation des
pour la rotonde, mais un seul fut prêt, et en- pattes, ce qui explique pourquoi le modèle
core partiellement, avec un fond couleur tient le troisième rang dans l’ordre des pro-
« grès », en 1787. En fin de compte, seul exem- ductions les plus coûteuses, après les seaux à
plaire disponible, il fut placé sur la table cen- lait et les plus grands vases. On n’avait réussi
trale. Le décor de chèvres parmi les roseaux à produire qu’un bol (« fond grès peinte en
correspond à un projet aquarellé de Lagrenée arabesque et Groupes de chaque coté compo-
(fig. 8). sés d’une figure de femme et chevres et va-
ches ») et deux supports (« à quatre pieds de
Grande terrine à pieds de vache Chevres colorées et fond grès et ornements
(dite parfois « à pieds de chèvre ») Étrusques ») en 1787 ; les trois autres exem-
Hauteur : 27,8 cm ; diamètre du bol : 45,3 cm. plaires complets furent livrés en 1788, et
Certains éléments de la composition (support deux furent décorés par Sinnesson82. La forme 8. Dessins préparatoires
en forme de balustre, pieds en forme de pattes n’est connue que par le « Profile des pièces » pour la « grande terrine
d’animal, type d’anse) se retrouvent sur deux (voir p. 161). basse » à décor de
chèvres par J.-
dessins de Lagrenée, bien qu’aucun d’eux ne J. Lagrenée, AMNS,
corresponde exactement à la forme réalisée. R 1, L 3, D 16, fo 1
Les pattes d’animal rappellent assez bien un
trépied représenté sur un antique capriccio
gravé par Lagrenée dans son Recueil de 1782.
Les supports en pattes d’animal figurent sur
d’innombrables gravures représentant des
tables tripodes et des braseros extraits de
fouilles, et sont devenus des formes symbo-
liques du monde antique. Ainsi, bien que la
forme de la « grande terrine » semble étrange,
elle était une expression de la vérité pour les
tenants du style archéologique. Aucun des
exemplaires publiés n’est vraiment proche du
modèle de Sèvres, dont Lagrenée apparaît
avec plus de probabilité comme le dessi-
nateur.
Quatre grandes terrines furent commandées
pour la laiterie. Les « répareurs » les plus qua- 8
7 bis
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Pots à lait
Comme les modèles de pots étaient beaucoup
plus grands que les habituels « pots à lait » de
la manufacture, on les retrouve indifférem-
ment dans les registres sous les dénomina-
tions de « pot à lait », « pot à l’eau » ou
« vase ». On en réalisa quatre types à l’atelier
de pâte dure (« pot à l’eau et tête de bouc »,
« vase à trois anses », « pot à l’eau nouvelle
forme de M. Boizot » et « pot à l’eau anse à ba-
guette »). Ces quatre modèles semblent se re-
9 et 10. Modèle en trouver sous une autre dénomination quand
plâtre pour le « pot à ils partent pour la cuisson et deviennent : un
anses tête de chèvre »,
AMNS « vase à tête et peau de bouc », un « vase à
trois anses », un « pot à l’eau Boizot forme
11. Dessin
pour la décoration
hune » et un « vase forme burette ». Bien que 9
d’un pot à lait, quatre formes soient mentionnées dans ces
J.-J. Lagrenée, AMNS deux documents, tous les autres font réfé-
rence à trois formes seulement. L’un de ces
trois modèles, le « pot à trois anses », fut re-
tiré après la livraison de 1787. Cette forme
était probablement dérivée de l’hydrie
grecque, qui possédait invariablement une
anse verticale et deux anses horizontales.
10
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grès peint de deux figures, deux chèvres et at- réalisés, on peut supposer que la manufacture 12 et 12 bis. Jatte
tribus et ornements Étrusques ». Les deux envisageait leur commercialisation et que les écuelle, fond petit bleu,
Sèvres, 1787,
pots que nous connaissons et qui figurent exemplaires supplémentaires furent couverts Metropolitan Museum
dans une collection particulière ont dû faire d’un autre décor pour la vente au grand of Art, 1997.518
partie de la livraison de 1788, car ils sont à public.
« fond étrusque ».
Jatte écuelle (b)
Pot à lait à anses relevées (a) ou « jatte à anses relevées »,
Hauteur sans l’anse : 23,7 cm. « jatte à anses de cuire (refendu) »
Le modèle reprend la forme du goulot en Hauteur : 8,1 cm ; diamètre : 19 cm.
trèfle et la poignée haute de l’œnochoé d’Apu- La forme des anses fendues par le milieu entre
lie (pot à vin). Deux exemplaires décorés d’un les points d’attache, ressemblant à des la-
« fond étrusque peint de deux masques, guir- nières de cuir, est probablement à l’origine de
landes de pampres et de 4 chèvres chacuns », la dénomination de « jattes à anses de cuire
furent livrés en 1787. Ils correspondent au refendu ». Le pied annelé est caractéristique
décor dessiné fait par Lagrenée pour le décor de Rambouillet. Un modèle de plâtre et un
d’un autre modèle de pot (fig. 11). Deux autres dessin technique préparatoire sont conservés
exemplaires furent livrés en 1788 pour rempla-
cer le « pot à lait à trois anses ». Nous n’en
connaissons la forme que par le « Profile des
pièces ».
Un “ air d’Antiquité ” : le service de Sèvres réalisé pour la laiterie…
Jattes
Toutes les jattes étaient conçues pour servir
de support aux gobelets cornets et tous les
documents font référence à des « jattes avec
leurs gobelets cornets ». On dessina pour la
laiterie trois types de jattes, difficiles à identi-
fier correctement dans les registres de l’atelier
de pâte dure, puisque l’on relève cinq dénomi-
nations différentes. Sur un total de deux cent
douze exemplaires de jattes, huit seulement
furent livrés. Dans l’inventaire de 1789, on re-
lève quarante-deux « jattes Service de la Laite-
rie » et trente-trois en 1790.
Étant donné le grand nombre d’exemplaires
12 bis
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« C’est une espèce de march-pié, […] sus- n’est pas copiée sur des exemples antiques,
pendu par des courroies de cuir aux côtés ou mais semble bien être une invention de
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Gobelets
Quatre modèles de gobelets furent dessinés
pour le service de Rambouillet, possédant
tous des éléments communs avec les jattes et
tous désignés par une terminologie sem-
blable. Sur un total de trois cent cinquante-
quatre gobelets figurant sur le registre de cuis-
son, quarante-huit étaient planifiés à l’origine
et vingt-huit constituèrent le service définitif. 14
Les pièces en excédent reçurent très certaine-
ment un décor différent de celui qui était af-
fecté au service de Rambouillet. De petite
taille et d’une utilisation plus facile que les Gobelet à anses relevées (f)
autres modèles du service, les gobelets repré- ou à « forme crachoire »,
sentèrent un moyen avantageux de propager ou encore « à grandes anses »
le style « étrusque ». Hauteur du gobelet : 8,1 cm ; diamètre de la
soucoupe : 19,6 cm. 14. Dessin pour le
Gobelet cornet (e) « gobelet cornet »,
Le pied annelé est typique du service de Ram- J.-J. Lagrenée, AMNS
Hauteur : 10,8 cm. bouillet. La forme est dérivée du canthare an-
15. Gobelet cornet,
Ce modèle était destiné à être placé à l’inté- tique, bien que les modèles antiques ne pos- fond gris de lin,
rieur des jattes et ne possédait pas de sou- sèdent pas de pied annelé. La dénomination Sèvres, 1787,
coupe. Il est possible qu’il ait été destiné à de « crachoire » s’explique par la forme et non décor de
Jean-Pierre Fumez,
servir de louche pour les seaux à lait ou les par l’usage. Le modèle est documenté par un Musée national de
grandes jattes. Le dessin préparatoire à la réa- dessin d’atelier comme « gobelet et soucoupe céramique, inv. 6795
lisation du modèle prouve que Boizot en fut
l’auteur et que le modèle prévu pour le service
de Rambouillet, à l’origine, ne comportait pas
de soucoupe87. Le pied du modèle aquarellé
de Lagrenée révèle une légère différence avec
celui du modèle réalisé (fig. 14). Les flancs lé-
gèrement incurvés et évasés rappellent la
silhouette des coupes évasées antiques, ap-
pelées kalathoi, mais la forme du gobelet cor-
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15
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16 18
16. Dessin pour de la laiterie de la reine que l’on nomme décor correspondant au dessin du gobelet fait
le « gobelet à anses forme Crachoire et dont le pied a Été relargie par Lagrenée (fig. 17).
relevées » avec « deux
groupes composés par ordre de Monsieur Regnier le mois d’octo-
d’une figure et d’un bre 178889 ». Ce dessin correspond exactement Gobelet à anses étrusques (g)
vache ou d’une chevre
à une aquarelle de Lagrenée (fig. 16). Il n’est ou « à anses botte »,
[…] decorations ou encore « à anses étrusques allongées »
Étrusques », pas facile de comprendre pourquoi le « Profile
J.-J. Lagrenée, AMNS des pièces » donne une version légèrement Hauteur du gobelet : 8,1 cm ; diamètre de la
17. Soucoupe différente et pourquoi il ne subsiste aucun soucoupe : 18,3 cm.
d’un « gobelet à anses modèle en plâtre de l’objet. En 1787, on livra Les anses du gobelet sont semblables à celles
relevées », fond six « gobelets à grandes anses », décorés de de la jatte portant le même nom. Le modèle
jonquille, Sèvres, 1787,
Musée national de « deux groupes composés d’une figure et est documenté par un dessin d’atelier et un
céramique, inv. 6795 d’une vache ou d’une chevre […] décorations modèle en plâtre. On connaît de nombreux
18. Dessin
Étrusques » à fond « petit gris », « petit bleu » autres exemples avec un autre décor, mais les
pour un « gobelet à et « jonquille ». Ce descriptif s’accorde parfai- pièces les plus tardives n’ont pas de pied an-
anses étrusque », tement à l’aquarelle de Lagrenée. Une seule nelé. L’indication « gobelet Boizot de la laite-
J.-J. Lagrenée, AMNS
des soucoupes, à fond « jonquille », porte un rie a botte », contenue dans les registres de
19. Gobelet à anses
étrusque, Sèvres,
1787, l’un des deux
exemplaires existant
en fond « verd
anglais », coll. part.
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Au départ étaient prévus quatre exemplaires. pièces de grande dimension, on n’aurait pas
En plus des cinq fabriqués en pâte dure, on en dû connaître de problèmes concernant la cuis-
fit vingt en pâte tendre, les seuls du service son de pièces peintes à la fin des années 1780.
réalisés selon ce procédé. Le décor peint en Peut-être une nouvelle technique fut-elle mise
était peut-être plus réussi ou plus près du na- à l’essai pour rester au plus près des modèles
turel. On livra en 1787 trois « petits pieds à antiques. En 1755, le comte de Caylus publia
trois têtes de chèvres en sculpture, colorées, son traité sur la peinture à l’encaustique
decorations Étrusques » (deux à « fond gris de d’après Pline92. Il s’agissait essentiellement
lin », le troisième à « fond grès »), mais les d’une méthode consistant à mélanger pig-
jattes correspondantes n’étaient pas prêtes, ments et cire, et à fixer la peinture à chaud.
ce qui laisse supposer des problèmes liés à la Wedgwood se flattait d’avoir redécouvert la
décoration. Les pièces additionnelles, quatre peinture à l’encaustique en 1769, bien qu’il fît
au total, furent livrées en 1788. Les trois exem- usage d’une technique différente pour retrou-
plaires connus ont un fond « gris de lin » ver la matité des surfaces caractéristique de la
(fig. 23). poterie antique93.
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rendu de la Commission, alors que l’on sait retrouve en magasin que les quelques pièces
aujourd’hui que plusieurs d’entre eux existent dont la liste apparaît dans le texte suivant :
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« Le Directeur Général du domaine national pour l’informer que tous les objets mention-
de Versailles et dépendence au Citoyen nés dans sa lettre précédente et provenant de
Denon, Directeur général du Musée central Versailles ou de Rambouillet avaient été en-
des arts, de la Monnaye, des Médailles, etc, voyés à Malmaison98. Seule l’existence des
etc. seaux à lait et de la « grande terrine basse » est
Citoyen Directeur Général, reconnue. Tous les autres objets, y compris
Par votre lettre du 6 fructidor, vous me deman- ceux qui nous sont parvenus, avaient été offi-
der divers objets qu’on vous a assuré avoir été ciellement déclarés perdus.
tirés de la laiterie de Rambouillet et transpor- Il n’est pas possible d’identifier les pièces de
tés au Musée Spécial de Versailles. Savoir : Rambouillet dans l’inventaire de la collection
deux passoires en porcelaine blanche, deux de Joséphine, fait en 1814-1815 après son
pieds de jatte en porcelaine, et quatre jattes décès, et dont une grande partie fut dispersée
aussi en porcelaine. D’après l’examen que j’ai au cours de ventes privées, réalisées sans cata-
fait faire dans nos dépots, il ne s’est trouvé, logue. La préface de l’un des rares catalogues
extrait de Rambouillet, qu’un grand vase de de vente existants indique que l’on enregistra
porcelaine de Sèvres, forme Étrusque, et seulement les pièces les plus importantes de
quatre jattes de même porcelaine, dont l’une chaque catégorie, ce qui interdit la certifica-
avec son trépied. Comme ces objets font tion exacte du contenu des objets vendus. Les
partie de ceux que vous m’avez demandés et pièces du service de Rambouillet révélaient
peuvent convenir à la laiterie de Malmaison, une originalité et une différence de concep-
je vous les ferai passer incessamment. tion si grandes par rapport aux réalisations ty-
D’après les renseignements que j’ai prise, les piques de Sèvres, que nombre d’entre elles
objets que je vous avais demandés de faire en- gardent probablement encore un anonymat
lever de Rambouillet pour les transférer à Ver- qui retarde leur découverte.
sailles, tels que bas-reliefs, consoles, etc, sont Ainsi, on est en mesure de ne retrouver qu’un
les mêmes que ceux que vous avez fait trans- petit nombre de pièces sans jamais savoir
porter en dernier lieu à Malmaison. Il reste comment elles ont traversé les ans avant de
pourtant encore à Rambouillet cinq grands nous parvenir. Les deux seaux à lait étaient à
vases de porcelaine de Sèvres, forme la vente de la duchesse douairière de Bedford,
Étrusque, deux grands Sceaux aussi de en provenance de sa résidence de Campden
Sèvres, une grande coupe sans trépied, trois Hill Lodge en 1853, décrits dans le catalogue
socles de porcelaine, […] ( plus quelques ob- comme « porcelaine de Dresde ». Ensuite, ils
jets sans rapport avec la laiterie). sont répertoriés dans la collection Mayer Am-
L’autorisation de faire transporter tous ces ob- schel de Rothschild à Mentmore, avant d’être
jets à Versailles, ayant été donnée depuis long revendus en 1977. La « grande terrine basse »
tems par le Ministre de l’intérieur, je crois qu’il fit l’objet d’un achat sur place par le Museum
seroit convenable de ne pas retarder le trans- für Angewandte Kunst de Francfort en 1940
port à moins que vous ne jugiez à propos d’y sans indication de provenance. Un « gobelet à
envoyer vous-même ; quelques uns de ces ob- anses étrusques » et sa soucoupe, un « gobe-
jets pouvant aussi être employés utilement à let cornet » et une soucoupe pour un « gobe-
la laiterie de Malmaison […]. let à anses relevées » furent acquis par le
Goulard97. » Musée national de céramique au XIXe siècle.
Cette lettre est une preuve de la disparition Ce même musée fit aussi l’acquisition de deux
Un “ air d’Antiquité ” : le service de Sèvres réalisé pour la laiterie…
chaotique et déréglée des objets de Ram- « jattes tétons ». Une troisième « jatte téton »
bouillet. Versailles devait donc abriter, à cette se trouve au Museo duca di Martina alla Flori-
époque, un grand « vase étrusque », alors que diana de Naples, également dépourvue de pe-
les cinq autres étaient à Rambouillet. Ver- digree. Plus récemment, plusieurs gobelets et
sailles abritait encore quatre modèles de la soucoupes, une jatte et deux pots sont appa-
« grande terrine basse avec son pied de rus sur le marché, sans qu’aucun renseigne-
vache », mais un seul trépied à pattes d’animal ment ne nous permette de remonter le cours
(les trois restants étant à Rambouillet). En de leur histoire jusqu’au XVIIIe siècle.
outre, à Rambouillet, il y avait les deux seaux à Après être resté stable pendant plusieurs dé-
lait et la « grande terrine basse ». Figurant à cennies, le nombre de pièces connues du ser-
Rambouillet, alors qu’elles auraient dû être en vice de Sèvres fait pour Rambouillet a
sécurité au dépôt, les huit pots et les huit presque doublé depuis la publication du ré-
jattes s’ajoutaient au nombre des pièces man- sultat de mes recherches, voici dix ans. Espé-
quant déjà en 1793. Le 29 fructidor an XI rons que cette nouvelle publication fera réap-
(17 septembre 1803), Goulard écrivit à Denon paraître d’autres pièces.
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appendice
R ELEVÉ DE QUELQUES DOCUMENTS RELATIFS AUX PRODUCTIONS ET AUX LIVRAISONS CONSERVÉS AUX ARCHIVES DE LA M ANUFACTURE
NATIONALE DE S ÈVRES
1. État des pieces de la laiterie de la reine et le nombres qui En à été fait dans l’attelier de porcelaine dure pres a aller au four lanée 1787
4 Vases Etrusque 1.er g.r pour la niches due millieu
14 Vases de Côté pour les niches
4 Tinettes et leurs passoires
13 jattes 1.er g.r ou le pied a 4 pieds de Chevres
14 jattes 1.er g.r ou le pied a des oziers
52 petite jattes à bordure
84 petites jattes a anses a baguette
48 petites jattes a anses de cuire refendu
28 petites jattes a anses a botte
5 jattes ou sein de femmes y comprie 20 que lon na fait En pâte tendre et 5 pieds
40 Ecremoires à aneaux
80 Ecremoires forme Soucoupe
18 Vases a tête et peaux de bouc
16 Vases a trois anses
6 Vase forme Burette
16 Pot à l’eau Boizot forme hune
20 Beurieres
60 tasses forme Crachoire
120 tasse a bordure
44 tasses forme Cornet
130 tasses a anses botte
400 soucoupes pour toutes les forme de tasses
2 Sucriers
4 Pieds support des Crêmoirs
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4 Écrêmoirs unis
2 Petits pieds a testes de Chevre
2 Testons
______________________________
60 Pièces
3. Plan de la Laiterie de Rambouillet avec L’arrangement des pieces de Porcelaine de la Manufacture du Roy
Renvoy
A. Tinette avec sa Passoire
B. Grande Terrine a pieds de Chevre
C. Pot a lait a anse relevé
D. Pot a lait a anses teste de Chevre 2 en plus
Suprimé E. Pot a lait a trois anses remplacé par 2 pots a anses relevé
F. Gobelets a anses releves avec leurs soucoupes
G. Jattes a Lait avec leurs Gobelets cornet
H. Jattes a Lait (a anses alongés) avec leurs Gobelets cornet
I. Gobelets et Soucoupes de deux formes
K. Sucriers ronds
Suprimé L. Beuriers remplacé par 2 Sucriers ronds
M. Jattes tetons avec leurs pieds
Suprimé N. Écresmoires
O. Grand Vases Etrusques
En plus, dans le milieu une grande terrine basse et Six tasses et Soucoupes
Deshaies
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notes
1. Selma Schwartz, « The Sèvres Porcelain for sous Louis XVI », Art de France, 3, 1963, 48. Marc Sandoz, p. 57.
Marie-Antoinette’s Dairy at Rambouillet : an p. 171, citant Blondel, Cours d’architecture,
49. AN, O1 20611, no 299, Lagrenée à
Exercise in Archaeological Neo-Classicism », The 1773, vol. IV, p. 68.
d’Angiviller, 3 mars 1785.
French Porcelain Society, IX, 1992.
20. Serge Grandjean, « Une création mi-royale
50. AN, O1 20611, no 271, Lagrenée à
2. Voir J. Maillard, Les Yvelines : histoire de mi-impériale de la Manufacture de Sèvres »,
d’Angiviller, 20 octobre 1785.
Rambouillet, de son château et des lieux Cahiers de la céramique et des arts du feu, 8,
remarquables de sa forêt, Paris, 1891 ; F. Lorin, 1957, p. 180-184 ; et AMNS, Eb1, D 12. 51. AN, O1 20621, no 182, Lagrenée aîné à
Rambouillet. La ville, le château, ses hôtes, 1768- d’Angiviller, 20 avril 1785.
21. (S. Girardin), Promenade ou Itinéraire des
1906, Paris, 1907 ; G. Lenotre, Le Château de
jardins de Chantilly, Paris, 1791, p. 44. 52. AN, O1 20612, no 300, Hettlinger à
Rambouillet, six siècles d’histoire, Paris, 1930 ; et
Jacques Silvestre de Sacy, Le Comte d’Angiviller, d’Angiviller, 24 mai 1785.
22. Madge Garland, « Rose Bertin : Minister of
dernier directeur général des Bâtiments du roi, Fashion », Apollo, 87, janvier 1968, p. 45. 53. AMNS, Vf 36 (1786), fo 11 ro, no 172, et
Paris, 1953. F 28 (1786).
23. Nouvelles Archives de l’art français, 3 série,
e
3. Pierre de Janti, Forêt, chasses et château de vol. XXII, p. 60-61. 54. AMNS, Vy 10, fo 76 ro, 7 septembre 1786.
Rambouillet, 1949, p. 99-100. Il s’agit très certainement du second volume de la
24. Transcription de l’abbé Pascal, Pierre Julien
4. F. Lorin, p. 220. Description des principales pierres gravées du
sculpteur (1731-1804) : sa vie et son œuvre,
cabinet du duc d’Orléans, publié en 1784 par
Paris, 1904, p. 49-51.
5. L. V. Thiéry, Guide des amateurs et des l’abbé Geraud de Lachau.
étrangers voyageurs dans les maisons royales, 25. Archives nationales (AN), O1 19191, nos 18
châteaux, lieux de plaisance, établissemens 55. AMNS, Vf 37 (1787), fo 10 ro, no 163,
et 68.
publics, villages et séjours les plus renommés aux 13 août 1787.
environs de Paris, Paris, 1788, p. 491. 26. Charles Mauricheau-Beaupré, « Un mobilier
56. Pierre François Hugues d’Hancarville,
de G. Jacob dessiné par Hubert Robert », Bulletin
6. G. L. Le Rouge, Détails des nouveaux jardins à Antiquités étrusques, grecques et romaines,
des musées de France, 6, avril 1934, p. 78.
la mode, Paris, 1784, vol. XI, pl. 1, 2, 15, 17 et gravées par F. A. David avec leurs explications,
18, et vol. XII, pl. 18. 27. Journal inédit du duc de Croÿ, vol. I, p. 269. par d’Hancarville, Naples, 1766, vol. I, p. XX.
7. Abbé Delille, Les Jardins ou l’Art d’embellir les 28. AN, O1 3443 et O1 3422. 57. Ibid., p. XVIII.
paysages, 1782, p. 80, 88. 29. AN, O1 19191, no 18. 58. K. E. Farrar, éd., Correspondence of Josiah
8. Raoul de Broglie, « Le hameau et la laiterie de Wedgwood, Londres, 1906, vol. III, p. 62.
30. AN, O1 1180, p. 292.
Chantilly », Gazette des beaux-arts, 37, octobre- 59. Ferdinando Bologna, « The Rediscovery of
décembre 1950, p. 320. 31. AMNS, Eb1, D 12.
Herculanum and Pompeii in the Artistic Culture of
9. Alison Kelly, Decorative Wedgwood in 32. AN, O1 3444, Bordereau de livraison signé Europe in the Eighteenth Century », Rediscovering
Architecture and Furniture, Londres, 1965, par Deshayes, concierge du garde-meuble de Pompeii, Rome, 1990, p. 79.
p. 122. Le service était en cane-ware, une pâte Rambouillet.
60. La correspondance relative à l’acquisition
de grès extraite de gisements d’argile situés dans 33. AN, O1 19192, no 134. de cette collection et à son transfert à Sèvres est
le North Staffordshire et gardant une légère teinte documentée aux Archives nationales, O1 1149,
ambrée à la cuisson. 34. Pierre de Janti, p. 100. 19 avril 1786 ; O1 1179, p. 273-274, 459 ;
10. Gustave Desjardins, Le Petit Trianon, histoire 35. François S. J. R. Beauchamp, Comptes de O1 20612, nos 389, 391, 392, 393, 394 ; et
et description, Versailles, 1885, p. 313, Louis XVI, Paris, 1909, p. 279. AMNS, H 3, L 4 (1786), nos 30 et 34.
et Christian Baulez, « Deux terrines de la 36. AN, O1 1180, p. 428. 61. Le Musée national de céramique possède
manufacture de la reine », Versalia, 4, 2001, actuellement environ trois cents pièces provenant
p. 16-17. 37. Anne Claude Philippe, comte de Caylus, de la collection Denon. Dans un compte rendu
Recueil d’antiquités égyptiennes, étrusques, en date du 3 germinal an III, le comité
11. Memoirs of the Baroness Oberkirch, Londres, grecques, romaines et gauloises, vol. I, 1752,
1852, vol. I, p. 313. révolutionnaire d’art et d’agriculture décide de
pl. 50, no 3. transférer au cabinet des Antiquités (probablement
12. Vicomte de Grouchy et Paul Cottin, éd., 38. Illustration dans Jean de Cayeux, Hubert au Louvre) les pièces qu’il considère comme ayant
Journal inédit du duc de Croÿ, Paris, 1906, vol. I, Robert et les jardins, Paris, 1987, p. 89. une valeur artistique et de laisser sur place celles
p. 269. qui pourraient être utiles à la manufacture (AN,
39. Jean-Claude Richard de Saint-Non, Voyage F12 1495, dossier 3).
13. Le Grand d’Aussy, Histoire de la vie privée pittoresque ou Description des royaumes de
des françois (depuis l’origine de la nation jusqu’à Naples et de Sicile, vol. V, 1786, p. IJ. 62. AN, O1 1179, p. 274, D’Angiviller à
nos jours), 2e éd., Paris, 1815, vol. III, p. 111- Hettlinger, 19 avril 1786.
112. 40. Marc Sandoz, Jean-Jacques Lagrenée (le
Jeune) 1739-1821, Paris, 1988, p. 62. 63. Madeleine Massoul, Corpus Vasorum
14. Ibid. et M. de Lescure, Correspondence Antiquorum : France, Musée national de Sèvres,
secrète inédite sur Louis XVI, Marie-Antoinette, la 41. Voir Guilhem Scherf, « Les bas-reliefs de Paris, 1934, p. XI.
cour et la ville de 1777 à 1792, Paris, 1866, Pierre Julien pour la laiterie de Rambouillet acquis
vol. I, p. 76. par dation », La Revue des musées de France, 64. Jean-Claude Richard de Saint-Non, vol. I,
revue du Louvre, 2, 2004, p. 18-24. t. II, 1782, p. 32.
15. Le Grand d’Aussy, vol. II, p. 56.
42. Charles Mauricheau-Beaupré, p. 78. 65. AN, O1 20612, no 391, D’Angiviller à
16. D. Diderot et J. d’Alembert, Encyclopédie, Denon, 24 mai 1786.
vol. IX, p. 213. 43. Rosalind Savill, The Wallace Collection
Catalogue of Sèvres Porcelain, Londres, 1988, 66. AN, O1 20612, no 393, Hettlinger à
17. Annick Heitzmann, « Hameau de Trianon. La vol. II, p. 785. d’Angiviller, 9 juin 1786.
laiterie de préparation », Versalia, 4, 2001,
p. 72-79. 44. Geoffrey de Bellaigue, Sèvres Porcelain from 67. AN, F121495, IV, dossier 3.
the Royal Collection, Londres, 1979, p. 8. 68. Alexandre Brongniart et Denis Riocreux,
18. Mémoires inédits de Madame la comtesse
de Genlis pour servir à l’histoire des dix-huitième 45. AMNS, H 3, no 12, 2 février 1783. Description méthodique du Musée céramique de
et dix-neuvième siècles, Paris, 1825, vol. IV, Sèvres, Paris, 1845, vol. I, p. II.
Selma Schwartz
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Armand « jeune », Asselin, Bouillat « père », vol. VI, 1764, pl. 100, nos IV et V. 90. AMNS, Va (1789), registre concernant
Castel, Fumez, Le Bel, Le Grand, Le Guay, Marcou.
80. AMNS, Vj4, f 228 r .
o o
Méraud « aîné », Pfeiffer, Pithou jeune, Rosset et 91. Anne Claude Philippe, comte de Caylus,
Sinnesson. 81. AMNS, Vl3, fo 49 ro. vol. VII, 1767, pl. 43, nos 1 et 4.
71. Toutes les listes sont regroupées aux Archives 82. AMNS, Vj4, fo 233 ro, et Vl3, fo 81 vo. 92. Memoire sur la peinture a l’encaustique et sur
de la manufacture nationale de Sèvres, Eb1 D.12. la peinture a cire par M. le Comte de Caylus de
83. Anne Claude Philippe, comte de Caylus,
72. AMNS, R 2, d 4. vol. VII, 1767, pl. 36, no 4, et Jean-Claude l’Académie des Belles-Lettres, Genève, 1755.
Richard de Saint-Non, vol. I, 2e partie, pl. 3. 93. Wedgwood & Bentley, Catalogue of
73. AMNS, H 3, L 4, 1786, no 79.
84. AMNS, Va (1790-1792), registre concernant Cameos, 1774, p. 69-70.
74. AMNS, Va (1786), registre concernant
Lepin. 94. Hilary Young, éd., The Genius of
Descoins « fils ».
85. Diderot, Encyclopédie, vol. II, 1751, Wedgwood, cat. exp., Victoria & Albert
75. Illustration dans Un album de croquis Museum, 1995, p. 59-60.
p. 346.
d’Hubert Robert (1733-1808), Genève, 1979,
nos 94 et 95, sans aucune référence au service 86. AMNS, Va (1786), entrée concernant 95. AN, F17 1036A.
de la laiterie de Rambouillet. Richard « aîné ». 96. Archives du Louvre (AL), M 12, Chaptal à
76. AMNS, Va (1789-1790), janvier 1790. 87. AMNS, R 1, L 2, D 2, fo 20. Denon, 4 fructidor an XI (25 août 1803).
77. AMNS, Vj4, fo 6 ro. 88. Anne Claude Philippe, comte de Caylus, 97. AL, M 12, Goulard à Denon, 23 fructidor
vol. II, 1756, pl. 41, no 1, et Jean-Claude an XI (11 septembre 1803).
78. Gobelet à anses étrusques, marqué « Sevres
Richard de Saint-Non, 5e partie, p. 139. 98. AL, M 12, Goulard à Denon, 29 fructidor an
RF », musée Carnavalet, inv. C.1912.
89. AMNS, R 1, L 2, D 1, fo 21. XI (17 septembre 1803).
79. Anne Claude Philippe, comte de Caylus,
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