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IIIÉME UNIVERSITÉ DES DOCTORANTS

EN SOCILOGIE DU TRAVAIL

EVIAN, 29 MARS - 2 AVRIL 1999

Changement organisationnel et recomposition


du rapport à l'entreprise.

Atelier 4 : Changements dans l'entreprise et l'administration

Christèle DONDEYNE
LEST - CNRS, 35 avenue Jules Ferry, 13 626 Aix en Provence cedex
( : 04 42 37 85 02, fax : 04 42 26 79 37
e-mail : Dondeyne@univ-aix.fr
Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

La thèse CIFRE en cours se déroule dans le réseau français d'une entreprise de services
internationale dans le secteur de la restauration collective (Restocol). Sa structure est
fortement décentralisée par nature, la production se faisant en général chez le client (Voir
annexe 1, la structure de l'entreprise). C'est une grande entreprise (14 000 salariés en France),
de création relativement récente (1966).
La recherche a véritablement commencé en mars 1997, après une réponse à un appel
d'offres lancé par Restocol en décembre 1996, et a donné lieu à la signature d'une convention
CIFRE en juillet 1997. Cela fait donc près de deux ans que le travail de thèse se poursuit, et
une partie importante du temps a été consacrée au terrain. L'année à venir sera plus
"théorique", afin d'opérer une vraie distanciation, et dans l'optique de soutenir la thèse à la fin
de la prochaine année universitaire.
Notre questionnement de départ porte sur l'appropriation du changement
organisationnel, mais il a quelque peu évolué en fonction des résultats empiriques obtenus pour
se porter sur la recomposition du rapport à l'entreprise, et se centrer sur la population cadre,
acteur majeur du changement chez Restocol .
Avant de rentrer dans l'explication de nos questionnements actuels, nous allons
présenter en quoi ils sont liés en partie aux conditions institutionnelles dans lesquelles se réalise
la thèse, et quel a été le cheminement "intellectuel" suivi qui nous a conduit à notre
problématique d'aujourd'hui. Nous proposerons alors les premiers résultats.

1. L'inscription de la recherche dans un contexte institutionnel,


quelles conséquences sur le choix de l'objet et de la méthodologie ?
1.1 Le dispositif CIFRE : une co-production de la recherche.
La recherche dans le cadre d'un dispositif CIFRE place immédiatement le doctorant
dans une situation de commande, quant au choix de l'objet, et dans notre cas, également en ce
qui concerne la méthodologie mise en place. Une relative liberté nous a cependant été octroyée
dans le déroulement du processus de recherche. D'une part sans doute parce qu'il y a eu une
alternance entre les périodes immersion dans l'entreprise et les périodes de détachement au
LEST, et d'autre part parce que le (l'apprenti)chercheur s'approprie de manière forte son
travail, quelques soient les contraintes qui pèsent sur lui. On peut parler de co-production de la
recherche dans notre situation car dans son état actuel, avant sa transformation en produit fini
que sera la thèse, c'est une recherche en partie collective.

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Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

Un dispositif original a été mis en place dans l'entreprise pour encadrer la recherche. Ce
dispositif est né d'un apprentissage de la collaboration entre différentes équipes de chercheurs
et Restocol. Une première recherche en ethnologie dans les années 80 a donné lieu à une thèse
soutenue en 88 ; une thèse en convention CIFRE (92-95) soutenue en 97 sur le travail en
projets a donné lieu à une autre forme de collaboration. Enfin une équipe de sociologues de
l'innovation s'est intéressée à la politique qualité chez Restocol. Ces différentes expériences de
Restocol avec le monde la recherche l'ont conduit à mettre en place une structure
d'encadrement de la recherche.
Un comité de recherche composé de cadres appartenant aux comités de direction de
Restocol s'est créé avant même le lancement de l'appel d'offre et le recrutement du doctorant,
sous la responsabilité de la directrice adjointe de la stratégie du groupe. Ces cadres sont issus
de différentes fonctions : gestion des ressources humaines (GRH), achats, direction
opérationnelle des filiales, bureau des méthodes, et stratégie du groupe. Même si la recherche
ne concerne que les trois filiales françaises, deux personnes occupent un poste au niveau de la
direction du groupe (GRH et stratégie). La coordination de ce dispositif a été assurée par le
docteur en sociologie qui a réalisé sa thèse en CIFRE dans la même entrerise de 1992 à 1995
et qui poursuit ainsi une collaboration avec Restocol entamée depuis la thèse, ce qui donne à la
recherche une perspective de long terme.
Le mobile de l'entreprise pour mener la recherche actuelle est tournée en partie vers le
président fondateur de l'entreprise, figure mythique chez Restocol, et personnage important en
externe, très présent au CNPF et entretenant des relations avec des personnalités politiques.
S'il ne participe pas au comité de recherche, il sera présent lors de la restitution finale. C'est un
enjeu important pour tous les participants du comité de recherche, d'autant plus que se pose la
question de sa succession, qui pourrait entraîner des repositionnements importants au sein des
comités de direction. C'est à lui que sont destinés les résultats de la recherche.
Finalement, la doctorante et son directeur de thèse Michel Arliaud se sont intégrés à ce
comité de recherche, composé des six cadres des comités de direction et du docteur en
sociologie déjà familiarisés avec Restocol.

Dès le départ, le LEST a demandé des marges de manoeuvre afin de se sentir à l'aise
dans le processus de recherche. La problématique suivie a fait l'objet de discussions régulières
par les interlocuteurs de l'entreprise, ce qui a contribué à l'enrichir, même s'il a fallu affronter
des difficultés lorsque les résultats allaient à l'encontre de ce qui était attendu, ou remmettaient

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partiellement en cause les actions menées par nos interlocuteurs. Au cours des rencontres avec
le comité de recherche, et sous l'effet des premiers apports du terrain1, les échanges ont permis
que chacun des interlocuteurs trouve sa place dans le dispositif et dispose de marges
d'autonomie dans les réalisations à conduire et dans les propositions à formuler pour l'avancée
de la recherche. C'est en ce sens que l'on peut parler de co-production de la recherche.
La formulation de l'objet de la recherche a ainsi évolué, des "résistances ou freins au
changement", choisi par restocol, à l'appropriation du changement organisationnel, selon les
souhaits du LEST. Si l'effet de la reformulation était surtout symbolique au départ, puisqu'il ne
s'agissait pas de résultats, cela n'en était pas moins important. Les déplacements d'objets qui se
sont produit ensuite (voir deuxième partie) sont liés au travail de terrain réalisé par le
doctorant, et marquent la véritable appropriation de la recherche par l'apprenti-chercheur. Les
choix méthodologiques ont été effectués au départ par le chercheur coordonateur du projet, et
ont rencontré l'accord de tous. L'observation directe a ainsi été privilégiée, mais adaptée en
fonction des populations, et complétée par des entretiens. Seul le calendrier prévu a été
bousculé, tant les temporalités réduites s'avéraient irréalistes.
Ce travail est donc le résultat d'une double socialisation Restocol/LEST pour le
doctorant. L'enchainement des enquêtes de terrain successives et leur caractère intensif ont
permis de se familiariser rapidement avec l'univers mental et pratique de restocol. Ces périodes
d'enquêtes ont eu lieu dans différents sites de l'entrepise, et dans différentes régions de France.
La situation du doctorant était donc davantage celle d'un "électron libre" dans l'entreprise, sans
rattachement précis à un service ou à un bureau, et qui se trouvait chez restocol uniquement
pour des enquêtes de terrain ou pour une réunion, jamais comme lieu de travail quotidien, ou
comme lieu de réflexion ou d'écriture, qui reste le LEST. L'espacement des enquêtes de terrain
en 98 ont permis de renforcer cette socialisation (voir annexe 2, les étapes de la recherche).

1.2 Mise en forme des résultats et conditions institutionnelles :


L'enracinement des résultats dans les observations empiriques.
Une théorisation tardive
Les conditions institutionnelles de production de la recherche ont nécessité d'aller très
vite, bien plus que je ne le souhaitais, et ne m'ont pas permis pendant un an et demi où se sont
succédé de nombreuses enquêtes empiriques d'approfondir la littérature sur les concepts que
j'utilisais, ou de découvrir d'autres approches que je ne maîtrisais pas.

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Le non recours initial à la littérature sociologique de manière systématique est lié aussi
à la nécessité de s'adapter aux modes de communication pratiqués dans l'entreprise, qui
utilisent des messages brefs, précis et univoques pour des soucis d'efficacité, afin d'en faciliter
la diffusion. J'ai préféré par souci pédagoqique (et pour les contraintes développées plus haut
!), utiliser le langage courant plutôt que des concepts théoriques parfois rébarbatifs pour les
non initiés.
Ce que j'ai vécu comme une contrainte négative se révèle avec du recul sous un jour
plus positif. La force de mon argumentation auprès des acteurs de l'entreprise à qui je rendais
des comptes réguliérement (cf calendrier des étapes de la recherche) a été puisée dans une
maîtrise très fine du terrain et m'a obligée à construire des "concepts locaux", qui ont évolué au
fur et à mesure de mes investigations empiriques puis surtout de ma prise de distance.
L'approfondissement théorique et l'aide de la littérature ne s'en révèlent que plus fructueux
aujourdhui, et surtout il me semble que j'ai écarté une bonne partie des risques de
surinterprétation de terrain, c'est à dire de faire dire à son terrain plus qu'il n'en dit.
L'aller-retour entre le terrain et la théorie et mise en cohérence des résultats a-
postériori
Des enseignements empiriques d'abord laissés de côté ont ensuite été repris à la lumière
de mes lectures et la progression de mes connaissances. La démarche suivie a donc un aspect
artisanal dans le tatônnement et les aller-retour entre le terrain et la théorie.
J'ai suivi plusieurs pistes de recherche, en fonction de demande de l'entreprise, qui
n'était pas univoque du fait du nombre de participants. Les résultats auxquels j'ai abouti ont été
mis en cohérence a-postériori, notamment au moment de la rédaction d'un rapport
intermédiaire de recherche, et vont l'être encore pour la rédaction à venir d'un rapport final
pour l'entreprise.

1.3 Le rapport au terrain et les conditions institutionnelles : neutraliser


la relation d'enquête et maîtriser les effets possibles sur les enquêtés.
L'accès au terrain n'est jamais neutre quand on fait du qualitatif, les personnes
rencontrées ne le sont jamais par hasard, et le chercheur ou l'apprenti chercheur est avant tout
une personne qui rencontre l'(les) enquêté(s) et avec qui il y a une interaction. Le cas de la
recherche dans l'entreprise, ou du moins chez Restocol pose en plus des problèmes spécifiques,
liés à la confidentialité et à l'anonymat.

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En effet certains des cadres du comité de direction choisissaient des sites sur lesquels ils
voulaient "récupérer de l'information". Une première chose est de s'apercevoir de ce type de
stratégies, d'avoir conscience des risques portant sur les enquêtés "menacés" et de les évaluer.
Une autre est de déjouer ces stratégies, en maquillant le terrain2, tout en présentant les mêmes
résultats3.
Les interlocuteurs de terrain eux mêmes se méfiaient souvent de notre présence au
départ. Nous avons réussi, quand nous nous en sommes rendue compte, à éviter la plupart de
ces pièges, grâce à la construction de la confiance sur la durée avec les interlocuteurs de
terrain. La qualité et la richesse des récits livrés par les personnes rencontrées témoignent de la
confiance qui s'est progressivement installée, notamment auprès de l'encadrement.
Concrétement, nous passions environ un mois dans chaque direction régionale étudiée,
composée de dix à quinze cadres, la plupart responsables de secteur (RS), chargés de
superviser la gestion et le développement des restaurants de la région découpée en secteurs. Ils
sont accompagnés par un responsable des ressources humaines, et parfois un responsable du
marketing, et sont managés par un directeur régional. Nous avons passé deux jours avec
chacun de ces cadres, en les accompagnant dans leur travail quotidien. Ces deux jours étaient
préparés, en présentant l'objet de notre présence et de la recherche, en assurant les conditions
de confidentialité, et en leur demandant que dans ces deux jours il y ait des moments passés
avec les gérants des restaurants, et avec des clients. Si tous n'étaient pas spontanément
coopératifs, ils ne pouvaient guère dissimuler ou modifier leur comportement habituel en
présence d'interlocuteurs, et finissaient par s'habituer à ma présence, qui révélait parfois chez
certains un besoin de parler.
Lorsque l'enquête portait sur les restaurants, nous avons pratiqué l'observation
participante. La méthodologie n'a jamais rééllement posé problème. Il était relativement facile
d'observer quinze jours durant une activité assez semblable d'un jour à l'autre. Le plus difficile
était d'expliquer ce qu'était la recherche, la sociologie, à des personnes pour qui cela ne faisait
pas sens. L'identification en tant que stagiaire suffisait finalement à justifier une présence
extérieure dans le restaurant, d'autant que les stagiaires étaient nombreux.
La construction de notre rapport au terrain s'est donc fait avec beaucoup de
précautions, éthiques et déontologiques, pour les enquêtés, et pour la fiabilité des résultats.
Nous avons réalisé pour nous même des récits des conditions d'enquêtes, afin d'essayer de
neutraliser autant que faire ce peut l'effet de la relation d'enquête (Bizeul, 1998).

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Nous diposons au final d'un matériau très riche grâce aux enquêtes qualitatives
approfondies. Nous avons adapté les techniques d'enquêtes aux populations rencontrées. Nous
avons pratiqué de l'observation participante sur les restaurants, de l'observation directe auprès
de l'encadrement régional, et des entretiens ont été menès auprès des cadres du siège à l'origine
des changements mis en place. Chaque type d'enquête a eu lieu dans les trois filiales, et dans
plusieurs régions. La nature du dispositif mis en place avec le comité de recherche qui se réunit
au minimum tous les trois mois depuis deux ans donne une dimension longitudinale à ce projet
de recherche. Nous avons par contre rencontré des difficultés (toujours pas surmontées à
l'heure actuelle) dès qu'il s'agit d'obtenir des éléments chiffrés.
Nous disposons également d'un questionnaire réalisée par la SOFRES en 1996 chez
restocol sur la diffusion du changement et les perceptions des nouvelles orientations
stratégiques. Nous pouvons utiliser également les différents travaux de recherche menés chez
restocol qui donnent une perspective historique d'autant plus intéresssante que l'on étudie le
changement.
Au delà de l'inscription dans un contexte institutionnel, la recherche est le fruit du
mûrissement d'un projet, d'une réflexion. Chaque recherche connaît je pense ses périodes
d'enthousiasme et de découragement, de flottement et d'accélération. On met le doigt sur une
variable explicative, qu'on décortique, qu'on exploite, puis on découvre une autre variable, peut
être plus importante, et il arrive qu'on doute. La complexité du réél qu'on analyse impose des
choix quant à l'objet, mais qui dit choix dit renoncement, et un travail de deuil. Cela ne se fait
pas sans errements, sans déplacements d'objets ou de problématique.

2. Le démélâge du fil d'Arianne, ou les déplacements de la


problématique en fonction des variables explicatives identifiées.
Afin de ne pas perdre le lecteur (comme nous avons pu l'être nous même dans tous nos
rapports de recherche !), nous allons les synthétiser en trois grandes étapes. La première est
intervenue après que nous ayons compris la nature et l'ampleur du changement et les effets qu'il
pouvait produire sur les différentes catégories de population (2-1). Nous avons alors porté une
attention particulière à la catégorie cadre, qui nous semblait un acteur clé du changement (2-2).
Enfin nous avons développé la notion de rapport à l'entreprise, qui nous semblait réunir les
principaux effets du changement (2-3).

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2.1 La découverte de l'entreprise, le changement et son appropriation.


L’appropriation du changement organisationnel est le processus par lequel les acteurs
donnent un sens aux politiques de changement, sens qui va s’incorporer dans les pratiques. Le
changement n’est-il qu’un discours, ou a-t-il modifié les pratiques et les modes de
fonctionnement ? Quelles sont les conditions pour que se réalise une appropriation sur un
mode positif ?
Le changement, objet de notre présence, nous avait été présenté de manière très
succinte lors de notre première rencontre avec le comité de recherche, chacun ayant sa propre
interprétation, souvent en fonction de ses propres actions. Il a fallu ainsi que nous
recontruisions le changement par nous même, en tenant compte des souhaits du comité de
recherche (voir annexe 3, méthodologie suivie pendant la phse d'intégration).
Le changement chez Restocol : Objectifs de croissance, réduction des coûts, et
normalisation poussée.
L’entreprise Restocol a mis en place de nouveaux objectifs stratégiques pour faire face
à la concurrence accrue entre les grandes entreprises dans le secteur de la restauration
collective et à une pression à la baisse sur les prix exercée par les clients. Ces objectifs se
déclinent en trois axes. 1)un axe de croissance et de développement ; 2) un axe de réduction
des coûts ; 3) un axe de normalisation et de standardisation de la production, que nous
présentons de manière synthétique dans le tableau qui suit.

Croissance
- augmentation des objectifs de résultats, qui se décline à chacun des niveaux : comité de
direction de l'entreprise, direction de filiale, direction régionale, responsable de secteur, restaurant
- développement de l'offre alimentaire par un choix accru, développement de nouveaux services :
entretien des espaces verts, nettoyage, pour aller vers une prise en charge globale de l'infrastructure.
- segmentation poussée de la clientèle à l'intérieur de chaque filiale (municipal/privé en scolaire,
hôpitaux cliniques/maisons de retraite en santé, regroupement des clients selon leurs activités dans
un même secteur en entreprise).
Réduction des coûts
- centralisation des achats pour de plus grandes économies d'échelle, planification des menus que
les gérants doivent appliquer, menus établis en fonction de gammes de clientèle.
- GRH : flexibilité par la multiplication des temps partiels dans le cadre d'une rationalisation du
travail pour les employés de service, individualisation des statuts et des rémunération pour les
employés qualifiés , les agents de maîtrise. Les grilles de compétences, individualisées, remplacent
les anciennes qualifications.
Normalisation
- standardisation des produits, par les menus, par des fiches de présentation.
- normalisation des procédés de production.
- formalisation des pratiques de gestion, dans le relationnel client, dans les évaluations annuelles
du personnel ...

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Premiers éléments d'interprétation : recomposition des rapports de pouvoir en


faveur du siège et modification des critères de compétence et de reconnaissance.
Recomposition des rapports de pouvoir
Le changement induit une formalisation des pratiques et la normalisation de la
production. Observés sous l'angle de l'autonomie et du pouvoir, les nouveaux outils peuvent
se lire comme une intrusion dans les espaces d'action antérieurs. Les règles informelles qui
régissaient ces espaces d'action étaient synonymes d'une certaine opacité dans les pratiques sur
le terrain. En clarifiant les pratiques, on permet au niveau du siège une compréhension et une
vision de ce qui se passe au niveau local. Pour tester cette interprétation, nous avons vérifié
l'hypothèse selon laquelle le changement s'accompagne d'une redistribution du pouvoir en
faveur du siège et d'une réduction de l'autonomie au niveau local.
Nous avons observé également le rôle du management dans la reconnaissance des
acteurs au niveau local. Nous avons vu qu’il était parfois possible de constituer de véritables
équipes au sein des directions régionales, sous l’impulsion du directeur régional, qui s’appuie
sur les compétences de tous et valorisent ainsi les individus. Cela peut représenter une
alternative à la perte d’autonomie que certains ont subi.
La mise en place d'un nouveau modèle de gestion des ressources humaines ?
La deuxième lecture proposée privilégie le rôle des variables d'emploi. Le changement
conduit à une évolution des compétences requises qui devrait se traduire par une évolution des
profils de recrutement et des promotions internes. De plus, l’entreprise étant toujours en
croissance forte, elle recrute chaque année de nouveaux effectifs. L’arrivée de populations
nouvelles peut s’accompagner d’une concurrence accrue pour les anciens dans l’obtention des
promotions. Dans ce cadre d'analyse, le changement peut se lire comme une modification de la
relation avec l'entreprise, relation fondée pour les plus anciens sur une confiance dans la
stabilité de l'emploi et la progression dans la carrière. Il faudrait donc dans cette optique tester
l'hypothèse selon laquelle les promotions sont davantage qu'avant destinées à des profils
d'individus qui possèdent des compétences généralistes, familiarisés avec l'écrit et le relationnel,
qui sont les compétences nécessaires pour mettre en place les nouvelles politiques, et moins
aux individus plus anciens, porteurs de compétences techniques et d'une culture orale. Un
début d'explication, à l'aide de la grille de lecture proposée par le marché interne, a été dessiné,
mais rapidement abandonné au vu de la difficulté anticipée de récolter des données. (Voir
annexe : la génèse d'un projet de recherche co-produit avec les acteurs de l'entreprise)

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Conclusion : Si l'activité évolue dans le sens d'un industrialisation de la production


des repas, la relation de service reste centrale et se professionalise.
A partir des modalités d'appropriation établies en fonction des catégories d'acteur
rencontrés (voir annexe 4, les modalités d'appropriation), nous avons essayé de voir quel sens
général se dégage du changement. On observe qu'une régulation par la norme se met
progressivement en place, et se superpose à une régulation par les résultats. Autrement dit à
une prescription sur les objectifs se rajoute une prescrition en termes de moyens.
La standardisation des prestations qui a été mise en place, pour homogénéiser le niveau
de qualité, diminue la part du travail technique pour les prestations quotidiennes et ordinaires4,
mais semble accroître la part du travail gestionnaire et relationnel. L'activité perd son caractère
domestique et artisanal et s'ancre dans le monde marchand et industriel (L.Boltanski et
L.Thévenot, 1991).
La forme que prend la norme et son caractère prescriptif est différent selon le niveau de
l'organisation et la catégorie d'acteur à laquelle on s'intéresse. Pour les employés de service, il
s'agit d'une standardisation des prestations et d'une réorganisation du travail de type taylorien.
La parcellisation des tâches se renforce en même temps que les normes sur les pratiques
s'étendent (préparation des produits frais, hygiène, nettoyage, produits à utiliser, présentation
de l'assiette, etc.). Pour les cuisiniers, le même mouvement se développe, mais il est associé à
une responsabilisation par une mise en concurrence des cuisiniers entre eux visant à les inciter à
vendre mieux leurs produits5. Pour les gérants des restaurants, le changement majeur a été la
mise en place de grilles de menus. Certains vivent mal la réduction des coûts qu'ils associent à
une baisse de qualité. D'autres ont du mal avec la formalisation des outils et la multiplication de
documents qu'ils induisent. En même temps une partie des gérants vit le changement comme
une professionnalisation de leurs métiers. Ces derniers sont souvent détachés de la production
et plus portés au relationnel client à la façon dont le mènent les responsables de secteur.
La catégorie cadre n'est pas homogène, en particulier il faut distinguer les cadres de
région qui transmettent ou appliquent les politiques, notamment les responsables de secteur, et
les cadres du siège qui sont davantage dans l'analyse des effets produits ou dans la mise en
place de nouveaux projets. Comme nous avons porté une attention particulière à ce groupe
d'acteurs, nous allons les présenter plus en détail dans la partie suivante.
2.2 L'encadrement comme acteur central du changement.
Nous avons posé les cadres comme les acteurs centraux du changement. Les cadres de
région sont un maillon essentiel de la diffusion des politiques venues du siège, en raison de la

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forte décentralisation de l'entreprise. En même temps l'ampleur des changements qui les
concernent posent pour certains la question même de leur statut, avec un brouillage des
frontières entre l'encadrement intermédiaire et les agents de maîtrise, et une séparation accrue
entre cadres supérieurs et encadrement intermédiaire. Pour clarifier notre démonstration, nous
avons présenté les évolutions qui les concernent en trois temps. Le premier est consacré aux
évolutions du contenu de leur travail. Dans un deuxième temps nous regarderons quelles sont
les caractéristiques de leur fonctionnement collectif. Enfin nous examinerons la GRH des
cadres.
2.2.1 Rationalisation cognitive du travail des cadres ?
Les évolutions du travail des cadres peuvent s'apparenter à une rationalisation cognitive
(Gadrey 1994b). Un mouvement accru de formalisation s'étend aux différents domaines de leur
activité, mouvement emprunt d'une forme de prescription. En même temps, les aptitudes à
l'abstraction et au gouvernement de la relation de service échappent à ce mouvement.
La formalisation du travail est vécu par certains comme une remise en cause de leur
autonomie antérieure, car elle s'apparente à une prescription sur les moyens à mettre en
oeuvre. Ce mouvement de formalisation s'est vraiment développé dans les années 92-93. Les
cadres opérationnels chez Restocol avaient traditionnellement des objectifs en termes de
résultats, qui assuraient la régulation globale de l'entreprise, et qui servaient aussi de critères à
l'évaluation et régissaient l'accès aux carrières Ils disposaient d'une autonomie importante quant
aux moyens à mettre en place pour atteindre ces résultats. De nombreux outils et documents
sont maintenant élaborés régissant leurs différents domaines d'intervention : gestion
(indicateurs à suivre), management et formation de leur personnel, et relationnel client6.
Une part de leur travail échappe cependant à cette rationalisation. Les choix, en matière
de temporalités, à l'intérieur de ce qui est prévu par les budgets et les objectifs prévisionnels,
sont laissés à la discrétion du cadre, et sont d'ailleurs une source importante de son autonomie.
La relation de service, part importante de ce travail des cadres opérationnels, comporte une
dimension d'interaction verbale irréductible et impropre à une formalisation complète
(Grosjean, Lacoste 1998). L'aptitude des RS à intervenir sur les différents registres de
l'interaction verbale avec un langage soutenu et une capacité à l'abstraction7 les différencie des
gérants, qui interviennent davantage sur le registre technique et sur un mode relationnel plus
proche du monde domestique. C'est la capacité des RS à gouverner cette relation qui justifie
leur rôle dans l'organisation et leur confère un statut de cadre.

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L'âge et le niveau de diplôme des cadres rencontrés déterminent les positons adoptées
face au changement. La multiplication de documents écrits, qui sont souvent à renvoyer au
siège, paraît parfois incongrue pour des cadres opérationnels surtout familier d'une
communication orale. Les termes employés par eux pour décrire cette évolution vont de
"l'accroissement de la paperasserie", à "une bureaucratisation de leurs métiers". D'autres le
ressentent comme une prescription accrue et une nouvelle forme de contrôle. Ces attitudes
sont surtout le fait des anciens, cadres issus du terrain, pour qui les cadres fonctionnels ne sont
pas légitimes. Ce passage est vu favorablement par les jeunes diplômés qui y voient une
professionnalisation des métiers.
Les cadres opérationnels se sentent quelque peu dépossédés de la dimension
stratégique, comme si "on ne leur faisait plus confiance", et qu'ils étaient relégués à un rôle
d'exécutant. Ce sentiment ne touche pas seulement les RS, il se propage à certains directeurs
de région, haut placés dans la hiérarchie et au fait des stratégies. A cela s'ajoute, dans certaines
régions, la baisse du train de vie dans un but de réduction des coûts, qui nécessite parfois de
négocier sur des notes de frais, ce qui est nouveau et peut représenter une attaque au privilège
de cadre.
Les gérants et quelques employés qualifiés se voient confiés de plus en plus de responsabilités.
Cet élargissement des responsabilités, en matière de gestion pour les employés qualifiés, et en
matière de développement pour les gérants, correspond à un contrat tacite, le travail
supplémentaire qui en résulte correspond à une formation qui sera récompensée par une
promotion. Les critères d'embauches des gérants augmentent, pour construire des filières de
promotion de gérants à cadre, et en amont de cuisinier (employé qualifié) à gérant. Les gérants
tendent ainsi à se rapprocher des cadres opérationnels.
2-2-3- Les collectifs de travail en région, entre recherche d'autonomie et
coopération.
Une forme de concurrence régit les rapports sociaux entre les cadres des
directions régionales, puisque l'évaluation repose sur les résultats budgétaires. Le
changement réside cependant dans la hausse des objectifs des cadres opérationnels, qui
reposent de moins en moins sur leur propres prévisions de développement, mais davantage sur
les objectifs fixés par les directeurs de filiale, dans une logique "top-down". L'atteinte des
objectifs donne droit à une prime d'objectif, dont le montant représente 10 à 15 % du salaire,
selon les années. La prime d'objectif est la marque de la reconnaissance de l'entreprise. La
hausse parfois considérable des objectifs fixés en dépit de leurs propres prévisions ne permet

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pas à tous de toucher la prime d'objectif, matériellement et symboliquement importante. Cette


dernière est aussi un indicateur de la compétence de la personne, et donc de ses possibilités
d'évolution dans l'entreprise.
La hausse des objectifs (et par là le durcissement du management) conduit dans
certaines régions à une forme de solidarité qui reste superficielle. Elle n'est le fruit que d'une
protestation éphémère, sans aucune forme de prolongement ni dans la durée ni dans des
engagements collectifs qui auraient pour but des formes de négociation avec les cadres
dirigeants.
De nouvelles formes de collaboration qui s'apparentent à des formes
organisationnelles de "mini-projets", c'est à dire de projets mis en place simultanément sur
différentes exploitations, en fonction de leurs configurations8 , associent responsables de
secteur et cadres fonctionnels, responsables ressources humaines ou responsables du
marketing. Elles sont en général le résultat de la volonté managériale d'un directeur régional, et
prennent corps quand elles sont relayées par les volontés de cadres opérationnels qui y voient
l'occasion d'échapper à la tyrannie des seuls résultats marchands. En effet des projets marketing
ou des réflexions sur les parcours professionnels des employés permettent aux responsables de
secteur de montrer ce qu'ils appellent la dimension qualitative de leur travail.
Cependant ces réalisations collectives se heurtent au manque de légitimité de jeunes
cadres fonctionnels auprès des anciens, et à une forte volonté d'autonomie de ces derniers,
corrélative d'un refus du regard extérieur qui pourrait émettre un jugement, qui, plus qu'un
jugement sur un travail, serait un jugement sur une personne. Le subjectif occupe une part
importante du travail d'un cadre, pour lequel il fait autant appel à des "ressources"
personnelles, qu'à des techniques professionnelles.
L'attitude du directeur régional, selon qu'il adopte un management par la contrainte
(Courpasson, 97), ou bien par l'accompagnement, et réciproquement l'attitude des responsables
de secteur, selon qu'ils acceptent ou non l'intrusion de responsables fonctionnels dans leur
domaine d'action permettent ou non le développement de ces formes de coopération. A un
niveau supérieur les directeurs de filiales peuvent jouer aussi ce rôle d'ajustement. Certains
directeurs de filiale sont plus ou moins ambitieux dans leurs résultats budgétaires, et peuvent
ainsi réajuster les objectifs fixés par le DG.

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

2.2.2 Le rapport à l'avenir et aux opportunités de carrière que propose


l'entreprise marqué par l'incertitude.
La GRH, en modelant les formes d'emploi et la durée dans le temps de ces emplois
détermine de manière importante le rapport à l'avenir des salariés. Chez les cadres, le rapport à
l'avenir s'est construit sur le modèle de la carrière (Castel, 1995). Les évolutions dans la GRH
de l'entreprise tendent à déstabiliser la relation d'emploi "classique" entre les cadres et
l'entreprise et se répercute sur le rapport à l'avenir de ces cadres.
Les modes de GRH suivent l'évolution des modèles de compétence : les compétences
reconnues par l'entreprise sont de plus en plus liées aux qualités personnelles et relationnelles
conférées à l'individu (Dubar, 1996). Les critères d'évaluation mettent en avant des qualités
personnelles et relationnelles : autonomie, responsabilité, esprit d'équipe ... La formation
continue se développe, par et dans l'entreprise. Les anciens systèmes de classification, issus de
la négociation collective, sont remplacés par des grilles de compétences ; les formules
d'individualisation des salaires se multiplient. Il en résulte une certaine opacité des critères
d'accès aux promotions. L'individualisation des variables d'emploi, en particulier des salaires
chez les cadres n'est pas nouvelle, mais semble s'exacerber.
De plus un lien implicite est fait par les recruteurs entre le niveau de diplôme et les
qualités personnelles et relationnelles. Ces changements se combinent avec un rajeunissement
de la population, plus diplômée que les générations précédentes. Les personnes diplômées de
l'enseignement supérieur gagnent en légitimité auprès des cadres dirigeants et supplantent peu à
peu les "encadrants". Il en résulte une concurrence accrue entre les anciens et les jeunes
diplômés. Il n'en reste pas moins que ces derniers subissent des conflits de légitimité sur le
terrain, les gérants reconnaissant davantage de compétences à quelqu'un d'expérience, issu du
terrain, qu'à un jeune, diplômé certes, mais peu au fait selon eux des réalités du terrain. Il
semblerait pour le moment que les passerelles entre les différentes catégories d'encadrement, de
cadre opérationnel à cadre fonctionnel par exemple, soient plus empruntées par les jeunes
diplômés.
La relation d'emploi classique chez les cadres paraît se fragiliser, les carrières
proposées, en rétribution d'un fort investissement, en particulier temporel, dans leur travail,
représentent toujours des opportunités d'avenir intéressantes, mais marquées par l'incertitude.
Les cadres anciens ont le sentiment que les opportunités de carrière se raréfient pour eux. Les
jeunes ont également intégré comme donnée l'incertitude quand à l'avenir. Eux aussi ne voient
pas toujours leurs attentes comblées, et développent un rapport opportuniste à l'entreprise. Ils

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

ne sont pas "mariés à l'entreprise" ; si celle ci leurs propose des opportunités intéressantes, ils
s'en saisiront, mais dans le cas contraire, ils n'hésiteront pas à partir.

2.3 La recomposition du rapport à l'entreprise : l'individualisation de


l'engagement ?
La notion de rapport à l'entreprise a été construite à partir des représentations, mais
aussi des liens matériels, que les salariés ont avec l'entreprise. C'est une notion purement
inductive, qui est née à la suite de nos enquêtes de terrain; nous avons pu recouper nos
enquêtes qualitatives par les résultats de l'enquête SOFRES, qui s'intéressait aux perceptions
des salariés sur le changement, sur leur avenir.... Ces représentations et ces liens matériels
recouvrent principalement trois dimensions :
u L'entreprise donne un travail à l'individu, dont le contenu se rapporte en partie à
l'activité de l'entreprise.
u L'entreprise est un tissu de relations sociales qui s'entrecroisent dans l'organisation.
u L'entreprise est une institution pourvoyeuse d'emplois, plus ou moins stables, plus ou
moins prometteurs de carrière.
Le rapport des salariés à l'entreprise est la position de l'individu envers ce qui spécifie
ces trois dimensions.
Le rapport à l'activité recouvre la valorisation et l'engagement dans le travail,
l'importance que le travail prend dans la réalisation personnelle de l'individu.
Le rapport au collectif désigne la satisfaction retirée des rapports établis avec autrui au
sein de l'entreprise, la façon dont il se sent intégré et reconnu dans le collectif de travail, et
l'importance qu'il y accorde.
Le rapport à l'avenir exprime la façon dont l'individu envisage l'avenir de son emploi
dans l'entreprise, qui est fonction notamment de la pérennité de cet emploi, et qui implique
l'anticipation d'une carrière.
Pour étudier les effets du changement sur le rapport à l'entreprise, il était nécessaire de
distinguer analythiquement ces trois dimensions, le changement recouvrant des politiques
plurielles, qui ont des effets propres. La distinction entre ces différentes dimensions permet de
qualifier les effets du changement. Notre hypothèse générale est que l'attitude des salariés
envers l'entreprise se construit sur leurs perceptions des politiques menées par cette dernière en
matière d'emploi, d'organisation du travail, de management, qui influencent chacune des
dimensions précedemment citées.

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

L'activité évolue dans le sens d'une rationalisation , qui prend des formes différentes
selon les catégories de populations étudiées. L'activité de travail des cadres et des gérants se
caractérise par un mouvement de formalisation , qui tend à modifier leurs pratiques dans les
domaines administratif, et relationnels avec le client, mais aussi en interne à l'entreprise.
L'activité de travail des gérants et des équipes de restauration voit se généraliser la
standardisation des prestations dans les domaines de la production.
Le collectif de travail s'inscrit moins dans la durée, et se cristallise moins dans une
identité commune. On trouve dans les perceptions des intéréssés le sentiment que les équipes
de travail constituées dans les restaurants semblent moins stables, du fait de la rotation du
personnel et de phénomènes de mobilité géographique et professionnelle. En fonction du mode
de management du directeur régional, le collectif en région se caractérise par la solidarité
spontanée (entraide ponctuelle) et des formes de collaboration naissantes, ou par un retrait et
une individualisation du projet.
La perception qu'ont les salariés de leur avenir dans l'entreprise se caractérise par
davantage d'incertitude. Les expressions de cette incertitude se manifestent différemment selon
les groupes d'âge, le niveau de diplôme, et les attentes en termes de carrière. On peut voir trois
tendances se développer selon ces groupes. Les plus anciens peuvent se sentir dépassés par
rapport aux attentes de leurs responsables hiérarchiques et aux nouvelles politiques. Ils ont
l'impression que les opportunités de carrière se raréfient pour eux. Les jeunes diplômés
envisagent le passage dans l'entreprise comme une première expérience formatrice, une carte
de visite, mais ne savent pas s'ils vont attacher leur parcours individuel à celui de l'entreprise.
Les cadres confirmés pour qui Restocol n'est pas la première expérience développent une
attitude opportuniste, qui lie le séjour dans l'entreprise aux bénéfices qui y sont attachés
(niveau de poste et de responsabilité, salaire).
Ces trois dimensions sont interdépendantes, dans le sens où elles intéragissent les unes
sur les autres. Le résultat des effets combinés du changement sur ces trois rapports se retrouve
dans l'évolution du rapport des salariés à l'entreprise. La personnalisation de l'entreprise naît de
la force et de la durée de l'engagement réciproque entre les salariés et l'entreprise. Or les
conditions d'un engagement fort et durable semblent moins présentes dans les perceptions des
salariés. La modification du rapport à l'entreprise dans le sens d'un retrait, une forme de
désengagement individuel du projet collectif de l'entreprise est la tendance d'évolution la plus
marquante.

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

3. Conclusion : perpectives envisagées et interrogations


diverses.
Nous avons essayé de montrer dans ce papier d'une part comment les conditions
institutionnelles de production de la recherche ont influencé notre travail, et d'autre part quel
cheminement nous avions suivi, de l'appropriation du changement, au rapport à l'entreprise.
Plusieurs pistes de recherche s'offrent encore à la réflexion.
Nous souhaitons maintenant intégrer la notion de rapport à l'entreprise, qui est une
réflexion qui se situe surtout au niveau de l'individu, dans une perspective plus large, qui
combinerait des niveaux "micro", "mezzo", et "macro". Trois niveaux d'analyse ont été
identifiés.
Le premier niveau est celui de la position de l'individu dans et vis à vis de
l'entreprise. Les effets du changement à ce niveau portent sur le désengagement individuel du
projet collectif de l'entreprise, et ont été interprétés à l'aide de la notion de rapport à
l'entreprise.
Un deuxième niveau d'analyse est celui de l'activité même de l'entreprise. La relation
de service prend de plus en plus d'importance par rapport au savoir-faire en restauration, et
cette évolution a des effets sur la façon de gouverner la relation de service, qui se
professionnalise. Il nous semble nécessaire de resituer l'évolution de Restocol par rapport aux
évolutions sectorielles de la restauration collective.
Le troisième niveau d'analyse est celui de la régulation globale de l'organisation. On
repère à ce niveau une transition d'un modèle culturel de type entrepreneuriat, reposant sur des
grandes aventures collectives, à un modèle "rationnel", qui repose sur une régulation par la
norme. Cette transition s'explique par un changement interne à l'entreprise, celui de la
normalisation poussée qui encadre l'activité. Elle s'explique également par la perméabilité de
l'entreprise à son environnement, dont une des caractéristiques est l'élévation du niveau de
diplôme de la population.
Un autre champ de réflexion que nous pourrions développer est celui de l'engagement.
La problématique de l'engagement du salarié pour le projet collectif de l'entreprise, quand le
contexte est marqué par l'incertitude, peut nous pousser à approfondir la littérature sur la
confiance. Nous pourrions aussi, dans cette même problématique, regarder dans d'autres
entreprises ce que produisent les mouvements de flexibilisation et de concentration sur
l'engagement des salariés. Autre problème : si nous voulons vérifier l'hypothèse, à laquelle nous

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

croyons, selon laquelle la perméabilité de l'entreprise à son environnement, en particulier par le


recrutement, notamment des jeunes diplômés, joue sur l'évolution du rapport à l'entreprise,
dans le sens de l'individualisation du projet par rapport au projet collectif de l'entreprise, quelle
méthodologie faut-il mettre en place ? Ne faut-il pas sortir de l'entreprise ? Ou bien la
comparaison au sein de Restocol des observations auprès des jeunes diplômés et celles menées
auprès des plus anciens et plus âgés suffit-elle ?
Nous pourrions également poursuivre la réflexion sur les effets en terme d'efficacité et
sur ce qui se dessine comme tendance en terme de modèle productif. En particulier quels effets
les modes de gestion de la main d'oeuvre au contact du client produisent sur la relation de
service ? Quelles caractéristiques l'évolution du modèle organisationnel observé chez Restocol
doit au service, et quelles caractéristiques doit-il à l'évolution d'une économie de marché.

Bibliographie
BERNOUX, La sociologie des entreprises, 1995
BOLTANSKI L. THEVENOT L. De la justification, Les économies de la
grandeur,collection Essais Gallimard, Paris, 1991
BONAMY J., MAY N., "Relation de service et relation d'emploi", La relation de
service au cœur de l'analyse économique, sous la direction de Louis REBOUD, L'Harmattan,
1997
BOUFFARTIGUE P. FERONI I."Rapport au travail et implication
gestionnaire.Enquête sur deux catégories de salariés : cadres infirmiers et ingénieurs.", Rapport
de fin de recherche pour le compte du CNRS (PIRTTEM) et du ministère du travail (DARES),
octobre 1995.
BOYER,R., « Comment émerge un nouveau système productif », in Jean-Pierre
DURAND, Vers un nouveau modèle productif ?, Syros, 1993
CASTEL R., Les métamorphoses de la question sociale, une chronique du salariat,
Fayard, 1995.
CORIAT,B., O.WEINSTEIN, Les nouvelles théories de l’entreprise, Le livre de
Poche, 1995
DONDEYNE C. "Eclatement des normes d'emploi et rapport à l'entreprise",
proposition de communication aux VIIèmes journées de sociologie du travail : Temps, statuts
et conditions de travail, 1999.
DUBAR C., La socialisation. Construction des identités sociales et professionnelles,
Colin, 1991
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du travail, 1996.
GADREY J., "La modernisation des services professionnels, Rationalisation industrielle
ou rationalisation professionnelle ?" Revue française de sociologie, 1994a.
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du travail, n°3, 1994b.
GAZIER B., Les stratégies des ressources humaines, La découverte, 1993.
GROSJEAN.M, LACOSTE.M, "L'oral et l'écrit dans les communications du travail ou
les illusions du tout écrit", Sociologie du travail, 1998.

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

LEST, "Les mutations des organisations productives et des modes de gestion", La


société salariale : crise et recompositions - projet scientifique du LEST pour la période 1996
- 1999, LEST-CNRS, Aix en Provence juin 1995.
SEGRESTIN D., « A propos du nouveau modèle productif : questions d’efficience,
questions de légitimité », Sociologie du travail, n°1, 1993.
VELTZ P., "Informatisation des industries manufacturières et intellectualisation de la
production", Sociologie du travail, n°1, 1986.
ZARIFIAN P., Travail et Communication : Essai sociologique sur le travail dans la
grande entreprise industrielle, Paris, PUF-Sociologie d'aujourd'hui, 1996.

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

Annexes.
1- La structure de l'entreprise
Nous présentons la structure de l'entreprise de son sommet, le comité de direction, à la
base, c'est à dire les unités de restauration qui sont situées chez le client.
Un comité de direction France dirige l'activité restauration et services de Restocol,
qui est découpée en trois filiales, qui correspondent à trois grands segments de clientèle : les
entreprises et les administrations, Le scolaire et les collectivités territoriales, et la santé.
Chacune des trois filiales a un comité de direction, coordonnés par le comité de
direction France, et des services fonctionnels au siège.
Pour chaque filiale, il y a des directions régionales, managées par un directeur
régional. Elles sont composées de cadres, responsables de secteurs, reponsable ressource
humaine de la région pour la filiale, et parfois un responsable marketing de la région pour la
filiale.
Chaque région est découpée en secteurs, supervisés par un responsable de secteur.
Chaque secteur regroupe des unités de restauration, qui sont situées chez le client,
qui sont pilotées par un gérant, qui manage une équipe de cuisiniers et d'employés de service
(plongeurs, et préparateurs des entrées froides et service).

2- les étapes de la recherche.

LES ÉTAPES DE LA RECHERCHE ENQUÊTES DE TERRAIN


(Chaque étape correspond à une réunion avec le comité de
recherche, et à un document écrit produit à l'occasion, indiqué en
italique.)
mars 97 Présentation de la demande de l'entreprise:
1 « Comprendre les modes d'appropriation du changement,
celui-ci étant une normalisation poussée dans un contexte
concurrentiel exacerbé où le client exerce une forte pression
sur les prix ».
mars 97 Compréhension de l'univers dans lequel évoluent les équipes et 15 j dans un restaurant à Paris,
2 de l'activité de production et de gestion des unités d'exploitation. filiale entreprise, OP
(observation participante)
15 j de stage à sa direction
régionale (DR).
avril 97 Les rôles de l'encadrement régional. 15 j dans un restaurant à
3 Marseille, OP, filiale santé,
15 j de stage en DR.
Mai juin Quelle vision du changement par l'encadrement, région et Entretiens auprès de
97 siège ? l’encadrement fonctionnel, siège
4 et régions, dans les trois filiales,
dans tous les services.
juillet 97 Une première lecture du changement sous l'angle des rapports 1 mois en DR entreprise à
5 de pouvoir. Nantes.
septembr Séminaire de thèse au LEST.
e 97 Changement organisationnel et rationalisation dans une
6 entreprise de services. communication discutée par Myriam
CAMPINOS (GIP Mutations industrielles).

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Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

Novembr L’évolution de la relation de service pour les cadres de direction 1 mois en DR de la filiale santé,
e97 régionale et les gérants. Marseille.
7
Janvierv9 Le changement : les politiques et les outils au service d’un
8 objectif de croissance ; l’appropriation du changement par les
8 acteurs locaux
Février Séminaire de thèse au LEST.
98 L’appropriation du changement organisationnel dans une
9 entreprise de restauration collective.
communication discutée par Christian THUDEROZ (CRISTO,
Grenoble).
Février L’appropriation du changement dans la filiale scolaire. 1 mois en DR de la filiale
98 Hypothèse intermédiaire : le changement se diffuse inégalement scolaire à Paris.
Mars 98 selon les filiales, mais on observe des logiques d’acteurs similaires
d’une filiale à l’autre chez l’encadrement et les agents de maîtrise :
10 la logique professionnelle et la logique client.
Avril 98 Rapport au comité de recherche de l’entreprise : 2 fois 15 jours sur 2 restaurants
Juin 98 L’articulation de trois systèmes de règles sur les restaurants : les de la filiale scolaire, Paris.
11 règles du siège, contenues dans les politiques de changement, les
règles professionnelles de l’équipe et les règles du client.

Août 98 Rapport au comité de recherche de l’entreprise : Enquête chiffrée à partir de


Sept. 98 L’évolution du rapport à l’entreprise. bilans sociaux et des Rapports
de l'Expert- Comptable au
12 Comité Central d'Entreprise
dans les trois filiales sur la
politique de ressource humaine.
Decembr Synthèse de la recherche France.
e 98
13
Mars 99 La perception du changement par le client : la Entretiens auprès de clients des
14 professionnalisation de la relation de service. trois filiales et de leurs
Projet de rapport final responsables de secteur.
Avril 99 préparation de la restitution finale auprès du comité de direction
France, et du président fondateur du groupe.
Mai 99 restitution finale auprès du comité de direction France, et du
président fondateur du groupe.

3 - La méthodologie suivie pendant la phase d'intégration.


Méthodologie pendant la phase d'intégration-
Dans un premier temps nous nous sommes familiarisée avec le fonctionnement des
unités de restauration et les directions régionales. Les premières observations ont porté sur
les caractéristiques socio-démographiques, l'attachement à l’entreprise, les compétences mises
en oeuvre dans l'activité. Dans un deuxième temps le but est devenu la découverte du
changement. Pour ce faire, des entretiens ont été mené auprès des cadres, au niveau du siège,
dans les directions des filiales, et en région. Les thèmes abordés étaient : le parcours de
l’individu avant et dans l’entreprise, l’historique de sa fonction et l’avenir supposé de cette

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

fonction selon la personne rencontrée, et enfin l’histoire de l’entreprise et ses évolutions


probables.

4 - Les modalités d'appropriation.

Signification du changement Traduction pratique Qui


Une recherche de transparence et Mise en place d'outils de Cadres dirigeants, contrôle de
d'homogénéisation des pratiques rationalisation et de formalisation des gestion, ressources humaines,
pratiques. marketing, directeurs régionaux
(DR).
Une volonté de contrôle et un Retrait de l'organisation DR, RS, gérants, directeurs de
manque de confiance. (désengagement) cuisines centrales.
neutralité, utilisation des outils quand
ils ne gênent pas l'activité telle que la
conçoit l'acteur.
Une recherche de réduction des coûts Réduction des coûts Cadres dirigeants, contrôle de
nécessaire. gestion, ressources humaines, service
achat, directeurs régionaux, RS,
gérants, cuisiniers.
Une réduction des coûts parfois Réduction des coûts appliquée, mais RS, directeurs de cuisines centrales,
source d'une baisse de qualité. rejet de la politique dans le discours. gérants, cuisiniers.

Une bureaucratisation synonyme de Sous-utilisation ou utilisation RS, gérants


"paperasserie" mécanique des documents cadres anciens, dirigeants et RS, DR

Une bureaucratisation synonyme


d'une plus mauvaise communication
Une professionalisation nécessaire, Rationalisation du travail, Contrôle de gestion, DR,
une aide opérationnelle formalisation des pratiques. responsables marketing, responsables
le passage d'une culture orale à une ressources humaines, RS, gérants
culture écrite.

1
Dès la signature d'un premier contrat (CDD de trois mois pour le doctorant avant la mise en place de la convention
CIFRE), le travail de terrain a commencé, en mars dans un restaurant, en avril dans des directions régionales, et a
donné lieu à une première présentation au comité de recherche début mai 97.
2
Ces situations se sont rencontrées malheureusement à plusieurs reprises, et je ne m'en apercevais qu'une fois sur
place, lorsque j'avais gagné la confiance de mes interlocuteurs et qu'ils me confiaient leur sentiment quant à leur
propre position dans l'entreprise. Il était alors trop tard pour changer de site. J'aurais mis la personne en position
encore plus délicate. Les sites étaient choisis au départ sur des critères gégraphiques, sur des critères de taille, et
parfois en fonction de la personnalité du directeur restocol sur place, et ce dans le but que je sois bien accueillie. Ne
connaissant pas tous les sites et encore moins les histoires du personnel sur place, je ne pouvais guère anticiper ces
problèmes, ni en discuter avec le comité de recherche au grand jour, car cela aurait été révéler ou renforcer des
informations sur les positions délicates des enquêtés, ce qui était inconcevable.
3
J'ai fait face à des situations insurmontables, notamment une des personnes du comité de recherche était tellement
dans une volonté de personnaliser les informations et les résultats de terrain, que lorsque mon récit ne lui permettait
guère cela, elle se lançait dans des projections, et identifiait dans l'erreur, ce qui menaçait quand même une
personne, mais pas celle que j'avais repéré. Il n'y a jamais eu, à ma connaissance, de conséquences liées à mon
passage sur un site.
4
En plus des prestations de self, c'est à dire de production et service des repas quotidiens, il arrive que le client
demande au gérant des prestations annexes, qui sont souvent des buffets ou des repas de direction, plus
prestigieux et qui échappent à la standardisation.
5
La politique marketing est tournée vers le développement de l'offre, notamment en matière de restauration, qui se
traduit par un choix entre plusieurs plats, proposés dans des stands. Chaque cuisinier est responsable d'un stand.
Cette responsabilisation n'est pour le moment qu'informelle, mais elle a un effet sur les promotions. Le projet à
l'étude est que cette responsabilisation devienne financière.

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Christèle DONDEYNE, LEST-CNRS
Changement organisationnel et recomposition du rapport à l'entreprise, mars 99, pour l'UDST.

6
Par exemple des plans d'action marketing définissent des guides de bonne pratique pour gouverner le relationnel
client, qui vont jusqu'à préciser à quel moment il faut le rappeler, combien de document il faut lui envoyer, sous
quelle forme ... Les entretiens annuels d'évaluation que les cadres doivent réaliser avec leurs gérants sont de plus en
plus élaborés.
De plus, les services du siège demandent souvent par écrit, par notes, des renseignements sur une exploitation, ou
sur le personnel, à des fins d'analyse, pour construire les indicateurs de pilotage de l'activité.
7
L'usager ou le client ajuste sa demande en fonction de ce qu'il perçoit des caractéristiques sociales de l'agent, ou
de l'opinion qu'il a de l'organisation prestataire. Le RS joue ce rôle de constact avec une autre entreprise. "Un RS
doit avoir un certain niveau culturel pour pouvoir discuter avec un directeur d'établissement scolaire" (DRH scolaire).
Les caractéristiques sociales et/ou les compétences relationnelles sont donc primordiales, mais au delà il faut pouvoir
transformer le problème ou les questions du client en cas, c'est à dire les typifier, les regrouper avec d'autres
problèmes similaires et mobiliser des méthodes ou des routines pour les résoudre (Gadrey, 1994b).
8
Un responsable marketing a des projets de développement sur différentes exploitations simultanément, et est ainsi
amené à travailler avec plusieurs responsables de secteur en même temps. Le responsable marketing travaille
généralement sur des aménagements du restaurant, qui sont bien sûr facturés au client. Ces aménagements sont
donc réalisés sur des restaurants qui s'y prêtent, et surtout auprès des clients qui y sont favorables, ce qui est
résumé sous le terme "configuration", sous entendu des relations avec le client et de l'architecture du restaurant.

22
1. L'INSCRIPTION DE LA RECHERCHE DANS UN CONTEXTE INSTITUTIONNEL,
QUELLES CONSÉQUENCES SUR LE CHOIX DE L'OBJET ET DE LA
MÉTHODOLOGIE ? 1

1.1 Le dispositif CIFRE : une co-production de la recherche. 1

1.2 Mise en forme des résultats et conditions institutionnelles : L'enracinement des


résultats dans les observations empiriques. 3

1.3 Le rapport au terrain et les conditions institutionnelles : neutraliser la relation


d'enquête et maîtriser les effets possibles sur les enquêtés. 4

2. LE DÉMÉLÂGE DU FIL D'ARIANNE, OU LES DÉPLACEMENTS DE LA


PROBLÉMATIQUE EN FONCTION DES VARIABLES EXPLICATIVES
IDENTIFIÉES. 6

2.1 La découverte de l'entreprise, le changement et son appropriation. 7

2.2 L'encadrement comme acteur central du changement. 9


2.2.1 Rationalisation cognitive du travail des cadres ? 10
2.2.2 Les collectifs de travail en région, entre recherche d'autonomie et coopération. 11
2.2.3 Le rapport à l'avenir et aux opportunités de carrière que propose l'entreprise marqué
par l'incertitude. 13

2.3 La recomposition du rapport à l'entreprise : l'individualisation de l'engagement ?14

3. CONCLUSIONS : PERPECTIVES ENVISAGÉES ET INTERROGATIONS


DIVERSES. 16

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