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La petit’esclave
et autres touch’
La petit’esclave
Une petite fille
Assise sur une grosse pierre
Attend une montagne
Un serpent vert
Traverse la route
Rouge
Qui sommes-nous ?
Où allons-nous ?
Les loups se déguisent en brebis
J’ai soif
J’ai faim
Lave-toi les mains!
7
Le chemin de l’école
Passe par une rue
A sens unique
Lèvres pincées
Jambes serrées
Une maîtresse enfante à nouveau
Vieux livres
Trop sacrés
Ils sentent l’urine
8
Mains liées
On lui raconte des histoires
D’esclaves
Elle a mal
Aux mains surtout
On lui caresse ses petits seins
Malade au lit
On lui raconte des histoires
De théâtre
Elle fuit
Un prince la poursuit
Les prisons se vident
9
La nuit des noces
Elle remplace sa vieille chandelle
Par une lanterne, magique
Nue
Elle traverse la route
Infestée de serpents
Un livre ouvert
Les poings fermés
Elle relit son enfance
Elle regarde
Au loin une montagne
Blanche comme une mariée
10
Parfum d’Asie
Un visage d’enfant
Elle pince mon sexe
Des larmes coulent de mes yeux
Méo, me dit-elle
Ou presque
Et je caresse son squelette
Le bol vide
Elle m’offre
Tous ses grains de beauté
13
Vierges encore
Elles dévorent des oeufs
Fécondés
Sexe
Après un repas piquant
Il refuse de faire la sieste
Je me couche
Elle se glisse dans mes draps
Comme un serpent
Je me lève à peine
Accroupie déjà
Elle me verse du thé
14
Les ruines d’un temple
Peut-être
Elle écarte ses jambes et pisse
Rouge de colère
Un bouddha me sourit
Blanc
Femme voilée
Elle traverse le village
Comme un ange de la mort
Cimetière abandonné
Un mort entre en voiture
Un ange sort en courant
15
Femme pudique
Dans une église désaffectée
Elle me montre ses cuisses
toutes bleues
Bouddha, en peluche
Shiva, en pluche
Un touriste se perd dans le dictionnaire
Moralité
Il cherche une page blanche
Dans un livre noir de préjugés
16
Le bouddha bleu
Le roi est mort
Vive la reine
Nue et généreuse
19
Qui es-tu ?
Son silence est plus réfléchissant
Qu’un miroir
Dieu, où es-tu ?
Cria le désespéré
En espérant
Femme légère
Elle s’envole
En levant sa jambe, gauche
20
Prostituées
Elles protègent l’humanité
Du bavardage des prêtres
Un marchand de glaces
Rêve de mettre en boîte(s)
Un iceberg
21
Trop savoir
Ne mène qu’au savoir
Un ignorant sourit
Le désert
La soif
Tous les je se mélangent au sable
Il cherchait la réponse
(à toutes ses questions)
Il découvre le bouddha bleu
Dans un ciel bleu
22
Lettres birmanes
Yangon, la nuit
La pagode Shedagon, toute illuminée
Flirt avec le ciel, en attendant
Assoiffés de Vérité
Ils se nourrissent d’images
Chargées de légendes
Un bouddha nu
Illumine les yeux d’un bouddha
Couvert de feuilles d’or
25
Une femme et son enfant
Un bouddha lointain
Accroché à un ciel souriant
26
Un longyi propre, autour de la taille
Quelques traces de thanaka, au visage
Il et elle se sont faits beaux,
l’un pour l’autre
Mandalay
Ils frappent l’or
Comme des horloges sans réveil
27
Deux (jeunes) filles me poussent
à réagir
Comme père et comme amant
Afin d’atteindre le Mont Popa
Bagan
La huitième merveille du monde
Oubliée, selon ses voeux
28
Au revoir Cambodge
Angkor, c’est beau
Angkor, c’est encore
Le paradis est dans la jungle
31
A travers ses yeux noirs
Je crois voir le fond de son âme
Angkor et encore
32
J’écoute mon guide
Un dictionnaire simplifié
Un moulin à prières
Je ne vois rien
J’entends l’histoire
Bavarde et sourde à la fois
33
Dans un temple englouti
par des racines
Le son de cent mille clochettes
me propulse hors de moi
Ce sont les cigales, me dit le guide
Au revoir Cambodge !
Angkor, c’est beau
Angkor, c’est encore
34
Lettres de Russie
Ils vont, ils viennent
Comme des lions en cage
Dompteur, où es-tu ?
Russie !
Serais-tu trop belle
Sans tes crottes ?
37
Lénine est mort
Une deuxième fois
Remplacé par la foi
Formules et formulaires
Ont mathématisé l’homme
Limitant sa vision du vide
Vision du vide ?
Les frontières invisibles
N’irritent que les aveugles
38
BABOUCHKA
Je suis la mère
De ta mère
Je suis l’eau
Le lait de ta mère
Coule dans ton sang
Je coule dans tes yeux
Le monde t’attend
En silence
Avec ses silences
39
Morts et vivants
Joies et peines
Oiseaux de passage
Ecoute-moi, regarde-moi
Je suis ta babouchka
Je suis ton drapeau
Babouchka
Tes larmes, même sèches
Rendent jalouse la Néva
40
Femme(s)
Elle m’aspira
Elle me rejeta
Puis elle m’embrassa pour la vie
Au coucher du soleil
Le lait de son sein
Séchait sur mes lèvres
Elle me sourit
Je baissai les yeux
Un train s’arrêta
43
Elle prit mon sexe
Dans sa bouche glacée
Un volcan se réveilla
Bangkok
Elles avalent des sexes
Pour nourrir des bouddhas
Laossienne
Elle me proposa le mariage
Le corps de sa meilleure amie en dot
Saïgon, la nuit
Elle se glissa dans mon lit
Pour fuir la poussière
44
Prostituée, la semaine
Nonne, le dimanche
Elle m’offrit du vin
et toutes ses hosties
Trop blonde
Elle s’endormait
Un psyché à la main
Un avortement
Une fausse couche
Enceinte, elle attendait un saint
Jouir
Ecrire
Elle ne mourait que dans ses romans
45
Nue, une fleur à la main
Même de marbre
La sueur sur mon front
Un fils
Une fille
Elle m’offrit le ciel et la terre
Sibérienne
Elle caresse la neige
Un ours surgit, en peluche
Corsage dégrafé
Sein généreux
Une femme nourrit l’homme
46
Lettre clandestine
Terrible lumière
Terrible coeur
Un corps se lève
Ouvre-moi ta porte
Ouvre toutes les portes
Je brûle d’impatience
49
J’ai rêvé de toi
Cette nuit
C’était demain
Une femme
Un homme
La tempête à l’horizon
Tu es nue
Je suis désir
Le plaisir veut tout
50
Tes mains me cherchent
Dans le souvenir
D’un instant inoubliable
Le premier baiser
La dernière caresse
Une mort injuste
Qui es-tu ?
Qui suis-je ?
Nous sommes l’autre
51
Ouvre-moi ta porte
Ouvre toutes les portes
Le feu nous appelle
Je suis ta chose
Oublie-toi
De clandestin à clandestine
Terrible coeur
Terrible corps
Le soleil se couche
52
Cinéma
Pour la première fois
Une lumière timide
Ose contrer l’obscurité
Un train passe
Un homme arrose
L’avenir
Histoires muettes
Un enfant entre dans un jardin
D’enfants pour adultes
Rires
Un condamné à mort
Renaît à reculant
55
Noir et blanc
Ils rêvent d’une vie
Riche en couleur
Production
Un marchand de sable se déclare
Marchand de rêve(s)
Acteur, actrice
Ils passent par le mensonge
Pour atteindre la vérité
Etoiles
Un moine bouddhiste regarde le ciel
Et sourit
56
Pornographie
Une femme pudique se fait visible
A l’oeil nu
Auteur
Un homme pauvre insulte
Des hommes riches
Poésie
Tel un touch’ que voici
Une fleur annonce des jardins
Vérité
Un artiste transforme des mots
En images
57
T.V.
Il engendre un nain
Assoiffé de publicité
Communication(s)
Un journaliste vend des miettes
Au prix du pain
D.V.
Une porte s’ouvre
Sur un avenir portable
58
L’ange volé
Voici un rêve
Mon rêve, d’enfant peut-être
Etre enfin
Dimanche
Je viens de mourir
Je viens de naître
61
Une femme chante
Un enfant (l’) écoute
Ils rêvent ensemble
Malade au lit
Il découvre le visage de son père
Semblable à celui d’une madone
L’école est là
Ils sont tous là
Sauf ma mère et mon père
62
Les loups d’un côté
Les moutons de l’autre
Les bergers, où sont-ils ?
63
Un soldat rentre au pays
Un homme blessé découvre
son enfance
Une fillette lui sourit
64
L’horloge sauvage
Une horloge, dite sauvage
Sonne minuit
A midi
Hiver, hiver !
J’attends le printemps
Pour craindre l’automne
Eté, été !
C’est encore trop tôt
Pour pleurer le printemps
67
Marin solitaire
Jour de tempête
Il s’accroche à son mât
68
Femme voilée
Elle jouissait davantage
Au moindre regard
Il remonte le chemin
Il remonte le temps
Une femme nue descend,
en courant vers lui
69
A la sortie d’un église
Un très vieil homme attend
Son arrière-grand-père
Sage, le jour
Sauvage, la nuit
Un homme écrit ses mémoires
sur le sable
70
Herbe
Elle marchait
Sur l’herbe fraîche
Pieds nus
Vierge accroupie
Elle caressa l’herbe
Puis l’arrosa d’urine
73
Nous fîmes l’amour
Sur l’herbe verte
Ecrasant tout
Après la pluie
L’herbe se parfume
et s’offre à nouveau
A sa terre fidèle
Amoureux en herbe
Ils se sont évaporés
A la rosée du matin
74
Maison abandonnée
Herbes en liberté
Des fantômes se retrouvent
Ailleurs
L’herbe a souvent la couleur
D’une émeraude bien taillée
75
Ils fument de l’herbe
Faute de tabac
Faute de tout
76
Quatre
Soleils d’hiver
Soleils d’été
Les brûlures de toute une vie
brillent dans les yeux
Un jour, un homme
Une nuit, une femme
Aujourd’hui est déjà demain
On se lève
On se lave
Le combat recommence
On se lave
On se couche
Le combat redevient rêve
79
Un amour fou
Un fou d’amour
Les magazines se multiplient
Lèvres rouges
Visage poudré
Une femme a fui
Des amulettes
Des allumettes
Un temple se construit
80
Rien à dire
Tout à faire
L’autorité s’installe
La lune, le jour
Le soleil, la nuit
Dieu est en train de créer
Le Beau, le Vide
Et l’Eternité
Un homme imagine la vie
81
On a soif
On a faim
On est encore plus seul au monde
Mariage blanc
Misère noire
La couleur est dans les yeux
82
Seize
Flashes
Flash des flashes
Un reporter est mort
Un homme debout
Une femme couchée
Dieu cherche une chaise
Du sang
Des larmes
Un soldat lave ses médailles
85
Mère
Mer
Un enfant verse des larmes
Avoir
Être
Un enfant se prépare à partir
Des mots
Des discours
Un politicien recule
Des mots
Sur le sable
Glissent dans l’oubli
86
Debout, assis
Debout, couché
La voie du maître
Une femme
Au coin du feu
Les années passent
Un homme
Au coin d’une rue
Rêve d’un ange
Tic
Tac
Le silence se déguise
87
La soif
La faim
La mort sourit-elle à la vie ?
Il n’est rien
Elle est tout pour lui
Dieu se repose
Des riches
Des pauvres
Un politicien hésite
Quatre, huit
Seize, trente-deux
Où est la voie du juste milieu ?
88
Buvard
Un ange et une ombre vivaient heureux
Ensemble sur un nuage
Le temps d’un buvard
Papier bavard ?
Un démon passe et repasse sans cesse
De buvard en buvard
91
Elle se bat contre un homme
Puis elle pisse tout son sang
Bleu
92
Elle était nue
Parfois trop nue
Sur mon buvard
Il conserve tout
Tout de lui
Sa sueur comme son sperme
93
R comme Russie
Une lettre abandonnée
Retrouve sa personnalité
Fatigué d’écrire
Il posa sa plume
Sur un ciel vert
Réussite
Un homme tire un trait
D’une tache à l’autre
La Vérité
Un écrivain absorbe l’encre
De son buvard
94
Le chemin
interminable
Chemin interminable
Je pars à l’aube
Le crépuscule m’attend
Il se compliqua la vie
Pour piéger la mort
Le temps de respirer
97
Lisons les images
Comme un roman
D’amour
Osons regarder
Un sexe au repos
Comme un chat qui dort
Les artistes
Qui vomissent leur art
Me donnent goût à la vie
98
Les discours que l’on accepte
Des fils de fer barbelés
Que l’on déroule autour de soi
La Vérité ?
Un mot
Qui cache bien des mensonges
Les étiquettes ?
Elles se décollent
Faute de trop de salive
Tout jugement
Une belle esquisse
En fil de fer barbelé
99
L’homme réclame toujours
Ce qu’il a connu
Même le pire, la guerre
Le facteur arrive !
Je crains le pire
L’annonce de ma mort
Le vent souffle
Dieu est un souffleur
Et non un comédien
100
© Editions Le Stylophile, 2008.