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Groupe des Elus Verts

et apparentés

Bordeaux, le 13 mars 2009

Mesdames et Messieurs les


Maires,
Messieurs les Présidents de
Syndicats Intercommunaux de
distribution de l’eau potable en
Gironde

Objet : Pour une politique départementale de l’eau en Gironde

Mesdames et Messieurs les Maires, Mesdames et Messieurs les Présidents,

En mai 2004, nous vous avions communiqué une cartographie du prix du service
de l’eau en Gironde sur la base du prix du service de l’eau 2003 (Source : Agence
de l’Eau Adour Garonne). Nous avions alors mis en avant les disparités de prix sur
notre département et tiré un certain nombre de constats qui ont pour ainsi dire
peu évolué voire qui se sont dégradés. Nous avions indiqué que la situation liée à
la dégradation des nappes profondes et les préconisations du SAGE (économiser
30 millions de m3 par an d’ici 2013) exigeaient une approche globale et solidaire
de la politique de l’eau sur le département.

Depuis, la situation des nappes s’est plutôt détériorée, comme en témoignent les
rapports du BRGM. Ce n’est plus seulement la nappe Eocène qui court un risque
mais également celle de l’Oligocène. L’ensemble des collectivités de Gironde est
concerné car la situation écologique de l’eau dépend essentiellement de la
gestion future que nous en ferons. La crise écologique liée aux usages de l’eau et
aux pollutions diffuses - engrais, pesticides est présente en Gironde. Les menaces
sur l’Estuaire, les Grands Lacs Médocains et les cours d’eau sont une réalité.

Avec la canicule et la sécheresse, nous avons pu toucher du doigt combien ce


bien doit être géré dans l’intérêt général et non dans l’intérêt de quelques
sociétés multinationales. L’eau n’est pas seulement un combat pour la nature,
c’est aussi un combat pour l’être humain.
________________________________________________________________________
Groupe des Verts de la Communauté Urbaine de Bordeaux
Esplanade Charles de Gaulle - 33076 Bordeaux cedex
Tel : 05 56 99 89 34 - Télécopie : 05 56 99 89 01 - Courriel : dnicolas@cu-bordeaux.fr
Conformément aux exigences de la loi sur l´eau de décembre 2006, la révision du
SAGE Nappes profondes est en cours. La nouvelle version du SAGE, qui doit être
approuvée avant le 31 décembre 2011, sera opposable aux tiers. Les élus Verts
souhaitent profiter de cette période où des décisions sur l’avenir de ce bien
commun seront prises pour porter publiquement le débat sur la politique de l’eau
en Gironde auprès des citoyens et des acteurs de l’eau.

La carte de l’eau

Vous trouverez donc ci- joint deux cartes :


- une carte sur le prix de l’alimentation en eau potable (pour une
consommation de 120 m3 hors taxes et redevances) qui concerne toutes
les collectivités et qui permet donc une analyse exhaustive,
- une carte sur le prix global du service de l’eau, c'est à dire
assainissement compris, (avec une note explicative, notamment pour
l’assainissement, qui tient compte des 235 communes du département
qui ont un assainissement individuel, ce qui influe sur la nature du
service final et le prix de l’eau total).

Ces cartes sont complétées par des histogrammes qui permettent d’avoir une
vision juste de la population et du nombre de collectivités concernées par telle ou
telle donnée.

Vous pourrez constater :


- un nombre élevé de collectivités ou de syndicats en charge de la
distribution de l’eau, 112, soit une très grande dispersion ;
- L’absence de prix unique de l’eau en Gironde, ceci n’étant pas bien sûr
une anomalie mais on constate une variabilité des prix avec des écarts
importants.
- L’absence de deux prix identiques, alors que la nature de la ressource
est quasiment la même (nappes profondes) et que les conditions de
production sont assez semblables (hormis le Sud du Bassin d'Arcachon
qui traite de l’eau superficielle, ce qui est plus onéreux)
- l'absence de corrélation à priori entre des similitudes ou des écarts de
prix et des logiques géographiques ou de continuité territoriale ;
- les prix les plus bas peuvent côtoyer des prix très hauts quel que soit le
territoire ;
- les aides éventuelles apportées par le Conseil Général à travers le fonds
d’harmonisation du prix de l’eau ne suffisent pas à corriger les
disparités, loin de là.

Il existe en partie bien sûr des explications logiques à ces différences. Tout
d’abord, le prix de l’eau comprend une partie déterminée par les choix
d’investissements et de gestion des syndicats et des collectivités. Les prix les
plus bas ne représentent pas nécessairement ceux qui font le plus d’effort ou ont
une meilleure gestion. Avant de parler prix, l’eau a un coût qui comprend des
investissements nécessaires au bon fonctionnement du réseau, à son
renouvellement, à la qualité et au niveau de service rendu, ainsi que leurs
amortissements, ces éléments se répercutant inévitablement au final sur le prix
payé par l’usager. D’autre part, la nature de la collectivité, comme sa densité de
population ou l’étalement urbain, influent sur le linéaire de réseau, sa rentabilité
et sa fiabilité, fuites, casses, etc.
Cependant, cette disparité des prix est opaque pour l’usager. Elle ne facilite pas
la compréhension de la politique de l’eau en Gironde, notamment celle liée aux
enjeux du SAGE Nappes profondes.

Ce manque de lisibilité est renforcé à notre sens par la prédominance historique


très importante de la société Lyonnaise des Eaux dans la gestion des contrats
parmi lesquels le contrat de la CUB (où le prix de l’eau est le plus élevé parmi les
grandes métropoles). Avec 1,06 million d’usagers desservis sur un total de 1,4
million, soit 75 % des abonnés et la moitié des contrats, cette société occupe une
position de domination et d’influence non négligeable.

 Le prix du service de l’eau en question

A partir de cet état des lieux, nous avons effectué un calcul du prix moyen de
l’alimentation en eau potable dans notre département par système de gestion,
en pondérant à partir de la population concernée (sur la base du dernier
recensement de l’INSEE). Cette analyse permet d’avoir une vision juste et précise
du prix moyen à partir du poids de la population par réseau de distribution et
évite les distorsions entre les petites communes et les agglomérations.

Ce calcul a été effectué également avec les mêmes sources sur le département
des Landes, département qui a entrepris depuis plusieurs années une politique
originale en matière de gestion publique de l’eau en aidant particulièrement les
collectivités en régie et en menant une bataille juridique contre les trois
entreprises privées historiques. Comme en Gironde, l'essentiel de l'eau potable
est issue des nappes souterraines.

Moyenne des prix de l’alimentation en eau potable en Gironde pondérée


par la population
Gironde 1.33 €
Gironde- hors LDEF 1.23 €
LDEF 1.36 €
Privé 1.35 €
Régies 1.07 €

Moyenne des prix de l’alimentation en eau potable dans les Landes


pondérée par la population
Landes : 1.17 €
En 2006, 162 communes des Landes sur 331 dépendaient d’une régie municipale
ou syndicale pour l’alimentation en eau potable (contre 62 en 1994). La
Lyonnaise des Eaux France représente 10% des abonnés landais et présente un
prix de l’eau de 1.44 €.
C’est une différence de près de 13 % du prix moyen entre les deux
départements.

Au sein même de la Gironde, on constate également des différences importantes.


Les prix pratiqués par la société LDEF sont supérieurs de 8 % au prix
moyen du département (dont l’influence sur le prix moyen global est
importante dans la mesure où cette société possède la moitié des contrats et
dessert 75 % de la population) et de 22 % au prix moyen de l’eau distribuée
en régie publique (seulement au nombre de 19 en Gironde). On observe
également une différence de 8 % sur l’assainissement avec les régies.

Calculs de moyenne prix total (sans les assainissements autonomes)


pondérée par la population
Gironde 3.4524 €
LDEF 3.4449 €
Privé 3.4715 €
Régies 3.1564 €

Ainsi la nature du système de gestion choisi a une influence certaine sur


le prix de l’eau. Le prix du service de l’eau distribuée en Régie est moins
élevé pour l’usager.

Malgré les travaux entrepris par la Commission Locale de l’Eau et la prise de


conscience qui en résulte, force est de constater que face à la problématique de
l’eau, le nombre de contrats en Gironde, l’atomisation et la diversité des prix et
des situations qui en découlent constituent un handicap supplémentaire à la
solidarité globale nécessaire sur ce dossier.

 Il y a urgence à faire avancer ce dossier.

Nous sommes confrontés à deux difficultés :

- celle qui concerne le manque de lisibilité des services de l’eau pour


l’usager avec des profits importants dégagés par le privé,
- celle qui consiste à résoudre la sécurité de l’alimentation en eau potable
par la préservation écologique de nos ressources.

Deux logiques s’affrontent. Comment expliquer au citoyen qu’il faut faire des
efforts pour préserver la ressource alors que le système profite principalement à
un monopole privé ?

Afin d’éviter l’altération définitive des nappes, l’atteinte des objectifs du SAGE
nappes profondes nécessitera d’ici 2013 des investissements lourds, estimés à 80
millions d’euros pour rechercher et exploiter de nouvelles ressources de
substitution. Ce sont des enjeux considérables et il y a donc urgence à
faire avancer ce dossier.

De plus, un certain nombre de questions se posent :


- Qui va décider de ces investissements et qui va les gérer ?
- Est ce chaque syndicat qui interviendra pour la part qui lui reviendra
selon la chance qu’il se situe ou pas sur une zone ou les nappes sont
déficitaires ?
- Y aura-t-il une solidarité départementale et un prix unique de l’eau
substituée (ce que nous défendons)?
- Qui va financer : une taxe sur le prix de l’eau ? la puissance publique
seule ? ou bien les délégataires seront-ils mis à contribution ?
- Souhaite-t-on une maîtrise publique des travaux ou un recours au privé
avec les conséquences tarifaires qui en découleront ?
- Comment harmoniser le prix de l’eau en Gironde alors qu’il existe un
fonds qui est sans effet?
- A l’heure de l'élaboration de nouveaux SCOT, y aura-t-il des restrictions
au développement de l'urbanisme liées à la ressource en eau ?

Ces questions méritent d’être posées publiquement. C’est le sens de notre


courrier. La politique de l’eau dans son ensemble et la situation des nappes
profondes, déficitaires, exigent à notre sens une gestion et un contrôle public des
investissements nécessaires mais également une politique de solidarité pensée
et élaborée à l’échelle départementale.

Même si la distribution de l’eau est une compétence communale et donc


forcément morcelée, par rapport à un service somme toute relativement
équivalent avec des problématiques hydrologiques très voisines voir identiques,
force est de constater l’inégalité du citoyen usager au regard du prix de l’eau.
Cette inégalité est peu compatible avec un accès égal à cette ressource vitale.

Nous souhaitons que la prise de conscience envers le développement durable


dont tout à chacun se réclame aujourd’hui se traduise concrètement, notamment
par une politique de l’eau qui privilégie la gestion publique, des prix
harmonisés et une protection efficace de la ressource.

Veuillez croire, Mesdames et Messieurs les Maires, Mesdames et Messieurs les


Présidents, en l’assurance de notre considération distinguée.

Gérard CHAUSSET,
Conseiller Communautaire
Président du Groupe Vert à la
CUB

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