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Hawaii d’ersatz et de l’Orient ?

Faute de tentations d’aller quelque part pour varier et enrichir


l’expérience vitale, on subit des bougeottes de constant surtout
quand une saison est en train de changer à l’autre. Certains de
nous sommes semblables aux oiseaux de migration automnale en
éployant et battrant instinctivement nos ailes, dégourdissant nos
muscles et nous ébrouant d’excitation à l’appel de vol imminent. La
force motrice de notre demande n’est qu’une curiosité incurable et
l’effroi de l’atonie quotidienne. L’envie de fuite ne s’enrobe jamais
en tuile de silence mais plutôt elle est nue, évidente dans les
gestes et le regard de lointain dans ces lueurs des yeux qui ne
faillent pas trahir les tréfonds de l’âme rétive. On sent lui-meme
écroué au cachot de claustrophobie à la fourmilière de Hongkong
où l’humanité est épaisse, écrasante, agaçante, aveulissant à
l’entrain et abêtissant.
Ma destination dernière, le nord du Japon, où je me suis gavé
voracement du paysage et duquel je démure toujours épris, était
encore frais sur mon cerveau lorsqu’en août j’ai achoppé sur un
avertissement criant issu de l’agence visant de séduire ses clients
avec ces promesses attigées d’aubaine après la ruée estivale, un
piètre truc depuis le coût coté actuellement ne changeait à peine
que cinq pour cent en baisse. Un tel débours s’alourdit maintenant
à cause des chutes boursières et de la récession qui sévit partout.
La brochure entre mes mains prônait des vacances d’exotique pour
la période de l’équinoxe et captant ceux prodigues qui dépensaient
plus et pensaient moins des conséquences. J’avoue maintenant que
ce désir est autant plus difficile de résister pour quelqu’un qui
emboîte à l’appel des larges étranges et flanche chaque fois à
retenir aux bois ce juron d’ennui – cette frousse corrosif, incolore,
inodore et pourtant puissant comme cyanure. L’antidote vient dans
la forme d’une aventure ou celle d’une nuit de bringues. J’opte
toujours à la première et repousse la seconde, convaincu-moi que
l’argent épargné en pratique de l’abstention soit meilleur misé en
vacances et dévié au futur achet d’un bidule ou deux. Ce besoin en
moi d’attiser l’instinct de vadrouiller me semble une force pérenne
et indomptable, une force qui m’influe et qui me définit au noyau.
Le troubadour de rock américain Bruce Springsteen l’exprimait le
meilleur en tonnant, « Bébé, nous sommes nés à courir, » un cri qui
reconnait que certains auront toujours cette quête insatiable pour
fouiller l’autre place, cette convoitise à l’errance, cette demande de
nous éprouver des sensations d’unique.
Durant ma durée à l’université dont cursus ne m’intéressait
autant que sa tranquillité sur campus pour assagir un cœur agité et
le souhait pour m’accoler à une communauté censément
intellectuelle, moi, étudiant octroié d’une bourse modique et doté
des hautes aspirations familiales en étant le premier d’atteindre ce
niveau d’éducation, je ne gravitais guère aux tavernes souilles et
discothèques miteuses aux recoins du centre-ville, même au week-
end ou congé. Cette esquive m’entraînait la charge d’insouciance
et d’insociabilité dans la face de ceux noctambules qui criaient du
vivat vide et dressaient leurs chopes en toast à quelconque; qui
devisaient et bredouillaient en voix rauques ; qui se noyaient en
gaieté fausse, même débordante comme l’alcool; qui se réveillaient
à une migraine ; qui aimaient joindre d’esclandre et qui se

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dégrisaient lendemain sans aucune mémoire de la nuit. (Nul ne
doute que certains timorés et penauds de ma génération affluaient
aux pubs afin de s’épancher avec l’aide des boissons qui
affranchissaient leurs langues. Moi, cependant, je ne biberonne pas
puisque, quand je suis éméché, je ne peux rien faire que bégayer.)
C’était assez au temps de siroter du thé, de tisane ou de bibine
pour les babines qui étanchait la soif et laissait alerte la tête qui je
voulais engager en pensée. Mais puis je refuse maintenant et
toujours d’être de fantoche à la mode, d’être à la merci des
complexes en induits et d’être seriné des standards mis par de
l’autrui. Mon intérêt est moins de palabrer et plus d’observer tout,
m’éprouver aux costumes étrangers, démêler ces écheveaux de
mystère et frôler une existence si distincte de la mienne. Les
raisons de cet évitement dans jeunesse aux ribouldingues étaient
aussi moins morales et plus physiologiques. J’en avais marre du
relent nauséabond des bières rassises, du boucan aux ribotes et à
la griserie de ceux fichus qui s’acquittaient comme cheptel aux
auges transis de l’abêtissement. Chacune de ces sensations me
donnait une migraine si sévère qu’elle me dépeçait et me
détraquait. Cet effet de cafouillage affligeait d’autres également
quoiqu’ils eussent tendance de leur en justifier comme une étape
dans leur développement. Parfois mes potes dragueurs manqués se
vantaient de leurs conquêtes amoureuses qui étaient, je suppose,
plus fictives que vraies. Sûrement ces donzelles n’étaient que
salopes qui accouplaient ces butors, pires, butors saouls, crasses,
inconnus et qui risquaient ces maladies vénériennes. On serait
sage de ne pas s’acoquine à ceux et celles que l’on ait la honte
d’introduire à sa mère.
Voire aujourd’hui je ne m’accoutumerais encore au milieu des
noceurs et je ne barbote aux tripots. Suis-je cuistre, un collet
monté ? Ouais peut-être. C’est toujours mon choix de rétrécir mon
cercle déjà circonscrit de copains et bouter quiconque qui
n’apparaît pas cordial ni génial, moi qui ne suivais à l’aveuglette
aux dictées de popularité et de manières plaisantes. Quant aux
fêtards invétérés qui se noient en alcool et accourent à quelconque
faste, je ne peux pas les blairer, leur prodigalité de pognon et de
temps. Je m’arrête de ce vice pour m’adonner à la poursuite de
connaissance et cultiver des amitiés plus sincères – celles-là des
sages, auteurs, artistes et oracles qui m’attendent sur étagères
bibliothèques, à la librairie et ces jours sur Internet. (Beaucoup de
nous aimons la texture d’une page moisie, la précision de la reliure
d’antan et l’odeur d’encre, tout ensemble une expérience tactile,
olfactive et visuelle. Le livre n’est jamais désuet dans la face des
changements technologiques.) On profite dans cette ère des
lecteurs de MP3 au volume abasourdi pour assourdir le tapage du
quotidien et cette flopée de gadgets pour se distraire du monde
actuel J’appelle les bibliothèques, librairies et l’Internet mes
repaires qui me permettent planer sur et plonger en domaines de
contemplation, cependant abstruse. La compagnie donc gagnée ne
me demande jamais plus un peu de ma curiosité qui surabonde
dans chaque cas.
Quand j’étais plus jeune, rien ne m’intriguait que ces tomes et
magazines. Là-bas on pouvait se dévouer à la pleine panoplie
d’érudit, de la géographie à l’anthropologie, de la psychologie à
l’économie, la plus exotique la meilleure. Il y a bien sûr le journal

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de la National Geographic dont images de naguères étaient
captivantes, scintillantes et inoubliables aux pupilles encore pas
habituées à la riche palette de couleurs. Je n’ai pas de honte en me
targuant des leçons délibérément manquées afin de feuilleter ces
pages qui me marquaient autant plus que les lettres mortes de
textes et tomes académiques. Ces étagères de lecteur me
primaient des informations joliment présentées et elles aiguisaient
aussi cet appétit pour les voyages vrais au-dessus ce qui faits
devers glanés des pages. J’avais ainsi pouvoir d’enjamber le monde
et franchir les barrières de distance sans jamais obtenir un billet
d’avion, C’était fouiller ces secrets de notre petite, et fragile,
planète qui motivait ce troupeau de scientifiques, journalistes et
photographes de braver ces hasards bruts, franchir ces entraves
naturelles, calquer des routes sur cartes caduques et contourner
des inhibitions officielles ou étatiques avec volonté et ingénie pour
déceler, rapporter, accroître et recueillir peu en peu ces chiffres et
aperçus afin de corser notre intelligence collective et alimenter
notre faim pour ce qui était incroyable, insolite et inspirateur.
Jusqu’au présent je continue de passer des temps aux
bibliothèques universitaires et librairies d’où j’aime survoler ces
livres et magazines qui me baillent une sensation inachevable sur
l’Internet. On dit souvent de l’académie que l’on n’y rate pas
jusque le passage des temps et on est également tenu d’y chérir
des mémoires douces comme celles-ci puisées du bercail, voilà la
nostalgie.
C’était dans une de ces excursions sédentaires
postuniversitaire que j’avais appris plus des nombreuses tribus qui
tramaient l’étoffe ethnique chinoise malgré la mécompréhension
que cette nation était toujours uniformément han. Un cliché qui
j’avais trié et fait ressortir était celui d’un vieux, frêle homme
s’habillant de costume, pantalon de soie noire et brodé aux ourlets,
un sachet drapé sur son épaule, dents cariées et tachées de bétel,
gencive à la couleur de cambouis, visage torve et buriné, le scalp
galeux, carrure courbe des années à la corvée, en pose de
s’agenouiller devant un autel dans un temple (plus comme une
cagna) pour offrir sa coulpe ou son repentir en ayant perdu sa terre
ancestrale à la saisie gouvernementale qui réglait tout avec
omnipotence dictatoriale. Il était un chef des gens (minzu) Li qui
sont les cousins aux Igorots, autochtones des îles Luzon
(Philippines septentrionales) et Taiwan. (Le peuple li, à l’origine
montagneuse dans la province de Guangxi nord du Vietnam, eut
déplacé et métissé les habitants autronesiens, eut en fait colonisé
i’île dans l’époque du second et premier siècles avant Christ.) Cette
image s’était gravée dans ma conscience car elle révélait le conflit
entre les coutumes et la modernité, entre quelqu’un qui collait aux
voies patrimoniales quand il s’était cerné des lois contemporaines
et cruelles, indifférentes à son sort, son héritage, son logis. Ces
avances autoritaires dans les années 1990, plus qu’une décade
après la Chine eut abandonnée le communisme, faisaient pâtir le
peuple natif et les paysans pauvres, provoquer l’exode rural et
causer le déracinement des foules désœuvrées et flottantes qui
s’entassaient et s’hébergeaient dans franges insalubres urbaines,
mêmes aux bidonvilles, qui suppléaient ceux déjà migrés aux
grandes villes sur le continent en transhumance d’emploies et
étaient méprisés comme la lie sociétale. C’étaient les quartiers, les

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taudis, d’où les caïds recrutaient leurs séides, prostituées et
courriers de drogues des nouveaux citadins, des hordes indigentes
et désespérées avec rien de ne perdre.
J’avais d’ailleurs vu cette photo d’une tente, bien, moins une
tente qu’une armature sur laquelle accrochée une bâche en
plastique d’où vivotait une famille des aborigènes déplacés. Ceci
m’avait dit que la marche de progrès était en train d’écraser une
culture et effacer une façon de vie. On ne niait pas que le régime
chinois veuille préserver des traces ethniques et de patine de
multiculturalisme mais seulement à plaire aux touristes. C’était
certain que l’habitation indigène en Chine n’était jamais
arcadienne, étant souvent éloignée, primitive, indigente et
susceptible aux maladies, d’où les gens vivotaient une existence
dure, pitoyable, sinistre et courte sans la moindre largesse. Cette
réalité était ce qui le gouvernement chinois avait cité pour justifier
le déménagement d’une population démunie et l’éducation
obligatoire en mandarin, la lingua franca. On n’avait pas de doute
que l’intention originale d’inclure les natifs dans les reformes soit
bienveillante dans un pays avec ressources limitées et doit toujours
plafonner sur les fiscaux. Qui disait que les champs globaux de
bataille sont toujours jonchés des épaves de bonté ? Encore
chaque chose éventuellement bonne avait émergée et donc
laissez-moi vous expliquer.
Le temps ne fige pas voire dans une civilisation qui se vantait
d’être éternelle et qui fut longtemps vétuste, pourrie, féodale. Ses
changements sociaux, économiques et politiques, quoique lourds et
lents en s’écoulant dans le passé, étaient en train de se dérouler et
s’accélérer dans les années 1980 qui s’avéraient critiques à
l’industrialisation rapide dans un pays, une fois enlisé dans une
longue kyrielle de crises, maintenant obnubilé du progrès
matérialiste et de l’envie à attraper l’Ouest et le Japon. La régie en
Chine, ambitieuse au cœur, ne voulait pas voir suppurer et
empester ce défaut d’insensibilité et de persécution des minorités
qui nuisait à l’image d’une nation censément férue de se
moderniser à toute allure et d’amadouer certains des opinions
dehors. Cependant irritée était la Chine vers ces intellectuels
étrangers infatigables en s’empêtrant des affaires internes, elle
avait eu à faire des concessions afin de cueillir plus des fonds à
l’investissement et de ne pas encourir la mauvaise publicité. Les
autorités donc avaient besoin de régler ces disputes et indemniser
les tribus pour leurs pertes, reconnaissant ainsi leur droit à la terre.
Rien des vieilles paroles, propagandes et fadaises ne suffisaient
plus de masquer un système fourbe, cynique, truqueur et éhonté
qui enfreignait ces clauses sa constitution avec méprisable
impunité. On doit aussi attribuer la modération en Chine qui était
claire mais qui s’était reversée en juin 1989 lorsqu’une faction
durement autoritaire avait ordonné l’armée de réprimer un
mouvement démocratique mené par les étudiants dissidents.
Jusqu’à ce point des dirigeants plus éduqués et raisonnables, gênés
aux méthodes crues de répression, avaient tenté d’assouplir les
décrets contre les groupes ethniques, régler leurs revendications et
résoudre ces questions afférentes aux cadastres, justes titres et
mainmises illégales. La revue était due à la reconnaissance de la
nature arbitraire implicite vis-à-vis à l’appropriation dans le nom de
l’état et du communisme. Cette question du droit était critique et

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sensible à cause des disputes aux justes titres et à l’histoire de la
razzia de terre aux mains des Hans, immigrants du continent, dont
présence s’avère irrévocable et ainsi la revendication terrienne des
natifs ci-gît, ne laissant pas de solution sauf un réglage de
compromis en loi. Le crime en saisi arbitraire n’est qu’un cas
simple de lèse-humanité. Il semble que la cour a déjà adjugé à la
faveur des autochtones dans la plupart des cas. La fin des affres et
conflits, jamais, mais encore plus d’espoir avec ces litiges plutôt
que des actes de violence et du pillage qu’on eut vu en Amériques,
Australie et ailleurs où les intérêts indigènes s’heurtèrent contre
ceux de l’intrus.
Les conséquences depuis sont que certaines des clans se sont
emparés des mottes ancestrales après la saisie durant la révolution
et sont épargnés de la politique de contrôle démographique
strictement limitant, aux risques de sanctions sur services publics
ou voire des amendes, chaque couple d’accoucher juste un seul
enfant à laquelle souscrits la majorité han. En déboutant ces
poursuites des autorités locales et provinciales, en contrevenant
aux demandes pour le développement déchainé, la cour avec le
consentement du Parti communiste défendait ces aborigènes, leur
cause et leurs atouts. Cette concession à la raison était vraiment
miraculeuse dans une société refoulée et supprimée où la presse
est encore muselée, la droiture est servile juxtaposée à l’intérêt
national (cependant il est défini) sinon en miettes, les personnes
blessées manquent du recours et l’état tout domine, règne avec
peu contraintes et peut déployer sa grande panoplie de pouvoirs à
son gré. On espère ainsi que le vieillard dans la photo d’antan
aurait eu sa prière exaucée et conscience assouvie en retenant sa
terre à l’honneur de son patrimoine et ses aïeuls, grâce au beau
geste du gouvernement chinois d’empêcher le génocide des
autochtones comme perpétré en Amérique et en Australie. On prie
aussi que le clivage ethnique répugnant est en train d’être comblé.
(C’est aussi éhonté des media occidental, dans sa ruée d’éreinter le
régime et prôner la cause tibétaine pour raisons idéologiques, de
ne pas commander un régime qui parfois agit consciencieusement,
effectue du progrès et ensuite élève son peuple de l’ornière de
pénurie.)
Je suis issu de la plus dominante tribu han et étais endoctriné
depuis enfance de me souscrire au mythe de sa supériorité vis-à-
vis à l’autrui. Ce chauvinisme me honnit et me détresse maintenant
quand dans ma jeunesse je n’avais peu raisons de le défier. On qui
s’enorgueillit de son parage agit sans pensée car son identité est
invariablement et inextricablement emballée au sens de valeur
ainsi enseignée. Les Hans ne peuvent que cogiter en fierté des
quatre milleniums d’histoire qui coule dans leurs veines. Cette
source est ce qui ils puisent surtout quand les temps sont durs. Je
me souviens de ce fort appel atavique parmi les confrères de mon
grand-père Lloyd dans la face de bigoterie et de discrimination
pratiquées à la majorité bornée au Canada du 20ième siècle. Cette
ferveur des Han en exil fut leur ressort et recours en réaction au
monde blanc qui les rebuta et leur nia la dignité, même la
citoyenneté. Il y eut donc un besoin de corser leur esprit en
arborant ce badge d’orgueil chinois et en bafouant les bravaches
qui les tenaillèrent, les brocardèrent et les acharnèrent,

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spécialement en concurrence pour l’emploie qui raga après la
Première Guerre Mondiale et pendant la Grande Dépression.
On tente de comprendre toujours ces Hans, leur angoisse,
rancune et aigreur. Mais pourquoi moult de leurs confrères
dirigèrent leur ressentiment aux aborigènes indiennes qui furent
les victimes initiales dans la conquête et la spoliation du nouveau
monde quand ils, les Chinois, eussent soudée cette alliance avec
les vrais natifs au bas de l’échelon ? Mais personnellement je ne
pardonne jamais cette propension des Hans asservis au Canada de
se boursouffler et secouer leurs tètes aux conduites des Indiens
saouls et qui les maudirent pour les moins infractions sans
empathie envers les causes de cette décrépitude. Ce paradoxe
pèse encore sur mes pensées longtemps maintenant après le
passage de cette génération antécédente qui se plia, s’accroupit
aux blancs « barbares » et or se crut au-dessus les « Indiens rouges
sauvages de maléfice», un peuple fait sujet habituel d’arnaque,
d’abus, d’animosité. Un peuple bafoué, les Chinois, aimèrent
fustiger ceux perçus d’être voire plus condamnés. Rien ne m’avait
donné plus de plaisir lorsqu’en Saskatchewan un jeune brave Cree
montant à califourchon mais sans selle un aubère à la lisière d’une
réservation bordante la bourgade de Swift Current m’avait salué
comme « frère » en solidarité sur un matin automnal irisant d’or
aux champs de blé. Ces Hans chinois sont aussi de la même souche
comme les Indiens, asiatiques, simplement dit. Quant à l’actualité,
les races ces jours se trouvent bien mixtes, faisant une panachure
du Canada, les Indiens encore exceptés, au moins cela est l’image
qui le gouvernement voudrait projeter parfois plus en leurre qu’en
fait. Mais puis on n’est pas si facilement dupé et n’est pas aveugle
à la réalité qui ne correspond pas à la propagande.

Le paradis faux de Sanya


Le truc en induisant un client de casquer pour ce qui il n’a pas de
besoin est créer un sens d’urgence et coller une date d’échéance à
l’offre. La brochure ébruite « la nouvelle » comment la station
balnéaire à la Baie de Yalong (un toponyme voulant « le dragon
asiatique ») au sud de l’ile de Hainan, avoisinante à la ville de
Sanya, est maintenant une destination de rigueur pour les pèlerins
du soleil, sable et vague déferlante. Cette idylle tropicale se
comparer sans la moindre vergogne à celle si célébrée à Hawaii, un
endroit duquel je suis familier et épris qui cependant ne
m’accessible sans un long vol et une escale en transit, soit à Taipei,
Tokyo, Osaka, Incheon ou Séoul. Un raccourci au paradis de bon
marché en hyperbole est comment le lieu est promu. Mes collègues
qui m’y ont précédé dans la première vague de touristes louent sa
beauté alors que dans la même haleine ils m’ont avoué d’avoir été
traités comme des cobayes à l’expérience. J’ai toujours convoité
une Hawaii dans le voisinage et on trouve ici trois choix, le sud du
Taiwan, Bali et bien Sanya qui en années récentes a profité du
boum touristique avec chaines hôtelières plongeantes fortunes
dans la construction des palais côtiers. L’idée du Hainan s’est
soldée avec une émission sur TV5 et CNN qui exaltait ce juron de la
mer aux cadres de partout en Asie. La durée de vol de Hongkong
compte de 92 minutes qui seraient typiquement le temps requis
pour un trajet local affligeant quiconque banlieusard. On y va

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durant un long week-end et peut abouler simplement une sacoche
ou valise, ainsi contournant la nuisance d’arrimer les bagages.
L’appel de voyage à la légèreté est rendu plus aguichant due à la
manie de ma femme vétilleuse d’apporter tout, surtout les
serviettes (et auparavant voire des oreillers et draps pour
empêcher le contact a sa peau, une bizarrerie sûr de m’affoler),
résultant de sa méfiance de l’hygiène publique. Essentiel aussi est
le haut standard d’accommodation de luxe qui elle issue d’une
famille bien-nantie demande et rien moins que cinq étoiles ne suffit
pas de lui plaisir. C’est mon sort de m’apparier aux princesses
dans ma vie de romance qui m’astreignent de les dorloter en voies
qu’elles s’accoutument depuis leur enfance.
La veille à notre voyage était un cauchemar dû à l’ouragan qui
a frappé intempestivement Hongkong, forçant des lignes aériennes
de résilier, remettre ou jongler certains vols. La pagaille qui s’est
ensuivie aux changements tels abrupts a affolé ces passagers
ordinairement déjà tracassés par l’effroi d’atterrissage, décollage
et menace terroriste. J’étais suis aussi exaspéré au surcoût levé sur
mon visa par le gouvernement chinois afin d’estamper les touristes
durant et après les Jeux Olympiques. C’est hypocrite et éhonté du
régime d’accueillir cet événement historique et grandiose avec tout
de son symbolisme et son appel à l’orgueil des Chinois, soit natifs,
soit d’une souche ancestrale commune (moi), en nous arnaquant.
Cet essai de tapoter et manipuler le patriotisme était futile, pataud
et gênant quand ce qui avive l’esprit civique est moins de la feinte
et plus de la sincérité. Le navire chinois présente au monde une
coque vernie mais ses vaigres arrière de la façade sont pourries et
vermoulues. Pas de surprise que je n’aie pas d’affinité à
l’intendance chinoise, de moins encore envers ces gestes et laïus
qui ne suscitent que le dégoût, sinon antipathie, aux dirigeants
goujats ratant une telle finesse en persuasion. Nous arrivons à
l’aérogare avec l’espoir, maintenant en vain, que la gestion ait déjà
réglé les commandes en attente. Ce manque m’avère comment la
confiance d’Esther dans l’efficacité des professionnels à Hongkong
est égarée. Nous découvrons comment notre vol sera retardé de
trois heures et demie, voulant dire que l’aéroplane ne parvienne
pas à Sanyo jusqu’à minuit. Nous précédant est une troupe épuisée
de passagers piégés au terminus, parmi ceux sont des routards qui
roupillent et se prélassent sans soin pour le décorum. Nous ne
pouvons nous y attendons dans le salon de Cathay Pacific, ma
femme feuilletant des magazines de commérage et de mode, moi
scandant des sites et sachant que le cyclone, qui avait louvoyé et
puis essuyé Hongkong, a frôlé la station balnéaire en route de
souffleter et tremper la côte de Guangdong duquel Hainan était
une part avant le gouvernement central avait scindé cette province
afin de permettre à l’île d’une superficie (33 920 kilomètres carrés)
supérieure à celle la Belgique cet apanage d’autonomie.
La nouvelle aérogare à Sanya est construite de poutrelles au
tek dont le bas est cimenté en dalles granitées. Sur macadam
dehors les avions se parquent en formation d’escadrille. Malgré la
chaleur opprimante et la moiteur collante et étouffante, le hall ne
s’équipe aucun climatiseur visible, optant plutôt pour ces
ventilateurs géants, meneaux et croisées de faire circuler l’air, une
apte réponse au défi de l’environnement et une concession à la
remise de coût. Le dédouanage aux comptoirs de contrôle est lent

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malgré le retard de l’heure, maintenant à déjà la première heure
du lendemain, lorsque ce jeune greffier, ses sourcils renfrognés,
essaie à peine de lire les deux langages, l’anglais et le français,
imprimés sur mon passeport canadien. Esther me dit que ces
officiers luttent également avec l’écriture chinoise classique car ils
sont enseignés de la version simple qui horripile des érudits
traditionnels qui la dénoncent comme une affronte et une
abomination. Je me crispe pour éviter ces bâillements et retenir
ouvertes les yeux sous les poids des paupières lourdes à l’instar de
plomb. Un couple britannique avec enfants métis est même frustré
à la carence d’alacrité mais ceci est un endroit tropical qui va sans
aucune hâte, une zone de langueur. L’homme blanc frise ses lèvres
en vexation qui s’assagit quand sa femme belle mulâtresse, une
fillette dans ses bras ensemble avec une poupée et un nourrisson
dormant dans la poussette, le lénifie avec une gestuelle à la
patience.
Nous sommes ravis d’avoir franchis le seuil et plantés nos pieds
sur sol, entrant la terre des palmiers, cocotiers, lianes, tamarix,
banians, papayers et manguiers qui flairent l’air d’un parfum
enivrant, un effluve tropical. Etrange que le parcours d’avion a
couvert juste d’une mille de kilomètres et or on aventure
actuellement au milieu distinct. Esther a bien épluché des billets de
yuan d’un magot pour rémunérer le taxi mais cela n’est pas
nécessaire car l’hôtel Marriott a déjà arrangé le transport, un
chauffeur brandissant une pancarte écrite sur laquelle est mon
nom et nous saluant à la sortie de l’aérogare. La fourgonnette
traverse cette extension de la route dans les ténèbres totalement
obscures sinon pour des réverbères récemment installés. Ce
monsieur trapu, un Han, nous assure que Sanya est florissant et le
nombre des visiteurs a décuplé depuis le début du nouveau siècle.
Il nous donne deux bouteilles d’eau et même prodigue des avis
gratuits sur des attraits insolites et salaces locaux dehors de
l’orbite à la station durant ce trajet de 35 minutes au Marriott,
peut-être avec un œil au prospect d’un pourboire. On croule sous
cette forme d’hospitalité persistante en Chine d’où certains gens
sont benoits et bonimenteurs qui se trouver dans cette sorte de
métier. Cela des Chinois sont gueulards est fait testament chez les
chaines d’émission qui télévisent sans pause ni sursis ces piètres
feuilletons et mélodrames éplorés. Je ne suis pas le type crédule
d’être tiraillé et distrait par des paroles sur comment je dois
dépenser d’argent et je ne suis clairement intéressé en aucun club,
tripot ni gargote ni racoleur. On ne doit pas vouloir qu’un trajet
sans anicroche vers l’hôtel après un vol trop retardé et l’anxiété
ainsi avivée due à la tempête telle perturbatrice. Nous sommes
aussi férus de quitter la fourgonnette dans laquelle nous
partageons l’espace avec un couple de golfeurs esbroufeurs.
Esther dit qu’elle puisse discerner les faciès qui distinguent un
Han d’un Li, même un Coréen, Miao, et al, qui tissent l’étoffe
ethnique en Chine. « Il est Li, » tonne-t-elle avec confiance en
hochant sa tête au portier qui nous accueillit à l’entrée au foyer
surgissant à la fin de l’allée et abritée par une palmeraie. (Ces jours
le personnel d’hôtel ou même de gouvernement est meilleur
habillé, disparus sont ces vareuses qui faisaient engoncés les
travailleurs et ces robes qui étaient déformées.) Ceci est comment
elle et d’autres chauvins s’engluent à la croyance que l’on observe,

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constate et souligne ces différences, cependant banales, en
impliquant et enfonçant la supériorité supposée et fausse du
groupe dominant. « Le teint de Han est comme celui de la mie et
celui de Li est de la croûte, » est l’avis de quelqu’une qui n’hésite
pas réciter sa litanie de plaintes et grognes à l’encontre des types
croisant son sentier des Philippins aux Coréens. (Je suis dubitatif de
cette sorte du stéréotype qui se percute à mon sens de justice mais
encore je n’engage plus ma femme en algarade puisqu’elle, chaque
brouille, ne soit pas résolue. Il y a vraiment assez de querelles
entre nous tel que nous nous disputions encore et encore sur la
formation de notre gosse, sur des questions politiques, etc.) Un Li
serait plus foncé si seulement parce qu’il se basane au boulot de
labeur dur, oui ? C’est la tendance d’esquisser, accentuer, exagérer
l’écart ethnique qui vient au grand dam d’une nation en cherche et
besoin de l’unité forgée de sa diversité. Cette ladite unité à l’alliage
est moulé dans le creuset de peine et de sacrifices. Ce Marriott,
comme ses rivaux, est même une entreprise jointe qui est à dire un
partenariat d’entre une compagnie chinoise et une société
étrangère qui la gère. Les tenanciers sont souvent des pays comme
les Etats-Unis, la Suisse ou l’Australie qui commandent des équipes
locales. Encore ces succursales se vantent d’être très autonomes
pour ajuster aux conditions particulières en Chine. Les profits
engrangés sont partagés mais seulement après une portion est
déjà détourée pour rembourser des banques et couvrir l’impôt
parfois réduit afin de donner aux investisseurs une prime. Le
manque de l’écot équitable n’émousse pas l’ardeur étrangère car
ceci est la Chine, la terre de promesse. Voici est la moule, et la
mode, de business en Chine où les profits et les risques sont bien
équilibrés, alors que l’avantage soit toujours plus accru aux hôtes
qui tentent d’apprendre ces méthodes de gestion occidentale et
d’accepte des secousses aux coutumes. Le vestibule ici est vaste,
le plafond haut, le décor est hawaiien ersatz et la terrasse offre un
panorama de la mer, quoique rien de cela ne puisse être vu dans
l’obscurité nocturne.
Notre chambre est odorante du jasmin frais, un arôme
émanant d’un vase tenant une gerbe de cette fleur. La literie est
beige en assortissant le papier peint qui tapisse juste un des murs
sur lequel accroche un tableau des sables mous et de la mer, un
thème évocateur de cette station qui n’était qu’un andain rustique
de rizières, marais et masures de tôle ondulée avant ces hôtels se
sont poussés tels des champignons après la pluie. Rien d’un passé
tel humble ne se retient en testament sauf des pans et des
champs. Le gouvernement central croyait ces investissements qui
dopaient l’économie et élevaient les natifs du marasme de
pauvreté étaient certains des moyens pour aborder la pauvreté et
désamorcer les griefs qui risquaient de tourner au mouvement
sécessionniste. Dans le passé les clans natifs guerroyèrent souvent
mais ces jours ils se rassérènent et se rallient pour avancer leurs
intérêts communs et gagner du boum qui leur fournit des emploies
et espoirs, une fois vus d’être les seuls gains des Hans qui
constituent 80 pourcent de la population hainanaise (huit million et
dense). Les jeunes plus éduqués et ambitieux déménagent de plus
en plus aux villes et abandonnent ces bleds et leurs bauges en
poursuite du rêve bourgeois. Certains de leurs chefs demeurent
néanmoins ces jours dans des maisons, voire manoirs, loin de leurs

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souilles de boues et brindilles. Marrant que je me souviens de mon
périple en 1997 au Sarawak, Bornéo, d’où même un groupe des
meneurs tribaux s’étaient éprouvés une transformation pareille. Un
chef dayak avait ironisé avec un gloussement sur ses gains de
fortune grâce au concessionnaire de bois et à la prestation étatique
malaysienne, son entrée à la classe aisée ; comment son grand-
père eut pratiqué la chasse de tête humaine qui fut fièrement
accroché sur poteau et prisé comme trophée et comment ses filles
étaient maintenant étudiantes enrôlées en Australie. C’est tout
surréel d’être témoins, comme lui et comme eux, aux changements
tels abrupts et pourtant ils s’en adaptent avec aplomb. Ces
hommes incarnent, pour moi, une révolution de l’esprit assortie au
conservatisme et une saute du primitivisme à la modernité dans
presqu’un clignement de l’œil. Est-il le dessein soit divin soit
accidentel de s’éprouver des courants dramatiques dans la cours
de vie ? Ce qui est sûr est que ces gens ont déjà vu plus en
décades que leurs ancêtres auraient vu en siècles car le monde
évolue de plus en plus vitement et radicalement. Pas de moins est
que ces personnes laissent les forces du monde influencer leurs
jeunes, un monde du pétrin social, éducatif et économique, sans,
eux-mêmes, trahir leurs croyances fondamentales en tradition,
famille, devoir, piète filiale car ces principes sont pérennes quand
ailleurs tout semble fugace, instable, changeant. Dans la face de
ces virages constants de mode, de manières et de moyens, un
branlebas, un bouleversement, n’est-ce pas une bonne chose
d’avoir une boussole ? C’est exactement comment je pense encore
de mon grand-père, Lloyd, qui essaya subtilement de remplir le
fossé creusé de formation dans ma jeunesse de la dérive et la
dissipation pour m’instiller certaines vertus moins temporales et
plus endurantes comme le devoir et la persévérance, vertus
rarement adressées aux écoles ni au foyer familial. Quand
j’entends décrier la faillite morale, je pense invariablement de lui.
Ce qui il m’eut légué fut vraiment un sens de l’histoire, non, de
l’Histoire, du continuum du passé, présente et futur. Cela demeure
ma feuille de route de laquelle je suis encore voire quand je vais à
tâtons dans l’obscurité figurative et comment elle me secourt de la
chute à l’oubli parce que je choisisse toujours de me souvenir de
lui, Lloyd, et de mon origine, une fusion de l’orient et l’occident, de
l’ancien et du nouveau.
Je me réveille ce matin gris avec des pensées de l’orpheline
chinoise adoptée par mon frère benjamin Warner et sa femme
Joanne qui s’appelle Madeline. Elle a 26 mois, je crois, trop jeune
d’avoir été marquée par son chagrin d’abandonnement aux perrons
ou portiques d’une école au bled quelque part nord de Guangzhou.
C’est d’atrabilaire en pensant à la douleur et au désespoir qui avait
conduite sa mère biologique de larguer son enfant. C’est assurant
cependant qu’un bébé une fois traumatisé mue et guérit la plaie
sans un jour la moindre cicatrice. C’est les adultes qui sont à la
traîne en maniant le grief et ainsi je peine de contempler la
première phase d’une vie privée de l’amour maternel, m’appelant
ce qui constate l’écrivain américain, John Irving, de la déchéance
psychologique dans son roman, « les Règles de cidrerie » : « Les
bébés à l’orphelinat apprennent tôt qu’il ne serve rien de pleurer et
donc ils sont silencieux. » Cette gamine, Maddy, se tait relative à la
cacophonie de vagissements provenue de ma gosse, Yo-yo, qui

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reconnaissait sa puissance sur et prise de nous depuis naissance. Je
suis ici en Chine où les calvaires sont une condition trop universelle
et où cette tristesse alourdit le cœur, surtout maintenant dans une
station balnéaire dont but est d’effacer ou d’échapper des peines.
Madeline était si contente d’être dans mes bras, un bonheur reflété
avec une glissade de sourires et gazouillis infectieux. Y-a-t-il
toujours cette douceur pour illuminer le monde morne grâce aux
gestuelles infantiles et cette innocence pour alléger l’humeur et
colorer tout qui était terne avec une palette vibrante ? Elle si preste
et délicate a pesé sa main sur mon bras et m’a regarde les yeux et,
moi, j’ai fondu dans ce moment tendre, moi, adopte par elle
comme tonton. Madeline ne comprend pas pourtant la signification
du mot brusque et brutal, « pitié », qui ne la convient plus car elle
se baigne actuellement dans tout de l’amour que ses parents lui
offrent, même de moi.
Esther me secoue de mes rêveries et m’emmène au grand
restaurant adjacent et ouvert au jardin pour notre petit-déjeuner.
Elle a déjà survolé le journal et le bristol sur le service de spa offert
que le concierge a mis sous la porte mais maintenant elle veut
entamer son jour. Je recule au coin loin de la véranda pour éviter
les piqures des moustiques et pour peur du paludisme, ceci malgré
l’assurance que cette maladie demeure rare à cause du drainage
des flaques et l’aspersion à l’insecticide. C’était la même aversion,
sinon paranoïa, au Sarawak, au Penang et au Phuket en Thaïlande
qui m’affligeait durant ces voyages où je me cachais ma peau sous
pantelons et chemises de longues manches voire après de m’avoir
enduit d’onguent. On écoute ces postulats d’une inoculation
capable à défaire ce fléau dans la même façon du triomphe à
l’encontre le polio et pourtant ce malaise tropical continue de
ravager ou menacer une tierce de la population globale. Elle
commence le matin, comme toujours, avec une tasse de café pour
s’aviver, non, pour se doper avec cette drogue. Je vois partout ces
accros de caféine, hommes et femmes qui bafouillent et regardent
videment la distance jusque le coup frappe leurs nerfs et extirpe
l’anxiété. Quant à moi, cependant, c’est toujours un verre de jus ou
maintenant au Hainan une noix de coco crue perforée et refroidie
qui aiguise l’appétit. On écoute partout le son de russe et voit des
panneaux écrits dans cette langue puisqu’il est, ici, une redoute
slave plus agréable aux habitants de la toundra sibérienne où déjà
le givre est arrivé et un héraut au gel profond. Un vol entre Sanya
et Vladivostok ne dure que cinq heures qui ne semblent trop loin
pour un peuple qui s’habituent de croiser neuf fuseaux. J’observe
que le teint blanc mat d’ivoire des Russes est pareille au mien et
distinct de celui d’incarnat aux nordiques. Certains d’eux, non,
certaines d’elles sont rouquines mais on n’est pas sûr soit cela du
au henné ou tout naturel. Si notre gosse était ici avec nous, elle
s’étonnerait à la chaleur de la chevelure vermeille car elle a voulu
changer la couleur de tresse à celle de rubis qui elle adorait dans
son enfance.
Rien ne vivifie un épicurien plus qu’une flânerie après un repas
et sous une couche légère de nuées qui ne bloque pas ces rayons
solaires intenses et qui, pire, aggrave l’effet de serre. Mais au
moins les sables sont mous, plus mous que voire ceux des Spanish
Banks (bancs d’espagnol) à Vancouver au palier de l’escarpement
de Point Grey et infiniment plus apaisants que ces galets des

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calanques méditerranéennes. On sent que l’on y déambule
indéfiniment, juste traînaillant, écoutent ronfler les vagues et buire
la brise, ou même y gambade sans aucun soin aux soucis
mondiaux. Les Russes sont vus allongés et prélassés pour absorber
le soleil, un luxe rare dans leur patrie froide et grise. Mais les
Chinois du continent qui aiment aussi passer leurs temps en
villégiature sur l’île essaient de se cacher sous parasols et pébrocs
bariolés, surtout ces femmes délicates qui ont peur de se basaner
et d’être se trompées pour des manouvrières en logique de
l’inverse vis-à-vis aux occidentales croyantes que un hâle soit une
marque de loisir et de santé. Esther dit que ces slaves ne
ressentent pas de honte en étalant leurs corps copulants, certains
d’eux se ressemblent aux phoques ou, pire, aux homards cuits. Je
tente en vain d’attraper plusieurs photos avec mon Sony a-300
mais en futilité puisque l’appareil refuse d’en happer quand
l’objectif s’embrume qui en train raye des senseurs. Esther jouit un
peu plus du succès qui m’élude avec son Olympus de poche qui
manque ces trucs et gadgets électroniques, mécaniques et
numériques desquels le réflexe est trop doté au chagrin et à
l’écueil des amateurs plus ardents et pointilleux résolus d’avoir à
leurs bouts de doigts ces contrôles trop sensibles. Pour franchir
cette entrave, on se requiert d’avoir la patience d’un saint (qui est
vraiment une prouesse et une épreuve pour moi) en laissant
monter la température et l’humidité de l’appareil afin d’assortir
celles de l’air.
On ne souhaite pas néanmoins de rôder sur la plage puisqu’on
risque de s’affronter aux racoleurs chafouins, pas de sexe mais des
jouets marins – yoles, jets, skis, parapentes, scaphandres et kayaks
– qui seraient d’intérêt à notre gosse plus aventureuse qu’Esther
toujours en effroi de l’eau plus profonde, l’abysse. Je dois aussi
éviter ces hommes chinois qui méritent le sobriquet, « la cheminée
humaine », à cause de leur propension de fumer sans guère pause,
plutôt pareille à celle des clients aux cafés parisiens, bien avant le
ban imposé en 2007. On répète avec emphase que rares sont ceux
qui ne tirent ces bouffées de leurs cigarettes voire dans certaines
aires où il est interdit, pire, clopes fabriqués en Chine qui sont plus
piquants, dont mégots sont jonchés partout voire quand dans la
présence des cendriers. C’est fait m’évident de l’ambivalence que
ma femme ressente vers les Chinois, fière, elle, de la culture mais
gênée, elle, des conduites crasses parmi les nouveaux riches, les
parvenus, vulgaires, rudes, béotiens, crâneurs, hargneux dans ses
yeux. Je trébuche parfois aux signaux de conflit dans sa
compagnie, elle, qui me reproche et m’houspille censément pour
mon manque d’appréciation à « notre patrimoine », elle, qui ne se
réconcilie encore aux manières qui font manifester à sa vergogne.
Chaque fois qu’elle essaie de rénover ou renouveler sa foi en
Chine, cette quête ne faille que la finir en déception de plus en plus
amère. Plus récemment ma femme avait exulté la gloire des
Chinois en accueillant avec panache le monde à Pékin pour le
29ième Olympiade seulement d’avoir vu subséquemment
l’admiration fondre en angoisse et anxiété parce que de
l’affolement et du dégoût aux scandales du frelatage laitier avec la
chimique toxique de mélamine à la contamination de la volaille,
etc. Partout c’est l’affreuse avidité, le nouveau capitalisme
acharné, l’indifférence endiablée à la valeur de vie et l’escroquerie,

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soit mineure, soit majeur, qui l’écœure et qui contredit tout des
vertus confucéennes censément choyées et incarnées les Chinois.
« Rien ne semble sacré ces jours. C’est juste le lucre qui compte.
Les fraudes, les mensonges, la fourberie, le leurre se tassent. Les
voleurs, bravaches et cagots ne craignent pas de conséquence en
sachant qu’ils soient saufs s’ils soudoient ces officiers et
magistrats. Ceux châtiés ne sont que des larbins et sbires, jamais
ces caïds et népotistes. Il n’y aucune justice. Personne n’a le sens
de rage ou voire de choque parce que le cynisme est banalisé dans
un état pourri, » j’ai entendu exprimer, tonner, marteler ces
critiques âpres, déçus de le vaste gouffre entre une civilisation
érigée sur certains préceptes de rectitude et une réalité si creuse
et laide. Esther leur appartient d’une génération confuse à l’identité
chinoise d’entre ce qui est mythe et ce qui est fait. Ce mépris qui
ciblait avant une classe de marchands sans scrupules est
maintenant transformé à la mitraille. Qui est à blâmer, le peuple, le
régime, la société, le déclin généralisé du respect, l’érosion de
civilité ? Je suis fourbu en luttant de comprendre la magnitude de la
décrépitude morale qui ronge l’âme collective de ceux encore
fidèles au honneur exemplifié par Lloyd et ses confrères humbles
pourtant nobles en exil de corvée et jamais oublieux de leur genèse
et de leurs dettes aux parents. Esther reste de se poser la question
au paradoxe personne ne peut pas démentir d’un patrimoine si
riche et d’un peuple moderne égaré échouant de manifester cet
héritage, au moins dans son estimation.
Ce qui me perturbe plus sont les péchés jumeaux en tout
prévalant. Leur attachement au tabac est déjà cité mais encore il y
a l’autre forme d’assuétude également pour assagir les nerfs et
lâcher des crispations. Les Chinois aiment donc chahuter, soit avec
leurs papotages, soit leurs blagues, chacun me sonnant de
s’engager dans un grabuge lorsqu’en fait il n’est qu’un échange de
plaisanterie. (Certes un papotage peut dégénérer à la chamaille
très rapidement parmi ces Pékinois notoires pour leur courroux
facilement provoqué et tempérament mercuriel. Tragique serait
quelqu’un qui achopper et croiser une telle mégère typique dont
rage est légendaire comme attestée par la femme d’un ami dotée
d’une langue au vitriol.) La cacophonie en mandarin parlé à
l’accent râpant pékinois m’agace à cause des grasseyements qui
se ressemblent à ceux des Parisiens en roulant leurs langues et
cachant des voyelles. Encore je refrène la moindre expression de
reproche puisque je suis invité à leur pays et dois leur déférer,
cependant dégueulasses sont leurs manières et habitudes dans
mon égard. Ce serait qu’ils me trouvent bizarre et odieux avec mon
mandarin souvent se mépris pour la version Singapourienne, ainsi
marrante. Le truc est de se taire, se dépêtrer des affaires locales et
esquiver l’attention qui me pose une nuisance car je ne suis pas
parti plutôt juste observateur à leur monde grattant et plébéien
malgré la dorure qui pare ceci et cela de vulgaire. (L’art de se
museler est bien appliqué dans un pays où les dissidents doivent
subir l’autocensure pour survire professionnellement.) Qu’est tout
dans l’analyse finale est le snobisme réciproque et l’arrogance
mutuelle dans cette enclave de vacances d’où s’assemblent les
Chinois du nord et les étrangers qui se froissent et qui ne se
mélangent sauf plus superficiellement.

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Nous nous détournons de la longue plage encore semi-
désertée sinon pour ces Russes sur chaises-longes désespérés
d’acquérir le bronzage, sans aucun doute un badge qu’ils soient
fiers de s’arborer dans la même façon des Canadiens en étalant
une peau rouge durant l’hiver pour ébahir leurs collègues et amis
envieux piégés à la zone grise, déprimante et dépourvue du soleil.
En traversant l’acréage adjacent de palmeraie et un réseau de
canaux, les flâneurs entrent le domaine de l’hôtel Hilton qui
s’épand et qui effectue la version idyllique des tropiques plus
romantiques que vrais. Il n’y aucun grand édifice plutôt une série
de bâtiments en ressemblance à des condos à l’orée de Waikiki,
l’ile hawaïenne d’Oahu. Parfois on n’a pas tort de penser que ce
rang des hôtels occidentaux est une balafre sur le paysage
impressif aux développeurs et investisseurs mais moins aux
puristes voulant retenir des traces naturelles dans le milieu
touristique. Cette entaille signifie cependant une veine
d’opportunité à ceux avec l’espoir de travail, de progrès. Esther me
raconte de la ruée vers l’or à la Baie de Yalong et exulte le grand
palais et la station ultra de luxe et décadente de Banyan Tree tôt
d’être inaugurée pour ahurir les clients plus tatillons. (On ne voit
jamais, sans exagérer, excepte au Qatar, un tel nombre de
chantiers encore cadenassés et un tel nombre de grues en
surplombe en héraut d’un avenir alarmant.) C’est sûr que la
gestion prenne la crémaillère avec tant pompe en décembre ou
janvier au comble de la saison de tourisme. Le machin de publicité
a déjà dégainé sa pleine panoplie de charme avec avertissements
riches en platitudes et hyperboles. Mais en essence ces émerveilles
ne sont que broutilles faites pour impressionner ceux qui vétillent.
L’architecture chez Hilton est néanmoins distincte en déguisant ses
fonctions hôtelières pour escamoter la réalité qu’ici rien n’attire
une clientèle sauf la mer tropicale depuis lors l’irruption du trafic
touristique il y a une décade, entamant dans la ville de Sanya et sa
baie mitoyenne et éponyme. Le surplus des hôtels surfaits sape
l’appel de quiconque place, cependant mirifique. Hainan est ainsi
dans le danger d’amenuiser ses qualités de calme et détente en
troc pour ces gains immédiats, éphémères et ultimement illusoires.
Voire mes lunettes s’embrument, émoussant ma vision du
paradis. Encore nous empruntons la venelle qui connecte au
méandre le Hilton et le Marriott. Tout est d’accord sauf que nous
avons paumé notre voie et avons eu à rebrousser chemin pour
radiner au terrain plus familier. Esther m’emmène à la « piscine
d’infinité » qui comprend une série de bassins interconnectés,
enjambés de passerelles, rafraîchis par cascades et divisés en
terrasses ; qui s’épand à l’horizon marine pour créer l’illusion d’être
une anse, une partie de la mer ; qui est servie par une buvette et
un café se met sur un îlot. Proche d’y surgit un club de cure pour
enjoliver les femmes, les hommes aussi, qui n’hésitent pas
dépenser un pécule sur le traitement facial et corporel. La vanité
n’est plus unisexuelle et beaucoup sont ces mirliflores ou dandys
en anglicisme dans l’époque de glamour faux. Esther m’assure que
certains jeunots barbotent ces jours au maquillage, à l’épilation,
voire à la chirurgie esthétique – juron au standard jadis de
masculinité. Je ricane à cette travestie mais suis-je si démode, si le
20ième siècle, selon ma gosse ?

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A l’entrée du foyer orné des vases et guéridons en appui des
objets d’art est une flotte de taxis à l’affût. C’est habituel de
négocier un gage journalier. Un chauffeur âgé de vingtaine nous
cote un frais de 500 yuans (60 d’euros) qui nous sonne raisonnable.
Je suis plutôt plus appréhensif de sa jeunesse car il me faut
reconnaître comment universellement un bougre aime la vitesse,
un chauffard. Il s’appelle Deng Qiang Fang, mince, grand et
volubile, un type qui adore sa voix et ne soigne pas ce qui fuit de
sa bouche, soit doléances, soit commentaires, soit fadaise. Je lui
pardonne son bavardage chiant parce qu’il ne fume pas dans notre
présence. Ce qui nous perturbe cependant est sa tendance de
causer sur un phone cellulaire et de tapoter des messages sur
l’autre lorsqu’il ne nous adresse. Egalement déconcertant est
comment il conduit sa berline Volkswagen (presque chaque taxi est
de la même marque fabriqué en Chine) avec une telle agression.
Deng accélère, freine et embrayer la voiture, faisant couacs des
pneus et tressaillements de l’essieu et le châssis, que ses clients,
nous, restent toujours nerveux. Ces cahots s’empirent lorsqu’il
s’achemine sur routes de lacet à la visée d’un parc de thème, un
hameau traditionnel, dans les collines, et fonce pour surpasser des
camions et une charrette attelée au moteur bruyant et fumant.
Ceci est démence sur rouage. Ce modèle de taxi est le plus basique
puisque voire les vitres ne s’ouvrent que par manivelle et il est à la
commande d’un sadique et accro d’informatique. Notre pire peur
est en train d’advenir. Nos vies sont dans les mains d’un forcené
qui me rapporte une expérience également effrayante à Phuket
d’où l’autre maniaque m’avait ballotté en imitation d’un rallye. Cela
cauchemar en Thaïlande avait enfin arrêté après un chahut
d’autres passagers et mes plaidoyers pour la santé mentale. Tout
de ceci s’était adouci avec le pourboire d’un billet à 20$
américains. Assez simplement, cette folie à toute allure devient
une forme de chantage. J’avoue que je suis lâche en face aux
diables volants qui me soumettent à leur méchanceté et merci
mais encore je prise plus ma survie et payerais une rançon pour ne
pas me tourner en donnée d’accident. Mais puis on n’oublie pas et
on doit permettre aux taxis qui bossent une chance de gagner un
petit profit de leur besogne dure et hasardeuse. Pis pourtant est la
combinaison de la flambée en prix et la dégringolade économique
en Chine et ailleurs qui appauvrit une légion de gens et menace
d’étioler les revenus de ceux chanceux d’être embauchés. Pour
eux, la manœuvre au temps de cherté et d’austérité signifie
vraiment la fane, sinon la fin, d’un rêve assez commun – de gagner
assez et épargner un petit pécule afin d’amorcer un commerce
puisqu’au cœur ces Chinois sont hommes de business. Quand un
espoir s’éloigne, les déboires sont difficiles d’accepter, d’épauler.

Un capsule en anthropologie
Le parc ethnique nous appâte avec l’appel à notre soif pour
l’authenticité, l’une qui nous essayons d’étancher avec des
moments passés dehors de la station balnéaire dont les
expériences sont ersatz. Cet endroit s’est fait connu dans un encart
du journal livré à notre chambre. C’est édifiant d’être visu d’une
culture en déclin irréversible, maintenant préservée en certaines
facettes pour nous amuser. Je ne me leurre plus que le

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gouvernement local respecte ces coutumes primitives dans son
estimation qui vaut les gadgets et prône le matérialisme sans
bride. Le héritage aborigène qui s’y rend n’est qu’une performance
ringarde du style perfectionnée chez Disney. On trouve en
contrebas de l’entrée le parking où les véhicules engorgent la voie
et où garent ces wagons de tour, chacun étalant une pancarte qui
nomme ceci ou cela province ou ceci ou cela entreprise à laquelle
ces visiteurs sont affiliés. Envoyer aux vacances est une façon pour
un employeur de monter son appréciation et d’affirmer la fidélité.
Plus souvent cependant, ce geste est offert juste aux cadres en
Chine où les divisions de classe s’approfondissent et s’augmentent
trois décades exactes après le rejet du communisme et le début de
la campagne d’affranchir les forces du marché capitaliste. On peut
bien supputer que la société chinoise actuelle reconnaisse la futilité
de la prétention à l’égalité sauf en théorie comme le reste du
monde et aille encore plus à l’extrême. Une fois que les touristes
débarquent, les chauffeurs s’assemblent aux troquets et gargotes
pour fumer, jouer des cartes, la tontine et le poker étant les plus
populaires, jacasser, se régaler avec rumeurs et bobards, se
cotiser. Deng les rejoint et nous achetons deux billets d’admission
au guichet sous un velum de frondes et une arche de six mètres
d’envergure essayée des étançons au tek dur comme granit. L’air
est collant, l’ambiance léthargique et les gardes flemmardes,
bâillantes au guet et moroses, qui est à dire typiquement tropical.
(Je me souviens d’un avis épousé d’une accointance
singapourienne qui avait déclaré comment seulement les Chinois,
comme elle-même, sont capables d’ahaner au milieu de stupeur.
Peu évident de cela maintenant. Elle, Elaine, comme Esther, a
parlé des natifs malais boumiputra « paresseux » dans son cas
avec un tel fiel et mépris, presque haine. Pourquoi l’ire résidente
dans les cœurs de ces dames d’une parure gracieuse et nature loin
de bilieuse ? C’est chaque chose d’un sport de pester parmi les
confrères et consoeurs contre ceux à qui l’on ressentirait un degré
de culpabilité car les autres sont autochtones avec un lien plus sûr
à la terre.) Mêmes sont les insectes qui n’essaiment pas exceptes
dans les ombres. J’ai déjà aspergé mes bras et cou de chimique et
je m’habille en pantalon, notifiant heureusement que mon Sony
s’est acclimaté à la moiteur et l’objectif est prêt de capter des
images. Esther sent de la flagrance florale mais il n’y aucune fleur
en vue. La douceur intense serait des choses pourries et moisies,
donc crassant l’illusion plus agréable.
La vie communale axe sur une piazza en Italie mais ici, au
Hainan rural et ethnique, elle pivote traditionnellement sur un puits
sans palan, utilisant seulement des sceaux qui s’encordent
manuellement. Un Han investit beaucoup de fierté et s’identifie à
son village ancestral, le « Hokku », et un Li est pareil. Quoique de
plus en plus des gens deviennent citadins, ajoutant à l’enflure de la
population dans les grandes villes loin de leurs berceaux natals,
cette distance ne flétrit peu ces connexions familiales centrales à
l’être chinois sans regard à son statut actuel, social, tribale,
économique. Ce parc de thème tente tout d’abord d’évoquer un
passé du hameau d’antan et d’éclaircir ceux bornés par certaines
idées fausses et préjudices vers ce qui l’on appelle et moque
comme « les sauvages ». Il y a une allégresse dans ce milieu de
réplique du foyer, une emphase sur l’harmonie qui censément

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fleurit dans l’ère la modernisation et l’assujettissement des tribus à
l’avènement et la domination han. L’exposition souligne le
pastoralisme li, l’animisme, les voies des chamans et chefs mais on
ne voit que cette pâté de huttes au marigot construites de
brindilles, boue, bave et mortaise sous un toit de chaume et feuilles
avec planches de sol, paillasses et, au coin, un grabat à dont
chevet est un tabouret rachitique. Au temps les dynasties en Chine
eurent érigés palais palatiaux égaux en grandeur et ampleur à
ceux à Versailles et à Vienne. Les « habitants », s’habillant en
costumes noires, semblent dépenaillés juxtaposés aux invitées qui
arborent leurs vêtements de marque. On n’a pas de tort de penser
que les touristes n’y sortissent qu’avec une empreinte fâcheuse
bien enfoncée de la supériorité han, incluse de laquelle est la
conclusion que l’envahissement fut juste dans la même façon que
les Britanniques aient tendance de croire en conquête des
Amériques et Australie afin de secourir les autochtones et les livrer
au giron de chrétienté, à la salvation. (Certains ont raison de
soupçonner que chacun projet adossé par le régime veuille gagner
un coup de propagande et gonfler l’orgueil de la majorité, han,
avec la séquelle secondaire d’un éclat de patriotisme.) Il se faut
apprécier les nuances et les rythmes d’une existence rustique et
basique mais cela requiert une sublimité de l’esprit et une astuce,
les deux absentes d’une ouaille de visiteurs plus intéressée dans
les curios comme le poignard d’argent et la carapace de tortue,
voilà l’autre excuse au détail.
Pour un petit frais, on se jouit d’une cérémonie feinte de
fiançailles à laquelle une paire de damoiselles nubiles le couronner
avec un tortis et le chamarrer avec une guirlande, lui servant aussi
une tasse de potion très sucrée et dégoûtante, dans une culture qui
promeut le mariage précoce. Mais l’autre aspect du rituel qui
requiert l’égorgement d’un verrat, ne s’en y inclut pas. Avec les
coutumes en plein éboulement et, dans sa place, la foison de
bidules attirants provenus de la Chine, l’atelier mondial, ce qui
reste serait ces rites dehors de leur ancien contexte. C’est dit aussi
que le trafic touristique au parc a décuplé depuis le début il y a une
décennie et serait la dernière redoute du vrai héritage li. Mais d’ici
la routine ne change pas, un chiffre qu’on ne doive pas brocarder
puisqu’en Chine la houle touristique domestique est remarquable
en reflet de l’essor économique peu vu, une pousse en danger de
péricliter à cause de la nouvelle incertitude globale de laquelle
chaque pays est touché. Les danseurs endurent l’ennui avec ces
pirouettes, girations et ébranles comme marionnettes aux fiches
mais sans aucune expression faciale. C’est assez certain qu’ils
n’empochent qu’une fraction de la fracture encaissée par la
gestion, probablement han, et plus maligne dans les affaires, une
plainte résonnante en travers le pays du Tibet à la Manchourie. Si
l’on était de sonder la réaction évidemment atone des clients,
certains d’eux dans l’auditoire faisant niques d’ennui, on serait sûr
personne n’y reviendra. Désolé est le contraste au grand hall
d’exposition dehors Honolulu, une fois le palais de la monarchie
hawaïenne, qui fête un héritage perdu et explique en texte, photos
et objets caducs mais instructifs du pays avant le glas sonna âpres
une insurrection engendrée par une cabale américaine dans le
19ième siècle. Le show finit et les foules, incluant un groupe de
Russes, s’égaillent, certains affluent au top d’une venelle pour

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explorer une sente qui sillonne une jungle (un lieu d’être tout évité
si l’on a frayeur des moustiques, punaises, fourmis géants et
scolopendres partout fourmillants et vénéneux) ou prendre une
glissade aux poulies en travers une ravine et en presque frôlant le
top du feuillage. Au bas est en fait un vrai village d’où l’on puisse
entendre aboyer des clebs galeux et voir fouger des coqs dressés
pour « le sport » cruel duquel la gageure fait rage. Il semble que le
parc englobe entier un patelin pour effectuer l’authenticité.
Croisant ce bled est un ruisseau dont l’eau clapote à la bordure
d’un verger de manguiers, inonde via chenal légèrement endigué
l’étang où pataugent des canes dodues et presque frise les seuils à
glaise des paillotes. Dans cette retraite vallonnée, un tel hameau
retient encore son autonomie rustique si prisée par les vieux sages
lis agrippants aux voies anciennes et menacées, oublieux au reste
du monde, voire aux touristes trapézistes qui s’élancent en travers
leur ciel. Quant à ma femme, elle repère se prélassant à son pied
sous le soleil, pas personne, plutôt un scinque de stries vertes
luisants et capte son image.
La virée et fouille à l’anthropologie conclut. Un gendarme trapu
et camard enfourchant une motocyclette sur béquille lorgne les
gens en portant ses lunettes de soleil et faisant pose cool d’un
sheriff américain comme dépeint dans ces films hollywoodiens et
ces policiers auxquels des Chinois sont dévots. Un flic dans ce lieu
est plus enclin de chasser des gueux plutôt qu’empêcher un mineur
larcin, la forme de plus commune est le pickpocket duquel les
chalands visiteurs pâtissent autant. C’est parfois en posant comme
épouvantail d’apeurer les voleurs et d’assurer aux visiteurs la
sécurité. Le monde actuel est pareil à celui rendu sur pages de
Charles Dickens (« Oliver Twist ») et de Victor Hugo
(« les Misérables »). Esther ne suinte que gouttes de suée mais je
suis beaucoup plus ventilée, sans jamais besoin d’aucun déodorant.
Je louche au trafic grouillant humain et espionne les gens en se
chamaillant, surtout ces couples. C’est mythe que les femmes se
soumettent à leurs maris, à moins dans la classe d’aise car les
épouses se grèvent de la responsabilité aux dépens, pas seulement
du ménage mais des affaires. On a raison de redouter ces carognes
vicieuses à la défense de la niche et la cagnotte avec une farouche
ténacité qui gène leurs époux trop faibles et moins fiables. Donc le
rapport contentieux chez mes parents n’est pas le moins unique
qui s’insinue encore aux conduites de leurs enfants.
Voici est l’autre saison de la cueillette et la cocagne. Les guides
tentent de rameuter leurs traînards tirés aux étals et éventaires,
surtout à ceux du maraîchage qui vendent un assortiment de
prémices exotiques (aux nordistes) très délectables et peu coûteux
(relatifs au renchérissement sévère urbain) comme pomelos,
papayes, fruits à dragon entarté en cosse épaisse d’orties et
dariens, une sorte de melon avec chair spongieuse piquante
emballée dans une coque dure et hérissée de pointes. Certains
touristes les achètent en vrac et sans chicaner. Je ne raffole du
dernier mais suis friand du premier. Moins savoureuses sont ces
viandes sèches et racornies de gibiers, même une compote de
porc. Reste au marchand finaud conscient du pognon accru des
visiteurs de la capitale en boum et de leur faim pour ces produits
rarement vus au nord à engouffrer chaque brèche, besoin et niche
de commerce en Chine. Jonchés partout sont des pépins, papiers,

18
plastiques et écorces en charpie pour les charretiers et éboueurs
malgré la présence des poubelles. C’est dit des gens plus cavaliers
vers la planète qu’il ne nuise pas à l’environnement si ces ordures
organiques étaient simplement enfouies pour laisser travailler les
microbes mais vraiment quand le préalable à la défense du monde
naturel serait plus de respect ?
Nous ne lanternons pas, férus les deux d’y fuir et sa cohue. Les
femmes sont chics mais jamais les hommes, certains d’eux ventrus
s’affublant en shorts et chemises criantes et bariolées, hawaïennes
fausses. Esther les trouve nais et gênants et, moi, naïfs et
amusants, leur accent et leurs voix montent au crescendo
d’excitation, heureux jocrisses, nouveaux riches. Ma femme renâcle
à leur argent si récemment récolté et donc entaché. Elle déteste
leur crudité, leurs traits coriaces, juxtaposés aux siens tels raffinés
et tout de ceci l’aggrave. Mais cela est snobisme d’un type j’avais
aussi discerné dans mes amies qui étaient pimbêches d’une sorte
de l’autre. C’est un délice d’être témoin aux frictions de classe dont
les dynamiques font une étude en sociologie captivante. Les seules
qui ne dédaignaient personne étaient deux issues de la petite
bourgeoisie qui mélangeaient et acceptaient ceux, cependant
revêches, trimaient pour améliorer leur station, ceux les arrivistes
et parvenus. Quant à l’autre paire, elles étaient prétentieuses
d’intellect qui est un type voire pire pour le manque de richesse ne
démentit jamais un sens de supériorité acquise de la connaissance,
pas de naissance. Ces gonzesses de ma jeunesse libertine
m’avaient éduqué à ces fissures de classe, à leur afféterie. Ces
expériences avaient aussi affûté mon sens du monde tel complexe
et nuancé. Chaque moment avec une était un guignol. Maintes
étaient ces incidences trop nombreuses d’en élucider maintenant
que j’avais vu la folie de la bigoterie parfois si subtile, pourtant si
puissante, en moulant mes perceptions du rapport humain. A
chacune d’elles, ma gratitude pour la richesse ne pas du lucre mais
de la compréhension sociale et les rires qui ne cessent pas me
chatouiller en réflexion.
En route tordue encore avec Deng au volant s’est une aventure
qui dresse les camails et la pression de sang. Le taxi dégringole des
collines en brimbalement et se décoche si rapidement qu’il fait
mitrailler des cailloux et crisser les pneus. Ces sièges en voiture
sont peu rembourrés d’amortir les soubresauts dus aux virages,
freinages et accélérations qui s’attaquent à mon dos encore tendre
d’une entorse. Ma femme m’accoude pour gagner un sens de
certitude. J’ai déjà eu à baisser la glace d’aérer l’intérieur du taxi et
bannir le relent rance de cigarette émanant du chauffeur qui a
fumé avec ses copains durant ma vadrouille au parc. Le coup de
vent rend échevelée ma tignasse à laquelle Esther dépeigne aux
doigts en geste d’amour. Ce fou aime côtoyer les tracteurs
agricoles et sonner le klaxon pour manifester son impatience. En
ses manœuvres erratiques, il percute presque une vache portant
une clarine qui s’écarte soudainement a la chaussée et lui vire
juste assez pour éviter un accident. La bête s’ébroue au démon qui
se carène à sa croupe. Est-il Michael Schumacher ? S’habillant d’un
jersey rouge au dossard 23, le nombre désuet du sorcier au
« hoop » (la nasse de basket-ball) Michael Jordan, Deng ôte
toujours sa ceinture, quoique nous nous en agrafons pour nos vies,
seulement de veiller boucler à la mire d’un policier imposant avec

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sa vareuse militaire d’épaulette et sanglant d’un baudrier ; mais
ceci n’est qu’une nuisance à lui car il la désemparer à nouveau
quand la figure d’autorité (et, pour lui, mépris) disparaît de sa
vision. Je ne lui déguise pas mon appréhension, non plus. Il pivote
pour m’affronter en disant comment il connaît chaque courbe de
chaque route et comment je devrais lui monter la confiance. Deng
est chauffard d’enfer. Je lui promets cependant un pourboire
suffisant si seulement il ralentit puisque je ne sois pas tel pressé
pour le temps et je veuille de jouir le paysage. Quand on galvaude
le monde, on doit se débrouiller et apprend aussi de s’adapter aux
bizarreries qui s’en y ensuivent. Sûrement plus il m’en incombe de
protéger ma famille à quelconque coût.
Rien de cette querelle ne surprend quiconque familier avec la
folie en volant partout, surtout dans ces pays sans aucun soin à la
sainteté des personnes. On peut chercher des bilans d’accidents
atroces rapportés quotidiens. Une détente atteinte que nous nous
tassons aux comptes à la fin de la journée, y compris le pourboire,
qui est à dire le pot de vin, nous reprenons notre route vers la ville
de Sanya en cabotant le large. Surgissant de la poussière qui se
monte des chantiers et des champs sont ces bâtisses de qui seront
condominiums adjacents aux hôtels. En route sont ces essaims de
motos qui bourdonnent comme abeilles agitées aux ruches sous
l’attaque. On ne faille pas voir ces foules de jeunots oisifs assis sur
tabourets, fumant et jouant des jeux de cartes, durant leurs
longues siestes dehors ces troquets. Deng nous explique que ces
bastringues viennent à la vie avec le coucher. On ne cherche pas
de taverne ni guinguette quand on à la faim d’étancher. Nous
pausons la promenade à voiture au coin d’une bretelle détournant
de l’autoroute et arrivons au restaurant orné d’une enseigne
criante qui nous offrit un étal des poissons, crabes, langoustines et
mollusques maintenus vivants aux aquariums pour laisser aux
clients une vue et une sélection des victuailles. Le prix de
quelconque n’est pas fixé et on pourrait chicaner, non, chinoiser
(c’est la Chine) qui approxime un sport. C’est Esther qui identifie
notre repas – un petit mérou écopé de la cuve à la résille pour
m’indiquer qu’il soit frais, une poignée de crevettes et mouilles
vertes et une sorte d’épinard sauvage. Je n’aime pas regarder se
tortiller ces animaux dans leurs finales affres et donc je hoche ma
tête à quelconque qui est présenté pour hâter la cuisine. Une jolie
et svelte serveuse peu plus ainée que notre gamine verse notre
thé. Cette fille gagnera un pourboire assez généreux d’esquisser un
doux sourire à son minois. Elle se fasciné de nous, le seul couple au
restaurant, qui nous attablons en parlant une langue étrangère et
or l’abordons plus poliment en mandarin d’un accent cocasse et
inouï dans sa région. Les plats hainanais sous l’influence cantonais
et légèrement assaisonnés sont tolérables à notre palais mais pas
délectables selon le standard auquel nous sommes accoutumés,
sinon gâtés, nous gourmands toujours ardents aux goûts exotiques.
Deng qui s’est déjà prélassé au sofa du coin chez restaurant et qui
a bavardé avec le cuistre dans un dialecte li, peut-être miao,
duquel je ne comprends pas un seul mot est prêt d’y partir. Il me
dit que le restaurateur m’a truqué mais je n’ai pas rechigné à la
facture en surcroît, sachant comment je ne suis pas dupe et suis
parfaitement content de ne pas chipoter qui risque toujours
d’esquinter l’humeur.

20
La route assez nouvelle d’ici à la destination prochaine est
grêlée de fosses qui apparaissent abruptement et sans aucun
avertissement. Ma secrétaire m’a suggéré de conduire une voiture
de location pour l’aise en faisant halte à mon gré mais cela
sûrement aurait été une mission de folie, sinon suicide. On se
détourne du chemin principal pour se diriger au bout d’un
promontoire qui marque la pointe la plus sud de l’île au lieu de
Jinmou qui saillit à la Mer de la Chine méridionale. Ce qui était
auparavant un affleurement de roches en commande d’un
panorama accessible à tout le monde est bien sûr rendu au parc de
thème. On doit joindre une queue de touristes et payer pour
l’apanage de marcher d’abord sur un boulevard qui se mène à la
rive et un grotesque statue dans la forme d’un astrolabe étayée
avec un socle au granit. Monnayer chaque forme d’attrait est
devenue la religion étatique et interloquant à ceux las de
l’exploitation. Ce qui était naturel est maintenant entaché, abîmé,
pour justifier le prix d’admission et pour prouver comment les
Chinois peuvent tout dompter et contrôler. La côte se ceinture d’un
rang de balustrades à gypse lisse sans chaque encoche et dans un
motif floral et pourtant l’autre statue, gris, qui n’est pas abstraite
plutôt en tribut douteux au général han dépeint glorieusement sur
selle qui commanda ses troupes de conquérir Hainan. Tout de ceci
triomphalisme est gênant et est plus de mythologie qu’historie.
Peut-être ce grand maréchal, j’espère, ne tua les natifs et, plutôt,
les soudoya d’étreindre ou d’acquiescer le mandat impérial. Ce qui
n’est pas douté cependant fut que l’armée japonaise eut
massacrée une tierce de la population indigène du Hainan pour sa
témérité de joindre les résidentes hans en resistance pourtant
encore à l’autre empire, un carnage rendrant pâle l’invasion nazie
de la Russe et fut juste de l’appeler un génocide. Ces jungles ont
néanmoins la magie d’escamoter, d’effacer, de balayer ces traces
de tragédie comme une lavette sur vaisselle. On peut oublier tout
en admirant et captant via Sony ces frondes de palmiers qui
penchent sur les vagues clapotantes rythmiquement les sables
d’une plage. Esther et moi, nous traversons des ruines de ce qui
aurait été un bureau d’administration maintenant abandonné –
abandonné comme la simplicité rustre et gratuite.
Accéder Sanya nous requiert de croiser un pont qui enjambe,
une ville entrecroisée des chenaux qui aident à la navigation et
abritent les flottes de pêche et plaisir. Il semble qu’à l’approche de
l’orage ces bateaux y ont embouqué et sont encore amarrés au
quai. Serrant les littoraux sont ces appartements encore neufs que
mon beau-frère Franklin, un banquier d’investissement, avait
imploré ses clients d’en agioter après son seul arpentage et sa
conversion à la cause. Le trafic s’alourdit et s’épaissit à l’entrée et
enfin le milieu est urbain. Deng nous emmène au quartier de
chalandise où les boutiques ne différent guère à celles ailleurs et
mêmes vis-à-vis aux échoppes et kiosques du marché, où les
piétons grouillent, où ceux d’une nation auparavant frugale
plongent dans la frénésie de shopping pour ne se prouver des
rapiats. Ce qui nous y attire cependant est un MacDonald’s dont
toilettes sont plus propres à l’hygiène occidentale. (Bien sûr
l’arche symbolique de la chaine au fast-food s’est devenue un
véritable pactole, étant la plus profitable quelque part pour
l’empire McDonald’s. Certains l’appellent « l’orpaillage » de

21
l’alimentation, une entreprise de grande échelle à laquelle l’avidité,
l’art de marketing et la standardisation s’imbriquent et s’enfoncent
pour maitriser un vaste marché.)
Le gouvernement l’avait déclaré, Hainan, la zone économique
spéciale la plus grande en 1988 pour l’atteler aux reformes
capitalistes et, voilà, le symbole du progrès est le consumérisme
effréné et la spéculation de fonds et de biens. Jamais ladre, on ne
souhaite néanmoins pas s’y attarder pour dépenser et acquérir ces
choses et on ne veut pas en y fouiller malgré l’impulsion de sa
femme à chiner. Sanya nous laisse insouciants et ardents de
retourner au chemin. Les autorités municipales ont essayée de
rebouiser Sanya, site du carnaval de Miss World depuis 2002 et par
la suite presque chaque décembre qui contredit tout qu’oppose au
système censément communiste et puritain en Chine. Parfois ces
affaires de paillettes, tapage et glamour encourent le courroux des
sages locaux en peur pour l’égarement des mœurs qui déplorent
ces changements peu sains mais ils sont la minorité dans un
monde éberlué des mannes du ciel. « Sanya vous épate ? »
demande-t-il, Deng. « Oui et non, » sonne la rétorque, « Oui au
niveau de développement mais non au paysage qui m’ébahit pour
son manque d’unique. On aurait ici sans la moindre conscience
qu’il est Hainan et ne pas quelque part d’ailleurs en Chine. » Je ne
suis pas certain que Deng reconnaisse comment j’éreinte sa ville
natale, se leurrant que ce contraste fait aux villes comme Shanghai
et Shenzhen soit un éloge. Dans le centre de Sanya, une ville
crâneuse typique de la Chine moderne, on se sentit mis à la
camisole de force et il n’y aucune chose qu’on veuille mais y
échapper pour respirer encore. Je lui confesse, Esther, que je
partage parfois le verdict facilement exprimé par Yo-yo : la Chine
crasseuse et barbare m’effare comme un épouvantail, un succube,
un pays qui laisse envenimer l’air, l’eau, les produits pour le profit,
qui extrait l’argent sans aucun soin aux conséquences, qui me
revendit comme fils dû au sang, une idée à laquelle je me rebiffe
avec chaque fibre de mon être.
La trêve atteinte avec Deng ne perdure pas dans la face des
tentations de foncer. Cet émule d’un champion fou de courses
conduit le taxi en travers d’une futaie de tek et de santal qui flaire
l’air et entame d’accélère, puis répond aux appels téléphoniques et
tape des messages de texte sur l’autre gadget, oublieux aux
conditions en route en se faufilant dans un convoi de camions
bennes en forte pente. On connait ce type, maitre à la
débrouillardise, toujours avec des soldes dans la soute et des
affaires arrangées. Je respecte ceux qui vivent d’expédients mais
seulement ne pas à mes dépens. Nous en avons marre de ses
cabrioles trop aléatoires et lubies et sans aucun souhait de tenter
le sort et être victimes d’une estocade d’accident. Je lui ordonne de
nous emmener à l’hôtel puisque ces quatre heures et demie dans
cette véhicule, non, ce cercueil au rouage suffit de nous convaincre
de la folie. Ce taxi téméraire semble obligeant, sinon extatique, de
nous quitter plus tôt, nous tapote pour l’argent ensemble avec le
pourboire promis afin de rejoindre ses copains. A ce point, j’ai
perdu tout intérêt en explorant plus de Sanya et ses alentours dans
la chaleur poisseuse. Deng nous trouve un raccourci en sillonnant
un parc national et dirigeant ce tacot prêt pour la casse à la rangée
des palais sur la rive de Yalong. Ses voies de conduite risquaient de

22
faire gripper le moteur voire si la Volkswagen à taxi était tout
nouvelle qui était rare dans cette région. Nous comptons les
minutes jusqu’à l’arrivée au foyer du Marriott où déjà les golfeurs
ont fini leur tournoi et salue leurs femmes. Tout est plus languide
dans l’après-midi quand enfin le soleil perce les nuages et, avec
une fente ouverte, projette un nimbe, puis une vague suggestion
d’un arc-en-ciel pour, durant notre absence, il y avait une brève
trombe. Esther rémunère Deng de qui je ne peux pas blairer. C’est
toujours moi qui lui laisse, ma femme, ces taches gênantes car je
suis couard social et car je n’aime pas manier le pognon et régler
ces factures qui s’amoncelaient à leur échéance quand j’étais plus
jeune et pas marié.

Ces soirées d’oubli


La pénombre à Sanya va bientôt s’y impose. Les clients
pullulent au salon du hôtel puisqu’il est vendredi et ces gens
s’assemblent pour assister à plusieurs conventions et retrouvailles
en train de se mettre en place, y compris celles accueillantes des
cadres des sociétés de Swire Pacific et Bayer en Chine. Parmi ces
avantages accessoires de leur appartenir est cette chance de faire
la bombance. Personne n’organise ces ripailles comme les Chinois
qui aiment s’affairer aux tables de festins et offrir ces toasts
interminables pour corser leur esprit de corps et pour s’enivrer. On
ne pourrait pas sûr des négoces dans l’état de pompette mais peut-
être l’objet de l’exercice n’est jamais le travail mais la carrière qui
marche plus aux rythmes d’amitié que de compétence. Il y a un
proverbe, sinon une litote, que peu importe quoi l’on sait et tout
importe qui l’on connaît. Nous filons à l’élévateur pour échapper
des foules entassées au comptoir pour accéder notre chambre sur
le sixième étage dédié à nous, les uns phobiques aux fumes. Je les
vois « avec », pas « sans », broncher avec les chopes sur leurs
lèvres, leurs voix hautes et leurs manières revêches. Esther se jette
à sa couette trop douillette en presque collapsus car elle n’endure
bien ces pressions de voyage sur ses nerfs et stress sur ses joints,
surtout ses genoux ; allume le téléviseur et lampe d’une bouteille
gratuite d’eau. Je viens d’entrer la cabine vitrée de douche pour me
laver le corps plus pour nettoyer totalement les poussières et suies
âcres d’une contrée beaucoup plus polluée et jonchée d’ordures
que j’y avais imaginé, un coin d’Eden entaché. Comment, on
s’exige, une contrée verdoyante se laisse sombrer en tas de
gravats et de boue sans la moindre conscience de la contradiction ?
Même nous évitons le grand restaurant qui rouvrit au soir et
met fin à l’accalmie. Pas de doute que ces polichinelles y iront,
chacun arborant un badge d’identité comme bétail tisonné et
ardent de s’aboucher au réseau ; chacun même parlant un langage
grossier de le profit d’être égrené et investi ; chacun dont gueule
rougit après les plus deux verres de cognac Martell Cordon Bleu,
une marque plus estimée. Je redoute de me mêler voire par
accident avec ce type auquel chaque occasion se tourne en
avançant de business. Esther est plus lui sympa, un groupe qui
gagne des contacts et des gueltes. Le sport de golf, l’abonnement
au club et voire ces vacances ne sont que chances pour les
hommes et femmes d’affaires de s’emboîter et de vendre chaque
chose ou chaque service. Elle les tolère si seulement parce que son

23
frère cadet est vétéran du circuit de courtage dont réseau
s’entrelace étroitement et forme une classe. J’ai choisi longtemps
d’en y esquiver afin de m’assourdir aux bruits, baratins et
boniments incessants qui émousser mes sens. Pis cependant est
qu’il y ait un embarras si je tamponnais quelqu’un connu du à mon
boulot, donc m’astreignant d’engager dans quelque parlote contre
mon gré et d’empiéter à ma paix d’esprit. Quels plaisir et privilège
on savoure ne pas avoir plaire à personne. Maintenant il me faut
clore mes oreilles aux bruits déprimants à l’âme si seulement
durant cette cassure de la routine. « On palabre mais juste pour un
gain et c’est ainsi un investissement du temps, » explique-t-elle
lorsque nous entrons l’autre restaurant de luxe au décor art deco,
un qui servit la cuisine vietnamienne et qui nous rappelle comment
y proche est l’Indochine. L’endroit est presque vide à cette heure.
Juste deux couples s’attablent. Nous sommes le troisième
d’entendre une bande de guitare, saxophone et trombone conjurer
les blues avec des rengaines au swing jazz des années 1930, les
plus évocatrices étant celles attribuées au maestro et clarinettiste
Artie Shaw et son orchestre : « Summer Time » (le temps d’ete),
« Rosalie », « Star Dust » (les poussières d’étoile) et « Begin the
Beguine » (Entamez la béguine). La dernière était, non, fut un des
berceuses qui ma mère m’eut appliquée. Ces sérénades
appartiennent à la génération de mon grand-père et pourtant j’en
connaissais, en sifflais, en fredonnais et les aimais dans ma
jeunesse, écoutant ces sons d’antan aux microsillons. La musique
est certainement meilleure que les plats sans flair, plutôt crevettes
embrochées à canne sucrée et écuelles de nouilles avec bœuf
légèrement pigmentées. Tout de ceci se fait une cassure des
fadaises et sottises en train d’apparaître dans l’autre restaurant où
la musique est le son de l’argent et des avantages troqués quand
cette villégiature s’en agit une brisure.
Nous déambulons de main en main sur la pelouse et aux bords
des piscines rendues romantiques par lampions et étoiles, la
planète Venus étant la plus distincte d’un ciel clair et dans une
brise qui assèche l’air et nous rafraîchit. Enfin l’ambiance ravive
ces mémoires de Waikiki en décembre 2001 lorsque, solitaire, je
m’étais promené la longueur de la plage dans une condition
identique avec le son distant des vagues clapotantes sur sable et
se tournantes en écumes sous la lumière lunaire. Dans l’eau
rendue bleue par ces veilleuses, quelques novices de natation
essayent de faire brasses, gloussants à la futilité de leurs efforts.
Un couple, l’homme blanc et poilu, la femme chinoise avec sa
chevelure presque au hennin (coiffure renouée par Sarah Palin, la
colistière de John McCain ?), moins discret se pelote au coin caché
de la vue ou donc il se leurre. J’évite l’esclandre en détournant
l’attention d’Esther, pudique, timide, au défaut, qui s’acquitte avec
aplomb ou l’apparence de calme. Enfin nous avons fouillé la vraie
paix et mis en suspens nos brouilles maritales souvent provoquées
par nos différends vers l’éducation de notre gamine. Esther se
tracasse plus d’une fille qui chiale au bord de la piscine due à
l’agression de son frère bravache et espiègle. L’instinct maternel
reste fort. Je me réjouis en observant ces signes et gestuelles. Ceci,
une pause au guignol, m’épelle assez d’un soulagement. Ce palais
de loisir est construit pour ce but en guérissant les troubles
affligeants l’esprit. On a même raison de remarquer comment le

24
monde évolue car, jadis, un tel endroit huppé était dehors les
moyens des Chinois et parfois certains étaient y éconduits mais
maintenant ils sont la clientèle dominante. Cette et d’autres
couleuvres avalées étaient le prix au développement et puis à la
revanche. Etrange aussi est que Hainan servit comme bagne et
lazaret lointain, même exil éloigné pour la Chine, ancienne certains
des forçats furent faits presque esclaves et colons en établissant la
présence han et en suite délogeant des natifs. Tout ceci aboutit à
ce temps quand ceux du continent s’y assemblent afin d’échapper,
gambader et dépenser. Un lieu dont nom évoqua l’effroi de
bannissement est aujourd’hui vu comme une idylle de luxe pour la
nouvelle classe aisée. Voici fut une prison jamais barbelé ni doté de
miradors, fortins et argousins, pas voire guérites, car il n’y eut un
havre à la ronde, les murailles étant-elles ces jungles, une mer, une
garnison et la sauvagerie. Où put on y fuir ? Ce qui fut censé
châtier tourna en occasion pour un groupe avec l’habilité et bon
sens d’accroître son économie via les entreprises et donc pas de
surprise comment Hainan attirait dès années 1980 ces
investissements ailleurs tabous en Chine supposément communiste
et ouvrait d’être déclaré une province séparée de Guangdong, en
quarantaine de l’ingérence de Guangzhou (Canton). Ce rôle
historique comme une place écartée, exotique et exceptionnelle a
abouti à la transformation capitaliste. Ces gains hanainais
affectaient la Chine entière qui gravitait à chaque méthode de
recueillir et serrer d’argent sans aucun scrupule en évidence, nulle
peur des conséquences.
Quand en 1982 le régime chinois avait avalisé le plan de
construire le premier hôtel au style occidental depuis la Révolution
de 1949, il n’envisageait pas de l’échelle, la grandeur, l’opulence
d’un tel palais. Je suis chanceux d’avoir été client de cet hôtel
White Swan (le cygne blanc) comme chroniqueur, guide et
interprète à la délégation commerciale américaine ignare en 1984
durant sa première année d’existence et d’être maintenant un
employé du magnat défunt, Henry Fok, dont vision de la Chine est
en train d’être réalisée. C’était une ère confuse quand la nation
luttait de se réconcilier aux changements de modernité mais avec
crainte et ambivalence. J’étais une source de connaissance et de
curiosité aux hôtes chinois avides de serrer les visiteurs bien lotis
et de me poser beaucoup de questions parce que j’étais Han et
pourtant pas compatriote. On reconnaissait que la Chine
s’embarque sur un voyage réformiste précaire et encombré des
écueils et on n’était pas sûr des séquelles au virage en direction
avec implications pour l’entier monde. Il n’y aucune boussole ni
aucune carte de route ni aucun phare, juste une foi et un espoir en
naviguant à tâtons. On étant avisé devait louer l’ambition d’élever
la nation de la misère qui voyait croupir l’économie et pourtant
avertir des impacts nuisants à la cohésion nationale – toujours un
souci pour le gouvernement central. Il ne requérait puis pas de
génie à prédire comment et combien le pot-de-vin, le piston et la
vénalité rampante seraient des produits de la libération de marché
dans un pays où telles tendances avaient été capées par un
puritanisme et disette sauf aux dirigeants comme Mao Zedong, ses
sbires et acolytes touts richement servis et dorlotés. (L’hypocrisie
grattante est plus vive sous le communisme que le capitalisme car

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le dernier ne masque mais fête le credo retranché de l’argent
suprême.)
L’aérophage qui fut le Politburo dicté par le nain physique
mais leader géant, tête comme citrouille, Deng Xiaoping, deux fois
purgé ce briscard de la guerre civile, n’hésita pas de prendre ces
risques car il eut parié pour l’astuce indéniable et l’avidité
irrépressible des Chinois. Le impérieux soutien sans équivoque il
eut demandé de ses adjoints fut en 1978 accablant, retentissant et
irrévocable qui eut impliqué le limogeage de ses rivaux maoïstes
afin de terminer ces empoignades politiques et lui eut octroyé des
finances cependant maigres d’engager les capitalistes chinois
d’outre-mer (tel le magnat Fok) via partenariat en frayant la Chine,
une région au temps avec l’île de Hainan étant parmi les
premières. J’étais ainsi quatre années après le déclenchement des
reformes, duquel beaucoup de progrès découlait en suit, un témoin
aux conséquences d’une révision drastique en Chine, me logeant
dans l’hôtel White Swan muni avec chaque aménité désirée (voire
une chute d’intérieur à laquelle attiraient ces badauds paysans
abasourdis, poussant au côté ces huissiers accoutrés et engoncés
en vareuses ridicules cousues des écuissons) sur l’îlot de Shiamin,
une enclave britannique dans le 19ième siècle, en surplombe du
fleuve Perle. Tout de ceci symbolisait la quête et l’ambition d’une
nation ravivée de monter comme un phénix. Cet ancien pays,
différent à ceux dans l’ouest, ne s’obère pas des dettes plutôt
acquiert une telle abondance des réserves et des enjeux en bons
américains pour étayer son futur. Le truc est toujours de ne pas
brader des fleurons nationaux pour ces gaines de courte durée, une
erreur trop souvent commise par certains états. Les dirigeants
étaient déjà assez astucieux aux moyens capitalistes et ciblaient de
faire ces décisions et les exécuter qui leur étaient profitable en
argent et en puissance. Cet hôtel Marriott est un exemple de la
puissance chinoise grandissante d’extraire du dehors l’expertise et
l’investissement pour créer chez la Chine une industrie, ceci étant
le tourisme une fois visant aux étrangers et maintenant ciblant les
locaux de fonds. Je me souviens de ce qui m’avait dit un official en
1984 comment les dirigeants voulaient faire vivier de talent
tenancier et managérial du White Swan afin de l’émuler, le
dupliquer, et s’en emparer et s’obstiner, sachant que ces secrets
commerciaux peu bornés soient dans leurs mains. Mission
accomplie.
Dans les années 1980, quand le gouvernement libérait le
mouvement des gens, les voyageurs chinois apportaient leurs
denrées en baluchons et portaient des haillons invariablement
verts ou bleus aux gares miteuses et auberges minables; ces jours,
ils se défilent en vêtements de griffes. On n’attige pas à dire le
peuple était une racaille de ploucs mais encore déterminé de
s’avancer avec une volonté farouche. Bientôt un bal costumé va
déferler dans le grand hall sous chandelière de cristaux avec ces
couples qui s’affublant en robes et ensembles. A la fin de la
bombance et danse une vente aux enchères va se tenir pour
recueillir plus des fonds afin de bénéficier les rescapés du sinistre
séismique en mais au Sichuan. Cette voie de vie est à la pleine
rage parmi ceux de la haute classe adorant l’élégance évocatrice
d’un temps longtemps écoulé à Shanghai, la capitale de jazz en
Asie durant les années 1930 à la veille de l’invasion japonaise

26
lorsque une soirée pallia le sens de tracas et craintes toujours y
régnant. Je remarque sur le pareil à cette ère d’incertitude et de
vicissitude quand le monde semble en train de péricliter,
d’effondre, sous les poids de l’excès capitaliste. Encore, d’ici, les
champagnes ne cessent pas d’être mis sur glace et de pétiller ; les
bijoux et montes suisses miroitent ; la musique de valse ne s’arrête
pas et ces soucis financiers se volatilisent. Nous empruntons une
route plus sereine et abritée des frondes à palmettes imbriquant
qui suggèrent une tonnelle tropicale pour regagner l’hôtel avec elle
prête d’aller au spa et moi au gymnase, avec elle voudrant masser
son genoux boiteux et moi me tonifier, avec les deux en cherche
d’une cassure de l’autre. C’est la condition d’un mariage à 20
années bien écoulées auquel on ne s’épanche pas que nécessaire
en deçà de la prudence pour peur d’une dispute ou d’un
malentendu. N’est-ce pas vraiment qu’il soit le surcroît de
familiarité qui rabaisse la valeur d’une union, qui induit l’ennui et
qui cause le mépris, les forces ensembles en combinaison afflouent
l’institution de mariage ? On n’est pas amer plutôt réaliste de
savoir qu’un vieux couple ne retienne guère la fougue, beaucoup
moins la foudre du premier coup quand tout devient une routine
démunie à l’excitation, à l’espérance, sonnant donc le glas au
bonheur avant censément en abondance, soit vraie, soit fausse.
Mes paupières sont lourdes comme plombe lorsque la lumière
de la fente au rideau me réveille. Ce matin entame avec un
mélange de soleil et nuage et illumine clairement le paysage des
parages dominés par ces acres de la verdure réservées aux hôtels
et aux terrains de golf. L’isolation est censément splendide et
anodine pour créer et soutenir l’illusion qu’ici est Hawaii, cependant
ersatz. L’essaie d’imiter l’état enchantant polynésien est plus
évident a la plage où les vagues déferlantes roulent, clapotent les
sables, écument en glaires et embruns sur lesquelles des surfeurs
s’ébattrent au zigzag. Nous bouffons plus rapidement au petit-
déjeuner. Puis nous ôtant la sortie-de-bain de strie bleue et blanche
issue de Marriott, nous habillant dans nos maillots, nous ayant
induit de lotion, Esther et moi, nous rejoignons une foule
occidentale qui folâtre, patauge et nage. Ma femme se contente de
flâner et sentir les ressacs essuyer ses genoux, croyant que la
saumure est thérapeutique pour ses joints et sa peau mais est
pourtant dangereux de s’y plonger. Ce cabotage n’étend que 20 de
minutes avant nous reculons de l’eau de la nature à celle
maintenue et filtrée dans la piscine d’infinité dont profondeur
atteint son menton et lui pose pas d’aléa. La mer l’apeure, ma
femme, qui y voit le danger alors que j’y discerne la promesse
d’aventure et de mystique. Elle s’enorgueillit d’être prudente et
donc ne prend le moindre risque aquatique quoiqu’elle soit toujours
insistante sur la natation sportive pour notre gosse. Je me confesse
au plaisir de me cacher arrière une courtine d’eau qui est la chute
artifice à l’alcôve. Nous nous souvenons et sommes appréciatifs
d’une ouvrière qui hier soir était vue nettoyer la piscine avec un
filet pour attraper ces insectes, surtout dytiques, tirées à l’eau et
les veilleuses qui l’illuminent. Aux étangs et marigots on peut
compter sur les essaims de libellule de chasser ces punaises mais
d’ici cependant la défense, comme l’environ, est artifice. Dans ces
tropiques chaque chose s’éboule, pourrit ou moisit que tout ait
besoin de maintenance constante, même le corps.

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Nous notifions encore le couple audacieux à la pelote de
piscine, le blanc et sa femme chinoise. Je l’entends lui parler en
français, accent belge, en exhortant sa jeune mariée aussi en effroi
aquatique de surmonter une phobie totalement psychologique. Au
bord sous un grand parasol et sur chaises longes sont les parents
de l’épouse si fiers de leur gendre qui leur finance ces vacances et
qui les abordent avec déférence en français, sauf ces titres de « ah
ba » (père) et « ah ma » (mère) avec la damoiselle ingénue agitant
l’interprète. Lui et moi, nous nous saluons ; il me dit qu’il s’appelle,
Albert, un bruxellois, ingénieur embauché par une société française
avec un contrat de travailler à Shanghai et ses alentours où il a
rencontré sa femme, collègue et ancienne étudiante en Suisse. Je
lui remarque, Albert, comment « le monde ne cesse pas de rétrécir
et ainsi augmenter notre cercle d’accointance,» à laquelle il hoche
sa tête et me consentir l’observation. « Laissez-moi, Albert, de vous
aider prendre une photo de votre famille toute entière, » lui offrit-
on en geste amical. Esther le loue à la générosité du Wallon accort,
disant comment elle espère qu’un jour son futur gendre lui monte
le même respect filial.
Ces deux heures vont bien et à tire d’aile. Nous nous attardons
et baignons un tel long temps que nos peaux se rident, écurées
vraiment de notre dernière trace d’un bronzage. J’y grimpe, de la
piscine, ayant éclaboussé et glissé sur chaque carre. Esther est
plus réticente de gravir et, en me joignant au café qui se perche
proche à la piscine, elle s’assécher avec l’alacrité d’un labrador en
s’ébrouant et est rapide aussi en se cachant sous une serviette-
éponge épaisse, ayant honte de son corps dodu, une figure avant
telle parfaitement roulée est maintenant potelée, sinon
plantureuse. « Peu importe ! C’est juste la chair qui réagit à la force
de pesanteur de laquelle elle a bravé en jeunesse ferme et allée, »
siffle-t-il, un mari sans trop de souci à l’effritement physique. « Ma
bedaine me gêne, » grogne-t-elle avec un regard d’entre dégoût et
désespoir en voyant le reflet sur miroir de son ventre et ses fesses
protubérantes, un regard bovin. Pourquoi, on se demande, une
dame comme elle se secoue à ces inévitables ravages en
vieillissant avec moins de grâce, en s’écriant au contraste d’entre
la soie du passé à celle de l’avenir et en déplorant comment elle ne
peut pas reconnaitre ses photos d’antan et comment elle ressentit
de honte. Telle est la peine aggravée par la vue de ces panneaux
d’avertissement partout qui s’adornent des mannequins à la
physique parfaite due l’aide de Photoshop et par l’industrie de
vanité. Les épreuves de la dégénérescence sont dures assez sans
ce persiflage émanant d’une culture qui fête la jeunesse et ses
simulacres.
Les nuées viennent d’obscurcir le ciel lorsqu’on y déguerpit,
laissant la piscine à la marmaille d’enfants surchargés d’énergie
aux gambades. Après la douche, on passe bien la sieste à la
terrasse abritée sous un auvent, sirotant du thé glacé, étudiant
maintenant le suroît qui y apporte la giboulée à la fin de l’embellie
et contemplant un passage rendu pittoresque voire dans la pluie
par ces hôtels, leur chapelet de piscines, leurs pelouses, la plage et
la mer, menaçante, sombre et aussi mélancolique. Esther survole
ses journaux de voyage et je lis un magazine publié en France qui
examine les legs romains du pays gaulois en antiquité. Ce qui
restent de l’époque césarienne sont des ruines et qu’est-ce ceci

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mais le destin éventuel de ces sérails modernes dédiés aux plaisirs
qui, avec ses spas et halls de banquet et de danse, évoquent le
luxe décadent de l’empire longtemps écoulé ? Au moins les
Romains léguèrent le monde avec ces lois, coutumes, fables,
amphithéâtres maintenant perdus de leurs velariums et inventions
qui persistent. Rien de cette sorte ne demeura quand la sauvagerie
réclamera sans douille cet Eden factice si facile de se décatir sous
les tropiques et dans un climat délétère. Qui seront les poètes et
chroniqueurs de cette grande folie, qui seront son Cicero (Marcus
Tullius), son Catulle (Caius Valerius Catullus) et son Horace
(Quintas Horatius Flaccus) ? Je manque le moindre intérêt en
éloges et panégyriques et ce qui sera aussi plus certaine que la
morte de littérature dans l’ère des technocrates illettrés, chacun
tapant farouchement sur leurs palimpsestes de Blackberry et I-
Phone. « Pourquoi tu souris comme un démon ? » demande-t-elle,
ma femme mystifiée au comportement étrange a laquelle, cette
question, je lui réponds, « J’ai rêvé du futur et réalisé qu’il ne sera
rien, absolument rien mais jungles et silence rongeant et
implacable.» Elle ébauche une expression d’implique que elle me
trouve désireux, surement à la lecture de ces écritures me
fournissent la lueur distante dans mes yeux et ces pensées
apparentement bizarres pour l’occasion.
Dîner au restaurant se situe au rez-de-chaussée d’une bâtisse
quelconque adjacente au terrain de golfe en avance de la cohue
qui y afflue plus ou moins aux même heures. Nous sommes les
seuls clients, nous attablant aux meubles de palissandre face-à-
face à l’aquarium d’où ces proies nous observent. La solitude sied à
notre besoin de nous rasséréner. La pluie s’arrete et encore la
lumière infiltre la place caverneuse avec climatiseur éteint, les
fenêtres ouvertes et les ventilateurs l’éventant tout naturellement.
Notre repas se constitue du rouget encore passé à la vapeur avec
flaveur et saveur glanées des ciboules, gingembres, une gousse
d’ail et thym au style cantonais ; soupe de lotus, porc et seiche
asséchée ; choux frisé et un plat de palourdes bouillies appelées
ailleurs aussi les clovisses. Notre regardons dehors une équipe de
travailleurs en train d’installer des appareils d’amusement pour
plaire à la marmaille et affranchir les parents pour la tenue d’une
soirée et un loto de charité. Je pense à ma gosse et regrette d’avoir
laissé mon téléphone cellulaire et Blackberry à Hongkong quand
soudainement j’ai l’impulsion de l’aborder si seulement d’écouter
sa voix douce, mélodique et bébête grésillante en travers des
éthers et me lénifiante, moi souvent en tracas de sa santé et de
son bonheur. Esther me raconte des rumeurs et ragots récoltés de
ces magazines qui me barbent mais encore je dois feindre l’intérêt
car, sinon, nous manquons d’affinité partagée sauf un amour
parental absolu et pour précipiter l’autre bisbille. Le gouffre entre
nous s’augmente et je suis trop piètre un acteur de lui convaincre
ma fascination avec son babillage, l’exacte même un auquel je dois
avoir étendu un mille de temps, chaque fois également agaçant.
On aurait à inventer des paroles, saynètes et rêveries dans sa tête
pour survivre le mariage. En route du retour nous voyons un vague
arc-en-ciel, apprécions la brise, savourons la fraîcheur de l’heure
juste avant le demi-jour et flairons ces herbes, voilà une magie
hainanaise du moment.

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Nous ne sommes pas convives aux événements peu fastueux
convoqués, y compris une partie sous les étoiles dans
l’amphithéâtre et la pelouse qui font le butoir entre l’hôtel et la
plage. C’est une célébration du 20ième anniversaire d’une
succursale chinoise à une compagnie d’assurance américaine, une
fête d’être mise au temps de crise créancière mondiale déferlante
précipitée par la fonte d’AIG, the Americain International Group
manquant la justesse et se faisant le symbole de l’incurie, l’avidité
et la fourberie si rampantes dans le monde corporatif. On ne
pourrait que discerner une triste ironique parmi ces cadres en déni
maintenant se réunissant à la ripaille et fredaine dans le milieu
d’un désastre pour un métier, une sorte de la parodie qui advint
aussi à Shanghai durant l’époque de jazz à la veille de son pillage
et occupation japonais ou au Weimar avant l’ascendance des Nazis.
On aurait reconnu que ce système de escroquerie boursière
vétuste ne perdure plus, qu’il dépérisse, mais personne ne compte
sur un collapsus déjà en train de se dérouler. A la terrasse, un verre
de julep à menthe dans la main, sentant la grillade sur barbecue,
nous nous traitons à une vue de la revue – danseurs ethniques,
chanteurs et chanteuses, comédie, performance de magicien
médusant et acrobates si prestes, un écran géant illuminé à la
vidéo en célébration des réussites qui leur étaient connues, ces
bénéficiaires de reforme capitaliste. Personne ne souhaite discuter
la tournure de fortune aux bourses, cependant inquiétante. Tout de
ceci est le scintillement de show-biz qui les Chinois ont embrassé
avec ferveur, sinon fièvre. La manie pour la culture pop américaine
est intégrale aux changements en Chine. Nous leur rendons un
toast, ces fêtards sur un soir si doux pourtant si douloureux.

Bye-bye au luxe

La première part du jour réplique celle du hier, cas déjà vu. Un


matin à la piscine d’infinité mais toujours sous un ciel couvert et
lourd avec la menace à nouveau de pluie. Le fort vent fait frisquet
l’air mais cela est pallié du chauffage. L’eau est toujours tiède et
chlorée. Plus lénifiant encore est la section du jacuzzi dont jets de
fluide chatouillent et massent bien le dos, au bas de l’épine, trop
souvent la source de l’entorse. Les Russes semblent préférer la mer
dehors l’enceinte de l’hôtel mais ces autres blancs, Britanniques,
Australiens et Français aiment se prélasser et se mouiller ici.
Pourquoi ceci est, une ségrégation ou quarantaine, demeure une
énigme d’autant plus mystérieuse quand les Russes ont leurs
stations thermales au bord de la Mer noire et ont une tradition de
se baigner dans les piscines. Peut-être ces slaves ne veulent pas se
mélanger à l’autrui et se contenter d’être ensembles dans leur
giron collectif. Les psychologistes parlent d’une zone de réconfort
qui pour les Russes serait bien restreinte. Ces écrivains exaltent
l’énormité de leur terre natale, une nation plus vaste voire que la
Chine, qui leur donne l’impression d’autarcie et une phobie
prononcée vers les visées et intentions des occidentaux puisque
leurs expériences noires, amères et sanglantes pour raisons des
assauts et agressions napoléoniennes et germaniques, soit dans la
Première, soit dans la Seconde guerre mondiale. Dans ce sens les
Chinois partagent leurs soucis et soupçons, quoique la génération

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moderne de l’empire célestiel apparaisse plus ouverte et inclinée
en forgeant contacts étrangers. Le consensus est encore que
l’Ouest est implacablement hostile et ne pause pas de comploter et
s’allier contre leurs intérêts. Donc les deux, Russes et Chinois, ont
raisons de s’en méfient et sont ambivalents vis-à-vis à l’Ouest dont
politiques n’hésiter pas de s’ingérer dans leurs affaires intérieures,
de subvertir leurs institutions, de poser comme défenseurs
hypocrites des droits humains et d’équarrir leurs pays afin d’aveulir
ces deux derniers majeurs rivaux à la domination occidentale; les
deux dotés aux mémoires éléphantines en contraste aux
américains spécialement qui pâtissent de l’amnésie nationale. Il
leur faut, les Russes, être prudents et séparés, plus confiants des
Chinois, mais juste, que des Européens et Yankees. Aller seuls est
une option désireuse durant ces vacances car il est un cas de bon
débarras.
C’est après le déjeuner et un petit somme que nous
embarquons sur une fouille des palais avoisinés au Marriott pour
étudier l’architecture. (Dans l’Ouest les designs hôteliers
s’encroûtent à cause de la frugalité requise du aux limites de
finance de plus en plus austère. Mais ici en Asie l’excès et la
grandeur sont le standard. Comment et combien a changé le
monde ?) Le soleil brise les nuées et la brise susurrante surgit de la
mer de tout rafraîchir durant notre flânerie sur la route qui côtoie
ces palais obscènes dans leur opulence avec un surplus de dorure
comme la parure d’une concubine. On repere dans l’horizon
distante marine une colonne de cumulonimbus à la parfaite forme
d’un entonnoir juxtaposé contre un tableau de le ciel d’azur. De
l’autre point de vue, il ressemble une sentinelle blanche; et encore
d’une nouvelle perception, un tas de neige tôlée. Esther, encore en
thérapie et dans les affres d’un genou bancal, clopine à la grimpe
envers l’hôtel au sommet du tertre frangé de palmiers. (Je l’appelle,
son joint boiteux, un genou de guimauve.) Elle n’a qu’un intérêt
velléitaire aux phénomènes métrologiques ou même scientifiques
en contraste à ma ferveur acharnée, ayant toujours observé mes
alentours et lu récemment le roman, non, une épopée aux
émerveilles de nature, « la Théorie de nuages » par Stéphane
Audeguy. Nous entrons le plus grand foyer de plancher à griotte et
de haut plafond voûté qui s’étend à la fontaine dont atrium gare
une Ferrari F-430 bien sûr en vermeil sportif italien. Voici un autel
au consumérisme crûment éhonté et un testament à la fringale en
chine de s’enrichir pêle-mêle et de crâner avec chaque
manifestation vulgaire d’argent. Le fougueux néocapitaliste Deng
Xiaoping eut exulté comment « d’acquérir une fortune est glorieux
» en exhortant ses compatriotes à s’évertuer pour soi et à bafouer
ces appels de sacrifice et partage intégraux au communisme. Au
Canada les prospects de la classe moyenne n’arrête pas de
s’écorner et la carence d’espoir déjà lésé du aux impôts lourds
pour la prochaine génération est presque totale mais ici ceux
demeurent en flèche et prêts d’être décrochés avec tel optimisme
presque naïf, bien au moins avant la chute économique. A ceci un
bolide est le symbole dans un pays où seulement deux décennies il
y a une houe mécanique et une machine à coudre furent objets
prisés conférant à leurs propriétaires un statut convoité.
Nous nous attardons un peu au foyer et arpentons les couloirs
qui connectent les deux coulisses du Sheraton en architecture

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tributaire au style classique en Chine. Ce semble que les
occidentalistes apprécient plus du patrimoine chinois que les gens
du royaume célestiel. Les maîtres locaux s’effarouchent de son
héritage en design et qui veulent émuler l’Ouest et les voies
branchées qu’implique l’architecture riche d’acier ou alliage et
vitres toutes à la luisance et la luxuriance. L’outrance de patine et
de paillettes apparaît de s’écrier au monde : « Regardez-vous de
quoi nous avons la puissance de faire ! Admettrez-vous que nous
sommes parvenus ! » Ce qui vraiment m’ébahit est plus
l’incertitude, le manque de confiance, que ses étincelles de faraud.
Mais ici les hôteliers américains ne souhaitent pas frimer plutôt ils
aiment fêter l’ancien art en instaurant ces balustrades en bois à la
peinture vermeille et ces rebords du toit de tuile glauque en
camouflage avec ce bosquet de banians et tamarins. Personne ne
nous interdit en attrapant des photos des nuages encadrés du
grand paysage soit naturel soit artificiel. On trouve ici la tanière à
laquelle de paresser, contempler, rêvasser et défenestrer chaque
souci mondial, lénifiant par la vue de la mer et de l’horizon encore
bleu strié des traces de vapeur et par le vent qui évente la tête
sans recours au climatiseur.
Je ralentis et écourte mes pas pour accommoder ma femme
mauviette qui claudique plus après l’ascension au Sheraton, qui
s’essouffle de l’effort et qui s’amoche si seulement de me côtoyer.
Au palier nous appelons un taxi et allons à notre destination
prochaine choisie de la carte – une étendue côtière d’où la plage
est vaste. En arrivant, cependant, on voit encore à l’entrée ce
guichet parce qu’encore les autorités ont converti l’aire en parc
d’amusement pour faire donne à l’attrait car elles sont inlassables
de grappiller de revenu touristique, donc esquintant ce qui reste du
charme naturel. Nous ne souhaitons pas y attarder et ainsi nous
marchons sans soin à la direction en espérance d’une découverte
photographique chanceuse. On a raison de se lamenter du recul
naturel en Chine dont ingénieurs et planificateurs ont-eux
l’impulsion d’en y imposer leurs œuvres. Finalement après un
kilomètre et demi de notre flânerie un andain verdoyant nous
salue, un lieu de gazon à dont marge sont touffes de carex, scirpes
et tussilages agitant comme écrans contre le vent marin. En
silhouettes sont ces palmiers et arbres avec troncs comme ceux de
l’eucalyptus dont noms botaniques m’éludent. Tout de ceci verdure
riche après la pluie m’accable maintenant dans l’après-midi juste
avant le crépuscule avec les rayons mous et partiellement filtrés et
diffusés par des vestiges de nuage. Je trébuche sur un milieu
parfait pour la photographie et c’est d’ici que j’entame de cligner le
Sony et happer les meilleures images de Yalong qui m’en projettent
un aperçu de l’ile édénique avant sa dépolissage et spoliation.
Esther déchaussure et, assise sur un cairn, sent les herbes masser
ses orteils. C’est dur enfin d’y quitter, une place d’enchantement,
et c’est une guigne que l’on n’y a pas croisé jusqu’aux dernières
heures du voyage. Ceci, un moment en temps préservé, me semble
d’être comme une émeraude biseautée dans un anneau d’or.
Nous avons déjà fini l’emballage de nos valises et dévalisé au
foyer pour nous apprêter d’y quitter et de nous acheminer à
l’aérogare, cette fois au moins avec peu de bagatelles d’alourdir
nos deux bagages. (Mais ma femme retient ces pantoufles issues
du Marriott comme souvenirs.) Le vol est pour 23.00 mais est

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certain d’être en retard à cause chaos de trafic aérien à Hongkong
dont réputation pour l’efficacité est exagérée. En partance, j’ai
encore cette finale chance de chasser les nuées et les lumières de
vêpres, l’heure divine en photographie, et donc je me mets à la
terrasse dotée d’une vista superbe de la mer et du ciel. Notre
dîneur est simple car nous ne voulons nous gaver avant chacun vol
avec chance de turbulence qui risque de nous déglinguer. Esther
demande à la serveuse pour un sandwiche et une salade et, moi,
une soupe d’oignon dans laquelle je trempe quignons et un plat de
pâte à source de tomate. C’est maintenant que le paysage
transforme au tableau céleste avec la retraite d’un tas de nuage
dans la forme d’une enclume, ceci vraiment est le nimbostratus qui
a déjà déclenché une trombe quand nous étions dans notre
chambre. Avec hâte ou plutôt alacrité, j’en vise mon appareil et les
attraper, ces photos inoubliables. On doit se contenter lors d’un
départ imminent, on trouve enfin ces facettes des vacances dignes
des temps et des fonds investis, s’averrant que rien ne soit pas en
vain. Hainan, vous n’êtes pas Hawaii, pas voire un simulacre du
paradis pacifique, mais cela cependant ne diminue pas votre
caractère contre lequel je viens de ne pas éreinter en sachant
comment vous me léguez ces clichés panoramiques.

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