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L'art du

E-learning

Thomas De Praetere

1
Sommaire
I. Introduction.....................................................................................4
1.Du e-learning comme l'un des beaux arts........................................................5
2.La tache aveugle de Gütenberg......................................................................6

II. Qu'est-ce que le e-learning?...........................................................7


1. Introduction...............................................................................................8
2. Eléments d'analyse ....................................................................................9
3. Ce que le e-learning n'est pas ....................................................................10
4. Activités et feedback..................................................................................11
5. La scénarisation .......................................................................................12
6. Quelques précisions...................................................................................14
7. Conclusion ..............................................................................................15

III. Logique de l'image......................................................................16


1. Devenir expert en images...........................................................................17
2. Les 3 fonctions.........................................................................................18
3. Design graphique......................................................................................19
4. Esthétique du public cible...........................................................................21
5. Articulation des 3 fonctions.........................................................................21
6. Intelligence visuelle...................................................................................22
7. Rhétorique pédagogique.............................................................................23
8. Sur l'échelle.............................................................................................24
9. Aux sources de la créativité visuelle.............................................................25
10. Logique pédagogique ..............................................................................26

IV. Apprendre en collaborant ...........................................................29


1. Des ingénieurs se forment à la philosophie....................................................30
2. La collaboration........................................................................................30
a) Qu'est-ce qu'un groupe?........................................................................30
b) Collaboration et coopération...................................................................30
c) Hétérogénéité et homogénéité................................................................31

2
d) Le conflit cognitif..................................................................................31
e) Les mécanismes de la collaboration.........................................................31
f) Inégalités.............................................................................................32
g) Problèmes d'évaluation..........................................................................33
3. Rôle du formateur.....................................................................................33
a) Distribution et redistribution des rôles......................................................33
b) Organisation du travail..........................................................................33
c) Choix du scénario.................................................................................34
4. La collaboration à distance.........................................................................35
a) Déstructuration....................................................................................35
b) Internet comme espace public................................................................35
c) La technique du regard croisé.................................................................36
d) Formalisation de la communication..........................................................37
e) Comportements particulier des grands groupes à distance.........................37
5. Le R.O.I. de l'apprentissage collaboratif........................................................38
a) Dégagement de main d'oeuvre bénévole..................................................38
b) Facilitation des processus de production...................................................39
c) Structuration des grandes organisations...................................................39
d) Diminution du délai décision / formation..................................................39
6. Bibliographie............................................................................................40

V. Gérer le projet .............................................................................41


1.Introduction..............................................................................................42
2. Gestion de la qualité..................................................................................42
3. Une approche orientée compétences............................................................42
4. Conception d'une formation : le storyboard...................................................44
5. Les 4 C prérequis......................................................................................46
6. Analyse, Design, Développement, Interaction................................................47
7. Tableau de bord du gestionnaire de projet.....................................................49
8. Outils auteurs multimédia...........................................................................49
9. Agenda du projet pilote..............................................................................51
10. Bibliographie ..........................................................................................52

3
I. Introduction

Résumé

Le pilotage d'un projet e-learning requiert une certaine connaissance scientifique et


s'appuie sur une méthodologie adéquate. Mais son analyse et sa conception reposent
aussi sur notre sensibilité et notre compétence à évaluer les situations sous l'angle de
l'art. Certaines évolutions techniques contiennent les germes d'une évolution de l'art,
mais leurs acteurs n'en sont pas d'abord conscients.

4
1. Du e-learning comme l'un des beaux arts
Ce livre est le résultat de 5 ans de travail auprès des entreprises et des
départements de ressources humaines pour les accompagner dans le montage
de projets de formation en ligne.

En parcourant la littérature sur le sujet, on trouve deux types d'ouvrages. Des


manuels qui enseignent les techniques du e-learning efficace et des ouvrages
théoriques qui essaient de dégager les lois du genre à l'aide de statistiques et
d'une méthode empruntée aux sciences.

Il m'a semble qu'au-delà de la technique et de la science, une dimension que


j'appelerai “art” faute de mieux joue (comme on parle d'un art médical ou de
l'état de l'art dans une discipline donnée) un rôle fondamental. A plusieurs
niveaux de décision et de réalisation, il est question de sensibilité, de
métaphore, d'observation et d'écoute informelle, et aussi bon goût, d'audace et
de pertinence.

Le plus difficile, en effet, dans l'analyse et la conception d'un cours e-learning,


est d'aboutir à une résultat qui soit pertinent par rapport aux objectifs du
cours et recevable par son public.

Si tant de cours en ligne aujourd'hui paraissent inefficaces, inadaptés ou


inutilisés, c'est que l'effort d'analyse qui devait conduire à leur mise au point ne
s'est pas nourri de notre “éducation” au sens artistique du terme.

Le e-learning, comme méthode de formation, relève de la culture comme


connaissance et expérience sensibles des formes, des couleurs et de l'ordre du
discours. Son appartenance indéniable, comme objet industriel, au domaine de
la technologie nous masque ce fait. Le présent ouvrage a pour objectif de nous
y reconduire pour retrouver le fil de la réflexion sur l'art d'enseigner, à travers
une mise en perspective dans les champs de la peinture, du cinéma et de la
littérature.

Les concepts clés du e-learning sont empruntés à ces disciplines : activités,


décor, storyboard, séquence, narration, personnage, interaction. Mais, de la
même façon que le cinéma s'est d'abord inventé comme un théâtre filmé, le e-
learning singe aujourd'hui les formes les plus visibles de l'art (notamment la
bande dessinée) et n'a pas encore trouvé son langage propre.

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2. La tache aveugle de Gütenberg

Il fallut 50 ans aux premiers imprimeurs pour définir le format du livre


moderne, son genre. La Bible à quarante-deux lignes de Gütenberg se confirme
à la méthode de production des codex du moyen-âge: la page de titre n'existe
pas encore, la pagination est absente et le papier d'épaissseur variable.

Jusqu'à la fin du XVIe siècle et par souci d'économie, les corrections de


dernière minute sont introduites à la main dans les ouvrages imprimés et
plusieurs copies d'un même ouvrage peuvent varier sensiblement.

Mais surtout : les premiers imprimeurs n'ont pas encore conscience de


l'évolution qu'ils ont introduite dans les modalités de la lecture désormais
individuelle et dans le contenu des livres qui évoluera en fonction des
stratégies éditoriales, à la rencontre de son nouveau public.

L'émergence de cette technologie dessine le profil et la personnalité d'une


nouvelle catégorie d'auteurs: Erasme, Montaigne, Rabelais. Pourtant, les
premiers livres publiés sont des ouvrages religieux et des traités
d'herboristerie. La révolution humaniste est en marche. Gütenberg ne le sait
pas encore.

6
II. Qu'est-ce que le e-learning?
Une approche empirique

Résumé

Le e-learning est souvent défini par une approche théorique : comme ce qu'il
pourrait ou devrait être, en fonction de ses objectifs, du modèle auquel il
correspond. Nous prenons ici le contrepied de cette méthode en commençant par
définir le e-learning empiriquement ou, si l'on veut, phénoménologiquement comme
une liste de pratiques. Pour remonter ensuite vers une première compréhension du
phénomène.

7
1. Introduction
Depuis qu'internet et le multimédia se sont développés dans les années '90, les
pratiques intellectuelles ont évolué. Ma petite nièce étudie son cours
d'économie politique un écran d'ordinateur à proximité et complète les parties
obscures de son manuel en recherchant dans Wikipedia la définition des termes
“vélocité de la monnaie” ou “politique expansionniste”.

Elle “chatte” avec une amie pour clarifier l'un ou l'autre point et visionne sur le
web des films sur le fonctionnement de l'argent et les mécanismes de
l'emprunt d'Etat. Pour préparer l'examen, elle télécharge sur internet la copie
des questions des années précédentes. Au fil de ses recherches, elle tombe sur
la version librement imprimable du manuel rédigé par le prédécesseur de son
prof, qu'elle trouve plus clair et dont elle se sert également.

Le monde a changé. Notre manière d'aprendre aussi. On peut cependant se


demander si notre manière d'enseigner a changé également, si elle a chqngé
pour un mieux et si nous pouvons contribuer à la qualité de ce changement.

L'hypothèse du présent ouvrage est que l'art d'enseigner gagne à se nourrir


des autres arts et qu'il est aujourd'hui sommé de se réinventer. Le e-learning
est un des lieux où se déroule cette réinvention.

Nos contemporains:
1. apprennent seuls dans des cours en ligne ou sur des CD-Rom à travers
un enchaînement de théorie et d'exercices;

2. collaborent à distance sur Wikipedia pour écrire des articles collectifs


sur un sujet donné;

3. alternent les rencontres en face-à-face et les interactions en ligne avec


un formateur ou un coach;

4. lisent des tutoriels en ligne et pratiquent seuls;

5. cherchent réponse à leurs questions dans Google®;

6. écrivent des blogs et s'efforcent de clarifier leur vision des choses à


l'aide de commentaires fournis par d'autres;

7. pratiquent la guitare en imitant des experts qui proposent des vidéos


didactiques sur Youtube®;

8. participent à des scénarios de formation en ligne sophistiqués qui


prennent place dans des Environnements Numériques d'Apprentissage
(Learning management Systems) où un coach accède à des données de
suivi sur leur progression dans le cours et interagit avec eux pour leur
fournir les réponses adéquates;

8
9. jouent à des jeux vidéo, des jeux "sérieux", des jeux en ligne,
individuellement ou collectivement;

10. envoient leur production à des collègues distants par email et reçoivent
par le même canal corrections et commentaires, en utilisant par
exemple les fonctions de correction de Ms-Word ou d'Openoffice;

11. écoutent sur leur téléphone dans le train des enregistrements de


conférences sur la gestion d'entreprise.

Bien que dans des proportions variables, toutes ces activités peuvent être
qualifiées de e-learning car elles constituent une expérience d'apprentissage à
travers des médias électroniques.

2. Eléments d'analyse
Essayons d'analyser tout ceci plus en détail.
(1) nous rappelle que le e-learning n'est pas nécessairement une activité en
ligne;

(2) signale que l'on peut organiser des cours en e-learning sans disposer d'un
contenu de formation;

(3) précise que e-learning n'est pas synonyme d'une absence de rencontre en
face-à-face entre les personnes;

(4) dit que l'on peut organiser un e-learning où la théorie est en ligne et les
exercices se déroulent dans une salle (la réciproque est envisageable
également);

(5) décrit quelque chose de trivial : la plupart d'entre nous apprennent


quotidiennement dans Google® sans même s'en apercevoir ou appeler cela
"apprentissage";

(6) insiste sur le fait que l'apprentissage peut être particulièrement efficace
lorsque celui qui apprend est invité à faire quelque chose;

(7) illustre une forme assez primitive d'apprentissage : par l'imitation (Bach
n'a-t-il pas appris à composer en copiant les partitions de Vivaldi?);

(8) est considéré par certains comme la forme la plus accomplie de e-learning;

(9) traite de la façon dont les enfants apprennent initialement, mais ne fournit
pas de critère sur ce qui est proprement formateur dans le jeu;

(10) fait allusion à une activité intellectuelle répandue dans la plupart des
organisations et souligne qu'elle est souvent une occasion d'apprendre;

(11) donne un exemple de m-learning ("m" pour "mobile") et nous pouvons

9
décider de le considérer comme du e-learning.

3. Ce que le e-learning n'est pas


Quand une activité relève de "e-" mais pas de "learning" ou inversement, elle
ne peut être considérée comme du e-learning.

E signifie électronique. Les activités d'apprentissage qui utilisent Internet, les


CD-Roms, le téléphone, la vidéo peuvent être considérées comme du e-
learning. De nos jours, la plupart de ces activités se déroulent dans Internet
comme réseau et même dans le Web (dans le navigateur : Internet Explorer,
Firefox, Safari etc.).

Learning est un peu plus difficile à définir. Quelle est la différence entre
apprendre et lire, par exemple? Ne dit-on pas "John reads in Oxford" pour
"John étudie à l'Université d'Oxford"?

Quand je lis les nouvelles, est-ce que je collecte simplement des informations
ou est-ce que je suis en train d'apprendre? Pour partir d'une idée simple,
supposons que nous soyons tous des comportementalistes et que nous
considérions par conséquent qu'apprendre signifie toujours devenir capable de
faire quelque chose.

Le modèle psychologique minimal du comportementalisme suppose que toute


information est, directement ou indirectement, rapportée à un projet d'action
et suggère un processus d'apprentissage en 3 temps:
1. une information sur "Comment faire quelque chose"

2. l'occasion de pratiquer cette nouvelle activité ou des activités qui y


préparent

3. un retour d'information ou "feedback"


Nous obtenons (1) des éléments d'information sur "comment faire quelque
chose". On nous propose ensuite (2) des occasions de pratiquer et d'exercer
nos compétences. Et quelqu'un ou "quelque chose d'automatique" (une
machine) valide ou invalide (3) nos résultats, nous fournit des compléments
d'information pour nous permettre de corriger nos erreurs.

Cette définition assez rudimentaire et certainement insuffisante a cependant le


mérite de clarifier les choses en éliminant de la définition du e-learning les
activités de simple réception d'information : lire, chercher, regarder, écouter.

Mais ce critère est difficile à manier dans la mesure où certaines des


dimensions de notre activité intellectuelle ne sont pas directement visibles ou
mesurables.

10
L'un cherche dans Google et se contente de lire là où un autre, à l'aide des
mêmes informations, prend des notes, synthétise, dessine une carte
heuristique des concepts en présence, produit à son tour un document ou le
prépare mentalement, explique à d'autres, etc.

Une autre difficulté est que certains d'entre nous ne se considèrent pas comme
comportementalistes. Je pense toutefois que dire "je ne suis pas
comportementaliste", signifie le plus souvent "je suis plus que
comportementaliste" et n'implique pas un refus de ce cadre théorique minimal.

Un troisième problème de l'approche comportementaliste est qu'elle ne donne


pas un statut clair à des compétences intellectuelles telles que connaître
l'Histoire ou devenir sage.

4. Activités et feedback
Mais l'avantage de la définition dite comportementaliste est qu'elle met l'accent
sur les activités et le feedback, qui sont les conditions de possibilité de ce que
les anglo-saxons appellent instructional design et que l'on pourrait se risquer à
traduire par "scénarisation". "La vérité est rarement simple mais seules les
idées simples sont utilisables" écrivait à peu près Paul valéry.

Vu du côté du producteur, le e-learning est souvent affaire de contenus :


présentations, articles, schémas explicatifs. Mais la diffusion de savoir ne
constitue pas par elle-même la matière du e-learning. Le e-learning commence
quand je passe de "mon cours se trouve sur internet" à "mon cours se passe
sur internet".

La conception d'activités pertinentes qui conduiront les apprenants d'une


attitude de lecture passive à une interaction dynamique n'est pas une chose
facile. Je dois, pour y parvenir, commencer par décrire les objectifs de mon
cours en termes d'action.

Si j'enseigne la conduite de réunions, je ne suis pas autorisé à décrire mes


objectifs avec des expressions du type "ils doivent savoir ce qu'est la conduite
de réunion" car "savoir" est une compétence mentale : je ne peux pas la
vérifier, je ne peux pas proposer d'activités pour l'améliorer, je ne peux pas
donner de feedback sur "comment ils savent" ou "combien ils savent".

Je ferais mieux de décrire es choses de cette façon: "ils doivent être capables
de lister les règls principales de la conduite de réunion" ou mieux "ils doivent
être capables de conduire une réunion" (et du coup imaginer comme activité
un jeu de rôle ou autre forme de mise en situation).

Si je forme un pilote d'avion, le questionnaire à choix multiple n'est pas


vraiment une option. Monteriez-vous dans un avions dont le pilote a été formé
à l'aide de questionnaires de ce type? Il n'aurait pas les compétences. L'activité

11
pertinente pour lui est probablement le simulateur de vol.

Et le feedback devrait porter sur les commandes données par l'apprenant au


simulateur, sa capacité à faire face à une situation fournie par l'appareil, lui
expliquer pourquoi il a "crashé" et comment éviter une telle erreur par la
suite.

5. La scénarisation
Un ami cinéaste me décrivait récemment ce que serait le plus mauvais
synopsis de film : "Il est un idéaliste et elle est amoureuse de lui". C'est
mauvais parce que ça ne décrit pas les choses visuellement.

Il vaut mieux dire "L'histoire commence dans un train. Il regarde le paysage à


travers la vitre et elle lui prend la main" car au cinéma c'est l'action qui nous
guide. La même règle s'applique aux scénaristes de formation.

Comment scénariserons-nous la séquence d'activités pertinente dans des cours


comme:
1. Conduite de réunion;

2. Histoire de l'Art;

3. English as a second language?

On pourrait commencer par affirmer que ces activités devront être aussi
proches que possible de situations "réelles":
(1) nous met sur la piste d'une activité en groupe, par exemple sous la forme

12
d'un jeu de rôles;

(2) suggère des questions d'interprétation, de catégorisation, de mémoire et


de correspondance entre des ensembles;

(3) offrira sans doute des compréhensions à la lecture, des compéhensions


à l'audition, des textes lacunaires (fill-in the gaps) etc.

Ci-dessous un extrait du scénario d'un cours sur la gestion d'un protocole de


prise en charge médicale.

Le sujet étudié, mais aussi la nature du public visé, son niveau (qui évolue au
fil du cours) et la richesse des médias existants, des logiciels disponibles sont
autant de paramètres à prendre en compte pour la rédaction du scénario de
formation.

13
Dans le tableau ci-dessous, nous proposons un essai de formalisation en 40
types d'activités e-learning possibles. Il en existe certainement davantage et
l'organisation du tableau pourrait être différente. Considérons ceci comme un
premier jet pour ouvrir la discussion.

Complexité >>
Action I II III IV V
Sélectionner Vrai/Faux Choix Choix Réponse Degré
alterné multiple implicite certitude
Identifier V/F multiple Oui/Non + Réponses R.M + Cliquer sur
explication multiples images l'image
Associer Apparier Catégoriser Séquencer Prioritiser Prouver
<< Ouverture

Corriger Retirer Phrase Détecter Cliquer sur Résolution


l'intrus mélangée erreur dans erreurs de
formulaire dans image problèmes
Compléter Remplir les Remplir les Remplir Réponse Compréh.
blancs blancs par formulaire calculée audition
menu
Construire Simulation Réponse Lier Dessiner Délinéer
ouverte concepts séquence zone sur
sur carte valide image
Projeter Essai Rapport Rapport Présenter Projet
avec calculs un projet multimédia
Collaborer Discuter Revue par Publication Blog Résolution
dans forum les pairs de groupe d'équipe problèmes
avec rôles en groupe

Les 8 lignes du tableau progressent des questions les plus fermées (ce qui
facilite la correction automatique) vers les questions les plus ouvertes (celles
que l'on ne peut corriger que manuellement).

Les 5 colonnes organisent les activités du plus simple au plus complexe (bien
que cette classification demeure vague et subjective). Notre proposition est
que les scénaristes e-learning utilisent ce tableau ou un tableau de ce genre et
y localisent les types de questions qui sont pertinentes en fonction des
paramètres évoqués ci-dessus.

6. Quelques précisions
Choix alterné signifie choix multiple à 2 options;

Degré de certitude signifie : un choix multiple ou un vrai/faux accompagné

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d'une question subsidiaire du type "A quel point êtes-vous sûr de votre
réponse?";

Oui/Non avec explication combine deux questions en une: "Oui parce que A",
"Oui parce que B", "Non parce que C", "Non parce que A";

Catégoriser désigne un exercice de correspondance ou appariement dans


lequel l'un des deux ensembles contient moins d'éléments que l'autre;

Séquencer est un exercice de correspondance dans lequel les éléments du


premier ensemble sont appelés "Premièrement", "Deuxièmement",
"Troisièmement" afin de classer les éléments du second ensemble
chronologiquement, comme dans un mode opératoire.

Remplir le formulaire est similaire à Remplir les blancs mais ajoute une couche
graphique qui donne au formulaire en ligne l'apparence d'un formulaire
existant afin d'accentuer l'effet de réel. Par exemple un dossier médical;

Simulation peut être une animation Flash dont le comportement est fonction de
paramètres que l'apprenant peut modifier, par exemple à l'aide de curseurs.

Délinéer des zones sur une image est un type d'activité particulièrement
pertinent en médecine: dessiner le contour d'une tumeur, par exemple. Mais
peut également se révéler pertinent dans d'autres domaines comme l'industrie
lourde ("Délimitez les zones dangereuses autour de ce pylone").

7. Conclusion
Le e-learning est une discipline riche et complexe. La partie la plus complexe
relève de la dimension "learning" car apprendre est en-soi quelque chose de
compliqué.

Le nom "e-learning" suggère que la personne qui apprend est au centre du


dispositif. Sinon on parlerait de "e-teaching". On peut cependant se demander
dans combien de projets ce paramètre est pris en compte.
Par ailleurs, les dispositifs les plus complexes (et les plus chers) ne sont pas
toujours les plus efficaces en termes d'apprentissage. Demandons-nous à quel
point le simple fait d'imiter un guitariste sur Youtube peut être efficace et
comment transférer ce principe dans nos formations.

La publication de ressources électroniques ne constitue un dispositif e-learning


que si elle est associée à la mise en oeuvre d'une pratique par rapport à
laquelle une certaine forme de feedback est disponible. Demandons-nous à
quel point peut être efficace le simple fait que ma soeur commente mon
interpétation du morceau de guitare (que ma soeur soit ou non une guitariste
patentée).

15
III. Logique de l'image
Traité de créativité visuelle à l'usage des professionnels
de la formation qui ne sont pas graphistes

Résumé

L'image remplit 3 fonctions en e-learning : navigation, contextualisation et


apprentissage. A travers une analyse de la grammaire, de la logique et de la
rhétorique de l'image, cet article dégage les invariants d'une pédagogie visuelle et
propose aux concepteurs e-learning une méthode simple pour l'appliquer à l'aide
des mindmaps ou cartes heuristiques.

16
1. Devenir expert en images
On est frappé, dans un cours e-learning, par l'omniprésence des images. Si les
livres et les manuels donnent à l'écrit le rôle principal, faisant de l'image son
complément éventuel, il n'en va pas de même en e-learning.

Les causes de ce phénomène sont multiples :


• on pense par écrans, comme en télévision ;
• on s'adresse à un public varié et parfois multilingue ;
• le public n'est pas captif et on souhaite lui faciliter la tâche ;
• les occasions de feedback sont plus limitées que dans un cours en face-
à-face et l'on souhaite exprimer les choses clairement du premier coup;
• les sujets traités se prêtent volontiers à une approche visuelle : sciences
et techniques, manipulation d'un logiciel, processus de production...

La nature de ces images, la façon dont elles sont agencées et utilisées tantôt
nous frappe par sa pertinence tantôt nous laisse avec le sentiment que la
dimension visuelle n'apporte rien de plus à ce qui serait expliqué par des mots.

Les experts dans le contenu enseigné ne sont pas nécessairement des experts
dans l'art de créer, de choisir et de manipuler les images. Dans le même
temps, ils sont les mieux placés pour le faire car un autre ne pourrait
appréhener aussi bien qu'eux le lien entre ce qui est montré et ce que l'on
explique. Et ainsi il faudrait l'instruire à tout moment ou travailler à côté de lui.
Ce qui se révèle lent, cher et laborieux, laissant les uns et les autres sur un
sentiment d'insatisfaction.

A travers mon expérience e-learning au sein de Dokeos, j'ai été amené à


réfléchir en termes visuels aux côtés de nombreux professionnels de la
formation. L'objectif du présent document est de donner à chacun la maîtrise
du processus de formation par l'image.

L'objectif est aussi de réfléchir en termes d'image mais à partir d'une logique
textuelle, afin d'une part de préserver la structure de ce qui doit être dit et
d'autre part de guider pas à pas ceux ceux qui, comme moi, sont au départ
assez démunis devant la complexité propre de l'univers pictural.

J'ai voulu traiter la question de façon relativement conceptuelle et universelle


car en cette matière on ne peut fonctionner par trucs et ficelles. Il ne s'agit pas
de dresser la liste ce qui marche, mais de comprendre comment imaginer et
concevoir un processus visuel en plusieurs étapes et dont le contenu sera
propre à chaque cours.

La dimension de la faisabilité entre également en ligne de compte. On ne


demande pas à l'expert de devenir un artiste peintre, on lui propose au
contraire des solutions de compromis (y compris logicielles) qui le rendent
autonome dans sa démarche créative.

17
2. Les 3 fonctions
Les images du e-learning remplissent trois fonctions principales :
• naviguer ;
• contextualiser ;
• apprendre.

Les icônes ou pictogrammes (bloc-notes, dossier, loupe...) remplissent


généralement la première fonction.

La contextualisation est souvent assurée par des personnages ou mascottes


qui évoluent dans un décor en 3 dimensions (“Nadine est secrétaire dans le
bureau Twombly, voici son environnement de travail”, “Christophe est ingénieur
chez Faurecia” etc.).

Parfois aussi, la contextualisation est assurée par une photo, une vidéo, un
contenu multimédia qui décrivent la situation où seront appliquées les
compétences en jeu dans la leçon (“voici une vidéo de la situation sur le terrain
telle que vous aurez à la gérer au terme de cette formation”).

Ci-dessous, la page d'accueil du portail e-learning de la Haute Autorité de


Santé. Au milieu les icônes principales de la navigation : Mes cours, Mon profil,
Mon agenda. En haut une photo de médecin avec son sthétoscope pour situer
rapidement le contexte.

18
La compétence proprement dite, c'est-à-dire ce qu'on nous propose
d'apprendre, de maîtriser, constitue le coeur du dispositif et s'appuie sur divers
types d'images: diagrammes, schémas, plans coupe, etc.

3. Design graphique
Icônes, personnages et diagrammes prennent place sur l'écran et doivent
former un tout harmonieux. Ceci constitue un casse-tête pour le concepteur de
cours e-learning lorsqu'il n'est pas un professionnel du design graphique.

Les outils auteurs ou de rapid learning qu'il acquiert ne l'aideront que s'il
maîtrise quelques notions fondamentales de dessin.

Ainsi, le résultat sera plus cohérent sur le plan visuel si l'ensemble des images
est pensé en termes de format, de couleur et de perspective.

Par exemple:
• format : tous les diagrammes en 720 pixels de large (l'espace sur un
écran d'ordinateur est habituellement calculé en pixels et un écran type
fait 1024x768 pixels)
• couleur : icônes, personnages et diagrammes dans des dégradés de
bleu outremer et de bordeaux
• perspective : on ne mélange pas des icônes en deux dimensions (2D)
avec des icônes en 3 dimensions (3D). Les ombres, s'il y en a, doivent
toutes aller dans la même direction, de même pour les effets de lumière
ou de clair obscur.

19
Sur un site web d'informations comme rue89.com, les images proviennent de
sources hétérogènes et doivent être traitées dans l'urgence qui caractérise la
presse quotidienne.

Pour donner à cette collection d'images la cohérence minimale qui en facilitera


la lecture, les responsables du portail se contentent de définir un format
standard (longueur x largeur), une gestion basique de la perspective (pas
d'ombres, pas de coins arrondis) et optent, dans certaines rubriques, pour le
noir et blanc si le panachage des couleurs est trop brutal.

Voilà une manière simple, économique et à la portée de tous de traiter les


images pour une publication web en général et donc e-learning en particulier.
Cette approche normalisée permet aussi, grâce à un système de templates ou
modèles d'ouvrir les portes de la publication à un grand nombre d'auteurs,
diminuant d'autant les coûts de production.

Un exercice simple consiste à observer un magazine papier ou web et à


détecter les formes géométriques qui le composent, ainsi que les rapports de
proportion souvent simples qui en assurent la composition : bloc de 3 x 3
carrés, rectangles dont la longueur double la largeur, rapports de type 4:3 ou
16:9 caractéristiques des formats d'écran, blocs de texte de dimensions égale
aux images qu'ils illustrent etc.

20
Un autre exercice consiste à prendre la mesure de la rareté choisie dans telle
publication: traitement en une ou deux couleurs, police unique, 2 tailles de
police, etc. De même que le poète s'impose un jeu de règles contraignantes
pour libérer son pouvoir expressif, de même le graphiste se choisit un univers
limité pour augmenter la puissance de son art.

4. Esthétique du public cible


Le champ de l'expérlence visuelle est aussi vaste que l'Histoire de l'Art. Et
chacun, sans doute, appréhende les représentations qu'on lui soumet avec son
bagage et sa sensibilité propres. Il y a, à première vue, autant d'esthétiques
que d'individus.

Les sociologiques nous enseignent cependant que le goût est aussi une affaire
de milieu social et que la préférence donnée à une laitue sérigraphiée d'Andy
Warhol sur un soleil levant de Monnet peut être corrélée, satistiques à l'appui,
avec un paramètre aussi simple que la différence de revenus.

Plus superficiellement, les groupes humains se caractérisent par des goûts


communs et une série d'entretiens informels nous renseignera utilement sur
les grandes tendance de la sensibilité esthétique dans un public donné. Chez
MSF, pas question d'introduire des personnages dessinés. L'esthétique de la
maison privilégie la photographie, la vidéo et plus généralement l'effet de réel.

Parmi les managers de telle organisation de bancassurance, le recours à une


esthétique naïve telle qu'on la trouve dans des publications pour enfants
(bande dessinée) crée un sentiment d'irritation et une impression de ridicule
qui finit par limiter la motivation et compremettre l'apprentissage.

5. Articulation des 3 fonctions


Si icônes, personnages et diagrammes forment un tout harmonieux sur le plan
esthétique, chacune de ces dimensions remplit sa fonction propre. Les icônes
ne contextualisent pas, les personnages n'expliquent pas, les diagrammes ne
contribuent pas à une claire navigation.

Cet état de fait est pourtant oublié dans bien des productions e-learning
actuelles. Plus précisément, le pouvoir d'explication des diagrammes demeure
en friche et l'on voit des personnages plus ou moins animés et/ou sonorisés
occuper le champ visuel de l'explication, donnant à la contextualisation de
l'apprentissage la fonction de donner à comprendre.

Si la mise en oeuvre d'une navigation claire et élégante combinée à une


contextualisation schématique constitue le point de départ visuel de la
scénarisation d'un cours, la problématique visuelle principale pour le

21
concepteur e-learning demeure de traduire à l'écran les contenus enseignés :
processus, concepts, méthodes... Cette problématique participe de ce que l'on
pourrait appeler l'intelligence visuelle.

6. Intelligence visuelle
Le langage verbal a ses règles propres, consignées dans les traités de
grammaire, de logique et d'argumentation, selon la division ternaire
classique. On s'exprime en respectant des règles de grammaire afin d'être
entendu de tous, on construit logiquement son raisonnement pour aboutir à
une conclusion et l'on tient compte de son auditoire pour argumenter
efficacement.

On peut, par analogie, parler d'une grammaire, d'une logique et d'une


rhétorique de l'image. Ce faisant, on ne perdra pas de vue qu'il ne s'agit que
d'une analogie, sans garantie que les deux termes de la comparaison
fonctionnent semblablement.

On sait même par avance que l'on échouera à décrire le propre de l'image
puisque précisément on la ramène à ce qu'elle n'est pas, on la décrit comme si
elle était un texte. Nous essaierons de nous appuyer sur cette analogie pour
voir ensuite comment la dépasser et nous aventurer dans la puissance propre
de l'image.

Je propose de nommer grammaire de l'image les règles que l'on s'est


assignées: harmonie des couleurs, rapports de proportion (pour mettre à
l'échelle, on ne peut modifier la largeur sans modifier proportionnellemment la
hauteur), perspective (ombres, lumière, point de fuite, règles de déformation
des objets en 3 dimensions..). Il s'agit là de paramètres quasi-objectifs de
l'objet visuel, que l'on ne peut trahir sans perdre la clarté de la représentation.

Je propose d'appeler logique de l'image ce que les théoriciens de l'art


nomment composition : disposition des objets dans l'espace, choix des plans
successifs (avant plan, arrière plan etc.) direction des regards des personnages
et organisation du regard du spectateur dans une ou plusieurs trajectoires
possibles.

L'image, qu'elle soit tableau, diagramme ou schéma, invite à un ou plusieurs


parcours possibles qui donnent à penser, à comprendre, à ordonner les objets
et les significations dans l'espace d'abord et dans le temps, subjectivement
perçu, par voie de conséquence.

Songeons aux Suivantes de Velasquez. Le jeu du montré (la face des


personnages) et du caché (ce qui est peint sur la toile qu'on nous montre de
dos), de l'avant plan (infante et suivantes) et de l'arrière plan (miroir et
personnage encadré par la porte), ainsi que le trajet complexe des jeux de
regards forment un itinéraire qui invite à parcourir la toile et à comprendre ce
qui s'y trame.

22
Dans le tableau de Velasquez, ce jeu est rendu complexe par le fait que le
regard de certains des personnages semble dirigé vers un point situé en dehors
de la toile et qui pourrait contenir les personnages reflétés dans le miroir, mais
aussi le peintre lui-même ou moi, spectateur.

Certes, l'auteur de e-learning n'est pas un peintre et il peut réussir dans son
projet sans s'intéresser à Velasquez. Les mêmes règles de composition
s'imposent cependant à lui, le contraignant à la même nécessité d'organiser les
objets dans l'espace et le regard dans le temps selon la logique propre de la
représentation visuelle.

Je propose, enfin, d'appeler rhétorique de l'image sa faculté d'emporter notre


adhésion, notre implication dans l'oeuvre. Certes, il faut que la représentation
soit correcte sur le plan grammatical, qu'elle soit ordonnée sur le plan de la
logique, mais il faut encore que je sois personnellement embarqué dans la
représentation, qu'elle prenne appui sur un lieu qui m'est familier et qu'elle me
rapproche, par quelque procédé que ce soit, de ce qu'elle me décrit et qui
risque, sinon, de me demeurer étranger. En un mot, la rhétorique a pour
fonction d'abolir la distance qui me sépare de l'oeuvre.

7. Rhétorique pédagogique
La figure centrale de la rhétorique est la métaphore, définie couramment
comme une comparaison prolongée. Il s'agit de décrire une chose à l'aide
d'une autre chose avec laquelle elle possède une ressemblance apparente. Par
où l'on voit que cette figure du texte procède dès le départ d'une intention
visuelle.

Le savoir scientifique moderne s'est construit contre la tendance naturelle de


notre esprit à réfléchir à partir de ressemblances et de correspondances, en
essayant plutôt de dégager des lois et des rapports de cause à effet qui soient
mesurables quantitativement. Mais l'ordre du savoir et celui de la pédagogie
suivent des chemins différents. Le premier procède à partir de lois et de

23
principes pour en déduire le fonctionnement des phénomènes alors que le
second part de l'observation des phénomènes pour remonter aux lois.

Celui qui explique et qui connaît les lois peut délibérément choisir de raisonner
par analogie ou comparaison parce qu'il sait par avance où l'explication doit
conduire et qu'il pourra, au moment opportun, souligner les limites de sa
comparaison. La comparaison est une échelle qui nous permet d'accéder à
l'étage du savoir, depuis lequel on aura loisir ensuite de la retirer.

8. Sur l'échelle
Dans la démarche e-learning, au premier niveau de cette échelle on trouve les
personnages virtuels et décor qui entourent l'explication proprement dite et qui
introduisent une ressemblance non encore entre ce qu'il faut comprendre et ce
que je comprends déjà, mais entre celui qui a compris et moi.

Au lieu de m'expliquer théoriquement les notions d'Actif et de Passif en


comptabilité, on me présente Jean, comptable auprès des établissements
Regalus, son bureau, les ouvrages qu'il tient à disposition et sur lesquels je
peux cliquer pour obtenir des informations complémentaires. On m'explique
que le patron de Jean lui a demandé d'établir le bilan annuel. Dans la saynète
qui m'est montrée, un personnage représente le patron qui formule une
demande, un autre incarne Jean qui essaie de calculer et d'appliquer des
formules.

A un second niveau de cette échelle se trouve une métaphore introduite cette


fois dans le diagramme explicatif lui-même. Le choix de représenter un
phénomène invisible comme l'électricité en le comparant à un cours d'eau
permet au débutant d'appréhender le phénomène à partir de ce qu'il sait. La
largeur du fleuve correspond à l'intensité du courant, calculée en Ampères; la
vitesse de l'eau correspond à la tension électrique, calculée en Volts et la
multiplication de l'un par l'autre correspond à la puissance calculée en Watts.

Pour Jean et son problème de comptabilité, l'imagerie pourra puiser dans le


trésor des objets mécaniques simples et anciens tels que: vases
communicants, clepsydre, ligne de flotaison.

Le troisième niveau de cette échelle est atteint lorsque l'on réussit à filer la
métaphore, montrant par là sa pertinence et conduisant vers une
compréhension dynamique du phénomène étudié. Si je rétrécis le cours d'eau,
à vitesse du courant égale, je diminue le débit du fleuve. Quelle est la
dimension impactée dans l'exemple électrique? Volts, Watts, Ampères?
Expliquez!

Ce troisième niveau pourra conduire à une démarche d'exercisation, mais aussi


d'animation ou encore de screencast, c'est-à-dire d'explication sonorisée sur
une image fixe avec synchronisation de la voix et des mouvements de la
souris.

24
Le screencast présente le quadruple intérêt de:
• pouvoir être réalisé par le formateur lui même à l'aide de logiciels
simples en reproduisant à l'écran la logique d'explication au tableau
classique et bien connue de tous;
• concentrer toute l'intelligence visuelle sur un support fixe au lieu de la
disperser dans la production complexe et déroutante d'une animation où
chaque objet serait potentiellement mobile;
• articuler l'écran et le papier : on pourra, par exemple, communiquer aux
apprenants un aide-mémoire qui repréndra au format imprimé le
résumé (à savoir l'image fixe) de ce qui a été dit dans le cours;
• permettre le recyclage de l'image fixe produite dans des tests et des
activités où l'on pourra, si nécessaire, retirer les légendes de l'image ou
en masquer des parties qui constitueront autant d'énigmes à résoudre.

9. Aux sources de la créativité visuelle


Ceci illustre plusieurs notions fondamentales de la créativité pédagogique en e-
learning.

Tout d'abord, la rhétorique pédagogique n'est pas propre au e-learning. Elle est
à l'oeuvre aussi bien dans les manuels et les enseignements en salle. Une
petite partie seulement de ce travail est propre au e-learning et est susceptible
d'ouvrir d'autres possibles techniques : vidéo, screencast, exercices auto-
corrigés...

Ensuite, cette créativité est fondamentalement ancrée dans la culture et dans


l'observation de la Nature. C'est la fréquentation de la Nature et des oeuvres
d'art, la lecture des romans, des mythes, des textes religieux, l'observation de
la peinture et des ouvrages didactiques qui nourrit notre imagination,
favorisant l'éclosion de telles comparaisons.

La fréquentation de jeunes enfants dans l'exercice du difficile métier de parent


est également propice à nourrir cette créativité. D'une part parce que les
enfants nous obligent continuellement à cet effort rhétorique qui consiste à
expliquer l'inconnu par le connu. Ensuite parce que les enfants nous font
partager la compréhension qu'ils ont acquise au contact de leurs maîtres et de
leurs manuels. On mesure, à les écouter, l'efficacité de telle métaphore, la
mécompréhension que suscite telle autre. La créativité pédagogique n'est nulle
part à l'oeuvre de façon aussi systématique qu'avec ces être pourvus de tant
d'intelligence et d'hypothèses drôles et imaginatives, mais dépourvus de tant
de connaissances.

Sans doute, les sujets traditionnels du e-learning sont différents de ceux des
classes maternelles: langues, bureautique, maniement de logiciels,
compétences métiers, gestion de projet etc. Mais d'une part on constate que ce

25
périmètre évolue: on forme aujourd'hui à la radiothérapie, à la gestion
financière et à la prise de décision, compétences qui sont moins directement
affaire de réalisation technique et de mode opératoire. Et d'autre part ce n'est
pas la nature de la compétence enseignée qui détermine la créativité et notre
capacité à générer les bonnes métaphores visuelles, mais bien notre capacité
propre, en tant que concepteurs nourrie, comme on l'a dit, au vivier de la
culture et de la sensibilité.

Au démarrage d'un projet et au début de chaque leçon ou objet


d'apprentissage, le concepteur e-learning est appelé à ouvrir les portes de son
imagination pour concevoir les figures de rhétorique visuelle qui feront entrer
l'apprenant dans les explications qui lui sont fournies.

L'apprentissage par le projet, par le problème, et plus généralement la mise en


action de l'apprenant dans le cours participent, eux aussi, de la rhétorique
pédagogique au sens large. Il s'agit, ici encore, de rapprocher l'apprenant de la
compétence “par la main”, par la pratique et l'expérimentation. Mais ceci ne
constitue pas l'objet de la présente réflexion.

10. Logique pédagogique


Une fois inventée la métaphore, il reste à dérouler l'explication. La logique
pédagogique invite à déployer le récit visuel en fonction de celui à qui on parle,
nous l'avons dit, mais aussi en fonction du sujet traité.

Or chaque sujet, contenu ou compétence en jeu a sa logique propre et il


convient, par rapport à celle-ci de fournir une analyse qui soit détaillée au point
de définir précisément les paramètres de l'image attendue.

Cette analyse porte sur


• la discipline étudiée: médecine, mécanique, architecture... et
l'iconographie en usage dans cette discipline;
• l'objet d'étude: par exemple un plan d'architecte;
• les tâches demandées : demande-t-on dans cette leçon à l'architecte
de calculer des aires, de définir des priorités dans son projet ou de le
justifier auprès de son client?
• La nature de l'explication existante : par exemple textuelle sous
forme de liste à puces dans une présentation Powerpoint.

En ce qui concerne la production technique des images, l'auteur pourra:


• recycler, améliorer, redessiner une image qu'il a lui-même produite
préalablement
• trouver des images dans un catalogue, un moteur de recherche,
• concevoir une nouvelle image

Dans les trois cas, il aura besoin de réfléchir en termes d'outils techniques
(logiciels) pour redimensionner, recadrer, encadrer, dessiner, capturer,

26
transformer, composer...

La dimension proprement logique de l'image est sa capacité à traduire dans


l'espace des concepts avec un minimum d'ambiguïté et un maximum de clarté.
Pour aboutir à ce résultat, on procède le plus souvent, par un double
mouvement d'induction et de déduction.

L'induction nous fait observer telle image particulière (dans un livre, dans un
autre cours, à la télévision...) et nous pousse à nous en approprier l'une ou
l'autre dimension. Par exemple : j'ai aimé les le schéma du flux sanguin dans
une encyclopédie médicale, pourquoi ne procéder de façon analogue pour
présenter le cycle de l'eau dans mon cours sur les écosystèmes?

La déduction suit un chemin plus conceptuel. Me demande de réfléchir à la


tâche de l'étudiant en termes de catégories et de types logiques pour aboutir à
la création ou composition d'une image.

Le tableau ci-dessous, organise les images en quatre catégories fondamentales


et propose au concepteur d'opter pour une branche (déduction) avant de
réfléchir par analogie (induction) à la façon dont les autres ont construit leurs
images dans des problématiques semblables.

Soit un projet d'architecture: construction d'un centre ambulatoire de nutrition


en Afrique équatoriale. Ce projet s'articule autour d'un plan et remplit
différentes fonctions dans lesquelles entrent des éléments de quantification
(mesure des aires), de séquence (fabrication des couches successives de la
construction), de classement (séparer dans le logiciel de dessin les couches
électrique, de gros oeuvre et de plomberie) et de représentation (prévisualiser
le bâtiment et ses différentes pièces).

Mais ma leçon porte sur la justification de la disposition des pièces dans le


bâtiment en fonction de son usage. Il faut donc expliquer le trajet du patient
dans l'édifice.

En m'inspirant de diagrammes vus ailleurs, représentant par exemple le trajet


de l'eau dans une centrale hydroélectrique, je choisis de superposer au plan
d'architecte un diagramme de processus. Ce diagramme inclut des photos des
opérations menées dans chacune des pièces (examen clinique, médication,
nutrition, repos) reliées entre elles par des flèches qui symbolisent le trajet du
patient.

27
Sections suivantes:

• Grammaire pédagogique
• Articulation des médias
• Texte et image
• Son et image
• Les mindmaps: images logiques
• La technique du screencast
• Recyclage d'une image dans un test
• Conclusion
Ce chapitre devrait faire 25 à 30 pages en tout.

28
IV. Apprendre en collaborant

Résumé

Le renforcement de la dimension collaborative dans l'apprentissage en ligne


conjugue des avantages économiques (dégagement de main d'oeuvre bénévole
parmi les stagiaires et ailleurs) et pédagogiques (augmentation de la motivation par
la technique du regard croisé). Il permet également un démarrage plus rapide des
formations et une meilleure articulation entre apprentissage et travail parce qu'il
déplace la méthodologie du contenu vers les activités.

29
1. Des ingénieurs se forment à la philosophie
De 1998 à 2003, j'ai enseigné la philosophie à des candidats ingénieurs
(Polytechnique) de l'Université catholique de Louvain sous la forme d'un
apprentissage collaboratif. Les 320 étudiants se rassemblaient en 40 groupes
de 8, se répartissaient le travail et les responsabilités en fonction de rôles
prédéfinis et produisaient ensemble un rapport d'activité de 16 pages. Ils
critiquaient ensuite les rapports de 3 autres groupes. Une partie du travail se
fait via internet par des forums, des outils de partage de documents. J'ai été
frappé par la motivation des futurs ingénieurs à se lancer dans la rédaction
d'essais dans un domaine qui, a priori, ne les intéresse pas. J'ai ensuite été
amené à m'interroger sur les raisons de cette motivation.

2. La collaboration

a) Qu'est-ce qu'un groupe?


Qu'est-ce qu'un groupe? 2, 3, 8 personnes? Ou bien 20.000 Personnes? Une
réponse pédagogiquement pertinente à cette question implique que nous
prenions en compte non seulement la question de la collaboration en général,
mais aussi la question de la distance. En effet, la collaboration à distance
donne d'autres limites à la notion de groupe, d'autres règles à la
collaboration. Si le dialogue platonicien est une forme canonique de
l'apprentissage collaboratif dans l'Antiquité, Wikipedia , l'encyclopédie libre sur
internet, à laquelle collaborent plus de 50.000 personnes, pourrait bien
constituer un canon moderne de la collaboration dans le savoir.

b) Collaboration et coopération
Collaboration et coopération. On entend souvent opposer les deux.
L'étymologie suggère que la collaboration est le fait de travailler ensemble, pas
nécessairement vers un but commun, une oeuvre commune. Alors que la
coopération consiste à travailler ensemble à une même oeuvre, à un même
but. La morale suggère aussi que coopérer c'est "mieux", plus fort que
simplement collaborer. Quand on collabore, on s'entend provisoirement, dans
les moyens mis en oeuvre, quand on coopère, ce sont les fins qui sont mises
en commun.

A propos de cette idée de mise en commun, il faut insister sur le fait que
l'apprentissage collaboratif n'est pas une forme de communisme. Il y
ressemble parfois, pour le meilleur et pour le pire. Ainsi on voit des formateurs
et des éducateurs animés d'un idéal de fraternité et de partage proposer à
leurs apprenants des travaux collaboratifs. Ce sont souvent ces formateurs-là
qui sont les premiers roulés par leurs apprenants, lesquels trichent en faisant

30
tout faire par l'un d'entre eux ou bien racontent, des anges dans les yeux, à
quel point la collaboration dans le groupe a été optimale.

Quand on parle d'apprentissage collaboratif, il ne faut pas être naïf. Il faut


vérifier le travail individuel, il faut aussi motivier ce travail individuel par des
récompenses, des reconnaissances qui se jouent sur le terrain d'un narcissisme
maîtrisé. A l'Open University, on fait volontiers travailler les étudiants par
groupes de 5 ou 6 sur des thèmes de recherche, puis on leur demande des
production individuelles. Il s'agit bien ici de collaboration, non de coopération.

c) Hétérogénéité et homogénéité
Un contre-argument à l'apprentissage collaboratif est que si l'on rassemble
deuxignorants, il en sort de l'ignorance. A cet argument, on oppose le constat
de l'hétérogénéité de l'ignorance. Si tous ignorent en partie la réponse aux
questions qui sont posées, tous n'ignorent pas la même chose, les zones
d'ignorance ne se recouvrent pas. Les deux collaborateurs ont ainsi des choses
à s'apprendre.

Un autre contre argument est que dans le travail collaboratif, l'un apprend (le
plus faible) tandis que l'autre (le plus fort) n'apprend pas. Une analyse de la
formalisation qui est à l'oeuvre dans le dialogue vient contredire ce dernier
point. Le contraire est plus courant : celui qui sait davantage est amené à
expliquer à celui qui sait moins et cet exercice de formalisation lui permet de
se réapproprier sa connaissance. C'est ce que les spécialistes appellent l'auto-
explication.

d) Le conflit cognitif
Comme l'a montré Vigotsky (une bibliographie sommaire figure à la fin du
texte) et les tenants du socio-constructivisme, l'apprentissage à plusieurs
génère des conflits cognitifs et le désir naturel de les résoudre. La divergence
de vues constitue en soi un appel à chercher la vérité. Ces dissonances
cognitives existent au sein d'un même esprit (Aristote ne définit-il pas la
pensée comme le " dialogue de l'âme avec elle-même"?), mais elles sont plus
mobilisatrices lorsqu'elles surgissent entre deux esprits car elles se jouent
alors sur le terrain de ce que Hegel appelle " le combat pour la
reconnaissance".

e) Les mécanismes de la collaboration


Pour faire collaborer les membres d'un groupe, et pour les faire collaborer dans
l'apprentissage, il faut leur donner une tâche qui soit de nature collaborative :
un puzzle dont chacun ne possède qu'une partie des pièces. Si vous donnez à
un groupe la tâche de résoudre une équation mathématique, il y a fort à
parier que chacun tentera de résoudre l'équation seul. Si vous donnez à un

31
groupe la tâche de réaliser un journal, comme le faisait Célestin Freinet à
l'école primaire, l'un rédigera des articles, l'autre apprendra à maitriser les
règles de la typographie, un troisième se lancera dans une illustration de
couverture, etc.

Une première difficulté pour le formateur est de définir des tâches qui soient
par nature collaboratives et de les expliquer avec suffisamment de détails pour
que chacun voie ce qu'il a à faire. Il faut aussi équilibrer la clarté des
consignes et un minimum de liberté ou d'initiative dans le chef des apprenants.

Ceux-ci souhaitent comprendre ce que l'on attend d'eux mais disposer dans le
même temps d'une marge créative. Ce rapport entre la marge créative et la
précision matérielle des consignes variera naturellement selon la nature du
public à qui l'on s'adresse.

L'expérience montre qu'à distance, les consignes doivent être plus claires, les
échéances plus impitoyables, les modes d'évaluation mieux cuits et les rôles
mieux définis. Le retard de l'un, ses erreurs, ses égarements, compromettent,
souvent sans espoir de réparation, la qualité du travail d'un autre.

f) Inégalités
De manière générale, les éducateurs et les formateurs se soucient d'égalité
dans l'apprentissage. Le respect de cette exigence se révèle particulièrement
difficile dans l'apprentissage collaboratif. Si l'un acquiert des compétences
linguistiques tandis que l'autre acquiert des compétences manuelles, on est
bien dans la reproduction d'un schéma de production qui peut être très
motivant (nous créons, nous fabriquons, nous oeuvrons...) , mais il n'est pas
sûr que l'on respecte le cahier des charges du cours.

La bonne nouvelle de l'apprentissage collaboratif est qu'il conjugue deux


élements de motivation forts : la production , le fait de produire une oeuvre, ce
qui est narcissiquement valorisant, et les mécanismes sociaux de la
motivation :
• confrontation,
• souci d'épater la gallerie,
• enjeux de reconnaissance,
• compétition inter-groupes,
• conflits socio-cognitifs.

La mauvaise nouvelle est que dans la tâche du groupe, certains rôles sont plus
formateurs que d'autres. Si je demande à un groupe de résoudre une équation
mathématique et d'en faire un article de journal, un membre du groupe
apprendra les mathématiques tandis qu'un autre apprendra la typographie.

32
g) Problèmes d'évaluation
L'apprentissage par le projet pose déjà des problèmes d'évaluation. On évalue
aisément la réponse à un quiz tandis qu'on peut difficilement donner des
points à un travail de dissertation. L'apprentissage collaboratif (qui contient
très souvent une dimension de projet ou de problème) en pose encore
davantage. Comment savoir si la faiblesse de la production de l'un n'est pas
due aux insuffisances de l'autre?

Comment Jean aurait-il pu produire un bon résumé de texte si Pierre, qui était
responsable de la recherche documentaire, n'a pas fourni les documents les
plus pertinents? Plus les compétences demandées sont de haut niveau, moins
l'évaluation est aisée. Et plus la tâche est collaborative, moins il est aisé de
discerner les responsabilités d'un échec. Cela ne signifie pas qu'il faille
renoncer à enseigner des compétences de haut niveau ni à le faire de faà§on
colaborative. La collaboration est en soi une compétence. Et elle est de haut
niveau. On devra bien souvent renoncer à l'évaluer au plus juste ou du moins
à l'aide de critères à l'objectivité garantie.

3. Rôle du formateur

a) Distribution et redistribution des rôles


Dans l'apprentissage collaboratif, le formateur a un rôle de distribution des
rôles, mais aussi de rééquilibrage des inégalités. Il doit veiller à distribuer et
redistribuer les rôles dans le temps afin de s'assurer que chacun passera par
les épreuves qui le forment et par l'apprentissage des différentes compétences
qui correspondent aux exigences définies par le système. Ceci renvoie le
formateur à une problématique de gestion des compétences : distribuer les
rôles dans un cours, mais aussi d'un cours à l'autre, à travers un suivi du
parcours d'apprentissage de chacun.

Pour conjurer ce danger d'inégalité dans l'apprentissage, le formateur pourra


veiller à équlibrer les rôles dans le temps, notamment par une gestion des
carrières d'apprentissage o๠l'apprenant qui se voit confier une tâche plus
analytique dans le cours 1 reà§oit d'autorité une tâche plus synthétique dans le
cours

b) Organisation du travail
Comme un responsable d'équipe ou de projet, le responsable d'un programme
d'apprentissage collaboratif doit veiller à organiser le travail. Qui fait quoi,
quelles sont les échéances, les délivrables, les rôles de chacun, les

33
récompenses, les réglementations, les standards de qualité, les résultats des
autres groupes? Il est amené à renvoyer les groupes les uns vers les autres
pour créer des synergies, des jalousies, des échanges de bonnes pratiques, des
confrontations.

Le formateur doit aussi veiller à ce que le groupe s'auto-organise. Dans


l'apprentissage collaboratif, gestion des ressources humaines (" team building"
etc.) et formation ne forment plus qu'un. Et si l'activité évolue positivement, on
peut imaginer que l'apprentissage de la collaboration obtenu dans
l'apprentissage sera bénéfique pour la collaboration dans le travail. On passera
ainsi, selon l'expression de Bernadette Charlier, d'une " communauté
d'apprentissage à une communauté de pratiques".

c) Choix du scénario
Apprentissage par le problème, par le projet (par l'oeuvre?), par les exercices,
jeu de l'oie, stratégo vivant, quiz, questions pour un champion, parcours piégé,
pré-test contenu-post-test, patient virtuel, recherche guidée, auto
apprentissage tutoré?

Quel scénario allez-vous choisir? En fonction de quels critères? On peut donner


la liste des principaux paramètres que vous allez probablement prendre en
compte:
• Nature des compétences à acquérir : s'agit-il de la maîtrise de Ms-Word
2000 ou des techniques de conduite de réunion?
• Niveau des apprenants : sont-ils capables d'auto-apprentissage, sont-ils
motivés par le contenu lui-même, sont-ils capables de chercher de
l'information, de problématiser par eux-mêmes?
• Hétérogénéité des apprenants : ont-ils des choses à s'apprendre l'un
l'autre, ne sont-ils pas trop différents (disparité linguistique par
exemple)
• Nombre des apprenants : sont-ils 20, 200, 2000? peut-on imaginer 100
groupes de 20? Il y a des scénarios qui marchent mieux avec beaucoup
de monde, spécialement en ligne
• Ressources humaines disponibles : suis-je condamné à
l'autoapprentissage faute de tuteurs? Puis-je compter sur de la main
d'oeuvre gratuite au sein du groupe d'apprenants, à l'extérieur?

• Scénario des autres cours : serez-vous le 14e à proposer d'apprendre


par le projet? Le contexte a son importance.

Que dit la théorie, que disent les autres expériences? On apprend, par
exemple, en lisant certains articles qu'un groupe de travail doit contenir
entre 3 et 7 personnes. Au-delà de 10, il y a peu de différence de
comportement entre, par exemple un auditoire de 20 et un auditoire de
2.000 personnes.

34
Il existe, dans l'apprentissage collaboratif, des sortes de déductions qui
permettent de définir le bon scénario pour une formation donnée. Bien
entendu, la liste cidessus n'est pas complète et doit être nourrie des éléments
qui sont propres à un contexte donné : type d'organisation, historique de la
formation, état du dialogue social, etc. Une telle déduction est typiquement le
genre de problème qu'une organisation peut avoir intérêt à traiter avec l'aide
d'une société de conseil spécialisée.

4. La collaboration à distance

a) Déstructuration
L'absence de communication non-verbale, la difficulté de corriger le tir en cas
de mécompréhension, ainsi que le sentiment de solitude associé au médium
froid qu'est internet font des cours en ligne des outils difficiles à manier, par
essence démotivants.

Il y a beaucoup d'échecs dans le e-Learning, beaucoup d'abandons. A l'Open


University , des tuteurs téléphonent aux étudiants pour faire le point avec eux.

On ne s'en sort qu'à grand renfort de pampering plus ou moins proactif. Sinon
c'est la démotivation qui pointe. Au Learning Center de Belgacom, o๠les
employés pouvaient pratiquer l'auto-apprentissage librement, il fallait souvent
les forcer pour venir.

Partout, on constate que les apprenants ne sont pas très chauds pour le e-
Learning. Sans parler des formateurs qui y voient une menace directe pour leur
activité, parfois à juste titre. Il y a crainte de l'outil technologique, ennui de la
solitude, exaspération devant les pannes, fatigue occulaire, etc.

De nombreuses raisons de préférer un bon cours en salle sur base d'un bon
bouquin. Sauf si .... les consignes sont claires au point d'atténuer l'inconfort du
net. Sauf si, par ailleurs, l'espace internet est utilisé comme un espace de
publication des productions de l'apprenant, nous faisant alors radicalement
sortir de la logique du Cd-Rom et des parcours de contenus qui est encore très
présente dans la culture e-Learning.

b) Internet comme espace public


Pour motiver des apprenants a priori peu enthousiastes pour l'apprentissage
par internet, j'ai pu constater qu'une méthode fort efficace était de jouer au
projecteur comme dans les concerts de Johnny Halliday. Johnny est confronté
au même problème potentiel que nous. Lui, il s'amuse sur scène, mais le
spectateur anonyme peut tomber dans la léthargie. Pour le réveiller, on
demande aux techniciens lumière de parcourir le public avec des projecteurs
dits " de poursuite". Et, comme une Lady Di qui se sentirait vivre à force
d'être poursuivie, nos apprenants peuvent, par ce moyen, se sentir mobilisés

35
par un espace scénique soudain projeté sur eux. "A notre époque, chacun de
nous sur terre sera célèbre un quart d'heure" disait Andy Warhol.

Mais comment s'y prend-on pour rendre chacun célèbre pendant un quart
d'heure? On peut, par exemple, prévoir de signaler à l'ensemble du groupe les
réponses de Jean Dupont à la question 6 du questionnaire 4. On peut aussi
prévoir de demander aux groupes de travail de lire les travaux des autres
groupes de travail. On sera, de cette façon, amené à considérer les écriveurs
que sont nos apprenants à la lumière des théories exposées par Umberto Eco
dans Lector in Fabula.

c) La technique du regard croisé


Eco remarque qu'un écriveur écrit en fonction d'un lecteur et plus
généralement un lectorat modèle, un lecteur relativement imaginaire que
l'écriveur se représente et qui constitue non seulement le destinataire du
travail de l'écriture, mais également son standard de qualité, sa source
d'inspiration, voire l'objet même de son écriture.

Autant il est peu motivant d'écrire pour un formateur qui aura 10 minutes à
consacrer à ma copie ou, pire encore, d'écrire à destination d'un programme
de correction automatique, autant il est motivant d'écrire pour lire ensuite sa
production à haute voix devant un parterre d'admirateurs, pour un grand
quotidien, à quelqu'un que l'on aime, à un groupe d'amis.

Voyez comment les Corinthiens servent de motivation et d'inspiration au travail


de l'écriture dans les Epitres aux Corinthiens , comment la jeune fille perdue
dans le poème de Goethe "An die Entfernte " est tout à la fois le destinataire,
le sujet et la matière même du texte.

Partant de là , on peut construire un scénério de formation en cherchant, par


principe, à multiplier les regards croisés, à garantir par avance à chaque
producteur de savoir que sa production sera lue, critiquée, analysée,
décortiquée par un maximum de paires d'yeux, par un maximum d'oreilles, par
un maximum de personnes et avec des grilles de lecture différentes.

A la composition d'équipes collaboratives (rôles fonctionnels ) vient donc


s'ajouter l'idée de critiques inter-groupes (rôles intellectuels ), de critiques
inter-personnelles, de relations de lecture et d'analyse croisée. Ce mécanisme
permet en partie d'échapper à la critique de l'apprentissage par le projet
collaboratif qui fait de celuici
un calque de la production. Si l'on n'y prend garde, en effet, on court le risque
de transformer l'apprentissage en une simple réalisation.

On sait que l'apprentissage ne se résume pas à faire des choses. Pas plus que
la pensée ne se mesure à ses seuls effets. Il y a, dans l'apprentissage, une
dimension critique et spéculative qui est potentiellement menacée par
l'apprentissage matérialiste et concret à la Freinet: produire un journal,
fabriquer une cabane, tout cela peut conduire à faire de nous des exécutants,

36
des manuels. La formation en entreprise, pas plus que l'université, ne sont des
centres d'apprentissage professionnel.

En introduisant cette idée de regard croisé, on réintroduit dans l'apprentissage


collaboratif une dimension spéculative et critique tout en demeurant dans le
schéma d'une activité à plusieurs.

d) Formalisation de la communication
Autant la collaboration en face-à -face est facilitée par des échanges non
verbaux, des ajustements en cours de route et des prises de contact de toutes
natures, autant sur internet la communication ne fonctionne qu'à grand
renfort d'artifices. Il faut tout définir et préciser : rôles, échéances, critères,
quantités, formats, ryhtme, style, zones, durées, lieux, adresses...

Les apprenants ont mille occasions de se perdre, d'hésiter, de confondre et l'on


doit prévoir toutes ces occasions à grand renfort de guides méthdologiques,
agendas détaillés, rappels par courriel, schémas récapitulatifs. Ce que chacun
doit faire, comment il se le voit attribuer, à quel endroit il doit le réaliser, le
déposer, autant de questions auxquelles les apprenants sont a priori sans
réponses.

Une fois passés à l'écran, on reçoit des messages suprenants demandant dans
quelle taille de caractère il faut rédiger. C'est qu'il y a tant de possibles
techniques et si peu d'occasions de se voir préciser l'ensemble des décisions
qu'il faut prendre! Si c'est possible, il se révèlera utile de prévoir des moments
de rencontre physique pour prendre en considération certaines questions qui
touchent aux représentations spatiales, à la manipulation des outils, à ce que
l'on peut formuler oralement, mais non par écrit.

L'univers de la communication internet, pour fonctionner, doit être plein de


règles et ces règles doivent toutes être précisées. Le temps, notamment, doit
faire l'objet d'un découpage minutieux et granulaire. Il faut imposer des étapes
successives qui permettront aux apprenants de recevoir des commentaires sur
leurs premières réalisations. La qualité du travail des uns repose sur le degré
d'accomplissement du travail des autres, jusque dans le moindre détail.

e) Comportements particulier des grands groupes à distance


Dans The Mythical Man-Month , Frederic Brooks constate que l'adjonction d'une
personne à une équipe, dans un projet en retard, n'augmentait pas la
productivité de cette équipe, mais la ralentissait au contraire. Plus
généralement, il existe, selon Brooks, une limite à la possibilité d'augmenter la
taille d'une équipe de travail.

Cette loi semble ne pas s'appliquer lorsque l'on collabore à distance. Ainsi on a
vu le phénomène Linux et Open Source se développer de faà§on spectaculaire
ces dernières années grâce à internet et mettre au jour un nouveau modèle

37
économique : celui du groupe gigantesque o๠chacun n'apporte qu'une
contribution minuscule.

Cela s'applique également à l'apprentissage à distance. China TV and Radio


University accueille chaque année 200.000 étudiants. Et il ne semble pas y
avoir de limite à la taille de cette organisation à distance. Mieux encore,
certains mécanismes sont facilités lorsque l'on atteint une taille critique. Ainsi
un forum fonctionne mieux avec 10.000 adhérents qu'avec 100, une
encyclopédie en ligne comme Wikipedia fonctionne du fait même qu'elle a
atteint la taille critique, le seuil de réactivité qui fait que chacun est motivé à
s'y rendre.

Dans la formation en ligne, on doit s'interroger sur la taille dont on dispose et y


adapter le scénario de la formation. Ne pas parier sur un forum avec un petit
groupe, ne pas parier sur des temps de rencontre individuelle avec 1000
apprenants, etc.

En outre, on doit chercher à exploiter la taille de la "classe" virtuelle et


éventuellement chercher à l'augmenter en fusionnant plusieurs classes, en
faisant collaborer plusieurs organisations. Les cours de langues qui font
dialoguer en anglais lusophones et francophones connaissent notamment un
certain succès.

On peut par ailleurs se demander pourquoi les grands groupes collaborent à


distance et non en présence. Selon E.S. Raymond, auteur de La cathédrale et
le bazar , l'explication est sociologique. Les collaborateurs en présence
convoitent les mêmes biens : femmes, promotions, emplois, places de parking,
etc. et sont donc en situation de conflit. Les collaborateurs distants ne
communiquent que par "l'âme" et ne convoitent pas les mêmes biens.

5. Le R.O.I. de l'apprentissage collaboratif

a) Dégagement de main d'oeuvre bénévole


On peut, dans un dispositif en réseau, faire collaborer les apprenants au point
de les faire analyser les productions de leurs condisciples. C'est même
pédagogiquement recommandé. Cette technique du regard croisé dégage de la
main d'oeuvre de motivation et de la main d'oeuvre de lecture.

On peut aussi faire appel à des contributions ponctuelles. Demander par forum
l'avis d'un expert qui n'aurait pas fait le déplacement dans un autre mode
d'interaction.

38
b) Facilitation des processus de production
Le passage d'une communauté d'apprentissage à une communauté de
pratiques fait faire des économies à l'organisation. La formation devient un
espace de gestion des ressources humaines et la formation une occasion de
faire du "team building".

L'auto-apprentissage prend l'acteur du système comme un individu isolé et le


rend comme un indvidu isolé. La formation par collaboration fait appel aux
réflexes individualistes de l'acteur, mais elle le familiarise avec les bénéfices
d'un travail partagé.

c) Structuration des grandes organisations


Dans des organisations multinationales comme Air France ou Delhaize, le
besoin de construire des équipes internationales qui collaborent à distance est
important. Mais ce projet passe rarement par la mise en place d'une formation.
Pourquoi ne pas former collaborativement à distance pour pemettre aux
équipes de se constituer?

d) Diminution du délai décision / formation


Pensé sans dimension collaborative, le e-Learning se conà§oit difficilement
sans la production de contenus multimedia sophistiqués, couteux et longs à
réaliser.

Ne pariant pas sur la motivation inter-personnelle, le e-Learning classique parie


sur la motivation par la présentation élégante d'un contenu et de tests
d'autoévaluation.

Ceci a un coût. D'abord l'apprenant se lasse de la sophistication multimedia,


aussi soignée soit-elle. Ensuite, cela suppose un délai long entre la décision de
former et le passage à l'acte. Enfin, cela demande de dépenser plus de
ressources humaines et financières que pour la production d'un équivalent
papier.

Dans l'apprentissage collaboratif, la dimension multimedia peut être réduite.


On voit même des dispositifs se baser sur une interaction en ligne à partir de
contenus papier.

39
6. Bibliographie
Brooks F.P., The Mythical Man-Month: Essays on Software Engineering,1975,
Addison Wesley Professional, London.

Dillenbourg P. & Schneider P., "Collaborative learning and the Internet",


http://tecfa.unige.ch/tecfa/research/CMC/colla/iccai95_1.html, 1995.

Dillenbourg P. Introduction de Collaborative Learning : cognitive and


computational approaches , P. Dillenbourg (Ed.), 1999, Oxford, Elsevier.

Eco U., Lector in fabula, Paris, Grasset, 1985.

Salomon, G. & Globerson, T., "When teams do not function the way they ought
to", International journal of Educational research ., 1989, 13, pp. 89-100.

Vygotsky L.S., Thought and Language, 1962, Cambridge, Massachusetts, MIT


Press.

40
V. Gérer le projet

Résumé

Pour mener à bien un projet e-learning, il faut prendre en compte au minimum 4


dimensions : l'analyse, le design (ou scénarisation), le développement et
l'interaction. On peut y ajouter l'infrastructure logicielle ainsi que le plan de
communication.

41
1. Introduction

Ce guide est le résultat d'une série de collaborations avec des responsables RH


et responsables de formation. Dans la plupart des cas, ces départements
souhaitaient déployer un programme de formation en e-learning pour
augmenter la flexibilité de l'offre de formation, rendre les formations plus
accessibles, les horaires plus flexibles, optimiser les ressources humaines
disponibles et améliorer la productivité. Ce document définit des lignes de
conduite pour la phase pilote d'un tel projet.

2. Gestion de la qualité
Près de 70% des projets e-learning échouent. Les participants abandonnent,
les compétences ne sont pas acquises, le projet n'est pas financièrement viable
ou bien il est désavoué par la direction. Il est donc important de prêter
attention aux faiblesses caractéristiques de ce mode de formation,
l'insuffisance de l'analyse et du design étant les plus évidents.

L'analyse des besoins de formation, du public et des ressources disponibles,


mais aussi des normes en vigeur dans le domaine : SCORM, W3C, normes pour
l'évaluation ainsi que normes internes à l'organisation qui monte le projet
aideront à en définir les contours et à garantir la qualité.

Dans l'une des sociétés avec lesquelles nous travaillons, le projet e-learning est
induit par la nécessité de se conformer à une série de normes nouvellement en
vigueur (PALASet CMMI). Le projet pilote e-learning constitue une occasion
d'appréhender ces normes et d'exploiter leurs mécanismes propres de
validation ainsi que les contenus de formation ou d'information qui leur sont
associés. On part toujours du principe que la formation doit opérer dans un
contexte aussi proche que possible que la situation de travail à laquelle elle est
censée préparer.

3. Une approche orientée compétences

Si la plupart des spécialistes recommandent que la formation se centre sur les


compétences (ce que les stagiaires seront capables de faire) plutôt que sur les
contenus (ce que les stagiaires sauront), c'est plus vrai encore en e-learning.
Le transfert d'une partie de votre programme vers des parcours
d'apprentissage en ligne vous invite à décire le processus étape par étape en
termes d'activités et de tests et vous êtes amené à définir les tests en termes
de compétences.

42
La formation en salle tolère des objectifs du type : « à la fin de la formation,
les participants connaîtront les principales règles de qualité de l'organisation »
mais la même formation en ligne vous conduira à décrire les objectifs en
termes de :
● associer une règle universelle à une situation particulière en répondant
à une série de questions sur un cas donné

● définir ce qui est inclus dans la règle et ce qui ne l'est pas

● comparer les résultats de deux processus et décider lequel applique le


mieux une règle donnée
Un des exercices les plus utiles que puissent faire les responsables de
formation au commencement du projet e-learning est de redéfinir les leçons et
leurs objectifs en termes de comportements mesurables d'où sont excluses
toutes considérations mentales du type « penser », « comprendre »,
« appréhender ».

Description orientée contenus Description orientée compétences

Connaître le protocole PALAS Lister les règles PALAS

Comprendre les règles PALAS Répondre correctement à un


questionnaire à choix multiple sur PALAS

Appliquer PALAS à une situation Pointer les fautes dans une application
particulière incorrecte de PALAS à une situation
donnée.
Remplir un formulaire PALAS à propos
d'une situation donnée.

La taxonomie de Bloom nous aidera à détailler le programme d'un cours et à


analyser une leçon ou un séminaire en termes de compétences. On se référera
utilement à un tableau du type de celui-ci.

Catégorie Exemple et mots-clefs

Connaître: Mémoriser des Exemples: Réciter un manuel. Dresser une liste de prix
informations. de mémoire à un client. Connaître les règles de
sécurité en vigueur.

Mots clé: définir, décrire, identifier, connaître, lister,


faire correspondre, reproduire, sélectionner.

Comprendre: comprendre Exemples: Réécrire un protocole de test. Expliquer


le sens, traduire, dans ses propres mots les étapes requises dans un
interpréter un jeu processus. Transposer une équation dans une feuille

43
d'instructions, reformuler. Excel.

Mots clés : comprendre, distinguer, estimer, étendre,


généraliser, donner des exemples, inférer, interpréter,
paraphraser, prédire, réécrire, résumer, traduire.

Appliquer: Utiliser un Exemples: Utiliser un manuel pour calculer le salaire


concept dans une situation d'un employé. Appliquer des lois statistiques à un test
nouvelle. pour en déterminer la fiabilité.

Mots clés: appliquer, modifier, calculer, démontrer,


découvrir, manipuler, préparer, produire, mettre en
relation, résoudre, utiliser.

Analyser: Séparer un Exemples: Déterminer la cause d'une panne dans un


raisonnement en ses équipement en raisonnant de façon logique.
composants afin d'en Reconnaître les sophismes dans un raisonnement.
exposer la structure,
distinguer les faits et les Mots clés: analyser, séparer, comparer, construire des
raisonnements. diagrammes, identifier, illustrer.

Faire la synthèse: Exemples: Rédiger un manuel qui décrit les opérations


Construire un modèle à courantes d'une société. Concevoir une machine.
partir d'éléments divvers Rédiger les minutes d'une réunion.
pour former un tout
cohérent. Mots clés: assembler, combiner, compiler, créer,
concevoir, expliquer, raconter, résumer, produire.

Evaluer: Poser des Exemples: Sélectionner la meilleure solution. Choisir le


jugements à propos de la meilleur candidat pour une fonction. Justifier une
valeur d'une idée ou d'une dépense, défendre un budget.
proposition.
Mots clés: comparer, conclure, mettre en contraste,
critiquer de façon constructive, évaluer, expliquer,
justifier, résumer, défendre.

D'après Bloom B. S. (1956). Taxonomy of Educational Objectives, Handbook I:


The Cognitive Domain. New York: David McKay Co Inc.

4. Conception d'une formation : le storyboard


La conception d'une formation en e-learning commence quand l'équipe
responsable est en mesure d'exprimer les compétences qui sont en jeu en
termes d'activités. Le tableau ci-dessous et l'exemple qu'il contient nous
aideront à articuler objectifs pour l'organisation, méthode pédagogique, étapes
du parcours de formation (ou objets d'apprentissage), média associés et outils
nécessaires pour la production de ces étapes.
L'exemple ci-dessous articule les différentes étapes d'une leçon autour de la
mise en application de la norme PALAS au sein d'un processus de production et

44
de livraison en interne dans un groupe industriel. L'avantage offert par la
situation de départ est une formalisation pré-existante à la formation en
termes de documents de livraison appelés « Délivrables ». Il s'agit de
formulaires à remplir pour valider la finalisation d'un développement et notre
leçon recycle ces formulaires pour en faire des outils d'apprentissage, coller
aux situations de travail et en reproduire le formalisme. Les tests pédagogiques
sont calqués sur les tests de qualité de la production.

Objectif Méthode Etapes Média Logiciels


(objets)
Remplir le Etude de cas Dresser la Présentation Vidéo flash et/ou
formulaire de puis liste des multimédia des page créée dans
délivrable apprentis- règles PALAS règles PALAS. Dokeos
sage par Documents
Compétences Choix multiple
problème.
cognitives Outil de tests
Dokeos
Connaître :
dresser la liste Observer un Présentation vidéo Flash video and/or
des règles formulaire ou texte du Dokeos web page
PALAS. PALAS formulaire authoring
Comprendre: correctement complété
Outil de tests
reformuler rempli et
Choix multiple Dokeos
PALAS dans répondre à
d'autres termes des questions
Appliquer: sur la
remplir un pertinence des
formulaire réponses
PALAS à propos fournies.
d'une situation
Observer un Présentation txte Animation flash
donnée
formulaire ou vidéo du et/ou page créée
PALAS qui formulaire erroné dans Dokeos
contient des Documents
erreurs et les
Choix multiple
détecter.
Outil de tests
Dokeos
Observer une Présentation Animation flash
situation et un multimédia du et/ou page créée
formulaire formulaire à trous dans Dokeos
incomplet. Documents
Test remplir les
Compléter le
blancs Outil de tests
formulaire.
Dokeos
Comparer Présentation des Animation flash
deux deux formulaires. et/ou page créée
formulaires et dans Dokeos
et répondre à Documents
Choix multiple
des questions
Outil de tests
comparatives
Dokeos

45
Remplir un Rappel des règles Animation flash
formulaire PALAS et/ou page créée
vide à partir dans Dokeos
d'une situation Documents
Question ouverte
donnée.
basée sur le Outil de tests
template des Dokeos et
formulaires. reporting
individuel.

5. Les 4 C prérequis
Pour limiter les risques d'échec, l'équipe doit s'assurer, au démarrage du projet,
qu'elle a validé 4 pré-requis.

4C Question Réponses

01 Connectivité L'infrastructure Accord avec le département IT


informatique garantit- Compatibité SCORM
elle que le projet se Comptabilité W3C
déroulera dans des test bande passante
conditions vérifier si haut-parleurs sur PCs
acceptables?

02 Compétences Formera-ton aux Etude de cas e-Learning


compétences Analyse des compétences
attendues, de manière attendues
efficace? Le processus Analyse de l'audience : à qui
sera-t-il suffisamment s'adresse-t-on?
adapté aux Design de la formation
contraintes propres du Développement multimédia :
e-learning? acheter ou faire soi-même?
Déploiement de l'interacton de
coaching

03 Capacité Les différents acteurs Tests sur les utilisateurs fiinaux


du projet Formation des formateurs
(responsables, Support de la direction
formateurs, coaches, Maîtrise du budget
stagiaires, direction)
possèdent-ils les
prérequis suffisants?

04 Culture Les différents acteurs Communiquer sur le projet en


sont-ils désireux interne
d'entrer dans le Détecter la motivation des
projet? stagiaires
Fournir des garanties aux
formateurs (temps consommé,
temps gagné, reconnaissance)
Valider au moyen d'un certificat
Promouvoir la collaboration et la
traçabilité dans le dispositif (au

46
moyen d'outils)

6. Analyse, Design, Développement, Interaction

Une pratique courante est de démarrer pendant les 6 premiers mois sur un
projet pilote afin de se familiariser avec la gestion de projet e-learning et en
apprivoiser les forces, les difficultés, les opportunités et les dangers.

Pendant cette phase, l'équipe projet devrait parcourir les 4 phases de la


gestion de projet : Analyse (définir les besoins), Conception (définir la
méthode), Développement (production des parcours d'apprentissage et des
médias associés) et Interaction (diffusion de la formation, maintenance des
contenus et des logiciels, interaction avec les stagiaires).

La carte mentale ci-dessous détaille les phases du projet et les questions à


soulever.

47
48
7. Tableau de bord du gestionnaire de projet

Pour gérer un projet e-learning à grande échelle, l'équipe aura intérêt à


résumer et archiver ses décisions, par exemple dans un tableau Excel à trois
couches:
● Couche Projet en termes d'Analyse, Conception, Développement et
Interaction

● Couche Scénario de cours en termes de pré-requis, de séquençage de


l'interaction semaine après semaine, de protocole d'évaluation et
d'organigramme de l'équipe projet

● Couche storyboard : description des parcours d'apprentissage objet par


objet (étape par étape ou SCO par SCO) en termes d'analyse des
Objectifs, de Compétences et de Méthode pédagogique.

Téléchargez le tableau de bord de gestion de projet:

http://www.dokeos.com/doc/DokeosElearningProjectDashboard.xls

8. Outils auteurs multimédia

Pour analyser, concevoir, développer et organiser ses cours, l'organisation


devra recourir à une série de logiciels. On peut imaginer que Dokeos ou un
autre LMS compatible SCORM servira de base au dispositif. Il sera complété par
une série d'outils auteurs spécialisés dans les différents domaines du
multimédia : image, son, image animée. La gestion de projet elle-même et la
conception du dispositif pourraient également bénéficier d'un appui logiciel.
Nous utilisons Freemind pour produire des cartes cocneptuelles. Dokeos pour
organiser le projet et Flyspray pour gérer la maintenance du dispositif.

Dokeos promeut l'utilisation de logiciels open source ou Free Software (mais


pas celle des logiciels gratuits ou Freeware qui sont de mauvaise qualité et ont
une durée de vie limitée) car ils offrent souvent un bon respect des normes et
des formats d'échange, une grande flexibilité et durée de vie. L'absence de
coûts de licence permet par ailleurs un déploiement rapide.

49
Tâche Propriétaire Open Source Avec Dokeos

Gestion de projet ● Ms-Excel ● OpenOffic De nombreuses


Orgniser le travail organisations
de l'équipe ● Ms-Project e Calc utlisent Dokeos
● Outlook ● Flyspray aussi pendant la
● Mindmanag ● Dokeos phase de
préparation pour
er (mind ● xMind échanger des
maps) (mind documents, créer
maps) des groupes de
travail etc.

Manipulation des Importer des


images images dans
l'outil Documents
Redimensionner les au format GIF,
photos, dessiner, JPG ou PNG.
éditer des
diagrammes

Photoshop The GIMP

Production audio Import audio


in the Documents
Enregistrer et
éditer du son au tool in .mp3
format .mp3 / format.
64 Kbps is a
good
compression
Audacity rate.

Importer les
Animation d'écran animations dans
l'outil Documents
Créer des au format SWF
simulations puis les intégrer
logicielles et des au parcours
diagrammes d'apprentissage
animés simples
Captivate Wink

Parcours ● Articulate ● Dokeos Le plus simple


d'apprentissage est de produire
Créer des ● Lectora ● Reload les parcours
séquences de cours ● e-Doceo Editor directement dans
SCORM avec e-Learning Dokeos via l'outil
reporting associé Parcours
Maker d'apprentissage.

50
On peut aussi
importer des
parcours tiers
sous forme de
ZIP SCORM.

Dessiner des cartes iMindmap xMind Dessiner la carte


mentale d'un
processus, puis
l'illustrer et
éventuellement
en faire un
sceencast

Screencast Adobe Captivate Wink, Xvidcap Filmer l'écran et


les mouvements
de la souris et les
synchroniser
avec un
commentaire
audio. Le tout
sera exporté au
format Flash.

9. Agenda du projet pilote

L'équipe projet devra s'accorder sur un agenda des opérations. Voici quelques
rubriques types d'un agenda de projet pilote et une proposition de séquençage
dans le temps à titre indicatif.

Mois 1 Mois 2 Mois 3 Mois 4 Mois 5 Mois 6


Choisir un Sélectionner Formation en Réunion sur Réunion des Tests avec
LMS le cours le webdesign coaches les end users
pilote ligne des
coaches
Brainstormin Etudes de Formation à Développeme Développeme Livraison
g cas e- la pédagogie nt webdesign nt webdesign webdesign
learning par le
problème
Formation Formation au Compléter le Authoring Authoring Lancement
des maniement Project multimédia multimédia du cours et
formateurs : du LMS Dashboard interactions
initiation
Modéliser les Formation Réunion sur Développeme Développeme Livraison

51
cours aux outils les nt LMS nt LMS développeme
classiques auteurs développeme nts LMS
nts à
apporter au
LMS
Définir un Analyse du Développeme Développeme Livraison Tests de
tableau de cours pilote nt du cours nt du cours cours pilote connectivité
bord projet pilote pilote
Définir lignes Conception Accompagne Accompagne Validation Evénement
de conduite, et storyboard ment ou ment ou cours pilote de
choix du cours développeme développeme communicati
stratégiques pilote : nt storyboard nt storyboard on
acheter ou et et
faire? multimédia multimédia
Choisir des Plan de Tests de Test de Formation à Réunion de
outils communicati connectivité capacité la qualité en lancement
auteurs on e-learning

10. Bibliographie

BE-ODL, 2003, E-Learning, comment commencer?


http://www.dokeos.com/doc/thirdparty/CommentCommencer.pdf

DOKEOS, 2007, E-Learning project Excel dashboard


http://www.dokeos.com/doc/DokeosElearningProjectDashboard.xls

DOKEOS, 2007, Manuel du formateur Dokeos 1.8


http://www.dokeos.com/marketing022113456/french_186.pdf

EPIC, 2003, Learning design and e-learning


http://www.dokeos.com/doc/thirdparty/Epic_Whtp_learningdesign.pdf

Le Préau, 2002, Quel modèle qualité pour la e-formation?


http://www.dokeos.com/doc/thirdparty/ModeleQualiteEform.pdf

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