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500 Ans D Impostures Scientifiques Gerald Messadie PDF
500 Ans D Impostures Scientifiques Gerald Messadie PDF
SCIENTIFIQUES
L’Archipel
© L’Archipel, 2013
ISBN 978-2-8098-1029-5
Petit aperçu sur l’histoire et
les variétés de l’imposture scientifique
(Lavoisier, en 1768)
(Charles Richet,
prix Nobel de médecine 1913)
(James Churchward,
archéologue amateur, 1931)
Il ajoutait :
*
De 1951 à 1954, des écoliers au développement
retardé, pensionnaires de la Fernald State School, dans le
Massachusetts, absorbèrent dans leurs corn flakes
matinaux de petites doses de minéraux radioactifs, pour
voir si ces substances modifiaient leurs capacités osseuses
à absorber le calcium et le fer. Les documents disponibles
assurent que les quantités de ces minéraux étaient
calculées de façon à correspondre aux normes de sécurité,
à supposer que ces normes de 1951 fussent fiables.
Demeure le fait que les familles de ces enfants n’avaient
pas été informées de l’expérience et n’y avaient
évidemment pas donné leur consentement.
D’un point de vue strictement médical,
indépendamment de sa totale illégalité et de son
infraction à l’éthique, une telle expérience n’avait pas le
moindre intérêt : il n’y avait en effet aucune probabilité
que ces enfants, demeurés ou pas, fussent jamais soumis
à la consommation de minéraux radioactifs. Le prétexte
de cette expérience était une mystification : ses meneurs
n’y apprendraient jamais rien d’utile à la protection des
populations civiles. « Si les responsables de cette
expérience avaient eu la conscience tranquille, ils
l’auraient entreprise à la Mayo Clinic », déclara le
directeur du Centre d’éthique bio-médicale de l’université
du Minnesota (la Mayo Clinic était une institution
réputée). Les faits parlaient d’eux-mêmes : pour mener
cette expérience sans véritable intérêt, les chercheurs
avaient choisi des enfants « demeurés » d’une obscure
école du Massachusetts, dans l’espoir qu’elle passerait
inaperçue. Il est difficile d’écarter le soupçon d’hypocrisie
et de mépris pour des « demeurés », et plus difficile
encore de ne pas évoquer les médecins des camps de
concentration nazis.
Égarement de quelques médecins fanatiques ? Il
s’en faudrait. Le sentiment de toute-puissance du corps
médical américain à l’époque mena certains de ses
membres à dépouiller toute prudence, voire tout souci
éthique. Ainsi de l’un des enquêteurs désignés pour
évaluer les effets de la radioactivité sur l’organisme
humain, le Dr C. Alvin Paulsen, « médecin émérite » de
l’université de Washington. Menant ses recherches
ouvertement et sans scrupule, il fit irradier les testicules
de quatre-vingt-quatre détenus de la prison d’État de
Washington, sous prétexte d’étudier les effets de ce
traitement sur leur fertilité. « Tous ces hommes ont
donné leur consentement par écrit », assura-t-il par la
suite. On peut certes s’interroger sur les circonstances
dans lesquelles ils donnèrent ce consentement et se
demander s’ils avaient été informés des conséquences de
l’irradiation. Mais on peut affirmer que cette « expérience
» ne pouvait produire aucun résultat utile, l’irradiation
exclusive des testicules représentant une éventualité
d’accident extrêmement improbable.
Il s’agissait là d’une sinistre mystification. Si le Dr
Paulsen avait été à ce point intéressé par les effets de
l’irradiation sur le système génital, par exemple, il
n’aurait eu qu’à se rendre à Hiroshima ou Nagasaki : il
aurait obtenu bien plus de sujets d’étude, et des deux
sexes. Depuis que Marie Curie et sa fille Irène étaient
mortes de leucémie, nul médecin radiologiste n’ignorait
les dangers des matériaux radioactifs.
*
Le gouvernement fédéral se montrait d’ailleurs
indifférent à l’égard des véritables accidentés de
l’industrie nucléaire, tels que des gens qui avaient été
exposés aux poussières radioactives lors des essais
expérimentaux dans le Nevada ou des travailleurs
accidentés sur les sites de ceux-ci. Ainsi de Keith I.
Prescott, qui avait fait partie des équipes creusant des
tunnels sur l’un des sites ; en 1969, il avait laissé sa torche
électrique tomber dans un fût contenant de la terre et il se
pencha pour la récupérer ; au contact des bords du fût,
ses côtes se brisèrent « comme du verre ». Les médecins
diagnostiquèrent un cancer des os. Il se battit vingt-
quatre ans pour obtenir des dommages et, en 1994, son
procès contre le gouvernement fédéral était toujours en
cours [66].
À la suite de la divulgation des documents cités
plus haut, diverses voix se sont élevées dans les milieux
académiques et scientifiques, surtout américains, pour
dénoncer l’influence excessive de l’industrie nucléaire.
Mais il faut également dénoncer la légèreté de nombreux
médecins, qui n’avaient apparemment pas pris la mesure
des dangers des radio-éléments. On trouve, en effet, dans
la littérature médicale de l’époque d’abondantes
références à l’usage d’éléments radioactifs et d’isotopes
utilisables comme traceurs pour étudier le métabolisme
ou diagnostiquer des maladies : C 14, H 3, P 32, S 35, Ca
45, Fe 59, Zn 65, Sr 89,I 131… Or, il n’est pas de nos jours
un médecin sensé qui ne frémirait à l’idée d’injecter du
soufre 35 ou du strontium 89 à un patient en connaissant
les risques de nécrose ou de cancer.
De haut en bas de la hiérarchie administrative,
l’inconscience et l’intention de dissimulation frisaient la
criminalité. Après les explosions atmosphériques
expérimentales des années 1950, le nombre de leucémies
dans les régions avoisinantes augmenta de cinq à vingt
fois, comme en témoigna en 1982 le Center for Disease
Control d’Atlanta. Un médecin de cette institution, le Dr
Glyn G. Caldwell, rapporta que, parmi les troupes qui
avaient assisté à un essai atmosphérique en 1957 – ils y
avaient assisté en plein air, sans autre protection que des
lunettes de soleil – le nombre de cas de leucémies était le
triple de la moyenne. Cependant, le Dr Willard Libby,
membre de la Commission américaine de l’énergie
atomique, assura en mai 1957 que les essais atomiques
n’avaient pas été réalisés de façon dangereuse pour la
santé. Et le Dr Edward Teller, « père » de la bombe H,
déclara en 1958 que « les essais nucléaires
atmosphériques ne mettent en danger sérieux ni les
générations actuelles ni les futures ».
C’était vraiment prendre là ses aises avec la vérité :
les informations abondaient sur les ravages de la
radioactivité à Hiroshima et Nagasaki.
Mais apparemment, certains médecins n’en
avaient pas tenu compte et utilisaient les éléments
radioactifs sous des prétextes futiles. Et toute une
communauté de scientifiques mentait effrontément au
public.
« Des extraterrestres se sont écrasés
à Roswell, leurs cadavres sont
aux mains des militaires… »
*
Les observations d’ovnis (le Geipan les appelle
pour sa part PAN, pour phénomènes aérospatiaux non
identifiés) se poursuivent, rapportées par diverses
publications spécialisées dans l’étrange. Et celles-ci
annoncent plus ou moins régulièrement des révélations
de « secrets d’État ». Peut-être le compte rendu d’une
entrevue à la Maison Blanche entre le président des
États-Unis et une délégation de petits hommes verts…
Cependant, le nombre des observations est en
nette diminution et celui des cas inexpliqués est presque
tombé à zéro en 2010. Le fait que les derniers ballons-
sondes américains se sont probablement désagrégés n’y
est sans doute pas étranger.
Force est également de se demander si les
intelligences supérieures qui franchissent des années-
lumière de distance pour nous observer – car telle est la
thèse sous-jacente de la croyance en ces objets – sont
réellement supérieures ; en effet, à l’occasion leurs
soucoupes tombent au sol ou heurtent des avions de ligne
qui ne leur ont nullement cherché querelle, du moins s’il
faut en croire certains rapports. Reste enfin la question
de l’intérêt que ces intelligences extraterrestres
trouveraient à survoler la Terre pendant plus de soixante
ans sans avoir jamais la curiosité de s’y poser et d’engager
un dialogue avec les Terriens.
« Je ferai pousser et fleurir
des orangers en Sibérie ! »
*
L’affaire Priore, car c’en est bien une, subit alors
deux évolutions contraires. D’un côté, l’effet de ce que
Priore appelle des champs magnétiques commence à
intéresser les niveaux supérieurs de l’institution médicale
française et de l’autre, dans les mêmes milieux, une
hostilité croissante à cette invention se manifeste.
L’intérêt de spécialistes éminents pour la machine
de Priore s’explique en partie par ses mérites purement
scientifiques. Il n’est pas contestable à ce jour qu’elle a
permis d’obtenir des améliorations et des guérisons de
cancers. Il est sans doute aussi soutenu par l’attention
que Jacques Chaban-Delmas, alors maire de Bordeaux,
lui porte. En 1964, Chaban-Delmas devient président de
l’Assemblée nationale, et son adhésion à la mystérieuse
machine pèse évidemment d’un poids particulier : il
demande des expérimentations approfondies pour ne pas
laisser perdre une chance de découvrir un nouveau
traitement du cancer. Parmi les partisans de Priore, on
relève aussi le nom du professeur Robert Courrier,
endocrinologie éminent et secrétaire perpétuel de
l’Académie des sciences.
L’hostilité de certains scientifiques tient à
l’emballement de l’opinion publique, entretenu par
certains médias. Ainsi, Le Parisien libéré écrira : «
L’Académie des sciences confirme : les ondes
électromagnétiques font disparaître les tumeurs sur les
rats. » Mais il est vrai qu’un autre quotidien publiera des
articles systématiquement défavorables, voire biaisés,
sous la signature d’une personne parallèlement liée à un
éminent cancérologue hostile à la machine… Les
affirmations insensées font florès, des espoirs démesurés
sont enflammés. Les comportements deviennent
erratiques et le corps médical commence à prendre en
grippe cet homme qui affole les malades et leurs familles.
Les médecins perdent à l’occasion le contrôle de leurs
nerfs. Un jour, par exemple, Priore reçoit à Floirac, où il
réside avec sa machine, les parents d’une malade
leucémique, Mme Y ; ils lui présentent une ordonnance
du Dr X ainsi rédigée : « La famille Y désire que vous
veniez voir Mme Y, atteinte d’une affection maligne… »
Priore téléphone au Dr X : il se voit agoni d’injures, «
maître chanteur ! imposteur ! charlatan ! ». Puis la
conversation est coupée.
L’hostilité de certains médecins est alimentée par
l’attitude même de Priore : il refuse obstinément de
révéler le fonctionnement de sa machine. Et quand il
dépose enfin un brevet, celui-ci est incompréhensible.
L’appareil contiendrait : « un émetteur de particules
chargées, un accélérateur de ces particules, un magnétron
émettant des ondes électromagnétiques centimétriques,
les deux rayonnements convergeant dans un tube
contenant de l’argon sous basse pression… »
C’est du charabia destiné à masquer le mystère de
la machine. Quelle est la nature de cet émetteur et quelles
particules émet-il ? Comment le tube d’argon émet-il à
son tour le rayonnement ? Pis : Priore s’autorise à
assaisonner le texte de commentaires sur les effets
cellulaires de son abracadabrante invention, qui ne sont
pas de sa compétence : ils sont de la même farine. On
conclurait sans peine que c’est un imposteur de la plus
basse espèce, n’était que « ça marche ». Les expériences
se succèdent, plus déconcertantes les unes que les autres.
Ainsi, le 1er mars 1965, le professeur Courrier lit-il à
l’Académie des sciences une communication incroyable :
des souris auxquelles on a greffé un cancer redoutable, le
LS2, un lymphosarcome, ont été partagées en deux
groupes. Celles qui n’étaient pas traitées mouraient entre
le quinzième et le dix-huitième jour, celles qui étaient
traitées par la machine de Priore au rayonnement
maximum, 180 minutes par jour, sont toutes guéries. La
communication est signée de cancérologues réputés, MM.
Guérin et Rivière.
*
On pourrait s’étonner que des physiciens n’aient
pas alors élevé cette objection. Cela s’explique par le fait
que les ingénieurs enrôlés pour le projet avaient reçu une
consigne formelle : n’intervenir que sur la demande des
maîtres d’œuvre et dans la stricte limite de leurs
compétences. La participation de l’Armée à certains vols
expérimentaux – son rôle était d’organiser la logistique
des opérations – faisait peser l’ombre du secret militaire
sur le projet. L’esprit critique fut donc muselé.
Tous ces éléments invitent à conclure que, parmi
les termes énumérés en début de ces pages pour qualifier
une mystification, celui de carabistouille est le plus
approprié pour l’affaire des avions renifleurs.
La mystification une fois désamorcée, les prestiges
individuels, puis la peur du scandale et les calculs
politiques épaissirent l’intrigue. Commencée dans le
secret en 1975, l’affaire s’acheva quand même sur un
scandale politique et financier quatre ans plus tard,
discréditant les décideurs ou les enrobant dans une
brume de soupçons.
Ironie du sort : les avions renifleurs firent leur
retour en 2003, mais en Australie, et avec des prétentions
sensiblement inférieures à celles de leurs infortunés
ancêtres. Le nouvel équipement utilise la mesure
gravimétrique du sol ; les relevés sont, en effet, différents
selon que le sol est compact sur une profondeur donnée
ou bien qu’il contient des poches d’hydrocarbures, pétrole
ou gaz. L’appareil inventé pour ces relevés s’appelle un
gradiomètre et dérive d’un appareil de la firme Lockheed
Martin, utilisé par les sous-marins pour localiser d’autres
sous-marins. C’est une aide à la prospection pétrolière et
non pas la clé de la caverne d’Ali Baba. Le terme d’avion
renifleur n’est donc plus infamant.
« L’Afrique sera sillonnée
de chemins de fer… »
*
Tout cela semble rationnel et, si l’on fait
abstraction de la nature ribaude du sujet, on n’y décèle
aucune mystification. Toutefois, le constat laisse perplexe
en raison de ses répercussions.
On découvre d’abord que les effets de la digestion
de la faune de l’époque mésozoïque eurent au moins
autant d’impact sur la biosphère que les éruptions de
volcans et les chutes d’astéroïdes. Cela évoquerait à la
limite une provocation.
Le même cadre de raisonnement induit ensuite à
se poser la question suivante : si le cheptel bovin à lui seul
élève de 2 % le volume des gaz à effet de serre, qu’en est-il
du cheptel porcin et ovin ?
En dernier lieu, et comme il s’agit en fin du compte
du réchauffement atmosphérique terrestre, il convient de
se demander si la simple présence de l’humanité sur la
Terre ne serait pas une cause essentielle de
réchauffement. Selon les normes admises, en effet, un
être humain dégage une moyenne de 40 kilocalories par
mètre carré de sa surface et par vingt-quatre heures
[143], soit 80 kilocalories (un être humain mesure
environ deux mètres carrés) qui se dissipent dans l’air. Il
s’ensuit que les 7 milliards d’habitants de la planète
produisent chaque jour quelque 550 milliards de
kilocalories. Et l’on observe incidemment que
l’accroissement des moyennes de la température terrestre
correspond à celui de la population terrestre.
Force serait donc de se demander si les espèces
vivantes n’auraient pas eu une influence nuisible sur la
biosphère tout au long de l’histoire de la planète. Dans le
même cadre de raisonnement, on s’avise, en effet, que les
modestes vers de terre ont été oubliés parmi les
producteurs de gaz à effet de serre. Car ces créatures
nécessaires à la fertilité d’un sol émettent, elles, de
l’oxyde d’azote, ce gaz qu’on appelait jadis « hilarant » et
qui fut le premier anesthésique. Les sols où elles sont
présentes produisent cinq fois plus de ce gaz que ceux
dont elles sont absentes [144] ; on suppose qu’elles le
produisent en digérant les nitrates et les nitrites du sol.
Un jardin de campagne ordinaire dégage, en effet, de
l’oxyde d’azote, et la proportion qui est due aux vers
oscille entre 25 et 44 %. Mais les prés et prairies
produisent aussi de l’oxyde d’azote (peut-être est-ce la
raison pour laquelle ils apaisent les citadins…).
Cela n’est pas une mystification, mais une
incitation à mesurer les conséquences ultimes de certains
raisonnements logiques, souvent soutenus avec
véhémence.