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AVANT PROPOS Sommaire

Pourquoi des recommandations


pour les petits barrages ?

Gérard DEGOUTTE, ENGREF,


animateur du groupe de travail

Le Comité Français des Grands Barrages a décidé de rédiger des recomman-


dations pour les petits barrages en partant du constat que les publications
professionnelles disponibles portaient surtout sur les grands ouvrages. Le pré-
sent document réalise donc la synthèse des expériences vécues et des recher-
ches françaises sous forme de recommandations pour la conception et la
construction de barrages de hauteur comprise entre 5 et 25 mètres environ,
en France métropolitaine.
Néanmoins, bien des développements sont aussi applicables dans d’autres
régions.

QUELS BARRAGES ?

Les barrages construits en France dans cette gamme de hauteur sont :


les barrages en terre (qui sont les plus nombreux),
les barrages poids en béton ou en BCR1.
Les barrages voûtes ainsi que les barrages en enrochements seront abordés plus succinc-
tement, car il en existe peu de hauteur inférieure à 25 mètres. Les barrages en maçonne-
rie, qui ne sont plus construits en France, et les barrages à contrefort ou les multi-voûtes,

1. BCR : béton compacté au rouleau. Technique décrite au chapitre Petits barrages en béton, p. 113 et s.
P ourquoi des recommandations pour les petits barrages ?

qui n’apparaissent plus économiquement intéressants dans cette gamme de hauteur, ne


seront pas traités.

SPÉCIFICITÉS DES PETITS BARRAGES

Les petits barrages présentent a priori autant de difficultés que les très grands. Bien sûr,
leur faible taille s’accompagne de faibles contraintes : le comportement d’un rocher
d’appui va rester dans le domaine élastique ; les vitesses à l’aval d’un coursier d’évacua-
teur n’engendreront pas de phénomènes de cavitation, mais à l’inverse, il ne sera pas
toujours financièrement raisonnable de vouloir acquérir une connaissance parfaite de
l’étanchéité d’une cuvette ; l’absence de station limnigraphique gonflera l’indétermina-
tion des débits de crue... Indétermination, zones d’ombre compliquent donc la tâche du
concepteur. Celui-ci devra alors concevoir un ouvrage adapté à ces incertitudes. Si c’est
impossible, il sera placé devant le dilemme de déclarer le site impropre ou bien de
prendre un risque. Risque de rupture, mais plus souvent risque de fuites excessives.
L’expérience de nombreux désordres conduit, dans ce cas, à recommander sans ambi-
guïté d’écarter le site, quitte à l’écarter à tort... ce qu’on ne saura jamais !

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QUE SIGNIFIE L’EXPRESSION PETIT BARRAGE ?

Il n’existe pas de définition unanimement reconnue de l’expression petit barrage.


En France, on considère souvent que les grands barrages ont une hauteur supérieure à
20 mètres1, parce que depuis 1966 les projets de tels barrages doivent être soumis au
Comité Technique Permanent des Barrages ; pourtant les textes applicables n’utilisent
pas le vocable grand barrage.
De son côté la Commission Internationale des Grands Barrages considère comme grands
barrages les ouvrages de hauteur supérieure à 15 mètres, ou bien même, dans certains
cas, comprise entre 10 et 15 mètres2.
En fait, il n’est pas très important de définir avec précision la limite entre petit barrage et
grand barrage. Un barrage de 20 mètres sera pour l’un le plus petit des grands barra-
ges et pour l’autre le plus grand des petits barrages ! Nous proposons simplement pour
fixer les idées, de baptiser petits barrages ceux dont la hauteur est inférieure à 15 mètres
et moyens ceux dont la hauteur est comprise entre 15 et 25 mètres. Cette définition ne
prétend pas être universelle, et elle n’a bien sûr aucun caractère réglementaire. Le pré-

1. Hauteur mesurée au-dessus du point le plus bas du terrain naturel et prenant en compte la profondeur du lit
mineur éventuel.
2. Hauteur mesurée au-dessus du point le plus bas de la fondation.
Avant Pro p os

sent document constitue des recommandations et non pas des règles qui s’applique-
raient obligatoirement à telle catégorie de barrage ou telle catégorie de maître d’ouvrage.

TAILLE DE L’OUVRAGE ET SÉCURITÉ

Petit ou moyen barrage n’est en rien synonyme de barrage sans risque. Pour des rete-
nues stockant plus de 100 000 m3 par exemple, on ne peut jamais exclure un risque
pour une personne présente au pied du barrage au mauvais moment. Pas de compromis
donc sur la sécurité. Le lecteur non convaincu devra bien considérer qu’il y a environ
10 000 petits ou moyens barrages en France.
Bien sûr, les recommandations doivent être en harmonie avec le risque encouru : un
barrage de 10 mètres de hauteur stockant 15 millions de m3 n’est pas à comparer avec
un barrage de 10 mètres stockant 50 000 m3.
Pour croiser ces deux facteurs - hauteur et volume - il a été convenu de s’appuyer sur le
paramètre H² V . H désigne la hauteur du barrage en mètres au-dessus du point bas du
sol naturel et V est le volume stocké en millions de m3 au niveau normal. Le graphique ci-
dessous (figure 1) comporte plusieurs valeurs de H² V comprises entre 5 et 3 000. La
zone comprise entre les pointillés encadre tous les barrages français, si on ne considère 15
pas les digues de fleuves.
Le lecteur est invité à reporter sur ce graphique les quelques barrages qu’il connaît le
mieux !

Fig. 1 - Relation hauteur - volume et quelques valeurs de H2 V (V en hm3, H en m)


P ourquoi des recommandations pour les petits barrages ?

Ce paramètre H² V n’a pas une signification scientifique particulière. Il doit être consi-
déré comme un indicateur du potentiel de risque à l’aval. Par exemple, on a pu constater
une bonne corrélation entre H² V et le débit maximal obtenu à l’aval d’un barrage
après un effacement total.
Le présent manuel préconise donc des dispositions minimales modulées en fonction de ce
paramètre. Cela n’empêchera pas d’adopter des dispositions supérieures, dictées par des
critères techniques, chaque fois que des circonstances particulières l’imposeront.

ASPECTS ABORDÉS

Le présent manuel traite, bien entendu, des études préalables tant géologiques et géo-
techniques (voir chap. III, p. 37) qu’hydrologiques pour la prédétermination des crues
(voir chap. II, p. 23). Il traite ensuite de la conception et de la réalisation des deux
grands types de barrage : barrages en remblais (voir chap. IV, p. 67) et barrages en
béton (voir chap. V, p. 113).
Les aspects liés à l’environnement sont de plus en plus à l’ordre du jour. Le chapitre VI traite
du problème fondamental de la qualité de l’eau, aussi bien dans la retenue qu’à son aval.
16 Mais si l’on construit des barrages depuis des millénaires, on ne mesure les impacts sur
l’eau que depuis au mieux quelques dizaines d’années. Ce chapitre est donc davantage
l’état actuel de la connaissance qu’un ensemble de recommandations précises.
Enfin, certains maîtres d’ouvrage attachent de plus en plus de poids à l’aspect paysager. Il
n’est pas traité ici, car le corps de doctrine n’existe pas à notre connaissance. Recomman-
dons simplement au maître d’œuvre et à l’entrepreneur de prendre davantage cet aspect
en considération à la fois pour l’aspect fini des parements et pour l’intégration des ouvra-
ges en béton ou des bâtiments de service.
Pour finir, rappelons qu’un barrage n’est pas définitif quand l’entreprise quitte les lieux,
ni même quand l’évacuateur déverse pour la première fois. Un barrage est vivant, il
vieillit donc. Il doit faire l’objet d’une surveillance attentive et être ausculté comme indi-
qué au chapitre VII.

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