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Vers une
humanité unifiée

P. Rajagopalachari
DEJA PARUS AUX MEMES EDITIONS

Ram Chandra(Lalaji)
– Vérité éternelle
Ram Chandra (Babuji)
– Lettres du Maître, tome III
– Le rôle de l’abhyasi dans le Sahaj Marg(1)
– Œuvres complètes de Ram Chandra, tome I, le Sahaj Marg, une nouvelle tradition
spirituelle (épuisé)
– Œuvres complètes de Ram Chandra, tome II, la voix de la Réalité
– Œuvres complètes de Ram Chandra, tome III, autobiographie
– Œuvres complètes, tome IV, Messages universels
P. Rajagopalachari
– Celui qui aime tout – He who loves all
– Dans ses pas (autobiographie)
– L’amour et la mort
– La pratique du Sahaj Marg (1)
– Mon Maître
– Qu’est-ce que le Sahaj Marg
– Religion et spiritualité
– Révéler la personnalité
– Vers une humanité unifiée
(1) Ces deux titres sont parus dans le même ouvrage.

A PARAITRE
Ram Chandra
– Lettres du Maître, tomes I,II et IV
- Oeuvres complètes tome 1, nouvelle traduction
Cet ouvrage regroupe les livres suivants :
– Commentaires sur les dix maximes du Sahaj Marg
– L’efficacité du raja yoga à la lumière du Sahaj Marg
– La philosophie du Sahaj Marg
– La Réalité à l’Aube
– Vers l’Infini
P. Rajagopalachari
– Au fil des souvenirs, tomes I et II
– De cœur à cœur, tome I à V
– Le cœur du lion
– Le rôle du Maître dans l‘évolution humaine (Nouvelle édition)
– Les principes du Sahaj Marg, tome I à XII
– Madagascar 1997
P. Rajagopalachari

Vers une humanité


unifiée
Cet ouvrage regroupe deux lettres puis les discours
prononcés par Shri P.Rajagopalachari en
Europe et aux USA durant l’été 2003.

2004
EDITION SRCM
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Première édition : 500 exemplaires.

The unification of humanity


Talks given in Europe and USA (2003)

© Shri Ram Chandra Mission 2004


Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation
réservés pour tous les pays.
Les termes « Shri Ram Chandra Mission » et « Sahaj Marg »,
ainsi que l’emblème de la Mission sont des marques déposées
par la Shri Ram Chandra Mission.
ISBN 2-906219-29-0
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Préface

Le présent ouvrage réunit les discours que Parthasarathi


Rajagopalachari (affectueusement appelé Chari ou Chariji) a prononcés
lors de son séjour en France, en Suisse puis aux Etats-Unis pendant l’été
2003.

S’ajoutent à ce recueil trois autres discours, celui de Krishna lors du


séminaire organisé fin juin à Paris (St Ouen), ceux de deux abhyasis
particulièrement proches du Maître et deux lettres de Chari.

Après un bref séjour à Paris, à l’occasion duquel il a donné plusieurs


méditations à la salle de la Mutualité et prononcé deux discours, les 9 et
10 juillet, Chari s’est rendu en Suisse. C’est à Cossonay que s’est déroulé
un séminaire qui a coïncidé avec le Guru Poornima, (fête du guru), ce qui
est, en Inde, un jour particulièrement béni pour les chercheurs spirituels
qui souhaitent vivement le passer en présence de leur Maître.

Quelques jours plus tard, un grand séminaire a réuni des abhyasis*


venus de toute l’Europe au Domaine de Lassy, dans le nord de la région
parisienne. Chari à cette occasion a fait trois nouveaux discours. Puis
son voyage s’est poursuivi aux Etats-Unis où, après un long périple qui
l’a emmené de Dayton et Chicago jusqu’à la Californie, il a de nouveau
présidé un important séminaire. Revenu de l’ouest des Etats-Unis, en
passant par le Texas et Atlanta où s’est tenue l’assemblée générale
américaine, le Maître a terminé son voyage par New York et enfin
Westport, dans le Connecticut. Il s’agissait presque d’un retour aux
sources, puisque c’est dans cet état que Babuji Maharaj avait commencé
son travail en Amérique, en 1972. Chariji accompagnait déjà son Maître
à cette grande occasion.

Tous les discours présents dans ce recueil ont été prononcés en


anglais lors des séminaires organisés par la Shri Ram Chandra Mission
et qui rassemblent des personnes de toutes les nationalités autour de
Chariji. Ceux qui pratiquent le yoga du Sahaj Marg, s’accordent pour
reconnaître que de tels rassemblements constituent une opportunité
unique de compréhension et d’ouverture spirituelle. C’est dans cet esprit
qu’ont été accueillis ces discours que nous publions aujourd’hui.

l’éditeur.
* abhyasi : celui qui pratique. V
Vers une humanité unifiée
l’Europe
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chariJI

ORGANISATION DE LA MISSION

Chennai

14 janvier 2003

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SHRI RAM CHANDRA MISSION


P. Rajagopalachari«Gayathri»
19, North Street
Sri Ram Nagar
MADRAS 600 018

Le 14 janvier 2003

Chers frères, chères soeurs,

Après avoir médité pendant une année sur le fonctionnement


de la Mission dans ce monde qui est le nôtre, rempli de peur,
d’incertitudes et de calamités et désastres potentiels, et après
beaucoup de réflexion, j’en suis venu à la vision d’une nouvelle
structure organisationnelle qui servira au fonctionnement de la
Mission dans tous les pays du monde. Je propose que celle-ci
soit mise en place immédiatement, avec la coopération totale
de chacun de vous. Cette structure n’affectera pas les structures
légales déjà en place dans chacun des pays mentionnés,
structures qui continueront à exister et devront subsister tout
comme auparavant. Les responsables nommés au sein de cette
structure sont priés de travailler directement sous ma guidance,
dans les régions pour lesquelles ils ont été désignés. J’espère
que cette nouvelle structure permettra un fonctionnement plus
harmonieux et plus efficace.

Les Vice-Présidents et Responsables divers qui œuvrent


actuellement dans leurs pays respectifs continueront à assurer leurs

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fonctions dans la mesure de leurs compétences pour satisfaire


aux exigences légales du pays en question. Ils travailleront
conjointement avec le Vice-Président Régional et, là où cela
s’applique, avec les Responsables de Zone, et les soutiendront dans
leur travail qui a pour but le développement et le fonctionnement
efficace de la Mission dans la région en question.

Pour l’Europe, j’ai nommé quatre Responsables de Zone pour


développer le travail sur le continent européen. Tous les pays qui
se joindront à l’Union européenne, comme la Turquie, la Grèce,
les états baltes (Lettonie, Lituanie, Estonie), seront destinés à
se regrouper sous la protection de cette structure européenne.
Chaque année, à tour de rôle, un des Responsables de Zone sera
désigné comme ‘Centre en charge’ de l’Europe. Le Centre en
charge de l’Europe est, par la présente, chargé de l’unification de
tous les peuples de l’Europe en une seule entité. Les Responsables
de Zone, et le Centre en charge de l’Europe, assisteront le Vice-
Président Régional pour faire progresser l’objectif de la Mission
en Europe, sous la direction du Vice-Président Régional. Le
planning d’alternance du rôle de Centre en charge de l’Europe
est établi ci-dessous, mais peut être modifié par le Vice-Président
Régional avec mon approbation :

1ère année : Responsable de Zone anglophone, français et espagnol
2ème année : Responsable de Zone germanique
3ème année : Responsable de Zone italienne et Europe de l’Est
4ème année : Responsable de Zone scandinave

La nomination du ‘Vice-Président Régional’ et ‘Responsable de


Zone’ sert un but strictement opérationnel. Avec mon approbation,
le Vice-Président Régional constituera un Comité de Direction
pour effectuer le travail dans la région qui lui a été assignée. Ce
Comité fonctionnera uniquement à titre de conseil et ne devrait
pas influer sur les structures légales déjà en place dans le ou les
pays en question.

OBJECTIF OPÉRATIONNEL : mon espoir est que chacun des


responsables nommés définira et mettra en œuvre un programme

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Organisation de la Mission → sommaire

de fonctionnement qui offrira au Président un soutien important


pour mener à bien les objectifs de la Mission dans un esprit
authentique de fraternité et d’humilité et sans que cela ajoute
une charge supplémentaire de travail inutile pour moi.

Je vous prie tous d’accuser réception de cette lettre et


d’accorder aux responsables nouvellement nommés votre
coopération entière et votre soutien le plus total.

Avec l’amour et les bénédictions du Maître,

P. Rajagopalachari
Président

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II

Lettre de Chariji

Chennai

8 juin 2003

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Lettre de Chariji

Chennai, le dimanche 8 juin 2003

Chère Sœur,

Après tant d’années passées dans la Mission, la moitié d’entre


elles en tant que Secrétaire, alors guidé à la fois intérieurement
et extérieurement par mon Maître bien-aimé, et l’autre moitié
pratiquement seul, recevant ce qui je l’espère a été, au moins à
certaines occasions, une guidance intérieure du Grand Maître,
j’en suis venu à comprendre que changer les êtres humains n’est
pas tâche facile. Et c’est vraiment peu dire. « Vous pouvez mener
un cheval à l’étang, mais vous ne pouvez pas le forcer à boire » dit
un dicton anglais bien connu ! Comme c’est vrai hélas !

CEPENDANT je ne suis pas du tout désillusionné, ni


déprimé par cela. Je dois faire ce que je peux, et laisser aux
autres le choix de changer ou non, comme ils veulent – car la
volonté des êtres humains doit être respectée, comme leur droit
à déterminer leur propre destinée. C’est une des raisons, en
plus de mes problèmes physiques croissants, pour lesquelles
je prends une distance physique avec les abhyasis chaque fois
que c’est possible. C’est aussi la raison pour laquelle je n’ai
pas voyagé à l’étranger ces trois dernières années - croyant que
ceux qui sentent le besoin de venir à moi, quelle qu’en soit la
raison, proximité personnelle, amitié (même), ou simplement
au nom d’une vieille amitié, viendront à moi où que je sois.

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La guidance, comme j’ai pu le voir à travers ma longue


expérience personnelle dans ce domaine, doit être cherchée
et NON offerte. Ceci s’applique à tous les aspects de la vie :
matériel, intellectuel, moral et spirituel. Ceux qui la cherchent la
TROUVERONT. C’est ce que j’ai vu et aussi expérimenté, dans
cette quête spirituelle du Sahaj Marg.

Mais l’offrir simplement à tous, eh bien, cela peut être


considéré comme faisant partie du devoir du ‘‘semeur de graine‘‘ !
Mais je crois qu’en spiritualité il est du devoir de chacun d’aimer
et si on a suivi sa propre vie spirituelle de manière correcte et
adéquate, un tel amour, un amour impersonnel pour tous, ne peut
que se développer dans le cœur. Nous devons apprendre à laisser
le reste à ceux qui sont (espérons-le) bénis de ou par cet amour.

L’ATTACHEMENT nous fait courir après ceux que nous


pensons aimer. L’AMOUR VÉRITABLE fait que nous sommes
juste là pour être disponibles lorsqu’on a besoin de nous. Je
pense que c’est là l’essence d’une maturité spirituelle et d’un
amour spirituel véritable - être là et ne pas être affecté parce que
ceux que nous aimons ne veulent pas ce que nous avons ! Cela ne
signifie ABSOLUMENT PAS que nous devons cesser de travailler,
parce que le travail spirituel continue à de très nombreux niveaux.
Tout ce que je fais ou que j’essaie de faire, est d’être passif au
niveau simplement physique et d’être aussi actif que possible à
tous les niveaux supérieurs d’activité qui m’ont été confiés par
mon Maître bienveillant.

Avec l’Amour et les Bénédictions du Maître,


Affectueusement,
Parthasarathi

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III

Discours de Krishna

St Ouen, Paris

28 juin 2003

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Discours de Krishna

28 juin 2003

Mon frère m’a demandé de dire quelques mots au sujet de


ce projet, rue du Cardinal Lemoine. Je ne pense pas qu’il soit
possible d’ajouter quelque chose à ce qu’il a dit de manière si
passionnée. Mais pendant, disons, ces trente dernières années,
j’ai été très profondément impliqué dans cette histoire d’ashram,
spécialement à Madras. Je vais donc vous faire part de quelques
réflexions tirées des expériences que j’ai eues au fil des ans.

Vous vous souvenez tous d’avoir lu dans le livre de Master


qu’après les célébrations du centenaire de la naissance de Lalaji,
en 1973, Babuji a permis à Master d’acquérir une propriété pour en
faire un ashram pour Madras et nous a autorisés à dépenser quelque
chose comme 40 ou 50 mille roupies - je ne sais pas combien. A partir
de ce moment, de 1973 à 1988 - pendant 15 ans - nous avons cherché
un ashram, en commençant par la maison située juste en face de
‘‘Gayathri’‘. Entre 1983 et 1988, nous avons vu des centaines de
propriétés. Chaque dimanche après le satsangh, nous étions une
petite équipe à partir dans ma voiture. Et à un certain moment,
c’est devenu tellement fou que les vrais agents immobiliers
avaient pris l’habitude de nous appeler pour nous demander où il
y avait des propriétés disponibles !

En 1988, vers la fin de l’année, vous savez, ma mère a eu une


attaque. Juste avant cela, son jeune frère avait un ami qui était

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agent immobilier, et tout comme l’a raconté Jacky, ce gars m’a


appelé et m’a dit : « Je crois savoir que vous cherchez un endroit.
Eh bien! je connais un endroit, voulez-vous le voir ? » J’y suis donc
allé, je l’ai vu et il m’a semblé que c’était un endroit vraiment
bien. Entre temps, bien sûr, ma mère a eu son attaque, elle a été
hospitalisée et nous avons mené une vie de dingue. Mais durant
toute cette période de trois mois, Master envoyait des équipes
de personnes voir cette propriété, et bien sûr ces personnes
différentes avaient des points de vue différents. Certaines
personnes étaient carrément négatives. Certains voulaient savoir
pourquoi Master voulait dépenser leur argent de cette façon. Je
leur disais alors : « C’est son affaire, je n’en sais rien, c’est à lui
qu’il faut demander. »

«En tout cas, vous le savez, nous avons acheté Manapakkam.


A cette époque, c’était la plus grande propriété jamais achetée
dans l’histoire de la Mission. En fait c’était la première propriété
que le Maître ait jamais achetée, que ce soit pour lui-même ou
directement pour la Mission. Et je peux vous dire personnellement
que l’atmosphère à Gayathri, pendant environ une semaine avant
l’achat et jusqu’à ce que l’achat soit finalisé, était complètement
électrique. Je veux dire que toutes les trente secondes il y avait du
tonnerre et des éclairs. Mais pour faire court, je pense que la leçon
de cette histoire est que lorsque nous avons acheté Manapakkam,
nous avions moins de 150 abhyasis au satsangh du dimanche.
Nous n’avons pas un seul instant pensé que nous pourrions
remplir l’espace d’abhyasis. Il y avait d’autres propriétés à
proximité, qui étaient à vendre et nous ne nous sommes même
pas donné la peine d’aller les voir. Nous avions de sérieux doutes
quant à nos capacités à utiliser convenablement cet endroit. Et
aujourd’hui, à cause de cela, nous pourrions nous gifler parce que
la situation actuelle est que nous avons 3500 abhyasis à Madras. Et
nous avons eu la célébration de l’anniversaire du Maître l’année
dernière et tous ceux d’entre vous qui y étaient ont vu la foule.
Nous étions incapables de l’organiser à Manapakkam parce
que l’endroit n’était pas assez grand. Et la tragédie est que nous
avons construit des équipements sur un terrain appartenant à
quelqu’un d’autre.»

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Discours de Krishna → sommaire

La morale de l’histoire est que nous ne savons jamais ce qui va


se passer dans l’avenir. Ceci concernait le potentiel dont parlait
Jacky. Nous ne savons vraiment pas quel est le potentiel. Tout
ce que je sais est que ces quinze dernières années nous avons
travaillé comme des forçats à Manapakkam. Vous le savez tous,
je veux dire, vous y avez aussi tous travaillé. J’en connais tant
parmi vous qui ont été là-bas, qui ont été volontaires et qui ont
participé au travail. Et c’est une des choses que Master aime dans
les ashrams, je le sens en Inde particulièrement, que les abhyasis
viennent et fassent le travail. Je ne sais pas si vous vous souvenez
que pendant la célébration de 1994 ou 1995 nous avons eu des
pluies énormes. Et pendant ces pluies torrentielles, il fallait couler
le ciment pour faire un étage au bâtiment du stock de livres. Et
Master était très soucieux de la sécurité des abhyasis.

Donc, je ne pense pas vraiment que nous sachions maintenant


ce que nous allons faire à Lemoine. Mais je peux vous assurer,
de tout mon cœur, que si nous l’abordons avec notre cœur, le
travail ne pourra que s’étendre. Il sera sans fin. Je veux dire
qu’aujourd’hui, en utilisant l’ashram de Manapakkam, par
l’intermédiaire du bureau d’accueil que nous mettons en place
le dimanche, nous introduisons 500 abhyasis par an. Vous ne
savez donc jamais ce qui peut se passer. Et, tout à fait entre
nous, je ne suis pas d’accord avec Jacky sur cette histoire de
baratin publicitaire. Master a toujours dit qu’un bon vendeur ne
vend jamais un produit, son travail consiste à faire en sorte que
l’acheteur l’achète. Et j’ai toujours trouvé dans la Mission que
chaque fois qu’une proposition en valait la peine, les gens étaient
disposés à la soutenir. C’est pour cela que je pense que l’anxiété
de Jacky au sujet de Lemoine est inutile. Je pense que les gens
seraient fous de ne pas le soutenir.

Hier, ou avant-hier, j’ai dit que nous étions témoins d’une


renaissance de la Mission en France. Et la chance est avec nous
parce que nous avons maintenant trois bonnes propriétés – l’une
à Nice, l’autre à Montpellier et maintenant la plus grande, à Paris.

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Et alors que Jacky est essentiellement concerné par Lemoine,


j’ai un objectif légèrement différent : je veux faire en sorte que
les trois fonctionnent au même moment ! (applaudissements
nourris). Vous voyez, parce que je crois que ces petits événements
de notre vie envoient des messages très forts, très subtils à travers
l’organisation tout entière. Donc pendant que je réussissais à
irriter complètement Marie Clavé au sujet de la propriété de Nice -
parce qu’ils ont commencé à l’utiliser sans sa permission – ils ont
pris la permission dans leur cœur. Et je suis très heureux de voir
que les gens écoutent leur cœur et qu’ils agissent en fonction de ce
que le cœur leur dicte. Parce que je voudrais humblement suggérer
que pendant trop longtemps nous avons cherché des réponses dans
notre mental ; et dans mon expérience du Sahaj Marg, le mental ne
vous donne que des problèmes, jamais de solution.

Et j’ai commis une bévue de plus, dont il faut que je fasse part
à Marie. J’ai demandé aux abhyasis de Montpellier d’achever
la reconstruction avant l’Assemblée Générale, de sorte qu’elle
puisse se tenir avec la permission du gouvernement, avec la
permission des co-propriétaires, le tout écrit noir sur blanc au
moment où l’Assemblée Générale s’y réunira. Donc, même si
nous ne voulons pas enfreindre la moindre règle, ni contourner
aucun règlement et même si nous nous engageons à agir toujours
en toute légalité, sans aucun compromis, ou tout au moins
sans aucun compromis raisonnable, nous devons quand même
comprendre que cette propriété est à nous et que nous devons
pouvoir y faire notre travail !

Donc, si cela était nécessaire, peut-être reporterions-nous


l’Assemblée Générale d’un mois environ, mais je préfèrerais de
beaucoup que celle-ci se tienne à l’ashram de Montpellier après
confirmation. Et je suis heureux de vous dire que Master lui aussi
est d’accord avec le principe.

Pour moi donc, la perspective est légèrement différente. Il est


très difficile d’amener le changement. J’ai eu une discussion très
sérieuse avec Master sur ce sujet parce que je ne comprenais pas
pourquoi il montrait tant de patience et pourquoi il ne mettait pas

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Discours de Krishna → sommaire

tout simplement les choses en marche. Et finalement, je crois qu’il


s’est fatigué de ma question. Il m’a dit : « Si on le fait, alors il y a
‘‘cause et effet’’ ». Si vous provoquez la cause, l’effet suivra. C’est
pour cela que Babuji parle du Kshob qui a commencé cet Univers,
comme n’ayant pas de cause mais comme étant simplement la
réalisation d’un potentiel. Donc, quand nous poussons, cela résiste.
Lorsque nous permettons à la chose de venir par elle-même, cela
vient naturellement de façon très belle. Et nous sommes maintenant
témoins de cette magnifique floraison en France et bien sûr dans
toute l’Europe. Et mon travail est de rendre cela possible. Bien
sûr, c’est notre travail à tous – de surveiller que cela ne s’arrête
pas, de veiller à ce qu’il n’y ait pas de barrières inutiles en travers
du chemin, qu’elles viennent de l’extérieur ou de l’intérieur, de
permettre à ce potentiel qui se manifeste, de le faire de façon
appropriée, jusqu’à son maximum. Et je pense qu’une fois que
nous aurons permis à ceci d’arriver, alors nous serons émerveillés
par les résultats.

Je veux dire qu’il y a des gens qui disent que Master a oublié
l’Europe. Mais je suis certain que ce n’est pas vrai. Il a plutôt travaillé
plus dur sur l’Europe que jamais auparavant. Mais sa démarche a
toujours été que cela doit venir de l’intérieur. Et aujourd’hui, alors
que les choses se passent de cette manière, notre premier devoir est
de soutenir ce qui se passe, du mieux que nous le pouvons. C’est
pour cela que je ne me fais pas de souci sur le fait que la bourse
suive le cœur. Nous devons écouter notre cœur et faire ce qui est
nécessaire. Et je voudrais que vous vous souveniez tous qu’une
telle opportunité n’arrive qu’une fois dans l’existence.

Vous savez, le premier séminaire auquel j’ai participé comme


volontaire était le Centenaire de Lalaji ; j’avais seize ans et je
n’étais pas abhyasi. Depuis lors j’ai eu l’honneur et le privilège
de servir le Maître pour la célébration du Centenaire de Babuji et
pour son 75ème anniversaire. Je pense quelquefois : « Qu’aurait été
ma vie si je n’avais pas pris part à ces événements ? » Elle aurait
ressemblé à un désert dépourvu de signification. C’est pour cela
que je dis que ces occasions ne se produisent qu’une fois dans
une vie et que nous devons vraiment sentir avec notre cœur ce

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que nous devons en faire. Si nous saisissons l’opportunité, alors
nous allons là où elle va. Si nous la manquons, alors elle est
perdue pour toujours.

Voilà, j’ai juste partagé avec vous quelques-unes des


expériences et des réflexions de ma vie à propos Manapakkam.
Je crois qu’en France et dans le reste de l’Europe nous sommes au
seuil d’une énorme période de croissance. En fait, je disais à mes
frères l’autre jour que j’ai un objectif personnel : je voudrais voir
10 000 abhyasis en Europe avant les quatre-vingts ans de Master.

Et j’ai toute confiance qu’entre nous, nous ferons tout ce qui


est nécessaire pour que cela arrive.

Merci.
→ sommaire

IV

CHARIJI

L’humanité entière unifiée


par l’amour

Théâtre de la Mutualité, à Paris

9 juillet 2003

27
→ sommaire

L’humanité entière unifiée par l’amour

9 juillet 2003

Bien, laissez-moi vous dire combien je suis heureux d’être avec


vous tous. Je vous suis reconnaissant à tous de m’accueillir. Je
suis reconnaissant envers ma sœur Marie-Christine pour tous les
efforts qu’elle a déployés pour obtenir mon visa, et envers tous
ceux que je n’ai pas rencontrés et dont l’aide a été déterminante
pour l’obtention de ce visa. Et, bien entendu, je suis reconnaissant
envers mon Maître de m’avoir permis de venir ici. Vous le savez,
je suis à cette étape de ma vie physique et spirituelle où j’aime
prétendre que tout ce que je dis et fais, doit l’être avec l’approbation
de mon Maître. Je suis donc plein de gratitude envers Lui et vous
devriez, vous aussi, être pleins de gratitude envers Lui.

Il rêvait constamment d’une humanité UNE. C’était Son but


dans la vie, et la direction que son travail empruntait était celle du
SAHAJ MARG qui n’était, je le sais, qu’un aspect de Son travail. Il
a, à Sa disposition, beaucoup de chemins et nous avons connaissance de
seulement un chemin (propos du maître en français). Eh oui! je suis
désolé (il rit). Mais je réalise de plus en plus combien Son travail
universel était rendu perceptible, et visible à nos yeux à travers
la Mission et le Sahaj Marg. Dans le domaine spirituel, un travail
est en cours pour que l’humanité devienne un système unique,
solide et vivant. Notre travail au Sahaj Marg devrait être de
matérialiser cet effort afin que la vie humaine physique devienne
un seul système. Et vous le savez bien, seuls les cœurs peuvent
accomplir cela, pas les têtes. Avec l’intellect, nous ne pouvons

29
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

créer que de la division, de la disparité, des différences. Avec le


cœur, nous pouvons créer l’unité, la fraternité, l’amitié, etc. C’est
pour cela que le Sahaj Marg concentre tout son travail à travers le
cœur, sur le cœur, par le cœur.

Au cours de ma visite en Europe, là maintenant et plus tard


en Amérique, tous mes efforts seront consacrés à unifier l’Europe
sur les plans spirituels et humains pour que nous trouvions de
l’humanité en Europe, au lieu d’y trouver des Européens. Nous
sommes des êtres humains, pas des Français, des Allemands, des
Belges, ni des Indiens, non, cela ne marche pas comme ça. Pour
ceux d’entre vous qui sont réellement engagés spirituellement
et qui croient aux enseignements de mon Maître concernant les
samskaras, le ‘‘pourquoi‘‘ nous sommes ce que nous sommes, là où
nous sommes, et comment nous sommes, tout cela est accidentel.
Vous êtes français par accident, je suis indien par accident, nous
sommes juifs, chrétiens, musulmans ou hindous par accident. La
cause de cet accident revient à notre stupidité manifestée par des
pensées et actions qui n’étaient pas nécessaires. Il n’est question
ni de vice, ni de vertu, ni de péché au Sahaj Marg. Mais lorsque
nous ne pensons pas et n’agissons pas dans le sens spirituel de
l’évolution, nous sommes alors renvoyés à cette réalité inexorable
de la vie : nous finissons sur ces grandes roues de fête foraine
tournant et tournant sans fin. Et vous savez à quel point les enfants
adorent ça, tout en ayant une bonne dose de peur à un moment
donné. En tant qu’adultes nous nous amusons aussi tout en ayant
peur. La peur est réelle mais l’amusement est une illusion. Une
chose comme la joie de vivre n’existe pas, il n’y a que l’existence,
la conscience, la possibilité de béatitude. Pas le bonheur. Le
bonheur n’est pas la béatitude. La béatitude est un état de parfait
équilibre dont sont exclus le bonheur et le chagrin, le bien, le mal,
le passé, le présent et le futur. Et c’est le seul état dans lequel nous
pouvons exister sans avoir besoin du cerveau ni de l’intellect.

Donc, voyez-vous, nous devons ici même, dans cette assemblée,


provoquer un intérêt commun pour l’Europe. Je ne veux pas
penser à cette propriété que la Mission doit acquérir bientôt
rue du Cardinal Lemoine, en terme de propriété pour Paris ou

30
L’humanité entière unifiée par l’amour→ sommaire

pour les Français, et même pas pour l’Europe. Mais pour les
êtres humains qui désireront ardemment y venir. Vous savez, les
grands lieux religieux de ce monde que sont le Vatican, Jérusalem
ou la Mecque, ne devraient pas être uniquement réservés aux
personnes de telle ou telle appartenance religieuse. S’il s’agit de
lieux consacrés, alors ce sont des lieux divins. Et les êtres humains
ne peuvent diviser Dieu en morceaux : le mien, le vôtre. Dans les
écoles, les gens étudient sans distinction de caste, de couleur, de
croyance ou de religion. Pourquoi ne pourrions-nous pas rendre
nos cultes dans des lieux sans considération de religion, de culture
et de langage ? Le Sahaj Marg aspire à un tel l’avenir. Et vous savez
que le futur ne peut être créé dans le futur ; il doit être créé dans
le présent. Et si vous n’avez pas assez d’amour envers l’humanité
pour créer ce futur pour vous-même, vos enfants et leurs enfants
en subiront les conséquences : une société divisée contre elle-
même, des êtres humains qui se haïssent et s’entretuent, des
mensonges racontés par les politiciens, les leaders religieux, par
tout le monde. Ce matin seulement, vous avez pu lire dans la
presse que George Bush, le président des Etats-Unis, a reconnu
que l’Irak n’avait pas acheté d’armes secrètes atomiques ou autre
à l’Afrique. Il a déclaré que cette information était fausse. Mais
vous savez bien qu’une guerre a eu lieu à cause de cela. Ce qui
était alors un mensonge délibéré est présenté aujourd’hui comme
un manque d’information ou une erreur. Ainsi, les mensonges
deviennent-ils des erreurs d’information, les guerres, des erreurs
de jugement, et les génocides alors, que sont-ils ? Des actes pour
lesquels nous sommes désolés ! Nous présentons nos excuses. Je
vais donc vous adresser aujourd’hui une très sérieuse mise en
garde, et s’il vous plaît ne la prenez pas à la légère. Vous savez
que je ne vous ai jamais, jusqu’ici, adressé la moindre mise en
garde. Je ne crois ni aux mises en garde, ni aux menaces ni à
toutes les choses de ce genre. Mais mon cœur me dit : « Mets-les
en garde ! S’ils continuent sur cette voie discriminatoire, où la santé
et le bonheur sont le privilège exclusif des riches, où la santé et le
bonheur n’appartiennent qu’à une minorité, où Dieu Lui-même
est considéré comme la propriété personnelle de quelques-uns, de
quelques communautés de ce monde… Dieu ne le tolérera pas. »

31
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

Donc, si vous êtes à la recherche du bonheur, de l’harmonie


et de la paix dans vos vies, cela ne sert à rien de dire qu’il n’y
a qu’un seul Dieu. Vous devez le sentir, vous devez le pratiquer
et vous devez l’offrir comme une réalité. Il ne s’agit pas de dire:
« Oui, oui, mais mon Dieu est le vrai Dieu ». Ou encore « Il n’y
a qu’un seul Dieu et c’est mon Dieu ». C’est un mensonge, un
crime contre l’humanité et contre Dieu lui-même. Dans nos
ashrams, dans nos halls de méditation, que ce soient des lieux
dont nous sommes les propriétaires ou des lieux loués comme
celui-ci, j’aspire à être le porteur de ce message de mon Maître
en faveur de l’unification de l’humanité, en affirmant que mon
Dieu est en moi, en chacun de nous, que Dieu n’a pas de nom,
n’a pas de forme, n’a pas d’attribut. Ce serait une grossière
erreur de répondre : « Mais Chari, Dieu a ma forme, mon nom
et mes attributs ». C’est une insulte envers Dieu. Si vous êtes
capable d’affirmer : « Je m’engage à assumer Son nom, Sa forme,
Ses attributs » c’est-à-dire, rien, rien, et rien, alors là, vous serez
dans le vrai. C’est pourquoi le Sahaj Marg dit que nous devons
nous mettre en chemin vers cette ‘‘rien-té’’. Notre but n’est pas
de devenir rien mais de devenir rien-té. Et il y a beaucoup de
manières d’y arriver, beaucoup d’exigences aussi. Nous devons
définitivement mettre de côté notre culture et la dépendance à
notre langage, l’attachement à notre religion, toute méfiance vis-
à-vis d’autrui. Ce n’est pas pour rien que le Christ disait : « Aime
ton prochain comme toi-même ». Et mon prochain n’est pas
seulement la personne assise à côté de moi, tout le monde est
mon prochain ; et cela inclut également les arbres, les animaux,
les oiseaux, les insectes. Si vous dites : « J’aime ma femme », il
se peut que ce ne soit pas un mensonge mais vous ne pouvez
pas aimer votre femme et ne pas aimer tous les autres. Cette
lumière ne peut pas briller uniquement pour vous. Le soleil est
universel. L’air, la lumière, l’eau, Dieu les a donnés pour tout
le monde. Tout ce qui est essentiel à la vie est gratuit. L’amour
est essentiel. Nous ne pouvons vivre sans amour. Sans amour
nous ne serions pas nés et mourir sans amour doit être une mort
atroce, une mort dans la solitude la plus totale, dans la misère,
une mort sans une once d’espoir.

32
L’humanité entière unifiée par l’amour→ sommaire

Donc, nous ne pouvons vivre un seul instant de notre vie sans


amour. Et, à vrai dire, cela ne peut être que de l’Amour universel.
Dans les scénarios de science-fiction, les hommes qui ont de
l’oxygène dans leurs combinaisons spatiales ou autre, sont en
situation de danger extrême. Si vous cherchez à garder pour vous
seul ce qui est bon, ce qui est essentiel à la vie, vous vous mettez
en danger. En revanche, quand vous en faites quelque chose
d’universel, vous êtes en sûreté. Vous êtes en sûreté parce que
c’est pour tout le monde. Si vous êtes dans une bulle d’oxygène,
un seul trou dans la bulle et vous êtes mort. Mais si votre monde
est plein d’oxygène, plein de lumière, plein d’air, plein d’eau,
vous êtes en sécurité parce que tout le monde est en sécurité.
Vous pouvez alors être heureux parce que tout le monde est
heureux. Si vous êtes la seule personne heureuse de votre société,
si votre maison est la seule maison prospère, vous ne survivrez
pas longtemps comme ça.

Par conséquent, la prière que je vous adresse à tous est de


devenir d’abord des Européens parce que cela va déjà être une
entreprise difficile pour la plupart d’entre vous. Ce n’est pas
que l’entreprise soit difficile en elle-même, c’est vous qui êtes
la difficulté dans l’histoire. Dans un monde égoïste, vous avez
fait la preuve que vous pouviez vous unir quand les données
économiques l’exigent. L’euro a remplacé vingt ou trente
monnaies sur ce continent – (interruption dans l’enregistrement)
… Pourquoi ? Pourquoi êtes-vous d’accord avec l’euro ? Parce que
vous en tirez profit. Politiquement parlant, vous vous êtes intégrés.
Et que vous le sachiez ou non, ce n’est pas une intégration très
joyeuse parce que ce rassemblement des nations qui constituent
l’Europe, se fait avec une peur profonde, une peur nouvelle. La
peur de la Russie communiste a disparu. Mais il y a, bien présente,
la peur d’une nation capitaliste et démocratique par delà les
océans, et cette nation occupe déjà le statut de leader mondial. Il
n’y a rien de mal dans l’avènement d’un gouvernement mondial,
s’il s’agit d’un gouvernement aimant, bienveillant, heureux. Mais
si c’est un gouvernement construit sur les bases du pouvoir, de
la domination, de la barbarie – comme il semble que ce soit le cas -
alors, vous avez seulement échangé un démon contre un autre,

33
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

un démon potentiel. Cette peur réside sûrement au fond du cœur


de tout Européen, et au moins dans celui des dirigeants politiques
des différentes nations européennes.

Donc cette unification européenne est fondée sur la peur,


sur le besoin de sécurité. Vous pouvez le constater dans tous les
aéroports aujourd’hui : de plus en plus de sécurité. Dans quel
but ? « Pour vous protéger, vous les passagers », disent-ils. « C’est
pour votre protection, parce que vous êtes dans un avion. Nous
voulons vous protéger et vous garder en vie ». Et ceci justifie toutes
ces humiliations que vous devez subir avant de monter en avion. Et
nous feignons d’être heureux ! « Enlevez vos chaussures ». Et nous
enlevons nos chaussures. « Posez votre sac ici ». Et vous vous
exécutez. « Passeport ! »Vous le présentez parce que nous allons être
protégés. La protection coûte très cher. La protection nous humilie,
nous déshumanise, fait que des frères et sœurs sont ennemis, et se
méfient les uns des autres. Regardez où nous en sommes arrivés !

Donc une société, qui s’est unie sur la base de la peur et de la


tentation, est en train d’établir un parallèle entre la domination
religieuse d’autrefois et la domination politique d’aujourd’hui. Les
instruments utilisés sont identiques : la peur et la tentation. Comment
pouvons-nous sortir de cette impasse ? Par l’amour, naturellement. Et
rien d’autre. Et l’amour n’a ni frontière politique, ni gouvernement,
ni société. Car tout ce qui est universel doit avoir transcendé les
tendances à la division qui régissent nos vies aujourd’hui.

J’espère qu’avec le Sahaj Marg à notre disposition, qu’avec la


grâce des Maîtres, nous pourrons essayer de construire une société
qui sera unifiée grâce à l’amour. Dans une telle société, il n’y aura
pas de peur. Et là où il n’y a pas de peur, la protection n’est pas
nécessaire. Là où il n’y a ni peur ni protection, nous sommes libres.
Vous savez, hier, nous parlions des prisons dans certains pays – je
pense à la Suède – des prisons qui sont si belles, vous savez, qu’elles
sont mieux que des maisons. Et les gens préféreraient y être. On
s’occupe bien d’eux, on les nourrit, il y a des projections vidéo et
des films. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond avec ce genre de prison
? Nous oublions seulement que de nos jours, le monde entier est

34
L’humanité entière unifiée par l’amour→ sommaire

une prison de ce style, plein de jouissances, plein de boutiques,


et nous nous figurons que nous sommes libres. Nous sommes
heureux. Et que sommes-nous au juste ? Nous n’avons pas peur
de la vie. Mais si un seul d’entre vous osait déclarer : « Je n’ai
pas peur de la vie », ce serait un mensonge. Parce que comme
l’ont maintes fois affirmé les philosophes à travers l’histoire de la
philosophie, ce n’est pas la mort qui est effrayante, c’est la vie.

Donc, chers frères et sœurs, je vous invite à vous considérer


comme un élément de l’humanité, juste comme une petite
parcelle de la vie. Parce que la vie n’est pas seulement pour les
êtres humains, la vie est partout ; les plantes sont vivantes, les
animaux sont vivants, les oiseaux sont vivants et je ne peux pas
dire : « j’aimerai seulement les êtres humains ». Si quelqu’un
parmi nous est capable d’amour, cet amour doit embrasser toute la
création. Il doit embrasser l’univers entier. Babuji disait: « L’univers
entier pourrait exister dans un tel cœur ». Je prie pour que vous
trouviez tous le courage et l’amour pour aspirer à une telle
existence, pour bâtir en vous-même un tel cœur, un cœur ainsi
fait que vous puissiez dire : « L’univers et moi sommes un ».

Merci.

35
→ sommaire

Chariji

Le besoin d’unification
de l’humanité

Théâtre de la Mutualité, à Paris

10 juillet 2003

37
Le besoin d’unification de l’humanité
→ sommaire

10 juillet 2003

Je souhaite poursuivre le fil de mes pensées d’hier sur


l’humanité qui, comme je le disais, devrait se rassembler pour
former une seule entité. Vous voyez, la vie humaine doit exister
comme un tout - nous aimer les uns les autres, nous faire
confiance nous entraider… C’est ainsi que nous devrions vivre.

Vous savez, de tous temps, les Maîtres spirituels ont essayé


d’amener ce comportement, cet idéal de fraternité humaine.
Malheureusement même en spiritualité nous avons des groupes,
nous avons des gurus, nous avons leurs disciples et à nouveau
nous mettons en place des catégories, par exemple vous avez
des chrétiens qui sont disciples de Saï Baba ou de je ne sais qui
d’autre encore… Donc, chaque fois que nous essayons d’amener
une unification de l’humanité, il semble que la tendance humaine
normale soit de se séparer, de s’isoler en groupes, et nous
souffrons des mêmes conséquences.

Peu importe que nous soyons séparés à cause de nos religions,


de la couleur de notre peau ou de nos races. Même si c’est la
spiritualité qui nous sépare en petits groupes ici et là à travers le
monde, ce n’est pas, je pense, le genre d’unification souhaitée par
les puissances spirituelles qui nous gouvernent. Comme Babuji
Maharaj l’a dit, vous le savez tous : « Là où s’arrête la religion, la
spiritualité commence ». Mais nous oublions souvent la suite de
la phrase : « Là où s’arrête la Spiritualité, la Réalité commence. »
Nous ne sommes généralement pas conscients que la spiritualité
aussi doit prendre fin. Vous savez, c’est comme un bébé : il naît,
il devient un enfant, il devient un jeune, il devient un adulte, il

39
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

devient vieux, et après ? Alors commence la vie suivante, la vie


éternelle, le monde plus lumineux, etc. Il n’y a pas de fin à la vie,
et si nous commençons avec la séparation, la séparation devient
comme les branches d’un arbre : une branche pousse d’un côté,
une autre de l’autre et le contact est perdu.

Il est donc très important de se rappeler que la spiritualité aussi


a une fin, pas l’idéal de spiritualité fait d’amour, de fraternité,
d’aide mutuelle, de compassion, de bienveillance. Ces qualités
n’ont jamais de fin parce que ce sont des qualités inhérentes à
la vie humaine ; mais, qu’elle soit d’origine raciale, politique,
religieuse ou spirituelle, la ségrégation quant à elle, a une fin.
Nous devons donc travailler pour atteindre cet idéal qui vise à
créer une fraternité spirituelle dans laquelle nous ne serons plus
divisés par des gurus. Et ceci adviendra seulement lorsque toutes
ces pratiques enseignées par différents systèmes, différents gurus,
deviendront inactives à un moment et alors comme la graine
plantée dans le sol doit, d’une certaine façon mourir, l’enveloppe
qui est autour doit partir, pourrir, pour que sorte le germe.

C’est pourquoi nous devons travailler en ayant aussi à l’esprit


cet idéal : mon guru est mon guru, mais ce n’est pas parce qu’Il
est un guru du Sahaj Marg qu’il est un vrai guru, c’est parce qu’il
est un guru spirituel. Or nous pouvons réaliser cela seulement
lorsque nous réussissons dans ce processus qui va du Maître
extérieur à son intériorisation, non pour perdre l’attachement,
ni pour abandonner l’attachement, mais pour transcender
l’attachement matériel à la forme visible du Maître, et créer une
association interne, une association permanente : désormais
Lui et moi nous sommes Un. Vous avez pu lire dans les livres
de Babuji ce que Lalaji Maharaj lui a dit lorsque son voyage
spirituel a été accompli. Il a dit  ceci : «  Aujourd’hui toi et moi
nous sommes Un, et personne ne peut dire qu’il y a une différence
entre toi et moi. » Alors il n’y a plus de Sahaj Marg, il n’y a plus de
Lalaji ni de Babuji. Ils sont là séparément, ils sont là aussi en tant
qu’Un. Et c’est un mystère : comment deux êtres peuvent-ils être
séparés et cependant ne faire qu’Un ?

40
Le besoin d’unification de l’humanité → sommaire

Nous essayons d’arriver à cela dans nos relations humaines :


aussi intimes que nous puissions devenir, nous sommes toujours
deux. Dans un des poèmes fameux de l’Inde, je pense qu’il est
de Kabir, on trouve deux vers où il est dit : « Même si tu es à
l’intérieur de mon cœur », il parle au Bien-Aimé, au Divin, il
dit : « Même si tu es dans mon cœur, la distance entre toi et moi
est cependant si grande que je ne peux la supporter, que je ne
peux la tolérer. »

Donc, cette idée de séparation doit disparaître, que je suis ici,


le Maître là, ou dans le monde plus lumineux. Vous voyez, tout
est une construction mentale. C’est nous qui construisons ces
différences mentales. Babuji disait souvent que certains abhyasis
en visite à Shahjahanpur, n’étaient pas attentifs et pensaient
toujours à autre chose : à leur maison, leur famille. Il me disait :
« Regarde-les, ils sont chez eux ; seul leur corps est ici. » Et il
ajoutait : « Cela ne sert à rien. » Les corps ne servent à rien. À quoi
sert le corps ? Parce qu’il est né, il devra mourir, être enterré ou
brûlé ou jeté à la mer, peu importe… Donc il ne sert à rien que le
corps de l’abhyasi soit ici et que son âme soit ailleurs. Au contraire
il y avait des abhyasis dont il disait : « Même s’ils sont à Madras
ou au Punjab ou je ne sais pas, à Tombouctou, ils sont toujours
avec moi. Leur corps est quelque part, mais eux sont toujours avec
moi. » De telles personnes sentent la présence du Maître, elles
sont toujours avec le Maître, où qu’elles soient.

Vous voyez, chaque fois qu’un abhyasi fait l’expérience de la


présence du Maître dans une méditation profonde, nous devons
comprendre que le Maître est toujours présent. Sa présence est
éternelle, Sa présence est toujours avec nous, parce qu’Il n’est pas
une présence différente pour chacun de nous. L’air que je respire
est le même que celui que vous respirez. Vous ne pouvez pas dire :
« Mon air et ton air. » S’il n’y a pas d’air ici, aucun de nous n’a d’air.
Donc si le Maître n’est pas partout, aucun de nous n’a le Maître.

Alors que se passe-il lorsque nous faisons l’expérience de la


présence du Maître ? À ce moment-là nous nous oublions, et nous
sommes réellement là où Il est, toujours. C’est pourquoi c’est une

41
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

expérience si profonde lorsque vous êtes absorbé en méditation,


que soudain vous sentez l’odeur du houka, vous Le sentez, Lui.
Et ensuite, que se passe-t-il lorsque la méditation se termine ?
On dit : « C’est tout », et nous revenons à nous. C’est l’erreur
que nous faisons. Instantanément, en un certain sens, nous
nous ressaisissons. Et nous redevenons cette créature humaine
ordinaire. Le contact est perdu, non pas parce qu’Il l’a rompu,
mais parce que je l’ai rompu, nous l’avons rompu.

C’est pourquoi Babuji disait : « Dans un sens, le souvenir


constant consiste à garder cette présence vivante ; même quand
j’ouvre les yeux, même quand le sitting est terminé, je continue à
sentir Sa présence parce que je ne l’ai pas coupée. » Et la grande
vérité spirituelle c’est qu’une fois que le Maître a établi une
connexion avec un disciple, Il ne peut pas la couper. Cette sorte
de connexion n’est pas faite pour être coupée, c’est nous qui la
coupons. Nous la coupons en redevenant humains après le sitting,
nous la coupons en détournant trop fortement notre attention du
spirituel vers le matériel, nous la coupons parfois parce que nous
perdons la foi et disons alors : « Cela suffit, plus de Sahaj Marg ! »

Ainsi, vous voyez, pour garder cette connexion éternelle qui de


Son côté est toujours éternelle… Lui n’a pas d’autre possibilité,
Il n’a pas le choix, parce que, comme Il ne vit pas dans le temps,
comment pourrait-Il limiter Sa connexion dans un contexte
temporel, un cadre temporel ? Il ne le peut pas. Mais nous
sommes des créatures temporelles, attachées au temps, attachées
au bonheur, attachées à la culture, attachées à tant de choses…
Et nous disons : « Maintenant cela suffit, j’ai fait l’expérience du
Maître aujourd’hui ». Et nous sortons le fameux journal, nous
notons nos remarques. Et puis peut-être six ou dix ans plus tard,
nous avons de nouveau une expérience profonde, alors les larmes
nous montent aux yeux : « J’ai déjà fait cette expérience il y a
longtemps »… Ainsi nos expériences spirituelles fonctionnent-
elles comme des rêves, pour nous rappeler ce qui a été établi, ce
qui reste établi, mais que, dans notre conscience humaine stupide,
limitée, nous avons coupé.

42
Le besoin d’unification de l’humanité → sommaire

Donc, frères et sœurs, voyez-vous, cette présence est aussi


une présence telle, que plus nous sommes nombreux à en faire
l’expérience en même temps, plus cette présence peut être
permanente. Vous savez, c’est comme partager. Lorsque vous êtes
assis seul dans un restaurant, tout seul, même si la nourriture est
très bonne, vous vous sentez solitaire. S’il y a trois amis qui la
partagent avec vous, il y a de la joie, de la gaieté, de la convivialité.
Si vous êtes toujours ensemble, il y a toujours de la joie. C’est
pour cela que, plus nous sommes nombreux à participer à cette
aventure qui consiste à garder vivante cette présence du Maître
divin avec nous, plus elle devient solide, plus elle devient concrète,
plus elle devient permanente.

C’est la raison pour laquelle nous devons devenir un seul bloc


d’êtres humains. Vous savez, si vous êtes deux dans l’obscurité ici,
et deux autres au soleil à l’extérieur, vous ne pouvez pas partager
la même expérience. Si vous voulez tous être au soleil, vous devez
tous être à l’extérieur. A l’extérieur de ces murs protecteurs, à
l’extérieur de ces portes et fenêtres. Libres ! Liberté signifie : pas
de protection ; c’est ce que je disais hier voyez-vous. Je ne peux
pas avoir dix gardes du corps autour de moi et proclamer que je
suis libre. C’est une prison, une autre sorte de prison, une prison
dans laquelle je pense être en sécurité. Être totalement libre, c’est
être totalement exposé, totalement dans la présence du Divin,
donc totalement et divinement protégé. Mais vous ne pouvez pas
à ce moment-là exiger une protection humaine selon des moyens
humains de protection, des méthodes humaines de protection.

Aussi, j’espère que vous comprendrez tous la nécessité de


construire une fraternité humaine où même la spiritualité ne
doit pas nous séparer en groupes. Comme lorsque nous disons :
« Aujourd’hui le groupe d’Espagne est arrivé. Hier nous avions le
groupe de Suisse »… Même dans le Sahaj Marg nous avons des
groupes, nous avons des tendances séparatistes. C’est pourquoi
il devient nécessaire de faire du Sahaj Marg au moins un seul
groupe, de telle sorte que - vous savez, quand vous avez des
gouttes d’eau, vous observerez cela parfois - quand une goutte est
assez grosse pour couler, elle se mélange avec la goutte suivante

43
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

et devient une goutte plus grosse. Vous pouvez le voir sur les murs
de votre douche. Au moment où elle touche une autre goutte, elles
deviennent ‘‘Une‘‘. C’est l’état de cohésion.

Mais les êtres humains ne fonctionnent pas comme cela. Ils


se rassemblent toujours de manière séparée. Cela se reflète aussi
dans votre manière de danser : vous changez de partenaire, puis
vous revenez ensemble, vous changez à nouveau de partenaire,
et vous revenez ensemble. La culture reflète toujours ce qui est à
l’intérieur de vous, vos désirs innés, vos souhaits, vos schémas.

Il devient donc extrêmement urgent je crois, car j’ai reçu


certaines indications selon lesquelles les Maîtres spirituels
de tous les âges, qui, dans une autre dimension, forment une
sorte de Principe qui nous guide, sont mécontents de ce qui se
passe dans ce monde. Et nous devons répondre en assumant le
sens des responsabilités mais dirigé par l’amour pour les êtres
humains, afin de créer une société qui soit le modèle sur lequel
le Divin veut nous voir construire. Et je prie pour que ceci puisse
être réalisé et devenir une réalité concrète, une réalité spirituelle,
une réalité d’amour, bientôt.

Merci.

VI
44
→ sommaire

Chariji

Liberté

Cossonay, Suisse

13 juillet 2003

45
→ sommaire

Liberté

13 juillet 2003

Si je ne suis pas libre, il m’est impossible de parler, pourquoi ?


Parce que si un oiseau a les ailes coupées, il ne peut voler, n’est-ce
pas ? Dans le Sahaj Marg, nous avons l’idée de liberté, pas comme
sous la Révolution française, mais… liberté, égalité, fraternité, cela
oui. Je souscris à toutes ces choses avec mon cœur. Mais, si vous
voulez être libre, vous devez permettre aux autres d’être libres
aussi. Parce que si c’est la liberté, c’est la liberté pour tous. Vous
ne pouvez pas avoir la liberté pour vous seul tandis que tous les
autres sont en esclavage.

Voici donc le problème de la liberté dans le monde moderne :


certains sont plus libres, certains sont moins libres, certains ne
sont pas libres. Vous le voyez dans votre vie politique, vous le
voyez dans votre vie économique, vous le voyez dans votre vie
civile ; certains pays sont plus libres que d’autres et ils veulent
être libres en ne laissant personne d’autre entrer dans leur pays.
Babuji Maharaj disait : « Lorsque vous fermez la porte de votre
maison, vous laissez peut-être les autres dehors, mais souvenez-
vous que vous vous enfermez à l’intérieur. » Vous êtes votre propre
prisonnier. Peu importe que votre maison soit petite ou grande
comme ce hall, ou qu’elle soit un pays tout entier, c’est toujours
une prison. Imaginez que l’on ferme toutes les portes maintenant
et que quelqu’un annonce : « Vous ne pouvez pas sortir. » Que se
passerait-il ? Le chaos. « Nous ne sommes pas libres ! »

47
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

Et quelqu’un comme moi, ou comme Fausto, dirait : « Mais c’est


un grand hall, vous voyez bien, et nous avons Chariji ici avec
nous. » « Cela suffit ! Assez ! » diriez-vous : « A quoi sert Chariji
si toutes les portes sont fermées ? »

Donc, que vous soyez libres et que les portes soient ouvertes
implique que vous soyez libres de sortir et que d’autres soient
libres d’entrer. Cela n’existe pas aujourd’hui. Est-ce que cela
existe ? Non. Cela existe pour quelques personnes, dans quelques
endroits, à certains moments, mais pas pour tous, partout, tout le
temps. Par conséquent la liberté aujourd’hui est un mensonge
– Oui ou non ? (L’assistance répond : « Oui »). Non ! Elle n’existe
pas, la liberté. Donc, la liberté est finie. Et quand nous n’avons pas
la liberté, nous n’avons pas la fraternité non plus. Eh oui! comment
peut-il y avoir une fraternité si vous êtes meilleur est l’égalité ? Elle
n’existe pas. Voici donc un second mensonge. Et s’il n’y a pas de
liberté, s’il n’y a pas d’égalité, il ne peut pas y avoir de fraternité.
C’est tout. Oui ou non ? Oui.

Maintenant, dans le Sahaj Marg, nous disons toujours


que nous sommes une société dans laquelle il n’y a pas de
discrimination pour des raisons de couleur, de race, de sexe,
d’éducation, de pouvoir, etc. Donc nous essayons vraiment
de créer ce que la Révolution française a essayé de faire il y a
longtemps. Et demain, ils vont célébrer cette révolution comme
s’ils avaient atteint cet idéal. Cela se passe partout, dans le monde
entier. Nous célébrons ce qui n’existe pas. Si cela n’existe pas, à
quoi bon le célébrer ? Et si cela existe, à quoi cela sert-il de le
célébrer ? Babuji Maharaj disait : « Si vous êtes conscient d’être
libre, vous êtes encore conscient du manque de liberté ». N’est-ce
pas ? Donc la vraie liberté est la liberté de la liberté. Nous devons
travailler pour toutes ces choses dans notre Sahaj Marg vous
savez, pour que nos membres soient vraiment égaux, pour créer
une véritable fraternité : plus d’Italiens, plus de Français, plus
d’Indiens. C’est pourquoi je commence par essayer de créer une
Shri Ram Chandra Mission européenne. Vous voyez, c’est comme
mon corps : j’ai des jambes, j’ai des mains, j’ai une tête, etc. Mais
si je n’existe pas, ils n’existent pas. Quand je dis « je », ce n’est pas

48
Liberté → sommaire

le corps. Tout le monde sait cela. Mais pourtant nous dépensons


tant de temps et d’argent pour ce corps, pour le protéger, essayer
de le rendre plus beau, de le faire valoir, vous savez, comme ça.
Et nous sommes beaux, ils sont sales, ils sont noirs, ils sont, vous
savez bien… etc.

Donc nous voulons, tout d’abord, une Shri Ram Chandra


Mission européenne. Comme je l’ai dit deux fois en France, à
Paris, vous avez maintenant une Europe qui est censée exister
politiquement et économiquement. Mais existe-t-elle vraiment ?
Je ne le pense pas. Parce qu’il y a encore, des limites invisibles, des
frontières invisibles, des nationalités bien localisées. Tant que ces
choses existent, vous ne pouvez pas dire qu’il y a une Europe. Bien
sûr, elle existe sur la carte on ne peut le nier, voyez-vous. Elle s’y
trouve depuis des siècles. Et, heureusement, les gens ne peuvent
pas la détruire, parce que Dieu l’a créée. Mais nous, nous sommes
en train de couper et de diviser et, parce que maintenant c’est un
avantage, nous sommes en train de jouer un jeu puéril, vous savez,
un jeu d’enfant. Quel est ce jeu ? Vous connaissez ce jeu avec de
nombreuses pièces qu’il faut assembler ? - Un puzzle. Donc,
tout d’abord vous coupez tout en morceaux, puis vous essayez
de les assembler et vous dites : « Oh ! Nous avons créé l’Europe.
Voilà ! » Ainsi au début c’étaient quelques pays, huit ou neuf,
ensuite, très élégamment, très - comment devrais-je dire ? – très
généreusement, ils ont inclus des nations plus pauvres, y compris,
je crois, l’Italie… la République Tchèque, la République Slovaque,
la Yougoslavie…

Maintenant, supposez que vous soyez capables de bouger


ces murs pour rendre la pièce de plus en plus grande. Il y aurait
toujours un dehors et un dedans. Il y aurait toujours des portes. Il
y aurait toujours le pouvoir d’admettre et le pouvoir d’exclure. Et,
même alors, si vous fermez les portes à clef vous serez prisonniers
de votre propre création. Oui ou non ? Oui. Je veux dire, c’est très
clair. Donc, tant qu’il y aura des murs, vous ne pourrez pas dire :
« Nous sommes un peuple libre », parce qu’actuellement vous
vous contentez de choisir les personnes que vous allez accepter.
C’est comme un club, un club fermé, un club d’hommes riches, un

49
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

club de pouvoir, voyez-vous. Car supposez qu’une organisation


quelconque ait le pouvoir d’accepter ou de rejeter – Pourrait-on
dire que c’est une organisation libre ? Oui ou non ? Non.

Le Sahaj Marg n’a pas ce genre de restriction. Tout le monde,


venant de n’importe où dans le monde, est bienvenu. Tout le
monde peut venir, tout le monde peut partir. Il n’y a pas de
restriction, pas de droit d’entrée. Nous n’avons aucune restriction
en matière d’éducation. Est-ce une organisation libre ? Une
organisation humaine ? Est-ce la véritable démocratie d’un
peuple libre, pour un peuple libre, par un peuple libre ? Oui ou
non ? (La salle répond : « Oui »).

Donc le Sahaj Marg est aujourd’hui, à mon avis, la seule


organisation dans ce monde remplissant les conditions de
la définition de liberté, égalité, fraternité. Vive le Sahaj Marg !
(Applaudissements nourris).

NOTE : Les mots en italique ont été prononcés en français.

VII
50
→ sommaire

CHARIJI

DEUX PETITS DISCOURS

Assemblée de la mission italienne

Cossonay, Suisse

13 juillet 2003

51
→ sommaire

Travailler ensemble

13 juillet 2003

Je dois aller à une autre réunion, vous savez, pour voir comment
cette organisation pourrait mieux servir l’humanité, comment nous
pourrions continuer à faire disparaître les murs, combien il est
important de faire en sorte que nos – vous savez, les personnes qui
ont des responsabilités dans cette organisation – travaillent dans
un climat d’amitié, de liberté et de fraternité. Parce que ce n’est pas
vraiment le cas ici. Même dans ces statuts italiens, j’entends, je crois
qu’il y a tellement de problèmes. Vous savez, lorsque vous ne faites
rien (comme moi, lorsque vous ne faites rien, vous êtes passif),
vous avez les yeux ouverts, vos oreilles ouvertes et votre bouche
fermée – vous fermez la porte – vous pouvez tout entendre. Vous
obtenez les informations sans rien demander. Mais normalement,
vous gardez les yeux fermés, les oreilles fermées et votre bouche
ouverte. Nous n’entendons rien. Nous n’entendons rien ! Nous
travaillons de cette manière, quelquefois.

Donc, cette réunion, vous savez, a pour objet de s’assurer que


mes frères et sœurs se comprennent les uns les autres, qu’ils
coopèrent avec le cœur, pas seulement avec le mental, et qu’ils
construisent un vrai Sahaj Marg, celui dont rêvait Babuji, et que
vous essayez tous d’amener à la réalité, à l’existence ici.

Nous nous retrouvons donc de nouveau ce soir pour le satsangh.

53
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Guru Poornima

13 juillet 2003

… Et Babuji m’a raconté que lorsque l’abhyasi est avec le guru


en ce jour particulier et qu’ils ont un sitting, ils progressent des
centaines de fois plus rapidement.

Vous savez il n’était pas prévu que nous soyons ici aujourd’hui,
et jusqu’à hier soir je ne savais pas qu’aujourd’hui était guru
poornima. Je pense donc que c’est un cadeau spécial pour chacun
ici, que ce jour est une bénédiction spéciale de Babuji Maharaj.

… Ce n’est pas de la chance, c’est une bénédiction. La


chance concerne les affaires de ce monde. Vous savez, le mot
sanskrit pour ’’chance’’ est ardushta : ‘‘ce que nous ne pouvons
voir‘‘ et ça, c’est la grâce divine. Et ce jour d’aujourd’hui est
comme cela, vous voyez.

Donc je suis heureux que nous soyons tous si nombreux ici,


ensemble, aujourd’hui. Et vous devez avoir senti ce qui s’est passé
durant le sitting – c’était très profond – et je ne m’en suis pas
encore remis. J’espère que vous tous serez encore comme ivres
du sitting d’aujourd’hui, jusqu’au prochain guru poornima.

Merci.

55
→ sommaire

VIII

CHARIJI

UN GOÛT D’ÉTERNITÉ

Lassy, France

17 juillet 2003

57
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Un goût d’éternité

17 juillet 2003

Bien que le séminaire ne débute que demain matin, j’aimerais


vous dire quelques mots en guise d’introduction. Jacky vient
d’annoncer que nous n’avons besoin que de votre coopération,
mais en fait ce n’est pas cela. Je veux dire que, bien sûr, nous avons
besoin de votre coopération mais je ne demande même plus la
coopération. Je ne demande plus rien (rires). Comment dites-vous
en français ? : « Je n’exige rien. » Parce que, lorsque vous coopérez,
c’est vous qui en bénéficiez. Si vous êtes ici pour du plaisir, vous
aurez du plaisir. Si vous voulez prendre des photos, vous prendrez
des photos. Nous avons la liberté. Pendant ce séminaire, nous
allons célébrer la liberté de l’esprit, la liberté de l’individu.

Parce que, vous savez, j’ai en quelque sorte pensé et ruminé


à propos de la vie spirituelle, et j’en suis venu à la conclusion
que, lorsque nous exigeons, nous n’obtenons rien. J’utilise le mot
dans le sens anglais du terme, ” demand ”, qui n’est pas juste
demander simplement, mais exiger. Ainsi nous offrons et, si cela
vous plaît, vous acceptez. Je serai toujours là pour continuer à
offrir et pour vous aider à accepter et vous aider encore, après
que vous aurez accepté, à faire ce que vous aurez à faire, mais
il n’y aura plus d’exigence à l’avenir. En fait, ces trois ou quatre
dernières années, c’est délibérément que je ne suis pas venu
parce que je souhaitais vous donner des vacances, ‘‘une petite
vacance‘‘, pas de Chariji.

59
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

Parce que c’est ennuyeux à la longue d’avoir quelqu’un qui


vient et revient vous voir et qui insiste à chaque fois pour que
vous méditiez, que vous fassiez votre cleaning, pour que vous
fassiez ceci et cela, ne fassiez pas ceci, ne fassiez pas cela… J’ai
donc pensé qu’il y avait peut-être eu trop de Sahaj Marg ces seize
ou dix-sept dernières années et que vous aviez peut-être besoin
d’un peu de temps pour en quelque sorte penser, réfléchir,
méditer, pour savoir si oui ou non vous voulez du Sahaj Marg,
si le Sahaj Marg vous est nécessaire. Car si c’est moi qui dit que
c’est nécessaire ou si c’est Babuji qui vous le dit : …« Ok, ça va »
comme vous dites en français. C’était nécessaire pour Lalaji,
c’était nécessaire pour Babuji, peut-être l’était-ce aussi pour
moi ! Peut-être !

Donc je suis ici, voyez-vous. J’ai une obligation que j’ai acquise
conformément aux souhaits de mon Maître. Et cette obligation
n’est rien d’autre que l’expression de ma gratitude envers mon
Maître pour tout ce qu’il a fait pour moi, que j’en aie connaissance
ou non. Parce que ce qui est malheureux en spiritualité c’est que
nous ne pouvons pas savoir ce que nous recevons. Et parce
que nous ne savons pas ce que nous recevons, nous sommes
négligents. Nous ne regardons pas en profondeur. Cela n’a rien
à voir avec l’achat d’un ventilateur, d’un cristal ou d’un bijou ; ces
objets-là, vous pouvez les voir, les estimer, examiner vos poches
pour savoir combien vous avez d’argent et vous achetez ou vous
n’achetez pas. Après avoir acheté, vous pouvez le regretter.
Quelquefois, vous pouvez regretter de ne pas avoir acheté.
Mais ici, comme vous ne savez pas ce que vous obtenez, il est
très difficile de comprendre la nécessité d’une pratique, d’une
discipline qui vous dicte sans cesse : « Faites ceci, faites cela, ne
faites pas ceci, ne faites pas cela… dix de ci et dix de ça, les dix
maximes. Levez-vous avant le lever du soleil ! » Pourquoi ? Non ?
Cela parait ridicule. Vous devez donc évaluer et peut-être devez-
vous prier pour que vous soit donnée la capacité de voir ce que
vous recevez, ce que vous avez déjà reçu, et peut-être, découvrir à
quel point il faut encore progresser sur le chemin avant de savoir
vraiment, voyez-vous.

60
Un goût d’éternité → sommaire

Vous savez, c’est comme… Imaginez qu’il y ait un ascenseur


et un grand savant comme Einstein, qui a donné un exemple. Vous
montez dans un ascenseur infini et c’est peut-être entre le premier
et le second étage qu’est l’infini. Quand allez-vous le savoir ? Et
qu’allez-vous savoir ? Comme vous êtes enfermé dans cet ascenseur
et que vous ne pouvez rien voir, vous ne pouvez rien comprendre,
donc vous ne pouvez rien percevoir. Il n’y a personne pour vous
informer. Voilà un très bel exemple qu’il a utilisé pour illustrer la
loi de la gravitation. Certains d’entre vous devraient peut-être le
lire. Pour ce qui nous concerne, à moins d’être capables de sentir et
d’être véritablement concernés par le fait de savoir si nous sommes
en mouvement et vers quoi nous avançons, cela devient un exercice
futile et nous perdons rapidement tout intérêt parce que nous
sommes comme des enfants.

Vous savez, quand vos enfants veulent aller au bord de la mer,


vous vous levez religieusement à quatre heures trente du matin
pour éviter la foule qui quitte Paris. Vous démarrez et au bout d’une
demi-heure de voiture, vous vous retrouvez dans un bouchon, un
bouchon de 12 km. Voilà ! Vous êtes stoppés. Maintenant les enfants
veulent aller aux toilettes, l’épouse est nerveuse, le mari est déjà
fatigué, au bout d’une demi-heure de route. Et dans ce merveilleux
pays qu’est l’Europe, vous ne pouvez même pas sortir pour des
besoins urgents. Bien sûr, il y a des inventions fantastiques pour
s’attaquer à des situations, comment dirai-je, aussi délicates ou
peut-être aussi indélicates. Mais le temps d’arriver à Nice ou à
l’endroit où vous voulez vous rendre sur la Côte d’Azur, vous en
avez déjà assez de vos vacances. Vous voilà enfin à la plage, les gens
sont collés les uns contre les autres.Vous devez parfois littéralement
enjamber des corps avant de pouvoir vous installer. Vous allez vous
baigner et là, c’est l’invasion des planches à voile et des scooters
de mer ; des gens tractés par des bateaux qui essayent de voler au-
dessus de l’eau. C’est comme un grand cirque. Seule différence : il
n’y a pas d’animaux mais seulement des humains et des engins.

Voilà ce que sont les vacances modernes en Europe ! Et, pour


cela, nous sommes prêts à dépenser des milliers de francs ou leur
équivalent moderne en euros, prêts à endurer toutes sortes de

61
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

désagréments et toutes sortes de frustrations. Mais nous faisons


tout cela parce que la mer est là-bas, que moi je suis ici et qu’il
me faut y aller. Mais cet océan de Béatitude, je ne sais pas où il
est. (Rires) Pourquoi l’appelle-t-on océan de Béatitude ? Y trouve-
t-on La Béatitude ? Y a-t-il un océan ? Et je pense : « Non, non,
quand j’étais dans la Baie de Biscay, la mer était agitée ; quand
j’ai traversé la Manche, c’était affreux. Comment peut-on parler
de béatitude à propos de la mer ? » J’essaie simplement de
vous donner un exemple de la manière dont nous pensons en
établissant un rapport entre nos expériences matérielles et nos
possibilités spirituelles. Alors nous affirmons qu’il vaut mieux
faire une longue promenade dans les bois, et si vous entendez
chanter le coucou, c’est une expérience merveilleuse. Je me
souviens quand nous avions Augerans, un jour j’étais dans les
bois, nous avons entendu : « Coucou ! » Et immédiatement, tout le
monde s’est figé parce qu’il devient si rare d’entendre le coucou !
Et nous voilà aux aguets pour entendre le prochain ‘‘Coucou‘‘ et il
ne vient pas ! C’est quelque chose comme ça. La responsabilité de
l’accomplissement repose complètement sur vous, sur l’abhyasi.
Si vous voulez réussir, vous voulez obtenir quelque chose, vous
devez faire quelque chose, vous devez devenir quelque chose.

J’en ai assez de ce mot coopération, coopération, coopération…


Coopérer avec quoi ? Avec qui ? Et pourquoi ? Vous voyez, nous
devons devenir suffisamment adultes pour comprendre qu’ici-bas,
nous devons travailler pour tout, et cela s’applique à la spiritualité
plus qu’à toute autre chose. La différence est que, dans le monde
matériel, vous travaillez à l’extérieur, vous soulevez des chaises,
vous jetez des choses, vous grimpez sur des échelles, vous fixez
des trucs et à la fin vous poussez un soupir de soulagement, en
disant : « Voilà, c’est fini ! » Mais, dans le domaine de la spiritualité,
vous devez travailler à l’intérieur de vous-même.

Je me souviens de la réponse d’un grand saint à un jeune


homme qui avait parcouru montagnes et océans. Il venait de
débuter sa pratique depuis quelques jours ou quelques mois
et il demanda au Maître : « Maître, que dois-je faire ? Où sont
les montagnes à escalader ? Où sont les océans à traverser ? »

62
Un goût d’éternité → sommaire

Le Maître lui répondit : « Mon fils, ils sont tous à l’intérieur de


toi. » Ainsi nous allons en Suisse et nous voyons les montagnes,
certains d’entre nous s’en réjouissent, comme moi d’ailleurs,
les uns veulent les gravir et ils sont heureux quand ils y sont
parvenus, d’autres veulent y monter et faire du ski. Formidable !

Mais ici, qu’avons-nous à faire ? À moins d’apaiser notre


mental, de l’apaiser complètement et d’être prêts à recevoir les
feed-back intérieurs : « À écouter la petite musique du silence »
comme disent les livres ésotériques, nous ne saurons jamais où
nous allons, ce que nous faisons ni ce que nous recevons. Ces
sessions de méditation n’ont d’autre but que de créer ou de tenter
de créer, tranquillement assis en silence, au cœur du silence, cet
état de réceptivité qui peut nous révéler que quelque chose est en
train de se passer. Et, progressivement, nous sommes capables de
voir. C’est comme lorsque vous êtes en avion et que vous traversez
des couches de nuages. À certains moments, vous ne voyez rien,
l’avion est peut-être agité de secousses et il y a un instant de peur.
Si vous n’avez rien lu sur la science et que vous êtes quelque
chose comme un pauvre Indien, vous allez dire : « Mais pourquoi
ces secousses alors que l’avion traverse de l’air ? » Vous savez,
j’ai eu ce genre de discussion l’autre jour à Bombay. Pourquoi un
avion est-il secoué de cette façon lorsqu’il traverse un nuage ou
même une couche d’air de nature différente ? Parce que la densité
n’est pas la même. Je veux dire que nous sommes habitués à ce
que les voitures cahotent sur les routes, mais nous n’avons pas
l’habitude que les avions tremblent, produisent des secousses et,
parfois, chutent verticalement de vingt ou trente mètres dans un
trou d’air, cela dépasse notre imagination. C’est pour cela qu’il y a
des ceintures de sécurité et que vous devez les garder attachées.

Ici il n’y a rien. Nous ne savons ni ce qui va se passer ni


quand cela va se passer. Parce que nous sommes habitués à
cette psychologie moderne, à l’esprit inventif moderne qui nous
permet d’avoir tout instantanément. Le café instantané, le thé
instantané, furent une grande innovation il y a vingt ans ! Vous
ouvriez un sachet, jetiez son contenu dans l’eau et vous aviez du
café, voilà ! Aujourd’hui cela ne s’arrête pas là. Assis devant votre

63
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

ordinateur, vous pouvez réserver des billets, acheter des billets


pour le théâtre. Vous pouvez même acheter votre cercueil si cela
vous chante. Vous pouvez passer votre commande et régler via
Internet, et le tout en deux, trois minutes. Vous pouvez acheter
des livres via Internet.

Nous courons de plus en plus après l’instantané et la


spiritualité change notre orientation pour la tourner vers l’Infini.
Ces buts matériels peuvent être manipulés, obtenus et acquis, ici
et maintenant. Les buts spirituels peuvent être ici et maintenant,
mais peut-être après un temps infini. Cela dépend de vous !
Donc voyez-vous, participer à la vie spirituelle de tout votre
cœur requiert à la base un cœur courageux, un cœur déterminé,
capable de dire : « Les secrets du cœur ne sont pas révélés comme
lorsqu’on regarde par la fenêtre d’un avion, les secrets du cœur
sont révélés à celui qui peut pénétrer dans ce qu’un grand auteur
inconnu appelait ‘‘Les Nuages d’Inconnaissance’’ ». C’est un titre
vraiment merveilleux pour ce livre. Malheureusement personne
ne sait qui l’a écrit : ‘‘Les Nuages d’Inconnaissance‘‘. Ainsi ce
nuage d’inconnaissance est à l’intérieur de nous. Et à moins d’être
très, très, très, très sérieux quant à ce que vous voulez savoir, et
extrêmement patients pour attendre de percer ces fameux nuages
– je veux dire, vous avez un nuage très épais ici et vous ne pouvez pas
voir le soleil pendant quelques jours, vous n’y pouvez rien, malgré
toute votre technologie moderne – ici, il n’y a pas de technologie, à
part, comment dire, cette belle et imperceptible touche d’amour.
L’amour doit balayer les nuages d’inconnaissance. La patience
doit donner aux nuages d’inconnaissance le temps de disparaître
et de vous révéler la vision de ce qui est censé être adorable,
désirable au-delà de toute attente, et que vous ne pourrez plus
jamais oublier après l’avoir contemplé. Vous ne pourrez pas
revenir en arrière après avoir vu cela. « Avoir vu ce dont on ne
peut revenir » disent les Véda.

Donc, je vous recommande à tous de créer, de cultiver des cœurs


de lions. C’est ce que disait Babuji : « Je veux des lions, pas des
moutons. » Les moutons ont toujours la tête baissée pour brouter
l’herbe. Les lions rugissent, pleins de défiance et vont là où nul ne

64
Un goût d’éternité → sommaire

peut aller. Il nous faut l’esprit de cette grande série télévisée que
j’aime regarder : Star Trek. ‘‘Aller là où aucun homme n’est encore
allé.‘‘ Mais là, c’est orienté vers la technologie. Vous y voyez un
magnifique vaisseau spatial, un vaisseau des étoiles dans lequel
vous êtes confortablement installé. Vous avez des médecins et tout
ce que vous voulez, la machinerie par excellence. Mais ici, tout
est en moi. Je suis le patient, je suis mon propre médecin, je suis
le voyageur et jusqu’à ce que je découvre le guide en moi, je dois
être mon propre guide. Donc, plus vite nous trouverons le guide
à l’intérieur et croirons en Lui, plus vite nous Lui ferons confiance
et Le laisserons marcher devant nous, mieux ce sera pour nous.
Sans ce cœur plein d’attente, plein de courage et de patience, je
crains que l’aspiration spirituelle ne reste une simple aspiration.
Et la participation des abhyasis se limitera à régler deux cents
euros d’inscription, comme on dit en Français, pour pouvoir
écouter quelques discours, consommer, je l’espère, de la bonne
nourriture, ceci restant à vérifier et, bien sûr, ce sera en quelque
sorte des vacances, vous savez.

Le problème est que nos séminaires spirituels sont complètement


associés à l’idée de vacances parce que nous quittons notre travail,
que nous laissons éventuellement nos familles, et que nous nous
relaxons pendant trois jours dans une sorte de Nirvana ; un Nirvana
artificiel que nous créons. Mais ce n’est pas vrai. Cela devrait être
- je ne veux pas le dire - mais cela devrait être des charbons ardents.
Nous devrions être au supplice sur nos sièges, et nous demander :
« Pourquoi suis-je ici, qu’est-ce que je fais si je ne fais pas ce que je
devrais faire ? Suis-je ici uniquement pour profiter de l’ambiance ? »
Vous savez, quand Jacky a annoncé le séminaire, il a maintes fois
promis que cela se déroulerait dans un lieu magnifique : quarante-
quatre hectares, des chevaux, des endroits aménagés pour les
enfants, des piscines… Pourquoi nous faut-il insister sur ces choses
lorsque nous parlons d’un séminaire ? Essayons-nous en quelque
sorte de vous allécher pour vous faire venir ici ? Pour vous consoler
à l’avance pour que, même si vous ne trouviez pas la spiritualité,
vous ayez tout cela ? C’est un peu triste pour moi que nous ayons
besoin d’être tentés pour venir.

65
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

J’aime toujours autant cette célèbre déclaration du Christ,


que je vous ai déjà citée, il y a une vingtaine d’années ; Jésus se
tient les bras ouverts et dit : « Souffrez qu’ils viennent à moi. »
J’interprète ce “souffrez” au sens d’une souffrance et aussi d’une
permission. « Permettez-leur de venir à moi. » Pourquoi « Souffrez
qu’ils viennent à moi ? »  Parce que cette permission est quelque
chose que vous devriez traiter comme … je suis désolé de le dire
mais c’est, dans un sens, une souffrance.

Nous souffrons tout le temps. Quand vous êtes dans un avion et


que vous êtes assis dans ces sièges ridicules et que vous aimeriez
bien avoir deux paires de genoux au lieu d’une afin de pouvoir
vous replier de plus en plus, vous savez, vous ratatiner sur vous-
même, où vous ne pouvez pas vous permettre d’avoir envie d’aller
aux toilettes parce que vous ne savez pas quand ce sera possible,
où vous n’osez pas manger parce vous savez qu’à nouveau vous
devrez retourner aux toilettes, vous avez peur de boire… N’est-ce
pas souffrir ? Juste parce qu’ils vous offrent six vidéos pendant les
huit heures de vol et quantité de journaux ? Mais trois sièges… Et
cet homme enjambe vos orteils tout le temps et cette femme de
l’autre côté vous enjambe tout le temps, et vous vous demandez :
« Qu’est-ce que je fais ici ? » N’est-ce pas souffrir ? N’est-ce pas
souffrir de quitter votre Paris dans votre magnifique voiture, que
ce soit une Mercedes Benz, une Volvo ou une de ces modestes
Renault 5 ? Ne souffrez-vous pas pendant vos neuf heures de
trajet pour Nice - qui en deviennent quatorze - en faisant semblant
d’être heureux tout le temps ? N’est-ce pas souffrir ?

Votre mental vous fait croire que vous prenez du plaisir. Votre
mental vous fait croire qu’en allant vers l’océan, vous allez vers
quelque chose qui est un autre Nirvana. Tous, sans exception,
avant même de partir, vous espérez être de retour là-haut dans
votre appartement, ne pas gaspiller votre argent durement gagné
pour un bonheur éphémère, promis mais jamais distribué. Vous
allez mal manger, de plus en plus de cochonneries… Qu’aurez-
vous à montrer lorsque vous rentrerez ? Vous devrez rentrer,
redoutant la reprise du travail. Votre femme, de son côté, redoute
la rentrée des classes de vos enfants, le nettoyage de la cuisine,

66
Un goût d’éternité → sommaire

de l’appartement. Tout le monde est de mauvaise humeur. Et ce


sont des vacances !

Puis-je vous suggérer qu’ici ce sont de vraies vacances pour


vous tous ? De vraies vacances où l’esprit peut s’élever, où l’âme
peut être en expansion, où il n’y a pas de préoccupation, pas
même d’ordre spirituel, pas même de peur, pas de peur, même de
la mort. Parce que, pendant ce moment, cette heure ou ces deux
heures de méditation, chacun de nous a fait l’expérience, si brève
soit-elle, d’une condition de béatitude, qui est ce qui vous pousse
à revenir encore et encore. S’il n’y avait pas cela, je serais face à
une salle vide et Jacky se demanderait à quoi ont servi toutes ses
tentations de piscine et de chevaux pour les enfants.

C’est cette étincelle de divinité, cette béatitude d’un instant,


cette expérience que vous ne pourrez jamais oublier, dont le
souvenir et l’espoir de la retrouver vous ramènent ici sans cesse.
Et je puis vous assurer que si vous continuez avec persévérance
et, je le répète encore, avec courage au cœur, espoir et foi qui seuls
rendent possible la patience, vous goûterez de plus en plus de
cette éternité, de plus en plus de cette béatitude, jusqu’à ce que
cela pénètre toute votre vie de façon continue non seulement en
ce qui concerne la conscience mais en tant qu’expérience réelle.

Je prie pour cela.



Merci.

NOTE : Les mots en italique ont été prononcés en français.

67
→ sommaire

IX

La jeunesse,

un temps pour l’aspiration.

Lassy, France

18 juillet 2003

69
→ sommaire
→ sommaire

La jeunesse, un temps pour l’aspiration.

18 juillet 2003

O.K. Un peu de philosophie si vous le voulez bien. J’ai toujours


trouvé que la jeunesse était le meilleur moment pour toutes les
bonnes choses. Je suis sûr que vous serez tous d’accord. Vous serez
tous d’accord ne serait-ce que pour une bonne raison, qui est
qu’actuellement vous êtes jeunes, que tout va bien pour vous et donc
vous hochez tous la tête, ravis, mais ce n’est pas ce que je voulais
dire. Vous avez vu les chevaux dans les grands prés, comment les
poulains courent partout et ruent en hennissant… (Le Maître hennit)
- comme cela. Ce n’est pas ce que je veux dire. Mon idée est que la
vie commence quelque part et continue, vous voyez. Et lorsque nous
naissons, nous amenons beaucoup de joie, de bonheur et de lumière
à une famille et nous nous prélassons dans cette lumière. C’est
comme en hiver quand nous nous asseyons à l’extérieur et que nous
prenons un bain de soleil, c’est un bon moment parce qu’il apporte de
la joie et du bonheur à tous. Puis en grandissant nous commençons à
nous différencier petit à petit. Nous acquérons notre propre volonté.
Nous prenons une direction qui peut être bonne ou mauvaise mais
nous insistons pour la prendre, oubliant qu’à ce stade si les choses
tournent mal, il sera très difficile de les corriger plus tard. Vous savez,
si vous avez une montagne et un ruisseau qui va dans cette direction
plutôt que dans l’autre, la rivière coulera vers le nord plutôt que vers
le sud. Ce n’est qu’un exemple car on ne peut pas dire dans quelle
direction la rivière devrait couler. Mais c’est pour cette raison que
la jeunesse est un moment qui offre l’opportunité de prendre des
décisions, et de faire des choix. Tout est ouvert.

71
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

Lorsque vous aurez mon âge, il n’y aura plus aucun choix
possible. Lorsqu’un chêne atteint vingt-cinq à trente mètres de
haut, il n’a plus de choix. Mais lorsque c’est un jeune arbre, il peut
se courber, il peut être emporté par le vent, détruit. C’est pour
cette raison que ce jeune arbre a besoin d’être protégé et que
cette protection vient d’autant de sources différentes. Elle vient
des parents, elle vient de la famille, de votre société, de l’école,
du gouvernement. On s’attend à ce qu’ils contribuent tous à un
environnement protecteur dans lequel vous pourrez grandir
correctement. Malheureusement, de nos jours, et ce depuis au
moins trente ou quarante ans, toutes ces sources de protection
s’effondrent, elles sont de moins en moins nombreuses et cela
concerne aussi les parents. Je suis navré d’avoir à dire que les
parents ne jouent pas leur rôle de guide et de conseiller, trop
occupés qu’ils sont d’eux-mêmes. Il fut un temps où jamais les
mères ne travaillaient, aussi étaient-elles source de bonheur,
d’amour et de protection. Aujourd’hui toutes les femmes
travaillent. On ne les considère plus comme source d’amour et
de protection. Elles sont immergées dans leur propre vie, elles
mènent leur vie. Les enfants sont en grande partie livrés à eux-
mêmes et grandissent dans une atmosphère à la fois d’aspiration
et de ressentiment. Ils n’acceptent pas de ne pas recevoir assez
d’attention de la part de leurs parents qui sont trop affairés
pour s’occuper d’eux, trop occupés à gagner de l’argent afin
de le gaspiller pour des vacances, ce dont je parlais ce matin.
Vous préféreriez avoir de l’amour dans la famille plutôt que
des grandes vacances à Nice ou aux Antilles ou n’importe où
ailleurs… n’est-ce pas ?

Une fois, je me trouvais à Bhopal, sur le point de conduire un


satsangh comme celui-ci. Cinq, six minutes avant de commencer
le satsangh, une grande fille en uniforme d’écolière s’avança. Elle
se planta devant moi, comme ça, et dit : « Je vous hais. » Alors j’ai
simplement souri et j’ai dit : « Pourquoi ? Je ne vous ai jamais
rencontrée, je ne vous connais pas, comment se fait-il que vous
me haïssiez ? » Elle dit : « Vous m’avez pris mes parents. Mon
père ne me regarde pas, ma mère ne me regarde pas. Même le
dimanche, ils laissent le petit-déjeuner sur la table, comme pour

72
La jeunesse, un temps pour l’aspiration→ sommaire

un chien, et ils partent pour le satsangh. Maintenant je n’ai plus


rien. » Elle était grande et bien bâtie, j’ai donc pensé qu’elle devait
être assez âgée pour être abhyasi. Alors je lui ai juste dit de s’asseoir,
de participer au satsangh maintenant et que nous parlerions plus
tard. Savez-vous ce qui arriva par la suite ? C’est de la magie, car
dans le satsangh il y a cet amour montré d’une manière que vous
ne pouvez exprimer d’aucune façon. Quelle est la façon humaine de
manifester de l’amour ? Se serrer les mains, se serrer dans les bras,
se donner des baisers et faire l’amour ? C’est tout ! Les animaux le
font, les oiseaux le font et tout le monde le fait. Qu’y a-t-il là-dedans
de si spécial ? Il y avait autrefois une chanson : « Les abeilles le font,
les oiseaux le font… » Je ne sais pas si vous la connaissez…? Mais
il existe un amour qui n’exige rien et qui donne tout. A l’échelon
humain, vous essayez autant que vous le pouvez de donner sans rien
demander en retour, mais c’est impossible.

Donc ici nous recevons tout ce dont nous avons besoin, ce dont
notre cœur a besoin, qu’il le sache ou non. C’est pourquoi vous êtes
tous ici, et manifestement vous êtes, pour la plupart, les enfants de
parents du Sahaj Marg et c’est très bien, parce que vous avez grandi
dans l’environnement même qui a permis à vos parents d’arriver
à quelque chose en spiritualité. Vous trouvez qu’ils sont différents
des autres parents, au moins sous certains aspects. Il se peut que
vous n’ayez pas accepté leur protection, mais ils ont essayé de vous
protéger. Ils vous ont donné les germes de la spiritualité. Ils vous ont
donné une aspiration spirituelle avec laquelle travailler. L’aspiration
n’est pas la même chose que, par exemple, l’espérance ou l’ambition.
L’ambition est très centrée sur elle-même, matérielle, orientée
vers l’argent, orientée vers le pouvoir, orientée vers la position.
L’aspiration se rapporte à des valeurs de vie plus élevées : comment
devenir quelque chose ! Et non : comment obtenir quelque chose !
L’ambition se rapporte à l’avoir. Oh ! Je suis ambitieux, je veux avoir
un… Je ne sais pas… La dernière voiture BMW et une maison de
neuf chambres à coucher. L’aspiration dit : je veux être un homme
bon, un bon membre de la société, un bon père et une bonne mère.

Donc je suis heureux que la nouvelle génération du Sahaj Marg,


dans l’ensemble et partout dans le monde, soit composée des enfants

73
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

de nos abhyasis. Des abhyasis de mon âge, des abhyasis de leur âge
et des abhyasis qui sont comme cette jeune dame qui vient de
se marier : leurs enfants viennent tous peu à peu, puisqu’il y a
pour eux un exemple à suivre au sein de la famille, et ceci si les
parents vivent leur vie ou aiment leur vie comme de bons abhyasis
le devraient… Vous savez, c’est comme quand on jette une pierre
dans un étang, les ondulations de l’eau se répandent d’elles-
mêmes. Les bonnes choses se répandent d’elles-mêmes. Vous
avez dû remarquer, vous êtes tous assez âgés pour observer que
les bonnes choses se répandent d’elles-mêmes ; les mauvaises
choses doivent être propagées. Le crime doit être propagé par la
terreur, la peur, la subornation, la corruption et la destruction. Les
bonnes choses ne se répandent pas ainsi. Les bonnes choses se
répandent tranquillement, par l’exemple. Donc, si vous trouvez
que vos parents sont bons, aimants, que leur existence est
harmonieuse, que la famille est littéralement vivante, avec amour,
je veux dire… Personne ne va refuser une telle vie.

Après l’enfance, vous devenez un jeune et, voyez-vous,


la jeunesse est un moment très important. Maintenant il y a
encore davantage d’occasions pour les bonnes et les mauvaises
choses. A cette époque de choix, si vous n’avez pas une guidance
aimante - guidance ne signifie pas verrouiller sa fille dans sa
chambre pour qu’elle n’attende pas son petit copain à minuit – ce
n’est pas ça. Et ça ne marche pas. Vous connaissez le proverbe
anglais : « Love laughs at locksmiths… » – l’amour se moque des
serruriers… Bien sûr, ils l’entendaient dans un sens différent, que
l’amour trouvera toujours sa voie. Mais à présent nous ne parlons
pas de l’amour. Nous parlons de ce que les jeunes peuvent avoir
comme bons moments. Vous savez : le jazz, les Rolling Stones
– je ne connais pas les noms - boire un petit coup, fumer un petit
coup. Vous commencez par un petit coup et… Autrefois seule une
poignée de jeunes se faisait avoir, maintenant, ils sont nombreux
et le temps qu’ils réalisent qu’ils détruisent leur vie, leur avenir,
leurs opportunités, il peut être trop tard pour les aider. Ils se sont
endurcis, ils sont devenus dépendants et, ce qui est pire, ils sont
devenus cyniques et disent : « Eh bien ! Ceci est le monde dans
lequel je vis, vous savez, que voulez-vous que je fasse d’autre ? »

74
La jeunesse, un temps pour l’aspiration→ sommaire

Malheureusement ceci n’est pas vrai, ce n’est pas le monde


dans lequel nous vivons. C’est le petit monde du crime et de la
corruption, de la violence et du sexe dans lequel vous tombez, dans
lequel vous vous faites prendre dans un moment de tentation, dont
vous êtes incapables de sortir. Ensuite vous blâmez la société, vous
blâmez vos parents et souvent vous blâmez aussi le Sahaj Marg
en disant : « Oh ! Si mes parents s’étaient occupés de moi… » Oui,
mais étiez-vous disposés à ce qu’ils s’occupent de vous ?

Au Sahaj Marg nous avons eu des enfants qui ont été, vous
savez, « poco loco » (un peu fous) dirons-nous, et ils sont revenus.
C’est bien parce qu’ils ont l’opportunité de revenir. Je veux dire, si
vous partez de la maison, à moins que vous n’ayez un foyer, vers
quoi allez-vous revenir ? Je dois dans ce contexte m’adresser à la
génération plus âgée et leur dire combien leur responsabilité est
effroyable et imposante. En effet, si les parents sont uniquement
concernés par leur croissance matérielle, par leur propre succès,
ils ne peuvent pas vraiment être d’une grande contribution pour
l’avenir de leurs enfants, quel qu’il soit. S’il est mauvais, les
parents y contribuent à 80%. S’il est bon, ils y contribuent à plus
de 80%… Je trouve que, dans la plupart des cas, les parents sont à
blâmer soit positivement, soit pour négligence, soit, simplement,
pour indifférence. « Oh ! Ils sont assez grands pour savoir ce
qu’ils veulent. » « Quand j’avais quinze ans… » Ils commencent
à se vanter… « Moi quand j’avais quinze ans, Chariji… » Oui,
quand vous aviez quinze ans, le monde était différent. Quand
j’avais quinze ans, le monde était très différent. Quand vos
enfants auront quinze ans, vous ne savez pas ce que le monde
sera. Donc vous voyez, vous avez aussi une lourde responsabilité.
Quand vous pensez à votre avenir, ce n’est pas seulement votre
avenir. Vous êtes des garçons et des filles, vous allez sûrement
vous marier. « Qu’en sera-t-il de nos enfants ? » Vous devez vous
poser la question. « Est-ce dans un monde comme celui-ci que
je veux élever mes enfants ? » Pourquoi ne posez-vous pas une
telle question ? Parce que vous savez déjà que ce monde-ci n’est
pas un lieu très enviable. Vous en avez fait l’expérience. Certains
d’entre vous s’y sont fait prendre, certains ont chuté. Certains
d’entre vous, par la Grâce du Maître, se sont relevés. Vous pouvez

75
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

tenir la tête haute et vous sortez grandis de cette expérience. Mais il


n’appartient pas à tout le monde de tomber et de se relever ensuite.
Il leur manque la force, il leur manque la volonté. Il leur manque
les gens capables de les aider à se relever. Heureusement pour
nous, au Sahaj Marg, nous avons un environnement de paix, de
tranquillité, d’harmonie et de spiritualité, où nous pouvons aider
sans vous aider de manière flagrante.

Les gens viennent à moi avec des problèmes de dépendance


à la drogue, d’abus sexuels ou autres abus parentaux, ils sont
déçus par la société, démoralisés par leurs amis. Souvent deux ou
trois sittings suffisent pour les mettre d’aplomb et ils vont bien. Je
veux dire que je suis sûr que la plupart d’entre vous, si ce n’est la
majorité, sait cela. Cela a marché avec beaucoup de parents qui
ont eu tendance à s’égarer. Ils sont de retour. C’est plus facile
de travailler avec les enfants parce que les enfants savent, ils ont
la foi dans leur cœur. Voyez-vous, cette période de jeunesse est
une période d’aspiration, comme je l’ai souligné, parce que nous
voulons ce qu’il y a de meilleur, de meilleur non pas du point de
vue matériel, mais du point de vue de l’évolution, des valeurs et
des qualités. L’enfance c’est l’innocence, la jeunesse doit être le
temps des aspirations et puis la phase adulte devrait être celle
de l’accomplissement. Vous voyez comment, pas à pas, cela se
construit. On perd vite l’innocence, puis, si l’aspiration n’y est
pas, il ne reste plus que l’ambition, qui nous est imposée de plus
en plus par le système éducatif d’aujourd’hui. Vous devez être
ceci, vous devez être cela, vous devez pouvoir vous permettre de
prendre un vol pour New York trois fois par an, de faire un voyage
organisé à Hawaï, etc., etc. Notre aspiration devient ambition,
devient corruption. Puis il n’y a rien que nous ne ferions pour
satisfaire notre ambition y compris ce que les Américains
appellent « l’esprit du tueur ». Vous savez, c’est très célèbre aux
Etats-Unis. Vous avez entendu John Mc Enroe en parler : « Tuer
l’adversaire », « massacrer le salaud ». Ce sont des expressions
courantes dans la société américaine. « Massacrer le salaud. » Je
cite, je suis désolé d’avoir à utiliser des mots comme ceux-ci dans
une assemblée spirituelle, mais c’est la vérité.

76
La jeunesse, un temps pour l’aspiration→ sommaire

Nous ne sommes pas censés vivre comme cela. Nous ne sommes


pas des chiens pour nous battre l’un contre l’autre et saigner à
mort. Même au sujet des chiens, la Bible dit : « Le chien ne mange
pas le chien. » Mais les êtres humains se mangent entre eux. Nous
ne nous soucions pas de savoir qui nous détruisons. Lorsqu’un
couple marié interfère dans la vie d’un autre couple marié et que
le mari de l’un prend la femme de l’autre, c’est la destruction de
la vie d’un autre couple. « Oui, mais elle m’aime. » Donc si j’aime
votre diamant et que je vous le prends dans la rue… Allez-vous
dire : « Eh oui ! Il aime mon diamant donc il l’a pris » ?  Pourquoi,
lorsqu’une fille fauche le mari d’une autre femme, ce ne serait
pas du vol ? Mais si jamais elle prend un stylo qui coûte peut-être
un euro ou même moins, alors là c’est du vol ! Votre éthique ne
vous permet pas de prendre le sac à main de votre amie : « Oh ! Je
l’aime tellement que je l’emporte ! » Et vous regardez impuissant.
Comment une société peut-elle tolérer que de simples vols
matériels soient qualifiés de vols, et pour cela punir des gens, les
envoyer en prison, et que dans le même temps un homme qui vole
la femme d’un autre s’en tire comme ça ? Et tout le monde de dire
seulement : « C’est comme ça, c’est la vie, hum ! (En français) » Ne
pensez-vous pas que cette société est corrompue, stupidement,
gratuitement, vicieusement corrompue ?

En Inde, nous croyons que les femmes sont investies de toute


la moralité. J’ai parlé de ceci il y a vingt ans à Augerans et je me
suis fait sévèrement critiquer. On a dit : « Pourquoi les femmes
seraient-elles seules responsables ? » Bien sûr, parce que, lorsqu’il
faut être deux pour faire quelque chose et que l’un des deux s’y
refuse… Vous devez restaurer la moralité, n’est-ce pas ? La Gita
est très explicite. Elle dit que lorsque les femmes se détournent
du droit chemin, la société s’anéantit. Ainsi c’est toujours le code
d’honneur de la femme de dire : « Non chéri, tu es déjà marié, tu
dois retourner chez ta femme, si tu lui fais ça aujourd’hui, après-
demain c’est à moi que tu le feras. » N’est-ce pas ? Vous l’avez tous
vu, vous en avez tous fait l’expérience. Chacun d’entre vous ou la
plupart d’entre vous ont vu un frère, un père, la fille de votre père, la
sœur de votre mère partir avec un autre homme. Je veux dire que la
société d’aujourd’hui est un désastre parce que l’égoïsme prévaut,

77
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

et qu’il n’y a pas d’ordre. Pourquoi cet état de fait ? L’affirmation


contient la réponse : l’égoïsme prévaut et non l’ordre.

L’ordre : la moralité c’est l’ordre, l’éthique c’est l’ordre, et la vérité


c’est l’ordre. Mais lorsque nous disons : « Je veux, et je prends ce
que je veux » alors cette société est anarchique. Vous pouvez avoir
de magnifiques camions sur la route, vous savez, roulant à droite,
obéissant au feu rouge et s’y arrêtant… C’est merveilleux sur le plan
superficiel, pour impressionner les étrangers comme moi : « Oh !
Comme cette société est disciplinée ! » Vous appelez la vendeuse
« Madame », vous faites la queue ; si elle est occupée pendant un
quart d’heure, vous attendez. Nous faisons semblant d’être une
merveilleuse société de gens éduqués, sains, et je ne sais quoi encore,
des êtres humains normaux. Mais toute cette éthique superficielle,
cette bonne conduite, cette obéissance à la loi cache un désastre
beaucoup plus profond. Ce qu’on peut appeler un marécage. Et qui
empeste voyez-vous.

Donc mes jeunes frères et sœurs, mes filles et petites-filles,


si vous souhaitez créer votre société, vous allez devoir travailler
pour. Je ne peux pas garder ce qui n’est pas à moi. Si je m’amuse
avec quelque chose qui appartient à quelqu’un d’autre, je renonce
à mes droits sur ce qui m’appartient. Prenez garde ! Cela peut être
tentant, cela peut être excitant, cela peut même être amusant. Et
vous pourriez même vous en tirer à bon compte, pour l’instant.
Mais il y a une loi divine qui dit que vous êtes coupable. Et alors,
quand vous aurez trente, quarante, cinquante ans, lentement
cette culpabilité commencera à vous ronger le cœur. Alors
vous commencerez à rechercher les églises, les psychiatres, les
thérapeutes, et si vous avez de la chance vous trouverez le Sahaj
Marg. Oui, bien sûr ! Tout le monde ne trouve pas le Sahaj Marg !
Dans ce monde immense, nous ne sommes qu’entre cent et deux
cent mille personnes.

Et ici aussi, nous sommes globalement rebelles… « Quelle


est cette stupide moralité des Indiens ? » m’a demandé une
dame il y a vingt ans. Elle disait : « Ça c’est bon pour les
Indiens, pas pour nous ! » Je ne sais pas comment elle pouvait

78
La jeunesse, un temps pour l’aspiration→ sommaire

faire cette distinction, ni comment dans sa sagesse, elle en était


arrivée à la conclusion que les Indiens sont stupides parce
qu’ils sont moraux et que les blancs sont grands parce qu’ils
peuvent prendre ce qu’ils veulent, où ils veulent mais pas les
possessions matérielles ! Ils peuvent briser des couples, briser
des mariages, détruire leurs enfants, les envoyer ici, les envoyer
là. Et à votre avis quelle est la meilleure société ? Donc je répète,
si vous voulez une société où ce qui est à vous est à vous, y
compris votre mari ou votre femme, où les couples peuvent
vivre ensemble de manière harmonieuse, sans danger… Vous
savez, j’étais choqué tout au début lorsque je venais en Europe
et que des centaines de jeunes gens et de maris me disaient :
« Ma valise est toujours prête. » Je disais : « Pourquoi ? » Ils
répondaient : « Je ne sais pas si ce soir quand je rentrerai, je
trouverai ma femme à la maison. » Je ne plaisante pas. Ce sont
des choses que j’ai entendues moi-même de personnes qui
sont aussi ici. Mais qu’est-ce que c’est que cette existence où
votre valise est toujours faite parce que vous ne savez pas si
le soir votre femme vous accueillera à la maison ou pas – ou
même si elle sera là ou pas ?

Donc voyez-vous, dire que l’herbe est verte n’est pas une
exagération. C’est la vérité. Chacun de vous sait ça. Je suis
disposé à en parler, vous ne l’êtes pas. Vous préférez ne pas
voir le problème, vous pensez qu’ignorer les choses apporte
sécurité et protection. Mais vous savez, la médecine dit que si
vous avez une blessure et que vous l’ignorez, ça va suppurer et
un jour il faudra peut-être vous couper la jambe. C’est ce qui
arrive. Ici couper la jambe, c’est briser un mariage, les enfants
dans l’angoisse, ne sachant pas où aller, parce l’enfant aime ses
deux parents. Mais cela devient une histoire légale. Lui dit : « Je
veux » et elle dit : « Je veux ». Les enfants sont abasourdis. Que
s’est-il donc passé là où il y avait tellement d’amour jusqu’à
hier soir ? Qu’est-il arrivé ce matin ?

Donc je ne veux pas que vous tous, vous grandissiez comme ça,
et je suis sûr que vous-même vous ne voulez pas grandir comme
ça. Je suis sûr que ceux d’entre vous qui sont les enfants de parents

79
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

divorcés ont haï leurs parents pour ça. Si quelqu’un veut nier
cela, c’est un fieffé menteur. Finalement, vous vous réconciliez
parce que vous n’avez pas le choix. Votre mère est partie avec
quelqu’un, votre père est parti avec quelqu’un. Il ne vous reste
plus qu’à être « partagé » comme disent les Français. Quelquefois
ici, quelquefois là-bas. Lui vous emmène en vacances, elle vous
fait des cadeaux, et « voilà » (en français), tout est merveilleux,
n’est-ce pas ?

Donc ne commettez pas cette erreur de justifier le mal, les


mauvaises actions et la corruption en prétendant que si vous ne les
regardez pas, si vous n’en parlez pas, ils n’existent pas. Que vous
aimiez ça ou pas, vous savez tous que les fantômes existent, même
si vous n’en parlez pas. Vous ne les voyez pas. Le mal existe bien
que vous puissiez ne pas l’avoir vu. La maladie existe bien qu’il
soit possible que vous n’ayez jamais été malade. Les mensonges
existent même si vous n’avez jamais menti. Donc en cachant les
choses, rien ne marche. Nous ne faisons que contribuer davantage
à cette stagnation, cette puanteur qui est, vous savez, comme une
flaque d’eau qui croupit, ça pue.

Donc soyez courageux, prenez votre vie en main et renoncez à


tous les désirs qui vont interférer avec la vie des autres, et dites :
« Ce qui est à moi, Dieu me le donne. Si je prends, cela ne peut
pas être à moi. » Donc, mes jeunes amis, c’est le moment de
permettre à l’aspiration de fleurir, de mettre les désirs de côté, et
ainsi, de commencer à mener ce qui finalement pourra être une
vie sainte.

Je prie pour vous tous. Puisse-t-il en être ainsi !

Merci.

80
→ sommaire

CHARIJI

Devenir maître de vous-même

Lassy, France

19 juillet 2003

81
→ sommaire
→ sommaire

Devenir maître de vous-même

19 Juillet 2003

J’aimerais vous dire ce que j’ai ressenti lorsque j’étais un


nouvel abhyasi. Je ne savais pas ce qu’était un abhyasi. Saviez-
vous, lorsque vous êtes entré à l’école, ce qu’était un étudiant ?
Vous l’avez appris petit à petit. Parce que lorsque nous allons à
l’école, certains ont peur, d’autres sont heureux, d’autres encore
ont peur de quitter la maison, etc. Chacun a sa propre approche
de l’école. Mais après un certain temps nous comprenons ce
qu’est une école et quelle est notre position vis-à-vis de l’école
en tant qu’étudiant. C’est comme ça, vous savez, ici aussi c’est un
processus de socialisation. Nous devons d’abord apprendre ce que
nous devons apprendre. Je ne joue pas avec les mots. Je n’ai pas joué
avec les mots, mais vous avez compris… Je dois d’abord savoir ce que
je dois apprendre, avant de pouvoir l’apprendre. Même problème
avec les abhyasis. Son vie, sa vie? 

O.K. plaisanteries mises à part, à la première leçon de natation,


par exemple, nous avons cette peur d’avoir à passer d’un élément
à un autre : de la terre à l’eau. Il y a donc de la peur. Alors certains
entraîneurs conseillent : « Plongez » et ils ajoutent de manière
très encourageante : « Nagez ou bien coulez » (il rit). Ce n’est
pas très encourageant mais c’est vrai. D’autres entraîneurs
disent : « Allongez-vous par terre, à plat ventre, et bougez les
mains et les pieds comme si vous nagiez. » Même si vous le
faites de manière très efficace, vous n’apprendrez jamais à nager

83
→ sommaire V ers une humanité unifiée l ’E urope

parce que vous faites ça au mauvais endroit (il rit). N’est-ce


pas ? Donc, la chose correcte, au bon endroit, au bon moment.
Et ceci est une combinaison tout à fait vitale de temps, de lieu
et d’activité. Vous savez par exemple, vous allez sur une de ces
routes souterraines, et exactement au même moment un avion
passe juste au-dessus de vous. Même lieu, même temps, mais
dans la troisième dimension vous êtes séparés : pas d’accident.
Si les trois dimensions sont toutes dans le même temps : crash !
Donc, que faire, où le faire, quand le faire ? C’est la discipline.

Nous avons toujours peur du mot discipline, et nous sommes


très satisfaits avec le mot liberté. Je viens de l’Inde, pays qui pour
la plupart d’entre vous est un endroit très peu discipliné. Je veux
dire que si vous voyez un film avec les voitures qui circulent
et les rickshaws qui circulent et les piétons qui circulent,
apparemment c’est chaotique. Et c’est rien de le dire. Ici tout a
l’air discipliné, bien rangé l’un derrière l’autre. Mais les gens
sont irrités et exaspérés tout le temps. Alors, devrions-nous
avoir une discipline totale ? Devrions-nous avoir une liberté
totale ? Ou cela devrait-il être un savant mélange des deux ? Une
heureuse combinaison ?

Être libre quand vous devez être libre, d’une manière


disciplinée, en respectant le fait que les autres aussi doivent être
libres, dans le même espace et dans le même temps est, je pense,
la perspective ou la vision idéale de la vie. Nous sommes tous
ici dans un grand hall. Cependant, pour certaines raisons nous
sommes actuellement tous entassés dans un petit espace de
cinquante mètres carrés et je suis sûr que la plupart d’entre vous
trouvent cela très agréable. Sinon pourquoi serions-nous ainsi
entassés ? Dans d’autres circonstances cela serait extrêmement
déplaisant et peut-être même insupportable. Donc, qu’est-ce qui
fait la différence entre supportable et insupportable ? Quand la
peur devient-elle confiance ? A quel moment un jeune homme
qui s’est jeté dans une piscine aime-t-il y tomber de trente mètres
de haut, à quel moment appelle-t-il cela plonger, et ayant fait
deux tours et demi, se pavane-t-il ? Quand ? Capacité, maîtrise.

84
D evenir M aître de vous - même → sommaire

Donc la vie tout entière consiste à maîtriser votre peur. Parce


que vous êtes encore là, l’eau est encore là. Au début vous osiez à
peine tremper votre gros orteil dans l’eau et l’agiter. Maintenant
vous sautez de trente mètres, et vous adorez ça. Donc voyez-vous,
c’est la maîtrise de vous-même qui vous permet de maîtriser
l’espace, le temps et les éléments, rien d’autre, ni les rampes
autour de la piscine, ni les mesures de sécurité, ni les objets qui
flottent sur l’eau, auxquels vous pouvez vous accrocher si vous
avez peur de nager, mais votre confiance en vous qui vient de ce
que vous avez maîtrisé l’élément. C’est ce que nous essayons de
cultiver, de créer, dans chaque abhyasi qui vient ici.

En sanscrit, « abhyas » signifie « pratiquer ». Si vous pratiquez


la natation, vous êtes un abhyasi de natation. Si vous pratiquez
l’écriture, vous êtes un abhyasi de l’écriture. Ici, nous pratiquons
la méditation, et nous sommes donc, par définition, des abhyasis
de méditation. Rien d’ésotérique, rien de merveilleux. C’est une
définition de ce que nous faisons ici.

Et quand cessons-nous d’être des abhyasis ? Lorsque nous


sommes devenus maître de nous-même. Nous ne devenons pas
des Maîtres, mais chacun devient maître de lui-même. Ceci est
l’apogée du progrès spirituel, du processus spirituel. Cela peut
prendre du temps car cela dépend de ce que vous faites de vous-
même. Si vous venez faire l’idiot et que, vous savez, vous essayez
de jouer au ping-pong tout en regardant une fille qui nage dans
le bassin à côté, vous ne deviendrez pas un très bon joueur de
tennis de table, même si vous pouvez y prendre beaucoup de
plaisir. Vous devez donc vous concentrer sur ce que vous faites,
y mettre tout votre cœur et tout votre temps, votre attention, et
c’est cela qui raccourcit la durée du processus.

C’est pourquoi nous vous demandons d’être discipliné, ce qui


veut simplement dire : être attentif à ce que vous avez à faire, et le
faire du mieux que vous pouvez. Cela ne veut pas dire que nous
essayons de limiter votre liberté ou d’empiéter sur votre liberté
ou que nous détruisions ces grands principes de la République
Française, l’un d’eux étant la liberté. Vous avez la liberté de faire

85
→ sommaire V ers une humanité unifiée l ’E urope

de vous ce que bon vous semble. Mais lorsque vous venez ici, si
vous voulez vous impliquer dans un processus qui vous garantit
la maîtrise de vous-même, cela vous demande de la discipline
dans un seul domaine : « Soyez attentif, faites attention. »

Voilà en quoi consiste le Sahaj Marg. Nous commençons


timidement sans savoir ce que nous devons faire. Et si, avec cette
timidité, vous continuez à faire ce que vous avez à faire, la peur
disparaît, parce que petit à petit vous maîtrisez le processus. Ayant
maîtrisé le processus, le voyage est achevé rapidement, et lorsqu’il
est achevé, vous ressortez maître de vous-même. C’est tout.

Maintenant, si vous voulez tous un sitting, s’il vous plaît, asseyez-


vous confortablement, je vais vous donner à tous un sitting spécial.

Un abhyasi : « Quelque chose de spécial va être donné ? »

Le Maître : « Je ne sais pas. Cela dépend de ce qui se passe.


Chaque méditation est une histoire d’amour. Son point culminant
est-il toujours à la hauteur de la ferveur avec laquelle nous y
venons ? Cela dépend des participants. Moi et vous, non ? Et ici,
qui est le moi et qui est le vous ? Plus ces deux-là se rapprochent,
comme en amour, une affaire de cœur, comme ça, plus nous sommes
proches, pas seulement physiquement, mais avec le cœur aussi, non ?
(applaudissements) Commencez s’il vous plaît.  »

86
→ sommaire

XI

OTTO R .

Lassy, France

19 juillet 2003

87
→ sommaire
→ sommaire

Discours d’ OTTO R. 

19 juillet 2003Maître Vénéré,

Chers frères et sœurs,

Le maître est arrivé à Paris le 6 juillet. Le 7, nous sommes allés


rue du Cardinal Lemoine voir notre futur ashram. Sur place nous
avons eu une conversation à bâtons rompus sur divers sujets et
principalement sur la façon de s’ouvrir au public. Il s’agit là d’un
vaste sujet et le Maître y a répondu en nous donnant en exemple
une histoire scientifique. Il a évoqué un groupe qui cherchait un
lieu sûr pour y établir un centre et qui n’arrivait pas à le trouver.
C’est alors que le leader du groupe eut l’idée d’extraire ce centre
du temps pendant cinq secondes. Ainsi ils n’étaient plus visibles.
Ceci est une histoire de science-fiction. Alors le Maître a dit :
« Qu’est-ce que cela signifie pour nous ? Nous ne devrions pas
être visibles, mais nous devrions être vus. » Dans le sens où la
visibilité est quelque chose de public, quelque chose de profane,
qui abaisse les choses. Tandis qu’être vus, pour ceux qui nous
cherchent, est quelque chose de différent.

J’ai beaucoup aimé cet exemple, dans le sens où le Sahaj Marg


n’est pas concerné par les secrets, voyez-vous. Il n’y a aucun secret,
vraiment. Si nous sommes prêts à percevoir, tout est ouvert. Si je
ne suis pas prêt, que signifie pour moi ce qu’on peut me dire ?
Cela ne signifie rien ! Parce que je n’en ai pas l’expérience. Il n’y a
aucun secret, mais il y a des moments sacrés. Et ce caractère sacré

89
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

est ce que nous devons préserver. C’est notre beauté et cela ne


devrait pas être abaissé en étant profané, en étant exposé.

Maintenant cela nous amène au point suivant : le changement.


Nous le ressentons en nous et je dirais que c’est plus qu’une
simple éventualité - il s’est déjà manifesté dans de petites choses,
peut-être un peu fragiles, mais il est déjà là, non seulement à
l’intérieur, mais aussi à l’extérieur. Je me souviens de la semaine
dernière, nous étions au Champ de Mars, assis dans l’herbe
une heure durant, dans la soirée. J’ai eu une sorte de flash, qui
m’est apparu ainsi : il y a quelques années, nous étions dans une
situation semblable. Et pourtant c’était différent. Je le ressentais
différemment en moi-même : il n’y avait plus d’embarras. Il
devait donc y avoir eu un certain changement à l’intérieur, mais
aussi à l’extérieur. L’approche des gens qui passaient non loin de
nous était différente, nous qui n’étions pas visibles, mais qu’on
pouvait voir. Ils sont venus et se sont assis. Certains nous ont
questionnés ; d’autres se sont relevés et sont partis. C’était une
approche naturelle - un grand changement.

Maintenant, comment pouvons-nous le maintenir ? Comment


pouvons-nous le renforcer ? Je pense qu’il est nécessaire de
redéfinir un peu ce que nous appelons le changement lui-même.
Il me semble que si nous avons comme idée du changement,
que nous allons tous penser et parler de la même manière, alors
c’est une illusion, un conformisme. Cela pourrait produire un
effet à court terme parce que c’est visible, mais il n’y aurait plus
aucun caractère sacré. Le changement est donc quelque chose
de sous-jacent, tout comme après l’hiver vient le printemps.
Nous gardons encore notre caractère, notre originalité, nous
gardons notre multiplicité, mais nous correspondons à cette idée
de changement. Et c’est là notre beauté, parce que dans cette
multiplicité il y a de la force. Elle inclut tout. Personne n’est exclu.
C’est cela que nous devons maintenir en toutes circonstances,
à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur, nous devons sans arrêt
l’approfondir, pour aller de la multiplicité à l’unité. Ce n’est pas
visible, mais cela doit être vu par ceux qui recherchent cela, par
ceux qui cherchent vraiment la spiritualité.

90
Discours Otto R. → sommaire

Et je pense que c’est notre devoir, parce qu’alors, il y a une sorte


de renouveau dans l’approche, en ce sens que la meilleure façon
de soutenir ce changement serait de prendre un nouveau départ
en reprenant la méthode, notre méthode. Pas dans le sens où nous
pourrions dire : « Oui, oui, la méthode, nous la connaissons tous,
alors que pouvons-nous faire d’autre ?  » Dans cette question il
y a déjà un petit germe de malentendu, parce que nous n’avons
pas vraiment prouvé l’efficacité du système, nous ne l’avons pas
réellement expérimenté. Pour ce qui concerne la voie spirituelle,
la méthode du Sahaj Marg n’a besoin d’aucun soutien extérieur,
pas même avec la meilleure attitude, ni auprès de cette énorme
« soupe » de mouvements «new-age», vous dirais-je. Aucun gadget
psychologique. Le système lui-même - le nettoyage, la méditation,
la prière et sa clé de voûte : le souvenir constant - fait qu’il est vu,
amène cette remontée et à vrai dire c’est cela qui nous fait vraiment
rester dans la Mission. Ou bien y a-t-il quelqu’un qui a commencé
le Sahaj Marg pour bâtir une organisation mondiale ? Je serais
très méfiant. Je pense que nous avons tous commencé, que nous
sommes tous ici pour cette transformation intérieure. Mais alors,
pas seulement pour nous. Comme un arbre, qui doit d’abord
s’enraciner en profondeur, de plus en plus profondément dans le
système, pour être vraiment installé dans le Sahaj Marg. Et nous
avons vraiment une joie énorme et confiance en nos expériences.
C’est dans cette croissance que nous donnons les fruits, que les
graines sont données.

Cette idée conventionnelle du travail - « Je dois travailler » -


désormais n’existe plus. Nous partageons notre expérience.
C’est une nouvelle définition du travail. C’est doux, c’est joyeux.
Et dans cette attitude, la question de la croissance de la Mission,
n’existe même plus. C’est une conséquence naturelle et douce de
notre propre croissance. Alors nous pouvons la maintenir ; alors
nous sommes vus. Le caractère sacré est préservé et il n’y a aucun
blasphème. Je suis donc absolument convaincu que ce qui est
arrivé dans les trois dernières années, toutes ces discussions sur
ce sujet, n’étaient qu’une partie de la voie. Cela fait partie de ma
résistance intérieure ; cela fait partie de mes défauts intérieurs,
que je dois subir pour les surmonter et ensuite m’ouvrir de

91
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

nouveau. Alors, en ce sens, je pense qu’il y a une énorme


chance de croissance durable, aussi bien au niveau individuel
qu’au niveau collectif. Maintenant, pour terminer, je voudrais
prendre l’exemple que le Maître vous a donné il y a quelques
jours, lorsqu’il disait qu’il voulait des lions et non des moutons.
Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela signifie-t-il « Miaou », vous
voyez ? Ou bien suis-je en train de suivre le « Maîaîaîaître ? »
(Il bêle comme un mouton). Je ne pense pas qu’il en soit ainsi.
Le lion et le mouton sont tous deux en moi, et c’est encore moi
- avec Son aide bien sûr - qui décide quelle partie je vais activer.
Et de nouveau, la boucle est bouclée ; c’est le droit pour chacun à
l’expérience personnelle. De cette manière nous pouvons et nous
devons nous soutenir les uns les autres. Mais la voie est une voie
individuelle et chacun doit y aller par lui-même. Maintenant, en
faisant un parallèle avec cet exemple et en référence à ce beau
pays, je voudrais dire, comme le « grognard » (j’espère que ma
prononciation est juste). Ok, c’est un garde de Napoléon. Le
grognard pouvait mourir mais ne renonçait jamais : « La garde
meurt mais ne se rend pas ! »

Merci

92
→ sommaire

XII

Patrick F.

De zéro à… L’éternité.

Lassy, France

19 juillet 2003
→ sommaire
→ sommaire

De zéro à… L’éternité.

19 juillet 2003

Chaque fois que je me sentais spirituellement perdu dans le


Sahaj Marg, je prenais la décision de recommencer la pratique
à zéro, mon approche du Maître à zéro et cela m’a toujours été
bénéfique. Ces dernières années, j’ai compris que le Maître me
demandait de rester tout le temps à ce point zéro. Cela peut
sembler très difficile, surtout lorsque comme moi vous avez
un mental très actif, mais c’est en réalité la solution de tous les
problèmes, la source de toutes les inspirations et surtout c’est la
possibilité d’être en permanence avec le Maître, car en fait le point
zéro de toute chose est situé dans le cœur. Je l’ai connecté à cette
phrase de notre Maître qui dit être au pôle Nord, et que du pôle
Nord il peut se rendre dans toutes les directions. Il ajoute que du
pôle Nord, tout chemin va vers le But. Il suffit simplement de se
déplacer, d’être en mouvement. Si nous suivons son exemple, il
n’est plus possible de se sentir perdu car toutes les directions sont
bonnes. Je suis certain de notre succès si nous l’appliquons dans
nos vies. Nous devons pour cela avoir foi en Lui, en nous-même.

Par exemple, lorsqu’hier, Il m’a demandé de vous faire un


discours, la confusion, l’excitation, les craintes habituelles ont
surgi. J’ai essayé d’attraper quelques pensées afin de les organiser.
Mais cela m’était impossible. Alors je me suis rappelé une lettre
que le Maître m’avait récemment adressée dans laquelle Il me
disait, alors que je lui demandais à être guidé : « Travaille avec la

95
→ sommaire Vers une humanité unifiée - l’Europe

foi. Qu’est-ce que la foi ? Tu te soumets à LUI, puis tu vois ce qui


t’est donné à faire, ensuite tu le fais aussi bien que possible, en Lui
laissant le résultat. Ceci est la foi. »

Lors de la rencontre en Suisse avec les dirigeants de la Mission


en Europe, nous attendions des mots de sagesse de la part de
notre Maître, des instructions. Il nous a tout simplement proposé
de revenir à notre cœur et de travailler à partir de la foi, de croire
en nous-même, dans le Soi, et de faire ce qu’il est nécessaire de
faire, en étant relié à Lui et à Lui seul.

Aussi de plus en plus, ai-je la sensation que le Sahaj Marg est


le « zéro » mais un zéro du cœur. Lorsque nous sommes à zéro,
nous sommes avec Lui, et Il nous indique instant après instant le
pas suivant que nous devons faire pour avancer vers notre But.

Nous pouvons l’imiter en trouvant le Maître intérieur, notre


Soi. C’est la raison pour laquelle Il se retire de plus en plus
physiquement. Il s’efface afin que nous Le trouvions dans nos
cœurs. Il nous demande de garder une distance entre Lui et nous,
afin que sa présence physique ne soit pas un obstacle et que nous
soyons en contact permanent avec Son essence dans notre cœur.

Certains disent : puisqu’Il est dans mon cœur alors je n’ai pas
besoin d’être en sa présence physique. C’est une erreur. Cela ne
marche pas. Nous avons besoin d’être en sa présence, mais à la
bonne distance. Quelle est la bonne distance ? Je ne la connais
pas car elle change tout le temps. Seul notre cœur peut nous
l’indiquer instant par instant.

Le Maître dit souvent aux abhyasis qui n’arrivent pas à


le rencontrer personnellement : « Si vous avez besoin de
me rencontrer, il n’y aura pas de problèmes, il n’y aura pas
d’obstacles. » Mais il ne sert à rien de Le rencontrer avec notre
ego, avec notre personnalité car cela ne résout aucun de nos
problèmes, ne répond à aucune de nos questions. Le Maître est
disponible pour chacun d’entre nous, à chaque instant parce que
notre connexion est permanente, sa transmission est constante,

96
Discours Patrick F. → sommaire

son programme spirituel était prêt pour nous, probablement bien


avant notre naissance.

Tout est en place.

La seule chose que nous ayons à faire est d’intégrer notre


personnalité par le cœur. Nous méditons pour réaliser qu’Il
a toujours été avec nous, qu’Il nous a toujours guidés, mais
trop souvent, nous étions occupés ailleurs, même lorsque nous
pensions pratiquer le Sahaj Marg. C’est la raison pour laquelle je
propose de revenir au point zéro.

L’autre jour en Suisse, j’ai capté quelques phrases du Maître


lors d’un échange avec une personne. Il disait que notre cœur
devait intégrer tout ce que nous rencontrons et que c’était la
manière de devenir éternel. La tâche qu’il nous a confiée est de
créer une Mission en Europe mais aussi d’intégrer toute chose,
toute personne comme nous le suggère le drapeau représentant
le ‘‘Sahaj Marg Spirituality Foundation’’ ‘‘méditation pour
l’intégration‘‘. Le Maître donne souvent cette image du cœur
comme un trou noir qui absorbe tout sans créer aucune
impression.

Aussi que devons-nous faire ? Suivre nos cœurs, être juste avec
Lui et le suivre à jamais. Après tout, ce n’est pas si difficile, en plus
c’est une source infinie de joie et de bénédictions.

Je nous souhaite à tous d’être avec Lui pour l’éternité.

Merci.

97
→ sommaire

Vers une humanité unifiée


les USA

99
→ sommaire

XIII

Le Sahaj Marg : Le plus sûr moyen

d’atteindre le But

Dayton

29 Juillet 2003

101
→ sommaire

Le Sahaj Marg : le plus sûr moyen d’atteindre le but

29 Juillet 2003

Je commencerai par vous souhaiter la bienvenue à ce séminaire


auquel vous devriez participer non seulement physiquement ou
avec vos dollars, mais surtout avec un cœur ouvert.

J’ai été un peu préoccupé par la manière dont cette Mission


fonctionne aux Etats Unis. Il semble qu’elle se soit un peu
embourbée, enlisée et l’un de mes principaux soucis est qu’elle
ne serve pas comme elle le devrait la population locale d’origine
américaine. J’ai parlé de ce souci pendant des années et les gens
ont attribué cet état de fait à tant de facteurs, sociaux ou autres.
Mais je crois qu’il y a quelque chose de plus fondamental, de
plus basique que la nourriture indienne, que les habitudes
indiennes ou les méthodes indiennes de socialisation. Que nous
soyons noirs ou blancs ou bruns ou gris ou bleus, je ne pense pas
que nous soyons si facilement affectés par le simple goût de la
nourriture sur les papilles de notre langue.

Il y a quelque chose qui manque dans ce que nous offrons aux


gens d’ici, à la population américaine, dans l’intérêt de laquelle la
Mission existe. Bien sûr, elle existe pour servir les Indiens aussi,
mais il ne s’agit pas d’une Mission indienne. C’est une Mission
qui est née en Inde. Son guru n’est pas un guru indien, il se trouve
qu’il est né en Inde et donc il est Indien. Et le système n’est pas un
système indien bien qu’il tire ses origines des anciens systèmes

103
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

yoguiques. Ce sont des accidents de naissance, de nationalité et


de géographie. Vous savez, comme le Christ n’est pas uniquement
pour Jérusalem et que Mohammed – que son nom soit béni – n’est
pas seulement pour l’Arabie Saoudite ou Jeddah ou ailleurs. Ce
sont toutes des personnalités reconnues comme universelles, dont
les philosophies, les enseignements sont destinés à l’ensemble de
l’humanité, pour tous ceux qui sont prêts à les accepter, comme
c’est le cas du Bouddha aussi ; ainsi en est-il de mon Maître.

C’est pourquoi j’aimerais que la Mission perde son caractère


indien et s’en tienne à sa nature unique, sa méthode qui rend
disponible un système spirituel facile à pratiquer, un système
efficace et opérant qui, s’il est pratiqué avec diligence, dévotion
et don de soi, est une méthode infaillible pour arriver à notre but,
notre but spirituel.

Ainsi j’aimerais que tous vous réfléchissiez à toutes ces choses


– comment faire perdre son caractère indien à la mission, sans la
rendre pour autant américaine ou mexicaine ou n’importe quoi
d’autre, voyez-vous. Les Etats-Unis d’Amérique sont célèbres
pour leurs Taco Bells, leurs Pizza Huts, etc., voyez-vous, des
tendances séparatistes concernant la nourriture et la gastronomie.
Mais cela ne devrait pas s’appliquer à la spiritualité.

Je vous demanderai à tous après cette méditation, ou plutôt


pendant la méditation, de garder à l’esprit cette question :
comment rendre ce système efficace pour tous, acceptable par
tous, sans aucun préjugé, comme nous le disons, sur la couleur,
la caste, la race, la croyance, le sexe, etc. Cela ne devrait pas
rester lettre morte comme dans une organisation politique, mais
une vraie méthode, infaillible, pour l’intégration des hommes.
S’il vous plait, pensez-y et sentez-vous libres de m’écrire,
confidentiellement, dans des enveloppes fermées, pour me dire
ce que vous pensez que la Mission devrait faire, comment elle
devrait s’y prendre pour ce travail, quels changements vous
proposeriez dans la hiérarchie administrative. Soyez absolument
libres, justes et francs. Cela me ferait plaisir et je vous assure que
cela restera confidentiel, juste avec moi.

104
Le Sahaj Marg le plus sûr moyen d’atteindre le but → sommaire

Pour l’instant, c’est tout ce que j’ai à dire. J’espère que vous
répondrez avec autant de franchise et d’intérêt pour la Mission
que j’en exprime moi-même.

Merci.

105
→ sommaire

XIV

La chaleur de l’amour
UNIT l’humanité

Chicago

1 août 2003
→ sommaire

La chaleur de l’amour unit l’humanité

1 août 2003

Je ne sais pas combien vous êtes ici. Je vous vois nombreux,


mais comme d’habitude j’aurais souhaité vous voir plus nombreux
encore. Vous savez, nous demandons toujours plus. Et une fois,
Babuji a dit que c’est une tendance humaine naturelle, alors que
quelqu’un lui demandait : « Pourquoi voulez-vous davantage
d’abhyasis ? » Il répondit : « Je viens de l’Infini et par conséquent
je veux l’infini. » Et, ainsi que nous en discutions à Détroit et de
nouveau à Dayton, il est temps que la Mission déploie ses ailes
aux Etats-Unis pour servir un nombre de plus en plus important
d’habitants de ce pays. Non pas pour faire la différence entre
Indiens et Américains et des choses comme cela, mais pour
qu’ils soient de plus en plus nombreux. Et bien entendu, lorsque
nous sommes en Amérique, vous savez, la majeure partie de la
population est américaine et nous devrions être capables de les
servir de mieux en mieux.

Nous sommes toujours ainsi, nous autres Indiens, nous aimons


que tout le monde change. Bien sûr, Babuji veut que tout le monde
change mais les Indiens semblent vouloir que les Européens et les
Américains deviennent plus indiens dans leur apparence, ce qui
n’est pas ce que Babuji voulait dire. Babuji pensait au changement
intérieur, au changement du caractère mais pas au changement
de couleur de peau ou de taille et, vous savez, pas non plus à cette
façon de parler l’anglais qui est typiquement américaine. Et nous,

109
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

les Indiens, devrions par conséquent développer la capacité à


nous changer nous-mêmes, également. Il ne s’agit pas de perdre
nos spécificités indiennes, pas plus que notre culture mais
d’accepter le fait que ce monde est plein de cultures, de traditions
et de langues, toutes magnifiques, toutes très humaines. Comme
on dit en Inde, le sang qui coule dans nos veines est partout le
même. Nos amours, nos haines sont partout les mêmes.

Ainsi devrait-on mettre l’accent sur cette similitude qui fait


l’humanité. Les cultures que nous apportons à ce monde, qui
viennent de nos différentes nationalités, régions, géographies,
valent la peine d’être préservées. Nos aspirations sont
universelles, non pas revendiquées mais préservées, car nos
besoins restent fondamentalement les mêmes. . Et il serait bon
de nous dépouiller de cet ego et de cette arrogance à propos de
ce que nous appelons notre propre culture. La notion de culture
personnelle n’existe pas. Vous pouvez avoir un bouquet de roses,
mais vous pouvez également avoir un bouquet de fleurs toutes
différentes, et cela paraît encore plus beau. La beauté vient de la
variété. Il y a la beauté individuelle, il y a la beauté dans la variété,
des beautés mélangées. La Nature entière est magnifique, les
déserts sont magnifiques.

Vous savez, il y a des endroits au Rajasthan vers lesquels des


étrangers affluent en hiver, pour vivre dans des tentes dans le
désert afin de voir le ciel de nuit. C’est quelque chose de spécial.
Vous pouvez, pour ainsi dire, détacher les étoiles des cieux. Vous
pouvez tendre le bras et l’étoile est là. Vous ne verrez jamais de
tels cieux, nulle part ailleurs. Les dunes de sable – elles ont leur
beauté propre. Lorsque le vent souffle et emporte le sable comme
des volutes de fumée, c’est une beauté particulière. Les déserts
sont beaux, les terres agricoles sont belles, les montagnes sont
belles, les forêts sont belles, les lacs sont beaux. Vous ne pouvez
pas dire : « J’aime seulement les lacs et les vastes paysages du
Midwest. » Pourquoi pas les montagnes ? Lorsque je vais en Inde,
je vais dans les Himalayas, et elles sont belles. Je pense qu’elles
sont au-delà de toute description, mais ma plage à Madras l’est
aussi. Je veux dire que rien ne peut soutenir la comparaison avec

110
La chaleur de l’amour unit l’humanité → sommaire

ma plage. C’est la mienne, c’est pourquoi elle est belle. De la


même façon que mon enfant est beau, mes abhyasis sont beaux,
mon peuple est beau, mon monde est beau.

Donc, je veux que vous soyez des gens qui développent l’idée
selon laquelle tout ce qui est à moi m’a été donné par Dieu. Et
quand je dis « à moi », c’est à chacun d’entre nous, ce n’est pas
exclusivement à moi. C’est à moi parce que c’est à nous.

Donc cette tendance à être un individu dans une communauté


où nous partageons des valeurs, où nous chérissons les mêmes
valeurs, où nous avons les mêmes aspirations, le même but, est ce
qui devrait nous souder en une communauté fortement unifiée
qui peut croître. Vous savez, après tout quand vous voulez créer
une ondulation à la surface d’un étang, un tout petit caillou suffit.
Vous n’avez pas besoin de jeter un rocher. Un tout petit caillou – et
ce caillou tombe et les anneaux de splendeur se déploient vers
l’extérieur. Ceci est naturel. Ce n’est pas le caillou qui le fait. Il
crée le mouvement initial, ainsi que le disait Babuji – le kshobh…
Et cela amène, en fin de compte, la propagation. Chacun d’entre
nous devrait être capable de faire tomber un caillou dans cet
océan de l’humanité, afin de créer quoi ? Ces toutes petites vagues
en cercles, qui vont se répandre à l’infini. Nul besoin de fournir de
grands efforts, ni de courir des marathons. On ne nous demande
pas de nourrir la multitude avec deux pains et cinq poissons.
Chacun d’entre nous avec sa propre humilité, avec sa propre et
humble approche, une approche aimante, doit introduire une
petite part de lui-même dans cet océan d’humanité et créer cette
vague qui continuera et continuera toujours, car l’océan est sans
limite. C’est à cela que j’aimerais que vous participiez tous, que
vous travailliez avec votre cœur.

N’ayez pas peur de donner ! Celui qui donne reçoit. Vous


savez, Jésus dit : « Celui qui veut préserver sa vie la perdra…
Et celui qui la perdra, la gagnera. » Nous devons perdre. Que
devons-nous perdre ? En premier lieu, nos egos – l’idée d’être
seul, d’être unique. Parce que lorsque nous serons dans le
monde plus lumineux, il n’y aura aucune séparation ; il y aura

111
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

toujours l’identité du Maître, le grand Maître, vous-même.


Espérons que nous nous rencontrerons tous là-bas un jour béni.
Nous serons toujours des individus conservant nos identités,
mais nous ne serons pas séparés les uns des autres. Vous voyez,
l’individualité ne signifie pas la séparation. Etre un Indien ne
doit pas signifier être isolé de l’environnement américain, qui
est un bel environnement. De la même façon que nous avons
nos déficiences, nos manques, nos coutumes qui sont anciennes,
nos superstitions, nos croyances que nous devrions rejeter, ils ont
les leurs aussi, et il en est ainsi pour chaque race dans le monde,
chaque communauté dans ce monde.

Ce qui doit nous rapprocher c’est notre ressemblance, notre


unité, ce que nous avons en commun… Et tout ce qui nous
différencie, nous sépare doit être éliminé. Dieu nous a créés de
diverses couleurs, de diverses formes, de diverses tailles… Cela,
nous ne pouvons le changer. Mais, Dieu n’a pas créé les Hindous,
les Musulmans, les Chrétiens et les Bouddhistes. Dieu n’a créé ni
culture, ni langue, cela vient de nous.

Si vous avez lu le passage concernant la Tour de Babel dans


la Bible, vous savez ce qui s’est passé – le chaos, la destruction ;
chaque race, chaque communauté revendiquant sa propre langue,
son unicité. En Inde, vous trouvez différents états : Tamil, Telugu,
Kannada tous les trois au sud et Malayalam. Dans l’Andhra
Pradesh, on trouve des subdivisions : des Khammas, des Reddys,
des Naidus, des Brahmines, n’est-ce pas ? Et à l’intérieur même de
la région Khamma, il y a encore des distinctions. Donc si vous voulez
faire des différences, cela signifie que vous découpez des morceaux
de plus en plus petits et proclamez que vous êtes unique.

Le Sahaj Marg essaie de dissoudre ces barrières, non de les


briser, mais de les dissoudre. Les dissoudre avec quoi ? Avec la
chaleur de l’amour. Vous savez, la chaleur dissout toujours. Si
vous voulez faire fondre de la glace, vous ne la congelez pas,
vous la chauffez, vous la tenez dans vos mains. Chaque enfant
sait que lorsque vous tenez un cornet de glace, elle commence à
dégouliner.Votre chaleur humaine la fait fondre. Et c’est pourquoi

112
La chaleur de l’amour unit l’humanité → sommaire

ils la lèchent frénétiquement avant qu’elle ne fonde. Pourquoi ne


pourrions-nous pas donner cette chaleur et faire fondre toutes
ces barrières qui sont nos créations ?

Donc, le thème de ma visite aux Etats-Unis cette année et


en Europe où j’ai commencé à diffuser ce message, est celui
de l’unification. J’ai dit aux Européens que l’argent, les intérêts
commerciaux et les valeurs économiques les ont rapprochés
– un seul euro. Mais les Européens sont toujours aussi isolés : les
Français sont toujours français, les Allemands toujours allemands.
Et ils ont conservé leurs frontières même si elles ne semblent plus
exister du tout, parce qu’il n’y a plus de frontières apparentes
quand vous voyagez sur les routes, elles ont été dissoutes. Mais
dans vos têtes, elles sont toujours là – les limites, les frontières. Et
quand vous allez en France, bien sûr, il y a toujours la Gascogne et
les habitants du sud de la France et ceux de l’est et ceux de l’ouest.
Lorsque vous allez en Suisse, qui est quelque chose de minuscule,
qui tient dans un mouchoir, là vous avez des Suisses qui parlent
italien, des Suisses germanophones et des Suisses francophones.

Ainsi vous voyez, la division peut être poursuivie à l’infini.


L’intégration d’un seul coup. Les êtres humains sont des êtres
humains. Du jour au lendemain, nous pouvons devenir des citoyens
du Monde sans aucune barrière de nationalité, de géographie ou
de politique. Le langage est magnifique, les variations linguistiques
sont extraordinaires, pourvu que nous ne les utilisions pas
pour nous séparer. Les différences dans la musique, qu’elle soit
classique ou autre, les multiples courants partis du Japon, vers la
Chine, l’Inde, le monde musulman, le monde européen, et jusqu’à
votre propre blues ou quelle que soit la façon dont vous l’appelez,
le jazz – tous sont magnifiques. S’ils sont exprimés dans leur beauté
individuelle pour former une gerbe, comme un bouquet de fleurs,
c’est formidable. Mais si vous voulez les utiliser comme mécanisme
de ségrégation pour être isolé, c’est une erreur. Cela ne sera pas
toléré par la Nature.

La destruction se produit quand nous sommes ‘‘anti-Dieu‘‘. Ce


que Dieu a fait un, nous voulons le séparer. Dieu a fait un monde

113
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

et nous avons, peut-être, cent quarante-huit nations. Dans chaque


nation, nous avons des états, des districts, et quoi d’autre ? Pour
gouverner c’est peut-être nécessaire, de la même façon que je
porte des chaussures à mes pieds et des gants à mes mains. Il est
significatif qu’en allemand, les gants soient appelés ‘‘handschuh‘‘,
ce qui signifie chaussures pour les mains. Qu’est-ce que des
chaussures et des gants ? J’entends par là que vous avez cinq
doigts et cinq orteils. C’est la forme qui varie.

Donc, oublions toutes ces séparations. Oublions nos chutneys


sambhar, avakkai et gongura. Mangeons de la nourriture : saine,
préparée avec amour, qui peut être partagée par tous. Si elle
renferme quelque chose qui ne la rendrait pas acceptable pour
quelqu’un d’autre, comme les piments dans la nourriture andhra,
ou comme des guds [jaggery] dans la nourriture gujarati (gud ne
signifie pas G-O-O-D, mais vous savez, l’autre variété de sucre),
renonçons-y (NDTLR : “ good ” signifiant “ bon ” en anglais)…

Ce qui nous sépare, nous devons nous en débarrasser parce


que ce n’est pas bon pour l’humanité. Cela peut être bon pour
moi, mais pour nous ce n’est pas bon. Donc adoptons ce qui
est bon pour nous, ce qui nous fera grandir de plus en plus. Et
faisons du Sahaj Marg un rassemblement de plus en plus grand
de peuples, de nations, le monde entier lui-même. Et cette façon
de voir les choses, je vous le dis, a été bénie depuis des temps
immémoriaux, est bénie et sera toujours bénie.

Merci.

114
→ sommaire

XV

PRATIQUEZ au lieu DE PRÊCHER

San José à Hayward, Californie

7 août 2003

115
→ sommaire

Pratiquez au lieu de prêcher

7 août 2003

Pour vous tous, discipline signifie arriver avant l’heure, pour


moi, cela signifie vous attendre. Je veux dire que c’est un des
principes d’invertendo du Sahaj Marg. Comme une mère qui
attend que ses enfants viennent manger, je dois attendre que
vous veniez tous et receviez ce que vous devez recevoir.

Je me souviens de la série du Mahabharata, quand ils étaient


tous dans la jungle, les cinq frères et leur mère, Kunti, ce jeune
gars, Bhima, est toujours affamé. Et il est le premier à venir et
à pester contre sa mère en disant : « Maman, maman, je veux
mon déjeuner. » Et elle dit : « Bhima, tu as toujours faim. Et si je
commence à te servir, tu mangeras toute la nourriture que j’ai
préparée pour vous tous. »

Babuji avait l’habitude de dire : « J’attends que vienne un


abhyasi qui soit tel qu’il prenne tout de moi. » De même puis-je
dire que j’attends aussi que vienne un abhyasi qui, pour utiliser
les mots de Babuji Maharaj ‘‘me pille‘‘. L’oiseau du matin n’attrape
pas le ver, il emporte le grenier !

Je pense que le sérieux de l’intention, le désir, l’aspiration


spirituels se manifestent dans le fait de ne pas manquer le
train. Babuji se lamentait toujours sur le fait que les gens font la
queue pour un billet de cinéma pendant une demi-heure avant
le spectacle, juste pour voir sur l’écran quelques stupidités qui

117
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

ne sont qu’illusion. La civilisation d’aujourd’hui se prête à de


tels buts illusoires. Les nécessités de sécurité actuelles dans les
avions, les vols aériens – vous devez être sur place deux heures
avant le vol. Vous devez enlever vos chaussures, vous les enlevez ;
vous passez derrière un écran et vous vous déshabillez – si on
vous demande de le faire, vous le faites. Je veux dire qu’autrement
vous n’entrez pas dans l’avion.

Mais en spiritualité nous sommes traités, comment dirons-


nous, avec des gants doux comme la peau d’un enfant. Nous
sommes cajolés, traités comme des rois. Du temps de mon Maître,
lorsque j’étais nouveau dans cette Mission, nous dormions sur
de froids sols de pierre en hiver, par une température juste au-
dessus de zéro, ou par zéro degré, avec du foin épandu sur le sol
pour isoler et cela coûtait beaucoup d’argent – même cela mon
Maître ne pouvait pas se le permettre.

Aujourd’hui, on nous offre le confort de sols en bois, chauffés,


moquettés, dans des chambres avec air conditionné, tout ceci
encourageant en nous, si ce n’est un désintérêt pour la spiritualité,
tout au moins, dirons-nous, dégradant l’intérêt pour la vie
spirituelle. Parce que les tentations de la vie matérielle, son luxe,
son prestige, sont tellement importants. Je ne pense pas qu’il y en
ait parmi vous qui se baignent dans l’eau froide ici aux USA. Je
n’entends pas même une protestation ! C’est bon de se baigner
dans l’eau froide, au moins en été, parce que cela vous garde en
contact avec – vous voyez, c’est bien de parler de Babuji qui disait
d’être en accord avec la nature, « soyez simple et en accord avec la
nature. » Et nous pensons que porter des tee-shirts à cent dollars
c’est être simple parce qu’il y a des tee-shirts à quatre cents dollars
que nous n’avons pas achetés. Porter une paire de chaussures à
deux cent cinquante dollars est bon marché parce que simple,
parce qu’il y a des chaussures en peau de crocodile pour deux
mille cinq cents dollars. « Mais Chari, les miennes ne coûtent que
soixante-dix dollars ! »

Vous voyez donc que nous nous comparons toujours avec ce


que nous aurions pu faire, plutôt qu’avec ce que nous aurions

118
Pratiquer au lieu de prêcher → sommaire

dû faire, en nous dupant nous-même, en nous induisant nous-


même en erreur, en nous donnant le sentiment que nous vivons
des vies simples, humbles. Nous courons dans tous les sens ou
nous conduisons dans tous les sens comme des fous de voitures à
soixante mille dollars, en restant simple parce que vous savez que
dans l’allée d’à côté il y a une Ferrari rouge qui coûte un quart
de million. Et vous dites d’une voix plaintive et avec un regard
d’envie : « J’aimerais en avoir les moyens. » Voilà que la simplicité
roule à 300 à l’heure !

Donc vous voyez, lorsque nous prêchons, nous devons


pratiquer. Je me souviens d’un jeune homme qui est venu me
rendre un service il y a deux jours, et qui m’a donné quelques
conseils pour prendre soin de moi-même. Il me disait : « Bien, je
pense que je prêche plus que je ne pratique moi-même. » Ainsi,
le premier principe du Sahaj Marg devrait être de pratiquer et de
cesser de prêcher.

Un problème dû à la croissance de notre Mission, pour autant


que je le voie ici, a été que nos précepteurs prêchent plus qu’ils ne
pratiquent eux-mêmes. Et ils prêchent à voix haute, en vociférant
et de façon répétée parce qu’ils ont mauvaise conscience ; leur
voix intérieure dit : « Hé, toi, tu ne fais pas cela ! » Alors nous
prêchons d’autant plus fort que c’est par défaut, comme nous le
disons en informatique, si ce n’est pas moi, c’est mon frère qui
le fera. Nous pouvons donc toujours aller dans le monde plus
lumineux et dire : « Babuji, je n’en ai pas été capable moi-même,
mais ces dix-sept gars que j’ai amenés avec moi, l’ont fait eux.
N’est-ce pas mieux d’avoir fait en sorte que dix-sept personnes
le fassent plutôt que de l’avoir fait moi-même et que personne
d’autre ne l’ait fait ? » Il semble que ce soit le genre d’argument
avec lequel nous nous dupons nous-même, avec lequel nous
faisons taire la voix de notre conscience déjà silencieuse et avec
lequel nous nous trompons nous-même en pensant que nous
sommes des gens bien.

Donc, s’il vous plaît, continuons le travail de pratique du


Sahaj Marg en nous souvenant que c’est ce que vous faites, ce que

119
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

vous dites, ce que vous pratiquez, qui fait de vous un exemple


pour le Sahaj Marg – bien plus que de pérorer sur une matière
tirée des enseignements et des livres sur ce que vous allez faire et
dont vous n’aurez digéré qu’un dixième. Peu d’entre vous savent
réellement ce qu’est le Sahaj Marg, de quoi il traite, ce qu’est
le monde plus lumineux. Pour nous, le monde plus lumineux
semble suggérer une sorte de monde fantastique quelque part
dans la meilleure partie de la Californie, vous savez, avec le
pittoresque, des centres commerciaux du dernier cri, avec tout
tellement bon marché que nous pouvons tout nous permettre,
la meilleure nourriture, pas de bruit, le calme. Nous avons créé
une sorte de monde plus lumineux selon nos propres désirs,
comme le paradis de la religion nous offre la tentation, chacune
ayant sa propre forme de paradis. Le paradis hindou est, et ça se
comprend, un endroit où vous pouvez être paresseux, traîner à
ne rien faire et occasionnellement jeter un regard à quelqu’un
assis sur une chaise en hauteur et qui est supposé être votre guru
ou votre dieu – et voilà. Une autre religion parle de rivières de
vin, de houris, etc.

Nous ne devrions donc pas abaisser le Sahaj Marg et en faire


une sorte d’institution où nous sommes guidés par la tentation et
la peur. Peur de ce monde et tentation du monde plus lumineux,
avec un paradis structuré en fonction de nos attentes imaginaires
personnelles, pour que nos désirs soient réalisés là s’ils ne le
sont pas ici. C’est un grand danger, et c’est ce qui empêche la
croissance de la Mission, c’est ce qui empêche les gens de venir
dans la Mission parce que lorsque vous dites : « Hé ! Le monde
plus lumineux, vous savez, vous ne faites rien ! » Il répond : « Bien,
si je n’ai rien à faire, eh bien ! J’ai cela dans ma propre religion.
Ma religion m’offre déjà la même sorte de paradis. Qu’y a t-il de
si merveilleux dans votre monde plus lumineux ? »

Nombre d’entre nous sommes maintenus en arrière par la


peur, comme je le fus à un moment, et cette peur n’est plus une
peur mais une certitude, celle que, quand je me trouverai dans
le monde plus lumineux, si j’y vais un jour, mon Maître aura une
nouvelle mission pour moi. C’est comme James Bond, vous savez,

120
Pratiquer au lieu de prêcher → sommaire

il revient, la vie sauve, avec Q qui fronce les sourcils parce que
toutes ses inventions ont été détruites, et il y a Mr. M qui attend
avec des billets pour Venise ou Saint-Pétersbourg ou n’importe
où, et qui dit : « James, vous avez trois semaines de vacances que
vous pourrez prendre à la fin de cette mission. » Il en va ainsi
dans le monde plus lumineux. Je vous assure que le monde plus
lumineux ne sera pas ce que vous croyez qu’il sera – de toute façon.
Et le meilleur moyen de le savoir est d’abord d’y être. Et le seul
moyen d’y être est de faire ce que vous avez à faire exactement
ici et maintenant, fidèlement, avec persévérance, pratiquer le
Sahaj Marg jour après jour comme il doit être pratiqué. Cessez
de prêcher, continuez le travail. Et cela me rappelle qu’il est
maintenant dix heures et que nous devons méditer.

S’il vous plaît, commencez la méditation.

121
→ sommaire

XVI

Nous créons le potentiel

en nous-même

San Jose à Hayward, Californie

8 août 2003 

123
→ sommaire

Nous créons le potentiel en nous même

8 août 2003

A propos de ce que j’ai dit ce matin, nous parlons toujours de


discipline sans comprendre que l’élément de base de la discipline
dans le Sahaj Marg est que cela doit venir de l’intérieur. Le
Sahaj Marg est un système unique dans le sens où il n’y a pas
ici de service chargé de faire respecter la loi. Comme on vous l’a
dit de façon répétée lorsque nous parlons des dix Maximes du
Sahaj Marg, il n’y a pas de « Fais ceci » et « Ne fais pas cela ». La
plupart des prescriptions religieuses sont bien connues pour leur
« Ne faites pas cela », « Tu ne feras pas » – toutes ces propositions
négatives ! Ici il n’y a que des propositions positives. « Levez-vous
à l’aube », « Faites votre méditation » etc., etc., etc. – rien que des
propositions positives. Et c’est à chacun de commencer par le
niveau de discipline qu’il peut amener dans ce système. De façon
naturelle, vous savez.

Babuji a fait une déclaration très profonde qui m’a touché


pendant longtemps. C’est au sujet d’une prière faite à Lalaji
qui disait : « Puissé-je commencer tel que je suis et terminer tel
que vous êtes ! » J’ai donc pensé, vous savez : « Qu’y a-t-il de si
merveilleux dans cette prière ? » Parce que nous devons toujours
commencer là où nous sommes. Je ne peux partir de là où vous
êtes et terminer là où vous êtes. C’est de manière évidente un peu
maladroit. Mais la profondeur entre dans cette humilité : « Où que
je sois, Seigneur, acceptez-moi comme je suis ici et maintenant. »
Ceci est mon niveau de – je ne dirais pas ‘‘évolution‘‘ , parce que

125
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

la plupart d’entre nous ne sont pas du tout évolués. ‘‘Evolution‘‘ a


un sens différent de ‘‘croissance‘‘ . Devenir de plus en plus riche
n’est pas de l’évolution ; devenir de plus en plus intelligent n’est
pas de l’évolution ; prendre de plus en plus de poids n’est pas de
l’évolution. Devenir de plus en plus beau n’est pas de l’évolution.
Cela, c’est de la croissance horizontale, comme ils disent dans le
monde corporatif, voyez-vous.

Donc cette attitude humble qui dit que « Je suis ce que je suis,
mais puis-je devenir ce que vous êtes ? », adressée au grand Maître,
vous voyez… il n’y a pas à stigmatiser ce que vous êtes lorsque
vous entrez dans cette Mission, pas du tout, parce que c’est ce que
nous devons être, c’est ce que nous pouvons être. Mais ce n’est plus
ce que nous devons être après quelques temps. Autrement ce serait
comme un de ces trains indiens, partant de Madras Centre et qui,
après six heures, s’y trouve encore.Vous savez, l’Inde est renommée
pour ses trains. J’ai été très fier de voir une émission de la BBC sur
le système ferroviaire indien. Merveilleux. Mais c’est cela l’Inde.

Pourtant, curieusement, dans l’arène spirituelle, il semble qu’il


y ait quelque chose, nous dirons dans le génie spirituel indien,
qui fait que ces derniers recherchent la spiritualité. Ne pas être
seulement poussé dedans par un ami, poussé ou fourré dedans
par le désespoir, la maladie, mais vraiment la rechercher alors
qu’on est bien. La déclaration fameuse de Kabir qui disait : « Celui
qui est dans le besoin, prie ». Lorsqu’ils sont malades, ils prient.
Chaque Indien sait cela… Personne ne le fait lorsqu’il est heureux,
en bonne santé et sage. S’ils le faisaient lorsqu’ils sont en bonne
santé, heureux et sages, pourquoi y aurait-il de la misère dans ce
monde ? C’est ce que demande Kabir, vous voyez. Question très
profonde. Quelque chose qui devrait nous pousser à dire que c’est
lorsque je suis en bonne santé qu’il est temps de rester en bonne
santé, de me maintenir en bonne santé. Pas d’essayer de recouvrer
la santé quand je suis malade. C’est tout le propos de la médecine
préventive. Nous n’allons pas chez le médecin seulement lorsque
nous sommes malades, mais nous prenons soin de notre santé.
Je connais quelques abhyasis qui sont si consciencieux pour le fil
dentaire qu’ils ont des fils et des aiguilles et je ne sais quoi d’autre,

126
Nous créons le potentiel en nous même → sommaire

des trucs automatiques, des choses qui marchent avec des piles, vingt-
cinq minutes après le dîner, chaque soir, pour les soins dentaires.

Mais vous répétez le même soin pour votre âme le matin,


pendant une demi-heure et personne ne semble s’y intéresser.
Mais, s’il vous plaît, soyez assuré que si vous êtes capable de le
faire alors que vous êtes en bonne santé, heureux et sage, vous vous
maintiendrez en bonne santé, heureux et sage ; puis vous serez en
meilleure santé, plus heureux et plus sage. Et finalement vous
finirez par devenir un saint qui ne sera peut-être pas en bonne
santé, qui ne sera peut-être pas heureux et qui peut-être ne sera
pas même sage – mais qui sera un saint.

Donc le moment de le faire est comme tout autre chose – comme


le jogging, nous faisons du jogging à l’âge de seize ans. J’ai vu une
fille en venant, elle faisait du jogging à quatre heures de l’après-
midi et à un carrefour, il y avait un feu rouge, mais elle a continué
à bouger tout le temps. Comme certaines de ces races de chevaux
de course qui caracolent avant le départ d’une course. Quelques
secondes d’arrêt du mouvement auraient gêné le jogging.

Donc, souvenez-vous, s’il vous plaît, que nous sommes acceptés


tels que nous sommes, c’est la grandeur du système – il n’est pas
demandé à ceux qui arrivent de remplir des conditions. Nous
n’avons rien de tel. Tous sont les bienvenus. Mais nous espérons
vraiment que lorsque nous arriverons à la porte de sortie de la vie,
nous serons tous capables de rejoindre cette région de splendeur
que Babuji Maharaj appelait le monde plus lumineux dont j’ai
parlé ce matin. Malheureusement, de même que je ne peux vous
montrer l’Amérique sans que vous la visitiez, je ne peux vous
montrer le monde plus lumineux sans que vous y soyez vous-
même. On peut toujours parler de vidéos, etc. Aucune vidéo sur
quoi que ce soit ne peut vous montrer la réalité telle que vous la
verrez lorsque vous y serez vous-même.

J’ai souvent fait référence à ce grand, comment l’appellerais-


je, poster très séduisant dans les agences de voyage : « Visitez
Tahiti. » Il y a un unique palmier, il y a l’océan bleu, et il y a une très

127
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

belle fille avec une de ces guirlandes de fleurs, langoureusement


appuyée contre le palmier, et chaque visiteur de cette agence pense
qu’il y en aura une qui l’attendra quand il ira à Tahiti.

La réalité n’est pas ainsi. En réalité – vous créez ce qui va vous


attendre là. Et si votre entreprise spirituelle, votre effort spirituel,
si les efforts que vous avez faits ici sont satisfaisants, vous êtes sûr
que celui qui vous attendra là sera le Maître lui-même. Personne
d’autre. Et si, comme nous le prétendons tous, nous aimons le
grand Maître, cela fera plus que compenser pour nous, tout autre
chose que nous voulons dans ce monde.

Nous parlons toujours de sentir la présence du Maître, d’avoir


vu le Maître dans une vision, d’avoir senti le hookah de Babuji.
Alors pourquoi devrions-nous penser rencontrer quelque chose
d’autre ou quelqu’un d’autre que lui, là, dans le monde plus
lumineux ? Tous ces efforts que nous faisons, quoi que nous soyons
appelés à faire ici, n’ont pas d’autre objectif que de le rencontrer à
la porte de sortie et qu’il dise : « Bienvenue, mon fils ! »

Voilà donc ce que je voulais clarifier, vous voyez, avant que nous
commencions la méditation. Et j’espère vraiment – je ne prie pas
pour des progrès spirituels. La prière est nécessaire pour d’autres
choses que le progrès spirituel. Le progrès spirituel dépend de moi,
précisément maintenant, ici, pour moi-même. Et de la même façon
il dépend de chacun d’entre vous pour vous-même. Ici, le système
fonctionne, le Maître aide. Vous savez, ce n’est pas comme un
ascenseur où il suffit de se tenir debout sans bouger pendant qu’il
vous amène en haut. Ce n’est pas non plus comme cette fameuse
merveille technologique que je pourrais souhaiter posséder et
où le Capitaine Kirk dit : « Téléporte-moi ! ». Je souhaiterais que
Babuji nous ‘‘téléporte‘‘ tous en une fois. Mais ça ne marche pas
comme ça. Ici, nous créons le potentiel en nous-même et nous le
transformons en force cinétique, vous pouvez l’appeler comme
vous voulez, qui vous propulsera là ; et là il attend, et dit : « C’est
bien, tu es de retour ! »
Merci beaucoup

128
→ sommaire

XVII

JE FAIS seulement MON TRAVAIL

San Jose

10 août 2003

129
→ sommaire

Je fais seulement mon travail

10 août 2003

Il y a de nombreuses années, à Molena, frère Williams Waycott


a fait un discours puis il a dit : « Je demande au Président » - et il a
ajouté sur un ton familier : « Cet homme qui va faire du shopping
en costume et qui vient en jeans à l’Assemblée générale, je lui
demande de nous donner son ‘‘address‘‘ (le mot ‘‘address‘‘
signifie à la fois ‘‘discours‘‘ et ‘‘adresse postale‘‘NDT). » Je me suis
donc levé et au micro j’ai dit : « Parthasarathi Rajagopalachari.
Gayathri. 19 north street, Shri Ram Nagar, Madras 18. » Je me
demande s’il s’en souvient encore. Et voilà qu’aujourd’hui, Diana
me demande : « Quelques mots », j’ai donc dit ‘‘quelques mots‘‘.
Et maintenant, qu’est-ce que vous voulez entendre ?

En général, les gens ont peur lorsque je parle, parce que


j’ai rarement des choses agréables à dire, que ce soit à propos
de moi, bien sûr, ou de vous tous. Mais je dois dire que je suis
heureux de vous voir tous.

Je ne comptais vraiment pas revenir aux Etats-Unis, parce


que j’étais bien déprimé par la situation en général, ici. Je ne
veux pas parler de l’économie, de la politique ou du pays, vous
savez, mais des abhyasis de la Mission. Les choses n’avaient pas
l’air d’aller dans la bonne direction. Je ne trouvais pas beaucoup
d’enthousiasme pour la spiritualité. Je ne trouvais pas beaucoup
d’aspiration au progrès, pour ne pas dire aucun. C’était devenu

131
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

routinier, comme peut le devenir tout le reste dans la vie, y


compris le mariage : au bout de quelques jours, c’est la routine,
tout perd ou semble perdre son éclat, sa fraîcheur, son orientation
vers la croissance et nous sombrons dans une sorte d’existence
continuellement léthargique. Nous ne vivons pas vraiment. Nous
poursuivons notre route, vous savez, comme un cadavre flotte sur
la rivière. On ne peut même pas dire qu’il flotte, c’est la rivière
qui le fait flotter.

Alors, je me suis dit : « Bon sang, si c’est comme ça, hé bien,


c’est comme ça ! » Et de toute façon, que je vienne ou pas, cela
ne changera pas grand-chose. Je suis, ils sont, et puis Il est et Il
continuera à être. Et chacun suivra son chemin respectif, souhaitant
désespérément une sorte de libération dont nous ne savons rien,
parlant du Monde plus Lumineux que nous connaissons encore
moins et continuant à vivre – comme je viens de le dire- dans une
sorte de coma léthargique. Vous voyez, c’était un tableau plutôt
déprimant. C’est une des raisons pour lesquelles je n’ai plus
voyagé en dehors de l’Inde, ces trois dernières années.

Bien sûr, en Inde, il y a, je suppose que c’est un accident de


l’histoire, l’effet de la bienveillance de la Nature et peut-être
la grâce spéciale de mon Maître si l’Inde continue d’avoir une
population ignorante, un peuple superstitieux et ridiculement
paresseux qui veut malgré tout continuer à poursuivre l’aventure
spirituelle. Je ne suggère pas que pour être spirituel nous devrions
être paresseux et ridiculement stupide et superstitieux, mais c’est
comme ça. Ceci étant, malgré ce que j’appellerais des obstacles, le
peuple indien continue pourtant de venir à la spiritualité.

C’est comme dans mon entreprise, quand j’étais encore en


activité, j’étais directeur de marketing. J’avais de bons marchés, de
mauvais marchés et ceux qui étaient corrects, et je devais partager
mon temps entre les trois. Bien sûr la tentation était toujours la
même : commencer par le bon marché, continuer avec celui qui
était correct et finir, à contrecœur, avec beaucoup d’appréhension,
par se risquer vers ces marchés qui n’étaient jamais les miens.
Mais vous savez, en gestion de marketing, il est préconisé de

132
Je fais seulement mon travail → sommaire

consacrer plus de temps à ces marchés qui ne sont ni tellement


rentables ni tellement productifs au lieu de se contenter des
marchés qui vous rapportent de l’argent. Cela reste toujours une
question de gestion de votre temps et de votre énergie face à ces
trois types de marché : à contrecœur, vers ceux que nous estimons
inutiles, joyeusement vers ceux que nous trouvons rentables et
productifs et de façon routinière vers ceux qui sont corrects.

Je me suis donc concentré sur l’Inde, ces trois dernières


années, et je suis très heureux de dire, qu’en termes de
statistique, nous y avons atteint certainement trois cents pour
cent de croissance au cours de ces trois années. Nous avons vu
surgir tant de nouveaux ashrams, de gros ashrams, des projets
immobiliers, et une multitude d’abhyasis qui sont arrivés, comme
un troupeau de bisons sauvages s’enfuyant d’une forêt en feu. Et
c’est bien. Mais alors, je ne dirais pas que des remords agitaient
ma conscience, parce que je n’ai pas de conscience du tout, c’est
juste une question de travail. Je ne me juge pas moi-même, je ne
fais que mon travail et Lui laisse le résultat.

Ainsi j’ai songé, que de fois j’ai songé : « Je suis vieux, faible,
peu attiré par les voyages, je suis devenu bourru, irritable, comme
on s’y attend de la part d’une personne âgée » - Maintenant,
même le shopping ne m’attire plus. J’ai plus d’argent à dépenser
et moins à acheter qu’auparavant. C’est la loi de l’invertendo.
Avant j’avais plus de dépenses à faire et moins d’argent, et
maintenant, c’est l’inverse.

Et malgré tout, avec tout cela, je me suis risqué à sortir, comme


un vieux lion sort de sa cage en clignant des yeux au soleil auquel
il n’est pas habitué. Et me voici. Et je peux dire que je suis heureux
d’être venu, parce que comme toutes les personnes âgées, j’ai
peut-être été un peu pessimiste et déprimé, sans doute plus à
cause de moi, qu’à cause de vous, ce qui est bien.

J’espère, s’il y a une prochaine fois, que je vous verrai encore


plus nombreux et qu’il y aura encore plus d’enthousiasme. Je
suis vraiment heureux de voir cette fois-ci dans la Mission plus

133
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

d’Américains d’origine qu’auparavant. Il ne fait pas de doute que


c’est le résultat du bon travail des précepteurs et de l’organisation,
mais je pense que cela vient aussi du travail de mon Maître :
les graines qu’il a semées en 1972, quand nous sommes venus
pour la première fois sur ces rivages, commencent à produire.
Et en quelque sorte, la végétation d’ici – si nous comparons la
population humaine à la vie de la flore – commence à répondre et
de plus en plus de personnes rejoignent la Mission.

J’espère que cela continuera ainsi, parce que je voudrais voir,
un jour, ici, un énorme auditoire américain. Je ne veux pas voir
moins d’Indiens, je veux voir plus d’Américains. De plus en plus
d’Indiens, beaucoup, beaucoup plus d’Américains, et ces halls
devraient devenir trop petits pour nous recevoir. Nous devrions
en voir par centaines de milliers, non pour moi, mais pour le bien
de votre peuple ici, parce qu’il est des signes qui montrent que
l’Amérique, malgré toutes les indications du contraire, fleurira
spirituellement. J’espère que ce sera comme dans nos histoires
de géants endormis : notre géant est un lève-tard, mais quand
il s’éveillera, il couvrira le monde de son ombre, non de sa
puissance, mais de sa sagesse, de son âme éveillée, et d’une vie
spirituelle nouvelle qu’il offrira à notre globe tout entier.

C’est ma prière et je pense que l’Amérique y répondra et que


mon Maître la bénira.

Merci.

134
→ sommaire

XVIII

La touche divine

Austin

17 août 2003

135
→ sommaire

La touche divine

17 août 2003

 J’ai quelque chose de plus à ajouter aujourd’hui. J’ai espéré que


des gens poseraient des questions, mais… Vous savez, le Sahaj
Marg dit que c’est seulement dans la vie que nous pouvons
travailler pour nous acquitter de nos samskaras. Personne ne
demande : « Pourquoi suis-je né à nouveau ? D’accord nous
avons des samskaras, mais pourquoi me faudrait-il renaître ? »
Cela nous mène à la question : « Pourquoi faut-il que la vie se
termine ? » L’existence est éternelle. La vie, c’est différent. La vie,
c’est quand nous existons dans un corps. Donc l’âme ne vit pas,
l’âme existe. Elle est éternelle, elle existe. L’existence est toujours
éternelle. La vie commence et finit quand nous sommes dans un
corps. Nous venons ici à cause de notre grossièreté. Lorsque cette
grossièreté est totalement enlevée, que ce soit par le cleaning ou
par ce que nous appelons bhog, qui veut dire : ‘‘Subir les effets des
samskaras‘‘, nous partons et revenons à l’existence. Voilà pourquoi,
comme je l’ai dit : existence, conscience, béatitude.

Maintenant, le monde du dehors, le monde extérieur opère


sur les samskaras à travers nos sens et nous fait subir l’effet de
ces samskaras, que ce soit sous forme de plaisir ou de douleur, de
souffrance, quel que soit le nom que vous lui donniez, vous savez,
de divertissement. Soit dit en passant ce sont les deux faces de
la même pièce. Vous ne pouvez avoir l‘un sans l‘autre. Beaucoup,
comme vous, aimeraient avoir l‘un et non l‘autre.

137
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

Maintenant, pourquoi devrions-nous méditer si notre nature


divine était destinée à se manifester ? Je crois que c’est seulement
par la méditation et le fait de recevoir des sittings que quelque
chose est amorcé dans l’âme. De même que le monde extérieur
agit sur nos samskaras pour que nous en soyons libérés, de même
que la graine doit être mise en terre pour germer, cette nature
qui est la nôtre ne peut pas se manifester sans méditation. Donc
le premier sitting que nous recevons démarre ce processus de
manifestation, on pourrait dire que c’est comme évoquer un
concept en quelques mots ou comme ‘‘ouvrir un dossier’‘ en
terminologie informatique. Jusqu’alors, c’est dans un état latent.
Cette nature latente assoupie doit être éveillée. Et c’est pour cela
que vous trouvez des expressions comme ‘‘le dormeur s’éveille‘‘
qu’on utilise même dans la littérature occulte. C’est pourquoi
la ‘‘touche divine‘‘, comme nous l’appelons, est nécessaire. Ce
contact divin n’est autre que la transmission.

Bien sûr, dans notre mythologie, nous avons des histoires où


l’action du contact divin même sur une pierre, a libéré la vie.
Une femme, nommée Ahilya, avait été transformée en pierre
par une malédiction, le contact divin du seigneur Rama libéra
la vie de sa prison de pierre. Ce contact libère ou enlève tous les
samskaras, voyez-vous comme lorsque vous touchez quelqu’un
qui dort : il s’éveille.

Donc, que ce soit de cette façon ou au moyen de notre


bhoga nous devons nous débarrasser de toutes ces choses que
nous avons. Parce qu’il est vital de comprendre pourquoi nous
devrions méditer, pourquoi la vie ne devrait pas faire ce qu’elle
fait avec les samskaras, avec notre nature également. Comme je l’ai
dit hier, nous ne choisissons pas d’être mauvais ou corrompu ou
violent ou vicieux. Nous y sommes contraints. Nous savons que
même des meurtriers pleurent après avoir commis un meurtre
– le remords. Le remords n’est rien d’autre que le sentiment de :
« Pourquoi ai-je fait ceci ? Pourquoi cela m’est-il arrivé ? »

Donc, voyez-vous, par la force des circonstances, à cause de


pulsions incontrôlables, quand la nature divine est vraiment,

138
La touche divine → sommaire

vraiment à son état le plus latent - soit dit en passant ‘‘latent‘‘


n’est rien d’autre que ‘‘en sommeil‘‘ – comme lorsque quelqu’un
est très profondément endormi, vous devez le secouer pour le
réveiller. Ces choses arrivent parce que le samskara est trop fort.
Il y a toujours du regret. Les gens qui prennent plaisir à manger
deux pizzas alors qu’ils devraient être heureux avec une part, le
regrettent. Les gens qui fument trop, le regrettent. Les gens qui
ont dépensé trop d’argent, le regrettent. Et lorsque le regret est
trop fort, il se transforme en culpabilité.

La culpabilité est suivie de ce que les psychologues appellent


refoulement, et le samskara devient de plus en plus dur ; même
entreprendre le processus spirituel devient très difficile. Nous le
rejetons. Je veux dire qu’il y a tant de psychologie impliquée dans
ces explications : que l’ego est très fort, que l’ego ne peut pas
survivre sans samskaras, que l’ego aime survivre, et n’en a rien à
faire de l’âme et ainsi de suite. Nous n’avons pas besoin de nous
lancer dans tout cela, c’est dans les livres.

Je voulais donc juste conclure ce, disons… ce développement


d’idées avec cette déclaration particulière : sans la méditation,
sans la transmission, nous continuerions tels que nous sommes.
Le monde extérieur suffit pour travailler sur nos samskaras. Il ne
travaillera pas sur notre nature latente qui doit être spécialement
éveillée par une impulsion différente qui est la transmission.

Merci.

139
→ sommaire

XIX

Foi et sagesse

Atlanta

22 août 2003
→ sommaire

Foi et sagesse

22 août 2003

Vous savez, j’ai été très impressionné par Bilbo Baggins – vous
avez sûrement tous vu le Seigneur des Anneaux – quand au
cours de la fête pour ses cent dix ans, il s’est levé pour prononcer
un discours ; j’ai toujours souhaité pouvoir dire quelque chose
comme il l’a fait – quelque chose qui laisse les gens, vous savez,
songeurs : « Que diable a-t-il dit ? » Parce que je pense qu’il a dit :
« J’aime la moitié d’entre vous autant que moi-même, et l’autre
moitié encore moins » (rires). Quelque chose comme cela. Pas
désobligeant, pas choquant en public mais qui fait que les gens se
demandent ce qu’il a bien pu vouloir dire.

Bon, je voulais faire un discours ce soir, mais j’étais un peu,


vous savez, mal fichu. J’ai effectivement eu un peu de fièvre cet
après-midi et… J’étais au lit, mais j’ai décidé de donner le sitting.
C’est à la fois un plaisir et un devoir, je le fais donc toujours.

Vous savez, j’ai demandé vos suggestions sur ce que nous


devrions faire pour amener de plus en plus d’Américains dans la
Mission. Ce n’était pas seulement un ballon d’essai, vous savez.
Je voulais voir comment allaient réagir les gens. Ce n’est pas que
j’aie vraiment besoin d’un conseil ou… Parce qu’un conseil ne
marche pas dans ces situations. Et j’ai beaucoup de réponses.
Mais je suis plutôt déçu par les réponses parce qu’elles sont soit
d’ordre culturel, soit d’ordre purement gastronomique, vous
savez. Et cela m’a conduit à me demander si nous avons changé

143
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

au cours du siècle depuis que Swami Vivekananda a dit qu’en


Inde la religion s’est déplacée vers les cuisines. J’espère que
vous comprenez ce qu’il voulait dire : le caractère sacré est
souvent associé à la préparation de la nourriture – jusqu’à quel
point est-elle pure ? Avez-vous bien pris un bain avant d’entrer
dans la cuisine, etc., etc., et bien sûr, ce qu’il a dit était vrai alors,
et reste vrai aujourd’hui. Nous sommes encore, vous savez,
préoccupés par notre nourriture et sa pureté – je ne parle pas de
la pureté biologique de ce que nous mangeons pour ne pas être
malades mais de la prétendue pureté spirituelle.

Babuji nous a enseigné le moyen de rendre toute chose


agréable au goût et bonne pour nous spirituellement. Il a
dit : « Avant de manger, méditez un moment et offrez votre
nourriture à votre Maître. » Je ne vois personne le faire. Pas une
seule personne. Quelquefois, lorsque je suis à table et qu’il y a
des anciens de la Mission, je pense qu’ils veulent me donner
une leçon, alors ils ferment les yeux et font semblant d’offrir leur
repas au Maître et cela me fait rire – je ris sous cape, voyez-vous.
Je me dis : « Ces gars veulent m’impressionner ! » Et si c’était
vraiment des anciens, et mes aînés, et si profondément avancés
spirituellement, ils n’auraient pas à m’impressionner, ce serait à
moi de les impressionner, n’est-ce pas ? Essayez donc seulement
cela. Même si ce n’est qu’un sandwich ou un cookie, comme vous
dites en Amérique pour parler d’un biscuit. Il suffit de fermer
un instant les yeux et de penser que le Grand Maître mange
cela. Et vous verrez que cela devient comme un nectar. Ce n’est
plus de la nourriture indienne, ce n’est plus de la nourriture
américaine. Ce n’est même plus de la nourriture, c’est du nectar.
Et le nectar appartient à tous, vous savez. Il n’y a pas du nectar
chrétien et du nectar hindou et du nectar musulman et du nectar
bouddhiste. Le nectar appartient aux dieux. Essayons cela lors
de nos assemblées. N’essayons pas artificiellement de faire de
tout le monde nos frères et nos sœurs, faisons en sorte de le
ressentir dans notre cœur. Nous ne pouvons pas aller partout
et dire : « Hé, toi ! Tu es mon frère, viens ici ! » Vous savez. Cela
vous sépare automatiquement.

144
Foi et sagesse → sommaire

Ce sont donc ces quelques choses dont je voulais vous parler


avec plus de détails dans la soirée, mais comme je l’ai dit, j’étais
trop fatigué et aussi un peu malade. Et je pense que mon Maître
me donne toujours l’opportunité dont j’ai besoin, voyez-vous,
comme cette opportunité qui s’est présentée d’elle-même. Ce
n’était pas de mon fait, je ne pense pas que vous le vouliez mais
c’est arrivé. Comme on dit, voici le papier et voici le feu et voilà
que c’est brûlé. Ou bien, voici l’amoureux et voici le bien-aimé
et voilà ! Comme disent les Français : « C’est arrivé ! » Nous
devrions donc laisser les choses arriver d’elles-mêmes. Le grand
problème dans l’éducation moderne est que nous voulons faire
se produire les choses. La sagesse divine dit : « Attendez, cela va
arriver ! » Cela doit arriver parce que c’est destiné à arriver. Et
qu’est-ce qui nous rend capable d’attendre ? Ce n’est rien d’autre
que la foi. J’ai toujours senti que la foi est la capacité d’attendre
indéfiniment. Vous ne pouvez pas regarder votre montre et dire :
« Bon, je suis disposé à attendre cinq minutes, Chari, c’est la
limite de ma foi ! » Ce n’est pas possible. Foi signifie patience
infinie, capacité d’attente infinie. Jusqu’à quand ? Hé bien vous
attendez qu’un fruit mûrisse sur l’arbre, n’est-ce pas ? Vous
savez que le fruit qui a mûri sur l’arbre est le plus délicieux,
alors que toutes les bananes que vous importez, les grosses
oranges californiennes, si elles ont mûri artificiellement, ce n’est
pas ça. Ces fruits ont l’air gros, ils ont l’air attirant, mais le goût
n’y est pas. La nature a donc sa propre façon de faire mûrir les
choses. Les choses qui croissent ont leur rythme de croissance.
Un enfant doit se développer à son rythme. Vous ne pouvez
pas dire : « Oh, la conception est terminée, maintenant je veux
l’accouchement ! » Ce n’est pas comme un envoi en express,
un ‘‘Fedex‘‘ non ? Nous devons attendre. Bon sang, combien de
temps ? Hé bien, jusqu’à l’accouchement !

Vous avez vu ce film au sujet de l’avion postal Fedex qui


s’est écrasé. Et ce gars se retrouvait dans un endroit isolé, livré
à lui-même. (Quelqu’un dit ‘‘Castaway‘‘, Master dit : « Oh, je
ne me soucie pas du titre mais de l’histoire ! ») Quatre ans et
demi, et il a vraiment livré le paquet. Eh bien ! C’est… Je veux
dire : « Hourrah ! » pour Fedex. Mais la question est que même

145
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

des paquets de Fedex peuvent être remis à leur destinataire


après quatre ans et demi, si la nature y prête main forte. Donc,
respectons toujours la nature et disons : « Nature, avec votre
permission, je vais livrer ceci demain matin, après cette nuit. »
Pourquoi ? Parce que j’ai demandé vingt-neuf dollars pour
le faire. La nature vous aidera. Mais si vous dîtes : « Contre
vents et marées, je vais le livrer ce machin ou je veux savoir
pourquoi, Chari ! » Ne soyez pas surpris alors si la nature vous
dit : « Hum, hum ! » Vous savez, la nature peut être américaine,
elle peut être indienne, australienne, mais la nature est la nature.
« Hum, hum ! » Nous devons donc respecter la nature. La nature
intérieure des gens aussi bien que la nature extérieure qui est
divine, et la Nature avec un ‘‘N‘‘ majuscule qui est Dieu. Si nous
apprenons à harmoniser ces trois natures, nous y sommes. Et
tant que nous nous battrons avec la nature intérieure et avec la
nature extérieure et que nous prierons à genoux la Nature avec
un ‘‘N‘‘majuscule, nous aurons trois ennemis.

Dieu n’aime pas qu’on le prie. Je veux dire, imaginez


que vous êtes parents et que votre enfant, sans cesse, vienne
et prie : « Papa, donne-moi cinq centimes ! Oh, tu es le vrai but
de la vie humaine, papa ! Aujourd’hui tout ce que je veux, c’est
un dollar. » Il répond : « Oui, mon fils, prends ! » A dix-huit ans
vous dîtes : « Oh, papa, quelle merveilleuse personne tu es ! Je
t’aime, papa ! » Et il répond : « Qu’est-ce que tu veux, mon fils ? »
« Seulement cinquante dollars, papa ! » « Oui, mon fils, prends ! »
Et le père se demande : « Quand ce fils qui est le mien viendra-
t-il pour autre chose que pour ce que je peux lui donner. Quand
viendra-t-il me voir, me serrera-t-il simplement dans ses bras et
me dira-t-il : « Papa, je veux être avec toi ! » Ainsi, voyez-vous,
Dieu a une patience infinie. Nous n’allons vers Lui qu’avec des
demandes, des besoins, des malédictions, même des mots de cinq
lettres. Blasphématoire. Et Il supporte tout. Pourquoi ? Parce qu’Il
est infiniment patient. Il a la foi, que finalement, nous, stupides
personnes, nous irons à Lui. Mais Il est le Tout-Puissant et nous
sommes de pauvres termites sur la terre, et nous n’avons pas foi
dans le fait qu’Il viendra à nous. Vous voyez quelle parodie nous
avons fait de notre vie, quelle tragédie nous avons fait de notre vie ;

146
Foi et sagesse → sommaire

Il a une patience infinie, une foi infinie : « Ce sont là les enfants que
j’ai créés ; ils doivent venir à moi et ils viendront. Tout ce que je dois
faire est d’attendre. » Et nous disons : « Je le veux maintenant ! » Et
Dieu dit : « Pourquoi ? » « Oh, allez, Dieu je le voulais hier ! » Ça,
c’est la grande tradition américaine. « Je le voulais hier. » Et Dieu
dit : « Si je t’avais donné hier ce que je dois te donner aujourd’hui,
tu aurais pu ne pas être à même de le supporter. »

Parce que vous savez, les choses sont rendues parfaites en étant
chauffées au feu et battues au marteau et écrasées à la meule et
alors elles deviennent parfaites. Imaginez un diamant. S’il n’avait
pas été soumis aux températures et aux pressions énormes
découlant des phénomènes géologiques, il n’y aurait pas de
diamant, il n’y aurait que du charbon. Vous payez deux mille neuf
cent quatre-vingt-dix-neuf dollars, neuf mille neuf cent quatre-
vingt-dix-neuf dollars, onze mille neuf cent quatre-vingt-dix-neuf
dollars pour des diamants – c’est toujours neuf cent quatre-vingt-
dix-neuf, je ne sais pas pourquoi – et vous admirez ce merveilleux
brillant, comme ils l’appellent. Imaginez les pressions auxquelles
il a été exposé, les températures auxquelles il a été exposé avant
que ce simple carbone ne devienne un diamant. Toujours du
carbone, mais pas le même. Soumettez-vous donc s’il vous plaît.
La soumission n’est pas, vous savez, être battu pour être réduit
à l’esclavage, comme c’était notoirement le cas dans la région
où nous sommes, le sud de l’Amérique. Je reçois des lettres
qui disent : « Hé, on vous appelle ‘Maître’, j’veux pas être un
esclave ! » Il n’y a pas d’esclavage ici. Je veux dire qu’il serait un
pauvre Maître celui qui dirigerait des esclaves, n’est-ce pas ? Les
battre à mort, les piétiner, les fouetter. Quelle sorte de Maître est-
ce là ? Quelle sorte de mari serait-il s’il lui fallait traîner sa femme
par les cheveux pour l’amener au lit tous les soirs ? Il aurait honte
de lui-même, n’est-ce pas ? Un mari dont la femme ne languit pas
en l’attendant au lit, n’est pas un mari. Si vous devez la battre, la
piétiner, quelle sorte d’amour est-ce ? Quelle sorte de Maître est
le type qui veut vous enchaîner, vous traîner, vous mettre dans
une cellule et vous y enfermer et dire ensuite : « Méditez ! » Ou
autre chose ? Non, non, non. Ce genre de chose ne colle pas avec le
Sahaj Marg. Le Sahaj Marg est une voie de liberté. Vous êtes libre

147
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

d’aller au paradis, vous êtes libre d’aller dans l’autre endroit et


vous êtes libre de rester ici, aussi longtemps que vous le souhaitez.
C’est vous qui choisissez. Dieu dit : « Mes chers enfants, je vous ai
donné le libre arbitre. Je vous ai donné l’intelligence. L’intelligence
doit vous aider à décider quoi faire, ce qui est bon pour vous.
Votre volonté doit vous rendre capable de le faire. Le reste vous
appartient. « Pas de Seigneur, cela va me prendre l’éternité ! » Il
dit : « Je peux attendre ! » Le pouvez-vous ?

C’est donc la question à laquelle fait face tout aspirant spirituel,


vous voyez, le fait qu’Il puisse attendre pendant l’éternité parce
qu’il est le Maître de l’éternité. Nous ne sommes même pas maître
de ce moment. Au moment où vous pensez que vous n’avez jamais
eu de meilleur moment, vous trébuchez sur un stupide caillou et
vous vous cassez la jambe. Vous passez les meilleures vacances
de votre vie, un petit accident et vous vous retrouvez à l’hôpital
pour les trois prochains mois. Un verre de trop et vous êtes à
l’hôpital avec une voiture écrabouillée. Une lune de miel qui se
prolonge un peu et vous avez perdu votre femme. Vous n’avez
aucun contrôle sur le moment à venir. La spiritualité dit : « Vivez
cet instant comme si c’était le dernier ! » Babuji Maharaj, lorsque
je lui ai demandé, vous savez : « Qu’est-ce que la sagesse ? » a
répondu : « Vivez comme si vous alliez mourir l’instant suivant ! »
Alors on fait ce qui doit être fait. On ne dit pas : « Waouh, c’est
quoi ça ? Une Bud light ! (une bière légère) – laissez-moi en boire
une avant de partir ! Juste une pour la route ! » Vous n’auriez pas
fait cela, n’est-ce pas, si vous aviez su que vous alliez mourir ?
La sagesse est donc d’utiliser un moment après l’autre, encore
un moment après l’autre, car des choses comme les heures et
les jours n’existent pas. Vous savez, si vous aviez une échelle à
laquelle il manque un barreau sur deux, vous ne pourriez pas y
grimper, n’est-ce pas ? De même, si dans votre vie il manque une
heure sur deux, cela veut dire que vous mourez et vivez à chaque
heure. Donner de la continuité au temps signifie utiliser chaque
instant comme il vient, comme il devrait être utilisé. C’est cela,
la vie. Une telle vie ne se termine jamais parce que son temps
ne se termine jamais. Et la sagesse qui nous est donnée, si vous
la développez dans ce but, c’est de la sagesse. Autrement c’est

148
Foi et sagesse → sommaire

simplement de l’intelligence. Ce monde est plein d’intellectuels,


de philosophes, d’auteurs, de rêveurs, et que sais-je encore ? Mais
des hommes sages, il y en a peu. Et malheureusement la vérité est
que si vous regardez les hommes sages de tous les temps, je ne
pense pas que certains d’entre eux aient été instruits au sens où
nous entendons l’instruction.

Vous savez, vous pouvez faire fermenter quelque chose


artificiellement, et cela peut fermenter tout seul. La sagesse
est votre mental qui fermente en lui-même de façon naturelle,
l’intelligence le fait artificiellement, comme faire mûrir une banane
d’Amérique du Sud – pas de goût. De telles intelligences n’ont
pas de valeurs, ne sont pas associées à des valeurs éthiques. C’est
comme un ordinateur – oui ou bien non. « Dois-je assassiner cette
personne ? » « Reformulez votre question. » « Dois-je terminer ? »
« Oui ! » A cause de Terminator 1, Terminator 2, Terminator 3, vous
savez. Vous ne finissez pas votre vie, vous y mettez un terme !
Donc, méfiez-vous des intellectuels qui n’ont rien comme support
à leur jugement, parce qu’alors vous pourriez aussi bien charger
vos questions dans l’ordinateur et attendre la réponse.

Voici donc quelques-unes des pensées que j’ai cru devoir


partager avec vous avant de partir demain, voyez-vous, nous
risquons de ne pas avoir le temps demain matin – il y a une
assemblée générale annuelle et, je crois, quelques mariages
de plus à accomplir ! Et vous savez, le moment du départ est
difficilement un bon moment pour des valeurs plus profondes –
elles …parce qu’elles prennent une teinte émotionnelle ; certains
disent : « Eh bien, pour l’amour du ciel, il s’en va enfin ! » Je ne les
blâme pas, parce que si je peux me permettre de le dire, c’est ce que
je ressens moi-même. Il est temps que je parte. Vous savez. Non,
non, je veux dire que c’est une discussion entre frères et sœurs.
Nous ne devrions pas attendre le dernier moment pour échanger,
dirons-nous, des sentiments d’amour, des pensées d’amour, parce
qu’après tout, un conseil, s’il n’est pas plein d’amour, n’est pas un
conseil, à nouveau c’est seulement intellectuel. C’est comme un
médecin fumeur qui dit à ses patients de ne pas fumer. Il n’y a pas
d’amour derrière. Il est en train de se tuer et vous dit de ne pas

149
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

vous tuer. Donc, lorsque vous êtes en relation avec des personnes
avec amour, un conseil n’est pas un conseil, c’est de la tendresse.
C’est de l’intérêt. Et lorsque nous parlons aux autres avec intérêt,
intérêt pour les autres, pas pour vous-même, cela leur va droit au
cœur comme une flèche. Et c’est là qu’il faut tirer. Non pas pour
tuer, mais comme Cupidon, pour gagner un autre cœur. J’espère
donc, vous savez, Indiens ou Américains, blancs ou noirs ou
jaunes ou bleus – cela n’a pas d’importance, nous sommes tous
des êtres humains, nous avons tous les mêmes aspirations, les
mêmes besoins. Et le besoin humain fondamental est l’amour.
Etre aimé et être capable d’aimer. Encourageons ce sentiment en
nous-même, cultivons cette valeur dans notre cœur, chérissons ce
sentiment envers ceux que notre destinée nous conduit à côtoyer
et à servir si possible. Et il n’y a rien de tel que la croissance de
la Mission ou la croissance du nombre ou de n’importe quoi. La
question est de savoir combien de personnes nous pouvons aimer
de sorte que nous soyons heureux et qu’ils soient heureux.

Merci

150
→ sommaire

XX

Dieu est tout

Molena, Assemblée générale

23 août 2003
→ sommaire

Dieu est tout

23 août 2003

Aucune proposition officielle ni vote, rien ?


Oh ! Je suis toujours déçu lorsqu’il n’y a aucune main qui se lève
(les abhyasis lèvent la main). OK, c’est merveilleux de voir tout cet
enthousiasme. L’enthousiasme signifie mettre Dieu en vous. Cela
vient de theos ; en-theos – mettre Dieu en vous. C’est ce que nous
faisons ici. Chaque transmission met Dieu dans votre cœur, parce
que la transmission est l’essence de la Divinité. Et lorsqu’elle se
manifeste dans notre travail, dans l’étincelle de nos yeux, dans
les larmes lorsque nous nous séparons, dans l’attente impatiente
d’être à nouveau réunis – tout cela est une expression du Divin en
nous. Parce qu’il n’y a pas de divinité sans sentiment.

Le monde ne nous a pas enseigné ce que signifie réellement


l’amour. L’amour est un sentiment, et non une émotion. L’émotion
est de la fumée. L’amour est un sentiment et c’est du feu. Et comme
tout feu, il doit brûler. Il doit nous consumer. Ainsi un amour qui
ne consume pas n’est pas de l’amour, c’est du clinquant. De la
tromperie. C’est donc ce que nous souhaitons voir, voyez-vous.
Et lorsque nous aimons des personnes, nous voulons travailler
pour elles ; nous voulons servir ceux que nous aimons, n’est-ce
pas ? Nous aimons nos enfants ; nous les servons, bien que ce
ne soit pas dans le sens où nous utilisons le mot ‘‘service‘‘, car
aujourd’hui, le mot service signifie ‘‘paisa‘‘ (centime de roupie)
dollar, argent. ‘‘Je sers Microsoft‘‘ signifie que c’est là que je gagne
ma vie, rien de plus. Et lorsque je vends mes parts et que je gagne

153
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

beaucoup d’argent, je me sers moi-même. C’est du ‘‘self-service‘‘.


Soit vous allez prendre une pizza dans un restaurant, ce qui est
aussi du self-service, soit vous appuyez sur un bouton et faites
sortir une barre de chocolat – self-service. Inscrivez-vous en
cliquant sur une touche – c’est du self-service. Mais le véritable
self-service c’est lorsque vous servez le Soi (Self) à l’intérieur :
votre Soi essentiel. C’est cela, la vie spirituelle.

Ainsi, il y a trois niveaux de travail. Celui où vous servez votre


soi matériel, ce que vous devez faire. Vous devez prendre soin du
corps, vous devez le nourrir, le maintenir en bonne santé afin
qu’il vous porte tout au long du voyage de cette vie que vous avez
commencée dans le ventre de votre mère et que vous finirez dans
le monde plus lumineux. C’est ce que devrait être notre voyage.
Pas d’ici jusqu’à Tokyo ou Tombouctou, mais de la conception,
moment où vous naissez dans ce monde matériel, jusqu’au
moment de la libération, lorsque vous êtes dans le monde plus
lumineux – voilà le véritable voyage de notre vie.

C’est pourquoi nous disons : « Tu es le vrai but de la vie


humaine ». Nos buts temporels… Aujourd’hui certains iront à
Détroit, d’autres iront à Dallas, d’autres à San José. Pour moi cela
ne finira jamais parce que je vais toujours d’un endroit à un autre
jusqu’à ce que cela se termine. Ainsi le premier niveau de travail
est le travail que nous faisons pour nous maintenir heureux, en
bonne santé et, espérons-le, sage.

Cette sagesse doit nous conduire au deuxième niveau


de travail – le travail spirituel sur nous-même : le fait que je
doive savoir que je suis ici dans un but spirituel et non dans
un but inférieur. Vous savez que tous les buts matériels sont
des buts inférieurs. Si je travaille pour de l’argent, je me vends
et rien ne sert de faire des compromis et de dire « Mais j’ai
besoin d’argent ! » Voilà pourquoi le travail noble ne demande
pas d’argent en retour. Le véritable docteur ne demande pas
d’honoraires. Le véritable enseignant n’accepte pas d’honoraires.
Autrefois, il était de tradition que le professeur enseigne et que
les étudiants apportent, l’un des céréales, l’autre qui avait des

154
Dieu est tout → sommaire

vaches du lait, un autre dont le père était millionnaire du sucre, et


tous s’asseyaient et mangeaient ensemble. Le propos n’était pas de
donner et de prendre. On participait, on partageait, et on appréciait
ensemble une mise en commun de l’existence dans laquelle tout
le monde partageait, chacun contribuant comme il le pouvait : le
professeur avec son savoir, sa sagesse, et les disciples, les étudiants
avec ce qu’ils pouvaient. D’abord par leur présence – s’il n’y a pas
d’étudiant, il n’y a pas de professeur. S’il vous plaît, souvenez-vous
que vous ne pouvez pas être un professeur sans étudiants, vous ne
pouvez pas être un Guru sans disciples, et vous ne pouvez pas être
Dieu sans dévots.
Il y a une philosophie qui dit : « S’il n’y a pas de dévots, il n’y
a pas de Dieu. »
Avant que les êtres humains ne viennent sur cette planète, il
n’y avait pas de Dieu.
Je veux dire que les animaux, les oiseaux, toutes les bêtes
et les insectes, ne savent pas ce qu’est Dieu. C’est comme une
personne qui ne s’est jamais mariée et qui dit : « J’attends mon
épouse. » Vous ne pouvez avoir une épouse. Il y a des milliards
de femmes dans le monde mais vous avez une épouse seulement
lorsque vous êtes marié. De la même façon, vous avez un Dieu
seulement lorsque vous reconnaissez Sa présence dans votre vie,
non comme une présence fictive quelque part dans un paradis
perdu qui n’existe pas.

Je ne crois pas que le paradis soit la demeure de Dieu. Un


paradis dans lequel je ne suis pas et dans lequel mon Dieu n’est
pas avec moi n’est pas le paradis. S’Il est avec moi ici, alors c’est
aussi le paradis. C’est pourquoi je dis : « Tout ceci et le Paradis
aussi », parce que vous tous êtes avec moi. Je suis au paradis et mon
Maître est avec moi. Merveilleux ! Nous sommes tous ensemble
dans une seule existence divine, dans une seule demeure divine
– qui est ici et maintenant. La religion nous offre des buts fictifs.
Où donc est le paradis ? ‘‘Dieu au Paradis‘‘. Oui, mais qu’est-ce
qu’Il fait là-haut ? S’Il est au Paradis, Il doit se sentir concerné par
moi, non par mon bien-être matériel qui serait : « Oh, aujourd’hui
je n’ai pas de chocolat ! » dirait l’enfant. « Aujourd’hui j’ai des
corn flakes mais pas de lait » dirait le mari. « Aujourd’hui j’ai un

155
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

portefeuille mais pas d’argent dedans » dirait l’homme. « J’ai une


voiture mais pas d’essence » dirait l’étudiant frustré. Ce n’est pas le
propos de Dieu. Si Dieu est avec moi, j’ai tout. Si Dieu est avec moi
là où je suis, même si je n’ai rien, j’ai tout, parce que Dieu est tout.

C’est cela la philosophie secrète. Elle est censée être ésotérique


et tout ce blablabla, vous savez : connaissance cachée, richesse
cachée, sagesse cachée. Pourquoi cachée ? Rien n’est caché. Tout
est ouvert. Mais on nous dit : « Ne regardez pas sinon vous serez
aveuglé ! » Hé bien, mes yeux n’ont pas été aveuglés, j’ai vu ! Ce qui
m’aveugle, c’est le flash des appareils photos qui ne me permet pas
de me voir moi-même. Rappelez-vous donc : aucune lumière ne
peut m’aveugler si elle est divine. Aucune forme ne peut m’effrayer
si elle est divine. Dieu n’est pas un fantôme qui apparaîtrait et dont
j’aurais peur en le voyant. Je ne verrai que le Bien-aimé.

Ainsi nous devons apprendre à nous dégager de l’emprise et,


comment dirais-je, des mensonges qu’on nous a imposés à travers
les enseignements religieux. Toutes les religions du monde nous
enseignent la même chose. Dieu n’est pas ici, s’il vous plaît, priez
à genoux, humiliez-vous. Je veux dire : un simple père ne veut pas
que son fils vienne vers lui en se traînant à genoux et lui dise :
« Papa, est-ce que je peux avoir deux dollars ? » Il dirait : « Qui
diable es-tu ? Es-tu mon fils ? Allez, debout, tiens-toi sur tes deux
fichus pieds, mon gars ! » Ne dirait-il pas cela ? Je n’aimerais pas
que mon fils se traîne devant moi dans la poussière, se frappe
la poitrine et mette des cendres sur son front. Le feriez-vous ?
Alors, comment pensez-vous que Dieu apprécierait de vous voir
vous traîner dans la poussière, vous frapper la poitrine et vous
lamenter ? Il veut que nous venions le corps droit, la tête haute en
disant : « Je suis votre fils ! Quoi que je sois, c’est ce que je suis ! »

Un fils a cette place dans la maison. Cette maison est mienne


parce qu’elle est celle de mon père. Je n’ai pas à me traîner,
je n’ai pas à avoir les portes ouvertes par des prêtres que je
dois corrompre. Je n’ai pas à acheter un emplacement dans un
cimetière pour y être enterré. Dans quel but ? Si je n’ai pas de
dignité dans mon âme, mon corps n’aura pas non plus du tout de

156
Dieu est tout → sommaire

dignité. C’est ce que dit la religion : poussière et cendres. Tous les


corps sont poussière et cendres, qu’ils soient chrétiens, hindous,
musulmans, bouddhistes ou autres. Le corps n’a pas de place dans
notre existence si ce n’est qu’il est un véhicule pour me transporter,
comme je l’ai dit, de la conception à la libération. S’il ne remplit
pas ce but – comme une voiture avec laquelle nous faisons tous les
jours le trajet vers Atlanta pour gagner notre vie et dans laquelle
nous roulons sans cesse – c’est ça, la misère de la vie.

Aussi assurons-nous, chers frères et sœurs, et tout l’avenir de


nos espoirs – nos enfants –, que nous ne ferons ce voyage qu’une
fois. Et rappelez-vous le vieil adage que je ne peux citer car moi-
même je l’ai oublié : « Je n’emprunterai ce chemin qu’une fois.
Quelque bien que je puisse faire, quelque charité que je puisse
donner ou quoi que je puisse partager, que je le fasse maintenant,
car il se peut que jamais plus je n’emprunte ce chemin ! »

Merci

157
→ sommaire

XXI

Prenez le cœur du Maître

East Durham, New York

29 août 2003

159
→ sommaire
→ sommaire

Prenez le cœur du Maître

29 aout 2003

Je souhaite révéler un secret. Je le fais souvent. Je le fais


toujours mais personne n’en fait grand cas parce que tant que
vous ne le révélez pas, les gens voudraient bien le connaître,
vous savez. Vous dites : « Oh, je ne vous le montrerai pas ! » Et
jeunes ou vieux répondent en haussant les épaules, ou quelque
chose comme ça. Mon seul secret est que je ne me suis jamais
abandonné à mon Maître. Avec ça, comme le diraient les vieux
Britanniques : « Bourrez-en votre pipe et fumez ! » Ce qu’ils
veulent dire est : essayez donc de trouver une signification à ça !
Que s’est-il passé ? Et je vous dis en étant honnête à cent pour
cent que je ne me suis jamais abandonné à mon Maître. Alors
comment en suis-je arrivé là ?

Aimeriez-vous trouver ? – « Oui ! » (Répond l’assistance.) Non,


je veux dire, trouver par vous-même. Je veux dire, c’est une belle
aventure. C’est une de ces pistes où vous continuez à laisser…
Comment appelez-vous cela ? Non, non, qu’est-ce que les espions
laissent derrière eux ? Des pistes, des indices. Vous pouvez jouer
à un jeu de piste, vous savez, et vous tournez autour, et vous
sautillez autour, puis vous trouvez. Hier… Vous savez, j’aime bien
le GPS (Global Positioning System). J’ai vu une publicité sur un
GPS qui est programmé de telle sorte que vous devez aller à la
chasse au trésor avec. Il n’y a pas de trésor mais vous enterrez
quelque chose quelque part et laissez une piste avec points de

161
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

repère, drapeaux et autres. Et vous utilisez votre GPS pour arriver


à comprendre où cela se trouve. Et lorsque vous y arrivez, vous
réalisez que vous avez payé 999,99 dollars (c’est étonnant comme
nous pouvons payer 999 dollars sans y penser et sans nous
souvenir des 99 cents qui y étaient ajoutés ! ) et vous découvrez
que c’était un jeu. La vie tout entière est un tel jeu. Nous payons
cher pour ne rien trouver à la fin.

Le Sahaj Marg est un voyage de ce genre. Parce que Babuji


a dit très honnêtement, très ouvertement, très clairement, que
la Réalité n’est rien. Je veux dire que si vous y réfléchissez, la
simplicité n’a rien à y voir. C’est simple parce qu’il n’y a rien
dedans. Tout le prestige et le scintillement que nous ajoutons
à la vie nous trompent, n’est-ce pas ? Nous voulons rendre les
choses attractives, prestigieuses, en faire quelque chose dont
nous aurons très envie, que nous convoiterons. Je veux dire
qu’une grande quantité d’industries fonctionnent sur ces, disons,
faiblesses humaines, l’industrie cosmétique, l’industrie du bijou,
l’industrie du vêtement, non ? Les modes d’automne… je pense
que les modes passent et nous passons aussi.(Chariji fait un jeu
de mot avec « fall » : l’automne et « to fall » : tomber )

Bien, quel est le secret des secrets ? J’ai pris mon Maître à
cent pour cent. Sans réserve. Comme, vous savez, quand César
est tombé, quand il s’est retrouvé par terre. Cela aurait pu être
interprété comme un mauvais présage par ses soldats, mais il a dit :
« Veni, vidi, vici ». Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu. Puis il a ramassé
une poignée de terre et dit : « Salut César ! » ou quelque chose de
ce genre, vous savez. Et toute la foule a répondu, chacun frappant
l’armure de sa poitrine avec le bras. Et voilà, c’était lui : « César ! »

Donc le secret est de prendre le vieil homme, empoignez-le et


tenez-le fort ! Ne le laissez pas abandonner ou essayer de vous
échapper ! Tenez-le ! C’est comme à la pêche, aucun poisson
ne veut être attrapé, et vous êtes là avec vos cuissardes et votre
équipement coûteux et votre canne à moulinet de mille dollars,
avec les mouches au bout. Le poisson n’en a vraiment rien à faire
de votre canne à moulinet à mille dollars, de vos cuissardes et

162
Prenez le coeur du Maître → sommaire

de la coûteuse voiture dans laquelle vous avez fait le trajet. C’est


comme ce petit poisson, ce petit poisson de rien du tout. Ça c’est
le poisson. Et quel est le poisson que vous devez, vous savez,
(il fait le geste comme s’il faisait se balancer un appât au bout
de l’hameçon) devant le vieil homme, qu’est-ce que c’est ? (Les
abhyasis répondent : « le cœur ! »)

Comme l’a dit Babuji, il n’y a rien d’autre. Vous pouvez faire
comme ceci (il ferme le poing) et dire : « Je ne me rendrai pas ! »
Un poing. Ou bien : « Je me rends, Maître. Prenez mon cœur ! »
Vous savez. Je n’ai fait ni l’un ni l’autre. J’ai pris son… Je pense
que mon Maître était un peu, disons, sidéré qu’un type lui vole
son cœur sans qu’il le sache. Je ne plaisante pas. C’est un discours
très sérieux. J’essaie de donner quelques chutes comiques, de
vous faire rire, car autrement petits polissons que vous êtes,
vous n’acceptez pas, vous savez, vous dites : « Oh, c’est trop
sérieux ça, Chari ! Comment puis-je prendre le Maître ? Si je le
prends, que feront les autres ? » Des bêtises de ce genre. Vous êtes
tous si gentils avec les autres sans être gentil pour vous-même
– merveilleuse démocratie, merveilleux partage. « Hé, mais
Chari ! » Je peux entendre Dave Bolevice intervenir, vous savez,
« Si je prends Babuji, que feront les autres ? » Eh bien, essayez !
Quand vous mangez un sandwich, vous ne pensez à personne
d’autre, n’est-ce pas ? Vous y allez et vous l’attrapez, hein ?

Je me souviens, j’étais à Cleveland et j’ai acheté des pizzas,


huit ou neuf, à douze dollars cinquante chacune. Après le
sitting, j’avais un peu de temps, je suis allé me promener. Il y
avait cette pizzeria italienne et cette vieille dame italienne toute
ronde qui a refusé de les couper, vous savez. Elle disait : « Huit
tranches ? » et moi de répondre  : « Seize ! » « Je ne couperai pas
ma pizza ! ». Je lui dis : « Mais, ma chère, il faut la couper ! » « Je
ne la couperai pas ! » Je lui dis : « Ok, faisons un compromis !
Vous la couperiez en combien de parts ? » « Huit, pas plus ! ». Je
lui dis : « Allez, soyez un amour, douze ! » Elle me regarda, vous
savez, très soupçonneuse. Je pense que c’est « Soyez un amour »
qui l’a décidée. Et elle m’a vraiment fait douze parts dans chaque
pizza. Bon, douze fois huit, quatre-vingt-seize parts de pizza sur

163
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

la table. Il fallait que je donne un autre sitting, parce que vous


savez, avec un groupe bruyant d’abhyasis qui disent : « Chari,
nous avons assez de temps pour un autre sitting ! » J’ai dit :
« Ok ! » Savez-vous ce qui s’est passé ? Les pizzas ont disparu. Il
ne restait pas la moindre miette, même d’une olive sur la table !
Il faut le prendre comme ça !

Je me souviens d’une fois, au Danemark, il y avait Babuji,


il y avait moi. Nous avons eu, je veux dire qu’il a donné le
satsangh à neuf heures. Je donnais des sittings individuels. A
midi, quelqu’un est venu – deux personnes – et il me dit : « Vous
donnez ce sitting et je donne celui-là ! » Et il s’est trouvé que par
coïncidence, par accident ou n’importe quoi, nous avons terminé
ensemble à une heure cinq, tous deux très affamés. Et juste avant
le sitting, j’avais vu deux énormes soupières en inox, vous savez,
la belle vaisselle danoise, pleines de la soupe aux champignons
préférée de Babuji. Donc Babuji dit en hindi : « Tu dois avoir
faim ! » Je réponds : « Eh bien, vous vous souvenez de ma faim
uniquement lorsque vous avez faim ! » Nous avons ri tous les
deux et lorsque nous sommes arrivés, le repas était fini et il ne
restait plus un brin d’herbe, plus une goutte de soupe nulle part.
Alors nous avons simplement grimacé un sourire, nous sommes
allés dans notre chambre et avons préparé son hookah. J’ai moi-
même fumé et nous avons attendu le dîner. Ainsi, c’est à nous de
prendre, c’est notre privilège !

Lorsque nous parlons de nous abandonner, nous avons


tous ces complexes concernant l’esclavage, le Maître et moi, et
comment puis-je m’abandonner, qu’en est-il de mon entité, et
où diable peut-elle aller lorsque je m’abandonne ? Eh bien, que
se passe-t-il lorsque vous vous abandonnez ? Vous êtes toujours
là, n’est-ce pas ? Même après l’abandon vous êtes tout à fait là.
Non pas en tant que « je » suis là, mais en tant que « c’est » là.
Et ce « c’ » apostrophe de « c’est », Lui sait ce que c’est. Mais
lorsque vous prenez, vous avez la fierté de la possession, de
l’acquisition, et si je peux me permettre de le dire, la fierté
d’avoir glissé, vous savez, une sorte de taie d’oreiller sur sa
tête pendant qu’il ne regardait pas et soudainement le voilà

164
Prenez le coeur du Maître → sommaire

paniquant comme le poisson pris et vous dites : « Hé, qui est le


Maître, vous ou moi ? »

Je vous suggère à tous d’essayer cela. Et je parie, vous savez,


que le Maître est de plus aussi glissant qu’un poisson, et plus le
poisson est gros, plus il est difficile de l’attraper.

Vous savez, je lisais une fois un livre sur la pêche et une énorme
truite, quelquefois de six ou sept kilos, vous avez cette sacrée bête
à votre mouche... Puis il vous faut la laisser filer, lui donner du
mou comme ils disent, vous savez. Vous n’essayez pas de la tirer
vers vous, elle casserait le moulinet et la canne. Laissez-la filer,
ensuite tirez doucement. Laissez-la filer à nouveau quand elle
le veut. Elle ira se cacher sous un rocher. Tirez doucement. Elle
filera encore. Mais en essayant de s’échapper encore et toujours,
elle perd son souffle. Finalement, vers quatre heures de l’après-
midi, lorsque vous êtes crevé et que votre bras est douloureux et
que vous vous demandez pourquoi diable vous êtes venu dans ce
cours d’eau pour pêcher la truite, vous enroulez le fil et voilà vos
huit kilos et demi. Vous pouvez rentrer à la maison et vous vanter :
« J’ai péché un poisson gros comme ça ! »

C’est aussi bon que cela, je dirais, ce sentiment de fierté d’avoir


vraiment attrapé le plus gros poisson de l’océan. Ce n’est pas le
poisson d’Hemingway qu’un autre poisson a volé alors qu’il le
ramenait. C’est mon poisson, celui que j’ai attrapé et sapristi, je m’y
cramponne encore ! Essayez cela !

Je vous souhaite à tous de réussir.

165
→ sommaire

XXII

Tout le monde mérite de devenir

Westport, Connecticut, USA

31 août 2003

167
→ sommaire

Tout le monde mérite de devenir

31 août 2003

Mes pensées me ramènent en 1972 à l’époque où je suis venu


dans ce pays, les Etats-Unis, avec Babuji Maharaj. Nous avons atterri
à New York à environ cinq heures de l’après-midi, je crois, et une
voiture attendait pour emmener Babuji Maharaj à Stonington dans
le Connecticut. C’est là qu’il a commencé son travail dans ce grand
pays que sont les USA, à Stonington, Connecticut. Je suis donc
heureux d’être de retour dans le Connecticut après trente et un ans
(applaudissements).

À cette époque, l’ensemble des abhyasis comprenait


probablement, bien sûr (il rit) Babuji Maharaj et moi-même (rires) et
peut-être deux autres. La famille chez qui nous logions avait entendu
parler de Babuji Maharaj et une des sœurs de Grace Kimball, qui
habitait à Cleveland dans l’Ohio, était mariée au fils de la famille
chez qui nous étions à Stonington.Voilà comment nous étions arrivés
là. Je me souviens que nous n’avions probablement que vingt-deux
abhyasis aux USA à ce moment-là et, quand nous sommes partis, trois
semaines plus tard, nous en avions environ soixante-huit. Babuji était
extrêmement heureux que le nombre d’abhyasis ait été multiplié par
trois. Nous avons aussi laissé quelques précepteurs derrière nous ;
certains d’entre eux sont encore là, d’autres ont disparu.

Comme on dit, le temps change tout. Babuji regrettait toujours,


alors que le temps transforme tout – il transforme les cheveux

169
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

noirs en cheveux blancs, rend vieux celui qui était jeune, fait
mûrir les fruits, affine le vin – de ne pouvoir changer grand chose
chez les êtres humains. Il y a un vieux dicton qui dit que ce qui
est vieux vaut de l’or. Je n’ai jamais été capable de déterminer
avec précision ce à quoi cela s’appliquait. Certaines vieilles
choses valent de l’or. Je pense, vous savez, à ces antiquités que
vous achetez. Elles valent de l’or parce qu’elles sont vieilles, pas
parce qu’elles ont une valeur intrinsèque. En Amérique, il y a,
au moins en apparence, comment dirais-je, beaucoup de respect
envers les vieux (il rit) et c’est plutôt, pour moi qui ai l’habitude
de parler franchement, mensonge et compagnie. Dans les
maisons pour personnes âgées et les établissements gériatriques,
où je soupçonne que nous mettons les personnes âgées loin des
regards, loin de nos préoccupations, on prend soin d’eux. Dans
les sociétés orientales, nous respectons les vieux. Nous avons,
bien sûr, nos propres problèmes avec les vieux, je sais bien. Vous
savez, je suis vieux moi-même, donc je sais de quoi je parle. Les
jeunes autour de moi ont des problèmes. Ils disent poliment :
« prendre soin du Maître. » [il rit] Bien sûr, voyez-vous, mais je
sais qu’ils ont leurs propres rancunes, leurs propres problèmes,
leurs propres difficultés car, à mesure que nous devenons vieux,
nous devenons irritables, comme dit le vieux dicton anglais.
Nous devenons impatients.

Babuji ne montrait jamais son impatience en public. Mais il


était souvent impatient en privé. Vous savez, j’ai eu le privilège
d’être son unique compagnon pendant des mois d’affilée, et je
le connaissais vraiment très bien. Toute sa déception venait du
fait que son travail pour l’humanité n’était pas accepté par nous,
les êtres humains et il répétait souvent que l’on pouvait dresser
un animal en trois mois. Son exemple favori était celui d’un
lion dans un cirque, que l’on peut dresser de telle sorte qu’il
ouvre la gueule et permette au dresseur d’y mettre sa tête sans
mordre. Mais il disait : « Hélas ! Les êtres humains... » Ils ne se
laissent pas former si facilement parce que, malheureusement
ou heureusement, Dieu seul dans Sa sagesse sait pourquoi, Il
nous a donné notre libre-arbitre.

170
Tout le monde mérite de devenir → sommaire

Babuji avait l’habitude de dire qu’aucun amoureux n’aimerait


que sa bien-aimée vienne de force. Vous ne pouvez tirer votre
bien-aimée par les cheveux comme étaient supposés le faire les
hommes de Néandertal. Vous savez, j’ai vu ces dessins animés où
un type avec de gros biceps et un énorme, vous savez, comment
appelez-vous cette espèce de massue sur son épaule, tirait sa bien-
aimée par les cheveux jusque dans la grotte. Les comportements
de ce genre ont disparu avec le dodo (NDT : oiseau de l’île Maurice
aujourd’hui disparu). L’amour doit venir librement. Vous voulez
que les enfants viennent à vous volontairement au lieu de leur
courir après en les frappant. L’amour doit être spontané, il doit
être réciproque, il doit venir et non être appelé. C’est le bien-aimé
qui désire impatiemment l’union, la rencontre, quelle que soit la
manière dont vous l’appelez. En Hindi, nous disons « milan ».

Babuji insistait beaucoup sur le fait que la spiritualité est, par


dessus tout, une histoire d’amour avec le Divin. Et le Divin est
comme ces beautés timides, vous savez, qui désirent ardemment
leur bien-aimé, mais sans jamais s’aventurer au-delà de leur
domaine, ni franchir le seuil de leur maison. C’est lui qui doit
venir. Je veux dire que c’est la loi, c’est l’étiquette, c’est la tradition
culturelle en amour. Cela n’a rien à voir avec la nationalité. On ne
peut pas dire : « Oh ! Mais en Occident, Chari, nous faisons les
choses différemment. » Ce n’est pas si différent. Il s’agit d’amour
et ce doit être la seule manière de faire. Procéder de manière
différente ne rend pas les choses correctes. Donc vous voyez,
cette étiquette de l’amour dit ceci : « vous qui m’aimez, vous
devez venir à moi. »

Et je pense que le Sahaj Marg - si vous en lisez la littérature


avec tant soit peu de perspicacité, avec l’idée de réellement
comprendre comment aller au-delà de ces choses superficielles
que sont les sittings, la méditation et le cleaning, et vous savez
toutes ces choses complètement superficielles - je pense que c’est
la transmission de la vie même. Pranahuti est défini comme la
transmission du prana du Maître dans le cœur du récipiendaire,
l’abhyasi, le dévot, si vous voulez. C’est une force qui donne la
vie, l’amour est une force qui donne la vie, prana est une force

171
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

qui donne la vie. Prana est la vie ultime. La vie qui est transmise
lorsque des amoureux s’unissent physiquement n’est pas du prana
– c’est juste la vie. Donc, vous voyez, ceci va au-delà du niveau
physique de l’amour. C’est l’amour dans son essence divine
absolue, déversé volontairement dans le cœur de quiconque est
prêt à l’accepter.

Et je n’aime pas cette notion de mérite. Parce qu’en quelque


sorte, nous avons tendance à nous juger nous-même en disant :
« Oh, je ne le mérite pas ! » Culpabilité, fausse modestie, fausse
humilité. « Oh je ne mérite pas Sa grâce ! » Comment savez-vous
que vous ne méritez pas Sa grâce ? Vous savez, si vous allez en
Inde ou dans des endroits où il y a des problèmes d’eau, quand
il y a des restrictions d’eau, vous verrez des gens recueillir l’eau
dans tous les récipients imaginables. Ils peuvent être en fer-blanc,
ils peuvent être en laiton, en cuivre, en or, ce que vous voulez. Le
récipient ne fait aucune différence, c’est l’eau qui est importante.
Et que doit avoir le récipient pour être méritant ? Il doit être vide.
Supposez qu’un seau dise : « Non, non, je ne suis qu’une tôle
galvanisée, je suis impropre au stockage de l’eau » Eh bien! nous
la conservons aussi dans des pots en terre, n’est-ce pas ?

Par conséquent, ne vous considérez pas comme méritant


ou non-méritant. Si vous pensez que vous êtes méritant, vous
pouvez être en train de vous duper vous-même. Si vous pensez
que vous ne méritez pas, vous pouvez être en train de vous
condamner vous-même. Ces deux notions ne concernent pas la
vie spirituelle. Dans la vie spirituelle tout ce qui importe, tout ce
qui est nécessaire est de vous offrir vous-même en disant : « Hé !
Me voici. Remplissez-moi ! » Je pense que le propriétaire d’une
voiture dont le réservoir serait rempli serait idiot s’il allait à la
pompe faire le plein, n’est-ce pas ? Vous videz votre réservoir et,
quand il est vide, vous allez le remplir.

Donc tout ceci…. Vous savez, beaucoup de ces concepts


dans le Sahaj Marg, ont été échangés superficiellement et
traités superficiellement, analysés intellectuellement. « Suis-je
méritant ? » Comment savez-vous ce qui vous rend méritant ou

172
Tout le monde mérite de devenir → sommaire

non ? Je veux dire, les histoires de la spiritualité de ce monde


sont pleines de saints qui ont été des pécheurs. Peu d’entre
eux sont nés saints, c’est ça le plus bizarre ! Dans l’histoire des
saints, parmi ceux qui sont devenus saints, un très petit nombre
seulement est né en état de sainteté. Si vous vous plongez dans
la vie individuelle des saints, la plupart d’entre eux étaient des
gens ordinaires, avec leur lot, disons, d’exubérance dans la vie,
d’amusement, de plaisirs. Même le grand Saint Augustin, si
vous lisez ses Confessions : c’était un fieffé menteur, un homme
à femmes etc. Jusqu’à l’âge de dix-neuf ou vingt ans. C’est écrit
dans ses Confessions ! Je ne critique pas Saint Augustin, il s’est
critiqué lui-même. Et il est devenu un saint et l’un des plus
grands de la tradition chrétienne. N’est-ce pas ?

Ne nous préoccupons donc pas du fait que nous sommes des


pécheurs, des meurtriers, des violeurs ou je ne sais quoi. C’est
la base de la culture humaine. Souvenez-vous que dans chaque
bougie, la lumière est au sommet et la cire à la base. Dans chaque
lampe, la lumière est là [il montre le haut], le dessous peut être
en cuivre, en bois, en étain, en laiton, en métal, tout ce que vous
voulez. C’est la lumière qui est importante. Ne vous excluez
donc pas vous-même en pensant que vous êtes trop méritant
et que le Sahaj Marg n’est pas assez bon pour vous et ne vous
condamnez pas vous-même en pensant : « Je suis un pécheur, je
suis un pécheur ; mea culpa, mea culpa ! » vous savez, comme dans
l’ancienne tradition. Il n’y a pas de mea culpa ici. Comme Jésus l’a
dit à ceux qui voulaient lapider la femme adultère : « Que celui
qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ! » Et personne
n’a osé ramasser une pierre.

Nous devons lire et comprendre la vie des saints. Ce qu’ils


étaient, ce qu’ils sont devenus. C’est dans ‘‘le devenir’’ que
réside le travail, pas dans ‘‘l’être’’, voyez-vous. Je veux dire
qu’un roi qui est né roi n’a rien à raconter. Et généralement
ils étaient stupides. Ils ne savaient pas gouverner. Ils ont ruiné
leurs royaumes. Ils ont fait des guerres inutiles. Et leurs peuples
étaient malheureux.

173
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

Méritons-nous de devenir ? Bien sûr. Tout le monde mérite


de devenir. Comment devenons-nous méritant ? En essayant de
devenir. Rien d’autre n’est nécessaire. Si j’essaie de devenir, je
deviendrai. Dans cet univers, le fait d’essayer n’est jamais négatif.
Babuji disait : « Faites et accomplissez ! » L’accomplissement est
garanti à celui qui essaiera. Mais si nous sommes juste assis dans
votre chaise longue à lire Platon et Augustin, et je ne sais pas, la
vie des grands criminels par exemple, nous allons de désespoir
en désespoir en disant : « Non, non, ceci n’est pas pour moi. Peut-
être dans une vie future ! »

Donc, vous voyez, tout ce dont nous avons besoin en spiritualité


c’est d’être capable d’avoir assez de courage pour dire : « Mon
passé est derrière moi. » Nous ne pouvons pas emporter notre
passé avec nous dans le futur. Vous savez, quand je roule sur les
routes d’Amérique, je vois de temps en temps des vide-greniers.
Les gens se débarrassent toujours des choses dont ils n’ont plus
besoin, les laissant derrière, changeant de maison, ‘‘s’installer
ailleurs‘‘ – la fameuse expression américaine. Vous tirez (Chariji
joue sur les mots, entre ’’U-Haul‘‘ entreprise de transports
américaine et ‘‘you haul‘‘ vous tirez). Non ? Ici c’est moi qui tire et
vous, vous suivez. [ rires et applaudissements]

Tout ce que signifie « soumission », tout ce que signifie


« abandon » c’est : « Mon passé est derrière moi ! Mon futur est
avec vous ! ». C’est comme une fille qui se marie, voyez-vous.
Mon passé se déroulait à Stonington, Connecticut. J’ai déménagé
en Californie avec mon bien-aimé. Cette vie n’est pas finie. Mes
parents sont encore vivants, mon ancienne maison est toujours
là-bas. Il y aura de la nostalgie. « Oh! papa ! » pouvez-vous dire
au téléphone, et « Oh! maman ! » et pleurer à chaudes larmes
pendant une heure. Mais votre vie est maintenant ici en Californie.
Toutes les filles connaissent cela. Chaque homme qui change de
travail est attiré par une meilleure situation, de meilleurs salaires,
de meilleures gratifications, davantage de stock options, que sais-
je encore, et ne se soucie pas de la maison qu’il laisse derrière.
Il ne peut pas dire : « Oh! j’aime cette maison, je ne peux pas la
quitter : c’est là que j’ai grandi ! »

174
Tout le monde mérite de devenir → sommaire

Vous savez les endroits morts sont pour le culte, pas pour y
grandir. On ne rend pas un culte pour grandir – rendre un culte
c’est rendre hommage à quelque chose qui a été. Grandir c’est
rendre hommage à ce que je dois devenir, au futur. La spiritualité
appartient au futur. Le culte et la religion appartiennent au passé.
Rappelez-vous s’il vous plaît, cette différence très significative. Je
rends un culte dans des temples, les temples sont magnifiques.
Walden Pond – merveilleux ! La maison des Thoreau – superbe !
Ce sont des monuments, ils ne vivent pas ! Il vaut mieux lire
Walden que d’aller à Walden Pond et s’asseoir pour méditer
n’est-ce pas ? Il vaut mieux lire Gandhi, mais vous ne pouvez
plus suivre Gandhi. Platon, où est-il aujourd’hui ? Bien sûr, ses
principes, sa philosophie, ses fameux Dialogues – si vous pouvez
en tirer profit, oui ; sinon, laissez-les. Car le plus facile est de
s’asseoir, méditer et devenir.

Nous n’avons pas besoin de connaissance. Nous n’avons pas


besoin de fonder notre vie spirituelle sur des philosophies du
passé, des systèmes de connaissance du passé, des réalisations
du passé. Je ne peux pas devenir Vivekananda en lisant des livres
de Vivekananda. Je peux essayer de devenir quelqu’un comme lui
en faisant ce qu’il a fait, c’est-à-dire méditer. A-t-il été capable
de méditer seul ? Non. Il était simple diplômé à Calcutta, très
arrogant, très fier, très intellectuel. Et il a eu besoin d’un Maître
tel que Babuji Maharaj vous savez – Ramakrishna Paramahamsa,
qui était un villageois, qui n’avait pas d’instruction mais qui était
un mystique par excellence. Et il a dû apprivoiser Vivekananda,
voyez-vous. Ainsi Vivekananda, un des grands intellectuels de son
temps, un lion parmi les hommes, un géant intellectuellement,
un homme qui a pu secouer le peuple des Etats-unis avec son
formidable discours : « Frères et sœurs d’Amérique ! » a-t-il rugi
de sa voix de lion. C’est historique. Supposez que vous vous
leviez en disant : « Frères et sœurs d’Amérique ! » combien de
personnes vous écouteraient ? Vous devez devenir ce qu’il était
devenu avant que les gens n’écoutent ce qu’il disait, si vous le
dites à nouveau.

175
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

Nous ne pouvons donc pas répéter comme des perroquets ce


que quelqu’un d’autre a dit et nous imaginer alors être lui. Je peux
être lui, uniquement si je deviens comme lui, si je fais ce qu’il a fait
et dis avec mon cœur ce qu’il a dit, vous voyez. Donc, le chemin le
plus facile c’est la méditation, la pratique spirituelle. Mais au lieu
de cela, nous préférons fréquenter des librairies comme Borders
ou, vous savez, Barnes and Noble, et acheter tous les livres que
nous pouvons, étudier tout, ergotant, nous arrêtant aux détails,
coupant les cheveux en quatre comme on dit. « Ceci n’est pas juste.
Cela est faux. Ils ont dit ceci. C’est comme cela. Le Judaïsme a dit
ceci. L’Islam a dit cela. Bouddha a dit cela. Mais vous dites quelque
chose de nouveau, comment puis-je vous croire ? »

Eh bien, vous savez, quand Jésus parlait, c’était tout à fait


inacceptable pour les gens de ce qu’on appelle aujourd’hui
Israël ! Combien de personnes ont aimé ou connu Jésus ? Ils ne
l’écoutaient pas et, en particulier, le clergé de la religion dans
laquelle il était né. Ils se sont acharnés sur lui, n’est-ce pas ? C’est
un fait historique. Les gouvernants de ces pays ne l’aimaient pas
parce qu’il représentait une menace potentielle – une menace pour
la paix. Donc les Romains ne l’aimaient pas. Son propre peuple ne
l’aimait pas. Les nobles ne l’aimaient pas. Mais les pauvres gens
le suivaient. Et quand il vint leur dire : « Suivez-moi, » le célèbre
Pierre le suivit, puis Jacques et Jean, les fils de Zébédée. Je sais de
quoi je parle, j’ai lu ma Bible, il y a longtemps à l’école, si bien que
j’en connais peut-être un peu plus sur le Christianisme que la
plupart des Chrétiens. Ceci est de l’obéissance. Ils n’ont pas dit :
« Il faut que je demande à ma mère. Vous savez, mon pasteur ne
va pas aimer cela. Ma grand-mère ne va pas approuver ! » Il a dit :
« Suivez-moi ! » Ils ont suivi.

Avons-nous le cran ? Avons-nous assez d’amour pour cet


homme qui nous guide, pour le suivre s’il dit : « Venez avec
moi ! » Un simple type, dirons-nous, dans un jean Armani coûtant
777 $, vous regarde, vous fait un clin d’œil, et vous le suivez.
C’est scandaleux ! C’est le jean qui est attirant, pas l’homme.
Connaissons-nous la valeur des gens avec lesquels nous avons des
relations ? Jugeons-nous avec le cœur ou avec la tête ? Regardons-

176
Tout le monde mérite de devenir → sommaire

nous avec nos yeux ou avec la sagesse divine dont le cœur est
doté ? Notre vie est devenue très triviale, très superficielle.
« Jolies glaces ! » « Ravissantes pizzas ! » [Rires étouffés] Que
sais-je encore ? – Tous ces termes que nous avons dénaturés.
Il n’y a plus de ravissantes jeunes filles, il y a de ravissantes
pizzas. Il n’y a plus de jolies filles, il y a de jolies glaces. Non ? La
transposition des valeurs se fait dans la mauvaise direction, sur
la mauvaise pente.

La vérité implique d’abord une perception correcte. Je ne


peux dire la vérité si je ne sais pas quelle est la vérité. Si vous
demandez son nom à un nouveau-né, il ne pourra que vous
regarder en clignant des yeux. Il doit savoir ce qu’est un nom
avant de pouvoir répondre.

Donc, vous voyez, le mérite consiste seulement à être vide,


ce qui signifie seulement jeter tout ce qui est dans le seau avant
de pouvoir le remplir – que cela ait ou non de la valeur. S’il y
a la sécheresse dans le pays, même s’il contient de l’or, vous
devez le vider, parce que le seau d’eau c’est la vie. L’or peut
aussi bien être la mort. Cherchons-nous la vie ou cherchons-
nous la richesse ? Si vous vous accrochez à l’or, vous n’aurez
peut-être pas d’eau à boire. Vous savez, il y a eu des périodes,
m’a-t-on dit, après la guerre en Allemagne, où il fallait une
valise remplie de billets pour acheter une miche de pain. Trois
millions de marks pour une miche de pain ! La valeur de la
monnaie avait tellement chuté. Trois millions de marks pour une
miche de pain ! La monnaie n’avait plus de valeur. Des quantités
de papier pour acheter un quignon de pain. Qu’est-ce qui a de
la valeur ? Le quignon de pain ou la valise pleine de billets ?
Grosse sécheresse, pas d’eau, qu’est-ce qui a de la valeur ? Le
seau plein d’or ou le seau plein d’eau ? Je donnerais ma vie pour
un verre d’eau si j’en étais vraiment privé, si j’avais soif. Mais
nous ne savons pas à quel point nous sommes assoiffés de cette
vie spirituelle. « La vie éternelle », comme on dit. Parce que nous
ne la connaissons pas. Nous sommes si imbus de ce que nous
appelons satisfaction, que nous avons développé des désirs en
oubliant nos besoins.

177
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

Babuji Maharaj insistait toujours sur le fait que c’est le besoin


et non le désir qui devrait gouverner notre vie. J’ai besoin de
nourriture, j’ai besoin d’eau, j’ai besoin d’air frais ; mais je veux
une pizza, je veux des asperges. Je veux une chambre au Marriott,
deux oreillers, l’air conditionné. Et quand on adopte cette sorte de
vie, on oublie les bases de la vie, à tel point qu’on a peur d’ouvrir
la fenêtre et de respirer l’air frais du dehors parce qu’il pourrait
être pollué. Vous voyez, ce qui est universel, qui couvre tout le
globe, pourrait être pollué, mais ce petit volume d’air dans cette
chambre, de 8 par 8 par 8 est pur. Puis-je exister dans de telles
conditions ? Voyez, nous nous enfermons dans des capsules de
plus en plus petites de vies prétendument heureuses et pleines de
santé, en oubliant le reste du monde. Comment il vit, comment il
meurt, ne nous concerne pas. Les guerres dans le reste du monde
ne nous affectent pas. Les tragédies ailleurs que chez nous ne
nous émeuvent pas. Nous vivons dans une bulle, et comme toute
bulle, elle peut éclater à tout moment.

Si quelque chose peut me venir en aide, c’est ce que Babuji


prescrivait pour une vie spirituelle : « Soyez simple et en accord
avec la nature ! » Pensez aux autres avant de penser à vous-même.
Elevez-vous vers une vie spirituelle où la vie est éternelle et ne
dépendez pas de cette vie, cette vie terrestre, cette vie mondaine,
qui n’est qu’une étincelle, ici aujourd’hui, demain évanouie.

Il avait l’habitude de raconter l’histoire d’un précepteur qui


avait dit à un abhyasi : « Reviens demain pour le satsangh ! » Et
il était très en colère. Je lui demandai : « Pourquoi ? Pourquoi
êtes-vous en colère, le précepteur avait peut-être du travail, il
était peut-être occupé ! » Il répondit : « Quand un précepteur se
charge d’un travail, il se charge du travail. Il n’est plus question
de sa convenance personnelle ! » Il ajouta : « Savez-vous, seul
Dieu peut dire revenez demain, parce que seul Dieu sait qui
sera là demain ! » Et il racontait l’histoire d’un grand saint qui
fut condamné par Dieu à souffrir, parce qu’un dévot vint à lui
cherchant un réconfort en un moment de besoin extrême et le
saint répondit : « Je suis occupé. Revenez demain matin s’il vous
plaît ! » Mais cet homme mourut en s’en allant. Et Babuji disait

178
Tout le monde mérite de devenir → sommaire

donc : « Son premier et son plus important travail à ce moment-


là était le péché ou quoi que ce soit d’autre qui avait poussé cet
homme à venir le voir, il n’avait pas à s’occuper d’autre chose ! »
Quand un patient est mourant et va chez le docteur, le premier
devoir du docteur est de s’occuper du patient et non de dire : « Je
suis occupé, j’emmène ma femme au théâtre, ou je suis occupé
avec la Bourse, vous savez, j’achète des actions ! » Nous n’avons
pas conscience de notre devoir, parce que nous ne pensons pas
aux autres, nous ne pensons qu’à nous-même - mon compte
en banque, mon marché des valeurs, mon courtier. Ce saint fut
condamné à souffrir. Tous les samskaras de l’homme qui était mort
lui furent transférés. Et c’est une histoire vraie, pas un truc sorti
du chapeau d’un magicien.

Voici donc l’importance, la profondeur de l’engagement qui


est demandé à un être humain. Vous vivez pour les autres et si
vous vivez pour les autres, les autres vivront pour vous. « Servez
pour mériter, » (en anglais, jeu de mots : ‘serve to deserve’) n’est
pas un slogan que j’ai sorti du chapeau d’un magicien. À moins
que vous ne serviez, personne ne vous servira. Dans un moment
de besoin absolu il n’y aura pas d’amis. Ils vous invectiveront.
Ils diront : « Oh ce type ! Eh bien qu’a-t-il jamais fait pour
quelqu’un d’autre ? » - « Non, non, pauvre homme ! Il est en
train de mourir ! » - « Et alors ? Appelez le 18 ou le 15 ou qui vous
voudrez ! » - « Oui, mais il ne peut même pas tendre la main pour
saisir le téléphone ! » – « Eh bien, je n’y peux rien ! » Nous avons
trop l’habitude de ce genre de réponses à des situations humaines
désespérées – quand un homme ne peut plus respirer, et qu’il
meurt en haletant faute de cette simple bouffée d’air dont nous
avons besoin dans nos poumons.

Tout doit être gagné. Mériter quelque chose signifie le gagner.


Le gagner de quelle manière ? Aimez et servez. Donc vous voyez,
la spiritualité c’est avant tout, aimer et servir. Pour devenir
capable de rendre ce service, vous devez vous-même être aimé
et servi par quelqu’un qui est d’accord pour vous aimer et vous
servir : le type que vous appelez Maître, vous savez ! Acceptez-
le ! C’est l’abandon. Commencez une nouvelle vie, ce qui signifie

179
→ sommaire Vers une humanité unifiée - Les USA

jeter l’ancienne. C’est cela l’abandon. Vous ne pouvez pas garder


les yeux sur cette page du livre et lire simultanément une autre
page. Vous devez la tourner. « Non, non, j’aime cette page ! » Vous
ne pouvez pas lire la page suivante. Je veux dire que c’est…. les
enfants savent cela.

Peut-être est-ce pour cela qu’il y a dans la Bible ou dans les


paroles de Jésus : « Soyez comme de petits enfants et vous entrerez
dans le royaume des cieux ! » - cette innocence, vous savez : avant
de pouvoir prendre dans ma main un nouveau jouet, je dois
renoncer à l’ancien. Bien sûr, les enfants aussi pleurent parce qu’ils
les veulent tous en même temps. Mais ils apprennent. Les enfants
apprennent très vite. Les adultes non. Ils veulent avoir tous leurs
jouets avec eux, toutes leurs prétendues amours avec eux, toutes
leurs richesses avec eux. Et ils perdent tout. Et quand ils perdent,
ils disent : « Pourquoi Dieu a t-il fait que cela m’arrive à moi ? »
Pas de réponse. Dieu ne dit pas : « Je te l’avais bien dit ! » parce
qu’Il ne nous l’avait jamais dit. Pourquoi ne nous l’a t-il jamais dit ?
Parce qu’il a dit : « Je suis ici, mais ici vous ne m’écoutez jamais
voyez-vous ! Vous m’avez cherché dans des temples, dans des
synagogues, dans des mosquées où je ne parle pas. Mais là d’où
je vous parle, à l’intérieur de vous, vous m’ignorez toute votre vie
durant. Que puis-je faire ? Je suis votre éternel compagnon. Je vis
dans votre cœur. Dans votre cœur, je traverse l’éternité avec vous.
Parce que le cœur ne meurt jamais, l’amour ne meurt jamais. La
présence éternelle est éternelle. Je suis toujours avec vous. Vivant
ou mort, vous ne le savez pas. Vous ne saviez pas lorsque vous
étiez vivant que j’étais avec vous, comment allez-vous faire pour le
savoir quand vous serez mort ? »

C’est cela l’enfer. L’enfer bizarre où l’on vous verse du plomb


fondu dans les oreilles, du cuivre fondu dans la gorge, où l’on vous
fait respirer des vapeurs de soufre et d’autres choses de ce genre,
cet enfer-là n’existe pas. Ce ne sont que des inventions poétiques.
Laissons cela à des gens comme Dante. Le véritable enfer, c’est
quand je suis seul pour la première fois de ma vie, complètement,
sans même savoir qu’Il est là. Au moins quand je suis vivant, j’ai
vaguement l’idée qu’il y a quelque chose en moi qui me garde

180
Tout le monde mérite de devenir → sommaire

en vie. Quand je suis mort, ce quelque chose est parti. Sauf si je


L’emporte Lui, avec moi - et alors c’est la vie éternelle.

Donc vous voyez, la spiritualité n’exige pas beaucoup : le vide


et la capacité ou la bonne volonté de se faire remplir - seulement
deux choses. Donc s’il vous plaît, je vous encourage tous vivement
à réexaminer votre propre compréhension et appréciation de la
vie spirituelle, pour découvrir jusqu’où vous pourrez aller si vous
rejetez tous les concepts intellectuels, les concepts préjudiciables
pour accepter qu’ici et maintenant ceci doit être.

Merci.

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Table des matières

V ers une humanité unifiée , l ’E urope

I Organisation de la Mission
Chennai 14 janvier 2003 9

II Lettre de Chariji
Chennai 8 juin 2003 15

III Discours de Krishna


St Ouen, Paris 28 juin 2003 19

IV L’humanité entière unifiée par l’amour
Théâtre de la Mutualité, Paris 9 juillet 2003 27

V Le besoin d’unification de l’humanité


Théâtre de la Mutualité, Paris 10 juillet 2003 37

VI Liberté
Cossonay, Suisse 13 juillet 2003 45

VII Deux petit discours
Cossonay, Suisse 13 juillet 2003 51

VIII U n goût d ’ éternité


Lassy, France 17 juillet 2003 57

IX L a jeunesse , un temps pour l ’ aspiration


Lassy, France 18 juillet 2003 69

X D evenir maître de vous même


Lassy, France 19 juillet 2003 81

XI D iscours O tto R.
Lassy, France 19 juillet 2003 87

XII Discours Patrick F.


Lassy, France 19 juillet 2003 93

Suite du sommaire
Table des matières

V ers une humanité unifiée , les USA

XIII Le Sahaj Marg : le plus sûr moyen d’atteindre le but


Dayton 29 Juillet 2003 101

XIV La chaleur de l’amour unit l’humanité


Chicago 1 août 2003 107

XV Pratiquez au lieu de prêcher


San Jose 7 août 2003 115

XVI Nous créons le potentiel en nous même


San Jose à Hayward 8 août 2003 123

XVII Je fais seulement mon travail


San Jose 10 août 2003 129

XVIII La touche divine


Austin 17 août 2003 135

XIX Foi et sagesse


Atlanta 22 août 2003 141

XX Dieu est tout


Molena 23 août 2003 151

XXI Prenez le cœur du Maître


New York 29 août 2003 159

XXII Tout le monde mérite de devenir


New York 31 août 2003 167

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