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Vse 172 0116
Vse 172 0116
L
a plupart des pays en développement et en transition se sont convertis dans un
modèle libéral de politique économique préconisé par les institutions de Bretton
Woods. Ce modèle qualifié de « consensus de Washington » fixe parmi ses
priorités la libéralisation du commerce extérieur et la poursuite d’une croissance
par l’exportation. Ce consensus est remis en question par Joseph Stiglitz, prix Nobel
d’économie en 2001. Il démontre que ce consensus utilise un nombre trop restreint
d’outils avec un objectif trop limité la croissance. Il propose d’élargir les instruments
utilisés et les objectifs. Une analyse des théories de l’échange international est
proposée. Enfin, le succès d’une politique libérale dépend de sa crédibilité. Elle doit
effectivement être crédible pour atteindre ses objectifs.
INTRODUCTION
L’ouverture n’est pas toujours source de gains, surtout dans le cadre d’une libéralisation
trop hâtive. Il est toujours difficile de mettre en évidence empiriquement les gains de
l’ouverture en termes de croissance pour les pays en développement. L’obtention de
gains à l’ouverture nécessite surtout la mise en œuvre de réformes économiques et
politiques adéquates.
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Ainsi, dans la première partie de cet article, nous examinerons les raisons qui ont
poussé les PED à fonder leur espoir dans un processus de libéralisation économique
tout en y apportant une explication théorique. La réussite d’une politique libérale
nécessite l’adhésion de tous, elle doit être crédible pour atteindre ses objectifs. La
question de la crédibilité de la libéralisation commerciale est exposée dans la deuxième
partie de ce travail.
totalement effondrée. Certains des pays les plus engagés dans cette stratégie tels que
l'Inde, la Turquie, la Chine, ou certains pays d'Afrique et d'Amérique Latine ont connu
des résultats économiques décevants et se sont désormais tournés vers une
libéralisation de leur commerce extérieur.
Les PED furent encouragés à abandonner la stratégie par substitution aux importations
pour des stratégies industrielles exportatrices. Dès lors, les politiques basées sur
l'exportation furent considérées comme la condition nécessaire à une amélioration des
résultats industriels, à une croissance rapide et aussi, comme source d'inspiration pour
la mise en œuvre de politiques d'ajustement structurel.
Pour de nombreux auteurs et observateurs (Rodrik, 1991), il est paradoxal que les
années 80 aient été la décennie de la libéralisation du commerce extérieur dans les
PED. Ils ont procédé à la réforme de leur régime commercial pour de multiples raisons.
La crise d'endettement
L'endettement de nombreux PED avait atteint une telle ampleur, que durant les années
1980, on parla de crise d'endettement et de trappe à l'endettement. La crise de la dette
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Peut-être aussi comme l'a souligné Rodrik (1992), la mise en place d'une industrie
manufacturière dans ces pays rend-elle la libéralisation moins menaçante pour les
responsables politiques et économiques. Les principales raisons relèveraient d'un
domaine qui est hors du champ économique. C'est l'objet du troisième point.
En effet, les réformes radicales sont plus faciles à appliquer en période de crise. En
période d'expansion économique, les réformes peuvent se heurter aux réticences de
groupes de pression et être rejetées. La dernière raison est liée au rôle des bailleurs de
fonds internationaux.
Ces deux instances internationales ont joué un rôle primordial dans l'adoption de
mesures libérales par les PED. Pour obtenir des prêts internationaux, les PED devaient
appliquer des réformes commerciales radicales.
Afin de bénéficier de leurs concours, ces pays ont été contraints de réformer leurs
régimes commerciaux (ouverture du marché intérieur, l'uniformisation et la diminution
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Ainsi, le Consensus de Washington constitue la réponse la plus influente qui ait été
apportée au problème de la crise d'instabilité macro-économique des PED d'Amérique
Latine, dont le besoin d'ajustement s'amplifiait.
Dix instruments politiques ont été identifiés pour rétablir les équilibres dans les pays
d'Amérique Latine (J.M. Fontaine, 1992). Ils proposent d'agir sur le déficit fiscal, sur les
dépenses publiques, sur les impôts, sur les taux d'intérêt et de change, de favoriser les
investissements directs en Amérique Latine ; d'accélérer les privatisations et la
dérégulation ; de faire respecter les droits de propriété et enfin, de pratiquer des
politiques commerciales libérales. La fin du protectionnisme et de l'intervention de l'Etat
permettraient d'éliminer les situations de rente.
D'après les chiffres de 1989 de la Banque Mondiale énoncés par Rodrik (1992), 42 pays
ont reçu d'elle des prêts avec l'accord explicite de renoncer au protectionnisme et de
recourir au libéralisme commercial. Tous les pays n'ont pas adopté des réformes
radicales. Parmi les 24 qui ont été évalués, la Banque Mondiale considère que 9 ont mis
en œuvre des réformes commerciales satisfaisantes (le Chili, la Corée, l'Ile Maurice, le
Ghana, Madagascar, le Mexique, les Philippines, le Sénégal et la Turquie).
Les PED qui ont choisi les politiques de croissance par l’exportation ont accru leur part
dans le commerce mondial. La croissance des parts de marché est concentrée sur les
pays émergents qui se sont spécialisés dans les produits manufacturés. La
marginalisation des pays les moins avancés (PMA) dans le commerce mondial se
poursuit (F. Benaroya, J.P. Cling, 2001).
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Les institutions de Bretton Woods et l’OMC ont montré à l’aide d’études empiriques que
la poursuite de la libéralisation commerciale est une priorité pour les PED. Cependant,
ce sujet a fait l’objet de nombreux débats même au sein des institutions internationales.
conteste les gains dont peuvent bénéficier les PED lors d’une amélioration de leur
Washington » dans une série de conférences publiées sous l’intitulé « Joseph Stiglitz
and the World Bank – the rebel within » (J. Stiglitz, 2002)
parfois dans la mauvaise direction. La maladie endémique des pays d’Amérique Latine
politiques économiques qui ne sont pas les plus adéquates à la croissance de long
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Stiglitz préconise de réinventer l’Etat, les économies en développement ont besoin d’un
Etat efficace, démocratique, ouvert, transparent affranchi de la corruption.
On ne peut que partager les analyses de Stiglitz qui rappelle le rôle du contrat social,
met en avant la dimension sociale et politique des programmes d’ajustement.
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Il rappelle les réussites des pays refusant un plan de sauvetage du FMI comme la
Malaisie ou la Chine. Au-delà des limites que peut comporter les réflexions de Stiglitz,
celles-ci sont fondateurs d’une remise en question de la libéralisation et de la
privatisation, d’une réhabilitation du politique (Ph. Hugon, 2003).
Après avoir examiné les raisons qui ont poussé les pays à adopter des politiques
commerciales libérales, nous nous efforcerons d'analyser les implications théoriques du
libre-échange.
Les modèles relatifs au libre-échange occupent une place importante dans la pensée
économique. Deux modèles s'affrontent, celui de la concurrence pure et parfaite et de la
concurrence imparfaite. Les théories du libre-échange ou du protectionnisme ont fait
l'objet de nombreuses publications. Cependant, historiquement, les modèles les plus
connus sont ceux de Ricardo, Heckscher et Ohlin, Krugman et Helpman. Notre attention
a été retenue par l'analyse de ces derniers.
Les thèses développées par Adam Smith (1723-1790) dans l'ouvrage « recherches sur
la nature et les causes de la richesse des nations (1776) » constituent le point de départ
d'Adam Smith du commerce est très limitée. Les modèles de David Ricardo et
d’Heckscher et Ohlin vont plus loin et visent à donner une explication globale de
l'ensemble des flux du commerce international.
Le facteur travail revêt une importance primordiale dans la détermination des avantages
comparatifs de Ricardo. Pour chaque produit, les écarts de productivité entre pays sont
expliqués par des différences technologiques. La théorie ricardienne explique que
chaque pays a intérêt à se spécialiser dans la production de biens pour lesquels il a la
plus grande supériorité ou la moins grande infériorité c'est-à-dire celle pour laquelle un
coût relatif est le plus bas. Le coût de chaque produit pour chaque pays se confond
avec la quantité de travail incorporée. La théorie ricardienne permet de déterminer les
prix relatifs des biens, ainsi que leurs proportions dans l'échange et la production de
chaque pays.
La taille du Marché.
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Dans les hypothèses subsistent aussi des difficultés au niveau de la valeur travail
postulant une proportionnalité rigoureuse entre la valeur et le coût de production, et
ignorant la diversité des éléments de coût.
L'hypothèse de constance des coûts est simpliste ; l'aspect demande, décisif pour la
constitution d'un surplus exportable est méconnu, d'où une notion de taux des échanges
indéterminée. A la parfaite mobilité internationale des produits s'opposent les éléments
suivants : barrière à la mobilité (norme des produits, protectionnisme, distances et coûts
de transport, obstacles institutionnels, différenciation socio-culturelle).
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Krugman (1979, 1980, 1981) montre que la taille relative des pays est un déterminant
du volume des échanges. Plus la production est différenciée, plus le volume des
échanges devient dépendant de la taille des pays. L'accès aux économies d'échelle
permet d'augmenter la taille économique et de bénéficier d'avantages sur ses
concurrents. Ainsi, pour Krugman (1985), la protection unilatérale pourrait favoriser les
exportations en améliorant la compétitivité des entreprises nationales.
Krugman (1993), à côté des deux idées, propose deux raisons essentielles à la
L'argument économique est issu de la théorie des distorsions domestiques que l'on doit
à J. Bhagwati (1971). Selon lui, « si les marchés sont incontestablement imparfaits, le
remède approprié à leurs imperfections ne relève que rarement de la politique
économique par elle-même » et ceci à cause des distorsions domestiques dues à
l'intervention de l'Etat.
L'Etat risque de créer des distorsions plus graves telles que la mauvaise allocation des
ressources que le libre-échange peut rétablir par les mécanismes de marché. Ces effets
pervers sont trop souvent vérifiés dans les pays en développement où l'Etat par des
mesures protectionnistes, écarte les concurrents potentiels des firmes nationales.
Face à cette théorie des distorsions domestiques, il existe un argument cher à Krugman
(1993), l'argument politique. Selon l'auteur, « le libre-échange constitue une très bonne,
voire parfaite politique économique, alors que chercher à le dévier d'une manière
sophistiquée finira probablement à faire plus de mal que de bien ».
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La protection pousse aussi les entreprises à s'écarter des ressources pouvant assurer
le développement et la production. Les entreprises disposant d'un monopole grâce à la
protection, produisent des biens de qualité médiocre à des prix élevés.
Enfin, la protection rend caducs les effets de l'ouverture sur la productivité globale des
facteurs. La protection ne permet pas nécessairement l'amélioration de l'efficacité
technique. L'ouverture doit inciter les entreprises à adopter une stratégie plus
La libéralisation permet d'améliorer l'efficacité car elle permet d'accéder directement aux
technologies les plus performantes et incite les entreprises domestiques concurrencées
à améliorer la productivité totale des facteurs. C'est l'alignement des prix relatifs
internes sur les prix mondiaux qui assure l'amélioration de l'efficacité allocative.
Il existe donc un relatif consensus qui consiste à dire que l’absence d’ouverture est
source de distorsions dans l’allocation des facteurs, en général préjudiciable au
développement.
L’ouverture tend à stimuler la croissance et la convergence entre pays, à condition que
l’environnement macro-économique, politique et institutionnel soit favorable. En ce
sens, l’ouverture est un catalyseur de la croissance (Fontagné et Guérin, 1997) au
moins pour les pays à revenu intermédiaire et à hauts revenus (Ben David et alii, 1999).
Un autre axe de réflexion s’est dégagé autour des effets de la libéralisation sur la
pauvreté et les inégalités internes. Malgré une plus grande ouverture, dans certains
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défavorisés.
La libéralisation commerciale est importante, mais non toujours prioritaire, elle doit
le dit Rodrik (2000), elle n’est pas une fin, mais un moyen.
désastreuses.
La réforme commerciale est souvent accueillie avec scepticisme par le secteur privé.
Après des années d'application de politique d'import-substitution, comme ce fut le cas
de certains pays d'Amérique Latine, il apparaît normal qu'une libéralisation du
commerce extérieur soit confrontée à un problème de crédibilité (Rodrik, 1992).
Un défaut de crédibilité est la réaction normale, car il faut tenir compte du contexte
économique dans lequel s'effectue cette libéralisation. Un défaut de crédibilité peut
compliquer le maintien de la réforme. Les pays en développement concernés sont
confrontés à une grande instabilité macroéconomique.
Ils subissent la détérioration des termes de l'échange, une diminution des entrées de
capitaux étrangers, des sorties massives de fonds ainsi que l'hyper-inflation. S'adresser
au FMI ou à la Banque Mondiale pour bénéficier de plans d'ajustement structurel
suppose l'adoption de réformes, y compris celle du régime commercial. Ces réformes
présentent des coûts budgétaires et sociaux particulièrement lourds, qui peuvent se
transformer en émeutes urbaines.
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Néanmoins, du fait des conditions imposées par les instances internationales, il peut
être contraint, soit d'ignorer les mécontentements, soit d'introduire si possible des
mesures sociales dans ses réformes.
Cette confusion est d'autant plus exacerbée que l'on se trouve en période de crise et
que les choix du gouvernement peuvent, selon le public, être momentanés puisque la
tutelle de la Banque Mondiale n'est que temporaire.
De même, le retard dans l'application des réformes favoriserait l'éviction des politiques
favorables à la libéralisation au profit des partisans du retour au protectionnisme. Le
manque de crédibilité entraîne un certain nombre de conséquences.
Or, une simple anticipation d'un changement de politique suffit à créer des distorsions
dans la structure inter-temporelle des prix relatifs même si, en fin de compte, le
gouvernement maintient la réforme. Ainsi, selon Rodrik, « une libéralisation non crédible
rend les prix actuels justes, avec l'inconvénient d'une future distorsion des prix par
rapport à ceux d'aujourd'hui ».
Le manque de crédibilité peut ainsi engendrer des coûts d'efficacité, comme par
exemple, la non-formation de capital fixe due à la présence de taux d'intérêt élevés,
issue de la diminution de la baisse des taux d'épargne, eux-mêmes la conséquence
d'un accroissement de l'achat de biens importés peu chers.
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La création d'une lourde taxe sur l'investissement est encore une autre conséquence
d'un défaut de crédibilité. Son existence est due à des coûts irrécupérables en capital.
Rodrik (1992) formalise cette idée par un petit modèle. Il précise que de faibles niveaux
d'incertitudes peuvent se traduire par une taxe importante qui peut réduire les incitations
à investir dans les secteurs exportateurs. Tout dépend du degré de l'incertitude. En
présence d'aversion pour le risque, les désaffections pour l'investissement seraient
encore plus fortes du manque de crédibilité créateur de l'incertitude.
Calvo (1990) souligne que la crédibilité peut s'accroître en incluant des politiques qui
vont permettre de faire aboutir l'ajustement. Le succès de la politique commerciale
dépendra des conditions initiales suivantes qui y jouent un rôle déterminant.
Or, on sait qu'un manque de crédibilité pourrait en être la cause, puisque les
Sur le plan micro-économique, la politique tarifaire doit tenir compte de l'évolution des
coûts nationaux ainsi que de la concurrence internationale. Elle doit tenter d'uniformiser
les tarifs dans le but d'éliminer les distorsions de prix relatifs et créer « une neutralité »
du régime commercial par rapport à la production de biens d'exportation ou d'import
substitution. Au niveau macroéconomique, la recherche d'un rééquilibre de la balance
des paiements est l'une des conditions de la réussite de la libéralisation. La maîtrise de
la politique du taux de change et la libéralisation des marchés financiers doivent
compléter la réforme commerciale.
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CONCLUSION
Nous constatons que l'ensemble des modèles qui constituent la nouvelle économie
internationale s'intéresse au commerce international en concurrence imparfaite. Ils ont
cherché le lien entre la dynamique des avantages comparatifs, l'innovation des firmes et
la croissance économique. Cet aspect de la question fera l'objet d'une prochaine
recherche. Nous nous sommes contentés dans cette étude d'exposer les fondements
théoriques de la libéralisation.
ABSTRACT
Most developing countries have changed their position in favor of economic liberalism
encouraged by the international institutions.
This model qualified as the” Washington agreement” is based on commercial free trade
and relies upon the exports growth. This approach has been questioned by Joseph
Stiglitz. According to him, this consensus has shown its limits; Its objectives should be
wider.
A theoretical analysis of international exchange has been proposed.
As a result credibility and complementary policies are the key for the success of free
trade policies.
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