Vous êtes sur la page 1sur 16

VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

L
a plupart des pays en développement et en transition se sont convertis dans un
modèle libéral de politique économique préconisé par les institutions de Bretton
Woods. Ce modèle qualifié de « consensus de Washington » fixe parmi ses
priorités la libéralisation du commerce extérieur et la poursuite d’une croissance
par l’exportation. Ce consensus est remis en question par Joseph Stiglitz, prix Nobel
d’économie en 2001. Il démontre que ce consensus utilise un nombre trop restreint
d’outils avec un objectif trop limité la croissance. Il propose d’élargir les instruments
utilisés et les objectifs. Une analyse des théories de l’échange international est
proposée. Enfin, le succès d’une politique libérale dépend de sa crédibilité. Elle doit
effectivement être crédible pour atteindre ses objectifs.

INTRODUCTION

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


Dans le contexte de la dette de 1982, de la dislocation de l’Union Soviétique, des plans
d’ajustement structurels, les pays en développement (PED) se sont engagés dans la
voie de la libéralisation commerciale.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

Aujourd’hui, le libre-échange semble être la norme et la protection la marge. L’idée


selon laquelle la libéralisation du commerce extérieur favorise la croissance
économique remonte à la théorie classique du commerce international.

La théorie du commerce international souligne les gains de l’échange et ses différents


canaux : la spécialisation, les économies d’échelle, la diffusion du progrès technique.
L’ouverture est perçue comme la solution incontournable dans un processus de
développement. Or, certaines études nuancent cette perception (F. Rodriguez, D.
Rodrick, 1999) en se démarquant des conclusions de la théorie classique de l’échange
international.

L’ouverture n’est pas toujours source de gains, surtout dans le cadre d’une libéralisation
trop hâtive. Il est toujours difficile de mettre en évidence empiriquement les gains de
l’ouverture en termes de croissance pour les pays en développement. L’obtention de
gains à l’ouverture nécessite surtout la mise en œuvre de réformes économiques et
politiques adéquates.

Les organisations internationales ont fortement encouragé la conversion des PED au


modèle libéral. Ce modèle qualifié de « consensus de washington » a constitué la
réponse apportée à leurs problèmes économiques.

Joseph Stiglitz (2001) a dénoncé les mesures néo-libérales du FMI et de la Banque


Mondiale destinées à stabiliser les économies des pays « émergents » d’Amérique

116
ANDESE

Latine : ouverture des marchés, privatisations, contrôle de l’inflation, déréglementation,


discipline budgétaire.

On est donc passé du « consensus de Washington » au « consensus Stiglitzien ».


Stiglitz a proposé quelques principes pour une nouvelle conception du développement.
La réforme commerciale soulève aussi la question de sa crédibilité.

Ainsi, dans la première partie de cet article, nous examinerons les raisons qui ont
poussé les PED à fonder leur espoir dans un processus de libéralisation économique
tout en y apportant une explication théorique. La réussite d’une politique libérale
nécessite l’adhésion de tous, elle doit être crédible pour atteindre ses objectifs. La
question de la crédibilité de la libéralisation commerciale est exposée dans la deuxième
partie de ce travail.

1. LES FONDEMENTS THÉORIQUES DE LA LIBÉRALISATION


COMMERCIALE
Dans les années 80-90, de nombreux PED (Pays en voie de développement) ont
adopté des politiques de libéralisation commerciale en rupture avec les anciennes
politiques protectionnistes.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


Dans les décennies précédentes, les PED avaient majoritairement créé un consensus
autour de la stratégie d'industrialisation par substitution aux importations. La préférence
de cette politique basée sur les barrières tarifaires et non tarifaires, s'est presque
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

totalement effondrée. Certains des pays les plus engagés dans cette stratégie tels que
l'Inde, la Turquie, la Chine, ou certains pays d'Afrique et d'Amérique Latine ont connu
des résultats économiques décevants et se sont désormais tournés vers une
libéralisation de leur commerce extérieur.

Les PED furent encouragés à abandonner la stratégie par substitution aux importations
pour des stratégies industrielles exportatrices. Dès lors, les politiques basées sur
l'exportation furent considérées comme la condition nécessaire à une amélioration des
résultats industriels, à une croissance rapide et aussi, comme source d'inspiration pour
la mise en œuvre de politiques d'ajustement structurel.

1.1. LIBÉRALISATION COMMERCIALE ET CONTRAINTES ÉCONOMIQUES

Pour de nombreux auteurs et observateurs (Rodrik, 1991), il est paradoxal que les
années 80 aient été la décennie de la libéralisation du commerce extérieur dans les
PED. Ils ont procédé à la réforme de leur régime commercial pour de multiples raisons.

Les quatre raisons fondamentales à ces réformes sont les suivantes :

La crise d'endettement

L'endettement de nombreux PED avait atteint une telle ampleur, que durant les années
1980, on parla de crise d'endettement et de trappe à l'endettement. La crise de la dette

117
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

de 1982 et la dislocation de l’Union Soviétique ont conduit les PED à la conversion à un


modèle libéral encouragé par les institutions internationales. C'est dans ce contexte que
se sont déroulées les grandes réformes adoptées par certains pays.

En Afrique et en Amérique Latine, la réforme commerciale était invoquée comme


solution à la crise. Selon Rodrik (1992), il n'existe pas de lien de causalité entre les
régimes de commerce extérieur et la propension aux crises macro-économiques. Par
exemple, les régimes même les plus protectionnistes sont compatibles avec un équilibre
extérieur et un service de la dette ponctuel (l'exemple de la Roumanie).
C'est de la même manière qu'au début des années 80, l'Indonésie et l'Inde n'ont pas
succombé à la crise de la dette quoique leurs politiques commerciales des années 80
aient comporté des restrictions à l'importation. Au vu des résultats macro-économiques
atteint par ces pays, Rodrik (1992) conclut que : « Les pays qui ont traversé une crise
de la dette ont été ceux qui avaient surévalué leurs monnaies et qui avaient laissé des
déficits budgétaires importants s'accumuler pendant de longues périodes ».

La création d'industries manufacturières

La période d'instabilité économique des années 80 ne constituait pas le meilleur


moment pour entreprendre des réformes commerciales. La question est de savoir

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


pourquoi les PVD l' ont fait ?

La libéralisation cherche à privilégier la croissance par les exportations, et notamment


celles des produits manufacturés. Que ce soit au niveau mondial, ou par pays, la
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

corrélation entre croissance économique et développement des échanges ne fait aucun


doute.

Peut-être aussi comme l'a souligné Rodrik (1992), la mise en place d'une industrie
manufacturière dans ces pays rend-elle la libéralisation moins menaçante pour les
responsables politiques et économiques. Les principales raisons relèveraient d'un
domaine qui est hors du champ économique. C'est l'objet du troisième point.

Une crise économique favorise l'applicabilité des réformes

En effet, les réformes radicales sont plus faciles à appliquer en période de crise. En
période d'expansion économique, les réformes peuvent se heurter aux réticences de
groupes de pression et être rejetées. La dernière raison est liée au rôle des bailleurs de
fonds internationaux.

Les pressions exercées par le FMI et la Banque Mondiale sur


les PED

Ces deux instances internationales ont joué un rôle primordial dans l'adoption de
mesures libérales par les PED. Pour obtenir des prêts internationaux, les PED devaient
appliquer des réformes commerciales radicales.

Afin de bénéficier de leurs concours, ces pays ont été contraints de réformer leurs
régimes commerciaux (ouverture du marché intérieur, l'uniformisation et la diminution

118
ANDESE

massive des droits de douane, et la réorientation de la production vers les marchés


extérieurs). Durant les années 80, ces institutions ont exercé une forte pression sur les
gouvernements débiteurs, particulièrement les pays les plus pauvres d'Afrique.
Ces pays à court de liquidités ont adopté les recommandations de la Banque Mondiale.
Ce modèle qualifié de «consensus de Washington» fixe parmi ses priorités la
libéralisation du commerce extérieur et la poursuite d’une croissance par l’exportation.

Ainsi, le Consensus de Washington constitue la réponse la plus influente qui ait été
apportée au problème de la crise d'instabilité macro-économique des PED d'Amérique
Latine, dont le besoin d'ajustement s'amplifiait.

Dix instruments politiques ont été identifiés pour rétablir les équilibres dans les pays
d'Amérique Latine (J.M. Fontaine, 1992). Ils proposent d'agir sur le déficit fiscal, sur les
dépenses publiques, sur les impôts, sur les taux d'intérêt et de change, de favoriser les
investissements directs en Amérique Latine ; d'accélérer les privatisations et la
dérégulation ; de faire respecter les droits de propriété et enfin, de pratiquer des
politiques commerciales libérales. La fin du protectionnisme et de l'intervention de l'Etat
permettraient d'éliminer les situations de rente.

Bon nombre d’économistes partageaient la philosophie de ce modèle. L’affirmation de

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


S. Fischer (1993), directeur général adjoint du FMI en est une preuve : « l’intégration
dans l’économie mondiale est le meilleur moyen pour un pays de croître » (Rodrik,
2000).
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

Le Mexique est l’exemple le plus représentatif de la rupture avec les stratégies


d’industrialisation par substitution aux importations. Ce pays a en effet abandonné sa
politique nationaliste menée pendant des décennies. A partir des années 80, il a lancé
une politique active de libéralisation commerciale qui a débouché sur sa ratification du
GATT (1986), à la mise en place de l’ALENA (1994), à l’adhésion à l’OCDE (1994), et
enfin à l’élection à la présidence de la République de Vicente FOX, favorable à un
approfondissement de l’intégration avec les USA.

D'après les chiffres de 1989 de la Banque Mondiale énoncés par Rodrik (1992), 42 pays
ont reçu d'elle des prêts avec l'accord explicite de renoncer au protectionnisme et de
recourir au libéralisme commercial. Tous les pays n'ont pas adopté des réformes
radicales. Parmi les 24 qui ont été évalués, la Banque Mondiale considère que 9 ont mis
en œuvre des réformes commerciales satisfaisantes (le Chili, la Corée, l'Ile Maurice, le
Ghana, Madagascar, le Mexique, les Philippines, le Sénégal et la Turquie).

L'adhésion à la libéralisation n'est pas due seulement au rôle du FMI et de la Banque


Mondiale et aux perspectives d'accéder plus facilement aux financements étrangers.
Les contraintes économiques ont conduit les pays à adopter des réformes libérales.

Les PED qui ont choisi les politiques de croissance par l’exportation ont accru leur part
dans le commerce mondial. La croissance des parts de marché est concentrée sur les
pays émergents qui se sont spécialisés dans les produits manufacturés. La
marginalisation des pays les moins avancés (PMA) dans le commerce mondial se
poursuit (F. Benaroya, J.P. Cling, 2001).

119
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

Le consensus de Washington a cependant montré ses limites. De nombreux PED ont

rejeté la libéralisation commerciale.

Les institutions de Bretton Woods et l’OMC ont montré à l’aide d’études empiriques que

la poursuite de la libéralisation commerciale est une priorité pour les PED. Cependant,

ce sujet a fait l’objet de nombreux débats même au sein des institutions internationales.

Contrairement à ce que sous-tend le consensus de Washington, la libéralisation

commerciale ne peut être le préalable nécessaire au développement. Personne ne

conteste les gains dont peuvent bénéficier les PED lors d’une amélioration de leur

accès au marché dans le cadre d’accords multilatéraux. L’ampleur de ces gains et la

contrepartie à accorder en termes d’ouverture de leurs propres marchés est désormais

discutée. Ce consensus a été fortement critiqué par J. Stiglitz.

1.2. DU CONSENSUS DE WASHINGTON AU CONSENSUS DE STIGLITZ

Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie en 2001, a remis en cause le « consensus de

Washington » dans une série de conférences publiées sous l’intitulé « Joseph Stiglitz

and the World Bank – the rebel within » (J. Stiglitz, 2002)

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


L’auteur souligne que les mesures préconisées par le consensus de Washington

(libéralisation des échanges, stabilité macroéconomique, prix de concurrence) sont

importantes pour le développement, mais clairement insuffisantes et qu’elles vont

parfois dans la mauvaise direction. La maladie endémique des pays d’Amérique Latine

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

qui a provoqué l’apparition du consensus de Washington a conduit à définir des

politiques économiques qui ne sont pas les plus adéquates à la croissance de long

terme. Il a détourné l’attention des autres causes majeures de l’instabilité macro­

économique, notamment les faiblesses du système financier. En affaiblissant le secteur

financier, la priorité donnée à la libéralisation des marchés a eu pour effet pervers de

contribuer à l’instabilité macro-économique (G. Abraham-Frois, B. Desaigues, 2003).

Joseph Stiglitz a montré que le « consensus de Washington » utilise un nombre trop

restreint d’instruments avec un objectif relativement limité, la croissance économique. Il

indique la nécessité d’élargir les objectifs du développement : amélioration de la santé

et de l’éducation, développement soutenable, équitable, assurant que tous les groupes

sociaux doivent bénéficier du développement, et participer au processus de décision.

Après avoir défini le développement comme une « transformation de la société »,

Joseph Stiglitz critique sévèrement les conceptions antérieures du développement. Les

modèles de développement des années 1960 envisageaient le développement comme

un problème de programmation dynamique peu différent de celui des pays développés.

A partir de 1980, l’accent est mis sur les problèmes macro-économiques,

« l’ajustement » aux déséquilibres budgétaires et aux erreurs de politique monétaire.

Joseph Stiglitz. ne se contente pas de dénoncer le caractère étroit de ces approches ; il

en montre aussi leur contexte «anhistorique» avant de développer un certain nombre de

principes pour une nouvelle conception du développement.

Il redéfinit aussi le rôle de l’Etat.

120
ANDESE

Après avoir sévèrement critiqué les arguments traditionnellement avancés concernant


les échecs de l’action de l’Etat, appelés « Conservative Propositions », Joseph Stiglitz
juge qu’il faut dépasser la vision traditionnelle consistant à tenter de donner des tâches
séparées aux secteurs public et privé. A ses yeux, il convient désormais de considérer
les pouvoirs publics et le secteur privé plus comme des partenaires que comme des
opposants.

Pour préciser cette proposition de vision « complémentaire », il fait cinq propositions


pour une meilleure gouvernance :

1. Restriction de l’intervention publique dans les domaines où des groupes


d’intérêt privés exercent une influence significative,
2. Forte présomption à l’encontre des actions gouvernementales
restreignant la concurrence,
3. Forte présomption en faveur de la transparence dans l’action
gouvernementale,
4. Encouragement à une production privée des biens publics, notamment

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


par l’intermédiaire des organisations non-gouvernementales,
5. Recherche d’un meilleur équilibre entre l’expertise d’une part et la
responsabilité et la représentativité démocratique d’autre part.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

Joseph Stiglitz analyse l’échec de la libéralisation financière au Kenya ou de l’austérité


budgétaire en Asie de l’Est. Il démontre comment les politiques de rigueur financière
répondent aux intérêts de la sphère financière et des pays créanciers du G7 et non aux
intérêts de l’économie mondiale. Il analyse en quoi la libéralisation du commerce
associée à des taux d’intérêt élevés accroît le chômage et la pauvreté, en quoi la
libéralisation des marchés financiers non associée à une réglementation appropriée
accroît l’instabilité économique ou en quoi la privatisation sans stimulation de la
concurrence et sans surveillance des abus du pouvoir de monopole peut aboutir à une
hausse des prix (Ph. Hugon, 2003).

En Russie, la privatisation rapide des entreprises étatiques s’est réalisée dans un


contexte de libéralisation des prix et de forte inflation. La libéralisation financière a
précipité la fuite de l’épargne vers les marchés financiers mondiaux. La hausse des taux
d’intérêts a favorisé la dépression profonde de l’économie. La montée d’une nouvelle
classe «mafieuse» a conduit à une économie de rentes. L’auteur présente, en
contrepartie, les réussites des démarches gradualistes, la réussite de la Chine
comparée à celle de la Russie.

Stiglitz préconise de réinventer l’Etat, les économies en développement ont besoin d’un
Etat efficace, démocratique, ouvert, transparent affranchi de la corruption.

On ne peut que partager les analyses de Stiglitz qui rappelle le rôle du contrat social,
met en avant la dimension sociale et politique des programmes d’ajustement.

121
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

Il rappelle les réussites des pays refusant un plan de sauvetage du FMI comme la
Malaisie ou la Chine. Au-delà des limites que peut comporter les réflexions de Stiglitz,
celles-ci sont fondateurs d’une remise en question de la libéralisation et de la
privatisation, d’une réhabilitation du politique (Ph. Hugon, 2003).

Après avoir examiné les raisons qui ont poussé les pays à adopter des politiques
commerciales libérales, nous nous efforcerons d'analyser les implications théoriques du
libre-échange.

1.3. LES IMPLICATIONS THÉORIQUES DE LA LIBÉRALISATION

Les modèles relatifs au libre-échange occupent une place importante dans la pensée
économique. Deux modèles s'affrontent, celui de la concurrence pure et parfaite et de la
concurrence imparfaite. Les théories du libre-échange ou du protectionnisme ont fait
l'objet de nombreuses publications. Cependant, historiquement, les modèles les plus
connus sont ceux de Ricardo, Heckscher et Ohlin, Krugman et Helpman. Notre attention
a été retenue par l'analyse de ces derniers.

Les thèses développées par Adam Smith (1723-1790) dans l'ouvrage « recherches sur
la nature et les causes de la richesse des nations (1776) » constituent le point de départ

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


de l'analyse classique des échanges internationaux. L'analyse d'Adam Smith met
l'accent sur les vertus de l'échange international par rapport aux situations de non-
échange. Les pays pour échanger doivent avoir des avantages absolus dans au moins
un produit, sinon ils ne peuvent pas participer au commerce international. L'explication
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

d'Adam Smith du commerce est très limitée. Les modèles de David Ricardo et
d’Heckscher et Ohlin vont plus loin et visent à donner une explication globale de
l'ensemble des flux du commerce international.

Le facteur travail revêt une importance primordiale dans la détermination des avantages
comparatifs de Ricardo. Pour chaque produit, les écarts de productivité entre pays sont
expliqués par des différences technologiques. La théorie ricardienne explique que
chaque pays a intérêt à se spécialiser dans la production de biens pour lesquels il a la
plus grande supériorité ou la moins grande infériorité c'est-à-dire celle pour laquelle un
coût relatif est le plus bas. Le coût de chaque produit pour chaque pays se confond
avec la quantité de travail incorporée. La théorie ricardienne permet de déterminer les
prix relatifs des biens, ainsi que leurs proportions dans l'échange et la production de
chaque pays.

Depuis Ricardo, le concept de l'avantage comparatif a beaucoup évolué et élargi le


champ de ses éléments constitutifs et explicatifs.

C'est ainsi qu’Aquino (1981) en a établi trois :

Les dotations d'un pays en technologie (fondement ricardien),

Le capital physique (foncier, technique et financier),

La taille du Marché.

122
ANDESE

L'approche ricardienne présente cependant un certain nombre de limites dans l'énoncé


de son principe :

Mobilité internationale des produits,

Mobilité nationale des facteurs de production,

Immobilité internationale des facteurs de production,

Absence de coûts de transport d'un pays à un autre,

Les rendements d'échelle sont constants.

Dans les hypothèses subsistent aussi des difficultés au niveau de la valeur travail
postulant une proportionnalité rigoureuse entre la valeur et le coût de production, et
ignorant la diversité des éléments de coût.

L'hypothèse de constance des coûts est simpliste ; l'aspect demande, décisif pour la
constitution d'un surplus exportable est méconnu, d'où une notion de taux des échanges
indéterminée. A la parfaite mobilité internationale des produits s'opposent les éléments
suivants : barrière à la mobilité (norme des produits, protectionnisme, distances et coûts
de transport, obstacles institutionnels, différenciation socio-culturelle).

L'hypothèse de l'immobilité internationale de production ne se réalise pas : mobilité des

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


capitaux, migration de la main-d’œuvre, transferts de technologie, mobilité et transferts
de l'avantage comparatif L'avantage comparatif est analysé entre deux pays et deux
produits. Cela entraîne des difficultés, car la généralisation de l'avantage comparatif
suppose une classification par produits et par pays.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

Heckscher et Ohlin ont approfondi les différences de coûts comparatifs en expliquant


l'échange international par l'abondance factorielle relative et l'intensité relative de
facteurs dans la fabrication des différents biens. Suivant le théorème d'Heckscher et
Ohlin : « chaque pays est incité à produire et à exporter les biens dont l'élaboration a
exigé relativement plus de facteurs abondants, et à importer les produits dont la
production domestique aurait nécessité relativement plus de facteurs rares, du fait que
ceux-ci sont relativement moins coûteux dans les pays où ils sont relativement plus
abondants » (Mucchielli et Sollogoub, 1980).

Samuelson a reformulé la proposition d'Heckscher et Ohlin à partir d'un certain nombre


d'hypothèses conservant la cohérence logique de leur démonstration. Ce théorème d'
Heckscher et Ohlin fonde la théorie néo-classique de l'échange.

Les modèles de Ricardo et d'Heckscher et Ohlin supposent que les fonctions de


production sont à rendements décroissants. Sous l'hypothèse de rendements
décroissants des facteurs, on aboutit à la convergence des rémunérations de facteurs
(travail et capital) et les coûts de production tendent à s'égaliser. Le libre-échange
permet ainsi d'aboutir à l'égalisation des prix des facteurs de production. Cette
hypothèse ne peut expliquer l'échange international dans son ensemble.

En effet, le libre-échange en concurrence parfaite ne reflète pas la réalité.

123
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

Des auteurs de la nouvelle théorie du commerce international se sont intéressés à


l'imperfection des marchés et donc au caractère imparfait de la concurrence, permettant
ainsi le passage de l'optimalité du libre-échange en concurrence parfaite à sa simple
nécessité en concurrence imparfaite. C'est la démarche de Krugman.

Krugman (1979, 1980, 1981) montre que la taille relative des pays est un déterminant
du volume des échanges. Plus la production est différenciée, plus le volume des
échanges devient dépendant de la taille des pays. L'accès aux économies d'échelle
permet d'augmenter la taille économique et de bénéficier d'avantages sur ses
concurrents. Ainsi, pour Krugman (1985), la protection unilatérale pourrait favoriser les
exportations en améliorant la compétitivité des entreprises nationales.

En effet, l'augmentation de la production consécutive au protectionnisme devrait


provoquer l'abaissement des coûts marginaux (économies d'échelle, effets
d'apprentissage). Par ailleurs, pour que les ventes supplémentaires sur le marché
intérieur soient rentables, il faut que les coûts marginaux soient bas, relativement à la
recette marginale, ce qui incite l'entreprise à les abaisser grâce notamment à des
investissements en recherche-développement.

Krugman (1993), à côté des deux idées, propose deux raisons essentielles à la

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


primauté du libre-échange en concurrence imparfaite sur la protection. Il distingue des
arguments économiques et politiques. Il précise que la nouvelle théorie du commerce
international montre la nécessité du libre-échange en concurrence imparfaite, tout en
réfutant l'hypothèse de son optimalité.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

L'argument économique est issu de la théorie des distorsions domestiques que l'on doit
à J. Bhagwati (1971). Selon lui, « si les marchés sont incontestablement imparfaits, le
remède approprié à leurs imperfections ne relève que rarement de la politique
économique par elle-même » et ceci à cause des distorsions domestiques dues à
l'intervention de l'Etat.

L'Etat risque de créer des distorsions plus graves telles que la mauvaise allocation des
ressources que le libre-échange peut rétablir par les mécanismes de marché. Ces effets
pervers sont trop souvent vérifiés dans les pays en développement où l'Etat par des
mesures protectionnistes, écarte les concurrents potentiels des firmes nationales.

Face à cette théorie des distorsions domestiques, il existe un argument cher à Krugman
(1993), l'argument politique. Selon l'auteur, « le libre-échange constitue une très bonne,
voire parfaite politique économique, alors que chercher à le dévier d'une manière
sophistiquée finira probablement à faire plus de mal que de bien ».

Pour beaucoup d’économistes, il n'existe pas d'autres politiques simples susceptibles


de faire mieux que le libre-échange. D'après Krugman, « le parfait peut être l'ennemi du
bien », c'est-à-dire que le libre-échange, tout en n'étant pas une politique optimale (en
concurrence imparfaite), est préférable à toute autre politique. En effet, « les gains que
l'on peut attendre de l'optimisation des écarts au libre-échange ne pourraient être
limités ».

124
ANDESE

En concurrence imparfaite, la réduction des coûts de la protection, la croissance de la


productivité industrielle et la recherche de compétitivité représentent les quatre objectifs
que la libéralisation permet d'atteindre :

La protection engendre des coûts que la libéralisation doit permettre d'éliminer. La


protection douanière est créatrice de rentes. Or, cette rente engendre des effets
pervers. Elle est responsable de l'augmentation des prix aux dépens des
consommateurs.

La protection pousse aussi les entreprises à s'écarter des ressources pouvant assurer
le développement et la production. Les entreprises disposant d'un monopole grâce à la
protection, produisent des biens de qualité médiocre à des prix élevés.

Les distorsions tarifaires et la surévaluation du taux de change qui résultent de


l'importation massive de biens capitaux et de technologies étrangères pour la réussite
de la stratégie d'import-substitution sont la cause du biais anti-exportateur.

Enfin, la protection rend caducs les effets de l'ouverture sur la productivité globale des
facteurs. La protection ne permet pas nécessairement l'amélioration de l'efficacité
technique. L'ouverture doit inciter les entreprises à adopter une stratégie plus

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


concurrentielle permettant ainsi de faire croître leur productivité.

La croissance de la productivité industrielle sera rétablie grâce à l' ouverture extérieure


laquelle devra assurer l'obtention de gains en termes d'efficacité technique et en termes
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

d'efficacité allocative (Grellet, 1994).

La libéralisation permet d'améliorer l'efficacité car elle permet d'accéder directement aux
technologies les plus performantes et incite les entreprises domestiques concurrencées
à améliorer la productivité totale des facteurs. C'est l'alignement des prix relatifs
internes sur les prix mondiaux qui assure l'amélioration de l'efficacité allocative.

Il existe donc un relatif consensus qui consiste à dire que l’absence d’ouverture est
source de distorsions dans l’allocation des facteurs, en général préjudiciable au
développement.
L’ouverture tend à stimuler la croissance et la convergence entre pays, à condition que
l’environnement macro-économique, politique et institutionnel soit favorable. En ce
sens, l’ouverture est un catalyseur de la croissance (Fontagné et Guérin, 1997) au
moins pour les pays à revenu intermédiaire et à hauts revenus (Ben David et alii, 1999).

Cependant, l’ouverture n’est pas toujours source de gains. L’accroissement de la


concurrence étrangère du fait de l’ouverture des marchés domestiques peut se traduire
par un processus de désindustrialisation si les entreprises locales ne disposent pas d’un
environnement propice pour investir dans de nouvelles activités où elles seraient
compétitives. Des pays comme la Russie, l’Afrique du Sud et de nombreux autres pays
africains ont connu de telles situations liées à une libéralisation trop hâtive.

Un autre axe de réflexion s’est dégagé autour des effets de la libéralisation sur la
pauvreté et les inégalités internes. Malgré une plus grande ouverture, dans certains

125
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

PED, on n’a pas constaté systématiquement d’amélioration du sort des plus

défavorisés.

Les controverses sur l’impact de la libéralisation commerciale sur la pauvreté sont

nombreuses (Demurger, 2000 et Li, 1999).

La libéralisation commerciale est importante, mais non toujours prioritaire, elle doit

s’intégrer dans une stratégie de développement et de lutte contre la pauvreté. Comme

le dit Rodrik (2000), elle n’est pas une fin, mais un moyen.

La réforme commerciale soulève d'autres types de problèmes comme celui de la

crédibilité. En effet, la réussite de la libéralisation commerciale exige un certain degré

de crédibilité, car toute absence de crédibilité peut entraîner des conséquences

désastreuses.

2. CRÉDIBILITÉ ET RÉUSSITE DE LA LIBÉRALISATION


COMMERCIALE
La réforme commerciale soulève de nouveaux problèmes. Sa réussite exige l'adhésion
des milieux d'affaires, de la classe politique, des travailleurs, enfin de toute la
population. La réforme du commerce extérieur doit être crédible pour atteindre ses

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


objectifs et surtout pour contenir les réactions des opposants à la libéralisation qui
peuvent la faire échouer. Ce problème de crédibilité de la réforme commerciale a été
principalement exposé dans le modèle de Rodrik (1992) et souligné dans les travaux
d'Attri (1990).
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

2.1. LES CONDITIONS DE CETTE RÉUSSITE

La réforme commerciale est souvent accueillie avec scepticisme par le secteur privé.
Après des années d'application de politique d'import-substitution, comme ce fut le cas
de certains pays d'Amérique Latine, il apparaît normal qu'une libéralisation du
commerce extérieur soit confrontée à un problème de crédibilité (Rodrik, 1992).

Un défaut de crédibilité est la réaction normale, car il faut tenir compte du contexte
économique dans lequel s'effectue cette libéralisation. Un défaut de crédibilité peut
compliquer le maintien de la réforme. Les pays en développement concernés sont
confrontés à une grande instabilité macroéconomique.

Ils subissent la détérioration des termes de l'échange, une diminution des entrées de
capitaux étrangers, des sorties massives de fonds ainsi que l'hyper-inflation. S'adresser
au FMI ou à la Banque Mondiale pour bénéficier de plans d'ajustement structurel
suppose l'adoption de réformes, y compris celle du régime commercial. Ces réformes
présentent des coûts budgétaires et sociaux particulièrement lourds, qui peuvent se
transformer en émeutes urbaines.

L'Etat, dont le pouvoir est discrétionnaire, peut à ce moment changer de politique. Ce


pouvoir soulève le problème de la « cohérence temporelle des politiques optimales » et
joue un rôle essentiel dans la crédibilité de la politique commerciale.

126
ANDESE

Néanmoins, du fait des conditions imposées par les instances internationales, il peut
être contraint, soit d'ignorer les mécontentements, soit d'introduire si possible des
mesures sociales dans ses réformes.

Cependant, les engagements du pouvoir quant à la réforme demeureront souvent


suspects aux yeux du public. Nous avons un exemple d'asymétrie de l'information. Il se
pose lorsque l'Etat a des difficultés à faire connaître ses engagements en matière de
réformes au secteur privé.

Le fait de changer brutalement de politique du jour au lendemain, peut selon Rodrik,


créer une confusion dans le public entre un gouvernement soudain « libéral » et un
gouvernement jadis « redistributeur » qui favorisait le protectionnisme.

Cette confusion est d'autant plus exacerbée que l'on se trouve en période de crise et
que les choix du gouvernement peuvent, selon le public, être momentanés puisque la
tutelle de la Banque Mondiale n'est que temporaire.

En outre, même si le gouvernement fait croire à sa bonne volonté, sa politique se


heurtera aux pressions des forces politiques. En effet, face au surendettement lié au
déséquilibre de la balance des paiements et au sous-investissement issu du manque de

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


confiance dans la réforme par les investisseurs privés, les équilibres
macroéconomiques seraient soumis à de nouvelles tensions, forçant certains
gouvernements bien intentionnés à faire avorter le processus de « réforme ».
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

De même, le retard dans l'application des réformes favoriserait l'éviction des politiques
favorables à la libéralisation au profit des partisans du retour au protectionnisme. Le
manque de crédibilité entraîne un certain nombre de conséquences.

2.2. DES CONSÉQUENCES PRÉJUDICIABLES SI ABSENCE DE CRÉDIBILITÉ

Tout d'abord, le défaut de crédibilité réduit les incitations à l'ajustement, lesquelles


retardent les gains d'efficacité productive de la libéralisation. En effet, le secteur privé ne
s'engagera dans les nouveaux secteurs que s'il est persuadé que les mesures adoptées
seront maintenues et que les réformes se poursuivront.

S'il y a un manque de crédibilité, les gains de productivité seront alors retardés.

Or, une simple anticipation d'un changement de politique suffit à créer des distorsions
dans la structure inter-temporelle des prix relatifs même si, en fin de compte, le
gouvernement maintient la réforme. Ainsi, selon Rodrik, « une libéralisation non crédible
rend les prix actuels justes, avec l'inconvénient d'une future distorsion des prix par
rapport à ceux d'aujourd'hui ».

Le manque de crédibilité peut ainsi engendrer des coûts d'efficacité, comme par
exemple, la non-formation de capital fixe due à la présence de taux d'intérêt élevés,
issue de la diminution de la baisse des taux d'épargne, eux-mêmes la conséquence
d'un accroissement de l'achat de biens importés peu chers.

127
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

La création d'une lourde taxe sur l'investissement est encore une autre conséquence
d'un défaut de crédibilité. Son existence est due à des coûts irrécupérables en capital.
Rodrik (1992) formalise cette idée par un petit modèle. Il précise que de faibles niveaux
d'incertitudes peuvent se traduire par une taxe importante qui peut réduire les incitations
à investir dans les secteurs exportateurs. Tout dépend du degré de l'incertitude. En
présence d'aversion pour le risque, les désaffections pour l'investissement seraient
encore plus fortes du manque de crédibilité créateur de l'incertitude.

On peut se poser la question de savoir si les gouvernements peuvent renforcer la


crédibilité de leurs politiques commerciales ?

Calvo (1990) souligne que la crédibilité peut s'accroître en incluant des politiques qui
vont permettre de faire aboutir l'ajustement. Le succès de la politique commerciale
dépendra des conditions initiales suivantes qui y jouent un rôle déterminant.

La faiblesse du ratio investissement/produit intérieur brut entraîne un ralentissement de


la libéralisation commerciale. L'investissement est le moteur de la croissance. Sa quasi-
absence risque de freiner le développement de certains secteurs.

Or, on sait qu'un manque de crédibilité pourrait en être la cause, puisque les

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


investisseurs privés ne s'engagent que s'ils sont persuadés que la libéralisation
aboutira. De même, plus le marché du travail sera un marché compétitif et flexible, plus
rapide sera le processus de libéralisation. Un marché compétitif et flexible permet de
supporter la concurrence accrue qui touche les secteurs jadis protégés. La main-
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

d’œuvre parvient ainsi plus rapidement à affronter la concurrence domestique et


étrangère.

La réussite de la libéralisation commerciale dépend de la mise en place de politiques


économiques adéquates. Pour Grellet (1994), elle s'effectue au niveau macro et micro
économique.

Sur le plan micro-économique, la politique tarifaire doit tenir compte de l'évolution des
coûts nationaux ainsi que de la concurrence internationale. Elle doit tenter d'uniformiser
les tarifs dans le but d'éliminer les distorsions de prix relatifs et créer « une neutralité »
du régime commercial par rapport à la production de biens d'exportation ou d'import­
substitution. Au niveau macroéconomique, la recherche d'un rééquilibre de la balance
des paiements est l'une des conditions de la réussite de la libéralisation. La maîtrise de
la politique du taux de change et la libéralisation des marchés financiers doivent
compléter la réforme commerciale.

En règle générale, les pays en développement choisissent de libéraliser en priorité les


secteurs de biens intermédiaires et de capitaux parce que non seulement, ils présentent
peu d'intérêts nationaux, mais parce qu'ils favorisent aussi l'industrialisation.

Selon Grellet (1994), ce choix de libéralisation sectorielle a deux effets négatifs : le


renforcement du taux de protection effectif des industries situées en aval, puis la priorité
donnée aux industries capitalistiques. Mais, à court terme, la libéralisation permet
d'assurer la restructuration de l'appareil productif. On peut juger des principaux effets de

128
ANDESE

la libéralisation commerciale à travers les travaux théoriques de nombreux auteurs,


notamment Lucas (1988) et rodrik (1992), qui s'inscrivent dans le cadre de la nouvelle
théorie du commerce international.

CONCLUSION

Nous constatons que l'ensemble des modèles qui constituent la nouvelle économie
internationale s'intéresse au commerce international en concurrence imparfaite. Ils ont
cherché le lien entre la dynamique des avantages comparatifs, l'innovation des firmes et
la croissance économique. Cet aspect de la question fera l'objet d'une prochaine
recherche. Nous nous sommes contentés dans cette étude d'exposer les fondements
théoriques de la libéralisation.

Notre analyse nous a permis de constater que même si la libéralisation commerciale


n'est pas une politique optimale, elle s'impose quelquefois dans des options de
développement. Elle doit cependant être crédible et accompagnée de politiques
complémentaires afin de maximiser les possibilités de réussite.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


La mise en œuvre d'une réforme commerciale exige le respect de conditions initiales
dans tous les pays en voie de développement. Or, ces derniers ne sont pas tous
homogènes, ce qui complique les interventions du Fonds Monétaire international et de
la Banque Mondiale.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

ABSTRACT

Most developing countries have changed their position in favor of economic liberalism
encouraged by the international institutions.
This model qualified as the” Washington agreement” is based on commercial free trade
and relies upon the exports growth. This approach has been questioned by Joseph
Stiglitz. According to him, this consensus has shown its limits; Its objectives should be
wider.
A theoretical analysis of international exchange has been proposed.
As a result credibility and complementary policies are the key for the success of free
trade policies.

MOTS CLÉS : LIBERALISATION COMMERCIALE, THEORIES DU COMMERCE INTERNATIONAL,


CONSENSUS DE WASHINGTON, CONSENSUS DE STIGLITZ, CREDIBILITE

KEYWORDS : COMMERCIAL LIBERALIZATION, INTERNATIONAL TRADE THEORIES,


WASHINGTON CONSENSUS, STIGLITZ CONSENSUS, CREDIBILITY

129
VIE ET SCIENCES ÉCONOMIQUES

BIBLIOGRAPHIE

) ABRAHAM-FROIS G et DESAIGUES B (2003), « du consensus de Washington au


consensus stiglitzien », Revue d’économie politique, janv-fév.
) AMABLE B. et GUELLEC D. (1992), « les théories de la croissance endogène »,
Revue d'économie politique, volume 102, n° 3, mai-juin.
) BARBET P. et BENZONI L. (1991), « rendements croissants et concurrence
internationale : vers la déréglementation stratégique », Revue d'économie
industrielle, ler trimestre, n° 55.
) BENAROYA JP et CLING JP. (2001), « crise du développement et impasse des
négociations commerciales multilatérales », Revue française d’économie, oct.
) BHAGWATI J. (1990), protectionnisme, Bordas, Paris.
) BHAGWATI J. (1991), Political Economy and International Economics, The
Massachusetts Institute of Technology Press, Cambridge, Massachusetts, London,
England.
) BHAGWATI J. (1994), “Free trade: old and new challenges”, The Economic Journal,
mars.
) BLISS C. (1989), "Trade and Development", in CHENERY H. and SRINIVASAN

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


T.N., Handbook of Development Economics 2, pp. 1187-1240.
) BRADFORD Jr C.I (1992), Options stratégiques pour l'Amérique Latine dans les
années quatre vingt-dix, OCDE, Paris.
) BROHMAN J. (1995), "Economism and Critical silences in Development studies: a
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

theorical critic of neoliberalism », Third World Quarterly, Vol. 16, n° 2, juin.


) BUFFLE E.F. (1984), "The Macroeconomics of Trade Liberalization", Journal of
International Economics, n° 17, pp.121-137.
) BUFFLE E.F. et SPILLER P.T. (1986) "Trade Liberalization in Oligopolistic
Industries (The Quota Case)", Journal of International Economics, n° 20, pp. 65-81.
) DEVARAJAN S. et RODRIK D. (1989), « Trade Liberalization in Developing
Countries: Do Imperfect Competition and Scale Economies Matter? », The American
Economic Review volume 79, n° 2, mai.
) DORNBUSCH R. (1992), "The Case for trade liberalization in Developing
Countries", Journal of Economic Perspectives, Vol. 6, Number 1, Winter, pp. 69-85.
) EDWARDS S. (1993), "Openness, Trade Liberalization, and Growth in Developing
Countries", Journal of Economic Literature, Vol. X)OU, September, pp.1358-1393.
) FISCHER S (1993), « the role of macroeconomic factors in growth”, journal of
monetary economics 32.
) FONDS MONETAIRE INTERNATIONAL (1994), Statistiques financières
internationales, annuaire, IMF publications, Washington D.C.
) FONTAINE J.M. (1992), réformes du commerce extérieur et politique de
développement, Presses Universitaires de France, Paris.
) FOUQUIN M. (1993), « le développement du régionalisme commercial », La Lettre
du CEPII, n° 118, novembre.

130
ANDESE

) GRELLET G. (1992), « Pourquoi les PED ont-ils des rythmes de croissance aussi
différents ? (un survol de quelques orthodoxies contemporaines) », Revue Tiers-
Monde, n° 129, janvier-mars.
) GRELLET G. (1994), Les politiques économiques des pays du Sud, PUF, Paris.
) GROSSMAN G. et HELPMAN E. (1990), "Comparative Advantage and Long-Run
Growth", The American Economic Review, Volume 80, n° 4, Septembre.
) GROSSMAN G. et HELPMAN E. (1990), "Trade, Innovation and Growth", The
American Economic Review, volume 80, n° 2, mai.
) GROSSMAN G. et HELPMAN E. (1991a), "Endogenous Product Cycles", The
Economic Journal, n° 101, septembre.
) GROSSMAN G. et HELPMAN E. (199lb), "Trade, Knowledge spillovers, and
growth", European Economic Review, n° 35.
) HARRIS R. (1984), "Applied General Equilibrium Analysis of Small Open Economies
with Scale Economies and Imperfect Competition", The American Economic
Review, volume 74, n° 5.
) HELLIER J. (1993), "la similitude dans l'échange international : une revue critique
des approches théoriques", Revue française d'économie, Vol. VIII, 1, hiver.
) HELPMAN E. et RAZIN A. (1991), International Trade and Trade Policy, The

Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE


Massachusetts Institute of Technology Press, Cambridge, Massachusetts, London,
England.
) HENIN P.Y et RALLE P. (1992), « les nouvelles théories de la croissance. Quelques
apports pour la politique économique », Revue d'économie politique, décembre,
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.65.75.43 - 21/07/2019 16h01. © ANDESE

hors-série.
) HUGON PH (2003), “Joseph Stiglitz, la grande désillusion” Revue d’économie
politique, Janv-Fév.
) KRUEGER A. (1984), « Trade Policies in Developing Countries », in R. W. Jones
and P.B. Kenen, Handbook of International Economics.2
) KRUGMAN P. (1979), "increasing returns, monopolistic competition and
international trade", journal of International Economics, n° 9, p. 469-479.
) KRUGMAN P. (1980), "Scale economies, product differentiation and the pattern of
trade", The American Economic Review, n° 5, décembre.
) KRUGMAN P. (1981),"Intra-industry specialization and the gains from trade",
Journal of political Economy, n°5
) KRUGMAN P. (1985), "import protection as export promotion: international
competition in the presence of oligopolies and economies of scales", in
KIERZKOWSKI H., ed., Monopolistic Competition and International Trade, Oxford
University press.
) KRUGMAN P. (1989), "New trade theory and the less developed countries", in
CALVO et al. Debt, Stabilization and Development, pp. 347-345.
) KRUGMAN P. (1993), "The narrow and broad arguments for free trade", the
American Economic Review, n° 2, mai.
) KRUGMAN P. et OBS'IFELD (1995), Economie internationale, De Boeck et Larcier,
Bruxelles.

131

Vous aimerez peut-être aussi