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La

fonction d’AJOUT

Les ajouts, comme les valents (sujet, compléments d’objet direct et indirect, attributs du
sujet et du COD), sont les dépendants d’une tête. Cependant, contrairement aux valents
qui sont obligatoires (régis/ sélectionnés par la tête), les ajouts sont optionnels.

La fonction ajout regroupe tous les constituants optionnels : les épithètes, la
plupart des circonstanciels, les phrases relatives, les appositions, les vocatifs, les
incises.
- épithète : une grande muraille, une muraille impréssionnante, une table longue de
deux mètres
- circonstanciel : Ce matin, Paul s’est disputé avec Marie. Jean dort la nuit.
- relatives : un livre qu’il faut lire, un livre dont on ne retient rien
- apposition (à droite d’un nom et avec prosodie incidente, marquée souvent à
l’écrit par des virgules) : Mes amis, linguistes pour la plupart, habitent à l’étranger.
Paul, ton professeur de français, habite dans le Quartier Latin.
- vocatifs : Vous avez, Marie, toutes les raisons d’être en colère. // Monsieur, le train
est parti il y a déjà deux minutes.
- incises (dont les incises de citation) : Jean, me semble-t-il, ne viendra pas
aujourd’hui. Marie est malade, dit-il.

La fonction ajout se caractérise par trois propriétés formelles :
1) optionnalité (les ajouts peuvent être supprimés sans toucher à la grammaticalité
de la phrase) : (Cette année), l’été a été pluvieux.
N.B. Attention aux circonstanciels obligatoires, qui sont donc des valents et non des
ajouts :
o circonstanciels obligatoires qui se combinent avec des verbes locatifs (de
localisation temporelle ou spatiale) => les circonstanciels sont dans ces
cas des COI de ces verbes : Le petit Pierre se rend à l’école. vs. *Le petit
Pierre se rend. // Je vais à Paris. vs. *Je vais. // Il habite rue de Richelieu. vs.
*Il habite. // Ce grand magasin est situé avenue de l’Opéra. vs. *Ce grand
magasin est situé. // Notre prochaine réunion se déroulera la semaine
prochaine. vs. * Notre prochaine réunion se déroulera.
o circonstanciels obligatoires qui se combinent avec des verbes de
comportement (se conduire, se comporter...) => les circonstanciels sont
dans ces cas des COI de ces verbes : Paul se conduit bien. Marie se comporte
correctement.
o circonstanciels obligatoires qui se combinent avec des verbes transitifs de
transfert => les circonstanciels sont dans ces cas des COD de ces verbes :
Cette rue mesure trois cents mètres. vs. *Cette rue mesure. // Ce collier coûte
1000 euros. vs. *Ce collier coûte.
2) (typiquement) mobilité dans la phrase (ils peuvent être déplacés facilement) :
Pendant ce temps, Hélène fit sortir la voiture du garage. // Hélène, pendant ce
temps, fit sortir la voiture du garage.
3) non-unicité (ils peuvent être plusieurs dans la phrase, contrairement aux
constituants obligatoires, qui sont généralement uniques) : Cette année, en Alsace,
contrairement aux prévisions de la météo, l’été a été pluvieux, au grand dam des
vignerons.

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Les catégories grammaticales qui réalisent la fonction ajout sont très variées : GN,
GPrép, GAdj, GAdv, GV, PhSub.
- GN : Elle éclata de rire, les deux mains pressées sur la gorge. Dimanche dernier, je suis
allée au théâtre. Elle sera de retour la semaine prochaine. La nuit, les loups hurlent.
- GPrép (un très grand nombre !) : L’avion décolla à midi. Il prend du café après le
repas. Elle partit avant la fin de la réunion. Il sera de retour dans 10 jours. Il arrivera vers
midi. Ce château date de la Renaissance. Il est parti depuis midi. Il sera mis au courant dés
son arrivée. Je me suis cassé la tête durant/pendant 3 heures avant de trouver la solution à
ce problème. La dernière réunion a eu lieu en novembre. Nous passerons chez vous entre 10
et 11 heures. Nous avons visité la Côte d’Azur, par une belle après-midi d’été. Versailles est
devenu sous Louis XIV un des plus grands palais d’Europe. Il rougit de honte. L’avion vola
au ras du sol avant de prendre de l’altitude. Avec tant de qualités, il n’a pas réussi.
- GAdv : Alors, elle éclata de rire. Il reviendra bientôt. La locomotive a violemment heurté
une voiture.
- GV (infinitif, participe passé, participe présent ou gérondif) : Elle vient prendre son
courrier. Rentré chez lui, Pierre a pu reprendre son rythme. Jean n’arrêtait pas de harceler
Marie, continuant de penser à ses problèmes financiers. En attendant votre réponse, je vous
souhaite les meilleures salutations.
- Phrase (en particulier PhSub) : Je lis si je peux. Je viendrai parce que tu me l’as
demandé. Je connais la fille à qui tu as parlé. Il a travaillé comme on lui avait demandé.
Paul dit-il est un imbécile.
+ phrases participiales : Le chat parti, les souris dansent. Les copies corrigées, il put se
reposer. L’orage se calmant, ils sortirent en ville.

Les ajouts peuvent s’adjoindre à n’importe quel type de syntagme.
- dans la phrase : Souvent, Paul parle à sa sœur. Ce matin, je me suis réveillé très tôt.
- dans le GN : un comportement très famille, un appartement très garçonnière, un
discours nickel, un achat tendance ; vos collègues les linguistes, le facteur coût ; des
ateliers coiffure ; un programme enfants, un espace fumeurs, une pause détente, son
déménagement rue Lepic ; une grande muraille, une muraille impréssionnante, une
table longue de deux mètres
- dans le GAdj : bleu ciel ; trois fois supérieur à la moyenne
- dans le GPrép : deux heures avant le match
- dans le GAdv : très gentiment, seulement récemment.
- dans le GV : trop parler, parle souvent à sa mère, savoir par cœur sa leçon, savoir de
source sûre que la terre est ronde

La notion d’ajout incident : des ajouts mobiles dans la phrase, servant de commentaire
par rapport au contenu principal et ayant une prosodie incidente (constituants isolés
prosodiquement du reste de la phrase dans laquelle ils apparaissent : Jean, chose
curieuse, a mis son pullover à l’envers. Paul, l’imbécile, a oublié ses clés au bureau. Ma
voiture, cette saleté, est encore tombée en panne. Elève médiocre, Jean a malgré tout
obtenu son bac. Jean, me semble-t-il, n’a pas réussi son bac.) ; les ajouts non-incidents ont
une prosodie intégrée (un sandwich maison, la fille que j’ai vue hier).

La fonction d’EXTRAIT

Dans les constructions à extraction, un constituant (qui est interprété comme un
valent ou comme un ajout dans une phrase) n’apparaît pas dans la phrase là où on

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l’attendrait dans sa position canonique/in-situ, mais plutôt à l’initiale de la phrase => il
est « manquant » dans la phrase (=> donc phrase « incomplète) et il est « extrait » à
l’initiale de la phrase.
- construction antéposée/topicalisée (nombre assez limité !) : 200000 euros, il a vendu sa
maison ◊ . A Marie, je parlerai ◊ demain.
- certaines phrases exclamatives : Quelle chance vous avez ◊ ! (Regarde) [Comme il est
fort ◊ ] !
- phrases interrogatives partielles : Comment allez-vous ◊ ? Quel jour est-ce que ton
ami arrive ◊ ? Quelle est la couleur de sa blouse ? On me demande [où il est allé ◊ pendant
le cours.]
- phrases relatives : Je verrai [qui tu verras ◊ ]. Il a voyagé très loin de l’endroit [où il est né
◊].
- certaines subordonnées concessives : [Quelque problème que vous ayez ◊ ], dites-le moi.
- certaines subordonnées causales : Tout le monde apprécie sa présence, [tellement il est ◊
gentil]. Elle agaçait tout le monde, [tant elle criait ◊].
- construction comparative : Il est fort [comme était ◊ son père].
- construction comparative corrélative : Moins de temps vous avez ◊, plus de mal vous
avez ◊ pour finir.

Dans les constructions à extraction, le constituant « extrait » entretient une
relation syntaxique avec la position du matériel « manquant » (c’est pour cela qu’à
chaque fois qu’on identifie un constituant extrait dans une phrase, il faut préciser à
quelle fonction syntaxique il correspond par rapport à sa position d’origine).

Extraction à distance : La relation syntaxique entre le constituant « extrait » et le
matériel « manquant » ne se limite pas à une même phrase, mais peut associer une
phrase racine et une ou plusieurs subordonnées (=> relation à distance) : A qui [Paul
pense [qu’il faudrait s’adresser ◊ ]] ?

Propriété de la plupart des constructions à extraction : autorisation de l’inversion dite
« stylistique » (= inversion du sujet nominal) : Je me demande [quel livre Paul lit en ce
moment]. vs. Je me demande [quel livre lit Paul en ce moment]. // J’ai recommandé le livre
[que Paul lit en ce moment]. vs. J’ai recommandé le livre [que lit Paul en ce moment].

La fonction de PÉRIPHÉRIQUE (ou détaché)

Les ‘périphériques’ sont des constituants qui apparaissent à la périphérie de la phrase,
ne faisant pas partie de la structure syntaxique de la phrase. Ils ont une prosodie
incidente. Ils sont fréquents à l’oral. Ils correspondent à : 1) des constituants qui
apparaissent dans les constructions disloquées ou bien 2) des constituants ‘thème
suspendu’.

1) Les disloqués (gauches ou droites ; liés à un élément présent dans la phrase :
généralement, repris par une expression anaphorique ou cataphorique) :
- dislocation à gauche : Paul, je n'aime pas son style. Jean, je ne parle jamais à cet idiot.
Les pommes, on les a mangées. Des pommes, il y en avait pas. Les Toyota, ça marche bien.
Médecin, Paul l’est depuis 5 ans.
- dislocation à droite : Tout le monde prétend la connaître, Marie. Il est venu, Jean. Il n’y en
avait pas, des pommes. Il m’a dit de me reposer, le médecin.

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- plusieurs disloqués dans la même phrase : Moi, ma mère, elle est musicienne. Je lui
parlerai, moi, à Jean. Moi, je lui parlerai, à Jean.

Les dislocations gauches sont plus contraintes que les dislocations droites :
- dislocation gauche : toujours à l’initiale ; toujours un GN (sans préposition) : Paul,
je lui ai parlé. *A Paul, je lui ai parlé.
- dislocation droite : position finale, mais aussi en position médiane : Je le
montrerai aux enfants, le livre. Je le montrerai, le livre, aux enfants. ; présence
obligatoire de la préposition (donc un GPrép) si le marquage s’impose : Je lui ai
parlé, à Paul. *Je lui ai parlé, Paul.

2) Les ‘thèmes suspendus’ (toujours en début de phrase ; jamais repris dans la phrase)
Paul, je crois qu'il n'y a plus rien à espérer. Une fille comme ça, rien à faire. L’Espagne, les
hôtels sont chers. Le cinéma, alors, on se décide ? Les enfants, il faut être ferme.

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N.B. Partie à ajouter au cours sur les compléments !!!

Quelques aspects liés aux groupes verbaux infinitifs (GVinf)
- Alternance GV infinitif vs. Phrase subordonnée en que : Je pense [aller le voir]GVinf. vs. Je
pense [que j’irai le voir]PhSub.
! distribution complémentaire pour les verbes vouloir, aimer, se plaindre,
souhaiter, accepter, offrir, refuser : GVinfinitif obligatoire si les sujets sont
coréférentiels (Je veux venir. vs. *Je veux que je vienne.), Phrase
subordonnée en que obligatoire si les sujets ne sont pas coréférentiels (Je
veux que tu viennes.)
! distribution libre (les deux sont de simples variantes l’une de l’autre) pour
les verbes savoir, espérer, oublier, décider si les sujets sont coréférentiels
(J’espère que je n’ai rien perdu. / J’espère n’avoir rien perdu. // Je décide que
je viendrai. / Je décide de venir.) ou bien pour les verbes proposer,
ordonner, offrir, suggérer, refuser, sembler si le COI du verbe principal est
interprété comme le sujet de l’infinitif (Je lui ai ordonné qu’il aille là-bas. /
Je lui ai ordonné d’aller là-bas.)
N.B. En roumain, c’est le subjonctif qui remporte la compétition sur l’infinitif
(la construction infinitive est perçue comme archaïque) : Sper să reușesc. /
Sper a reuși. // Vreau să vin. / Vreau a veni.

- Certains verbes qui normalement ne sélectionnent pas une préposition exigent à et de
devant le GVinf : Il commence à travailler. J’apprends à nager. Il refuse de venir. Jean
promet de venir. => les verbes principaux sélectionnent un COD (cf. le test cela). Dans ces
cas, les formes à et de ne doivent pas être analysées comme des prépositions, mais
plutôt comme des complémenteurs (∼ ConjSub) = marqueurs du mode infinitif (∼ la
forme a devant l’infinitif roumain ou bien la forme to devant l’infinitif anglais).
A ne pas confondre avec des cas comme : Nous invitons nos lecteurs à nous critiquer. J’ai
chargé mon mari de faire la vaisselle. => les verbes principaux sélectionnent un COI (ici,
les formes à et de sont de vraies prépositions, têtes de GPrép).

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