Vous êtes sur la page 1sur 18

PORFOLIO

L’ART
D’AIMER

Les Amours d’une blonde


Nouvelles Vagues. Des tournages légers
qui permettent de rentrer jusque dans
les chambres des jeunes gens et de
saisir sans ambages les nouveaux codes
amoureux. Les premiers plans des
Amours d’une blonde (Milos Forman,
1965) vont droit au but, tout en
inventant une autre forme de pudeur.
La caméra s’infiltre dans un dortoir
de jeunes ouvrières, mais sur la pointe
des pieds. Des jeunes filles, nous ne
voyons d’abord que leurs mains qui
se frôlent. Ce n’est pas une parade
de séduction, mais un pacte entre
deux meilleures amies. L’une confesse
à l’autre son amour pour un garçon
qui lui a offert une bague. En une
chorégraphie minimale entre paumes
et doigts, presque un tour de
prestidigitation, le précieux anneau
passe de l’une à l’autre. Le chuchotement
du dialogue enrobe la douceur
de ces gestes, véritable entrelacs
d’amour, de confiance et d’amitié.
Joachim Lepastier

78
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Adieu Philippine
être invité à danser le mambo sur
une plage corse dans les années 60,
qui refuserait pareille invitation ?
Les bras tendus et les sautillements
de Liliane (Yveline Céry) dans
Adieu Philippine (Jacques Rozier,
1962) font jongler les contraires :
lascivité et nervosité, grâce de ses
mouvements et gaucherie de son
cavalier, ensorcellement chorégraphique
et documentaire sur la France en
vacances. Loin d’un simple instantané,
une pièce en trois moments. D’abord
un plan large au milieu des autres
danseurs, puis une leçon particulière,
au fond de la paillotte, où les
chamailleries du couple viennent
parasiter l’entrain de la musique.
Enfin, l’apothéose ! Liliane se lève,
elle fixe du regard la caméra qui
vient à elle. La danse les yeux dans
les yeux, avec en bande-son l’écho
d’un chorus extatique. Voilà du
cha-cha-cha vaudeville. D’un duo
désaccordé, on passe au ménage
à trois, accordant au spectateur
la place de l’amant transi. J.L.

Les Enchaînés
Dans Les Enchaînés d’Alfred Hitchcock
(1946), le couple d’espions jusqu’au
dernier moment ne s’aime pas.
Ils se plaisent, ils se désirent, mais
ils ne s’aiment pas. Et puis vient cette
séquence finale ultra-tendue où
Cary Grant découvre Ingrid Bergman sur
son lit de mort, empoisonnée lentement
par son mari. Et ce travelling avant,
début d’un long plan, qui vient enserrer
les mains en train de se joindre du
couple. C’est un pacte, c’est une prière.
De la mort qui les cerne émanent
des bouffées d’amour. Alicia ne sera
pas tant sauvée par le courage de
Devlin que par son amour débordant,
qui la ressuscite plan après plan :
« Say that you love me, it keeps me
awake. » (« Dis-moi que tu m’aimes,
cela me tient éveillée. ») Laura Tuillier

79
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Possessed
Un manteau qui tombe raccorde avec
une montre qui tourne. Deux amants
clandestins arrivent avec une heure
de retard au dîner. Le coup d’œil
furtif échangé ne dit pas seulement
l’embarras du retard, il désigne surtout
cette heure d’amour passée dans la
collure entre le manteau et la montre.
Et plus encore : il désigne la passion
secrète, mais connue du tout
Hollywood, qui unissait Joan Crawford
et Clark Gable. Elle entre par effraction
dans la scène, accueillie par le réalisateur,
Clarence Brown, pilier de la MGM.
Le star system est un art aux dimensions
industrielles de regarder des gens
qui s’aiment. Jean-Philippe Tessé

Mélo
Trouble au paradis au début de
Mélo d’Alain Resnais (1986). Ce sont
deux regards qui ne se croisent pas.
Celui de Sabine Azéma est brillant de
convoitise, l’amande du regard allumée
par le hors-champ : André Dussolier
vient de lui parler d’amour. Celui
de Pierre Arditi, le mari, est au contraire
benoîtement amoureux : quoi de moins
romanesque qu’un homme qui aime
sa femme ? Il vient de se repousser dans
l’ombre pour savourer sa pipe, il ne sait
pas que c’est son bonheur même qui le
condamne. En même temps qu’un mélo,
on a affaire à un formidable film d’amis.
Le bonheur d’Arditi c’est également
de retrouver Azéma après L’Amour
à mort. Et le triangle amoureux, c’est
donc aussi celui que ces deux-là forment
avec Resnais, dont la bienveillance
les éclaire de son halo joueur. L.T.

Tous les autres


s’appellent Ali
L’amour chez Fassbinder est cruel
car il ne peut exister qu’en vase clos :
dès que le couple ouvre la porte à la
société, jugement et hypocrisie entrent
en trombe, jusqu’à ce que les amants
se retournent contre eux-mêmes.
Tous les autres s’appellent Ali (1974)
est sans doute le plus douloureux
et le plus exquis des films de Fassbinder
car le cinéaste se permet d’aimer Emmi
et Ali – ou du moins de nous laisser
croire un instant à cet amour improbable
qui se déclare de manière pourtant
si naturelle. Quand Emmi et Ali sont
seuls, on les aime comme Fassbinder
les aime, ou comme il aimerait
qu’ils soient aimés. Nicholas Elliott

80
cahiers du cinéma AVRIL 2020
Une femme sous influence
Quand, après 2h20 de folies, de
tourments, de confusions, ils sont enfin
seuls… Ils vont se coucher comme
ils devaient le faire aux premières
minutes du film. Après tout Une femme
sous influence (John Cassavetes, 1974)
raconte juste comment on empêche
un couple comme les autres (Gena
Rowlands et Peter Falk) d’aller se
coucher et faire l’amour. Maintenant
elle sourit, ils enlèvent la table, déplient
le canapé-lit, s’envoient des oreillers.
Soudain tout est si léger, simple et
facile. La musique est guillerette, loin
de la danse macabre du Lac des cygnes,
le générique commence « trop tôt », cela
ne nous regarde plus, ils nous ferment
la porte au nez, et on dirait deux acteurs
qui sortent de scène, qui rigolent
dans les coulisses. On éprouve une telle
gratitude après cette épopée torturée.
Ils se sont tellement battus l’un pour
l’autre ! Le cœur se lève. Derrière les
rideaux, Peter Falk ressemble un instant
à Cassavetes, le cinéaste qui a bâti
son œuvre sur des torrents d’amour
et d’amitié. Stéphane Delorme

L’Empire des sens


Une nuit d’été pluvieuse, Sada et Kichi de l’ombrelle, laissant apparaître
sortent de leur chambre d’auberge et leurs visages malicieux. Le sourire de
font une escapade au bord d’une rivière. Kichi, un des plus radieux de l’histoire
Ils ont atteint le point lumineux où du cinéma, pourrait arrêter toutes
chaque instant de leur vie est devenu les guerres, si on comprenait que
un acte d’amour, de joie et de liberté. c’est celui d’un homme qui par amour
Couple clandestin dans un monde a renoncé à toutes les formes de pouvoir.
gagné par la folie du militarisme, Nagisa Ôshima, qui laissait les acteurs
ils retombent en enfance et imitent dans le noir complet débuter les scènes
les yokaïs, ces démons burlesques d’amour et, seul sur le plateau, attendait
du folklore japonais et en particulier leur signal pour rallumer les projecteurs
Bura-Bura, le cyclope-ombrelle et faire tourner la caméra, avait lui aussi
qui avance en rebondissant sur son renoncé à ce pouvoir. Sada remonte
manche. Devenus créatures des les pans de son kimono et la pluie tombe
fleuves et des forêts, ils font partie sur ses jambes. On a vu le sexe de
de ce tissage de tous les éléments Kichi, la vulve de Sada, des fellations et
de la nature, unissant les humains des caresses, tous les gestes amoureux,
et les dieux, les vivants et les morts, mais ce sont ces jambes mouillées
les hommes et les femmes, dans par la pluie qui deviennent les choses
une même harmonie. Dans cette les plus adorables au monde. Dans cette
apologie de la vie, qui était aussi celle chaude nuit de la saison des pluies, on
du monde flottant, rien du corps peut presque sentir l’odeur de la rivière,
et de la sexualité ne peut être tabou. de la terre et de la peau humide de
Pour figurer l’œil unique du yokaï, Sada. L’empire des sens est désormais
les amants percent le papier laqué sans limites. Stéphane du Mesnildot

81
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Jacques Rivette, le veilleur


Je n’ai jamais connu Serge Daney.
Quant à Jacques Rivette, je l’ai croisé
métro Bastille, peu après mon arrivée
à Paris en 1996, et me suis dit
que s’il y avait bien une personne
qu’on pouvait se permettre de
suivre dans les rues de Paris, c’était
Rivette. Après une longue filature,
je l’ai rattrapé sur un trottoir. Suite
à un bref échange de politesses,
nous ne sommes pas devenus amis.
On me dira que les textes de l’un et
les films de l’autre devraient me suffire,
et je serais presque d’accord, si le
« Cinéma, de notre temps » de Claire
Denis, Jacques Rivette, le veilleur,
n’était pas là pour me narguer avec
l’extraordinaire gestuelle de Rivette,
cette manière qu’il avait de brasser
les idées dans l’espace à une
vitesse totalement désynchronisée
de son regard doucement amusé.
Voir, vraiment voir, c’est aimer, et
le cinéma voit mieux que tout. N. E.
Cemetery of Splendour,
Douleur et Gloire
Robert Bresson le faisait dire à la fin
de Pickpocket : « Pour aller jusqu’à toi,
quel drôle de chemin il m’a fallu
prendre... » L’amour ne prend pas
toujours les mêmes voies que les corps :
voilà déjà du scénario, et de la mise
en scène. Une jeune femme baise la
jambe mutilée d’une plus âgée qui fond
en larmes, dans Cemetery of Splendour
d’Apichatpong Weerasethakul (2015).
Un acteur danse sur la scène d’un petit
théâtre avant de raconter l’histoire
d’un ancien amour, et un spectacteur
pleure, dans Douleur et Gloire de Pedro
Almodóvar (2019). La jeune femme est
une médium investie par l’esprit d’un
soldat atteint d’une étrange maladie
du sommeil, que la plus âgée soigne
et aime sans doute, sans s’en rendre
compte. L’acteur dit les mots d’un autre,
qui a écrit la pièce, et le spectateur
ému est, par hasard, l’amant réel qui
a vécu cette histoire il y a longtemps.
Dans les deux cas, l’évidence
terrassante de l’amour est cristallisée
par un autre, une possédée ou un
comédien : un avatar, un être qui passe
par là et se fait, non pas messager
(le cinéma n’est pas qu’une affaire de
signes), mais porteur de gestes autant
que témoin. C’est que dans le cinéma
que l’on aime, les corps et les histoires
peuvent ainsi s’éloigner, se rejoindre, se
séparer à nouveau comme des courbes
déphasées, laisser les récits flotter dans
l’air et les corps danser en liberté, et
puis dans un moment de conjonction,
envoyer une pointe au cœur. Cyril Béghin

82
cahiers du cinéma AVRIL 2020
Le Sport favori de l’homme Steamboat Round
Non, ceci n’est pas une image de the Bend
mansplaining : un peu d’humour
On connaît l’apparition de la
amoureux ! Paula Prentiss, sourire en
garçonnette en salopette, Keechie, dans
coin, l’œil légèrement moqueur, écoute
Les Amants de la nuit de Nicholas Ray.
d’une oreille les lamentations de
Mais John Ford en 1935 a déjà filmé
M. Willoughby (Rock Hudson) mais le
une enfant sauvage, une fille des marais
dévore du regard en buvant son martini
farouche. Un garçon qui a tué pour elle
dry. Le pauvre homme ne voit rien.
l’emmène sur le bateau de son oncle
Ce coup d’œil à son insu en dit long.
pour demander de l’aide. Elle ne bouge
Elle a ferré un gros poisson et ne
pas, le regard planté, ne cillant jamais,
le lâchera pas de si tôt. Empêtré
ne parlant pas, mais toute la mise
et maladroit, il devient son jouet : elle
en scène est comme aimantée. Regard
le noie à demi, le manipule comme
sublime de Ford sur elle, costumée
une grande peluche, lui plâtre et lui
magiquement avec son chapeau qui
déplâtre le bras à la scie à métaux.
laisse tomber sa lanière, sa trop grande
Cette screwball comedy tardive
veste, ses godillots pas lacés, puis
de Howard Hawks (1964) nous rappelle
assise pieds nus sur un coffre. L’oncle
que l’art d’aimer est un irrépressible
tourne le dos à l’encombrante et
plaisir de jouer. Sophie Charlin
pourtant plus tard ils deviendront
les meilleurs amis de la Terre, pilotant
ensemble le gros gouvernail du bateau
à vapeur. Le plus beau portrait
de sauvageonne est donc dépeint par
le bourru John Ford, tout attentif et
attendri devant cette actrice sidérante
tombée du ciel. On reverra peu Ann
Shirley hélas, mais son regard noir
et le regard sur elle (malheur à ceux
qui s’évertuent à parler de male gaze
pour salir l’ensemble du cinéma
hollywoodien !) sont gravés pour
l’éternité. S.D.

Mr and Mrs Smith


Règle de vie : « Ne jamais se séparer
avant de s’être réconciliés. » Comme
souvent, Mr et Mrs Smith sont confinés
depuis plusieurs jours dans leur
chambre sens dessus dessous après une
dispute. Ils finissent par se réconcilier
autour d’un geste ou d’un regard
qui tourne bien et la vie peut reprendre
son cours. Hitchcock, dans cette
comédie sous-estimée de 1941, joue
un autre suspense, sur la brèche entre
rabibochage et rechute. C’est un petit
déjeuner de remariage qui célèbre les
retrouvailles. Tandis que les amoureux
gazouillent en mangeant leurs tartines,
la caméra passe sous la table pour
cadrer leurs quatre pieds. Sur ses pieds
à lui en chaussures vernies, sont posés
ses pieds nus à elle dépassant de
son pyjama noir à pois blancs. Rituel
touchant de petit déjeuner. Mieux que
toute explication, le gros plan raconte
l’intimité du couple dans la sous-
conversation des gestes. Le regard sous
la table s’attendrit devant le spectacle
furtif et annonce déjà malicieusement
une dernière scène de ménage autour
de chaussures de ski. S.C.

83
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

No Home Movie
Quand on pense à l’amour au cinéma, le déchirant et désopilant Aujourd’hui,
on pense le plus souvent à un garçon dis-moi). Si son dernier film, No Home
et à une fille ou, avec un siècle de Movie (2015) est bouleversant par
retard, à deux garçons ou à deux filles. sa façon de se resserrer sur la figure
L’amour romantique. Chantal Akerman maternelle pour lui dire adieu,
a passé une vie à aimer sa mère, il ne faut pas oublier que c’est surtout
à construire une œuvre sur et contre un sublime film d’amour. Et le grand
et avec cet amour. Par ses films, art d’Akerman nous rappelle
nous avons aimé sa mère de loin maintenant que même ce qui peut
(News from Home) ou à travers des sembler petit – aimer par écrans
figures de substitution (à peu près interposés – résonne loin jusque dans
tout le reste, à commencer par notre confinement de 2020. N.E.

La Nuit du chasseur
Aimer est tout un art. Il descend
jusqu’à l’art d’envelopper une pomme
dans un napperon, avec une pince
à linge décrochée d’un sapin de Noël,
et remonte jusqu’au regard d’un enfant.
La pauvreté du cadeau, une pomme,
est le gage d’un amour inconditionnel.
« C’est le plus beau cadeau qu’on
puisse recevoir », répond la vieille
femme en acceptant et la pomme,
et l’amour. J-Ph.T.

Shokuzai
Comment l’art d’aimer est aussi
parfois un art martial. Pour défendre
ses petits élèves, la frêle institutrice
Maki s’empare d’un manche à balai
et se lance au bord de la piscine dans
un combat de kendo sans pitié contre
l’homme armé qui menace sa classe.
Vingt-quatre prunelles dans la piscine
l’observent, certains admiratifs,
amusés, inquiets. Les cris aigus
résonnent et se mêlent à une musique
dramatique aux airs de Dents de la mer.
Dans cette scène drôle, héroïque
mais aussi inquiétante, le personnage
est transfiguré. Droite, à petits pas,
le geste assuré, la maîtresse d’école
devient une guerrière prête à tuer.
Kiyoshi Kurosawa la suit de près,
cadre ses postures au cordeau en plan
large et finit sur son regard impérieux
et un peu stupéfait. Naissance
d’une héroïne samouraï. S.C.

84
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Hotel by the river


Quelle tendresse infinie émane de
ces corps endormis et entrelacés comme
deux flocons de neige. Kim Min-hee
et son amie ne cessent de dormir
dans Hotel by the River, film à l’état
gazeux s’il en est. L’amitié de l’une
pour l’autre chasse les plis de la
souffrance (un amour blessé par la
lâcheté d’un homme) et fait régner
dans l’espace blanc de la chambre ces
« nappes de paix » dont parle
Henri Michaux dans Face aux verrous.
L’amitié répare ce que l’amour abîme,
c’est le passage de relais amoureux que
nous confie à présent Hong Sang-soo
en nous montrant comment une
entaille saignante sur la main laisse
la place à un visage filmé comme
un morceau d’ouate. Paola Raiman
La Petite Vendeuse
de soleil
L’enfance est reine chez Djibril Diop
Mambéty, et son dernier film, La Petite
Vendeuse de soleil (1999), fait de sa
petite héroïne, une jeune handicapée
vendeuse de journaux à la criée, le
symbole d’une marche enchantée de la
jeunesse dakaroise contre toute autorité.
Dans un instant suspendu, une troupe
s’avance en dansant au rythme des
cannes de l’héroïne qui claquent sur
Au hasard Balthazar
le bitume et d’un sublime morceau L’âne bien sûr : tant d’amour pour
de Wasis Diop, frère du cinéaste, cet âne sacrifié ! Mais cette petite fille
grésillant dans les enceintes de la radio au début, aussi blanche et pâle que
d’un petit ange éclopé. Cette parade l’âne est gris et noir ? Revoir et revoir
de quelques secondes est le moment Au hasard Balthazar (Robert Bresson,
de conquête définitive du film : un 1967), c’est creuser cet angle
plan-talisman à la mesure d’un mort du début du récit, cette fillette
testament poétique, portant l’amour fou malade qui ne peut pas jouer avec
que voue Mambéty au petit peuple et les autres. Elle est pourtant coquette
à la jeunesse de la rue de Dakar. V.M. avec son ruban dans les cheveux.
Mais l’âne n’est pas à elle, et elle
n’a pas d’amoureux. L’infirmière pose
sa main sur sa main, en réconfort.
Elle est comme l’âne, un paquet
qu’on trimbale, le témoin de la vie
des autres. Au moment du départ,
à la fin des vacances, on soulèvera
la fillette endormie comme une
poupée morte. Elle est là pour tous ces
enfants malades qui passent leur vie
au lit, le garçon glacé de Qu’elle était
verte ma vallée de John Ford, ou
le petit paralytique du mélo Sans
famille. Tous ceux que la santé et
la vie délaissent, mais que la caméra
n’oublie pas. S.D.

85
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Le Désert rouge
De nuit, Giuliana erre, perdue,
sur le port, parmi les bateaux, les
cordages, les passerelles, les machines.
Elle s’adresse à un marin inconnu,
s’enquiert fébrilement de la possibilité
d’embarquer sur un navire marchand.
Faux regard caméra dans le vague,
sa voix résonne dans le silence.
En plan rapproché : « Les corps…
sont… séparés. » Le visage de Monica
Vitti est enveloppé dans le flou de
l’arrière-plan. Cut. Plan large, la figure
a basculé dans le flou, le quai lui
offre une scène, un sol où se tenir.
Giuliana se pince la main : « Si vous
me pincez… vous ne souffrez pas… »
Dans un raccord, la mise en scène
éprouve avec l’actrice une distance
désespérante entre les corps, mais
le regard d’Antonioni ne l’abandonne
pas à cette solitude, il l’accompagne,
la caresse. Par la tendresse du
regard, nous devenons le mur d’êtres
aimants dont rêvait Giuliana dans
une autre séquence. Le cinéma fait
ici circuler un amour naissant
des espacements, entre les corps,
entre les langues. Camille Bui

P.P. Rider !
Dans ce plan de P.P. Rider ! de Shinji
Somai (1983), une jeune fille se brosse
les dents, ses compagnons masculins
se promènent ou s’alanguissent
cigarette à la main dans ce nouveau
lieu où ils ont échoué (un dortoir).
L’un d’entre eux est pris en ombre
chinoise derrière un rideau qui forme
un drapé, épiphanie lumineuse dans
cet environnement sans qualité.
Ouvrir grand les plans au désordre,
manifester l’égalité de tous les
personnages, regarder le foisonnement
du monde, en même temps l’individu
et le groupe, le quotidien émaillé de
la singularité de chaque geste, capter
l’énergie autant que la fatigue des
corps, les gestes inconscients comme
la beauté des postures, transgresser
toute idée de belle composition pour
des compositions encore plus belles News from Home
mais débraillées, où les corps affirment
Le cinéma, c’est aussi l’art d’aimer
leur présence dans une confrontation
les inconnus, ces individus qui se
tangible, presque érotique et souvent
détachent de la foule ou sont surpris
transgressive elle-même avec tout
dans la marge, comme cette femme
l’environnement : dans P.P. Rider !,
croisée par Chantal Akerman lorsqu’elle
les adolescents sont lancés dans
tourne News from Home dans les
une course sans fin. Florence Maillard
rues de New York en 1976. Une façon
d’aimer sans parole, sans nom,
sans histoire, qui pourtant reste
pour l’éternité. N.E.

86
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Slacker
Film de flâneur, le manifeste Slacker de 1958). Musique voluptueuse, images
(Richard Linklater, 1990) obéit à heurtées parmi lesquelles on attrape
la règle du marabout-bout de ficelle. des visages radieux, des rires et
24 heures de la vie d’Austin, au rythme des sourires, la vitalité à l’état pur,
du croisement des personnalités un précipité de joie et d’amitié déposé
les plus extravagantes et des discours à même la pellicule. Le dernier geste
les plus improbables. Comment clore du film est à la hauteur de sa folie :
cette ronde insensée ? La réponse suivre cette bande de farfadets jusqu’au
provient de la dernière rencontre de sommet de la colline, et sans remords
hasard surgie au petit matin. Une bande ni précautions jeter la caméra par-
d’amis, entassée dans une décapotable. dessus bord. Une apothéose en forme
Une dernière escapade filmée à de signature. Un joyeux saut dans
la volée, en Super 8, au rythme le vide où le film se consume de
d’un standard jazzy (Skokiaan, dont lui-même, entre esprit d’enfance
on entend une reprise easy listening et ivresse de la conspiration. J.L.

Syndromes and a Century


Chez Weerasethakul, l’amour découle au centre de l’écran aspirant fumées,
toujours du soin. Syndromes and vapeurs et miasmes, soldant ainsi
a Century (2007) part sur les traces toutes les passions de cette histoire.
de la rencontre de ses parents Mais le cinéaste ne pouvait pas
médecins, sur le mode d’une chasse en rester là. Et dans un revigorant
aux effluves du sentiment comme post-scriptum, il remonte à la surface
antidote à un monde de plus en plus et conclut sur une incroyable séance
aseptisé. Le secret du film est tapi collective de fitness dans un parc,
dans les sous-sols d’un hôpital balancée par les sifflements
moderne. Le stupéfiant dénouement d’un imparable hymne de pop thaï
déploie un majestueux travelling (Fez de Neil & Iranza). Musique,
sur une bouche d’aération, trou noir joie et santé pour tous ! J.L.

87
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Les égarés
et Pather Panchali
Amour du paysage. La même année
(1955), dans Les égarés de Francesco
Maselli, Lucia Bosè s’arrête devant
la beauté de la plaine du Pô, et dans
Pather Panchali de Satyajit Ray,
deux enfants sont pris sous la protection
de roseaux. On est soufflés de découvrir
l’espace s’ouvrir ainsi devant nous.
Les personnages, debout, de dos,
se retrouvent relégués au second
plan, même s’ils restent au premier
plan. C’est que derrière, autour,
au-dessus, en-dessous, le paysage
étend sa magnificence. Amour du noir
et blanc : chevelure noire posée
en haut du cours d’eau, plumeaux
blancs désordonnés dansant au vent
(que la fumée d’un train viendra
surligner d’un trait noir). C’est toujours
bon signe quand le film fait ce pas
de côté et réintègre les personnages
dans le paysage, la nature, le monde,
dans ce qui est plus grand qu’eux,
pour les extraire de leur petite histoire
et les rendre à l’immémorial. S.D.
Strangers When We Meet
A la fin de Strangers When We Meet amoureux. Le film est aussi
(Liaisons secrètes, Richard Quine, simplement cela : un documentaire
1960), l’architecte joué par Kirk Douglas sur la construction d’une maison, que
rejoint sa maîtresse Kim Novak dans la Columbia elle-même offre à son
une maison vide, la maison qu’il a fait couple vedette. Projet extraordinaire que
construire pour un écrivain, et tous de construire un décor de cinéma qui
deux imaginent comme ils pourraient y restera et dans lequel on vivra. Projet
vivre. Ce mélo terrible ne leur permettra magique que de réaliser ce que les
pas de vivre leur amour, mais le plus personnages malheureux n’arriveront pas
bouleversant est que cette maison, bien à faire : vivre ensemble. Mais la réalité
réelle, n’est pas construite seulement n’a pas conjuré la malédiction de la
pour le film. Philippe Garnier le raconte fiction : Kim Novak quitte Quine à la fin
dans Caractères, le cinéaste compte du tournage, qui emménage dans
y aménager avec son actrice dont il est une maison vide. S.D.

88
cahiers du cinéma AVRIL 2020
Certaines femmes
Filmer le paysage comme un être
aimé, à la fois familier et lointain.
Ce sont de longues scènes sans paroles
où l’on entend le bruit des pas et des
sabots sur les planches puis sur la terre
gelée, la porte qui grince, des objets
qui se heurtent doucement. Et l’on
voit dans la répétition quotidienne qui
rythme la troisième partie du film
de Kelly Reichardt, les gestes appliqués
et routiniers de Lily Gladstone.
Le personnage au bonnet de laine et
au visage rond s’occupe de ses chevaux
chaque matin. Autour de cette ritournelle
concrète, un immense espace sublime
et froid : la neige par endroits, au loin
les montagnes brumeuses du Montana,
la lumière rose du matin et les animaux
tout chauds sortis de l’étable. Célébré
tranquillement dans les rituels les
plus simples par ceux qui l’habitent,
hommes et bêtes, et celle qui le filme,
le vaste paysage devient une maison
où l’on revient. S.C.

Les Onze Fioretti


de François d’Assise
« Dieu, fais que je m’inquiète moins
d’être aimé que d’aimer », entonne
le moine Francesco dans les Fioretti
(1950) alors qu’il s’apprête à chanter
les louanges de Dieu aux oiseaux.
Ces petits oiseaux qu’il appelle avec
tendresse fratellini (petits frères)
et qui comme les frères franciscains
en soutane – à qui l’amour donne
littéralement des ailes – sautillent
avec légèreté d’une branche à l’autre.
Et puisque Rossellini est un peintre
primitif héritier de Giotto, ce n’est pas
un hasard si l’oiseau masqué au
centre de l’image est un chardonneret,
qui doit son nom aux épines de
chardon de la couronne du Christ qu’il
Nouvelle Vague
serait venu picorer et se serait ainsi Si le diable se cache dans les détails,
taché d’une goutte de sang. P.R. alors l’amour se trouve dans les
inserts. à commencer par ce petit
nimbus en forme de cœur qui traverse
brièvement le ciel ensoleillé de
Nouvelle Vague (1990) et obscurcit
un instant la surface bleue du
lac Léman. « J’aime les nuages…
les nuages qui passent… là-bas…
là-bas… les merveilleux nuages ! »
En citant ces vers de Baudelaire dans
l’entretien du numéro de décembre,
Godard nous invitait bien à lever les
yeux au ciel et à prêter attention au
langage poétique des nuages. P.R.

89
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Blue Velvet
Sandy est apparue une minute
auparavant, s’extirpant de la nuit
environnante, invoquée par Jeffrey
Beaumont. Ses cheveux blonds
et sa robe rose éclatent à travers
l’obscurité, à la manière des lucioles.
Ils se rencontrent, mais paraissent
pourtant déjà se connaître, mus
par une soif intarissable de mystère.
Le vent bruisse dans les arbres ;
leur curiosité et leur désir naissant
gonflent dans l’air du soir. Un arbre
se découvre, quelques secondes
seulement, au rythme de la marche :
l’univers entier semble les
accompagner. Mathis Badin

Blissfully Yours
Muets, à bord de la voiture, les deux
amants se dirigent vers la jungle,
réunis enfin. Il faut du temps pour
y accéder : la scène est suspendue au
vrombissement du moteur, à la route
sinueuse encadrée par les arbres.
Weerasethakul, caméra installée derrière
le pare-brise, filme des paysages aimés.
Tout à coup, quelques mots viennent
ponctuer le silence : « Est-ce que
tu as faim ? » « Tu n’entends pas mon
estomac grogner ? » Les premiers
tintements de la musique apparaissent,
et ce que nous entendons, ce sont
des gargouillis. M.B.

Glitterbug
« L’amour se consume dans la passion
du rouge », écrit Derek Jarman dans
Chroma, précis poétique des couleurs
chères au peintre et cinéaste anglais.
Voir rouge, cela ne veut donc plus dire
être en colère, mais aimer et vibrer
à la recherche « de ce sexe rouge
et fort » dans les ruelles du Red Light
District du Soho londonien. Amour
transfiguré dans le pur écarlate des
fleurs – des tulipes anglaises appelées
aussi Lady Jane – qui éclabousse
ce plan tiré de Glitterbug, bouquet
final et fragmentaire des films
Super 8 tournés par Jarman au cours
de sa vie. P.R.

90
cahiers du cinéma AVRIL 2020
Le Roi des roses
Ces images sont empruntées à une
scène du Roi des roses de Werner
Schroeter (1986). Ce n’est pas tout
à fait un montage des attractions,
c’est un collage intime, l’expression du
désir dont la nature offre un généreux
véhicule. Le symbolisme y est explicite,
mais inscrit à même le mystère du
monde. Le soleil transperce le toit,
les rais de lumière dardent et prennent
corps dans la matière changeante
des fumigènes, l’eau s’écoule en jets
charnus et scintille, irréelle, dans
la lumière pure, tandis que les humains
s’abandonnent à leur appel. La scène,
où s’invitent d’autres plans, incite le
spectateur au même abandon, dépassant
sa fonction symbolique pour nous
plonger dans une transe érotique.
C’est peut-être ça l’art d’aimer, quand
le désir se déplie et se répercute en
miroir, résonne, rebondit sur les choses
et transforme le monde alentour.
Jean-Sébastien Chauvin

Amsterdam Global Village


L’érotisme surgit à la fin d’Amsterdam Relais de caresses, de baisers, de
Global Village (1996). Pour cette courbes, de peaux, de bouches, inséré
scène d’amour, Johan van der Keuken entre deux plans de fenêtres, pénétrant
reste fidèle aux gestes documentaires derrière la surface de la ville vue depuis
qui sont les siens : le filmage haptique, les canaux au-dehors. Cette séquence
par lequel la caméra se mêle à charnelle n’est pas en rupture avec
la chorégraphie des corps, le montage la pudeur du regard de van der Keuken.
comme mise en réseau d’énergies Elle en fait plutôt apparaître le secret
singulières. L’étreinte anonyme lumineux : l’infini de la confiance
de trois couples se confond, les corps entre filmeur et filmés, le documentaire
nus féminins et masculins se comme geste d’amour. Le cinéaste-
substituent les uns aux autres, dans filmeur tournait d’ailleurs avec
un espace, un désir, un mouvement, son épouse, Noshka Van der Lely,
un souffle continus que le film invente. à la prise de son. C.Bui

91
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Over the Edge


Feu ! Le vendredi 13 mars, les Cahiers
projetait d’Over the Edge (1979)
de Jonathan Kaplan au cinéma occupé
La Clef. Ses héros insurgés mettent
consciencieusement le feu à leur
banlieue américaine trop bien rangée.
Un garçon en tee-shirt rouge vif et une
fille à la tignasse rousse s’enlacent
au milieu des voitures enflammées,
l’air hagard, l’œil sérieux, et autour
d’eux des départs de feux de tous côtés,
des explosions partout jusqu’à ce
qu’on n’arrive plus à les compter.
Amélie Barbier

Les Rendez-vous du diable


Feu ! En 1959, Godard écrivait dans
les Cahiers que Les Rendez-vous
du diable était le plus beau film du
monde : « N’y aurait-il en effet dans
Les Rendez-vous du diable que
le seul plan où l’on voit, filmée par
son ami Bichet, la silhouette à la
Manfred d’Haroun Tazieff remonter
frénétiquement sa Paillard-Bolex pour
ne rien manquer du feu d’artifice
à la Michel-Ange qui lui fait front, n’y
aurait-il que le seul plan toujours filmé
par l’ami Bichet, où l’on voit Tazieff
courbé sous les rafales de pierres
comme un soldat sous celles de la
mitrailleuse, n’y aurait-il que le seul
plan, encore filmé par le très courageux
et sympathique Bichet, où l’on voit
Tazieff descendre à pas de loup le long
des parois de cendre de l’Etna pour
s’approcher plus près encore plus près,
toujours plus près du cratère qui ne dort
que d’un œil, n’y aurait- il que ces
plans, qu’ils suffiraient à faire des
Rendez-vous du diable le plus beau
film du monde. » « Les volcans, c’est
très simple, raconte Haroun Tazieff.
à six mètres, on ne sent rien. à quatre
mètres, on a chaud. à deux mètres,
on brûle. » Lorsque Tazieff plonge sa
caméra au cœur des cratères, il fait
le même geste que Vittorio De Seta à la
surface du Stromboli dans Isole di fuoco
: filmer une terre révoltée qui les fascine
et joue à ses propres jeux d’échelles, de
ralentis, d’accélérés. Les mouvements
s’inversent, le minéral s’anime et les
humains se figent. Pétrifiés dans leur
attente, les visages des hommes-pierres
reflètent la lumière des paysages
incandescents : le cinéma et la terre,
matériaux combustibles, s’amusent
avec les multiples formes du feu pour
basculer vers l’incontrôlable. A.B.

92
cahiers du cinéma AVRIL 2020
PORFOLIO

Zabriskie Point et Carrie


Feu ! à quelle distance du feu se
trouvent les caméras d’Antonioni,
Tarkovski, Lynch ou De Palma,
cinéastes-pyromanes ? Quels sont
ces films de feu dans lesquels chaque
image rapproche inexorablement
le spectateur du point-limite où tout
l’écran s’enflamme ? Dans la vallée
de la Mort, la villa ultra-moderne
explose en mille morceaux : « Il existe
un lieu où les rêves restent toujours
si jeunes », chante Roy Orbison au
générique de Zabriskie Point, évoquant
le désert où les corps nus se rencontrent
et s’embrassent. L’amour est un espace
et un temps, où un regard peut mettre
le feu en une fraction de seconde.
Le coup d’œil explosif de Daria dans
Zabriskie Point n’a rien à envier aux
regards assassins de Carrie. Parsemé
de tons rouge sang, le quotidien
de Carrie glisse vers une inévitable
déflagration finale : amoureuse,
l’adolescente se laisse berner jusqu’au
point de non-retour. Carrie, rousse
diaphane, s’associe aux flammes
pour venger son existence enserrée
dans un étau puritain ; curieusement,
c’est dans ce déchaînement
Sailor et Lula destructeur que sa mince silhouette
Dans l’atmosphère électrique, il y a à voir le feu prendre jusqu’à la semble pour la première fois calme
toujours un incendie au bout de leur pellicule, grignoter l’écran, irradier la et incarnée. A.B.
cigarette : «Un de ces jours le soleil salle : c’est l’image qui clôt la dernière
va se lever et brûler un trou à travers course de Macadam à deux voies,
la planète », présage Lula. Les deux ou qui interrompt le premier baiser
amants sont poursuivis par des images de La La Land. Sailor, Lula, Carrie,
de fournaise, une voiture qui explose, Carl et Cory, tous ces personnages
une maison qui brûle, un homme combustibles et révoltés, leurs
immolé. « Don’t turn away from love », cinéastes qui n’ont de cesse de réduire
répète Sheryl Lee en lévitation, la distance avec les flammes, leurs
« ne te détourne pas de l’amour » : spectateurs qui se prennent à cette
Laura Palmer joue les bonnes fées. course aux brasiers, n’avancent-ils pas
Dans l’air échauffé et survolté au rythme d’une même litanie ? Ces
où tout semble pouvoir s’enflammer quatre mots qui jouent la bascule entre
à la moindre étincelle, on s’attendrait les mondes, Fire Walk With Me. A.B.

93
cahiers du cinéma AVRIL 2020

Vous aimerez peut-être aussi