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Le Maroc parviendra-t-il à se doter d'un texte sur la grève, comme cela est mentionné dans les cinq
Constitutions qu'a connues le pays depuis 1962 ? Dans son plan d'action pour 2010, le ministère de l'emploi a
programmé l'achèvement du processus (car c'en est véritablement un) d'élaboration d'une loi organique sur les
conditions et les modalités d'exercice du droit de grève, mais cette initiative a un air de déjà-vu. Il y a plus de
sept ans, le 30 avril 2003, plus exactement, le package découlant de l'Accord social signé entre le
gouvernement, le patronat et les syndicats comprenait la sortie de cette loi. A l'époque, un projet existait déjà et,
en septembre de la même année, une nouvelle mouture avait été élaborée, mais les syndicats avaient considéré
que le préavis de grève imposé par le texte était trop long (15 jours). On en est resté là en dépit de la promesse
faite solennellement par Driss Jettou en 2006 de résoudre le problème.
Quatre ans plus tard, les choses n'ont pas beaucoup changé. Le texte, plusieurs fois revu et corrigé, a été soumis
aux partenaires sociaux, afin qu'ils y apportent leurs observations, depuis maintenant onze mois environ. A
l'heure qu'il est, seulement quelques syndicats ont remis leurs observations au ministère de l'emploi. «Mais il
s'agit des syndicats qui ne sont pas parmi les plus représentatifs», au sens de l'article 425 du code du travail,
confie une source. Autrement dit, les organisations syndicales qui participent au dialogue social, au nom
justement de leur représentativité, n'ont pas exprimé, officiellement et par écrit, leurs remarques ou suggestions.
La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), en revanche, a étudié le texte et formulé ses
observations et propositions.
Le projet de loi organique, qui en est à sa troisième mouture, a subi des changements profonds par rapport aux
versions précédentes. Il est plus étoffé (52 articles au lieu de 38 précédemment) ; son champ d'application ne se
limite plus au secteur privé mais englobe le secteur public, semi public et la fonction publique étatique et
territoriale ; toute la partie, la septième, qui concerne les sanctions, est laissée en pointillé, c'est-à-dire à la
négociation ; bref, sur la forme en tout cas, le texte s'est sensiblement amélioré. Même sur le fond, la volonté de
parvenir à un équilibre entre les droits et obligations des uns (salariés) et des autres (employeurs) transparaît
au travers d'un certain nombre de dispositions. Comme, par exemple, l'acceptation d'un délai de préavis de 48
heures seulement (article 18, alinéa 2) en cas de non versement des salaires dans les délais ou l'existence d'un
danger imminent sur la santé et l'intégrité des salariés.
Depuis pratiquement une dizaine d'années, le texte fait le va-et-vient entre l'administration et les partenaires
sociaux, soit depuis la période où Abbas Al Fassi était ministre de l'emploi. Et, ironie, même durant son mandat
de Premier ministre il risque de rester à l'état de projet. Car le projet, on le sait, a toutes les difficultés du
monde à accrocher les syndicats des salariés! Ces derniers, en effet, paraissent toujours, malgré les
changements évoqués plus haut, peu enthousiastes à l'idée de se laisser corseter dans un cadre rigide dont ils ne
voient pas tout à fait l'intérêt, tout au moins l'urgence.
Article 9 : «Le recours à la grève ne peut être exercé qu'après échec des négociations directes
ou indirectes. En cas d'impossibilité d'organiser ces négociations, pour une raison ou une
autre, il est permis de recourir à la grève suivant les dispositions et les règles édictées dans
cette loi organique».
Article 11 : «Il est interdit de punir toute personne pour cause de participation à une grève
déclenchée conformément aux dispositions de ce texte. De même, il est interdit à l'employeur
d'entraver de quelque manière que ce soit l'exercice du droit de grève».
Article 12 : «Le droit au travail est garanti par cette loi organique pour les salariés qui ne
participent pas à la grève».
Article 16 : «Il est interdit à l'employeur, pendant la période de grève, de remplacer les
travailleurs grévistes par des travailleurs n'ayant aucun lien contractuel avec l'entreprise,
antérieur à la date de la réception par lui de la décision de déclencher la grève».
Article 17 : «La décision de recourir à la grève au sein d'une entreprise ou d'un établissement
est prise par le syndicat le plus représentatif, ou le bureau syndical ou par le comité de grève
en cas d'absence?de?représentation?syndicale. Lorsque la grève concerne un secteur d'activité
ou l'ensemble du territoire national, la décision de son déclenchement est prise par les
syndicats les plus représentatifs conformément à l'article 425 du code du travail. La décision
de faire grève à l'échelle d'une préfecture, d'une province, d'une collectivité locale, d'un
service public ou d'un établissement public à caractère administratif, est prise par les bureaux
des syndicats des organisations syndicales les plus représentatives».
Article 18 : «Avant tout déclenchement de grève, dans les secteurs privé, public, semi-public
ou les collectivités locales, un préavis de 10 jours est requis. Toutefois, ce préavis est de 48
heures en cas de non versement des salaires dans les délais ou de danger imminent sur la santé
et l'intégrité des salariés».
Article 30 : «Il est interdit à l'employeur de recourir à la fermeture, partielle ou totale, de son
entreprise pour cause de grève, lorsque la grève se déroule dans le calme, n'entrave pas la
liberté de travail et ne cause pas de préjudice aux outils de production».
Article 39 : «Un service minimum doit être assuré par les fonctionnaires et agents de l'Etat,
des collectivités locales, des établissements publics et des services à caractère administratif
dont les fonctions sont nécessaires pour le fonctionnement normal des services des forces
armées royales, de la gendarmerie nationale, de la DGSN, des forces auxiliaires, de la
protection civile, de la justice, de l'administration pénitentiaire, de l'administration des
douanes, des impôts et des eaux et forêts».