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Thermodynamique de l’ingénieur

Cours I
Notions fondamentales

It’s only work if someone makes you do it.

CALVIN — Bill Watterson, The Indispensable Calvin & Hobbes

v1.6
by-sa Olivier Cleynen
Introduction
Les notions que nous abordons dans ce Cours I : Notions fondamentales ne sont pas particulières à la
thermodynamique ; mais elles nous serviront de multiples fois dans les cours à venir.

1. Notions essentielles

a) L’ énergie

Nous n’étudierons pas ici la nature de l’énergie, dont nous stipulerons simplement qu’elle
représente la capacité d’un corps à fournir du travail et de la chaleur. Elle ne peut être ni créée, ni
détruite. L’étudiant/e n’aura aucun mal à quantifier deux de ses formes mécaniques, l’énergie
cinétique :

1 (I-1.1)
Ec = m C2
2

où E c est l’énergie cinétique (J),


m la masse du corps (kg),
et C la vitesse (m/s).
et l’énergie potentielle d’altitude :

Ep = m g z (I-1.2)

où g est la valeur de l’accélération gravitationnelle (m.s-2),


et z l’altitude par rapport au point de référence (m).

Elle peut prendre une multitude d’autres formes. Nous nous intéresserons particulièrement à deux
d’entre elles :

• La chaleur, en tant que source (par combustion par exemple) ou puits (par frottement dans
un frein par exemple) ;

• Le travail, forme mécanique liée à un déplacement.

Pour l’ingénieur, la thermodynamique représente l’étude des transformations de l’énergie de l’une à


l’autre de ces deux formes. Nous reviendrons de multiples fois sur ces deux notions.

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Exemple 1.1

Un corps de masse 100 kg est initialement immobile à une altitude de 80m.

Il glisse sans frottement le long d’une pente, en 15 secondes, jusqu’à une altitude de 50m.

Quelle est la vitesse atteinte ?

Exemple 1.2

Une automobile est équipée d’un moteur de 95 chevaux.

Quelle est la vitesse théorique maximale qu’elle peut atteindre ?

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b) La puissance

La puissance représente un débit d’énergie dans le temps. Son unité SI est le Joule par seconde, c’est
à dire le Watt :

1 Watt ≡ 1 J.s −1 (I-1.3)

D’autres unités sont souvent utilisées, comme le cheval-vapeur1 (1 ch = 735 Watts).

Les puissances seront dénotées avec un point au dessus du symbole de l’énergie, ainsi on note Ė
une puissance (par exemple mécanique) apportant une énergie E chaque seconde.

Dans le langage courant, le terme puissance est utilisé pour quantifier la puissance maximale utile
d’un système. Ainsi par exemple, pour une automobile dite « de puissance de 50 kW » :

• la puissance mécanique maximale que peut fournir le moteur au véhicule est de 50 kW ;

• la puissance maximale fournie au moteur sous forme de chaleur (par combustion) sera trois
fois plus grande environ ;

• la puissance maximale de freinage (transformation d’énergie mécanique en chaleur dans les


freins) avoisinera les 300 kW ;

• la puissance moyenne effectivement fournie par le moteur sera de quelques kW seulement.

Il convient donc de toujours prendre garde à la signification du terme « puissance » en ingénierie.

1 Nous devons la création de cette unité à... James Watt. Attention aux différentes définitions du cheval vapeur. Dans le
monde automobile, la norme allemande DIN est le plus souvent utilisée.

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c) Valeurs spécifiques

Dans de nombreuses applications en thermodynamique, il est intéressant de quantifier les


grandeurs en fonction de la quantité de masse à l’intérieur du système. On utilise pour cela des
grandeurs dites spécifiques.

L’énergie spécifique (parfois appelée énergie massique), se mesure en joules par kilo (J/kg) :

E (I-1.4)
e ≡
m

où e est l’énergie spécifique (en J/kg) ,


E l’énergie (J) ,
et m la masse du corps considéré.
Ainsi, une masse perdant 10 kJ/kg de chaleur aura perdu 20 kJ au total si elle est de 2 kg.

La puissance spécifique (parfois également appelée puissance massique), a la même grandeur : on


divise des Watts (Joules par seconde) par un débit de masse (kilos par seconde).

Ė (I-1.5)
ė ≡

où ė est la puissance spécifique (J/kg) ,


Ė la puissance (W) ,
et ṁ le débit de masse traversant le système (kg/s).
Ainsi, une turbine fournissant une puissance spécifique de 100 kJ/kg fournira 300 kW si elle est
traversée par un débit de masse de 3 kg/s.

Nous dénoterons les valeurs spécifiques avec des minuscules, mais attention : la plupart des
ouvrages ne font pas de telle distinction – c’est le contexte qui permet de déterminer s’il s’agit d’une
valeur spécifique.

Le même raisonnement s’appliquera aux autres grandeurs (volume, enthalpie, entropie) que nous
aborderons dans les cours à venir : les grandeurs spécifiques indiqueront une division par la masse.

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2. Le travail
Le travail est, en physique, une forme d’énergie. Il y a dépense de travail lorsqu’une force est exercée
sur un corps et produit un mouvement sur ce dernier. Nous le notons W et le définissons comme :

W ≡ Fl (I-2.1)

où W est le travail (J),


F la force (N),
et l la distance sur laquelle la force F a été exercée (m).
L’équation ci-dessus sous-entend que la force F reste constante le long du déplacement l . En
pratique, c’est rarement le cas et nous avons alors recours à l’intégrale suivante :

W A B = ∫ dW
A

W A B = ∫F dl (I-2.2)
A

où d W est une quantité de travail infiniment petite (J),


F est la force (N),
d l est la distance infinitésimale sur la quelle la force F est exercée (m).
Sur un graphique représentant la force en fonction en fonction de la distance, ce travail W A B est
représenté par la surface sous la courbe de A à B. La forme de la courbe, c’est à dire la relation entre
F et l au fur et à mesure de l’évolution, déterminera la quantité W A B .

Figure 1.1 : Le travail est représenté par l’aire sous la courbe force-déplacement.

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Exemple 1.3

Un ressort monté sur le train d’atterrissage d’un ULM est comprimé à l’atterrissage. Sa constante de
raideur est de 104 N/m .

• Quelle est l’énergie stockée entre 10 et 15 centimètres d’enfoncement ?

• Quelle serait l’énergie stockée si la caractéristique du ressort était F = 1,2 × 106 × l² ?

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3. Chaleur et température

a) La chaleur

La chaleur, notée Q , est une forme d’énergie (mesurée en Joules). Nous nous contenterons pour
l’instant de spécifier qu’elle représente la propagation de l’agitation interne des corps.

Le terme de chaleur implique nécessairement un flux, de façon analogue au courant électrique.


La chaleur peut apparaître par phénomène de frottement : c’est alors une transformation d’un
travail (par exemple, à la surface d’un frein). Elle se manifeste également lorsque deux corps de
températures différentes sont mis en contact.

On a longtemps cru la chaleur être un fluide (le calorique) de densité très faible, capable
d’imprégner tous les matériaux. Cette théorie a été abandonnée au milieu du XXème siècle, lorsque
l’on a mis en évidence que la chaleur n’est pas conservée. On peut en fournir à un corps, et le
ramener à sa condition initiale sans qu’il doive en fournir autant en retour 2.

b) La température

La température est une propriété, qui indique la capacité d’un corps à fournir de la chaleur à un
autre. On peut la considérer comme un potentiel de chaleur. Par définition, la chaleur ne se transmet
spontanément que vers un corps de température plus basse3.

En physique microscopique, la température se définit comme le degré d’agitation des molécules,


mais lors de notre étude de la thermodynamique, nous resterons toujours à plus grande échelle.

La température se mesure en Kelvins (K) et a un degré zéro dit absolu en deçà duquel on ne peut
descendre. Un corps à température zéro a un degré d’agitation interne nul et ne peut fournir de la
chaleur à aucun autre.

Dans la vie courante en Europe, on utilise plutôt une échelle en degrés Celsius. La relation entre ces
deux échelles est fixée depuis 1954 : il suffit d’ajouter 273,15 à une température en degrés Celsius
pour lire une température en Kelvins :

T K = T °C  273,15


2 Par exemple en lui faisant effectuer un travail. C’est le principe fondamental du moteur thermique, qui propulse tous nos
véhicules aujourd’hui.

3 Nous reviendrons de multiples fois sur cette propriété, qui a des conséquences bien surprenantes...

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T K ≈ T °C  273 (I-3.1)

Les puristes remarqueront que l’unité est bien le Kelvin et non le « degré Kelvin ».

La recherche d’une définition de la température a été un aspect central de la thermodynamique


pendant de nombreuses années. Nous aurons plusieurs fois l’occasion de l’étudier et de la préciser,
aux cours IV et VII.

Différents corps voient leur température augmenter différemment lorsqu’ils reçoivent la même
quantité de chaleur. Nous avons intuition de cette notion de capacité thermique, capacité à fournir
ou recevoir de la chaleur, dans la vie courante. Ainsi, il faut moins de chaleur pour augmenter d’un
Kelvin la température d’un kilo de bois que d’un kilo d’acier. La capacité thermique peut même
varier avec la température.

Notons enfin que dans le langage courant, il est souvent fait amalgame entre température et chaleur
(ex. « les grandes chaleurs ») et que le vocabulaire n’est pas toujours intuitif (« un corps chaud »).

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4. Le premier principe de la thermodynamique
L’étudiant/e devrait appréhender sans difficulté le premier principe de la thermodynamique, qui
stipule simplement que l’énergie est conservée : elle est indestructible. Autrement dit, lorsqu’un
système reçoit un Joule d’énergie, il peut soit l’emmagasiner, soit le re-fournir à l’extérieur ; mais en
aucun cas il ne peut le détruire.

Dans notre étude de la thermodynamique, nous ne nous intéresserons qu’à deux formes d’énergie 4,
le travail W et la chaleur Q .

Lorsqu’un système revient à son état d’origine, il a émis autant d’énergie qu’il en a reçu – on dit qu’il
a parcouru un cycle thermodynamique complet. Il peut avoir transformé cette énergie d’une forme à
une autre, de sorte que nous avons :

Qcycle  W cycle = 0 (I-4.1)

pour un cycle thermodynamique complet,


où W cycle est le travail reçu par le système (J),
et Qcycle est la chaleur reçue par le système (J).

Notons la convention de signe adoptée : chacun des transferts peut être négatif ou positif. Tout
comme pour les transferts sur le compte en banque de l’étudiant/e, une valeur positive indique une
réception, et une valeur négative, une perte.

Cette équation (I-4.1) revient à stipuler :

Lorsqu’un système parcourt un cycle thermodynamique complet, la somme de la chaleur


nette fournie et du travail net effectué est égale à zéro.

Si le système ne revient pas à son état original (on dit il n’a pas parcouru un cycle thermodynamique
complet), alors la quantité d’énergie qu’il contient a varié.
De façon très conceptuelle, nous allons appeler cette énergie énergie interne, et nous la noterons U .
Nous verrons dans les cours IV et V que les corps emmagasinent cette énergie interne de différentes
façons, et qu’elle est liée à la température.

4 Nous ne nous intéresserons pas à l’énergie stockée sous forme chimique (ex. carburant) ou de masse (réactions nucléaires).

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Lorsque la quantité de masse d’un système est fixe, nous écrivons, pour toute évolution de 1 à 2 :

Q1 2  W 1  2 = U 2 − U 1 =  U (I-4.2)

pour une quantité de masse fixe,


où U 2 − U 1 est la variation d’énergie interne (J),
W  1 2 est le travail reçu par le système (J),
et Q1  2 est la chaleur reçue par le système (J).

L’énergie interne U , par définition, est toujours positive, mais sa variation  U ne l’est pas
nécessairement.

L’équation (I-4.2) peut être exprimée avec des grandeurs spécifiques :

q 1  2  w1 2 = u 2 − u1 =  u (I-4.3)

pour une quantité de masse fixe,


où u 2 − u 1 est la variation d’énergie interne spécifique (J/kg),
w 12 est le travail spécifique reçu par le système (J/kg),
et q 1 2 est la chaleur spécifique reçue par le système (J/kg).

Il faut bien noter que les équations ci-dessus ne sont valables que pour un système fermé, c’est à dire
une quantité de masse fixe. Elles s’appliquent, par exemple, pour une masse d’air enfermée dans un
cylindre, mais pas pour de l’air en circulation dans une pompe.
Les systèmes ouverts, dans lesquels la masse entrante ou sortante peut porter avec elle de l’énergie
interne, seront abordés dans le cours III.

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Exemple 1.4

Une masse de 0,25 kg d’air est décompressée dans un cylindre de moteur. L’énergie interne
spécifique (déduite de la température) passe de 420 kJ/kg à 200 kJ/kg .

Le travail total effectué par l’air, en 25s, est de 25 kJ.

Quelle est la quantité de chaleur gagnée ou perdue ?

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