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Jean Luc CERDIN

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GÉRER
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CARRIERES
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Collection Pratiques d ' Entreprises


GÉRER LES
CARRIÈRES

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Copyright © 2000 EMS Editions.
COLLECTION « PRATIQUES D’ENTREPRISES »
dirigée par Luc BOYER

GERER LES
CARRIÈRES
Vade-mecum
Jean-Luc CERDIN
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-éditions
ems
1 8, rue Claude-Bloch
14050 CAEN CEDEX 4
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LE PHOTOCOPILLAGE
TUE LE LIVRE

Le logo qui figure sur la couverture de ce livre mérite une explication. Son
ë objet est d’alerter sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit, tout par¬
S ticulièrement dans le domaine du droit, d’économie et de gestion, le dévelop¬
Z
pemtn massif du photocopillage.
LU
O
Le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet expres¬
sément la photocopie à usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or,
° cette pratique s’est généralisée dans les établissements d’enseignement supé¬
rieur, provoquant une baisse brutale des achats de lives, au point que la possi¬
ç.
CL
bilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire édi¬
U ter correctement est aujourd’hui menacée.

© Éditions EMS, 2000

Nous rappelons donc qu’il est interdit de reproduire intégralement ou partielle¬


ment sur quelque support que ce soit le présent ouvrage sans autorisation de
l’auteur, de son éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie
(CFC) 3, rue Hautefeuille, 75006 Paris (Code de la propriété intellectuelle,
articles L. 122-4, L. 122-5et L. 335-2.

ISBN : 2-912647-49-5
Sommaire

Introduction. Faut-il gérer les carrières ? 13


Chapitre 1. La gestion des carrières au cœur de la GRH 21
1. Un système au cœur de la GRH 23
2. Définitions 25
3. Évolutions des carrières 30
3.1. Mobilité verticale, horizontale et latérale 30
3.2. La mobilité géographique 32
3.3. Carrières à double échelle 35
3.4. Aperçu réaliste de la carrière 36
4. Vers le succès de carrière 37
Chapitre 2. Les déterminants du succès de carrière 39
i 1. Manager efficace versus manager promu rapidement 41
S 2. Quelques biais dans les promotions 43
W
LU
O 3. Approche tournoi 44
° 4. Capital humain 45
5. Système de mentor 47
£
CL
5.1. Rôle du mentor 47
U
5.2. Relations formelles et informelles 50
5.3. Étapes de la relation 52
5.4. Soutien à 360 degrés 54
6. Du succès aux situations particulières 58
Chapitre 3. Une gestion des carrières ciblée 61
1. Flexibilité et gestion des carrières 63
2. Cibles et problématiques particulières 67
6 GÉRER LES CARRIÈRES
2.1. Cadres / Non-cadres 67
2.2. Les Xers 69
2.3. Les expatriés 69
2.4. Structure familiale 74
2.5. Les hauts potentiels 82

3. Des cibles au défi du temps 83

Chapitre 4. Défis du temps pour la gestion des carrières 85

1 . Plafonnement de carrière 87
1.1. Trois types de plafonnement 87
1.2. Réactions différentes par rapport au plafonnement . 92
1.3. Gérer les plafonnements 94
2. Gestion des fins de carrière 98
3. Du temps aux cheminements de carrière 102

Chapitre 5. Cheminements et attitudes de carrière 105

1. Les étapes de la carrière 108

2. Les ancres de carrière 112

3. Les orientations de carrière et autres typologies 116


i
4. Attitudes envers la carrière 119
S
W 4.1. La motivation de carrière 120
LU 4.2. L'implication dans la carrière 120
O
4.3. L'orientation carriériste 122
°
5. Des cheminements à l’employabilité. 123
ç.
CL Chapitre 6. Vers une plus grande responsabilité de l’individu ? 127
U

1. Employabilité 129
1.1. Définitions 129
1.2. Les moyens de l’employabilité 131
1.3. Formation 137

2. Contrats psychologiques 139


2.1. Définitions du contrat psychologique .. 139
2.2. Changement de contrat psychologique 141
2.3. L'équité dans la gestion des carrières . 144
SOMMAIRE 7
3. De l’individu à l’organisation 146
Chapitre 7. Approches contingentes de la gestion des carrières 149
1. Stratégie organisationnelle et marché du travail 151
2. Les préoccupations des entreprises 154
3. Approches de gestion des multinationales 156
4. Stades de développement à l’international 158
5. Structure organisationnelle 159
6. Autres facteurs organisationnels 162
7. Pyramides des âges 164
8. Du contexte aux outils 167
Chapitre 8. Les outils fondamentaux de la gestion des carrières 169
1. Outils de suivi de l’évolution des salariés par l’entreprise 171
1.1. Assessment centers 171
1.2. L’entretien annuel d’appréciation 172
1.3. Évaluation à 360 degrés 174
1.4. Les comités de carrière 176
i 1.5. La revue des potentiels 177
1.6. La formation des potentiels 177
S 1.7. L’organigramme prévisionnel 178
W
LU 1.8. Les comités métiers 178
O
1.9. Les pépinières ou viviers 178
° 1.10. L’observatoire des métiers 179
1.11. Système de mentor 179
£
CL
1.12. Suivi des carrières 179
U
2. Outils d’accompagnement des projets des salariés 180
2.1. Les entretiens professionnels ou entretiens de carrière.... 180
2.2. La bourse des emplois 180
2.3. Les cartes des métiers 181
2.4. Le bilan professionnel ou de compétences 181
2.5. L’outplacement 182
2.6. Les formations 183
2. 7. Le coaching 183
2.8. Le conseil ou l’orientation de carrière 184
8 GÉRER LES CARRIÈRES
3. Efficacité des outils dans la gestion des carrières 184
3.1. Principales qualités des outils 184
3.2. Vers une charte de la gestion des carrières. 187

4. Vers la fin du parcours 190


Un bout de chemin 193
Annexes 199

Références bibliographiques 211

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Copyright © 2000 EMS Editions.

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Copyright © 2000 EMS Editions.
Remerciements

Cet ouvrage se focalise à la fois sur les besoins des organ¬


isations dans la gestion des carrières de leurs salariés et des
personnes qui s’interrogent sur leur carrière. Je remercie
Luc Boyer de me donner l’occasion de développer, dans la
collection qu’il dirige, quelques thèmes centraux à cette
question.

J’aimerais remercier également Jean-Marie Peretti avec


qui j’ai le plaisir de co-écrire des articles sur la gestion des
carrières. Les échanges avec mes autres collègues, pro¬
fesseurs à l’ESSEC, Alain Bernard, Laurent Bibard, Marie-
Laure Djelic, Alan Jenkins, Junko Takagi et Maurice
Thévenet, ont enrichi mes réflexions. J’associe à ces
ë remerciements Eléonore Marbot, doctorante à l’ESSEC,
co-auteur de quelques articles sur le sujet.
S
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LU
o
Les enseignants chercheurs d’autres institutions m’ont
° apporté, à différentes occasions, des éléments utiles à mes
travaux. Je tiens à remercier tout particulièrement Jacques
ç. Igalens, Patrice Roussel et Bruno Sire, professeurs à l’uni¬
g. versité de Toulouse 1, Dominique Ballot, de l’Université
Toulouse 3, Alain Roger, professeur à l’université de Lyon,
Loïc Cadin, professeur à l’ESCP, Charles-Henri Besseyre
des Horts, professeur à HEC, Franck Bournois, professeur
à Paris-II, Jean-Pierre Neveu, professeur à l’université de
Limoges, Michel Tremblay, professeur à HEC Montréal,
Sekkiou Lakhdar, professeur à Verville, Québec, Éric
Vatteville, professeur à l’IAE de Rouen, Fernando Cuevas,
professeur à ESC Pau, Joan Mundet Hiem, professeur à
UPC, Barcelona et Peter Cappelli, professeur à Wharton.
J’aimerais remercier aussi Michel Joras, Président de
l’ICIAC, David Manson, Garon Institut des dirigeants,
Jean Perreau, Entreprise et Personnel, et ceux (il est impos¬
sible de tous les citer ici) aussi bien dans la sphère
académique que dans l’entreprise, qui ont enrichi mon
approche de la gestion des carrières.

Les échanges avec les participants de l’Executive MBA de


l’ESSEC ont nourri certaines de mes réflexions. Que tous
trouvent ici l’expression de ma reconnaissance.

Je tiens à remercier l’équipe de la bibliothèque de l’ESSEC


qui m’a fourni, avec une efficacité remarquable, les
ouvrages et les articles demandés, toujours dans la bonne
humeur.

Ma reconnaissance va aussi à Nathalie. Son aide, son sou¬


tien affectueux et sa compréhension m’ont permis de
réaliser cet ouvrage.
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INTRODUCTION

FAUT-IL GÉRER LES CARRIÈRES ?

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Copyright © 2000 EMS Editions.
FAUT-IL GÉRER LES CARRIÈRES 15

La gestion des carrières comprend des activités qui s’in¬


scrivent dans la gestion des ressources humaines. Son util¬
ité repose au moins sur trois éléments :
• contribuer à la satisfaction des besoins organisationnels
aussi bien au niveau des effectifs recherchés que des
compétences souhaitées ;
• apporter des réponses individualisées aux aspirations
des salariés ;
• fidéliser une partie des salariés.
La gestion des carrières se trouve à la croisée de deux logiques,
celle de l’organisation et celle de chacun de ses salariés.
Pour dépasser l’anthropomorphisme trop souvent prêté aux
organisations, les principaux acteurs organisationnels dans
le domaine de la gestion des carrières sont :
• Le supérieur direct
Il agit en « développeur » des membres de son équipe.
• La Direction des Ressources Humaines
Elle définit les politiques de gestion des carrières et
s’assure de leur mise en œuvre le long des hiérarchies.
ë
La figure 1 représente un exemple d’organisation d’une
S DRH.
W
LU
o
Figure 1. Exemple d'organigramme
s

Directeur des
g. Ressources Humaines
u

Top excecutive Ressources


Ressources humaines
management- humaines
Site production 1
administration Site production 2

I I I I 1
Gestion des Systèmes de Relations
Mobilité Formation
carrières récompense industrielles
16 GÉRER LES CARRIÈRES

La gestion des carrières s’inscrit dans une politique plus


large relative aux salariés de l’entreprise. Sans dresser ici
l’historique de la fonction ressources humaines, il nous
semble utile d’examiner cette gestion des carrières dans la
perspective de la gestion du personnel et dans celle de la
gestion des ressources humaines. Le tableau 1 résume les
principales différences entre ces deux conceptions, sans
établir, tout au moins à ce niveau, la suprématie de l’une
sur l’autre.
La Gestion des Ressources Humaines (GRH), dans le
tableau 1, considère les individus comme des ressources
qu’il faut développer et non plus comme un coût qu’il faut
minimiser. Cependant, les salariés ne sont pas seulement
une ressource pour l’entreprise. Ils ont surtout des res¬
sources1 nécessaires à la performance organisationnelle.
Ces ressources prennent notamment aujourd’hui le nom de
compétences.
La gestion des ressources humaines aurait supplanté la
gestion du personnel. A son tour, elle semble supplantée
ë par la gestion des personnes qui annoncerait sa fin2. Pour
S
Thévenet3, gérer les personnes «... c’est reconnaître que
W chacun agit d’abord par rapport à lui-même, que chacun a,
LU
O dans les organisations, des marges de liberté pour essayer
° au mieux de servir ses intérêts, que les intérêts de chacun
ne sont pas forcément en opposition avec ceux de l’organ¬
ç. isation... ». Ici, les compétences en jeu sont des compé¬
g.
tences relationnelles.
La Gestion Individualisée des Salariés (GIS) s’installe de
plus en plus dans tous les domaines des ressources
humaines. Elle est particulièrement saillante pour la ges¬
tion des carrières, dans la mesure où les aspirations indi¬
viduelles des salariés occupent une position centrale.
Néanmoins, le risque consiste, dans la volonté d’aider les
salariés à prendre en main leur carrière, à négliger les
FAUT-IL GÉRER LES CARRIÈRES 17

Tableau 1. Gestion du personnel


et gestion des ressources humaines
Gestion du personnel Gestion des ressources
humaines

Temps et planification Court terme Long terme


Contrat psychologique Obéissance Implication
Systèmes de contrôle Externes Auto-contrôle
Relations avec Pluraliste Unitaire
les employés Collectives »- Individuelles
>ÿ Confiance faible >- Confiance élevée
Bureaucratique / mécanique Organique
Structures préférées >- Centralisées >ÿ Décentralisées

>ÿ Définitions formelles >- Rôles flexibles


des rôles
Rôles Spécialistes / professionnels Largement intégré
dans le « line
management »

Minimisation des coûts Utilisation maximum


Critères d’évaluation Homme = coût qu’il >* Homme = ressource
faut minimiser à développer

Source : adapté de Guest, 1987, p. 507.


w

besoins de l’entreprise. Cette gestion individualisée ne


S
W devrait pas s’exprimer en totale rupture avec la dimension
LU
O
collective.
°© La complexité de la gestion des carrières provient de l’effort
£ de la part de l’entreprise de rapprocher deux logiques, la
Q!
o
sienne et celle des salariés, qui peuvent diverger.
Une autre complexité réside dans la responsabilité de cette
gestion. L’entreprise et le salarié sont les deux principaux
acteurs du processus. Aujourd’hui, le salarié prend une part
de plus en plus active dans la propre gestion de son par¬
cours professionnel. La responsabilité de la carrière
incombe de plus en plus à la personne, porteuse d’aspira¬
tions personnelles et poursuivant un parcours, ou plutôt un
cheminement, qui lui est propre.
18 GÉRER LES CARRIÈRES

« Faut-il gérer les carrières ? » est alors une question


qui s’adresse aussi bien aux représentants de l’en¬
treprise qu’aux personnes qui ont une carrière ou font
carrière. Pour pouvoir apporter des éléments de répons¬
es à cette question, nous commençons dans un premier
chapitre de cet ouvrage par préciser le concept de car¬
rière et différents types de mobilité. Nous examinons
ensuite, dans le deuxième chapitre, quels sont les prin¬
cipaux déterminants des succès de carrière. Nous mon¬
trons alors, dans le troisième chapitre que la place
qu’occupent les salariés dans l’organisation peut con¬
duire à adopter différentes approches de la gestion des
carrières. Cette gestion des carrières doit relever égale¬
ment un autre défi, celui du temps. Le quatrième
chapitre développe les situations de plafonnement et la
gestion des fins de carrière. Ces situations de plafon¬
nement surviennent au cours d’un parcours profession¬
nel ou d’un cheminement de carrière. Nous montrons,
dans le cinquième chapitre, quelques aspects de chem¬
inements et d’attitudes de carrière. Ils soulèvent la
ë
question de la finalité de la gestion des carrières,
S notamment en termes de fidélisation des salariés de
W
LU l’entreprise. Fidéliser peut conduire l’entreprise à aug¬
O
menter la responsabilité individuelle dans la gestion
°
des carrières. L’entreprise donne alors les moyens de
ç. cette responsabilité en favorisant l’employabilité de ses
g. salariés. Le sixième chapitre analyse dans quelle
mesure l’entreprise peut aller vers une plus grande
responsabilité de l’individu dans la gestion des car¬
rières. Nous passons ensuite de l’individu à l’organisa¬
tion car la politique de gestion des carrières varie selon
le contexte organisationnel. Aussi, le septième chapitre
traite-t-il des approches contingentes de la gestion des
carrières. Les entreprises disposent d’un éventail
d’outils qu’elles peuvent mobiliser, aussi bien pour
FAUT-IL GÉRER LES CARRIÈRES 19

suivre l’évolution de leurs salariés qu’accompagner


leurs projets. Le huitième chapitre détaille ces princi¬
paux outils avant de conclure l’ouvrage.

NOTES DE L’INTRODUCTION

i
Peretti, 1996, Tous DRH : un défi pour les responsables hiérarchiques.
2 Thévenet, 1999, Le retour du travail et la fin de la gestion des ressources humaines.
3
Thévenet, 1999, p. 11, Le retour du travail et la fin de la gestion des ressources
humaines.

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Copyright © 2000 EMS Editions.
CHAPITRE 1

LA GESTION DES CARRIÈRES


AU CŒUR DE LA GRH

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LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 23

Dans ce premier chapitre, la gestion des carrières est


placée au cœur de la Gestion des Ressources Humaines
(GRH). Cette gestion des carrières, selon l’approche
développée dans cet ouvrage, demande une précision des
termes utilisés. Nous donnons alors quelques définitions de
la carrière et de la gestion des carrières, à la fois dans la
perspective de l’organisation et des personnes, deux
acteurs de cette gestion. Les évolutions des carrières sont
ensuite examinées, notamment avec les différents types de
mobilité possibles dans l’organisation.

1. UN SYSTÈME AU CŒUR DE LA GRH

La gestion des carrières s’impose au cœur de la gestion des


ressources humaines comme le souligne la figure 1.L

Figure LL Au cœur de la GRH

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S Aulne Rnlncmkfi
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LU
O Fmviiatm f onulMS ci
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g.
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Source : adapté de Guérin et Wils, 1992, p. 50.

Pour l’organisation, la gestion des carrières est utile car


elle contribue à la satisfaction de ses besoins en ressources
24 GÉRER LES CARRIÈRES

humaines1. La planification des ressources humaines, dans


un souci de gestion prévisionnelle, est l’expression de la
stratégie organisationnelle au niveau des ressources
humaines. La gestion des carrières apparaît comme une
partie intégrante de la gestion prévisionnelle des emplois et
des compétences.
L’analyse des emplois (contenu, exigences) et les systèmes
d’évaluation des salariés (rendement, potentiel) sont égale¬
ment des systèmes de gestion des ressources humaines
vitaux pour le système de gestion des carrières puisque de
telles informations sont essentielles au processus d’élabo¬
ration des plans de carrière. La figure 1.1 comprend un
deuxième groupe de pratiques qui visent à l’implantation
des plans de carrières. Par exemple, au niveau de la for¬
mation, un MBA peut servir d’accélérateur de carrière pour
certains postes à forte composante managériale et interna¬
tionale.
Pour résumer, le système de gestion des carrières est au
cœur de la GRH car il favorise à la fois selon Guérin et
i Wils2 :
S
W
• L’approche consensuelle
LU Elle vise à satisfaire aussi bien les besoins des salariés
O
que ceux des employeurs. Cette approche concourt à la
° convergence des intérêts organisationnels et indivi¬
duels.
ç.
g. • L’approche intégrée
Elle recherche aussi bien la cohérence externe avec la
stratégie organisationnelle que la cohérence interne des
systèmes de gestion des ressources humaines.
Une précision s’impose sur les termes qui définissent la
pratique de la « gestion des carrières ».
LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 25

2. DÉFINITIONS

Tout d’abord, la notion même de carrière mérite d’être


mieux définie afin de savoir ce que l’entreprise et les
salariés gèrent.
Étymologiquement, le mot carrière signifie « chemin pour
les courses de chars ». L’idée de chemin ou de trajectoire
est plutôt positive. La carrière est souvent associée à
d’autres notions positives comme celles de :
• progression ;
• avancement ;
• promotion ;
• développement.
Les sciences humaines et sociales proposent chacune leur
définition en fonction de leur champ d’investigation. Nous
reprenons les principales dans le tableau 1.1, à la suite
d’auteurs français et anglo-saxons3.
Tableau 1.1. Définitions de la carrière
selon différentes disciplines
i
Disciplines Définitions
S
W Sciences économiques Réponse aux forces du marché
LU
O
Sciences politiques Représentation
° de l’intérêt personnel
Sociologie Succession de rôles sociaux
£
g.
U Anthropologie Changement de statut
Histoire Interaction
personnes-circonstances
Géographie Réponse aux circonstances
géographiques
Psychologie Vocation
Gestion Succession d’emplois
dans l’entreprise
26 GÉRER LES CARRIÈRES

Ces différentes définitions permettent de saisir la carrière


dans ses différentes dimensions. Cependant, au niveau de
l’entreprise, c’est souvent l’acception proposée par l’ap¬
proche gestion qui est retenue, i.e. la succession d’emplois
dans l’entreprise.
L’entreprise ne peut ignorer la dualité ontologique de la
carrière4. La face objective de la carrière revient, dans
l’optique de l’organisation, à considérer pour un individu
sa carrière comme une succession de postes qui répondent
aux besoins organisationnels. La face subjective se focalise
plutôt sur l’individu, porteur de sa propre définition du
succès de carrière.
Le concept de carrière revêt ainsi une signification à la fois
pour l’individu et l’organisation (figure 1.2) :
• du côté de l’individu, il s’agit de la carrière interne.
Les critères pour déterminer le succès de carrière sont
subjectifs, correspondant aux aspirations individuelles.
Chaque individu va utiliser des critères qui lui sont
ë
propres pour évaluer le succès de sa carrière. La per¬
ception de la réussite ou de l’échec de la carrière peut
S
W alors varier fortement d’un individu à l’autre ;
LU
O
• du côté de l’organisation, il s’agit de la carrière externe.
° Les critères de succès sont plutôt objectifs, s’inscrivant
dans une définition sociétale de la réussite de l’individu.
ç. Ainsi, c’est la société par ses valeurs qui va déterminer
g.
si une personne est en situation de réussite ou d’échec.
Il vaut mieux être, par rapport à ces critères, au sommet
de la hiérarchie qu’à sa base.
Associer à la carrière le terme de gestion implique aussi
quelques précisions. En effet, la responsabilité de la car¬
rière, et en particulier de sa « gestion » est double. La réal¬
ité que recouvre le terme de gestion des carrières est loin
d’être monolithique.
LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 27

Figure 1.2. Carrière interne et carrière externe

Carrière interne Carrière externe

Critères subjectifs pour Critères objectifs pour


déterminer le succès déterminer le succès
de carrière de carrière

Aspirations' Approches
individuelles sociétales

Nous proposons de réserver le terme « gestion des car¬


rières » lorsque l’accent est mis sur l’organisation. Des
définitions plus ou moins larges de la gestion des carrières
ont été proposées comme le rappellent Guérin et Wils5 :
i
S • la gestion des carrières au sens très large peut inclure les
W
programmes de formation. Dans certains ouvrages de
LU
O gestion des ressources humaines, nous pouvons trouver
° traitées, dans un même chapitre, la formation et la ges¬
tion des carrières ;
ç.
CL

U
• à l’opposé, dans une perspective beaucoup plus
restreinte, la gestion des carrières est limitée aux flots
de main-d’œuvre à l’intérieur d’une organisation.
La gestion des carrières regroupe les activités de l’organi¬
sation destinées à satisfaire les besoins futurs de l’organi¬
sation, comprenant aussi bien la sélection, l’évaluation,
l’affectation et le développement des salariés.
L’organisation identifie des trajectoires et des activités
pour les salariés pris individuellement.
28 GÉRER LES CARRIÈRES

La planification de carrière regroupe plutôt les activités de


l’individu salarié qui tente d’organiser sa carrière d’une
manière personnelle, dans la poursuite de la satisfaction de
ses aspirations personnelles. Dans ce processus, la person¬
ne établit des objectifs de carrière et identifie les moyens de
les atteindre. L’approche traditionnelle dans laquelle la car¬
rière est gérée par l’organisation fait plutôt place à une
approche protéenne dans laquelle la personne reste maître
de sa carrière6. Roger7 rappelle que « Prothée, dans la
mythologie grecque, pouvait changer d’apparence quand il
le voulait, se transformer en sanglier, en lion, en dragon, en
feu, etc. ».
L’intérêt dans le plan de carrière au niveau de l’individu
provient de trois éléments8 :
1. Un déplacement des valeurs de la société s’effectuant de
l’importance accordée à la rémunération et autres avan¬
tages sociaux vers des récompenses psycholo-giques
comme les opportunités de développement personnel.
2. La réussite dans la vie n’est plus définie seulement en
termes de résultats liés au travail comme la promotion
et la rémunération mais sont également pris en compte
désormais les résultats liés aux activités extra-profes¬
sionnelles.
©
A-J 3. La sécurité de l’emploi devient de plus en plus un ves¬
tige du passé.
Selon Hall9, planifier sa carrière est un processus délibéré
qui consiste à :
1. Devenir conscient des possibilités et des contraintes qui
se présentent, des choix à effectuer et de leurs limites.
2. Identifier ses objectifs de carrière.
3. Programmer le travail, la formation et les expériences
de développement afin d’être en mesure de définir la
LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 29

direction et les étapes à suivre pour atteindre un objec¬


tif spécifique de carrière.
La gestion des carrières et la planification de carrière con¬
stituent les deux extrémités d’un continuum représentant
les activités de développement de carrière10 (figure 1.3).
Les planifications de carrière (individuelle) et la gestion

Figure 1.3. Développement de carrière

Développement de carrière

Planification des carrières Gestion des carrières

i
S
W Accent mis sur l’individu Accent mis sur l’organisation
LU
O

°
des carrières (organisationnelle) ne sont pas deux proces¬
ç. sus séparés et distincts. Une personne qui ne peut suivre
g.
son plan de carrière dans l’organisation la quittera proba¬
blement. Dans le cas où ses opportunités seraient réduites
à l’extérieur de l’organisation, ses performances peuvent
diminuer, elle sera ainsi moins productive dans son
entreprise actuelle. Aussi, les programmes orientés vers les
pourvois de postes (accent mis sur l’organisation) vont de
pair avec ceux dont l’objectif est d’aider les salariés à
mieux se connaître (accent mis sur l’individu).
Mieux se connaître permet d’appréhender les différents
30 GÉRER LES CARRIÈRES

types d’évolution de carrière.

3. ÉVOLUTIONS DES CARRIÈRES


La mobilité est multidimensionnelle. Après avoir présenté
trois types de mobilité organisationnelle, verticale, hori¬
zontale et latérale, nous présentons la notion de filière pro¬
motionnelle. Ensuite, nous abordons un deuxième type de
mobilité, la mobilité géographique. Nous terminons cette
partie par deux concepts, les doubles échelles et l’aperçu
réaliste de carrière.

3.1. Mobilité verticale, horizontale et latérale


Gérer les carrières nécessite de considérer les différents
types de mobilité possibles dans une organisation.
Le modèle tridimensionnel d’une organisation (figure 1.4)
de Schein11 indique que la gestion des carrières dépasse la
gestion de la mobilité verticale.
Trois types de mobilité organisationnelle sont pris en
compte :
i
S
• La mobilité verticale
W Elle est connue comme la mobilité hiérarchique qui
LU
O consiste à passer d’un niveau N au niveau supérieur
° N + 1. Elle correspond à la promotion classique. Le
mouvement inverse, la rétrogradation, est plus rare.
ç.
g. • La mobilité horizontale
Le salarié conserve dans sa mobilité le même niveau
hiérarchique mais passe d’une fonction à une autre. Par
exemple, cette mobilité interfonctions peut conduire le
salarié de la vente à la production.
• La mobilité latérale
Elle s’exprime en termes de pouvoir informel.
Indépendamment du niveau hiérarchique, cette mobilité
radiale ou d’inclusion reflète le rapprochement ou
LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 31

l’éloignement du salarié du noyau décisionnel de l’or¬


ganisation. Cette mobilité traduit le degré d’influence
ou de pouvoir exercé par une personne dans l’organisa¬
tion où elle travaille.
Ces trois formes de mobilité peuvent se combiner.
Les filières promotionnelles (figure 1.5) définissent des
Figure 1.4. Modèle tridimensionnel d’une organisation

Ventes

Lte. ]/ Mar :etinj


iProducTti Niveau
hiérarchique

ë
"Pouvoir / Périphérie ou Centre
S Ventes
z Etc., Prodùctîï
LU
Marketing
O

s
- Fonction -
£
CL
Source : d’après Schein, 1971, p. 404.
U

trajectoires qui alternent plusieurs postes du même niveau


hiérarchique avant de pouvoir envisager une mobilité ver¬
ticale. Chacun des postes « Pn » constitue davantage des
possibilités de postes qu’un poste unique et incontour¬
nable. Ainsi, une filière promotionnelle indique des alter¬
natives de postes, des scénarios qui permettent une pro¬
gression de carrière au sein d’une entreprise.
Ces alternatives signalent aux personnes des chemine-
32 GÉRER LES CARRIÈRES

Figure 1.5. Filière promotionnelle

N+2 A P7

)
N+l P6 P5 P4

N PI P2 P3

Source : adapté de Peretti, 1998, p. 244.

ments possibles dans une même filière. Cependant, des


passerelles peuvent exister entre différentes filières, facili¬
tant la mobilité aussi bien horizontale que verticale.
i
5
s 3.2. La mobilité géographique
LU
O
Les trois formes de mobilité, la mobilité verticale, la
°
mobilité horizontale et la mobilité latérale peuvent s’in¬
scrire dans une autre forme de mobilité, la mobilité géo¬
£
Q. graphique. Toutes ces formes de mobilité peuvent être :
U

• Intra-organisationnelle
Elles s’effectuent à l’intérieur d’une même entreprise.

• Inter-organisationnelles
Elles impliquent un changement d’entreprise.

La mobilité géographique s’exprime à deux niveaux :


LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 33

• La mobilité nationale
Le salarié est « transféré » du lieu d’exercice de son
activité à un autre. Cette mobilité peut par exemple
impliquer un changement d’établissement situé dans la
même ville ou nécessiter un changement de région à
l’intérieur du même pays.
• La mobilité internationale
A partir du moment où le salarié est muté hors de son
pays d’affectation, il entre dans le cadre de la mobilité
internationale.
La mobilité internationale peut revêtir plusieurs formes
comme :
• Des missions de courtes durées
Elles sont en général inférieures à un an, et le plus sou¬
vent entre trois et six mois.
• L’Eurocommuting
Le salarié est domicilié dans un pays et travaille la
semaine dans un autre pays européen.
• L’expatriation
ë C’est une mobilité internationale temporaire intra-
S
entreprise. La durée moyenne est de trois ans environ
W afin de limiter les problèmes de retour.
LU
O
Aujourd’hui, les affectations internationales appa-rais-
° sent incontournables pour atteindre des postes à respon¬
sabilités. La mobilité internationale, géné-ralement sous
ç. forme d’expatriation de quelques années alterne avec
g.
des postes au siège. L’entreprise a recours à l’expatria¬
tion au moins pour trois raisons12 :
• Besoin spécifique de personnel
Vacances de postes dues à l’absence de compétences
locales.
• Développement organisationnel
La mobilité se justifie pour des raisons de contrôle et de
coordination. Le transfert de la culture et du savoir-faire
34 GÉRER LES CARRIÈRES

est souvent fondamental au développement de filiales à


l’étranger.
• Développement de managers
La mobilité internationale s’inscrit dans le développe¬
ment des compétences des salariés détectés comme des
hauts potentiels. Pour occuper des postes à responsabil¬
ités dans des organisations qui opèrent sur des marchés
mondiaux, il faut avoir été confronté, sur le terrain, à
des réalités culturelles différentes de celles de son pays
d’origine. Dans la filière promotionnelle internationale
(figure 1.6) la progression de carrière est conditionnée
par plusieurs passages à l’international. Par exemple,
pour certaines entreprises, deux mobilités de deux à
trois ans sont nécessaires dans les dix premières années
de carrière pour pouvoir accéder à des postes d’un cer¬
tain niveau hiérarchique.
Figure 1.6. Filière promotionnelle internationale

N+2 A, P 7

et -©
i
S
W
LU
O

s N+l

ç.
g.
N PI P2

Le passage par l’international est-il toujours un accéléra¬


teur de carrière dans l’organisation ou cette dernière per¬
met-elle la progression à des personnes qui ne désirent pas
une mobilité internationale ? La mobilité internationale
développe des compétences particulières comme une corn-
LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 35

préhension des marchés internationaux ou une ouverture


interculturelle. Pourtant, l’entreprise devrait proposer une
double échelle de carrière, nationale et internationale.
Cette optique permettrait peut-être d’éviter des mobilités
géographiques subies. Dans une recherche récente13, la
mobilité internationale est plutôt perçue comme un handi¬
cap pour la progression de la carrière pour 32 % des cadres
français en cours d’expatriation.
Le concept de carrières à double échelle a d’abord été
introduit au niveau des mobilités verticales.

3.3. Carrières à double échelle


Cette approche permet à des spécialistes de poursuivre leur
progression dans l’entreprise sans accéder à des postes de
managers dans le cas où ils souhaiteraient continuer à
développer leur expertise technique. L’avantage de ce sys¬
tème revient à éviter un poste managérial à des personnes
qui n’en ont ni l’envie ni les compétences tout en maintenant
leur motivation dans l’entreprise. Avoir pour seule alterna¬
ë tive un poste de manager pour récompenser un expert peut
S mener à une insatisfaction et une faible performance de la
W
LU
personne promue dans sa nouvelle fonction et la perte d’une
O
expertise technique. L’approche « double échelle » recon¬
° naît alors que dans l’entreprise la contribution managériale
ou technique des salariés sont aussi importantes. La rétribu¬
ç. tion des salariés sera comparable à chaque niveau de
g.
l’échelle, managériale ou technique.
Ce système de double échelle comporte l’avantage de lim¬
iter les mobilités subies. Elles ne sont ni favorables à l’en¬
treprise, ni à l’individu. Par exemple, nos travaux montrent
que les mobilités internationales subies sont moins favor¬
ables en termes d’adaptation internationale que les mobil¬
ités choisies. Toute mobilité demande un temps d’adapta¬
tion. Aussi, pouvons-nous faire l’hypothèse qu’une mobil-
36 GÉRER LES CARRIÈRES

ité horizontale ou verticale subie puisse conduire à des dif¬


ficultés en termes d’adaptation et de performance.

Pour pouvoir choisir, encore faut-il avoir un aperçu réaliste


de la nouvelle situation engendrée par la mobilité, quelle
que soit sa nature, géographique, verticale ou horizontale.

3.4. Aperçu réaliste de la carrière

Le premier concept d’aperçu réaliste concerne le con¬


tenu du travail. L’aperçu réaliste du travail de Wanous14
se concentre principalement, comme son intitulé
l’indique, sur le travail lui-même. Cette théorie établit
un lien entre le discours réaliste de l’organisation, dans
la phase de recrutement d’un salarié sur le contenu de
son travail, et le fait que le salarié, s’il accepte de rejoin¬
dre l’organisation, restera dans l’organisation. En
revanche, cette approche ne considère pas le système
organisationnel de carrière alors même que le salarié,
ë pour prendre des décisions en termes de carrière, a
S besoin de ces informations15. Dans la même logique que
W
cet aperçu réaliste du travail, l’organisation semble
LU
O avoir intérêt à donner un aperçu réaliste de la carrière,
° non seulement dans la phase d’entrée d’un salarié, mais
aussi tout au long de son cheminement dans l’organisa¬
ç. tion. Ce réalisme passe par une définition précise des
g.
cheminements possibles, avec la capacité à proposer des
scénarios reposant sur des hypothèses de réussite. Les
filières promotionnelles ou internationales que nous
avons exposées y contribuent. Ce réalisme n’enferme
pas les salariés dans des parcours prédéfinis mais
indique le plus justement possible des opportunités
d’évolutions. Il s’appuie alors en général sur des exem¬
ples de parcours réels dans l’organisation.
LA GESTION DES CARRIÈRES AU CŒUR DE LA GRH 37

4. VERS LE SUCCÈS DE CARRIÈRE

Au cœur de la GRH, la gestion des carrières s’efforce de


concilier deux visions, celle de l’entreprise et celle du
salarié. L’entreprise inscrit sa politique dans une gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences. L’individu,
quant à lui, planifie sa carrière en fonction de ses aspira¬
tions personnelles.

L’évolution de la carrière se traduit par différents types de


mobilité : verticale, horizontale, latérale et géographique.
L’organisation peut l’aider par la définition de filières pro¬
motionnelles, nationales ou internationales. Elle veille
alors à offrir aux personnes la possibilité de suivre la voie
qui leur correspond le mieux pour progresser dans une
optique de carrière à double échelle. Le réalisme de car¬
rière s’impose pour que le salarié puisse réussir son évolu¬
tion dans l’organisation. Dans le chapitre suivant, nous
examinons les principaux déterminants de cette réussite.
w

S NOTES DU CHAPITRE 1
w
LU
O
1
°© Guérin et Wils, 1992, La gestion des carrières : une typologie des pratiques.
2 Guérin et Wils, 1992, p. 50, La gestion des carrières : une typologie des pratiques.
£
3 Arthur et al., 1993, Handbook of career theory ; Boumois, 1991, La gestion des cadres
a en Europe.
o
4
Barley, 1993, Careers, Identities and Institutions : the Legacy of The Chicago School
of Sociology.
5 Guérin et Wils, 1992, La gestion des carrières : une typologie des pratiques.
6 Hall, 1976, Careers in Organizations.
7
Roger, 1992, La gestion des carrières.
8
Exposés par Aryee et Debrah, 1993, A cross-cultural application of a career planning
model.
9
Hall, 1986, An overview of Current Career Development Theory, Research, and Practice.
10 Hall, 1986, An overview of Current Career Development Theory, Research, and
Practice.
38 GÉRER LES CARRIÈRES
11 Schein, 1971, The Individual, the Organization, and the Career: a Conceptual
Scheme.
12 Ondrack, 1985, International Transfers in North American and European MNEs.
13 Cerdin, 1999, La mobilité internationale : réussir
l’expatriation.
14 Wanous, 1992,
Organizational entry : recruitment, selection and socialization of new¬
comers.
15 Rosembaum, 1993, Organization career system and employee misperceptions.

S
=5
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£
o

3
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CHAPITRE 2

LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS


DE CARRIÈRE
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A-J

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CL
O
U
Copyright © 2000 EMS Editions.
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 41

Les déterminants du succès de carrière intéressent aussi bien


l’individu que l’entreprise. Wayne1 et ses collègues rappellent
que le succès de carrière peut être défini à la fois en termes :
• Objectifs
Cette définition comprend des réalisations observables
comme la progression de salaire ou le taux de
promotion.
• Subjectifs
Un indicateur subjectif du succès de carrière est la
satisfaction de la personne envers sa carrière,
comprenant les promotions, le salaire et le
développement professionnel.
Nous examinons dans ce chapitre les facteurs supposés
influencer les évolutions de carrière. Elles comprennent la
mobilité verticale, qui s’exprime par des promotions, et la
mobilité horizontale. Nous commencerons par présenter
une étude2 qui compare les managers efficaces aux man¬
agers promus rapidement. Nous développons ensuite le
système des mentors, qui apparaît très puissant dans la pro¬
ë gression de carrière des personnes.
S
W 1. MANAGER EFFICACE VERSUS MANAGER
LU
O PROMU RAPIDEMENT
° Luthans et ses collègues3 examinent les activités de 450 ma¬
nagers et comparent leurs succès en termes de carrière.
ç.
g. Leurs résultats indiquent que les managers remplissent
quatre types d’activités :
• Gestion traditionnelle
Prise de décision, planification et contrôle.
• Communication
Échange d’informations.
• Gestion des ressources humaines
Motiver, gérer les conflits, employer, former, etc.
42 GÉRER LES CARRIÈRES

• Réseau
Socialisation, être politique, relationnel, interagir avec
des personnes à l’extérieur.

Comme le montre la figure 2.1, le manager passe en


moyenne :
•32 % de son temps dans les activités traditionnelles ;
•29 % de son temps dans la communication ;
•20 % dans la gestion des ressources humaines ;
•19 % dans le relationnel (politique).
Le manager qui a du succès (en termes de promotion) ne
met pas l’accent sur les mêmes activités que le manager
qui est « seulement » efficace (défini en termes de quantité
et qualité de la performance et de la satisfaction et de l’im¬
plication de leurs subordonnés).

Figure 2.1. Efficacité versus promotions rapides


Manager moyen Manager à succès Manager efficace
il*

2**
S 44%
il*
S
W
LU
O

° EU Réseau CI Gestion des Ressources Humaines


EU Communication I Management traditionnel
ç.
CL
Source : d’après Luthans, 1988, adapté de Robins, 1998, p. 7.
U

Parmi les managers qui ont du succès, c’est le réseau et le


relationnel qui y contribuent le plus. Ces managers ont une
forte orientation carriériste4 où ils n’essaient pas de max¬
imiser leur performance, mais se contentent d’une perfor¬
mance suffisante et comptent sur leur réseau pour pro¬
gresser dans leur carrière. Parmi les managers efficaces, la
communication constitue l’activité la plus importante, et le
« politique », le moins important.
LES DETERMINANTS DU SUCCES DE CARRIERE 43

Ces résultats contredisent l’hypothèse historique que les


promotions sont basées sur la performance5. En effet, il
semble plutôt que les capacités sociales et politiques jouent
un rôle plus important pour les promotions. Dans la per¬
spective de la gestion des carrières, toute entreprise devrait
analyser minutieusement ses décisions de promotion. Les
questions suivantes doivent être posées :
1. Que veut récompenser l’entreprise ?
2. Que récompense-t-elle vraiment ?
3. Quels sont les messages véhiculés par le système de pro¬
motion ?
4. Le système d’évaluation des performances constitue-t-il
une base réelle pour les décisions concernant les promo¬
tions ?

2. QUELQUES BIAIS DANS LES PROMOTIONS

Les décisions de promotion ont des biais spécifiques.


o L’idée prévaut que les réussites passées des cadres et les
±L
"O
qualités qu’ils ont démontrées permettent de prédire leur
CO
réussite à un poste de niveau élevé6. On a probablement
O
O
O
trop tendance à confondre l’évaluation dans le poste actuel
et la prédiction qui concerne la réussite dans un poste dif¬
CM

©
A-J
férent. Cette erreur est notamment souvent faite dans le
CL contexte d’une mobilité internationale où l’entreprise con¬
U
sidère trop souvent qu’une personne compétente à Paris le
sera à Kuala Lumpur. Des forces peuvent devenir des faib¬
lesses et des faiblesses tolérables devenir critiques avec de
nouvelles responsabilités, exercées dans un nouveau con¬
texte.

Tl apparaît capital de distinguer la performance du poten¬


tiel. Quatre niveaux de l’évaluation de la personne peuvent
être considérés7 :
44 GÉRER LES CARRIÈRES

1. Les capacités cognitives


Elles correspondent aux traits ou à ce que la personne
est.

2. Les comportements
Ils se manifestent par ce que fait la personne.
3. Les performances
Ce sont les résultats obtenus par la personne.
4. Le potentiel
Difficile à cerner, il saisit la capacité à évoluer.
Des efforts importants sont faits dans les grandes organisa¬
tions pour dépister précocement les cadres à fort potentiel
avec l’intention de8 :
• dresser des listes de succession ;
• prévoir ceux à qui l’entreprise propose des parcours for¬
mateurs.

Une fois que les personnes sont identifiées comme haut


potentiel, il leur est offert un parcours de formation qui va
ë
les accompagner dans leur progression. Leurs chances de
S
W
progression seront alors accrues par rapport à celles des
LU salariés qui ne rentrent pas dans ces programmes. Ces
O
chances sont déterminées très tôt, comme l’approche
° tournoi le suggère.
ç.
g. 3. APPROCHE TOURNOI

Dans le système de carrière proposé par Rosenbaum9, ce


sont les premiers résultats en termes de carrière dans une
organisation qui vont affecter l’avancement de la carrière.
L’histoire de l’individu en termes de carrière a une influence
sur sa progression ultérieure de carrière. La rapidité des pre¬
mières promotions envoie des « signaux » de compétences10
sur lesquels l’entreprise, qui dispose de peu
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 45

d’informations sur ses salariés, fonde ses futures décisions


de promotion.
Rosenbaum11 souligne que la carrière des salariés a été
conçue au moins de deux façons :
1. Le modèle individualiste
Dans ce modèle, l’individu lui-même est le principal
agent de sa progression de carrière. Dans cette optique,
la carrière des salariés repose sur la connaissance de
leurs forces et faiblesses sans prendre en compte la con¬
naissance du système de carrière proposé par l’organi¬
sation. L’hypothèse implicite est que l’individu peut
contrôler sa carrière.
2. Le modèle structurel
Ce modèle considère que la carrière de l’individu est
« structurée » par les caractéristiques internes du
marché du travail et les politiques organisationnelles.
L’auteur susmentionné propose d’améliorer le modèle
individualiste en incorporant des facteurs structurels. Le
ë
modèle du tournoi avance que le système organisationnel
de carrière fonctionne comme un tournoi dans lequel l’his¬
S
W torique individuel des gains et des pertes définit les oppor¬
LU
O
tunités futures, les récompenses et l’investissement que le
° salarié reçoit de l’organisation.
Le modèle individualiste mérite quelques éclaircisse¬
ç. ments puisqu’il explique également le succès de carrière.
g.
Dans cette perspective, le modèle économique du capital
humain apporte un éclairage sur le rôle de l’individu dans
le développement de sa propre carrière.

4. CAPITAL HUMAIN
Le modèle économique du capital humain est une version
détaillée du modèle individualiste12. Les théories
économiques classiques avancent que les entreprises
46 GÉRER LES CARRIÈRES

investissent en capital (machines, équipements, usines,


etc.) pour de futurs profits. Le modèle du capital
humain13 suggère que les personnes investissent dans
leur capital humain pour améliorer leurs compétences et
leur carrière future. Leur investissement se manifeste
notamment au niveau de leurs études initiales et ensuite
dans la formation continue. L’hypothèse centrale de ce
modèle est que les personnes contrôlent les investisse¬
ments qui affectent leur carrière. Cependant, l’entreprise
elle-même investit dans le développement des compé¬
tences de ses salariés, ou plutôt d’une partie de ses
salariés. Parmi ces derniers, les hauts potentiels sont priv¬
ilégiés.
Un groupe de chercheurs14 fait référence aux deux sys¬
tèmes de carrière identifiés par Turner15, qu’il reprend
ainsi :
• La mobilité compétition
Ce modèle est représenté par un hybride des théories du
capital humain et de la motivation. Le capital humain
i est représenté par le niveau d’études du salarié, son
S expérience au travail et sa participation à des forma¬
W
LU
tions. La motivation est abordée via la théorie des
O
attentes où l’individu établit un lien entre ses efforts et
° la performance qu’il peut en retirer, et un lien entre cette
performance et les récompenses associées, notamment
ç. en termes de progression de carrière.
g.
• La mobilité parrainage
Des individus sélectionnés bénéficient du soutien et des
conseils de leurs supérieurs. Dans cette approche, les
auteurs s’intéressent aux rapports entre le supérieur
direct et une partie de leur subordonnés. Nous exam¬
inerons cette relation mais nous l’élargissons sur le
terme générique du système de mentor qui implique des
niveaux hiérarchiques supérieurs.
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 47

5. SYSTÈME DE MENTOR
Lévy-Leboyer, d’après une autre étude américaine réalisée
par le Center for Creative Leadership16, relève deux élé¬
ments déterminants pour les promotions :
• la visibilité d’un candidat possible ;
• la disponibilité au moment où un poste doit être pourvu.
Ces deux éléments sont particulièrement saillants pour les
personnes en mobilité internationale. Cette mobilité, sou¬
vent accompagnée d’une mobilité latérale avec un éloigne¬
ment du noyau décisionnel de l’organisation, fait courir le
risque de se trouver « loin des yeux, loin du cœur » si les
expatriés n’ont pas un parrain ou un mentor qui s’occupe
de leur carrière. Le mentor apparaît central dans les pro¬
gressions de carrière des personnes.
5.1. Rôle du mentor
Pour les hommes et les femmes qui sont parvenus à se hiss¬
er au sommet d’une organisation, la nature et la qualité de
leurs relations humaines ont joué un rôle fondamental dans
ë leur réussite17.
S Le mentor sert de modèle, assure un feedback, prodigue un
W
LU
appui social. A partir d’entretiens avec vingt dirigeants18, six
O fonctions principales sont reconnues aux mentors qui :
° • rendent les cadres plus efficaces ;
• confèrent de la visibilité et une image ;
ç. • sont source d’informations ;
g.
• sont pourvoyeurs de conseils ;
• apportent un soutien ;
• contribuent à faire évoluer les carrières.
En revanche, les hommes et les femmes ne mobilisent pas
les mêmes dimensions des réseaux comme le montre le
tableau 2.1.
Ce mentor est un élément capital du réseau de l’individu
qui assure sa visibilité et son appartenance à des réseaux
48 GÉRER LES CARRIÈRES

Tableau 2.1. Caractéristiques des réseaux


pour les femmes et les hommes
Caractéristiques du réseau Femmes Hommes
Types Réseaux exclusivement Réseaux informels
féminins ; réseaux informels

Accès Difficile Aisé


Efforts fournis Importants Minimaux

Quand Sur le temps de travail En dehors des heures


de travail
Postes occupés par les Très variés Peu variés
membres du réseau
Fonctions les plus Visibilité, conseil, Contacts pour évoluer
fréquentes du réseau information, soutien dans la carrière

Source : Schor, 1998, p. 4L

sociaux plus larges. Cependant, les fonctions du mentor


nécessitent une analyse plus approfondie car les entreprises
mettent en place parfois des systèmes formels de mentors.
Deux types de mentors se manifestent :
i • Le mentor formel
S Tl est désigné par l’organisation dans le cadre d’un pro¬
W
LU
gramme formel.
O

° • Le mentor informel
L’organisation n’intervient pas. C’est l’affaire du
ç. mentor et de son protégé.
CL

U Pour comparer l’efficacité des mentors formels et des men¬


tors informels, il est nécessaire de définir les fonctions
d’un mentor.
Les mentors sont des personnes avec une expérience et des
connaissances poussées qui s’engagent à fournir soutien et
mobilité ascendante pour la carrière de leurs protégés19.
Les relations avec un mentor sont une ressource de carrière
critique pour les salariés dans une organisation.
LES DETERMINANTS DU SUCCES DE CARRIERE 49

Les mentors aident leurs protégés en fournissant deux


types de fonctions20 :
• fonctions de développement de carrière, qui facilitent
l’avancement du protégé dans l’organisation ;
• fonctions psychosociales, qui contribuent à la
croissance personnelle et au développement
professionnel du protégé.
Chacune de ces fonctions se décline elle-même en
plusieurs fonctions.
Selon Kram21, les mentors peuvent fournir cinq fonctions
de développement de carrière :
• Parrainage
Le mentor parraine les promotions et les mouvements
latéraux. Il « ouvre les portes ».
• Coaching
Le mentor accompagne le protégé en lui fournissant un
feedback.
• Protection
o
±L
~o
Le mentor « protège » le protégé des forces adverses. Il
LU
CO lui fournit du soutien et agit comme un « tampon ».
Z
LU
O
O
O
• Défis
CM

©
Le mentor fournit à son protégé des missions où il faut
A-J

&
relever des défis.
>-
CL

U
• Visibilité
Le mentor contribue à augmenter la visibilité du protégé.
Cette fonction de développement de carrière dépend du
pouvoir et de la position du mentor dans l’entreprise. Elle
se concentre sur l’organisation et la carrière du protégé.
50 GÉRER LES CARRIÈRES

La fonction psychosociale présente quatre aspects22 :


• Modèle
Le mentor est un modèle auquel peut s’identifier le pro¬
tégé, notamment en termes de comportements, d’atti¬
tudes et de valeurs.
• Conseils
Le mentor aide à résoudre les dilemmes personnels et
professionnels.
• Acceptation et confirmation
Le mentor apporte soutien et respect au protégé.
• Amitié
Le mentor fait preuve de bienveillance au-delà des
exigences liées au travail.
Cette fonction psychosociale dépend de la qualité des rela¬
tions interpersonnelles et du lien émotionnel qui sous-tend
la relation. Elle se concentre sur le protégé, en particulier
sur son développement personnel.
Ces fonctions ne semblent pas se manifester avec la même
efficacité dans l’évolution de la carrière du protégé, selon
i qu’elles s’inscrivent dans une relation formelle ou informelle.
S
W 5.2. Relations formelles et informelles
LU
O
Ragins et Cotton23 notent des différences entre les relations
° formelles et informelles qui peuvent avoir une influence
sur les fonctions des mentors et sur les résultats en termes
ç.
g. de carrières. Ces différences se situent à trois niveaux,
développées dans le tableau 2.2 :
•la façon dont la relation débute ;
•la structure de la relation ;
•le processus impliqué dans la relation.
Ragins et Cotton24 examinent les effets du type de la rela¬
tion entre le mentor et son protégé sur les résultats en ter¬
mes de carrière, à partir d’un échantillon de 352 femmes et
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 51

Tableau 2.2. Différences entre les relations formelles


et informelles

Relations formelles Relations informelles


Début de la relation Rapprochement par le Identification et
coordinateur du programme attraction mutuelle
Structure de la relation
•durée De 6 mois à 1 an De 3 à 6 ans
•fonctionnement Prévu par contrat Flexible en fonction
des besoins
Processus impliqué
•Motivation Faible Élevée
•Capacités coaching Faibles
de Élevées
•Intérêts Plutôt éloignés Intérêts mutuels

257 hommes protégés. Les protégés de mentors informels


perçoivent leurs mentors comme plus efficaces. Ils
reçoivent aussi une plus grande rétribution que les protégés
ë de mentors formels. Les protégés de mentors informels
S
obtiennent également plus de résultats en termes de car¬
W rière que les personnes sans mentor. En revanche, aucune
LU
O différence significative n’a été trouvée entre les personnes
° sans mentor et celles qui ont un mentor formel.
Ces résultats montrent le peu d’efficacité des programmes
ç.
CL qui mettent en place de manière formelle des mentors.
U
L’entreprise a intérêt à laisser se développer les relations
mentors-protégés de manière informelle.
Les programmes formels sont parfois justifiés par les
entreprises pour les femmes bloquées par le « plafond de
verre ». Cette métaphore traduit la difficulté pour une
femme d’atteindre le sommet de l’organisation qu’elle a
seulement l’opportunité d’entrevoir. Nous développerons
plus amplement ce concept dans le troisième chapitre.
52 GÉRER LES CARRIÈRES

Des programmes formels sont aussi mis en place dans le


cadre de la mobilité internationale, particulièrement pour
l’expatriation. Leur objectif est notamment d’éviter que
l’expatrié soit oublié lors de l’expatriation. Ces pro¬
grammes permettent aux expatriés de garder un lien con¬
tinu avec leur organisation d’origine.
Ces programmes sont aussi très utilisés pour l’intégration de
jeunes salariés recrutés et sélectionnés comme des hauts
potentiels. Un des risques est de sélectionner une caste de
privilégiés par rapport à des personnes qui ne bénéficient
pas d’un tel système, même si l’efficacité d’une telle relation
formelle est loin d’être prouvée.
Aussi faudrait-il encourager le cadre à choisir son mentor et
encourager des cadres à devenir mentor sans les contraindre,
au vu des résultats des recherches mentionnées. De plus, la
composition de la relation en termes de « homme-femme »
ne serait pas neutre25.
Le mentor informel serait plus efficace pour la carrière de
ë
son protégé. La relation mentor-protégé apparaît comme
S une relation évolutive, suivant différentes étapes.
W
LU
O
5.3. Étapes de la relation
°
La durée de la relation mentor-protégé est une question
ç. importante. Si pour un mentor informel, elle dure entre
g.
trois à six ans, cette relation a tendance à évoluer à travers
une série de quatre phases identifiées et décrites par
Kram26 :
1. Début de la relation
Cette phase dure en général de six mois à un an. Leur
position dans l’organisation et leurs responsabilités
conduisent les deux personnes, l’une beaucoup plus
expérimentée que l’autre, à interagir. Dans ce cadre,
LES DETERMINANTS DU SUCCES DE CARRIERE 53

elles découvrent une complémentarité dans leurs


besoins de progression. En général, à ce stade, ce sont
les fonctions de développement de carrière qui entrent
enjeu. En contrepartie de l’aide apportée par le mentor,
notamment dans l’acquisition d’attitudes et de compé¬
tences nécessaires dans la réalisation de tâches de plus
en plus exigeantes, le protégé fournit une assistance
technique, du respect et se montre loyal.
2. Culture
Pendant cette deuxième étape, les fonctions s’élargissent
au maximum. L’interaction entre le mentor et son pro¬
tégé augmente comme les deux parties tirent profit de la
relation. Elles tendent à prendre plus de risques, à la fois
personnels et professionnels, dans l’intérêt de la relation.
Leur engagement mutuel se développe, ce qui les conduit
à promouvoir la réputation et la carrière de l’autre.

3. Séparation
La relation mentor-protégé subit des transformations
majeures et peut même se terminer. Cette évolution peut
s’expliquer à la fois par des changements individuels ou
organisationnels. La position de pouvoir du mentor peut
changer. Il peut tomber en disgrâce dans l’entreprise et ainsi
devenir un handicap pour le protégé. Ce dernier peut aussi
©
A-J
désirer retrouver une certaine autonomie en s’éloignant
.S' d’une relation de type « parent-enfant ». Des conflits peu¬
vent aussi émerger. Le protégé peut faire des erreurs qui
déçoivent fortement le mentor qui a investi de l’énergie et
du temps dans la relation. Enfin, une restructuration organ¬
isationnelle ou la mobilité fonctionnelle ou géographique
peut simplement séparer les deux parties de la relation, ren¬
dant difficile toute interaction. La séparation apparaît
comme une période douloureuse, la relation mentor-pro¬
tégé étant souvent imprégnée d’émotion.
4. Redéfinition
54 GÉRER LES CARRIÈRES

Après la période de séparation, la relation peut être ran¬


imée. Elle se rétablit souvent sous une autre forme, plus
égalitaire, du type de celle entre pairs.
La relation mentor-protégé est une relation fondée sur la
réciprocité. Les deux parties doivent bénéficier de la rela¬
tion pour qu’elle puisse se maintenir. C’est dans cette
optique une relation gagnant-gagnant.
Il peut être peu judicieux pour un salarié de placer son suc¬
cès professionnel entre les mains d’une seule personne.

5.4. Soutien à 360 degrés


Les relations qui permettent de progresser devraient
inclure plusieurs personnes au cours de la carrière27.
Comme la rétroaction à 360 degrés pour l’évaluation, les
sources d’aides en termes de développement pourraient
être multipliées. Nous proposons de regrouper ces sources
(figure 2.2) sous le terme de « soutiens à 360 degrés » ou
soutiens multiples de carrière.
ë
Chacune de ces sources ne remplit pas les mêmes fonc¬
S tions.
W
LU
O Lorsque la relation inclut une personne beaucoup plus
° expérimentée qu’une autre, nous sommes dans le cas clas¬
sique de la relation mentor-protégé avec les fonctions men¬
ç. tionnées précédemment.
g.
La figure 2.2 montre une distance relativement importante
qui exprime l’écart de niveau hiérarchique entre le mentor
et le protégé, et la flèche en pointillé indique que le men¬
tor est ou non salarié de la même entreprise que son pro¬
tégé.
La relation « supérieur direct-subordonné » est hiérarchi¬
quement plus proche. Cependant, le supérieur direct n’est
peut-être pas le plus adéquat pour remplir le rôle de mentor.
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 55

Figure 2.2. Soutien à 360°

4 *
JC

4
T

La fonction du supérieur direct le conduit à la fois à s’af¬


firmer comme un évaluateur et un développeur de carrière28.
i Un conflit peut naître entre ces deux fonctions. De plus, le
S subordonné peut percevoir son supérieur plutôt comme une
W menace qu’un accélérateur pour sa progression. Le terme le
LU
O plus adéquat dans cette relation est celui de parrain. Au
° début de ce chapitre, nous avons mentionné la « mobilité
parrainage ». La théorie de l’échange « leader-membres »
ç.
CL
caractérise bien la relation de parrainage du supérieur direct
U avec certains de ses collaborateurs29. Cette théorie30 peut se
résumer en trois points centraux :
• les leaders font une distinction entre leurs subordonnés ;
• cette distinction n’est pas le fruit du hasard ;
• le statut « in-group » (ce sont les subordonnés qui ont
des liens privilégiés avec leur supérieur direct) ou
« out-group » (les subordonnés sont uniquement dans
le cadre de relations formelles avec leur supérieur
56 GÉRER LES CARRIÈRES

direct) est relié à la performance et à la satisfaction


des salariés. Ceux qui appartiennent au « in-goup »
présentent une satisfaction et une performance plus
élevée que ceux qui sont dans le « out-group ». Leur
supérieur leur porte une attention particulière,
notamment au niveau du développement de leur
carrière. Pour les « in-goup », les supérieurs sont plus
susceptibles d’apparaître comme des développeurs.
Cette fonction peut être négligeable pour les
subordonnés appartenant au « out-group ».
Les subordonnés d’un manager pourraient également
fournir un soutien dans la carrière de ce dernier dans la
mesure où il est loyal.
Nous ne sommes plus vraiment dans une relation de men¬
tor-protégé lorsqu’une personne senior n’est plus
impliquée, mais plutôt dans une relation de soutien-con-
seillé. Une alternative sérieuse à la relation mentor-protégé
est la relation entre pairs pour la progression de la car¬
rière31. La relation entre pairs paraît plus accessible pour
i les individus car les pairs sont potentiellement plus nom¬
S breux que les responsables hiérarchiques ou que les per¬
W
LU
sonnes seniors susceptibles de tenir le rôle de mentor.
O
Le tableau 2.3 compare les fonctions des mentors et des
° pairs relatives au développement de carrière. Ce tableau
montre que les fonctions assumées par les mentors et les
ç.
g. pairs sont plutôt proches. Néanmoins, un attribut spécial
les distingue fortement. Les relations entre les pairs pla¬
cent ces derniers à la fois comme fournisseurs et receveurs
des fonctions de développement. Il s’agit alors d’une rela¬
tion fondée sur la réciprocité. En revanche, la relation
mentor-protégé est plutôt fondée sur la complémentarité
avec chacun des partenaires tenant un rôle différent32. La
relation mentor-protégé dure également en moyenne
moins longtemps (trois à six ans comme déjà mentionné)
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 57

Tableau 2.3. Comparaison des fonctions des mentors


et des pairs

Relations avec le mentor Relations avec les pairs


Fonctions d’évolution de carrière Fonctions d’évolution de carrière
•parrainage •partage d’information
•coaching •stratégie de carrière
•visibilité •feedback lié au travail
•protection
•défi
Fonctions psychosociales Fonctions psychosociales
•acceptation et confirmation •confirmation
•conseil •soutien émotionnel
•modèle •feedback personnel
•amitié •amitié
Attribut spécifique Attribut spécifique
•complémentarité •réciprocité

Source : adapté de Kram et Isabella, 1985, p. 117.

qu’une relation entre pairs (parfois une vingtaine d’années


ë si ce n’est plus).
S
W Les relations entre pairs sont classées par Kram et Isabella33,
LU
O à partir d’une étude approfondie de vingt-cinq relations, sur
° un continuum comprenant trois types majeurs :

ç. • Information
CL

U
Les personnes dans la relation bénéficient de l’échange
d’information concernant leur travail et l’organisation.
• Collégial
La relation, si elle repose aussi sur le partage de
l’information, va au-delà avec un soutien émotionnel.
Les personnes sont susceptibles de participer à des
relations plus intimes sur les préoccupations du travail
et de la famille.
58 GÉRER LES CARRIÈRES

• Spécial
C’est la forme la plus intime de la relation. Ce type de
relation implique la possibilité d’évoquer des dilemmes
personnels relatifs au domaine familial ou à celui du
travail.

Selon les auteurs, ces trois formes de relations, sur le con¬


tinuum, soutiennent la progression des individus dans leurs
différentes étapes de carrière. Elles semblent être perçues
différemment par les individus. Ces relations pourraient
satisfaire différents besoins individuels aux différentes
étapes de la carrière. Toujours dans la comparaison mentor
et pairs, les mentors semblent plus importants pour les
débuts de carrière alors que les pairs semblent jouer un rôle
capital à toutes les étapes de la carrière.

6. DU SUCCÈS AUX SITUATIONS


PARTICULIÈRES

Le succès de carrière repose fortement sur les liens rela¬


ë tionnels que tisse un salarié et non uniquement sur ses per¬
S formances. Avancer dans sa carrière n’est pas un acte soli¬
W taire. Les entreprises qui veulent aider leurs salariés à pro¬
LU
O gresser ont intérêt à les encourager à utiliser les ressources
° qui les entourent, notamment dans la perspective d’un sou¬
tien à 360 degrés. Les relations mentor-protégé s’affirment
ç. particulièrement efficaces, surtout lorsqu’elles présentent
g.
un caractère informel. Les relations entre pairs procurent
également une source fructueuse de progrès et de
développement.
Le succès de carrière n’a pas le même sens pour tous les
individus. Aussi, paraît-il excessif de considérer les
salariés comme un ensemble homogène. Une approche
ciblée de la gestion des ressources humaines semble alors
s’imposer dans une optique de « marketing social ». Nous
LES DÉTERMINANTS DU SUCCÈS DE CARRIÈRE 59

examinons dans le chapitre suivant cette gestion des car¬


rières ciblée.

NOTES DU CHAPITRE 2

i
Wayne et al., 1999, The role of human capital, motivation and supervisor sponsorship
in predicting career success.
2
Luthans et ai, 1988, Real managers ; étude reprise et développée dans Robins, 1998,
Organizational Behavior.
3 Luthans et al, 1988, Real managers.
4 Feldman et Weitz, 1991, From the invisible hand to the
gladhand : understanding a
careerist orientation to work.
5
Robins, 1998, Organizational Behavior.
6 Lévy-Boyer, 1995, Repenser la gestion des carrières des cadres.
7
Igalens, 1991, Audit des Ressources Humaines.
Lévy-Boyer, 1995, Repenser la gestion des carrières des cadres.
9
Rosenbaum, 1979, Tournament mobility : career patterns in a corporation ; 1984,
Corporate mobility in a corporate hierarchy.
10
Rosenbaum, 1993, p. 332, Organization career system and employee misperceptions ;
l’auteur fait référence notamment aux travaux de Arrow, 1973, Higher education as a
filter et Spence, 1974, Market signaling : information transfer in hiring and related
processess.
i
Rosenbaum, 1993, Organization career system and employee misperceptions.
2 Rosenbaum, 1993,
Organization career system and employee misperceptions.
W 3 Becker, 1964, Human Capital.
4
Wayne et al., 1 999, The role of human capital, motivation and supervisor sponsorship
2 in predicting career success.
5 Turner, 1960,
LU
Sponsored and contest mobility and the school system.
6
O Lévy-Boyer, 1995, Repenser la gestion des carrières des cadres, se référant à
Ruderman, 1994, The realities of management promotion.
© 7 Schor, 1998, Femmes, hommes : deux routes vers le sommet.
£ 8
Schor, 1 998, Femmes, hommes : deux routes vers le sommet.
£ 19
Kram, 1985, Mentoring at work : developmental relationship in organizational life.
o 20 Kram, 1985, Mentoring at work :
developmental relationship in organizational life.
21 Kram, 1985,
Mentoring at work : developmental relationship in organizational life.
22
Kram, 1985, Mentoring at work : developmental relationship in organizational life.
23 Ragins et Cotton, 1999, Mentor functions and outcomes : a
comparative of men and
women in formal and informal mentoring relationship.
24
Ragins et Cotton, 1999, Mentor functions and outcomes : a comparative of men and
women in formal and informal mentoring relationship.
25
Ragins et Cotton, 1 999, Mentor functions and outcomes : a comparative of men and
women in formal and informal mentoring relationship.
26
Kram, 1983, Phases of the mentor relationship.
27 Hill et Kamprath, 1995, Beyond the myth of the perfect mentor : building a network

of developmental relationship.
60 GÉRER LES CARRIÈRES
28 Hill
et Kamprath, 1995, Beyond the myth of the perfect mentor : building a network
of developmental relationship.
29 Wayne et al., 1999, The role of human capital, motivation and supervisor sponsorship

in predicting career success.


30
Elle est développée par Liden et Graen, 1980, Generalizability of the vertical dyad
linkage model of leadership. Nous basons la description de cette théorie sur celle de
Robbins, 1998, Organizational Behavior.
31
Kram et Isabella, 1985, Mentoring alternatives : the role of peer relationship in career
development.
32 Kram et Isabella, 1985,
Mentoring alternatives : the role of peer relationship in career
development.
33 Kram et Isabella, 1985,
Mentoring alternatives : the role of peer relationship in career
development.

2
LU
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CHAPITRE 3

UNE GESTION DES CARRIÈRES


CIBLÉE

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Copyright © 2000 EMS Editions.
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 63

La place qu’occupent les salariés dans l’organisation con¬


duit à adopter différentes approches de la gestion des car¬
•V
rières. La flexibilité permet d’introduire la question : à qui
s’adresse la gestion des carrières dans l’organisation ?
L’entreprise peut difficilement apporter les mêmes répons¬
es à toutes les catégories de salariés. En effet, certains
groupes de salariés sont uniques à cause des caractéris¬
tiques spécifiques du travail qu’ils font ou de leurs propres
caractéristiques personnelles1. Les aspirations individu¬
elles des personnes demanderaient des réponses au niveau
de chaque individu. Cependant, il est utile d’examiner les
problématiques dues à des situations particulières comme
le statut professionnel, la mobilité internationale, la struc¬
ture familiale à laquelle appartient le salarié, sa génération
ou encore son potentiel.

1. FLEXIBILITÉ ET GESTION
DES CARRIÈRES

Le modèle de l’entreprise flexible (figure 3.1), développé à


l’Université de Sussex, à l’Institute for Employment
Studies2, recense les différentes formes de flexibilité dont
disposent les entreprises.

© Ce modèle est utile dans l’approche de la gestion des car¬


A-J

.S' rières. Il est avant tout un outil analytique qui met en évi¬
dence les différents types de flexibilité qu’une organisation
pourrait utiliser.

Ce modèle distingue quatre types de flexibilité3 :

1. Flexibilité numérique (quantitative)


Cette flexibilité a pour but d’améliorer les capacités de
l’entreprise à ajuster les flux d’entrée et de sortie de ses
salariés.
64 GÉRER LES CARRIÈRES

Figure 3.1. Modèle de Fentreprise flexible

Tr«» «il m ,lr |>f inUnr

f |
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en Source : adapté de Atkinson, 1985 et Atkinson et Meager, 1986.


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2. Flexibilité fonctionnelle
LU
O
O
C’est la capacité de l’entreprise à ajuster et à déployer les
O
IN capacités de ses salariés pour remplir les tâches exigées
©
A-J
par des changements de charges de travail, de méthodes
&
CL
de production et / ou de technologie. Cette forme de
O
U flexibilité correspond à une recherche de polyvalence.

3. Stratégies de distanciation (externalisation)


Cette troisième catégorie implique le remplacement de rela¬
tions d’emploi (contrat de travail) par des relations com¬
merciales (contrat commercial). Les employeurs peuvent
choisir, par exemple, de sous-traiter plutôt que de réorgan¬
iser leurs pratiques internes d’ affectation du personnel.
4. Flexibilité des rémunérations
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 65

Cette forme de flexibilité est relative à l’étendue dans


laquelle la structure de la rémunération et des récom¬
penses soutient et renforce les divers types de flexibilité
recherchés - numérique et / ou fonctionnelle.

Le modèle de l’entreprise flexible opère une segmentation


de la population salariée entre ceux qui appartiennent au
noyau central de l’organisation et ceux qui sont plutôt à la
périphérie. Au cœur de l’entreprise flexible se trouve le
noyau central entouré par des groupes périphériques de tra¬
vailleurs qui sont ou non salariés de l’entreprise. Les
groupes périphériques fournissent la flexibilité numérique.
La flexibilité fonctionnelle est atteinte dans le noyau cen¬
tral.

La gestion des carrières des personnes dépend notamment


de leur situation dans l’entreprise flexible :

• Le noyau central
L’entreprise recherche des salariés appartenant au
noyau central une flexibilité fonctionnelle ou qualita¬
tive. Le développement de l’entreprise repose sur cette
catégorie de salariés qui constituent le marché de tra¬
vail principal. Aussi, l’entreprise s’attache-t-elle à les
© fidéliser et à les motiver puisque la polyvalence repose
sur le développement de compétences qui s’inscrit sur
A-J

.S'
la durée. La gestion des carrières veillera alors à inté¬
grer l’atteinte de cette flexibilité fonctionnelle, notam¬
ment par l’organisation de filières professionnelles ou
géographiques, au service du développement des com¬
pétences de salariés au statut « privilégié ». La poli¬
tique de formation est un élément capital d’accompag¬
nement du processus. Ces salariés ont des perspectives
de carrière supérieures à ceux composant les groupes
périphériques.
66 GÉRER LES CARRIÈRES

• Deux groupes périphériques


1. Premier groupe périphérique
Les salariés constituant ce groupe appartiennent au
marché secondaire du travail. Ils possèdent des com¬
pétences utiles sans être spécifiques à l’organisation.
La stratégie pour ces postes repose alors sur le marché
externe. L’organisation fournit à ces salariés plus un
travail qu’une carrière.
2. Second groupe périphérique
Il concerne les contrats temporaires (types CDD), les
temps partiels, les stagiaires, les postes partagés. Ces
salariés ont encore moins de sécurité que le premier
groupe périphérique. Leurs contrats de travail sont
limités. L’entreprise recherche ici une flexibilité
quantitative. La gestion des carrières de ces salariés
apparaît alors secondaire, puisque, bien que salariés
de l’entreprise, ils y restent cantonnés à la périphérie.
La taille des groupes périphériques reflète la nature
des compétences recherchées par les entreprises. Les
i travailleurs périphériques sont ceux dont les compé¬
tences peuvent être facilement obtenues sur le
S
W marché externe du travail. Ce sont également ceux
LU
O
dont la coopération dans le processus de production
° ne s’avère pas fondamentale à la performance de
l’organisation. La flexibilité numérique fournie par le
ç. groupe périphérique soutient la sécurité de l’emploi
g. du noyau central.

• La couronne extérieure
L’entreprise peut recourir à des personnes qui ne sont
pas salariées de son organisation. Elle le fait notam¬
ment pour absorber des surcroîts d’activité. Ces per¬
sonnes sont extérieures à l’organisation. Elles sont
« out carrière » pour l’organisation dans laquelle
elles côtoient les « in carrière ».
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 67

Ce modèle permet aux entreprises d’avoir une réflexion


sur les populations cibles de leur système de carrière. Il
montre clairement que certaines populations sont plus
stratégiques pour l’organisation dans le sens où elles
détiennent les compétences clés à son développement.
La rencontre entre le développement organisationnel et
le développement individuel s’établit de manière opti¬
male.

Le modèle de l’entreprise flexible peut être rapproché de


l’organisation en forme de trèfle à trois feuilles4. La pre¬
mière feuille correspondrait au noyau central avec des per¬
sonnes très qualifiées. La deuxième feuille correspon-drait
à la périphérie et la troisième feuille à la couronne ex¬
térieure. Les deux dernières feuilles deviendraient de plus
en plus importantes5. La gestion des carrières dans une
entreprise pourrait alors se concentrer sur un nombre de
plus en plus restreint de personnes.
ë
Nous proposons d’examiner dans les sections suivantes
s
W des problématiques particulières de gestion des carrières.
LU
O

s 2. CIBLES ET PROBLÉMATIQUES PARTIC¬


ULIÈRES
ç.
g.
La première problématique que nous abordons concerne la
dichotomie cadres / non-cadres.

2.1. Cadres / Non-cadres


La gestion des carrières paraît pertinente surtout pour les
personnes qui appartiennent au noyau central de l’organi¬
sation. Ce sont en général des personnes avec le statut
cadre, et un contrat de travail à durée indéterminée (CDI).
68 GÉRER LES CARRIÈRES

La gestion des carrières s’impose particulièrement pour les


cadres. Elle se résume parfois à la gestion des cadres où
des « responsables de la gestion des cadres » s’occupent
uniquement de cette population.

La problématique de la gestion des carrières des non-


cadres, en comparaison aux cadres, paraît peu pertinente
du fait de trois raisons selon Roger6 :
• postes plus spécialisés ;
• plus grande résistance à la mobilité ;
• formation plus longue et coûteuse pour leur
développement professionnel.

La gestion des carrières dans la logique du marketing social


s’adresse de façon différenciée au public non cadre et au pub¬
lic cadre. La segmentation peut paraître également pertinente
au sein même de la population cadre. Selon Livian7, « la caté¬
"O gorie cadres est aujourd’hui de plus en plus hétérogène, à sup¬
poser qu’elle n’ait même jamais eu la moindre homogénéité
sociologique ». L’auteur illustre la segmentation de la popula¬
©
tion par les deux exemples ci-après :
A-J

&

1. Les jeunes diplômés


Leur carrière peut être schématiquement caractérisée
par :
•l’opportunisme vis-à-vis du poste proposé ;
•la recherche de l’autonomie rapide.
Les cinq premières années de leur carrière nécessitent
un suivi particulier afin de contrôler le turnover et d’ori¬
enter convenablement les individus ;
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 69

2. Les chercheurs de centres de Recherche et


Développement industriels
En général, les chercheurs, se définissant par rapport au
projet sur lequel ils travaillent, ont peu de mobilité car
ils sont trop spécialisés. De plus, même s’ils ont des
attentes à l’égard de leur entreprise, l’idée même de car¬
rière peut leur paraître inadaptée.

Ce deuxième exemple souligne l’intérêt de mettre en place


des systèmes de carrières à double échelle. Le premier exem¬
ple conduit à développer une cible particulière, les Xers.

2.2. Les Xers


Les salariés de la génération X, concept qui nous vient des
USA, appartiennent aux 25-35 ans. Cette génération est
fortement consciente que l’emploi à vie et les carrières
linéaires appartiennent au passé8. Elle a été le témoin des
déboires de ses parents. Aujourd’hui, ses valeurs et ses atti¬
tudes par rapport à la vie dans la société, l’éducation, l’é¬
conomie et aussi le travail divergent de celles des généra¬
tions qui les précèdent.
L’entreprise doit prendre en compte aujourd’hui les
aspirations de cette nouvelle génération. La demande
de cette génération semble particulièrement forte en ce
©
A-J
qui concerne l’acquisition de compétences et d’exper¬
.S'
tise. La gestion des carrières se concentre notamment
sur le développement de l’employabilité, particulière¬
ment recherchée par les Xers. L’équilibre recherché
entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle
semble aussi s’affirmer comme un élément central.

2.3. Les expatriés

La mobilité internationale revêt un statut particulier dans


la carrière des individus. Sa forme la plus classique est
70 GÉRER LES CARRIÈRES

l’expatriation. Il s’agit d’une mobilité nationale tempo¬


raire intra-entreprise9. Les entreprises y recourent sou¬
vent pour des raisons de contrôle et de coordination de
leurs opérations. Elles peuvent expatrier des personnes
pour trois raisons principales10. Énoncées brièvement
dans le premier chapitre, nous les rappelons ici car elles
ont des incidences en termes de carrière pour les person¬
nes concernées :

• Un besoin spécifique de personnel


Une absence de compétences dans le pays d’accueil
contraint l’entreprise à choisir un expatrié pour tenir
un poste basé à l’étranger. Ce poste peut ne pas s’in¬
scrire dans une trajectoire de carrière pour l’individu
en question. Son retour risque d’être problématique
dans la mesure où il court le risque d’être « loin des
yeux, loin du cœur » de son organisation d’origine
durant son séjour à l’étranger.

ë • Le développement des managers


L’expatriation est également utilisée dans le but de
S
W développer les compétences de personnes qui ont été
LU
O
détectées comme des hauts potentiels. Le raison¬
° nement sous-jacent revient à considérer que ceux qui
sont perçus comme pouvant occuper des postes à
ç. responsabilités dans quelques années doivent être
g. exposés à des expériences internationales significa¬
tives. La théorie de la courbe en U, qui montre que
l’adaptation est un processus qui s’inscrit dans le
temps avec des phases plus ou moins difficiles comme
le choc culturel, invite à retenir une exposition d’au
moins un an, voire plus pour des pays difficiles en ter¬
mes d’adaptation. Pour ces hauts potentiels, leur
retour ne pose pas de problème dans la mesure où leur
affectation s’est soldée par un succès, parce que la
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 71

mobilité constitue une étape dans un parcours bien


balisé ;

• Le développement de l’organisation
Le développement de l’organisation comprend le con¬
trôle et la coordination d’opérations internationales et
l’échange d’informations. L’expatriation revêt là une
dimension stratégique pour le devenir de l’organisation.
L’échange d’informations se déroule pendant et après la
mobilité. En effet, le rôle international de l’expatrié se
poursuit une fois de retour dans son pays d’origine.
Aussi, l’entreprise a-t-elle intérêt à offrir des postes qui
permettent d’exploiter l’expertise développée lors de
l’affectation internationale.

Un des points les plus délicats dans une mobilité inter¬


nationale, est la gestion du retour. Des études montrent
que 25 % des personnes quittent leur organisation dans
la première année de leur retour11. La réussite d’une
mobilité internationale comprend la réussite dans le pays
ë d’accueil. Elle passe par l’adaptation des expatriés, aussi
S bien à leur travail, à l’interaction avec les membres de la
W
LU
culture d’accueil et avec les conditions générales de vie.
O
Ces adaptations conduisent à la réussite mesurée par
° deux indicateurs principaux :
• la performance durant la mission ;
ç. • la réalisation de la mission dans sa totalité.
g.

La réussite d’une affectation internationale englobe la


réussite lors du retour.

Il faut surmonter à la fois des difficultés liées au travail et hors


travail12. Du côté du travail, les principales difficultés sont :
• les chances limitées de promotion du fait de l’éloigne¬
ment (ou ne pas avoir une présence récente) ;
72 GÉRER LES CARRIÈRES

• les connaissances et les savoir-faire peuvent être


obsolètes du fait des progrès technologiques ;
• les changements dans les procédures formelles ou
informelles et des canaux de communication.

Du côté de la vie hors travail (foyer), trois problèmes


majeurs sont soulignés :
• sentiment d’aliénation ;
• avoir moins en commun à partager avec les anciens
amis ou relations ;
• perte de statut.

L’entreprise peut soulager les problèmes du retour à


travers des actions durant la mission telles que le par¬
rainage. Ces programmes consistent à maintenir un lien
entre l’expatrié et l’entreprise d’origine via un parrain.
Ce parrain remplit notamment le rôle de conseil en car¬
rière. L’efficacité du parrain sera d’autant plus grande
ë qu’il possède les caractéristiques ci-après13 :
S
W
LU
1. Avoir une position influente dans l’organisation
o
Cette position lui permet d’avoir une bonne connais¬
°
sance des opportunités de carrières qui peuvent corre¬
ç. spondre à l’expatrié lors de son retour.
g.

2. Être un ancien expatrié


Ainsi peut-il mieux comprendre les préoccupations de
l’expatrié avec lequel il a une relation privilégiée.

3. Être prêt à investir du temps.


Aider une personne dans l’évolution de sa carrière est
une action exigeante en termes de temps.
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 73

4. Avoir une compréhension de l’importance d’un vivi¬


er international
Pour défendre un expatrié dans un comité de carrière ou
dans un autre contexte pour l’obtention d’un poste
demande de croire à la valeur ajoutée d’une mobilité
internationale pour son organisation.

Un tel mentor permet à l’expatrié de rester efficace lors des


derniers mois de sa mobilité internationale. L’incertitude
autour de la question du retour étant moindre, l’expatrié
peut conserver une bonne adaptation jusqu’à la fin de la
mission. Avoir moins d’incertitude quant à sa carrière ne
signifie pas « rester passif »14. La relation entre le parrain
et l’expatrié repose sur un véritable partenariat dans la ges¬
tion de la carrière du second. Le tableau 3.1 donne un
exemple de parrainage.
Les personnes, dont la mobilité s’inscrit dans le développe¬
ment des managers, font souvent l’objet d’un suivi partic¬
ulier associé à un retour prometteur en cas de réussite dans
ë la mission. Leur affectation ne se traduit pas automatique¬
ment par des gains immédiats. Ces salariés accepteront de
S
W limiter d’autant leurs gains à court terme, durant les affec¬
LU
O
tations internationales, qu’ils sauront que les expériences
° internationales constituent des étapes incontournables dans
la progression de leur carrière. La mobilité internationale
ç. revient alors à un investissement pour l’expatrié dont le
g.
retour sur investissement s’exprimera en termes moné¬
taires via une progression de carrière.

Pour l’expatriation, une autre difficulté réside dans la dis¬


position des personnes envers la mobilité internationale.
Les questions de la disposition se posent pour toute forme
de mobilité géographique, aussi bien internationale que
nationale. La structure familiale constitue un des facteurs
qui influencent cette disposition.
74 GÉRER LES CARRIÈRES

Tableau 3.1. Exemple de parrainage


Principes du parrainage :
•Programmer des entretiens informels avec l’expatrié et
sa famille avant le départ.
•Donner des conseils sur la formation.
•Maintenir des contacts réguliers avec l’expatrié et son
supérieur.
•Participer à l’évaluation de l’expatrié.
•Fournir des informations régulières sur l’entreprise
d’origine.
•Consacrer du temps à l’expatrié lorsqu’il est en
déplacement ou en vacances dans son pays d’origine.
•Signaler à l’expatrié toute opportunité de poste pour le
retour.
•Planifier et mettre en œuvre une réintégration « en
douceur» de l’expatrié une fois rentré dans son pays
d’origine.

Source : d’après Swaak, 1997, p. 30.

Û
2.4. Structure familiale
S
W
LU
o
La structure familiale peut se décomposer en plusieurs
s dimensions15 :
• statut marital ;
ç. • statut parental ;
g.
• statut d’emploi du conjoint.
Au moins quatre théories apportent un éclairage sur le lien
entre la structure familiale et l’avancement dans la car¬
rière16 :
• Le capital humain
Les entreprises regarderaient le mariage comme un
indicateur de la stabilité et de la responsabilité. Les
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 75

hommes mariés devraient alors plus progresser que les


hommes célibataires. Au contraire, les femmes mariées,
et notamment celles avec des enfants, chercheraient à
jongler entre leur travail et leur foyer, ce qui affecterait
leur carrière. Les femmes célibataires consacreraient
plus d’énergie à la progression de leur carrière.

• La conformation aux attentes sociales


De manière traditionnelle, le revenu principal de la
famille est apporté par le mari. Les hommes mariés ont
alors la nécessité de progresser dans leur carrière plus
que les célibataires, surtout lorsqu’ils ont des enfants ;

• La femme comme ressource


Les hommes mariés auraient plus de ressources à inve¬
stir dans leur carrière que les célibataires. En effet, les
conjoints fourniraient à leur partenaire salarié des
ressources supplémentaires en les soutenant et en leur
libérant du temps qu’ils peuvent consacrer à leur travail.
La femme apporte une aide d’autant plus grande qu’elle
ë
n’est pas salariée. Les maris peuvent alors se concentr¬
S er sur leur travail au profit de la progression de leur car¬
W
LU rière. En revanche, lorsque les deux conjoints travail¬
O
lent, les maris n’apporteraient pas une ressource aussi
°
importante que leur apporterait leur femme.
ç.
g. • La justice distributive
C’est le besoin financier qui orienterait la progression
de carrière. Les hommes mariés, surtout avec des
enfants et un conjoint sans revenus, auraient besoin de
revenus plus importants que les célibataires, ce qui les
conduirait à progresser davantage dans leur carrière. En
revanche, les femmes célibataires progresseraient plus
que des femmes mariées dont le conjoint poursuit égale¬
ment une carrière.
76 GÉRER LES CARRIÈRES

La situation d’emploi du conjoint invite à aborder la ques¬


tion des doubles carrières. Nous développerons ensuite, en
rapport à la carrière des femmes, le concept du « plafond
de verre ».

2.4.1. Doubles carrières

La disposition envers une mobilité géographique s’avère


problématique pour les couples à doubles carrières. Cette
question des doubles carrières apparaît de plus en plus
comme un obstacle au processus d’expatriation17. Les
recherches18 montrent que la disposition envers la mobilité
géographique d’un salarié dépend fortement de la disposi¬
tion du conjoint envers cette même mobilité. C’est un des
enjeux majeurs pour l’entreprise car la mobilité d’un
salarié peut signifier une interruption dans l’emploi ou la
carrière de son partenaire.

Un couple à double carrière est un couple dans lequel cha¬


cun des partenaires accorde de l’importance à sa carrière.
i Tl faut le distinguer du :
S
W
• couple traditionnel (l’homme travaille, la femme est au
LU foyer) ;
O
• couple à double revenu (les deux conjoints travaillent,
° mais l’un d’entre eux a un revenu d’appoint).
ç.
g. Aussi, la disposition du conjoint peut moins influencer
celle du salarié à qui est proposée la mobilité géographique
dans le cas des couples traditionnels et des couples à dou¬
ble revenu. En effet, le « pouvoir conjugal » de chacun des
membres du couple, exprimé en termes de statut et de
niveau de revenu, apparaît déséquilibré au profit de la per¬
sonne qui a une carrière par rapport à celle qui a un revenu
d’appoint ou pas de revenu. Dans un couple à double car¬
rière, le pouvoir est plus équilibré dans la mesure où cha-
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 77

cun de ses membres est fortement impliqué profession¬


nellement.

Deux types d’implication sont pertinents pour les couples


à double carrière :
• l’implication professionnelle ;
• l’implication familiale.

Plusieurs typologies de familles à double carrière ont été


proposées19. Celle de Hall et Hall20 s’organise autour des
deux implications précédentes. Pour les auteurs, il n’y a
pas une structure unique de rôle pour les couples à double
carrière. Au contraire, ils distinguent quatre types princi¬
paux qui correspondent à différents degrés et types de con¬
flits. Nous reprenons chacun de ces types en les analysant
au regard des difficultés potentielles de mobilités géo¬
graphiques :

• Les conciliants
Dans ces couples, un partenaire est fortement impliqué
o
±L
dans sa carrière et faiblement impliqué dans son foyer.
~o
LU
CO
L’autre partenaire est dans la situation opposée. Aussi,
Z
LU cette situation ne devrait-elle pas être défavorable à une
O
O
O
CM
mobilité géographique si elle est proposée au partenaire
©
A-J
impliqué dans sa carrière. En effet, elle n’implique
& pas de sacrifice de carrière de l’un pour l’autre.
>-
CL

U
• Les adversaires
Les deux partenaires sont fortement impliqués dans leur
carrière et peu impliqués dans la famille. Cette situation
est très stressante dans la mesure où chacun a pour pri¬
orité sa carrière.
Un problème de négociation se posera quand une
entreprise proposera une mobilité géographique à l’un
des deux. L’autre devra, d’une certaine manière, sacrifi-
78 GÉRER LES CARRIÈRES

er sa carrière pour suivre. Aussi, l’entreprise devrait-elle


accompagner le conjoint pour l’aider à poursuivre sa car¬
rière « ailleurs », i.e. où est muté le salarié.

• Les alliés
Les deux partenaires sont tous deux impliqués dans le
même domaine, soit leur famille, soit leur carrière.
Leurs priorités sont identiques et ne provoquent pas de
conflits. Si leur identité est définie par rapport à la
famille et leurs relations, la mobilité géographique
devrait poser des difficultés aux deux partenaires. Si
leur identité est liée à la carrière, ils pourraient accepter
que l’un des deux soit mobile alors que l’autre conserve
son activité. Etre ensemble n’est pas la priorité pour ces
couples. Le « natiocommuting » (comme travailler à
Paris la semaine et rejoindre son conjoint le week-end à
Toulouse) ou le « eurocommuting » (travailler à
Londres la semaine et rejoindre son conjoint à Paris le
week-end) pourraient alors leur convenir.

i
• Les acrobates
S Les deux partenaires sont fortement impliqués à la fois
W
LU dans leur carrière et leur vie familiale. Leur identité est
O
définie sur ces deux dimensions. Aussi ne délégueront-
°
ils aucune activité à l’autre partenaire. Ils vont jongler,
ç. d’où la métaphore d’acrobate, entre leurs deux activités
g. auxquelles ils accordent une importance identique.
Proposer une mobilité à l’un des partenaires peut
rompre l’équilibre. De jongleurs acrobates, ils risquent
de devenir boxeurs adversaires.

Les auteurs soulignent que les situations de ces couples ne


sont pas figées. Ils peuvent changer de catégorie.
L’entreprise, dans sa gestion des carrières, a intérêt à com¬
prendre la problématique de ces couples. 11 ne s’agit pas de
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 79

s’immiscer dans leur vie mais leur donner les moyens d’une
mobilité. L’étude des liens entre les stades de la vie familiale,
l’épanouissement personnel et la carrière21 contribue à cette
meilleure compréhension (tableau 3.2).

Tableau 3.2. Liens entre les stades de la vie familiale,


de l’épanouissement personnel et de la carrière

Stades de la vie familiale Stades de l’épanouissement Stades de la carrière


personnel

1. Début du mode de vie besoin d’établir son identité exploration


à deux carrières
2. Jeune couple marié besoin de s’établir, suivi par établissement
sans enfant un désir de se réaliser davantage

3. Jeunes parents femme : épanouissement par femme : maintien ou


les enfants stagnation
4. Parents matures désir de changement pour femme : avancement
les deux homme : déclin
5. Le nid vide femme : épanouissement par homme : déclin
l’implication dans la carrière
homme : épanouissement par
W l’implication dans la famille

S Source : adapté de Sekaran, 1992, p. 30.


W
LU
O
La question des doubles carrières devrait devenir de plus
°© en plus importante avec le développement de l’homogamie
£ (mariage ou partenariat entre individus de même statut)
Q! due notamment au diplôme22.
o

L’étude de la structure familiale conduit à examiner de plus


près la carrière des femmes.

2.4.2. Le plafond de verre

Aborder la carrière des femmes conduit à développer le con¬


cept du plafond de verre. Il s’agit d’une barrière organisa-
80 GÉRER LES CARRIÈRES

tionnelle faisant obstacle à la progression des femmes vers


des postes de direction. Cette barrière paraît invisible et
impénétrable. Les femmes se heurteraient à ce plafond de
verre, à cette barrière invisible qui les sépare des positions de
top management.
Toute la littérature en gestion conclut qu’il y a une différence
entre les femmes et les hommes au niveau de la carrière23.
Kanter24, dans une étude d’une vingtaine d’années sur les
décisions de promotion, montre que les managers promeu¬
vent à leur propre image. Ils privilégient les critères poli¬
tiques aux critères de performance. Cette approche, qualifiée
de « système de reproduction homosociale », où les déci¬
sions de promotion sont habituellement prises par des
hommes, est particulièrement défavorable pour les femmes
qui aspirent à des hauts niveaux dans l’organisation.
Pourquoi le plafond de verre continue-t-il à empêcher les
femmes d’avancer au sommet de l’organisation ? Pour
répondre à cette question, des recherches s’efforcent de
déterminer quelles sont les variables importantes pour l’a¬
ë vancement de la carrière25. La hiérarchie des critères semble
S différer entre les femmes et les hommes comme l’indique le
W
LU
tableau 3.3.
O

° Les répondants indiquent le niveau d’importance de chacun


des dix-huit critères, à la fois pour les hommes et les
ç. femmes. Ces femmes ont le sentiment qu’elles doivent être
g. meilleures sur tous les points pour atteindre le même niveau
d’avancement. Les femmes sont aussi confrontées aux inter¬
ruptions de carrière dues à la maternité et à l’éducation de
leur(s) enfant(s). Aussi leur carrière mérite-t-elle des amé¬
nagements qui évitent les blocages matérialisés par le pla¬
fond de verre. En effet, choisir d’avoir un ou plusieurs
enfants ne devrait pas provoquer la perte du statut de haut
potentiel, population particulièrement concernée par la ges¬
tion des carrières.
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 81

Tableau 3.3. Importance des critères pour Tavancement


de la carrière
Critère Niveau d’importance Niveau d’importance
pour les femmes pour les hommes
Avoir un mentor 4,21 3,58
Attrait physique 3,57 2,75
Formation 4,42 3,87
Expérience 4,51 3,80
Conseil en carrière 2,99 2,48
Environnement
organisationnel d’un 4,48 3,29
grand secours
Capacités interpersonnelles 4,58 3,64
Capacités à communiquer 4,58 3,96
Capacités à changer 2.40 3.38
de lieu de travail
Réseau 3,85 3,65
Disposition à voyager 3,85 3,72
Famille d’un grand secours 4,48 3,36
Capacité à adopter les
valeurs de son 3,65 3,47
W supérieur
Bonne prise de risques 3,98 3,76
S
Travail relié à ses études 3,24 2,85
z
LU
O
Images professionnelles 4,54 2,82
s Capacité à changer de
3,74 3,15
© modèles de vie
£
Capacité à équilibrer
les exigences 4,62 2,80
O
de la famille et carrière

1 = extrêmement peu important / 5 = extrêmement important

Source : adapté de Marlow et Marlow (1999), p. 42.


82 GERER LES CARRIERES

2.5. Les hauts potentiels

Pour Boumois et Roussillon26, la « gestion des cadres à


haut potentiel est à la fois un analyseur, un révélateur et un
symptôme du management de l’entreprise ».

La notion de cadre à haut potentiel est sujette à débat. La


notion de potentiel porterait plutôt, pour Roussillon27, sur
la dimension de son expertise propre à sa personnalité
plutôt que sur ses compétences techniques ou ses con¬
naissances. La relative permanence des cadres sur les
listes de hauts potentiels apparaît plutôt comme une man¬
ifestation du déterminisme des premiers choix (théorie de
l’engagement) que de la qualité de ces choix. L’auteur
place la construction de l’identité professionnelle au cen¬
tre du développement des potentiels.

Saint-Giniez et Bernard28, en développant les jugements


d’attribution du potentiel, rappellent que le potentiel est
un construit social. Il n’existe que s’il est reconnu et
validé par l’entourage qui joue un rôle déterminant dans
le développement personnel. La capacité de la personne à
se projeter dans le futur constitue une autre condition
©
A-J
pour que son potentiel se réalise. Les auteurs soulignent
.S'
l’intérêt des processus de jugement concerté dans l’attri¬
bution de potentiel.

Les hauts potentiels, dirigeants en devenir, font l’objet de


toutes les attentions. Une fois détectés, l’entreprise leur
donne les moyens de se développer, à la fois en leur offrant
des programmes de formation particuliers et des parcours
professionnels qui développent les compétences jugées
nécessaires pour leur progression.
UNE GESTION DES CARRIÈRES CIBLÉE 83

3. DES CIBLES AU DÉFI DU TEMPS

Le modèle de l’entreprise flexible, en segmentant les per¬


sonnes par rapport à la flexibilité attendue par l’entreprise,
montre que cette dernière adopte une gestion des carrières
ciblée. Le cœur de cible de la gestion des carrières de l’en¬
treprise est le noyau central. A l’intérieur même de ce
noyau central, l’entreprise rencontre plusieurs types de
problématiques liées à des caractéristiques particulières
des salariés telles que les couples à double carrière ou les
hauts potentiels.

Cette notion de haut potentiel, au cœur de la gestion des


carrières, devrait laisser la place à la notion de talents. En
effet, la notion de talent paraît plus séduisante dans la
mesure où elle est plus indépendante de l’âge. Pour toute
gestion des carrières le temps s’impose comme un vérita¬
ble défi que l’entreprise cherche à relever.

w
NOTES DU CHAPITRE 3

S 1
Mondy, Noe et Premeaux, 1999, Human Resource Management.
z 2
LU Atkinson, 1985, Flexibility : planning for the uncertain future, Atkinson et Meager,
O
1 986, Changing Working Patterns : How Companies Achieve Flexibility to Meet their
3 Needs.
© 3
Description basée sur Atkinson et Meager, 1986, Changing Working Patterns : How
£ Companies Achieve Flexibility to Meet their Needs ; Pollert, 1988, The « flexible
firm » : fixation or fact ?
Q! 4
o Handy, 1989, The age of unreason.
5 Hall et Mirvis, 1996, The New Protean Career : Psychological Success and the Path

with a Heart.
6
Roger, 1992, La gestion des carrières.
7 Livian,
1990, La gestion des carrières des cadres dans les grandes entreprises français¬
es.
8
Thévenet, 1 999, Le turnover des Xers dans les nouveaux secteurs de services.
9
Cerdin, 1999, La mobilité internationale : réussir l’expatriation.
10 Ondrack,
1985, International Transfers in North American and European MNEs.
11
Black et Gregersen, 1999, The right way to manage expats.
12 Dowling, Schuler et Welch, 1994, International dimensions of human resources man¬

agement ; Porter et Tansky, 1999, Expatriate success may depend on a « learning ori¬
entation » : Considerations for selection and training.
84 GÉRER LES CARRIÈRES
13
Swaak, 1 997, Repatriation : A Weak Link in Global HR, repris dans Cerdin, 1 999, La
mobilité internationale : réussir l’expatriation.
14
Cerdin, 1999, La mobilité internationale : réussir l’expatriation.
15 Tharenou, 1999, Is there a link between family structures and women’s and men’s

managerial career advancement.


16
Tharenou, 1999, Is there a link between family structures and women’s and men’s
managerial career advancement, se référant à PfefFer et Ross, 1982, The effects of
marriage and a working wife on occupational and wage attainment.
17 Smith et Still, 1999, Managing the dual-career expatriate.
18
Brett, Stroh et Reilly, 1993, Pulling up roots in the 1990s : Who’s willing to relocate ?
19
Rappelées par Mérignac, 1999, Gestion de la mobilité internationale des couples de
cadres à double carrière.
20
Hall et Hall, 1979, The two-career couple. Pour Mérignac, 1999, les auteurs proposent
la typologie la plus pertinente.
21 Sekaran, 1992, Relations travail-famille, dynamique du couple et design organisa¬

tionnel.
22
Mérignac, 1999, Gestion de la mobilité internationale des couples de cadres à double
carrière, se référant notamment à Forsé et Chauvel, 1995, L’évolution de l’homogamie
en France.
23 Marlow et Marlow, 1999, Career Development and Women Managers : Does « One

Size Fit Ail » ?


24
Kanter, 1977, Men and women of the corporation.
25 Marlow et
Marlow, 1999, Career Development and Women Managers : Does « One
Size Fit All»?
26 Boumois et Roussillon,
1998, p. 10, Préparer les dirigeants de demain.
27 Roussillon, 1998, Approche psychologique de la préparation des dirigeants.
28 Saint-Giniez et Bernard, 1998, Les jugements d’attribution du potentiel : une

approche constructiviste.

S
Z
LU
O

°©
£

Q!
o
CHAPITRE 4

DÉFIS DU TEMPS
POUR
LA GESTION DES CARRIÈRES
CO
C
.2
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LU
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Z
LU
O
O
O
CM

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A-J

&
>-
CL
O
U
Copyright © 2000 EMS Editions.
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 87

Gérer les carrières contient une forte dimension temps. Dans


ce chapitre, nous nous concentrons sur des situations où le
développement des carrières des personnes semble connaître
un arrêt. Phénomènes qui apparaissent de plus en plus tôt
dans la carrière des personnes1, les situations de plafon¬
nement constituent un véritable défi pour la gestion des car¬
rières. Après avoir exposé trois situations de plafonnement,
nous poursuivons par une gestion particulière, celle des fins
de carrière. Nous introduirons alors le concept de sentiment
de fin de vie professionnelle.

1. PLAFONNEMENT DE CARRIÈRE

Les concepts de plateau ou plafonnement, utilisés ici de


manière interchangeable, traduisent tous deux un arrêt dans
la progression de carrière. La métaphore du plateau suggère
une étape franchissable alors que celle du plafonnement
paraît décrire une situation plus définitive. Ici, nous nous
intéressons à la situation d’arrêt en tant que telle.

1.1. Trois types de plafonnement


Comme le résume lafigure 4.1, nous pouvons distinguer au
moins trois types de plateau ou plafonnement2 :
1. Le plafonnement structurel ;
©
A-J
2. Le plafonnement de contenu ;
3. Le plafonnement salarial.

Chacun de ces plafonnements peut être mesuré en termes


objectif ou subjectif.

1.1.1. Le plafonnement structurel


Ce plafonnement correspond à une perspective limitée de
mobilité verticale pour certains auteurs3 et même horizon¬
tale pour d’autres4.
88 GERER LES CARRIERES

Figure 4.1. Trois types de plafonnement

Plafonnement structurel

Objectif Plafonnement de contenu Subjectif

Plafonnement salarial

La mesure objective du plafonnement structurel se focalise


sur le nombre d’années pendant lesquelles une personne
n’a pas eu de promotion. La difficulté consiste à détermin¬
er le nombre d’années sans mobilité qu’il faut retenir. Ce
nombre dépend notamment du secteur d’activité, du méti¬
o
±L
er ou même de l’organisation.
~o
LU
CO
Pour la mesure subjective, c’est le salarié qui décrète s’il
Z
LU est plafonné en constatant que ses possibilités de mobilité,
O
O
O
CM
aussi bien verticales qu’horizontales, sont fortement com¬
©
A-J
promises.
CL

U
Le modèle de plafonnement de carrière qui semble le plus
largement accepté est celui de Ference, Stoner et Warren5.
Ce modèle, élaboré sur la base d’interviews exploratoires
dans neuf organisations, permet de classifier les situations
managériales en fonction de deux dimensions (figure 4.2) :

1. Le potentiel
C’est la capacité de l’individu à évoluer, surtout verti¬
calement. Le potentiel revient à la probabilité de pro-
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 89

motion de l’individu. Néanmoins, la mobilité horizon¬


tale mériterait d’être introduite.

2. La performance
Il s’agit des résultats obtenus par les salariés.

Figure 4.2. Modèle de carrière de Ference


Potentiel

Performance Faible Élevé


(plafonné) (non plafonné)

Faible Branches mortes Espoirs

Élevée Piliers Étoiles

Source : d’après Ference, 1977, p. 603.

La figure 4.2 indique quatre types de salariés, deux étant


non plafonnés et les deux autres plafonnés.
Au rang des non plafonnés, le modèle distingue :
ë
• Les espoirs
S Les espoirs, appelés aussi les « réserves », ont une
W
LU capacité d’évolution jugée importante par l’organisa¬
O
tion même si leur performance actuelle est considérée
° en deçà des normes ou des attentes. Cette faiblesse rel¬
ative peut s’expliquer notamment par la période d’ap¬
ç.
CL prentissage ou d’intégration liée à l’arrivée dans une
U
organisation. Elle peut aussi correspondre à la période
nécessaire pour maîtriser un nouveau poste à la suite
d’une promotion. Lorsque la personne rejoint le
niveau de performance attendu, elle devient une étoile

• Les étoiles
Ce sont les stars de l’entreprise puisqu’elles sont à l’a¬
pogée, aussi bien en termes de potentiel que de perfor-
90 GERER LES CARRIERES

mances. Une promotion peut les conduire à redevenir


réserves, le temps de s’adapter à de nouvelles respons¬
abilités. Le plus grand risque pour une étoile est de se
transformer en pilier, rejoignant ainsi les « plafonnés ».

Parmi les plafonnés, le modèle de carrière de Ference dis¬


tingue :

• Les piliers
Ils sont considérés comme ayant peu de chance de se
voir offrir une promotion dans un avenir immédiat et
même lointain bien que leur performance soit consid¬
érée comme satisfaisante ou même exceptionnelle.
Dans la plupart des organisations, ils constituent le
groupe majoritaire. Les salariés deviennent de plus en
plus tôt des piliers, notamment à cause des structures de
plus en plus aplaties des entreprises.

• Les branches mortes


Vraisemblablement les individus les plus problématiques
pour l’organisation, les branches mortes, semblent à la
croisée des faiblesses en regard de leur probabilité de
promotion et de leur performance. Leur motivation peut
être au plus bas et leurs attitudes négatives déteindre sur
leurs collègues et subordonnés.
©
A-J

.S'
Cette typologie présente une grille d’analyse pour l’en¬
treprise pour gérer les carrières. Elle permet notamment de
dresser une cartographie de ses salariés et lui donne des
indicateurs d’évolution des personnes vers des situations
de plafonnements.

La notion de plafonnement peut être perçue comme néga¬


tive, à la fois par l’individu qui vit cette situation de car¬
rière, ou par l’entreprise dont une partie de ses salariés sont
plafonnés.
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 91

Pour le salarié, le passage entre non-plafonnement et pla¬


fonnement revêt parfois un caractère permanent et
irréversible qui rend le phénomène craint et redouté,
notamment pour tout cadre ayant l’ambition de progresser
au sein de la hiérarchie6.

1.1.2. Plafonnement de contenu

Lorsqu’une personne connaît trop bien son travail, elle


risque de connaître le plafonnement de contenu. Ce pla¬
fonnement correspond pour l’individu à un contenu de tra¬
vail qui ne parvient plus à le stimuler. L’individu a « fait le
tour de son travail » et il n’a plus rien à apprendre. Ce pla¬
fonnement est essentiellement subjectif puisqu’il est basé
sur la perception par le salarié du contenu de son travail.

1.1.3. Plafonnement salarial


o
±L
~o
LU
CO Le troisième type de plafonnement concerne le salaire, lié
Z
LU
O
à l’évolution de carrière.
O
O
CM

©
A-J

& Le plafonnement salarial se définit en termes objectifs et


CL

U
subjectifs :
• En termes objectifs, une personne est en situation de
plafonnement salarial quand elle a atteint le maximum
de son échelle salariale.
• En termes subjectifs, la personne est plafonnée quand
elle a le sentiment que son salaire a une probabilité
quasi nulle d’augmenter si elle reste dans la situation
qu’elle occupe.
92 GERER LES CARRIERES

Pour la gestion des ressources humaines, c’est le plafon¬


nement subjectif qui semble le plus important. En effet,
face à une même situation objective, les salariés réagissent
différemment, impliquant des réponses adaptées de l’en¬
treprise.

1.2. Réactions différentes par rapport


au plafonnement

De nombreux managers associent le terme de plafon¬


nement au « Principe de Peter ». Ce principe énonce que
les personnes sont promues jusqu’au moment où elles
atteignent leur niveau d’incompétence. Elles restent alors
« scotchées » à ce poste, ce qui empêche les autres d’a¬
vancer7.
Aujourd’hui, comme les organisations ont diminué leurs
effectifs et se sont restructurées, leur taille et leur forme ont
changé. Les organisations se sont aplaties avec pour résul¬
tat des opportunités de promotion limitées, ce qui signifie
que les managers atteignent une situation de plafonnement
de plus en plus tôt dans leur carrière. Le plafonnement
arrive particulièrement tôt lorsque la pyramide des âges
présente des bosses8. Ces changements nécessitent une
redéfinition fondamentale des carrières loin de la logique
©
A-J « gravir les échelons est une bonne chose »9.
.S'

Kaye10 définit quatre types de personnes plafonnées (fig¬


ure 4.3), à savoir :

• Les plafonnés productifs


Ce sont les piliers définis par Ference. Il est fort proba¬
ble qu’ils ne savent pas ou ne croient pas être plafon¬
nés11. Ils demeurent productifs parce que leur contribu¬
tion est reconnue. Ils ont atteint le sommet de leur car¬
rière mais savent puiser dans les ressources de l’en-
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 93

Figure 4. S. Typologie des plafonnements de carrière /


action des organisations et des salariés
Action des salariés
Action des
organisations Élevée Faible

Élevée Plafonnés Plafonnés heureux


productifs

Faible Partiellement Plafonnés passifs


plafonnés

Source : adapté de Kaye, 1989, p. 60.

treprise pour trouver de l’intérêt à leur travail. D’une


certaine manière, ils se sentent indispensables dans leur
emploi actuel.

i • Les salariés partiellement plafonnés


S Ils n’ont peut-être pas le sentiment d’avoir atteint un
W
LU
plateau de carrière car ils sont reconnus comme des
O
experts sur des aspects spécifiques de leur travail. Cette
° reconnaissance les stimule. Ils sont reconnus par leur
organisation pour leur travail mais cette dernière n’in¬
ç.
CL vestit pas sur leur développement de carrière.
U

• Les plafonnés heureux


Le message de ces personnes serait « laissez-moi tran¬
quille »12. Elles sont bien là où elles sont. Elles ne
demandent pas à progresser. Le plafonnement peut alors
être un acte volontaire. Leur organisation est satisfaite
de leurs connaissances et de la maîtrise de leur travail.
94 GERER LES CARRIERES

• Les plafonnés passifs


Ces personnes sont mécontentes de leur position, de
leurs fonctions et de l’entreprise, ce qui les cantonne
dans une inertie et les fait frôler la dépression. Elles
occupent leur poste depuis longtemps, sans perspective
d’évolution, de leur fait ou de celui de l’organisation.
Elles correspondent aux bois morts de Ference.

Cette typologie montre de nouveau que les individus ne


réagissent pas de la même façon face à une situation de
plafonnement. Le plafonnement peut constituer un sérieux
problème de gestion des ressources humaines puisqu’il
peut conduire à une diminution aussi bien de la perfor¬
mance organisationnelle que du bien-être individuel.
L’entreprise a alors intérêt à gérer sérieusement les plafon¬
nements.

1.3. Gérer les plafonnements

o
Les pratiques de ressources humaines peuvent être util¬
±L
"O isées pour aider les salariés en situation de plafonnement à
CO
réussir.
O
O
O
CM

© Cinq aspects de la Gestion des Ressources Humaines appa¬


raissent particulièrement saillants dans la gestion du pla¬
A-J

CL fonnement selon Ettington13, à savoir la gestion de la per¬


U
formance, la formation, la rémunération, le développement
des carrières et la gestion prévisionnelle (planification des
ressources humaines).

1.3.1. Gestion de la performance

Gérer les plafonnements par une bonne gestion des perfor¬


mances consiste notamment à14 :
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 95

• Combattre les stéréotypes négatifs sur le plafonnement


pour évaluer les personnes de manière juste.

• Ne pas évaluer une capacité à être promu mais une


réelle performance.
Comme tous les problèmes d’évaluation, les solutions
incluent la formation des évaluateurs et leur évaluation.

• Rassembler des sources supplémentaires sur le feed¬


back de la performance afin d’aider à surmonter la
vision négative des salariés plafonnés.
L’évaluation de la performance à 360 degrés semble
particulièrement bien indiquée. Par exemple, les sub¬
ordonnés de Fiat évaluent leurs managers sur la façon
dont ils guident et développent leurs salariés. Les pro¬
fessionnels en ressources humaines conduisent des
sessions dQ feedback où ils comparent l’auto-évalua¬
tion des managers et l’évaluation par leurs subordon¬
nés.

o
±L
• Fournir un feedback continu et non pas seulement
~o
LU
CO
quand les problèmes se posent.
Z
LU La difficulté d’accepter des feedbacks, surtout lorsqu’ils
O
O
O
CM
sont exprimés dans des situations problématiques, n’est
©
A-J
pas favorable à la performance. Le stéréotype des pla¬
& fonnés médiocres est de ce fait renforcé.
>-
CL

U
1.3.2. Formation

Les politiques de formation peuvent être aussi utilement


sollicitées pour gérer les situations de plafonnement.

Les salariés plafonnés peuvent ne pas montrer de prob¬


lèmes de performance mais, à moins d’être formés pour de
futurs besoins, leur contribution peut se détériorer.
96 GÉRER LES CARRIÈRES

Deux logiques s’imposent15 :

• Former pour le futur et non pas pour l’avancement


Les entreprises sont parfois peu disposées à investir dans
des salariés plafonnés qui peuvent également être âgés et
qui n’ont plus que quelques années dans l’organisation.
Cependant, des salariés jeunes peuvent également quitter
l’organisation et ne resteront donc pas plus longtemps
que les plus âgés. Les besoins en formation devraient être
considérés pour chaque salarié de l’organisation.

• Former tous les salariés pour leur collaboration, pas


seulement les hauts potentiels
Cette approche permet d’impliquer tous les salariés
dans les changements organisationnels. Par exemple,
mettre en place un programme de qualité totale passe
par la formation de tous.

1.3.3. Développement des carrières et dotation en


personnel
Nous avons mentionné la diversité des situations de pla¬
fonnement. Différents en termes de compétences, d’in¬
térêts et d’aspiration, les plafonnés devraient avoir accès à
une variété d’options de développement. Pour contribuer à
©
A-J
la rencontre des besoins individuels et organisationnels,
.S' deux pistes peuvent être suivies16 :
r

• Elargir les opportunités pour que les personnes se


développent
L’entreprise pourrait aider les personnes à penser
autrement en termes de carrière. Plutôt que d’expliquer
le développement de la carrière par le fait de grimper
des échelons, il faudrait aider les salariés à voir leur car¬
rière comme une série d’opportunités pour développer
leurs compétences, surmonter des défis, et contribuer
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 97

aux objectifs organisationnels. Au-delà des mobilités


verticales ou horizontales, un même poste peut être
enrichi par la participation de son titulaire à des comités
particuliers ou à des projets mobilisateurs.
Une personne plafonnée peut également s’avérer être un
formateur efficace, notamment auprès des nouveaux
arrivants dans l’entreprise. La formation ou le « men¬
toring » se traduit par une reconnaissance de leurs
expériences.

• Aider les salariés à identifier de nouveaux défis


L’entreprise pourrait fournir aux salariés les informa¬
tions utiles sur les compétences nécessaires pour
évoluer dans l’organisation.

1.3.4. Rémunération
La rémunération est particulièrement sensible dans la ges¬
tion des plafonnements. Deux mesures semblent notam¬
ment prometteuses selon Ettington :

i
• Payer les salariés pour leur performance
S Nous retrouvons ici la dichotomie performance / potentiel.
W
LU
O
Une rémunération liée à la performance récompense les
° salariés plafonnés pour leur performance actuelle plutôt
que pour leur potentiel. Une rémunération basée sur la
ç. performance peut compenser un manque d’opportunités
g. de promotion.

• Dépasser les récompenses financières


Au-delà de la rétribution extrinsèque, certains éléments
de la rétribution intrinsèque devraient être privilégiés
comme valoriser la fonction occupée par une personne
plafonnée. Quelle que soit la nature de la rétribution,
l’entreprise devrait vérifier quels sont les messages
envoyés.
98 GERER LES CARRIERES

1.3.5. Planification des ressources humaines

Le dernier aspect de la gestion des plafonnements,


développé par Ettington, concerne la planification des
ressources humaines. Il s’agit pour l’entreprise de déter¬
miner d’abord le nombre de salariés plafonnés et de déter¬
miner la proportion qui réussit dans l’organisation en ter¬
mes de performance. Les évaluations des performances et
des enquêtes de satisfaction des salariés contribuent à cet
objectif. Cette démarche facilite l’anticipation des évolu¬
tions des personnes dans l’entreprise.

La gestion des plafonnements conduit à une innovation per¬


manente de la part des acteurs impliqués dans la gestion des
carrières. Comme le souligne Tremblay17, il faut préparer les
salariés et leurs responsables au phénomène de plafon¬
nement. Les salariés sont sensibilisés sur les causes du pla¬
fonnement et les moyens pour progresser. Les supérieurs
directs, en première ligne face à cette situation de certains de
leurs subordonnés, peuvent bénéficier d’une formation afin
de les préparer à apporter le soutien nécessaire.

2. GESTION DES FINS DE CARRIÈRE

© Les objectifs de la gestion de la fin de carrière sont de plus


en plus nombreux du fait de l’évolution démographique18.
A-J

.S'

Les pratiques reliées à la gestion des carrières compren¬


nent trois aspects19 :
•faciliter la planification de carrière des salariés vieillissants ;
•assurer le développement de carrière ;
•gérer les mouvements de carrière.

Ces trois aspects font partie des pratiques visant la gestion de


la main-d’œuvre vieillissante (figure 4.4) au côté d’ aménage-
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 99
Figure 4.4. Les pratiques visant à la gestion
de la main-d'œuvre vieillissante
GESTION DES CARRIèRES

w
Planification de carrière : Développement de carrière : Mouvement de carrière :
Orientation, évaluation, Formation technique, promotion, recrutement,
aide... en gestion... mutation, rappel...

| AMéNAGEMENTS SPéCIAUX |

M \1
Incitatifs à rester :
Temps de travail : Temps Contenu de travail : Contribution prolongée à la
partiel, désengagement caisse de retraite, transférabi¬
Nouveaux rôles
progressif, horaire flexible lité de la caisse de retraite

V ir

Incitatifs à quitter : Retraite Rémunération : Gratifications hors


anticipée avec pleins d’avan¬ échelle, congés supplémentaires,
tages, pressions pour quitter... rémunération liée aux résultats...

Source : Saba, Guérin et Wils, 1997, p. 174.

w ments spéciaux. Ces derniers recherchent à adapter le travail


et les conditions de travail aux besoins des salariés plus âgés.
S
W Ainsi, l’organisation peut-elle les mobiliser et bénéficier de
LU
O
leurs compétences d’une manière optimale.
°©
A partir d’une enquête conduite auprès de 1 427 cadres
provenant du secteur public et privé, Saba et ses col¬
Q!
o lègues20 proposent un bilan de la gestion des salariés vieil¬
lissants dans différents milieux québécois. Parmi les pra¬
tiques les plus efficaces de gestion du vieillissement pour
réduire les insatisfactions des professionnels de 50 ans et
plus, ils trouvent :
• les politiques de formation ;
• les pratiques de mobilité de carrière ;
• les pratiques de désengagement graduel comme la
retraite progressive ou partielle.
100 GÉRER LES CARRIÈRES

Les deux premières pratiques offrent aux salariés vieillis¬


sants des possibilités d’avancement équivalentes à celles
offertes à leurs collègues plus jeunes.
Les auteurs trouvent ensuite six pratiques qu’ils jugent effi¬
caces, classées ci-après par ordre décroissant d’efficacité :
•l’aide de carrière ;
• les nouveaux rôles ;
•l’évaluation et la rétroaction ;
• les mesures spéciales ;
•la préparation des salariés à la retraite ;
•les horaires flexibles.
Les pratiques moyennement à faiblement efficaces sont :
•la rémunération liée au rendement ;
•les incitatifs à rester ;
• les rappels des salariés à la retraite ;
•les incitatifs au départ ;
•l’indexation des rentes ;
•la contribution prolongée à la caisse de retraite.
ë L’enquête canadienne montre que les insatisfactions de
S carrière les plus fortes concernent :
W
LU
•le développement des compétences ;
O
•le besoin de reconnaissance ;
° •la progression de carrière.
ç. Ce résultat confirme la réticence des entreprises à proposer
g. des formations à leurs salariés vieillissants. L’organisation
peut intervenir à ce niveau, à la fois pour sa propre perfor¬
mance et pour réduire l’insatisfaction des salariés en leur per¬
mettant de réaliser leurs aspirations relatives au développe¬
ment des compétences. Néanmoins, comme les auteurs cana¬
diens le soulignent, l’insatisfaction des salariés varie notam¬
ment en fonction des caractéristiques individuelles comme la
santé ou la situation financière ou encore l’intensité de l’at¬
tachement à la profession.
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 101

Pour gérer les fins de carrière, il semble utile d’introduire le


concept du sentiment de fin de vie professionnelle21.

Ce concept est distinct de celui du plafonnement. Une


recherche22 sur des salariés de plus de 50 ans apporte des
enseignements sur leurs aspirations et la façon dont ils
perçoivent le plafonnement de leur carrière. Cette
recherche invite les entreprises à repenser leur gestion des
carrières et à faire preuve d’originalité pour des personnes
qui reprennent leur autonomie par rapport à l’organisation.
Le tableau 4.1 synthétise les modifications, créées par le
sentiment de fin de vie professionnelle, tant sur le plan
individuel qu’organisationnel.

Prendre en compte le sentiment de fin de vie profession¬


nelle permet de mieux comprendre pourquoi certains réus¬
sissent la transition de leur « mi-carrière » à leur « fin de
carrière », alors que d’autres n’y parviennent pas. Pour les
entreprises, cette approche contribue à aider leurs salariés
à ne pas devenir des « branches mortes ».
i
S
W
LU
Tableau 4.1. Les implications du sentiment
O
de fin de vie professionnelle
° Le sentiment de fin de vie professionnelle implique
Sur le plan individuel : Sur le plan organisationnel :
g. •une perception du changement • une modification de la gestion
u de son implication des plafonnements
•une recherche d’autonomie dans • une remise en cause des outils de
sa vie (de travail et hors travail) gestion des carrières par la
réévaluation :
- de la perception de la relation
âge/performance/
potentiel/promotion.
- de la rétribution de l’entreprise,
notamment en termes de
reconnaissance.

Source : Cerdin, Marbot et Peretti, 1999, p. 309.


102 GÉRER LES CARRIÈRES

3. DU TEMPS AUX CHEMINEMENTS


DE CARRIÈRE

Au cours de sa carrière, un salarié a une probabilité de


vivre une situation de plafonnement, qu’il soit structurel,
de contenu ou salarial. Les salariés réagissent différem¬
ment selon leur sensibilité et leurs objectifs de carrière.
L’enjeu pour les entreprises est de bien analyser ces situa¬
tions afin de les gérer au mieux. Elles disposent à cette fin
de plusieurs leviers d’action tels que la gestion de la per¬
formance, la formation, le développement des carrières, la
rémunération ou la planification des ressources humaines.
La question des fins de carrière s’avère particulièrement
sensible.
Le défi à relever pour les entreprises consiste à accompag¬
ner leurs salariés tout au long du cheminement de leur car¬
rière et à porter une attention particulière à leurs attitudes
envers la carrière. Le chapitre suivant examine différents
types de parcours et d’attitudes des carrières des salariés.
w NOTES DU CHAPITRE 4

S 1
Tremblay, 1992, Comment gérer le blocage des carrières.
z
LU
2
Bardwick, 1986, The Plateauing Trap. ; Tremblay, Wils et Lacombe, 1995, Structural,
O content and salary plateaus : Their influence on engineers’ attitude.
3 Ference, Stoner et Warren, 1977,
Managing the Career Plateau.
°© 4 Veiga, 1981, Plateaued vs. Non-Plateaued
Managers : Career Patterns, Attitudes and
£ Path Potential.
5 Ference, Stoner et Warren, 1977, Managing the Career Plateau.
6
Cardinal et Lamoureux, 1992, Le plateau de carrière chez les gestionnaires: diagnos¬
O
tic et intervention.
7 Peter et Hull, 1969, The Peter
Principle, mentionné par Ettington, 1997, How human
resource practices can help plateaued managers succeed.
8 Benraiss, Marbot, Peretti, 2000, Étude de l’influence des plateaux de carrière sur la

satisfaction des employés : cas d’une PME marocaine.


9
Ettington, 1997, How human resource practices can help plateaued managers suc¬
ceed.
10
Kaye, 1989, Are plateaued performers productive. Nous basons notre description sur
le travail original de Kaye et l’analyse de Tremblay, 1992, Comment gérer le
blocage des carrières.
11
Tremblay, 1992, Comment gérer le blocage des carrières.
12
Tremblay, 1992, Comment gérer le blocage des carrières.
DÉFIS DU TEMPS POUR LA GESTION DES CARRIÈRES 103
13
Ettington, 1997, How human resource practices can help plateaued managers suc¬
ceed. Nous développons ces 5 points en reprenant les développements de l’auteur.
14 Ettington, 1997, How human resource practices can help plateaued managers suc¬

ceed.
15
Ettington, 1997, How human resource practices can help plateaued managers suc¬
ceed.
16 Ettington, 1997, How human resource practices can help plateaued managers suc¬

ceed.
17
Tremblay, 1992, Comment gérer le blocage des carrières.
18 Saba, Guérin et Wils, 1997, Gérer
l’étape de fin de carrière.
19
Saba, Guérin et Wils, 1997, Gérer l’étape de fin de carrière.
20 Saba, Guérin et Wils, 1997, Gérer
l’étape de fin de carrière.
21 Le
concept de « fin de vie professionnelle » est développé par Marbot dans sa thèse
de doctorat en cours à l’ESSEC.
22 Cerdin, Marbot et Peretti, 1999, Autonomie et gestion des âges.

S
W
LU
O

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Copyright © 2000 EMS Editions.
CHAPITRE 5

CHEMINEMENTS ET ATTITUDES
DE CARRIÈRE

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A-J

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CL
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Copyright © 2000 EMS Editions.
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 107

Le cheminement de carrière est un concept qui recouvre une


réalité très diverse. Le terme de cheminement est surtout
utilisé par les auteurs canadiens. Il désigne « l’ensemble des
expériences de travail qu’un individu accumule au cours de
sa vie active »1. En France, le parcours professionnel semble
être préféré. Le terme parcours signifie « chemin pour aller
d’un point à un autre »2. Du chemin au cheminement s’in¬
stalle souvent l’idée de progression lente et régulière. Aussi,
le parcours professionnel peut-il apparaître comme une
notion plus neutre. Cependant, le parcours paraît plus défini
a posteriori. Il comporte une idée de linéarité, ralentie peut-
être par quelques « obstacles de parcours ». Enfin, le par¬
cours professionnel correspond plus à la notion de carrière
externe présentée dans le premier chapitre. Nous dirons
qu’untel a fait un beau parcours, un parcours sans faute, ou
un parcours atypique. Le cheminement est plus dans la per¬
spective de la carrière interne, avec des critères subjectifs
pour déterminer le succès de carrière. Ce concept évoque
davantage la notion d’opportunité pour l’individu, avec un
éventail de choix, que le concept de parcours professionnel.
i
S
W
LU
o
Les formes de cheminements constituent autant de choix
s plus ou moins délibérés faits par l’individu au fil des étapes
de sa carrière. Le développement de carrière peut revêtir
ç. des formes diverses. Nous commençons par exposer le
g. concept d’étapes de la carrière comme premières
approches du cheminement de carrière. Nous poursuivrons
avec d’autres alternatives de cheminement de carrière afin
de mieux appréhender les réalités des parcours des person¬
nes et donc de mieux y répondre. Il faut alors aborder les
attitudes de carrière des personnes dans la mesure où elles
aboutissent à des comportements comme le turnover. Elles
posent alors la question de la finalité de la gestion des car¬
rières.
108 GÉRER LES CARRIÈRES

1. LES ÉTAPES DE LA CARRIÈRE

Les attentes vis-à-vis du travail évoluent au cours de la vie


professionnelle, ce qu’expriment les approches reposant sur
les cycles de carrière, fondées sur les modèles psy¬
chologiques de cycle de vie. Ces théories du développe¬
ment des carrières s’intéressent aux changements psy¬
chologiques des salariés pendant leur progression à travers
des cycles de carrière, allant de leur premier emploi à la
retraite3. Ces théories subdivisent ces cycles de vie profes¬
sionnelle en un nombre d’étapes qui varient selon les
recherches. Super4 propose quatre étapes alors que
Havighurst5 en propose trois. Pour le premier, la progres¬
sion entre les différentes étapes de la carrière dépend de
l’expérience des événements de la vie. Pour le second, le
passage d’une étape du cycle de vie à l’autre dépend de la
maîtrise des tâches de développement de l’étape précé¬
dente. Ces tâches de développement englobent les efforts
d’un individu pour faire face aux événements qui naissent
d’une pression combinée de la famille, du travail et de la
ë société. Pour ces deux auteurs, ces phases peuvent se pro¬
S duire à des âges radicalement différents6.
W
LU
O
Au contraire, Levinson7 offre un modèle plus rigide sur les
°
âges avec huit étapes, même s’il reconnaît que chaque vie
ç. est unique. L’auteur8 montre que les attentes d’un individu à
g. propos des différentes sphères sociales varient dans le
temps. Cette approche est résumée dans le tableau 5.1 où
sont retenues les sept étapes relatives à la vie profession¬
nelle. En effet, la première étape proposée, la transition pré¬
adulte, concerne des personnes de 17 à 22 ans. Aujourd’hui,
cette tranche d’âge est surtout consacrée à des études et de
ce fait n’apparaît pas dans le tableau9.
S’appuyant sur les théories du développement des car¬
rières, Hall10 propose un autre modèle prenant fortement
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 109

Tableau 5.1. Théorie du développement des adultes


de Levinson
Période Tranche Tâche de carrière Type de
d’âge période
Entrée dans la structure Création d’une structure
de vie en début d’âge 23-28 ans de vie stable avec des Stable
adulte engagements
Transition de la 28-33 ans Réévaluation et
trentaine modification de la Transitoire
structure initiale

Point culminant de la Mise en place d’une


structure de vie en 33-40 ans niche par la réalisation Stable
début d’âge adulte d’un objectif ambitieux
Réévaluation et
reformulation des
Transition de la 40-45 ans objectifs pour permettre Transitoire
quarantaine à des parties négligées
de sa personnalité de
s’exprimer.
Entrée dans la structure Création d’une structure
de vie en milieu 45-50 ans de vie productive Stable
d’âge adulte et significative

Transition de la Évaluation, modification


cinquantaine 50-55 ans et amélioration de Transitoire
la structure en milieu
uj d’âge adulte
Point culminant de la Réalisation des objectifs
S structure de vie en 55-60 ans fixés pendant la Stable
z milieu d’âge adulte cinquantaine
LU
O
Source: adapté de Levinson, 1986, p. 7 et de Smart et Peterson, 1994, p. 244.
°©
en compte l’âge de l’individu. Selon l’auteur, la carrière est
Q!
o « une succession d’attitudes et de comportements perçus
par un individu à propos des expériences et des activités
liées à son travail tout au long de sa vie ». Il découpe la
carrière en quatre grandes étapes :

1. La période d’exploration
En début de carrière, l’individu cherche sa « voie ». Il fait
l’expérience de divers choix professionnels et de différents
types d’organisations.
110 GÉRER LES CARRIÈRES

2. L’établissement et l’avancement
Ici, le succès de carrière se définit comme une série de
mouvements organisationnels tels que les promotions ou
les transferts.
3. La croissance, le maintien ou la stagnation
Cette période correspond à la « mi-carrière ». Uindividu
peut toujours être désireux de progresser dans la hiérar¬
chie ou préférer se maintenir dans sa position actuelle. La
stagnation peut survenir également si le salarié a atteint
son potentiel maximal ou si l’organisation, faute de crois¬
sance, n’a pas d’opportunité à lui présenter.

4. La période de détachement graduel


L’individu se désengage progressivement de sa carrière
soit « forcé » par le progrès technique ou ses propres
défaillances, soit il décide de se retirer psycholo¬
giquement de la sphère professionnelle. Cette période est
ponctuée par la retraite.

Ces différentes étapes sont illustrées par la figure 5.1.


i
:1
S
W
LU
o
Figure 5.1. Les différentes étapes de la carrière
°
Performance
ç. Statut n Stabilisation
g.
U Établissement
Progression ? Retrait
?
Exploration

Age
Source : d’après Hall, 1976.
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 111

La linéarité de ces modèles est actuellement remise en


cause. Les différentes étapes ne s’inscriraient plus sur la
durée d’une vie. Hall et Marvis11 proposent un nouveau
modèle (figure 5.2). Ce modèle récursif, avec une succes¬
sion des différentes phases qui s’inscrivent sur des péri¬
odes courtes et se renouvellent, traduit mieux les disconti¬
nuités croissantes des nouvelles carrières.

Figure 5.2. Modèle récursif des étapes de la carrière


lxta'ixk’
L* : KxpliTiilm
flcvcc K* : KKIU

s
H : FT ifiliat’imrl
M : Mal TM’ /
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Mil I I I I I I I I I I I I
i UI25UI2545U 2 5 4 5
S
W Tcm ps de carrière
LU
O
Source : adapté de Hall et Marvis (1996).
°
ç.
CL

U
Cette discontinuité des carrières s’inscrit dans les carrières
protéennes. Ces carrières ne sont plus limitées à une organ¬
isation. Elles se particularisent par leur caractère
nomade12, entre plusieurs organisations, ou avec des péri¬
odes d’activités professionnelles et d’autres périodes avec
des activités de nature différente. Cependant, un fil con¬
ducteur pourrait bien guider et contraindre ces différents
temps de carrière. Il correspondrait alors à ce que Schein13
a défini comme une ancre de carrière.
112 GÉRER LES CARRIÈRES

2. LES ANCRES DE CARRIÈRE

Une ancre de carrière correspond à ce que l’individu con¬


sidère le plus important et non négociable dans sa carrière.
Elle guide et contraint toutes les décisions majeures de la
carrière. L’ancre de carrière représente ce qu’un individu
n’abandonnerait pas lorsqu’il est confronté à un choix de
carrière.

Selon Schein14, une ancre de carrière est composée de trois


sortes de perception de soi qui concerne :
• ses talents et capacités ;
• ses motifs et besoins ;
• ses attitudes et valeurs.

Progressivement, se dégage de l’expérience de chacun


dans sa vie personnelle, familiale et professionnelle une
vision plus claire de ses propres capacités, de ses valeurs et
de ses motivations, une ancre qui va réduire ses possibil¬
ités de choix. L’individu aurait, selon Schein, une seule
ë ancre de carrière, Le. un ensemble unique de talents, de
valeurs et de motifs au sommet de sa hiérarchie person¬
S
W nelle. La métaphore évoque « la proéminence de la fixité
LU
O dans une mer de changement »15. Les personnes évoquent
° le fait d’être « tirées en arrière » vers quelque chose qui
leur correspond mieux quand elles font l’expérience d’un
ç. travail qui ne leur convient pas16.
g.

Huit ancres de carrières ont été identifiées par Schein :

• La compétence technique / fonctionnelle


Les personnes ancrées « compétence technique » ont
besoin d’être liées à un domaine de compétence. Elles
cherchent avant tout à être reconnues pour leur exper¬
tise. Leur identité est construite autour du contenu de
leur travail. Toute décision de mobilité, verticale, hori-
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 113

zontale ou géographique, sera perçue favorablement


dans la mesure où elle apparaît comme une opportunité
de se perfectionner ou tout au moins de rester un bon
spécialiste reconnu par ses pairs.

• La compétence manager général / gestion


Les choix de carrière sont dictés par l’objectif d’atteindre
un poste de direction. Le management en tant que tel cap¬
tive les personnes ancrées manager général. La mobilité
verticale est une importante forme de reconnaissance pour
elles. Trois domaines de compétences semblent cruciaux
pour un manager général :
- compétence analytique : capacité d’exposer des prob¬
lèmes de telle sorte que des décisions peuvent être pris¬
es sous des conditions d’incertitude ;
- compétence interpersonnelle : capacité à influencer et

contrôler d’autres personnes afin d’atteindre les buts


organisationnels ;
- compétence émotionnelle : capacité à être stimulé par
les crises, les hautes responsabilités, le pouvoir plutôt
que d’être anéanti par eux.
L’atteinte des sommets ne suit pas automatiquement
une ligne verticale continue. La mobilité horizontale
peut être une étape incontournable, et sera acceptée
comme telle, pour permettre la progression verticale.
©
A-J

.S' • L’autonomie / indépendance


Ancrée autonomie, la personne a un besoin primordial
d’être libre des contraintes organisationnelles.
L’autonomie est possible dans de grandes organisations
dans la mesure où elles offrent des postes comme la
recherche et développement ou la gestion d’une unité
géographiquement éloignée. Néanmoins, les personnes
qui se reconnaissent dans cette ancre ont une forte prob¬
abilité de se tourner vers des carrières autonomes
comme consultant ou professeur.
114 GÉRER LES CARRIÈRES

• La sécurité / stabilité
La stabilité dirige la carrière des personnes qui sont car¬
actérisées par cette ancre. La continuité dans l’emploi
ou dans une compagnie donnée fait partie des priorités
ainsi que stabiliser sa famille et s’intégrer dans une
communauté. La stabilité géographique est également
centrale. Le contexte du travail, pourvoyeur de sécurité,
peut primer la nature du travail.
• La créativité entrepreneuriale
La personne ancrée créativité éprouve le besoin de créer
quelque chose, que ce soit une nouvelle affaire, de nou¬
veaux produits ou services. Sa carrière repose sur la
volonté de prouver qu’elle peut créer. Certains échouent
dans la création et passent leur carrière à chercher des
solutions créatives tout en occupant un travail tradition¬
nel dans une organisation.
• Le dévouement à une cause
Certaines personnes choisissent un métier parce qu’elles
désirent exprimer dans leur travail des valeurs centrales
ë pour elles. Celles qui se dévouent à une cause organisent
S leur carrière autour d’elle. Vouloir travailler avec d’autres
W
LU
personnes et les aider oriente leur carrière. Cela peut être
O
le cas pour certaines personnes qui choisissent des
° métiers tels que médecin, enseignant, avocat du travail ou
les ressources humaines. Cependant, certaines personnes
ç. peuvent occuper ces fonctions sans mettre au centre de
g.
leur choix de carrière le désir de servir. Certains
médecins, avocats, et travailleurs sociaux sont ancrés
dans des compétences techniques / fonctionnelles, ou
l’autonomie, ou encore la sécurité, d’autres veulent
atteindre des fonctions de direction.

• Le défi pur
L’individu ancré « défi pur » définit sa vie en termes
compétitifs. Il a la perception qu’il peut tout con-
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 115

quérir. Ce qu’il recherche, c’est l’opportunité de trou¬


ver des solutions à des problèmes soi-disant insol¬
ubles, de surmonter des obstacles difficiles ou de
vaincre des adversaires sérieux. Le travail doit fournir
des occasions de s’auto-tester.

• Le style de vie / qualité de la vie


Selon Schein17, « il ne s’agit pas simplement d’équili¬
brer les vies personnelles et professionnelles comme
beaucoup de personnes l’ont traditionnellement fait, il
s’agit plutôt de trouver un moyen d’intégrer les besoins
de l’individu, de la famille, et de la carrière ». La per¬
sonne ancrée style de vie est prête à travailler pour une
organisation pourvu que les bonnes options pour elle
soient disponibles au bon moment. De telles options
incluent par exemple le temps partiel choisi, la prise
d’années sabbatiques, des horaires flexibles, ou le tra¬
vail à la maison. Le respect de l’organisation pour les
préoccupations de l’individu et de la famille est jugé
fondamental.
ë
s La variété, le pouvoir et la créativité pure ou l’identité
W
LU
organisationnelle sont exprimées de diverses manières
O
dans les huit ancres et ne constituent alors pas des ancres
° de carrière en tant que telles18. L’ancre de carrière définit
et limite les choix de chaque individu. Ces choix influ¬
ç. encent fortement non seulement les décisions des indi¬
g.
vidus quant au type d’emploi, mais également les déci¬
sions relatives au poids à accorder au travail et à la vie
personnelle.
116 GÉRER LES CARRIÈRES

3. LES ORIENTATIONS DE CARRIÈRE ET


AUTRES TYPOLOGIES

Derr19 propose une alternative à la notion d’ancre de car¬


rière, qu’il nomme orientations de carrière ou cartes de
succès de carrière interne. Ses travaux s’appuyant en par¬
tie sur ceux de Schein20, les ancres et les orientations de la
carrière sont très proches.

Les cinq orientations de carrière se déclinent comme :

• La progression vers le haut de la hiérarchie


La mobilité verticale motive l’individu qui cherche à
grimper les différents échelons.

• La sécurité
Cette orientation pousse la personne à trouver une posi¬
tion solide dans une organisation.

• La liberté
11 s’agit de rechercher des espaces d’autonomie dans
ë son travail.
S
W
LU
• Le défi et l’intérêt au travail
O
Le contenu du travail est primordial pour les personnes
° qui sont orientées défi.
ç. • L’équilibre entre les différentes composantes de la vie
g.
Ce sont les stratégies de carrière qui associent les dif¬
férentes dimensions importantes de la vie. La carrière
est valorisée mais une très grande importance est
accordée à la famille et à la sphère hors travail.

D’autres typologies de cheminement de carrière ont été


proposées comme celle de Driver21. Elle s’inspire égale¬
ment des travaux de Schein. L’auteur avance quatre types
de cheminement (tableau 5.2) :
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 117

Tableau 5.2. Synthèse des cheminements de carrière


de Driver
Type Mobiles Fréquence Direction Caractéristiques
de carrière de la mobilité de la mobilité individuelles

Possède un faible besoin de


réussite
S’adapte difficilement aux
changements
Homéo¬ Nulle Nulle
Aime les milieux structurés
Compétence
Ne recherche pas les
statique Sécurité
positions d’autorité
Est un travailleur retiré
A besoin de beaucoup de
sécurité

Possède un besoin de réussite


élevé
Aime les responsabilités
Pouvoir Fait preuve de sociabilité
Réalisation Déteste l’ambiguïté et
Linéaire Fréquente Verticale
Changement l’incertitude
(2-4 ans)
Autonomie Possède une bonne capacité
de leadership
Aime les postes de pouvoir

Est très peu sociable


Est très motivé par le salaire
i/i Possède un grand besoin de
§ Autonomie changement
S Transitoire Changement Fréquente Horizontale
S Aime prendre des risques
Identité (2-4 ans)
LT) Se montre très résistant
T
psychologiquement
O
Aime être le centre d’attention
°©
Est une personne introvertie
Se montre peu attiré par le
I
a.
pouvoir et la supervision
o Est prudent en ce qui
Spiral Développement Rare Horizontale
concerne la prise de décision
Identité (5-7 ans)
A besoin d’être compris par
Créativité les gens qui l’entourent
Fait montre d’un grand
besoin d’autonomie et
d’indépendance

Source : adapté de Dolan & al., 1996, p. 364.


118 GÉRER LES CARRIÈRES

•homéostatique ;
•linéaire ;
•transitoire ;
• spiral.
L’hypothèse de base à ce modèle est que les personnes
développent des structures relativement stables quant à
leur carrière. Les différentes caractéristiques de ces quatre
cheminements, présentés comme des types purs par son
auteur, Le. immuables, peuvent être synthétisées par le
tableau 5.222 .
Cette typologie a été testée et affinée par trois chercheurs
québécois23. Ils l’ont élargie par un cinquième élément
nommé le type étapiste né « du croisement d’une mobilité
à l’intérieur d’un même champ occupationnel et d’une
faible fréquence de déplacement»24. Il s’agit d’un type
hybride, entre les types homéostatique et linéaire. Ces car¬
actéristiques sont résumées dans le tableau 5.3.
Tableau 5.3. Caractéristiques du type étapiste
i Type Mobiles Fréquence Direction Caractéristiques
de carrière de la mobilité de la mobilité individuelles
S
z • Possède une grande
LU autonomie émotive
O
• Possède un grand
° Sécurité besoin de domination
Étapiste Compétence Rare Verticale • Démontre un intérêt
Réalisation (5-7 ans) moyen pour le pouvoir
ç.
CL et le leadership
U
• Est très orienté vers
l’autoformation
• Possède une grande
confiance en soi

Source : adapté de Dolan & al., 1996, p. 364.

Le cheminement d’un individu peut être mixte, i.e. qu’il


peut être d’un type donné pendant une période et d’un
autre type ensuite25. La personne n’est pas figée dans un
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 119

type particulier. Les typologies ont tendance à enfermer


les personnes dans un seul cheminement de carrière. Par
exemple, selon Schein, les personnes auraient une seule
ancre de carrière, un ensemble unique de talents, de
valeurs et de motifs au sommet de sa hiérarchie person¬
nelle. Les études longitudinales, quoique rares, penchent
vers la stabilité. La carrière change, pas l’ancre.

Lorsque les personnes complètent des questionnaires pour


déterminer leur ancrage, elles obtiennent, d’après notre
expérience, des scores élevés en général sur au moins deux
ancres. Cet exercice permet de les aider à mieux se situer
par rapport à leur cheminement de carrière.

4. ATTITUDES ENVERS LA CARRIÈRE


Les personnes entrent dans les entreprises avec leurs pro¬
pres plans de carrière et pourraient être attirées par des
entreprises qui ont des pratiques qui correspondent à leurs
ë aspirations de carrière26. Les attitudes des personnes envers
S
leur carrière peuvent avoir une influence sur leur attitude
W envers leur entreprise actuelle. En effet, ces personnes
LU
O poursuivent leur carrière dans cette entreprise aujourd’hui,
° mais elle ne sera pas la seule où elles travailleront dans le
futur dans l’optique de la carrière protéenne.
ç.
g. Les attitudes des personnes envers leur carrière expliquent
notamment le turnover, rupture dans la relation entre les
individus et l’organisation. Ces attitudes ont été conceptu¬
alisées de diverses façons27. Nous en présentons ici trois,
particulièrement utiles dans la compréhension des nou¬
velles formes de carrière :
•le concept de motivation de carrière ;
•l’implication dans la carrière ;
•l’orientation carriériste.
120 GÉRER LES CARRIÈRES

4.1. La motivation de carrière


La motivation de carrière28 englobe trois dimensions :

• L’élasticité de la carrière
Cette dimension correspond à la capacité à surmonter
des échecs dans sa carrière.

• La compréhension (le discernement) de la carrière


Cette dimension reflète le degré de réalisme de la per¬
ception par l’individu de sa carrière.

• L’identité par rapport à la carrière


Elle capte dans quelle mesure la carrière est centrale
à l’identité d’une personne. C’est un concept très
proche de l’implication au travail et de la mobilité
verticale29.

Cette théorie permet d’expliquer des comportements relat¬


ifs à la carrière comme :
ë • rechercher et accepter un travail ;
S • décider de rester dans une organisation ;
W
LU
• revoir ses plans de carrière ;
O
• rechercher des formations et de nouvelles expériences
° de travail ;
ç. • essayer d’accomplir ses objectifs de carrière.
g.
4.2. L’implication dans la carrière

Une autre forme d’attitude envers la carrière peut être


décrite comme l’implication dans la carrière. Cette impli¬
cation est reconnue comme une forme d’implication au tra¬
vail30. Ce concept est lié à la théorie de la motivation de
carrière, notamment aux deux composantes de l’élasticité
et de l’identité31.
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 121

Les personnes avec un fort degré d’implication dans leur


carrière peuvent montrer de plus hauts niveaux d’at¬
tentes et d’exigences de l’organisation avec laquelle
elles ont forgé une relation32. Cela implique aussi que les
personnes avec une forte implication dans la carrière
peuvent être plus motivées quand leurs attentes sont sat¬
isfaites par l’organisation que celles qui sont moins
impliquées.

Chang33 propose un modèle (figure 5.3) qui résume les


effets supposés de l’implication dans la carrière.
Figure 5.3. Effets supposés de Vimplication
dans la carrière

Implication
dans la carrière

Perception des i r
pratiques Implication
i organisationnelles organisationnelle
Intention de départ

S quant à la carrière
W
LU
O
Effet modérateur
° Effet indépendant

ç.
CL
Source : Chang, 1999, p. 1259.
U

L’auteur suppose que les salariés montrent un plus haut


niveau de loyauté et restent dans l’organisation quand ils
perçoivent que l’organisation adopte des politiques qui :
•poursuivent des promotions en interne ;
•évitent des licenciements ;
•forment les salariés ;
•fournissent un soutien.
122 GÉRER LES CARRIÈRES

Néanmoins, cette relation peut changer en fonction de l’at¬


titude du salarié envers la carrière.

Ses résultats, sur un échantillon de 225 chercheurs coréens,


indiquent que lorsque les individus sont impliqués dans
leur organisation, ils sont moins disposés à la quitter.
Il a été montré que les salariés sont plus impliqués dans une
organisation quand ils pensent qu’elle poursuit une politique
de promotion en interne34. Ils éprouvent moins d’incertitude
en ce qui concerne l’avenir de leur carrière dans l’entreprise.

4.3. L’orientation carriériste

Un autre concept, l’orientation carriériste, a des con¬


séquences sur les attitudes des personnes dans leur travail
et leur carrière35. Feldman et Weitz36 définissent ce con¬
cept comme « la propension de poursuivre une progression
de carrière via des moyens non fondés sur la
performance ». Ils avancent que l’orientation carriériste est
reliée négativement à l’implication au travail et à l’impli¬
ë cation organisationnelle. Elle est aussi associée négative¬
ment à la satisfaction et la motivation au travail. En
S
W revanche, elle est reliée positivement à la disposition de
LU
O changer de travail et au désir d’obtenir des promotions.
° Elle est aussi reliée positivement aux véritables décisions
de mobilité comme la fréquence de changement d’en¬
ç. treprise et d’obtention de promotions. Le niveau de salaire
g.
obtenu serait aussi plus élevé pour les personnes avec une
orientation carriériste. Feldman et Weitz résument ces dif¬
férentes conséquences de l’orientation carriériste dans la
figure 5.4.

Ce concept d’orientation carriériste peut constituer une


manifestation de la perception de soi à travers l’établisse¬
ment d’un contrôle personnel dans une carrière de moins
en moins structurée37.
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 123

Figure 5.4. Les conséquences de Vorientation carriériste


Attitudes au travail
Satisfaction
Motivation
Implication au travail
Implication organisationnelle
(-)
Désir de mobilité
Désir de promotion
Orientation carriériste (+) Disposition à changer
de travail

Mobilité véritable
(+) Taux de promotions

\ Taux de changements
d’organisation
Salaire

Source : adapté de Feldman et Weitz, 1991, p. 241.

5. DES CHEMINEMENTS A L’EMPLOYABIL-


i ITÉ
S
W
LU Selon les étapes de la carrière, les personnes expriment des
o
s attentes différentes envers leur travail. Cependant, elles
sont guidées tout au long de leur cheminement de carrière
ç. par une ancre qui oriente leurs choix de carrière. D’autres
CL

U
typologies telles que les cartes de succès de carrière interne,
expliquent aussi les différences d’orientation de carrière.

Les personnes, dans leur cheminement de carrière, travaillent


dans des entreprises qui correspondent ou non à leurs aspira¬
tions de carrière. La nature de cette rencontre a une influence
sur leurs attitudes envers les entreprises, qui peuvent conduire
à des comportements comme le turnover quand l’entreprise
ne répond pas aux aspirations individuelles.
124 GÉRER LES CARRIÈRES

Par exemple, le salarié, avec une forte orientation car¬


riériste, poursuit ses propres fins au dépend de ses
employeurs successifs38. La carrière protéenne reflète le
besoin pour les individus de prendre en charge leur car¬
rière.

Fidéliser les salariés, éviter que les salariés talentueux quit¬


tent l’organisation nécessite peut-être de donner plus de
responsabilités à l’individu dans la gestion des carrières, en
l’invitant à devenir « un entrepreneur de soi ». Encore faut-
il lui en donner les moyens, notamment par le développe¬
ment de son employabilité. Nous développons ce concept
dans le prochain chapitre.

NOTES DU CHAPITRE 5

1
Durivage et Barette, 1 992, p. 11, Savoir choisir son cheminement de carrière.
2 Petit Robert.
3
Smart et Peterson, 1994, Stability versus transition in women’s career development : a
test of Levinson’s theory.
W
4 Super, 1957, The Psychology of Careers.

5 Havighurst, 1 964, Youth in exploration and man emergent.

2 6
Smart et Peterson, 1994, Stability versus transition in women’s career development : a
W
test of Levinson’s theory.
LU 7 Levinson, 1986, A conception of adult development.
O
8
Levinson, 1978, The season of a Man’s Life, Levinson, 1986, A conception of adult
3 development.
© 9
Smart et Peterson, 1994, Stability versus transition in women’s career development : a
£
test of Levinson’s theory.
£
Q!
10 Hall,
1976, Careers in Organizations.
o 11 Hall et
Marvis, 1996, The new Protean Career : Psychological Success and the Path
with a Heart.
12 Cadin, 1998, Faut-il changer de paradigme en théorie des carrières. Bailly, Cadin et

Saint Giniez (de), 1998. Les « carrières nomades » : recherche empirique et apports
pour la GRH éclatée ; les auteurs traduisent « Boundaryless career » par « carrière
nomade », ce qui leur semble plus parlant que la traduction littérale.
13
Schein, 1978, Career dynamics : matching individual and organisational needs.
14 Schein, 1978, Career dynamics : matching individual and organisational needs.

15 Gowler et Legge,
1993, Rhetoric in bureaucratic careers : managing the meaning of
management success.
16
Schein, 1990, Career Anchors : Discovering Your Real Values.
17
Schein, 1990, p. 33, Career Anchors : Discovering Your Real Values.
18 Schein, 1990, Career Anchors : Discovering Your Real Values.
CHEMINEMENTS ET ATTITUDES DE CARRIÈRE 125
19
Derr, 1986, Managing the New Careerists.
20 Schein, 1978, Career dynamics : matching individual and organisational needs.
21
Driver, 1979, Career Concepts and Individual Differences.
22 Synthèse de Dolan, Lamoureux et Gosselin, 1996, Psychologie du travail et des organ¬

isations.
23 Mercure, Bourgeois, et Wils, 1991, Analyse critique de la typologie des choix de car¬

rière.
24
Dolan, Lamoureux et Gosselin, 1996, p. 365, Psychologie du travail et des organisa¬
tions.
25 Mercure, Bourgeois, et Wils, 1991, Analyse critique de la typologie des choix de car¬

rière.
26 Chang, 1999, Career commitment as a complex moderator of organizational commit¬

ment and turnover intention.


27 Chang, 1999, Career commitment as a complex moderator of organizational commit¬

ment and turnover intention.


28
London, 1983, Toward a theory of career motivation.
29Grzeda et Prince, 1997, Career motivation measures : a test of convergent and dis¬
criminant validity.
30
Morrow, 1 993, The theory and measurement of work commitment.
31 Blau, 1989, Testing and generalizability of a career commitment measure and its

impact on employee turnover.


32 Chang, 1999, Career commitment as a complex moderator of organizational commit¬

ment and turnover intention.


33 Chang, 1999, Career commitment as a complex moderator of organizational commit¬

ment and turnover intention.


34
Gaertner et Nollen, 1989, Career experiences perceptions of employment practices and
psychological commitment to the organization.
35
Chay et Aryee, 1999, Potential moderating influence of career growth opportunities on
careerist orientation and work attitudes : evidence of the protean career era in
Singapore. Les auteurs s’appuient sur les travaux de Feldman et Weitz.
36 Feldman et Weitz, 1991,
W
p. 237, From the invisible hand to the gladhand : understand¬
ing a careerist orientation to work.
2 37 Chay et Aryee, 1999, Potential moderating influence of career growth opportunities on

W careerist orientation and work attitudes : evidence of the protean career era in
LU Singapore.
O
38 Feldman et
Weitz, 1991, From the invisible hand to the gladhand : understanding a
3 careerist orientation to work.
©
£
£
Q!
o
Copyright © 2000 EMS Editions.
CHAPITRE 6

VERS UNE PLUS GRANDE RESPON¬


SABILITÉ DE L’INDIVIDU ?

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Copyright © 2000 EMS Editions.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 129

La carrière protéenne1 est une carrière où l’individu gère


lui-même sa carrière. Cette carrière n’est pas limitée aux
expériences de l’individu dans une seule organisation. Ces
expériences contribuent à développer son employabilité,
l’objet de la première partie de ce chapitre.

L’individu semble de plus en plus encouragé à adopter une


attitude proactive envers sa carrière dans un contexte où le
contrat psychologique change de nature2. Nous exam¬
inerons, dans une seconde partie, dans quelle mesure ce
contrat change et ses répercussions éventuelles sur la ges¬
tion des carrières.

1. EMPLOYABILITÉ

Les discours sur l’employabilité mettent l’accent sur la


nécessité d’une plus grande responsabilisation des salariés
dans la gestion de leur parcours professionnel. Cependant,
la responsabilité de l’entreprise ne saurait être écartée,
puisque cette dernière détient un rôle capital dans le
ë
développement de l’individu.
S
W
LU
o
1.1. Définitions
s
Les définitions de l’employabilité sont nombreuses. Nous
en reprenons une, à titre d’illustration3 :
ç.
g. « Conditions de gestion des ressources humaines, néces¬
saires et suffisantes, lui [le salarié] permettant à tout
moment de retrouver un emploi, à l’intérieur ou à l’ex¬
térieur de l’entreprise, dans des délais et des conditions
raisonnables. »

Deux caractéristiques soulignent l’employabilité individuelle :


•capacité à maintenir sa valeur sur le marché du travail ;
•capacité à accéder à un emploi.
130 GERER LES CARRIERES

Plusieurs risques, non négligeables quant à la tendance


actuelle à se concentrer sur l’employabilité individuelle,
apparaissent selon Dany4 :
• l’employabilité individuelle dépend de l’employabilité
de marché (capacité du marché du travail à fournir un
emploi). Elle est donc liée aux conditions
économiques ;
• la stigmatisation et la culpabilisation des « inemplo-
yables ».

Un système à double vitesse s’installerait même dans


les organisations selon Stephany5 :
• aux tenants du premier cercle, le noyau central de
l’entreprise flexible présenté dans le troisième
chapitre, la capacité à gérer leur parcours profession¬
nel dans la durée ;
• aux tenants du second cercle, ceux de la périphérie
de l’entreprise flexible, l’acceptation définitive
qu’ils sont en situation temporaire dans l’entreprise.

Les résultats des recherches de Dany6 l’incitent à


défendre l’idée d’un engagement des employeurs dans
des promesses en matière d’employabilité. Aujourd’hui,
des promesses d’employabilité se substituent à des
©
A-J
promesses de carrière. La majorité des cadres de l’étude
.S' rejettent l’idée de plan de carrière associée à la notion de
promesse de carrière. Par contre, une très forte majorité
revendiquait un engagement de l’entreprise sur un
ensemble de moyens à mettre à leur disposition pour leur
permettre d’accéder aux emplois qui leur conviennent.
L’auteur à la suite de ses investigations oppose alors des
« promesses de contenu » et des « promesses de
moyens ». Ce sont des promesses de moyens qui peuvent
se substituer à des promesses de contenu. Les promesses
de contenu concernent les caractéristiques des parcours
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 131
professionnels envisageables comme l’accès à de plus
grandes responsabilités alors que les promesses de
moyens correspondent à l’engagement pris par les
entreprises pour permettre aux cadres d’accéder aux
emplois qui leur conviennent7. Les cadres préfèrent
d’ailleurs les promesses de moyens.

L’auteur note que les pratiques de gestion basées sur


l’idée d’employabilité plutôt que sur celle de carrière
accordent plus de place à l’initiative individuelle dans le
déroulement des parcours professionnels.

L’idée d’employabilité permet de rompre également


avec l’idée de progression verticale. Selon l’auteur8,
« elle permet en effet de reconnaître le mérite de tous
ceux qui auront su conserver un emploi en dépit des
vicissitudes du marché du travail ». Conserver un emploi
ou progresser en termes de carrière repose sur l’idée de
valeur ajoutée par l’individu. L’employabilité interne
pourrait répondre à la question : quelle valeur ajoutée
ë l’individu peut apporter à l’entreprise ? Cette démarche
S
passe par une bonne connaissance des besoins de l’en¬
W treprise et des compétences nécessaires pour répondre à
LU
O ces besoins.
°
1.2. Les moyens de l’employabilité
ç.
g.
La gestion de l’employabilité concerne aussi bien la ges¬
tion de l’employabilité individuelle que la gestion de
l’employabilité de marché comme le résume Dany9 dans
le tableau 6.1.

Un des outils pour gérer l’employabilité est le projet pro¬


fessionnel. L’individu peut prendre l’initiative de constru¬
ire son projet. L’entreprise peut l’accompagner dans cette
démarche.
132 GERER LES CARRIERES

Tableau 6.1. Les moyens de l’employabilité


•Gestion de l’employabilité individuelle :
• Le développement des compétences et autres
attributs individuels recherchés par les entrepris¬
es (formation, mobilité...).
• L’évaluation individuelle et la gestion individu¬
elle des carrières (bilan de compétences, sensi¬
bilisation et formation à la gestion des carrières).
• L’information sur les métiers (GPEC, répertoire
des métiers, dictionnaires et référentiels de com¬
pétences...).

•Gestion de l’employabilité de marché :


• Des accords d’entreprise pour limiter les licen¬
ciements (aménagement du temps de travail,
développement de nouvelles activités...).
• L’essaimage.
• La consolidation des bassins d’emplois (prêt à
taux préférentiels, mise à disposition de compé¬
tences...).
"O

Source : Dany, 1998, p. 445.

©
A-J
1.2.1. Projet professionnel
Après avoir proposé deux définitions d’un projet profes¬
sionnel, nous en présenterons les grandes étapes.
1.2.1.1. Définitions

Un projet professionnel est à la fois, selon Potel10 :

1. « Un processus de transformation d’aspirations vagues


et floues en images précises. On réserve le terme de pro¬
jet à des buts précis situés suffisamment loin dans le futur.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 133

2. Un plan d’action, une démarche adaptée à un but.


L’important est que l’individu construise un programme
de réalisation qui clarifie les parcours à suivre et les
moyens à mettre en œuvre. »

La définition ci-après, proposée par Goguelin et Krau11,


dépasse le projet professionnel :
« Qu’il s’agisse du projet de vie ou du projet profes¬
sionnel, le projet est une projection dans son avenir et
peut-être encore plus dans son devenir - au cours de
laquelle l’homme (ou la femme) forme l’image d’une
situation qu’il souhaite atteindre, et de façon plus ou
moins précise, réfléchit à la façon de l’atteindre. »

Le projet professionnel doit être cohérent avec le projet de


vie. Goguelin12 prône l’anticipation et l’ajustement perma¬
nent du devenir professionnel en cohérence avec le projet
de vie. L’auteur13 signale qu’un projet de vie s’articule
autour de quatre axes, chacun ayant deux pôles, de
« ouvert aux autres » à « centré sur soi » :
ë
• La tendance économique
S
W
C’est le fait d’« avoir», de «donner aux autres» à
LU « garder pour soi, voire amasser ».
O

° • La tendance sociale
Elle correspond à « pouvoir », de « rendre service » à
ç. « influencer ».
g.

• La tendance affective
Elle correspond à « aimer », de « aimer les autres » à
« être servi ».

• La tendance au développement de soi


Elle est centrée sur « être » allant de « être capable
d’aider les autres » à « être tourné vers son épanouisse¬
ment personnel ».
134 GERER LES CARRIERES

L’auteur souligne la distinction entre la réussite et la réali¬


sation. Réussir revient à « bien s’en sortir ». Ce verbe cor¬
respond à la carrière externe, à l’approche sociétale de la
carrière présentée dans le premier chapitre de cet ouvrage.
Se réaliser c’est s’épanouir, selon l’auteur. Nous sommes
ici dans la carrière interne, où les aspirations individuelles
deviennent centrales.

La construction du projet professionnel se fait alors autour


de ces aspirations individuelles tout en tenant compte des
réalités de l’environnement, notamment en termes de
marché de l’emploi.

1.2.1.2. Les étapes

La construction d’un projet professionnel s’organise en


deux étapes, décrites par Potel14 :

• Une étape de bilan.


Cette étape « permet de faire le point sur ses motiva¬
tions et compétences et de déterminer ses possibilités de
"O
progressions professionnelles »15. La personne, afin de
mieux se connaître, réfléchit sur son parcours et cherche
à comprendre :
©
A-J
• le sens de son orientation professionnelle ;
& • sa dynamique interne en identifiant ses principaux
leviers d’action ;
• sa personnalité.

Pour construire une image précise de soi, il est néces¬


saire, toujours selon Potel, de :
• clarifier la définition de soi, Le. l’identité que chacun
essaye de faire comprendre et accepter par les autres ;
• se confronter à la perception que les autres ont de soi
pour aider à la prise de conscience de soi.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITE DE L'INDIVIDU ? 135

• Une étape de construction de projet


Fondée sur le bilan, cette étape permet à la personne de
valider les options choisies par rapport à des opportu¬
nités et des contraintes. Les options correspondent au
projet de vie alors que les opportunités ou les con¬
traintes se rapportent à différentes facettes de l’environ¬
nement, comme le marché du travail, le secteur d’activ¬
ité ou les formations possibles.

L’étape bilan mérite quelques développements puisqu’elle


peut inclure un dispositif défini légalement en France, le
bilan de compétences.

1.2.2. Le bilan de compétences

Trois textes sont à l’origine du droit au bilan de compé¬


tences16 :
• l’accord interprofessionnel du 3 juillet 1991 ;
• la loi du 31 décembre 1991 ;
• le décret du 2 octobre 1992.
"O
Le législateur vise deux objectifs principaux, à savoir per¬
mettre au salarié17 :
• de définir un projet professionnel ;
©
A-J
• d’élaborer un projet de formation.

Ces deux objectifs apparaissent clairement dans la défini¬


tion du bilan de compétences (Article L.900-2) :
« ... Les actions permettant de réaliser un bilan des compé¬
tences... ont pour objet de permettre à des travailleurs
d’analyser leurs compétences professionnelles et person¬
nelles ainsi que leurs aptitudes et leurs motivations afin de
définir un projet professionnel et, le cas échéant un projet
de formation. »
Le mécanisme juridique repose sur :
136 GÉRER LES CARRIÈRES

• l’institution d’un droit à un congé dont dispose le


salarié à son initiative ou à celle de son employeur ;

• un financement imputé, soit au budget de formation de


l’entreprise, soit au budget géré par les organismes
paritaires collecteurs.

Les moyens, pour un salarié, de développer son employa¬


bilité, comme les bilans de compétences, restent souvent
associés à des situations de reconversion ou d’ outplace¬
ment qui leur donnent une image défavorable.

Le développement de l’employabilité facilite le redé¬


ploiement en interne des salariés ou les prépare à trouver
plus facilement un poste dans une autre organisation en cas
de licenciement.

Le bilan de compétences, comme son nom l’indique fait un


état des lieux. Il permet notamment de faire le point sur des
ë expériences personnelles et professionnelles ou de déceler
S des potentialités inexploitées18.
W
LU
o
La démarche, dans l’optique du projet professionnel, peut
s se résumer en cinq points :
• repérer les compétences d’une personne à un instant
ç.
g. donné ;
• examiner les compétences nécessaires à une situation
recherchée ;
• examiner dans quelle mesure les compétences actuelles
sont transférables à une situation recherchée ;v
• mesurer la distance à parcourir ou l’écart entre une
situation actuelle et une situation recherchée ;
• déterminer les moyens nécessaires pour réduire cette
distance, comme une formation.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 137

1.3. Formation
Si la formation professionnelle est un moyen, pour les
entreprises, d’entretenir leur compétitivité, pour les
salariés, il s’agit d’entretenir leur employabilité.

La formation d’employabilité permet au salarié de main¬


tenir sa valeur sur le marché du travail, qu’il soit interne
ou externe. La formation d’adaptation du salarié à « l’outil
de travail », contribue peut-être plus à l’employabilité
interne. Ici, la formation fournit les connaissances et les
compétences nécessaires pour accomplir le travail actuel.
La formation d’employabilité s’inscrit dans une optique de
développement puisqu’elle revient à une forme d’appren¬
tissage qui va au-delà des compétences nécessaires pour
tenir l’emploi actuel. Dans ce sens, elle contribue à la ges¬
tion des carrières. Certaines organisations reconnaissent
l’intérêt d’offrir à certains de leurs cadres une formation
de type MBA, ce qui est à la fois bénéfique pour l’individu
et l’organisation. La question centrale est la transférabilité
ë des compétences développées, notamment dans l’ap¬
S
proche de « carrière nomade »19. L’entreprise et le
W « nomade » trouvent tous deux un intérêt à l’échange.
LU
O Pour l’entreprise, le nomade apporte une compétence par¬
° ticulière et transférable. Pour le nomade, l’entreprise lui
donne l’occasion de développer des compétences qu’il
ç. pourra alors « transporter » ailleurs.
g.
Les organisations apprenantes reconnaissent l’importance
critique d’une formation et d’un développement reliés à la
performance continue. Elles considèrent la formation
comme un investissement stratégique plutôt que comme un
coût. L’individu « apprenant » adopte la même attitude avec
en mémoire la théorie du capital humain qui distingue :
• les compétences spécifiques à une organisation, peu
transférables ;
138 GÉRER LES CARRIÈRES

• les compétences génériques, fortement transférables car


moins liées à un contexte particulier.

Cadin20 rappelle que la qualification d’une compétence


comme spécifique ou transférable peut varier selon la per¬
spective entreprise ou individu.

L’entreprise dispose d’informations multiples sur les


besoins en formations des salariés. Nous pouvons notam¬
ment distinguer :

• L’utilisation des données fournies par le salarié lors


de l’embauche
Elles concernent, entre autres, les aspirations de l’indi¬
vidu en termes de carrière. Ces aspirations peuvent
nécessiter une formation afin de pouvoir être satisfaites.

• L’évaluation des performances


Une évaluation bien conduite peut révéler les points
faibles et les points forts de l’individu en termes de per¬
ë formance. C’est un moment privilégié pour déterminer
le type de formation nécessaire. L’entretien d’évalua¬
S
W tion permet également d’exprimer pour le salarié ses
LU
O aspirations quant à sa carrière.
°
• Les centres d’évaluation
ç. C’est un moyen efficace pour évaluer les forces et les
g.
faiblesses des salariés.

Nous développerons ces méthodes dans le chapitre con¬


sacré aux outils de gestion des carrières.

Prendre en charge sa carrière conduit l’individu à être actif


par rapport à sa formation continue. Cette démarche s’im¬
pose dans un contexte où le contrat psychologique entre un
salarié et l’entreprise qui l’emploie semble se modifier.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 139

2. CONTRATS PSYCHOLOGIQUES
La prise en compte du contrat psychologique est incon¬
tournable dans la gestion des carrières. L’accent devrait
surtout être mis sur le changement du contrat psy¬
chologique. Cependant, avant d’aborder ce changement et
sa réalité, il faut surmonter une première difficulté qui
réside dans la définition même d’un contrat psychologique.
2.1. Définitions du contrat psychologique
Guest21 illustre le problème de définition du contrat psy¬
chologique en listant les définitions les plus connues :

« Un ensemble d’attentes réciproques tacites entre un


individu salarié et l’organisation22. »

« Un contrat implicite entre un individu et son organi¬


sation qui spécifie ce que chacun prévoit de donner et
recevoir de l’autre dans leur relation23. »

« La perception des deux parties de la relation d’emploi,


i l’organisation et l’individu, des obligations implicites
S dans la relation. Le contrat psychologique est le proces¬
W
LU
sus par lequel on est arrivé à ces perceptions24. »
O

° « La croyance d’un individu en ce qui concerne les


modalités d’un accord d’échange réciproque entre la
ç. personne et l’autre partie. Un contrat psychologique
g.
émerge quand une partie estime qu’une promesse d’une
récompense future a été faite, une contribution a été
donnée, et donc une obligation a été créée pour fournir
de futurs avantages25. »

La diversité de ces définitions montre, selon Guest, que le


contrat psychologique peut faire référence à des percep¬
tions, des attentes, des croyances, des promesses ou à des
obligations.
140» GÉRER LES CARRIÈRES

La deuxième définition du contrat psychologique insiste


sur son aspect implicite. Le caractère implicite et subjectif
de ce contrat constitue une source de difficultés quand les
parties en présence ont des programmes divergents. Les
attentes réciproques devraient être clarifiées afin de mieux
prendre en compte les aspirations individuelles dans le
domaine de la carrière.

Le contrat psychologique est très complexe, étant donné


qu’il y a au moins deux parties, chacune d’entre elles ayant
son propre programme, et chacune n’étant peut-être pas
consciente du programme des autres parties26 :

• La partie représentée par chacun des salariés


Elle rassemble autant d’aspirations individuelles
auxquelles les organisations pourraient apporter des
réponses par une gestion individualisée des salariés
poussée à l’extrême.

ë
• La partie représentée par l’organisation
Elle est plus complexe à définir. Le contrat de travail
S
W traditionnel est signé entre le salarié et un représentant
LU
O
de l’organisation identifié par son nom au bas d’un doc¬
° ument. Le contrat psychologique ne permet pas cette
clarté. Rousseau27 suggère que les salariés ne formulent
ç. pas leurs attentes à l’égard d’une personne particulière
g. de l’organisation. Cette dernière est alors dotée d’une
identité anthropomorphique. Guest28 signale cet anthro¬
pomorphisme de l’organisation comme un danger en la
transformant en un individu. Le deuxième danger men¬
tionné est de redéfinir le contrat seulement en termes de
la perception du salarié. Pour l’auteur, il existe une mul¬
titude d’agents représentants l’organisation. Ces agents
peuvent offrir différents contrats et parfois des contrats
concurrents.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 141
En termes de carrière, les attentes des salariés pourraient
s’exprimer envers deux acteurs principaux :

• Le supérieur hiérarchique
Le manager a la responsabilité de développer les com¬
pétences de ses collaborateurs afin de leur permettre
une évolution de carrière.

• Un représentant de la fonction ressources humaines


Ici, le danger d’anthropomorphisme existe de nouveau.
Est-ce la DRH en tant que fonction ou le DRH, qui
dirige la politique des ressources humaines et qui la per¬
sonnifie ? Les représentants de la fonction sont proba¬
blement très attendus en termes de gestion des carrières
et jouent dans ce domaine une partie de leur crédibilité
dans l’entreprise.

Souvent, le modèle du contrat psychologique suppose


que les intérêts de l’organisation sont les mêmes quels
que soient les représentants de l’organisation29. Le
supérieur hiérarchique pourrait avoir une vision à court
ë
terme, centrée sur la performance immédiate, alors que
S le responsable de la gestion des cadres, de la DHR,
W
LU
O
inscrirait son action dans une perspective de développe¬
ment à plus long terme.
°

£
2.2. Changement de contrat psychologique
g.
Le contrat psychologique est l’objet aujourd’hui de con¬
troverses sur ce qu’il représente réellement et sur les
moyens de le mesurer, notamment en termes de contenu30.

Pourtant, il est fréquemment avancé que le contrat psy¬


chologique, exprimé le plus souvent par les attentes des
salariés au sujet de leur carrière, a fortement changé dans
les dernières années31.
142 GERER LES CARRIERES

Des entretiens conduits auprès de vingt-cinq dirigeants


d’entreprises nord-américaines Fortune 500 indiquent que
le contrat psychologique, dans leur perspective, a radicale¬
ment changé dans les années 90. Cette étude32 distingue
deux périodes :

• De 1950 à la fin des années 80


Pendant ces années, les salariés étaient traités avec bien¬
veillance, la sécurité du travail et les mobilités verti¬
cales étant une réalité. Aussi, les salariés pouvaient-ils
anticiper toute leur carrière dans une seule entreprise
tant que leur performance était acceptable.

• Depuis 1990
Le contrat psychologique changerait au moins sur trois
aspects :
1. Une relation d’emploi fondée sur l’échange
L’échange continu tant qu’il est favorable aux deux par¬
ties. Pour l’entreprise, les conditions de sa poursuite
reposent sur la performance plutôt que sur l’ancienneté,
avec la préoccupation de faire correspondre les compé¬
tences des salariés et les besoins organisationnels. Les
salariés semblent avoir également changé d’attitude,
leur intérêt personnel primant.
©
A-J
2. Un changement de responsabilités de l’employeur
.S' aux salariés
Les salariés prennent en main leur propre carrière au
côté de leurs managers. C’est aujourd’hui une respons¬
abilité plus partagée qu’il y a quelques années ;
3. Le passage d’une carrière dans une seule organisation
à l’idée d’employabilité dans plusieurs organisations.
Les entreprises reconnaissent qu’elles n’offrent plus
une relation sur le long-terme. Les salariés peuvent
perdre leur travail et acceptent alors la responsabilité
de développer leurs compétences.
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 143

Ces résultats peuvent être rapprochés avec ceux obtenus


dans le secteur financier britannique33. Cette étude a exam¬
iné le contenu du contrat psychologique à la fois dans la
perspective du salarié et dans celle de l’employeur en util¬
isant la méthode des incidents critiques. Elle trouve que les
aspects du travail les plus souvent mentionnés par les
salariés sont l’environnement du travail, la rémunération et
l’équité avant la sécurité de l’emploi. Ce résultat indique
qu’il faut être prudent en affirmant que la carrière est par¬
ticulièrement saillante. Néanmoins, il concerne un secteur
particulier, la finance, qui n’est peut-être pas représentatif
des autres. De plus, les contenus des contrats psy¬
chologiques peuvent varier selon la culture34. Il est alors
nécessaire aujourd’hui d’aborder dans des recherches le
contrat psychologique en termes de ce que :
• le salarié attend ;
• l’organisation peut offrir.

Le contrat peut être distingué, selon la définition de


ë
MacNeil35 en :
S
W • Contrat relationnel
LU
O Il est basé sur un engagement mutuel sur le long terme
° et sur la confiance.

ç.
g. • Contrat transactionnel
Il regroupe des obligations à court terme, à portée lim¬
itée et fondées sur l’échange entre les parties. Il est
purement instrumental.

Le contrat social ou psychologique est aujourd’hui essen¬


tiellement transactionnel alors que le modèle « ancien »
était à la fois relationnel et transactionnel36. Le concept de
carrière protéenne reflète ce changement37.
144 GÉRER LES CARRIÈRES

Les organisations, dans leur gestion des carrières, doivent


veiller à ce que le contrat psychologique ne fasse pas l’objet
d’une violation. La violation du contrat psychologique s’ex¬
prime à deux niveaux :
• obligations non remplies ;
• promesses non tenues.
La carrière et la sécurité de l’emploi sont-elles deux
domaines fondamentaux du contrat psychologique des
années à venir ? Les entreprises, dans leur gestion des car¬
rières, devront entre autres essayer de répondre à cette ques¬
tion. Elles devront également éviter que leurs politiques
« violent » les contrats psychologiques qu’elles ont avec cha¬
cun de leurs salariés. Rousseau et MacLean Parks38 mettent
l’accent sur la nature contractuelle des carrières et les per¬
ceptions d’équité qui résultent du contrat psychologique.
2.3. L’équité dans la gestion des carrières
Dans la mesure où le contrat est relationnel, l’équité procé¬
durale devient centrale. Le principe de justice procédurale
ic consiste à s’assurer que les décisions concernant la carrière
S soient prises de façon juste et perçue comme telles par les
W
LU
salariés. Dans cette approche, c’est plus le processus qui
O
compte que les résultats. La dimension transactionnelle du
° contrat conduit à se concentrer sur l’équité distributive. Il
s’agit ici de savoir dans quelle mesure l’échange est consid¬
ç. éré par les salariés comme juste.
g.
La théorie de l’équité d’Adams39 est souvent mobilisée dans
l’étude des rémunérations. Elle est aussi utile pour l’étude des
carrières. Cette théorie avance qu’un individu compare son
ratio « rétribution / contribution (R/CA) » au ratio « rétribu¬
tion / contribution (R/CB) » d’un autre individu ou ensemble
d’individus considérés comme point de référence. Cette
référence ou repère appartient à l’organisation dans laquelle
l’individu est salarié ou se trouve à l’extérieur de cette organ¬
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 145

isation. Le salarié compare donc ses inputs au profit de l’or¬


ganisation comme ses efforts et ses compétences, et ses out¬
puts, Le. les avantages qu’il en retire en termes de rémunéra¬
tion ou d’évolution de carrière. Trois types de perceptions
sont possibles comme l’illustre la figure 6.1.

Figure 6.1. Théorie de Téquité

Ratios de comparaisons*
C Perception

R/CA<R/CB sous-équité

R/CA= R/C,
I équité

R/Ca> R/CB sur-équité

* où A représente l’individu « qui compare » et B l’individu « repère »


Source : d’après Adams, 1963.
Û
Selon la théorie d’Adams, le salarié va rechercher l’équité.
S
W La rétribution qu’il attend de l’entreprise n’est pas seulement
LU
O
extrinsèque, sous forme de rémunération. Elle est également
° intrinsèque comme une possibilité de carrière. L’individu
compare, par exemple, ses possibilités de progression de car¬
ç. rière avec d’autres salariés, en fonction de la contribution de
g. chacun. S’il a le sentiment qu’il progresse moins vite, à con¬
tribution égale, il a une forte probabilité d’être démotivé et de
diminuer sa contribution pour rétablir l’équité. Il pourra
également quitter l’organisation pour une autre qui lui offrira
l’égalité de son ratio avec celui de son repère. Cette appréci¬
ation de l’équité, aussi bien interne qu’externe, est fortement
subjective. L’organisation a intérêt à connaître la perception
de ses salariés afin de jauger l’équité de son système de ges¬
tion des carrières.
146 GÉRER LES CARRIÈRES

3. DE L’INDIVIDU A L’ORGANISATION
L’employabilité et le contrat psychologique constituent deux
éléments fondamentaux dans la gestion des carrières. Ils
invitent à prendre en compte les besoins des deux acteurs
que sont l’entreprise et l’individu. Encourager l’individu à
jouer un rôle de plus en plus actif pour le développement de
sa carrière n’exonère pas l’entreprise de ses responsabilités.
Dans le contexte du nouveau contrat psychologique transac¬
tionnel, chacun doit bénéficier de l’interaction. L’entreprise
gère un salarié de passage. Pour que l’échange soit prof¬
itable, elle aurait intérêt à développer les compétences les
plus génériques, Le. les plus transférables. Cette approche
peut paraître paradoxale dans le sens où elle pourrait inciter
un salarié à offrir ses compétences ailleurs. Cependant, un
salarié qui perçoit l’entreprise comme une source de
développement et de progression sera peut-être prêt à plus
d’efforts comme résultante d’une motivation renforcée. La
période sédentaire du « nomade » apportera alors une plus-
value à l’organisation qui contribuera à la performance
i organisationnelle.
S Dans cette recherche de performance, les organisations ne
W
LU
O
suivent pas les mêmes politiques de gestion des carrières.
En effet, leurs approches sont contingentes à certaines sit¬
°
uations comme leur stratégie. C’est l’objet du chapitre
ç. suivant.
g.
U
NOTES DU CHAPITRE 6

1 Hall, 1976, Careers in Organizations.


2
Chay et Aryee, 1999, Potential moderating influence of career growth opportunities on
careerist orientation and work attitudes : evidence of the protean career era in
Singapore.
3 Pelosse, Sauret et Thierry, 1995, Développement et emploi.

4
Dany, 1998, p. 438, La promesse d’employabilité : Un projet pour la GRH compatible
avec l’éclatement de la fonction ?
5
Stephany, 1998, Pour en finir avec l’employabilité.
6 Dany, 1997, La
promesse d’employabilité : un substitut possible à la promesse de car¬
rière ?
VERS UNE PLUS GRANDE RESPONSABILITÉ DE L'INDIVIDU ? 147
7 Dany, 1998, La promesse d’employabilité : Un projet pour la GRH compatible avec
l’éclatement de la fonction ?
8
Dany, 1998, La promesse d’employabilité : Un projet pour la GRH compatible avec
l’éclatement de la fonction ?
9 Dany, 1998, La
promesse d’employabilité : Un projet pour la GRH compatible avec
l’éclatement de la fonction ?
10
Potel, 1997, p. 36, Le projet professionnel au service de l’employabilité.
11
Goguelin et Krau, 1992, p. 97, Projet professionnel, projet de vie, définition mention¬
née par Potel, 1997, p. 36, Le projet professionnel au service de l’employabilité.
12
Goguelin, 1998, Anticipation et ajustement permanent du devenir professionnel en
cohérence avec le projet de vie.
13 Goguelin, 1998,
p. 74 et 75, Anticipation et ajustement permanent du devenir profes¬
sionnel en cohérence avec le projet de vie.
14 Potel, 1997, Le projet
professionnel au service de l’employabilité.
15 Potel, 1997,
p. 36, Le projet professionnel au service de l’employabilité.
16 DARES, 1999, Premières informations, 99.08 - N° 31.1.

17 DARES, 1999, Premières informations,


99.08 - N° 31.1.
18 Joras, 1996, Utiliser les bilans de
compétences.
19
Cadin, 1998, Faut-il changer de paradigme en théorie des carrières ?
20 Cadin, 1998, Faut-il
changer de paradigme en théorie des carrières ?
21
Guest, 1998, p. 650 et 651, Is the psychological contract worth taking seriously ?
22 Schein, 1978, Career
dynamics : matching individual and organisational needs.
23 Kotter, 1993, The psychological contract.

24 Herriot et Pemberton, 1995, New deals : The revolution in managerial careers.

25 Rousseau, 1989,
Psychological and implied contracts in organizations.
26 Guest, 1998, Is the psychological contract worth taking seriously ?

c? 27
Rousseau, 1989, Psychological and implied contracts in organizations.
28
Guest, 1998, Is the psychological contract worth taking seriously ?
2 29 Herriot et Pemberton, 1996,
Contracting careers.
LU
30 Guest, 1998, On
meaning, metaphor and the psychological contract : a response to
O Rousseau (1998) ; The « problem » of the psychological contract considered.
31 Mondy et al., 1999, Human Resource Management ; Altman et Post, 1996, Beyond the

© « social contract » : An analysis of the executive view at twenty-five large companies.


£ 32 Altman et Post, 1996, Beyond the « social contract » : An analysis of the executive

£ view at twenty-five large companies.


Q! 33 Herriot, Pemberton et Hawtin, 1996, The career attitudes and intentions of managers
o
in the finance sector.
34 Rousseau et Tijoriwala, 1998, Assessing psychological contracts : Issues, alternatives

and measures.
35 MacNeil, 1985, Relational contract : What we do and do not know.

36 Altman et Post, 1996,


Beyond the « social contract » : An analysis of the executive
view at twenty-five large companies.
37 Chay et Aryee, 1999, Potential moderating influence of career growth opportunities on

careerist orientation and work attitudes : evidence of the protean career era in
Singapore.
38 Rousseau et MacLean Parks, 1993, The contracts of individuals and
organizations.
39 Adams, 1963, Toward an understanding of inequity.
Copyright © 2000 EMS Editions.
CHAPITRE 7

APPROCHES CONTINGENTES
DE LA GESTION DES CARRIÈRES

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Copyright © 2000 EMS Editions.
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 151

Il n’existe probablement pas un système de gestion des


carrières efficace dans l’absolu mais plutôt des systèmes de
gestion des carrières plus ou moins efficaces selon le con¬
texte organisationnel ou certaines caractéristiques des
organisations.

Nous commençons ce chapitre par l’examen de la stratégie


organisationnelle et du marché du travail en exposant une
typologie des systèmes de carrière. Ensuite, nous présen¬
tons une autre typologie en fonction des préoccupations
des entreprises. Nous examinons aussi l’impact de la
dimension internationale des entreprises sur la gestion des
carrières. Différentes approches de gestion des multina¬
tionales et stades de développement sont passés en revue.
D’autres caractéristiques des organisations comme la
structure organisationnelle ou celle des effectifs semblent
également influencer les politiques de gestion des car¬
rières.

ë
1. STRATÉGIE ORGANISATIONNELLE
S ET MARCHÉ DU TRAVAIL
W
LU
O
Sonnelfeld, Peiperl et Kotter1 proposent une typologie des
°
systèmes de carrière. Selon ces auteurs, un système de car¬
ç. rière est un ensemble de politiques et de pratiques qu’une
g. organisation utilise pour fournir du personnel afin de satis¬
faire ses besoins en ressources humaines.

Les auteurs combinent l’entrée et la sortie de personnel en


une dimension qu’ils appellent flux de ressources et la
mettent en contraste avec le développement de personnel,
qu’ils appellent flux d’affectation. Ce sont deux dimen¬
sions, externe et interne, qui fournissent une classification
des systèmes de carrière (figure 7.1).
152 GÉRER LES CARRIÈRES

Figure 7.1. Systèmes de carrière


Forteresse Équipe de base-bail
Externe
Orientation ressources Orientation ressources
'' humaines : retranchement humaines : recrutement
Modèle stratégique : réactif Modèle stratégique : prospectif

Type de stratégie Type de stratégie


concurrentielle : coût concurrentielle : focus (basé
Flux de
sur les compétences humaines)
Ressources
Club Académie
Orientation ressources Orientation ressources
humaines : rétention humaines : développement

Modèle stratégique : défensif Modèle stratégique : analyse

' Type de stratégie


concurrentielle : focus
Interne (non-compétitif)
Type de stratégie
concurrentielle : différentiation

Contribution Contribution
collective individuelle
Flux
d’affectation

Source : adapté de Sonnenfeld, Peiperl, & Kotter, 1992, p. 305.



:1
S
Les auteurs détaillent chacune des deux dimensions :
Z
LU
O

°© • Les flux de ressources


Ils peuvent être essentiellement internes, Le. les emplois
£
sont pourvus par le marché interne du travail, plus par¬
Q!
o ticulièrement pour les plus bas niveaux, ou peuvent être
externes. Dans ce dernier cas, l’entreprise a une proba¬
bilité aussi importante d’embaucher des talents de l’ex¬
térieur que de les promouvoir de l’intérieur à tous les
niveaux. Stratégiquement, les entreprises qui se concen¬
trent sur un flux de ressources internes tendent à con¬
sidérer les personnes comme un capital, avec des
valeurs de développement à long terme, plutôt que
comme des coûts.
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 153

• Les flux d’affectation


Ils concernent les mouvements à l’intérieur de l’organisa¬
tion. Ils mesurent sur quelles bases les personnes sont
affectées et promues à de nouvelles tâches. Cela peut se
concentrer essentiellement soit sur la contribution indi¬
viduelle à la production ou aux profits, soit sur une con¬
tribution collective comme le soutien des autres, la loy¬
auté, l’ancienneté ou le statut. Stratégiquement, les
entreprises qui se focalisent sur la contribution individu¬
elle s’attentent à ce que les personnes produisent contin¬
uellement de la valeur alors que celles qui se concentrent
sur la contribution collective voient les personnes comme
ayant une valeur intrinsèque.

En croisant ces dimensions, les auteurs proposent quatre


types de systèmes de carrière qui correspondent à quatre
types d’organisations différentes :

• Académies
Ces entreprises recourent au marché interne du travail.
ë
Elles mettent l’accent sur les contributions individuelles
S en termes notamment de promotions. Ces entreprises
W
LU sont caractérisées par la stabilité et un faible turnover.
O
Le modèle du tournoi est souvent utilisé pour détermin¬
°
er les promotions pour des salariés qui restent dans l’en¬
ç. treprise jusqu’à leur retraite. Les industries qui suivent
g. ce modèle comprennent par exemple les industries
pharmaceutiques ou automobiles.

• Clubs
Ces entreprises, comme les académies, recourent égale¬
ment aux marchés internes du travail. Les promotions
ont une plus forte probabilité d’être accordées sur la
base de la loyauté, de l’ancienneté plutôt que sur la con¬
tribution individuelle. Parmi les clubs se trouvent les
154 GÉRER LES CARRIÈRES

sociétés assurant un service public ou les assurances.

• Équipes de base-bail
Ce sont des entreprises qui sont ouvertes aux marchés
externes à tous les niveaux. Aussi, la fonction centrale
des ressources humaines est le recrutement. Nous
sommes ici dans l’optique de la théorie du capital
humain où les salariés augmentent leur propre capital
à travers les études, la formation continue et leurs
expériences. Les personnes dans une équipe de base¬
ball s’identifient plus à leur profession qu’à une
entreprise. Parmi les équipes de base-bail se trouvent
les sociétés de conseils, les sociétés d’expertise
comptable, les cabinets d’avocats, les banques d’in¬
vestissements ou encore les sociétés de développe¬
ment de logiciels.

• Forteresses
Ces entreprises sont préoccupées par leur survie. Aussi
ë ne peuvent-elles se permettre de se concentrer sur ses
S membres individuels, soit en termes de récompense,
W
LU
soit en termes de promotions. Elles ont une forte proba¬
O
bilité de dépendre d’un recrutement externe, tourné vers
° des généralistes disposant de compétences de redresse¬
ment d’entreprises. Les exemples d’entreprises
ç.
g. avancées par les auteurs sont l’édition ou le secteur
hôtelier.

2. LES PRÉOCCUPATIONS DES ENTREPRISES

Toutes les organisations n’ont pas les mêmes préoccupa¬


tions. Roger2 distingue quatre types d’ entre-prises, selon
qu’elles sont centrées sur :
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 155

• Les résultats
Dans ces entreprises, ceux qui atteignent les objectifs
sont promus, les autres devant quitter l’organisation.

• Les procédures
La gestion des carrières veille à réduire la subjectivité
des décisions. Le salarié joue un rôle majeur dans la
gestion de sa carrière dans la mesure où il décide de
passer un examen synonyme de l’obtention d’un nou¬
veau poste ou d’une promotion.

• L’ambiance
Les relations humaines sont au cœur de la gestion des
carrières. Les aspirations individuelles des salariés sont
fortement prises en compte. Les « parrains » ont un
rôle d’intégration important. L’esprit de l’entreprise est
transmis par des « mentors ».

• Le développement individuel
Les aspirations individuelles sont également centrales
ë au côté de l’amélioration du fonctionnement de l’organ¬
S isation en valorisant ses ressources humaines. Le rôle de
W
LU
la hiérarchie en matière de suivi de carrière est le plus
O
marqué dans ces organisations.
°
Pour ces quatre types d’entreprises, où l’organisation se
ç. concentre davantage sur un aspect, sans exclure forcément
g.
les autres, les critères d’évolution de carrière, les politiques
de mobilité interne ou externe et les moyens adaptés vari¬
ent comme le montre la figure 7.2.
156 GÉRER LES CARRIÈRES

Figure 7.2. La gestion des carrières


dans différents types d’entreprise
Entreprise centrée Critères d’évolution Mobilité Moyens
sur
interne Autonomie,
les résultats Réalisation d’objectifs + délégation
externe

Respect des règles Règles formalisées


les procédures Réussite aux examens interne Grilles
Ancienneté Examens, concours

Loyauté Parrains
l’ambiance interne Mentors
Esprit d’équipe Information interne
Entretiens
le développement Potentiel interne d’orientation
individuel + Bilans professionnels
externe Formation

Source : Roger, 1996, p. 158.

3. APPROCHES DE GESTION DES


MULTINATIONALES
i Quatre approches de gestion des multinationales peuvent
S être distinguées selon l’autonomie accordée aux filiales3.
W
LU
Ces approches correspondent à des caractéristiques dif¬
O
férentes de gestion des carrières. Ces approches sont :
°
• L’approche ethnocentrique
£
CL Les entreprises s’inscrivant dans cette approche laissent
U
peu d’autonomie à leurs filiales. Plus le besoin de con¬
trôle de la maison mère sur ses filiales est grand, plus
ses pratiques de gestion des ressources humaines à l’in¬
ternational sont structurées et centralisées au siège
social4. La gestion des carrières est alors fortement cen¬
tralisée. Les postes clés, aussi bien dans le pays d’orig¬
ine que dans les filiales, sont tenus par des managers du
siège dont la carrière est privilégiée.
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 157

• L’approche polycentrique
Les entreprises ont plutôt une gestion des carrières
décentralisée quand elles adoptent une approche poly¬
centrique. Les filiales sont traitées par le siège comme
des entités autonomes. Cette autonomie conduit à une
approche de la gestion internationale des ressources
humaines fondée sur le particularisme local. Aussi, les
locaux occupent-ils les postes clés des filiales.

• L’approche géocentrique
Dans l’approche géocentrique, les entreprises accordent
peu d’importance à la nationalité des cadres mais plutôt
à leurs compétences. Il s’agit plutôt de choisir le
meilleur candidat, qu’il soit expatrié, local ou d’un pays
tiers. La gestion des carrières est alors globale et
indépendante de la nationalité des salariés.

• L’approche régiocentrique
La relation siège filiale n’est plus caractérisée par une
interdépendance globale, comme pour l’approche géo¬
ë centrique, mais par une interdépendance régionale. La
S gestion des carrières devient régionale. Elle est définie
W
LU
par rapport à un bassin géographique. La mobilité des
O
salariés s’effectue dans les limites de la région. Les
° transferts entre la région et le siège sont exceptionnels.

ç. Cette typologie permet aux entreprises de mieux cerner


g.
leurs politiques de gestion internationale des carrières et
de l’intégrer dans leur approche de la gestion interna¬
tionale des ressources humaines. Elle est résumée dans la
figure 7.3.
158 GÉRER LES CARRIÈRES

Figure 7.3. Différentes approches de Vinternational


et gestion des carrières

Approches de l’international
Ethnocentrique Polycentrique Géocentrique Régiocentrique
Siège : décisions Filiales : traitées
stratégiques par le siège Interdépendance Interdépendance
Siège / Filiales : pas ou comme des globale régionale
Filiales peu d’autonomie entités nationales
distinctes

Celui du pays Basé sur le par¬


MIRH d’origine ticularisme local Transnational Régional

Décentralisée
Gestion des
Centralisée (localement) Globale Régionale
Carrières
Expatriation :
Carrière des mot sans con¬
Indépendante Mobilité des
cadres du siège de la nationalité cadres dans les
privilégiée tenu, limites d’une
Locaux : région.
Rares transferts
W postes clés
des régions au
des fdiales siège social
S
W
LU Source : Cerdin, 1999, p. 16.
o

°© Les stades de développement des entreprises à l’internation¬


£ al peuvent également influencer la gestion des carrières.

o 4. STADES DE DÉVELOPPEMENT À
L’INTERNATIONAL
Adler et Ghadar5 proposent quatre stades de développement
des opérations internationales :

• Local
Ce stade de développement se concentre sur le marché
local et l’exportation.
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 159

• International
Ce stade vise à s’adapter aux habitudes de consomma¬
tion locales et à effectuer un transfert d’apprentissage.

• Multinational
Ce stade vise une orientation stratégique globale, c’est-
à-dire l’intégration et la coordination des activités sur le
plan mondial, de sorte à être compétitif aux niveaux des
prix et des coûts.

• Global
Ici sont recherchées à la fois la différentiation des pro¬
duits pour pénétrer de nouveaux marchés et l’intégra¬
tion de manière à contrôler les coûts.

Selon ces auteurs, les stades de développement dans les


opérations internationales influencent les pratiques de ges¬
tion internationale des ressources humaines. Dans les
stades « Multinational » et « Global », les organisations
recourent plutôt à un personnel véritablement intema-tion-
ë
al. Sur un marché mondial, elles se positionnent comme
S
W
des entreprises mondiales où le développement des com¬
LU pétences et la gestion des carrières dépassent ainsi les fron¬
O
tières géographiques. Par exemple, Schlumberger a
°
développé le concept de carrières sans frontières qui
ç. dépasse non seulement les frontières géographiques mais
g. aussi les frontières de produits et de fonctions6.

5. STRUCTURE ORGANISATIONNELLE

La structure des organisations influe sur la gestion des car¬


rières. Aujourd’hui, les organisations présentent des struc¬
tures hiérarchiques de plus en plus plates où les possibilités
de mobilité verticale sont réduites7. La fonction de
développement des salariés passe alors par les mobilités
160 GÉRER LES CARRIÈRES

horizontales, sources de diversité des expériences8. Dans


les structures matricielles, cette mobilité horizontale est
favorisée puisqu’elles placent le salarié à l’intersection
d’un produit, d’un marché ou d’un projet et d’une fonction.
Ainsi, il a l’opportunité de développer des compétences
transversales sur lesquelles peut s’appuyer une mobilité
horizontale. Lorsqu’elles sont internationales, notamment
par des projets mobilisant des équipes de plusieurs pays,
ces structures facilitent les mobilités internationales.

Le tableau 7.1, proposé par Cadin9 sur la base des travaux


de Miles et Snow10, examine cinq types de structures, dont
la structure matricielle, et le système de carrière corre¬
spondant, en termes de parcours de carrière, de compé¬
tences clés et de responsabilités de la carrière.
Dans la dernière ligne du tableau 7.1, l’entreprise cellulaire
se présente comme la forme la plus futuriste d’organisation

i
Tableau 7.1: Structures organisationnelles
S et systèmes de carrière
z
LU
O
Structure Parcours Responsabilité
Compétences clés
° organisationnelle de carrière de la carrière

dans une firme département


Fonctionnelle technique
dans la fonction fonctionnel
g.
u dans une firme technique
Divisionnelle division, firme
transdivisions commerciale
dans une firme technique département, projet,
Matricielle
par projets commerciale firme

Réseau à l’intérieur et à technique, corn., la firme et l’in¬


travers les firmes coopérative dividu
professionnel technique, corn.,
Cellulaire individu
indépendant coop., gestion de soi

Source : Cadin, 1998, p.147.


APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 161

selon Miles et Snow11. Les auteurs proposent cette


métaphore de l’organisation comme un ensemble de cellules,
où chacune peut agir seule, mais en agissant de concert avec
les autres cellules, devient capable d’effectuer des fonctions
plus complexes. Avec cette structure l’organisation ne fonc¬
tionne pas comme un employeur mais comme un mécanisme
facilitateur qui favorise l’application et la mise en valeur des
compétences professionnelles de chacun de ses membres.
C’est dans ce type d’organisation que l’individu a l’entière
responsabilité de sa carrière, tout en étant aidé et encouragé
par les autres membres. Le développement des compétences,
le partage des connaissances constituent la pierre angulaire
de ce système de carrière.

Dans une telle structure cellulaire, la notion de haut poten¬


tiel ne semble pas avoir sa place dans la mesure où elle
isole des individus repérés comme ayant une capacité d’a¬
vancement plus rapide que les autres.

ë
Cette gestion des cadres à haut potentiel est aussi influ¬
s
W encée par l’évolution des structures. Hesterley et Derr12
LU
O examinent le management de cette population à l’ère du
° changement. Ils montrent la réduction de la hiérarchie dans
les organisations, l’apparition de structures de direction
ç. plus décentralisées et autonomes, une coordination hori¬
g.
zontale et une flexibilité avec des équipes à fonction¬
nement transversal. Le nouveau paradigme des affaires
requiert une nouvelle forme de gestion des hauts poten¬
tiels. Par exemple, les entreprises devraient former, selon
les auteurs, des « espèces variées de dirigeants plutôt que
des directeurs généraux traditionnels ». La carrière du xxie
siècle apparaît alors comme un modèle en spirale dont le
problème est avant tout de gérer les transitions.
162 GÉRER LES CARRIÈRES

6. AUTRES FACTEURS ORGANISATIONNELS

Une étude, reposant sur la description par 50 cadres de la


gestion des carrières dans leur entreprise13, bien que peu
représentative par la taille de l’échantillon, indique que
plusieurs facteurs conditionnent la gestion des carrières :

• La taille de l’entreprise
« La petite taille de l’entité ne facilite pas la gestion des
carrières dans l’entreprise. »
«La taille du groupe, plus de 17 000 personnes au
niveau mondial, offre de nombreuses possibilités d’évo¬
lution. »

• La date de création de l’entreprise


« Etant donné sa jeunesse et le contexte dans lequel elle
évolue, l’entreprise n’a rien développé dans le domaine
de la gestion des carrières. »

• Le secteur d’activité
« Comme la majorité des sociétés évoluant dans le
secteur informatique, l’entreprise n’a pas à ce jour
établi de programme formalisé de gestion des carrières.
Les évolutions technologiques et le turnover important
©
A-J
dans ce secteur sont les causes avancées par tous les
.S' interlocuteurs avec lesquels j’ai pu discuter de ce
sujet. »

Un modèle de système de promotion (figure 7.4) proposé


par Ferris et ses collègues14 établit un lien entre certains de
ces facteurs et les caractéristiques des systèmes de promo¬
tion dans l’entreprise.

Les facteurs organisationnels, retenus par les auteurs, ont


un impact sur le système de promotion, d’après une
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 163

Figure 7.4. Systèmes de promotion


dans les organisations
Facteurs d’environnement

>- Secteur d’activité


>•Économie
>ÿ Cadre légal

>ÿ Marché du travail


Performance
Caractéristiques du organisationnelle
Facteurs organisationnels système de promotion

>- Centralisation >- Critères de promotion


>- Formalisation >- Comité de promotion
>- Taille >- Identification du candidat
>ÿ Structure >- Rôle du « politique » Attitudes des
Stratégie salariés
>- Syndicalisation

Facteurs du travail

>- Caratéristiques,
fonctions et critères
de performance du
travail considéré

Source : adapté de Allen, 1997, p. 253 et de Ferris et al., 1992, p. 52.

w enquête par questionnaire et des entretiens. Nous


reprenons ci-après quelques résultats relatifs à cinq carac¬
S
W téristiques organisationnelles :
LU
O

°© • La centralisation
Dans les entreprises les plus centralisées, les critères de
£
sélections semblent, d’après les managers, mieux con¬
Q!
o nus des salariés ;

• La formalisation
Plus une entreprise est formalisée, moins elle détermine
le nombre d’années nécessaires sur un poste avant de
pouvoir obtenir une promotion. Elle est aussi plus
encline à utiliser une procédure pour communiquer
l’ouverture d’un poste dans les politiques de promo¬
tions.
164 GÉRER LES CARRIÈRES

• La taille
Les plus grandes entreprises sont davantage suscepti¬
bles de favoriser des parcours plus rapides pour les pro¬
motions. Ce résultat rejoint nos conclusions mention¬
nées précédemment.

• La stratégie
Les entreprises qui adoptent une planification des
ressources humaines en incorporant les considérations de
promotions et de successions ont plus de probabilité d’u¬
tiliser des moyens informels ou politiques. Un processus
formel de planification des ressources humaines se met
alors en œuvre via des processus informels.

• Le niveau de syndicalisation
Plus les entreprises sont syndiquées, moins l’affichage
des postes pour promotions est pratiqué. Ceci peut s’ex¬
pliquer par les limites de ce système qui a une forte
probabilité d’entraîner un mécontentement des person¬
nes qui postuleraient sans obtenir leur promotion.

Une autre caractéristique de l’organisation, la structure de


ses effectifs, n’est pas neutre par rapport aux politiques de
gestion des carrières.
©
A-J

.S'

7. PYRAMIDES DES AGES

La pyramide des âges constitue un élément de base à la


gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
puisqu’elle permet de constater la structure des effectifs à
un instant t et de se projeter quelques années plus tard.

Cinq grands types de pyramides émergent après l’analyse


de bilans sociaux15, comme l’indique la figure 7.5.
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 165

Figure 7.5. Les différentes pyramides des âges

ii ni
« Champignon » « Toupie » « Cylindre »

IV V
« Poireécrasée » « Pelote de laine »

Source : Peretti, 1998, p.115.

La structure des effectifs, imagée par chacune des cinq


pyramides, a un impact sur la gestion des carrières16 :
g
5 • Champignon
S Ces organisations présentent un fort pourcentage de
LU personnes au-delà de 50 ans. Les organisations devront
O
se concentrer sur la gestion des fins de carrière et le
°
renouvellement de leur effectif.
£
Q.

U
• Toupie
L’organisation se caractérise par une forte proportion de
baby-boomers. Ils occupent les postes clés, ce qui rend
difficile la gestion des carrières des salariés qui les suiv-
ent.

• Cylindre
Cette structure des effectifs est rare en France. Elle cor¬
respond à une politique de recrutement régulière sur une
166 GÉRER LES CARRIÈRES

longue période. Cependant, elle permet une gestion des


carrières harmonieuse.

• Poire écrasée
Les moins de 35 ans, les Xers, constituent au moins
50 % des effectifs. Nous avons mentionné les dif¬
férences de valeurs qu’ils véhiculent par rapport à leurs
aînés. Ces structures se rencontrent notamment dans des
entreprises récentes.

• Pelote de laine
Cette structure est marquée par la faiblesse des classes
d’âge intermédiaires avec deux groupes équilibrés, les
moins de 30 ans et les plus de 50 ans.

Cette approche par les pyramides souligne l’influence


d’une structure des âges de l’effectif sur la gestion des car¬
rières. Cependant, elle comporte un risque de discrimina¬
tion qui se manifeste notamment par :
• l’exclusion des salariés vieillissants pour équilibrer la
o
±L
pyramide des âges.
~o
LU
CO
• une gestion favorable aux Xers, âgés de 25 à 35 ans.
Z
LU
O
o
o
CM
Comme le note Vatteville17, ces deux populations sont
©
A-J
nécessaires car « les jeunes sont le potentiel de l’en¬
& treprise, mais les plus anciens en sont la mémoire ».
>-
CL

U
Le risque de discrimination repose en partie sur la réduc¬
tion de l’âge à son approche chronologique (calculé par
rapport à la date de naissance de la personne). D’autres
formes d’âges interviennent également dans la gestion des
carrières comme l’âge physiologique (l’âge que l’on
paraît) ou l’âge social (sur lequel se fonde des rapports
sociaux). Les expériences et les compétences qu’elles per¬
mettent de développer devraient prévaloir sur l’âge. Les
APPROCHES CONTINGENTES DE LA GESTION DES CARRIÈRES 167

expériences ne s’évaluent pas seulement sur leur durée


mais surtout sur leur nature et leur diversité.

L’âge peut être abordé différemment selon les cultures


mais il semble qu’il constitue un référentiel puissant. Il
peut conduire à des mesures différentes en matière de ges¬
tion des carrières. Certaines associations profession-nelles,
comme l’Institute of Personnel and Management18, en
Grande Bretagne, sensibilisent leurs membres sur la ques¬
tion de la discrimination. Pour cette institution, « les déci¬
sions d’emploi, fondées sur l’âge ne sont jamais justifi¬
ables parce que :
• l’âge n’est pas un véritable critère d’emploi ;
• l’âge prédit faiblement la performance ;
• il est trompeur d’assimiler les capacités physiques et
mentales à l’âge ».

i 8. DU CONTEXTE AUX OUTILS


S
W La culture nationale et la culture organisationnelle influen¬
LU
O
cent certainement les politiques de gestion des carrières.
° Le champ de connaissances mériterait ici d’être cultivé en
profondeur.
ç.
g.
Nous avons abordé, sans rechercher l’exhaustivité, des fac¬
teurs organisationnels ou d’environnement ayant une influ¬
ence, supposée ou établie, sur la gestion des carrières.
Cette démarche permet de mieux comprendre certaines
différences dans l’approche de la gestion des carrières par
les entreprises. Elle offre l’opportunité aux entreprises de
mieux situer leurs politiques de gestion des carrières par
rapport au contexte dans lequel elles évoluent.
168 GÉRER LES CARRIÈRES

Pour mener à bien leurs politiques de gestion des carrières,


les entreprises disposent d’une large palette d’outils dont
nous présentons les principaux dans le chapitre suivant.

NOTES DU CHAPITRE 7

1 Sonnenfeld, Peiperl et Kotter, 1992, Strategie determinants of managerial labor mar¬


kets : a career systems view.
2 Roger, 1996, Suivre la carrière de ses collaborateurs.

3 Perlmutter, 1969, The tortuous evolution of the multinational corporation ; Perlmutter

et Heenan, 1979, Multinational organization development.


4
Dowling, Schuler et Welch, 1994, International dimensions of human resources man¬
agement.
5 Adler et Ghadar, 1990, Strategic Human Resource Management : A Global Perspective.
6 Personnel, n° 406,
p. 10.
7 Par ex. DeVrie, 1993, Executive selection, a look at what we know and what we need

to know ; Ferris et al., 1992, Promotion systems in organizations.


8 Lévy-Boyer, 1995, Repenser la gestion des carrières des cadres.

9
Cadin, 1998, Faut-il changer de paradigme en théorie des carrières.
10 Miles et Snow, 1996,
Twenty-first-century careers.
11 Miles et Snow, 1996,
Twenty-first-century careers.
12
Hesterley et Derr, 1998, Le management des cadres à haut potentiel à l’ère du change¬
ment.
13 Étude par l’auteur de la description de la gestion des carrières dans leur entreprise par
c? 50 cadres qui suivent une formation continue de haut niveau.
14 Ferris et al.,
1992. Promotion systems in organizations.
S 15
Igalens et Peretti, 1997, Le bilan social de l’entreprise.
Z 16 Cerdin, Marbot et Peretti, 1999, Gérer les carrières par les pyramides.
LU
17 Vatteville, 1999,
O p. 184, Structures par âge et compétitivité de l’entreprise.
18 IPD, 1999, September, Age and Employment, Key Fact.

°©
£

Q!
o
CHAPITRE 8

LES OUTILS FONDAMENTAUX


DE LA GESTION DES CARRIÈRES

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Copyright © 2000 EMS Editions.
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 171

Les différents outils peuvent se décliner entre ceux qui


permettent à l’entreprise de prendre des décisions sur
l’évolution de ses salariés et ceux qui contribuent à accom¬
pagner les salariés quant à leur propre cheminement de car¬
rière. Les salariés, particulièrement les cadres, semblent
exprimer des attentes et même des exigences quant au
deuxième type d’outil mentionné, pour maintenir ou
développer leur employabilité, notamment en assurant
l’évolution de leurs compétences1.

1. OUTILS DE SUIVI DE L’ÉVOLUTION


DES SALARIÉS PAR L’ENTREPRISE
L’ensemble des outils de suivi de l’évolution des salariés
permettent aux entreprises d’asseoir leurs décisions relatives
à la mobilité2. Nous présentons ici ces principaux outils.

1.1. Assessment centers


Un assessment center n’est pas un lieu mais une méthode,
ë
où plutôt un ensemble de méthodes regroupant des tests et
des exercices que les participants font sous observation.
S
W
LU
o
Les assessment centers mettent l’accent sur la mise en sit¬
s uation et l’approche comportementale. Il s’agit de mettre
en situation des personnes afin de détecter leurs compé¬
ç. tences, pour les sélectionner et/ou pour les développer3.
g.
Les trois principaux domaines d’application sont :
• le recrutement ;
• les promotions ;
• les développements de carrière.

Les assessment centers incluent un feedback qui permet à


la personne évaluée de s’approprier les résultats. Cette
méthode offre à la personne « une restitution d’éléments
172 GÉRER LES CARRIÈRES

d’observation factuels », source de progrès4.

Des comparaisons européennes montrent la spécificité


française, notamment avec un faible recours aux assess¬
ment centers5. Les spécialistes de la GRH en France
ignorent quasiment ces centres comme méthode de détec¬
tion du potentiel6. Pourtant, cet outil a une très forte valid¬
ité en comparaison avec les autres méthodes7. Il multiplie
les perspectives sur les aptitudes et les potentiels des per¬
sonnes en s’appuyant sur diverses techniques d’évaluation.

1.2. L’entretien annuel d’appréciation


L’entretien d’évaluation se compose de cinq grandes par¬
ties qui doivent être respectées8 :

• Introduction
Elle permet de présenter la structure de l’entretien. Il
s’agit principalement de définir l’objectif de l’en-tre-
tien.
i
s • Bilan de l’année par l’évalué
W
LU Extrêmement importante, cette phase permet à l’évalué
O
d’exposer ses résultats et de les commenter.
°

£
• Evaluation par le responsable
g. C’est la phase où l’évaluateur exprime son jugement.

• Recherche en commun des moyens et des solutions


pour des améliorations
Cette étape permet notamment d’aborder la manière
dont le salarié peut augmenter ses compétences. Une
formation peut être envisagée. Les questions de
développement personnel de l’évalué peuvent être abor¬
dées.
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 173

• Aborder l’avenir
C’est l’étape où les questions de développement de
carrière sont soulevées. Que veut l’évalué ? Que peut-il
faire ?

Le format peut différer entre les cadres et les non-cadres.


Généralement, le document d’entretien annuel est com¬
plété par la hiérarchie directe et le subordonné.

Nous avons demandé à cinquante cadres d’entreprises dis¬


tinctes de décrire par écrit la gestion des carrières dans leur
entreprise. L’entretien annuel d’évaluation est apparu
comme l’outil le plus mentionné. Ce document favorise
notamment :
• la communication entre le salarié et sa hiérarchie
directe ;
• le repérage des compétences ;
• l’expression de la part du salarié d’un désir de mobilité ;
ë • la satisfaction du salarié dans son poste et ses aspira¬
tions à une évolution personnelle ;
S
W • l’identification d’un souhait du salarié de suivre une for¬
LU
O
mation et son inscription dans le cadre d’un projet.
°
Pour les cadres, ces entretiens font l’objet d’une fiche de
ç. synthèse par les gestionnaires de carrières reprenant suc¬
CL

U
cinctement les résultats et les souhaits de mobilité. Les
autres outils mentionnés dans les sections suivantes
utilisent pour la plupart les données fournies par les entre¬
tiens.

Ces entretiens sollicitent la source la plus traditionnelle


d’évaluation des salariés, le supérieur direct. Cependant, le
concept d’évaluation à 360 degrés invite à considérer des
sources complémentaires.
174 GÉRER LES CARRIÈRES

1.3. Évaluation à 360 degrés

La référence géométrique de cette évaluation indique sim¬


plement que l’évaluation d’une personne repose sur les
autres personnes qui l’entourent9, plus elle-même. Ces per¬
sonnes peuvent être membres de l’entreprise ou extérieures
à cette entreprise. L’avantage de cette approche réside dans
la multiplicité des sources de l’évaluation. Cette multiplic¬
ité des sources rend le processus plus objectif.

Les principaux évaluateurs dans l’entreprise sont :

• La personne à évaluer
Le salarié s’auto-évalue. Cette approche est surtout utile
si le salarié est honnête dans la réalisation de cet exer¬
cice. Les enjeux se concentrent alors sur le développe¬
ment personnel et la formation nécessaire pour pro¬
gresser.

• Le supérieur hiérarchique direct


i Cette évaluation se manifeste dans l’entretien annuel
S
W
traditionnel. Nous avons mentionné ses principales car¬
LU actéristiques dans la section précédente. Le supérieur
O
direct, en tant que manager, a un rôle central dans le
° développement de ses subordonnés.
ç.
g. • Les pairs
Les objectifs de cette évaluation consistent en général à
fournir un feedback et faciliter le développement des
salariés10. Dans cette optique, ils présentent de très
bonnes qualités comme son acceptabilité et son efficac¬
ité à réduire les erreurs (par exemple, effet de halo ou
générosité). Néanmoins, les évalués doivent être pré¬
parés à recevoir des feedbacks de leurs pairs. Cette éval¬
uation est surtout mobilisée dans des situations de tra-
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 175

vail en groupe. Elle paraît plus discutable lorsque les


pairs évaluent le salarié dans la perspective de l’obten¬
tion d’une augmentation ou d’une promotion.

• Les subordonnés
Ils constituent la source la plus délicate en termes de
légitimité puisqu’ils inversent le processus classique.
Néanmoins, ils occupent la meilleure position pour
évaluer les qualités de manager de leur supérieur direct.
Ils peuvent se prononcer notamment sur l’implication
de leur manager dans la gestion des carrières de leurs
collaborateurs.

• Les clients internes


Le salarié travaille au contact d’autres personnes dans
l’organisation auxquelles il apporte ses compétences
pour répondre à leurs besoins. Cette source fournit au
i salarié un feedback utile, en particulier sur ses com¬
portements.
S
W
LU
o A l’extérieur de l’entreprise, ses clients, notés dans la. fig¬
s
ure 8.1 comme les clients externes, peuvent également
fournir un feedback utile au développement personnel.
ç.
g.
Toutes ces sources peuvent être mobilisées pour identifi¬
er les forces et les besoins de progression des individus.
Pour prendre des décisions en termes de carrière, un
leader de l’évaluation peut centraliser les données issues
des différentes sources et les mettre à la disposition de
comités où sont prises les décisions, comme les comités
de carrière.
176 GÉRER LES CARRIÈRES

Figure 8.1. Evaluation à 360 degrés

Supérieur

1
Pairs Salarié Clients
internes

\
/

\
\

/
Clients
Subordonnés externes

i 1.4. Les comités de carrière


S Ces comités réunissent des responsables hiérarchiques au
W
LU
O
moins de niveau N+2 par rapport aux personnes passées en
revue. La DRH est représentée, notamment avec la ou les
°
personnes en charge de la gestion des carrières. Sur la base
ç. des évaluations qu’ils possèdent, les hiérarchiques donnent
CL

U
leurs appréciations. La confiance entre les membres du
comité doit permettre la transparence et la mise en com¬
mun des données qui résument les forces et les faiblesses
des personnes évoquées. Cet exercice revient à une « cap¬
italisation collective » des appréciations. Le comité est un
lieu de décision, où la personne qui le préside est parfois
amenée à arbitrer.
Les comités de carrière sont souvent réservés aux cadres
mais devraient inclure tous les salariés afin de prendre des
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 177

décisions concernant leur mobilité éventuelle. Ils pour¬


raient ainsi permettre la création d’une véritable base de
données « mobilité » à partir de laquelle les personnes
repérées comme mobiles pourraient être sollicitées.

Parmi la population cadre, les comités de carrière peuvent


établir les listes de cadres à haut potentiel11, qui peuvent
faire l’objet d’une revue particulière.

1.5. La revue des potentiels


Des comités de carrière spécifiques sont réservés parfois
aux hauts potentiels. Ils se prononcent sur les postes que
chacune des personnes passées en revue peut occuper, par
exemple dans un horizon de cinq ans. Les décisions sont
fondées notamment sur l’analyse des compétences des per¬
sonnes exprimées, par exemple, dans le cadre d’un assess¬
ment center.

1.6. La formation des potentiels


i
Puisque les hauts potentiels sont ces salariés qui con¬
S
W stitueront les dirigeants de l’entreprise dans les années à
LU
O
venir, cette dernière accorde une attention particulière à
° leur développement. Une fois sélectionnés, l’entreprise les
prépare à leurs responsabilités futures. Pour optimiser leurs
ç. talents, elle dispose de plusieurs options :
g.
• Les jeunes salariés, fraîchement recrutés et identifiés
comme des hauts potentiels, peuvent suivre des pro¬
grammes d’intégration qui les ouvrent aux différents
métiers de l’entreprise. Ils « tournent » alors sur dif¬
férents postes, en moyenne entre une et deux années. Le
suivi de leur évolution se traduit parfois par la réalisa¬
tion d’un rapport défendu devant des membres de la
direction générale ;
178 GERER LES CARRIERES

• Les salariés confirmés comme haut potentiel peuvent


être retenus pour des programmes spécialisés de
quelques semaines. Par exemple, ils travailleront sur
des projets multiculturels, avec le double objectif de
développer leurs compétences et leurs réseaux néces¬
saires à leurs futurs postes.

1.7. L’organigramme prévisionnel


Grâce aux revues de potentiel, il est possible de connaître
en permanence l’ensemble des personnes susceptibles de
pouvoir remplacer une défection dans des postes clés.
L’organigramme prévisionnel, aussi nommé organi¬
gramme de remplacement ou organigramme bis, concerne
en effet les postes à fortes responsabilités dans l’entreprise.
Il faut pouvoir réagir rapidement au départ du titulaire d’un
poste. Ils permettent également des prévisions à plus long
terme. Dans ce dernier cas, l’entreprise aura le temps de
préparer les salariés, en général repérés comme des hauts
potentiels, à ces postes. L’efficacité de cet outil repose sur
une mise à jour fréquente.

1.8. Les comités métiers

Ils sont proches des comités carrières dans la mesure où


©
A-J leur objectif est de réfléchir de manière collégiale aux pos¬
sibilités d’évolutions des salariés. Ils se distinguent par
leur composition qui passe d’une structure hiérarchique à
une structure d’experts.

1.9. Les pépinières ou viviers

Ces systèmes s’adressent à de jeunes potentiels qui sont


destinés à prendre des postes de direction. Il s’agit d’une
gestion particulière du recrutement de jeunes diplômés.
Leur première année dans l’entreprise est consacrée à la
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 179

formation. Cela revient à un investissement lourd sur des


personnes qui peuvent toujours partir pour la concurrence.
Un risque existe également de développer une caste priv¬
ilégiée par rapport aux jeunes diplômés recrutés classique¬
ment.

1.10. L’observatoire des métiers


Cet outil contribue à la détermination des compétences
requises dans les années à venir. Ainsi, il participe à la ges¬
tion prévisionnelle des emplois et des compétences. Il per¬
met notamment de construire des référentiels de compé¬
tences.

1.11. Système de mentor


Des programmes formels de mentors peuvent être mis en
place pour faciliter l’évolution professionnelle des salariés.
Néanmoins, nous avons mentionné qu’ils ne sont pas tou¬
jours très efficaces. En termes d’avancement de carrière,
ë les relations informelles qui s’instaurent entre un mentor et
S son protégé semblent plus puissantes que les relations
W
LU
formelles imposées par la gestion des carrières. Plus large¬
O ment, dans la logique du soutien à 360 degrés que nous
° avons développé, les autres sources comme les pairs ou le
supérieur direct sont utiles.
ç.
g.
1.12. Suivi des carrières
Des commissions composées de représentants du personnel
et de la direction peuvent examiner l’application des pra¬
tiques affichées de la gestion des carrières dans l’entreprise.
Elles sont l’occasion de vérifier si chacun des acteurs rem¬
plit bien son rôle, de la DRH, en passant par le manager et
le salarié lui-même, véritable acteur de sa carrière.
La gestion des carrières comprend aussi des outils qui ser-
180 GÉRER LES CARRIÈRES

vent à accompagner les projets des salariés.

2. OUTILS D’ACCOMPAGNEMENT
DES PROJETS DES SALARIÉS

Les outils d’accompagnement des projets des salariés cor¬


respondent à leurs attentes d’assurer leur valeur actuelle et
future sur le marché du travail, aussi bien interne qu’ex¬
terne.

2.1. Les entretiens professionnels ou entretiens


de carrière

L’entreprise peut prévoir pour ses salariés des entretiens


professionnels avec leur responsable hiérarchique ou le
responsable des ressources humaines. Ces entretiens peu¬
vent revêtir différentes formes, notamment :
• l’entretien d’activité individuel dans le cadre de l’em¬
ploi occupé, entre le salarié et son responsable hiérar¬
ë
chique. C’est l’occasion d’actualiser le CV et de dis¬
cuter des progrès pour la période à venir ;
S
W • l’entretien de carrière avec un spécialiste des ressources
LU
O
humaines qui permet d’examiner le parcours profes¬
° sionnel du salarié. Il peut s’appuyer sur des outils
comme les carrières types dans l’entreprise, ou les
ç. bourses des emplois.
g.
2.2. La bourse des emplois
Tous les postes vacants au sein de l’entreprise ou du
groupe peuvent être présentés dans la bourse de l’emploi.
Il s’agit souvent d’un descriptif détaillé du poste avec les
indications nécessaires pour postuler. Sa mise à jour est
généralement mensuelle.
Un journal de mobilité interne constitue la forme la plus tradi-
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 181

tionnelle d’une bourse de l’emploi. Aujourd’hui, l’utilisation du


réseau intranet s’impose de plus en plus. Intranet contribue à
responsabiliser les salariés en matière de mobilité.
L’information peut devenir plus facilement accessible à tous.

Cet outil comporte cependant quelques inconvénients s’il


est mal utilisé. En effet, la bourse de l’emploi n’empêche
pas le risque de voir se développer un « marché noir » des
postes disponibles. Ce marché fonctionne essentiellement
sur la base de relations dans la mesure où la bourse de
l’emploi ne semble pas contenir toutes les opportunités.
Cette situation se produit notamment quand :
• la bourse des emplois est réservée à des postes sans
grand intérêt ;
• la procédure de recrutement laisse le choix de faire figur¬
er ou non le poste à pourvoir dans la bourse des emplois.

2.3. Les cartes des métiers

Les cartes des métiers permettent aux salariés de visualis¬


ë er les zones de mobilité dans l’entreprise. Ainsi, ils peu¬
vent envisager, à partir de leur poste actuel, des mobilités
S
W à plus ou moins long terme. Ces cartes des métiers déter¬
LU
O minent des cheminements possibles via des passerelles
° qu’elles matérialisent. Elles sont fondées sur des réper¬
toires métiers qui identifient les proximités profession¬
ç. nelles par le repérage de compétences transversales.
g.
2.4. Le bilan professionnel ou de compétences
Un bilan de compétence permet d’orienter, c’est-à-dire12 :
• de définir les projets professionnels ;
• d’orienter les carrières et les suivre.
Le bilan de compétences donne aux cadres des repères
pour mieux appréhender l’ensemble de leurs compétences
et leur potentiel. Le salarié peut analyser son parcours pro-
182 GÉRER LES CARRIÈRES

fessionnel et extra-professionnel afin d’identifier l’ensem¬


ble de ses compétences et de ses capacités d’évolution pro¬
fessionnelle. L’objectif est de définir un projet profession¬
nel réaliste. Sa construction passe notamment par l’utilisa¬
tion de tests de personnalité.

Le bilan de compétence peut compléter l’entretien de car¬


rière. Il peut être effectué à la demande du salarié dans le
cadre des dispositions réglementaires. Ce bilan est alors
confié à un organisme habilité. Cependant, demander à
bénéficier d’un bilan de compétences ne devrait pas
déclencher la réaction suivante rapportée par un cadre :
« J’ai personnellement demandé à bénéficier d’un bilan de
compétence pour m ’entendre demander par mon supérieur
hiérarchique et par le DRH si je préparais mon départ. »

Trop souvent, le bilan de compétences est associé à une sit¬


uation de rupture avec l’entreprise. Il fait d’ailleurs partie
des dispositifs mobilisés dans 1’ outplacement.
2.5. L’outplacement
i
S L’anticipation ne permet pas toujours à l’entreprise de con¬
W
server l’ensemble de ses salariés. Un des outils d’accom¬
LU
O pagnement du départ des personnes est 1’ outplacement.
°
Sur l’initiative de l’employeur et avec l’accord du salarié,
ç. 1’ outplacement aide le salarié à retrouver une situation pro¬
g.
fessionnelle dans une autre entreprise.
L’outplacement est une démarche volontaire, à la fois13 :

• De l’entreprise
Elle montre ainsi qu’elle se préoccupe de tous ses
salariés, ceux qui répondent à ses besoins et ceux dont
elle a décidé de se séparer.
• Du salarié qui part
Le collaborateur doit accepter le processus conduit, le
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 183

plus souvent, par un prestataire de service spécialisé qui


va l’aider à retrouver une situation professionnelle.

D’autres outils peuvent être mobilisés, comme les cellules


de reconversion. Elles peuvent d’ailleurs être relayées par
des mesures individualisées d’ outplacement. Elles orien¬
tent les salariés vers d’autres métiers ou secteurs d’activité
dans le cadre d’un plan social. Dans ce contexte, les
recherches14 montrent que les restants ne doivent pas être
négligés. Pour maintenir leur motivation et les aider à
mieux se situer dans des organisations en restructuration,
un « inplacement » pourrait être proposé. Il consiste à
mobiliser les outils mentionnés précédemment comme les
bilans de compétences ou les évaluations à 360 degrés dont
les résultats appartiennent exclusivement aux salariés.

Cependant, la gestion des carrières ne devrait pas se limiter


aux périodes de licenciement ou de restructuration mais se
déployer sur le long terme.
ë
2.6. Les formations
s
W
LU
o
Elles permettent aux salariés de maintenir ou de dévelop¬
° per leurs compétences. Elles contribuent alors à leur
employabilité, qu’elles soient ou non qualifiantes. Dans la
ç. perspective de la théorie du capital humain, les individus
g.
investissent sur leur propre capital dans le but d’avoir un
retour sur investissement en termes de carrière.

2.7. Le coaching
Terme à la mode, il désigne le fait d’être accompagné dans
ses activités et dans ses réflexions professionnelles. Le
coach est une sorte d’entraîneur qui peut encourager le
changement. Le coaching de performance permet d’être
184 GÉRER LES CARRIÈRES

plus efficace dans son travail. Le coaching de croissance


est plutôt centré sur l’être afin d’aider la personne à trou¬
ver le sens de son projet individuel15.

2.8. Le conseil ou l’orientation de carrière


Rédiger un CV et une lettre de motivation constitue sou¬
vent un exercice délicat pour les personnes qui envisagent
une mobilité. Le bilan de compétences contribue à mieux
se connaître et à définir un projet professionnel « porté »
par le CV. Il s’agit alors d’orienter la personne pour l’aider
à progresser dans sa carrière. Ce peut être aussi l’occasion
de sensibiliser les personnes à la question de la carrière et
de les inviter à adopter une attitude de « veille » quant aux
possibilités ou aux opportunités de carrière.

3. EFFICACITÉ DES OUTILS


DANS LA GESTION DES CARRIÈRES
L’entreprise peut disposer d’une palette riche d’outils liés
à la gestion des carrières. Cependant, elle doit veiller à
ë communiquer leur existence et leur utilité.
S
W 3.1. Principales qualités des outils
LU
O
Ce ne sont pas forcément les outils les plus sophistiqués
°
qui sont les plus efficaces. Une gestion des carrières sim¬
ç. plifiée est certainement plus facile à appliquer à tous les
g. échelons de l’organisation. L’entreprise doit surtout se
donner les moyens de faire fonctionner les outils qu’elle
met en place. Par exemple, lorsque l’entretien d’évaluation
annuel se résume à un bilan de réalisation des objectifs de
l’année passée et à la fixation des objectifs de l’année suiv¬
ante, il ne remplit pas son rôle comme outil de gestion des
carrières. Il arrive aussi que les documents remplis ne
soient pas transmis au N+2 et encore moins à la DRH.
Aussi ne peuvent-ils pas appuyer des décisions de carrière.
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 185

La cohérence interne de ces outils, Le. la cohérence des


différents outils entre eux, et la cohérence externe, Le. la
cohérence des outils de gestion des carrières avec les autres
outils mobilisés en gestion des ressources humaines, sont
fondamentales. Ces outils peuvent servir la gestion prévi¬
sionnelle des emplois et des compétences dans la mesure
où ils participent à réduire les écarts entre les besoins
anticipés et les ressources nécessaires.

Une des causes d’échec des systèmes de gestion de carrière est


de demander à un seul outil de poursuivre plusieurs objectifs16.
Les entretiens annuels d’évaluation s’inscrivent dans cette
logique quand ils servent à mesurer à la fois les performances,
c’est-à-dire des résultats obtenus et des potentiels, c’est-à-dire
une capacité à progresser. Obtenir un résultat aujourd’hui, dans
un contexte particulier et faire un pronostic sur des résultats
dans un autre contexte ne relèvent pas de la même logique. Il
semble incontournable de séparer les deux exercices. Pour l’é¬
o
±L
valuation des potentiels, les assessment centers semblent
~o
LU
CO
un des outils les plus pertinents17.
Z
LU
O
O
O
CM

© Les décisions prises dans le cadre de la gestion des car¬


A-J

rières reposent en partie sur l’utilisation d’instruments de


CL
mesure, notamment des instruments d’évaluation. Les
U
qualités de ces instruments ont été largement étudiées18.

Deux qualités sont particulièrement saillantes :

• La validité
Mesurer ce que l’instrument prétend mesurer.
186 GÉRER LES CARRIÈRES

• La fidélité
Les résultats doivent être indépendants des personnes ou
des périodes de son utilisation. Par exemple, pour un
ensemble de salariés, les décisions de promotion prises
par un comité de carrière devraient être très proches de
celles prises par un autre comité de carrière. Les comités
de carrières fondant leurs décisions en partie sur des éval¬
uations antérieures, ces dernières doivent aussi être
fidèles. Les décisions finales en termes de gestion des
carrières se fondent sur une série d’évaluations intermé¬
diaires qui sont sujettes à autant d’erreurs.
Aussi, les évaluateurs intermédiaires et ceux qui prennent les
décisions devraient être formés afin d’éviter quelques biais :
• L’effet de halo
Donner une impression générale sur un individu sur la
base d’une seule caractéristique.
• La perception sélective
Les personnes interprètent ce qu’elles voient sur la base
ë
de leurs intérêts, de leur vécu, de leur expérience et de
leurs attitudes.
S
W
LU
• Les effets de contrastes
O
L’évaluation des caractéristiques des personnes se fait
° en comparaison avec les autres personnes que l’on a
récemment rencontrées.
ç.
g. • La projection
Tendance à attribuer aux autres ses propres caractéris¬
tiques.
• Les stéréotypes
Jugement d’une personne sur la base de la perception
qu’elle a de son groupe d’appartenance.
De l’action des différents acteurs dans la gestion des car¬
rières dépend également l’efficacité des outils mobilisés.
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 187

Pour qu’un système de gestion des carrières fonctionne, il


apparaît nécessaire selon Thierry et Maincent19, que :
• le « triangle » (hiérarchie, DRH et salariés) soit d’ac¬
cord sur le principe d’une co-responsabilité ;
• des objectifs communs à ces acteurs se dégagent ;
• les directions générales appuient de leur volonté la mise
en place des politiques ;
• les pratiques suivent les politiques.
3.2. Vers une charte de la gestion des carrières

Une charte de la mobilité interne permet de fixer les règles


du jeu et le mode d’emploi de la mobilité. Une telle charte
pourrait insister sur les points suivants :

• La transparence
Dans la mesure où la mobilité est une priorité dans le
groupe, elle devrait être clairement affichée. Les
salariés sont alors encouragés à exprimer clairement
leur souhait de mobilité et les postes disponibles sont
i connus de tous. L’information sur le poste et sur son
S environnement est la plus complète possible. Pour
W
LU promouvoir la transparence, les organisations peuvent
O
être tentées de demander aux salariés d’avertir leurs
° directions dès le début de leurs démarches de mobil¬
ité. Ces pratiques peuvent conduire à un frein à la
ç.
g. mobilité si tous les acteurs ne respectent pas les règles
du jeu. Aussi les managers doivent-ils avoir con¬
science qu’ils ne recrutent pas seulement pour leurs
besoins mais qu’ils sont également formateurs et four¬
nisseurs de compétences pour l’ensemble de l’organi¬
sation. Ils doivent donc laisser partir un collaborateur
dont l’évolution professionnelle correspond aux
besoins organisationnels.
• Le rôle centralisateur de la DRH
188 GÉRER LES CARRIÈRES

Pour la cohérence de la gestion des carrières, il semble


capital que la DRH soit placée au cœur du système. Elle
évite ainsi que chacun mette en place ses propres procé¬
dures, se transformant parfois en chasseurs de têtes vis-
à-vis des départements voisins. Aussi les besoins des
managers sont-ils adressés à la DRH qui peut répondre
en fonction des ressources internes et des aspirations
personnelles des collaborateurs.

• La préparation et l’accompagnement
Une mobilité peut exiger une formation. L’entretien
d’évaluation annuel est une des opportunités de pro¬
grammer une telle formation, en particulier pour des
mobilités horizontales ou verticales.
La mobilité géographique nationale peut être encour¬
agée en facilitant ses aspects matériels et logistiques.
Des spécialistes de la « relocation » peuvent aider le
salarié à s’installer dans un autre lieu de vie. Le conjoint
qui suit doit être aidé à retrouver une situation profes¬
sionnelle dans la logique d’un outplacement, en cas de
ë
perte d’emploi liée au transfert du salarié.
S La mobilité internationale doit être clairement explic¬
W
LU itée. L’aide logistique est nécessaire mais insuffisante.
O
Une préparation interculturelle s’impose, notamment
°
dans les zones géographiques difficiles en termes
ç. d’adaptation comme la zone Asie-Pacifique. La gestion
g. du retour est un élément central de la gestion des car¬
rières d’un expatrié. Elle se prépare avec l’aide d’un
parrain qui suit l’expatrié pendant son séjour et l’ac¬
compagne dans la recherche d’un poste.

• La liberté de choix
Toute mobilité devrait pouvoir être choisie. Nous avons
mentionné les doubles échelles de carrière qui permet¬
tent à des personnes de rester par exemple dans leur fil-
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 189

ière technique, sans un passage obligé par la filière


management pour pouvoir progresser. Gérer les car¬
rières demande de bien connaître les aspirations person¬
nelles des salariés.

• Le droit à l’erreur
Dans la lignée du libre choix, les salariés pourraient être
encouragés à prendre des risques, à la fois dans leurs
activités et dans leur cheminement de carrière. Pour
pouvoir se développer et progresser, les personnes
doivent pouvoir s’aventurer sur des sentiers nouveaux
avec la possibilité de revenir sur leurs pas sans être
sanctionnées sans appel.

• L’équité
Nous avons développé la théorie d’Adams dans un
chapitre antérieur. Chaque décision d’évolution profes¬
sionnelle devrait être perçue par les personnes con¬
cernées comme équitable. Aussi, à contributions égales,
les personnes obtiennent-elles des rétributions équiva¬
ë
lentes, ou perçues comme telles, notamment en termes
S de progression de carrière. Cela repose sur des principes
W
LU énoncés précédemment comme la transparence. Utiliser
O
des outils d’évaluation qui n’ont pas les qualités suff¬
°
isantes, ou les détourner de leurs objectifs affichés, par¬
ç. fois involontairement par une mauvaise application, est
g. susceptible de conduire à un sentiment d’iniquité. Les
outils seront alors perçus comme un « alibi » à des déci¬
sions reposant sur d’autres ressorts, notamment poli¬
tiques. Ferris et ses collègues20 rappellent que plusieurs
chercheurs reconnaissent l’importance du « politique »
dans les décisions de promotions. Par exemple, ils men¬
tionnent, à partir des résultats des travaux d’un
chercheur21 deux déterminants importants des décisions
de promotions :
190 GÉRER LES CARRIÈRES
- « ce sont les personnes que le salarié connaît » ;
- la visibilité.
Nous avons souligné l’importance du système de mentor
dans le développement de la personne. L’approche
« politique » ne pose pas de problèmes majeurs quand
elle aide la personne à progresser et à comprendre son
environnement relationnel. Elle devient plus délicate
quand elle s’affirme dans la réalité comme l’élément
déterminant d’une promotion alors que la politique
affichée s’organise autour d’autres outils sans véritables
poids que celui de justifier a posteriori des décisions.

4. VERS LA FIN DU PARCOURS

Nous avons listé ici quelques outils et grands principes


attachés à une politique de gestion des carrières. Les outils
se répartissent selon deux catégories. La première con¬
cerne le suivi de l’évolution des salariés par l’entreprise
i avec des outils comme les comités de carrière. La seconde
se focalise sur les outils d’accompagnement des projets des
S
W salariés tels que les bilans de compétences.
LU
O

° L’efficacité de ces outils repose sur leur mobilisation en


adéquation avec les objectifs poursuivis. Elle dépend aussi
ç. d’autres qualités comme la cohérence interne et externe.
g. Nous avons alors détaillé quelques grands principes
regroupés dans une charte de la gestion des carrières. Son
objectif principal est de fixer les règles du jeu et de donner
le mode d’emploi des différentes formes de mobilité qui
permettent aux salariés de progresser dans leur carrière.

Nous terminons cet ouvrage par quelques dernières réflex¬


ions sur le bout de chemin que nous avons parcouru
ensemble.
LES OUTILS FONDAMENTAUX DE LA GESTION DES CARRIÈRES 191

NOTES DU CHAPITRE 8

1 Rousillon et Boumois, 2000, Management des cadres à haut potentiel : tendances


actuelles et pour les années 2000.
2 Cadin,
Guérin et Pigeyre, 1997, Gestion des ressources humaines : pratique et éléments
de théorie, font référence à des outils à l’initiative de l’organisation.
3 Emoult, 1998, « Assessment Center » : Gestion des compétences et employabilité.

4 Marsal,
1998, La détection des potentiels : pour une gestion anticipée des ressources
humaines et des carrières.
5 Bournois, 1998, Les
points de vue du gestionnaire.
6
Roussillon et Boumois, 1998, La perméabilité des élites dans les entreprises français¬
es.
7 Iles, 1998, L’apport des centres d’évaluation.
8 Teboul, 1991, L’entretien d’évaluation : comment
s’y comporter, comment le mener.
9 Marsal, 1998, La détection des
potentiels : pour une gestion anticipée des ressources
humaines et des carrières.
10
Druskat et Wolff, 1999, Effects and timing of developmental peer appraisals in self¬
managing work groups.
11 Boumois, 1998, Les
points de vue du gestionnaire.
12 Joras, 1996, Utiliser les bilans de
compétences.
13 Boyer et Equilbey, 1999, Le vade-mecum du DRH.

14 Par exemple, Amiel, M, 1998, La perception de la justice organisationnelle du


plan
social et ses effets sur les attitudes et les comportements du personnel restant dans
l’entreprise.
15 Enjeux, septembre 1999.

16
Thierry et Maincent, 1980, Gestion des carrières et mobilité des cadres.
17 Emoult, 1998, « Assessment Center »
: Gestion des compétences et employabilité.
18 Par ex. Petit et Haines, 1994, Trois instruments d’évaluation du rendement.

19
Thierry et Maincent, 1980, Gestion des carrières et mobilité des cadres.
20 Ferris et al., 1992. Promotion
W systems in organizations.
21 Ruderman, 1991, Promotion : Beliefs and Reality.

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Copyright © 2000 EMS Editions.
CONCLUSION

UN BOUT DE CHEMIN

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Copyright © 2000 EMS Editions.
UN BOUT DE CHEMIN 195

Nous avons commencé cet ouvrage par une interroga¬


tion : « Faut-il gérer les carrières ? » Nous avons vu que
la réalité des carrières est complexe, multiforme, des
carrières protéennes aux carrières nomades. Nous avons
alors exploré des pistes qui nous ont emmenées vers dif¬
férents types de mobilités, les décisions de promotion,
les attitudes des personnes envers la carrière, leur
employabilité, les défis du temps, le contexte et les out¬
ils utiles à la gestion des carrières.

Notre cheminement, tout au long de ces pages, a rejoint


celui d’autres auteurs sur la co-responsabilité de la ges¬
tion des carrières1. Nous soulignons, dans cette conclu¬
sion, le rôle de chacun des acteurs principaux d’une ges¬
tion des carrières :

• Les managers
La célèbre grille managériale de Blake et Mouton2
ë rappelle l’importance de deux dimensions pour un
manager :
S
W
LU
• l’intérêt pour les impératifs de la production ;
O
• l’intérêt pour l’élément humain.
°
L’intérêt pour l’élément humain devrait conduire les
ç. managers à prendre en considération les aspirations
g. de leurs collaborateurs sans perdre de vue les impérat¬
ifs économiques de l’organisation ou les besoins
organisationnels. Les managers devraient être notam¬
ment évalués sur leur capacité à développer les mem¬
bres de leur équipe. Les développeurs de compétences
sont récompensés alors que ceux qui s’approprient
des compétences au détriment de l’intérêt organisa¬
tionnel devraient être pénalisés au niveau de leur
rémunération.
196 GÉRER LES CARRIÈRES

• Les personnes dans l’entreprise


Elles sont les premières intéressées par leur carrière.
Aussi les entreprises pourraient-elles avoir tendance à
se désengager de leurs responsabilités. Au contraire,
accroître la responsabilité individuelle demande à l’en¬
treprise de fournir les moyens adéquats pour le
développement de ses salariés.

• La fonction ressources humaines


Elle se situe à l’interface entre le manager et l’individu.
Elle assure la cohérence globale des décisions prises.
Elle définit les orientations et accompagne les différents
acteurs par les conseils qu’elle promulgue. Elle fixe les
règles d’un nouveau « jeu » où les entreprises et les per¬
sonnes acceptent de passer non plus une vie ensemble
mais un moment d’un parcours. Elle veille alors à ce
que l’entreprise serve les intérêts de la personne en lui
donnant les moyens de se développer, et que la person¬
ne ajoute une plus-value à l’entreprise lors de son pas¬
sage. Elle évite que chacun des acteurs joue son propre
jeu au détriment de l’autre.

A ces trois acteurs, co-responsables de la gestion des car¬


© rières, se rajoute un acteur organisationnel, le sommet
A-J

.S' organisationnel représenté par la direction. Cette dernière


doit mettre la gestion des carrières au sommet de ses prior¬
ités. Gérer les carrières participe à la politique plus large des
ressources humaines qui conduit à une plus grande perfor¬
mance organisationnelle. Gérer les carrières produit une
plus-value pour l’organisation. Au-delà des rétributions
extrinsèques, les talents, au cœur du développement organ¬
isationnel, appellent aujourd’hui à plus d’attention à leur
rétribution intrinsèque. Cette dernière exige :
• La reconnaissance ;
UN BOUT DE CHEMIN «197

• Le développement personnel.
Encourager les personnes qui apportent une plus-value
organisationnelle passe par leur développement de car¬
rière afin de répondre à leurs besoins de progression.

Gérer les carrières, y compris la sienne, ne s’improvise pas.


Les différentes parties prenantes de la gestion des carrières
pourraient bénéficier d’une aide dans ce domaine afin de
développer leurs compétences et leurs connaissances rela¬
tives à la carrière. Ceci s’impose d’autant plus que le travail
aujourd’hui revêt des formes de plus en plus variées. Les
acteurs de l’organisation gèrent des personnes aux statuts
multiples. Dans l’« entreprise flexible » des personnes à des
postes équivalents se situent au niveau du noyau central ou
à la périphérie selon le contrat qui les régit. A la périphérie,
l’organisation ne gère plus automatiquement des personnes
avec qui elles ont un contrat de travail. Par exemple, dans
l’intérim, ces personnes ont un contrat de travail avec la
société intérimaire qui à son tour a un contrat commercial
avec l’organisation utilisatrice. Les travailleurs indépen¬
dants poursuivent une carrière hors contrat du travail pour
les organisations dans lesquelles ils fournissent leurs ser¬
vices. La carrière des personnes qui travaillent dans l’en¬
treprise, ou plutôt pour l’entreprise, sans être rattachées
©
A-J
juridiquement par un contrat de travail, échappe dans une
.S' certaine mesure à la gestion de cette entreprise.

La gestion prévisionnelle des emplois est de plus en plus


difficile pour les organisations qui évoluent dans des envi¬
ronnements dynamiques. Aussi invitent-elles les salariés à
prendre en main leur carrière. Cette approche ne signifie
pas un désengagement des entreprises. Au contraire, elles
ont aujourd’hui la responsabilité d’encourager et d’accom¬
pagner les évolutions professionnelles de leurs salariés. La
fidélisation de leurs salariés en dépend.
198 GÉRER LES CARRIÈRES

La carrière et la gestion des carrières ont encore un avenir.


« La carrière est morte : vive la carrière »3 souligne bien
que la carrière traditionnelle, poursuivie dans les limites
d’une seule organisation a laissé place à une carrière plus
diversifiée, hors limites d’une seule organisation, plus
nomade. Les organisations dans leur gestion des carrières
ne peuvent ignorer cette transformation. Les personnes qui
travaillent dans ces organisations, ou qui ont d’autres aspi¬
rations, seront aussi inspirées de la prendre en compte.

NOTES DE LA CONCLUSION

' Par ex. Roger, 1996, Suivre la carrière de ses collaborateurs ; Thierry et Maincent,
1980, Gestion des carrières et mobilité des cadres.
2 Blake et Mouton, 1964, The managerial grid.
3 Hall et al. 1996, The career is dead : long live the career.

2
LU
O

©
£
£
Q!
o
ANNEXES

EXEMPLES D’OUTILS
DE GESTION DES CARRIÈRES

CO
C
.2
±L
"O
LU
CO
Z
LU
O
O
O
CM

©
A-J

&
>-
CL
O
U
Copyright © 2000 EMS Editions.
ANNEXES : EXEMPLES D'OUTILS DE GESTION DES CARRIÈRES 201

Organigramme de remplacement
ou Organigramme Bis

Centre Production
-
Organigramme Bis lre ligne
I COURT TERME LONG TERME

Responsable
production
M. Martin

Contrats &
juridique
M. Deplaix

Relations
clientèle
Mme Claire

i
Engineering
S M. Benoît
W
LU
O

° Promotion
produit
ç. M. Maréchal
g.
u

Qualité
M. Guyot

Ressources
humaines
M. Laffite
202 GÉRER LES CARRIÈRES

Les axes et les critères


CRITèRES CRITèRES
Animation Décision
d’équipe Efficacité
Charisme & & Implication
Communication &y., s Intérêt général
Maîtrise de soi &s'y Sens du client
Organisation .V Sens prospectif
Écoute $
tu
U
CRITèRES Z CRITèRES
tu
FILIèRE DIRECTION FILIèRE PROJET
Conduite des opérations Connaissance des métiers
Connaissance de l’activité O Connaissances techniques
Gestion des moyens Sens de la coordination
irS
Gestion des RH Pilotage d’un projet
Pivot de communication Relationnel externe

CRITèRES CRITèRES CRITèRES


FILIèRE GESTION FILIèRE MARKETING / VENTE FILIèRE TECHNIQUE
Connaissance de Analyse des situations Analyse du
l’entreprise Connaissance besoin
Fiabilité / de l’entreprise Maîtrise des
Rigueur Connaissances associées
connaissances
W
techniques
% Maîtrise des Crédibilité
=5 Proposition de
techniques de Dynamisme solutions
U)
gestion Négociation Relationnel
£ Sens du conseil Relationnel
o technique
s Sens du contrôle Sens du progrès
©

Q!
o

Cet axe permet à chaque personne, pour progresser dans sa


filière, ou éventuellement pour changer de filière :
• d’avoir une vision plus claire de l’entreprise ;
• de se situer professionnellement ;
• d’avoir une vision plus claire des connaissances à
acquérir et des aptitudes à développer.
ANNEXES : EXEMPLES D'OUTILS DE GESTION DES CARRIÈRES 203

Les référentiels de compétence


Quelques exemples

Commercial

1. Conduite d'un entretien commercial


S’assurer la maîtrise du déroulement d’un entretien :
date du RDV, thèmes abordés, produits proposés, temps
imparti.
2. Connaissance de la clientèle
Rencontrer régulièrement tous ses clients, rechercher et
exploiter les informations utiles.
3. Maîtrise de l'offre commerciale
Grâce à sa connaissance actualisée des produits et ser¬
vices, apporter la réponse la plus appropriée aux besoins
exprimés ou détectés.
4. Techniques de négociation
Présenter les réponses adaptées aux objections de la
ë clientèle, savoir finaliser un entretien par une vente.
S
5. Approche des prospects
W Utiliser la recommandation, le parrainage pour con¬
LU
O quérir de nouveaux clients.
°
ç.
g. Management

1. Prévoir
Connaître son environnement, y détecter les opportu¬
nités, définir des objectifs en cohérence avec ceux de
l’entreprise.
2. Optimiser
Gérer efficacement l’ensemble des moyens alloués :
humains, financiers, matériels.
204 GÉRER LES CARRIÈRES

3. Animer une équipe


Créer les motivations nécessaires à l’atteinte des
objectifs, responsabiliser en déléguant, assumer son
rôle d’exemple.
4. Contrôler
S’assurer de la compréhension des objectifs et missions
confiées, vérifier leur degré de réalisation, contrôler les
modalités de leur exécution.
5. Décider
Exercer des choix, des arbitrages motivés même dans
des situations complexes en veillant à ce que ses déci¬
sions soient comprises et mises en œuvre.
6. Apprécier
Mesurer les performances de ses collaborateurs en se
dotant de moyens objectifs, sanctionner de façon posi¬
tive ou négative, détecter leurs potentiels.
7. Communiquer
Maîtriser les techniques d’expression écrite et orale
pour communiquer ses idées, ses stratégies en tenant
compte des publics visés.
i 8. Former
S Transmettre les savoirs utiles, veiller à l’acquisition des
W
LU
compétences par les collaborateurs.
O
9. Négocier
° Parvenir à définir une solution dans une situation réu¬
nissant des intérêts divergents.
ç.
g.
Copyright © 2000 EMS Editions.

Synthèse des appréciations >


Z
Z
m
X
m
LO

m
Nom Fonction Appréciation Potentiel Souhait Evolution Formation Recommandation X
m
Prénom d’ensemble ++/ + / = /-/- envisageable à réaliser poste à court terme
T7
m
LO

o
Z
=d
m
O
m
O
m
3
ô
Z

++ : Haut potentiel s
LO
+ : Potentiel à développer
O
: Adapté à son poste >
70
70
: Nécessite un soutien m/
70
: Difficulté à développer m
LO

ro
o
Ln
206 GÉRER LES CARRIÈRES

Extrait d’un entretien annuel


de développement

PLAN DE CARRIÈRE

INTÉRESSÉ RESPONSABLE
ÉVOLUTION SOUHAITéE ÉVOLUTION RECOMMANDéE
Évolution dans la même filière Évolution dans la même filière
Responsabilités : Responsabilités :

Évolution dans une filière différente Évolution dans une filière différente
Responsabilités : Responsabilités :

Mobilité : Pays : Mobilité : Pays :


même unité même unité
autre unité autre unité
U) filiale filiale
§
:ÿ= autre autre
S Terme souhaité : Terme recommandé :
U)

LU
O

°
©
Ces informations sont traitées dans le cadre des comités de
£
>ÿ développement.
O
U
ANNEXES : EXEMPLES D'OUTILS DE GESTION DES CARRIÈRES 207

Exemple de passerelles naturelles

EMPLOIS EMPLOIS AVAL EMPLOIS AMONT


Chargé de clientèle part. Chargé d’accueil Chargé de clientèle part.
Assistant commercial

Chargé d’accueil Assistante DR Chargé de clientèle part.


Technicien administratif
Chargé de mission
Agent administratif

Assistante DR Technicien administratif Chargé de clientèle part.

Technicien administratif Agent administratif Chargé de clientèle part.

Chargé de mission Agent administratif Chargé d’accueil

Agent administratif Chargé de mission


Technicien administratif
W Chargé d’accueil

S
W
LU
O

°©
£

Q!
o
208 GÉRER LES CARRIÈRES

High Flyer / High Potential

HIGH FLYER
Collaborateur âgé de moins de 30 ans pour lequel est
identifiée une capacité d’évolution de l’ordre
de 2 niveaux hiérarchiques

Dimension
Compétence
personnelle

Management
Stratégie
& Leadership

CO
C
O
±L
~o
LU
CO
Z
HIGH POTENTIAL
LU
O
O
Collaborateur âgé de plus de 30 ans en position hiérar¬
O
CM chique pour lequel est précisément identifiée une capacité
©
A-J d’évolution l’amenant au Comité Direction / Exécutif
&
>-
CL
O
U
ANNEXES : EXEMPLES D'OUTILS DE GESTION DES CARRIÈRES 209

SUPPORT D’ÉVALUATION
COMPéTENCE DIMENSION PERSONNELLE
Valeurs Sociale
d’entreprise
H
I
G
H
Techniques âe Managériale
F
L
Moyen
Y
E +
Fort
Connaissance
R Pour chaque critère
du business Évolutive
positionner le salarié à
l’aide d’une croix

SUPPORT D’ÉVALUATION
COMPéTENCE DIMENSION PERSONNELLE
uj Valeurs
H d’entreprise Sociale
S I
z Techniques Managériale
LU
o
G
s H
©
£ Connaissance Évolutive
Q!
P du business
o
O le
Charisme & Développer
T Exemplarité la stratégie
E Moyen
N
Savoir décider
T Développer Fort
l’équipe
I Vision
Optimiser
A partagée Pour chaque critère
positionner le salarié à
L l’aide d’une croix
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