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COMPRENDRE LA FORMATION DES PRIX DES ACTIFS FINANCIERS : CE

QUE NOUS DEVONS AUX LAURÉATS DU PRIX NOBEL 2013, EUGENE


FAMA, LARS PETER HANSEN ET ROBERT SHILLER

Catherine Bruneau

Dalloz | « Revue d'économie politique »

2014/5 Vol. 124 | pages 681 à 714


ISSN 0373-2630
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-d-economie-politique-2014-5-page-681.htm
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Comprendre la formation des prix des actifs

/ OPINIONS
financiers : ce que nous devons aux lauréats
du prix Nobel 2013, Eugene Fama, Lars Peter
Hansen et Robert Shiller

• DÉBATS
Catherine Bruneau1

Dans cet article, nous examinons l’apport des travaux des trois lauréats du prix Nobel
2013 concernant la question de la formation des prix des actifs financiers. Nous faisons
principalement référence à la propriété d’efficacité des marchés financiers dans la
transmission de l’information par les prix et plus particulièrement à la question de la
prévisibilité des rendements associés. Nous rappelons d’abord la formalisation de la
propriété d’efficience qui revient à Fama [1970] et nous proposons un panorama des
nombreuses études empiriques qui se sont développées dans la décennie qui a suivi,
en présentant, à titre d’illustration, quelques unes d’entre elles, portant essentiellement
sur la prévisibilité des rendements de court-terme qui se révèle très limitée. Puis, nous
rappelons comment, en 1981, Shiller a remis en question l’efficience informationnelle
des marchés financiers à partir du constat empirique du phénomène de « volatilité
excessive » des prix par rapport aux fondamentaux, suscitant à son tour de nom-
breuses études portant cette fois sur la prévisibilité des rendements de long-terme.
Nous présentons alors les deux voies de recherche qui se sont développées par la
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suite : l’une, prônée par Fama, consiste à rechercher des modèles plus performants
pour expliquer la formation des prix tout en maintenant l’hypothèse d’anticipations
rationnelles ; l’apport de la méthode d’inference dite des moments généralisée (GMM)
introduite par Hansen [1982] se révèle alors d’une utilité décisive pour tester la validité
de ces modèles et plus précisément les contraintes non linéaires impliquées par ces
modèles. L’autre voie, privilégiée par Shiller et explorée également par Hansen
concerne la finance comportementale et l’étude des déviations par rapport aux antici-
pations rationnelles.
actifs financiers – formation des prix – taux d’actualisation stochastique – efficacité des
marchés – prévisibilité des rendements d’actifs – anticipations rationnelles – finance
comportementale – méthode des moments généralisés

The behavior of asset prices: Eugene Fama’s, Lars Peter


Hansen’s and Robert Shiller’s contributions.

In this paper we examine what the study of asset pricing owes to the latter Nobel 2013
laureates’ seminal contributions. We mainly refer to the efficiency of the financial mar-

1. CES, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Maison des Sciences Économiques,


106-112, Boulevard de l’Hôpital, 75647, PARIS CEDEX 13. Email : cbruneau475@gmail.com.

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kets in transmitting information through the prices and, more specifically, to the pre-
dictabilty of asset returns. We first recall the concept of market efficiency formulated by
Fama in 1970 and we give an overview of the numerous empirical studies about this
concept during the ten years after this contribution and more precisely on the predict-
ability in short run returns. Typically these methods find very modest predictability.
Then we recall how Shiller questioned the efficiency property in 1981, by pointing out
the “excess volatility” of prices compared to the one of the fundamentals and how this
finding inspired many empirical studies on the predictability in long run returns. Both
Fama and Shiller and many others discovered that such predictability becomes an
important and even the dominant influence on longer-run movements in asset prices.
Two main strands of research have thus followed. Broadly speaking, Fama believes that
asset price movements can be understood using economic models with rational inves-
tors, whereas Shiller does not. Indeed the first strand advocated by Fama consists in
improving the models explaining the pricing of financial assets while maintaining the
rational expectation hypothesis; using the econometric method of GMM introduced by
Hansen [1982] is thus decisive to test the non linear constraints implied by these
models. On the other side, Shiller helped to launch the strand of resarch related to
behavioral finance, and investigated, as well as Hansen and others, deviations from
rational expectations.

Financial Assets – Pricing – Stochastic Discount Factor – Market Efficiency – Predict-


ability in asset returns – Behavioral Finance – Generalized Method of Moments

Classification JEL: G10, G12, G14


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1. Introduction

Comprendre la formation des prix sur les marchés financiers, tel est le
thème de recherche qui a été récompensé par le prix Nobel attribué en 2013
aux trois économistes Eugene Fama, Lars Peter Hansen et Robert Shiller.
Ce thème de recherche n’est certainement pas épuisé mais les travaux de
ces trois économistes ont constitué des contributions majeures, tant théo-
riques qu’empiriques, à la compréhension du fonctionnement des marchés
financiers en mettant en évidence un certain nombre de caractéristiques
empiriques régulières des processus de prix et en proposant des facteurs
explicatifs plausibles de ces caractéristiques.
Plus précisément, la question centrale qu’ils ont abordée est de savoir si
on peut prévoir l’évolution future des prix des actifs financiers. Cette ques-
tion est évidemment au cœur de nombreux processus de décision, tant au
niveau individuel – qu’ils s’agissent de projets d’investisseurs professionnels
ou de décisions d’épargne des ménages – qu’au niveau macroéconomique,
puisqu’il est désormais bien établi que l’évolution des marchés financiers a
des répercussions majeures sur l’économie réelle des pays, en termes
d’investissement, de consommation ou d’endettement, en particulier à la
suite de bulles ou de crashs.
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Malgré des approches différentes, les trois économistes récompensés par


le dernier prix Nobel ont abouti au même type de conclusion : il est possible
de prévoir le cours général des prix d’actifs financiers à des horizons assez
longs, mais il est quasiment impossible de les prédire à très court terme.
Eugene Fama est reconnu comme « le père de la finance moderne », parce
qu’il a développé la théorie des marchés efficients postulant que les prix
reflètent toute l’information disponible (Fama [1970]), ou, plus précisément,
toute l’information pertinente intégrée par les investisseurs dans leurs anti-
cipations et décisions, donnant ainsi un contenu économique à l’hypothèse
avancée antérieurement sur l’imprévisibilité des rendements ou le compor-
tement de martingale ou de marche aléatoire des prix (Bachelier [1900],
Working [1934]), par exemple).
Lars Peter Hansen est un économètre de premier plan qui a développé
une méthode d’inférence originale, la « méthode des moments généralisés »
(GMM), qui a permis de résoudre un certain nombre de difficultés relatives
au test de validité de l’hypothèse d’efficience des marchés et plus générale-
ment au test de validité de modèles d’équilibres représentatifs de compor-
tements rationnels des agents.
Ces deux économistes, chercheurs à l’Université de Chicago, postulent la
rationalité « classique » des agents économiques pour expliquer la prévisi-
bilité des prix des actifs financiers.
Robert Shiller, quant-à-lui, a une position différente puisqu’il remet en
question l’efficience informationnelle des marchés, estimant que la rationa-
lité des investisseurs n’obéit pas aux règles de rationalité postulées dans les
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modèles classiques. Il est ainsi l’un des pionniers de la finance comporte-
mentale dont l’objectif est d’expliquer par la psychologie des investisseurs
des caractéristiques des processus de prix dont ne rendent pas compte,
précisément, les modèles classiques.
Robert Schiller a par ailleurs construit un indice de prix de l’immobilier
aux États-Unis, appelé Case-Shiller et il s’est appuyé sur cet indice pour
affirmer que le secteur financier américain avait alimenté une bulle spécula-
tive, ce qui risquait de conduire à une catastrophe, qui s’est effectivement
produite en 2007-2008 lors de la « crise des subprime ».
Dans la suite de l’article, nous examinons les principaux apports des trois
économistes en faisant référence essentiellement à la question de la prévi-
sibilité des rendements d’actifs financiers en relation avec l’hypothèse d’effi-
cience informationnelle des marchés financiers. D’après cette hypothèse,
formulée par Fama en 1970, le prix de marché constitue une synthèse
exhaustive des informations liées à l’actif.
Pour simplifier, on peut dire que les travaux de Fama et de ses co-auteurs
ont eu un impact majeur dans les années 70 en inspirant de nombreuses
études, essentiellement empiriques, sur l’étude de du contenu informatif des
prix courants des actifs financiers dans les projections à court-terme, avec,
au final, l’émergence d’un consensus assez large sur l’absence de prévisibi-
lité des rendements. Puis, dans les années 80, les travaux de Shiller ont
remis en question ce consensus en mettant en évidence des propriétés de
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prévisibilité des rendements à des horizons de moyen ou long-terme.


L’observation célèbre de Shiller concerne « l’excès de volatilité » des prix
observés par rapport aux valeurs fondamentales déduites d’un modèle clas-
sique de formation des prix où les rendements anticipés sont supposés
constants. Ce résultat empirique a conduit les chercheurs à se poser la
question de savoir si les rendements anticipés, plutôt que constants, pou-
vaient varier dans le temps de manière prévisible, notamment à des hori-
zons de moyen ou long terme.
Deux voies de recherche ont alors été engagées. La première a consisté à
chercher des modèles plus sophistiqués pour représenter le processus de
formation des prix, sans remettre en cause l’hypothèse d’anticipations
rationnelles des agents, en considérant que la mise en évidence de la prévi-
sibilité des rendements ne remettait pas en question l’efficience des mar-
chés mais plutôt le modèle retenu pour décrire le processus de formation
des prix : c’est la voie prônée par Fama, pour laquelle la méthode d’infé-
rence proposée par Hansen s’est révélée d’une utilité décisive. Cette
méthode permettait en effet de tester la validité de contraintes non-linéaires
au coeur des modèles proposés pour expliquer la formation des prix des
actifs financiers. Shiller [1981, 1984, 2000], par contre a conclu de ses obser-
vations de « volatilité excessive » que les modèles classiques ne pouvaient
pas expliquer ce phénomène qui révélait plutôt des « modes » (fads) et des
sur-réactions aux changements des fondamentaux : il ouvrait ainsi la voie
aux recherches en finance comportementale qui n’ont pas cessé de se déve-
lopper depuis.
Le plan de l’article est le suivant. En section 2, nous examinons le contenu
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théorique de l’hypothèse d’efficience informationnelle des marchés finan-
ciers, en rappelant la formulation proposée par Fama [1970] et en la repla-
çant dans le cadre plus général de valorisation d’actifs par arbitrage. En
section 3, nous présentons les principes des études empiriques de cette
hypothèse, que nous appelons de première génération ; elles s’inscrivent
dans la continuité des travaux de Fama et concernent principalement l’étude
du contenu informatif des prix pour des projections à court-terme. En sec-
tion 4, nous examinons la remise en cause de l’hypothèse d’efficience telle
qu’elle a été initiée par Shiller, en relation avec les propriétés de prévisibilité
des rendements à long-terme. Les deux dernières sections sont consacrées
à la présentation des deux voies de recherche qui se sont développées à la
suite des travaux de Shiller. En section 5, nous examinons les principales
extensions des modèles classiques d’explication de la formation des prix
des actifs, en illustrant l’intérêt de la méthode économétrique des moments
généralisés proposée par Hansen [1982] pour tester ces modèles. En sec-
tion 6, nous faisons référence aux développements de la Finance dite
Comportementale.

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2. Efficience informationnelle
des marchés financiers :
noyau théorique
En 1953, Kendall étudia le comportement des changements hebdoma-
daires des cours de 90 indices actions, du prix du coton à New York et du
prix du blé à Chicago. Après une étude des corrélations, il concluait :
« The series look like a wandering one, almost as if once a week the
Demon of Chance drew a random number from a symmetrical population of
fixed dispersion and added it to the current price to determine the next
week’s price ».
La conclusion de Kendall avait été suggérée auparavant par Working
[1934] et elle sera soulignée par la suite par Robert [1959]. Cependant, les
conclusions de ces trois auteurs étaient basées sur des observations et
aucun d’entre eux ne proposa d’explication économique à ses conclusions.
Osborn [1959] suggéra que des conditions de marché analogues à celles
décrites par Bachelier [1900] pourraient expliquer le comportement de mar-
che aléatoire. Mais dans ces différentes approches, l’indépendance des
changements de prix successifs est dérivée de l’hypothèse selon laquelle les
décisions des investisseurs relatives à un titre sont indépendantes d’une
transaction à l’autre, ce qui n’est pas usuel dans un modèle économique.
En 1965, Fama a proposé une formalisation économique de la question de
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l’efficience informationnelle des marchés financiers en soulignant l’impor-
tance de la caractérisation économique des processus de prix pout tester la
validité de l’efficience.
La première formulation la plus célèbre (Fama [1965]) :
« A market in which prices ‘fully’ reflect available information is called
‘efficient’ »
était si générale que l’on ne pouvait pas en déduire d’implications tes-
tables empiriquement.
C’est pourquoi Fama [1976] précisa cette formulation en ajoutant qu’il
fallait conjointement spécifier un modèle de formation des prix :
« Some model of market equilibrium, however simple, is required. This is
the rub in tests of market efficiency. Any test is simultaneously a test of
efficiency and of assumptions about the characteristics of market equili-
brium ».
Il souligna également qu’il fallait préciser la nature de l’information sup-
posée « totalement reflétée dans les prix », ce qui justifiera la distinction
entre forme faible, semi-forte et forte de l’hypothèse d’efficience. Pour l’effi-
cience faible, il suppose que l’ensemble d’informations est constitué des
seuls prix passés. Pour l’efficience semi-forte, cet ensemble inclut, outre les
prix passés, toutes les informations publiques pertinentes et pour la forme
forte, il inclut toutes les informations publiques et privées qui peuvent être
utilisées par les intervenants sur les marchés financiers.
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Ainsi formulée, l’hypothèse d’efficience est apparue paradoxale à certains


(Grossman et Stiglitz [1980]).
Si les marchés sont efficients, plus rien ne justifie la recherche d’une
information sur les titres. L’hypothèse d’efficience est donc incompatible
avec l’existence d’agents informés lorsque l’information est coûteuse.
D’après Grossman et Stiglitz, les manifestations d’inefficience que sont les
rendements « anormaux » sont nécessaires pour compenser les dépenses
engagées par les investisseurs lorsqu’ils cherchent à acquérir une informa-
tion utile. Ces auteurs vont même plus loin en considérant que ces ineffica-
cités informationnelles offrent des opportunités de profit sans lesquelles les
marchés ne fonctionneraient pas.
Quoi qu’il en soit, il est indiscutable que l’hypothèse d’efficience est une
hypothèse de travail qui s’est révélée extrêmement fructueuse en suscitant
une recherche prolifique sur les processus de formation des prix des actifs
financiers.
La traduction la plus populaire de cette propriété consiste à dire que « la
meilleure prévision du prix de demain » est le dernier prix observé : dès lors
que le dernier prix d’un titre est connu, il est inutile de chercher d’autres
informations pour prendre une décision d’achat ou de vente de ce titre. En
faisant référence à la notion d’espérance conditionnelle2, on peut ainsi tra-
duire la propriété d’efficience par la propriété de martingale des processus
de prix, 共 Pi, t 兲t :

∀t, E 共 Pi, t + 1 /It 兲 = Pi, t [1]


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Le prix Pi, t de l’actif i à la date t est égal à l’espérance conditionnelle
E 共 Pi, t + 1 /It 兲 du prix aléatoire Pi, t + 1 de la date t + 1, « sachant l’information
It » disponible à la date t, c’est-à-dire la fonction des informations contenue
dans It qui approche le mieux le prix futur.
Cependant, l’hypothèse de martingale est une formulation simplifiée de
l’hypothèse d’efficience. De fait, comme l’a souligné Fama [1970], pour éva-
luer l’efficience informationnelle des marchés financiers, il faut avoir une
représentation du processus de formation des prix qui résultent des déci-
sions des agents et en particulier de leurs anticipations.
« In an informationally efficient market, price changes must be unforecas-
table if they are properly anticipated, that is, if they fully incorporate the
information and expectations of all market participants » (Samuelson
[1965]).

2. L’espérance conditionnelle E 共 Y/X 兲, lorsqu’elle existe, est la variable aléatoire W 共 X 兲 qui


est la plus « proche » de Y au sens de l’erreur quadratique moyenne minimale :
Min 兵 W 共 X 兲 其 E 共 关 Y − W 共 X 兲 兴 兲.
2

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En vertu de la définition du taux de rendement ri, t + 13 du titre i entre les


dates t et t + 1, on peut relier les prix de deux dates successives à partir de la
relation suivante :

E 共 Pi, t + 1 /It 兲
Pi, t = [2]
1 + E 共 ri, t + 1 /It 兲

puisque le prix courant est effectivement intégré dans l’information It.


L’hypothèse d’efficience informationnelle signifie alors que l’information
disponible It, telle qu’elle est utilisée dans la détermination des rendements
anticipés est « totalement reflétée » dans la formation des prix Pi, t effective-
ment observés à la date courante.
Par conséquent, pour étudier la validité de l’hypothèse d’efficience il faut
proposer et – donc tester – conjointement une modélisation des rendements
anticipés ; on se heurte alors inévitablement à la difficulté d’avoir un rejet
possible de l’hypothèse d’efficience à cause d’une mauvaise spécification du
modèle de référence. Fama [1998] a d’ailleurs souligné à ce propos que le
rejet de l’hypothèse d’efficience mis en évidence dans un certain nombre de
travaux empiriques était par nature incomplètement fondé.
De manière naturelle, le rendement anticipé est spécifié comme une fonc-
tion du risque du titre et les modélisations des rendements anticipés dif-
fèrent selon la caractérisation du risque qui est retenue. Examinons quel-
ques exemples.
– Lorsqu’on accepte l’hypothèse de martingale énoncée dans l’équation
(1), on doit supposer que le taux de rendement anticipé est égal à 0. Ainsi
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reformulée, l’hypothèse de martingale devient donc paradoxale. Si tel était
le cas, les marchés ne fonctionneraient évidemment pas, puisque personne
n’aurait intérêt à investir avec une rentabilité espérée nulle.
Cette implication de l’hypothèse de martingale redevient toutefois plau-
sible si on considère les rendements nets, calculés en excès du rendement
d’un titre sans risque, dans un monde neutre au risque où tous les agents
sont indifférents au risque et où il n’existe pas d’opportunité d’arbitrage.
Dans un tel monde, fictif, tous les titres, qu’ils soient risqués ou non, ont
alors la même rentabilité espérée et leurs taux de rendement nets espérés
sont nuls4. En d’autres termes, la prime de risque de tous les titres risqués
est nulle dans le monde neutre au risque.
C’est en faisant référence à ce monde fictif et en excluant toute opportu-
nité d’arbitrage que l’on peut calculer le « juste » prix de n’importe quel actif
financier comme l’espérance de gains futurs actualisés au taux sans risque,
l’espérance étant calculée par rapport à une mesure de probabilité dite cor-
rigée du risque et qui caractérise le risque dans le monde neutre au risque.
La valeur actualisée au taux sans risque de n’importe quel actif est alors une
martingale pour la probabilité corrigée du risque.

Pi, t + 1 − Pi, t
3. Le taux de rendement « hors dividendes » est défini par : ri, t + 1 = .
Pi, t
4. 兵 ∀i, E 共 ri, t + 1 /It 兲 = rF, t + 1 其 ⇔ 兵 ∀i, E 共 ri, t + 1 − rF, t + 1 /It 兲 = 0 其 où rF, t + 1 désigne le taux de
rendement du titre sans risque F (free-risk) entre les dates t et t + 1.

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L’hypothèse de « martingale » associée à la référence au monde neutre au


risque est ainsi à la base de tous les modèles de « pricing ». Il est intéressant
de faire cette remarque parce qu’elle explique la vigueur de l’hypothèse de
martingale dans l’esprit des acteurs intervenant sur les marchés financiers,
et, par voie de conséquence, la force de l’hypothèse d’efficience souvent
confondue, de manière abusive, avec l’hypothèse de martingale.
– Pour lever le paradoxe de l’hypothèse de martingale dans le monde
« réel », l’hypothèse la plus simple sur les taux de rendement anticipés
consiste à supposer qu’ils sont constants et non-nuls.
Cette hypothèse est en particulier vérifiée lorsqu’on suppose, comme c’est
le cas fréquemment, que les logarithmes des prix suivent une marche aléa-
toire forte avec dérive :

∀t, log 共 Pi, t + 1 兲 = ci + log 共 Pi, t 兲 + ei, t + 1 [3]

où 共 eit 兲t est un bruit blanc fort, c’est-à-dire une suite de variables centrées
indépendantes et de même loi et ci 7 05.
Dans ce cas, on peut approcher les taux de rendement par les différentiels
des logarithmes de prix successifs, s’ils sont petits devant 1, ce qui est le
plus souvent le cas :

log 共 Pi, t + 1 兲 − log 共 Pi, t 兲 = log 冉 1+


Pi, t 冊
Pi, t + 1 − Pi, t

Pi, t + 1 − Pi, t
Pi, t
= ri, t + 1
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En supposant alors que l’information courante It est constituée de tous les
prix passés du titre, l’équation (3) implique, en vertu des propriétés du bruit
blanc fort, la constance des taux de rendement :

E 关 ri, t + 1 /It 兴 ≈ E 关 log 共 Pi, t + 1 兲 − log 共 Pi, t 兲/It 兴 = ci + E 关 ei, t + 1 /It 兴 = ci

Dans le cas particulier où ci = 0, on retrouve bien la propriété de martingale


pour les logarithmes des prix6.

∀t, E 共 log 共 Pi, t + 1 兲/Pi, t + 1 兲 = log 共 Pi, t 兲 + E 共 ei, t + 1 /Pi, t + 1 兲 = log 共 Pi, t 兲

On notera que l’hypothèse de martingale, écrite pour les logarithmes de prix


– et non pour les prix – n’implique pas la propriété de marche aléatoire, sauf
dans le cas où les prix sont supposés log-normaux. Cette dernière hypo-
thèse est une hypothèse standard dans l’approche quantitative de la finance,
telle qu’elle a été initiée par Bachelier [1900], où les prix, caractérisés en
temps continu, sont des processus de diffusion faisant intervenir le mouve-

5. En supposant que le processus démarre à la date 0, le terme ci correspond à la dérive,


parce qu’on peut écrire : Log 共 Pi, t 兲 = Log 共 Pi, 0 兲 + ci t + 兺 ei, s.
1≤s≤t
6. On ne peut pas déduire la propriété de martingale de la propriété de marche aléatoire
pour les prix (et non leur logarithme) parce que l’espérance du logarithme n’est pas égale au
logarithme de l’espérance.

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ment brownien7. Dans ce cas, conditionnellement à l’information courante,


les logarithmes de prix sont effectivement distribués selon la loi normale.
– Plus généralement, il est intéressant de faire référence à la théorie du
taux d’actualisation stochastique (SDF, Stochastic Discount Factor) à la base
des modèles d’évaluation par arbitrage ; cette théorie offre en effet un cadre
très général pour modéliser les rendements anticipés.
D’après cette théorie dont les fondements sont issus des travaux fonda-
teurs de Ross [1976] et Harrison et Kreps [1979], en stipulant une hypothèse
d’absence d’opportunité d’arbitrage, on peut montrer que le taux de rende-
ment net espéré d’un titre i entre les date t et t + 1 vérifie :
Et 共 ri, t + 1 − rF, t + 1 兲 = − 共 1 + rF, t + 1 兲covt 共 ri, t + 1, Mt + 1 兲 [5]

où rF, t + 1 est le taux de rendement du titre sans risque entre les dates t et
t + 1, ri, t + 1 celui du titre i calculé à partir des prix des dates t et t + 1 et des
versements intermédiaires entre les deux dates, comme les dividendes dans
le cas d’une une action. Et 共 . 兲 désigne l’espérance conditionnelle, covt 共 ., . 兲
la covariance conditionnelle sachant l’information disponible à la date t et
Mt + 1 est le facteur d’actualisation stochastique entre les dates t et t + 1.
Un actif dont on attend un rendement bas lorsque le facteur M – i.e. la
valeur de la monnaie – est élevé et vice-versa, doit avoir (a) une prime de
risque relativement plus élevée (la covariance anticipée est négative).
La modélisation du rendement anticipé est donc ramenée à la spécifi-
cation du facteur d’actualisation stochastique M 共 . 兲.
Par exemple, dans le cas du modèle CCAPM (Consumption Capital Asset
Pricing model), ce facteur a pour expression :
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u′ 共 ct + 1 兲
Mt + 1 = b
u′ 共 ct 兲
où u désigne la fonction d’utilité et b le facteur d’actualisation de l’agent
(représentatif). Le facteur d’actualisation stochastique M s’interprète alors
comme le taux marginal de substitution entre la consommation de la date
t + 1, ct + 1 et celle de la date t, ct.
Une fois le facteur M spécifié, et donc le modèle de détermination des rende-
ments anticipés d’après (5), si on définit Zit = 共 1 + rF, t + 1 兲 共 1 − covt 共 Mt + 1, ri, t + 1 兲 兲,
la propriété d’efficience informationnelle signifie que le rendement effective-
ment observé de tout titre i entre les dates t et t + 1 doit obéir à l’équation :
1 + ri, t + 1 = Zit + ui, t + 1

7. Un processus de diffusion choisi pour caractériser la dynamique des logarithmes de


prix 共 pt = log 共 Pt 兲 兲t ∈ 关 0, 1 兴 s’écrit :
dpt = µ 共 t, pt 兲dt + r 共 t, pt 兲dWt
où les fonctions µ 共 t, pt 兲 et r 共 t, pt 兲 possèdent de bonnes propriétés de mesurabilité et le
mouvement brownien standard sur [0,1], 共 Wt 兲t ∈ 关 0, 1 兴 est un processus en temps continu
défini sur l’intervalle [0,1], tel que :
i) W0 = 0
ii) ∀t1 < t2 < t3 < t4, Wt4 − Wt3 et Wt2 − Wt1 sont deux variables aléatoires indépendantes
i) Wt′ − Wt ≈ N 共 0, 共 t′ − t 兲 兲

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690 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

où ui, t + 1 est non prévisible à partir de l’information de la date t, telle qu’elle


intervient dans la définition de Zit, et donc dans les anticipations via la
covariance conditionnelle (Campbell [2014]).
Outre les formalisations précédentes de la propriété d’efficience, liées à
des modélisations des rendements anticipés, on trouve d’autres formula-
tions relevant d’avantage de la pratique d’investissement et donc a priori
plus faciles à tester.
Jensen [1978] a ainsi proposé de formuler la propriété d’efficience en
disant qu’elle doit exclure toute opportunité de « Free Lunch » :
« Un marché est efficient, conditionnellement à un ensemble d’informa-
tions, s’il est impossible de réaliser des profits anormaux en spéculant sur la
base de cet ensemble d’informations. »
On peut citer, dans le même ordre d’idées, la formulation de Malkiel [2003]
qui considère que « Les marchés financiers efficients ne permettent pas aux
investisseurs de réaliser des gains supérieurs à la moyenne sans accepter de
prendre des risques supérieurs à la moyenne »
Ces énoncés renvoient à des arguments souvent avancés pour justifier
des stratégies d’investissement passives puisque, dans un marché efficient
au sans précédent, il est impossible de réaliser des profits au-delà de ce que
permet le marché (en tenant compte du risque couru). De telles stratégies
consistent à investir une part de son portefeuille dans l’actif sans risque et
l’autre part dans l’actif de marché, les parts respectives dépendant du profil
de risque. Sur un marché efficient, les stratégies actives ne permettent pas
de « battre le marché ». Autrement dit, on ne peut pas tirer profit d’une
prévision à partir de données passées quelle qu’elle soit pour obtenir une
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performance supérieure à celle d’un portefeuille bien diversifié de même
risque (J. Senanedsch [2009]).
La section suivante est consacrée à la présentation des principes et résul-
tats des différents types d’études empiriques de l’hypothèse d’efficience qui
ont été développées dans les années 70 et que nous appelons études de
première génération : inspirés par les travaux de Fama [1970], ces études
portent essentiellement sur le contenu informatif des prix courants dans des
projections de court-terme.

3. Etudes empiriques de l’efficience


de première génération

Les travaux empiriques relatifs à l’efficience des marchés financiers sont


habituellement divisés en trois groupes selon la nature de l’information qui
est retenue dans l’énoncé de l’hypothèse d’efficience, faible, semi-forte ou
forte selon la terminologie rappelée précédemment.
Examinons le principe et les principaux enseignements des différents
tests.
REP 124 (5) septembre-octobre 2014
Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 691

3.1. Test de la forme faible

C’est la forme faible de l’hypothèse d’efficience qui a été le plus testée,


parce que le test est facile à mettre en œuvre et on peut affirmer que les
résultats empiriques sont fortement favorables à cette hypothèse.
Il s’agit de tester s’il existe des liens significatifs entre rendements succes-
sifs. Si de tels liens existent, les rendements futurs sont prévisibles sur la
base des rendements observés dans le passé et l’hypothèse d’efficience
(faible) est invalidée par les faits.
On peut distinguer deux grandes classes d’études, celles qui consistent à
tester l’absence de corrélations entre rendements successifs et celles qui
testent la propriété plus forte d’indépendance.
La pratique la plus simple consiste à caractériser les liens en termes de
corrélations. On régresse alors les rendements sur les rendements passés et
on teste la significativité des coefficients associés aux rendements passés.
Si on considère les taux de rendement calculés comme différentiels de
logarithmes de prix, on peut, par cette méthode, valider ou invalider l’hypo-
thèse de marche aléatoire faible pour les logarithmes des prix :

ri, t + 1 ≈ log 共 Pi, t + 1 兲 − log 共 Pi, t 兲 = ci + 兺b r


j≥1
j i, t + 1 − j + ei, t + 1

En effet, dans le cas où les coefficients bj ne sont pas significatifs et sous


réserve que les résidus de la régression ne présentent pas de corrélations
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inter-temporelles et sont homoscédastiques (c’est-à-dire de même variance),
共 ei, t 兲t est alors un bruit blanc faible (suite de variables aléatoires centrées,
de même variance et non auto-corrélées) et la série des logarithmes de prix
est une marche aléatoire faible :

log 共 Pi, t + 1 兲 = ci + log 共 Pi, t 兲 + ei, t + 1

Cependant, comme son nom l’indique, la propriété de marche aléatoire


faible est plus faible que celle de marche aléatoire forte évoquée dans la
section précédente, sauf si les prix sont log-normaux8.
En pratique, quels sont les résultats trouvés avec ce type d’analyse empi-
rique ? On observe une dépendance positive entre les changements quoti-
diens successifs des logarithmes de prix et, de cette dépendance, on peut
déduire des décisions de transactions qui peuvent se révéler marginalement
profitables (Fama’s data [1965]). Par ailleurs, si on considère des rendements
(ou changements de log-prix) à des horizons courts, mais plus grands que la
journée, l’hypothèse d’efficience semble aussi invalidée ; Cootner [1964] et
Moore [1962] par exemple, font état de dépendance, surtout négative bien

8. Une marche aléatoire forte, associée à un bruit blanc fort, vérifie les propriétés d’une
marche aléatoire faible, associée à un bruit blanc faible mais la réciproque n’est pas vraie,
l’indépendance impliquant l’absence de corrélation, mais pas l’inverse, sauf lorsque le bruit
blanc est gaussien.

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692 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

que faible, entre des rendements hebdomadaires successifs ; Fama [1965],


quant à lui, obtient des résultats comparables en retenant un horizon de
quatre jours.
Cependant, dans tous les cas, la part de variance expliquée reste très
faible (quelques %) et les gains potentiels sont trop faibles pour compenser
les coûts de transaction.
Lorsqu’on cherche à tester l’indépendance des rendements successifs, on
met en œuvre ce que l’on appelle des « runs tests » comme le font par
exemple Fama et Blume [1966]. Le « runs test » est un test non-
paramétrique qui permet de déterminer si les réalisations successives d’une
variable sont indépendantes. Il est construit sur l’observation du signe des
changements de la variable. Un « run » est alors une succession de change-
ments de même signe concernant les taux de rendement. Ce type de test est
particulièrement adapté pour valider la propriété de bruit blanc fort, énoncé
dans la section 2.1 pour les taux de rendement (ou, plus précisément, les
différentiels de logarithmes de prix successifs).
Alexander [1961] et Fama et Blume [1966] montrent ainsi que des filtres
très fins peuvent se révéler plus profitables qu’une stratégie standard
d’achat-vente. De fait, ils mettent en évidence une dépendance plutôt posi-
tive mais ils montrent aussi que toutes les stratégies qui cherchent à trans-
former les dépendances de court-terme en profits nécessitent tellement de
transactions que les profits sont absorbés par les coûts de transaction.
D’autres résultats relatifs à l’existence de dépendances entre rendements
apportent des informations intéressantes sur la formation des prix des
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actions, mais ils ne peuvent en aucun cas remettre en question l’hypothèse
d’efficience. Par exemple, Fama [1965] montre que des changements quoti-
diens importants des prix tendent à être suivis par d’autres changements
importants, mais sans que l’on sache prédire le signe. Ce résultat suggère
qu’une information « importante » ne peut pas être évaluée complètement
dans l’immédiat, mais que l’ajustement du prix à l’information dès le pre-
mier jour n’est pas biaisé, ce qui est suffisant pour assurer la « propriété de
martingale ». Niederhoffer et Osborne [1966], pour leur part, mettent en
évidence une tendance à une inversion excessive dans le comportement des
changements des 共 log 兲 prix d’actions entre transactions successives. Cette
tendance s’explique par le mécanisme qui assure la correspondance entre
les ordres d’achat et de vente malgré la limitation, mais là encore l’existence
de ces dépendances ne permet pas d’assurer des profits.
En conclusion, les études empiriques de la forme faible de l’efficience
informationnelle tendent à révéler des liens de dépendance très faibles,
lorsqu’ils sont significatifs, entre les changements successifs de log-prix, ou,
de manière équivalente, entre les rendements, considérés sur des horizons
de court-terme ; de plus, ces liens sont cohérents avec le modèle du jeu à
somme nulle dès lors que l’on prend en compte les coûts de transaction, et
ils ne sont donc pas considérés comme suffisants pour déclarer que la
transmission de l’information par les prix est inefficace, au moins à court-
terme.

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Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 693

3.2. Tests de la forme semi-forte

L’hypothèse d’efficience dans sa forme semi-forte implique que les prix


observés sur les marchés reflètent toute l’information publique disponible,
notamment l’information relative aux résultats comptables, dividendes, aug-
mentations de capital, PER (Price-Earning ratios), annonces d’OPA (Offre
publique de rachat), et OPE (Offre publique d’échange). Ce type d’informa-
tion est donc intégré dans le prix de l’actif à l’instant même où elle est
rendue publique, de sorte qu’il est impossible de réaliser un profit sur la
base des informations publiques disponibles.
Il existe principalement deux façons de tester cette forme semi-forte de
l’efficience :
— en étudiant l’existence de « rendements anormaux » ;
— en examinant s’il est possible de trouver de stratégies de gestion de
portefeuille qui puissent battre le marché.

3.2.1. Etude des « rendements anormaux »

Concernant l’étude de « rendements anormaux », il s’agit de voir si des


caractéristiques observables distinctives des prix et/ou si l’arrivée d’une
information publique est capable de modifier les rendements d’un titre ;
dans le dernier cas, on mène ce que l’on appelle une « étude d’événe-
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ments » (event study).
Concernant le premier cas d’inefficience potentielle, on peut mentionner
deux « effets » souvent cités :
• l’effet « Taille » (Banz [1981]) selon lequel la rentabilité des petites capi-
talisations est supérieure à celle des grandes capitalisations (ce qui est expli-
qué par l’étroitesse des marchés (prime d’illiquidité) et les coûts d’informa-
tion...) ;
• l’effet « Janvier » (Rozeff et Kinney [1976]) : on observe des mouve-
ments anormaux (prévisibles) des prix des actions en Décembre et Janvier.
Ce qui s’explique par une optimisation fiscale : il est en effet intéressant de
vendre en décembre pour réaliser les pertes en capital déductibles, et de
racheter en Janvier.
Malgré tout, ces anomalies et saisonnalités ne sont pas assez importantes
et stables pour qu’il y ait des profits anormaux : « l’effet Janvier semble
avoir disparu aussitôt après avoir été découvert » (Malkiel [2003]).
Pour ce qui est des études d’événements, un grand nombre d’études
examinent l’impact d’opérations sur les titres ; si on se concentre sur les
actions, on peut citer des opérations concernant des versements de divi-
dendes, des opérations de split (opérations purement comptables qui
consistent à multiplier le nombre d’actions en divisant leur valeur unitaire),
des distributions d’actions gratuites, des émissions de nouvelles actions,
des rachats d’actions.
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694 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

Fama, Fisher, Jensen, et Roll [1969] trouvent que l’information sur les
paiements futurs de dividendes contenue dans les segmentations d’actions
est reflétée en moyenne par les prix. Ball et Brown [1968] obtiennent des
conclusions semblables en ce qui concerne l’information contenue dans (i)
les annonces des bénéfices annuels (ii) les nouvelles émissions d’actions.
On peut considérer que les différents types d’information considérés dans
ces études sont en nombre limité mais ils correspondent aux événements
les plus significatifs.
Certaines études examinent aussi les effets des offres publiques. Par
exemple, en ce qui concerne les offres publiques de rachat, Keown et Pin-
kerton [1981] constatent une appréciation de la société cible dans la mesure
où le prix de l’offre est supérieur au dernier cours coté de ce titre mais
trouvent un bilan mitigé de l’opération selon qu’elle engendre des synergies
profitables ou au contraire augmente la prise de risque.
On citera aussi les études qui consistent à étudier l’impact de « news » en
identifiant des rendements dits « anormaux », c’est-à-dire si des écarts au
consensus de marché et en examinant les ajustements des cotations, à
l’occasion de ces nouvelles. Le consensus est la moyenne des anticipations
des analystes et l’écart est généralement mesuré entre le rendement
observé de l’actif et un rendement espéré déduit d’un modèle, par exemple,
le MEDAF.
Les études d’impact de nouvelles sont multiples puisqu’elles se réfèrent
chacune à un événement particulier.
Cooper et al. [2001] étudient par exemple l’impact d’une annonce de chan-
gement de nom, avec passage à une adresse internet, sur les rendements
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« anormaux » cumulés de 147 entreprises américaines entre 1998 et 1999. Ils
calculent les rendements anormaux cumulés chaque jour, sur une période
encadrant l’annonce du nouveau nom, 30 jours avant et 120 jours après. Ils
considèrent plusieurs façons de calculer les rendements anormaux. Par
exemple, ils calculent un écart de rendement des entreprises qui ont changé
de nom par rapport au rendement d’un indice constitué des actions d’entre-
prises internet (cotées par OTCBB9) qui n’ont pas changé de nom. Ils mon-
trent que des changements sont très significatifs, positifs et persistants, avec
des rendements anormaux cumulés qui passent de 0 %, 10 jours avant
l’annonce, à 50 %, 150 %, voire 200 % selon les cas, dès le jour de l’annonce
et jusqu’à 120 jours plus tard.
Konar et Cohen [1997] étudient l’effet de la divulgation d’informations
relatives à l’émission de rejets toxiques sur les rendements d’entreprises
concernées et mettent effectivement en évidence des rendements « anor-
maux » durant les 5 jours qui suivent l’annonce. On peut aussi citer l’étude
de Capelle-Blancard et Laguna [2006] sur les effets de l’explosion du dépôt
de Buncefield, ou des études des réactions des marchés financiers aux
attentats du 11 Septembre. Ces études révèlent généralement l’existence de
rendements anormaux sur des intervalles de temps significatifs de 0 à 5
jours après « l’événement ».

9. Over-The-Counter Bulletin Board (OTCBB) : système de cotation électronique aux États-


Unis.

REP 124 (5) septembre-octobre 2014


Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 695

Les résultats des tests précédents de l’efficience semi forte sont contras-
tés. Si on examine l’effet d’informations renouvelées régulièrement, il sem-
ble qu’ils ne remettent pas en question l’hypothèse. Par contre, on observe
que des événements exceptionnels et l’information associée peuvent être à
l’origine de rendements « anormaux » pendant une durée relativement limi-
tée après l’événement.
Le deuxième mode d’analyse de l’efficience semi-forte consiste à étudier
les stratégies des gestionnaires de portefeuille et à examiner si certaines
d’entre elles permettent de battre le marché.

3.2.2. Peut-on battre le marché ?

D’après Malkiel [1973], « en matière de sélection d’actions, un chimpanzé,


les yeux bandés, qui lance des fléchettes sur le Wall Street Journal peut faire
aussi bien que les experts ».
On peut toutefois améliorer les outils de cible et de fléchette et mener
l’analyse avec des mesures de performance très variées ; le rendement
espéré, l’indice de Treynor [1965], de Sharpe [1966] ou de Jensen [1968]
(alpha) sont les plus connues, mais on trouve aussi l’indice de Sortino
[1994], le ratio d’information, l’indice de Treynor et Black [1973] (rapport
alpha /bêta) ou encore le rapport d’évaluation AR (Appraisal Ratio AR), égal
au rapport alpha/sigma.
D’autres études utilisent des modèles multi-factoriels, tels que celui de
Fama et French [1992, 1996]. Ces auteurs montrent que l’on peut expliquer
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les rendements « anormaux » d’un panel d’actions, puisqu’on peut trouver
d’autres facteurs explicatifs que le seul rendement du marché pour expli-
quer les rendements des titres, contrairement à ce que prévoit le MEDAF ; il
s’agit de facteurs liés à la taille, (différence entre le rendement moyen d’un
portefeuille d’actions de grandes entreprises et celui d’un portefeuille
d’actions de petites entreprises : SMB, Small minus Big) et au Book-to-
market10 (HML High minus Low : différences entre les rendements de porte-
feuilles dont le ratio book-to-market est élevé, respectivement bas). Ces
auteurs valident le pouvoir explicatif de ces facteurs et mettent donc en
évidence des rendements anormaux. Ils montrent que les prix des titres (et
donc leurs rendements) intègrent – au delà de la cotation de l’indice de
marché – des informations – publiques – relatives à l’entreprise. Ce résultat
ne contredit pas à proprement parler l’hypothèse d’efficience au sens semi-
fort. Il montre qu’il existe des compositions de portefeuilles capables de
battre le marché tel qu’il est représenté dans le modèle MEDAF.
Enfin, on peut citer des approches de type « market timing », où il s’agit
d’anticiper les évolutions du marché à la hausse ou à la baisse et d’en tirer
profit. Une approche célèbre de « market timing » est la « théorie de Dow »

10. Book-to-Market : rapport de la valeur comptable (somme des valeurs de tout ce qui
appartient à l’entreprise donc de tous les actifs inscrits dans les comptes de la société
déduits des amortissements et des éventuelles dépréciations) à la valeur de marché (déduite
de la valeur des actions émises).

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696 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

introduite au début du XXe siècle, du nom de l’éditeur-fondateur du Wall


Street Journal, Charles Henry Dow, mais véritablement développée et diffu-
sée par William Peter Hamilton en 1922. L’objectif de la stratégie « market
timing » est d’identifier le trend « primaire » (haussier ou baissier) du mar-
ché, en respectant essentiellement deux règles : d’une part, le trend doit être
confirmé dans deux secteurs différents, d’autre part, un grand mouvement
suivi d’une période de quiescence permet généralement d’identifier le début
d’une tendance dans la direction du mouvement observé.
En comparant sa stratégie de market-timing à la stratégie « buy and hold »
sur une période de 27 ans, Hamilton montre qu’il bat le marché jusqu’en
1926, date à laquelle s’arrête la tendance haussière du marché. Son porte-
feuille a un ratio de Sharpe plus élevé (0,559 vs 0,456) sur toute la période
avec un rendement moyen de 10,73 % contre 10,75 % pour le marché.

3.3. Test de la forme forte


Supposer que les marchés sont fortement efficients implique que toutes
les informations publiques ou privées, y compris les informations d’initiés,
sont reflétées dans les prix ; une façon logique de tester cette hypothèse
consiste donc à étudier s’il existe des délits d’initiés et/ou si des agents
informés (dirigeants, gérants de fonds...) sont capables ou non de battre le
marché.
La forme forte de l’efficience forte doit être vue comme un benchmark qui
permet d’évaluer les écarts par rapport au fonctionnement strictement effi-
cient du marché.
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3.3.1. Impact d’informations privées sur les prix
Pour ce qui est de l’exploitation d’une information privée, Niederhoffer et
Osborne [1966] soulignent le fait que des spécialistes des marchés
d’échange de la plus part des titres ont un accès monopolistique à l’infor-
mation concernant les ordres limite non exécutés et qu’ils utilisent cette
information pour dégager des profits dans leurs transactions. Pour le
moment, cependant, on ne dispose pas de documentation sur d’autres types
d’investisseurs susceptibles d’avoir un accès privilégié à l’information, ce
qui fait dire à Fama [1998] que le modèle du marché efficient doit être
considéré comme une première (et même seconde) meilleure approxima-
tion de la réalité (first et second best).
En ce qui concerne les délits d’initiés (Insider trading), on peut citer Meul-
broek [1992] qui met en évidence un rendement anormal intra day d’environ
3 % relié à de tels délits.

3.3.2. Capacité d’une gestion de fond à battre


le marché
Une autre manière d’étudier la validité de l’hypothèse d’efficience forte
consiste à examiner si les fonds bien classés (par performance) une année le
REP 124 (5) septembre-octobre 2014
Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 697

sont ou non l’année suivante. Si la performance passée ne préjuge pas de la


performance future, le marché peut être considéré comme efficient au sens
fort.
Certaines études empiriques de la forme forte fournissent des résultats
qui sont favorables à l’hypothèse : de fait, lorsqu’il analyse la performance
des analystes et des gérants de fonds, Jensen [1978], par exemple, trouve
qu’ils ne parviennent pas à battre le marché.
Cependant Grinblatt et Titman [1992] montrent que la performance de
fonds mutuels de placement est reliée à leurs performances passées ; de
plus, ils concluent de leur étude que les performances de plusieurs fonds
présentent des différences durables et révèlent la capacité de leurs gérants à
dégager des rendements anormaux par rapport à un portefeuille retenu
comme benchmark.
Quoi qu’il en soit, il est important de souligner des difficultés de mesure
inhérentes à toutes les études de performance de fonds.
• La taille de l’échantillon : l’observation de fonds qui ne vivent pas long-
temps ne fournit pas d’indications fiables sur les propriétés des stratégies
des gérants.
• Le choix du benchmark : quel modèle faut-il utiliser pour mesurer les
surcroîts de performance ? Il faut en particulier considérer le niveau de ris-
que : si une performance supérieure est trouvée, doit-elle être attribuée au
gérant ou au risque du portefeuille ?
• Les biais de sélection : la plupart des fonds souffrent du biais de survie.
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Des fonds qui ne survivent pas disparaissent de la base d’observations.
Puisque les fonds qui ne survivent pas tendent à avoir de mauvaises perfor-
mances, les exclure de la base conduit à surestimer la performance
moyenne des fonds.
Au vu des études précédentes, il est difficile de tirer une conclusion défi-
nitive en faveur ou contre l’hypothèse d’efficience ; si elle est rejetée stricto
sensu, on ne peut nier que les rendements à court-terme sont extrêmement
difficiles à prévoir, que les rendements « anormaux » lorsqu’ils sont mis en
évidence sont très faibles, que les impacts d’événements ou de nouvelles
sont limités dans le temps...
Cependant, il convient de noter aussi que la majorité des travaux cités
portent sur l’étude d’efficacité des marchés en termes de transmission
d’information pour des projections de court-terme.
L’étude de Shiller en 1981 a remis plus fondamentalement en question
l’hypothèse d’efficience en suggérant d’étudier la prévisibilité des rende-
ments à des horizons de plus long terme.

REP 124 (5) septembre-octobre 2014


698 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

4. Efficience informationnelle
et prévisibilité des rendements
à long-terme : l’apport de Shiller
[1981]
A la fin des années 70, l’impossibilité de prévoir les rendements des actifs
financiers à des horizons de court terme faisait l’objet d’un consensus assez
large. Ce résultat pouvait laisser penser qu’il n’y avait aucun espoir à pou-
voir prévoir des rendements à des horizons de long-terme, associés par
définition à un incertitude plus grande.
Cependant, des analyses empiriques ont révélé que cette conjecture était
incorrecte. Parmi celles-ci, les études de Shiller ont été déterminantes. Elles
ont en effet contribué à remettre en question l’imprévisbilité des rendements
et surtout l’hypothèse de constance des rendements espérés.
Avant 1980, la plupart des analystes financiers pensaient en effet que les
annonces relatives aux dividendes constituaient un facteur explicatif majeur
des fluctuations des marchés boursiers. Shiller, en 1981, remettait en ques-
tion ce point de vue dans son article intitulé :
« Do stock prices move too much to be justified by subsequent changes in
dividends ? »
Considérant que, dans un marché sans opportunité d’arbitrage, le prix doit
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être égal à l’espérance des gains futurs actualisés, il écrit ce prix pour une
action i, en fonction des dividendes futurs associés, sous la forme :

Pi, t = Et 共 P i, t + 1 兲
*

P i, t + 1 =
*
冋兺
j=1

m 共 t, t + j 兲Di, t + j 册
m 共 t, t + j 兲 désigne le facteur d’actualisation – aléatoire – entre les dates t et
t + j et Di, t + j les dividendes – aléatoires – versés à la date t + j.
Dans ce cas, l’efficience du marché signifie que le prix courant doit être égal
à l’espérance de la valeur fondamentale P i,* t + 1 (ou valeur d’équilibre). Par défi-
nition de l’espérance conditionnelle, l’écart P i,* t + 1 − Et 共 P i,* t + 1 兲 = P i,* t + 1 − Pi, t
est non-corrélé à l’information utilisée pour anticiper P i,* t + 1 de sorte que l’on
attend une variance plus élevée pour le prix observé que pour la valeur fonda-
mentale :

Var 共 P i, t + 1 兲 > Var 共 Pi, t 兲


*

puisque

P i, t + 1 = Et 共 P i, t + 1 兲 + 共 P i, t + 1 − Et 共 P i, t + 1 兲 兲
* * * *

REP 124 (5) septembre-octobre 2014


Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 699

soit

P i, t + 1 = Pi, t + 共 P i, t + 1 − Pi, t 兲
* *

Shiller [1981] cherche à vérifier cette inégalité et trouve, en supposant le


facteur d’actualisation m constant, que la variance de la valeur fondamentale
constatée ex-post est bien plus faible que la variance des prix observés dans
le cas de l’indice Standard and Poors étudié sur la période 1871-1979.
Ce phénomène a été désigné sous le terme de volatilité excessive des prix
(sous-entendu en comparaison de celle des dividendes). Par ailleurs, puis-
que les prix courants, dans un marché efficient – sans opportunité d’arbi-
trage, – doivent être fonction des dividendes futurs anticipés, Shiller a déduit
qu’une information sur les dividendes passés pouvait être utile pour prévoir
les rendements futurs. De fait, il montre que le rendement à l’horizon d’un
an Rt + 1 est positivement corrélé au ratio dividendes/prix Dt /Pt courant. Ce
résultat suggère qu’un investisseur est capable de battre le marché en adop-
tant une stratégie « contrariante » qui consiste à acheter lorsque le prix est
bas « relativement » aux dividendes et à vendre dans le cas contraire.
Par la suite, les résultats obtenus par Shiller ont été remis en question sur
la base d’arguments économétriques, notamment par Marsh et Merton
[1986] et Kleidon [1986] qui font remarquer que les tests mis en œuvre par
Shiller ne sont valables que si les séries sont stationnaires, ce qui n’est pas
le cas.
Des études menées en utilisant la théorie de la cointégration (Engle et
Granger [1987]), ont permis de valider les résultats avancés par Shiller, en
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tenant compte de la non-stationnarité des séries, par exemple, celle de Cam-
pbell et Shiller [1987] qui postulent une relation de cointégration entre les
prix et les dividendes impliquant la stationnarité du ratio dividende/prix.
Cependant, cette propriété de cointégration n’est validée que sur des pério-
des très longues ; Campbell et Shiller [1987] valident la propriété sur la base
d’observations mensuelles d’un indice boursier entre 1871 et 1986. Cette
propriété n’est pas validée sur des périodes plus courtes (Bruneau et al.
[2002]).
Quoi qu’il en soit, les travaux de Shiller et de ses co-auteurs ont convaincu
la communauté des chercheurs, y compris ceux de l’école de Fama, de
l’importance des anticipations des rendements dans l’explication des fluc-
tuations des rendements futurs dès lors que les rendements étaient de
moyen ou long-terme (mensuels à annuels). Fama et French [1988a] ont
ainsi montré que le ratio dividende/prix a un pouvoir prédictif significatif
lorsqu’on cherche à prévoir des rendements d’actions condidérés à des
horizons de long-terme (de 1 à 5 ans), avec une part de variance expliquée
croissant avec l’horizon considéré. Ces mêmes auteurs [1988b] et Poterba et
Summers [1989] ont également établi l’existence de corrélations inter-
temporelles de rendements annuels.
D’autres études, menées pour d’autres actifs que les actions, notamment
sur les obligations ou les devises, ont conduit au même type de conclusion
concernant la prévisibilité des rendements de moyen ou long terme sur la
base d’informations « fondamentales » bien choisies.
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700 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

Fama et Bliss [1987] ou Campbell et Shiller [1991] ont ainsi mis en évi-
dence le pouvoir prédictif de la pente de la courbe des taux du trésor amé-
ricain lorsqu’on prévoit les rendements futurs des obligations, quelle que
soit la maturité considérée. Campbell [1987] et Fama et French [1989] ont
par ailleurs montré que la structure par terme des taux permettait de prévoir
les rendements des actions à moyen et long-terme.
Ces résultats de prévisibilité rejettent évidemment l’hypothèse d’efficience
stricto sensu même si on peut considérer que les résultats des études utili-
sant notamment la théorie de la cointégration valident une efficience de
« long terme » associée à une rationalité « fondamentaliste ». En effet, le
principe de ces études consiste à valider une propriété de cointégration
entre un prix et une valeur fondamentale bien choisie, par exemple, entre le
cours de l’indice Standard and Poors et une fonction des dividendes et d’un
taux d’intérêt (Bruneau et al. [2000]). Cette propriété signifie que le prix et la
valeur fondamentale ne s’écartent jamais durablement : un écart positif,
indiquant une surévaluation de l’actif, (respectivement négatif, indiquant
une sous-évaluation) entraîne une correction du prix à la baisse (resp. à la
hausse) en vertu d’un mécanisme à correction d’erreur. En considérant que
l’information intégrée dans les anticipations est constituée des fondamen-
taux jugés pertinents, on peut conclure que les prix reflètent « à long-
terme » l’information sur les fondamentaux.
Dans tous les cas cependant, la part de variance des rendements expli-
quée par les fondamentaux reste limitée. L’article de Shiller [1981] a donc eu
un retentissement important en faisant apparaître la volatilité excessive des
cours des titres comme un phénomène « pathologique » ; partant du prin-
cipe de rationalité, il devenait improbable d’expliquer le niveau de volatilité
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des actifs risqués en se basant purement et uniquement sur le comporte-
ment dynamique des fondamentaux, ce qui a inspiré de nombreux travaux
postérieurs dont Shiller [1989], Odean [1999], Barberis et Thaler [2003],
Chuang et Lee [2006] et Glaser et Weber [2007].
La conclusion de Shiller est qu’il est difficile de réconcilier la volatilité des
prix observés des actions et celle de la valeur fondamentale qui intègrent les
anticipations des agents sur les dividendes et les rendements futurs. Selon
les hypothèses retenues concernant les propriétés « stochastiques » des
séries de dividendes, les données peuvent ou non rejeter le modèle. En
particulier, le modèle peut ne pas être rejeté si la représentation de la dyna-
mique des séries intègre des mouvements de très grande ampleur interve-
nant avec une faible probabilité ou si on admet qu’il existe une faible proba-
bilité, à chaque période, d’observer une forte modification du trend dans
l’évolution des dividendes, ce qui n’est jamais observé dans l’échantillon.
D’après Shiller, les mouvements du prix corrigé de son trend, observés sur
le dernier siècle, peuvent s’expliquer par des réponses rationnelles à de
nouvelles informations concernant les futurs mouvements anticipés des
dividendes réels, également corrigés de leur trend, seulement si on suppose
que ces mouvements anticipés sont d’une ampleur qui est beaucoup plus
grande que celle des mouvements effectivement observés. Par conséquent,
d’après lui, « le modèle des marchés efficients est au mieux un modèle
académique portant sur de nouvelles informations relatives au trend (des
REP 124 (5) septembre-octobre 2014
Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 701

dividendes distribués) inobservables et ne décrit pas les mouvements réels


des prix observés sur les données. »
Comme mentionné en introduction, deux voies de recherche se sont
principalement développées à la suite des travaux sur la prévisibilité de
long-terme des rendements : la première concerne l’amélioration des modè-
les classiques avec la proposition de meilleures représentations de la ratio-
nalité des agents sans que celle-ci ne soit remise en question. C’est la voie
privilégiée par Fama et pour laquelle la contribution économétrique majeure
de Hansen [1982] s’est révélée d’une utilité décisive. La deuxième voie,
directement inspirée des propositions de Shiller, s’inscrit dans le champ
récent de la finance comportementale. Dans la section suivante, nous pré-
sentons quelques travaux s’inscrivant dans la première voie et exposons les
principes de la méthode d’inférence proposée par Hansen.

5. Développements récents
sur l’analyse de la formation
des prix des actifs financiers

Les observations d’excès de volatilité et de prévisibilité à long terme des


rendements ont rapidement incité les chercheurs à développer des modèles
dynamiques de valorisation des actifs reposant sur des choix inter-
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temporels optimaux d’agents rationnels impliquant des formations de prix
excluant toute opportunité d’arbitrage.
Nous présentons à ce titre le modèle CCAPM (Consumption Capital Asset
Pricing Model) déjà mentionné en section 2 ; il est l’un des premiers modè-
les dynamiques de validation de prix et a constitué le point de départ de
modélisations plus complexes proposées par la suite, après le rejet du
CCAPM par l’application de la méthode GMM introduite par Hansen [1982].

5.1. Les principes du modèle CCAPM

Dans un modèle dynamique, les préférences des agents en matière de


prise de risque peuvent varier dans le temps, à la suite de chocs affectant la
richesse ou la consommation, créant ainsi des fluctuations de la prime de
risque et la prévisibilité des rendements.
Dans le modèle CCAPM les agents choisissent consommations et compo-
sitions de leur portefeuille pour les différentes périodes de façon à maximi-
ser l’espérance d’utilité inter-temporelle :

E 冉兺

j=0
j

b u 共 ct + j 兲/It

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702 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

sous une contrainte de budget s’exerçant à chaque période :


兺 wi Pi, t + ct ≤ 兺 wi, t − 1 共 Pi, t + Di, t 兲 + yt
t i
u est la fonction d’utilité, ct la consommation, wi, t le nombre de parts du
titre risqué i dans le portefeuille, Pi, t et Di, t, respectivement le prix unitaire
du titre i et les dividendes versés par une part de ce titre à la période t ; yt
désigne le revenu du travail à cette période.
Les conditions d’optimalité conduisent aux équations d’Euler qui four-
nissent la juste valorisation de chaque titre i :

Pi, t = bE 冋 u′ 共 ct + 1 兲
u′ 共 ct 兲
. 共 Pi, t + 1 + Di, t + 1 兲/It 册
On retrouve ainsi comme facteur d’actualisation stochastique :
u′ 共 ct + 1 兲
Mt + 1 = b qui est le taux marginal de substitution entre la consom-
u′ 共 ct 兲
mation d’aujourd’hui et celle de demain.
Lorsque la consommation est faible, en période de récession, l’utilité mar-
ginale correspondante est élevée (la dérivée de u est décroissante en vertu
de l’aversion au risque traduite par la concavité de la fonction d’utilité) et le
taux marginal de substitution est faible (et inversement dans le cas de pério-
des d’expansion). Ces variations pourraient expliquer la prévisibilité de long
terme des rendements dès lors que les agents sont adverses au risque et
que l’on est capable de prévoir les changements de leur comportement de
consommation en fonction de la conjoncture économique.
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Cependant le modèle doit être validé empiriquement.

5.2. Le principe du test du CCAPM


par la méthode GMM
Une des difficultés majeures rencontrées pour tester le modèle CCAPM
tient à la non-linéarité des équations dont il faut tester la validité, sans
compter la nécessité de spécifier le processus de consommation. La
méthode des moments généralisés permet de résoudre ces difficultés.
Les équations du CCAPM spécifiant les « justes » prix des actifs peuvent
être réécrites :

1 = bE 冋 u′ 共 ct + 1 兲
u′ 共 ct 兲
.Ri, t + 1 /It 册
D’où l’on peut déduire les équations : E 冋冉 b
u′ 共 ct + 1 兲
u′ 共 ct 兲
冊册
.Ri, t + 1 − 1 /It = 0

La variable 冉 b
u′ 共 ct 兲
u′ 共 ct + 1 兲

.Ri, t + 1 − 1 peut être vue comme une erreur de
prévision à l’horizon d’une période et, sous l’hypothèse d’anticipations
REP 124 (5) septembre-octobre 2014
Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 703

rationnelles, cette erreur doit être sans corrélation avec toute information
disponible à la date t, donc avec toute variable contenue dans l’ensemble
d’information It ; par suite, pour toute variable Zj, t contenue dans le système
d’information It, et pour tout titre i, on doit avoir la condition « d’orthogo-
nalité » (ou non-corrélation) suivante :

E 冋冉 b
u′ 共 ct + 1 兲
u′ 共 ct 兲
冊册
.Ri, t + 1 − 1 Zj, t = 0

On trouve ainsi un ensemble de d’équations du type de celles qui peuvent


être estimées et testées par la méthode GMM11 qui s’écrivent sous la forme :

E 关 g 共 Xt , h 兲 兴 = 0

où Xt est le vecteur des processus stochastiques du système dont les compo-


santes sont, dans ce cas, les processus de consommation et des rendements
des différents titres i, 1 ≤ i ≤ I ; la fonction g correspond aux différentes
contraintes « d’orthogonalité » précédentes écrites pour les différents titres i

11. Plus précisément, si on note h l’ensemble des paramètres à estimer, au nombre de k,


les l contraintes sur les moments de la distribution, sous l’hypothèse nulle 共 h0 兲, sont expri-
mées sous la forme :
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m 共 h0 兲 = E 关 g 共 Y, h0 兲 兴 = 0
où m 共 . 兲 est une fonction vectorielle comportant autant de composantes que de contraintes
spécifiées sur les moments, soit l composantes.
L’idée de la méthode GMM est de traduire empiriquement les contraintes en introduisant la
1 n
contrepartie empirique de la fonction m : m̂ 共 h 兲 = 兺 g 共 Yi, h 兲.
ni=1
L’estimation GMM des paramètres est alors obtenue en cherchant la valeur des paramètres h
qui minimisent la norme :
储 m̂ 共 h 兲 储 W = m̂ 共 h 兲′ Wm̂ 共 h 兲,
2

où W est une matrice de poids, définie positive, estimée par un estimateur bien choisi, W | n,
soit :
h| = Argminh ∈ H 冋1 n

n i兺
=1
册 冋
g 共 Yi, h 兲 ′ W |n
1
n i兺
n

=1
g 共 Yi, h 兲
L’estimation se fait en deux étapes ; on estime d’abord par h| 共 1 兲 obtenu en minimisant
l’expression précédente avec W | n = Id (matrice identité) ; puis on estime W | n par :
W|n = 冋1 n
ni=1兺 册
g 共 Yi, h| 共 1 兲 兲g 共 Yi, h| 共 i 兲 兲′
−1

et on ré-estime h en utilisant cette estimation W | n.


Une fois les paramètres estimés, on peut tester si les contraintes portant sur les moments
sont satisfaites par les données, à condition que le modèle soit sur-identifié, c’est-à-dire dans
le cas où le nombre de contraintes imposées est plus élevé que le nombre de paramètres à
estimer.
On teste alors l’hypothèse :
H0 : 兵 m 共 h0 兲 = E 关 g 共 Y, h0 兲 兴 = 0 其
en considérant la J-statistique :
J=n 冋1 n
n i兺=1
册 冋
g 共 Yi, h| 兲 ′ W |n
1 n
n i兺
=1

g 共 Yi, h| 兲
calculée pour l’estimation GMM des paramètres, h|.
Sous l’hypothèse nulle H0, la J-statistique tend vers un chi-deux dont le nombre de degrés de
liberté est égal à l − k.

REP 124 (5) septembre-octobre 2014


704 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

et les différentes variables Zj, t, 1 ≤ j ≤ J ; g a donc dans ce cas IJ compo-


santes :

gi, j 共 Xt, h 兲 = 冉b
u′ 共 ct + 1 兲
u′ 共 ct 兲

.Ri, t + 1 − 1 Zj, t

Dans leur étude du CCAPM, Hansen et Singleton [1982], supposent que la


fonction d’utilité correspond à une taux d’aversion relatif au risque constant
c et a donc pour expression :

1 − c兲
u″ 共 c 兲
u共c兲 = c共 /共1 − c兲 ⇔ − =c
u′ 共 c 兲

Les paramètres qui doivent être estimés sont b et c ; les variables « instru-
mentales » Zj, sont les rendements retardés des différents titres. Aucune
hypothèse n’est requise concernant la spécification des processus puisque
l’estimation est réalisée en considérant les traductions empiriques des
contraintes d’orthogonalité :

兺 冋b 冉c 冊 册
T ct c
1
Ri, t + 1 − 1 Rj, t − k = 0
T t=1 t+1

L’estimation GMM des paramètres donne des valeurs tout-à-fait raison-


nables des paramètres d’un point de vue économique avec une valeur esti-
mée de b légèrement inférieure à 1 et une valeur estimée de c proche de 1
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(mais avec une très faible précision). Par contre l’ensemble des contraintes
est rejeté. La version simple du CCAPM est donc rejetée par les données et
ne peut constituer un « bon » modèle pour caractériser les rendements anti-
cipés.
Ces résultats ont été à l’origine de recherches actives pour améliorer le
modèle de caractérisation des rendements anticipés.

5.3. Extensions du CCAPM

Le modèle CCAPM doit être rejeté sans qu’il faille pour autant remettre en
question l’idée selon laquelle les rendements attendus doivent être plus
élevés dans les périodes de conjoncture difficile, lorsque la consommation
est faible. Différentes études empiriques faisant intervenir des variables
explicatives liées aux conditions du cycle économique pour prévoir les ren-
dements ont effectivement validé cette idée. Fama et French [1989] par
exemple ont montré que les évolutions des rendements boursiers sont liées
à celles des rendements obligataires et que la prime de terme (ou pente de
la courbe des taux) a un pouvoir prédictif des rendements des actions,
au-delà du ratio dividende/prix. Lettau et Ludvigson [2001] ont monté quant-
à-eux que le ratio consommation/richesse avait un pouvoir prédictif propre,
au-delà de celui de la prime de terme et du ratio dividendes/prix.
REP 124 (5) septembre-octobre 2014
Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 705

Le problème d’un modèle tel que le CCAPM tient au fait que la covariance
qu’il génère entre la consommation et les rendements d’actifs financiers
n’est pas assez élevée pour produire une prime de risque et une volatilité
suffisantes de ces actifs, par rapport à celles qui sont effectivement mesu-
rées.
Ces résultats ont conduits de nombreux chercheurs à proposer des nou-
veaux modèles capables de générer des primes de risques et des volatilités
plus réalistes.
Pour certains, le fait que le taux marginal de substitution et l’aversion au
risque soient déterminés par un seul et même paramètre ( c dans le modèle
CCAPM) constitue une simplification abusive. Epstein et Zin [1989] ont ainsi
introduit des préférences autorisant une séparation des caractérisations de
l’aversion au risque et du taux de substitution. Bansai et Yaron [2004], utili-
sant la classe des préférences introduites par Epstein et Zin [1989], ont
proposé un modèle où les processus de consommation et de croissance des
dividendes ont une petite composante persistante (donc prévisible à long-
terme) et où la volatilité de la consommation varie dans le temps, de sorte la
prime de risque et la volatilité des rendements des actifs déduites du
modèle deviennent plus proches de celles qui sont effectivement observées.
Une deuxième approche a consisté à modifier les préférences de façon à
introduire des effets d’habitude (Deaton [1992]) en faisant dépendre l’utilité
du consommateur non seulement du niveau absolu de la consommation
mais aussi du changement de ce niveau. On peut citer à ce propos les
études de Sundaresan [1989], Constantinides [1990] ou Abel [1990], qui
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introduisent ces effets d’habitude dans le modèle CCAPM. Ils montrent que
cette modification permet d’augmenter la volatilité du facteur d’actualisation
stochastique.
Selon une troisième approche, les modèles introduisent de l’hétérogénéité
dans les préférences. Le facteur d’actualisation ne dépend plus alors seule-
ment du niveau agrégé de la consommation mais aussi de la distribution
des consommations des différents agents. (Malloy et al. [2009]).
Ces différentes approches partagent une même hypothèse qui est que le
consommateur utilise non seulement l’information de manière rationnelle et
efficace mais qu’il connaît le vrai processus de génération des données.
Hansen et Sargent [2001], Cagetti et al. [2002] ont analysé les conséquences
d’une incertitude de l’agent représentatif sur le « vrai » modèle et consi-
dèrent que cette incertitude est un facteur de risque supplémentaire qui peut
expliquer une prime de risque plus élevée que dans les modèles standard.
Dans toutes ces propositions de modèles, les agents sont supposés ration-
nels et leur rationalité est caractérisée de manière classique en termes de
maximisation d’espérance d’utilité.
L’autre voie privilégiée par Shiller remet en question cette représentation
des comportements des agents intervenant sur les marchés financiers.

REP 124 (5) septembre-octobre 2014


706 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

6. Perspectives offertes par la finance


comportementale

Les propositions les plus récentes pour étudier la formation des prix sur
les marchés financiers sont relatives à la caractérisation de la rationalité des
intervenants. De fait, c’est par leurs comportements et leurs choix que les
agents contribuent à la formation des prix.
On trouve parfois dans littérature la distinction entre la « rationalité fonda-
mentaliste » qui concerne l’anticipation de la distribution statistique des fon-
damentaux, la « rationalité financière » qui consiste à maximiser l’espérance
d’utilité de la richesse (selon l’axiomatique de Von Neumann et Morgens-
tern) et la « rationalité stratégique » qui prend en compte l’opinion (même
irrationnelle) des autres investisseurs (Orléans [2004]).
C’est l’étude de ce dernier type de rationalité, qui correspond aux propo-
sitions les plus récentes. Parmi celles-ci, on peut citer la « Noise Trader
Approach » qui suppose qu’il existe plusieurs types d’investisseurs :
— les investisseurs ignorants (« noise traders »), non fondamentalistes,
non stratèges, qui ont des anticipations irrationnelles, peuvent suivre des
signaux faux et adopter des règles stratégiques « irrationnelles » (en
s’appuyant, par exemple, sur une analyse technique) ;
— les arbitragistes rationnels (fondamentalistes) qui sont fondamenta-
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listes mais non stratèges et qui ont un impact stabilisateur limité :
• face au risque fondamental qu’ils peuvent mal anticiper à cause
d’erreurs d’anticipations ou d’évaluation,
• face au risque de marché, parce que l’écart à la valeur fondamentale
peut s’accroître avant de se résorber, induisant une incertitude sur le prix de
revente futur ;
— les investisseurs rationnels qui sont à la fois fondamentalistes et stra-
tèges : ils connaissent les fondamentaux et maximisent leur espérance d’uti-
lité en prenant en compte la réaction des autres.
Plus généralement, les recherches les plus récentes sur la représentation
des comportements des acteurs sur les marchés financiers s’inscrivent dans
le champ de la Finance Comportementale.
La théorie de l’utilité espérée de Von Neuman Morgenstern (VNM) est
remise en question par les résultats obtenus à partir d’analyses menées
dans ce champ de recherche, qui ont montré que des erreurs cognitives et
émotionnelles collectives « faussent » la formation des prix.
La Finance (Économie) Comportementale (FC) recense les travers de com-
portement et leurs effets sur les marchés financiers, sous forme d’anomalies
de prix ou de rendement. La FC cherche à détecter ces anomalies et à les
utiliser éventuellement dans les stratégies de placement. Elle s’oppose en
cela à la théorie classique basée sur l’hypothèse d’efficience des marchés
REP 124 (5) septembre-octobre 2014
Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 707

financiers. Elle critique également, pour des raisons évidentes, la théorie


classique de l’utilité (espérée).
Les « biais de comportement » sont de nature variée ; ils peuvent être :
• cognitifs, liés à la compréhension, la mémorisation... ;
• ou émotionnels (peurs, envies, admirations, répulsions, fierté...) ;
• associés à de purs automatismes (réflexes, habitudes) ;
• individuels ou collectifs (mimétisme de groupe ou de foule) ;
• liés à des prophéties auto-réalisatrices : ayant entendu dire que le cours
d’une action va monter, l’investisseur achète, d’autres en font autant, le
cours monte effectivement et la prédiction se réalise.
Certaines anomalies de marché peuvent être expliquées au moins en par-
tie par ces biais de comportement. Par exemple, une suite de sous-réactions
et sur-réactions collectives aux informations peut être à l’origine de phéno-
mène de tendance haussière ou baissière d’un marché.
Ces tendances peuvent aboutir, par effet d’entraînement et d’exacerbation,
à des niveaux de prix extrêmes et disproportionnés par rapport aux fonda-
mentaux économiques, ce qui engendre des bulles. (cf. section précédente).
Kahnemann et Tversky [1979] posent les bases de l’étude de la psycholo-
gie des marchés et ont introduit la théorie des perspectives (prospect
theory) qui remet en question la théorie de l’utilité espérée de VNM comme
modèle descriptif des décisions en situation de risque.
La remise en cause de la théorie classique est fondée sur des constats
expérimentaux de la façon suivante : si une loterie W qui rapporte x avec une
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probabilité p et y avec une probabilité q, elle doit être évaluée par :

U 共 W 兲 = p 共 p 兲v 共 x ; C 兲 + p 共 q 兲v 共 y ; C 兲

où v 共 . 兲 et une fonction des pertes ou gains et non de la richesse finale ; C


désigne une indication du contexte. v′ > 0 ; v″ 共 x 兲 > 0 si x < 0 et v″ 共 x 兲 < 0 si
x > 0.
La valorisation est donc différente de celle qui est obtenue à partir de
l’espérance d’utilité :

E 共 U 共 W 兲 兲 = pu 共 W0 + x 兲 + qu 共 W0 − y 兲

La première valorisation rend compte de l’attraction du risque observée en


cas de perte et de la phobie du risque en cas de gain. Elle doit aussi traduire
l’aversion aux pertes.
La fonction v est croissante mais concave dans la région des gains et
convexe dans la région des pertes. Par ailleurs p 共 . 兲 est une transformation
non linéaire des probabilités qui surestime les petites probabilités et sous-
estime les probabilités élevées pour rendre compte des comportements
effectivement observés.
Pour un développement complet sur la manière dont la représentation
précédente de la rationalité peut expliquer une variabilité excessive des prix
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708 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

sur un marché financier, on se reportera à Pollin [2004]. Nous proposons ici


quelques éléments d’explication.
On peut d’abord faire référence à la « loi des petits nombres » pour rendre
compte des erreurs de prévision dues à un ensemble trop limité d’observa-
tions ; dans ce cas, les biais de prévision vont perturber la formation des
prix ; par exemple, des investisseurs qui observeraient les résultats d’une
entreprise sur un petit nombre d’années et constateraient que les résultats
sont bons, auraient tendance à avoir une anticipation trop optimiste des
résultats futurs ce qui conduit à une appréciation exagérée des cours. Bar-
beris et al. [1998] complètent la loi « des petits nombres » par le conserva-
tisme pour expliquer certaines caractéristiques de l’évolution des cours.
D’après eux, la combinaison du « conservatisme » (c’est-à-dire l’adhésion
durable à un certain modèle de formation des anticipations, retour à la
moyenne ou modèle extrapolatif par exemple) et la « loi des petits nom-
bres » peuvent en effet expliquer de brusques ajustements des prix.
La théorie des perspectives peut apporter également des éléments d’expli-
cation à la volatilité des cours. D’après cette théorie, le point de référence
par rapport auquel on apprécie les gains ou les pertes a une influence
décisive sur l’aversion au risque. Autrement dit, cette aversion n’est pas la
même selon que l’investisseur a subi des pertes ou engrangé des gains
auparavant. En pratique, l’accumulation des mauvaises nouvelles retarde le
moment où les investisseurs se décident à vendre. Ce n’est que lorsqu’ils
considèrent que la perte est certaine qu’ils vendent leurs actifs, provoquant
alors une chute brutale des cours. La prise en compte du « contexte »,
comme le permet la théorie des perspectives, se révèle donc cruciale pour
comprendre la rationalité des investisseurs et donc les variations de prix.
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Pour illustrer plus précisément, l’intérêt de la finance comportementale
pour expliquer la volatilité excessive, signe d’une exubérance irrationnelle
d’après Shiller [1981], on peut citer le travail empirique de Naoui, K. et M.
Khaled [2010] qui montre, à partir d’un échantillon d’entreprises observées
quotidiennement sur la période 2006-2008, qu’effectivement, il existe une
volatilité excessive, mise en évidence par des tests de bornes de variance, et
une modélisation ARMA-EGARCH, en relation synchrone avec le volume de
transaction révélant des échanges intensifs entre investisseurs sur-confiants.
Les développements à attendre de l’enrichissement de la représentation
des comportements apparaissent donc prometteurs.

7. Conclusion

Si on considère l’ensemble des études sur l’efficience, celles dont les


résultats sont favorables à l’hypothèse semblent plus nombreuses que cel-
les qui la remettent en question, mais aucun des deux points de vue ne
saurait l’emporter sur des arguments comptables de ce type. Fama, à l’ori-
gine du développement de la théorie de l’efficience, s’est attaché à défendre
l’hypothèse depuis son article fondateur de 1970, et reste, à l’évidence,
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Catherine Bruneau ——————————————————————————————————————————————————— 709

convaincu de bien fondé de cette hypothèse, malgré les études assez nom-
breuses qui ont pu la remettre en question. Réexaminant l’impact des ano-
malies des marchés des actions sur l’efficience des marchés en 1998, il
conclut que l’hypothèse d’efficience des marchés résiste aux anomalies
mises en avant par la littérature. D’après lui, il existe en effet autant de
phénomènes de sur-réactions que de sous-réactions apparentes de même
que la prolongation des rendements anormaux avant et après événement
est aussi fréquente que le retournement. De plus, ces anomalies apparentes
s’expliquent, selon lui, par des problèmes de mesure et disparaissent si la
méthodologie est adaptée.
Cependant, il insiste aussi sur le fait qu’il ne faut pas considérer la ques-
tion comme fermée. En particulier, il suggère des pistes d’investigation tel-
les que le développement et le test de modèles de marchés en équilibre en
avenir incertain. Il est en effet crucial, d’après lui, de mieux comprendre le
processus de génération des rendements d’équilibre afin d’avoir un cadre
d’analyse plus riche pour développer des tests plus discriminants de l’hypo-
thèse d’efficience sur des marchés de titres différenciés.
On ne peut qu’être d’accord sur ces recommandations d’approfondisse-
ment, que ce soit sur le plan de la théorie économique ou sur le plan de la
mesure statistique. Sans prendre une position tranchée sur son bien-fondé,
on doit considérer que l’hypothèse d’efficience est une hypothèse de travail
intéressante lorsqu’on se confronte à la complexité du fonctionnement des
marchés financiers.
Si on conserve le cadre classique d’analyse, il est important de mener des
études statistiques de manière rigoureuse, en spécifiant de manière précise
la contrainte testée et son lien logique avec l’hypothèse d’efficience. Plus
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spécifiquement, il serait intéressant d’étudier comment l’efficience peut être
affectée par l’émergence d’une crise. Examiner ce qu’il advient des résultats
des tests sur la période récente incluant la dernière crise financière serait
instructif à ce titre, notamment pour savoir si cette crise – et plus générale-
ment toute crise – peut être endogénéïsée dans la caractérisation de l’effi-
cacité des marchés financiers.
Sur le plan de la formalisation, et notamment de la représentation des
comportements des agents, il faut attendre des progrès et peut être des
remises en cause assez radicale des modèles.
Il est clair par exemple que les modèles les plus couramment utilisés ne
tiennent pas compte du fait que la maîtrise de la théorie des probabilités par
les intervenants sur les marchés financiers n’est pas nécessairement acquise
sans compter que, fondamentalement, les individus sont souvent joueurs,
comme le souligne Roger [2013] : « L’insuffisante maîtrise des probabilités et
le goût pour le risque d’une portion non négligeable des investisseurs
engendrent une « anomalie », appelée « low volatility anomaly » ».
On peut noter ainsi que contrairement à ce qui est modélisé dans les
modèles les plus couramment utilisés (Markovitz, MEDAF, par exemple), les
analyses empiriques révèlent soit une absence de relation, soit une relation
inversée entre rendement espéré et risque. De fait, on observe que l’attrac-
tivité des actifs qui peuvent avoir une rentabilité très élevée, est forte, même
lorsque la probabilité de gains élevés est très faible. Par conséquent, ces
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710 ———————————— Comprendre la formation des prix des actifs financiers

titres sont surpayés et donc engendrent des rentabilités faibles, mais ils sont
aussi très volatils. La relation rentabilité/risque peut être alors inversée.
Il est donc important que la Finance comportementale continue à appro-
fondir l’analyse et la représentation du comportement des investisseurs.
Mais au-delà d’une description plus pertinente des comportements, il est
aussi essentiel d’étudier les conséquences de comportements « biaisés » sur
les prix et les rentabilités des actifs financiers. Comprendre ces consé-
quences est décisif pour l’exploitation des richesses véhiculées sur les mar-
chés financiers, à des fins d’épargne ou d’investissement, sans oublier
l’objectif d’une réglementation efficace pour éviter les défaillances graves
des marchés qui peuvent entraîner des périodes d’appauvrissement intolé-
rable. Alors on pourra peut-être plus sereinement parler d’efficience des
marchés financiers.

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