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LUTTE CONTRE L'ÉVASION FISCALE : L'ÉCHEC DE LA SDN DURANT

L'ENTRE-DEUX-GUERRES

Christophe Farquet

Altern. économiques | « L'Économie politique »

2009/4 n° 44 | pages 93 à 112


ISSN 1293-6146
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L’Economie politique

fiscale : l’échec de la SDN


Trimestriel-octobre 2009
Lutte contre l’évasion
p. 93

Lutte contre l’évasion


fiscale : l’échec de la SDN
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durant l’entre-deux-guerres
Christophe Farquet,
assistant en histoire contemporaine à l’université de Lausanne.

L
e secret des banques n’est pas un dogme international. » [1] Archives de la SDN
(ASDN) à Genève, EFS/
Cette assertion, qui pourrait provenir des communiqués DT/2e session/PV10,
des dernières réunions du G20, est extraite en réalité procès-verbal (PV)
du comité d’experts
d’un discours prononcé à la Société des nations (SDN) sur la double imposition
par le chef de l’administration fiscale belge, Charles Clavier, il y a plus et l’évasion fiscale (CE),
13 octobre 1923.
de quatre-vingt-cinq ans [1]. En effet, à la sortie de la Première Guerre
mondiale, en raison de l’accroissement très sensible des dépenses
publiques occasionné par le conflit et la reconstruction, la question
de l’évasion fiscale acquiert déjà une place de premier ordre dans
l’agenda politique des grands pays européens. L’augmentation
considérable de la charge d’imposition directe provoque en réaction
une importante fuite de capitaux vers des pays refuges assurant
l’inviolabilité du secret bancaire. De multiples sanctions et mesures
de contrôle unilatérales sont instaurées contre la fraude, mais il
apparaît rapidement que seule une collaboration multilatérale entre
les administrations fiscales se montrerait efficace afin d’atteindre les
avoirs exportés. L’organisation économique et financière (OEF) de la
SDN va être chargée en conséquence de pourparlers internationaux
sur ce problème au début des années 1920. ›››

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Lutte contre l’évasion
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p. 94 Le présent article offre ainsi pour la première fois un


éclairage global sur les circonstances qui ont conduit à l’ap-
parition de la question fiscale à la SDN, sur les dissensions
et les rapports de force en présence et enfin sur les facteurs
qui ont contribué à une atténuation marquée des pressions
à l’encontre des paradis fiscaux et de leurs secrets bancaires
dès la fin des années 1920 [2].

Il convient de relever tout d’abord combien cette théma­


[2] Cet article s'appuie sur tique, malgré son indéniable actualité, n’a éveillé que très
les recherches d’une thèse
de doctorat en cours sur peu l’attention des historiens. Les travaux de Godefroy et
l’histoire des négociations Lascoumes constituent, avant mes recherches, l’unique effort
de double imposition
durant l’entre-deux-guerres. d’utilisation historique des ressources des archives de la SDN
L’appareil de notes
a été réduit au minimum.
sur ces discussions fiscales [Godefroy et Lascoumes, 2004,
Le lecteur pourra se référer p. 134-138 ; cf. aussi Godefroy et Lascoumes, 2002, p. 55-68].
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à mes travaux précédents
pour des références plus Cherchant à retracer l’histoire de l’ensemble des mesures de
exhaustives [cf. Farquet, régulation de la finance offshore au XXe siècle, leur exposé du
2007 et 2009].
déroulement des pourparlers demeure néanmoins fragmentaire
et met l’accent essentiellement sur
les ressemblances les plus frap-
La finance offshore s’est développée pantes entre les débats à la SDN
en fait dès la fin du XIXe siècle et ceux qui ont cours aujourd’hui.
dans la contradiction systémique Pour parachever cette présenta-
entre l’expansion d’une économie tion du champ historiographique,
transnationale et le maintien il suffit de signaler encore l’exis-
de législations confinées tence de deux études : d’un côté,
aux frontières étatiques. un ouvrage pointu sur la manière
dont le problème de la taxation
des multinationales a été traité
dans les publications de la SDN [Picciotto, 1992, p. 1-37], et de
l’autre, une thèse de doctorat qui s’est penchée succinctement
sur les relations franco-suisses autour de ces débats fiscaux
[Schaufelbuehl, 2006, p. 362-374].

Cependant, en dépit de la relative indifférence qu’elles ont


suscitée jusqu’à présent, les discussions à la SDN ­marquent
l’échec originel d’une action contre l’évasion fiscale par les
organisations internationales et présentent à ce titre un
­d ouble intérêt. D’une part, ce n’est pas le moindre mérite
d’une analyse historique que de replacer les discussions
actuelles sur les paradis fiscaux dans un panorama plus large.
Les condamnations récentes formulées au G20 à l’encontre du
secret bancaire sont apparues comme une prise de conscience

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Lutte contre l’évasion
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collective face à des pratiques frauduleuses dont le dévelop- p. 95
pement serait en lien direct avec la spéculation financière
débridée de ces dernières années. Or, cette vision – qui par-
ticipe aux tentatives d’imputer les causes de la crise à des
comportements excessifs et d’écarter les questionnements
sur les tendances structurelles du
capitalisme – met des œillères à
la compréhension du phénomène Il serait erroné de déceler
de la finance offshore. Comme dans les discussions des commissions
l’ont relevé plusieurs ­études de fiscales de la SDN une action très
sciences politiques, celle-ci s’est soutenue contre la finance offshore.
développée en fait dès la fin du Car si la diffusion des accords contre
XIXe siècle dans la contradiction la double imposition a été réussie,
systémique entre l’expansion l’instauration d’une entraide sur
d’une économie transnationale et l’évasion fiscale a rapidement avorté.
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le maintien de législations confi-
nées aux frontières étatiques
[Palan, 2002 et 2003 ; Picciotto, 1999]. Visant précisément
à résoudre cet antagonisme par l’élaboration de normes
internationales, les discussions de la SDN se présentent donc
comme un terrain d’étude propice pour saisir concrètement
les conditions qui ont empêché une prohibition efficace des
paradis fiscaux au XXe siècle.

D’autre part, l’étude de la question fiscale donne la pos-


sibilité d’observer sous un nouvel angle les activités de
l’OEF, qui connaissent depuis quelques années un regain de
considération grâce au renouveau historiographique sur les
organisations internationales. Présentés à l’époque comme
des organes techniques et décrits comme tels par l’histoire
classique de l’institution genevoise [par exemple, Northedge,
1986, p. 169-174], les comités économiques et financiers de la
SDN sont envisagés désormais comme des lieux conflictuels
où s’entremêlent indistinctement expertise et négociations
économiques ; l’OEF est précurseur en ce sens des institutions
multilatérales contemporaines [Fior, 2008 ; Clavin et Wessels,
2005 ; Pauly, 1997, p. 44-78].

L’analyse des discussions des commissions fiscales de la


SDN – ancêtres en ligne directe des négociations de l’Organi-
sation des Nations unies (ONU) et de l’Organisation de coopé-
ration et de développement économiques (OCDE) – appuie ce
constat en raison des affrontements politiques dont elles ont ›››

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p. 96 été le théâtre. Il serait erroné pourtant d’y déceler une action


très soutenue contre la finance offshore. Car si la diffusion des
accords contre la double imposition – une autre problémati-
que débattue à Genève – a été réussie, l’instauration d’une
entraide sur l’évasion fiscale a rapidement avorté. Au lieu de
promouvoir la justice fiscale, la SDN a paradoxalement contri-
bué à soulager les charges des détenteurs de capitaux.

Le compromis ambigu de la conférence


de Gênes de 1922
L’émergence de la question fiscale sur la scène diploma­tique
s’insère dans les grands débats internationaux sur la stabili-
sation financière européenne de la fin de la Première Guerre
mondiale. Devant l’accumulation des déficits publics, la
charge d’imposition s’est certes alourdie fortement dans tous
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les pays belligérants, marquant une rupture profonde avec
le libéralisme fiscal du XIXe siècle. Toutefois, deux ­modèles
antagonistes ­ s’affrontent, entre
les Etats sortis vainqueurs de
Les partisans d’une intervention la guerre, sur la façon d’endi-
acceptent de renoncer à une résolution guer l’accroissement des dettes
qui appuie les mesures de contrôle publiques [Kindleberger, 1990,
des changes ; ils obtiennent p. 399-491 ; sur la fiscalité, cf.
en compensation un texte qui encourage Ardant, 1972, p. 493-515]. D’un
les échanges internationaux côté, les milieux dirigeants de la
de renseignements fiscaux. puissance financière britannique
promeuvent, au bénéfice de la
City, une politique bienveillante
à l’égard des capitalistes. Celle-ci se caractérise à l’interne
par une déflation rigoureuse afin d’assurer le raccrochage de
la livre sterling aux taux d’avant-guerre et par une volonté à
l’externe de libéralisation internationale des mouvements de
capitaux. A l’inverse, les autorités françaises et leurs alliés
belges et italiens écartent l’adoption de mesures rigoureuses
d’austérité budgétaire et tentent, pour couvrir les dépenses
publiques, d’exiger d’immenses réparations de guerre de la
part du gouvernement allemand et de contrôler plus étroite-
ment l’imposition des valeurs mobilières.

Or, très vite, l’application de cette seconde politique va


buter sur le problème récurrent de l’évasion des capitaux.
L’exode massif à l’étranger des avoirs devant l’impôt ali-
mente dans ces pays la dépréciation monétaire et retarde la

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r­ ésorption des déficits étatiques. En outre, il prive simultané- p. 97
ment le Reich des ressources fiscales nécessaires au paiement
des créances de guerre. Aussi, en avril et mai 1922, alors que
le cours du franc a amorcé une chute rapide depuis deux ans
et que l’Allemagne est sur le point d’entrer en hyperinflation,
les délégués français, italiens et belges soutiennent à la confé-
rence économique de Gênes une motion promouvant une col-
laboration internationale pour surveiller les capitaux exportés
[Fink, 1984]. Devant l’opposition du chancelier de l’Echiquier
britannique, le tory Robert Horne [3], qui défend à Gênes un
programme orthodoxe de retour à la normale financière du
siècle précédent, la conférence débouche sur un ­compromis,
suggéré par la délégation allemande : les partisans d’une
intervention acceptent de renoncer à une résolution qui
appuie les mesures de contrôle des changes pour lutter contre
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la fuite des capitaux ; ils obtiennent en compensation un texte
qui encourage les échanges internationaux de renseignements
fiscaux [4]. Comme de nombreuses autres questions discutées
à la conférence, le dossier est ensuite délégué au comité
financier de la SDN. [3] ASDN, R. 1608, PV
de la sous-commission des
devises de la commission
Cette résolution de Gênes établit, dans l’histoire de la financière de la conférence
lutte contre l’évasion fiscale, une rupture significative [5]. Elle de Gênes, 18 avril 1922.

aura une influence durant tout l’entre-deux-guerres par trois [4] ASDN, R. 1610,
mémorandum confidentiel
aspects. Premièrement, fait inédit, les discussions passent de Frank Nixon, directeur
sur le plan multilatéral. Il s’agit indéniablement d’une étape de l’OEF, mai 1922.

cruciale pour étendre l’entraide fiscale. Depuis la guerre, [5] Pour la résolution :
quelques accords bilatéraux prévoyant une collaboration pour ASDN, R. 1609,
« Conférence économique
fixer l’assiette globale d’imposition ont certes déjà été signés internationale de Gênes,
rapport de la commission
par l’Allemagne, l’Italie et des pays d’Europe centrale [6], mais financière (II) », avril 1922,
leur diffusion élargie se confronte irrémédiablement au danger résolution n° 13.

usuel de la fuite des capitaux dans un pays non signataire de [6] ASDN, F. 39,
la convention. Une solution multilatérale permettrait de pallier mémorandum du secrétariat
sur les conventions
ainsi cette objection derrière laquelle se protègent les défen- bilatérales existant
ou ayant existé en matière
seurs des paradis fiscaux. Deuxièmement, sur le modèle des de double imposition
conventions ratifiées par l’Allemagne, la résolution de Gênes et d’évasion fiscale,
29 mai 1923. Notons
consacre le lien entre la question de l’évasion fiscale et celle qu’avant la Grande Guerre,
de la double imposition, un problème qui concerne principale- un nombre très restreint
de conventions d’assistance
ment les multinationales, dont les profits sont taxés plusieurs fiscale sur les biens fonciers
et successoraux ont été
fois par les différents Etats qui abritent leurs établissements. conclues, notamment
Ce rapprochement – respecté encore de nos jours dans le par la France.

droit fiscal international – offre la possibilité aux partisans


d’une intervention contre l’évasion fiscale de soumettre la ›››

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p. 98 diminution des superpositions d’impôts à des contreparties


en matière d’échanges de renseignements.

Tandis que ces deux points appuient clairement la collabo-


ration internationale, le troisième aspect relevable du texte de
Gênes les contrebalance allègrement. Rédigée dans sa forme
finale par un comité d’experts convoqué par Horne et qui com-
prend plusieurs banquiers, la résolution de Gênes condamne
très explicitement « toute proposition tendant à entraver la
liberté du marché des changes ou
à violer le secret des relations entre
En accordant rien de moins les banquiers et leurs clients ». En
qu’une caution internationale accordant rien de moins qu’une
au secret bancaire, la conférence laisse caution internationale au secret
une marge de manœuvre très large aux bancaire, la conférence laisse
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milieux économiques quant donc une marge de manœuvre très
à l’application des futurs accords large aux milieux économiques
contre l’évasion fiscale. quant à l’application des futurs
accords contre l’évasion fiscale.
Produit d’un compromis bancal,
issu lui-même d’une controverse déterminante sur la structure
financière d’après-guerre, les discussions multilatérales sur
l’entraide fiscale se voient entachées dès leur origine d’une
restriction sensible de leur champ d’action.

Quelque ambiguë que soit la résolution de Gênes, une


mince brèche est percée en 1922 dans l’hermétisme des fron-
tières nationales aux échanges d’informations d’impôts. Si la
question d’un éventuel contrôle international sur les capitaux
allemands évadés pour assurer le règlement des créances de
guerre est progressivement écartée par la Commission des
réparations [cf. Weill-Raynal, 1947], les autorités françaises
et belges vont poursuivre sur cette base les initiatives contre
l’évasion fiscale du fait de la persistance d’une crise monétaire
dans ces deux Etats. Suite à une action les 6 et 8 juin 1922 au
comité financier de la SDN de la part de l’influent délégué du
gouvernement français, Joseph Avenol, et du directeur de la
banque centrale belge, Albert Janssen, une réunion regroupant
les chefs des administrations fiscales de la Belgique, de la
France, de la Grande-Bretagne, de l’Italie, des Pays-Bas, de la
Suisse et de la Tchécoslovaquie est mise sur pied [7]. Respec-
[7] ASDN, F/7e session/ tant la politique universaliste de l’OEF, ces hauts fonction-
PV1 et PV5, PV du comité
financier, 6 et 8 juin 1922. naires officieront à la SDN en nom personnel à titre d’experts

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et les décisions du comité se prendront à l’unanimité. Une p. 99
grande liberté leur est dès lors octroyée pour la détermination
du contenu des discussions.

Les conflits sur le secret bancaire


à la SDN (1923-1925)
De juin 1923 à février 1925, le nouveau comité de la SDN va
servir de tribune aux représentants des fiscs français et belge
pour tenter de stimuler de multiples démarches sur l’évasion
fiscale. En premier lieu, ceux-ci essaient d’assurer, dans l’op-
tique des futurs accords internationaux, d’un côté, l’indisso-
ciabilité de la question de la double imposition et de l’évasion
fiscale, et de l’autre, l’assouplissement de la garantie du
secret bancaire stipulée dans la résolution de Gênes. Repré-
sentant d’une administration qui a acquis depuis la guerre des
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pouvoirs de contrôle considérables sur les avoirs mobiliers, le
délégué français, Henri Baudouin-Bugnet, déclare dans ce but
qu’« aucune atteinte n’est portée au secret des banques par le
fait que les agents du fisc ont le droit de faire des recherches
dans les registres des banques »  [8]. Il est appuyé très fortement
par son homologue belge, Charles Clavier, qui n’a de cesse
d’invoquer « la moralité publique et […] la solidarité interna-
tionale » [9] pour blâmer les Etats favorisant l’importation de
capitaux frauduleux.

Parallèlement, l’offensive franco-belge est complétée par [8] ASDN, EFS/DT/


3e session/PV14, PV du CE,
des actions visant à encourager l’extension des contrôles fis- 7 avril 1924.
caux. D’une part, l’administration française met en cause des
[9] ASDN, EFS/DT/
pratiques dommageables d’évasion fiscale dont elle entend 1re session/PV10, PV du CE,
obtenir une dénonciation officielle par la SDN. C’est le cas par 8 juin 1923.

exemple du compte-joint, un système créé au siècle précédent [10] ASDN, EFS/DT/


4e session/PV5, PV du CE,
pour contourner les impôts de succession [Depuichault, 1911]. 22 octobre 1924.
Ce procédé étant prohibé dans la législation hexagonale, le
délégué français soutient une diffusion internationale de cette
interdiction afin d’enrayer le refuge de grosses fortunes fran-
çaises dans les coffres bancaires étrangers [10]. D’autre part,
Baudouin-Bugnet et Clavier font pression pour que le comité
reconnaisse l’utilité du bordereau de coupons, une mesure
de transmission automatique à l’administration du nom des
bénéficiaires de revenus mobiliers. Cette seconde démarche
­comporte une double visée, extérieure et intérieure. Une légiti-
mité donnée par la SDN au bordereau favoriserait son utilisation
en Europe par les administrations nationales, ce qui simpli­ ›››

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p. 100 fierait les échanges internationaux de renseignements fiscaux.


Du même coup, une telle caution court-circuiterait l’opposition
présentée jusqu’alors au bordereau en France et en Belgique,
où sa mise en œuvre s’est heurtée à la crainte que cette mesure
[11] ASDN, F. 40, n’accentue d’autant plus l’hémorragie de capitaux [11].
mémorandum de Baudouin-
Bugnet, 29 mai 1923 ; F. 47,
mémorandum de Clavier, Ces différentes propositions suscitent des réactions diver-
4 juin 1923.
gentes chez les autres délégués du comité de la SDN. Un
[12] ASDN, F. 48, exposé groupe composé des fonctionnaires des Etats italien, tché-
du délégué tchécoslovaque,
Vladimir Valnicek, 7 juin coslovaque et néerlandais les appuie modérément. Les admi-
1923 ; F. 144, mémorandum
du délégué italien, nistrations des deux premiers pays ont en effet augmenté
Pasquale d’Aroma, 31 mars sérieusement les contrôles fiscaux au début des années 1920
1924.
et ont déjà toutes deux participé à des négociations interna-
[13] ASDN, EFS/DT/ tionales sur l’entraide fiscale [12]. Quant au fisc des Pays-Bas,
2e session/PV10, PV du CE,
13 octobre 1923. pays neutre qui a échappé en partie à la crise financière de
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l’après-guerre, il a tout de même
fait un pas dans cette direction
Les représentants anglais et suisse puisque des prises de contact
ont reçu comme instruction de leur bilatérales sur la collaboration
gouvernement respectif de combattre contre l’évasion fiscale ont débuté
les initiatives françaises et belges. en 1923 avec la Belgique [13]. Il faut
Le Britannique Percy Thompson bien souligner que ces trois délé-
se montre très réticent à l’égard gués appellent cependant à une
des échanges de renseignement fiscaux grande précaution par rapport à
et souhaite encourager avant tout la signature de conventions très
la suppression des doubles impositions contraignantes contre l’évasion
sur les placements anglais à l’étranger. fiscale. Estimant que le renforce-
ment des pouvoirs des adminis-
trations fiscales en Europe consti-
tue une situation temporaire liée à la guerre, ils mettent
invariablement en garde contre les troubles monétaires que
pourraient engendrer des atteintes trop frontales portées au
secret bancaire.

Par contre, les représentants anglais et suisse tiennent


un discours beaucoup plus tranché : ils ont reçu comme
instruction de leur gouvernement respectif de combattre les
initiatives françaises et belges. Dans la continuité de la ligne
présentée à Gênes par son ministère des Finances, le Britan-
nique Percy Thompson se montre très réticent à l’égard des
échanges de renseignements fiscaux et souhaite encourager
avant tout la suppression des doubles impositions sur les
placements anglais à l’étranger. Pour contrer les velléités

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Lutte contre l’évasion
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franco-belges sur la taxation des valeurs mobilières, il se p. 101
retranche invariablement derrière une définition large du
secret bancaire dont, selon ses propos, en Grande-Bretagne
« l’opinion publique ne consentirait pas à la violation » [14]. Le
délégué suisse, Hans Blau, va encore plus loin dans le refus
de mesures de collaboration fiscale. Après des débats ­internes
au sein desquels s’est imposée la puissante organisation
de la finance helvétique, l’Association suisse des banquiers
(ASB), l’exécutif conservateur de
la Confédération a expressément
exigé de Blau qu’il écarte toute Le délégué suisse, Hans Blau,
possibilité de collaboration inter- écarte toute possibilité
nationale pour lutter contre l’éva- de collaboration internationale
sion fiscale. Cette position n’est pour lutter contre l’évasion fiscale.
pas surprenante quand on consi- La place financière de ce pays neutre
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dère que la place financière de ce connaît une croissance accélérée au
pays neutre – au bénéfice d’un début des années 1920 grâce à l’afflux
secret bancaire sorti intact de la de capitaux français et allemands.
période de guerre – connaît une
croissance accélérée au début des
années 1920 grâce à l’afflux de capitaux français et allemands [14] Ibid.
[Farquet, 2009, p. 102-105]. Le leitmotiv de la défense de Blau [15] ASDN, EFS/DT/
consiste alors à démontrer son incapacité à corroborer des 3e session/PV14, PV du CE,
7 avril 1924.
dispositifs centralisés de surveillance des capitaux à cause
de « l’organisation politique de la Suisse [qui] rend impossible
l’application de ces mesures. Les 22 cantons suisses sont sou-
verains en matière fiscale » [15].

Après les premiers échanges de vue en 1923 et au début de


1924, les conflits dans le comité vont atteindre leur paroxysme
dès la deuxième moitié de cette dernière année. Embourbée
dans une situation monétaire désastreuse, la nouvelle coali-
tion du Cartel des gauches, qui est arrivée au pouvoir en mai,
subit en France de très fortes attaques de la part des milieux
économiques à l’encontre de sa politique financière. Ceux-ci
exigent tout particulièrement une décision : l’abrogation du
bordereau de coupons qui a fini par être adopté unilatérale-
ment et sans l’appui de la SDN par le Parlement le 22 mars
[Sauvy, 1965, p. 383-385]. Ainsi, le nouveau délégué du fisc
français à la SDN, Marcel Borduge, secondé toujours par
­Clavier, cherche à obtenir dans l’urgence une simple résolu-
tion du comité de la SDN appuyant la pratique du bordereau
sans aucun engagement formel des gouvernements. Pourtant, ›››

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L’Economie politique

fiscale : l’échec de la SDN


Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet

p. 102 même cette exigence limitée ne rencontre aucune approbation


du camp anglo-suisse, qui n’a pas de mots assez durs pour
la discréditer. Selon le délégué du Trésor britannique Gerald
Canny, remplaçant momentané de Thompson dans le comité,
le bordereau est considéré en Grande-Bretagne comme « un
procédé inquisitorial donnant lieu à de la paperasserie inu-
tile » [16]. Blau qualifie pour sa part d’« odieux » [17] ce système
qui porterait atteinte, d’après lui, au secret bancaire suisse.

Devant cette intransigeance, Borduge doit menacer de


dénoncer publiquement l’attitude réticente à la collaboration
internationale des paradis fiscaux anglais et suisse pour
obtenir l’unanimité sur un compromis édulcoré dans le pre-
[16] ASDN, EFS/DT/
4e session/PV4, PV du CE, mier rapport de la commission publié en février 1925. Le texte
22 octobre 1924. formule dès lors des recommandations sur l’évasion fiscale
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[17] ASDN, EFS/DT/ desquelles il est difficile de déceler une ligne directrice [18].
5e session/PV3, PV du CE, Les commentaires mettent certes en évidence l’utilité des
3 février 1925.
échanges de renseignements fiscaux – automatiques ou sur
[18] ASDN, F. 212,
« Double imposition et demande – et la pertinence de lier le combat contre l’évasion
évasion fiscale. Rapport fiscale à l’élimination des doubles impositions. Néanmoins,
et résolutions présentés
par les experts techniques les résolutions promulguées par la SDN contiennent des
au comité financier
de la Société des nations »,
réserves déterminantes pour les gouvernements anglais et
7 février 1925. suisse : elles précisent qu’un accord contre l’évasion fiscale
devrait être conclu simultanément
par « le plus grand nombre possi-
Bien loin de raviver les conflits ble, sinon l’unanimité des Etats »,
sur l’évasion fiscale, afin d’éviter un exode de capitaux
la seconde phase des débats va voir dans des pays non parties prenan-
remarquablement disparaître tes. Cette phrase, en l’absence de
les attaques contre le secret bancaire. représentants de nombreux Etats
dans les discussions, rend très
hypothétique une possibilité de
régulation multilatérale. Le texte abandonne de plus toute
critique à l’encontre du laxisme de certaines autorités fiscales
en préconisant un respect des « pratiques fiscales actuelles »
dans la transmission d’informations.

Le rapport de 1925 constitue donc un outil très peu effi-


cace pour pousser les gouvernements réticents à étendre les
contrôles d’impôt ou pour les inciter à entrer en négociation
sur l’entraide fiscale. Deux réactions au texte de la SDN
ne laissent planer aucun doute sur sa valeur performative.
Les réserves formulées dans le texte satisfont largement le

L’Economie politique n° 44
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Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet
­ ouvernement suisse ; il y voit aussi bien une garantie de son
g p. 103
secret bancaire qu’une promesse de pouvoir rester encore
longtemps à l’écart des mesures internationales de colla-
boration fiscale. A l’inverse, en France, les bordereaux sont
abandonnés le 17 février 1925, soit quelques jours après la
fin de cette première partie des discussions qui a démontré
l’improbabilité de voir ce système se généraliser en Europe
[Farquet, 2009, p. 111-113].

Pris en étau à l’intérieur de leurs pays entre des critiques


mettant en cause leurs pratiques coercitives à l’égard des
possédants et l’évasion effective de la substance d’imposition
à l’étranger, les administrations française et belge ont tenté
entre 1923 et 1925 de transformer le comité de la SDN en un
lobby international d’action contre la fraude fiscale. De la part
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de fonctionnaires siégeant à titre personnel, elles ont attendu
autant un soutien à leur politique fiscale qu’une promesse de
collaboration multilatérale. Ces démarches se seront heurtées
en fin de compte au front soudé des négociateurs anglais et
suisse, mis au service des intérêts de leur place financière.

L’avortement des démarches multilatérales


contre l’évasion fiscale (1926-1928)
Après les compromis successifs du texte de Gênes et du
rapport de 1925, le dossier fiscal n’est pas classé à la SDN.
A partir de 1926, les débats s’orientent vers l’élaboration de
conventions-types sur l’évasion fiscale et la double imposi-
tion visant à servir de modèles dans les futures négociations
internationales. Le comité intègre de nouveaux représentants
d’administrations fiscales européennes et américaine avant
de mettre sur pied, du 22 au 31 octobre 1928, une conférence
internationale réunissant vingt-sept Etats. Ayant pour but de
reconnaître les modèles de la SDN comme base de pourpar-
lers, cette réunion débouchera sur la création à Genève d’un
comité fiscal permanent chargé d’encadrer la diffusion des
conventions.

Mais, bien loin de raviver les conflits sur l’évasion fiscale,


cette seconde phase des débats va voir remarquablement
disparaître les attaques contre le secret bancaire. Il n’est
désormais plus question, au sein du comité, de tenter d’éten-
dre les pratiques nationales d’imposition. Pour expliquer ce
renversement, trois facteurs – tous liés à l’atténuation des ›››

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Lutte contre l’évasion
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p. 104 troubles monétaires et à l’âge d’or que connaît la finance


internationale dans la deuxième moitié des années 1920 –
peuvent être avancés.

Tout d’abord, c’est l’élément déterminant, le camp des


partisans de mesures contre l’évasion fiscale se délite soudai-
nement avec le tournant à droite et la stabilisation monétaire
en France et en Belgique de l’été 1926 [sur la stabilisation fran-
çaise, cf. Mouré, 1998, p. 33-92]. Obtenu notamment grâce à
des crédits internationaux, l’arrêt de la dépréciation du change
provoque une dépolitisation de la question de l’évasion fiscale
dans ces deux pays. Pour consolider le retour à l’équilibre,
l’heure est à l’apaisement envers les milieux possédants, dont
il s’agit de gagner la confiance par
des mesures d’attraction de capi-
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En France et en Belgique, taux, à l’image de « la plus forte
l’arrêt de la dépréciation du change baisse de taux de toute l’histoire
provoque une dépolitisation de l’impôt sur le revenu en France »
de la question de l’évasion fiscale. décidée par le gouvernement de
Pour consolider le retour à l’équilibre, Raymond Poincaré [Piketty, 2001,
l’heure est à l’apaisement envers p. 267]. Les délégués français et
les milieux possédants, dont il s’agit belge abandonnent consécutive-
de gagner la confiance par des mesures ment dans la commission fiscale de
d’attraction de capitaux. la SDN leurs attaques ­véhémentes
à l’égard des paradis fiscaux. Le
plus virulent opposant au secret
bancaire à la SDN, le Belge Clavier, est même contraint de lire
devant le comité, en avril 1927, un communiqué officiel de son
ministère des Finances qui désavoue ouvertement son attitude
antérieure en prenant « les plus expresses réserves sur les
engagements nouveaux qui seraient suggérés dans le domaine
de l’assistance administrative en matière d’impôts » [19].

Ensuite, l’intégration à l’OEF des Etats-Unis vient, au même


moment, renforcer sensiblement le camp des libéraux au sein
des débats fiscaux de la SDN. Le chef de la délégation améri-
caine, le professeur de Yale Thomas Adams, se rend à la réunion
fiscale d’octobre 1928 dans le seul but de favoriser la réduction
des doubles impositions qui grèvent les nombreux investisse-
ments états-uniens en Europe. A une époque où une politique
de taxation très favorable aux milieux aisés s’impose dans son
[19] ASDN, EFS/DT/ pays, sous la conduite du secrétaire au Trésor américain, l’ultra­
8e session/PV5, PV du CE,
8 avril 1927. conservateur Andrew Mellon [cf. Krooss et Studenski, 1963,

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Lutte contre l’évasion
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p. 312-314], Adams n’accorde aucun égard à la lutte contre p. 105
l’évasion fiscale, considérée comme une entrave superflue à la
libéralisation financière. Son discours est pour le moins expédi-
tif : « Ce qui est essentiel dans l’œuvre actuelle, c’est de relever le
niveau moral du contribuable et d’obtenir sa loyale collaboration.
Le seul moyen de décourager les fraudeurs est de mettre fin à
tous les cas de double imposition » [20]. Dans le même sens, c’est
aussi sur une initiative américaine que, à l’intérieur des conven-
tions-types sur la double imposition, les filiales sont rayées de
la liste des établissements que le fisc est en droit de taxer sur
la base d’une répartition des bénéfices avec la maison mère.
Cette suppression réduit les moyens de parer aux manipula-
tions comptables que les multinationales effectuent entre leurs
entités. Toutefois, pour Adams,
la question n’a pas sa place dans
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une convention internationale : « Il A une époque où une politique
appartient à chaque Etat de veiller à de taxation très favorable aux milieux
ce que les compagnies situées sur aisés s’impose dans son pays,
son territoire tiennent des comptes sous la conduite du secrétaire
exacts » [21]. au Trésor américain,
l’ultraconservateur Andrew Mellon,
Enfin, la troisième condition Adams n’accorde aucun égard
qui favorise l’atténuation des à la lutte contre l’évasion fiscale,
démarches contre l’évasion fiscale considérée comme une entrave
à la SDN est à chercher dans la superflue à la libéralisation financière.
structure institutionnelle de l’OEF.
Les réunions des experts fiscaux
sont supervisées par le comité financier, un organe hybride [20] ASDN, DT/Réunion/
PV14, PV de la réunion des
réunissant des financiers privés, des banquiers centraux et experts gouvernementaux,
des représentants des ministères des Finances. Mais ses 30 octobre 1928.

­sièges sont rapidement « trustés » par des grandes person- [21] ASDN, DT/Réunion/
nalités du monde des affaires qui se présentent, durant les PV6, PV de la réunion des
experts gouvernementaux,
Roaring Twenties, comme les garants d’un internationalisme 24 octobre 1928.
libéral à forte consonance antiétatique [cf. Fior, 2008]. Aussi, [22] ASDN, F/18e session/
observant avec une méfiance non retenue les conférences PV7, PV du comité financier,
7 juin 1925.
de fonctionnaires fiscaux de la SDN, les membres du comité
financier vont influer sur leur déroulement par divers biais.

Les manœuvres débutent en juin 1925 lorsque ceux-ci


décident d’émettre, à l’égard des travaux fiscaux, une mise
en garde officielle sur « les inconvénients qu’il y aurait à porter
obstacle à la libre circulation internationale des capitaux » [22].
Action encore plus notable, le comité financier soutient, une ›››

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Lutte contre l’évasion
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p. 106 année plus tard, en 1926, l’entrée définitive dans les discus-
sions fiscales de la SDN de la Chambre de commerce interna-
tionale (CCI), une organisation privée représentante du monde
économique qui discute aussi de la double imposition depuis
la sortie de la guerre. Il suffit d’ajouter, pour comprendre la
nature de cette collaboration, que le délégué officiel de la CCI
[23] ASDN, EFS/DT/ ne sera autre qu’un membre de l’ASB, le banquier genevois
8e session/PV5, PV du CE,
8 avril 1927.
Robert Julliard, qui va dénoncer inlassablement devant les
fonctionnaires fiscaux « l’ingérence des pouvoirs publics dans
[24] ASDN, F/33e session/
PV3, PV du comité financier, la vie économique » [23].
6 décembre 1928.

[25] ASDN, Journal officiel, La dernière opération d’obstruction du comité financier


PV de la 53e session du s’effectue dans la foulée de la réunion de 1928. Alertés par
conseil, 14 décembre 1928.
la création d’une commission fiscale permanente, les ban-
[26] ASDN, C.562.
quiers demandent alors à ce que tous ses futurs rapports
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M.178.1928.II, « Rapport
présenté par la réunion transitent d’abord par eux « pour veiller, comme l’expose sans
générale des experts
gouvernementaux détours le représentant de la City, Henry Strakosch, à ce que les
en matière de double
imposition et d’évasion
­mesures qu’on prendra […] ne portent pas atteinte au secret des
fiscale », 31 octobre 1928. ­banques » [24]. Le conseil, l’organe exécutif de la SDN, ira fina-
lement plus loin en accordant en
décembre 1928 une place réser-
Le comité financier soutient, vée à deux membres du comité
en 1926, l’entrée définitive, financier au sein des discussions
dans les discussions fiscales fiscales [25].
de la SDN, de la Chambre
de commerce internationale (CCI). Tournant à droite en France
Le délégué officiel de la CCI et en Belgique, renforcement du
ne sera autre que le banquier front anti-interventionniste et sur-
genevois Robert Julliard, représentation des banquiers à
qui va dénoncer inlassablement l’OEF : à la fin des années 1920,
devant les fonctionnaires fiscaux le rapport de force international
« l’ingérence des pouvoirs publics ­penche donc nettement en faveur
dans la vie économique ». des libéraux, ce qui explique
l’abandon des critiques contre la
finance offshore. Il faut tout de
même préciser que les fonctionnaires fiscaux ne renoncent
pas à la rédaction de modèles de conventions sur l’échange
de renseignements. A la conférence d’octobre 1928, ceux-
ci en présentent deux, l’un sur la fixation de l’assiette de
l’impôt, l’autre sur le recouvrement des créances fiscales [26].
L’inclusion dès 1926 d’un ­délégué du Reich, le seul grand Etat
à avoir tissé un réseau important de conventions bilatérales
sur l’entraide fiscale, explique en partie la poursuite de ces

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Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet
travaux. Plusieurs représentants ne délaissent pas non plus p. 107
subitement l’ensemble de leurs convictions antérieures. Le
Français Borduge défend encore lui-même mollement les
projets contre la fraude sur lesquels, estime-t-il, « il ne faut
pas aller jusqu’à jeter un voile funèbre » [27]. Pour les raisons
évoquées auparavant, ces paroles sonnent cependant comme
un aveu d’impuissance. Le comité prend en effet soin d’inclure
dans les conventions-types toutes les objections émises dans
le rapport de 1925. Surtout, devant l’opposition que suscite
la lutte contre l’évasion fiscale auprès des superpuissances
financières anglo-saxonnes, l’idée d’une régulation multila-
térale est renvoyée au profit de la conclusion d’accords bila-
téraux entre Etats consentants. La publication des modèles
de conventions sur l’évasion fiscale est en définitive acceptée
à la réunion de 1928 dans l’indif-
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férence générale et sans que le
délégué états-unien ne prenne La SDN n’a non seulement pas servi
part à cette décision. de pilier à un accord multilatéral,
mais elle n’a ni dénoncé des pratiques
Dans son compte rendu de dommageables d’évasion fiscale,
cette conférence, The Economist ni déclenché un mouvement de signature
se plaît à dépeindre les fonction- d’accords bilatéraux sur l’échange
naires fiscaux réunis à Genève de renseignements.
comme « une meute de loups affa-
més, rôdant autour de la bergerie,
et qui discute […] des plus gros morceaux qui peuvent être [27] ASDN, DT/Réunion/
PV14, PV de la réunion des
arrachés le plus facilement des victimes » [28]. On ne saurait trop experts gouvernementaux,
dire à quel point le tableau du grand journal libéral anglais est 30 octobre 1928.

à rebours des tendances réelles qui se sont manifestées à la [28] The Economist,
réunion. Au crépuscule des années 1920, la conférence de la 15 décembre 1928.

SDN enterre pour près d’une décennie les pourparlers multila- [29] ASDN, « Recueil des
accords internationaux et
téraux sur l’évasion fiscale. L’organe institué pour poursuivre des dispositions de droit
la diffusion des traités fiscaux ne s’occupera plus de la ques- interne tendant à éviter
la double imposition et
tion de la transmission d’informations d’imposition ­jusqu’en l’évasion fiscale », 6 vol.,
1936. L’échec de cette première tentative de régulation de 1928-1936.

la finance offshore est patent. La SDN n’a non ­ seulement


pas servi de pilier à un accord multilatéral, mais elle n’a ni
dénoncé des pratiques dommageables d’évasion fiscale, ni
déclenché un mouvement de signature d’accords bilatéraux
sur l’échange de renseignements. Preuve du peu d’impact
de ces discussions à la SDN, aucune nouvelle convention sur
l’évasion fiscale n’est paraphée, de 1925 à 1929, entre des
Etats importants économiquement [29]. ›››

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Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet

p. 108 Conclusion : le mythe du succès technique


du comité fiscal de la SDN dans les années 1930
En 1938, pour défendre l’intérêt des travaux économiques
de la SDN, le directeur de l’OEF, Alexander Loveday, met
en ­exergue le « résultat stupéfiant » du comité fiscal [Love-
day, 1938, p. 790]. Fondée sur le constat de la diffusion
d’une soixantaine d’accords bilatéraux de double imposition
– dont la plupart sont conclus après 1929 – et sur la qualité
des ­études techniques publiées par le comité, cette idée a
été ­perpétuée par la suite dans plusieurs ouvrages. Même
­Picciotto, dans un très bon livre, en fait « un des succès tran-
quilles et méconnus de la Société » [1992, p. 36]. Regroupant
pour l’essentiel les fonctionnaires fiscaux présents dans les
précédents débats, ainsi que des représentants du comité
financier et de la CCI, le comité fiscal de la SDN institue sans
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doute un réseau de négociateurs qui accélère le mouve-
ment de signature des accords de double imposition. Si ces
délégués restent des porte-voix officieux de leur gouverne-
ment, ils acceptent à présent unanimement l’étiquette de
l’expertise apposée par l’OEF. Les discussions suivent dès
lors la tendance en cours à la fin
des années 1920 par l’adoption
La thématique de l’évasion fiscale de résolutions trouvant un vaste
internationale est remarquablement consensus et pouvant ensuite
négligée durant la Grande Dépression. être incluses dans les conventions
Il faut attendre en fait l’arrivée ­bilatérales.
au pouvoir du Front populaire
en France, en 1936, pour que Cette technicisation des dis-
des discussions multilatérales cussions cache pourtant un résul-
soient ravivées à la SDN. tat que les représentants de la
SDN se gardent bien de mention-
ner : le problème des échanges de
renseignements fiscaux, éminemment conflictuel, est de facto
écarté des discussions du comité. La thématique de l’évasion
fiscale internationale est ainsi remarquablement négligée à
Genève durant la Grande Dépression. Il faut attendre en fait
l’arrivée au pouvoir du Front populaire en France, en 1936,
pour que des discussions multilatérales soient ravivées à la
SDN. Comme quatorze ans auparavant à Gênes, c’est en sou-
lignant simultanément ses efforts pour éviter d’instituer un
contrôle des changes à l’égard des capitaux fuyant la France
socialiste que ce gouvernement en appelle à la collaboration
internationale en octobre 1936 à l’assemblée de la SDN, afin

L’Economie politique n° 44
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fiscale : l’échec de la SDN


Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet
d’empêcher que cette décision ne profite aux fraudeurs [30]. p. 109
Les possibilités d’un accord englobant une majorité d’Etats
sur la transmission d’informations sur les valeurs mobilières
sont réétudiées par le comité fiscal suite à cette démarche.
Sans succès : les réponses des gouvernements ne laissent
planer une nouvelle fois aucun doute sur l’impossibilité d’une
telle convention puisque dix pays, au premier rang desquels
la Grande-Bretagne et la Suisse, refusent catégoriquement
d’entrer en matière sur une régu-
lation multilatérale  [31]. Le comité
fiscal conclut laconiquement en Un élément d’importance
octobre 1938 : « les conventions s’est modifié dans la deuxième moitié
bilatérales restent seules pos- des années 1930 : l’adhésion
sibles »  [32]. C’est sur ce constat du gouvernement américain
d’échec que s’achèvent les débats à des accords bilatéraux sur l’évasion
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multilatéraux sur l’évasion fiscale fiscale, après l’arrivée au pouvoir
dans l’entre-deux-guerres. du démocrate Franklin Roosevelt
et de son secrétaire au Trésor,
Un élément d’importance le vigoureux opposant aux fraudeurs
s’est malgré tout modifié dans la Henry Morgenthau.
deuxième moitié des années 1930 :
l’adhésion du gouvernement amé-
ricain à des accords bilatéraux sur l’évasion fiscale, après [30] ASDN, journal officiel,
actes de la XVIIe assemblée,
l’arrivée au pouvoir du démocrate Franklin Roosevelt et de PV de la 2e commission,
son secrétaire au Trésor, le vigoureux opposant aux fraudeurs 5 octobre 1936.

Henry Morgenthau [cf. Thorndike, 2003]. La France, les Etats- [31] ASDN, F/Fiscal/95,
Unis et la Suède vont alors signer avant la Seconde Guerre « Observations
des gouvernements
mondiale des accords bilatéraux (Suède-France ; Etats-Unis- sur les propositions
du comité. Notes du
Suède ; France-Etats-Unis) qui prévoient, pour la première secrétariat », 8 septembre
fois de l’histoire du droit fiscal international, des échanges et 5 octobre 1937.

automatiques de renseignements fiscaux sur les valeurs [32] ASDN, F/Fiscal/104,


mobilières et les dépôts bancaires. Mais ces conventions ne rapport au conseil sur
les travaux de la 8e session
constituent que des exceptions isolées. Si l’on tire un bilan du comité fiscal tenue
du 17 au 20 octobre 1938.
global de la diffusion des traités bilatéraux durant l’entre-
deux-guerres, il est certain que les mesures d’entraide fiscale [33] Sur les conventions
fiscales conclues dans
se sont incomparablement moins répandues que celles contre l’entre-deux-guerres, cf. par
la double imposition. Sur la totalité des accords signés contre exemple ASDN, F/Fiscal/
111, Mitchell B. Carroll,
la superposition des taxes, près de la moitié ne sont liés à « La prévention de la double
imposition internationale
aucune disposition d’échange de renseignements. Quant et de l’évasion fiscale.
aux autres conventions, l’assistance sur l’évasion fiscale s’y Vingt ans de progrès sous
les auspices de la Société
résume encore pour un tiers d’entre elles environ à une courte
déclaration de principe énonçant la possibilité d’une collabo-
ration entre les administrations [33]. ›››

Octobre-novembre-décembre 2009
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fiscale : l’échec de la SDN


Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet

p. 110 Contrastant avec les apologies du comité fiscal, on ne peut


donc qu’adhérer au constat dressé à la fin des années 1930
par le spécialiste français André Piatier au sujet des efforts
internationaux effectués à partir de la conférence de Gênes :
« depuis cette date il est d’usage d’accoupler les problèmes de
la double imposition et de l’évasion fiscale et de ne traiter que
le premier » [1938, p. 7]. L’opposition des grandes puissances
financières – conjuguée à la préférence de la droite pour les
politiques d’attraction des capitaux et à la capacité d’interven-
tion des banquiers – aura permis de désamorcer à la SDN les
attaques contre les paradis fiscaux
nées des affrontements politiques
On ne peut qu’adhérer au constat au sujet du financement de la Pre-
dressé à la fin des années 1930 mière Guerre mondiale. Une fois
par le spécialiste français André Piatier la solution multilatérale sur l’éva-
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au sujet de la conférence de Gênes : sion fiscale écartée, les milieux
« depuis cette date il est d’usage possédants ont le champ libre
d’accoupler les problèmes de la double pour lever la rituelle menace de la
imposition et de l’évasion fiscale fuite des capitaux – remarquable
et de ne traiter que le premier ». prédiction autoréalisatrice – afin
d’entraver les nouvelles ­tentatives
unilatérales ou bilatérales de lutte
contre la finance offshore. Mieux, sous le couvert d’un dis-
cours techniciste, le comité fiscal se mue parallèlement en
un support dédié uniquement à l’émulation des accords de
double imposition favorables à leurs intérêts.

Au regard des multiples résonances entre les discussions


actuelles et celles de la SDN, la tentation serait grande de
pronostiquer en conclusion un échec à l’offensive entreprise
contre les paradis fiscaux depuis l’éclatement de la crise
financière en 2007 [sur ces démarches, cf. Chavagneux,
­Murphy et Palan, 2009]. Il n’empêche que les prises de posi-
tion communes des Etats-Unis et de l’Union européenne
contre le secret bancaire ainsi que l’extension des mesures
bilatérales d’échanges de renseignements fiscaux attestent
du chemin parcouru depuis les années 1920. Les pressions
ne restent plus confinées à des commissions d’experts et se
matérialisent dans des actions économiques concrètes. Pour
le dire rapidement, la collaboration internationale ne semble
plus être entravée, comme au temps de l’OEF, par un respect
absolu de la souveraineté fiscale. Les partisans d’une inter-
vention contre la finance offshore ne doivent pas pour autant

L’Economie politique n° 44
L’Economie politique

fiscale : l’échec de la SDN


Lutte contre l’évasion
Christophe Farquet
relâcher leur vigilance. C’est peut-être l’intérêt principal de p. 111
mon analyse des négociations à la SDN que de démontrer que
la question de la régulation de l’évasion fiscale, s’attaquant
à un trait fondamental du capitalisme, peut disparaître sans
coup férir de la scène internationale. ■

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Octobre-novembre-décembre 2009
L’Economie politique

fiscale : l’échec de la SDN


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