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Burmester Roger 2014 These
Burmester Roger 2014 These
par
Haroldo Roger Benghi Burmester
Faculté de musique
Novembre, 2014
Université de Montréal
Faculté des études superieures et postdoctorales
Comporre di fantasia : le stylus phantasticus dans le répertoire pour cordes pincées des XVIIe
et XVIIIe siècles
Présentée par
Haroldo Roger Benghi Burmester
ii
Résumé
Ce travail présente l’analyse de sept œuvres des XVII et XVIIIe siècles écrites pour
instruments à cordes pincées. Le but de l’analyse est de déterminer si ces pièces contiennent,
ou non, les éléments typiques des œuvres à caractère improvisé, connues sous le nom de «
style fantastique » ou stylus phantasticus. Basé sur les écrits théoriques référents de l’époque,
nous tenterons de trouver, à travers l’analyse de ces œuvres, les éléments caractéristiques de
ce style. Le cas échéant, cela permettrait aux musiciens d’approfondir leur connaissance dudit
style, leur permettant ainsi de prendre des décisions interprétatives cohérentes.
Mots-clés : baroque – analyse musicale – style fantastique – guitare baroque – luth – théorbe
Abstract
This research analyses seven musical works from the 17th and 18th centuries written for
plucked instruments, and aims to determine whether or not these works contain the typical
elements of music performed in an improvised manner known as “fantastic style” or stylus
phantasticus. Based on the period’s authoritative theoretical writings, we will analyze the
musical works in an attempt to find the characteristic elements of this style. Our findings may
allow musicians to deepen their knowledge of the style, and help them in making informed
interpretative decisions.
Keywords: baroque – musical analysis – fantastic style – baroque guitar – lute – theorbo
iii
TABLE DE MATIÈRES
1 Introduction .................................................................................................................... 1
1.1 Les oeuvres de structure libre pour luth et vihuela, au XVIe siècle ............................. 5
1.1 Le prelude et la toccata ................................................................................................. 6
1.1 La fantasia et le ricercar ............................................................................................... 9
1.1 Le tiento et le tastar de corde ....................................................................................... 11
3 Analyses .......................................................................................................................... 30
3.1 Toccata Seconda, de Domenico Pellegrini .................................................................... 30
3.2 Tastegiata detta la Feretti, de Giovanni Paolo Foscarini ............................................. 33
3.3 Toccata Nona, de Giovanni Girolamo Kapsberger ....................................................... 35
3.4 Toccata Quinta, de Giovanni Girolamo Kapsberger ..................................................... 38
3.5 Prélude en la mineur pour théorbe, de Robert de Visée .............................................. 43
3.6 Phantasia en la majeur, de David Kellner .................................................................... 46
3.7 Phantasia en re majeur, de David Kellner .................................................................... 50
4 Conclusion ....................................................................................................................... 54
Bibliographie ..................................................................................................................... 56
Annexe 1 ............................................................................................................................ 58
Annexe 2 ............................................................................................................................ 62
iv
LISTE D’EXEMPLES MUSICAUX
v
LISTE DE FAC-SIMILES
LISTE DE GRILLES
LISTE DE GRAPHIQUES
vi
Remerciements
A l'issue de la rédaction de cette recherche, je suis convaincue que la thèse est loin
d'être un travail solitaire. En effet, je n'aurais jamais pu réaliser ce travail doctoral sans le
soutien d'un grand nombre de personnes dont la générosité, la bonne humeur et l'intérêt
manifestés à l'égard de ma recherche m'ont permis de progresser dans cette domaine.
En premier lieu, je tiens à remercier mon directeur de recherche, monsieur Prof.
Sylvain Bergeron, pour la confiance qu'il m'a accordée en acceptant d'encadrer ce travail
doctoral, pour ses multiples conseils et pour toutes les heures qu'il a consacrées à diriger cette
recherche. J'aimerais également remercier à la co-directrice de recherche, Mme. Nathalie
Fernando, pour sa disponibilité et ses précieux conseils. Mes remerciements vont aussi au
professeur Peter McCutcheon, membre de jury et à Mme. Christiane Laflamme (Vice-
doyenne aux études en interprétation), dont la sensibilité et qualités humaines sont
inoubliables.
Je remercie également au corps enseignant de la Faculté de Musique de l’Université de
Montréal et aussi au personnel administratif, y compris la biblithécaire Mme. Christiane
Melançon.
J'adresse mille mercis au chirurgien plasticien Dr. Charles Guertin et à l’équipe
ergotherapeutes de l’Hopîtal Maisonneuve-Rosemont ; à l’ergothérapeute Mme. Isabelle
Quintal, du Centre Professionel d’ergothérapie de Montréal.
Je souhaiterais aussi adresser ma gratitude à Mme. Anne-Marie Leclerc pour les
révisions des textes à la langue française, au M. Henrique Pascoal, pour le soutien
technologique ; à Mme. Marcelle Guertin, Mme. Geneviève Soly et à Mme. Margaret Little;
au M. Luc Beauséjour et au M. Jean-Pierre Pinet ; à Hubi Miguel, Jivko Georgiev, Viviane
LeBlanc, Bruno Tavares, Louis Desjarlais, Claire Gignac, Vanessa Reis, Silvana Scarinci et
Alvaro Carlini, pour l’affection et amitié.
Enfin, je suis extrêmement reconnaissant à CAPES (Coordenação de Aperfeiçoamento
de Pessoal de Nível Superior), agence du gouvernement brésilien, pour l’indispensable aide
financière à la réalisation des mes études.
vii
Chapitre I
Les recherches sur la musique médiévale européenne ont démontré que les
instruments à cordes pincées étaient parmi les instruments musicaux actifs de cette
période historique. Ces instruments, tout comme d’autres instruments médiévaux, sont
originaires du Moyen-Orient et furent probablement introduits en Europe par
l’intermédiaire de la présence de la culture arabe à la péninsule Ibérique ainsi que par
les échanges commerciaux à la mer Méditerranée. L’iconographie de l’époque démontre
aussi la coexistence d’instruments de la famille du luth et de la famille des guitares.
Le musicien-instrumentiste était versatile, il improvisait et jouait des danses,
accompagnait des chanteurs et des ensembles instrumentaux. Le rôle de ces instruments
dans la musique de cette époque était principalement rythmique et mélodique, puisque
la technique était encore proche de celle du luth arabe, qui comprenait l’usage d’un
plectre pour produire le son. C’est à la fin du XVe siècle que la technique de jeu qui
consistait à utiliser les doigts de la main pour produire le jeu fut développée, ce qui a
permis la possibilité d’un jeu polyphonique. 6
Les premières publications et manuscrits de musique pour le luth sont apparus
au début du XVIe siècle, à Venise. À titre d’exemple, nous pouvons citer les
publications d’oeuvres de Joanambrosio Dalza, Francesco Spinacino et Franciscus
Bossinensis, par l’éditeur Ottaviano Petrucci entre 1507 et 1511, et le manuscrit de luth
de Vincenzo Capirola (1474-c.1548), aux alentours de 1517.
Il est possible de catégoriser le répertoire des instrumentistes du XVIe siècle
comme étant : 1) une musique vocale transcrite pour le luth (chansons, madrigaux,
motets, messes, etc, mises en tablature) ; 2) des versions instrumentales et des variations
sur des mélodies pré connues, comme des cantus firmus ; 3) des variations sur des
basses ostinati ou des séquences d’accords récurrents ; 4) des ricercares, fantaisies et
canzonas ; 5) des préludes (préambules) et toccatas ; 6) de la musique de danse ; 7) des
chansons composées précisément pour le luth et la voix.7 Cependant, il y a des genres
qui ont été plus cultivés à certains endroits plus que d’autres, à cause de la pluralité des
goûts et des cultures locales.
6
COELHO; POLK (2006, p. 531)
7
BROWN (1976, p.257)
5
Parmi tous ces genres de compositions, on y trouve des genres improvisés,
essentiellement instrumentaux, tels que la fantaisie, le ricercar, le prélude et la toccata,
soit des genres qui n’ont ni rapport avec la structure d’une chanson ou d’un texte
poétique, ni rapport avec la structure d’une danse. Ce sont ces genres qui seront ensuite
approchés.
6
Ex.2 – préamble in sol. ms.15-16
Source : ms. 1512
Un autre genre semblable au prélude est la toccata. Cette ressemblance est due
au fait que les deux genres avaient le rôle d’introduction ainsi qu’un caractère
improvisé. Le verbe tocare en italien, signifierait toucher, soit le clavier ou le manche
d’un instrument. Ainsi, les toccatas pouvaient avoir des éléments musicaux qui
mettaient en valeur les qualités idiomatiques pour lesquels les instruments ont été
conçus.
Dans la littérature pour les instruments de la famille du luth, encore au XVIe
siècle, le terme toccata est d’abord apparu en 1536, dans l'œuvre de Giovanni Antonio
Castiglione (c.1484-c.1557) intitulée Intabolatura de leuto de diversi autori pour le luth
de la Renaissance. Le genre toccata n’était pas beaucoup cultivé par les luthistes italiens
du XVIe siècle. Les genres préférés étaient la fantaisie et le ricercar. C’est à la fin du
ce siècle que d’autres exemples sont apparus, comme chez Giovanni Antonio Terzi
(c.1580-c.1600) et Michelangelo Galilei (1575-1631). L'auteur de la toccata du livre de
Castiglione est le célèbre luthiste italien Francesco da Milano (1497-1543), auteur de
référence dans la période d'or du luth. L’exemple suivant montre les premières mesures
de cette toccata, qui sont caractérisées par une gamme improvisée suivie d’un
contrepoint libre (sans cantus firmus) à deux voix :
7
Ex. 4 – Toccata. Francesco da Milano, ms. 1-5
Source: CHIESA (1971)
8
1.2 – La fantaisie et le ricercar
Le terme fantaisie signifie imagination, et c’est pour cette raison que les oeuvres
nommées fantaisie ont toujours été proches de l’acte de l’improvisation. Selon le
compositeur et vihueliste espagnol Luys Milán (c.1500-c.1561), ces oeuvres
proviennent « de la fantaisie et habilité de l’auteur qui l’a créé »8, ça veut dire, de sa
propre imagination. Pour le musicien et théoricien espagnol Tomás de Sancta Maria
(c.1510-1570), l’instrumentiste devrait savoir par coeur des modèles de cadences et des
procédés d’imitation, afin de les utiliser pendant l’improvisation d’une fantaisie.9 Le
théoricien italien Gioseffo Zarlino entendait par comporre di fantasia, le fait du
compositeur trouver le motif principal ou le sujet à être devéloppé ou imité pendant
l’acte de la composition et non avant.10 Si au niveau théorique la fantaisie est décrite
dans le contexte de la musique polyphonique, au niveau pratique, il est possible de voir
que les procédés de composition des fantaisies pouvaient être divers, de la même façon
que pour le prélude ou la toccata. Si on observe le répertoire des fantaisies publiées par
les luthistes du XVIe siècle, la plupart de ces oeuvres était composée de textures
polyphoniques imitatives et de plusieurs sections, limitées par des cadences. Bien
qu’elles constituent un genre purement instrumental, il y avait encore une influence de
la musique vocale, et en ce sens, certaines fantaisies ressemblent beaucoup, au niveau
de la texture, à des motets ou à des chansons françaises de compositeurs tels que
Josquin de Prés et ses contemporains.
Les fantaisies pouvaient être monothématiques ou polythématiques, basées sur
un cantus firmus, sur une mélodie connue (comme les fantaisies de parodie) ou sur un
ostinato (séquence de notes répétées). Elles pouvaient aussi avoir un un rôle didactique,
lorsque la caractéristique principale était une certaine questions techniques devant être
apprises ou développées par l’instrumentiste ou l’élève, notamment pour ce qui
concerne les diminutions et les accords. Le vihueliste espagnol Luys Milán a publié,
dans son livre de 1536 (El maestro), plusieurs fantaisies qu’il a appelées « de
consonancias y redobles » avec consonances et diminutions. Selon lui, les sections
d’accords devaient être jouées lentement, et les sections de diminutions devaient être
jouées rapidement. Dans ce cas, on voit clairement l’approche flexible par rapport au
8
COELHO; POLK. op. cit, p.548
9
SMITH (2011, p.133-134)
10
OWENS (1997, p.20)
9
tempo, comme dans une improvisation. Un exemple de ce genre est la fantaisie XIII de
Luys Milán, où on peut remarquer les redobles (gammes en croches) et les consonances
(accords) :
11
En guise d’exemple, la fantasia (Ness 28), est nomée fantasia dans l’Intabolatura de lauto di
Francesco da Milano, Libro Primo (Venice: Scotto, 1563, p.26-27), d’autre part, la même oeuvre est
nomé ricerchare, dans le manuscript « Livre de luth de Sienne » (f.° 66v). Voir d’autres concordances
chez NESS (1970, p.17-26)
10
Ex. 8 - Ricercar XXIII. Francesco da Milano, m. 1-5
Source: CHIESA (1971)
Le tento et le tastar de corda, sont des genres moins connus parmi les genres
improvisés de structure libre. Ils furent cultivés au début du XVIe siècle, le premier fut
développé exclusivement en Espagne et le dernier, en Italie. Le tento était aussi présent
dans la littérature pour instruments à clavier, au contraire du tastar de corda, qui était
joué seulement aux cordes pincées. L’exemple suivant montre les 10 premières mesures
du tentos del quinto y sexto tono de Luys Milan. On peut voir la même idée dans une
11
fantaisie de consonancias y redobles, en la présence des diminutions et des accords,
d’où une certaine difficulté à distinguer un genre de l’autre :
Ex. 11 – Tentos del quinto y sexto tono. Luys Milan, ms. 1-10
Source: CHIESA (1965)
12
COELHO ; POLK. op. cit, p.546
12
Ex. 12 – Tastar de corda. Joan Ambrosio Dalza, m. 1-11
Source: Intabulatura de lauto, libro quarto. Venise,1508
Synthèse
13
survécu et ont été adaptés à la nouvelle esthétique du XVIIe siècle, appelée seconda
prattica, comme il sera démontré ensuite.
14
Chapitre 2
Au XVIe siècle, les recherches sur la musique grecque entreprises en Italie, ont
suggéré que la musique monodique de cette ancienne culture était plus efficace pour
émouvoir les auditeurs que la polyphonie du XVIe siècle.13 Ce fait a encouragé les
musiciens et les théoriciens de l’époque à chercher de nouveaux moyens d’expression
musicale. L’effet de cette nouvelle pensée se retrouve dans les théories et compositions
musicales publiées en Italie à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle,
lesquelles s’inscrivent dans le contexte de la naissance de l’opéra.
La première et la plus importante publication a été Le Nuove Musiche de Giulio
Caccini, de 1601. Pour Caccini, la «nouvelle musique» se traduisait par des arias et des
récitatifs chantés par une seule voix. Ceux-ci étaient accompagnés par une ligne de
basse chiffrée sur laquelle les instrumentistes accompagnateurs devaient réaliser les
accords indiqués. Le but de l’accompagnement était de soutenir la voix et de renforcer
les affects exprimés dans le texte poétique chanté. Face à cette nouvelle musique, les
instruments se sont développés et d’autres ont été créés afin de s’adapter à cette
nouvelle esthétique. Comme conséquence, les techniques du jeu instrumental se sont
beaucoup développées et une nouvelle génération d’instrumentistes-compositeurs
virtuoses a émergé, dont le but était d’atteindre le même effet émouvant. Quoiqu’il y ait
déjà eu des genres instrumentaux bien émancipés des modèles vocaux du XVIe siècle,
comme on l’a vu dans le premier chapitre, la musique instrumentale recevait encore les
influences de la musique chantée.
13
PALISCA (2006, p.116)
15
rapport aux genres de structure libre, Thomas Morley (c.1557-1602), Michael Praetorius
(1571-1621) et Marin Mersenne (1588-1648) ont présenté quelques définitions.
14
MORLEY (1597, p.180-181)
16
et des changements de métrique, mais il ne faudrait pas trop s’éloigner ni déborder le
mode et le thème. On voit une influence de la théorie de Morley sur la compréhension
de la fantaisie par Praetorius, toutefois ce dernier a présenté plus de liberté lorsqu’il a
suggéré au musicien de ne pas « trop » s’éloigner des limites du mode et du thème.
La toccata, selon lui, était un genre de prélude improvisé par un claviériste avant
de jouer une pièce polyphonique telle qu’un motet ou une fugue. De plus, elle pouvait
disposer d’éléments comme des accords et des diminutions (lignes mélodiques
ornementales). Comme chaque instrumentiste avait sa propre façon de l’exécuter,
Praetorius a considéré inutile de la décrire de manière plus détaillée.15
Par rapport à la sonate, il a affirmé qu’il s’agissait d’oeuvres jouées
exclusivement par des instruments, comme la canzona, ce qui suggère une musique de
chambre. Praetorius a aussi mentionné que la sonate avait un caractère plus solennel et
sérieux, tout comme le motet, au contraire de la canzona qui avait un caractère plus
vivant avec des figures rythmiques plus rapides. La sinfonie aussi n’était jouée que par
des instruments, et pouvait être composée dans le style d’une toccata ou d’une danse,
comme la pavane ou la gaillarde par exemple. Elle pouvait être placée au début d’une
pièce, tout comme un prélude, ou au milieu des concerts.
15
PARK, (2008, p.40)
16
MERSENNE, (1636, p.164) apud PARK, (op.cit, p.23)
17
PARK, op.cit., loc. cit.
17
2.2 - Le Stylus Phantasticus, selon Athanasius Kircher (1650)
(…) propre aux instruments. Elle est la méthode de composition la plus libre et
la moins contraignante. Elle n'est soumise à rien, ni aux mots, ni à un sujet
mélodique. Elle a été conçue pour exposer l’ingéniosité et pour enseigner la
secrète conception de l'harmonie et l’ingénieuse composition de phrases
harmoniques et de fugues. Le stylus phantasticus est divisé en ces [oeuvres] qui
généralement sont appelées fantaisies, ricercatas, toccatas, et sonates. 19
(traduction libre)
Cette citation fait ressortir l’héritage des concepts relatifs aux genres de structure
libre donnés par les trois théoriciens cités. Les aspects tels que la liberté
compositionnelle, les genres de composition, la démonstration d’ingéniosité/habilité,
18
BIANCONI (1987, p.49)
19
The fantastic style is suitable to instruments. It is the most free and unrestrained method of composing;
it is bound to nothing, neither to words nor to a melodic subject; it was instituted to display genius and
to teach the hidden design of harmony, and the ingenious composition of harmonic phrases and
fugues; it is divided into those [pieces] which are commonly called fantasias, ricercatas, toccatas, and
sonatas. KIRCHER (1650, p.585) apud SNYDER (1987, p.254)
18
par exemple, confirment cet héritage. Une des raisons de cette ressemblance est le
rapport évident entre le mot fantaisie (phantasia, en latin médiéval) qui veut dire
imagination, idée, conception de l’esprit et l’adjectif fantastique (phantasticus en latin
médiéval) qui signifie « créé par l’imagination ; qui paraît créé par l’imagination ; ce
qui est irréel ».20 De plus, fantastique et fantaisie ont le même préfixe et la même
origine (du grecque phainein : faire apparaître), donc on peut penser à un genre de
musique imaginative où le musicien doit faire apparaître, en termes musicales, ses
images mentales créées sans rapport avec un texte poétique.
Kircher a illustré ce style avec cinq compositions, dans des sections distinctes de
sa publication, en 1650. Tous les exemples qu’il a choisis sont des oeuvres de
polyphonie imitative, avec développement du thème. Pour présenter le troisième
exemple, une fantaisie supra ut, ré, mi, fa, sol, la (FbWV201) de Johan Jakob Froberger
pour clavier, Kircher a écrit, en guise d'introduction :
On peut percevoir que Kircher n’a pas été aussi précis que Morley, Praetorius ou
Mersenne, pour indiquer des procédés de composition typiques du style, mais il a noté
20
GRECU (2007, p.89). Voir aussi Dictionnaire en ligne www.le-dictionnaire.com
21
Harpsichords, organs, regals and all multiplucked musical instruments…require compositions, which
indeed must be such, that with them the organist not only shows his own genius, but also with them as
preambles as it were he prepares and excites the spirits of the listeners for the entertainment of the
symphonic harmony that will follow. Many call harmonic compositions of this type praeludia, Italian
toccatas, sonatas, ricercatas, of which manner we present one, which J.Jacob Froberger, imperial
organist and formerly pupil of the most celebrated organist Hieronymus Frescobaldi made on ut, re,
mi, fa sol, la, prepared with such workmanship that whether you observe the most perfect method of
composition and of fugues, the order of things following themselves cleverly, or the remarkable change
of time, it seems that nothing at all can be missing; and therefore we consider it to be set out before all
organists as a most perfect example of composition of this kind, which they might imitate. KIRCHER
(1650, p.465) apud SNYDER (1987, p. 255)
19
qu’il était possible d’avoir la présence de deux éléments distincts, les « phrases/sections
harmoniques » et « fugues ». On a vu que chez Praetorious, le terme fugue voulait dire
un contexte de polyphonie imitatif.22 Donc, on peut déduire que les phrases/sections
harmoniques pouvaient avoir une autre texture que celle de la polyphonie. Aussi, on
peut remarquer la même idée que Praetorius, c’est-à-dire que ce genre d’oeuvre servait
de préludes pour « préparer les esprits des auditeurs » pour les oeuvres qui seront
présentées. Kircher a démontré l’importance des enchaînements de phrases harmoniques
et des sections imitatives, malgré que les exemples fournis par lui ne relèvent que de la
texture polyphonique.
Bien que le concept proposé par Kircher souligne le caractère libre de ces genres
de composition qui, selon lui, « ne sont soumis à rien, ni aux mots, ni à un sujet
mélodique », la présence de l’hexacorde dans la fantaisie de Froberger représente une
restriction à la liberté de composition, ce qui contredit le concept tel que pensé par
Kircher. Malgré cette contradiction, un autre aspect du concept est également évident :
l’ingéniosité du compositeur pour surmonter la restriction qu’il s’impose, en manipulant
l’hexacorde dans chaque section, soit par transpositions, soit par augmentation ou
diminution rythmique et autres procédés typiques des contextes imitatifs. La
manipulation de l’hexacorde devient un jeu difficile qui amusait le compositeur. Le
« remarquable changement de temps » dit par Kircher,23 a rapport avec les changements
de métrique mentionnés aussi par Morley et Praetorius, et présents dans la fantasia de
Froberger, comme on peut le vérifier à la cinquième mesure du fac-simile 1b (p.21)
ainsi qu’à la deuxième mesure du fac-simile 1c (p.22).
Dans les premières mesures de la première section, l’hexacorde apparaît d'abord
à la basse, puis est ensuite imité à l’alto :
22
Voir p. 15
23
Voir p. 18
20
Fac-símile 1a – Fantaisie de Froberger. Première section
Source: KIRCHER (1650)
21
Fac-simile 1c – Fantaisie de Froberger, changement de métrique, cinquième section
Source: KIRCHER (1650)
§88
Le terme fantaisie est généralement détesté, même si nous avons un style
de composition avec le même nom, qui est un favori et qui garde sa place
principalement dans l'orchestre et sur scène, non seulement pour les instruments,
mais aussi pour les chanteurs. En réalité, ce n'est pas tant l’acte d’écrire ou de
composer avec la plume, mais plutôt celui de chanter et de jouer qui se produit
spontanément, ou de façon extemporanée. Les Italiens appellent ce style a mente
[dans l’esprit] ou non a penna [pas écrit]. Bien que les dites fantaisie, Capriccie,
24
MATTHESON (1739) apud HARRISS (1981, p.216)
22
Toccate, Ricercare, etc., soient écrites ou imprimées, elles appartiennent
vraiment à ce style, tout comme les boutades et les préludes. 25 (traduction libre)
On peut observer que l'auteur a considéré que la fantaisie était proche de l’acte
de l’improvisation lorsqu'il a été informé qu’il ne s’agissait pas d’ « écrire ou (de)
composer avec la plume », mais au contraire, de procéder à une improvisation, qui était
entendue par les Italiens comme a mente (dans l’esprit), c’est-à-dire non écrite. La
fantaisie n’était pas seulement un genre de composition, mais aussi un terme générique
dont résultait une attitude spécifique face à l’exécution musicale, laquelle pouvait être
chantée ou jouée. Cependant, on peut constater que ces oeuvres de structure libre
peuvent également être écrites, toutefois, avec l'intention de sonner spontanément. En
plus de lier le terme fantaisie avec ceux de toccata, ricercares et caprices, Mattheson a
également inclus le prélude et la boutade26 en tant que représentant de ce style. Dans un
autre paragraphe, Mattheson mentionne :
§89
Les musiciens italiens prennent très souvent l'occasion de montrer leurs
idées, et ainsi se prévaloir de ce style pour le plaisir particulier du connaisseur.
Si la fantaisie est effectivement écrite, le chanteur ou l’instrumentiste étaient
donc sauvés du problème ; ou, qui est toujours mieux, le compositeur ne devait
que indiquer l'endroit approprié où cette spontanéité pouvait être utilisée comme
il veut. Telles [spontanéités] se produisent généralement à une cadence, que ce
soit à la fin ou n'importe où ailleurs. Mais il faut des esprits avertis qui sont plein
d'inventions et riches en toutes sortes de figures (parfois exagérés).27 (traduction
libre)
25
The name fantasy is normally detested; though we do have a style of writing with this name which is a
favorite and which maintain its place mainly with the orchestra and on stage, not only for instruments,
but also for vocalists. It actually consists not so much in the writing or composing with the pen, as in
singing and playing that occurs spontaneously, or as is said, extempore. The Italians call this style a
mente or non a penna. Though the so-called Fantasie, Capriccie, Toccate, Ricercare, etc.; be they
written down or printed, really belong here, not to mention the boutades and preludes. MATTHESON
(1739) apud HARRISS (1987, p.216)
26
Boutade: Au XVIIe siècle, le terme se réfère à une sorte de danse improvisée dans une suite de danses
instrumentales, notamment en France. Au début du XVIIIe siècle, le terme a été utilisé pour désigner
une brève fantaisie, habituellement jouée sur les claviers, ou une brève improvisation sur la viole de
gambe. Voir Boutade, In: SADIE (2001, v. 4, p.121-122)
27
Italian musicians very often take the opportunity to show off their ideas thus, and avail themselves of
this style to the special pleasure of the connoisseur; whether or not the fantasy were actually written
down and the vocalist or instrumentalist were thus saved the trouble; or, which is always better, the
composer were to do nothing further than to note the appropriate place where such spontaneity could
be employed as one wishes. Such commonly occurs at a cadence, be it at the end or anywhere else. But
this takes clever minds which are stock full of inventions and are rich in all sorts of figures (sometimes
overly so). MATTHESON (1739) apud HARRIS (1981, loc.cit.)
23
L'auteur évoque des questions qui touchent l’interprétation musicale, lorsqu'il
mentionne que ce style présentait de la spontanéité, laquelle pouvait être comprise
comme la liberté d’exécution des cadences aussi bien que l'utilisation des ornements
cadentiels. On remarque que dans le contexte de Mattheson, les pôles instrumentiste-
compositeur coexistaient toujours, depuis que les instrumentistes pouvaient interférer
dans la composition.
Alors que dans les publications en 1713 et 1717 il a seulement cité la définition
de stylus phantasticus présente dans le dictionnaire de Brossard, dans le chapitre 10 de
Der vollkommene Capellmeister (1739), Mattheson a fourni sa propre définition de ce
style, qu’il a compris comme styl phantastische :
§93
Ce style est le plus libre et le moins restreignant que l'on peut concevoir
pour composer, chanter et jouer, puisque l'on utilise parfois une idée et parfois
une autre, car on n’est limité ni par les mots ni par une mélodie, mais seulement
par l'harmonie, de sorte que les compétences des joueurs et des chanteurs
peuvent être révélées, puisque toutes sortes de passages autrement inhabituels,
ornements, mordants et embellissements ingénieux sont produits, sans
observation du temps et du ton, même si ceux-ci se produisent sur le papier ;
sans une mélodie ou un motif principal réguliers ; sans thème ou sujet qui
doivent être réalisés, parfois rapide, parfois lent, parfois avec une, parfois avec
plusieurs voix, et aussi parfois légèrement derrière la pulsation ; sans métrique ;
afin de plaire, éblouir et étonner. Ce sont les caractéristiques essentielles du style
fantastique. 28 (traduction libre)
Mattheson a utilisé des termes très proches de ceux utilisés par Kircher, quand il
a décrit le style comme « le plus libre et le moins restreignant que l'on peut concevoir
pour composer [...] on n’est limité ni par les mots ni par une mélodie ». En mettant en
évidence les caractéristiques rythmiques qui ne respectent pas un seul et même tempo
(« parfois rapide, parfois lent [...] parfois légèrement derrière la pulsation »), Mattheson
renvoie à une caractéristique d’une improvisation, d’un essai ou d’une recherche, où
naturellement l’instrumentiste va hésiter avant de prendre une décision ou un chemin à
28
For this style is the freest and least restricted style which one can devise for composing, singing, and
playing, since one sometimes uses one idea and sometimes another, since one is restricted by neither
words nor melody, but only by harmony, so that the singer’s or players’ skill can be revealed; since all
sorts of otherwise unusual passages, obscure ornaments, ingenious turns and embellishments are
produced, without close observation of the beat and pitch, though these do occur on the paper; without
a regular principal motif and melody, without theme and subject which would be performed;
sometimes fast, sometimes slow; sometimes with one sometimes with many voice parts; also sometimes
a little behind the beat; without meter; yet not without a view to pleasing, to dazzling and to
astonishing. Those are the essential characteristics of the fantasy style. MATTHESON (1739) apud
HARRIS (1981, p.217)
24
suivre. On peut percevoir aussi une ressemblance avec ce que les anciens théoriciens
comme Morley et Praetorius indiquaient concernant la métrique, qui selon Mattheson,
pouvait être suspendue. Une autre aspect qui semble hérité de Praetorius est
l’affirmation selon laquelle le style ne présentait pas un sujet principal, « puisque l’on
utilise parfois une idée, parfois une autre ». Mattheson a averti qu’il était possible
d’avoir parfois une, parfois plusieurs voix. Cette information peut suggérer la possibilité
d’avoir une mélodie accompagnée ainsi que des sections polyphoniques. Mattheson
continue sa description du style dans le paragraphe suivante :
§94
Dans ce style d'écriture, on n’est seulement limité que par les règles de
l'harmonie. Celui qui peut mettre à profit le plus d’ornements artistiques et les
inventions les plus rares fait le mieux. Et si par hasard un type de rythme un peu
rapide est introduit, il ne dure qu'un moment ; si aucun autre ne suit, la métrique
cesse. Les motifs et sujets principaux ne peuvent complètement être ignorés
uniquement en raison de la nature improvisée ; ils ne peuvent toutefois se faire
en séquence, et encore moins être joués souvent : d'où le fait que ces
compositeurs qui ajoutent des fugues formelles dans leurs fantaisies ou toccatas
ne maintiennent pas l'intégrité de ce style, car rien n'est plus contraire que l'ordre
et la contrainte. Et pourquoi une toccata, boutade ou capriccio ont besoin d’avoir
certaines tonalités dans lesquelles ils doivent conclure ? Ils ne peuvent pas
choisir la tonalité dans laquelle ils veulent terminer la pièce ? En effet, ils ne
doivent pas souvent passer d'une tonalité à une autre tonalité totalement opposée
et étrangère si une pièce régulière va suivre par la suite ? Cette condition est
observée aussi peu que la précédente et appartient aussi certainement aux
caractéristiques du style fantastique. 29 (traduction libre)
Selon Mattheson, les oeuvres de ce style n’avaient comme restriction que les
règles de l’harmonie, et toute sorte d’ordre ou contrainte étaient contraires au style.
C’est pour cette raison qu’il a affirmé que ceux qui ajoutent des fugues formelles à ce
genre de composition ne maintiennent pas l’intégrité du style. On voit aussi
l’importance de l’ornementation parfois inhabituelle, comme élément à être exécuté par
29
One is restricted in this style of writing only to the rules of harmony, to no others. Whoever can bring
to bear the most artistic embellishments and the rarest inventions does the best. And if occasionally a
rather fast type of beat slips in, it only lasts a moment; if no other follows, then the meter ceases. The
principal motifs and subjects cannot be completely ignored just because of the improvisatory nature;
they may however not be done in sequence, much less be regularly performed: hence those composers
who work out formal fugues in their fantasias or toccatas do not maintain the integrity of this style, for
nothing is so very contrary to it as order and constraint. And why should a toccata, boutade or
capriccio have certain keys in which they must conclude? can they not cease in whichever key they
want; indeed do they not often have to be led from one key into a second entirely opposed and strange
key if a regular song is to follow afterwards? This circumstance is observed just as little as the
preceding one, and yet it certainly belongs among the characteristics of the fantasy style. Idem, op.cit.,
loc. cit.
25
l’instrumentiste, comme un geste improvisée, de façon à montrer son
habilité/ingéniosité. La présence des morceaux polyphoniques était permise, mais ils
devaient être intercalés avec d’autres sections et ils ne devaient pas être toujours
présents. En ce qui concerne le fait de finir les oeuvres dans une autre tonalité, il est
possible de penser que ça pouvait arriver selon le contexte. Si les oeuvres du stylus
phantasticus pouvait jouer le rôle de prélude pour d’autres pièces, elles pouvaient
préparer la tonalité de la pièce suivante, laquelle était dans une autre tonalité. Si les
oeuvres étaient des pièces autonomes ou si les pièces suivantes étaient dans le même
ton, l’instrumentiste pouvait finir dans le ton principal. Mattheson a choisi deux
exemples pour illustrer le concept de stylus phantasticus, dont le crédit revient à
Froberger. Selon Snyder, aucun des exemples choisis ne figure parmi les œuvres les
plus connues de Froberger, et les toccatas restantes commencent avec des accords
lents.30 La musicologue a également noté que le premier exemple (fac-simile 2) se
réfère aux premières mesures d'un prélude à Buxtehude (BuxWV162):
30
SNYDER (2007, p.250)
26
Fac-simile 3 – Début d’une fantaisie de Froberger
Source: HARRISS (1987)
[...] ce qui était « fantastique » à l'intellect pour Kircher, l’a été à l’oreille pour
Mattheson, dont l'esthétique était dans « l’immédiateté », dans laquelle les
31
Ibid., p.254
32
Kircher’s stylus phantasticus demonstrates the skill of the composer, chiefly through contrapuntual
artifice; Mattheson’s stylus phantasticus demonstrates the improvisatory skill of the performer and
rejects formal fugues. SNYDER (2007, p.253). Ce point de vue est également partagé par Zink. Voir
ZINK (1991, p.9-10)
27
caractéristiques de la surface d'une oeuvre sont cruciales, car celles-ci sont le
plus facilement perçues et ainsi, la meilleure façon d’émouvoir les auditeurs.33
(traduction libre)
Par rapport à l'analyse d’œuvres du XVIIe siècle qui appartiennent aux genres que
recouvrenent les concepts de Kircher et Mattheson, Collins questionne quel critère
théorique devrait être utilisé. Selon l'auteur, on peut utiliser les deux lentilles, « parce
que chaque approche éclaire les différentes facettes de l'œuvre ». 34
Zink a confirmé une tendance plus équilibrée entre les chercheurs modernes, et a
souligné que les discussions analytiques sur les œuvres qui présentent des
caractéristiques du stylus phantasticus se concentrent généralement sur les passages
avec des procédés non imitatifs de composition. Cependant, Zink a noté que les
instrumentistes des XVIIe et XVIIIe siècles improvisaient régulièrement des fugues et
d’autres œuvres polyphoniques et a déclaré que « les textures de fugue ne peuvent pas
être considérées contraires au style, alors même qu'elles ont été décrites par
Mattheson. » 35
Selon Collins et Brewer, après la première présentation du stylus phantasticus
par Kircher en 1650, la compréhension du style a été développée au fil des ans. Les
modifications ont eu lieu dans les dictionnaires de musique de Tomas Baltazar Janovka
(Prague, 1701), Sébastien de Brossard (Paris, 1703), Johann Gottfried Walther (Leipzig,
1732), James Grassineau (Londres, 1740) et dans les écrits de Mattheson. Le style, qui
pour Kircher était le résultat d’un procédé rationel du musicien/compositeur, est devenu,
pour Mathesson, le résultat de l’acte spontané de l’instrumentiste/improvisateur.36 Sans
doute, les écrits de Kircher ont eu une forte influence en ce qui a trait aux réflexions sur
les classifications de styles et sur la définition du stylus phantasticus présentés plus tard.
33
What was “fantastic” to the intellect for Kircher was so to the ear for Mattheson, whose aesthetic was
one “of immediacy, one in wich the superficial features of a work are decisive, since these are the most
easily perceived and therefore the best means for moving the listener. MARCO (1956, p.78) Guy A.
Zarlino on Counterpoint: An Indexed Annotated Translation of the Istitutioni Harmoniche, Book III,
with a Glossary and Commentary. Thèse (Doctorat en Musique) –Université de Chicago, 1956. p.78,
apud COLLINS (2008, p.60)
34
COLLINS (2008, p. 70)
35
ZINK (1991, p.10)
36
COLLINS (2008, p.53-70) ; BREWER (2011, p.357)
28
Synthèse
37
PARK (2008, p.23)
29
Chapitre 3
3 – Analyses
Après avoir traité des descriptions des genres de structure libre et des
caractéristiques du stylus phantasticus selon les théoriciens, on va dans ce chapitre
vérifier par l’analyse si les oeuvres choisies y correspondent bien.
30
Ex. 14 – Toccata Seconda, ms.1-11
31
Ex. 16 – Toccata Seconda, ms.19-26
Le découpage de cette toccata est clair, une fois indiqués par le compositeur
l’Allegro et Adagio respectivement des sections centrales et finales de l’oeuvre. Le
tableau suivant démontre les contrastes de texture, de tempo et de caractère :
Cette toccata présente des éléments contrastants entre les trois sections. La
première, qui est improvisée et virtuose, requiert une approche rythmique plus libre
(même si elle est mesurée) pour donner un effet de spontanéité. La deuxième section
(Allegro), de texture polyphonique, demande une approche rythmique plus constante,
32
plus stable. La troisième section (Adagio) présente un grand contraste par rapport à la
deuxième, le tempo doit être plus lent ; la texture est homophonique et pleine de
dissonances.
3.2 – Il terzo libro della chitarra spagnola (1629) : Tastegiata detta la Feretti, de
Giovanni Paolo Foscarini
33
Ex. 19 – Tastegiata, ms.5-9
34
éléments typiques d’une mélodie accompagnée d’où se distinguent d’autres voix plus
autonomes, ce qui contribue à créer une texture plus polyphonique à certains endroits.
Quoique ce genre de composition n’ait pas été cité comme relevant d’une oeuvre
de stylus phantasticus, ni par Kircher ni par Mathesson, l’exploration des dissonances et
des suspensions, la présence d’un motif annoncé et non développé, le contraste de
textures et d’affects entre les trois premières sections et le geste virtuose de la coda
fournissent des preuves suffisantes pour les inclure dans ce style.
35
toccata de Francesco da Milano (Ex.4, p.8) et au ricercar I de Vincenzo Capirola
(Ex.10, p.11), dans lesquels un passagio est utilisé pour attirer l’attention de l’auditeur.
Cette section est délimitée par une cadence à la dominante mineure, ornée par la
technique de campanella :
36
On voit un bref changement de texture (ms.12-13) où les arpèges de la mineur et
de mi mineur, en croches, font contraste avec les motifs rythmiques des figures
ponctuées (ms. 6-11). À nouveau, les imitations sont présentes (m.14), mais elles
deviennent plus fluides parce que le motif imité est une gamme ascendante de rythme
constant. La basse devient plus active pour annoncer la cadence à la dominante (m.19),
qui prépare la section suivante :
La dernière section commence avec une anacrouse à la mesure 19, laquelle mène
à ré mineur. Le même motif mélodique utilisé à l’ouverture (m. 1), transposé à ré
mineur, est repris par le compositeur, ce qui démontre l’usage d’un matériau mélodique
similaire à celui que l’on retrouve à l’ouverture de la dernière section. L’ornement en
campanella est immédiatement répété trois fois :
37
Ex. 26 – Toccata Nona, m. 23-27
38
oeuvre vocal et instrumental. La toccata commence avec une triade de sol majeur en
position fondamentale, ornée avec des notes de passage sur les temps faibles, résultant
une pédale de sol jusqu’à la mesure 13. Cette pédale de 13 mesures provoque une
sensation d’immobilité et de stabilité tonale. La tablature originale indique que
l’instrumentiste doit jouer l’accord de sol majeur sur deux positions distinctes sur le
manche de l’instrument, dans les trois premières mesures. Ce choix du compositeur peut
avoir un rapport avec le geste de vérification de la bonne position des frettes et la façon
dont l’instrument est accordé, comme s’il était un tastar de corde, ou tasteggio. Le
symbole signifie «arpège» à la tablature originale :
39
Dans la mesure 27, le motif apparaît au ton de la dominante, augmenté
rythmiquement à la basse. Alors que le motif de canzone à sa version de base (a) occupe
trois mesures, le motif à la basse transformé par augmentation rythmique (a’) occupe
cinq mesures, ce qui permet le développement musical des autres voix. L'interprète a
des conditions techniques pour soutenir les notes éditoriales (entre parenthèses) à
travers un bon doigté de main gauche, ce qui rend cette augmentation motivique
perceptible :
L'exemple suivant montre que le motif a aussi subi une transformation par
diminution rythmique (a'') à la voix du soprano (m.38-41). La cadence 4-3 qui a été
préparée par la suspension à l’alto frustre les atteintes de l'auditeur quand la sensible est
laissée en suspens, sans conclusion. (m.41) :
40
Si le compositeur savait développer le motif par diminution et augmentation,
dans la section imitative, il a démontré sa connaissance de l’écriture contrapuntique, en
contraste avec l’ouverture, où il a démontré sa facette « instrumentiste improvisateur ».
Après la section centrale de texture polyphonique, on voit huit mesures où la
polyphonie commence à devenir plus légère, à cause de la présence d’accords. Cet
interlude prépare l’entrée de la section suivante :
39
COELHO (1987, p.148)
41
Ex. 33 – Toccata Quinta, m.62-72
42
caractéristique a été adoptée par les claviéristes et autres instrumentistes, et a influencé
des compositeurs tels que Johann Schmelzer (c.1620-1680), Heinrich Biber (1644-
1704) et Dietrich Buxtehude (1637-1707).
Dans une brève analyse du répertoire français d’oeuvres de structure libre pour
cordes pincées du début du XVIIe siècle, on peut remarquer la présence des fantaisies,
des entrées et des préludes. Ces derniers genres étaient les plus cultivés, en tant
qu’entrées pour suites de danses et ballets de la cour. Un genre assez spécial et unique
dans l’histoire de la musique était connu comme prélude non mesuré. Ces préludes ont
eu comme origine les improvisations produites par des luthistes tels que les cousins
Denis et Ennemond Gautier. Ces préludes improvisés, d’écriture non mesurée (sans
barres de mesure et parfois, sans symboles rythmiques) ont été adoptés par les
claviéristes, qui ont amené cet art à l’extrême, et étaient en vogue jusqu’au début du
XVIIIe siècle.
Dans le manuscrit Vaudry de Saizenay, on trouve un bon exemple de ce genre de
composition pour théorbe, composé en la mineur par le célèbre luthiste français Robert
de Visée. Gérard Rebours a publié un article où il a démontré la caractéristique
improvisée de ce prélude, en comparant plusieurs sources de cette même pièce. Selon
l’auteur, toutes les versions sont valides, ce qui démontre d’un coté l’absence d’une
version « officielle », et de l’autre, le rôle de l’interprète-improvisateur qui interfère
avec la composition musicale.40
La section d’ouverture (A) a comme caractéristique des mélodies ornementales
en doubles-croches qui mettent en valeur l’effet idiomatique du théorbe, la campanella.
Ces mélodies sont accompagnées par la basse, donc on a principalement une texture à
deux voix, sauf pour certains accords où d’autres voix se sont ajoutées :
40
REBOURS (2012, p.3)
43
Ex.34 – Prélude en la mineur, porté 1-2
44
idiomatiques de la théorbe, la campanella et le strascino, afin de démontrer la virtuosité
de l’instrumentiste. Celui-ci pouvait supprimer cette gamme, selon ce qu’a démontré
Rebours, et ce, sans préjudice pour le contenu du discours musical.
41
REBOURS (2012, p.3)
45
d’imagination, sa virtuosité technique et aussi son ingéniosité, afin d’émouvoir
l’auditeur.
3.6 – XVI Auserlesene Lauten Stucke (1747) : Phantasia en la majeur pour luth
baroque, de David Kellner (1670-1748)
46
Cette ouverture peut être découpée en deux parties, dont la deuxième qui
commence à la mesure 6 après la cadence V-I et qui présente une texture davantage
mixte, à cause d’une troisième voix plus indépendante, apparaissant à la mesure 6 et 7.
On voit aussi la présence d’accords arpégés au style brisé, ou style luthé, pour les
claviéristes qui ont adopté la technique :
47
Ex. 39 –Phantasia en la majeur, Gigue, ms.13-33
Les caractéristiques plus frappantes de cette section sont les lignes chromatiques
descendantes (encerclées) au soprano et à la basse. Une autre instabilité harmonique est
causée par la dualité entre la majeur et mineur à la fin des deux dernières
48
phrases (ms.117 et 121) et en raison de l’absence de la tierce à la tonique après les
cadences (ms.118 et 122) :
49
3.7 – XVI Auserlesene Lauten Stucke (1747) : Phantasia en ré majeur, David Kellner
(1670-1748)
Pour l’arpège, le compositeur profite des cordes à vide pour avoir l’effet du
campanella.
Après cet allegro (ms.1-5), qui souligne toujours la tonique, le compositeur
demande une autre approche rythmique, indiquée par « un poco adagio » au style brisé,
qui ne dure que trois mesures, jusqu’à la moitié de la mesure 8. De nouveau, un autre
tempo doit être pris par l’interprète. Cette fois, il est indiqué « presto » pour le
mouvement cadentiel de l’ouverture, au deuxième temps de la mesure 8. On y retrouve
la caractéristique des gammes en demi-croches qui soulignent la tonalité de la
dominante, jusqu’à la mesure 11 :
Après la cadence V-I à la mesure 11, une autre section, qui présente un contraste
encore plus frappant, commence à la mesure 12. Ce contraste est établi par le
50
changement de métrique, de quaternaire à ternaire. Les notes en croches sont des
arpèges, ce qui provoque aussi un contraste au niveau de la texture :
51
Ex. 46 – Phantasia en ré majeur, ms.25-30
52
Dans le tableau ci-dessous, nous pouvons avoir une vue générale de la fantaisie :
Synthèse
L’annexe 1 contient la grille 2 (p.60) qui démontre les occurrences des procédés
de composition caractéristiques de la fantaisie et du stylus phantasticus dans chaque
oeuvre analysée, pour lesquelles nous indiquons la mesure où ils se produisent. Le
graphique 1 (p.61) démontre parmi l’ensemble des sept oeuvres analysées, le nombre
d’oeuvres dans lesquels on trouve la présence de chaque caractéristique du style, tel
qu’énumérée.
53
Conclusion
54
d’un interprète/improvisateur sur scène. Les deux points de vue théoriques sont valides
pour l’approche analytique des oeuvres du XVIIe et XVIIIe siècles, parce que chacun de
ces points de vue nous éclaire sur des aspects distincts d’une oeuvre.
Après avoir analysé les oeuvres choisies en vue de trouver les procédés de
composition caractéristiques de la fantaisie et du stylus phantasticus décrites par les
théoriciens du XVII et XVIIe siècles et présentés au deuxième chapitre (voir grille 8), je
peux conclure que sur plusieurs aspects, celles-ci y correspondent bien. Les
compositions ont présenté des gestes improvisés, des sections contrastantes au niveau
de la texture, du tempo, de la métrique et des affects ; des syncopes et des dissonances,
des gestes virtuoses et surprenants, toujours en vue d’éblouir et d’étonner l’auditeur.
Lorsque les luthistes pouvaient jouer dans différents milieux musicaux, ils ont
absorbé et disseminé différentes possibilités d’intérpretation et expression musicales, et
ont aidé à maintenir et à propager les genres improvisés et le stylus phantasticus. Ils ont
apporté à la musique instrumentale de nouveaux répertoires et de nouvelles techniques
de composition, lesquelles ont été adoptées par les interprètes d’autres instruments.
Dans les manuscrits et publications du XVIIe et XVIIIe siècles, il reste encore
un grand corpus d’oeuvres pour les instruments à cordes pincées qui appartient à ce
style, et qui peuvent être approchés selon ce point de vue. Cette approche et les
réflexions qu’elle peut provoquer, peuvent apporter de nouvelles conclusions et enrichir
la culture de cette musique « imaginative ». Si l’instrumentiste moderne connaît les
caractéristiques du style et son but artistique, il peut prendre des décisions
interprétatives plus cohérentes et efficaces dans l’intention de rendre l’interprétation
plus émouvante et surprenante.
55
BIBLIOGRAPHIE
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contemporaries. Farnham: Ashgate Publishing Limited, 2011.
COELHO, Victor A.; POLK, Keith. Instrumental Music. In: European Music, 1520-
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COLLINS, Paul. The Stylus Phantasticus and Free Keyboard Music of the North
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56
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SANGUINETTI, Giorgio. The art of Partimento: History, Theory and Practice. New
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ZINK, Gary D. Athanasius Kircher’s Stylus Phantasticus and the Viennese Ensemble
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Washington University Press, 1991.
SOURCES MUSICALES:
CHIESA, Ruggero. El Maestro. Compozitioni per sola vihuela, de Luys Milan, vol. I et
2. Milan: Edizioni Suvini Zerboni, 1965.
57
ANNEXE I
58
59
Grille 8 : Caractéristiques de la fantaisie et du stylus phantasticus, selon les théories du XVI et XVIIe siècles
Morley (1597) Praetorius (1619) Mersenne (1636) Kircher (1650) Mattheson (1739)
Préparer les
esprits (préludes) ;
Préludes ; révéler les
Démontrer les Introduction, comme exposer l’ingéniosité ;
Faire un mouvement et un compétences des joueurs et
Objectif connaissances sur les préludes ; montrer l’habilité enseigner l'harmonie et la
air agréable à l’oreille des chanteurs ; plaire, éblouir
procédés de composition et l’ingéniosité artistiques composition de phrases
et étonner
harmoniques et des
fugues
La moins contraignante Le plus libre et le moins
Non limité par le contenu des Toutes sortes d’idées des méthodes de restreignant des genres de
Liberté Attaché à rien mots ; utiliser tout ce qui est musicales, sans représenter composition ; soumise à composition/interprétation ;
permis en musique les passions d’un texte rien, ni aux mots, ni à un n’est limitée ni par les mots
sujet mélodique ni par une mélodie
Observer les règles
Ne pas changer la Ne s’éloigner pas trop du d’harmonie ; fugues
Restriction structure modale ni le ton mode et du sujet, se tient -------- -------- formelles ; polyphonie jouée
initial entre leurs limites en séquence ; pas trop
d’imitation
Spontanéité (ornements) à la
Ajouter ou enlever, cadence ; passages
déformer ou transformer inhabituels, ornements
Choisir un sujet pour
un sujet (motif) ; ingénieux ; changement de
improviser des imitations à Ne pas observer de façon Phrases harmoniques et
additionner des métrique ; parfois rapide,
Procédés de d’autres voix ; digressions, traditionelle le contrepoint fugues (contrepoint
suspensions et des parfois lent, parfois
composition ajouter, enlever et fleuri ; présence de fugues et imitatif) ; changements de
dissonances, utiliser des légèrement derrière la
ornementer, suspensions et de syncopes métrique
mouvements rapides ou pulsation ; textures diverses ;
changements de métrique
lents ; changements de textures alternées; finir dans
métrique autre tonalité que la
principale.
Instruments ou voix ;
Préludes, capriccios, fugues,
Fantasie, ricercares, fantaisie, Capriccie, Toccate,
Genres/instruments Fantaisie fantaisies, ricercares, Fantaisie ou ricercar
toccate, sonatas, prélude Ricercare, prélude, boutade,
toccate, sinfonies et sonates
etc.
60
Grille 9 : Ocurrences des procédés de la fantaisie et du stylus phantasticus dans les oeuvres analysées
Ornements, Polyphonie Changer/développer Changements Changements Changements Démonstration
Dissonances Suspensions syncopes
Diminuitions imitative le motif de texture de tempo de métrique de virtuosisme
Toccata
seconda ms.23-30 ms. 12-21 m.12; m.22 m.12; m.22 ms.1-9
(Pellegrini)
Tastegiata ms.3; 5; 6; ms.1 ; 4 ; ms. 8-10 ;
m.4 ms. 13-14 ms. 8-10 m.13 ms. 13-14
(Foscarini) 10 et 15 5 et 9 ms. 13-14
Toccata
m.6 ; ms.12- ms.1-5 ;
nona ms.1-5 ms.6-12 ms.6-12 m.6 ; m.20
13 ms.22-27
(Kapsberger)
Toccata ms.7-8 ; 12-
quinta m.8 13 ; 40-41 ; ms.23-54 ms.23-54 ms.23 et 54 m.23 m.62
(Kapsberger) 59-60
Prélude la
Portés 1-5 et Portés 1-5 et
mineur Porté 4 et 6 Porté 6
7-8 7-8
(Visée)
Phantasia en
ms. 107- ms. 107-
la majeur ms. 107-122 ms.1-5 m.13 et 107 m.13 et 107 m.13 et 107 ms.1-5
122 122
(Kellner)
Phantasia en
ms.11; 18- ms.18 ; 25 et ms.6 ; 8 ;
ré majeur ms.6-8 ms.25-39 ms.12 et 18 ms.25-39
23 et 28 40 18 ; 25 et 40
(Kellner)
61
Graphique 1: procédés de la fantaisie et du stylus phantasticus dans l’ensemble d’oeuvres
0 1 2 3 4 5 6 7
Dissonances
Suspensions
syncopes
Ornements,diminuitions
Polyphonie imitative
Changer/manipuler le motif
Changements de texture
Changements de tempo
Changements de métrique
Démonstration de virtuosisme
ANNEXE II
62
Toccata seconda
Armoniosi Concerti sopra La Chitarra Spagnola (1650)
Domenico Pellegrini (?-c.1682)
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Il terzo libro della chitarra spagnola (1629)
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Tocata Nona
Libro IV d'Intavolatura di Chitarrone (1640)
G.G. Kapsberger (c.1580-1651)
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Tocata Quinta
Libro I d'Intavolatura di Chitarrone (1604)
G.G. Kapsberger (c.1580-1651)
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Phantasia A dur
XVI Auserlesene Lauten Stucke (1747)
David Kellner (1670-1748)
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Phantasia D dur
Auserlesene Lauten Stucke
David Kellner (1670-1748)
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