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I- GÉNÉRALITÉS 

:
O Une plaie de l’abdomen correspond à une communication traumatique de la cavité péritonéale avec l’extérieur
par l’intermédiaire d’un agent vulnérant (arme à feu, arme blanche).
O L’examen clinique est fondamental.
 Il doit commencer par une appréciation de l’état hémodynamique avec la prise de la pression artérielle et la
mesure de la fréquence cardiaque, tout en recherchant des sueurs, une pâleur et des marbrures des
extrémités.
 L’examen évalue également :
 les circonstances de la blessure,
 l’agent vulnérant,
 il précise le siège de l’orifice d’entrée, un éventuel orifice de sortie ou l’existence d’autres plaies par un
examen clinique complet (se méfier tout particulièrement de plaies dorsolombaires qui, associées à une
plaie abdominale antérieure concentrant l’attention, peuvent passer inaperçues).
 Il est essentiel de préciser le caractère pénétrant ou non de la plaie dans la cavité péritonéale.
 Ce caractère peut être évident lorsque l’intestin ou l’épiploon sont éviscérés ou en cas de choc
hémorragique.
 Il est souvent beaucoup plus difficile à déterminer si l’orifice d’entrée est de petite taille, la plaie est
basithoracique, fessière, périnéale ou lombaire, avec un état hémodynamique stable spontanément, ou
lorsque n’existe aucun signe clinique ni échographique d’hémopéritoine.
 Un hémopéritoine doit être recherché : douleur abdominale à irradiations scapulaires, hoquet, défense, iléus
réflexe, augmentation du volume de l’abdomen, matité des flancs, douleur du cul-de-sac de Douglas au
toucher rectal.
 La sensibilité de l’examen clinique est faible pour la détection d’un hémopéritoine car le patient doit être
conscient et l’épanchement intrapéritonéal volumineux.
 La mise en évidence d’un hémopéritoine doit donc faire appel à des examens complémentaires, une
échographie (qui peut être obtenue au lit du malade en urgence), ou un scanner (qui permet de détecter des
épanchements liquidiens, sang ou liquide digestif, ou aériques). Les radiographies d’abdomen sans
préparation, les radiographies thoraciques et les clichés centrés sur les coupoles sont très peu contributifs,
sauf en cas d’hémopéritoine ou de pneumopéritoine massifs, et ne doivent donc pas faire partie des
examens morphologiques des patients victimes d’une plaie de l’abdomen.

II- CONDUITE À TENIR EN URGENCE :


O Le caractère pénétrant ou non de la plaie doit être évalué en urgence afin de guider la conduite à tenir.
O Cependant, même en cas de pénétration, le dogme selon lequel toute plaie pénétrante de l’abdomen doit être
opérée est actuellement remis en cause.
O En effet, 20 % des laparotomies exploratrices systématiques pour plaie pénétrante sont non thérapeutiques. Il
s’agit essentiellement de petites plaies du foie ou du mésentère ne saignant plus à l’ouverture de l’abdomen.
O Différentes options ont été proposées pour diminuer la fréquence de ces laparotomies inutiles. Elles se sont toutes
heurtées au risque de laisser évoluer à bas bruit une plaie punctiforme du tube digestif, ne s’exprimant pas
cliniquement au stade initial, mais évoluant progressivement vers une péritonite aiguë généralisée dont le
pronostic est sévère.
O La cœlioscopie, qui ne doit pas remplacer l’exploration de la plaie sous anesthésie locale car il s’agit d’une
intervention chirurgicale imposant une anesthésie générale, a sans doute trouvé une place, quoique assez limitée,
parmi les méthodes diagnostiques.
O L’attitude vis-à-vis du blessé va varier en fonction des lésions et de l’état hémodynamique.

A- Laparotomie en urgence :
O La laparotomie s’impose parfois dès l’arrivée du blessé aux urgences :
 une large plaie de l’abdomen avec éviscération de grêle ou de côlon,
 un état hémodynamique instable.
O Il est impératif de contrôler l’hémorragie et de traiter les lésions.

B- Diagnostic de pénétration intrapéritonéale :


1- Exploration sous anesthésie locale de la plaie :
O Elle doit être systématique chez un patient stable hémodynamiquement.
O Elle consiste à vérifier visuellement l’intégrité ou non du péritoine pariétal en élargissant si besoin la plaie
cutanée.
O Il ne faut pas se fier aux autres méthodes dont le résultat est plus incertain :
 opacification de la plaie par un produit de contraste hydrosoluble,
 ou exploration « à l’aveugle » de la plaie à l’aide d’un instrument mousse.
O Cette exploration sous anesthésie locale peut se faire aux urgences ou, s’il est disponible, au bloc opératoire afin
de pouvoir effectuer immédiatement une anesthésie générale en cas de lésion nécessitant un recours à une
exploration de la cavité abdominale.

2- Cas particuliers :
O L’exploration d’une plaie sous anesthésie locale n’est pas toujours contributive. Ce sont les cas où l’orifice
d’entrée est situé à distance de l’abdomen (lombaire ou basithoracique).
O Il est nécessaire dans ces cas de bien rechercher des signes cliniques et échographiques d’hémopéritoine. On peut
s’aider du scanner et, éventuellement, d’une cœlioscopie ou d’une thoracoscopie.

3- Conduite à tenir en fonction du caractère pénétrant ou non de la plaie chez un patient stable :
a- Plaie non pénétrante :
O Si la plaie n’est pas pénétrante, le patient peut être renvoyé à son domicile après parage de la plaie et vérification
de la vaccination antitétanique.
O Il peut être nécessaire de le garder en observation pour des pathologies associées, notamment pour passer le cap
d’une intoxication éthylique aiguë souvent concomitante.
b- Plaie pénétrante :
O Si la plaie est pénétrante, se discute actuellement une attitude non opératoire, une cœlioscopie exploratrice ou
une laparotomie exploratrice.
O Attitude non opératoire :
 L’attitude non opératoire ne peut être conduite qu’à condition de respecter des règles précises (Tableau).
 La surveillance doit être prolongée (au moins 1 semaine) car le risque est de laisser évoluer une péritonite à
bas bruit dont le diagnostic sera retardé de plusieurs jours.
 Cette attitude ne doit être recommandée qu’avec la plus extrême prudence chez des patients stables, calmes et
asymptomatiques.
 Au moindre doute, une exploration chirurgicale sous anesthésie générale doit être pratiquée.
Critères autorisant une prise en charge non opératoire des plaies et contusions de l’abdomen.
Critères d’inclusion Ne sont pas des critères d’exclusion
 Stabilité hémodynamique spontanée ou après  Âge
transfusion < 4 culots globulaires  Volume de l’hémopéritoine (échographie ou
 Absence de signes en faveur d’une plaie du tube scanner)
digestif  Gravité des lésions parenchymateuses (foie, rate,
 Absence de lésions extra-abdominales pouvant rein)
nécessiter un traitement chirurgical potentiellement
hémorragique (fracture du fémur ou du rachis)
 Équipe expérimentée (chirurgiens, anesthésistes-
réanimateurs, gastroentérologues)
 Radiologie interventionnelle disponible en urgence
 Disponibilité d’un bloc opératoire

O Cœlioscopie :
 Une cœlioscopie, lorsqu’elle est proposée, doit bien visualiser l’ensemble des organes intrapéritonéaux.
 Il est certain que la cœlioscopie permet de diminuer le taux de laparotomies blanches ou non thérapeutiques.
 Cependant, même ses plus ardents défenseurs ne proposent une cœlioscopie que chez 1 malade / 4
nécessitant une exploration intrapéritonéale, car plus de la moitié des plaies du tube digestif passent
inaperçues.
 De plus, les plaies diaphragmatiques qui sont fréquentes en cas de plaie basithoracique sont difficilement
accessibles à la cœlioscopie surtout si elles sont postérieures ou à droite (elles sont alors masquées par le foie),
et exposent au risque de pneumothorax compressif.
 Enfin, il n’est pas possible de diagnostiquer une plaie postérieure sur un segment fixe du côlon par plaie
lombaire. Seuls des signes indirects comme un hématome rétropéritonéal contenant des bulles d’air peuvent
faire évoquer le diagnostic et conduire à une mobilisation du côlon en regard.
 Pour ces raisons, la cœlioscopie n’est donc pas recommandée à l’heure actuelle de façon routinière.
 Elle peut cependant se discuter pour diagnostiquer la pénétration intrapéritonéale d’une plaie basithoracique
gauche chez un malade non choqué, ou pour les plaies de l’hypocondre droit avec érosion hépatique ne
saignant plus ou facilement accessible à une simple électrocoagulation. Les plaies diaphragmatiques, souvent
punctiformes, peuvent être suturées sous cœlioscopie.
 Au moindre doute, une conversion en laparotomie doit être décidée.
O Laparotomie :
 Indications :
 La laparotomie reste donc largement recommandée pour l’exploration de plaies abdominales.
 Elle permet de vérifier la totalité des organes intrapéritonéaux, des espaces rétropéritonéaux et du
diaphragme.
 Les plaies par arme blanche ont un trajet rectiligne avec des lésions viscérales à bords nets.
 En revanche, les plaies par arme à feu associent au traumatisme direct lié à la balle des phénomènes de
cavitation lors du freinage du projectile dès la traversée des tissus superficiels avec des lésions de
cisaillement parfois très à distance du trajet de la balle. Ce phénomène de cavitation est directement
proportionnel à l’énergie transférée aux tissus par le projectile, c’est-à-dire à sa masse et surtout à sa
vitesse. Enfin, le trajet de la balle dans l’abdomen est aléatoire, en fonction des différentes densités des
organes traversés. Ceci explique que, même dans les cas où existent un orifice d’entrée et un orifice de
sortie, il est impossible de prévoir quel trajet la balle a pu suivre dans l’abdomen et, par voie de
conséquence, quels organes elle a pu traverser ou léser par éclatement secondaire aux phénomènes
d’étirement et de cavitation. Pour ces raisons, la laparotomie a de très larges indications dans les plaies de
l’abdomen par arme à feu. Elle doit être systématique si cette plaie est pénétrante.
 Interventions :
 Quel que soit l’organe, le principe général est d’être conservateur.
 Les résections ne doivent s’adresser qu’aux organes très délabrés et dévascularisés.
 Le tube digestif est le plus souvent touché (grêle 50 %, côlon 30 %, estomac 12 %).
 Malgré l’absence de préparation intestinale et le fait que les blessés ne soient habituellement pas à jeun,
une suture directe ou une résection-anastomose est presque toujours possible, quel que soit l’agent
vulnérant et quel que soit l’organe blessé.
 Les entérostomies sont devenues très rares, même dans les lésions les plus contaminantes, les plaies
coliques par arme à feu. Elles sont réservées aux grands délabrements intestinaux chez des patients en
choc hémorragique sévère et prolongé.
 On peut noter par exemple que la mortalité postopératoire (1,3-5 %) et la morbidité par sepsis intra-
abdominal (24-27 %) des plaies coliques sont indépendantes du type de traitement (stomie ou suture).
 Les autres organes sont plus rarement atteints.
 Il faut noter la fréquence particulière d’une plaie des gros vaisseaux (aorte, veine cave inférieure) qui
nécessite une hémostase rapide.

III- POUR RÉSUMER :


O L’attitude vis-à-vis d’une plaie de l’abdomen peut être résumée dans un algorithme privilégiant l’état
hémodynamique du blessé et le caractère pénétrant ou non de la plaie.

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