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LES JUMEAUX

En Musey les jumeaux, la gémellité etc. a un statut particulier et se dit « ægonira ».

Noter que ægonira est une « divinité » et c’est comme un dieu (loæ ægonira) et donc on le craint et il y
a beaucoup de rituels à faire. Une fois dedans tu es lié à ægonira pour toute la vie.
Pour les jumeaux on distingue :
¾ ægonira vrai : deux du même sexe
¾ ægonira sauvage/esclave (faux) : de sexes différents

La grossesse dure plus longtemps, de 10 à 12 mois (on croît cela).


Signes : des enflures (œdèmes) aux pieds ; plus de fatigue que pour la grossesse normale. Même si
quelqu’un s’aperçoit des signes, il ne faut pas dire qu’une femme aura ægonira car les sages-femmes
en ont peur (le sang versé pour cet accouchement rend aveugle et stérile). On dit aussi que le
« jumeaux » c’est comme un voleur, on ne connaît pas (ægonira ni ko sa kullã naa).

Lors de l’accouchement, quand le premier est sorti et on voit qu’il y en encore un autre, les femmes
fuient. Seules, les vieilles restent car elles ne se préoccupent plus. Les femmes présentes à
l’accouchement doivent y rester jusqu’à la fin des rites. c.à.d. ceux qui sont là contractent le
« ægonira » donc doivent participer à tous les sacrifices.... En plus on craint le sang de jumeaux, car si
on ne fait pas bien la purification il peut te rendre aveugle. Quand vient le second, on avertit le père de
s’asseoir par terre parce que les chefs sont arrivés. On cherche un couple ayant eu ægonira dont la
femme pousse un cri de joie, des you-yous (le premier cri c’est la vieille femme restée auprès de la
mère = ca dora ci yirra) et dit que les chefs sont arrivés. On cherche d’abord une grande calebasse
blanche avec de l’eau et on y renverse dessus une petite pour rythmer le chant en tapant avec deux
tiges de mil. Les voisins commencent à arriver et portent déjà des cadeaux. C’est tout de suite la joie.
On commence à chanter aussi des « moqueries » pour la famille, cela c’est pour voir leur cœur car les
jumeaux n’aiment pas ceux qui se fâchent. (ægonira ka u so’oloqu, gelera lay, ægulla lay... æguluzi
kayra ana ægonira ni zlappa...) . Pendant 10 jours on chante et le 10ème jour on fait la « levée » et on
part en chantant, le matin tôt, traversant le village pour aller accomplir le rite du lavage en brousse...

Quand les parrains (parrain et marraine) son là, on coupe le nombril. On change la tenue des parents
(peau brute) ; et on donne déjà aux enfants ce qu’ils recevraient chez le chef. On met du kaolin
(beena) sur les parents. A leur mort, on en mettra aussi et pour celles des enfants. Les parents sont
assis par terre, chacun avec un servant.

On prépare de la purée sans sel ni oseille, on la fait goûter et on plante tout de suite deux foyers pour
la préparation de la nourriture.

Le placenta on l’enterre en deux trous proches où on va « piétiner » la mère. .(To’omma pi ki zet zet...
vek tani may, pi tana may... huu li ma azi tay cara huna).

Ce sont les parents qui font l’entrée des enfants aidés par la vieille femme restée là (cara ægolla ut slet
sletta cuk ægonira kalaviya) et les parrains : on les fait entrer toujours avec le dos dans la case (la
mère) et selon leur « chiffre » de chance. Puis la vieille femme est libre et leur dit de continuer avec
les parrains pour la suite des rites.

N.B. Pendant ces jours-là (de la naissance jusqu’au 6/10ème) on mange tous ensemble, même
la belle-mère (normalement c’est un interdit). Cela se passe pour tout sacrifice à la puissance
des jumeaux ; on ne respecte pas l’interdit de ne pas manger avec la belle-mère (huu åivun
ægonira ka saæ kunuæga ði...).

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On vient toujours avec des cadeaux. Il faut donner aux deux ; donc pas venir avec une seule chose. -
Quelqu’un ayant eu des jumeaux ramasse tout et partage en laissant la plupart aux parents des
nouveau-nés (cela le jour de « dik ægonira »). Même les possédés peuvent venir mais à titre personnel
pour louer les enfants, pas au nom de leur divinité.

1) Levée et « souillure » (togoora)


Pour les jumeaux on parle de « levée » plutôt que de sortie car ils vont se relever du sol où ils sont
restés depuis la naissance et ils vont se laver (purification du sang) etc.

On prépare la boisson (sans la laisser fermenter parce que les jumeaux n’aiment pas les choses
« fortes » (azi ka min yara ði) pendant trois jours ; d’autre préparent la veille et c’est dans cette
boisson qu’on fera cuire aussi un bout de la ceinture et des la peau (habits) des parents. Le jour venu
(maintenant on fait vite mais autrefois se passait selon le « chiffre du destin » (ægaffa) des jumeaux),
on sort avec les parents et on leur en fait goûter, tout comme aux enfants. On prend les déchets de la
boisson et on le jette à un croisement.

On lave les parents hors du village et ils déposent leurs tenues de ægonira sur une termitière ou sous
un grand arbre (cinda = tamarinier, ou un arbre « important »...). Et ils ne pourront plus y retourner.

En rentrant, ils reçoivent de nouvelles tenues.

Ce rituel on l’appelle aussi « togoo ægonira » dans le sens qu’on va se purifier du danger qui vient du
sang de la divinité gémellaire, pour cela on change les habits, on jette la boisson et puis on se lave.

N.B. = Pour la suite ce n’est pas facile de bien séparer les choses car chaque lignage à sa façon de
faire et les jours d’un rituel changent : par exemple la sortie est faite le huitième (4+4) pour deux filles
(aussi 4ème = 2+2) ; le sixième (3+3) ou le 10ème (5+5) pour deux garçons ; ou le septième (3+4) ou
9ème (5+4) pour un garçon et une fille.
Cependant tous font la levée, la boisson « à jeter », le lavage, la sortie sous l’arbre, et le sacrifice, la
boisson « spéciale » et la grande fête avec le tambour « tiniæga ». Certains font cela vite, du 4ème au
10ème jour, d’autres peuvent attendre même un an pour faire le dernier rite.
Donc il y a ceux qui font tout de suite (le 10ème jour) le « dik ægonira » et la fête. Pour cela il y a un
peu de confusion dans la description et il faut prêter attention car, après la première partie (si on la fait
le 4ème ou 6ème jours) il y a tout de suite (le 10ème jour) la fête et la deuxième partie du rituel, même
si après un an il y aura encore des choses à faire... Surtout pour le dik ægonira ; ce rituel se passe dans
des temps différents selon les lignages. Les Domo font vite et toute de suite, d’autres peuvent attendre
même un an pour faire cela. A noter quand même l’importance du 10ème jour et la fin des rituels
après un an.

¾ Témoignage :
L’accouchement a été fait à l’hôpital ; les jours n’ont pas été respectés ; le père n’a pas quêté le mil et
la sauce a été préparée avec l’une de ses propres chèvres ; la nourriture était normale. Les deux filles
se sont mariées ; l’une a eu des enfants ; l’autre a été abandonnée sans enfants. La grossesse suivante,
qui aurait donné des jumeaux, a abouti à la mort de la jeune mère.

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2) « Dik Ngonira » chasser la souillure des jumeaux
Le père fait la quête de mil (accompagné par le parrain ...), sans entrer dans les concessions ; on lui
donne beaucoup de cadeaux. Mais on ne donne ni de sésame rouge ni de graines d’oseille, ni
d’arachides. Le mil quêté est pilé et mis tout de suite dans l’eau pour en préparer de la boisson. Pour
savoir si les « divinités » l’acceptent, le père prend une poignée de mil et demande un signe. S’il y a
un éternuement d’homme ou de chèvre, bruit d’oreilles (kakabara) les esprits ne l’acceptent pas. On
va chercher le tambour a fût long (tiniæga) pour la fête.
Ce jour là on plante les « poteries » au nombre de trois pour les jumeaux (2 pour eux-mêmes et un
pour la divinité) à l’entrée de la concession et seront utilisées à tout sacrifice à la puissance de
ægonira.

Les familles sont averties du jour de la « fête ». Les parents du père offrent un bélier (autrefois c’était
toujours 2 ovins). Le père sort du village et tous le suivent jusqu’à l’arrivée à l’arbre Golomgolomba
(Vitex doniana). Si les ægonira acceptent de ce bois pour que l’on leur en fasse un trône de chef (siège
tabouret), ils ouvriront les yeux. Alors on coupe de ce bois et on en ramène à la maison (deux
morceaux). C’est sur ce bois taillé en petit siège que les jumeaux verront mis et on leur donnera à
boire (ciiriziya). L’arbre pour le siège « Vitex doniana » donne beaucoup de fruits et est doux (la
douceur qu’aiment les ægonira). Même l’eau n’est pas chaude (en plus de la douceur, la fraîcheur).
Même le repas de la fête, dans le cas des ægonira, si quelqu’un en mange avant, il n’y a pas de
problème. Une femme ayant eu des enfants ne mettra jamais de bois de ægonira (Golomgolomba ;
autrefois ses fruits étaient interdits...) sur son foyer. Ceux qui ont été au bois n’y reviendront pas pour
ne pas avoir des ægonira.

Après on tue les bêtes pour la fête. Les parents de la mère tuent une chèvre (autrefois toujours 2
chèvres) et apportent un gigot tout entier (sli bikka dew u dagalawna...). Les parents du père en font
autant avec un gigot du bélier. On en prépare la sauce. Pour faire le sacrifice, on prend la boule des
deux mains croisées (signe d’unité, pas de jalousie etc.). On en prend un morceau et on le plonge
dans la sauce. Puis un morceau pour le dieu des ægonira (celui qui a donné des ægonira). La
signification, c’est de demander que les ægonira ne soient pas méchants. Ils sont des chefs et
cherchent la paix, mais sont quand même dangereux car ils peuvent tuer.

La danse (koðomma) :
d’abord avec le tambour à fût long, puis avec des « calebasses » (maraca = cagira). Les autres
chantent et, dans le chant, disent les quatre vérités du couple (louanges, moqueries etc.), qui ne doit
pas se fâcher.

N.B. La fête est plus au moins grande selon les moyens des parents. Bien sûr ceux qui font
« vite » n’ont pas le temps de bien organiser et donc on fait un semblant de fête « koðomma ».
Mais d’autres attendaient pour avoir une grande fête (parfois cela dépendait de la quête du mil
est des dons aussi) et cela donnait lieu à un rassemblement joyeux et de vraie fête
« koðomma ».

Les parents courent et se couchent sur le lit et les parents de la femme prennent son bras et le posent
sur le mari, et ils sortent tout de suite. Si c’est le père qui prend le premier l’enfant, s’il y a souillure
(togoora), c’est la femme qui ramasse, et vice-versa. De même pour les grands-parents. Si ce sont
ceux du père qui préparent les premiers la sauce, ce sont ceux de la femme qui ramassent l’éventuelle
souillure, et vice-versa.

La nourriture doit être préparée sans sel (ni heppa) et la boisson ne doit pas être fermentée. On fait
cuire la sauce dans la boisson (un peu = vo summa duk nde). La peau doit être enlevée du côté et non
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pas de sur la chèvre. On donnera épaule, tête et arrière-train (avec la queue) aux jumeaux car ils
aiment la viande. Ils mangeront cela à eux seuls avec les parrains.

La sauce :
On se dépêche (li zak zak ana, Yow ægonira tok taæu) parce que le dernier attrape ce qu’il y a de
mauvais dans le ægonira. Les deux familles en préparent, chacune avec son gigot. Le papa prend la
boule avec les deux mains et tous les ægonira doivent en manger. Après ægonira, ce sont les parents et
les enfants qui mangent et prennent de la boisson. Puis les gens rentrent.

Il n’y a pas de rite pour donner le nom. C’est toujours un nom lié à une chose importante, aujourd’hui
à la « chefferie » (mieux dire que c’est le nom utilisé maintenant pour désigner les chefs implantés
depuis la colonisation, car autrefois les « grands » c’état le sa ægollã, sa boæona huu zina...), et à des
choses « grandes et authentiques », à la joie (cfr. Vuru = authentique ou sans tâche... ni sa bay zozotta
egemma...). Il peut y avoir une révélation en songe.

- Le lendemain, on sort à la chasse des souris. On en enlève la peau et on ajoute la chair à la purée de
ægonira. Le reste est mangé normalement. Cela signifie que les « nouvelles choses » sont arrivées, on
va manger comme avant etc. Les parrains rentrent et on donne des cadeaux (poulets, etc.) pour qu’ils
offrent leur sacrifice. Ils emmènent les tenues des parents. Ils laissent des conseils : ne pas manger de
la même calebasse, ne pas s’asseoir ensemble, ne pas travailler ensemble dans le même champ. Avant
les rites, le père ne communique pas avec les autres (nam fut tam coco) ; même pour la quête du mil, il
est aidé par le parrain.

Tous ces rites sont faits même si l’un ou les deux meurent. En ce cas, on ne fait que le lavage des
parents et on attend le prochain enfant. Au prochain enfant on fera tout le rituel des jumeaux. Dans
le cas où un seul meurt, on peut chercher un nouveau-né dans la famille. Sinon, on cherche une tige de
mil qu’on pare du collier. Et on ne doit pas pleurer la mort d’un des jumeaux parce que l’autre ne doit
pas entendre.

N.B. - Pour la mort des jumeaux voir aussi le texte sur la culture « La mort et les Funérailles ».

Quand une femme a mis au monde des jumeaux et que l’un d’eux est mort, on « creuse » un trou
devant l’entrée de la case de la mère. D’abord on arrache un bois, fourche du lit etc. et ensuite on
creuse ; en effet on ne donne pas le premier coup...(garakæa kala, guna...azi paðam kiyo, vek zulla
tuwa...). S’il n’y a pas un piquet à enlever on traces des signes avec un bois (xii ha guna ni ko ndal
paðam kiyo). On ne creuse pas à cause du vivant qui autrement va tomber malade etc. ; mais quand le
2ème meurt on donnera le premier coup sans problème. Le père et la mère font la purée (durbira)
parce que le ngonira (divinité des jumeaux) est devenue leur divinité (fullã). Donnent cela aux
jumeaux : au vivant et à l’autre avant de l’enterrer. On ferme les yeux de la mère. Ensuite on enterre
l’enfant sans pleurer sur lui. Souvent on cache cela (sa ka wi maqam ði). – En cas de fausse couche –
avortement pour les jumeaux on fait un peu de purée que les parents prennent et ce sera à la prochaine
naissance qu'on fera tout le rituel comme si c’était les jumeaux (huu ma ndiira kay ægonira ni
zlurukka, ana huruk zluruk kiyo. Azi li durbira nde, jup ni wii ma daææa a li zlara ægonira tuwa. Ndat
ka vi wii ði azi tut tin garira).
Si l’un de jumeaux meurt avant l’adolescence on ne pleure pas, pas même la mère. S’il meurt déjà
adolescent l’autre s’en va assez loin pour ne pas entendre le tambour de la mort, autrement il mourrait
lui aussi. Il y a pleurs mais on ne fait que le sacrifice d’un poulet et de haricots. Alors le jumeau
survivant peut aller voir le devin et lui demander s’il doit faire quelque sacrifice (Vek zulla vek ni, pam
gaw, ma hiææa azi tinim ha ki day,... ægayam ha ki ægoo bagiya...kawi daåina lay, haåalaw ægutta...).

A la mort des jumeaux on met aussi du kaolin (beena = bee hapma est plus blanc que le « jaune »).
On marque le front des gens de la famille pour dire qu’ils sont « unis » par les jumeaux (suu vi sanana
ndolozi u beena ni ana, ami zlaåi ha ægonira) et c’est la mère qui va faire cela. - En cas de décès on
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fait cela toute de suite en saison sèche (cuk beena huu walla hol) mais en saison pluvieuse seulement
au moment où on va l’enterrer autrement la pluie va les empêcher d’accomplir tout le rituel (huu
ndolla, azi a pamba wa ni, tinim beena tuwa, ka ði ni lona doorozi ki kay tiina...- kay mat gor
ægonina, azi tin beena huu ndolla wa ni, lona ka hinizi maðazi a tii ði...).

Le kaolin est une marque de « grandeur » : pour la terre « Mbassa » c’est « sira », pour un
grand type c’est « gaæina » (sa li zlara ægolla). Donc c’est une marque d’honneur et tout vieux
ou personne importante sera « marqué » par un type de kaolin pour signifier qu’il est
quelqu’un. – Pour les jumeaux il y en a toujours : naissance, levée, fête, mort. Cf. Proverbe :
An ka coo iirin u gaæi slaw ði (je ne me crève pas les yeux avec le kaolin = je ne vais plus me
donner de la peine pour cette chose là. On le dit à un homme : je suis fatigué de toi)

A noter aussi que si l’enfant à déjà le bracelet torsadé on le lui enlève cela avant de l’enterrer. Ensuite
on va le jeter ou bien le cacher quelque part (peretna : ma dewna mit wa ni azi gigim kiyo, ka ði ni
ægayam kiyo...).

N.B. Pour tout objet en fer (chose de valeur) on l’enlevait du cadavre avant de l’enterrer et cela
pour tout homme ou femme. Mais si par hasard on avait oublié, ne fusse que l’anneau, on allait
le déterrer pour lui enlever cela. (Sauf les labrets des femmes qu’on les laissait.) (Azi ka pi sa
miðina u åalaææa kam ði... ægukæa lay, walakæa lay, kaadumba lay...). Les colliers on les
laissait sans problème (c-à-d on l’enlevait et on les jetait dans la tombe).

¾ Témoignage :
Lors de la mort d’une jumelle qu’ont pleurée les parents, le ventre de la survivante s’est gonflé et elle
commença à vomir. Elle fut écartée des parents qui se sont lavés. Il y eut un rite sur le tombeau et les
problèmes ont fini.

On ne veut pas avoir des jumeaux parce que la fête est chère et pour les élever, c’est très difficile car
ils sont très sensibles. Quand un couple en a plusieurs fois, il doit faire une fête pour chacun pour que
les enfants ne se sentent pas diminués. Quand les parents n’ont pas les moyens, la sortie et la boisson
peuvent attendre une année jusqu’à ce qu’ils aient ramassé tout le matériel nécessaire. L’important,
c’est de le faire. Les jumeaux ce sont des personnes délicates et « têtues ». Les jumeaux peuvent vivre
ensemble dans la même case.

¾ Y a-t-il des rites spéciaux pour le mariage des jumeaux ?


Oui, c’est à ce moment qu’on faisait le rituel appelé « tordre le cou » (gulutta), même si chaque fois
qu’on tue une bête pour ægonira on lui tord le cou si on dit qu’on va faire gulutta c’est pour le
mariage. Pour les jumelles, la mariée fera le rituel chez elle, ensemble avec sa soeur qui mange avec le
couple qui après cela rentre. Pour celle qui se marie, on étouffe une bête et offre un morceau de foie
cru au couple (et à la soeur jumelle aussi). On prend la purée (lora), le garçon aussi Puis ils quittent la
famille de la fille. On dit que c’est mieux faire cela toute de suite après le versement de la dot, avant
de prendre la fille chez toi comme ça tu n’auras pas de problèmes. (a øamba wan ni nam tut gulut
timina lay, slegenina lay... ni daåiya, ni gulut ægonira. Azi ti funa wa ni, yow naa gaw, ka sli sliwna
kozi ði...). Certains font vite et prennent la fille chez eux, aujourd’hui sans même pas savoir si elle est
jumelle. Ensuite s’il y a des difficultés on va demander si par hasard elle est jumelle. Si on n’a pas fait
le rituel sûrement il y a des problèmes et la fille ne tombe pas enceinte. Dans ce cas on va voir le
devin, parfois on dit qu’on n’a pas sacrifié (gulutta) une bête avant de coucher ensemble
(normalement : gulut maæ tamba a buu u ndaðu... – Goo ta ægonira a kal ki ægoo bagi ziæ njuffãra ni,
njuvut i guluðu’ ay ki voo vi semeye’ tuwa. A gazira ni naa, ka ði ni, ægonira åa’at bay vutta...).

En principe, les jumeaux n’ont pas d’autre problème pour trouver un conjoint que leur caractère.

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Ægonira aime beaucoup la viande, surtout poulet et mouton (ægonira njeni øay. Min ni slek happa,
timirigina kay heppa lay). Il faut qu’il y en ait à la maison pour lui. Même si les enfants jumeaux ne
sont pas là, à chaque sacrifice il offrira à ægonira. La mort et la naissance des jumeaux sont souvent
accompagnées de pluie (lona si u vut ægonira lay, u maðam lay...ni ana, ni lona vi ægonira ...).
Les rites des jumeaux continuent toute la vie. Tout sacrifice, semailles, décès, et le fils aîné d’un
jumeau les perpétue ; c’est la divinité dews jumeaux de mon père (ni ægonira vi bunda) et fait le
sacrifice offrant à « mon Dieu, mon père, jumeaux… » (Loonna, bunu, ægonira...). Toutes les filles de
cette famille, en se mariant, doivent amener la brebis de ægonira, même si elle n’est pas jumelle.

La sécheresse n’est pas due à ægonira. Là où il y en a, il y a même de petites pluies. Des jumeaux non
fêtés ne sont pas raison de sécheresse. A la naissance, s’il ne pleut pas, le ciel reste couvert si le
ægonira aime la propreté (la pluie salit et il y a des jumeaux qui n’aiment pas la saleté donc il ne
pleuvra pas pendant un certain temps), jusqu’au jour de la grande fête (lona ka si ði ko ægonira
njenjera ... huu ndolla gak gak tew buu ma azi digit kiyo).

Les gens ont peur de ægonira ; on ne peut toucher les animaux élevés par les jumeaux ; on peut en
leur préparer mais pas en égorger pour son propre besoin (de celui qui a préparé). Un vieux papa qui a
des jumeaux doit, à chaque fois qu’il veut de la viande, supplier ses fils qui lui indiqueront lequel.
Aussi pour toute chose des jumeaux, c’est « fort » et peut t’infecter, et si tu est là au sacrifice il faut
manger (ko ndal va ægoniyo vi sana, lora kala...) La couleur de ægonira est le blanc. La couleur des
animaux élevés par lui est de préférence blanche. Donc dans la cour des jumeaux il y a toujours un
mouton blanc et une poule blanche.
Mais cela n’est pas toujours vrai car la couleur dépend des jumeaux (on exclut le rouge qui est pour la
puissance des morts « marina »)(timi ta ægonira tat li hap herek zu ? An fagar ana, øawa’a... col ay ni
ko huu ægonira...- timi mayra mayga maygara ka gi u ægonira ði...)

¾ Y a-t-il des observances en cas d’animaux ægonira ?


Il y a des jours indiqués pour faire les sacrifices et souvent prépare de la boisson. Pour se servir de
l’animal, il faut consulter le devin, surtout pour le vendre autrement la semence va se perdre (gol
garira ana, guzum kiyo a njevem ndi ki ði).
Les animaux voués à une divinité étaient réserves pour le sacrifice (togolla) mais après on pouvait
vendre les petits. Cela se passait en famille, on s’entendait pour ne pas vendre dehors.
Si on le vend on gardera la corde pour la mettre au cou d’une autre bête qui va le remplacer.

Avant on n’élevait des moutons que pour les jumeaux (si on voyait des moutons chez un type c’était
pour cela ou pour des divinités particulières comme des « fulina » ou les rouges pour la puissance des
morts...). Et avoir des animaux en général avait une signification autre que le marché. Un cheval de
course, par exemple, c’était la dot de deux femmes. Autrefois tout animal était réservé (dot, sacrifices
etc.) et on n’allait pas le vendre au marché. Même pour le cheval, on le remarquait à la fête
(koðomma- vun tillã) et après on allait le demander comme on va pour demander une fille.

Quand il naît des ægonira, le gibier (de la chasse collective) est présenté au père mais il ne le réclame
pas. On le fait par peur. Cela pour les gens de la famille seulement (deera). Après avoir donné au père
des ægonira, le chasseur, lors de la chasse suivante le donnera déjà au chef de terre.

N.B. Si à la chasse si on ne prend rien on donne la faute aux jumeaux (huu lamba, kozi hep
kiyo, ci va ði). Il y a des rituels à faire pour apaiser la puissance des jumeaux et pouvoir
prendre du gibier. On donnait de la purée au jumeaux pour que les mains « s’ouvrent » à la
chasse, ou bien on leur donnait une qualité de sorgho (gaåagaåana) comme purification de la
cour du gibier (azi tut li durbira maæ ægonira...hin kozi mal kiyo. Ka ði ni azi øal gaåagaåana
ko gor ægonira a po jak mazira...). Sa pezera hal ni namu= Kimba, ni va aæ sana cam jew huu
lam ta aæ tuðutta ni pezera (boora, garina etc.).

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Les frères des jumeaux sont très attentifs. Aujourd’hui on dit qu’il faut les traiter également pour
qu’ils ne « fassent pas la tête ». Quand ils sont petits, ils sont libres mais il y a des corrections, par
exemple, en cas de vol. quand ils sont adultes, ils doivent respecter les lois comme tout le monde. Il
faut le leur apprendre à partir de l’âge où ils puissent comprendre. Pour la correction, on peut
demander à l’autre jumeau. Celui-ci doit comprendre qu’il ne faut pas se moquer ou agresser l’autre
car il peut lui lancer un maléfice. Quand ils sont petits, il ne faut pas faire la différence entre les
jumeaux car la jalousie est dangereuse. En cas de ægonira né d’adultère, c’est le vrai père qui
accomplit les rites. Après il y a les problèmes déjà vus. Pour le nom, celui qui a reçu la révélation la
souffle aux parents. Pendant la visite, il arrive en les appelant par les noms révélés. S’il ne le fait pas,
ils lui feront du mal.
Pour effrayer les jumeaux qui ont mauvais cœur, on dit : « Je vais boire de l’eau chaude avec/sur toi. »
(an wan ni caæ mboo kuna kaæu / uæu) En cas de maladie, pendant que le malade prend de l’eau
chaude, la maladie (provoquée par ægonira) passe aux jumeaux. La phrase est une menace.

¾ Quel est le rôle de la tige de mil ?


Elle représente l’arme (kaayara ni ko ndal åagina (kawi) ægonira naa) de ægonira (encore signe de la
douceur). Mais à celui qu’il veut, il peut faire du mal avec cette tige. On ne frappe pas le ægonira
avec, ni n’en utilise pour griller des arachides. Il y a l’autre tige qu’on met au portail pour la boisson.
Avec une tige de mil on mélange aussi la boisson.

¾ Quelle est la signification du grand arbre et de la termitière pour les Musey (en général) ?
Ce sont les habitations des esprits. Les grands arbres donnent de l’ombre et c’est au moment de la
chaleur (avril, mai) que les esprits cherchent les grands arbres. Pour se reposer, ils s’assoient sur les
termitières. La construction d’une termitière comporte des graines bonnes et mauvaises ; les termites
reçoivent donc de tout, que ce soit bon ou mauvais. Celui qui passe devant en ayant des souillures est
pris au pied par elles. Quand on fait de bonnes actions (comme quelqu’un qui connaît remettre les os
en place) met les bandages, après le rétablissement, sur une termitière pour qu’il n’y ait plus de
blessures. Les termites les mangent. Une femme qui perd beaucoup d’enfants se lave les génitaux sur
une termitière et y laisse la calebasse qu’elle a utilisée. Les termites la mangent. Donc pour toute
« purification » on utilisait la termitière dans le sens qu’elle va enfermer le mal dedans et les termites
vont coller à nouveau la sortie (kay ðagaara, aæ coot dugu, aæ col kayami...mbus taæu... cora kal ni
huwa...toåora neret ki kaðu, azi dugut kiyo, ni daåiya).

¾ Peut-on casser les termitières ?


Dans le village, oui. Dans la forêt, les seuls chasseurs, qui sont de grands esprits (« blindés »). Plutôt il
se purifiait avec pour attraper du gibier, il se mettait au dessus et laissaient là leur « malchance » puis
il regardaient à l’est et à l’ouest et partaient en courant (azi hok tazi u ndaðu, ka ði ni azi ci va ði... Azi
tin doæ mazira kay toåora.. peret iirizi maði lay, fiðigi lay, col liææa a hin ndoæga uwa...). Mais
aujourd’hui on ne sait plus bien quelles sont les limites du village.

La boisson :
Quand on prépare de la boisson pour un sacrifice (pour n’importe quel sacrifice = ægayra vun gerekæa
tak ki ni ana summa kay åivunna ka’a, go zoææa bak ka um ði ka kal ði, tamara keena u baraw
deægedewra ka u’ ði ka kal ði lay...), on met deux tiges de mil croisées à l’entrée pour indiquer ce
que l’on fait. Pour qu’une femme y entre, elle doit porter sa tenue de mariage. Quelqu’un
n’appartenant pas à la famille, en voyant le signe, n’y entre pas. Il voit le signe et, ayant besoin de
quelqu’un, il l’appelle dehors. Les femmes du village parties en mariage dehors sont averties du jour
où on a plongé le mil. - Les parents de la mère arrivent et apportent une chèvre ou un cabris, selon
qu’il s’agisse d’un garçon ou d’une fille. Les déchets de boisson sont déposés sur un croisement et on
y met aussi une tige de mil (est-ce la tige qu’on utilise pour tourner la boisson ?) car pour ces
boissons, de tout sacrifice, on n’utilise pas du bois (summa azi guurum ha kaayara doy hol). On rentre
et on étouffe le poulet (ægonira n’aime pas le sang). Puis on tue la chèvre/cabris et prépare le gigot.

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N.B. Avant de boire il faut absolument verser la bière en libation pour la puissance de ægonira.
(summa, caraw ka ki ðina ay ka cuk cam ði...)

¾ Pourquoi faire une partie du rite sur un croisement ?


Pour chasser le ægonira du village ; le premier qui passe, le ramasse.

¾ Pourquoi enlève-t-on le sel des sauces ?


A cause de ægonira, pour accentuer ce qui est doux. Les jumeaux aiment la paix et ne veulent pas de
choses fortes (durbira ni mbalara heppa... ægonira ka ægaf u ya ði ni kay ndatta sle suu ya, ko ndal
vuvuna, ka huu ði...).

Les rites (en résumé)


Première étape : Laver de la souillure (togoora) de ægonira.
Deux ou trois jours (la veille) avant la levée, on met le mil pour en faire la boisson. Le jour établi, très
tôt, on fait goûter sans boire car on laisse cela pour les vieilles et les enfants.. Après on lave les
parents. Pour cela on l’appelle la boisson pour laver le visage « sum ma mbus iira » car depuis
l’accouchement les parents ne se sont pas lavés. C’est un couple ayant eu de ægonira qui lave les
parents.

Seconde étape : quand les enfants commencent à marcher ; rite pour chasser de la maison le
ægonira (dik ægonira).
On va avec les enfants en brousse ; ce sont les parents qui ouvrent la danse ; le père chante seul, puis
avec le parrain, enfin avec ses frères. Le père danse et appelle sa femme, et les deux sont suivis par le
parrain. Ils entrent et se couchent trois fois ; la troisième, ils prennent les enfants. Le second ramasse
ce qu’il y a de mauvais. Après il y a la grande danse et le repas.

Après la grande fête, on va raser la mère et les enfants. Ici, c’est le parrain. A partir de ce moment,
les parents peuvent manger, se coucher et travailler ensemble.

On met des bracelets (peretna) autour des poignées des enfants et des parents ; le forgeron à qui le
père demande de les préparer doit tout laisser pour s’en occuper. Le bracelet est l’ornement du grand
homme du village ; en l’occurrence, privilège de ægonira. C’est pour se faire distinguer comme
jumeau ou parent de jumeaux. L’homme le porte sur le bras droit, la femme, sur le bras gauche. Les
jumeaux peuvent aussi demander en songe à quelqu’un le « collier de chef ». Plus tard, s’il y a
révélation ils chercheront ce collier (herew mulmulla) pour lequel il fallait donner une grande chèvre.

L’homme va chez ses oncles maternels (ni tin yam ægonira vi nduzuyumu) et ils lui offrent un bélier ;
mais d’abord, c’est la femme qui va chez ses parents. Ils donnent toujours des colliers pour les
enfants. Si le beau-père peut, il égorge un bélier. La femme en ramène un morceau à la maison.
L’homme en fait autant.

Il faut quitter les lieux, la maison. On ramasse les ustensiles de cuisine, les armes, les animaux, la
nourriture, pratiquement tout sauf le bois du lit et la maison. A la nouvelle maison, il faut introduire
une brebis et une poule ; ce qu’elles produiront sera pour ægonira. Aujourd’hui on ne se déplace plus
beaucoup. Au village, encore ; mais en ville, c’en est de plus en plus difficile.

¾ S’ils font une cérémonie quelconque, ils font toujours quelque chose pour le ægonira.

Cela pour toute rituel- sacrifice : voir le cycle cultural à partir de « ka vun joora...heella...vun tillã... »
on appelle toujours la puissance des jumeaux. La sauce se prépare toujours dehors, jamais dans la
cuisine. Quand on fait un sacrifice à ægonira on mettra toujours le bout de la queue (belessã) à leur
cou. La boisson n’est pas toujours présente. Ce qui est toujours sacrifié c’est un mouton et un poulet.

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Ce qui est tué pour les jumeaux tous peuvent le manger, il n’y a pas d’interdit et cela ne fait rien car
c’est un sacrifice « paisible ».

Les sacrifices - rituels de ægonira peuvent précéder ceux du maître de terre (prémices et premier mil).
c-à-d. qu’ils ne sont pas obligés d’attendre le maître de terre. Ce sacrifice peut être mangé par tous car
il est « frais » et n’a pas de conséquences (til hella mba wa ni, sa ægonira ka jup sa mbassa ði... kay
da yorira lay, Da slawna lay... may daææa ægonira ka ya coco ði...kay me ægonira ni heppa. Ndat ni
mulla, ndat ni vaa yowna lay... ; åivun ægonira ni heåe...suuna a tam ki ni halaæ...).

De temps en temps on fera le sacrifice à la puissance avec une brebis, une poule et de la purée (lora).

N.B. Si c’est la 2ème femme qui accouche des jumeaux elle devient pratiquement la 1ère car c’est
elle qui présidera les rituels à côté de son mari. La première gardera le droit de monter au grenier mais
ce sera la mère des jumeaux qui lui prendra le pied pour la mettre sur l’échelle et qu’elle puisse
monter sans problème.

¾ Quand finit le travail du parrain ?


A la fin des rites (une fois chassé la souillure et fait le rasage... = azi dik ægonira (wel yamba) ki wa ni,
ni daåiya). Cependant les parents doivent garder des bonnes relations et les inviter aux repas fait avec
des bêtes tuées pour les jumeaux. Les parents peuvent venir rendre visite. - Pratiquement tous ce qui
ont eu des jumeaux forment une « famille » lié par les sacrifices à cette divinité et par le
« parrainage ». On les appelle pour le mariage ou des grands sacrifices... donc ils sont très liés entre
eux.
- N.B. Quant au terme « parrain » il y a des confusions et parfois on a emprunté cela à l’initiation qui
vient d’ailleurs. Certains disent « payna » dans le sens que c’est un ancien, un qui a déjà vécu cela, qui
connaît la chose... D’autres utilisent « mukæa » dans le sens que c’est celui que tu choisis et qui va te
conseiller et te conduire. Celui-ci devient comme ton père (mukæa aæ yam ana, mba ay laæ zlaaæga...
nam øaæ gatta... ni buæu...).

Exemples de chrétiens face aux jumeaux :


Premier cas :
Prière pour introduire les enfants dans la case ; conseils aux parents de ne pas écouter ce que
disent les autres à propos des jumeaux ; - six ou sept mois après (à cause de la mère), on fait la
fête avec le bélier que donne la famille du père, de la boisson ; les parents choisissent les
invités ; - on va jusqu’à l’arbre ; les parents donnent le nom Musey ; la communauté donne les
noms chrétiens ; - prière ; on remercie Dieu ; ægonira n’est ni dangereux ni mauvais ; - retour,
fête, cadeaux.
Deuxième cas : dans une famille chrétienne :
Prière d’entrée, le père décide de la date de la fête ; il n’y aura pas d’autres rites. Pour la fête :
prière dans la concession, puis au lieu de prière ou on y a donné les noms Musey et chrétien ;
retour, fête, cadeaux.
Problèmes actuels :
Ceux qui ne sont pas chrétiens ont peur et demandent de faire un rite à l’église car on y
dépense moins. Les coutumes sont en train de se perdre mais la peur reste et parfois il y a
opposition de la famille pour faire quand même certains rituels. En cas des difficultés cela
resurgit. Les jumeaux est toujours quelque chose « hors norme » et les gens ont besoin de
soutien et de rites pour se libérer de cela avec une vraie participation communautaire.

Proposition pour les non chrétiens qui veulent faire cela en Église : d’abord une prière simple ;
puis les conseiller et leur dire de suivre l’enseignement de la Parole de Dieu ; s’ils persévèrent,
dans un an on fait la fête. 1) Reste à étudier et bien expliquer le sens de la plante
« golomgolomba » que si on veut on peut utiliser (crée par Dieu, il n’y a rien de mal mais c’est

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un lien avec la tradition etc.). 2) Aussi pour le bracelet torsadé « peretna » que certains
refusent (peur, forge comme lieu « sacré » et à payer etc...) mais d’autres mettent.

- Y a-t-il un fétiche « plante magique » (guna) de chrétien ?


Non, pour le chrétien ce qui compte c’est la prière et la Parole de Dieu. Pour les jumeaux on
prend comme signe l’eau qu’on donne. Comme pour toute naissance on pourra y mettre les
plantes médicinales qui viennent de la tradition, cela est bon. Exemple : Le guna de
« capitaine » pour la beauté de la fille n’est pas de la magie mais plutôt un vœu. Alors on peut
en mettre sans problème. Mais rien de ce qui est en rapport avec la sorcellerie, les puissances
ou les ancêtres n’est admis.

DIVERS SUR LES JUMEAUX :


Il y a les vrais jumeaux pas seulement par le sexe mais aussi quand ils ont un signe sur le corps qui
désigne leur union avant la naissance, ou bien s'il pleut le jour de la naissance (ex. naissent à 16hoo,
s'il pleut entre temps, pour le lendemain matin…)
Un cérémonial spécial célèbre la venue des jumeaux. Chaque groupe – lignage Musey a ses habitudes
mais on peut retrouver pas mal de choses communes : partout cela est un “tabou” (yawi) et c’est une
“mauvaise chose” (va coo) même si tous sont contents pour ne pas déplaire à la puissance des
jumeaux.

Récit d’un vieux papier datant de 1965 (il y a un peu de confusion mais il y a des bonnes choses) :
Chez les Boæo H.H. c’est le 10ème jour après la naissance que tous se rassemblent des alentours. Dans
le saré des jumeaux, leur mère prépare une bière spéciale dans laquelle mijote sa ceinture en fine
paille (keena) et la peau de son mari (on y met des morceaux). Ce jour-là personne ne se promène en
brousse. Les parents des jumeaux répandent en brousse, au croisement d’une route la bière (so’
summa) préparée avec leurs habits, on offre cela à la puissance des jumeaux. Peu après moutons,
chèvres, poulets, que les proches parents et tout le village ont apporté, sont sacrifiés, chacun au nom
d’une puissance (génie). - Puis 3 canaris de bière sont avancés (pazi ni vun gerekæa). Une pour la
puissance des Jumeaux (loæ ægonira = dieu créateur des jumeaux), une pour le dieu de l’aîné, une
pour celui du cadet. Avec une petite calebasse ils puisent ensemble dans le premier canari et répandent
la bière par terre en disant : “loæ ægonira, je te répands cette bière, regarde les jumeaux avec le bon
œil.” Et le même rite est repris à l’intention des 2 autres puissances, et en plus à l’intention des
puissances de tous les autres jumeaux dont on a entendu parler. D’une bête tuée on amène alors le foie
(dukduk njuffa) coupé en morceaux. L’homme et la femme s’assoient face à face; chacun croise les
bras à la hauteur des poignets et des leurs 2 mains respectives prennent le même morceau de foie
qu’ils jettent par terre à l’intention des mêmes puissances pour lesquelles on a répandu la bière. Vient
enfin la boule où le même cérémonial des mains est repris; ils en mangent ensuite toujours dans la
même position. Ce dernier rite terminé la curée des amis et des parents commencent. Le lendemain on
attachera au poignet des jumeaux et des parents un bracelet de paille tressée qui le protégera.
(peenera= cilit u dandanlayra). Désormais le mari évitera toujours de se trouver avec sa femme dans
la case, aux champs, sur le sentier... cela jusqu’au sevrage où la même cérémonie lèvera tous les
interdits (1 an pour chasser cela = dik ægonira). Donc c’est un an après qu’on va faire une autre
cérémonie avec boisson et bêtes offertes en sacrifice. Puis, tous rassemblés se dirigent vers un arbre
(vitex doniana = golomgolomba) en chantant : les jumeaux c’est tabou et extraordinaire... (ægonira
yowna hoho wé...). Ils coupent deux bûches pour la jeter dans le saré des jumeaux; leur mère alors
s’assoie dessus (cet zlaamba). Un simulacre de fête commence. Au tambour, les 2 époux dansent, la
femme en face de son mari qu’elle tient avec sa hache de fête passée au cou de celui-ci .Quant à lui, il
agite une maraca (cagira). Après cette manifestation de joie ils rentrent dans leur case, couchent côte à
côte sur le même lit et se caressent mutuellement; leurs caresses terminées ils reviennent à la danse.
C’est le parrain qui va les unir.

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Récit de 1965 chez les DOMO :
Dès qu’une femme accouche des jumeaux, tous les gens se moquent des parents, on danse en face de
chez eux (sans tambour) et on rythme avec des 2 tiges de mil utilisées comme baguettes de tambour
sur une petite calebasse, elle même retournée et flottant dans une grande calebasse d’eau. Pendant les
10 jours qui les séparent du sacrifice qui remettra tout en ordre, on se distrait ainsi sur le dos des
heureux parents. Ceux-ci coucheront par terre pendant cette période. Leur menu sera spécial : une
boule que ensemble ils tremperont toute entière dans une sauce, non sans en avoir répandu en libation
à l’intention de la puissance des jumeaux. Le 10ème jour venu, ils “chassent” les jumeaux (l’impureté
qui vient du contact avec cette puissance). Pour ce faire les 2 parents prennent les bébés et répandent
une libation le résidu de la bière. Ensuite tous se rendent sous l’arbre protecteur Gogolomba et, dès
qu’ils voient une branche s’agiter c’est que la puissance des jumeaux est apaisée... éclate alors un
chant improvisé, deux branches sont coupées et le joyeux cortège regagne le saré. Après une toilette
des bébés à l’eau chaude, une onction à l’huile de sésame, on pose ceux-ci sur les rameaux
protecteurs, après quoi ils sont rentrés dans la case. Tous sortent dehors et les deux époux dansent à
l’intérieur du saré : l’homme avec la maraca en main et la femme se serrant derrière lui. Brusquement
le mari s’arrête, jette par terre la maraca qui se brise et il se précipite vers la case des petits, sa femme
le suit. Il saisit brusquement l’aîné et sa femme le second; il est alors évident pour tous les spectateurs
que l’anomalie des jumeaux retombe sur elle, puisqu’elle saisit l’enfant anormal, le second. - Les 2
jumeaux sont ensuite remis à leur place et les 2 époux, couchés l’un contre l’autre, dans la case du
mari, se prodiguent des caresses. C’est cette tendre conclusion qui met fin à la cérémonie. De reste
dans le domaine de le fécondité toute anomalie est imputée à la femme, son mari lui donnant tout ce
qu’il faut pour faire son enfant sans histoires.

¾ Que faire pour ægonira en cas de maladie ?


Exemples de sacrifices divers :

Si par hasard quelqu’un de la famille est malade, ils vont chez le devin et souvent il dit que cela vient
de la puissance ægonira. Alors on lui demande ce qu’il faut faire pour que le malade recouvre la
santé ; le devin peut dire, par exemple, de prendre le haricot, le concombre et du sésame blanc
(dagalawna) et il fera la cérémonie avec ça pour avoir la santé. Le type fera exactement ce que le
devin lui a dit. Quand la femme a fait la boule elle appelle son mari, celui ci appelle tous ses enfants
et, s’il a plusieurs femmes, il les fait venir aussi. Quand tous sont là, il coupe la boule et en jette par
terre en disant « Prends ægonira et qu’en prennent les autres divinités (fulina) aussi ; ægonira c’est toi
qui me faisait toujours « mal ». Aujourd’hui je te fais un rituel, donne moi la santé : à moi, à mes
femmes et à tous mes enfants. » Ainsi la cérémonie de ægonira est faite. L’année prochaine, si l’un ou
l’autre de la famille est malade, il fera encore un sacrifice selon le résultat de la divination.

Autre exemple :
Des jumeaux sont malades. La divination a dit de faire gulutta et de la bière avec toutes les femmes
des jumeaux. Le père met du kaolin (beena) sur le front de tous, puis prend le mouton et dit : « Prends
ægonira j’ai trouvé un mouton, Dieu des jumeaux je t’ai pris un mouton, Dieu de mon père je t’ai pris
un mouton ; les jumeaux sont malades et c’est mauvais, je tord le cou de ce mouton que les jumeaux
soient en paix. » (Nãa ægonira, an vak timina kon wanna, lona u ægonira an vaæ timina, loæ bunna an
vaæ timina ; gor ægonira li tuguðira wanna, co’o, an gulu’ timina wanna, gor ægonira cuk heppa). Il
tord le cou du mouton. Son fils découpe la viande et sa femme la fait cuire. Pendent cela il prend le
foie et dit : « Le Dieu des jumeaux je t’offre le foie… mon Dieu… le Dieu de mon père… » (Lona u
ægonira an yak dudukka... Loonna... loæ bunna ... ). Puis tord le cou à un poulet sans rien dire. Sa
femme le fait cuire à part avec du sésame (slekæa azi davat ha dagalawna). Ensuite il tord le cou à un
deuxième mouton dehors devant sa porte d’entrée (vun gerekæa) sans rien dire, et sa femme le fait
cuire dehors. On distribue les boissons. Puis on prend les sauces, les boules ; les deux jumeaux avec
l’adjudant (gaææa) et donne la boule aux divinités : « Dieu des jumeaux, Dieu de mon père, divinités,
jumeaux, Terre… c’est votre boule, mangez! » (loæ ægonira, loæ bunna, fulina, ægonira, mbassa...ni
fuugina, agi tiye) et ensuite tous mangent.
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Croyances :
Celui qui se moque des jumeaux (ægul goo ægonina) ou qui les fait fâcher, les jumeaux peuvent lui
envoyer un scorpion le pîquer (gam u huuðura) ou bien lui mettre un tige aux côtes (cugum kaayara
payamu). Donc quand le type se rend compte qu’il a mal à cause des jumeaux il va consulter
« maayra » et le femem qui fait la divination par cet insecte va lui dire quel rituel faire (offrir des
oléagineux ou en donner au jumeaux, préparer de la purée etc. : cuk njeåe ki kala, øal njeåe maæ goo
ægonira kala, li lora kala). Une fois accompli le rituel la maladie termine aussi.

Es-tu un jumeau ? : Aæ ni goo ægoni zu ? Expression pour qui fait les choses en cachette, sans
parler...

« Proverbes » sur la naissance :


La grossesse est comme la nouvelle poterie : Wiina ni doy ma leåena. Quand elle est encore fraîche
(on vient de le faire) si on ne fait pas attention elle va se casser (cara li u wiina ni, li u tat jiviya)

La chienne mange son placenta : Dira kom toomoðu. S’il y a quelque chose en famille, entre frères,
on laisse aller car c’est des affaires « internes ».

Faut-il te supplier comme le cordon qui ne veut pas sortir ? : Aæ a øu ðef zu ? Quand le cordon-
placenta ne sortait pas on allait chercher une femme qui avait une « plante magique » spéciale pour
supplier les choses de sortir. On dit cela à un enfant qui embête beaucoup et qui n’est jamais content
de quelque chose.

On a enterré l’homme et laissé « en haut » le placenta : Pi sa warna ki kaæga hin kolo ni toomma.
Moquerie pour un type un peu bête, qui ne réfléchit pas, pas capable de discerner ni de bien travailler
(différent de un fou et d’une maladie...).

Est-ce que le singe a mangé ta purée : Vìì tàæ looæ su ? (celle qu’on prépare à la naissance) on dit
cela pour un type rusé et malin.

Notes sur la CULTURE MUSEY fruit d’une session tenue à Gounou-Gaya (Tchad) en Juillet 2000, plus notes de Marco et
fruit des rencontres du « Groupe Inculturation » avec Jean Wihawna (transcription Musey) puis mis en forme par Marco
Bertoni.
N.B. Ce matériel est conçu pour des personnes se trouvant sur le terrain et donc parfois il peut y avoir des choses pas trop
claires pour celui qui ne connaît pas les Musey. On s’excuse de cela. Merci de votre bonne compréhension.

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