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Dissertation de Philosophie 

:
Le réel est-il hors de moi  ?
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Lorsque l’on se demande ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, on a tendance à rendre réel
tout ce que l’on perçoit grâce à nos sens et à rendre irréel et imaginaire ce qui appartient au domaine
de l’immatérielle. Mais l’histoire, les lois, la volonté, la passion, la douleur et l’amour ne sont donc
pas réels ? Sous le prétexte de ne pas avoir de présence physique pouvons-nous dire que des notions
primordiales comme l’évolution, l’intelligence ou la pensée n’existent pas ? Nombreux sont ceux qui
en essayant de définir le réel, le restreignent à une catégorie spécifique. Les idées, l’expérience,
Dieu…. Mais on pourrait d’abord se demander si on, si nous, et plus particulièrement si moi sommes
seulement inclus dans la définition de réel pour pouvoir l’étudier ou alors si étudions nous
l’inatteignable ?
Le réel est-il hors de moi ? Suis-je inextricablement lié au réel ou alors m’est-il inconnu ? En
effet, sommes-nous inhérent à la notion de réel ou alors est-ce que cette dernière nous exclut
totalement ?
Pour répondre à ces interrogations nous essayerons de déterminer si le réel est
effectivement hors de moi, puis nous nous demanderons si au contraire je fais partie du réel avant de
finir and expliquant que c’est le sujet, donc moi, qui décide de mon appartenance au réel.

Nous commencerons par essayer de prouver que le moi est bien exclu de la notion de réel. En effet,
d’après Platon, philosophe grec du IVème siècle av J.C et disciple de Socrate, le monde sensible,
c’est-à-dire celui que l’on perçoit grâce à nos sens comme le toucher ou la vue ne fait pas partie du
réel. Il considère que ce sont les idées qui sont réelles et que cette forme de réel peut influer sur le
monde sensible qui deviendrait alors la représentation concrète des idées. Par exemple, l’idée du
meuble appartient bien au réel mais le meuble en lui-même n’appartient pas au réel. C’est-à-dire que
ça représentation concrète, matérielle, sensible n’est pas réelle mais est inspirée et issue de l’idée du
meuble. L’idée du meuble n’a pas de couleurs, de tailles, de décorations spécifique tandis que sa
représentation physique en a car on peut la peser, lister ses couleurs, décrire le matériau qui la
compose, décrire ses motifs etc… Ainsi, ces deux entités sont bien distinctes, si l’idée du meuble est
générale et correspond à une quantité infinie de représentations sensibles de meubles, chaque
meuble est unique en son genre à cause de ses caractéristiques physiques. L’idée immatérielle
appartient donc au monde du réel tandis que sa représentation en est exclue. Ainsi, on peut dire que

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l’idée du moi est bien réelle mais que la représentation physique du moi, celle appartenant au
monde sensible n’est pas réel. Le moi n’est donc pas réel car il ne fait que représenter une l’idée
générale d’une « moi » hypothétique qui, elle, est réelle. Ainsi d’après Planton, le réel est bien hors
de moi car il se trouve dans le monde des idées tandis que je n’y suis pas car j’appartiens au monde
tangible.

Gorgias, un autre disciple de Socrate, rejoint Platon dans sa vision et va même plus loin car il affirme
dans son traité De la nature ou Traité sur le non-être qu’aucun des êtres n’existe. Pour expliquer son
point de vue, il commence par définir que s’il existe quelque chose, il s’agit soit de l’être, soit du non-
être, soit des deux à la fois. Il commence ensuite par expliquer que le non-être ne peut pas être car il
serait et ne serait pas à la fois ce qui est impossible. En effet, il explique tout comme Sartre le fera à
son tour qu’une chose ne peut pas être les deux contraires au même moment du même point de
vue. En utilisant ce raisonnement, il explique donc également que ce qui existe ne peut pas être à la
fois l’être et le non-être. Enfin pour démontrer que l’être n’est pas, il explique qu’il ne peut pas être
engendré car s’il avait été engendré cela aurait été à partir de l’être, donc de lui-même ou du non-
être qui n’existe pas. Donc l’être ne peut avoir été engendré. Or n’étant pas éternel car la notion
d’éternité inclus une absence de limite qui à son tour implique une absence d’emplacement et donc
une absence d’existence, l’être ne peut pas être. En prenant l’exemple d’un singe, le singe ne peut
pas exister selon Gorgias car l’existence d’un non-singe n’inclurait pas l’existence d’un singe, un singe
ne peut pas être à la fois singe et non-singe et un singe ne peut pas être engendré si ce n’est pas lui-
même ce qui est impossible. De plus, ce dernier n’est pas immortel car cela impliquerait également
son absence d’existence. Donc d’après Gorgias, le singe ne peut exister. Le disciple de Socrate arrive
donc à la conclusion très contesté que les êtres n’existent pas. Par conséquent, en suivant cette
théorie, le moi n’existe pas car je ne peux pas être un non-moi, ni être moi, ni être les deux à la fois.
Me privant d’existence, cette théorie m’empêche de faire partie du réel et donc pousse le réel à être
hors de moi. Ainsi, deux des disciples de Socrate s’accordent à dire que le moi est hors du réel car les
êtres n’appartiennent pas au réel. Mais ces doctrines, ne se limitent pas à la philosophie antique.

En effet, le philosophe irlandais Berkeley du XVIIIème siècle explique, d’après sa théorie de


l’immatérialisme que : « être, c’est être perçu ou percevoir ». Ainsi, les objets peuvent être réduits à
une quantité limitée de caractéristiques qui n’existent que dans l’esprit. Par exemple, la couleur
d’une cerise, c’est l’interprétation de notre esprit d’une certaine longueur d’onde que l’on reçoit
grâce à nos yeux. De même, pour son goût ou son odeur qui ne sont que notre propre interprétation
de la cerise. Dénuée de ces caractéristiques, la cerise en tant que matière propre ne peut être perçue
et donc ne peut exister et être réelle. Berkeley explique donc que parler de l’existence d’objets non
pensants lorsque qu’ils ne sont sujets d’aucunes interactions avec un être pensant n’a pas de sens car
ces derniers n’appartiennent pas au domaine du réel. La matière n’existe que lorsqu’elle a un lien
avec un être pensant qui la perçoit, l’analyse et l’étudie. Les esprits et les êtres spirituels et
immatériels sont donc l’essence du monde car ce sont les seules entités à pouvoir exister. En effet,
chaque esprit a des idées lui étant propres qui sont des perceptions du monde. Ils perçoivent donc et
par conséquent, ils sont. Hors de « moi », ne se résume pas à une entité immatérielle. Le moi
possède des caractéristiques tangibles, matérielles. Ainsi, dénué de ces caractéristiques qui entraient
dans l’entendement des êtres spirituels, le « moi » ne peut plus être perçu et par conséquent n’est
pas réel. Le réel se situe donc d’après Berkeley hors de moi, dans le domaine des esprits spirituels et
immatériels tandis que moi, étant caractérisable, je suis exclu du réel. Ainsi, même au XVIIIème
siècle, l’appartenance du moi au réel n’apparait pas comme une évidence. Cependant, on peut

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également considérer que le « moi » peut être une source de pensées, d’idées, de réflexions et donc
de perception. En tenant en compte de cet aspect, le moi ne semble plus si étranger au domaine du
réel et pourrait même y appartenir.

En effet, Aristote, l’un des plus grand philosophe antique, aborde la question de la diversité du réel.
D’après lui, les réalités naturelles existent en tant que perpétuellement soumises au changement et à
la transformation. Il considère les objets du monde physique comme des sujet au changement et les
êtres vivants comme des corps organiques doués de mouvement. Ces derniers sont le siège de leurs
propres changements contrairement aux objets qui le subissent. Ils qualifient enfin l’intégralité des
êtres en tant qu’existant. Ainsi, d’après Aristote les êtres vivants sont la source de leurs
mouvements. Mais plus important encore, d’après lui, tous les êtres vivants sont. D’après la
philosophie d’Aristote, l’ensemble des êtres vivants existent et donc l’ensemble des êtres vivants
appartiennent au réel. Par conséquent, j’existe et j’appartiens au réel, donc mon moi appartient au
réel. D’après Aristote, le réel est en moi car je suis un être vivant. Et ce n’est pas le seul philosophe à
penser de la sorte. En effet, les empiristes se sont également penchés sur la question de la position
du moi par rapport à la réalité

D’après les empiristes : « Rien n’est dans l’entendement qui n’ait jamais été dans le sens ». D’après
ces philosophes parmi lesquels on peut citer John Locke, un philosophe anglais du XVIIème siècle, ce
que l’on connait est formé à partir de l’expérience. On perçoit quelqu’un chose grâce à nos sens, puis
on y réfléchit, c’est alors que la chose est connue. Si je perçois l’aspect d’un plat, que je sens son
odeur et que j’en ressens le goût en le mangeant, je réfléchis et je sais que le plat existe, je sais ce
que c’est. Par analogie, je peux faire l’expérience de mon moi. Je peux sentir mon odeur, voir mon
reflet, toucher ma peau. Je peux aisément connaitre toutes mes caractéristiques physiques et donc
me percevoir. M’ayant perçu je peux donc réfléchir sur moi-même et me connaitre, je sais qui je suis.
Ainsi, je me connais, je peux me définir, expliquer mes caractéristiques. Je peux décrire ce qui fait
que je suis, que j’existe. Je peux décrire et définir mon moi, ce qui a pour conséquence que mon moi
appartient au réel. La connaissance que j’ai de mon moi que j’ai acquis premièrement via la
perception puis via l’entendement m’a permis de dire que mon moi appartient au réel et donc que le
réel n’est pas hors de moi. J’appartiens à l’ensemble d’entités qui sont considérés comme réelles,
ensemble qui varie énormément selon les auteurs pouvant ne rien contenir du tout ou au contraire
tout contenir.

C’est par exemple le point de vue de Spinoza qui est un philosophe juif néerlandais du XVIIème
siècle. Il écrit dans son livre l’Ethique paru en 1667 que pour lui Dieu et la Nature sont la même
entité. Il explique cette phrase polémique par le fait que la substance est définie par quelque chose
qui est en soi sans dépendre de rien d’autre et que le monde est constitué que d’une seule substance
et que c’est substance c’est Dieu, ou comme il l’appelle également la Nature. Plus simplement, il
considère que l’intégralité du monde est composé d’une seule substance et que cette substance,
c’est Dieu. Or Dieu n’a pas de limite, il est infini. Par conséquent, absolument tout sans limite est
compris dans Dieu et absolument tout existe puisque Dieu existe. Par exemple, la feuille qui tombe
de l’arbre, la vague qui échoue sur la côte, l’homme qui marche, la physique, la méchanceté, la
pensée et les idées sont compris dans la définition de Dieu et donc existe. La Nature dans son
ensemble est d’après Spinoza réelle. De même, tout a le droit de vivre puisque tout est Dieu. Par

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conséquent, moi qui suis dans ce monde, moi qui possède mes propres caractéristiques, j’existe car
je suis Dieu, car je suis la Nature et car je suis réel. Par conséquent, le réel ne peut être hors de moi
puisque tout est réel. La notion même de réel comprend absolument tout chez Spinoza donc il est
impossible qu’il existe quelque chose hors du réel. J’appartiens donc bel et bien au réel. Cependant,
cette notion de constance impliquant que tout est un ne met pas en avant de théorie expliquant
l’évolution et les différents changements que connait le monde. Elle n’est donc pas partagée par tous
les philosophes.

Hegel, philosophe allemand du XVIII-XIXème siècle, explique que le monde est composé de
contraires qui en s’opposant interagissent et évoluent afin de donner de nouveaux éléments. Ainsi, il
considère que tout a existé à un certain moment puis qu’il s’est transformé en se remplaçant par un
nouvel objet. L’histoire contient donc tout d’après lui. Il explique également que tout le réel est
rationnel et que tout le rationnel est réel. Ainsi, il explique l’évolution du monde par des
changements rationnels, ou plutôt des transformations entre deux objets liés. Par exemple, on peut
expliquer le passage de la monarchie à la démocratie par la suppression de certaines caractéristiques
de la monarchie comme le fait qu’un seul individu réunit tous les pouvoirs, par la conservation d’un
système politique visant à la stabilité d’un Etat et par l’apparition du pouvoir partagé entre
l’ensemble d’un peuple. Il s’agit donc bien d’une transformation qui conserve, supprime et créé afin
de faire naitre un nouvel objet, une nouvelle entité issue d’une ancienne. La démocratie était
instable car elle prônait la paix dans un royaume tout en provoquant des inégalités entre les
individus ce qui l’a poussé à évoluer au cours du temps. A cause de son instabilité, elle devenait de
plus en plus irrationnelle et de moins en moins nécessaire, ce qui a provoqué la révolution française
en 1789. En effet, pour Hegel, ce qui est réel c’est ce qui est nécessaire. Ainsi, la monarchie n’était
plus nécessaire, était jugé comme irréel et ce qui est irréel finit par se transformer et être remplacer.
SI nous prenons un autre exemple, le nazisme est apparu en Allemagne car il était nécessaire pour
purger l’Allemagne de son humiliation lors de la 1ère Guerre Mondiale. Cependant, le nazisme a pris
de telles démesures qu’il n’était plus nécessaire, si bien qu’il n’était même plus réelle et a disparu,
remplacé par le retour de la démocratie. En suivant, cette philosophie, on peut affirmer que ce qui
existe est nécessaire et que l’irréel, qui n’est pas nécessaire est remplacé pour redevenir utile. Ainsi,
moi est nécessaire à la formation de mes pensées, à l’accomplissement de mes désirs et plus
généralement à mon existence ce qui explique mon appartenance au réel. Cependant, si je désire
évoluer, me transformer pour changer mon mode de vie, ma façon de penser, mon moi n’est plus
nécessaire et devient irréel afin de pouvoir évoluer et être remplacer. Ainsi, c’est ma volonté qui
décide si mon moi est nécessaire ou non et donc qui décide s’il est réel ou non. Je décide donc si le
réel est hors de moi ou non.

Kant également pense que c’est le sujet qui décide du réel. En effet, le philosophe allemand du
XVIIIème siècle affirme que le centre de la connaissance est le sujet, c’est-à-dire l’être qui résonne et
réfléchit. Il explique également que la réalité extérieure au sujet, c’est-à-dire la transcendance qui
regroupe les connaissances a priori et les objets en soi, n’impose plus ses règles à la connaissance
mais au contraire elle doit se soumettre aux règles imposées par le sujet pour que ce dernier accède
à la connaissance. Autrement dit, le sujet n’a plus accès à la connaissance en soi mais seulement à la
manifestation de cette connaissance via des phénomènes. Il ne connait plus que ce qui a été
modifiées pour d’adapter à son esprit. Il ne voit pas le réel mais un mélange entre le réel et son

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esprit. Par exemple, Kant explique que l’on ne peut connaitre l’existence de Dieu car on n’a qu’une
connaissance à priori de ce dernier. On n’a pas d’expérience empirique ou a posteriori de Dieu. Si le
sujet assistait à un phénomène découlait de Dieu, il aurait une connaissance de ce dernier. C’est donc
le sujet qui décide de la connaissance et donc du réel. Le sujet, c’est-à-dire l’être pensant décide de la
connaissance et donc du réel. En effet, la connaissance, la pensée, le réel et les idées sont
inextricablement liés.

C’est ce que défend le philosophe Descartes avec sa célèbre citation « Je pense donc je suis ».
Cependant, le terme « donc » ne correspond pas à une causalité mais plutôt à une intuition ce qui le
pousse à redéfinir sa pensée plus tard par « je suis, j’existe ». Ainsi, le philosophe tente de démontrer
l’importance de la pensée qui domine sur les sens. Pour cela, Descartes a commencé par douter de
ses sens. En effet, il explique que ses sens peuvent le tromper et que par conséquent ils ne sont pas
fiables. Par exemple, la mer peut sembler rouge lors d’un coucher de soleil, bleue en pleine journée
ou alors complètement noire la nuit. Cependant, la mer reste la même, elle est identique, elle n’a pas
changé de taille ni de composants. Ainsi, Descartes arrête de croire ses sens, les ignore
complètement et se met à douter de tout. Or n’écoutant plus ses sens qu’ils considèrent comme
infidèles, il se concentre sur sa pensée. Cependant, le fait de penser implique une action, une action
dont il est le sujet. Le fait de penser le rend donc sujet d’une action et le fait exister. Il arrive ainsi à sa
célèbre maxime « je pense donc je suis ». Ainsi, le fait d’exister est caractérisé par notre capacité à
penser et à raisonner. Peu importe si ce que l’on pense est vrai ou faux, car tant qu’on pense on
existe. Il va même jusqu’à dire qu’on décide d’exister car c’est nous qui décidons de penser ou non.
Par conséquent, si on applique ce raisonnement au « moi », on arrive au fait que moi je pense, ou du
moins je pense penser, ce qui revient à dire que j’existe. Etant capable de penser, je peux affirmer
que selon la philosophie de Descartes, j’existe et donc que j’appartiens au réel. Ma pensée détermine
donc mon appartenance au réel. Or, je contrôle ma pensée. Je peux par exemple choisir de réfléchir
à un problème ou d’arrêter. Le contrôle de ma pensée implique donc un contrôle sur mon
appartenance au réel. C’est donc bien le sujet qui décide de son appartenance ou non au réel et donc
qui décide de la position du réel par rapport à lui.

En nous interrogeant sur la position du réel par rapport à moi, nous avons vu que les avis des
philosophes divergeaient beaucoup. Si les disciples de Socrate et Berkeley semblent vouloir une
séparation entre moi et le réel, Aristote, les empiristes et Spinoza au contraire soutiennent un lien
fort entre la réalité et moi. Cependant, si ces avis divergent, il semblerait que le sujet soit
effectivement celui qui décide de son appartenance ou non au réel. En effet, d’après Hegel, Kant et
Descartes, c’est le sujet qui possède véritablement le pouvoir de se définir lui-même comme
appartenant au réel ou non. Ainsi son appartenance dépendra non pas de facteurs extérieurs mais
simplement de sa volonté et de son envie. C’est donc moi qui décide si le réel est effectivement hors
de moi ou si au contraire nous formons un tout.

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