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2M02 Oscar Troillet

Analyse Jupiter et les Tonnerres

Défendre les inégalités, montrer les failles de la société et leurs conséquences


furent les principaux objectifs de La Fontaine en écrivant ses fables. Ses critiques
efficaces étaient toujours indirectes. Soit, dissimulées par un ton léger et
humoristique, soit, par le biais d’une autre morale qui cache et détourne le sens
véridique de la fable. La justice est un thème sur lequel il a beaucoup écrit.
L’Huitre et les Plaideurs ou encore Le Loup plaidant contre le Renard par devant
le Singe sont deux exemples de fables parlant de justice. Nous retrouvons ce thème
dans une autre fable : Jupiter et les Tonnerres. À la première lecture, la morale du
texte pourrait être « Ô vous Rois qu’il voulut faire arbitres de notre sort, laissez
entre la colère et l’orage qui la suit l’intervalle d’une nuit. ». Mais en y regardant
de plus près, n’aurait-il pas une autre morale ? Après réflexion la véritable morale
du texte paraît être : « Tout père frappe à côté ». Nous pouvons donc en déduire
l’axe suivant : Comment la Fontaine montre-il qu’une justice cruelle et sévère et
moins efficace qu’une qui laisse une seconde chance.

La fable est découpée en trois partie. Tout d’abord, des vers 1 à 18, La colère
incontrôlée de Jupiter. Ensuite, au vers 19 à 41, la demande à Alecton et l’envoie
d’une salve d’éclair préventive. Et finalement, du vers 42 au 64, la deuxième
sentence, dévastatrice.

Dans cette fable, Jupiter est décrit comme étant le père de l’Humanité, il est leur
créateur. « Le père même de ceux » (v.36). « Tout père frappe à côté » (v.41). 49 « On
lui dit qu’il était le père » (v.49). En appuyant cette connexion entre le Dieu et
l’Homme, La Fontaine accentue le lien de parenté entre Le Père et sa création.
Jupiter aime les Hommes inconditionnellement car il les a créés. Même quand il
est en colère contre notre engeance, il finit par reprendre ses moyens et à modérer
son propos. Contrairement aux autres divinités présentent dans la fable, il est le
seul qui juge les Hommes avec modération. Alecton est prête à tuer l’humanité et
Vulcain lance une foudre qui est dévastatrice. Jupiter est le seul à avoir cette
clémence envers nous. Jupiter est montré comme étant celui qui crée, les autres
déités sont celles qui détruisent. Sénèque le dit lui-même dans le texte qui
inspirera La Fontaine. « Parce que Jupiter, c'est-à-dire le roi de l'univers, doit
toujours, s'il est seul, faire du bien et ne peut faire du mal que sur l'avis des dieux
qui le conseillent. » (Sénèque, Questions naturelles, II, 43).

De plus, il sait contrôler ses émotions. Il ne cède pas à la colère et à une folie
destructrice. « Jupiter ne tarda guère à modérer son transport. » (v.12-13). Il sait
mesurer ses actes et se recentrer afin de prendre une décision. Il est montré en
diplomate, privilégiant la crainte et l’avertissement à l’anéantissement et la
destruction. Jupiter sait que les ravages et la mort ne sont pas la solution au mal
sur terre. La Fontaine décrit ici le dieu comme étant à l’écoute. « Tout l’Olympe
s’en plaignit…de former d’autres orages. » (v.44-47). Ce dernier entend les
critiques données par rapport au jugement des Hommes et décide donc de revenir
sur son choix. Il n’est pas tyrannique, même si l’avis de la majorité n’est pas le
même que lui, il révoque ses décisions pour aller dans le sens du plus grand
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nombre. Il met en valeur la démocratie plus qu’une politique monarchique. Bien


qu’il soit vu comme le dieu des dieux, il reste humble et n’hésite pas à demander
l’avis de son entourage.

La foudre est la représentation de la punition divine. Celle de Jupiter n’a pas pour
but de punir mais de dissuader par la crainte. En visant toujours « à côté » il
rappelle aux mortels qu’il les surveille et qu’il voit ce qu’ils font. « Le tonnerre
ayant pour guide…Se contenta de leur crainte » (v.35-38). Il est d’ailleurs le seul à
penser ainsi. Toutes les autres divinités de l’Olympe ne sont pas satisfaites de son
verdict. « Tout l’Olympe s’en plaignit » (v.44). C’est ce qu’il le pousse à lancer de
nouveau une foudre. Jupiter comprend que ce n’est pas par la destruction totale
que l’on peut résoudre le cas de l’Homme. Il est conscient que la peur est le meilleur
moyen car elle montre la puissance divine, rappelle au mortel le pouvoir des dieux,
mais elle laisse la vie aux personnes immorales. La foudre de Jupiter laisse à
l’Homme la possibilité de se repentir, d’arrêter par eux-mêmes d’être mauvais.
Tandis que la punition destructrice élimine, elle efface les dissidents sans se
soucier qu’ils puissent changer.

En conclusion, La Fontaine nous montre un Jupiter prônant les valeurs


démocratiques. Il montre un dirigeant à l’écoute de sa coure et tenant à ses sujets.
Avec cette fable, le fabuliste nous montre qu’infliger une peine dure à toutes les
personnes ayant commis des actes immoraux n’est pas une bonne idée. Il veut
apporter une nouvelle vision à la justice, une justice moins stricte et plus tolérante
ou l’on pardonne et où l’on laisse une seconde chance. La Fontaine est comme
Jupiter, il pense que ce n’est pas en tuant tous les scélérats que la criminalité va
s’arrêter. Dans notre époque contemporaine, cette idée est beaucoup débattue.
Faudrait-il être plus sévère avec les peines des criminels ? La peine de mort est-
elle un réel moyen de dissuasion ? Plusieurs études nous ont montré, à l’instar du
fabuliste, qu’un état avec une justice plus « laxiste » avait une criminalité et des
taux de récidives plus faible. Au contraire, les pays qui encouragent à marginaliser
les criminels ou qui utilisent la peine de mort ont des taux de récidives bien plus
élevés. La Fontaine nous demande de repenser notre jugement et de nous
questionner sur la répression de l’état par rapport aux criminels.

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