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Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 1

UNIVERSITE DE BRETAGNE OCCIDENTALE


Département de psychologie

L1/S1

PSYCHOLOGIE CLINIQUE

Notes pour CM

Introduction
à la clinique et à la psychopathologie
psychanalytiques

Enseignant

Abdelhadi ELFAKIR
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 2

Introduction
à la clinique et à la psychopathologie
Psychanalytiques

I- Naissance de la psychanalyse et rupture avec les savoirs médico –psychiatriques

A- La formation scientifique de Freud et son rapport à la médecine

B- Les rencontres scientifiques de Freud, préparant la naissance


de la psychanalyse

1- Charcot, l'hystérie et l'hypnose


2- Breuer, Anna O. et la « cure par la parole »
3- Fliess, la cause sexuelle de l'hystérie et le transfert

C- Les ruptures avec les savoirs et les thérapeutiques médico-psychiatriques de


l'époque

1- La rupture de Freud avec la pratique de l’hypnose et la suggestion


2- La rupture sur le plan des théories explicatives

II- Concepts freudiens et clinique psychanalytique

1- La conception freudienne du psychisme


2- Le rêve et son interprétation
3- La pulsion sexuelle et son devenir psychique

III- Psychopathologie psychanalytique de la névrose

1- La névrose selon le regard médico-psychiatrique


2- La névrose dans la conception psychanalytique
3- Les types cliniques de la névrose (hystérie, obsession et phobie)
4- L’hystérie comme modalité névrotique fondamentale de défense

Lectures conseillées

FREUD S. (1901). Sur le rêve. Paris : Gallimard, 1989.


FREUD S. (1909). Cinq leçons sur la psychanalyse. Paris : Payot, 1950.
FREUD S. (1915-1917). Introduction à la psychanalyse. Paris : Payot, 1951.
FREUD S. (1925). S. Freud présenté par lui-même. Paris : Gallimard, 1984.
MARIE P., Psychanalyse, psychothérapie : quelles différences ? Paris, Aubier, 2004.
NASIO J.-D., L’hystérie, Paris, Rivages, 1990.

LAPLANCHE J. et PONTALIS J.-B. Vocabulaire de la psychanalyse. Paris, PUF, 1967.


CHEMAMA R. et VANDERMERSCH B. Dictionnaire de la psychanalyse. Paris, Larousse,
1998.
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I- Naissance de la psychanalyse et rupture avec les savoirs


médico –psychiatriques

A- La formation scientifique de Freud et son rapport aux sciences


médicales

En 1873, Freud, âgé alors de 17 ans, devait choisir une orientation pour ses études
supérieurs et pour son avenir professionnel. Il se trouva d’abord partagé entre des études en
droit et sciences politiques ou des études en sciences médicales pour lesquelles son choix se
porta en définitive.

Toutefois, en 1881, à l’âge de 25 ans, une fois devenu docteur en médecine, il ne


s’empressa pas à s’engager dans la pratique médicale, il préféra à celle-ci la voie de la
recherche dans laquelle il s’est déjà engagé durant ses études. Ces recherches portaient sur un
domaine très particulier : les cellules nerveuses des écrevisses. Son manque d’intérêt précoce
pour la pratique médicale, Freud l’exprime clairement en 1878, âgé alors de 22 ans, quand il
écrit à un de ses amis qu’il préférait «continuer à écorcher des animaux plutôt que de
torturer des hommes ».

Certes, la médecine telle qu’elle était pratiquée à l’époque n’était pas pour le satisfaire.
Mais la vraie raison réside dans le désir propre de Freud.
Autrement dit, malgré son statut de médecin, Freud déclare n’avoir jamais eu ni
attrait, ni intérêt, ni préférence particulière pour le statut et les préoccupations du
médecin. Depuis son jeune âge et jusqu'à la fin de sa vie, Freud était, écrit-il dans Ma vie et la
psychanalyse : « habité par une sorte de soif de savoir, mais qui se portait plus sur ce qui
touche les relations humaines que sur les objets propres aux sciences naturelles. »

C’est pour cela qu’il avait aussi envisagé des études en droit et sciences politiques.
Son intérêt particulier pour les relations humaines, qu’elles relèvent du collectif ou de
l’individuel. Néanmoins, il s’avise que son engagement dans les études médicales était pour
lui, la seule voie, une sorte de passage obligé pour pouvoir disposer et maîtriser les
méthodes scientifiques lui permettant de « disséquer », de « décortiquer », non pas
l’organisme, qui est l’objet électif des médecins, mais le champ du psychisme et le monde
des relations humaines.

Ces quelques indications permettent de pointer ce désir très particulier et très fort
qui a toujours animé Freud et qui consistait à dévoiler la vérité inconsciente animant les êtres
humains dans toutes leurs actions. Ce désir le pousse à inventer et à construire, une nouvelle
approche et un nouveau procédé complètement différents de ceux proposés jusque-là par les
sciences médicales, pour comprendre et analyser les relations humaines individuelles ou
collectives, normales ou pathologiques.

Donc, la science médicale, entant que pratique, n'avait rien de quoi intéresser Freud
dans son projet, cependant, dans sa démarche scientifique, Freud y trouvait effectivement, les
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principes et les méthodes scientifiques qui allaient être déterminantes dans ses découvertes
psychanalytiques ultérieurs.

Cette démarche scientifique qu’il affectionnait, Freud la trouva d’abord dans le


modèle de recherche scientifique proposé par Emil Du Bois-Reymond (1818-1892). Celui-ci,
avec d'autres savants comme Ernest Brücke (1819-1892), Hermann Helmholtz (1821-
1894), Carl Ludwig (1816-1895), a fondé, à Berlin une Ecole de pensée basée sur un
programme de recherche expérimental et positiviste. Dans leur objectif, ce modèle
supplanterait les modèles théologiques et vitalistes1 qui dominaient jusque là dans
l’explication des phénomènes naturels en général et physiologiques en particulier.

Freud va être séduit par les idées de cette Ecole et en particulier, par les principes de
déterminisme2, de matérialisme3 et de dynamisme physiologiques dont il va s’inspirer plus
tard dans sa conception déterministe et dynamique du fonctionnement psychisme, normal ou
pathologique.

En 1884, vers l’âge de 28 ans, Freud finit, pour des raisons essentiellement
matérielles, par occuper un poste d'assistant en neurologie, et ce après avoir entrepris une série
de stages dans différents services de l'Hôpital général de Vienne, par ex. en médecine
générale, en neurologie et en dermatologie.

Mais, tout en étant neurologue praticien, il ne renonça pas à ses recherches


histologiques qui le passionnaient toujours. Il se lança à pratiquer des dissections de
cerveau de fœtus humains et d'enfants. Ces recherches lui vaudront, quelque dix années
plus tard, une renommée internationale comme expert en neurologie infantile.

A cette phase de sa carrière scientifique (les débuts donc), Freud va nouer des liens
intellectuels et d'amitié avec un certain nombre de ses collègues et maîtres.

De ces figures scientifiques, nous relèveront 3 en particuliers qui vont laisser, à des
degrés divers, de profondes traces aussi bien sur sa trajectoire personnelle que sur ses
découvertes et élaborations théoriques et pratiques. Il s’agit d'abord de Jean Martin Charcot
(1825-1893) ensuite, de Josef Breuer (1842-1925) et enfin de Wilhelm Fliess (1858-1928).

Ces personnalités ont largement contribué à l’invention de la psychanalyse, par ce que


Freud a appris d’eux ; leur savoir et leur expérience. Mais, aussi et surtout, Freud a
beaucoup appris de ce que ces savants ignoraient dans ce qu’ils ont pu lui transmettre
malgré eux.

Il a surtout beaucoup appris des limites de ces savants dans l’abord de la


souffrance psychique malgré ou plutôt à cause de leur savoir scientifique et médical

1
- Le vitalisme est une doctrine en biologie qui défendait l’idée que les fonctions de l'organisme seraient régies
par un principe vital, distinct à la fois de l'âme et de l'organisme.
2
- C'est le principe d'après lequel tout fait a une cause, et dans les mêmes conditions, les mêmes causes
produisent les mêmes faits, ce qui implique l'existence de lois spécifiques des faits et des causes qui les
provoquaient
3
- Position philosophique qui considère la matière comme la seule réalité et qui nie l'existence de l'âme, de l'au-
delà et de Dieu.
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classique. Celui-ci, comme Freud va nous le démontrer, ne leur avaient pas été de grand
secours dans ce domaine. Ce sont ces limites que Freud a pu mettre à profit de son invention.

Nous allons voir ce que cette triple rencontre a apporté de décisif dans le projet
freudien ?

B- Les rencontres scientifiques de Freud préparant la naissance de la


psychanalyse

1 - Charcot, l'hystérie et l'hypnose


Rappelons tout d’abord que Freud, en tant que neurologue praticien, comptait dans sa
clientèle privée beaucoup de névrosés et d'hystériques en particulier, et, comme tous les
médecins de l'époque, il ne savait pas comment les traiter correctement étant donnée
l'inefficacité de l'arsenal thérapeutique qu'on leur offrait.

Néanmoins, très soucieux du respect de ses patients, il s'engage à trouver d'autres


pistes et arrive à Paris, à la fin de l'année 1885, pour effectuer un stage chez Jean -Martin
Charcot dont les recherches scientifiques autour de l'hystérie étaient les plus avancées.

De ce fait, on ne peut saisir ce que va être l'apport original de Freud dans ce champ
sans reconsidérer les avancées de Charcot sur cette question. En même temps on ne peut
évaluer les idées novatrices de Charcot sans les mettre en perspective dans l’histoire des idées
relatives à l'étiologie et à la symptomatologie de l'hystérie.

Toutefois, avant de procéder à un bref rappel de cette histoire, la précision suivante


s’impose : si la structure subjective qui caractérise l’hystérie reste la même, invariable dans le
temps et l’espace, les manifestations pathologiques et comportementales qui peuvent découler
de cette structure sont, quant à elles, très changeantes et prennent des formes diverses et
variées en fonction de la culture en vigueur dans un espace et à un moment donnés de la
civilisation.

Les symptômes hystériques, plus que d’autres, prennent leurs formes selon les moules
que leur offre telle ou telle socio-culture. Ces symptômes se caractérisent par leur capacité à
attirer l'attention, à éveiller l'inquiétude (des parents, de l’entourage, etc.), et plus important
encore, à mettre perpétuellement en défi les savoirs et les méthodes des experts (politiques,
sociologues, théologiens, médecins, psychologues, psychanalystes, etc.) qui par leur savoir
constituent un soutien du pouvoir social dont l’hystérique s’applique toujours à en dévoiler les
limites.

Revenons maintenant à cette mise en perpective historique que nous avons évoquée
tout à l’heure. Jusqu’à Charcot, l'histoire de l’étiologie et de la symptomatologie de l’hystérie
se répartie en plusieurs grandes périodes que nous allons reconsidérer très brièvement.
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- Pendant l'Antiquité
Les médecins Grecques, Hippocrate à leur tête, placent l’étiologie de l’hystérie au
niveau de l’utérus. Les symptômes qui la caractérisaient à l’époque, comme les convulsions,
la boule à la gorge, les paralysies etc., sont ramenées aux phénomènes de constriction et de
suffocation causées par le déplacement de l'utérus insatisfait, du bas vers le haut. Ainsi,
Platon, le grand philosophe et contemporain d'Hippocrate, explicite cette thèse en écrivant que
: « Chez les femmes ce qu'on nomme la matrice ou utérus est comme un vivant possédé du
désir de faire des enfants. Lorsque pendant longtemps et malgré la saison favorable, la
matrice est demeurée stérile, elle s'irrite dangereusement ; elle s'agite en tous sens dans le
corps, obstrue les passages de l'air, empêche l’aspiration, met ainsi le corps dans les pires
angoisses et lui occasionne d'autres maladies de toute sorte ». (Timée, 91 C). C’est là une
théorie naturaliste mais fantasque.

Le traitement préconisé à cette maladie vise alors à faire revenir l'utérus errant à sa
place, et à cet effet, les médecins prescrivaient essentiellement des rapports sexuels, avec en
second lieu, des grossesses multiples accompagnées de travaux manuels.

- Au Moyen Age, le christianisme impose une conception cosmologique où l'humanité


entière est l'enjeu d'un combat d'ordre spirituel entre Dieu et son adversaire nommé Satan.
Dans cette lutte, les symptômes hystériques sont considérés comme un triomphe des forces du
mal, du démon sur la personne du croyant. Du coup, la prescription sexuelle ne peut plus être
considérée comme un remède mais plutôt une démesure, un désordre, un mal à la mesure de
l’impureté qui caractérise la nature en générale et humaine en particulier.

Ainsi, les troubles autrefois considérés comme liés à la sécheresse et à la migration de


l’utérus prend ici le nom de possession diabolique qui, elle, se décline en 4 actes :
a- La sorcellerie qui consiste à prendre pouvoir sur le corps de celui ou celle à qui la
sorcière, en pactisant avec le diable, cherche à faire du mal.
b- De l’acte du sorcier découle la possession qui se manifeste dans le corps de
l'ensorcelé par des stigmates qui signent l'anesthésie de certaines zones du corps, etc., et aussi
par des visions d’esprits ou de démons.
c- S’ensuit la guérison qui est d'ordre spirituel, et qui est conduite par un exorciste.
Elle consiste à chasser le démon en cause, mais, le plus important est d'obtenir de l'ensorcelé
(e) à la fois la nomination de la sorcière et l'aveu de complicité avec elle, en vue d'un
jugement de condamnation.
d- L'exécution de la condamnation en fin, qui est l'œuvre du pouvoir politico-
religieux à qui est confiée la purification par le feu, c’est à dire le bûcher, selon le précepte
biblique : « Tu ne laisseras pas en vie la magicienne » (Exode, 22, 18).

Dans ce contexte donc, les manifestations hystériques sont interprétées, non dans le
registre de la perturbation des états naturels du corps de la femme comme on l’a vu lors de la
période précédente, mais en tant qu’attitudes anti-religieuses, de révolte et de contestation
contre le pouvoir divin incarné dans l’autorité religieuse, au profit de celui du Démon.

- La Renaissance et la naissance de la médecine psychiatrique


Avec la Renaissance s'instaure une sorte de retour à l'Antiquité qui considérait
l’hystérie comme une pathologie puisqu’elle relèverait de causes internes et naturelles. Et à
partir du XVIIe siècle en particulier, les développements des sciences médico-
psychiatriques vont donner lieux à des approches théoriques et thérapeutiques qu’on peut
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regrouper dans trois orientations qui vont se succéder et se compléter dans le cadre d’une
approche médico-psychiatrique globale de l’hystérie.

- Tout d'abord, un courant purement organiciste qui, en s’appuyant sur des


considérations neurologiques, va contester la théorie utérine d'Hippocrate en défendant l’idée
que ce genre de phénomènes ne peut découler que d'un trouble du fonctionnement du cerveau.
Et du fait de ce désordre neurologique supposé, l’hystérie est considérée comme incurable.

- Un second courant, considère, contrairement au précédent, que l’hystérie est


essentiellement un désordre des passions avec des conséquences somatiques et non une
maladie organique du cerveau. L’hystérie reçoit ainsi, pour la première fois un fondement
psychologique. Et, en tant qu’aliénation mentale, une affection de l'esprit, elle peut donc
profiter d’un traitement psychique qualifié de moral à l’époque.

- Enfin, à partir du XVIIIe siècle surtout, se distingue une troisième voie dont
l’hypnotisme va jouer un rôle prépondérant. Sous les noms de magnétisme, de fluide animal
ou de suggestibilité, certains médecins, d’abord Mesmer en France, ensuite Braid en Grande-
Bretagne, et enfin et surtout Charcot à la Salpêtrière, vont démontrer le pouvoir de l'hypnose
sur les symptômes hystériques.

Ce courant va combiner les deux positions précédentes et va ainsi triompher jusqu'à


nos jours dans la clinique médico-psychiatrique. Pour cette position, si l'hystérie a pour
étiologie, une dégénérescence d’ordre neurologique qui peut être héréditaire, les symptômes,
quant à eux, sont provoqués par des traumatismes affectifs ou réels comme la chute d'une
échelle, des paroles brutales, une gifle offensante, voire la voix de l'hypnotiseur qui, par la
suggestion, peut faire et défaire les symptômes en vertu de ce qui, à l’époque, est supposé un
clivage pathologique de la conscience.

Revenons maintenant à Charcot et à quelques unes de ses idées principales sur


l’hystérie. Charcot, en tant que professeur de neurologie à la Salpêtrière4, s’est d’abord
appliqué à étudier les maladies neurologiques et en particulier, la sclérose en plaque5. Puis, du
fait du nombre impressionnant des patientes hystériques dans cet asile, il s’intéresse à
l'hystérie en lui appliquant sa démarche d’observation et de description issue de sa clinique
anatomo-pathologique du système nerveux.

Ce que Charcot va apporter dans l’étude de l’hystérie dans le cadre de sa clinique


médico-psychiatrique, on peut le regrouper en 3 points :

1- Une sémiologie précise : la construction d’un tableau clinique des symptômes


hystériques. Sa méthode de recherche en anatomo-pathologie va le conduire à décrire
4
- A l’époque, la Salpêtrière était le plus grand asile d'Europe. Il renfermait, parmi tous les types de pathologies
mentales, entre 5 à 8 milles femmes et filles relevant particulièrement de l’hystérie. E. ROUDINESCO, dans son
Histoire de la Psychanalyse en France T. I nous décrit l’atmosphère de ce haut lieu d’enfermement de la manière
suivante : « Les femmes alcooliques, les prostituées voisinent avec les vieillards déments et les enfants débiles.
Les folles sont isolées dans le quartier spécial des incurables et enchaînées ; on les abandonne ainsi demi nues,
au milieu de leurs immondices. A travers les barreaux d'une grille, on leur distribue une nourriture faite de
soupes froides et de déchets ; elles mangent à même la paille qui leur sert de lit. Etc.»
5
- Affection de la substance blanche du système nerveux se manifestant par de multiples foyers de sclérose de
celle-ci et entraînant des troubles nerveux variés.
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méthodiquement et à rassembler les symptômes à travers lesquels l’hystérie se manifestait à


son époque et à en donner le type ou le modèle dominant. Il en construit le tableau clinique de
ce qu’il appelle « la grande crise hystérique » qui, dans sa forme complète, est constituée de 4
phases :
a- « la phase épileptoïde » qui se caractérise par la perte de connaissance subite
accompagnée de la convulsion des globes oculaires, de la raideur, de l’extension du tronc et
des membres, et oscillation des membres raidis ;
b- « la phase de clownisme », dominée par des attitudes imprévisibles, une position en
arc de cercle, souvent accompagnée de cris et des mouvements incontrôlables et illogiques ;
c- « la phase passionnelle » qui est caractérisée par des extases, dans un tableau gai ou
triste selon les hallucinations vécues par la patiente ;
d- et en fin la phase dite « terminale », dominée par des crises de contractures
généralisées.

Avec Charcot donc, Freud va rencontrer pour la 1ère fois une description minutieuse et
précise des phénomènes psychopathologiques de l'hystérie de son époque que la quasi-totalité
de ses collègues médecins, taxaient de simulation, théâtralisme et de mensonge.

Parallèlement à l’établissement de ce tableau, Charcot démontre, et pour la première


fois que l'hystérie est aussi présente, et même de manière fréquente chez l'homme. Le lien
établie depuis l’antiquité par les médecins Grecs et Egyptiens entre hystérie et utérus, ne tient
plus depuis Charcot.

2- Une clinique différentielle : la distinction nette entre hystérie et épilepsie. Avant


son arrivée à la Salpêtrière, et sous l’effet de la notion nosographique « hystéro-épilepsie »,
déjà assez vague, les patients hystériques étaient confondus et mélangés avec les patients
épileptiques.
Charcot, à partir d’une observation minutieuse, va scinder cette catégorie en deux
genres de maladies : l'épilepsie d'un coté et l'hystérie de l'autre. Il va aussi, par conséquent,
séparer les patients hystériques des patients épileptiques à l’intérieur même de l’hôpital.

3- Un début d’explication psychologique des troubles hystériques


Premièrement, Charcot défend l'origine neurologique et héréditaire des symptômes
hystériques, mais il affirme aussi l’importances des causes dites occasionnelles, affectifs ou
réels, dans l’apparition de ces symptômes.
De cette manière, on tendait avec Charcot vers un abord « psychologique » des
symptômes hystériques. Néanmoins, la conception de la psychologie dont il se réclamait
considère les actes psychiques comme des effets directs du système nerveux et de ses troubles.
Il écrit en 1881: « Ce que j’appelle psychologie, c'est la physiologie rationnelle de l'écorce
cérébrale ».

Ainsi, le tableau clinique de la grande hystérie n’est aux yeux de Charcot que des
manifestations psychopathologiques résultant de perturbations imperceptibles au niveau du
cerveau. Et malgré sa tentative d’introduire d’autres facteurs explicatifs ; psychologiques en
l’occurrence, Charcot reste accroché à une conception profondément biologiste (organiciste)
des troubles hystériques.

D’ailleurs Freud, avant de quitter Paris, soumet à Charcot le projet d'une recherche
dont l'objectif serait de mener une comparaison entre les paralysies organiques et les
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paralysies d'origine hystérique qui seraient, selon lui, liées, non pas à l’organicité ou à
l’anatomie mais plutôt au registre des représentations.

Devant les hésitations de Charcot, Freud finit par comprendre que son maître, écrit-il :
« n'avait aucune prédilection pour une étude psychologique approfondie de la névrose».

Deuxièmement, Charcot, pour mener ses recherches expérimentales, va trouver dans


l'hypnose le moyen de démontrer la reproductibilité des symptômes hystériques. Mais
contrairement à d'autres médecins hypnotiseurs (Liébault et Bernheim de l'école de Nancy en
particulier) qui considèrent l’hypnotisme comme un artifice, pour lui, l’hypnotisme constitue
une particularité propre à l'hystérie en tant que pathologie. Selon lui, c'est un état pathologique
chez l'individu malade qui peut se réactiver artificiellement.

Quant à Freud, il a été fasciné par le fait que Charcot pouvait provoquer et annuler les
symptômes par l’hypnose, mais, il pensait, au-delà de Charcot, qu’aussi bien l’état hypnotique
que la manifestation des symptômes qui s’ensuit, relèvent plutôt de l’impact de la force
suggestive du médecin et des effets du pouvoir de sa parole.

A partir de cette manipulation par Charcot des symptômes de l’hystérique sous l’effet
de sa voix, alors que les patients n’en gardent le moindre souvenir, Freud fut alors conduit à
supposer l'existence d'une pensée « séparée de la conscience... sans que le moi en sache rien
ni ne soit capable d'intervenir pour l'empêcher».

Ce constat de Freud va être à la base de la découverte de certains concepts majeurs de


la psychanalyse comme l’inconscient et le refoulement.

D’autre part, en constatant que le corps pouvait réagir ainsi sous l'effet d'une pensée
écartée de la conscience et que la parole de l'hypnotiseur avait un tel effet somatique, Freud
disposait déjà là des éléments de base pour approcher ce qu'il nommera plus tard la conversion
du psychique au somatique, mécanisme spécifique dans l’apparition des symptômes
hystériques.

2- Breuer, Anna O. et « la cure par la parole »

Si Freud est parvenu à inventer la psychanalyse, c'est essentiellement grâce aux


patientes hystériques. C'est de la participation active de celles-ci, en tant qu’analysantes, que
Freud a appris l'essentiel de sa découverte. C’est pour cela qu’il ne manque aucune occasion
pour leur rendre hommage.

Anna O. est l'une des patientes qui l'ont profondément enseigné même si ce n'était pas
lui qui s'est occupé de son traitement. C'est cette patiente, comme on va le voir, qui est la
première à avoir témoigner expressément du fait que le symptôme hystérique réagit à la
parole.

Josef Breuer, éminent médecin physiologiste, rencontre Freud lors d’un passage dans
le laboratoire de Brücke, en 1880, et ne manque pas de constater le grand intérêt de ce dernier
pour la compréhension et le traitement de l'hystérie. En 1883, il lui rapporte l'histoire de
Bertha Pappenheim, une de ses anciennes malades, et lui expose la façon tout à fait singulière
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dont il a mené son traitement de décembre 1880 en juin 1882, pendant presque 2 ans. Cette
façon toute particulière, Breuer l'appelle « la méthode cathartique » ou « le procédé
cathartique ».

Anna O., est une jeune fille de 21 ans, très intelligente, de grande sensibilité et large
culture mais qui commence à présenter de nombreux symptômes lorsque son père, au service
de qui elle était très dévouée, agonisait. Elle présente des paralysies variables, des troubles de
la vision, des hallucinations, une grave inhibition de boire. Elle présente également le
symptôme de ne plus comprendre ni parler l'allemand, qui était pourtant sa langue première et
de ne s'exprimer qu'en anglais, etc.

Breuer, son médecin qui la traitait à l’aide du chloral ( un calmant), de la morphine et


surtout par l’hypnose, avait constaté que quelques chose d’originale se passait chez cette
patiente. Anna O., lors de ses crises hypnotiques, se met, spontanément et dans un état
d’inconscience, à « raconter une histoire » à propos des troubles qui l'avaient tourmentés
pendant la journée.

Après quelques mois de consultation, Breuer fait une autre observation non moins
importante : les symptômes de la patiente disparaissaient, à chaque fois qu'elle parvenait à se
souvenir des circonstances dans lesquelles ils étaient apparus pour la première fois, tout en
revivant pendant son souvenir l'état émotionnel dans lequel elle s'était alors trouvée.

Dans ce traitement cathartique, il s'agit donc de la remémoration, dans un état


hypnotique ou sous hypnose, de la scène qui se trouvait à l'origine du symptôme et d'en faire
le récit. Le rappel de ce récit n’est pas moins douloureux puisqu'il évoque et ravive les affects
ressentis lors de la survenu d’un événement traumatique.

Ici encore, Freud vérifie son hypothèse sur la valeur de la parole et son impact. Il pense
alors que le résultat cathartique incombe moins à l'hypnose qu’aux incidences de la parole qui,
dans des situations pareilles, lui paraissait douée de pouvoirs thérapeutiques. La patiente de
Breuer avait elle-même d’ailleurs, qualifié ce mode de traitement de « talking cure », de
« cure par la parole ». Elle l'appelait aussi « Chemney sweeping » ; « ramonage de
cheminée ».

Toujours est-il que Breuer s'étant trouvé fasciné par l'évolution de sa malade, il en était
venu à lui consacrer plus de temps. Puis, la croyant suffisamment améliorée, il avait décidé,
en accord avec la patiente, de mettre un terme au traitement.

Néanmoins, le soir même de leurs adieux, Breuer fut appelé d'urgence au chevet de
Anna O. Celle-ci se trouvait en pleine crise d'hystérie et mimait l'accouchement de ce
qu’elle appelait, elle, « l'enfant du Dr Breuer ». A partir de cet incident, et contrairement à
ce qu’on pourrait s’attendre, Breuer décida de ne plus continuer à s’occuper de cette patiente.

Dans cette attitude de Breuer, Freud voit une réaction de fuite, défensive donc,
devant l’angoisse que provoquaient en lui les manifestations d’amour de sa patiente à son
égard. Devant ce transfert massif d’Anna O., Breuer prend la fuite et renonce définitivement à
son traitement.
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Breuer et sa conception médicale des symptômes hystériques


Dans un premier temps, Freud et Breuer se trouvent d’accord pour dire que
l’hystérique souffre surtout de réminiscences. Autrement dit, les symptômes hystériques sont
liés à des traumatismes psychiques et par la suite au souvenir de ceux-ci.

Mais, contrairement à Freud, Breuer soutient que cet événement traumatique à


l’origine des symptômes, survient dans un état de conscience anormal, nommé « état
hypnoïde» et qui est dû à une altération pathologique fondamentale du système nerveux. Pour
Breuer donc, le symptôme hystérique exprime une anomalie dans le processus de décharge des
excitations neuronales qui, à défaut d’être métabolisées par une activité associative ou
motrice, donneraient lieu à des troubles somatiques. Nous voyons donc que dans cette
conception médicale, le symptôme est déterminé par une diminution des résistances au niveau
de la conduction intracérébrale.

En rejetant cette conception par la suite, Freud définira le symptôme comme


l’expression de l’accomplissement d’un désir inconscient et comme la réalisation d’un
fantasme servant à accomplir ce désir. Dans ce sens, le symptôme est le retour d’une motion
sexuelle refoulée, mais il constitue aussi une formation de compromis par l’intermédiaire de
laquelle le refoulement s’exprime.

3- Fliess, la cause sexuelle de l’hystérie et le transfert

Fliess est Oto-rhino-laryngologiste, mais il est connu principalement par deux théories
relevant du champ de la biologie et qui depuis, ne tiennent plus devant la preuve scientifique.
- L'une concerne une entité clinique, dans laquelle, d’après lui, le nez tient une place
centrale et qu'il appelle la « névrose nasale réflexe ». Le syndrome de cette névrose renferme
des migraines, des douleurs névralgiques et des troubles fonctionnels principalement digestifs,
cardiaques, respiratoires et sexuels. Fliess prétend qu'il pouvait faire disparaître ce syndrome
en appliquant de la cocaïne sur la muqueuse nasale. Du coup, il en déduit que ces symptômes,
ne devaient leur existence qu'à une seule zone - le nez.

- l'autre est ce qu’il appelle la « théorie des périodes », fondée sur l’idée d’une
bisexualité physiologique fondamentale de l’homme et sur des cycles biologiques.
Relativement à ces derniers et en s’appuyant sur des calcules complexes, il pense par exemple,
qu'à côté du cycle de la menstruation de 28 jours, une autre périodicité de 23 jours,
déterminerait, autant chez la femme que chez l'homme, beaucoup de phénomènes tel que le
jour de la naissance, les caractères sexuels, le développement de l’organisme, voire la date du
décès.

A ces idées, Freud a cru un moment pour des raisons personnelles, mais finit par
s’apercevoir, très vite, de leur caractère spéculatif et infondé. Mais ce qui l’a le plus retenu
chez Fliess, c’est surtout son intérêt pour le champ de la sexualité et sa ténacité à défendre des
hypothèses impliquant celle-ci. Freud supposait ainsi à Fliess un savoir dans ce domaine
beaucoup plus étendu que le sien, et comme il souffrait de n'avoir jamais été entendu dans
l'expression de ses idées concernant l'étiologie sexuelle des névroses, il allait se retrouver pris
dans une relation qu’on peut qualifier de transférentielle à Fliess et qui va avoir des incidences
sur la personne de Freud et sur la découverte de la psychanalyse, et ce à deux niveaux :
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 12

• d'une part, et parallèlement à la formulation de ses d'hypothèses sur l'inconscient, le


refoulement, le pouvoir de la parole, etc., Freud va vivre à travers cette relation, l'exacerbation
de ses malaises et de ses troubles névrotiques qui viennent justement en position défensive
contre l'émergence de ces hypothèses et innovations.

• D'autre part, cette relation va permettre à Freud d’analyser puis procéder


méthodiquement à l'annulation de ses défenses narcissiques comme préalable dans l'avancée
de ses découvertes psychanalytiques, telles que le fantasme, le complexe d’Œdipe, le
complexe de castration, l’origine sexuelle des symptômes, etc..

Les effets analytiques de cette relation et ses incidences


Nous allons les synthétiser en 3actes :
Acte 1
Vers les années 1893-95, période où il écrit en collaboration avec Breuer, Etudes sur
l’Hystérie, Freud s’est aperçu que ses patientes hystériques évoquaient souvent des scènes
d’un ou plusieurs traumatismes sexuels remontant à l’enfance. De ces évocations persistantes,
Freud fut conduit à croire en l'existence réelle de tels faits et propose la théorie explicative
suivante : chaque névrosé a dû subir réellement pendant sa petite enfance une ou plusieurs
scènes de séduction sexuelle par un parent adulte.

Mais après un examen approfondi des faits et suite à la progression de son analyse
personnelle, Freud se met petit à petit à douter de la véracité d’une telle théorie. Il commence
à s’apercevoir qu’elle ne tient plus la route puisqu’elle se révèle stérile sur les plans
thérapeutique et théorique.

Acte 2
Lorsque Freud s’est aperçu que cette théorie ne tient plus, il va se trouver d'emblée pris
dans la trame de ses conflits intrasubjectifs. Il écrit à Fliess dans une lettre du 12 juin 1897, p.
186 : « Jamais je n'avais été atteint d'une paralysie intellectuelle pareille à la présente. Ecrire
le moindre mot m'est un supplice (...), il me semble être dans un cocon. Qui sait quelle bête en
sortira ? »

Ce témoignage montre bien à quel point les idées, même avancées comme étant
d’ordre scientifique peuvent fonctionner comme une béquille défensive pour soutenir et
protéger ses propres fantasmes.

Beaucoup plus important encore, Freud perçoit ici le lien entre, d'un côté, l’insistance
de son désir inconscient de percer l’énigme des symptômes hystériques et plus largement
encore le psychisme humain, et de l'autre, l'inhibition intellectuelle frappant ses avancées dans
ce sens.

C’est ce qu’il explicite dans une lettre datée du 7 juillet 1897, il écrit, p. 187 : «je
continue à ne pas savoir ce qui m'est arrivé. Quelque chose venu des profondeurs abyssales
de ma propre névrose s'est opposé à ce que j'avance encore dans la compréhension des
névroses et tu y étais, j'ignore pourquoi, impliqué».

Dans cette lettre, Freud se montre tout à fait certain que Fliess occupe une place
centrale dans laquelle se nouent l’articulation entre ses élaborations théoriques et
l’effervescence de ses symptômes névrotiques.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 13

Ainsi, Freud s'est trouvé d'un coup pris dans une déstabilisation affective en réaction à
l'écroulement de la théorie de séduction sexuelle précoce qui fondait jusque là ses explications
de l'hystérie.

Acte 3
Les efforts continus de Freud de percer les secrets de son désir, vont lui valoir, après la
défaite de l'idée confortable de séduction, la découverte du fantasme.
Mais au préalable, il a fallu au moi de Freud d’accepter, non sans douleur, sa défaite
narcissique devant l'exigence intraitable de son désir inconscient et c'est l'analyse de ses
défenses moiiques, qui va lui permettre d’avancer vers la construction d’une nouvelle théorie
plus adéquate.

Il va découvrir que cette conception n'était au fond rien d'autre qu'une résistance de sa
part face aux désirs œdipiens, ceux de ses patients et aussi et surtout les siens propres.
Autrement dit, la théorie de la séduction lui servait de bouclier défensif contre ses propres
fantasmes œdipiens.

Cette découverte personnelle, va lui révéler que les scènes traumatiques relatées très
souvent par ses patients avaient un fondement imaginaire fantasmatique et que la sexualité
infantile participait à ces formations inventées. Ce que Freud appelle : « les théories sexuelles
infantiles ».

Ainsi, dans une lettre datée du 3 octobre 1897, Freud, non seulement révèle des
sentiments inconscients d'hostilité et de jalousie à l'endroit de son père, après avoir rêvé
auparavant subir une tentation sexuelle de sa part, mais il parvient aussi à déterrer des désirs
sexuels refoulés à l’endroit de sa mère. « J'ai découvert aussi que, plus tard (entre 2 ans et 2
ans 1/2), ma libido s'était éveillée et tournée vers matrem [ma mère]... ». De cette manière et
pour la première fois, le complexe d’Œdipe se trouve éclairé à travers celui de Freud lui-
même.

Du même coup, Freud parvient ainsi, à démêler tout autant ses désirs incestueux et
hostiles à l'endroit de ses parents que ceux de ses patients à l'égard des leurs, de la prétendue
séduction, voire des passages à l’acte, dont ses patients et lui aussi les accusaient.

Ce pas décisif est d’une importance telle sur la psychanalyse que Freud n’a pas
manqué 30 ans après, de le reévoquer dans Ma vie et la psychanalyse, p. 44 : « j'avais
rencontré ici, pour la première fois, le complexe d'Œdipe qui devait par la suite acquérir une
signification dominante, mais que sous un déguisement aussi fantastique je ne reconnaissais
pas encore ».

De ces quelques indications sommairement rappelées, nous pouvons bien repérer la


place et la fonction que Freud assignait à Fliess et attendait de lui qu'il les assume. Il lui
demande essentiellement d'être son auditeur privilégié « mon premier public », dit-il, c’est à
dire l’écouter de ce lieu d'où Freud pouvait recevoir en retour un sens à son message, message
dont Fliess ne constituait qu'un simple support.

Récapitulons maintenant les impacts de ces diverses rencontres examinées plus haut
sur l’invention de la psychanalyse :
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 14

• la rencontre de Charcot va permettre à Freud, à travers ses descriptions rigoureuses


des symptômes et la présentation de malades hystériques hypnotisées, d’envisager
scientifiquement les phénomènes psychiques qui, jusque-là, étaient soit rejetés et ignorés soit
considérés comme de la pure simulation.

• A la suite de la collaboration avec Breuer, Freud, au lieu d’examiner et de décrire les


symptômes à la manière d’un médecin physiologiste, il va tenter de les écouter d'une façon
particulière pour les amener à extraire le savoir qui les sous-tend. Le savoir dont il s’agit ici
relève du registre de l’inconscient, et donc non su par avance par le patient lui-même et encore
moins par le médecin.

• En compagnie de Fliess, Freud comprendra mieux le poids du transfert dont il a déjà


constaté les effets fulgurants mais ignorés par ses précédents maîtres. Aussi, avec Fliess et
malgré celui-ci, Freud se convaincra de l'importance de la sexualité dans la causation des
symptômes névrotiques, ce que les deux précédents soupçonnaient par ailleurs mais qui, par
souci de conventionnalisme disciplinaire et aussi morale, ils évitaient de s'y risquer.

Freud apprendra aussi que l’essentiel de la psychanalyse comme expérience pratique et


théorique ne s’invente, ne s’apprend ni ne se transmet qu’à partir de l’entre-deux du transfert.
L’analyse est une expérience qui ne se transmet qu’en tant que « savoir inconscient en acte
dans le transfert » (Dictionnaire de la psychanalyse, p. 138.)

C'est donc à partir de ces trois compagnons et maîtres, et pour être plus précis, au-delà
d'eux, que Freud va découvrir les mécanismes de l'inconscient et en particulier le fantasme
inconscient, le refoulement, le transfert, la résistance, etc. et, dans le même mouvement,
inventer la psychanalyse.
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C- Les ruptures avec les savoirs et les thérapeutiques


médico-psychiatriques

1 - La rupture de Freud avec la pratique de l’hypnose et de la suggestion.

Avant l'invention de la psychanalyse, Freud, avait à sa disposition une panoplie de


moyens thérapeutiques utilisés fréquemment par les médecins de son époque. Les traitements
utilisés se répartissent en deux catégories :

a- Les traitements physiques


- L'intervention chirurgicale qui procédait par ablation des ovaires, pratiquée surtout
par les tenants de l'étiologie utérine de l'hystérie, encore nombreux à l’époque de Charcot.
- L'hydrothérapie, pratiquée plusieurs fois par jours, elle consistait généralement en
douches froides de 8 à 12°, et pour les plus fragiles, des douches écossaises ou immersions de
quelques secondes dans des piscines à 14°. Elle s’appliquait aussi sous forme
d’enveloppement dans des draps mouillés.
- l'électrothérapie utilisée surtout pour les troubles localisés de la peau, des muscles et
des muqueuses. Elle procédait par un souffle électrique, ou des étincelles sur tout le corps ou
des parties déterminés.
- L’application de massages et des relaxations utilisées surtout dans les cas de
contractures spasmodiques surtout,
- le traitement médicamenteux qui ne consistait pas à grand chose à l'époque, mais qui
étaient de deux types : • Une médication composée de quelques calmants, comme le bromure
de potassium, du chloroforme. • D'autre part, tout ce qui était appelé la « médecine
d'imagination », et qui consistait en l'administration de pilules de mie de pain, de bleu de
méthylène, voire d’injection d'eau sucrée distillée [le placebo].

Freud a bien connu et appliqué ces moyens thérapeutiques. Mais il les repousse très
rapidement de fait qu’ils s’avèrent infondés sur le plan scientifique et inefficace, voire
nuisible sur le plan thérapeutique.

b- Les traitements moraux et psychiques


- le traitement moral consiste à ramener le malade, le fou ou le délirant à la raison, au
droit chemin. Pour cela, il consiste à utiliser toutes sortes de méthodes fortes telles que
persuasions, intimidations, railleries, voire des coups de fouet et des punitions diverses visant
à forcer le malade à mobiliser sa volonté, à se "reprendre" et à retrouver la raison.
- Le traitement sous hypnose
Le patient est allongé. Il lui est demandé de se relaxer, de se détendre et de suivre les
ordres de l'hypnotiseur en vue d'entrer dans un sommeil artificiel.

L'état obtenu par l'hypnose n'est pas identique au sommeil. Il produit un état de
conscience particulier, "modifié". Le sujet, tout en n’étant plus dans un état de vigilance et de
conscience, ne s'endort pas complètement non plus. Il reste réceptif aux indications, aux
ordres du maître du jeu, l’hypnotiseur.
L'hypnose n'est pas une thérapie en elle-même. Une fois que le patient est placé dans
cet état de sommeil artificiel, le thérapeute peut alors intervenir de deux manières :
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 16

• soit par la suggestion directe, le thérapeute exige du patient qui est sous hypnose,
d’obéir et d’exécuter ses intimations, une fois réveillé, comme par ex. ne plus présenter un
symptôme donné.
• soit par la méthode cathartique, qui consiste à mettre le patient sous hypnose et lui
suggérer de se rappeler l’événement traumatique supposé être à l’origine du symptôme dont
souffre le patient. (la méthode cathartique de Breuer)

Dans tous les cas, et quelque soit la technique thérapeutique employée, l’essentiel de
l’action thérapeutique revenait au bout du compte, d’après les médecins de l’époque, à
l’attitude d’ascendance et de maîtrise que devrait avoir le thérapeute sur son patient. Il doit se
montrer maître de la situation, et pour ce faire, on procédait par isoler le malade de son
entourage, et le placer dans un établissement où le clinicien règne en maître. Ainsi, le patient
doit se sentir bien tenu en main ferme et obéir aux exigences et recommandations du médecin.

c- La position de Freud à l'égard de l'hypnose et de la suggestion


A défaut d'autres moyens plus appropriés et plus efficaces, Freud, pour un certain
temps seulement, s’est replié sur l'hypnose et la suggestion hypnotique qui présentaient le
moindre mal pour ses patientes.

A signaler toutefois que c'est à travers la pratique de l'hypnose qu’il a pu soupçonner


l'existence de l'inconscient. Ce qui a fait de cette pratique un pas nécessaire dans la découverte
de la psychanalyse. Aussi, c’est à travers l’hypnose que Freud a fait le constat que les mots
agissent sur les maux.

Ceci dit, l’intérêt de l'hypnose et de la suggestion qu’elle implique s’arrête là pour


Freud et pour la psychanalyse. Freud va rompre avec l’hypnose et la suggestion pour les
raisons suivantes :

- Dans la suggestion hypnotique, comme dans toute psychothérapie sans exception,


seul le symptôme est allégé et parfois supprimé. Tandis que l'organisation de la personnalité
qui conditionne toutes ses manifestations symptomatiques reste telle qu'elle est, sans
modification notable. Les mécanismes inconscients de défenses restent intactes. les fantasmes
à la base du symptôme restent toujours voilés. Ainsi, les symptômes chassés par la suggestion
finissent par réapparaître. Freud prend au sérieux ce constat puisque le symptôme traité par
cette méthode, finit par se déplacer, se remplacer ou faire retour à la même place.

- Dans ces limites que rencontrent les pratiques psychothérapiques, Freud ne voit pas
une simple faiblesse de la technique qui serait un jours dépassée. Il y repère plutôt la position
d'un sujet décidé à demeurer responsable de sa réponse et de son acte. Il y repère l'objection du
sujet à la violentation subjective émanant de l'hypnose et aussi de la suggestion
psychothérapique. Dans les diverses pratiques psychothérapeutiques, le patient se trouve placé
sous l’influence directe et entière du thérapeute qui devient en quelque sorte son directeur de
conscience. C'est là un autre argument décisif dans la mise au point par Freud d'un procédé
nouveau : l’association libre qui permet, en effet, d'atteindre la ou les scènes traumatiques,
sans priver le sujet de sa participation volontaire, de sa parole singulière, de son implication
responsable dans ce qui lui arrive et dans ce qu’il va advenir pour lui. Elle lui permet de
réélaborer librement et consciemment son propre savoir inconscient.
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2- La rupture sur le plan des théories explicatives

Freud, en rompant avec l'hypnose et plus précisément avec la suggestion


psychothérapeutique, quitte définitivement l’approche médico-psychiatrique, pour permettre
au patient d'élaborer librement et consciemment son propre savoir inconscient.
Il abandonne donc l'hypnose parce qu'elle violente le sujet. Ensuite, il adopte d'abord
l'association forcée par suggestion, car à ce moment là, il pensait que l'origine du symptôme
est un événement traumatique à contenu unique, et il tente d'y conduire les patients. Mais il
finit par découvrir que la résistance ne vient pas seulement du moi qui censure, mais surtout
des représentations inconscientes liées à des investissements pulsionnels multiples qui
résistent à se dire.

Ainsi, il finit par renoncer aussi à la suggestion et aux artifices qui l'accompagnent
pour adopter uniquement et définitivement la méthode d'association libre. Cette méthode fut
d’ailleurs imposée à Freud par l'une de ses patientes hystériques, Emmy von N. Lors d'une
séance de son traitement (du 12 mai 1889), elle intime l'ordre à Freud de se taire et de la
laisser parler comme cela lui vient.

Ce nouveau dispositif, révèle à Freud l'ampleur de l'amour de transfert qui a, pour


conséquence, la mise en acte, par la parole, de la réalité sexuelle de l'inconscient. Le patient
« répète » en présence de l'analyste, les péripéties de sa rencontre traumatique avec le sexuel,
conformément à son fantasme. Cette découverte amène Freud à se laisser guider par le
transfert vers la cause sexuelle localisée dans le fantasme et non pas se satisfaire du
soulagement du symptôme.

Pour définir le dispositif de la psychanalyse, il ne suffit donc pas de pointer la part de


l'écoute ou de l’entretien qu’on qualifie de libre, dans la relation médecin-malade, mais il faut
souligner la distinction entre deux types de savoirs dont l'extrême importance revient au
second :
- d'un côté, il y a le savoir théorique et technique de la psychanalyse que le
psychanalyste doit acquérir dans divers instituts de formations et Ecoles, pour diriger la cure,
- d'un autre côté, il y a le savoir du sujet sur ce qui fait la vérité de son symptôme, sur
la construction de son fantasme, sur les voies de son effectuation. De ce savoir, à produire
dans la cure, le psychanalyste n'a aucune idée à priori. Seul le patient détient la décision d'en
révéler ou pas les coordonnée et le contenu. Si le clinicien doit être suffisamment préparé et
près pour l'accueillir, il ne peut ni le deviner, ni le forcer ni le précipiter.

Depuis toujours, les médecins, neurologues ou psychiatres privilégient les faits d'ordre
organique dans leur explication de l'hystérie ou de toute autre maladie mentale. Ils tiennent à
ramener les fonctions et leurs perturbations au cerveau. Par conséquent, du fait de la stérilité
de cette théorie, remarque Freud, les médecins ne savent que faire du facteur psychique. Et
puisqu'ils ne peuvent le saisir correctement, ils « l'abandonnaient aux philosophes, aux
mystiques et aux charlatans, et tenaient même de non scientifique de s'en occuper. » Ainsi, les
travaux psychiatriques accomplies dans cette perspective vont devenir sans intérêt suite aux
découvertes de Freud dans le domaine.

Contrairement à cette perspective inféconde, la psychanalyse à cette période, dira


Freud ultérieurement, s'était fixée un objectif qui était « de comprendre quelque chose de la
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nature des maladies nerveuses dites "fonctionnelles", pour surmonter l'impuissance médicale
existant jusqu'alors dans le traitement de celles-ci. »

Ainsi, les débuts de rupture avec l'explication médicale vont être liés aux études
comparatives de Freud entre les paralysies hystériques et les paralysies organiques. Si ces
dernières sont en effet causées par des lésions qui affectent le système nerveux, les paralysies
hystériques s'en distinguent par des perturbations et des troubles fonctionnels réels sans
substrat lésionnel organique.

Cette nouvelle façon de voire inaugurée par Freud, suppose donc l'invention d'une
autre détermination que la détermination organique. Freud va la dégager en notant que la
paralysie hystérique est conforme à l'idée que le sujet se fait de l'organe concerné. Donc ce qui
est atteint, ce n'est pas l'organe biologique, mais bien la représentation inconsciente que le
sujet s'en fait.

Cette remarque va avoir pour Freud une portée générale en affirmant que notre
organisme, est recouvert, « du fait d’être pris dans le langage, d'un réseau de représentations
grâce auquel le sujet retrouve la fonction de ses organes et s'en sert. » Freud produit là une
théorie qui distingue radicalement le corps de l'organisme.

A partir de là, il est possible de postuler une lésion psychique distincte de l'atteinte
organique : il s’agit de la lésion qui isole une représentation (du bras ou de la jambe...) du
reste des représentations qui composent le moi, et par conséquent, le corps aussi.

Mais, la raison pour laquelle une représentation (celle de la cuisse comme dans le cas
d'Elisabeth, dans Etudes sur l’hystérie) se trouve mise à l'écart, refoulée, c'est qu'elle s'est
chargée d'une valeur affective incompatible avec les autres représentations, c'est ce qui
engendre le conflit intrapsychique. C'est aussi ce qui explique que les malades peuvent
abandonner leurs atteintes corporelles sous hypnose et par suggestion, et les récupérer quand
les effets de ces dernières s'estompent.

Ainsi, Freud postule aussi une double "détermination" de la névrose.


- D'un côté, la représentation inconsciente de l'organe liée au souvenir biographique et
à la trace mnésique d'un événement,
- De l'autre côté, la valeur affective, c'est-à-dire l’investissement pulsionnel qui excède
le registre de la représentation et qui est donc en rupture avec la détermination langagière.
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II- Concepts freudiens et clinique psychanalytique

Partons d’abord de la définition que propose Freud pour la psychanalyse et qui se


compose de 3 volets. La psychanalyse est :
1e- un procédé d’investigation des processus psychiques basé sur la méthode des
associations libres.
2ème- une méthode de traitement des troubles névrotiques qui se fonde sur cette
investigation.
3ème- un corpus métapsychologique, c’est à dire un ensemble de concepts
psychologiques et psychopathologiques qui servent à nommer et à systématiser les données
cliniques apportées par la méthode psychanalytique d’investigation et de traitement.

Dans ce troisième volet donc, nous pouvons reconnaître la dimension


métapsychologique de la psychanalyse, c’est à dire le cadre conceptuel et théorique que celle-
ci se donne pour l’analyse des processus inconscients à la base de toute psychopathologie,
voire de toute action humaine en générale.

1- La conception freudienne du psychisme


Dès les débuts de sa recherche et pratique analytiques, Freud fut confronté à un
psychisme d’un fonctionnement fort ramifié et complexe. Et pour rendre son fonctionnement
compréhensible et abordable, il envisage celui-ci sous la forme d’un appareil constitué de
plusieurs parties ou systèmes accomplissant chacun une fonction particulière mais toujours en
articulation avec les autres.

A- l’appareil psychique et ses instances

Suivant la progression de sa pensée et de sa pratique, Freud élabore successivement


deux modèles de l’appareil psychique. Le second modèle n’annule pas le premier mais le
complète et l’affine.

- Dans sa première répartition, Freud différencie 3 instances :

- L'inconscient : Avec l'hypnose, avons-nous dit, Freud constate l’existence d’un état
psychique différent de l'état de conscience et de veille habituelle, et suppose l'existence d'un
groupe séparé de représentations psychiques mais agissant sur le reste du psychisme. Il est
amené à faire l'hypothèse d'un lieu psychique où les pensées sont inconscientes, parce que
involontairement mais activement oubliées par le sujet qui les refoule et qui résiste à leur
remémoration. Ces pensées inconscientes restent hors de la portée du conscient sauf si le sujet
passe par un travail d’analyse conduit par un psychanalyste.

- Le préconscient désigne un lieu dont les pensées qui le constituent, sont latentes
mais que le sujet peut se les rappeler et les ramener facilement à sa conscience.
Certaines idées ou souvenirs sont dits préconscients dans la mesure où ils sont présents
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 20

de façon implicite dans l’activité mentales et que le sujet peut actualiser par un effort de
mémoire. C’est ce qui fait dire à Freud que le préconscient et le conscient constituent
quasiment un même système par opposition au système de l’inconscient.

- Le conscient : pour forger ce concept, Freud commence par distinguer le conscient


des traces mnésiques et de la mémoire. Pour lui, un même système ne peut à la fois percevoir
et emmagasiner les informations. Les excitations qui proviennent et du monde extérieur et de
l'intérieur du corps sont perçues par le conscient qui est souvent associé par Freud à la
fonction de perception.

Dans ce sens, une représentation ne peut être qualifiée de consciente que du fait de sa
perception effective, c’est à dire, au moment de sa présence à la conscience.
Le conscient se situe ainsi à la périphérie externe de ce premier modèle dont
l’inconscient constitue la part interne et la plus importante.

- La seconde répartition (topique) :

Cette seconde répartition, constituée du ça, du moi et du surmoi, est forgée par Freud
vers les années 1920, pour mieux répondre à certaines difficultés pratiques et théoriques
rencontrée avec l’évolution de l’exercice de la psychanalyse.

- Le ça est un terme que Freud emprunte à G. Groddeck pour y inclure, au-delà des
représentations refoulés qui constituent le domaine de l’inconscient, le champs des pulsions
dont il commence à élaborer les contenus à partir de 1905 dans ses 3 essais sur la théorie
sexuelle.

Dans sa constitution, le ça est chaotique, sans organisation propre, et permet


l'existence côte à côte de pulsions contradictoires qui ne se supprimeraient pas les unes les
autres. En ce sens, il est régi par les processus primaires qui caractérisent aussi le
fonctionnement de l'inconscient dans la première répartition.

- Le moi va correspondre au système préconscient-conscient de la première répartition.


La notion du moi correspondait à l’ensemble des activités conscientes ou celles pouvaient
l’être. Mais avec l’approfondissement du travail d’analyse, Freud découvre que le moi se met
à s’opposer et à se défendre contre la levée du refoulement que la cure cherche à rétablir. La
résistance du moi se renforce à mesure de l’approche du refoulé et se manifeste par la
résistance qui consiste à arrêter les associations sans savoir pourquoi.

Freud découvre ainsi que le moi est en grande partie inconscient, puisqu’il est
constitué aussi de mécanismes de défenses dont il n’est absolument pas maître.

Par ailleurs, à la suite de l'introduction du concept de narcissisme en 1914, Freud


s’aperçoit que l'investissement libidinal qui porte essentiellement sur les objets, porte aussi sur
le moi. Le moi lui- même devient objet d’amour et de haine ou même les deux à la fois. Dans
le cas de la paranoïa, par ex., il devient l’objet d’un amour extrême, tout comme il devient
l’objet de haine extrême comme dans le cas de la mélancolie).

- Quant au Surmoi, Freud le définit comme l'héritier du complexe d'Œdipe dont le rôle
serait celui d'un juge à l'égard du moi. Avec la mise en place du surmoi, l'enfant est amené à
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renoncer à ses désirs œdipiens et à s’engager dans des investissements libidinaux acceptés et
encouragés socialement et culturellement.

Si donc le Surmoi se constitue par l'intériorisation des exigences et des interdits


parentaux, l’idéal du moi se constitue par une identification aux parents comme modèles et
comme possibilités de devenir. L'idéal du moi se présente comme un prescription, une
commande : « Tu dois être comme ton père, ta mère, ton frère, etc. » alors que le Surmoi est
un interdit : « Tu ne dois pas t’approprier le père ou la mère »,

Dans ce sens, le Surmoi se constitue par l’intériorisation des interdits parentaux. Mais
cette intériorisation poussée à l’extrême, le surmoi peut se déchaîner contre le moi et parfois
le conduit jusqu’au suicide comme c’est le cas dans la mélancolie en particulier.

B- Les trois registres de la vie psychique

En psychanalyse tout processus psychique est apprécié d’après trois registres, c’est à
dire à partir de trois angles de vue :

1e - Le registre topique concerne la disposition spatiale des instances ou les parties


composant l’appareil psychique. C’est un point de vue descriptif qui vise à donner une
représentation topographique des différentes instances ou parties de cet appareil. Celui- ci est
imaginé et construit par Freud sur le modèle des localisations cérébrales. Néanmoins, dans
l’esprit de Freud, il ne s’agit que d’une analogie métaphorique. Il ne s’agit pour lui, d’aucune
correspondance réelle et matérielle entre cette répartition imagée de l’appareil psychique et les
localisations cérébrales repérées et considérées par les neurologues, à la base de certaines
activités psycho–motrices et intellectuelles.

2e - Le registre dynamique examine les rapports de force entre les différentes


instances. Ces rapports déterminent le ou les conflits psychiques en jeu. Le conflit psychique
est central en psychanalyse. Il est constitutif du psychisme humain qui s’élabore dans la
dynamique conflictuelle entre le conscient d’un coté et les représentations inconscientes
empêchées d’y accéder de l’autre. Le point de vue dynamique vise ainsi, une description
qualitative des rapports entre les forces en présence.

3e - le registre économique tient compte des énergies libidinales en jeu dans le conflit
psychique avec leurs différentes modalités (investissement, désinvestissement, contre-
investissement).
Ce registre repose sur un principe que Freud appelle principe de constance, selon
lequel l'appareil psychique tend à maintenir au plus bas la quantité d'excitation qu'il contient.

C- Les processus primaires et les processus secondaires

Ce sont deux modes de fonctionnement de l'appareil psychique :


■ D’une part, les processus primaires, qui caractérisent l'inconscient et qui se
définissent par deux traits :
- la circulation libre de l'énergie qui se déplace et se condense,
- la tendance de cette énergie libre à réinvestir les traces mnésiques, les représentations
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refoulées ainsi que les expériences de satisfaction originelles ou primitives.


■ D’autre part, les processus secondaires, qui régissent le système préconscient –
conscient et qui, contrairement aux premiers, lient l'énergie et contrôlent son écoulement dans
un investissement stable des représentations. La satisfaction immédiate qui caractérise les
processus primaires est ici ajournée, renvoyée à plus tard, suivant le fonctionnement du
système préconscient – conscient, tandis que le jugement, l'attention, le raisonnement et le
contrôle de l'action deviennent alors possibles.

Ces deux processus correspondent aux deux principes que Freud postule à la base du
fonctionnement de l’appareil psychique: le principe de plaisir et le principe de réalité.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 23

2- Le rêve et son interprétation


Commençons par donner une définition de ce que sont les formations de l’inconscient
avant de parler directement de l’une d’entre elles : le rêve. D'après le dictionnaire de la
psychanalyse, les formations de l'inconscient sont « les irruptions involontaires dans le
discours selon des processus logiques et internes au langage, permettant de repérer le désir. »
p. 87

C'est bien le cas du symptôme qui a la particularité d’être durable et pathologique, et


c’est aussi le cas du rêve, de l'acte manqué, du lapsus, de l'oubli..., qui surviennent
fréquemment dans la vie normale de façon furtive, inattendue, passagère mais répétée.

2.1- Le rêve dans la perspective expérimentale


Pour les théories neuropsychologiques, le rêve correspond à une baisse de l'activité
psychique pendant laquelle les excitations internes ou externes jouent un rôle déterminant. Il
n’est ainsi considéré que comme une activité psychophysiologique très localisée au niveau du
système nerveux et très limitée dans l’activité mentale.

Mais cette approche psychophysiologique, intéressante d’ailleurs par ses recherches


expérimentales, laisse complètement dans l'ombre le contenu du rêve et le rapport de celui-ci
avec l'histoire personnelle du rêveur.

2.2- Le rêve a un sens et se rapporte à l’histoire personnelle


Le rêve pour Freud, tout comme les symptômes névrotiques, recèle un sens et mérite
de ce fait de trouver son explication propre par la personne elle-même. Le choix de certaines
scènes et les élaborations qu’en donne le rêveur doivent avoir des raisons d'ordre psychique
propres au sujet au delà des excitations internes ou externes.

Pour expliciter cette idée, Freud, dans Introduction à la psychanalyse, rapporte le


témoignage d'un homme qui lui rapporte avoir réagi, trois nuits de suite, de trois façons
différentes, à la sonnerie d'un réveil :
• la première nuit, il se voit en rêve se rendre à l'église d'un village, et aperçoit le
sonneur monter au clocher pour faire sonner les cloches.
• La nuit suivante, la scène se déroule en hiver et il se voit partir en traîneau, et au
démarrage les grelots se mettent à teinter.
• A la troisième nuit, le rêve tourne autour de sa femme de chambre qui se rend à la
salle à manger, et, malgré les avertissements qu’il lui prodigue, elle laisse tomber, dans un
grand fracas, une pile d'assiettes.

Suite à l'exposé de ces différents rêves, engendrés par un même stimulus extérieur, (ici
le réveil), Freud nous dit que dans ce cas, le rêveur ne reconnaît pas le réveil, qui ne figure
jamais dans ses rêves, mais il en remplace le bruit par un autre, et interprète chaque fois d'une
manière différente la même excitation. Ainsi, nous dit Freud : « comprendre le rêve serait
précisément expliquer pourquoi le rêveur choisit tel bruit et non pas tel autre, pour
interpréter l'excitation qui provoque le réveil. »

Pour lui, le rêve confirme l'idée que ce qui est refoulé, non seulement subsiste de façon
constante chez tout sujet, malade ou pas, mais aussi persiste à engendrer des productions
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 24

psychiques, normales ou pathologiques.

2.3- L'association libre et l’explication freudienne du rêve


Dès les débuts de sa pratique analytique, Freud constate que chaque patient, dès qu’il
accepte de se soumettre à la règle de l'association libre, il se met spontanément à intégrer les
récits de ses rêves dans son discours et associations.

L’association libre va alors permettre à Freud, non seulement d’approfondir le contenu


de chaque rêve, mais surtout d’en dégager le sens qu’il renferme pour le rêveur.
Pour Freud donc, le rêve, à l’instar du symptôme et tous les autres actes psychiques,
est un langage à déchiffrer même si pour le rêveur, il s’avère parfois absurde. Freud part du
postulat que chaque sujet recèle un savoir réel, que le rêveur ignore. Le rêve est donc une sorte
de symptôme psychique, non pathologique, et dont les causes sont des processus inconscients.

Le rêve est ainsi, un texte énigmatique qui reste à lire, à déchiffrer par le rêveur lui-
même à partir de ses propres paroles et associations. Freud note à ce propos : « "interpréter un
rêve", signifie donner son "sens", le remplacer par quelque chose qui peut s'insérer dans
la chaîne de nos actions psychiques.»

2.4- Contenu manifeste et contenu latent du rêve


Freud, sans omettre l’impact des influences immédiates ou récentes dans l’élaboration
d’un rêve, pense que les impressions qui en découlent sont le plus souvent liées à des
événements et significations dont la source peut remonter très loin dans le passé psychosexuel
du sujet.
Pour lui, le rêve puise souvent dans la réserve des souvenirs infantiles oubliés. Il note :
« L'expérience analytique m'a montré, (...) que le contenu manifeste de chaque rêve serait lié
aux événements récents, son contenu latent, aux plus anciens événements de notre vie. »
Partant de cette distinction dans le rêve entre contenu manifeste et contenu latent, Freud
répartis les rêves en 3 groupes ou catégories :
- les rêves sensés et compréhensibles,
- les rêves clairs, cohérents et compréhensibles comme ceux de la catégorie
précédente, mais qui, nous dit Freud, produisent un effet déconcertant. L’exemple qu’en
donne Freud est de rêver de la mort d’une personne chère par la peste alors qu’il n’y a
aucune raison à redouter un tel événement.
- Enfin, les rêves dépourvus de sens et d’intelligibilité. Ils se présentent à la fois
comme incohérents, confus et absurdes. A ce groupe appartient la grande majorité de notre
production onirique.

A partir de cette répartition, Freud précise que l’opposition entre les deux contenus du
rêve ; le manifeste et le latent, s’accentue à mesure que nous avançons des rêves simples aux
rêves compliqués.

2.5- Le rêve est l'accomplissement d'un désir inconscient


Freud fait un pas de plus et affirme que « après analyse approfondie, tout rêve se révèle
comme l'accomplissement d'un désir. » Et pour défendre cette thèse, il s’appuie d’abord sur
les rêves d’enfants qui, le plus souvent, mettent en scène la réalisation directe d’un désir et, de
ce fait, ne nécessitent pas d’êtres interprétés. Toutefois, ce schéma se complique
particulièrement avec les rêves absurdes des adultes qui impliquent fortement la censure.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 25

Celle-ci occupe une place importante dans le rêve, comme elle l’occupe dans le
psychisme en générale. Freud la désigne en disant que : « Le rêve est l'accomplissement
(déguisé) d'un désir (réprimé, refoulé).»

A préciser aussi que Freud accorde un rôle déterminant à la motivation libidinale :


«Plus on s'occupe des rêves, plus on doit reconnaître que la plupart des rêves d'adultes ont
trait à des faits sexuels et expriment des désirs érotiques. »

Par conséquent lorsque Freud dit que le rêve est la réalisation déguisée d'un désir, il
vise non pas le contenu manifeste mais les causes du rêve, autrement dit, les idées latentes ou
les idées incidentes.

Donc, si l’on s’en tient uniquement à son aspect manifeste, le rêve, nous dit Freud
« peut signifier tout ce que l'on voudra : avertissement, projet, préparatifs, etc. : mais il est
toujours en même temps la réalisation d'un désir inconscient, et il n'est que cela, si vous le
considérez comme l'effet du travail d'élaboration. »
Reste à savoir maintenant comment selon Freud se forme un rêve et plus précisément
son contenu manifeste dont se rappelle le rêveur.

2.6- Le travail du rêve ou le travail d’élaboration


Freud, par le moyen de la méthode des associations libres, montre comment se fait le
passage du contenu manifeste au contenu latent ou "sens" caché du rêve. C'est cette méthode
qu'il appelle travail d'analyse ou travail d'interprétation.
A l'inverse, le travail du rêve est le processus de transformation et de passage qui
s'opère du contenu latent constitué par les pensées du rêve vers le contenu manifeste tel que se
le rappelle le rêveur et en parle.
Le travail du rêve représente donc l'ensemble des processus par lesquels le contenu
latent donne naissance au contenu manifeste. Ce travail est régit par 4 mécanismes qui sont à
l'œuvre dans l’élaboration du rêve :
l- le déplacement,
2- la condensation,
3- la figurabilité ou la dramatisation,
4- l’élaboration secondaire.

- le déplacement,
C’est le mécanisme le plus important et qui, de manière générale, préside à la
dynamique inconsciente. Il désigne le processus par lequel une charge affective se détache de
son objet pour se porter sur un autre objet.
Au niveau du rêve, ce mécanisme intervient pour brouiller la correspondance entre la
valeur psychique d'un des éléments du contenu manifeste et celle d’un ou des éléments du
contenu latent auxquels il est associé.

De ce fait, une idée latente de moindre intérêt peut être représentée par un élément qui
occupe le centre du contenu manifeste. Et inversement, un élément très tenu et quasi inaperçu
du contenu manifeste peut représenter le noyau même des pensées du rêve.

De mêmes pour les affects ; l'amour, la haine ou l'angoisse par exemple, peuvent
accompagner dans le contenu manifeste, des éléments insignifiants ou sans rapports avec
l’affect concerné. D’un autre côté, une pensée latente à laquelle se rattache un affect très fort
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 26

peut apparaître dans le rêve manifeste dépourvue de toute résonance affective.

C'est ce que Freud appelle aussi une transposition affective. A la faveur de cette
transposition, une idée très significative peut se trouver remplacée par une autre jusqu'alors
indifférente et de peu d'importance et vice versa.

II en résulte que le rêve manifeste est autrement centré que ses pensées latentes. Ainsi
il advient que l'élément essentiel du contenu latent semble à peine représenté dans le contenu
manifeste. Ce déplacement, il va de soi, est toujours l'effet du refoulement, une conséquence
de la censure.

- la condensation,
Lorsqu’on analyse un rêve on constate tout d’abord que le contenu manifeste est une
version transformée et très réduite du contenu latent. Freud écrit : « Le rêve est bref, pauvre et
laconique comparé à l'ampleur et la richesse des pensées du rêve».

C'est cette transformation qu’il appelle la condensation. Ce mécanisme à pour visée de


mélanger, de fondre plusieurs idées de la pensée du rêve en une seule image du contenu
manifeste.

C’est ce qui fait dire à Freud que les images du contenu manifeste sont, comme dans le
symptôme, surdéterminées : autrement dit, chaque élément manifeste dépend de plusieurs
idées ou représentations latentes et exprime plusieurs pensées inconscientes. Par ailleurs, une
pensée latente peut exercer son influence sur plusieurs images manifestes. C’est ce qui
explique l'extrême enchevêtrement des liaisons associatives entre le contenu manifeste et ses
causes, les pensées inconscientes.

A signaler enfin, que la condensation est particulièrement agissante dans le domaine


des images, et le rêve en profite particulièrement. L’illustration la plus courante est cette sorte
de « personne collective » construite à partir de traits ou de signes prélevés sur différentes
personnes réelles.

Nous voyons ainsi, que le déplacement et la condensation constituent les deux


principaux moyens de déformation qui se produit pendant le passage du contenu latent au
contenu manifeste du rêve. Le degré d'absurdité, de bizarrerie et de confusion d'un rêve,
dépend du degré d'implication de ces deux mécanismes dans sa formation.

- la figurabilité ou la dramatisation
Tout le monde sait que les rêves ne sont pas composés uniquement d'images.
Toutefois, les images visuelles tiennent une place prépondérante et le plus souvent, la pensée
conceptuelle se traduit, se transpose en représentations imagées.

Freud désigne ce processus par le terme : dramatisation ou figurabilité. dans ce


mécanisme du travail du rêve, il s'agit de la transformation automatique des pensées en images
lors de la formation du rêve. Une image se substitue à une pensée et devient un équivalent de
cette pensée. Il s'y produit une sorte de figurabilité, de visualisation de la pensée.

Non seulement la visualisation domine le rêve, mais encore, celui-ci, mous dit Freud
n'a aucun moyen de représenter les relations logiques. Si le rêve manifeste, en tant que tel, ne
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 27

donne lieu à aucun travail intellectuel, les pensées latentes du rêve, par contre, renferment
toutes sortes d'opérations intellectuelles telles que jugements, oppositions, comparaisons,
conditions, preuves, etc.

Dans le contenu manifeste du rêve donc, seul le contenu matériel des pensées est
représenté mais pas les relations logiques entre ces pensées.

Le système propre au rêve exige que toutes les significations, jusqu'aux pensées les
plus abstraites, s'expriment par des images. Ainsi, les articulations logiques entre les pensées
du rêve sont remplacées par des modes d'expression que Freud décrit comme « procédés de
figuration du rêve ».

- l’élaboration secondaire
Ce mécanisme est le dernier qui préside à la formation des rêves. Il diffère
radicalement des trois autres en ce qu'il provient de l'activité défensive du moi et de ses
mécanismes propres et non des idées latentes du rêve.

Lorsque lors du réveil, un rêve est perçu par le moi, il n'est pas accepté dans son état
brut, étant donné le contenu refoulé qui le fonde et, de ce fait, se trouve soumis à une
reconstruction qui ne dérange ni ne déstabilise le moi. C’est avec le réveil, que le rêve se
trouve cette fois-ci contrôlé et régis par les mécanismes défensifs du moi.

Le rêve se trouve ainsi, encore une fois, refaçonné afin de s'harmoniser avec d'autres
pensées conscientes. En d'autres termes, une tentative plus ou moins heureuse est faite par le
moi pour rendre le contenu du rêve moins offensant et humiliant sa propre dignité.

C'est cette élaboration secondaire qui explique l'ordre, la suite et la cohésion qu’il nous
arrive parfois de constater dans un certain nombre de nos rêves.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 28

3- La pulsion sexuelle et son devenir psychique


A la suite de l’élaboration de la théorie du fantasme et celle du refoulement, Freud se
préoccupe par la question concernant les forces énergitiques qui conditionnent les symptômes
névrotiques et même, toutes les fonctions et les activités de l’homme de manière général.

Pour aboutir à la compréhension de ces forces, Freud va emprunter, simultanément,


deux voies différentes :
1- Le champ des perversions et de leurs pathologies,
2- le domaine de la sexualité infantile.

L'étude des perversions d’une part, et la sexualité infantile d’autre part, va lui fournir
les moyens d'élaborer une théorie générale de la sexualité, basée sur le concept de pulsion.

1- Pulsion et instinct
la pulsion est à distinguer de l'instinct avec lequel, elle se trouve souvent confondue.
L'instinct désigne la relation entre un besoin naturel qui réclame satisfaction et le
comportement engagé en vue de cette satisfaction et qui est fixé par l'hérédité pour l’espèce.

Les comportements instinctuels veillent, de façon automatique, spécifique et


prédéterminée génétiquement, à la satisfaction des besoins vitaux ; par ex. se nourrir, se
défendre, se reproduire... etc.,

Quant aux objets de satisfaction des besoins instinctuels. ils sont aussi dans un rapport
d'adéquation prédéterminée à ces besoins.
Ces comportements instinctuels déterminés biologiquement ainsi que leurs objets
inchangeables et naturellement adéquats à la satisfaction des besoins, caractérisent le monde
animal.

Dans ce sens, et à l'opposé de l'instinct, les comportements pour la satisfaction de la


pulsion sexuelle ne sont ni prédéterminés par l'hérédité ni préfixés par une programmation
génétique. La pulsion sexuelle n'a pas non plus un objet préfixé, stable et définitif pour sa
satisfaction.

L’être humain, du fait de sa dépendance au langage, et son immersion dans un univers


de parole et de sens, bénéficie plutôt d'une disposition pulsionnelle que d'une prédisposition
ou un codage instinctuels.

2- Caractéristiques de la pulsion :
Les caractéristiques de la pulsion sont à repérer, selon Freud, au niveau des 4
dimensions qui la concernent et qui sont : la source, la poussée, l'objet et le but de la pulsion.
Ces caractéristiques déterminent la nature de la pulsion, c’est à dire ce qui la distingue
de l’instinct ou d’un simple stimulus, interne ou externe. Elles déterminent aussi les différents
devenirs psychiques des pulsions.

a- La poussée de la pulsion : Si chez l'animal, les comportements sexuels sont


conditionnés dans leur déclenchement par les périodes de rut et organisés de manière cyclique,
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 29

chez l'homme, par contre, ils ne sont pas soumis à une quelconque périodicité, mais à ce que
Freud appelle « une poussée pulsionnelle constante ». Autrement dit, la pulsion sexuelle est
toujours active et perpétuellement mobilisatrice, même dans les cas où elle prend forme de
passivité. Dans ce cas, en fait, elle recouvre une recherche active de la passivité, ce qui
l'oppose totalement à l'inertie.

b- La source de la pulsion : elle est dans le corps, il s'agit d'un organe ou d'une
partie du corps «dont l'excitation est représentée dans la vie psychique par la pulsion». La
source de la pulsion, en effet, indique d'une part la zone corporelle dans laquelle prend
naissance l'excitation et d'autre part l'énergie psychique qui s'y trouve qualitativement et
quantitativement investie.

c- Le but de la pulsion : c'est toujours la satisfaction, à savoir la diminution de


l'état d'excitation. Il s’agit de la possibilité d'accéder à une décharge enérgitique qui ramenerait
la tension à son point le plus bas. Mais, le but de la pulsion ne peut être atteint que de manière
provisoire. la satisfaction n'est jamais complète puisque la tension renaît très vite.

d- L'objet de la pulsion : C'est, nous dit Freud, tout ce en quoi ou par quoi la
pulsion peut atteindre son but. La pulsion, pour ainsi dire, peut faire feu de tout bois. Ainsi,
l’objet est ce qu'il y a de plus variable dans la pulsion. il ne lui est ni naturellement, ni
originairement lié. Les objets pulsionnels sont innombrables et toujours en partie inadéquats et
leur fonction jamais définitivement remplie.
Ce peut être un objet-chose (comme dans le fétichisme), tout comme il peut être une
partie du corps propre (par ex. l’orifice anal dans l’homosexualité passive ; ça peut être aussi
une partie de la peau avec le percing, le tatouage ou les scarifications).

Du fait de ces caractéristiques, la pulsion est toujours de nature partielle, ce qui veut
dire qu’une sexualité totalement génitale où se rassemble et s’unifient les pulsions partielles
est inexistante.

3- Le dualisme pulsionnel
Dans la mesure où la recherche de la satisfaction sexuelle prend pour l’être humain des
formes très variées, et passe per des objets multiples, on devrait, suivant Freud, parler plutôt
de pulsions, au pluriel. Nous en avons parlé au singulier uniquement en désignant leur nature
générale et les caractéristiques communes qui les constituent.

Il y a donc une multiplicité de pulsions que Freud rassemble en deux groupes qui
s’opposent et s'affrontent. C’est ce que Freud appelle le dualisme pulsionnel. De cette
opposition naît la dynamique qui conditionne la vie psychique de tout sujet.

1er dualisme pulsionnel : Pulsions sexuelles et pulsions d'auto - conservation


Freud postule un 1er groupe de pulsions, qui a pour fonction de maintenir l'individu en
vie. Ce groupe englobe les pulsions que Freud appelle les « pulsions d’auto – conservation »,
poussent le sujet à se nourrir, à se défendre, etc., Freud les appelle aussi pulsions du moi
puisqu’elles portent sur l'individu lui-même qui est leur objet.

Le second groupe est constitué des pulsions sexuelles qui, en plus des fonctions de la
satisfaction sexuelle et de la reproduction, elles se lient aussi par étayage sur les fonctions
d'auto - conservation.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 30

Les pulsions de ces deux groupes se lient en équilibre et favorisent une activité
psychique harmonieuse et adaptée à la réalité, mais parfois, elles entrent en opposition, en
conflit et engendrent les défenses et les symptômes névrotiques.

Dans ce cas, les pulsions du moi oeuvraient au refoulement des pulsions sexuelles pour
préserver le moi de représentations inconciliables avec son idéal moral, esthétique etc., ou
même avec ses capacités d’action et de maîtrise.

Donc, ce premier dualisme pulsionnel, Freud l’a forgé dans un premier temps, pour
comprendre le fonctionnement de l'appareil psychique et plus particulièrement la constitution
des névroses,

2e dualisme pulsionnel : Pulsions du moi et pulsions d’objet


La rencontre de Freud avec des pathologies relevant de la psychose, va exiger de lui de
faire un pas théorique supplémentaire dans ce domaine.
Dans les états psychotiques, en somme, on constate que le malade fait refluer sur son
moi une grande part de la libido qu'il avait auparavant dirigée sur les objets du monde
extérieur.

C’est l’introduction du concept de narcissisme qui va lui permettre d’expliquer ce


phénomène. Lors du développement de la sexualité, le narcissisme correspond à une phase
très précoce où le sujet commence par se prendre lui-même, et par prendre son propre corps
comme objet d'amour. Cette phase se situe, en position intermédiaire, entre l'auto-érotisme et
l'amour objectal.

Ainsi, Freud va pouvoir affirmer que, dans la schizophrénie par exemple, la libido
régresse à l'auto-érotisme, alors que dans la paranoïa, la libido régresse au narcissisme.

Avec l’introduction du concept du narcissisme donc, un nouveau dualisme pulsionnel


apparaît : la libido du moi et la libido d'objet.

Dès lorsque le moi est aussi objet sexuel, alors que dans le premier dualisme le moi
était conçu comme non sexualisé. Il en découle, donc, que la distinction entre pulsions
sexuelles et pulsions du moi n'a plus lieu d'être.

Freud la remplace alors par celle de pulsions du moi et de pulsions d'objet. Parmi ces
objets multiples, Freud, désigne 3 auxquels la pulsion se trouve plus particulièrement liée. Ces
3 objets pulsionnels sont le sein, le scybale (l'excrément), et le phallus, auxquels Lacan
ajoutera deux autres : le regard et la voix.

Ces objets se distinguent d’être particulièrement investis libidinalement dans les


relations primordiales du sujet à l’Autre maternel.

3e dualisme pulsionnel : Pulsions de vie et pulsions de mort


Ce qui va amener Freud à ce nouveau et dernier dualisme, c'est la nécessité de rendre
compte de certains faits observés cliniquement et que le dualisme précédent ne pouvait plus
expliquer. Parmi ces faits cliniques :
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 31

1- Après un très grand enthousiasme thérapeutique, Freud va être confronté à ce qu’il


appelle « la réaction thérapeutique négative ». Autrement dit, les patients, au bout d’un
certain temps de traitement et malgré leur demande pressante de guérir, se révèlent très
accrochés à leurs symptômes, ce qui parfois peut aller à un refus catégorique, inconsciemment
motiver, de guérir,

2- La tendance chez certains patients, dans la cure, à se maintenir dans des répétitions
compulsives de situations déplaisantes, désagréables, voire douloureuses,

3- la révélation de l'importance des auto-reproches, voire l’appétit pour la mort dans


une affection comme la mélancolie,

L’ensemble de ces constats conduise Freud à envisager les problèmes cliniques que
posent le masochisme primaire et la haine, en particulier la haine de soi, dans la vie
quotidienne comme dans le travail analytique.

Ce type de situation et bien d’autres encore sont pour Freud les témoins et l’expression
cliniques de l’action de ce que Freud va finalement appeler les pulsions de mort.

A partir de 1920, les pulsions sexuelles, du moi ou d'objet, vont donc se ranger,
suivant leur fonction, dans l'une ou l'autre de ces deux catégories : les pulsions de vie
regroupent une partie des pulsions sexuelles, celle qui permet la survie de l'espèce et une
partie des pulsions du moi, celle qui vise à la survie de l'individu et aussi une partie des
pulsions d’objet, celle qui permet l’incorporation des objets.

Par ailleurs, les pulsions de mort résorbent désormais :


1- une partie des pulsions sexuelles, celle qui met en péril 1'individu en se mettant
exclusivement au service de l'espèce, (La politique Nazi de la purification de la race arienne).
2- une partie des pulsions du moi, celle qui menace l'espèce parce que privilégiant
l'individu (étudiante allemande : impossible d’enfanter dans ce monde de guerres …etc.)
3- une partie des pulsions d'objet, celle qui préside à la destruction de l'objet une fois
incorporé par le moi (la mélancolie, les passages à l’acte suicidaires….etc.)

4- Le devenir psychiques des pulsions


C’est ce que Freud appelle les destins des pulsions et qui sont à considérer comme
des modalités de défense contre ces pulsions, car, nous dit Freud, l'être humain peut se
détourner de sa sexualité totalement ou partiellement, en la sublimant dans un investissement
quelconque. Il peut aussi en faire un mode de jouissance qui passe par l'avéllissement,
l'asservissement et la torture des autres ou de soi même, comme dans le sadisme et le
masochisme... etc.
De ces distincts de la pulsion, Freud en énumère quatre :

1- La sublimation

La civilisation est basée sur des renoncements pulsionnels. Elle pousse à renoncer à
nos premiers objets de satisfaction sexuelle, à patienter dans la satisfaction des exigences
pulsionnelles, et à supporter les frustrations qui en résultent. Celles –ci peuvent êtres pris en
chargent par le refoulement ou alors sublimées dans des œuvres culturels.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 32

La valorisation par la société des valeurs culturelles encourage une désexualisation des
pulsions, à ne pas tout vouloir tout de suite (supporter la frustration),

La sublimation consiste en une opération où la satisfaction intellectuelle ou esthétique


est recherchée à la place d'une satisfaction sexuelle. Il y a mise en jeu d'un processus
sublimatoire chaque fois qu'un intérêt pulsionnel se transpose en une activité culturellement
reconnue et valorisée.

2- Le renversement dans le contraire


Ici, la pulsion sexuelle n'est ni refoulée, ni désexualisée et sublimée, mais s'inverse
par :
a- un retournement de l'activité à la passivité et vice versa,
b- par un renversement du contenu pulsionnel.
Dans le 1e cas, ce devenir pulsionnel s'exprime dans les couples d'opposition comme
sadisme/masochisme, voyeurisme/exhibitionnisme, couples où il y a des passage d’un versant
à l’autre. les romans de SADE mettent, par exemples, en scène des libertins foncièrement
sadiques, qui ne dédaignent pas se faire fouetter par leurs victimes.

Cependant, il n'y a pas une parfaite symétrie entre le sadique et le masochiste, le


premier pouvant dans les cas pathologiques mener sa victime à la mort, tandis que le
masochiste s'attache davantage à la mise en scène qu'à la recherche d'une souffrance physique.

Déjà dans la vie courante, on retrouve des situations qui témoignent d'une satisfaction
masochiste à jouir de la douleur. Par exemple, les situations banales où un enfant provoque
ses parents, jusqu'à provoquer le châtiment violent qu'il semble rechercher. D’au autre côté,
cette correction fait simultanément jouir sadiquement l'adulte qui frappe.

Dans le 2e cas qui concerne l'inversion du contenu de la pulsion, le passage de l'amour


à la haine le démontre. Des exemples de la vie quotidienne en témoignent : par exemple, quel
parent n'a eu envie de massacrer son enfant qui l'a fait enrager par une provocation ou une
grosse bêtise ? Et quel enfant « normal » n'a souhaité, au moins un court instant, la mort d'un
parent lors d'un accès de rage ?

La situation deviendra pathologique si l'enfant n'arrive pas à distinguer la pensée de


l'acte, ni à réaliser qu'il aime et déteste simultanément ses parents. Freud a introduit le concept
d'ambivalence pour dire qu’au niveau inconscient on peut aimer et haïr ou haïr et aimer à la
fois. C’est ce qui se constate très aisément chez les petits enfants à l’égard de leurs joués et
animaux préférés. L’enfant peut passe d'une extrême attention à une brusque rage destructrice
sans pitié.

Quant au sadisme et au masochisme, en tant que tendance, ils existent chez tous. Ils
procurent une jouissance liée à la satisfaction pulsionnelle : mordre ou refuser de manger pour
la pulsion orale, fesser, être fessé ou refuser d'être propre pour la pulsion sadique-anale
(littéralement « faire chier », « emmerder »), violer pour la pulsion génitale, etc. D'ordinaire,
ces tendances agressives sont soit monnayés en jeux de rivalité, joutes verbales...), soit
refoulés et fissent par s’épanouir sous forme de fantasmes.

Dans tous les cas, ces tendances ne peuvent être considérés comme pervers que
lorsqu’ils constituent un mode de jouissance privilégié, voire exclusif, et imposé à l'autre.
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 33

Le sadisme consisterait alors en une activité de violence, une manifestation de


puissance à l'encontre d'une autre personne prise comme objet sexuel.

Le masochisme renvoie au fait de jouir de la fureur dirigée contre sa propre personne.


La passivité seule, n'est pas encore le tout du masochisme, Freud précise que celui-ci
« comprend un caractère de déplaisir qui est si étrange dans un accomplissement de la
pulsion.»

3- Le retournement sur la personne propre


« Le retournement sur la personne propre se laisse mieux saisir dès que l'on considère
que le masochisme est précisément un sadisme retourné sur le moi propre et que
l'exhibitionnisme inclut le fait de regarder son propre corps. » Alors que le renversement dans
le contraire porte sur l'action (activité/passivité), le retournement porte sur l'objet (inversion
sujet/objet) : le masochiste jouit, lui aussi, de la fureur dirigée sur sa personne propre,
l'exhibitionniste partage la jouissance de celui qui le regarde se dénuder.

Les deux derniers destins pulsionnels se rejoignent dans l'opposition des couples
sadisme/masochisme et voyeurisme/exhibitionnisme ; seule change la perspective. Armés des
concepts d'ambivalence et de renversement du contenu, les analystes considèrent la pitié pour
quelqu'un comme une défense contre un sentiment agressif éprouvé à son égard, mais qu'un
refoulement trop grand empêche d'assumer consciemment.

Pitié et charité ne sont pas des attitudes gratuites et désintéressées : un excès de


compassion fait soupçonner un rejet ou une haine inconscients d'autant plus importants. Cela
ne doit évidemment pas nous faire rejeter tout sentiment de pitié, puisqu'on s'identifiant à la
victime, on intériorise par empathie une règle

4- Le refoulement
Qu'est ce donc que le refoulement en psychanalyse?
- Avant même de le forger en concept, le refoulement s'est imposé à Freud en tant que
vécu subjectif, en tant que fait clinique dès ses premières tentatives de traitement de ses
patients hystériques.
Freud constatait que ces patients n'avaient pas du tout idée des événements
traumatiques, des souvenirs d'enfance qui ont causés leurs troubles et leurs souffrances,
traumatismes et souvenirs qui réapparaissent avec toute leur force et leur vivacité lorsqu'ils
sont retrouvés grâce au traitement.
Il est à constater ici que la notion de refoulement, dès ses premiers abords par Freud,
s'avère intimement corrélé à celle de l'inconscient. Il est même synonyme d'inconscient.
Le refoulement constitue ainsi le concept le plus ancien chez Freud dans son projet
d'explication des faits cliniques.

- Dans Contribution à l'histoire du mouvement psychanalytique, Freud écrit en 1914


que «la théorie du refoulement est la pierre d'angle sur laquelle repose tout l’édifice de la
psychanalyse et même la pièce la plus essentielle de celle-ci.»

Mais ce concept central de l'édifice psychanalytique, n'est pas, nous prévient Freud,
une pure construction théorique ou une simple fabulation abstraite. Il est précise-t-il,
Abdelhadi ELFAKIR - PSY11B Psychologie clinique L1-S1 - 34

«l'expression théorique d'une expérience que l'on peut répéter aussi souvent qu'on veut
lorsqu'on entreprend l'analyse d'un névrosé sans le secours de l'hypnose».

Et Freud d'insister encore, je le cite, «je m'élèverait très violemment contre celui qui
prétendrait ranger la théorie du refoulement et de la résistance parmi les présupposés de la
psychanalyse et non parmi ses résultats (...). La théorie du refoulement est acquisition du
travail psychanalytique.»

- Sa pratique quotidienne avec les patients névrosés l'a conduit à pointer les faits
suivants :
a- les contenus refoulés échappent complètement à la conscience du sujet, à toute
tentative de contrôle de sa part,
b- ils ne dépendent absolument pas de sa pensée raisonnante,
c- ces contenus et pensées refoulées constituent, un groupe psychique séparé,
commandé par des lois propres et régit par le processus primaire et particulièrement agissant
sur le reste du psychisme.

A partir de là, la définition la plus ramassée que l’on peut en donner est la suivante :
c'est une opération par laquelle le sujet cherche à repousser ou à maintenir dans l'inconscient
des représentations (pensées, images, souvenirs) liées à une pulsion. Cette opération se produit
à chaque fois que la satisfaction d'une pulsion risquerait de provoquer du déplaisir à l'égard
d'autres exigences.

4- Dans son article intitulé "le refoulement", écrit en 1915, Freud fait la distinction
entre 3 moments, 3 temps dans l'opération de refoulement :
- le refoulement originaire,
- le refoulement secondaire,
- et le retour du refoulé,
En quoi consiste chacun des ces trois temps ? Sur quoi portent-ils et comment
s'articulent-ils ?

1- Le refoulement originaire qui constitue la première phase du refoulement consiste


à mettre à l'écart et à empêcher d'accéder au conscient, un premier représentant de la pulsion.
Ce refoulement originaire ne porte donc pas sur les pulsion elles-mêmes mais il porte
plutôt sur leurs représentants, autrement dit leurs signes. Une fois ces représentants frappés de
refoulement deviennent l'inconscient, la pulsion ou les pulsions qu'ils représentent leur restent
fixées.

Avec le fonctionnement du refoulement originaire, nous dit Freud, le représentant de la


pulsion interdit d'accès au conscient va constituer le noyau de l'inconscient. Ce premier
représentant refoulé, ce noyau de l’inconscient fait fonction de pôle d’attraction de toutes les
représentations qui vont faire l’objet d’un refoulement par la suite. Parallèlement à ce pôle
d’attraction, ce sont les mécanismes de défenses du moi qui constituent le pôle de répulsion
faces aux représentations à refouler.

Le refoulement originaire est une opération constitutive du psychisme de façon


générale et en ce sens, il est un mécanisme psychique universel. Universel dans la mesure où
il est considéré ainsi à l'origine de la constitution de l'inconscient en tant que domaine séparé
du reste du psychisme mais qui n'est pas sans influencer et orienter ce dernier et ce
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indépendamment de la volonté du sujet. Ce qui nous conduit au second temps du refoulement.

2-Le refoulement proprement dit


Le refoulement est aussi un mécanisme particulièrement agissant au niveau de
certaines organisations psychopathologiques telles que les névroses (hystérie, névrose
obsessionnelle, phobie ou névrose d'angoisse). Les images, idées et autres représentants de la
pulsion, bien que refoulés ou pour mieux dire, parce qu'ils sont maintenus refoulés, demeurent
toujours actifs et toujours près à importuner le conscient, ils travaillent d'arrache-pied, comme
on dit, pour faire retour vers le conscient. Mais plus ils tentent de forcer la porte du conscient,
plus le refoulement se renforce d'où la très grande dépense énergétique du névrosé.

3- le retour du refoulé
Mais le refoulement n’est jamais total, n’est jamais complet. Il ne parvient jamais à
écarter complètement les représentants de la pulsion non tolérés par le moi. C’est ainsi que le
refoulement subit toujours un échec qui souvent partiel et qui se parfois se trouve à l’origine
des symptômes névrotiques. Quand le refoulement échoue, le retour du refoulé permet à la
pulsion de se satisfaire partiellement et par une voie détournée. En effet la signification
refoulée du désir de satisfaire une pulsion s'exprime à travers le surgissement du symptôme,
lequel constitue pourtant une gêne subjective ;
Un refoulement trop puissant empêchant toute satisfaction pulsionnelle risque
d'échouer et de provoquer des symptômes névrotique
.
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III- Psychopathologie psychanalytique de la névrose*

1- La névrose selon le regard médico-psychiatrique

A rappeler tout d’abord que la névrose, comme tout autre psychopathologie, est
abordée à partir de deux points de vue très différents :

le point de vue de la clinique médico-psychiatrique, qui envisage la névrose de


manière descriptive ; elle s’attache à repérer les signes psychopathologiques et à les regrouper
en entités cliniques définies ; De ce point de vue, la névrose, présente un certain nombre de
symptômes spécifiques à chacun de ses types cliniques : hystérie, névrose obsessionnelle ou
phobie :

- L’hystérie se présente à l’observation du psychiatre sous forme de troubles


somatiques essentiellement, touchant la motricité (contractures, paralysies…), la
sensibilité (douleurs, anesthésies, migraines…) et la sensorialité (cécité, surdité,
aphonie…) ainsi que d’autres troubles spécifiques comme des insomnies, des
évanouissements, des altérations plus ou moins graves de la conscience, de la mémoire et
de l’intelligence et aussi des perturbations sexuelles (dégoût sexuel, éjaculation précoce,
frigidité, impuissance…). A noter à l’occasion que l’hystérie de nos jours se présente sous
des formes différentes qu‘à l’époque de FREUD et de CHARCOT. Au lieu de donner à
voir les crises bruyantes et spectaculaires d’antan, elle prend actuellement différentes
formes cliniques, parfois plus discrètes comme les états d’inhibition, des états de
dépression, d’anorexie ou de boulime…etc.

- la névrose obsessionnelle se donne à voir au psychiatre essentiellement à partir


de troubles touchant la sphère des idées.

- La phobie se présente essentiellement à travers une peur panique d’une


situation que le malade ne peut affronter, une tâche qu’il ne peut exécuter ou un objet qu’il
ne peut approcher.

2- La névrose dans la conception psychanalytique

Plaçons-nous maintenant du côté de la psychanalyse. Celle-ci considère la névrose au


niveau des registres de la dynamique psychique et relationnelle. Elle envisage la névrose
comme une perturbation de la vie psychique dans ses liens à autrui. Dans cette perspective, de
la relation transférentielle qui lie pendant un certain temps le patient et l’analyste, se dégage
une manière d’appréhender la névrose différente de celle de la clinique médico-psychiatrique.
le névrosé « est celui qui, à son insu, impose dans le lien affectif à l’autre la logique malade de
son fantasme inconscient » (p. 18). Cette même perturbation se traduit et se déploie tout le

*
La réflexion qui suit s’appuie principalement sur l’ouvrage de J.-D. NASIO, L’hystérie ou l’enfant magnifique
de la psychanalyse, Paris, Rivages, 1990. Pour avoir une idée ample et précise sur l’approche psychanalytique de
la névrose et de l’hystérie en particulier, la consultation de cet ouvrage clair et pertinent est vivement
recommandée. Il est aussi publié en format de poche.
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long de la cure analytique et ce à travers le discours du patient et l’écoute du psychanalyste. La


cure analytique de la névrose consiste en la réactivation de la névrose infantile appelée par
Freud névrose de transfert et la fin de la cure consiste à venir à bout de celle-ci pour dépasser
celle-là.
Comment devient-on névrosé ? Quel est le mécanisme en jeu dans la formation des
symptômes névrotiques ?

La névrose « est provoquée par l’action pathogène d’une représentation psychique,


d’une idée parasite non consciente et fortement chargée d’affect. » (p. 31) mais selon Freud
cette idée parasite est une idée « à contenu essentiellement sexuel ». C’est une idée ou une
représentation sexuelle inconsciente.

Dans sa relation à l’Autre et à son corps, l’enfant fait la rencontre avec le sexuel
(érections chez le garçon, apparition des signes de la féminité chez la fille….) qui peut
provoquer chez lui un émoi sexuel excessif qui le submerge et dont il n’a nulle conscience.

Le moi cherche à neutraliser cette représentation sexuelle inconsciente qui devient


parasite et intolérable. Mais plus le moi met des efforts pour combattre et isoler cette
représentation, plus celle-ci gagne de force et de pouvoir pathogènes. Les efforts que déploie
le moi à repousser cette représentation et à l’isoler, Freud l’appelle « refoulement ». Le
refoulement, dans ce cadre, est le mécanisme par lequel le moi du névrosé cherche à se
défendre contre la représentation sexuelle inconscient intolérable. Mais plus le refoulement se
renforce, plus la représentation acquière d’énergie, ce qui installe un conflit larvé et insoluble
dans le psychisme et conduit le moi à s’épuiser dans des efforts tant inutiles que stériles car ils
n’épargnent pas au moi l’angoisse qui le submerge et le déborde.

Devant la puissance infaillibles des forces inconscientes, le refoulement échoue


partiellement à contenir cette surcharge d’énergie qui fait inévitablement retour sur le moi.
Celui-ci cède alors à une solution de compromis qui permet à ces forces énergétiques de faire
retour mais de façon transformée, défigurée par différents mécanismes qui entrent en jeu à cet
effet (la condensation et le déplacement en particulier). Cette solution de compromis permet la
satisfaction libidinale en surcharge tout en rendant, pour le moi, absolument méconnaissables
leurs contenus (sexuels) et leur source (inconsciente). De cette manière, les représentations
intolérables, les affects qui les accompagnent et l’angoisse qui en découle deviennent plus ou
moins supportables pour le moi.

La névrose est ainsi une façon de se défendre contre une jouissance inconsciente,
dangereuse et intolérable. Mais elle est, comme on vient de le voir, une mauvaise façon de se
défendre. Devant l’insistance de cette jouissance, le moi du sujet s’acharne à se défendre et ne
trouve parfois d’autres moyens que de transformer l’angoisse inconsciente en douleurs
conscientes, en un symptôme névrotique localisable et donc plus supportable.

3- Les types cliniques de la névrose : (hystérie, obsession et phobie)

Les 3 névroses se répartissent alors suivant le mode particulier qu’utilise le moi pour
se défendre inconsciemment. Le moi dans chacune de ces névrose procède par une modalité
spécifique dans l’opération de défense contre cette jouissance intolérable. Cette opération de
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défense consiste à tenter d’éviter le danger, impossible à éliminer, tout en lui trouvant une
solution détournée et moins coûteuse pour le moi : plutôt un ou plusieurs symptômes qu’une
angoisse massive, diffuse et invalidante.

- Le mode obsessionnel de la défense procède par le déplacement de la


jouissance inconsciente et intolérable en souffrance de la pensée. La représentation pénible
refoulée par le moi est maintenue dans l’inconscient tandis que l’énergie libidinale qui
l’accompagne, se déplace et investie une autre représentation au niveau du conscient et
devient envahissante dans la pensée et la vie quotidienne de l’obsessionnel. C’est ce
déplacement qui constitue le mécanisme de formation de l’idée fixe de l’obsessionnel et
qui installe la souffrance dans la pensée de celui-ci.

- Le mode phobique de la défense névrotique procède, quant à lui, par la


projection de cette jouissance sur un élément de l’environnement qui devient l’objet
menaçant, (la foule, un espace clos, un espace ouvert, un tunnel… etc.). Le phobique
localise ainsi le danger dans un élément prélevé dans le monde extérieur et doit tout faire
pour ne pas le rencontrer, évitant ainsi l’apparition de l’angoisse. Cette projection de
l’angoisse et sa localisation au niveau du monde extérieur fait que le phobique souffre
particulièrement dans ses rapports au monde environnant.

- Le mode de défense hystérique procède par convertir cette jouissance en


troubles et en souffrances localisés au niveau du corps. Ce qui fait que l’hystérique
souffre prioritairement dans son corps. La conversion consiste en le report, d’une façon
déguisée et donc symptomatique, de la charge sexuelle excessive sur une partie du corps
ou un organe dont la représentation sexualisée et traumatisante s’est trouvée frappée de
refoulement.

En somme, les symptômes d’ordre névrotique, qu’ils prennent forme hystérique,


phobique ou obsessionnelle, s’originent dans le refoulement de représentations inconciliables
dont la charge libidinale qui leur est attachée, se trouvant déliée, redouble de force, investie
d’autres représentations conscientes et se transposent en souffrance. L’écoute du
psychanalyste dans le transfert permet au patient d’une part de déchiffrer le sens des
représentations refoulées qui finissent par reprendre leur place dans le système
conscient et d’autre part de disséminer la surcharge libidinale et faire disparaître ainsi
la souffrance névrotique.

4- L’hystérie comme modalité névrotique fondamentale de défense

Voyons maintenant, avec un peu plus de détails, ce qui caractérise l’hystérie, non pas
comme ensemble de symptômes tels que décrits par la clinique psychiatrique mais en tant que
position subjective (modalité de défense et résolution du conflit) telle qu’elle se dévoile dans
le cadre d’une cure analytique.

Rappelons tout d’abord que c’est grâce à la parole des hystériques que Freud a
découvert un mode entièrement nouveau des relations humaines. La relation transférentielle
prolongée avec l’analyste, fait apparaître la position subjective du sujet hystérique caractérisée
par 3 états permanents et stables de son moi. Durant la relation transférentielle, ce moi se
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révèle sous 3 aspects :

- Un moi profondément insatisfait. Dans son fantasme inconscient, l’hystérique «


joue le rôle d’une victime malheureuse et constamment insatisfaite. » (p.19) Mais
paradoxalement, au-delà de ses demandes incessantes de satisfactions, elle cherche
constamment chez l’Autre les non réponses qui frustrent. Car pour le sujet hystérique, toute
satisfaction préfigure cet état de jouissance maximale qui, si elle se réaliserait, le rendrait fou,
voire l’anéantirait. « Cet état, au demeurant impossible, est pourtant pressenti par
l’hystérique comme une menace réalisable, comme le danger suprême d’être un jour ravi par
l’extase et de jouir jusqu’à la mort. En somme, le problème de l’hystérique est avant tout sa
peur, une peur profonde et décisive, jamais ressenti mais agissant à tous les niveaux de son
être, une peur concentrée sur un seul péril, le fait de jouir. Ce sont bien la peur et le refus
tenace de jouir qui occupent le centre de la vie psychique du névrosé hystérique. » (p. 20).
D’une jouissance redoutée, l’hystérique tente de prouver la pérennité de son désir à travers les
marques de son insatisfaction et pour cela il construit inconsciemment un fantasme où l’Autre
de ses demandes est toujours décevant car il est tantôt fort, démesuré et puissant, tantôt faible,
impuissant et malade. Inconsciemment, l’hystérique décèle chez autrui, y compris le
psychanalyste, « avec une perception très aiguë, le signe d’une puissance humiliante qui le
rendra malheureux, ou d’une impuissance touchante sur laquelle il s’apitoie mais à laquelle
il ne pourra remédier. Bref, qu’il s’agisse du pouvoir de l’autre ou de la faille dans l’autre,
que ce soit avec l’Autre de son fantasme ou avec l’autre de sa réalité, ce sera toujours
l’insatisfaction que le moi hystérique tiendra à retrouver comme son meilleur gardien.» (p.
20). « Il cherche dans l’autre la puissance qui le soumet ou l’impuissance qui l’attire et le
déçoit. » (p. 21).

- Un moi hystérisant, c’est à dire un moi qui suscite chez l’autre une tension
libidinale. « L’hystérique est un remarquable créateur de signes sexuels qui sont rarement
suivis par l’acte sexuel qu’ils annoncent. Sa seule jouissance, jouissance masturbatoire,
consiste à produire ces signes qui lui font croire et font croire à l’autre que son vrai désir est
de s’engager dans la voie d’un acte sexuel accompli. Et pourtant s’il est un désir auquel tient
l’hystérique c’est qu’un tel acte échoue, plus exactement il tient au désir inconscient de la non
réalisation de l’acte, et par conséquent, au désir de demeurer un être insatisfait. » (p.23) Il
cherche et parvient à transformer le contexte de la relation clinique en un espace de projection
fantasmatique à contenu sexuel. Le moi hystérique érotise facilement le cadre de la cure.

- Un « moi tristesse ». « Cette singulière plasticité du moi installe l’hystérique dans


une réalité confuse, mi-réelle, mi-fantasmée, où s’engage le jeu cruel et douloureux des
identifications multiples et contradictoires à divers personnages, et cela au prix de rester
étranger à son propre identité d’être, et plus particulièrement à son identité d’être sexué.
L’hystérique peut ainsi s’identifier à l’homme, à la femme, ou encore au point de fracture
d’un couple, c’est à dire qu’il peut incarner l’insatisfaction même dont un couple est affligé.
Il est frappant de constater combien le sujet adopte avec une aisance étonnante aussi bien le
rôle de l’homme, que celui de la femme, mais aussi le rôle du troisième personnage par qui le
conflit arrive ou, au contraire, grâce à qui le conflit s’apaise. Que l’hystérique déclenche le
conflit ou qu’il l’éteigne, qu’il soit homme ou femme, il occupe invariablement le rôle de
l’exclue. C’est justement le fait d’être rejeté à cette place d’exclu qui explique la tristesse dont
souvent sont accablés les hystériques. Ils créent une situation conflictuelle, mettent en jeu des
drames, s’immiscent dans des conflits, et puis une fois le rideau tombé, ils s’aperçoivent avec
la douleur de la solitude que tout n’a été qu’un jeu dont ils sont la part exclue. C’est lors de
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ces moments de tristesse et de dépression si caractérisés, que nous repérons l’identification


de l’hystérique avec la souffrance propre à l’insatisfaction : le sujet hystérique n’est plus un
homme, n’est plus une femme, il est maintenant douleur d’insatisfaction. Et avec cette
douleur, il reste dans l’impossibilité de se dire homme ou de se dire femme, de dire tout
simplement l’identité de son sexe. La tristesse du moi hystérique répond au vide et à
l’incertitude de son identité sexuée. » (p.25)

« En somme, le visage de l’hystérie dans une cure d’analyse, et au-delà, dans tout
rapport avec autrui, se présente comme un lien insatisfait, érotisant et triste, tout entier
polarisé autour du refus tenace de jouir, » (p. 26) de peur que cette jouissance ne l’anéantisse
en tant que sujet. L’essentiel du travail de l’analyste consiste alors à l’amener à traverser cette
peur et l’angoisse qui centre son être et inhibe son désir.

Notes

« Les expériences hypnotiques, en particulier la suggestion post-hypnotique ont démontré de


façon tangible, avant même l’époque de la psychanalyse, l’existence et le mode d’acton de
l’inconscient dans l’âme » Freud, l’inconscient 1915.

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