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caractère spécial la haine die Dieu.

» Pour achever d’éclairer le Roi, Bertin


lui dévoila le sens de ces demi-mots « Ecr. l’inf. », par lesquels Voltaire
terminait un si grand nombre de ses lettres. Il ajouta que tous ceux qui
recevaient de Voltaire des lettres terminées par l’horrible formule étaient ou
membres du comité secret ou initiés à ses mystères.
Ce club avait été fondé entre les années 1763 et 1766. Au moment où la
Révolution éclata, il travaillait donc depuis vingt-trois ans au moins à
séduire le peuple, sous le spécieux prétexte de lui venir en aide et de
soulager ses maux.
Pour arriver au grand but de leur conjuration, les sectaires crurent qu’il
ne suffisait point d’employer les moyens généraux que nous venons de dire
et auxquels tous devaient concourir d’un commun effort. Ils s’attribuèrent
chacun une besogne particulière à laquelle ils se consacrèrent plus
spécialement. Voltaire s’était chargé des ministres, des ducs, des princes et
des rois 29. Quand il ne pouvait approcher le prince lui-même, il le
circonvenait. Il avait placé près de Louis XV un médecin, Quesnay, qui sut
si bien s’emparer de la direction des idées du roi que celui-ci l’appelait son
« penseur ». Et le moyen choisi par le penseur pour s’immiscer dans l’esprit
du roi était celui employé par les économistes : appeler son attention sur ce
qui pouvait faire le bonheur du peuple.
D’Alembert fut chargé ou se chargea de recruter de jeunes adeptes.
« Tâchez, lui écrivait Voltaire, tâchez, de votre côté, d’éclairer la jeunesse
autant que vous le pourrez (15 septembre 1762). » Jamais mission ne fut
29 E. J. F. Barbier, avocat au Parlement de Paris, a tenu un Journal historique et
anecdotique du règne de Louis XV, publié par la société de l’histoire de France, d’après
le manuscrit inédit de la Bibliothèque nationale par A. de la Villegille (Paris, chez Jules
Renouard et Cie, rue de Tournoin, 6, MDCCCXLIX. On y voit comment les princes
étaient particulièrement recherchés par les chefs de la Franc – maçonnerie : « Nos
seigneurs de la Cour ont inventé tout nouvellement un ordre appelé des Frimasons, à
l’exemple de l’Angleterre, où il y a aussi différents ordres de particuliers et nous ne
tarderons pas à imiter les impertinences étrangères. Dans cet ordre étaient enrôlés
quelques-uns de n os secrétaires d’État et plusieurs ducs et seigneurs. On ne s ait quoi
que ce soit des statuts, des règles et de l’objet de cet ordre nouveau. Ils s’assemblaient,
recevaient de nouveaux chevaliers, et la première règle était un secret inviolable pour
tout ce qui se passait. Comme de pareilles assemblées, aussi secrètes, sont très
dangereuses dans un État, étant composées de seigneurs, surtout dans les circonstances
du changement qui vient d’arriver dans le ministère, le cardinal Fleury a cru devoir
étouffer cet ordre de chevalerie dans sa naissance, et il a fait défense à tous ces
messieurs de s’assembler et de tenir de pareils chapitres ».T. II, mars 1737, p. 448.) En
1738, parut à Dublin un livre que la F.-M. publia spécialement pour la France. Le titre en
est : Relation apologique et historique de la Société des Francs-Maçons, par S. G. D. M.
F. M. Cette apologie fut condamnée par le St Siège en février 1739. Clément XII venait
de lancer la première bulle papale contre la F. M.. ; le cardinal Fleury avait donné au
général de police Hérault l’ordre de faire une enquête dans les assemblées des Free-
Mason et le 14 septembre 1737, une sentence de police avait prohibé leurs réunions.
L’attention des Pouvoirs spirituels et temporels était appelée sur la secte. Le pouvoir
civil qui avait en mains les moyens de coercition ne sut point aller jusqu’au bout.

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