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Marc B ONNET
bonnet@lms.polytechnique.fr
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4 TABLE DES MATI ÈRES
A Compléments 153
A.1 Points et poids de Gauss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153
Introduction
L’augmentation rapide et régulière des capacités (puissance, mémoire vive, stockage) des
ordinateurs, certes un lieu commun maintes fois évoqué, n’en constitue pas moins un facteur
essentiel du développement technologique. Un simple ordinateur personnel suffit actuellement
pour effectuer des simulations numériques de systèmes physiques d’une grande complexité.
Ces facteurs techniques et économiques, associés aux progrès dans la conception d’algorithmes
et leur développement pratique, font que la simulation numérique occupe une place essentielle
dans la recherche et l’industrie.
7
8 TABLE DES MATI ÈRES
• Les éléments de frontière (équations de champ linéaires mises sous forme d’équations
intégrales) ;
• Les différences finies (approximations de dérivées dans des équations différentielles ou
aux dérivées partielles) ;
• Les volumes finis (forme intégrale des équations de conservation) ;
• Les méthodes spectrales (représentation de champs sur des bases de polynômes de degré
élevé).
Le choix parmi ces approches dépend des particularités des équations constituant le modèle
mathématique du système à simuler. On les emploie parfois de façon combinée : traitement
dissocié des variables d’espace et de temps, ou encore situations présentant des couplages mul-
tiphysiques.
La simulation du comportement mécanique des solides déformables et des systèmes com-
posés de tels solides, cadre général de ce cours, repose le plus souvent sur la méthode des
éléments finis, complétée par la méthode des différences finies pour le traitement de la variable
temps, et occasionnellement sur la méthode des éléments de frontière pour des situations par-
ticulières. La méthode des éléments finis est ainsi devenue de facto la référence en matière de
calcul des solides déformables, et en particulier un outil essentiel de l’ingénieur, à travers de
nombreux codes de simulation employés dans l’industrie et la recherche. Elle est donc tout
naturellement au centre de ce cours.
Objectifs et cadre du cours. Ce cours a ainsi pour but de présenter de façon structurée les
concepts et techniques principaux mis en œuvre dans les méthodes numériques de simulation
des solides déformables en régime linéaire et non-linéaire fondées sur les éléments finis. Ce
périmètre, restreint par rapport à la problématique générale de la simulation numérique, délimite
encore un domaine très vaste, qu’il n’est pas question d’espérer couvrir par un cours de ce
format. Par souci de cohérence, et aussi de complémentarité avec d’autres enseignements de
l’Ecole Polytechnique, on a fait les choix suivants :
• Le cadre retenu est celui des solides déformables tridimensionnels, incluant le cas parti-
culier des déformations planes, et dans le cadre de l’hypothèse des petites perturbations
(HPP). Cela signifie que sont exclus du champ de cet enseignements tous les modèles
servant à la description de solides élancés ou minces : barres et poutres (pour lesquels le
diamètre de la section est petit devant la longueur) ; membranes, plaques et coques (pour
lesquels l’épaisseur est petite devant les autres dimensions). Ces modèles de structures
élancées ou minces requièrent le développement d’éléments finis spécialement adaptés.
Le cas des barres et poutres est traité dans le cours de Modélisation et calcul des structures
élancées (Ballard et Millard, 2005), y compris hors de l’hypothèse HPP.
• La grande variété des comportements de matériaux ne permet pas, là non plus, un traite-
ment exhaustif. La présentation sera restreinte aux modèles de comportements élastique
linéaire, support classique et de grande importance pratique des notions de base concer-
nant les éléments finis, et élasto-plastique (sous sa forme la plus simple, adaptée à la
description de matériaux métalliques).
• L’analyse mathématique du comportement numérique des méthodes d’éléments finis (ca-
dre fonctionnel, théorèmes de convergence, estimateurs d’erreur) n’est pas abordée, en-
dehors de la mention sans démonstration de quelques résultats importants. Certaines de
ces notions sont abordées dans le cours d’Analyse numérique et optimisation (Allaire,
2004).
Le contenu proposé exploite fortement les acquis des cours de Mécanique des milieux continus
(Salencon, 2004) et de Plasticité et rupture (Suquet, 2004). Des rappels relativement succincts
Table des matières 9
des notions nécessaires antérieurement traitées dans le dernier cours cité sont fournis, efin de
rendre ce cours auto-suffisant.
Thèmes abordés. Le cours aborde les thèmes suivants (numérotés par chapitre, chaque cha-
pitre correspondant à un amphi) :
1. Rappels sur l’élasticité linéaire et les principes de minimum. Forme générale de la mé-
thode de Galerkin.
2. La notion d’élément fini isoparamétrique ; maillages, conformité, aspects locaux et glo-
baux de l’interpolation.
3. La méthode des éléments finis en élasticité linéaire : matrices élémentaires, assemblage,
forces nodales, résolution par méthode directe ou itérative, prise en compte des liaisons,
post-traitement.
4. Mécanique de la rupture linéaire : rappels ; approches locale (éléments finis spéciaux) et
globale (taux de restitution d’énergie, méthode G − θ, intégrale J).
5. Comportements non-linéaires : motivation, exemples et applications. Présentation d’al-
gorithmes pour la non-linéarité de contact, puis pour l’élasticité non-linéaire. Bases des
méthodes de type Newton pour les équations non-linéaires.
6. Calcul des structures élasto-plastiques : modéle de comportement (rappel), aspects locaux
(intégration numérique implicite du comportement, méthode du retour radial).
7. Calcul des structures élasto-plastiques : aspects globaux (algorithme incréméntal impli-
cite, méthode de Newton, opérateur tangent cohérent).
8. Thermoélasticité avec effets thermiques instationnaires ; intégration d’équations linéaires
d’ordre 1 en temps (approches explicite et implicite, stabilité).
9. Dynamique en régime transitoire ; intégration d’équations linéaires d’ordre 2 en temps
(algorithme de Newmark, stabilité).
Initiation à la pratique des éléments finis. Certaines séances de travaux dirigés de ce cours
ont lieu en salle informatique, et s’appuient sur des programmes d’initiation aux éléments finis
écrits en M ATLAB par A. F RANGI.
D’autre part, tous les TMS (travaux de modélisation et simulation) portant sur des problèmes
de mécanique des solides et qui se déroulent parallèmement à ce cours reposent implicitement
sur les notions développées ici et en constituent une application directe via les codes d’éléments
finis utilisés (le plus souvent C AST 3M).
Constantinescu et N. Tardieu pour l’utilisation de la figure 5.5 sur l’indentation, ainsi que P.
Suquet pour m’avoir permis de lui « emprunter » les figures 4.1, 6.3 de son cours Rupture et
Plasticité.
Chapitre 1
Les structures mécaniques sont susceptibles de présenter des comportements très divers,
selon les caractéristiques de leurs matériaux constitutifs, les chargements subis, la nature des
liaisons entre éléments structuraux... Le concept d’élément fini fournit, comme on le verra au
long de ce cours, un cadre générique permettant la définition de méthodes de calcul approché des
structures dans toute leur diversité, adaptées à la prise en compte de configurations géométriques
complexes et de comportements variés.
Le modèle de comportement le plus simple à prendre en compte est celui de l’élasticité
linéaire sous l’hypothèse des petites perturbations (HPP), traité en détail dans le cours de
Mécanique des milieux continus (Salencon, 2004). Beaucoup de matériaux vérifient ces hy-
pothèses pour des chargements « pas trop élevés », tels que les contraintes sont en tout point
dans un domaine d’élasticité dont la définition précise dépend du matériau (Suquet, 2004). Le
modèle de comportement élastique linéaire HPP est très important pour la pratique, car les
conditions de fonctionnement de nombre de structures doivent être telles que leur réponse reste
dans le domaine élastique.
Il est donc naturel d’aborder la problématique de la résolution approchée des équations de
la mécanique des solides déformables en se restreignant, dans un premier temps, au cas de
l’élasticité linéaire HPP. Ce chapitre introductif a pour but de poser les bases nécessaires à
l’introduction de la méthode des éléments finis dans ce cadre. Il s’appuie sur des rappels des
équations de l’équilibre en élasticité linéaire tridimensionnelle sous leur formes locale (sec-
tion 1.1) et faible résultant du principe des puissances virtuelles (section 1.2). La résolution par
éléments finis s’appuie alors soit sur cette formulation faible, soit sur les principes variationnels
de l’élasticité linéaire, déjà traités en Mécanique des milieux continus (Salencon, 2004) mais re-
trouvés ici à partir de la notion d’erreur en relation de comportement (section 1.3). On présente
alors en section 1.4 la méthode de Galerkin, une procédure générique de résolution approchée
par minimisation d’énergie, et le lien entre formulations variationnelles et faibles est précisé.
L’extension de l’approche variationnelle à des conditions aux limites plus générales fait enfin
l’objet de la section 1.6
11
12 C HAPITRE 1. R ÉSOLUTION APPROCH ÉE DE PROBL ÈMES D ’ ÉQUILIBRE EN ÉLASTICIT É
_d
T
ST
Ω
Sξ
ξ_d
Figure 1.1: Équilibre HPP d’un solide élastique : notations.
On dit alors que les conditions aux limites sont bien posées, au sens où elles garantissent l’exis-
tence et l’unicité de la solution en contrainte et en déformation. Les conditions (1.4) et (1.5) ne
sont pas les seules possibles : on peut par exemple imposer des conditions exprimant l’existence
d’un plan de symétrie (voir section 1.6) ou la périodicité (liaisons entre déplacements sur deux
faces opposées). Dans tous les cas, les conditions aux limites doivent être telles que, en tout
point de la frontière, trois relations indépendantes entre des composantes du déplacement et du
vecteur-contrainte soient imposées.
Les équations (1.1) à (1.5) constituent ce qu’on appelle parfois la formulation forte du
problème d’équilibre en élasticité (par opposition aux formulation faibles introduites aux sec-
tions 1.2 et 1.3). Elles relèvent, comme pour tout modèle de milieu continu, de trois catégories
essentielles :
(i) Équations de compatibilité cinématique : (1.1), (1.4) ;
(ii) Équations d’équilibre : (1.2) et (1.5) ;
(iii) Équation de comportement : (1.3).
tandis que l’ensemble S(ξ D ) des contraintes statiquement admissibles avec les efforts imposés
(T D , f ) est défini par
n o
S(T D , f ) = τ | div τ + ρf = 0 dans Ω, τ .n = T D sur ST (1.8)
Àces définitions déjà connues (Salencon, 2004), il est commode d’ajouter celle de l’ensemble
C(0) des déplacements cinématiquement admissibles à zéro :
n o
C(0) = u | u continu et régulier sur Ω et u = 0 sur Sξ (1.9)
et de désigner simplement par C l’ensemble des champs de déplacement admissibles sans condi-
tion sur la frontière : n o
C = w | w continu et régulier sur Ω (1.10)
Les définitions (1.7), (1.9) et (1.10) stipulent que tout déplacement est continu, traduisant l’hy-
pothèse que le matériau se déforme en restant continu1 . Pour éviter des possibilités « patholo-
giques » et en tout cas peu physiques, on exige de plus une certaine régularité. Une formulation
forte du type (1.1)–(1.5) requiert a priori des déplacements admissibles deux fois continûment
différentiables par morceaux2 . Pour les besoins de l’approximation par éléments finis, on peut
se contenter d’une hypothèse de régularité un peu moins contraignante :
v et ∇v sont de carré intégrable sur Ω (1.11)
Comme on le verra en section 1.3, cette condition3 exprime esssentiellement l’hypothèse d’une
énergie de déformation finie.
Une reformulation plus compacte du problème (1.1)–(1.5) gouvernant l’équilibre d’un so-
lide élastique est alors
trouver (ξ, σ) ∈ C(ξ D )×S(T D , f ) tels que σ(x) = A : ε[ξ](x) (x ∈ Ω) (1.12)
où la notation ε[v] désigne l’opération consistant à évaluer selon (1.1) le tenseur de déformation
linéarisé associé à un champ de déplacement v. On cherche donc le couple unique4 (ξ, σ) de
champs de déplacement cinématiquement admissible et de contrainte statiquement admissible
qui se correspondent par le comportement élastique linéaire.
Cette identité présente notamment les caractéristiques suivantes : (i) elle ne fait pas référence
aux données cinématiques (1.4), et (ii) elle fait intervenir le vecteur-contrainte T = σ.n sur Sξ ,
a priori inconnu et représentant les réactions associées à l’imposition de déplacements sur Sξ .
1.3. Principes du minimum, formulation variationnelle de l’équilibre 15
Compte tenu de ces remarques, on peut formuler le problème d’équilibre de deux manières à
partir des équations (1.24), selon qu’on choisit d’éliminer la réaction ou de faire figurer expli-
citement la donnée cinématique (1.4).
Première variante : formulation faible obtenue par élimination de la réaction. Pour que la
réaction T ne figure pas dans la formulation finale, il suffit de restreindre l’équation (1.24) aux
champs virtuels cinématiquement admissibles à zéro. La donnée cinématique (1.4) vérifiée par
ξ doit alors être prise en compte dans la définition de l’espace dans lequel ξ est cherché. On
obtient ainsi la formulation faible suivante pour le problème d’équilibre élastique (1.1)–(1.4) :
Deuxième variante : formulation faible obtenue par ajout de la donnée cinématique. On peut
choisir de conserver la réaction T dans la la formulation faible finale. L’équation (1.24) est
alors complétée par la condition (1.4) écrite sous forme faible à l’aide d’un « vecteur contrainte
virtuel » T 0 pouvant prendre des valeurs arbitraires sur Sξ , pour obtenir la formulation faible
dans laquelle C 0 [Sξ ] est l’ensemble des champs de vecteurs contrainte sur Sξ définis par dualité
par rapport aux éléments de C, c’est-à-dire tels que les intégrales sur Sξ dans (1.26) sont définies
pour tout champ w ou ξ de C.
Discussion. La méthode consistant à établir une formulation faible par introduction des équa-
tions locales de compatibilité et de comportement dans la forme intégrale de l’équation d’équili-
bre (puissances virtuelles) est très générale. Elle est en particulier applicable pour des compor-
tements non-linéaires et en dynamique, comme on le verra respectivement aux chapitres 6, 7
(analyse quasistatique des solides élastoplastiques) et 9 (dynamique des solides élastiques).
Ces propriétés et la formulation (1.28) entraı̂nent donc que la solution (ξ, σ) du problème
d’équilibre élastique minimise l’erreur en relation de comportement. On peut donc chercher
(ξ, σ) comme solution du problème de minimisation
Ce couple (ξ, σ) n’est solution d’un problème d’équilibre élastique bien posé que si E(ξ, σ) = 05 .
La notion d’erreur en relation de comportement s’étend à des lois de comportement non
linéaires (Moës, Ladevèze et Douchin, 1999b; Ladevèze, 1999) ; cette généralisation est hors
du cadre de ce cours.
Le premier terme ne dépend que du déplacement, tandis que le second ne dépend que de la
contrainte. On remarque alors que le principe des puissances virtuelles écrit sous la forme (1.22)
est vrai pour tout τ ∈ S(T D , f ), et pour le choix de champ virtuel w = v, ce qui donne
Z Z Z
τ : ε[v] dV = ρf .v dV + [τ .n].v dSx
Ω
ZΩ Z∂Ω Z
= ρf .v dV + [τ .n].ξ D dSx + T D .v dS
Ω Sξ ST
5
Si les conditions aux limites sont bien posées (voir section 1.1), on sait que le problème (1.1)–(1.5) admet une
solution unique (éventuellement à mouvement rigidifiant près), de sorte que la solution du problème de minimisa-
tion (1.31) vérifie E(ξ, σ) = 0.
Il existe des situations, hors du cadre de ce cours, où on est en possession de données aux limites surabondantes,
obtenues expérimentalement, de sorte que le déplacement et le vecteur contrainte soient simultanément connus
en certains points de la frontière. On peut encore dans ce cas définir et minimiser une fonctionnelle d’erreur en
relation de comportement. Le problème de minimisation (1.31) est dans ce cas susceptible de conduire à une
solution (ξ, σ) telle que E(ξ, σ) > 0. Cela indique que la modélisation du solide, caractérisée par la donnée de
Ω et A, n’est pas cohérente avec les conditions aux limites. Quand ces dernières sont d’origine expérimentale, et
donc représentatives de la structure réelle, E(ξ, σ) > 0 traduit le fait que le modèle ne représente pas correctement
la structure réelle : mauvaise connaissance des modules d’élasticité, présence d’une cavité, fissure ou autre défaut
non pris en compte dans la définition de Ω...
1.3. Principes du minimum, formulation variationnelle de l’équilibre 17
où la deuxième égalité tient compte des conditions d’admissibilité (1.4) et (1.5). On parvient
ainsi à exprimer l’erreur en relation de comportement sous la forme
E(v, τ ) = P(v) + P ? (τ ) (1.32)
dans laquelle l’énergie potentielle P(v) est définie par
P(v) = W(v) − F(v) (1.33)
avec
1Z Z Z
W(v) = ε[v] : A : ε[v] dV F(v) = ρf .v dV + T D .v dS (1.34)
2 Ω Ω ST
tandis que la contrainte solution σ est obtenue par minimisation de l’énergie complémentaire
sur l’ensemble des contraintes statiquement admissibles :
σ = arg min P ? (τ ) (1.38)
τ ∈S(T D ,f )
(la notation x = arg miny f (y) signifie que x est une valeur de la variable, ou argument, y telle
que f (y) soit minimale). Rappelons que (ξ, σ) ne définissent la solution que s’ils vérifient
E(ξ, σ) = P(ξ) + P ? (σ) = 0.
Celle-ci, conséquence et traduction du principe variationnel (1.40), est appelée formulation va-
18 C HAPITRE 1. R ÉSOLUTION APPROCH ÉE DE PROBL ÈMES D ’ ÉQUILIBRE EN ÉLASTICIT É
riationnelle du problème d’élasticité linéaire (1.1)–(1.5). On remarque par ailleurs que (1.41)
reproduit la formulation faible (1.25) découlant du principe des puissances virtuelles.
La matrice de rigidité [K] est carrée d’ordre N , et {F}, {α} sont des N -vecteurs.
L’équation (1.18) introduit une convention de notation, fréquemment utilisée dans les pu-
blications traitant de la méthode des éléments finis, suivant laquelle les vecteurs et matrices as-
sociés à la représentation des inconnues du problème approché (ici, les déplacements générali-
1.4. Minimisation approchée : méthode de Galerkin 19
sés) sont respectivement entre accolades {·} et crochets [·]. Cette convention a pour objet de
distinguer les vecteurs et tenseurs définis par référence à l’espace physique (vecteur position x,
déplacement v, déformation ε,...) et les tableaux de nombres à une ou deux dimensions associés
à l’espace vectoriel ou affine abstrait engendré par les fonctions de base de la méthode de Galer-
kin. De plus, comme suggéré par (1.44), {α} indique un N-vecteur colonne et la transposition
{α}T un N-vecteur ligne, de sorte que (par exemple) l’expression {α}T [K]{α} représente un
scalaire, en conformité avec les règles usuelles de l’algèbre matricielle.
La matrice de rigidité [K] est symétrique et positive, comme conséquence directe des pro-
priétés de symétrie et de positivité de la relation de comportement élastique linéaire (sec-
tion 1.1.3). Si de plus aucun des ϕI n’est un mouvement rigidifiant (c’est en particulier néces-
sairement vrai dès que la portion Sξ de ∂Ω est de mesure non nulle), alors toute combinaison
linéaire des ϕI possède une énergie de déformation non nulle. La matrice de rigidité est alors
définie positive (c’est-à-dire : {α} 6= {0} ⇒ {α}T [K]{α} > 0), et en particulier inversible. A
contrario, si la représentation (1.42) contient des déplacements rigidifiants, la matrice de ri-
gidité n’est pas inversible : pour tout {α} tel que le déplacement (1.42) est rigidifiant, on a
[K]{α} = {0}. Cette éventualité doit clairement être évitée en pratique.
Supposant [K] définie positive, l’énergie potentielle P ({α}) définie par (1.43) est stricte-
ment convexe par rapport à {α} et admet un minimum unique. Ce dernier est trouvé par annu-
lation des dérivées partielles de P ({α}) (condition nécessaire de minimisation), ce qui conduit
au système de N équations à N inconnues
[K]{α} = {F} (1.47)
et, par inversion, aux déplacements généralisés optimaux
{αmin } = [K]−1 {F} (1.48)
La solution approchée en déplacement au problème d’équilibre élastique est donc donnée par
l’expression (1.42) avec {α} = {αmin }, soit
N
(D)
αImin ϕI (x)
X
ξ N (x) = v (x) + (1.49)
I=1
Il est possible d’en déduire, par application de la relation de comportement élastique linéaire,
une solution approchée en contrainte, donnée par
N
σ N = A : ε[v (D) ](x) + αImin A : ε[ϕI ](x)
X
I=1
Celle-ci n’est en général pas statiquement admissible, et en particulier ne réalise pas le minimum
de l’énergie complémentaire (sauf si, par chance, le déplacement correspondait à la solution
exacte du problème d’équilibre élastique).
Méthode de Galerkin pour la formulation variationnelle. Il est possible d’utiliser des repré-
sentations de la forme (1.42) directement dans la formulation variationnelle (1.41). Supposant
le champ ξ de la forme (1.42) et les champs virtuels δξ de la forme
N
δαI ϕI (x)
X
δξ(x) = (1.50)
I=1
la formulation variationnelle (1.41) devient
{δα}T [K]{α} = {δα}T [F] pour tout {δα} ∈ RN
où {F} et [K] sont encore définis par (1.45) et (1.46). Cette équation est équivalente à (1.47), et
on retrouve ainsi la solution approchée en déplacement définie par (1.48).
20 C HAPITRE 1. R ÉSOLUTION APPROCH ÉE DE PROBL ÈMES D ’ ÉQUILIBRE EN ÉLASTICIT É
qui, par soustraction, conduisent à établir que l’erreur ∆ξ est orthogonale (au sens du produit
scalaire associé à l’énergie de déformation) à tout champ virtuel de l’espace d’approximation
utilisé : Z
ε[∆ξ] : A : ε[δξ N ] dV = 0 (1.51)
Ω
Le champ ξ N − v N étant de la forme (1.50), la dernière intégrale ci-dessus est nulle en raison de
la propriété d’orthogonalité (1.51), et on obtient l’inégalité
Z Z
ε[∆ξ] : A : ε[∆ξ] dV ≤ ε[ξ − v N ] : A : ε[ξ − v N ] dV (1.52)
Ω Ω
qui montre que ξ N est la meilleure approximation de ξ parmi tous les champs de la forme (1.42),
au sens de la norme en énergie.
Supposons que le déplacement imposé est nul (ξ D = 0), de sorte que la solution approchée ξ N
est également de la forme (1.50). La dernière intégrale ci-dessus est alors nulle en raison de la
propriété d’orthogonalité (1.51), et on obtient
Z Z Z
ε[ξ N ] : A : ε[ξ N ] dV = ε[ξ] : A : ε[ξ] dV − ε[∆ξ] : A : ε[∆ξ] dV
Ω ZΩ Ω
c’est-à-dire comme somme d’une solution particulière statiquement admissible avec les données
1.4. Minimisation approchée : méthode de Galerkin 21
et du vecteur {Ud } des déplacements généralisés associés aux données cinématiques, de com-
posantes Z Z
D
d
UI = [τ .n].ξ dS − τ I : S : τ (D) dV
I
Sξ Ω
La matrice de souplesse [S] est carrée d’ordre N , définie positive ; {U}, {β} sont des N -
vecteurs. La minimisation de P ? ({β}) par rapport à {β} conduit alors à
[S]{β} = {Ud } ⇒ {β min } = [S]−1 {Ud } (1.57)
La solution approchée en contrainte est alors donnée par (1.54) avec {β} = {β min }. En général,
le champ de contrainte ainsi obtenu ne mène pas, via la relation de comportement inverse (1.20),
à des déformations compatibles, et ne peut donc pas être intégré en vue d’obtenir une solution
approchée en déplacement.
1.4.5 Discussion
La méthode de Galerkin pour l’énergie potentielle est dans son principe assez facile à mettre
en œuvre dans la mesure où la construction de bases (ϕI ) vérifiant les conditions d’admissibilité
cinématique l’est. Cela découle du fait que les ϕI ne sont astreints, outre les conditions aux
limites sur Sξ , qu’à vérifier des conditions de régularité : continuité, énergie de déformation
W(ϕI ) finie. En particulier, on peut proposer des méthodes systématiques de construction de
bases (ϕI ) d’ordre N quelconque à partir de familles de polynômes orthogonaux ; cette approche
est à la base des méthodes spectrales (Bernardi et Maday, 1992).
La méthode de Galerkin pour l’énergie complémentaire est plus difficile à mettre en œuvre
, car les bases (τ I ) doivent être constituées de champs de contrainte statiquement admissibles
à zéro, et donc en particulier à divergence nulle. Cela rend la construction de telles familles de
champs très difficile, sauf sur des systèmes de géométrie simple.
22 C HAPITRE 1. R ÉSOLUTION APPROCH ÉE DE PROBL ÈMES D ’ ÉQUILIBRE EN ÉLASTICIT É
La méthode de Galerkin appliquée avec des bases (ϕI ) de champs définis sur tout Ω (et en
particulier l’approche spectrale) présente deux caractéristiques notables :
(a) Les coefficients de la matrice de raideur (ou de souplesse) et du second membre résultent
du calcul d’intégrales sur tout Ω ;
(b) La matrice de raideur (ou de souplesse) est pleine : tous les coefficients KIJ donnés
par (1.45), ou SIJ donnés par (1.56), sont a priori non nuls.
Le point (a) est gênant pour traiter des configurations géométriques complexes, l’intégration
numérique devenant alors délicate à mettre en œuvre et chère en temps de calcul. Le point
(b) est défavorable en termes de temps de calcul, la résolution d’un système d’équations tel
que (1.47) étant plus rapide si la matrice du système linéaire (dans cet exemple, [K]) est creuse,
c’est-à-dire présente une proportion importante de termes nuls.
La méthode des éléments finis, qui sera exposée en détail à partir du chapitre 2 est une
forme particulière de la méthode de Galerkin concue de façon à éviter ces inconvénients. L’idée
principale est de définir des bases constituées de fonctions ϕI à support « petit », c’est-à-dire
nulles en dehors d’une petite région ΩI ⊂ Ω de forme simple.
(a) Les intégrations numériques portent sur des petites régions, ce qui permet une mise en
œuvre plus simple et une évaluation numérique plus rapide. Par exemple, le calcul de KIJ
défini par (1.45) repose sur une intégration sur ΩI ∩ ΩJ .
(b) Tous les coefficients KIJ ou SIJ tels que ΩI ∩ ΩJ = ∅ sont nuls, ce qui conduit à des
matrices de raideur ou de souplesse très creuses.
1.5 Récapitulation
Dans ce chapitre, on a montré comment obtenir des formulations faibles équivalentes au
problème d’équilibre élastique initial posé en termes d’équations de champ et de conditions
aux limites. Ces formulations faibles résultent soit de l’application du principe des puissances
virtuelles, dans lequel on incorpore les équations locales de compatibilité et de comportement,
soit de l’expression de principes variationnels énergétiques (quand cela est possible).
Une approche générale pour la recherche de solutions approchées repose alors sur la métho-
de de Galerkin, consistant à représenter les champs de déplacement inconnu et virtuel sur une
même base choisie a priori. Nous verrons dans les chapitres qui suivent que la méthode des
éléments finis peut être vue comme une forme particulière de la méthode de Galerkin, reposant
sur des fonctions de base à support géométrique « localisé ».
1.6. Complément : cas de conditions aux limites plus générales 23
où σn = n.σ.n est la contrainte normale. Les surfaces Sξ , ST supportent, comme précédemment, des
valeurs imposées du déplacement ou du vecteur contrainte, tandis que les conditions (1.60) et (1.61)
expriment un glissement sans frottement le long de la surface Ssym . L’utilité pratique de ce nouveau type
de condition vient de ce qu’elle représente le comportement attendu des déplacements et des contraintes
sur un plan de symétrie géométrique quand les conditions de chargement sont elles-mêmes symétriques.
Elles permettent ainsi de poser le problème d’équilibre sur un domaine réduit par utilisation de symétries
planes (la figure 1.2 en montre un exemple).
Il faut alors adapter la définition des espaces de champs admissibles à la nouvelle structure de condi-
tions aux limites. Les ensembles de champs admissibles sont ainsi maintenant
En reprenant l’argumentation développée en section 1.3, on trouve que les énergies potentielle et complé-
mentaire sont encore définies par les expressions (1.33) à (1.36). La surface de symétrie Ssym intervient
ainsi dans la définition des ensembles de champs admissibles, et implicitement par le fait que Sξ et ST
ne définissent maintenant plus une partition de la frontière ∂Ω.
Ssym
Figure 1.2: Exemple de symétrie par rapport à un plan. Le domaine utile Ω, sur lequel les équations à
résoudre sont posées, est la moitié supérieure du solide (d’autres choix étant aussi possibles).
24 C HAPITRE 1. R ÉSOLUTION APPROCH ÉE DE PROBL ÈMES D ’ ÉQUILIBRE EN ÉLASTICIT É
Chapitre 2
Cette hypothèse présume notamment que les sollicitations (forces ou déplacements) sont exer-
cées selon les directions 1 et 2 et de façon invariante par translation suivant x3 . Dans un souci
d’uniformité de notation, il est alors commode dans ce contexte de désigner par Ω le domaine
x2
Sξ
x3
Ω
x2
ST
x1
x1
25
26 C HAPITRE 2. L A NOTION D ’ ÉL ÉMENT FINI ISOPARAM ÉTRIQUE
2.1.1 Maillage
Il est alors possible de créer l’approximation d’un domaine plan Ω quelconque par un as-
semblage Ωh de régions triangulaires à côtés rectilignes, appelé maillage, et les sommets des
triangles ainsi créés sont alors appelés nœuds (figure 2.4). L’approximation réside en ce que la
frontière, généralement courbe, de Ω se trouve représentée par une suite de segments rectilignes.
Il est par ailleurs clair que
(i) le « vrai » domaine Ω peut être approché, aussi précisément que l’on voudra, par un
maillage de triangles « suffisamment petits » ;
(ii) Pour tout domaine Ω de forme polygonale, on peut réaliser Ωh = Ω.
La lettre h apparaissant en indice dans la notation Ωh utilisée pour désigner l’approximation du
domaine Ω désigne la dimension caractéristique d’un élément (diamètre du plus grand cercle
circonscrit à un triangle du maillage). Cette notation est devenue habituelle dans les publications
portant sur la méthode des éléments finis, et est aussi utilisée pour signaler le caractère approché
d’autres quantités (par exemple le déplacement dans l’équation (2.2) ci-dessous).
h = max d
éléments
Figure 2.2: Elément triangulaire à trois nœuds et définition du paramètre h de finesse de maillage.
v
x2
_ (m)
x
x (k)
_ (T)
x2
x (m)
_
v (k) x1 _ (l )
x
(T)
x_ (k)
x (l )
_
x1
Figure 2.3: Elément triangulaire à trois nœuds, interpolation linéaire des valeurs nodales de v.
2.1. Exemple : déformations planes et maillage par éléments triangulaires 27
_(n)
x d
ξ_ h d
ξ_
Figure 2.4: A gauche : Fonction de forme globale définie à partir d’éléments triangulaires linéaires.
A droite : support de la fonction ξ (0) servant à interpoler des données cinématiques (en grisé
foncé) ; ξ D et ξ D
h
désignent respectivement la donnée exacte et son interpolée sur le bord. ξ (0)
s’annule à tous les nœuds de couleur blanche, et est nulle sur la zone en grisé clair.
où les fonctions d’interpolation Nk , N` et Nm , dites aussi fonctions de forme, sont affines en
(x1 , x2 ) et telles que
Nk (x(`) ) = δk` (2.3)
Cherchant chaque Nk (x1 , x2 ) pour un élément fini triangulaire générique sous la forme
(p) (p) (p)
Np (x1 , x2 ) = c0 + c1 x1 + c2 x2 (p = k, `, m) (2.4)
et imposant les trois conditions (2.3), les expressions explicites des fonctions de forme (2.4)
sont obtenues sans difficulté. La fonction Nk associée au sommet x(k) correspond ainsi à
(k) 1 (`) (m) (`) (m) (k) 1 (`) (m) (k) 1 (m) (`)
c0 = (x1 x2 − x2 x1 ) c1 = (x2 − x2 ) c2 = (x1 − x1 ) (2.5)
2A 2A 2A
où A est l’aire du triangle T , donnée par
(`) (k) (m) (k) (`) (k) (m) (k)
2A = (x1 − x1 )(x2 − x2 ) − (x2 − x2 )(x1 − x1 )
Les fonctions de forme N` (x1 , x2 ) et Nm (x1 , x2 ) sont obtenues par le même procédé, et se
déduisent de (2.5) par permutation circulaire des indices (k, `, m).
Il est clair que l’interpolation linéaire (2.2) des déplacements nodaux conduit à une déforma-
tion constante par triangle. Le tenseur de déformation associée à v h défini par (2.2) sur le triangle
générique T de sommets x(k) , x(`) , x(m) est relié aux déplacements nodaux v (k) , v (`) , v (m) par
(k)
v 1
(k)
ε11 (x)
b(k) 0 b(`) 0 b(m) 0
v
2
v (`)
ε22 (x) =
0 c(k) 0 c(`) 0 c(m) 1(`) (x ∈ T ) (2.6)
v
2
(k)
2ε (x)
b(k) c(`) b(`) c(m) b(m)
12 c
(m)
v1
(m)
v
2
dans laquelle
• n = 1, . . . , NN sont les numéros globaux des nœuds du maillage ;
• La fonction de forme globale Ñn (x) associée à un nœud x(n) a pour support Ω(n) la
réunion des triangles du maillage ayant le nœud x(n) pour sommet ; elle est linéaire sur
chaque triangle, vaut 1 en x = x(n) et zéro à tous les autres nœuds du maillage (figure 2.4) ;
• La partition {1, . . . , NN } = D ∪ I (avec D = {n | x(n) ∈ Sξ } et I = {1, . . . , NN } \ D) des
numéros de nœuds permet de distinguer entre déplacements nodaux inconnus et donnés
par les conditions aux limites (1.4).
La représentation (2.7) du déplacement est de la forme (1.42), le champ particulier v (D) ∈ C(ξ D )
correspondant au premier terme (somme sur n ∈ D) et les fonctions de base ϕ(I) (x) ∈ C(0)
étant données par ϕ(I) (x) = Ñn (x)ej (n ∈ I) moyennant une renumérotation (n, j) → I.
Elle permet donc la construction d’un problème approché selon la méthode de Galerkin décrite
en section 1.4. Il est important de noter que cette construction a maintenant pour support le
domaine approché Ωh et les fonctions de base définies sur Ωh , et non le domaine exact Ω.
En particulier, la matrice de rigidité et le vecteur des forces généralisées résultent d’intégrales
du type (1.45) et (3.11) calculées pour le domaine approché Ωh et sa frontière, tandis que la
fonction ξ (0) (x) est cinématiquement admissible avec les données en déplacement au sens de
l’approximation par éléments finis.
Les éléments finis fondés sur l’interpolation linéaire par triangle sont un cas particulier
d’une famille d’éléments finis dits isoparamétriques. Cette famille, et les problèmes approchés
auxquels elle conduit, est traitée en détail dans la suite de ce cours. Il n’est donc pas nécessaire
d’approfondir à ce stade le procédé de construction du problème approché fondé sur l’élément
fini triangulaire linéaire.
L’idée d’interpolation linéaire par triangle, et une application, figurent dans un article de
Courant (1943), une des toutes premières références où apparaı̂t la notion d’élément fini.
2.2.1 Maillage
On se place à partir de maintenant dans le cadre général d’un solide dont la configuration
est décrite par le domaine Ω ⊂ RD (D = 2 en déformations planes ou contraintes planes, D = 3
pour un solide tridimensionnel).
(i) Le domaine Ω est divisé en NE régions E (e) (1 ≤ e ≤ NE ) de forme simple : triangles
ou quadrangles (problème plan) ; parallélipipèdes, prismes ou tétraèdres (solide tridimen-
sionnel). Ces régions pourront être distordues, et en particulier avoir des faces ou côtés
curvilignes. Chacune de ces régions définira le support géométrique d’un élément fini.
(ii) On choisit par ailleurs un nombre fini NN de points x(n) (1 ≤ n ≤ NN ) de Ω, ap-
pelés nœuds . Ces nœuds comprennent en particulier tous les sommets des régions du
découpage.
2.2. Le concept d’élément fini isoparamétrique 29
L’ensemble des éléments E (e) et des nœuds x(n) ainsi définis constituent un maillage de Ω. Pour
un découpage donné de Ω en éléments, le choix des nœuds n’est pas arbitraire. Il doit en effet
correspondre à l’une des possibilités répertoriées de familles de fonctions de forme associées à
une forme d’élément donnée (triangle, quadrangle, tétraèdre,...), comme celles présentées aux
sections 2.2.2 et 2.2.3.
Sur le plan informatique, les données nécessaires à la définition d’un maillage sont habituel-
lement structurées en deux tables :
• La table des coordonnées nodales, notée COOR, disposée en NN lignes et D colonnes, telle
que la ligne n donne les coordonnées du nœud x(n) :
(n)
COOR (n, j) = xj
• La table de connectivité, notée CONNEC, disposée en NE lignes, telle que la ligne e donne
la liste des numéros des nœuds situés sur l’élément E (e) . Tous les éléments n’ayant
pas nécessairement le même nombre de nœuds, il faut par ailleurs stocker la valeur de
N(e) pour chaque élément, par exemple sous la forme d’une colonne supplémentaire de
CONNEC . On aura ainsi1 :
n= CONNEC (e, k)
indique que le nœud de numéro local k relativement à l’élément fini E (e) est le nœud x(n)
de numéro global n.
L’association des éléments et des nœuds constitue le support permettant la définition
(i) d’une approximation Ωh du domaine Ω (permettant le calcul des intégrales d’énergie de
déformation et de puissance des efforts extérieurs), et
(ii) d’une approximation v h de tout champ de déplacement cinématiquement admissible v.
Ces points (i) et (ii) sont essentiels à la compréhension de la méthode des éléments finis, et vont
maintenant être détaillés, respectivement dans les sections 2.2.2 et 2.2.3.
a2
x(4)
x(7) x(3)
4 7 3
1 5 2 x(5) x(2)
x(1)
Figure 2.5: Element fini quadrangulaire à 8 nœuds : élément de référence ∆ (gauche) et élément E dans
l’espace physique (droite).
Les points de E sont alors mis en relation avec ceux de ∆ par une représentation paramétrique
de la forme
N(e)
Nk (a)x(k)
X
x= (2.8)
k=1
(voir figure 2.5) où les fonctions de forme Nk (a) sont des polynômes à D variables.
La définition des fonctions de forme Nk (a) est soumise à la contrainte suivante : la représen-
tation (2.8) doit être vraie si x est un nœud x(`) , ce qui impose de vérifier les identités
N(e)
(`)
Nk (a(`) )x(k) (1 ≤ ` ≤ N(e) )
X
x = (2.9)
k=1
où a(`) désigne l’antécédent de x(`) sur l’élément de référence ∆. Cette condition devant être
vraie pour tout choix des N(e) nœuds, les fonctions de forme doivent donc vérifier
Nk (a(`) ) = δk` (1 ≤ k, ` ≤ N(e) ) (2.10)
Notion de maillage conforme. Deux éléments contigus décrits par des représentations (2.8)
doivent se raccorder sans recouvrement ni « trou » (figure 2.6). Pour ce faire,
• la position d’un point x situé sur une face (respectivement une arête) de E ne doit
dépendre que des nœuds x(k) situés sur la même face (respectivement la même arête).
Cette exigence est réalisée si chaque fonction Nk (a) s’annule non seulement aux nœuds x(`)
(` 6= k) comme le prévoit (2.10), mais également sur toute face et toute arête de E ne contenant
pas le nœud x(k) .
Si cette condition est remplie pour les fonctions d’interpolation, il faut alors aussi que
(i) Les traces des fonctions de forme sur l’interface commune soient égales ;
(ii) Deux éléments contigus partagent les mêmes nœuds sur leur interface commune.
On parle alors de maillage conforme. Le domaine approché Ωh construit par assemblage con-
forme d’éléments finis ne présente alors ni trou ni recouvrement aux interfaces d’éléments
Quelques exemples d’éléments finis et de fonctions de forme, pour des problèmes plans ou
tridimensionnels, satisfaisant aux exigences ci-dessus sont présentés au tableau 2.1, page 32.
2 2 2
1 1 1
Figure 2.6: Raccord conforme (gauche) ou non conforme (milieu et droite) de deux élements.
2.2. Le concept d’élément fini isoparamétrique 31
a2 a2
2 7 N8 = 0
4 3
N4 = 0
N8 = 0
4 a1
5
8 6
3 1 a1
1 2
6 N4 = 0 5 N8 = 0
Figure 2.7: Nulllité de la fonction de forme Nk (a) sur toute face et toute arête ne contenant pas le nœud
x(k) (à gauche : k = 4 pour le triangle à 6 nœuds, à droite : k = 8 pour le quadrangle à 8 nœuds).
Exemple : raccord conforme d’un triangle à six nœuds et d’un quadrilatère à huit nœuds. Con-
sidérons le maillage de la figure 2.8, constitué d’un triangle à six nœuds et d’un quadrilatère à
huit nœuds. Les côtés d’éléments pour lesquels les nœuds ne sont pas alignés sont curvilignes.
y=10
(nœud 1) 0 0 11
10 8
(nœud 2) 3 0
(nœud 3) 6 1
9 2
(nœud 4) 8 3 y=5
7 5
(nœud 5) 10 5
6 1
(nœud 6) 0 3 4
(nœud 7) 4 4
3
(nœud 8) 8,5 7,5 1 2 x=5 x=10
(nœud 9) 0 6
(nœud 10) 3 8 N(e) nœuds
(nœud 11) 6 9 (élément 1) 6 3 9 1 7 6 2 × ×
(élément 2) 8 3 5 11 9 4 8 10 7
COOR CONNEC
Figure 2.8: Maillage constitué d’un triangle à six nœuds et d’un quadrilatère à huit nœuds ; tables de coor-
données (le maillage étant plan, chaque nœud a deux coordonnées) et de connectivité associées.
dans lesquelles les cordonnées paramétriques (a1 , a2 ) sont relatives à chaque élément et par-
courent le triangle unité ∆1 et le carré unité ∆2 , respectivement, comme représenté sur la fi-
32 C HAPITRE 2. L A NOTION D ’ ÉL ÉMENT FINI ISOPARAM ÉTRIQUE
N1 (a1 , a2 ) = a1 (2a1 − 1)
2 N2 (a1 , a2 ) = a2 (2a2 − 1)
4
N3 (a1 , a2 ) = (1 − a1 − a2 )(1 − 2a1 − 2a2 )
5 2 2
N4 (a1 , a2 ) = 4a1 a2
3 6 1 N5 (a1 , a2 ) = 4a2 (1 − a1 − a2 )
N6 (a1 , a2 ) = 4a1 (1 − a1 − a2 )
1
4 3 N1 (a1 , a2 ) = (a − 1)(a2 − 1)
4 1
1
N3 (a1 , a2 ) = (a + 1)(a2 + 1)
4 1
1 2 1
N2 (a1 , a2 ) = (a + 1)(a2 − 1)
4 1
1
1 2 N4 (a1 , a2 ) = (a − 1)(a2 + 1)
4 1
1
N1 (a1 , a2 ) = 4
(1 − a1 )(1 − a2 )(−1 − a1 − a2 )
1
N2 (a1 , a2 ) = 4
(1 + a1 )(1 − a2 )(−1 + a1 − a2 )
1
4 7 3 N3 (a1 , a2 ) = 4
(1 + a1 )(1 + a2 )(−1 + a1 + a2 )
1
N4 (a1 , a2 ) = 4
(1 − a1 )(1 + a2 )(−1 − a1 + a2 )
8 6 2 3 1
N5 (a1 , a2 ) = 2
(1 − a21 )(1 − a2 )
1
1 5 2 N6 (a1 , a2 ) = 2
(1 − a22 )(1 + a1 )
1
N7 (a1 , a2 ) = 2
(1 − a21 )(1 + a2 )
1
N8 (a1 , a2 ) = 2
(1 − a22 )(1 − a1 )
3 N1 (a1 , a2 , a3 ) = a1
N2 (a1 , a2 , a3 ) = a2
2
1 1
4
N3 (a1 , a2 , a3 ) = a3
1
N4 (a1 , a2 , a3 ) = 1 − a1 − a2 − a3
1
N1 (a1 , a2 , a3 ) = (a − 1)(a2 − 1)(a3 − 1)
8 1
1
N2 (a1 , a2 , a3 ) = (a + 1)(a2 − 1)(a3 − 1)
8 1
1
5 6 N3 (a1 , a2 , a3 ) = (a + 1)(a2 + 1)(a3 − 1)
8 1
1
8 7 N4 (a1 , a2 , a3 ) = (a − 1)(a2 + 1)(a3 − 1)
8 1
1 3 1
1 4
N5 (a1 , a2 , a3 ) = (a − 1)(a2 − 1)(a3 + 1)
8 1
1
2 3 N6 (a1 , a2 , a3 ) = (a − 1)(a2 + 1)(a3 + 1)
8 1
1
N7 (a1 , a2 , a3 ) = (a + 1)(a2 + 1)(a3 + 1)
8 1
1
N8 (a1 , a2 , a3 ) = (a + 1)(a2 − 1)(a3 + 1)
8 1
gure 2.9. On note que la convention de numérotation locale des nœuds sur les éléments doit être
cohérente avec les indices des fonctions de forme de (2.11).
a2 a2
2 (+1) 7
(+1) 4 3
4 (−1) (+1) a1
5
8 6
(∆1) (∆2)
3 1 a1
(0,0) (+1)
1 (−1) 5 2
6
Figure 2.9: Triangle à six nœuds et quadrilatère à huit nœuds : domaines paramétriques (éléments de
référence) ∆1 et ∆2 , conventions de numérotation des nœuds.
Examinons de plus près la façon dont les deux éléments se raccordent selon leur côté com-
mun. Pour cela, il faut examiner la restriction des fonctions de forme (2.11) au côté com-
mun. Compte tenu de la numérotation globale des nœuds (figure 2.8) et des conventions de
numérotation locale sous-jacentes à (2.11), le côté partagé par les deux éléments correspond
aux droites définies respectivement par 1 − a1 − a2 = 0 sur l’élément de référence ∆1 (tri-
angle) et a1 + 1 = 0 sur l’élément de référence ∆2 (quadrangle). On peut représenter ces
deux
droites en termes d’une même coordonnée paramétrique b ∈ [−1, 1] en posant (a1 , a2 ) =
(1 − b)/2, (1 + b)/2 (∆1 , segment {1, 4, 2}) et (a1 , a2 ) = (−1, b) (∆2 , segment {1, 8, 4}),
comme indiqué sur la figure 2.10. La restriction des fonctions de forme (2.9) est :
N̂1 (b) = b(b − 1)/2 , N̂4 (a) = 1 − b2 , N̂2 (b) = b(b + 1)/2 , autres = 0 (∆1 )
N̂1 (b) = b(b − 1)/2 , N̂8 (b) = 1 − b2 , N̂4 (b) = b(b + 1)/2 , autres = 0 (∆2 )
Les restrictions sur le bord commun des fonctions de forme associées aux nœuds partagés par les
deux éléments raccordés sont donc égales. Par conséquent, la représentation paramétrique des
points de ce bord en termes des nœuds partagés et des fonctions de forme unidimensionnelles
N̂k (b) ci-dessus coincide, et les bords se raccordent exactement.
Régularité de la représentation paramétrique. Une fois les critères énoncés ci-dessus sur la
construction des fonctions de forme remplis, d’autres conditions apparaissent. En particulier,
le paramétrage (2.8) doit réaliser une bijection entre ∆ et son image E (en d’autres termes,
a2 a2
b
b 7
2 (b=1) (b=1) 4 3
4 (b=0) a1
5
(b=0) 8 6
3 1 (b=−1)
a1 (b=−1)1 2
6 5
N4 (a1 , a2 ) = 4a1 a2 (gauche)
1 2
N8 (a1 , a2 ) = 2 (1 − a2 )(1 − a1 ) (droite)
Figure 2.10: Triangle à six nœuds et quadrilatère à huit nœuds : description paramétrique des côtés selon
lesquels les éléments du maillage de la figure 2.8 se raccordent.
34 C HAPITRE 2. L A NOTION D ’ ÉL ÉMENT FINI ISOPARAM ÉTRIQUE
tout point x ∈ E doit avoir un seul antécédent a ∈ ∆). Pour traduire mathématiquement cette
condition, on définit la matrice jacobienne J et le jacobien J du paramétrage (2.8) :
∂xi
J(a) = J(a) = DetJ (2.12)
∂aj 1≤i,j≤D
La correspondance (2.8) est alors bijective si J(a), continu, ne s’annule en aucun point a ∈ ∆.
La formule ci-dessus montrant que les coefficients de J(a) sont des fonctions continues de a, le
jacobien J(a) est également continu et possède alors nécessairement un signe constant sur ∆.
Si on considère un type fixé d’élément (les fonctions de forme étant donc choisies a priori),
la condition de non-nullité du jacobien sur ∆ est donc une condition qui restreint le choix
des nœuds x(k) . Pour beaucoup de types d’éléments, elle n’est de fait pas vérifiée pour toute
combinaison de nœuds. Exceptions notables, les éléments les plus simples (triangle à 3 nœuds,
tétraèdre à 4 nœuds) ont un jacobien constant, proportionnel à la mesure (aire ou volume) de
l’élément et ne sont donc pas sujets à ces difficultés (il faut simplement éviter les cas dégénérés :
trois sommets alignés ou quatre sommets coplanaires).
Si le jacobien s’annule sur ∆, la correspondance (2.8) est « pathologique » : par exemple,
l’élément présente une auto-pénétration ou un recouvrement. En pratique, la nullité d’un jaco-
bien signale souvent une déficience du maillage (par exemple éléments exagérément distordus)
ou une erreur dans les données le définissant (par exemple une interversion de deux nœuds).
La correspondance (2.8) peut être interprétée comme une représentation lagrangienne abs-
traite d’un élément de matière déformé (Salencon, 2004). Dans ce cadre, la condition sur J(a)
est aussi celle qui garantit qu’une telle représentation décrit un milieu continu.
1 2 3 0.75
α=1/8
α=1/4
0.25 α=3/8
α=1/2
α=5/8
α=3/4
0 α=7/8
-1 -0.5 0 0.5 1
b
Figure 2.11: Interpolation de trois nœuds alignés (le jacobien J(b) est positif pour α = 3/8, 1/2, 5/8).
2.2. Le concept d’élément fini isoparamétrique 35
Il est immédiat de vérifier que J(b) ne conserve un signe (positif) constant sur ∆ = [−1, 1] que
pour 1/4 < α < 3/4. Pour les autres valeurs de α, J(b) change de signe sur ∆, et le segment
image de ∆ par le paramétrage (2.13) est alors plus grand que E (par exemple, α = 1/8 donne
x ∈ [−25/24, 1], voir figure 2.11), et les abscisses x situées hors de E sont atteintes deux fois.
Nk (a)v (k)
X
v h (x) = pour tout x ∈ E défini par (2.8) (2.16)
k=1
Le terme « isoparamétrique » fait ainsi référence au fait que les mêmes fonctions de forme, ou
d’interpolation, sont utilisées pour représenter la géométrie et les inconnues.
Il est commode, en termes de programmation, de disposer l’ensemble des valeurs nodales
associées à l’élément E (e) dans un « vecteur » {Ve } selon la convention
(e) (1) (1) (N(e) ) T
{Ve } = {v 1 , . . . , v N }T = {v1 , v2 , . . . , vD } (2.17)
La formule (2.16) d’interpolation isoparamétrique prend alors la forme équivalente
v h (x) = [N (a)]{Ve } pour tout x ∈ E défini par (2.8) (2.18)
ayant disposé les fonctions de forme dans la matrice [N (a)] à D lignes et D×N(e) colonnes :
N1 (a) 0 0 NN(e) (a) 0 0
[N (a)] = 0
N1 (a) 0 ... 0 NN(e) (a) 0 (si D = 3)
0 0 N1 (a) 0 0 NN(e) (a)
Le mode de représentation (2.16) du déplacement introduit de nouvelles contraintes sur les
fonctions de forme Nk (a) possibles. Celles-ci découlent d’une condition nécessaire de conver-
gence, que l’on peut intuitivement formuler comme suit. Considérons une suite de maillages de
plus en plus fins, c’est-à-dire composés de nombres de plus en plus grands d’éléments finis et
conçus de façon à ce que le diamètre maximal h d’un élément décroisse. On s’attend alors à ce
que, sur le maillage le plus fin, le champ de déplacement diffère peu, sur chaque élément, de
son développement local de Taylor à l’ordre 1. Les déformations et les contraintes de la solu-
tion exacte deviennent à peu près constantes sur chaque élément. Il est alors important que les
interpolations isoparamétriques puissent au minimum représenter correctement toutes les pos-
sibilités de variations spatialement constantes ou linéaires du champ de déplacement approché,
qui correspondent à des déformations nulles (mouvements rigides) ou constantes.
Considérons un champ de déplacement v(x) qui soit fonction affine des coordonnées :
v(x) = A.x + b
où A est une matrice D × D constante et b un D-vecteur constant. Les valeurs nodales de ce
36 C HAPITRE 2. L A NOTION D ’ ÉL ÉMENT FINI ISOPARAM ÉTRIQUE
Désignant par Ω(n) la région formée par la réunion des éléments finis contenant le nœud x(n) ,
les fonctions de forme globales Ñn (x) apparaissant dans (2.21) sont alors telles que
(a) Le support de Ñn (x) est Ω(n) ; en d’autres termes, Ñn (x) = 0 pour x ∈6 Ω(n) .
(b) Si E (e) ⊂ Ω(n) , alors Ñn (x) = Nk (a) avec n = CONNEC(e, k) et x, a reliés par (2.8).
Les fonction de forme globales vérifient en particulier, comme conséquence de (2.20)
NN
X
Ñn (x) = 1 (x ∈ Ωh )
n=1
Prise en compte des déplacements imposés. La représentation (2.21) consiste en une som-
mation sur tous les nœuds du maillage et ne fait pas la distinction entre déplacements nodaux
inconnus ou donnés à partir de conditions aux limites du type (1.4). Pour pouvoir opérer et
systématiser cette distinction, introduisons une partition des numéros de nœuds :
{1, . . . , NN } = D ∪ I D = {n | x(n) ∈ Sξ } , I = {1, . . . , NN } \ D (2.22)
La représentation (2.21) est alors mise sous la forme
(D)
v h (x) = v h (x) + uh (x) (x ∈ Ωh ) (2.23)
2.2. Le concept d’élément fini isoparamétrique 37
avec
(D)
Ñn (x)ξ D (x(n) ) ∈ Ch (ξ D )
X
v h (x) =
n∈D
(2.24)
Ñn (x)un
X
uh (x) = ∈ Ch (0)
n∈I
D
où Ch (ξ ) et Ch (0) désignent les ensembles de déplacements cinématiquement admissibles (res-
pectivement à la donnée ξ D et à zéro) au sens de la discrétisation éléments finis. La représenta-
tion (2.23)–(2.24) est une forme particulière de représentation de Galerkin (1.42), avec
(n)
ϕI (x) = Ñn (x)ej et αI = uj avec I = DOF(j, n) (2.25)
où la notation DOF (acronyme anglo-saxon d’usage fréquent pour degree of freedom, soit « de-
gré de liberté ») se rapporte à la table des inconnues, telle que l’inconnue correspondant au
déplacement du nœud n dans la direction j ait le numéro DOF(j, n). Cette table des inconnues
permet en particulier de tenir compte des nœuds supportant des déplacements imposés, par
exemple en attribuant par convention le numéro d’inconnue « 0 » à toute composante imposée
par les conditions aux limites.
Exemple. Reprenons le maillage de la figure 2.8 (page 31), sous l’hypothèse de la déformation
plane, et supposons par ailleurs le déplacement imposé sur le côté constitué des nœuds 5, 8, 11.
Les ensembles D et I définis par (2.22) sont donc
D = {5, 8, 11} , I = {1, 2, 3, 4, 6, 7, 9, 10}
et la table des inconnues est (chaque colonne correspondant à un nœud du maillage)
1 3 5 7 0 9 11 0 13 15 0 (j = 1)
DOF =
2 4 6 8 0 10 12 0 14 16 0 (j = 2)
Reportant les deux différentielles dans (2.26) et égalant les deux membres pour tout choix de
da, on obtient l’expression du gradient de v h en termes des cordonnées paramétriques :
∇v h (x) = H(a).J −1 (a) , x et a reliés par (2.8) (2.27)
Cette relation entraı̂ne immédiatement
2ε[v h ](x) = H(a).J −1 (a) + J −T (a).H T (a) (2.28)
38 C HAPITRE 2. L A NOTION D ’ ÉL ÉMENT FINI ISOPARAM ÉTRIQUE
Pour les besoins de la programmation, il est commode de mettre cette expression sous la forme
n o
ε[v h ](x) = [Be (a)]{Ve } (2.29)
où le « vecteur » {Ve } rassemble l’ensemble n des déplacements
o nodaux de l’élément considéré
selon la convention (2.17), le « vecteur » ε[v h ](x) rassemble les six composantes indépen-
dantes de ε[v h ](x) selon la convention (2.30) décrite ci-après, dite « notation ingénieur » ou
« notation de Voigt », et [Be (a)] est une matrice comportant 6 lignes et N(e) × D colonnes,
fonction des coordonnées paramétriques a ∈ ∆, obtenue par identification. Par exemple, pour
le cas de l’élément triangulaire plan (déformations planes), la matrice [Be (a)], constante sur
chaque triangle, est celle reliant les déformations aux déplacements nodaux dans (2.6).
0 0 0 0 0 µ
Bien entendu, les représentations telles que (2.30) doivent être adaptées au contexte. Par exem-
ple, en déformations planes, les déformations et contraintes seront représentés sous forme de
« vecteurs » à trois composantes.
2.3 Conclusion
Les notions liées à l’interpolation isoparamétrique développées dans ce chapitre constituent
une fondation, sur laquelle s’appuie la construction de problèmes mécaniques approchés par
mise en œuvre de la méthode de Galerkin. Elles permettent un traitement systématique de cette
construction, accommodant la diversité et la complexité des configurations géométriques dans
un cadre unifié. A ce titre, elles constituent une fondation adéquate pour le développement
d’outils logiciels de simulation possédant le haut degré de généralité et de flexibilité requis par
l’immense variété des applications industrielles.
Chapitre 3
(D) 1 (D)
P(v h ) = P(uh + v h ) = {U}T [K]{U} − {U}T {F} + P(v h ) = P ({U}) (3.1)
2
le « vecteur » {U} rassemblant tous les déplacements nodaux inconnus, c’est-à-dire appa-
raissant dans la définition (2.24) de uh . On notera par N le nombre effectif d’inconnues du
problème, c’est-à-dire la taille de {U}.
En pratique, on ne calcule pas la matrice de rigidité [K] et le vecteur des forces nodales {F}
directement par des formules telles que (1.45) et (3.11), qui demanderaient de former expli-
citement les fonctions de forme globales Ñn (x). Il est beaucoup plus commode de traiter ces
calculs élément par élément et recourir à un procédé d’assemblage.
Cette approche repose sur le fait que l’énergie potentielle P(v h ) s’exprime en termes d’inté-
grales sur Ω et sur (une partie de) sa frontière, et sont donc additifs par rapport aux éléments
39
40 C HAPITRE 3. L A M ÉTHODE DES ÉL ÉMENTS FINIS EN ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
finis. La forme développée de P(v h ) pour v h défini par (2.23)–(2.24) est en effet
E Z N E Z N E Z N
1X
T D .v h dS
X X
P(v h ) = ε[v ] : A : ε[v h ] dV − f .v h dV −
2 e=1 E (e) h e=1 E (e)
e=1 TΓ (e)
N
E Z
1X
= ε[uh ] : A : ε[uh ] dV
2 e=1 E (e)
NE Z Z Z
X D (D) (D)
+ − f .uh dV − T .uh dS + ε[v h ] : A : ε[uh ] dV + P(v h )
e=1 E (e) ΓT (e) E (e)
où ΓT (e) = ∂E (e) ∩ ST désigne la portion de la frontière de l’élément E (e) située sur ST (celle-ci
est vide pour un grand nombre d’éléments). En termes de l’écriture matricielle (3.1), on a ainsi
NE Z
T
X
{U} [K]{U} = ε[uh ] : A : ε[uh ] dV (3.2)
(e)
e=1 E
NE Z NE Z NE Z
T
X X D
X (D)
{U} {F} = f .uh dV + T .uh dS − ε[v h ] : A : ε[uh ] dV (3.3)
e=1 E (e) e=1 ΓT (e) e=1 E (e)
La minimisation de l’énergie potentielle sur l’espace de dimension finie engendré par les élé-
ments finis isoparamétriques conduit alors, par analogie à (1.47), au système d’équations
[K]{U} = {F} (3.4)
Les expressions (3.2) et (3.3) suggèrent que le calcul effectif de la matrice de rigidité [K]
et du second membre {F} pourra être effectué à l’aide d’une procédure consistant à (i) évaluer
des intégrales sur des éléments et des portions de frontières d’éléments, puis (ii) reporter ces
contributions dans des matrices et vecteurs associés aux valeurs nodales de l’ensemble du
maillage. Ces deux types d’opérations sont détaillées dans les sections 3.2 (calcul de matrices
élémentaires) et 3.3 (assemblage du modèle du solide complet).
ce qui conduit, par identification avec (3.2), (3.3), à retrouver le système linéaire (3.4).
De nombreuses formules d’intégration approchée de cette forme sont connues, et une présenta-
tion un peu plus détaillée est proposée en section 3.2.3. La matrice de rigidité élémentaire est
alors évaluée de façon approchée par une formule de la forme
n
wg [Be (ag )]T [A][Be (ag )]Je (ag )
X
[Ke ] ≈ (3.9)
g=1
C’est en particulier ici qu’apparaı̂t l’avantage d’avoir introduit une représentation paramétri-
que de la géométrie et du déplacement. En effet, les intégrations nécessaires au calcul des contri-
butions élémentaires au système linéaire (3.4) sont ainsi traitées de manière très systématique,
par transformation en intégrales sur un petit nombre de domaines simples (carrés, triangles,
cubes,...) et de dimensions « normalisées » Ċe point joue un rôle important dans le haut degré
de flexibilité et de généralité permis par la méthode des éléménts finis.
Il est important de noter que ces « forces nodales » ne sont pas en général des forces à stric-
tement parler, mais des efforts généralisés associés par dualité aux déplacements nodaux, de
sorte que (par exemple) le produit {U̇e }T {Fvol
e } donne la puissance des efforts de volume dans
le champ de déplacement défini par interpolation de {Ue }.
1
Pour un élément fini volumique général, l’intégrand de (3.6) est un quotient de polynômes en (a1 , a2 , a3 ).
42 C HAPITRE 3. L A M ÉTHODE DES ÉL ÉMENTS FINIS EN ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
En pratique, {Fξe } ne doit être calculée que si l’un au moins des nœuds de E (e) est situé sur
Sξ (éléments en grisé foncé sur la figure 2.4b). D’autre part, la contribution de [Ke ] à [K] est
réduite à la sous-matrice [KIIe ].
Forces de volume. Le champ uh étant de la forme (2.18), l’intégrale sur E (e) s’écrit, par pas-
sage sur l’élément de référence ∆e :
Z Z n o
T T
f .uh dV = {Ue } [N (a)] f (x(a)) Je (a) dV (a) = {Ue }T {Fvol
e }
E (e) ∆(e)
et {Fvol
e } est en pratique évalué à l’aide d’une intégration approchée par points de Gauss (3.8).
Forces de surface. La surface ΓT (e) est une frontière d’élément. Comme conséquence de l’exi-
gence de conformité sur la construction des fonctions de forme (section 2.2.2), la surface ΓT (e)
admet un paramétrage de la forme
N̂k (b)x(k)
X
x= (b ∈ Σ)
x(k) ∈ΓT (e)
où la sommation est restreinte aux nœuds situés sur ΓT (e), les fonctions de forme N̂k (b) pro-
viennent des restrictions au bord des fonctions de forme Nk (a) de l’élément E (e) , et les coor-
données paramétriques (b1 , b2 ) parcourent une surface de référence. Par exemple, si E (e) est un
cube à huit nœuds (tableau 2.1, page 32) et ΓT (e) correspond à la face définie par les nœuds
(1, 2, 8, 5), on peut prendre (b1 , b2 ) = (a1 , a3 ) et N̂k (b1 , b2 ) = Nk (a1 , −1, a3 ) (k = 1, 2, 5, 8).
La géométrie différentielle des surfaces permet alors d’écrire
∂ N̂k X ∂ N̂k
X
n dS(b) = (b)x(k) ∧ (b)x(k) db1 db2 = Ĵ(b) db1 db2 (3.12)
k ∂b 1 k ∂b 2
ˆ
dS(b) = kĴ(b)k db1 db2 = J(b) db1 db2 (3.13)
où n est la normale unitaire à la surface ΓT (e). L’intégrale de surface s’écrit alors
Z Z n o
T D .uh dS = {Ue }T ˆ db1 db2 = {Ue }{Fsurf
[N (b)]T T D (x(b)) J(b) e }
ΓT (e) Σ
Dans le cas où les efforts imposés prennent la forme d’une pression (T D = −pn), les forces
nodales élémentaires sont calculées par
Z n o
{Fsurf
e } = p(x(b))[N (b)] T
Ĵ(b) db1 db2
Σ
avec le jacobien vectoriel Ĵ défini par (3.12), qui est une fonction polynômiale de b.
en termes de G points de Gauss ag tels que −1 < ag < 1 et poids wg > 0. Pour tout entier G,
il existe une unique famille de points et poids définissant une telle formule. Toute intégrale sur
un intervalle borné se ramène à la forme (3.14) par un changement de variable affine.
Les formules d’intégration approchée du type (3.14) sont connues pour être très précises,
même pour des petites valeurs de G, quand elles sont appliquées à des fonctions f très régulières
(c’est le cas pour les intégrales élémentaires). Un résultat plus précis, et remarquable, est :
• La formule d’intégration approchée de type gaussien (3.14) à G points est exacte si f (a)
est un polynôme quelconque de degré ≤ 2G − 1.
Les points et poids de Gauss vérifient pour toute valeur de G certaines propriétés :
(i) Les points de Gauss sont toujours intérieurs au segment : −1 < ag < 1 ;
(ii) Les points de Gauss sont disposés symétriquement par rapport à l’origine, avec des
poids identiques : si ag est un point de poids wg , il existe g 0 tel que ag0 = −ag et wg0 = wg ;
(iii) Les poids sont strictement positifs, et de somme égale à 2 (nécessaire pour intégrer
correctement la constante f = 1).
Par exemple, la formule d’intégration approchée pour G = 2 est définie par
Z 1 √ √
f (a) da ≈ f (−1/ 3) + f (1/ 3)
−1
Il est facile de vérifier directement que l’intégration de tout polynôme de degré ≤ 3 par cette
formule est exacte. D’autres jeux de points et poids de Gauss sont donnés en annexe A.1.
Intégrales sur des carrés ou des cubes. Il est très facile de définir des formules d’intégration
numériques sur un D-cube. Le cube unité en dimension D est en effet le produit cartésien
de segments, et on construit ainsi selon ce principe des « formules-produit », en dimension
quelconque. Pour les besoins de ce cours, on peut ainsi évaluer par la formule
Z G X
X G
f (a1 , a2 ) da1 da2 ≈ wg1 wg2 f (ag1 , ag2 ) (3.15)
C2 g1 =1 g2 =1
une intégrale sur le cube unité C 3 = {−1 ≤ a1 , a2 , a3 ≤ 1}, les nombres agi et poids wgi étant
associés à une formule d’intégration unidimensionnelle (3.14).
Intégrales sur des triangles ou tétraèdres. Les triangles en dimension 2, les tétraèdres en
dimension 3, et plus généralement les simplexes en dimension quelconque, ne pouvant être
44 C HAPITRE 3. L A M ÉTHODE DES ÉL ÉMENTS FINIS EN ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
naturellement être représentés comme produits cartésiens de segments, les intégrales sur des
domaines de ce type sont évaluées par des formules spécifiques. Par exemple :
Z G
X
f (a) da1 da2 ≈ wg f (ag ) (3.17)
T2 g=1
Discussion. Il est assez naturel d’utiliser les méthodes d’intégration numérique par points de
Gauss dans la mise en œuvre des éléments finis car les intégrales élémentaires font intervenir
des expressions polynômiales (fonctions de forme et leurs dérivées). Les fonctions à intégrer
ne se réduisent toutefois pas en général à des polynômes en raison de la présence de J −1 ,
l’inverse du jacobien de l’interpolation isoparamétrique (noter que J est polynômial en a). Les
contributions polynômiales permettent cependant de fixer une limite inférieure au nombre de
points de Gauss nécessaires à une évaluation précise des intégrales élémentaires, sachant qu’on
cherche par ailleurs, pour des raisons évidentes d’efficacité numérique, à utiliser aussi peu que
possible de points de Gauss dans les formules d’intégration numérique.
Ces formules sont par ailleurs d’une mise en œuvre pratique très simple. Leur emploi
systématique confère un rôle important aux points de l’élément physique images des points de
Gauss par l’interpolation isoparamétrique (également appelés points de Gauss pour simplifier) :
N(e)
Nk (ag )x(k)
X
xg = (3.18)
k=1
En effet, la formation des matrices [Be (ag )] associées à la relation entre déplacements nodaux
et déformation sur l’élément est nécessaire aux points de Gauss, afin d’évaluer les matrices de
rigidité élémentaires par la formule (3.9). Pour optimiser les calculs numériques, il est donc
habituel de stocker ces matrices [Be (ag )] afin d’effectuer le post-traitement de la solution ap-
prochée (calcul des déformations et des contraintes) aux points de Gauss (section 3.4.5). Des
considérations similaires valent également pour les algorithmes prenant en compte des modèles
de comportement non-linéaires (chapitres 6 et 7).
3.3 Assemblage
3.3.1 Assemblage de la matrice de rigidité
L’opération d’assemblage de la matrice de rigidité revient formellement à exploiter la rela-
tion NE
T
{Ue }T [KIIe ]{Ue }
X
{U} [K]{U} = (3.19)
e=1
entre la matrice de rigidité globale et les matrices de rigidité élémentaires [KIIe ] réduites aux
valeurs nodales inconnues sur les éléments, résultant de la combinaison de (3.2), (3.7) et (3.10).
3.3. Assemblage 45
Cette relation ne peut toutefois pas être appliquée directement. En effet, chaque matrice
élémentaire [Ke ], une fois calculée selon le procédé décrit dans la section précédente, est définie
par référence à la numérotation locale de l’élément E (e) , tandis que la matrice globale [K] est
bien sûr définie en termes de la numérotation globale. Pour prendre en compte correctement
la contribution de [Ke ] à [K], il faut donc savoir à quels numéros globaux d’inconnues corres-
pondent les numéros locaux associés à l’élément E (e) . Ainsi, le calcul et l’assemblage de [K]
fonctionne schématiquement selon le principe suivant :
En pratique, la boucle d’assemblage ci-dessus est susceptible de ne porter que sur une faible
proportion des éléments finis du maillage. Par exemple :
(a) Si les sollicitations consistent uniquement en des déplacements imposés, seuls les élé-
ments dont au moins un nœud est situé sur Sξ sont concernés, et les coefficients non nuls
de {F} correspondent aux degrés de liberté portés par ces éléments.
(b) Si les sollicitations consistent uniquement en des efforts imposés sur la surface, seuls
les éléments dont un bord est situé sur ST sont concernés, et les coefficients non nuls de
{F} correspondent aux degrés de liberté associés aux nœuds situés sur ST .
Des forces nodales peuvent être définies pour d’autres types de sollicitations : déformations
initiales (d’origine thermique, plastique,...), précontraintes,...
La matrice [K] est creuse. Une conséquence essentielle de la discrétisation par éléments finis
est que [K] est creuse, c’est-à-dire présente un grand nombre de coefficients nuls. En effet, si I et
J désignent des numéros globaux de degrés de liberté, on peut formellement écrire le coefficient
KIJ en termes de la représentation globale par fonctions de forme (2.21)
Z
KIJ = ε[Ñm (x)ei ] : A : ε[Ñn (x)ej ] dV (x) (I = DOF (i, m), J= DOF (j, n))
Ω(m) ∩Ω(n)
où Ω(m) et Ω(n) sont les supports géométriques des fonctions de forme globales Ñn (x) et Ñm (x).
Or on a vu (section 2.2.4) que chaque Ω(m) est l’ensemble des éléments finis contenant le noeud
x(m) . Par conséquent, KIJ n’est non nul que si les noeuds x(m) et x(n) appartiennent au même
élément fini (figure 3.1). De façon équivalente, cette propriété peut également être vue comme
conséquence du fait que [K] résulte de l’assemblage des matrices élémentaires [Ke ], chacune ne
contenant que des coefficients associés à des paires de noeuds situés sur le même élément.
Le nombre de termes non nuls sur une ligne (ou une colonne) de [K] ne dépend que de
la configuration locale des éléments finis adjacents au noeud support de l’inconnue correspon-
dante, et est donc indépendant de la finesse du maillage (c’est-à-dire du nombre d’éléments finis
utilisé pour représenter Ω). Cela entraı̂ne que plus un maillage est fin, plus [K] est creuse : la
proportion de coefficients non nuls diminue si on augmente la finesse du maillage.
(m)
Ω _(m)
x Ω
(n)
x(n)
_
(m) (n)
Ω
U
Ω
Figure 3.1: Intersection Ω(m) ∩ Ω(n) des supports des fonctions d’interpolation globales Ñm et Ñn as-
sociées aux nœuds x(m) et x(n) .
(avec cette définition, une matrice [K] diagonale a donc une demi-largeur de bande nulle). En
d’autres termes, tous les coefficients non nuls sont situés dans une bande (de largeur 2LB + 1)
disposée symétriquement par rapport à la diagonale. La demi-largeur de bande donne la plus
grande différence entre numéros d’inconnues appartenant au même élément. Pour des maillages
de finesse croissante, on observe que
LB /N → 0 (N → ∞)
En fait, la population de [K] (c’est-à-dire la disposition de ses coefficients non nuls) est telle
que la bande n’est pas remplie de façon uniforme. Pour toute colonne J de [K], définissons L(J)
(1 ≤ L(J) ≤ J) par
L(J) = min{I | KIJ 6= 0} (3.21)
On appelle profil la fonction L(J) ainsi associée à une matrice [K] donnée. La demi-largeur de
bande est reliée à la fonction profil par
LB = max J − L(J)
1≤J≤N
Les structures bande et profil sont illustrées en figure 3.2 pour un maillage très simple constitué
d’éléments triangulaires linéaires (10 nœuds, 10 éléments, une inconnue scalaire par nœud).
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
5 1
2
2 Terme non diagonal
9 3
Terme diagonal
4
5
1 4 7 10 6 Bande
7
Profil
8
3 9
6 8 10
J 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
LB = 4
L(J) 1 1 1 1 2 3 3 6 5 7
Figure 3.2: Exemple de maillage (à gauche), et population d’une matrice de rigidité construite sur ce
maillage, avec une inconnue scalaire par nœud (à droite) ; les symboles carrés indiquent les
coefficients non nuls de [K], et les zones de stockage bande et profil sont matérialisées.
où [D] est une matrice diagonale définie positive (c’est-à-dire DII > 0 pour tout I) et [L] est
une matrice triangulaire inférieure à diagonale unité (LII = 1 pour tout I). Une fois le système
linéaire (3.4) mis sous la forme
[L][D][L]T {U} = {F}
{U} est obtenu par résolution successives de deux systèmes triangulaires (donc très simples à
résoudre, en procédant de proche en proche) selon les étapes
[L]{Z} = {F} [L]T {U} = [D]−1 {Z}
où la symétrie de [K] permet de se restreindre à I ≤ J. On considère alors dans cet ordre les cas
J = 1, J = 2, . . . , J = N.
• J = 1 (initialisation) : la relation (a) donne D11 explicitement :
D11 = K11 (c)
• J = 2, . . . N : la relation (b) écrite pour chaque I (1 ≤ I ≤ J − 1) donne LJI :
I−1
1
X
LJI = KIJ − LIK LJK DKK (1 ≤ I ≤ J − 1) (d)
DII K=1
et permet ainsi de calculer, de proche en proche, les coefficients de la J-ième ligne de [L]
connaissant les J − 1 lignes précédentes et les J − 1 premiers termes de Diag([D]).
La relation (a) donne ensuite DJJ en fonction de quantités connues :
J−1
L2JK DKK
X
DJJ = KJJ − (e)
K=1
Cet algorithme réalise ainsi le calcul de tous les coefficients de [L] et Diag([D]).
stocker que N×(LB +1) coefficients environ, avec LB N si N est grand, cette évaluation
correspondant au stockage intégral de la demi-bande supérieure.
(c) Ce besoin de mémoire peut encore être réduit si on adopte un mode de stockage « pro-
fil », dit aussi « ligne de ciel », consistant à ne conserver en mémoire que les coefficients
de [K] situés dans la demi-bande supérieure et sous le profil L(J).
(d) Enfin, si le système [K]{U} = {F} est résolu par une méthode itérative, telles que
la méthode du gradient conjugué (section 3.4.4), seuls les coefficients non nuls de [K]
doivent être stockés. On utilise dans ce cas une convention de stockage adaptée aux ma-
trices creuses, par exemple le « stockage Morse ». Celle-ci consiste à stocker trois ta-
bleaux à une dimension :
n
1. Un tableau K de réels donnant KIJ 6= 0, 1 ≤ I ≤ N, L(I) ≤ J ≤ I} (la matrice [K]
est parcourue ligne par ligne, et pour chaque ligne I les coefficients non nuls situés
sur des colonnes de numéro ≤ I sont stockés selon J croissant) ;
2. Un tableau J d’entiers donnant le numéro de colonne J de chaque coefficient KIJ ,
dans l’ordre de leur stockage dans K ;
3. Un tableau I de N entiers tel que I(I) donne le numéro d’ordre dans K de KII
(dernier coefficient non nul stocké pour la ligne I).
Pour un maillage donné, la valeur de LB dépend de la numérotation des inconnues. Il est donc
possible, et désirable, de diminuer la demi-largeur de bande par renumérotation des nœuds au
moyen d’une permutation bien choisie de {1, . . . , NN }, par exemple au moyen de l’algorithme
proposé par Cuthill et McKee (1969).
Pour illustrer cette notion, la figure 3.3 présente la population de la matrice de rigidité as-
sociée à un maillage d’éprouvette entaillée (contraintes planes, 17150 éléments triangulaires
linéaires, 8762 noeuds) avant et après renumérotation des nœuds par l’algorithme de réduction
de largeur de bande symrcm de M ATLAB.
Figure 3.3: Haut : maillage d’éprouvette entaillée (élasticité plane, 17150 éléments triangulaires linéaires,
8762 noeuds). Bas : population de la matrice de rigidité construite sur ce maillage sous l’hy-
pothèse des contraintes planes, avant (gauche) et après (droite) renumérotation des nœuds par
l’algorithme de réduction de largeur de bande symrcm de M ATLAB. Sur cet exemple, la po-
pulation (proportion de coefficients non nuls) de [K] est ≈ 7, 9 10−4 , et on a LB /N ≈ 0.0137
après renumérotation.
déplacement peut donc être traité comme un problème d’optimisation. Concrètement, l’équation
matricielle [K]{U} = {F} peut être vue comme la condition d’annulation du gradient de la
forme discrétisée P ({U}) de l’énergie potentielle :
1
P ({U}) = {U}[K]{U} − {U}T {F} + P ({U(D) }) (3.23)
2
où le vecteur constant {U(D) } est associé à l’interpolation des déplacements imposés aux nœuds
situés sur Sξ . [K] étant définie positive, la solution de [K]{U} = {F} réalise le minimum de
P ({U}).
De façon générale, les méthodes itératives de résolution de systèmes linéaires consistent à
créer, à partir d’un choix initial {U(0) } arbitraire, une suite minimisante {U(k) } (k ≥ 0), et
reposent pour cela sur la possibilité de calculer les résidus
{R(k) } = {F} − [K]{U(k) } (k ≥ 0) (3.24)
Il n’est alors plus nécessaire de stocker [K], pour peu qu’on accepte de faire le calcul complet de
{R(k) } à chaque itération k (ça implique d’effectuer l’ensemble des intégrations élémentaires,
ainsi qu’une procédure d’assemblage, à chaque itération).
L’algorithme du gradient conjugué consiste à construire, à chaque itération, une « direction
de descente », c’est-à-dire un vecteur {D(k) } ∈ RN tel que
d (k)
P {U } + δ{D(k) } <0
dδ δ=0
de façon à garantir l’existence d’une valeur δ (k) > 0 de δ telle que P ({U(k) } + δ (k) {D(k) }) <
3.4. Le système d’équations discret et sa résolution numérique 51
P ({U(k) }). De plus, les directions {D(k) } ∈ RN sont K-conjuguées, c’est-à-dire orthogonales
entre elles au sens du produit scalaire associé à [K], de sorte que la suite de ces directions réalise
une exploration de directions successives linéairement indépendantes.
L’algorithme du gradient conjugué appliqué à l’énergie potentielle (3.23) est alors défini par
les étapes suivantes (où désigne une tolérance choisie a priori) :
1. Initialisation :
(i) Choix de {U(0) } ∈ RN (en pratique, {U(0) } = {0}) ;
(ii) Résidu initial : {R(0) } = {F} − [K]{U(0) } ;
(iii) Direction de descente initiale : {D(0) } = {R(0) } (gradient changé de signe).
2. Pour k = 1, 2, . . . et tant que k{R(k) }k > :
(i) Calcul de {Z(k) } = [K]{R(k−1) } ;
{D(k−1) }T {R(k−1) }
(ii) Calcul de δ (k) =
{D(k−1) }T {Z(k) }
(iii) Solution actualisée : {U(k) } = {U(k−1) } + δ (k) {D(k−1) } ;
(iv) Résidu actualisé : {R(k) } = {R(k−1) } + δ (k) {Z(k) } ;
(v) Test de convergence : si k{R(k) }k ≤ , poser {U} = {U(k) }, F IN ;
{R(k) }T {R(k) }
(vi) Calcul de β (k) = ;
{R(k−1) }T {R(k−1) }
(vii) Direction de descente actualisée : {D(k) } = {R(k) } + β (k) {D(k−1) } ;
(viii) Passer à l’itération suivante : k ← k + 1.
On remarque en particulier que chaque itération demande un seul produit matrice-vecteur, lors
du calcul de {Z(k) } = [K]{R(k−1) } à l’étape 2-(i)), les autres étapes ne demandant au pire que
des produits scalaires entre vecteurs. Pour les problèmes de grande taille, la plus grande partie
du temps de calcul nécessaire à une itération est donc consommée dans cette étape.
L’algorithme du gradient conjugué appliqué aux fonctions quadratiques de la forme (3.23)
possède une propriété remarquable :
• En arithmétique exacte (c’est-à-dire sans tenir compte des erreurs numériques d’ar-
rondi dues à la représentation tronquée des nombres en machine), l’algorithme ci-dessus
converge exactement (c’est-à-dire avec = 0) en N itérations au maximum.
Dans la pratique, on cherche plutôt à obtenir une convergence approchée (c’est-à-dire en termes
d’une tolérance faible mais non nulle) en un nombre d’itérations beaucoup plus petit que
le nombre d’inconnues (de l’ordre de la centaine pour N de l’ordre du million). Cette rapi-
dité de convergence est souvent conditionnée par un préconditionnement efficace du système
d’équations, opération qui formellement consiste à remplacer ce dernier par une forme modifiée
[P]T [K][P] {Y} = [P]T {F} avec [P]{Y} = {U}
où la matrice [P] est choisie de sorte que [P]T [K][P] soit plus proche de la matrice identité (en
un sens à préciser) que [K]. Un choix simple, mais déjà utile, pour le préconditionneur [P] est
PII = (KII )−1/2 , PIJ = 0 (I 6= J)
([K] étant définie positive, tous ses termes diagonaux sont strictement positifs) qui est en parti-
culier tel que, si [K] est diagonale, [P]T [K][P] = [I].
alors être évaluées aux points de Gauss de chaque élément par application directe de (2.29), soit
ε[ξ h ](xg ) = [Be (ag )]{Ue } aux points de Gauss de l’élément E (e)
où e et g parcourent les numéros d’éléments et de points de Gauss sur chaque élément, res-
pectivement. Les contraintes associées par la relation de comportement élastiques sont ensuite
obtenues par
σ(xg ) = [A][Be (ag )]{Ue } aux points de Gauss de l’élément E (e)
à l’aide de la matrice [A] des modules d’élasticité écrite en notation de Voigt (2.31). Le choix
d’effectuer ce post-traitement aux points de Gauss correspond, on l’a vu, au fait que le calcul de
[K] nécessite la formation de toutes les matrices [Be (ag )], que l’on a alors avantage à conserver.
Traitement complémentaire pour les tracés graphiques. Il est habituel de représenter des
résultats liés aux déformations ou contraintes sous forme graphiques, par exemple cartes d’iso-
valeurs. Le calcul de ces graphiques est plus commode si la quantité à tracer (par exemple le
champ σ11 (x)) est représentable par une fonction sur Ωh .
Le post-traitement « naturel » (et économique) donnant ces grandeurs en termes de valeurs
aux points de Gauss, on peut alors calculer, par une procédure numérique, le champ σ11 (x) (par
exemple) défini par une interpolation de valeurs nodales de la forme (2.16) qui soit « le plus
proche2 » des valeurs aux points de Gauss. C’est ce champ, obtenu par « extrapolation » des
valeurs aux points de Gauss, qui est alors représenté graphiquement.
Cette formulation fait apparaı̂tre une nouvelle inconnue, le vecteur contrainte T sur Sξ , qui
représente la distribution d’efforts apparaissant en réaction à l’application des déplacements
imposés. La construction du problème approché associé à (3.25) procède des choix suivants :
(a) La solution approchée en déplacement est cherchée dans l’espace Ch des déplacements
de la forme (2.21), c’est-à-dire
NN
Ñn (x)ξ (n) = [Ñ (x)]{U}
X
ξ h (x) =
n=1
(c) Le vecteur contrainte inconnu T et le « vecteur contrainte virtuel » T 0 sont définis par
dualité par rapport aux éléments de Ch , c’est-à-dire doivent être tels que les intégrales sur
Sξ dans (3.25) sont définies pour tout champ w ou ξ de Ch .
Elle est construite selon une procédure d’assemblage du même type que celle décrite en sec-
tion 3.3. La forme bilinéaire associée à l’énergie de déformation devient
Z
ε[ξ] : A : ε[w] dV = {W}T [K]{U} (3.26)
Ω
tandis que les intégrales sur Sξ se mettent sous la forme
Z Z Z
0
T
T .w dS = {W} [A]{T} , 0 T
ξ.T = {T } [A] {U} , T
ξ D .T 0 = {T0 }T {U(D) }
Sξ Sξ Sξ
(3.27)
en termes du « vecteur » {T} des forces nodales inconnues et de sa contrepartie virtuelle {T0 },
définis par
Z Z
TK = Ñm (x)Ti (x) dSx TK0 = Ñm (x)Ti0 (x) dSx (K = DOF(m, i)) (3.28)
Sξ Sξ
On note à nouveau que {T} et {T0 } sont définis par dualité, et donc sans qu’il soit nécessaire
d’introduire explicitement une représentation sur une base de fonctions. La matrice [A] rec-
tangulaire apparaı̂t suite à la nécessité d’exprimer les deux premières intégrales de (3.27) en
termes de {U} et {W}, définis sur le maillage entier, alors qu’elles ne portent a priori que sur
les valeurs aux nœuds situés sur Sξ .
Cette approche conduit à remplacer (3.4) par le système linéaire augmenté
" #( ) ( )
K −A U F
= (3.29)
−AT 0 T −U(D)
dans lequel la matrice de rigidité [K] est maintenant définie par référence à tous les déplacements
nodaux (sans distinction entre valeurs imposées ou non par les conditions aux limites). La
résolution de ce système fournit, en plus des déplacements nodaux, les forces nodales {T} as-
sociées aux efforts de liaison (réactions). Cette version est par exemple utile dans le traitement
du contact (chapitre 5).
Il est important de noter que la matrice du système (3.29) est inversible mais n’est pas
définie positive (en raison de la présence de zéros sur la diagonale). Les techniques de résolution
présentées en section 3.4 (factorisation LDLT , gradient conjugué) ne sont donc pas directement
applicables. De plus, la sous-matrice [K] de (3.29) n’est pas inversible, les mouvements de corps
rigide faisant partie de l’espace Ch .
Point de vue de la minimisation sous contraintes. Le système (3.29) peut aussi être obtenu à
partir du point de vue de la minimisation de l’énergie potentielle, traitée comme un problème
d’optimisation sous contraintes. La démarche générale (Bonnans, Gilbert, Lemaréchal et Sa-
gastizabal, 1997) consiste à incorporer les contraintes dans un lagrangien L(v, T ) associé à
l’énergie potentielle P(v) :
Z
L(v, T ) = P(v) + (v − ξ D ).T dS (v ∈ C, T ∈ C 0 (Sξ )) (3.30)
Sξ
Le champ T est ici un champ de multiplicateurs de Lagrange. L’écriture des conditions de sta-
tionnarité de L(v, T ) par rapport à des variations quelconques δv et δT de v et T redonne la for-
mulation faible (3.25), et donc (après discrétisation, assemblage, etc.) le système linéaire (3.29).
54 C HAPITRE 3. L A M ÉTHODE DES ÉL ÉMENTS FINIS EN ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
3.6 Convergence
La méthode des éléments finis appliquée au problème de l’équilibre en élasticité linéaire
permet de déterminer une solution approchée en déplacement ξ h pour un maillage donné, et
donc en particulier un choix de fonctions d’interpolation sur chaque élément. Une question
très importante est alors celle de la convergence de la solution approchée ξ h vers la solution
exacte ξ, ainsi que de la convergence des grandeurs dérivées : déformations, contraintes. L’ana-
lyse des propriétés de convergence des méthodes d’éléments finis fait ainsi l’objet d’études
mathématiques poussées (Ciarlet, 1980; Strang et Fix, 1973; Babuska et Strouboulis, 2001)
dont certains éléments sont traités dans le cours d’Analyse numérique et optimisation de Al-
laire (2004). On se contentera ici de mentionner quelques résultats.
Convergence du déplacement. Si les éléments finis permettent sur chaque élément une repré-
sentation exacte de tous les déplacements à variation polynômiale en x de degré inférieur ou égal
à p, alors cette représentation est susceptible de reproduire sur chaque élément le développement
de Taylor à l’ordre p de la solution exacte :
h i
ξ(x) = ξ(x0 ) + ∇ξ(x0 ).[x − x0 ] + ∇∇ξ(x0 ) : (x − x0 ) ⊗ (x − x0 )
L’erreur commise sur le déplacement est ainsi de l’ordre du reste de cette formule, soit, avec
kx−x0 k ≤ h :
kξ(x) − ξ h (x)k = O(hp+1 ) x ∈ Ee (3.31)
Il en découle que les erreurs sur les déformations, ainsi que sur les contraintes en élasticité
linéaire, sont telles que
Rappelons que tout élément fini doit permettre une représentation exacte de tous les champs
à variation affine en x (section 2.2.3). On a donc nécessairement p ≥ 1 dans les estimations
d’erreur (3.31) et (3.32).
On définit la norme en énergie d’un champ de déplacement u par
Z
kuk2E = 2W(u) = ε[u] : A : ε[u] dV (3.33)
Ω
(c’est en fait une semi-norme car pour tout w mouvement de corps rigide on a kwkE = 0 et
kukE = ku + wkE ). On montre alors les résultats de convergence suivants (Allaire, 2004) :
• Supposons que la solution exacte ξ soit de norme en énergie finie. Alors la méthode des
éléments finis converge :
kξ − ξ h kE → 0 (h → 0) (3.34)
• Supposons que la solution exacte ξ soit telle que toutes ses dérivées jusqu’à l’ordre p + 1
inclus soient de carré intégrable (on dit que la norme kξkH p+1 (Ω) est finie), avec p +
1 > D/2. Alors, pour des éléments finis permettant une représentation exacte sur chaque
élément des polynômes de degré inférieur ou égal à p, on a l’estimation d’erreur
55
56 C HAPITRE 4. A PPLICATION À LA M ÉCANIQUE LIN ÉAIRE DE LA RUPTURE
et cette discontinuité traduit l’ouverture de la fissure sous l’effet d’un chargement appliqué au
solide. On suppose le plus souvent que les deux lèvres de fissure sont libres de contrainte.
Ce chapitre n’abordant que le cas des déformations planes, une fissure F générale dans
ce contexte est représentée un arc de courbe dans le plan. Une fissure rectiligne dans ce plan,
représentée par un segment de droite, correspond ainsi à une fissure en forme de bande dans un
milieu tridimensionnel invariant par translation.
Modes d’ouverture. Sous l’effet d’une sollicitation externe, les lèvres de la fissure se déplacent
l’une par rapport à l’autre. Ce déplacement relatif peut se faire, selon la terminologie consacrée,
selon trois modes (figure 4.1) :
(i) Le mode I (mode d’ouverture) : le déplacement relatif est dans la direction normale à la
fissure ;
(ii) Le mode II (mode de cisaillement plan) : le déplacement relatif est tangent à la fissure
en restant dans le plan de référence ;
(iii) Le mode III (mode de cisaillement antiplan) : le déplacement relatif est tangent à la
fissure et perpendiculaire au plan de référence.
Dans le cadre des déformations planes, seuls les modes I et II sont activés.
Equilibre d’un solide fissuré. La configuration géométrique du solide est décrite par un do-
maine plan Ω ⊂ R2 de frontière ∂Ω = (Sξ∪ST )∪(F +∪F − ). On utilisera parfois la notation Ω(F )
pour insister sur le fait que la configuration géométrique dépend de la fissure F . On suppose
pour simplifier l’absence de forces de volume (f = 0). L’équilibre du solide dans les conditions
ainsi définies est gouverné par les équations locales
1
div σ(x) = 0 , σ(x) = A : ε(x) , ε(x) = (∇ξ + ∇T ξ) (x ∈ Ω) (4.2)
2
les conditions aux limites sur la frontière externe (sollicitations appliquées au solide)
ξ(x) = ξ D (x) (x ∈ Sξ ,) σ(x).n(x) = T D (x) (x ∈ ST ) (4.3)
et les conditions de surface libre sur les lèvres de la fissure
σ.n(x) = 0 (x ∈ F + ∪ F − ) (4.4)
Tous les champs apparaissant dans (4.2), (4.3) et (4.4) sont fonction des seules coordonnées
(x1 , x2 ) ; de plus les composantes ξ3 du déplacement, ε31 , ε32 , ε33 des déformations et σ32 , σ33
des contraintes sont nulles.
où Pe est la puissance fournie par l’extérieur au système, Ẇ est la variation de l’énergie de
déformation élastique et D est la puissance dissipée en chaleur par l’avancement de la fissure.
En particulier, la propagation de la fissure est irréversible (positivité de la dissipation).
Notons par P (F, ξ D , T D ) la valeur prise par l’énergie potentielle P(ξ) définie par (1.33)
quand ξ est la solution du problème d’équilibre (4.2)–(4.4), soit :
D D 1Z Z
P (F, ξ , T ) = ε[ξ] : A : ε[ξ] dV − T D .ξ dS (4.6)
2 Ω(F ) ST
On a alors le résultat remarquable suivant, qui relie la puissance dissipée dans l’avancée de
fissure à la dérivée de l’énergie potentielle par rapport à la position de la fissure, le chargement
(ξ D , T D ) étant fixé :
∂P
D = −h (F, ξ D , T D ), Ḟ i (4.7)
∂F
La notion mathématique de « dérivée par rapport à F », qui apparaı̂t dans l’expression ci-
dessus de D, sert de façon générale à relier la variation d’une quantité scalaire fonction de F
(ici, l’énergie potentielle (4.6)) à des perturbations de la forme de F :
∂P
δP = P (F + δF, ξ D , T D ) − P (F, ξ D , T D ) = h (F, ξ D , T D ), δF i
∂F
En d’autres termes, et comme suggéré par la notation h·i, ∂P/∂F est une application linéaire qui
à toute perturbation δF de F donne la perturbation δP de P . On ne cherchera pas, dans le cadre
restreint de ce chapitre, à développer plus avant la formalisation de cette notion, reposant sur
le concept de dérivée par rapport au domaine (Murat et Simon, 1976; Sokolowski et Zolesio,
1992). Donnons-en néanmoins une forme plus explicite, et plus simple à appréhender, dans le
cas où la fissure est droite, de sorte que (moyennant un choix judicieux de repère) on puisse
représenter F par un segment [A, B] :
F = Fa,b = [A, B] = {−a ≤ x1 ≤ b, x2 = 0}
et où on considère une propagation rectiligne de cette fissure le long de la droite (AB). La
propagation est alors géométriquement décrite par l’évolution des abscisses −a(t) et b(t) des
deux extrémités A et B de la fissure1 . En particulier, l’énergie potentielle à l’équilibre pour une
configuration Fa,b de la fissure est de la forme P (a, b, ξ D , T D ) et (4.7) devient
∂P ∂P
D=− (a, b, ξ D , T D )ȧ − (a, b, ξ D , T D )ḃ (4.8)
∂a ∂b
On définit alors, pour chaque pointe de fissure, les taux de restitution d’énergie
∂P ∂P
GA = − (a, b, ξ D , T D ) , GB = − (a, b, ξ D , T D ) (4.9)
∂a ∂b
de sorte que l’énergie dissipée dans la propagation de fissure s’écrive
D = GA ȧ + GB ḃ
En mécanique linéaire de la rupture, on suppose couramment que le matériau est caractérisé,
du point de vue de l’éventualité de la propagation de fissures, par un taux de restitution d’énergie
critique Gc , et on formulera alors, pour la propagation de l’extrémité x1 = a, une loi à seuil :
si G < G alors ȧ = 0,
A c
(4.10)
si GA = Gc alors ȧ ≥ 0
et de même pour l’extrémité x1 = b. Un des buts du calcul numérique en mécanique de la
rupture sera alors d’évaluer GA et GB , afin de prédire par comparaison avec Gc l’éventualité
1
Le signe moins devant a permet d’avoir un signe homogène des vitesses : (ȧ, ḃ > 0) si extension de la fissure.
58 C HAPITRE 4. A PPLICATION À LA M ÉCANIQUE LIN ÉAIRE DE LA RUPTURE
Ténacité. Dans le cas d’une propagation de fissure selon un mode donné (par exemple en mode
I d’ouverture, habituellement considéré comme le plus dangereux), le critère de propagation
proposé par Irwin en 1957 porte sur la limitation de la valeur de KI par une valeur critique
appelée ténacité :
si K < K alors ȧ = 0,
I Ic
si KI = KIc alors ȧ ≥ 0
(4.13)
la ténacité KIc étant alors une grandeur caractéristique du matériau, accessible à l’expérience,
que l’on mesure sur des expériences de traction d’éprouvettes de rupture ou de flexion de poutres
4.2. Objet de la mécanique de la rupture numérique 59
entaillées. La validité de la notion de ténacité, assez problématique sur le plan théorique car
la singularité des solutions élastiques en contrainte implique l’apparition de zones plastiques
autour des pointes de fissure, est bien vérifiée sur le plan expérimentale pour certaines classes
de matériaux (en particulier les métaux).
1 2 3 4 5 6
(a)
14 15 17 18 16 7
(b)
13 12 11 10 9 8
1 2 3 4 5 6
(a)
+
14 15 17 (F ) 18 16 7
19 (F −) 20
(b)
13 12 11 10 9 8
Figure 4.3: Maillage avec « double nœuds » : portion de solide sans fissure et maillage réalisant une inter-
polation continue (en haut) ; portion de solide contenant une fissure F et maillage réalisant une
interpolation discontinue à travers F (en bas). Dans les tables de connectivité des maillages
respectifs, les éléments (a) et (b) sont ainsi définis par les listes de nœuds {17, 18, 4, 3} et
{11, 10, 18, 17} (solide non fissuré) et {17, 18, 4, 3} et {11, 10, 20, 19} (solide fissuré).
Les fonctions de base de la méthode des éléments finis sont par construction continues
sur l’ensemble du domaine approché Ωh . Par conséquent, une fissure ne pourra pas traverser
des éléments : la courbe F devra coincider avec des frontières d’éléments finis. De plus, il
faut traiter les nœuds situés sur cette courbe comme des « noeuds doubles », comme suggéré
par la figure 4.3 ; cela revient à traiter le maillage du solide fissuré comme la situation limite
du maillage d’un solide contenant une cavité infiniment mince. Les nœuds, éventuellement
géométriquement confondus, relatifs aux deux lèvres de la fissure doivent porter des numéros
distincts. Les fonctions de base construites sur un tel maillage sont alors automatiquement dis-
continues à travers F .
Une autre approche, non traitée dans ce cours, consiste à enrichir l’espace des fonctions de
base associées au maillage du solide non fissuré par des fonctions de base complémentaires qui
sont spécifiquement construites pour présenter des discontinuités à travers une courbe (problè-
mes plans) ou une surface (problèmes tridimensionnels). C’est la méthode des éléments finis
étendus, ou X-FEM2 , dont la genèse est récente (Moës, Dolbow et Belytschko, 1999a).
2
Pour eXtended Finite Element Method.
4.3. Calcul numérique des facteurs d’intensité de contraintes 61
(F+) (F+) C+
B+ A B+ A
(F−) B− (F−) C− B−
Figure 4.4: Notations pour le calcul de KI , KII par extrapolation au nœud double (B + , B − ) le plus
proche de la pointe de fissure (à gauche) ou au moyen de plusieurs nœuds doubles successifs
(B + , B − ), (C + , C − ), . . . (à droite).
62 C HAPITRE 4. A PPLICATION À LA M ÉCANIQUE LIN ÉAIRE DE LA RUPTURE
où t et n sont les directions tangente et normale à F en A, B est le lieu géométrique commun à
B + et B − et d est la distance de B à A. Ces formules nécessitent en pratique un maillage très
raffiné au voisinage de la pointe de fissure.
Une variante de cette approche consiste à utiliser plusieurs nœuds doubles successifs à partir
de la pointe de fissure, et de considérer une approximation du saut de déplacement [[ξ̂]] de la
forme
√ h i
[[ξ̂]] = r αt + βn
Les constantes α, β sont alors recherchées par une méthode de moindres carrés, de façon à
ce que la fonction [[ξ̂]] s’approche au mieux des valeurs de saut de déplacement aux nœuds
doubles. Les facteurs KI , KII sont alors approchés par les valeurs obtenues par identification
avec le terme principal de la relation (4.12) :
√ √
2πE 2πE
KI ≈ α KII ≈ β (4.19)
8(1 − ν 2 ) 8(1 − ν 2 )
Interpolation unidimensionnelle avec nœud au quart. Sous sa forme la plus simple, la méthode
de l’élément avec nœud au quart peut être présentée pour une seule dimension spatiale. Considé-
rons pour cela trois nœuds alignés {A, B, C} dans la direction d’une fissure rectiligne (fi-
gure 4.5), A étant en pointe de fissure, de sorte que le segment Γ = [A, C] corresponde à un
côté d’élément fini associé à des fonctions d’interpolation du second degré par rapport à chaque
coordonnée paramétrique (pour les problèmes plans considérés dans ce chapitre, il s’agit du tri-
angle à six nœuds ou du quadrangle à huit ou neuf nœuds, tels que représentés au tableau 2.1).
Les traces des fonctions d’interpolation des éléments finis adjacents au segment Γ sont alors
les polynômes d’interpolations de Lagrange du second degré :
où a ∈ [−1, 1] est la coordonnée paramétrique servant à décrire Γ, les nœuds (A, B, C) étant
associés à a = (−1, 0, 1) respectivement.
L’interpolation avec nœud au quart consiste tout simplement à placer le nœud intermédiaire
B au quart de la longueur de Γ et à utiliser l’interpolation quadratique standard (4.20). Avec ce
choix de placement, et en choisissant l’origine en A, les abscisses des trois nœuds sont données
par xA = 0, xB = d, xC = 4d, d étant le quart de la longueur de Γ. La coordonnée physique x1 de
4.3. Calcul numérique des facteurs d’intensité de contraintes 63
x2
+ +
C B A B C
C
− −
B d d x1
4d 4d
Figure 4.5: Interpolation unidimensionnelle sur trois nœuds ({A, B, C} ou {A, B ± , C ± }) avec nœud (B
ou B ± ) au quart.
3
3d
d 6 _ (r,θ )
x
θ 5
1
4
(a) 2
(b)
Figure 4.6: Elément triangulaire à six nœuds : (a) disposition des nœuds dans l’espace physique √ telle
que l’interpolation isoparamétrique permette la représentation d’une singularité O(1/ r) des
déformations ; (b) arrangement typique de tels éléments autour d’une pointe de fissure.
Le principe du calcul de G exposé ci-après est cependant applicable à des situations plus
générales.
4.4. Calcul numérique du taux de restitution d’énergie 65
x2
θ1 (Α)<0 A F B θ1 (Β)>0
(x1 =−a)
−−−
(x1 =b) x1
4.4.2 La « méthode G − θ »
Dérivation lagrangienne de l’énergie potentielle : principe de la « méthode G − θ ». L’idée
principale est alors de calculer G par dérivation particulaire de P (a, b, ξ D , T D ), sous forme
lagrangienne. La dérivée est prise à τ = 0, et avec les données aux limites (ξ D , T D ). Ce calcul
repose sur les notions et identités suivantes, introduites en cinématique des milieux continus
(Salencon, 2004) :
66 C HAPITRE 4. A PPLICATION À LA M ÉCANIQUE LIN ÉAIRE DE LA RUPTURE
où Ω(τ ) est l’image de Ω = Ω(0) à l’« instant » τ par la transformation (4.26).
La transformation étant considérée à chargement fixé, en vertu de la définition (4.7), l’énergie
potentielle à l’équilibre ne dépend de τ qu’à travers a(τ ) et b(τ ). Sa dérivée lagrangienne ne
dépend donc que de la vitesse de transformation aux pointes de la fissure :
d ∂P ∂P ∂P ∂P
D D
Ṗ = P (a(τ ), b(τ ), ξ , T ) = ȧ + ḃ = − θ1 (A) + θ1 (B) (4.31)
dτ τ =0 ∂a ∂b ∂a ∂b
L’idée principale de la « méthode G − θ » est ainsi de calculer la dérivée lagrangienne de
P dans une transformation (4.26) dont la vitesse vérifie les conditions (4.27), et d’identifier
GA , GB par comparaison de (4.31) et (4.9). Cela reviendra donc à exploiter la relation
dP
= GA θ1 (A) − GB θ1 (B) (4.32)
dτ τ =0
avec
Z
D(u, v; θ) = ∇u : A : ∇v div θ − ∇u.∇θ : A : ∇v − ∇u : A : ∇v.∇θ dV (4.34)
Ω
Cette identité permet alors d’exprimer la dérivée de l’énergie potentielle (4.6) comme
d 1
Z Z
D D
P (a(τ ), b(τ ), ξ , T ) = ε[ξ̇] : A : ε[ξ] dV + D(ξ, ξ; θ) − T D .ξ̇ dS (4.35)
dτ τ =0 Ω 2 ST
d 1
P (a(τ ), b(τ ), ξ D , T D )
= D(ξ, ξ; θ)
dτ τ =0 2
1
Z
= ∇ξ : A : ∇ξ div θ − ∇ξ.∇θ : A : ∇ξ dV (4.36)
Ω 2
Evaluation de GA et GB . A première vue, la valeur (4.36) de dP/dτ semble dépendre des va-
leurs prises par le champ de vitesse de transformation θ dans tout le domaine, et non seulement
comme attendu des vitesses d’extension de fissure θ1 (A), θ1 (B).
En fait, on montre (c’est un peu délicat3 ) que si deux champs de vitesses de transformation
θ0 et θ00 vérifient les conditions (4.27) et sont tels que θ0 (A) = θ00 (A) et θ0 (B) = θ00 (B), alors la
formule (4.36) calculée pour θ = θ0 et θ = θ00 donne la même valeur de dP/dτ .
Considérons alors deux champs de vitesse θA et θB , tels que
θA (A) = −e1 θA (B) = 0 θA vérifie les conditions (4.27)
(4.37)
θB (A) = 0 θB (B) = e1 θB vérifie les conditions (4.27)
En vertu de (4.32) et (4.36), les taux de restitution d’énergie GA , GB sont alors donnés par
1 1
GA = D(ξ, ξ, θA ) , GB = − D(ξ, ξ, θB ) (4.38)
2 2
Une grande latitude subsiste pour le choix des champs de vitesse θA et θB . L’intégrale (4.36)
donnant D(ξ, ξ, θ) faisant intervenir ∇ξ, qui est singulier au voisinage des pointes de fissure, il
est intéressant de définir des champs θ permettant d’éviter le calcul d’intégrales sur ce voisinage.
Cela revient à demander l’annulation de ∇θ sur ce voisinage.
Un procédé simple qui réalise cet objectif est le suivant. Considérant par exemple le champ
θB , on choisit deux courbes fermées régulières Γ0 et Γ1 telles que Γ0 encercle Γ1 et B est
intérieur à Γ1 (figure 4.8). Notant par CB la couronne délimitée par Γ0 , Γ1 et F , et par DB la
région délimitée par Γ1 (D est en particulier un voisinage de B relativement à Ω). On considère
alors un champ θB de la forme :
θB (x) = 1
(x ∈ DB )
θB (x) = θB (x)e1 avec θB (x) = 0 (x ∈ Ω \ (CB ∪ DB )) (4.39)
θB (x) continue sur Ω
la définition de θB sur CB étant arbitraire, sous la seule condition de réaliser une transition
continue entre θB = 0 sur Γ0 et θB = 1 sur Γ1 . La fonction θB peut alors être définie sur C par
interpolation de valeurs nodales. Ces dernières sont fixées à 0 et 1 aux nœuds situés sur Γ0 et
Γ1 , respectivement, les valeurs de θB aux nœuds intérieurs à CB pouvant alors en principe être
choisies de façon arbitraire (la continuité de la fonction θB ainsi construite étant garantie par le
3
Notant par (dP/dτ )0 et (dP/dτ )00 les valeurs de dP/dτ obtenues par (4.36), on a alors
dP 0 dP 00 Z n 1 o
− = (∇ξ : A : ∇ξ)div (θ0 − θ00 ) − ∇ξ : A : ∇ξ.∇(θ0 − θ00 ) dV
dτ dτ 2
ZΩ 1
= T .∇ξ.(θ0 − θ00 ) − (∇ξ : A : ∇ξ)(θ0 − θ00 ).n ds
∂Ω 2
=0
où la deuxième égalité résulte de l’utilisation de l’identité (4.42) et la troisième des conditions (4.27).
Le point délicat est le suivant : l’application directe de l’identité (4.42) à l’expression (4.36) de dP/dτ n’est
pas licite car la densité d’énergie de déformation (∇ξ : A : ∇ξ)/2 est singulière comme 1/r, de sorte que prendre
la divergence de cette quantité conduit à une expression dont l’intégrale sur Ω est divergente. En revanche, cette
opération appliquée à (dP/dτ )0 − (dP/dτ )00 est licite car la différence (θ0 − θ00 ) s’annule en pointe de fissure et
vient ainsi compenser la singularité de la densité d’énergie de déformation.
68 C HAPITRE 4. A PPLICATION À LA M ÉCANIQUE LIN ÉAIRE DE LA RUPTURE
x2
Γ1 Γ0
B x1
( DB )
(CB )
procédé d’interpolation isoparamétrique). Le choix de ces valeurs nodales peut en pratique être
effectué au moyen de divers procédés, comme par exemple :
• Si C est une couronne circulaire comprise entre les rayons r0 et r1 , interpolation affine :
r − r1
θB (x) =
r 0 − r1
• Résolution par éléments finis, sur le même maillage, de l’équation de Laplace avec condi-
tions de Dirichlet :
∆θB = 0 (dans CB ), θB = 0 (sur Γ0 ), θB = 1 (sur Γ1 )
Avec cette construction, le taux de restitution d’énergie GB est calculé numériquement à l’aide
de la formule
Z
1
GB = ∇ξ.∇θB : A : ∇ξ − ∇ξ : A : ∇ξ div θB dV (4.40)
CB 2
dont la valeur ne dépend ni du choix de la couronne CB encerclant B ni de la définition de θB
sur C. Bien entendu, un champ θA peut être défini suivant le même principe, et GA calculé en
termes d’une intégrale sur une couronne CA .
où σ = A : ε[ξ] est la contrainte associée au déplacement solution ξ. L’intégrale sur le contour
Γ1 est indépendante du choix du contour encerclant B ; on parle d’invariant intégral de contour.
Elle est connue sous le nom d’intégrale J de Rice.
En passant, notons qu’une démonstration de la formule d’Irwin (4.14), qui relie G aux fac-
teurs d’intensité de contraintes, consiste à évaluer la limite de l’invariant intégral (4.43) pour un
contour Γ1 infiniment petit (et donc infiniment proche de B), à l’aide des expressions asympto-
tiques (4.11).
2a
2V
2H
−σ
Figure 4.9: Plaque rectangulaire avec fissure droite. Notations pour la géométrie et le chargement (gauche) ;
maillage par éléments triangulaires linéaires (élément à 3 nœuds, dits T3), avec deux agrandis-
sements successifs du maillage au voisinage d’une des pointes de fissure (droite).
70 C HAPITRE 4. A PPLICATION À LA M ÉCANIQUE LIN ÉAIRE DE LA RUPTURE
Figure 4.10: Plaque rectangulaire avec fissure droite. Déformée au voisinage de la pointe de fissure :
maillage avec éléments linéaires T3 (gauche) et avec éléments quadratiques T6 (droite). La
vue de droite juxtapose la déformée obtenue sans (gauche) ou avec (droite) élément spécial
avec nœud au quart. On voit que cette dernière se rapproche le mieux de la déformée à tangente
verticale prédite par la solution asymptotique (4.12).
de contraintes KI∞ (pour la plaque infinie dans les deux directions) et KIH (pour la plaque de
hauteur V infinie et de largeur H finie) :
√ √ r πa
KI∞ = σ πa , KIH = σ πa sec (4.44)
2H
Cette solution exacte va être comparée aux résultats numériques obtenus par les trois méthodes
d’évaluation de KI traitées dans ce chapitre (extrapolation, élément avec nœud au quart, métho-
de G − θ). Les résultats numériques qui suivent ont été obtenus au moyen des programmes
(M ATLAB) d’initiation elast2 tri3 et elast2 tri6 écrits pour ce cours par A. Frangi. La largeur
H = 5a a été utilisée pour tous les résultats qui suivent. La figure 4.10 montre la déformée en
pointe de fissure calculée par les deux premières approches.
(a) Extrapolation. Le tableau ci-après donne les valeurs de KIH obtenues par extrapolation
(éléments T3), pour trois valeurs de V . Les écarts à la solution exacte sont de l’ordre de
20 %.
exact numérique
KI∞ KIH KIH (V = 5a) KIH (V = 9a) KIH (V = 13a) (H = 5a)
1.7725 1.8175 1.6527 1.6058 1.6016
(b) Eléments spéciaux avec nœud au quart. Le tableau ci-après donne la valeur de KIH obte-
nues à l’aide d’éléments spéciaux avec nœud au quart, ainsi que (pour comparaison) celle
obtenue par extrapolation (éléments T6). On note une nette amélioration de la précision.
exact T6 (extrapol.) T6 (spécial)
KI∞ KIH KI KI (H = 5a, V = 13a)
1.7725 1.8175 1.6888 1.8093
(c) Méthode G−θ. Le tableau ci-après donne les valeurs de KIH obtenues par calcul du taux
de restitution d’énergie (au moyen d’éléments T3, et donc en particulier sans utilisation
d’élément spécial) et application de (4.14) en mode I pur (KII = KIII = 0), pour trois
valeurs de V . Un gain de précision considérable apparaı̂t par rapport aux résultats obtenus
par extrapolation sur le même maillage.
exact numérique
KI∞ KIH KI (V = 5a) KI (V = 9a) KI (V = 13a) (H = 5a)
1.7725 1.8175 1.8561 1.8037 1.7991
Chapitre 5
5.1 Introduction
Ce chapitre propose une introduction sur la simulation numérique en mécanique des so-
lides déformables hors du domaine linéaire défini par le comportement élastique linéaire et
l’hypothèse des petites perturbations (HPP), cadre de travail des chapitres précédents. Pour
ce faire, un aperçu de quelques grandes classes de comportements non-linéaires de structures
déformables est d’abord présenté en section 5.2. La section 5.3 est ensuite consacrée à la
résolution numérique pour deux classes de problèmes proches de l’élasticité linéaires : élasticité
linéaire avec contact unilatéral sans frottement (section 5.3.1) et élasticité non linéaire (sec-
tion 5.3.2). Ce chapitre met ainsi en place des notions utiles à la compréhension détaillée
des nombreuses techniques de calcul de structures en conditions non-linéaires existantes. Cer-
taines de ces notions seront reprises et développées aux chapitres 6 et 7, dans lesquels le calcul
numérique de solides élastoplastiques, dans des conditions de chargement quasistatique et dans
le cadre HPP, sera abordé en détail.
71
72 C HAPITRE 5. C ALCUL DE SOLIDES À COMPORTEMENT NON - LIN ÉAIRE
q ,Q Q
. .
a=0 a>0
A
a
B
q
Figure 5.1: Eprouvette de rupture schématisée ; diagramme force-déplacement (Q, q). La partie non-
linéaire du diagramme correspond à la propagation de fissure (ici instable si l’expérience est
pilotée à force imposée).
entraı̂ne une propagation de la fissure, la réponse du solide fissuré Ω(F ) dépend du chargement
de façon non-linéaire (même dans des conditions quasistatiques et pour un matériau à compor-
tement linéaire). En effet, la fissure F dépend du temps : F = F (t), et ce d’une manière qui
n’est pas connue à l’avance puisque la propagation se produit habituellement selon une loi à
seuil telle que (4.10) ou (4.13), et la réponse élastique du solide Ω(F ) dépend par ailleurs, à
chargement donné, de la configuration F de la fissure. Ce point est schématisé sur la figure 5.1.
La configuration de fissure en fonction du temps n’étant pas connue à l’avance (en lon-
gueur et en direction), le calcul numérique d’une propagation de fissure nécessite en général
une approche incrémentale, le chargement étant échantillonné dans le temps et les positions
successives de la fissure étant déterminées pas à pas, comme sur l’exemple de la figure 5.2
(noter le raffinement du maillage en pointe de fissure, qui accompagne cette dernière au fil des
actualisations de maillage nécessitées par l’évolution simulée de la fissure).
Figure 5.2: Calcul mécanique incrémental permettant de suivre l’évolution d’une fissure à l’aide d’un re-
mailleur automatique avec raffinement du fond de fissure (document communiqué par le Centre
de mise en forme des matériaux (CEMEF) de l’Ecole des Mines de Paris).
5.2. Aperçu de comportements non-linéaires à l’échelle de la structure 73
5.2.2 Endommagement
Les propriétés d’unn matériau à l’échelle macroscopique de la structure (milieu continu)
peuvent être affectées d’une manière indésirable par la présence de micro-défauts (fissures,
cavités), individuellement de très petite taille mais en grand nombre. De même qu’une fissure
macroscopique, ces micro-défauts sont susceptibles d’évoluer (s’aggraver) selon l’histoire de
chargement appliquée à la structure.
Les outils développés en mécanique de la rupture ne sont pas adaptés à la prise en compte de
tels ensembles de micro-défauts, pour lesquels a été développée la théorie de l’endommagement.
Celle-ci est présentée en détail dans des ouvrages tels que ceux de Lemaı̂tre et Chaboche (1990)
ou Besson, Cailletaud, Chaboche et Forest (2001), et on n’en donne ici qu’un aperçu très bref
et partiel.
Les modèles d’endommagement fragile consistent à continuer à considérer le comporte-
ment du matériau comme élastique linéaire, et à postuler que la présence de micro-défauts se
traduit par une modification (affaiblissement) des propriétés macroscopiques d’élasticité. On
pose alors que le tenseur des modules d’élasticité est fonction d’une variable interne α (scalaire
ou tensorielle selon les modèles), la variable d’endommagement :
A = A(α) (5.1)
Le modèle d’endommagement le plus simple consiste ainsi à poser
A = A0 (1 − α)
où A0 est le tenseur des modules d’élasticité du matériau non endommagé. On postule alors
que l’endommagement est irréversible et évolue selon une loi à seuil :
si ε : A(α) : ε < w alors α̇ = 0
critique
si ε : A(α) : ε = wcritique alors α̇ ≥ 0
Pour un solide, l’endommagement du matériau varie selon le point et la variable d’endommage-
ment α est un champ. Compte tenu du caractère évolutif et irréversible de l’endommagement,
la réponse d’un solide endommagé est une fonction non-linéaire du chargement appliqué, et
dépend de l’histoire de chargement.
L0
k k k m
R
γ m0 =0 δ m1 R m2
Figure 5.3: Exemple de réponse non-linéaire due au contact unilatéral sans frottement : système masse-
ressort suspendu au-dessus d’un support plan.
∂Ω Ω γ(x
_)
SC _
x
S
_
n
Figure 5.4: Surface de contact potentiel SC et distance γ(x) entre SC et le support S.
5.2. Aperçu de comportements non-linéaires à l’échelle de la structure 75
F
d
_ =0
T _
SC x2 ST
d
Sξ ξ_ =0
_
x1
Figure 5.5: A gauche : schéma de principe de l’expérience d’indentation. A droite : exemple de courbe
d’indentation expérimentale (pointillé) et courbe d’indentation simulée numériquement pour
les paramètres de comportement identifiés (trait plein), tels que les courbes numérique et
expérimentale coincident au mieux (Constantinescu et Tardieu, 2001).
R
a
δ
(E,ν )
c’est-à-dire une version modifiée des conditions (5.2) tenant compte du fait que l’indenteur
rigide a subi un déplacement vertical δ (compté positivement vers le bas). La force d’indentation
est obtenue en fonction de la solution de (5.3) par
Z
P = Tn dS
SC
La figure 5.5 montre un exemple, dû à Constantinescu et Tardieu (2001), de courbe d’inden-
tation expérimentale comparée à la courbe d’indentation simulée numériquement pour les pa-
ramètres de comportement identifiés, c’est-à-dire ceux pour lesquels les courbes numérique et
expérimentale coincident au mieux.
Une modélisation simplifiée de cette expérience consiste à considérer le contact sans frotte-
ment entre un indenteur (solide rigide de révolution autour d’un axe vertical ∆) et un support
horizontal élastique infini, le contact initial se faisant au point situé sur ∆. La solution de ce
problème, connue sous le nom de solution de Hertz, donne la profondeur d’indentation δ et le
rayon a de la zone de contact effectif, en fonction des modules d’élasticité (E, ν) du massif
élastique et du rayon de courbure R de l’indenteur au point de contact initial, par :
3(1 − ν 2 ) 2/3 2/3 3R(1 − ν 2 )
1/3
δ= √ P a= P 1/3 (5.4)
4E R 4E
On note le caractère non-linéaire de la relation entre P et δ.
Figure 5.7: Modèle rhéologique pour le comportement élastoplastique : plasticité parfaite (gauche), plasti-
cité avec écrouissage cinématique (droite).
représenté par un modèle rhéologique (la rhéologie est la science du comportement mécanique
des matériaux). Par exemple, les modèles schématisés en figure 5.7 correspondent à la plasticité
parfaite et la plasticité avec écrouissage cinématique. Dans les deux cas, le frotteur vérifie une
loi à seuil : en appelant σP la contrainte qui lui est appliquée (comptée positivement vers la
droite), on doit avoir :
|σP | < σ0 → le frotteur est immobile
|σ| ≤ σ0 et
|σP | = σ0 → le frotteur peut glisser, dans le sens de l’effort qu’il subit
Figure 5.9: Excavation d’une fouille circulaire revêtue d’une paroi cylindrique (enceinte d’un parking sou-
terrain). Document communiqué par le service de Mécanique des sols du Laboratoire Central
des Ponts et Chaussées.
Figure 5.10: Modélisation de l’excavation d’une fouille circulaire : maillage utilisé et distribution du
déplacement vertical (code de couleurs et maillage déformé). Document communiqué par
le service de Mécanique des sols du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées.
Figure 5.11: Modélisation de l’excavation d’une fouille circulaire : distribution de la contrainte équivalente
de von Mises (à gauche) et de la déformation plastique cumulée dans le sol (au milieu),
déformée de la paroi cylindrique à la fin du processus d’excavation (à droite). Documents com-
muniqués par le service de Mécanique des sols du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées.
Figure 5.12: Modélisation d’un essai de compactage de coques (contact, transformations finies) et visuali-
sation du champ de contraintes (document communiqué par le Centre de mise en forme des
matériaux (CEMEF) de l’Ecole des Mines de Paris).
déformée) Ω(0) et actuelle (déformée) Ω(t) dans l’écriture des équations locales et des condi-
tions aux limites, ce qui constitue une simplification considérable sur le plan mathématique
(l’erreur faite en confondant Ω(0) et Ω(t) étant du second ordre en |∇ξ|).
Quand la transformation envisagée ne satisfait pas aux hypothèses de petites perturbations,
l’analyse d’un solide devient nécessairement non-linéaire :
• Il n’est plus possible d’approcher la déformation par sa partie linéaire ε, et il faut utiliser
le tenseur de déformation e de Green-Lagrange, non-linéaire en ∇ξ :
1
e= ∇ξ + ∇T ξ + ∇T ξ.∇ξ
2
• La forme faible (1.22) de l’équilibre (principe des puissances virtuelles) est écrite sur la
configuration actuelle Ω(t) et sa frontière, qui n’est en général pas connue a priori, et non
sur la configuration initiale Ω(0).
Diverses formes d’instabilités, comme le flambement, sont susceptibles d’apparaı̂tre. Le calcul
de structures élastiques élancées en transformations finies est traité dans le cours de Ballard et
Millard (2005), et les instabilités par flambement et les effets de précontrainte y sont abordés.
Figure 5.13: Forgeage à chaud d’un pivot de fusée pour automobile. Simulation avec F ORGE 3 (plasticité,
contact, transformations finies). Forme finale de la pièce et distribution de la déformation
plastique (document communiqué par le Centre de mise en forme des matériaux (CEMEF) de
l’Ecole des Mines de Paris).
80 C HAPITRE 5. C ALCUL DE SOLIDES À COMPORTEMENT NON - LIN ÉAIRE
(hypothèse des petites perturbations), peuvent aussi se présenter sur des solides dont le matériau
a lui-même un comportement non-linéaire ou en liaison avec des grands déplacements ou
grandes déformations.
On ne cherchera pas ici à présenter une typologie exhaustive, et se contentera de deux
exemples pour illustrer ce point. Un premier exemple (figure 5.12) porte sur la simulation du
compactage d’un empilement de coques cylindriques déformables, qui présente des transfor-
mations finies ainsi que de nombreux contacts. Un second exemple relève de la mise en forme,
ici la simulation du forgeage d’une pièce automobile (figure 5.13). La mise en forme mobilise
ici trois types de non-linéarités. D’une part, le comportement du matériau est nécessairement
non-linéaire (plasticité) afin que la forme finale soit conservée à la sortie du processus de mise
en forme. De plus, dans de nombreux cas, et en particulier ici, des transformations finies sont
nécessaires, afin de pouvoir créer la pièce à partir d’un objet de forme simple (tôle...). Enfin, il
faut prendre en compte le contact entre la pièce et l’outil imposant la forme finale.
Tn Tn >0 → ∉SC
(k+1)
(k+1)
ξ n−γ>0 → ∈SC (k)
SC
(k) (k+1)
• Sinon, la surface de contact candidate est actualisée (SC → SC ) selon la règle sui-
vante (x(n) étant un nœud générique de SC ) :
(k) (k+1)
Si x(n) ∈ SC et T (k) (x(n) ) > 0 alors x(n) 6∈ SC
(k) (k+1)
Si x(n) 6∈ SC et ξn(k) (x(n) ) − γ(x(n) ) > 0 alors x(n) ∈ SC
(k)
le statut des autres nœuds de ∂Ω par rapport à l’appartenance à SC étant maintenu, et on
passe à l’itération suivante k + 1.
D’autres algorithmes reposent sur la théorie de l’optimisation sous contraintes (par exemple,
en élasticité, recherche du minimum de l’énergie potentielle P(v) où v est assujetti à vérifier
la contrainte de non-pénétration sur SC ). La mécanique numérique du contact est l’objet d’un
ouvrage récent (Wriggers, 2002).
r(u)
Méthode de Newton modifiée : direction constante. Cette variante consiste à remplacer r0 (u(k) )
par une constante K dans (5.18), ce qui donne la récurrence
r(u(k) )
u(k+1) = u(k) − (5.21)
K
Géométriquement parlant, cela revient à déterminer l’itéré u(k+1) en cherchant le point d’inter-
section avec l’axe r = 0 de la droite de pente K passant par le point (u(k) , r(u(k) )) (figure 5.16).
La convergence de cette version modifiée est seulement linéaire au voisinage de la solution :
les erreurs successives sont en effet reliées par
r0 (u) (k)
e(k+1) = 1 − e + o(|e(k) |) = O(|e(k) |)
K
Cette variante n’a pas un très grand intérêt pour la résolution d’équations scalaires. En revanche,
on verra que son extension au cas d’équations non linéaires dans RN peut être utile pour des
raisons de coût de calcul numérique.
5.3. Résolution numérique pour l’équilibre de solides à comportement non-linéaire 85
r(u)
Figure 5.16: Equation scalaire non-linéaire : principe de la méthode de Newton modifiée, direction
constante.
Méthode de Newton modifiée : direction sécante. Cette variante consiste à remplacer r0 (u(k) )
par la pente de la droite sécante passant par les points (u(k−1) , r(u(k−1) ) et (u(k) , r(u(k) ) corres-
pondant aux deux itérés précédents (figure 5.17), ce qui donne la récurrence
u(k) − u(k−1)
u(k+1) = u(k) − r(u(k) ) (5.22)
r(u(k) ) − r(u(k−1) )
Concernant la convergence de cette variante de la méthode de Newton, on peut montrer que
√
|e(k+1) | = O(|e(k) |(1+ 5)/2
)
√
(incidemment, l’exposant 1 + 5)/2 dans la formule ci-dessus est le nombre d’or). La conver-
gence vers u de la suite construite à l’aide de la récurrence (5.22) est ainsi moins bonne que
celle obtenue par la méthode de Newton « standard » (exposant 2, c’est-à-dire convergence
quadratique) mais meilleure que pour la méthode de Newton avec direction constante (exposant
1, c’est-à-dire convergence linéaire).
r(u)
Figure 5.17: Equation scalaire non-linéaire : principe de la méthode de Newton modifiée, direction sécante.
86 C HAPITRE 5. C ALCUL DE SOLIDES À COMPORTEMENT NON - LIN ÉAIRE
La méthode de Newton est, comme pour la résolution des équations scalaires, un algorithme
reposant sur l’écriture, à chaque itération, du développement limité à l’ordre 1 du résidu autour
de l’itéré précédent :
{R(k+1) } ≈ {R(k) } + [K(k) ]{δU(k) } (5.23)
où {R(m) } = {R(Um )} est la valeur du résidu calculé pour l’itéré m,
{δU(k) } = {U(k+1) } − {U(k) }
est la correction apportée à la solution par l’itération en cours, et
(k) ∂RI
[K(k) ] = ∇U {R(U(k) )} soit KIJ = ({U(k) })
∂UJ
est la matrice de rigidité tangente en {U(k) }. La correction {δU(k) } est alors trouvée en annulant
l’approximation (5.23) de {R(k+1) }, c’est-à-dire en résolvant le système d’équations linéaire
{R(k) } + [K(k) ]{δU(k) } = {0} (5.24)
L’algorithme mettant en œuvre la méthode de Newton pour un système d’équations non linéaire
du type (5.17) est ainsi défini par les étapes suivantes (où désigne une tolérance choisie a
priori) :
dont l’inconnue est la correction δξ (k) = ξ (k+1) − ξ (k) . L’application linéaire tangente R0 de R
apparaissant dans (5.27) est définie par
R(v + z, w) − R(v, w) = hR0 (v, w), zi + o(kzk)
L’itéré ξ (k+1) = ξ (k) + δξ (k) est donc trouvé comme solution du problème linéaire
D E
trouver δξ (k) ∈ C(0) tel que R0 (ξ (k) ; w), δξ (k) = −R(ξ (k) ; w) ∀w ∈ C(0)
Une forme explicite de l’application linéaire tangente R0 est alors obtenue en effectuant le
développement à l’ordre 1 en z dans l’expression (5.16) de R(v + z, w). Pour cela, on utilise le
développement de ∂φ/∂ε(ε[v + z]) autour de v :
∂φ ∂φ ∂2φ
ε[v + z] = ε[v] + ε[v] : ε[z] + o kε[z]k
∂ε ∂ε ∂ε∂ε
Prenant v = ξ (k) et z = δξ (k) , on obtient ainsi
D E Z
0 (k) (k)
R (ξ ; w) , δξ = ε[ξ (k) ] : A(k) : ε[w] dV (5.28)
Ω
où le tenseur d’ordre 4 A(k) (x) désigne le module d’élasticité tangent local associé au compor-
tement élastique non linéaire :
∂ 2 φ (k)
A(k) (x) = ε[ξ ](x) (5.29)
∂ε∂ε
Par hypothèse de convexité stricte de φ, le module d’élasticité tangent local est défini positif, et
s’interprète comme un comportement élastique linéaire (hétérogène) tangent.
88 C HAPITRE 5. C ALCUL DE SOLIDES À COMPORTEMENT NON - LIN ÉAIRE
Discrétisation par éléments finis. L’introduction d’une approximation par éléments finis dans
l’équation (5.28) permet alors de définir la matrice de rigidité tangente [K(k) ] à travers la relation
D E Z
R0 (ξ (k)
h
; wh ) , δξ (k)
h
= ε[ξ (k)
h
] : A(k) : ε[wh ] dV = {W}T [K(k) ]{δU(k) } (5.30)
Ω
La matrice de rigidité tangente [K(k) ] est donc la matrice de rigidité (au sens introduit au cha-
pitre 3 pour le comportement élastique linéaire) pour un comportement élastique linéaire fictif
défini par le champ de modules d’élasticité tangents locaux A(k) (x). Elle est donc calculée au
moyen de la procédure fondée sur les intégrations élémentaires et l’assemblage, développée en
sections 3.2 et 3.3. Ensuite, la correction {δU(k) } est trouvée par résolution du système linéaire
d’équations
{R(k) } + [K(k) ]{δU(k) } = {0} (5.31)
Commentaires. On voit ainsi que, pour tirer parti des propriétés de convergence quadratique
(donc rapide, en termes de nombre d’itérations) de la méthode de Newton, le prix à payer est
l’assemblage à chaque itération de la matrice de rigidité tangente. Ainsi, le coût numérique
de chaque itération de la méthode de Newton, principalement dû à l’assemblage de la rigidité
tangente et la résolution du système d’équations (5.31), est du même ordre de grandeur que
celui d’un calcul complet en élasticité linéaire.
Il peut alors parfois être avantageux (en termes du temps de calcul total de la procédure
itérative) de remplacer la méthode de Newton « standard » par une variante qui ne possède
pas la propriété de convergence quadratique mais nécessite un temps de calcul par itération
sensiblement inférieur. L’une de ces variantes consiste à utiliser une matrice de rigidité constante
[K̂] définie positive et choisie à part cela de façon arbitraire, de sorte que le système d’équations
gouvernant la correction {δU(k) } soit
au lieu de (5.31). Un choix naturel pour [K̂] consiste à construire la matrice de rigidité élastique
pour le module d’élasticité tangent pour l’état naturel non déformé :
∂2φ
A(0) = (0)
∂ε∂ε
De même que pour le cas scalaire, cette variante de la méthode de Newton a des propriétés
de convergence dégradées (linéaire au lieu de quadratique). En revanche, le temps de calcul
par itération est sensiblement réduit grâce au fait que la matrice de rigidité constante [K̂] peut
être assemblée et factorisée (au moyen de l’algorithme de factorisation LDLT présenté en sec-
tion 3.4) lors de la première itération, puis stockée en mémoire.
Il existe d’autres variantes de méthodes de Newton, qu’on ne développe pas ici. Par exemple,
il est possible de mettre en œuvre des approches hybrides « classique-modifié », dans lesquelles
la matrice de rigidité tangente est calculée toutes les quelques itérations et utilisée comme rigi-
dité constante entre deux actualisations. D’autres variantes reposent sur la notion de « rigidité
sécante ».
Chapitre 6
89
90 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
Figure 6.1: Essai de traction-torsion sur cuivre : surface seuil initiale (avec, en trait plein, la surface seuil
prédite par le critère de von Mises), d’après Bui (1964, 1970).
Critère de von Mises. Pour décrire la plasticité des métaux, on utilise souvent le critère de von
Mises, qui s’écrit
σ eq − R ≤ 0 (6.1)
où R est la limite d’élasticité et la contrainte équivalente σ eq est définie par
q 1
σ eq = 3
2
ksk avec s = σ − Tr(σ)1 (6.2)
3
s étant le déviateur des contraintes. La norme kak d’un tenseur euclidien d’ordre 2 a ∈ R3×3
est définie par kak = (a : a)1/2 , par extension directeqde la définition usuelle kvk = (v.v)1/2 de la
norme euclidienne d’un vecteur v ∈ R3 . Le facteur 3/2 figurant dans la définition (6.2) permet
d’écrire σ eq = σ pour un état de contrainte uniaxiale σ = σ(ex ⊗ex ), conférant à la contrainte
équivalente une interprétation simple. En particulier, cette interprétation entraı̂ne que le seuil R
du critère de von Mises (6.1) est la valeur de la limite d’élasticité observée dans une expérience
de traction-compression uniaxiale.
τ
τ
σ
σ
Figure 6.2: Essai de traction-torsion sur acier doux. Evolution de la surface seuil pour deux histoires de
chargement : trajet de chargement radial (gauche), traction pure inférieure à la limite élastique
suivie d’une torsion à force de traction constante (droite), d’après Bui (1964, 1970).
Trajet de chargement Trajet de chargement
τ τ
Surface seuil initiale Surface seuil actuelle Surface seuil initiale Surface seuil actuelle
σ X σ
0 0
τττ τ
σσ
σ
Figure 6.4: Constatation expérimentale de la normalité des vitesses de déformation plastique à la surface
seuil, en différents points d’un trajet de chargement, d’après Bui (1964, 1970).
cumulée s’écrit q q3 q 2 eq
ṗ = 2
3
kε̇P k
= 2
3
γ̇σ = γ̇
2σ eq 3
Ainsi, pour le critère de von Mises, le multiplicateur plastique γ̇ est égal à la vitesse de déforma-
tion plastique cumulée ṗ. Comme on ne considèrera dans la suite que le critère de von Mises,
on écrira les relations de comportement en termes de ṗ plutôt que γ̇.
où (i) σ0 est la limite d’élasticité initiale en traction simple, (ii) stipule que la limite d”élasticité
augmente avec la déformation plastique cumulée, et (iii) la fonction R(p) est concave. La
contrainte équivalente σ eq étant une fonction convexe de σ, la clause (iii) permet d’assurer que
l’ensemble des couples (σ, p) plastiquement admissibles est convexe. Dans le cas particulier
courant de l’écrouissage isotrope linéaire, la fonction seuil R(p) est de la forme
R(p) = σ0 + hp (6.10)
où σ0 est la limite d’élasticité initiale et h est le module d’écrouissage, et vérifie clairement les
hypothèses (6.9).
94 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
Il est d’autre part utile de remarquer que la règle de normalité (6.8c) peut être mise sous la
forme q q ∂f q 1
ε̇P = 32 ṗN avec N = 23 (σ, p) = 32 eq s (6.11)
∂σ σ
et que le tenseur N ainsi défini (« normale » à la surface seuil de plasticité définie par f (σ, p) =
0) est de norme unité (kN k = (N : N )1/2 = 1). Enfin, on note qu’une conséquence immédiate
de la règle de normalité sous sa forme (6.8c) ou (6.11) est l’incompressibilité plastique :
Tr(εP ) = 0
qui est en fait vérifiée pour tout critère f (σ) indépendant de la pression.
Le calcul numérique des structures élastoplastiques repose sur une démarche analogue, mais
doit prendre en compte deux caractéristiques supplémentaires :
(a) Les équations (6.12) définissent un problème d’évolution, dont la solution doit être re-
cherchée comme fonction de l’espace et du temps ;
(b) La relation contrainte-déformation n’est plus instantanée (contrairement à (5.12c) pour
l’élasticité non linéaire), la contrainte σ(x, t) dépendant de l’histoire des variables at-
tachées au point x.
Discrétisation temporelle, résolution pas à pas. Pour prendre en compte (de façon approchée)
le caractère évolutif de la solution recherchée, on introduit une suite de M + 1 instants discrets
régulièrement espacés2 t0 = 0, t1 = ∆t, . . . , tM = M∆t = T (le pas de temps est donc ∆t =
T /M). L’algorithme de résolution a alors pour but l’évaluation de tous les champs mécaniques
(déplacement ξ, déformation ε, déformation plastique εP , contrainte σ) aux instants tn (0 ≤
n ≤ M). On met pour cela en œuvre une approche qualifiée d’incrémentale : l’état mécanique
est évalué successivement, de proche en proche, aux instants t0 , t1 , . . . , tM . Plus précisément,
en adoptant la notation abrégée fn (x) pour désigner la valeur f (x, tn ) prise par tout champ
f (x, t) à l’instant tn , l’approche incrémentale consistera à déterminer l’état mécanique Sn+1 =
{ξ n+1 , εn+1 , εPn+1 , σ n+1 } à l’instant tn+1 connaissant l’état mécanique Sn = {ξ n , εn , εPn , σ n } à
l’instant tn et le chargement (f n+1 , ξ D n+1
,TD 3
n+1 ) appliqué à t = tn+1 .
Discrétisation spatiale, approche par les déplacements. Pour la résolution numérique à cha-
que pas de temps, une approximation de Ω et des champs cinématiques (déplacement inconnu
ξ, champs virtuels) par éléments finis, reposant sur les principes développés au chapitre 2, est
utilisée.
Comme pour l’élasticité linéaire (chapitres 3 et 4) ou non linéaire (chapitre 5), la construc-
tion des équations du problème approché prend appui sur la formulation faible de l’équilibre.
Ici, la formulation faible des conditions d’équilibre (6.12b) et (6.12f) à l’instant tn+1 est
Z Z Z
σ n+1 : ε[w] dV = ρf n+1 .w dV + TD
n+1 .w dS ∀w ∈ C(0) (6.13)
Ω Ω ST
La technique considérée ici pour l’approximation par éléments finis, dite « approche par les
déplacements », confère au champ de déplacement le statut d’inconnue principale, les autres
grandeurs étant traitées comme des grandeurs secondaires4 . Elle conduit à chercher à expri-
mer, en chaque point du domaine, la contrainte σ n+1 en fonction du déplacement ξ n+1 et de
l’ensemble, noté Sn , des variables mécaniques à t = tn , de façon à transformer (6.13) en une
équation non linéaire dont l’inconnue est le champ ξ n+1 . Le calcul de la solution pourra alors
reposer, à chaque pas de temps, sur un algorithme itératif recherchant ξ n+1 selon un procédé
qui sera inspiré de celui proposé pour l’élasticité non linéaire. La suite de ce chapitre, et le
chapitre 7, consiste essentiellement à développer et mettre en œuvre cette démarche.
On retiendra donc, à ce stade, le caractère incrémental et itératif de la stratégie de calcul
d’une structure élastoplastique que les remarques qui précèdent dessinent : caractère incrémen-
tal (pas à pas) de l’intégration temporelle, nature itérative de l’algorithme de résolution d’équa-
tions non linéaires fournissant la solution à chaque pas de temps.
2
L’hypothèse du pas de temps constant ∆t = T /M n’est pas impérative mais simplifie l’analyse et l’algorithme.
3
L’expression anglo-saxonne time-marching scheme est parlante.
4
Il existe par ailleurs des « formulations mixtes » et des « formulations hybrides » faisant intervenir des
représentations de champs de contrainte ; celles-ci ne sont pas abordées dans ce cours.
96 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
où le résidu R(ξ n+1 ; w, Sn ) est défini en termes de l’algorithme F (qui reste à spécifier) par
Z Z Z
R(ξ n+1 ; w, Sn ) = F(ξ n+1 ; Sn ) : ε[w] dV − ρf n+1 .w dV − TD
n+1 .w dS (6.17)
Ω Ω ST
La résolution numérique d’un pas de temps associe donc des phases de calcul de nature
locale et de nature globale :
• Le problème d’intégration du comportement élastoplastique sur un pas de temps, symbo-
lisé par (6.15), est de nature strictement locale ;
• La résolution de l’équilibre sous la forme faible (6.16) nécessite un traitement global,
étendu à toute la structure analysée.
L’intégration du comportement élastoplastique sur un pas de temps est l’objet du reste de ce
chapitre, la résolution du problème global d’équilibre étant traitée au chapitre 7.
Cette différence finie peut être considérée comme l’approximation de ε̇Pn (schéma « explicite »),
ou de ε̇Pn+1 (schéma « implicite »), ou encore de ε̇P à un instant intermédiaire entre tn et tn+1 .
Comme on le verra plus en détail au chapitre 8 à propos de l’intégration en temps de l’équation
de la chaleur instationnaire, les propriétés (stabilité, précision) des schémas numériques sont
alors susceptibles de dépendre de ce choix d’affectation de la différence finie. Il est en particulier
fréquent que la variante « implicite » conduise à un schéma d’intégration en temps stable pour
tout choix de pas de temps ∆t tandis que la stabilité de la variante « explicite » n’est acquise
que pour des pas de temps suffisamment petits (et donc au prix d’un nombre éventuellement
élevé de pas de temps).
Pour ces raisons, on retient ici un traitement de type implicite : les relations de compor-
tement (6.8a,b,c) sont écrites à l’instant final t = tn+1 et les différences finies approchent des
vitesses à cet instant final. La forme discrète en temps ainsi obtenue des relations de comporte-
ment, qui servira de base à la procédure d’intégration locale, est :
Dans ces équations, ∆en = K : ∆εn est la partie déviatorique de l’incrément de déformation
∆εn imposé à l’élément de matière, la notation ∆pn = pn+1 − pn désigne l’incrément (pour
l’instant inconnu) de déformation plastique cumulée, et N n+1 désigne la normale unitaire (pour
l’instant inconnue) à la surface de plasticité finale.
σ elas
n+1
= σ n + [3κJ + 2µK] : ∆εn soit selas
n+1
= sn + 2µ∆en , (6.19)
ce qui revient à faire (temporairement) l’hypothèse d’une évolution purement élastique (et donc
en particulier telle que ∆pn = 0) des contraintes entre les instants tn et tn+1 .
La fonction seuil f (σ, p) = σ eq − R(p) étant par hypothèse convexe (section 6.1.5), on a
∂f ∂f
f (σ elas
n+1 n
, p ) − f (σ n+1 , pn + ∆pn ) ≥ (σ elas
n+1
− σ n+1 ) : (σ n+1 ) − ∆pn (pn + ∆pn )
∂σ ∂p
par application directe de la propriété caractéristique d’une fonction convexe f (z) différentiable
De plus, la partie élastique (6.18a) du comportement et la règle de normalité sous forme discrè-
te (6.18c) entraı̂nent que
q
σ elas
n+1
− σ n+1 = A : ∆εn − A : (∆εn − ∆εPn ) = A : (∆εPn ) = 3
2
∆pn A : N n+1
98 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
de sorte que
∂f ∂f
(σ elas
n+1
− σ n+1 ) : (σ n+1 ) − ∆pn (pn + ∆pn )
∂σ ∂p
3
= ∆pn N n+1 : A : N n+1 + ∆pn R0 ((pn + ∆pn ) ≥ 0
2
en raison de l’hypothèse (6.9(ii)) sur la fonction R(p) et du caractère défini positif de la forme
quadratique associée à A. On a ainsi prouvé l’inégalité
f (σ elas
n+1 n
, p ) ≥ f (σ n+1 , pn + ∆pn ) (6.20)
Deux possibilités se présentent alors :
• Si f (σ elas
n+1 n
, p ) ≤ 0, alors l’inégalité (6.20) entraı̂ne f (σ n+1 , pn + ∆pn ) < 0. L’état final
σ n+1 résulte donc d’une évolution purement élastique sur le pas de temps, et la prédiction
élastique σ elas
n+1
est correcte :
σ n+1 = σ elas
n+1
εPn+1 = εPn pn+1 = pn
• Si f (σ elas
n+1 n
, p ) > 0, alors la prédiction élastique σ elas
n+1
n’est pas plastiquement admissible,
E
et en particulier ∆εn = 6 ∆εn . Il faut donc supposer une variation de déformation plastique
durant le pas de temps, et donc ∆pn > 0. La condition de complémentarité discrète
∆pn f (σ n+1 , pn +∆pn ) = 0 implique alors f (σ n+1 , pn +∆pn ) = 0 : la contrainte finale est
sur la surface de plasticité finale. Dans ce cas de figure, les relations de comportement en
temps discret (6.18a,c) se réduisent alors aux équations
q
σ n+1 = σ elas
n+1
− 2µ∆εPn , ∆εPn = ∆pn 3
N
2 n+1
, ∆pn > 0
Il en ressort que la correction σ n+1 − σ elas
n+1
à apporter à la prédiction élastique σ elas
n+1
pour
obtenir σ n+1 est dirigée selon la normale à la surface de plasticité finale. En d’autres
termes, σ n+1 est la projection orthogonale de σ elas
n+1
sur la surface de plasticité finale (fi-
gure 6.5) :
σ n+1 = P (σ elas
n+1
) (6.21)
On note que l’étape de correction est de nature implicite car la surface f (σ n+1 , pn+1 ) = 0 dépend
de l’état final via pn+1 . On va maintenant approfondir cette procédure et préciser l’algorithme
de retour radial permettant de réaliser l’intégration du comportement sur le pas de temps ∆t.
s elas
n+1
f(σ,pn+1 )=0
s n+1
sn
f(σ,pn )=0
Compte tenu de la règle de normalité sous sa forme (6.18c), cette relation se met après élimina-
tion de ∆εPn sous la forme
q
sn+1 = selas
n+1
− 2µ 3
2
∆pn N n+1 (6.23)
Par définition (6.11) de la normale à la surface de plasticité pour le critère de von Mises, on a
q
2 eq
sn+1 = σ N
3 n+1 n+1
1 q 1
N n+1 = selas = 3
2
elas
elas,eq sn+1 = N elas (6.24)
ksn+1 k n+1
elas
σn+1 n+1
sn
f(σ ,pn )=0
Figure 6.6: Interprétation géométrique de l’algorithme de retour radial : calcul de σ n+1 par prédiction
élastique σ elas
n+1
et détermination de σ n+1 comme intersection de la direction radiale passant par
σ elas
n+1
avec la surface de plasticité finale f (σ, pn+1 ) = 0
100 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
Enfin, l’évolution de la contrainte au cours du pas de temps n’étant pas purement élastique par
eq
hypothèse, la contrainte finale doit être sur le seuil de plasticité : σn+1 − R(pn + ∆pn ) = 0,
c’est-à-dire
elas,eq
σn+1 − 3µ∆pn − R(pn + ∆pn ) = 0. (6.26)
Cette égalité permet la détermination de ∆pn , les autres termes étant par hypothèse connus
(ils dépendent soit de l’état initial Sn , soit de l’incrément de déformation prescrit ∆εn ). Elle
constitue en fait la forme discrète de la condition de cohérence exprimant que la matière reste
en charge plastique au cours de l’incrément.
Récapitulant les étapes précédemment décrites, on obtient l’algorithme de retour radial
pour l’intégration incrémentale des relations de comportement :
Algorithme de retour radial. q
elas,eq 3
(a) Former selas
n+1
= s n
+ 2µK : ∆ε n
(prédicteur élastique) ; calculer σn+1 = 2
kselas
n+1
k;
elas elas,eq
(b) Calcul de fn+1 = f (σ elas
n+1 n
, p ) = σn+1 − R(pn ) et test :
elas
• Si fn+1 ≤ 0, actualiser par
σ n+1 = σ elas
n+1
= 3κTr(∆εn )1 + selas
n+1
, εPn+1 = εPn , pn+1 = pn (FIN)
elas
• Si fn+1 >0:
(i) Résoudre (6.26) par rapport à ∆pn
(ii) Calculer l’incrément de déformation plastique :
3∆pn
∆εPn = elas,eq selas
2σn+1 n+1
(iii) Actualiser les variables mécaniques :
εPn+1 = εPn + ∆εPn , pn+1 = pn + ∆pn
σ n+1 = selas
n+1
+ κTr(∆εn )1 − 2µ∆εPn . (FIN)
6.3.5 Généralisation
La forme σ n+1 = F(∆εn , Sn ) de schémas d’intégration locale des relations de comporte-
ment, et en particulier l’idée de trouver σ n+1 par projection de σ elas
n+1
sur la surface seuil ac-
6.3. Intégration locale du comportement élastoplastique 101
tuelle, est applicable à beaucoup d’autres modèles de comportement non linéaire, notamment
élastoplastiques mais aussi viscoplastiques. La notion de retour radial, c’est-à-dire le fait que
cette projection se fasse selon la direction radiale émanant du centre du convexe d’élasticité,
est liée à l’hypothèse d’isotropie dans l’espace des contraintes du critère considéré (von Mises
ici) ; certains critères ne la vérifient pas. Le lecteur intéressé par une présentation plus complète
de l’algorithmique associée aux modèles de comportement mécanique pourra se reporter aux
ouvrages de Simo et Hughes (1998) et de Besson, Cailletaud, Chaboche et Forest (2001).
D’autre part, utilisant la règle de normalité sous la forme (6.11) en temps continu, on a
Z tn+1 q Z tn+1
∆εPn = εPn+1 − εPn = P
ε̇ (u) du = 3
2
ṗ(u)N (u) du (6.29)
tn tn
c’est-à-dire la règle de normalité (6.18c) formulée en temps discret. Les autres rela-
tions de (6.18a,b,c) ne faisant pas intervenir d’approximation, les relations de compor-
tement (6.18a,b,c) en temps discret se déduisent exactement de celles (6.8a,b,c) en temps
continu, le passage en temps discret n’introduisant pas d’erreur. Cette situation corres-
pond au cas où le prédicteur élastique σ elas
n+1
est colinéaire à la contrainte initiale σ n (fi-
gure 6.6).
(ii) La normale N à la surface de charge varie pour tn ≤ t ≤ tn+1 . Dans ce cas, on a
q q Z tn+1
∆εPn − ∆pn 3
N
2 n+1
= 3
2
ṗ(u)[N (u) − N n+1 ] du
tn
et l’intégrale au second membre reflète l’erreur commise par passage en temps discret.
On voit que le niveau de cette erreur augmente avec l’écart à la radialité N (u)−N n+1 sur
le pas de temps.
6.3.7 Exemple
On a vu que l’algorithme de retour radial réalise l’intégration exacte sur un pas de temps
quand les évolutions de contrainte sont radiales, c’est-à-dire colinéaires dans l’espace des con-
traintes à l’état de contrainte au début du pas de temps. C’est en particulier le cas pour la
traction-compression uniaxiale d’une éprouvette cylindrique.
L’exemple qui suit permet d’illustrer le fonctionnement de l’algorithme de retour radial sur
une situation simple (champs de déformation et de contrainte homogènes) mais non radiale.
Pour cela, on considère, sous l’hypothèse des déformations planes, un solide dont la section
102 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
h q(t)
h x
L L
Le matériau constitutif du solide est homogène, isotrope, élastique parfaitement plastique. L’état
initial est naturel. Le trajet de chargement considéré consiste à augmenter le déplacement im-
posé q(t) à partir de 0. La solution exacte de ce problème est traitée dans le cours de Suquet
(2004). Les seules composantes non nulles des déformations et des contraintes sont εxx , εyy et
σxx , σzz . La particularité de cet exemple réside en ce que, quand la charge de première plas-
tification q0 est atteinte, il est possible de poursuivre le chargement q(t) bien que le matériau
soit parfaitement plastique et que l’état de contraintes soit homogène. Le point représentatif des
états de contrainte (σxx , σzz ) ultérieurs se déplace alors sur la courbe f (σxx , σzz ) = 0 traduisant
le critère de von Mises, de sorte que ces évolutions ne sont pas radiales (figure 6.8).
On s’intéresse ici à l’intégration en temps discret par application de l’algorithme de retour
radial. Pour cela, à chaque instant tn , un incrément de déformation ∆εxx , ∆εyy est appliqué,
avec ∆εxx = ∆q/2L pour respecter les conditions de déplacement imposé. Les contraintes
σxx,n+1 , σyy,n+1 , σzz,n+1 sont alors calculées par l’algorithme de retour radial. L’équilibre du
solide impose de vérifier σyy,n+1 = 0, et la valeur de l’incrément ∆εyy est trouvée (par une
méthode de Newton) de façon à ce que l’état de contrainte vérifie cette condition.
Les résultats obtenus par intégration numérique, pour q(t) variant entre q0 et 6q0 (q0 étant
la valeur du déplacement imposé à laquelle la première plastification se produit), sont présentés
sur la figure 6.9, page 103. Les contraintes σxx , σzz sont tracées en fonction de la déformation
εxx . Trois découpages de l’intevalle [q0 , 6q0 ], qui joue le rôle d’intervalle temporel, ont été
σzz
B
A
σxx
O
Figure 6.8: Elongation d’un barreau en déformation plane : représentation dans le plan (σxx , σzz ) des tra-
jets de chargement élastique (de O à A) puis plastique (de A à B). La non-radialité de la partie
plastique du trajet de chargement apparaı̂t clairement.
6.3. Intégration locale du comportement élastoplastique 103
1.25
0.75
contrainte
0.5
σxx (exact)
0.25
σzz (exact)
σxx (numerique, 5 pas)
σzz (numerique, 5 pas)
0
0 -3
1×10
-3
2×10
-3
3×10 4×10
-3 -3
5×10
-3
6×10
εxx
1.25
0.75
contrainte
0.5
σxx (exact)
0.25
σzz (exact)
σxx (numerique, 20 pas)
σzz (numerique, 20 pas)
0
0 -3
1×10
-3
2×10
-3
3×10 4×10
-3 -3
5×10
-3
6×10
εxx
1.25
0.75
sigma
0.5
σxx (exact)
0.25
σzz (exact)
σxx (numerique, 50 pas)
σzz (numerique, 50 pas)
0
0 1×10
-3
2×10
-3
3×10
-3
4×10
-3
5×10
-3
6×10
-3
εxx
Figure 6.9: Elongation d’un barreau en déformation plane : comparaison des courbes déformation-
contrainte exacte et approchée par la méthode de retour radial en fonction du nombre de pas de
chargement utilisé à partir de l’apparition de la première plastification (haut : 5 pas, milieu : 20
pas, bas : 50 pas).
considérés : 5 pas (∆q = q0 ), 20 pas (∆q = q0 /4) et 50 pas (∆q = q0 /10). On voit en particulier
la convergence avec le nombre de pas de chargement. Les résultats pour 5 pas de chargement
apparaissent comme nettement moins précis que les autres, traduisant le fait que l’écart à la
radialité sur chaque pas de chargement est alors trop grand.
104 C HAPITRE 6. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS LOCAUX
Chapitre 7
1
ε = (∇ξ + ∇T ξ) dans Ω × [0, T ] compatibilité (7.1a)
2
divσ + ρf = 0 dans Ω × [0, T ] équilibre (7.1b)
La condition initiale suppose en particulier que les valeurs initiales f (x, 0), ξ D (x, 0), T D (x, 0)
des sollicitations sont telles que la réponse à l’instant initial est dans le domaine élastique.
105
106 C HAPITRE 7. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS GLOBAUX
Problème approché par éléments finis. A ce stade, une approximation de Ω et des champs
cinématiques (déplacement inconnu ξ, champs virtuels) par éléments finis, reposant sur les prin-
cipes développés au chapitre 2, est introduite. Le problème global défini par (7.4) et (7.5) prend
alors la forme
{Rn+1 (Un+1 )} = {KEP n (Un+1 )} − {Fn+1 } = {0} (7.6)
où le N-vecteur {Un+1 } rassemble les inconnues nodales pour l’instant tn+1 , {KEP
n (U)} est
défini par Z
F(ε[∆ξ n ]; Sn ) : ε[w] dV = {W}T {KEP
n (U)}
Ω
et {Fn+1 } est le N-vecteur des forces généralisées associées aux efforts imposés à tn+1 :
Z Z
ρf n+1 .w dV + TD T
n+1 .w dS = {W} {Fn+1 }
Ω ST
Notons que, contrairement au cas de l’élasticité linéaire (chapitre 3), il n’est pas commode d’as-
sembler les contributions associées aux déplacements imposés dans une contribution {Fξn+1 } au
vecteur {Fn+1 } des forces généralisées {Fξn+1 } en raison du caractère non-linéaire en ξ n+1 de
F(ε[∆ξ n ]; Sn ).
Evolution élastoplastique de la contrainte. Dans ce cas, (7.12) donne, compte tenu de l’ex-
pression de ∆εPn donnée par l’étape (ii) de l’algorithme
∂σ n+1 ∂∆εPn ∂
∆pn elas
(∆εn ; Sn ) = A − 2µ = A − 3µ elas,eq sn+1 (7.14)
∂∆εn ∂∆εn ∂∆εn σn+1
7.2. Résolution par méthode de Newton avec opérateur tangent cohérent 109
elas,eq
Pour rendre cette formule explicite, il faut disposer des expressions des dérivées de selas
n+1
, σn+1
et ∆pn . Les deux premières sont faciles à établir :
∂ elas ∂
sn+1 = 2µK : ∆εn = 2µK (7.15a)
∂∆εn ∂∆εn
∂ elas,eq ∂ q 3 elas elas 1/2 q 3 2µ 3µ
σn+1 = (s : s ) = 2 elas elas 1/2 K : selas
2 n+1 n+1 n+1
= elas,eq selas
∂∆εn ∂∆εn (sn+1 : sn+1 ) σn+1 n+1
(7.15b)
La dérivée de ∆pn s’obtient par dérivation par rapport à ∆εn de la condition de cohérence (6.26)
dont ∆pn est solution. Avec l’aide de (7.15b), on obtient
3µ elas 0 ∂
elas,eq sn+1 − [3µ + Rn+1 ] ∆pn = 0
σn+1 ∂∆εn
0
(avec Rn+1 = R0 (pn+1 ) = R0 (pn + ∆pn )) dont la solution est donc
∂ 3µ 1 elas
∆pn = 0 elas,eq sn+1 (7.16)
∂∆εn 3µ + Rn+1 σn+1
Les identités (7.15a), (7.15b) et (7.16), appliqués à
∆pn
2µ∆εPn = 3µ elas,eq selas
σn+1 n+1
donnent
selas selas
!
∂ P n+1 n+1 déf
2µ ∆ε = 3µ(γ − β) elas,eq ⊗ elas,eq + 2µβK = D(∆εn ; Sn ) (7.17)
∂∆εn n σn+1 σn+1
avec
3µ∆pn Rn+1 3µ
β = elas,eq = 1 − elas,eq γ= 0
σn+1 σn+1 3µ + Rn+1
(la deuxième égalité dans la définition de β résulte de (6.26), avec la notation Rn+1 = R(pn+1 )).
elas,eq
Le tenseur D est d’ordre 4 et dépend (à travers β, γ, selas n+1
et σn+1 ) de Sn et de ∆εn . Il donne
la « correction plastique » à apporter aux modules d’élasticité A, de sorte que A − D soit
le tenseur des modules tangents reliant (au premier ordre en δε) les variations de contraintes
autour de σ n+1 = F(∆εn ; Sn ) aux variations de déformation autour de εn+1 = ε[ξ n ] + ∆εn . De
plus, D possède les mêmes symétries (1.13) que le tenseur A des modules élastiques, car (i) K
défini par (1.18) les possède, et (ii) selas
n+1
est un tenseur d’ordre 2 symétrique.
La dérivée de l’application F(∆ε; Sn ) est ainsi donnée dans le cas d’une évolution élasto-
plastique de la contrainte par
∂F
(∆εn ; Sn ) = A − D(∆εn ; Sn ) (7.18)
∂∆εn
Synthèse. La définition (7.10) et les résultats (7.13) et (7.18) conduisent ainsi à l’expression
recherchée de l’opérateur tangent local AEP :
A elas
si fn+1 < 0 (évolution élastique)
AEP (∆εn , Sn ) = (7.19)
A − D(∆ε(k) ; Sn ) si f elas > 0 (évolution élastoplastique)
n n+1
elas
où fn+1 = f (σ elas ) − R(pn ) est le critère calculé dans l’hypothèse d’une évolution de contrainte
purement élastique.
elas
On note que l’application F(∆εn , Sn ) est différentiable par rapport à ∆εn si (i) fn+1 < 0 ou
elas
(ii) fn+1 > 0. Le cas (i) correspond au cas où la contrainte finale est dans le domaine d’élasticité,
et le cas (ii) à une évolution élastoplastique avec variation non nulle de déformation plastique
110 C HAPITRE 7. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS GLOBAUX
∆pn (charge élastoplastique). En revanche, dans la situation limite où fn+1 = 0, qui correspond
à une évolution que l’on peut qualifier de « charge neutre » (contrainte finale sur le seuil de
plasticité mais absence de variation de déformation plastique, soit ∆pn = 0), l’application
F(∆εn , Sn ) n’est pas différentiable.
Le premier terme du second membre correspond bien sûr à l’opérateur de rigidité élastique
habituel, appliqué à la correction δξ (k)n+1
(x). Le second terme correspond à une « correction
plastique » de l’opérateur de rigidité. Son expression est similaire à celle de l’opérateur de
rigidité élastique (le tenseur A étant simplement remplacé par D). L’equation (7.8) prend, après
une discrétisation par éléments finis, la forme
(k) (k) (k) (k)
[Kn+1 ]{δU(k)
n } + {Rn+1 } = {0} avec [Kn+1 ] = [K] − [Dn+1 ] (7.21)
(k)
où [K] est la matrice de rigidité élastique, [Dn+1 ] la « correction plastique » de la rigidité cons-
truite par assemblage (au sens du chapitre 3) de l’opérateur de rigidité associé à D(∆ε(k) n
, Sn ),
(k) (k)
et {Rn+1 } = {R(Un+1 )} le résidu évalué pour l’itéré précédent.
Ecriture en notation de Voigt adaptée à l’assemblage. Sur le plan pratique, la méthode d’as-
semblage de la rigidité élastique [K] (section 3.3) est applicable au calcul de la matrice de
(k)
correction plastique [Dn+1 ], la seule différence étant le remplacement du tenseur d’élasticité A
par D. Il est donc utile de reformuler ce dernier dans le cadre de la notation matricielle (« no-
tation de Voigt », section 2.2.6) adaptée à la programmation, associée à la représentation (2.30)
des déformations et contraintes sous forme de vecteurs à 6 composantes (en dimension 3). Pour
ce faire, on établit facilement que l’opération ε → K : ε s’écrit en termes d’une matrice [K] :
2/3 −1/3 −1/3
0 0 0
−1/3 2/3 −1/3 0 0 0
−1/3 −1/3 2/3 0 0 0
K : ε = [K]{ε} avec [K] =
0
0 0 1/2 0 0
0 0 0 0 1/2 0
0 0 0 0 0 1/2
De même, le déviateur et la contrainte équivalente associés à une contrainte σ générique s’écri-
vent, avec ces notations :
1
{s} = {σ} − (σ11 + σ22 + σ33 ){1 1 1 0 0 0}T
3
/2
3
σ eq = s211 + s222 + s233 + 3s212 + 3s213 + 3s223
2
(k)
On associe alors au tenseur de correction plastique D défini par (7.17) la matrice [Dn+1 ] ∈ R6×6
donnée par
(k) 3µ(γ − β) elas
[Dn+1 ] = {s }{selas }T + 2µβ[K] (7.22)
(σ elas,eq )2
7.2. Résolution par méthode de Newton avec opérateur tangent cohérent 111
(k)
L’assemblage de la matrice de correction plastique [Dn+1 ] suit alors exactement la procédure
d’assemblage de la matrice de rigidité élastique décrite en section 3.3, la matrice [A] étant
(k)
simplement remplacée par la matrice [Dn+1 ].
(k) (k)
Il est important d’insister sur le fait que D, et par suite [Dn+1 ], dépend de Sn et ξ n+1 et est
(k)
donc pour cette raison une fonction du point. En particulier, [Dn+1 ] = [0] à tous les points pour
lesquels l’évolution calculée sur la base de l’incrément ∆ξ (k+1)
n
est élastique.
(k)
Commentaires. La matrice [Kn+1 ] définie par (7.21b) est la matrice tangente élastoplastique
globale. Elle se réduit à la matrice de rigidité élastique en l’absence de plasticité dans la struc-
ture. Elle est aussi connue sous le nom de matrice tangente cohérente1 , l’adjectif « cohérent »
(k)
se référant au fait que [Kn+1 ] est la matrice tangente correcte associée à la méthode de Newton
(et donc cohérente avec cette méthode).
La méthode de Newton « cohérente », c’est-à-dire fondée à chaque itération sur la matrice
(k+1)
tangente cohérente [Kn+1 ], présente l’avantage d’une convergence quadratique au voisinage
(k+1)
de la solution ξ n+1 . Le prix à payer est le calcul à chaque itération de la matrice [Kn+1 ]. La
matrice de rigidité élastique [K] étant calculée une fois pour toutes au début de la procédure
(k+1)
incrémentale-itérative, il faut en fait calculer à chaque itération la correction plastique [Dn+1 ].
Le coût de ce calcul dépend de la proportion du domaine actuellement affectée par la plasti-
(k+1)
cité, puisque les matrices élémentaires dont l’assemblage constitue [Dn+1 ] ne sont non nulles
que sur les éléments pour lesquels l’évolution calculée sur la base de l’incrément ∆ξ (k+1) n
est
plastique pour au moins un point de Gauss.
Comme cela a déjà été mentionné au chapitre 6, des schémas d’intégration en temps discret
de la forme ∆εn → F(∆εn , Sn ) existent pour une grande variété de modèles de comportements.
La notion d’opérateur tangent cohérent, exposée ici pour une classe particulière de comporte-
ment élastoplastique, a ainsi une portée beaucoup plus générale.
Dans les modèles de plasticité courants tels que celui considéré dans ce chapitre, la partie
plastique de la déformation est incompressible. Cette incompressibilité modélise le fait que les
déformations plastiques dans les métaux se produisent par glissements dans le réseau cristallin,
et donc sans variation de volume (Suquet, 2004).
Quand le chargement croı̂t au-delà de sa valeur de première plastification (en-dessous de
laquelle toute la structure se déforme élastiquement), la déformation est susceptible de devenir
progressivement dominée par sa partie plastique, et tend ainsi vers un état de déformation in-
compressible. Cette situation est d’autant plus susceptible de se produire que l’écrouissage du
matériau est faible (cas-limite de la plasticité parfaite). Or, le traitement numérique de l’incom-
pressibilité introduit des difficultés.
qui est donc aussi le nombre de liaisons introduites par l’incompressibilité. D’autre part, un
problème en déformations planes posé sur ce maillage a a priori N = 2(NIN + NTN ) incon-
nues compte tenu des déplacements imposés aux NξN nœuds de Sξ . Le nombre d’inconnues
indépendantes une fois imposées les liaisons d’incompressibilité est donc donné par
Ce nombre est beaucoup plus petit que N, et peut même être négatif si plus de la moitié des
nœuds de la frontière sont bloqués ! On voit donc que les liaisons cinématiques peuvent bloquer
(presque ou totalement) la réponse cinématique. A titre d’exemple, le maillage de la figure 7.1
comporte 30 éléments et 24 nœuds. Avec une hypothèse d’encastrement du côté vertical gauche,
il reste 10 inconnues effectives une fois prises en compte les liaisons d’incompressibilité.
Les difficultés à surmonter dans les cas de déformations plastiques incompressibles élevées
ont été initialement soulevées dans l’article de Nagtegaal, Parks et Rice (1974). Des techniques
d’interpolations par éléments finis adaptées à l’incompressibilité plastique ont depuis été pro-
posées, comme par exemple la méthode dite « B̄ », présentée par exemple dans l’ouvrage de
Simo et Hughes (1998), qui repose sur une redéfinition de la matrice [B] réalisant sur un élément
fini le passage entre déplacements nodaux et déformations aux points de Gauss de l’élément
(section 2.2.5).
Figure 7.1: Exemple de maillage par éléments triangulaires linéaires : 30 éléments, 24 nœuds, déplacement
imposé sur le bord gauche. Il reste 10 inconnues nodales après prise en compte des liaisons
d’incompressibilité.
Cette variante suit l’idée de la méthode de Newton modifiée avec direction de recherche
constante présentée en section 5.3.3 pour une équation scalaire. Elle repose sur le remplacement
de la matrice tangente cohérente [KEP ] par une matrice « tangente » constante [K̂]. L’avantage
de cette simplification est une réduction du temps de calcul consommé par une itération. On
perd en revanche la propriété de convergence quadratique de la « vraie » méthode de Newton
(voir section 5.3.3). Le calcul d’une structure peut encore être présenté sous la forme de trois
algorithmes emboı̂tés :
Algorithme 1 bis
Procédure complète de calcul incrémental-itératif, au niveau de la structure entière ;
Algorithme 3 bis (appelé pour chaque point de Gauss du maillage par l’algorithme 2) :
Intégration locale du comportement sur un pas de temps.
7.4 Exemples
Cette section a pour but de présenter deux exemples. Le premier (section 7.4.1) a pour
but d’illustrer le fonctionnement des algorithmes décrits aux sections 7.2 et 7.3. Le second
(section 7.4.2) correspond à une application dans le domaine de l’industrie automobile.
x2
B
0,5
0,75 0,5 1,5
Q(t) Q(t)
x1
Figure 7.2: Eprouvette entaillée en traction : géométrie et chargement (haut) et maillage (bas).
Le matériau constitutif est supposé élastoplastique et représenté par les relations de com-
portement (7.12c,d), avec une loi d’écrouissage isotrope linéaire
R(p) = σ0 + hp
Les paramètres de comportement utilisés sont : ν = 0, 3, σ0 = 0, 88E. Deux cas d’écrouissage
sont envisagés : h = 0 (écrouissage nul, c’est-à-dire plasticité parfaite) ou h = 0, 05E. Avec
cette définition des paramètres de comportement, et compte tenu du mode de chargement par
effort imposé (voir plus loin), les contraintes ne dépendent pas du module de Young E et les
déformations sont inversement proportionnelles à E. La valeur de E a ici été prise égale à l’unité
par commodité.
L’éprouvette est chargée en traction simple dans la direction horizontale : une traction uni-
forme d’intensité Q(t) par unité de surface est appliquée aux bords extrêmes comme schématisé
sur la figure 7.2a. Le chargement Q(t) est lentement croissant, à partir d’une valeur initiale nulle.
Les autres frontières sont libres de contraintes. Pour bloquer les trois degrés de liberté rigides a
priori permis par ce chargement, on impose en plus les liaisons
ξ1 (A) = ξ2 (A) = ξ1 (B) = 0
Avec la valeur de σ0 /E adoptée ici, un calcul purement élastique (fait par exemple pour Q = 1)
montre que la première apparition de plasticité se produit pour Q = Q0 ≈ 0.08024 .
0.7
0.6
0.5
0.4
Q
0.3
0.2
0.1
0
0 2 4 6 8 10
q
Figure 7.3: Eprouvette entaillée en traction, matériau parfaitement plastique (h = 0) : force de traction en
fonction de l’allongement (en variables adimensionnelles).
n 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
(a) [KEP ] 1 4 4 4 4 5 6 7 8 8
(b) [K̂] = [K1n+1 ] 1 18 25 40 46 74 120 147 79 190
(c) [K̂] = [K] 1 18 44 109 227 380 821 1259 1396 3639
Tableau 7.1: Eprouvette entaillée en traction, matériau parfaitement plastique (h = 0) : nombre d’itérations
pour chaque pas de chargement : méthode de Newton avec matrice tangente cohérente
(a), méthode de Newton modifiée utilisant la matrice tangente élastoplastique calculée à la
première itération pour chaque pas de temps (b), méthode de Newton modifiée utilisant la
matrice de rigidité élastique (c).
Figure 7.4: Eprouvette entaillée en traction, matériau parfaitement plastique (h = 0) : carte de déformation
plastique cumulée à l’instant final (n = 10).
La figure 7.3 montre la relation entre Q et une variable cinématique q proportionnelle à l’ex-
tension longitudinale. La valeur finale du chargement choisie ici apparaı̂t comme proche de la
charge limite de la structure. La figure 7.4 présente la distribution de déformation plastique
cumulée au stade final du chargement.
Le tableau 7.1 présente une comparaison des nombres d’itérations requis pour chaque pas
(k+1)
de temps, le critère de convergence étant k{Rn+1 }k < k{Fn+1 }k avec une tolérance relative
= 10−4 . On note en particulier que l’emploi de la matrice de rigidité élastique comme direction
de recherche dans la méthode de Newton modifiée conduit à des nombres d’itération prohibitifs
pour les pas de chargement finaux. cela est dû à l’hypothèse de plasticité parfaite et au fait que le
chargement final est proche de la charge limite (la courbe force-allongement s’approchant pour
ces raisons de l’horizontale). La convergence de la méthode de Newton « cohérente » (basée
sur l’opérateur tangent [KEP ]) demande très peu d’itérations, même pour les pas de chargement
finaux, mais chaque itération est plus chère en temps de calcul en raison de la nécessité dans
7.4. Exemples 119
0.9
0.8
0.7
0.6
0.5
Q
0.4
0.3
0.2
0.1
0
0 2 4 6 8 10
q
Figure 7.5: Eprouvette entaillée en traction, matériau plastique avec écrouissage isotrope linéaire (h =
0, 05E) : force de traction en fonction de l’allongement (en variables adimensionnelles).
n 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
(a) [KEP ] 1 3 3 3 4 5 5 5 5 5
(b) [K̂] = [K1n+1 ] 1 16 18 23 27 40 74 70 44 52
(c) [K̂] = [K] 1 16 34 54 59 80 102 113 128 147
Tableau 7.2: Eprouvette entaillée en traction, matériau plastique avec écrouissage isotrope linéaire (h =
0, 05E) : nombre d’itérations pour chaque pas de chargement : méthode de Newton avec
matrice tangente cohérente (a), méthode de Newton modifiée utilisant la matrice tangente
élastoplastique calculée à la première itération pour chaque pas de temps (b), méthode de
Newton modifiée utilisant la matrice de rigidité élastique (c).
n 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Q 0 0,08 0,16 0,24 0,32 0,40 0,48 0,56 0,64 0,72 0,8
Cet exemple provient d’un travail de recherche réalisé par Constantinescu, Charkaluk, Le-
derer et Verger (2004) dans le cadre d’une collaboration entre PSA Peugeot Citroën et deux
laboratoires publics (LMS, Ecole Polytechnique et LML, université de Lille), portant sur l’ana-
lyse à la fatigue de composants de moteurs automobiles. Plus spécifiquement, il s’agit d’estimer
par le calcul le nombre Nrupt de cycles de démarrage / fonctionnement / arrêt d’un moteur pou-
vant conduire à la rupture par fatigue d’un prototype de collecteur de gaz d’échappement.
120 C HAPITRE 7. C ALCUL DE SOLIDES ÉLASTOPLASTIQUES : ASPECTS GLOBAUX
Figure 7.6: Prototype de collecteur d’échappement : champ de température calculé (haut) ; évolution ther-
mique typique en deux points, avec comparaison entre mesures et simulation (bas). D’après
Constantinescu et al. (2004).
Figure 7.7: Prototype de collecteur d’échappement : champs de déformation plastique cumulée (haut) et
de contrainte équivalente de von Mises (bas) obtenus une fois l’état stabilisé atteint. D’après
Constantinescu et al. (2004).
7.4. Exemples 121
Figure 7.8: Prototype de collecteur d’échappement : distribution du critère de fatigue calculé à l’aide des
champs élastoplastiques de la figure 7.7. D’après Constantinescu et al. (2004).
Ce chapitre aborde la résolution numérique par éléments finis pour la thermoélasticité dé-
couplée. Il s’agit de situations où la réponse de la structure (supposée ici élastique linéaire et
dans le cadre HPP) résulte de l’incompatibilité des déformations qu’un champ de température
tend à engendrer en raison de la dilatation thermique du matériau.
Le calcul de la réponse thermoélastique nécessite la connaissance du champ de température.
Une fois celui-ci connu, il est facile de le prendre en compte dans la formulation éléments finis
du problème mécanique sous la forme d’un terme de type force généralisée. C’est pourquoi ce
chapitre est pour une grande part consacré au calcul numérique du champ de température. Si
celui-ci correspond à un état d’équilibre, il vérifie l’équation de Laplace avec des conditions aux
limites appropriées, et le traitement numérique du problème thermique est alors essentiellement
une forme simplifiée du traitement de l’élasticité linéaire.
Cependant, les chargements thermiques sont fréquemment évolutifs dans le temps, en raison
de la conduction de la chaleur dans le solide. La conduction est souvent un phénomène lent
et progressif, et l’hypothèse d’une réponse thermomécanique quasistatique de la structure est
alors raisonnable. Ce chapitre aborde ainsi l’intégration en temps des équations de l’évolution
thermique, le champ de température obtenu à chaque instant étant utilisé comme donnée d’un
problème mécanique d’équilibre.
Après un rappel des équations de la thermoélasticité linéaire et de leur formulation va-
riationnelle (section 8.1), la résolution numérique du problème thermique instationnaire est
abordée. La section 8.2 détaille la semi-discrétisation en espace par éléments finis. L’intégration
numérique en temps discret du système d’équations différentielles issu de la semi-discrétisation
est l’objet de la section 8.3. La méthode de calcul numérique de la réponse thermoélastique de la
structure est enfin abordée en section 8.4, une application à un composant de moteur automobile
étant présentée en section 8.5.
123
124 C HAPITRE 8. E VOLUTION THERMIQUE ET THERMO ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
dans lesquelles le champ de température T (x, t) résulte d’un calcul thermique préliminaire et
est supposé connu, et les conditions aux limites
Compte tenu de l’équation d’équilibre (8.2c) et des conditions aux limites (8.2d) et (8.2e), on a
Z
(v, τ ) ∈ C(0)×S(0, 0) =⇒ (τ : ε[v]) dV = 0
Ω
Le déplacement ξ solution est alors obtenu par minimisation de l’énergie potentielle sur
l’ensemble des déplacements cinématiquement admissibles à zéro :
ξ = arg min Pth (v) (8.8)
v∈C(0)
tandis que la contrainte solution σ est obtenue par minimisation de l’énergie complémentaire
sur l’ensemble des contraintes statiquement admissibles à zéro :
σ = arg min Pth? (τ ) (8.9)
τ ∈S(0,0)
Conditions aux limites. L’équation (8.16) doit être complétée par une condition aux limites en
tout point de ∂Ω. On ne considère dans ce chapitre que deux possibilités : flux de chaleur imposé
8.2. Conduction thermique instationnaire : semi-discrétisation en espace par éléments finis127
Conditions initiales. Enfin, il faut préciser les conditions initiales, c’est-à-dire donner le champ
de température à l’instant t = 0 :
Equilibre thermique. Les équations gouvernant l’équilibre thermique d’un corps se déduisent
simplement des équations (8.16) et (8.19) en supposant les grandeurs indépendantes du temps.
Il n’y a plus de conditions initiales dans ce cas, et les équations locales sont
Pour établir la formulation faible recherchée, fixons un instant t ∈ [0, tF ], multiplions l’équation
(8.16) par un champ virtuel v ∈ T (0) et intégrons le résultat sur Ω ; cela conduit à la relation
Z
∂T Z Z
ρc (x, t)v(x) dV − div (k∇T )(x, t)v(x) dV = g(x, t)v(x) dV
Ω ∂t Ω Ω
T (·, 0) = T0 (·)
128 C HAPITRE 8. E VOLUTION THERMIQUE ET THERMO ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
Nk (a)x(k)
X
x= a ∈ ∆(e) (8.24)
k=1
où le type d’élément fini utilisé est implicitement défini à travers le nombre N(e) de nœuds et le
choix des N(e) fonctions de forme Nk (a).
Le champ de température T (x, t) est alors approché en termes d’une semi-discrétisation en
espace fondée sur l’interpolation isoparamétrique. Sous sa forme globale (au sens conféré en
section 2.2.4, page 36, à ce terme), cette interpolation est de la forme
(0)
Ñn (x)T (x(n) , t) + Ñn (x)T D (x(n) , t) = Th (x, t) + T̂h (x, t)
X X
Th (x, t) = (8.25)
n∈I n∈D
où les Ñn (x) sont les fonctions de forme globales construites à partir des fonctions de forme
locales utilisées dans l’interpolation (8.24). La partition des numéros de nœuds définie, comme
au chapitre 2, par
{1, . . . , NN } = D ∪ I D = {n | x(n) ∈ Sth } , I − {1, . . . , NN } \ D
est utilisée dans la représentation (8.25) pour distinguer les nœuds du maillage supportant des
températures inconnues ou données. Le problème thermique étant scalaire, et la partition ∂Ω =
Sth ∪ Sq étant en général différente de celle ∂Ω = Sξ ∪ ST introduite pour les conditions aux
limites mécaniques, il faut définir une table d’inconnues thermiques DOFth , distincte de celle
DOF introduite à l’équation (2.25), telle que la température nodale inconnue portée par le nœud
x(n) ait le numéro DOFth (n).
Substituant tour à tour toutes les possibilités de champs virtuels de la forme
Ñn (x)v (n) ∈ T (0)
X
v(x) =
n∈I
dans laquelle {Ṫ(t)} désigne la dérivée temporelle du vecteur {T(t)} des températures nodales,
et les matrices [C], [M] et le vecteur {F(t)} découlent de la formulation faible (8.23) selon
Z
k∇T̂h (·, t).∇v dV −→ {V}T [C]{T(t)}
Ω
Z
∂ T̂h
ρc (·, t)v dV −→ {V}T [M]{Ṫ(t)}
ZΩ ∂t Z Z
D (0)
g(·, t)v dV − q (·, t)v dS − k∇Th (·, t).∇v dV −→ {V}T {F(t)}
Ω ∂Ω Ω
Schémas explicite et implicite. Dans la famille de schémas paramétrés par θ, on peut noter en
particulier les versions purement explicite (θ = 0) et purement implicite (θ = 1). Pour ces cas
particuliers, l’opération de transition {Tn } → {Tn+1 } définie par (8.31) s’écrit
[M]{Tn+1 } = ∆t{Fn } + [M] − ∆t[C] {Tn } (θ = 0, explicite) (8.32)
[M] + ∆t[C] {Tn+1 } = ∆t{Fn+1 } + [M]{Tn } (θ = 1, implicite) (8.33)
L’appellation « explicite » de la version (8.32) vient du fait qu’il est souvent possible, et légiti-
me, de remplacer la matrice [M] par une approximation diagonale [M̃], ce qui conduit à une
expression explicite de {Tn+1 } (cette notion sera repris au chapitre 9).
k=0
Cette expression n’est pas utilisée pour le calcul numérique mais permet de préciser la notion de
stabilité du schéma. Celle-ci est liée à la possibilité d’amplification d’erreurs sur les solutions
successives {Tn } : le schéma est considéré comme instable si la matrice [R] dans (8.34) est
telle qu’il existe une possibilité d’erreur sur {Tn } qui soit amplifiée par le produit [R]{Tn }. En
effet, si une telle erreur est présente, par exemple dans les conditions initiales {T0 }, le calcul de
[R]n+1 {T0 } va alors conduire aux instants ultérieurs à une erreur croissant exponentiellement
avec le temps discret. Il importe donc de déterminer les valeurs de ∆t et θ qui garantissent la
stabilité de l’intégration en temps, c’est-à-dire telles que pour toute erreur {δT}, on ait
k [R]{δT} k < k {δT} k (8.35)
L’étude de la stabilité est facilitée par une diagonalisation de [R], de manière à raisonner sur
des coefficients d’amplification scalaires. Dans ce but, on introduit, pour 1 ≤ I ≤ N, les valeurs
propres κI et les vecteurs propres {XI } solutions du problème aux valeurs propres généralisé2
[C]{X} − κ[M]{X} = {0} (8.36)
Les valeurs propres sont positives : κI > 0. Les vecteurs propres {XI } peuvent être choisis de
façon à former une base [M]-orthonormée et [C]-orthogonale de RN , c’est-à-dire :
{XI }T [M]{XI } = 1 {XI }T [M]{XJ } = 0 (J 6= I)
{XI }T [C]{XI } = κI {XI }T [C]{XJ } = 0 (J 6= I)
Posons alors
N N
αnJ {XJ } J
{XJ }
X X
{Tn } = {Tn+1 } = αn+1
J=1 J=1
2
La matrice [M] étant définie positive (et donc en particulier inversible) et les matrices [M] et [C] étant
symétriques, ce problème aux valeurs propres est bien posé et conduit bien à une diagonalisation simultanée des
matrices [M] et [C]. De plus, la matrice [C] est positive, ce qui entraı̂ne κI ≥ 0 pour tout I.
8.3. Conduction thermique instationnaire : intégration en temps discret 131
et reportons ces développements dans (8.31). Après multiplication de l’équation obtenue par
{XI }T pour I fixé et exploitation des relations de [M]-orthonormalité et [C]-orthogonalité des
vecteurs propres, (8.31) conduit à N équations scalaires découplées :
1 1
I I
+ θκ αn+1 = + (θ − 1)κ αnI + {XI }T {θFn+1 + (1 − θ)Fn }
I
∆t ∆t
soit
I
αn+1 = rI (θ, ∆t)αnI + yn+1
I
(8.37)
1 + (θ − 1)κI ∆t {XI }T {θFn+1 + (1 − θ)Fn }∆t
rI (θ, ∆t) = , y I
n+1 =
1 + θκI ∆t 1 + θκI ∆t
La condition de stabilité du schéma d’intégration temporelle peut alors être formulée en termes
des coefficients d’amplification scalaires rI (θ, ∆t) :
− 1 < rI (θ, ∆t) < 1 pour tout I, 1 ≤ I ≤ N (8.38)
Les valeurs de θ et ∆t doivent donc être choisies de façon à respecter, compte tenu de l’expres-
sion (8.37) de rI (θ, ∆t), les inégalités
κI ∆t
−2 < − <0 pour tout I, 1 ≤ I ≤ N
1 + θκI ∆t
La positivité de θ, κI et ∆t fait que l’inégalité de droite est toujours vérifiée. L’inégalité de
gauche devient
2 + (2θ − 1)κI ∆t > 0 pour tout I, 1 ≤ I ≤ N (8.39)
et montre qu’il faut distinguer deux cas :
(i) 1/2 ≤ θ ≤ 1 : les inégalités (8.39) sont vérifiées pour tout choix de ∆t, et les schémas
d’intégration temporelle (8.31) correspondants sont dits inconditionnellement stables.
(ii) 0 ≤ θ < 1/2 : les inégalités (8.39) ne sont vérifiées que si ∆t est choisi de sorte que
2 1
déf
∆t < (∆t)stab = min I (8.40)
1 − 2θ I κ
les schémas d’intégration temporelle (8.31) correspondants sont dits conditionnellement
stables. Un pas de temps trop grand, au sens du critère (8.40), donne un schéma (8.31)
instable.
8.3.5 Exemple
On propose d’illustrer le fonctionnement des schémas d’intégration implicite et explicite sur
un exemple simple d’évolution thermique, pour lequel une solution exacte est connue.
Un milieu thermiquement conducteur, de caractéristiques thermiques ρ, c, k, occupe une
sphère de rayon R. Il est initialement à la température T = 0. Une température T D constante
est imposée sur la surface r = R durant l’intervalle [0, tF ] (r étant la coordonnée sphérique
radiale), et la source volumique de chaleur g(x, t) est nulle. Dans ces conditions, le champ
de température est à symétrie sphérique. T = T (r, t). Compte tenu de la forme que prend le
laplacien dans ce cas, les équations régissant T (r, t) sont :
a ∂ 2 ∂T ∂T
r − = 0, T (r, 0) = 0 , T (R, t) = T D (0 ≤ r ≤ R , 0 ≤ t ≤ tF ) (8.44)
r2 ∂r ∂r ∂t
T=T d
r1 r2 rN
0.8
0.6
0.4
T / Te
0.2
exact
0 ∆t = 0.012
∆t = 0.0124
∆t = 0.0125
∆t = 0.0126
-0.2
∆t = 0.0127
-0.4
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
r/R
Figure 8.2: Sphère avec température extérieure imposée : température finale T (r, tF ) obtenue par
intégration explicite (N = 10 inconnues spatiales, (∆t)stab ≈ 1, 2433 10−2 ) pour plusieurs
choix de ∆t autour de (∆t)stab , et comparaison à la solution exacte.
1
0.8
0.6
0.4
T / Te
0.2
exact
0 ∆t = 0.0031
∆t = 0.00313
∆t = 0.00314
∆t = 0.00315
-0.2
-0.4
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
r/R
Figure 8.3: Sphère avec température extérieure imposée : température finale T (r, tF ) obtenue par
intégration explicite (N = 20 inconnues spatiales, (∆t)stab ≈ 1, 3086 10−3 ) pour plusieurs
choix de ∆t autour de (∆t)stab , et comparaison à la solution exacte.
qui permettra de quantifier la précision des résultats obtenus par intégration numérique.
La discrétisation spatiale du problème se résume donc à un découpage de l’intervalle 0 ≤
r ≤ R en N segments, que l’on prend ici de pas constant ∆r = R/N de façon à définir les
rayons r(1) = 0, . . . , r(n) = (n − 1)∆r, . . . , r(N) = (N − 1)∆r. La température inconnue est
représentée sous la forme d’une interpolation continue et linéaire par morceaux des valeurs
inconnues en ces points : {T(t)} = {T (1) (t), . . . , T (N) (t)}, avec T (n) (t) = T (r(n) , t). Il est
alors facile de mettre le problème (8.44) sous la forme semi-discrétisée en espace (8.26).
Les figures 8.2 à 8.5 montrent les résultats numériques pour le champ de température à l’ins-
tant final, T (r,F ), obtenus par les schémas explicite et implicite d’intégration en temps. Dans le
cas explicite, le pas de temps critique (∆t)stab a été calculé à l’aide de la résolution numérique
du problème aux valeurs propres généralisé (8.36). Les paramètres suivants ont été utilisés :
134 C HAPITRE 8. E VOLUTION THERMIQUE ET THERMO ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
0.8
0.6
0.4
T / Te
0.2
exact
0 ∆t = 0.012
∆t = 0.013
∆t = 0.015
∆t = 0.02
-0.2
∆t = 0.05
-0.4
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
r/R
Figure 8.4: Sphère avec température extérieure imposée : température finale T (r, tF ) obtenue par
intégration implicite (N = 10 inconnues spatiales) pour plusieurs choix de ∆t autour et com-
paraison à la solution exacte. Le choix du pas de temps n’affecte pas la stabilité de la solution
((∆t)stab ≈ 1, 2433 10−2 pour l’intégration explicite).
1
0.8
0.6
0.4
T / Te
0.2
exact
0 ∆t = 0.003
∆t = 0.005
∆t = 0.01
∆t = 0.025
-0.2
-0.4
0 0.2 0.4 0.6 0.8 1
r/R
Figure 8.5: Sphère avec température extérieure imposée : température finale T (r, tF ) obtenue par
intégration implicite (N = 20 inconnues spatiales) pour plusieurs choix de ∆t autour et com-
paraison à la solution exacte. Le choix du pas de temps n’affecte pas la stabilité de la solution
((∆t)stab ≈ 1, 3086 10−3 pour l’intégration explicite).
R = 1 m, k/ρc = 0, 1 m2 s−1 , tF = 1 s. Les figures 8.2 et 8.3 montrent les résultats obtenus par
intégration explicite pour N = 10 et N = 20 pas d’espace, respectivement. Plusieurs valeurs de
∆t, choisies très proches de la valeur critique (∆t)stab , ont été utilisées. On note dans les deux
cas l’apparition d’instabilités près de r = 0 pour les valeurs de ∆t supérieures à (∆t)stab . Des
valeurs de ∆t plus grandes conduisent à des solutions T (r,F ) calculées divergeant fortement de
la valeur exacte. Les figures 8.4 et 8.5, établies pour des valeurs de ∆t proches de (∆t)stab mais
aussi pour d’autres nettement supérieures à (∆t)stab , confirment expérimentalement la stabilité
inconditionnelle prédite par l’analyse du schéma implicite.
Sur le plan pratique, l’évaluation de ce terme repose sur une procédure d’assemblage dont le
principe suit l’assemblage de la matrice de rigidité élastique ou des forces généralisées associées
aux autres types de sollicitations, tel que présenté au chapitre 3. Pour résumer : l’intégration sur
Ωh ci-dessus résulte de la sommation des intégrations correspondantes sur chaque élément fini
(intégrales élémentaires) ; chaque intégrale élémentaire est évaluée par la méthode des points
de Gauss (section 3.2.3) ; les variables tensorielles sont écrites en notation matricielle de Voigt
(section 2.2.6) ; la température Th (·, t) est exprimée sur chaque élément à l’aide des valeurs
nodales et fonctions de forme, ce qu’on peut mettre sous la forme
Th (x, t) = {N (a)}T {Te (t)} x ∈ E (e) , x et a reliés par (8.24)
enfin le tenseur de déformation ε[wh ] est exprimé sur chaque élément en termes de l’interpola-
tion éléments finis au moyen de (2.29). Cette opération d’assemblage peut ainsi être résumée
par les formules
NE
T
{We }T {Fe (t)}
X
{W} {F(t)} = (8.45)
e=1
dans laquelle les composantes des vecteurs élémentaires {Fe (t)} et {We } sont définies en
numérotation locale, la force généralisée élémentaire {Fe (t)} étant évaluée par la formule
Z
{Fe (t)} = [B(a)]T {AV (a)}{N (a)}T {Te (t)}J(a) dV (a)
∆(e)
G
wg [B(ag )]T {AV (ag )}{N (ag )}T {Te (t)}J(ag )
X
≈ (8.46)
g=1
Remarque sur les interpolations thermique et mécanique. Tous les développements présentés
dans ce chapitre supposent implicitement que le même maillage est utilisé comme support des
calculs thermique et mécanique, ou plus précisément que les deux maillages sont tels que les
éléments coincident. Il est cependant utile de faire deux remarques :
(i) Il est possible d’utiliser deux maillages différents, et en particulier tels que les éléments
ne coincident pas. Dans ce cas, le calcul des forces nodales d’origine thermique (8.14)
nécessite une opération de « projection » dont le but est de définir le champ de températu-
re T̃h supporté par le maillage mécanique qui soit le plus proche du champ Th supporté
par le maillage thermique.
(ii) Il est par ailleurs conseillé d’utiliser pour ξ et T des interpolations dont la différence des
degrés est 1 (par exemple, pour des problèmes plans, utiliser des éléments triangulaires
à 6 nœuds pour ξ et à 3 nœuds pour T ), cela conduisant à des représentations de même
degré de la déformation ε[ξ] et de la déformation thermique εth .
136 C HAPITRE 8. E VOLUTION THERMIQUE ET THERMO ÉLASTICIT É LIN ÉAIRE
8.5 Application
On présente à titre d’illustration une application du calcul thermoélastique à l’analyse du
noyau d’eau d’une culasse diesel, aimablement communiquée par PSA Peugeot Citroën. Il
s’agit d’une zone intérieure de la culasse où de l’eau circule pour refroidir le bas de la cu-
lasse. Des fissurations dues à la fatigue polycyclique sont susceptibles de se produire dans cette
zone. Il est alors nécessaire de simuler l’essai de dimensionnement où l’on charge la culasse
à pression maximale en tenant compte du procédé de fabrication, qui inclut une trempe ther-
mique. La figure 8.6 présente le maillage créé pour cette étude. La figure 8.7 montre le champ
de température calculé pour une phase de la trempe (refroidissement inhomogène) ainsi que le
champ de pression hydrostatique (partie sphérique de la contrainte induite par le chargement
thermique), de façon à déterminer les zones soumises aux plus fortes tractions, qui sont celles
présentant les plus grands risques de rupture.
Figure 8.6: Maillage d’une culasse diesel. Document communiqué par PSA Peugeot Citroën.
Figure 8.7: Culasse diesel : champ de température pour une phase de la trempe (gauche) ; distribution de la
partie sphérique de la contrainte (droite). Documents communiqués par PSA Peugeot Citroën.
Chapitre 9
Ce chapitre aborde la résolution numérique, dans le cadre de la méthode des éléments finis,
des équations de la dynamique d’un solide à propriétés élastiques linéaires, dabns le cadre
habituel de l’hypothèse des petites perturbations.
Comme pour le chapitre précédent consacré (notamment) à la résolution des équations de la
conduction thermique instationnaire, on procède à deux discrétisations. La semi-discrétisation
par rapport aux coordonnées spatiales fait appel à la méthode des éléments finis, sous sa forme
« standard » pour l’analyse linéaire développée au chapitre 3. C’est pourquoi, ici encore, la
principale problématique abordée est celle de l’intégration en temps des équations d’évolution.
Après des rappels succincts sur l’élastodynamique (section 9.1) et la construction du problème
semi-discrétisé en espace par éléments finis (section 9.2), la famille à deux paramètres des
schémas d’intégration de Newmark, très couramment utilisée en analyse dynamique, est présen-
tée en section 9.3. La cohérence de ces schémas est établie, ainsi que les conditions sur les
paramètres et le pas de temps assurant sa stabilité. Le schéma « explicite » de la méthode des
différences centrées est également présenté, d’abord de façon indépendante en raison de son
caractère relativement intuitif (section 9.3.2), avant d’être établi comme l’un des schémas de
la famille de Newmark (section 9.3.7). Enfin, la section 9.4 traite du bilan d’énergie totale
associé aux schémas de Newmark, une méthode qui permet aussi d’anticiper et d’interpréter
leurs propriétés et notamment les conditions (choix de paramètres) pour lesquelles l’intégration
temporelle n’est pas stable (divergence de l’énergie totale du système).
137
138 C HAPITRE 9. A NALYSE DYNAMIQUE DES STRUCTURES ÉLASTIQUES
Potentiels de Lamé. Les solutions de l’équation de Navier élastodynamique (9.2) peuvent être
représentées sous la forme
ξ = ∇φL + rotφT avec divφT = 0 (9.3)
en termes des potentiels de Lamé φL (scalaire) et φT (vecteur). On peut montrer que tout champ
de vecteur suffisamment régulier admet une représentation par potentiels de Lamé ; c’est en
particulier le cas de la force de volume :
f = ∇fL + rotf T
2 − 2ν µ
c2L =
1 − 2ν ρ
Les déplacements de la forme ξ T = rotφT représentent des ondes de cisaillement, aussi qua-
lifiées de transversales, se propageant à la célérité cT telle que
µ
c2T =
ρ
On note l’inégalité cL > cT .
Il reste à prendre en compte la donnée en déplacement (9.1d) et les conditions initiales (9.1f)
qui, combinées à l’identité (9.7), conduisent à la formulation faible des équations régissant la
réponse dynamique d’un solide élastique :
Matrice de masse. Par rapport au cas quasistatique, le système d’équations (9.9) fait intervenir
une nouvelle entité, la matrice de masse [M]. Celle-ci est définie par l’égalité
∂2ξh Z
{W}T [M]{Ü(t)} = .w dV ρ (9.10)
Ω ∂t2 h
La matrice de masse est associée à l’énergie cinétique de la structure
1 Z
∂ξ
2
déf
K(t) = ρ dV,
2 Ω
∂t
ou plus précisément à celle évaluée sur le modèle semi-discrétisé
1 Z
∂ξ h
2 1
T
Kh (t) = ρ
dV = {U̇(t)} [M]{U̇(t)} (9.11)
2 Ω ∂t 2
La matrice de masse est clairement définie positive, car tout vecteur de vitesses nodales {U̇(t)}
non nul correspond à un champ de vitesses ∂ξ h /∂t non nul et donc à une énergie cinétique
strictement positive. Il est facile de vérifier par ailleurs que [M] est symétrique.
Le calcul numérique de [M] peut être résumé par la relation
NE
T
{We }T [Me ]{Üe (t)}
X
{W} [M]{Ü(t)} = (9.12)
e=1
qui doit sur le plan pratique être interprétée comme une opération d’assemblage, au même titre
que la relation (3.19) pour la matrice [K], et dans laquelle chaque matrice de masse élémentaire
résulte de l’égalité
Z
T T T
{We } [Me ]{Üe (t)} = {We } ρ[N (a)] [N (a)]J(a) dV (a) {Üe (t)}
∆(e)
la matrice [N (a)] des fonctions de forme de l’élément e étant définie selon la convention (2.18).
9.3. Intégration en temps. Algorithme de Newmark 141
1 1
0.5 0.5
0 0
−0.5 −0.5
−1 −1
1 1
0.8 1 0.8 1
0.6 0.8 0.6 0.8
0.4 0.6 0.4 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0.2 0.2
0 0 (a) (b) 0 0
1 1
0.5 0.5
0 0
−0.5 −0.5
−1 −1
1 1
0.8 1 0.8 1
0.6 0.8 0.6 0.8
0.4 0.6 0.4 0.6
0.4 0.4
0.2 0.2
0.2 0.2
0 0 (c) (d) 0 0
Figure 9.1: Interpolation d’une onde plane sur le maillage d’un carré de côté 1 formé de 20 × 20 éléments
carrés à 4 nœuds, pour 4 valeurs de longueur d’onde ` = 1 (a), ` = 2 (b), ` = 4 (c), ` = 8 (d).
On remarque que la combinaison des approximations (9.15) de{U̇} et (9.16) de {Ü} conduit
à la formule classique d’approximation de {Ü} par différences finies centrées d’ordre 2 :
1 h i
{Ün } ≈ {U n+1 } − 2{U n } + {U n−1 }
∆t2
Caractère explicite de la méthode des différences centrées. Cet algorithme est qualifié d’ex-
plicite car il repose sur la résolution du système (9.17), dont la matrice est la matrice de masse.
En toute rigueur, il faut donc faire appel à un solveur (direct ou itératif), et la solution {Ün } du
système d’équations n’est pas donnée par une expression explicite. Cependant, il est souvent
légitime de remplacer la matrice de masse [M] par une approximation diagonale [M̃], appelée
matrice de masse condensée1 . Une telle approximation diagonale est assez facile à construire,
et divers procédés existent, décrits par exemple dans l’ouvrage de Hughes (1987). On peut par
exemple additionner tous les termes d’une ligne de [M] et affecter le résultat au coefficient dia-
gonal correspondant. Le remplacement de [M] par une approximation diagonale [M̃] dans le
système (9.17) conduit à une expression explicite, et très économique à calculer, de {Ün }.
On verra en section 9.3.7 que la méthode des différences centrées est conditionnellement
stable, le pas de temps ∆t devant être choisi inférieur à une valeur critique (∆t)stab . Cette ca-
ractéristique de stabilité conditionnelle peut parfois être gênante, d’autant que l’évaluation de
la valeur critique (∆t)stab n’est ni simple ni économique. C’est pourquoi il est utile de disposer
de schémas éventuellement implicites mais à stabilité inconditionnelle. La famille des schémas
de Newmark répond à ce besoin (en particulier, certains de ces schémas sont inconditionnel-
lement stables), c’est pourquoi elle va maintenant être abordée et analysée. En particulier, on
montrera que la méthode des différences centrées peut être reformulée comme un schéma de
type Newmark.
1
On parle de lumped mass matrix dans la littérature internationale.
144 C HAPITRE 9. A NALYSE DYNAMIQUE DES STRUCTURES ÉLASTIQUES
{U̇n+1 } = {U̇pred
n+1 } + ∆tγ{Ün+1 }
porte donc de déterminer les éventuelles restrictions que ces conditions induisent sur le choix
des paramètres β, γ.
et reportons ces développements dans (9.22). Après multiplication à gauche de l’équation ob-
tenue par {(XI )T (XI )T } pour I fixé et exploitation des relations de [M]-orthonormalité et [K]-
orthogonalité des vecteurs propres, (9.22) conduit à N systèmes découplés de 2 équations à 2
inconnues :
1
1 + β∆t2 ωJ2 0 uJn+1 β− 2
∆t2 ωJ2 − 1 ∆t uJn
=
γ∆t ωJ2 J
1 vn+1
(γ − 1)∆t ωJ2 1
vJ
n
1 − β ∆t2 fnJ + β∆t2 fn+1
J
2
+ (9.24)
J
(1 − γ)∆tfnJ + γ∆tfn+1
La condition de stabilité est donc que, pour tout J, la matrice [RJ ] ne puisse amplifier une
perturbation de la solution :
δuJn
δuJ
n
[RJ ]
≤
(∀J, 1 ≤ J ≤ N)
δv J
J
δvn
n
La matrice [RJ ] n’étant pas symétrique, cette condition s’exprime comme suit en termes de ses
valeurs propres λJ1 , λJ2 :
Si λJ = λJ2 : il faut |λJ1 | ≤ 1, |λJ2 | ≤ 1
1 6
(∀J, 1 ≤ J ≤ N) (9.26)
Si λJ = λJ : il faut |λJ1 | = |λJ2 | < 1.
1 2
La matrice [RJ ] étant définie par les équations (9.24) et (9.25), ses valeurs propres sont
solution du problème aux valeurs propres généralisé
" # ( )
1
β − ∆t 2
− 1 ∆t ωJ21 + β∆t ωJ2 2
0 u
2 −λ =0
2
(γ − 1)∆t ωJ 1 γ∆t ωJ2 1 v
qui évite le calcul explicite de l’inverse de la matrice apparaissant au premier membre de (9.24).
Tous calculs faits, l’équation caractéristique associée est
Det([RJ ] − λ[I]) = 0 ⇔ λ2 − 2Aλ + B = 0
1 1 ωJ2 ∆t2
2 2
avec 2A = 2 − +γ ζ , B =1+ − γ ζ = 0, ζ = (9.27)
2 2 1 + βωJ2 ∆t2
Les conditions de stabilité (9.26), exprimées par rapport à (A, B), sont alors :
(i) Si A2 − B > 0 (deux valeurs propres réelles distinctes) :
1 − 2A + B ≥ 0
−1 ≤ A ≤ 1 et 1 + 2A + B ≥ 0
B
(B=1)
P Q
B ≤1
A2−B<0
A
(A=−1) 2 (A=1)
0
A −B>0
B+
+1≥
2A
2A
+1≥
B−
0
Figure 9.2: Domaine de stabilité de l’algorithme de Newmark défini en termes des coefficients A, B de
l’équation caractéristique (9.27).
correspondant géométriquement au triangle fermé privé des deux points P,Q. Traduites en ter-
mes des paramètres β, γ et du pas de temps ∆t, les conditions ci-dessus deviennent
1
ζ 2 ≥ 0, γ− ≥ 0, 4 − 2γζ 2 ≥ 0 (9.28)
2
La condition (9.28c) est automatiquement vérifiée pour toutes les valeurs des paramètres, en
raison de la définition (9.27). La condition (9.28a) impose γ ≥ 1/2. Enfin, la condition (9.28b)
peut, compte tenu de la définition (9.27) de ζ 2 , se mettre sous la forme
4 + 2(2β − γ)ωJ2 ∆t2 ≥ 0
Par conséquent, deux possibilités apparaissent :
(i) Si 2β − γ ≥ 0, la condition (9.28b) est vérifiée quel que soit ∆t ;
(ii) Si 2β−γ < 0, la condition (9.28b) implique une condition sur le choix du pas de temps :
2
ωJ2 ∆t2 ≤ ∀J
γ − 2β
Le pas de temps ∆t doit donc être choisi plus petit qu’une valeur critique (∆t)stab :
déf 1 2
∆t < (∆t)stab = min √ (9.29)
J ωJ 2γ − 4β
le résidu des équations réalisant le schéma tend vers zéro avec ∆t quand {Un+1 } et {Un } pro-
viennent d’une fonction vectorielle {U(t)} suffisamment régulière vérifiant le système différen-
tiel (9.9).
Ici, l’action du schéma de Newmark peut être représentée par l’équation matricielle (9.22)
exprimant la transition en temps discret (9.21). Il est donc intéressant d’évaluer le résidu du
système (9.22) quand {Un+1 } et {Un } proviennent d’une fonction vectorielle {U(t)} vérifiant le
système différentiel en temps continu (9.9). En développant {Un+1 }, {U̇n+1 } et {Fn+1 } autour
de t = tn dans le système (9.22) et en utilisant les équations
...
[K]{Un } + [M]{Ün } = {Fn }, [K]{U̇n } + [M]{Un } = {Ḟn }
traduisant la vérification de (9.9) à l’instant tn chaque fois que cela est possible, on obtient tous
calculs faits :
# 3 1 ... (
M 0 ∆t 6 − β Un
" )
o(∆t3 )
Premier membre du système (9.22) = ... + (9.30)
0 M ∆t2 1 − γ Un o(∆t2 )
2
Cela prouve en particulier que, quels que soient les paramètres retenus pour la méthode de
Newmark, le résidu du système (9.22) tend vers zéro avec ∆t. La méthode de Newmark est
donc cohérente, sans restriction sur le choix de ses paramètres.
9.3.6 Précision
Le résultat (9.30) suggère que la précision de la méthode de Newmark peut être optimisée
en sélectionnant les paramètres
β = 1/6 , γ = 1/2 (9.31)
Cependant, ce choix définit un schéma conditionnellement stable, la condition 2β − γ ≥ 0 de
stabilité inconditionnelle n’étant pas vérifiée. Pour cette raison, on préfère souvent utiliser les
paramètres
β = 1/4 , γ = 1/2 (9.32)
qui permettent la précision optimale compatible avec une stabilité inconditionnelle.
avec des conditions initiales {U0 }, {U̇0 } non nulles : cela correspond physiquement à calculer
la réponse dynamique d’un solide placé dans une configuration initiale perturbée par rapport à
l’état de repos puis relâché.
Multiplier (9.35) à gauche par {U̇}T donne
relation qui se met sous la forme d’une dérivée exacte en temps et exprime en fait la conservation
de l’énergie totale :
dh i
W(t) + K(t) = 0 (9.36)
dt
où K(t) et W(t) sont les énergies cinétique et de déformation de la structure à l’instant t :
1 1
K(t) = {U̇}T [M]{U̇} W(t) = {U}T [K]{U} (9.37)
2 2
Pour un schéma numérique d’intégration donné, il est alors intéressant d’examiner l’évolu-
tion de l’énergie totale calculée à deux instants discrets successifs. Par exemple, pour l’équation
homogène (9.35) considérée ici, les propriétés du schéma numérique peuvent être classées se-
lon :
(i) Si W(tn+1 ) + K(tn+1 ) − W(tn ) − K(tn ) < 0 : il y a amortissement numérique, l’énergie
totale diminuant alors même que le problème physique traité est (ici) conservatif ;
(ii) Si W(tn+1 ) + K(tn+1 ) − W(tn ) − K(tn ) > 0 : il y a amplification, l’énergie totale
augmentant, ce qui correspond à un schéma instable ;
(iii) Si W(tn+1 ) + K(tn+1 ) − W(tn ) − K(tn ) = 0 : le schéma numérique conserve l’énergie
(ni amplification ni amortissement numérique) ;
On va appliquer cette idée aux schémas de Newmark. Il s’agit donc d’évaluer
la solution à l’instant tn+1 étant déduite de celle à l’instant tn par la résolution de (9.20) et les
formules (9.18). Pour ce faire, les définitions (9.37) permettent d’écrire les variations d’énergie
sous la forme
W(tn+1 ) − W(tn ) = 2{Un }Ts [K]{Un }d K(tn+1 ) − K(tn ) = 2{U̇n }Ts [M]{U̇n }d
9.5 Exemple
Pour illustrer les notions présentées dans ce chapitre, on considère une barre élastique (lon-
gueur L, module de Young E, section d’aire A, masse linéique ρA). Le déplacement longi-
tudinal ξ(x, t) de la section A(x) située à l’abscisse x est gouverné, dans le cadre du modèle
des barres minces élastiques décrit par exemple dans le cours de Ballard et Millard (2005), par
l’équation aux dérivées partielles
∂2ξ 1 ∂2ξ
(x, t) − (x, t) = 0 (9.41)
∂x2 c2 ∂t2
qui est l’équation des ondes à une dimension d’espace, la célérité des ondes de compression
dans la barre étant q
c = E/ρ (9.42)
On se place ici dans les conditions suivantes : barre au repos initial, encastrée à son extrémité
gauche x = 0 et soumise à son extrémité droite x = L à une force de traction constante P
appliquée à partir de l’instant initial, soit :
∂ξ
ξ(x, t) = (x, t) = 0 , (0 ≤ x ≤ L) (conditions aux limites)
∂t
∂ξ
ξ(0, t) = 0 EA (L, t) = P , (t ≥ 0) (conditions initiales)
∂x
Cet exemple a une solution exacte, dont la figure 9.3 donne une idée.
D’autre part, le calcul numérique de cette réponse a été effectué pour plusieurs choix de
schémas et de pas de temps. Dans tous les cas, la semi-discrétisation spatiale est effectuée avec
NE = 50 éléments rectilignes de longueur uniforme et à deux nœuds (interpolation linéaire
de ξ sur chaque élément). La figure 9.5 présente la réponse calculée par le schéma de New-
x=L
2
x=L/2
(EA/cP)ξ
ct/L
0 2 4 6 8
Figure 9.3: Dynamique d’une barre sollicitée à son extrémité : solution exacte en déplacement. Les deux
courbes représentent ξ(x, t) pour x = L/2 et x = L.
2.5
x=L/2
x=L
2
1.5
(EA/Pc) ξ
0.5
0
0 5 10 15 20
t c/L
Figure 9.4: Dynamique d’une barre sollicitée à son extrémité : réponse calculée avec le schéma de New-
mark inconditionnellement stable (β = 1/4, γ = 1/2) et c∆t/L = 0, 1. Les deux courbes
représentent ξ(x, t) pour x = L/2 et x = L.
152 C HAPITRE 9. A NALYSE DYNAMIQUE DES STRUCTURES ÉLASTIQUES
3.5 x=L/2
x=L
3
2.5
(EA/Pc) ξ
1.5
0.5
-0.5
-1
-1.5
0 5 10 15 20
t c/L
Figure 9.5: Dynamique d’une barre sollicitée à son extrémité : réponse calculée avec le schéma de New-
mark instable (β = 1/4, γ = 99/200) et c∆t/L = 0, 1. Les deux courbes représentent ξ(x, t)
pour x = L/2 et x = L.
2.5 2.5
x=L/2 x=L/2
x=L x=L
2 2
1.5 1.5
(EA/Pc) ξ
(EA/Pc) ξ
1 1
0.5 0.5
0 0
0 5 10 15 20 0 5 10 15 20
ct/L ct/L
2.5 3e+56
x=L/2 x=L/2
x=L 2e+56
x=L
2
1e+56
1.5
(EA/Pc) ξ
(EA/Pc) ξ
1
-1e+56
0.5
-2e+56
0
0 5 10 15 20 0 5 10 15 20
ct/L ct/L
Figure 9.6: Dynamique d’une barre sollicitée à son extrémité : réponse calculée avec le schéma de New-
mark associé à la méthode des différences centrées (β = 0, γ = 1/2), conditionnellement
stable. Chaque graphique présente ξ(x, t) pour x = L/2 et x = L, calculé pour les pas de
temps ∆t = 0, 99083(∆t)stab (en haut, à gauche), ∆t = 0, 99966(∆t)stab (en haut, à droite),
∆t = 1, 00237(∆t)stab (en bas, à gauche), ∆t = 1, 00815(∆t)stab (en bas, à droite).
mark inconditionnellement stable (β = 1/4, γ = 1/2) avec c∆t/L = 0, 1, qui est satisfaisante.
En revanche, avec γ = 99/200, qui viole (légèrement) la condition de stabilité γ ≥ 1/2, le
calcul de la réponse devient instable après quelques allers-retours dans la barre (figure 9.5).
Enfin, la figure 9.6 montre l’application du schéma de Newmark associé à la méthode des
différences centrées (β = 1/4, γ = 1/2), qui est conditionnellement stable avec la condi-
tion (9.34). Cette dernière donne ici c(∆t)stab /L ≈ 0, 01155, valeur obtenue par résolution
numérique du problème aux valeurs propres généralisées (9.23). Quatre pas de temps très
proches de cette valeur ont été choisis, et l’instabilité de l’intégration numérique est très violente
pour des ∆t violant très légèrement la condition de stabilité.
Annexe A
Compléments
Points de Gauss pour le segment [−1, 1]. Le tableau A.1 présente les points ag et poids
wg de Gauss pour le segment S = [−1, 1]. Ceux-ci sont toujours intérieurs à S, et disposés
symétriquement par rapport à a = 0, ag et son symétrique ayant le même poids wg . Il suffit
donc d’indiquer les abscisses positives.
G ±ag wg
1 0. 2.
2 0.57735026918962576450 1.
3 0. 0.88888888888888888889
0.77459666924148337703 0.55555555555555555556
4 0.33998104358485626480 0.65214515486254614262
0.86113631159405257522 0.34785484513745385737
5 0. 0.56888888888888888889
0.53846931010568309103 0.47862867049936646804
0.90617984593866399279 0.23692688505618908751
6 0.23861918608319690863 0.46791393457269104738
0.66120938646626451366 0.36076157304813860756
0.93246951420315202781 0.17132449237917034504
Tableau A.1: Points de Gauss pour le segment −1 ≤ a ≤ 1, d’après Stroud et Secrest (1966).
Points de Gauss pour le triangle de référence. Le tableau A.2 présente les points (aT1,g , aT2,g )
et poids wg de Gauss pour le triangle de référence ∆ = {(a1 , a2 ) | (a1 , a2 ) ≥ (0, 0), 1 −
a1 − a2 ≤ 1} d’après Lyness et Jespersen (1975). Ils sont intérieurs à ∆. D’autre part, ces
formules respectent la symétrie ternaire du triangle : toutes les permutations des coordonnées
barycentriques aT1,g , aT2,g , 1 − aT1,g − aT2,g définissent des points de Gauss, auxquels les mêmes
poids sont affectés. Cette symétrie permet de condenser l’information dans le tableau A.2 :
les points apparaissent avec une « multiplicité » M (M = 1, 3 suivant les cas), qui indique à
combien de points distincts correspond la ligne considérée.
153
154 A NNEXE A. C OMPL ÉMENTS
G aT1,g aT2,g wg M
3 0.166666666666667 0.166666666666667 0.166666666666667 3
6 0.445948490915965 0.445948490915965 0.111690794839005 3
0.091576213509771 0.091576213509771 0.054975871827661 3
7 0.333333333333333 0.333333333333333 0.112500000000000 1
0.470142064105115 0.470142064105115 0.066197076394253 3
0.101286507323456 0.101286507323456 0.062969590272414 3
Tableau A.2: Points de Gauss pour le triangle de référence, d’après Lyness et Jespersen (1975).
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