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Brevet

Sujet brevet 2

« Une houle vivante »

Le 26 aout 1944, à l’occasion de la libération de Paris, le général de Gaulle descend


triomphalement les Champs-Élysées jusqu’à la cathédrale Notre-Dame. Il retrace cet
épisode dans ses Mémoires de guerre.

Au cours de la matinée, on me rapporte que de toute la ville et de toute la banlieue, dans


ce Paris qui n’a plus de métro, ni d’autobus, ni de voitures, d’innombrables piétons sont en
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marche. À trois heures de l’après-midi, j’arrive à l’Arc de triomphe. [...] Je ranime la flamme .
Depuis le 14 juin 1940, nul n’avait pu le faire qu’en présence de l’envahisseur. Puis, je quitte la
voûte et le terre-plein. Les assistants s’écartent. Devant moi, les Champs-Élysées !
Ah ! C’est la mer ! Une foule immense est massée de part et d’autre de la chaussée. Peut-
être deux millions d’âmes. Les toits aussi sont noirs de monde. À toutes les fenêtres
s’entassent des groupes compacts, pêle-mêle avec des drapeaux. Des grappes humaines
sont accrochées à des échelles, des mâts, des réverbères. Si loin que porte ma vue, ce n’est
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qu’une houle vivante, dans le soleil, sous le tricolore.
Je vais à pied. [...] Il s’agit, aujourd’hui, de rendre à lui-même, par le spectacle de sa joie et
l’évidence de sa liberté, un peuple qui fut, hier, écrasé par la défaite et dispersé par la servitude. [...]
Je vais donc, ému et tranquille, au milieu de l’exultation indicible de la foule, sous la tempête
des voix qui font retentir mon nom, tâchant, à mesure, de poser mes regards sur chaque flot de
cette marée afin que la vue de tous ait pu entrer dans mes yeux, élevant et abaissant les bras pour
répondre aux acclamations. II se passe, en ce moment, un de ces miracles de la conscience
nationale, un de ces gestes de la France, qui parfois, au long des siècles, viennent illuminer notre
Histoire. Dans cette communauté, qui n’est qu’une seule pensée, un seul élan, un seul cri, les
différences s’effacent, les individus disparaissent. Innombrables Français dont je m’approche tour
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à tour, à l’Étoile , au Rond-Point , à la Concorde , devant l’Hôtel-de-Ville, sur le parvis de la
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cathédrale , si vous saviez comme vous êtes pareils ! Vous, les enfants, si pâles qui trépignez et
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criez de joie ; vous, les femmes, portant tant de chagrins, qui me jetez vivats et sourires ; vous,
les hommes, inondés d’une fierté longtemps oubliée, qui me criez votre merci ; vous, les vieilles
gens, qui me faites l’honneur de vos larmes, ah ! comme vous vous ressemblez ! Et moi, au centre
de ce déchaînement, je me sens remplir une fonction qui dépasse de très haut ma personne, servir
d’instrument au destin.

©
CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, tome 2, « L’Unité », Éditions Plon, 1956.
1. Sous l’Arc de triomphe brule constamment une flamme qui commémore, depuis 1923, le
souvenir des soldats morts au combat.
2. Mouvement de la mer.
3. La place de l’Étoile à Paris (= place Ch. de Gaulle), où s’élève l’Arc de triomphe.
4. La Place de l’Etoile forme un très grand rondpoint.
5. La plus grande place de Paris, en bas des Champs-Élysées.
6. Notre-Dame de Paris.
7. Acclamations (du latin vivat, « qu’il vive ! »).

Le jour de l’épreuve, vous pourrez parfois vous aider du corpus d’histoire-


géographie pour comprendre le contexte de l’extrait. Retrouvez dans votre
manuel d’histoire-géographie, l’appel du Général de Gaulle en sujet de brevet ( chapitre 4).

Foule acclamant le passage de la 2e division blindée

Foule acclamant le passage de la 2e division blindée sur les Champs-Élysées le 26 août 1944,
photographie de Jack Downey, 1944.

1ᵉ partie : compréhension, analyse et interprétation (1 h)

Questions (20 points)


100% numérique

1 De quel envahisseur (l 5) est il question ? Rappelez rapidement la situation


1 De quel « envahisseur » (l. 5) est-il question ? Rappelez rapidement la situation
historique. (1 point)

2 Rappelez ce que sont des Mémoires. Pourquoi peut-on dire que ce texte illustre bien
ce genre de récit ? (1,5 point)

3 À quel temps ce texte est-il rédigé ? (0.5 point)

4 Quelle est la valeur de ce temps ici ? (0.5 point)

Narration.

Vérité générale.

Habitude.

5 Quel est l’effet ainsi créé ? (0,5 point)

6 a) Au début du 2ᵉ paragraphe, à quoi de Gaulle compare-t-il la foule ? b) Relevez


plus loin dans le texte une métaphore qui s’appuie sur le même rapprochement. c) Quel est
l’effet produit par cette image ? (2 points)
7 a) Relevez une phrase exclamative et une phrase nominale. b) On trouve de

nombreuses phrases exclamatives dans ce texte. Selon vous, pourquoi ? (2,5 points)

8 Pour parler de l’Occupation, de Gaulle emploie le mot « servitude » (l. 15). a)

Relevez dans la même phrase un antonyme de ce mot. b) Relevez dans le texte un mot
appartenant à la même famille que « servitude ». Est-ce le même effet qui est produit ? c)
À la fin du texte, relevez le champ lexical que de Gaulle utilise pour montrer l’émotion des
Français face à la Libération. (2,5 points)

9 a) À qui de Gaulle s’adresse-t-il ? Citez des passages précis du texte. b) Quelle

figure de style est employée pour montrer que son discours s’adresse à tous ? c) De quel
message se veut-il porteur ? (3 points)

10 a) Relevez les passages où apparaissent les pronoms personnels de la 1ᵉ


personne du singulier. b) Quel regard de Gaulle porte-t-il sur lui-même ? c) Que pensez-vous
de ce portrait de lui-même ? Vous apporterez une réponse nuancée, qui s’appuiera sur des
passages précis du texte et sur vos connaissances historiques. (3,5 points)

11 À propos de l’image. a) Quels rapports pouvez-vous établir entre la

photographie et le texte ? b) À votre avis et d’après le texte que vous venez de lire, où de
Gaulle se trouve-t-il par rapport aux chars ? c) Pourquoi peut-on dire cette photographie est
historique ? (2,5 points)
Zoom sur la 2ᵉ partie de l'épreuve

Dictée et réécriture (10 points)

1 Dictée : F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d’outre-tombe,


préface testamentaire, 1832.

Si je suis destiné à vivre, je représenterai dans ma personne, représentée dans mes


Mémoires, les principes, les idées, les événements, les catastrophes, l’épopée de mon temps,
d’autant plus que j’ai vu finir et commencer un monde, et que les caractères opposés de cette
fin et de ce commencement se trouvent mêlés dans mes opinions. Je me suis rencontré entre
les deux siècles, comme au confluent de deux fleuves ; j’ai plongé dans leurs eaux troublées,
m’éloignant à regret du vieux rivage où j’étais né, et nageant avec espérance vers la rive
inconnue où vont aborder les générations nouvelles.

F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe, préface testamentaire, 1832.

2 Réécrivez le passage ci-dessous en remplaçant « vous » par « tu ». Faites toutes


les modifications nécessaires.

Vous, les enfants, si pâles qui trépignez et criez de joie ; vous, les femmes, portant tant de
chagrins, qui me jetez vivats et sourires ; vous, les hommes, inondés d’une fierté longtemps
oubliée, qui me criez votre merci.

Méthode pour la réécriture

Il s’agit de modifier un extrait en fonction de consignes précises. On peut vous


demander :
de changer de temps verbal : vérifiez bien la terminaison de chaque forme modifiée,
l’accord des participes passés si besoin, l’application de la concordance des temps (si le
verbe introducteur devient un verbe au passé par exemple).
de changer de personne : vérifiez les accords des verbes et des adjectifs si vous passez
au féminin ou au pluriel, la cohérence des déterminants (« son » qui devient « leur » par
exemple), l’accord des participes passés si nécessaire.
de passer du discours direct au direct indirect ou inversement : attention aux
changements de ponctuation, de pronoms (Il lui dit qu’il … > Il lui dit : « Je… »),
des indications de temps et de lieu (hier > la veille).
de passer de la voix active à la voix passive ou inversement : prenez garde à bien
former le verbe en conjuguant l’auxiliaire au temps qui correspond et faites attention aux
accords avec le sujet.
Ces consignes peuvent être implicites si on vous demande de changer les premiers mots du
passage et de faire toutes les modifications nécessaires qui en découlent.

Travail d’écriture (20 points)


Vous traiterez au choix l’un des deux sujets suivants. Votre texte aura une longueur
minimale de deux pages.

Sujet de réflexion

Selon vous, un mémorialiste peut-il raconter aussi objectivement qu’un historien un épisode
historique auquel il a participé ? Vous répondrez à cette question en exposant les
ressemblances puis les différences entre Mémoires et travail d’historien. Vous illustrerez
vos propos par des exemples de Mémoires ou d’autobiographies que vous avez pu lire et
en vous appuyant sur vos connaissances historiques.

Sujet d'invention

Imaginez que vous avez vécu un évènement historique. Devenu vieux, vous racontez par écrit
à l’un de vos petits-enfants âgé de quinze ans ce que vous avez vécu et ressenti ce jour-là.
Vous respecterez les trois étapes suivantes : la description du contexte ; le récit de
l’évènement lui-même ; la description de ce que vous avez ressenti et l’impression que vous
en avez gardée.

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