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LA POLYSÉMIE: PRINCIPE D’ÉCONOMIE DES LANGUES

 Le lexique sert nos besoins de communication et il


est emmagasiné dans le cerveau.
 Or, notre mémoire a un caractère limité alors que nos
besoins communicatifs sont illimités.
 C’est donc extrêmement utile qu’un signe linguistique
donné puisse désigner des objets appartenant à des
catégories différentes, à condition que cette richesse
polysémique soit motivée au niveau conceptuel.
 En effet, notre mémoire retient beaucoup mieux les
informations cohérentes que les ensembles
disparates.
LA POLYSÉMIE: DÉFINITION

 Ces unités linguistiques aux multiples sens


sont appelées polysèmes.
 Il s’agit de la propriété qu’ont certaines unités
lexicales de posséder plusieurs signifiés ou
lexies.
 Donc à un seul signifiant correspondent
plusieurs signifiés.
LA POLYSÉMIE: EXEMPLE
Le Petit Robert, identifie pour le mot café cinq
significations ou acceptions principales:
1. Graines de fruit du caféier, dans récolte de
café
2. Grains torréfiés, dans paquet de café
3. Caféiers, dans plantation de café
4. Boisson obtenue par infusion de grains
torréfiés et moulus, dans tasse de café
5. Lieu public où l’on consomme des boissons,
dans aller au café
LA POLYSÉMIE: EXEMPLE
Le Petit Robert, identifie pour le mot tissu quatre
significations ou acceptions principales:
1. Surface souple et résistante
2. Fig. suite ininterrompue (de choses)
3. Biol. Ensemble de cellules de même
morphologie
4. Sociol. Ensemble d’éléments de mêmes
fonctions, organisé en un tout homogène.
LA POLYSÉMIE

 Les mots peuvent cacher plusieurs sens.


 Pour comprendre un texte ou un discours, le
locuteur fait émerger les nuances de sens
qui conviennent dans le contexte où les mots
se trouvent et attribue ainsi au texte (ou au
discours) un sens juste et précis.
LE SENS: NUANCES TYPOLOGIQUES

Dans les mots polysémiques, l’on distingue:


- Le sens propre

- Le sens figuré

- Le sens concret

- Le sens abstrait

- Le sens spécialisé

- Le sens général
LE SENS PROPRE

C’est le sens premier du mot, celui qui est le


plus proche de l’origine étymologique du
mot.

Exemple

tissu: Surface souple et résistante


LE SENS FIGURÉ

Appelé sens second ou sens dérivé, il ajoute


au sens propre une dimension imagée,
métaphorique qui aide à la représentation
mentale.
Sens propre et sens figuré: le moteur de la
polysémie
Exemple
Tissu: Fig. suite ininterrompue (de choses)
LE SENS CONCRET

Le sens concret d’un mot réfère au monde


physique perçu par les sens (nature, objets,
animaux, sensations, actions, etc.).

Exemple
tissu: les 4 acceptions sont concrètes
LE SENS ABSTRAIT

Il réfère à la pensée, à ce qui est perçu par l’esprit


(une caractéristique, une qualité de l’objet, de la
nature, des animaux, de l’action, etc.)

Exemple
Naissance: la condition sociale résultant du fait
qu’on est né dans telle ou telle classe sociale.
LE SENS SPÉCIALISÉ

Il s’agit d’un lexème dont le sens est propre à


un domaine d’activité ou de connaissances.

Exemple
1. Biol. Ensemble de cellules de même
morphologie
2. Sociol. Ensemble d’éléments de mêmes
fonctions, organisé en un tout homogène.
LE SENS GÉNÉRAL

 Le sens général est le sens courant des


mots.
LE SENS CONTEXTUEL
C’est le sens qui s’adapte le mieux au lexème en fonction de
la phrase ou du contexte plus général du texte (ou du
discours).
Exemple
Quel sens donner au mot culture si l’on ne sait pas dans quel
domaine (agriculture, biologie, etc.) il est utilisé?
Dans un texte d’agronomie - rotation des cultures: succession
des espèces végétales cultivées;
Dans un texte de biologie – culture: techniques de
développement de micro-organismes...
LE SENS CONTEXTUEL
Il désambigüise la polysémie sauf dans les jeux de mots
(souvent utilisés dans les slogans publicitaires).

Ex.: Quand j’entends le mot trafic, je sors mon automatic

TRAFIC: 1. COMMERCE ILLICITE; 2. CIRCULATION


AUTOMATIC: 1. PISTOLET; 2. BOITE AUTOMATIQUE

Double isotopie
ETAPES DE L’ÉTUDE DU POLYSÈME

Rémi-Giraud distingue deux étapes :

- l’identification des différentes significations;

- la mise en relation de ces différentes


significations.
L’IDENTIFICATION

Elle prévoit des critères:

- extralinguistique
- paradigmatique
- syntagmatique
- sémantique
LE CRITÈRE EXTRALINGUISTIQUE

Il s’agit de l’expérience du locuteur, qui connaît


l’objet et les réalités référés par le mot.

Exemple:
Les grains de café se présentent différemment
que la boisson obtenue à partir de ces
grains.
LE CRITÈRE PARADIGMATIQUE
C’est le critère par lequel on fait entrer le vocable dans une
grille lexicale, appelée paradigme, faite de synonymes et/ou
antonymes.
Paradigme de aigu (adj.)
synonyme antonyme Signification (PR)
Une flèche pointue émoussée Terminée en pointe
aiguë
Une voix aiguë perçante grave D’une fréquence élevée.
en haut de l’échelle des
sons
Une douleur vive sourde Intense et pénétrante
aiguë
Un esprit aigu subtil Lourd, lent Particulièrement vif et
pénétrant dans le
domaine de l’esprit
LE CRITÈRE SYNTAXIQUE

C’est le critère qui étudie le vocable dans son


contexte syntaxique. Il est aussi appelé
syntagmatique.
Exemple: penser
construction signification
Les animaux pensent-ils? v. intr. être capable d’une
pensée abstraite
À quoi pensez-vous? v. tr. ind. appliquer son esprit à un
objet
Je lui ai dit tout ce que je v. tr. dir. avoir pour opinion, pour
pensais conviction
LE CRITÈRE SÉMANTIQUE

À partir du sens des noms qui jouent un rôle de


support, on peut distinguer les différentes
significations.
Étude de impossible
support signification
Un amour impossible Amour: chose Qui ne peut pas se
produire, être atteint ou
réalisé
Ces enfants sont Enfants: personne insupportable
impossibles
INTERDÉPENDANCE DES CRITÈRES
Les critères que l’on vient d’énumérer peuvent être ajoutés les
uns aux autres et ils peuvent être imbriqués les uns aux
autres.
Exemple: tourner (la page) vs tourner (le dos)
1. Critère extralinguistique: ils expriment deux
comportements différents: mettre à l’envers vs se
présenter de dos.
2. Critère syntaxique: l’un des emplois admet un complément
indirect, l’autre non (tourner le dos à quelqu’un vs *tourner
la page à quelqu’un).
3. Critère sémantique: dans l’homme tourne le dos, le
complément signifie une partie du sujet. Dans l’homme
tourne la page, le complément signifie un objet distinct du
sujet (feuille).
MISE EN RELATION DES DIFFÉRENTES SIGNIFICATIONS

o Il est nécessaire de mettre en relation les


différentes significations d’un mot établies les unes
avec les autres. Si la relation entre les significations
est possible il y a la polysémie.

o Les significations peuvent être mises en relation


par des procédés sémantiques ou par des
procédés rhétoriques.
LES PROCÉDÉS SÉMANTIQUES

o Il s’agit de procédés sémantiques de mise en


relation des significations d’un mot par
addition, par suppression ou par
différenciation d’un trait de sens.

o Ce sont l’extension de sens et la restriction


de sens.
L’EXTENSION DE SENS
o Il s’agit d’un élargissement de sens.
o Dans l’analyse sémique, c’est une variation d’une
même signification de base par suppression d’un trait
sémantique spécifique.
o Généralement, dans les dictionnaires sont marquées
par l’abréviation “par ext.”

Exemple: curé
1. prêtre catholique placé à la tête d’une paroisse
2. prêtre catholique
LA RESTRICTION DE SENS
o Le passage d’une signification à l’autre résultera une
signification plus étroite, moins étendue.
o Dans l’analyse sémique, elle correspond à une variation
d’une même signification de base par addition ou bien par
différenciation d’un trait sémantique spécifique.
o Généralement, dans les dictionnaires sont marquées par
l’abréviation “spécialt.”.
o Elle est aussi appelée spécialisation.

exemple: homme
1. être humain
2. être humain de sexe masculin
LES PROCÉDÉS RHÉTORIQUES
 Ils effectuent le passage d’une signification (dite
sens propre) à l’autre (dite sens figuré) par une
figure de sens.
 Ils sont aussi appelés tropes, cad des variations de
sens attribuées à une expression, normalement
liée à un champ sémantique bien défini,par
extension à d’autres objets de la réalité.
 En d’autres mots, ce sont des figures de style qui
donnent aux termes un sens figuré.
LES PROCÉDÉS RHÉTORIQUES

o Dumarsais les définit en tant que “des figures


par lesquelles on fait prendre à un mot une
signification qui n’est pas précisément la
signification propre de ce mot.
o Ils sont:
- la métaphore
- la métonymie
- la synécdoque
LA MÉTAPHORE

Il s’agit d’un trope par ressemblance


(ressemblance entre les signifiés), cad qui
donne à un mot un autre sens en fonction
d’une comparaison implicite. Ces deux sens
recouvrent des réalités qui présentent une
certaine similitude.
LA MÉTAPHORE
Exemple: perle
a. Petite bille de nacre

b. Personne remarquable dans un domaine

 C’est une relation métaphorique qui unit


l’acception propre A de “perle” à l’acception
figurée B en vertu d’une ressemblance (/rareté/ et
/excellence/) entre les deux acceptions.
LA MÉTONYMIE

 Elle joue sur la relation référentielle. C’est un


trope par correspondance qui consiste à
nommer une réalité par le nom d’une autre
réalité en raison d’une contigüité entre ces
objets.
LA MÉTONYMIE

o Il y a glissement de la référence d’un objet à


l’autre. Ce processus s’explique par une
ellipse (j’ai bu un verre pour j’ai bu le contenu
d’un verre).

o L’ellipse définit le rapport qui caractérise


chaque catégorie de métonymie.
LA SYNECDOQUE
 Il s’agit d’un trope par connexion, fondé sur la
relation d’inclusion entre les référents dénotés.
 C’est un procédé qui relève de la métonymie, mais
qui dénomme essentiellement l’emploi du tout pour
la partie ou inversement.
 Voile pour un bateau à voile de la partie pour le
tout
 Les mortels pour les hommes du genre pour
l’espèce
 Un fer pour l’èpée de la matière pour l’objet.
LA POLYSÉMIE EN LEXICOGRAPHIE
 Dans les dictionnaires, le polysème a une seule entrée
lexicale, construite sur une représentation arborescente
des acceptions numérotées.
 L’article d’un polysème se presente sous forme de
arborescence numérotée. Cette division interne
présente les multiples signifiés possibles qu’un
signifiant exprime à lui seul.
 Le numérotage exprime le fait qu’entre les différents
sens du mot il y a des relations de parenté plus ou
moins étroites.
TRAITEMENT DU POLYSÈME EN LEXICOGRAPHIE

 Les différentes formes de passage d’une


acception à l’autre peuvent être traitées du
point de vue diachronique ou synchronique.
o En diachronie, l’on présente l’évolution
sémantique du polysème en suivant l’ordre
d’apparition des acceptions.
o En synchronie, l’on décrit les relations
régulières qui unissent les différentes
acceptions du polysème.
TRAITEMENT DU POLYSÈME

 La lexicographie prédilige, le plus souvent,


l’approche diachronique.
POLYSÈME VS MONOSÈME

 Les unités monosémiques ont un seul unique


sens.
 La relation entre signifiant et signifié est
univoque.
 Donc un signifiant n’a qu’un signifié.

 Du point de vue lexicographique, ils n’ont


qu’une seule entrée lexicale et une unique
signification.
POLYSÈME VS MONOSÈME

 Le terme monosémique appartient presque


toujours au langage spécialisé.

 Il est l’unité de la terminologie des techiques


et des professions.
POLYSÉMIE ET HOMONYMIE

 Lorsque aucune mise en relation entre les


significations n’est possible, lorsque les
domaines d’emploi sont éloignés à l’extrême,
on n’a pas de polysémie mais de mots
homonymes.
POLYSÉMIE ET HOMONYMIE
 L’homonymie caractérise des mots qui se
prononcent ou s’ècrivent de la même manière,
mais qui n’ont pas le même sens.
 En termes saussuriens, ils entretiennent une
relation entre plusieurs formes linguistiques ayant
le même signifiant, tout en ayant des signifiés
totalement différents.
 Ils sont différents des polysèmes pour leurs
origines sémantiques, cad que les homonymes ne
sont pas issus des mêmes étymons.
L’HOMONYMIE EN LEXICOGRAPHIE

 Dans les dictionnaires, l’homonymie a deux


entrées lexicales, parfois plus, et chaque
entrée peut à son tour contenir un
regroupement numéroté interne.
 Donc, il n’y a aucun trait sémantique
commun entre deux ou plusieurs mots
homonymiques, même s’ils s’écrivent et se
prononcent de manière similaire.
CAS SPÉCIAUX DE L’HOMONYMIE

Homographie même forme graphique


prononciation et sens différents

Homophonie même forme phonique


orthographe et sens différents
HOMOGRAPHIE

L’Ukraine est un pays se trouvant à


l’est de l’Europe
HOMONYMES LES PLUS COURANTS
Ou/où
a/à
On/ont
Son/sont
Ce/se
Ces/ses
Sait/c’est/s’est
Mes/mais
Mon/m’ont
but/butte
Camp/quand
ATTENTION: LES PARONYMES

Les paronymes sont des mots qui sont


distincts par le sens et la prononciation, mais
qui possèdent une certaine ressemblance
graphique qui peut prêter à confusion.

Exemple:

affluence/influence
À VOUS...
Rechercher divers emplois des mots en l’insérant dans de
courts contextes.

Exemple: ordre
-L’ordre dans sa chambre
-L’ordre de me présenter tout de suite à la direction
-L’ordre du jour de la réunion

Langue, café, fleuve, monter, bras.


TEXTE : L’ÉPIDERME
L’épiderme est constitué d’un épithélium pavimenteux stratifié et contient
quatre types de cellules différentes. Environ 90 % des cellules de
l’épiderme sont des kératinocytes. Elles produisent une protéine, la
kératine, qui aide à imperméabiliser et à protéger la peau et les tissus
sous-jacents. Les mélanocytes, qui produisent le pigment mélanine,
constituent environ 8 % des cellules de l’épiderme. Leurs prolongements
minces et allongés s’étendent entre les kératinocytes et transfèrent à
ces derniers les grains de mélanine. La mélanine est un pigment noir qui
donne à la peau sa coloration et qui absorbe les rayons ultraviolets
(UV). Après avoir infiltré les kératinocytes, les grains de mélanine se
regroupent afin de former un voile protecteur au-dessus du noyau
cellulaire, du côté de la surface de la peau. Ainsi, ils protègent le
matériel génétique contre les effets des rayons ultraviolets.
À VOUS...

Classez chacun des mots suivants selon qu’ils


sont employés au sens propre ou au sens
figuré.

Cellules
Protéger
Protéine
À VOUS...

Classez chacun des mots suivants selon qu’ils


sont concrets ou abstraits.
Épiderme
Stratifié
Produisent
Sous-jacents
Pigment
Noir
Coloration
À VOUS...

Dans le texte relevez cinq mots qui n’ont qu’un


sens spécialisé approprié au domaine de
connaissance traité dans le texte, et, s’il y
en a, cinq mots d’usage courant employés
dans le texte dans un sens spécialisé.
À VOUS...

Compte tenu des caractéristiques du


vocabulaire employé dans le texte, dites :

- Le domaine visé: scientifique, technique,


littéraire, philosophique
- Le type de texte: narratif, descriptif,
argumentatif
EXERCICE: QUESTIONS
1. “verre” est un mot...............
2. Petit et grand sont des ................
3. Crier et hurler sont des.................
4. Avoir la moutarde qui monte au nez est au
sens...............
5. Manger de la moutarde est au sens .............
6. Attitude et altitude sont des ...............
7. Cent, sans, sang sont des .................
8. Humidité et sécheresse sont des ...............
9. Précepteur et percepteur sont des..................
10. “lettre” est un mot................

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