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13/07/2021
Introduction : Des enjeux climatiques aux enjeux sociétaux, le logement doit être
considéré comme un sujet d’intérêt général
Nous vivons un début de 21ème siècle particulier : sur le plan climatique nous avons surexploité
nos ressources et nos terres fertiles. Le secteur du bâtiment est fortement responsable des
émissions de gaz à effet de serre. La production du béton a doublé en 10 ans sur la planète et il
paraît donc important de s’interroger sur la manière dont on construit aujourd’hui et choisit les
matériaux.
En France, 66% des déchets proviennent du bâtiment et des infrastructures, il nous faut donc
partir de l’existant, de la réhabilitation.
Ces données environnementales doivent être croisées avec les enjeux sociétaux actuels : la crise
des gilets jaunes a révélé les difficultés de mobilité et d’accès aux services publics, conséquences
d’une sorte d’individualisation de la ville. Les confinements successifs ont mis l’accent sur le
manque de logements, le surpeuplement (notamment en métropole), le mauvais éclairage, le
besoin de pièces plus grandes et l’absence d’espaces extérieurs.
A l’échelle locale, les documents d’urbanisme sont les premiers outils au service des collectivités
bâtisseuses. Pour jouer leur rôle, les PLU et PLUI nécessitent une plus grande qualité et une
meilleure contextualisation territoriale. Les élus, surtout dans les moyennes et petites
communes, ont besoin d’un accompagnement renforcé en ingénierie.
Le problème de la quantité des logements ne peut être décorrélé de celui de leur qualité.
Si l’objectif des 500 000 logements fixé par le gouvernement n’a pas été atteint, le chiffre de
380 000 logements autorisés en 2020 se situe dans la moyenne de la production de ces
dernières décennies. Rappelons que la construction neuve ne correspond ainsi chaque année
qu’à environ 1% de l’ensemble du parc de logement. En outre, le premier Ministre a rappelé
récemment que la relance de la construction était attendue dans le respect de l’objectif
absolument nécessaire du Zéro Artificialisation Nette. Les mesures en faveur de la construction
neuve sont à mettre en perspective du stock existant et sont à prendre en cohérence avec la
politique de rénovation du bâti et de réhabilitation de la ville.
Les coûts de construction sont difficilement compressibles, les taux de marge des entreprises du
secteur étant déjà faibles (en France, le taux de marge de l’industrie est presque deux fois
supérieur à celui du secteur de la construction 3).
En 2016, le CSCEE notait que les coûts de construction du bâtiment étaient en progression deux
fois moins rapide que les prix de vente des logements.
Cependant, dans un rapport publié en 2014, l’Office parlementaire d’évaluation des choix
scientifiques et technologiques (OPECST) mettait également en cause le CSTB (centre
scientifique et technique du bâtiment, office d’évaluation et de régulation des normes
techniques) pour son manque de transparence, son activité d’évaluation technique jugée « trop
chère, avec des délais de procédure trop longs, créant une barrière pour les produits étrangers »
ainsi que son fonctionnement « très centralisé » négligeant les compétences des régions.
L’OPECST proposait notamment de « séparer les fonctions de prescription et de prestation en
sollicitant des laboratoires externes et indépendants », sur le modèle allemand, jugeant qu’« un
tel modèle de fonctionnement permettrait au CSTB d’échapper au soupçon qu’il multiplie les
demandes d’analyses complémentaires pour accroître ses ressources ».
1 Source : La maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction, 2019.
2
https://www.cairn.info/revue-de-l-ofce-2013-2-page-365.htm et
https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2009-5-page-48.htmRenard
3
INSEE / Esane, 2014
La qualité des logements neufs se détériore, avec en premier lieu une diminution des surfaces :
on construit aujourd’hui des 3 pièces de 60m² alors que la moyenne en Europe est de 75m². La
moyenne de la superficie des appartements en Europe est de 83 m2 contre 71,4 m2 en France.
La raison en est que l’on construit plus petit pour construire moins cher et plus. Or La générosité
spatiale est le point de départ d’une vie sociale acceptable.
La question n’est pas de programmer de nouvelles typologies de logements en fixant
arbitrairement la dimension de chaque pièce. Il s’agit de se donner des objectifs de conception
qui permettent de dépasser la fonctionnalité programmatique pour atteindre le bénéfice réel
d’usage des lieux à vivre 4.
Mais aussi :
- un manque de hauteur sous plafond, en 60 ans: les Français ont grandi de 7 cm alors que la
hauteur sous plafond des appartements a diminué de 27 cm.
- des SDB sans ouverture : 37 % des salles de bain ne possèdent pas de fenêtre.
- des tailles de fenêtre réduites,
- des cuisines dans le salon en second jour,
- des chambres trop petites pour accueillir un bureau,
- des parties communes aveugles,
- des matériaux médiocres qui entrainent une obsolescence plus rapide,
- une absence d’entrée, de balcon ou de loggia,
- des logements mono-orientés donc mal ventilés et mal éclairés,
- des logements sans possibilité de flexibilité, etc.
Depuis 15 ans la privatisation de la construction des logements sociaux et la généralisation de la
VEFA (on est passé de 5 % du logement social produit en VEFA en 2006 à 52% en 2017),
engendre une perte de qualité. Cette privatisation de la commande de logements sociaux
entraine aussi une perte néfaste des savoir-faire de la maîtrise d’ouvrage publique.
Les m² sont « rentabilisés » au maximum par les promoteurs. La « rentabilité » recherchée des
plans des immeubles affaiblit encore davantage la qualité des plans des logements.
4« La ville par le logement » F. Druot, A. Lacaton & J.-P. Vassal in Paris Habitat édité par le Pavillon
de l'Arsenal en 2015
CONCLUSION
Si l’on veut construire dans le respect du zéro artificialisation nette, le modèle du pavillon isolé et
excentré est dépassé. Il faut proposer des formes d’habitat intermédiaire entre la maison
individuelle et le logement collectif, des formes architecturales qui soient réellement désirables.