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ECOLE D’INFIRMIER(E)S ANESTHESISTES DIPLOME(E)S D’ETAT

Extubation et oxygénothérapie chez les patients


ASA 1 et ASA 2 en chirurgie programmée.
Étude multicentrique au CHU de Poitiers et au CHR d’Orléans.

Par
Audrey DEPREZ

Sous la direction de
Docteur TROITZKY Anne
Médecin Anesthésiste Réanimateur – CHU de Poitiers

Docteur DRILLEAU Rémi


Médecin Anesthésiste Réanimateur – CHU de Poitiers

Monsieur FOURNIER Stéphane


Infirmier Anesthésiste Diplômé d’État – CHU de Poitiers

Juillet 2022
UE 7 : MEMOIRE PROFESSIONNEL
En vue de l’obtention du Diplôme d’État d’Infirmier Anesthésiste
PRÉFET DE LA RÉGION NOUVELLE-AQUITAINE

Charte anti-plagiat de la Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et


de la cohésion sociale Nouvelle-Aquitaine

La Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Nouvelle-


Aquitaine délivre sous l’autorité du Préfet de région les diplômes du travail social et des auxiliaires médicaux et
sous l’autorité du Ministre chargé des sports les diplômes du sport et de l’animation.
Elle est également garante de la qualité des enseignements délivrés dans les dispositifs de formation préparant
à l’obtention de ces diplômes.
C’est dans le but de garantir la valeur des diplômes qu’elle délivre et la qualité des dispositifs de formation
qu’elle évalue que les directives suivantes sont formulées à l’endroit des étudiants et stagiaires en formation.

Article 1 : Tout étudiant et stagiaire s’engage à faire figurer et à signer sur chacun de ses travaux, deuxième de
couverture, l’engagement suivant :

Je soussignée Audrey DEPREZ

atteste avoir pris connaissance de la charte anti-plagiat élaborée par la DRDJSCS Nouvelle-Aquitaine et de
m’y être conformé.

et certifie que le mémoire/dossier présenté étant le fruit de mon travail personnel, il ne pourra être cité sans
respect des principes de cette charte

Fait à Orléans Le 23 juin 2022

Article 2 :
« Le plagiat consiste à insérer dans tout travail, écrit ou oral, des formulations, phrases, passages, images en
les faisant passer pour siens. Le plagiat est réalisé de la part de l’auteur du travail (devenu le plagiaire) par
l’omission de la référence correcte aux textes ou aux idées d’autrui et à leur source »1.

Article 3 :
Tout étudiant, tout stagiaire s’engage à encadrer par des guillemets tout texte ou partie de texte emprunté(e) ;
et à faire figurer explicitement dans l’ensemble de ses travaux les références des sources de cet emprunt. Ce
référencement doit permettre au lecteur et correcteur de vérifier l’exactitude des informations rapportées par
consultation des sources utilisées.

Article 4 :
Le plagiaire s’expose aux procédures disciplinaires prévues au règlement intérieur de l’établissement de
formation.
En application du Code de l’éducation2 et du Code pénal3, il s’expose également aux poursuites et peines
pénales que la DRDJSCS Nouvelle-Aquitaine est en droit d’engager. Cette exposition vaut également pour tout
complice du délit.

_____________
1
Site Université de Genève http://www.unige.ch/ses/telecharger/unige/directive-PLAGIAT-19092011.pdf
2
Article L. 331-3 du Code de l’éducation : « les fraudes commises dans les examens et les concours publics qui ont pour objet l’acquisition
d’un diplôme délivré par l’Etat sont réprimées dans les conditions fixées par la loi du 23 décembre 1901 réprimant les fraudes dans les examens
et concours publics ».
3
Articles 121-6 et 121-7 du Code pénal.
REMERCIEMENTS

A Morgan, mon futur mari, d’avoir toujours cru en moi, que ce soit dans cette formation
ou dans la vie quotidienne. Merci d’avoir fait en sorte que je ne manque de rien et que je
puisse réaliser mon projet professionnel. Et surtout merci d’avoir pris soin de notre petite
Jude durant ces deux années.
A nos futurs projets plus fous les uns que les autres.
Je rentre !

Merci à tous mes amis et particulièrement à mes amies Claire, Mylène et Domitille qui sans
elles ma vie serait beaucoup moins fun !

Merci à mon ami Rudy d’avoir su prendre du temps pour mon travail de recherche.

A mes copains de promo, merci pour ces nombreux moments de partage, de rire, de fête,
de pleurs. Il faut vraiment le vivre pour comprendre !
Un grand merci à Monsieur Gil, tu sais déjà tout. Rentre vite retrouver ta famille !

Merci à Stéphane pour ton accompagnement, ta patience et ta bonne humeur.

A Dr Anne Troitzky et Dr Rémi Drilleau d’avoir accepté de suivre ce travail de recherche.

Merci à Sandra de toujours avoir un sourire et un mot doux pour chacun d’entre nous.

A l’équipe pédagogique Laurent, Alain et Valérie.


LISTE DES ABREVIATIONS

AA : Air Ambiant L/min : Litre par minute


AG : Anesthésie Générale ML : Masque Laryngé
ALR : Anesthésie Loco Régionale MMC : Masque Moyenne Concentration
AMM : Autorisation de Mise sur le OFA : Opioid Free Anesthesia
Marché OMS : Organisation Mondiale de la Santé
ASA: American Society of ORI : Oxygen Reserve Index
Anesthesiologists O2 : Oxygène
BJA : British Journal of Anaesthesia O2Hb : Oxyhémoglobine
BTS : British Thoracic Society PaO2 : Pression Partielle Oxygène
CHU : Centre Hospitalier Universitaire SaO2 : Saturation en Oxygène
CHR : Centre Hospitalier Régional SAOS : Syndrome d’Apnée Obstructif du
CNIL : Commission Nationale de Sommeil
l’Informatique et des Libertés SFAR : Société Française Anesthésie et
CO2 : Dioxyde de Carbone Réanimation
EOT : Extubation Oro Trachéale SpO2 : Saturation Pulsée de
ET : Extubation Trachéale l'hémoglobine en Oxygène
FiO2 : Fraction Inspirée en Oxygène SSPI : Salle Surveillance Post
Hb : Hémoglobine Interventionnelle
IMC : Indice Masse Corporelle VA : Voies aériennes
IOT : Intubation Oro Trachéale VS : Ventilation Spontanée
ISO : Infection Site Opératoire
SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

1. OXYGENOTHERAPIE, CONCEPT D’HYPEROXIE ET D’HYPOXIE : RAPPELS PHYSIOLOGIQUES 2

1.1. L’OXYGENE ET L’OXYGENOTHERAPIE CONVENTIONNELLE 2


1.2. L’HYPEROXIE 3
1.3. L’HYPOXEMIE ET L’HYPOXIE 6
1.4. MOYENS DE MESURE DE L’OXYGENE AU BLOC OPERATOIRE 6

2. L’EXTUBATION 9

3. METHODE 10

3.1. TYPE D’ETUDE 10


3.2. OBJECTIFS 10
3.2.1. OBJECTIF PRINCIPAL DE L’ETUDE 10
3.2.2. OBJECTIFS SECONDAIRES 10
3.3. POPULATION ETUDIEE 11
3.3.1. CRITERES D’INCLUSION A L’ETUDE 11
3.3.2. CRITERES DE NON INCLUSION A L’ETUDE 11
3.4. METHODOLOGIE 12
3.5. ANALYSE STATISTIQUE 13

4. RESULTATS 14

4.1. INCLUSION 14
4.2. DESCRIPTIF DE LA POPULATION ETUDIEE 15
4.3 RESULTATS DES RELEVES DE SATURATION 17
4.4 RESULTATS EN LIEN AVEC L’OBJECTIF PRINCIPAL 20
4.5 RESULTATS EN LIEN AVEC LES OBJECTIFS SECONDAIRES 20

5. ANALYSE ET DISCUSSION 21

5.1. LES LIMITES ET BIAIS DE L’ETUDE 23

6. PERSPECTIVES 24

7. CONCLUSION 25
Introduction

Chaque année, plus de 11 millions d’anesthésies sont pratiquées en France 1. L’utilisation
d’Oxygène (O2) au sein des blocs opératoires est quotidienne et nécessaire à la pratique
d’une Anesthésie Générale (AG). Son utilisation est parfois banalisée par certains
professionnels. Tous les jours un grand nombre de patients bénéficient d’une
oxygénothérapie supplémentaire après une chirurgie programmée afin de prévenir
l’hypoxémie induite par l’anesthésie.

Il n’existe, à ce jour, pas de recommandation précise quant à l’utilisation systématique ou


non de l’oxygénothérapie en post opératoire immédiat. C’est pourquoi, nous constatons
une très grande variabilité des pratiques en fonction des professionnels de santé mais aussi
des habitudes des différents centres hospitaliers.

Je me suis donc interrogée sur la nécessité de mettre de l’oxygène en systématique en post-


extubation chez les patients ASA 1 et ASA 2 opérés sous AG d’une chirurgie programmée.

Le but de ce travail est de voir si chez les patients à qui nous n’avons pas mis d’O2
systématique faisaient des complications en Salle de Surveillance Post Interventionnelle
(SSPI).
1. Oxygénothérapie, concept d’hyperoxie et d’hypoxie : rappels
physiologiques

1.1. L’oxygène et l’oxygénothérapie conventionnelle

L’oxygène est considéré comme un médicament depuis le décret 98-79 du 11 février 1998
et dispose d’une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) depuis cette date 2. Hors
contexte d’urgence, l’oxygène est administré sur prescription médicale. Il est utilisé en
milieu hospitalier et préhospitalier et il est délivré par voie inhalée.
Comme tout médicament, l’O2 a ses indications, ses contre-indications et ses effets
indésirables 3.

L’oxygénothérapie normobare consiste à administrer un mélange gazeux plus riche en O2


que l’Air Ambiant (AA), (soit avec une Fraction d’O2 Inspiratoire supérieure à 21%). Elle a
pour but de maintenir une Pression Partielle Artérielle en Oxygène (PaO2) > à 60mmHg ou
une saturation du sang artériel (SaO2)  90%.

Les indications thérapeutiques de l’administration de l’oxygène sont :


- L’alimentation des respirateurs en anesthésie-réanimation et la correction des
hypoxies.
- Être le vecteur des médicaments pour inhalation administrés par nébuliseur et le
traitement des crises d’algie vasculaire de la face.

Il n’y pas de contre-indication à l’oxygénation normobare. L’oxygène peut être administré


en Ventilation Spontanée (VS) à l’aide de lunettes nasales, d’une sonde nasopharyngée ou
d’un masque. Ces dispositifs doivent être adaptés en fonction du débit d’oxygène souhaité.
Concernant les patients sous AG, l’O2 est administré par ventilation assistée ou contrôlée
4.

2
Tableau 1 : Dispositifs d’oxygénothérapie conventionnelle.

Sonde et lunettes Masques standard et Masque à haute


nasales Venturi* concentration avec
réservoir
Débit L/min 1à6 2 à 15 10 à 15
FiO2 (%) 24 à 26% 24 à 60% 65 à 90%
* Pour les masques Venturi la FiO2 dépend de la couleur de buse choisie : bleu = 24%, blanc = 28%, jaune
= 35%, rouge = 40% et vert = 60%.

L’oxygène, en plus d’être indispensable à la cellule pour produire de l’énergie, est essentiel
à la production de radicaux libres oxygénés. Ce sont des moyens de défense anti-infectieux
très puissants. Lorsque leur production est excessive, ils accompagnent certaines
pathologies graves avec de lourdes conséquences comme des lésions cellulaires et
tissulaires. C’est un des effets indésirables de l’oxygène.
La prescription médicale de l’oxygénothérapie doit être raisonnée et individualisée en
fonction de la pathologie sous-jacente, des capacités d’adaptation à l’hypoxémie et des
paramètres d’oxygénation tissulaire disponibles 5.

Les recommandations de la British Thoracic Society (BTS) préconisent « une


oxygénothérapie pour une SaO2 entre 94 et 98% » 6.

1.2. L’hyperoxie

L’hyperoxie est définie « par la présence d’un contenu en oxygène des tissus plus élevée que
celle existant naturellement au niveau de la mer (oxygénation supraphysiologique). Elle
correspond à une hyperoxémie définie par une PaO2 > 120 mm Hg » 7.
Pour la SaO2, il est impossible de déterminer un seuil pour l’hyperoxie, en raison de la
courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine. La SaO2 est proche de 100% à des valeurs de
PaO2 > 90 mmHg (figure 1 : Courbe de Barcroft).

3
En anesthésie, l’hyperoxie s’obtient par l’inhalation d’un mélange riche en oxygène, afin
d’obtenir des valeurs de PaO2 supérieures aux valeurs physiologiques. Celle-ci est pratiquée
lors de la phase de pré-oxygénation, lorsqu’une situation critique est prévue ou vécue et
en fin d’anesthésie avant d’extuber le patient 8.

Selon les recommandations d’experts du British Journal of Anaesthesia (BJA), il est


recommandé d’avoir une FiO2 à  0,4 après l’intubation et d’administrer la FiO2 la plus basse
possible lors de l’intervention pour un objectif de SpO2  94% afin d’éviter l’hyperoxie 9.

L’utilisation de l’hyperoxie peut également se retrouver en anesthésie pour prévenir les


Infections du Site Opératoire (ISO). En effet, en 2016, l’Organisation Mondiale de la Santé
(OMS), a recommandé d'administrer une FiO2 de 0,8 à tous les patients intubés subissant
une intervention chirurgicale, afin de réduire les ISO. Cette recommandation reste
controversée au sein de la communauté des anesthésistes. En 2018, l’OMS a rétrogradé
cette recommandation en recommandation « conditionnelle » 10.

Figure 1. Courbe de Barcroft : courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine de Barcroft.

4
L’hyperoxie peut être délétère dans certaines situations. Elle provoque une
vasoconstriction coronaire, systémique et cérébrale. Elle est également responsable d’une
hausse de la pression artérielle systémique 1&.

Les effets délétères de l’hyperoxie chez l’adulte ont été décrits dans l’article de Hafner et
al. de 2015 12.

Une hyperoxie prolongée est délétère par différents mécanismes et affecte plusieurs
systèmes 13 14 :
• Pulmonaire :
o Par la formation d’atélectasies d’absorption engendrant une diminution de
la production de surfactant,
o Par l’altération des échanges gazeux pulmonaires en raison de l’inhibition
de la vasoconstriction pulmonaire hypoxique provoquée par l’augmentation
de la PaO2 alvéolaire et veineuse,
o Par l’augmentation du shunt intrapulmonaire droite-gauche 15.
• Cardiovasculaire :
o Par l’augmentation des résistances vasculaires systémiques,
o Par la vasoconstriction coronarienne et l’augmentation du travail
myocardique puis de la diminution du débit cardiaque.
• Neurologique : par la diminution de la perfusion cérébrale en raison d’une
vasoconstriction.
• Métabolique : par l’effet Haldane (c’est la perte d’affinité de l’hémoglobine pour le
Dioxyde de carbone (CO2) quand la PaO2 augmente) et la dysfonction
mitochondriale.
• Rénal : par la diminution du flux sanguin rénal.
• Autres : la toxicité des radicaux libres et le retard de détection d’une détérioration
clinique.

Il faut seulement 5 minutes à FiO2 1 pour que la formation d’atélectasies ait lieu. La toxicité
de l’hyperoxie semble proportionnelle à la durée d’exposition et au niveau de la FiO2
utilisée 15.

5
1.3. L’hypoxémie et l’hypoxie

L'hypoxémie correspond à « une diminution de la PaO2 », tandis que l'hypoxie correspond


à une « insuffisance d'oxygénation tissulaire » 16.
Lorsqu’un patient présente une hypoxémie, l’objectif de l’oxygénothérapie est
d’augmenter la FiO2 3.

Plusieurs causes peuvent être à l’origine de l’hypoxémie 3:


- L’hypoventilation alvéolaire : liée à une dépression du système nerveux central. Elle
provoquera d’abord une hypercapnie (augmentation de la concentration en CO2
dans le sang), puis une hypoxémie.
- L’hétérogénéité des rapports ventilation/perfusion qui correspond à une mauvaise
répartition entre la ventilation et le débit sanguin pulmonaire.
- Le shunt vrai (sang veineux désoxygéné passe directement dans la circulation
artérielle sans passer par la circulation pulmonaire ou à travers un territoire
pulmonaire totalement non ventilé).
- L’effet shunt (inadéquation des échanges gazeux avec un rapport
ventilation/perfusion <1. Il y a des zones dans lesquelles la perfusion est normale
mais la ventilation est altérée 17.

Il semble important de rechercher les causes de l’hypoxie afin de mettre en place le


traitement le plus adapté.

1.4. Moyens de mesure de l’oxygène au bloc opératoire

Depuis 1994, il est obligatoire de monitorer en continu la SpO2 de tous les patients au bloc
opératoire et en SSPI 18. Les oxymètres de pouls font partis du monitorage standard des
patients du bloc opératoire.

6
Le saturomètre a été créé par Carl Matthes en 1935. A l’origine, il est non pulsatile. C’est
en 1974 que Takuo Aoyagi découvre la saturation pléthysmographique (SpO2 ou saturation
pulsée en oxygène), qui est à l’origine des oxymètres de pouls. Le premier a été
commercialisé en 1982. Ce dispositif est devenu indispensable à la pratique de l’anesthésie.
Il permet la mesure de la saturation artérielle en oxygène par voie transcutanée (SpO 2)
19.
La saturation pulsée en oxygène (SpO2) est une technique non invasive et est mesurée par
un oxymètre de pouls qui reflète le pourcentage d’oxyhémoglobine (partie de
l’hémoglobine combinée avec l’oxygène) (O2Hb).

L’oxymétrie de pouls est basée sur deux principes physiques :


- La présence d’un signal pulsatile généré par le sang artériel, relativement
indépendant du sang artériel non pulsatile, du sang veineux, capillaire et d’autres
tissus.
- L’oxyhémoglobine et l’hémoglobine réduite (partie de l’hémoglobine qui n’est pas
combinée à l’oxygène) (Hb). 20.

Les oxymètres actuels utilisent deux diodes électroluminescentes qui émettent de la


lumière aux longueurs d’onde de 660nm (rouge) et de 940nm (infrarouge). Ces deux
longueurs d’ondes sont utilisées car l’O2Hb et l’Hb ont des spectres d’absorption différents
à ces longueurs d’ondes 20.

La SpO2 normale est comprise entre 95% et 98% 21. Ce dispositif apporte plusieurs
informations sur l’oxygénation artérielle, la fréquence cardiaque et la perfusion tissulaire
du patient 22. La détection précoce d’une hypoxémie permet la mise en place de
l’oxygénothérapie. Le monitorage de la SpO2 permet également de suivre et d’évaluer la
réponse à l’oxygénothérapie.

7
La SpO2 est corrélée à la PaO2, lorsqu’elle atteint des valeurs élevées (98-100%), la PaO2
peut varier entre 100 et 600 mmHg chez le sujet sain (courbe de dissociation de
l’oxyhémoglobine de Barcroft – Figure 1). Ainsi, pour une SpO2 égale, un patient peut être
en normoxie ou en hyperoxie. Le saturomètre de pouls ne peut donc pas être utilisé pour
déceler l’hyperoxie.
La SpO2 est principalement utilisée pour détecter des épisodes d’hypoxémie, les soignants
ne sont pas habitués à l’utiliser pour réduire les apports d’oxygène 23. « Il a été démontré
qu’en se basant sur la SpO2 pour adapter la FiO2 des ventilateurs, les patients passent plus
de la moitié de leur temps en hyperoxie et que la FiO2 n’est que peu diminuée, en particulier
lorsqu’elle est déjà basse (30-50%) » 24 25 26.

Pour connaître la PaO2 des patients et détecter une éventuelle hyperoxie, il faudrait
effectuer une gazométrie artérielle. Celle-ci donne le reflet des échanges gazeux. La PaO2
normale est comprise entre 75 et 100mmHg 3.
Mais cela représente une surveillance invasive, couteuse, responsable d’une spoliation
sanguine. Les résultats de cette technique sont intermittents et retardés.

Le capteur de SpO2 semble être le dispositif le plus adapté pour évaluer l’oxygénation d'un
patient, car il permet une surveillance non invasive et continue. Bien que la surveillance de
la SpO2 facilite la détection de l'hypoxémie, elle n’aide pas à détecter l'hyperoxémie car
une PaO2 élevée n'est pas détectée une fois que la SpO2 est ≥ 98 % 27. Seulement l’alarme
minimale de la SpO2 sur le cardioscope est généralement réglée en fonction du profil du
patient alors que l’alarme maximale est rarement réglée et reste préréglée à 100.

8
2. L’extubation

Le contrôle des voies aériennes est une des principales préoccupations en anesthésie.
L’extubation est un acte quotidien dans notre pratique professionnelle mais elle représente
une période à haut risque.

L'extubation trachéale (ET) d'un patient doit être réalisée uniquement si la réversibilité des
médicaments de l'anesthésie est suffisante et que les paramètres physiologiques sont
stables. Les conditions pour extuber un patient sont :
- Le TOF T4/T1 est > 90 %.
- La respiration spontanée régulière assurant des échanges gazeux satisfaisants.
- Les conditions hémodynamiques satisfaisantes.
- Le patient éveillé (ouverture des yeux/réponse aux ordres/sans agitation) sauf si
décision d'extuber un patient sous anesthésie (pour éviter la toux)
- L'absence de risque immédiat de complication chirurgicale 28.

Avant l’extubation, il est recommandé de rechercher les facteurs de risque d’échec


d’extubation (Grade 2+. Accord fort). Comme facteurs de risque il a été décrit 28:
- La curarisation résiduelle.
- Des facteurs humains évitables (inexpérience, absence de procédure…).
- Des facteurs médicaux qui limitent des réserves de l’organisme (cardiaque ou
respiratoire).
- L’obstruction des voies aériennes.
- La chirurgie lourde.
- La chirurgie tête et cou.
- La chirurgie de longue durée > 4heures en position déclive avec remplissage
vasculaire sans monitorage et une sonde de diamètre important (taille >7,5mm).

Une FiO2 trop importante (FiO2  0,8) et inappropriée au patient favorise la formation
d’atélectasies 29. Une FiO2  0,4, si elle est tolérée par le patient, est recommandée par
les experts des recommandations du BJA 9.

9
3. Méthode

3.1. Type d’étude

Il s’agit d’une étude rétrospective, observationnelle, multicentrique au sein du CHU de


Poitiers et du CHR d’Orléans. Cette étude est réalisée auprès des patients ASA 1 et ASA 2
ayant bénéficiés d’une chirurgie programmée sous AG, n’ayant pas d’oxygénothérapie à
l’extubation.

Cette étude se déroule sur la période de juin 2021 à mai 2022.

3.2. Objectifs

3.2.1. Objectif principal de l’étude

L’objectif principal de ce travail de recherche est d’évaluer la survenue de désaturation


après l’extubation des patients ASA 1 et ASA 2 ayant bénéficiés d’une chirurgie sous AG.

3.2.2. Objectifs secondaires

Les objectifs secondaires de ce travail de recherche sont :


- D’évaluer la fréquence de survenue de désaturation lors du transfert entre la salle
d’intervention et la SSPI
- D’évaluer la fréquence d’une reprise d’oxygénothérapie supplémentaire en SSPI
après l’extubation du patient sans oxygénothérapie en salle opératoire.
- De s’’interroger sur la nécessité de l’oxygénothérapie en systématique après
extubation chez les patients ASA 1 et ASA 2 en chirurgie programmée.

10
3.3. Population étudiée

3.3.1. Critères d’inclusion à l’étude

Les critères d’inclusion sont :


- Patient majeur
- Patient ASA 1 ou ASA 2
- Patient opéré sous anesthésie générale avec une intubation ou un masque laryngé
- Patient opéré d’une intervention chirurgicale programmée
- Patient arrivant en SSPI sans oxygène

3.3.2. Critères de non inclusion à l’étude

Les critères de non-inclusion sont :


- Patient mineur
- Patients ASA 3 et 4
- Indice de Masse Corporelle (IMC) > 30kg/m2
- Intervention urgente
- Patient opéré sous Anesthésie Loco-Régionale (ALR)
- Patient opéré en chirurgie rhino-Laryngologique, thoracique, neurochirurgie et
thyroïdienne
- Patient ayant un pansement compressif en région thoracique, abdominale ou
patient ayant une ceinture abdominale en post-opératoire.
- Patient asthmatique ayant fait une crise récente
- Patient ayant un Syndrome d’Apnée Obstructif du Sommeil (SAOS)

11
3.4. Méthodologie

Les données ont été anonymisées et une demande d’autorisation à la Commission


Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) a été effectuée (Annexe 1).

Le recueil de données a été effectué à l’aide d’un document mis en place dans les SSPI du
CHU de Poitiers et du CHR d’Orléans (Annexe 2). Le personnel de SSPI devait relever la
saturation du patient à l’arrivée en SSPI et à la sortie de SSPI, indiquer si une
oxygénothérapie a été débutée en SSPI et renseigner la position dans laquelle se trouvait
le patient en SSPI. Les autres données ont été recueillies à l’aide du logiciel informatique
Diane et Excel.

Le critère de jugement principal est la désaturation. Le seuil fixé lors de cette étude est à
94%.

12
Les données recueillies afin d’effectuer ce travail de recherche sont :
- Age, sexe, IMC, antécédents principaux, score ASA
- Tabagisme
- Type de chirurgie et le type d’abord chirurgical
- La technique d’abord des voies aériennes (Intubation Oro-Trachéale : (IOT), Masque
Laryngé : (ML))
- Le nom du morphinique et la quantité totale de celui-ci reçu par le patient
- La saturation du patient à l’arrivée au bloc opératoire, à l’extubation, à l’arrivée en
SSPI et à la sortie de la SSPI
- Les manœuvres de recrutement
- La durée de l’intubation/masque laryngé, de la chirurgie
- L’absence d’oxygénothérapie à l’extubation
- La mise en place d’oxygénothérapie, le dispositif utilisé, le débit d’oxygène et la
durée de l’oxygénothérapie
- La SpO2 du patient avant de recevoir l’oxygène et la SpO2 du patient à la sortie de la
SSPI
- La durée de séjour en SSPI
- La position de l’installation du patient
La méthodologie du recueil de ces données est identique dans les 2 centres hospitaliers.

3.5. Analyse statistique

- Les variables qualitatives ont été décrites par leur effectif et leur pourcentage.
- Les variables quantitatives ont été retranscrites sous forme de moyenne, médiane
et valeurs (minimale ; maximale).

Elles sont illustrées si besoin par un graphique.

13
4. Résultats

4.1. Inclusion

Cette étude porte sur 200 patients ASA 1 ou ASA 2 de chirurgie programmée sous
anesthésie générale ayant été intubés ou ayant eu un masque laryngé au cours de
l’intervention.

100 patients ont été étudiés au CHU de Poitiers et 100 patients ont été étudiés au CHR
d’Orléans. L’ensemble de ces patients n’ont pas bénéficié d’oxygénothérapie à l’extubation
ou au retrait du dispositif supra glottique.

Aucun patient n’a été exclu. La cohorte de patients étudiés est donc de 200 patients
(n=200).

14
4.2. Descriptif de la population étudiée

Tableau 2 : Descriptif de la population étudiée

Nombre de patients (n) 200


Age (ans) 39 (18 ; 83)
Sexe (Femme/Homme) (%) 130/70
IMC 24,20 (17,71 ; 30)
I 107
Classe ASA (n)
II 93
Ambulatoire 65
Mode de sortie du CH (%) Hospitalisation 23
NR* 12
Fumeurs 24,5
Tabac (%) Non-fumeurs 64,5
Ex-fumeurs 11
Gynécologie 39
Ophtalmologie 1,5
Orthopédie 11
Otologie 0,5
Chirurgies (%) Plastie 4,5
Rachis 2,5
Urologie 6,5
Vasculaire 0,5
Viscéral 26,5
Incision 39,5
Voies
34,5
naturelles
Voies d'abords chirurgicales (%)
Coelioscopie 36,5
Laparotomie 1,5
Double abord 1
IOT 61
Technique abord VA (%)
ML 39
Oui 9,5
Manœuvre de recrutement peropératoire (%)
Non 40,5

* NR = Non Renseigné sur la consultation d’anesthésie : 24 soit 12% des patients étudiés.

15
Figure 2 : Durées des dispositifs de contrôle des voies aériennes

Durée des dispositifs de contrôle des voies aériennes


60

40
Effectif

20

0
< 30 Entre 30 et 60 Entre 61 et 90 Entre 91 et 120 > 120

Durée en minutes
IOT ML

La durée moyenne d’intubation est de 77 minutes. La durée médiane d’intubation est de


79,5 minutes.
La durée moyenne de masque laryngé est de 77 minutes également alors que la durée
médiane de masque laryngé est de 52 minutes.

Pour les chirurgies de plus de 60minutes, l’intubation est le dispositif glottique le plus
utilisé.

16
4.3 Résultats des relevés de saturation

Figure 3 : Relevés de la saturation en air ambiant à l’arrivée au bloc opératoire des patients en
décubitus dorsal.

Saturation à l'arrivée au bloc opératoire


100
77
80
Effectifs

60
45
38
40
21
20 10
4 5
0
94 95 96 97 98 99 100
SpO2 en %

Nous remarquons que tous les patients étudiés ont une SpO2  94% en air ambiant à leur
arrivée au bloc opératoire.

Figure 4 : Relevés de la saturation à l’extubation

Saturation à l'extubation
90 81
80
70
58
60
Effectifs

50
40
30 24
19
20
5 5 8
10
0
94 95 96 97 98 99 100
SpO2 en %

L’ensemble des patients ont une SpO2  94% à l’extubation en air ambiant.

17
Figure 5 : Relevés de saturation à l’arrivée en SSPI

Saturation à l'arrivée en SSPI


100 92

80
Effectifs

60

40
23 22 24 21
20 8 10

0
94 95 96 97 98 99 100
SpO2 en %

L’ensemble des patients ont une SpO2  94% en arrivant en SSPI et seulement 9% des
patients ont une SpO2 < 96%.

Figure 6 : Relevés de la saturation à la sortie de SSPI

Saturation à la sortie de SSPI


70
61
60
50
37
Effectifs

40
27
30 24 22
17
20
10
0
95 96 97 98 99 100
SpO2 en %

Tous les patients ont une SpO2  95% à la sortie de la SSPI. La majorité, soit 62,5% des
patients quittent la SSPI avec une SpO2  98%.

18
Figure 7 : Évolution des relevés de la saturation lors du transfert en SSPI

Evolution des SpO2 lors du transfert en SSPI


100
90
80
70
60
Effectifs

50
40 SpO2 à l'extubation
30 SpO2 à l'arrivée en SSPI
20
10
0
94 95 96 97 98 99 100
SpO2 en %

Nous observons qu’il n’y a eu aucun patient qui n’a désaturé durant le transfert entre la
salle d’intervention et la SSPI.

Figure 8 : Comparaison des relevés de la saturation entre l’arrivée et la sortie de SSPI

Comparaison des SpO2 entre l'arrivée et la sortie de SSPI


100
90
80
70
60
Effectifs

50
SpO2 à l'arrivée en SSPI
40
SpO2 à la sortie de SSPI
30
20
10
0
94 95 96 97 98 99 100
SpO2 en %

Nous remarquons que tous les patients arrivent en SSPI avec une SpO 2  95% et qu’ils
sortent tous de la SSPI avec une SpO2  95%.

19
4.4 Résultats en lien avec l’objectif principal

→ 100% des patients étudiés n’ont pas reçu d’oxygénothérapie une fois l’extubation
réalisée.
→ 100% des patients n’ont pas désaturé dans les minutes suivant l’extubation.
→ 9 patients, soit 4,5% ont désaturé durant leur séjour entre 90-94% de SpO2.

4.5 Résultats en lien avec les objectifs secondaires

Sur les 200 patients étudiés qui n’ont pas reçu d’oxygénothérapie en post-extubation
immédiate les résultats sont les suivants :
- A l’arrivée au bloc opératoire : 100% des patients ont une SpO2  94%.
- 100% des patients ont eu une FiO2  80% précédant l’extubation.
- A l’extubation sans oxygénothérapie : 100% des patients ont une SpO2  94%.
- 100% des patients ont une SpO2  94% lors du transfert de la salle d’intervention
vers la SSPI.
- En SSPI, concernant les 9 patients ayant désaturé :
▪ Pour 8 patients, il a été administré de l’O2 à 3L/min aux lunettes
nasales. Pour le patient ayant eu 90% de SpO2, il a reçu 6L/min au
masque moyenne concentration. En moyenne, les patients ont
bénéficié d’oxygène durant 50 minutes 22 ; 102.
▪ 1 patient était en position allongé lors de la désaturation, les 8 autres
patients étaient en position ½ assise lors de leur désaturation.
▪ Aucun de ces 9 patients n’a eu de titration de Morphine.
▪ Tous les patients ayant désaturé sont ASA 2 car ils sont ex-fumeurs.
Au total, 4,5% des patients étudiés ont désaturé et ont eu besoin d’oxygène avant leur
sortie de SSPI.
- 100% des patients sont sortis de SSPI avec une saturation  95% en AA.
o 83,5% des patients ont été installés en position demi-assise en SSPI. 11,5%
ont été installés en décubitus dorsal et 10% des positions dans laquelle se
trouvait le patient en SSPI n’ont pas été renseignées par l’équipe de SSPI.

20
5. Analyse et discussion

Au CHR d’Orléans, les patients sont majoritairement extubés en SSPI en position ½ assise
mais pour cette étude il a été demandé d’inclure que les patients arrivant en SSPI extubés.

A l’arrivée au bloc opératoire, tous les patients avaient une SpO2  94% en air ambiant, en
décubitus dorsal. Cette SpO2 relevée correspond à la première pris en compte par le logiciel
Diane lorsque le patient est installé en décubitus dorsal, en air ambiant sur la table
d’intervention (figure 3).

A l’extubation, l’ensemble du panel a une SpO2  94% en air ambiant. Plus de la moitié des
patients, soit 69,5% ont une SpO2  99% lors de l’extubation (figure 4).

A l’arrivée en SSPI, l’ensemble des patients ont une SpO2  94% et seulement 9% des
patients ont une SpO2 < 96%. Nous remarquons que 46%, pratiquement la moitié des
patients étudiés, ont une SpO2 à 100%. 45% des patients ont une SpO2 comprise entre 96
et 99% (figure5). Il faut garder à l’esprit qu’une FiO2  80% est administrée en systématique
lors de la phase de réveil avant l’extubation ce qui pourrait expliquer qu’aucun patient n’a
désaturé à l’extubation et lors du transfert de la salle d’intervention jusqu’à la SSPI. Cette
étude a révélé qu’aucun patient n’a désaturé après extubation et lors du transfert de la
salle d’intervention vers la SSPI (figure 6). Pourtant, la diminution de la FiO2 lors de
l’extubation est recommandée pour diminuer le risque d’atélectasies 29, ce qui n’est pas
respectée pour l’ensemble des patients étudiés dans cette étude.

En 2012, Maity et al. a démontré au cours d’une étude portant sur 150 patients ASA I ou
ASA II que « 28% des patients qui n’ont pas reçu d’oxygène ont développé une hypoxémie
lors du transfert du bloc opératoire à la salle de réveil, alors qu’aucun de ceux qui ont reçu
de l’oxygène supplémentaire n’a développé d’hypoxémie postopératoire précoce » 30.
Nous retrouvons une différence significative entre les données de l’étude de Maity et al. et
les résultats obtenus dans notre étude concernant le pourcentage de désaturation lors du
transfert de salle d’intervention vers la SSPI.

21
Au CHR d’Orléans, la majorité des patients n’ont pas d’oxygène en systématique après
l’extubation. Contrairement au CHU de Poitiers où la majorité des patients ont de l’oxygène
en systématique directement après l’extubation effectuée. Il semblerait que l’oxygène
administré en systématique après l’extubation des patients au CHU de Poitiers soit une
habitude de service et/ou de pratique.

Il s’avère que seulement 4,5% des patients étudiés ont désaturé en post opératoire lors de
leur séjour en SSPI. L’évolution de la saturation de chaque patient a été relevé à l’aide du
logiciel Diane. Nous avons relevé qu’un seul patient a désaturé à 90% de SpO2, les 8 autres
patients avaient une SpO2 comprise entre 93-94% en air ambiant.

La position de l’installation des patients en SSPI a été relevée et ne semble pas influer. En
effet, seul un patient sur les 11,5% patients qui se trouvaient en position allongé en SSPI a
désaturé. Tous les patients qui ont désaturé ont un score ASA 2 pour tabac sevré. Le tabac
sevré pourrait être un facteur de risque de désaturation post opératoire selon cette
étude. Ayant un faible échantillon de population, ceci est une hypothèse.
Concernant les différentes chirurgies, aucune ne se diffère. Le type de chirurgie ne semble
pas influer sur la désaturation post opératoire.

Nous remarquons que lorsqu’une désaturation survient, l’oxygénothérapie


supplémentaire est débutée avec 3L/min d’O2 aux lunettes nasales lorsque la SpO2 est
94%. Les recommandations du BJA préconisent que l’oxygène supplémentaire doit être
administré lorsque la SpO2 est inférieure à 94 % 9. Il a été observé que l’oxygénothérapie
débutée en SSPI est sevrée avant que le patient quitte la SSPI. En moyenne, le patient reçoit
de l’oxygène durant 50 minutes. Il n’existe à ce jour, aucune recommandation formelle
avec un algorithme de titration d’oxygène. Cela pourrait être intéressant de construire et
de mettre en place un protocole de titration d’oxygène afin d’uniformiser les pratiques
professionnelles au sein d’un même service. De plus, l’oxygène est un médicament et
comme tout médicament, il doit être titré et adapté en fonction de chaque patient et de
chaque situation, cela pourrait également limiter l’apparition d’une hyperoxie. Selon
Suzuki, S 27, une surveillance appropriée, y compris celle de la SpO2 et une titration de

22
l’oxygène doivent être effectuées pendant l’administration d’oxygène pour maintenir la
normoxémie.

A la sortie de SSPI, tous les patients ont une SpO2  95% en air ambiant. La majorité, soit
62,5% des patients quittent la SSPI avec une SpO2  98%.
Cette étude a mis en évidence la non nécessité d’administrer en systématique de l’oxygène
en post-extubation chez les patients ASA 1 et ASA 2 opérés sous AG d’une chirurgie
programmée et quelle que soit la technique d’abord des voies aériennes.
Une utilisation raisonnée et individualisée de l’oxygénothérapie post opératoire immédiate
apparaît donc comme sûre.

En effet, sur les 200 patients étudiés, seulement 4,5% ont présenté une désaturation en
SSPI ayant nécessité une oxygénothérapie transitoire.

5.1. Les limites et biais de l’étude

La limite principale de notre étude est le biais de sélection des patients et de chirurgies. En
effet, même si l’étude est multicentrique, elle ne représente que deux centres hospitaliers
français sur une période limitée. La taille de l’échantillon reste faible malgré les 200
patients inclus. Les dossiers des patients répondant aux critères d’inclusion ont été
sélectionnés de façon aléatoire et les chirurgies gynécologiques et viscérales représentent
respectivement 39% et 37% des dossiers étudiés lors de ce travail de recherche, ces
chirurgies sont surreprésentées.

Une autre limite retrouvée dans ce travail est la différence de pratiques entre les infirmiers
anesthésistes ainsi que la différence de pratiques entre les deux centres hospitaliers
étudiés. Au CHU de Poitiers, la majorité des IADE administrent en systématique de
l’oxygène au MMC en général à 6L/min ou 8L/min par habitude de service et/ou de
pratique. Alors qu’au CHR d’Orléans, les IADES ne mettent pas d’oxygène supplémentaire
en systématique après l’extubation du patient. L’administration éventuelle d’oxygène se
fait par titration à travers des lunettes à oxygène nasales.

23
6. Perspectives

Un dispositif récent a fait son apparition sur le marché afin de détecter un risque
d’hyperoxie : L’Oxygen Reserve Index (ORI). C’est un monitorage non invasif qui permet
d’évaluer les réserves en oxygène du patient. C’est un capteur digital qui analyse
l’absorption de l’hémoglobine dans ses composantes artérielles, veineuses et capillaires.
L’indice est sans unité et varie entre 0,00 et 1,00 et est corrélé à la PaO 2 du patient. Il
pourrait prévenir la désaturation précoce avant même la baisse de la SpO2. Il pourrait
également limiter les épisodes d’hyperoxie en périopératoire en détectant des PaO 2 entre
100 et 200mmHg contrairement à la SpO2 3. Il permettrait d’avoir un aperçu de la réserve
en oxygène des patients bénéficiant d’un apport supplémentaire d’oxygène 31.

24
7. Conclusion

Cette étude suggère que l’utilisation de l’oxygénothérapie en post extubation immédiate


chez des patients ASA 1 et ASA 2 pour des chirurgies programmées n’est pas nécessaire et
qu’une utilisation raisonnée et individualisée de celle-ci est tout à fait sécuritaire pour les
patients.
Un protocole de titration de l’oxygène pourrait limiter l’apparition d’une hyperoxie
délétère.

25
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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Décrets en Conseil d'Etat) : 2004.
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l’anesthésie et modifiant le code de la santé publique (troisième partie : Décrets).
Disponible sur : https ://sfar.org/decret-securite-8121994/ (consulté le
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ventilation appliquée. Tours : Presses universitaires François-Rabelais ; 2021. P 85-
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critically ill patients.2019.Disponiblesurhttps://dune.univ-
angers.fr/fichiers/20070416/2020MDEAR11605/fichier/11605F.pdf
24. Suzuki S, Eastwood GM, Peck L, Glassford NJ, Mellomo R. Current oxygen
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hyperoxia in ventilated patients in a Dutch ICU depends on the level of FiO2.
Intensive Care Med 2011 ; 37 : 46-51.
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review. J intensive care 2020 ; 8 : 79.
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Chollet-Rivier M, Lenfant F, Plaud B, Schoettker P, Fletcher D, Velly L, Nouette-
Gaulain K. Intubation difficile et extubation en anesthésie chez l’adulte. Anesth
Reanim 2017 ; 3 : 552-571.
29. Benoit Z, Wicky S, Fischer JF, Frascarolo P, Chapuis C, Spahn DR, Magnusson L. The
effect of increased FiO(2) before tracheal extubation on postoperative atelectasis.
Anesth Analg 2022 ; 95 : 1777-81.
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l'hypoxie au début de la période postopératoire. Anesth Essais Res 2012 ; 6 :34–7.
31. ORITM. Disponible sur https://www.masimo.fr/technology/co-oximetry/ori/
(consulté le 18.03.2022)
ANNEXE I : Déclaration à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés.

AVIS D’INSCRIPTION AU REGISTRE DES TRAITEMENTS DES ACTIVITES

J’ai le plaisir de vous confirmer l’inscription au registre des traitements du CHU de Poitiers à
compter de ce jour :
10 juin 2022
Des traitements suivants :

Extubation et oxygénothérapie chez les patients ASA 1 et ASA 2 en chirurgie programmée.

Il est inscrit sur le registre des activités de traitement, dans le domaine :

ECOLE

Avec le numéro d’inscription :


CHU86-ECOL-R2022-06-05

Cordialement,
Pierre Taveau
DPO CHU Poitiers et GHT86

Délégué à la protection des données 1/1


ANNEXE II : Relevé de saturation mis à disposition en SSPI.

Relevés de saturation pour mémoire Audrey Deprez (EIADE)

Pouvez-vous relever les saturations des patients arrivant en SSPI SANS O2 SVP ? OU relever
les saturations des patients qui sont extubés en SSPI SANS O2 ?

Critères d’inclusion :

- Patient majeur Étiquette Patient


- ASA 1 ou ASA 2
- Chirurgie programmée
- Anesthésie générale avec IOT ou ML

Critères d’exclusion :

- BMI > 30kg/m2


- Patient avec SAOS appareillé ou non appareillé
- Chirurgie en urgence
- Chirurgie ORL, Thoracique, Neurochirurgie
- Patient ayant un pansement compressif en région thoracique, abdominale
- Patient ayant une ceinture abdominale

Relevé de saturation :

Saturation %

A l’extubation en SSPI ou à l’arrivée en SSPI

A la sortie de SSPI

• Avez-vous remis de l’O2 au cours du séjour en SSPI ? Si oui, quelle était la


saturation avant l’O2 ?

• A cocher, le patient est-il allongé, ½ assis ou assis ?

Allongé
½ Assis
Asiss
Ecole d’Infirmier(e)s Anesthésistes Diplômé(e)s
d’Etat

UE 7 - MEMOIRE PROFESSIONNEL
En vue de l’obtention du diplôme d'Etat d'infirmier anesthésiste
2020-2022

ÉVALUATION DE LA NECESSITE D’OXYGENOTHERAPIE SYSTEMATIQUE


APRES EXTUBATION AU BLOC OPERATOIRE CHEZ LES PATIENTS ASA 1 ET
ASA 2 EN CHIRURGIE PROGRAMMEE.

Introduction : L’oxygénothérapie est une pratique courante lors d’une anesthésie au bloc
opératoire mais son impact et son utilisation lors de la phase de réveil d’un patient est
inégale. Banalisé par certains professionnels, cette oxygénothérapie peut s’avérer
inadaptée voir néfaste.

Objectifs : L’objectif de cette étude est d’évaluer la survenue de désaturation après


l’extubation d’un patient. Elle interroge sur la nécessité de l’oxygénothérapie en
systématique après extubation chez les patients ASA 1 et ASA 2 en chirurgie programmée.

Méthode : Il s’agit d’une étude rétrospective, multicentrique au sein du CHU de Poitiers


et CHR d’Orléans. Elle est réalisée sur 200 patients ASA 1 et ASA 2 opérés d’une chirurgie
programmée sous anesthésie générale, ne recevant pas d’oxygénothérapie à l’extubation.
Elle se déroule de juin 2021 à mai 2022.

Résultats : Il s’avère qu’un faible taux de patient présentent une désaturation durant leur
séjour en SSPI.

Conclusion : Cette étude remet en cause l’utilisation de l’oxygénothérapie systématique


lors de la période post-extubation de patients ASA 1 et 2, pris en charge lors de chirurgies
programmées. Le taux de désaturation observé suggère une utilisation raisonnée de
l’oxygène ainsi qu’un respect plus strict des indications de celui-ci en regard au potentiels
effets néfastes qu’une hyperoxie peut engendrer après une période de réveil.

Mots clés : Oxygène, Extubation, Saturation, Hyperoxie, Hypoxémie

Auteur : Audrey DEPREZ

Directeur de mémoire : Dr Rémi DRILLEAU et Dr Anne TROITZKY


Ecole d’Infirmier(e)s Anesthésistes Diplômé(e)s
d’Etat

PROFESSIONAL DISSERTATION
To obtain the National Diploma in Anaesthetic Nursing
2020-2022

EVALUATION OF THE NEED FOR ROUTINE OXYGEN THERAPY AFTER


EXTUBATION IN THE OPERATING ROOM IN ASA 1 AND ASA 2 PATIENTS
UNDERGOING SCHEDULED SURGERY.

Introduction : Oxygen therapy is a common practice during anaesthesia in the operating


theatre but its impact and use during the recovery phase of a patient is uneven.
Trivialised by some professionnals, this oxygen therapy can be inappropriate or even
harmful.

Objectives : The aim of this study is to evaluate the occurrence of desaturation after
extubation of a patient. It questions the need for routine oxygen therapy after extubation
in ASA 1 and ASA 2 patients undergoing scheduled surgery.

Method : This is a retrospective, multicentre study in the Poitiers University Hospital and
the Orleans Regional Hospital. It is carried out on 200 ASA 1 and ASA 2 patients operated
on during a scheduled surgery under general anaesthesia, not receiving oxygen therapy at
extubation. It will take place from June 2021 to May 2022.

Results : It was found that a low rate of patients were desaturated during their stay in the
ICU.

Conclusion : This study questions the use of systematic oxygen therapy in the post-
extubation period of ASA 1 and ASA 2 patients undergoing scheduled surgery. The rate of
desaturation observed suggests a reasoned use of oxygen as well as a stricter respect of
the indications of this one with regard to the potential harmful effects that hyperoxia can
generate after a period of recovery.

Keywords : Oxygen, Extubation, Saturation, Hyperoxia, Hypoxemia

Author : Audrey DEPREZ

Supervisor : Dr Rémi Drilleau and Dr Anne TROITZKY

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