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1.

Les nombres Complexes


Globalement ce chapitre est un rappel de notions du programme du terminale.
Dans R, l’ensemble des nombres réels, tous les nombres positifs ont une racine carrée. Par
contre, aucun réel négatif n’a de racine carré (réelle). L’ensemble C des nombres complexes
offre la possibilité à palier à cette insuffisance.  
Dans ce chapitre le plan est rapporté un repère orthonormé O,⃗i, ⃗j .

1.1. Écriture algébrique d’un nombre complexe.


Définition 1.1. Il existe un ensemble noté C, appelé ensemble des nombres complexes qui
possède les propriétes suivantes :
1. C contient l’ensemble des nombres réels R.
2. C contient un élément irréel i vérifiant i2 = −1.
3. Les opérations d’addition et de multiplication des nombres réels se prolongent au nombres
complexes et les régles de calcul restent les mêmes.
4. Tout nombre complexe z s’écrit d’une façon unique sous la forme z = a + ib avec a et b
deux réels.
5. L’écriture z = a + i b est dite la forme algébrique ou cartésienne du nombre complexe
z. a est la partie réelle de z et b est la partie imaginaire de z et on note a = Re(z) et
b = Im(z).
Exemples 1. z = −3 + 2 i, Re(z) = −3, Im(z) = 2.
z = −3i Re(z) = 0, Im(z) = −3.
z = 5 Re(z) = 5, Im(z) = −3.
z = 0 Re(z) = 0, Im(z) = 0.
Remarques 1.2.
• ∀z ∈ R, z ∈ R ⇐⇒ Im(z) = 0.
• Si Re(z) = a = 0, alors z est appelé nombre imaginaire pur, l’ensemble de ces com-
plexes est noté iR.
• ∀z ∈ C, z ∈ iR ⇐⇒ Re(Z) = 0.
• 0 est considéré à la fois comme un réel et un imaginaire pur.
1.2. Somme, produit et inverse. Soient z = a+i b et z ′ = a′ +i b′ deux nombres complexes.
z + z ′ = (a + a′ ) + i (b + b′ ), z × z ′ = (aa′ − bb′ ) + i (ab′ + a′ b)
1 a b
et pour z ̸= 0, on a: = 2 −i 2 .
z a + b2 a + b2
Proof. 1. z × z ′ = (a + i b)(a′ + i b′ ) = aa′ + i ab′ + i a′ b + i2 bb′ = aa′ − bb′ + i(ab′ + a′ b)
1 1 a − ib a − ib a − ib a − ib
2. = = = 2 2
= 2 2
= 2
z a + ib (a + i b)(a − i b) a − (ib) a − (−1)b a + b2

√ √
1 1 3−i 3 1 3
Exemple 1.3. La forme algébrique de √ est: √ = = −i .
3+i 3 3+i 3 9+3 4 12
Proposition 1.1. Soient x, y, x′ , y ′ des nombres réels. On a
x + iy = x′ + iy ′ ⇐⇒ x = x′ et y = y ′ .
En particulier x + iy = 0 ⇐⇒ x = 0 et y = 0.
1
Proof.  ⇐=) implication évidente.
 =⇒).
x + iy = x′ + iy ′ =⇒ x − x′ = i(y ′ − y)
=⇒ (x − x′ )2 = −(y ′ − y)2
=⇒ (x − x′ )2 + (y ′ − y)2 = 0
=⇒ x − x′ = 0 et y ′ − y = 0
=⇒ x = x′ et y = y ′ .

Remarques 1.4. Dans C il n’y a pas la notion d’ordre usuelle. On ne peut pas comparer un
nombre comlexe à un autre ou dire qu’il est positif ou négatif.

Le symbole est réservé aux nombres réels positifs.
1.3. Conjugué d’un nombre complexe.
Définition 1.5. Le conjugué du nombre complexe z = x + iy est le nombre complexe z =
x − iy.
Exemples 2. 3 + 7i = 3 − 7i, 2 − 5i = 2 + 5i, −10 = −10 3i = −3i.
Proposition 1.2. Soit z un nombre complexe.
1. z + z = 2 × Re(z), z − z = 2 i × Im(z).
2. z est un nombre réel si et seulement si z = z, et z est un imaginaire pur si et seulement
si z = −z.
3. Si z = x + i y, alors zz = x2 + y 2 .
Proposition 1.3. Soient les nombres complexes z = x + i y et z ′ = x′ + i y ′ .
1. z + z ′ = z + z ′ , z − z ′ = z − z ′ , z × z ′ = z × z ′ .
 
1 1
2. =
z z
z z
3. = ′
z′ z
4. Pour tout réel λ on a: (λ × z) = λ × z
5. (z n ) = (z)n , n entier naturel.
Exemple 1.6. Le nombre complexe z = (1 + 2i)(3 − i)(1 − 2i)(3 + i) est un nombre réel.
En effet, on peut toujours faire les calculs
z = (1 + 2i)(1 − 2i)(3 − i)(3 + i)
= (12 + 22 )(32 + 12 ) = 5 × 10
z = 50
Donc z ∈ R.
Aussi, on peut utiliser le fait que z ∈ R ⇐⇒ z = z.
z = (1 + 2i)(3 − i)(1 − 2i)(3 + i)
= (1 + 2i).(3 − i).(1 − 2i).(3 + i)
= (1 − 2i)(3 + i)(1 + 2i)(3 − i)
z = z
2
1.4. Représentation géométrique d’un nombre complexe.

1.4.1. Définitions.
Soit M un point de coordonnées (x, y). Le nombre complexe z = x + i y est appel l’affixe du
point M . Le point M est appelé image du nombre complexe z. On note M(z) le point d’affixe
z.
Remarque 1.7.
−−→
• Le nombre complexe z est aussi l’affixe du vecteur OM .
−−→
• Le vecteur OM est aussi l’image du nombre complexe z.
• Le plan muni du repère orthonormé direct (O, ⃗e1 , ⃗e2 ) est appelé le plan complexe.
• (O,⃗e1 ) est appelé l’axe des réels et (O,⃗e2 ) est appelé l’axe des imaginaires purs.
Exemples 3. Si I(1,0 et J(0,1) alors l’affixe de I est 1 et l’affixe de J est i.
Si A(1, − 3) alors l’affixe de A est le nombre complexe 1 − 3i.
Définition 1.8. Si M (z) et M (z ′ ) avec z = x + iy et z ′ = x′ + iy ′ avec a, b ∈ R, alors on peut
−−−→
associer au vecteur M M ′ de coordonnées (x′ − x,y ′ − y) le nombre complexe
−−−→
z ′ − z = (x′ − x) + i(y ′ − y) et on écrit af f (M M ′ ) = z ′ − z = af f (M ′ ) − af f (M ).
Soient ⃗u et ⃗v deux vecteurs du plan. Alors af f (⃗u + ⃗v ) = af f (⃗u) + af f (⃗v ).
1.5. Module d’un nombre complexe.
Définition 1.9. Soit M un point du plan d’affixe z. On appelle module du nombre complexe
z la distance OM . On le note |z| = OM .
Propriétés 1.4. Soit M et M ′ deux points d’affixes respectives les nombres complexes z et
z′ .
p
1. Si z = x + i y, alors |z| = x2 + y 2 .
2. |z| = |z| , z × z = x2 + y 2 = |z|2 .
1 1 z |z|
3. |z × z ′ | = |z| × |z ′ |, = , ′ = ′ .

z |z| z |z |
4. |z + z ′ | ≤ |z| + |z ′ |.
5. |z n | = |z|n , n entier naturel.
6. |z|2 = zz.
7. M M ′ = |z ′ − z|.
√ √ √ q√
2 √ √
Exemples 4. |1 + 2i| = 12 + 22 = 5. | 3 − 3i| = 3 + (−3)2 = 12 = 2 3.
Exercice 1.10. Soit z ∈ C différent de 1 et M le point du plan complexe
d’affixe z.
z +i
Déterminer F l’ensemble des points M lorsque z varie dans C et = 1.
z − 1
1.6. Écriture trigonométrique d’un nombre complexe.

1.6.1. L’argument d’un complexe.


Définition 1.11. Soit M un point d’affixe le nombre complexe z non nul.
−−→
On appelle argument de z tous les réels θ, mesure en radians de l’angle →

 \
e 1 , OM . On note
arg(z) = θ + 2kπ, k ∈ Z ou arg(z) ≡ θ [2π] (modulo [2π] ).
3
Autrement dit, un nombre complexe non nul a une infinité d’arguments.
Si θ est l’un d’entre eux, tout autre argument de z s’écrit θ + 2kπ.
On dit aussi qu’un argument de z est défini modulo 2π.
−−→
Le nombre complexe 0 n’a pas d’argument car la définition arg(z) = →−

e 1 , OM suppose
que M ̸= O.
Proposition 1.5.
1. Si z est un réel strictement positif, alors arg(z) ≡ 0[2π].
2. Si z est un réel strictement négatif, alors arg(z) ≡ π[2π].
π
3. Si z est un imaginaire pur non nul, alors arg(z) ≡ [π].
2
4. Si arg(z) ≡ θ [2π], alors arg(−z) ≡ θ + π [2π]
5. Si arg(z) ≡ θ [2π], alors arg (z) ≡ −θ [2π].
1.6.2. L’écriture trigonométrique d’un nombre complexe.
Définition 1.12. Tout nombre complexe z non nul, de module r et dont un argument est θ,
peut s’écrire
z = r (cos(θ) + i sin(θ)) .
Cette écriture est appelée écriture trigonométrique du nombre complexe z.
Théorème 1.6. Soit z = x+i y un nombre complexe non nul. On a z = |z| (cos(θ) + i sin(θ))
avec
x y
cos(θ) = 2 2
et sin(θ) = 2 .
x +y x + y2
Réciproquement: si z = r (cos(θ) + i sin(θ)) , r > 0 alors |z| = r et arg(z) ≡ θ[2π].
Exemple 1.13. Écrire le nombre √ complexe √ 1 + i sous forme trigonométrique.
On calcul son module : |1 + i| = 12 + 12 = 2.
1 1
Puis on cherche θ ∈ R vérifiant cos θ = √ et sin θ = √ .
π
√ 2 π π
2
On obtient θ = 4 [2π]. D’où 1 + i = 2 cos + i sin .
4 4
Proposition 1.7. Soient z et z ′ deux nombres complexes non nuls.
• arg(z × z ′ ) ≡ arg(z) + arg(z ′ ) (mod 2π).
• arg z1  ≡ −arg(z) (mod 2π).


• arg ′zz ≡ arg(z) − arg(z ′ ) (mod 2π).


• arg(z n ) ≡ n.arg(z) (mod 2π).
Remarque 1.14. On notera l’analogie entre ces relations et les propriétés de la fonction
logarithme.
Proposition 1.8 (Formule de Moivre). Soient z = r(cos θ + i sin θ) et n un entier naturel.
On a:
z n = rn (cos(nθ) + i sin(nθ)).
 n
|z | = |z|n ,
Autrement dit n
arg (z ) = n × arg(z).
Remarque 1.15. Cette formule est utilisée pour rechercher les puissances nièmes de nombres
complexes sous forme trigonométrique:
z n = rn (cos nθ + i sin nθ) ,
4
ainsi que pour linéariser les puissances de cos(θ) et sin(θ), i. e. pour obtenir les formes de
cosn θ et sinn θ en fonction de cos(θ), sin(θ), ..., cos mθ et sin mθ et inversement.
Par exemple, pour obtenir cos 2θ et sin 2θ on écrit d’après la formule de Moivre:
(cos(θ) + i sin(θ))2 = cos 2θ + i sin 2θ.
Donc cos2 (θ) − sin2 (θ) + 2i cos(θ) sin(θ) = cos 2(θ) + i sin 2(θ),
d’où
cos(2θ) = cos2 (θ) − sin2 (θ) et sin(2θ) = 2 cos(θ) sin(θ).
On a aussi
cos(2θ) = 2 cos2 (θ) − 1 et cos(2θ) = 1 − 2 sin2 (θ).
D’où on obtient
1 + cos 2θ 1 − cos θ
cos2 (θ) = et sin2 (θ) = .
2 2
√ √ z1
Exercice 1.16. Soient les nombres complexes: z1 = 2 + i 6, z2 = 2 + 2i et Z= .
z2
1. Écrire Z sous forme algébrique.
2. Donner les modules et arguments de z1 , z2 et Z.
π π
3. En déduire cos et sin .
12 12
4. Écrire sous forme algébrique le nombre complexe Z 2007 .
Corrigé.
√ √ √ √ √ √ √ √ √ √
z1 2+i 6 (2 − 2 i)( 2 + i 6) 2 2 + i 2 6 − 2 2ı − 2 i2 6 2 6+2 2
1. Z = = = = = +
√ z2 √ 2 + 2i 22 + 22 8 8
2 6−2 2
i .
8 √ √ √ √
6+ 2 6− 2
Et donc Z = +i .
√ √4 √ 4 √ √
2. i. z1 = 2 + i 6, |z1 | = 2 + 6!= 8 = 2 2.
√ √ √ !
√ 2 6 √ 1 3
D’où z1 = 2 2 √ +i √ =2 2 +i .
2 2 2 2 2 2

1 3 π
Et donc cos θ = et sin θ = . Soit θ = [2π].
2 √ √2 √ 3
ii. z2 = 2 + 2i, |z2 | = 22 + 22 = 8 = 2 2.
√ ! √ √ !
√ √ √
 
2 2 1 2 2 2
D’où z2 = 2 2 √ +i √ =2 2 √ +i√ =2 2 +i .
2 2 2 2 2 2 2 2
√ √
2 2 π
Et donc cos θ = et sin θ = . Soit θ = [2π].
2 √ 2 4
z1 |z1 | 2 2
iii. Z = , donc |Z| = = √ = 1.
z2   |z2 | 2 2
z1 π π π
Et arg(Z) = arg = arg(z1 ) − arg(z2 ) = − = [2π].
z2 √ √ √ √ 3 4 12
π π 6+ 2 6− 2
3. Z = cos + i sin = +i .
12 12 4 4
 π  √6 + √2  π  √6 − √2
Et donc cos = et sin = .
12 4 12 4
5
 π  π
4. D’après la formule de Moivre : Z 2007 = cos 2007 × + i sin 2007 × .
12 12
2007 π 1992 π 15 π 15 π 5π
Or = + = 166 π + = 83 × 2 π + .
12 12  12   12 4
5π 5π
Et donc Z 2007 = cos + i sin
4 4 √
 
5π  π π  2
Or cos = cos π + = − cos =− ,
4 4 4 √2
 
5π  π π  2
et sin = sin π + = − sin =−
4 √ √ 4 4 2
2 2
D’où Z 2007 = − −i
2 2
1.7. Écriture exponentielle d’un nombre complexe.

Définition 1.17.
1. Le nombre complexe de module 1 et dont un argument est θ est noté eiθ .
eiθ = cos θ + i sin θ.
2. Si z est un nombre complexe de module r et d’argument θ on écrit:
z = r eiθ = r(cos θ + i sin(θ)) = |z|(cos θ + i sin θ).
π π
Exemples 5. ei0 = 1, ei 2 = i, eiπ = −1, ei 4 = √1
2
+ i √12 .
π √ π
−5 = 5eiπ , −7i = 7ei 2 , 3 + i = 2ei 6 .
Remarque 1.18.
′ ′ eiθ ′
1. On a ∀θ, θ′ ∈ R, eiθ × eiθ = ei(θ+θ ) , iθ′
= ei(θ−θ ) .
n e
2. Formule de Moivre : ∀n ∈ N, eiθ = ei n θ ⇐⇒ (cos θ + i sin θ)n = cos nθ + i sin nθ.
e + e−iθ = 2 cos θ,
 iθ  iθ
e = cos θ + i sin θ,
3. Formules d’Euler. On a: −iθ Donc
e = cos θ − i sin θ. eiθ − e−iθ = 2i sin θ.
eiθ + e−iθ eiθ − e−iθ
D’où : cos(θ) = ; sin(θ) =
2 2i
4. ∀r, ρ, θ, α ∈ R, on reiθ = ρeiα ⇐⇒ r = ρ et θ ≡ α [2π].
Définition 1.19. La fonction exponentielle, définie à priori de R dans R, peut être étendue
à C de la façon suivante :
Si z = a + ib, où (a,b) ∈ R2 , on définit ez = ea+ib = ea eib = ea (cos b + i sin b).
En d’autre terme, ∀z ∈ C, (z = a+ib avec a, b ∈ R) ez ∈ C et on a |ez | = ea et arg(ez ) ≡ b [2π].

Exercice 1.20. Résoudre dans C les équations suivantes : ez = 1, ez = i, ez = 1 + i 3.
Pour la première équation ez = 1, on pose z = x + iy avec x, y ∈ R.
ez = 1 ⇐⇒ ex .eiy = 1.ei0
⇐⇒ ex = 1 et y ≡ 0[2π]
⇐⇒ x = ln 1 et (∃k ∈ Z, y = 2kπ)
⇐⇒ x = 0 et (∃k ∈ Z, y = 2kπ)
z
e = 1 ⇐⇒ ∃k ∈ Z, z = 2kπ i
6
D’où l’ensemble des solutions est S = {2kπ i, k ∈ Z}.
Remarque 1.21. D’une façon générale, les solutions de l’équation ez = ρeiα sont
z = ln(ρ) + i(α + 2kπ), k ∈ Z.
Remarque 1.22. Soit z ∈ C. z peut se mettre sous trois formes différentes:
1. la forme cartésienne: z = x + iy,
2. la forme polaire ou forme trigonométrique: z = ρ(cos θ + i sin θ) = [ρ, θ],
3. la forme eulérienne: z = ρeiθ .
1.8. Racines d’un nombre complexe.
1.8.1. Racine nième.
Définition 1.23. Soient u un nombre complexe donné et n un entier naturel non nul, on
appelle racine nième complexe de u tout nombre complexe z, s’il existe, tel que z n = u. En
particulier, un nombre complexe a en général plusieurs racines nième.
Exemples 6.
1. On a (2i)3 = −8i, donc 2i est une racine 3ième de −8i,
2. On a (1 + i)2 = 2i, alors 1 + i est une racine 2ième ou (racine carrée) de 2i.
3. On a (1 − i)2 = −2i, alors 1 − i est une racine 2ième ou (racine carrée) de −2i.
4. On a (1 − i)4 = (−2i)2 = −4, alors 1 − i est une racine 4ième de -4.
Remarque 1.24. On prendra garde à ne pas confondre le racine nième d’un nombre complexe
√ 1
avec la racine nième d’un nombre réel positif. On réservera les notations n x et x n au cas où
x est un nombre réel positif. Cela désignera alors le nombre réel positif a tel que an = x.
Proposition 1.9. Soient u = ρeiθ ∈ C∗ et n ∈ N. Alors, il existe n racines nièmes:
z0 , z1 , · · · , zn−1 de u distinctes deux à deux. De plus
 1

 |zk | = ρn ,

 arg(z ) = θ + 2πk , où k ∈ {0, 1, 2, · · · , n − 1}.



k
n n
Proof.
Si u = 0, alors la seule racine n-ième est z = 0.
Supposons si u ̸= 0, soit z une racine n-ième de u, alors u et toute racine n-ième z de u
peuvent s’écrire sous forme exponentielle. Soient θ et φ des arguments respectifs de u et z, et
ρ, r leurs modules respectifs, on a:
z n = u ⇐⇒ (reiφ )n = ρeiθ ⇐⇒ rn einφ = ρeiθ ,
donc
rn = ρ,

nφ = θ + 2kπ, k ∈ Z.
n √
or ρ > 0 et r > 0 donc l’équation r = ρ admet une solution unique: r = n ρ et l’équation
θ 2kπ
nφ = θ + 2kπ, k ∈ Z ⇐⇒ φ = + , k ∈ Z.
n n
On en déduit que les racines de u sont les nombres complexes :
1 θ 2πk
zk = ρ n ei( n + n
)
où k ∈ {0, 1, 2, · · · , n − 1};
il n’y a en fait que n racines n-ième distinctes de u, car à partir de k = n on ”retombe” sur
les mêmes racines par périodicité. □
7
Exemples 7.
1. Quelles sont les √
racines cinquièmes de 1 + i?
π
Comme 1 + i = 2ei 4 , alors les racines 5ième de 1 + i sont les nombres complexes zk tels
que  √ 1
 |zk | = 25 ,


π
 4 2πk
 arg(zk ) = + , où k ∈ {0, 1, 2, · · · , 5 − 1}.

5 5
Donc  √ 1 p
5
√ √
10


 |zk | = 25 = 2= 2,

 arg(zk ) = π + 2πk , où k = 0, 1, 2, 3, 4.




20 5
D’où les racines cinquièmes de 1 + i sont les nombres complexes
√ 1 π 2kπ
zk = 2 5 .ei( 20 + 5 ) , où k = 0, 1, 2, 3, 4.
C’est-à-dire les racines cinquièmes
√ 1 iπ de 1 + i sont :
• Pour k = 0, on a z0 = ( 2) 5 e 20 .
√ 1 π 2π √ 1 9π
• Pour k = 1, on a z1 = ( 2) 5 ei( 20 + 5 ) = ( 2) 5 ei( 20 ) .
√ 1 π 4π √ 1 17π
• Pour k = 2, on a z2 = ( 2) 5 ei( 20 + 5 ) = ( 2) 5 ei( 20 ) .
√ 1 π 6π √ 1 25π
• Pour k = 3, on a z3 = ( 2) 5 ei( 20 + 5 ) = ( 2) 5 ei( 20 ) .
√ 1 π 8π √ 1 33π
• Pour k = 4, on a z4 = ( 2) 5 ei( 20 + 5 ) = ( 2) 5 ei( 20 ) .

2. Calculer les racines carrés de u = 3 + 3i 3. On a:
√ !
√ 1 3  π π π
u = 3 + 3i 3 = 6 +i = 6 cos + i sin = 6ei 3 .
2 2 3 3
√ π π
Les racines carrés de u = 3 + 3i 3 = 6ei 3 c’est-à dire les solutions de l’équation z 2 = ei 3
sont les nombres complexes zk tels que
√ π
2kπ π
|zk | = 6 et arg(zk ) = 3 + = + kπ, avec k = 0, 1.
√2 π
2 6
En d’autre terme zk = 6ei( 6 +kπ) où√k = 0, 1.
D’où √les racines carrées
√ i( deπ u = 3 +√3i 3π sont :
i π6 +π)
z0 = 6e et z1 = 6e 6 = − 6ei 6 = −z0 .
Remarque 1.25. Tout nombre complexe non nul admet deux racines carrées opposées.

Autrement dire si u = ρeiθ alors les racines carrées de u sont z0 = ρeiθ/2 et z1 = −z0 .
Exemple 1.26. Voilà une méthode algébrique permettant de déterminant les racines carrées
éventuelles d’un nombres complexes: la méthode pour déterminer les racines carrées d’un
nombres complexe Z = a + ib consiste à poser z = x + iy (où x et y sont des réels ) puis
résoudre le système d’équation à deux inconnues qui en résulte en effet:
z 2 = Z ⇐⇒ (x + iy)2 = a + ib ⇐⇒ x2 − y 2 + 2xyi = a + ib.
8
En identifiant les parties réelle et imaginaire, on montre obtient le système (non linéaire):
 2
x − y 2 = a,
(1)
2xy = b.
D’autre part, en identifiant les modules de chaque côté, on trouve:
p
(2) : x2 + y 2 = a2 + b2 .
√ √
En effet |z 2 | = |a + ib| ⇐⇒ |z|2 = a2 + b2 ⇐⇒ √ x2 + y 2 = a2 + b2 .
2 2 2 2 2 2
En faisant la somme √ des équations x + y = a + b et x − y = a, membre à membre, on
a+ a +b 2 2
obtient x2 = .
2 √
En faisant la différence
√ des équations x2 + y 2 = a2 + b2 et x2 − y 2 = a, membre à membre,
a2 + b2 − a
on obtient y 2 = .
2
s √ s√
a + a2 + b2 a2 + b2 − a
Donc x = ± et y = ± .
2 2
L’équation 2xy = b permet de déterminer le signe de x celui de y et donc déterminer x et y
et par conséquent déterminer z.
Exemple. Déterminer les racines carrées de 3 + 4i.
On pose z = x + iy où x, y ∈ R. Si z est racine carré de 3 + 4i, alors (x + iy)2 = 3 + 4i. Donc
 2
 x − y 2 = 3,
  2 
 2x2 = 8,  x = 4,  x = ±2,
2xy = 4, 2 2 y = ±1,
√ ⇐⇒ 2y = 2, ⇐⇒ y = 1, ⇐⇒
 2
x + y 2 = |3 + 4i| = 32 + 42 = 5. xy = 2. xy = 2. xy = 2.
  

Puisque x et y sont de même signe alors


 
x = 2, x = −2,
ou
y = 1, y = −1.
C’est à dire z = 2 + i ou z = −2 − i.
Remarque 1.27. Dans des cas particuliers, on peut déterminer rapidement les racines carrées
sous forme algébrique d’un nombre complexes en utilisant les identités
(1 + i)2 = 2i, (1 − i)2 = −2i, (a + ib) = a2 + 2abi + b2 , et (a − ib) = a2 − 2abi + b2 où a,b ∈ R.
• 3 + 4i = 4 + 4i − 1 = 22 + 2 × 2 × i + i2 = (2 + i)2 . Donc les racines carrées de 3 + 4i
sont 2 + i et −2 − i. q 2
• 3i = 32 × 2i = 23 × (1 + i)2 = 3
2 (1 + i) . Donc les racines carrées de 3i sont
q q
3 3
2 (1 + i) et − 2 (1 + i).
q 2
• −5i = 25 × (−2i) = 25 × (1 − i)2 = 5
2 (1 − i) . Donc les racines carrées de −5i sont
q q
5 5
2 (1 − i) et − 2 (1 − i).

1.8.2. Racines n-ième de l’unité.


Définition 1.28. Soit n ⩾ 1 un entier. On appelle racine n-ième de l’unité dans C, tout
élément z de C vérifiant z n = 1. Une racine n-ième de l’unité est donc une racine de l’équation
z n − 1 = 0 dans C. L’ensemble de ces racines est noté Un .
Un = {z ∈ C∗ | z n = 1}.
9
Proposition 1.10. Pour tout z et pour tout z ′ dans Un , on a:
2kπ
1. Tout élément de Un est de la forme: ei n , où k ∈ {0, 1, · · · , n − 1}, c’est-à-dire les racines
2kπ
n-ième de l’unité sont: ei n , où k ∈ {0, 1, · · · , n − 1}.
2. ∀z ∈ Un , ∀z ′ ∈ Un , zz ′ ∈ Un .
1
3. ∀z ∈ Un , ∈ Un .
z
Exemples 8.
1. Pour n = 1, il y a une racine de 1 qui est le nombre complexe 1.
2. Pour n = 2, les racines carrées de l’unité sont 1 et −1 = eiπ .
3. Pour n = 3, les racines
√ cubiques de l’unité sont √ 1, j et j 2 = j avec
1 3 1 3
j = ei2π/3 = − + i et j 2 = ei4π/3 = − − i .
2 2 2 2
Remarquer que j 3 = (j)3 = 1.
4. Pour n = 4, les racines quatrièmes de l’unité sont 1, −1, i = eiπ/2 et −i = ei3π/2 = e−iπ/2 .
Remarque 1.29. Soit n ∈ N∗ \{1}.
La somme des racines n-ième de l’unité est toujours égale à 1.
En effet, les racines n-ième de l’unité sont :
2kπ
 2π k
zk = ei n = ei n où k = 0,1,...,n − 1.

On a
2π 2π 2π
z0 + z1 + ..... + zn−1 = 1 + ei n + (ei n )2 + .... + (ei n )n−1

= 1 + u + u2 + .... + un−1 avec u = ei n
un − 1 2π
= car u ̸= 1 puisque ̸≡ 0 [2π].
u−1 n
z0 + z1 + ..... + zn−1 = 0, car un = ei2π = ei0 = 1.
Cette remarque est parfois très utiles dans certains calculs.
Ainsi si on considère par exemple les racine cubiques de 1 qui sont 1, j et j = j 2 .
On a 1 + j + j 2 = 0.
1.8.3. Racines d’un trinôme du second degré.
Proposition 1.11. Soit l’équation a z 2 + b z + c = 0 où a, b et c sont des réels, a non nul,
∆ = b2 − 4ac est le discriminant.
−b
1. Si ∆ = 0, alors l’équation admet une unique solution: z = .
2a
2. Si ∆ > 0, alors l’équation admet deux solutions réelles:
√ √
−b − ∆ −b + ∆
z1 = et z2 = .
2a 2a
3. Si ∆ < 0, alors l’équation admet deux solutions complexes:
√ √
−b − i −∆ −b + i −∆
z1 = et z2 = .
2a 2a
Proof.
On a:
10
" 2 # " 2 #
2 2
 
b c b b c b b 4ac
a z 2 +b z+c = a z 2 + z + =a z+ − 2+ =a z+ − 2+ 2 .
a a 2a 4a a 2a 4a 4a
" 2 # " #
b2 − 4ac b 2
 
b ∆
Donc a z 2 + b z + c = a z + − 2
= a z + − 2 .
2a 4a 2a 4a
" 2 #
b
• Si ∆ = 0 alors a z 2 + b z + c = a z + . Et a étant non nul on doit avoir
2a
b 2
 
b
z+ = 0, d’où z = −
2a 2a
 √ 2 
 2 ∆

 2 √ !2 
b b ∆ 
• Si ∆ > 0, alors a z 2 +b z+c = a  z + −  = a z + − .
 
2a 4a 2 2a 2a
Et a étant non nul
√ on!2doit avoir √ ! √ !
 2
b ∆ b ∆ b ∆
z+ − = 0, d’où z+ + z+ − = 0.
2a 2a 2a 2a 2a 2a
Ou encore
√ √
−b − ∆ −b + ∆
z= ou z = .
2a 2a
√ 2
• Si ∆ < 0, alors ∆ = i −∆ . Et a étant non nul on doit avoir
  √ 2 √ √
b 2
   
i −∆ b i −∆ b i −∆
z+ − = 0, d’où z + + z+ − = 0. Ou
2a 2a
√ √ 2a 2a 2a 2a
−b − i −∆ −b + i −∆
encore z = et z = .
2a 2a

Exercice 1.30.
On considère l’équation :
(E) : z 3 − (4 + i)z 2 + (13 + 4i)z − 13i = 0
où z est un nombre complexe.
1. Vérifier que le nombre complexe i est solution de cette équation.
2. Déterminer les nombres réels a, b et c tels que, pour tout nombre complexe z on ait :
z 3 − (4 + i)z 2 + (13 + 4i)z − 13i = (z − i) az 2 + bz + c .


3. En déduire les solutions de l’équation (E).

Corrigé.
Soit (E) l’équation z 3 − (4 + i)z 2 + (13 + 4i)z − 13i = 0.
1. On a : i3 − (4 + i)i2 + (13 + 4i)i − 13i = −i + 4 + i − 4 + 13i − 13i = 0 donc i est solution
de (E).
2. (z − i)(az 2 + bz + c) = az 3 + (b − ai)z 2 + (c − bi)z − ic.
Deux polynômes sont égaux si et seulement si les coefficients sont égaux. On obtient le
système :
11
 
a = 1 a = 1 
 a = 1

 

b − ai = −4 − i c = 13
 
⇔ ⇔ b = −4
c − bi = 13 + 4i b−i = −4 − i
c = 13

 
 
−ic = −13i 13 − bi = 13 + 4i
 
donc z 3 − (4 + i)z 2 + (13 + 4i)z − 13i = (z − i)(z 2 − 4z + 13).
3. L’équation (E) s’écrit (z − i)(z 2 − 4z + 13) = 0.
Dans C, un produit de facteurs est nul si et seulement si l’un des facteurs est nul.
(z − i)(z 2 − 4z + 13) = 0 ⇐⇒ z − i = 0 où z 2 − 4z + 13 = 0.
On va résoudre l’équation z 2 − 4z + 13 = 0.
on a: ∆ = −36 = (6i)2 < 0. Il y a donc deux racines complexes conjuguées

4 − 6i
= 2 − 3i et 2 + 3i.
2
L’ensemble des solutions est: S = {i ; 2 − 3i ; 2 + 3i}
Proposition 1.12. Soit l’équation a z 2 + b z + c = 0 où a, b et c sont des
nombres complexes ∈ C, a non nul, ∆ = b2 − 4ac est le discriminant.
−b
1. Si ∆ = 0, alors l’équation admet exactement une racine complexe (dite “double”) z = .
2a
2. Si ∆ ̸= 0, alors l’équation admet deux solutions complexes:
−b + δ −b − δ
z1 = et z2 = ,
2a 2a
où δ est une racine carrée de l’équation ∆, c-à-d, δ 2 = ∆.
Proof. C’est la même que dans le cas précédent: on met le trinôme sous forme réduite (où z
n’apparaı̂t qu’une seule fois). □
Exemple 1.31. Résoudre dans C l’équation z 2 − 3iz − 3 + i = 0.
Corrigé.
On a
∆ = b2 − 4ac = (−3i)2 − 4(−3 + i)
= −9 + 12 − 4i
= 3 − 4i
= 4 − 4i − 1
= 2 2 − 2 × 2 × i + i2
∆ = (2 − i)2 = δ 2 .
donc les solutions de l’équation sont :
−b + i δ 3i + 2 − i −b − i δ 3i − 2 + i
z1 = = = 1 + i et z2 = = = −1 + 2i.
2a 2 2a 2
L’ensemble des solutions est donc: S = {1 + i , − 1 + 2i}.
Remarques 1.32. (1) Si z1 et z2 (éventuellement égales) sont solutions de l’équation
az 2 + bz + c = 0 alors le polynôme complexe P (z) = az 2 + bz + c se factorise sous la
forme
P (z) = a(z − z1 )(z − z2 ).
12
(2) Les solutions z1 et z2 (éventuellement égales) de l’équation az 2 + bz + c = 0 vérifient
b c
z 1 + z2 = − et z1 .z2 =
a a
(3) Soient α et β deux nombres complexes quelconques. On a
(z − α)(z − β) = z 2 − (α + β)z + α.β.
Donc α et β sont les racines de l’équation z 2 − (α + β)z + α.β = 0.
Exercice.
1. Résoudre dans C l’équation z 2 − 2z cos θ + 1 = 0, où θ est un réel fixé.
2. Résoudre dans C l’équation z 2 − (2 + i m)z + (i m + 2 − m) = 0, où m est un nombre
complexe fixé.
Corrigé
1) Le discriminant de l’équation est :
∆ = b2 − 4ac = 4 cos2 (θ) − 4 = 4(cos2 (θ) − 1) = −4 sin2 (θ) = (2i sin(θ))2 .
Donc les solutions sont :
2 cos(θ) + 2i sin(θ)
z1 = = cos(θ) + i sin(θ), et z2 = z1 = cos(θ) − i sin(θ).
2
Autre méthode :
On a z 2 − 2z cos θ + 1 = z 2 − (eiθ + e−iθ )z + eiθ .e−iθ = (z − eiθ )(z − e−iθ ).
Donc les solutions sont z1 = eiθ et z2 = e−iθ .
2) Le discriminant de l’équation est
∆ = b2 − 4ac = (2 + im)2 − 4(im + 2 − m) = −(m − 2)2 = (i(m − 2))2 .
Les solutions sont donc :
−b + δ 2 + im + i(m − 2) −b − δ 2 + im − i(m − 2) 2 + 2i
z1 = = = 1+i(m−1) et z2 = = = = 1+i.
2a 2 2a 2 2

13
2. Les Polynômes
Dans tout ce chapitre, K désignera R ou C (i.e., K = R ou K = C).
2.1. Définition d’un polynôme.
Définition 2.1. Un monôme est une expression de la forme: aX n où a est un nombre réel ou
un nombre complexe et n un entier naturel. Le nombre a est appelé coefficient du monôme
et le nombre n est appelé le degré du monôme. L’objet X porte le nom d’indéterminé.
Exemples 9.
• 7X 3 est un monôme
√ de coefficient 7 et de degré 3.
−1
• 5X et −3 X ne sont pas des monômes.
• 9 = 9X 0 est un monôme de degré 0 et de coefficient 9.
Définition 2.2. Un polynôme à coefficients dans K est une somme finie de monômes, c-à-d,
une expression de la forme
P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 ,
avec n ∈ N et a0 , a1 ,..., an sont dans K. L’ensemble des polynômes est noté K[X].
- Les ai sont appelés les coefficients du polynôme.
- Si tous les coefficients ai sont nuls, P est appelé le polynôme nul, il est noté 0.
- On appelle le degré de P le plus grand entier i tel que ai ̸= 0, on le note deg(P ). Pour le
degré du polynôme nul on pose par convention deg(0) = −∞.
- Un polynôme de la forme P = a0 avec a0 ∈ K est appelé un polynôme constant. Si
a0 ̸= 0, son degré est 0.
- L’objet X porte le nom d’indéterminé.
Exemples 10.
- P (X) = X 3 + 5X + 34 est un polynôme à coefficients réels de degré 3.
- P (X) = X n + 1 est un polynôme à coefficients réels de degré n pour tout n ∈ N.
- P (X) = 2 est un polynôme constant, de degré 0.
- Q(X) = 1 + (1 + i)X + iX 2 est un polynôme à coefficients complexes de degré 2.
Notations:
On note indifféremment l’expression explicite d’un polynôme dans l’ordre des puissances crois-
santes de X ou dans l’ordre des puissances décroissantes, autrement dit:
P (X) = a0 + a1 X + · · · + an X n ou P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 .
On convient de noter un polynôme P , Q ou f etc.... En parlant d’un polynôme non explicité
ou encore P (X), Q(X) ou f (X), etc.
Remarque 2.3.
1. L’ensemble des polynômes à coefficients réels (à coefficients dans R) est noté R[X].
2. L’ensemble des polynômes à coefficients complexes (à coefficients dans C) est noté C[X].
Définitions 2.4.
1. Si P est un polynôme non nul, l’expression an X n où n est le degré de P (i.e., an ̸= 0), est
appelée terme dominant de P . Le coefficient an est appelé coefficient dominant du
polynôme P .
2. Un polynôme P est dit unitaire si son coefficient dominant est égal à 1.
Exemple 2.5.
14
• P (X) = 3X 12 − 3 est un polynôme dont le terme dominant est: 3X 12 , et le coefficient
dominant est: 3.
• P (X) = X 10 − 5X 9 − 3X + 21 est un polynôme unitaire, car son coefficient dominant
est: 1.
Remarques 2.6.
1. Se donner un polynôme de degré n veut dire se donner n + 1 coefficients a0 , a1 , · · · , an
avec an ̸= 0 tels que
P (X) = a0 + a1 X + · · · + an X n .
2. Écrire P (X) = a0 + a1 X + · · · + an X n ne signifie pas que P est de degré n tant que l’on
n’a pas précisé que an ̸= 0.
Définition 2.7. Soit P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 un polynôme de K[X]. La
fonction f définie sur K par:
f : K −→ K
x 7−→ f (x) = P (x) = an xn + an−1 xn−1 + · · · + a1 x + a0
est appelé fonction polynomiale associée au polynôme P .
Exemple 2.8.
• La fonction polynomiale associée au polynôme
P (X) = 3X 12 − 3X + 9 de R[X]
est:
f : R −→ R
x 7−→ f (x) = P (x) = 3x12 − 3x + 9
• La fonction polynomiale associée au polynôme
P (X) = 5iX 10 − 5X 9 − (3 + 2i)X + 21i + 9 de C[X]
est:
f : C −→ C
x 7−→ f (x) = P (x) = 5ix10 − 5x9 − (3 + 2i)x + 21i + 9
Remarque 2.9. On peut parfois se permettre d’assimiler un polynôme à sa fonction polynômiale
et aisni par exemple dériver ce polynôme.
2.2. Opérations sur les polynômes.

2.2.1. Égalité.
Définition 2.10. Soient P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 et
Q(X) = bm X m + bm−1 X m−1 + · · · + b1 X + b0
deux polynômes à coefficients dans K. On dit que P et Q sont égaux et on écrit P = Q si et
seulement si n = m et ai = bi pour tout i. En particulier un polynôme est nul ssi tous ses
coefficients sont nuls.
Un polynôme est donc défini de manière unique par ses coefficients. On peut dire que: un
polynôme est une suite finie d’éléments de K.
15
2.2.2. Addition.
Définition 2.11. Soient P et Q deux polynômes à coefficients dans K. Quitte à introduire
des coefficients nuls, il existe un entier n tel que
P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 et
Q(X) = bn X n + bn−1 X n−1 + · · · + b1 X + b0 .
Alors on définit la somme de P et Q, noté P + Q, par:
(P + Q)(X) = cn X n + cn−1 X n−1 + · · · + c1 X 1 + c0 avec
cn = an + bn , · · · , c1 = a1 + b1 et c0 = a0 + b0 .
De la définition de la somme de deux polynômes, on déduit immédiatement la proposition
suivante.
Proposition 2.1. Soient P et Q deux polynômes à coefficients dans K.
deg(P + Q) ≤ max(deg(P ), deg(Q)).
Exemples 11.
1. Soient P (X) = X 2 + X + 1 et Q(X) = X 3 − 3 deux polynômes de R[X]. Alors
(P + Q)(X) = X 3 + X 2 + X − 2.
C’est un polynôme de degré égal à 3 qui est bien le plus grand des deux degrés à savoir 2
et 3.
2. Soient P (X) = X 2 + X + 1 et Q(X) = −X 2 + 2X − 3 deux polynômes de R[X]. Alors
(P + Q)(X) = 3X − 2.
C’est un polynôme non nul de degré égal à 1. Ce degré est strictement inférieur à 2. Ce
phénomène se produit lorsque la somme fait intervenir deux polynômes de même degré
dont les termes dominants s’éliminent.
3. Soient P (X) = X 2 + X + 1 et Q(X) = X 2 + 2X − 3 des polynômes de R[X]. Alors
(P + Q)(X) = 2X 2 + 3X − 2.
C’est un polynôme non nul de degré égal à 2, qui est le degré de P et de Q.
4. Soient P (X) = X 2 + X et Q(X) = −X 2 − X des polynômes de R[X]. Alors
(P + Q)(X) = 0 et deg(P + Q) = −∞.
Proposition 2.2. Tous les polynômes considérés dans ces formules sont des éléments de
K[X]. Alors l’addition des polynômes:
1. est associative, c’est-à-dire que pour tous polynômes P , Q et R on a:
(P + Q) + R = P + (Q + R).
2. est commutative, c’est-à-dire que pour tous polynômes P et Q on a: P + Q = Q + P .
3. admet un élément neutre, qui est le polynôme nul, tel que pour tout polynôme P , on a:
0 + P = P + 0 = P.
4. est telle que tout polynôme P admet un symétrique, qui est −P , c’est à dire que
P + (−P ) = 0.
2.2.3. Multiplication par un scalaire.
Définition 2.12. Soient P un polynôme et α ∈ K, alors αP est le polynôme dont le i-ème
coefficient est αai avec ai est le i-ème coefficient de P . C’est-à-dire si
P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0
16
et α ∈ K, alors
αP (X) = αan X n + αan−1 X n−1 + · · · + αa1 X + αa0 .
Si α et P sont non nuls, alors αP et P ont le même degré.

Il est clair, compte tenu de cette définition, que toutes les propriétés du produit d’un
élément de K[X] par un scalaire de K se déduisent immédiatement des propriétés du produit
de K. On obtient alors la proposition suivante.

Proposition 2.3. Soient P et Q deux polynômes de K[X] et α, β ∈ K. Alors


1. α(P + Q) = αP + αQ.
2. (α + β)P = αP + βP .
3. (α.β)P = α(βP ).
4. 1.P = P .

2.2.4. Produit des polynômes.

Définition 2.13. Soient P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 et


Q(X) = bm X m + bm−1 X m−1 + · · · + b1 X + b0
deux polynômes à coefficients dans K.
Le produit des deux polynômes P et Q est le polynôme, noté P × Q ou P · Q ou P Q, et donné
par:
(P × Q)(X) = cr X r + cr−1 X r−1
X+ · · · + c1 X + c0 , avec
r = n + m, ck = ai bj , pour tout k ∈ {0, 1, 2, ..., r}.
i+j=k

En particulier, ak X k · bs X s = ak bs X k+s .

Exemple 2.14. Soient P (X) = X 2 + X + 1 et Q(X) = X 3 − 3 deux polynômes de R[X].


Alors (P.Q)(X) = X 5 + X 4 + X 3 − 3X 2 − 3X − 3

Proposition 2.4. Pour P , Q, R trois polynômes dans K[X], alors


1. P × Q = Q × P , le produit est commutatif.
2. (P × Q) × R = P × (Q × R), le produit est associatif.
3. 1 × P = P , le produit admet un élément neutre qui est 1.
4. P × (Q + R) = P × Q + P × R, le produit est distributif par rapport à l’addition.

Proposition 2.5.
Soient P et Q deux polynômes à coefficients dans K. Alors

deg(P × Q) = deg(P ) + deg(Q).

Exemple 2.15. Soient P (X) = X 2 + X + 1 et Q(X) = X 3 − 3 deux polynômes de R[X].


Alors
(P Q)(X) = X 5 + X 4 + X 3 − 3X 2 − 3X − 3,
donc on a bien: deg(P Q) = deg(P ) + deg(Q) = 2 + 3 = 5.

Proposition 2.6. Soient P et Q deux polynômes, alors le produit P Q est égal au polynôme
nul, i.e. P Q = 0, si et seulement si P ou Q est le polynôme nul.
17
2.3. Division euclidienne.
Il existe de grandes similarités entre la division euclidienne dans Z et la division euclidienne
dans K[X].
Définition 2.16. Soient A, B ∈ K[X], on dit que B divise A s’il existe Q ∈ K[X] tel que
A = BQ. On note alors B|A. On dit aussi que A est multiple de B ou que A est divisible
par B.
Proposition 2.7. Soient A, B, C et P des polynômes de K[X] non nuls.
1. Tout polynôme non nul P divise lui-même.
2. Tout polynôme non nul P divise le polynôme nul.
3. Pour tout a ̸= 0 de K, a et aP divisent P .
4. Si A divise B, et si B ̸= 0, alors deg(A) ≤ deg(B).
5. Si A|B et B|A, alors il existe α ∈ K ∗ tel que A = αB.
6. Si A|B et B|C, alors A|C.
7. Si C|A et C|B, alors C|(AU + BV ), pour tout U, V ∈ K[X].
Théorème 2.8 (Division euclidienne des polynômes).
Soient A et B deux polynômes dans K[X], avec B ̸= 0, alors il existe un couple (Q, R) unique
de polynômes vérifiant la double condition:
A = BQ + R et deg(R) < deg(B).
Q est appelé le quotient et R le reste et cette écriture est dite: la division euclidienne de A
par B.
Remarque 2.17.
Notez que la condition deg(R) < deg(B) signifie R = 0 ou bien 0 < deg(R) < deg(B).
Et R = 0 si et seulement si B|A.
Exemple 2.18.
1- Faisons la division euclidienne de A(X) = X 3 + X 2 − 1 par B(X) = X − 1.
X 3 +X 2 +0X −1 X −1
−X 3 +X 2 X 2 +2X +2
2X 2 +0X
−2X 2 +2X
2X −1
−2X +2
+1
Ce qui fournit la division euclidienne: A(X) = (X − 1)Q(X) + 1 où Q(X) = X 2 + 2X + 2.
2- Faisons la division euclidienne de
A(x) = 6X 3 − 2X 2 + X + 3 par B(X) = X 2 − X + 1.

6X 3 − 2X 2 + X + 3 X 2 − X + 1

6X 3 − 6X 2 + 6X 6X + 4
2
4X − 5X + 3

4X 2 − 4X + 4
−X − 1
On trouve A(X) = B(X)Q(X) + (−X − 1) où Q(X) = 6X + 4.
18
2.4. Dérivation.

Définition 2.19. Soit P un polynôme de K[X], on appelle polynôme dérivé, la fonction


P ′ (X) dérivée de P . C’est aussi un polynôme. Plus précisément, si
n
X
P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 = ak X k ,
k=0

alors

 0 si deg(P ) < 1, i.e., si P est constant ou nul

n
P ′ (X) = X
 nan
 X n−1 + (n − 1)an−1 X n−2 + · · · + 2a2 X + a1 = kak X k−1 si deg(P ) ≥ 1.
k=1

Exemples 12.
a. Soit le polynôme P (X) = X 2 − 3X + 2, alors P ′ (X) = 2X − 3.
b. Soit le polynôme P (X) = 5X 4 + 7X 3 − 2X 2 − 5X + 8, alors

P ′ (X) = 20X 3 + 21X 2 − 4X − 5.

c. Pour P (X) = 7 ou P (X) = 0; on a P ′ (X) = 0.

Proposition 2.9. Soit P un polynôme de K[X]. Alors on a:



′ −∞, si deg(P ) < 1
deg(P ) =
deg(P ) − 1, si deg(P ) ≥ 1.

On peut généraliser la définition précédente 2.19.

Définition 2.20. Soit P un polynôme de K[X], on définit par récurrence le polynôme dérivé
′
d’ordre m ≥ 1 par: P (0) = P , et P (m) = P (m−1) .

Remarque 2.21.

k!
X k−m = Am
k X
k−m si m ≤ k,

(X k )(m) = (k − m)!
 0 si m > k.

Exemple 2.22. Calculons les dérivées d’ordre 1, 2 ,3 et 5 et 6 du monôme X 5 .


On a (X 5 )′ = (X 5 )(1) = A15 X 5−1 = 5X 4 .
On a (X 5 )” = (X 5 )(2) = A25 X 5−2 = 5 × 4 × X 3 = 20X 3 .
On a (X 5 )(3) = A35 X 5−3 = 5 × 4 × 3 × X 2 = 60X 2 .
On a (X 5 )(5) = A55 X 5−5 = 5X 2 = 5 × 4 × 3 × 2 × 1 × X 0 = 120.
On a (X 5 )(6) = 0 car 6 < 5.

Proposition 2.10. Soit P un polynôme de K[X] de degré n, et


n
X
n n−1
P (X) = an X + an−1 X + · · · + a1 X + a0 = ak X k .
k=0
19
- Pour m > n, on a: P (m) (X) = 0,
- Pour m ≤ n, on a:
n n
X
m k−m
X k!
(m)
P (X) = a k Ak X = ak X k−m ,
(k − m)!
k=m k=m
m! (m + 1)! 1 k! n!
= am X 0 + am+1 X + · · · + ak X k−m + · · · + an X n−m ,
0! 1! (k − m)! (n − m)!
(m + 1)! k! n!
= am m! + am+1 X + · · · + ak X k−m + · · · + an X n−m ,
1! (k − m)! (n − m)!
Exemple 2.23. Soit le polynôme P (X) = 3X 5 + 2X 4 − 5X 2 + 7, alors
 P ′ (X) = 15X 4 + 8X 3 − 10X.
 P ′′ (X) = 60X 3 + 24X 2 − 10.
 P (3) (X) = 180X 2 + 48X.
 P (4) (X) = 360X + 48.
 P (5) (X) = 360.
 ∀m ≥ 6, P (m) (X) = 0.
2.5. Formule de Taylor pour les polynômes.
La formule de Taylor en général consiste à approcher une fonction d’une variable réelle par une
fonction polynomiale. Le reste est en général n’est pas nul. Pour les polynômes, la formule
de Taylor ne contient pas de reste. Commençons par un corollaire de la Proposition 2.10.
Proposition 2.11 (Formule de Taylor en 0). Soit P un polynôme de K[X] de degré n,
et P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 . Alors on a:
P (m) (0)
∀m ∈ {0, 1, 2, · · · , n}, am = .
m!
En conséquence, en remplaçant la valeur de am par celle trouvé plus haut, on a:
P (n) (0) n P (n−1) (0) n−1 P (1) (0) P (0) (0)
P (X) = X + X + ··· + X+
n! (n − 1)! 1! 0!
P (n) (0) n P (n−1) (0) n−1 (1)
P (0)
P (X) = X + X + ··· + X + P (0).
n! (n − 1)! 1!
Proof. Par la proposition 2.10, on a pour tout m ≤ n
n
X k!
P (m) (X) = ak X k−m
(k − m)!
k=m
n
m! X k!
= am + ak X k−m
0! (k − m)!
k=m+1
n
X k!
= am m! + ak X k−m ,
(k − m)!
k=m+1

donc P (m) (0) = am m! + 0 = am m!, d’où le résultat. □


Remarque 2.24. Il est équivalent de connaı̂tre un polynôme P et de connaı̂tre toutes ses
dérivées en 0. Autrement dit, un polynôme est entièrement déterminée par ses dérivée en 0.
Exemple 2.25. Soit le polynôme P (X) = 3X 5 + 2X 4 + X 3 − 5X 2 + 8X + 7, alors P (0) = 7.
 P ′ (X) = 15X 4 + 8X 3 + 3X 2 − 10X + 8, donc P ′ (0) = 8 = 8 × 1!.
 P ′′ (X) = 60X 3 + 24X 2 + 6X − 10, donc P ′′ (0) = −10 = −5 × 2!.
20
 P (3) (X) = 180X 2 + 48X + 6, donc P (3) (0) = 6 = 1 × 3!.
 P (4) (X) = 360X + 48, donc P (4) (0) = 48 = 2 × 4!.
 P (5) (X) = 360, donc P (5) (0) = 360 = 3 × 5!.
 ∀m ≥ 6, P (m) (X) = 0, donc P (m) (0) = 0. 
Proposition 2.12 (Formule de Taylor en a). Soit P un polynôme de K[X] de degré
inférieur ou égal à n, et soit a un élément de K.
P (X) = an X n + an−1 X n−1 + · · · + a1 X + a0 .
Alors
P (m) (a)
∀m ∈ {0, 1, 2, · · · , n}, am = .
m!
Et on a
n
X P (k) (a)
P (X) = (X − a)k ,
k!
k=0
P ′′ (a) P (n) (a)
P (X) = P (a) + P ′ (a)(X − a) + 2! (X − a)2 + · · · + n! (X − a)n .
En particulier, on trouve que:
n
X P (k) (0)
P (X) = X k , et
k!
k=0
n
X P (k) (a)
P (X + a) = Xk.
k!
k=0

Remarque 2.26.
• Comme pour le cas de 0, cette formule montre que P est déterminée par ses dérivées
successives en a.
• Si P annule toutes ses dérivées en a, alors P est nul, ce que l’on pourra traduire par
si P admet une racine d’ordre infinie, alors P est nul.
• L’intérêt de la formule de Taylor en a est qu’elle permet de factoriser le polynôme P
et aussi d’exprimer les coefficients du polynôme (composé) P ◦ (X + a) = P (X + a)
en fonction du polynôme P .
2.6. Racines d’un polynôme.

Définition 2.27. Soient a un scalaire (a ∈ K) et P un polynôme de K[X]. On dit que a est


une racine ou un zéro de P si P (a) = 0, i.e. l’image de a par la fonction polynôme f est 0.
Exemple 2.28.
1. le nombre 2 est une racine du polynôme P (X) = X 2 − 3X + 2. En effet,
P (2) = 4 − 6 + 2 = 0.
2. le nombre −3 est racine du polynôme P (X) = (X + 3)(X 3 − 2X − 5), car
P (−3) = (−3 + 3)((−3)3 − 2 × (−3) − 5) = 0.
3. Le complexe i est racine du polynôme Q(X) = X 2 + 1, car Q(i) = i2 + 1 = −1 + 1 = 0.
Remarque 2.29. Il est équivalent de dire:
“a est une racine de P ” ou ”a est un zéro de P ” ou ”a est une solution de l’équation
P (x) = 0”.
21
Proposition 2.13. Soit a ∈ K.
P (a) = 0 ⇐⇒ X − a divise P ⇐⇒ P = (X − a)Q où Q ∈ K[X].
Proof. Lorsque l’on écrit la division euclidienne de P par X − a on obtient P = Q · (X − a) + R
où R est une constante car deg R < deg(X − a) = 1. Donc
P (a) = 0 ⇐⇒ R = 0 ⇐⇒ (X − a)|P.

Définition 2.30. Soit k ∈ N∗ . On dit que a est une racine de multiplicité k ou racine d’ordre
k de P si (X − a)k divise P et (X − a)k+1 ne divise pas P . En d’autre terme a est une racine
de multiplicité k s’il existe un polynôme Q ∈ K[X] tel que P (X) = (X − a)k Q(x) et Q(a) ̸= 0.
La racine de multiplicité d’ordre k = 1 est dite racine simple. La racine de
multiplicité d’ordre k = 2 est dite racine double et pour k = 3 c’est une racine
triple ... etc.
Proposition 2.14. Soient P un polynôme de K[X], a un nombre de K et k ∈ N∗ . Alors a
est une racine d’ordre k (ou encore d’ordre de multiplicité k) si et seulement si
P (a) = P ′ (a) = . . . = P (k−1) (a) = 0 et P (k) (a) ̸= 0.
Remarque 2.31. Il y a équivalence entre :
i. a est une racine de multiplicité k de P .
ii. Il existe Q ∈ K[X] tel que P = (X − a)k Q, avec Q(a) ̸= 0.
iii. P (a) = P ′ (a) = · · · = P (k−1) (a) = 0 et P (k) (a) ̸= 0.
Exemple 2.32. Soit le polynôme P (X) = X 4 + 2X 3 − 2X − 1. Alors
1. 1 est une racine simple de P , puisque P (1) = 0 et P (1) (1) = P ′ (1) = 8 ̸= 0.
2. Par contre −1 est une racine triple de P , car P (−1) = P ′ (−1) = P ”(−1) = 0 et
P (3) (−1) = −12 ̸= 0.
Remarque 2.33. Comment trouver les racines d’un polynôme:
a. 1ère méthode: on teste plusieurs valeurs et si on tombe sur une qui annule le polynôme on
a gagné.
b. 2ème méthode: on résout l’équation P (X) = 0. On s’arrange pour mettre le polynôme sous
la forme d’un produit dont les facteurs sont du premier ou second degré et on utilise la
règle du produit nul.
Remarque 2.34. Tout polynôme de R[X] de degré impair admet au moins une racine réelle.
Théorème 2.15. Soient A et B deux polynômes de C[X]. A est divisible par B si et seulement
si toutes les racines de B sont aussi des racines de A avec au moins le même ordre de
multiplicité.
Exemple 2.35.
Le polynôme Q(X) = (X + 1)2 (X + 2) divise le polynôme P1 (x) = (X + 1)3 (X + 2)(X − 3)4
mais il ne divise pas le polynôme P2 (X) = (X + 1)(X + 2)2 (X 2 + 1).
Théorème 2.16 (Théorème de d’Alembert-Gauss). Tout polynôme à coefficients complexes
de degré n ≥ 1 a au moins une racine dans C. Il admet exactement n racines si on compte
chaque racine avec sa multiplicité.
22
Ce théorème s’appelle aussi le théorème fondamentale de l’algèbre. A partir
de ce théorème on déduit
Théorème 2.17. Tout polynôme P à coefficient dans C, de degré n ≥ 1 admet exactement
n racines α1 , α2 ,..., αr chacune étant comptée avec son ordre de multiplicité et on a :
P = an (X − α1 )k1 .(X − α2 )k2 + .......(X − αr )kr avec k1 + k2 + .... + kr = n.
Dans R[X] nous avons le résultat plus faible suivant.
Théorème 2.18. Soit P ∈ R[X] de degré n ≥ 1. Alors P admet au plus n racines dans R.
Exemple 2.36. Soit le polynôme P (X) = X 5 − X 4 + 2X 3 − 2X 2 − 3X + 3.
On remarque 1 est une racine double donc P se décompose en
P (X) = (X − 1)2 (X 3 + X 2 + 3X + 3).
On remarque que −1 est une racine simple de Q(x) = X 3 + X 2 + 3X + 3, donc on déduit que
X 3 + X 2 + 3X + 3 = (X + 1)(X 2 + 3)
Finalement la décomposition de P s’écrit
P (X) = (X − 1)2 (X + 1)(X 2 + 3) = (X − 1)(X − 1)(X + 1)(X 2 + 3).
- Mais si on le considère comme un polynôme à coefficients√dans C,
√ alors il admet cinq racines
comptée avec leurs ordre de multiplicité qui sont −1, 1, i 3, −i 3 et P se décompose en
√ √ √ √
P (X) = (X + 1)(X − 1)2 (X − i 3)(X + i 3) = (X + 1)(X − 1)(X − 1)(X − i 3)(X + i 3).
2.7. Polynômes irréductibles.
Définition 2.37. Soit P ∈ K[X] un polynôme de degré ≥ 1, on dit que P est irréductible si
pour tout Q ∈ K[X] divisant P , alors
- soit Q ∈ K ∗ ,
- soit il existe λ ∈ K ∗ tel que Q = λP .
Remarque 2.38.
• Un polynôme irréductible P est donc un polynôme non constant dont les seuls diviseurs
de P sont les constantes ou P lui-même (à une constante multiplicative près).
• Dans le cas contraire, on dit que P est réductible; il existe alors des polynômes A, B
de K[X] tels que P = AB, avec deg A ≥ 1 et deg B ≥ 1.
• Tous les polynômes du premier degré sont des polynômes irréductibles dans R[X].
• Les polynômes irréductibles dans C[X] sont les polynômes de degré 1.
• Les polynômes irréductibles dans R[X] sont les polynômes de degré 2 à discriminant
négatif (∆ < 0).
• Tous les polynômes de degré 1 sont irréductibles dans R[X] et C[X]. Par conséquent
il y a une infinité de polynômes irréductibles.
Exemples 13.
• X 2 − 1 = (X − 1)(X + 1) est réductible dans R[X].
• X 2 + 1 = (X − i)(X + i) est réductible dans C[X] mais est irréductible dans R[X].
• X 2 + X + 1 = (X − j)(X − j) est réductible dans C[X] mais irréductible dans R[X].
Théorème 2.19. Si P ∈ R[X] admet le nombre z ∈ C\R pour racine, alors z le conjugué de
z est aussi une racine de P avec le même ordre de multiplicité.
23
Proof. Soit P = an X n + an−1 X n−1 + .... + a1 X + a0 avec a0 , a1 , ..., an des nombres réels.
Puisque z est une racine de P alors P (z) = an z n + an−1 z n−1 + .... + a1 z + a0 = 0.
Prenons le conjugué des deux membres de l’égalité, on obtient :
an z n + an−1 z n−1 + .... + a1 z + a0 = 0 = 0
an z n + an−1 z n−1 + ... + a1 z + a0 = 0
an z n + an−1 z n−1 + ... + a1 z + a0 = 0
P (z) = 0.
Donc z est une racine de P . □
Factorisation dans C[X] et R[X].
Théorème 2.20 (Théorème de factorisation). Tout polynôme non constant A ∈ K[X]
s’écrit comme un produit de polynômes irréductibles unitaires :
A = λP1k1 P2k2 · · · Prkr
où λ ∈ K ∗ , r ∈ N∗ , ki ∈ N∗ et les Pi sont des polynômes irréductibles distincts. De plus cette
décomposition est unique à l’ordre près des facteurs.
Il s’agit bien sûr de l’analogue de la décomposition d’un nombre en facteurs
premiers.
Proposition 2.21.
- Tout polynôme de C[X] se factorise en un produit de facteurs du premier degré.
- Tout polynôme de R[X] se factorise en un produit de facteurs du premier degré et de trinômes
du second degré à discriminant négatif.
Théorème 2.22. Les polynômes irréductibles de C[X] sont les polynômes de degré 1. Donc
pour P ∈ C[X] de degré n ≥ 1 la factorisation s’écrit
P = λ(X − α1 )k1 (X − α2 )k2 · · · (X − αr )kr ,
où α1 ,...,αr sont les racines distinctes de P et k1 ,...,kr sont leurs multiplicités.
De plus n = k1 + k2 + · · · + kr .
Théorème 2.23. Les polynômes irréductibles de R[X] sont les polynômes de degré 1 ainsi
que les polynômes de degré 2 ayant un discriminant ∆ = b2 − 4ac < 0.
Soit P ∈ R[X] de degré n ≥ 1. Alors la factorisation s’écrit
P = λ(X − α1 )k1 (X − α2 )k2 · · · (X − αr )kr Qℓ11 · · · Qℓss ,
où les αi sont exactement les racines réelles distinctes de multiplicité ki et les Qi sont des
polynômes irréductibles de degré 2 : Qi = X 2 + βi X + γi avec ∆ = βi2 − 4γi < 0. De plus
n = k1 + k2 + · · · + kr + 2ℓ1 + 2ℓ2 · · · + 2ℓs .
Exemple 2.39. Le polynôme
P (X) = 2X 4 (X − 1)3 (X 2 + 1)2 (X 2 + X + 1)
est déjà décomposé en facteurs irréductibles dans R[X] alors que sa décomposition dans C[X]
est
P (X) = 2X 4 (X − 1)3 (X − i)2 (X + i)2 (X − j)(X − j 2 )

2iπ 2π 2π −1 + i 3
où j = e 3 = cos( ) + i sin( ) = .
3 3 2
Les racines de P dans C sont : 0 racine d’ordre 4, 1 racine d’ordre 3, i, −i deux racines
d’ordre 2 (racines doubles) et finalement j et j 2 deux racines d’ordre 1 (simples).
24
Exemple 2.40. Soit P (X) = X 4 + 1.
• Sur C, On peut d’abord décomposer P (X) = (X 2 + i)(X 2 − i). Les racines de P sont
donc les racines carrées complexes de i et −i. Ainsi P se factorise dans C[X]:
√ √ √ √
P (X) = X − 22 (1 + i) X + 22 (1 + i) X − 22 (1 − i) X + 22 (1 − i) .
   

• Sur R, Pour un polynôme à coefficient réels, si α est une racine alors ᾱ aussi. Dans
la décomposition ci-dessus on regroupe les facteurs ayant des racines conjuguées, cela
doit conduire à un polynôme réel:
h √ √ i h √ √ i
P (X) = X − 22 (1 + i) X − 22 (1 − i) X + 22 (1 + i) X + 22 (1 − i)
 
√ √
= X 2 + 2X + 1 X 2 − 2X + 1 ,
  

qui est la factorisation dans R[X].


Exercice 2.41. Soit le polynôme P = X 4 − 5X 3 + 13X 2 − 19X + 10.
(1) Calculer P (1) et P (2).
(2) En déduire la factorisation du polynôme de P dans R[X] puis dans C[X].
Corrigé 1) On a P (1)1 − 5 + 13 − 19 + 10 = 0 et P (2) = 16 − 40 + 52 − 38 + 10 = 0.
2) P est divisible à la fois par X − 1 et X − 2. Donc P est divisible par le polynôme
(X − 1)(X − 2) = X 2 − 3X + 2.
En effectuant la division euclidienne de P par X 2 −3X +2, on obtient la factorisation suivante
de P .
P (X) = (X 2 − 3X + 2)(X 2 + 2X + 5) = (X − 1)(x − 2)(X 2 + 2X + 5).
Le discriminant de X 2 + 2X + 5 est ∆ = −16 < 0 donc X 2 + 2X + 5 est irréductible dans
R[X] et donc la factorisation de P dans R[X] s’écrit
P (X) = (X − 1)(X − 2)(X 2 + 2X + 5).
2 + 4i
Les racines complexes de X 2 + 2X + 5 sont z1 = = 1 + 2i et z2 = z1 = 1 − 2i.
2
Donc la factorisation de P dans C[X] est
P (X) = (X − 1)(X − 2)(X − 1 − 2i)(X − 1 + 2i).
Exercice 2.42. Soient a, b, c et d des entiers naturels.Montrer que le polynôme X 3 +x2 +X +1
divise le polynôme P (X) = X 4a+3 + X 4b+2 + X 4c+1 + X 4d .
Corrigé
On sait que
z4 − 1
∀z ∈ C\{1}, z3 + z2 + z + 1 = .
z−1
Donc les racines de X 3 + x2 + X + 1 sont les racines 4ième de l’unité distinctes de 1
c’est-à-dire −1, i et −i.

X 3 + x2 + X + 1 divise P ⇐⇒ ∃Q ∈ C[X], /P (X) = (X 3 + x2 + X + 1)Q(X)


⇐⇒ ∃Q ∈ C[X], /P (X) = (X + 1)(X − i)(X + i)Q(X)
⇐⇒ −1, i, −i sont des racines de P dans C.
25
D’autre part, on sait que P (X) = X 4a+3 + X 4b+2 + X 4c+1 + X 4d .
On a P (−1) = (−1)4a+3 + (−1)4b+2 + (−1)4c+1 + (−1)4d = −1 + 1 − 1 + 1 = 0.
On a
P (i) = (i)4a+3 + (i)4b+2 + (i)4c+1 + (i)4d
= (i4 )a .i3 + (i4 )b i2 + (i4 )c .i + (i4 )d
= −i − 1 + i + 1
P (i) = 0
De même
P (−i) = (−i)4a+3 + (−i)4b+2 + (−i)4c+1 + (−i)4d
= ((−i)4 )a .(−i)3 + ((−i)4 )b i2 + ((−i)4 )c .(−i) + ((−i)4 )d
= i−1−i+1
P (−i) = 0
Donc −1, i et −i sont des racines de P dans C et par suite X 3 + x2 + X + 1 divise P .

2.8. Division suivant les puissances croissantes.


Théorème 2.24. Soit h un entier naturel et Soient A et B deux polynômes à coefficients
dans K où B(0) ̸= 0 (i.e. la constante du polynôme B est non nulle). Alors il existe un
unique couple de polynômes (Q, R) tels que
A = B.Q + X h+1 R avec deg(Q) ≤ h.
C’est la division suivant les puissances croissantes d’ordre h de A par B.
Exemple 2.43. Faisons la division suivant les puissances croissantes à l’ordre 2 de
A(X) = 1 + 2X + X 3 par B(X) = 1 + X + 2X 2 .

1 + 2X + X3 1 + X + 2X 2

1 + X + 2X 2 1 + X − 3X 2
X − 2X 2 + X 3

X + X 2 + 2X 3
− 3X 2 − X 3

−3X 2 − 3X 3 − 6X 4
2X 3 + 6X 4
Comme 2X 3 + 6X 4 = X 3 (2 + 6X) = X 2+1 (2 + 6X), on en déduit que
A(X) = B(X)(1 + X − 3X 2 ) + X 3 (2 + 6X).
Remarque 2.44. Cette division ne se termine jamais !. C’est pour cette raison qu’il faut
indiquer l’ordre h de la division suivant les puissances croissantes.

26

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