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Proposition 1 

: sujet de deux heures// spé passée en première.

Avec les Entretiens d’un sauvage et d’un bachelier Voltaire propose un dialogue philosophique entre deux
personnages qui raisonnent ici sur le caractère sociable de l’homme.

LE BACHELIER

Monsieur le sauvage, vous avez vu sans doute beaucoup de vos camarades qui passent

leur vie tout seuls : car on dit que c’est là la véritable vie de l’homme, et que la société

n’est qu’une dépravation artificielle ?

LE SAUVAGE

Jamais je n’ai vu de ces gens-là : l’homme me paraît né pour la société, comme plusieurs

espèces d’animaux ; chaque espèce suit son instinct ; nous vivons tous en société chez nous.

LE BACHELIER

Comment ! en société ! vous avez donc de belles villes murées, des rois qui tiennent une

cour, des spectacles, des couvents, des universités, des bibliothèques, et des cabarets ?

LE SAUVAGE

Non ; est-ce que je n’ai pas ouï dire que dans votre continent vous avez des Arabes,

des Scythes 1, qui n’ont jamais rien eu de tout cela, et qui forment cependant des nations

considérables ? nous vivons comme ces gens-là. Les familles voisines se prêtent du secours.

Nous habitons un pays chaud, où nous avons peu de besoins ; nous nous procurons

aisément la nourriture ; nous nous marions, nous faisons des enfants, nous les élevons,

nous mourons. C’est tout comme chez vous, à quelques cérémonies près.

LE BACHELIER

Mais, monsieur, vous n’êtes donc pas sauvage ?

LE SAUVAGE

Je ne sais pas ce que vous entendez par ce mot.

LE BACHELIER

En vérité, ni moi non plus ; il faut que j’y rêve 2.

Voltaire, Entretiens d’un sauvage et d’un bachelier, (1761).

1. Arabes, Scythes : peuples vivant du Moyen-Orient à l’époque de Voltaire.

2. Que j’y rêve : que j’y songe.

Question d’interprétation littéraire : Comment la notion de « sauvage » est-elle mise en question dans le
dialogue ?

Question de réflexion philosophique : Comment en vient-on à considérer l’autre comme un sauvage ?


Pour construire votre réponse, vous vous référerez au texte ci-dessus, ainsi qu’aux lectures et
connaissances, tant littéraires que philosophiques, acquises durant l’année.

Proposition 2 : 4heures/ spé poursuivie en terminale

(…)Ai-je laissé quelque chose à voir derrière moi ? J’y retourne : c’est toujours mon chemin. Je ne trace
aucune ligne certaines, ni droite ni courbe. Ne trouvé-je point, où je vais, ce qu’on m’avait dit ? Comme il
advient souvent que les jugements d’autrui ne s’accordent pas aux miens, et les ai trouvés plus souvent
faux, je ne plains(3) pas ma peine : j’ai appris que ce qu’on disait n’y est point.
J’ai la complexion du corps libre(4), et le goût commun autant qu’homme du(5) monde. La diversité des
façons(6) d’une nation à autre ne me touche que par le plaisir de la variété. Chaque usage a sa raison.
Soient des assiettes d’étain, de bois, de terre, bouilli ou rôti, beurre ou huile de noix ou d’olive, chaud ou
froid, tout m’est un : et si un, que vieillissant, j’accuse cette généreuse faculté et aurais besoin que la
délicatesse et le choix arrêtât l’indiscrétion(7) de mon appétit et parfois soulageât mon estomac. Quand j’ai
été ailleurs qu’en France, et que, pour me faire courtoisie, on m’a demandé si je voulais être servi à la
française, je m’en suis moqué et me suis toujours jeté aux tables les plus épaisses d’étrangers.
J’ai honte de voir nos hommes enivrés de cette sotte humeur de s’effaroucher des formes(8) contraires aux
leurs : il leur semble être hors de leur élément quand ils sont hors de leur village. Où qu’ils aillent, ils se
tiennent à leurs façons et abominent les étrangères. Retrouvent-ils un compatriote en Hongrie, ils festoient
cette aventure : les voilà à se rallier et à se recoudre ensemble, à condamner tant de mœurs barbares qu’ils
voient. Pourquoi non barbares, puisqu’elles ne sont françaises ? Encore sont-ce les plus habiles qui les ont
reconnues, pour en médire. La plupart ne prennent l’aller que pour le venir(9). Ils voyagent couverts et
resserrés d’une prudence taciturne et incommunicable, se défendant de la contagion d’un air inconnu.
Ce que je dis de ceux-là me ramentoit(10), en chose semblable, ce que j’ai parfois aperçu en aucuns de nos
jeunes courtisans. Ils ne tiennent qu’aux hommes de leur sorte, nous regardant comme gens de l’autre
monde, avec dédain ou pitié. Ôtez-leur les entretiens des mystères de la cour, ils sont hors de leur
gibier(11), aussi neufs(12) pour nous et malhabiles comme nous sommes à eux. On dit bien vrai qu’un
honnête homme c’est un homme mêlé.
Au rebours, je pérégrine(13) très saoul(14) de nos façons, non pour chercher des Gascons en Sicile (j’en ai
assez laissé au logis) : je cherche des Grecs plutôt, et des Persans : j’accointe(15) ceux-là, je les
considère(16) : c’est là où je me prête et où je m’emploie. Et qui plus est, il me semble que je n’ai rencontré
guère de manières qui ne vaillent les nôtres.
Michel de Montaigne – Essais, "De la vanité", III 9, 1580.
1. Embarras, gêne.//2. Raffinement.//3. Regrette.//4. Qui n’est pas lié par des goûts particuliers.
Commun a le même sens.//5. Au.//6. Usage.//7. Intempérance, manque de discernement et de
retenue.//8. Manières d’agir.//9. Ne partent que pour revenir.//10. Me rappelaient.//11.
Perdus.//12. Novices.//13. Je voyage.//14. Las.//15. J’aborde, je fréquente.//16. Je m’intéresse à
eux.//17. Je m’avance peu, je prends peu de risque en déclarant cela.
Question d’interprétation littéraire : Comment Montaigne s’y prend-il pour changer notre regard sur nos
propres usages ? Comment Montaigne s’y prend-il pour défendre des valeurs de tolérance vis-à-vis
d’autrui ?

Question de réflexion philosophique : Peut-on juger moralement d'un fait de culture ?

A-t-on le droit de juger les cultures qui sont différentes de la nôtre ? Peut-on juger une culture ? Peut-on
juger les autres cultures ? Les différences culturelles nous éloignent-elles les uns des autres ? Peut-on juger
objectivement la valeur d'une culture ? Peut-on juger légitimement de la valeur d'une culture ?
Des cultures différentes font-elles des humanités différentes ? Puis-je juger une culture à laquelle je
n'appartiens pas ? La diversité des cultures est-elle nuisible à l'humanité ? La diversité des cultures sépare-t-
elle les êtres humains ? La diversité des cultures est-elle incompatible avec l'unité de l'être humain ? La
diversité des cultures nous oblige-t-elle à renoncer à l'universel ? La pluralité des cultures est-elle un
obstacle à l'unité du genre humain ? La pluralité des cultures fait-elle obstacle à l'unité du genre humain ?
Les devoirs de l'être humain varient-ils selon la culture ? Les devoirs de l'être humain varient-ils selon
les cultures ? Peut-on comparer les cultures ? Peut-on échapper à sa culture ? Peut-on juger la culture à
laquelle on appartient ?

Montrez qu’en retournant contre soi les reproches que l’on est tenté de faire à d’autres, on se donne les
moyens de progresser dans sa compréhension d’une humanité commune. ( sans doute à modifier
Gaëtan ??)

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